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Commission des affaires culturelles et de l’éducation

Mercredi 26 novembre 2014

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 18

Présidence de M. Patrick Bloche, président

– Audition, ouverte à la presse, de Mme Agnès Saal, présidente-directrice générale de l’Institut national de l’audiovisuel

– Présences en réunion

COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L’ÉDUCATION

Mercredi 26 novembre 2014

La séance est ouverte à neuf heures trente-cinq.

(Présidence de M. Patrick Bloche, président de la Commission)

——fpfp——

La commission procède à l’audition, ouverte à la presse, de Mme Agnès Saal, présidente-directrice générale de l’Institut national de l’audiovisuel.

M. le président Patrick Bloche. Nous avons le plaisir d’accueillir Mme Agnès Saal, qui a été nommée présidente-directrice générale de l’Institut national de l’audiovisuel (INA) le 30 avril dernier. Cette nomination consacre une carrière au service de la culture et de la communication, que ce soit au Centre national du cinéma et de l’image animée, à la Bibliothèque nationale de France (BnF) ou encore au Centre Pompidou, où vous nous aviez, madame, accueillis ce printemps à l’exposition Cartier-Bresson.

Vous voilà donc à la tête d’une entreprise que vous connaissez bien, puisque vous étiez membre de son conseil d’administration depuis 2012, et pour laquelle vous avez de grandes ambitions. Vous souhaitez que l’INA s’engage de façon volontariste dans la révolution numérique en cours, et « réinvente » les missions fondamentales de conservation et de valorisation des collections audiovisuelles dont il a la charge, mais également de formation et d’expertise audiovisuelles. Ces ambitions devraient structurer le prochain contrat d’objectifs et de moyens (COM) que vous êtes en train de négocier, et qui s’appliquera durant la période 2015-2019. L’État actionnaire vous a déjà donné un signal très encourageant puisque la dotation publique de l’INA atteindra 90,8 millions d’euros en 2015, en hausse de 28 % par rapport à 2014.

Quel premier bilan tirez-vous du COM finissant ? Le chiffre d’affaires des cessions de droits est en baisse depuis 2012, et inférieur aux prévisions avancées lors de la négociation de ce COM ; pourrez-vous nous en dire les raisons et la manière dont vous entendez redynamiser les ressources propres de l’INA, élément essentiel dans un contexte budgétaire contraint ? Vous avez annoncé vouloir construire une plate-forme de contenus culturels numériques pluridisciplinaire qui rassemblerait des fonds relevant d’institutions culturelles publiques, de collectivité territoriales et d’acteurs privés français et étrangers : nous vous entendrons avec intérêt détailler ce projet, et nous dire aussi vos projets relatifs aux implantations immobilières de l’INA, et singulièrement à la réhabilitation des bâtiments de Bry-sur-Marne.

Je vous laisse la parole pour nous présenter la situation de l’INA et nous exposer vos projets pour les cinq années à venir.

Mme Agnès Saal, présidente-directrice générale de l’Institut national de l’audiovisuel. Je vous remercie de m’offrir l’occasion de vous parler de l’Institut national de l’audiovisuel, cette très belle entreprise qui, en 2014, fête ses quarante ans, et dont j’ai pris la responsabilité il y a six mois. De l’INA, la loi de 1974 décrit toutes les missions : conserver, valoriser, chercher, former. La lecture roborative de ce texte commande de tenir compte des évolutions en cours et de positionner résolument l’INA comme un acteur majeur de l’audiovisuel, des médias et du numérique au XXIe siècle.

À mon arrivée, j’ai trouvé l’Institut en fin de cycle, quelque peu à bout de souffle. C’est que venait à son terme le grand mouvement lancé au début des années 2000 par les présidents Francis Beck puis Emmanuel Hoog pour sauvegarder et numériser les archives audiovisuelles qui forment la mémoire de la Nation et donner accès à une partie de ces fonds au public et aux professionnels par le biais de sites électroniques.

Il nous faut maintenant réinventer les missions de l’INA et pour cela mettre en œuvre une stratégie qui insufflera un nouveau dynamisme à l’entreprise et lui donnera une vision d’avenir ; elle suppose des chantiers multiples et j’en ai ouvert beaucoup, qui ont une cohérence interne. Les objectifs qui structurent notre démarche sont l’ouverture, l’innovation et la modernisation.

L’ouverture, pour commencer. La palette des compétences et des savoir-faire de l’INA est infiniment vaste, mais insuffisamment connue. Il convient donc de l’ouvrir au monde extérieur de plusieurs manières. La première est d’accueillir des fonds qui ne font pas partie de ceux que l’Institut est historiquement chargé de conserver, en allant à la recherche de nouvelles ressources qui enrichiront nos collections, et ainsi d’élargir – autre signe d’ouverture – les publics. À cette fin, nous diversifions nos sites électroniques, et nous allons créer une plate-forme de vidéo à la demande par abonnement (SVOD).

La volonté d’ouverture nous conduira aussi à diversifier nos partenariats. Je juge indispensable d’en établir avec les entreprises, et pas uniquement celles de l’audiovisuel, public ou privé. Des entreprises « hors média » peuvent parfaitement bénéficier de l’excellence des savoir-faire de l’INA, qu’il s’agisse de valorisation d’un patrimoine audiovisuel propre ou de formation. Je souhaite aussi conclure des partenariats avec les collectivités territoriales, pour mener une action rayonnante sur l’ensemble du territoire ; j’ai déjà noué des contacts en ce sens avec certaines régions et certaines villes.

L’INA doit aussi s’ouvrir davantage à un partenaire évident, le monde de l’éducation. Étant donné la richesse de ses collections, sa capacité à les valoriser et à les ordonner en thématiques et sa capacité de formateur, l’INA peut très nettement intensifier ses relations et avec l’Éducation nationale et avec les animateurs d’ateliers périscolaires. J’ai évoqué la question avec la Ligue de l’enseignement.

L’ouverture à l’international s’impose également, pour faire rayonner les savoir-faire de l’INA hors de nos frontières ; cette reconnaissance sera bonne pour la marque « INA » et pour la marque « France ». Il conviendra donc de valoriser sa science de la conservation des archives audiovisuelles et de la formation de jeunes élites dans le champ du numérique. Ainsi contribuerons-nous à trouver des ressources propres, qui s’érodent effectivement de manière préoccupante depuis trois ou quatre ans. Il m’appartient dans un premier temps de stopper cette chute puis, autant que possible, de développer ces ressources.

Dans cette perspective d’ouverture, notre projet phare, c’est la plateforme des contenus culturels numériques. Je souhaite que l’INA se voie attribuer le rôle de pilote, d’agrégateur de contenus culturels – audiovisuels aujourd’hui, numériques demain –, de manière que tous les fonds des institutions de l’État, des collectivités territoriales, des institutions culturelles privées et éventuellement des entreprises ayant un patrimoine audiovisuel peu, mal ou jamais valorisé à ce jour, soient numérisés pour être dûment conservés et rendus accessibles au public sur une plate-forme unifiée. La prodigieuse richesse de l’ensemble, couplée à la capacité singulière d’indexation des fonds documentaires de l’INA, donnera aux consultations une profondeur de champ exceptionnelle. Sur ce point, j’aurai besoin de l’aide du législateur.

Le deuxième axe de ma démarche a trait à l’innovation. Je veux faire de l’INA un laboratoire, mettre en valeur la capacité de ses équipes à expérimenter de nouveaux outils de fouille des contenus audiovisuels pour donner aux consultations de notre fonds un supplément de sens. J’entends à cette fin conclure des partenariats avec des PME innovantes. Je souhaite que, dès 2015, l’INA devienne une sorte d’incubateur, en mettant au service d’une pléiade d’entreprises inventives ses contenus, ses équipements et ses collaborateurs afin que nous inventions, ensemble, de nouvelles formes de décryptage des données que nous conservons.

L’innovation consiste aussi à ériger l’INA en nouvel observatoire des usages et des métiers des médias et de l’audiovisuel, en l’ouvrant à l’université, aux professionnels de l’audiovisuel et du numérique, à la presse, pour en faire le lieu de l’échange, de la libre parole et de l’invention.

La volonté d’innovation doit également se traduire par la création de nouveaux formats. L’INA produit déjà des programmes documentaires ; il lui faut expérimenter et tenter de donner la parole à des réalisateurs et à des producteurs travaillant sur le transmédia et le webmédia.

En matière d’innovation, mon projet-phare est d’ouvrir, en collaboration avec le Parlement, une réflexion d’ordre juridique tendant à réviser la loi qui a donné à l’INA un rôle éminent en matière de dépôt légal pour l’audiovisuel et le webmédia. Le texte dispose en effet que les collections du dépôt légal ne peuvent être consultées qu’en des lieux déterminés : à la Bibliothèque nationale de France (BnF) à Paris et dans moins d’une dizaine de délégations régionales. Il me paraît que contraindre un chercheur tokyoïte ou australien à venir consulter ces collections en France ne correspond plus aux usages du temps. Il faudra définir les modalités de leur mise à disposition des étudiants et des chercheurs, en ligne, dans les conditions de sécurité qui s’imposent.

Le troisième chantier, celui de la modernisation de l’organisation interne de l’entreprise, n’est pas le moins urgent. Aujourd’hui, l’INA est dépourvu des outils élémentaires qui devraient pourtant constituer l’ossature lui permettant de mener à bien l’évolution que j’ai esquissée. Je compte agir en matière de gestion budgétaire et de politique de l’achat public mais aussi dans le champ des ressources humaines, avec la volonté de renouer le dialogue social et de donner à l’INA la capacité de se projeter dans l’avenir en abordant la question des carrières et des métiers. Il faut, enfin, définir un nouveau schéma directeur informatique : alors que l’informatique est la colonne vertébrale de l’INA, le système dont il est doté pour l’instant manque à la fois de rationalité et de robustesse. Le schéma directeur informatique que nous mettrons en œuvre dans le cadre du quatrième COM dotera l’INA d’un outil indispensable.

Je traiterai de l’immobilier en répondant à vos questions.

M. le président Patrick Bloche. Au terme de cette synthèse d’une parfaite clarté, la parole est à ceux de mes collègues qui souhaitent vous interroger, et pour commencer aux représentants des groupes.

Mme Martine Martinel. Le groupe SRC observe que cette audition a lieu à un moment charnière pour l’INA, alors que s’achève le troisième contrat d’objectifs et de moyens, auquel succédera, en 2015, le nouveau, qui courra jusqu’en 2019.

Les principales missions de l’Institut ont été renforcées par la poursuite du plan de sauvegarde et de numérisation des fonds menacés de dégradation physico-chimique d’une part, l’enrichissement des collections d’autre part. À ce sujet, l’INA s'était engagé, dans le troisième COM, à améliorer l'éditorialisation de ses fonds d'archives en constituant une offre thématisée multimédia, et à mettre en œuvre le dépôt légal sur internet, tout en multipliant les points de consultation locaux pour les intéressés. Pouvez-vous détailler les actions menées en ce sens en 2014 ?

Le COM 2009-2014 prévoyait également le développement de l'exploitation des fonds, les services aux professionnels et l'offre grand public. L'accès aux fonds devait notamment s'améliorer par la poursuite de la mise en ligne des fonds de l'INA pour les professionnels via InaMédiaPro, l'enrichissement éditorial et l'adaptation technologique de l'offre payante et gratuite sur internet des collections de l’INA destinée au grand public, un plan spécifique de capitalisation juridique devant permettre de fluidifier la gestion des droits. Vous nous avez dit que la vaste palette des savoir-faire de l’INA n’est pas assez connue ; comment accroître la notoriété de cette expertise ?

Vous avez récemment jugé dépassé le modèle d’offre de vidéo à la demande proposée sur le site de l'INA, soulignant qu’elle constitue une faible source de revenus pour l’Institut. Pourriez-vous expliciter les pistes que vous entendez suivre en ce domaine et nous en dire davantage sur la plate-forme de contenus culturels que vous entendez lancer et sur l'abonnement que vous envisagez ? Comment comptez-vous augmenter les ressources propres de l'entreprise ?

Le COM qui s’achève avait aussi pour objectif de « constituer et diffuser de nouveaux savoirs et compétences, notamment à destination du monde éducatif » avec l’ambition que l’Institut « se constitue en université de l'image et des médias ». Qu’en a-t-il été ? Quel avenir prévoyez-vous pour le site de Bry-sur-Marne ?

Enfin, le troisième COM tendait à améliorer l'efficacité et la qualité de la gestion de l’INA, particulièrement en matière de ressources humaines. Quel sort réserverez-vous à l’accord collectif signé le 9 novembre 2012 entre la précédente direction et les organisations syndicales ? La mission du Contrôle général économique et financier a souligné que l’accord a eu pour effet d’augmenter les frais de personnel et qu’« il semble absorber pour l’avenir la totalité des marges de manœuvre de l’établissement en matière salariale ». La question se pose avec d’autant plus d’acuité que vous avez déclaré avoir trouvé, en arrivant à l’INA, un personnel « démotivé, démoralisé et sans vision d'avenir », ajoutant que « la gestion prévisionnelle de l’emploi et des compétences n’y est pas ». Que comptez-vous faire à ce sujet ? Comment votre enthousiasme communicatif permettra-t-il à la belle maison qu’est l’INA de s’améliorer tout en rendant son action plus visible ?

M. Frédéric Reiss. Vous avez donc pris vos fonctions il y a six mois, madame, et le groupe UMP constate qu’à la différence de certains de nos grands dirigeants, vous affichez un cap ambitieux, avec une détermination qui force l’admiration. Après que M. Matthieu Gallet a quitté l’établissement public avec un bon bilan, selon le CSA, vous avez voulu un souffle neuf, et pour cela des innovations en matière de management, de fonctionnement et de financement. À la veille de la signature du nouveau COM, les projets ne manquent visiblement pas. Vous souhaitez d’abord affirmer la place de l’INA face à des géants qui, tels Google, numérisent gratuitement certains fonds. Vous entendez pour cela créer une plateforme culturelle pluridisciplinaire rassemblant les archives d’institutions culturelles publiques et privées ainsi que celles des collectivités territoriales. Nous suivrons avec intérêt votre politique volontariste à cet effet.

Vous souhaitez aussi lancer un service de vidéo à la demande, sur abonnement, pour moins de 5 euros par mois ; le fait que votre prédécesseur ait lancé une offre de ce type sans rencontrer le succès escompté ne semble pas vous décourager. Ce projet s’accompagnerait de l’extension de l’activité de l’INA à de nouveaux fonds d’archives encore non exploités. On note aussi que, d’ici 2016, l’achèvement de leur numérisation aura sauvé les archives audiovisuelles de la dégradation. J’ai aussi relevé votre proposition de faire de l’INA l’observateur neutre des médias et du champ numérique. Je salue enfin votre souhait d’engager de nouvelles collaborations, notamment avec le monde de l’éducation.

Le nouveau COM que vous êtes en train de négocier avec le ministère de la culture reflétera-t-il fidèlement votre vision de l’avenir de l’INA ? Disposerez-vous des moyens nécessaires à sa mise en œuvre ? Chacun aura noté trois nouvelles nominations au sein de votre équipe, qui correspondent à vos axes stratégiques : le développement de la formation et la conquête de nouveaux marchés en France et à l’étranger. Les économies réalisées par le renoncement à des multiples consultants extérieurs et par une nouvelle rigueur dans la gestion suffiront-elles ? Le niveau de dotation de l’INA en 2015 sera le même qu’en 2013, la ponction exceptionnelle de 20 millions d’euros opérée en 2014 n’étant pas répétée. Dans un entretien avec le journal Le Figaro, vous annonciez négocier avec l’État l’allocation d’une part plus importante de la contribution à l’audiovisuel public pour les cinq années à venir. En cette période de disette budgétaire pour la culture, pensez-vous parvenir à vos fins ?

La gestion des coûts est, a priori, maîtrisée, grâce à des redéploiements et aux économies réalisées en cours d’exercice. J’aimerais, comme Mme Martinel, connaître vos intentions au sujet de l’accord collectif conclu le 9 novembre 2012.

Enfin, exprimant vos préoccupations relatives à la baisse des ressources propres de l’INA, vous avez proposé de mettre le savoir-faire de l’Institut en matière de numérisation au service des grandes entreprises ayant un patrimoine audiovisuel et vous devriez signer prochainement un partenariat de ce type. Pourriez-vous nous en dire plus à ce sujet ?

Mme Barbara Pompili. Je vous remercie, madame, pour votre présence et votre présentation. Le groupe écologiste a salué la réévaluation des crédits alloués à l’INA dans le projet de loi de finances pour 2015. Cette augmentation de ressources témoigne du sérieux du travail réalisé par l’Institut. La conservation des archives et le plan de sauvegarde et de numérisation contribuent à notre enrichissement culturel et à notre mémoire collective, dont la préservation est essentielle.

Concernant l’accès aux sources numérisées et aux archives globales de l’INA, les écologistes sont opposés à l’idée qu’un bien culturel puisse être payé plusieurs fois par le contribuable ; les émissions financées, entre autres, par la contribution à l’audiovisuel public doivent être mises à disposition gratuitement et sans limitation dans le temps. Dernièrement, lors de l’audition de votre prédécesseur, M. Matthieu Gallet, j’ai eu l’occasion de réaffirmer cet impératif de gratuité dans l’accès aux podcasts puisque les émissions de Radio France bénéficient de financements publics. La même exigence vaut pour l’INA. Quel est l’état de vos réflexions à ce sujet ? La question vaut d’autant que les recettes tirées de cette conception de la valorisation du patrimoine sont très faibles. Il pourrait être plus pertinent de choisir la gratuité pour contribuer à la notoriété de l’INA, et ainsi à celle de ce patrimoine culturel.

Je soutiens naturellement votre volonté de mettre en place une plate-forme culturelle publique de l’audiovisuel, mais l’enjeu de la liberté d’accès aux contenus est central. L’autre question est celle des fonds concernés. L’INA aurait, selon nous, toute la légitimité de son expertise et de ses réussites passées pour être l’opérateur privilégié d’une telle plate-forme. Outre les institutions que vous avez mentionnées, le projet pourrait aussi concerner les universités et les centres de recherche qui ont des fonds audiovisuels. Avez-vous pris des contacts en ce sens ?

Nous appelons de nos vœux une véritable évolution pour que nos musées s’associent enfin et offrent un accès facile à l’ensemble des œuvres du patrimoine public français. Envisagez-vous un tel projet ? Le ministère de la culture et de la communication et les directeurs des musées de France ou des universités et des centres de recherche ont-ils déjà réagi à vos propositions ?

Je tiens d’autre part à souligner le risque que l’élargissement du champ des activités de l’INA aux acteurs privés, y compris à l’étranger, puisse être perçu par la Commission européenne comme une concurrence déloyale en raison du soutien financier de l’État. Je suppose que cet aspect des choses a été étudié par l’INA ; pourriez-vous préciser ce qu’il en est ?

Sur le fond, nous partageons votre opinion : il ne revient pas à un acteur privé de devenir le portail principal de nos institutions culturelles. Nous partageons donc sans réserve votre analyse, telle qu’exprimée au journal Le Figaro : « L'INA ne peut pas laisser à Google le soin de démarcher ces acteurs de la culture pour leur proposer de numériser gratuitement les fonds, comme il l'a déjà fait avec la Bibliothèque de Lyon et la BnF ». Nous pensons, ce disant, aux nombreuses difficultés que présentent les numérisations d’œuvres dans le cadre du Google Art Project. Il est donc louable de vouloir prendre en charge des contenus audiovisuels existant pour assurer leur préservation et les rendre accessibles au plus grand nombre. Mais quel avantage peut-on en attendre pour les internautes ? Se pose à nouveau la question de l’accès gratuit à ces fonds privés. La vigilance s’impose pour éviter que l’élargissement du champ de compétence et d’activité au secteur marchand et la diversification des partenaires privés et des ressources ne conduisent à une approche industrielle de la culture qui serait éloignée des missions de l’INA.

M. Rudy Salles. Le groupe UDI se souvient, madame, qu’en prenant vos fonctions vous avez affirmé l’ambition de donner à l’INA un nouveau départ en faisant de l’Institut un champion du numérique. Vous vous proposez de trouver de nouveaux partenaires qui confieraient à l’INA leur patrimoine audiovisuel dans le cadre d’accords prévoyant le partage des recettes découlant de la diffusion et de la commercialisation de ces archives. Votre démarche est en concurrence directe avec celle de Google, qui propose à des partenaires de numériser gratuitement leur fonds. Disposez-vous des moyens nécessaires pour mener à bien cette bataille vitale pour la préservation de notre patrimoine ? Qu’attendez-vous du COM 2015-2019 ? Le relèvement de la contribution à l’audiovisuel public serait-il suffisant pour mener à bien les projets dont vous nous avez parlé, en particulier celui de plate-forme culturelle unifiée ?

M. Jean-Noël Carpentier. Le groupe RRDP vous a entendue exprimer pour l’INA, à l’occasion de son quarantième anniversaire, des intentions ambitieuses, visant à faire de l’Institut une entreprise tournée vers l’avenir, un outil de service public développant ses missions de manière novatrice dans un environnement très concurrentiel où le secteur privé n’a pas les mêmes contraintes que vous. Cette politique est enthousiasmante. Le travail de numérisation accompli depuis quinze ans donne à l’INA une autorité en ce domaine qui est un atout ; mais la mémoire ne doit pas seulement être préservée, elle doit être transmise –singulièrement en ces temps troublés, savoir d’où l’on vient est essentiel. Comment différencierez-vous l’INA de Google ? Par quels objectifs convaincrez-vous nos concitoyens qu’il vaut la peine de financer ce service public ? Le groupe RRDP se réjouit de votre volonté de respecter les missions fondamentales de l’INA dans un esprit d’ouverture, d’innovation et en développant le numérique. Il se félicite de votre projet de plate-forme culturelle qui permettra sans doute d’offrir des services à haute plus-value que vos concurrents ne proposent pas encore – mais il faut faire vite.

J’apprécie aussi votre volonté de proposer de nouveaux services aux collectivités territoriales, comme vous en avez annoncé l’intention au Salon des maires. Il y a là un beau partenariat à développer, et un autre avec l’Éducation nationale dans toute sa diversité – avez-vous noué des contacts avec le ministère à cet effet ?

Enfin, quel est votre modèle économique ? Pour être menés à bonne fin, les nombreux projets à traduire dans le COM 2015-2019 demanderont des investissements que le financement public ne permettra sans doute pas à lui seul. Comment se présente, à cet égard, la négociation de ce futur COM ? Les partenariats que vous souhaitez créer avec le secteur privé permettront-ils de dégager de nouvelles recettes ? Celles-ci permettront-elles elles de préserver le principe de gratuité d’accès à des archives dont la constitution a déjà été financée par l’impôt ?

Mme Sandrine Doucet. Je ne peux manquer de faire le lien entre les grandes ambitions que vous affirmez pour l’INA et la loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans les domaines de la propriété littéraire et artistique et du patrimoine culturel que nous avons votée jeudi dernier et qui prévoit en particulier la numérisation et l’accès gratuit aux œuvres orphelines. Comment gérer au mieux la profusion d’archives audiovisuelles dont l’INA est le conservateur sans verser dans la nostalgie que l’on ressent en consultant le site de l’Institut ? Comment faire de ce corpus un outil de la modernité, pour attirer la jeunesse ?

Mme Annie Genevard. J’apprécie que vous ayez l’intention de faire rayonner l’INA dans les territoires, et aussi que vous vous attachiez à trouver de nouveaux partenaires privés ; vous avez d’ailleurs annoncé en d’autres lieux la signature prochaine d’un accord avec une entreprise du CAC40. Mais il serait bon que subsiste aussi la mémoire des belles filières qui ont fait la prospérité de nos provinces avant de disparaître au fil d’une dramatique désindustrialisation progressive. La mémoire des industries de nos territoires demeure sous la forme de documents audiovisuels qui ne doivent pas se perdre. Ils peuvent en effet contribuer à la renaissance d’anciennes pratiques. J’ai pu le constater dans ma circonscription à l’ancienne tradition horlogère malheureusement déclinante : nous avons de très beaux musées qui exposent des pièces rares, et de grandes maisons d’horlogerie suisses venues voir ce patrimoine cherchent ensuite à racheter certaines machines anciennes. De même, il serait bon, par une démarche volontariste, de préserver de l’oubli, sinon de la destruction, le patrimoine audiovisuel de ces filières, qui peut être utile à l’avenir.

M. Hervé Féron. L’arrivée de Netflix sur le marché français, outre qu’il a conduit à engager une réflexion sur la chronologie des médias, a fait des émules, et vous avez surpris en annonçant le lancement par l’INA d’une plate-forme de vidéo en ligne à la demande moyennant un abonnement mensuel de quelque 5 euros. Pouvez-vous nous en dire davantage sur vos intentions à ce sujet ? La précédente ministre de la culture s’était dite préoccupée de ce qu’en installant son siège européen au Luxembourg, Netflix contourne l’obligation de contribuer à la promotion et au financement de la culture française. Pourtant, si la société Netflix diffuse en France, elle devrait, à mon sens, respecter nos règles fiscales et certaines obligations comme le financement de la création à hauteur d’une certaine proportion de son chiffre d’affaires et la diffusion d’un quota d’œuvres françaises et européennes. Ès qualités, considérez-vous Netflix comme un danger et un concurrent déloyal ? Enfin, l’INA tire actuellement 70 % de ses ressources de la contribution à l’audiovisuel public, ce qui représentera 89 millions d’euros en 2015. L’hypothèse évoquée d’abord par le Président de la République puis par Mme la ministre Fleur Pellerin d’élargir l’assiette de cette contribution aux tablettes et aux smartphones serait-elle l’occasion pour l’INA de se voir allouer des ressources supplémentaires importantes ?

M. Lionel Tardy. La loi portant transposition de plusieurs directives relatives à la propriété littéraire et artistique et au patrimoine culturel votée jeudi conduit notamment à étendre à 70 ans la durée de protection des droits voisins dans le seul secteur musical, le Gouvernement n’ayant pas souhaité étendre cette durée de protection aux œuvres audiovisuelles, pourtant assez proches. Quelles seront les conséquences de cette disparité pour l’INA ?

M. Jacques Cresta. J’ai toujours pensé que par la richesse de son catalogue et le travail considérable de ses documentalistes, l’INA était le véritable pionnier français de la vidéo sur internet. Dans cet environnement foisonnant, le remarquable travail éditorial des équipes de l’INA a facilité les recherches des internautes venus découvrir notre patrimoine audiovisuel. Créer un site de vidéo à la demande, c’est mettre à la portée de chaque citoyen le service que l’INA a longtemps rendu uniquement aux grandes entreprises de médias telles que France Télévisions. Néanmoins, ce rôle de pionnier ne peut suffire car le secteur connaît des mutations permanentes. Il y a deux ans seulement, le Conseil supérieur de l’audiovisuel consacrait un rapport à la vidéo à la demande ; on y lisait que trois acteurs se partageaient 72 % du marché ; l’arrivée de Netflix bouleverse le marché et fait s’interroger. Vous avez décidé de faire progresser significativement le chiffre d’affaires de l’INA dans la vidéo à la demande. Or, le succès d’un tel service dépend non seulement du catalogue proposé mais aussi des capacités de prescription. Qu’en est-il de ce projet et les chercheurs de l’INA sont-ils capables d’élaborer les algorithmes nécessaires ?

Mme Dominique Nachury. Vous souhaitez, madame, élargir les publics de l’INA. Mais l’Institut ne risque-t-il pas de pâtir de son défaut certain de notoriété auprès du grand public ?

M. Christophe Premat. Tous mes vœux de réussite, madame, dans votre nouvelle mission à la tête de l’INA, dont l’évolution illustre la démocratisation de l’accès aux données que permet internet – le site ina.fr accueille désormais 80 % des archives en visionnage gratuit. Au cours du récent colloque consacré, dans nos murs, à la promotion de la francophonie grâce au numérique, l’accent a été mis sur le moyen formidable ainsi mis à disposition pour toucher de nouveaux publics. À quelques jours de l’ouverture du 15e Sommet de la francophonie, à Dakar, quelle collaboration envisager entre l’INA et les pays francophones pour les aider à archiver leurs fonds audiovisuels et pour valoriser et diffuser nos propres archives dans tout l’espace francophone ?

Mme Martine Faure. Qu’en est-il du projet de création d’une chaîne du patrimoine ?

M. Christian Paul. La stratégie que vous proposez pour l’INA semble emporter une très large adhésion. Suppose-t-elle, pour aboutir, des évolutions législatives ? Pensez-vous, en particulier, que la transposition dans notre droit du concept de « bien commun informationnel » serait utile à l’Institut ?

Mme Agnès Saal. Vos questions traduisent l’intérêt que vous portez à l’INA ; je vous en remercie. Pour vous répondre, j’évoquerai successivement le projet de plate-forme culturelle de contenus numériques ; le prochain COM et les moyens de l’INA ; les obstacles juridiques qui peuvent entraver le développement de ses missions ; enfin, la question immobilière et celle des ressources humaines et financières nécessaires pour mener à bien les projets annoncés.

Quelques mots pour préciser notre beau projet de plate-forme culturelle de contenus numériques, dont le champ est assez large. Pour apprécier l’intérêt qu’il pourrait susciter, j’ai déjà noué de multiples contacts, avec des interlocuteurs que je connais bien, au sein d’institutions patrimoniales et de spectacle vivant relevant de l’État : l’Opéra de Paris, la Comédie française, la Cinémathèque française, les théâtres nationaux, d’autres encore. Tous ont exprimé un intérêt soutenu à l’idée de ce projet, qui consisterait à confier à l’INA leur patrimoine audiovisuel respectif : captations de spectacles, de répétitions générales, de masterclasses, de séminaires, de conférences, de prises de parole… Ces manifestations sont pour l’instant enregistrées sur des supports vulnérables ; le péril majeur est que leur consultation devienne impossible dans quelques années. L’INA serait parfaitement dans son rôle en entreprenant la préservation patrimoniale exhaustive et pérenne de ces fonds. Ensuite, l’INA n’étant pas le conservatoire d’une mémoire morte, ces archives seraient mises à disposition, une fois surmontés les obstacles juridiques relatifs à la libération des droits de propriété, que je ne mésestime nullement.

Selon moi, le périmètre de la plate-forme a vocation à s’élargir bien au-delà des institutions d’État. C’est pourquoi j’ai commencé à prospecter des institutions relevant des collectivités territoriales – ainsi, à la Ville de Paris, le Théâtre du Châtelet et le Musée d’art et d’histoire du judaïsme – suscitant l’enthousiasme de leurs dirigeants. Ce projet couvre tous les champs culturels, l’architecture et l’archéologie par exemple, mais aussi, pourquoi pas ?, les universités si elles ont des fonds pertinents.

Pour ce qui concerne le secteur privé, le champ envisagé est bien plus large que celui des seules entreprises du CAC40. Je pense particulièrement à celles dont la dimension culturelle est évidente. Je me suis ainsi entretenu de ce projet avec M. Alexandre Bompard, qui dirige la FNAC, et il a mentionné la quantité de captations de conférences faites dans les locaux de l’entreprise par des personnalités éminentes, un fonds auquel il faut garantir permanence et accessibilité.

Le projet de plate-forme consiste donc à rassembler des fonds audiovisuels de provenances variées et à tisser les passerelles documentaires qui permettront de les relier. Ainsi, une fois la plate-forme créée, l’internaute qui s’intéresse à Patrice Chéreau aura accès à des captations de ses mises en scène pour le théâtre et pour l’opéra, aux propos qu’il a tenus en diverses occasions, à certains de ses films et aux documents préparatoires, l’ensemble ainsi constitué étant lui-même rattaché, par rebonds, à d’autres créateurs et à d’autres œuvres. Les documentalistes de l’INA savent fort bien mettre en relation les contenus, et la plate-forme y gagnera en profondeur.

Mon intention n’est pas tant d’entrer en guerre avec Google que d’engager l’INA dans une politique volontariste. Cessons de nous lamenter quand de grands acteurs internationaux s’implantent en France – réagissons ! En l’espèce, notre proposition tend, sans arrogance, à faire mieux que Google puisque nous ne livrerons pas des images et des sons en vrac mais en formant des parcours qui leur donneront un sens. C’est une spécificité de l’INA en réponse aux propositions de Google, dont les moyens sont infiniment supérieurs aux nôtres. Notre fonds documentaire, d’une extraordinaire richesse, ne doit pas être perdu. La mission de service public de l’INA est de le sauvegarder, et c’est pourquoi je veux absolument mener ce projet à terme. La tutelle me prête une oreille attentive, et je compte bien inclure ce projet dans le COM en cours de négociation, en redéployant pour cela les ressources humaines et financières jusqu’à présent consacrées au plan de sauvegarde et de numérisation. En faisant intelligemment travailler les équipes et en gérant rigoureusement les moyens qui nous sont accordés, nous pourrions ainsi absorber en grande partie le coût de la création de la nouvelle plate-forme.

Sur le modèle économique de l’accès à ces contenus, nous n’avons pas encore tranché. Spontanément, j’ai tendance à penser que si la totalité des coûts de ce projet – y compris celui de la libération des droits de propriété littéraire et artistique, afin que les ayant-droit soient justement rémunérés pour la mise à disposition de ces contenus très variés – est couverte, il n’y a pas raison d’exiger un paiement de la part des internautes, en tout cas pour la plus grande partie de ces contenus. Si ce n’est pas le cas et qu’il faut pencher en faveur d’un modèle mixte payant/gratuit, nous le ferons, mais nous nous acheminons vers un accès très largement ouvert. Pour l’heure, ce qui importe est la validation politique du projet consistant à confier cette mission à l’INA.

Plusieurs orateurs se sont dits préoccupés par les conséquences financières pour l’INA de l’accord collectif signé à l’automne 2012 après trois ans de discussion et mis en œuvre au début de 2013. Je ne compte pas le renégocier ; nous éviterons ainsi de nouveaux mois d’une négociation éreintante. Cet accord a été avalisé par les tutelles et nous l’appliquerons, mais il se traduit en effet par une hausse annuelle de la masse salariale de 1,3 million d’euros que nous devrons assumer. Je proposerai donc dans le COM 2015-2019 un effort de rigueur destiné à financer et cette dépense et le schéma directeur informatique, dont le coût sera d’environ 55 millions d’euros. Cela peut sembler beaucoup, mais l’INA a consacré, au cours des cinq années antérieures, près de 50 millions d’euros à des dépenses informatiques qui n’ont pas été pensées de manière homogène. Avec une somme à peine plus importante, nous nous doterons du système informatique dont nous avons impérativement besoin ; il devra être financé par nos ressources actuelles, l’hypothèse étant que notre part de la contribution à l’audiovisuel public sera maintenue à son niveau actuel.

Le projet immobilier que je présenterai dans le COM 2015-20191 est le seul que l’INA ne pourra assumer intégralement. J’ai beaucoup de projets pour l’Institut, et je n’ai pas l’intention que mes collaborateurs et moi-même consacrions les cinq années qui viennent à la construction d’un nouvel immeuble ; nous avons mieux à faire, dans l’intérêt de la Nation. Je considère que les deux sites d’avenir pour l’Institut sont celui de Bry-sur-Marne, à l’est de Paris, et l’emprise d’Issy-les-Moulineaux, à l’ouest de la capitale, proche des clients naturels de l’INA. Cette double implantation est rationnelle. Mais nous louons aussi actuellement, à grands frais – plus d’un million d’euros par an – et, selon moi, inutilement, un immeuble situé dans le 13ème arrondissement de Paris où travaillent 40 personnes. Je compte mettre un terme à cette location et répartir les salariés concernés entre les deux autres sites. Il faut pour cela trouver un repreneur du bail, qui court malheureusement jusqu’en 2018.

D’autre part, sur notre site principal à Bry-sur-Marne, nous avons des terrains et des bâtiments, mais nous occupons aussi un immeuble vétuste et mal adapté à nos activités, que nous louons 1,3 millions euros l’an. Je veux également mettre fin à cette location au plus tôt, mais il me faut pouvoir accueillir ailleurs les quelque 600 personnes qui y travaillent actuellement. L’Opérateur du patrimoine et des projets immobiliers de la culture (OPPIC) a pour cela validé l’hypothèse de la construction, sur les terrains qui sont la propriété de l’INA à Bry, d’un bâtiment de 4 000 m², simple et fonctionnel. Le coût cumulé de la rénovation des bâtiments Bry I et Bry II et de la construction nouvelle sera de 37 millions d’euros. L’INA apportera 12 millions d’euros. Restent donc 25 millions d’euros à financer, par une hausse de quelques millions d’euros de la contribution à l’audiovisuel public versée chaque année à l’INA pendant la durée du COM – ce qui, je l’admets, peut faire beaucoup –, ou par des crédits d’État, ou par un emprunt. Avant toute chose, un arbitrage est nécessaire : ou ce projet immobilier reçoit un avis positif et nous trouvons les moyens de le financer, ou l’on me dit que le financement nécessaire n’est pas mobilisable, ce qui peut se concevoir, et nous devrons nous contenter de l’existant. Dans ce cas, nous pourrons, avec les 12 millions d’euros de trésorerie dont nous disposons, améliorer les conditions de travail de mes collaborateurs en modernisant les locaux de Bry-sur-Marne et, en abandonnant les locaux du 13ème arrondissement parisien, faire quelques économies de fonctionnement.

Si je parviens à bien les gérer, tous les autres projets, qu’il s’agisse de développement externe ou de modernisation interne, peuvent s’autofinancer. Telle est, brossée à grands traits, ma proposition aux tutelles.

Je conclurai par les sujets d’ordre juridique qui peuvent faire obstacle au développement de nos projets. L’INA gagnerait en effet à ce que quelques verrous législatifs soient levés ; ce n’est pas chose simple, car nous sommes contraints par la loi nationale et par la réglementation européenne. Vous avez mentionné la durée de protection conférée à certains droits voisins, qui vient d’être allongée à 70 ans pour les œuvres musicales, la protection restant de 50 ans pour les œuvres audiovisuelles. Cette disparité est effectivement source de difficulté pour l’INA, sauf pour l’Institut à négocier avec chaque ayant-droit une nouvelle période de couverture au-delà de 50 ans – qui est une durée brève en matière audiovisuelle.

Il faudra aussi préciser la question de la capacité juridique de l’INA à pratiquer la fouille de données dans les contenus qu’il conserve, de manière qu’il puisse exploiter les fonds dont il dispose et les rendre accessibles en toute sérénité. Il faudra donc déterminer si l’état du droit le permet ou si une évolution législative est nécessaire.

Enfin, je vous l’ai dit, donner accès à des sources du dépôt légal à distance me semble tout à fait souhaitable mais cette évolution, qui suppose une modification significative des textes, provoque des craintes et des résistances. Il faudra les surmonter, car la consultation en ligne des fonds du dépôt légal conditionne l’avenir et la légitimité des institutions chargées de ce dépôt à poursuivre leur mission et à donner accès à ces fonds.

M. le président Patrick Bloche. Je vous remercie, Madame, pour cette présentation dont la fluidité et l’esprit de synthèse nous permettent de presque tout savoir de l’INA.

L’audition est levée à onze heures.

——fpfp——

Présences en réunion

Réunion du mercredi 26 novembre 2014 à 9 heures 30.

Présents. – M. Jean-Pierre Allossery, M. Benoist Apparu, Mme Laurence Arribagé, M. Patrick Bloche, Mme Marie-Odile Bouillé, Mme Brigitte Bourguignon, M. Emeric Bréhier, M. Xavier Breton, M. Jean-Noël Carpentier, Mme Dominique Chauvel, M. Jean-François Copé, Mme Valérie Corre, M. Jacques Cresta, M. Laurent Degallaix, M. Pascal Deguilhem, M. Pascal Demarthe, Mme Sophie Dessus, Mme Sophie Dion, Mme Sandrine Doucet, Mme Virginie Duby-Muller, Mme Anne-Lise Dufour-Tonini, M. Yves Durand, Mme Martine Faure, M. Hervé Féron, Mme Annie Genevard, Mme Claude Greff, M. Patrick Hetzel, Mme Gilda Hobert, M. Guénhaël Huet, M. Christian Kert, Mme Anne-Christine Lang, Mme Colette Langlade, M. Dominique Le Mèner, Mme Annick Lepetit, Mme Lucette Lousteau, Mme Martine Martinel, M. François de Mazières, M. Michel Ménard, Mme Dominique Nachury, M. Christian Paul, Mme Barbara Pompili, M. Michel Pouzol, Mme Régine Povéda, M. Christophe Premat, M. Frédéric Reiss, M. Franck Riester, M. Paul Salen, M. Rudy Salles, Mme Claudine Schmid, M. Claude Sturni, Mme Michèle Tabarot, M. Patrick Vignal

Excusés. – Mme Huguette Bello, M. Ary Chalus, M. Bernard Debré, M. Jean-Pierre Giran, M. Michel Herbillon, Mme Sonia Lagarde, Mme Julie Sommaruga

Assistait également à la réunion. – M. Lionel Tardy