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Commission des affaires culturelles, et de l’éducation

Mercredi 18 mars 2015

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 33

Présidence de M. Patrick Bloche, président

– Présentation du point d’étape du Comité de suivi de la loi pour la refondation de l’école de la République sur la formation des enseignants, par M. Yves Durand, président du Comité

– Présences en réunion

COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L’ÉDUCATION

Mercredi 18 mars 2015

La séance est ouverte à neuf heures trente.

(Présidence de M. Patrick Bloche, président de la Commission)

——fpfp——

M. le président Patrick Bloche. Je suis heureux d’accueillir aujourd’hui notre collègue M. Yves Durand, en sa qualité de président du Comité de suivi de la loi n° 2013-595 du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République, afin qu’il nous présente un point d’étape des travaux de ce Comité en particulier sur les questions relatives à la formation des enseignants.

Comme vous le savez, nous avons-nous même souhaité, lors de l’examen du texte au printemps 2013, consacrer dans un article la création de ce Comité, chargé d’évaluer au fil des mois l’application de cette loi si importante pour l’avenir de notre pays. Placé auprès du ministre de l’éducation nationale, le Comité a été institué par le décret n° 2013-1232 du 23 décembre 2013. Composé de douze membres, dont quatre députés (M. Yves Durand, M. Jean-Noël Carpentier, Mme Martine Faure et Mme Dominique Nachury) et quatre sénateurs, le Comité de suivi a débuté ses travaux il y a un an environ.

L’article 88 de la loi prévoit qu’il doit notamment étudier la formation des enseignants et des personnels d’éducation en suivant la mise en place des écoles supérieures du professorat et de l’éducation (ESPE) ainsi que les questions de pré-recrutement et d’évolution du concours de recrutement des enseignants.

Le Comité doit remettre chaque année au Parlement un rapport sur ses travaux. Dans cette perspective, je remercie M. Yves Durand d’avoir proposé au bureau de la Commission de nous présenter dès à présent l’état des travaux et des réflexions de cet organe sur l’enjeu décisif qu’est la formation des enseignants. Ce sujet est en effet déterminant pour la réussite de la refondation de l’école. Nous avons également pu constater combien la formation était une préoccupation forte dans les échanges que nous avons eus récemment au sujet du plan de mobilisation de l’école pour les valeurs de la République, notamment au cours de notre table-ronde du 18 février dernier avec les principaux syndicats d’enseignants.

Qu’il s’agisse de formation initiale ou continue, les attentes sont donc importantes et, dans cette deuxième année de fonctionnement des ESPE, nous sommes tous intéressés à connaître votre sentiment et celui du Comité de suivi sur les rénovations en chantier dans ce domaine essentiel.

M. Yves Durand, président du Comité de suivi de la loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République. La communication que je me propose de vous présenter ce matin, à la suite de la demande formulée par nos collègues au cours d’une réunion du bureau de notre commission, ne constitue ni un pré-rapport ni un rapport du Comité de suivi, lequel sera probablement remis en septembre.

Je tiens tout d’abord à remercier chaleureusement les quatre députés membres pour leur assiduité et leur très forte implication dans les travaux du Comité, qui comprend également quatre personnalités qualifiées nommées par le ministre de l’éducation nationale : Mme Béatrice Gille, rectrice de l’académie de Nancy-Metz, M. Khaled Bouabdallah, président de l’université de Saint-Étienne, Mme Viviane Bouysse, inspectrice générale de l’éducation nationale et M. Alain Bouvier, président du conseil de l’école supérieure du professorat et de l’éducation de l’académie de Créteil au sein de l’université Paris-XII. Le secrétariat général du Comité est assuré par Mme Virginie Gohin, ancienne cheffe du bureau de la formation des enseignants à la Direction générale de l’enseignement scolaire (DGESCO), qui m’accompagne ce matin.

Je rappelle que l’esprit de la loi était de bâtir une école à la fois plus juste et plus exigeante pour chacun. C’est pourquoi elle est une loi de « refondation », c’est-à-dire qu’elle ne se contente pas de procéder à des aménagements par petites touches mais elle porte une réforme des fondations de notre Éducation nationale, en commençant par le commencement, la priorité donnée à l’école primaire. Cette ambition était nécessaire et urgente pour répondre aux deux défis majeurs de notre système scolaire : 150 000 jeunes quittent chaque année le système scolaire sans qualification ni diplôme et 30 % des élèves sortent de l’école élémentaire sans maîtriser les fondamentaux.

La loi a donc souhaité donner la priorité à l’école primaire : cette ambition passe notamment par le dispositif « plus de maîtres que de classes » et par l’accueil en maternelle des enfants de moins de trois ans, qui s’applique en particulier dans les zones difficiles. Elle intègre aussi la réforme des rythmes scolaire, qui n’a pas été instituée par la loi, mais celle-ci l’a toutefois actée en créant le fonds d’amorçage au profit des communes, aujourd’hui pérennisé, qui l’accompagne. Je ne nie d’ailleurs pas les difficultés de mise en œuvre de cette réforme, dont l’objectif commande de constater qu’elles se règlent toutefois ici ou là avec la bonne volonté des enseignants et des élus et qu’elles n’impliquent pas une contestation de son bien-fondé. Je rappelle à cet égard que sous la précédente législature, notre commission avait adopté à l’unanimité le rapport d’information que j’avais cosigné avec M. Xavier Breton et qui préconisait une telle réforme des rythmes scolaires. Enfin, la loi a prévu l’élaboration d’un nouveau socle commun de connaissances, de compétences et de culture, une répartition des enseignements en cycles dépassant la simple annualité, la création d’un service public du numérique éducatif et la mise en place de projets éducatifs territoriaux. La loi, également de programmation, a aussi prévu des moyens pour accompagner la réforme avec un effort budgétaire particulier et sanctuarisé. Dans la lignée de ces mesures, la ministre de l’éducation nationale vient en outre d’annoncer la rénovation du collège unique, axée sur l’idée de renforcer la continuité éducative jusqu’à la fin de la troisième qui procède directement de la loi de refondation.

Les travaux du Comité de suivi se fondent d’une part sur des auditions, très approfondies car reposant sur des questionnaires particulièrement fouillés et précis envoyés aux personnes ou institutions auditionnées et se déroulant de manière non publique, ce qui permet une grande liberté de parole et de ton, et, d’autre part, sur de nombreuses visites sur site. Nous nous sommes ainsi rendus dans les académies de Lille, de Lyon et de Bordeaux. Au cours de ces visites, nous visitons généralement un collège, afin d’observer la mise en place du nouveau cycle commun CM1-CM2-sixième, une école élémentaire, afin d’y observer le fonctionnement du dispositif « plus de maîtres que de classes », et l’ESPE de l’académie, où nous rencontrons la direction, les enseignants et les stagiaires.

Notre état d’esprit est semblable à celui qui a présidé à la concertation de juillet 2012 préalable à l’élaboration de la loi. Nous sommes persuadés que les acteurs doivent s’approprier la réforme et nous sommes attachés à une vision dynamique de la loi. Cette dernière a en effet enclenché un mouvement, mais elle ne saurait répondre à elle seule à tous les problèmes. Dans cet esprit, en insistant sur l’école primaire, elle nous encourage plus tard à revenir sur la question du lycée. De même, nous pouvons nous apercevoir que tel ou tel dispositif n’est pas en phase avec la réalité pour pouvoir le faire évoluer ensuite par la loi ou le décret. Notre travail est donc plus un travail d’accompagnement que de suivi. C’est d’ailleurs pourquoi je vous encourage à nous faire remonter toutes difficultés d’application que vous pourriez constater dans vos circonscriptions ainsi que vos éventuelles suggestions d’amélioration.

J’en viens à présent à nos premiers constats. Pour les rythmes scolaires, comme je viens de l’indiquer, nous ne saurions nier ni les difficultés de mise en place ni le bien-fondé manifeste du principe même de la réforme. Le dispositif « plus de maîtres que de classes », réclamé de longue date par plusieurs organisations syndicales d’enseignants, est quant à lui extrêmement bien accueilli par les enseignants et les directeurs d’écoles qui font preuve d’une très grande mobilisation autour de l’objectif d’organiser le travail autrement et de transformer les pratiques pédagogiques au bénéfice des élèves.

La continuité éducative entre l’école et le collège avait été mise en œuvre par certains collèges et certaines écoles élémentaires avant même l’adoption de la loi tant le besoin était fort en la matière. Or on constate que le dispositif fonctionne d’autant mieux que sa mise en place avait été anticipée. Des difficultés sont néanmoins observées dans la mise en place d’enseignements communs et de projets pédagogiques transversaux pour des raisons d’organisation qui peuvent notamment tenir à l’incompatibilité des emplois du temps et surtout aux distances géographiques entre les écoles et les collèges, mais aussi pour des raisons qui tiennent à la différence de culture entre le primaire et le secondaire que la formation en commun devrait atténuer avec le temps.

Le conseil supérieur des programmes (CSP), passés les soubresauts qui ont suivi son installation, a repris son travail d’élaboration des contenus. Les programmes de l’école maternelle sont aujourd’hui actés et ils ont été très bien reçus. Le socle commun a pour sa part été adopté à l’unanimité du conseil.

En parallèle, le service public du numérique éducatif s’installe progressivement. Je me souviens que nous avions tous partagé, au moment des débats sur le projet de loi, quelques doutes sur la nature et la forme précises que devait prendre ce service public. Sa mise en place rencontre elle-aussi des difficultés liées à en particulier à son caractère encore flou et aux inégalités de couverture numérique sur l’ensemble du territoire.

En ce qui concerne l’éducation prioritaire, dont la réforme ne figurait pas précisément dans la loi, je rappelle que la géographie prioritaire vient d’être remodelée, avec les problèmes que soulève toujours ce type de redécoupage. Ma conviction est cependant qu’elle se fait au plein bénéfice des élèves et des enseignants.

Enfin, j’en viens à ce qui va conditionner la réussite de la refondation, à savoir la formation professionnalisante des enseignants et de tous les personnels de l’éducation, qu’il s’agisse des personnels d’encadrement, des conseillers principaux d’éducation (CPE), des personnels de direction, voire des corps d’inspection, dont les ESPE ont la charge. La réforme que nous mettons en place repose sur la conviction que le métier d’enseignant est un métier particulier, et que ce métier s’apprend. Les ESPE ont pour mission de mieux professionnaliser cette formation mais aussi de transmettre une culture, une éthique de l’enseignement à l’heure où tout le monde s’accorde à reconnaître le rôle central de l’école dans la consolidation des valeurs de la République.

Les ESPE sont en voie de construction c’est pourquoi notre rôle à ce stade n’est pas tant de les contrôler ou de les évaluer que de les accompagner. La situation est très contrastée selon les cas. Il y a aujourd’hui trente ESPE en France, que nous allons visiter. Est actuellement envisagée la création d’un Comité des directeurs d’ESPE qui pourrait utilement confronter leurs expériences. Des ESPE mettent en place des équipes pluridisciplinaires au sein desquelles les maîtres sur le terrain participent à la formation des futurs enseignants. Force est de constater que la relation avec le monde universitaire est souvent difficile et marquée par une certaine incompréhension entre présidents d’universités, présidents d’unités de formation et de recherche (UFR) et directeurs d’ESPE, en ce qui concerne notamment la notion de budget de projet, dont je reconnais qu’elle peut parfois poser problème. Au-delà de ces difficultés de mise en place, je note une conscience commune de l’importance que revêt le succès de la mise en place des ESPE.

Par ailleurs, nous constatons que les enseignants stagiaires rencontrent des difficultés réelles pour gérer leur emploi du temps. Ils doivent, en effet, à la fois faire un stage, en assumant la responsabilité d’une classe à temps partiel et rédiger un mémoire de master. Cette situation nous impose de réfléchir à la nature du concours et à celle des modalités de professionnalisation du métier d’enseignant.

Je souhaiterais en conclusion vous détailler quelques points de vigilance qui me semblent devoir recueillir notre attention.

Le premier concerne la priorité accordée au primaire. Ces premières années de scolarité doivent être un lieu d’acquisition des fondamentaux, selon la formule que Jules Ferry qui rappelait qu’il s’agit de « savoir lire, écrire, compter », la légende lui prêtant même le complément « et de voter républicain ». Ces principes demeurent toujours aussi fondamentaux, jusqu’à l’enseignement des valeurs républicaines auxquelles l’actualité a donné une nouvelle acuité. Notre défi est dès lors de réfléchir aux pratiques pédagogiques permettant de garantir que la priorité donnée au primaire assurera la maîtrise de ces compétences incontournables.

Le second point de vigilance est lié aux structures administratives. Celles-ci n’ont pas évolué depuis des décennies, bien qu’elles ne correspondent plus à l’objectif de la loi qui est de faire du primaire un échelon prioritaire. Il me semble qu’il faudrait qu’une administration unique gère le primaire.

Le troisième défi est de parvenir à valoriser l’établissement comme lieu décisif d’application de la loi. Je pense que nous sommes ici tous d’accord en effet pour considérer que les établissements doivent être tout à la fois des lieux de vie, de transmission des savoirs et de formation.

Le quatrième point de vigilance concerne la gestion par l’administration de l’Éducation nationale de ses agents. Plus que jamais, cette institution doit mettre en place une véritable politique des ressources humaines qui lui manque trop souvent.

La formation continue des enseignants doit constituer un cinquième point de vigilance. Pour l’instant, seule la formation initiale fait l’objet d’une organisation progressive, tandis que la formation continue, pourtant essentielle et réclamée par tant de professeurs, demeure très perfectible. De manière générale, je considère que la formation doit être mieux adossée à la recherche, en particulier dans le domaine de la pédagogie. Le Comité a ainsi auditionné deux chercheurs en techniques cognitives dont les conclusions étaient passionnantes et mériteraient amplement d’être mises au service de tous les enseignants.

Enfin, un dernier point de vigilance ressortit de l’organisation des interventions des acteurs publics. Pour réussir la refondation, il me semble que les échelons décisifs d’appropriation doivent être les établissements et les bassins d’éducation, tandis que les corps intermédiaires doivent acquérir un caractère plus opérationnel. Quelles que soient les opinions sur la loi de refondation de l’école, nous avons tous pu constater l’extraordinaire implication et l’enthousiasme des personnels sur le terrain. Or, les courroies de transmission entre le sommet et la base ne sont pas toujours efficientes. Il faut mettre en place une structure plus décentralisée et plus déconcentrée.

Soyez assurés que nous demeurerons très concentrés sur tous ces sujets, en veillant à entretenir l’excellente ambiance qui préside aux travaux du Comité et qui rappelle qu’au-delà de nos divergences politiques, l’école est notre plus précieux bien commun.

M. le président Patrick Bloche. Je vous remercie pour ce bilan très exhaustif. Je rappelle cependant à nos collègues, pour guider nos débats, que le bureau de la Commission a choisi de centrer cette audition tout particulièrement sur la question de la formation des enseignants, et que nous aurons bien d’autres occasions de débattre des importants autres enjeux évoqués par M. Yves Durand, notamment au cours de l’audition de Mme Vallaud-Belkacem, ministre de l’Éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, la semaine prochaine, sur la réforme du collège.

Mme Martine Faure. Je vous remercie d’avoir initié ce moment d’échanges autour des travaux du Comité de suivi dont je suis également membre. Permettez-moi d’insister sur quelques points.

Depuis plusieurs mois, nous nous réunissons paritairement au sein de ce Comité avec la volonté partagée de comprendre et accompagner l’évolution de notre école de la maternelle à l’université. Les auditions et les déplacements organisés nous permettent de dresser un état des lieux précis des expériences, des réalisations et de la mise en place de la loi sur l’ensemble de nos territoires, et aussi de constater les difficultés auxquelles peuvent se heurter les professionnels de l’Éducation. Nos travaux nous autorisent à poser quelques constats partagés quasi unanimement. Ainsi, la priorité accordée au primaire et à la maternelle, le rétablissement de la formation des enseignants, la mise en place des conseils école-collège, la concentration des apprentissages fondamentaux sur les cinq matinées travaillées au primaire, l’élargissement de la scolarisation des moins de trois ans quand les parents le souhaitent, le déploiement du dispositif « plus de maîtres que de classes », le développement du numérique, l’instauration de l’enseignement d’une langue vivante dès la classe préparatoire sont des avancées il me semble incontestées, toutes entrées en application dès 2013.

Permettez-moi de donner l’exemple de la Gironde dans lequel nous avons fait un déplacement la semaine dernière. Nous avons rencontré des professeurs d’école et de collège qui nous ont présenté les résultats d’une réflexion collective remarquable ayant débouché sur l’élaboration d’outils partagés pour la continuité des apprentissages entre le premier et le deuxième degré. Nous avons pu constater leur enthousiasme, mais aussi les problèmes qu’ils affrontent notamment en termes d’horaires et de transport. Nous avons également assisté à un cours de mathématiques en troisième avec l’utilisation de supports numériques, affecté toutefois en l’espèce par quelques difficultés matérielles. Des élèves sont venus ensuite nous faire partager leur ressenti très positif sur ces pratiques tout en rappelant avec beaucoup de conviction et de maturité que le numérique est un support intéressant mais qu’il ne peut remplacer ni le professeur ni l’écrit. Toujours au cours de ce déplacement, nous avons pu visiter l’ESPE d’Aquitaine, où apparaissent des difficultés majeures dans la coopération et l’interaction entre l’établissement et l’université. Nous avons aussi pu constater combien les professeurs en sciences cognitives regrettent que ces sciences peinent à irradier les formations et les pédagogies alors qu’elles ont fait leur preuve lorsqu’elles ont été expérimentées, je pense notamment au célèbre exemple de l’école maternelle de Gennevilliers.

Je conclurai en soulignant l’importance de la diversité de la composition de notre Comité. Cette composition plurielle garantit un regard équilibré sur toutes les situations et une prise en considération lucide des enjeux et des problèmes. J’insiste à mon tour sur la qualité de nos échanges qui viendront nourrir le rapport que présentera notre président. C’est tout le sens de la mission que de rendre compte à la ministre de l’Éducation et à vous-mêmes, chers collèges, de ce qui est constaté sur le terrain, de la réalité de l’application de la loi qui reste une loi ambitieuse préparant la réussite pour tous dans le temps long qui caractérise l’éducation.

M. Frédéric Reiss. Je tiens à remercier Yves Durand pour la qualité de sa présentation, comme de celle d’ailleurs de sa présidence du Comité de suivi. Ce point d’étape nous est particulièrement précieux, notamment s’agissant de la réforme de la formation des enseignants.

À cet égard, vous connaissez ma crainte que les nouveaux ESPE ne reproduisent le « pédagogisme » qui avait tant fait pour affaiblir la légitimité des anciens instituts universitaires de formation des maîtres (IUFM). Quelles nouveautés ces établissements ont-ils réellement apporté en ce qui concerne la formation professionnalisante des enseignants ? Les relations presque conflictuelles que vous évoquez avec les universités pourront-elles être rapidement apaisées, les bienfaits d’une formation in situ étant connus de tous ?

Par ailleurs, un rapport récent d’un médiateur académique de l’éducation nationale a montré sans ambiguïté combien les élèves obéissent moins souvent, souffrent régulièrement, et combien les relations entre les parents et les professeurs se dégradent et le métier d’enseignant se corse. Cela n’a rien de nouveau, il est vrai. Mais ce rapport conclut en indiquant que la compétence humaine d’un professeur prend aujourd’hui le pas sur la maîtrise de sa discipline et sur la pédagogie. Cet aspect du métier d’enseignant est-il efficacement abordé au sein des ESPE ?

Dans le contexte de la mobilisation pour les valeurs de la République annoncée par la ministre de l’éducation nationale à la fin du mois de janvier, est apparu en pleine lumière l’énorme besoin en formation continue des enseignants. À la suite des événements dramatiques de janvier, il a été décidé de former 1 000 formateurs, qui devront eux-mêmes former ensuite 300 000 enseignants d’ici la fin de l’année 2015. Comment les ESPE sont-elles mobilisées sur ce point ?

La formation dispensée au sein des ESPE est-elle réellement axée sur la culture du socle, sur l’essentiel que représente savoir lire, écrire et compte ?

Je suis surpris que le récent rapport de la Cour des comptes sur le suivi individualisé des élèves n’ait pas été évoqué. Il souligne l’inefficacité d’une politique qui bénéficie pourtant de près de deux milliards d’euros de crédits, en raison d’orientations hésitantes et d’un pilotage défaillant. Or le socle, dont l’importance a été consacrée par la loi pour la refondation de l’école, doit être acquis par l’intégralité des élèves. Répondant à ce constat, la Cour des comptes souhaite que soit systématisée la formation des enseignants à la prise en compte de l’hétérogénéité des élèves. Même si cela n’est pas nouveau – l’établissement Louis-le-Grand a mis en place ces formations dès les années 1970 –, une enquête indique que 55 % des collèges déclarent aujourd’hui qu’aucun de leurs enseignants n’a été formé à l’accompagnement personnalisé. Le constat dans le primaire est sans doute comparable, ce qui est d’autant plus regrettable que cette formation permettrait de multiplier l’efficacité du dispositif « plus de maîtres que de classes ». Dès lors, comment les ESPE vont-elles assurer la formation au suivi individualisé, à l’intérieur de la classe et non à l’extérieur, ces suivis individualisés hors des classes étant considérés comme inopérant par la Cour des comptes ?

Monsieur Durand, vous n’avez pas abordé la question de la cyber-violence, qui avait focalisé l’attention de M. Vincent Peillon lorsqu’il était ministre de l’Éducation nationale. Celle-ci doit être repérée, réprimée et traitée au plan pédagogique : les ESPE ont-elles intégré cette dimension ?

Enfin, où en est-on sur l’aide à l’apprentissage, l’« apprendre à apprendre », en particulier pour ce qui est de la lecture ? Les résultats des tests PISA montre bien que c’est dans ce domaine que les difficultés apparaissent les plus considérables.

Mme Barbara Pompili. Cette réunion est importante et j’espère qu’elle en préfigure bien d’autres, tant la réforme est décisive et tant les sujets à aborder sont nombreux. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle le bureau de la commission avait décidé d’axer cette réunion sur la formation des enseignants, la mise en place des ESPE constituant une mesure essentielle de la refondation de l’école. Rappelons que la formation des enseignants avait été abandonnée pendant plusieurs années, générant de redoutables problèmes. Or le métier de professeur est bien un métier et les questions de pédagogie sont absolument essentielles. C’est pourquoi nous avions soutenu avec force la création des ESPE.

Nous avons aujourd’hui besoin de faire le point sur ce qui fonctionne et sur ce qui ne fonctionne pas. J’attends dans cet esprit du Comité de suivi qu’il formule des propositions concrètes pour améliorer ce qui doit l’être. Nous avions anticipé certaines difficultés qui, malheureusement, se concrétisent aujourd’hui. Deux rapports sur les difficultés d’installation des ESPE sont déjà parus – l’un émanant du Sénat, l’autre de l’inspection générale de l’éducation nationale et de l’inspection générale de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche. Ces difficultés sont du reste compréhensibles dans la mesure où les ESPE ont été mises en place en trois mois seulement.

Même si la perfection ne saurait être atteinte en si peu de temps, la question de l’intégration des ESPE à l’université doit être soulevée. En effet, on constate que dans un certain nombre de cas, les moyens des ESPE sont détournés au profit d’autres postes au sein de l’université, notamment pour des postes de formateurs non affectés à l’ESPE. Nous avions présenté des amendements sur ce sujet pendant l’examen du projet de loi pour la refondation de l’école, qui n’ont malheureusement pas été retenus.

En ce qui concerne le continuum de formation, nous avions aussi posé la question de la place du concours. Contrairement à ce que vous semblez considérer, cette question n’est pas derrière nous. La première année de master, absorbée par le bachotage en vue du concours, est en réalité une année perdue pour apprendre le métier d’enseignant. Beaucoup regrettent ainsi le manque de contact avec le terrain durant cette année. Et, de ce fait, la seconde année de master est extrêmement chargée entre les cours, le mémoire, le stage à mi-temps, etc. Ce dernier est d’ailleurs beaucoup trop lourd et sert en réalité à compenser des postes de professeurs non remplacés. Le stagiaire, au lieu d’apprendre, se retrouve déjà à devoir enseigner. De plus, le travail de recherche qui est exigé des élèves, obéré par le manque de temps, est très mal vécu.

En matière de diversité du recrutement du corps enseignant, les emplois d’avenir de professeurs sont en nombre insuffisant. Leur demander de travailler durant leurs études n’est pas la meilleure façon de réussir ces dernières… Il y a, dans ce domaine, une vraie réflexion à conduire. Nous proposons pour notre part de mettre en place un pré-recrutement dès la licence, avec un concours en fin de troisième année, suivi d’une vraie formation initiale de deux ans, ainsi qu’une formation continue renforcée durant les premières années de pratique mais aussi tout au long de la carrière.

L’ouverture des ESPE sur l’ensemble des acteurs de l’éducation, notamment les associations d’éducation populaire, pour se former mais également en tant que formateur, faisait partie intégrante de l’esprit de la loi pour la refondation de l’école. La formation des formateurs conditionne la qualité de la formation dispensée par les ESPE. Il faut aussi créer des équipes de formateurs plurielles et répondre au mal-être exprimé par les personnels des ESPE. S’il l’on veut que l’esprit de la loi pour la refondation de l’école anime également ces écoles, il faut apprendre aux futurs enseignants à travailler avec les autres acteurs de l’éducation : les parents, les animateurs, les auxiliaires de vie scolaire, les structures associatives, etc. Cette diversité, qui constitue une indéniable richesse, doit absolument être prise en compte dans la formation initiale et continue.

Enfin, j’attends du Comité de suivi qu’il formule des propositions pour répondre aux insuffisances du tronc commun, qui est aujourd’hui dénoncé comme une superposition de thématiques non articulées entre elles, pour mieux articuler l’enseignement et la recherche scientifique dans le domaine de l’éducation et pour assurer la formation à la scolarisation de tous les élèves, notamment les enfants affectés par des handicaps. Des modules spécifiques sont du reste prévus, mais je crois comprendre qu’il existe une réelle disparité entre les formations.

M. Rudy Salles. Je tiens à féliciter les membres du Comité de suivi, ainsi que son président, pour le travail réalisé. Les résultats obtenus par la France lors de la dernière enquête PISA, ainsi que le nombre toujours élevé de jeunes sans diplôme, témoignent de l’incapacité de notre système éducatif à faire réussir tous les élèves alors même que cet objectif est inscrit dans la loi.

La Cour des comptes, dans son rapport cité tout à l’heure sur le suivi individualisé des élèves, déplore notamment le manque de lisibilité des nombreux dispositifs existants ainsi que leur coût, particulièrement élevé au regard de leur efficacité limité. Au-delà de ces constats, qui ne sont pas nouveaux, la Cour souligne que la démarche de formation au dispositif de suivi individualisé des élèves mise en place par le ministère ne permet pas de répondre aux besoins observés sur le terrain. Or, afin de résoudre les difficultés des élèves, il est essentiel de mieux préparer les enseignants et de placer le suivi individualisé au cœur de leur formation.

Je souhaiterais également réagir à vos propos sur la réforme des rythmes scolaires. Je ne partage pas l’opinion selon laquelle cette mesure ne serait plus mise en cause. En effet, dans ma ville, les conseils d’école continuent de s’y opposer avec force, contrairement à ce que vous indiquez. Je me permets ainsi de tempérer l’optimisme dont vous faites preuve s’agissant de l’enthousiasme des acteurs de terrain face à cette réforme. Il ne faudrait pas prendre nos désirs pour des réalités !

Parmi les recommandations formulées par le rapport de la Cour des comptes, figure notamment la nécessité de systématiser la formation des enseignants à la démarche d’individualisation et d’évaluer ces derniers sur leurs pratiques de suivi des élèves, qu’il s’agisse du diagnostic des besoins comme des pratiques éducatives. Pouvez-vous nous indiquer si des progrès ont été réalisés dans ce domaine, tant en ce qui concerne les besoins en formation initiale que continue ? Quelles sont, selon vous, les premières mesures qui pourraient être prises avant la rentrée prochaine afin d’améliorer concrètement le suivi individualisé des élèves ? Enfin, les récentes annonces de la ministre de l’éducation nationale sur la réforme du collège semblent-elles suffisantes en ce qui concerne la formation des enseignants ?

M. Jean-Noël Carpentier. Notre école ne peut pas tout. Elle ne peut pas résoudre à elle seule les maux de la société. Mais, il faut l’admettre : notre école ne va pas bien. Trop inégalitaire, elle ne conduit pas assez d’élèves à la réussite. Trop d’enfants sortent de notre système scolaire sans diplôme. Trop d’enfants arrivent au collège sans savoir lire et écrire correctement. Toutes ces lacunes, nous les connaissons. Il faut les corriger sans tarder. Notre ambition, matérialisée par la loi pour la refondation de l’école, est claire : nous voulons la réussite de tous les enfants.

Ce travail de refondation doit se faire dans la lucidité. Il nous faut, à la fois, mesurer les difficultés de notre école et nous appuyer sur ses formidables atouts. Notre école est vivante, trépidante, offensive : il faut l’aider à se réformer.

Permettez-moi de formuler quelques remarques, au nom de mon groupe mais aussi en tant que membre du Comité de suivi de la loi. D’abord, je fais le constat que la réforme des rythmes scolaires, qu’il faudra corriger sur certains aspects, a perturbé la mise en place de la loi. Elle a, d’une certaine manière, occulté le débat de fond sur les vraies avancées scolaires contenues dans la loi : les programmes, les méthodes pédagogiques, la formation des enseignants, le principe « plus de maîtres que de classes », l’accueil des enfants de moins de trois ans, etc. Je regrette que les enjeux et les orientations de la loi ne soient pas assez connus, notamment à cause d’une concertation et d’un dialogue très insuffisants sur le terrain. Ni les parents, ni les enseignants ne maîtrisent ces questions, pourtant si importantes pour le succès de la scolarité des élèves. Je propose donc que soient organisées au niveau local des réunions permettant de débattre avec les acteurs de l’école des grands axes de la loi. Car il faut rappeler que les difficultés de notre système éducatif ne sont niées ni par les enseignants, ni par les parents. L’idée de refondation est rassembleuse. Il nous faut donc encourager l’engagement d’un travail collectif constructif entre enseignants et parents : c’est, de mon point de vue, une des clés de la réussite de la refondation de notre école. Cet échange doit entrer dans le quotidien des établissements, dont il faut ouvrir les portes en grand.

Il est un fait connu que l’épanouissement de l’élève dans ses apprentissages dépend pour beaucoup de la qualité de la relation nouée entre l’école et sa famille. S’il faut favoriser l’implication des familles – l’école ne pourra se refonder sans les parents –, il faut aussi valoriser le rôle des enseignants. Indéniablement, malgré les efforts louables de la ministre de l’éducation nationale, les enseignants souffrent d’un manque de reconnaissance de leur employeur, mais aussi, plus largement, de la société. Cela conduit parfois à des crispations et même à des formes exacerbées de démotivation.

Pour ma part, je suis favorable à des gestes forts de la Nation envers les enseignants, pour leur dire à quel point leur mission est importante. Ils sont les soldats de la République. Je suis donc favorable à une revalorisation salariale conséquente et à une meilleure concertation sur toutes les mesures engagées qui ont un impact direct sur leur quotidien. Les mesures améliorant la formation des enseignants sont également essentielles. Dans ce domaine, nous devons reconstruire ce qu’a détruit la précédente majorité. La relance de la formation initiale est une bonne chose, mais il faut sans plus tarder améliorer la formation continue des enseignants, qui en sont très demandeurs, démontrant clairement leur appétence à s’engager toujours davantage dans l’exercice de leurs missions. Bien sûr, cette formation continue réclame énormément de moyens, et là encore les questions budgétaires devront nécessairement être abordées.

Enfin, je relève moi aussi que l’éducation au numérique suscite des attentes. Elle ne progresse pas assez vite. L’État doit s’impliquer dans la coordination et l’accompagnement des collectivités locales pour éviter que cette éducation ne subisse de plein fouet les inégalités territoriales au moment même où se creuse un fossé dans ce domaine avec les pays voisins.

Au total, nous devons être fiers de la loi de refondation de l’école et des moyens supplémentaires accordés par notre majorité à l’éducation. Les dispositions de cette loi doivent maintenant se traduire concrètement dans le quotidien des enseignants et des élèves. Leurs résultats sont attendus.

Mme Marie-George Buffet. Je félicite M. Yves Durand pour son rapport et pour le travail particulièrement intéressant et riche du Comité de suivi, qui mesure les impacts de la loi de refondation de l’école et nous permet d’envisager de l’amender là où c’est nécessaire. Cette loi établit les piliers de la réussite scolaire de tous les enfants. Les enseignants sont au cœur de son dispositif, à rebours des discours démagogiques de ceux qui les stigmatisent, insistent sur leur responsabilité dans l’échec scolaire en exonérant le système scolaire ou pointent du doigt leurs difficultés à faire respecter les valeurs de la République dans des environnements parfois très hostiles, en dénonçant par exemple hâtivement ces classes qui n’ont pas respecté la minute de silence en hommage aux victimes des attentats de janvier dernier.

Le discours de M. Yves Durand parle au contraire de l’engagement enthousiaste des enseignants dans leur métier, dans leurs missions. Il souligne utilement combien la formation professionnelle à ce métier est essentielle. Les jeunes enseignants manquaient auparavant de formation initiale, nous devons tous l’admettre. Les ESPE rencontrent il est vrai encore des problèmes, repérés d’ailleurs très vite par les organisations syndicales, en particulier celui de leur place et de leur reconnaissance par l’université, celui du cadrage national du contenu des formations, celui du recrutement des formateurs, celui du service à mi-temps des stagiaires qui ne leur laisse pas assez de temps pour conduire les recherches que l’on leur demande. Ne faudrait-il pas à cet égard réduire leur présence en classe à un tiers temps ?

Je m’interroge aussi sur la formation professionnelle continue qui appelle des efforts dans les recherches pédagogiques et des moyens supplémentaires pour remplacer les maîtres partis en formation. Je souhaite que le Comité de suivi le rappelle à la veille du prochain débat budgétaire. Dans un même esprit, et nous le disons depuis longtemps, le métier d’enseignant mérite davantage de reconnaissance et une réelle revalorisation des carrières et des rémunérations.

Sur le terrain, je constate moi aussi que la mise en œuvre des principales dispositions de la loi progresse doucement. En Seine-Saint-Denis, seules 26 des 425 écoles maternelles accueillent aujourd’hui des enfants de 2 ans. Cette innovation si importante reste ainsi l’exception, qui motive l’incompréhension des parents qui croyait que ce droit était affirmé dans la loi et se heurte en pratique au manque de places disponibles. Dans le même département, 38 écoles seulement ont à ce jour un maître de plus que le nombre de classes, ce qui est un effectif de portée encore expérimental. Pour que la loi soit appliquée, il faut donc consentir un effort budgétaire plus intense. Je voudrais connaître le sentiment de M. Yves Durand sur ces deux sujets et sur le besoin d’une formation particulière qu’éprouvent, selon moi, les enseignants qui accueillent des enfants de 2 ans. De même, les maîtres en plus sont-ils utilisés partout de la même façon ?

J’aimerais également connaître son opinion sur les emplois d’avenir de professeurs.

Enfin, la réforme des rythmes scolaires était une bonne idée, je n’en disconviens pas. Je m’interroge cependant sur sa mise en œuvre dans des quartiers populaires, où le taux d’activité des femmes est faible et où les enfants qu’elles reprennent à la pause de 15 heures 30 ne participent pas aux activités programmées plus tard. Cet effet pervers n’avait peut-être pas été pleinement envisagé lors de l’adoption de cette réforme, et il convient que nous y faisions face.

M. Stéphane Travert. Les dispositions de la loi de refondation de l’école répondent aux engagements pris par le Gouvernement et la majorité de rompre avec la période précédente, de construire une école qui accueille, qui instruise, qui garantisse l’égalité des chances, qui éduque à la citoyenneté et qui réduise de moitié le décrochage scolaire. La priorité accordée aux écoles primaires et maternelles, aux travaux en petits groupes, à la médiation entre parents, enseignants et élèves pour rétablir une confiance entre eux, rompt avec les obsessions répressives du passé. Je voudrais toutefois interroger le président du Comité de suivi sur les inégalités des moyens de lutte contre le décrochage scolaire qu’il a pu observer entre les territoires urbains et ruraux et sur leurs répercussions sur l’égalité des chances des élèves qui y sont scolarisés ?

Mme Dominique Nachury. En tant que membre du Comité de suivi, je peux témoigner du rythme et de la qualité des travaux présidés par M. Yves Durand. C’est nécessaire car il est malaisé de suivre l’application d’un texte aussi large tout en restant toujours concrets et proches du terrain. J’ai le sentiment que nous sommes parfois face à trois mondes s’ignorent, celui des penseurs, celui des services centraux du ministère et celui des établissements d’enseignement. Ce sont ces établissements de terrain que les membres de la commission connaissent le mieux. Il serait intéressant qu’ils fassent part au Comité de suivi des attentes exprimées par les établissements de leur circonscription.

Les ESPE rencontrent en effet des difficultés à trouver leur place dans l’université, à obtenir des budgets, à recruter des formateurs, à organiser des stages. La formation continue, qui est fondamentale pour faire face aux besoins, est elle-même encore peu développée. Tous ces chantiers devant nous nous encouragent à demeurer vigilants et à redoubler d’énergie pour faire de notre Comité un acteur important de la réforme de l’école.

M. Michel Ménard. Je constate à mon tour que l’absence de formation professionnelle des enseignants est préjudiciable à l’exercice de leur métier. L’exigence d’un master pour se présenter aux examens de recrutement a certes amélioré leur maîtrise de leur discipline mais elle n’a rien changé quant aux prérequis de pédagogie et d’aptitude à transmettre du savoir. En outre, les ESPE sont inégales selon les territoires. Le Comité pourrait-il faire le point sur les meilleures pratiques qu’il a pu observer ? Quel est en outre votre premier jugement sur le dispositif « plus de maîtres que de classes » ?

Mme Gilda Hobert. Partageant beaucoup des analyses exposées, je n’évoquerai ici que le sujet du harcèlement à l’école. Ce phénomène est difficile à déceler mais il préoccupe légitimement les enfants. J’ai pu le constater en entendant les élèves de la classe de CM2 de ma circonscription qui participe au Parlement des Enfants. Il faut se saisir de cette question prégnante avec détermination. Le prix « Mobilisons-nous contre le harcèlement » et le site internet Agir contre le harcèlement à l’école connaissent un réel succès. Mais peu d’enseignants sont sensibilisés à ce phénomène. Ils ne savent pas comment lutter contre les violences verbales et physiques qui se banalisent. Cette lutte doit être conduite à l’égard des victimes, des témoins et des auteurs des violences.

M. François de Mazières. J’adresse mes félicitations au rapporteur pour la clarté de son exposé.

Le Gouvernement a annoncé un plan de 250 millions d’euros sur 3 ans pour la défense des valeurs de la République à l’école à la suite des attentats de janvier. Quelles sont les mesures qui concernent spécifiquement les enseignants ? Comment les 1 000 formateurs qui vont les mettre en œuvre ont-ils été sélectionnés ? Quels montants de crédits ont été engagés à ce jour ? Les enseignants témoignent-ils de l’utilité de la formation qu’ils reçoivent ?

Je voudrais ensuite savoir comment les concours de recrutement des enseignants et les ESPE préparent à l’éducation des élèves à la citoyenneté, sur laquelle la ministre de l’Éducation nationale a insisté. Enfin je voudrais interroger le président du Comité de suivi sur l’engagement des élèves dans le scoutisme, à la suite de l’émoi provoqué par une proposition de loi visant à lui appliquer l’obligation de neutralité religieuse et le respect du principe de laïcité, qui devait être débattue en séance le 12 mars et a été reportée au 11 mai.

M. Yves Durand. Je ne vous répondrais pas sur le sujet du scoutisme, qui sort largement de nos débats d’aujourd’hui.

Mme Martine Martinel. Je remercie mes collègues membres du Comité de suivi qui se sont engagés dans une mission longue et difficile. Dans la lignée des points évoqués, je souhaite demander plus concrètement au président du Comité s’il dispose d’informations particulières sur les rapports entre l’université de Toulouse et son ESPE. Par ailleurs, quel est son point de vue sur le timing des concours précédemment contesté ? N’interviennent-ils pas trop tôt dans l’année ? Les stagiaires nous disent que le mi-temps d’enseignement qui leur est imposé est trop lourd et qu’il obère leur préparation du mémoire de master dans de bonnes conditions. Enfin, dans le prolongement de l’annonce de Mme la ministre de l’Éducation concernant la formation des enseignants à l’éducation à la citoyenneté et à la laïcité par un module particulier, ne serait-il pas opportun d’introduire dans les ESPE un enseignement du fait religieux ?

M. Michel Herbillon. Je me félicite des travaux menés par le Comité de suivi de la loi pour la refondation de l’école. Parmi les points de vigilance cités par M. Yves Durand, je regrette toutefois que la question des rythmes scolaires n’ait pas été évoquée. Sur ce thème, de manière elliptique et presque pudique, M. Yves Durand s’est contenté de signaler quelques difficultés lors de la mise en place sans que cette réforme n’ait cependant été à ses yeux remise en cause. Les échos venant des territoires et des élus locaux sont pourtant très différents. Cette réforme a été imposée aux parents, aux élus locaux et aux enseignants qui n’en voulaient absolument pas. Et on cherche maintenant à nous imposer aux forceps « le projet éducatif territorial » qui conduit à mettre les activités périscolaires sous la férule de l’Inspection académique, en contradiction flagrante avec le principe de libre administration des collectivités territoriales.

Le président du Comité de suivi serait-il d’accord pour que cette réforme fasse l’objet d’un bilan objectif et apaisé ? À plusieurs reprises, et encore hier après-midi lors de la séance des questions au Gouvernement, Mme la ministre de l’Éducation nationale a été interrogée sur ce point et elle n’a pas voulu répondre, se contentant de stigmatiser ceux qui ne sont pas d’accord avec les nouveaux rythmes scolaires.

M. Hervé Féron. En écoutant nos débats, je me disais avec une certaine nostalgie que les Écoles normales d’antan constituaient un véritable modèle ! J’ai déjà eu l’occasion d’interroger M. Benoît Hamon, lorsqu’il était ministre de l’Éducation nationale, sur les nouvelles ESPE intégrées aux universités, en relevant la réticence manifestée par certaines universités à les accueillir, en regrettant l’absence de certains enseignements comme la philosophie et en m’inquiétant du caractère très chargé de l’année de stage.

Concernant la lutte contre le harcèlement scolaire évoqué tout à l’heure, qui toucherait près de 9 % des élèves en particulier dans les collèges, le Gouvernement a annoncé qu’il allait revoir la formation des enseignants. Ne faut-il pas étendre cette innovation à l’ensemble des membres des équipes éducatives, en particulier les conseillers d’éducation ?

Je voudrais aussi évoquer les projets de fermeture de plusieurs collèges en Moselle et demander si une procédure de concertation avec les principaux intéressés va être menée pour que les décisions soient prises en toute connaissance de cause.

Enfin, je voudrais à mon tour évoquer la recommandation récente de la Cour des comptes de mieux former les enseignants à l’accompagnement individualisé des élèves, démarche indispensable dans les classes où une forte hétérogénéité des élèves empêche de dispenser un enseignement exclusivement collectif et magistral. Le Comité de suivi
partage-t-il cette analyse ?

M. Guénaël Huet. Je me réjouis à mon tour de cette démarche d’évaluation. L’habitude est tellement ancrée de multiplier les nouvelles lois sans nous interroger sur l’évaluation des plus anciennes que les démarches innovantes comparables à celles du Comité de suivi de la loi de refondation de l’école doivent être saluées.

Je voudrais évoquer le problème de la maîtrise de l’outil numérique et de ses conséquences sur la pédagogie. Il semble que certains enseignants ne soient pas à l’aise avec son utilisation et qu’ils ne mesurent pas toujours certains de leurs effets défavorables. L’utilisation massive du numérique semble en outre souvent accompagner voir nourrir l’apparition de lacunes importantes dans la maîtrise de l’orthographe et de la syntaxe. Le Comité de suivi s’est-il saisi de ce problème ?

Je voudrais aussi interroger le Comité sur l’utilité du Conseil supérieur des programmes. N’est-ce pas un alibi législatif permettant à l’administration de l’Éducation nationale et à l’Inspection générale, qui ne font guère que semblant de tenir compte de ses travaux, de continuer à appliquer leur propre doctrine ?

Mme Annie Genevard. En tant que membre du Conseil supérieur des programmes je me sens interpellée par cette question un peu provocatrice. Je voudrais dire que le travail fourni par cette instance est tout à fait réel mais que la tâche est ardue, d’une part parce que le moindre changement dans les programmes déclenche immédiatement de très vifs débats qui nous obligent à peser soigneusement chacun de nos mots, et, d’autre part, parce que les textes élaborés, dont s’emparent  aussitôt les syndicats et la direction générale de l’enseignement scolaire, nous échappent dès qu’ils sont adoptés. Nous avons connu quelques déceptions dans la façon dont les textes ont ainsi évolué, en particulier sur la question de l’évaluation, qui nous est essentielle et qui a pourtant purement et simplement disparue du programme du socle commun face à l’hostilité de cette dernière direction.

Je dois à mon tour saluer la qualité de la démarche d’évaluation suivie par le Comité, mais pour déplorer aussitôt la faible place donnée à cette dimension décisive de l’action publique par la loi de refondation de l’école, sans doute en raison de la pression d’une administration encline à faire de cette question un véritable tabou. Or, on ne peut pas faire l’économie de l’évaluation, et je signale d’ailleurs que si les IUFM ont été supprimés, c’est précisément parce que les évaluations conduites démontraient qu’ils ne donnaient pas satisfaction. Dans cet esprit, il m’apparaît primordial de procéder rapidement à un bilan de la mise en place des nouvelles ESPE car c’est dès le début qu’il faut apprécier et corriger les défauts de cette nouvelle formation avant que le temps et les habitudes ne fassent leur ouvrage.

Comme mes collègues, je serais tout à fait intéressée de connaître l’opinion des membres du Comité de suivi sur les préconisations de la Cour des comptes dans ses deux rapports récents, de mai 2013 sur l’évaluation des enseignants, intitulé « Gérer les enseignants autrement » et de mars 2015 sur « le suivi individualisé des élèves ».

La loi de refondation de l’école date d’un an et demi à peine et pourtant sur certains aspects, elle paraît déjà dépassée.

C’est ainsi que sur la maîtrise de la langue française, nos amendements rappelant l’importance de l’apprentissage du français ont tous été rejetés. Tout au contraire, un amendement adopté par le Sénat avait même consacré la reconnaissance de la langue parlée dans la famille, sans se rendre compte que le plurilinguisme ne doit pas se faire en négligeant la maîtrise la langue française. L’actualité et les résultats scolaires montrent combien ces questions étaient importantes.

Lors de la discussion de la loi de refondation nous avions aussi insisté sur l’importance de l’autonomie des établissements. Cette notion avait été sévèrement critiquée par le Gouvernement… avant qu’il n’en fasse, dans la réforme du collège qu’il a présenté il y a quelques jours, l’une des solutions aux difficultés de l’école !

On pourrait renouveler ce raisonnement sur la discipline et le respect de l’autorité, auxquels vous aviez refusé toute référence il y a deux ans avant que les événements tragiques de janvier 2015 n’en fassent des nouvelles priorités de la République.

Dans ce contexte mouvant, le Comité de suivi n’estime-t-il pas nécessaire de faire évoluer certains aspects de la loi de refondation de l’école ?

M. Xavier Breton. La loi de refondation de l’école semble déjà dépassée alors qu’elle a été votée il y a un an et demi. J’en donnerai pour exemple la récente mobilisation du ministère de l’Éducation nationale sur les valeurs républicaines suite aux événements de janvier 2015. Il faut se souvenir que les amendements de l’UMP sur le goût de l’effort et le respect de l’autorité avaient été systématiquement refusés. Certains socialistes ont-ils aujourd’hui des regrets voire des remords ?

Concernant la réforme du collège récemment annoncée, comment va-t-elle se coordonner avec les dispositions de la récente loi de refondation ? Est-ce à dire que le ministère s’est rendu compte des limites de ce texte ?

M. Patrick Hetzel. Je voudrais revenir sur deux points qui avaient donné lieu à un débat important dans l’hémicycle : l’organisation du conseil supérieur des programmes et la formation des enseignants.

Le conseil supérieur des programmes, tout d’abord, comme l’a souligné notre collègue Mme Annie Genevard, se trouve souvent dépossédé de son travail au cours des étapes qui suivent sa consultation. Or, la question des programmes est centrale. Nous avons hélas l’impression que la création de ce conseil n’a pas permis la définition d’objectifs et de responsables clairs et a échoué à encourager la mise en place d’un dispositif d’évaluation efficace.

Je souhaiterais donc aller plus loin sur cette question et évoquer également son articulation avec les travaux de l’inspection générale de l’éducation nationale. Théoriquement, celle-ci est bien sûr placée sous l’autorité du ministre, mais j’ai l’impression qu’elle fonctionne parfois un peu en roue libre.

La formation des enseignants, ensuite, repose sur une alternance entre une formation théorique et une formation plus pratique, dont la qualité dans les nouveaux ESPE a été contestée notamment par M. Daniel Filâtre, recteur de l’académie de Grenoble, en septembre dernier.

M. Yves Durand. Trois grands thèmes se sont dégagés de vos questions : la formation, l’évaluation et le pilotage de la refondation de l’école.

Concernant l’évaluation, je pense que ce Comité de suivi pourrait constituer un exemple de ce que les parlementaires pourraient utilement faire pour toutes les lois importantes, à l’image par exemple de la loi sur la fin de vie dont l’importance des sujets justifie qu’elle fasse elle aussi l’objet d’une évaluation et d’un suivi attentifs.

La question de l’évaluation du système lui-même, évidemment très complexe de par sa taille, se pose également. Nous devons ainsi être très attentifs au bon fonctionnement du Comité national d’évaluation du système scolaire (CNESCO), dont c’est la mission. Notre Comité a ainsi auditionné Mme Nathalie Mons, sa présidente, qui a pu nous exposer la qualité de ses travaux, qui dépassent toutefois le cadre de la seule évaluation qui est pourtant sa vocation. Nous devons sans doute mieux définir les missions du CNESCO et en particulier préciser ce que l’on entend par « l’évaluation », il est vrai malheureusement assez étrangère à notre culture politique et juridique.

Il en va de même pour le conseil supérieur des programmes (CSP). Son rôle est crucial, le sujet étant de savoir ce que l’on souhaite enseigner aux enfants, comment le traduire dans un socle commun, puis dans des programmes. Nous avons voulu que ce CSP soit représentatif de la nation et indépendant du ministère. Cela n’est pas facile et suppose de préciser le rôle des institutions qui existent depuis si longtemps mais qui doivent tenir compte de ces nouveaux acteurs, je pense notamment bien sûr à l’inspection générale de l’Éducation nationale.

Le Comité de suivi, en votre nom à tous, doit identifier les difficultés rencontrées. Il appartient ensuite au ministre d’en tirer les conséquences.

Tout le monde était d’accord, au moment du vote de la loi, pour dire que la maîtrise de la langue française était essentielle. La priorité accordée à l’école primaire en témoigne. Nous nous sommes également entendus sur la place de la discipline et sur l’autonomie nécessaire des établissements, qui doivent être à mes yeux des lieux de vie, d’apprentissage et de formation.

Concernant le collège, il n’y a aucune contradiction entre la réforme présentée et la loi de refondation de l’école. En particulier, les évolutions proposées pour la classe de sixième et la pluridisciplinarité vont dans le sens d’une plus grande continuité éducative entre l’école primaire et le collège, dans la pleine logique de la loi de 2013.

Je suis tout à fait favorable à l’évaluation et je suis donc tout à fait d’accord pour que la réforme des rythmes scolaires soit pleinement évaluée afin d’identifier les éventuelles améliorations à apporter au dispositif. Je relève d’ailleurs que les projets éducatifs de territoire se mettent en place de manière diverse, tout le monde se félicitant de cette mesure dans son principe, en dépit des difficultés d’organisation rencontrées ici ou là.

En ce qui concerne la formation, deux rapports, l’un de l’inspection générale, l’autre du Sénat, se sont penchés sur le fonctionnement des ESPE. Il est cependant difficile de donner un avis définitif sur un dispositif aussi nouveau qui, reconnaissons-le, a été mis en place à marche forcée. C’est d’ailleurs pourquoi je préfère parler d’accompagnement que d’évaluation, car notre rôle à ce stade est de réussir l’application de la loi, pas de formuler des jugements prématurés sur ses principes et leur concrétisation.

Je reconnais que la deuxième année de master est vécue difficilement par les stagiaires, notamment en raison de la place du concours, qui ne figure d’ailleurs pas dans la loi. Mon opinion est qu’avant de tout bouleverser il faut réfléchir à une pré-professionnalisation dès la dernière année de licence et à des changements dans la nature du concours, qui doit être davantage professionnalisé. Il est dans notre mission d’y réfléchir, puisque je rappelle que l’article 88 de la loi de refondation de l’école, qui a institué le Comité de suivi, dispose que celui-ci « doit notamment étudier la formation des enseignants et des personnels d’éducation en suivant la mise en place des écoles supérieures du professorat et de l’éducation ainsi que les questions de pré-recrutement et d’évolution du concours de recrutement des enseignants ».

Je vous remercie vivement pour vos questions et vos remarques, qui alimenteront très opportunément nos travaux. Et je me félicite que la priorité donnée à l’école demeure au centre de nos préoccupations et au cœur de notre consensus républicain.

La séance est levée à douze heures.

——fpfp——

Présences en réunion

Réunion du mercredi 18 mars 2015 à 9 heures 30.

Présents. – M. Jean-Pierre Allossery, M. Benoist Apparu, Mme Laurence Arribagé, Mme Isabelle Attard, M. Patrick Bloche, Mme Marie-Odile Bouillé, Mme Brigitte Bourguignon, M. Emeric Bréhier, M. Xavier Breton, Mme Marie-George Buffet, M. Jean-Noël Carpentier, Mme Dominique Chauvel, M. Jean-François Copé, Mme Valérie Corre, M. Bernard Debré, M. Laurent Degallaix, M. Pascal Deguilhem, Mme Sophie Dion, M. William Dumas, M. Yves Durand, Mme Martine Faure, M. Hervé Féron, Mme Michèle Fournier-Armand, Mme Annie Genevard, M. Jean-Pierre Giran, Mme Claude Greff, M. Mathieu Hanotin, M. Michel Herbillon, M. Patrick Hetzel, Mme Gilda Hobert, M. Guénhaël Huet, M. Christian Kert, Mme Anne-Christine Lang, Mme Annick Lepetit, Mme Martine Martinel, M. François de Mazières, M. Michel Ménard, Mme Dominique Nachury, Mme Maud Olivier, M. Christian Paul, M. Michel Piron, Mme Barbara Pompili, Mme Régine Povéda, M. Frédéric Reiss, M. Paul Salen, M. Rudy Salles, Mme Julie Sommaruga, M. Claude Sturni, M. Stéphane Travert

Excusés. – Mme Huguette Bello, M. Bernard Brochand, M. Ary Chalus, Mme Sandrine Doucet, Mme Virginie Duby-Muller, Mme Sonia Lagarde, M. Dominique Le Mèner, Mme Lucette Lousteau, M. Victorin Lurel, M. Franck Riester, Mme Claudine Schmid