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Commission des affaires culturelles, et de l’éducation

Mercredi 24 juin 2015

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 49

Présidence de M. Patrick Bloche, Président

– Examen du rapport d’information sur les dix ans de la convention UNESCO sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles (M. Patrick Bloche, rapporteur)

– Présences en réunion

COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L’ÉDUCATION

Mercredi 24 juin 2015

La séance est ouverte à neuf heures trente-cinq.

(Présidence de M. Patrick Bloche, président de la Commission)

——fpfp——

La Commission procède à l’examen du rapport d’information de M. Patrick Bloche en conclusion des travaux de la mission d’information sur les dix ans de la convention UNESCO sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles.

M. le président Patrick Bloche, rapporteur. Nous examinons ce matin le rapport d’information sur les dix ans de la convention de l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) relative à la protection et à la promotion de la diversité des expressions culturelles dont vous m’avez confié la rédaction en avril dernier. Ce rapport permettra à notre Commission de mettre en valeur un instrument juridique international essentiel, bien qu’insuffisamment connu, pour le droit des États à construire des politiques culturelles propres et pour la préservation de la diversité culturelle dans le monde. Cela devrait également nous permettre de débattre de la question fort actuelle de l’avenir de la diversité culturelle dans notre monde numérique globalisé – question dont la dimension européenne est très prégnante.

L’engagement de l’UNESCO pour la promotion de la diversité culturelle s’inscrit dans son mandat institutionnel au sein du système des Nations unies, puisque l’une des missions de cette organisation est d’« assurer la préservation et la promotion de la féconde diversité des cultures ». Dans les années 1990, l’accélération du processus de mondialisation a fait émerger de nouveaux enjeux pour la diversité culturelle, auxquels la communauté internationale s’est efforcée de répondre en évoluant d’une position strictement défensive vers une démarche plus ouverte et coopérative.

La notion d’exception culturelle a ainsi fait son apparition à l’époque de l’Uruguay Round et de l’échec, à l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), de la négociation sur l’accord multilatéral sur les investissements (AMI). La marchandisation de la culture, l’appauvrissement des contenus et le creusement des inégalités Nord-Sud ont alors été identifiés comme autant de risques dont il fallait se prémunir. Le concept d’exception culturelle était donc avant tout défensif face à l’hégémonie des marchés.

L’adoption par l’UNESCO, en novembre 2001, de la Déclaration universelle sur la diversité culturelle, marque une première évolution dans cette conception. La France, soutenue par le Québec et l’Organisation internationale de la francophonie (OIF), a beaucoup œuvré pour obtenir l’adoption de ce premier texte, certes non normatif, mais qui consacre la diversité culturelle – terme inventé par nos amis québécois – comme un élément du patrimoine commun de l’humanité. Abandonnant une démarche strictement défensive, cette déclaration invite les États membres de l’UNESCO à engager une réflexion sur les instruments juridiques à mettre en œuvre pour assurer la promotion de la diversité culturelle.

C’est ainsi qu’a été élaborée, sous l’impulsion de la France et des pays francophones, la Convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles. Adoptée le 20 octobre 2005 à la quasi-unanimité des États membres de l’UNESCO – seuls les États-Unis et Israël ont voté contre – et entrée en vigueur en France le 18 mars 2007, cette convention est le premier instrument juridique international à consacrer la double nature, à la fois économique et culturelle, des biens et services culturels. Partant de ce constat, la Convention énonce trois grands principes : la liberté pour chaque État souverain d’adopter des politiques publiques nationales en faveur de la culture ; la nécessité de mener des politiques de coopération et de solidarité internationales en matière culturelle avec les pays en développement ; enfin, une articulation avec l’ordre juridique international affirmant la légitimité de la diversité culturelle face au droit du commerce.

Pour soutenir l’application de ces principes et appuyer les projets favorisant l’émergence d’un secteur culturel dynamique dans les pays en développement, la Convention a créé un Fonds international pour la diversité culturelle (FIDC). Opérationnel depuis 2010, ce fonds a récolté au total environ 4,6 millions d’euros sous forme de contributions volontaires des États parties.

À ce jour, 138 États, sur les 195 membres de l’UNESCO, ont ratifié la Convention. Parmi les États non signataires, figurent notamment les États-Unis, la Russie, le Japon, Israël et la Turquie. L’Union européenne y a quant à elle adhéré dès décembre 2006, ce qui est très important puisque la Convention fait en conséquence partie de l’ordre juridique européen et que l’Union peut l’invoquer dans ses négociations commerciales internationales.

La Convention dispose d’un autre atout : sa neutralité technologique. Son champ d’application n’étant jamais déterminé en référence à des supports mais uniquement en fonction des contenus des œuvres créées, produites ou diffusées, elle s’applique de fait aux produits et services culturels numériques. Dans le contexte actuel, c’est là un élément essentiel pour la légitimité et l’efficacité du texte.

Comme je l’ai évoqué précédemment, la France a été particulièrement active dans l’adoption de la Convention et, depuis 2007, dans sa mise en application. Elle est notamment l’un des premiers donateurs du FIDC, avec 1,2 million d’euros versés depuis la création du Fonds. Il est donc essentiel de réaffirmer la priorité que notre pays accorde à ces questions à l’occasion de la célébration des dix ans de la Convention.

Le Québec, la Belgique et l’OIF sont d’ores et déjà mobilisés pour cet anniversaire mais, du côté français, si plusieurs colloques et rencontres ont été programmés, aucun événement majeur n’est prévu pour célébrer les dix ans de la Convention. Il me paraît donc nécessaire que la prochaine Conférence générale de l’UNESCO, au début du mois de novembre, permette à la France de témoigner solennellement, à l’occasion du dixième anniversaire de la Convention et des soixante-dix ans de l’UNESCO, de l’importance que revêtent pour notre pays les questions de diversité culturelle.

Mon rapport détaille dans une deuxième partie l’impact de la Convention de l’UNESCO de 2005 sur les politiques culturelles et la promotion de la diversité culturelle dans le monde, ainsi que sa contribution au développement durable des pays du Sud.

Si un bilan général est aujourd’hui complexe à réaliser en raison du manque de données globales, les synthèses annuelles établies par le secrétariat de l’UNESCO permettent de mettre en valeur les bonnes pratiques des différents États parties et d’identifier les difficultés d’application de la Convention. Concernant les politiques nationales, il semble que les États aient privilégié l’action en faveur de la création artistique à travers la mise en place d’un environnement favorable à la création, comprenant des aides ciblées à destination de certains artistes ou secteurs créatifs, mais aussi de législations favorables au statut de l’artiste, aux droits d’auteur et aux industries culturelles. En matière de coopération internationale, les programmes bilatéraux Nord-Sud constituent un outil majeur mais l’on peut relever, parallèlement à l’action publique, une implication croissante des acteurs de la création à travers des réseaux internationaux d’artistes et de professionnels de la culture.

Les difficultés rencontrées pour la mise en œuvre de la Convention sont essentiellement structurelles. L’insuffisance de financement est mentionnée par la quasi-totalité des États parties – les dotations apportées par le FIDC étant très limitées en raison du caractère volontaire des contributions –, mais le manque de connaissance, de la part des autorités publiques comme de la société civile, des questions entourant la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles, est également considéré comme criant.

Enfin, la dernière partie de mon rapport est consacrée à la question plus spécifique de la diversité des expressions culturelles à l’ère numérique.

Pour la démocratisation de l’accès à la culture et l’émergence de nouveaux champs créatifs, les technologiques numériques représentent des chances remarquables, mais elles sont également lourdes de défis, telles la fragilisation des créateurs locaux face aux cultures dominantes et l’uniformisation potentielle d’une culture mondialisée. Une réflexion sur cet enjeu doit donc être menée au sein de l’UNESCO, et la Convention de 2005, avec ses 139 signataires, est l’outil le mieux à même de soutenir cette mobilisation. Comme je l’ai dit, les mutations technologiques ne remettent en cause ni les principes fondateurs, ni les applications concrètes de la Convention ; elles offrent au contraire l’occasion de confirmer son utilité et l’opportunité d’enrichir son contenu par l’utilisation de nouveaux outils, pour peu que ses dispositions soient utilisées à bon escient et que ses modalités d’application soient ajustées au nouvel environnement numérique.

Depuis deux ans maintenant, la France s’est attachée à sensibiliser les États parties à la Convention, avec un certain nombre de partenaires historiques – comme le Canada, notamment la représentation québécoise, et la Belgique – sur les enjeux liés à l’application de la Convention dans l’environnement numérique. Ces efforts ont fini par porter leurs fruits puisque la cinquième Conférence des parties, qui s’est tenue du 10 au 12 juin 2015, a finalement adopté la proposition, portée par la France et ses partenaires québécois, de préparer un projet de « directives opérationnelles transversales » consacré à l’impact du numérique sur la diversité des expressions culturelles. Ces directives consistent en des circulaires destinées à préciser les dispositions d’une convention et à orienter sa mise en œuvre.

Il s’agira en particulier de réaffirmer la neutralité technologique de la Convention – en rappelant que les biens et services culturels ont une valeur intrinsèque, indépendante des modalités techniques de leur production et de leur diffusion – et de rappeler que les États ont la capacité d’accompagner les écosystèmes numériques par des politiques publiques afin d’encourager la diversité de l’offre artistique et culturelle ainsi que d’en renforcer l’accessibilité. Les défis liés à la rémunération équitable des artistes et créateurs à l’ère numérique, y compris par le droit d’auteur, devront également faire l’objet d’un traitement spécifique.

Il convient donc désormais de travailler sur cette base afin de donner une nouvelle visibilité à la Convention de 2005 et de renforcer sa légitimité sur les questions numériques, tant au niveau des États souverains qu’au sein de l’Union européenne et des négociations internationales. J’ai notamment à l’esprit le futur Traité transatlantique entre l’Union européenne et les États-Unis d’Amérique. Nous nous sommes en effet mobilisés il y a moins de deux ans afin que la culture audiovisuelle soit exclue du mandat de négociation de la Commission européenne.

Comme l’a souligné la ministre de la Culture et de la communication dans un communiqué de presse saluant la décision de la Conférence des parties, nous avons là l’occasion de « faire du numérique une chance pour tous, pays développés et pays en développement », et de « définir nos objectifs et nos outils pour la diversité culturelle dans le siècle connecté qui est le nôtre ». Saisissons-nous de cette occasion et travaillons, tous ensemble, pays du Nord et du Sud, à faire du monde numérique qui est désormais le nôtre un espace où chacun, de façon libre et éclairée, puisse plus aisément aller à la rencontre de la culture de l’autre !

M. Christophe Premat. Nous fêtons cette année les dix ans de la convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles, traité adopté puis ratifié par la plupart des États membres de la communauté internationale grâce à l’UNESCO dont le rapport rappelle la légitimité politique et l’expertise inégalée sur ces sujets. Cette année 2015 est une grande année pour l’UNESCO et tout ce que l’agence onusienne peut représenter puisque cette dernière célébrera ses soixante-dix printemps. Nous sommes donc fiers que notre commission des Affaires culturelles et de l’Éducation consacre à cette institution indispensable – et pourtant en péril faute de financements suffisants – un rapport spécifique afin de nous rappeler les besoins de construire des normes internationales ambitieuses pour la protection de la culture.

La Convention de l’UNESCO, en consacrant la double nature culturelle et économique des biens et services culturels et la spécificité de ces derniers pour affirmer le droit souverain des États d’élaborer des politiques culturelles, est aujourd’hui encore un point d’ancrage très important pour la défense d’une certaine exception culturelle, notamment dans le Traité transatlantique en cours de négociation entre l’Union européenne et les États-Unis. Vous rappelez dans votre rapport, monsieur le président, que l’intégration de la Convention dans l’ordre juridique européen permet la protection de la diversité culturelle dans les négociations commerciales internationales qu’elle conduit. C’est ainsi que le mandat de négociation confié à la Commission européenne par le Conseil européen a exclu l’audiovisuel du champ des négociations, comme le souhaitaient la France et le Parlement européen. Comme vous l’avez également souligné, il est indispensable de faire preuve d’une vigilance toute particulière quant à la définition des services culturels numériques, qui pourrait offrir l’occasion à certains de ses détracteurs de relancer les débats sur l’exception culturelle.

Trop souvent, nous nous gargarisons d’une exception culturelle française qui nous différencierait de nos autres partenaires. Celle-ci est pourtant défendue par la Convention de l’UNESCO, elle-même ratifiée par plus de 138 États à ce jour. C’est la preuve que, lorsque la France s’implique dans une négociation, qu’elle noue des partenariats fructueux avec ses alliés, elle est écoutée dans le monde et peut ainsi concilier ses propres intérêts avec ceux de l’ensemble de la communauté internationale.

La Convention pose deux grands principes chers à notre patrimoine culturel.

Le premier consiste en la reconnaissance du droit pour les États souverains de soutenir la culture et la création par des dispositifs nationaux de régulation et de financement. L’article 6 affirme ainsi le droit pour les États parties d’adopter des mesures destinées à protéger et à promouvoir la diversité des expressions culturelles au sein de leur territoire.

Le second réside dans l’affirmation de politiques de coopération et de solidarité internationales en matière culturelle avec les pays en développement. Deux outils sont prévus pour soutenir cette solidarité internationale en matière culturelle : l’établissement d’un Fonds international pour la diversité culturelle (FIDC), prévu à l’article 18, et la mise en place, à l’article 16, d’un dispositif de traitement préférentiel qui fait obligation aux pays développés de faciliter les échanges culturels avec les pays en développement. Cet article invite ainsi à tempérer la stricte application des règles de libre échange en favorisant certaines parties plus vulnérables que d’autres, en encourageant des dispositifs dérogatoires au principe de non-discrimination. La convention esquisse une forme de juste échange dans la coopération entre le Nord et le Sud et devrait servir de modèle à de nombreux autres accords commerciaux.

C’est sur ces deux grands principes que s’appuie la diversité culturelle, en permettant à tous les pays de contrôler leur production culturelle et d’éviter ainsi que ces biens soient livrés aux seules forces du marché. Sans reprendre les analyses des philosophes de l’école de Francfort sur la culture de masse, notamment celles de Theodor Adorno qui évoque « l’esprit qui ne peut survivre lorsqu’il est défini comme un bien culturel et destiné à des fins de consommation », le préambule de la Convention rappelle néanmoins que « les activités, bien et services culturels ont une double nature, économique et culturelle, parce qu’ils sont porteurs d’identités, de valeurs et de sens et qu’ils ne doivent donc pas être traités comme ayant exclusivement une valeur commerciale ».

Monsieur le président, vous avez brillamment rappelé comment la France et les pays francophones, le Canada français en tête, ont été les principaux artisans de cet accord construit autour de la notion d’exception culturelle dès les années 1990. Nous pouvons ainsi fièrement constater que les pays francophones ont su défendre une même position dans le cadre de cette Convention, qui doit servir d’exemple dans la construction d’une francophonie ambitieuse. Pour cela, il me paraît utile que la France renforce le FIDC avec les autres pays francophones du Nord afin de soutenir la création artistique des pays de l’espace francophone.

Pour toutes ces raisons, nous nous devons d’être les ardents défenseurs de cette convention et, plus généralement, de l’UNESCO elle-même car, en France comme en dehors de nos frontières, l’année 2015 sera une année capitale pour l’avenir de la diversité culturelle. Dès la rentrée, nous aurons en effet à examiner le projet de loi du quinquennat dédié à la culture dans un contexte ambivalent. D’un côté nous célébrons les dix ans de cette Convention fondatrice ainsi que les soixante-dix ans de l’institution qui en a permis l’adoption. De l’autre, nous devons faire face à de sérieux défis : le principe de diversité culturelle nous contraint à rester vigilants à l’égard du projet de directive européenne sur le marché unique numérique, qui pourrait consister à briser les barrières nationales en matière de réglementation du droit d’auteur et de la protection des données dans un sens qui ne serait pas favorable à cette diversité.

Pour toutes ces raisons, le groupe Socialiste, républicain et citoyen émet un avis très favorable à la publication de ce rapport.

M. Michel Herbillon. Je vous félicite, monsieur le président, d’avoir établi au nom de notre Commission le bilan décennal d’une Convention que nous sommes nombreux à avoir soutenue en son temps. Nous souscrivons à votre souhait d’apporter une nouvelle dynamique et davantage de visibilité à ce texte. Vous avez eu raison de rappeler l’aspect fondateur de la Convention, le rôle essentiel de la France dans son adoption et qu’elle a été largement ratifiée par 138 pays, à l’exception regrettable de quelques-uns. S’il est toujours difficile de dresser un bilan, l’examen des bonnes pratiques que vous nous avez présenté dans votre rapport permet d’évaluer concrètement l’application du traité dans différents pays. Enfin, vous avez également eu raison d’indiquer que cette convention pourrait être un instrument de gouvernance de la culture à l’ère numérique.

Bien entendu, l’application concrète de cette convention doit encore être améliorée. Il ressort notamment du bilan que vous avez établi un manque de moyens financiers et humains pour la culture – tant à l’UNESCO que dans nombre de ses États membres. D’ailleurs, le contexte de crise économique et la situation politique difficile pour plusieurs pays n’arrangent pas les choses : les gouvernements ont parfois tendance à réduire l’effort en faveur de la culture – secteur considéré trop souvent comme non prioritaire et traité comme une variable d’ajustement dans les phases de difficultés économiques. La baisse du budget français de la culture au début du quinquennat est en l’illustration – erreur finalement reconnue par le Premier ministre lui-même.

Les futures directives opérationnelles en préparation, relatives à l’application de la Convention à l’ère numérique permettront de renforcer la lisibilité de celle-ci et, partant, son efficacité.

Certaines de vos propositions méritent particulièrement que l’on s’y arrête. Tout d’abord, la régulation des géants du web est un enjeu stratégique pour préserver la diversité des contenus, et l’harmonisation des fiscalités du numérique à l’échelle européenne pour lutter contre la concurrence déloyale en ce domaine doit être la priorité. Quelles orientations et quelles mesures préconiser à cet effet ? Comment, d’autre part, s’appuyer sur le développement du numérique pour favoriser la culture et la diversité culturelle dans les pays du Sud lorsque, dans bon nombre d’entre eux, ce sont d’abord des enjeux économiques, sociaux, sanitaires et de développement – la satisfaction de besoins essentiels – qui priment ? Enfin, monsieur le président, vous avez axé une partie de votre rapport sur le contenu numérique des prochaines directives opérationnelles, soulignant qu’il nous faudrait rester vigilants à cet égard. Compte tenu de votre large espace d’analyse, quelles autres directives devraient, selon vous, être adoptées afin de renforcer la Convention de 2005 et de rendre son application plus concrète ?

Le groupe Les Républicains apporte son soutien à la publication du rapport.

Mme Isabelle Attard. Dans le rapport qu’il nous présente aujourd’hui, le président Patrick Bloche établit un état des lieux des premières années d’application de la Convention de 2005 sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles pour se concentrer ensuite sur le numérique en tant que nouvel enjeu pour la diversité culturelle. Il commence par rappeler que la Convention est « le premier instrument international à avoir reconnu la double nature, à la fois économique et culturelle, des biens et services culturels, qui sont au cœur des économies créatives dans le monde » et que « les activités, biens et services culturels ont une double nature parce qu’ils sont porteurs d’identités, de valeurs et de sens et qu’ils ne doivent donc pas être traités comme ayant exclusivement une valeur commerciale ». Le groupe Écologiste souscrit entièrement aux conclusions du rapporteur, notamment quant à l’état inquiétant des financements dédiés à l’application de la Convention.

Monsieur le président, vous présentez l’écosystème numérique comme étant porteur d’enrichissements, mais aussi de dangers potentiels. Comme vous le savez, j’estime que la licence globale est une solution identique à celles qui ont été mises en œuvre face au développement de la radio, de la télévision, des cassettes audio puis vidéo. Que pensez-vous de la possibilité de mettre en place une telle licence globale afin que l’activité croissante du secteur numérique soit enfin source de financement pour les créateurs, notamment ceux qui ne peuvent pas aujourd’hui vivre décemment de leur art ?

Enfin, nous avions évoqué, lors de la présentation du rapport d’information relatif à la gestion des réserves et des dépôts des musées, élaboré conjointement avec Marcel Rogemont, Michel Herbillon et Michel Piron, la position des Américains en matière d’œuvres spoliées. Il y a soixante et onze ans, ceux-ci ont débarqué sur nos côtes normandes pour nous rapporter, grâce aux fameux Monuments Men, les œuvres de notre culture pillées par les nazis. C’est grâce à eux que nous pouvons aujourd’hui nous vanter d’avoir en notre possession notre patrimoine. Or, avec le futur traite de libre-échange et les autres accords en discussion, c’est l’inverse qui risque de se produire, et je trouve regrettable qu’à soixante-dix ans d’intervalle le même pays adopte deux positions aussi contradictoires.

M. Laurent Degallaix. Alors que nous célébrons cette année les dix ans de la signature de la Convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles et le soixante-dixième anniversaire de l’UNESCO, notre Commission a pris l’initiative de faire le point sur la diversité culturelle dans le monde et les actions menées en faveur de sa défense, dans le cadre d’une mission d’information. Cette Convention constitue le premier instrument juridique international reconnaissant la spécificité de ces biens et services dans leur double dimension – économique et culturelle – et affirmant le droit souverain des États d’élaborer des politiques culturelles.

Je salue la qualité du travail effectué par notre président, aujourd'hui rapporteur, qui s’est employé à démontrer l’impact de cette Convention sur la promotion de la diversité culturelle dans le monde, sa contribution au développement durable des pays du Sud, ainsi qu’à rappeler le rôle joué par la France pour l’adoption, puis l’application de la Convention depuis son entrée en vigueur. Ce travail est d’autant plus utile que les bouleversements géopolitiques et les révolutions technologiques que nous connaissons nous conduisent sans cesse à repenser la diversité culturelle.

Selon notre rapporteur, le manque de ressources humaines et financières est l’obstacle principal à la mise en œuvre de la Convention. Le nombre de projets financés par le FIDC s’est ainsi réduit entre 2010 et 2014. La sélection drastique des projets est parfois vécue comme injuste par les pays du Sud. Dès lors, comment favoriser les contributions financières, notamment d’origine privée ? Le crowdfunding vous semble-t-il constituer une solution pertinente pour drainer des contributions complémentaires ?

Si le numérique constitue une formidable chance pour la démocratisation de la culture, il représente également pour les cultures locales une menace d’hégémonie de la part d’une culture uniforme et mondialisée. Ne conviendrait-il pas de réinventer les mécanismes traditionnels de financement de la création et du renouvellement des talents qui risquent un assèchement du fait des nouveaux mécanismes de « consommation » culturelle sur la Toile ? Quelles pistes préconisez-vous en la matière ?

Enfin, alors que 138 États ont à ce jour ratifié la Convention, il est regrettable que les États-Unis n’en soient toujours pas signataires. La France plaide-t-elle auprès de ce dernier pays pour la valorisation de la diversité des expressions culturelles en tant que source potentielle de développement ?

Le groupe Union des démocrates et indépendants salue le travail réalisé et soutient le rapport avec enthousiasme.

Mme Gilda Hobert. Le rapport d’information que le président Patrick Bloche nous présente ce matin a, entre autres, le mérite de dresser un bilan d’étape, dix ans après la signature de la Convention de 2005, et ainsi de rappeler l’importance de mener une politique culturelle mondiale qui soit ouverte et volontariste. En effet, si comme le président-rapporteur le montre bien, il est aujourd’hui difficile de dresser un bilan précis des effets de la signature de cette convention, ce texte n’en a pas moins permis de développer la culture grâce à des soutiens nationaux de plus en plus importants et à une aide apportée par le FIDC à près de soixante-dix-huit projets concrets dans quarante-huit pays depuis sa mise en application. La France, engagée dès la première heure, et épaulée par des pays francophones tels que la Belgique ou le Canada, a joué avec eux un rôle prédominant dans la protection de la diversité culturelle des États grâce à cette Convention, ainsi que dans la promotion de la culture sur la scène internationale. Cela se traduit par l’investissement financier important que notre pays consent au sein du FIDC, ce dont nous pouvons nous réjouir. Je rejoins votre souhait, monsieur le rapporteur, que la France célèbre solennellement le dixième anniversaire de la Convention.

Je souhaiterais souligner un point particulier de ce rapport, qui est contenu dans l’acte constitutif de l’UNESCO, où il est notamment précisé que parmi ses missions figure celle d’« assurer la préservation et la promotion de la féconde diversité des cultures ». Il s’agit là d’un principe fondamental et universel, s’agissant tant de l’essence de ces identités diverses que de leur représentation formelle. Cette pratique d’écoute attentive et de proposition nous éloigne de certains clichés. Désormais, grâce à la Convention de l’UNESCO, nous pouvons, sans prétendre tout savoir sur telle ou telle culture, en découvrir des aspects jusque-là méconnus – je pense notamment aux cultures africaines…

Si la Convention de 2005 rassemble 138 États, nous regrettons que des puissances comme les États-Unis n’en soient toujours pas signataires. Compte tenu de la négociation en cours du partenariat transatlantique, quelles garanties pouvons-nous avoir que les objectifs de cette Convention seront préservés ? Notre Commission devra veiller à ce que ce texte décennal ne perde pas de sa portée de ce fait.

Dans son bilan d’étape, notre rapporteur pointe également du doigt les profondes transformations qu’a subies le domaine culturel en dix ans, tant du point de vue des pratiques que de la consommation, à l’heure du tout numérique. Nous devons aujourd’hui être en mesure d’apporter des solutions et nous adapter à ces transformations qui, loin d’être toujours gage de diversité culturelle, pourraient échapper aux États. Convenons cependant que le numérique peut offrir de formidables opportunités en permettant une démocratisation culturelle dont le crowdfunding est un bel exemple.

Déplorant que les droits d’auteur soient mis à rude épreuve, je suis satisfaite qu’une vision européenne soit en cours de définition à ce sujet. Monsieur le rapporteur, avez-vous recueilli au cours de vos auditions des propositions concrètes de mesures à adopter afin que les États puissent défendre un système équilibré de rémunération à travers le droit d’auteur ?

Le groupe Radical, républicain, démocrate et progressiste émet bien évidemment un avis très favorable à la publication de ce rapport d’information.

Mme Sophie Dessus. Même si les plus incrédules survolant cette Convention arborent un sourire des plus diaboliques, n’y voyant que vœux pieux, vous aurez le soutien, monsieur le président, des sages et des braves qui savent combien cette convention est nécessaire pour préserver la liberté de créer.

Même si les plus sceptiques vous traitent de Don Quichotte du numérique et ne perçoivent dans votre credo qu’une histoire de moulins à vent, vous aurez le soutien, monsieur le président, des romanciers et des poètes à qui vous répétez, sans jamais vous lasser, que la quête de l’inaccessible étoile n’est qu’affaire de constance, de partage et d’émoi.

Même s’il y a des fous furieux de par ce vaste monde qui, plutôt que de faire de cette convention leur livre de chevet, tirent à la kalachnikov sur ceux qui brandissent des crayons, vous aurez le soutien, monsieur le président, de tous les camarades qui sortiront de l’ombre pour résister à la folie des hommes.

Même si Google, Apple, Facebook ou Amazon ramènent votre combat à quelques coups d’épée dans l’eau, vous aurez le soutien, monsieur le rapporteur, de Taylor Swift, la petite frondeuse qui n’a pas hésité à rabattre les prétentions de ces géants en empruntant leurs propres armes.

Même si certains jours, la marchandisation et l’appât du gain à tout crin vous font douter de tout et craindre l’anéantissement du pot de terre face au pot de fer, vous aurez le soutien, monsieur le président, du biblique David pour braver les lois du marché et vaincre Goliath.

Alors, monsieur le président, avec, à vos côtés, pour armer votre bras, toutes ces bonnes fées penchées sur ce texte dont nous célébrons les dix ans, vous saurez donner corps aux enjeux de la Convention de l’UNESCO et rendre l’hommage qu’il se doit à feu l’exception culturelle, pour que vive la diversité culturelle.

M. François de Mazières. Je salue tout d’abord le travail accompli par notre président et rapporteur, fruit d’une excellente initiative. L’un des intérêts majeurs de ce rapport réside dans sa troisième partie, relative aux enjeux de l’ère numérique. On s’y aperçoit que cette Convention peut être un moyen d’enfin introduire un coin dans ce mur que Sophie Dessus a décrit avec lyrisme.

Le rapporteur fait le constat d’une possible remise en cause de l’économie générale de la création, d’un assèchement des mécanismes traditionnels de financement du fait des nouveaux modes de consommation culturelle sur le web et de la captation de la valeur par les nouveaux opérateurs de diffusion qui optimisent leur fiscalité au détriment des États mais surtout des producteurs de contenu.

Nous partageons largement ces constats, comme en attestent les amendements que nous avons déposés dans le cadre de l’examen du projet de loi Macron. Au Sénat, Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission des affaires culturelles, a fait adopter à l’unanimité un amendement visant à soumettre les moteurs de recherche au contrôle de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) pour éviter qu’ils ne favorisent leur propre contenu d’activité. L’ARCEP dispose en effet de plus de moyens d’action que l’Autorité de la concurrence. Mais, alors même qu’il existe un consensus pour que nous nous donnions les moyens d’encadrer ces pratiques, la Commission spéciale de notre assemblée a supprimé cette disposition. Le regrettant, j’avais déposé des amendements pour la réintroduire ou, à tout le moins, en discuter avec le Gouvernement. Ayant été privé de débat du fait du recours à l’article 49 alinéa 3 de la Constitution, je souhaiterais avoir votre avis, monsieur le président et rapporteur, sur les moyens dont dispose le législateur français pour, conformément aux dispositions de la Convention de l’UNESCO, protéger et promouvoir la diversité des expressions culturelles face aux pratiques monopolistiques de ce qu’on appelle les GAFA – acronyme regroupant Google, Apple, Facebook et Amazon. N’oublions pas qu’un seul acteur détient aujourd’hui 92 % des parts de marché dans l’Union européenne dans le secteur des moteurs de recherche. Là réside le vrai problème de la diversité culturelle aujourd’hui. Souhaitant que l’on puisse agir concrètement dans la loi française, je regrette que nous n’ayons pu le faire lors de l’examen du projet de loi Macron.

M. Jean-Pierre Allossery. Monsieur le président et rapporteur, permettez-moi tout d’abord de vous remercier pour votre rapport qui nous rappelle à quel point la diversité culturelle est une précieuse richesse – par la valeur économique qu’elle crée, mais surtout pour l’humanité entière en tant que caractéristique inhérente à celle-ci. La Convention de l’UNESCO repose sur deux piliers : d’une part, la possibilité pour tous les États de subventionner la culture ; d’autre part, l’aide apportée aux pays en voie de développement pour qu’ils adoptent des politiques publiques culturelles.

Dans ce contexte, la France a su être fidèle à sa réputation, entraînant ses partenaires européens jusqu’à amener l’Union européenne en tant que telle à ratifier ce texte mais aussi par l’aide au développement qu’elle apporte avec une remarquable constance. Cependant, la France s’oublierait-elle elle-même ? Alors que la crise s’est lentement installée jusqu’à faire partie du quotidien, alors que la reprise apparaît très péniblement, de plus en plus de collectivités – onze régions sur vingt-deux, vingt-trois départements, quarante grandes villes – diminuent leur budget consacré à la culture. Si l’effet de la crise se fait sentir, il s’agit tout autant de choix politiques très inquiétants sur de trop nombreux territoires. Pour reprendre l’expression prononcée par Jack Lang le week-end dernier, la culture et sa diversité sont pourtant un remède contre la violence. Parallèlement, depuis janvier 2015, la ministre Fleur Pellerin propose un pacte culturel aux communes qui sanctuarisent leur budget culturel
– pacte qui permet de pérenniser la dotation de l’État. Dès lors, est-ce pour des raisons de contraintes financières ou à la suite d’un réel choix politique que les quelque quarante grandes villes précitées ont baissé ce budget ?

Je souhaite donc remercier une fois encore notre président. Son rapport nous permet de mettre à nouveau sur la table le sujet de la diversité de l’expression culturelle et de montrer qu’il s’agit là de choix politiques qui nous engagent – et au-delà de nous, qui engagent le patrimoine commun de l’humanité.

M. Stéphane Travert. La Convention de 2005 de l’UNESCO, texte fondateur, repose sur deux grandes idées : celle que tous les États souverains ont le droit de soutenir la culture et la création par le biais de dispositifs de régulation et de financement ; l’obligation pour les pays riches d’aider les pays moins avancés à instituer des politiques publiques de soutien à la culture, à développer une production autonome de biens et services culturels et à bénéficier d’une circulation équitable de ses biens dans le cadre de partenariats internationaux équilibrés.

Comme vous l’indiquez à la page 58 de votre rapport, monsieur le président, les grands acteurs mondiaux du web usent aujourd’hui de leur position dominante dans le contrôle des flux d’échanges numériques. Ainsi, les États parties à la Convention ont perdu de leur influence dans une économie culturelle dématérialisée. Comment, dès lors, remplir la mission que se sont donnée les États signataires de la Convention ? Comme vous le préconisez, il faut faire de ce texte un instrument de gouvernance à l’ère du numérique, notamment en réaffirmant la neutralité technologique et en permettant l’entrée de tous les pays dans l’ère numérique. Comment, selon vous, la Convention de 2005 permettra-t-elle à l’avenir d’affronter les nouveaux défis de l’accès à la culture dans un monde numérique, dans les pays du Nord comme du Sud, afin de protéger et promouvoir la diversité des expressions culturelles ?

Mme Laurence Arribagé. Au même titre que mes collègues, je me réjouis que notre président ait dressé un bilan de l’application de la Convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles de l’UNESCO, dix ans après sa ratification. Dans les 138 pays signataires à ce jour, le marché des biens et services culturels représente des millions d’emplois et un moteur non négligeable de la croissance économique. Au-delà du caractère culturel et identitaire, ce marché est une formidable source d’essor et de développement. Pour autant, comme le souligne le rapporteur, la protection de la diversité des expressions culturelles est aujourd’hui mise à mal par le tournant de la révolution numérique et les mutations des pratiques de consommation qu’elle entraîne. Aussi le cadre juridique international et européen de cette Convention semble-t-il un outil essentiel.

Il reste toutefois particulièrement regrettable que nos partenaires outre-Atlantique refusent toujours de la ratifier, a fortiori à la lumière des récents conflits entre les artistes et le géant américain Apple dans le domaine du streaming musical, qui rappellent notamment les défis du marché de la culture face aux progrès technologiques. Il semble aujourd’hui toujours primordial de souligner que la logique du profit ne doit pas, au nom de la suprématie commerciale, se développer au détriment de la richesse et de la diversité culturelle, facteur de développement, de progrès et de force collective.

M. Hervé Féron. Nous avons récemment débattu, dans le cadre de l’examen du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe), des droits culturels évoqués dans la Convention de l’UNESCO dont nous fêtons cette année le dixième anniversaire. Bien que cette Convention soit l’une des plus ratifiées dans le monde, ces droits n’ont toujours pas été consacrés en droit français. Certains d’entre nous voulaient donc les faire figurer dans la loi précitée pour en faire une compétence partagée entre l’État et les collectivités territoriales. Mais le Gouvernement et le rapporteur ont estimé que ce n’était pas le véhicule législatif approprié. L’ayant personnellement regretté, j’espère qu’un texte verra bientôt le jour qui réaffirmera ces droits autant qu’ils le méritent : quelle est votre position sur le sujet ? Une loi pourrait-elle bientôt consacrer des droits culturels afin de garantir l’accès de chaque citoyen à la culture dans la diversité de ses œuvres ?

D’autre part, nous avons récemment appris que l’accord de libre-échange en cours de négociation entre Européens et Américains avait reçu une première marque de soutien de la part de Strasbourg, et notamment des eurodéputés socialistes. Pour expliquer leur vote, les eurodéputés ont assuré que les services publics et la culture avaient été totalement exclus du champ des négociations, notamment grâce à l’action de la France. Or, si l’on sait que le secteur de l’audiovisuel a dès le départ été exclu du mandat de négociation, on n’a rien entendu de tel s’agissant des secteurs du livre et de la musique. Estimez-vous ces secteurs menacés et, avec eux, toute notre diversité culturelle ? Plus largement, êtes-vous inquiet de l’adoption d’un accord en l’état avec les États-Unis ou pensez-vous que les garanties obtenues sur le plan culturel sont suffisantes ?

Mme Martine Martinel. Dans votre rapport, monsieur le président, vous soulignez qu’une approche plus large en matière de culture devrait être adoptée, incluant les traditions et le patrimoine. Vous préconisez un élargissement des domaines d’intervention des politiques de développement culturel et un renforcement des données et indicateurs dans les pays en voie de développement. Pourriez-vous nous détailler ces préconisations ?

M. Michel Pouzol. Permettez-moi tout d’abord de vous remercier, monsieur le président, pour la qualité et l’intérêt indéniables de ce rapport anniversaire. La Convention de l’UNESCO sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles témoigne d’une prise de conscience, depuis dix ans, de l’apport particulier des biens et services culturels à nos sociétés, tant du point de vue de la création que de l’économie. J’attirerai votre attention sur la destruction hier par DAECH de deux mausolées antiques de Palmyre – attentat qui prouve, s’il en était besoin, que le combat pour la préservation de cette diversité, où qu’elle se trouve, est au cœur de nos choix de société et de l’ensemble de nos combats républicains, ici comme ailleurs, mais qui prouve aussi la nécessité d’étendre la notion de culture au patrimoine, en grand danger dans les pays émergents.

Au-delà de la façon dont ce problème se pose dans le véritable combat de civilisation qui se déroule sous nos yeux, je souhaiterais soulever trois questions et tenter modestement de fixer des perspectives à cette Convention pour les dix années à venir. Comme l’a souligné le rapporteur, promouvoir la préservation de la diversité culturelle dans les États émergents est une nécessité. Mais comment y parvenir si, dans le même temps, la protection des politiques culturelles n’est pas réellement assurée dans les pays où elle est soumise aux coups de boutoir des marchés, là où les politiques sont souvent les plus développées et les plus fortes ? Comment étendre cet impératif à l’émergence de nouveaux modes de consommation culturelle liés aux outils numériques ? Comment cette Convention, dix ans après son adoption, peut-elle nous permettre de poser les bases d’une réelle politique culturelle supranationale, notamment au niveau européen où l’intégration en ce domaine est plus un vœu pieux aujourd’hui qu’une réalité concrète et où les disparités sont plus fortes encore que dans tous les autres domaines ? Comment, enfin, cette Convention peut-elle nous aider à dresser un bilan, par zones géographiques, des bonnes pratiques en matière culturelle, afin de permettre à chaque nation de s’enrichir des expériences des autres pays signataires et de renforcer ainsi le dynamisme potentiel de chacune tout en réduisant les fractures fortes qui persistent entre les nations du Nord et celles du Sud en matière de développement culturel ?

M. Jacques Cresta. L’article 12 de la Convention de 2005, intitulé « promotion de la coopération internationale », est essentiel en ce qu’il encourage les échanges et les collaborations entre tous les États signataires du texte, qu’il s’agisse de coopération bilatérale, régionale ou internationale. Il stipule en effet que ces coopérations doivent concerner tous les acteurs de la vie culturelle de nos pays, aussi bien les décideurs politiques que la société civile ou les artistes – en particulier pour ces derniers par le biais de coproductions. Ces coopérations internationales, notamment dans le domaine du spectacle vivant, restent trop rares et souvent difficiles à instituer.

J’ai d’ailleurs été étonné que, dans notre pays, le nombre de titres de séjour portant la mention « professions artistiques et culturelles » accordés pour un an n’ait cessé de baisser selon le ministère de l’intérieur. Ces coopérations sont pourtant essentielles dans un monde globalisé. Et l’article 12 de la Convention nous rappelle aussi que les retours d’expérience des autres pays peuvent permettre à tous d’améliorer les politiques et les actions menées. Comment renforcer les effets de son application ?

Dans le même esprit, la France, en tant que signataire de la Convention, ne pourrait-elle contribuer à l’analyse des documents transmis par les différents pays afin de compenser en partie la diminution des moyens accordés au secrétariat de l’UNESCO ?

Mme Régine Povéda. La Convention de 2005 institue mondialement la préservation et la promotion de la culture pour tous et de la diversité de ces cultures à travers le monde. Il y est rappelé que si la culture, essentielle pour la France, revêt aujourd’hui une valeur marchande, elle est avant tout un outil de transmission de valeurs et d’enseignement, de notre histoire. Il nous faut donc préserver cette diversité, non seulement en France mais aussi en Europe.

Tandis que des négociations commerciales sont en cours entre l’Union européenne et les États-Unis, nous devons avoir des exigences pour nos politiques culturelles. Quel message fera entendre la France dans ces négociations, alors que les États-Unis ne sont pas signataires de la Convention ? Le budget de l’UNESCO étant de plus en plus restreint, pouvons-nous espérer que la diversité culturelle soit promue à sa juste valeur notamment dans les pays les plus pauvres ? Comment faire pour améliorer l’accès à la culture, dans les pays du Sud comme dans notre propre pays, où trop de gens n’y ont pas accès malgré des infrastructures développées ?

Mme Valérie Corre. Le Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement doit être signé dans les prochains mois entre l’Union européenne et les États-Unis, non signataires de la Convention de l’UNESCO. Si le champ audiovisuel a clairement été exclu de la négociation de ce traité, le mandat de négociation semble moins clair s’agissant du champ culturel. L’Union européenne doit déjà faire face à une uniformisation massive de sa culture, grandement influencée par les superproductions américaines même si la France demeure une alternative culturelle de premier ordre avec une production cinématographique variée ainsi qu’une littérature abondante et de qualité. Comment sera-t-il possible de préserver l’exception culturelle française et européenne, une fois signé le traité transatlantique, qui, sur d’autres plans, constitue à mon sens une avancée économique intéressante ?

M. le président Patrick Bloche, rapporteur. Je vous remercie tous à mon tour pour vos contributions riches et variées. La célébration du dixième anniversaire de la Convention de l’UNESCO et la présentation de son bilan et de ses perspectives nous ont permis d’évoquer nombre de questions culturelles fort actuelles qui nous mobilisent de façon unanime. Notre débat de ce matin est en lien direct avec l’échange que nous avons eu récemment avec nos collègues du Bundestag et avec notre rencontre avec Mme Hélène David, ministre de la culture du Québec. Celle-ci nous a alors parlé de la politique québécoise du livre, illustration très concrète de ce que peut être une politique culturelle nationale consacrée au livre dans un pays signataire de la Convention.

Croyant en l’avenir de cette Convention et la considérant comme un instrument utile qu’il faut faire vivre, notamment dans son volet de coopération Nord-Sud, plusieurs d’entre vous ont insisté sur la nécessité de disposer de moyens financiers et humains pour favoriser l’accès à la culture et développer une offre culturelle aussi bien dans les pays développés que dans les pays en développement. Comme l’a souligné Jean-Pierre Allossery, cela suppose que le financement de nos politiques publiques de la culture soit exemplaire, aussi bien au niveau de l’État que des collectivités territoriales. Il reste que les 4,6 millions d’euros alloués en quelque dix années au FIDC, dont 1,2 million d’euros versés par la France, représentent une somme assez faible. Mon rapport présente à ce sujet un tableau inquiétant, illustrant que la tendance à alimenter ce fonds est à la baisse. Il est donc nécessaire d’accroître ses ressources afin d’envoyer un signe fort aux pays en développement. Ayons à l’esprit le courage et la détermination dont doivent faire preuve dans ces pays les autorités publiques et les acteurs de la société civile pour imposer la culture comme priorité des politiques publiques, quand nous avons en France une certaine facilité à le faire. Le secrétariat de l’UNESCO souhaite mettre à profit le double anniversaire de l’organisation et de la Convention pour mener une large campagne de communication afin d’encourager les contributions à ce fonds. L’OIF et les organisations professionnelles, telles que les quarante-trois coalitions nationales pour la diversité culturelle, ont aussi un rôle à jouer. Et peut-être les parlementaires français pourraient-ils, lors de la prochaine discussion budgétaire, déposer des amendements prévoyant des transferts de crédits afin d’abonder la dotation prévue pour le FIDC en 2016.

Le second thème que vous avez abordé est la négociation du Traité transatlantique entre l’Union européenne et les États-Unis. Vous avez été plusieurs à rappeler que, dix ans après, ces derniers ne sont toujours pas signataires de la Convention et ne sont pas près de l’être. Vous avez souligné la nécessité pour nous, face à ce marché unique du numérique que veut instaurer la Commission européenne, de faire vivre la diversité culturelle, compte tenu du risque de standardisation et d’uniformisation de la culture qu’entraîne la pression exercée par les géants du web, les fameux GAFA. La Convention de l’UNESCO est à cet égard un outil très utile puisque, ayant été ratifiée par l’Union européenne, elle fait partie non seulement de l’ordre juridique national mais également européen. S’agissant de la négociation en cours, j’ai indiqué dans mon rapport que si l’audiovisuel est clairement exclu du mandat de négociation de la Commission européenne, ce dernier est beaucoup moins clair s’agissant des services culturels. Il nous faut donc rester vigilants tant au niveau national qu’européen et je souhaiterais qu’il y ait au Parlement européen une mobilisation comparable à celle qu’il a connue avant ses dernières élections afin qu’il imprime sa marque sur le mandat de négociation de la Commission européenne. Je remercie donc ceux d’entre vous qui ont évoqué cette indispensable mobilisation.

Michel Herbillon a évoqué avec justesse les directives opérationnelles transversales qui vont être élaborées dans les deux ans qui viennent à la suite de la décision prise à la Conférence des parties il y a une dizaine de jours. Ces directives présentent l’intérêt de viser l’ensemble des dispositions et domaines d’application de la Convention de 2005 – la politique interne des États, la coopération Nord-Sud et le poids dans les négociations internationales. Cette transversalité me paraît une innovation très opportune dont il faut se saisir.

S’agissant du développement du numérique, les pays en développement sont en train de franchir un cap décisif quant à leur insertion dans le monde numérique qui est le nôtre aujourd’hui. Grâce au smartphone, beaucoup de femmes et d’hommes de la planète, n’ayant jamais vu ni eu entre les mains un ordinateur, ont un accès très direct à la toile et par conséquent un accès inégalé à la culture. C’est là une des chances extraordinaires offertes par le numérique, au-delà des risques que celui-ci représente.

Isabelle Attard a justement évoqué les dangers de cet écosystème numérique et m’a interrogé quant à la licence globale. Je n’ouvrirai pas ce matin le débat sur cette question, mais nous aurons bientôt l’occasion de traiter de la répartition équitable de la valeur créée sur internet lors de la diffusion de contenus culturels, qu’ils soient sonores ou audiovisuels. Nous disposons déjà sur le sujet du rapport de la Fédération nationale des labels indépendants (FELIN), et Marc Schwartz a été missionné par la ministre de la Culture pour y apporter sa contribution. Nous pourrions donc utilement promouvoir la gestion collective obligatoire, déjà promue par les rapports de Patrick Zelnik et de Pierre Lescure, mais dont ne veulent absolument pas ceux qui ont suffisamment de force pour négocier directement avec les plateformes Deezer et Spotify.

Laurent Degallaix a insisté à juste titre sur l’indispensable renouvellement des talents qui nous a conduits à imposer à la radio des quotas en faveur de la promotion de nouveaux talents mais aussi de la défense de la Francophonie.

Je remercie Gilda Hobert d’avoir fait référence à la « féconde diversité des cultures » et d’avoir rappelé que la Convention est un moyen de découvrir des cultures méconnues.

Je remercie aussi Sophie Dessus pour son intervention lyrique : il est essentiel d’avoir le soutien des sages et des braves, des romanciers et des poètes, de tous les camarades sortis de l’ombre, de Taylor Swift, du biblique David et des bonnes fées, mais c’est avant tout celui de mes collègues de la Commission des affaires culturelles et de l’éducation qui m’importe, en particulier sur un sujet en faveur duquel nous nous engageons collectivement.

François de Mazières a exprimé sa déception que l’amendement de mon homologue du Sénat au projet de loi Macron, instaurant un contrôle de l’ARCEP sur les moteurs de recherche, n’ait pu être maintenu. Nous serons inévitablement amenés à revenir sur ce sujet lors de l’examen du projet de loi sur le numérique à l’automne. Dans son rapport, le Conseil national du numérique propose de définir et d’imposer le concept de loyauté des plateformes. Enfin, la France s’est engagée au niveau de l’Union européenne pour que s’appliquent les règles du pays de destination des services – enjeu essentiel pour des raisons fiscales.

Stéphane Travert a insisté, comme d’autres collègues, sur l’instrument que peut constituer cette Convention, non pour s’opposer aux géants du web, mais pour leur faire accepter de s’intégrer dans un cadre régulé sans avoir pour objectif de casser des dispositifs visant avant tout à rémunérer les créateurs et à éviter la disparition de la création. Ainsi que l’a souligné Laurence Arribagé, si la culture revêt une dimension économique, les services et biens culturels ne sauraient être considérés comme des marchandises comme les autres.

Hervé Féron a abordé les droits culturels, sujet que je vous propose de laisser de côté compte tenu de son caractère très polémique, y compris chez les acteurs culturels. Il a néanmoins raison d’indiquer que la Convention de 2005 fait référence à ces droits, affirmés dans d’autres textes adoptés par l’UNESCO. Certains jugent nécessaire de reprendre cette notion dans notre droit interne. C’est pourquoi Marie-Christine Blandin a soutenu avec conviction au Sénat un amendement en ce sens, que vous avez souhaité, mon cher collègue, relayer à l’Assemblée nationale. Cependant, le Gouvernement et le rapporteur du projet de loi NOTRe y ont donné un avis défavorable. Nous devrons donc à nouveau en débattre dès que l’occasion se présentera, les nombreux acteurs culturels que je rencontre étant défavorables à l’intégration des droits culturels dans notre droit interne. S’agissant d’autre part du partenariat de libre-échange, Hervé Féron a eu raison de souligner que le livre et la musique pourraient être des secteurs menacés.

Martine Martinel et Michel Pouzol ont invoqué les impératifs de protection patrimoniale, le second ayant même fait référence aux destructions du patrimoine de l’humanité consécutives aux terribles actions de DAECH en Syrie. Il est donc nécessaire de mettre en avant des préconisations en faveur de la protection de ce patrimoine culturel. De ce fait, il me semblerait utile de renforcer les actions de coopération pour l’acquisition des compétences et des savoir-faire dans ce domaine. Je citerai notamment la Banque européenne d’expertise, créée en 2010, qui accompagne des États parties dans la réalisation de projets globaux de mise à niveau de leurs compétences et capacités d’action en matière culturelle.

S’agissant de l’application de la Convention de 2005, un rapport global comprenant des indicateurs devrait être présenté en fin d’année 2015, permettant de mettre en corrélation les politiques menées dans les États parties avec leurs résultats en termes de diversité culturelle afin que les bonnes pratiques puissent être identifiées comme telles.

Michel Pouzol m’a aussi interrogé quant au mot d’ordre, très incantatoire dans les discours officiels, relatif à l’élaboration d’une politique culturelle européenne. Vous connaissez tous par cœur la fameuse phrase que l’on prête à Jean Monnet : « Si c’était à refaire, je commencerais par la culture », mais la France, avouons-le, a beaucoup de mal à mobiliser ses partenaires et la Commission européenne en faveur d’une politique culturelle supranationale, notamment parce que la direction générale (DG) Culture est très faible, au sein des institutions de l’Union européenne, face à la DG Commerce notamment. Il convient donc de persévérer en organisant des rencontres bilatérales. Le Haut Conseil culturel franco-allemand est un outil dont nous avons pu mesurer l’efficacité l’autre jour lorsque nous avons reçu Catherine Trautmann et Doris Pack. Il existe également des rencontres multilatérales, telles que le Forum de Chaillot, permettant de mobiliser nos partenaires européens. Enfin, les professionnels de la culture et les artistes sont un relais important.

Jacques Cresta m’a interrogé sur l’article 12 de la Convention de 2005, et Valérie Corre, que nous avons désignée rapporteure pour avis sur le projet de loi sur le droit des étrangers, a entendu cette requête pertinente. Nous sommes souvent mobilisés pour intervenir auprès des préfets, voire du ministre de l’intérieur lui-même, afin d’arracher des titres de séjour, souvent au dernier moment, qui permettent à des artistes venus du bout du monde de participer à des événements ayant lieu sur notre sol.

La nécessité de garantir l’accès à la culture au Nord comme au Sud a été rappelée avec beaucoup de pertinence par Régine Povéda. Quant à Valérie Corre, elle a évoqué à cet égard à juste raison le Traité transatlantique.

Je nuancerai toutefois ce sentiment que nous pourrions avoir d’écrasement par les GAFA : il existe en effet dans le monde des écosystèmes numériques autonomes dotés d’un potentiel de développement important – en Chine, en Inde, en Russie, en Amérique latine et en Corée du Sud par exemple – mais aussi des initiatives locales fondées sur les modèles de développement propres à certains pays et à certaines zones géographiques, compte tenu, notamment, du rôle que joue le téléphone portable en Afrique et en Inde.

Enfin, en ce qui concerne la coopération Nord-Sud, Mme Youma Fall, représentante de l’Organisation internationale de la francophonie que j’ai auditionnée dans le cadre de la rédaction de mon rapport, m’a rappelé que grâce aux technologies numériques, le local pouvait rejoindre l’universel. La coopération doit donc avant tout permettre aux sociétés civiles des États du Sud de prendre conscience de leur richesse et de leurs atouts culturels et de se donner les moyens, avec leurs propres outils, de valoriser ces atouts.

Tels sont les enjeux de la Convention UNESCO de 2005 sur la diversité des expressions culturelles. Il me semblait important que l’Assemblée nationale puisse en célébrer l’anniversaire en en faisant un instrument d’avenir pour la vitalité de la diversité culturelle. Dans les débats à venir, et notamment dans le cadre de la prochaine discussion budgétaire, nous serons amenés à invoquer cette convention pour appuyer notre force de conviction et faire en sorte, entre autres, que le Fonds international pour le développement culturel soit mieux provisionné. (Applaudissements sur tous les bancs.)

La Commission autorise à l’unanimité la publication du rapport d’information.

La séance est levée à onze heures.

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Présences en réunion

Réunion du mercredi 24 juin 2015 à 9 heures 30

Présents. – M. Jean-Pierre Allossery, M. Benoist Apparu, Mme Laurence Arribagé, Mme Isabelle Attard, M. Jean-François Copé, Mme Valérie Corre, M. Jacques Cresta, M. Bernard Debré, M. Laurent Degallaix, M. Pascal Deguilhem, Mme Sophie Dessus, Mme Sophie Dion, Mme Sandrine Doucet, Mme Anne-Lise Dufour-Tonini, M. William Dumas, M. Yves Durand, Mme Martine Faure, M. Hervé Féron, M. Michel Françaix, Mme Annie Genevard, Mme Claude Greff, M. Michel Herbillon, M. Patrick Hetzel, Mme Gilda Hobert, M. Guénhaël Huet, M. Christian Kert, Mme Annick Lepetit, Mme Martine Martinel, M. François de Mazières, M. Michel Ménard, Mme Dominique Nachury, Mme Maud Olivier, M. Christian Paul, M. Michel Pouzol, Mme Régine Povéda, M. Christophe Premat, M. Marcel Rogemont, M. Paul Salen, Mme Claudine Schmid, Mme Julie Sommaruga, M. Claude Sturni, Mme Sylvie Tolmont, M. Stéphane Travert

Excusés. – Mme Huguette Bello, Mme Marie-Odile Bouillé, Mme Brigitte Bourguignon, M. Bernard Brochand, M. Ary Chalus, Mme Michèle Fournier-Armand, M. Jean-Pierre Giran, Mme Sonia Lagarde, M. Dominique Le Mèner, Mme Lucette Lousteau, Mme Barbara Pompili, M. Frédéric Reiss, M. Franck Riester, M. Rudy Salles, Mme Michèle Tabarot, M. Patrick Vignal