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Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République

Mercredi 14 mai 2014

Séance de 11 heures

Compte rendu n° 57

Présidence de M. Dominique Raimbourg, Vice-président

– Échange de vues sur les travaux de la Commission

– Examen de la proposition de résolution européenne de Mme Marietta Karamanli sur la proposition de règlement relatif à l’Agence de l’Union européenne pour la coopération judiciaire en matière pénale (Eurojust) (n° 1890) (Mme Marietta Karamanli, rapporteure)

La séance est ouverte à 11 heures.

Présidence de M. Dominique Raimbourg, vice-président.

Échange de vues sur les travaux de la Commission.

M. Dominique Raimbourg, président. Mes chers collègues, je vous prie d’excuser l’absence du président Jean-Jacques Urvoas, actuellement en déplacement dans le cadre d’une mission d’information avec René Dosière et Daniel Gibbs.

Je vous rappelle par ailleurs que, conformément au message qui vous a été adressé hier, le projet de loi sur la prévention de la récidive sera examiné en séance à compter du mardi 3 juin, l’examen en commission devant débuter le 27 mai à neuf heures trente par une audition de Mme Christiane Taubira, garde des Sceaux. Nous espérons que la Commission pourra ensuite examiner le texte dans la journée du 27, de façon à ménager un délai de réflexion utile avant la séance. Le délai de dépôt des amendements en vue de la séance publique court normalement jusqu’au vendredi 30 mai à dix-sept heures.

M. Éric Ciotti. Monsieur le président, le poste de Défenseur des droits, laissé vacant par le décès du regretté Dominique Baudis, n’est toujours pas pourvu à ce jour. Savez-vous quand notre Commission sera saisie pour avis de la nomination à ce poste ?

M. Marc Dolez. S’agissant du calendrier d’examen du projet de loi sur la prévention de la récidive, je sais combien est difficile la tâche de notre président, tenu de s’adapter à la décision, prise par la Conférence des présidents, d’avancer la discussion du texte en séance publique. Toutefois, la date fixée pour l’examen en commission – le mardi 27 mai, matin, après-midi et soir, et éventuellement le mercredi matin – n’est pas sans poser quelques problèmes.

Je rappelle d’abord que le mardi matin est en principe dévolu aux réunions des groupes parlementaires. En outre, mardi 27 mai, dans le cadre de la semaine de contrôle, l’ordre du jour de la séance prévoit, l’après-midi, un débat à l’initiative de nos collègues radicaux de gauche sur l’évaluation des politiques d’accueil des demandeurs d’asile, et, le soir, un débat à l’initiative du groupe UDI sur – excusez du peu ! – la réforme territoriale. Ces deux débats intéressent directement notre Commission. Ce téléscopage n’est évidemment pas satisfaisant, c’est le moins que l’on puisse dire. Il se trouve – vous n’y pouvez rien – que cette semaine est aussi celle du jeudi de l’Ascension, ce qui ne va pas faciliter le dépôt des amendements avant le vendredi soir.

L’exercice est certes difficile, mais ces conditions de travail sont absolument inacceptables. Malheureusement, je ne vois pas quelle solution alternative proposer dès lors que l’examen en séance doit débuter le 3 juin.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Peut-être pourrions-nous demander par l’intermédiaire du président Urvoas que la date limite du dépôt des amendements soit repoussée au-delà du vendredi soir, voire jusqu’au jour de la séance. Je sais, pour l’avoir représenté hier en Conférence des présidents, qu’il a déjà envisagé ce report, qui aurait le mérite d’apaiser les esprits.

M. Dominique Raimbourg, président. Monsieur Ciotti, s’agissant du Défenseur des droits, le président de notre Commission a pris contact avec le Gouvernement pour indiquer que nous étions disponibles pour procéder à toute audition utile. Le Gouvernement a accusé réception de cette proposition mais, à ce jour, rien n’est arrêté. Nous suivons ce dossier avec attention.

Vous avez raison, monsieur Dolez : le calendrier était très difficile à établir. Je le sais pour avoir participé avec lui aux discussions sur ce sujet, notre président aurait voulu que le projet soit examiné en séance le 16 juin, date à laquelle est inscrit à l’ordre du jour un texte sur la réforme ferroviaire qu’il était malheureusement impossible de déplacer. C’est donc la moins mauvaise des solutions qui a été retenue, compte tenu d’un programme comme toujours trop chargé.

Merci de votre excellente suggestion, monsieur Le Bouillonnec : nous pourrions en effet indiquer que notre Commission souhaite que le délai de dépôt des amendements soit prolongé jusqu’au lundi 2 juin, à dix-sept heures. Ce report ne pourra être acté que par la Conférence des présidents, mais je ne vois pas pourquoi celle-ci s’y opposerait.

*

* *

La Commission examine, sur le rapport de Mme Marietta Karamanli, la proposition de résolution européenne sur la proposition de règlement relatif à l’Agence de l’Union européenne pour la coopération judiciaire en matière pénale (Eurojust) (n° 1890).

M. Dominique Raimbourg, président. Nous allons maintenant passer à l’examen de la proposition de résolution européenne présentée par Mme Marietta Karamanli. C’est l’occasion pour nous de faire un point sur les questions européennes conformément à l’objectif qui a été fixé par notre Commission au début de cette législature avec la désignation de deux rapporteurs chargés de la veille européenne, Mme Karamanli et M. Guy Geoffroy.

Mme Marietta Karamanli, rapporteure. Notre Commission est aujourd’hui saisie de la proposition de résolution européenne, que j’ai déposée le 16 avril dernier en commission des Affaires européennes, sur la proposition de règlement relative à l’Agence de l’Union européenne pour la coopération judiciaire en matière pénale (Eurojust), présentée par la Commission européenne le 17 juillet 2013.

Créée par une décision du Conseil du 28 février 2002 et installé à La Haye, Eurojust a pour mission d’encourager et d’améliorer la coordination des enquêtes et des poursuites judiciaires entre les autorités compétentes des vingt-huit États membres de l’Union européenne en matière de criminalité organisée transfrontalière – trafic de stupéfiants, traite des êtres humains, immigration irrégulière, fraude, contrefaçon, blanchiment d’argent et terrorisme.

Actuellement, 350 personnes travaillent au sein de l’institution, dont 80 magistrats. En 2013, Eurojust a traité 1 576 affaires, contre 202 l’année de sa création, en 2002 : le nombre de dossiers a été multiplié par plus de sept en dix ans.

L’organisation et le fonctionnement d’Eurojust sont aujourd’hui régis par la décision précitée du Conseil du 28 février 2002, telle que modifiée par la décision du Conseil du 16 décembre 2008. Or l’article 85 du Traité sur le fonctionnement de l’Union Européenne (TFUE) stipule qu’Eurojust a vocation à être régie par un règlement adopté conformément à la procédure législative ordinaire et que les co-législateurs fixent dans ce règlement la structure, le fonctionnement et le domaine d’action d’Eurojust.

C’est dans ce cadre que s’inscrit la proposition de résolution européenne que nous examinons aujourd’hui. En effet, la proposition de règlement déposée par la Commission européenne le 17 juillet 2013, et qui devrait succéder à la décision précitée du Conseil du 28 février 2002, vise à transformer Eurojust en une agence de l’Union européenne, dotée d’une nouvelle gouvernance. Elle apporte également des modifications aux prérogatives des membres nationaux d’Eurojust et définit les modalités selon lesquelles le Parlement européen et les parlements nationaux sont associés à l’évaluation des activités de l’Agence.

Je présenterai rapidement les modifications apportées par la proposition de règlement à la décision du Conseil, avant d’en venir à cette question de l’évaluation parlementaire.

Si la proposition de règlement modifie significativement la gouvernance et le fonctionnement d’Eurojust, elle demeure peu ambitieuse faute d’exploiter suffisamment les possibilités juridiques offertes par l’article 85 du TFUE. La Commission européenne a ainsi choisi de ne pas confier à Eurojust, comme l’y autorisait pourtant le Traité, la faculté de déclencher des enquêtes pénales, de proposer le déclenchement de poursuites conduites par les autorités nationales compétentes, de coordonner ces enquêtes et ces poursuites ou encore de résoudre les éventuels conflits de compétences.

Si je ne peux que regretter ce manque d’ambition, je me félicite du renforcement des compétences des membres nationaux d’Eurojust, dont nous avons eu l’occasion de rappeler ici le rôle, en lien avec le Parquet européen et avec Europol.

La proposition de règlement vise également à rénover la gouvernance d’Eurojust, par une nouvelle structure à deux niveaux. D’une part, sont instaurées deux formations distinctes du collège, dédiées l’une aux fonctions opérationnelles, l’autre aux fonctions de gestion ; ces dernières recouvrent notamment l’adoption des documents de programmation et du rapport annuel d’activité, l’adoption du budget annuel, la programmation des ressources humaines et la nomination du directeur administratif. D’autre part, un conseil exécutif de taille réduite est créé, chargé d’assister la formation du collège dédiée aux fonctions de gestion administrative et budgétaire.

La création de ces deux nouvelles structures renforce sensiblement les pouvoirs de la Commission européenne, laquelle sera représentée au sein de ces deux instances décisionnelles. Or Eurojust n’est pas une agence de l’Union européenne comme une autre ; les spécificités de la coopération judiciaire en matière pénale doivent impérativement être respectées. La faible évolution des attributions d’Eurojust ne saurait en aucun cas justifier l’augmentation excessive du rôle et des pouvoirs de la Commission européenne dans la nouvelle gouvernance, qui risquerait de remettre en cause l’indépendance de l’Agence à l’égard des institutions européennes. Cette question fait l’objet du point 6 de la proposition de résolution.

La proposition de règlement vise également, selon la Commission européenne, à renforcer le régime de protection des données personnelles traitées par Eurojust. Le texte propose ainsi de confier la protection des données non plus à un organe de contrôle indépendant et collégial – tel l’organe de contrôle commun qui en était chargé depuis la création d’Eurojust en 2002 –, mais au Contrôleur européen de la protection des données. L’Allemagne et la France ont souligné leur préférence pour le maintien d’une autorité de contrôle ad hoc, justifiée par la spécificité des données personnelles collectées en matière pénale. Cette position est réaffirmée au point 8 de la proposition de résolution.

La proposition de règlement redéfinit également les conditions dans lesquelles les données personnelles transmises par les États membres et traitées par Eurojust pourraient être transférées vers des pays tiers ou des organisations internationales. Ainsi, l’autorisation de l’État membre pourrait désormais être réputée acquise si ce dernier n’a pas expressément limité la possibilité d’effectuer des transferts ultérieurs ou s’il a donné son accord préalable en des termes généraux. De notre point de vue, le consentement d’un État membre doit être expressément donné pour que le transfert soit sécurisé. C’est l’objet du point 7 de la proposition de résolution.

J’en viens à l’évaluation parlementaire. L’article 85 du TFUE dispose que le règlement ayant vocation à régir demain le fonctionnement et l’organisation d’Eurojust fixe « les modalités de l’association du Parlement européen et des parlements nationaux à l’évaluation des activités d’Eurojust ». Pour se conformer aux dispositions du Traité, la proposition de règlement prévoit la transmission au Parlement européen et aux parlements nationaux d’une série de documents : le rapport annuel d’activité et les résultats d’études et de projets stratégiques élaborés ou commandés par l’Agence.

Cela ne paraît pas suffisant pour garantir un contrôle démocratique digne de ce nom des activités d’Eurojust, qui ont une incidence sur les droits fondamentaux et particulièrement sur la vie privée des citoyens, ne serait-ce que par l’échange de données à caractère personnel. Cette position est rappelée au point 2 de la proposition de résolution.

Avant même que le Parlement européen ne se prononce sur la proposition de règlement, il me paraît indispensable de définir des modalités d’évaluation parlementaire bien plus ambitieuses, sur le modèle de ce qui a été proposé pour Europol. C’est d’autant plus important que le parquet européen va être créé à partir d’Eurojust.

Comme elle l’a fait en décembre 2013 pour Europol, notre Commission – et, plus largement, notre assemblée – doit clairement se prononcer en faveur de la création d’une commission mixte d’évaluation qui se réunirait au Parlement européen. Cette commission serait composée, d’une part, de représentants du Parlement européen, membres de la commission des Libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures (LIBE) ; d’autre part, d’un représentant de chaque parlement national, membre de la commission compétente en matière de justice, et d’un suppléant. Les États membres dont le système parlementaire est bicaméral seraient représentés par un membre de chaque chambre. La commission mixte serait coprésidée par le président de la commission LIBE du Parlement européen et par un membre du parlement national de l’État assurant la présidence tournante du Conseil. Convoquée par ses deux coprésidents, la commission devrait être dotée d’attributions effectives et pouvoir, à ce titre, entendre, à sa demande, le président et les vice-présidents d’Eurojust, et recevoir l’ensemble des documents dont seront également destinataires les parlements européen et nationaux.

Enfin, les parlements nationaux doivent pouvoir continuer à prendre leurs propres mesures d’évaluation des activités d’Eurojust. Dans cette perspective, la proposition de règlement ne saurait restreindre les pouvoirs d’évaluation que les parlements nationaux détiennent et exercent en application des législations nationales.

En conclusion, si certains éléments de la proposition de règlement constituent des progrès, d’autres – comme le renforcement des pouvoirs de la Commission ou la protection des données – appellent des observations et des réserves. L’évaluation parlementaire des activités d’Eurojust nécessite également une prise de position claire des parlements nationaux, qui doivent se saisir des pouvoirs qui leur sont dévolus par le Traité de Lisbonne.

Telle est l’ambition de la proposition de résolution européenne qui vous est soumise. Adoptée à l’unanimité par la commission des Affaires européennes, elle ne fait que transposer à Eurojust, en prélude à la création du Parquet européen, les dispositions que nous avons votées au sujet d’Europol. Je vous propose donc de l’adopter en l’état.

M. Jacques Bompard. C’était une bonne chose que de créer cette structure, mais il y a lieu de s’inquiéter de son fonctionnement.

L’alinéa 9 de la proposition de résolution européenne est assez timide dans sa critique : plutôt que de parler de « dispositions insuffisantes », nous devrions faire état des craintes qu’inspire la grave absence de tout examen démocratique de l’action d’Eurojust.

De manière bienvenue, l’alinéa 10 tente de faire barrage à un fonctionnement opaque d’Eurojust que l’on justifierait par des contraintes réglementaires, et de préserver le pouvoir des parlements européen et nationaux. Toutefois, faute d’attaque contre la logique technocratique, il risque de rester un vœu pieux.

L’alinéa 11 propose la création d’une commission mixte, commune au Parlement européen et aux parlements nationaux, afin de garantir l’évaluation d’Eurojust. Cette disposition va dans le bon sens, mais reste prisonnière de la perte de souveraineté des parlements nationaux qui résulte des réformes de Bruxelles. Comment se satisfaire d’un dispositif « sparadrap » quand l’architecture sécuritaire de notre pays est en péril ?

L’alinéa 13 ne va pas assez loin dans sa critique de la disposition scandaleuse qui acte encore la prééminence de la Commission européenne. Le fait que cette dernière veuille nommer le directeur administratif d’Eurojust est tout simplement intolérable. Il faut comprendre que cette Commission exaspère les Français !

Les alinéas 14 et 15 traitent de la protection des données. Le premier refuse de présumer de l’accord donné par un État membre au transfert de données à caractère personnel vers des organes de l’Union. En effet, nous ne pouvons accepter ce principe : s’il faut bien entendu tout mettre en œuvre pour faciliter la traque des criminels transfrontaliers, nous ne saurions abandonner cet aspect essentiel de la sécurité intérieure. Par ailleurs, les parlements nationaux doivent continuer de défendre la vie privée dans le traitement des données, même s’il s’agit de criminels, la justice et la sécurité intérieure demeurant des éléments constitutifs du pouvoir régalien.

S’agissant de l’immigration criminogène, aucune action n’est proposée. Or, comme le montre la situation en Italie, l’immigration clandestine, qui explose en Europe – l’agence Frontex fait état d’une hausse de 48 % entre 2012 et 2013 –, pose de graves problèmes qui inquiètent les populations locales : maladies, criminalité, démultiplication des coûts sociaux. L’Europe doit elle aussi s’en inquiéter.

J’en terminerai par la méthode. Eurojust a été créée en 2002 par une décision du conseil des ministres de l’Union européenne afin de lutter contre les formes graves de criminalité. Cette disposition a été transposée en droit français par l’article 17 de la loi du 9 mars 2004. Nous ne pouvons que regretter qu’aucun parlement national n’ait jugé utile de prévoir les garde-fous nécessaires à la préservation de la souveraineté nationale. C’est la question de la subsidiarité qui est une nouvelle fois posée, comme le notait le Sénat dans son rapport du 17 avril dernier. Or, sans subsidiarité, l’Europe perd l’essence même de son droit à exister.

Aux termes de l’article 85 du TFUE qui lui est consacré, « la mission d’Eurojust est d’appuyer et de renforcer la coordination et la coopération entre les autorités nationales chargées des enquêtes et des poursuites relatives à la criminalité grave affectant deux ou plusieurs États membres ou exigeant une poursuite sur des bases communes, sur la base des opérations effectuées et des informations fournies par les autorités des États membres et par Europol ». Il y a donc eu tromperie sur la marchandise, puisqu’au lieu de l’organe de coopération promis, nous sommes confrontés à une intégration forcée qui ne respecte plus le principe de subsidiarité.

Permettez-moi de conclure en me référant à Saint Thomas : l’objet naturel de toute intervention en matière sociale est d’aider les membres du corps social, et non de les détruire ou de les absorber – comme le font en quelque sorte nos institutions européennes.

M. Dominique Raimbourg, président. Monsieur Bompard, pour lutter contre une criminalité transfrontalière, il faut bien se doter d’outils transfrontaliers.

Ensuite, la difficulté réelle que vous évoquez, celle de l’articulation entre souveraineté nationale et souveraineté européenne, est ici redoublée par le fait qu’il s’agit de juges, soucieux de leur indépendance.

Par ailleurs, la proposition de résolution européenne souligne bien la nécessité d’une évolution démocratique. En particulier, l’idée d’une commission mixte d’évaluation associant les parlements nationaux tient compte des préoccupations que vous relayez.

Enfin, l’arbre ne doit pas cacher la forêt : si l’on rapporte les 1 500 dossiers par an traités par Eurojust aux 600 000 décisions de condamnations prononcées chaque année par les tribunaux correctionnels français, on voit que l’atteinte supposée à notre souveraineté est tout à fait supportable. Certes, les « piqûres d’épingle » peuvent être douloureuses et il convient de les soigner, mais il me semble qu’il ne faut pas trop s’en inquiéter.

M. Guy Geoffroy. Notre Commission et celle des Affaires européennes travaillent de plus en plus ensemble ; cette très intéressante proposition de résolution en témoigne. Mme Karamanli et moi-même prenons très au sérieux la mission de veille européenne qui nous a été confiée par notre Commission, en particulier sur des sujets au long cours comme celui dont nous sommes saisis aujourd’hui.

Le texte qui est à l’origine de cette proposition de résolution est effectivement trop timide. Il était donc bienvenu que la commission des Affaires européennes, puis la nôtre, puissent dire, au nom de l’Assemblée nationale – car si d’aventure le texte devait être examiné en séance, il y recueillerait notre approbation –, que la proposition de règlement va dans le bon sens mais que, dans la lettre et l’esprit des institutions européennes, il convient que les prérogatives des parlements nationaux soient garanties comme il se doit.

Il est d’autant plus essentiel de voter cette proposition de résolution européenne que c’est sur la base d’Eurojust que notre assemblée souhaite, depuis l’origine, que soit créé le Parquet européen. Les volumes de dossiers à traiter seront alors beaucoup plus importants et leur nature beaucoup plus sensible. Le contrôle des parlements nationaux sur l’évolution de ces institutions à l’échelle européenne n’en sera que plus nécessaire.

Je remercie Marietta Karamanli de son travail, qui s’inscrit dans la continuité de celui que nous menons depuis plusieurs années. Je souhaite vivement l’adoption de cette proposition de résolution.

Mme la rapporteure. Merci, monsieur Geoffroy ; en effet, nous travaillons sur ces questions depuis fort longtemps.

Monsieur Bompard, une partie des questions que vous avez soulevées ont trouvé une réponse dans les propos du président. Il s’agit bien ici non seulement de reconnaître la souveraineté nationale, mais aussi d’installer un échelon supplémentaire dès lors que c’est la criminalité transfrontalière qu’il s’agit de combattre.

Sur l’immigration, je n’ai aucun élément de réponse à vous apporter, car cette question ne relève pas d’Eurojust. En revanche, nous aurons sans doute l’occasion d’en reparler prochainement.

Enfin, si nous présentons une proposition de résolution, c’est bien pour exprimer la position de notre parlement en vue du Conseil européen qui se réunira fin juin, pour que la Commission européenne nous apporte une réponse officielle et pour que le Parlement européen puisse faire œuvre législative en modifiant, le cas échéant, la proposition de règlement par voie d’amendement.

L’évaluation parlementaire est essentielle. Voilà pourquoi nous l’introduisons ici comme nous l’avons fait ailleurs. C’est en coopérant avec le Parlement européen que les parlements nationaux pourront élaborer les réponses qu’ils adressent à la Commission européenne, voire influencer celle-ci. Mieux vaut s’atteler avec optimisme à la construction européenne, en tentant de lui donner les moyens de répondre aux questions des citoyens d’Europe, plutôt que de trembler à l’idée de ce que nous pourrions perdre. Nous ne perdons rien, à condition de demander à garder ce à quoi nous tenons.

La Commission adopte à l’unanimité la proposition de résolution européenne sans modification.

La séance est levée à 11 heures 30.

——fpfp——

Membres présents ou excusés

Présents. - Mme Nathalie Appéré, M. Erwann Binet, M. Jacques Bompard, Mme Colette Capdevielle, M. Christophe Cavard, Mme Marie-Anne Chapdelaine, M. Éric Ciotti, M. Jean-Michel Clément, Mme Pascale Crozon, M. Marc-Philippe Daubresse, M. Jean-Pierre Decool, M. Sébastien Denaja, Mme Françoise Descamps-Crosnier, M. Patrick Devedjian, M. Marc Dolez, M. Philippe Doucet, Mme Laurence Dumont, M. Matthias Fekl, M. Hugues Fourage, M. Guy Geoffroy, M. Bernard Gérard, M. Philippe Gosselin, M. Philippe Goujon, M. Philippe Houillon, Mme Marietta Karamanli, M. Guillaume Larrivé, M. Jean-Yves Le Bouillonnec, M. Bernard Lesterlin, Mme Sandrine Mazetier, M. Patrick Mennucci, Mme Nathalie Nieson, M. Jacques Pélissard, M. Edouard Philippe,
M. Jean-Frédéric Poisson, M. Pascal Popelin, M. Dominique Raimbourg, M. Alain Tourret, Mme Cécile Untermaier, M. Daniel Vaillant, M. Jacques Valax, M. François Vannson, M. Patrice Verchère, M. Alain Vidalies, M. François-Xavier Villain, M. Jean-Luc Warsmann, Mme Marie-Jo Zimmermann

Excusés. - M. Marcel Bonnot, M. Dominique Bussereau, M. René Dosière, M. Guillaume Garot, M. Daniel Gibbes, M. Yves Goasdoué, Mme Françoise Guégot, Mme Anne-Yvonne Le Dain, M. Alfred Marie-Jeanne, M. Pierre Morel-A-L'Huissier, M. Bernard Roman, M. Roger-Gérard Schwartzenberg, M. Jean-Jacques Urvoas

Assistait également à la réunion. - M. Paul Molac