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Commission spéciale pour l’examen du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte

Jeudi 25 septembre 2014

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 24

Présidence de M. François Brottes Président

– Suite de l’examen du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte (n° 2188) (Mmes Ericka Bareigts, Marie-Noëlle Battistel, Sabine Buis, MM. Denis Baupin et Philippe Plisson, rapporteurs)

La commission a poursuivi l’examen du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte (n° 2188) sur le rapport de Mmes Ericka Bareigts, Marie-Noëlle Battistel, Sabine Buis, MM. Denis Baupin et Philippe Plisson.

M. le président François Brottes. Nous avons examiné, à ce stade, 7 % des amendements.

M. Jean-Paul Chanteguet. Il reste en effet quelque 2 000 amendements : à raison d’une minute par amendement, cela ferait plus de trente-trois heures de discussion. Il serait inacceptable, et irrespectueux pour le Parlement, de terminer la lecture de ce texte à quelques-uns, dans la nuit de vendredi à samedi ou de samedi à dimanche ; je m’y opposerais en tout cas vigoureusement. Il convient donc, soit d’accélérer le rythme de nos travaux, soit de les décaler dans le temps.

M. le président François Brottes. Pour ma part, c’est l’absence de certains membres de notre commission spéciale que je trouve inacceptable. Pour le reste, il me semble que les débats se sont déroulés jusqu’à présent comme ils le doivent. De plus, monsieur le président Chanteguet, tous les amendements ne sont pas défendus… En tout état de cause, nous aviserons vendredi en fin de journée, en fonction de l’avancement de nos travaux.

M. Julien Aubert. Vous êtes un peu la victime, monsieur le président, du calendrier imposé par le Gouvernement... Des élections sénatoriales ont lieu dimanche, et tous les députés électeurs n’habitent pas dans la grande couronne parisienne : il ne serait donc pas normal de terminer nos travaux dans la nuit de samedi à dimanche. Jusqu’à présent, l’opposition a pu s’exprimer sans enliser les débats. Si toutefois ceux-ci n’avancent pas assez vite, il faudra en effet songer à les décaler : il serait pour le moins dommage d’expédier l’examen d’un texte de cette importance.

M. le président François Brottes. Je n’ose imaginer, évidemment, que certains fassent tout pour retarder notre discussion… Quoi qu’il en soit, c’est moi qui préside cette commission, et j’entends le faire jusqu’au bout.

TITRE II

MIEUX RÉNOVER LES BÂTIMENTS
POUR ÉCONOMISER L’ÉNERGIE, FAIRE BAISSER
LES FACTURES ET CRÉER DES EMPLOIS

Avant l’article 3

La Commission examine l’amendement CS526 de M. Julien Aubert.

M. Julien Aubert. Je propose d’inscrire dans le titre II l’objectif de diminution des émissions de CO2, en d’autres termes de la consommation d’énergie fossile.

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche, auprès de la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie. Cet amendement restreint les objectifs d’économies d’énergie dans les bâtiments aux seules énergies fossiles. Or le texte vise aussi à diminuer l’empreinte environnementale des bâtiments et à limiter leur consommation pour faire baisser la facture des ménages. Avis défavorable.

Mme Sabine Buis, rapporteure sur le titre II et le titre IV. Avis défavorable également : le texte porte sur la sobriété énergétique, sans se limiter aux énergies fossiles.

M. Martial Saddier. Nous sommes d’accord avec l’idée de la sobriété énergétique, mais déplorons l’absence de mesures en faveur de l’efficacité énergétique, qui puissent aider nos concitoyens à moderniser leurs appareils de chauffage et permettent d’encadrer leur facture d’énergie.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CS1954 de la rapporteure.

Mme Sabine Buis, rapporteure. La méthode de calcul permettant de justifier du respect des caractéristiques des bâtiments neufs ou existants définies par décret en Conseil d’État et la méthode de calcul visé par le diagnostic de performance énergétique sont différentes dans leur périmètre et leur mode de calcul. Cela entraîne des résultats différents pour un même bâtiment ou un même logement.

M. le secrétaire d’État. Je souscris à cet objectif d’harmonisation, et le ministère y travaille, mais la disposition est de niveau réglementaire. Les méthodes de détermination de la performance énergétique doivent être adaptées aux caractéristiques techniques des bâtiments concernés ; pour les bâtiments existants, il convient notamment de distinguer l’ensemble des techniques constructives, dont les caractéristiques sont beaucoup plus variées que dans le domaine de la construction neuve. Avis défavorable.

M. Martial Saddier. L’amendement témoigne d’un souci de précision. De ce point de vue, pourrait-on avoir des garanties, par voie législative ou réglementaire, quant à la prise en compte des zones géographiques, qui, pour des bâtiments similaires, posent des enjeux spécifiques en matière énergétique ?

M. le secrétaire d’État. Cela est déjà pris en compte dans la réglementation, et le sera encore en l’espèce, bien entendu.

Mme Sabine Buis, rapporteure. Dans ces conditions, je retire mon amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission en vient à l’examen, en discussion commune, des amendements CS1955 de la rapporteure, CS1268 de M. Jean-Paul Chanteguet, CS1428 de M. Philippe Bies et CS1469 de Mme Cécile Duflot.

Les amendements CS1268 et CS1428 sont identiques.

Mme Sabine Buis, rapporteure. Je suggère que le Gouvernement présente, tous les cinq ans, un rapport au Parlement afin de présenter la stratégie nationale à l’horizon 2050 pour la maîtrise de l’énergie dans le domaine du logement.

M. le secrétaire d’État. C’est l’objet des budgets carbone et de la stratégie bas- carbone de définir cette feuille de route. La France met déjà en œuvre des dispositions de la directive européenne de 2012 sur l’efficacité énergétique ; à cette fin un rapport a été transmis à la Commission européenne sur la stratégie de rénovation des bâtiments. L’horizon retenu est 2020.

Par ailleurs, ladite stratégie doit être mise à jour tous les trois ans et rendue publique par la Commission. L’amendement me paraissant satisfait, je suggère son retrait.

M. Jean-Paul Chanteguet. L’amendement CS1268 est défendu.

M. Philippe Plisson. L’amendement CS1428 l’est aussi.

Mme Cécile Duflot. Il est nécessaire de définir une stratégie de plus long terme, à l’horizon 2050 et non 2020, afin de permettre aux acteurs de s’organiser. Ce n’est pas un hasard, monsieur le secrétaire d’État, que l’amendement de la rapporteure ait été relayé par d’autres.

M. le secrétaire d’État. La stratégie bas carbone est définie sur quinze ans glissants : la prise en compte des objectifs est donc assurée de façon permanente. Aussi, je maintiens ma demande de retrait des amendements.

M. Denis Baupin. La stratégie doit être claire et visible, ce qui n’a pas été le cas des plans successifs. Nous avons adopté, hier, un amendement important pour inscrire dans la loi l’objectif de rénovation de tous les bâtiments à l’horizon 2050. Un rapport qui précise régulièrement la stratégie, même si ce n’est pas forcément tous les cinq ans, serait donc utile.

Mme Cécile Duflot. Contrairement à celui de la rapporteure, notre amendement n’impose pas la remise d’un rapport tous les cinq ans. Nous pouvons partager les objectifs, mais la question est de savoir les moyens que nous mobilisons pour les atteindre. Sans stratégie de moyen terme sur le développement des compétences des acteurs, sans lisibilité pour les particuliers ni sur l’évolution des transactions immobilières, voire sans une réflexion sur le rôle du diagnostic de performance énergétique (DPE), l’objectif de 500 000 rénovations thermiques, par exemple, ne sera pas atteint. Je regrette, de ce point de vue, d’avoir retiré la mesure relative au bouquet de travaux ouvrant droit au crédit d’impôt. Bref, sans une stratégie de long terme, nous en resterions à un bel affichage non assorti de moyens, en termes financiers et au regard des perspectives d’avenir pour les acteurs.

M. le président François Brottes. Maintenez-vous votre amendement, madame la rapporteure ?

Mme Sabine Buis, rapporteure. Oui, pour les raisons qui viennent d’être évoquées.

La Commission adopte l’amendement CS1955.

En conséquence, les amendements CS1268, CS1428 et CS1469 tombent.

La Commission passe à l’amendement CS181 de M. Martial Saddier.

M. Martial Saddier. Il s’agit d’un amendement d’appel. Une fois encore, je regrette l’absence d’un volet dédié à l’efficacité énergétique.

L’exemple de ce qui a été fait, sur une partie du territoire, avec le Conseil national de l’air devrait nous inspirer. L’acte de vente me semble être la meilleure occasion d’afficher les atouts et les contraintes d’un bien immobilier, s’agissant en particulier du chauffage. Une expérimentation est menée actuellement sur les cheminées ouvertes : tout acte notarié doit préciser au vendeur et à l’acheteur si le chauffage au bois est défectueux.

M. le secrétaire d’État. L’amendement présente un risque d’inconstitutionnalité car il limiterait le droit du vendeur à disposer librement de son bien. De surcroît, certains vendeurs peuvent être dans une situation financière rendant difficile la réalisation de tels travaux. Cet amendement aurait également un impact négatif sur le marché immobilier, avec une augmentation des prix de vente et un surcoût lié aux travaux de l’ordre de 30 000 euros, au détriment des ménages qui ont déjà des difficultés à accéder à la propriété.

Le projet de loi, dans son titre II, contient des dispositions visant à améliorer les performances du parc de logements, comme l’accompagnement de travaux d’une certaine ampleur et l’obligation de réaliser une amélioration énergétique, selon le principe des travaux embarqués. Avis défavorable.

Mme Sabine Buis, rapporteure. En marquant que « la rénovation énergétique des logements participe à la politique de l’énergie de la France », l’amendement se borne à rappeler un état de fait, pour ne pas dire une évidence. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements CS1956 deuxième rectification de la rapporteure, et CS1006 de M. Bertrand Pancher.

Mme Sabine Buis, rapporteure. À l’horizon 2030, les bâtiments résidentiels et tertiaires doivent avoir fait l’objet d’une rénovation leur permettant de sortir des catégories F et G du DPE.

M. Bertrand Pancher. Les bâtiments neufs représentent seulement 1 % des constructions chaque année, et ils sont déjà réglementés. L’objectif de réduction de moitié de notre consommation d’énergie finale à l’horizon 2050 passe par une vision ambitieuse et à long terme du parc existant ; c’est d’ailleurs ce que prévoit la directive relative à l’efficacité énergétique.

M. le secrétaire d’État. L’ambition du Gouvernement en matière d’efficacité énergétique dans les bâtiments est inscrite à l’article 1er du projet de loi, avec un objectif de 100 % de bâtiments performants à l’horizon 2050. Ces amendements me semblent donc superfétatoires ; aussi je suggère leur retrait.

M. le président François Brottes. Tout cela suppose de revoir les normes du DPE.

Mme Cécile Duflot. Je soutiens l’amendement de la rapporteure. Nous sommes en effet au cœur du sujet, s’agissant de l’obligation de rénovation et des moyens que nous nous donnons. Ne nous cachons pas derrière notre petit doigt : l’objectif d’une division par deux de la consommation d’énergie restera un objectif de papier sans une stratégie concrète, dotée de moyens financiers, politiques et associant les collectivités – même si les transports seront bien entendu déterminants, nous y reviendrons. Je rappelle que 75 % des logements dans lesquels nous vivrons en 2050 sont déjà construits. La rénovation est donc un enjeu décisif – d’ailleurs le problème est plus complexe encore s’agissant des logements des années 50-60 à 80. Dans ce cadre, un DPE plus normé et plus prescriptif me semble en effet essentiel.

Mme Sabine Buis, rapporteure. Avis défavorable à l’amendement CS1006.

La Commission adopte l’amendement CS1956 deuxième rectification.

L’amendement CS1006 est retiré.

Article 3 (article L. 111-6-2 du code de l’urbanisme) : Dérogation aux règles d’urbanisme au bénéfice des travaux d’isolation

La Commission est saisie d’un amendement CS103 de M. Martial Saddier, tendant à la suppression de l’article.

M. Martial Saddier. Je ne vois pas comment cet amendement pourrait laisser insensible la rapporteure. L’article introduit en effet une dérogation au code de l’urbanisme, qui s’imposerait à toutes les autorisations délivrées par le maire ou, le cas échéant, le président de l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI), qu’il s’agisse du permis de construire, des documents d’urbanisme ou des prescriptions des schémas de cohérence territoriale (SCOT) et des plans locaux d’urbanisme (PLU). Avouez que c’est un peu fort de café.

L’isolation extérieure des bâtiments, par ailleurs nécessaire, est inscrite dans le texte comme un unique et sacro-saint principe ; or un rapport de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) le confirme, les techniques évolueront.

M. le secrétaire d’État. L’article 3 complète l’article L. 111-6-2 du code de l’urbanisme ; il tend à lever certains blocages qui, systématiquement rencontrés dans les PLU, empêchent l’isolation des façades extérieures et la mise en place de dispositifs de protection contre le rayonnement solaire. Il ne s’agit en aucun cas de privilégier une technique particulière, mais de permettre le recours à cette technique quand elle est adaptée, et quand seul le manque de souplesse du règlement du PLU empêche sa mise en œuvre.

Mme Sabine Buis, rapporteure. De nombreux cas exigent en effet une dérogation au code de l’urbanisme. L’appréciation de M. Saddier ne me paraît pas tout à fait objective. Avis défavorable.

M. Julien Aubert. N’avez-vous pas l’impression que l’article gèle l’état actuel des techniques de rénovation ?

M. Martial Saddier. Votre réponse m’étonne, monsieur le secrétaire d’État. Elle laisse en effet entendre que tous les documents d’urbanisme empêchent la rénovation extérieure des bâtiments. Encore une fois, je ne suis pas contre ce type de rénovation, mais de là à en faire une obligation qui s’impose au pouvoir du maire en matière d’urbanisme, il y a un pas que je ne franchirais pas. S’il existe des blocages, il faut ouvrir la possibilité de dérogation, non en faire une obligation légale qui s’appliquera sur l’ensemble du territoire.

M. le président François Brottes. Les blocages sont nombreux, on le sait…

M. Bertrand Pancher. Prenons-y garde car, dans beaucoup de communes, l’urbanisme ne peut faire l’objet de n’importe quelle évolution : songeons au patrimoine classé ou aux règlements locaux soucieux de la qualité architecturale. S’il y a des blocages, nous pourrions les identifier et en débattre. Votre souhait de modifier la réglementation suscite beaucoup d’interrogations.

Mme Cécile Duflot. Je suis résolument opposée à l’amendement de M. Saddier, que je soupçonne de mauvaise foi. L’article, passez-moi l’expression, vise à empêcher l’empêchement ; autrement dit, sans empêchement il n’aura pas d’objet.

Par ailleurs, monsieur Pancher, ses dispositions ne s’appliqueront ni au secteur sauvegardé ni aux bâtiments classés.

Le fait est que certains PLU interdisent explicitement toute isolation extérieure. On ne peut poursuivre les objectifs que nous avons fixés sans permettre aux habitants de rénover leurs logements.

La Commission rejette l’amendement.

Puis la Commission adopte l’amendement rédactionnel CS1 de la rapporteure.

Elle examine ensuite l’amendement CS1190 de M. Jean-Yves Le Déaut.

M. Jean-Yves Le Déaut. L’installation de parois végétalisées se développe de plus en plus en plus en milieu urbain. Les progrès réalisés dans cette technique devraient permettre à terme de coupler sa dimension décorative à une fonction d’isolation. Le présent amendement vise à lever les blocages qui, dans les règlements d’urbanisme, subsistent parfois à leur installation.

M. le secrétaire d’État. L’article L.111-6-2 dispose déjà que « le permis de construire ou d'aménager ou la décision prise sur une déclaration préalable ne peut s'opposer à l'utilisation de matériaux renouvelables ou de matériaux ou procédés de construction permettant d'éviter l'émission de gaz à effet de serre, à l'installation de dispositifs favorisant la retenue des eaux pluviales etc. ». Avis défavorable.

Mme Sabine Buis, rapporteure. Avis défavorable. Il n’est pas opportun de consigner dans la loi l’emploi d’une technique particulière.

M. Martial Saddier. Je relève avec plaisir que le Gouvernement et la rapporteure sont d’accord pour ne pas fixer par des dispositions légales une préférence en faveur d’une technique plutôt que d’une autre.

L’amendement CS1190 est retiré.

La Commission examine ensuite les amendements identiques CS1005 de M. Bertrand Pancher et CS1373 de M. Philippe Plisson.

M. Bertrand Pancher. Le projet de loi prévoit que le permis de construire ne peut pas s’opposer à certains travaux visant l’isolation thermique des bâtiments. Il faut cependant veiller à leur bonne intégration architecturale dans l’ensemble. Des prescriptions particulières pourraient à cet effet accompagner le permis de construire.

M. Philippe Plisson. Il convient en effet de pouvoir tracer des limites et éviter les verrues architecturales sous prétexte d’isolation thermique.

M. le secrétaire d’État. En l’état du droit, le permis de construire peut déjà être assorti de conditions, avec avis d’un architecte des Bâtiments de France. Le présent amendement n’ajoute donc rien, à part de la complexité. Avis défavorable.

Mme Sabine Buis, rapporteure. Avis défavorable. Une telle disposition risque d’être source de difficultés, voire de favoriser les nids à contentieux.

M. Bertrand Pancher. Je suis étonné d’entendre des arguments si contradictoires, la rapporteure déplorant le surcroît de contraintes, tandis que le secrétaire d’État soutient quant à lui que l’amendement n’ajouterait rien au droit existant. Cela m’inquiète.

M. le président François Brottes. Naguère, les maires pouvaient contrôler la situation a posteriori à l’occasion de la déclaration d’achèvement des travaux. Mais une majorité précédente a voulu simplifier les procédures…

L’amendement CS1373 est retiré.

La Commission rejette l’amendement CS1005.

Puis la Commission adopte l’article 3 modifié.

Après l’article 3

La Commission est saisie de l’amendement CS1372 de M. Christophe Bouillon.

M. Christophe Bouillon. Lorsqu’un propriétaire met en location un bien pouvant être considéré comme une passoire thermique, le maire devrait pouvoir le contraindre à engager des travaux de rénovation énergétique de son bien.

M. le secrétaire d’État. Je comprends votre souci de faire bénéficier les locataires du parc de logements privés d’un niveau de confort thermique minimum, mais 30 % du parc locatif est classifié F ou G au regard de la nomenclature thermique. Il s’agit souvent de biens appartenant à des propriétaires aux faibles revenus. L’adoption de l’amendement conduirait donc à retirer du marché du logement beaucoup de biens, réduisant ainsi une offre de location souvent déjà insuffisante.

Mme Sabine Buis, rapporteure. L’objectif ultime de l’amendement fera consensus, personne ne voulant tolérer les marchands de sommeil. Je crains pourtant que sa mise en œuvre soit difficile. J’émets néanmoins un avis favorable.

M. Christophe Bouillon. En entendant le secrétaire d’État, je me demande quels sont les moyens alors mis en œuvre pour réduire le stock de ces logements. Les maires sont souvent confrontés à des problèmes d’isolation thermique ou même d’insalubrité. Que peuvent-ils faire dans un cas pareil ?

M. Martial Saddier. Je voudrais mettre en garde tant la majorité que le Gouvernement contre la tentation de faire de ce projet de loi un texte sur les collectivités territoriales. Alors que le projet de loi propose des mesures qui, ajoutant aux règlements d’urbanisme, entament la compétence des maires en ce domaine, il risque de transférer, dans le même temps, sur ceux-ci de nouvelles charges.

D’autres textes, relatifs aux collectivités territoriales, sont en cours d’examen devant notre assemblée. Ne faudrait-il pas développer une vue plus globale de ces questions, et, surtout, réfléchir au rôle laissé en définitive aux maires en matière d’urbanisme ?

M. le président François Brottes. Ceux qui ont l’expérience des responsabilités municipales savent que les communes doivent trop souvent assumer les frais des travaux, se trouvant en face de propriétaires désinvoltes ou non solvables. À la lumière de cet état de fait, la recevabilité financière de l’amendement apparaît ainsi problématique.

M. le secrétaire d’État. Je partage l’objectif affiché, mais la méthode retenue pourrait faire naître des difficultés. Après l’article 4, le Gouvernement a déposé l’amendement CS2386, qui répond à ces préoccupations, mais en renvoyant à un texte réglementaire le soin des modalités de mise en œuvre.

Mme Sabine Buis, rapporteure. Dans ces conditions, il semble peut-être préférable de retirer l’amendement.

Mme Cécile Duflot. J’ajoute que le décret « décence » n’inclut aucune disposition sur la performance énergétique des logements. L’article 5 devrait nous fournir l’occasion d’en débattre à nouveau.

L’amendement CS1372 est retiré.

Article 4 (articles L. 123-1-5 et L. 128-1 du code de l’urbanisme) : Institution d’obligations de performances énergétiques et environnementales dans les documents d’urbanisme et exemplarité de la construction sous maîtrise d’ouvrage publique

La Commission examine les amendements identiques CS236 de M. Damien Abad et CS1211 de Mme Marie-Hélène Fabre.

M. Martial Saddier. L’amendement CS236 est défendu.

Mme Marie-Hélène Fabre. La réalisation de bâtiments respectant des performances énergétiques et environnementales renforcées devrait se faire par la volonté du maître d’ouvrage, et non du fait de mesures coercitives. Les dispositions proposées risquent d’aboutir à la multiplication de référentiels locaux, alors qu’ils ont fait l’unanimité contre eux de la part de l’ensemble de la maîtrise d’ouvrage lors des groupes de travail « objectifs 500 000 » mis en place au sein du ministère du logement. L’amendement propose leur suppression.

M. le secrétaire d’État. Le Gouvernement veut encourager la créativité, sans poser d’exigence plus élevée, mais en faisant naître un nouveau marché dont la demande stimule les cabinets d’architectes et les urbanistes. Il veut que les pouvoirs publics soient exemplaires. L’objectif est de tirer la construction en France vers le haut. Des prêts de la Caisse des dépôts seront accordés aux collectivités qui s’engagent de manière volontaire dans la transition énergétique. Avis défavorable.

Mme Sabine Buis, rapporteure. Il est normal d’attendre de l’État, dans le domaine énergétique, l’exemplarité qui est posée comme principe par cet article. Je ne peux soutenir la suppression de certains de ses alinéas. Avis défavorable.

Les amendements CS236 et CS1211 sont retirés.

La Commission examine ensuite les amendements identiques CS332 de M. Jean-Jacques Cottel,  CS738 de M. Jean-Luc Bleunven et CS1394 de M. Philippe Plisson.

M. Jean-Jacques Cottel. Des engagements du Grenelle découle la volonté de construire des villes durables, lesquelles impliquent de concevoir la ville à l’échelle des quartiers. Le présent amendement vise à obliger les collectivités compétentes en matière d’urbanisme à intégrer systématiquement une réflexion sur la stratégie énergétique en établissant des objectifs et des normes plus ambitieux sur des zones identifiées.

M. Jean-Luc Bleunven. Défendu !

M. Philippe Plisson, rapporteur. Il s’agit de compléter la loi ALUR pour parvenir à une meilleure performance énergétique des constructions.

M. le secrétaire d’État. Le gouvernement se refuse à imposer des contraintes zone par zone. Cela pourrait se révéler trop contraignant, notamment pour les collectivités de petite taille. Le projet de loi propose une position intermédiaire, en pratiquant l’incitation, mais non la contrainte. Avis défavorable.

Mme Sabine Buis, rapporteure. La mise en œuvre de cet amendement me semble devoir déboucher sur des difficultés pratiques. Avis défavorable.

Les amendements CS332, CS738 et CS1394 sont retirés.

La Commission est saisie des amendements identiques CS2188 de la rapporteure et CS562 de M. Martial Saddier.

Mme Sabine Buis, rapporteure. Le présent amendement vise à renforcer la cohérence entre les plans locaux d’urbanisme et les schémas régionaux climat air énergie.

M. Martial Saddier. Nous avons en effet multiplié les schémas et outils de planification ces dernières années. Il faut désormais veiller à ce qu’ils soient cohérents les uns avec les autres.

M. le secrétaire d’État. Avis défavorable. Le Gouvernement approuve la mise en cohérence des plans locaux d’urbanisme avec les schémas régionaux climat-air-énergie. Mais, compte tenu de la hiérarchie juridique en la matière, il est préférable d’indiquer que cette cohérence s’apprécie à travers le PCET qui constitue l’échelon intermédiaire.

L’amendement CS2188 est retiré.

M. Martial Saddier. Les collectivités devraient être néanmoins plus étroitement associées à la définition des schémas régionaux.

L’amendement CS562 est retiré.

La Commission examine ensuite l’amendement CS1610 de M. Jacques Krabal.

M. Joël Giraud. Comme la parité, l’engagement en faveur des énergies renouvelables recueille l’assentiment général au stade des principes, mais il n’en va pas de même lorsqu’il faut passer à la mise en œuvre. Je crois qu’il faut imposer une production minimale d’énergie renouvelable à toutes les nouvelles constructions. C’est le seul moyen de faire émerger une filière économique.

M. le secrétaire d’État. Le Gouvernement veut encourager les acteurs locaux à ajuster ces dispositifs à leurs besoins et contraintes propres. L’adoption de ces amendements restreindrait le champ des possibilités qui leur sont ouvertes, sans apporter de valeur ajoutée. Avis défavorable.

Mme Sabine Buis, rapporteure. Tous les territoires ne sont pas identiques. L’amendement ne permettrait pas de prendre en compte les contraintes locales. Dans certains cas, fixer une valeur plancher pourrait même avoir un coût prohibitif, si cette énergie était trop difficile à produire. Avis défavorable.

M. Julien Aubert. Le soutien aux énergies renouvelables ne doit pas engendrer de perte financière. Pour chaque nouveau kilowattheure, il faut prendre en compte le bilan coût-avantages. Car la transition énergétique doit être flexible, souple et adaptable. Au demeurant, l’argument de la filière économique me semble peu pertinent. Alors que tous les Français ont une voiture, notre industrie automobile se porte-t-elle bien ?

M. Joël Giraud. Le décret d’application pourrait fixer la flexibilité nécessaire. Je maintiens l’amendement.

La Commission rejette l’amendement CS1610.

Elle examine ensuite l’amendement CS1167 de M. Jean-Yves Le Déaut.

M. Jean-Yves Le Déaut. Une obligation de production d’énergie renouvelable, sans autre précision, pourrait se traduire par la multiplication des installations photovoltaïques à des fins de spéculation, sans aucun apport du point de vue de l’efficacité énergétique intrinsèque des bâtiments.

Il importe au contraire que les contraintes supplémentaires éventuellement imposées par les plans locaux d’urbanisme encouragent les efforts pour développer des solutions techniques orientées vers la réalisation de bâtiments se rapprochant des constructions passives, c’est-à-dire maximisant le recours aux énergies renouvelables disponibles sur place, et minimisant le besoin d’apport thermique via les équipements de chauffage classiques, alimentés par les réseaux d’électricité ou de gaz.

Il s’agit, par exemple, d’encourager l’installation de puits canadiens, de capteurs solaires thermiques, de récupérateurs de chaleur dans les eaux grises, de réseaux de chaleur alimentés avec des combustibles renouvelables. Tout effort pour utiliser ces techniques permettra en effet d’en accélérer la diffusion par un effet d’apprentissage. Et cela évitera la spéculation.

M. le secrétaire d’État. S’orienter de manière systématique vers des énergies renouvelables produites et consommées sur place irait à l’encontre des objectifs que nous poursuivons, dans la mesure où beaucoup d’énergies renouvelables peuvent également être stockées. De nombreux ballons d’eau chaude peuvent ainsi fonctionner grâce au solaire thermique. Avis défavorable.

Mme Sabine Buis, rapporteure. L’amendement pourrait avoir un effet pervers et freiner le développement des énergies renouvelables qui ne seraient pas consommables sur place.

M. le président François Brottes. Nous sommes en effet favorables à l’autoconsommation, mais pas à l’exclusion de tout le reste. L’adoption de l’amendement poserait un problème d’équilibre économique, voire d’équilibre du réseau s’il dissuadait le stockage de capacité.

M. Jean-Yves Le Déaut. Je me perds dans cette casuistique réglementaire, mais j’accepte vos explications.

L’amendement CS1167 est retiré.

La Commission examine ensuite l’amendement CS563 de M. Martial Saddier.

M. Martial Saddier. L’article faisant l’objet de l’amendement vise à favoriser l’autoproduction d’énergies au sein des nouvelles constructions. L’amendement tend à prévoir que l’installation de production d’énergies renouvelables sera surdimensionnée au vu de la consommation du logement ou du bâtiment qu’elle alimente.

M. le secrétaire d’État. Le Gouvernement s’inquiète des répercussions pratiques sur la gestion des flux par le réseau électrique. Sans doute l’idée est-elle intéressante, mais il n’est peut-être pas indispensable de fixer les choses au niveau législatif. Sagesse.

Mme Sabine Buis, rapporteure. Le principe est vertueux, même si la mise en pratique peut se révéler difficile. Sagesse.

M. le président François Brottes. Il s’agit d’un vrai problème en tout cas.

L’amendement CS563 est adopté.

La Commission est saisie des amendements identiques CS132 de M. Martial Saddier, CS782 de M. Julien Aubert, CS1007 de M. Bertrand Pancher et CS1609 de M. Joël Giraud.

M. Martial Saddier. Défendu !

M. Julien Aubert. L’amendement va dans le sens de la transition flexible et souple que nous défendons. Il vise en effet à garantir que ne soient pas exclus du champ de l’article 4 les modes de production d’énergies renouvelables collectifs, par exemple un réseau de chaleur alimenté par des énergies renouvelables ou de récupération (biomasse, géothermie, unité de valorisation énergétique) ou une unité de méthanisation alimentant un réseau de gaz dédié. Car l’essentiel est que le bâtiment soit alimenté en énergies renouvelables produites à proximité, dans le secteur ou par exemple dans une commune voisine.

M. Bertrand Pancher. Il me semble à moi aussi que le plan local d’urbanisme pourrait imposer une production minimale d’énergies renouvelables. Notre amendement permet de ne pas exclure des modes de production d’énergies renouvelables collectifs de la définition dans les PLU des bâtiments à énergie positive.

M. Joël Giraud. Nous avons déjà entendu un exposé complet au soutien de ces amendements. J’ajouterais seulement que leur adoption permettrait de faciliter, le cas échéant, l’acheminement de l’énergie renouvelable d’une commune à l’autre.

M. le secrétaire d’État. En favorisant la production d’énergies renouvelables, le Gouvernement ne veut pas se restreindre à l’échelle de la parcelle, mais accepte tout à fait de fixer les règles à l’échelle du quartier, plus adapté notamment pour les réseaux chaleur. Les amendements visent à garantir que les modes de production d’énergies renouvelables collectifs ne soient pas exclus. L’article L.123-1-5 permet d’imposer des prescriptions de production d’énergies renouvelables aux constructions et aménagements et pourrait faire l’objet d’une interprétation à la lettre impliquant obligatoirement que ce soit ces constructions et des aménagements qui produisent directement l’énergie. Or il serait intéressant de permettre le recours à des solutions collectives. C’est pourquoi le Gouvernement émet un avis favorable.

Mme Sabine Buis, rapporteure. Nous sommes tous favorables à la création d’îlots à énergie positive. La notion de proximité mériterait seulement d’être précisée, s’agissant d’une disposition légale. Avis favorable.

Les amendements CS132, CS782, CS1007 et CS1609 sont adoptés.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette ensuite l’amendement CS850 de M. Julien Aubert.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels CS2 et CS3 de Mme Sabine Buis, rapporteure, et les amendements identiques CS4 de Mme Sabine Buis, rapporteure, et CS1611 de M. Joël Giraud.

Elle examine ensuite l’amendement CS1470 de Mme Cécile Duflot.

Mme Cécile Duflot. En substituant aux mots du projet de loi le verbe « devront », l’amendement vise à imposer une réelle obligation énergétique aux commandes publiques.

M. le secrétaire d’État. Le Gouvernement partage votre volonté, mais il est nécessaire, avant de les généraliser, de vérifier l’opportunité et la faisabilité des projets en termes techniques, économiques et au regard du bilan environnemental. En milieu urbain dense, il est parfois difficile d’obtenir un bilan positif du fait du faible gisement en énergies renouvelables disponibles. Des surcoûts de nature à remettre en cause l’équilibre financier des projets de construction pourraient apparaître. Avis défavorable.

Mme Sabine Buis, rapporteure. Il ne serait en effet pas systématiquement possible de respecter cette obligation sans devoir faire supporter parfois un coût prohibitif aux finances publiques. Avis défavorable.

M. Bertrand Pancher. Je suis consterné quand j’examine cet alinéa. Quels en sont la portée et l’intérêt ? Les collectivités fournissent déjà l’effort maximal en termes énergétiques, lorsque c’est possible. Je comprends l’amendement de Cécile Duflot. Nous avons là un exemple de loi bavarde, qui se contente d’afficher des objectifs dans un grand flou artistique.

Mme Cécile Duflot. Le projet de loi prévoit en l’état actuel que « toutes les nouvelles constructions sous maîtrise d’ouvrage de l’Etat et de ses établissements publics et des collectivités locales font preuve d’exemplarité énergétique et seront, chaque fois que possible, à énergie positive ». Voilà ce qu’on aurait pu écrire dans une loi semi-écolo des années 90 ou 80 ! « Faire preuve d’exemplarité » est beaucoup trop vague. Soit il faut imposer une mise en œuvre obligatoire, soit il vaut mieux ne rien prévoir du tout.

M. Denis Baupin. Nous sommes un peu étonnés de ne pas retrouver dans la loi l’enthousiasme dont Mme la ministre a fait preuve la semaine dernière dans un communiqué. Je veux bien admettre qu’il soit nécessaire d’assortir notre proposition de certaines exceptions, ce qui pourrait être fait au moyen d’un sous-amendement, mais la règle doit être affirmée clairement. Pour ce qui est des contradictions qui pourraient exister entre la notion de bâtiments à énergie positive et d’autres aspects environnementaux, je pense que les architectes maîtrisent parfaitement les moyens techniques, notamment en matière de ventilation, visant à ce qu’un bâtiment à énergie positive ne devienne pas un thermos.

M. Jean-Paul Chanteguet. Mme Duflot disait il y a quelques instants que certains objectifs ne pourraient pas être atteints si nous ne mobilisions pas les moyens nécessaires. Il en est de même dans le cas présent : la loi peut donner des orientations, voire imposer, nous n’en demeurons pas moins confrontés à la problématique du financement, et ce ne sont pas les annonces faites par Mme la ministre sur ce point qui permettront de répondre à nos interrogations. Ne soyons pas schizophrènes, mes chers collègues !

M. Julien Aubert. Je rejoins Mme Duflot quand elle affirme que la simple exigence d’« exemplarité énergétique » n’a pas de sens. Cela dit, aller plus loin en précisant que tous les bâtiments sous maîtrise d’ouvrage publique devront être des bâtiments à énergie positive risque d’entraîner une explosion du montant des devis, ce qui va aggraver les problèmes auxquels sont déjà confrontées nos collectivités désargentées. En fait, on en revient toujours à la même question, consistant à savoir où nous devons placer l’argent public pour qu’il produise un effet maximal sur la réduction des gaz à effet de serre. Non seulement nous ne disposons pas d’étude d’impact sur le coût budgétaire de la mesure proposée, mais nous ne connaissons pas le rapport entre le montant des fonds engagés et leur effet sur les objectifs attendus – ce qui fait qu’il est permis de se demander si ces sommes ne devraient pas être affectées à d’autres mesures qui auraient un effet supérieur en matière de lutte contre le réchauffement climatique. Ne perdons pas de vue le véritable problème, à savoir la recherche de l’efficacité maximale en matière économique et environnementale, qui mériterait sans doute une analyse plus approfondie.

Mme Cécile Duflot. C’est justement pour tenir compte de la problématique des coûts que nous devons faire évoluer les choses. Dès lors que la construction de bâtiments à énergie positive sera généralisée, le coût des matériaux et des processus de fabrication va diminuer – s’ils sont chers pour le moment, c’est parce qu’ils sont expérimentaux, donc rares. L’instauration de la réglementation thermique 2012 a démontré la validité de ce raisonnement.

M. Julien Aubert. C’est valable pour l’EPR, j’imagine ?

Mme Cécile Duflot. Il suffit d’aller faire un tour en Finlande pour se rendre compte du contraire.

M. Julien Aubert. Et en Chine ?

M. le secrétaire d’État. La disposition proposée crée des charges pour l’État et pour les collectivités locales et n’aurait donc pas dû être soumise au débat. Le Gouvernement a néanmoins considéré qu’un tel débat, concernant également la politique du logement, était utile. En l’état actuel, plutôt que d’invoquer l’irrecevabilité de l’amendement CS1470, je suggère qu’il soit retiré en vue d’une nouvelle rédaction auquel le Gouvernement pourrait souscrire.

M. le président François Brottes. Effectivement, cet amendement est rédigé d’une telle manière que j’aurais moi-même dû invoquer son irrecevabilité au titre de l’article 40.

Mme Cécile Duflot. Je ne suis pas d’accord : imposer de nouvelles normes en matière de performance énergétique n’entraîne pas nécessairement une augmentation des charges publiques.

M. le président François Brottes. L’augmentation des charges ne fait pas de doute au regard de la rédaction de l’amendement.

M. Denis Baupin. Considérer d’emblée qu’investir pour l’efficacité énergétique constitue une charge publique est un point de vue très contestable et à tout le moins restrictif. Une fois le bâtiment construit, il en résultera des économies qui contribueront à la diminution des charges publiques : il faut donc y voir un investissement qui n’a aucune raison d’être sanctionné au titre de l’article 40, bien au contraire, et sans doute ne serait-il pas inutile d’ouvrir un débat sur ce point. Cela dit, nous ne sommes pas opposés à une réécriture de l’amendement.

M. le président François Brottes. Je persiste à penser que cet amendement présente un problème de recevabilité, et je demanderai à ce qu’il soit à nouveau vérifié sur ce point. La position du Gouvernement ne consiste pas à vouloir enterrer cet amendement – ce qu’il aurait, à mon sens, la possibilité de faire en invoquant l’article 40 – mais simplement à souligner que son écriture n’est pas aussi normative qu’elle devrait l’être, et à suggérer une nouvelle rédaction avant la séance publique.

M. Julien Aubert. Contrairement à ce que vient de dire M. Baupin, tout investissement n’est pas forcément rentable : il faut systématiquement comparer le surcoût qu’entraîne la construction à hautes performances énergétiques avec les économies que cet investissement doit permettre de réaliser, et c’est seulement quand le bilan résultant de cette comparaison est positif qu’il faut réaliser l’investissement envisagé. Au vu de cette règle, M. le président a raison de dire que l’amendement proposé est irrecevable au titre de l’article 40.

M. le président François Brottes. Il ne s’agit pas d’avoir raison, mais simplement de faire application du droit.

Mme Sabine Buis, rapporteure. En matière d’exemplarité énergétique, nous avons beaucoup débattu, jusqu’à présent, sur le coût de construction d’un bâtiment à énergie positive. Or, la notion d’exemplarité énergétique ne se limite pas à cela : des initiatives peuvent être prises dans d’autres domaines, comme cela a été fait dans ma circonscription.

Mme Cécile Duflot. Si je souscris à ce que vient de dire Mme la rapporteure, il me semble tout de même que nous ne pouvons pas laisser inchangé l’alinéa 3 de l’article 4. Cela étant, nous acceptons la proposition de M. le secrétaire d’État de retravailler la rédaction de l’amendement CS1470 afin de le mettre en accord avec la déclaration faite le 6 septembre dernier par Mme la ministre et de tenir compte de toutes exigences s’imposant à nous en matière d’efficacité énergétique, et retirons donc cet amendement.

M. le secrétaire d’État. Je vous confirme que le Gouvernement est disposé à travailler en vue d’aboutir à une nouvelle rédaction compatible avec les exigences juridiques évoquées.

L’amendement est retiré.

La Commission examine ensuite, en discussion commune, les amendements identiques CS1944 de la rapporteure, CS1008 de M. Stéphane Demilly et CS1719 de M. Jacques Krabal, l’amendement CS119 de M. Martial Saddier – qui fait l’objet d’un sous-amendement CS2372 de la rapporteure –, et les amendements identiques CS1009 de M. Stéphane Demilly et CS2047 de M. Jacques Krabal.

Mme Sabine Buis, rapporteure. L’amendement CS1944 vise à compléter l’exigence d’exemplarité énergétique en matière de construction des bâtiments par une exigence d’exemplarité environnementale.

M. Bertrand Pancher. Partant du principe qu’il vaut mieux s’en tenir à des objectifs accessibles, l’amendement CS1008 a simplement pour objectif de compléter le mot « énergétique » par les mots « et environnementale » à l’alinéa 3 de l’article 4.

M. Joël Giraud. L’amendement CS1719 est identique à celui qu’a présenté Mme la rapporteure.

M. Martial Saddier. L’amendement CS119 est pratiquement identique à celui de Mme la rapporteure, si ce n’est qu’il propose de compléter également l’alinéa 3 de l’article 4 par les mots « et à haute valeur environnementale ».

M. le président François Brottes. On voit que vous avez été député du mont Blanc, cher collègue !

Mme Sabine Buis, rapporteure. Le sous-amendement CS2372 vise à remplacer, dans l’amendement CS119 de M. Saddier, les mots « à haute valeur environnementale » par les mots « à haute performance environnementale ».

M. Bertrand Pancher. L’amendement CS1009 est défendu.

M. Joël Giraud. L’amendement CS2047 l’est également.

M. le secrétaire d’État. Le Gouvernement est favorable à l’amendement CS119 sous-amendé par le sous-amendement CS2372.

L’amendement CS1944 est retiré.

La Commission adopte le sous-amendement CS2372.

Puis elle adopte l’amendement CS119 ainsi sous-amendé.

En conséquence, les amendements CS1008, CS1719, CS1009 et CS2047 tombent.

La Commission est ensuite saisie de l’amendement CS1906 de M. Jacques Krabal.

M. Joël Giraud. Cet amendement vise à inciter l’État à l’exemplarité en matière d’utilisation d’énergie renouvelable, en précisant que le chauffage électrique pourra être remplacé par des solutions de chauffage plus sobres à chaque fois que cela sera possible.

M. le secrétaire d’État. Cet amendement, qui ne relève pas du domaine législatif, part du principe que le chauffage électrique présente forcément de mauvaises performances énergétiques, ce qui est faux, car certaines solutions électriques, telles les pompes à chaleur, sont très performantes. Si nous devons fixer des objectifs énergétiques au niveau de la loi, celle-ci ne doit pas avoir pour objet de stigmatiser une énergie sans faire de propositions concrètes, les acteurs concernés devant conserver le choix des moyens afin d’atteindre les objectifs évoqués. Avis défavorable.

Mme Sabine Buis, rapporteure. Il n’y a effectivement pas de raison de pointer du doigt telle ou telle solution de chauffage. Avis défavorable.

M. le président François Brottes. Effectivement, dans un bâtiment parfaitement isolé – c’est le cas des bâtiments dits à énergie positive –, un tout petit radiateur électrique, qui augmente légèrement la température du logement avant que ses occupants ne rentrent, est suffisant. Il ne me paraît donc pas justifié de condamner en bloc l’usage du chauffage électrique.

L’amendement CS1906 est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement CS2373 du Gouvernement.

M. le secrétaire d’État. Cet amendement vise à affirmer la possibilité pour les collectivités territoriales de bonifier et de prioriser leurs aides financières en faveur des bâtiments à énergie positive.

Mme Sabine Buis, rapporteure. Pour encourager le développement des bâtiments à énergie positive, il est important que les aides financières octroyées par les collectivités territoriales puissent prendre en compte cet objectif. Avis favorable.

M. Michel Heinrich. Pourquoi faut-il préciser dans la loi une possibilité déjà offerte aux collectivités territoriales – et à laquelle nombre d’entre elles ont déjà recours ?

M. le président François Brottes. Je pense que c’est une précision utile pour se prémunir d’éventuelles remarques de la part de la Cour des comptes – je parle en connaissance de cause.

M. Bertrand Pancher. Je me demande comment les collectivités territoriales vont pouvoir se plier aux injonctions croissantes de l’État en matière d’aide aux bâtiments à énergie positive, alors qu’une diminution moyenne de 30 % des dotations de l’État est attendue dans les trois ans.

M. Martial Saddier. Sans vouloir polémiquer, je remarque que, si l’article 40 restreint considérablement les possibilités offertes aux parlementaires d’influer sur la politique gouvernementale, le Gouvernement, lui, ne se prive pas d’augmenter la dépense des collectivités territoriales, alors qu’une diminution de 30 % de leurs dotations est annoncée et que ce projet de loi n’est absolument pas financé. Je trouve cela un peu facile pour l’État de faire la leçon aux collectivités territoriales tout en les laissant régler la facture.

M. le président François Brottes. Ce n’est pas exactement ce que dit l’amendement.

La Commission adopte l’amendement.

Elle en vient à l’amendement CS2371 du Gouvernement.

M. le secrétaire d’État. Cet amendement vise à étendre le bonus de constructibilité aux bâtiments à énergie positive et aux projets atteignant un certain niveau de performance environnementale. Ainsi, au-delà des seuls aspects de performance énergétique, pourront être pris en compte d’autres éléments tels que les émissions de CO2 ou « l’énergie grise » consommée lors de la construction du bâtiment.

Mme Sabine Buis, rapporteure. Avis favorable – j’avais d’ailleurs déposé un amendement identique.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, les amendements CS1957, CS364, CS1255, CS1471, CS983, CS1221 et CS 1890 tombent.

Elle examine ensuite l’amendement CS867 de Mme Frédérique Massat.

Mme Frédérique Massat. L’amendement CS867 vise à prévoir la mise en place d’actions de sensibilisation des utilisateurs à la maîtrise de leurs consommations.

M. le secrétaire d’État. Cet amendement a le mérite de souligner un aspect très important de la performance énergétique du bâtiment. En effet, les modalités d’usage et d’occupation sont primordiales pour atteindre l’objectif de faible consommation, en particulier dans les bâtiments à haute performance énergétique. Avis favorable.

Mme Sabine Buis, rapporteure. Avis également favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Elle est saisie des amendements identiques CS1010 de M. Bertrand Pancher, CS1429 de M. Philippe Bies et CS1887 de M. Jacques Krabal.

M. Bertrand Pancher. Cet amendement vise à tenir compte de la directive 2010/31/UE relative à la performance énergétique des bâtiments, visant à ce qu’à partir de 2020, tout nouveau bâtiment soit à énergie quasi nulle, ce qui exige un dispositif de production d’énergie renouvelable – géothermie, panneaux solaires photovoltaïques ou thermiques, et caetera. Elle exige qu’il en soit de même pour les nouveaux bâtiments détenus par le secteur public à partir de 2018 – ce qui risque d’être compliqué compte tenu du contexte budgétaire.

M. Jean-Jacques Cottel. L’amendement CS1429 précise qu’à partir de 2018, tout nouveau bâtiment devra être doté d’un dispositif de production d’énergie renouvelable ou de raccordement à un réseau urbain si celui-ci comporte une part d’énergie renouvelable.

M. Joël Giraud. L’amendement CS1187 vise, lui aussi, à mettre en cohérence les dispositions prévues dans le présent projet de loi avec le droit communautaire.

M. le secrétaire d’État. Si le Gouvernement partage la volonté de voir se généraliser le recours aux énergies renouvelables, la rédaction proposée ne lui paraît pas de nature à permettre de mutualiser des systèmes de production d’énergie renouvelable à l’échelle du quartier. De nombreux amendements déposés sur le même sujet montrent pourtant qu’il s’agit d’une alternative réellement pertinente pour de nombreux systèmes d’exploitation d’une énergie renouvelable. Par ailleurs, la précision apportée par ces amendements ne nous paraît pas du tout relever du domaine législatif, mais du domaine réglementaire. Je suggère donc à leurs auteurs de les retirer, faute de quoi j’émettrai un avis défavorable.

Les amendements CS1010, CS1429 et CS1887 sont retirés.

La Commission adopte l’article 4 modifié.

Après l’article 4

La Commission est saisie de l’amendement CS2386 du Gouvernement.

M. le secrétaire d’État. L’amendement CS2386 vise à intégrer la performance énergétique dans les critères de décence des logements, et précise que cette intégration se fera de manière progressive.

Mme Sabine Buis, rapporteure. Avis favorable à une mesure qui nous paraît constituer une grande avancée.

La Commission adopte l’amendement CS2386.

Elle en vient ensuite à l’amendement CS1162 de M. Jean-Yves Le Déaut.

M. Jean-Yves Le Déaut. L’amendement CS1162, qui visait à insérer un alinéa précisant qu’une insuffisance du système de chauffage ne met en jeu la décence d’un logement que dans le cas où le besoin d’apport thermique n’est pas couvert, me paraît satisfait. Par conséquent, je le retire.

L’amendement CS1162 est retiré.

La Commission est saisie d’un amendement CS525 de M. Julien Aubert.

M. Julien Aubert. Défendu.

M. le secrétaire d’État. Avis défavorable.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CS 1183 de M. Jean-Yves Le Déaut.

M. Jean-Yves Le Déaut. Les amendements situés après l’article 4 sont le fruit du rapport que le président de l'Assemblée nationale avait demandé à l’Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques sur les freins réglementaires à l’innovation en matière d’économies d’énergie dans le bâtiment. Je vais d’abord présenter deux ou trois amendements individuellement, avant de faire une présentation globale de ceux relatifs au Centre scientifique et technique du bâtiment, qui sont la traduction de la position de repli que j’ai adoptée à la suite d’une discussion avec le ministère du logement.

L’amendement CS1183 tire les conséquences de l’absence de coordination entre les certifications nationales et les certifications européennes, qui constitue l’un des freins au développement de l’isolation des bâtiments. Il est proposé que, pour les matériaux innovants utilisés dans le secteur du bâtiment et non encore couverts par une norme publiée au niveau européen, les certifications nationales délivrées par un organisme établi dans l’Espace économique européen et accrédité par un organisme d’accréditation signataire de l’accord européen multilatéral pertinent pris dans le cadre de la coopération européenne pour l’accréditation soient reconnues pour une période de trois ans à compter de la date de leur délivrance. L’objectif poursuivi est de vaincre les blocages freinant le développement des matériaux innovants, notamment la ouate de cellulose.

M. le secrétaire d’État. L’introduction d’une telle clause dans la loi française nous paraît contraire au règlement européen 764/2008 portant sur la reconnaissance mutuelle des règles techniques nationales appliquées à des produits commercialisés légalement dans un autre État membre de l’Union européenne. Ce règlement prévoit déjà la reconnaissance entre États membres de certificats nationaux équivalents, et ne limite pas la validité de cette reconnaissance dans le temps. La loi française ne peut donc ni répéter un règlement européen d’application directe, ni limiter la portée de l’une de ses dispositions. De plus, il ne relève pas du cadre législatif d’encadrer la reconnaissance de dispositifs volontaires de certification de qualité, qu’ils soient établis par un organisme français ou par un organisme étranger.

Les dispositifs de certification volontaire restent régulés par les acteurs du marché en ce qui concerne le cadre de reconnaissance de la qualité intrinsèque du produit. Le Gouvernement souhaite donc le retrait de cet amendement et, à défaut, émettra un avis défavorable.

Mme Sabine Buis, rapporteure. Avis défavorable, dans la mesure où la disposition proposée entrerait en contradiction avec un règlement européen.

M. Jean-Yves Le Déaut. J’ai bien étudié le règlement 764/2008 et je n’en fais pas du tout la même interprétation que vous, monsieur le secrétaire d’État. En tout état de cause, ce règlement n’est pas appliqué en France et les normes freinent donc le développement de nouveaux produits et la transition énergétique.

Mme Cécile Duflot. Si je partage l’avis de M. Le Déaut sur l’existence de freins au développement des nouveaux matériaux – notamment certains éco-matériaux –, je ne suis pas d’accord avec la solution qu’il propose. Je sais que M. le président n’aime pas trop que l’on demande des rapports, mais il me semble tout de même qu’il serait bon d’engager une réflexion sur l’harmonisation des matériaux de construction : il n’est pas normal que les coûts de construction soient plus élevés en France que chez nos voisins et que, du fait de l’absence de filières de production de matériaux bio-sourcés en France, nous soyons obligés de nous procurer ces matériaux – je pense notamment au bois et au verre recyclé – dans d’autres pays européens.

M. le président François Brottes. Je n’ai jamais dit que je n’aimais pas les rapports, madame Duflot, et il m’arrive d’ailleurs souvent d’en proposer. Je vous rappelle qu’à l’époque où vous étiez ministre, nous avions visité ensemble des bâtiments où il nous avait été expliqué que les normes en vigueur n’étaient plus du tout adaptées aux nouveaux matériaux utilisés, du fait d’une réactivité insuffisante des bureaux de contrôle. Les amendements que nous examinons actuellement sont donc relatifs à un problème bien réel, celui des entraves normatives au développement des nouveaux produits.

M. Michel Heinrich. Nous sommes là confrontés à une vraie difficulté : celles de nos PME qui souhaitent développer des matériaux bio-sourcés ne le peuvent parce que les organismes certificateurs défendent plutôt de grands groupes, de grands lobbies qui, et c’est un scandale, siègent au sein des dits organismes – dès lors juges et parties – et y établissent et y modifient les normes. Ainsi, pour la ouate de cellulose, la norme a changé à trois reprises en une seule année, si bien que ce qui est commercialisable un jour ne l’est plus le lendemain, si bien que pour obtenir une certification il faut produire pendant un an ou deux. L’Allemagne ne rencontre pas du tout les mêmes difficultés et nos entreprises parviennent à vendre outre- Rhin, pas en France !

M. le président François Brottes. L’accord paraît général à la fois sur le sort réservé à ces matériaux – un sort à géométrie variable – et sur l’application du dispositif. Je sais que le Gouvernement travaille sur un texte visant à libérer un certain nombre de leviers de croissance. Quand on mesure la difficulté d’entrer dans le sérail des bureaux d’étude, des bureaux de contrôle où, au nom d’une nécessaire longue expérience, règne une vraie oligarchie, quand on constate que seuls des grands groupes ont la main sur la norme, il faut certainement réduire la voilure réglementaire pour qu’interviennent de nouveaux acteurs. Dans le secteur du bâtiment, les réglementations et les exigences en matière d’assurances sont telles qu’elles empêchent l’initiative et induisent des surcoûts.

M. le secrétaire d’État. Le Gouvernement se préoccupe également de la question et entretient des contacts, sur le plan local, avec les PME innovantes. Le travail de simplification en cours, de même que l’élaboration du texte sur la croissance permettront d’ouvrir ce débat parfaitement légitime.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CS1201 de M. Jean-Yves Le Déaut.

M. Jean-Yves Le Déaut. Cet amendement concerne les départements ruraux qui n’ont pas accès au gaz naturel, ainsi que l’effacement des périodes de pointe de consommation d’électricité. Il vise à modifier le deuxième alinéa de l’article L. 111-9 du code de la construction et de l’habitation. Lors d’une audition par l’OPECST, en février 2014, Alain Lambert a souligné la rupture d’égalité entre les territoires, certains choix techniques entraînant des surcoûts de construction dans des zones déjà en difficulté économique. Je propose ici de régler par la loi la question de l’effacement, lequel doit permettre, pendant les périodes de pointe, après déconnection du réseau, l’usage de chauffages d’appoint.

M. le secrétaire d’État. La réglementation thermique de 2012 (RT2012) est applicable aux bâtiments neufs construits depuis 2013. Elle fixe un plafond de consommation d’énergie primaire de 50 kWh par mètre carré et par an en moyenne. Ce plafond est modulé pour tenir compte du climat, de l’altitude, de certaines énergies et des faibles émissions de gaz à effet de serre. La prochaine réglementation énergétique tiendra également compte de la performance énergétique des émissions de gaz à effet de serre des bâtiments, afin de répondre aux enjeux de la lutte contre le réchauffement climatique.

C’est dans le contexte de la préparation de cette future réglementation que doivent être débattues les propositions d’adaptation de la règle évoquée par l’amendement. En effet, le secteur de la construction a aujourd’hui besoin de la stabilité réglementaire nécessaire à la bonne conception des projets et à l’assimilation complète de la réglementation de 2012. Les questions d’effacement de la consommation d’électricité évoquées par l’amendement seront sans aucun doute importantes dans la conception de cette future réglementation.

Je suggère donc à son auteur de retirer l’amendement, faute de quoi, le Gouvernement émettra un avis défavorable.

Mme Sabine Buis, rapporteure. Avis défavorable.

M. Jean-Yves Le Déaut. Je retire l’amendement. Je n’en regrette pas moins que, dans le cadre d’un débat sur la transition énergétique, le logement apparaissant comme le secteur dans lequel on peut réaliser le plus d’efforts, on ne tienne pas compte des solutions existantes en matière de réglementation thermique. Je n’ai pas demandé la modification de la réglementation de 2012, considérée par le rapport de l’OPECST comme un progrès. M. le secrétaire d’État vient de le dire : la prise en compte des émissions de gaz à effet de serre, pour la future réglementation thermique, est une bonne chose. Nous souhaitons seulement qu’on puisse mentionner dès aujourd’hui les zones qui n’ont pas accès au gaz naturel ainsi que les installations qui permettent l’effacement.

Député depuis longtemps, je trouve assez anormal qu’un travail parlementaire tel que le rapport de l’OPECST n’ait été suivi d’aucune discussion approfondie avec le ministère du logement – alors qu’il a été sollicité. Le député n’a pas vocation à s’entendre dire que le problème pour lequel il propose une solution sera réglé dans quelques années ; si j’en crois mes vingt-huit années d’expérience à l’Assemblée, on vous répond ainsi pour en fait ne pas aborder le problème. Nous nous honorerions de reprendre contact avec le ministère pour vraiment traiter de la question.

M. Julien Aubert. Les considérations de M. Le Déaut sont très pertinentes, même si je serais un peu moins laudateur que lui sur la RT2012 car, s’agissant des constructions neuves, on note un effondrement du nombre de primo-accédants dû à la surfacturation des coûts liée à l’application de cette réglementation thermique.

En tant qu’élu d’un territoire rural, je ne peux qu’être sensible à l’argumentation de M. Le Déaut : en effet, le choix de la source d’énergie n’est pas le même lorsqu’on se trouve sur un territoire rural. Or son amendement doit être déconnecté de votre réponse, monsieur le secrétaire d’État, car donner la priorité aux territoires ruraux en souffrance et promouvoir les techniques d’effacement me paraît tout à fait pertinent.

Enfin, au-delà de toute considération partisane, je ne puis que souscrire à la méthode proposée par M. Le Déaut : des parlementaires prennent beaucoup de temps pour mener une réflexion de fond et remettent des rapports d’une qualité – ici celui de l’OPECST – dont on peut regretter qu’il ne soit pas tenu compte au cours du travail législatif. C’est à désespérer ceux qui veulent faire avancer les choses ! Les rapports doivent servir, ceux émanant du Parlement comme ceux de la Cour des comptes.

M. le président François Brottes. Les considérations de M. Le Déaut sont de même nature que les empêchements, que nous évoquions tout à l’heure, dont est victime le secteur du bâtiment. À l’origine de la création du marché de l’effacement, je constate qu’il est complètement torpillé aujourd’hui par ceux qui ne s’intéressent qu’à la capacité de production supplémentaire. Je m’entendrai avec le président de la commission des affaires économiques pour organiser une audition sur le rapport de l’OPECST en présence de la ministre du logement. Nous pourrons ainsi, à la veille de l’examen du texte sur la croissance, prendre en compte tous les aspects abordés qui ne sont ni mineurs ni dérisoires. Le Gouvernement n’a pas pu intégrer dans le présent projet de loi toutes les dispositions entrant comme ici dans le détail, certaines, du reste, étant de nature réglementaire. Il faut en effet, sur ces questions, si j’ose dire, secouer les cocotiers administratifs.

M. le secrétaire d’État. Je rappelle que la ministre s’est engagée à répondre point par point aux recommandations du rapport en question.

L’amendement CS1201 est retiré.

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CS365 de M. Antoine Herth, CS1473 de Mme Cécile Duflot et CS1156 de M. Jean-Yves Le Déaut.

M. Michel Sordi. L’amendement CS365 est défendu.

Mme Cécile Duflot. Il en est de même pour l’amendement CS1473.

M. Jean-Yves Le Déaut. L’amendement CS1156 vise à harmoniser la méthode de calcul permettant de justifier le respect des caractéristiques des bâtiments neufs ou existants, et la méthode de calcul visée par le diagnostic de performance énergétique. Ces méthodes, différentes dans leur périmètre, entraînent des résultats différents pour un même bâtiment ou un même logement.

M. le secrétaire d’État. Vous avez raison de souligner que les différentes réglementations doivent être harmonisées le plus possible. Les services du ministère travaillent à l’uniformisation des outils mis à disposition des professionnels. Reste que vos propositions ne relèvent pas, à l’évidence, du domaine législatif. Je vous invite par conséquent à retirer vos amendements respectifs.

Mme Sabine Buis, rapporteure. Avis défavorable pour les mêmes raisons : si nous considérons l’objet de ces amendements tout à fait louable, ils ne relèvent pas du domaine de la loi.

Les amendements CS365 et CS1156 sont retirés.

L’amendement CS1473 est rejeté.

La Commission examine l’amendement CS1198 M. Jean-Yves Le Déaut.

M. Jean-Yves Le Déaut. La définition du bâtiment à énergie positive est proche de celle de la directive 2010/31/CE du 19 mai 2010 sur les bâtiments dont la consommation d’énergie est quasi nulle. Je propose ici de la reprendre afin que le texte soit plus précis.

M. le secrétaire d’État. Je vous invite à retirer votre amendement. Cette question sera en effet traitée par décret et le Gouvernement s’engage à travailler avec vous sur sa rédaction.

L’amendement est retiré.

La Commission en vient à l’examen de l’amendement CS871 de M. Jean-Yves Le Déaut.

M. Jean-Yves Le Déaut. Quand, à la demande de M. Chassaigne, le bureau de l’Assemblée a demandé, il y a plus d’un an, au même M. Chassaigne, comme à MM. Heinrich, Bui en Bretagne, Dufau dans les Landes, et à moi-même en Lorraine, de traiter l’affaire dite de la ouate de cellulose, nous avons déploré les errements de l’administration.

La ouate de cellulose, produit isolant fabriqué à partir du bois, est ignifugée grâce au sel de bore. La réglementation européenne REACH a interdit l’emploi du bore, substance qu’aucun pays n’a pourtant retirée car, en tant qu’ignifugeant, les quantités utilisées n’étaient pas susceptibles, estimait-on en Allemagne, en Finlande, d’avoir des effets nocifs. On s’est néanmoins servi de cette interdiction pour, en quelques mois, demander aux exploitants de changer d’ignifugeant. Ils ont utilisé du nitrate d’ammonium dont on s’est rendu compte, au bout de six mois, qu’il dégageait bien plus d’ammoniaque que le bore. On est par conséquent revenu sur cette réglementation. L’Agence de la qualité de la construction – agence privée –, dont le rôle est de déceler, en lien avec les assurances, tout danger sériel causé par certains produits, a déclaré qu’il y avait des dangers d’incendie, non du fait de la ouate de cellulose mais de la présence de spots avoisinants. J’avais alors saisi Mme Duflot sur les certificats d’économie d’énergie. Les exploitants ont eu tellement d’ennuis que certaines sociétés on fait faillite comme NrGaïa à Épinal.

Quand on observe le système d’accréditation technique de ces produits, on s’honorerait d’améliorer la gouvernance. Notre enquête dans le monde du contrôle et de la réglementation énergétique du bâtiment nous a fait découvrir un système similaire à celui qui régissait le domaine nucléaire il y a une vingtaine d’années : mélange des genres entre recherche, évaluation, conseil, expertise et contrôle ; combinaison désordonnée entre une centralisation à outrance des instances décisionnaires et une multiplicité des opérateurs institutionnels travaillant plus en concurrence qu’en coopération ; endogamie des acteurs décisionnels avec les responsables industriels – l’Autorité de la concurrence est d’ailleurs saisie d’un autre dossier que celui de la ouate de cellulose ; distance marquée entre les universités, les écoles d’architecture et les centres techniques chargés des technologies du bâtiment – on ne trouve pas un seul architecte, pas un seul universitaire au sein de ces instances décisionnaires ; aucune place dans le monde de la recherche pour la physique des bâtiments en tant que tels – à l’inverse de ce qui se passe en Allemagne ; pas de réelle stratégie pour traiter des priorités absolues de la rénovation. En somme, le bâtiment est en France une discipline subalterne.

Il faut changer tout cela. Le ministère du logement et en particulier la direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages (DHUP) en a pris conscience et des progrès ont été réalisés au cours de ces derniers mois même si, avec le système de gouvernance actuel, ceux qui restent à accomplir seront difficiles. J’avais d’abord proposé de couper en deux les activités du centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB). Selon certains – parmi lesquels Mme Duflot – cela risquait d’ajouter de la confusion à la confusion. Je retire donc les amendements proposant cette séparation.

Et, je viens de l’évoquer avec le secrétaire d’État, je suis prêt à discuter de tous ces amendements relatifs à la gouvernance. Nous pouvons nous mettre d’accord sur les améliorations à apporter en la matière sans tout chambouler. Reste qu’aujourd’hui, quand on saisit l’autorité de la concurrence, quand on constate l’endogamie déjà évoquée, quand on observe ce monde cloisonné et quand on mesure à quel point la rénovation est une priorité, on ne peut que convenir de la nécessité d’un gros effort. Si le Gouvernement en est d’accord, nous sommes prêts à retravailler nos propositions pour proposer des amendements au titre de l’article 88 du règlement.

M. le président François Brottes. Je félicite une fois encore l’OPECST pour la qualité de son expertise.

M. le secrétaire d’État. Le Gouvernement partage complètement vos préoccupations, monsieur Le Déaut, et poursuit les mêmes objectifs de modification de la gouvernance que vous. Je prends acte du retrait de vos amendements sur le sujet, le Gouvernement s’engageant à travailler d’ici à l’examen en séance sur un amendement qui permettrait d’atteindre ces fins. Aussi le Gouvernement retire-t-il l’amendement CS2370 rectifié.

Les amendements CS871 et CS989 de M. Jean-Yves Le Déaut sont retirés, l’amendement CS2370 rectifié du Gouvernement est retiré et les amendements en discussion commune CS877 et CS1938 de M. Jean-Yves Le Déaut sont retirés.

La Commission examine les amendements identiques CS163 de M. Jean-Marie Tetart et CS333 de M. Jean-Jacques Cottel.

M. Jean-Marie Tetart. Les plans départementaux de l’habitat doivent prendre en compte les objectifs d’efficacité énergétique et de développement des énergies renouvelables.

M. Jean-Jacques Cottel. L’amendement CS333 est défendu.

M. le secrétaire d’État. Il ne paraît pas indispensable de compléter les PLH dès lors que ce sont les plans « Climat Air Énergie Territoriaux » (PCAET) qui ont vocation à décliner les objectifs d’efficacité énergétique au sens large. Avis défavorable.

L’amendement CS333 est retiré.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, l’amendement CS163 est rejeté.

La Commission examine à présent l’amendement CS71 de M. Julien Aubert.

M. Julien Aubert. Nous nous sommes rendu compte que l’un des problèmes majeurs de la rénovation résidait dans la complexité des circuits. Si vous voulez bénéficier d’une incitation fiscale à l’occasion de travaux de rénovation thermique, vous allez avoir affaire à plusieurs acteurs : la PME, compétente mais pas toujours au courant de la réglementation ; le diagnostiqueur, censé vous encourager à réduire votre consommation mais qui est par ailleurs, souvent, celui qui vous vend l’énergie ; l’administration fiscale qui a sa propre logique. Aussi le citoyen se demandera-t-il s’il vaut bien la peine d’engager des frais importants de rénovation thermique.

Pour remédier à cette complexité, notre proposition est radicale : si nous voulons vraiment « décoincer » ce marché, le diagnostic énergétique doit relever de l’État et doit être gratuit. Nous voulons éviter que le diagnostic énergétique soit lié à des intérêts privés et nous assurer que le citoyen n’aura aucune mauvaise surprise fiscale ou liée à l’application de la réglementation.

Il s’agit ensuite pour l’État de pouvoir exercer une action directe sur la rénovation qu’il souhaite engager, autrement dit de pouvoir mener une véritable politique avec la possibilité de demander à ses diagnostiqueurs de réduire ou au contraire d’étendre la voilure.

Pour satisfaire aux obligations de l’article 40 de la Constitution, nous proposons une expérimentation d’une durée de trois ans. Une contractualisation avec un opérateur extérieur est également prévue.

Le directeur départemental de La Poste m’expliquait que la baisse de l’activité liée à la distribution courrier conduisait à la recherche de nouveaux métiers comme le gardiennage, la rénovation thermique… Des réseaux existants peuvent donc être amenés à évoluer.

L’idée est bien que le diagnostic énergétique relève désormais du service public, à l’heure où l’on a plutôt tendance à réduire le périmètre des services publics. Si l’on veut consacrer cette fonction régalienne, aller au cœur du problème, il faut la sanction de la loi.

M. le secrétaire d’État. Je prends acte de la proposition de l’opposition de créer un nouveau service public, mais le principe de celui que vous appelez de vos vœux est déjà inscrit dans la loi Brottes. Nous y reviendrons au titre VIII, dans le cadre du débat que nous aurons sur la gouvernance de la transition énergétique.

C’est pourquoi je vous demande de retirer l’amendement, faute de quoi j’émettrai un avis défavorable.

Mme Sabine Buis, rapporteure. Si je rejoins l’idée d’un service public, je tiens à souligner qu’il existe déjà. De plus, pourquoi l’amendement en limite-t-il la portée au diagnostic énergétique ?

Avis défavorable.

M. Bertrand Pancher. Il existe un vrai débat sur les conditions de la réussite de la transition énergétique, notamment dans le domaine du logement.

On ne réussira pas à passer ce cap en menant des politiques centralisées, notamment parce que les contrôles de l’État voient leurs moyens diminuer. Il faut donc poursuivre la décentralisation et augmenter les compétences des collectivités territoriales en la matière.

Un tel amendement me met mal à l’aise : à mes yeux l’État doit limiter son rôle à engager de grandes stratégies et à cibler les moyens avant de confier l’ensemble des responsabilités en la matière aux collectivités locales, comme c’est le cas en Allemagne ou en Autriche, où ces politiques réussissent.

Je tenais à intervenir dès maintenant, car j’ignore si je pourrai assister aux travaux de la commission lorsque nous débattrons de la gouvernance de la transition énergétique.

M. le président François Brottes. J’ai demandé à la présidence de l’Assemblée nationale de me préciser les possibilités de procuration aux élections sénatoriales pour les députés : ils doivent en faire la demande vendredi avant midi aux préfectures.

M. Jean-Paul Chanteguet. Ce sera trop tard puisqu’il faut faire cette demande par lettre recommandée avec accusé de réception.

M. le président François Brottes. Je vous communique simplement les éléments à ma disposition.

Mme Sabine Buis, rapporteure. Je vous renvoie à mon amendement CS2193 après l’article 5, qui vise à asseoir le service public sur les plateformes territoriales.

M. Julien Aubert. Ce sujet, qui invite à un vrai débat de fond entre deux écoles – celle des Girondins et celle des Jacobins –, pose également la question du mode d’organisation de l’énergie, qui est centralisée en France, où existent de grandes entreprises publiques. Certains pensent qu’il faudrait dynamiter ce monopole au profit d’une organisation décentralisée fondée sur des énergies vertes.

Il convient de rester pragmatique sur la question, tout en sachant qu’il est risqué de basculer d’un modèle à l’autre sans réfléchir à la gouvernance ni à l’articulation. On ne peut pas laisser les collectivités territoriales multiplier les énergies intermittentes sans en référer à EDF qui doit gérer le réseau : dans un monde ouvert aux interconnexions, c’est prendre le risque d’une panne de courant électrique.

Si l’amendement prévoit un service public national du diagnostic énergétique, c’est que l’incitation est d’ordre fiscal et que l’administration fiscale est une administration nationale : le but est d’éviter toute perte de transmission entre le diagnostiqueur et l’administration fiscale. Tant que le citoyen n’aura pas la certitude que les sommes qu’il débourse pour rénover son logement bénéficieront bien de l’incitation fiscale promise, il y regardera à deux fois avant d’engager les dépenses nécessaires. Il ne doit plus craindre de voir son imposition réévaluer sous prétexte qu’il aura mal lu la réglementation. L’instauration d’un système simplifié est nécessaire pour obtenir un effet de masse.

L’objet de l’amendement n’est d’ailleurs pas tant d’instaurer un système centralisé que de reconnaître le caractère national de l’enjeu de ce service public et d’assurer son articulation avec l’administration fiscale. En revanche, le niveau de l’opérateur n’est pas fixé. Le service public du diagnostic énergétique pourra très bien être décliné au plan local.

Le service public proposé dans la loi Brottes n’a pas la même matérialité. Celui que je propose sera directement accessible aux citoyens et assurera un diagnostic gratuit et personnalisé. Trop souvent, les Français n’ont de contact individuel avec l’administration que lorsqu’il s’agit pour celle-ci de les contrôler ou de les réprimander – en cas de contrôle fiscal, l’État sait très bien se rendre au domicile des Français ! En revanche, vous pouvez le demander aux TPE et au PME, lorsqu’il s’agit de demander de l’aide, les Français n’ont plus affaire qu’à des acteurs globaux ! Élaborons des administrations ou des services publics modernes, qui iront au contact des citoyens et sauront les aider.

M. Denis Baupin. Monsieur Aubert, les États fédéraux savent depuis longtemps gérer la complémentarité entre les plans national et local pour éviter les pannes de courant.

M. Julien Aubert. S’il n’y a pas de black-out en Allemagne, c’est que celle-ci importe de l’électricité française.

M. Denis Baupin. Chaque mois, c’est la France qui importe de l’électricité d’Allemagne et non l’inverse. Le pays le plus menacé d’un block-out est la France, comme l’indiquent d’ailleurs les rapports de RTE.

M. le président François Brottes. Ne rouvrons pas les mêmes débats à chaque article du projet de loi !

M. Denis Baupin. Il n’y a aucune contradiction entre décentralisation, péréquation et coordination.

Je partage néanmoins le point de vue de M. Aubert, sinon son amendement, sur la question de l’indépendance et de la crédibilité du diagnostic de performance énergétique des bâtiments. Nos concitoyens sont trop souvent démarchés par des diagnostiqueurs intéressés qui ne leur font pas de propositions pertinentes.

S’agissant de l’organisation du service public de l’efficacité énergétique entre les plans national, régional, intercommunal, je tiens d’ores et déjà à indiquer que je déposerai des amendements à l’article 56. La coordination nécessaire entre les différents niveaux ne doit pas brider les initiatives.

M. Jean-Yves Le Déaut. Il ne faut pas faire l’impasse d’une réflexion sur l’organisation d’un service public de l’efficacité énergétique. Le futur Conseil de la construction et de l’efficacité énergétique, sur lequel nous reviendrons au titre de l’article 88 du Règlement, y contribuera.

Des pays fédéraux comme l’Allemagne ont réussi à traiter cette question en créant des conseillers à la rénovation qui sont mis à la disposition des Länder. Au nombre de 7 000, ils sont indépendants et issus de différents secteurs – ils peuvent être architectes, ingénieurs conseils ou artisans. Ce corps de l’efficacité énergétique pourrait s’appuyer, en France, au plan national sur l’ADEME et, au plan régional, sur les conseillers des Points rénovation info service.

La Commission rejette l’amendement CS71.

Puis elle passe à l’examen des amendements identiques CS104 de M. Martial Saddier et CS173 de M. Jean-Marie Tetart.

M. Martial Saddier. Pour assurer son application efficace, il faudrait réussir à faire comprendre et à faire accepter le texte par nos concitoyens, ce qui est un vrai défi.

À cette fin, l’amendement CS104 vise à créer un guichet unique national de la rénovation, relayé département par département. C’est à cette seule condition que les mesures, que nous inscrirons dans la loi, pourront être effectivement appliquées sur le terrain.

M. Jean-Marie Tetart. Je retire l’amendement CE173.

M. le secrétaire d'État. Je demande à son auteur de bien vouloir retirer son amendement. Il sait en effet que le Gouvernement a mis en place en septembre 2013 un guichet unique national de la rénovation énergétique des logements, constitué d’une plateforme téléphonique nationale et d’un site internet orientant les ménages vers un réseau de 450 Points rénovation info service qui, répartis sur tout le territoire, fournissent un premier niveau d’information et de conseil indépendant et gratuit. Les collectivités locales ont également mis en place des plateformes de la rénovation énergétique, qui fournissent un accompagnement complet des ménages tout au long de leur démarche.

Les expérimentations de passeport rénovation énergétique à partir de 2015 s’articuleront aux initiatives des collectivités locales visant à développer et à améliorer le conseil, notamment en l’orientant vers une approche globale.

Enfin, le guichet unique et le réseau des Points rénovation info service ont été définis dans la circulaire de territorialisation du 22 juillet 2013 et ne nécessitent pas de définition législative, laquelle rigidifierait le système.

J’émettrais un avis défavorable à l’amendement s’il n’était pas retiré.

Mme Sabine Buis, rapporteure. Le mécanisme de guichet proposé par l’amendement existe d’ores et déjà. Par ailleurs, il n’est pas certain que ces dispositions relèvent de la loi.

Je demande le retrait de l’amendement, faute de quoi j’émettrai, moi aussi, un avis défavorable.

M. Martial Saddier. Si j’ai bien précisé qu’un dispositif existait déjà. Mais il ne fonctionne pas parce qu’il est trop centralisé.

Si vous comptez sur le dispositif actuel pour vendre l’usine à gaz qu’est ce texte, vous prenez un double risque d’incompréhension et de blocage et la loi ne sera pas appliquée.

Mon amendement est un amendement d’alerte : il vise à décliner un guichet unique département par département et à engager tous les acteurs autour des préfets de département.

Monsieur le président, vous nous avez informés de la possibilité de voter par procuration aux élections sénatoriales. Alors que nous regrettons tous l’abstention croissante aux élections, il serait pour le moins fâcheux que les grands électeurs de la représentation nationale ne puissent pas, physiquement, participer à un scrutin élisant la deuxième chambre du Parlement.

En serions-nous arrivés là ?

M. le président François Brottes. Je réunis à l’issue de cette séance le bureau et les rapporteurs pour organiser la poursuite de nos travaux.

M. Bertrand Pancher. Les dispositifs d’information mis en place par l’État ne fonctionnent pas : tous les élus locaux, de gauche comme de droite, le savent.

Les moyens étant trop éparpillés, il serait souhaitable de les transférer aux collectivités territoriales en leur donnant mission, via des points d’information ou des sociétés de services en économie d’énergie, de muscler le dispositif, d’autant que nous assistons à une diminution notamment du nombre des agents de l’État sur les territoires.

Je partage les propos de M. Saddier, que j’avais mal interprétés dans un premier temps.

M. le secrétaire d'État. Seul le système d’information est aujourd'hui centralisé.

De plus, votre constat d’échec doit être nuancé, voire infirmé puisque le nombre des ménages ayant bénéficié des crédits de l’Agence nationale de l’habitat – ANAH – dans le cadre du programme « Habiter mieux » a été multiplié par trois depuis 2012.

L’amendement CS173 est retiré.

La Commission rejette l’amendement CS104.

Elle examine ensuite l’amendement CS257 de M. Jean-Yves Le Déaut.

M. Jean-Yves Le Déaut. L’amendement CS257 vise à créer une recette additionnelle, ce qui, il est vrai, n’est pas très populaire en ces temps difficiles.

L’évaluation technique des nouveaux produits de la construction a un intérêt direct pour les compagnies d’assurance, du fait que cette activité permet de réduire à la source les risques mis en jeu par le régime de responsabilité décennale, ce qui profite, de facto, aux compagnies d’assurance, qui exigent des avis techniques pour assurer les bâtiments. Or les compagnies ne participent pas financièrement au processus d’évaluation technique : membres de l’Agence de la qualité de la construction (AQC), un organisme privé, elles se contentent de participer à l’aval technique puisque l’AQC gère les informations relatives aux sinistres constatés en cherchant à identifier les sinistres sériels.

Alors que le CSTB souffre aujourd'hui d’un manque de moyens, cette recette conforterait son rôle, en lui permettant de mieux accompagner les entreprises dans les régions. Je tiens à souligner que les CSTB accompagnent déjà des PME-PMI en Bourgogne, en Alsace, dans les Pays-de-la-Loire ou en Gironde, dans l’évaluation technique. Bien qu’elles y soient opposées, les assurances doivent participer à ce dispositif.

L’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et techniques a adopté cette disposition à l’unanimité.

M. le secrétaire d'État. Ce débat sur les moyens du CSTB a plus sa place dans l’examen du projet de loi de finances. C’est pourquoi je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement – d’autant que la discussion sur la gouvernance du CSTB a été renvoyée à la séance publique.

Il ne faudrait pas non plus qu’une telle initiative entre en contradiction avec la politique du Gouvernement de relance du logement.

Mme Sabine Buis, rapporteure. Je suis également favorable au retrait de l’amendement.

M. Jean-Yves Le Déaut. Je le retire.

L’amendement CS257 est retiré.

La Commission examine ensuite les amendements identiques CS1334 de M. Jean-Paul Chanteguet et CS1613 de M. Joël Giraud.

M. Jean-Paul Chanteguet. L’amendement CS1334 prévoit la création d’un seuil d’alerte précarité énergétique entraînant, à compter du 1er janvier 2025, une obligation de réaliser des travaux.

Les logements dont la performance énergétique crée des situations de précarité énergétique seront identifiés, notamment via une enquête auprès des personnes sollicitant des aides aux impayés d’énergie.

Les propriétaires de ces logements seront contactés afin d’être sensibilisés aux différentes aides pour réaliser les travaux. Ils devront mettre en place le volet énergétique du carnet de santé du logement dans un délai fixé par voie réglementaire puis réaliser les travaux dans un délai de dix ans, afin de sortir du seuil d’alerte.

M. Joël Giraud. L’amendement CS1613 prévoit un plan contraignant à long terme visant à mettre fin aux situations de précarité énergétique qui sont liées à la très faible performance énergétique des bâtiments.

M. le secrétaire d'État. Ces amendements ouvrent un débat de fond sur la méthode, puisqu’ils reviennent à demander aux propriétaires concernés, qu’ils soient bailleurs ou occupants, à réaliser des travaux. Or il apparaît difficile pour des questions sociales d’obliger notamment des propriétaires occupants en situation de précarité énergétique de réaliser de tels travaux. Ces publics, qui sont pour la plupart fragiles, ont besoin de mesures d’accompagnement plutôt que de mesures coercitives.

Il vaut mieux continuer à les accompagner avec le programme « Habiter mieux » que les confronter à des obligations qu’ils ne pourraient pas honorer en raison de leur manque de moyens financiers.

Ces amendements risquant d’avoir un effet contraire à l’objectif recherché, je vous demande de bien vouloir les retirer.

Mme Sabine Buis, rapporteure. On ne saurait faire abstraction de la situation financière dans laquelle se trouvent de nombreux ménages.

Par ailleurs, c’est l’article 5 qui traite la question des travaux de rénovation.

Je vous demande de bien vouloir retirer ces amendements.

M. Jean-Paul Chanteguet. Je retire l’amendement tout en soulignant qu’il ne prenait effet qu’à compter du 1er janvier 2025. Il convient d’adopter dans le reste du texte des dispositions permettant de mieux lutter contre la précarité énergétique.

M. Joël Giraud. Avant de retirer mon amendement, j’aimerais connaître la teneur finale de l’article 5.

Mme Sabine Buis, rapporteure. Vous avez sous les yeux l’article 5 tel qu’il a été rédigé par le Gouvernement. En revanche, personne ne connaît sa rédaction définitive, les amendements à cet article n’ayant pas encore été examinés. Il n’en reste pas moins que votre amendement entre dans le cadre de cet article.

M. Joël Giraud. Je maintiens l’amendement.

L’amendement CS1334 est retiré.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette l’amendement CS1613.

La Commission examine ensuite les amendements quasiment identiques CS1961 troisième rectification de la rapporteure et CS2384 du Gouvernement.

Mme Sabine Buis, rapporteure. L’amendement CS1961, troisième rectification, vise à créer un carnet de santé numérique du logement, qui serait obligatoire pour toute construction neuve à compter du 1er janvier 2017 et pour tous les logements faisant l’objet d’une mutation à compter du 1er janvier 2025.

M. le secrétaire d'État. Je retire l’amendement CS2384 du Gouvernement au profit de l’amendement de la rapporteure.

M. Martial Saddier. En tant qu’humaniste, je suis gêné par l’appellation « carnet de santé », celle-ci visant la santé de chacun des membres de la famille. Il serait préférable d’en changer.

M. le président François Brottes. Je ferai observer qu’un logement insalubre nuit à la santé de ses occupants.

M. Bertrand Pancher. Je m’interroge sur l’évolution de ce texte.

Le 1er août dernier, il nous a été transmis une version qui n’avait rien à voir avec celle qui avait été présentée en conseil des ministres. Alors que nous l’examinons dans des conditions très difficiles, voilà qu’on nous propose des amendements dont la portée a dû faire l’objet de discussions.Avec qui un tel amendement, dont je ne remets pas en cause le bien-fondé mais qui mériterait presque un texte spécifique, a-t-il été préparé ? Quelles ont été les conditions de sa rédaction ?

M. le secrétaire d'État. Que le Gouvernement et Mme la rapporteure aient proposé deux amendements identiques n’est pas contraire au fonctionnement normal des institutions.

Par ailleurs, je ne suis pas opposé à une modification de l’appellation de ce carnet de santé numérique. Le Gouvernement y réfléchira d’ici à la séance publique.

Mme Sabine Buis, rapporteure. Je proposerai un amendement en séance à cette fin.

J’ai rédigé cet amendement en concertation avec le Gouvernement. Les nombreuses auditions auxquelles j’ai participé en ma qualité de rapporteure ont également inspiré cette rédaction.

M. le président François Brottes. Les rapporteurs n’ont pas besoin d’attendre les suggestions explicites de tel ou tel pour rédiger un amendement.

L’amendement CS2384 est retiré.

La Commission adopte à l’unanimité l’amendement CS1961 troisième rectification.

Les amendements identiques CS2376 de la rapporteure, CS1335 de M. Jean-Paul Chanteguet et CS1612 de M. Joël Giraud sont retirés.

La Commission examine ensuite l’amendement CS524 de M. Julien Aubert.

M. Julien Aubert. Cet amendement tend à demander au Gouvernement un rapport sur la mise en œuvre d’une incitation à la rénovation énergétique par le biais d’un dégrèvement de la taxe foncière.

Par ailleurs, j’indique à M. Baupin que ses assertions sur les exportations et les importations d’électricité entre la France et l’Allemagne sont totalement fausses. Les chiffres qu’il a cités, issus de RTE, portent sur les contrats échangés au niveau des bourses européennes alors que ce sont les échanges physiques qu’il faut prendre en compte. Or les chiffres donnés à ce sujet par les douanes françaises, accessibles sur le site internet du ministère des finances, font apparaître pour janvier, février et mars 2013 un solde positif en faveur de la France, de l’ordre de 200 à 600 gigawattheures.

M. le secrétaire d’État. Avis défavorable. Le code général des impôts prévoit la possibilité pour les communes et les EPCI d’exonérer de la taxe foncière sur les propriétés bâties, à concurrence de 50 % ou de 100 %, les logements achevés avant le 1er janvier 1989 ayant fait l’objet par le propriétaire de dépenses d’équipements éligibles au crédit d’impôt dédié au développement durable.

Cette disposition est méconnue alors même qu’elle peut faciliter la décision du propriétaire de se lancer dans des travaux de rénovation. Une transposition aux bâtiments non résidentiels pourrait être étudiée. Je vous demande donc de retirer votre amendement.

L’amendement est retiré.

La commission en vient à l’amendement CS72 de M. Julien Aubert.

M. Julien Aubert. En matière de diagnostic énergétique, des initiatives existent au plan local, mais elles impliquent des disparités. Pour assurer l’égalité de tous, je suggère, en bon républicain, de mettre en place un service public national qui permettra d’harmoniser les méthodes là où des dispositifs sont déjà place et d’encourager les bonnes pratiques là où ils ne le sont pas encore.

Cet amendement vise à demander au Gouvernement de remettre dans les six mois suivant la promulgation de la loi un rapport au Parlement sur la création d’un tel service public. J’ai l’espoir qu’il aura en outre la vertu de nous engager dans un débat de fond, au-delà des multiples questions techniques, sur ce qu’est un service public et de nous conduire à une forme de consensus.

M. le secrétaire d’État. Comme la commission a rejeté la création du service public du diagnostic énergétique sur la mise en place duquel vous demandez un rapport, la cohérence impose de demander le retrait de l’amendement.

Mme Sabine Buis, rapporteure. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

M. le président François Brottes. La suite de l’examen des articles du projet de loi est renvoyée à la prochaine réunion de la Commission spéciale.

——fpfp——

Membres présents ou excusés

Commission spéciale pour l'examen du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte

Réunion du jeudi 25 septembre 2014 à 9 h 30

Présents. - Mme Sylviane Alaux, M. Julien Aubert, M. Christian Bataille, Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Denis Baupin, Mme Catherine Beaubatie, M. Yves Blein, M. Jean-Luc Bleunven, M. Christophe Borgel, M. Christophe Bouillon, M. François Brottes, Mme Sabine Buis, M. Jean-Paul Chanteguet, M. Jean-Michel Clément, M. Jean-Jacques Cottel, Mme Françoise Dubois, Mme Cécile Duflot, Mme Geneviève Gaillard, M. Joël Giraud, M. Michel Heinrich, Mme Bernadette Laclais, M. Jean-Luc Laurent, M. Alain Leboeuf, M. Jean-Yves Le Déaut, M. Serge Letchimy, Mme Frédérique Massat, M. Philippe Plisson, Mme Émilienne Poumirol, M. Martial Saddier, Mme Béatrice Santais, M. Michel Sordi, M. Jean-Marie Tetart, M. Stéphane Travert, Mme Catherine Troallic, Mme Clotilde Valter

Excusés. - M. Patrice Carvalho, M. André Chassaigne, M. Jean-Paul Tuaiva

Assistaient également à la réunion. - M. Éric Alauzet, Mme Michèle Bonneton, Mme Marie-Hélène Fabre, Mme Chantal Guittet, M. Laurent Kalinowski, M. François-Michel Lambert, M. Michel Lesage, Mme Barbara Pompili