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Délégation aux outre-mer

Jeudi 11 septembre 2014

Séance de 11 heures

Compte rendu n° 17

Présidence de M. Serge Letchimy, vice-président de la Délégation aux outre-mer

– Audition de Mme Laurence Hézard et M. Jean Jouzel, membres du Conseil économique, social et environnemental (CESE), rapporteurs, respectivement au nom de la section des activités économiques et au nom de la section de l’environnement, sur le projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte (n° 2188)

– Audition de M. Éric Brac de La Perrière, directeur général de la société Eco-emballages, organisme pilote du dispositif national concernant le tri et le recyclage des emballages ménagers dans l’hexagone et dans les départements et régions d’outre-mer, accompagné de Mme Sophie Legay, directrice des opérations régionales, de M. Johann Leconte, directeur des relations avec les élus et les associations, et de Mme Sandrine Jounet, directrice conseil de la société Euros/Agency, sur le projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte (n° 2188)

La séance est ouverte à 11 heures.

Présidence de M. Serge Letchimy, vice-président.

La Délégation aux outre-mer procède à l’audition de Mme Laurence Hézard et M. Jean Jouzel, membres du Conseil économique, social et environnemental (CESE), rapporteurs, respectivement au nom de la section des activités économiques et au nom de la section de l’environnement, sur le projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte (n° 2188).

M. Serge Letchimy, vice-président et rapporteur. J’ai le plaisir d’accueillir M. Jean Jouzel et Mme Laurence Hézard, membres du Conseil économique, social et environnemental, rapporteurs sur le projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte. 

Le projet de loi sur la transition énergétique intéresse la Délégation aux outre-mer à trois titres. Il s’agit d’abord de s’interroger sur la manière dont l’outre-mer peut s’inscrire dans la lutte contre les gaz à effet de serre et le changement climatique, essentielle pour la préservation de l’humanité.

Cela implique, ensuite, de réfléchir aux évolutions sociétales qui doivent accompagner la transition énergétique. Si, jusqu’à présent, les régions ultramarines ont eu assez peu prise sur leur développement énergétique, nous avons le sentiment, pour paraphraser Aimé Césaire, chez qui l’on sait l’importance de la dimension écologique dans son appréhension de l’homme, que la nature nous redonne la main. Encore faut-il saisir cette main de la façon la plus intelligente et la plus équitable possible. C’est ce à quoi nous nous sommes efforcés à travers les lois Grenelle I et Grenelle II, les conférences environnementales et, aujourd’hui, cette loi sur la transition écologique, dont l’ambition est de préserver l’équilibre entre l’homme et la nature.

Nous devons enfin nous demander comment les sociétés d’outre-mer peuvent saisir cette chance en la traduisant par un nouveau modèle de développement économique qui partage la croissance entre tous. Au-delà des enjeux techniques qu’elle implique, la transition énergétique se pose pour l’outre-mer, compte tenu de la spécificité de nos territoires, en termes de gouvernance, et il est impératif d’imaginer dans les bassins transfrontaliers, en Martinique, en Polynésie ou à La Réunion, un nouveau modèle de gouvernance, même si je suis conscient que l’on m’opposera d’emblée des obstacles financiers, législatifs, réglementaires ou institutionnels.

Il s’agit d’un énorme défi pour nos économies très dépendantes, le plus souvent assises, du fait de leur passé d’anciens comptoirs, sur les services et l’administration. Pourtant, après avoir lu La troisième révolution industrielle de Jeremy Rifkin, je suis persuadé qu’il existe des stratégies de développement industriel horizontales permettant d’en finir avec l’organisation verticale des économies pétrolières. La récente visite de Mme Ségolène Royal en Martinique me conforte d’ailleurs dans cette idée.

Comment, de votre côté, concevriez-vous l’implication de l’outre-mer dans la transition énergétique ? Doit-on parler de laboratoire, sachant que, si le terme me convient, il faut prendre garde aux rapports de force qu’il peut sous-entendre ? Pour ce qui me concerne, l’expression « laboratoire de développement » me paraîtrait préférable, dans la mesure où elle évoque davantage l’idée d’une dynamique locale.

M. Jean Jouzel, membre du Conseil économique, social et environnemental, rapporteur, au nom de la section de l’environnement, sur le projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte. Nous nous sommes appuyés pour rendre notre avis sur le rapport que j’ai co-écrit avec Catherine Tissot-Colle sur la transition énergétique, le rapport d’Anne de Bethencourt et Jackie Chorin sur les économies d’énergie, et le rapport enfin de Patrick Galenon, dont le titre « Les énergies renouvelables outre-mer : laboratoire pour notre avenir » dit bien la pertinence pour ce qui nous réunit aujourd’hui.

Le projet de loi sur la transition énergétique est important à différents titres. Je pense comme vous que c’est une chance pour les Outre-mer, où les questions d’autonomie énergétique, de sécurité de l’approvisionnement, d’emploi et de compétitivité se posent avec plus d’acuité encore qu’en métropole. Quant au réchauffement climatique, le rapport que j’ai remis à Mme Ségolène Royal sur les scénarios envisageables pour la France à l’horizon 2100 consacre plusieurs pages à ses implications particulières en outre-mer, où se pose également le problème, plus spécifique, de l’acidification des océans.

Je regrette, cela étant, le manque d’ambition européenne de cette loi. Il n’existe guère de véritable politique européenne de l’énergie, et nous appelons de nos vœux une politique plus dynamique en la matière, à laquelle vos territoires auraient tout à gagner.

Très attaché à la recherche et à l’innovation, j’aime la notion de laboratoire. Il reste en effet beaucoup à faire en matière de stockage de l’énergie, mais l’objectif de parvenir, à l’horizon 2020, à 50% d’énergies renouvelables à La Réunion, en Martinique, en Guadeloupe et en Guyane, et à 30% à Mayotte, doit nous inciter à multiplier les innovations à grande échelle dans ce domaine.

Mme Laurence Hézard, membre du Conseil économique, social et environnemental, rapporteure, au nom de la section des activités économiques, sur le projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte. Nous retenons avant tout de ce projet de loi la dynamique concrète impulsée par les propositions qu’il contient. Le CESE se soucie toutefois que les objectifs et les actions à engager fassent l’objet d’une hiérarchisation : si certaines propositions peuvent être mises en œuvre immédiatement, d’autres doivent faire l’objet d’un travail plus approfondi.

Si ce projet de loi permet à tous les acteurs, au niveau national comme au niveau territorial, d’être responsabilisés, chacun voyant ses marges de manœuvre clairement définies pour mieux s’approprier l’ensemble des dispositifs et les mettre en œuvre en fonction de son environnement, il aura créé une belle dynamique. Pour autant, nous avons identifié un certain nombre de points qui méritent d’être précisés.

La notion de performance énergétique des bâtiments est intéressante. Elle permet de mobiliser l’ensemble des personnes concernées, du maître d’ouvrage et du maître d’œuvre aux occupants des bâtiments. Cela implique néanmoins, si l’on veut véritablement réduire l’impact des gaz à effet de serre, de réaliser des économies d’énergie et de maîtriser la facture énergétique, de définir des objectifs qui permettent de prendre les bonnes décisions en termes de matériaux et d’organisation de l’habitat. Les mesures proposées sont intéressantes, leur financement – tiers investisseur, ou implication des collectivités locales – reste à préciser. De même, on ne voit pas très bien ce qui peut inciter aujourd’hui un propriétaire à réaliser des travaux de rénovation, qui exigent souvent de lourds investissements. La question du retour sur investissement demeure un vrai point d’interrogation.

Le problème de la précarité a retenu notre attention. Force est de constater que nombre de personnes en situation précaire habitent dans des logements énergivores, ce qui exige de mettre en place, en amont, des solutions permettant de leur proposer un habitat moins consommateur en énergie. Si le « chèque énergie » trouve sa place dans les dispositifs d’aide aux familles en difficulté, il n’a pour autant pas vocation à financer des travaux de rénovation de l’habitat. Il doit par ailleurs s’accompagner de mesures qui ne relèvent pas de la loi mais de l’action des services publics de proximité, ciblée vers la recherche de solutions individuelles.

Nous notons que le transport fait l’objet du titre III du projet de loi. Les mesures proposées ne nous satisfont pas pleinement, car nous considérons que la solution du tout-électrique n’est pas celle qui doit être retenue. Il faut rester ouvert à des solutions adaptées aux différents usages et aux différents environnements. Il existe aujourd’hui d’autres carburants – le gaz naturel pour véhicules, le GPL – et des moteurs hybrides. Ne les excluons pas, tout en poursuivant les recherches sur les biocarburants de deuxième génération.

Pour maintenir la dynamique de la filière automobile, il est essentiel d’organiser la cohérence entre les objectifs, la réglementation et les incitations fiscales. Cela permettra aux constructeurs automobiles de continuer à travailler sur la réduction de la consommation du nombre de litres par kilomètres mais aussi sur la diminution des gaz à effet de serre et des particules.

Si l’on veut atteindre l’objectif de 32% d’énergies renouvelables en 2030, il est nécessaire de faire évoluer les dispositifs de soutien et de régulation, et de mettre en place un pilotage qui prenne en compte la maturité qu’ont atteinte certaines technologies permettant d’ores et déjà de produire de l’électricité à un coût intéressant. Dans cette optique, nous préconisons d’accroître la transparence et la lisibilité de la contribution au service public de l’électricité (CSPE). La création d’un organisme chargé du pilotage de la CSPE nous paraît à ce titre une bonne mesure. Nous soutenons par ailleurs l’idée qu’il faut simplifier les procédures, bien plus lourdes chez nous que dans d’autres pays, que ce soit au plan administratif ou technique : construire des éoliennes ou des installations photovoltaïques est une bonne chose, mais encore faut-il pouvoir acheminer l’électricité jusqu’au consommateur. D’où l’importance d’appréhender les projets dans leur globalité.

En matière de nucléaire, les membres du CESE expriment, comme l’ensemble de la société civile, des positions contrastées. Unanimes sur la question de la sûreté des centrales actuelles, nous sommes partagés sur la définition du bon mix énergétique, étant entendu que, au-delà des positions de principe défendues par chacun, nous ne disposons pas des éléments nous permettant de privilégier un scénario plutôt qu’un autre. Il faut, pour cela, clarifier pour chaque énergie son coût total, ce qui inclut son coût environnemental, mais également son coût en termes de traitement des déchets, de gestion du risque, de bilan carbone, d’emploi et de formation. Il est indispensable également de pouvoir évaluer l’impact de chaque scénario sur la facture du consommateur.

Ce projet de loi doit être l’occasion de responsabiliser chacun, du décisionnaire – à chacun des niveaux qui émergeront de la future loi sur les territoires – au citoyen. La transition énergétique ne pourra s’accomplir avec succès que si elle implique tous les acteurs, les entreprises comme les ménages, les uns et les autres ayant à repenser leurs modes de consommation, en se tournant, le cas échéant, vers des énergies de proximité.

Nous avons jeté un œil attentif et parfois critique sur le dispositif de pilotage proposé dans la loi. Un nombre important d’organismes sont créés ; il est important de clarifier leurs rôles respectifs et leurs interactions, comme il est important de clarifier quels sont les organismes existants qui seront supprimés. Mieux vaut être exemplaires que redondants si l’on veut créer une dynamique positive.

Une programmation pluriannuelle sur cinq ans dessinant une trajectoire énergétique est une bonne chose. Il importe néanmoins de conserver des marges de manœuvre, pour pouvoir s’adapter, le cas échéant, aux évolutions économiques et géopolitiques. Nous devons nous en tenir à des objectifs peu nombreux mais mobilisateurs, et envisager des points d’étape qui permettent d’évaluer, sous forme de bilans, l’efficacité des actions retenues aux niveaux local, régional, ou national. C’est important pour installer la confiance et enclencher une dynamique qui se traduise par des résultats positifs.

En ce qui concerne le développement des Outre-mer, nous nous sommes beaucoup appuyés sur le rapport de notre collègue Patrick Galenon, à qui nous avons emprunté le terme de laboratoire. C’est pour nous un terme très positif dans la mesure où il évoque l’innovation, mais je comprends qu’il puisse avoir des connotations négatives, et sans doute faudra-t-il le préciser. Cette perspective, quoi qu’il en soit, ne peut être envisagée sans que s’opère un véritable transfert de compétences. Les Outre-mer doivent pouvoir saisir cette chance d’un nouveau développement industriel qui peut faire de vos territoires des modèles à suivre pour les zones non-interconnectées.

Le dispositif de la CSPE doit faire l’objet d’une clarification, je n’y reviens pas.

L’émergence d’un nouveau secteur énergétique et industriel dans les zones non-interconnectées aura naturellement un impact, pour l’heure difficile à évaluer en termes d’emploi. Il implique des efforts dans le domaine des compétences et de la formation, ainsi que la mise en place d’un pilotage qui assure la coordination entre les solutions développées localement et la politique énergétique conduite en métropole.

La recherche enfin doit s’attacher à explorer l’ensemble des technologies possibles.

J’en termine avec ces quelques réflexions, plusieurs de nos recommandations, notamment en matière de gouvernance, ayant d’ores et déjà été prises en compte dans la nouvelle rédaction du projet de loi.

Mme Maina Sage. Les territoires d’outre-mer doivent sortir de la rivalité et développer des stratégies complémentaires en matière de recherche et d’innovation. C’est particulièrement vrai pour les grands projets – SWAC ou OTEC. Compte tenu de ce qu’il en coûtera pour transformer ces projets de recherche en solutions réelles, adaptables à l’ensemble du territoire français, il est indispensable d’élaborer, en marge de ce projet de loi, une véritable politique de développement et d’innovation dans les territoires d’outre-mer, qui sont les lieux les plus propices pour accueillir des projets de cette envergure.

La notion de laboratoire est à double tranchant. Elle a une résonance particulière en Polynésie française, qui fut le laboratoire des essais nucléaires français, et peut être en effet mal perçue : en d’autres termes, nous ne voulons pas être transformés en « rats » de laboratoire. Nous sommes néanmoins conscients qu’il y a là une chance de faire évoluer nos relations avec l’État central : qu’après avoir fait de la Polynésie française le laboratoire d’expérimentations très polluantes l’État apporte son soutien à la reconversion de notre territoire dans le domaine des énergies renouvelables n’est pas seulement une nécessité économique, cela constituerait également à nos yeux une forme de réparation symbolique.

M. Serge Letchimy, vice-président et rapporteur. Tout le monde aura compris les sentiments ambivalents que nous inspire la notion de laboratoire.

Mme Huguette Bello. Un quart seulement du potentiel que représente la canne à sucre dans nos territoires est actuellement exploité. Alors que le monde agricole s’émeut de la fin des subventions françaises et européennes en 2017, nous devons prendre conscience de ce gisement qui se chiffre en milliards de dollars, la canne pouvant servir à la fabrication des bioplastiques ou des biocarburants. La France semble ignorer la richesse de ses territoires ultramarins, qui en font pourtant la deuxième puissance maritime et qui sont un réservoir d’énergies renouvelables, qu’il s’agisse de l’énergie marine, géothermique ou éolienne, sachant que La Réunion est désormais inscrite au patrimoine mondial de l’humanité et qu’il ne s’agit pas de développer l’éolien au détriment de la beauté de nos paysages, primordiale pour notre activité touristique.

M. Serge Letchimy, vice-président et rapporteur. J’ajoute que la loi doit être l’occasion de relancer le débat sur le tarif de rachat de la bagasse aux planteurs.

Des avancées considérables ont été réalisées dans les territoires ultramarins en matière d’énergies renouvelables. Toute la question aujourd’hui est de transformer ces expérimentations en dynamique de développement industriel. Nous nous y emploierons à travers des amendements au projet de loi. Nous devons notamment lever l’obstacle que constitue la limitation à 30% du taux d’énergies renouvelables intermittentes injecté dans le réseau électrique d’EDF, qui limite notre capacité à développer ces énergies, alors que les énergies non intermittentes – SWAC ou ETM – relèvent encore de procédés extrêmement coûteux.

Se pose aussi la question du transfert de la CSPE vers le financement de la politique de développement des énergies renouvelables. La diminution de la consommation d’énergies fossiles allégeant la facture de la CSPE, il serait normal de réinjecter les sommes économisées dans le financement d’énergies renouvelables permettant d’atteindre un mix énergétique le plus complet possible.

Je ne comprends pas, par ailleurs, que la Polynésie ne bénéficie pas de la CSPE. C’est une question de solidarité, et le fait que les territoires ultramarins relèvent de statuts différents n’est pas une réponse satisfaisante, puisque la CSPE s’applique à Saint-Pierre-et-Miquelon qui relève, comme la Polynésie française, de l’article 74 de la Constitution.

L’habilitation à légiférer ou à réglementer conférée par l’article 73 aux collectivités d’outre-mer – à l’exception de La Réunion – ne vaut pas transfert de compétences et interdit la mise en place dans ces territoires d’une véritable gouvernance qui permette le développement d’actions pérennes, par exemple dans le domaine de l’emploi ou de la formation, susceptibles de porter la transition énergétique. C’est ainsi que, du fait des réticences de la Commission de régulation de l’énergie (CRE) à intégrer la biomasse parmi les énergies renouvelables, des usines sont bloquées en Guadeloupe et en Martinique, alors qu’elles représentent un investissement de 180 millions d’euros et pourraient produire 20 mégawatts d’énergie stable.

Un mot enfin sur l’interconnectivité. Certes, nous sommes en zone non-interconnectée par rapport à l’hexagone, puisqu’à des milliers de kilomètres ; mais pourquoi ne pas envisager l’interconnectivité à l’échelle régionale, c’est-à-dire en imaginant de se raccorder à des réseaux transfrontaliers ? Cela a bien sûr un coût, mais c’est le seul moyen pour nous d’assurer notre indépendance grâce à un bon mix énergétique.

Le problème, c’est que les structures-mères comme EDF sont à la fois juge et partie dans l’arbitrage entre énergies renouvelables et énergies fossiles. Cela génère des conflits d’intérêt particulièrement importants outre-mer. C’est ainsi qu’EDF a renoncé à un projet de centrale géothermique à la Dominique pour des questions de rentabilité de l’investissement, alors même que cette centrale constituait pour la Martinique une solution extrêmement pérenne en matière d’énergie renouvelable.

Notre politique en matière d’énergies renouvelables doit s’inscrire dans des stratégies régionales pour mettre un terme à des situations aussi ridicules que celle qui conduit La Réunion à devoir exporter ses déchets vers la métropole pour les recycler, en étant financée par le programme d’options spécifiques à l’éloignement et à l’insularité (POSEI). Les bassins régionaux constituent un formidable potentiel de croissance si l’on y ancre des filières de développement économiques axées autour de la fabrication d’énergie renouvelable à partir du retraitement des déchets.

Mme Laurence Hézard. Notre rapport indique bien que tous les projets de méthanisation qui se développent de plus en plus constituent des solutions très intéressantes en matière d’utilisation des déchets ménagers et agricoles. On ne peut s’en priver même s’ils requièrent de la part de ceux qui les conduisent une énergie abyssale pour être menés à bien – j’insiste ici sur le fait qu’un effort de simplification réglementaire est absolument nécessaire. La méthanisation permet de nombreuses innovations. Elle participe de l’économie circulaire, apporte des solutions au problème des déchets ; elle est responsabilisante et permet notamment la production de biométhane carburant. C’est une piste d’autant plus intéressante que l’on est désormais au-delà du stade expérimental.

Pour ce qui concerne le transfert de compétences, il doit concerner non seulement les prises de décision mais aussi tout ce qui ressort à l’aide à la décision. Dans les zones non-interconnectées comme dans les zones connectées, l’intercommunalité nous apparaît comme l’échelon adapté à ce transfert de compétences, d’une part parce que les collectivités locales n’ont pas aujourd’hui les moyens matériels de développer seules des projets énergétiques, d’autre part parce que ces derniers ont un impact territorial qui dépasse souvent le niveau de la commune. En bref, il faut, selon nous, regrouper et rationaliser les compétences au niveau où seront prises les décisions – dans un cadre naturellement défini au niveau national – et où s’effectueront le suivi de leur mise en œuvre et le retour d’expérience.

Je n’ajouterai rien sur la CSPE car, au-delà des positions de principes que nous avons pu énoncer, le CESE n’a pas l’expertise requise.

En matière d’ENR, je n’ai pas compris que l’objectif fixé était restrictif pour les zones non-interconnectées…

M. Serge Letchimy, vice-président et rapporteur. Le taux d’intégration maximum d’ENR au réseau EDF est de 30%, sans que l’on sache sur la base de quels calculs a été établi ce plafond. Il s’agit d’une mesure de sécurisation du réseau qui vise à éviter le black-out, mais qui nous empêche, faute de stockage, de progresser au-delà des 8% d’énergies renouvelables que nous avons déjà atteints dans notre mix énergétique. La question de l’innovation technologique est donc fondamentale, et il y a là un verrou qu’il faut faire sauter si l’on veut préserver la filière.

Mme Laurence Hézard. Notre section travaille actuellement sur la question du stockage et devrait présenter ses conclusions mi-2015.

Mme Maina Sage. 30% de la production électrique polynésienne provient de l’hydroélectricité produite par EDT, filiale polynésienne de GDF Suez. Pour ce qui concerne en revanche les énergies solaires produites individuellement et qui font l’objet d’une obligation de rachat par le groupe EDT, leur pénétration sur le réseau est plafonnée à 5%, là encore pour des raisons invoquées de sécurité. Le taux plafond de 30% est donc à nos yeux un excellent argument pour contraindre EDT à revoir les limites qu’il nous oppose et qui sont aussi intolérables qu’injustifiées.

M. Jean Jouzel. Il me semble que ce plafond de 30% est imposé par EDF, pas par la loi.

M. Serge Letchimy, vice-président et rapporteur. En effet, mais cela emporte des aspects réglementaires sur lesquels nous souhaiterions revenir.

M. Jean Jouzel. En matière de recherche, de nombreux projets se développent à l’échelle européenne. Je partage votre idée qu’il est important de ne pas mettre en compétition les différents territoires ultramarins.

J’insiste sur l’acidification des océans, conséquence directe du rejet des matières fossiles en mer et qui, à côté des gaz à effet de serre dont on parle davantage, sont pour vos régions une question critique.

J’ai mentionné le rapport de Patrick Galenon consacré aux énergies renouvelables ; la loi doit permettre de débloquer les verrous qui empêchent leur développement. Il est naturel qu’EDF se soucie d’assurer la continuité énergétique mais il ne faut pas perdre de vue les perspectives que dessinent les progrès possibles dans le domaine du stockage, de la méthanisation ou de l’utilisation des déchets. J’espère donc que vous pourrez inscrire dans cette la loi les ouvertures nécessaires pour faire de vos territoires de véritables laboratoires de la transition énergétique.

M. Serge Letchimy, vice-président et rapporteur. Il me reste à vous remercier de votre visite et de vos interventions.

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La Délégation procède ensuite à l’audition de M. Éric Brac de La Perrière, directeur général de la société Eco-emballages, organisme pilote du dispositif national concernant le tri et le recyclage des emballages ménagers dans l’hexagone et dans les départements et régions d’outre-mer, accompagné de Mme Sophie Legay, directrice des opérations régionales, de M. Johann Leconte, directeur des relations avec les élus et les associations, et de Mme Sandrine Jounet, directrice conseil de la société Euros/Agency, sur le projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte (n° 2188).

M. Serge Letchimy, vice-président et rapporteur. Notre ordre du jour appelle l’audition de M. Éric Brac de La Perrière, directeur général de la société Eco-emballages, organisme pilote du dispositif national concernant le tri et le recyclage des emballages ménagers dans l’hexagone et dans les départements et régions d’outre-mer.

Monsieur le directeur général, quels sont les enjeux en matière de recyclage des emballages ? Quelle est votre approche dans ce domaine et quelles vous paraîtraient être les meilleures adaptations possibles dans le cadre de la loi sur la transition énergétique pour les régions et départements d’outre-mer ?

M. Éric Brac de La Perrière, directeur général de la société Eco-emballages. Notre entreprise est entièrement privée et travaille uniquement en vue de l’intérêt général. Elle résulte d’une innovation politique, sociale et environnementale datant de 1992, consistant à confier aux entreprises mettant sur le marché des produits emballés, la gestion et le financement de la fin de vie des emballages.

L’enjeu est de permettre à tous d’avoir le même droit au tri et une solution simple, proche, peu coûteuse et efficace pour ne pas polluer. Depuis vingt ans, Eco-emballages est très présente dans les DOM-COM. Alors que 34 pays européens ont des éco-organismes comme le nôtre, nous sommes une véritable vigie pour voir ce qui fonctionne. Notre maître-mot est l’efficacité environnementale. Nous sommes constamment dans l’action et l’expérimentation nous permet d’avoir un point de vue assez tranché en la matière.

Nous avons 217 collaborateurs et 650 millions d’euros de chiffre d’affaires venant entièrement des entreprises mettant sur le marché des produits de grande consommation. 96 % de cette somme sont reversés aux collectivités locales chaque année. Nous sommes agréés par l’État tous les six ans. Près de 4 milliards d’euros seront ainsi investis dans les six prochaines années pour le recyclage et créer de l’économie circulaire locale.

Plus de 90 % des déchets d’emballage sont recyclés à la maille nationale. D’autres pays ont fait d’autres choix en envoyant les déchets en Inde ou en Chine, alors que la France a choisi une option courageuse, consistant à créer un maillage de petites entreprises et de grands groupes internationaux recyclant les déchets sur place.

C’est un enjeu majeur pour les DOM-COM de s’appuyer sur une économie circulaire, sans avoir au bout de la circularité un transport apportant de la valeur ajoutée ailleurs.

Aujourd’hui, 90 % de la population ultramarine est couverte par un pourvoi apporté par Eco-emballages et les collectivités.

Nous avons un dispositif financé par notre société reposant sur des contrats avec des collectivités locales, qui mettent en œuvre avec nos financements toute une série d’actions pour réaliser le recyclage – de l’information à l’éco-éducation, à la collecte et au tri jusqu’au recyclage proprement dit.

Mais à Mayotte et en Guyane, les collectivités nous ont demandé de pourvoir à leur place au dispositif de collecte et de tri, sachant que dans un délai de six à douze ans, nous leur en redonnerons la gestion. Pour Mayotte notamment, nous avons décidé de ne pas attendre que toute la mise en place d’infrastructures et institutionnelle soit effective pour agir. Nous nous retrouvons donc en tant que donneur d’ordre vis-à-vis d’infrastructures, d’associations ou d’entreprises. Nous avons ainsi 100 000 personnes dans ce département, soit la moitié de la population, couvertes par un dispositif de tri. En outre, nous avons choisi une formule expérimentale de collecte séparée par flux du verre, du plastique et des métaux pour éviter un centre de tri.

En 2013, nous avons recyclé 27 000 tonnes dans les DOM-COM. Ce montant est en croissance mais ne représente que 21 % de taux de recyclage, contre 67 % en métropole, soit 16 kilos par habitant et par an, contre 46 kilos en moyenne en France.

Nous avons versé depuis 2001 40 millions d’euros à cet effet. J’ai pris la décision de doubler nos financements lors du dernier barème, il y a trois ans, pour essayer de relancer l’information, la communication, la collecte, le tri et le recyclage.

Cette augmentation était conditionnée à un accroissement du nombre de tonnes recyclées. Les financements doivent en effet diminuer au fil du temps et être remplacés par un financement lié au tonnage recyclé. Malheureusement, le tonnage escompté n’est pas au rendez-vous et si nous continuons ainsi, nous risquons de voir les financements diminuer. Car Eco-emballages est un système toujours lié à l’efficacité – sachant que le financement de chaque tonne couvre les frais de communication, de la collecte, du tri, du recyclage et du transport.

Nous avons travaillé avec les services de l’État, les associations et les élus pour faire en sorte qu’on ne paye plus tout de suite 100 tonnes et que, petit à petit, des financements réglés d’avance soient remplacés par des financements payés sur facture de recyclage. On ne peut donc pas dire que cela a marché ou n’a pas marché.

Nous nous interrogeons pour savoir comment relancer le dispositif, notamment en Guadeloupe et Martinique, où l’on est à 8 kilos par an et par habitant, contre plus de 20 kilos à la Réunion. En Guyane, nous démarrons, avec du pourvoi et de la collecte sélective classique, et nous venons de lancer le recyclage du verre à Saint-Pierre-et-Miquelon, où les résultats dépasseraient ceux de la métropole.

Nous avons également installé dans ces deux dernières collectivités et sur cinq sites dans les DOM-COM des systèmes nous permettant de recycler localement le verre notamment, grâce à un broyeur à verre. Le verre broyé est réinjecté dans diverses applications comme les sous-couches routières ou des filtres à piscine. À la Réunion, au contraire, les 7 000 tonnes de verre recyclées sont transportées en Afrique du Sud.

Nous sommes inquiets sur la capacité de beaucoup de collectivités à passer à une véritable économie circulaire. Comme on n’arrive pas à massifier les matériaux, on ne peut créer les industries locales permettant de « faire tourner la machine ».

Ainsi, en Martinique, environ 1000 tonnes de PET sont récupérées, servant par exemple à fabriquer des bouteilles d’eau en plastique. Or une usine a la capacité de récupérer ce PET et de fabriquer des préformes de bouteilles avec. Mais elle ne peut aujourd’hui fonctionner avec les bouteilles d’eau consommées par les Martiniquais et elle est obligée d’importer du plastique de la métropole, du Mexique ou d’Haïti.

Pour moi, cela ne peut durer : un investissement a été financé notamment par l’Europe et la région, avec à la clé 5 emplois effectifs et 30 potentiels. Or le gisement de bouteilles n’est pas assez collecté et trié pour nourrir cette usine locale. Si cela continue ainsi, elle ne pourra pas fonctionner.

De même, nous avons en Guadeloupe des perspectives de récupérer le carton pour faire des litières pour l’industrie volaillère. Mais les granulés utilisés en sous-couche, qui valent entre 800 et 1 000 euros la tonne, sont importés alors qu’on pourrait les produire localement pour un coût de 300 à 500 euros la tonne. Nous avons donc lancé un appel à projet pour évaluer ce dispositif. Si cela marchait, les Martiniquais et les Guadeloupéens sauraient que leurs gestes de tri créent de l’industrie et de l’emploi.

Je rappelle que le geste de tri est le premier geste environnemental des Français, mais ils se posent deux questions à cet égard : les déchets sont-ils recyclés ? Combien cela coûte-t-il ? Avoir des réponses locales à ces questions me paraît essentiel pour le développement de l’économie circulaire dans les DOM-COM.

Après trois ans d’expérimentation de ce dispositif de surfinancement, nous avons décidé d’investir encore. Conscients des difficultés rencontrées par les collectivités, nous avons proposé à l’État d’élaborer un plan de relance, que ce soit dans les DOM-COM ou en métropole.

Nous souhaitons investir davantage dans les villes car on y trie deux fois moins que dans les zones pavillonnaires ou les campagnes. Nous avons en outre décidé d’investir 4 millions d’euros de plus sur deux ans dans des moyens de collecte et de sensibilisation dans les DOM-COM, où toutes les collectivités ont la possibilité de répondre à notre appel à projet. En métropole au contraire, nous avons ciblé des collectivités ayant de faibles performances pour ne pas saupoudrer les financements. Des villes du sud arrivent en effet à obtenir entre 3 et 5 euros par an et par habitant contre 17 euros dans des villes de l’ouest.

Dès qu’on entre dans un processus d’optimisation et de récupération de plus de tonnage, la rémunération de la collectivité devient exponentielle. Si, en métropole, nous souhaitons que les collectivités soient davantage aidées à cette fin, nous lierons les financements à des actions précises et efficaces. Tel est le but de notre plan de relance de la collecte sur les territoires.

Dans les DOM-COM, nous souhaitons aussi faire, parallèlement avec les collectivités, des expérimentations concernant d’autres acteurs futurs de la collecte – laquelle doit prioritairement être accrue. Nous voulons également développer des appels à projet concernant le secteur de la distribution ou des associations, quelles qu’elles soient.

Le geste de tri permet de développer la citoyenneté. Toutes nos études montrent que lorsque quelqu’un tri, il ne jette plus de papier par terre. Nous allons donc investir dans des actions de sensibilisation, notamment au travers des associations, et j’espère que les collectivités locales et les autres acteurs répondront à nos appels à projet.

Cela dit, il faut peut-être revoir les dispositifs de collecte dans les DOM-COM. On s’aperçoit que les systèmes d’apport volontaire ne sont pas beaucoup plus performants que les systèmes de porte à porte. Si ces derniers sont nettement plus onéreux, il n’y a pas beaucoup de différence entre les deux en termes de tonnage. Nous essaierons donc de mettre en place des systèmes d’apport volontaire au plus près possible des habitants, avec un container pour 400 habitants. Si on augmentait ce nombre, on risquerait en effet de perdre des consommateurs. Le but d’Eco-emballages est de disposer d’études et de savoir-faire des collectivités locales pour être sûr que ce que l’on va mettre en place sert le consommateur et le citoyen à un coût acceptable, sachant que si on réduit les coûts, la collectivité a moins de charges et si on augmente les tonnes, elle a plus de revenus.

Les quelques secondes que l’on prend à trier déterminent soit une perte d’argent, soit un gain financier, mais aussi du point de vue environnemental, social et de l’emploi. Beaucoup de pays émergents ont d’ailleurs mis en place des systèmes informels de récupération des emballages pour gagner de l’argent. Nous pensons qu’avec les élus des DOM-COM, la collecte sélective peut devenir le socle de l’économie circulaire.

S’agissant du projet de loi, concernant le titre IV, nous souhaitons faire partager notre approche dans les DOM-COM et avancer des propositions. Je crois beaucoup au développement d’une économie circulaire indépendante, confiée à des entrepreneurs, dans laquelle la création de nouveaux matériaux sert à l’industrie locale.

Au sujet de l’article 19, nous sommes tout à fait favorables à des objectifs de valorisation de matière, qui aideront les collectivités à atteindre l’objectif de 75 % de recyclage des emballages, de même qu’à l’objectif de réduction des quantités mises en décharge. La mise en décharge n’apporte pas aujourd’hui de solution durable et le geste de tri développant l’éducation à l’environnement et à la citoyenneté est cohérent avec les objectifs politiques des DOM-COM.

Nous sommes aussi entièrement favorables à la création de combustibles de récupération – le dispositif SCR nous permettrait d’avoir un accès à l’énergie – ainsi qu’à l’objectif national de 15 millions d’habitants pour la tarification incitative, car cela développe le geste de tri et contribue à revoir les dispositifs de collecte. On a en effet beaucoup de mal à voir s’appliquer cette tarification prévue par la loi.

En outre, nous sommes pour des dispositifs de consigne, à partir du moment où ils sont étudiés et où ils ont un résultat positif pour l’environnement et la récupération des tonnes. Alors que la consigne marche très bien en Allemagne avec par exemple les fabricants de bière locale, si, en France, le système de consigne conduit aux transporteurs à produire des tonnes de CO2, il ne sert à rien.

Si nous sommes favorables au principe de proximité, il faut être conscient qu’il ne pourra pas y avoir de recyclage des métaux dans les DOM-COM, faute d’aciérie sur leur sol – ce qui suppose de trouver une solution ad hoc par territoire. Ce principe doit aussi tenir compte de l’atteinte des objectifs de tonnage pour que les industries puissent être pérennes.

Je crois beaucoup que les DOM-COM développeront des systèmes propres de recyclage, mais pas des solutions toutes faites venant de métropole. L’installation de très gros centres de tri dans les DOM-COM coûterait ainsi très cher en investissement et en opérations alors que des infrastructures plus petites permettraient de mieux répondre aux besoins locaux. Il faut mettre en place des dispositifs et des infrastructures ayant un rendement suffisant, que les habitants puissent constater.

Quant à l’article 21, nous n’avons pas bien compris son contenu.

Nous avons lancé sept appels à projet dans les DOM-COM pour faire du recyclage local à partir d’une étude réalisée dans tous les pays émergents pour essayer de cerner les possibilités de recyclage simples, sans gros investissements.

S’agissant de la prévention, je rappelle que le rôle d’Eco-emballages est la promotion du geste de tri et la réduction des erreurs de tri, qui coûtent 50 millions d’euros par an. Mais la prévention dans la consommation n’est pas dans nos responsabilités.

En conclusion, nous souhaitons ouvrir la collecte à tous les acteurs locaux – collectivités, associations ou entreprises. Nous avons quatre emplois à temps plein et cinq personnes à mi-temps travaillant dans les DOM-COM : nous y sommes donc fortement implantés et voulons nous y développer. La clé de la réussite du tri dans ces collectivités repose sur l’implication des élus, qui en général ne le regrettent pas, car les habitants s’intéressent beaucoup à ces sujets.

Nous avons d’ailleurs un partenariat avec l’éducation nationale couvrant 11 000 écoles, avec des journaux tirés à 350 000 exemplaires sur le tri. Les demandes sont très importantes dans ce domaine et nous avons même créé un jeu pour les classes.

Il est en outre important de bien transmettre les bonnes pratiques pour réussir le tri sélectif et l’économie circulaire, car elles existent dans les DOM-COM. Cela peut permettre une forte augmentation des financements d’Eco-emballages et des autres éco-organismes et une nette réduction des coûts.

Nous sommes volontaires pour encadrer et former vos ambassadeurs de tri.

Quant à la radio, elle constitue un média efficace sur les questions d’environnement, plus que la télévision. De même, il vaut mieux développer l’apport volontaire que le porte à porte, celui-ci ne devant être retenu que si on est sûr qu’il permet d’augmenter les tonnages. Avec un maillage de conteneurs d’apport volontaire qui n’excède pas 400 à 600 habitants, et un apport volontaire géré, suivi, collecté et propre.

Il est certain que, si l’apport volontaire se résume à créer une mini-déchetterie, voire une mini-décharge, autour du conteneur d’apport volontaire, et que cela n’est pas nettoyé, l’habitant ne s’y rendra plus car il sera dégoûté ; il se dira que son geste de tri salit, alors même que c’est, en principe, un geste propre. Il est donc très important, une fois les infrastructures en place, que leur entretien soit assuré. Cela repose sur les consignes données aux organisations : elles sont fondamentales dans les DOM-COM.

Le tri et la collecte, dans ces territoires, doivent être sanctuarisés comme quelque chose dont les gens soient fiers. Le Costa Rica est un pays émergent tout à fait étonnant qui a décidé de considérer le tri et la collecte comme un élément parmi les plus forts de son attraction touristique ; ces gestes y sont vraiment mis en valeur. C’est un état d’esprit, une culture que nous souhaitons développer avec vous. Il y a déjà de très bons résultats, et je crois que ce que vous allez faire avec l’économie circulaire est fondamental. Le sujet de l’économie circulaire est très précis, pragmatique et direct dès lors qu’il est lié à la collecte sélective ; ce ne sont pas de grandes idées, mais quelque chose de très concret, et je vous engage à adopter, avec Éco-emballages comme partenaire, un agenda court : dans certains cas, en moins de dix-huit mois on peut bâtir des solutions qui prouvent que l’économie circulaire est efficace dans les DOM-COM.

M. Serge Letchimy, vice-président et rapporteur. Nos performances sont relativement faibles en matière de recyclage alors que pratiquement toute la Martinique est couverte en collecte : la collecte est prise en charge, par les communautés d’agglomération, de manière de plus en plus régulière. Nous sommes passés au stade du tri sélectif, alors qu’il n’y avait auparavant que la collecte pure et simple. Nous avons mis en place des bornes, qui sont rapidement devenues très sales, avec beaucoup d’amoncellements, et nous avons donc engagé le tri sélectif à domicile ; c’est actuellement ce que pratiquent la plupart des communautés. Nous sommes également allés vers le tri avec déchetterie. Les campagnes de sensibilisation existent. Nous menons en outre un gros travail sur l’élimination des décharges où tout est jeté sans distinction.

Compte tenu de tout cela, il est surprenant que nos résultats soient trois fois inférieurs aux résultats nationaux. Ne devons-nous pas aussi faire l’inventaire des outils intermédiaires, communication, sensibilisation… ? Vous avez pris l’exemple du verre : il conviendrait de dresser un inventaire détaillé permettant d’élaborer un plan d’action au niveau du territoire et pas seulement de la communauté, car cette dernière échelle poserait un problème d’efficacité. Notre raisonnement est celui de l’économie circulaire : au bout de la chaîne, c’est elle que nous souhaitons privilégier. Nous pouvons trouver un axe qui donne tout son poids à une stratégie d’économie circulaire au-delà de la simple élimination des déchets. Or le raisonnement « économie circulaire » n’existe pas vraiment ; ce qui existe, ce sont des interrogations sur la manière de rendre le tri plus performant, un raisonnement comptable plutôt qu’un raisonnement de stratégie économique. Peut-être conviendrait-il d’introduire dans la loi un amendement sur des plans d’action régionaux de l’économie circulaire.

Ensuite, vous n’avez pas du tout évoqué le problème des interconnexions. Vous avez parlé de massification, mais si celle-ci n’a lieu que sur un seul territoire, cela ne va pas. Il faut que cela se passe entre territoires : Mayotte-Réunion, Martinique-Guadeloupe, et mieux encore Martinique-Guadeloupe-Sainte-Lucie-Dominique, Martinique-Guadeloupe-Mexique. Réexporter en Europe présente un coût écologique, un coût POSEI car le Programme d'options spécifiques à l’éloignement et l’insularité finance… Puisqu’il est ridicule de réexporter à Paris, il serait intéressant de développer des marchés mutualisables, avec, bien sûr, une réglementation adaptée ; aujourd’hui, eu égard aux questions de conformité entre règles du tri à Sainte-Lucie et en Martinique, par exemple, nous n’y sommes pas encore.

Mme Huguette Bello. Il s’agit d’un problème éminemment politique, dans le sens noble du terme, car cela concerne, comme vous l’avez dit, la vie de la cité. À vous entendre, je comprends aussi que vous n’êtes pas partisan de l’incinérateur mais plutôt du tri sélectif.

Il s’agit, de même, d’un problème fondamental d’éducation. Notre société consumériste doit prendre conscience qu’elle risque d’être submergée de déchets, et que pour l’éviter il faut éduquer. Les enfants, à l’école, sont de merveilleux communicants. Quand j’étais maire, j’ai conduit des expériences dans des écoles, qui ont reçu un label. Beaucoup de choses ont été accomplies à la Réunion, qui compte deux stations performantes, celle de Sainte-Suzanne et celle de Saint-Pierre. Mais il reste encore beaucoup à faire pour éveiller l’esprit citoyen.

Les îles, que ce soit la Polynésie ou les Caraïbes, comptent fortement sur l’industrie du tourisme. Comment faire vivre le tourisme si la saleté est partout, si, à 3 069 mètres au sommet de notre fameux Piton des neiges, il faut aller ramasser les ordures en hélicoptère parce que les randonneurs n’ont pas la conscience de rapporter leurs saletés ? Autour des bornes à verre, faute d’un ramassage conséquent, les ordures s’entassent. Dans la zone ouest de la Réunion, le ramassage est devenu moins fréquent, et le résultat est affreux.

Des personnes ont commencé à mettre en place ce que l’on appelle des « ressourceries », où l’on reprend les tissus. Je regrette qu’il n’existe pas de bornes pour les piles. En Hollande, on a donné des poules aux gens pour qu’elles mangent les pelures d’oignon, on a placé des composteurs là où il y a des jardins. Je souhaiterais davantage de projets de cette nature. Tout a un coût mais de telles initiatives, ressourceries, transformation des déchets – avec les bouchons de bouteille on peut fabriquer des fauteuils roulants –, créent aussi, comme vous l’avez dit, des emplois. Il convient donc, vous avez raison, d’informer les gens sur les suites du tri. Je comprends que vous alliez voir dans les poubelles comment les gens ont trié leurs déchets. Dans nos pays sinistrés par le chômage, cette filière crée de l’emploi.

On ne peut pas ne pas s’intéresser aux conséquences de notre société d’hyperconsommation. On a souvent parlé de la « France moche », avec les grands supermarchés, et pensons de même à toutes les forêts abattues pour faire du papier. Quant à la mer, elle est polluée par des quantités de plastiques, qui tuent les bêtes, d’ailleurs. On sait aussi que certains produits sont trop emballés : on ne peut plus acheter un yaourt, ou plutôt on le pourrait mais on ne le sait pas, et on achète tout un paquet. Il est indispensable de transformer.

Nos concitoyens sont sensibles à ces questions, car ils n’aiment pas la saleté. Néanmoins, ils produisent de la saleté. Ils n’aiment pas que ce soit sale mais ils ne trient pas. Il faut éveiller la conscience de tout un chacun au respect de l’environnement. Je suis donc très contente de vous entendre. Il faudrait que vous veniez aussi chez nous pour que les élus vous entendent. Il faut véritablement mettre en place une éducation à l’environnement, au tri. La quantité de choses que nous jetons est monstrueuse. Il y a énormément de progrès à faire.

M. Stéphane Claireaux. Saint-Pierre-et-Miquelon est au cœur de l’actualité en ce qui concerne le tri puisque Éco-emballages et d’autres éco-organismes organisent une mission chez nous toute cette semaine. Nous faisons face à plusieurs difficultés : la rigidité du contexte réglementaire, qui ne tient pas compte de l’environnement régional, l’éloignement de la métropole, ainsi que l’existence d’effets de seuil puisque nous sommes la plus petite collectivité, avec 6 000 habitants. Les difficultés de la Martinique avec la massification ont été évoquées : elles sont encore plus criantes chez nous. Tous ces organismes doivent faire preuve de pragmatisme et d’innovation.

J’entends bien la nécessité du traitement local. Dans mon territoire, la question du verre est en bonne voie, mais pour les déchets tels que les huiles usagées, les piles, les plastiques, nous sommes obligés de partir à l’export. Le pays le plus proche, le Canada, n’accepte pas nos plastiques parce que ses normes sont différentes.

M. Johann Leconte, directeur des relations avec les élus et les associations. Je peux apporter un éclairage sur ce point. À Saint-Pierre-et-Miquelon, il peut être plus simple d’envoyer les tonnes à recycler sur le territoire métropolitain que de les porter à quarante kilomètres, sur le territoire canadien, ce qui est tout de même un paradoxe environnemental. La loi française autorise le transfert de déchets mais avec de multiples contraintes. Une balle de bouteilles en plastique triées a le statut de déchet ; il est difficile de l’exporter ailleurs que dans un pays européen. De son côté, le Canada impose des contraintes sanitaires qui empêchent quasi totalement l’importation de bouteilles de lait vides, par exemple, des bouteilles qui, au passage, ont probablement été exportées par le Canada pour être consommées à Saint-Pierre-et-Miquelon. Il faudrait donc voir comment de tels échanges pourraient être facilités, dès lors qu’il s’agit de déchets non à détruire mais à introduire dans un circuit industriel de production.

Mme Sophie Legay, directrice des opérations régionales de la société Éco-emballages. Je comprends votre étonnement, monsieur le président, sur le fait que les résultats ne soient pas au rendez-vous alors que tout est en place. Pour parler clairement, les poubelles, en Martinique, sont en place. Il reste en revanche un gros travail de sensibilisation à conduire, ce qui passe notamment par la formation et l’encadrement des ambassadeurs du tri. Mme la ministre, la semaine dernière, en a rencontré plusieurs de votre territoire et je pense que cela les a motivés. Les enjeux des ambassadeurs du tri sont les mêmes chez vous qu’en métropole. Les effectifs sont en poste depuis de nombreuses années. Ce n’est pas un métier facile. C’est l’habitant qui détient le moyen d’optimiser le dispositif que vous avez mis en place.

Pour le verre, le nombre de conteneurs en Martinique est encore insuffisant. C’est la question cruciale du maillage. Les gens sont prêts à porter leur verre au bout de la rue mais nos études indiquent qu’au-delà de 350 mètres ils ne le font plus. Je vous rejoins sur la notion de plan d’action et de diagnostic territorial : il faut, à l’échelle de chaque territoire, communal, intercommunal et départemental, regarder ce qui manque. Avec le plan d’amélioration de la collecte et les 4 millions que nous souhaitons investir après deux ans, c’est bien que nous vous proposons de financer : un travail avec les services de vos collectivités locales pour examiner sur le terrain les nécessités en équipement.

Les grands axes sont donc les suivants : optimiser les moyens, par de la sensibilisation afin que l’habitant trie mieux, et donner du sens au geste de tri. Quand les gens comprendront que, lorsqu’ils trient leur verre, en Martinique, celui-ci, après le passage au broyeur, sert à rénover les routes et crée, notamment pour la gestion du broyeur, de l’emploi local, en Martinique, les résultats seront au rendez-vous. Les élus ont évidemment un grand rôle à jouer. Il faut motiver les gens par du concret, et le concret ce n’est pas « je trie pour la planète » mais « je trie pour chez moi ».

M. Serge Letchimy, vice-président et rapporteur. Je ne veux pas donner le sentiment que l’outre-mer serait sale. Des efforts considérables ont été déployés. Les dépôts sauvages, que l’on trouvait partout il y a une dizaine d’années, ont disparu. Les véhicules hors d’usage (VHU) laissés le long des routes sont bien moins nombreux que par le passé, même si l’on en trouve encore beaucoup sur les parcelles privées. Nous préparons un amendement à la loi sur la transition énergétique pour interdire le dépôt de VHU sur ces parcelles.

Il y a néanmoins des enjeux plus structurels, et c’est pour répondre à ces enjeux que je souhaite proposer pour la Martinique un contrat de projet, comportant un diagnostic, cofinancé par la région et le département, sur la question du tri en tant que filière économique complète.

S’agissant des VHU, encore, nous ramasserons des voitures toute notre vie. L’outre-mer est très importateur de voitures. Or les concessionnaires ne sont nullement intéressés par les questions de la fin de vie des véhicules, ni pour le ramassage des VHU – ce sont les collectivités qui paient pour retirer les carcasses le long des routes – ni pour la filière de traitement. Il faut régler ce problème. Quel est le blocage ? Il faudrait sans doute organiser le circuit de manière à s’approprier collectivement la filière.

La question de l’équivalence des normes, en matière de santé ou d’environnement, est cruciale dans les bassins transfrontaliers. On peut parfaitement parvenir à des dynamiques avec les autres pays, comme le Canada, mais la réglementation souvent l’empêche. Quel est l’outil qui permettra de parvenir à des équivalences ?

Je pense qu’il faut un inventaire complet des outils permettant d’industrialiser le déchet en tant que filière énergétique. Vous avez parlé de l’outil créé sur le plastique en Martinique. La région a contribué à son financement. Quelle est l’importance du marché ? La présence d’un dépôt de tri alimente-t-elle les capacités à trouver des produits locaux ? Au moment où le projet a été présenté, il était basé sur la filière locale, car il n’était pas question pour nous d’importer des déchets de l’extérieur ; nous l’avons clairement dit quand nous avons accepté de financer le projet.

Vous avez également évoqué la consigne. Quand j’étais tout jeune, on consignait certains produits. Ne faut-il pas en effet combiner plusieurs approches ?

Je me demande même s’il ne faudrait pas introduire, à côté de l’incitation, un élément de sanction. En Belgique, quand la personne chargée de retirer les ordures observe que l’habitant n’a pas respecté l’affectation des bacs, elle ne lui prend pas ses bacs. Ceux-ci restent devant la maison de l’habitant en faute pendant des jours. Je suis prêt à défendre un amendement en ce sens.

J’ai été président de la Communauté d’agglomération du centre de la Martinique (CACEM), où nous avons mené un travail considérable d’installation de bacs, et en tant que maire j’ai fait construire quatre déchetteries dans l’agglomération de Fort-de-France. Je suis même allé jusqu’à « frauder ». Comme je voulais éliminer les dépôts sauvages et que je n’avais pas de moyens financiers, j’ai annoncé à la télévision que je ferais placer trente caméras : j’en ai acheté une et j’ai fait construire vingt-neuf leurres. J’ai fait une déclaration en dénonçant, très clairement, les personnes indélicates qui avaient jeté un lit sur la voie publique et en avertissant qu’un tel geste serait sanctionné de 2 700 euros d’amende, les caméras étant installées. Il n’y a plus eu de dépôt sauvage au bout d’une semaine. Il faut intégrer un volet de sanctions, prévoir des amendes.

M. Éric Brac de la Perrière. Quand les élus s’y mettent, quand simplement même ils en parlent, cela ne reste pas sans effet. Dans certaines très grandes villes françaises, voire dans la plus grande d’entre elles, de tels propos n’ont malheureusement pas été tenus depuis huit ou dix ans.

Le sujet de l’expérimentation ou des prototypes pourrait peut-être entrer également dans la loi. Dans les Caraïbes, on pourrait très bien, au lieu de parler de déchet, parler de « produit issu de la consommation », de PIC, et nous pourrions tenter une expérimentation pour massifier entre la Guadeloupe, la Martinique et Haïti, où il existe des centaines de milliers de tonnes. Si vous faites cela, vous ouvrez, d’un coup, un agenda. Les bons sentiments, c’est bien, mais je ne fonctionne qu’à l’agenda. Nous sommes prêts à vous appuyer, en nous rendant dans les îles pour conduire une expérimentation.

M. Serge Letchimy, vice-président et rapporteur. Je pense qu’une expérimentation large, au titre de la loi, sur l’interconnectivité énergétique pourrait être lancée. Une expérimentation régionale peut également être demandée et conduite. Faites-nous des propositions. Quel plan d’investissement pour un traitement complet de la filière ? Que manque-t-il pour que le traitement se fasse de A à Z ? Nous mènerons la stratégie de communication et sensibilisation, y compris à l’école, mais présentez-nous des propositions sur le caractère nocif pour la santé et l’environnement du non-traitement des déchets, ainsi que sur les surcoûts concrets, avec l’existence de sanctions.

Nous avons besoin d’une gouvernance et d’un plan d’action. L’implication des EPCI dans la gouvernance politique de la transition énergétique est une bonne chose, mais il ne faut pas oublier que ces établissements segmentent le territoire : si chacun des quatre EPCI de Martinique mène sa transition énergétique, je ne sais pas où cela peut conduire. Une cohérence est nécessaire. Les EPCI sont directement responsables des déchets mais, s’il n’existe pas de cadre régional du recyclage et de l’économie circulaire, il ne peut y avoir de pilotage ni d’évaluation conséquente.

J’ai mis en place les ambassadeurs du tri au sein de la CACEM. Ils sont démunis, car ils ne peuvent sanctionner les mauvais comportements. Ils ne font que parler et, comme ils n’ont aucune autorité, bientôt plus personne ne les écoute. Cela fait trois ans que j’attends que le tribunal permette aux ambassadeurs du tri de verbaliser. Pour l’instant, il faut passer par la police municipale. Quand un ambassadeur du tri voit quelqu’un jeter ses détritus, il est obligé de chercher le maire : un mois passe, c’est trop tard. Je ne suis pas un policier de l’environnement, mais je pense qu’il faut allier sensibilisation et sanction.

En ce qui concerne l’expérimentation, je vous écrirai au sujet d’une convention-cadre avec la région. J’en parlerai à Victorin Lurel, pour lui demander s’il ne veut pas faire de même. Nous serions ainsi deux territoires d’expérimentation.

M. Stéphane Claireaux. Sur le traitement local des déchets et la réglementation, je peux citer un cas très parlant. À Saint-Pierre-et-Miquelon, une association d’adultes handicapés prévoyait d’acheter une machine pour traiter le carton et en faire des bûches combustibles afin de les revendre. Or il est interdit de revendre un déchet. Ainsi, quand une solution s’est présentée pour traiter localement du carton, l’opération n’a pu aboutir car on n’a pas le droit de vendre des déchets.

M. Johann Leconte. La direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) y a en effet mis des barrières, alors que l’on aurait pu imaginer qu’elle accepte de faire preuve d’un peu de souplesse.

M. Serge Letchimy, vice-président et rapporteur. Il faut introduire un amendement sur le statut du déchet. À quel moment le déchet doit-il être considéré comme déchet, à quel moment devient-il énergie ? La DREAL est un frein d’État au développement local, dans tous les domaines. La souplesse est parfaitement justifiée, et nécessaire, dans certains cas.

Mme Sophie Legay. Compte tenu de ce qui a été dit sur l’effet d’échelle et l’absence de débouchés locaux en outre-mer, il serait probablement justifié de créer des exceptions pour ces territoires quant au statut des déchets.

M. Éric Brac de la Perrière. Une expérimentation temporaire serait préférable.

Mme Sophie Legay. Les lois prévoient souvent des exceptions.

M. Serge Letchimy, vice-président et rapporteur. L’idée d’expérimentation avec la région, peut-être dans deux régions, peut permettre de faire avancer celle d’exception.

La séance est levée à 13 heures 25.