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Mercredi 14 octobre 2015

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 5

Présidence de M. Jean-Paul Chanteguet Président

– Audition de M. Bernard Guirkinger et de M. Gaël Virlouvet, rapporteurs du Conseil économique, social et environnemental (CESE), sur leurs avis « Réussir la conférence climat 2015 » et « 20 ans de lutte contre le réchauffement climatique en France : bilan et perspectives des politiques publiques »

Commission
du développement durable et de l’aménagement du territoire

La Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a entendu M. Bernard Guirkinger et M. Gaël Virlouvet, rapporteurs du Conseil économique, social et environnemental (CESE), sur leurs avis « Réussir la conférence climat 2015 » et « 20 ans de lutte contre le réchauffement climatique en France : bilan et perspectives des politiques publiques ».

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Mesdames, Messieurs, chers collègues, ce n’est pas la première fois que la Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire auditionne des rapporteurs du Conseil économique, social et environnemental. À la suite des contacts que j’ai pris, il y a quelques années, avec Anne-Marie Ducroux, présidente de la section de l’environnement du CESE, j’ai décidé d’auditionner régulièrement les rapporteurs du Conseil sur les sujets et thématiques intéressant notre Commission.

Nous avons ainsi reçu, le 13 mars 2013, M. Jean Jouzel, climatologue, et Mme Catherine Tissot-Colle, présidente de la FEDEM, co-rapporteurs d’un avis sur la transition énergétique ; le 8 octobre 2013, Mme Catherine Chabaud, sur son avis « Quels thèmes et quelle gouvernance pour une gestion durable des océans ? » ; le 14 mai 2014, M. Antoine Dulin et M. Allain Bougrain-Dubourg, sur l’avis sur « l’éducation à l’environnement et au développement durable tout au long de la vie, pour la transition écologique » ; le 3 juin 2014, Mme Anne-Marie Ducroux, présidente de la section de l’environnement, M. Marc Blanc et M. Allain Bougrain-Dubourg, sur l’avis « Agir pour la Biodiversité ».

Aujourd’hui, nous accueillons à nouveau Anne-Marie Ducroux, ainsi que deux rapporteurs du CESE : M. Bernard Guirkinger sur l’avis « Réussir la conférence climat 2015 » et M. Gaël Virlouvet sur l’avis « 20 ans de lutte contre le réchauffement climatique en France : bilan et perspectives des politiques publiques ».

Mme Anne-Marie Ducroux, présidente de la section de l’environnement du Conseil économique, social et environnemental. Je remercie les membres de votre Commission pour l’intérêt dont ils font preuve à l’égard des travaux du CESE, et de la section de l’environnement en particulier. Notre section a été l’une des plus auditionnées par l’Assemblée nationale, ce dont je me réjouis, car il est très important à nos yeux, et à ceux du président du Conseil, Jean-Paul Delevoye, d’entretenir des relations mutuelles de coopération, de compréhension et d’échange : en effet, nos rôles sont complémentaires.

En plus des recommandations « climat » figurant dans nos autres avis, notamment ceux relatifs à la transition énergétique, dont il a été tenu compte dans la loi votée en juillet 2015, nous avons produit trois avis portant spécifiquement sur le climat : les deux qui vous sont présentés aujourd’hui, ainsi qu’un troisième portant sur l’adaptation climatique, que nous tenons à votre disposition. Nous avons en effet tenu à travailler sur les deux volets des politiques climatiques que sont l’atténuation d’une part, l’adaptation d’autre part. La section des affaires européennes et internationales s’est, pour sa part, plutôt intéressée aux aspects de la COP21 relatifs aux négociations.

Globalement, les enjeux du climat ont réuni un très large consensus au sein du CESE. Il n’y a eu aucune discussion sur la nature de l’enjeu climatique, et en particulier de ses origines anthropiques. Nous avons trouvé des acteurs très mobilisés, animés par une vraie envie d’agir et de faire valoir des solutions, dans une dynamique positive plutôt que dans une attitude critique qui paraît aujourd’hui dépassée.

Les avis ont été votés à une très large majorité, ce qui atteste là encore de l’appropriation des enjeux et, je l’espère, des recommandations formulées. Je ne pourrai rester jusqu’à la fin de cette réunion, devant rejoindre la section de l’environnement que je préside tous les mercredis, mais je ne doute pas que Bernard Guirkinger et Gaël Virlouvet répondent à toutes vos questions.

M. Bernard Guirkinger. On peut se demander pourquoi le CESE travaille sur la question des négociations climatiques, et pourquoi sa section des affaires européennes et internationales s’est emparée de ce sujet pour la deuxième fois, après avoir rendu un premier avis sur la conférence de Cancún de 2010.

Le premier objectif du Conseil est de faire de la pédagogie et de mobiliser autour des négociations internationales qui vont avoir lieu, en montrant les enjeux ainsi que la difficulté de parvenir à un accord. Nous avons pris conscience, en travaillant sur la question des changements climatiques et de la COP21, du fait que les négociations à venir n’étaient pas tant de nature environnementale que de nature économique et géopolitique.

Notre deuxième objectif consiste à exprimer les attentes de la société civile vis-à-vis de négociateurs. Il n’y a plus de débat au sein du CESE sur l’origine humaine du changement climatique, et notre intervention vise aussi à traduire l’impatience, pour ne pas dire l’exaspération, que l’on peut ressentir en constatant la difficulté à conclure un accord, alors que l’on travaille depuis une vingtaine d’années sur ces questions, dont on connaît désormais les enjeux au regard des conséquences dramatiques qui sont à craindre.

Nous assumons notre rôle militant en prenant le relais de la société civile, y compris en dehors de nos frontières, puisque nous avons travaillé avec des associations internationales et de nombreux conseils économiques et sociaux de par le monde afin de les mobiliser sur ces questions. Un avis a été adopté récemment à Moscou, et le CESE a organisé plusieurs réunions associant des membres de la société civile travaillant dans des enceintes équivalentes à la nôtre. Nous avons eu à cœur de montrer, notamment aux pouvoirs publics, que la société civile était prête à agir, et que les acteurs économiques et syndicaux, ainsi que les ONG, prenaient déjà de nombreuses initiatives afin de contribuer à l’atténuation et à la lutte contre le changement climatique. Nous avons donné plusieurs exemples internationaux montrant que de très nombreuses choses sont faites partout dans le monde, notamment en Chine – beaucoup plus active qu’on ne l’imagine dans ce domaine – et aux États-Unis, en particulier en Californie.

Il est impressionnant de voir à quel point les syndicats ont pris la mesure des enjeux liés aux changements climatiques. La Confédération syndicale internationale (CSI) se prononce très clairement pour un autre mode de production et de consommation, et est parfaitement consciente des enjeux que cela implique en termes d’emploi dans les secteurs d’activité qui vont devoir s’adapter et les nouveaux secteurs d’activité qui vont émerger. La secrétaire générale de la CSI a déclaré en 2014 : « Il n’y a pas d’emploi sur une planète morte ». Ce que demandent les syndicats aujourd’hui, c’est que l’on anticipe l’engagement de la transition écologique en ouvrant des négociations, en renforçant les plateformes de négociation telle l’Organisation internationale du travail (OIT), et en accompagnant, en termes de formation, toutes les personnes dont l’emploi est susceptible d’être impacté.

Nous nous sommes peu étendus sur la nature de l’accord attendu, considérant que le débat n’est pas d’ordre juridique. Ainsi, nous n’avons pas utilisé l’adjectif « contraignant » : nous considérons qu’il faut un accord juste, global et ambitieux, basé sur des engagements réciproques, et à partir duquel il faudra encore créer une dynamique afin de renforcer continuellement les engagements pris par les différentes parties, mesurer, contrôler et améliorer ces engagements, et mettre en œuvre les plans d’action qui seront définis.

Le Fonds vert pour le climat et les engagements pris à ce sujet à Copenhague constituent également un point très important. Tous ceux qui s’intéressent à la négociation savent qu’il s’agit là d’une question de confiance : c’est la manifestation de la responsabilité différenciée des différentes parties. Les pays en voie de développement attendent, sur ce point, une concrétisation des engagements pris, en particulier sur ce chiffre mythique de 100 milliards de dollars par an à partir de 2020. C’est une somme considérable et un engagement qu’il va falloir honorer, ce qui va demander des efforts aux pays développés. Le Président de la République a déclaré en janvier 2015 que la taxe sur les transactions financières serait entièrement affectée au Fonds vert – une démarche que nous soutenons.

Nous avons attiré l’attention de toutes les parties sur l’importance de la gouvernance du Fonds vert, qui va être à l’origine de flux d’argent considérables. La société civile demande à être partie prenante des conseils d’administration du Fonds vert. L’OCDE vient de publier une analyse dans laquelle elle a miraculeusement identifié 60 milliards d’euros qui seraient d’ores et déjà disponibles. On peut être perplexe devant ce chiffre qui, à notre sens, n’a pu s’obtenir qu’en additionnant choux et carottes, c’est-à-dire dons et prêts, aides au développement et sommes d’autre nature.

Pour ce qui est de la fiscalité, le CESE réclame plus de fiscalité écologique et moins de fiscalité sur le travail. La seule façon de faire évoluer les comportements des acteurs économiques est d’agir soit sur la réglementation et les normes – ce qui relève de la compétence du législateur –, soit sur la fiscalité, afin de faire évoluer les comportements des acteurs économiques. Nous considérons qu’émettre des gaz à effet de serre constitue une pollution, donc une externalité négative, et qu’il convient en la matière d’appliquer le principe « pollueur-payeur » et de taxer les émissions, soit sous forme de marché de droits à polluer, soit sous forme de redevances pollution – ma préférence allant à cette deuxième solution compte tenu de la difficulté qu’il y a à faire fonctionner un marché.

S’il est souvent question de la Californie dans l’actualité en raison des problèmes de sécheresse auxquels elle est confrontée, cela fait plus de dix ans qu’elle travaille régulièrement, et avec une grande continuité d’un gouverneur à l’autre. Cet État a mis en place des taxations sur toutes les émissions de gaz à effet de serre, toutes les énergies fossiles, ce qui a eu des conséquences très importantes sur le plan économique : aujourd’hui, ce n’est pas un hasard si la Californie est en train de prendre une longueur d’avance en matière de fabrication de voitures électriques. Alors que la question du stockage de l’électricité va jouer un rôle majeur dans les années qui viennent, c’est en Californie que l’on investit le plus actuellement, et que des industriels commencent à travailler à très grande échelle sur cette question.

Nous sommes très partisans du principe « put a price on carbon » – fixer un prix pour le carbone – et considérons même que, de ce point de vue, nous vivons un moment historique. Tous ceux qui réclament aujourd’hui un prix du carbone sont surpris de constater que les grands acteurs économiques adhèrent à cette démarche – plus de 1 000 entreprises ont signé l’appel de la Banque mondiale – et une grande partie des leaders du secteur énergétique se sont prononcés en faveur d’un prix du carbone. Il y a donc une chance à saisir.

M. Gaël Virlouvet. Je suis très heureux de venir vous présenter le rapport « 20 ans de lutte contre le réchauffement climatique en France : bilan et perspectives des politiques publiques ». Au cours de la préparation de cet avis, nous avons invité les députés Arnaud Leroy et Martial Saddier à venir nous faire part de leurs points de vue sur la question de la lutte contre le réchauffement climatique. Il est donc logique qu’aujourd’hui, nous venions vous exposer les travaux que nous avons menés avec leur appui.

Je vous présenterai successivement les enjeux de la lutte contre le réchauffement climatique, les constats que nous avons faits et les préconisations que nous formulons.

Pour ce qui est des enjeux, nous avons rapidement pris conscience que la COP21 allait constituer un moment fort de focalisation sur le climat. Depuis quelques années, on assiste à une dramaturgie médiatique de la COP, s’achevant par la constatation que celle-ci n’a pas permis d’aboutir à un accord significatif et constitue donc un échec – on a parfois l’impression que le deus ex machina que l’on s’attendait à voir surgir ne s’est jamais montré. En réalité, les négociations internationales et la lutte contre le changement climatique concernent les modes de vie de l’ensemble des habitants du monde ; de ce fait, les avancées que l’on peut obtenir dans ce domaine sont forcément lentes – ce qui ne nous empêche pas d’espérer que nous en verrons de significatives en décembre prochain. Pour ne pas ressortir de la COP21 avec la gueule de bois, il faut resituer la lutte contre le changement climatique dans une continuité s’étalant sur plusieurs dizaines d’années. Parler de vingt ans de lutte contre le réchauffement climatique, c’est aussi mettre en lumière ce qui s’est fait en amont de la COP en France, et évoquer ce qui pourrait se passer après – de ce point de vue, on peut espérer que la COP va avoir un effet stimulant.

Les avancées de la COP21 seront, à notre sens, d’autant plus importantes qu’elles trouveront leur origine à l’échelle territoriale : aucune négociation internationale ne peut être totalement déconnectée de ce qui se passe sur les territoires. Il était donc intéressant de se pencher sur la réalité française en matière de lutte contre le réchauffement climatique.

Le premier constat que nous ayons fait, c’est que la France a agi depuis vingt ans : si c’est une évidence, elle n’est pas suffisamment rappelée. Entre 1990 et 2000, l’objectif national n’a consisté qu’à stabiliser nos émissions de gaz à effet de serre après leur décrue au cours des années 1980, notamment grâce à la montée en puissance du nucléaire ; notre objectif était très modeste sur cette période, mais il a été atteint. Depuis 2000, nous avons diminué de 13 % les émissions de gaz à effet de serre en France, en particulier dans les secteurs énergétique et industriel et, dans une moindre mesure, dans le secteur agricole ; quant au secteur des transports, il n’y a été obtenu aucune diminution des émissions.

Nous constatons, par ailleurs, que la politique nationale de lutte contre le réchauffement climatique a été, jusque dans les années 2000 à 2005, une politique engagée principalement par le niveau national, en excluant presque totalement l’initiative territoriale. C’était alors un petit groupe composé d’ingénieurs et de fonctionnaires de haut niveau rattaché au ministère de l’environnement – ou parfois au Premier ministre, au sein de la mission interministérielle sur l’effet de serre – qui impulsait la politique nationale de lutte contre le réchauffement climatique. Il n’y avait donc pas de réalité territoriale de la lutte contre le réchauffement climatique, tout au plus une réalité sectorielle, par silo.

La réalité territoriale a émergé au début des années 2000, avec la mise en application des premiers agendas 21 dans les territoires, qui, pour certains, ont pris une dimension « énergie-climat », avec le soutien de l’ADEME, qui a aidé les territoires à s’intéresser non seulement à la question énergétique, mais aussi à celle du climat. En 2004 est apparue la possibilité d’élaborer des plans climat volontaires dans les territoires ; les premiers de ces plans ont servi de modèle pour la massification des plans climat territoriaux intervenue à l’issue de la loi Grenelle, qui a constitué un véritable point de bascule pour l’implication des territoires dans la lutte contre le changement climatique.

Enfin, notre troisième constat est que la territorialisation progressive de la lutte contre le changement climatique, initiée à partir de la seconde moitié des années 2000 et poursuivie avec la loi de transition énergétique votée par votre assemblée au cours de l’été dernier, s’est accompagnée d’une décentralisation des enjeux énergétiques : lorsqu’on a commencé à parler de climat dans les territoires, on a également décentralisé les questions énergétiques.

J’en viens à nos préconisations, toutes liées aux difficultés observées. La première difficulté notée, c’est qu’alors que la participation de tous est requise dans la lutte contre le changement climatique, la politique nationale est confiée à la ministre chargée de l’environnement, sans pouvoir interministériel lié. La deuxième difficulté, c’est qu’il n’y a pas d’instance officielle de dialogue et de suivi de la politique climat au niveau national : s’il existe un conseil national de l’eau et un conseil national des déchets, il n’y a pas de conseil national du climat, en dépit de l’importance de la politique à mener en la matière.

Nous proposons donc une gouvernance lisible, tenant en deux points. Il s’agit d’abord de doter la politique climat d’une dimension interministérielle en faisant en sorte qu’elle soit assumée par le Premier ministre, notamment devant le Parlement. Il y a eu débat sur le point de savoir si la dimension opérationnelle devait rester entre les mains du ministre de l’environnement ou être confiée au Premier ministre, et ce débat n’a pas été tranché en section. Pour ma part, je pense que le ministre doit rester responsable de cette dimension opérationnelle, puisqu’il existe une direction générale de l’énergie et du climat, que l’on voit mal rattachée au Premier ministre. Nous proposons également de confier le suivi de la politique climat à une instance de dialogue unique, qui pourrait être le Conseil national de la transition écologique (CNTE) ou un conseil national du climat.

Une autre difficulté consiste dans le fait que la mobilisation des acteurs repose sur la proximité. Beaucoup de solutions étant territoriales ou locales, les politiques territoriales sont essentielles dans la lutte contre le changement climatique. Cela dit, la contribution des territoires à l’atteinte des objectifs nationaux est peu lisible. Il faut donc responsabiliser les territoires en les dotant de contrats d’objectifs climat – définissant, par exemple, les objectifs d’un territoire en matière de réduction des gaz à effet de serre. Il s’agit d’inclure ces objectifs territoriaux dans les objectifs nationaux et d’améliorer l’articulation entre les politiques sectorielles d’une part – en matière de d’énergie, de transport, d’industrie – et les politiques territoriales d’autre part.

Le troisième groupe de difficultés réside dans le changement conséquent attendu dans les modes de vie. Or, le changement climatique est encore peu abordé à l’école et le savoir-faire d’accompagnement au changement est relativement limité en France – de ce point de vue, les Anglo-Saxons sont bien meilleurs que nous. Il convient donc de densifier le contenu « climat » des programmes scolaires – encore davantage que cette année, où une circulaire ministérielle a incité à un effort en ce sens. Par ailleurs, il faut aussi dynamiser la recherche en France sur l’accompagnement au changement : nous ne devons pas laisser les Anglo-Saxons nous distancer sur ce point. Enfin, nous devons favoriser la mobilisation grâce à une semaine nationale du climat et des moyens de communication et de proximité.

Le quatrième ensemble de difficultés est celui lié aux transports. Le transport routier est le premier émetteur de CO2, avec 25,1 % des émissions de CO2. Les émissions du secteur routier ont augmenté de 9 % entre 1990 et 2012 : non seulement nous n’avons pas réussi à réduire ces émissions, mais elles ont même augmenté !

La loi Grenelle de 2009 avait fixé pour objectif de revenir en 2020 au niveau de 1990. Malheureusement, nous ne sommes pas sur cette trajectoire aujourd’hui : la distance entre le domicile et le travail continue d’augmenter, et la taxe kilométrique poids lourd a été abandonnée – au grand regret du CESE, qui a toujours soutenu le principe de l’écotaxe. Nous proposons d’initier un Grenelle du transport et de la mobilité afin d’avancer sur ces questions, en donnant une franche impulsion à la dynamique en matière de mobilité.

Le cinquième groupe de difficultés réside dans le fait que le prix du carbone n’incite pas à la réduction des émissions des gaz à effet de serre, et que certaines politiques publiques favorisent même les émissions. Sur ce point, nous partageons une préconisation avec la section des affaires internationales : il s’agit de refléter, dans le cadre économique, la préférence collective pour la réduction des émissions de gaz à effet de serre – concrètement, de donner un prix incitatif au carbone, et de commander un audit sur l’impact des investissements et aides publics en matière de carbone.

En conclusion, ce n’est pas en faisant peur au sujet du climat que nous parviendrons à mobiliser : en procédant de la sorte, nous ne ferions que contribuer à ce que les Français cèdent à la tentation de repli à laquelle ils sont parfois soumis. Nous devons mobiliser sur des valeurs positives : en d’autres termes, donner envie. Il se trouve que la lutte contre le changement climatique, qui constitue un enjeu mondial, ouvre aussi de nouvelles opportunités économiques, puisque tous les territoires y sont confrontés et vont donc avoir besoin de solutions. La France doit conserver son leadership dans la course mondiale que constitue la lutte contre le changement climatique. Nous devons nous montrer offensifs, en promouvant les solutions développées en France, en assurant une veille à l’international – ce que nous faisons insuffisamment – et en encourageant l’investissement des acteurs français dans les structures et réseaux internationaux œuvrant sur le climat. Il ne faut pas laisser aux seuls Anglo-Saxons la définition des normes qui régiront demain le monde en matière de lutte contre le changement climatique : il est essentiel que les Français contribuent à l’édiction de ces normes.

Par ailleurs, l’accueil de la COP21 doit être bénéfique à la politique française de lutte contre le changement climatique. Cela signifie que nous devons fournir de l’information fiable aux Français, et ouvrir un vrai débat, où les climato-sceptiques n’ont plus leur place – il n’y en a plus un seul au CESE, et ils sont désormais très rares au sein de la communauté scientifique –, portant sur les moyens qui nous permettront de limiter le réchauffement à plus 2 °C : c’est le sujet numéro un dans les médias français en amont de la COP.

Il s’agit donc de parler des solutions, comme l’a fait le Gouvernement, mais aussi – et cela reste à faire – de capitaliser la mobilisation de tous les acteurs – entreprises, syndicats, monde scientifique, associations – à laquelle on assiste actuellement autour de la COP21, et d’établir un bilan afin de contribuer à pérenniser et amplifier la dynamique française de lutte contre le réchauffement climatique.

M. Jean-Yves Caullet. L’un des premiers objectifs de la COP21 doit être de permettre à notre pays de retrouver son rôle et son ambition d’universalité dans la réflexion et dans les propositions, mais aussi en termes d’action et d’exemple. Je ne m’étendrai pas sur la nature juridique de l’accord : nous savons tous qu’elle est conventionnelle, et que cet accord ne va pas nous faire passer des ténèbres à la lumière. En revanche, le fait qu’il y ait un accord global sera le signe d’une avancée et constituera un succès pour la France – qui obligera notre pays au niveau national comme international.

Pour ce qui est du financement, vous avez parlé d’une taxation sur les transactions financières, mais croyez-vous que la réflexion et le travail autour de la COP21 puissent accoucher d’un système global ? Nous avons adopté ici même, il y a quelques jours, un amendement en loi de finances ayant pour objet d’élargir la taxe sur les transactions financières aux transactions intraday – c’est-à-dire l’achat et la revente d’un titre au cours d’une seule journée. Pensez-vous que la COP21 pourrait faciliter la globalisation du système, ou que nous devrons toujours nous contenter d’une addition de systèmes ?

En ce qui concerne la gouvernance, nous avons tous en tête les mêmes schémas classiques de représentativité, désignation, articulations et institutions. Mais quelle place pourrait être faite aux réseaux, notamment les réseaux sociaux – nationaux et internationaux – pour que la société civile cristallise son influence dans la gouvernance de l’après COP21 ?

Vous avez parlé du prix du carbone, et je crois qu’il y a effectivement un paradoxe à constater que le monde de l’entreprise – en particulier dans le secteur énergétique – est en avance sur les pouvoirs publics, alors qu’il semble dans le même temps souhaiter un guide pour prendre les décisions stratégiques, et surtout éviter d’être surpris par des décisions politiques brutales, qui pourraient avoir de graves conséquences.

L’enjeu des transports interpelle tout particulièrement notre Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire. Est-il normal d’évoquer ces deux thèmes séparément ? Finalement, dans le cadre de l’aménagement du territoire au sens d’un aménagement de l’économie, de la présence des ressources humaines, matérielles et capitalistiques, pour produire, n’a-t-on pas fait trop confiance à la performance technique du transport ? En Île-de-France, notamment, il me semble que l’on a trop souvent vu les transports comme une variable d’ajustement, et considéré qu’il serait toujours possible de trouver un moyen de remédier à la saturation des infrastructures. Ce modèle mérite aujourd’hui d’être remis en question, étant donné que le secteur des transports est le seul où nous ne parvenons pas à progresser. Quelle est votre opinion sur une transition vers le gaz, et quel serait l’impact sur le secteur des transports si nous accompagnions de façon résolue une transition des produits pétroliers vers le gaz, censé produire moins d’émissions ?

Vous avez parlé d’engagements territoriaux, mais de quels moyens et compétences techniques les territoires disposent-ils pour conduire une politique décentralisée ?

Enfin, dans le prolongement de ce que vous avez dit au sujet de l’école, je voudrais évoquer la formation supérieure : pourquoi ne forme-t-on pas des ingénieurs, qui pourraient proposer des solutions pouvant être mises en œuvre dans le domaine de la lutte contre le réchauffement climatique, comme ce fut le cas précédemment pour l’électrification ou l’adduction d’eau potable ? Le changement climatique ne constitue-t-il pas un enjeu suffisamment important ?

M. Jean-Marie Sermier. « Notre maison brûle et nous regardons ailleurs », a dit le président Jacques Chirac lors du IVe Sommet de la Terre en 2002 à Johannesburg. Depuis une quinzaine d’années, les gouvernements qui se sont succédé dans les différents États du monde – notamment les États développés – s’efforcent de trouver des solutions afin de préserver notre capacité à rester sur cette planète. Aujourd’hui, plus personne ne remet en cause un changement climatique qui ne se résume pas à un simple réchauffement, mais va engendrer des modifications susceptibles de se traduire par des effets dévastateurs. De même, l’origine anthropique de ce phénomène est admise de façon unanime : c’est bien l’homme qui est à l’origine de l’évolution climatique dont nous ressentons les premiers effets et qui, dans le meilleur des cas, pourra être contrôlée à l’horizon 2100 à environ plus 2 °C. Encore faudrait-il que cet objectif soit encore à notre portée, ce qui n’est pas certain : si l’on se réfère aux tendances observées depuis trente à quarante ans, il est bien plus probable que nous nous dirigions vers un réchauffement de l’ordre de 4 °C à 5 °C.

Dans ce contexte, s’intéresser à la réussite de la COP21 est sans doute important, mais pas essentiel. L’objectif que nous devons poursuivre n’est pas de réussir la COP21 pour que la France en tire un motif de gloire, mais de faire en sorte que la prise de conscience qui a déjà eu lieu – plus largement qu’on ne le dit dans les pays en voie de développement – puisse déboucher sur des mesures extrêmement précises. Les discours tenus au niveau national, européen et mondial, ne peuvent plus être discordants, en particulier sur cette question essentielle qu’est l’émission de CO: un message très clair doit être envoyé sur la nécessité de favoriser les énergies rejetant le moins de gaz à effet de serre. De ce point de vue, si la France a tenu un certain nombre de ses engagements, c’est grâce à la politique de maintien, voire de maintien de l’énergie nucléaire, qu’elle a menée durant des années. On ne peut donc pas, dans un texte de loi, envisager de réduire drastiquement la part du nucléaire, et prétendre dans le même temps réduire le volume de CO2 rejeté dans l’atmosphère. De ce point de vue, nos voisins allemands ont été confrontés à de très grandes difficultés après avoir pris la décision de mettre fin au nucléaire.

Il est important de faire des progrès en termes de gouvernance. Vous avez évoqué celle mettant en œuvre les réseaux, tandis que d’autres ont parlé des associations. Pour ma part, je m’en tiendrai aux gouvernements, car on sent bien que nous sommes très loin, à l’heure actuelle, d’une gouvernance internationale.

Enfin, il est extrêmement important que nos chercheurs, excellents dans le domaine scientifique, s’améliorent dans le domaine de la communication : ils doivent apprendre – en faisant appel à des experts, si besoin est – à trouver les mots justes, afin que notre société comprenne l’importance de ce sujet.

M. Bertrand Pancher. Je remercie les membres du CESE pour leurs rapports, comme toujours de grande qualité. Je partage avec eux la conviction que les solutions de demain se construiront avec le concours de l’ensemble des acteurs de la société civile : il n’appartient pas aux responsables politiques de les définir à eux seuls.

La COP21 aboutira à un accord qui, si ambitieux soit-il, ne résoudra pas la question du réchauffement climatique : après la conférence, nous devrons continuer à imaginer et à mettre en œuvre des modèles de régulation sur le plan national, européen et international car, sans ces modèles, rien ne pourra se régler. En la matière, la fiscalité écologique est un levier indispensable, que nous devons constamment faire progresser. La gouvernance nationale doit également être améliorée et rendue plus stable. À cet égard, il convient de s’interroger sur les moyens à attribuer, soit à un grand ministère de l’écologie, soit à un ministère du long terme directement rattaché au Premier ministre : en tout état de cause, la question de la gouvernance du long terme doit être posée, car notre instabilité réglementaire et fiscale est l’un des premiers obstacles à la mise en place de stratégies environnementales efficaces.

Sur le plan européen, le modèle de demain est-il celui d’une meilleure gouvernance et d’une plus grande stabilité de nos stratégies en matière de marché des émissions de carbone – ce que l’on désigne par l’expression Emission Trading Scheme (ETS) – et une ouverture des ETS à d’autres modes de production des gaz à effet de serre, notamment le transport, ou celui d’une taxation du carbone aux frontières de l’Europe ? Alors que de telles questions paraissaient totalement hors de propos, pour ne pas dire taboues, il y a quelques années, elles sont aujourd’hui sur la table – l’ancien commissaire européen Michel Barnier vient d’ailleurs de signer une tribune très intéressante à ce sujet. Quelle est votre position sur ce point ?

Sur le plan international, c’est encore plus confus : rien n’est structuré en matière d’émissions de gaz à effet de serre. La solution consiste-t-elle en un système de bonus-malus entre les pays, où ceux qui polluent le plus sont ceux qui payent le plus, selon des modalités restant à définir ? Convient-il de tarifier le carbone par grandes zones économiques ? Est-il envisageable d’appliquer des normes sectorielles, selon un système qui laisse espérer des avancées, notamment dans le domaine du transport automobile ? Enfin, en matière de finances, la régulation des placements et des investissements ne se pose pas seulement au niveau national, mais bien à l’échelle internationale. Pouvez-vous nous éclairer sur ce point ?

M. Jacques Krabal. Il importe d’entendre ce que dit la société civile sur la problématique du dérèglement climatique, c’est pourquoi les rapports du CESE, qui travaille sur la question depuis dix ans, présentent un si grand intérêt. Nous devons tous œuvrer à la réussite de la COP21, sans nous demander si cela va profiter au Gouvernement. Si un premier pas a été fait avec la reconnaissance unanime de la responsabilité humaine dans le dérèglement climatique, la question de la diplomatie climatique reste extrêmement compliquée. Vous nous proposez de surmonter la dramaturgie habituelle des conférences internationales en organisant des ruptures, mais une telle entreprise n’a rien de facile. Tout dépend de la brutalité de la rupture et de sa proximité avec la réalité du terrain, vécue au quotidien par les citoyens et les acteurs économiques et sociaux. Tout dépend également du lien qui doit nécessairement être retissé entre le local et le global, entre la régulation mondiale et les initiatives des forces vives territoriales.

Vous comparez les politiques climatiques déployées avec plus ou moins de réussite dans d’autres pays, notamment la Chine, les États-Unis ou la Suède, ce qui permet de constater que tout est possible en la matière, le meilleur comme le pire. La question de l’appropriation de l’enjeu climatique est essentielle. Constatant qu’en termes de mobilisation, il reste beaucoup à faire, vous saluez les actions menées dans ce domaine, que ce soit par l’Association des Journalistes de l’environnement et du climat (AJEC21), ou conjointement par le ministère de l’environnement et le ministère de l’éducation nationale. Vous soulignez également le risque, qui peut sembler paradoxal, d’une surexposition médiatique temporaire, suscitant des espoirs qui pourraient se trouver déçus. Si vous aviez un seul conseil à nous donner pour que la mobilisation puisse être amplifiée jusqu’à aboutir à une véritable appropriation de la préoccupation climatique par les citoyens, quel serait-il ?

Partageant votre constat selon lequel la population française reste encore relativement peu associée, nous soutenons la possibilité pour les collectivités locales de solliciter directement le Fonds vert et, plus largement, les financements internationaux, ainsi que la possibilité pour les pays en développement de recourir au Fonds vert pour l’obtention d’un appui dans l’élaboration de leurs politiques publiques visant à adapter leur trajectoire de réduction d’émissions de gaz à effet de serre. Comme vous le soulignez, sans avancée sur les financements, il n’y aura pas d’accord à Paris pour confirmer et renforcer la décision prise à Copenhague de mobiliser 100 milliards de dollars de fonds publics et privés à partir de 2020 pour les pays en développement. L’Agence française de développement (AFD) a consacré plus de 2,5 milliards d’euros au climat, et contribue à hauteur d’un milliard de dollars sur quatre ans au financement du Fonds vert. Comme on le voit, le compte n’y est pas, et notre diplomatie doit s’engager activement pour mobiliser les banques de développement, les pays industrialisés et le secteur privé, et pour trouver des financements innovants. Pensez-vous que des améliorations soient apparues depuis le vote de votre rapport en avril dernier ?

Comme l’a dit tout à l’heure Mme la présidente Anne-Marie Ducroux, le CESE aborde la question du climat dans un esprit de consensus – vos deux rapports ont d’ailleurs été adoptés à l’unanimité. Je pense que cet état d’esprit devrait inspirer les parlementaires que nous sommes, mais aussi les instances diplomatiques internationales. La raison du plus fort ne doit pas être toujours la meilleure, et les pays dominants doivent faire preuve d’une plus grande écoute si nous voulons aboutir à un accord utile à tout le monde.

M. Philippe Plisson. Chacun ici est convaincu de l’importance de l’enjeu que représente la COP21 pour la France, pays organisateur, mais aussi et surtout pour l’avenir de la planète.

Comment pensez-vous qu’il soit possible d’accompagner les pays en voie de développement vers la prise en compte du défi climatique, autrement que dans le cadre d’un événement catastrophique majeur, alors que les populations de ces pays aspirent à une croissance économique dont ont largement bénéficié, et parfois abusé, les pays dits développés dont nous sommes ?

La France a fait un grand pas vers la prise en compte du réchauffement climatique dans les politiques publiques, notamment avec la loi sur la transition énergétique pour la croissance verte. En dépit des restrictions budgétaires, un effort de 10 milliards d’euros sera consenti sur trois ans au profit des secteurs du transport, du logement et de l’énergie. Vous avez mis en avant, dans votre rapport, l’importance du travail spécifique à accomplir vers le lien entre climat et aménagement du territoire. Pouvez-vous nous donner quelques pistes concrètes relatives à l’aménagement agricole et industriel, ainsi qu’à l’urbanisation ?

Enfin, nous sommes maintenant à quelques semaines de la COP21. Quel sera pour vous l’indicateur majeur de la réussite de cette conférence ?

Mme Sophie Rohfritsch. Ma question s’adresse à M. Gaël Virlouvet. L’une des préconisations de votre rapport consistait à mobiliser les entreprises, en particulier les PME, et à les mettre en réseau. Une initiative semblable avait déjà été lancée à la suite de la Conférence sur le climat qui s’était tenue à Doha en 2012, avec la mise en place du réseau Global Compact. Ce réseau s’est structuré et rassemble aujourd’hui 8 000 entreprises, mais ce n’est que l’année dernière que les PME françaises ont été invitées à s’y joindre, comme vous le soulignez. Aujourd’hui, quel est l’état de la mobilisation que vous appelez de vos vœux ? Théoriser les solutions au réchauffement climatique est une chose, mais il serait beaucoup intéressant que les acteurs concernés se saisissent du sujet et agissent, notamment par le biais de ce type de réseaux.

M. Yannick Favennec. L’un des enjeux centraux des négociations qui vont se tenir dans quelques semaines à Paris est d’obtenir des avancées concrètes et significatives, contrairement à celles résultant de la Conférence de Copenhague de 2009, contenues dans un accord final juridiquement non contraignant pour les États signataires. Après ce que l’on a appelé l’échec de Copenhague, la COP21 est particulièrement attendue, en ce qu’elle doit permettre un accord universel fixant notamment les engagements étatiques pris pour lutter contre le réchauffement climatique au-delà de 2020.

La COP21 sera aussi l’occasion de négocier l’ampleur des réductions des émissions de gaz à effet de serre, auxquelles les États doivent s’engager pour la période de l’après 2015. La lutte contre le réchauffement climatique, véritable pierre d’achoppement dans les négociations à venir, nécessite des engagements concrets et actifs. Alors que des pays nouvellement industrialisés, comme l’Inde et la Chine, refusent d’être tenus responsables des émissions ayant permis le développement économique des pays occidentaux, certains États industrialisés comme les États-Unis, le Canada, la Russie et l’Australie, ne semblent pas très enclins à mettre en place des politiques de réduction des émissions. L’avenir des négociations sur ce point ne vous semble-t-il pas particulièrement flou, alors que notre planète est désormais engagée dans une course contre la montre à l’enjeu crucial ?

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Je souhaite la bienvenue parmi nous à Marie Le Vern, dont l’arrivée marque à la fois le rajeunissement et la féminisation de notre Commission. Vous avez la parole, chère collègue.

Mme Marie Le Vern. Je vous remercie, Monsieur le président. Monsieur Bernard Guirkinger, vous soulignez dans votre rapport la nécessité de susciter l’adhésion et la participation des populations aux négociations environnementales de la COP21, et appelez les pouvoirs publics à un effort de pédagogie en direction des citoyens par le biais des associations, fondations, organisations syndicales et patronales. Des efforts ont été faits en direction des enfants, de la primaire au collège, au travers d’actions visant à l’éducation au développement durable ; de même, au sein de notre assemblée, les enjeux de la COP21 ont été pris en compte dans le cadre du Parlement des enfants. Pourtant, à deux mois de la conférence, on constate que les 15-30 ans restent faiblement mobilisés. Ainsi, un sondage a récemment révélé que dans cette tranche d’âge, deux jeunes sur trois ne savent pas ce qu’est la COP21 ; ils sont, par ailleurs, peu optimistes quant à l’issue des négociations et aux solutions institutionnelles et politiques qui pourraient en résulter.

On ne peut que regretter que cette génération passe à côté de l’événement fondateur pour demain qu’est la COP21. Au regard de vos recommandations, comment évaluez-vous la mobilisation de la population et de la société civile française sur cet enjeu, et comment jugez-vous l’effort de pédagogie du Gouvernement que vous appeliez de vos vœux ? Vous préconisez que les États fassent figurer dans leurs contributions nationales un volet sur les modalités d’information et de participation du public à la prise de décision. À votre connaissance, dans quelle mesure cela a-t-il été fait ?

M. Jean-Louis Bricout. Vous avez dit que la contribution des territoires sur l’enjeu climat était essentielle. J’ai trouvé le bilan que vous avez dressé un peu pessimiste. Il me semble que les écoles mènent des actions pédagogiques sur l’environnement et le climat. Les programmes des territoires à énergie positive (TEPOS) et les territoires à énergie positive pour la croissance verte (TEP-CV) actuellement mis en place montrent que tout n’est pas négatif.

En revanche, vous avez raison, dans les territoires dits en décrochage, la contribution à l’enjeu climatique est parfois annexe. La précarité sociale est souvent liée à la précarité énergétique. Vous indiquez dans votre avis qu’il faudrait une action forte des pouvoirs publics en matière pédagogique. Pouvez-vous préciser quel pourrait être l’investissement des collectivités locales dans ce domaine ?

M. Guillaume Chevrollier. Messieurs les rapporteurs, votre rapport préconise de responsabiliser davantage les collectivités locales, estimant que la participation de tous est indispensable. Vous envisagez une meilleure articulation entre l’État et les territoires entraînant une clarification des objectifs donnés aux collectivités, vous recommandez une responsabilité croissante des territoires dans les émissions de gaz à effet de serre et vous demandez la fixation d’objectifs de réduction définis dans le cadre du Schéma régional climat air énergie (SRCAE).

À l’heure où le Gouvernement réduit de manière drastique les dotations allouées aux collectivités territoriales, il convient d’accompagner financièrement ces collectivités dans la mise en œuvre de ces nouvelles obligations. Il faut allier des moyens en phase avec l’ambition affichée dans le domaine environnemental.

Vous avez indiqué que la société civile est prête à s’investir. Mais vous n’avez pas suffisamment parlé du secteur agricole qui est particulièrement concerné par le changement climatique. Les agriculteurs sont déjà mobilisés pour préserver leur capacité de production et s’investir dans le cadre de la transition énergétique dans les territoires.

M. Stéphane Demilly. Chateaubriand écrivait : « Les forêts précèdent les peuples, les déserts les suivent. » C’est par cette citation que commence l’exposé des motifs d’une proposition de loi que j’ai déposée récemment dans le cadre de la COP21. Cette proposition a pour objet d’assurer le suivi des engagements pris par la France dans le cadre des accords adoptés lors des différentes conférences, en obligeant l’État à présenter un rapport annuel devant le Parlement.

À quelques semaines de la COP21, la question n’est plus en effet de savoir si des engagements seront pris par les États mais quelle sera la nature de ces engagements et s’ils seront tenus.

Tous, autour de cette table, nous suivons de près les débats qui entourent la COP21 et tous nous partageons la même inquiétude qui est finalement résumée dans le titre de l’avis du CESE « Réussir la COP21 ». L’heure n’est plus au constat, l’heure n’est même plus aux propositions. Les constats ont été faits à de nombreuses reprises et nous sommes abreuvés de littérature sur le sujet. Limiter à deux degrés le réchauffement est en lui-même un aveu de l’acceptation de la situation dramatique dans laquelle nous sommes déjà.

Les mesures à prendre pour freiner le réchauffement sont connues et, si les dirigeants internationaux n’agissent pas d’eux-mêmes, c’est la société qui doit les y contraindre, qu’ils soient responsables associatifs, chefs d’entreprise, élus ou citoyens engagés. C’est là que je rejoins les rapports du CESE, tout comme j’applaudis l’initiative « La France des solutions » que vous lancez avec l’association Reporters d’espoirs. Dans la présentation de cet événement, vous écrivez sur votre site : « Le pessimisme national contraste avec l’incroyable vitalité des initiatives locales » et vous lancez astucieusement le pari : « Et si on démultipliait la visibilité des citoyens, entrepreneurs, agriculteurs, acteurs publics associatifs qui prennent l’initiative ».

La COP21 ne sera pas réussie simplement si une belle photo des chefs d’État satisfaits est prise ni parce qu’un beau document sera signé ; elle le sera si, sur le terrain, les acteurs locaux mettent en marche une machine.

Je souhaite donc que vous puissiez nous parler de cette initiative « la France des solutions » et des implications que nous pouvons y puiser.

M. Charles-Ange Ginesy. Messieurs les rapporteurs, vous dites que la société civile est prête à agir, beaucoup plus que ne l’imagine le monde politique. N’y a-t-il pas un vrai problème de vulgarisation ?

Les responsables sont-ils suffisamment informés ? Sont-ils en mesure de prendre les bonnes mesures ? « Les rapports des experts à l’attention des décideurs politiques et des grands publics sont incompréhensibles. » C’est ce que nous indique une étude publiée par la revue Nature. Le Groupement d’experts intergouvernementaux sur l’évolution du climat (GIEC) signale qu’une réflexion est en cours pour mieux partager les connaissances sur le climat. La climatologue française Valérie Masson-Delmotte reconnaît que les publications du GIEC sont d’un accès très difficile pour les non-spécialistes. Il est nécessaire de mieux communiquer et de mieux vulgariser l’information. Quel est votre avis sur ce sujet ?

J’ai eu l’occasion d’auditionner, dans la perspective du programme de recherche lié à la biodiversité et au développement durable, des responsables de l’Institut national de recherche en sciences et technologies pour l’environnement et l’agriculture (IRSTEA), du Centre national de la recherche scientifique (CNRS), de l’Institut de recherche pour le développement (IRD), et de l’Agence nationale de la recherche (ANR). J’ai pu constater que, s’ils sont tous mobilisés pour la COP21, ils n’ont pas les moyens d’y satisfaire, en tout cas ils ne sont pas prêts à y participer. Jean-Marie Sermier a posé la question de la recherche et de l’implication de la recherche en vue de la COP21. Que pouvez-vous ajouter à cela ?

Enfin, vous parlez d’un lien nécessaire avec les territoires et vous avez raison. Quelles sont, au-delà du constat que vous faites, les préconisations que vous pouvez nous donner pour la mise en œuvre de modalités pratiques ?

Mme Françoise Dubois. Je veux saluer les collectivités territoriales, les ONG ou encore les mouvements associatifs qui sont engagés dans la lutte contre le réchauffement climatique.

Je m’interroge sur la mobilisation citoyenne en faveur de la COP21. J’ai encouragé, dans le département de la Sarthe, des initiatives éducatives dans des établissements scolaires en lien avec des structures associatives. Ces initiatives sont absolument remarquables. Mais lorsque la population s’intéresse à cette conférence internationale, pourtant majeure pour l’avenir de notre planète, je n’ai pas le sentiment d’un déferlement d’enthousiasme et d’espoir. J’aurais aimé connaître votre sentiment sur ce point. Partagez-vous ce diagnostic ? Si oui, quelles en sont les raisons ?

M. Jacques Kossowski. Cet été, l’ancien maire de New York, Michael Bloomberg, a appelé à la mobilisation des maires des villes du monde entier sur le climat. Nous devons entendre ce message avec force. Après tout, ces élus sont notamment en Europe. Ils sont les premiers concernés par l’aménagement, l’urbanisme, l’éclairage public, les réseaux de chaleur, la mobilité, la mise en place de ce que l’on appelle la smart city.

Les villages et les villes émergent sur la scène nationale et internationale, comme en témoigne l’organisation du forum des collectivités locales à Durban, et commencent à jouer un rôle important dans la transition énergétique. Je souhaite que vous traciez les perspectives de ce rôle croissant que vont jouer les communes et les métropoles dans la lutte contre le réchauffement climatique. Comment, dans la recherche de cet objectif, voyez-vous l’articulation entre les échelons européen, national, communal et métropolitain ?

Mme Geneviève Gaillard. Avec la COP21, nous vivons un moment historique et nous espérons tous qu’elle aboutira.

Nombreux sont mes collègues qui ont parlé de l’aide au développement. Ce sujet nous intéresse, à travers l’Agence pour le développement et le Fonds vert. Je reviens d’une mission à Madagascar, l’un des pays les plus pauvres de la planète, où la déforestation de la forêt primaire est monumentale. La population utilise le bois pour faire cuire les légumes alors que l’électrification est possible…

Cette année, la France va diminuer les crédits en faveur de l’aide publique au développement puisqu’ils passent de 2,77 à 2,6 milliards d’euros, ce qui n’est pas un signe enthousiasmant. Que faire pour les pays qui veulent s’inscrire dans une démarche de limitation des perturbations par le climat ? Vous préconisez dans votre rapport une utilisation efficace et équitable du Fonds vert. Comment ? Peut-on les obliger à certaines actions ? Je connais d’autres pays qui sont dans la même situation que Madagascar. Pensez-vous que les pays les plus en difficulté peuvent recevoir davantage, comment et sous quelle forme ?

M. Jean-Pierre Vigier. Les pays du G20 font des efforts concernant l’évolution de l’intensité carbone puisqu’elle aurait chuté de 2,7 % entre 2013 et 2014. Pour autant, les émissions de gaz à effet de serre ont progressé de 0,5 % en 2014. Pour limiter à deux degrés le réchauffement climatique, la baisse de l’intensité carbone devrait atteindre 6,3 % par an au niveau mondial. La France est un bon élève en réalisant la deuxième plus forte réduction de l’intensité carbone. Cependant, les mauvais élèves du G20 sont des pays d’envergure comme le Brésil ou l’Inde où l’augmentation des émissions de gaz à effet de serre a atteint des seuils élevés, voire très élevés.

À la veille de la COP21, sans vouloir être pessimiste, pensez-vous que la mobilisation internationale est suffisamment forte pour limiter le réchauffement climatique à deux degrés ?

M. Michel Lesage. À mon tour, je tiens à féliciter les rapporteurs du CESE pour le travail qui a été réalisé et les propositions qui ont été faites. Toutefois, ils n’ont pas évoqué la question de l’eau. C’est d’ailleurs souvent le cas lors de diverses réunions et colloques sur ce sujet. On parle souvent des émissions de gaz à effet de serre, de la transition énergétique, des mobilités et des transports mais peu de l’eau alors que c’est le premier élément concerné par les dérèglements climatiques. J’en veux pour preuve la baisse de la pluviométrie, l’intensification des catastrophes naturelles ou encore l’élévation du niveau de la mer. L’eau menacée est désormais menaçante. J’ajoute que les pressions sur la ressource sont aussi à l’origine de plus en plus de tensions entre les pays. Bref, c’est un véritable enjeu de développement humain.

Avez-vous mené des réflexions sur ce sujet, et quelles sont-elles ? Comment intégrer un objectif eau ambitieux dans la COP21 ? Comment intégrer l’eau dans les priorités de financement climat pour cette conférence ?

M. Alain Chrétien. La COP21 va se tenir du 30 novembre au 11 décembre prochain. Connaissez-vous le déroulement des négociations et leur fonctionnement en termes de prise de décision ? Certaines décisions seront-elles prises à l’unanimité, à la majorité et dans quel ordre thématique ? On parle beaucoup de grands enjeux, mais plus concrètement connaît-on le programme durant ces dix jours que tout le monde qualifie d’historiques ? Faudra-t-il faire pression et montrer nos exigences ou bien est-ce une boîte noire dans laquelle seuls ceux qui ont un sésame pourront entrer et découvrir les résultats ?

M. Laurent Furst. Comme d’habitude, on fait un procès aux transports individuels. Mais il faut regarder les chiffres. En 1980, la France comptait 21 millions de véhicules, contre 38 millions en 2014. Notre pays était alors en retard par rapport aux autres pays occidentaux en ce qui concerne l’équipement des ménages et des entreprises. Ce retard a été rattrapé depuis. Actuellement, la population augmente de 0,4 à 0,5 % par an alors que le parc de véhicules progresse de 0,2 %, c’est-à-dire que nous sommes complètement sortis de cet accroissement massif du parc de véhicules. Vous prenez toujours en compte l’évolution de la consommation et des gaz mais jamais de la dynamique du parc. Or notre pays connaît un plateau en termes d’équipement du parc de véhicules.

En renouvelant tout le parc de véhicules avec des véhicules plus modernes, on économiserait entre 15 et 20 % d’émissions de gaz à effet de serre. Or l’âge moyen des véhicules était de 6 ans en 1990, contre 8,3 ans en 2013. De plus, le parc moyen de véhicules vieillit et se renouvelle de moins en moins. Il faut changer le paradigme d’analyse et regarder les chiffres avec objectivité.

La commission d’enquête visant à évaluer les conséquences sur l’investissement public et les services publics de proximité de la baisse des dotations de l’État aux communes et aux EPCI a constaté que la baisse des dotations aux collectivités locales s’est déjà traduite par une baisse de l’offre en transports en commun urbains et interurbains de 2,5 % alors que nous n’en sommes qu’au tiers de la baisse des dotations aux collectivités locales. Il y a donc un antagonisme incroyable entre l’objectif recherché et les conséquences de la baisse des dotations aux collectivités locales.

J’ai déposé une proposition de loi sur l’autoconsommation électrique. Vous avez parlé du projet de batterie domestique de Tesla. C’est un projet extraordinaire pour un pays comme le nôtre qui possède une grande surface de toitures. Toutefois, ce que l’on ne maîtrise pas, c’est notre culture électrique faite de grandes productions industrielles et nucléaires avec des polytechniciens. La production déconcentrée et l’autoconsommation, c’est-à-dire ce qui ne passe pas par notre réseau, ne sont pas dans notre culture. Que peut-on faire pour changer cette culture ?

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Faire disparaître la pensée unique !

Mme Geneviève Gaillard. Très bien !

M. le président Jean-Paul Chanteguet. La France compte aujourd’hui 31 millions de véhicules de tourisme, dont 9 à 10 millions de véhicules particulièrement polluants qui sont des véhicules diesel anciens. La fiscalité sur le diesel est un vrai sujet compte tenu de ses conséquences au plan environnemental et sanitaire – en la matière, je vous renvoie au rapport fait par la Sénat – et de l’actualité récente avec l’affaire Volkswagen.

Nous avons examiné un amendement de M. Jean-Yves Caullet qui visait à corriger l’écart de fiscalité qui existe entre le gazole et l’essence sur cinq, six ou dix ans. Actuellement, l’écart est de 15 centimes par litre. En multipliant 400 millions par 15, on atteint 6 milliards d’euros, ce qui n’est pas négligeable.

Il faut adresser aux utilisateurs et consommateurs d’énergie fossile un signal prix suffisamment fort si l’on veut qu’ils modifient leur comportement. Certains pensent que cette compensation doit se faire uniquement sur le gazole tandis que d’autres estiment qu’il faut augmenter le prix du gazole et diminuer celui de l’essence. Personnellement, je pense que la deuxième solution serait une erreur parce que l’objectif est de diminuer la part des énergies fossiles dans le mix énergétique et de lutter contre le réchauffement climatique. Il ne faut pas considérer que le gazole est une énergie fossile mais pas l’essence. Actuellement, on constate que la consommation d’essence et de gazole augmente en raison de la baisse du prix du baril de pétrole. J’estime qu’il faudra augmenter dans le temps la fiscalité sur le gazole sans diminuer celle sur l’essence.

Le relèvement de 2 centimes du prix du gazole rapporte près d’un milliard d’euros. Avec cette somme non négligeable, il faut mettre en place des mesures d’acceptation. Ces mesures concernent bien entendu les automobilistes à titre individuel qu’il faut aider à changer leur véhicule polluant et ancien. Il faut aider également un certain nombre de secteurs d’activité qui bénéficient d’exonérations – je pense au secteur du transport routier. Enfin, il faut donner des moyens financiers à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) pour développer les transports en commun et les infrastructures alternatives à la route, qu’il s’agisse du rail ou de la voie d’eau. L’objectif n’est pas, au travers de l’augmentation de cette taxe, d’alimenter le budget de l’État, mais de mettre en œuvre une politique pertinente et cohérente qui incite les agents économiques à s’engager sur la voie de la transition bas carbone.

Messieurs les rapporteurs du CESE, faut-il, de votre point de vue, augmenter le prix du gazole et baisser celui de l’essence ou faut-il seulement augmenter le prix du gazole pour corriger cet écart de 15 centimes par litre ?

M. Jacques Kossowski. Ce matin, Ségolène Royal a dit qu’il fallait diminuer le prix de l’essence et augmenter celui du diesel.

M. Jean-Louis Bricout. Ce n’est pas forcément une bonne solution !

M. le président Jean-Paul Chanteguet. J’ai évoqué ce sujet car je sais que le débat existe. Il est important que les rapporteurs du CESE s’expriment sur ce point et sur toutes les questions que vous avez soulevées.

M. Bernard Guirkinger. Monsieur le président, nous n’avons pas travaillé sur la question de la fiscalité sur le gazole et l’essence. Dans la mesure où nous sommes favorables à la fiscalité écologique et au signal prix, il me semble évident qu’il faut être cohérent et maintenir des prix élevés. Je regrette qu’une TIPP flottante n’ait pas été mise en place et que l’on ne profite pas des baisses comme celle que l’on a constatée récemment sur le prix du pétrole pour augmenter un peu la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE).

Il n’y a pas de honte à dire qu’un tel dispositif peut permettre à l’État d’alimenter ses recettes et d’en diminuer d’autres. En tout cas, c’est l’esprit dans lequel travaille le CESE depuis plusieurs d’années.

Les entreprises sont convaincues que le changement climatique est une réalité. Elles veulent se préparer aux marchés de demain qui concerneront plutôt toutes les technologies susceptibles de lutter contre les émissions de gaz à effet de serre. Aussi veulent-elles avoir une vision à moyen terme. C’est pourquoi elles réclament une fiscalité sur les énergies fossiles mais aussi une fiscalité stable parce qu’une entreprise qui investit se projette forcément sur plusieurs années.

Il ne faut pas sous-estimer l’action des actionnaires privés. Je suis frappé de voir de plus en plus d’investisseurs privés faire pression sur les entreprises pour savoir si les engagements qu’elles prennent sont sincères. Il ne faut pas sous-estimer les patrons qui se projettent aussi vers cette prise de conscience collective sur les conséquences du changement climatique. Enfin, il y a ceux qui prennent des engagements, même quand la loi ne les y oblige pas, et qui doivent rendre des comptes à un moment donné parce que toute une série d’activistes le demande.

Aujourd’hui, les entreprises ont donc intérêt à ce que de vraies actions soient engagées en matière de lutte contre le changement climatique.

Vous me demandez si l’on peut imaginer le grand soir où l’on aura fixé un prix mondial du carbone. Personnellement, je n’y crois absolument pas. La législation restera forcément organisée par sous-ensembles à l’échelle des États ou de groupements d’États comme l’Union européenne. Il me paraît important que la COP21 ait la volonté de fixer un prix sur le carbone. Plusieurs d’entre vous ont souligné que la COP21 n’était pas un aboutissement, que ce ne serait pas le grand soir et que tout restera à faire ensuite. Il faudra suivre les engagements et continuer à faire pression sur les moins vertueux en ce qui concerne le prix du carbone. S’il faut une législation française sur le prix du carbone, le vrai périmètre c’est l’Europe. Il ne faut pas écarter la nécessité d’une taxation à l’entrée du territoire européen. C’est une évolution tout à fait souhaitable.

Si un engagement collectif est pris pour fixer le prix du carbone, il ne faut pas sous-estimer que dans la mesure où ils se préparent au marché de demain, les acteurs économiques vont demander à leur gouvernement de mettre en place une fiscalité carbone. C’est ce que font les Chinois qui, bien que réticents à accepter des contraintes de la part des autres pays, travaillent sur les questions de pollution, d’énergie solaire sous forme thermique ou électrique. Aux États-Unis, si le scepticisme est encore présent il n’empêche que des sous-ensembles travaillent sur les marchés de demain, comme le montre l’exemple californien.

Si l’on ne peut pas mettre au point un grand système, dès lors qu’une dynamique sera engagée les choses iront dans la bonne direction dans un deuxième temps.

Le choix des mots est très important. Il faut parler de changement climatique plutôt que de réchauffement climatique, certains pouvant encore croire que c’est une bonne chose.

En ce qui concerne la gouvernance, de par mon parcours personnel j’avais une vision plutôt hiérarchique et simpliste des choses. Je considérais qu’il y avait des chefs qui donnaient des ordres, des politiques, etc. (Sourires) Mais cela ne marche plus de cette façon-là. Aujourd’hui, vous êtes obligé de dialoguer avec les parties prenantes, avec la société civile et c’est cela qui est source de progrès. Je suis absolument persuadé que c’est la société civile beaucoup plus que les partis politiques qui est en train d’inventer le monde de demain.

Mesdames, Messieurs les députés, utilisez la société civile, gérez leurs contradictions. Le CESE parvient à faire voter des choses extraordinaires. Mais tous ceux qui les votent au CESE ne tiennent pas forcément le même discours à titre individuel, quand ils sont à l’extérieur. Il faut donc mettre les différentes parties de la société civile face à ses propres contradictions. Bien sûr, il y a un paradoxe entre la mobilisation de la société civile française et la mobilisation des citoyens. Mais je suis beaucoup moins pessimiste que vous, Madame Dubois. En effet, on ne peut pas demander aux citoyens de s’intéresser tout à coup à une négociation internationale particulièrement complexe et alors qu’ils ont perdu toute confiance dans les institutions. Cela dit, les citoyens ne se désintéressent pas autant qu’on peut l’imaginer des questions environnementales. Il y a une sensibilité environnementale qui se développe.

Madame Marie Le Vern, je vous trouve très pessimiste à l’égard des jeunes. Ils sont plutôt modernes, ils ont envie de changer les choses, ils prennent des initiatives. L’action du Gouvernement en matière de pédagogie a été très sincère. Je pense, en particulier, à ce qui a été fait par l’éducation nationale.

Il n’y a pas suffisamment de débats politiques sur le terrain en ce qui concerne le changement climatique. Or je suis persuadé que pour trouver un consensus autour d’un nouveau projet politique, il faut associer la société civile et organiser le débat sur le terrain.

Vous nous avez interrogés sur la formation supérieure. Je suis ingénieur de formation. J’ai réalisé, à travers le Grenelle de l’environnement, que notre pays formait des ingénieurs sans jamais leur expliquer quelle était la contribution de la nature. Jusqu’à présent, on ne leur parlait pas de la biodiversité. Les choses commencent à changer, mais notre pays reste dominé par les sciences rationnelles. On pense que les solutions viendront toujours des mathématiques, de la physique et de la chimie. En la matière, il faut faire un effort collectif. Dans notre avis figure une phrase de Descartes qui considérait que la nature devait être au service de l’homme et qu’il fallait absolument la dominer. Il est assez intéressant de réfléchir à notre culture dans ce domaine. C’est très spécifique à la France.

Monsieur Alain Chrétien, vous nous faites beaucoup d’honneur en nous demandant comment va fonctionner dans le détail la COP21. Je rappelle que nous ne sommes pas partie prenante. La COP21 rassemblera 190 parties prenantes, des États ou des groupes d’État. Beaucoup de choses se passent avant cette conférence.

Depuis que je suis attentivement ce dossier, je vois de nombreux signaux positifs, par exemple l’accord bilatéral sur le climat signé entre la Chine et les États-Unis. Certes, ces signaux ne sont pas à la hauteur de l’objectif de limiter à deux degrés le réchauffement climatique, mais on le savait, d’où l’importance de la dynamique qui sera impulsée derrière. Je pense que la France est très mobilisée et qu’elle réalise un travail exceptionnel au niveau international.

Le texte de vingt pages qui vient d’être mis sur la table est très intéressant. Pour une fois, on arrive à le lire en entier. (Sourires)

Monsieur Michel Lesage, j’ai passé l’essentiel de ma carrière professionnelle dans le domaine de l’eau. Aussi, je vous remercie pour votre question. Bien évidemment, l’eau est la première concernée par le réchauffement climatique et elle contribue à créer des catastrophes, comme on l’a encore vu récemment.

Nicolas Hulot insiste beaucoup sur le fait que le changement climatique est l’injustice suprême, c’est-à-dire que les premiers à en subir les conséquences sont ceux qui n’y sont pour rien, à savoir les pauvres qui habitent dans des pays en voie de développement. Dans les pays développés, les premiers touchés sont aussi les plus modestes d’entre nous. D’où l’importance d’être extrêmement vigilants en matière de conséquences sur les plus pauvres de la mise en place d’une fiscalité écologique.

Les pays en développement aspirent à la croissance, à consommer davantage d’énergie. D’où leur réticence à signer des engagements les concernant. Je suis persuadé qu’ils ont envie, comme les autres pays, d’être sur les marchés de demain. La gestion du Fonds vert doit être crédible. Il faut créer un climat de confiance qui incarne cette responsabilité différenciée qu’on accepte. Mais lorsque l’on parle de responsabilité différenciée, je ne suis pas sûr que l’on mesure bien la portée des mots. Cela veut dire que les pays développés qui sont responsables de 70 ou 80 % du stock des émissions de gaz à effet de serre dans l’atmosphère acceptent une responsabilité particulière vis-à-vis de ceux qui sont affectés directement aujourd’hui. On parle de 100 milliards de dollars par an en direction du Fonds vert sans expliquer que cela va nous demander, à nous pays riches, un effort supplémentaire alors que nous n’arrivons même pas à atteindre notre objectif collectif de 0,7 % en direction de l’aide au développement. Aujourd’hui, la France stagne tranquillement à 0,4 %.

Je vous remercie pour toutes vos questions. J’ai eu plaisir à vous écouter.

M. Gaël Virlouvet. À mon tour, je me réjouis que nos travaux suscitent toutes ces questions.

Vous avez été nombreux à poser des questions sur les territoires, à la fois en ce qui concerne la partie maîtrise d’œuvre et les moyens.

S’agissant de la maîtrise d’œuvre, le Grenelle de l’environnement a massifié les choses. Nous avons demandé à chaque territoire de produire un plan climat-énergie territorial. En la matière, certains départements, comme les Alpes-Maritimes et l’Ille-et-Vilaine, se sont fortement investis. Puis la loi sur la transition énergétique a apporté des clarifications. Dans ce texte, vous avez clairement indiqué que la planification est nationale, qu’elle est régionale avec les SRCAE et locale avec les plans climat air énergie territoriaux (PCAET) confiés aux intercommunalités. Le schéma de lutte contre le réchauffement climatique est donc désormais lisible. L’articulation étant définie, on sait qui a la maîtrise d’œuvre.

La section environnement du CESE estime que la loi n’a pas défini concrètement ce que l’on fait quand on a un PCAET. Doit-on seulement regarder les émissions de gaz à effet de serre produites par la collectivité ? Doit-on mobiliser l’ensemble du territoire ? Si l’on veut des réponses territorialisées, il faut bien évidemment mobiliser l’ensemble du territoire. Pour ce faire, il faut des moyens, des animateurs qui aillent chercher les acteurs du territoire, les amènent à s’impliquer, à proposer des actions de lutte contre le changement climatique. L’outil qui permet cela, c’est l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME). C’est ce que l’on a su faire en matière de réduction des déchets. Il s’agit d’accélérer le mouvement et d’apporter une aide aux territoires via l’ADEME en ce qui concerne la lutte contre le changement climatique.

M. Jacques Krabal a évoqué les comparaisons internationales qui figurent dans notre rapport. Nous avons procédé à des comparaisons pour montrer que chaque pays a sa propre manière d’avancer dans la lutte contre le réchauffement climatique. On n’avance pas de la même manière quand on est en Chine, aux États-Unis, en Suède ou en Italie, mais tous les territoires le font dans un seul et même objectif : réduire les émissions de gaz à effet de serre. Il faut que la France trouve sa manière d’avancer, tout en sachant que dans notre pays la diversité des territoires est une réalité.

Madame Françoise Dubois, vous avez constaté que l’appropriation citoyenne n’était pas suffisante localement. Ce n’est pas le constat que je fais. Au contraire, je n’ai jamais vu une telle mobilisation. Lors du Grenelle de l’environnement, la mobilisation était très forte, essentiellement au plan national. Et dans les territoires, on se posait des questions. Hier soir, j’étais à Saint-Malo où j’ai participé à une soirée sur l’eau et le changement climatique. Il y avait 200 personnes dans la salle, toutes intéressées par le sujet. Les conseillers du CESE chargés de la question du changement climatique nous disent que les choses bougent dans les territoires, que les écoles s’y intéressent.

Mme Françoise Dubois. En milieu rural, c’est plus difficile !

M. Gaël Virlouvet. Mais si les trois quarts des lycéens ne connaissent pas la COP21, peu importe ! Ce qui compte, c’est qu’il y ait une dynamique en faveur du climat. Quand on demande aux Français si le changement climatique aura une répercussion sur leur vie, les trois quarts répondent par l’affirmative.

Il faut savoir qu’il y a vingt-cinq ans, même les défenseurs de l’environnement n’étaient pas convaincus du changement climatique. Les progrès qui ont été accomplis depuis sont extraordinaires. Évidemment, il nous reste d’importantes marges de manœuvre. D’abord, nous constatons que, dans les territoires, aucun éducateur à l’environnement ne parle du climat et très peu de l’énergie.

Certes, l’appropriation citoyenne n’est pas suffisante, mais elle est bien plus forte qu’elle ne l’a jamais été en matière environnementale.

Mme Françoise Dubois. Tant mieux !

M. Gaël Virlouvet. Il y a deux jours, j’ai effectué le contrôle technique de mon véhicule. La personne qui a fait ce contrôle technique savait que quelque chose était en train de se passer sur le climat.

Tous les membres du CESE ont voté l’avis sur la COP21 – il n’y a pas eu de vote contre, seulement quelques abstentions – pour envoyer ce message que la société civile est derrière le Gouvernement et le Parlement dans la lutte contre le changement climatique. Nous partageons l’objectif du facteur 4 qui a été fixé à l’horizon 2050. Nous savons qu’il ne sera pas facile à atteindre, mais nous avons envie d’essayer.

Mme Marie Le Vern a posé la question de l’évaluation de la mobilisation de la population et de l’implication du Gouvernement. Pour ce faire, il faut compter le nombre d’événements qui sont mis en place. Si cet indicateur n’est pas parfait, il montre la dynamique qui existe dans les territoires. En revanche, il est difficile de mesurer l’évaluation de l’implication du Gouvernement. J’observe un effort de communication très important depuis le mois de septembre, mais il est perturbé par le contexte international.

Monsieur Guillaume Chevrollier, le secteur agricole est très mobilisé en termes d’adaptation et on comprend bien pourquoi, mais il peut mieux faire en termes d’atténuation. Depuis un an, on sent un frémissement. Les chambres d’agriculture ont publié des documents sur les actions réalisées par les agriculteurs à l’occasion du salon de l’agriculture. Il y a un début d’appropriation du sujet. Il faut maintenant amplifier la démarche.

M. Laurent Furst a évoqué les transports. C’est une question difficile. Il faut savoir que les Suédois, qui sont les bons élèves en matière de lutte contre le changement climatique, connaissent eux aussi une augmentation du nombre de véhicules. Il faut trouver des solutions. Cela passe par un Grenelle transports. Les acteurs de la société civile estiment que les objectifs qui ont été fixés lors du Grenelle de l’environnement sont bons mais que l’on a mis trop de temps à mettre en place les moyens. L’écotaxe en est le meilleur exemple puisque sept ans après on l’a abandonnée. Il faut retrouver une impulsion en matière de transports et de mobilité. Pour cela, il faut réunir les acteurs, montrer que l’on a envie d’avancer sur cette question et passer à l’action avec des moyens. L’écotaxe est un système qui tient la route. Il doit être remis sur pied.

Monsieur Jean-Yves Caullet, l’ancien président de l’autorité environnementale considérait que chaque projet d’infrastructure d’aménagement du territoire devait montrer en quoi il contribuait à atteindre le facteur 4 en 2050, si le facteur 4 est un objectif important pour la nation, ce que je crois.

M. Jean-Paul Chanteguet et M. Laurent Furst ont évoqué la question de la fiscalité du gazole. Nous en avons discuté au sein de la section environnement du CESE. La réponse de M. Bernard Guirkinger convient parfaitement. Si l’on demande, d’un côté, le renforcement de la fiscalité carbone, on ne peut pas, de l’autre, s’amuser à baisser les taxes sur l’essence, d’autant que l’avancée la plus importante à mes yeux depuis 2012, a été d’inclure une assiette carbone dans la TICPE. Si on commence à diminuer l’assiette carbone qui s’applique aussi bien au gazole qu’à l’essence, cela signifie que l’on réduit ce qui ressemble à une taxe carbone qui a été mise en place en 2014.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Son impact est très limité !

M. Gaël Virlouvet. Exactement !

Le CESE appelle à un prix du carbone qui soit significatif. Le prix du gazole doit rattraper celui de l’essence et pas l’inverse.

Monsieur Bertrand Pancher, le CESE estime qu’il faut revoir la fiscalité environnementale afin qu’elle soit prise en compte dans l’ensemble du système fiscal avec un rééquilibrage en faveur de la fiscalité environnementale. Je vous renvoie à notre avis sur le financement de la transition écologique qui est très clair. Le CESE, s’il n’est pas unanime, partage en tout cas un consensus relatif sur ce besoin en fiscalité.

Notre avis n’aborde pas la question de l’eau. L’agence de l’eau Rhône-Méditerranée-Corse est mobilisée sur la lutte contre le changement climatique. Les autres agences ont du mal à le faire, notamment l’Agence Loire-Bretagne qui ne considère pas l’eau comme un sujet prioritaire cette année. Or le réchauffement global de la planète, s’il aboutit à des dérèglements locaux, entraînera une mise en tension de toutes les relations autour de l’eau. J’en veux pour preuve ce qui s’est passé à Sivens l’année dernière. Il existe déjà des tensions très vives sur l’eau. Si l’on y ajoute un facteur de pression qu’est le changement climatique, on ne fera qu’accroître ces tensions entre acteurs, ce qui renvoie aux gouvernances à mettre en place. Je le répète, la gouvernance sur le changement climatique doit exister au niveau national à travers un conseil national du climat ou quelque chose d’équivalent.

Les gens qui travaillent dans les territoires sur le climat ne sont pas en lien avec l’administration centrale, ce qui veut dire que la tête n’est pas reliée aux pieds. Il faut corriger ce phénomène. C’est la tête qui a impulsé pendant dix ans l’activité de la France en matière de lutte contre le changement climatique. Il se trouve qu’elle est composée essentiellement du corps des mines, ce qui veut dire que l’on a un corps d’ingénieurs qui s’intéresse à la question climatique. Il me semble donc que la question de la formation supérieure en matière de lutte contre le changement climatique n’est pas si aiguë, même s’il faut renforcer les formations sur l’énergie, l’agriculture, l’économie circulaire et les déchets.

M. Jean-Yves Caullet. Peut-être faut-il modifier le nom de l’école ! (Sourires.)

M. Gaël Virlouvet. Mais je ne suis pas sûr que l’on ait besoin d’une formation spécifique climat aujourd’hui.

Stéphane Demilly a demandé quelle serait la récupération de la COP21 par les territoires. Il appartient à chaque territoire de s’organiser pour relancer la dynamique dans les plans climat air énergie territoriaux, d’organiser des réunions au niveau local lors de la COP21 ce qui permettra de rendre visible le plan climat au niveau territorial. Ensuite, il faudra profiter de l’effet de cette conférence pour continuer à mobiliser les acteurs. Là encore, la réponse est territoriale.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Messieurs, je vous remercie pour la qualité de votre rapport et de nos échanges. Notre réunion d’aujourd’hui a montré qu’il était utile que nous continuions à dialoguer avec les rapporteurs du CESE.

——fpfp——

Membres présents ou excusés

Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Réunion du mercredi 14 octobre 2015 à 9 h 30

Présents. - Mme Laurence Abeille, Mme Sylviane Alaux, M. Yves Albarello, M. Guy Bailliart, Mme Catherine Beaubatie, M. Jacques Alain Bénisti, M. Sylvain Berrios, M. Christophe Bouillon, M. Jean-Louis Bricout, Mme Sabine Buis, M. Vincent Burroni, M. Alain Calmette, M. Patrice Carvalho, M. Jean-Yves Caullet, M. Jean-Paul Chanteguet, M. Luc Chatel, M. Guillaume Chevrollier, M. Alain Chrétien, M. Jean-Jacques Cottel, M. Gérald Darmanin, Mme Florence Delaunay, M. Stéphane Demilly, Mme Françoise Dubois, M. Philippe Duron, M. Olivier Falorni, M. Yannick Favennec, M. Jean-Marc Fournel, M. Jean-Christophe Fromantin, M. Laurent Furst, Mme Geneviève Gaillard, M. Charles-Ange Ginesy, M. Jacques Kossowski, M. Jacques Krabal, Mme Valérie Lacroute, M. Alain Leboeuf, M. Michel Lesage, Mme Marie Le Vern, M. Philippe Martin, M. Gérard Menuel, M. Yves Nicolin, M. Bertrand Pancher, M. Rémi Pauvros, M. Philippe Plisson, M. Christophe Priou, Mme Catherine Quéré, Mme Sophie Rohfritsch, M. Jean-Marie Sermier, Mme Suzanne Tallard, M. Thomas Thévenoud, Mme Catherine Troallic, M. Jean-Pierre Vigier

Excusés. - M. Julien Aubert, M. Serge Bardy, Mme Chantal Berthelot, M. Yann Capet, M. David Douillet, M. Christian Jacob, Mme Viviane Le Dissez, M. Arnaud Leroy, Mme Martine Lignières-Cassou, M. Napole Polutélé, M. Martial Saddier, M. Gilbert Sauvan, M. Gilles Savary, M. Gabriel Serville

Assistaient également à la réunion. - M. Lionel Tardy, M. François Vannson