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Commission des affaires économiques

Mardi 18 décembre 2012

Séance de 16 heures 15

Compte rendu n° 35

Présidence de M. François Brottes Président

– Table ronde, ouverte à la presse : « Produits alimentaires et marges de la grande distribution », avec la participation de :

• M. Philippe Chalmin, président de l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires,

• M. Jacques Creyssel, président de la Fédération des entreprises du commerce et de la distribution (FCD),

•  M. Laurent Grandin, vice-président de l’Interprofession de la filière des fruits et légumes frais (Interfel),

• M. Yves Berger, directeur général de l’Association nationale interprofessionnelle du bétail et des viandes (Interbev),

• M. Alexander Law, directeur « économie » de l’Association nationale des industries alimentaires (ANIA),

•  M. Olivier Andrault, chargé de mission « alimentation » à l’Union fédérale des consommateurs « UFC-Que choisir »

La commission a organisé une table ronde intitulée « Produits alimentaires et marges de la grande distribution » avec la participation de M. Philippe Chalmin, président de l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires, M. Jacques Creyssel, président de la Fédération des entreprises du commerce et de la distribution (FCD), M. Laurent Grandin, vice-président de l’Interprofession de la filière des fruits et légumes frais (Interfel), M. Yves Berger, directeur général de l’Association nationale interprofessionnelle du bétail et des viandes (Interbev), M. Alexander Law, directeur « économie » de l’Association nationale des industries alimentaires (ANIA), M. Olivier Andrault, chargé de mission « alimentation » à l’Union fédérale des consommateurs « UFC-Que choisir ».

M. le président François Brottes. Mes chers collègues, nous avons le plaisir d’accueillir aujourd’hui, pour une table ronde sur les produits alimentaires et les marges de la grande distribution, M. Philippe Chalmin, président de l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires, M. Jacques Creyssel, président de la Fédération des entreprises du commerce et de la distribution (FCD), M. Laurent Grandin, vice-président de l’Interprofession de la filière des fruits et légumes frais (Interfel), M. Yves Berger, directeur général de l’Association nationale interprofessionnelle du bétail et des viandes (Interbev), M. Alexander Law, directeur « économie » de l’Association nationale des industries alimentaires (ANIA), M. Olivier Andrault, chargé de mission « alimentation » à l’Union fédérale des consommateurs « UFC-Que Choisir »

J’aurais préféré que cette table ronde se tienne beaucoup plus tôt, mais l’agenda de M. Chalmin et celui de notre commission ne l’ont pas permis. Monsieur le directeur, le rapport de l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires indique que, pour 100 euros de dépenses alimentaires, environ 8 euros seulement reviennent à l’agriculture, 11 euros aux industries agroalimentaires, et 21 euros au commerce. À cet égard, le Gouvernement s’interroge, à juste titre, sur la nécessité de rééquilibrer les relations commerciales, sachant que la discussion de la loi de modernisation de l’économie (LME) avait fait l’objet d’un débat intense dans cette commission et permis d’inverser le rapport entre le pot de fer et le pot de terre, autrement dit entre les fournisseurs et les distributeurs.

M. Philippe Chalmin, président de l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires. L’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires a présenté le 13 novembre dernier son deuxième rapport, qui a été communiqué aux présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat. Créé par la loi de modernisation de l’agriculture et de le pêche votée en 2010, cet observatoire est une commission administrative dont les activités ont commencé à l’automne 2010. Il est l’héritier d’un organisme antérieur, qui était placé sous le contrôle de la Direction générale des politiques agricoles, agroalimentaire et des territoires (DGPAAT) du ministère de l’agriculture et de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) de Bercy. Son originalité est d’avoir un président indépendant et de regrouper au sein de son comité de pilotage les représentants de l’ensemble des professionnels de la production et de la distribution, mais aussi des consommateurs.

Depuis sa mise en place, l’Observatoire est avant tout un lieu de dialogue relativement libre qui nous a permis de mettre à plat l’ensemble des prix et des marges au long des filières. Son rôle n’est pas de porter un jugement, mais de fournir une information transparente sur la formation des prix et des marges. Cela est particulièrement important dans le contexte de la nouvelle politique agricole européenne, au vu de la dérégulation des marchés et donc de l’instabilité des prix. En effet, si l’Europe et la France ont connu pendant une longue période des prix agricoles stables, les marchés agricoles nationaux et surtout internationaux sont aujourd’hui confrontés à de véritables chocs.

Loin de vouloir montrer du doigt les horribles personnages qui « s’en mettent plein les poches », nous nous attachons à démontrer que les différents métiers au sein d’une filière sont plus ou moins bien rémunérés et que les différents stades – le stade industriel et celui de la distribution – peuvent éventuellement servir d’amortisseurs lors des périodes de tension.

À mon sens, le rôle de l’Observatoire est important car il permet de clarifier les rapports au sein des filières. De ce point de vue, il a plutôt bien fonctionné depuis deux ans, dans un climat de cordialité que je tiens à saluer, l’ensemble des professions ayant joué le jeu.

Notre premier rapport a été présenté au mois de juin 2011, mais nous avons quelque peu reculé la publication du deuxième – pensant que la représentation nationale aurait d’autres préoccupations en juin 2012 –, ce qui nous a permis d’aller plus loin sur un sujet très précis que je vous vais vous exposer. Notre rapport 2012, que nous tenons à votre disposition et qui figure sur le site de l’Observatoire, comprend 400 pages. La version résumée qui vous a été distribuée en reprend les principales idées, que je vais maintenant développer.

Ce rapport s’inscrit dans un contexte de très forte hausse des prix agricoles. En effet, jamais les prix des céréales et des oléagineux n’ont été aussi élevés sur les marchés mondiaux. Si le prix du blé est à peu près revenu à son niveau du printemps 2008, y compris sur le marché de Paris en euro la tonne, les prix du maïs et du soja sont beaucoup plus élevés. La viande porcine et la viande bovine ont atteint des niveaux de prix record. Quant aux produits laitiers, ils ont connu, après une période de tassement, de légères inflexions de prix à la hausse. La crise agricole mondiale actuelle est la troisième en cinq ans, ce qui nous amènera probablement à revoir notre analyse sur les dynamiques agricoles mondiales.

Dans le résumé du rapport, le graphique de la page 7 montre clairement la hausse des prix à la production agricole. Selon les chiffres de l’INSEE, ils ont dépassé en juillet 2012 les niveaux du printemps 2008. En comparaison, les prix de production des industries agroalimentaires (IAA) et les prix à la consommation ont moins progressé. Ainsi, l’une des principales constatations de ce rapport est un resserrement des marges de l’industrie et de la distribution depuis un an. Pour la viande bovine, par exemple, le graphique au bas de la page 9 montre que la carcasse reconstituée au stade du producteur passe de 2,73 euros le kilo au premier semestre 2010, à 3,41 euros au premier semestre 2012 – cette hausse très importante étant d’ailleurs une bonne chose pour les producteurs de viande bovine dont les coûts de production comptent parmi les moins équilibrés, notamment les éleveurs de races allaitantes. Les marges de l’industrie et de la grande distribution se sont légèrement réduites, passant pour la première de 1,54 euro au premier semestre 2011, à 1,37 euro au premier semestre 2012, et pour la seconde de 1,76 euro à 1,69 euro. Cette tendance se retrouve pratiquement sur tous les graphiques. En effet, en période de forte tension, du fait de la sensibilité des consommateurs au regard de leur pouvoir d’achat, une certaine compression des marges est observée, à la fois pour l’industrie et la grande distribution. Tel est le constat général que nous avons pu tirer pour l’année écoulée : les hausses très fortes de la production agricole ont été amorties dans une certaine mesure.

Une partie du rapport porte sur l’augmentation des prix de l’alimentation animale. En effet, la hausse des prix des céréales et des oléagineux a eu une incidence sur les prix de l’alimentation animale, autrement dit sur l’augmentation des prix de revient de la production, notamment des volailles et du porc, laquelle a été en partie répercutée de façon heureuse sur les prix de la viande porcine. Malheureusement, nous constatons depuis quelques semaines un repli du marché de la viande porcine, alors même que les coûts de l’alimentation animale restent très élevés. Cet effet de ciseaux des prix, notamment dans le secteur porcin et de la volaille, commence à être inquiétant.

Dans notre précédent rapport, nous avions raisonné uniquement en termes de marge brute : nous indiquions le prix à la production, la marge brute de l’industrie et celle de la distribution. Dans la mesure où, pour l’industrie, nous avions la possibilité d’accéder aux comptes sectoriels, nous pouvions calculer la marge nette. Cela n’est pas apparu possible pour la grande distribution où les seuls comptes sectoriels agrègent l’ensemble des rayons d’un magasin. Une critique nous a été adressée à l’époque selon laquelle la marge de la grande distribution devait intégrer l’ensemble des coûts directement liés aux rayons du magasin pour pouvoir raisonner en termes de marge nette.

Notre grand chantier de l’année dernière a donc consisté, pour la grande distribution, à calculer la marge nette pour cinq rayons, correspondant aux cinq filières que nous suivons. Pour ce faire, nous avons bénéficié de la totale coopération des enseignes – les cinq de la Fédération du commerce et de la distribution, représentée par Jacques Creyssel, mais aussi Leclerc et Intermarché, non-membres de la FCD. À partir d’une méthodologie que nous avons élaborée et d’un très important travail mené avec la grande distribution, nous avons été capables cette année, pour la première fois, d’indiquer les marges nettes de la grande distribution par rayon. Ainsi, le tableau de la page 12 du résumé vous indique la moyenne des marges nettes des cinq rayons de la grande distribution, calculée à partir des résultats fournis par les sept enseignes représentatives. Notre prochain rapport nous donnera certainement l’occasion d’affiner notre analyse, même si la méthodologie utilisée est robuste – nos amis de la FCD ayant même fait travailler le cabinet KPMG. La lettre de l’Observatoire, qui vous a également été distribuée, détaille la méthodologie utilisée et le mode de calcul.

Nos calculs montrent des résultats très différents d’un rayon à l’autre et – surprise – une marge nette négative pour certains rayons, en particulier la boucherie. La différence entre le chiffre d’affaires du rayon et le coût d’achat des produits permet de déduire la marge brute. Sont ensuite déduits les frais de personnels spécifiques aux rayons – particulièrement élevés pour la boucherie, en raison des actes de transformation de la viande, et les fruits et légumes, pour lesquels l’entretien est important –, ce qui nous donne la marge semi-nette. Les autres charges déduites sont le foncier, autrement dit le calcul au mètre carré – le rayon fruits et légumes ayant un chiffre d’affaires au mètre carré plus bas que les autres. Ce calcul nous donne une marge nette qui va de 0,60 euro pour les fruits et légumes et de moins 1,90 euro pour la boucherie à 1,90 euro pour les produits laitiers, 5,10 euros pour la charcuterie et 5,90 euros pour les volailles. En définitive, personne ne gagne sa vie dans la filière viande bovine – mais on imagine mal un supermarché ou un hypermarché sans rayon boucherie.

Nous avons réalisé un autre calcul original, qui relève davantage d’une approche macroéconomique. Il s’agit de la décomposition de l’euro alimentaire – cela figure à la page 14 de notre résumé – qui indique ce que vous payez lorsque vous dépensez un euro en produits alimentaires. Une fois retirées les taxes, la valeur ajoutée de l’agriculture ne représente que 7,6 %, celle de l’industrie agroalimentaire s’élève à 11,3 %, tandis que les importations représentent 26,8 %. Au total, l’agroalimentaire ne représente que 20 % de votre facture. En réalité, en achetant dans un rayon de supermarché, vous payez des services commerciaux, des transports et d’autres produits industriels. Ainsi, la partie agricole et agroalimentaire du panier alimentation du ménage est extraordinairement faible, même si, paradoxalement, la dimension symbolique agricole de notre comportement alimentaire reste importante.

Pour conclure, l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires est la seule structure de ce type qui existe en Europe. Son rapport 2012 constitue une base de données particulièrement fournie. Certes, il couvre pour l’instant cinq à six filières seulement, mais nous avons des travaux en cours sur la pêche et le vin – et espérons en avoir à l’avenir sur les céréales. À notre modeste niveau, nous avons essayé de concourir à la construction de rapports de confiance au sein des filières agroalimentaires françaises.

M. le président François Brottes. Je salue votre approche, moins intuitive que celle que vous aviez eue lors d’une précédente présentation, monsieur le président.

Si j’ai bien compris, monsieur Berger, ce sont les autres filières qui permettent à la vôtre de vendre ses produits, qui le sont pratiquement à perte.

M. Yves Berger, directeur général de l’Association nationale interprofessionnelle du bétail et des viandes (Interbev). L’interprofession du bétail et des viandes regroupe producteurs et distributeurs, comme celle des fruits et légumes – pas les consommateurs, encore que nous prenons très souvent en compte leurs desiderata.

Ce rapport est une première et représente un travail considérable. Après une première mise à plat il y a quelques mois, ce document beaucoup plus complet permet à nos organisations d’avoir des échanges beaucoup plus fructueux et approfondis au regard de la complexité de la situation. J’ignore si nous profitons des autres, mais il est difficilement imaginable que perdure un système où, à tous les niveaux, les gens gagnent relativement mal leur vie.

Certes, la viande bovine a connu le plus fort pourcentage d’évolution entre le premier semestre 2010 et le premier semestre 2012. Néanmoins, d’après les communications récentes sur les comptes annuels de l’agriculture, le revenu des éleveurs bovins compte encore parmi les plus faibles, voire est le plus faible, ce qui n’est pas sans poser de questions, sachant que l’évolution du coût de la matière première agricole traduit celle du revenu des agriculteurs.

Je fais deux lectures de ce rapport.

La première consiste à tirer les enseignements au sein de la filière elle-même. Nous sommes interloqués par le niveau de la marge nette de la boucherie, à moins 1,90 euro. La méthode est bonne, mais comme toute moyenne, ce chiffre cache des disparités. D’ailleurs, comme l’écrivent les rédacteurs du rapport, « les marges nettes du rayon boucherie des enseignes sont très dispersées autour de leur moyenne, elles se trouvent en moyenne à plus ou moins 2,80 euros de la marge nette moyenne du rayon, de moins 1,90 euro ». En clair, parmi les sept enseignes, quelques-unes gagnent de l’argent dans la boucherie.

En réalité, les marges se tassent car nous n’arrivons pas à faire passer les hausses rendues nécessaires par la hausse de la matière première.

La deuxième lecture consiste à comparer notre filière aux autres. En fait, nous nous demandons pourquoi la production porcine et la production laitière, qui ne sont pas très éloignées, réussissent à tirer leur épingle du jeu un peu moins mal que les autres.

À notre propre initiative, nous avons lancé ce que nous appelons les « états généraux » des filières bovine et ovine, qui réunissent plusieurs groupes de travail. Le rapport de l’Observatoire a largement contribué à la prise de conscience de notre interprofession : nous ne pouvons pas continuer dans la direction actuelle. Il est en effet devenu très difficile de trouver des remplaçants pour les exploitations agricoles – les terres sont certes reprises, pas forcément le bétail –, mais aussi des salariés à tous les niveaux de la filière, y compris dans la distribution.

En conclusion, ce rapport nous est utile au quotidien, et nous attendons avec impatience la troisième version qui améliorera la connaissance de certains secteurs.

M. le président François Brottes. Monsieur Grandin, le nombre d’emplois est très important dans votre filière, où peu de transformations sont effectuées par rapport aux autres et pour laquelle le réapprovisionnement et la mise en rayon engendrent des charges.

M. Laurent Grandin, vice-président de l’Interprofession de la filière des fruits et légumes frais (Interfel). La filière des fruits et légumes frais est une des rares filières à travailler sur des produits non transformés. Elle est très atomisée pour un certain nombre de productions et présente des caractéristiques assez diverses entre les différentes espèces de fruits et légumes, certaines productions étant stockables, d’autres pas.

Le rapport de l’Observatoire permet d’objectiver un certain nombre de données. Celles-ci attestent de l’insuffisance de la valeur ajoutée apportée par la filière. En effet, si les producteurs se sont plaints certaines années de leurs revenus, la filière ne s’est pas portée beaucoup mieux.

Cette filière longue est également une des rares filières où très peu de mécanismes de régulation opèrent. Elle est donc très exposée, et ses difficultés s’expliquent en grande partie par la pression permanente qui s’exerce dans un univers ouvert au niveau européen. De ce point de vue, la question de la compétitivité se pose avec acuité.

Notre interprofession a vécu des hauts et des bas, mais, aujourd’hui, la filière est en ordre de marche. Nous avons relancé des travaux sur les relations commerciales au sein d’Interfel, en particulier sur la thématique des avoirs, au vu de la disparition des rabais, remises et des ristournes, et sur celle de la contractualisation, assez complexe au regard de la diversité des filières.

Un grand nombre de changements sont intervenus ces dernières années, en particulier à la suite du vote de la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche (LMAP). Notre souhait est de parvenir à intégrer les évolutions qui ont été imposées par le cadre légal et de pouvoir travailler collectivement sur ces sujets dans un contexte stable.

M. le président François Brottes. Monsieur Law, le chiffre d’affaires de votre filière est deux fois et demie plus important que celui des filières agricoles. « S’en met-elle plein les poches » ou pas ? Quels sont ses rapports avec la grande distribution au regard des nouvelles méthodes de négociation ?

M. Alexander Law, directeur « économie » de l’Association nationale des industries alimentaires (ANIA). Avec un chiffre d’affaires de 157 milliards d’euros en 2011, l’industrie agroalimentaire française est la première industrie du pays. En revanche, personne ne « s’en met plein les poches ».

En effet, comme le montre le rapport, elle est confrontée à une volatilité exceptionnelle des cours des matières premières et ne parvient pas à répercuter les hausses sur ses marges. Les marges sont faibles tout au long de la filière, que ce soit en amont de la filière agricole, au stade de la distribution ou au niveau des industriels.

En outre, l’industrie agroalimentaire paie un lourd tribut à la guerre des prix que se livrent les distributeurs. Dans un système perdant-perdant, la valeur ajoutée est détruite en aval de la filière. Le pouvoir d’achat et la consommation alimentaire des Français baisseront encore cette année, et la croissance du produit intérieur brute est en berne depuis un an. Il est certain que la situation serait différente dans un contexte de forte croissance et de consommation élevée.

Ces difficultés s’expliquent par le fait que l’industrie alimentaire est dans une position d’oligopsone : elle compte 10 000 entreprises, dont 97 % sont des petites et moyennes entreprises (PME), 75 % des très petites entreprises (TPE), contre 7 grandes centrales d’achat, celles-là même qui sont analysées dans le rapport de l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires.

Il en ressort que notre industrie subie une dégradation très importante de sa rentabilité. Depuis fin 2008, la marge brute des industriels du secteur a chuté de 14 points et, aujourd’hui, notre tissu industriel est en péril. Selon nos estimations, il perdra cette année 5 000 emplois sur 500 000, et risque d’en perdre 5 000 supplémentaires si rien n’est fait pour inverser la tendance.

J’entends bien l’argument du secteur de la distribution sur la nécessité de serrer les prix afin de préserver le pouvoir d’achat des Français. Mais avant d’être des consommateurs, les Français sont des producteurs. L’industrie alimentaire est la seule à avoir résisté à la vague de délocalisations qui a laminé l’industrie française. Il faut protéger les emplois pérennes localisés sur l’ensemble du territoire français.

Selon moi, il convient de substituer au paradigme everyday, low prices, le paradigme everyday, more value. Ce dernier renvoie à la valeur telle qu’elle doit être créée à tous les maillons de la chaîne et au rapport qualité/prix. Il est important que tous les maillons de la filière coopèrent et que le consommateur soit remis au centre du débat, car c’est lui qui choisit in fine. Un travail commun sur la création de valeur est indispensable face à la destruction de valeur provoquée par la baisse des prix.

M. le président François Brottes. Notre pays compte davantage d’opérateurs de téléphonie que de centrales d’achat !

Monsieur Creyssel, votre secteur subit actuellement d’importantes restructurations. Partagez-vous l’analyse du professeur Chalmin sur vos coûts ?

M. Jacques Creyssel, président de la Fédération des entreprises du commerce et de la distribution (FCD). En fournissant des données chiffrées incontestables, ce type de rapport permet de s’affranchir des débats traditionnels. Notre pays est aujourd’hui le seul en Europe à disposer de chiffres sur les marges nettes de la grande distribution. L’effort de transparence de notre secteur, noté par Philippe Chalmin, y a largement contribué.

Je retiens quatre enseignements du rapport de l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires.

Premièrement, les marges nettes de la grande distribution sont globalement faibles – de 1,4 % en moyenne pour les entreprises du commerce et de la distribution. Elle est nulle pour les fruits et légumes, et négative pour la boucherie. Je précise que le pourcentage de la masse salariale entre en ligne de compte pour le calcul, dans la mesure où un rayon avec libre-service aura tendance à afficher une marge positive, alors que les rayons nécessitant des frais de personnel auront une marge nulle ou négative. Cette situation s’explique d’ailleurs par les décisions prises récemment sur le coût du travail.

Deuxièmement, dans un contexte économique difficile, tous les acteurs souffrent. Comme le montre le rapport, depuis 2010, les marges brutes reculent davantage dans la grande distribution et reculent légèrement dans le secteur de la transformation. Par contre, contrairement à ce que l’on pourrait croire, elles augmentent dans le secteur de la production sur à peu près tous les segments en raison de l’augmentation des coûts.

Troisièmement, la très forte volatilité des prix des matières premières agricoles entraîne un pincement global des marges nettes de l’ensemble des acteurs, d’où le niveau extrêmement faible de l’inflation. Selon les derniers chiffres parus, les prix de la grande distribution augmentent de 1 % en moyenne annuelle. Cet élément est primordial pour nos concitoyens.

Enfin, comme le montre l’euro alimentaire détaillé dans le rapport, la valeur ajoutée de la distribution est égale au total de la valeur ajoutée des industries et de celle de l’agriculture, soit 32 %, ce qui correspond à la part de la distribution dans l’emploi, soit 35 % des salaires – l’agriculture et l’industrie réunies représentant 25 % des salaires. En fait, nous rémunérons un certain nombre de charges de personnel. À cet égard, ce nouvel indicateur est très intéressant, sachant que l’excédent brut d’exploitation sur la valeur ajoutée indique que notre filière se situe derrière l’industrie et l’agriculture. Au final, nos marges sont plus faibles qu’ailleurs.

Enfin, j’approuve l’analyse d’Alexander Law sur la valeur. L’exemple de la filière bovine démontre la nécessité de changer de raisonnement : au lieu de s’interroger sur le partage de la valeur, il faut réfléchir à la manière de la créer, sachant que les producteurs, les transformateurs et les distributeurs perdent aujourd’hui de l’argent.

M. le président François Brottes. Nous terminons ce tour de table par le représentant des consommateurs.

M. Olivier Andrault, chargé de mission « alimentation » à l’Union fédérale des consommateurs « UFC-Que Choisir ». L’alimentation représente en moyenne 13 % du budget des ménages – 17 % pour les ménages les plus modestes. Cette dépense est incompressible, sauf à consommer des aliments moins chers souvent moins intéressants du point de vue nutritionnel.

En 2007-2008, l’augmentation phénoménale des prix des matières premières agricoles s’est répercutée sur les prix en rayons, l’inflation ayant atteint 7 % en un an pour les produits alimentaires, soit près de quatre fois et demie l’inflation des années précédentes. À l’époque, l’UFC-Que Choisir ne s’est pas exprimée faute de disposer d’informations sur la construction des prix alimentaires.

Néanmoins, à la suite de l’effondrement des prix agricoles en 2009, les prix alimentaires ont peu ou pas baissé. Autrement dit, certains opérateurs – les fabricants, la distribution, ou les deux – ont augmenté leurs marges brutes selon les types de produits. À titre d’exemple, pour le poulet, la marge brute de la grande distribution est passée en dix ans de 1,80 euro le kilo à 2,60 euros. Pour le lait de consommation, alors que le prix agricole baissait entre 2005 et 2008, aucune baisse n’a été répercutée au consommateur, non plus qu’en 2009, année où le prix payé aux éleveurs laitiers s’effondrait de manière dramatique – c’est seulement en 2010 qu’une baisse représentant la moitié de la baisse du prix est intervenue.

À l’instar de l’ensemble des acteurs agricoles, l’UFC-Que Choisir a demandé que l’Observatoire des prix se saisisse de ce problème. Ce dernier a fourni un travail de qualité, et je me réjouis de la publication de son deuxième rapport.

Certes, les marges brutes n’ont pas augmenté sur la période prise en compte dans ce rapport. Effectivement, il est difficile pour les opérateurs de répercuter la très forte augmentation des prix agricoles sur les prix, connaissant l’impact de la première hausse des prix alimentaires en 2007-2008 sur la consommation des ménages, laquelle a chuté. Au final, tout le monde serre les boulons. Néanmoins, les marges qui se sont constituées chez certains opérateurs pendant la période de baisse des prix agricoles, en 2009 et 2010, autorisent ces derniers à desserrer les boulons. En tout état de cause, il est très important d’appréhender l’évolution des prix alimentaires au regard de l’évolution des prix agricoles, notamment à la baisse.

Ce deuxième rapport révèle que les niveaux de marge de la grande distribution sont très différents entre les marques nationales et les marques de distributeur (MDD). Pour les yaourts, par exemple, la marge brute est de 20 % pour les marques nationales, mais elle a été pendant longtemps de 40 % pour les MDD – la grande distribution a récemment diminué leur niveau de marge brute moyen. Pour d’autres produits, la marge brute est relativement élevée : de 42 % pour le jambon et le poulet – ce dernier et le porc étant les viandes les moins chères. Ainsi, au-delà des marges réalisées au niveau d’un rayon, il est intéressant de connaître les marges des produits de base.

S’agissant des marges nettes, nous ne pouvons pas porter d’appréciation, puisque c’est la première fois que nous disposons de chiffres en la matière.

En conclusion, l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires est un très bel outil. Toutefois, ses études gagneraient à être assorties d’enquêtes de la DGCCRF pour affiner le niveau des marges au-delà des moyennes, notamment pour ce qui concerne les marques nationales et les marques de distributeur.

La demande de l’UFC-Que Choisir n’est pas que le coût soit le moins cher possible, mais que le prix en rayon reflète fidèlement les variations des prix agricoles, afin de permettre au consommateur de se reporter vers les produits en baisse, et à l’ensemble de la chaîne de bénéficier de ces baisses de prix, notamment les acteurs agricoles.

M. le président François Brottes. Je constate, monsieur Chalmin, que vous êtes un homme de consensus !

M. Razzy Hammadi. Confrontés à une augmentation du prix de certaines matières premières – de 25 % à 35 % pour le maïs et le soja –, les acteurs de l’industrie agroalimentaire cherchent non plus à garantir leurs marges, mais à limiter leurs pertes. Dans ce contexte, certains groupes de la distribution ont fixé comme date butoir des négociations tarifaires le 31 décembre, au lieu du 1er mars.

Ce rapport fournit des moyennes par rayons, mais ne prend pas en compte les stratégies différenciées des enseignes. Monsieur Chalmin, est-il possible de déterminer les écarts de marge qui existent selon les enseignes ?

Enfin, le législateur a créé une instabilité juridique. Après la loi Galland, sous prétexte de négociabilité, les acteurs arrivent non à discuter les prix et les tarifs, mais à vouloir garantir leur marge. Comment sortir du climat de défiance, unique en Europe, qui caractérise les rapports entre fournisseurs, acteurs de la transformation et distributeurs dans ce pays ? Comment faire en sorte que la loi soit appliquée et stabilisée ?

M. Lionel Tardy. Monsieur Chalmin, les organisations de producteurs, notamment les éleveurs, contestent certains chiffres de votre rapport, lequel, selon eux, repose sur les éléments que la grande distribution a bien voulu vous fournir sans que leur véracité et leur exhaustivité aient pu être vérifiées. Qu’en est-il, monsieur Chalmin ?

Le dispositif mis en place par la loi de modernisation de l’économie (LME) en 2009, destiné à encadrer les relations commerciales entre la grande distribution et ses fournisseurs, est mal appliqué. Les négociations commerciales sont bloquées. Les distributeurs, qui se livrent à une féroce guerre des prix, réclament des mesures de compensation de marge avant le début de toute négociation. Les producteurs, notamment les éleveurs, connaissent de grandes difficultés du fait de la hausse des prix du maïs et du soja, base de l’alimentation animale, et de la baisse de l’euro. Ils sont également inquiets à propos des négociations en cours sur l’avenir de la politique agricole commune (PAC). Dans ce contexte, les distributeurs rejettent toute mesure d’indexation des prix sur le cours des matières premières. Comment sortir de cette défiance ?

Une rencontre a eu lieu le 21 novembre au ministère de l’agriculture. Une mission interministérielle « finances et agriculture » a été mise en place pour analyser le fonctionnement des différentes filières. Son rapport est attendu pour le mois de mai 2013. Un plan d’urgence en faveur des filières animales a été annoncé, des mesures devant être prises avant la fin de l’année. Les débats portent actuellement sur la répartition de la valeur sur l’ensemble de la filière, les industriels et les producteurs demandant instamment que l’État fasse appliquer la LME en recourant à des contrôles et en utilisant les outils de cette loi pour prononcer d’éventuelles sanctions.

Si la LME n’est pas officiellement remise en cause, des évolutions législatives significatives peuvent intervenir, soit au moment de l’examen de la loi sur la consommation qui sera présentée au Parlement au printemps 2013, soit lors de l’examen de la loi d’avenir de l’agriculture agricole, actuellement en préparation. Les adaptations porteraient sur des mécanismes permettant de mieux prendre en compte la volatilité des cours des matières premières, afin que les producteurs puissent répercuter plus facilement ces hausses sur l’ensemble de la filière. Quel est votre avis, monsieur Chalmin, sur les mesures gouvernementales à adopter ?

Mme Michèle Bonneton. Le secteur de l’alimentation doit faire face à des enjeux sociaux, de santé publique, culturels et identitaires. Pour autant, la souveraineté alimentaire, à laquelle nous sommes très attachés, n’est pas atteinte en France – sachant que des importations sont nécessaires pour l’alimentation du bétail.

Cela dit, le transport pèse lourdement dans l’euro alimentaire. Afin de favoriser les circuits courts, serait-il possible que les grandes surfaces aient à respecter un quota de produits locaux ? En outre, est-il envisageable que l’empreinte carbone ou la distance parcourue par le produit soit inscrite sur le produit ?

S’agissant de la qualité des produits, les services sanitaires et les douanes ont vu leurs moyens diminuer ces dix dernières années. Cette tendance est-elle compensée par les services des commerçants et de quelle manière, en particulier en ce qui concerne l’hygiène et la qualité sanitaire, mais aussi les pesticides ?

Les petits producteurs et les coopératives se plaignent fréquemment des conditions imposées par la grande distribution en matière de prix, mais aussi de calibrage des fruits et légumes, par exemple. Ne pensez-vous pas qu’une meilleure organisation des filières en difficulté permettrait d’augmenter les marges et de mieux rémunérer les producteurs ?

En outre, les normes imposées et le refus des commerçants de vendre à prix coûtant pour des questions de concurrence conduisent au gaspillage alimentaire, qui atteint 150 à 200 kg par habitant et par an, soit à peu près 30 % de la production. Que proposez-vous pour éviter ce gaspillage ? L’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires pourrait-il travailler sur ce sujet, d’autant que le Parlement européen a voté en janvier 2012 une résolution visant à faire de 2014 l’année européenne de la lutte contre le gaspillage alimentaire ?

Enfin, la consommation des produits transformés augmente, alors qu’ils comportent de nombreux additifs – sucre, sel, exhausteurs de goût, graisse hydrogénée, huile de palme, etc. –, favorisant très probablement l’obésité, le diabète et certains cancers. Un étiquetage adapté indiquant la composition précise des produits et les risques courus pourrait-il être envisagé ?

Mme Jeanine Dubié. Au nom du groupe RRDP, je tiens à remercier le président Brottes d’avoir organisé cette table ronde, ainsi que l’ensemble des participants, plus particulièrement Philippe Chalmin et les équipes de FranceAgriMer pour la présentation de ce rapport volumineux et fort intéressant qui témoigne d’un travail impressionnant. Les données qu’il présente sont très utiles aux acteurs concernés, mais aussi et surtout aux membres de la Commission des affaires économiques.

Tout ce qui va dans le sens de la transparence des prix, des marges et des marchés est bon à prendre, surtout dans nos sociétés occidentales de plus en plus complexes. Pour décortiquer les mécanismes économiques, du producteur au distributeur en passant par les intermédiaires, nous avons besoin d’informations fiables. N’oublions pas que le revenu des producteurs est constitué par les marges.

L’agriculture française est en crise, particulièrement les filières fruits et légumes, viandes et lait. Pour les filières intensives en main-d’œuvre, le coût du travail est le facteur principal puisqu’il est deux fois plus élevé en France que chez nos voisins. Les autres facteurs de crise sont l’organisation insuffisante des filières, les contraintes administratives, mais aussi les relations commerciales déséquilibrées avec les industries de la transformation et, surtout, avec la grande distribution. Cette dernière est souvent accusée de capter, voire d’aspirer la valeur ajoutée au détriment des producteurs.

Cela dit, entre le premier rapport publié en juin 2011 et ce deuxième rapport, il semblerait que la distribution ait davantage joué le jeu de la transparence pour permettre l’évaluation des marges nettes. Selon la présente édition, ces marges nettes réelles sont assez faibles et très variables d’un rayon à l’autre.

Dans quelle mesure pouvez-vous garantir la fiabilité et la véracité des informations sur lesquelles vous avez travaillé, monsieur Chalmin ? Il est en effet notoire que les grandes entreprises pratiquent l’optimisation fiscale, au demeurant légale, à laquelle les entreprises de la grande distribution n’échappent pas. Pour prendre un exemple, une enseigne bien connue se loue à elle-même ses locaux commerciaux et se verse donc un loyer, ce qui lui permet de diminuer les bénéfices, de minimiser les impôts et de présenter des chiffres largement sous-évalués pour ses marges nettes.

Sachant que les grandes et moyennes surfaces distribuent entre 70 % et 80 % des produits étudiés par l’Observatoire, ne serait-il pas plus avantageux pour l’agriculture française de mettre en place des dispositifs efficaces visant à favoriser les circuits courts, et de se diriger vers une agriculture de proximité plus saine, moins chère et à taille humaine ?

Enfin, il me semble que le rapport démontre la nécessité d’équilibrer les relations commerciales au profit de ceux qui ont un pouvoir de négociation beaucoup plus faible, en révisant la loi de modernisation de l’économie. Qu’en pensez-vous ?

M. Éric Straumann. Contrairement à ce que l’on pouvait imaginer, les marges semblent relativement réduites dans la distribution : celle de la boucherie est négative, et celle des fruits et légumes très faible.

Certes, le secteur de la distribution est un grand pourvoyeur d’emplois, mais ces derniers disparaissent progressivement par le jeu de la réduction des marges. Ainsi, dans ma commune, sur plus de 700 emplois dans la distribution, une centaine a disparu depuis cinq ou six ans.

Si les enseignes nationales semblent avoir joué le jeu et être respectueuses du travail de nos agriculteurs, je m’interroge sur le hard discount. Celui-ci a-t-il fait l’objet d’une étude particulière, sachant qu’il représente environ 14 % de la distribution alimentaire ?

M. Kléber Mesquida. Ce rapport démontre le poids de l’agroalimentaire dans le produit intérieur brut et la balance commerciale.

Dans un contexte de baisse des prix, c’est généralement l’agriculteur qui voit ses prix diminuer, ce qui l’amène parfois à vendre à perte. Or si le produit de base disparaît parce que le producteur n’est pas rémunéré, c’est toute la filière qui risque de s’écrouler. Quels éléments de régulation pourraient être imaginés afin d’éviter les ventes à pertes des produits de base, comme c’est trop souvent le cas, en particulier pour les produits vitivinicoles ?

M. Dino Cinieri. Selon le rapport de l’Observatoire, les marges nettes réalisées par les distributeurs sur les produits laitiers, la boucherie, les volailles, la charcuterie et les fruits et légumes varient de moins 2 à plus 6 euros en moyenne, pour 100 euros de chiffre d’affaires.

Beaucoup de PME du secteur agroalimentaire sont victimes de la crise économique, qui touche la consommation, et de la volatilité des matières premières. Quelles actions les enseignes de la distribution ont-elles engagées avec ces PME afin de leur garantir une meilleure protection, notamment dans les relations commerciales ? La question des délais de paiement doit-elle, selon vous, être à nouveau posée ?

Mme Frédérique Massat. La présence des représentants de consommateurs à cette table ronde est, sauf erreur de ma part, une première : c’est là un point très positif.

En mars 2011, l’Observatoire nous avait présenté son premier rapport. Y a-t-il eu des évolutions cette année ? L’Observatoire a-t-il eu plus de facilités pour travailler ?

Les moyennes présentées constituent des données assez floues, qui ne correspondent pas forcément aux réalités des enseignes.

Récemment, les ministres respectivement chargés de l’agriculture et de la consommation ont lancé une mission d’inspection spécifique. Alors que les négociations commerciales sont en cours, M. Hamon a pointé le non-respect de règles du jeu, qu’il s’agisse de la transparence, des marges des fournisseurs, du partage équitable entre les acteurs économiques, des variations de prix ou du coût des matières premières. Que vous inspirent ces déclarations ?

Qu’attendez-vous, les uns et les autres, des futurs projets de loi relatifs à la consommation et à l’agriculture ?

M. Alain Marc. Comme son nom l’indique, un observatoire est chargé d’observer. De ce point de vue, on est en droit de se demander ce que recèlent les charges, dès lors que certaines marges nettes apparaissent comme négatives. Les surfaces louées sont imputées dans leur calcul ; or il est très facile de louer les espaces à une société civile immobilière (SCI) qui appartient au groupe. J’aimerais donc avoir davantage de précisions sur ce point.

Des milliers de données recueillies émanent de la grande distribution. Quelles relations l’Observatoire entretient-il avec les associations de consommateurs, dans l’optique de rendre ces données les plus objectives possibles ?

Les circuits courts, fréquents dans ma circonscription rurale, répondent-ils pour la grande distribution à des objectifs économiques, compte tenu notamment du coût des transports, ou à des démarches de marketing ?

M. Hervé Pellois. L’année de référence pour le calcul des marges nettes est-elle bien 2011 ? Aurons-nous un jour connaissance des marges nettes pour les différents maillons des filières ? La volatilité du marché des matières premières a certainement conduit les acteurs des filières à veiller à ce que les prix n’augmentent pas trop. Quant aux marges brutes, si elles ont augmenté cette année, elles avaient accusé une baisse l’an dernier par rapport à 2009 et 2010.

M. Philippe Le Ray. Les prix des matières premières échappant à tout contrôle, le système ne survit peut-être que de façon artificielle, grâce notamment à la PAC. La question du coût du travail dans la transformation doit sans doute être également posée.

Depuis un an ou deux, on semble par ailleurs découvrir que les grandes surfaces réalisent moins de bénéfices qu’on ne le croyait.

Coincés entre la grande distribution et ceux qui maîtrisent les matières premières, les éleveurs sont un peu, si vous me passez l’expression, les « pigeons » du système.

Que pensez-vous des marges arrière dissimulées dans le stockage par les centrales ?

Pourquoi ne parle-t-on pas de la TVA dans le secteur alimentaire ? Ne pensez-vous pas que le modèle du discount touche à sa fin ?

Ne pourrait-on enfin imaginer, pour les filières, un mécanisme de répartition fondé, non sur les marges de la grande distribution, mais sur le coût des matières premières ?

Mme Annick Le Loch. Le ton de cette table ronde me paraît bien policé, par comparaison avec ce que nous entendons sur le terrain.

Un grand patron qui vient de remettre un rapport sur la compétitivité a dit, il y a quelques jours, que la grande distribution a tué l’industrie agroalimentaire. M. Serge Papin, quant à lui, a récemment déclaré : « La guerre des prix met en péril les PME de l’agroalimentaire. […] Si on continue comme ça, c’est la chronique d’une mort annoncée de certaines filières agricoles et de pans entiers de notre industrie agroalimentaire. Il faut tirer le signal d’alarme. Il y a une véritable distorsion de concurrence entre les multinationales et les PME. » Les marges réalisées sur les grandes marques internationales étant faibles, on les compense par des marges plus élevées sur les produits des filières agricoles, de marques de distributeur ou de PME. M. Papin, de fait, préconise une modification de la loi de modernisation de l’économie, dite LME, afin de donner un peu d’air aux PME : les dispositifs, selon lui, sont mal appliqués, les règles du jeu pas respectées et la transparence des prix n’existe plus. Qu’en pensez-vous ?

M. Frédéric Roig. J’ai un peu l’impression, en écoutant les différentes parties prenantes, d’être dans une foire agricole. Le transport des produits importés génère, a-t-on entendu, des coûts élevés. La grande distribution ne pourrait-elle se tourner davantage vers les circuits courts, à travers par exemple des contrats locaux d’approvisionnement, qui accordent une place plus grande aux produits locaux ? Le consommateur, en effet, me semble être le dindon de la farce, si vous me permettez l’expression à l’approche de Noël.

Mme Anne Grommerch. Dans le contexte économique actuel, il nous faut trouver de nouveaux moyens de créer de la valeur, de relancer l’économie et l’emploi et de dynamiser la compétitivité. La question, observait M. Creyssel, n’est pas de répartir les pertes mais de créer de la valeur : comment la grande distribution peut-elle le faire ?

Mme Marie-Lou Marcel. De nombreuses associations de consommateurs ont observé que toute hausse des prix des produits agricoles est systématiquement répercutée sur les prix à la consommation – comme on l’a vu il y a quelques mois avec le lait –, mais jamais les baisses. Le Gouvernement, suite à la remise du rapport de l’Observatoire, a souligné l’urgence d’agir pour certaines filières en difficulté, en particulier celle de l’élevage. Quel système d’encadrement peut-on envisager ? La mise en place d’un coefficient multiplicateur est-elle une solution ?

M. Frédéric Barbier. Ce rapport nous a mis en appétit sur l’agroalimentaire, si j’ose dire ; ne pourrait-on, au sein de la grande distribution, répartir les frais généraux entre ce segment et d’autres, tels que l’habillement, l’hygiène, la hi-fi, la vidéo ou l’électroménager ?

L’étude portant sur les rayons et non sur les produits, les résultats s’en trouvent globalisés : des marges élevées sont peut-être masquées en étant liées à celles réalisées, par exemple, sur des produits en promotion. L’étude prend-elle en compte ces promotions ?

Mme Catherine Vautrin. Les industriels sont pris en étau entre la grande volatilité des prix agricoles, la distribution et le coût du travail ; de surcroît, des groupes internationaux sont davantage en mesure de négocier avec les distributeurs, car leurs produits sont considérés comme indispensables. Par ailleurs, la grande distribution est en pleine mutation, comme on le voit avec le « drive » ou la distribution spécialisée. Ces évolutions n’ouvrent-elles pas des perspectives ? Faut-il voir dans le développement des nouveaux instruments promotionnels (NIP) et du « cagnottage » un retour aux marges arrière ? Ces pratiques, en tout cas, ont un coût pour le consommateur.

M. Jean-Jacques Cottel.  Dans ma circonscription rurale, les producteurs se plaignent tous de la grande distribution et de la faiblesse de leurs marges. C’est particulièrement vrai avec le lait, dont le prix d’achat au litre – 32 centimes –, au regard des marges de la grande distribution, donne aux producteurs le sentiment d’être lésés : ils réclament donc davantage de transparence. Quelle est votre réponse ?

Sur les volailles, les marges de la grande distribution sont confortables. D’où viennent les produits ? Quelle est la qualité recherchée ? Le label a-t-il encore un avenir ? Comment expliquer que, dans le Nord-Pas-de-Calais notamment, la filière avicole ne puisse vivre malgré le grand nombre de consommateurs ?

M. le président François Brottes. Je me demande s’il ne faudrait pas organiser une nouvelle table ronde avec les acteurs directement concernés. Les représentants de l’interprofession s’en tiennent en effet à un discours d’équilibre qui escamote les clivages. Je vous invite donc à ne point vous brider dans vos réponses.

Monsieur Chalmin, tout compte fait, le consensus dont vous vous faites l’écho dérange autant que son contraire.

M. Philippe Chalmin. C’est là un faux procès, monsieur le président.

Je tiens à préciser, en préambule, que ce rapport n’est pas le « rapport Chalmin », mais celui de l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires. Comme l’a souligné Mme Dubié, il doit beaucoup à la compétence des services de FranceAgriMer. Adopté par l’ensemble des organisations représentatives au sein du comité de pilotage – qu’il s’agisse des filières, de la grande distribution, des industriels ou des consommateurs –, il est le fruit d’une trentaine de réunions, celles du comité de pilotage comme celles des groupes de travail spécifiques à chaque filière. Les universitaires s’apparentent parfois aux fous du roi, qui disent tout haut des vérités que l’on doit taire ; mais, en l’occurrence, je me suis cantonné à un rôle de médiation, même si – M. Creyssel peut en témoigner – certains points ont suscité de très vifs débats.

M. le président François Brottes. Lesquels ?

M. Philippe Chalmin. Celui, par exemple, du respect de la confidentialité des travaux. Sept enseignes seulement étant concernées, l’étude ne pouvait pas aller trop loin dans les détails, car les chiffres auraient alors pu être rapportés à l’une d’entre elles. Nous nous sommes donc engagés à ce que l’ensemble des éléments restent totalement confidentiels.

M. le président François Brottes. En somme, soyons transparents, mais ne disons rien.

M. Philippe Chalmin. Le problème ne se pose pas en ces termes : des groupes nous ont ouvert leurs comptes et donné accès à des éléments fondamentaux de leur politique commerciale, y compris vis-à-vis de leurs concurrents. Nous nous sommes en particulier engagés à ne prendre en compte que les rayons sur lesquels les sept enseignes nous ont toutes répondu. Beaucoup de magasins n’ayant pas de rayon poissonnerie, par exemple, les données en ce domaine étaient trop peu représentatives.

Ce rapport résulte d’un authentique travail de transparence : nous sommes donc parvenus, monsieur Hammadi, à sortir du climat de défiance. Cependant, pour le dire non en ma qualité de président de l’Observatoire mais avec mon statut d’électron libre, cette défiance est une spécificité française ; elle conduit chacun à s’en remettre à l’État et au législateur, son ampleur étant à la mesure de l’accumulation des normes réglementaires. Le coefficient multiplicateur, que certains ont évoqué, serait en ce sens une usine à gaz : l’installation d’un grillage autour du poulailler est une incitation pour le renard à y chercher des trous !

M. le président François Brottes. Ce n’est pas mieux sans grillage.

M. Philippe Chalmin. Cela se discute, car il faut précisément faire le pari de la confiance. Le modèle français, marqué par une forte présence de l’État à tous les niveaux, l’est aussi par une absence de confiance dans les relations commerciales. Si l’observatoire que je préside est le seul de son genre en Europe, c’est aussi, sans doute, parce que les négociations donnent lieu chaque année à des psychodrames : en Allemagne, à ma connaissance, les tensions sont bien moindres. On parle toujours de la relation entre industrie et négoce mais, dans certaines filières, comme celle du lait, la relation entre production et industrie n’est pas marquée au coin de la plus grande confiance !

La confiance passe d’abord par la transparence, à laquelle concourent précisément les chiffres que nous vous donnons, et dont je crois pouvoir dire qu’ils sont fiables. La grande distribution a joué le jeu, comme nous avons pu le vérifier en comparant certaines données avec celles d’enseignes n’appartenant pas à la FCD. Bien entendu, on peut constater des divergences en fonction des stratégies d’entreprise et du profil des groupes : pour le rayon boucherie, notamment, les résultats varient sensiblement entre les supermarchés et les hypermarchés. Quoi qu’il en soit, je n’ai aucune raison de remettre en cause les résultats que nous avons présentés. Il est vrai, monsieur Tardy, que la FNB les a contestés – alors que la FNSEA, qui en est partie prenante, a adopté le rapport –, même si elle s’est montrée moins vociférante que d’habitude, les prix de la viande bovine ayant beaucoup augmenté. Il est incontestable qu’un éleveur de race allaitante ne gagne pas sa vie ; l’industrie sort à peine la tête de l’eau ; au surplus, le consommateur a le sentiment que la viande est chère. Il faut dire aussi que la viande bovine reste très largement un sous-produit du lait. J’avais beaucoup choqué lorsque je m’étais demandé si, au restaurant de l’Assemblée, on servait de la vache de réforme laitière, éventuellement d’origine allemande ; j’espère que des vérifications ont été faites depuis lors ; reste que ce type de viande est souvent servi dans la restauration.

Les chiffres présentés dans le tableau sont donc les meilleurs possibles. Dans le prochain rapport, nous essaierons d’y voir plus clair dans la ligne « Autres charges ». Il est vrai qu’elle inclut le foncier, lequel est souvent constitué par une SCI qui appartient au propriétaire du magasin, quand elle n’a pas été remise sur le marché par l’enseigne, comme on l’a vu récemment.

Quant aux frais financiers, ils ne dépendent pas, dans les groupes intégrés, des taux du marché mais du niveau de rentabilité exigé par la centrale. Bref, s’il existe des divergences, il ne faut pas les surestimer. J’ajoute que les différentes enseignes ont des modèles économiques très différents, qui vont d’une organisation totalement centralisée, dans laquelle le magasin n’a presque pas de comptabilité propre, au système franchisé. Les recoupements entre les données ont permis de garantir un niveau de fiabilité des chiffres correct.

Quant à la possibilité d’un raisonnement à partir des marges, nous avons essayé d’évaluer les coûts de production agricole dans chaque filière. La notion de « marge brute » n’a de pertinence que pour certaines activités, comme l’élevage de porcs ou de volailles, où l’intégration entre l’amont et l’aval est plus nette ; pour un éleveur de race allaitante, c’est la notion de coût de production qui s’impose. Il faut aussi rappeler que, sur l’élevage, la PAC a radicalement changé au cours des quinze dernières années, passant d’un soutien par les prix à un soutien aux revenus, sans lequel la filière ne s’en sortirait pas : d’une façon ou d’une autre, il faut bien rémunérer la valeur que la présence des vaches confère à nos paysages.

L’année 2012 a bénéficié des effets conjoints – et non corrélés – de la flambée des prix des céréales et oléagineux, de la forte hausse des prix du porc – 1,70 euro le kilogramme au cadran de Plérin – et de ceux de la viande bovine, compte tenu notamment des exportations vers la Turquie. L’année 2013 sera beaucoup plus difficile : on constate déjà un retournement sur le marché du porc, avec un prix retombé à 1,50 euro le kilogramme, et, si la viande bovine continue de profiter des débouchés du sud méditerranéen, les prix des céréales resteront très tendus jusqu’en mars ou avril. Pour la filière de l’élevage, certains coûts de production risquent donc de n’être pas couverts par les prix de vente.

Enfin, l’idée des circuits courts est assurément sympathique et flatteuse, mais peu compatible avec l’évolution de notre modèle de consommation alimentaire, plus urbain : nous consommons de plus en plus hors du foyer et, lorsque nous le faisons dans celui-ci, c’est de façon beaucoup plus déstructurée qu’autrefois. En d’autres termes, nous achetons de plus en plus de produits intégrant des services et directement consommables. Pour la viande bovine que l’on achète en barquette dans les supermarchés, il faut ajouter de 2,5 à 3 % de freinte par rapport à la viande traitée par le sympathique boucher de quartier, qui utilise toute la carcasse, sans pertes. On entend parfois dire que l’on pourrait nourrir le monde si 30 % des aliments n’étaient pas jetés sans être consommés ; mais c’est oublier que notre modèle de consommation, qui rejette tout risque alimentaire, est par essence gaspilleur.

M. le président François Brottes. Il y a encore beaucoup de bouchers de proximité de grande qualité, et la vente directe existe aussi pour la viande.

M. Yves Berger. La part de marché des bouchers indépendants est inférieure à 15 %.

M. le président François Brottes. Elle n’est donc pas nulle.

M. Olivier Andrault. Beaucoup de députés nous ont interrogés sur les moyens de faire accepter les hausses de matières premières aux industries agroalimentaires et aux distributeurs et nous ont demandé s’il existe un mécanisme de répercussion des hausses, d’encadrement ou de répartition. S’agissant du coefficient multiplicateur, je romprai le consensus évoqué par M. Chalmin : l’« UFC-Que choisir » considère que le coefficient multiplicateur peut être utile, s’il s’applique à certains produits bruts ou peu transformés, et dès lors que l’on constate une divergence entre l’évolution des prix des matières premières agricoles et celle des prix de vente en rayon. Ce système, je le rappelle, existe depuis 2005 pour les fruits et légumes.

L’étiquetage est une question importante pour notre association, car il permet d’informer le consommateur sur l’origine et le parcours du produit. L’expérience menée en ce domaine sur l’empreinte carbone est une piste à suivre, pour peu que les experts s’entendent sur les modalités de calcul. Dans un contexte de développement du surpoids et de l’obésité, l’étiquetage relatif aux qualités nutritionnelles est également fondamental, d’autant que celui proposé au niveau européen n’est pas compréhensible par le consommateur moyen.

Enfin, la véracité des marges est effectivement un vrai sujet. Comme l’a souligné M. Chalmin, les administrations, notamment FranceAgriMer et la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), ont effectué un travail remarquable en ce domaine. Les efforts engagés nous semblent pouvoir être poursuivis, puisque la marge nette dépend de charges encore opaques, qu’il s’agisse du foncier ou des frais financiers. L’Observatoire pourrait étudier les variations de ces charges dans le temps, afin de vérifier qu’elles ne constituent pas des moyens de diminuer artificiellement la marge nette.

M. le président François Brottes. Vous avez certainement senti dans les interventions de nos collègues, monsieur Creyssel, une affection mitigée pour la grande distribution… Notre assemblée a récemment adopté, à l’unanimité, un texte visant à lutter contre la vie chère dans les outre-mer. Avec quel degré d’enthousiasme avez-vous accueilli sa promulgation ?

M. Jacques Creyssel. Le métier de commerçant est aussi noble que celui d’agriculteur ou d’industriel. Dans vos circonscriptions, les commerçants sont souvent les principaux employeurs, et ceux qui recrutent le plus grand nombre de jeunes peu qualifiés, ne l’oublions pas. La grande distribution a donc un rôle économique et social majeur ; au demeurant, le modèle français est souvent considéré comme un exemple à l’étranger : les difficultés propres à telle ou telle filière ne doivent pas servir de prétexte pour le remettre en cause, d’autant que, pour la première fois l’an dernier, notre secteur a vu ses effectifs diminuer de 2 %, ce qui représente 12 000 emplois en moins. La question du maintien et du développement de l’outil doit donc être posée avant celle de la répartition de la valeur.

M. le président François Brottes. Le Gouvernement, avec son plan de compétitivité, n’a pas oublié la grande distribution.

M. Jacques Creyssel. J’en suis d’accord. C’était d’ailleurs tout à fait indispensable : où seraient employés les 50 000 jeunes peu qualifiés que nous recrutons chaque année si nous ne pouvions plus le faire ?

S’agissant de l’oligopsone que formeraient quelques centrales d’achat, M. Law a répété les balivernes que l’on entend souvent. Existe-t-il, en France, vingt-cinq producteurs de yaourt, de lait, de boissons gazeuses ou alcoolisées ? Il y a plus de centrales d’achat que de producteurs ! J’ajoute que les bénéfices mondiaux de certains grands groupes industriels sont sans commune mesure avec ceux de l’ensemble de la grande distribution française. Il faut donc sortir des idées préconçues.

Nous avons souhaité que, avant d’être transmises à l’Observatoire, les données soient authentifiées par un cabinet indépendant – KPMG, en l’occurrence –, car nous savions bien qu’elles dérangeraient et, pour cette raison, qu’on les soupçonnerait d’être fausses. Quant aux données spécifiques à chaque enseigne, elles relèvent évidemment du secret des affaires.

On évoque des montages comptables sur le foncier, mais je rappelle que certains groupes de la grande distribution étant cotés, ils présentent des comptes consolidés, qui par définition englobent ces éléments ; ces comptes sont d’ailleurs tout à fait cohérents, en moyenne, avec les données du rapport de l’Observatoire. Ces dernières concernent la comptabilité analytique par rayon, pour laquelle nous disposions des marges brutes mais pas des marges nettes ; c’est pourquoi il a fallu un an pour les établir. Calculer la marge nette de la cerise bigarreau n’aurait aucun sens, non plus que d’évaluer le nombre de secondes qu’il faut pour sa mise en rayon ! La péréquation, je le rappelle, est la base même du métier. Un hypermarché, par exemple, propose jusqu’à 100 000 références : la marge moyenne n’étant que de 1,4 %, il faut bien que celle dégagée sur certains produits soit supérieure à d’autres. Pour les fruits et légumes, par exemple, le résultat net par kilogramme est de l’ordre du centime. Bref, si la transparence a été totale, elle s’arrête aux portes de la confidentialité et du raisonnable...

Les négociations ne sont pas bloquées, monsieur Tardy : elles aboutiront le plus tôt possible pour les PME et, en tout état de cause, d’ici à la fin du mois de février prochain pour l’ensemble des marques – même si, comme chaque année, on a entendu dire qu’elles seraient achevées à la fin du mois de décembre. Il n’y a du reste pas de difficultés particulières par rapport aux années précédentes, mais, comme dans les négociations sociales, il faut un certain temps pour parvenir à un accord global, que j’appelle bien entendu de mes vœux.

S’agissant des PME, quelques secteurs rencontrent des difficultés particulières, à commencer par celui de la charcuterie. Des groupes de travail ont donc été mis en place sous l’autorité de M. Stéphane Le Foll et de M. Guillaume Garot. Reste que la crise frappe les PME davantage que les grandes entreprises, c’est là une évidence, même si, à en croire un article récent paru dans la revue Libre service actualités (LSA), leur chiffre d’affaires dans les rayons des grandes surfaces progresse. Les PME, on le dit rarement, représentent plus de la moitié du chiffre d’affaires de la grande distribution et l’essentiel des marques de distributeur (MDD) : elles profitent d’ailleurs des circuits courts, lesquels, avant de permettre des économies sur les frais de transport, répondent à une demande des consommateurs.

Outre la transparence, dont témoigne le rapport, la meilleure solution, à nos yeux, ne réside pas dans une septième loi en dix ans, mais dans la définition de codes de bonne conduite. Un accord, en cours d’examen par la DGCCRF, vient d’être conclu avec la Fédération des entreprises et entrepreneurs de France (FEEF), avec laquelle nous poursuivons la réflexion sur des sujets tels que les appels d’offres et la volatilité des prix. Nous obtiendrons, dans les mois qui viennent, des résultats concrets. J’ajoute que les négociations à l’étranger ne sont pas aussi simples qu’on a l’air de le croire. Au reste, la concentration de l’agriculture allemande ne me semble pas être un modèle à suivre, même s’il facilite les négociations.

Nous ne sommes pas favorables à une modification de la LME, non seulement parce que cela créerait de l’instabilité, mais aussi parce que cette loi a des effets positifs : les marges arrière ont globalement disparu, la concurrence a rarement été aussi vive – certaines campagnes publicitaires le montrent – et l’impact sur les prix est considérable, puisque, selon l’INSEE, ceux-ci ont n’ont augmenté que de 1 % en un an dans la grande distribution, contre 3,6 % dans les autres réseaux de vente. Ce dernier niveau d’inflation est sans doute celui que l’on atteindrait dans la grande distribution si la LME était remise en cause : ce serait sans doute la pire chose à faire en cette période de crise.

Je rejoins M. Chalmin sur le coefficient multiplicateur : méfions-nous des solutions faciles. La France a mis longtemps à sortir des systèmes d’indexation ; y revenir serait la plus mauvaise nouvelle pour le consommateur. De tels systèmes constituent des négations de la concurrence ; or nier la concurrence est contraire à l’efficacité économique.

Le gaspillage alimentaire est un phénomène qu’il faut combattre, même si une étude européenne montre que la grande distribution n’y contribue qu’à hauteur de 5 % ; elle est d’ailleurs la principale donatrice de produits alimentaires en France, avec 35 % des dons. Une réunion s’est tenue la semaine dernière avec les associations, pour essayer d’aller plus loin encore. L’effort doit notamment être poursuivi au niveau européen, car il s’agit d’un enjeu collectif.

La réduction des délais de paiement aux PME est la mauvaise idée par excellence, car elle avantagerait les grandes marques nationales. Chacun s’accorde à dire que les délais fixés par la LME sont satisfaisants : il convient donc de s’assurer de leur respect. La prochaine loi relative à la consommation contiendra sans doute des dispositions sur le contrôle ; nous n’y sommes pas opposés, même si cela risque de créer des complications administratives.

La situation des céréaliers est très favorable, compte tenu des niveaux de prix des grandes cultures. Les éleveurs en subissent les conséquences, mais ce n’est pas au consommateur de régler la facture, comme je l’ai dit, en fâchant le président de la FNSEA et celui de Coop de France, lors de la réunion du le 21 novembre dernier. Les éleveurs et les céréaliers doivent s’accorder sur des péréquations et des mécanismes de couverture financière. Il n’est pas normal, par exemple, que le prélèvement visant à abonder le Fonds de modernisation se limite à 2 euros par tonne de céréales, alors que le prix du blé à la tonne a augmenté de 80 euros en un an.

Le modèle de la grande distribution, qui associait jusqu’alors une forte croissance, un foncier relativement bon marché, de longs délais de paiement et des taux d’intérêt élevés, n’a effectivement plus cours, madame Vautrin. Il nous faut donc trouver d’autres voies. Le « drive », par exemple, crée beaucoup d’emplois, ou à tout le moins évite d’en supprimer. Nous avons à chercher d’autres façons de créer de la croissance, que ce soit par la qualité, à travers le travail le dimanche ou par la vente de produits pharmaceutiques, délivrés sans ordonnance, et parapharmaceutiques.

Je regrette que la loi relative à la régulation économique outre-mer ne soit pas passée devant le Conseil constitutionnel : les mesures qu’elle contient sont-elles compatibles avec les principes de liberté et de propriété ? Toutes les études préalables tendent à montrer que non. En dotant l’Autorité de la concurrence d’un pouvoir d’injonction, on lui permet de sanctionner en l’absence de faute alors que, jusqu’à présent, elle ne pouvait le faire qu’en constatant des abus de position dominante. Seuls les États-Unis et l’Allemagne ont tenté d’instaurer un tel mécanisme de sanction sans faute ; mais ils y ont renoncé car il contrevenait aux libertés fondamentales définies par leurs constitutions respectives. La solution choisie ne permettra pas de régler le problème de la vie chère dans les outre-mer, toutes les études ayant au demeurant montré que la grande distribution n’en était pas responsable. C’est plutôt sur la taxation spécifique des produits importés dans ces territoires qu’il faut s’interroger.

M. le président François Brottes. Vous voulez sans doute parler de l’octroi de mer.

Si je vous ai bien compris, vous ne souhaitez pas intégrer dans la LME ces dispositions relatives aux outre-mer, sauf si cela vous permet de les voir retoquées par le Conseil constitutionnel. Je savais bien que je déclencherais votre enthousiasme, comme vous avez déclenché le nôtre avec les codes de bonne conduite, dont l’expérience dans le secteur bancaire a néanmoins montré qu’ils ne profitaient guère aux consommateurs.

Monsieur Law, votre raisonnement a été sévèrement jugé par M. Creyssel…

M. Alexander Law. C’est presque un compliment, monsieur le président.

M. Jacques Creyssel. M. Law est pour la loi, c’est bien normal.

M. Alexander Law. Je suis surtout pour son application, à commencer par celle de la LME.

Nous ne souhaitons pas plus que vous de grand soir législatif, mais la sanction effective de pratiques scandaleuses, telles que les compensations de marges ou la libre négociation des tarifs en l’absence de plans d’affaires étayés. Nous ne transigerons pas sur ces points.

La grande distribution est peut-être un exemple et un employeur important ; au reste, qu’elle augmente ses marges ne me pose aucun problème : au final, le consommateur – qui, comme d’aucuns l’affirment, n’a pas à payer la facture de l’augmentation des cours des matières premières – arbitre entre les enseignes concurrentes. Notre différend avec la grande distribution tient à ce qu’elle souhaite voir les marges des industriels baisser. Or la création de valeur, que nous appelons également de nos vœux, suppose des marges : c’est ainsi que l’on peut investir et créer des emplois. Le PIB, comme vous le savez, est la somme de toutes les valeurs ajoutées. Rappelons aussi que l’industrie agroalimentaire a dégagé, sur les douze derniers moins, un excédent commercial de 9,6 milliards d’euros, alors que la balance commerciale française accuse un déficit de 70 milliards. Mieux vaudrait donc protéger le secteur.

Vous avez parlé de « balivernes » à propos du concept d’oligopsone, ajoutant que les centrales d’achat seraient moins nombreuses que les grandes entreprises agroalimentaires ; pourtant, vous affirmez aussi que les PME représentent plus de la moitié du chiffre d’affaires de la grande distribution… Les distributeurs, à commencer par M. Papin et M. Leclerc, s’efforceraient par ailleurs de créer des régimes d’exception pour les PME.

M. Jacques Creyssel. Préférez-vous que nous protégions les grands groupes ?

M. Alexander Law. Je souhaite que l’on protège tout le monde et que l’on applique la loi votée par les représentants de la nation. Pourquoi vouloir créer des régimes d’exception, sinon pour diviser afin de mieux régner ? Michel-Édouard Leclerc a déclaré qu’il vaut mieux faire vivoter quelques entreprises à sa main et « castagner » les grandes : comment accepter des propos aussi violents ? À n’en pas douter, des codes de bonne conduite profiteraient aux plus puissants.

M. Jacques Creyssel. Ce n’est pas l’opinion de nos interlocuteurs.

M. Alexander Law. Je ne contesterai pas le chiffre de 1,4 % pour vos marges ; reste que leur faiblesse est le propre de votre modèle d’affaires : les grands distributeurs n’étant que sept, ils écoulent des volumes considérables. Il est donc normal que leurs marges soient plus faibles que celles des 10 000 entreprises du secteur agroalimentaire. Une marge d’un centime par produit n’a pas le même impact selon que l’on vend ce produit par milliers ou par milliards.

Les adhérents des fédérations d’entreprises, principalement de PME, nous font part, au rebours de ce que vous affirmez, de difficultés dans les négociations commerciales, avec des demandes déflationnistes, allant de moins 5 à moins 10 %, alors que les prix des céréales ont augmenté de 30 % au cours du seul mois de juillet dernier.

La LME a certes permis de contenir la hausse des prix ; mais n’oublions pas que les produits agroalimentaires ne représentent que 1 % de la consommation des ménages : ce n’est donc pas par un matraquage sur ces prix que l’on réglera le problème du pouvoir d’achat. Pour augmenter ce dernier de 2 %, il faudrait diminuer les prix de nos produits de 20 %, et partant détruire 70 000 emplois. Le problème du pouvoir d’achat est d’abord lié au chômage, aux dépenses pré-engagées – qui représentent un tiers des dépenses des ménages –, et au logement, auquel ces derniers consacrent un quart de leur budget, contre 10 % pour les dépenses alimentaires.

Le modèle de la grande distribution, après des années de vaches grasses, a effectivement évolué. Lorsque la consommation diminue, il faut revenir aux fondamentaux du commerce. L’un d’entre eux consiste à travailler en bonne intelligence avec les fournisseurs. Force est de constater que, pour l’instant, ce n’est guère le cas.

M. le président François Brottes. Après un début de réunion apaisé, le débat reprend ses droits ; j’en serais presque rassuré. Cela nous change de « Chalmin 2 » !

M. Philippe Chalmin. L’Observatoire s’est efforcé de sortir de l’opposition frontale. Les effets de manche peuvent effectivement révéler certaines tensions, mais je suis au regret de vous dire que « Chalmin 2 » est plutôt consensuel.

M. le président François Brottes. J’ai entendu des arguments plus que des effets de manche.

Monsieur Grandin et monsieur Berger, puisque, sur 100 euros de dépenses alimentaires, 8 euros seulement reviennent à l’agriculture, vous êtes en première ligne sur les crises, mais en position d’observateurs dans ce débat.

M. Yves Berger. Oui, dans une certaine mesure. C’est d’ailleurs la première fois que l’on ne m’accuse pas d’être la mouche du coche, celle qui pose les questions gênantes et qui assume, parfois, un rôle de modérateur. Notre mission est de réunir les treize responsables des organisations professionnelles, de la production jusqu’à la distribution. La recherche du consensus à tout prix est souvent vouée à l’échec, mais nous nous efforçons de faire émerger des positions communes. En ce sens le rapport de l’Observatoire est un travail utile qu’il faut poursuivre.

Le vrai problème, pour la filière bovine, réside dans un ajustement entre l’offre et la demande. La viande consommée en France, a observé M. Chalmin, est pour l’essentiel un sous-produit de l’élevage laitier ; ce n’est malheureusement plus vrai, puisque 55 % de la viande bovine consommée est celle de l’élevage allaitant ; or, dans ce secteur, les revenus proviennent exclusivement de la commercialisation des bêtes. Je préfère la notion de co-produit à celle de sous-produit, même s’il est vrai que l’éleveur laitier, de son côté, se soucie trop peu du prix du veau de huit jours ou de la vache de réforme. Quoi qu’il en soit, doit-on inciter les éleveurs qui ne vivent que de la vente du bétail à se cantonner à ce type d’élevage, alors qu’ils sont parfois en mesure d’en développer d’autres ? Là est la vraie question, même si elle dépasse nos débats d’aujourd’hui.

Au sein de l’interprofession, les échanges sont parfois vifs entre les éleveurs, qui se plaignent de mal gagner leur vie, et les distributeurs, qui affirment qu’ils ne peuvent pas faire plus. Quant aux transformateurs, ils se déclarent prêts à payer plus cher, mais à la condition que les produits correspondent mieux à leurs besoins. Or, force est de constater que les vaches laitières étant de moins en moins nombreuses, le minerai pour les steaks hachés se raréfie également. Les syndicats du secteur de l’abattage ont fourni, l’an dernier, des tableaux chiffrés qui montrent que les minerais issus de vaches allaitantes seront bientôt aussi intéressants, pour la confection des steaks hachés, que ceux issus de vaches laitières. Notre préoccupation, dans ces conditions, est de mieux ajuster l’offre à la demande, sans oublier les exportations, qui occupent désormais une place prépondérante dans la mesure où elles permettent de vendre à des prix rémunérateurs.

Quant aux circuits courts, ils ne peuvent être, dans notre filière, que des exceptions, du moins pour ce qui concerne les relations entre producteurs et consommateurs. On pourrait en revanche les développer dans la restauration collective. Il faudrait peut-être que les appels d’offres favorisent le mieux-disant, comme c’est le cas avec les produits « bio ». Je n’ai évidemment rien contre les bouchers, mais leur activité s’apparente de plus en plus à la haute couture. Loin devant elle, la restauration collective constitue aujourd’hui la deuxième source de commercialisation de la viande.

Le « drive », dont a parlé M. Creyssel, me semble incompatible avec la distribution de viande : les Français préfèrent les produits préparés sur place à ceux préparés ou commandés ailleurs ; cela explique sans doute que la viande fraîche soit quasiment absente du panier moyen du « drive ».

L’Observatoire doit poursuivre son travail ; depuis la publication du tableau sur les minerais que j’évoquais, les fédérations d’abatteurs lui transmettent des données anonymes. Il faut enfin pousser plus loin les investigations sur les frais fixes, afin de les rendre plus transparents.

M. le président François Brottes. Je viens enfin de comprendre, avec les « minerais », pourquoi notre commission était compétente sur le code minier comme sur l’agriculture.

M. Laurent Grandin. Le dialogue entre les différentes familles d’une interprofession longue est le fondement même de son existence.

On a évoqué plusieurs outils, parmi lesquels le coefficient multiplicateur, dont je rappelle qu’il n’a jamais été appliqué pour les fruits et légumes. De fait, il peut être contre-productif s’il ne concerne qu’un seul produit : il entraîne alors des transpositions, qui ne peuvent être des solutions dans une économie ouverte.

Les fruits et légumes sont l’une des filières pour lesquelles les contrats avec les agriculteurs, dans le cadre des ventes de proximité, sont obligatoires. Cela donne une certaine lisibilité aux relations entre les acteurs, mais les situations varient beaucoup d’une région à l’autre. En Île-de-France, la demande est très supérieure à l’offre – c’était déjà le cas au Moyen Âge, lorsque les rois se demandaient comment alimenter Paris. Les contrats sont donc faciles à conclure, si bien que la question est plutôt de savoir comment protéger certains espaces et relocaliser les productions. Le débat est évidemment tout autre dans les départements où l’agriculture est omniprésente.

Pour la restauration collective, le mieux-disant prévaut désormais ; toutefois, il convient de réfléchir aux critères retenus. Je rappelle que l’article 53 du code des marchés publics autorise à privilégier les achats en circuit court, avec un intervenant au maximum entre le producteur et l’acheteur.

Nous sommes favorables à la stabilité juridique, car les textes se sont accumulés sans qu’on ait le temps de les « digérer ». La loi relative à la contractualisation est pour ainsi dire inappliquée au sein de la filière des fruits et légumes, car elle lui est inadaptée. Notre filière a des particularités dont il faut tenir compte : elle est fragile, longue, et les acteurs qui la composent travaillent sur des produits frais.

M. le président François Brottes. Si certaines lois sont inappliquées, c’est peut-être qu’elles sont inapplicables ; auquel cas il vaut mieux les rayer du corpus législatif.

Messieurs, je vous remercie.

——fpfp——

Membres présents ou excusés

Commission des affaires économiques

Réunion du mardi 18 décembre 2012 à 16 h 15

Présents. - M. Frédéric Barbier, Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Yves Blein, Mme Michèle Bonneton, M. François Brottes, M. Dino Cinieri, Mme Jeanine Dubié, Mme Marie-Hélène Fabre, M. Daniel Fasquelle, Mme Pascale Got, M. Jean Grellier, Mme Anne Grommerch, M. Razzy Hammadi, M. Jean-Luc Laurent, Mme Annick Le Loch, M. Philippe Le Ray, Mme Audrey Linkenheld, M. Alain Marc, Mme Marie-Lou Marcel, Mme Frédérique Massat, M. Jean-Claude Mathis, M. Kléber Mesquida, M. Yannick Moreau, M. Hervé Pellois, M. Bernard Reynès, M. Frédéric Roig, Mme Béatrice Santais, M. Éric Straumann, M. Lionel Tardy, Mme Catherine Vautrin, M. Fabrice Verdier

Excusés. - M. Damien Abad, M. Christian Franqueville, M. Philippe Armand Martin

Assistait également à la réunion. - M. Jean-Jacques Cottel