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Commission des affaires économiques

Mercredi 13 mars 2013

Séance de 10 heures

Compte rendu n° 57

Présidence de M. François Brottes Président

– Audition, ouverte à la presse, de Mme Claude Revel, auteure du rapport commandé par le Gouvernement « Développer une influence normative internationale stratégique pour la France », de M. Alain Costes, directeur « normalisation » à l’AFNOR sur « la normalisation, outil de compétitivité » et de M. Alain Savary, directeur général d’AXEMA, union des syndicats des agroéquipements.

La commission a auditionné Mme Claude Revel, auteure du rapport commandé par le Gouvernement « Développer une influence normative internationale stratégique pour la France », M. Alain Costes, directeur « normalisation » à l’AFNOR sur « la normalisation, outil de compétitivité » et M. Alain Savary, directeur général d’AXEMA, union des syndicats des agroéquipements.

M. le président François Brottes. Madame, messieurs, soyez les bienvenus. J’avais indiqué à Mme Nicole Bricq, ministre du commerce extérieur, lors de son audition, que nous entendrions Mme Claude Revel, dont le rapport concerne un domaine qui a toujours requis l’attention de notre commission et dans lequel la France se fait souvent « tailler des croupières », si vous me passez l’expression : en matière de normalisation, nos amis allemands semblent plus performants, si bien que nos industriels ont parfois le sentiment d’arriver après la bataille, alors même que leurs produits les plaçaient en position de force.

M. Alain Costes, directeur « normalisation » à l’AFNOR, est en quelque sorte le « grand manitou » du secteur ; quant à M. Alain Savary, directeur général d’AXEMA, il nous apportera le témoignage d’un lobby français. Le salon des agroéquipements à Villepinte, dont l’organisation coïncide avec celle du salon de l’agriculture, m’a donné l’occasion de constater que la France possède beaucoup de PME dynamiques dans le secteur des équipements agricoles, qui représente quelques dizaines de milliers d’emplois. Le prochain salon des agroéquipements se tiendra en 2015 : peut-être devrions-nous, une année sur deux, nous y attarder davantage qu’au salon de l’agriculture, même si celui-ci reste un rendez-vous incontournable.

Mme Claude Revel. Je vous remercie de votre invitation.

La compétition internationale s’est étendue à l’immatériel, c’est-à-dire aux informations, aux images et aux règles ayant présidé à la fabrication des produits. Or 90 % des normes qui s’imposent à nous sont élaborées à l’étranger, essentiellement par l’Union européenne, qui elle-même s’inspire des réglementations internationales : notre pays a évidemment plus intérêt à influer sur cette élaboration qu’à la subir.

Les normes, comme les règles, organisent, encadrent et contraignent la production de nos entreprises et la politique des États : dans la pratique, il n’y a donc pas lieu de les distinguer ; elles constituent les règles du jeu et procurent un avantage concurrentiel évident à celui qui en décide. Les normes émanent de l’Organisation internationale de normalisation (ISO), du Comité européen de normalisation (CEN), de l’AFNOR ou des agences étrangères – au premier rang desquelles les américaines. Elles portent non seulement sur la technique, mais aussi sur la gouvernance, comme en témoignent, par exemple, les normes financières et comptables – applicables aux entreprises comme aux États –, les normes de responsabilité sociale des entreprises (RSE) ou de reporting. Quant aux règles de droit positif, nationales et internationales, elles recouvrent les accords signés au sein de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), les accords de libre-échange – à l’instar de celui qui est en préparation entre l’Union européenne et les États-Unis – ou encore les directives européennes. Le Codex alimentarius, par exemple, constitue un corpus normatif, bien qu’il relève d’organismes internationaux.

Les classements internationaux visant universités, États ou entreprises suscitent une émulation que l’on peut assimiler à une réglementation invisible. Les Américains sont particulièrement performants en ce domaine pour fixer eux-mêmes les critères de classement ; le classement de la Banque mondiale, par exemple, repose sur des critères qui ne nous sont guère favorables. Règles et normes résultent de jeux d’influence et traduisent toujours, même pour les plus techniques d’entre elles, des visions, des cultures ou des conceptions du droit.

La normalisation est le fait non seulement des acteurs publics, mais aussi, de plus en plus souvent, d’opérateurs privés tels que les organisations professionnelles – ISO, Chambre de commerce internationale ou fédérations d’ingénieurs-conseils – et les ONG, par exemple en matière de lutte anti-corruption – Transparency international, que chacun connaît, n’étant pas la seule organisation spécialisée en ce domaine – ou de biocarburants : World wildlife fund (WWF) a ainsi contribué à la définition de normes de culture durable. La privatisation de la règle, de plus en plus appelée à devenir la norme, est un phénomène croissant : même si ce que les anglo-saxons appellent la « soft law » – principes directeurs ou codes de conduite – n’a pas force de droit, elle n’en demeure pas moins un pouvoir de contrainte par les sanctions, notamment médiatiques, qu’elle suppose. Il faut donc travailler avec l’ensemble des acteurs, publics comme privés. Enfin, de nouvelles règles peuvent être édictées à la suite d’événements tels que des catastrophes naturelles ou des guerres civiles, notamment en matière de construction, dans le cadre des marchés publics. La définition de ces règles fait alors l’objet de luttes d’influence considérables, de même que l’assistance technique, puisque l’ouverture de certains marchés – et leur fermeture à la concurrence – peut aussi dépendre de l’orientation des expertises à l’origine des normes.

Troisième point : le rôle des accords de libre-échange. On dit de l’OMC qu’elle est dans l’impasse, ce qui n’est que partiellement vrai dans la mesure où sa jurisprudence forme un nouveau corpus juridique, sur lequel la France pourrait d’ailleurs influer. L’Union européenne, vous le savez, négocie de nouveaux accords de libre-échange avec le Canada et surtout avec les États-Unis ; or, aux dires des Américains eux-mêmes, ce futur accord passe par la définition de règles appelées à avoir une portée mondiale. Ce nouveau droit concurrencerait celui de l’OMC et les normes que des pays comme la Chine pourraient essayer d’imposer.

Par le fait, les pays émergents pèsent de plus en plus en matière de normalisation. La Chine est très présente à l’ISO, et s’intéresse aussi, désormais, aux règles de gouvernance : en témoigne le consensus de Beijing, qui fait pièce à celui de Washington et à sa vision d’un développement fondé sur le libre-échange. Il est bien évident que les normes proposées par ce pays ont plus d’influence, au regard de l’ampleur de son marché, que celles qui pourraient l’être par le Liechtenstein.

La première question posée par la normalisation est celle de l’information : celle-ci est nécessaire non seulement pour connaître les stratégies de nos concurrents et les orientations des organismes internationaux, mais aussi pour imposer notre propre modèle au niveau international. C’est ce qui explique que le lien entre normalisation et intelligence économique soit si étroit. En ce sens, notre politique de normalisation doit pleinement s’inscrire dans notre action internationale : elle est un moyen d’affirmer notre présence dans le monde, non seulement sur le plan commercial, mais aussi sur les plans culturel, politique et juridique. Je formule des préconisations en ce sens dans mon rapport, notamment pour le secteur de l’agroalimentaire dont s’occupent de très nombreux organismes internationaux. L’enjeu majeur, de ce point de vue, est moins l’expertise que l’ingénierie de projection, la coopération, la définition de positions communes et l’anticipation des attentes de la société civile : je pense par exemple, outre l’agroalimentaire, à l’énergie, au développement durable, au numérique ou à la santé, sans oublier des domaines comme la métrologie, dans lesquels la France est traditionnellement performante.

M. Alain Costes, directeur « normalisation » à l’Association française de normalisation (AFNOR). Au vu des indicateurs existants, la France occupe, en matière de normalisation, le deuxième rang européen après l’Allemagne et le troisième au sein de l’ISO, derrière l’Allemagne et les États-Unis. La priorité, à mon sens, est de conserver cette position en ciblant plusieurs domaines plutôt que d’adopter une attitude conquérante. Le poids de la Chine, quasi nul il y a dix ans, représente désormais la moitié de celui de la France au sein de l’ISO : si, en accord avec l’Allemagne et les États-Unis, nous avons volontiers fait de la place à ce pays, nous considérons désormais qu’il n’y a plus de raisons de lui faire de « cadeaux », d’autant que son marché lui donne beaucoup de pouvoir. Nous entendons désormais limiter la coopération à ce qui peut être utile.

L’AFNOR est responsable de l’ensemble de l’activité de normalisation en France ; elle élabore une partie des normes françaises, en coopération avec des bureaux de normalisation sectoriels tels que l’Union technique de l’électricité et l’Union de normalisation de la mécanique, dont nous supervisons les travaux. L’AFNOR défend enfin les intérêts français à l’international, au sein du CEN et de l’ISO.

La norme dont s’occupe l’AFNOR est dite « volontaire », c’est-à-dire qu’elle donne présomption de conformité : elle inclut des savoirs et des savoir-faire ; elle a donc un prix. La norme est également un produit vivant, puisqu’elle fait l’objet d’un réexamen tous les cinq ans au plus. Ce travail s’effectue dans la transparence, la publication d’une nouvelle norme étant précédée d’une enquête publique que chacun peut consulter et commenter : notre commission de normalisation doit prendre en compte toutes les remarques formulées à cette occasion.

Le format de papier A4, créé par les Allemands, offre un bon exemple de norme volontaire. L’intérêt de la norme est de garantir l’adéquation du produit aux usages que l’on en peut faire – en l’occurrence, introduire les feuilles de papier dans une imprimante ou une enveloppe, par exemple –, mais la commercialisation d’un autre format n’a rien d’illégal : on le voit chaque année avec les cartes de vœux. De même, si les appareils d’Apple ne sont pas compatibles avec les normes techniques des clés USB, non plus qu’avec celles des fichiers MPEG, cela n’empêche pas cette entreprise d’occuper une place majeure sur le marché du numérique.

Notre pays possède un portefeuille de 33 000 normes. Ce volume est globalement stable, dans la mesure où le nombre de normes créées est à peu près équivalent à celui de normes supprimées, soit environ 2 000 par an – au demeurant, il ne s’agit parfois que de remplacer des normes anciennes par une version actualisée. Sur l’ensemble du stock, 400 normes sont, aux termes exprès de la réglementation, d’application obligatoire : elles concernent souvent la sécurité, par exemple pour les établissements recevant du public (ERP) ou l’électricité.

De notre point de vue, la norme offre trois avantages majeurs aux entreprises et à l’économie en général. Référentiel public, elle permet en premier lieu de fluidifier les marchés et d’optimiser le coût d’approvisionnement des entreprises, puisqu’un fabricant n’a qu’à la mentionner auprès d’un fournisseur pour obtenir le produit adéquat. De plus, en mettant en avant la conformité de ses produits avec telle ou telle norme, l’entreprise se facilite l’accès au marché.

Par ailleurs, la norme diminue les asymétries d’information du marché : elle traduit des niveaux de performance et des contenus intrinsèques, comme les chevaux DIN pour les voitures. Ce faisant, elle empêche les mauvais produits, souvent moins coûteux, de remplacer les bons et met en relief les contraintes extérieures, liées par exemple aux objectifs de développement durable. Ainsi, les normes de consommation électrique ont permis de valoriser, auprès des consommateurs, les réfrigérateurs plus économes, si bien que ne subsistent sur le marché que les produits estampillés A, AA ou AAA. En ce sens, la normalisation a un effet protecteur pour les entreprises françaises, souvent plus performantes.

Enfin, la norme étant en perpétuelle adaptation, elle accompagne les évolutions du marché et permet de soutenir l’innovation. Selon une étude allemande, la normalisation génère près de 50 % de la croissance du PIB. L’utilisation des normes et la fluidification du marché qui en résulte, en acquisition de fournitures comme en vente, représentent enfin un gain compris entre 1 et 4 % du chiffre d’affaires des entreprises.

La norme résultant d’un consensus, les travaux qui président à son élaboration sont ouverts et transparents : ils réunissent autour d’une même table les consommateurs et les entreprises concurrentes. Chacun se prononce évidemment en fonction de ses compétences propres ; ainsi, la norme devient un outil, non seulement d’adaptation au marché, mais aussi d’intelligence économique : en participant à son élaboration, les entreprises d’un même secteur peuvent échanger des informations sur des technologies, des innovations ou des critères de qualification, en d’autres termes anticiper les évolutions du marché.

M. le président François Brottes. Ces deux premières interventions dressent un tableau plutôt optimiste de la situation, si bien, monsieur Savary, qu’on pourrait s’interroger, en étant un peu caricatural, sur l’utilité des lobbyistes. D’ordinaire, nous entendons plutôt les industriels se plaindre des retards accumulés par notre pays.

M. Alain Savary, directeur général d’AXEMA, union des syndicats des agroéquipements. Après un bref exposé du contexte pour le secteur des agroéquipements, j’évoquerai les travaux de normalisation qui le concernent et les perspectives d’avenir.

AXEMA regroupe 250 entreprises françaises, des TPE jusqu’aux groupes multinationaux, qui conçoivent, importent ou exportent des machines agricoles. Le secteur génère en France un chiffre d’affaires de 5,5 milliards d’euros, sur un total de 72 milliards pour l’ensemble du monde et de 22 milliards pour l’Europe. Notre pays est le premier marché européen, lui-même premier marché dans le monde. Les produits concernés vont des tracteurs, semoirs, moissonneuses-batteuses ou machines destinées à l’élevage – salles et robots de traite, systèmes d’alimentation animale – jusqu’aux pressoirs à vin, serres horticoles, systèmes d’irrigation de maraîchage, en passant par les machines d’entretien des parcs et jardins – débroussailleuses, tondeuses ou tronçonneuses –, destinées aux professionnels comme au grand public.

La grande variété de la taille des entreprises concernées a une incidence sur la normalisation. En outre, le marché se caractérise par sa dimension internationale : si les trois quarts de la production française sont exportés, les trois quarts des produits vendus en France sont importés. Ces ordres de grandeur valent aussi pour l’Allemagne, l’Italie et les principaux pays étrangers. Enfin, rares sont les machines uniques et indépendantes : la plupart doivent être combinées à d’autres, ce qui suppose un minimum de standardisation.

Ces différentes raisons expliquent que la normalisation soit un sujet très ancien pour le secteur : la question s’est posée au lendemain de la Seconde guerre mondiale avec la mécanisation de l’agriculture, lorsqu’il fallut harmoniser la puissance des tracteurs avec les autres outils. Dans les années 50, 60 et 70 les industriels ont été incités à s’impliquer dans ce chantier, principalement au niveau de l’ISO. Des développements ultérieurs sont intervenus via le CEN et l’AFNOR, pour le secteur des machines et celui des tracteurs, le premier étant régi par la directive « Machines », dont la première version a été adoptée en 1989 et la dernière révision date de 2006. Les entreprises françaises participent à ces différents groupes de normalisation, dont l’un, le CEN/TC 144, est sous présidence française. Bien que l’Allemagne soit la principale intervenante au niveau européen, la présence française s’intensifie par le biais des syndicats et des entreprises. Cet engagement a permis d’associer de nombreuses PMI intéressées par l’harmonisation des normes dans le cadre de l’export. Je veux également saluer l’action de la sous-direction de la qualité pour l’industrie et de la normalisation au ministère de l’intérieur, dite SQUALPI, avec laquelle nous travaillons activement et efficacement.

Cette dynamique a récemment suscité la rédaction volontaire, hors contrainte réglementaire, de normes environnementales pour les pulvérisateurs de produits phytosanitaires et les épandeurs d’engrais. Dans le secteur des tracteurs, les normes sont moins nombreuses en raison d’une réglementation très prégnante, qu’il s’agisse des émissions de particules et de gaz issus des moteurs thermiques, ou plus généralement des directives européennes.

L’engagement de nos entreprises au cours des vingt dernières années a permis la création d’un corpus de règles de sécurité fondées sur une approche différente de celle de notre principal concurrent, l’Allemagne. En plus de stimuler nos exportations, cette participation aux groupes de normalisation a été une bonne école pour nos PME, qui ont pu y acquérir une culture de la réduction des risques et des enjeux environnementaux. Leur engagement s’est néanmoins essoufflé pour plusieurs raisons, dont deux majeures. La première est l’insuffisance des contrôles : il ne s’écoule pas un mois sans que notre organisation soit saisie au sujet d’appareils à bas prix importés de Chine, et qui ne respectent ni les normes de sécurité ni les normes environnementales. Nous prévenons l’administration et tentons de faire saisir les containers, mais entre-temps, les grands distributeurs ont vendu les appareils. Cette concurrence déloyale démotive nos entreprises.

L’autre raison de l’essoufflement tient à la raréfaction des ressources humaines compétentes, les questions de normalisation étant parfois reléguées au second plan par les préoccupations de court terme. Le crédit d’impôt recherche permet de faire face au coût induit par l’engagement dans les travaux de normalisation : il convient donc de le maintenir.

J’insisterai, pour conclure, sur trois enjeux d’avenir. Le premier est l’intégration des technologies de l’information dans les normes, depuis l’amont – machines agricoles et semences et engrais –, jusqu’à la transformation en aval par l’industrie agroalimentaire, en passant par la production. Les données transmises d’un semoir muni de capteurs, fabriqué par un constructeur, à un tracteur géopositionné par satellite et fabriqué par un autre constructeur sont ensuite transférées vers un logiciel de gestion d’exploitation ou de traitement de données relatives, par exemple, au verdissement de la politique agricole commune. La normalisation du transfert d’informations sur toute la chaîne représente un enjeu considérable, car de grands groupes imposent des normes fermées aux autres, à l’instar d’Apple dans l’informatique.

Le deuxième enjeu majeur est la mise en œuvre de normes en matière de développement durable sur l’ensemble du cycle de vie des produits, depuis la conception des machines jusqu’à leur utilisation et, enfin, leur destruction.

Le troisième et dernier enjeu est de porter nos acquis européens au niveau de l’ISO, au sein duquel les Chinois, mais aussi les Brésiliens et les Indiens sont de plus en plus présents. Rappelons que la part du marché chinois dans le marché mondial des agroéquipements est passée de 7 % en 2005 à 17 % aujourd’hui – et l’Inde et le Brésil suivent de près. Si nous n’affirmons pas notre présence dans ce secteur par essence international, nous serons exclus des marchés.

M. le président François Brottes. Il nous faut aussi réfléchir à la façon dont le législateur français peut influer sur la normalisation : s’agissant, par exemple, de la diminution des produits phytosanitaires, certains dispositifs sont peut-être plus vertueux que d’autres, que nous pourrions interdire.

M. Patrice Prat. Permettez-moi tout d’abord, au nom du groupe SRC, de remercier nos invités pour leur éclairage sur cette face immergée de nos échanges internationaux, ainsi que le président de notre commission pour cette audition sur un sujet trop méconnu, voire minoré en France.

Nous partageons, madame Revel, votre constat selon lequel l’influence normative doit être comprise comme un facteur de compétitivité pour nos entreprises et pour l’État en général. Il faut donner à notre système productif les moyens de se construire un environnement juridique favorable à ses propres intérêts : c’est la condition sine qua non d’une reconstruction industrielle et de notre redressement économique.

Cette dimension est encore trop peu présente dans l’inconscient collectif français, et plus particulièrement au sein des entreprises. Votre rapport a le mérite de prendre la problématique à bras le corps, dans un contexte de production croissante de normes internationales. Je souhaite insister sur trois points.

En premier lieu, comme vous l’avez rappelé, le développement d’une influence normative doit prendre une forme professionnelle et cohérente ; il passe par la construction d’une image et d’un discours vis-à-vis non seulement de nos entreprises, mais aussi de nos concurrents et partenaires étrangers. Il incombe à la puissance publique de sensibiliser son tissu productif à ces questions en mettant en œuvre des mécanismes qui incitent les entreprises à redevenir actrices de leur propre normalisation. De ce point de vue, l’alignement du crédit d’impôt normalisation sur le crédit d’impôt recherche (CIR) va dans le bon sens.

La France doit, en deuxième lieu, réinvestir le champ des institutions internationales à un niveau opérationnel. Notre pays a positionné des têtes d’affiche à des postes prestigieux, mais cela ne suffit pas, ou en tout cas ne suffit plus. Ces têtes d’affiche n’ont en effet qu’une influence opérationnelle toute relative sur les processus de normalisation : il convient de réinvestir les instances plus restreintes qui, bien qu’elles soient parfois considérées comme mineures, sont le théâtre des luttes d’influences concrètes. Notre pays doit enfin se montrer plus présent dans les appels d’offre des organisations internationales et même des États, en développant une véritable politique d’expertise internationale.

S’agissant en troisième lieu du processus prénormatif, c’est-à-dire l’émergence d’idées ou de concepts appelés à devenir des normes, la France accuse malheureusement un retard important que les think tanks, les lobbies, les universités, les grandes écoles et la communauté des chercheurs pourraient contribuer à combler. Une telle démarche doit être encouragée et devenir un véritable moyen d’influence.

Comment la diplomatie économique, dont M. Fabius a déclaré qu’elle était une priorité, peut-elle s’articuler avec une diplomatie d’influence normative ?

Dans un monde globalisé, où les règles internationales d’origine anglo-saxonne et européenne sont en recrudescence, la France peut-elle, seule, développer une stratégie d’influence normative ?

Enfin, la création d’un poste de Haut représentant chargé de piloter et coordonner une stratégie française d’influence normative et d’expertise internationale ne serait-elle pas pertinente pour combler nos lacunes en la matière ?

M. Daniel Fasquelle. Au-delà des enjeux économiques, le rapport de Mme Revel met en évidence les enjeux culturels et juridiques de la normalisation. Plusieurs rapports de la Banque mondiale laissent entendre que les systèmes juridiques d’inspiration continentale sont moins efficients pour l’activité économique que ceux issus de la common law. Il faut y être attentif, afin de défendre au mieux nos intérêts. Le rapport de Mme Revel, qu’il faut saluer sur ce point, témoigne d’une volonté de défendre la position de notre pays dans les instances internationales, où s’élaborent les normes.

J’ai été frappé par la quasi-absence de l’Europe dans les présentations que nous venons d’entendre. Pourtant, après la création du marché commun en 1957, la signature de l’Acte unique européen en 1985 a accéléré la normalisation européenne, générant un nombre considérable de directives ou règlements en matière de produits agricoles, de médicaments, de produits agroalimentaires et d’autres secteurs industriels, qu’il s’agisse de la sécurité des jouets, des ascenseurs ou des appareils de pesée. C’est en œuvrant à l’élaboration des normes européennes que la France se donnera les moyens d’imposer son point de vue au niveau mondial, non en agissant seule. Quelle est votre position sur ce point ?

Autre sujet dont vous n’avez guère parlé : le risque d’un alignement par le bas. Les pays qui imposent des normes élevées, par exemple en matière environnementale, se trouvent handicapés dans la compétition mondiale. Quel est votre sentiment sur cette question ?

Certaines entreprises s’entendent pour faire évoluer les normes afin d’inciter les consommateurs à de nouveaux achats. De ce point de vue, la normalisation peut devenir un instrument de manipulation des marchés. Qu’en est-il de la protection des consommateurs, dont vous n’avez pas parlé non plus ?

Vous appelez de vos vœux la création de nouvelles normes ou l’harmonisation internationale de celles qui existent ; mais, sur le terrain, on ne cesse de se plaindre de leur nombre excessif – j’ai eu l’occasion de le constater en rédigeant, avec d’autres parlementaires, un rapport remis au précédent Président de la République –, d’autant qu’il faut aussi compter avec l’application qu’en fait l’administration française, qui se montre particulièrement zélée. Les mêmes normes ne sont pas appliquées de la même façon dans les différents pays européens. Pourriez-vous nous donner des précisions sur cet aspect ?

Enfin, existe-t-il une norme applicable aux prises des véhicules électriques, pour la production desquels notre pays sera en pointe ?

M. Joël Giraud. Le sujet dont nous parlons n’est pas banal, bien qu’il soit souvent peu visible ou sous-estimé. À cet égard, le rapport commandé à Mme Revel par Mme la ministre du commerce extérieur dès septembre 2012, avec des objectifs clairs, marque le début d’un changement salutaire. Ce rapport fait un constat plutôt sévère sur le manque d’organisation de la France, surtout par rapport à l’Allemagne et au Royaume-Uni. Il suggère des pistes d’amélioration, dont la plupart ne semblent pas hors de portée, à l’exception du crédit d’impôt normalisation, sans doute plus coûteux. Ayant travaillé au sein d’organismes de normalisation internationaux, je me souviens avec un certain amusement de la façon dont les représentations permanentes de la France s’y exprimaient, parfois sans avoir lu les fiches techniques, ce qui provoquait de menues catastrophes. Nous avions aussi le plus grand mal à obtenir des ministères les moyens financiers nécessaires à de véritables actions de lobbying, sans parler des difficultés résultant de la piètre maîtrise des langues étrangères de nos représentants –aujourd’hui encore, les hauts fonctionnaires français parlant anglais, allemand ou italien ne sont pas très nombreux.

La première grande difficulté, en tout état de cause, est de faire travailler ensemble des intervenants disséminés dans de multiples instances, c’est-à-dire de passer d’une logique de silo à une logique de réseau. Reste que, dans un contexte de mondialisation déloyale des échanges, le malaise des peuples est réel : le modèle français en souffre tout particulièrement.

Nous ne pouvons plus faire l’impasse sur les normes qui encadrent le droit du travail, le droit sanitaire, le droit de l’environnement ou le droit de la protection sociale. Si ces normes sont bafouées par nos partenaires commerciaux, alors le principe de réciprocité doit s’appliquer pour rétablir la justice : c’est en lui donnant au plus vite une traduction concrète que nous défendrons notre modèle et protégerons nos entreprises contre l’asphyxie qui les menace à plus ou moins brève échéance, selon leur secteur d’activité et leur exposition à la mondialisation. Les électeurs nous envoient sur ce point des messages clairs, comme on l’a aussi vu récemment en Italie.

On nous demande de prendre acte de la privatisation croissante des règles : l’élaboration des normes, comme le contrôle de leur application, devraient être délégués à des experts et à des entreprises. Je reste très sceptique sur ces formes d’autocontrôle préconisées, par exemple, pour les normes sanitaires ; quant à la traçabilité dans l’agroalimentaire, on a vu ce qu’elle donnait : la sanction tombe en cas de fraude, mais des contrôles publics mieux organisés en amont permettraient d’éviter les dérives. Hier, Fleur Pellerin a aussi expliqué que, dans le domaine des télécoms, Alcatel-Lucent allait pâtir, sur le marché français, du « Long term evolution » (LTE), dont le niveau de normalisation est en deçà de la 3G. L’entreprise privée a choisi des normes technologiques qui avantagent les Américains : le secteur des télécoms français en subira des conséquences dramatiques. Si les pouvoirs publics français et européens avaient été plus actifs sur ces normes, même en se limitant à un rôle de prescription, nous n’en serions pas là. Ne pensez-vous pas, dans ces conditions, que l’articulation entre public et privé, dans l’ensemble des secteurs, doit être rééquilibrée en faveur du premier ?

Les rapports « Doing business » de la Banque mondiale, dont le premier date de 2004, classent la France en très mauvaise position sur la capacité de son droit à favoriser l’économie. Rédigés par des cabinets d’avocats d’affaires américains, ils reposent sur l’idéologie sous-jacente d’une concurrence entre les normes et sur l’idée qu’un modèle universel est possible et souhaitable. Cette vision mécanique des relations sociales et économiques est évidemment contestable : l’efficacité d’un système de droit est complexe, et dépend aussi de facteurs culturels, géographique ou linguistiques.

La France a répliqué par la création d’un organisme baptisé « Fondation pour le droit continental », dont l’originalité ne peut cacher le manque cruel de financements. Que pensez-vous de cette concurrence juridique ? N’avons-nous pas intérêt à défendre une vision plus juste et plus pragmatique de la diversité des droits sans favoriser les oppositions dogmatiques ? Comment pouvons-nous améliorer la défense du droit continental ?

M. Thierry Benoit. J’espère que le titre du rapport de Mme Revel ne suggère pas que la France doit faire preuve d’imagination pour créer davantage de normes : en ce domaine, la priorité est la simplification, la clarification et l’harmonisation. Les chiffres – plus de 30 000 normes, dont 2 000 remplacées chaque année et 400 obligatoires – atteignent en effet des niveaux vertigineux.

Le deuxième enjeu est le contrôle, notamment au niveau européen. La Commission européenne vient de décider de lever la taxe anti-dumping sur les briquets, dont nos amis chinois pourront désormais inonder nos marchés sans garantir le respect des normes françaises et européennes.

Troisième sujet majeur : la stabilité et les coûts. La normalisation en matière environnementale, sociale, sanitaire et de sécurité tourne à la folie pure. J’aurais aimé, madame Revel, que votre rapport, dont je salue par ailleurs la qualité, fasse des propositions sur ce point.

Enfin, il faut s’interroger sur l’influence de la France et de l’Europe sur la scène internationale. La question des normes est aussi directement liée à celle de l’emploi. Selon le dernier rapport de l’INSEE, 46 000 postes salariés ont été supprimés en France au troisième trimestre de 2012 et 44 000 postes au quatrième trimestre, soit 90 000 postes en six mois. Quelles conclusions peut-on en tirer pour la production réglementaire et normative ? Comment donner aux entreprises françaises et européennes les moyens de lutter à armes égales sur la scène internationale ? En matière de normalisation, la voix de la France est certainement entendue, et j’ai été sensible à vos arguments sur l’organisation des règles du jeu. Mais, plutôt que d’empiler les normes, il convient de débroussailler la jungle qu’elles sont devenues. Si la France doit jouer un rôle moteur au niveau européen et international, c’est d’abord en matière de convergence qu’elle doit le faire. Comment, par exemple, rendre nos granitiers aussi compétitifs que les granitiers chinois ? Comment imposer, pour les viandes importées du Brésil ou d’Inde, les mêmes exigences que celles imposées aux éleveurs français et européens ? Le rapport et les exposés que nous venons d’entendre ne répondent guère à ces questions.

Mme Brigitte Allain. Le rapport qui nous a été présenté érige en enjeu stratégique la production de normes et leur adoption par les partenaires commerciaux. Il souligne, dans ce cadre, le manque d’influence de notre pays dans la production de normes internationales et dans la publicité de celles qu’il crée.

Ce rapport nous interpelle, et j’adhère à quelques-uns de ses constats. Pour valoriser la compétitivité hors coût, il est sûrement nécessaire de faire connaître et respecter à l’international un certain nombre de normes que nous produisons, mais pas n’importe lesquelles, et pas à n’importe quelle fin. Pourquoi, par exemple, appliquer des normes internationales à des commercialisations locales, qui s’en trouvent ainsi mal valorisées, voire exclues du marché ? L’obligation de moyens prend souvent le pas sur l’obligation de résultat. J’en veux pour preuve les petits abattoirs, la petite restauration ou les boucheries indépendantes, tous victimes des normes.

Une production stratégique doit émaner de la puissance publique, en concertation avec les acteurs concernés, impliqués en amont, et non l’inverse. La production normative doit protéger des intérêts délaissés par les instances internationales, tels que la sécurité des consommateurs ou la protection de l’environnement.

Comme vous l’écrivez, madame Revel, nous sommes dans un monde où il faut « agir en amont pour ne pas se voir imposer une politique dont on ne veut pas ». La France doit non seulement refuser le clonage, les biotechnologies et les hormones de croissance, mais aussi promouvoir les pratiques qu’elle souhaite voir essaimées, qu’il s’agisse de la responsabilité sociale des entreprises, de l’affichage environnemental, de la lutte contre l’obsolescence programmée des produits ou de la labellisation des éco-quartiers et des villes durables.

Le risque du crédit d’impôt normalisation que vous préconisez serait d’accélérer la délégation du public au privé en matière de normalisation, avec toutes les difficultés d’adaptation prévisibles pour les petites entreprises, sans parler de l’aspect éthique.

Pouvez-vous aussi, monsieur Costes, madame Revel, nous donner votre point de vue sur le système normatif dans le domaine agroalimentaire, actuellement au cœur de l’actualité ? Les crises et les scandales sanitaires révèlent les difficultés croissantes rencontrées par les autorités de contrôle. Comment, en l’absence d’acteur unique, garantir aux consommateurs le strict respect des normes et les informer sur leurs droits en ce domaine ?

M. Alain Marc. Être conscient, comme nous le sommes tous, de l’importance des normes en termes de compétitivité ne m’empêche pas de penser que nos administrations en font parfois trop.

Je pense au cas d’un petit industriel de Saint-Sernin-sur-Rance, dans ma circonscription, qui avait, au prix d’un travail de recherche considérable, développé, en s’inspirant d’une norme belge, un prototype de cage pour l’élevage de canards gras, qui préservait le bien-être de l’animal. Ce modèle rencontrait un vif succès jusqu’à ce que la Commission européenne, via sa direction générale de l’alimentation, impose une norme de fabrication à laquelle son invention n’était en rien conforme. Cette petite entreprise de dix employés a perdu de ce fait des centaines de milliers d’euros et surtout des opportunités considérables à l’international comme sur le marché français. Il faudrait peut-être envisager de mettre en place une instance qui permette à ces petits industriels extrêmement innovants d’être informés en amont de la production de nouvelles normes. Cet exemple peut paraître anecdotique, mais ce sont ces petits ruisseaux qui sont susceptibles de faire les grandes rivières de notre compétitivité.

M. Michel Lefait. Si notre pays dispose de compétences remarquables et de savoir-faire pointus, tant dans le secteur public que dans le privé, il compte encore trop peu d’entreprises qui associent leurs atouts à des stratégies d’influence en termes de normalisation et de règles du jeu. En dehors du levier très pertinent du crédit impôt recherche, que préconiserez-vous aux pouvoirs publics pour persuader nos entreprises d’effectuer le changement culturel décisif qui leur permette de s’approprier ces problématiques d’intelligence économique, comme d’autres entreprises ont su le faire, notamment chez nos voisins britanniques et allemands ?

M. Éric Straumann. Comment s’articulent la normalisation française et la normalisation européenne ? Comment la normalisation française est-elle perçue à l’étranger ? Quelle est la responsabilité des distributeurs, notamment de la grande distribution, en cas de mise sur le marché de produits non conformes aux normes en vigueur ? Faut-il améliorer la législation en la matière ?

Sachant que 2 000 normes nouvelles sont édictées chaque année, au grand dam des professionnels, on peut se demander si une forme de bureaucratie normative n’est pas en train de se mettre en place.

Mme Jacqueline Maquet. Votre rapport, madame, insiste sur la lourdeur des dispositifs de normalisation. Que préconisez-vous pour aider les PME à mettre en place ces dispositifs aujourd’hui pratiquement indispensables ?

M. Dino Cinieri. Nous avons bien compris que la normalisation constitue à la fois un formidable outil de valorisation de la recherche et un vecteur de diffusion des innovations. Utilisée en amont de l’innovation comme un outil d’intelligence économique, elle permet en effet de capitaliser et de diffuser les connaissances interdisciplinaires. Une entreprise qui participe au développement des normes en intégrant ses propres innovations peut ainsi faciliter l’accès à ses produits et augmenter ses parts de marché. Au même titre que les brevets, la normalisation doit être utilisée non seulement comme outil de valorisation, mais aussi comme moyen de compétitivité permettant d’acquérir une position dominante à l’international. Or les propositions de votre rapport en la matière – s’approprier l’influence normative comme outil stratégique, réinvestir les institutions internationales créatrices et prescriptrices de normes et de règles, agir en amont de la règle, peser sur les normes des marchés futurs, maîtriser les accords internationaux, mettre en place une ingénierie d’influence professionnelle, repenser la structure de pilotage de l’intelligence économique – ne valent que pour les grandes entreprises. Quelles actions préconisez-vous pour les petites entreprises ?

Mme Marie-Lou Marcel. Madame Revel, l’AFNOR vient d’établir une nouvelle norme européenne pour lutter contre les émissions de gaz à effet de serre. Cette norme fixe une méthodologie pour le calcul et la déclaration de la consommation d’énergie et des émissions de gaz à effet de serre émises à l’occasion des prestations de transport, qu’il s’agisse de passagers ou de fret. Vous nous avez expliqué que cette nouvelle norme viendrait compléter la réglementation nationale, qui entrera en vigueur au cours de l’année 2013 et contribuera à atteindre les objectifs fixés par l’Union européenne. Pouvez-nous nous en dire un peu plus à cet égard ?

M. Alain Suguenot. Simplification, stabilité, contrôle : voilà ce qu’on demande aujourd’hui aux normes. Le drame, c’est la multiplication des normes. L’autre danger pour nous, pays de la vieille Europe, est de subir les normes des pays émergents, qui sont parfois l’outil du fort vis-à-vis des faibles. Si la norme n’est que la règle du nouvel arrivant, il n’y a aucune raison qu’elle s’impose aux autres. C’est pour ne pas en arriver là que la France doit agir, mais l’accumulation de règles administratives ne saurait se substituer à un lobbying efficace auprès des instances internationales.

Par ailleurs, une normalisation excessive ne risque-t-elle pas au surplus d’entraîner une trop grande homogénéisation et la perte d’identité de nos produits, notamment agroalimentaires ?

Mme Frédérique Massat. L’OCDE a reconnu pour la première fois le mois dernier l’existence de failles dans les normes fiscales internationales et a promis de mettre en œuvre un plan ambitieux pour y remédier. L’Organisation a dressé un bilan sévère des règles fiscales existantes qui, selon elle, permettent aux multinationales d’échapper à l’impôt. Or ces règles sont bien souvent issues de conventions bilatérales négociées sous l’égide de la même OCDE, et dont la remise en cause s’avère complexe. Pourriez-vous, madame, nous exposer ce que serait l’« initiative de révision des règles fiscales applicables aux multinationales » à laquelle la France devrait selon vous s’associer ?

Pourriez-vous par ailleurs nous expliquer quels dispositifs législatifs seraient nécessaires pour alléger et simplifier les normes ?

M. Razzy Hammadi. L’AFNOR travaille en ce moment à l’établissement d’une norme certifiant la fiabilité des avis délivrés par les consommateurs sur internet, notamment dans le domaine de l’hôtellerie, dont 5 à 10 % du chiffre d’affaires sont captés par les sites de réservation en ligne. Cette norme devrait notamment fixer la durée de la mise en ligne de ces avis, permettre l’authentification de leurs auteurs, garantir la réalité de l’expérience de ceux-ci et le caractère désintéressé de l’avis. Comment comptez-vous y parvenir ?

M. Henri Jibrayel. Sans contester l’intérêt des conclusions de votre rapport, force est de contester, madame Revel, que celles-ci ne diffèrent guère des préconisations du rapport Martre de 1994 et que la question reste entière : que faire pour développer l’influence stratégique de la France dans le domaine des normes ? Notre pays doit-il développer les mêmes méthodes de lobbying que les entreprises privées ?

M. Alain Savary. Le manque d’implication des entreprises françaises dans le domaine de la normalisation, au niveau tant national qu’européen ou international, peut s’expliquer par le sentiment qu’elles ont d’être victimes d’un traitement inéquitable : il est beaucoup plus facile pour l’administration française de contrôler la production d’une entreprise ayant pignon sur rue, des sites de production et des employés en France que de vérifier la conformité à la réglementation de produits qui arrivent par containers en grande surface pour être vendus en deux jours. Les mesures à la fois rapides et complexes dans leur mise en œuvre que cela supposerait étant de nature à bloquer l’ensemble de la machine économique, on préfère y renoncer. D’où le sentiment d’injustice qui prévaut au sein des entreprises françaises.

Par ailleurs, les normes sont en Europe, et en France en particulier, beaucoup plus contraignantes que dans les pays anglo-saxons. En effet, la judiciarisation des relations d’affaires que l’on observe dans ces derniers pays entraîne une conception différente de la norme : moins la norme est contraignante, moins la responsabilité des entreprises risquera d’être engagée, et moins celles-ci risqueront de verser des dommages et intérêts en cas de problème. Cette différence de perception est particulièrement sensible dans le secteur de l’agroéquipement, où la question de la sécurité est essentielle. Nous voyons poindre chez nos partenaires anglo-saxons la crainte qu’une normalisation excessive ne nourrisse des contentieux coûteux.

M. Alain Costes. Certaines de vos questions trahissent une confusion entre les normes obligatoires, issues de la réglementation administrative, qui sont au nombre de 400 000, et les 30 000 normes édictées par l’AFNOR. Parmi celles-ci, à peine 1 % est d’application obligatoire. Un des problèmes posés par la norme obligatoire est qu’elle est très difficile à amender ou à adapter, à la différence des normes de l’AFNOR, qui évoluent constamment. Quand nous publions 2 000 normes, nous en retirons autant, et le « stock » des normes est constant.

M. le président François Brottes. Ces chiffres ne nous éclairent que partiellement si l’on ne dispose pas du nombre de produits concernés.

M. Alain Costes. Cela n’est pas aisé à chiffrer, d’autant qu’un même produit peut faire l’objet de plusieurs normes. Dans l’innovation, par exemple, la définition du vocabulaire employé nécessite déjà l’élaboration d’une norme. La caractérisation du produit fait également l’objet d’une norme. Ainsi celle établie par l’AFNOR pour la lutte contre l’émission de gaz à effet de serre définit la méthodologie qui sera utilisée par les autorités européennes pour calculer la performance des véhicules en la matière. Or, il se trouve que c’est une méthodologie que nous maîtrisons en France, ce qui est un avantage pour nous.

Par ailleurs, 10 % seulement des normes qui s’appliquent en France sont « franco-françaises » : les 90 % restantes sont pour moitié d’origine internationale et pour moitié issues de l’harmonisation européenne. C’est pourquoi il n’est pas de pire politique dans ce domaine que celle de la chaise vide. La question de l’anticipation des normes est cruciale. C’est deux ou trois ans avant la publication de la norme qu’il faut mettre en place une stratégie d’influence : une fois la norme publiée, il est trop tard pour agir. L’AFNOR participe, via un réseau d’environ 20 000 experts, à l’élaboration des normes internationales au sein des organisations de normalisation européenne et internationale, qui sont un cadre d’échanges d’idées et de mutualisation de l’information.

La participation de nos experts à ces travaux est donc nécessaire à l’accroissement de notre influence. Or c’est aussi ce qui coûte le plus cher dans l’élaboration de la norme. Il me semble en conséquence que la création d’un crédit d’impôt normalisation serait pour le législateur le meilleur moyen de soutenir l’influence française dans le domaine de la normalisation.

M. François Brottes. Par qui sont payés ces experts ?

M. Alain Costes. Par les entreprises, qui savent très bien que leurs parts de marché dépendent de cet investissement. Ce sont les entreprises qui financent notre participation aux travaux des instances internationales de normalisation et toutes les actions que nous entreprenons pour défendre les intérêts français au sein de ces instances. Le coût de l’activité de normalisation de l’AFNOR s’élève à environ 30 millions d’euros par an, dont un tiers est financé par une subvention du ministère en charge de l’industrie, au titre de la mission d’intérêt général assurée par l’Association, et les deux tiers restants par les entreprises.

M. Alain Marc. Comment un industriel pourrait-il savoir que l’innovation qu’il est en train d’élaborer devra être conforme à une norme AFNOR ou à une réglementation administrative qui n’existe pas encore ? Toutes les entreprises, notamment les PME, n’ont pas les moyens d’avoir accès à cette information.

M. Alain Costes. Dans le cas d’espèce que vous nous avez exposé, l’industriel aurait dû contacter l’AFNOR ; nous aurions proposé un sujet de normalisation à la Commission européenne et la machine aurait été lancée !

Les commissions de normalisation comptent par ailleurs des représentants des parties prenantes, notamment des consommateurs. Elles sont consultées sur des projets tels que notre projet de certification des avis des consommateurs sur internet. Sur une question aussi sensible, nous avons préféré rechercher les voies d’un consensus franco-français avant de la soumettre aux instances de normalisation européennes ou internationales. Nous avons ainsi pu entendre la position des représentants de toutes les parties, syndicats tels que l’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie – l’UMIH –, associations de consommateurs, sociétés d’avis en ligne telles que Tripadvisor, afin de dégager les points d’accord et d’élaborer la meilleure solution possible en dépit des divergences inévitables entre des parties aux intérêts différents. Le premier impératif est d’établir une norme, mais sa publication et sa diffusion ne signifient pas que l’ouvrage ne pourra plus être remis sur le métier : la norme est un outil vivant et c’est son utilisation même qui permettra de la perfectionner. Il n’est pas rare de modifier une norme deux ans après sa publication. C’est tout l’intérêt du travail de normalisation que de permettre d’adapter les normes au marché et aux évolutions techniques, en tenant compte des avis des industriels et des autres parties prenantes.

Mme Claude Revel. La nécessité de prendre en compte la dimension européenne dans l’élaboration d’une stratégie d’influence dans le domaine de la normalisation est tellement évidente que je ne la mentionne même plus, mais mon rapport témoigne que ce souci est omniprésent dans ma réflexion. De ce point de vue, notre action doit être à double détente : il s’agit d’influer, non seulement sur l’élaboration des normes édictées par les instances européennes, mais également sur les positions défendues par l’Union européenne auprès des instances internationales telles que l’OMC, où nous sommes représentés via l’Union européenne, et auprès des organismes internationaux où la France est directement représentée. Dans ce dernier cas, nous devons nous efforcer de défendre une position commune à l’ensemble de l’Europe, ce qui peut se révéler plus difficile encore, tant notre capacité d’influence a baissé auprès de nos partenaires européens, pour les raisons déjà évoquées. À ce propos, je voudrais vous faire part d’une anecdote significative. À l’occasion d’un déjeuner où m’avait convié le numéro deux de l’ambassade des Pays-Bas en charge des affaires économiques, afin que j’expose l’objectif du rapport qui m’avait été confié, et où étaient également présents ses homologues allemand, suédois et finlandais, j’ai été soumise pendant deux heures à un feu nourri de questions, chacun voulant connaître, dans le cadre de sa mission de veille économique, les raisons de cet intérêt nouveau des autorités françaises pour la normalisation.

M. le président François Brottes. S’ils nous regardent, qu’ils sachent que cela nous intéresse vivement !

Mme Claude Revel. Deuxièmement, je suis extrêmement sensible au problème de l’inflation normative et mon rapport propose des moyens pour lutter contre la norme inutile. « Développer une influence normative » signifie non pas multiplier les normes, mais être plus présent dans leur fabrication, ce qui peut parfois se traduire par la destruction de normes inutiles. Mon rapport évoque l’existence d’un véritable « business de la norme », notamment dans les domaines financiers et comptables, où l’incessante modification des règles semble avoir pour principal objectif de permettre aux cabinets d’experts de ne jamais manquer de travail. Il est donc nécessaire de juguler l’inflation des normes privées et mon rapport montre comment il est possible d’en tirer de nouvelles opportunités.

Même l’élaboration des 10 % de normes de caractère strictement national doit intégrer la dimension internationale, via une sorte de benchmarking systématique. On doit notamment veiller à ne pas aggraver la réglementation internationale déjà existante.

Je propose par ailleurs que la norme intègre sa propre obsolescence, afin de favoriser sa stabilité tout en évitant l’empilement de normes à vocation purement commerciale, qui paralyse le système alors que la norme doit être au contraire un outil d’interopérabilité. C’est seulement en accroissant notre influence normative que nous pourrons agir sur ces leviers.

Troisièmement, l’influence normative internationale est sans conteste un élément de la diplomatie économique. Il est de ce point de vue essentiel que notre pays s’efforce d’acquérir une vision transversale de la problématique normative, qui ne saurait relever de la compétence d’un seul ministère. Ainsi, la question de la responsabilité sociale des entreprises, susceptible de constituer un levier extrêmement puissant pour peser sur l’élaboration de normes internationales auxquels seraient assujettis nos concurrents, est actuellement prise en main par le ministère des affaires étrangères. Pourtant, ce sujet concerne également Bercy. Il faut absolument casser les rigidités institutionnelles qui font obstacle aux politiques transversales. Un des moyens pour ce faire serait de déterminer des priorités normatives dont le traitement serait confié à des structures interministérielles.

Le rapport Martre de 1994 a été un premier pas dans la compréhension que l’intelligence économique devait être un processus actif, et non pas seulement une réaction de protection suscitée par la peur. Aujourd’hui, chacun a pris conscience de la nécessité d’actions coordonnées de recueil, de traitement, de sécurisation et de distribution de l’information utile aux acteurs économiques. Il appartient désormais aux responsables de tirer toutes les conséquences de cette prise de conscience.

Il est évident que la France ne pourra pas avancer seule, et qu’elle devra travailler avec l’Union européenne, voire avec d’autres partenaires, dans le cadre de ce qu’on appelle une « coopétition » : il peut être avantageux pour nous de nouer des alliances avec les Chinois dans certains domaines, avec les Américains dans d’autres. Ainsi, dans l’affaire de la ractopamine, l’Union européenne s’est, au nom du principe de précaution, alliée à la Russie, l’Inde et la Chine contre les États-Unis, l’Australie et le Mexique, pour s’opposer à l’importation de bétail porteur d’une certaine dose de résidus de ce que le Codex Alimentarius définit comme accélérateurs de croissance. La position des États-Unis l’a finalement emporté d’une voix, grâce à l’appui de tous les pays africains, y compris francophones, ce qui prouve que nous avons un véritable problème d’influence.

Vous m’avez interrogée sur le rôle des entreprises dans le développement de notre influence normative. Il est clair que l’avance de certains pays dans ce domaine est attribuable à l’engagement de leurs entreprises. En Allemagne, aux Pays-Bas, aux États-Unis, les entreprises considèrent que financer la normalisation est un élément de leur stratégie. À combien d’industriels ai-je dit qu’ils ne pouvaient pas à la fois souhaiter la réduction des dépenses de l’État tout en déplorant le recul de l’AFNOR, dont le budget a considérablement baissé. Il y a un moment où les entreprises doivent prendre en charge les missions qui sont stratégiques pour elles : c’est le cas de la normalisation, qu’il s’agisse de la développer ou de la contrer. Mais pour cela, la politique de l’État doit être lisible. Il faut des efforts des deux côtés.

S’agissant des PME, les avancées doivent venir des organisations professionnelles : c’est leur rôle d’anticiper et de prévoir les évolutions normatives. Dans mon rapport, je cite l’exemple d’une PME de soixante personnes œuvrant dans le secteur des systèmes d’information qui a réussi à faire labelliser ses propres pratiques par le CEN en suivant mes conseils. En principe, ce rôle de conseil relève des organisations professionnelles.

Mon rapport évoque également les différences entre le droit romain et la common law. Il ne faut pas jouer l’un contre l’autre, mais essayer au contraire de dégager des convergences entre ces deux visions juridiques. Bien qu’étant membre du conseil scientifique de la Fondation pour le droit continental, je suis la première à considérer que celle-ci ne se préoccupe pas assez des problématiques de droit des affaires.

En tant que contributeur important de la Banque mondiale, la France aurait dû au moins être informée que le classement « Doing Business » 2013 était sur le point d’être publié. Par ailleurs, la Banque européenne d’investissement dispose de tous les critères pour établir un classement européen.

Qui dit norme dit certification. Le rôle de celle-ci est essentiel, notamment pour renforcer une image de marque, et c’est pourquoi il doit se développer, à côté du contrôle réglementaire, qui reste indispensable, notamment pour des questions de sécurité. Le problème est que nous n’avons pas les moyens de vérifier que les organismes de certification des autres pays, de la Chine par exemple, sont aussi bons que les nôtres. Nous devons absolument inscrire cette question à l’ordre du jour des négociations internationales, que ce soit dans le cadre de l’OMC ou dans un cadre bilatéral.

De façon générale, la négociation doit nous permettre d’imposer nos normes. De ce point de vue, on peut regretter que l’Union européenne ne soit pas allée assez loin dans la négociation de l’accord de libre-échange qui la lie avec la République de Corée : elle aurait dû exiger à cette occasion que ce pays lève son embargo sur l’importation de viande bovine européenne.

M. le président François Brottes. C’est ce qu’on appelle les barrières non tarifaires, terme pudique pour désigner des mesures purement protectionnistes.

Mme Claude Revel. Absolument, et c’est pourquoi le débat qui a lieu en ce moment au sein de l’OMC pour établir la différence entre protectionnisme et mesures de politiques publiques est crucial. Nous devons absolument faire valoir notre point de vue sur cette question, les pays émergents considérant les critères sociaux ou environnementaux défendus par l’Europe comme des barrières non tarifaires. Voilà un autre débat où l’ingénierie d’influence joue un rôle essentiel.

Le projet Base Erosion & Profit Shifting, ou projet BEPS, a été lancé par l’OCDE pour réviser en profondeur les règles fiscales dont relèvent les entreprises multinationales qui parviennent, par des stratégies d’optimisation fiscale, à ne pas ou presque pas payer d’impôt. Ce projet a été présenté au G 20 de Los Cabos, avec le soutien des ministres des finances britannique et allemand. Je pense que nous devrions à notre tour nous associer à cette initiative, qui est non seulement utile mais bénéfique en termes d’image. Notre association à ce type d’initiative ne peut qu’accroître notre influence normative.

Je ne peux pas vous dire où en est l’élaboration d’une norme européenne de lutte contre les émissions de gaz à effet de serre. En tout état de cause, il faudra veiller à la façon dont notre norme nationale s’articule avec cette future norme européenne.

Vous m’avez également interrogé sur le lobbying privé. Je pense que les États devraient se doter d’une ingénierie d’influence aussi efficace que les lobbyistes privés peuvent l’être, ce qui n’est pas toujours le cas. Par ailleurs, l’État devrait pouvoir, à titre subsidiaire et dans le respect de l’intérêt général, collaborer avec des lobbyistes privés, entreprises, professions juridiques, voire ONG, sous l’égide d’une structure spécifique à visée stratégique, s’inspirant de l’action de l’Advocacy Center et du Trade Promotion Coordinating Committee américains. Ces deux organismes sont chargés de coordonner l’action des dix-neuf agences américaines liées au commerce extérieur et à l’aide au développement, et d’orienter les moyens à leur disposition en fonction des priorités qu’ils se sont fixées.

M. le président François Brottes. Je tiens, madame, à vous remercier pour votre implication, votre maîtrise du sujet et l’enthousiasme avec lequel vous nous l’avez exposé. Nous nous félicitons que le Gouvernement vous ait confié le soin d’étudier cette question des normes qui passionne depuis toujours notre commission.

Nous devrions peut-être suggérer au Gouvernement de mettre en place une structure dédiée à cette problématique des normes, quelle que soit la forme qu’elle puisse prendre – délégation, observatoire, médiateur, ou autre.

M. François Sauvadet. Je voudrais à mon tour saluer votre implication, madame, tout en soulignant les limites de l’exercice du rapport : une fois le diagnostic posé, la question des remèdes à mettre en œuvre reste entière. C’est pourquoi je suggère, monsieur le président, que Mme Revel revienne chaque année nous faire part des évolutions de cette problématique et formuler des propositions concrètes, qui pourraient être défendues par notre commission.

M. le président François Brottes. J’ai bien l’intention de permettre à la Commission d’exercer un suivi des conclusions de ce rapport. La difficulté est d’avoir un interlocuteur permanent, car j’imagine que Mme Revel va passer à autre chose.

Mme Claude Revel. Il existe déjà un délégué interministériel aux normes, M. Le Parco, qui dépend du ministère en charge de l’industrie, ainsi qu’un délégué interministériel à l’intelligence économique, M. Buquen, sachant qu’il ne peut pas y avoir d’influence normative sans intelligence économique.

M. le président François Brottes. Je persiste cependant à penser qu’il faut distinguer les deux et mettre en place une structure dédiée à la problématique de la norme.

M. Thierry Benoit. J’aurais parié que ce rapport déboucherait sur la proposition de créer une nouvelle structure administrative. Pourquoi créer une instance de plus ? Les structures existantes ne peuvent-elles pas se charger de ce travail d’évaluation, de suivi, de clarification, de simplification, de transposition et de création de richesses pour les entreprises, de développement de l’influence de la France et de l’Europe sur la scène internationale ? Je suis certain que l’AFNOR, par exemple, dispose de toutes les compétences pour assumer une telle mission.

M. le président François Brottes. Vous me permettrez de ne pas partager votre point de vue, cher collègue. Mon expérience de commissaire m’a convaincu de la nécessité, dans certains domaines, d’incarner la transversalité.

——fpfp——

Membres présents ou excusés

Commission des affaires économiques

Réunion du mercredi 13 mars 2013 à 10 heures

Présents. - M. Damien Abad, Mme Brigitte Allain, Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Thierry Benoit, M. Yves Blein, Mme Michèle Bonneton, M. François Brottes, M. André Chassaigne, M. Dino Cinieri, M. Jean-Michel Couve, Mme Jeanine Dubié, Mme Corinne Erhel, Mme Marie-Hélène Fabre, M. Daniel Fasquelle, M. Christian Franqueville, M. Joël Giraud, Mme Pascale Got, M. Jean Grellier, M. David Habib, M. Razzy Hammadi, M. Antoine Herth, M. Henri Jibrayel, M. Armand Jung, Mme Laure de La Raudière, M. Michel Lefait, Mme Annick Le Loch, M. Philippe Le Ray, Mme Audrey Linkenheld, Mme Jacqueline Maquet, M. Alain Marc, Mme Marie-Lou Marcel, Mme Frédérique Massat, M. Kléber Mesquida, M. Yannick Moreau, M. Yves Nicolin, M. Germinal Peiro, M. Hervé Pellois, Mme Josette Pons, M. Dominique Potier, M. Patrice Prat, M. François Pupponi, M. Franck Reynier, M. Frédéric Roig, Mme Béatrice Santais, M. François Sauvadet, M. Michel Sordi, M. Éric Straumann, M. Alain Suguenot, M. Lionel Tardy, M. Jean-Charles Taugourdeau, Mme Catherine Troallic, Mme Clotilde Valter, M. Fabrice Verdier

Excusés. - M. Bruno Nestor Azerot, M. Frédéric Barbier, Mme Ericka Bareigts, M. Christophe Borgel, M. Jean-Claude Bouchet, M. Franck Gilard, M. Georges Ginesta, M. Daniel Goldberg, Mme Anne Grommerch, M. Philippe Kemel, M. Jean-Luc Laurent, M. Thierry Lazaro, Mme Annick Lepetit, M. Serge Letchimy, M. Philippe Armand Martin, M. Jean-Claude Mathis, M. Bernard Reynès, M. Jean-Marie Tetart, M. Jean-Paul Tuaiva, Mme Catherine Vautrin