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Commission des affaires économiques

Mardi 2 avril 2013

Séance de 17 heures

Compte rendu n° 64

Présidence de M. François Brottes Président

– Audition, ouverte à la presse, de M. Guillaume Garot, ministre délégué auprès du ministre de l’Agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, chargé de l’agroalimentaire.

La commission a auditionné M. Guillaume Garot, ministre délégué auprès du ministre de l’Agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, chargé de l’agroalimentaire.

M. le président François Brottes. On ne le sait pas assez, mais les industries agroalimentaires constituent le troisième poste d’exportation dans notre pays. Ce secteur emploie au moins 415 000 salariés, et ses productions ont représenté, en 2011, 13 % de la valeur des exportations françaises – soit 57 milliards d’euros – et généré7, 6 milliards d’euros d’excédents commerciaux. Autant dire qu’il constitue un atout de poids dans la bataille en faveur de l’équilibre de notre balance commerciale.

Mais alors que la loi de modernisation de l’économie – LME – avait tenté de poser un nouveau cadre de discussion – sans même parler de négociation – entre les producteurs, les transformateurs et la grande distribution, nous avons bien vu que le dialogue se limitait, pour cette dernière, à réclamer de nouvelles ristournes. Il semble donc nécessaire de revoir la législation. Je sais que le Gouvernement y travaille ; pouvez-vous nous en dire quelques mots, monsieur le ministre ?

De même pourriez-vous évoquer les dispositions innovantes que vous entendez proposer en matière de lutte contre le gaspillage de produits alimentaires. Il s’agit en effet d’un sujet de préoccupation majeur, non seulement en France, mais dans le monde entier.

Après le scandale de la viande de cheval, nous ne saurions par ailleurs éviter d’aborder la question de la traçabilité des aliments. La France a beau être championne du monde dans ce domaine, nous voyons bien que ceux qui veulent tricher ont toujours la possibilité d’y parvenir.

Rappelons que les dispositions relatives à la loi LME et à la traçabilité seront examinées lors du débat sur le projet de loi relatif à la consommation que doit bientôt déposer votre collègue Benoît Hamon.

Je vous donne maintenant la parole pour un propos liminaire qui ne devra pas dépasser une quinzaine de minutes, de façon à laisser le temps nécessaire aux échanges avec les députés.

M. Guillaume Garot, ministre délégué chargé de l’agroalimentaire. Je suis d’autant plus ravi de répondre à votre invitation que j’ai été moi-même, il n’y a pas si longtemps, membre de votre commission. Je présenterai rapidement les orientations de la politique du Gouvernement dans le secteur de l’agroalimentaire et, plus généralement, en matière d’alimentation.

Le contexte actuel est celui d’une crise de confiance des Français à l’égard de leur alimentation. Cette crise n’est sans doute pas récente, mais elle a pris un tour particulier en février avec le scandale de la viande de cheval.

Face à cette affaire difficile, le Gouvernement a agi rapidement et avec la plus grande fermeté. Nous avons multiplié les contrôles sur l’ensemble de la filière viande et pris les mesures qui s’imposaient vis-à-vis de ce qui apparaissait comme une forme de tromperie ou de fraude – même s’il appartient à la justice, désormais saisie, de se prononcer sur la qualification pénale exacte. Non seulement cette fermeté restera de mise, mais les sanctions susceptibles d’avoir un effet dissuasif sur les fraudeurs seront renforcées par le projet de loi relative à la consommation dont vous serez saisis à partir du mois de juin.

La fermeté est nécessaire au plan national, mais elle est également indispensable au plan européen. À cet égard, je trouve très intéressante la proposition du commissaire Tonio Borg d’harmoniser et de renforcer les sanctions au sein des pays de l’Union européenne, qui tous ont été touchés par la crise.

Outre la fermeté, la transparence et l’information des citoyens constituent un des points forts de notre doctrine en matière de lutte contre la fraude alimentaire. Nous portons ainsi, au sein de l’Europe, le combat en faveur d’un étiquetage plus clair des viandes composant les plats préparés. Le travail avance, et nous avons bon espoir que, d’ici la fin de l’année, la mention de l’origine des viandes soit désormais rendue obligatoire dans les plats transformés. C’est une lacune importante que nous nous préparons ainsi à combler.

Mais sans attendre la nouvelle réglementation européenne, nous avons invité les sociétés françaises d’agroalimentaire concernées par la fabrication ou la distribution de tels plats à indiquer sur l’emballage, de façon volontaire, l’origine de la viande utilisée. Certaines entreprises ont d’ores et déjà franchi le pas. Il vous est donc possible d’acheter sur les linéaires de votre supermarché préféré des plats préparés portant la mention « viande bovine française » ou « viande de porc française ».

M. le président François Brottes. Dans une épicerie aussi, sans doute !

M. le ministre délégué. Bien entendu, même si la grande majorité des Français, le samedi, se tournent vers les grandes surfaces.

En matière de transparence, toutefois, les entreprises agroalimentaires reconnaissent qu’elles ont encore des efforts à faire. Elles doivent en particulier mieux se protéger contre les tentatives de fraude ou de tromperie. Nous avons ainsi élaboré avec elles une charte anti-fraude qui sera rendue publique dans les prochaines semaines. Les entreprises de transformation animale s’y engagent à se prémunir contre les risques de dérives et à améliorer l’autocontrôle.

Cette crise, qui a ébranlé la confiance des Français à l’égard de leur alimentation, a donc donné lieu à une réponse immédiate de la part du Gouvernement. Mais il ne suffit pas d’en tirer les leçons à court terme ; nous devons réfléchir à une véritable politique publique pour l’alimentation et l’agroalimentaire en France.

Le premier axe d’une telle politique serait l’emploi. Le secteur de l’agroalimentaire représente près de 500 000 emplois, de surcroît non délocalisables et répartis sur l’ensemble du territoire. Pourtant, bon nombre d’entre eux restent non pourvus. À l’évidence, les métiers de l’agroalimentaire souffrent d’un problème d’attractivité ; ils pâtissent même parfois d’une image négative. Il nous appartient donc de rappeler leur noblesse. Quel plus beau métier y a-t-il, en effet, que celui de nourrir les hommes ? Les métiers de l’alimentation sont d’autant plus nécessaires à l’économie que l’un des grands défis du siècle, pour notre planète, sera de nourrir 9 milliards d’habitant à l’horizon 2050. Nos jeunes ont donc un avenir dans les entreprises alimentaires.

Dès demain, ces dernières seront susceptibles d’ouvrir leurs portes à toute une nouvelle génération. Et les outils créés par le Gouvernement pour les y aider, comme les emplois d’avenir et les contrats de génération, les intéressent beaucoup.

La question de l’emploi étant centrale pour l’agroalimentaire, nous devons également nous préoccuper de l’élévation du niveau de compétences au sein du secteur, et donc de la formation. Les salariés doivent disposer des outils nécessaires pour valoriser les parcours et les compétences professionnels.

Cependant, si nous voulons rendre le secteur attractif, nous devons aussi nous préoccuper des conditions de travail, qui peuvent, on le sait bien, s’avérer rudes dans certaines filières.

Le deuxième axe d’une politique publique pour l’agroalimentaire est ce que j’appelle le « défi vert », c’est-à-dire la mutation écologique appliquée à l’industrie alimentaire. Si nous sommes tous convaincus de la nécessité d’une croissance verte, c’est avant tout parce que nous savons, au vu des exemples que nous observons tous les jours sur le terrain, que les entreprises ayant fait le choix d’économiser leur consommation d’eau, d’investir dans de nouvelles énergies ou d’innover en matière de recyclage sont aussi les plus performantes et les plus créatrices d’emplois. Nous devons donc prolonger dans le secteur agroalimentaire les initiatives prises dans le cadre de l’agroécologie – et dont le plan méthanisation, qu’il a présenté la semaine dernière avec Delphine Batho, est un exemple. Il s’agit d’un vrai levier de croissance, susceptible de nous redonner des marges de manœuvre.

La lutte contre le gaspillage, autre aspect de la mutation écologique, est un enjeu pour lequel il me semble possible de laisser les étiquettes politiques au vestiaire, car il concerne chacun de nous. Cette lutte doit être menée dans l’ensemble des maillons de la chaîne alimentaire, du producteur jusqu’au consommateur. Sachant que plus de 30 % de la production alimentaire mondiale est jetée, perdue, gâchée, nous ne pouvions rester sans réaction. Nous avons donc lancé, avec l’ensemble des acteurs, une réflexion visant à élaborer des mesures très concrètes, immédiatement opérationnelles et susceptibles de s’appliquer à tous – y compris à la puissance publique. Ces mesures seront présentées dans un pacte national contre le gaspillage alimentaire que nous dévoilerons au mois de juin.

Le dernier axe d’une politique publique pour l’agroalimentaire est la qualité alimentaire pour tous, c’est-à-dire l’idée de justice sociale appliquée à l’alimentation. De même que je ne privilégierai jamais une façon de produire ou de transformer plutôt qu’une autre – par exemple les circuits courts par rapport aux autres modèles –, je ne veux pas d’une séparation entre une alimentation de bonne qualité, parfaitement traçable, destinée à ceux qui en aurait les moyens, et une alimentation différente accessible à tous les autres.

Bien sûr, nous devons favoriser les circuits courts, qui offrent une opportunité de croissance pour nos territoires. Mais nous devons nous montrer tout aussi exigeants pour l’ensemble des produits issus de l’industrie alimentaire. J’ai donc engagé, avec les professionnels du secteur, un travail sur l’amélioration de la valeur – au sens large – du contenu de nos assiettes, qu’il s’agisse des ingrédients – par exemple la teneur en sucre, en sel, en graisses – ou de l’équilibre nutritionnel.

Dans ce domaine, les Français attendent des actes. Pour restaurer leur confiance, il faut non seulement plus de transparence et d’information, mais aussi une meilleure qualité. Grâce aux efforts très importants consentis depuis des années par les entreprises agroalimentaires françaises, la sécurité sanitaire est, à l’évidence, bien mieux assurée aujourd’hui qu’elle ne l’était il y a cinquante ans. Mais nous pouvons encore faire mieux, et ce, dès cette année.

Pour conclure, j’ai la conviction que nos industries alimentaires sont une force économique de premier ordre dans notre pays, mais elles peuvent encore se développer. C’est tout le sens de la politique que je souhaite conduire avec vous.

Soyez sûrs de ma détermination à obtenir rapidement des résultats. Avec le soutien de la politique publique que nous sommes en train d’inventer – car il s’agit d’une nouveauté –, l’industrie agroalimentaire peut contribuer au redressement économique du pays et produire les résultats que le pays attend.

M. le président François Brottes. Vingt-deux députés souhaitent poser des questions. J’invite donc les orateurs à respecter strictement leur temps de parole.

M. Jean-Claude Mathis. La structure actuelle du secteur agroalimentaire tend à multiplier le nombre d’intermédiaires entre producteurs et consommateurs, ce qui nuit à la qualité des produits, porte atteinte à l’environnement et fragilise l’économie de proximité. Quelles pistes serait-il possible de suivre pour valoriser les circuits courts et l’agriculture de proximité, qu’il s’agisse des marchés ou magasins de producteurs, de la vente à la ferme ou de tout autre système permettant d’établir un lien direct entre producteurs et consommateurs et de mieux garantir la qualité des produits ?

Malgré la publication en janvier 2012 du décret qui en encadre l’usage, peu de produits, dans les supermarchés, arborent aujourd’hui la mention : « Nourri sans OGM ». Certes, garantir une alimentation sans organismes génétiquement modifiés représente un effort pour les professionnels, mais d’après une enquête, 63 % des consommateurs, s’ils en étaient informés, n’achèteraient pas de produits issus d’animaux nourris avec du fourrage transgénique.

Une autre enquête récente, relative à l’équilibre nutritionnel dans les cantines scolaires, a par ailleurs mis en évidence des inégalités importantes d’un établissement à l’autre, qu’il s’agisse de la qualité alimentaire ou de l’équilibre nutritionnel. Quelles actions entendez-vous mettre en œuvre pour favoriser la consommation locale et l’usage de produits frais dans les cantines ?

M. Dominique Potier. Cinq cent mille emplois, 12 000 entreprises, le deuxième poste d’excédent commercial de notre économie, un quatrième rang mondial en termes d’exportations : le secteur agroalimentaire vaut la peine qu’un ministre délégué y consacre son énergie et élabore une stratégie pour accompagner le marché, l’adapter au temps présent et le préparer aux défis futurs. Les députés du groupe socialiste sont donc fiers de la création de ce département ministériel, mais aussi du travail que vous avez accompli, notamment pendant la crise de confiance que nous avons connue en février.

Non seulement 10 000 emplois restent à pourvoir dans ce secteur d’activité, mais chaque milliard d’euros de chiffre d’affaires gagné à l’export peut générer 10 000 emplois supplémentaires. Il s’agit donc d’un des plus importants leviers de redressement productif.

C’est aussi un levier en matière d’aménagement du territoire. Une politique agroalimentaire doit accompagner l’ensemble des mille terroirs français et constituer une locomotive pour l’agroécologie que le ministre de l’agriculture entend promouvoir, afin de faire de la France un modèle en ce domaine. Pour avoir une économie solide, un pays se doit d’avoir un pied dans l’économie mondiale – c’est le cas du grand quart nord-est, qui exporte vers tous les points cardinaux – et un autre dans l’écosystème local.

Nous avons par ailleurs conscience que l’agroalimentaire et l’alimentation sont importants dans notre civilisation, fondée sur le lien, le repas pris en commun, la fête, la qualité.

Enfin, nous partageons votre préoccupation au sujet de la santé publique comme facteur d’égalité des chances.

J’en viens à mes questions. Le gouvernement précédent a dépouillé les services vétérinaires de leurs capacités à vérifier la traçabilité des produits. Quels moyens seront mis en œuvre pour que les fonctionnaires puissent faire preuve de la sévérité requise dans leurs contrôles, compte tenu des enjeux en termes commerciaux et de santé publique ?

Par ailleurs, outre la viande, ne serait-il pas nécessaire de mieux connaître l’origine et le circuit emprunté par d’autres produits que nous trouvons sur nos étals, comme le lait et le miel ?

Quelles mesures comptez-vous mettre en œuvre dans le cadre de la révision de la loi LME pour retrouver, au sein du secteur agroalimentaire, une chaîne des valeurs plus équilibrée, et pour garantir la dignité des ouvriers de l’industrie alimentaire comme des paysans en leur offrant des conditions de travail et des salaires décents ?

Entre les circuits courts et les circuits longs, entre le réseau des associations pour le maintien d’une agriculture paysanne – AMAP – et l’exportation via Rotterdam, n’y a-t-il pas des circuits intermédiaires de production, transformation ou distribution qu’il faudrait inventer ou conforter, notamment autour des métropoles régionales ? Quelles infrastructures de transformation – notamment d’abattage – et de commercialisation pourraient-elles être développées pour reconquérir les marchés intérieurs ?

Enfin, la lutte contre le gaspillage alimentaire et les gains que nous pouvons en escompter peuvent être mis au service de l’égalité des chances à l’école. Dans un pays où le pouvoir d’achat est quatre fois plus important qu’à l’époque de Pierre Mendès France, il est scandaleux que l’on puisse encore distinguer l’origine sociale des élèves selon la façon dont ils sont nourris.

Mme Michèle Bonneton. La crise de confiance à l’égard de l’alimentation nous conduit à nous interroger sur notre modèle agroalimentaire et sur la relation entre fournisseurs et consommateurs. Il paraît ainsi important de favoriser la production nationale et européenne, ainsi que les circuits courts et la proximité. À ce sujet, l’administration exige actuellement des éleveurs transformateurs des compétences qui ne sont pas en adéquation avec les réalités. On demande par exemple à un producteur de poulets d’être titulaire d’un diplôme de boucher pour tuer et cuisiner ses bêtes.

Quelles mesures comptez-vous prendre pour favoriser les circuits courts, rapprocher les producteurs des consommateurs et améliorer leur compréhension mutuelle ? Comment protéger les petits producteurs confrontés aux grandes centrales d’achat ?

Comment peut-on envisager d’augmenter le nombre de contrôles et d’améliorer la qualité de l’alimentation compte tenu du manque de moyens dont souffre la DGCCRF, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ? Allez-vous augmenter ces moyens ?

Par ailleurs, pensez-vous améliorer l’information sur les principaux ingrédients composant les plats préparés, et pas seulement sur la viande ? De nombreuses études menées par des nutritionnistes montrent que les taux d’huile de palme, de sel, de sucres et de graisses sont trop élevés dans les aliments industriels, avec les conséquences néfastes qui en résultent pour la santé des consommateurs. Il en est de même pour les agents de saveur. Quelles sont précisément vos intentions en ce domaine ?

La santé des animaux d’élevage pose également un problème. Selon un rapport de 2006 de l’Office parlementaire d’évaluation des politiques de santé, la France détient ainsi le record européen en matière d’antibiotiques résistants, ce qui pourrait être dû à l’alimentation. Le Gouvernement entend-il réduire l’administration de médicaments aux animaux, et si oui, par quels moyens ?

Cette façon de traiter les animaux est généralement liée aux conditions de vie dans certains élevages. Est-il prévu des mesures d’accompagnement afin d’aider les éleveurs à sortir d’un modèle de production intensif, souvent polluant et néfaste pour la santé humaine ?

Est-il possible, par ailleurs, de faire entendre raison à la Commission européenne en ce qui concerne l’usage de farines animales dans les élevages ?

Enfin, en dépit de ses excédents commerciaux, la France reste dépendante de l’importation de produits agricoles bruts et même transformés. Que faire pour lui assurer une souveraineté alimentaire ?

M. le président François Brottes. Notre commission s’apprête à adopter une résolution sur les farines animales, de façon à soutenir le Gouvernement dans l’action qu’il mène à Bruxelles.

M. le ministre délégué. Dominique Potier a insisté sur la force économique de l’agroalimentaire. Je suis convaincu que ce secteur représente un levier puissant pour développer la présence de notre pays à l’export. Aujourd’hui, en effet, les 11,5 milliards d’euros d’excédents commerciaux générés par le secteur proviennent essentiellement des vins et spiritueux, des produits laitiers et des céréales. Et d’autres filières agricoles – les viandes, en particulier – sont en grande souffrance.

C’est pourquoi nous avons défini, avec Nicole Bricq, une stratégie de dynamisation des exportations agroalimentaires, en faisant de l’Asie un objectif pour 2013. Nous avons ainsi installé un « comité Asie » comprenant des opérateurs publics, des représentants de nos ministères et des professionnels du secteur. L’idée est de constituer un arsenal d’outils au service des entreprises françaises de l’agroalimentaire soucieuses d’exporter sur ces marchés émergents. Le comité devra formuler ses propositions avant l’été, car dans ce domaine également, nous avons l’obligation de prendre des mesures concrètes et opérationnelles. Ce qu’il nous faut développer, c’est une culture commune de l’export, partagée entre l’État, les collectivités territoriales et les entreprises. Si nous voulons être forts à l’export, nous devons agir ensemble : c’est seulement à ce prix que nous pourrons surmonter les barrières douanières ou tarifaires et améliorer notre balance commerciale.

Mais nos entreprises doivent être capables de s’adapter à ces marchés émergents. Un produit fabriqué en France, pour se vendre à l’étranger, doit tenir compte du mode de vie, des traditions culinaires, du goût des consommateurs visés. Les fabricants de foie gras l’ont bien compris, mais ce n’est pas le cas de toutes les filières de production – on pourrait même citer de parfaits contre-exemples. J’invite donc les entreprises françaises à être extrêmement attentives aux attentes de leurs consommateurs étrangers.

Plusieurs orateurs ont évoqué les relations au sein de la chaîne alimentaire. La chaîne de valeur, pour reprendre l’expression de Dominique Potier, est-elle optimale ? Non. Nous le savons, des producteurs, des PME souffrent, et la grande distribution, parfois, refuse de voir les problèmes.

La loi LME, au risque de froisser certains, n’a pas produit les effets que l’on en attendait en termes de soutien à notre appareil de production. Combien de producteurs, combien de responsables d’entreprises de transformation nous disent qu’ils ne s’en sortent pas, qu’ils sont étranglés ? Il est donc nécessaire d’adapter, de corriger la loi, comme le Gouvernement s’y est engagé.

Selon moi, il est possible d’avancer sur deux questions.

La première concerne la volatilité du prix des matières premières, qui doit être prise en compte dans le prix final, ou du moins être reconnue par la grande distribution. Aujourd’hui, ce sont pour l’essentiel les producteurs qui en subissent les effets, de façon parfois dramatique.

La deuxième tient aux conditions de la négociation commerciale, parfois très rudes, au point que certaines PME ne peuvent ou ne veulent s’y soumettre. Je souhaite pour ma part apporter de la clarté à ces négociations, de façon à ce que chacun sache à quoi s’en tenir. Cela implique de partir des conditions générales de vente et de se montrer précis et clairs sur les prix, les volumes et les conditions de promotion.

Sur ces deux aspects, il est essentiel que les choses changent. Et l’examen du projet de loi sur la consommation porté par Benoît Hamon vous donnera l’occasion de vous prononcer sur les moyens de rétablir un équilibre économique dans le secteur.

Beaucoup d’entre vous m’ont interrogé sur les circuits courts. Ces filières, nous en sommes convaincus, sont un facteur de dynamisme économique, de développement de l’emploi local et de croissance. Même si elles ne peuvent suffire à nourrir l’ensemble des Français, ni contribuer, par définition, aux exportations au long cours, elles doivent donc être confortées. Pour cela, nous explorons deux pistes : le recours à la commande publique et l’amélioration de la formation des producteurs – ce qui implique aussi de les protéger, de les accompagner et de leur donner les instruments nécessaires pour ne pas subir un rapport de forces déséquilibré lors des discussions commerciales.

Dans ces deux domaines, nous vous présenterons des propositions dans le cadre de la loi d’avenir pour l’agriculture, dont l’inscription à l’ordre du jour des assemblées aura lieu avant la fin de l’année.

J’en viens aux farines animales. La France s’est opposée, sans succès, à la décision, prise le 18 juillet 2012, d’autoriser à nouveau l’usage des protéines animales transformées – PAT – pour l’alimentation des poissons. Mais les pisciculteurs français se sont engagés, dans le cadre d’une charte de filière, à ne pas utiliser de produits issus d’animaux d’origine terrestre. Le consommateur est donc en mesure de choisir, entre deux produits, celui qui a été fabriqué à partir de poisson élevé sans farines animales.

En ce qui concerne l’usage des farines animales dans les élevages porcins et avicoles, le Gouvernement ne déviera pas de sa position, car nous considérons que la société française – comme d’ailleurs celles d’autres pays d’Europe – n’est pas prête à l’accepter. Au moment où nous sortons à peine d’une crise de confiance relative à l’alimentation, cette question ne peut, selon nous, être mise à l’ordre du jour.

De même, nous continuons à souhaiter une remise à plat du dispositif européen de contrôle des OGM et des pesticides. À nouveau, il y va de la confiance éprouvée par les consommateurs à l’égard de leur alimentation. La France a saisi les instances communautaires de cette question, et nous souhaitons que le débat à venir prenne en compte les attentes et les inquiétudes des citoyens.

S’agissant des ingrédients alimentaires, y compris les huiles et les graisses, il est nécessaire d’obtenir des engagements collectifs de la part des professionnels de l’industrie agroalimentaire. Jusqu’à présent, des efforts ont été consentis par certaines entreprises, sur tel ou tel aspect de la composition de leurs produits, mais cela ne suffit pas. Si nous voulons rétablir la confiance des Français, la filière alimentaire, dans son ensemble, doit montrer qu’elle a compris leurs attentes et qu’elle est en capacité d’y répondre concrètement, par des améliorations substantielles. C’est ce à quoi nous travaillons actuellement.

M. Germinal Peiro. Tout le monde souscrit aux efforts demandés en matière de transparence. Mais ne serait-il pas possible de promouvoir, en s’inspirant du secteur touristique, un label : « Produit et transformé en France » ? Sans être nécessairement un gage de qualité, il constituerait un bon signal, dans l’agroalimentaire comme dans de nombreux autres secteurs.

Par ailleurs, la révision de la loi LME ouvrira-t-elle la possibilité de renégocier les contrats dès lors que des indicateurs précis auront permis de mettre en évidence une augmentation du coût des matières premières ?

S’agissant des conditions de négociation, la grande distribution sera-t-elle contrainte de s’en tenir au contrat, et rien qu’au contrat, c’est-à-dire de ne pas chercher à rétablir, d’une manière ou d’une autre, la pratique des marges arrière ?

M. Jean-Marie Tetart. Je me réjouis d’apprendre que la question de la volatilité des prix sera prise en compte dans le cadre de la révision de la loi LME. Mais qu’en est-il de la répercussion des charges d’exploitation sur les prix de production ? Les producteurs se situant en amont de toutes les filières agroalimentaires, il convient d’assurer la stabilité de leurs ressources économiques, sans quoi les secteurs placés en aval risquent également de pâtir de leurs difficultés.

S’agissant des circuits courts, vous avez annoncé des initiatives en matière de commande publique et de formation. Des efforts seront-ils également réalisés en faveur des installations de conditionnement, qu’il s’agisse de la viande, des fruits ou des légumes ?

Mme Pascale Got. L’agroalimentaire est comme le tourisme : ce secteur est un levier de croissance, il peut peser fortement sur l’économie, mais il doit faire l’objet de nombreuses actions très concrètes. Les conférences régionales sur l’agroalimentaire ont identifié des besoins en termes d’innovation, de formation, d’aide à l’export. Sur ce dernier point, comment comptez-vous assurer la coordination entre les différents opérateurs ? Faut-il mettre en place un guichet unique pour centraliser les dispositifs déjà en place ? Quel rôle jouera la Banque publique d’investissement – BPI – ?

M. le ministre délégué. Dans son activité quotidienne, la BPI portera une attention particulière à l’agroalimentaire, dont la réalité économique n’est pas celle du numérique, par exemple. Les taux de retour sur investissement, en particulier, ne sont pas du tout ceux que l’on observe dans d’autres domaines, et c’est pourquoi la Banque devra prendre en compte la singularité économique du secteur.

Son intervention ne se limitera pas au soutien à l’exportation, puisqu’elle devra également contribuer à une modernisation des outils de production, dont certaines filières – les viandes, en particulier – ont grandement besoin.

Mais c’est évidemment à l’aune de la transition écologique que seront définies les priorités de la Banque. Elle devra favoriser les investissements relevant du défi vert, qui sont, je l’ai dit, les plus performants sur le plan économique et social. C’est ainsi que nous retrouverons des marges de manœuvre en matière d’exportation.

En tout état de cause, le secteur agroalimentaire, en raison de la force économique qu’il représente, mérite d’être soutenu par la Banque publique d’investissement.

Germinal Peiro s’est interrogé sur l’opportunité de créer un label : « Produit et transformé en France ». Des marques privées le font déjà pour valoriser soit une identité régionale, soit certaines filières, comme la viande bovine ou la viande de porc françaises. De telles démarches, effectuées par des acteurs privés sur le mode du volontariat, ne posent pas de difficultés, et le Gouvernement est prêt à les accompagner. Mais une marque nationale, portée par l’État, devrait respecter strictement la réglementation européenne.

S’agissant des aides à l’export, il est absolument nécessaire d’assurer une bonne coordination entre les opérateurs concernés. Trop souvent, on me fait part d’une concurrence entre des organismes dont les champs d’activité sont contigus : ce comportement est insupportable, car il nuit à l’efficacité de l’action exercée et augmente les coûts. Avec Nicole Bricq, nous avons donc choisi de clarifier les compétences et le cahier des charges de chaque opérateur. Le « Comité Asie » en est un exemple, puisqu’il permet de définir les rôles respectifs d’Ubifrance, de la Sopexa et des missions économiques de nos ambassades.

Enfin, les dispositions du projet de loi sur la consommation visant à modifier la loi LME ne prévoient pas, à ce stade, la prise en compte des charges d’exploitation. Toutefois, rien n’empêche les parlementaires de proposer des amendements sur ce point.

M. Philippe Armand Martin. Vous avez fait l’éloge des métiers de l’alimentation – qu’il s’agisse de la production, de la transformation ou de la distribution – et appelé les jeunes à embrasser une carrière dans ce secteur, tout en notant que les conditions de travail pouvaient être difficiles. L’exonération de charges que nous avions mise en place en faveur du travail agricole temporaire avait permis à nos producteurs d’être plus compétitifs par rapport à leurs concurrents européens, notamment dans les secteurs qui emploient de nombreux saisonniers, comme l’arboriculture, la viticulture, la production de fruits et de légumes. La diminution de cette exonération, et l’augmentation des charges qu’elle entraîne, risque d’aboutir à une réduction du nombre d’embauches. Qu’entendez-vous faire pour alléger les charges des employeurs de travailleurs saisonniers et éviter le travail au noir ?

M. Hervé Pellois. La crise de l’agroalimentaire ne date pas des dix derniers mois. Comme nous, vous avez pointé du doigt la responsabilité des grandes surfaces et déploré l’absence d’effets de la loi LME. Mais le malaise sévit également à l’intérieur des filières de production, faute d’une solidarité suffisante entre les maillons de la chaîne : on l’a vu lors des tentatives de contractualisation pour stabiliser le prix du lait, ou quand les abattoirs bretons ne sont pas parvenus à se mettre d’accord sur la réduction de leurs capacités de production. Comment pourrions-nous convaincre les acteurs économiques de « chasser en meute », comme le rapport Gallois les y incite ? Comment augmenter les plus-values à l’intérieur des filières ? Comment redonner confiance aux éleveurs en leur permettant de rénover dans des délais acceptables leurs outils de production, trop souvent obsolètes, sachant que le traitement des dossiers prend deux ans en France, contre six mois en Allemagne ?

Mme Laure de La Raudière. Le développement des circuits courts en matière d’élevage implique que soit maintenue l’existence des abattoirs de proximité. Or la ligne d’abattage de Nogent-le-Rotrou s’apprête à fermer en raison de la concurrence allemande et espagnole – le coût de la main-d’œuvre est en effet de 10 euros l’heure dans ces pays, contre 22 euros en France. De plus, les bovins du Perche et d’autres territoires proches sont envoyés en masse vers la Turquie. Dans un premier temps, cette exportation a été une bonne chose, puisqu’elle a permis de maintenir les cours de la viande. Mais les abattoirs ont désormais des difficultés à s’approvisionner en bovins vivants. Quelle réponse le Gouvernement peut-il apporter à ce problème ?

M. le ministre délégué. La question du coût du travail est revenue dans les trois interventions. En ce domaine, je n’ai pas de tabou : je reconnais que le problème existe, notamment vis-à-vis de notre principal partenaire commercial, l’Allemagne. Faut-il, pour autant, ramener le niveau de salaire à celui pratiqué chez notre voisin ? La réponse est non, bien sûr. Dès lors, que peut-on faire ?

Tout d’abord, nous devons intervenir au plan européen afin de dénoncer les abus commis par l’Allemagne dans l’application de la directive relative au détachement des travailleurs.

M. Philippe Armand Martin. Nous ne sommes pas prêts d’en voir les résultats !

M. le ministre délégué. En attendant, il faut bien poser le problème, et c’est ce gouvernement qui en a pris l’initiative. Michel Sapin, au nom du Gouvernement français, entend en effet remettre à plat l’usage de cette directive, qui permet à l’Allemagne d’employer dans ses abattoirs des travailleurs provenant de pays entrés récemment dans l’Union européenne et payés au taux horaire de leur pays d’origine. En outre, il n’existe pas de convention collective dans l’agroalimentaire allemand, et donc pas de salaire minimum équivalent à ce qui existe dans d’autres secteurs de l’industrie.

Le crédit d’impôt compétitivité emploi – CICE – est la réponse du Gouvernement au problème du coût du travail dans le secteur agroalimentaire. En 2013, les entreprises connaîtront l’équivalent d’une baisse de 4 % des cotisations sociales patronales, et de 6 % en 2014. Une telle mesure se traduit immédiatement dans les comptes de résultat, et représente un vrai ballon d’oxygène.

Il convient d’y ajouter les mesures destinées à favoriser l’emploi, et notamment l’emploi des jeunes. Ainsi, une entreprise qui conclut un contrat de génération peut recevoir jusqu’à 4 000 euros par an pendant trois ans. Le cumul de cette disposition avec le CICE et l’allégement de cotisations sur les salaires inférieurs à 2,5 SMIC représente au total une aide équivalant à 60 % des cotisations pour un salaire au niveau du SMIC. Pour les entreprises du secteur agroalimentaire, c’est un soutien puissant à l’embauche, et une façon directe, concrète de répondre au problème du coût du travail.

Pour renforcer la solidarité au sein des filières, monsieur Pellois, il convient d’élaborer des stratégies de filières. Nous présenterons justement, le 15 avril, une stratégie pour la filière porcine, et le 18 avril pour la filière avicole : c’est le résultat d’un travail inédit, engagé dès l’automne avec l’ensemble des acteurs concernés. De toute évidence, le fonctionnement actuel de ces filières ne peut perdurer : elles ont besoin de s’organiser, de se structurer davantage, de définir des objectifs et des ambitions, notamment sur le plan commercial, qu’il s’agisse de l’exportation ou, pour ce qui concerne la production avicole et porcine, de la reconquête du marché intérieur.

Les difficultés de la filière porcine ne sont pas récentes, nous le savons, mais il n’est pas envisageable d’attendre un an de plus pour y répondre. Nous devons agir maintenant.

Mme Corinne Erhel. Vous avez répondu aux questions que je me posais sur les stratégies de filières – notamment dans le secteur avicole – après avoir été récemment alertée au sujet des difficultés que connaissent les producteurs d’œufs de consommation.

Quel regard portez-vous sur la mise en place de l’écotaxe poids lourds et ses éventuelles répercussions, non seulement pour les entreprises de transport, dont les marges sont déjà très réduites, mais aussi sur le secteur agroalimentaire, qui souffre également d’un climat économique tendu ?

M. Dino Cinieri. Le ministre de l’agriculture, avec lequel nous avons dialogué dans le cadre du groupe d’étude sur l’élevage, nous a annoncé tout à l’heure qu’une réunion sur la filière du lait serait organisée le 8 avril, autour des représentants des producteurs, des transformateurs et des distributeurs. Bien entendu, il s’est dit déterminé à tout faire pour parvenir à un accord.

Le lait est sous-payé. Nos producteurs souffrent et sont inquiets. La Fédération nationale des producteurs de lait – FNPL – a élaboré un indicateur de marges pouvant servir de base à un mécanisme d’alerte, et qui montre la situation critique dans laquelle se trouvent les éleveurs. Si la hausse des charges alimentaires, qui représente plus de 30 euros pour 1 000 litres, était répercutée en totalité sur les prix à la consommation, il n’en résulterait pourtant qu’une hausse de 2 centimes par brique de lait.

Nous avons besoin d’une politique agricole commune « anticrise », susceptible de redonner du souffle à l’élevage dans l’attente de la nouvelle PAC, dont la mise en œuvre n’interviendra pas avant deux ou trois ans.

Rappelons que parmi les productions de ruminants, seule la filière lait ne bénéficie pas du couplage des aides, pourtant la solution la plus équitable, parce qu’elle tient compte des actifs et s’applique en montagne comme en plaine.

La réunion du 8 avril devra être l’occasion de réfléchir aux moyens d’améliorer les contrats entre entreprises et producteurs, afin de tenir compte de la dépendance économique des éleveurs vis-à-vis de leurs acheteurs. La FNPL a fait des propositions destinées à rééquilibrer le rapport de forces : donner aux éleveurs la possibilité d’inclure des clauses de sauvegarde, notamment en cas de hausse anormale des charges ; installer une instance d’arbitrage – par exemple le Médiateur des contrats – doté du pouvoir de contraindre les parties à une bonne application du contrat ; sécuriser la situation des jeunes agriculteurs grâce à l’allongement de la durée des contrats et la suppression des pénalités en cas de rupture ; améliorer le droit européen en levant les ambiguïtés sur le rôle joué par le Centre national et les centres régionaux interprofessionnels de la production laitière dans la définition des indicateurs économiques figurant dans l’article L. 632-14 du code rural.

Mme Annick Le Loch. J’espère, monsieur le ministre, que les modifications que vous souhaitez apporter à la loi LME seront en mesure de rééquilibrer le rapport de forces entre quelques centrales d’achat et les milliers de producteurs et industriels qui leur font face.

De nombreux abattoirs sont situés en Bretagne et à l’ouest de la France – ce qui est normal, compte tenu de l’importance des élevages dans ces régions –, mais la baisse de la production en a mis certains en difficulté. C’est le cas notamment d’une installation située dans le Finistère. Si une ligne d’abattage devait disparaître, quelle solution de revitalisation proposeriez-vous ?

La part réservée à l’alimentation dans le budget des consommateurs n’a cessé de se réduire au fil des ans, au point que les producteurs dénoncent des prix devenus trop faibles. Ne faudrait-il pas convaincre les Français qu’ils doivent, pour obtenir une alimentation de qualité, consentir à y consacrer plus d’argent ?

M. le président François Brottes. Le choix d’inclure les dispositions de modification de la loi LME dans le projet de loi sur la consommation risque de retarder l’examen du texte en commission, sans pour autant modifier les dates d’examen en séance publique. Les rapporteurs – dont Mme Le Loch – devront donc mettre les bouchées doubles.

M. le ministre délégué. Les dispositions sur l’écotaxe poids lourds ont été adoptées le 27 mars par la Commission du développement durable et seront examinées en séance publique à partir du 10 avril. Leur entrée en vigueur est prévue le 1er octobre. D’ici là, le Gouvernement conduira des travaux complémentaires en faisant preuve de pragmatisme.

Il convient tout d’abord de rappeler l’objectif de cette taxe : il n’est pas d’embêter les transporteurs, mais bien de financer l’amélioration du réseau de transport dans notre pays et de répondre aux exigences d’un transport plus propre.

En outre, il va sans dire que l’application du dispositif sera adaptée en fonction de la géographie. La situation des régions périphériques, et notamment de la Bretagne, sera ainsi prise en compte.

Le Gouvernement avait pris l’engagement de mettre en place cette taxation, même s’il n’ignore pas les craintes et les inquiétudes exprimées par les professionnels, en particulier dans le secteur agroalimentaire. Mais je le répète, il fera preuve, lors de son application, d’un grand pragmatisme et d’un souci constant de l’évaluation, en veillant à ne pas fragiliser les acteurs économiques.

Il est vrai, monsieur Cinieri, que le lait n’est pas payé à sa juste valeur, au point que de nombreux producteurs ont du mal à équilibrer leurs comptes et à vivre dignement de leur travail.

Notre action, dans ce domaine, s’inscrit d’abord dans le cadre européen. Le combat mené par Stéphane Le Foll pour modifier le contenu de la future PAC a précisément pour but de soutenir les régions d’élevage, et donc aussi les producteurs de lait. C’est le cas, notamment, de la disposition visant à donner une prime aux cinquante premiers hectares, qui est une façon de rendre la politique agricole commune plus juste.

Il va de soi, cependant, qu’un éleveur ne vit pas des aides, mais d’abord des revenus qu’il tire de la vente de sa production. C’est pourquoi nous travaillons avec les professionnels – dont la FNPL – dans l’objectif d’obtenir un nouvel équilibre en matière de contractualisation et un meilleur partage de la valeur. Notre ligne de mire est l’année 2015, car c’est maintenant qu’il faut se préparer à la fin des quotas laitiers. C’est ainsi que nous redonnerons des perspectives et de l’espoir à la filière.

M. le président François Brottes. N’oublions pas, par ailleurs, que les agriculteurs bénéficieront également du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi.

M. le ministre délégué. En effet.

La crise des outils d’abattage, en particulier dans l’Ouest, est une réelle source d’inquiétude pour les salariés, les élus et plus généralement les habitants. Cette question est liée à l’établissement d’une stratégie pour la filière porcine, pour laquelle je vous ai donné rendez-vous le 15 avril.

Face à la diminution de la production porcine dans notre pays, il convient d’être réaliste et de se fixer l’objectif d’une stabilisation à 25 millions de têtes. S’il est possible de faire mieux, nous le ferons, mais cela suppose de redonner de vraies perspectives économiques à la filière. À cet égard, le plan méthanisation présenté la semaine dernière par Delphine Batho et Stéphane Le Foll constitue aussi une réponse. Car si la production diminue, c’est aussi parce que les éleveurs ont de plus de mal à faire accepter leurs installations, en raison des nuisances qu’elles occasionnent, des effets sur la qualité de l’eau, de la pollution causée par les nitrates ou du développement des algues vertes. De ce point de vue, la méthanisation, qui permet à la fois de produire de l’énergie et de limiter les intrants phytosanitaires, constitue une vraie solution d’avenir. C’est l’agroécologie en actes !

Il faut donc définir une nouvelle stratégie pour la production, mais aussi pour la transformation. Comment, en effet, nos abattoirs peuvent-ils s’en sortir si le volume est insuffisant ? C’est impossible, mécaniquement. Des adaptations sont donc nécessaires pour moderniser et rationaliser l’outil économique. Mais pour atteindre cet objectif, nous n’abandonnerons personne. Nous devrons trouver des solutions humaines, à l’échelle des territoires, afin que personne ne se sente laissé pour compte.

Ce sera difficile, bien sûr. Lorsque j’ai rencontré, la semaine dernière, les organisations de salariés d’une entreprise mise en redressement judiciaire, je leur ai tenu ce langage de vérité, qui seul nous permettra d’obtenir de vrais résultats sur le plan économique comme sur le plan social. Mais je suis prêt à travailler avec vous, madame la députée, pour trouver les solutions nécessaires.

M. Frédéric Roig. Au vu des difficultés éprouvées par les différents acteurs de la chaîne agroalimentaire pour se mettre d’accord, il nous semble voir se vérifier la prophétie de Georges Orwell : « Nous pourrions bien nous apercevoir un jour que les aliments en conserve sont des armes bien plus meurtrières que les mitrailleuses. » Il est nécessaire de repenser les contrats commerciaux – et notamment les contrats de proximité – pour que toutes les formes de l’agriculture aient accès à la distribution.

En amont, le secteur est concerné par la mise en place prochaine de la nouvelle politique agricole commune. Mais le FISAC, le Fonds d’intervention pour les services, l’artisanat et le commerce, a également un rôle à jouer s’agissant des plus petites entreprises. Dans le cadre des réflexions que vous menez autour du projet de loi sur la consommation, mais aussi sur la production et la transformation agricoles, il est important de veiller à mettre en cohérence les dispositifs destinés à accompagner les investissements et la modernisation des installations ainsi que la mise en place d’une traçabilité.

Peut-être serait-il aussi nécessaire de réduire le champ d’activité de certains groupes industriels, dont la taille n’a pas été sans effet sur les dérives récemment observées. Ainsi, dans ma circonscription, un abattoir a pu reconstituer un marché en ouvrant un atelier de découpe. Certes, les volumes traités sont moins importants que dans les abattoirs industriels, mais la valeur ajoutée permet d’équilibrer les coûts de l’abattage.

Mme Marie-Lou Marcel. Avec 10 000 emplois à pourvoir, le secteur de l’agroalimentaire représente une force économique importante, mais qui n’existerait pas sans les agriculteurs. Or ces derniers sont très inquiets dans mon département. Dans la filière laitière, en particulier, ils souffrent du resserrement du crédit bancaire, de l’augmentation des charges et de relations déséquilibrées avec la grande distribution. Pour égaler le chiffre d’affaires qu’ils produisaient il y a une dizaine d’années, ils devraient vendre 20 000 litres de lait supplémentaires.

Sur la LME, vous avez en partie répondu. Mais les producteurs constatent que la loi n’est pas appliquée dans certains secteurs. Comment peut-on y remédier ? Faut-il donner des moyens nouveaux à la DGCCRF ?

Des assises de l’agroalimentaire doivent se tenir prochainement. Qu’en sera-t-il de la loi d’avenir pour l’agriculture ?

Enfin, que pensez-vous de la mise en place d’un indicateur des marges pour l’ensemble de la filière, du producteur au consommateur ?

M. Jean Grellier. Quelle est votre position sur les problèmes rencontrés par la filière laitière, et plus particulièrement la filière laitière caprine ?

D’une manière générale, les prix à la production ne permettent plus aux éleveurs de vivre de leur activité. La grande distribution est la cible d’actions syndicales fortes, voire violentes, interpellant les élus et les services de l’État des territoires concernés.

Il est manifestement nécessaire de rééquilibrer la répartition des marges au sein de la filière, en particulier entre la transformation, la distribution et la commercialisation. Comptez-vous travailler avec les acteurs privés ou coopératifs – à très court terme, compte tenu de l’urgence – afin de rétablir un équilibre, de permettre aux producteurs de retrouver un minimum de rentabilité et de sauvegarder leurs exploitations ? Je crains que la future PAC et les mesures destinées à anticiper le tournant de 2015 ne suffisent pas à atteindre cet objectif.

Mme Catherine Troallic. Je tiens à saluer le volontarisme dont vous faites preuve en matière d’étiquetage et d’information des consommateurs. Le combat en faveur de la transparence est en effet indispensable.

De même, je me félicite des mesures envisagées pour lutter contre le gaspillage, et notamment celle consistant à généraliser le recours aux chantiers d’insertion dans les marchés d’intérêt national afin de récupérer les invendus et de les recycler dans les circuits de l’aide alimentaire. Cette initiative fait-elle partie des mesures de compensation prévues par le Gouvernement à la suite de la refonte du programme européen d’aide aux plus démunis – PEAD –, ou s’agit-il d’un dispositif complémentaire destiné à appuyer les associations caritatives qui viennent en aide aux plus défavorisés ?

M. le ministre délégué. M. Roig me demande s’il existe un avenir pour les petits abattoirs. S’il apparaît qu’ils peuvent trouver une rentabilité en traitant des volumes différents avec des moyens différents, il va sans dire que nous les soutiendrons. Je suis prêt à examiner attentivement l’équilibre économique de ces petites structures dans le cadre de la loi d’avenir pour l’agriculture.

Dans le cas où les nouvelles dispositions de la loi LME ne seraient pas respectées, nous avons prévu de renforcer l’arsenal des amendes administratives susceptibles d’être infligées. L’exercice des prérogatives régaliennes de l’État, et donc la fonction de contrôle attribuée aux services de la DGCCRF ou aux services vétérinaires, reste pour nous une priorité. Certes, l’application de la révision générale des politiques publiques a eu parfois pour effet de laisser, sur certains territoires, ces services démunis. Je rends d’ailleurs hommage à leurs agents, qui font un excellent travail sur le terrain – ils l’ont montré lors de la crise de la viande de cheval – dans des conditions pas toujours faciles. Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2014, vous aurez l’occasion de débattre sur les moyens de les soutenir.

S’agissant de la filière caprine comme d’autres filières, les mêmes questions se posent : comment créer de la valeur ajoutée, comment répartir cette valeur ? Les professionnels doivent s’interroger sur les pistes à explorer en matière de diversification. On parle toujours du lait à propos de la filière caprine, mais il est également possible de valoriser la viande.

M. le président François Brottes. D’autant que le chevreau, c’est excellent !

M. le ministre délégué. J’en viens à la question du gaspillage alimentaire. On peut en effet construire des ponts entre les marchés d’intérêt national et les associations de solidarité : c’est déjà le cas à Rungis, où des fruits et légumes frais invendus sont recyclés et transformés en jus et en soupes, grâce à une association d’insertion qui a permis la création d’emplois durables. Ce modèle fonctionne et pourra être appliqué à d’autres sites.

Mais de telles actions sont destinées à lutter contre le gaspillage et non à compenser une réduction des crédits. Pour ce qui concerne le niveau du PEAD, Marie-Arlette Carlotti s’attache à trouver les bonnes réponses, en lien direct avec le Premier ministre. Elle aura l’occasion de vous les présenter le moment venu.

M. Fabrice Verdier. Le débat sur la traçabilité a été l’occasion d’évoquer les relations entre produits alimentaires et santé publique. Les Français consomment beaucoup d’aliments riches en graisses et à forte densité énergétique. Cette tendance, qui est aussi la conséquence du choix des industries agroalimentaires d’incorporer une grande quantité de sel, de sucre, de graisses saturées et d’additifs dans leurs produits manufacturés, a de vraies conséquences sur la santé : obésité, diabète, maladies cardiovasculaires, ostéoporose… Est-il envisageable d’imposer un étiquetage plus précis et une meilleure traçabilité sur les composants ajoutés par les industriels ? L’ANIA, l’Association nationale des industries alimentaires, dont nous avons auditionné les représentants, nous avait fait une réponse pour le moins floue sur ce sujet.

De même, ne serait-il pas opportun de mieux informer le consommateur sur les conséquences, en termes de santé publique, de l’excès dans l’alimentation de certains composants comme le sel ? Cette demande forte des professionnels de santé pourrait toutefois être compliquée à mettre en œuvre dans le contexte difficile que connaît l’industrie agroalimentaire.

Mme Marie-Hélène Fabre. Après la révélation, par l’agence britannique de sécurité alimentaire, de la présence de viande de cheval dans des lasagnes supposées contenir du bœuf, après la découverte, dans une enseigne de grande distribution, de produits périmés ayant été reconditionnés, la crise de confiance ouverte il y a un mois – alors qu’il n’y avait pas de risques sanitaires – tend à s’amplifier. La suspicion s’est installée chez les consommateurs et affecte les filières de l’agroalimentaire. Il importe donc qu’une traçabilité soit assurée et que des contrôles soient effectués. À cet égard, le rôle joué par la DGCCRF est fondamental. Mais a-t-elle encore les moyens humains de remplir ses missions ? Dans mon département, l’Aude, ses effectifs ont ainsi diminué de 38 %.

Le contrôle est pourtant une étape importante si nous voulons développer la performance du secteur agroalimentaire et surtout valoriser la qualité et la réputation de la cuisine et de l’agriculture françaises. Que comptez-vous faire pour les personnels des services concernés ?

M. Lionel Tardy. Vos propos sur le gaspillage me conduisent à évoquer le problème du suremballage, sur lequel il serait temps que notre commission se penche. Même si la composition des foyers tend à évoluer, je trouve préoccupante la multiplication des portions individuelles dans les étals. En tant que ministre délégué à l’agroalimentaire, ne pourriez-vous pas envisager des dispositifs permettant d’améliorer le recyclage ?

Bien sûr, les députés élus dans des circonscriptions où l’industrie de la plasturgie occupe une place importante pourront citer de nombreuses raisons de ne rien faire. Il n’en demeure pas moins que le problème s’aggrave.

Par ailleurs – et nous avions abordé la question lors de l’audition de Pascal Lamy –, que fait le Gouvernement au sujet des barrières non tarifaires, qui constituent des obstacles importants pour l’exportation de nos produits ?

M. le président François Brottes. Le problème des emballages concernerait plutôt la Commission du développement durable.

Je remarque au passage que depuis notre débat sur l’usage des sacs en plastiques, les consommateurs n’ont jamais autant payé pour obtenir des sacs de caisse. La pollution est la même, mais les distributeurs parviennent à faire de la marge grâce à ces ventes…

Mme Sophie Errante. Les conclusions de l’expérimentation du dispositif d’étiquetage environnemental, lancé en juillet 2011 dans 168 entreprises, sont sur le point d’être connues : le rapport des consommateurs a été rendu en décembre, celui des entreprises en février, et celui de la DGCCRF sera publié prochainement. Delphine Batho a d’ores et déjà affiché l’ambition d’une généralisation de cet affichage. Quelle est votre position sur ce dispositif, qui vise non seulement à mieux informer le consommateur, mais aussi à orienter sa consommation – et donc la production – sur le long terme, ce qui ne manquera pas d’avoir des conséquences dans le secteur agroalimentaire ?

Quelles seraient vos préconisations pour articuler les diverses informations à destination du consommateur, de façon à les rendre efficaces et pertinentes ?

M. Yves Daniel. Avant tout, je souhaite rappeler à notre collègue Bonneton que l’on peut à la fois faire du bio et de l’intensif. L’agriculture intensive n’est pas nécessairement polluante.

La chaîne agroalimentaire, qui va du producteur au consommateur, comprend de nombreux métiers. Où en est-on en matière d’adaptation de la formation des agriculteurs et des autres professions du secteur ?

La mobilité des produits de l’agroalimentaire – que nous voyons, vivants ou morts, circuler partout et traverser les frontières – a-t-elle fait l’objet d’une étude approfondie de façon à en connaître l’impact ? On vend des bovins ou des porcs à l’Allemagne ou l’Italie, mais on en importe aussi, et il en est de même pour de nombreuses autres productions.

Les géographes nous mettent en garde contre la tentation de faire toujours plus grand et d’aller toujours plus loin, ce qui doit nous inciter à opter pour la territorialisation. Certains exemples de construction d’abattoirs ou d’ateliers de découpe montrent que des solutions alternatives peuvent être trouvées pour concilier la notion de proximité avec la production de masse.

Je suis inquiet au sujet de la filière de production de lait, qui fait partie de celles qui bénéficient le moins des dispositions de la nouvelle PAC, qu’il s’agisse du découplage, du « verdissement » ou de la prime aux 50 premiers hectares.

Enfin, la réduction des prix des denrées alimentaires a contraint les producteurs à augmenter leurs volumes pour maintenir le revenu de leur exploitation. En conséquence, les agriculteurs travaillent de plus en plus – certains sont en situation de mal-être –, de nombreuses exploitations disparaissent, et la mécanisation s’intensifie, ce qui entraîne une diminution de l’emploi. Comment inverser cette tendance ?

M. le ministre délégué. S’agissant des ingrédients alimentaires, je souhaite vraiment obtenir des résultats en 2013, et même franchir une première étape avant l’été. Pour restaurer la confiance des Français, il faut améliorer la composition des produits transformés, ce qui passe par la signature de chartes et d’engagements collectifs. Toute la filière doit se mobiliser et tirer les leçons de la crise que nous vivons. En matière de qualité alimentaire, mon approche sera à la fois pragmatique et très exigeante.

Il en est de même s’agissant de l’information du consommateur, notamment sur les aspects nutritionnels. Mais la logique de l’équilibre alimentaire dépasse la question de l’utilisation de tel ou tel produit, qu’il s’agisse de sel, de sucre ou de graisse. Elle relève de l’hygiène de vie. D’une certaine façon, c’est l’ensemble du modèle alimentaire français qu’il nous faut refonder, même s’il est très puissant et contribue à porter à l’étranger une image de la France et de sa gastronomie fondée sur la qualité et la sécurité sanitaire. Dans un pays comme la Chine, ce dernier aspect prend un relief particulier, et les Chinois sont très attentifs à nos atouts dans ce domaine. Il est rassurant, pour eux, de savoir que les produits importés de France sont sûrs et sains. C’est donc en partant de ce qu’il a de meilleur que nous devons refonder le modèle alimentaire français, mais aussi en veillant à l’améliorer sans cesse, qu’il s’agisse de la composition des produits, de l’information ou de l’équilibre nutritionnel.

Je répète, madame Fabre, que redonner des moyens d’action aux services de répression des fraudes et aux services vétérinaires est une priorité pour le Gouvernement. Il faut assurer ce contrôle dans les meilleures conditions possible : nous le devons aux citoyens, d’autant que le contrôle fait partie des points forts du modèle alimentaire que j’évoquais à l’instant. Vous aurez donc à débattre, dans le cadre du projet de loi de finances, sur les moyens financiers que vous souhaitez affecter à ces missions.

Le suremballage, monsieur Tardy, est en effet lié à la question du gaspillage alimentaire. Dans les deux cas, nous sommes incités à promouvoir un autre modèle de société. Je travaille en étroite association avec Delphine Batho pour que les mesures que nous présenterons au mois de juin tiennent compte de ces deux préoccupations.

Aujourd’hui, une famille de quatre personnes gaspille en moyenne 20 à 30 kilogrammes d’aliments par an, ce qui correspond à une dépense de 400 euros et représente donc une réduction non négligeable du pouvoir d’achat. Cela vaut donc le coup de se mobiliser contre ce phénomène, de même que contre le suremballage. Le défi vert implique aussi, d’ailleurs, de proposer des emballages recyclables. Sur ce point également, nous proposerons des réponses dans le cadre du pacte national contre le gaspillage alimentaire.

Pour redonner de l’avenir aux filières d’élevage avicole et porcin, nous devons nous assurer que les bêtes françaises puissent être abattues en France plutôt que d’être expédiées dans des abattoirs étrangers avant de revenir dans nos entreprises de transformation. Mais il appartient aussi aux acteurs eux-mêmes de prendre leurs responsabilités, chacun devant annoncer en quoi il participe à l’équilibre de la filière et à la construction de son avenir. Pour apporter des remèdes durables, il est très important de parvenir à un accord non seulement sur le diagnostic, mais aussi sur la stratégie à suivre.

S’agissant de la filière lait, la question de la contractualisation est sur la table, mais je souhaite la lier à la préparation de l’après-quotas et à la mise en œuvre de la nouvelle PAC, dont les aides seront plus justes et mieux orientées vers les régions d’élevage.

Il est vrai que l’agroalimentaire n’est rien sans la production agricole ; les deux sont intimement liés. J’ai donc la volonté de conduire, avec vous, une politique permettant à la fois de consolider les emplois existants, d’en créer de nouveaux, et de faire de l’agroalimentaire une filière d’avenir au service de l’économie du pays. J’y crois profondément, car nous disposons d’un formidable potentiel pour assouvir cette ambition. Nous sommes en train de finaliser les outils nécessaires avec les acteurs locaux, que nous avons mobilisés lors de rencontres régionales. Ces outils devront être concrets et immédiatement opérationnels.

Lors de mes déplacements sur le terrain, j’ai pu ressentir beaucoup de volonté, d’énergie et d’attentes dans les entreprises comme chez les salariés ou les élus locaux. Si nous savons expliquer simplement et clairement le sens de la politique que nous élaborons, nous parviendrons à de beaux résultats économiques, sociaux et environnementaux.

M. le président François Brottes. L’agroalimentaire concerne la totalité des consommateurs et représente de nombreux emplois. Ce secteur méritait un ministre délégué, vous en avez fait la démonstration aujourd’hui. Merci d’avoir répondu le plus précisément possible aux nombreuses questions qui vous ont été posées. Nous serons amenés à nous revoir rapidement.

——fpfp——

Membres présents ou excusés

Commission des affaires économiques

Réunion du mardi 2 avril 2013 à 17 h 15

Présents. - M. Damien Abad, M. Frédéric Barbier, Mme Marie-Noëlle Battistel, Mme Michèle Bonneton, M. François Brottes, M. Dino Cinieri, Mme Corinne Erhel, Mme Marie-Hélène Fabre, M. Christian Franqueville, Mme Pascale Got, M. Jean Grellier, Mme Laure de La Raudière, Mme Annick Le Loch, Mme Audrey Linkenheld, Mme Marie-Lou Marcel, M. Philippe Armand Martin, M. Jean-Claude Mathis, M. Yannick Moreau, M. Germinal Peiro, M. Hervé Pellois, M. Dominique Potier, M. Frédéric Roig, Mme Béatrice Santais, M. Éric Straumann, M. Lionel Tardy, M. Jean-Marie Tetart, Mme Catherine Troallic, M. Fabrice Verdier

Excusés. - M. Yves Blein, M. Joël Giraud, M. Antoine Herth, M. Henri Jibrayel, Mme Frédérique Massat, M. Bernard Reynès

Assistaient également à la réunion. - M. Yves Daniel, Mme Sophie Errante, M. Paul Molac