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Commission des affaires économiques

Mercredi 16 octobre 2013

Séance de 16 heures 15

Compte rendu n° 10

Présidence de M. François Brottes Président

Table ronde, ouverte à la presse, sur le compteur électrique intelligent avec :

– Mme Michèle Bellon, présidente du directoire d’ERDF ;

– M. Jean-Yves Ollier, directeur général de la Commission de régulation de l’énergie ;

– M. Nicolas Mouchnino, chargé de mission énergie-environnement de l’UFC-Que choisir ;

– M. Didier Hervé, vice-président de Schneider Electric en charge de l’Eco business.

La commission a organisé une table ronde sur le compteur électrique intelligent avec la participation de Mme Michèle Bellon, présidente du directoire d’ERDF, M. Jean-Yves Ollier, directeur général de la Commission de régulation de l’énergie, M. Nicolas Mouchnino, chargé de mission énergie-environnement de l’UFC-Que choisir, M. Didier Hervé, vice-président de Schneider Electric en charge de l’Eco business.

M. François Brottes, président. Cette audition est l’occasion, si vous me permettez l’expression, de remettre les compteurs à zéro. Chacun en conviendra, différentes polémiques, rumeurs, non-dits, ont fini par attiser les tensions sur le sujet du déploiement du compteur électrique intelligent Linky. Nous avons besoin de réponses claires sur différents points, à l’heure où les économies d’énergie sont une exigence et le développement des smart grids un axe fort.

Pour traiter de ces problématiques, nous avons réuni aujourd’hui : Mme Michèle Bellon, présidente du directoire d’ERDF, M. Jean-Yves Ollier et Mme Cécile George, directeur général et directrice de l’accès aux réseaux électriques à la Commission de régulation de l’énergie (CRE), M. Nicolas Mouchnino, chargé de mission énergie et environnement de l’association UFC-Que choisir et M. Didier Hervé, vice-président en charge de l’éco-business de Schneider Electric. Je précise au préalable que Schneider Electric ne sera pas impliqué dans la production des compteurs électriques intelligents, mais que le point de vue d’une entreprise leader mondial en matière de domotique est essentiel sur ce sujet.

Cette audition sera l’occasion de traiter plusieurs sujets.

Premièrement, pourquoi est-il utile et intelligent de déployer des compteurs électriques – et de gaz – intelligents ? Comment expliquer que la France, qui était pourtant pionnière dans ce domaine, soit désormais en retard dans le déploiement de ces compteurs ?

Deuxièmement, la question de la propriété des compteurs semble réglée. Les collectivités concédantes, regroupées au sein de la FNCCR, sont les propriétaires du réseau de distribution géré par ERDF, et par là même du compteur électrique, qui en constitue une composante essentielle.

Troisièmement, la question du financement paraît, elle aussi, en bonne voie. La question de la durée d’amortissement constitue une variable d’ajustement intéressante pour des équipements destinés à durer de nombreuses années.

Quatrièmement, les consommateurs vont-ils y trouver un intérêt, ou bien le compteur est-il destiné à n’être qu’un instrument technique au service du gestionnaire de réseau ?

Cinquièmement, il nous faut évoquer la dimension potentiellement intrusive du compteur intelligent et la problématique de la préservation des données personnelles.

Enfin, une récente enquête de l’UFC-Que choisir a fait naître d’autres sujets de discussion.

Je vais laisser la parole au régulateur, auquel il reviendra la responsabilité d’ouvrir cette table ronde.

M. Jean-Yves Ollier, directeur général de la Commission de régulation de l’énergie. L’appel d’offres lancé par ERDF cet été signe l’entrée dans la phase opérationnelle du programme de déploiement de Linky. La CRE s’en félicite, car elle porte ce projet depuis sa création, en 2000. Dès sa première année d’existence, elle indique que ce compteur apporterait aux consommateurs une connaissance exacte de leur consommation et permettrait aux fournisseurs de leur proposer des offres adaptées. Ce déploiement traduit également la volonté du législateur. La loi du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique, dite loi « POPE », insère dans les missions du gestionnaire du réseau de distribution la mise en œuvre d’un dispositif incitant les utilisateurs à limiter leur consommation pendant les périodes où la consommation est la plus élevée à l’échelle nationale. La loi du 3 août 2009, dite « Grenelle I », prévoit la généralisation des compteurs intelligents pour contribuer à la gestion de la pointe et à la maîtrise de la demande d’énergie (MDE).

La CRE joue donc un rôle moteur dans ce projet et a encadré les différents stades de son développement en définissant les cahiers des charges des différentes études technico-économiques, en arrêtant les différentes étapes des expérimentations, ainsi qu’en déterminant les fonctionnalités du compteur au regard desdites expérimentations. Tous ces éléments ont fait l’objet d’une importante concertation depuis 2005 entre le gestionnaire du réseau, les fournisseurs, les industriels, les associations d’élus et les associations de consommateurs, parmi lesquelles UFC-Que choisir. Ce travail se poursuit s’agissant de l’évolution des services liés à l’arrivée du comptage. 71 réunions de concertation ont ainsi déjà été organisées sous l’égide de la CRE et, parmi les travaux à venir, figurent les procédures d’accès aux données, notamment à la courbe de charges, avec l’ouverture d’un site Internet dédié aux clients pour leur permettre de consulter quotidiennement et gratuitement leur consommation.

La compétence de la CRE pour la régulation du projet s’exerce dans le cadre fixé par la loi et le règlement, à de multiples titres. Elle a en effet pour mission générale de veiller au bon fonctionnement du marché de l’énergie et veille ainsi au respect par le gestionnaire de réseau et par les fournisseurs de leurs obligations au titre du code de l’énergie, notamment celles liées à la mise en œuvre de ce dispositif. En outre, la Commission est chargée d’évaluer les coûts et les bénéfices dudit dispositif, ce qu’elle a fait dans le cadre d’une étude rendue publique en juillet 2011. Elle a été chargée de proposer au ministre chargé de l’énergie un arrêté sur les fonctionnalités du compteur, qui a été pris en janvier 2012, et de fixer les modalités du traitement tarifaire du comptage, puisque le compteur est financé par le TURPE, le cas échéant avec un dispositif spécifique de régulation incitative. Sur l’éventualité de ce dernier dispositif, les parties prenantes ont du reste été interrogées dans le cadre d’une consultation organisée en décembre 2012. Les services de la CRE et d’ERDF sont en train de travailler sur ces questions, sur la base de l’actualisation du plan d’affaires qu’ERDF vient d’envoyer à la CRE.

Ces travaux de longue haleine traduisent notre implication très forte, de même que la conviction que le projet permettra des améliorations substantielles dans la qualité du service électrique fourni par le gestionnaire de réseau, en généralisant la relève à distance, en diminuant les temps de coupure, en permettant une facturation fondée sur la consommation réelle et en encourageant une diversification des offres. Le projet répond par ailleurs aux évolutions du réseau, il améliore notamment la connaissance des points de congestion, ce qui facilite l’orientation des investissements et l’équilibrage du réseau dans un contexte de production de plus en plus décentralisée et d’apparition de nouveaux usages, comme le véhicule électrique. Enfin, comme vous le disiez, monsieur le Président, le comptage évolué est une brique essentielle des réseaux intelligents.

Pour conclure ce propos liminaire, je rappellerai que la délibération de la CRE de juillet 2011 considérait qu’une mise en œuvre rapide de la généralisation serait très favorable à l’industrie française, dans la mesure où la France dispose d’avantages comparatifs dans la maîtrise des technologies liées à ces compteurs.

M. François Brottes. M. Hervé, représentant Schneider Electric, nous situera sans doute le compteur électrique dans l’univers des smart grids.

M. Didier Hervé, vice-président en charge de l’éco-business de Schneider Electric. Schneider Electric est un groupe français, spécialiste mondial de la gestion de l’énergie. Il compte 150 000 salariés dans le monde, dont 20 000 en France, où il réalise 7 % de son chiffre d’affaires sur un total de 24 milliards d’euros. La France est ainsi notre troisième marché, derrière les États-Unis et la Chine, et nous y localisons 12 % de notre production mondiale. Nous nous inscrivons dans une filière électrotechnique française d’excellence, au même titre que des acteurs comme Legrand, ou, dans le domaine de la distribution de matériel électrique, Rexel et Sonepar. Nous accompagnons également des entreprises, PME, installateurs, artisans, en les visitant, en les formant et en les aidant à se développer.

Nous développons des solutions qui permettent à nos clients de mieux gérer leur consommation tout en améliorant le confort. L’efficacité énergétique rime trop souvent avec l’idée de contrainte ; nous souhaitons au contraire insister sur les progrès en matière de confort que l’on peut apporter. Nos produits ne se remarquent pas forcément, ce ne sont pas nécessairement des équipements ou des investissements de grande taille. Nous installons dans les maisons, les usines ou les bâtiments de bureaux, des capteurs et des actionneurs, mis en relation avec des logiciels analysant les données recueillies. Ces systèmes permettent d’aider le consommateur à devenir un véritable acteur de sa consommation énergétique. Notre activité se trouve à la rencontre de l’électricité, de l’électronique et de l’informatique.

Le déploiement et la généralisation de Linky est une étape importante vers le développement de telles solutions au sein de réseaux intelligents. Il ne s’agit en aucun cas de créer un Big brother. L’intelligence que nous proposons aide le consommateur au quotidien, en lui proposant des fonctionnalités nouvelles, des services supplémentaires. Nous entrons ainsi dans le domaine de l’efficacité énergétique active, qui est le meilleur moyen de parvenir à des résultats rapides : le temps de retour sur investissement des équipements que nous proposons est inférieur à trois ans.

Ce qui se passe dans le monde de l’électricité est comparable à ce que nous avons connu dans le secteur de la téléphonie mobile et de l’Internet. Nous sommes à l’aube d’une nouvelle ère, gage de progrès et d’emplois nouveaux pour la France.

M. le président François Brottes. Je vais passer maintenant la parole à un représentant de l’UFC-Que choisir, qui a conduit sur le sujet un travail d’expertise, d’analyse et de vulgarisation du compteur Linky. Les médias se sont emparés à juste titre de cette question, qui à terme concernera en effet l’ensemble de nos foyers. UFC a eu une approche assez critique de ce compteur, avec des arguments qui ont du reste été eux-mêmes contestés. C’est l’intérêt de cette table-ronde d’entendre les différents points de vue et de les confronter !

M. Nicolas Mouchnino. Le contenu de notre message sur Linky a parfois été déformé par les médias et je tiens à rétablir la vérité. UFC-Que choisir n’est pas opposée au compteur Linky et ne mène pas contre lui une cabale, comme on a pu l’entendre. Nous pensons qu’au regard des enjeux de maîtrise de la demande énergétique et d’amélioration du conseil fourni aux consommateurs, ce compteur peut apporter un plus. Cela étant, au regard de son coût, environ 4,5 milliards d’euros au total, le consommateur est en droit d’en attendre de réelles avancées et de savoir si cet investissement obligatoire lui sera utile. Nous avons ainsi participé à la concertation et aux groupes de travail menés par la CRE, mais aussi aux différentes réunions organisées notamment sous l’égide du Conseil supérieur de l’énergie, dans une optique constructive.

Au début du mois de juillet dernier, le Premier ministre a confirmé le déploiement du compteur Linky. Cependant, si certaines interrogations ont été levées, pour ce qui concerne notamment le financement, d’autres points demeurent obscurs et risquent de poser problème. Je souhaite donc profiter de ma présence ici pour aborder certaines problématiques, sur lesquelles nous avons déjà attiré l’attention de nos interlocuteurs sans pour autant toujours obtenir de réponse éclairante.

Premier élément, le compteur doit permettre de mieux cerner le profil des consommateurs et, par conséquent, de remettre à plat un certain nombre de situations inadaptées qui entraînent des ruptures d’égalité entre les différents consommateurs. Nous souhaitons savoir quelles sont les mesures concrètes prévues ou envisagées pour réduire les inégalités actuelles. Je pense notamment au coût de changement de puissance, mais aussi aux mesures destinées à garantir à l’avenir l’équité de traitement, autrement dit l’adéquation entre les besoins du consommateur et les tarifs.

M. le président François Brottes. Sur le changement de puissance, vous dites que le compteur peut s’adapter sans que le client soit informé qu’il est en train de changer d’abonnement. Ai-je bien lu ce que vous avez écrit à ce sujet ?

M. Nicolas Mouchnino. Ce que nous disons, c’est qu’aujourd’hui, avec le compteur Linky, il est possible d’avoir une meilleure précision dans le réglage de la puissance dont a besoin le consommateur. Techniquement, tout cela est faisable mais doit être mis en place au niveau des tarifs et dans les contrats des fournisseurs.

M. le président François Brottes. Vous pointez notamment les paliers qui existent aujourd’hui dans les puissances d’abonnement.

M. Nicolas Mouchnino. Effectivement, les paliers sont aujourd’hui très grands et l’adéquation ne s’opère pas au plus près du besoin réel.

Le deuxième élément sur lequel je veux insister concerne l’information du consommateur en temps réel, qui a déjà été longuement débattue. Nous craignons que l’ensemble des consommateurs n’ait pas accès à cette information, comme le recommandent notamment les institutions européennes. Les seules options validées à ce jour, comme l’option Internet, ne nous semblent pas à même de garantir l’objectif d’une information certaine et minimale. Nous avons soulevé cette question dans le cadre du groupe de travail initié par Mme Delphine Batho au sein du Conseil supérieur de l’énergie, mais elle n’a pas été tranchée. L’annonce récente du Premier ministre ne nous en a pas appris davantage.

Troisième point enfin, un groupe de travail a été monté par ERDF avec les équipementiers « aval compteur », qui a permis de définir des interfaces afin de permettre la meilleure communication possible entre le compteur Linky et les équipements « aval compteur ». Nous restons cependant très inquiets sur la nature de cette interface qui ne nous semble pas apporter toutes les garanties de neutralité permettant le développement d’un marché parfaitement concurrentiel innovant et favorable aux consommateurs. Les aspects techniques abordés ne semblent pas permettre d’avancées car les interfaces n’intègrent que des volumes de consommation, via le compteur, et ne prennent pas en considération la dimension du prix.

M. le président François Brottes. Mme Bellon va désormais pouvoir nous dire où en est ERDF et nous éclairer sur les modalités du règlement financier de l’opération. Annoncer un coût de plusieurs milliards d’euros peut légitimement effrayer mais j’ai cru comprendre que le compteur allait également permettre d’optimiser la gestion du réseau. Enfin, des questions techniques ont été soulevées par les précédents intervenants, qui appellent peut-être des réponses.

Mme Michèle Bellon. Je vous remercie de me donner l’occasion de m’exprimer sur ces différents sujets qui, effectivement, intéressent tout le monde puisqu’en pratique nous allons entrer dans 35 millions de domiciles. Le besoin de pédagogie est indiscutable.

Au-delà du compteur, je veux d’abord revenir sur l’état d’avancement du « système Linky », qui intègre aussi des concentrateurs et un système d’information au sein d’une chaine « intelligente ». Le comptage doit permettre d’apporter un meilleur service aux consommateurs : facturation sur index réel et non sur des estimations comme c’est le cas aujourd’hui, meilleure connaissance par chacun de sa consommation, facilitation des dépannages et des interventions à domicile. Beaucoup d’interventions pourront en effet se faire à distance et nous pourrons, en cas par exemple d’incidents climatiques, détecter beaucoup plus rapidement les endroits où le réseau est coupé. Le consommateur aura enfin accès à la maîtrise de la demande. Sans compteur électronique, nous ne parviendrons pas à assurer une efficacité énergétique de grande ampleur. Aujourd’hui, les usagers ne savent pas ce qu’ils consomment et à quel prix, ils ne peuvent pas véritablement participer à l’effacement et agir à distance. Le compteur permet le pilotage différencié des différents usages de la maison : chauffage électrique, ballon d’eau chaude, charge du véhicule électrique, climatisation. A l’heure actuelle, quand nous avons des craintes relatives au passage de l’hiver en région Bretagne ou PACA, nous sollicitons les consommateurs pour qu’ils fassent un effort de sobriété dans leur consommation mais s’ils ne sont pas chez eux, ils ne peuvent rien faire. Dans les situations les plus extrêmes, nous envisageons même le délestage, c'est-à-dire que nous coupons tout ou rien. Demain, avec l’accord du client, et sous réserve d’une clause contractuelle en ce sens, le délestage pourra être sélectif, en coupant par exemple le chauffage dans seulement deux pièces sur trois.

M. le président François Brottes. Si vous arrêtez le congélateur, ça peut être embêtant...

Mme Michèle Bellon. Arrêter un congélateur pendant une demi-heure n’est pas bien grave, il faut relativiser. C’est beaucoup plus grave en revanche si la télévision est coupée en plein match de football au moment où le but est marqué…

M. le président François Brottes. Surtout quand il y a beaucoup de buts comme en ce moment ! (Sourires)

Mme Michèle Bellon. Exactement ! D’où la nécessité d’un effacement sélectif ! Je veux également rappeler que Linky fonctionne et que nous l’avons testé en grandeur réelle, avec près de 300 000 compteurs déployés en Indre-et-Loire en zone rurale et semi-rurale, ainsi que dans quatre arrondissements et dans la banlieue de Lyon.

Linky servira les intérêts du consommateur mais s’avère tout autant profitable au réseau. Si l’on veut continuer à développer des énergies renouvelables intermittentes, comme le photovoltaïque ou l’éolien, le réseau doit être renforcé mais aussi rendu plus intelligent, pour connaître en temps réel l’état de la production électrique. Les producteurs disposeront donc également de compteurs communicants. Nous saurons ainsi à tout moment ce qui est produit et ce qui est consommé et comme l’électricité se stocke difficilement, notre gestion sera grandement facilitée.

Le compteur est-il intrusif ? Nous ne le pensons pas dans la mesure où seule la consommation totale est comptée et où les usages et effacements d’usages s’opéreront selon des contrats signés par le consommateur lui-même. Au surplus, le consommateur pourra choisir le tarif le mieux adapté, selon par exemple qu’il est absent de chez lui le week-end. En revanche, on ne saura pas à quelle heure le client prend sa douche parce qu’en général le ballon d’eau chaude se recharge durant la nuit, et pas à chaque fois que 10 ou 20 litres d’eau sont consommés. Nous avons du reste l’obligation, en tant qu’entreprise assurant une mission de service public, de garantir la confidentialité des données dont nous disposons, et qui appartiennent aux clients. Nous continuerons d’être extrêmement vigilants sur ce point.

S’agissant du coût de 5 milliards d’euros, tout dépend de la vitesse de déploiement. Si vous déployez sur quinze ans au lieu de déployer sur cinq ans, cela coûtera forcément plus cher car davantage de monde devra être mobilisé au total et l’amortissement sera différent. Le plan d’affaire que nous avons transmis au régulateur prévoit, comme l’a annoncé le Premier ministre, un déploiement de trois millions de compteurs en 2015 et 2016, puis les 32 millions de compteurs restants dans la continuité et sans interruption jusque fin 2020. S’il devait y avoir une interruption, cela poserait notamment de vrais problèmes d’emploi, tant chez les fabricants de compteurs et de concentrateurs que dans les entreprises de pose. Nous visons donc une certaine continuité dans le déploiement dans un délai raisonnable et raisonnablement supportable pour nos équipes et pour les installateurs électriciens. Selon les configurations, le coût se situera donc de fait entre 4,5 et 5 milliards d’euros.

Quand j’entends M. Muchnino dire que de toute façon, le consommateur paiera, je ne peux pas aller dans son sens car le système doit se rembourser sur les économies générées, notamment en termes d’interventions. Davantage d’interventions à distance, c’est en effet beaucoup moins de kilomètres parcourus, environ 35 millions de kilomètres selon nos estimations. Par ailleurs, nous détecterons mieux les pertes sur le réseau, qui sont pour partie des pertes physiques que nous ne pouvons éviter, mais qui résultent aussi de fraudes et de consommations non comptabilisées. Chacun paiera ainsi le juste prix de ce qu’il consomme réellement. Voici pourquoi, d’après nos calculs, le coût sera neutre pour le consommateur, les économies générées permettant d’amortir sur 20 ans l’investissement initial. Cette durée est celle de notre plan d’affaire et correspond à la durée de vie du système mis en œuvre. Il y a bien un coût d’investissement, mais sans cet investissement nous ne ferons pas les économies qui vont avec.

Monsieur le président François Brottes. Je vais maintenant passer la parole pour deux minutes à chacun de mes collègues qui l’ont demandée et ensuite nous referons un tour de table.

Mme Frédérique Massat. Beaucoup de choses ont été dites. Vous avez notamment été très claire, Mme Bellon, sur la propriété des compteurs. Mais, pour le consommateur, on a toujours du mal à s’imaginer physiquement le compteur intelligent. Il est d’ailleurs dommage que vous n’en ayez pas apporté un aujourd’hui. Le consommateur va-t-il pouvoir, de chez lui, voir sa propre consommation ou est-ce que cela se fera par communication ? Et comment pourra-t-il, lui, faire varier sa propre consommation ? Vous avez aussi évoqué le financement, c’est une question importante.

Ensuite, par rapport aux nouveaux métiers qui vont naître à ERDF, du fait de l’installation des nouveaux compteurs intelligents, qui sera lissée dans le temps nous l’avons bien compris, comment le personnel va-t-il changer de métier ?

Enfin, concernant le réseau, vous avez indiqué que le compteur intelligent permettra d’éviter des coupures. Mais concrètement, comment cela va-t-il être géré ? Et en particulier, comment cela va-t-il se passer demain dans les zones régulièrement touchées par les coupures, comme la montagne ?

M. Jean-Claude Mathis. Je vais être très bref parce que j’avais basé mon intervention sur l’enquête assez virulente publiée par l’UFC-Que Choisir mais on a déjà eu beaucoup de réponses concernant le coût de cette installation. Dans cette enquête, j’ai aussi relevé que, pour éviter le relèvement du coût de l’énergie, UFC-Que Choisir préconisait deux mesures : une grille tarifaire beaucoup plus fine que celle qui existe actuellement et une gratuité de la prestation de changement de puissance pendant au moins deux ans, le temps de parvenir à la mise à plat des abonnements imposée par le nouvel équipement. Je crois que ces questions n’ont pas été abordées.

M. André Chassaigne. L’intérêt pour moi est double. Il y a tout d’abord la question sociale, parce que l’on compte aujourd’hui quatre millions de foyers en précarité énergétique, 42 % de foyers qui ont restreint leur consommation de chauffage l’hiver dernier pour ne pas avoir de factures trop élevées et 500 000 consommateurs qui ont fait l’objet d’une réduction ou d’une suspension de leur fourniture d’énergie en 2011. Je crois que cela est à prendre en compte quand on parle du compteur intelligent. La deuxième chose, c’est bien évidemment l’impératif d’économie d’énergie. Il faut, pour cela, améliorer l’équipement.

Mais j’ai deux questions : pourquoi ce retard ? Ou à qui a profité ce retard ? On voit que certaines entreprises ont avancé beaucoup plus rapidement, sur l’effacement par exemple. Je crois qu’il y a de quoi s’interroger sur les intérêts ou une absence d’intérêt ou tout simplement sur des dysfonctionnements qui tiennent à notre système institutionnel.

Ensuite, l’expérimentation qui a eu lieu a-t-elle une fonction d’étude d’impact ? Si oui, en fonction des expérimentations qui ont été faites, quelles sont les conséquences sur le volume de consommation ? Je crois que c’est important de savoir pour le consommateur, notamment d’un point de vue financier.

Est-ce qu’il y aura également une évolution au niveau technique ? Dans un premier temps, le compteur Linky ne comportait pas la dimension effacement. Il semblerait qu’elle puisse être introduite dans l’avenir. Est-ce que vous considérez que cela devra être volontaire ou systématique ? La liberté du consommateur peut ici être posée et c’est un des choix qu’il faut faire.

Enfin, une dernière question : vous avez fait allusion tout à l’heure à l’installation des compteurs. Est-ce que cela veut dire qu’elle sera systématiquement sous-traitée ou peut-on considérer qu’un service public est à même d’effectuer ces installations, comme vos services le font actuellement ?

Mme Laurence Abeille. Sur le fonds, les écologistes soutiennent le déploiement des smart grids et des compteurs communicants ou intelligents dès lors qu’ils sont indispensables pour réussir la transition énergétique. L’objectif, comme l’a rappelé le président de la République lors de la dernière conférence environnementale, est d’atteindre le facteur quatre en 2050 et donc d’entrer dans une ère de décroissance de la consommation énergétique. Si les compteurs intelligents peuvent être un moyen d’y parvenir, ils sont alors sans doute indispensables. Mais il me semble assez paradoxal de confier au fournisseur d’énergie la mise en place de solutions d’économie d’énergie alors que leur objectif premier est de gagner de l’argent en vendant de l’énergie. C’est comme si on demandait à un vendeur d’eau minérale d’inciter à boire de l’eau du robinet.

Pour que les compteurs intelligents soient un moyen de parvenir au facteur quatre, ils doivent être intelligents pour les deux parties : le consommateur et le fournisseur. Or, ce qui nous est proposé ressemble davantage à un compteur communiquant, qui communique des données de consommation au fournisseur d’énergie, plutôt qu’un compteur intelligent qui permet au consommateur de réellement réduire sa facture. Pourquoi Linky est-il donc un compteur « intelligent » ? Pour que la réduction de consommation soit réelle, il faut que le consommateur s’approprie cette intelligence via notamment un suivi de consommation en direct, soit grâce à un curseur facilement lisible à l’intérieur du logement, soit sur internet. Est-ce que c’est prévu ?

Enfin, un dernier point sur lequel je souhaitais intervenir : celui d’émission d’ondes électromagnétiques. Nous savons que ces compteurs, ainsi que les répartiteurs, émettent des ondes. De nombreuses associations s’inquiètent de cette nouvelle source d’émission. Or le flou quant aux modalités de fonctionnement est total. Nous ne savons pas à quelle puissance ces compteurs émettent. Nous ne connaissons pas les modalités de fonctionnement des répartiteurs qui seront principalement installés sur les toits des immeubles et tout cela créé de l’inquiétude. J’aimerais donc des réponses précises sur les caractéristiques techniques de ces compteurs en matière d’émission d’ondes et que ces réponses fassent l’objet de communications publiques.

Monsieur le président François Brottes. Je rappelle qu’ERDF n’est pas un fournisseur d’énergie mais un distributeur au service de tous les fournisseurs.

Mme Marie-Noëlle Battistel. Merci Monsieur le président. J’avais deux questions concernant ce compteur intelligent, aussi utile qu’intelligent dans une période où toute économie d’énergie est à promouvoir.

Ma première question concerne l’accès aux données personnelles. Pouvez-vous préciser les mesures qui vont être prises pour préserver la confidentialité ? Vous y avez déjà en partie répondu, sur l’accord du client notamment, mais pas sur le cryptage des données. Ma deuxième question porte sur le coût de cette installation et son amortissement dans le temps. Nous n’avons pas le coût réel de l’installation et la durée d’amortissement. Plus elle est longue et moins elle pèsera, bien évidemment, mensuellement sur la facture du consommateur. Comment envisagez-vous ce lissage dans le temps ?

M. Eric Straumann. On lit beaucoup de choses à ce sujet sur Internet, on reçoit régulièrement des mails et on sait qu’on dissuade même les consommateurs d’accepter l’installation de ces compteurs intelligents. Pour ma part évidemment, je comprends l’intérêt de Linky, qui permet d’optimiser et de lisser la consommation. En contribuant à réduire la pointe électrique, il diminuera certainement les émissions de gaz à effet de serre. Le consommateur peut suivre sa facturation en temps réel. Néanmoins, on peut avoir un certain nombre d’interrogations. Ma première question est : pourquoi amortit-on ce matériel sur trois ans ?

Monsieur le président François Brottes. C’est vingt ans maintenant. Ils ont changé d’avis.

M. Eric Straumann. D’accord, j’avais compris trois ans. Ma deuxième préoccupation porte sur le fait que le consommateur citoyen, qui est attentif à sa consommation, doive bien y gagner financièrement. Cette technologie doit permettre d’encourager le stockage d’énergie chez le consommateur, notamment les ballons d’eau chaude mais aussi dans les dalles en béton par exemple.

Par ailleurs, peut-on connaître le détail de la consommation par appareil ? Est-ce techniquement possible ? Pour les télévisions en veilleuse par exemple ? Il faudra également envisager le lissage de la facture parce que si on a une facturation en temps réel, la facture en hiver sera évidemment très élevée, et moins en été, si on a le chauffage électrique. J’ai relevé le coût : 5 milliards d’euros. Cela fait à peu près 142 euros par compteur installé. A-t-on chiffré les économies en comparaison, du fait de la fin des relevés physiques ou du dépannage à distance ? Le solde sera probablement positif.

M. Hervé Pellois. En Bretagne, on a peu d’énergie, mais on a beaucoup d’idées (Rires), et notamment une entreprise qui s’appelle Voltalis qui intervient dans le cadre du pacte électrique breton, en posant déjà des boitiers chez les particuliers pour essayer de réduire les consommations électriques. Ce type de compteur est-il assimilable à un compteur Linky ? C’est une question de quelqu’un qui ne connaît pas très bien cette matière là. Et puisque vous avez parlé des économies sur les fraudes, à combien estimez-vous les fraudes aujourd’hui par an en France ?

M. Daniel Fasquelle. Je voudrais réagir à la protection des données parce que je ne suis pas complètement rassuré par ce qui a été dit. L’Europe a d’ailleurs émis des réserves, la CNIL également, et je ne vois pas très bien aujourd’hui ce qui permet de lever ces réserves. On nous dit : vous pourrez vous exclure de certains services proposés par le compteur, afin de ne pas prendre le risque que vos données personnelles soient connues. Mais c’est quand même un formidable aveu ! C’est bien la preuve qu’il y a un danger. S’il n’y avait pas de danger pour les données personnelles, on ne donnerait pas la possibilité à l’usager de ne pas avoir accès à telle ou telle possibilité offerte par le compteur. Je crois que c’est donc un vrai sujet et vous l’avez écarté d’une façon un peu rapide.

Ensuite, je comprends surtout l’utilité du système pour le gestionnaire du réseau. Mais alors à ce moment là, s’il s’agissait d’avoir une gestion plus souple du réseau en raison du développement des énergies renouvelables, il y avait d’autres solutions beaucoup moins coûteuses, comme de n’intervenir que sur les postes de transformations au lieu d’intervenir dans chacun des foyers français.

Des pays ont, par ailleurs, renoncé à l’installation de ce type de compteurs. L’Allemagne y a notamment renoncé à la suite d’une étude qu’elle avait commandée à un cabinet. Comment se fait-il donc que l’Allemagne y ait renoncé ? Pourquoi les raisons qui ont conduit l’Allemagne à renoncer n’ont-elles pas également conduit la France à renoncer ?

Enfin, j’ai une dernière remarque de néophyte. Pourquoi imposer à tous les consommateurs le même compteur ? Pourquoi ne pas permettre au consommateur de choisir, dans une gamme, entre différents compteurs ? Plusieurs compteurs intelligents pourraient être mis sur le marché. C’est une remarque qui n’est pas intelligente c’est ça, Mme Batho ?

Mme Delphine Batho. Je disais qu’il y a quelque chose qui s’appelle le service public.

M. Daniel Fasquelle. Il y avait un service public pour les terminaux de téléphone mais aujourd’hui tout le monde a le choix du modèle de son téléphone portable. Vous qu’il n’y ait pas qu’un téléphone portable et pas qu’un téléphone chez soi ?

Monsieur le président François Brottes. Il n’y a jamais eu de service public du téléphone mobile.

M. Daniel Fasquelle. Effectivement il y a eu une grande époque où on n’avait pas le choix, il y avait un type de téléphone chez soi.

Monsieur le président François Brottes. Ou un minitel.

M. Daniel Fasquelle. Alors vous pouvez regretter cette époque, c’est votre droit, moi je ne la regrette pas parce qu’aujourd’hui j’ai la possibilité d’acheter un terminal qui me convient, plus ou moins sophistiqué et plus ou moins cher. Pourquoi ne ferait-on pas la même chose pour le compteur puisqu’il y aura plusieurs compteurs qui seront mis sur le marché ? Pourquoi ne pas laisser au consommateur la possibilité de choisir le compteur qui lui convient ?

Monsieur le président François Brottes. Je rappelle que ce n’est pas le consommateur qui investit sur ce point.

Mme Marie-Hélène Fabre. Madame la présidente, vous avez indiqué que d’ici 2020, il y aurait trente-cinq millions de compteurs Linky installés sur tout le territoire. Ma question est simple : il y a trois millions de compteurs qui vont être prochainement installés, est-ce qu’on peut savoir, dès à présent, sur quelle zone ? Sous quel calendrier ? Et par ailleurs, qui assumera le coût financier au final de ce déploiement ?

M. Lionel Tardy. Je serai volontairement provocateur. Et si la transition énergétique, c’était aussi et surtout l’adaptation des systèmes électriques aux nouvelles technologies ? Cela a été dit tout à l’heure. Or ma question est simple : on aura bientôt plus de six milliards d’objets intelligents dans le monde, qui seront connectés, et avec lesquels on pourra interagir. Quelle est la place pour ces objets intelligents dans le débat sur la transition énergétique ? Comment faire en sorte qu’ils aient une place centrale ? Je trouve qu’il y a très peu de choses sur ce sujet dans la synthèse du débat national sur la transition énergétique. J’aimerais donc avoir votre avis à ce sujet.

Monsieur le président François Brottes. C’est une question pour Schneider Electric notamment.

Mme Annick Le Loch – J’ai les mêmes curiosités qu’André Chassaigne, notamment concernant l’expérimentation, qui est menée à grande échelle, puisque 250 000 compteurs ont été déployés de 2009 à 2011. Elle a certainement été concluante puisqu’on a décidé de généraliser ce compteur. J’aimerais avoir des précisions sur la consommation, puisque l’un des objectifs affichés est celui des économies d’énergie et de la maîtrise de ces consommations. Y a-t-il eu effectivement une baisse de la demande et les consommateurs ont-ils réellement vu une baisse de leur consommation ?

Deuxième question qui concerne le coût pour le consommateur : pouvez-vous nous confirmer que la modification de la puissance contractuelle à la suite de la pose du compteur sera bien réalisée gratuitement par ERDF ? Je vous remercie.

Mme Fanny Dombre Coste. Pour ma part, comme tout le monde, je suis séduite par ce projet de déploiement du compteur Linky. Séduite d’abord parce que c’est un projet industriel pertinent avec des milliers d’emplois à la clef. Séduite aussi par la perspective d’une meilleure maîtrise de la consommation et de la production énergétiques.

J’aurais deux questions. La première, qui est à mon sens la plus importante : quelle sera la place des PME françaises dans l’appel d’offres que vous avez lancé ? Moi qui suis une adepte du made in France, je voudrais avoir une réponse à cette question. La deuxième question rejoint ce qui a été dit par l’UFC-Que choisir sur la nécessaire pédagogie vis-à-vis de l’usager. Nous savons que nous sommes inégaux devant l’outil numérique : la fracture numérique rejoint souvent la fracture sociale, notamment la précarité énergétique. Ce ne sont donc pas forcément ceux qui en ont le plus besoin qui pourront utiliser au mieux ce nouvel outil.

Mme Delphine Batho. Effectivement, Linky est un projet stratégique pour la politique énergétique française. Au plan industriel, je pense que c’est l’occasion de rappeler, comme l’a remarqué Daniel Tardy, l’importance de l’efficacité énergétique active, dont on ne parle pas assez souvent et qu’il ne faut pas opposer à l’efficacité énergétique passive, c’est-à-dire tous les travaux de rénovation thermique des logements. Elle est porteuse d’un potentiel d’innovation, de développement et de déploiement de technologies d’ores et déjà disponibles, qui est stratégique à la fois pour réduire la consommation d’énergie et pour l’industrie. Linky est un dossier qui a une longue histoire, qu’il a fallu reprendre, et je me réjouis du lancement des appels d’offre tant attendus. J’insisterai sur ce qui a été dit sur la question des volumes et sur les PME françaises qui ont les capacités de fabriquer ce compteur : il va falloir ne pas faiblir sur la vitesse de déploiement après ces trois premiers millions de compteurs !

Pour réussir le déploiement de Linky, il est très important de répondre à toutes les questions et à toutes les objections qui sont soulevées. De ce point de vue, l’initiative du Président de la commission des Affaires économiques est très utile pour répondre à un certain nombre d’objections ou de questions qui peuvent être soulevées sur ce dossier.

Je voulais revenir sur deux d’entre elles : tout d’abord, la plus importante, parce que Linky est vraiment un outil au service des consommateurs, c’est la question de l’accès aux données de consommation pour les consommateurs. Un travail important a été fait sur cette question. Il faut, une fois pour toutes, avoir une réponse technique précise sur la façon dont les consommateurs vont pouvoir accéder à leurs données de consommation de façon pratique.

Deuxième question, qui renverra peut-être aux discussions que nous avions sur la tarification progressive, je pense qu’il est indispensable, en parallèle, d’engager une réforme en structure des tarifs, et donc de créer un tarif de pointe en parallèle au déploiement du compteur intelligent. C’est techniquement possible, c’est une évolution qui prend du temps, mais qui devrait à mon sens être expertisée maintenant parce qu’elle me paraît indispensable en parallèle du déploiement de ce type de technologies et des compteurs intelligents.

M. François Brottes. Peut-être peut-on commencer par Didier Hervé, qui est le plus éloigné de la problématique stricte de Linky mais qui incarne à lui tout seul l’efficacité énergétique active dans cette table ronde et qui peut évoquer cet environnement global qui est en train d’évoluer considérablement. Quel est le monde que vous pouvez nous promettre dans les dix ans qui viennent sur ces questions-là, en quelques phrases ?

M. Didier Hervé. Très rapidement, comme je vous l’ai dit tout à l’heure, ce que l’on imagine au niveau de l’énergie et de l’efficacité énergétique, active notamment, c’est le même type de révolution que celle qu’on a connue avec le téléphone, selon l’exemple que vous avez pris tout à l’heure. Je me souviens en 1990 : si on m’avait dit que je paierais tous les mois un abonnement pour mes enfants et mon épouse qui me coûte un certain montant, je l’aurais refusé. Aujourd’hui, un certain nombre de gens, toutes couches sociales confondues d’ailleurs, paient ce type d’abonnements, même si c’est une charge fixe très importante.

L’efficacité énergétique active est un concept étrange, dans la mesure où elle présente un réel retour sur investissement mais met en jeu une énergie impalpable, à la différence de l’essence à la pompe par exemple, pour laquelle on voit très bien ce qu’elle signifie concrètement.

Notre première priorité est de rendre visible cette énergie que l’on consomme. Linky présente d’ailleurs un avantage sur ce point, en complément de tous les dispositifs que l’on développe en termes d’efficacité énergétique active.

Le consommateur sera ainsi mobilisé car il y a un effet mécanique d’entraînement : dès qu’on rend visible la consommation, celle-ci baisse mécaniquement. On l’a vu pour la voiture : les baisses de consommation sont liées à la fois au développement de moteurs moins consommateurs en énergie et à l’affichage, en permanence, de la consommation instantanée : quand vous voyez la consommation monter à 18 litres au 100, vous levez le pied.

Pour nous, Schneider Electric, il y a tout un pan d’éducation sur cette question : il faut conduire une démarche vis-à-vis de la filière – on l’a mise en place chez Schneider – notamment vis-à-vis des installateurs et des électriciens, pour les former et les informer sur le sujet. Mais il y a aussi un devoir collectif d’informer les consommateurs sur les avantages de l’efficacité énergétique et sa signification concrète.

Quelle mutation voyons-nous donc pour demain ? Nous attendons la même mutation que celle que vous avez connue pour votre voiture : en 1990, vous entriez dans votre voiture avec une clé, le chauffage était manœuvré à la main et vous aviez, bon an mal an, une jauge à essence qui marchait plus ou moins bien. Aujourd’hui, la voiture démarre toute seule. Et tout un environnement vous indique votre consommation et améliore votre confort, avec un système automatique pour les essuie-glaces par exemple. Et quand vous rentrez chez vous le soir, dans votre appartement ou votre maison que vous avez payé cinq ou dix fois plus cher que votre voiture, vous avez toujours un interrupteur, et globalement un dispositif qui reste extrêmement manuel et extrêmement basique.

On va en arriver à des dispositifs qui vont permettre, dans la maison, à la fois de maîtriser l’énergie et d’améliorer le confort, par exemple avec des systèmes de régulation de l’éclairage. Nous pensons chez Schneider qu’on va aller très loin dans la mesure et la maîtrise de l’énergie : votre cafetière, votre réfrigérateur, la moindre prise vont être équipés de façon telle que non seulement vous allez pouvoir mesurer mais aussi visualiser la consommation d’une manière qui permette de la corriger. Certains dispositifs seront automatisés, on a parlé du délestage tout à l’heure, d’autres le seront plus ou moins, et l’on aura aussi des systèmes qui seront laissés à l’usage du consommateur, comme pour la voiture : vous avez beau avoir une voiture qui consomme 3 litres au 100, si vous l’utilisez mal elle peut consommer 7 litres au 100. C’est la même chose pour votre appartement ou votre voiture : vous pouvez avoir un appartement très bien isolé, avoir tous les équipements électroniques d’efficacité énergétique que vous souhaitez, si vous avez un mauvais comportement, vous consommerez beaucoup.

M. François Brottes. Vous nous donnez quelques idées assez précises sur ce qui nous attend. De plus, ces technologies sont en phase de recherche, de développement et de production dans notre pays. Il faut le rappeler puisque l’énergie et les télécommunications ont toujours été le fer de lance de nos industries.

M. Didier Hervé. Ces solutions existent aujourd’hui. Elles sont opérationnelles.

M. François Brottes. Monsieur Ollier, vous n’avez pas manqué d’être interpellé en tant que régulateur en chef.

M. Jean-Yves Ollier. La tarification au pas d’un kilovoltampère est déjà prévue dans les textes. La question qui se pose est celle de la possibilité technique, donc celle des appareils de comptage et des systèmes d’information. S’agissant du coût des prestations annexes et notamment de celui du changement de puissance, leur tarification est aujourd’hui fixée par une décision de 2009, que nous devons réexaminer l’année prochaine ; une consultation sera organisée en ce sens avant la fin de l’année par la CRE.

S’agissant de la protection des données personnelles, ce point a déjà été évoqué par Mme Bellon à propos de la protection des informations commercialement sensibles. Je souhaite ajouter que l’arrêté de janvier 2012 pris sur notre proposition prévoit que les dispositifs doivent être conformes à un référentiel de sécurité certifié par l’ANSSI (Agence nationale de sécurité des systèmes d’information), ce qui constituera une sécurité importante. Nous avons également mené un travail continu avec la CNIL en amont de ses recommandations de décembre 2012. D’autre part, les questions qui se posent en matière de comptage évolué sont communes aux régulateurs européens de l’énergie et des données personnelles. Elles sont traitées dans une enceinte à laquelle nous participons, qu’on appelle la Smart Grid Task Force, le groupe de travail sur les réseaux intelligents. Ce groupe travaille en collaboration avec le groupe de l’article 29, qui est, pour parler schématiquement, l’association européenne des CNIL, qui examine toutes les questions liées à la protection des données personnelles en matière de comptage.

Par ailleurs, vous posiez la question de savoir si l’expérimentation a porté sur les impacts en termes de maîtrise pour les demandes d’énergie. Ce n’est pas le cas au stade qui a été retenu par l’étude technique et économique. Néanmoins, aujourd’hui, grâce à Linky, des expérimentations se poursuivent, comme Watt&Moi à Lyon, qui vont permettre de mesurer ces effets. Je pense que Mme Bellon pourra nous en parler.

M. François Brottes. Est-ce que vous autoriseriez pour le compteur électrique ce que l’Arcep autorise pour le téléphone, à savoir que chacun choisisse le combiné qu’il veut ? C’est la question de M. Fasquelle.

M. Jean-Yves Ollier. Dans le cadre d’un service public, il s’agit de fournir une prestation uniforme, financée par le tarif. Cela explique le choix d’un compteur unique, pour des raisons de coût et d’égalité devant le service public. Celui-ci est susceptible d’une certaine flexibilité mais qui ne peut être que limitée à partir du moment où un objet est financé par le tarif plutôt que par des prestations annexes. Il y a des prestations, dans le cadre du service public du compteur, que vous pouvez choisir, et il y a des objets qui sont financés par le tarif et qui présentent des caractéristiques plus universelles ; c’est l’orientation qui existe aujourd’hui s’agissant de Linky.

M. François Brottes. Vous ne tomberez pas dans le piège d’un nouveau recours devant le Conseil constitutionnel pour rupture de l’égalité concernant les compteurs. Je vous remercie de cette réponse car M. Fasquelle est un spécialiste de ce genre de recours !

M. Nicolas Mouchnino – Sur la question du coût du compteur Linky et du paiement par le consommateur, je voudrais préciser qu’il y a une couverture des coûts par le TURPE. Si le compteur avait été gratuit, l’ensemble des économies réalisées aurait été redistribué au consommateur. Ce n’est pas le cas aujourd’hui puisqu’elles sont conservées pour financer le compteur. Donc, indirectement, le consommateur finance le compteur, même si l’effet est neutre sur la facture.

Sur l’information du consommateur, le test Watt&Moi est très intéressant car il donne des éléments de compréhension sur l’information du consommateur et sur la façon dont elle doit être amenée. Pour autant, lors de l’expérimentation, aucun élément parallèle n’a été expérimenté, par exemple un afficheur, alors qu’il y a dans le lieu de vie plusieurs afficheurs, notamment des téléviseurs et des consoles. Seul Watt&Moi via Internet a été testé mais aucune autre solution n’a été testée et évaluée en termes de coût. 50 % des compteurs aujourd’hui sont en dehors du lieu de vie, et un tiers des ménages n’a pas accès aujourd’hui à Internet pour des questions de coût ou de compétences. Cela signifie qu’aujourd’hui, potentiellement, l’information de l’ensemble des consommateurs n’est pas garantie. Il y a là un risque de rupture de l’égalité entre consommateurs.

Un autre élément est celui de l’emploi qui serait développé via le déploiement du compteur. C’est un marché qui représente plusieurs milliards d’euros et des milliers d’emplois. Ainsi, demain, il y aura des diversifications tarifaires, par exemple pour la pointe mobile.

Toute la domotique, toutes les technologies qui vont être installées, tous les services qui vont permettre d’informer le consommateur vont avoir besoin de plusieurs types d’informations : sur les volumes certes, mais aussi sur les coûts, y compris sur des afficheurs déportés. Aujourd’hui le consommateur ne peut pas avoir un affichage des coûts de manière déportée avec le compteur Linky. Pour cela le consommateur intéressé devra prendre une technologie proposée par les fournisseurs, qui risque d’être payante. Mais c’est aussi toute la domotique liée qui aura un coût.

On crée un marché qui sera détenu par les fournisseurs et le consommateur sera obligé d’en passer par eux pour avoir la domotique. Le problème est qu’on peut garantir aujourd’hui l’interopérabilité du compteur Linky mais non celle des solutions proposées par les fournisseurs. Cela signifie que demain, potentiellement, vous prendrez un service de box tel que proposé par les fournisseurs, vous achèterez des équipements de domotique qui seront compatibles avec cette box et si vous voulez changer de fournisseur, vous devrez changer tous les équipements. Potentiellement, on rend captif le consommateur.

M. François Brottes. C’est ce qui se passe pour Internet, notamment.

M. Nicolas Mouchnino. C’est ce qui se passe pour Internet, et c’est ce qui se passe pour les téléphones portables. Quand vous avez des systèmes d’exploitation avec des clouds, le transfert de données est bloqué. Nous ne voulons pas que cela se reproduise pour l’énergie : il y a là un enjeu pour l’emploi car à fermer les interfaces, on risque de réduire l’innovation et le développement du marché aval compteur et, surtout, la compétitivité des entreprises à l’étranger parce que nos technologies ne seront pas forcément adaptées. En Angleterre, il y a des afficheurs déportés qui sont déployés avec les compteurs, et les interfaces ont été laissées ouvertes pour préserver le plus de concurrence possible.

M. François Brottes. Je crois que l’ensemble des problèmes est bien posé. Madame Bellon, vous avez la mission de conclure.

Mme Michèle Bellon, présidente du directoire d’ERDF. Je vais commencer par une comparaison avec nos voisins pour expliquer pourquoi l’Allemagne a abandonné son projet de compteur intelligent et pourquoi il n’est pas possible de choisir son compteur soi-même. Mme Massat et M. Ollier ont déjà bien répondu à la question : les compteurs font partie du périmètre de la distribution, ils appartiennent aux collectivités locales qui les financent, comme les réseaux, et donc le consommateur ne les choisit pas.

La plupart des pays voisins sont très avancés aujourd’hui. La Suède, les Pays-Bas, l’Espagne ou l’Italie sont passés rapidement au compteur communicant. En Allemagne et en Angleterre, le distributeur ne fait pas d’économies d’intervention ou de gestion du réseau sur les compteurs puisque ceux-ci n’entrent pas dans son périmètre mais dans celui du fournisseur d’énergie. Et comme il n’y avait pas de rentabilité réelle, celui-ci a fini par abandonner le projet. Ce n’est pas du tout le même modèle économique.

Concernant l’expérimentation des compteurs Linky, il s’agissait de mettre au point une nouvelle technologie, de tester l’installation de compteurs dans les domiciles, de voir comment on pouvait mobiliser les acteurs de la filière électrique sur le terrain, de les former, et de vérifier les coûts.

Nous savons désormais que l’investissement se répartit à part égale entre le coût du matériel et celui de la pose. Nous devons désormais organiser la montée en puissance, partout en France, des installateurs électriciens, qui sont principalement des PME-PMI. La pose de 35 millions de compteurs suppose la création de 5 000 emplois supplémentaires en rythme plein pendant cinq à six ans. Cette augmentation n’est pas envisageable pour le distributeur. 10 à 15 % des installations seront faites en interne chez ERDF qui préfère, pour le reste, s’appuyer sur le tissu industriel local et permettre la montée en compétences des entreprises. Pour des sociétés de 10 salariés, le rythme de pose sera d’environ 20 000 compteurs par semestre.

ERDF est prêt à discuter de la stratégie de déploiement, notamment des premiers trois millions, qui n’est pas encore arrêtée. Elle relève du dialogue avec les autorités concédantes et les élus. Certains critères de décision sont envisagés, comme le fait de suivre une logique de déploiement en tâche de léopard, c'est-à-dire d’installer systématiquement les compteurs zone par zone, afin d’optimiser les coûts de déploiement.

En termes de métier, il y aura toujours des métiers de gestionnaires de réseaux, de maintenance, de remplacement des câbles, notamment pour vérifier la qualité de l’électricité. Les investissements de maintenance pour raccorder de nouveaux consommateurs et de nouveaux producteurs ne seront pas abandonnés. Et ce nouveau compteur, par exemple, permettra de mieux diagnostiquer les microcoupures sur le réseau. Il y aura cependant une évolution des métiers vers l’informatique et les télécommunications car le besoin d’analyse des données des compteurs va s’amplifier. Par exemple en Suède, la généralisation du compteur communicant n’a pas fait diminuer les effectifs mais les a transformés. ERDF prévoit d’ajuster les emplois à hauteur d’environ 400 personnes sur 36 000 salariés.

Sur la question de la maîtrise de la demande, il faut informer le consommateur, mais aussi veiller à ce qu’il comprenne correctement sa consommation. La délibération du régulateur de l’énergie de juillet 2011 recommandait de généraliser l’accès, pour tous les consommateurs, à leur consommation d’énergie sur internet. Le dispositif Watt & moi, créé en mai 2012 à Lyon, permet déjà d’expérimenter l’accès en ligne aux données de consommation électrique pour 1 000 habitants de logements sociaux, dont le mode de chauffage est varié. Cependant, il est fondamental pour le client de bien comprendre sa consommation. Pour cela, un accompagnement est mis en place avec GrandLyon Habitat, les gardiens d’immeubles, et des sociologues pour étudier comment faire évoluer les comportements. Ainsi, Watt & moi a permis aux consommateurs identifiés comme « hors norme » d’être sensibilisés et les résultats montrent que ceux-ci ont diminué leur consommation.

Pour ce qui est de la différenciation tarifaire, le consommateur a déjà le choix aujourd’hui entre le tarif de base ou celui distinguant les heures creuses des heures pleines, grâce aux grilles tarifaires. Demain, si les signaux tarifaires varient, des systèmes de tarifs différenciés existeront également, en fonction de la consommation du consommateur.

Concernant la possibilité d’obtenir les informations en temps réel, ce n’est pas indispensable par rapport à une facture annuelle. Il est préférable d’axer les efforts sur la pédagogie envers les choix tarifaires et la compréhension des données.

En matière de domotique, Schneider Electric et les autres acteurs du marché fabriquent déjà des produits Linky-compatibles de moins en moins chers. Les usages vont se développer puisque nous recherchons toujours plus de commodité.

La question des ondes électromagnétiques est une question récurrente et des mesures ont été réalisées par des associations de consommateurs et trois syndicats – le syndicat d’Indre et Loire, le Sigerly à Lyon et le Sipperec en région parisienne. Les résultats démontrent que Linky n’émet pas plus d’ondes électromagnétiques que les compteurs électroniques actuels. Certaines mesures sont même entre 150 et 2 000 fois inférieures aux normes européennes en matière d’émission, voire se sont révélées à la limite du mesurable.

Concernant le cryptage des données, le consommateur aura accès à ses informations de consommation d’électricité par usage (réfrigérateur, téléviseur…), mais celles-ci ne remonteront pas par le réseau auprès du gestionnaire car c’est interdit. L’ANSSI est très vigilante et un important travail a été mené avec la CNIL et les services du Premier ministre au sujet de la protection de ces informations.

Au sujet d’une éventuelle rupture d’égalité entre consommateurs, ERDF s’efforcera de donner un accès aux informations de consommation par internet ou, lorsque ce n’est pas possible, notamment pour les logements sociaux, par téléphone portable.

L’effacement volontaire ne sera pas possible sans contractualisation.

Enfin, les coûts de la pose seront amortis sur 20 ans donc l’installation sera neutre pour le consommateur. On ne peut pas mesurer la fraude, mais les pertes sont quantifiables car ce sont des kilowattheures qu’ERDF doit acheter sur le marché, pour un montant d’environ 1,5 milliard d’euros par an. Elles correspondent pour moitié à l’effet joule mais 10 térawattheures par an sont des pertes commerciales, qu’il est prévu de réduire d’un tiers, en suivant l’exemple de l’Italie qui est même allée au-delà.

M. François Brottes. Merci à tous pour ces clarifications. Nous serons probablement amenés à nous revoir pour évoquer les futures évolutions du dispositif.

——fpfp——

Membres présents ou excusés

Commission des affaires économiques

Réunion du mercredi 16 octobre 2013 à 16 h 15

Présents. – M. Frédéric Barbier, Mme Delphine Batho, Mme Marie-Noëlle Battistel, M. François Brottes, M. André Chassaigne, Mme Fanny Dombre Coste, Mme Corinne Erhel, Mme Marie-Hélène Fabre, M. Daniel Fasquelle, M. Christian Franqueville, M. Franck Gilard, Mme Pascale Got, M. Jean Grellier, Mme Annick Le Loch, Mme Frédérique Massat, M. Jean-Claude Mathis, M. Germinal Peiro, M. Hervé Pellois, Mme Béatrice Santais, M. Éric Straumann, M. Lionel Tardy, M. Fabrice Verdier

Excusés. – M. Thierry Benoit, M. Dino Cinieri, Mme Jeanine Dubié, M. Joël Giraud

Assistaient également à la réunion. – Mme Laurence Abeille, Mme Florence Delaunay