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Commission des affaires économiques

Mardi 24 juin 2014

Séance de 21 heures 30

Compte rendu n° 98

Présidence de M. François Brottes Président

– Suite de l’examen, en deuxième lecture, du projet de loi, modifié par le Sénat, d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, (n° 1892 rectifié) (M. Germinal Peiro, rapporteur)

La commission a poursuivi l’examen, en deuxième lecture, du projet de loi, modifié par le Sénat, d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt (n° 1892 rectifié) sur le rapport de M. Germinal Peiro.

TITRE Ier

PERFORMANCE ÉCONOMIQUE
ET ENVIRONNEMENTALE DES FILIÈRES AGRICOLES
ET AGROALIMENTAIRES

Article 2 (articles L. 611-1, L. 621-2, L. 621-5, L. 621-8 du code rural et de la pêche maritime) : Adaptation de la composition et des missions du conseil supérieur d’orientation et de coordination de l’économie agricole et alimentaire (CSO) et de FranceAgriMer

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CE640 du rapporteur.

La Commission examine les amendements identiques CE93 de M. Antoine Herth et CE729 de M. Thierry Benoit.

M. Antoine Herth. Cet amendement vise à assurer la représentation des interprofessions du secteur agricole et agroalimentaire au sein du Conseil supérieur d’orientation et de coordination de l’économie agricole et alimentaire (CSO). 

M. Thierry Benoit. Même argumentation.

M. Stéphane Le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement. J’émets un avis défavorable à l’adoption de ces amendements, car le CSO, comprenant entre 70 et 80 membres, a trouvé un équilibre ; l’ouvrir davantage le transformerait en assemblée et mettrait en danger le fonctionnement actuel. 

M. Germinal Peiro, rapporteur. Même avis.

La Commission rejette les amendements.

Puis elle en vient à l’amendement CE730 de M. Thierry Benoit.

M. Thierry Benoit. Amendement défendu.

M. le ministre. Avis défavorable.

M. le rapporteur. Même avis.

La Commission rejette l’amendement.

La Commission adopte successivement les amendements rédactionnels CE641, CE642, CE643 et CE644 du rapporteur, l’amendement de simplification CE637 du rapporteur, l’amendement rédactionnel CE645 du rapporteur, l’amendement de simplification CE639 du rapporteur et l’amendement rédactionnel CE633 du rapporteur.

La Commission adopte l’article 2 modifié.

Article 3 (articles L. 311-4 à L. 311-7 [nouveaux], L. 666-1 du code rural et de la pêche maritime) : Création des groupements d’intérêt économique et environnemental (GIEE) et définition des conditions de leur reconnaissance

La Commission est saisie de l’amendement CE94 de M. Antoine Herth.

M. Antoine Herth. Nous avions déjà déposé cet amendement lors de la première lecture ; nos arguments pour le défendre restent les mêmes.

M. le ministre. Avis défavorable.

M. le rapporteur. Même avis.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel CE634 du rapporteur. 

La Commission aborde l’amendement CE443 de M. Philippe Le Ray.

M. Antoine Herth. Cet amendement a pour objet de permettre aux ostréiculteurs d’intégrer les groupements d’intérêt économique et environnemental (GIEE).

M. le ministre. Je comprends le lien que l’on peut établir entre l’ostréiculture et l’objet des GIEE, mais cette loi est relative à l’agriculture et non à la pêche. Cette question mérite néanmoins un débat en séance publique.

M. le rapporteur. L’inclusion d’un ostréiculteur dans un GIEE est une proposition sensée, mais l’activité ostréicole ne relève pas directement de l’agriculture, et cette loi ne peut prévoir l’instauration de GIEE centrés sur l’ostréiculture.

M. Philippe Le Ray. Les ostréiculteurs sont rattachés à la mutualité sociale agricole (MSA) et évoluent souvent au sein de groupements agricoles d’exploitation en commun (GAEC). Les complémentarités entre ostréiculteurs et agriculteurs sont nombreuses, notamment dans la valorisation de la matière première ostréicole – les déchets d’huîtres –, dans les circuits courts composés de produits de la mer et agricoles, et dans la reconquête de la qualité de l’eau – l’association Cap 2000 rassemble ainsi ostréiculteurs et agriculteurs. Il serait donc légitime que cette loi agricole ménage une place pour les ostréiculteurs, et ceux-ci ne comprendraient pas d’en être exclus alors qu’ils veulent participer aux GIEE.

M. Frédéric Roig. Les complémentarités existent en effet, et il serait intéressant de promouvoir le travail en commun.

M. le ministre. En fait, votre amendement est satisfait, monsieur Le Ray, car les ostréiculteurs ont le statut d’agriculteur.

M. Philippe Le Ray. Je retire donc mon amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission étudie l’amendement CE445 de M. Philippe Le Ray.

M. Antoine Herth. Il s’agit plutôt d’un sous-amendement à l’amendement CE624 du rapporteur. En effet, celui-ci vise à apporter une nouvelle rédaction au début de la dernière phrase de l’alinéa 3, alors que je propose de préciser cet amendement en prévoyant que la performance sociale se mette en place de façon progressive dans une période de trois ans.

M. le rapporteur. Il n’appartient pas à la loi de définir a priori le contenu des projets pluriannuels, et c’est l’autorité administrative qui appréciera au cas par cas si ceux-ci déploient des pratiques permettant d’améliorer la performance économique, environnementale et sociale.

M. le président François Brottes. Cela relève du domaine du règlement ; si le délai de trois ans est mal calibré, il faudra réécrire la loi !

M. le ministre. Je souscris à l’argument de M. le président et émets donc un avis défavorable à l’adoption de cet amendement.

M. Philippe Le Ray. Le GIEE peut viser à améliorer la performance même si certains agriculteurs ou ostréiculteurs n’atteignent pas cet objectif dans un premier temps.

M. le président François Brottes. Votre proposition d’un délai de trois ans n’est pas normative, alors que la loi se doit de l’être ; en outre, si le délai est mal calculé, on devra modifier la loi.

M. Philippe Le Ray. Si seuls les projets répondant immédiatement au cahier des charges sont retenus, il s’avérera difficile de créer certains GIEE. J’accepte néanmoins de retirer mon amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CE624 du rapporteur. 

Puis elle en vient à l’amendement CE442 de M. Philippe Le Ray.

M. Philippe Le Ray. Comme les coopératives d'utilisation de matériel agricole (CUMA), les GIEE devraient comprendre au moins quatre agriculteurs ; cela conférerait davantage de cohérence au texte en empêchant qu’un groupement ne se constitue avec seulement deux agriculteurs et une collectivité locale.

M. le ministre. Cet amendement fixe un seuil et ne relève pas du domaine de la loi. Lors de la première lecture du texte à l’Assemblée nationale, nous avions décidé de laisser beaucoup de liberté pour la constitution des GIEE.

M. le rapporteur. J’émets également un avis défavorable à l’adoption de cet amendement.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle aborde l’amendement CE444 de M. Philippe Le Ray.

M. Philippe Le Ray. Cet amendement cherche également à assurer la majorité aux agriculteurs dans les GIEE en limitant à une place la présence des associations à caractère environnemental.

M. le ministre. Monsieur Le Ray, vous souhaitez décidément encadrer strictement la composition des GIEE ! Le projet prévoit déjà que les agriculteurs représentent au moins 50 % des membres d’un GIEE, si bien qu’il semble très réducteur de restreindre davantage la présence d’une association ou d’une collectivité. Mon avis est donc défavorable.

M. le rapporteur. J’émets le même avis, d’autant plus qu’un de mes amendements adopté en première lecture précise que les agriculteurs doivent détenir ensemble la majorité des voix au sein des instances du groupement.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CE446 de M. Philippe Le Ray.

M. Philippe Le Ray. Si un GIEE comprend deux agriculteurs et une collectivité locale, celle-ci dirigera de fait le groupement du fait de son poids politique ; une telle situation contreviendrait à l’esprit de la loi qui vise à créer une dynamique entre les agriculteurs. J’accepte donc votre argumentation en ce qui concerne les associations, messieurs les ministre et rapporteur, mais la situation diffère pour les collectivités, dont il faut limiter la présence à une seule place. La réforme territoriale portée par le Gouvernement souhaite supprimer la clause de compétence générale, si bien qu’une seule collectivité aura la compétence d’accompagnement des projets de développement économique.

M. le ministre. La réforme territoriale promouvra l’intercommunalité ; en outre, la majorité sera détenue par les agriculteurs qui accepteront ou non une ou deux associations et une ou deux collectivités territoriales. Il faut donc leur faire confiance, car seuls les GIEE qui les intéresseront seront créés.

M. le rapporteur. J’émets également un avis défavorable à l’adoption de cet amendement.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement CE631 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement a pour objet de supprimer l’alinéa 6 de l’article 3.

M. le ministre. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel CE646 du rapporteur. 

La Commission étudie l’amendement CE632 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement vise à prévoir, à la place de l’actuel alinéa 13, que « L’organisation et l’animation des actions menées en vue de la capitalisation et de la diffusion des résultats des groupements d’intérêt économique et environnemental sont assurées, en lien avec les organismes de développement agricole intéressés, au niveau régional, par la chambre régionale d’agriculture, sous le contrôle du représentant de l’État dans la région et du président du conseil régional, et, au niveau national, par l’assemblée permanente des chambres d’agriculture, sous le contrôle du ministre chargé de l’agriculture ». 

M. le ministre. Avis favorable.

M. Antoine Herth. Je souhaite d’autant plus l’adoption de cet amendement que j’étais opposé à la suppression de l’alinéa 6 ; il rétablit donc un équilibre minimal en précisant que des actions, contrôlées par l’État au travers des chambres consulaires, ont été mises en œuvre depuis des décennies. Je comprends votre volonté d’innover au travers des GIEE, mais celle-ci ne doit pas rompre la cohérence de l’organisation des différents mouvements de développement en France.

Mme Brigitte Allain. Cet amendement donnerait aux chambres d’agriculture l’exclusivité de la capitalisation et de la diffusion des résultats des GIEE. Est-ce bien le cas, monsieur le rapporteur ?

M. le rapporteur. En effet, l’organisation et l’animation des actions en vue de la capitalisation seraient menées par les chambres d’agriculture, mais en lien avec les organismes de développement agricole. Nous souhaitons connaître le bilan du fonctionnement des GIEE et avons donc besoin de confier cette mission à une instance. Il semble cohérent que les chambres régionales d’agriculture récolent ces résultats.

Mme Brigitte Allain. Les chambres d’agriculture pourraient ne pas être impliquées dans certains GIEE, si bien qu’il s’avère curieux qu’elles puissent être chargées de diffuser l’information et de récoler les résultats. Cet amendement se révèle trop prescriptif.

Mme Laure de La Raudière. L’inclusion de l’alinéa 13 dans l’article L.311-5 du code rural et de la pêche maritime ne me paraît pas logique : il convient de l’insérer dans l’article L.311-5-1 ou de créer un nouvel article.

M. Dominique Potier. Madame Allain, la mission confiée aux chambres régionales d’agriculture n’empêche pas les organismes nationaux à vocation agricole et rurale (ONVAR) de piloter des programmes. Ceux-ci se trouvent d’ailleurs en pointe dans l’appel à projet lancé par M. le ministre, comme l’ont fait remarquer les chambres d’agriculture.  

Mme Michèle Bonneton. L’adoption de cet amendement conférerait-elle aux chambres régionales d’agriculture le monopole de la diffusion des innovations ?

M. le rapporteur. Il ne s’agit pas de l’animation des GIEE – les chambres portent actuellement 40 % des projets, mais les CUMA et les regroupements en promeuvent également –, mais de récoler et de diffuser les informations.

M. le ministre. Il est logique que les chambres d’agricultures, établissements consulaires et publics, soient chargées de l’information, du récolement et de la capitalisation, mais l’organisation des GIEE ne leur est pas confiée.

Mme Michèle Bonneton. Les chambres régionales d’agriculture disposeront-elles du monopole de la diffusion des résultats des GIEE ?

M. le rapporteur. Madame de La Raudière, je répondrai à votre question en séance publique.

Mesdames Bonneton et Allain, cet amendement ne concerne que la mission d’intérêt public exercée par les chambres d’agriculture, à savoir récoler les informations et les diffuser. Il ne s’agit pas d’intervenir dans l’animation des GIEE.

Mme Brigitte Allain. Monsieur le rapporteur, la rédaction de votre amendement ne traite pas simplement de la capitalisation et de la diffusion des résultats des GIEE, car elle impose aux organismes de développement agricole de travailler avec les chambres d’agriculture alors que cela ne s’avère pas toujours possible ou se révèle sclérosant. Je comprends que les chambres, chargées d’une mission de service public, récolent et diffusent les résultats, mais cet amendement dépasse ce simple cadre.

M. Dominique Potier. Les termes d’« organisation » et d’« animation » prêtent à confusion, si bien que l’on pourrait les supprimer.  

M. le rapporteur. Cette proposition semble sage.

Madame Allain, il est normal que chaque organisme agricole parle avec une chambre d’agriculture. La rédaction de mon amendement laisse la faculté aux organismes comme les centres d’initiatives pour valoriser l’agriculture et le milieu rural (CIVAM) ou les CUMA de capitaliser, mais une instance doit avoir la responsabilité de l’organisation et de l’animation de la capitalisation, ce qui exige que les organismes lui fournissent les informations nécessaires.

Mme Brigitte Allain. La confusion créée par cet amendement aujourd’hui sera encore plus grande dans six mois, dans un an ou dans deux ans. Je n’ai pas dit que les organismes de développement agricole ne pouvaient pas parler avec les chambres d’agriculture, mais je sais qu’ils ne souhaitent pas travailler avec elles pour tous les projets.

M. le rapporteur. Madame Allain, nous examinerons la possibilité de sous-amender cet amendement en séance publique.

 La Commission adopte l’amendement.

La Commission examine en discussion commune les amendements CE664 du rapporteur et CE935 de M. Joël Giraud. 

M. le rapporteur. L’amendement CE664 est rédactionnel.

Mme Jeanine Dubié. L’amendement CE935 vise à associer la région à la sélection des projets de GIEE.

M. le rapporteur. Si je partage cet objectif, votre amendement me semblerait mieux placé à l’alinéa 5.

La Commission adopte l’amendement CE664.

En conséquence, l’amendement CE935 devient sans objet.

L’amendement CE458 de Mme Laure de La Raudière est retiré.

Puis la Commission aborde l’amendement CE732 de M. Thierry Benoit. 

M. Thierry Benoit.  L’article 3 du projet de loi détermine les conditions de reconnaissance des projets pluriannuels constitués d’actions ayant un double objectif de performance économique et environnementale, par des groupements qui seront reconnus comme GIEE. Il vise ainsi à faciliter les actions en commun. Les actions de ces groupements bénéficieront de la présomption d’entraide agricole instituée au profit des actions des agriculteurs membres des groupements d’intérêt économique et environnemental.

En l’état, le projet de loi minimise la portée de la création de la présomption d’entraide et ses conséquences sur l’application phytosanitaire en prestation de services qui, régie par l’article L. 254-1 du code rural, fait l’objet d’un agrément administratif afin de garantir le respect de l’environnement et de la santé des applicateurs. La présomption d’entraide remet en cause les investissements engagés par les applicateurs en prestation de services dans la certification en vue de l’agrément phytosanitaire et la professionnalisation de l’activité d’application des produits phytosanitaires.

C’est pourquoi mon amendement vise à faire référence à l’article L. 254-1 du code rural à l’alinéa 19 de l’article 3 du projet de loi.

M. le ministre. Cette précision est inutile.

L’amendement est retiré.

Ensuite, la Commission examine en discussion commune l’amendement CE556 de M. Antoine Herth et l’amendement CE460 de Mme Laure de La Raudière. 

M. Antoine Herth.  L’amendement CE556 est défendu.

Mme Laure de La Raudière.  L’amendement CE460 est un amendement de repli par rapport à l’amendement de mon collègue.

M. le ministre. Comme en première lecture, le Gouvernement est défavorable à ces amendements.

M. le rapporteur. Même avis.

La Commission rejette successivement ces deux amendements.

Puis elle est saisie des amendements identiques CE459 de Mme Laure de La Raudière et CE733 de M. Thierry Benoit. 

Mme Laure de La Raudière.  Ces amendements visent à préciser que les majorations d’attribution des aides publiques seront réservées aux agriculteurs et non destinées à l’ensemble des membres des GIEE.

M. Thierry Benoit.  Il s’agit en effet de spécifier dans la loi que les aides publiques majorées bénéficieront exclusivement aux agriculteurs professionnels.

M. le ministre. Dans sa version actuelle, l’article 3 accorde déjà la priorité aux agriculteurs. Si l’on ne restreint l’attribution des aides publiques qu’à ces derniers, on risque de les empêcher de s’organiser – comme par exemple lorsqu’ils recourent à un animateur pour installer un système de haies.

M. le rapporteur. L’alinéa 21 précise déjà que les majorations ne peuvent financer que les « actions en faveur de l’agriculture » et que « les critères déterminant la majoration des aides publiques privilégient les exploitants agricoles ». Et comme vient de l’illustrer M. le ministre, ces majorations ne sauraient être exclusivement affectées à des agriculteurs mais doivent pouvoir l’être à un organisme servant à l’animation du GIEE.

M. Philippe Le Ray. Monsieur le ministre, l’exemple que vous venez de citer ne me paraît pas adéquat dans la mesure où lorsque des plantations sont effectuées sur des terrains agricoles, celles-ci s’intègrent à la comptabilité des agriculteurs. Il n’est donc pas anormal que les majorations d’aides publiques soient exclusivement accordées à ces derniers, quitte à ce qu’elles leur permettent de rémunérer ensuite l’association qui leur aura fourni cette prestation de services. Il convient que l’argent public destiné à compenser des baisses de prix reste bien attribué aux agriculteurs.

M. Dominique Potier. En réglementant de façon excessive les GIEE, on risque de leur nuire, d’autant qu’il s’agit ici d’une expérimentation. Les excès seront combattus car la profession est responsable. En outre, la réglementation fera l’objet de cahiers des charges à l’échelle régionale. Laissons place à l’innovation. Ne nous empêchons pas d’accorder de l’argent public à des personnes qui contribuent à la réussite de l’agriculture. D’ailleurs, heureusement que dans les années 60, les groupements de vulgarisation agricole (GVA) et les centres d’études techniques agricoles (CETA) n’ont pas souffert de tels excès normatifs !

M. le ministre. Monsieur Le Ray, votre projet d’ostréiculture illustre la nécessité de conserver une certaine souplesse en matière d’attribution d’aides majorées, car tous les ostréiculteurs n’ont pas le statut d’agriculteurs. Maintenons la priorité accordée aux agriculteurs, certes, mais prévoyons aussi la possibilité d’octroyer des majorations à certaines organisations susceptibles de leur être utiles.

M. Thierry Benoit. Le projet de loi fait référence aux « actions en faveur de l’agriculture » et non pas à la production agricole. Or de nombreux acteurs interviennent aux côtés des agriculteurs, dans l’agriculture au sens large.

Si l’on souhaite maintenir une agriculture de production, il convient, d’ici au passage du texte dans l’hémicycle, que nous rédigions un amendement alternatif nous permettant à la fois de conserver une certaine souplesse et de cibler la production agricole. Car nous aurons des difficultés, dans les années à venir, à assurer le renouvellement des générations et notamment à faire en sorte que les agriculteurs puissent transmettre leurs outils de production. En leur attribuant exclusivement les majorations d’aides publiques, on ferait montre d’une attention particulière à l’égard de la production agricole française.

Si, lors d’une table ronde à laquelle j’ai participé ces jours derniers en Bretagne, les Jeunes agriculteurs se sont dits globalement satisfaits des orientations stratégiques du texte, ils estiment que certaines de ses dispositions mériteraient d’être précisées. La question soulevée dans cet amendement me semble en faire partie. Cela dit, je retire mon amendement et je suis prêt à travailler avec le rapporteur et le ministre sur ce point.

M. le rapporteur. Je suis moi aussi défavorable à cet amendement. La rédaction de cet alinéa a évolué entre la première lecture du texte à l’Assemblée nationale et celle qui a eu lieu au Sénat : si le texte adopté par notre assemblée faisait référence à « tout ou partie des actions prévues dans le projet pluriannuel », le Sénat a précisé qu’il ne s’agissait que de tout ou partie des actions « en faveur de l’agriculture ». En outre, les sénateurs ont complété cet alinéa par une phrase disposant que « les critères déterminant la majoration des aides publiques privilégient les exploitants agricoles ». Sachant que les agriculteurs sont majoritaires en voix au sein des GIEE, il me semble inutile d’aller plus loin. Enfin, l’exemple de l’ostréiculture cité par le ministre conforte cette position.

L’amendement CE733 est retiré.

La Commission rejette l’amendement CE459.

La Commission examine l’amendement CE854 de Mme Brigitte Allain. 

Mme Brigitte Allain. Cet amendement a pour objet d’orienter les soutiens publics en direction des méthaniseurs collectifs, afin de permettre aux petites exploitations de bénéficier de ces financements et de s’associer à un GIEE développant la méthanisation.

M. le président François Brottes. Je doute du caractère normatif d’un amendement tendant à encourager une pratique.

M. le ministre. Sans être défavorable à cet amendement, je reconnais que la remarque du président de la commission est juste. J’ajoute que l’organisation collective pose surtout des questions d’ordre fiscal.

M. le président François Brottes. Par ailleurs, j’aurais pu déclarer cet amendement irrecevable au titre de l’article 40 de la Constitution dans la mesure où il vise à encourager le développement d’une énergie subventionnée.

M. le rapporteur. Je suis pour ma part favorable à cet amendement.

M. Antoine Herth. Sur le plan rédactionnel, l’expression « installations de méthanisation », retenue par Mme Allain dans son amendement CE853, me paraît préférable à celle d’« installations collectives de méthaniseurs » qui suppose que plusieurs méthaniseurs soient détenus collectivement.

M. le président François Brottes. Mme Allain, accepteriez-vous de rectifier votre amendement dans le sens proposé par M. Herth ?

Mme Brigitte Allain.  Je reconnais la pertinence de sa remarque.

M. le ministre. Je vous propose de réécrire cet amendement d’ici à l’examen du projet de loi en séance publique.

Mme Brigitte Allain. S’agissant de la recevabilité financière de cet amendement, il ne s’agit pas d’ajouter des subventions supplémentaires mais d’orienter les aides existantes vers des outils collectifs. Cela étant, j’accepte de retirer cet amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission examine en discussion commune les amendements CE1015 de Mme Brigitte Allain, CE95 de M. Antoine Herth et CE428 de M. Dominique Potier.

Mme Brigitte Allain. Le Sénat a restreint la pratique de l’échange de semences entre agriculteurs aux seuls GIEE. Une telle disposition risque de détourner ces groupements de leurs finalités.

M. Philippe Le Ray. L’article 3 prévoit que les producteurs de céréales associés dans un GIEE seront dispensés de passer par un organisme stockeur. Ils pourront donc commercialiser leurs propres céréales. Or une telle disposition risque de nous faire perdre le bénéfice du contrôle de France AgriMer.

M. Dominique Potier. Dans un souci de transparence du marché des céréales, il convient d’adapter l’article 1619 du code général des impôts, relatif à la taxe due par les producteurs de céréales, au cas de la commercialisation des céréales au sein de GIEE. L’amendement CE428 précise que cette taxe est exigible à la date de commercialisation et non de livraison des céréales.

S’agissant des amendements CE1015 et CE95, de nombreux membres du groupe socialiste ne sont guère favorables à l’échange de céréales et de semences orienté spécifiquement vers les GIEE. Afin de ne pas dévoyer ces groupements de leur objet initial, il conviendrait de déposer un amendement dissociant les GIEE des pratiques d’échange et d’entraide au sein des groupements agricoles.

M. le ministre. Bien que nous ayons déjà débattu en première lecture de la question de l’échange de semences, je suis prêt à en rediscuter avec vous, compte tenu des risques de remise en cause de la qualité des semences que certains d’entre vous dénoncent. Pour l’heure, je préfère en rester à l’équilibre défini au Sénat.

M. le rapporteur. Il convient de préciser que cet échange vise des semences libres de droits et ne concernera que des quantités minimes. Je propose que l’on rédige, d’ici à l’examen du texte en séance publique, un amendement qui, sans limiter cet échange aux GIEE, ne laisse pas non plus supposer qu’on détournerait ces groupements de leur objet.

M. Yves Daniel. Je suis d’accord avec le rapporteur. Aujourd’hui, cet échange se pratique beaucoup au sein des CUMA de sorte que recourir aux GIEE dans ce but pourrait compliquer les choses et détourner ces groupements de leur objectif.

M. le président François Brottes. Mme Allain, acceptez-vous de retirer votre amendement ?

Mme Brigitte Allain. Oui, à condition que le rapporteur m’aide à le retravailler d’ici à l’examen du texte en séance publique.

M. Philippe Le Ray. Quant à l’amendement CE95, il est retiré dans l’attente de la réécriture de l’amendement CE1015.

Les amendements CE1015 et CE95 sont retirés.

La Commission adopte l’amendement CE428.

Puis elle en vient à l’amendement CE853 de Mme Brigitte Allain. 

M. Paul Molac. Cet amendement a pour but d’éviter certaines dérives constatées en Allemagne, où des cultures de maïs ont été dédiées aux seuls méthaniseurs sans plus servir ni à l’alimentation animale ni à l’alimentation humaine. Nous proposons de plafonner la masse de ces cultures dédiées.

Mme Annie Genevard. Si la méthanisation doit être encouragée, il nous faut éviter les dérives du modèle allemand – en Allemagne, la viande de porc est par exemple devenue un sous-produit de la méthanisation.

Dans l’incapacité de juger de la pertinence de la limite de 3 % retenue par l’amendement, je ne le voterai pas, mais je partage les inquiétudes exprimées par ses auteurs.

M. le ministre. Avis défavorable. Nous irions beaucoup trop loin en adoptant cet amendement et en édictant une réglementation trop précise et lourde dont personne ne contrôlera l’application. Notre souhait est parfaitement clair et des règles existent : la partie carbonée de la production destinée à alimenter les méthaniseurs doit provenir de cultures dérobées ou intermédiaires.

M. le rapporteur. Avis défavorable. Il serait choquant de produire des céréales dans le seul but de fournir les méthaniseurs, mais le cadre proposé est trop rigide. Je rappelle que la France ne dispose que de cent cinquante méthaniseurs contre cinq mille pour l’Allemagne. Nous légiférerons si une dérive apparaît.

M. Paul Molac. Est-il bien inscrit dans la loi que la méthanisation n’utilise que les cultures dérobées ou intermédiaires ?

Mme Delphine Batho. La méthanisation n’étant pas aujourd’hui dans la loi, rien n’est précisé à ce sujet.

Nous partageons tous la volonté des auteurs de l’amendement qui souhaitent voir se développer une méthanisation « à la française » évitant les dérives qu’ont connues nos partenaires. Plutôt que par la voie législative, il faudrait agir en jouant sur les plans d’approvisionnement et les autorisations administratives délivrées par les directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL) du ministère de l’environnement.

M. le ministre. Il est d’autant moins pertinent d’adopter cet amendement que la méthanisation qui fait partie des grands objectifs du plan « énergie méthanisation autonomie, azote » (EMAA) n’est pas dans la loi.

M. Dominique Potier. Le projet de loi sur la transition énergétique devra traiter du sujet.

L’amendement CE853 est retiré.

La Commission en vient à deux amendements identiques CE96 de M. Antoine Herth et CE823 de Genevard.

M. Dino Cinieri. L’article 3 pose plus de questions qu’il n’apporte de solution.

Dans l’étude d’impact jointe au projet de loi, il est seulement écrit que les impacts économiques et financiers de la création des GIEE « devraient être très positifs, mais ne peuvent être chiffrés à ce stade ». De même, concernant les impacts sur l’emploi, il est indiqué que « cette mesure favorisant le développement de l’activité aura un impact positif sur l’emploi en agriculture ». Ces éléments ne sont pas assez précis.

L’amendement vise en conséquence à prévoir une expérimentation des GIEE avant d’envisager toute mesure définitive

M. le ministre. Avis défavorable. L’expérimentation est déjà en cours ; nous devons maintenant avancer. Je vous invite à faire confiance aux GIEE.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette les amendements.

Puis elle adopte l’article 3 modifié.

Article 4 (articles L. 255-2-1 [nouveau], L. 411-27, L. 820-1 du code rural et de la pêche maritime) : Déclaration de l’azote commercialisé et extension du bail environnemental

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CE461 de Mme Laure de La Raudière, et CE97 de M. Antoine Herth.

M. le ministre. Avis défavorable. La déclaration de l’azote constitue un enjeu environnemental majeur pour substituer l’azote organique à l’azote minéral. Les premières études menées dans le Morbihan montrent que l’azote issu de la méthanisation est mieux assimilé par les plantes ce qui réduit les résidus.

Mme Laure de La Raudière. Ces arguments sont convaincants mais ne peut-on pas procéder autrement qu’en imposant aux agriculteurs une contrainte administrative supplémentaire ?

M. le ministre. La déclaration ne concerne pas les agriculteurs mais les professionnels qui vendent de l’azote minéral. Il est essentiel de procéder à des mesures.

L’amendement CE461 est retiré.

M. Philippe Le Ray. Monsieur le ministre, le texte ne reflète pas vos arguments. L’alinéa 5 de l’article 4 me paraît s’imposer aux agriculteurs. Derrière la déclaration, nous voyons aussi se profiler un fichier qui permettrait de créer une nouvelle taxe.

M. Dominique Potier. Pour le pilotage stratégique d’une agro-écologie vivante, quelques indicateurs sont indispensables. Dans le domaine de la phytopharmacie, les distributeurs ne renâclent pas à fournir les nombreuses données qui leur sont demandées Nous nous contentons d’ajouter une question à celles auxquelles ils répondent déjà. Ne créons pas de problème où il n’en existe pas !

M. Thierry Benoit. Le ministre a confirmé ce qu’il nous avait dit en première lecture : seuls les professionnels qui commercialisent l’azote sont soumis à la déclaration.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement CE97.

Elle est saisie de l’amendement CE1016 de M. Paul Molac.

M. Paul Molac. Il convient d’introduire dans la loi la possibilité pour l’autorité administrative de fixer un plafond maximal d’épandage d’azote minéral et organique par hectare en fonction des situations locales et de leur évolution.

Aujourd’hui, les seules limites existantes, soit 170 kilogrammes d’azote par hectares, concernent la quantité maximale d’azote contenu dans les effluents d’élevage, c’est-à-dire l’azote organique. Aucune limite n’est fixée pour l’épandage d’azote minéral, ce qui est incohérent.

M. le ministre. Avis défavorable. Cette limite ne concerne que l’azote organique car elle a été fixée dans les zones où la production animale était supérieure aux capacités d’épandage. En cas d’excédent d’azote organique, parce qu’il est absurde d’importer de l’azote minéral, nous proposons simplement un dispositif de substitution.

M. le rapporteur. Avis défavorable. Cet amendement relève en outre du domaine du règlement.

M. Philippe Le Ray. Il est d’autant plus difficile de fixer un seuil que tout dépend de l’azote pris en compte.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CE1017 de Mme Brigitte Allain.

Mme Brigitte Allain. La déclaration doit être obligatoire.

M. le ministre. Avis défavorable. Il est préférable d’en rester à la rédaction du projet de loi. Les préfets prendront une décision dans chaque région.

M. le rapporteur. Même avis. Il est toujours préférable de conserver certaines marges de manœuvre.

Mme Brigitte Allain. En France, la « directive nitrates » est loin d’être respectée. Cette disposition contraignante aurait pu constituer une avancée en la matière.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à un amendement CE98 de M. Antoine Herth.

M. Jean-Marie Tetart. La déclaration annuelle ne doit pas pouvoir servir à l’établissement d’une taxe sur les matières fertilisantes. Monsieur le ministre, cette précision aiderait à susciter la confiance que vous appelez de vos vœux.

M. le ministre. Je suis défavorable aux taxes en la matière.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

Elle adopte l’amendement de précision rédactionnelle CE647 du rapporteur.

Puis elle est saisie des amendements identiques CE99 de M. Antoine Herth, CE462 de Mme Laure de La Raudière et CE734 de M. Thierry Benoit.

M. Antoine Herth. Il s’agit de revenir sur la généralisation du bail environnemental qui crée une instabilité juridique.

M. le ministre. Avis défavorable.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette ces amendements.

Elle examine ensuite les amendements identiques CE56 de M. Martial Saddier, CE735 de M. Thierry Benoit et CE574 de M. Antoine Herth.

M. Lionel Tardy. L’application limitée aux trois situations envisagées par le projet de loi de la possibilité d’introduire des clauses environnementales dans les baux ruraux paraît préférable à une banalisation pure et simple du bail environnemental. Il convient de préciser que ces clauses sont introduites lors de la conclusion du bail.

M. Thierry Benoit. Sans modalités d’encadrement relatives à la pertinence des clauses environnementales, leur généralisation risque de se révéler totalement inefficace, de compromettre l’avenir de certaines exploitations et, surtout, de créer de véritables tensions entre les propriétaires et les exploitants agricoles. Sur un tel sujet, je souhaite que nous restions raisonnables.

M. le ministre. Avis défavorable car ces amendements sont satisfaits. Monsieur Benoit, nous veillons à respecter le rapport entre bailleurs et preneurs mais, en matière environnementale, il nous faut prendre garde à toujours avancer et à ne jamais revenir en arrière dès lors qu’une étape est franchie.

M. le rapporteur. Avis défavorable. Le régime général du bail rural précise d’ores et déjà que de nouvelles clauses ne peuvent être introduites que lors de la conclusion d’un bail. Ces amendements sont donc satisfaits.

M. Thierry Benoit. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous dire ce qui changera pour les baux ruraux avec l’adoption du projet de la loi ? Nous avons cru comprendre que tous ceux qui arriveront à échéance feraient systématiquement l’objet de clauses environnementales. Avons-nous raison de craindre qu’une contrainte, qui n’était de mise que dans des zones nécessitant une attention particulière sur le plan environnemental, soit désormais imposée partout ?

M. le ministre. Le statut du fermage précise qu’il n’est pas possible d’imposer à un preneur des clauses qu’il refuse. La négociation primera lors de la signature du bail.

Afin d’éviter tout retour en arrière, la loi facilitera la négociation d’un nouveau bail pour une parcelle sur laquelle se pratiquait déjà une agriculture biologique.

M. Philippe Le Ray. Si en première lecture, nous avions compris que vous souhaitiez éviter que le propriétaire empêche l’exploitant de faire des choix en faveur de l’environnement, nous avons pris conscience que les dispositions que vous proposiez pouvaient fragiliser le preneur. C’est ce que nous voulons empêcher.

M. Thierry Benoit. Pouvez-vous nous dire précisément à quels types de clauses le projet de loi fait référence ? Quels éléments nouveaux doivent selon vous entrer dans la négociation du bail ?

M. le rapporteur. C’est la loi Bussereau qui a créé le bail environnemental. Cette loi a énuméré toute une série de clauses que le bailleur pouvait imposer au preneur dans une dizaine de zones – parcs naturels régionaux, zones Natura 2000, zone littorale, zones vulnérables, etc.

À l’origine, le présent texte prévoyait d’appliquer à l’ensemble du territoire la même réglementation. J’avais d’ailleurs défendu cette proposition devant l’Assemblée nationale lors de la première lecture. Mais le Sénat a souhaité revenir en arrière. Il suffit de lire l’alinéa 11 de l’article 4 pour s’en convaincre : « Des clauses visant au respect par le preneur de pratiques ayant pour objet la préservation de la ressource en eau, de la biodiversité, des paysages, de la qualité des produits, des sols et de l’air, la prévention des risques naturels et la lutte contre l’érosion, y compris des obligations de maintien d’un taux minimal d’infrastructures écologiques, peuvent être incluses dans les baux dans au moins un des cas suivants : » En vérité, cela ne vaut que dans un cas : « - pour garantir, sur la ou les parcelles mises à bail, le maintien de ces pratiques ou infrastructures ».

Cela signifie que le bailleur ne peut imposer au preneur que des clauses environnementales déjà existantes, en l’occurrence la poursuite des pratiques antérieures. Voilà comment le texte est ressorti du Sénat.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette les amendements identiques.

La Commission est ensuite saisie de l’amendement CE452 de Mme Delphine Batho.

Mme Delphine Batho. Pour développer l’agroécologie, il y avait deux méthodes possibles : définir un ordre public environnemental s’appliquant de la même façon sur l’ensemble du territoire ou mobiliser la société civile au travers de la généralisation du bail environnemental. C’est la seconde méthode qui a été choisie.

Le texte qui est sorti du Sénat est en recul par rapport au choix qui avait été opéré. Cela pose, selon moi, un problème de fond : lier le bail environnemental au maintien des pratiques existantes donne de l’agroécologie l’image d’une agriculture conservatrice, ce qu’elle n’est pas. Voilà pourquoi il convient de parler de « respect » des pratiques ou des infrastructures d’intérêt écologique plutôt que de « maintien » de celles-ci, s’agissant des objectifs du bail environnemental.

M. le rapporteur vient de dire que personne ne serait concerné si l’on adoptait la rédaction du Sénat. En effet, ce bail environnemental n’existe pas en dehors des territoires déjà visés – zones Natura 2000, etc. Si l’on ne fait que maintenir les clauses déjà existantes, il n’y en aura pas ailleurs.

Je sais que nombre de mes collègues considèrent qu’après le débat compliqué qui a eu lieu sur le bail environnemental, le texte adopté par le Sénat est très bon. Pour moi, il est très mauvais, puisqu’il est contraire à l’idée première.

Cela dit, on ne peut pas mettre tout et n’importe quoi dans les clauses environnementales. Voilà pourquoi, dès le début, j’avais défendu une autre façon de faire : appliquer aux territoires spécifiques toute une série de clauses environnementales, et au reste du territoire un certain nombre de clauses environnementales plus ciblées. Ce n’est pas la solution qui a été choisie, et je le regrette. Mais je souhaite que l’on enlève au moins du texte le mot « maintien » qui renvoie à une vision totalement conservatrice de l’agriculture, qui n’est pas du tout celle du Gouvernement.

Mme Laure de La Raudière. Contrairement à ce que dit Mme Batho, il existe des baux comprenant des clauses environnementales. Le problème est que celles-ci n’ont pas de valeur juridique et que les parties n’en sont pas forcément conscientes – j’ai le cas dans ma circonscription.

L’adoption de cet amendement donnerait une force juridique à des clauses qui n’en avaient pas auparavant. De fait, il arrivait que l’agriculteur cède au propriétaire, sachant que telle ou telle clause n’avait pas de valeur juridique. Modifier la situation ne pourra que générer des contentieux.

M. Antoine Herth. Pour moi, le terme de « maintien » n’est pas minimaliste, C’est un terme dynamique, dans la mesure où on peut l’apparenter à la maintenance, qui suppose, en l’occurrence, une intervention de l’homme dans un but écologique. Nous le savons tous, un étang, une rivière qui ne sont jamais curés meurent. De la même façon, une haie qui n’est jamais taillée – et je connais bien les zones bocagères du centre de la France – n’est plus une haie. À force de vouloir respecter la nature, on interdit à l’homme d’intervenir, on empêche l’entretien de la nature, et donc sa régénération. Voilà pourquoi je suis très opposé à cet amendement.

M. Paul Molac. L’objectif est clairement d’empêcher que les terres aujourd’hui consacrées à l’agriculture biologique soient reprises par un agriculteur classique, et donc, disparaissent.

Je n’ai pas la même lecture que Mme Batho. L’alinéa 12 précise : « – pour garantir, sur la ou les parcelles mises à bail, le maintien de ces pratiques ou infrastructures ». Ce n’est pas l’ancien bail – éventuellement un bail environnemental – qui est visé, mais les pratiques agricoles. En conséquence de quoi, si les terres concernées sont consacrées à l’agriculture biologique, les pratiques biologiques seront maintenues.

M. le ministre. Le débat est certes intéressant, mais je voudrais rappeler l’objectif que nous nous sommes fixé : lancer l’agroécologie en France. Pour ce faire, nous définirons certains critères – la biodiversité générée, la microbiologie des sols, la limitation des intrants et des IFT (indicateurs de fréquence de traitements phytosanitaires), etc. – et nous mettrons en place des labels en agroécologie. En 2025, 50 % de toutes les exploitations françaises devront respecter ces critères.

Nous nous engageons vers une modification intelligente et agroécologique de l’agriculture. Le bail environnemental n’est pas destiné à anticiper ce qui va se passer, mais à acter chacune des étapes qui aura été franchie.

La dynamique que nous allons créer fera avancer l’agroécologie. Le bail environnemental viendra consacrer les efforts réalisés. Il permettra de maintenir ce qui a été acquis, comme le faisait le « bon père de famille » pour maintenir l’héritage. Nous pourrons ainsi progresser et conquérir des espaces nouveaux pour l’agroécologie.

M. le rapporteur. Tout le monde avait bien compris l’idée première du texte : étendre à l’ensemble du territoire le bail environnemental des zones vulnérables. Le ministre considérait en effet que c’était le moyen de faire avancer l’agroécologie : d’où la possibilité donnée au bailleur, c’est-à-dire au propriétaire du terrain, d’imposer des clauses environnementales à son preneur.

J’ai soutenu cette idée-là en première lecture, face à M. Le Fur. Mais celle-ci est aujourd’hui totalement rejetée par le monde agricole qui y voit la mainmise du propriétaire sur le preneur, je dirais presque la mainmise du seigneur sur les manants. Et le preneur ne veut pas se faire imposer quoi que ce soit par le propriétaire.

Le Sénat a essayé de trouver une formule permettant de conforter les avancées réalisées. Madame Batho, on ne peut pas dire qu’elle est sans intérêt : en fin de bail, le bailleur pourra imposer au nouveau preneur de poursuivre la pratique de la culture biologique.

Mes chers collègues, j’ai bien peur que la situation ne se retourne contre les agriculteurs, exactement comme cela se passe aujourd’hui avec le statut du fermage. Celui-ci est tellement serré que petits propriétaires ne veulent plus louer à des agriculteurs, et que les grands propriétaires ont compris qu’ils avaient intérêt à s’installer eux-mêmes comme agriculteurs. C’est le président de l’Assemblée permanente des chambres d’agriculture (APCA) qui le dit. Dans mon propre département, au mois d’octobre dernier, la chambre d’agriculture a organisé un colloque pour réfléchir à la façon de rassurer les propriétaires qui ne veulent plus louer à des agriculteurs.

Si on interdit au propriétaire de demander au preneur d’appliquer des clauses environnementales – alors qu’il ne s’agirait peut-être que de maintenir les haies –, les agriculteurs ne finiront-ils pas par en pâtir ?

Cela dit, il faut toujours essayer d’avancer. On peut le faire en restant sur le texte du Sénat et en confirmant, à chaque fois, les avancées qui iront dans le sens de l’agroécologie.

Mme Delphine Batho. Soyons clairs : dans sa rédaction actuelle, le texte signifie que le propriétaire d’un terrain qui n’était pas cultivé en agriculture biologique ne peut pas imposer au nouveau preneur de le cultiver en agriculture biologique.

M. le rapporteur. Exactement.

Mme Delphine Batho. De la même façon, le propriétaire d’un terrain où il n’y a pas de haies ne peut pas le louer en posant comme condition d’y planter des haies. Personnellement, j’avais une ambition d’un autre niveau pour l’agroécologie…

Le rapporteur défend un développement progressif de l’agroécologie. Je le comprends, mais j’avais en tête un calendrier un peu plus resserré.

M. Dominique Potier. Le statut du fermage, qui protège le preneur, est une conquête sociale importante. Sans doute faudra-t-il procéder à des assouplissements. Pour autant, nous devons faire progresser l’agroécologie – il ne s’agit pas de caprices d’un propriétaire qui voudrait une ferme à la Marie-Antoinette. Le bail environnemental permettra, entre autres, de conforter les progrès réalisés. En conclusion, je considère que l’on est parvenu à un bon compromis et qu’il faut s’en tenir là.

M. Yves Daniel. Je suis d’accord avec les explications qui ont été données par le ministre et le rapporteur. L’exemple de Mme Delphine Batho m’amène à dire que l’on ne développera pas la culture biologique en l’imposant. Nous n’y parviendrons que par l’incitation. En un mot, nous devons créer les conditions d’un développement volontariste.

Mme Delphine Batho. Qu’il n’y ait pas de malentendu : ce dispositif n’est pas le mien, mais celui qu’a proposé le Gouvernement en première lecture. Le bail environnemental n’est d’ailleurs pas le dispositif que j’aurais choisi. Mais dans la mesure où il a été choisi, autant qu’il serve à quelque chose. Pourquoi créer des dispositions dont l’impact serait limité ?

M. le ministre. Je me souviens parfaitement du débat qui a eu lieu au Sénat, où fut développée l’idée d’un propriétaire qui imposerait au preneur ses propres choix. Mais cela ne se fait pas comme cela. Prenez l’exemple d’un propriétaire qui demanderait que le bail soit transformé, pour pouvoir passer à l’agriculture biologique. Ce n’est pas si facile : il faut que les aides et l’ensemble des dispositifs suivent.

Quoi qu’il en soit, un compromis a été trouvé. Certes, nous aurions pu être beaucoup plus ambitieux. Mais ce compromis nous permettra d’avancer – et de ne pas reculer – vers notre objectif. Prenez l’exemple des systèmes de conservation des sols par gestion de la matière organique. On peut partir aujourd’hui d’un pourcentage de 1,5 % en se fixant un objectif de 3 ou 4 %. Revenir à 1,5 % serait un recul. Rester à 4 % est un enjeu.

Je suis donc défavorable à cet amendement.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite les amendements identiques CE18 de M. Dino Cinieri, CE375 de M. Dominique Potier, CE736 de M. Thierry Benoît, CE557 de M. Antoine Herth et CE934 de Mme Jeanine Dubié.

M. Dino Cinieri. Il s’agit de sécuriser les contractants par la forme authentique du bail qui permet de s’assurer de leur consentement éclairé par les conseils d’un notaire, de s’assurer du sérieux des démarches respectives du bailleur et du preneur, dans un esprit de dialogue, afin de sécuriser juridiquement les baux environnementaux conclus antérieurement.

M. Dominique Potier. Je retire mon amendement.

M. le ministre. Défavorable.

L’amendement CE375 est retiré.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette les amendements identiques.

Elle est ensuite saisie des amendements identiques CE1037de M. Antoine Herth, CE43 de M. Dino Cinieri, CE245 de M. Daniel Fasquelle et CE737 de M. Thierry Benoît.

M. Antoine Herth. Mon amendement tend à préciser les conditions dans lesquelles se régleront les litiges.

M. Dino Cinieri. Même argumentation.

M. Thierry Benoit. Défendu.

M. le ministre. Avis défavorable. Ils sont déjà satisfaits. Les parties peuvent toujours modifier les clauses à l’amiable, sans qu’il soit besoin de les inscrire dans la loi. Le tribunal paritaire des baux ruraux est compétent pour connaître des contestations entre bailleurs et preneurs de baux ruraux – article L.491-1 du code rural.

M. le rapporteur. Avis défavorable.

Ces amendements identiques sont retirés.

La Commission examine alors l’amendement CE1035 de Mme Jeanine Dubié.

Mme Jeanine Dubié. Cet amendement propose de modifier la possibilité de résiliation du bail pour le preneur en remplaçant le caractère de la permanence de l’incapacité grave par une durée supérieure à trois ans. Il s’agit de la durée maximale pendant laquelle peuvent être servies les indemnités journalières, en cas d’affection de longue durée, aux personnes non salariées des professions agricoles en cas de maladie ou d’accident de la vie privée.

M. le ministre. Je suis défavorable à une période de trois ans, mais plutôt favorable à une période de deux ans.

M. le rapporteur. Même avis.

Mme Jeanine Dubié. Choisir trois ans avait du sens pour la maladie de longue durée. Mais je propose que l’on rectifie mon amendement en remplaçant « dont la durée est supérieure à trois ans » par « dont la durée est supérieure à deux ans ».

La Commission adopte l’amendement rectifié.

Elle est saisie de l’amendement CE855 de Mme Brigitte Allain.

Mme Brigitte Allain. Cet amendement revient partiellement sur les modifications apportées par le Sénat. Il propose d’adapter les conditions du bail rural aux nouvelles formes de regroupement agricole. Il permettra aux organisations à forme sociétaire ou associative, comme l’association du type Terre de liens, de bénéficier d’une mise à disposition de bail rural.

M. le ministre. Défavorable. Cet amendement manque de clarté. Il conviendrait de le réécrire en prévision du débat en séance.

M. le rapporteur. Sur le fond, je suis favorable à cet amendement qui gagnerait en effet à être plus concis.

Mme Brigitte Allain. Je le retire.

L’amendement est retiré.

La Commission adopte ensuite l’amendement de coordination CE665 du rapporteur.

Elle adopte enfin l’article 4 modifié.

Article 4 bis AA (article L. 411-34 du code rural et de la pêche maritime) : Résiliation du bail après le décès du preneur

La Commission est saisie de l’amendement CE932 de Mme Jeanine Dubié.

Mme Jeanine Dubié. Aujourd’hui, le bailleur dispose de la possibilité de résilier le bail en cas de non-respect des clauses environnementales insérées dans le bail. Pour éviter une multiplication des litiges, il est important que le bailleur qui invoque la résiliation démontre que l’attitude du preneur est de nature à lui porter préjudice.

Le texte issu du Sénat ne prévoit pas de modifications relatives au régime de sanction par la résiliation du bail en cas de non-respect de ces clauses, ce qui, une fois de plus, rend l’extension du dispositif dangereuse.

M. le ministre. Défavorable.

M. le rapporteur. Défavorable.

Mme Jeanine Dubié. Je le retire.

L’amendement est retiré.

La Commission adopte ensuite l’amendement de coordination CE648 du rapporteur.

Elle adopte alors l’article 4 bis AA modifié.

Article 4 bis AB (article L. 411-34 du code rural et de la pêche maritime) : Prescription de la demande du preneur sortant en indemnisation des améliorations apportées au fonds loué

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CE649 du rapporteur.

Elle est alors saisie de l’amendement CE627 du Gouvernement.

M. le ministre. L’article 4 bis AB vise à prévoir un délai de prescription pour que le preneur sortant présente au bailleur une demande d’indemnisation des améliorations apportées au fonds loué. Le présent amendement tend à porter ce délai de six à douze mois.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel CE650 du rapporteur.

Elle adopte enfin l’article 4 bis AB modifié.

Article 4 bis AC (article L. 411-71 du code rural et de la pêche maritime) : Moyens de preuve admis pour la fixation de l’indemnisation des améliorations apportées au fonds loué

La Commission est saisie d’un amendement CE619 du Gouvernement.

M. le ministre. Cet amendement vise à clarifier la rédaction de l’alinéa 2 du présent article, introduite par le Sénat, qui précise la manière dont doit être fixé le montant de l’indemnité due au preneur, au regard des améliorations apportées sur le terrain.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

Elle adopte alors l’article 4 bis AC modifié.

Article 4 bis A (Supprimé) : Rapport au Parlement sur la couverture au titre des calamités agricoles des risques liés à l'engagement dans des pratiques innovantes

La Commission se saisit de l’amendement CE342 de M. Yves Daniel.

M. Yves Daniel. Cet amendement vise à demander au Gouvernement un rapport sur l’opportunité de créer une quatrième section du Fonds national de gestion des risques en agriculture (FNGRA), destinée à soutenir les pratiques agricoles innovantes. Couvrir le risque de l’innovation agricole pourrait notamment aider les GIEE.

M. le ministre. C’est une question de fond, sur laquelle il y a beaucoup à faire. Vous m’avez entendu tout récemment sur cette question des assurances agricoles : nous avons quelques idées, mais le financement reste un problème. Sagesse.

M. le rapporteur. Nous avons vraiment essayé de limiter le nombre de rapports demandés au Gouvernement, mais j’émets ici, à titre exceptionnel, un avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

L’article 4 bis A est ainsi rétabli.

Article 4 bis (article L. 411-64 du code rural et de la pêche maritime) : Report de la reprise par le bailleur à l’âge de la retraite à taux plein du preneur

La Commission examine les amendements identiques CE185 de M. Dominique Potier, CE742 de M. Thierry Benoit, CE930 de Mme Jeanine Dubié et CE533 de M. Antoine Herth.

M. Dominique Potier. La cession du bail rural est très strictement encadrée par le statut du fermage. Nous proposons de clarifier la situation des époux co-preneurs.

M. Thierry Benoit. Le fait que l’un des époux co-preneur d’un bail ne participe pas à l’exploitation du bien loué ne devrait pas constituer un motif suffisant de refus de cession du bail.

M. le ministre. Je suis prêt à prendre en considération ces observations, car c’est un sujet de fond ; mais la rédaction de cet amendement n’est pas satisfaisante.

M. le rapporteur. Sur le fond, je suis favorable à ces amendements, mais, à l’instar du ministre, je demande leur retrait afin de trouver une rédaction adéquate d’ici à la séance publique.

M. Jean-Michel Clément. Sur les co-preneurs, il est d’usage de dire que la théorie reste à faire. Je ne suis pas sûr que ces amendements suffisent à régler le problème. Ici, on ne regarde la situation des co-preneurs que sous l’angle du statut du fermage, mais il y a bien des péripéties possibles : dépôt de bilan, redressement judiciaire, garantie de paiement, divorce… Le statut matrimonial a des conséquences nombreuses – sur le bail d’habitation, sur le bail rural… De plus, un co-preneur est censé être exploitant.

L’équilibre est fragile, et y toucher risque d’accroître la confusion. C’est une question qui ne me paraît pas susceptible d’être réglée par un dispositif particulier : n’essayons pas de faire le bien des gens malgré eux.

M. le rapporteur. Le bailleur trouve, vous en conviendrez, avantage à louer à des co-preneurs. Dès lors, il est un peu fort de café que cet avantage se retourne contre les co-preneurs en servant d’argument pour refuser une transmission.

Les amendements sont retirés.

La Commission se saisit, en discussion commune, des amendements identiques CE19 de M. Dino Cinieri, CE558 de M. Antoine Herth, CE931 de Mme Jeanine Dubié et CE681 de M. Yves Daniel, ainsi que de l’amendement CE738 de M. Thierry Benoit.

M. Dino Cinieri. Le régime déclaratif du contrôle des structures met parfois en danger l’exploitant fermier en place, notamment lorsque des propriétaires délivrent un congé en vue de reprendre leur bien. Cet amendement prévoit de rétablir un équilibre en permettant un examen par le tribunal paritaire des cas où l’exploitation du fermier serait gravement mise en péril par une reprise totale faite par un bailleur.

M. le ministre. Avis défavorable : ces amendements sont au moins en partie satisfaits par les textes existants.

M. le rapporteur. Avis défavorable.

M. Thierry Benoit. L’amendement CE738 vise à permettre au fermier de demander au tribunal paritaire d’examiner si la reprise prévue dans un congé met en péril la viabilité de son exploitation, et, le cas échéant, de ne pas permettre celle-ci, ou d’en réduire la dimension. C’est un amendement que nous avions déjà défendu en première lecture.

M. le ministre. Avis défavorable.

M. le rapporteur. Avis défavorable.

La Commission rejette les amendements identiques.

Puis elle rejette l’amendement CE738.

Elle adopte ensuite l’amendement de coordination CE666 de M. le rapporteur.

Elle se saisit ensuite de l’amendement CE622 du Gouvernement.

M. le ministre. Il s’agit d’un amendement de précision.

M. le rapporteur. Avis favorable.

M. Antoine Herth. Les modalités d’entrée en vigueur ne se placent-elles pas d’habitude en fin de texte ? Et, dans la mesure où il paraît difficile d’appliquer des lois avant leur publication, cette précision n’est-elle pas superfétatoire ?

M. le ministre. Cette précision est tout à fait nécessaire pour limiter les contentieux.

M. Antoine Herth. Vous interdisez l’anticipation.

M. le ministre. C’est cela.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 4 bis modifié.

Article 4 ter A (nouveau) (article L. 417-11 du code rural et de la pêche maritime) : Suppression de la conversion de plein droit du bail à métayage en bail à ferme pour la vigne

La Commission examine plusieurs amendements identiques, CE20 de M. Dino Cinieri, CE186 de M. Dominique Potier, CE1018 de Mme Brigitte Allain, CE929 de Mme Jeanine Dubié, CE531 de M. Antoine Herth et CE743 de M. Thierry Benoit.

M. Dino Cinieri. La conversion des baux à métayage en baux à ferme, possible depuis 1945, et renforcée en 1984, est une faculté qui est laissée tant au propriétaire qu’au métayer. Empêcher partiellement cette conversion pour les plants de vigne, et pour le seul métayer, représente une rupture de l’équilibre trouvé jusqu’à présent entre les parties.

M. Dominique Potier. Le Sénat a essayé par des voies détournées de rétablir le métayage ! Il faut rétablir les principes du fermage.

M. Antoine Herth. Effectivement, il serait regrettable de revenir tellement en arrière dans le cadre de l’examen d’une loi sur l’avenir de l’agriculture…

M. le ministre. Sagesse. Je reconnais que l’Assemblée a quelques arguments à faire valoir.

M. le rapporteur. Avis favorable : j’aurais moi-même défendu cet amendement si d’autres collègues ne l’avaient pas fait.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 4 ter A est supprimé.

Article 4 quater (nouveau) (Supprimé) (article L. 411-73-1 [nouveau] du code rural et de la pêche maritime) : Possibilité pour bailleurs et preneurs de s'entendre à l'avance sur l'indemnisation en contrepartie des travaux effectués sur le fond loué

La Commission maintient la suppression de cet article.

Article 4 quinquies (nouveau) (article L. 418-3 du code rural et de la pêche maritime) : Alignement de la durée du renouvellement du bail cessible sur la durée du bail rural de droit commun

La Commission se saisit des amendements identiques CE21 de M. Dino Cinieri, CE927 de Mme Jeanine Dubié et CE745 de M. Thierry Benoit.

M. Dino Cinieri. Le bail cessible hors du cadre familial, introduit en 2006, n’a pas rencontré le succès escompté, et il ne vise pas expressément l’installation. De plus, il déroge à la prohibition générale des pas-de-porte. Cet amendement vise donc à lui substituer une cessibilité qui serait ciblée exclusivement sur l’installation d’un nouvel agriculteur.

Mme Jeanine Dubié. Ces amendements visent donc à instaurer une cessibilité fléchée et de principe pour tous les nouveaux baux.

M. le ministre. Avis défavorable. Nous pensons qu’il faut plutôt mettre en place une politique globale, dans le cadre des Assises de l’installation.

M. le rapporteur. Ces amendements auraient pour effet de modifier profondément la législation sur les baux. Avis défavorable.

M. Jean-Michel Clément. On touche ici à un point important du statut du fermage. Le preneur est en place pour toute sa carrière, ou à peu près ; le bailleur ne peut reprendre les terres que dans quelques cas, ou bien à la fin de la vie professionnelle du preneur. Si l’on autorise la cessibilité du bail, jamais un bailleur ne pourra reprendre ses terres !

Le bail cessible existe, mais on sait ce qu’il y a derrière ! On ferait bien de se demander pourquoi il n’a pas fonctionné ; en revanche, on ne peut pas introduire un peu de cessibilité dans le statut du fermage classique.

La Commission rejette les amendements.

Suivant l’avis défavorable de M. le rapporteur, la Commission rejette ensuite les amendements identiques CE744 de M. Thierry Benoit, CE928 de Mme Jeanine Dubié et CE532 de M. Antoine Herth.

Elle adopte alors l’article 4 quinquies sans modification.

Article 5 (articles L. 323-2 et L. 323-13 du code rural et de la pêche maritime) : Clarification du statut du groupement agricole d’exploitation en commun

La Commission examine d’abord l’amendement CE100 de M. Antoine Herth.

M. Antoine Herth. Sur la différence de traitement entre GAEC et EARL, vous n’avez pas avancé depuis la première lecture.

M. le ministre. Avis défavorable, pour les mêmes raisons qu’en première lecture.

Nos négociations avec la Commission européenne ont beaucoup progressé, notamment sur la possibilité de transformation d’une EARL en GAEC. J’espère également qu’il sera bientôt possible de transformer une EARL entre époux en GAEC entre époux.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

Elle se saisit alors de l’amendement CE825 de Mme Annie Genevard.

Mme Annie Genevard. J’apprends avec intérêt l’évolution de ce dossier, mais il n’en reste pas moins qu’il existe aujourd’hui une inégalité de traitement entre les GAEC, puisque certains ne bénéficient pas de la transparence. Dans le Doubs, d’après les organisations agricoles, cela concerne 130 GAEC, issus d’EARL.

Comment peut-on faire en sorte que les aides européennes bénéficient à chaque membre associé du GAEC ?

M. le ministre. Nous travaillons, je l’ai dit, sur la possibilité de transformation d’EARL en GAEC entre époux.

Le cas des GAEC où certaines parts ne sont pas reconnues, notamment là où il existait des primes couplées qui ont été transformées en primes découplées, est très spécifique. Nous essayons aussi de trouver des solutions, mais cela relève des règles d’application de la PAC et non de cette loi.

Mme Annie Genevard. Mais quand faudrait-il donc en parler ? Comment défendre cette exigence de justice ? Un amendement similaire avait été jugé irrecevable en première lecture au titre de l’article 40 ; celui-ci ne crée aucune charge, mais vous appelle à votre responsabilité de négociateur.

M. le ministre. Je suis tout à fait responsable.

Vous me parlez de GAEC qui ne bénéficient pas de la transparence. On ne peut pas modifier cette situation en changeant la situation juridique des GAEC – ce que propose votre amendement ; il faut modifier les modalités d’attribution des aides européennes, transformées il y a quelques années. Ce sont deux choses très différentes.

Mme Annie Genevard. Je me permets d’insister, monsieur le ministre : certains GAEC entre époux, issus d’EARL, n’ont aujourd’hui qu’une part pour deux conjoints ; d’autres GAEC entre époux, constitués plus tard, disposent de deux parts. C’est une différence de traitement parfaitement injuste ! Dans le Doubs, région d’élevage, donc particulièrement concernée, on aboutit à des différences de revenus tout à fait conséquentes. C’est pourquoi les agriculteurs réclament justice.

M. le rapporteur. Avis défavorable à l’amendement.

M. Dominique Potier. Je me rangerai à l’avis exprimé par le Gouvernement sur le fait que ce cas ne relève pas de la loi, mais il est vrai qu’il existe une incompréhension sur le terrain. Nous avons des cas précis de GAEC où des agriculteurs ont choisi, au lieu de travailler quatre fois soixante heures, de travailler cinq fois cinquante heures et de partager leurs revenus. Ce sont des choix de vie que l’on ne peut pas condamner ; or ils n’ont pas accès à la transparence. Le statut même du GAEC est pourtant suffisamment strict pour garantir que l’on a affaire à de vrais travailleurs.

D’un côté, certaines formes sociétaires échappent au contrôle des structures, et passent sous les radars ; d’un autre côté, le GAEC, coopérative de travail, ne peut pas être totalement reconnu. Nous connaissons tous des cas désespérants, et je vous ai écrit à ce sujet, monsieur le ministre. Il y a bien là un problème de justice.

M. Yves Daniel. J’avais cru comprendre qu’à la suite de nos débats en première lecture, le Gouvernement travaillait à une redéfinition de la transparence. L’utilisation de nouveaux critères pourrait changer les choses.

Mme Annie Genevard. Si la discussion de cette loi n’est pas le moment idoine, quand faut-il alors poser ? C’est un sujet brûlant ! L’EARL était en son temps la seule forme sociétaire disponible ; le GAEC entre époux n’est apparu qu’après. La conversion ne sera achevée que quand la transparence sera garantie à chaque membre, ce qui serait tout à fait légitime.

Il est vrai qu’il s’agirait sans doute de redistribuer des fonds autrement.

M. Philippe Le Ray. Quand la PAC a été mise en place, il y avait une logique de regroupement d’exploitations. On réfléchissait alors en nombre d’exploitations, et d’exploitations reconnues – nombre que j’avais proposé d’augmenter fortement, d’ailleurs.

Pour situer le problème, il faut revenir à l’histoire de la politique agricole commune (PAC). Les aides européennes n’étant distribuées qu’aux exploitations reconnues, la question est de savoir combien d’exploitations reconnues se sont regroupées à l’origine pour former un groupement agricole d’exploitation en commun (GAEC). C’est ce critère qui est pris en compte pour calculer le plafond global des aides de la PAC pour un GAEC. Il ne faut donc pas tout mélanger.

Les entreprises à responsabilité limitée (EARL) jouissent d’un traitement différent, alors que nombre d’entre elles sont issues de GAEC ayant dû se dissoudre à l’époque où les GAEC n’ont plus été possibles entre conjoints. Peu d’EARL ont d’ailleurs été formées en tant que telles comme des regroupements. À cause du principe de transparence qui gouverne les GAEC, leur situation paraît donc inéquitable au regard de celle des EARL.

Mme Marie-Lou Marcel. Dans l’Aveyron, l’indemnité compensatoire de handicap naturel (ICHN) est versée dans des conditions où la conjointe active n’est pas reconnue. Un GAEC aujourd’hui formé entre époux est pourtant bien composé de deux parts. Il y a contradiction.

M. le ministre. Cela ne relève pas de la compétence législative. Tout vient de ce que les GAEC sont une forme juridique garantie à l’échelle européenne. Pour verser de manière dégressive les aides de la politique agricole commune, une tranche de cinquante-deux premiers hectares a été créée. Dans les GAEC, ce montant est évalué sous la forme de parts, conformément au principe de transparence.

La surface totale exploitée par le GAEC est divisée par le nombre de parts pour évaluer la participation dans cette tranche des cinquante-deux premiers hectares. Si ce projet de loi est adopté, il ne sera plus nécessaire de détenir une surface minimale pour entrer dans un GAEC ; la participation pourra aussi bien prendre la forme d’un apport économique. Dans ce schéma, la question des aides se posera donc dans les mêmes termes ; les données de base du calcul en seront seulement modifiées.

Mais la transformation des aides existantes peut avoir dans d’autres circonstances des répercussions sur lesquelles nous devrons nous pencher. Ainsi, en Vendée, les jeunes éleveurs de bovins ont subi des pertes par rapport au soutien existant du fait de sa transformation en une aide à l’hectare. Ce n’est cependant pas une modification législative qui peut y remédier, puisque cette situation est due à une évolution de la politique agricole commune.

Mme Annie Genevard. La loi peut néanmoins exprimer une intention. Cet amendement propose seulement que chaque associé puisse bénéficier d’une aide de la politique agricole commune. L’intention est louable, puisqu’elle juste. Une négociation pourra alors s’engager, non avec l’Europe, mais avec les fédérations professionnelles. Il s’agit de redistribuer plus équitablement les aides européennes.

M. le ministre. Cet amendement ne saurait marquer une intention. Dans la règle et dans la loi, les critères d’attribution des aides doivent être définis de manière exacte.

Un amendement ne peut revenir de manière rétroactive sur l’éligibilité aux aides directes de la politique agricole commune, telle qu’elle découle de l’évolution de cette dernière.

Mme Annie Genevard. L’alinéa 20 de l’article 5 pourtant que « pour la mise en œuvre des règles de la politique agricole commune, ce principe ne s’applique qu’aux groupements agricoles d’exploitation en commun totaux et dès lors que les associés ont contribué (…) à renforcer la structure agricole du groupement ». Il revêt donc une dimension rétroactive.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

La Commission examine ensuite l’amendement CE926 de Mme Jeanine Dubié.

Mme Jeanine Dubié. Le présent amendement vise à circonscrire la participation d’un GAEC, en tant que personne morale associée d’une autre société, aux seules structures de production et, le cas échéant, de commercialisation de produits de la méthanisation agricole, dans un souci de cohérence entre l’objet du GAEC et son fonctionnement.

M. le ministre. J’y suis favorable.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

L’amendement CE746 de M. Thierry Benoit est retiré.

La Commission examine ensuite l’amendement CE5 de M. Dino Cinieri.

M. Dino Cinieri. L’ensemble de la construction des GAEC repose sur une gestion paritaire administration – profession, maintenant bien rodée au niveau départemental et national au travers des comités d’agrément, laquelle permet une exacte appréciation des situations de terrain et un agrément selon les critères prévus par la loi. La formule actuelle, consistant à confier l’agrément à un comité de spécialistes de huit personnes disposant des informations nécessaires, donne toute satisfaction.

M. le ministre. J’y suis défavorable.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

La Commission examine ensuite les amendements identiques CE534 de M. Antoine Herth et CE747 de M. Thierry Benoît.

M. Philippe Le Ray. Cet amendement concerne la procédure d’agrément des GAEC. Il vise à éviter de donner, dans un excès de simplification, trop de pouvoir aux autorités administratives, en maintenant la formule classique d’agrément des GAEC. Vis-à-vis des autorités européennes, cela pourrait également permettre de faire valoir que le GAEC se définit avant tout comme un regroupement familial, ou du moins comme un regroupement à taille humaine. Il faut enfin que le comité d’agrément garde une certaine proximité avec les demandeurs, car les tailles de GAEC sont très différentes selon les territoires.

M. Thierry Benoît. Le Sénat a voulu prétendument simplifier en supprimant les comités d’agrément au niveau départemental, pour transférer leurs compétences à des comités d’agrément régionaux. Il reste à voir cependant s’il ne serait pas mieux de conserver, dans certaines parties des territoires, des comités départementaux. L’amendement vise à ménager cette possibilité.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette les amendements.

La Commission examine ensuite les amendements CE1046, CE1047 et CE1048 du rapporteur.

M. le rapporteur. Ces trois amendements ont pour objet de clarifier les dispositions relatives à l’agrément des GAEC, en supprimant les dispositions de nature réglementaire. Ils s’inscrivent donc dans une logique de simplification et de lisibilité du droit, et de respect de la hiérarchie des normes en renvoyant au niveau réglementaire les dispositions qui en relèvent.

La Commission adopte ensuite successivement les amendements.

Elle adopte ensuite l’article 5 modifié.

Article 5 bis (nouveau) (article L. 113-3 du code rural et de la pêche maritime) : Groupements pastoraux comportant une EARL

La Commission adopte l’article 5 bis sans modification.

Article 6 (articles L. 521-3, L. 521-3-1 [nouveau], L. 522-5, L. 524-5-1, L. 524-1-3 [nouveau], L. 524-2-1, L. 524-3, L. 527-1, L. 527-1-3 [nouveau], L. 322-3, L. 551-5 du code rural et de la pêche maritime) : Renforcement de la transparence au sein des coopératives agricoles et avantages accordés aux organisations de producteurs

La Commission examine l’amendement CE1020 de Mme Brigitte Allain.

Mme Brigitte Allain. Il vise à permettre aux coopératives agricoles, à l’image de ce qui existe pour les coopératives artisanales, d’accueillir des « associés stagiaires » admis à titre provisoire pendant une période probatoire de un an.

La Commission examine deux sous-amendements CE1051 et CE1052 du rapporteur.

M. le rapporteur. D’une part, il apparaît plus logique de situer cet alinéa à l’endroit où les coopératives sont qualifiées dans le code rural et de la pêche maritime. D’autre part, un article de la partie législative du code ne peut renvoyer à un article de la partie réglementaire.

M. le président François Brottes. Mme Allain, ces deux sous-amendements vous conviennent-ils ?

Mme Brigitte Allain. Oui, ils me semblent apporter des précisions importantes.

La Commission adopte les sous-amendements du rapporteur, puis l’amendement ainsi sous-amendé.

Elle adopte ensuite les amendements rédactionnels CE652 et CE653 du rapporteur.

La Commission adopte l’article 6 modifié.

Article 6 bis (nouveau) (article L. 611-8 du code rural et de la pêche maritime) : Création d’une sanction pour non-respect des dispositions sur les magasins de producteurs

La Commission adopte l’article 6 bis sans modification.

Article 7 (articles L. 631-24, L. 631-25, L. 631-27 [nouveau], L. 631-28 [nouveau] du code rural et de la pêche maritime) : Modification des règles relatives à la contractualisation et renforcement du rôle du médiateur des relations commerciales agricoles

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CE656 du rapporteur.

Elle examine ensuite l’amendement CE598 du Gouvernement.

M. le rapporteur. Il s’agit de supprimer les contrats à terme. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CE101 de M. Antoine Herth.

M. Antoine Herth. L’amendement vise à fixer un délai maximum au médiateur lorsqu’il rend sa délibération.

M. Stéphane Le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt. L’amendement met en difficulté le médiateur car, si une date limite est fixée à sa médiation, le temps joue contre lui. Les parties n’auront qu’à attendre que ce délai soit écoulé pour constater que son rôle est terminé. C’est contradictoire avec l’objectif de la médiation, qui consiste précisément à rapprocher les points de vue.

M. le président François Brottes. Quand nous organiserons un débat avec la grande distribution et les agriculteurs, notre collègue Antoine Herth aura l’occasion de présenter le principe de cet amendement.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte ensuite l’amendement CE595 du Gouvernement.

Elle examine ensuite l’amendement CE615 de Mme Annick Le Loch.

Mme Annick Le Loch. Cet amendement a pour but de ramener de la raison dans les relations commerciales entre distributeurs et producteurs. Les distributeurs se livrent en ce moment à une guerre des prix qui a déclenché un cycle déflationniste. Peut-être le consommateur y a-t-il trouvé son compte, mais le salarié pas forcément, puisqu’il se retrouve menacé dans son emploi du fait des pertes de marge.

Nous avions déjà abordé la question au cours des débats sur la loi sur la consommation, mais elle ne s’applique pas encore. Il est temps d’apaiser les tensions commerciales entre les différentes parties. Des demandes de compensation de marge, parfois massives, continuent à être formulées et perturbent le fonctionnement de toute l’industrie agroalimentaire. Cet amendement vise à définir un seuil économique en dessous duquel il n’est pas possible de descendre.

M. Stéphane Le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt. Si la loi pouvait fixer le juste prix, ce serait parfait ! Mais la loi Galland, qui n’a jamais atteint ses objectifs, a montré les limites de ce type d’approche. Ces bonnes intentions n’auraient aucun impact sur l’attitude des fournisseurs. Je n’y suis pas favorable.

M. le rapporteur. J’avais moi-même déposé d’abord un amendement semblable. Comme notre collège Annick Le Loch, je m’inquiète en effet de la guerre des prix qui détruit emplois et valeur ajoutée. Bientôt, nous ne pourrions plus avoir qu’un distributeur unique. Ces tensions pèsent sur l’ensemble de la chaîne, de la production à la transformation. J’exprime néanmoins un avis défavorable.

M. Thierry Benoît. Notre collègue ouvre le débat sur un vrai sujet. En première lecture, vous nous disiez vouloir corriger les faiblesses et les imperfections de la loi de modernisation de l’économie. Que pensez-vous aujourd’hui des pratiques de la grande distribution ? Le débat reviendra dans l’hémicycle.

M. Stéphane Le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt. La loi de modernisation de l’économie visait attiser la concurrence entre grands distributeurs pour conduire à une baisse des prix qui profite aux consommateurs en augmentant leur pouvoir d’achat. Mais cette course à la baisse des prix s’est emballée à tel point que la déflation s’installe. Les consommateurs n’en consomment pas plus, mais attendent au contraire une baisse des prix encore plus accentuée.

Toutes les entreprises bénéficient aujourd’hui du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE). Sous ce prétexte, chaque entreprise d’aval dans la chaîne considère que l’entreprise d’amont peut consentir des sacrifices encore plus grands. Je voudrais rappeler que la hausse des prix du lait n’a au contraire été obtenue que par la médiation. Édicter des règles dans les négociations commerciales n’a pas de sens. Des coopératives peuvent aussi bien être tentées de se faire entre elles une concurrence acharnée, contre l’intérêt même de la filière à laquelle elles appartiennent.

Nous ne pouvons régler par la loi des problèmes qui lui échappent totalement.

Mme Annick Le Loch. Monsieur le ministre, j’entends vos arguments, mais il n’en demeure pas moins qu’une forte demande s’exprime en faveur d’une implication accrue des pouvoirs publics et d’un contrôle par la loi.

Il faudra attendre 2015 pour apprécier comment la lois sur la consommation a pu modifier les relations entre fournisseurs et distributeurs. Entre-temps, la DGCCRF pourrait répondre à la demande de contrôle des PME, qui sont nombreuses à dénoncer des abus. Alors qu’elles ont signé des conventions avec la grande distribution en début d’année, elles n’en reçoivent pas moins, parfois deux mois plus tard, des demandes de compensation de marge. Le système actuel n’est donc pas satisfaisant ; il y a largement matière à réguler.

M. le président François Brottes. Peut-être pourriez-vous retirer l’amendement, pour le déposer de préférence avant l’examen en séance, qu’il permettre du moins d’ouvrir le débat sur cette question dans l’hémicycle.

M. Yves Daniel. Je suis d’accord avec vous, monsieur le président. Nous sommes nombreux à avoir signé cet amendement, et un débat dans l’hémicycle permettrait de souligner le problème.

M. le président François Brottes. Qu’en pensez-vous, monsieur le ministre ?

M. le ministre. Votre souhait que l’on contrôle la bonne application de la loi relative la consommation me paraît tout à fait légitime, et je suis favorable à ce que l’on engage un débat sur le sujet dans l’hémicycle, en présence de Mme Carole Delga ; on pourrait ainsi aboutir à des engagements précis du Gouvernement. Cela étant, le fait que la loi modifie les règles en vigueur a peut-être suscité des réactions d’anticipation de la part de la grande distribution.

L’amendement est retiré.

La Commission en vient à l’amendement CE616 de Mme Annick Le Loch.

Mme Annick Le Loch. Cet amendement vise à supprimer l’adverbe « abusivement », qui a été introduit dans l’article L 442-6 du code de commerce par la loi relative à la consommation. Ce terme introduit en effet une distinction parmi les demandes de compensation des marges – officiellement interdites mais pratiquées par tous les grands distributeurs – entre certaines qui seraient légitimes et d’autres qui ne le seraient pas. En outre, le critère de l’abus me semble impossible à qualifier juridiquement. Cela reviendra à laisser la porte ouverte précisément aux abus – ce dont le secteur n’a nul besoin, vu les derniers communiqués des fédérations !

En ôtant du texte le terme « abusivement », nous renforcerions les dispositions tendant à rééquilibrer les relations commerciales entre les fournisseurs et les distributeurs. La guerre des prix à laquelle se livrent les enseignes de la grande distribution est dangereuse pour notre économie, en particulier pour le secteur agroalimentaire.

On a déjà bien du mal à faire respecter la loi ; si, en plus, la rédaction de cette dernière est sujette à interprétation, on risque d’aboutir à un résultat contraire à la volonté du législateur !

M. le ministre. Soyons clairs, madame Le Loch : par cet amendement, vous interdirez à toute entreprise de chercher à maintenir ou accroître ses marges ou sa rentabilité durant une négociation commerciale. Est-ce bien ce que vous voulez ?

M. le président François Brottes. Le problème, c’est qu’en l’absence de toute jurisprudence, il paraît délicat de distinguer ce qui serait abusif de ce qui ne le serait pas. Toutefois, vous avez raison, monsieur le ministre : si l’on supprime l’adverbe « abusivement », on enlève aux entreprises toute possibilité de générer du profit – or elles n’ont pas vocation à être philanthropes… Peut-être serait-il bon que le Gouvernement précise le sens qu’il donne au terme ?

M. le rapporteur. Je suis d’accord : on ne peut pas reprocher à une entreprise d’essayer de maintenir ses marges ou sa rentabilité. Avis défavorable.

Mme Annick Le Loch. Conserver le texte en l’état ne me semble pas pour autant une solution : à partir de quel seuil une augmentation de marges devient-elle « abusive » ? C’est impossible à définir juridiquement !

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 7 modifié.

Article 7 bis : Service public d'enregistrement et de contrôle des performances des ruminants

La Commission adopte l’article 7 bis sans modification.

——fpfp——

Membres présents ou excusés

Commission des affaires économiques

Réunion du mardi 24 juin 2014 à 21 h 30

Présents. - Mme Brigitte Allain, Mme Delphine Batho, Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Thierry Benoit, Mme Michèle Bonneton, M. François Brottes, M. André Chassaigne, M. Dino Cinieri, M. Jean-Michel Clément, M. Yves Daniel, Mme Fanny Dombre Coste, Mme Jeanine Dubié, Mme Marie-Hélène Fabre, Mme Pascale Got, M. Jean Grellier, M. Antoine Herth, Mme Laure de La Raudière, Mme Annick Le Loch, M. Philippe Le Ray, M. Jean-Pierre Le Roch, Mme Marie-Lou Marcel, Mme Frédérique Massat, M. Germinal Peiro, M. Hervé Pellois, M. Dominique Potier, M. François Pupponi, M. Frédéric Roig, Mme Béatrice Santais, M. Lionel Tardy, M. Jean-Marie Tetart

Excusés. - M. Damien Abad, M. Philippe Armand Martin

Assistaient également à la réunion. - M. Jean-Pierre Barbier, Mme Chantal Berthelot, M. Guillaume Chevrollier, Mme Annie Genevard, M. Michel Heinrich, M. Paul Molac, Mme Catherine Quéré