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Commission des Finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Mission d’évaluation et de contrôle

Jeudi 7 mai 2015

Séance de 9 heures

Compte rendu n° 16

Présidence de M. Pascal Terrasse, rapporteur

Les financements et la maîtrise de la dépense des organismes extérieurs de langue française

– Audition, ouverte à la presse, de MM. Ludovic Berthelot, sous-directeur de l’audiovisuel à la direction générale des médias et des industries culturelles (DGMIC) du ministère de la culture et de la communication, Romain Laleix, chef du bureau de l’audiovisuel public, et Benoît Lecerf, chargé de mission au bureau de l’audiovisuel public

M. Pascal Terrasse, rapporteur La direction générale des médias et des industries culturelles (DGMIC) du ministère de la culture et de la communication (MCC) est responsable du programme budgétaire 847 TV5 Monde qui porte sur la contribution française au financement de la chaîne multilatérale francophone. Nous avons donc souhaité vous interroger sur les points suivants : Quelles ressources sont affectées à TV5 Monde ? À quels évaluations et contrôles procédez-vous sur l’utilisation de ce financement par la chaîne ? Je précise que notre mission ne traite pas de la politique francophone, mais bien de la gestion financière des organismes extérieurs de langue française et, en l’occurrence, de TV5 Monde.

M. Ludovic Berthelot, sous-directeur de l’audiovisuel à la direction générale des médias et des industries culturelles (DGMIC) du ministère de la culture et de la communication. TV5 Monde est une chaîne multilatérale à vocation mondiale, qui occupe une place à part au sein des opérateurs audiovisuels sur lesquels le MCC exerce une co-tutelle. Le Gouvernement a récemment et opportunément clarifié les rapports entre TV5 Monde et France Médias Monde (FMM), deux acteurs qui proposent une offre à la fois complémentaire et différenciée. Ainsi, en 2013, FMM a cédé la place à France Télévisions comme actionnaire de référence de TV5 Monde, à la suite de nombreuses réflexions, dont celle confiée à M. Jean-Paul Cluzel. Cette évolution a été positive pour les relations de la partie française avec ses partenaires francophones dans TV5 Monde, à savoir la Suisse, la Fédération Wallonie-Bruxelles le Québec et le Canada. Depuis deux ans, la différenciation éditoriale a également été renforcée: un contrat d’objectifs et de moyens (COM) a été signé pour la période allant de 2013 à 2015 pour FMM, et TV5 Monde vit avec le plan stratégique couvrant les années 2014, 2015 et 2016. TV5 Monde s’est recentrée sur une programmation culturelle généraliste qui la différencie des autres chaînes d’information internationales, dont France 24, membre du groupe FMM.

La signature d’un accord-cadre entre FMM et TV5 Monde, approuvé par les conseils d’administration des deux opérateurs l’année dernière, a permis de poser le principe selon lequel aucune distribution à l’étranger de l’une de ces chaînes ne doit avoir pour conséquence d’évincer l’autre.

FMM poursuit des missions définies dans la loi et déclinées dans un cahier des charges et un contrat d’objectifs et de moyens. Il regroupe France 24, chaîne qui pouvait se présenter comme une concurrente de TV5 Monde, mais qui, en réalité, occupe un spectre distinct de celui de TV5 Monde grâce aux clarifications récentes. Nos partenaires francophones, soucieux d’assurer l’originalité de TV5 Monde, partagent d’ailleurs ce constat.

M. Pascal Terrasse, rapporteur. France 24 est une chaîne d’information francophone.

M. Ludovic Berthelot. Pas uniquement francophone, car elle émet également en anglais et en arabe. De son côté, TV5 Monde n’émet bien entendu qu’en français, puisqu’elle est la chaîne de la francophonie, mais ses programmes ne se limitent pas à l’information.

M. Pascal Terrasse, rapporteur. La ligne éditoriale de TV5 Monde est centrée sur la culture, alors que France 24 ne diffuse que des programmes d’information.

M. Ludovic Berthelot. Tout à fait.

M. Romain Laleix, chef du bureau de l’audiovisuel public à la direction générale des médias et des industries culturelles (DGMIC) du ministère de la culture et de la communication. France 24 est une chaîne d’information en continu émettant en trois langues, et TV5 Monde est une chaîne généraliste, exclusivement francophone, dont la programmation fait une large place à la culture.

M. Ludovic Berthelot. TV5 Monde est une chaîne multilatérale dont la gouvernance repose sur deux instances : un conseil d’administration dans lequel figurent les radiodiffuseurs partenaires – France Télévisions, actionnaire à hauteur de 49 %, FMM, Arte, la Radio-télévision suisse (RTS), la Radio-télévision belge francophone (RTBF) et Radio-Canada – et la conférence des ministres qui se réunit tous les deux ans. Les hauts fonctionnaires représentant les gouvernements se rencontrent annuellement.

M. Pascal Terrasse, rapporteur. Quels sont les pays financeurs de TV5 Monde ?

M. Romain Laleix. Les pays bailleurs de fonds sont la France, la Fédération Wallonie-Bruxelles, la Suisse, le Québec et le Canada.

M. Benoît Lecerf, chargé de mission au bureau de l’audiovisuel public à la direction générale des médias et des industries culturelles (DGMIC) du ministère de la culture et de la communication. Il peut arriver que des États africains apportent des contributions ponctuelles, mais ces apports ne sont pas inscrits dans la charte de TV5 Monde. Le partenariat ne concerne bien que cinq gouvernements.

M. Ludovic Berthelot. L’ensemble des gouvernements bailleurs de fonds ont signé une charte, qui définit l’organisation, les missions et les règles d’approvisionnement en programmes francophones des différents pays. Elle traite également des questions de distribution et de financement propres à TV5 Monde. Elle date de 2005 et a été révisée en 2008 et à la fin de l’année 2014. Les discussions multilatérales entre ministres francophones portent notamment sur les sujets budgétaires, qu’examinent ensuite le conseil d’administration et les radios-télévisions partenaires qui n’ont pas de réel de pouvoir de décision en matière financière. Le MCC et le ministère des affaires étrangères et du développement international (MAEDI) avancent de concert dans cette enceinte, le premier gérant surtout les programmes et les finances, quand le second traite des enjeux géographiques, stratégiques et de francophonie.

M. Pascal Terrasse, rapporteur. TV5 Monde émet-elle au-delà de l’espace francophone ?

M. Ludovic Berthelot. Oui, et il s’agit de l’un des objectifs principaux assignés à TV5 Monde, qui doit véhiculer la langue française dans les pays non francophones.

M. Benoît Lecerf. TV5 Monde est diffusée dans plus de 250 millions de foyers, répartis dans des pays francophones ou non, car ses programmes sont sous-titrés en douze langues.

M. Pascal Terrasse, rapporteur. Parmi ces 250 millions de foyers, combien regardent TV5 Monde ?

M. Benoît Lecerf. TV5 Monde est suivie par 38 à 40 millions de téléspectateurs hebdomadaires en cumulé.

M. Pascal Terrasse, rapporteur. Comment parvenez-vous à cette estimation ?

M. Benoît Lecerf. Les mesures varient selon les pays et n’ont pas toutes la même précision que celles de Médiamétrie, par exemple. Les audiences de TV5 en Afrique sont évaluées par des sondages réalisés pour un panel de chaînes internationales – France 24, la British Broadcasting Corporation (BBC) et la Deutsche Welle – émettant dans les principales villes africaines et au Maghreb.

M. Romain Laleix. Les données dont nous venons de faire état agrègent les résultats de plusieurs études : celle d’Africascope pour la zone africaine, de Maghreboscope pour le Maghreb et de l’European Media&Marketing Survey (EMS) pour l’Europe.

M. Ludovic Berthelot. TV5 Monde émet, depuis la France, huit signaux différents à destination du monde entier, tous francophones et sous-titrés. Ils s’adressent à des populations spécifiques d’Amérique du Nord, du Maghreb, d’Afrique et d’Asie. Un neuvième signal, celui du Québec et du Canada, est opéré sur place par la société TV5 Québec-Canada, exclusivement financée par les gouvernements bailleurs de fonds nord-américains.

La contribution annuelle de la France au budget de TV5 Monde relève depuis 2015 de la redevance allouée à l’audiovisuel public – des crédits budgétaires l’alimentaient jusqu’alors. Elle se décline selon les missions assurées par cet opérateur. Ainsi, une partie des frais est assumée par l’ensemble des pays bailleurs de fonds, une autre, dédiée aux programmes nationaux est acquittée par les pays concernés, et la dernière part du financement est assurée par la France, en compensation des emplois et des recettes fiscales découlant de la localisation du siège de la chaîne à Paris. En 2015, cette ligne de financement représentait 76,2 millions d’euros – montant qui a crû ces dernières années. La charte stipule qu’indépendamment du concours lié au siège de l’opérateur, la France contribue à hauteur des six neuvièmes du budget de TV5 Monde – soit les deux tiers, contre trois quarts il y a quelques années –, la Suisse, la Belgique et le Canada finançant chacun un neuvième de celui-ci. La part canadienne est partagée entre le gouvernement fédéral et celui de la province du Québec.

Depuis 2013, la France a pris du retard dans le versement de l’apport qu’elle doit à TV5 Monde dans le cadre du respect des quotes-parts des frais communs. Ce retard a été en partie rattrapé par une augmentation de la contribution française en 2014. En tout état de cause, la France s’est engagé lors de l’adoption du plan stratégique 2014-2016 à s’efforcer de rattraper ce retard de financement avant la fin du plan.et tout porte à croire qu’elle respectera cette promesse. La compensation de l’avantage de la localisation du siège est passée de 12,2 millions d’euros en 2008 à 14,4 aujourd’hui – soit plus de 18 % d’augmentation – en raison de ses règles de calcul. Celles-ci ont changé en 2012 : avant cette date, elles reposaient sur une quote-part prenant en compte chaque année les dépenses afférentes au siège, ainsi que différents indices dont celui du coût de la construction ; depuis trois ans, la contribution est fixe. Elle s’élevait à 13,8 millions d’euros en 2012. Ce montant est simplement réindexé tous les ans et atteint 14,4 millions d’euros aujourd’hui.

Chaque pays fournit des programmes provenant de ses diffuseurs partenaires, ceux-ci étant France Télévisions et Arte pour la France. TV5 Monde, éditrice, se trouve responsable juridiquement de la programmation qu’elle choisit au sein du catalogue dont elle dispose. Elle doit s’acquitter des coûts liés à la libération des droits à l’international, ces frais spécifiques transitant, pour la France, par le budget de TV5 Monde, à la différence des autres diffuseurs qui sont directement pris en charge par leur opérateur national. À l’exception des programmes dont France Télévisions détient les droits, il est nécessaire d’acquérir ceux-ci auprès des producteurs indépendants sous la forme de préachat des droits de diffusion pour les fictions et les documentaires.

Le montant de la part de la dotation française qui permet à TV5 Monde de libérer les droits des programmes diffusés sur France Télévisions s’est élevée à 15,1 millions d’euros en 2014.

M. Ludovic Berthelot. Les huit signaux mondiaux de TV5 Monde diffusent environ 70 000 heures de programmes par an, dont 38 000 – soit 54 % – proviennent d’opérateurs français. La production interne, réalisée au siège avenue de Wagram à Paris, représente 20 % de la grille. Les autres diffuseurs francophones fournissent un peu plus de 20 % des programmes diffusés sur la chaîne.

France Télévisions fournit 44 % de l’approvisionnement français et Arte 4 %, le reste, soit 52 %, découlant de l’achat de droits et notamment du préachat de fictions et de documentaires.

M. Pascal Terrasse, rapporteur. La France dispose-t-elle d’une forte capacité à produire des émissions dans les pays étrangers, y compris francophones ?

M. Ludovic Berthelot. La situation respecte en tout cas les équilibres sur lesquels reposent l’actionnariat de TV5 Monde et les clefs de répartition prévues par la charte. La France dispose d’une capacité de production supérieure à celle de ses trois autres partenaires, et la croissance de l’audience de TV5 Monde se révèle satisfaisante dans les bassins de population visés. La France possède bien entendu une place particulière dans la francophonie, qui se retrouve dans la part qu’elle occupe dans les approvisionnements de la chaîne.

M. Romain Laleix. TV5 Monde permet à nos compatriotes qui vivent à l’étranger d’accéder à un grand nombre de programmes de France Télévisions, dont les journaux télévisés ; elle remplit ainsi sa fonction de diffusion de l’audiovisuel public français dans le monde.

M. Ludovic Berthelot. Le plan stratégique pour la période allant de 2014 à 2016 prévoit des actions prioritaires pour TV5 Monde, qui ont été validées par la réunion annuelle des représentants des gouvernements bailleurs de fonds et par le conseil d’administration de la chaîne. Ce plan a été construit à partir d’une hypothèse de stabilité des ressources des contributions publiques pendant ces trois années. Cette constance se retrouve dans la dotation triennale française pour les années 2015, 2016 et 2017 et dans les positions des autres gouvernements bailleurs de fonds. Le plan promeut des projets de développement pour la chaîne, qui pèsent à hauteur de 1,95 milliard d’euros chaque année. Il s’agit de la création d’une chaîne destinée à la jeunesse en Afrique, du renouvellement de l’habillage des antennes, du passage partiel en haute définition et du lancement d’une émission culturelle francophone hebdomadaire.

Les gouvernements ont fait comprendre à la chaîne qu’elle devrait financer elle-même les autres projets qu’elle souhaiterait éventuellement déployer. TV5 Monde vient de suivre cette feuille de route avec la création, sans ressources supplémentaires, de la chaîne Style, centrée sur l’art de vivre à la française, destinée principalement au public asiatique et notamment chinois, et dont l’antenne a ouvert en avril dernier.

La réunion des hauts fonctionnaires représentant les gouvernements de novembre dernier a confirmé ce cap financier, la France ayant maintenu sa contribution pour 2015 au niveau de l’année précédente. Cette ligne est également suivie par la Suisse, le Canada et la Belgique, cette dernière ayant rattrapé le retard de financement qu’elle accusait jusqu’alors.

TV5 Monde a subi le 8 avril dernier, soit le même jour que le lancement de la chaîne Style, une attaque informatique d’une ampleur inédite pour un média dans le monde. Un mois a passé, mais les équipes de TV5 Monde restent perturbées par ce choc, il est vrai très inquiétant. Cet événement a des incidences financières, car la chaîne va devoir consentir des investissements pour le renforcement de la sécurité de son système d’information. Nous nous situons au stade de l’évaluation de ce coût, et TV5 Monde continue de travailler avec l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (ANSSI) à la reconstruction de son réseau informatique. Nous tentons de déterminer l’ampleur de l’impact de cette attaque sur le budget de l’opérateur pour l’année 2015 et pour les exercices suivants.

M. Pascal Terrasse, rapporteur. TV5 Monde demandera-t-elle une rallonge financière ou réussira-t-elle à faire face à cette dépense imprévue à ressources constantes ?

M. Ludovic Berthelot. Il est un peu tôt pour répondre à cette question, car TV5 Monde est en train d’estimer le coût financier induit par cette attaque.

M. Pascal Terrasse, rapporteur. Discuterez-vous avec les partenaires étrangers ?

M. Ludovic Berthelot. Bien sûr, et il est probable que l’on organise une réunion spécifique avec eux. Je ne souhaite pas fournir de chiffre maintenant, car les estimations fournies par TV5 Monde sont encore liminaires, mais il représente plusieurs points de pourcentage du budget de la chaîne et plusieurs millions d’euros. Cependant, ce montant peut évoluer dans un sens positif, des appels d’offres devant encore être lancés. En outre, ce coût ne concernera pas que l’année 2015, car les enjeux d’investissement ne sont pas ponctuels mais durables.

Les ministres de l’intérieur et de la culture et de la communication ont réuni les acteurs des médias pour leur expliquer la situation et pour les mettre en garde contre l’ampleur du risque existant.

M. Pascal Terrasse, rapporteur. Cette attaque n’a-t-elle pas été rendue possible par des économies opérées par TV5 Monde sur la sécurité de son système d’information ? Une telle frappe pourrait-elle toucher d’autres médias dépourvus de dispositifs de sécurité efficaces ?

M. Ludovic Berthelot. TV5 Monde n’a pas délaissé la sécurisation de son système d’information au profit d’autres dépenses.

Une enquête judiciaire sur cette attaque est en cours, si bien que nous ne disposons encore que de peu de renseignements. Nous comprenons simplement que cet assaut fut d’une ampleur inédite et que les autres médias ne sont pas à l’abri d’en subir une comparable. Chacun doit avoir conscience qu’il peut être une cible, et la réponse à cette menace doit être globale.

Les mesures visant à maîtriser la dépense constituent un enjeu important, que nous mettons au centre de nos discussions avec la chaîne. Le plan stratégique a déjà décidé de l’arrêt du sous-titrage dans des langues moins parlées dans le monde, et des renégociations de contrats de prestations de sous-titrages viennent d’être menées. Elles permettront à la chaîne d’économiser près d’un million d’euros en 2015 sur ce lourd poste de dépenses. De même, le contrat de bail de location des locaux de l’avenue de Wagram a été revu à la baisse. Pour un budget d’une centaine de millions d’euros, ces économies ne sont pas anecdotiques.

La mutualisation de certaines ressources avec les autres opérateurs de l’audiovisuel public – c’est-à-dire les sociétés nationales de programmes (SNP) dont la principale est France Télévisions – représente également une source d’économies. Des premières synergies ont été déployées en 2013 et en 2014 par le biais d’appels d’offres communs pour des dépenses de capacité satellitaire, de bureautique, de prestations d’accueil et de sécurité. Le MCC souhaite donner davantage d’ampleur à ce mouvement, car il nous semble que l’audiovisuel public peut progresser en la matière. C’est pour cette raison que Mme Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication, a annoncé en mars dernier la mise en place prochaine d’un comité de pilotage stratégique de l’ensemble des entreprises de l’audiovisuel public.

La pérennisation des emplois précaires est une question sensible : le taux de précarité, élevé dans l’ensemble du secteur des médias, est particulièrement fort à TV5 Monde. En effet, la population des journalistes comprend de nombreux pigistes et celle des techniciens, dont les gros bataillons sont des monteurs, est très largement constituée d’intermittents. Le Gouvernement souhaite pérenniser les contrats de certains salariés ; TV5 serait concernée à hauteur d’une soixantaine d’équivalents temps plein (ETP). Les plans de réduction de la précarité engagés depuis 2014 ont bénéficié à une douzaine de journalistes et à autant d’intermittents. Le surcoût de l’opération pour les seuls journalistes représente environ 200 000 euros par an.

En outre, la chaîne passe régulièrement des provisions pour faire face aux éventuelles condamnations découlant de la non-intégration d’intermittents devant les prud’hommes. Ces provisions se sont élevées à près de 2,5 millions d’euros en 2014 du fait de l’ouverture de 17 contentieux. TV5 Monde se montre très attentive à ces sujets qui concernent l’ensemble des entreprises de l’audiovisuel public. Les conséquences financières de l’attaque informatique renforcent la vigilance de la chaîne car son équilibre financier reste fragile, même s’il est assuré jusqu’en 2016.

Nous avons besoin d’indicateurs permettant de contrôler l’emploi des contributions publiques et la performance de l’action de TV5 Monde. Nous évoluons dans un cadre spécifique qui est celui d’un financement et d’une gouvernance multilatéraux de la chaîne, et qui repose sur une charte et non sur un COM. Le MCC a néanmoins réussi à développer le même nombre d’indicateurs pour assurer le suivi de la gestion de TV5 Monde que pour les SNP. La conférence des ministres discute du bilan annuel d’exécution du plan stratégique. Le MCC, tutelle financière, assiste aux réunions de préparation des conseils d’administration, dispose donc des informations communiquées aux administrateurs et fait connaître la position de l’État avant la tenue de ces conseils.

M. Pascal Terrasse, rapporteur. Existe-t-il une régie publicitaire à TV5 Monde ? À combien se montent les recettes ? Quelle est la politique suivie pour faire connaître les produits français ?

M. Ludovic Berthelot. Les ressources propres de la chaîne s’avèrent assez faibles et ne dépassent pas 9 millions d’euros, soit moins de 10 % de son budget. Au sein de ces recettes, les abonnements représentent 3 millions d’euros et la publicité seulement 2,7 millions. La régie publicitaire de TV5 Monde est assurée par celle de France Télévisions. La moitié du chiffre d’affaires de la publicité était générée en France jusqu’en 2012, mais cette situation a récemment changé. La difficulté tient au fait qu’il n’existe pas vraiment de marché publicitaire accessible à une chaîne diffusée dans le monde entier en français.

M. Pascal Terrasse, rapporteur. Sans vouloir être désobligeant, le nombre d’auditeurs de TV5 Monde en France est très faible.

M. Ludovic Berthelot. Certes, mais la chaîne n’est pas présente sur la télévision numérique terrestre (TNT). TV5 Monde a été reléguée dans le fond des bouquets de chaînes – comme la plupart des chaînes internationales, France 24 comprise –, et la France reste un marché marginal.

Il existe un marché publicitaire mondial, et l’on pourrait envisager que des acteurs veuillent y communiquer en français ; mais cela n’est pas le cas, même si l’Afrique constitue un gisement de croissance pour le marché de la publicité.

M. Pascal Terrasse, rapporteur. TV5 Monde a-t-elle une ambition en la matière ?

M. Ludovic Berthelot. Oui, même s’il est encore faible, le chiffre d’affaires a crû de 20 % en Afrique au cours des dernières années, et ce continent représente 40 % du chiffre publicitaire total. La concurrence est rude, et il faut réussir à diffuser TV5 Monde sur la TNT africaine.

M. Romain Laleix. Dans la grande majorité des cas, TV5 Monde est présente dans des bouquets payants pour lesquels le marché publicitaire est réduit. La diffusion sur la TNT en Afrique constitue donc un enjeu majeur pour la chaîne. TV5 Monde suit avec vigilance le passage des pays africains à la TNT, afin d’être bien positionnée le moment venu.

M. Pascal Terrasse, rapporteur. Les bouquets payants ne sont pas diffusés avec la même ampleur, et il me semble que TV5 Monde est moins bien placée que les chaînes allemandes et italiennes dès que l’on sort du bouquet des hôtels du groupe Accor.

M. Romain Laleix. Beaucoup de chaînes internationales, souhaitant accroître leur influence, paient pour cette distribution, alors que TV5 Monde s’inscrit dans une logique opposée, puisqu’elle cherche dans la distribution une source de diffusion, mais également de revenus.

M. Benoît Lecerf. Le marché des hôtels est très spécifique, puisque les chaînes démarchent directement les groupes.

M. Pascal Terrasse, rapporteur. Nous vous remercions des réponses que vous nous avez apportées et attendons les compléments écrits que vous voudrez bien nous transmettre.

——fpfp——