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Jeudi 10 avril 2014

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 8

Présidence de M. Jean-Christophe Fromantin, Président

– Présentation, ouverte à la presse, des travaux réalisés par des étudiants de Sciences Po Paris et du Centre Michel Serres, suivie d’un débat

Mission d’information
sur la candidature de la France à l’exposition universelle de 2025

M. le président Jean-Christophe Fromantin. Mes chers collègues, nous avons le plaisir d’accueillir aujourd’hui des élèves de Sciences Po Paris et du Centre Michel Serres, qui vont nous présenter leur projet pour la candidature de la France à l’Exposition universelle de 2025.

Présentation d’un « power point » par des élèves de Sciences Po Paris.

Mlle Josepha Degosse. Bonjour mesdames, bonjour messieurs, bienvenue en 2025. Vous êtes arrivés à l’exposition universelle française, mais attention, cette exposition n’est pas comme les autres !

Vous n’êtes pas de simples visiteurs, vous êtes des participants. Il ne s’agit pas d’une exposition à proprement parler, mais d’une vraie expérience. Celle-ci n’est pas organisée en un site unique – avec différentes indications du type « sens de la visite », « attention, pas de flash », etc. –, elle est organisée en réseau.

Préparez-vous, grâce à votre implication active, à une expérience qui vous emmène en France, se poursuit dans les transports du Grand Paris, et s’invite même chez vous.

Les États, régions et toutes sortes d’organisations non étatiques vous proposent d’accéder aux nouvelles innovations grâce à des expériences interactives et multi sensorielles. Saviez-vous que le toucher est un sens fondamental à l’expérience culinaire et que la transmission d’odeurs permet de rendre plus réaliste une communication à distance ? Les différents ateliers présents dans les pavillons vont vous le faire découvrir…

Préparez-vous aussi à rencontrer des personnes, qui ont les mêmes centres d’intérêt que vous, pour des relations amicales ou professionnelles, grâce à l’ « Expo up ». Cette application, disponible sur smartphone et tablette, connectera tous les lieux et tous les participants entre eux.

Préparez-vous, enfin, à voyager. Si l’exposition a sa porte d’entrée dans le Grand Paris, elle est aussi reliée à des événements dans des régions de France, en Europe, voire sur les cinq continents et même dans l’espace.

En nous appuyant sur ces idées novatrices, mais aussi sur l’héritage des expositions universelles depuis 1851 – dont vous voyez à l’écran les différents thèmes –, nous vous proposons le thème « Tant de vie(s). Une nature ». Il s’agit de la traduction de notre thème original « Many lives. One nature », puisque nous avons travaillé entièrement en anglais avec une équipe d’étudiants internationaux.

« Tant de vie(s) », tout d’abord, fait référence à l’ensemble des activités que nous pratiquons tous – activités culinaires, habillement, communication, expériences scientifiques, sportives, culturelles, etc. –, mais que, du fait de nos différences individuelles et sociales, nous exerçons différemment. Nous avons classé ces activités en sept groupes : arts vivants et cinéma ; sports et loisirs ; beaux-arts ; sciences et éducation ; cuisines et agriculture ; nature et biodiversité ; modes et habillement.

Malgré cette diversité, nous partageons tous une seule et même nature. D’où la seconde partie de notre thème, « Une nature ». Une seule nature, un seul environnement où nous vivons tous et que nous devrons apprendre à respecter. Cette nature commune nous pousse à coopérer et à interagir pour résoudre les problèmes communs à l’Humanité, lesquels seront exacerbés en 2025 du fait de l’augmentation exponentielle des échanges et de la dissolution des frontières.

Cette interconnexion n’apporte pas seulement des problèmes, elle offre aussi de formidables opportunités, comme celle – pourquoi pas ? – d’inviter le monde entier en France autour d’une volonté commune d’éclairer l’avenir de l’Humanité. Belle perspective !

Nous représentons notre thème dans notre logo par l’ADN, cette matrice de la nature humaine et de sa diversité. Pour nous, les différences ne sont pas des clivages qui doivent nous diviser, elles sont des richesses à valoriser.

À nos yeux, ce thème est capable de convaincre les décideurs français et les membres du Bureau international des expositions (BIE), mais aussi et surtout les Français qui aspirent à dépasser ce climat de morosité ambiante que l’on tente de leur imposer.

Nous vous invitons donc aujourd’hui à vous engager avec nous – et pour la France – dans une nouvelle dynamique autour de ce projet.

Voyons maintenant comment nous l’avons organisé.

M. Aloïs Kirner. « Many lives. One nature », « Tant de vie(s). Une nature ». Comment ce thème se traduit-il sur le terrain ?

En 2025, nous serons un village global. Nous aurons conscience de l’existence de nos similitudes et de nos différences, nous ferons tous les mêmes choses, mais différemment. Telle est la philosophie de notre thème.

Ce village global se décline en sept villages, qui incarnent sept facettes de l’Humanité. Cette liste, sur laquelle nous avons travaillé depuis le début du projet, est légitime bien qu’améliorable. Notre terrain de jeu, c’est la France et, avant tout, le Grand Paris.

Le Grand Paris et la plupart des infrastructures seront réalisés d’ici à 2020-2030 ; l’exposition universelle aura lieu en 2025. Nous cherchons donc à tirer parti de ces horizons temporels communs pour mettre en commun les moyens, les ressources, mais aussi les objectifs. C’était donc pour nous une évidence de travailler sur la base du Grand Paris.

Tout autour du Grand Paris, chacun des sept sites se spécialise déjà dans le thème que nous voulons lui attribuer. Nous réfutons l’idée selon laquelle l’exposition universelle serait une cité éphémère. Dans notre projet, chaque village a déjà une histoire, une spécialité au regard du thème que nous lui attribuons. Pendant six mois, il aura un présent et, après l’exposition universelle, un futur.

Nous installerons le village des « arts vivants et du cinéma » à Saint-Denis – où Luc Besson a ouvert sa cité du cinéma. Le village « sports et loisirs » s’installera à L’île de Puteaux, à proximité du Bois de Boulogne et de grandes installations sportives. Versailles – patrimoine majeur, où les touristes auront à cœur de se rendre à leur arrivée en France – accueillera le village des « beaux-arts ». Le plateau de Saclay sera dédié aux « sciences et à l’éducation ». Rungis, le marché de gros le plus important au monde, accueillera les « cuisines et l’agriculture» du monde. Le Bois de Vincennes sera consacré à la « nature et à la biodiversité ». Enfin, le projet immobilier Europa City, qui va émerger d’ici à 2020 au nord de Paris, sera consacré aux « modes et à l’habillement» du monde.

Parallèlement à ces sept villages, qui constitueront une toile autour de Paris, il y aura un huitième point géographique : le centre-ville. L’expérience de l’exposition débutera véritablement au centre de Paris, où sept monuments historiques donneront chacun un avant-goût de ce que vous pourrez découvrir à l’extérieur de Paris.

Cette approche crée des liens. Elle crée un lien entre le centre-ville et la banlieue. Le Grand Palais, par exemple, qui pourra accueillera le village « cuisines et agriculture », sera lié d’une manière thématique au Bois de Vincennes. Cette approche créera également un lien entre héritage et innovation. À cet égard, nous voulons reprendre la belle idée d’ExpoFrance, celle d’offrir aux nations participantes la possibilité d’investir le patrimoine de la ville, de s’approprier un monument. Nous pourrions, par exemple, mettre à l’honneur les pays d’Amazonie pour obtenir une superbe Tour Eiffel végétale !

Le plateau de Saclay, qui accueillera le village des sciences et de l’éducation, est un des sites clés du Grand Paris. Il est en passe de devenir une « Silicon Valley à l’européenne », avec 3 milliards d’investissements publics dans le futur proche et 50 kilomètres carrés de terrains disponibles. Il est donc tout à fait réaliste de l’intégrer au projet d’exposition universelle. Ce faisant, nous donnerions la possibilité aux nations participantes d’y exposer un de leurs pavillons pour faire valoir leurs travaux dans les domaines de la recherche, des sciences et de l’éducation. Nous donnerions également la possibilité aux acteurs non étatiques – ONG, grandes entreprises, institutions universitaires, centres de recherche – de présenter un pavillon, sachant qu’en 2025 ils seront, plus encore qu’aujourd’hui, des contributeurs majeurs de la recherche et de la science au niveau mondial.

Ainsi, nous pourrons visiter des pavillons appartenant aux nations désireuses de mettre en valeur leurs travaux scientifiques, par exemple, mais aussi des pavillons des Arts et métiers, de Sciences Po, d’Harvard, etc.

Vous l’avez compris, notre projet prévoit une articulation entre plusieurs sites autour de Paris. Mais qui dit plusieurs sites, dit déplacement d’un site à l’autre. C’est pourquoi, dans notre projet, les transports constituent un élément crucial.

D’abord, les transports seront innovants. L’exposition universelle est l’occasion de mettre en valeur les technologies innovantes. La France est à la pointe du progrès en matière de transports : elle pourra mettre en avant ce formidable atout.

Ensuite, les transports seront une expérience intégrée. Prendre le métro du Grand Paris pour vous déplacer d’un village à un autre vous permettra de voyager, de découvrir, d’être surpris… Comme vous le savez, le RER C, ligne qui dessert Versailles, a été entièrement décoré de reproductions de Versailles, notamment des magnifiques peintures de Le Brun. Cette idée nous a inspirés pour faire des transports un prolongement de l’expérience de l’exposition universelle.

Les transports seront également un moment social. Ils sont l’endroit où l’on est en contact avec le plus de personnes dans la journée, mais aussi où l’on est le plus anonyme. Nous cherchons à mettre fin à ce paradoxe, notamment grâce à l’« Expo up ». Une application sur votre smartphone vous permettra de vous connecter, par exemple dans les transports, avec les participants qui ont les mêmes centres d’intérêt que vous.

Enfin, les transports seront une expérience surprenante. L’exposition universelle est une fête où les gens s’amusent, elle doit donc surprendre. Lors de l’exposition universelle de 1900 à Paris, les Parisiens et les étrangers furent surpris, ravis, fascinés… de voir un trottoir roulant ! C’est un peu ce genre de sensation qu’il faudrait reproduire.

Dans notre projet, l’exposition universelle sera une offre de pavillons sur-mesure. Cet élément est fondamental.

Dubaï a remporté l’organisation de l’exposition universelle de 2020 parce qu’elle a déroulé le tapis rouge à toutes les nations participantes, en leur offrant un choix de pavillons sur-mesure, à la carte. Nous voulons mettre en place la même chose : offrir à chaque nation participante la possibilité de s’installer dans le pavillon qu’elle souhaite, comme elle l’entend. Les maîtres mots seront « modularité » et « liberté ». Grâce à une offre à la fois modulable et flexible, les pavillons pourront être physiques, virtuels, pérennes, temporaires, conservés ou démontés après l’exposition. Souvenez-vous : après l’exposition de Lisbonne en 1998, certains pavillons ont été conservés, déplacés et réutilisés, comme le pavillon de l’eau, devenu quinze ans plus tard un gymnase dans un parc en banlieue.

Ainsi, l’exposition universelle n’est pas une fin en soi. Elle permet, pendant six mois, de mettre à l’honneur le patrimoine existant, de créer des liens entre héritage architectural et innovation, mais aussi de proposer de nouvelles pistes. Notre philosophie est claire : laisser sa marque et revenir – « leave your mark and come-back ».

À l’image des amoureux du monde entier qui viennent sur le Pont des arts pour attacher un cadenas en symbole de leur amour, et qui peuvent revenir plusieurs années plus tard, chaque individu, chaque nation participante viendra à Paris, y laissera sa trace, pourra revenir dix ou quinze ans après et constater la trace de son passage. Pour traduire cette idée dans les faits, pourquoi ne pas imaginer que chaque participant puisse apposer sur les parois de la Petite ceinture une brique personnelle imprimée en 3D, créant ainsi une sorte de « walk of fame » universelle où il aura ses quinze minutes de gloire, mais pour l’éternité et dans le patrimoine parisien ?

Voyons maintenant comment convaincre les nations participantes de voter pour nous.

Mlle Charlotte Crémoux. Vous l’avez compris, Paris Expo 2025 n’est pas une expo comme les autres : c’est une expérience conçue par tous ceux qui y participent. Voilà pourquoi elle se doit aussi d’être une expérience conçue pour tous, pour chaque Français et pour chaque pays participant. Comment traduire cette expérience dans la réalité, et comment faire de Paris Expo 2025 un pari(s) gagnant ?

Nous avons trois objectifs. D’ici à 2025, nous devrons convaincre les Français qu’il s’agit d’un projet réalisable et ambitieux qui s’aligne sur les défis que s’est lancés la France pour les prochaines années. D’ici à 2018, nous devrons convaincre les 167 pays membres du BIE. D’ici à 2025, Paris Expo 2025 bâtira une plateforme de coopération entre les acteurs fédérés autour de cette merveilleuse aventure.

Pourquoi la France devrait-elle s’investir dans une exposition universelle ? Parce que ce projet répond à son ambition de poursuivre dans la voie de la compétitivité et de l’innovation. Le grand avantage de ce projet est de placer la France sous les projecteurs du monde, et le monde sous les projecteurs de la France, en créant de nouveaux liens, de nouveaux partenariats et de nouvelles idées. De surcroît, l’organisation de notre candidature autour du Grand Paris comporte un avantage de taille : rendre notre exposition universelle plus rentable et plus durable.

Notre exposition s’articule autour d’infrastructures présentes et en cours de construction pour le Grand Paris. Elle sera ainsi l’occasion de faire découvrir aux Français et au monde entier un nouveau Paris, plus ouvert, plus moderne et encore plus dynamique.

Paris Expo 2025 est avant tout un engagement national et régional, l’occasion de promouvoir le made in France à travers nos régions. C’est pourquoi nous avons imaginé de mettre à l’honneur chaque mois plusieurs personnalités régionales et de proposer à nos participants d’acheter un « pass » national afin de découvrir nos régions françaises.

Paris Expo 2025 est aussi un projet européen. Nous avons imaginé cette exposition comme une opportunité de célébrer nos partenariats, grâce à des événements jumeaux qui auraient lieu partout en Europe, et des « pass » Euro Paris expo 2025 permettant à nos participants d’y accéder.

Ainsi, en associant la France et l’Europe, Paris Expo 2025 sera un événement valorisant.

Au-delà, Paris Expo 2025 déroule le tapis rouge aux 167 pays membres du BIE. Lors d’une exposition universelle, une nation expose, mais surtout s’expose en nous livrant l’image qu’elle souhaite donner d’elle-même. C’est pourquoi nous proposons un menu de pavillons à la carte : il donnera la possibilité à chaque pays d’acheter, d’emprunter ou de louer un ou plusieurs pavillons dans un ou plusieurs villages.

Paris Expo 2025 est aussi un projet de coopération. Pourquoi ne pas imaginer une colocation de pavillons entre plusieurs pays partageant des intérêts ou des projets communs ?

Enfin, Paris Expo 2025 est un projet solidaire. Nous envisageons un fonds de solidarité, destiné à aider des pays dont le budget est faible, financé, d’une part, par une loterie virtuelle mondiale, permettant à ses participants de gagner des « pass » à l’exposition et, d’autre part, par un pourcentage d’opportunités publicitaires proposées aux pays participants.

En définitive, Paris Expo 2025 est un pari(s) gagnant, car viable et ambitieux. Comme l’a si bien dit l’un de nos compatriotes, « impossible n’est pas français ». Tel est le message que nous voulons faire passer au monde entier en vue de cette magnifique expérience !

M. Guillaume de Langre. Une campagne de communication permettra de nous assurer que nous nous adressons à tout le monde, afin que Paris Expo 2025 reçoive un public le plus vaste possible – des personnes, des entreprises, des instituts, des écoles.

Cette campagne de communication sera structurée autour de deux échéances – 2018, date de la décision du BIE, et 2025, année de l’exposition – et quatre phases. Chacune de ces phases correspond à un public précis. En 2017, il s’agira de convaincre les Parisiens que l’arrivée de milliers de personnes ne va pas chambouler leur quotidien, ni abîmer leur ville ; à partir de 2021, on s’adressera davantage à un public international. En 2017, il s’agira également de voir en quoi le concept d’exposition est bénéfique pour les Français et les Parisiens ; à partir de 2018, on abordera le thème lui-même de l’exposition, « Tant de vie(s). Une nature ».

En outre, la durabilité du projet est un élément primordial. Lors des JO de Sotchi, l’ensemble des médias internationaux s’est fait l’écho cet enjeu. L’objectif est donc de rassurer tout le monde.

Enfin, et Sotchi l’a également montré, la sécurité est un élément clé dans la dernière année, lorsque l’événement approche et que les journalistes étrangers commencent à arriver. Il s’agira donc de rassurer tout le monde, de prouver que nous maîtrisons la situation.

Nous envisageons une campagne parallèle, la campagne pour le renouveau de la marque France. J’y reviendrai.

La France, et Paris en particulier, disposent d’un atout majeur : leur présence dans les médias internationaux du mois de février au mois de juin grâce à des événements majeurs – Tour de France, Vendée Globe, Concours Lépine, Festival de Cannes, etc. Nous proposons donc de nous appuyer sur ces événements pour communiquer à travers le monde. Le Tour de France sera un excellent moyen de rassembler les régions autour de cette grande manifestation !

Voyons maintenant de quelle manière nous allons communiquer.

M. Mizuha Suzuki. Vous l’avez constaté : notre exposition universelle a un côté futuriste et novateur. Pour autant, notre thème « Tant de vie(s). Une nature » nous rappelle que nous communiquons à travers tous nos sens. C’est pourquoi notre stratégie de communication s’appuie sur une approche multi sensorielle.

Lorsque nous communiquons, nous utilisons essentiellement la vue et l’ouïe.

Pour la vue, nous allons créer des films holographiques ou en 3D, mais aussi développer des applications pour smartphones et lunettes à réalité augmentée, à l’image des Google glasses, qui seront synchronisées avec les événements de l’exposition.

Pour l’ouïe, nous allons organiser des concerts internationaux simultanés, où seront invités les musiciens du monde entier. Nous pourrons également organiser un concours musical, dénommé « Expovision »…

Il serait bien sûr très intéressant d’utiliser les réseaux sociaux – YouTube, Facebook et Twitter, qui vont évoluer d’ici à 2025 – pour communiquer avec les potentiels participants.

Nos autres sens, peu utilisés aujourd’hui, pourraient l’être davantage grâce à l’exposition universelle de 2025.

Tout d’abord, l’odorat. Avec LVMH, supporter officiel de l’exposition universelle, nous pourrons créer le parfum officiel de l’expo et le transmettre via les mobiles, ce qui permettra à tout le monde, même à ceux qui ne seront pas en France, de « sentir » l’exposition universelle !

Ensuite, le toucher. Avec le développement des nouvelles imprimantes, tout le monde pourra imprimer en 3D les symboles, les logos de l’exposition universelle, et même la ville de Paris.

Enfin, le goût. En tant qu’étudiant japonais en France, j’en apprécie beaucoup la cuisine. Nous avons pensé très intéressant de créer un « guide Michelin » version exposition universelle pour donner des informations aux participants, mais aussi d’organiser des festivals culinaires, où les participants en balade dans Paris pourront goûter des plats du monde entier…

Voilà comment l’exposition universelle de 2025 s’invitera chez vous !

M. Guillaume de Langre. Si vingt-cinq étudiants de dix-huit nationalités différentes ont décidé, à la fin de l’année 2013, de travailler ensemble sur un projet qui aboutira – peut-être – dans douze ans, c’est parce qu’ils y croient. Nous croyons en Paris, nous croyons en la France.

Pour réussir à attirer des personnes à une telle manifestation, l’image de la ville, du pays doit rayonner à travers le monde, incarner les valeurs d’une exposition universelle. Or aujourd’hui ce n’est pas vraiment le cas.

En termes d’image, la France était 3e en 2007, et 13e en 2012. Elle s’est maintenue dans le haut du classement grâce à la force de sa culture et de son patrimoine. Dans toutes les autres catégories, par exemple le climat des affaires, notre pays chute inexorablement. Si ce mouvement se poursuit, l’exposition universelle sera vide, d’où notre proposition d’une campagne, à l’image de celle de l’Angleterre en 2009.

Un étudiant de l’Oklahoma à qui je demandais récemment à quelle personnalité française il pensait spontanément m’a répondu Édith Piaf. Ce n’est pas pour cette image-là – la cité de l’amour, le printemps, les oiseaux… – que les gens viennent à une exposition universelle !

Trois ans avant les JO, je le disais, l’Angleterre a lancé une grande campagne de « rebranding », de renouveau de sa marque, à travers le monde entier, où toutes les personnalités du pays, notamment les chefs d’entreprise, se sont investies. Et cela a marché : notre image de ce pays est aujourd’hui meilleure que celle d’il y a dix ans.

En clair, le choix des personnalités, des ambassadeurs de l’exposition universelle est très important. Plutôt que de choisir Johnny, Belmondo ou Drucker, et sans demander à Stromae de se faire naturaliser, on devrait pouvoir trouver en France des personnalités qui incarnent le progrès, la jeunesse et l’innovation. Et pas n’importe quel progrès : le progrès proche de l’homme.

Ainsi, nous réinventerons l’exposition universelle, nous réinventerons la France.

Mlle Charlotte Crémou. Pour conclure, Paris Expo 2025 sera un projet profondément humaniste qui conjuguera universalisme et singularité. Ce projet est aussi beau sur la forme qu’il est réalisable sur le fond. Tel est le message que nous voulons faire passer aujourd’hui et qui fait la force de notre proposition.

On entend souvent dire que la France est morose, un peu pessimiste. Pour notre part, nous croyons en une France fidèle aux valeurs qui l’ont créée. Nous pensons que toutes les générations croient en une France fidèle aux valeurs des expositions universelles, où elle a été pionnière.

Paris Expo 2025 apportera ce souffle de dynamisme, ce sens de l’émulation que les Français attendent. Mais bien plus qu’un souffle, elle sera aussi l’occasion de pérenniser la célébration de l’Homme dans toutes ses différences et toute son unicité.

L’identité française est à la fois singulière et plurielle, comme le sera cette exposition. D’où notre proposition de réinventer l’ADN de l’exposition universelle, de réinventer la France.

Merci. (Applaudissements).

M. le président Jean-Christophe Fromantin. Deux verbes sont au cœur de ce projet : réinventer et réincarner.

Réinventer, c’est-à-dire refuser de continuer à vivre sur nos acquis, pour échapper à l’érosion que vous avez dénoncée et dont les répercussions sur l’emploi et sur notre tissu économique sont extrêmement graves.

Réincarner, c’est-à-dire donner aux valeurs françaises, aux valeurs de rêve que la France incarne encore à l’étranger, un nouvel élan.

M. Bruno Le Roux, rapporteur. Grâce à votre travail, on pourrait avoir en 2025 la première exposition universelle du XXIe siècle ! En effet, jusqu’à présent, les expos n’ont pas amené de rupture avec les précédentes.

Votre concept dynamite l’expo pour en faire une succession de lieux, où s’invitent la fête et la découverte. Cette multiplicité de sites vous semble une évidence, alors qu’elle apparait comme un frein à plusieurs des personnalités que nous avons auditionnées. Les techniques modernes, telles que le smartphone, facilitent d’ailleurs des entrées multiples.

En fin de compte, l’expo n’est-elle pas, dans votre esprit, prétexte à une fête nationale géante, voire internationale, permettant à un pays entier de s’offrir au monde ? C’est la dimension supplémentaire de votre travail ; vous rejetez l’expo conçue comme un monument qu’il faut visiter.

M. Guillaume de Langre. L’exposition universelle est bien évidemment une grande fête – et non un autre salon du mariage ou de l’agriculture Porte de Versailles ! C’est un événement qui implique toute la ville et toutes les régions.

M. Aloïs Kirner. Nous aimerions également que cette expo recrée une sensation qui devient rare de nos jours, je veux parler de l’émerveillement. Plus personne aujourd’hui ne se dit émerveillé ; les jeunes ne sont émerveillés par rien car ils ont accès à tout…

Pour nous, l’exposition universelle doit être un grand moment d’émulation qui fait rêver, un moment où les cultures du monde se rejoignent.

Mme Catherine Quéré. Je vous félicite pour votre présentation dynamique, moderne et très intelligente !

Les idées que vous avez évoquées – réseau, solidarité, durabilité, approche sensorielle – sont très intéressantes, tout comme celle de promouvoir l’expo grâce à des événements majeurs, comme le Tour de France Roland Garros, le festival de Cannes.

Je ferai trois remarques.

D’abord, dans LVMH, il y a « MH », et donc pas seulement le parfum, mais aussi le cognac et le champagne…

Ensuite, la dénomination « modes et habillement » me semble redondante, il faudrait peut-être utiliser le terme « luxe » ; et le village dénommé « cuisines et agriculture » pourrait peut-être intégrer la notion de « terroirs ».

Enfin, vous avez parlé de rêve, d’émerveillement ; il est un autre mot que j’aime beaucoup, c’est celui de bonheur.

M. Guillaume de Langre. Effectivement, avec Moët Hennessy, c’est la fête !

Notre projet intègre la notion de bonheur, car nous parlons de progrès proche de l’Homme. Nous voulons mettre en avant un progrès bon pour l’homme – pas celui de Star Wars –, car nous pensons que c’est naturellement vers cela que l’on va s’orienter. C’est une forme de progrès qui rapproche l’homme de lui-même, l’homme des autres hommes, et qui le rend donc plus heureux.

M. Yves Albarello. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, je pense nécessaire d’auditionner le maire de Paris pour connaître son sentiment sur ce que nous proposerons !

Mesdemoiselles, messieurs, l’architecture de votre projet est calquée sur le Grand Paris et ses clusters. Le volet « nature » doit y jouer un rôle prépondérant. Je pense donc qu’il devrait inclure le cluster Descartes, à Marne-la-Vallée, où 1 500 chercheurs travaillent sur le développement durable et les métiers verts de demain. La transition énergétique est devenue une réalité !

La Tour Eiffel est le monument le plus visité au monde. Et pourtant, vous imaginez la difficulté qu’a dû avoir son créateur pour imposer cette vision d’un nouveau Paris en 1889 ! Aujourd’hui, nous devons faire la même chose, forcer le destin, faire preuve d’imagination !

La France reste la première destination touristique du monde, et Paris la ville la plus visitée au monde. Or à l’heure actuelle, il n’y a aucune liaison directe entre l’aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle et la ville lumière. Par conséquent, un effort colossal en matière de transports et de mobilité s’impose si l’on veut recevoir 70 à 100 millions de visiteurs en 2025 ; rappelons qu’il y en avait déjà 50 millions en 1900 avec des moyens beaucoup plus limités ! L’achèvement du Grand Paris sera concomitant avec l’exposition : saisissons cette opportunité. La décoration du RER C est très sympathique : faisons la même chose, faisons rêver les gens !

En matière de communication, je trouve très intéressant le côté olfactif. Les meilleurs parfumeurs du monde sont à Paris : il faut, là encore, saisir cette opportunité. Pourquoi ne pas intégrer dans des revues ou magazines, vendus dans le monde entier, des microcapsules à l’intérieur desquels se trouvera le parfum de l’exposition universelle ? Car là nous serions des winners !

En conclusion, je vous félicite : vous êtes la preuve que des jeunes se battent pour la France !

M. Aloïs Kirner. Les transports sont effectivement un élément primordial : ils devront être développés. Mais pour mener cette réflexion, il vous faudrait plutôt vous adresser à des spécialistes, comme KPMG.

Pour notre part, nous nous sommes attardés, non sur la dimension quantitative de ce développement, mais sur sa dimension qualitative. Les gens passent beaucoup de temps dans les transports ! C’est pourquoi, en prenant l’exemple très intéressant du RER C, nous voulons repenser les transports pour en faire un moment agréable, un moment de plaisir, de contact avec les autres, avec d’autres cultures.

M. Guillaume de Langre. La Tour Eiffel, le cognac, les parfums, etc., renvoient à l’image traditionnelle de la France. Certes, nous devons construire l’exposition universelle sur cette base, mais il faut mettre en avant d’autres atouts, changer la manière dont nous parlons de Paris et de la France à l’étranger. Je pense que si notre pays a échoué lors de précédentes candidatures, c’est parce qu’il a trop misé sur une carte un peu datée, certes romantique, mais totalement insuffisante pour un tel événement.

Mlle Josepha Degosse. En matière de communication à distance, l’approche olfactive est une révolution. En 2025, l’outil de communication sera moins la revue que la tablette, les ordinateurs, les smartphones. D’où notre idée de transmettre l’odeur par des mécanismes qui s’ajouteront à ces technologies.

M. Jean-Louis Gagnaire. Vous avez évoqué la morosité ambiante en France. Vous êtes jeunes et optimistes : j’espère que vous prendrez une part active à l’exposition universelle de 2025.

Faire appel à des spécialistes pour les transports, comme KPGM ? Surtout pas ! Car ils vont parler technologie et ratios financiers, mais non pas imaginer ce que pourraient être les transports de demain. Twitter démarrait il y a à peine huit ans ! On ne sait pas ce que sera 2025, il y aura peut-être des révolutions à partir de nouveaux usages, et la technologie y contribuera.

Vous avez raison : il faut sortir des clichés traditionnels de la France. Sans nier ce qui fait sa force et celle de Paris, on peut parler du futur. Dans tous nos territoires, il y a une force d’innovation, une volonté de créer. C’est ce qu’on doit montrer au reste du monde. Il faut en finir avec une France arrogante et mettre en avant nos atouts. Les Français sont très appréciés à l’étranger, et notre système de formation reconnu. N’oublions pas qu’un grand nombre d’inventions ont été initiées chez nous, même si ensuite, on en a perdu l’exploitation commerciale. La France a en outre un rôle particulier à jouer pour transmettre ses valeurs.

Plutôt que de mode et de luxe, je préfère que l’on parle d’industrie créative, de design culinaire ; c’est une manière moderne de parler de nos traditions. Il y a donc un chemin à trouver. La dimension multi-sites est extrêmement intéressante, le lien avec les autres pays est essentiel. Ce sera bien l’exposition universelle de toute la France, et pas seulement du centre de Paris.

M. Bruno Leroux, rapporteur. L’exposition universelle doit laisser quelque chose derrière elle. Généralement, ce sont des bâtiments. Mais l’exposition de 2025 ne doit-elle pas laisser une technologie nouvelle, un type d’équipement totalement nouveau ?

Ne pourrait-on imaginer six ou sept cubes dans le Grand Paris dans lesquels, grâce aux nouvelles technologies qui existeront en 2025, on pourrait être immergé dans un autre monde ? Pensiez-vous à cela lorsque vous parliez d’ouverture sur le monde et sur l’espace ? Comment pourrait-on matérialiser cette ouverture sur l’espace ?

M. Guillaume de Langre. Pour le Plateau de Saclay, nous avions pensé, par exemple, à une rampe de lancement réelle ou à la reproduction holographique en taille réelle  du lancement d’une fusée à Kourou : les gens pourraient assister au lancement d’une fusée Ariane ! La technologie nous permettra bientôt de voir des endroits où l’on ne pourra jamais rêver d’aller… Pourquoi ne pas imaginer également des petites caméras, du type GoPro, dans l’espace afin d’admirer « en live » ce que « voit » la fusée ?

M. Aloïs Kirner. Je retiens deux choses de vos interventions.

D’abord, les gens viendraient à Paris pour voyager de façon virtuelle à partir de cette ville. Cela est tout à fait faisable ; les nombreuses technologies développées actuellement – hologrammes, réalité virtuelle, etc. – permettent ce genre d’expérience. C’est une bonne idée, sachant que Paris est la ville la plus visitée au monde.

Ensuite, l’exposition serait l’occasion d’exposer des technologies, mais aussi de travailler sur le progrès. En ce sens, elle serait non seulement une vitrine, mais également un atelier. C’est une philosophie que nous avons intégrée dans notre projet, car nous souhaitons que les énergies des différents pays soient mises en relation. D’où notre idée d’une approche multi-sites, où les nations et les acteurs non étatiques travailleraient ensemble sur chacun des thèmes. Ainsi, dans un climat d’émulation, chaque participant apporterait sa pierre à l’édifice. (Applaudissements.)

M. le président Jean-Christophe Fromantin. Merci beaucoup de cette très belle présentation.

Présentation d’une vidéo par des étudiants du Centre Michel Serres.

M. Quentin Dubuis. Qu’est-ce qu’une exposition universelle au XXIe siècle ? D’abord un thème, car c’est lui qui fait l’identité première d’une exposition universelle. Pour que celle-ci soit attractive, et donc réussie, il lui faut un thème fort, fédérateur, qui nous touche tous, au-delà de nos différences de culture, de génération et de langue. Ce thème doit être, pour le visiteur, la promesse d’une véritable expérience immersible, sensitive et sociale – pas seulement d’une expérience visuelle, esthétique et intellectuelle, ce que permet facilement internet. Ce doit être enfin un thème innovant, qui peut parler du passé de l’humanité, de son héritage, de son présent et de son actualité, mais surtout de son avenir, et dessiner un avenir meilleur. J’ai donc l’honneur de vous présenter le thème que nous avons choisi pour l’exposition universelle de 2025 : « Le génie du corps ».

Quoi de plus universel, en effet, que le corps ? Tous les êtres humains, sur la planète, ont un corps. Tous les êtres sont un corps. Le corps nous rassemble tous. Et en même temps chacun a un corps unique, un corps qui lui est propre. La première force de ce thème, « le génie du corps », est d’être universel et personnel. Il peut s’adresser au monde, et s’adresser à l’individu.

L’autre force de ce thème est son inégalable richesse, en raison des nombreuses capacités que notre corps nous offre. C’est par notre corps que nous pouvons manger, boire, nous déplacer, danser, donner la vie, percevoir, communiquer, imaginer, nous projeter, nous relaxer, etc. Bref, c’est dans notre corps et par notre corps que nous vivons le monde. C’est par notre corps que nous vivons notre environnement, naturel et social.

Ce thème « le génie du corps » nous permet d’aborder les grands défis du XXIe siècle avec un regard un peu différent, un point de vue nouveau : celui du corps. Parler du corps, faire l’expérience du corps, c’est nécessairement faire l’expérience de notre rapport à l’environnement. C’est prendre conscience que notre santé est forcément liée à la santé de notre milieu et de notre planète. C’est aussi faire l’expérience de notre propre différence et de la différence des autres, et l’occasion d’aborder le « vivre ensemble ». Comment partager un espace qui soit adapté à tous, quelles que soient ses différences ?

Enfin et surtout, « le génie du corps » est un thème d’avenir. Car, pour l’essentiel, le corps reste à découvrir. Le corps demeure pour nous un mystère qui pose beaucoup de questions. Comment fonctionne-t-il vraiment ? Quelles sont ses réelles limites ? Jusqu’où peut-il aller, se transformer, se réinventer ? En ce début du XXIe siècle, la célèbre formule de Spinoza : « Nul ne sait ce que peut le corps » est plus que jamais d’actualité.

C’est cette idée qu’expriment, avec leur propre perspective, deux des personnalités que nous avons rencontrées pour ce projet :

Selon Alain Berthoz, professeur au Collège de France, aujourd’hui, dans une perspective à vingt ans, à cinquante ans, dans tous les domaines, il faut non seulement refonder une théorie, mais retrouver des savoir-faire qui réintègrent le corps en actes dans la vie sociale et dans la technologie. C’est un grand défi.

Selon Georges Amar, prospectiviste de la mobilité, le corps est intéressant parce qu’il est en train de changer – c’est ce qu’il entend par « génie du corps » : d’une part notre connaissance du corps, nos moyens d’action sur le corps et dans le corps se renouvellent, d’autre part le corps est en train de devenir l’instrument fondamental alors que dans l’histoire humaine, on a toujours eu l’impression que l’instrument était ce qui supplée aux limites du corps.

Mlle Chloée Sersiron. « Le génie du corps » est un thème innovant.

L’objectif de notre dossier était d’inventer un nouveau concept d’exposition universelle. La France a une légitimité historique en la matière : c’est elle qui a inventé le concept d’exposition universelle, et c’est elle qui héberge en son sein le siège du Bureau international des expositions universelles (BIE).

Nous avons construit notre dossier autour de trois thématiques fortes, qui sont chronologiques : l’« avant exposition universelle », qui consiste dans la préparation par toutes les nations, en amont de 2025, de ce gigantesque évènement ; le « pendant exposition universelle », qui recoupe l’expérience du visiteur, placé dans une démarche très active ; et l’« après exposition universelle », qui marque les logiques de pérennité spatiale et temporelle.

Nous avons bâti l’« avant exposition universelle » autour d’une logique de co-construction. Il s’agit, dans cette première étape, de mobiliser les nations. Nous sommes partis du constat que les sociétés avaient évolué depuis le XIXe siècle et que celles d’aujourd’hui sont à la fois multiculturelles et hyper connectées. Nous avons donc voulu accélérer ces dynamiques de relations internationales en jouant sur les interactions entre les nations.

Ce n’est plus la France qui s’expose, mais la France qui invite les autres pays à mettre en avant ce qu’ils ont dans leurs patrimoines nationaux. Derrière cela, l’idée est de supprimer les pavillons nationaux qui mettent en avant de façon atomisée les fleurons industriels ou culturels de chaque pays, et de jouer sur des processus de collaboration pour mettre en œuvre des projets innovants en 2025.

Nous voulons placer dans une démarche active tous les participants de l’exposition universelle. Les visiteurs seront amenés à être acteurs de leur propre parcours, et les nations seront invitées à travailler main dans la main, en amont de 2025, sur des projets qu’elles créeront ensemble et présenteront à l’occasion de ce grand évènement.

Premier exemple de cette « co-création », dans le domaine des arts et spectacles : la construction d’un gigantesque son et lumière, dans le parc omnisports de Bercy, réalisé à partir d’une proposition de pyrotechniciens grecs qui travailleraient avec les Russes du Bolchoï et un producteur de Bollywood. Ainsi les nations seront-elles amenées à porter un nouveau regard sur les compétences qu’elles ont chacune en leur sein, et sur les identités qu’elles veulent mettre en avant. Cela donnera lieu à la création d’œuvres inédites qui seront promues uniquement pour l’exposition universelle.

Deuxième exemple, dans le domaine médical : la création, à l’initiative de « Médecins sans frontières », d’un humanoïde à destination médicale qui les aiderait dans leurs interventions en cas de catastrophe naturelle, ce qui les amènerait à travailler avec les entreprises japonaises de robotique. De cette façon, les entreprises, les ONG, les organisations internationales seront représentées et pourront créer des synergies pour répondre à des besoins particuliers.

L’idée est aussi de rapprocher les peuples. Des populations très éloignées géographiquement se retrouveront autour de défis communs et mettront au point des solutions innovantes qui seront présentées en 2025 pour cette exposition universelle.

Le thème « génie du corps » est très large. Il englobe nombre de problématiques et de défis à relever. Aujourd’hui 168 États sont membres au BIE, ce qui représente autant de façons de s’approprier le thème du génie du corps humain. Et nous voulons faire en sorte que les nations y travaillent ensemble.

Nous avons préparé une petite vidéo sur la façon dont s’insèrent les nations dans ce processus de collaboration autour du thème du « génie du corps ». L’œuvre qui sera présentée en 2025 sera constituée d’une mosaïque de projets innovants, qui représentera davantage qu’une simple exposition : un produit universel mis en place pour l’occasion.

Six sous-thèmes mettent en évidence la manière dont notre corps interagit avec le monde : culture et divertissement, pour notre corps qui crée ; artisanat et savoir-faire, pour notre corps qui fabrique ; environnement, pour notre corps dans la nature ; sciences et santé, pour notre corps soigné et étudié ; nouvelles technologies, pour notre corps augmenté ; villes et société, pour notre corps en communauté.

Ces six sous-thèmes seront préparés en amont au sein de six « Expofaces. »

Les « Expofaces » sont des interfaces qui permettront la construction, en amont de 2025, de tous ces projets. Concrètement, ce sont des laboratoires de projets itinérants, qui vont rayonner à travers le monde, et qui ont une double utilité : communiquer autour de la tenue de l’exposition universelle, en France, en 2025, et communiquer autour du sous-thème qu’elles représentent.

Elles constitueront des lieux de visite en soi, pour le monde diplomatique, pour le monde de la recherche, pour le corps médical, pour les dirigeants d’entreprise, pour le monde du spectacle. Elles agiront par ailleurs comme des laboratoires de projets, c’est-à-dire qu’elles rayonneront à travers le monde et proposeront aux nations de s’inscrire et de déposer des projets.

Elles partiront de France, quelques années avant 2025. Elles demanderont aux nations de créer des partenariats économiques, qui seront à la fois multinationaux et pluridisciplinaires, et de prendre une prise de participation horizontale. Ce n’est plus simplement un État, un gouvernement qui s’engage à participer en achetant un pavillon national en 2025, mais l’ensemble des acteurs économiques et des secteurs d’activité concernés par le thème du génie du corps qui agiront comme forces de proposition.

Toutes ces « Expofaces » vont rayonner. Nous jouons sur les nations, qui agiront comme des leviers pour notre exposition universelle, et comme des accélérateurs de mondialisation. Dans un tel schéma, les nations seront très libres. Elles choisiront de participer en fonction de leurs intérêts, de leurs compétences propres, et de leurs capacités financières. Elles pourront moduler leur participation dans chacun des six sous-thèmes en fonction de ces paramètres.

Enfin, les « Expofaces » vont revenir en France. Tous ces projets seront matérialisés sur notre territoire. La France invitera le monde à venir rêver chez elle pour découvrir toutes ces solutions innovantes. Ce ne sera plus une exposition passive mais très active, très pro active pour relever les défis d’après 2025. Les projets seront présentés aussi bien dans le Grand Paris, que sur l’ensemble du territoire français – et donc dans les régions.

Mlle Aurélie Reynaud. Comment se matérialise cette exposition sur le territoire français ?

Sur le territoire du Grand Paris, 6 pôles investissent des zones en développement situées sur la Petite couronne, le long de la rocade et de la future ligne 15 du Grand Paris Express.

L’idée est de remettre l’homme au centre du propos, mais surtout au centre de Paris. Après avoir exploré les pôles thématiques associés aux contrats de développement territorial du Grand Paris, le parcours proposé réinvestit la ville grâce à la Coulée verte, et mène les visiteurs en son centre, au Trocadéro, et plus précisément au Musée de l’Homme. 

À Paris, une expérience interactive sera proposée au plus grand nombre, mais le visiteur sera invité à venir partager dans toutes nos régions une expérience plus intime, plus extrême et surtout plus immersive, comme je vous le dévoilerai un peu plus tard. Chacune de nos grandes métropoles accueillera une ou plusieurs nations participantes, afin que celles-ci puissent prendre possession du territoire français et proposer un sujet un projet plus libre sur le thème du génie du corps. Tous les sites régionaux de l’exposition seront reliés entre eux sans hiérarchie et constitueront un réseau de mobilité qui s’inscrira dans toutes les villes et dans toute la France.

Ce projet est l’occasion de nous inscrire dans des dynamiques de développement déjà lancées, comme par exemple l’extension du réseau SNCF et la mise en place par la RATP des futures lignes 15 et 16 du Grand Paris Express. Cette nouvelle mobilité, au-delà d’être un simple trajet, se veut aussi être une expérience immersive.

La mobilité du visiteur ne se pense pas seulement en termes de géographie. C’est un voyage temporel, fictionnel que nous leur proposons. C’est une expérience à part entière dans l’exposition. Chaque train, chaque avion, chaque gare sera équipé et permettra à l’usager de vivre une transition extraordinaire entre sa réalité et l’immersion proposée dans chaque grande ville participante. 

Focalisons-nous sur l’acteur principal de notre projet : le visiteur, ou plutôt l’« expérienceur ». J’utilise ce terme à dessein car au-delà d’une simple expérimentation dans laquelle le visiteur adopterait une posture plutôt passive d’observateur, nous souhaitons lui proposer une réelle « expérienciation », lui faire adopter une posture dynamique pour qu’il devienne acteur de ce projet.

Imaginons qu’en tant que visiteur, je choisisse de rentrer dans l’exposition par Marseille. Ce choix n’est absolument pas obligatoire, puisque toutes les villes partenaires de l’exposition constitueront des pôles d’accueil. Mais je choisis Marseille pour deux raisons : la première, évidente, c’est que c’est la plus belle ville du monde … pour tous ceux qui y sont nés ; la seconde, la raison principale, c’est que pendant les six mois de l’exposition, Marseille va devenir une ville sous-marine, où je vais pouvoir confronter mon corps à l’élément aquatique au sein du dispositif immersif créé pour l’occasion.

Dès mon entrée dans l’exposition, j’échange mon billet contre le « Biopass » : un petit carnet de santé numérique que je complète tout au long de ma visite et qui me permet de mesurer mes performances et mes réactions lors des activités.

Après Marseille, je continue ma visite à Paris. Je découvre les sites du Grand Paris après un voyage à bord d’un train très spécial.

Dans chacun des six pôles, des projets élaborés par les nations participantes lors des « Expofaces » sont exposés dans les structures pré-existantes. À cela s’ajoutent des monuments symboliques entièrement nouveaux, qui s’insèrent dans le tissu urbain des contrats de développement territorial (CDT), pour proposer aux visiteurs d’« expériencer » les six thèmes présentés. Par exemple, je me dirige vers le pôle « culture et divertissement » au nord de Paris, entre la Défense et Saint-Denis, situé sur le CDT de Plaine-Commune. J’y découvre un territoire des arts, offert aux nations, qui peuvent investir à leur guise, la Cité du cinéma, l’Académie Fratellini, ou encore le 6 B, lieu de création en Seine-saint-Denis. Je pénètre dans le « Corplexe », monument symbolique de ce pôle, à mi-chemin entre le parc d’attraction et le cirque. J’explore bien d’autres choses encore dans les sites parisiens de l’exposition et je termine ma visite à Toulouse, en apesanteur.

Dans cette ville transformée en station spatiale, je visite ou revisite la Cité de l’espace, mobilisée et augmentée pour l’occasion et si je l’ose, je m’enferme dans une capsule proposant une simulation de voyage dans l’espace.

Ma visite de l’exposition universelle de 2025 est maintenant terminée, mais avant de rentrer chez moi, je vais pouvoir récupérer ma propre mémoire de l’exposition : une collection de dessins, photos, vidéos, réalisés par les autres visiteurs lorsque j’étais moi-même en train de participer aux activités, lorsque j’étais moi-même un petit bout de cette exposition, c’est-à-dire un « expositionnaire ». Ce souvenir sera une preuve pour mes proches auxquels je raconterai cette aventure, et surtout une preuve pour moi, dans les années futures, pour me rappeler que, « moi aussi, j’y étais », à cet évènement historique que fut l’Exposition universelle de Paris en 2025.

M. Quentin Dubuis. Je vous propose maintenant de faire le point sur l’après exposition, sur les empreintes que pourrait laisser une telle exposition universelle.

Commençons par les empreintes matérielles : dans le Grand Paris, les six pôles, construits pour l’occasion en amont, sont appelés à être pérennes. Ce n’est pas une déconstruction, mais une véritable construction du Grand Paris. Ces six pôles s’inscrivent dans les CDT et sont appelés à développer l’identité locale de chaque zone.

Dans ces six pôles, on retrouve : d’une part, les collaborations internationales, qui seront nouées pour l’occasion et seront amenées à s’inscrire dans la durée sur le territoire ; d’autre part, les six monuments symboliques qui sont amenés à devenir, comme leur nom l’indique, des symboles, non seulement de cette exposition universelle de 2025, mais aussi plus largement du Grand Paris de demain et qui permettront de développer un tourisme lié non pas juste à l’expérience esthétique, mais à l’expérience immersive, à l’expérience interactive.

En revanche, les musées et les lieux culturels, que ce soit le Musée de l’Homme, au centre de Paris, ou plus généralement les musées français de l’ensemble du territoire, reprendront leur fonctionnement habituel à la fin de l’exposition universelle, de sorte que la transformation de ces musées et de ces lieux culturels sera éphémère, et donc véritablement exceptionnelle pendant les six mois de l’exposition.

Par ailleurs, les dispositifs immersifs, dont on vous a présenté deux exemples (Marseille et Toulouse), sont destinés à développer l’identité locale des régions et des grandes métropoles. C’est pour cela qu’on a choisi Marseille pour installer le dispositif de la ville sous-marine. Ces dispositifs immersifs ont vocation à s’inscrire dans la durée et à devenir de véritables centres d’attraction pour un tourisme alternatif, basé sur l’expérience.

Enfin, les transports seront développés, modernisés, ce qui permettra de relier le territoire français, d’accompagner le mouvement de décentralisation, mais aussi de mieux relier la France au reste du monde.

Passons à l’héritage immatériel. Une exposition universelle est une occasion pour la France de redéfinir son image pour elle-même, et surtout à l’international.

À propos de cette image de la France, nous retiendrons trois mots clés. Tout d’abord, en organisant un tel évènement, la France se montre au monde comme une nation « fédérée » autour d’un thème, d’un projet, autour d’un territoire. Bref, une nation mobilisée. Ensuite, en organisant une telle exposition universelle, ce sera une France « ouverte » qui se montrera au reste du monde, qui proposera aux autres pays de s’exposer sur son territoire, et invitera à nouer des partenariats. Enfin et surtout, ce sera une France « innovante », de par le thème choisi mais aussi de par le choix du modèle collaboratif d’exposition universelle et des dispositifs immersifs basés sur l’expérience.

Au-delà de la France, organiser une exposition universelle en 2025 sur le génie du corps, c’est l’occasion de participer à l’avènement d’un monde meilleur, d’un monde où chacun aura davantage conscience du génie de son corps, d’un monde où chacun respectera, aimera davantage son propre corps, d’un monde où chacun aura conscience du lien nécessaire qu’il y a entre son corps et l’environnement, et donc de la nécessité de respecter notre environnement, et d’un monde où chacun acceptera davantage sa propre différence comme la différence des autres.

C’est donc un projet ambitieux, mais nous sommes convaincus que la France et que le monde peuvent être à la hauteur de cette ambition.

Nous avons été trois à vous présenter le projet, mais au nom des douze étudiants qui ont participé, je vous remercie. (Applaudissements).

Avant les questions, nous vous proposons de visionner un petit film, intitulé « Dévoiler le génie du corps ».

M. le président Jean-Christophe Fromentin. Merci pour cette présentation et pour le thème choisi, ainsi que pour ce bonus qui matérialise votre thème et votre approche. Une exposition tourne en effet autour d’un thème que l’on décline. Vous l’avez fait dans le cadre d’une fête, avec les territoires, les villes, en tenant compte des mobilités. De ce point de vue, je crois que l’on a une bonne illustration de ce que pourrait préfigurer une candidature, dans une perspective très universelle.

Mme Catherine Quéré. Tout d’abord, merci. Je ne suis pas très versée dans les sciences, mais votre petit film humanise vos propos.

J’ai trouvé qu’il y avait de nombreuses connexions avec vos camarades de Sciences-Po, ce qui est d’autant plus intéressant que vous n’avez pas travaillé ensemble. Je pense à l’aspect participatif, « expérienceur », et à l’interaction entre les pays et les régions. J’ai surtout apprécié la partie de votre exposé sur « l’après exposition universelle », ce que vous avez appelé « les mémoires », et que j’ai trouvée géniale et innovante.

Comme pour vos camarades, c’était moderne, intelligent et jeune. Je regrette simplement que vous n’ayez pas préparé des clés USB, à la place du petit fascicule que vous nous avez distribué. Je ne vous en félicite pas moins pour votre travail.

Mlle Aurélie Reynaud. Évidemment, nos projets sont assez proches et se complètent. Ils reflètent les idées de la jeunesse, que nous sommes tous prêts à défendre aujourd’hui.

Pour l’après exposition universelle, nous souhaitions nous inscrire dans la continuité des expositions universelles du début du XXe siècle, avec leur label « exposition universelle » et les médailles dont on gardait le souvenir génération après génération. C’étaient des traces, presque affectives, de la participation à un tel évènement.

M. Jean-Louis Gagnaire. Ce sont deux projets très différents. Mais nous ne connaissons pas les profils des uns et des autres, ce qui me semblerait important. Je suis favorable au métissage des équipes et aux approches pluridisciplinaires. La véritable innovation ne peut pas venir des seuls ingénieurs, elle a besoin aussi des sociologues et des artistes.

Vous avez adopté un parti pris très ambitieux en écartant les pavillons nationaux. Mais c’est une vision idyllique des choses, et je ne suis pas sûr qu’on y parvienne. Pour avoir eu à financer un pavillon à Shanghai, au titre d’une région, je sais comme il est difficile de faire participer les différents pays au financement de chacun des pavillons. Tout le monde est généreux… mais aussi un peu égoïste.

M. Quentin Dubuis. S’agissant de la première partie de votre intervention, je précise que nous sommes douze étudiants à avoir travaillé sur ce projet, dont : deux designer, deux ingénieurs, deux architectes, deux étudiants en tourisme, un économiste, Aurélie en histoire de l’art, Chloée en droit et moi-même en philosophie.

S’agissant de la deuxième partie, j’observe que c’est plutôt la logique des pavillons nationaux qui est surprenante. Dans une telle logique, comment des petits pays peuvent-ils trouver leur place ? Ils en ont davantage dans la forme collaborative que nous proposons, en travaillant avec des pays plus grands pour trouver des solutions aux problèmes qu’ils rencontrent.

M. Jean-Louis Gagnaire. Ce sont les grands pays qui vont poser problème.

Mlle Chloée Sersiron. Les grands pays peuvent aussi être une solution. Nous sommes en train de continuer à développer, avec une nouvelle équipe, le projet que nous avons inventé.

Nous avons eu deux idées : la première est que, effectivement, le visiteur vient aussi découvrir, par exemple, la Corée du Nord pour passer, cinq minutes après, aux États-Unis. Il a besoin de cet ancrage visuel et culturel. Les États ont aussi envie de mettre en avant leur identité naturelle. Nous nous sommes donc dit que l’on pourrait garder cette représentation des nations, mais en lui donnant une forme très immatérielle, plus précisément une forme événementielle : par exemple, « une nation, une parade ». À dix-neuf heures, tous les jours ou tous les deux jours, une parade serait organisée par une nation différente. Les pays mettraient en avant ce qu’ils désirent. Le visiteur pourrait vivre cette expérience. Et à chacun de se rencontrer à cette occasion.

L’autre idée, c’est que le processus de participation sera très étendu. Les « Expofaces » vont regrouper des appels à projets, qui feront se rencontrer des investisseurs et des développeurs de projets. En réalité, ce n’est pas une question de nations. C’est une question de financement et de rencontres d’intérêts autour d’un défi à relever. Par exemple, dans un pays asiatique, un entrepreneur doit traiter un problème d’hygiène, de santé publique, de communication visuelle. Google pourrait avoir envie de le lancer en le finançant, parce que cela lui permettra de gagner en visibilité, et créera une synergie en termes de moyens.

L’architecture des pavillons peut répondre à un autre appel à projets, à un concours entre architectes internationaux. Mais le financement se fera par sélection naturelle des projets. Si un entrepreneur présente un projet qui n’intéresse personne, il ne sera pas promu. Mais s’il rencontre un financeur qui se dit que c’est une idée géniale qui peut intéresser quelqu’un de son entourage, de très nombreux réseaux professionnels vont s’activer. Ainsi, en amont de l’exposition universelle, aura lieu cette rencontre de l’offre et de la demande, qui permettra de promouvoir des solutions très innovantes.

M. le président Jean-Christophe Fromentin. La question des pavillons était au cœur de notre audition d’hier. Les pavillons nationaux sont une dérive des expositions universelles. Celles que la France a organisées entre 1855 et 1900 n’en avaient pas. On les organisait autour de grandes galeries, où l’on amenait les gens à vivre des expériences sur le progrès incarné par les machines. Mais lorsque la mystique du progrès a faibli, on a invité les pays à construire leur propre pavillon et à montrer ce qu’ils avaient envie de montrer.

Votre projet est intéressant, dans la mesure où il revient à l’origine des expositions universelles, pour faire partager le progrès et faire vivre au visiteur des expériences liées à ce progrès. C’est extrêmement exigeant car depuis le début du XXe siècle, chaque pays construit son pavillon un peu comme il veut, sur une thématique qu’il respecte plus ou moins.

Aujourd’hui, il n’y a plus d’avenir pour les expositions universelles où chaque nation affirme sa puissance par l’architecture ou les grands pavillons. Et comme l’a fait remarquer l’équipe de Sciences-Po, les innovations du XXIe siècle devraient permettre de retrouver l’esprit des premières expositions universelles et d’éviter d’avancer dans la foulée de l’exposition de Shanghai – comme ce sera sans doute le cas de celle de Milan ou de Dubaï.

Mlle Chloé Sersiron. Que ce soit au sein des pavillons « palais de l’industrie » ou « palais des machines », ou des pavillons nationaux, les nations étaient en concurrence les unes avec les autres et présentaient leurs produits de façon très atomisée. Nous avons souhaité revenir aux sources de ce qu’était une exposition universelle, d’autant que la France pouvait légitimement se positionner comme un pays innovant sur la scène internationale. C’est une occasion, selon nous, de redéfinir l’image de la France à l’étranger. Mais en nous interrogeant sur ce modèle, nous avons pensé que l’on pouvait accompagner les dynamiques des relations internationales, qui sont de plus en plus connectées, pour présenter des projets issus de collaborations.

M. Bruno Le Roux, rapporteur. Je trouve passionnant que l’exercice ait abouti à deux présentations différentes, que ce soit dans la façon d’aborder le sujet ou de se servir des thèmes, mais j’observe que toutes les deux s’appuient sur les réseaux.

Je m’adresse maintenant à chacune des deux équipes : que prendriez-vous dans le projet de l’autre pour renforcer le vôtre ?

Mlle Charlotte Crémoux (Sciences Po Paris) On a tendance faire une quasi religion de la technologie et on parle beaucoup des réseaux sociaux. Mais ceux-ci ont pour conséquence d’isoler les gens. On communique par téléphone, par mail, par ordinateur, et on perd un peu le sens de l’humain. Je pense que ce que nos projets ont en commun, c’est de replacer l’humain au cœur du monde et de recréer du lien entre les hommes.

Personnellement, si j’avais quelque chose à prendre dans le projet des étudiants du Centre Michel Serres, ce serait leurs dispositifs immersifs en région. Je les trouve assez intéressants, physiquement et visuellement.

M. Quentin Dubuis (Centre Michel Serres). En premier lieu, j’ai trouvé intéressant la communication sur les sens. C’est un terrain que nous n’avions pas exploré.

En second lieu, j’aime bien l’idée de construire un patrimoine universel, que vous avez bien matérialisé. Que chacun puisse imprimer une brique en trois D avec sa main m’a paru assez fort au niveau symbolique.

Mlle Chloée Sersiron (Centre Michel Serres). J’ai moi aussi retenu l’approche sensorielle proposée par les étudiants de Sciences-Po. Cela fera partie de notre quotidien et je pense qu’il est vraiment intéressant d’intégrer la dimension sensorielle au projet.

J’ai retenu également la logique des pavillons démontables. C’est une solution pratique pour exposer, écologique et apte à développer la conscience environnementale.

Mlle Aurélie Reynaud (Centre Michel Serres). Et si l’on se place du côté du visiteur, personne n’est exclu : ni les Français qui ne sont pas à Paris puisque l’exposition se déroule dans toute la France ; ni les Parisiens, ni même les gens qui n’auront pas pu se rendre physiquement en France, puisque l’exposition vient à eux, avec un parfum ou avec ces objets que l’on imprime.

Mlle Charlotte Crémoux (Sciences Po Paris). Le « Biopass » nous a également plu.

M. Yves Albarello. Si j’ai bien compris la différence entre les deux projets est la suivante : le premier, celui de Sciences Po, est centralisé autour du Grand Paris, du double 8 ; et le second, celui du Centre Michel Serre, est décentralisé. Mais il faudra tenir compte des limites budgétaires. Le Grand Paris, qui va démarrer en 2015, représente déjà presque 35 milliards d’euros d’investissements. Les CDT ne sont pas inclus dans le prix, pas plus que l’exposition universelle elle-même. Et plus on la décentralisera, plus cela coûtera cher. Il y aura des arbitrages à faire.

M. Quentin Dubuis. Il est exact que le budget n’est pas un critère que nous avons pris en compte. Mais il suffirait de trouver des financements  auprès les entreprises qui veulent développer le tourisme local, s’agissant du Grand Paris, auprès des nations étrangères qui souhaitent nouer des partenariats avec des citoyens français et auprès des régions, pour les dispositifs immersifs. On pourrait également associer, comme cela a été dit, les nations étrangères à la construction d’un dispositif immersif ; elles pourraient y participer parce que le thème les intéresse, ou pour des raisons d’image.

Je pense, pour ma part, que le financement de cette exposition universelle ne sera pas uniquement français et qu’il ne sera pas uniquement assuré par l’État français et les collectivités.

Mlle Chloée Sersiron. On peut aussi imaginer, par exemple, que le projet soutenu par une « Expoface » de construire une cité sous-marine devienne un gigantesque projet international.

M. le président Jean-Christophe Fromentin. Le financement peut aussi être un élément d’innovation. Nous sommes là dans le crowdfunding ou financement participatif. C’est un véritable sujet dans un modèle économique qui partirait des présentations que vous avez faites les uns et les autres.

Je vous remercie pour la qualité de vos travaux.

——fpfp——

Membres présents ou excusés

Mission d'information sur la candidature de la France à l'exposition universelle de 2025

Réunion du jeudi 10 avril 2014 à 9 h 30

Présents. - M. Yves Albarello, M. Jean-Christophe Fromantin, M. Jean-Louis Gagnaire, M. Bruno Le Roux, Mme Catherine Quéré

Excusés. - M. Sylvain Berrios, Mme Marie-Odile Bouillé, M. Christophe Bouillon, M. Philip Cordery, Mme Martine Martinel