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Mercredi 9 juillet 2014

Séance de 16 heures 45

Compte rendu n° 30

Présidence de M. Jean-Christophe Fromantin, Président

– Table ronde, ouverte à la presse, sur le thème « L’exposition universelle comme vecteur du renouvellement urbain », avec M. Pierre Mansat, président de l’Atelier international du Grand Paris, M. Jean-Marie Duthilleul, architecte et ingénieur, Agence Duthilleul, M. Guy Amsellem, président de la Cité de l’architecture et du patrimoine, M. Alexandre Labasse, architecte, directeur général du Pavillon de l’arsenal, et M. Jacques Ferrier, architecte, Agence Jacques Ferrier Architectures

Mission d’information
sur la candidature de la France à l’exposition universelle de 2025

M. le président Jean-Christophe Fromantin. Messieurs, je vous remercie d’avoir accepté d’échanger avec nous sur la candidature de la France et du Grand Paris à l’exposition universelle de 2025. Nous avons auditionné les responsables du secteur économique et des transports, les diplomates qui ont suivi les précédentes candidatures françaises, l’ensemble des acteurs territoriaux, des personnalités qui ont travaillé sur d’autres grands événements – notamment les candidatures françaises aux Jeux olympiques –, de manière à disposer d’un large spectre d’expertises. Nous souhaitons examiner dans quelle mesure l’organisation d’un tel événement serait bénéfique pour le rayonnement, l’économie, l’urbanisme et le dynamisme territorial de notre pays. Notre mission d’information, qui a débuté en février, se prolongera jusqu’à la fin du mois de septembre : nous devons rendre notre rapport en octobre.

Notre projet, qui est multi-sites et polycentrique, souhaite rompre avec le modèle des expositions universelles au XXe siècle, qui étaient organisées dans des lieux fermés, avec des guichets d’entrée, et étaient composées de pavillons. Notre candidature se veut ouverte sur le Grand Paris et sur les grandes métropoles françaises, en s’adossant à l’existant pour réinvestir nos monuments et utiliser nos infrastructures de transport, notamment celles qui seront mises en fonctionnement à l’horizon 2025.

Pensez-vous que ce projet soit pertinent ? Quelle pourrait être sa contribution à l’urbanisme, à l’architecture et la dynamique des flux dans le cadre du Grand Paris ? Auriez-vous des idées afin de donner un rayonnement maximal à cette opération ?

M. Guy Amsellem, président de la Cité de l’architecture et du patrimoine. La Cité de l’architecture et du patrimoine est un établissement public à caractère industriel et commercial créé en 2004 et ouvert au public en 2007. Il résulte de la réunion de plusieurs entités : un musée, un centre d’architecture, une école, une bibliothèque spécialisée et un centre d’archives. Ses missions sont très diversifiées. Nous conservons et mettons en valeur des collections qui permettent de situer l’architecture dans une histoire longue ; nous concevons des expositions temporaires afin de diffuser la culture architecturale et patrimoniale ; nous organisons des manifestations visant à inscrire l’architecture dans le champ plus vaste des connaissances et de la création contemporaine, ainsi que des rendez-vous destinés au public professionnel, comme le prix de l’Équerre d’argent, le grand prix de l’association des architectes français à l’exportation ou les albums des jeunes architectes et paysagistes ; nous délivrons des formations post-diplôme pour les architectes qui souhaitent se spécialiser dans le patrimoine afin de devenir architectes en chef des monuments historiques ou architectes des bâtiments de France, ainsi que des formations post-concours des architectes et urbanistes de l’État ; nous mettons enfin à la disposition des étudiants et des chercheurs en architecture un ensemble de ressources, comprenant une bibliothèque, des ressources numériques et un centre d’archives.

L’histoire de la Cité de l’architecture et du patrimoine est indissolublement liée à celle des expositions universelles et internationales.

Le palais de Chaillot, qui abrite la Cité, est un enfant des expositions universelles. Son ancêtre, le palais du Trocadéro, avait été bâti par Davioud pour celle de 1878, dans le style éclectique caractéristique de l’époque Napoléon III ; il a été critiqué presque dès sa création, et des personnalités aussi diverses que Matisse, Picasso, Cocteau, Zadkine ou Maillol ont demandé sa destruction. Ils ont fini par être entendus : dans la perspective de l’exposition internationale de 1937, on a ouvert un concours d’idées pour savoir que faire de ce bâtiment. On s’attendait à ce qu’il soit détruit, mais il a finalement été rénové en profondeur par Carlu, qui, tout en conservant son ossature, a évidé la partie centrale pour aménager un point de vue sur la tour Eiffel et doublé les ailes par une nouvelle galerie côté Seine. Aujourd’hui, le palais abrite, outre la Cité de l’architecture et du patrimoine, le musée de la marine et le musée de l’homme – tous deux en rénovation – et, sous l’esplanade, le théâtre de Chaillot – qui va bientôt être rénové.

En 1882 a été implanté dans le palais du Trocadéro l’ancêtre du musée des monuments français, le musée de sculpture comparée, qui avait été conçu, conformément à la volonté de Viollet-le-Duc, dans une perspective comparatiste et didactique, afin de former le goût des architectes français. L’exposition internationale de 1937 fut l’occasion d’ajouter une nouvelle strate d’œuvres, en ouvrant les collections, sous l’impulsion de Paul Deschamps, alors directeur du musée, à la peinture murale et au vitrail. La troisième strate, qui date de 2004, n’est en revanche pas directement liée à une exposition universelle.

En outre, trois caractéristiques du projet ExpoFrance 2025 rejoignent directement nos axes de réflexion programmatique.

Le premier est d’inscrire le thème de l’exposition dans une perspective résolument métropolitaine. Ce qui manque au projet du Grand Paris est peut-être un récit commun. Julien Gracq, évoquant le Nantes de ses années d’internat, disait : « Je vivais dans un territoire presque autant imaginé que connu ». C’est ce territoire imaginé qu’il nous faut construire, et un projet comme celui-ci pourrait y contribuer.

Le deuxième est le fait de croiser la question des territoires avec celle des mobilités et des identités. Il importe de repenser les mobilités à l’aune des identités nomades issues des grandes migrations et de faire de celles-ci un avantage comparatif, comme à Londres, plutôt qu’un enjeu de technologie sécuritaire. Il serait également intéressant de croiser la question des identités avec celle du patrimoine. Nous avons été partie prenante d’une réflexion organisée par l’Agence nationale de la recherche et par le Centre national de la recherche scientifique sous la forme d’un atelier de réflexion prospective sur la question du patrimoine culturel, qui vise à identifier les grands sujets susceptibles de faire l’objet d’appels d’offres dans les dix ou quinze prochaines années. Ce qui est ressorti de ces réflexions d’anthropologues, ethnologues, économistes, juristes, historiens, c’est que la question des mobilités va totalement reconfigurer le rapport au patrimoine. D’un côté, la globalisation a tendance à diluer le sentiment identitaire ; de l’autre, des populations mobiles ou nomades réinvestissent les monuments et les chargent d’autres histoires et d’autres mémoires. Votre projet tient compte de ce phénomène dans sa façon d’adresser aux pavillons étrangers une invitation à habiter nos monuments et à leur donner une autre signification.

La troisième caractéristique a trait à l’usage du patrimoine bâti. Viollet-le-Duc disait que la meilleure façon de conserver un édifice était de lui trouver une destination. Or votre projet pose la question cruciale, dans la perspective de la mutation de la ville contemporaine, de la réutilisation du patrimoine bâti – qu’il faut distinguer de sa rénovation, sa restauration ou sa réhabilitation, car la problématique est celle de l’usage, et non celle de l’enveloppe. Nous préparons pour la fin de l’année une exposition sur le sujet, intitulée « Un bâtiment, combien de vies ? » ; on n’y parlera pas uniquement du patrimoine monumental, mais aussi des édifices en béton et des friches industrielles, et l’on se posera la question de la réutilisation dans le contexte d’une mutation accélérée des villes. C’est un sujet particulièrement d’actualité, avec le projet de l’agence SANAA de transformation de la Samaritaine ou celui de Dominique Perrault sur la poste centrale du Louvre – pour ne citer que ces deux-là.

Pour toutes ces raisons, nous soutenons le projet ExpoFrance 2025. À titre personnel, j’aurais d’ailleurs eu l’occasion de le soutenir deux fois : une première en tant que directeur de l’École nationale supérieure d’architecture de Paris-La Villette, qui fait partie des institutions d’enseignement supérieur partenaires, et une deuxième au titre de mes nouvelles fonctions à la Cité de l’architecture et du patrimoine.

M. le président Jean-Christophe Fromantin. Monsieur Duthilleul, vous aviez participé au projet d’exposition universelle en 1989, et vous avez beaucoup travaillé sur les gares. Compte tenu de ces expériences, quel regard portez-vous sur notre projet d’exposition universelle ? Que pensez-vous de l’idée de réutiliser l’existant, notamment les gares, de manière à créer un nouvel imaginaire ?

M. Jean-Marie Duthilleul, architecte et ingénieur, agence Duthilleul. J’ai aussi travaillé sur le Grand Paris, puisque j’ai fait partie de l’Atelier international du Grand Paris. L’action sur la ville est une action de longue durée, qui nécessite un effort collectif soutenu, et il est merveilleux d’avoir un projet qui lui donnera un élan pendant dix ans.

À l’ère du numérique, une exposition universelle doit offrir une expérience physique extrême, sinon autant rester chez soi à pianoter sur son ordinateur ou à consulter sa tablette ! Cette expérience physique pourrait être spatiale ; ce serait l’occasion de mettre en scène de nouvelles richesses, par exemple les paysages magnifiques de la grande boucle de la Seine à Gennevilliers ou les bords de Seine, ainsi que de faire converger les nationalités du monde entier. Quand conçoit une exposition universelle, il faut penser, très concrètement, aux trois dimensions et aux cinq sens.

Sur au moins trois sujets, le projet d’exposition universelle en 2025 touche à la problématique du renouvellement urbain.

Premièrement, même si l’on décide de réutiliser le patrimoine existant, il faudra réfléchir à la libération d’emprises. Dans la perspective de l’exposition de 1989, qui était prévue sur deux sites reliés par la Seine, nous avions libéré les emprises qui ont servi, d’un côté, à la construction du quartier Seine Rive Gauche et de la Bibliothèque de France, de l’autre, à la réalisation du quartier de Javel, sur l’emplacement des anciennes usines Citroën ; bien que l’exposition n’ait pas eu lieu, ces sites se sont développés. Avec le projet de Grand Paris Express, une libération d’emprises arriverait à point nommé. Le métro va révéler des entre-deux aujourd’hui méconnus, comme la presqu’île de Gennevilliers, qui seront peut-être demain les nouveaux paysages parisiens, susceptibles de renouveler l’imaginaire de la capitale. Ces emprises accueillent un patrimoine industriel aujourd’hui disponible, qui pourrait être investi par le monde entier.

Deuxièmement, il faudra veiller à l’accessibilité de ces emprises. L’armature du Grand Paris Express, d’Eole et des Tangentielles se met en place, mais un projet d’exposition universelle permettrait de faire émerger d’autres idées d’utilisation des infrastructures ou conduirait à privilégier un métro aérien, afin que l’on puisse découvrir et admirer ce paysage – car la ville est aussi un patrimoine d’images partagées. Elle susciterait des opérations concomitantes, qu’elles soient à visée purement logistique – il faudra bien accueillir 80 millions de personnes – ou qu’elles contribuent à modifier le regard porté sur le patrimoine. Par exemple, la gare de Saint-Lazare, empruntée quotidiennement par 500 000 personnes, pourrait accueillir des installations fabuleuses. On romprait ainsi avec le modèle des pavillons implantés sur un grand espace, au profit d’installations dans des lieux emblématiques.

Troisièmement, le socle de l’exposition pourrait être l’hospitalité. Il s’agirait, non pas de montrer au monde entier à quel point la France est riche et agréable, mais de faire de la France une terre d’accueil et de mise en valeur des particularités de chacun. Le modèle traditionnel des expositions universelles est caduc. Si l’on prévoit que les nations invitées s’installeront dans des lieux précis, il faudra veiller à ce que l’on passe directement d’un pays à l’autre, sans avoir à transiter par un espace public neutre. Cet effort de juxtaposition spatiale, avec un système de seuils entre les pays, pourrait donner des résultats extraordinaires.

Enfin, vous avez raison : l’exposition universelle ne doit pas être un événement en plus, mais une étape dans le développement de la métropole. Les territoires périphériques de Paris sont mûrs pour accueillir un tel projet, qui provoquera aussi bien le mélange des fonctions que leur irrigation. Vous avez toujours parlé de « mobilité », sans jamais employer le mot « transport » : cela me ravit, car le transport est ce qui sépare le mouvement du reste de la ville. Si Paris doit accueillir une exposition universelle, c’est pour devenir le Grand Paris, à savoir un lieu de mise en relations – la ville par excellence. En fixant comme objectif de mettre en relation les pays du monde entier, nous nous donnons les moyens de transformer notre territoire en vraie ville.

M. le président Jean-Christophe Fromantin. Le concept de « mobilité » est en effet fondamental. La principale difficulté pour le Bureau international des expositions (BIE) est d’accepter un projet multi-sites ; il nous faut le rassurer sur cet aspect et, au-delà, présenter la mobilité non pas comme une fonction, mais comme une expérience, un pavillon à part entière.

Monsieur Mansat, vous êtes l’un des architectes du Grand Paris ; vos efforts consistent précisément à créer du lien – d’abord par l’intermédiaire de la Conférence métropolitaine, aujourd’hui de manière plus institutionnelle. L’exposition universelle sera, non pas un événement isolé, mais une séquence dans un processus qui a été engagé plus tôt et qui se poursuivra au-delà. Quel regard portez-vous sur ce projet ?

M. Pierre Mansat, président de l’Atelier international du Grand Paris. Contrairement aux autres intervenants, je ne suis pas un expert de la ville. Je m’efforce, depuis quatre ans, d’animer l’Atelier international du Grand Paris (AIGP), structure issue de la consultation internationale des architectes sur le Grand Paris, qui comprenait à l’origine dix équipes, et aujourd’hui quatorze. Ces équipes travaillent sur les enjeux du Grand Paris, avec des résultats passionnants sur des thèmes comme « Habiter le Grand Paris » ou « Les systèmes métropolitains ».

Il est évident que ce projet d’exposition universelle arrive à un moment crucial, alors que se met en place une institution métropolitaine et que se pose la question d’une nouvelle représentation de l’organisation métropolitaine. Il faut rompre avec les conceptions figées qui ne correspondent plus aux réalités : la ville-centre et sa périphérie, Paris et sa banlieue, la capitale et le reste de la France. Le projet d’exposition serait un catalyseur, susceptible de nourrir, dix ans durant, une volonté collective de penser autrement la métropole. Celle-ci ne peut se construire sans l’adhésion des habitants ; or, jusqu’ici, les débats sur le sujet sont restés l’apanage des décideurs et des professionnels – à l’exception de l’exposition issue de la consultation internationale sur le Grand Paris, qui a été visitée par 250 000 personnes, ce qui prouve l’intérêt de nos concitoyens pour ces questions.

Le Premier ministre a annoncé aujourd’hui en Conseil des ministres que les lignes du Grand Paris Express seraient mises en service dès 2024. Cela signifie qu’en 2025, l’essentiel du réseau sera réalisé, ce qui entraînera bien évidemment une transformation des usages, des représentations et de l’organisation de la métropole.

Le projet d’exposition universelle pourrait également être un facteur de mobilisation en vue de concrétiser les objectifs définis dans le cadre du Grand Paris, par exemple en matière de logement, avec la construction de 70 000 logements par an, ou de relations interterritoriales. La métropole ne peut pas être désincarnée ; il faut qu’elle se traduise par des réalisations concrètes, dont les habitants pourront voir les effets sur leur vie quotidienne.

Nous n’avons pas eu le temps de consulter le conseil scientifique de l’AIGP sur la question, mais pour l’équipe permanente, travailler sur un projet d’exposition universelle serait une perspective exaltante. Nous pourrions vous soumettre des propositions de séminaires ou d’ateliers sur le Grand Paris, autour de lieux emblématiques ou de territoires encore méconnus, mais qui recèlent des potentialités exceptionnelles – comme la boucle de la Seine à Gennevilliers mentionnée par Jean-Marie Duthilleul. Ce serait également l’occasion de développer une pensée architecturale et urbanistique sur le système de transports et la conception d’une métropole qui ne se résumerait pas à Paris intra-muros.

M. le président Jean-Christophe Fromantin. Merci, monsieur Mansat, pour cette proposition stimulante.

Monsieur Labasse, vous êtes architecte et dirigez le Pavillon de l’Arsenal ; vous disposez d’une expérience du mélange du patrimoine ancien et de la culture contemporaine, puisque vous avez été le commissaire de quelques grandes expositions au Centre Georges-Pompidou. On sait que l’exposition universelle de 1900 a transformé Paris en une grande galerie d’art ouverte au monde entier. Quel regard portez-vous sur notre projet ?

M. Alexandre Labasse, architecte, directeur général du Pavillon de l’Arsenal. Le Pavillon de l’Arsenal est le centre d’architecture et d’urbanisme de Paris et de la métropole parisienne. Il avait été ouvert en 1988, avec pour mission de présenter aux Parisiens et aux Franciliens le plan programme de l’est de Paris, à la suite de la candidature à l’exposition universelle de 1989.

Quand on examine les précédents de Séville, Shanghai ou Lisbonne, on voit bien qu’une exposition universelle est un catalyseur de renouvellement urbain, qui permet de reconquérir des friches, d’urbaniser de nouveaux territoires, d’investir des ports, bref d’inventer la ville du XXIe siècle. Néanmoins, il convient à mon avis d’éviter trois écueils.

Le premier est la tabula rasa. Les exemples que j’ai cités ont tous été conçus sur le modèle traditionnel de l’exposition universelle : à savoir, on choisit un site, on le vide et on reconstruit dessus – le problème étant de réinvestir les lieux ensuite. Je crois qu’une exposition en 2025 devra tenir compte de ce qui est là aujourd’hui et de ce qui sera là demain. C’est une interrogation nouvelle, et le projet que vous défendez peut y répondre.

Le deuxième écueil est le zoning. Vous avez raison de vouloir une exposition multi-sites et polycentrique, mais cela va l’encontre de ce qu’attend le BIE, voire de ce que souhaitent les visiteurs : quelqu’un qui viendra à Paris pour deux ou trois jours n’aura peut-être pas envie de parcourir l’intégralité de la métropole pour visiter cinq expositions. Il faudra donc une certaine densité dans les lieux où seront organisés les événements et veiller à la porosité de chacun avec la ville – ce qui va à l’encontre de la conception traditionnelle des expositions universelles, qui fonctionnent un peu comme les villages olympiques. Il faut impérativement éviter le phénomène de l’enclave.

Le troisième écueil a été résumé par Louis Sullivan, architecte américain mort en 1924, dans la formule : « Form follows function ». Ici, la forme ne doit surtout pas traduire la fonction ; il faut au contraire inventer des bâtiments mutables, fertiles, démontables – Rem Koolhaas dirait « génériques ». En 2025, un des problèmes majeurs de la construction et de l’architecture sera celui de la matière ; il y a de fortes chances que nous n’ayons plus beaucoup de sable à notre disposition. Il convient donc de se demander comment construire, déconstruire et réemployer – pas forcément « recycler », qui nécessite une énergie particulière, mais simplement mettre ailleurs. À l’exposition de 1900, les bâtiments les plus futiles, comme la tour Eiffel, ont finalement été les plus intéressants.

Il me semble que si un site devrait être retenu pour l’exposition universelle, c’est la Seine : d’abord, parce qu’elle raconte une histoire, ensuite, parce qu’elle fédère un nombre incalculable de projets. Je précise que je prends « Seine » dans un sens large : les sites parisiens – les berges, Paris Rive gauche, Bercy Charenton, la colline des musées –, mais aussi les canaux – souvenons-nous du projet extraordinaire de Patrick Berger pour la candidature de Paris aux Jeux olympiques de 2008 –, le bassin avec l’Oise et la Marne, les sites en aval avec la Défense, les îles, Cergy, voire Rouen et Le Havre, et les sites en amont, comme la confluence avec la Marne ou le site des Ardoines.

En outre, la mobilité sur l’eau est réduite – surtout depuis l’abandon de Voguéo : l’exposition universelle pourrait être l’occasion de donner à la Seine un rôle en la matière.

M. le président Jean-Christophe Fromantin. Monsieur Ferrier, vous avez signé le pavillon français de l’exposition universelle de Shanghai, et vous travaillez actuellement sur les gares du Grand Paris. Quel regard portez-vous sur les modèles successifs d’expositions universelles : celui du XIXsiècle, fonctionnant autour d’une grande galerie centrale ; celui du XXe siècle, avec des pavillons ; et celui, polycentrique, que nous sommes en train de concevoir ? Quels sont les avantages et les limites de chacun ?

M. Jacques Ferrier, architecte, agence Jacques Ferrier Architectures. Peut-on encore faire des expositions universelles ici et maintenant à l’ère du numérique ? La question s’était déjà posée à Shanghai. Tous ceux qui sont allés là-bas, et notamment le géographe Michel Lussault, ont constaté l’importance d’être ensemble : plus de 70 millions de visiteurs au total, et 10 millions pour le seul pavillon français, qui fut le plus visité. L’envie de partager un espace public, fut-il aussi artificiel qu’une exposition universelle, est toujours très forte. Il est certain que le BIE doit évoluer sur l’unité de lieu, mais la question de la scénographie du plaisir festif de la foule reste entière. Tous les pays du monde sont appelés à se croiser, mais encore faut-il qu’ils le puissent !

Il a toujours existé, depuis 1851 jusqu’à Shanghai, différents types de pavillons ; on peut ainsi distinguer le pavillon sculpture, le pavillon stand et le bâtiment prototype. C’est dans cette dernière tradition que j’avais voulu m’inscrire avec le pavillon France de Shanghai : un bâtiment qui, de par ses systèmes constructifs, son rapport au développement durable et l’utilisation de sa terrasse, ne se contente pas d’être une partie d’une exposition, mais donne des pistes pour imaginer un avenir pour la ville. Dans le cadre de votre projet, tous les pays seront obligés de se poser cette question : ils ne pourront pas être uniquement dans le démonstratif.

La France est l’un des rares pays à disposer de tels atouts en matière de culture. Pour le pavillon France de Shanghai, nous avions travaillé sur les cinq sens et décidé de présenter des toiles impressionnistes. Cela nous a demandé beaucoup d’efforts, car les musées ne prêtent qu’aux musées et pour une durée maximale de trois mois. Sans la ténacité de l’équipe et surtout de Guy Cogeval, président du musée d’Orsay, nous n’aurions pas réussi notre pari. Le China Daily incitait les gens à visiter notre pavillon car, disait-il, c’était une vitrine de la culture française. Une exposition universelle est l’occasion de faire bouger les lignes.

Depuis 1851, toutes les expositions universelles visaient à l’exaltation du progrès et à la célébration de la technique ; elles reposaient sur la certitude que demain serait mieux qu’aujourd’hui. L’exposition de Shanghai, malgré ses défauts, a ouvert de nouvelles perspectives. Son thème, la ville du XXIe siècle : « Better city, better life », est loin d’être épuisé. Votre projet met lui aussi l’accent sur la ville et son territoire. En la matière, la France dispose d’une certaine originalité, grâce aux ingénieurs des Ponts et à ses infrastructures de canaux, de voies ferrées et de routes uniques au monde : les villes se sont toujours développées en tirant le territoire. Ce qui est inquiétant aujourd’hui, c’est que les mégapoles mondiales semblent se développer « sous bulle », comme dans le roman Globalia de Jean-Christophe Rufin : on ne sait pas ce qu’il se passe dans l’arrière-pays ! La France a un modèle à proposer – cela pourrait même être le thème de l’exposition : Paris, le Grand Paris et les grandes villes en régions reliées par le TGV.

Ma mission actuelle me fait percevoir l’enjeu qu’il y a pour le Grand Paris à créer des « cartes postales » et des « symboles » : contrairement à Paris Centre, cet immense territoire a un imaginaire pauvre. Il faut donner une visibilité à cette ville archipel. Ce qui reliera les pavillons, c’est la mobilité ; or nous, nous travaillons précisément sur l’expérience de la mobilité, en prenant les sens au sérieux, et en l’envisageant comme une question d’architecture – d’où notre slogan de « gare sensuelle ». Si les gares étaient incluses dans le projet d’exposition universelle, on pourrait en accroître encore la qualité ; ce serait l’occasion de les inscrire dans un récit urbain et architectural qui rendrait les habitants fiers de leur métropole.

M. Bruno Le Roux, rapporteur. Eh bien, voilà qui donne envie de travailler sur vos propositions le plus rapidement possible !

On voit bien que l’enjeu, au-delà du simple fait de constituer un dossier de candidature, est de repenser la notion même d’exposition universelle – avec le risque que nos propositions ne soient pas comprises. Nous savons de quel type d’exposition nous ne voulons pas ; nous souhaitons créer un lieu où viendront aussi bien les visiteurs de l’exposition universelle que les personnes qui vivent sur place.

Deux questions principales se posent aujourd’hui. Tout d’abord, celle de la mobilité – problème que le projet d’exposition universelle ne suffira pas à résoudre. L’accélération de la réalisation du Grand Paris Express annoncée par le Premier ministre découle autant de la situation actuelle de l’investissement public et privé que de la perspective d’une exposition universelle. Pensez-vous que cela sera suffisant ou faudrait-il aller encore plus loin, de façon pérenne ou temporaire ?

Ensuite, où situez-vous la frontière entre la réutilisation et la rénovation ? Que pourrait être la réutilisation d’un bâtiment historique ? Quel geste d’architecture est possible sur de l’existant ?

M. Guy Amsellem. Dans un dossier, un journaliste vous fait dire, monsieur le président – mais probablement vous aura-t-il mal compris : « Nous n’allons pas faire d’architecture, nous allons utiliser les bâtiments existants ». Or qu’est-ce que cela, sinon précisément faire de l’architecture ? Aujourd’hui, l’architecture, ce n’est plus construire des bâtiments neufs ; on est obligé de tenir compte de ce qui est là, de travailler sur la continuité et la contiguïté. L’époque des villas Savoye est révolue, tous les architectes le savent !

La réutilisation est un problème passionnant, qui touche à de multiples questions, dont celles du patrimoine – a-t-on le droit de toucher aux édifices patrimoniaux, faut-il muséifier les villes ? –, du logement – doit-on recycler pour habiter, comme à la tour Bois-le-Prêtre ? – des infrastructures – peut-on faire de l’architecture avec elles, sur l’exemple des gares de Strasbourg ou d’Anvers ? –, et de l’urbanisme – avec les entrepôts Macdonald à Paris ou Euromed Center à Marseille. Rendez-vous au début du mois de décembre à la Cité de l’architecture, pour une exposition en trois séquences, avec des exemples issus de l’ensemble des pays d’Europe !

Quant à la mobilité, il faut envisager la question à toutes les échelles, spatiales et temporelles. Il ne s’agit plus de réduire les temps de transport par l’accroissement de la vitesse : on en sait désormais les inconvénients. Toujours plus de vitesse aboutit à de l’étalement ; on vide les villes centres de fonctions auparavant internalisées et, lorsqu’elles sont subies, ces mobilités ne sont bénéfiques ni pour les habitants ni pour les territoires qui les accueillent. Je pense qu’il vaudrait mieux travailler sur les modes de travail et le coworking : comment être plus mobile sans pour autant se déplacer davantage ou plus vite ? Cela passe par d’autres usages de l’Internet – non pour être assigné à résidence, mais au contraire pour multiplier les échanges. Le travail de Jacques Ferrier sur les gares ouvre des perspectives intéressantes de ce point de vue. Quelles applications sont susceptibles de créer du lien social et de l’échange ? Au stade où nous en sommes, il semble préférable d’ouvrir le spectre des réflexions plutôt que de le refermer. Proposer au bureau international des expositions de revoir la façon dont il envisage les choses est un défi passionnant. Est-il intéressant d’organiser une exposition traditionnelle de plus ?

M. le président Jean-Christophe Fromantin. Ce qui revient tout le temps dans nos auditions, c’est la nécessité de partager et de vivre une expérience, et pas seulement d’exposer. L’obsession du BIE pour l’unité de lieu est liée à l’idée que l’on doit voir des choses – alors que si l’on partage des moments, on ne posera pas forcément le même regard sur les monuments.

M. Jean-Marie Duthilleul. La mobilité découle, non pas de la vitesse, mais de la facilité d’usage – et, pour le BIE, probablement aussi de la robustesse du système. Le métro du Grand Paris est un système formidable mais qui restera fragile s’il n’est pas maillé. Quand il a conçu le trajet Étoile-Nation, Bienvenüe a prévu qu’on puisse le faire par le sud, par le nord ou par le milieu : si une ligne souffre de thrombose, on peut toujours trouver une solution. Là, le métro amènera toutes les quatre minutes des voyageurs à Clamart, mais il faudra attendre vingt minutes le train sur le quai de la SNCF ! Mettre en place pour le Grand Paris un maillage aussi robuste que celui de la petite couronne : voilà la principale tâche à accomplir dans les dix prochaines années.

Il conviendra de concevoir ce maillage aussi à l’échelle des mobilités individuelles : on a beau vouloir réduire la place de la voiture, il existera toujours des mobilités individuelles, quelle que soit la technologie employée. Il y a énormément à faire de ce point de vue.

Enfin, il faudra concevoir la mobilité comme une découverte. Aujourd’hui, on est encore dans l’idéologie de la vitesse et du transport nuisant ; du coup, on conçoit les trajets sous terre. Mais lorsque le métro sort pour emprunter le pont de Bir-Hakeim, tout le monde lève le nez de son smartphone et s’exclame : « Regardez comme c’est beau ! ». Si on ne fait pas la même chose partout dans le Grand Paris, on aura tout faux ! Il faut qu’une partie du métro sorte à l’air libre pour être un instrument de découverte de l’exposition.

M. Jacques Ferrier. En plus, cela reviendra moins cher !

M. Jean-Marie Duthilleul. Il paraît inconcevable d’arriver à Orly pour prendre l’avion sans avoir vu le ciel – d’autant que l’on traverse le marché de Rungis, l’un des lieux de restauration les plus extraordinaires d’Ile-de-France !

J’en viens maintenant aux questions relatives à la rénovation et à la réutilisation. S’emparer d’un bâtiment, c’est continuer une histoire. C’est ce que nous avons fait avec les gares de Strasbourg et de Marseille : même si ces bâtiments sont restés des gares, nous avons écrit une nouvelle page de leur histoire. Idem pour les usines Panhard, derniers vestiges de l’industrie automobile à Paris, que nous avons réutilisées pour y installer nos bureaux. Je suis d’accord avec Alexandre Labasse : il ne faut pas de tabula rasa ; il faut faire avec ce qui existe, comprendre pourquoi c’est là et essayer d’écrire la suite de l’histoire.

M. Pierre Mansat. Un aspect du projet d’exposition universelle m’apparaît particulièrement intéressant : le thème des mobilités place les sites patrimoniaux et les lieux du renouvellement urbain sur un pied d’égalité. La métropole du Grand Paris a un caractère profondément déséquilibré – ce qui ne serait pas un problème si cela n’engendrait pas des inégalités. Voici un point à creuser : en quoi le projet d’exposition est-il susceptible de remédier à ces inégalités massives, qui portent tort à l’attractivité et au rayonnement de notre territoire ?

En ce qui concerne le récit, auquel les architectes sont très attachés, il faudra que ce dernier englobe non seulement la grande, mais aussi la petite histoire. L’histoire du Grand Paris est à révéler : c’est un travail formidable sur lequel nous pourrions nous retrouver.

M. Alexandre Labasse. Espérons qu’en matière de mobilité, l’exposition universelle apportera à Paris autant qu’elle a apporté à Séville, où elle a permis de faire le TGV ; en l’occurrence, il serait bon qu’elle accélère la réalisation des infrastructures, notamment le Grand Paris Express. Mais il faut aussi envisager des mobilités plus douces, ou que nous ne connaissons pas encore : des voitures électriques et sans chauffeur, des « blablacars », de nouvelles mobilités individuelles… Il est difficile de savoir à quoi ressembleront les mobilités de demain ; renseigner le BIE sur ce point me semble ambitieux.

La rénovation, la réhabilitation et la reconversion sont des questions très « XXe siècle ». En Ile-de-France, tout le patrimoine social des années 1960-1970 est à réhabiliter. Quant à la reconversion, c’est-à-dire le changement d’affectation, elle est pratiquée depuis longtemps : songeons à la gare d’Orsay devenue un musée, ou aux entrepôts Macdonald reconvertis en logements et bureaux. Sur ce type de bâtiments, on peut inventer n’importe quelle architecture : il existe des exemples d’interventions prodigieuses, soit minimales, soit au contraire extrêmement visibles. Le problème est plutôt de savoir ce qui va être construit : quels matériaux utiliser, comment faire en sorte que les bâtiments conçus pour l’exposition universelle puissent ultérieurement accueillir des bureaux ou des logements, ou être démontés pour être positionnés ailleurs. L’enjeu n’est pas tant le patrimoine que ce qui sera fait demain – d’autant que Paris est certainement la ville la plus regardée pour ce qui concerne la réhabilitation et la reconversion.

M. Jacques Ferrier. Une manière de répondre aux inquiétudes de M. Loscertales, le secrétaire général du BIE, serait de proposer de faire avec les lignes 14, 15, 16 et 17 du métro un parcours qui, tout en étant connecté aux aéroports de Roissy et d’Orly, au réseau de Paris centre et à la Seine, proposerait la mise en scène de ces flux, et dont chaque gare serait un point fort ; on pourrait en faire sortir des portions en surface. Cela serait l’équivalent pour le XXIe siècle du trottoir roulant, qui avait émerveillé les visiteurs de l’exposition universelle de 1900 !

S’agissant de la rénovation, j’abonderai dans le sens de Pierre Mansat : les sites prestigieux du centre de Paris doivent être mis sur le même plan que les lieux en devenir. Autour des gares du futur Grand Paris Express, on trouve de véritables pépites. Hélas, pour l’instant, nous ne disposons d’aucun moyen financier permettant d’assurer leur rénovation et leur reconversion – c’est notamment le cas pour le projet de villa Médicis pour la tour Utrillo de Clichy-Montfermeil, dont la maîtrise d’œuvre sera attribuée cet été. Ce serait pourtant l’occasion de lancer des programmes créatifs et ambitieux, en adéquation avec le projet d’exposition universelle, qui pourraient déboucher sur des logements.

M. Guy Amsellem. Et si l’unité de lieu était le parcours ? On pourrait mettre en scène une expérience de la fluidité, en s’inspirant des adolescents qui font du « parkour » : ils circulent à travers la ville avec un skate, en s’aidant de ce qui, pour nous, fait obstacle. Ainsi, vous ne dérogeriez pas au principe de l’exposition universelle, mais vous le réactualiseriez.

M. le président Jean-Christophe Fromantin. Le BIE nous a dit qu’il serait prêt à accepter une exposition à trois dimensions. Le premier niveau serait celui du village, praticable à pied ; dans cette perspective, l’espace historique des expositions universelles parisiennes, autour du Champ de mars et des Tuileries, pourrait abriter le guichet d’accueil sur le thème de l’histoire des expositions universelles, avec une expression des pays modulable et légère. Le deuxième niveau serait un parcours, une sorte de « tour du monde » autour du projet de transport. Et comme nous ne souhaitons pas que le projet soit exclusivement parisien, on pourrait concevoir des animations ou des colloques thématiques dans les grandes métropoles françaises – Marseille, Lyon, Bordeaux, Nantes, Lille –, dans la mesure où, grâce au TGV, la durée des trajets entre deux villes seront en 2025 comparables aux temps de transport dans les grandes métropoles émergentes.

Nous avons reçu le 25 juin M. Xu Bo, ancien adjoint au Commissaire général de l’Exposition universelle de Shanghai. La perspective d’investir le patrimoine français avec d’autres moyens d’expression intéresse beaucoup les pays émergents. Une approche conviviale, sur la base d’une rencontre entre les civilisations, leur plaît beaucoup, de même que l’idée d’un village au centre de Paris. M. Loscertales a d’ailleurs souligné que les meilleurs résultats étaient obtenus dans les villes où l’on pouvait associer la visite de l’exposition et un intérêt touristique. Le problème, c’est que le BIE pense que l’on ira visiter l’exposition, puis Paris, tandis que nous, nous souhaitons mélanger les deux : le touriste fera le tour du patrimoine tout en visitant l’exposition ; quand il ira à Versailles, il visitera un continent, et quand il montera au sommet de la tour Eiffel, il découvrira en même temps un pavillon thématique. Nous espérons que cette approche convaincra le BIE.

Pour M. Xu Bo, il n’y a rien d’anormal à ce que nous proposions une semaine thématique à Aix ou à Lille, dans la mesure où aller d’une ville à l’autre ne prendra pas plus de temps que traverser Shanghai. Chez nous, la ville métropole s’apparente au pays métropole !

M. Alexandre Labasse. Combien de temps le visiteur d’une exposition universelle reste-t-il sur place ?

M. le président Jean-Christophe Fromantin. Il faudrait distinguer les cas où l’on va seulement à l’exposition et ceux où l’on en profite pour visiter le pays d’accueil, mais, en moyenne, entre trois jours et une semaine – étant entendu que la durée d’une exposition universelle s’étale sur six mois au maximum. Ce phénomène de dilution distingue les expositions universelles des jeux olympiques, qui sont concentrés sur quinze jours.

M. Jean-Marie Duthilleul. L’enjeu, dans ce cadre, est non seulement de faire en sorte qu’en visitant le patrimoine, on visite l’exposition, mais aussi d’amener le public sur de nouveaux sites. Faire aller les visiteurs de la tour Eiffel à Versailles et leur faire découvrir le continent africain dans la caserne des matelots est de l’ordre du réalisable ; en revanche, il est plus difficile de les amener aux Ardoines ou à Gennevilliers. La Seine est de ce point de vue un atout fantastique, car c’est un patrimoine à grande échelle. En partant du village en bord de Seine, les visiteurs pourraient non seulement se rendre sur des sites célèbres à proximité, mais aussi découvrir les sites méconnus plus éloignés.

M. Hervé Pellois. Je suis l’élu d’une circonscription bretonne et je n’ai pas la même approche que vous du Grand Paris. En vous écoutant, je réalisais par exemple que je n’avais jamais eu l’occasion de sortir de Paris intra-muros, hormis pour aller à Versailles ou au Grand Stade. Vous m’avez donné envie de voir d’autres sites !

La notion de convivialité me semble particulièrement intéressante. Il serait bon que Paris redevienne la capitale de tous les Français. Aujourd’hui, certains de nos concitoyens n’ont guère la possibilité d’y aller. Une liaison avec quelques sites ciblés serait appréciable.

On est toujours attiré par les lieux les plus spectaculaires. J’ai été maire d’une commune de 10 000 habitants, à cinq kilomètres de Vannes : tout le monde connaît le golfe du Morbihan, mais personne ne va visiter l’intérieur. Chez nous, l’été, il n’y a pas un chat !

M. le rapporteur. Nous n’en sommes qu’au début de la conception du projet. Nous allons ouvrir le concept d’exposition universelle dans des proportions encore inconnues, avec des dizaines de projets qui vont venir se greffer au nôtre. L’exposition universelle peut déboucher sur une fête populaire qui durera six mois. Au fur et à mesure que le projet va se développer, certains éléments vont prendre une importance croissante, notamment tout ce qui relève de la sécurité publique, mais nous allons intéresser des protagonistes qui ne pouvaient jusqu’alors accéder aux expositions qu’en tant que consommateurs. Au-delà du dossier de candidature, nous devons réfléchir à ce à quoi il va donner naissance – et c’est pourquoi la proposition de Pierre Mansat nous intéresse beaucoup.

M. le président Jean-Christophe Fromantin. Ce matériau brut est en effet appelé à s’enrichir au cours des dix prochaines années, grâce à un processus d’appropriation collective. Nous sommes confrontés à un double défi : l’approfondissement du projet, jusque dans l’épaisseur de la ville, et son enrichissement par les autres acteurs – villes, entreprises, grand public.

Merci à tous pour votre collaboration.

——fpfp——

Membres présents ou excusés

Mission d'information sur la candidature de la France à l'exposition universelle de 2025

Réunion du mercredi 9 juillet 2014 à 16 h 30

Présents. - M. Jean-Christophe Fromantin, M. Hervé Pellois

Excusés. - M. Yves Albarello, M. Guillaume Bachelay, M. Christophe Bouillon, M. Bruno Le Roux, Mme Catherine Quéré