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Commission des affaires sociales

Mardi 12 mars 2013

Séance de 16 heures 15

Compte rendu n° 39

Présidence de Mme Catherine Lemorton, Présidente

–  Audition, ouverte à la presse, de MM. Michel Sapin, ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, et Thierry Repentin, ministre délégué chargé de la formation professionnelle et de l’apprentissage, sur le projet de loi relatif à la sécurisation de l’emploi (n° 774)

– Présences en réunion

COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

Mardi 12 mars 2013

La séance est ouverte à seize heures vingt.

(Présidence de Mme Catherine Lemorton, présidente de la Commission)

La Commission entend MM. Michel Sapin, ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, et Thierry Repentin, ministre délégué chargé de la formation professionnelle et de l’apprentissage, sur le projet de loi relatif à la sécurisation de l’emploi (n° 774).

Mme la présidente Catherine Lemorton. Nous accueillons aujourd’hui M. Michel Sapin, ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, et M. Thierry Repentin, ministre délégué chargé de la formation professionnelle et de l’apprentissage, pour nous présenter le projet de loi relatif à la sécurisation de l’emploi. Ce texte témoigne, une nouvelle fois, de la volonté du Gouvernement de trouver des solutions au chômage, particulièrement prégnant dans notre pays.

Je rappelle que ce projet de loi a été adopté en conseil des ministres la semaine dernière. Nous l’examinerons en commission dans quinze jours, les mardi 26 (après-midi et soir) et mercredi 27 (matin). L’examen en séance publique aura lieu la semaine suivante, à partir du 2 avril.

Comme vous avez pu le voir sur la convocation, j’ai décidé que la Commission procéderait à l’audition non seulement du Gouvernement, mais aussi des partenaires sociaux, qu’il s’agisse des cinq organisations signataires de l’Accord national interprofessionnel (ANI) du 11 janvier dernier, ou des deux organisations syndicales qui ne l’ont pas signé mais qui ont participé jusqu’au bout aux négociations. En raison de l’agenda des uns et des autres, nous avons eu de grandes difficultés à programmer ces auditions qui commenceront demain et se poursuivront la semaine prochaine.

Messieurs les ministres, je vous laisse la parole.

M. Michel Sapin, ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. Madame la présidente, mesdames, messieurs les députés, le projet de loi que je vous présente aujourd’hui est important. Il démontre que la France peut, dans ce domaine difficile qu’est le marché du travail, se réformer par le dialogue.

L’accord du 11 janvier dernier a marqué l’aboutissement de l’une des plus ambitieuses séquences de négociation interprofessionnelle depuis plus de quarante ans. Il fera date, j’en suis certain, dans l’histoire du droit social français.

Après plusieurs décennies d’avancées – parfois positives, mais souvent très partielles –, d’échecs ou de renoncements, les principaux enjeux de notre marché du travail sont désormais pris à bras-le-corps pour fonder un nouvel équilibre, un équilibre dans lequel ce que les uns gagnent n’est pas ce que les autres perdent, un équilibre qui ouvre un nouveau champ des possibles face aux grands défis du marché du travail : la lutte contre le chômage et la précarité, la création d’emplois.

Le projet de loi sur la sécurisation de l’emploi se présente – et ce n’est pas là son moindre mérite – sous la forme d’un texte global, et non pas « à la carte », en abordant l’ensemble des sujets concernant le marché du travail et en ne laissant de côté aucun sujet difficile. Il aborde de front, dans leur totalité, les problèmes que notre société traîne depuis trop longtemps : la lutte contre la précarité du travail, la préférence qu’il faut rendre au contrat à durée indéterminée, les droits individuels et collectifs des salariés, l’anticipation des mutations économiques, la recherche de solutions collectives pour sauvegarder l’emploi dans une conjoncture difficile, la nécessaire refonte des procédures de licenciements collectifs.

Le pacte de compétitivité a été la marque d’une ambition, de l’effort d’une société tout entière qui fait le choix de jeter toutes ses forces dans la création d’emplois.

Cela étant, plus de performance économique ne signifie pas moins de cohésion sociale : c’est au contraire plus de cohésion sociale, plus de capacité de dialogue, plus de possibilité de négocier. Tel est l’objet de ce texte sur la sécurisation de l’emploi : permettre une adaptation à la conjoncture économique, non en précarisant davantage, mais en augmentant les droits individuels et collectifs des salariés.

Ainsi, et contrairement à ce que j’entends dire parfois, ce texte n’est pas un échange entre la flexibilité pour les entreprises et la sécurité pour les salariés. Il apporte sécurité et visibilité à chacun. C’est en en ce sens qu’il est différent de ce que l’on a pu faire jusqu’à présent dans ce domaine. Il est une équation nouvelle de l’économique et du social.

La sécurisation de l’emploi va donner aux acteurs sociaux le pouvoir de négocier, à tous les niveaux, et de le faire sur de vrais enjeux. Le seul moyen de rendre les acteurs responsables, c’est de leur donner des responsabilités et des pouvoirs. Voilà le vrai changement, dont les partenaires sociaux – signataires comme non-signataires – sauront se saisir. Et ils auront raison de le faire.

Derrière l’accord, derrière la loi, il y a une méthode : celle du dialogue social à la française. Si chacun voit ce que signifie « dialogue social », les termes « à la française » méritent une explication.

Nous ne sommes pas un pays scandinave, ni même l’Allemagne où la cogestion se pratique presque indépendamment de la politique. Dans notre cas, c’est d’abord une impulsion politique qui a donné l’élan au dialogue social. Je veux bien sûr parler de la grande conférence sociale qui a su rassembler tous les acteurs et qui a permis de partager des constats et de fixer une feuille de route commune. Je veux aussi rappeler le cap fixé par le Président de la République : « mobiliser les forces vives de notre pays vers des solutions nouvelles pour l’emploi ».

Il y a eu ensuite un document d’orientation du Gouvernement – rédigé par moi-même – pour cette négociation, acte politique qui engageait les partenaires sociaux à rechercher un accord, et l’État à mettre en œuvre les changements législatifs et réglementaires qui en découleraient.

Est alors venu le temps du dialogue social : quatre mois de négociation intense pour parvenir à l’accord du 11 janvier 2013.

La balle est ensuite revenue dans notre camp, celui des acteurs politiques : le Gouvernement pour écrire la loi, le Parlement pour la voter.

Respecter l’accord, c’était un engagement – et cela le reste – du Gouvernement. Cet engagement est aujourd’hui tenu, car il en va du respect des partenaires sociaux et du respect du dialogue social. Comment pourrais-je me présenter devant vous, en tant que ministre du dialogue social, avec un projet de loi qui déferait ou dénaturerait un accord valablement conclu avec les partenaires sociaux ? Ce serait déconsidérer et affaiblir des acteurs qui ont au contraire besoin d’être confortés. Ce serait condamner le dialogue social à une nouvelle période de glaciation.

Pour moi, la démocratie sociale n’est pas un « tour de palabres » sans conséquence avant que ne commencent les « choses sérieuses », c’est-à-dire que le Gouvernement, les administrations et le Parlement proposent et décident d’un projet différent.

Vous êtes saisis du projet de loi. Pour avoir été parlementaire de longues années, je sais la difficulté de faire la loi, les questions que le législateur se pose face aux expressions parfois contradictoires des uns et des autres. Je sais aussi à quel point il est précieux de pouvoir s’appuyer sur le travail préalable des acteurs eux-mêmes.

Pour autant, le passage de l’accord au projet de loi, puis du projet de loi à la loi, demande aussi un travail. Une transposition n’est pas un recopiage, un parlement n’est pas une chambre d’enregistrement. De la même manière, je n’ai jamais été le scribe de je ne sais quel accord conclu dans mon dos.

Là où l’accord du 11 janvier laissait apparaître des ambiguïtés ou des zones d’incertitude, là où il était silencieux, des choix clairs ont dû être opérés. Ils ont été faits en toute transparence avec une seule grille d’analyse : celle de l’option la plus favorable pour répondre à l’ambition de sécurisation de l’emploi et des parcours professionnels, et la plus conforme à l’intérêt général.

Je sais que vous vous efforcerez d’agir avec la même volonté de respecter l’accord et son équilibre. Dans quelques semaines, la loi aura donc inscrit l’accord dans notre ordre juridique, avec le poids des engagements qui sont nés des acteurs sociaux eux-mêmes.

À la force du dialogue s’ajoutera donc celle de la loi, son complément nécessaire. Nécessaire, car c’est la loi qui porte l’intérêt général ; nécessaire car la France est un pays qui s’est construit par le droit. Nous sommes ici au cœur de notre modèle social et politique français, avec une articulation utile entre le contrat et la loi, entre la démocratie sociale et la démocratie politique.

À cet égard, le projet de loi constitutionnelle sur la démocratie sociale qui sera soumis demain au Conseil des ministres marquera un pas décisif et complémentaire. Nous aurons l’occasion d’en reparler.

J’en viens maintenant à la présentation générale du projet de loi lui-même. Il poursuit trois objectifs principaux : créer de nouveaux droits pour les salariés ; lutter contre la précarité ; agir en faveur de l’emploi par la négociation autour des mutations économiques.

D’abord, créer de nouveaux droits pour les salariés.

Les nouveaux droits créés par le projet de loi sont en premier lieu des droits individuels.

Le premier de ces droits, c’est le droit à la santé via la généralisation de la couverture complémentaire collective. Quel que soit le parti politique auquel nous appartenons, nous croyons tous à la protection sociale et à la nécessité d’une couverture maladie qui permette l’accès à la santé. Les situations de renoncement aux soins pour des raisons financières nous blessent donc tous dans nos convictions.

Aujourd’hui, 400 000 salariés se passent de complémentaire, 4 millions n’ont pas accès à une complémentaire collective cofinancée par leur employeur.

Ces salariés, qui sont-ils ? Certainement pas des cadres ou des salariés de grandes entreprises, qui ont en général une complémentaire d’entreprise. Ce sont les précaires, les mères célibataires, ceux qui alternent petits emplois et périodes de chômage. C’est pour eux que nous voulons agir, et c’est pour eux que la couverture complémentaire obligatoire et la portabilité des droits à la complémentaire – c’est-à-dire la possibilité de conserver ses droits à une complémentaire pendant une période de chômage – ont un sens.

La négociation sera privilégiée pour mettre en place cette complémentaire santé. Mais en tout état de cause, si aucun accord de branche ou aucun accord d’entreprise n’est trouvé sur le sujet, sa mise en place sera effective au 1er janvier 2016.

Le projet prévoit ensuite la création d’un compte personnel de formation, sur lequel Thierry Repentin vous en dira davantage. Ce dispositif constitue une réponse par le haut à la sécurisation des parcours professionnels et à la nécessaire évolution professionnelle des salariés français.

Le texte crée également un droit à la mobilité professionnelle sécurisée, pour permettre aux salariés de tenter une expérience dans une autre entreprise et de revenir ou de rester selon leur souhait.

Le projet de loi crée, en outre, de nouveaux droits collectifs pour les salariés.

C’est ainsi que demain, des salariés entreront dans les conseils d’administration des grandes entreprises et pèseront sur les décisions car ils auront un droit de vote, comme les autres membres. Environ 200 groupes, employant près de 4 millions de salariés en France, seront concernés.

Demain également, les salariés seront mieux informés et consultés par la mise en
place, d’une part, d’une nouvelle consultation sur les orientations stratégiques de l’entreprise, et, d’autre part, d’une base de données unique, actualisée en permanence, comportant toutes les informations et perspectives économiques et sociales de l’entreprise. Car sécuriser l’emploi, c’est construire des acteurs forts et informés pour pouvoir négocier.

Deuxième objectif du projet de loi : faire reculer la précarité.

Le projet de loi porte en effet sur la qualité de l’emploi et sur le recul de la précarité.

Agir contre la précarité, c’est d’abord encourager le recours au contrat à durée indéterminée (CDI) en augmentant, dès le 1er juillet prochain, les cotisations d’assurance chômage pesant sur les contrats courts – en dix ans, ceux de moins d’un mois ont augmenté de 120 % ! – et en diminuant les cotisations pesant sur les embauches de jeunes en CDI – les trois premiers mois pour les entreprises de plus cinquante salariés, et les quatre premiers mois pour celles de moins de cinquante salariés.

Agir contre la précarité, c’est également instaurer des droits rechargeables à l’assurance chômage, qui seront mis en place dans la nouvelle convention d’assurance chômage négociée cet automne. Pour les salariés aux parcours heurtés, ceux qui passent trop souvent par la « case » chômage, l’accord permettra une amélioration concrète et substantielle de leur prise en charge. Un salarié qui reprendra un emploi après une période de chômage conservera le reliquat de ses droits aux allocations chômage non utilisés pour les ajouter, en cas de nouvelle perte d’emploi, aux nouveaux droits acquis au titre de la période d’activité ouverte par cette reprise d’emploi. Face à la multiplication des contrats courts, il s’agit là d’un droit extrêmement important.

Agir contre la précarité, c’est enfin prendre des mesures relatives au temps partiel, notamment lorsqu’il est subi.

Le projet de loi constitue un pas en avant, puisqu’il fixe une durée minimale hebdomadaire de 24 heures. C’est une avancée importante car, aujourd’hui, l’accès aux droits sociaux obéit à des seuils. Les salariés qui ne réalisent que de petits temps partiels n’ont accès ni aux indemnités journalières en cas de maladie, ni à une couverture chômage en cas de rupture de contrat, ni à la formation professionnelle, sans compter que les périodes travaillées ne sont pas validées au titre de la retraite. Désormais, le « petit » temps partiel ne sera possible qu’à titre dérogatoire, à la demande motivée du salarié ou par accord de branche et si, et seulement si, l’organisation du travail est revue pour éviter les plages horaires dispersées – qui concernent en premier lieu les femmes – et faciliter la possibilité pour le salarié de cumuler plusieurs emplois.

De plus, une majoration de 10 % dès la première heure complémentaire viendra renforcer le pouvoir d’achat des salariés à temps partiel. Ainsi, la majorité des salariés à temps partiel verront leur situation s’améliorer, soit par une hausse des heures travaillées, soit par une meilleure répartition de celles-ci.

Le projet de loi améliore donc le sort des salariés précaires, qui sont aux marges de l’emploi le plus sécurisant. En ce sens, il est un indéniable progrès, en particulier pour les femmes car elles sont les premières concernées par le temps partiel subi.

Troisièmement, ce projet de loi est favorable à l’emploi.

Il vise en effet à agir pour l’emploi dans un contexte économique difficile.

Il le fait tout d’abord en procédant à une réforme et une refonte, attendue depuis de nombreuses années, du dispositif de chômage partiel. Demain, un dispositif unifié et simplifié, plus attractif pour les entreprises et pour les salariés, sera mis en place. Cela est essentiel pour maintenir l’emploi et conserver les compétences des entreprises qui connaissent un passage difficile. Il nous faut davantage mobiliser le chômage partiel, notamment dans les petites et moyennes entreprises (PME) et dans les services.

Demain, par les accords de maintien de l’emploi, employeurs et salariés auront la possibilité de s’adapter à la crise, et de le faire non plus en sacrifiant des emplois, qui constituent systématiquement aujourd’hui la variable d’ajustement de tout choc conjoncturel. Ainsi, un accord de maintien de l’emploi pourra être trouvé dans l’entreprise pour faire varier le temps de travail ou la rémunération, mais avec de nombreuses garanties. D’abord, la difficulté conjoncturelle de l’entreprise devra être avérée, vérifiée par les syndicats et un expert qu’ils pourront désigner. Ensuite, l’accord devra être signé par des syndicats représentant plus de 50 % des salariés, et sa durée ne pourra pas dépasser deux ans. En outre, les plus bas salaires ne pourront pas être concernés. L’entreprise ne pourra pas licencier pendant la durée de l’accord. De plus, une clause de retour à meilleure fortune devra être prévue pour les salariés en cas d’amélioration de la situation de l’entreprise. Par ailleurs, les dirigeants et les actionnaires devront participer aux efforts demandés aux salariés. Enfin, tout salarié qui refusera l’application de cet accord bénéficiera de l’accompagnement spécifique lié à un licenciement économique.

À l’évidence, ce n’est pas de gaieté de cœur qu’un salarié accepte de voir baisser son salaire ou modifier ses horaires de travail. Mais j’ai la conviction que les salariés ne sont ni des otages, ni des pantins manipulés, ni des victimes : ils sont les premiers défenseurs de leur outil de production, et ils sont prêts à des efforts si, et seulement si, ils participent à la décision et voient leurs droits protégés. Ce sera le cas au regard des conditions posées pour la conclusion de l’accord et pour le suivi de sa mise en œuvre.

De la même manière, la loi réforme profondément les procédures de licenciements collectifs, sujet éminemment difficile et douloureux. Ils ne seront désormais possibles qu’avec l’accord des organisations syndicales – accord majoritaire – ou, à défaut, de l’administration – homologation du plan de sauvegarde de l’emploi. Ces modalités permettront d’agir pour limiter le nombre de licenciements, d’améliorer le contenu des plans de sauvegarde de l’emploi et, par conséquent, de sécuriser les procédures et les délais correspondants pour les entreprises comme pour les salariés. Car il n’y a rien à gagner dans les batailles judiciaires infinies.

Cela étant, je ne condamne pas ce qui se passe aujourd’hui : l’utilisation, parfaitement légitime, des procédures judiciaires est malheureusement le seul moyen de se défendre pour les organisations syndicales et les salariés, et chacun a droit à un juge. Dorénavant, cela se fera en sécurisant les procédures et en avançant le plus possible les décisions.

La loi inversera une donnée : à la réparation a posteriori par le juge, elle substituera l’intervention a priori par l’accord ou l’homologation, sans priver qui que ce soit du recours au juge. Le projet de loi crée par ailleurs une obligation de recherche d’un repreneur en cas de projet de fermeture de site, en assurant l’information des représentants des salariés sur cette recherche et en leur donnant les moyens d’évaluer – y compris par la nomination d’un expert – les propositions de reprise.

En sécurisant ainsi les procédures et en les encadrant dans le temps, l’accord répond à une préoccupation des entreprises, sans pour autant restreindre les droits des salariés. Au contraire, il réforme en profondeur le droit applicable en donnant plus de pouvoir aux représentants des salariés et aux services de l’État.

Vous le voyez, nous n’avons évité aucun sujet, nous n’en avons renvoyé aucun à plus tard. Nous avons au contraire réussi à unir des dispositions en faveur de l’emploi et du renforcement des droits collectifs des salariés, de nouveaux outils pour sauver immédiatement des emplois et un cadre plus favorable à la création d’emplois de qualité dans les mois et les années à venir.

Comme l’accord du 11 janvier, ce projet de loi croit au dialogue social, à l’autonomie et à la responsabilité des acteurs, à la mobilité, à la formation tout au long de la vie, à l’adaptation négociée, à la capacité de se mettre d’accord pour sauver son entreprise tout en bénéficiant de droits sanctuarisés – car tout n’est pas négociable.


Ce projet porte l’idée que la France peut tourner le dos à sa funeste préférence pour le licenciement, que le CDI est préférable au contrat à durée déterminée (CDD), et l’information des salariés en amont à une opposition stérile entre stratégies d’évitement du dialogue social d’une part, et manœuvres de retardement de l’autre.

Sur tous les sujets délicats qu’il traite, il se veut donc ambitieux et équilibré, susceptible de faire bouger les lignes et de contribuer à la grande bataille pour l’emploi que nous avons engagée.

M. Thierry Repentin, ministre délégué chargé de la formation professionnelle et de l’apprentissage. La formation professionnelle résulte d’une construction collective entre l’État et les partenaires sociaux. Les accords et les lois l’ont structurée au fil du temps, ouvrant des droits nouveaux auxquels votre Assemblée a pris toute sa part. Les résultats et les acquis sont nombreux : la formation professionnelle est portée par un dialogue permanent et riche ; les entreprises dépassent largement leurs obligations légales de formation ; de nombreux demandeurs d’emploi et jeunes accèdent à une qualification ou à une reconversion via la formation.

Ce système souffre cependant de vrais défauts. Il n’est pas assez organisé pour offrir une nouvelle chance à ceux – notamment les jeunes – qui sont sortis de formation initiale sans qualification. Il bénéficie davantage à ceux qui sont déjà formés qu’aux plus fragiles. Enfin, le droit à la formation reste attaché au statut des personnes, alors que les trajectoires professionnelles sont de plus en plus discontinues.

Ainsi que vient de le dire Michel Sapin, l’accord national interprofessionnel du 11 janvier crée de nombreux droits nouveaux en faveur des salariés, dont des droits relatifs à l’orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie, qui vont permettre d’améliorer le système existant dans le sens de la justice et de l’efficacité. Je pense à la participation des salariés à la définition des orientations du plan de formation au sein de l’entreprise, qui figure à l’article 9, à la création du compte personnel de formation, et à celle d’un service de conseil en évolution professionnelle, prévues à l’article 2.

Même si ces trois évolutions font système, je m’attarderai principalement sur l’innovation que constitue le compte personnel de formation, qui permettra de donner une traduction concrète à ce qui était jusqu’à présent resté un slogan : le droit à se former tout au long de la vie. Attaché à la personne, doté de droits intégralement transférables, ouvert à tous, ce compte favorisera la prise en main de son destin par chacun, et lui permettra de mener son projet de formation à bien sans blocage, au moment le plus opportun de son parcours professionnel – par exemple lorsqu’il souhaitera progresser ou changer de métier, ou s’y verra contraint.

En créant le compte personnel de formation dans l’article 5 de leur accord, les partenaires sociaux ont donc posé un acte fondateur. Nous avons porté haut leur ambition en l’inscrivant à l’article L. 6111-1 du code du travail, qui dispose que chacun doit pouvoir progresser d’au moins un niveau de qualification au cours de sa vie professionnelle.

Outre cette ambition qualifiante, le projet de loi définit les grands principes régissant le compte, sans entrer dans le détail de son fonctionnement. Nous sommes en effet au carrefour de plusieurs initiatives, qui doivent permettre d’affiner les modalités de mise en œuvre du compte. Il s’agit d’abord de la concertation à venir entre l’État, les régions et les partenaires sociaux, et de la discussion entre ces derniers, inscrites dans l’accord du 11 janvier. Dans une logique de solidarité, cette concertation devra notamment permettre de déterminer comment le compte personnel de formation pourra faire l’objet d’une dotation spécifique en faveur de ceux qui sont sortis de l’école sans qualification. Lundi prochain 18 mars seront par ailleurs remises, à l’occasion d’une réunion du Conseil national de la formation professionnelle tout au long de la vie, les conclusions du groupe de travail consacré au compte individuel de formation, dont le lancement avait été décidé dans le cadre de la grande conférence sociale des 9 et 10 juillet derniers.

Enfin, vous n’êtes pas sans savoir que lors de son déplacement à Blois la semaine dernière, le Président de la République a appelé de ses vœux une réforme en profondeur de la formation professionnelle, assortie d’un projet de loi avant la fin de l’année. Ce projet nécessitera probablement en amont une négociation nationale interprofessionnelle, qui inclura dans son périmètre la novation que constitue le compte personnel. Je m’entretiendrai de ces perspectives dans les jours qui viennent avec les partenaires sociaux, afin de voir comment assembler progressivement l’ensemble des briques opérationnelles du compte personnel de formation.

Les deux autres volets du projet relatifs à la formation professionnelle sont également constitutifs d’un progrès social.

La création d’un nouveau service de conseil en évolution permettra au salarié de construire un projet professionnel au sein d’un lieu neutre, en dehors du « colloque singulier » avec son employeur, nécessairement biaisé. Les salariés ont toujours été les parents pauvres de l’information et de l’orientation professionnelle en France ; ce nouveau service va donc changer la donne. Nous avons d’ailleurs tenu à l’inscrire dans le cadre du service public de l’orientation, qui sera demain – après l’adoption du projet de loi portant décentralisation et réforme de l’action publique – organisé par les régions, afin d’assurer à la fois son accès à tous les salariés et sa pertinence au regard des besoins économiques du territoire.

Enfin, l’article 9 du projet prévoit que dans les entreprises de plus de 300 salariés, ceux-ci pourront désormais négocier les orientations de la politique de formation professionnelle dans le cadre de la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC), en particulier celles concernant le plan de formation. Il s’agit là d’une capacité nouvelle accordée aux salariés, puisque la définition du plan de formation est depuis plus de quarante ans une prérogative exclusive de l’employeur. Nous en attendons des effets vertueux : une plus forte appétence des salariés pour la formation, une meilleure prise en considération des moins qualifiés dans l’entreprise, des formations plus ciblées sur l’avenir et l’emploi de demain, répondant mieux aux anticipations des évolutions économiques.

Portabilité des droits, projets de formation mieux accompagnés et plus pertinents, représentants des salariés impliqués dans les stratégies de formation sont autant d’avancées concrètes portées par les partenaires sociaux et par ce projet de loi qui contribueront donc, comme l’a souhaité le Président de la République, à construire une formation professionnelle plus juste et plus efficace, davantage orientée vers ceux de nos concitoyens qui en ont le plus besoin. Ne nous privons pas de cette nouvelle étape !

Mme la présidente Catherine Lemorton. Permettez-moi d’insister sur la méthode, initiée et voulue par le Président de la République dès son discours d’ouverture de la conférence sociale de juillet 2012 au Palais d’Iéna. Elle a été respectée, puisque les différents partenaires ont accepté de se remettre autour de la table pour discuter.

Le texte que vous nous présentez reste au plus proche de l’accord. Nous sommes loin du cauchemar d’août 2008, où le gouvernement de M. Fillon avait profité du projet de loi transposant dans le code du travail les dispositions sur la représentativité syndicale négociées par les partenaires sociaux pour faire adopter un titre II sur l’augmentation du temps de travail et mettre fin aux 35 heures. Nous ne pouvons que vous remercier de ne pas être tombés dans ce travers, même si nous aurions préféré que l’accord du 11 janvier soit signé par tous les partenaires sociaux.

Vous avez dit que le Parlement n’était pas une chambre d’enregistrement. Sous la dernière législature, nous avions en effet été quelques membres de l’opposition à nous interroger sur les ruptures conventionnelles – bien que l’accord ait été signé par les partenaires sociaux. Sans doute avions-nous raison, puisque ce dispositif est aujourd’hui dévoyé. Nous y reviendrons probablement dans le cadre d’une mission d’information.

« Nous n’avons évité aucun sujet, nous n’en avons renvoyé aucun à plus tard », avez-vous dit. Aucune question ne sera donc exclue ni ajournée ce soir…

M. Jean-Marc Germain, rapporteur. Je salue à mon tour la méthode. Une démocratie sociale à la française est en train de s’inventer. Elle ne met ni l’accord au-dessus de la loi, ni la loi au-dessus de l’accord, mais consiste en une sorte de dialogue constructif ou de valse à trois temps.

Les orientations politiques issues des élections présidentielles et législatives sont le premier de ces temps. La feuille de route que vous avez adressée aux partenaires sociaux était directement inspirée des objectifs politiques du Président de la République. Je pense par exemple à l’engagement 55, relatif à la présence des salariés au conseil d’administration des grandes entreprises, mais aussi, au-delà de celui-ci, à la plus grande implication des salariés dans les stratégies d’entreprise – vous avez évoqué les avancées en la matière. Je pense aussi à l’engagement 35, concernant la création d’une sécurité sociale professionnelle. C’est en effet le deuxième axe de ce texte, qui opère des avancées significatives en matière de santé, avec la couverture santé complémentaire obligatoire et portable d’une entreprise à l’autre, mais aussi en matière de formation professionnelle et de droits au chômage. Je pense enfin à l’engagement 25 sur la lutte contre la précarité, qui prévoyait notamment la taxation des emplois précaires.

Je tiens à saluer les partenaires sociaux – c’est le deuxième temps de la valse – qui ont accepté de négocier autour de ces objectifs politiques, et cela qu’ils les partagent ou non. Je pense ici au MEDEF, qui n’était pas nécessairement favorable à la taxation des emplois précaires – pour ne citer que ce point. Cette négociation a eu lieu, et nous l’avons respectée, hormis lorsque certaines lignes rouges risquaient d’être franchies.

Vient aujourd’hui le troisième temps, tout aussi essentiel : celui de la transcription de l’accord dans la loi. Contrairement au droit allemand, qui relève principalement des conventions collectives, notre droit social est fondé sur la loi. Il ne peut donc être amélioré que par la loi. Ce troisième temps est celui du projet que vous nous présentez et du travail parlementaire.

Je salue ensuite le choix très structurant qui fonde le texte. Il fallait éviter l’écueil que constituait ce qui était pourtant le postulat du MEDEF à l’ouverture de la négociation, à savoir une sorte de théorème de Schmidt revu selon lequel les licenciements d’aujourd’hui feraient les embauches de demain. C’est en effet une erreur fondamentale. Non seulement il n’est pas difficile de procéder à des licenciements économiques en France, mais notre pays n’a pas les moyens de s’offrir une flexisécurité à la danoise : il faudrait doubler les moyens de l’assurance chômage au sens large pour assurer une indemnisation chômage égale à 90 % du revenu moyen antérieur. Cette voie aurait donc été une impasse. Ce n’est d’ailleurs pas celle qu’a choisie l’accord, qui rend plus difficiles les plans sociaux « secs » – vous avez parlé de mettre fin à l’exception française de la préférence pour les licenciements – au profit de mesures de redéploiement comme le chômage partiel, rebaptisé activité partielle, les accords de maintien dans l’emploi, qui sont des formes de chômage partiel négocié, ou les mobilités internes, qui sont des formes de réorganisation des entreprises hors périodes de crise.

Ce choix structurant doit beaucoup à la négociation, mais aussi à la touche personnelle que vous y avez apportée en rétablissant une forme moderne d’autorisation de licenciement, qui repose fondamentalement sur la négociation. Aujourd’hui, le licenciement est une prérogative unilatérale du chef d’entreprise – avec information et consultation des salariés. Demain, grâce à l’accord et à ce texte, il devra recueillir soit l’accord majoritaire des salariés, soit une forme d’accord de l’administration, à travers la procédure d’homologation. Vous avez fait le choix que celle-ci puisse porter sur le fond des mesures proposées par l’entreprise, et non sur la seule procédure. Ce choix conditionne les effets possibles de l’accord en matière d’emploi, puisque l’administration aura les moyens de peser concrètement sur les solutions mises en œuvre, donc en faveur des solutions alternatives aux licenciements. Pouvez-vous nous en dire plus sur les moyens dont elle disposera pour remplir la nouvelle mission fondamentale qui lui incombe, sachant que vous avez précisé que les moyens mis en œuvre par les entreprises devraient être proportionnés à ceux des groupes auxquels elles appartiennent ? Quoi qu’il en soit, je me félicite que vous ayez préféré à la flexisécurité une « sécuri-sécurité » à la française.

J’en viens au rôle du Parlement. Les partenaires sociaux ayant signé un accord, nous sommes dans la même situation qu’il y a quelques semaines, lorsque nous avons examiné le projet de loi créant les contrats de génération – à ceci près que l’accord avait ici été signé par tous les partenaires sociaux. Le Parlement jouera donc pleinement son rôle, dans le respect de la signature des organisations syndicales qui se sont engagées à travers l’accord. Les dirigeants du MEDEF ont par exemple accepté de s’engager dans la voie du rétablissement d’une forme d’autorisation de licenciement. Remettre cette signature en cause serait compromettre toute négociation dans les prochaines années. Or pour redresser notre pays, lutter contre le chômage, protéger les salariés et améliorer la compétitivité des entreprises, nous avons besoin que salariés et employeurs se parlent.

Par le travail que vous avez accompli, marchant en quelque sorte sur un chemin de crête et tenant compte des inquiétudes manifestées par les organisations non-signataires, qui représentent près de la moitié des salariés, mais aussi par d’autres forces vives de notre pays, vous avez montré que nous pouvions progresser dans cette voie. C’est dans le même état d’esprit que je vous proposerai de faire évoluer ce texte. Les partenaires sociaux ont édifié les murs, vous y avez ajouté le toit ; il nous reste à poser les portes et les fenêtres, en respectant la négociation et en restant à l’écoute de ceux qui souhaitent nous aider à améliorer le texte.

Je terminerai par quelques questions précises. La première – que je vous ai déjà posée – porte sur les moyens de l’administration. Pouvez-vous également nous en dire plus sur la capacité de la justice administrative à assumer, en lieu et place de la justice judiciaire, sa nouvelle mission en matière de gestion des procédures collectives ?

Ma deuxième question porte sur la généralisation de la couverture complémentaire santé. Comment l’articuler avec l’objectif qu’a fixé le Président de la République à Nice – offrir cette généralisation à tous les Français, notamment les 4 millions de salariés actuellement non couverts ?

S’agissant du compte personnel de formation, nous restons un peu sur notre faim. L’accord avait beaucoup progressé sur les conditions de son utilisation. Ce projet de loi aurait donc pu arrêter définitivement ses contours, la loi de décentralisation et la future loi sur la formation professionnelle traitant ensuite de la gouvernance et du financement. L’objectif d’un projet de loi d’ici à la fin de l’année, qui a été annoncé par le Président de la République, doit être tenu : il y va de la compétitivité de notre pays et de la sécurité des salariés face au risque du chômage.

Le texte comporte une réforme du chômage partiel – l’activité partielle – et un nouveau dispositif – les accords de maintien dans l’emploi, que j’ai qualifiés de forme de chômage partiel négocié. Sera-t-il possible de recourir aux aides de l’État en cas de signature d’un accord de maintien dans l’emploi ? Je vous pose cette question car si nous envisagions de préciser le texte sur ce point, notre amendement tomberait sous le coup de l’article 40.

M. Jean-Patrick Gille. Je salue à mon tour la méthode, qui a permis de restaurer et de renforcer le dialogue social, faisant naître une sorte de « dialogue social à la française ». Mais comme il n’y a pas d’autonomie de la création de la norme dans notre pays, il est nécessaire d’en passer par la loi.

La condition pour que ce « dialogue social à la française » fonctionne – qui n’a pas toujours été remplie sous la législature précédente, comme l’a rappelé la présidente – est la loyauté. Dès lors que l’on demande aux partenaires sociaux de négocier, il importe de respecter leur négociation et le fruit de leur travail. Le processus a ici parfaitement fonctionné.

Certains parlent de flexisécurité, d’autres de flexibilité à l’allemande ou à la française. Il s’agit simplement d’améliorer le fonctionnement du marché du travail. Nous sommes en train d’inventer une méthode – « à la française » elle aussi – qui consiste à donner davantage de place à la négociation, à réduire la précarité, mais aussi – ce qui n’a pas été assez souligné par les observateurs – à accroître la participation des salariés à la stratégie de l’entreprise. Il s’agit enfin de sortir d’une culture de management par le licenciement et la condamnation de certains publics – notamment les jeunes – à la précarité, à laquelle notre pays s’est habitué. L’accord et la loi vont permettre de faire évoluer cet état d’esprit.

Le texte comporte des avancées immédiates telles que la sur-cotisation employeur sur les CDD et l’encadrement du temps partiel, mais aussi l’encadrement des accords de maintien dans l’emploi et la représentation des salariés au conseil d’administration des grandes entreprises.

Il contribue également à la construction de nouveaux droits, avec la généralisation de la couverture complémentaire santé, le compte personnel de formation et les droits rechargeables.

Certains points, qui restent à préciser, donneront lieu à débat. Je pense par exemple à la réforme des procédures de licenciements collectifs, qui doit constituer une arme contre les licenciements abusifs. Je pense aussi à la délicate question de la mobilité, notamment de la mobilité interne. Comment veiller à ce que la multiplication des accords que nous appelons de nos vœux, notamment au niveau de l’entreprise, n’aboutisse pas à déroger à la loi ?

Bien que peu d’observateurs l’aient noté, le texte opère également des avancées en matière de formation professionnelle, qu’il s’agisse du conseil en évolution professionnelle, de la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) et de son lien avec la formation, de la consultation du comité d’entreprise sur la politique de formation, attendue depuis longtemps, ou du compte personnel de formation, sur lequel nous aimerions des précisions. Il me semble que ce ne serait pas trahir l’accord que d’introduire dans la loi, ainsi que l’avait proposé le Président de la République durant la campagne présidentielle, un droit à la formation initiale différée en prévoyant que le compte personnel de formation puisse être abondé pour les salariés n’ayant aucune qualification.

Ces points dont nous aurons à discuter constituent autant d’étapes dans la sécurisation des parcours professionnels. Efforçons-nous de ne pas cantonner notre réflexion aux salariés insiders, afin qu’elle contribue à la lutte contre le chômage et au développement de l’emploi grâce à l’amélioration du marché du travail.

M. Gérard Cherpion. Permettez-moi de rappeler que l’accord du 11 janvier est le quatorzième signé en application de la loi de modernisation du dialogue social du 31 janvier 2007, dite « loi Larcher ». Il s’inscrit donc dans la volonté de dialogue social portée par celle-ci, qui a introduit dans le code du travail les articles L1 et L2 – sur lesquels se fondent toutes les négociations sociales en cours.

L’accord du 11 janvier est un accord tout à fait intéressant. Il n’y a en effet ni gagnant ni perdant, mais un équilibre, et un certain nombre d’avancées importantes pour les salariés comme pour les entreprises.

Certains articles de l’accord ne nécessitaient pas de transposition législative. Ils s’appliqueront donc directement, ou après une négociation. Je pense notamment à l’article 4, relatif à la sur-cotisation d’assurance chômage des CDD.

Plusieurs questions se posent par ailleurs. Vous l’avez rappelé, 4 millions de personnes adhèrent individuellement à une complémentaire santé, dans des conditions parfois peu favorables, voire difficiles ; d’autres n’en ont pas du tout. La couverture complémentaire santé est donc une réelle avancée. Reste à discuter de la clause de désignation – Jean-Pierre Door y reviendra.

La réduction des délais de prescription constitue une autre avancée. Ainsi que l’ont rappelé les partenaires sociaux, ces derniers sont en moyenne inférieurs à deux ans. Prenons cependant garde à ce que cette réduction ne conduise pas à une judiciarisation plus massive d’entrée de jeu qu’elle ne l’était auparavant. C’est un point auquel il conviendra d’être attentif.

Les progrès attendus de certaines dispositions dépendront de la manière dont celles-ci vont être appliquées. Je pense par exemple aux dispositions relatives au temps partiel, qui ne renvoient pas à celles concernant le travail temporaire et l’intérim. Il faudra donc sans doute revoir l’articulation de ces différentes mesures.

J’en viens à la formation professionnelle. L’article 1er de la loi du 24 novembre 2009 relative à l’orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie affirmait déjà la volonté que la formation professionnelle permette à chacun de progresser d’au moins un niveau de qualification professionnelle au cours de sa carrière, ce qui est d’ailleurs assez peu ambitieux – on pourrait espérer aller plus loin.

Nous sommes aujourd’hui dans une période de transition, puisque vous allez prochainement présenter un projet de loi sur l’apprentissage et la formation professionnelle. La mise en œuvre d’un certain nombre de mesures risque donc d’être reportée dans l’attente de l’adoption de cette loi.

En cas de difficultés d’application par l’administration, peut-on envisager une sorte de procédure de rescrit durant la période d’incertitude juridique qui s’ensuivra pour les entreprises ?

Le groupe UMP reconnaît que ce texte constitue une avancée sur le plan social et sur celui de la protection de l’emploi et de la lutte contre la précarité de l’emploi. Son vote dépendra de la loyauté que manifestera le texte par rapport à l’accord signé par les partenaires sociaux et de l’accueil réservé à ses amendements.

Mme Véronique Massonneau. Permettez-moi d’excuser Christophe Cavard, qui se trouve bloqué à Berlin par une tempête de neige et que je supplée volontiers.

Je commencerai par rappeler la méthode et la position actuelle du groupe écologiste. Dès le début de son quinquennat, François Hollande a affirmé un principe fort que nous partageons, celui de la démocratie sociale. Contrairement aux pays d’Europe du Nord, la France se caractérise par une primauté de la loi et de la réglementation sur le dialogue social, comme en témoigne un épisode frappant de la précédente législature : réécrivant de façon déséquilibrée et partisane les accords négociés, Nicolas Sarkozy a confirmé son mépris pour la construction d’une démocratie sociale moderne. Comme ils s’y sont engagés, les députés écologistes réaffirment leur volonté d’instaurer une véritable démocratie sociale en redonnant du pouvoir aux salariés, à la fois sur le plan individuel et sur le plan collectif. Dans cette logique, nous partageons l’objectif du respect de l’équilibre de l’accord.

Néanmoins, il est de notre devoir de parlementaires de garantir son articulation avec la loi et les grands principes internationaux de protection des salariés, qui trouvent leur origine dans la nécessité de rééquilibrer une relation déséquilibrée par nature, celle de la subordination salariale. Si le droit du travail constitue avant tout une protection du salarié, il convient de transcrire l’accord dans la loi avec le souci d’assurer cette protection. C’est avec cette grille de lecture que nous évaluerons le texte final et arrêterons la position de notre groupe.

Si les évolutions constatées depuis le pré-projet constituent un signe positif, il nous faut cependant aller plus loin. Plusieurs points doivent en effet faire l’objet de précisions ou d’améliorations.

La formation professionnelle est un élément clef de la transition écologique de notre économie. Si nous saluons la création du compte personnel de formation, nous souhaitons le voir étendre à l’ensemble des formations, ce qui suppose une concertation étroite avec les régions, en tenant compte de la formation initiale des salariés. La flexisécurité tant vantée par le patronat repose sur une formation forte et qualifiante. L’occasion de cette loi doit donc être saisie pour amorcer une vaste réforme de la formation.

Il conviendra également de préciser le texte en ce qui concerne la mobilité interne, qui semble tantôt envisagée comme un outil de la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC), ce qui peut être considéré comme une avancée, et tantôt comme un outil de réponse aux difficultés économiques de l’entreprise, ce qui peut créer un effet d’aubaine pour des patrons peu scrupuleux. La loi doit inscrire clairement cette mesure dans une logique de GPEC, en encadrant plus strictement ses conditions d’application et en précisant les possibilités de dérogation.

D’autre part, les délais prévus pour les validations et l’homologation des accords ou plans unilatéraux sont très courts. Dans un contexte de fortes restrictions budgétaires, l’administration aura du mal à les honorer. Nous ne pouvons considérer ce paramètre comme un outil déguisé d’assouplissement des conditions de licenciement. Il faudra donc permettre à l’administration d’honorer sa mission, par des garanties de moyens ou un allongement des délais.

Je conclurai sur la taxation des CDD, qui vise à lutter contre la précarité des salariés. Si nous saluons l’objectif vers lequel semblent converger tous les partenaires, les mesures proposées ne sont pas suffisantes pour les atteindre. La sur-cotisation prévue rendra l’arbitrage entre CDD et intérim favorable à ce dernier, annulant ainsi l’esprit même de la loi. Nous devons donc veiller à ce que les moyens prévus par la loi soient à la hauteur des objectifs qu’elle se donne.

M. Jean-Noël Carpentier. Je vous remercie pour votre présentation claire, franche et extrêmement ouverte au débat, monsieur le ministre. En dépit des inquiétudes qui ont pu être formulées ici ou là, vous nous confirmez que l’Assemblée nationale n’est pas une chambre d’enregistrement, et que le travail législatif suivra son cours.

Je tiens à féliciter le Gouvernement pour son travail sur le front de l’emploi. Depuis que cette majorité est au pouvoir, son principal but est de protéger nos concitoyens face à la crise et au chômage. Pour cela, nous essayons de mettre en œuvre une politique cohérente. Si ses fruits sont encore peu visibles, la cohérence est bien là, avec de nombreux dispositifs comme les emplois d’avenir et le contrat de génération, qui procèdent eux aussi d’une démarche d’écoute et d’un dialogue social que je veux saluer. Oui, c’est une nouveauté que de faire confiance aux acteurs sociaux pour surmonter leurs antagonismes, qui ne disparaîtront pas. Les rapports de force existent bien dans notre pays, et le droit social est là pour protéger les salariés. Puisque le dialogue social n’exclut pas les confrontations, il revient au législateur de l’organiser, afin qu’il se déroule le mieux possible et permette les évolutions qui sont nécessaires pour surmonter les crises. C’est ce qu’accomplissent aujourd’hui le Gouvernement et sa majorité, de la conférence sociale de juillet 2012 à ce projet de loi.

Vous avez donc organisé le dialogue ; vous vous y êtes personnellement investi, monsieur le ministre. À nous désormais de transposer cet accord dans la loi.

Ce texte vise à faire évoluer le marché du travail, conformément à la tradition républicaine française. La question est de savoir dans quel sens. Va-t-il améliorer la situation de l’emploi, éviter sa précarisation ? Va-t-il permettre aux salariés de conserver leurs droits ? Tout notre travail de parlementaires consiste à veiller à la préservation de l’intérêt général au moment de mettre cet accord en musique.

Vous parlez d’un accord sans gagnant ni perdant, avant tout fruit d’une démarche commune. Le groupe RRDP se félicite de cette volonté et proposera des améliorations du texte par voie d’amendement.

Ce projet comporte des avancées pour les salariés, avec les nouveaux droits qui ont été évoqués – couverture sociale complémentaire, formation professionnelle, dialogue social renforcé par la présence de représentants des salariés au conseil d’administration et la consultation du comité d’entreprise sur les orientations stratégiques de l’entreprise. Ces nouveaux droits compensent-ils cependant les importants efforts demandés aux salariés ? Je pense à la facilitation des mobilités internes – voire forcées pour certains – ou à celle des accords de maintien dans l’emploi, qui revient à inscrire dans la loi la possibilité de baisser les salaires pour maintenir l’emploi.

Je terminerai par deux questions. Avez-vous évalué le nombre des licenciements que ce texte permettra d’éviter ? Pensez-vous qu’il participera à la relance tant attendue de notre économie ?

M. le ministre délégué. Les intervenants qui se sont exprimés ont salué les avancées du texte en matière de formation. Même s’il reste du travail, il crée un droit nouveau, appelé à devenir incontournable : le compte personnel de formation. J’aurai donc l’occasion de revenir devant vous. Le ministre l’a dit, nous ne sommes pas les greffiers de l’accord qui a été négocié.

M. le ministre. Mais nous en sommes les garants.

M. le ministre délégué. Nous avons cependant fait le choix de reprendre dans le projet de loi les grands principes régissant le compte personnel de formation, à savoir son caractère universel, son caractère individuel et sa transférabilité. En revanche, ses modalités de mise en œuvre ne sont pas détaillées de manière exhaustive. Des points importants restent ainsi à traiter, tels que le lien entre le compte personnel et le droit individuel à la formation (DIF), l’articulation opérationnelle entre le compte personnel et le congé individuel de formation (CIF), ou les voies et moyens d’abondement du compte. C’est la raison pour laquelle les partenaires sociaux envisagent de poursuivre leurs travaux, sous la double forme d’une concertation avec l’État et les régions – partenaires importants de la formation auxquels Mme Massonneau a fait référence à juste titre – et d’une négociation en vue d’adapter les dispositions conventionnelles interprofessionnelles impactées par la création du compte.

J’aurai l’occasion de m’exprimer de manière plus précise à partir du 18 mars, date à laquelle me seront remises les conclusions du groupe de travail du Conseil national de la formation professionnelle tout au long de la vie sur le compte individuel de formation. Cette commande avait été passée à l’issue de la conférence sociale de juillet ; nous avions fixé l’échéance au mois de mars. Entre-temps a été signé l’accord du 11 janvier ; les partenaires sociaux attendent donc les conclusions du groupe de travail pour définir les modalités opérationnelles du compte personnel de formation. Dès la remise de ce rapport, j’entamerai une série de consultations auprès des partenaires sociaux – signataires et non signataires de l’accord – sur deux points qui sont intimement liés. Il s’agit d’une part de la suite des discussions sur le compte personnel de formation, qui doivent associer l’État, les régions et les partenaires sociaux, de leur échéancier et de leur traduction législative, et d’autre part des suites à donner au discours prononcé le 4 mars à Blois par le Président de la République, qui prône une réforme ambitieuse de la formation professionnelle, avec une relance éventuelle de la négociation interprofessionnelle, et donc ses thèmes et son calendrier. Je n’envisage pas que cette négociation puisse s’ouvrir avant l’adoption définitive de la loi sur la sécurisation de l’emploi. C’est donc brique par brique que se construira le compte personnel de formation. En fonction de la nature de la discussion arrêtée par l’État et les partenaires sociaux après la remise du rapport, de ses thèmes et de son calendrier, on peut envisager que quelques-unes de ces briques soient posées par amendement dans le cadre de ce texte, ou bien – notamment pour celles qui aboutiront à des avancées de fond – dans celui du projet de loi sur la formation professionnelle continue qui sera présenté à l’automne. Nous avons comme vous l’ambition de construire un très bel outil, pour reprendre les propos que vous avez tenus dans la presse, monsieur le rapporteur. J’aurai donc le plaisir de m’exprimer à nouveau devant votre commission – peut-être à l’occasion d’une quinzième application de la « loi Larcher », monsieur Cherpion.

Il est bien dans nos intentions de mettre en œuvre l’engagement du Président de la République en faveur de la création d’un droit à la formation initiale différée, monsieur Gille. Ce droit figure d’ailleurs à l’article 8 du projet de loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République, sous la forme d’une formation complémentaire pour les jeunes sortis sans qualification de leur formation initiale. Nous devrons l’articuler avec le compte personnel de formation. Pour cela, une discussion complémentaire associant l’État, les régions et les partenaires sociaux – qui l’ont appelée de leurs vœux à l’article 5 de l’accord – est nécessaire. Chacun de ces acteurs pourrait contribuer à ce volet en faveur des jeunes sans qualification : les régions, qui sont compétentes depuis 1993 pour la formation professionnelle des jeunes sans qualification ; l’État, à travers l’éducation nationale, la lutte contre le décrochage scolaire et les dispositifs dits de deuxième chance, que vous connaissez bien ; les partenaires sociaux enfin, qui se sont engagés cette année en faveur des jeunes en difficulté, notamment au travers du Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels. La discussion va s’engager entre ces différents partenaires afin de concrétiser rapidement le droit à la formation différée au sein du compte.

Je me réjouis pour finir que les spécialistes que vous êtes aient salué les avancées que constituent la création du conseil en évolution professionnelle, et la consécration par la loi du lien entre gestion prévisionnelle des emplois et des compétences et plan de formation des entreprises, qui permettra de mieux anticiper les évolutions économiques au sein de l’entreprise, et donc de sécuriser les parcours des salariés.

M. le ministre. Je remercie les différents intervenants des appréciations qu’ils ont portées sur ce projet de loi. La question de la place du dialogue social dans notre République est en train de mûrir et de prendre toute sa dimension. Nous ne l’avons certes pas inventé : certains ont fait allusion à des dispositions législatives dont nous avions soutenu l’adoption en leur temps, auxquelles la constitutionnalisation – qui sera proposée au Parlement – conférera encore davantage de force.

J’entends aujourd’hui la volonté des uns et des autres de respecter le dialogue social et l’équilibre de l’accord, en y apportant leur pierre. Le devoir des parlementaires est en effet d’examiner la loi, et de l’amender le cas échéant. Il me semble important de le redire, puisque l’on entend encore dire que le Parlement serait une chambre d’enregistrement. Les choses peuvent évidemment bouger, mais dans le respect d’un certain équilibre, et je remercie chacun de l’avoir reconnu.

Permettez-moi maintenant de vous apporter quelques éléments de réponse à ce stade du débat.

La généralisation de la couverture complémentaire santé est une innovation très importante, qui remet en cause des habitudes et des situations acquises, y compris du point de vue économique. Parce que certains ne bénéficient pas de ces situations acquises, il faut aujourd’hui élargir le cercle. Rappelons que 4 millions de salariés ne voient pas leur employeur participer au coût de cette couverture complémentaire, et que 400 000 ne bénéficient d’aucune protection – ce qui est indigne. Nous agirons dans le respect des équilibres économiques, mais ceux-ci devront tout de même évoluer.

Les partenaires sociaux avaient été d’une clarté quelque peu nébuleuse sur le sujet. En accord avec eux, j’ai voulu faire en sorte que cette clarté soit totale : le droit doit être le plus clair possible. Deux principes fondent donc nos propositions. Le premier est celui de la transparence, qui doit être absolue dans ce domaine, puisque ce sont les entreprises, voire les branches, qui se substitueront aux individus pour choisir l’organisme qui assurera cette couverture complémentaire santé. C’est ici l’auteur de la loi dite Sapin relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques qui vous parle… Ce seront des dispositions réglementaires. Nous pourrons néanmoins en parler, car nous avons commencé à travailler sur cette question de la transparence et du respect de la concurrence avec le ministère des affaires sociales et de la santé.

Il faut ensuite que la mutualisation soit possible, dans la mesure où les salariés de certaines entreprises présentent des risques plus importants que les autres. En l’absence de possibilité de mutualisation, les organismes rechercheront les « meilleurs » risques, et certaines entreprises – souvent les PME – devront payer plus cher pour garantir cette couverture complémentaire à leurs salariés.

Vous m’interrogez sur l’inscription de ce dispositif dans un processus plus global. Le Président de la République a en effet fixé un nouvel objectif : ouvrir à tous – salariés et non salariés – cette couverture complémentaire santé, afin que chaque Français puisse en bénéficier. Quoi qu’il en soit, c’est aujourd’hui un pas important qu’il est proposé de franchir. Le coût est loin d’en être négligeable pour les entreprises. Elles l’ont accepté en toute connaissance de cause, car elles savent combien cela est important, y compris pour le bien-être de leurs salariés au travail, et donc pour leur compétitivité.

M. Carpentier s’interroge sur le nombre de licenciements que ce projet de loi permettra d’éviter. Je ne peux répondre à cette question plus précisément qu’en évoquant, tel Fernand Raynaud, un « certain nombre » ou un « nombre certain ». Vous connaissez la situation : face à une difficulté conjoncturelle, les entreprises ont systématiquement recours au licenciement. Les médias se font certes l’écho de quelques cas particuliers dans lesquels un accord a pu être trouvé – de manière non encadrée – entre les salariés et la direction. Mais dans la plupart des cas, la variable d’ajustement reste le licenciement. Demain, elle ne le sera plus qu’en dernier ressort. Le texte permettra donc d’éviter des licenciements – donc des chômeurs supplémentaires.

Il aura également un effet sur la création d’emplois. Bien sûr, il ne saurait créer en lui-même de l’emploi, mais il doit permettre d’en finir, pour reprendre une expression du Président de la République, avec une forme de peur de l’embauche. Beaucoup d’entreprises diffèrent en effet le moment où elles vont embaucher – ou ont recours à des contrats précaires – lorsque la croissance repart. Notre dispositif permettra de faire sauter ce verrou, et donc d’agir aussi vite et aussi fort que les autres en période de reprise, contrairement à l’habitude qui est la nôtre en France, que ce soit en termes d’investissement – avec le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) – ou en termes d’embauches – avec la loi sur la sécurisation de l’emploi. C’est sans doute l’un des éléments les plus décisifs. Nous ne sommes pas là dans le domaine des mathématiques, mais dans celui de la confiance et des mécanismes qui permettent aux acteurs sociaux de se comporter différemment de ce qu’ils faisaient jusqu’à présent.

J’en viens aux questions du rapporteur. Le texte comporte des dispositions qui faciliteront le chômage partiel. Les partenaires sociaux ont d’ailleurs déjà entamé les discussions dans ce domaine. Rappelons que cette question du chômage ne ressort pas du domaine législatif, mais du domaine conventionnel. J’insiste sur ce point, madame Massonneau, car vous vous êtes interrogée sur le point de savoir si l’augmentation des cotisations chômage sur les CDD était suffisante pour être dissuasive – question qui a sans doute longuement occupé les partenaires sociaux. Or le texte ne fixe pas de taux de cotisation : il se borne à ouvrir aux partenaires sociaux la possibilité juridique de différencier ces taux selon les types de contrats. Le taux des cotisations sera donc fixé par les partenaires sociaux eux-mêmes.

Le dispositif du chômage partiel est donc refondu. Il est complémentaire de celui des accords de maintien dans l’emploi, qui constituent un autre outil nouveau et important pour les entreprises. Une entreprise peut ainsi recourir au chômage partiel, puis subir une nouvelle dégradation conjoncturelle qui la conduit à négocier un accord de maintien dans l’emploi. De même, une entreprise qui a conclu un tel accord et se trouve confrontée à des difficultés plus importantes peut préférer recourir au chômage partiel plutôt que de dénoncer cet accord et de licencier. Les deux dispositifs peuvent donc se cumuler.

Venons-en aux questions humaines. Plusieurs d’entre vous se demandent – à juste titre – si l’administration a les moyens d’assumer les pouvoirs nouveaux qui lui sont confiés par le texte. Par ailleurs, l’équilibre entre l’ordre administratif et l’ordre judiciaire se trouve modifié pour le traitement des éventuels contentieux.

Le juge administratif d’aujourd’hui n’est plus celui que certains ont connu il y a quelques années. Il juge bien plus rapidement que naguère, puisque les délais devant la juridiction administrative sont de l’ordre de trois mois. Nous avons en outre prévu des procédures particulières, en fixant des délais de même nature que ceux qui existent dans le domaine du droit des étrangers, à savoir des délais impératifs. Nous avons également engagé un travail avec le Conseil d’État et l’ensemble des juridictions administratives, afin que les procédures et les moyens mis en place permettent de traiter immédiatement les contentieux qui surviendront dans ce domaine. L’objectif du texte est de faire en sorte que les recours contentieux, qui encore une fois sont légitimes, soient traités dans les délais les plus brefs possible, ce qui est capital pour les entreprises comme pour les salariés. Je n’ai donc aucune inquiétude sur ce point. Le juge judiciaire reste bien sûr compétent pour tous les licenciements individuels, y compris lorsqu’ils surviennent dans un cadre collectif.

J’en viens aux directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DIRECCTE). Le retour de l’État et celui de l’administration comme un élément qui sécurise l’ensemble de la procédure est sans doute l’aspect le plus révolutionnaire de ce texte. Aujourd’hui, l’entreprise décide seule avant de voir éventuellement contester sa décision devant le juge. La procédure peut prendre des années : dans le cas de LU, elle a duré dix ans. Ce n’est bon ni pour les entreprises, ni pour les salariés. Désormais, l’administration interviendra très en amont, non pour se substituer au juge, mais pour permettre qu’un équilibre soit trouvé le plus tôt possible. Les DIRECCTE auront les moyens de mettre en œuvre les nouveaux pouvoirs qui leur sont confiés conformément au souhait de tous les partenaires sociaux, y compris les représentants du patronat. En effet, elles examinent déjà la quasi-totalité des 1 000 plans de sauvegarde de l’emploi (PSE) mis en œuvre chaque année, sur lesquels elles formulent des observations. La nouveauté réside dans le pouvoir d’homologation qui leur est donné. Cela nécessitera sans doute des formations complémentaires et des moyens supplémentaires, mais la charge de travail ne devrait pas être modifiée : seule la nature de ce travail change.

M. Bernard Perrut. On ne peut qu’être d’accord avec l’ambition que vous assignez à ce projet de loi : lutter contre le chômage et la précarité. Mais on peut aussi s’interroger sur ce qu’il en restera à la fin de la discussion parlementaire. Accepterez-vous que des amendements aient pour effet de modifier le contenu du texte, quitte à changer notre point de vue à son sujet ?

Par ailleurs, la création de nouveaux droits individuels et collectifs, la sécurisation des parcours professionnels et la réforme des procédures ne vont-elles pas être la source de complexités nouvelles, voire entraîner des difficultés de fonctionnement pour les DIRECCTE ? Ces dernières auront-elles les moyens de faire face à leurs nouvelles obligations ?

Sur le plan de la méthode, vous n’avez pas suffisamment souligné ce que votre texte devait à l’adoption, en 2007, par une autre majorité, de la loi de modernisation du dialogue social, dont j’avais dit moi-même à l’époque, en tant que rapporteur du projet, qu’elle avait « l’humilité des grandes ambitions ». Son but était de donner toute sa place à la démocratie sociale et d’organiser les relations entre cette dernière et la démocratie représentative, le tout afin de passer d’une culture du conflit à une culture de la négociation, du compromis et de la responsabilité. Non seulement l’idée que nous développions en 2007 est toujours valable aujourd’hui, mais vous la mettez en application avec ce projet de loi.

On peut être confiant en l’avenir d’un texte qui ne manque pas d’aspects positifs. Mais on peut aussi se demander s’il est à la hauteur des enjeux économiques et sociaux auxquels nous sommes confrontés. Le principe consistant à donner plus de sécurité aux personnes plutôt qu’aux postes, en contrepartie d’une plus grande flexibilité, va dans le bon sens. Vous reprenez ainsi le principe des accords compétitivité-emploi portés par la précédente majorité. Cela étant, nous resterons attentifs à l’évolution du projet de loi.

Mme Monique Iborra. Alors que le précédent Président de la République rêvait de supprimer les corps intermédiaires, vous avez mis les partenaires sociaux face à leurs responsabilités en leur demandant de négocier à partir de la feuille de route que vous leur aviez communiquée. On peut donc parler de vrai changement, voire de rupture.

Ce qu’induit ce projet de loi, c’est une culture différente, dans laquelle la négociation se substitue à l’affrontement. La confiance envers les partenaires sociaux est renouvelée, mais elle est aussi encadrée, l’État jouant son rôle de protecteur, de facilitateur de compromis, de garant de la justice sociale et de l’efficacité économique. Là encore, il s’agit d’une rupture par rapport aux anciennes pratiques.

C’est le retour du politique dans l’économique. Dans ce contexte, la place de chacun – y compris du Parlement – doit être respectée, mais avec le souci d’équilibrer les rapports de forces. Votre démarche, à la fois courageuse et audacieuse – mais aussi perturbante pour certains, comme toute politique induisant un réel changement de culture –, ne renie toutefois en rien les convictions dont nous sommes porteurs. De ce point de vue, elle mérite d’être soutenue et respectée.

En ce qui concerne la formation professionnelle – sujet complexe s’il en est –, la loi du 24 novembre 2009 n’a pas eu les effets escomptés. Dans ce domaine, qui voit pouvoirs publics et partenaires sociaux se partager les compétences, nous avons besoin de cohérence et de simplification. Il semble donc nécessaire de regrouper les différentes mesures contenues dans les différents projets de loi, qu’il s’agisse de celui que nous examinons, de l’article 18 du projet de loi pour la refondation de l’école, ou des futurs projets de loi sur la décentralisation ou sur la formation professionnelle.

M. Gérard Sébaoun. Bien entendu, nous restons attentifs aux souhaits des partenaires sociaux, qu’ils soient ou non signataires de l’accord.

Ma question concerne la mobilité – non pas tant la mobilité externe sécurisée, évoquée à l’article 3, que la mobilité interne à l’entreprise, à laquelle se consacre l’article 10, l’un des plus importants du texte. Il est prévu une négociation triennale obligatoire sur les conditions de mobilité professionnelle et géographique interne à l’entreprise. Dans les entreprises de plus de 300 salariés, cette négociation a lieu dans le cadre de la gestion prévisionnelle des emplois et compétences.

L’article 10 contient des dispositions très sensibles, pour ne pas dire inquiétantes. Il ne s’agit pas de dénier l’importance, pour une entreprise, de pouvoir s’organiser et se développer. Mais pour être comprise, pour être juste, la mobilité doit être accompagnée et bien encadrée, car elle touche à la vie des salariés dans toutes ses composantes. Vous avez d’ailleurs rappelé vous-même, monsieur le ministre, l’importance du bien-être au travail.

Quelle est votre conception de la mobilité interne dans l’entreprise ?

M. Jean-Pierre Door. La généralisation de la couverture complémentaire est un droit nouveau pour les salariés qu’il convient de saluer. Mais alors que les partenaires sociaux, lors de la négociation de l’accord national interprofessionnel, avaient privilégié la liberté de choix de l’entreprise assurantielle, le principe d’une clause de désignation a depuis été introduit qui aurait pour effet d’imposer un opérateur aux entreprises d’une même branche.

Pour M. Étienne Caniard, président de la Fédération nationale de la mutualité française, la recherche d’une mutualisation ne suffit pas à justifier l’existence d’une clause de désignation. Il faut donc tout à la fois laisser aux entreprises la liberté de choisir l’assureur et prévoir un panier de soins de qualité, de façon à garantir que le contrat complémentaire proposé ne soit pas un contrat de second ordre. Cela passe peut-être par la mise en place d’un cahier des charges.

Même si nous sommes favorables à la transparence, la clause de désignation constitue, à nos yeux, un point de blocage.

Mme Joëlle Huillier. Toutes les mutuelles nous disent qu’elles réalisent peu de bénéfices sur les contrats collectifs, qui bénéficient de tarifs préférentiels. Il en résulte des primes surévaluées pour les contrats individuels.

Or si le projet de loi prévoit une portabilité de la couverture santé pour les salariés devenus demandeurs d’emplois, il ne dit rien des salariés âgés, qui perdent le bénéfice de leur mutuelle au moment de prendre leur retraite, et doivent payer très cher leur assurance complémentaire individuelle.

M. Dominique Dord. Beaucoup, ici, sont convaincus que ce texte peut recueillir un soutien très large au sein de l’Assemblée nationale, pour peu que l’on fasse l’économie, de part et d’autre de l’hémicycle et au sein du Gouvernement, de certaines polémiques, querelles sémantiques ou procès en recherche de paternité destinés à savoir à qui il faut attribuer le mérite de telle ou telle disposition. Les dispositions que nous examinons, en effet, sont avant tout dictées par l’actualité, puisque de plus en plus d’entreprises – hier en Allemagne, aujourd’hui en France – cherchent à mettre en place des accords de compétitivité.

Sur la forme – vous l’avez rappelé, madame la présidente –, la méthode, excellente, ne peut que recueillir l’assentiment de tous ; et même sur le fond, il existe probablement peu de divergences entre nous. Ainsi, monsieur le ministre délégué, je ne peux qu’approuver le principe du compte personnel de formation, même si l’expérience montre qu’en matière de formation professionnelle, les tentatives de réforme tendent à se heurter à des complications lors de leur mise en œuvre.

Finalement, les interrogations portent surtout sur le résultat du débat parlementaire, puisque l’obtention d’une large majorité dépendra des modifications que vous aurez acceptées, monsieur le ministre. Vous avez annoncé vouloir préserver l’équilibre de l’accord national interprofessionnel, et une telle intention est plutôt de nature à nous rassurer. Mais si personne ne se sentirait trahi par l’adoption d’amendements de type technico-juridique, il n’en irait pas de même si des modifications profondes étaient proposées au prétexte d’améliorer le projet de loi.

Quelle est donc, monsieur le ministre, votre stratégie parlementaire ?

M. Michel Issindou. Nous recevons, sur le terrain, de nombreux représentants d’organisations syndicales. Certains d’entre eux, s’ils comprennent la nécessité de faire des efforts afin de préserver l’emploi lorsque la conjoncture est difficile, s’interrogent sur les conditions d’application de la clause de bonne fortune, selon laquelle une meilleure conjoncture doit entraîner le retour à des conditions d’emploi normales. Qui va déterminer le moment où la situation de l’entreprise s’améliore, et selon quels critères ? Va-t-on prendre en compte l’évolution du chiffre d’affaires, celle du carnet de commandes ? Les salariés ont besoin d’être rassurés, tant ils craignent que les fruits d’une éventuelle reprise ne leur échappent au profit, par exemple, d’une augmentation des dividendes. Ils sont prêts à se sacrifier, à travailler un peu plus ou à gagner un peu moins, à condition toutefois de pouvoir profiter de toute amélioration de la situation.

Mme Isabelle Le Callennec. À propos du compte personnel de formation, vous évoquez systématiquement l’État, les régions et les partenaires sociaux. Qu’en est-il des autres interlocuteurs intervenant dans la formation, comme Pôle emploi – qui finance notamment les actions de formation préalable au recrutement –, les missions locales ou les OPCA, les organismes paritaires collecteurs agréés ?

Par ailleurs, vous avez souligné la nécessité de développer un service neutre de conseil en évaluation professionnelle. Les maisons de l’emploi, quand elles fonctionnent, ont cette capacité : les salariés, tout au long de leur carrière, peuvent s’y informer sur les opportunités existant dans leur bassin d’emploi.

Quant aux « droits rechargeables », ils représentent une révolution. Mais il convient de refonder le système et de travailler davantage sur l’accompagnement. De même, il faut prévoir des droits, mais aussi des devoirs pour les demandeurs d’emplois. C’est sans doute l’occasion d’envisager d’une autre façon l’assurance chômage et peut-être de relancer la discussion sur la question de la dégressivité des droits. Par ailleurs, certains s’interrogent sur le coût de la nouvelle disposition. Avez-vous cherché à l’évaluer ?

Les DIRECCTE disposeront d’un pouvoir très important au moment de la conclusion d’un accord de maintien de l’emploi, celui d’apprécier les difficultés conjoncturelles que traverse une entreprise. Comment faire en sorte qu’elles se prononcent en toute objectivité ?

Enfin, un meilleur accès au logement favorise la mobilité interne au sein de l’entreprise. Quel est le contenu de l’accord conclu en ce domaine entre l’État et l’Union d’économie sociale du logement ?

M. Denys Robiliard. Je m’interroge sur la compatibilité entre les dispositions relatives aux accords de mobilité ou de maintien de l’emploi et la directive 98/59/CE. Est-il envisageable d’effectuer plus de dix licenciements économiques tout en restant dans le cadre du licenciement individuel ?

Par ailleurs, en matière de mobilité, est-il possible, sans dénaturer l’accord national interprofessionnel, de définir plus précisément la notion de secteur géographique, voire de poser certaines limites ?

En termes de modification du contrat de travail, les conséquences d’un accord de mobilité seront les mêmes que celles d’un accord de maintien de l’emploi. Dès lors, pourquoi ne pas prévoir un accord majoritaire dans les deux cas ?

Lorsque les engagements souscrits dans le cadre d’un accord de maintien de l’emploi ne sont pas appliqués de manière loyale et sérieuse, ou quand la situation économique de l’entreprise a évolué de manière significative, le projet de loi prévoit la possibilité d’une suspension de l’accord par le juge, puis, dans un deuxième temps, d’une suspension définitive, ce que pour ma part j’appellerais une résiliation. Or l’annexe de l’accord national interprofessionnel évoque la possibilité d’une résolution, c’est-à-dire d’une annulation avec effet rétroactif. Pourquoi ne pas avoir retenu cette option ?

Le contrôle des licenciements ne porte que sur la procédure. Ne faudrait-il pas aller plus loin et vérifier l’existence d’une cause réelle et sérieuse ?

Enfin, je regrette, au nom de la sécurité juridique, que le contentieux soit éclaté entre la juridiction administrative et la juridiction judiciaire. Une jurisprudence met en effet au moins dix ans à se construire : pourquoi abandonner celle de la Cour de cassation ?

Mme Véronique Louwagie. L’accord national interprofessionnel est un acte majeur de démocratie sociale qu’il nous appartient de respecter.

La disposition sur les « droits rechargeables » représente une avancée. Mais l’accord reste silencieux sur les moyens de la financer, alors même que les partenaires sociaux ont émis le souhait de ne pas aggraver le déséquilibre financier du régime d’assurance chômage.

Nous sommes tous d’accord pour limiter la précarité et donc le nombre de contrats à durée déterminée. Pour autant, ces derniers représentent une source de flexibilité pour les entreprises. En imposant un coût supplémentaire sur ces types de contrats, ne risque-t-on pas, dans certains cas, de les dissuader d’embaucher ?

L’article 8 prévoit l’instauration d’une durée minimale hebdomadaire de vingt-quatre heures, avec deux exceptions, dont l’une concerne les particuliers employeurs. Quelle conséquence peut-il entraîner dans le secteur des services à la personne, qui représente un nombre d’emplois important ?

Enfin, vous avez évoqué un retour de l’État et de l’administration s’accompagnant de nouveaux moyens humains et matériels. Les DIRECCTE interviendront non seulement pour accompagner la négociation des accords, mais aussi pour les homologuer. Ne risquent-elles pas d’être à la fois juge et partie ?

M. Christophe Sirugue. Les dispositions sur la durée du travail hebdomadaire et la majoration de la rémunération des heures complémentaires auront un impact positif sur le phénomène de précarité du travail dont souffrent particulièrement les femmes. Mais la possibilité de conclure jusqu’à huit avenants consécutifs n’est-elle pas contradictoire avec la volonté de stabiliser la situation des travailleurs à temps partiel ?

Le projet vise à éviter l’émiettement des horaires de travail, ce dont on ne peut que se réjouir. Mais qu’en est-il de la notion de temps de travail effectif, notamment en cas de déplacement entre deux emplois ?

Enfin, je me réjouis de voir que la dernière version du texte renonce à l’exception concernant les salariés des particuliers employeurs. Cela aurait été une importante source de précarité.

Mme Fanélie Carrey-Conte. La généralisation des assurances complémentaires de santé conduit à se poser la question du niveau minimum de garantie proposée. Si nous n’y prenons pas garde, l’application du projet de loi pourrait entraîner la juxtaposition d’une assurance maladie obligatoire, d’une assurance complémentaire collective et de « surcomplémentaires » facultatives, plus ou moins accessibles selon les moyens financiers dont disposeront les salariés. Un décret doit préciser le niveau de prise en charge des dépenses de santé par l’assurance complémentaire. Quel sera son contenu ? Quelles seront les dispositions concernant les contrats solidaires et responsables, leur éventuelle évolution et leur fiscalité ?

M. Jérôme Guedj. Vous avez dit, monsieur le ministre, que vous ne vous étiez pas comporté en simple scribe à l’égard de cet accord interprofessionnel. C’est vrai, et je vous en remercie. Qu’il s’agisse de la clause de désignation de l’assurance complémentaire, des modalités de désignation des salariés siégeant au conseil d’administration, du moment d’intervention de l’administration dans les procédures de licenciement collectif ou des conséquences du refus d’un accord de mobilité, vous avez, lors de la transposition de l’accord, interprété les dispositions ambiguës, voire corrigé les défaillances juridiques – je pense en particulier au problème de compatibilité avec la convention n° 158 de l’Organisation internationale du travail.

Pour la même raison, vous avez déclaré ne pas vouloir que le Parlement soit une simple chambre d’enregistrement. De fait, les interventions précédentes dénotent une volonté d’amender le texte du projet de loi. C’est pourquoi je trouve particulièrement déplacé le chantage exercé par notre collègue de l’opposition, qui se dit prêt à voter le texte à condition que les parlementaires n’usent pas de leurs prérogatives. Nous ne devons pas céder à une telle menace.

Pour autant, plusieurs interrogations subsistent, qu’il s’agisse de la réduction de cinq à trois ans du délai de prescription des actions concernant le contrat de travail – surprenante dans un texte destiné à sécuriser l’emploi –, de la barémisation de la conciliation prud’homale ou du CDI intermittent.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Mon cher collègue, modérez vos propos. Il n’y avait aucune menace dans l’intervention de notre collègue, qui s’est contenté d’évoquer les conditions d’un vote favorable de la part de son groupe.

Mme Catherine Coutelle. La ministre des droits des femmes envisage d’inclure un volet relatif à l’égalité entre hommes et femmes dans les études d’impact accompagnant les projets de loi. Il aurait été particulièrement intéressant d’appliquer cette démarche à celui que nous examinons.

La majoration de 10 % de la rémunération des heures complémentaires en cas de travail partiel est une avancée importante. Mais pourquoi ne pas aligner le montant de cette majoration sur celui de la rémunération des heures supplémentaires, soit 25 % ? Certes, le projet de loi ne fait ici qu’appliquer l’accord, mais nous parlons de salaires très bas : 10 % du SMIC horaire ne représentent pas une somme très élevée.

En ce qui concerne la formation professionnelle, les partenaires sociaux seront-ils incités à prendre en compte la situation spécifique des femmes ? Celles-ci seront-elles en mesure de concilier vie professionnelle, vie familiale et formation ?

De nombreux éléments du texte doivent faire l’objet de discussions entre partenaires sociaux dans le cadre d’accords de branche. Mais, outre que tous les salariés ne sont peut-être pas couverts par de tels accords, il y lieu de s’inquiéter lorsque l’on constate la lenteur avec lesquels ces mêmes partenaires discutent de l’égalité professionnelle entre hommes et femmes : après huit mois, ils en sont encore à élaborer l’ordre du jour des négociations. Le Gouvernement va-t-il donner des consignes fortes en ce domaine ?

Mme Cécile Untermaier. Le chapitre II du projet de loi a pour objectif de faire reculer la précarité, une ambition salutaire tant celle-ci a été aggravée par les dispositions de la loi de 2008 de modernisation de l’économie. Il suffit de songer à la banalisation du travail le dimanche que subissent les femmes travaillant dans la grande distribution. Ce dernier secteur doit d’ailleurs faire l’objet d’une vigilance d’autant plus accrue qu’il va bénéficier du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, alors même que les salariés à temps partiel subi y sont particulièrement nombreux.

Comme Catherine Coutelle, je m’interroge sur la différence de traitement entre la rémunération des heures complémentaires effectuées dans le cadre d’un temps partiel et celle des heures supplémentaires effectuées dans celui d’un temps plein. En raison de la majoration modeste – 10 % – s’appliquant aux premières, on risque d’encourager la signature de CDI de vingt-quatre heures hebdomadaires. Il est par ailleurs injuste de favoriser ainsi ceux qui ont déjà la chance de travailler à temps plein.

De même, ne faudrait-il pas limiter à quatre, soit un par trimestre, le nombre d’avenants autorisés chaque année par salarié ? Même si on me dit que la disposition représenterait une amélioration dans certains cas, huit avenants me paraissent un nombre excessif.

Enfin, je souhaite souligner l’intérêt du service de conseil en évolution professionnelle, car de nombreuses femmes – et sans doute beaucoup d’hommes – en situation de précarité professionnelle ne connaissent aucune progression de leur carrière, même après vingt ans.

M. Yann Galut. Le retour de la puissance publique dans la procédure de plan de sauvegarde de l’emploi constitue une avancée fondamentale dont il convient de mesurer toute la portée pratique, pour les salariés comme pour les employeurs. Pouvez-vous nous confirmer, monsieur le ministre, que l’administration ne se contentera pas de donner un coup de tampon, et que son intervention ne se limitera pas à vérifier que les conditions techniques d’une validation sont réunies ? Quel rôle jouera la DIRECCTE dans l’examen d’un plan social et quelle sera la nature du contrôle exercé ? Dans l’idéal, elle devrait pouvoir se pencher sur l’existence d’une cause réelle et sérieuse des licenciements.

Par ailleurs, l’obligation pour une entreprise de rechercher un repreneur ira-t-elle jusqu’à l’obligation de céder un site ? La DIRECCTE sera-t-elle amenée à vérifier la validité d’une telle recherche ?

Mme Ségolène Neuville. La majoration des heures complémentaires constitue une avancée réelle. Dans la limite fixée au premier alinéa de l’article L. 3123-17 du code du travail, c’est-à-dire le dixième du temps de travail, chaque heure complémentaire donnera ainsi lieu à une majoration de 10 %. Mais au-delà de cette limite, en l’état actuel du droit, la majoration est de 25 %. Or, aux termes du projet de loi, « une convention ou un accord de branche peut prévoir un taux de majoration différent, qui ne peut toutefois être inférieur à 10 % ». J’en déduis que son application pourrait, dans certains cas, donner lieu à une rémunération inférieure des heures complémentaires. Pouvez-vous nous apporter un éclaircissement sur ce point ?

Mme Hélène Geoffroy. En tant que députés ou élus locaux, nous sommes souvent sollicités lorsqu’une entreprise licencie, et nous constatons une défiance croissante des salariés à l’égard des chefs d’entreprise. Comment pouvons-nous faire en sorte de restaurer la confiance afin que salariés et responsables d’entreprises se comprennent mieux lors de l’élaboration d’une stratégie d’entreprise ?

Comment, par ailleurs, améliorer l’efficacité des plans de sauvegarde de l’emploi en termes de reconversion des salariés ?

Pour les salariés enchaînant contrats d’intérim, contrats aidés de tous types, contrat de travail à temps partiel, les droits rechargeables représentent un réel progrès. Peut-on envisager, à terme, une homogénéisation des indemnisations ?

Enfin, l’ancienneté est-elle le seul critère pertinent pour élaborer un barème des indemnités ?

M. Michel Liebgott. En Alsace-Moselle, il existe déjà une couverture complémentaire collective obligatoire qui donne toute satisfaction à l’ensemble des salariés, d’autant que les retraités en bénéficient également. En revanche, ce régime local ne fait pas participer les employeurs, contrairement à la couverture complémentaire prévue par l’article 1er. Dans ce domaine, l’accord national interprofessionnel fait mieux que les Alsaciens et Mosellans : c’est dire à quel point il s’agit d’un bon accord !

Cela étant, si nous voulons éviter une question prioritaire de constitutionnalité, il conviendra de trouver le moyen d’harmoniser ce régime local avec l’accord et le projet de loi.

M. le ministre délégué. Les préoccupations exprimées par Mme Coutelle s’agissant de la formation professionnelle des femmes vont bien au-delà du contenu du projet de loi dont vous êtes saisis. Sur ce point, je vous renvoie au projet de loi portant réforme de la formation professionnelle, que le Gouvernement déposera avant la fin de l’année, conformément à l’engagement pris par le Président de la République.

Je suis d’accord avec Mme Iborra sur la nécessité de donner plus de cohérence aux dispositions relatives à la formation professionnelle, mais un tel objectif est difficile à atteindre tant les acteurs concernés sont nombreux. Ainsi, le projet de loi sur la décentralisation que Mme Marylise Lebranchu présentera dans quelques semaines comprend une quinzaine d’articles sur ce sujet, puisqu’il conduit à renforcer la compétence des régions en matière de formation. De même, certaines formations en alternance, qui se déroulent dans des lycées techniques ou des lycées professionnels, relèvent du champ d’intervention du ministre de l’éducation nationale. Et le projet de loi pour la refondation de l’école confie aux régions le soin de fermer ou d’ouvrir des filières en fonction des débouchés disponibles et des demandes des entreprises.

La loi sur la décentralisation sera aussi l’occasion de créer un service public régional de l’orientation, et donc d’organiser le conseil en évolution professionnelle en tenant compte des outils existants – qu’il s’agisse des maisons de l’emploi, des cités des métiers ou des structures mises en place par les régions à titre expérimental. Là où elles existent et fonctionnent bien, les maisons de l’emploi auront en effet un rôle à jouer en matière de conseil en évolution professionnelle. Dans ce domaine, l’application de l’accord doit s’appuyer sur les outils existants, ainsi que sur les régions.

Bien entendu, madame Le Callennec, Pôle emploi, les missions locales et les OPCA sont tous parties prenantes aux discussions relatives au compte personnel de formation. Pôle emploi et les missions locales sont en effet prescripteurs de formation, tandis que les OPCA financent une grande partie de la formation professionnelle. Mais lorsque j’évoquais une concertation avec les partenaires sociaux, je songeais plus aux responsables politiques qu’aux représentants des institutions elles-mêmes.

M. le ministre. J’ai peur de ne pouvoir répondre immédiatement à toutes les questions, car certaines exigent des réponses extrêmement précises.

De nombreux orateurs ont souligné l’avancée que constituent les droits rechargeables. Songeons que certains préféraient rester au chômage plutôt que de perdre leurs droits à indemnisation au profit d’un nouvel emploi à la durée incertaine. Les partenaires sociaux ont souhaité mettre un terme à ce phénomène. À cet égard, les droits rechargeables constituent bien une incitation au travail, et non l’inverse comme on a pu parfois l’entendre.

Bien sûr, une telle disposition a un coût. Mais le fait de rester au chômage pour profiter jusqu’au bout des droits à indemnisation en a un également. Je ne suis donc pas en mesure d’estimer l’impact financier de l’article 6 du projet de loi, ni même de déterminer si les coûts supplémentaires l’emporteront sur les économies réalisées. Il appartiendra de toute façon aux partenaires sociaux d’aborder cette question – qui relève de la pure gestion paritaire – lors de la négociation sur la nouvelle convention d’assurance chômage, qui devrait débuter en septembre. Mais il va sans dire que l’État s’en préoccupe également, d’autant que le déficit de l’assurance chômage est pris en compte dans le calcul du déficit public global de la France, que le respect des critères de Maastricht nous oblige à maîtriser. Il n’est donc pas interdit au Gouvernement d’aider les partenaires sociaux à prendre les bonnes décisions.

S’agissant de l’assurance complémentaire de santé, je sais que les députés sont sollicités par des organismes nombreux et variés qui, tous, veulent promouvoir une solution plutôt qu’une autre, sans que l’on puisse faire le moindre lien, bien sûr, entre leurs recommandations et les parts de marché qu’ils espèrent conquérir. À l’évidence, d’importants intérêts économiques sont en jeu, même pour les sociétés à but non lucratif que sont les mutuelles.

Comme toujours, dans ces cas-là, il convient de s’en tenir à un objectif, la défense de l’intérêt général. En l’occurrence, l’intérêt général est que les salariés soient tous concernés, qu’ils bénéficient tous d’une garantie et que cette garantie soit de qualité. Le panier minimal de soins sera fixé par décret. Bien entendu, les contrats conformes aux exigences propres aux contrats responsables et solidaires bénéficieront du régime fiscal et social correspondant. Dans le cas où ces exigences connaîtraient une évolution, le panier minimal évoluera également.

S’agissant des clauses de désignation, je vous invite à lire le paragraphe concerné dans l’accord du 11 janvier : une phrase dit : « blanc », une autre : « gris » et une dernière : « noir », si bien que chacun, adversaire comme partisan des clauses de désignation, pouvait y trouver ce qu’il cherchait. Il revenait donc au Gouvernement – et désormais au Parlement – de clarifier le dispositif.

Les clauses de désignation ne seront jamais obligatoires : un accord de branche déterminera le régime applicable. Dans certaines branches, la liberté de choisir l’assureur sera totale, ce qui permettra sans doute à de petites mutuelles de trouver leur place. Dans d’autres, une clause de désignation sera adoptée, de façon à ne retenir qu’un seul organisme. Mais dans ce cas, la désignation se fera sur appel d’offres et à partir d’un cahier des charges, afin de garantir la libre concurrence et la transparence du marché – ce qui, en soi, représente une nouveauté par rapport à la situation actuelle. Tel est l’engagement que j’ai pris à l’égard des partenaires sociaux, quoiqu’en disent les représentants du patronat.

La question du logement ne relève pas du pouvoir législatif. Sur ce point, je vous renvoie à l’article 10 de l’accord du 11 janvier. Plus généralement, de nombreuses dispositions de celui-ci doivent trouver une application grâce à des dispositions réglementaires ou conventionnelles.

La mobilité interne préoccupe de nombreux parlementaires, ce que je comprends parfaitement. Mais je rappelle qu’aucun changement, en la matière, ne pourra être appliqué sans un accord collectif signé par des organisations syndicales représentant plus de 30 % des salariés, et seulement si des organisations représentant plus de 50 % des salariés ne s’opposent pas à un tel accord. Il s’agit donc de garanties suffisamment solides pour éviter tout risque de dérive se traduisant par une évolution défavorable pour les salariés.

Le projet de loi fait explicitement référence à la conciliation entre la vie professionnelle et la vie personnelle, et donc à la jurisprudence extrêmement précise qui a été élaborée dans ce domaine. Celle-ci continuera donc à s’appliquer. À cet égard, et même si je peux comprendre les inquiétudes qui se sont exprimées, le contenu de l’article 10 ne correspond absolument pas à la description que certains en font. En aucun cas un salarié ne pourra être obligé d’accepter une mutation à 200 kilomètres de chez lui ! Les accords envisagés doivent permettre de tenir compte de certaines spécificités en termes d’organisation ou d’activité, mais ils ne visent pas à remettre en cause les droits individuels.

J’en viens aux accords de maintien de l’emploi, que chacun est libre de comparer aux accords compétitivité-emploi, en dépit des nombreuses différences que j’ai déjà eu l’occasion de relever – il suffit de songer aux obligations imposées aux actionnaires. Ainsi, les accords devront obligatoirement prévoir une clause de meilleure fortune, en détaillant les critères d’appréciation et en précisant les conséquences qu’une amélioration de la conjoncture doit entraîner pour les salariés. Pour comprendre comment un tel système fonctionne, il faut se tourner vers l’Allemagne : en acceptant d’abord une réduction de leur salaire, puis en bénéficiant de l’application d’une clause de retour à meilleure fortune, les salariés de Volkswagen ont finalement gagné plus, sur une période de cinq ans, que s’ils n’avaient pas accepté de signer un accord d’entreprise. S’ils avaient exigé de conserver leur salaire initial, l’entreprise aurait connu en outre des difficultés économiques, ou, plus probablement, aurait licencié.

Certains voient comme un recul la réduction du délai de prescription en matière de contentieux relatif au salaire. Mais il ne faut pas en faire un chiffon rouge, dans la mesure où le nombre de recours exercés après trois ans est extrêmement faible – je vous communiquerai les chiffres exacts. Les partenaires sociaux ont voulu privilégier la sécurité juridique, mais je ne pense pas, de toute façon, que leur choix n’aboutisse à léser les salariés. En tout état de cause, ce point fait partie de ceux qui concourent à l’équilibre de l’accord interprofessionnel.

Quant à la barémisation des indemnités, elle n’a pas vocation à s’imposer au juge. Ce dernier conservera une liberté totale d’appréciation en ce domaine. En adoptant cette disposition, l’intention des partenaires sociaux – y compris de certaines organisations non-signataires – était de valoriser la procédure de conciliation prud’homale, aujourd’hui peu utilisée, alors qu’elle est plus simple et permet de clore les contentieux plus rapidement. Au bout du compte, le salarié comme l’entreprise en ressortent gagnants. En cas d’échec de la conciliation, il restera possible de recourir au juge, sans que ce dernier ne se voie appliquer aucun cadre contraignant.

En cas de fermeture d’un établissement, les dispositions contenues dans le projet de loi ne concernent que les conséquences internes à l’entreprise. Celle-ci est obligée de rechercher un repreneur et d’informer le comité d’entreprise, tandis que ce dernier a la possibilité de faire appel à un expert pour étudier les éventuelles offres de reprise, sur lesquelles il peut donner son avis. Mais il revient aux parlementaires de dire ce qui se passe quand l’entreprise n’effectue aucune recherche, ou quand elle refuse une offre que les représentants du personnel ont jugée valable. S’agissant des conséquences externes à l’entreprise, et en particulier de l’éventuel recours à un juge, les partenaires sociaux ne se sont en effet pas prononcés. Ils ne seraient de toute façon pas parvenus à un accord, et c’est pourquoi le document d’orientation suggérait de laisser au Gouvernement et au Parlement le soin de décider sur ce point.

Je ne reviendrai pas sur la question des moyens dont disposeront les DIRECCTE, mais j’insiste sur le fait qu’elles consacrent déjà beaucoup de temps aux plans de sauvegarde de l’emploi. Certes, le projet de loi aura pour effet d’augmenter leur charge de travail, mais il leur octroie surtout des pouvoirs et des responsabilités supplémentaires, qui donneront plus de sens à leur travail. Je leur transmettrai un certain nombre d’orientations afin qu’elles puissent mener à bien les travaux d’homologation dans les meilleures conditions possibles.

L’homologation ne se réduit pas à un coup de tampon, elle est le fruit d’une discussion. Alors qu’un juge se prononcerait uniquement sur la validité ou l’absence de validité d’un document, l’administration indiquera à quelles conditions celui-ci pourra être homologué. Et elle le fera en évaluant objectivement la situation de l’entreprise et le contenu de ses propositions.

Pour finir, je n’ai aucune stratégie parlementaire. Il appartient à chacun, dans cette assemblée, de se prononcer en toute responsabilité. Ma seule ligne de conduite tient au respect de l’équilibre de l’accord interprofessionnel et à la loyauté dont nous devons faire preuve à l’égard de ceux qui l’ont conclu. Dès lors que chacun s’est prononcé en faveur du dialogue social, il paraît difficile, en effet, de remettre en cause les éléments constitutifs de l’accord. Pour le reste, je m’en remets à ma boussole, l’intérêt général.

Dès lors, chacun jugera, qu’il se trouve dans la majorité ou dans l’opposition. Je ne cherche pas à tout prix à ce que tout le monde vote en faveur de ce texte, mais je suis convaincu qu’il est bon pour la France.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Merci, monsieur le ministre, pour votre disponibilité.

La séance est levée à dix-neuf heures dix.

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Information relative à la Commission

La Commission des affaires sociales a désigné Mme Hélène Vainqueur-Christophe, rapporteure sur la proposition de loi de M. Bruno Le Roux tendant à prohiber la différence de taux de sucre entre la composition des produits manufacturés et vendus dans les régions d’outre-mer et celle des mêmes produits vendus dans l’hexagone (n° 774).

Présences en réunion

Réunion du mardi 12 mars 2013 à 16 heures 15

Présents. – M. Gérard Bapt, Mme Véronique Besse, Mme Gisèle Biémouret, Mme Sylviane Bulteau, M. Jean-Noël Carpentier, Mme Fanélie Carrey-Conte, M. Gérard Cherpion, M. Rémi Delatte, M. Jean-Pierre Door, M. Dominique Dord, Mme Hélène Geoffroy, M. Jean-Marc Germain, M. Jean-Patrick Gille, M. Henri Guaino, M. Jérôme Guedj, Mme Joëlle Huillier, Mme Monique Iborra, M. Michel Issindou, M. Denis Jacquat, Mme Chaynesse Khirouni, Mme Isabelle Le Callennec, Mme Catherine Lemorton, M. Céleste Lett, Mme Geneviève Levy, M. Michel Liebgott, Mme Véronique Louwagie, M. Gilles Lurton, Mme Véronique Massonneau, M. Pierre Morange, Mme Ségolène Neuville, Mme Dominique Orliac, Mme Monique Orphé, M. Bernard Perrut, Mme Bérengère Poletti, M. Denys Robiliard, Mme Barbara Romagnan, M. Gérard Sebaoun, M. Fernand Siré, M. Christophe Sirugue, M. Olivier Véran

Excusés. – M. Christophe Cavard, M. Richard Ferrand, M. Christian Hutin, M. Arnaud Richard, M. Dominique Tian, M. Francis Vercamer

Assistaient également à la réunion. – M. Olivier Audibert Troin, M. Pierre Aylagas, M. Christophe Borgel, Mme Catherine Coutelle, Mme Pascale Crozon, Mme Laurence Dumont, M. Yann Galut, M. Régis Juanico, M. Philippe Noguès, M. Boinali Said, Mme Cécile Untermaier, M. Éric Woerth