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Commission des affaires sociales

Mercredi 20 mars 2013

Séance de 9 heures 

Compte rendu n° 46

Présidence de Mme Catherine Lemorton, Présidente

–  Examen, ouvert à la presse, de la proposition de loi, adoptée par le Sénat, tendant à modifier la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique en autorisant sous certaines conditions la recherche sur l’embryon et les cellules embryonnaires (n° 473) (Mme Dominique Orliac, rapporteure)

Échange de vues sur le courrier adressé par le président du Comité consultatif national d’éthique, consultant la Commission sur l’organisation d’états généraux sur l’assistance médicale à la procréation

– Amendements examinés par la commission

– Présences en réunion

COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

Mercredi 20 mars 2013

La séance est ouverte à neuf heures cinq.

(Présidence de Mme Catherine Lemorton, présidente de la Commission)

La Commission des affaires sociales examine la proposition de loi, adoptée par le Sénat, tendant à modifier la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique en autorisant sous certaines conditions la recherche sur l’embryon et les cellules embryonnaires (n° 473) (Mme Dominique Orliac, rapporteure)

Mme la présidente Catherine Lemorton. Après la discussion de la proposition de loi inscrite à l’ordre du jour de cette réunion, nous procéderons à un bref échange de vues consécutivement à la lettre, qui vous est distribuée, de M. Jean-Claude Ameisen, président du Comité consultatif national d’éthique, sur les états généraux qu’il envisage d’organiser à propos de l’assistance médicale à la procréation. La consultation de notre commission fait suite à un article de la loi de bioéthique du 7 juillet 2011, introduit par un amendement de Jean Leonetti.

Nous en venons à l’examen de la proposition de loi n° 473, adoptée par le Sénat, qui traite d’une question très longuement débattue au sein de la commission spéciale chargée d’examiner, en 2011, ce qui allait devenir la troisième loi de bioéthique.

Mme Dominique Orliac, rapporteure. La présente proposition de loi, déposée au Sénat le 1er juin 2012 par M. Jacques Mézard, président du groupe du rassemblement démocratique et social européen (RDSE), a été adoptée en décembre dernier. Un texte identique fut déposé à l’Assemblée nationale le 23 janvier dernier par M. Roger-Gérard Schwartzenberg, président du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste (RRDP). Il vise à soumettre la recherche sur les cellules souches embryonnaires à un régime d’autorisation encadrée.

La recherche sur l’embryon humain et sur les cellules souches embryonnaires qui en sont dérivées constitue l’un des problèmes les plus sensibles de la bioéthique car il touche aux origines de la vie. Sujet récurrent depuis 1994, il figurait parmi les plus discutés lors de la révision de la loi de bioéthique en 2011.

En 1994, la loi avait posé le principe d’une interdiction absolue de la recherche sur l’embryon. En 2004, ce principe avait été maintenu, mais assorti de dérogations pour une période de cinq ans. Comme l’a souligné M. Axel Kahn, directeur de recherche à l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM), ancien membre du Comité consultatif national d’éthique, lorsque nous l’avons auditionné à la fin de ce moratoire, le législateur avait alors le choix entre deux solutions : maintenir l’interdiction des recherches ou les autoriser de manière encadrée. Il a opté pour une solution hybride.

Le régime actuel, prévu par l’article L. 2151-5 du code de la santé publique tel que modifié par la loi de 2011, repose sur une interdiction de principe de la recherche sur les embryons, assortie de dérogations. L’affichage d’un interdit symbolique, dont on peut comprendre l’intention, recouvre en réalité une autorisation qui ne dit pas son nom.

Dans la perspective de la révision de la loi de bioéthique du 6 août 2004, de nombreuses instances se sont prononcées sur la question de la recherche sur l’embryon. La commission des affaires sociales du Sénat avait adopté un texte en ce sens lors de la discussion de la loi de bioéthique de 2011, tout comme notre Assemblée l’avait fait en première lecture de la loi de bioéthique de 2004. Le Comité national consultatif d’éthique, l’Académie de médecine, l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST), le Conseil d’État, une partie des députés membres de la mission d’information sur la révision des lois de bioéthique, enfin les citoyens ayant participé aux états généraux de la bioéthique, ont tous préconisé la mise en place d’un régime d’autorisation encadrée de la recherche.

Pourquoi ne pas les avoir entendus ?

Plusieurs arguments ont été à l’époque invoqués en faveur de la pérennisation du régime d’interdiction avec dérogations.

Il s’agissait tout d’abord d’affirmer un interdit symbolique fort, et de refuser de considérer l’embryon comme un matériau de recherche. Nous approuvons cet objectif mais le régime mis en place en 2011 non seulement ne s’avère pas plus protecteur qu’un régime d’autorisation encadrée mais paraît en outre de nature à stigmatiser la recherche. Ainsi, comme l’a clairement souligné le Conseil d’État dans son étude sur la révision des lois de bioéthique, « afficher le principe d’une interdiction là où les projets sont autorisés en quasi-totalité revient à créer un paradoxe peu souhaitable. »

Ainsi, au 1er mars 2013, 198 autorisations avaient été délivrées par l’Agence de la biomédecine (ABM), 79 concernant des protocoles de recherche dont 54 portant sur des cellules souches embryonnaires, 12 sur des embryons, 29 concernant la conservation de cellules souches embryonnaires et 50 leur importation.

Surtout, le régime actuel n’est pas plus protecteur pour les embryons. En effet, si l’on considère que l’embryon doit être respecté en tant qu’être humain dès sa conception, il faut non seulement interdire toute recherche mais interdire aussi la production d’embryons surnuméraires dans le cadre de l’assistance médicale à la procréation. Car, comme nous l’a rappelé M. Jean-Claude Ameisen, président du Comité national consultatif d’éthique, « on ne protège pas l’embryon humain de la destruction en interdisant la recherche. La question éthique première est celle de la destruction de l’embryon humain » ne faisant plus l’objet d’un projet parental. C’est peut-être même en raison de la faiblesse de notre législation concernant la destruction de l’embryon in vitro, paradoxalement autorisée sous conditions, que le législateur a été « conduit à faire peser, par une forme de compensation, une charge symbolique supplémentaire ailleurs, en l’occurrence sur la recherche », poursuivait M. Ameisen.

On a estimé, en 2011, que le système dérogatoire ne portait pas préjudice à la recherche et pouvait être assimilé de fait à une autorisation encadrée. Et en effet, les statistiques de l’Agence de la biomédecine traduisent un grand dynamisme de la recherche française en la matière.

En vérité, le texte actuel stigmatise nos chercheurs et tend à les isoler sur la scène internationale, tant le système mis en place en France est incompréhensible à l’étranger. Les professeurs José-Alain Sahel, directeur de l’Institut de la vision, Philippe Menasché, chirurgien cardiaque à l’hôpital européen Georges Pompidou et directeur de recherches à l’INSERM sur les thérapies cellulaires en pathologie cardio-vasculaire, et Marc Peschanski, directeur scientifique de l’Institut des cellules souches pour le traitement et l’étude des maladies monogéniques (I-Stem), ont fait état des obstacles rencontrés par leurs équipes et des difficultés d’accès à certains financements en raison de l’illisibilité de la loi française.

S’y ajoute une véritable insécurité juridique qui nous prive de progrès thérapeutiques majeurs. La rédaction actuelle de la loi est source de contentieux qui retardent le lancement de certains projets scientifiques. Onze procédures, engagées par la fondation Jérôme Lejeune, sont aujourd’hui en cours contre des décisions d’autorisation de recherche sur l’embryon ou sur les cellules souches embryonnaires, accordées essentiellement à l’INSERM et au Centre national de la recherche scientifique (CNRS) par l’Agence de la biomédecine, au motif que celle-ci n’avait pas prouvé l’impossibilité de mener ces recherches par d’autres méthodes. Or, en matière de recherche fondamentale, une telle preuve ne peut pas être apportée.

Enfin, il a été considéré, en 2011, que l’existence de méthodes alternatives de recherche rendait inutile l’autorisation encadrée des recherches sur l’embryon.

Ce débat a récemment été relancé par l’attribution du prix Nobel de physiologie et de médecine à John Gurdon et Shinya Yamanaka, qui ont démontré la possibilité de faire régresser des cellules adultes jusqu’au stade de la pluripotence.

Même si d’autres techniques se révèlent prometteuses, la recherche sur les cellules souches embryonnaires conserve toute sa pertinence thérapeutique. L’année 2011 a ainsi été marquée par les premiers essais cliniques utilisant des dérivés de cellules souches embryonnaires humaines. Ensuite, certaines recherches ne peuvent être menées que sur l’embryon, notamment celles concernant son développement précoce. Enfin, l’efficacité et les effets des autres méthodes, notamment des cellules iPS (induced pluripotent stem cells, cellules souches pluripotentes induites) ne sont pas encore suffisamment connus et leur utilisation pose, elle aussi, des problèmes éthiques. Il faut envisager la possibilité que des hommes demandent une « reprogrammation » de leurs cellules, pouvant éventuellement conduire, un jour, à la naissance d’un bébé possédant l’entièreté de leur génome.

Il existe un véritable consensus pour reconnaître que les recherches sur les cellules souches adultes et les cellules reprogrammées n’ont pas vocation à se substituer, en l’état actuel des connaissances scientifiques, à la recherche sur les cellules souches embryonnaires, mais qu’elles en sont le complément nécessaire. La plupart des chercheurs que nous avons entendus ont déclaré mener ces différents types de recherche en parallèle.

Il n’y a aucune « appétence » particulière des scientifiques pour la recherche sur les cellules souches embryonnaires : si, à l’avenir, d’autres méthodes s’avèrent plus efficaces, elles évinceront naturellement cette dernière.

En 2004, notre manque de recul pouvait expliquer le choix d’un régime d’interdiction avec dérogation. En revanche, le texte de la loi de 2011 est allé plus loin : par le biais de dérogations pérennes, et non plus provisoires, il autorise de fait la recherche sur les embryons, tout en l’assortissant de conditions restrictives parfois impossibles à remplir, sources d’insécurité juridique et de confusion pour nos concitoyens. C’est pourquoi il est aujourd’hui proposé de modifier la loi sur ce point.

Le régime d’autorisation encadrée est-il la voie ouverte à toutes les dérives ? Est-il moins respectueux du statut de l’embryon ? Non, car l’autorisation n’implique pas un droit systématique mais offre une simple faculté. La plupart des comités éthiques considèrent le consentement parental comme nécessaire mais non suffisant pour la manipulation des embryons créés in vitro. S’y ajoutent des autorisations accordées par des commissions scientifiques et techniques, ce qui donne à ces embryons, sinon pas plus de droits qu’aux autres, du moins une meilleure protection, en instituant une sorte de tutorat de la collectivité.

S’inscrivant dans cette logique, la présente proposition de loi maintient le statut d’exception de la recherche sur l’embryon et sur les cellules souches embryonnaires, faisant ainsi droit au respect qui leur est dû.

Ainsi, comme à l’heure actuelle, quatre conditions strictes encadreront toute autorisation de recherche et il reviendra à l’Agence de la biomédecine d’autoriser les protocoles de recherche, après vérification du respect de toutes les conditions légales, comme elle l’a fait jusqu’ici avec la plus grande rigueur depuis 2006. Je rappelle à cette occasion que l’agence ne se fonde pas uniquement sur des avis scientifiques pour prendre ses décisions : son comité d’orientation, réunissant des scientifiques et des représentants de la société civile, est appelé à se prononcer sur chaque dossier ; les considérations éthiques sont donc présentes pendant l’instruction de celui-ci.

La première condition demeure inchangée, prévoyant que la pertinence scientifique de la recherche doit être établie.

Deuxièmement, « la recherche, fondamentale ou appliquée, doit s’inscrire dans une finalité médicale ». Nous reprenons ici la formulation proposée dans le rapport d’information de notre Assemblée en vue de la dernière révision de la loi de bioéthique.

La troisième condition porte sur le caractère subsidiaire des recherches sur l’embryon. « En l’état des connaissances scientifiques, cette recherche ne peut être menée sans recourir à ces embryons ou ces cellules souches embryonnaires. »

Enfin, la quatrième condition prévoit que « les projets de recherche et les conditions de mise en œuvre des protocoles doivent eux-mêmes respecter les principes éthiques relatifs à la recherche sur l’embryon et les cellules souches embryonnaires ». Cet alinéa n’est pas modifié par la présente proposition de loi.

De plus, le consentement parental demeurera une condition sine qua non. Il est prévu, comme le législateur en a décidé en 2004 et en 2011, que le couple doit consentir aux recherches par écrit, après un délai de réflexion de trois mois. Il doit être informé des possibilités d’accueil des embryons par un autre couple ou d’arrêt de leur conservation. Enfin, le consentement des deux membres du couple ou du membre survivant est révocable sans motif tant que les recherches n’ont pas débuté.

Existerait-il une conception de droite ou de gauche de la bioéthique ? Je ne le crois pas. Ces questions complexes, mobilisant des convictions souvent personnelles, transcendent les clivages politiques traditionnels. De même, il est impossible de ramener le débat à une opposition simpliste entre partisans forcenés ou détracteurs du progrès scientifique, ou entre, d’un côté, ceux qui considéreraient l’embryon comme un simple matériau de laboratoire et, de l’autre, ceux qui lui accorderaient l’attention et la dignité qu’il mérite. Toute solution ne peut résulter que d’un compromis, et nul ne possède la réponse à l’énigme que constitue pour nous l’embryon humain. Si nous avons souhaité modifier la loi de 2011, c’est parce qu’elle a introduit une ambiguïté juridique et morale qui nuit à la recherche, sans pour autant mieux protéger l’embryon.

Ce texte ne remet donc pas en cause la philosophie générale de la loi de bioéthique et maintient l’équilibre entre le respect de l’embryon comme être en devenir et les perspectives offertes par la recherche. Il fait simplement le choix de la lisibilité et de la responsabilité vis-à-vis de nos concitoyens. C’est pourquoi je vous invite à l’adopter.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Votre groupe parlementaire, madame la rapporteure, a bien fait de s’emparer d’un sujet sur lequel la France accuse un important retard. On ne saurait, à la fois, déplorer que notre industrie pharmaceutique soit à la traîne dans certaines recherches et interdire ce qui se pratique dans d’autres pays de façon encadrée. Ce texte est très attendu des chercheurs, du public comme du privé.

M. Alfred Spira nous a indiqué, lorsque nous l’avons auditionné sur son rapport sur les troubles de la fertilité, que « la recherche en reproduction et troubles de la fertilité humaine est assez bien développée en France » mais que « des obstacles n’en demeurent pas moins : tout d’abord le régime actuel d’interdiction des recherches sur l’embryon assortie de dérogations nourrit la suspicion sur ces recherches, en tout cas décourage les équipes au vu des difficultés administratives et réglementaires à surmonter. Trop peu de chercheurs français travaillent sur le sujet. Ce serait pourtant indispensable pour mieux connaître les mécanismes du développement embryonnaire et in fine améliorer les techniques d’assistance médicale à la procréation », ce qui signifie améliorer le taux de réussite des projets parentaux quand ils ont recours à la procréation médicalement assistée.

Entendu le même jour par notre commission, M. Dominique Royère, professeur à l’université de Tours et biologiste à l’Agence de la biomédecine, a indiqué que 17 % des 171 000 embryons cryoconservés, soit environ 30 000, ne font plus l’objet d’un projet parental. La moitié des couples accepte que leurs embryons soient donnés à un autre couple, infertile, et l’autre moitié qu’ils soient confiés à la recherche. Il nous faut tenir compte des aspirations de ces couples et améliorer les chances de réussite des projets parentaux.

M. Jean-Louis Touraine. Cette proposition de loi était fortement attendue et j’adhère entièrement aux propos de la rapporteure.

Substituer une autorisation strictement encadrée à une interdiction assortie de dérogations représente une avancée significative pour notre pays et notre société. Nous rejoindrons ainsi le concert du plus grand nombre de nations développées engagées dans la recherche sur les embryons, comme nous suivrons les propositions formulées par les états généraux de la bioéthique, le Comité consultatif national d’éthique, le Sénat, le Conseil d’État, l’Académie de médecine : en définitive par tous ceux qui ont étudié en profondeur cette question délicate. Nous sortirons ainsi de l’hypocrisie consistant à interdire de développer des lignées de cellules souches embryonnaires en France mais à en autoriser l’importation. Comme si les embryons ne méritaient pas le même respect, de part et d’autre des frontières !

Nous privilégierons ainsi la confiance dans la recherche et dans le progrès. De nombreux projets de recherche sur des cellules souches embryonnaires sont aujourd’hui soumis à l’Agence de la biomédecine, ainsi que trois demandes d’applications thérapeutiques, pour les tissus cutanés, la rétine et le cœur. À l’étranger, les recherches portent bien sûr sur une plus grande variété de tissus encore, tant les perspectives thérapeutiques sont porteuses d’espoir.

l’Agence de la biomédecine supporte actuellement d’importants frais d’avocat pour faire face aux nombreux recours contentieux en annulation de ses décisions – onze en cours à ce jour et combien demain ? – déposés notamment par la fondation Lejeune. Les fonds correspondants seraient évidemment mieux employés à financer les missions sanitaires de l’agence plutôt que des frais de procédure.

On oppose souvent à la recherche sur les embryons deux types d’arguments qu’il me faut réfuter. Le premier consiste à affirmer qu’il serait possible de se passer des cellules souches embryonnaires, en recourant à d’autres cellules souches, notamment les cellules iPS. L’identité de dénomination ne doit pas conduire à confondre les deux, pas plus que le vieillard et le nouveau-né ne sont semblables, bien qu’à tous deux le mot « humain » puisse s’appliquer ! Les cellules iPS conservent la mémoire de leur tissu d’origine et offrent donc des possibilités plus limitées de spécialisation. En outre, leur maniement soulève d’autres problèmes éthiques : ainsi ces cellules génétiquement modifiées sont susceptibles de se différencier en gamètes.

Deuxième argument : la vitrification des ovocytes permettrait qu’il n’y ait plus, demain, d’embryons surnuméraires dans les cuves d’azote liquide de nos laboratoires. C’est tout aussi faux. Cette technique de congélation permet de lutter contre certaines formes de stérilité aujourd’hui non traitées, et offre des opportunités supplémentaires de fécondité. Mais elle ne dispensera pas de fécondations in vitro conduisant à l’existence d’embryons surnuméraires – dont des dizaines de milliers sont chaque année détruits parce que ne faisant plus l’objet d’un projet parental. C’est sur ces embryons-là qu’avec autorisation parentale il est possible de prélever des cellules pour les besoins de la recherche et, à terme, de ses applications thérapeutiques.

Ce qui nous est proposé à travers cette proposition de loi ne fait qu’étendre à l’embryon les dispositions en vigueur concernant les prélèvements d’organes ou d’éléments du corps, effectués sur l’adulte, l’enfant, le nouveau-né, mais aussi depuis plusieurs décennies sur le fœtus humain post mortem – avec autorisation parentale.

C’est, en définitive, une marque de respect, de considération et de dignité que la proposition de loi accorde à l’embryon humain puisqu’on ne voit pas pourquoi celui-ci n’aurait pas droit au même statut que les autres phases de développement de l’être humain, depuis la fécondation jusqu’à la mort.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Merci d’avoir rappelé les différents stades du vivant, eu égard aux courriers outranciers que nous recevons en vue de la discussion de ce texte. L’embryon, constitué de huit cellules au maximum, n’a rien à voir avec un fœtus.

M. Jean Leonetti. J’invite nos collègues à adopter sur des sujets aussi sensibles des positions moins tranchées, triomphantes ou binaires.

La loi de 2011 a mis en place, de façon consensuelle, une certaine procédure. J’avais proposé qu’on puisse modifier les lois de bioéthique dès que nécessaire. L’opposition de l’époque préférait une formule de révision régulière, tous les sept ans. Ce que nous avons voté, hormis le cas où une découverte scientifique viendrait à bouleverser les équilibres. Nous avons précisé aussi, par amendement adopté à mon initiative, que chaque modification législative devrait être précédée d’états généraux, comme le traduit sur un autre thème le courrier du président Jean-Claude Ameisen. Car il ne s’agit pas d’un sujet aussi simple qu’on pourrait le croire. Or, voilà qu’aujourd’hui nous légiférons au bout d’un an et sans états généraux, donc sans débat public préalable, alors même que, à côté des scientifiques qui plaident toujours en faveur de la recherche, les citoyens se montrent extrêmement prudents quant au statut de l’embryon, être en devenir et non pas objet.

La bioéthique repose à la fois sur le pragmatisme et sur le symbolique, avec des conflits de valeurs portant sur la dignité de la personne humaine dès sa conception – référence constitutionnelle et non pas biblique – et autour de la nécessité de progresser sur le plan scientifique.

La loi Veil sur l’interruption volontaire de grossesse protège le fœtus et autorise néanmoins, par dérogation, le droit à l’avortement. C’est là une constante du droit français, jamais abandonnée jusqu’ici, que d’affirmer la protection avant de prévoir des dérogations.

Certains feront valoir qu’entre l’autorisation encadrée et l’interdiction avec dérogation, il existe la même différence qu’entre blanc bonnet et bonnet blanc. Dans ce cas, ne serions-nous pas en train de discuter du sexe des anges dans Byzance assiégée par une crise économique ? Non, car s’il y a probablement peu de différence pour le chercheur, il n’en demeure pas moins que la position adoptée par la France revêt une portée symbolique sur le plan international. Ce n’est pas parce que certaines pratiques ont cours dans certains pays qu’on doit les autoriser chez nous. Au Brésil, on vend son rein pour quelques reals et la gestation pour autrui est autorisée dans certains pays européens… Attention donc à ne pas céder au moins disant éthique au nom du mieux disant scientifique et de la performance !

Il existe bien sûr des alternatives à la recherche sur les embryons et les lignées de cellules embryonnaires. Shinya Yamanaka, aujourd’hui prix Nobel, a montré que des cellules souches adultes pouvaient fournir des résultats supérieurs à ceux permis par des lignées embryonnaires. La recherche sur l’embryon demeure néanmoins nécessaire car cette « potentialité de personne humaine » n’est pas un objet et mérite que l’on progresse sur sa connaissance ainsi que sur ses traitements, lesquels peuvent d’ailleurs servir à d’autres stades.

Les scientifiques sont-ils aujourd’hui en France gênés dans leurs travaux de recherche ? L’ont-ils été par le moratoire : comment lancer un programme de recherche en sachant qu’au bout de trois ans il faudra peut-être l’arrêter ?

C’est pourquoi nous avons choisi un régime de dérogations pérennes. Ainsi, tout chercheur bénéficie d’une continuité dans ses travaux – du moins si les majorités parlementaires changeantes ne modifient pas chaque fois les lois de bioéthique – à la condition d’œuvrer pour le progrès médical et non pour tester des cosmétiques…

Vous avez dit, madame la présidente, que la France était en retard. Relisez donc ce qu’a écrit Mme Sylviane Agacinski sur les lois de bioéthique : elle rappelle que la France est, au contraire, en avance, parce qu’elle est protectrice.

Ulysse, au large de l’île des sirènes, fait boucher à la cire les oreilles de ses hommes d’équipage et lui-même se fait attacher au mât afin de résister à la tentation de succomber à leurs charmes trompeurs. Il ne s’interdit pas d’entendre leur chant : il veut au contraire le connaître mais y résister. « Un homme, cela s’empêche », disait Albert Camus, mais par des liens humains. Ce chant s’appelle aujourd’hui lobbying avec, à la clé, d’importants intérêts financiers. De ce lobbying, les députés doivent se garder comme Ulysse du chant des sirènes : il faut avoir connaissance du progrès mais ne pas s’y fourvoyer. Tel est le projet qui nous anime.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Vous avez fait allusion à mes propos sur le retard de la France et sur la position des industriels du médicament. Soyons clairs : ces derniers, dont vous défendez volontiers les intérêts, sont heureux de savoir qu’on va enfin autoriser les recherches sur les cellules embryonnaires, comme dans les autres pays. Ce qui n’a rien à voir avec la vente d’organes humains…

M. Jean Leonetti. Je n’ai pas fait cet amalgame !

Mme Jacqueline Fraysse. Comment le groupe UMP peut-il se permettre de nous inviter à la modération alors que, sur ces sujets complexes et délicats touchant à des convictions intimes, la droite, encore tout récemment à propos du mariage pour tous, a fait preuve d’excès indignes ?

Au nom de mon groupe, je me réjouis de cette proposition de loi, très attendue et dont le thème a été longuement discuté lors de l’examen des lois de bioéthique. Le texte adopté en 2011 frôle en effet le ridicule.

Nous sommes, comme par le passé, favorables aux recherches sur l’embryon et les cellules souches embryonnaires dès lors qu’elles sont rigoureusement encadrées. Leur régime doit évoluer d’une interdiction assortie de dérogation à un système plus ouvert et conquérant. Le régime actuel, hypocrite, retarde la recherche française et la place dans une position ringarde, à la limite du ridicule. Notre pays, reconnu et respecté par la communauté scientifique internationale, ne doit pas, pour des raisons que je ne qualifierai pas davantage, continuer de prendre de retard dans ce champ de recherche.

Mme Véronique Massonneau. Dans le domaine de la bioéthique, on échappe aux clivages politiques pour passer aux convictions personnelles. La recherche sur l’embryon, sujet potentiellement angoissant, nous a valu de nombreux courriers et courriels hostiles à la présente proposition de loi.

Au Sénat, seuls quelques-uns des membres du groupe écologiste se sont abstenus sur la présente proposition de loi. Dans notre assemblée, ils l’approuvent également dans leur grande majorité, sans préjudice d’une vigilance nécessairement accrue sur les suites qui seront concrètement données à son adoption.

Il nous paraît cohérent, notamment en tant que défenseurs de l’interruption volontaire de grossesse, que soient autorisées les recherches, dès lors qu’elles font progresser la médecine, sur les cellules souches embryonnaires et les embryons surnuméraires issus de fécondations in vitro et n’entrant plus dans le cadre d’un projet parental, après information et consentement des parents, protégés par un délai de rétractation.

Or, la législation actuelle ne permet pas de conduire des recherches à finalité médicale ou thérapeutique dans les meilleures conditions.

La loi de 2011 a constitué un indéniable progrès avec son régime de dérogations pérennes Mais elle a aussi provoqué quelques dysfonctionnements, notamment dans les études comparatives.

La présente proposition de loi laisse cependant subsister une interrogation relative au délai de rétractation des parents. Elle prévoit en effet que le couple donateur dispose de trois mois au terme desquels il doit confirmer ou infirmer sa volonté de céder son embryon. Notre collègue sénateur Jean Desessard avait déposé un amendement visant à autoriser la rétractation du couple, pour lui éviter une pression trop lourde, tant que la recherche n’avait pas commencé, au-delà du délai minimum de trois mois. Mais il n’a pas été adopté. Le texte qui nous est soumis garantit-il un suivi suffisant des couples concernés ?

M. Jean-Noël Carpentier. Le groupe RRDP soutient évidemment cette proposition de loi, raisonnable et renforçant la recherche scientifique française, qui ne doit pas prendre de retard. Ne cherchons pas de clivages politiques sur des thèmes qui doivent naturellement y échapper au profit d’une réflexion approfondie.

La communauté scientifique et les débats publics organisés depuis plusieurs années ont éclairé le législateur, désormais apte à prendre des décisions raisonnables.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Après les interventions des représentants des groupes, je donne la parole à M. Le Déaut, premier vice-président de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST), qui a souhaité exposer à notre Commission le point de vue de l’Office.

M. Jean-Yves Le Déaut. La loi prévoit la saisine de l’OPECST sur les questions éthiques et celui-ci a désigné deux rapporteurs sur ces sujets, Alain Claeys et Jean-Sébastien Vialatte. Dominique Orliac est également membre de l’Office.

S’agissant d’un sujet complexe, les débats doivent se cantonner aux faits. La recherche scientifique est nécessaire à tous les stades du développement humain. Il a été longtemps difficile d’admettre qu’elle pût porter sur les êtres vivants. La loi Huriet-Sérusclat du 20 décembre 1988 relative à la protection des personnes se prêtant à des recherches biomédicales en a, de façon très encadrée et après des débats passionnés, ouvert la possibilité, y compris sur les embryons. De même, la loi du 29 juillet 1994 relative au don et à l’utilisation des éléments et produits du corps humain a permis la recherche post mortem.

La loi de bioéthique actuelle pèche par hypocrisie dans la mesure où l’interdiction assortie de dérogations débouchait sur une autorisation dans presque tous les cas, hélas aujourd’hui perturbée par des procédures contentieuses. C’est ainsi que la Cour d’appel de Paris vient de demander à l’Agence de la biomédecine de prouver qu’il n’existait pas de possibilité de recherche alternative. Sans ce harcèlement judiciaire on aurait pu considérer les deux formules juridiques possibles comme presque équivalentes.

On prétend à tort que la loi de 2011 se trouve dépassée par les progrès récents. Certes John Gurdon et Shinya Yamanaka ont réussi à dédifférencier des cellules adultes, autorisant ce qu’on appelle la reprogrammation. Mais rien ne permet de dire que l’on revient ainsi au début de la vie. La brebis Dolly, clonée à partir d’une cellule de glande mammaire, est morte jeune parce que née vieille !

Ce sont donc par les recherches comparatives entre les cellules souches embryonnaires et les cellules reprogrammées qu’on arrivera à répondre aux questions qui se posent.

On ne peut pas davantage affirmer que ces recherches n’ont pas d’applications : d’abord parce que la recherche fondamentale se justifie par elle-même, ensuite parce que les applications existent déjà, comme le montrent les travaux du professeur Philippe Menasché, lequel attend une autorisation pour un essai de phase pré-clinique, et d’autres actuellement menés aux États-Unis, notamment par la firme ACT qui travaille sur les dégénérescences maculaires.

Refuser la recherche sur l’embryon et les cellules souches embryonnaires ne peut obéir qu’à des considérations idéologiques.

M. Jean-Sébastien Vialatte. Je regrette que la proposition de loi ne s’insère pas dans une révision plus globale puisque nous allons bientôt discuter de la procréation médicalement assistée (PMA).

L’Agence de la biomédecine est aujourd’hui confrontée à un problème judicaire considérable : toutes ses décisions d’autorisation, ainsi que leurs renouvellements, font l’objet de recours contentieux.

L’éthique est-elle mieux préservée par la destruction d’un embryon dépourvu de projet parental en le laissant se décongeler sur le bord d’une paillasse avant de le jeter à la poubelle plutôt que par sa consécration à la recherche scientifique ?

Il peut en effet servir à la recherche fondamentale sur les premiers stades du développement embryonnaire, comme à des recherches appliquées au profit de l’embryon lui-même, notamment sur les mécanismes d’implantation dans la membrane utérine. De premiers essais cliniques sur l’embryon ont lieu. Et on pourra bientôt envisager des recherches sur lui sans que l’on ait à le détruire.

Malgré tout leur intérêt, notamment pour le screening des molécules pharmaceutiques, les cellules iPS, artificiellement rajeunies par des procédés non dépourvus de risque oncogène, ne sont pas équivalentes aux cellules souches embryonnaires.

Le prochain texte sur la procréation médicale assistée devra fournir l’occasion de réfléchir aux moyens de limiter le nombre d’embryons surnuméraires, notamment par la congélation des ovocytes.

Nous devons, en effet, prendre garde au chant des sirènes. Les recherches sur l’embryon ne vont pas, demain, permettre aux aveugles de voir, aux paralytiques de marcher et aux sourds d’entendre : il y a encore loin de l’espoir à la réalisation couronnée de succès. La communauté scientifique devait d’ailleurs se monter très prudente dans sa communication car on assiste aujourd’hui à un désamour de la recherche en raison d’annonces tonitruantes mais non suivies d’effets.

Cette proposition de loi n’en constitue pas moins une indéniable avancée et, personnellement, je la voterai.

M. Gérard Bapt. J’approuve pleinement la position présentée par Jean-Louis Touraine. Je regrette que notre collègue Jean Leonetti, en dépit de son excellente connaissance du sujet, ait cru bon d’inciter à une guerre picrocholine en prétendant qu’interdiction assortie de dérogations et autorisation encadrée revenaient au même. Les chercheurs que nous avons entendus ne partagent pas ce point de vue. Certaines jurisprudences mettent d’ailleurs aujourd’hui l’Agence de la biomédecine en difficulté, comme il a été indiqué.

On n’aurait pas découvert les propriétés des cellules iPS si on n’avait effectué, préalablement, des recherches sur des cellules embryonnaires. Elles ne sauraient donc être considérées comme une formule de remplacement.

Nous recevons, notamment en tant que médecins, des courriers et des courriels hostiles à la proposition de loi au motif qu’elle attenterait à la vie. Mais nous ne discutons pas aujourd’hui du statut de l’embryon, ni de la loi Veil. La législation en vigueur n’interdit pas la destruction des embryons. N’est-il donc pas paradoxal d’interdire la recherche sur eux ?

M. Bernard Perrut. La présente proposition de loi entend substituer un régime d’autorisation encadrée des recherches sur l’embryon et les cellules embryonnaires au régime actuel d’interdiction assortie de dérogations. S’il s’agit seulement de renforcer la sécurité juridique des autorisations de recherche, l’objectif risque de ne pas être atteint dans la mesure où l’élément déterminant, comme dans la loi de 2011, réside dans le respect des conditions auxquelles sont soumises les recherches. Aujourd’hui, la plupart des projets de recherche soumis à l’Agence de la biomédecine se voient octroyer une autorisation.

La proposition de loi est-elle de nature à rassurer les équipes dont l’autorisation de recherche a été déférée devant la justice ? Si ce n’était pas le cas, l’intention des auteurs du texte ne relèverait que de l’ordre du symbole. Des éléments scientifiques nouveaux justifient-ils aujourd’hui une modification du droit en vigueur ?

L’abandon de la notion de progrès médical « majeur », telle qu’actuellement prévue par l’article L. 2151-5 du code de la santé publique comme condition de l’autorisation de recherche, me paraît plus grave. Il suffira désormais, pour qu’une recherche soit autorisée, d’invoquer une simple finalité médicale, que son effet curatif prévisible soit attesté ou non.

Je demeure en effet soucieux de concilier l’exigence fondamentale du progrès médical pour guérir certaines maladies jusqu’ici incurables avec celle de la protection de l’embryon, qui n’est pas un matériau comme les autres et appelle une protection adaptée.

M. Dominique Dord. Je suis un peu surpris : toutes les interventions commencent par souligner la difficulté du sujet et la nécessité de respecter les convictions de chacun, mais ensuite, on entend que certaines opinions seraient « ridicules » ! J’ai été blessé par ce terme, madame Fraysse. Je défends ces convictions ridicules depuis des décennies, et je demande que l’on nous respecte.

Sur ces sujets sensibles, il est d’usage que l’on se donne du temps, et que l’on organise un débat public : comment pouvez-vous modifier la loi dans de telles conditions, par une proposition de loi comportant un article unique, en balayant d’un revers de main des convictions qui, si elles ne sont pas les vôtres, sont partagées par des millions de Français ?

Mme Isabelle Le Callennec. Le sujet, qui touche aux convictions personnelles, est effectivement difficile.

L’alinéa 11, pour sa part, dispose « qu’en cas de violation des prescriptions, l’Agence de biomédecine suspend l’autorisation de la recherche ou la retire. » Par qui l’agence est-elle saisie ? Peut-elle s’autosaisir ? A-t-elle les moyens de remplir correctement cette mission de contrôle ?

Mme Véronique Louwagie. Sur ce sujet sensible, qui touche à l’humain, vous proposez un changement inédit, puisque le principe fondateur de la protection de l’être humain devient une exception. La recherche est indispensable, mais elle doit être encadrée.

En particulier, les couples dont sont issus les embryons doivent donner – ou non –leur consentement écrit à leur utilisation à des fins de recherche. Pour cela, ils doivent être « dûment informés des possibilités d’accueil des embryons par un autre couple ou d’arrêt de leur conservation ». Cette information est-elle correctement délivrée ? Quelles garanties et quelle aide la collectivité apporte-t-elle à ces couples dans leur prise de décision ?

Mme Jacqueline Fraysse. Je voudrais rectifier l’interprétation qui a été donnée de mes propos : je n’appliquais pas l’adjectif « ridicule » aux convictions de chacun – convictions respectables et respectées – mais au régime actuel d’interdiction avec dérogation. Dans la mesure où il s’agit d’embryons qui seront de toute façon détruits, puisqu’ils ne font plus l’objet d’un projet parental, dans la mesure où les dérogations sont presque toujours accordées, je pense qu’il y a lieu de modifier la loi, qui me paraît en effet, sinon ridicule, puisque ce terme est peut-être inapproprié, du moins ringarde.

Mme la rapporteure. Je voudrais d’abord remercier Jean-Louis Touraine de son travail et de sa participation aux auditions ; son exposé était intéressant et complet. Je regrette que plus de députés n’aient pas pu être présents lors de ces auditions : le débat d’aujourd’hui ne serait pas le même.

Monsieur Leonetti, vous nous reprochez de ne pas avoir organisé d’états généraux avant de modifier la loi. Sur le plan juridique, votre raisonnement est erroné : la procédure de consultation prévue à l’article L. 1412-1-1 du code de la santé publique est de niveau législatif, et non de nature organique ou constitutionnelle. Elle peut donc être opposée par le Conseil d’État au Gouvernement lors de la présentation d’un projet de réforme qui n’aurait pas fait l’objet d’une concertation préalable ; mais une loi ordinaire ne saurait créer une telle contrainte procédurale opposable au législateur. De plus, il s’agit ici d’un texte d’initiative parlementaire.

Sur le fond, lors du forum citoyen organisé à Marseille en 2009, les citoyens se sont clairement prononcés en faveur de l’autorisation de la recherche sur les cellules souches embryonnaires. Cette volonté exprimée par les citoyens n’a pas été entendue en 2011.

Effectivement, l’interdiction avec dérogation ou l’autorisation encadrée, ce n’est pas bonnet blanc et blanc bonnet. Les recours presque systématiques qui sont aujourd’hui formés – en dernier lieu contre les recherches du professeur Peschanski sur l’autisme – sont très préoccupants pour l’Agence de la biomédecine car ils mobilisent des moyens humains importants et induisent des frais, d’avocat notamment, très lourds. Les chercheurs se sentent stigmatisés, accusés de mener des recherches dangereuses, à visée potentiellement eugéniste. Or, encore une fois, ils n’ont pas d’appétence particulière pour les recherches sur les cellules embryonnaires : ils ne font qu’utiliser l’ensemble des outils à leur disposition.

Hier, lors de l’audition du professeur Peschanski, Mme Martinat, médecin et chercheur à l’I-Stem nous a expliqué que les jeunes chercheurs sont fortement incités à aller travailler quelque temps à l’étranger après leur doctorat, mais qu’ils rencontrent de grandes difficultés à leur retour, car ils ne peuvent pas faire de la recherche en France comme ils le faisaient par exemple aux États-Unis – vous savez que le président Obama a de nouveau autorisé le financement des recherches sur les cellules souches embryonnaires par des crédits fédéraux. Pourtant, les chercheurs français sont nombreux, très motivés, et très doués, notamment en matière de thérapie cellulaire et génique.

Ils attendent ce texte avec impatience. Vous avez raison, madame Fraysse : oui, aujourd’hui, nous sommes en retard ; non, cette recherche n’est pas obsolète, bien au contraire puisqu’on en est maintenant au stade préclinique. C’est notamment le cas de plusieurs recherches des professeurs Peschanski et Menasché. Nous sommes donc à l’aube de résultats très prometteurs.

Monsieur Carpentier, je vous remercie également de votre soutien.

Madame Massonneau, les couples pourront effectivement revenir sur leur consentement tant que les recherches n’ont pas commencé. Ils sont informés de toutes les possibilités, notamment de celle de donner l’embryon à un autre couple, mais il est rare qu’ils acceptent cette solution. Il leur est également bien expliqué que les embryons sont systématiquement détruits au bout de cinq ans s’ils ne font plus l’objet d’un projet parental. Je précise que s’ils acceptent l’utilisation de leurs embryons à des fins de recherche, ils ne sont pas informés des suites éventuelles, par exemple du type de recherche qui peut être faite, et cela afin de les protéger humainement.

Monsieur Le Déaut, merci d’avoir rappelé que l’OPECST est très favorable à cette proposition de loi. Vous avez insisté sur la complémentarité des différentes recherches. Le professeur Yamanaka travaille à la fois sur les cellules souches embryonnaires et sur les cellules iPS. Les secondes, modifiées génétiquement et susceptibles de « remonter le temps » jusqu’au stade des gamètes, ouvrant potentiellement la voie au clonage, peuvent poser autant de problèmes éthiques que les premières.

Madame Le Callennec, l’Agence de la biomédecine peut effectivement s’autosaisir en cas de violation des prescriptions ; elle dispose des moyens d’effectuer les contrôles nécessaires.

La Commission en vient à l’examen de l’article unique de la proposition de loi.

Article unique : Autorisation encadrée de la recherche sur l’embryon et les cellules souches embryonnaires

La Commission examine les amendements de suppression AS 1 de Mme Véronique Besse et AS 2 de Mme Valérie Boyer.

Mme Véronique Besse. La présente proposition de loi constitue une erreur fondamentale.

Elle ignore la reconnaissance par la communauté scientifique internationale du professeur Yamanaka, qui a reçu le prix Nobel de médecine pour avoir découvert une alternative à l’utilisation de cellules souches provenant des embryons. Ce que vous proposez est donc inutile et dépassé.

D’autre part, la présente proposition de loi ignore le code de la santé publique, qui impose l’organisation d’un débat public sous forme d’états généraux avant tout projet de réforme sur les questions bioéthiques. Notre discussion d’aujourd’hui ne constitue évidemment pas un tel débat public. Pour la première fois, le Parlement s’apprête donc à voter une loi de bioéthique sans consultation ni même information des citoyens.

Enfin, cette proposition de loi est immorale. Elle constitue une menace pour « le respect de l’être humain dès le commencement de sa vie », qui est garanti par l’article 16 du code civil.

Il faut donc supprimer cette proposition de loi obsolète et antidémocratique, qui n’est pas fondée sur des considérations médicales ou scientifiques, mais idéologiques.

Mme Valérie Boyer. Cette proposition de loi propose un bouleversement majeur des conditions de la recherche sur l’embryon et les cellules souches embryonnaires. Sans débat et sans raison, la majorité s’acharne, avec la complicité du Gouvernement, à détruire les principes fondateurs de notre société. Le respect de l’embryon humain, au cœur du droit bioéthique français, est aujourd’hui menacé. Faut-il rappeler qu’en vertu de l’article 16 du code civil, « la loi assure la primauté de la personne, interdit toute atteinte à la dignité de celle-ci et garantit le respect de l’être humain dès le commencement de sa vie » ? Comme le relève Jürgen Habermas, l’autorisation de conduire des recherches sur l’embryon transforme la perception culturelle de la vie humaine.

Lors des révisions de la loi de bioéthique, en 2004 puis en 2011, le principe éthique essentiel d’interdiction de la recherche sur l’embryon avait été maintenu et réaffirmé, tout en étant assorti de dérogations ; c’était un compromis entre la reconnaissance de la dignité de l’embryon humain et la volonté de ne pas empêcher les avancées thérapeutiques rendues possibles par la recherche scientifique.

Le renversement au profit d’un principe d’autorisation est loin d’être anodin. La promotion de la recherche sur l’embryon ainsi opérée par la majorité socialiste et le Gouvernement, qui se fait sans organisation d’états généraux de la bioéthique pourtant imposés par la loi de 2011, est d’autant plus inacceptable que l’expertise scientifique a prouvé que les cellules souches non embryonnaires dépassent aujourd’hui les cellules souches embryonnaires.

En effet, les cellules souches adultes et issues du sang de cordon permettent d’ores et déjà de soigner des pathologies grâce à la thérapie cellulaire. En ce qui concerne la modélisation de pathologies et le criblage de molécules, les cellules souches iPS ont le même potentiel que les cellules souches embryonnaires.

Dès 1991, les travaux de l’équipe de Marie-Louise Labat, du CNRS, montraient la présence dans le sang d’une cellule souche capable de former différents tissus, vraisemblablement pluripotente. Récemment, en France également, l’équipe du professeur Luc Douay a obtenu des globules rouges à partir de cellules souches de sang de cordon ou de moelle osseuse. Les travaux des professeurs Yamanaka et Gordon, couronnés par le prix Nobel en 2012, prouvent à quel point la recherche sur les cellules embryonnaires est désormais supplantée par les cellules non-embryonnaires ; plus de vingt lignées ont été obtenues et un institut, l’iPS Core, créé à Harvard, leur est consacré. Les pathologies concernées sont la maladie de Parkinson, le diabète, la chorée de Huntington, la trisomie, la maladie de Gaucher, la dystrophie de Duchenne, pour n’en citer que quelques-unes.

Ces progrès extraordinaires concernant les cellules souches adultes ou induites et leurs possibles applications thérapeutiques, ou encore la vitrification des ovocytes autorisée depuis le 27 janvier 2011 et qui va enfin mettre un terme à la production d’embryons humains surnuméraires, sont totalement ignorés par cette proposition de loi passéiste. Force est de constater qu’il s’agit d’une démarche purement idéologique, qui fait courir de lourds risques de dérives et d’instrumentalisation.

Avant toute modification des conditions de la recherche sur l’embryon et les cellules souches embryonnaires, et a fortiori avant d’opérer un tel bouleversement du principe d’interdiction, il fallait organiser un débat public ouvert à tous, sur le modèle des forums citoyens, comme le gouvernement précédent en avait organisé notamment à Marseille en 2009. Quant à la recherche sur les gamètes, leur conservation et la fécondation in vitro, son objectif doit être de permettre aux biologistes et aux gynécologues-obstétriciens d’évaluer les innovations susceptibles d’améliorer les résultats de l’assistance médicale à la procréation. L’Agence de la biomédecine doit conduire ces évaluations afin que ces innovations soient connues, reconnues et promues dans notre pays. Sans cela, légiférer sur les conditions de recherche sur l’embryon, en dehors de toute expertise sur les nouvelles techniques, n’a pas de sens. Vous agissez ici dans une grande précipitation idéologique.

Pour toutes ces raisons, je défends la suppression de l’article unique de cette proposition de loi.

Mme la rapporteure. Je suis évidemment défavorable à ces amendements.

J’ai déjà répondu sur les états généraux : ce raisonnement est erroné. J’ai déjà répondu aussi sur les cellules iPS : les deux types de recherches sont complémentaires, et non exclusifs l’un de l’autre. Il convient de les mener en parallèle, comme le fait d’ailleurs le professeur Yamanaka car pour travailler utilement sur les cellules iPS, il faut pouvoir les comparer aux cellules souches embryonnaires. La connaissance des propriétés et du potentiel thérapeutique des cellules iPS est encore très parcellaire. L’alternative est donc un faux débat, tous les scientifiques que nous avons auditionnés l’ont confirmé : il est dommage que vous n’ayez pas pu être présentes à ces auditions, mesdames.

S’il y a des embryons surnuméraires – dont la vitrification des ovocytes permettra sans doute de diminuer quelque peu le nombre –, ce n’est pas parce que la recherche en aurait besoin. Il faut savoir que les chercheurs de l’I-Stem par exemple travaillent depuis des années sur deux lignées seulement de cellules souches embryonnaires. Nul besoin d’embryons en très grand nombre !

Il y a sur ce sujet beaucoup de désinformation ; il est immoral de faire croire à nos concitoyens que la recherche sur les cellules souches embryonnaires s’apparente à la recherche sur le foetus – confusion pourtant entretenue dans de nombreux courriers que nous recevons. Faut-il rappeler par ailleurs que la recherche sur le fœtus est autorisée ?

Le texte que nous proposons assure le respect et la dignité des embryons.

M. Jean-Louis Touraine. Madame Boyer, je vous félicite de votre modération et de votre sens de la nuance lorsque vous nous accusez « de nous acharner, avec la complicité du Gouvernement, à détruire les principes fondateurs de notre société » !

Prétendre que les cellules iPS peuvent remplacer les cellules souches embryonnaires est faux sur le plan scientifique ; et l’utilisation de ces cellules iPS, susceptibles d’évoluer en cellules cancéreuses du fait de la modification génétique qu’elles ont subie mais aussi de se différencier en gamètes, pose encore plus de problèmes éthiques que celle des cellules souches embryonnaires. Ces recherches sont toutes deux indispensables et porteuses d’espoirs ; simplement, leurs applications, tant pour la recherche que pour la thérapeutique, ne seront pas les mêmes.

Quant à la vitrification des ovocytes, elle ne diminuera en réalité que légèrement le nombre d’embryons surnuméraires : au lieu d’en détruire plusieurs dizaines de milliers par an, on n’en détruira peut-être qu’une dizaine de milliers… De plus, la recherche n’a effectivement pas besoin de nombreuses lignées, puisque ces cellules ont une capacité de renouvellement et de multiplication infinie.

Il faut savoir également qu’il existe des lignées de cellules souches provenant d’embryons porteurs d’une maladie génétique et écartés après un diagnostic pré-implantatoire. Ces lignées permettront d’étudier les affections en question, ce que ne permettent pas les cellules iPS. Nous pouvons ainsi espérer faire disparaître de nombreuses maladies génétiques.

L’avancée proposée par ce texte est logique. Je peux comprendre que l’on ait commencé par un régime d’interdiction assorti de dérogations : plusieurs années de pratique ont montré qu’il n’y avait pas de dérives. Nous sommes donc rassurés. Il est grand temps de franchir un pas supplémentaire et de passer à un régime d’autorisation.

M. Gérard Bapt. Madame Besse, il y a pour vous quelque paradoxe à vous recommander du professeur Yamanaka car il travaille sur les cellules iPS, mais aussi sur les cellules souches embryonnaires !

Vous nous parlez de morale et de menace pour le respect de la vie humaine dès son commencement, relançant un débat sur le statut de l’embryon ; mais le respect de la vie est-il mieux assuré lorsque les embryons sont détruits, ou lorsqu’ils servent à une recherche qui permettra, ensuite, de préserver la vie humaine ?

M. Jean Leonetti. L’argument selon lequel les dérogations accordées n’ont pas conduit à des dérives est à double tranchant : on pourrait donc aussi plaider pour laisser en place un système qui a bien fonctionné.

Il existe des arguments scientifiques de part et d’autre. Ces sujets sont complexes. Nul ne parle de tout interdire ou de tout autoriser. Le débat éthique est par nature très difficile.

Vous avez raison, madame la rapporteure, la loi de bioéthique n’est pas une loi organique. Nous n’avons pas voulu qu’elle le soit, nous n’étions pas si sûrs de nous et après un an et demi de débats, nous légiférions encore d’une main tremblante. Mais, parce que l’organisation d’états généraux n’est pas constitutionnellement nécessaire, en devient-elle moralement ou démocratiquement inutile ? Les règles seraient-elles différentes pour la droite et pour la gauche ? Au motif qu’elle détiendrait la morale, la gauche peut-elle s’affranchir d’un débat démocratique, des états généraux, des avis scientifiques, des auditions télévisées, de la consultation des citoyens ?

Avez-vous moralement raison parce que vous êtes politiquement majoritaires ?

Sur ces sujets essentiels, qui touchent à la conception de l’homme, de son avenir et de sa dignité, ne serait-il pas utile de réfléchir ensemble, et de nous demander ensemble si la loi est, sur certains points, trop restrictive ou au contraire trop permissive ? Vous ne semblez pas le penser et modifiez notre législation subrepticement, avec une petite proposition de loi, parce qu’un texte d’initiative parlementaire n’oblige pas à organiser d’états généraux. Je regrette vraiment que vous n’ayez pas fait preuve d’assez d’ouverture d’esprit pour ouvrir un débat, chercher à surmonter les clivages et accepter le doute collectif comme un élément de progression – nous l’avions fait, nous, en 2011, en désignant par exemple Alain Claeys président de la commission spéciale.

C’est pour cette raison essentiellement que notre groupe votera contre cette proposition de loi. Nous serions pourtant capables de réfléchir avec vous sur la recherche sur l’embryon et sur ce qui est préférable pour l’Humanité. Seulement vous souhaitez nous écarter du débat parce que vous nous considérez comme ridicules et ringards.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Jacqueline Fraysse s’est déjà expliquée sur son usage de ces termes.

De plus, l’autorisation de la recherche sur les cellules souches embryonnaires était un engagement de campagne du Président de la République.

Mme la rapporteure. Le problème du régime actuel, monsieur Leonetti, c’est le grand nombre de recours en justice doublé d’une certaine hypocrisie. Quant au débat, il a bien eu lieu : les citoyens ont été consultés en 2009. Alain Claeys, que vous citez, n’approuvait pas le texte de 2011 sur ce point.

Celui que nous proposons aujourd’hui n’est ni de gauche, ni de droite. C’est un texte de 2013.

M. Jean Leonetti. Ce que vous dites est faux ! Le forum citoyen de Marseille, auquel Valérie Boyer et moi avons assisté, n’a pas conclu comme vous le prétendez. Ne caricaturez pas des positions qui étaient beaucoup plus modérées et nuancées que vous ne le prétendez.

Mme la rapporteure. J’ai le texte sous les yeux : « Les citoyens ont ainsi voulu mettre en exergue la question spécifique de la recherche portant sur l’embryon destiné à naître, qui selon eux doit bénéficier d’un statut protecteur. Il leur est apparu en revanche que les embryons voués à la destruction en l’absence de projet parental pouvaient être utilisés, sous certaines conditions, à des fins de recherche. »

M. Jean Leonetti. Eh bien, ce n’est pas une approbation !

Mme la présidente Catherine Lemorton. Monsieur Leonetti, je ne suis pas sûre de comprendre votre position… On ne passe jamais outre la décision du couple dont est issu l’embryon, de toute façon.

M. Jean Leonetti. J’appelle l’attention de tous les députés présents sur le fait que ces sujets sont complexes, qu’il faut accepter le doute, et qu’il faut bien réfléchir avant toute décision : qu’est-ce un embryon, si ce n’est un être humain en devenir ?

Nous aurions pu faire ce chemin ensemble : lorsque nous étions au pouvoir, nous avons débattu pendant un an et demi, et avons associé l’opposition. Pourquoi faire un texte de gauche, quand nous aurions pu voter un texte beaucoup plus global ?

La Commission rejette les amendements de suppression AS 1 et AS 2.

Elle adopte ensuite l’article unique de la proposition de loi sans modification.

En conséquence, la proposition de loi est adoptée sans modification.

*

Puis, la Commission en vient à un échange de vues sur le courrier adressé par le président du Comité consultatif national d’éthique, consultant la Commission sur l’organisation d’états généraux sur l’assistance médicale à la procréation.

Mme la présidente Catherine Lemorton. J’en viens au courrier que m’a adressé M. Jean-Claude Ameisen, président du Comité consultatif national d’éthique, en application de l’article L. 1412-1-1 du code de la santé publique, issu de la loi de bioéthique de 2011.

Cet article, introduit à l’initiative de notre collègue Jean Leonetti, prévoit que tout projet de réforme sur les problèmes éthiques et les questions de société soulevées par les progrès de la connaissance dans les domaines de la biologie, de la médecine et de la santé doit être précédé d’états généraux organisés à l’initiative du Comité après consultation des commissions permanentes compétentes et de l’OPECST.

C’est pourquoi M. Ameisen a adressé un courrier aux présidents des commissions des affaires sociales et des lois des deux assemblées et au président de l’OPECST. Le Comité consultatif, nous écrit-il, entend organiser des états généraux sur l’assistance médicale à la procréation (AMP) qu’il s’agisse des nouvelles demandes de la société – femmes célibataires, couples de femmes, couples d’hommes, autoconservation des ovocytes – qui vont au-delà des motifs médicaux aujourd’hui prévus par la loi, de la question de l’anonymat des donneurs de gamètes ou encore de la prise en charge par la solidarité nationale de l’élargissement éventuel des indications de l’assistance médicale à la procréation.

Il s’agit de la première application de cette procédure, et ce serait également la première fois que le Comité consultatif organiserait lui-même des états généraux, puisque les précédents en 2009 avaient été lancés par le gouvernement de l’époque et organisés par un comité de pilotage spécifique, présidé par notre collègue Jean Leonetti.

M. Ameisen souhaiterait connaître nos remarques et suggestions.

M. Jean Leonetti. Il y aura donc des états généraux sur l’assistance médicale à la procréation, et il n’y en aura pas eu sur la recherche sur l’embryon. Y aurait-il des sujets légitimes, et d’autres illégitimes ?

Je me réjouis pour ma part de l’organisation de ces états généraux : sur tous ces sujets, nous avons tous hésité, voire parfois changé d’avis. L’éthique n’appartient ni aux experts, ni aux politiques : elle appartient aux citoyens ! Chaque fois qu’on les consultera, les avis seront plus divers, plus nuancés, plus complexes : grâce à ce débat public et démocratique, on évitera stéréotypes, quolibets et affrontements stériles.

L’article que j’avais proposé d’introduire à ce sujet dans la loi avait d’ailleurs été voté à l’unanimité : il est bon que le débat démocratique se saisisse de l’éthique, c’est-à-dire de nos valeurs communes.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Il n’y a aucun rapport entre le futur débat sur l’assistance médicale à la procréation et la proposition de loi que nous venons de voter. M. Ameisen a été auditionné à l’occasion de celle-ci, et il n’a pas demandé de débat public sur ce sujet.

En tout cas, avec les futurs états généraux sur l’assistance médicale à la procréation, vous ne pourrez pas dire que les décisions prises auront été prématurées.

Plus personne ne demande la parole ?

J’informerai donc M. Ameisen que la Commission donne un avis favorable à l’organisation de ces états généraux.

La séance est levée à dix heures cinquante.

——fpfp——

Amendements examinÉs par la Commission

Amendement AS 1 présenté par Mme Véronique Besse

Article unique

Supprimer cet article.

Amendement AS 2 présenté par Mme Valérie Boyer

Article unique

Supprimer cet article.

——fpfp——

Présences en réunion

Réunion du mercredi 20 mars 2013 à 9 heures

Présents. – M. Élie Aboud, M. Bernard Accoyer, M. Gérard Bapt, M. Jean-Pierre Barbier, Mme Véronique Besse, Mme Gisèle Biémouret, Mme Kheira Bouziane, Mme Valérie Boyer, Mme Sylviane Bulteau, M. Jean-Noël Carpentier, Mme Fanélie Carrey-Conte, Mme Martine Carrillon-Couvreur, M. Gérard Cherpion, Mme Marie-Françoise Clergeau, M. Rémi Delatte, M. Jean-Pierre Door, M. Dominique Dord, M. Richard Ferrand, Mme Jacqueline Fraysse, Mme Hélène Geoffroy, M. Jean-Patrick Gille, Mme Linda Gourjade, M. Henri Guaino, Mme Joëlle Huillier, Mme Sandrine Hurel, M. Christian Hutin, M. Michel Issindou, M. Denis Jacquat, Mme Chaynesse Khirouni, Mme Bernadette Laclais, Mme Conchita Lacuey, Mme Isabelle Le Callennec, Mme Annie Le Houerou, Mme Catherine Lemorton, M. Jean Leonetti, M. Céleste Lett, Mme Geneviève Levy, M. Michel Liebgott, Mme Gabrielle Louis-Carabin, Mme Véronique Louwagie, M. Gilles Lurton, M. Laurent Marcangeli, Mme Véronique Massonneau, M. Pierre Morange, M. Hervé Morin, Mme Ségolène Neuville, Mme Dominique Orliac, Mme Monique Orphé, Mme Luce Pane, M. Christian Paul, M. Bernard Perrut, Mme Martine Pinville, Mme Bérengère Poletti, M. Arnaud Richard, M. Denys Robiliard, M. Arnaud Robinet, Mme Barbara Romagnan, M. Gérard Sebaoun, M. Fernand Siré, M. Christophe Sirugue, M. Dominique Tian, M. Jean-Louis Touraine, M. Francis Vercamer, M. Jean-Sébastien Vialatte

Excusés. – M. Jean-Marc Germain, Mme Monique Iborra, M. Jean-Philippe Nilor, M. Jean-Louis Roumegas, M. Jonas Tahuaitu

Assistaient également à la réunion. – M. Pierre Aylagas, M. Régis Juanico, M. Jean-Yves Le Déaut, M. Lionel Tardy