Accueil > Travaux en séance > Les comptes rendus > Les comptes rendus de la session > Compte rendu intégral

Afficher en plus grand
Afficher en plus petit
Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIVe législature
Deuxième session extraordinaire de 2013-2014

Compte rendu
intégral

Première séance du jeudi 11 septembre 2014

SOMMAIRE

Présidence de Mme Sandrine Mazetier

1. Agriculture, alimentation et forêt

Présentation

M. Germinal Peiro, rapporteur de la commission mixte paritaire

M. Stéphane Le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Discussion générale

Mme Brigitte Allain

Mme Jeanine Dubié

M. André Chassaigne

M. Dominique Potier

M. Antoine Herth

M. Thierry Benoit

Mme Pascale Got

M. Martial Saddier

M. Jean Lassalle

Mme Gabrielle Louis-Carabin

M. Stéphane Le Foll, ministre

Texte de la commission mixte paritaire

Amendement no 8

Vote sur l’ensemble

Suspension et reprise de la séance

2. Adaptation de la société au vieillissement

Discussion des articles (suite)

Après l’article 30

Amendement no 460

Mme Martine Pinville, rapporteure de la commission des affaires sociales

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État chargée de la famille, des personnes âgées et de l’autonomie

Amendements nos 461 , 381 , 382

Article 31

Mme Bérengère Poletti

Amendements nos 643 rectifié et 661 , 198 , 227 , 345 , 662 , 228 , 658 , 230 , 659 et 660 , 231

Article 32

Mme Jacqueline Fraysse

Amendements nos 631 , 678

Article 33

Amendements nos 517 rectifié , 613 , 384 , 532 , 385 , 346 , 386 , 161 , 679

Article 34

Mme Bérengère Poletti

Amendements nos 644, 665 et 664 , 634 , 680 rectifié , 162 , 533

Après l’article 34

Amendement no 331

Avant l’article 35

Amendements nos 341 rectifié , 620

3. Ordre du jour de la prochaine séance

Présidence de Mme Sandrine Mazetier

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

1

Agriculture, alimentation et forêt

Commission mixte paritaire

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la discussion, sur le rapport de la commission mixte paritaire, du projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt (n2176).

Présentation

Mme la présidente. La parole est à M. Germinal Peiro, rapporteur de la commission mixte paritaire.

M. Germinal Peiro, rapporteur de la commission mixte paritaire. Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la vice-présidente de la commission des affaires économiques, monsieur le rapporteur pour avis de la commission du développement durable, mes chers collègues, nous abordons aujourd’hui la discussion finale d’un projet de loi qui nous a occupés pendant de nombreux mois : s’il a été déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale le 13 novembre 2013, sa conception remonte au printemps 2013, et cela fait en réalité plus d’un an et demi que nous travaillons et que nous réfléchissons ensemble aux moyens d’améliorer le cadre législatif de l’économie agricole.

M. Germinal Peiro, rapporteur. Au terme des travaux de la commission mixte paritaire, les deux assemblées sont parvenues à un accord et ont rapproché leurs points de vue. La CMP est intervenue après deux lectures successives à l’Assemblée nationale et au Sénat, la procédure accélérée n’ayant pas été engagée sur ce texte, contrairement à ce qui s’était passé pour la loi de modernisation de l’agriculture de 2010. Le texte a été examiné en première lecture à l’Assemblée nationale au mois de janvier, puis au mois d’avril au Sénat. La deuxième lecture a eu lieu au début du mois de juillet à l’Assemblée nationale et s’est achevée mi-juillet au Sénat.

Alors que le projet de loi initial comptait trente-neuf articles, le texte issu des travaux de la commission mixte paritaire en compte désormais quatre-vingt-quatorze. Les discussions ont été riches et passionnées, et M. le ministre a toujours fait preuve, je tiens à le souligner, d’une réelle capacité d’écoute. Un travail constructif s’est ainsi instauré entre l’administration de notre assemblée et le cabinet du ministre de l’agriculture. En tant que rapporteur, j’ai mené près de cent cinquante auditions et je me suis efforcé, comme l’ensemble de mes collègues, d’être à l’écoute, à la fois de tous les groupes politiques, mais aussi de tous les professionnels concernés par ce texte.

J’en viens aux principales dispositions du texte. Notre fil conducteur a été de favoriser la transition de l’agriculture française vers l’agro-écologie. De quoi s’agit-il ? Il s’agit d’abord de produire davantage, car notre pays en a besoin, et pas seulement dans le domaine industriel : dans le secteur agricole, la France a régressé au cours des dix dernières années, passant de la première à la troisième place en Europe, derrière les Pays-Bas et l’Allemagne. Il faut améliorer nos capacités de production, mais il faut aussi produire mieux, pour rendre les exploitations agricoles de notre pays plus compétitives, pour faire en sorte qu’elles dépensent moins et qu’elles évitent au maximum d’acheter leurs intrants à l’extérieur. Il faut aussi produire mieux, pour protéger notre environnement, ainsi que la santé des agriculteurs et celle de nos concitoyens.

Cette double exigence a été le fil directeur de ce projet de loi, et c’est dans cet esprit que nous avons créé les groupements d’intérêt économique et environnemental, les GIEE. Les agriculteurs qui le souhaiteront se rassembleront au sein d’un GIEE pour améliorer la performance de leur exploitation, d’un point de vue à la fois économique, écologique et social. Ces GIEE seront portés par une personne morale – une coopérative d’utilisation de matériel agricole, par exemple, de façon à éviter le flou juridique dans les prises de décision.

Nous avons donné plus de poids au bail environnemental. Introduit en 2006 par la loi Bussereau, il permettait au bailleur, dans des zones déjà très étendues – tous les parcs naturels, régionaux et nationaux, les zones littorales et les sites du réseau Natura 2000 – d’imposer des mesures environnementales au preneur. Nous avons essayé d’aller plus loin encore dans la voie tracée il y a huit ans par une majorité différente de la nôtre. Sans adopter la proposition initiale du projet de loi, nous avons fait un pas en avant, puisqu’un bailleur pourra désormais demander à un nouveau preneur de conserver, au minimum, les pratiques en cours sur les terres qu’il lui loue. Sans aller jusqu’à la généralisation du bail environnemental, nous allons donc dans la bonne direction, puisque cette disposition contribuera à l’amélioration des pratiques culturales.

Nous avons voulu protéger tous les produits sous signe de qualité et avons prévu de protéger les appellations d’origine. Nous avons en outre décidé que seraient inscrits au patrimoine culturel, gastronomique et paysager de la France le vin, les bières, les cidres, les poirés et les spiritueux issus de traditions locales, et ce, à l’issue de discussions passionnées. (Sourires.)

L’un des atouts majeurs de cette loi est d’avoir renforcé le volet foncier. Je tiens, à cet égard, à saluer le travail ardent et passionné de Dominique Potier, mais aussi de nombreux collègues du groupe socialiste – je songe notamment à Jean-Michel Clément – qui, dès le dépôt du projet de loi, se sont emparés de cette question, considérant qu’il s’agissait là d’une question primordiale et essentielle pour favoriser l’installation de jeunes agriculteurs et assurer la pérennité des exploitations agricoles.

C’est ainsi que le pouvoir des sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural, les SAFER, a été largement étendu : elles devront mettre davantage encore leur action au service de l’installation des jeunes agriculteurs. Le contrôle des structures a été repensé et renforcé, un parcours progressif d’installation a été conçu, et nous avons introduit, pour la première fois dans la loi, le principe de la compensation agricole. Notre cadre législatif prévoyait déjà une compensation environnementale, qui n’existait pas dans le domaine agricole. C’est maintenant chose faite et, désormais, les maîtres d’ouvrage des projets publics ou privés devront restaurer la valeur ajoutée agricole perdue à l’occasion de travaux qui consommeront des terres agricoles. Nous avons également créé un registre de l’agriculture, dont la gestion sera confiée aux chambres d’agriculture sur la base des données transmises par la Mutualité sociale agricole.

Sur le volet sanitaire, nous nous sommes engagés sur la voie de la réduction drastique de l’utilisation des antibiotiques vétérinaires – c’était là une nécessité absolue, compte tenu du développement préoccupant de l’antibiorésistance dans notre pays. Nous avons, de la même façon, voulu renforcer l’encadrement de l’utilisation des produits phytosanitaires. Nous avons encouragé le développement des techniques alternatives, comme le biocontrôle, et réussi à mettre fin à la guerre du purin d’ortie ! La guerre du purin d’ortie n’aura plus lieu, et elle n’a plus lieu d’être, puisque, grâce à votre écoute, monsieur le ministre, nous avons pu introduire dans la loi une nouvelle procédure pour les biostimulants, à l’image de ce qui a été fait en Espagne, par exemple. Cela règle la question des préparations naturelles peu préoccupantes, qui constituent une alternative très intéressante aux pesticides ou aux produits phytosanitaires les plus dangereux, à la fois pour l’environnement et pour la santé.

Nous avons également recherché un consensus sur le rôle des chasseurs. Nous avons renforcé leur rôle en matière de surveillance et de prévention, puisque la faune sauvage présente aujourd’hui un risque sanitaire réel et peut être cause de déséquilibres – je songe notamment à la présence des cervidés dans les massifs forestiers. Nous avons, à l’initiative du Sénat, permis aux éleveurs de se défendre contre les attaques des prédateurs, en particulier contre les attaques du loup.

M. Jean Lassalle. Et de l’ours !

M. Germinal Peiro, rapporteur. Nous avons modernisé l’enseignement agricole, avec l’acquisition progressive des diplômes et la création de l’Institut agronomique, vétérinaire et forestier de France.

Mme la présidente. Merci de conclure, cher collègue.

M. Germinal Peiro, rapporteur. S’agissant des forêts, nous avons créé le fonds stratégique de la forêt et du bois, pour mieux mobiliser la ressource, et renforcé le régime de contrôle en matière de travail illégal. Enfin, nous avons fait en sorte de reconnaître la juste place de l’agriculture dans les outre-mer.

Puisque Mme la présidente m’invite à conclure, je vous dirai, mes chers collègues, qu’avec la promotion de l’agroécologie, la création des GIEE, l’encouragement à l’installation, la protection des terres agricoles, la réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires, la réduction de l’usage des antibiotiques, le développement des organismes de biocontrôle et des préparations naturelles peu préoccupantes, et la création du mécanisme de compensation agricole, je crois très sincèrement que nous avons fait œuvre utile pour l’agriculture de notre pays. Nous avons fait œuvre utile pour la France.

À voir la manière dont ce texte a été reçu par l’ensemble des acteurs, professionnels et syndicaux, du monde agricole, nous pouvons vous féliciter, monsieur le ministre, car nous avons, collectivement, fait du bon travail pour l’agriculture française. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, GDR, écologiste et RRDP.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.

M. Stéphane Le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement. Madame la présidente, mesdames, messieurs les députés, je suis heureux de vous retrouver. Je reconnais parmi vous beaucoup de ceux qui ont ardemment participé à nos débats sur ce texte.

Ce texte a commencé son parcours, en commission, il y a pratiquement un an. Ce fut long, car nous aimerions que les choses aillent plus vite, mais ce fut aussi nécessaire. Au cours de ces échanges, chacun a été dans son rôle : majorité, opposition, et tous ceux qui y ont porté leurs convictions. Tous ont permis d’enrichir ce texte et de traiter l’ensemble des grands sujets.

Les chiffres qui m’ont été donnés font état de 7 438 amendements déposés, dont 1 556 ont été retenus, tous groupes confondus – j’insiste sur ce point. C’est ce qui fait la richesse de ce débat, et qui explique la nécessité de soumettre ce projet à deux lectures afin d’approfondir tous les sujets que nous avons souhaité traiter.

Comme d’autres d’entre vous, des images me resteront de ces débats. Celle de l’opposant, incarné par Antoine Herth qui, en jouant son rôle, aura su apporter des éléments importants et susciter des réflexions, comme ce fut le cas lors des débats enflammés sur le rôle de l’ANSES et le transfert à cette dernière de la compétence de délivrance des autorisations de mise sur le marché.

Je me souviens également, cher Thierry Benoit, de ce débat qui s’était ouvert sur la reconnaissance des vignes et des paysages viticoles, patrimoines de la France, pour aboutir à l’inscription des vins et spiritueux, poiré inclus, au patrimoine culturel et gastronomique de notre pays.

Je me souviens de ces débats toujours passionnants avec Brigitte Allain, toujours passionnée. Je me souviens des débats sur le foncier, eux aussi enflammés. Il s’agissait d’un engagement fort, et Dominique Potier en sait quelque chose. Je me souviendrai de ces discussions et du travail qui a été nécessaire pour améliorer les choses.

Je me souviens également de cet instant où, au milieu de la nuit, alors que nous débattions des groupements d’intérêt économique et environnemental, André Chassaigne nous a gratifiés de références poétiques, citant René Char pour nous rappeler que peut-être des choses essentielles naîtront demain de ce qui est inachevé. Belles formules, belle idée qui permettent à la loi d’exprimer ce qu’elle a de plus fort : sa capacité à susciter l’envie des acteurs de s’en saisir et de l’utiliser.

Nous avons débattu de la forêt avec Jean-Yves Caullet, à propos du fameux équilibre sylvo-cynégétique. Belle façon d’expliquer simplement que si l’on veut qu’une forêt se régénère, il faut éviter qu’à peine naissante, elle ne soit détruite et mangée par les différents gibiers qui, eux aussi, font la richesse de nos forêts.

L’outre-mer, la forêt, le foncier, l’environnement, tous ces éléments ont fait partie des débats, avec Germinal Peiro, votre rapporteur, et Jean-Yves Caullet, qui nous ont permis de faire avancer une conception et un projet pour l’agriculture qui l’inscrivent dans une démarche prospective.

Je me souviens également de nos échanges en commission, lorsqu’à votre demande, nous avons débattu de la réforme de la politique agricole commune. Ce projet de loi est cohérent avec ce qui s’est décidé à l’échelle européenne sur la grande question du verdissement, sur le choix de la redistribution des aides. Rien n’a été fait qui puisse entrer en contradiction avec le cadre européen qui était alors en pleine discussion. Nous avons au contraire cherché à adapter une législation française aux grands objectifs négociés à l’échelle européenne, et à donner à l’agriculture française tous les moyens pour valoriser ses richesses et sa diversité.

Là est aussi l’enjeu : sur tous les bancs de cette assemblée, tous groupes confondus, des députés représentent une part de cette diversité de l’agriculture française. Qu’il s’agisse des outre-mers, de la Bretagne, de l’Alsace, de l’Ouest, du Sud, du Sud-Ouest, l’Est ou le Centre, partout il y a des spécificités, partout il y a une diversité. Elle doit être respectée, elle doit être valorisée parce qu’elle fait aussi la force de notre agriculture.

Il y avait une ligne directrice : faire en sorte qu’au terme d’un débat profond, important, cette loi sur le secteur agricole et forestier serve de précurseur à l’idée que produire, répondre économiquement aux besoins de nos sociétés modernes, doit se concilier avec les enjeux environnementaux. Ce fut l’enjeu des débats sur l’agroécologie et les groupements d’intérêt économique et environnemental. Des éléments nouveaux sont sortis de toutes ces discussions, comme l’illustre le fameux débat sur le purin d’ortie. « La guerre du purin d’ortie n’aura pas lieu » pourrait être le titre d’un prochain livre de Germinal Peiro, qui serait sûrement un grand succès littéraire. (Sourires.)

Tous ces débats ont permis de définir une ligne directrice, un projet autour de la combinaison de la performance économique, de la performance environnementale, et de la performance sociale. Nous avons, me semble-t-il, défini quatre grands objectifs.

Le premier est de produire autrement, pour arriver à être performant à la fois sur le plan économique et sur le plan environnemental. Cet objectif s’est décliné dans toutes les discussions sur les produits, phytosanitaires, sur la lutte contre l’antibiorésistance et sur la définition même de l’agroécologie.

Hier, devant l’Assemblée nationale, je suis intervenu sur la question de la directive Nitrates pour dire quelque chose de simple : dans cette nouvelle conception des modèles de production agricole, des choses vont changer. Nous allons nous fixer pour objectif Nous allons nous fixer pour objectif de développer beaucoup plus de matière organique dans les sols, beaucoup plus de microbiologie. Les dernières recherches de l’INRA ont permis de démontrer que la microbiologie permettait de transformer les oxydes nitreux en azote, ce qui permettrait d’éviter le réchauffement climatique. Voilà les enjeux. Plus de matières organiques dans les sols signifiera plus de carbone dans les sols, et il faudra aussi plus d’azote pour faire vivre les sols, leur permettre d’avoir cette capacité de résilience à l’érosion hydrolienne, éolienne, et de constituer un élément de biodiversité, de stockage de carbone, tout en produisant afin d’atteindre l’objectif de combiner performance économique et performance environnementale. Ce projet de loi, et toutes les discussions qui l’ont entouré, porte ces changements importants pour l’avenir de l’agriculture.

Le deuxième objectif est d’enseigner autrement. C’est pourquoi nous avons débattu de l’enseignement agricole, de sa réalité et de ses qualités. La mobilité sociale et la promotion sociale sont des réalités dans l’enseignement agricole. C’est extrêmement précieux au moment où nous devons nous adresser à la jeunesse, où nous devons parler de l’avenir et donner à chaque jeune la capacité de réussir. L’enseignement agricole, au vu des résultats qui sont les siens, est un enseignement d’excellence, et nous devons le promouvoir, le renforcer et le soutenir, comme nous l’avons fait au cours de nos débats.

L’enseignement agricole va aussi permettre, demain, de construire le projet de l’agroécologie. Cet enseignement doit évoluer, et c’est pourquoi nous avons d’ores et déjà intégré dans les référentiels de l’enseignement agricole tous les éléments nouveaux qui vont être introduits, mis en œuvre et enseignés. Les exploitations de l’enseignement agricole vont aussi être des lieux de démonstration des nouveaux modèles de production, de mise en application de cette nouvelle conception de l’agriculture qui, je le rappelle, combine performance économique et écologique.

Nous avons aussi fait le choix de l’acquisition progressive des diplômes dans l’enseignement agricole pour assurer à celui qui commence un cursus la capacité d’aller jusqu’au bout. Ces messages envoyés à l’enseignement agricole dans le cadre du projet de loi d’avenir de l’agriculture valent aussi pour l’enseignement de manière générale. Permettre de toujours progresser, donner cette capacité à acquérir le savoir et à le transformer en possibilité de trouver un emploi et s’insérer dans le marché du travail, c’est tout l’enjeu de cette partie sur l’enseignement agricole.

Le troisième objectif est de rechercher autrement. Au début de nos discussions, il existait un doute : tout serait fait contre la science, contre la recherche. Et ressurgissait le débat, qui dure depuis des années, des organismes génétiquement modifiés. Nous avons besoin, pour lancer ce processus, pour réussir, au contraire de redonner une capacité à la recherche scientifique française. Nous avons eu des débats importants sur cette question, et l’innovation et la recherche scientifique sont au cœur de ces débats.

J’évoquais l’exemple du travail de l’INRA sur le rôle des micro-organismes dans les sols. Mais il existe de nombreux autres sujets, et bien d’autres enjeux. Rechercher autrement, c’est aussi l’un des messages de cette loi d’avenir. Nous devons nous appuyer sur l’innovation et la recherche. C’est pour cela que nous avons décidé de mettre en place l’Institut agronomique, vétérinaire et forestier de France – le terme forestier a été introduit à la demande de Jean-Yves Caullet – afin que cette force de recherche permette de porter le message de l’agroécologie dans toutes ses dimensions : sanitaire, agricole et agronomique, forestière. Cela donnera du corps à l’ensemble que représente l’agriculture, la forêt et l’agroalimentaire. Surtout, cela donnera une force supplémentaire à la recherche, c’est aussi un enjeu de ce projet de loi.

Quatrième objectif de ce projet de loi : développer autrement. C’est un enjeu majeur. Notre projet de développement est de combiner performance économique et performance environnementale, d’assurer la viabilité et valoriser la diversité de l’ensemble des agricultures. Je n’ai pas oublié nos débats sur l’agriculture de montagne et les nombreuses interventions, de nuit, le matin ou l’après-midi, pour défendre cette agriculture. Elle a sa place au sein de cette diversité.

Développer autrement, c’est aussi considérer que demain, notre agriculture aura besoin de chefs d’exploitation, qu’on les nomme agriculteurs, cultivateurs, paysans ou éleveurs, peu importe. Cette diversité des mots montre d’ailleurs bien la diversité des fonctions dans l’agriculture. Aujourd’hui, nous ne sommes pas toujours capables de les synthétiser en une seule dénomination. Mais c’est aussi une force. Que fait cette loi d’avenir ? Elle ne cherche pas à trancher cette question : elle cherche au contraire à rassembler, à synthétiser.

En matière d’installation, le projet de loi vise à offrir un cadre nouveau pour la gestion du foncier – j’ai rappelé nos débats sur le rôle des SAFER, l’accès au foncier, l’agrandissement et l’installation – parce que demain, nous aurons besoin d’une agriculture avec des agriculteurs. C’est le message fort de cette loi. Et pour avoir des agriculteurs, il faut que nous installions des jeunes. C’est pourquoi nous nous sommes dotés d’outils dans le cadre de cette loi permettant d’assurer le renouvellement. Il en va ainsi de l’activité minimale d’assujettissement – l’AMA – qui permettra aux jeunes qui s’installent de savoir que ce n’est pas la surface qui va compter, mais l’activité économique qui sera développée. Les commissions départementales de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers – les CDPENAF – permettront de gérer les terres agricoles face aux enjeux urbanistiques et aux projets d’infrastructures.

Il faut protéger la terre agricole pour l’avenir, je l’ai dit au cours de nos débats. Si l’on se projette dans les années à venir, la France qui compte aujourd’hui 65 millions d’habitants dépassera la barre des 70 millions d’habitants. Nous ne pourrons pas continuer à consommer de l’espace agricole sans prendre la précaution de le préserver pour l’avenir, car c’est notre capacité de production agricole, et donc alimentaire, qui serait remise en cause. Et cela aussi, nous l’anticipons.

Développer autrement, ce fut aussi l’objet de nos débats sur les GIEE. La création de ces structures manifeste la volonté de créer un cadre. Nos débats ont été extrêmement intéressants, et j’ai rappelé qu’ils se sont conclus par cette belle citation de René Char par André Chassaigne. Il faut un cadre, mais souple. Tout est possible à condition que chacun des acteurs, et en particulier les agriculteurs, puisse s’en saisir pour développer des projets, des objectifs territoriaux et agricoles, des relations contractuelles avec les collectivités territoriales et les associations. C’est aussi cela que l’on trouve dans ce projet de loi, dans nos débats et qui fera la force de cette future loi.

Nous avons aussi parlé de la forêt et évoqué des objectifs économiques qui sont au cœur d’un débat aujourd’hui. Comment est-il possible que la grande forêt française ne puisse subvenir à nos besoins ? Comment pouvons-nous accepter que cette grande forêt puisse produire des billes de bois que nous exportons, alors que nous importons ensuite des produits transformés ? Il convient donc de mobiliser cette ressource, de l’organiser et de procéder à des regroupements, dans le cadre des groupements d’intérêt économique environnementaux et forestiers.

À ce sujet, la création du Fonds stratégique de la forêt et du bois est très importante, et le débat se poursuivra lors de la discussion du projet de loi de finances.

M. Jean-Yves Caullet. Absolument !

M. Stéphane Le Foll, ministre. Comment pouvons-nous disposer de moyens pour renouveler la forêt et lui permettre de s’adapter au réchauffement climatique, qui constitue un enjeu majeur ? Nous avons débattu de toutes ces questions, et nous avons apporté des réponses dans le projet de loi. Tout cela est très important, et je sais que vous êtes convaincus, comme moi, de la multifonctionnalité de la forêt : il s’agit d’un enjeu territorial, économique, mais aussi écologique.

Nous avons discuté de l’agriculture dans sa diversité, en particulier dans les outre-mers, autour d’un objectif stratégique : assurer une capacité de diversification des agricultures des outre-mers. Même si les marchés concernés sont petits, nous devons faire en sorte d’y valoriser les productions locales et empêcher qu’ils soient envahis, année après année, par des produits agricoles importés. Nous nous sommes fixé cet objectif, tout en respectant le fait que deux grandes productions, la canne à sucre et la banane, restent des piliers sur lesquels il faut continuer à s’appuyer. C’est aussi une nouvelle gouvernance de l’agriculture dans les outre-mers que nous avons décidée ensemble.

Ce projet de loi a été l’objet de débats nécessaires. Il est intitulé « projet de loi d’avenir », et il porte effectivement de grandes orientations pour l’avenir. Il est lié à la réforme de la politique agricole commune.

Nous avons aussi débattu de la question des GAEC. Nous avons choisi d’organiser collectivement l’agriculture autour de chefs d’exploitation, d’agriculteurs, qui maîtrisent les grandes questions techniques, agronomiques et pédologiques, tout en étant capables d’être aussi des chefs d’entreprise. Encourager le développement d’une agriculture sans agriculteurs serait le pire choix, et nous ne l’avons pas fait.

Tous nos débats inscrivent notre projet dans la diversification des agricultures et des modèles, et dans l’accompagnement des changements de règles et de modèles de production. Par sa diversité, cette agriculture est la richesse commune de la nation : dès lors, nous devons nous donner les moyens d’assurer sa force, pour le présent comme pour l’avenir. C’est ce que fait ce projet de loi. Mesdames et messieurs les députés, merci pour tous ces débats et pour votre participation. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, GDR, écologiste. et RRDP)

M. Jonas Tahuaitu. Très bien !

Discussion générale

Mme la présidente. Dans la discussion générale, la parole est à Mme Brigitte Allain.

Mme Brigitte Allain. Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, monsieur le rapporteur pour avis, madame la vice-présidente de la commission des affaires économiques, chers collègues, l’année dernière, M. le ministre nous présentait un projet de loi dense et volontaire visant à reconnaître la diversité des régions et des modèles agricoles. Preuve s’il en est du grand intérêt de ce texte, de très nombreux parlementaires, mes collègues, se sont impliqués. Nous avons noué un dialogue avec les organisations professionnelles, les associations, les élus et la société civile sur les orientations. Je remercie encore Germinal Peiro, le rapporteur, mon voisin, pour les nombreuses auditions qu’il a organisées et son implication personnelle afin de redonner du sens à notre agriculture. Le travail parlementaire sur ce projet de loi a été remarquable, parfois controversé, souvent passionné, mais toujours fourni et studieux.

Nous avons, en tant que représentants de la nation, fixé les orientations et les conditions de l’agriculture et de l’alimentation que nous voulons. Nous nous sommes prononcés pour un développement résolu de l’agroécologie, permettant aux agriculteurs de vivre et aux gens de manger sainement.

Le compromis trouvé en commission mixte paritaire est satisfaisant. Je ne reviendrai pas sur les différentes mesures, mais ferai juste une observation concernant les pesticides. Si je suis très satisfaite que nous ayons obtenu la reconnaissance des préparations naturelles peu préoccupantes, je regrette que la représentation nationale n’ait pas suffisamment écouté la société civile mobilisée sur la dangerosité, aujourd’hui reconnue, des pesticides. En excluant, à l’article 23 du projet de loi, la précision « en particulier lorsque la zone à traiter est située à proximité d’un bâtiment d’habitation », la commission mixte paritaire a ignoré les alertes graves pour la santé mentionnées dans le rapport sénatorial de Mme Bonnefoy. Pourtant, les voisins des agriculteurs ont tout autant droit à un cadre de vie sain que les publics dits sensibles. Dans la rédaction initiale du projet de loi, le Gouvernement avait eu la sagesse de préconiser des mesures de précaution permettant d’éviter que soient atteintes les personnes vivant à proximité des lieux de traitement.

Alors que nous avons soutenu un projet consensuel pour répondre aux enjeux actuels de lutte contre le réchauffement climatique, de création d’emplois, de conciliation entre les intérêts des producteurs et des consommateurs, on a vu se développer récemment un double discours sur les orientations agricoles. Cela est incompréhensible en cette période difficile de défiance de nos concitoyens envers l’action politique. Je pense aux décrets sur l’extension de la taille des ateliers d’élevage, ou encore au projet de règlement portant autorisation des OGM à Bruxelles. Pour ajouter au trouble ambiant et donner satisfaction à quelques agriculteurs réfractaires aux changements incontournables de pratiques agricoles, le Premier ministre annonçait ce week-end son souhait de voir révisée la directive Nitrates.

La condamnation de la France par Bruxelles pour non-respect de ses obligations en matière de qualité de l’eau constitue pourtant une opportunité pour promouvoir notre projet de loi et faire cesser les erreurs du productivisme, aujourd’hui dépassé. En effet, malgré l’élaboration de cinq programmes d’action depuis 1991 et la mise en œuvre de la directive Nitrates, la pollution des eaux souterraines et de surface s’aggrave dans de nombreuses régions françaises, provoquant même la fermeture de captages d’eau potable devenue impropre à la consommation. Que les mesures mises en place soient contestables, c’est indéniable ; pour parer à leur inefficacité, je vous renvoie, mesdames et messieurs, au rapport et aux préconisations pleines de bon sens du Conseil économique, social et environnemental sur la gestion et l’usage de l’eau en agriculture.

Les conséquences écologiques et sanitaires des taux de nitrates élevés sont aujourd’hui connues. Selon le ministère de l’écologie, les ménages français paient chaque année entre 1 et 1,5 milliard d’euros pour la dépollution de l’eau. Au-delà de notre responsabilité à porter haut les valeurs de respect de nos biens communs que sont la terre, l’air et l’eau, la perspective d’une économie potentielle dans notre budget devrait suffire au Gouvernement pour encourager les pratiques allant dans ce sens.

Si nous connaissons la difficulté et le temps nécessaire pour passer de notre modèle de production fortement consommateur en intrants et en pesticides à un modèle dense en emplois et en connaissances, le Gouvernement ne peut se plier aux demandes des lobbies conservateurs et productivistes à chaque fois qu’un choix doit être fait, et céder à la tentation de relâcher les normes.

Monsieur le ministre, l’agroécologie que nous avons définie dans cette loi ne consacre pas une croissance d’intrants chimiques. Nous avons choisi un autre chemin. Je vous rappelle que nous allons adopter un texte qui dispose que « les politiques publiques visent à promouvoir et à pérenniser les systèmes de production agroécologiques, dont le mode de production biologique, qui combinent performance économique, sociale, notamment à travers un haut niveau de protection sociale, environnementale et sanitaire ».

La définition de l’agroécologie qui s’en suit est digne d’intérêt et doit être gardée en mémoire pour éviter les discours banalisant ces orientations : « Ces systèmes privilégient l’autonomie des exploitations agricoles et l’amélioration de leur compétitivité, en maintenant ou en augmentant la rentabilité économique, en améliorant la valeur ajoutée des productions et en réduisant la consommation d’énergie, d’eau, d’engrais, de produits phytopharmaceutiques et de médicaments vétérinaires, en particulier les antibiotiques. Ils sont fondés sur les interactions biologiques et l’utilisation des services écosystémiques et des potentiels offerts par les ressources naturelles, en particulier les ressources en eau, la biodiversité, la photosynthèse, les sols et l’air, en maintenant leur capacité de renouvellement du point de vue qualitatif et quantitatif. Ils contribuent à l’atténuation et à l’adaptation aux effets du changement climatique. »

Lors de la discussion de ce texte, nous n’avons cessé, d’une part, de promouvoir l’agriculture biologique, système sans pesticides auquel il faut parvenir, et d’autre part, de soutenir une plus forte régionalisation. Des régions pourront enfin, via la gestion des fonds du développement rural de la PAC, mener une politique agricole au plus près des territoires et des citoyens. Les écologistes en sont convaincus, et c’est animés de cet esprit que nous avons proposé de mettre en place des contrats alimentaires territoriaux. Nous espérons que, persuadé de leur rôle fédérateur entre milieux rural et urbain, vous en serez, monsieur le ministre, un grand promoteur auprès des régions. Mais nous avons constaté avec stupéfaction que la plupart des régions présentent un budget pour l’agriculture biologique bien en deçà de ce que le Gouvernement préconisait pour atteindre les objectifs du programme Ambition bio 2017.

Le maintien de l’agriculture biologique est mis en danger par ignorance de notre projet de loi, ambitieux et salutaire pour notre économie, pour l’écologie et pour l’emploi. Alors que nous manquons cruellement de légumes biologiques pour répondre à notre propre consommation, alors que notre balance commerciale agricole n’est réellement positive que grâce à nos exportations de vins et spiritueux – ce dont nous pouvons nous satisfaire –, nous importons nos aliments biologiques quand nous pourrions installer des centaines de nouveaux agriculteurs dans toutes les régions. Les élus et les pouvoirs publics doivent prendre leurs responsabilités et cesser de gérer les enveloppes sous la pression des bénéficiaires en place. D’ailleurs, la Commission européenne a abondé dans notre sens et pointe la faiblesse de ces enveloppes pour le bio.

Le ministère de l’agriculture se doit d’être le garant de l’orientation des politiques publiques de notre pays. En cette période de doute, il est important de respecter le travail parlementaire et la voix de la représentation nationale : c’est pourquoi nous tenons particulièrement à ce qu’une fois voté, ce texte soit mis en œuvre dans le respect des orientations et arbitrages qui ont été le fruit du débat. Nous vous faisons confiance, monsieur le ministre, pour publier rapidement l’ensemble des décrets d’application et poursuivre dans la voie engagée. Ainsi, tout reste à faire et nous veillerons à ce que les décrets d’application et leur mise en œuvre dans les régions et départements soient cohérents.

Tenons le cap. Je reste convaincue que cette loi est bonne. Elle n’est pas la loi que les écologistes auraient écrite, bien sûr, mais elle donne un nouveau souffle à nos relations avec le vivant et sa culture. Si la ligne que nous avons définie est respectée, cette loi aura des effets qui donneront raison aux écologistes de voter aujourd’hui en sa faveur. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Jeanine Dubié.

Mme Jeanine Dubié. Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la vice-présidente de la commission des affaires économiques, monsieur le rapporteur, monsieur le rapporteur pour avis, mesdames et messieurs les députés, mes chers collègues, nous sommes ce matin rendus à l’ultime étape parlementaire de l’examen du projet de loi d’avenir pour l’agriculture, après l’accord trouvé en commission mixte paritaire qui s’est tenue à la fin du mois de juillet dernier.

Vous le savez bien, et nous vous l’avons dit tout au long de nos débats, en commission comme en séance : les députés du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste sont très attachés à l’avenir de notre agriculture, à l’avenir de nos paysans et à la réussite de la transformation de ce secteur d’activité stratégique pour notre pays. Ce secteur est stratégique car il s’agit tout simplement de la question de notre autonomie et de notre sécurité alimentaires, de notre balance commerciale, mais aussi et surtout de la question de la vitalité des territoires ruraux et de montagne, en particulier pour l’emploi.

Il est utile de le rappeler : dans la région Midi-Pyrénées comme dans plusieurs régions rurales de France, le secteur de l’agro-alimentaire au sens large est le premier en termes d’emplois. Pourtant, l’agriculture française traverse aujourd’hui une crise profonde. Nous avons pu nous en rendre compte, encore cet été, avec les colères manifestées par les producteurs de fruits et légumes du sud de la France.

Monsieur le ministre, l’objectif principal de votre projet de loi est d’accompagner et d’accélérer la transition vers une agriculture compétitive et durable, une agriculture conciliant les exigences de performance économique, environnementale et sociétale, objectif que vous avez traduit, monsieur le ministre, par le concept d’agroécologie désormais inscrit dans la loi. Ce terme, parfois critiqué, a suscité des débats et des craintes.

Pour ce qui nous concerne, nous ne critiquons pas cette expression car nous sommes conscients de la nécessité de dépasser les postures idéologiques et les oppositions entre compétitivité et écologie.

Oui, nos paysans doivent pouvoir vivre du fruit de leur travail dans des conditions dignes et nous devons agir pour limiter les conséquences négatives pour l’environnement, en gardant une position pragmatique et de bon sens.

Nos débats ont parfois été vifs sur ce sujet et il y a pu avoir des malentendus sur les distances d’épandage des produits phytosanitaires ou sur l’utilisation de certains engrais.

Nous sommes parvenus à des consensus raisonnables et après des débats féconds à l’Assemblée nationale et au Sénat, nous nous félicitons des clarifications et des points d’accord qui ont pu être trouvés.

Au terme de plus de dix mois de processus législatif – des semaines entières de travaux au cours des deux lectures dans les deux chambres –, la commission mixte paritaire a abouti à un texte que les députés du groupe RRDP approuvent globalement. Le projet de loi initial, le rapporteur l’a rappelé, était plutôt concis et limité à trente-neuf articles, le texte soumis à nos suffrages ce matin en contient quatre-vingt-quatorze.

Tout au long de nos travaux, nos débats sur des sujets importants ont été de qualité et s’ils furent passionnés, parfois vifs, je me félicite qu’ils aient pu se tenir dans un climat serein d’écoute réciproque. Monsieur le ministre, je tiens à vous remercier pour votre détermination, votre écoute et votre sens de l’intérêt général, et je n’oublie pas votre équipe de collaborateurs, disponibles et conciliants, avec qui nous avons eu des échanges fructueux.

Mme Frédérique Massat, vice-présidente de la commission des affaires économiques. En effet !

Mme Jeanine Dubié. Je voudrais aussi remercier tous nos collègues qui ont participé, tôt le matin et tard dans la nuit, à toutes ces séances de travail, pour avoir exprimé leurs convictions tout en conservant une forme de bienveillance, contribuant ainsi à la sérénité de nos débats. J’ai une pensée particulière pour notre rapporteur Germinal Peiro, qui n’a pas compté les heures, pour examiner, parfois dans des conditions d’urgence, un par un les milliers d’amendements, avec son expertise qui n’est plus à démontrer. Je l’en remercie.

Enfin, je n’oublie pas le président de la commission des affaires économiques, François Brottes, qui, comme d’habitude, a su trouver les mots pour assurer la bonne tenue de nos débats lorsque nous avons rencontré des blocages, tout en détendant régulièrement l’atmosphère avec ses bons mots et son sens de la convivialité.

Au Sénat comme à l’Assemblée, de très nombreux amendements, dont certains très importants, ont été adoptés, des amendements émanant de toutes les familles politiques, ce qui est trop rare et qui mérite d’être souligné car lorsqu’il s’agit de sujets majeurs, nous devons pouvoir travailler ensemble en dépassant les clivages partisans.

Au cours des deux lectures, le groupe RRDP a déposé plus de deux cent cinquante amendements. Plus de soixante ont été adoptés et une trentaine ont été satisfaits par l’adoption d’amendements identiques ou proches. Nos amendements visaient globalement à donner des perspectives d’avenir à l’agriculture en favorisant l’installation des jeunes agriculteurs et la diversité des productions sur l’ensemble du territoire, en luttant contre la perte de foncier agricole, notamment par le renforcement des SAFER, et en confortant la gouvernance territoriale avec l’amélioration du rôle des chambres et de leurs salariés, ainsi que le rôle et les fonctions des départements et des régions.

Ils visaient aussi à revenir à des mesures raisonnables et pragmatiques sur le respect de l’environnement en assouplissant et aménageant des interdictions et des conditions d’utilisation des produits phytopharmaceutiques, des engrais et des pesticides. Nous nous félicitons que des amendements de compromis aient été adoptés pour encadrer l’utilisation des produits les plus dangereux à proximité des lieux sensibles, sans pour autant nuire à la compétitivité des exploitations agricoles.

Concernant la lutte contre les prédateurs, plusieurs amendements du groupe RRDP visaient à améliorer la prise en compte du rôle de la chasse et des chasseurs dans les territoires ruraux et agricoles. Je remercie ici Frédérique Massat pour son engagement sur ce sujet.

Nous nous félicitons de certaines avancées, notamment celle concernant les éleveurs qui sont désormais autorisés à abattre les loups dans certaines zones et à certaines conditions, pour se défendre et enrayer les phénomènes de surpopulation et d’attaques sur les troupeaux. Je me permets d’ailleurs de dire que je suis heureuse que la CMP ait permis d’ajouter au texte de l’Assemblée les termes « ou du berger ». Le texte sera ainsi plus clair.

Au final, ce texte contient de très nombreuses dispositions, dont certaines plus importantes que d’autres, qui se traduiront par de réelles améliorations pour nos agriculteurs. Même si aucune d’entre elles ne suffira à résorber la crise grave et profonde que traverse notre agriculture, les députés du groupe RRDP sont convaincus que leur addition sera profitable à nos paysans.

Parmi les mesures les plus significatives de ce projet de loi figurent la création des groupements d’intérêt économique et environnemental et l’instauration d’un cadre juridique visant à leur reconnaissance. Ce nouvel outil visant à une triple performance économique, sociale et environnementale sera utile au développement des projets sur l’ensemble de notre territoire.

Au sujet du développement du bail environnemental, qui était l’un des objectifs du projet de loi initial, le dialogue avec le Sénat a été fructueux. Nous avons réussi à limiter les contraintes pour les agriculteurs tout en amorçant un mouvement. Toutes les dispositions visant à améliorer l’encadrement collectif pour l’organisation de notre « ferme France », les coopératives, les interprofessions, les relations fournisseurs-distributeurs, vont dans l’ensemble dans le bon sens. Elles répondent à des blocages ou à des manques, même si nous aurions probablement pu ou dû aller plus loin dans les relations commerciales avec la grande distribution.

Sur la question de la préservation du foncier agricole, cette loi sera certainement celle d’une réforme durable qui fera date. S’agissant des commissions départementales de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers – CDPENAF –, du registre de l’agriculture, du renforcement des sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural – SAFER –, des mesures d’installation pour les jeunes, de la fin de l’incitation à l’agrandissement des exploitations et d’un contrôle des structures repensé, de l’introduction de la notion de compensation agricole, notamment pour les maîtres d’ouvrage des projets publics ou privés : nous nous félicitons du travail accompli.

Par ailleurs, le projet de loi initial établissait, conformément à l’engagement du Président de la République, une priorité pour la jeunesse et le renouvellement des générations. Le texte comporte de bonnes mesures même si certains de nos amendements, qui n’ont pas été adoptés, proposaient d’aller plus loin.

Je n’oublie pas la modernisation de l’enseignement agricole, notamment par l’acquisition progressive des diplômes ou la facilitation de l’accès aux études supérieures pour tous les publics et la mise en place de l’Institut agronomique, vétérinaire et forestier de France.

Enfin, la commission mixte paritaire a mis un point final au grand débat sur l’encadrement des produits phytopharmaceutiques. Il existe déjà des outils juridiques qui donnent les moyens au préfet d’édicter des règles pour limiter la dissémination vers les habitations, les cours d’eau ou les champs voisins. La commission mixte paritaire a supprimé l’exigence spécifique d’encadrement au titre des zones de traitement proches des habitations : c’est donc la rédaction plus raisonnable de l’Assemblée nationale qui a prévalu. Nous nous en félicitons car nous sommes en mesure d’exercer une surveillance efficace.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, toutes ces mesures étaient nécessaires car notre pays ne serait pas le même sans les milliers d’exploitations qui subsistent, parfois dans de grandes difficultés, en dépit du travail courageux de nos paysans. Aujourd’hui, nous le savons, le contexte est préoccupant pour les exploitants et leurs salariés, notamment dans les zones de montagne.

L’agriculture française décline de façon progressive et continue depuis environ dix à quinze ans. Aussi bien en matière de production, de surfaces cultivées, de nombre d’agriculteurs, de salariés et d’exploitations, tous les chiffres démontrent un affaissement inquiétant, même si toutes les filières ne souffrent pas de façon homogène.

Les mesures contenues dans ce projet de loi étaient nécessaires dans leur immense majorité, mais seront-elles suffisantes pour garantir le relèvement de notre agriculture ? Restons lucides, nous n’en avons pas la garantie. Les députés du groupe RRDP considèrent que nous aurions pu aller plus loin sur les sujets de la lutte contre la concurrence déloyale avec nos voisins européens, du coût du travail, des relations commerciales, de la lutte contre les contraintes administratives, de l’encouragement des jeunes et de la préservation du foncier, pour ne citer que quelques exemples qui me tiennent à cœur.

Monsieur le ministre, nous savons aussi qu’une grande partie du combat pour le redressement de l’agriculture française a lieu à Bruxelles et nous comptons sur vous pour défendre nos agriculteurs au niveau européen.

Pour conclure, je dirai que ce texte trace un chemin. Il ouvre des perspectives et des orientations que les députés du groupe RRDP approuvent et soutiennent. Dans ces conditions, monsieur le ministre, nous voterons ce projet de loi avec la conviction qu’il portera de beaux fruits et qu’il donnera de bonnes raisons d’espérer à tous nos paysans. (Applaudissements sur les bancs des groupes RRDP, SRC et écologiste.)

Mme la présidente. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, l’ultime examen de ce projet de loi après son vote définitif au Sénat à la fin du mois de juillet nous permet de faire un premier constat : le temps long du travail parlementaire, votre sens de l’écoute, monsieur le ministre, ainsi que le partage d’idées ont permis d’améliorer le contenu d’un texte législatif. Ainsi, nombre des dispositions initiales ont pu être enrichies et adaptées de façon très concrète. En préambule à mon intervention, je tenais à le souligner car, hélas, un tel travail de fond est loin d’accompagner tous les textes soumis à la représentation nationale. Refuser de recourir à la procédure accélérée est devenu un acte politique fort, exceptionnel, pour ne pas dire extraordinaire !

Je tiens également à souligner le travail remarquable de notre rapporteur Germinal Peiro et à rendre hommage à sa qualité d’écoute et sa volonté de concertation. Je n’oublie pas les membres de notre commission des affaires économiques qui se sont fortement impliqués dans l’examen de ce projet de loi.

Aussi, l’objectif de mon intervention n’est pas de revenir dans le détail sur les dispositions du texte, dont les derniers ajustements ont été trouvés en commission mixte paritaire, avec, je le crois, le souci réel de l’efficacité et de la justesse dans la mise en application des outils retenus.

Comme nous l’avons déjà dit en première et deuxième lectures, nous soutenons le nouvel outil qu’est le groupement d’intérêt économique et environnemental et avons défendu l’élargissement à la dimension sociale du projet que porteront les groupements. Il s’agit d’une avancée réelle qui sera, je l’espère, source de nombreux projets novateurs qui pourront être pleinement accompagnés sur les territoires. De même, je salue les précisions sur les majorations d’aides dont peuvent profiter les membres des GIEE, qui doivent naturellement bénéficier en priorité aux exploitants agricoles, tout comme les précisions relatives à l’entraide agricole au sein des groupements.

Je ne reviendrai pas longuement non plus sur les objectifs fondamentaux de ce texte en faveur de nouvelles pratiques agricoles. Nous souscrivons pleinement aux objectifs de réduction des intrants phytosanitaires et des antibiotiques en élevage, dont l’incidence négative sur les milieux naturels et la santé des hommes est connue. L’antibiorésistance notamment est un sujet particulièrement préoccupant. Si ce projet de loi prend manifestement la question à bras-le-corps, je crains que cette détermination ne soit pas la même quand il s’agit de négocier les accords de libre-échange, qui pourraient aboutir à un alignement par le bas de la réglementation dans le domaine alimentaire. Terrible contradiction, j’aurais l’occasion d’y revenir.

Nous saluons également la priorité donnée à l’installation des jeunes, avec le contrat de génération destiné aux jeunes agriculteurs, la rénovation des aides à l’installation et la suppression de la surface minimum d’installation, remplacée par l’activité minimale d’assujettissement, qui devrait faciliter l’installation progressive. Cette ambition en faveur du renouvellement des exploitations va de pair avec le renforcement de la politique foncière et de contrôle des structures.

Sur le volet forestier, on ne peut que se féliciter de la création par la loi du Fonds stratégique de la forêt et du bois en regrettant cependant que nous n’ayons pu lui assurer plus de pérennité avec un compte d’affectation spéciale.

Aussi, je réitère l’appréciation positive des députés du Front de gauche et plus largement du groupe de la Gauche démocrate et républicaine sur l’orientation générale et les outils nouveaux introduits dans ce projet de loi. Ils doivent servir utilement à dépasser le stade de l’expérimentation des nouvelles pratiques pour un déploiement réel sur les exploitations. C’est d’ailleurs là la difficulté première : passer le cap de la réalisation et de l’évaluation concrète, si souvent repoussées faute de moyens ou de volonté.

Je le répète, en dépit de ses omissions, ce texte a un grand mérite : avec lui, nous changeons de paradigme. Et je souhaite sincèrement que les outils novateurs qu’il contient servent réellement à passer à la vitesse supérieure dans la mise en œuvre de nouvelles pratiques agricoles.

Cependant, monsieur le ministre, nous ne pouvons pas, sous prétexte d’un texte globalement positif, esquiver des enjeux tout aussi fondamentaux auxquels devra faire face l’agriculture française et européenne.

J’avais, en deuxième lecture, noté plusieurs sujets qui sont aujourd’hui, plus encore qu’hier, d’une bouillante actualité pour le monde agricole. Je veux parler plus particulièrement des accords de libre-échange, de la question des revenus et des prix agricoles, et de la gestion des risques et des crises en agriculture.

Monsieur le ministre, vous le savez, les paysans français et européens se trouvent dans une situation toujours plus délicate, aggravée par les retours de bâton diplomatiques de la Russie, mais surtout minée par les conséquences d’une politique agricole européenne toujours plus inconséquente. Quel paradoxe en effet de voir le Conseil des ministres de l’agriculture se préoccuper subitement de la gestion des volumes pour les productions potentiellement touchées par l’embargo russe, quand les dirigeants européens ont défendu, des années durant, la liquidation de tous les outils de régulation des volumes et des prix, et alors même que la fin des quotas laitiers est prévue dans quelques semaines !

Les 240 millions d’euros d’aides au retrait du marché ou au stockage envisagées risquent en effet d’être un emplâtre sur une jambe de bois au regard de l’impact des difficultés supplémentaires pour des millions d’exploitations européennes sans doute. Nous ne pouvons pas laisser sous le tapis les problèmes de fond, au premier rang desquels des contradictions évidentes entre la volonté de changer de cap agricole comme le fait si utilement ce texte, et les choix libéraux européens désastreux pour nos agriculteurs.

Oui, grâce au renouveau des travaux agronomiques et aux paysans pionniers de l’agroécologie, nous savons aujourd’hui que des pratiques culturales profondément renouvelées sont les mieux capables de répondre aux défis climatiques et alimentaires et de permettre le développement de l’emploi agricole et rural. Mais dans ce cas, comment interpréter les choix totalement contradictoires d’une Commission européenne qui entend continuer à brader l’agriculture sur l’autel du libre-échange ?

Certes, la diplomatie française, asservie depuis 2007 aux exigences américaines, n’avait sans doute pas mesuré les effets néfastes de son suivisme pour l’avenir de notre agriculture. Mais pourquoi, dès lors, accepter tacitement d’approfondir les menaces qui pèsent sur nos producteurs avec, au premier rang, la poursuite des négociations sur les accords de libre-échange, particulièrement sur le grand marché transatlantique ?

Monsieur le ministre, ces négociations sont guidées par le seul approfondissement de la doctrine libérale et conduiront à un véritable cataclysme pour nos paysans. Sont particulièrement concernées nos filières d’élevage de grande qualité, qui ont une véritable épée de Damoclès au-dessus de la tête. En effet, elles ne seront pas seulement mises en concurrence directe avec les productions américaines, canadiennes ou sud-américaines – car il existe d’autres traités –, mais elles ne bénéficieront plus d’aucune régulation des prix et des volumes au niveau européen.

Je profite donc de cette tribune pour renouveler mon appel à la représentation nationale et au Gouvernement : il est encore temps pour notre pays de refuser ce grand marché de dupes en appelant les Européens à rompre avec le libre-échange sur les marchés agricoles, afin de favoriser une autre ambition européenne et de redonner une vision à notre politique agricole commune pour les années à venir.

Par ailleurs, et pour couronner le tout, les stratégies de marge de la distribution continuent d’être appliquées sans vergogne. De fait, la puissance publique laisse les producteurs subir des prix d’achat souvent inférieurs aux coûts de production. Pour la distribution, la croissance des importations constitue une aubaine en vue de compresser toujours plus les prix d’achat aux producteurs. Il ne suffit pas d’en appeler à leur simple « responsabilité » pour « ne pas spéculer sur une baisse des cours », comme vous venez de le préciser dans votre note aux parlementaires sur l’embargo russe – cela me rappelle les méthodes de la précédente majorité, qui voulait sans cesse « responsabiliser « le capitalisme…

Ce que veulent nos producteurs qui voient les prix plonger, ce sont des mesures concrètes et efficaces pour ne pas mettre la clé sous la porte. La garantie des prix d’achat, notamment, doit être prise en urgence, avec en priorité l’application immédiate du coefficient multiplicateur tel que prévu à l’article L. 611-4-2 du code rural. Cette mesure est depuis longtemps l’un de mes chevaux de bataille, mais elle n’a sans doute jamais été d’une si urgente nécessité.

Accords de libre-échange, absence de régulation, chute des prix : tous les ingrédients d’une grave crise agricole en Europe sont réunis. Il faut donc choisir : laisser-faire les marchés ou réorienter notre modèle agricole, comme y tend ce projet de loi ? Poursuivre la fuite en avant dans la croissance des importations déloyales avec les accords de libre-échange ou refuser enfin les diktats de la Commission européenne ? Se soumettre aux géants de la distribution et à leurs stratégies de rentabilité ou revenir à une véritable régulation des marchés, des volumes et des prix ?

Comme en matière de politique économique, sociale et budgétaire, il faut répondre à ces questions. L’avenir des agriculteurs français et européens dépend à court terme de choix politiques courageux et assumés.

Aussi l’adoption de ce projet de loi, que nous soutenons, ne doit-elle pas être considérée comme un aboutissement. Nous attendons désormais que la représentation nationale soit rapidement saisie d’un véritable débat de fond sur les sujets que je viens d’évoquer.

Je conclurai par une citation de Paul Eluard – certes moins poétique que celle de René Char que vous avez rappelée tout à l’heure, monsieur le ministre : « Le passé est un oeuf cassé ; l’avenir est un oeuf couvé » Il nous reste encore beaucoup de travail pour le développement de l’agriculture de notre pays et de l’agriculture européenne. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Potier.

M. Dominique Potier. Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, monsieur le rapporteur pour avis, chers collègues, c’est la fin, le temps de la paix des braves, où nous portons une fierté commune autour de ce projet de loi.

En tant que responsable du groupe socialiste, républicain et citoyen, je tiens à remercier l’ensemble de mes collègues investis sur ce dossier et à rappeler l’importance de la présence dans nos rangs d’élus locaux passionnés, possédant une expérience forte du milieu rural, et de personnes connaissant de l’intérieur le monde de l’entreprise agricole. Cette loi a été portée viscéralement par des députés qui avaient au cœur et à l’esprit cette passion de l’agriculture et du monde rural et qui ont évité toutes les dérives qui peuvent survenir lorsque nous produisons hors-sol des lois pour l’avenir de notre nation. Merci à eux pour leur investissement très précis. Je n’en citerai aucun pour n’oublier personne, mais ils savent qu’ils ont joué un rôle capital.

Je tiens aussi à saluer la diversité des apports dont le texte a bénéficié. Je me félicite ainsi de la qualité du dialogue que j’ai eu tant avec André Chassaigne, Brigitte Allain et Jeanine Dubié, dans la majorité, qu’avec les groupes de l’UDI et l’UMP, qui ont toujours été respectueux et ont recherché, lorsque c’était possible, des solutions de compromis.

Cette loi apporte des réponses au moyen d’une boîte à outils. Comme je l’ai déjà dit ici même, l’outil le plus précieux en politique est aujourd’hui la boussole. Or, la grande qualité de cette loi est de fixer un cap, de montrer le sens dans lequel nous devons agir.

Elle comporte aussi des outils-solutions. À cet égard, je vous remercie, monsieur le ministre, pour l’annonce faite voici quelques jours par le Premier ministre à Bordeaux, à vos côtés, de la victoire historique que représente la reconnaissance du travailleur dans l’entreprise coopérative agricole et de la transparence du GAEC. Depuis des années, en effet, on nous affirmait que c’était impossible, que la France était singulière et que sa voix ne pouvait pas être portée. C’est donc là un combat historique et nous vous devons un immense merci pour l’avoir mené.

Mme Chantal Guittet. Bravo, monsieur le ministre !

M. Dominique Potier. Loi-solution pour les GAEC, pour l’ANSES – l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail – et pour de nombreuses autres choses, cette loi est aussi une loi de révolution – avec, bien sûr, le GIEE, laboratoire du futur, mais aussi avec le projet alimentaire territorial porté par notre collègue écologiste, le fonds carbone et la logique de compensation que nous avons défendue, sur tous les bancs de cet hémicycle, autour des grands projets d’infrastructure.

Surtout, avec cette boîte à outils et cette boussole, le texte apporte une cohérence : la régulation du foncier est au service de l’installation des agriculteurs et le renouvellement des générations est la condition de l’agroécologie – en d’autres termes, pas d’agroécologie sans l’installation de paysans nombreux, et pas d’installation de paysans nombreux sans régulation du foncier. C’est ce que nous avons rappelé à force de combats et de débats parfois vifs, mais que nous sommes fiers de voir aujourd’hui aboutir.

Permettez-moi maintenant d’en tirer quelques leçons politiques. Cette loi nous a donné un bel exemple de non-contradiction entre ce que Max Weber désignait comme l’éthique de responsabilité et l’éthique de conviction. Il y a en politique dans notre pays un chemin entre l’angélisme et le cynisme. Il peut s’incarner dans des politiques fortes, qui tiennent compte de la réalité du monde sans pour autant renoncer à la justice ni à l’enclenchement d’un autre modèle de développement. C’est ce que nous avons fait dans cette loi.

Il y a place dans l’espace politique français pour un dialogue de respect exigeant avec la profession agricole. Je me réjouis que notre politique et les choix que nous avons portés puissent être salués lors d’un congrès par la jeune génération d’agriculteurs – même si le dialogue a également pu être vif avec certains syndicats. M. Germinal Peiro et moi-même avons également mené des tables rondes intersyndicales qui ont montré que des consensus tirés par le haut étaient possibles. Les apparentes contradictions peuvent en effet être dépassées lorsque nous recherchons la vérité et l’intérêt général. Une autre clé de la politique consiste encore à chercher à dépasser nos contradictions en en sortant par le haut.

Enfin, la France rassemblée sur un véritable projet politique a fait entendre sa voix en Europe par une négociation de la politique agricole commune et en mettant en application notamment les mesures relatives aux GAEC et le plan protéagineux, ainsi que diverses mesures agroenvironnementales qui accompagneront la transition écologique sur le terrain. La France est forte quand elle est unie et qu’elle fait entendre une autre voix en Europe.

Voilà pour les leçons politiques, mais le combat continue, car des rendez-vous nous attendent, notamment à propos du foncier. De fait, il existe aujourd’hui une boîte noire du phénomène sociétaire. Des rendez-vous importants nous attendent également à propos de l’agroécologie. Responsable d’une mission sur les phytosanitaires, je sais en effet qu’elle sera l’indicateur de la réussite de l’agroécologie et que nous aurons à porter dans la loi de finances des réformes de l’ANSES afin de déplafonner sa capacité d’action.

Mme la présidente. Veuillez conclure, je vous prie, cher collègue.

M. Dominique Potier. D’autres rendez-vous encore nous attendent autour de la PAC 2020, de l’alimentation et de la lutte contre le gaspillage et pour la qualité alimentaire. Il nous faut surtout, comme l’a montré le débat sur l’épandage des produits phytosanitaires, retrouver les conditions d’un débat public apaisé entre la population et le monde paysan.

Monsieur le ministre, en portant cette loi, vous vous êtes inscrit dans les pas du grand Edgar Pisani. Nous avons montré ensemble, au-delà des débats – vifs, mais toujours respectueux – que nous avons eus, que l’on ne peut pas aimer notre pays sans aider ses paysans à vivre les transitions du futur et à cultiver ensemble la France que nous aimons, la France du XXIe siècle. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, GDR et écologiste.)

Mme la présidente. La parole est à M. Antoine Herth.

M. Antoine Herth. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, avec cette ultime séance devant valider le texte issu de la commission mixte paritaire qui s’est tenue le 23 juillet dernier, nous arrivons au terme du débat parlementaire autour du projet de loi dit d’avenir pour l’agriculture et la forêt.

Au terme de ses lectures successives, le texte a pris de l’embonpoint, passant de trente-neuf à quatre-vingt-quinze articles. Pour certains d’entre eux, je tiens à le souligner, nos convergences de vues sont réelles, en particulier pour ce qui est des dispositions touchant à la forêt ou des mesures spécifiques à l’outremer – j’aurais pu ajouter les articles portant sur l’enseignement agricole si le groupe UMP avait obtenu la certitude d’une équité de considération entre le public et le privé.

M. Patrick Hetzel. Très juste !

M. Antoine Herth. Parmi les autres mesures intéressantes, il convient de noter la clarification des relations entre bailleur et locataire, la reconnaissance du vin, des terroirs viticoles, des cidres et poirés, le droit d’opposition de l’Institut national de l’origine et de la qualité – l’INAO – à l’enregistrement d’une marque auprès de l’Institut national de la propriété industrielle – l’INPI – et les possibilités accrues données aux éleveurs pour lutter contre les loups – n’est-ce pas, cher Martial Saddier ?

M. Martial Saddier. Tout à fait !

M. Antoine Herth. Cependant, les députés UMP, comme les sénateurs UMP, ont voté contre ce texte. En effet, malgré l’objectif de renforcer la compétitivité des filières, enfin exprimé à l’article 1er grâce à notre insistance, l’ensemble du projet de loi traduit une vision frileuse et statique de l’économie agricole.

M. Patrick Hetzel. Excellent !

M. Antoine Herth. L’impression générale reste celle de la tentation du repli sur soi, que votre marketing politique qualifie pompeusement de « reconquête du marché intérieur ».

En réalité, vous n’êtes que fidèle aux visions classiques de la gauche, celle qui ne s’intéresse qu’à l’administration des moyens de production et à une répartition supposée plus juste des aides publiques. Vous vous résignez à gérer la pénurie.

Il en est ainsi de votre grande victoire sur la question des GAEC : grâce à la reconnaissance de la transparence, ils recevront plus d’aides pour les cinquante-deux premiers hectares et les prochains bénéficiaires de tickets de rationnement supplémentaires seront les vingt mille EARL qui choisiront de modifier leur statut social. Quant à ceux qui perdront à ce jeu à enveloppe fermée, ce seront tous les autres, ceux qui n’exercent pas leur profession d’agriculteur dans un cadre sociétaire qui plaise à la gauche.

Mais en la matière, monsieur le ministre, il convient de ne pas oublier la loi de Murphy : plus la part de gâteau est belle, plus elle a de chances de tomber de travers dans l’assiette lorsqu’on la servira. Or, vous ne faites rien pour augmenter la taille, non pas de certaines parts, mais de l’ensemble du gâteau.

Alors que le Premier ministre veut déverrouiller les leviers de la croissance, la majorité qui lui apportera – peut-être – son soutien la semaine prochaine s’apprête à voter un texte d’exception pour l’agriculture. En effet, aucune disposition n’est envisagée pour que ce secteur de premier plan puisse, lui aussi, se moderniser, innover, développer son activité, décrocher des parts de marché à l’étranger et, au bout du compte, contribuer à la création d’emplois et de richesses nationales.

Au contraire, de nombreuses dispositions vont complexifier durablement le quotidien de la profession, avec la transmission de données et l’augmentation du nombre de déclarations, la réforme du fonctionnement des interprofessions, qui risque de conduire à leur blocage, la modification des critères relatifs au contrôle des structures et à l’assujettissement au régime des non-salariés agricoles et la création d’un registre des agriculteurs.

M. Patrick Hetzel. Où est le choc de simplification !

M. Antoine Herth. Je vous rappelle que ce même gouvernement, cette même majorité ont adopté en juillet 2014 – il y a quelques semaines – le projet de loi n2145 relatif à la simplification de la vie des entreprises. Et que faites-vous pour simplifier la vie des agriculteurs ? Pas grand-chose ! Force est de constater que la gauche parlementaire a du mal à tirer les conséquences du virage social libéral du Premier ministre. Elle préfère enrichir le dictionnaire du monde rural d’un concept nouveau, celui d’agroécologie, en laissant d’ailleurs présupposer qu’actuellement les agriculteurs n’intègrent pas le respect de l’environnement dans leur activité. Autre néologisme : le groupement d’intérêt économique et environnemental, ou GIEE. Véritable couteau suisse de votre politique agricole,…

M. André Chassaigne. Oh ! Couteau suisse !

M. Antoine Herth. …il est supposé répondre à toutes les difficultés techniques, économiques et administratives des agriculteurs, peut-être même faire les déclarations fiscales, et devrait lui aussi devenir un sésame pour toucher des aides supplémentaires, sans que l’on sache réellement lesquelles.

Enfin, je veux brièvement revenir sur votre choix de transférer à l’ANSES la responsabilité de la gestion des mises sur le marché des produits phytosanitaires. Malgré nos avertissements, vous avez, monsieur le ministre, persisté à donner un signal politique de désintérêt à l’égard de ce sujet sensible. Votre collègue de l’écologie ne s’y est pas trompée, qui s’est aussitôt engouffrée dans la brèche avec sa proposition sur les distances à proximité des habitations. Heureusement, à ce stade, on en est revenu à une rédaction plus équilibrée. Il conviendra cependant de rester attentif aux circulaires adressées par le Gouvernement aux préfets concernant les notions de « proximité » et de « distance minimale adaptée ».

Quant à votre guerre des préparations naturelles peu préoccupantes, les PNPP, cher Germinal Peiro, pourquoi devrait-elle avoir lieu ? Je vais vous le dire : parce que vous avez failli la déclencher vous-même en faisant peur à vos amis avec une supposée plus grande rigueur de l’ANSES que ne l’est aujourd’hui la direction générale de l’alimentation, la DGAL. Résultat : vous créez un passe-droit via la catégorie des engrais pour que ces préparations naturelles, pas toujours anodines, puissent être utilisées plus facilement. En ville, monsieur le rapporteur, cela s’appelle des petits arrangements entre amis !

M. Germinal Peiro, rapporteur. Oh !

M. Patrick Hetzel. C’est pourtant juste !

M. Antoine Herth. Plus généralement, les députés UMP ne voteront pas ce texte et regrettent que ce projet de loi ne soit pas à la hauteur des enjeux de l’agriculture. Depuis deux ans, le Gouvernement et la majorité mettent à mal ce secteur : suppression de la TVA compétitivité que nous avions mise en place et qui aurait pu bénéficier à 94 % des entreprises du secteur agricole ; baisse significative des crédits budgétaires en lois de finances ; hausse des charges en raison de la réforme du dispositif d’exonération de charges sur les travailleurs occasionnels dit TO-DE.

Ce projet de loi passe donc à côté des véritables préoccupations des agriculteurs. Il ne répond pas à la question cruciale de l’avenir et du rôle de l’agriculture française dans un monde ouvert. Surtout, la plupart de ses dispositions sont, hélas, obsolètes avant même d’être votées, tant le cap du Gouvernement a changé entre le dépôt du projet de loi et cette dernière séance de débat à l’Assemblée. Décidément, le temps politique est trop rapide pour les idéologues des partis ! Décidément, cette loi dite d’avenir se conjugue de plus en plus au passé ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Patrick Hetzel. Excellent !

Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Benoit.

M. Thierry Benoit. Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la vice-présidente de la commission des affaires économiques, monsieur le rapporteur, monsieur le rapporteur pour avis, chers collègues, nous en arrivons donc à la phase finale de ce marathon parlementaire consacré à la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt. Moi aussi, monsieur le ministre, je suis heureux de vous retrouver ! Comme vous devez être impatient de savoir ce que va faire le groupe UDI, je vous donne la réponse immédiatement : le groupe UDI votera la loi d’avenir pour l’agriculture ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Patrick Hetzel. Qu’avez-vous négocié en contrepartie ? (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Mme Chantal Guittet. Ils votent cette loi parce que c’est une bonne loi !

M. Thierry Benoit. Nous allons voter pour, et je vais vous en expliquer les raisons, monsieur le ministre, et surtout en expliquer les raisons aux agriculteurs.

Selon nous, les enjeux et les défis qu’ont à relever les agriculteurs sont de plusieurs natures. Le premier enjeu, le premier défi est d’abord de nourrir les sept milliards d’hommes et de femmes qui peuplent la planète, dont beaucoup souffrent de malnutrition. Le deuxième défi pour l’agriculture française et mondiale – l’agriculture française se devant de rester le moteur en Europe – est celui du changement climatique. Les agriculteurs étant, depuis bien longtemps, nos vrais partenaires dans la préservation de l’environnement et dans la reconquête de la qualité de l’eau, il y a là un enjeu que nous avons tous cerné et dont nous avons pu débattre lors de l’examen de ce projet de loi d’avenir pour l’agriculture. Le troisième enjeu est social et humain : les agriculteurs demeurent en effet de véritables aménageurs du territoire et sont, de par leur profession, en lien direct avec la terre et les terroirs.

Sans vouloir m’appesantir sur les manquements de cette loi d’avenir, je souhaite cependant dire que le texte que vous présentez, monsieur le ministre, n’est pas forcément la grande loi révolutionnaire que l’on pouvait attendre – d’ailleurs, une telle loi est-elle possible ? Une bonne loi répondrait immédiatement aux enjeux de compétitivité de l’agriculture française et répondrait de manière plus précise aux enjeux de la simplification, tant attendue par nos concitoyens et notamment par les agriculteurs, comme aux enjeux européens liés à la globalisation des échanges. Malgré tout, même si la loi est imparfaite, l’UDI va voter ce texte parce qu’il est rare dans une législature, lorsque nous sommes députés de la minorité, d’avoir ce sentiment d’utilité !

M. Jean-Yves Caullet. Très bien !

M. Thierry Benoit. Monsieur le ministre, grâce à votre esprit d’ouverture, grâce aux échanges que nous avons eus avec messieurs les rapporteurs, grâce aux travaux qui ont été menés en commission puis dans l’hémicycle, j’ai eu le sentiment réel d’avoir été utile à mon pays et à la profession agricole française.

M. Germinal Peiro, rapporteur. Très bien !

M. Thierry Benoit. Cela m’a permis de dire aux agriculteurs, à l’occasion de cinq comices agricoles qui se sont tenus à la rentrée dans ma circonscription, que leur profession était en effet exigeante, difficile et soumise à beaucoup d’aléas mondiaux, des aléas climatiques, des aléas politiques – comme en Ukraine actuellement –, des aléas humains et des enjeux géopolitiques. Je leur rappelle toutefois régulièrement que s’il y a une profession dans ce pays – et je le dis en tant que député breton – qui fait l’objet des plus grandes attentions de la part du législateur, quels que soient les gouvernements, c’est bien la profession agricole ! Nous avons la volonté de soutenir notre agriculture.

J’ai, monsieur le ministre, nourri de très grandes craintes à l’issue de la première lecture ; je vous ai même fait le reproche, ici en séance, d’avoir donné trop de gages aux lobbies, sensibilités ou mouvements environnementalistes et écologistes. Trop de gages ayant été donnés à l’issue de la première lecture, j’ai trouvé qu’il existait un déséquilibre flagrant entre la nécessité de production agricole et la nécessité de préservation de l’environnement. Avec ce concept d’agro-écologie, que je pense avoir compris après vos propos dans l’hémicycle, je dis aux agriculteurs qu’ils sont en plein dans leur sujet et qu’ils n’ont pas à craindre de cette loi d’avenir pour l’agriculture, parce que des garde-fous ont été posés par les députés de l’opposition, comme vous l’avez souligné tout à l’heure. Les collègues UMP ont bien combattu sur ces sujets pour empêcher certaines dérives dans la loi, tout comme nous l’avons fait au groupe UDI.

Venons-en aux réalités concrètes de ce texte. L’UDI souhaitait que les groupements d’intérêt économique et environnemental, ou GIEE, bénéficient spécifiquement des aides publiques, notamment des aides publiques majorées, et que celles-ci soient réservées aux agriculteurs et uniquement à eux. Cette disposition est dans le texte, ainsi que vous l’avez rappelé à plusieurs reprises : voilà qui nous rassure.

S’agissant de l’agroécologie, il faut dire aux agricultures qu’elle n’est que la poursuite des travaux qu’ils ont engagés depuis quarante ans. Après l’agriculture raisonnée, puis l’agriculture écologiquement intensive, il y a maintenant l’agroécologie, qui n’est que la reconnaissance du travail accompli par les agriculteurs à travers le territoire national.

Le débat que nous avons eu sur la transparence des groupements agricoles d’exploitation en commun, les GAEC, va dans le bon sens. Nous avons évité le pire concernant les clauses environnementales dans le cadre du renouvellement des baux, en précisant que ces clauses doivent faire l’objet d’un accord bilatéral entre le bailleur et le preneur et surtout qu’elles ne doivent pas fragiliser le projet économique des agriculteurs.

L’UDI se réjouit également qu’un amendement sur les compensations écologiques, proposé par Antoine Herth, par l’UDI et peut-être même par des collègues socialistes, ait été adopté. Je précise, pour les agriculteurs, que nous avons abaissé une borne : alors que, jusqu’à présent, la compensation écologique était de deux pour cinq, nous avons abaissé la borne minimale de deux à un. Ainsi, si l’on prend un hectare de terre aujourd’hui, on peut compenser à partir d’un pour un : cela paraît sibyllin, mais les agriculteurs, eux, comprendront. Ce point est très important.

En ce qui concerne le débat sur les produits phytosanitaires, loin de la polémique sur la limite des deux cents mètres et de toute l’agitation régnant sur ce sujet, l’UDI se réjouit, monsieur le ministre, que le travail entre le Gouvernement, la commission et le rapporteur ait permis l’adoption d’un amendement de l’UDI précisant que tout porteur de nouveaux projets en milieu rural devait financer les mesures compensatoires : c’est une avancée.

Pour ce qui est de la déclaration relative aux quantités d’azote, nous avons obtenu que l’autorité administrative puisse imposer une déclaration annuelle, mais surtout que cette déclaration ne concerne pas les agriculteurs, puisque nous avons écrit dans la loi qu’elle concerne les détenteurs et ceux qui commercialisent les produits azotés.

En ce qui concerne les médicaments, fidèle à l’esprit de la loi, vous avez voulu tout à la fois reconnaître le travail des vétérinaires, qui sont de grands professionnels – nous y avons également veillé à l’UDI –, et trouver un véritable équilibre avec les agriculteurs en confiant un rôle accru à l’ANSES. Pour ma part, je n’y vois pas de danger, peut-être parce que dans ma circonscription, à Fougères, nous accueillons un site de l’ANSES : je connais le grand professionnalisme des collaborateurs de l’ANSES.

S’agissant de la forêt, monsieur le rapporteur, nous avons trouvé dans ce texte le bon équilibre entre la fonction écologique, environnementale, et la fonction économique de la forêt, avec la création du Fonds stratégique de la forêt et du bois et l’accès aux données cadastrales ouvert à l’ensemble des professionnels exerçant les activités de production forestière ; l’amendement de François Sauvadet que nous avons adopté sur ce point allait dans le bon sens.

La revalorisation du métier d’agriculteur, grâce notamment à la création d’un registre des actifs agricoles, est un premier pas nécessaire pour créer, à terme, en France un véritable statut du professionnel de l’agriculture, afin de distinguer l’agriculture professionnelle d’une agriculture plus occupationnelle ou plus bucolique, ainsi que j’ai déjà eu l’occasion le dire dans cet hémicycle. Il faut que celles et ceux qui vivent du métier d’agriculteurs soient reconnus à travers une revalorisation de leur métier, notamment par le biais de formations. Vous vous êtes montré très attentif à la formation en alternance ainsi qu’au travail réalisé par les maisons familiales rurales, auxquels je suis très attaché.

Puisque l’UDI compte dans ses rangs beaucoup de députés représentant des territoires d’outre-mer, nous nous réjouissons aussi globalement des avancées ou des prises en compte spécifiques des territoires ultramarins.

Enfin, je souhaiterais clore mon propos avec un sujet qui me tient à cœur, et que vous avez cité, monsieur le ministre : l’inscription au patrimoine culturel de la France des cidres et des poirés. Les producteurs bretons et normands se sont réjouis de cette inscription, qui reconnaît leur travail, au même titre que celui des brasseurs qui produisent les bières de France ou celui des viticulteurs qui produisent d’excellents grands crus. Nos cidriculteurs, celles et ceux qui produisent les cidres et les poirés, ont à cœur d’organiser à l’automne un rassemblement, un temps de convivialité, en votre présence, monsieur le ministre, afin de fêter cette inscription au patrimoine culturel de la France.

Le groupe UDI pense que cette loi, même si elle n’est pas révolutionnaire, respecte le métier d’agriculteur. Parce qu’elle respecte les femmes et les hommes qui ont l’amour du travail bien fait, qui ont la volonté du bien produire en matière agricole française, la volonté du bien nourrir, du bien manger, du bien vivre et du bien-être, le groupe UDI votera la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, monsieur le ministre. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, GDR et RRDP.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Pascale Got.

Mme Pascale Got. Monsieur le ministre, messieurs les rapporteurs, madame la vice-présidente de la commission des affaires économiques, l’examen de cette grande loi touche à sa fin. Je ne doute pas qu’elle sera positive, car ce texte va contribuer à renforcer très significativement notre agriculture sur les plans économique, écologique et social. C’est ce qu’attendaient nombre d’agriculteurs et une frange importante de la population.

Je remercie à mon tour les rapporteurs et l’ensemble des parlementaires qui ont enrichi ce texte au fil des débats.

J’insisterai sur les dispositions relatives à l’enseignement agricole et à la forêt.

Dans l’agriculture comme dans tous les autres domaines, la jeunesse est une priorité de la majorité. Et comme dans les autres domaines, cette jeunesse souhaite se former et accéder à l’emploi. C’est pourquoi nous avons eu raison de mettre en place le principe d’acquisition progressive des diplômes. Nous avons eu raison de faciliter pour tous les publics l’accès aux études supérieures, notamment pour les bacheliers professionnels. Nous avons eu raison de conforter l’enseignement agricole comme facteur de promotion sociale par l’obtention de diplômes et l’accès des jeunes à l’emploi.

Nous avons eu également raison de promouvoir la recherche agricole française pour mieux assurer la mutation vers l’agroécologie avec des techniques de production innovantes et respectueuses. La création de l’Institut agronomique, vétérinaire et forestier de France, l’IAVFF, vise ainsi à répondre aux grands enjeux agricoles de demain. Investir dans l’intelligence et le savoir était impératif et sera porteur.

Tout comme seront porteuses les avancées réalisées en faveur de la forêt.

Depuis le début du quinquennat, monsieur le ministre, vous nourrissez une nouvelle ambition forestière qui n’a pas échappé aux professionnels du secteur. Cette ambition se retrouve dans le texte à travers plusieurs mesures :la modernisation de la gouvernance de la politique de la forêt et du bois, à travers la définition d’une stratégie nationale ; l’élaboration de plans régionaux ; le regroupement de la propriété forestière, avec la création des groupements d’intérêt économique et environnemental forestiers et le renforcement de la procédure des biens vacants, sans oublier la création du Fonds stratégique de la forêt et du bois, qui permettra précisément la mobilisation nécessaire.

Et je ne peux pas passer sous silence l’équilibre sylvo-cynégétique qui a été préservé grâce à l’engagement de plusieurs parlementaires, à l’Assemblée comme au Sénat.

Vous l’aurez compris, c’est un texte équilibré qu’il nous est proposé d’adopter définitivement. Il donne une nouvelle direction à notre agriculture et conforte tout ceux ont déjà entamé cette mutation afin de produire autrement. Cette loi d’avenir les accompagnera et encouragera les autres à prendre la même direction.

La France, nous l’avons rappelé, est un pays agricole et doit le rester : cultivons cet atout en permettant à notre agriculture de devenir plus durable et plus respectueuse de l’environnement. C’est ce que veulent les agriculteurs et l’ensemble des Français. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, GDR, écologiste et RRDP).

Mme la présidente. La parole est à M. Martial Saddier.

M. Martial Saddier. Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, véritable richesse pour notre pays, l’agriculture est le moteur du développement de nos territoires. Elle façonne, entretient et embellit nos paysages. Jour après jour, des hommes et des femmes passionnés par leur métier œuvrent pour valoriser et promouvoir leur savoir-faire et les produits de nos terroirs. Notre rôle, en tant qu’élus de la Nation, est de leur fournir les outils adéquats pour parvenir à relever les défis auxquels l’agriculture est actuellement confrontée et à préparer l’avenir de nos filières.

Or, malgré près de dix mois de débats au sein de l’Assemblée nationale et du Sénat, le projet de loi tel qu’il est issu des travaux de la commission mixte paritaire ne permettra pas de dessiner l’agriculture de demain. De l’avenir, il n’a que le nom. Nous le regrettons infiniment, d’autant plus que nous savons tous, sur les bancs de cet hémicycle, qu’il n’y a pas plus d’une grande loi agricole par législature. Nous avons donc manqué là, mes chers collègues, l’opportunité de préparer le futur de ce secteur primordial pour nos territoires et notre économie.

Toutefois, au fil de nos débats, des avancées notables ont pu être apportées par rapport au projet de loi initial.

En tant qu’élu d’un territoire de montagne, je tiens tout particulièrement à saluer l’adoption de mesures qui enrichiront indéniablement l’agriculture de montagne. Le projet de loi reconnaît l’importance des activités d’élevage et de pastoralisme pour l’aménagement du territoire et la conduite du développement rural. Figurent également désormais dans le texte la représentation des élus des territoires de montagne au sein des instances nationales et locales relatives à l’agriculture et à la forêt, ainsi que la prise en compte du rôle essentiel des bois et des forêts en matière de protection de la qualité de l’air. Je remercie Mme Massat et les autres élus de territoires de montagne qui ont défendu ces idées.

La prise en compte de la maîtrise du foncier agricole dans les zones de montagne, avec l’adaptation de la surface minimale d’assujettissement est une autre avancée essentielle pour les territoires de montagne. Ont été considérablement renforcées les appellations d’origine protégées, les AOP, et les indications géographiques protégées, les IGP. Le vin, les cidres et poirés, les boissons spiritueuses et les bières, issus des traditions locales, figureront dorénavant dans le patrimoine culturel, gastronomique et paysager protégé de la France.

Enfin, en tant que membre du comité national Loup, je retiens également, au titre des mesures intéressantes du texte, la nouvelle rédaction de l’article 18 bis. Celui-ci autorise le préfet à délivrer, à chaque éleveur ou berger concerné, dès lors qu’une attaque est avérée et pour une durée de six mois, une autorisation de tir de prélèvement du loup. Il crée également, pendant un an, des zones de protection renforcées dans les territoires où les activités d’élevage sont perturbées par les attaques de loups. Ces mesures assureront ainsi la mise en œuvre du quota de prélèvements élaboré au sein du comité national Loup, quota issu d’une concertation entre le monde environnemental et le monde des éleveurs.

Comme je ne cesse de le répéter depuis dix ans que je suis membre du comité national Loup, définir un quota de prélèvement ne suffit pas : encore faut-il se donner les moyens de le mettre en œuvre.

M. Jean Lassalle. Très bien !

M. Martial Saddier. Il est vrai, monsieur le ministre, que vous avez cet avantage sur nous qu’aucune association environnementale ne vous reproche de tripler le quota de prélèvement alors qu’elles hurlaient lorsque nous demandions le prélèvement ne serait-ce que d’un loup. Autant profiter donc que cette majorité soit au pouvoir pour tripler le quota !

En dépit de ces quelques avancées, le projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt reste en deçà de nos attentes.

Globalement, ce texte ne permettra pas à notre agriculture de se moderniser, ni d’être plus compétitive, encore moins de gagner des parts de marché à l’étranger. Plutôt que de réduire les contraintes qui pèsent sur ce secteur, certaines dispositions risquent fort d’entraîner un véritable choc de complexification : augmentation du nombre de déclarations ; réforme du fonctionnement des interprofessions ; modification des critères relatifs au contrôle des structures et à l’assujettissement au régime des non-salariés agricoles, autant de mesures qui alourdiront incontestablement le quotidien des agriculteurs.

Vous avez, monsieur le ministre, souhaité inscrire durablement l’agroécologie au cœur de votre projet de loi. Si vos intentions sont louables, je n’en doute pas et vous ai d’ailleurs remercié de ce qui a été fait pour les territoires de montagne, il n’en reste pas moins que la définition du groupement d’intérêt économique et environnemental reste assez vague. Tout ce que nous savons, alors que le texte sera définitivement adopté aujourd’hui, c’est que les exploitants concernés pourront bénéficier d’une majoration de leurs aides pour la mise en œuvre d’actions pluriannuelles répondant à une problématique locale. Pour une disposition présentée comme une mesure phare du projet de loi, ce n’est absolument pas satisfaisant.

Bien que le bail environnemental ait connu des avancées lors des débats dans les deux chambres, la rédaction actuelle de l’article 4 nous laisse également craindre une multiplication des conflits entre propriétaires bailleurs et agriculteurs.

Enfin, concernant l’utilisation des produits phytosanitaires, si la suppression en commission mixte paritaire de toute référence à la proximité des habitations va dans le bon sens, il nous faudra, il vous faudra, monsieur le ministre, impérativement être vigilant quant aux définitions qui seront données dans les circulaires adressées aux préfets au sujet des notions de « proximité » et de « distance minimale adaptée ». Comme l’a rappelé très justement mon collègue Antoine Herth, spécialiste des questions agricoles au sein de notre formation politique, ce texte demeure décevant en l’état et ne préparera assurément pas l’avenir de notre agriculture. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Lassalle.

M. Jean Lassalle. Monsieur le ministre, chère Frédérique Massat, cher Germinal Peiro, sans vouloir bien sûr dévaloriser quiconque, je dois dire que nous aurions difficilement pu trouver aujourd’hui, dans le monde politique français, une telle équipe pour aborder le problème de l’agriculture d’aujourd’hui sur l’ensemble des territoires de notre beau pays.

Notre collègue Martial Saddier a dit tout le bien qu’il pensait des dispositions concernant la montagne. Je n’y reviendrai donc pas.

Je ne pense pas, monsieur le ministre, que quiconque aurait fait mieux que vous dans la situation actuelle. Cette loi est ce qu’elle est. Elle permet surtout de reposer les bases d’un dialogue actualisé qui prend en compte les nouvelles contraintes de notre temps, qui n’existaient pas il y a vingt-cinq ou trente ans, liées à l’Europe, à la mondialisation, voire à la financiarisation en tous domaines.

Je pense que votre charisme, et peut-être aussi vos origines bretonnes, vous ont permis de faire le maximum de ce qui pouvait être fait.

Mais le fait qu’une équipe comme la vôtre ne puisse pas aller plus loin montre combien notre société est bloquée, toutes choses s’étant enchevêtrées d’une manière kafkaïenne pour nous interdire d’impulser à notre agriculture le formidable élan qui lui est nécessaire.

Depuis une trentaine d’années, nous avons oublié combien notre pays est différent de tous les autres pays, notamment des autres pays d’Europe, d’abord parce qu’il représente la troisième surface agricole en Europe et qu’on peut pratiquement tout y cultiver, mais du fait également de son organisation territoriale et de celle de sa population.

Il faut dire que vous n’êtes pas bien accompagné. Ainsi Manuel Valls devrait retirer d’urgence sa réforme territoriale, car c’est elle qui provoquera la chute de François Hollande, plus que les petites histoires ou les mauvais sondages. Quand on veut réformer, il faut savoir ce qu’on veut faire. Ce type de projet doit être mis en œuvre au lendemain d’une élection présidentielle, comme François Mitterrand l’avait fait pour l’abolition de la peine de mort ou Giscard d’Estaing pour l’IVG. Mais dans un contexte où plus personne ne sait plus à quoi il sert, où plus personne ne sait s’il exercera encore ses responsabilités dans deux ou trois ans, comment voulez-vous que cela marche ?

En attendant, la nature ayant horreur du vide, ceux qui ont pris les rênes ignorent tout de la réalité du terrain, même s’ils ont suivi des études très longues, difficiles et coûteuses.

La réalité, c’est qu’il y a dans tous nos territoires des hommes et des femmes qui veulent être paysans, qui veulent relancer l’agriculture. Beaucoup voudraient se passer de pesticides, mais ils me disent : « Mais, monsieur le député, comment empêcher l’herbe de pousser ? » Et quand je leur dis d’employer quelqu’un, ils me répondent qu’ils ne trouvent personne. Comment faire pour trouver de nouveau du personnel ?

En tant qu’ancien élève d’un lycée agricole, je peux vous dire, monsieur le ministre, que la formation dispensée dans ces lycées est excellente. Le problème, c’est qu’après il n’y a rien pour leurs élèves.

Monsieur le ministre, si nous ne voulons pas que notre agriculture s’effondre comme notre industrie s’est effondrée au cours de ces vingt-cinq dernières années, nous devons, sur la base de votre travail, bâtir un consensus national. Pour ma part, je crois au local : c’est à partir des communes, des territoires qu’il faut cheminer, avec ceux qui ont envie de « mettre le paquet ». C’est ainsi qu’on pourra donner un grand dessein à la paysannerie française et à la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR, UDI et UMP).

Mme la présidente. La parole est à Mme Gabrielle Louis-Carabin.

Mme Gabrielle Louis-Carabin. Monsieur le ministre, chers collègues, nous voilà réunis pour conclure l’examen du projet de loi sur l’avenir de l’agriculture, de l’alimentation et de la forêt.

Ce texte comporte un volet « Outre-mer » et des dispositions dont il convient de noter l’importance.

Importance, car l’agriculture est un secteur dont le poids demeure conséquent dans l’économie ultramarine, en étant vecteur d’emplois et d’activités. Elle représente à elle seule 1,4 à 4,4 % du PIB en Outre-mer, contre 2,2 % en moyenne dans l’Hexagone ; en termes d’emplois, 2 à 7 % contre 3,3 % en France métropolitaine.

Importance, car les avancées de ce projet de loi apportent un certain nombre de solutions aux agricultures ultramarines. Désormais les chambres d’agriculture, dans le cadre de contrats d’objectifs et de performance, doivent promouvoir l’accompagnement et le suivi des groupements d’intérêt économique et environnemental.

Importance, avec la gouvernance des SAFER, le contrat de génération, la création des comités d’orientation stratégique et de développement agricole pour coordonner les objectifs de production, les contrats d’objectifs entre État, régions et chambres d’agriculture.

Monsieur le ministre, prendre en compte les particularités de nos agricultures d’Outre-mer, leur taille, leur fragilité, c’est favoriser leur développement pérenne, c’est permettre une structuration, voire une meilleure organisation des filières, avec pour objectif de satisfaire de manière optimale la demande alimentaire locale et l’accès aux marchés.

Je me félicite aussi que l’article 1er et le titre VI de ce texte de loi insistent bien sur les enjeux économiques et sociaux des agricultures ultramarines ; ces dernières doivent se défendre et s’adapter pour une meilleure prise en compte de leurs spécificités.

Reste encore à relever le défi de la pression foncière avec la mise en œuvre du dispositif pour régler les problèmes de l’indivision, de l’installation des jeunes agriculteurs, du revenu de nos agriculteurs et de la diversification de nos cultures.

Il est à noter que demeure toujours d’actualité l’utilisation de produits phytosanitaires adaptés à l’agriculture en milieu tropical, pour lutter efficacement contre les maladies propres à nos cultures.

Je terminerai mon propos en saluant le travail remarquable des parlementaires d’outre-mer, particulièrement de mes collègues Hélène Vainqueur-Christophe et Chantal Berthelot. Cette dernière ne peut être présente ce matin, mais il faut rappeler qu’elle s’est beaucoup investie dans ce débat car c’est un sujet qu’elle maîtrise très bien, puisqu’elle fait partie de la profession.

M. Jean-Yves Caullet, rapporteur pour avis de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire. C’est vrai.

M. Germinal Peiro, rapporteur de la commission mixte paritaire. Tout à fait !

Mme Gabrielle Louis-Carabin. Les propositions et améliorations mises en relief ont permis de faire progresser le débat sur une agriculture d’avenir, agriculture tant réclamée par nos agriculteurs soucieux de faire face à la concurrence accrue des marchés mondiaux. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Mme la présidente. La discussion générale est close.

La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Le Foll, ministre. Je veux dire quelques mots à la fois pour me féliciter de toutes les interventions et pour remercier tous ceux qui ont participé à ce débat : Germinal Peiro bien sûr, rapporteur de cette loi ; Jean-Yves Caullet sur la forêt ; Jean-Pierre Le Roch sur l’enseignement ; les chefs de file Dominique Potier et Pascale Got ; Chantal Berthelot pour l’agriculture des Outre-mer ; mais aussi François Brottes, président de la commission, et la vice-présidente Frédérique Massat qui a formé d’ailleurs un duo souvent convaincant avec M. Saddier sur cette grande et belle question de l’agriculture de montagne. Je salue aussi Fanny Dombre Coste, Hervé Pellois, les radicaux comme Jeanine Dubié ou encore Joël Girod qui nous a rappelé les enjeux de l’irrigation capillaire ; les écologistes comme Brigitte Allain, toujours là, toujours présente pour défendre ses idées et ses convictions. Je ne vais pas revenir sur André, notre poète, sur Thierry Benoit et sur Charles-Amédée de Courson qui, les lunettes bien vissées, lorsqu’il s’agissait de fiscalité, est venu pointer son nez sur la loi d’avenir de l’agriculture

Je voudrais saluer aussi Antoine, qui chuchote ses soutiens et tonne lorsqu’il s’oppose (Sourires), ainsi qu’Annie Genevard et Dino Cinieri – je me souviens de cet amendement sur les friches qui nous a tous rassemblés ; Philippe Le Ray, le Breton, qui a beaucoup participé. Il n’est pas présent aujourd’hui, mais je tenais à le saluer.

Et je n’oublierai pas bien sûr, descendu de sa montagne, ayant entrecoupé sa « marche » de quelques présences dans les travées de l’Assemblée, Jean Lassalle, qui à chaque fois nous rappelle une vérité toute simple : derrière l’agriculture, derrière ce secteur économique, il y a surtout des hommes et des femmes.

Je terminerai sur un petit mot de Saint-Exupéry : « C’est l’esprit qui mène le monde et non l’intelligence. » En effet, disait-il, « si tu veux construire un bateau, fais naître dans le cœur de tes hommes et femmes le désir de la mer ». L’esprit, c’est ce qui donne envie aux hommes de traverser les océans ; l’intelligence, c’est ce qui permet de construire des bateaux. Je crois qu’ensemble, nous avons eu et l’esprit, et l’intelligence. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC,GDR, RRDP, écologiste et UDI.)

Texte de la commission mixte paritaire

Mme la présidente. J’appelle maintenant le texte de la commission mixte paritaire.

Conformément à l’article 113, alinéa 3, du règlement, je vais d’abord appeler l’Assemblée à statuer sur l’amendement dont je suis saisie.

M. Stéphane Le Foll, ministre. Voici en effet – après Saint-Exupéry ! – un amendement de précision à l’article 20 concernant l’interdiction de remise, de rabais ou de ristourne à l’occasion de la vente d’antibiotiques. Les nouvelles dispositions s’appliquent aux contrats en cours, en laissant aux opérateurs un délai allant jusqu’au 31 décembre 2014 pour les mettre en conformité. Toutefois, le texte ne précise pas ce qui se passe en l’absence de mise en conformité à cette date. L’objet de l’amendement est de combler cette lacune.

(L’amendement n8, accepté par la commission, est adopté.)

Vote sur l’ensemble

Mme la présidente. Je mets aux voix l’ensemble du projet de loi, compte tenu du texte de la commission mixte paritaire, modifié par l’amendement adopté par l’Assemblée.

(L’ensemble du projet de loi est adopté.)

Suspension et reprise de la séance

Mme la présidente. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à onze heures vingt, est reprise à onze heures vingt-cinq.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

2

Adaptation de la société au vieillissement

Suite de la discussion d’un projet de loi

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi relatif à l’adaptation de la société au vieillissement (nos 1994, 2155, 2119).

Discussion des articles (suite)

Mme la présidente. Hier soir, l’Assemblée a poursuivi l’examen des articles, s’arrêtant à l’amendement n21 portant article additionnel après l’article 30.

Après l’article 30

Mme la présidente. L’amendement n21, portant article additionnel après l’article 30, n’est pas défendu. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n460.

Mme Jacqueline Fraysse. La prestation versée à une personne en situation de handicap n’est pas la même selon l’âge auquel le handicap est acquis. Si le handicap est survenu avant l’âge de soixante ans, la personne perçoit la prestation de compensation du handicap, la PCH, sachant que la demande de cette dernière doit être effectuée avant l’âge de soixante-quinze ans. Après soixante-quinze ans, ou si le handicap est survenu après soixante ans, la personne perçoit l’aide personnalisée d’autonomie, l’APA.

Cette différence de traitement, sur le seul critère de l’âge, s’explique difficilement. La PCH a été pensée pour répondre aux situations de handicap : c’est une prestation plus adaptée que l’APA.

Il est probable que cette règle s’explique uniquement par cette raison qu’elle permet de réaliser des économies, puisque, selon un rapport de l’IGAS, une modification des conditions d’âge serait susceptible d’alourdir le poids financier de la prestation.

La loi de 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées prévoyait pourtant, dans son article 13, de supprimer ces barrières d’âge dans un délai de cinq ans : autrement dit, en 2010.

Cette réforme, qui répondait à une exigence d’équité, n’a hélas jamais été appliquée. Comme cette situation concerne bien les personnes âgées en perte d’autonomie, ce texte nous paraît être le cadre idoine pour prévoir enfin la mise en œuvre de la loi de 2005 avant le 1er janvier 2017.

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Pinville, rapporteure de la commission des affaires sociales, pour donner l’avis de la commission.

Mme Martine Pinville, rapporteure de la commission des affaires sociales. Cet amendement n’est pas inintéressant, mais je ne peux qu’émettre un avis défavorable à son adoption.

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de la famille, des personnes âgées et de l’autonomie, pour donner l’avis du Gouvernement.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État chargée de la famille, des personnes âgées et de l’autonomie. Madame la députée Jacqueline Fraysse, vous avez raison de rappeler que la loi de 2005 prévoyait la suppression des barrières d’âge à un horizon de cinq années. Nous sommes en 2014 mais, à aucun moment, l’état des finances publiques n’a probablement permis qu’il en soit ainsi.

Vous proposez d’accélérer le processus mais le projet de loi dont nous discutons comprend déjà des mesures tendant à rapprocher les conditions sociales et à limiter les effets de la barrière d’âge : amélioration des aides apportées aux personnes âgées en situation de perte d’autonomie, rapprochement de l’Allocation personnalisée d’autonomie, l’APA, et de la Prestation de compensation du handicap, la PCH, dans le cadre de la conférence des financeurs de la prévention de la perte d’autonomie des personnes âgées, réintroduction – nous en discuterons un peu plus tard – des Maisons départementales de l’autonomie, les MDA, et des Conseils départementaux de solidarité et de l’autonomie, les CDSA.

Néanmoins, très franchement, l’état actuel des finances publiques ne nous permet pas de donner un avis favorable à votre amendement avec lequel nous ne sommes pas en désaccord sur le fond ; nous connaissons l’état de nos capacités budgétaires…

Certes, nous savons que l’engagement financier est très élevé, mais nous verrons dans le cadre de la discussion de votre prochain amendement – j’émettrai un avis favorable à son adoption – qu’il est possible de mieux affiner encore notre connaissance des implications budgétaires.

Mme la présidente. La parole est à M. Denis Jacquat.

M. Denis Jacquat. Madame la secrétaire d’État, cet amendement nous rappelle un certain nombre de débats qui ont eu lieu en commission ou ici-même.

Ce qui nous rassemble aujourd’hui, c’est donc la question de l’adaptation de la société au vieillissement, dont le volet concernant le maintien au domicile – le volet institutionnel n’étant quant à lui pas évoqué.

Lors de nos discussions ces dernières années, les associations nous ont dit dans un Livre noir – s’agissant de ce qu’il ne faut pas faire – puis dans un Livre blanc – sur ce qu’il conviendrait de faire – que la barrière d’âge devait être supprimée en matière de perte d’autonomie. Tel est l’esprit de ce que nous rappellent très régulièrement les associations nationales ou locales.

Je comprends très bien ce que sont les contraintes économiques existantes, mais il faut à tout prix que par la suite, madame la secrétaire d’État, les vœux des associations – qui ont énormément travaillé sur ces questions, Mme Fraysse ayant souligné l’une d’entre elles – soient entendus.

Lorsqu’un membre d’une famille est handicapé, cela constitue aussi un handicap moral et financier car le handicap coûte cher. D’une manière générale, nous devons faire beaucoup de progrès dans ce domaine.

Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud Richard.

M. Arnaud Richard. J’ajouterai quelques considérations à celles que mon collègue Denis Jacquat vient de formuler.

Il est dommage que le Gouvernement ne se montre pas plus ambitieux sur ces questions liées à l’âge, au handicap et à la dépendance. L’attente est grande à ce sujet et je souscris totalement à la proposition de notre collègue Jacqueline Fraysse même s’il est bien malheureux que la situation de nos finances publiques ne permette pas de la satisfaire.

Si vous le permettez, madame la présidente, j’évoque en quelques mots l’amendement 308 rectifié qui n’a pas pu être défendu même si cela peut vous sembler un peu indélicat. Il a été en effet soutenu par de nombreux groupes et ce qu’il propose ne coûterait rien aux finances publiques puisqu’il concerne le rapport juridique entre les assureurs, l’État et les personnes handicapées suite à un accident. J’espère qu’il pourra être discuté et voté au Sénat.

(L’amendement n460 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n461.

Mme Jacqueline Fraysse. J’ai écouté avec intérêt la réponse de Mme la secrétaire d’État et je me félicite qu’elle n’ait pas abandonné l’idée de supprimer les barrières d’âge. Je regrette, en revanche, que le Gouvernement trouve de l’argent pour le distribuer sans contrôle à certaines entreprises qui en ont déjà beaucoup et n’en trouve pas pour répondre à ces exigences humaines extrêmement importantes pour les personnes concernées, comme cela a été rappelé et comme les associations nous le rappellent très régulièrement.

Compte tenu du fait que le problème qui se pose est financier, l’amendement n461 propose qu’un rapport soit remis aux parlementaires afin d’examiner, précisément, le poids financier que représenterait cette réforme visant à mettre un terme dans les meilleurs délais à cette inégalité. Mme la secrétaire d’État a fait savoir qu’elle y était favorable et je m’en félicite.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Martine Pinville, rapporteure. La commission a rejeté cet amendement, mais j’y suis favorable à titre personnel.

Comme l’a dit Mme la secrétaire d’État, il importe que nous puissions disposer d’une évaluation de cette question sensible pour toutes les personnes handicapées, notamment, lorsqu’elles n’ont pas soixante ans.

Le rapport de l’IGAS, en 2011, indiquait que le déplacement de ces bornes d’âge aurait un coût mais qu’aucune évaluation relativement précise n’avait été faite. Or, nous avons besoin de connaître un peu plus exactement l’impact que cela pourrait avoir.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État. Également favorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Jeanine Dubié.

Mme Jeanine Dubié. Je salue l’ouverture dont Mme la rapporteure et Mme la secrétaire d’État font preuve.

La question de la barrière d’âge est en effet importante et sa disparition est demandée depuis longtemps. Les personnes dépendantes ayant besoin de tiers pour accomplir les actes de la vie quotidienne doivent être traitées de façon égalitaire, qu’elles aient ou non soixante ans. La différence de traitement est inacceptable.

J’ajoute que ce rapport est d’autant plus opportun que la loi de 2005 prévoyait la suppression de cette barrière d’âge et que les décrets ne sont jamais parus. Il est temps de réparer cette injustice. J’espère que ce rapport servira au Gouvernement à prendre la décision que nous attendons depuis trop longtemps, de même que les professionnels et les personnes âgées et handicapées.

(L’amendement n461 est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Bérengère Poletti, pour soutenir l’amendement n381.

Mme Bérengère Poletti. Cet amendement est particulièrement important et intéressant. Anticipant certains commentaires, je précise que je suis prête à le sous-amender afin de modifier, en l’occurrence, la date de la remise d’un rapport, que M. Hetzel avait envisagée être assez précoce.

Il s’agit donc de demander un rapport sur l’état des lieux de l’assurance privée, sujet auquel le Gouvernement doit être sensible puisqu’un chapitre du rapport annexé à la loi est consacré à l’assurance privée.

Il y est notamment mentionné combien il est difficile de se repérer dans l’offre assurantielle actuelle, variée, diversifiée mais inégale, les définitions de l’état d’entrée en perte d’autonomie étant souvent restrictives et n’étant pas alignées sur la grille utilisée pour l’APA ; certains assurés peuvent donc bénéficier de cette allocation tout en se voyant refuser une rente ; les rentes peuvent être modestes au regard du reste-à-charge et faiblement revalorisées ; enfin, les délais de franchise ou de carence sont souvent importants et peuvent faire obstacle au déclenchement des garanties ; dans ce contexte, la Fédération française des sociétés d’assurance a lancé un label pour les contrats d’assurance dépendance au mois de mai 2013 ; pour aller plus loin, le Gouvernement envisage de favoriser dans le cadre des prochaines lois financières les contrats les plus protecteurs, qui devront respecter un cahier des charges.

J’avais mentionné cet extrait du rapport annexé lors de mon intervention en discussion générale.

Cette sensibilité, exprimée noir sur blanc par le Gouvernement, me laisse penser qu’un rapport décrivant l’état des lieux de l’assurance privée pourrait fortement l’intéresser afin de faire avancer la question.

Mme la présidente. Pouvez-vous préciser la rectification que vous avez proposée s’agissant de la date ?

Mme Bérengère Poletti. Comme dans l’amendement n461, je propose que la remise du rapport ait lieu dans les six mois suivant la promulgation de la loi.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Martine Pinville, rapporteure. Avis défavorable.

Vous l’avez dit, madame Poletti, le rapport annexé fixe déjà, aux alinéas 100 à 103, l’objectif d’une régulation du marché de l’assurance.

Lors des auditions, les représentants de la Fédération française des sociétés d’assurance ont indiqué qu’ils avaient lancé un label permettant d’offrir un niveau minimal de garanties.

Le Gouvernement, me semble-t-il, travaille sur cette question, Mme la secrétaire d’État nous le dira.

Les demandes de rapports sont assez fréquentes, mais lorsque nous discuterons, un peu plus loin, de l’installation du Haut conseil de l’âge, nous verrons sans doute que cette instance pourrait se saisir d’un certain nombre de sujets.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État. Faut-il réaliser une expertise et procéder à un état des lieux s’agissant des assurances dépendances privées ? La réponse est oui.

Qui doit le faire ? Mme Poletti propose que le Gouvernement remette un rapport au Parlement. Je préférerais quant à moi que cela relève plutôt des missions du futur Haut conseil de l’âge, que je saisirai. Nous allons bientôt examiner l’article et les amendements le concernant et je crois que c’est en effet une mission dont il pourrait se charger. Si l’on se livre à une comparaison avec l’action du Haut conseil de la famille, par exemple, on ne peut que constater que cela correspondrait à ses compétences. Il faudra donc donner du grain à moudre à cette instance !

Mon avis est défavorable mais pas tant sur l’objet de cet amendement que sur l’émetteur du rapport.

Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud Richard.

M. Arnaud Richard. Je suis d’accord avec Mme la secrétaire d’État : ce sera peut-être au Haut conseil de l’âge de réaliser ce rapport.

Je tiens surtout à répéter ce que j’ai dit dans la discussion générale : cette réforme de la dépendance ne se fera, selon nous, que si le système assurantiel est obligatoire. Vous me direz qu’il s’agit d’une révolution ; c’est un risque à prendre. Tout le monde sait que l’on y viendra.

Les assureurs ne sont pas d’accord et c’est peut-être bien là le problème. Les contrats souffrent également d’un manque de transparence, nombre de rentes étant variables.

Il importe de trouver un cahier des charges commun et l’État doit pleinement jouer son rôle à ce propos.

Je vous prie de m’excuser de vous avoir fait part hier un peu vertement de mon regret, madame la secrétaire d’État, que le Gouvernement n’ait pas pris ce risque nécessaire, seul moyen de résoudre le problème de la dépendance.

Mme la présidente. La parole est à M. Denis Jacquat.

M. Denis Jacquat. Mme la secrétaire d’État parlait de grain à moudre : je suis entièrement d’accord avec elle. Des pistes de réflexion doivent être tracées. Selon certaines personnes que nous avons auditionnées, des contacts ont été noués à ce propos avec les ministres concernés et même la Présidence de la République.

Puisqu’il est question de grain à moudre, madame la secrétaire d’État, je voudrais précisément que l’on se pose aussi la question de recettes. En fait, le problème est là. Si on veut accorder des prestations, eh bien, en face, il faut des cotisations, ou des recettes.

Pour ce faire, certaines méthodes, que je tiens à évoquer, peuvent peut-être marcher. Je prends toujours l’exemple du régime de Sécurité sociale de l’Alsace-Moselle, qui ne coûte pas un centime aux employeurs et qui est financé exclusivement par les cotisations des employés. Tout le monde est d’accord, toutes tendances politiques, pour ne pas changer ce système. Les salariés payent donc tous un tout petit peu plus chaque mois pour bénéficier du régime local, et ça marche. Indirectement, c’est l’esprit d’une cotisation supplémentaire, ce qui représente, c’est vrai, une perte, une toute petite perte de pouvoir d’achat chaque mois, mais, en Moselle comme en Alsace, les gens adorent ce système, dans lequel il n’y a ni ticket modérateur ni forfait hospitalier.

Ce qui marche en Alsace-Moselle pourrait peut-être marcher au niveau national.

Mme la présidente. Madame Poletti, maintenez-vous l’amendement ?

Mme Bérengère Poletti. Oui, madame la présidente, car je tiens à ce que l’Assemblée se prononce sur le problème, même si j’ai bien entendu les arguments donnés par Mme la secrétaire d’État.

Je veux revenir sur la problématique de l’assurance privée. J’avais précisément consacré quelques instants à cette question, en évoquant le fait qu’un certain nombre de pays imposent de recourir à l’assurance obligatoire – mon collègue Arnaud Richard vient aussi de le souligner. Cependant, l’assurance obligatoire est-elle compatible avec une assurance privée ? Dès que l’on s’engage sur la voie d’une assurance obligatoire, qui s’impose à tous, il faut envisager un système assurantiel public. C’était d’ailleurs toute la question du cinquième risque, maintes et maintes fois abordée sous le précédent quinquennat.

Actuellement, seules 20 % des personnes âgées sont concernées par la grande dépendance, sachant que la question de l’admission dans des établissements dédiés se pose : cela coûte très cher, et on a besoin de mobiliser des moyens. La mutualisation permise par une assurance obligatoire permettrait justement d’engager des moyens importants pour faire face à cette dépendance. Pour ma part, je suis assez convaincue que c’est sur cette voie qu’il faut s’avancer.

C’est pourquoi l’amendement n381 me paraissait important. Si le Haut conseil du financement de la protection sociale s’empare du sujet, il faudra quand même que le Gouvernement lui demande assez rapidement de produire des travaux sur le sujet.

(L’amendement n381 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Bérengère Poletti, pour soutenir l’amendement n382.

Mme Bérengère Poletti. Il s’agit encore de demander un rapport. Je suis toujours un peu gênée de demander de nombreux rapports, car je sais que les ministères ont déjà tellement de travail ! Cependant, nous sommes souvent obligés, au Parlement, d’en passer par là, car il nous est impossible – c’est normal – d’engager des dépenses supplémentaires par voie d’amendement.

En l’occurrence, il s’agirait d’un rapport sur la variabilité des tarifs pratiqués au titre de l’allocation personnalisée d’autonomie, source d’une véritable injustice entre les départements. En effet, ceux-ci ont des visions, des manières de tarifer si différentes que l’on aboutit à des situations extrêmement diverses, que n’explique pas le caractère urbain ou rural du département. Chacun en fait à sa tête, et l’on parvient finalement à des tarifs aberrants. C’est injuste, évidemment, pour les personnes âgées suivies à domicile, c’est également injuste pour les services à domicile. Leurs fédérations nous le disent : il y a des situations assez choquantes.

Il serait donc intéressant, même si nous savons un peu comment les choses se passent, de disposer de quelque éclairage sur les pratiques différentes des départements. Nous aurions ainsi une photographie de la réalité, ce qui nous permettrait de constater ces injustices.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Martine Pinville, rapporteure. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État. Madame la députée, j’ai eu l’occasion de le dire aussi bien en commission qu’en séance publique : la restructuration organisationnelle des services de l’aide à domicile fait partie de mes priorités. Dans cette perspective, une étude des coûts est indispensable ; elle est déjà en cours. J’espère vivement qu’elle nous sera livrée avant la promulgation de la loi – je m’engage même devant vous à ce qu’elle le soit –, parce que les échéances sont beaucoup plus proches.

J’émets donc un avis défavorable, car l’étude est déjà en cours.

M. Patrice Martin-Lalande. En somme, vous êtes défavorable parce que c’est réalisable !

Mme la présidente. La parole est à M. Denis Jacquat.

M. Denis Jacquat. Quand nous avons discuté ici même, dans cet hémicycle, de l’APA, avec, à l’époque, Mme Guinchard, nous étions tous d’accord, sur tous les bancs, sur le principe. Cependant, j’avais déjà appelé l’attention sur le risque encouru au niveau national. Nous avions voté une loi homogène, qui devait s’appliquer à tout le monde, que ce soit en domicile ou en institution, mais on sentait très bien, notamment au travers des propos de certains représentants de l’Assemblée des présidents de conseils généraux, devenue l’Assemblée des départements de France, qu’il risquait d’y avoir des disparités départementales. Celles-ci sont effectivement apparues extrêmement vite, comme le rappelle l’exposé sommaire de cet amendement. Chaque département a – passez-moi l’expression – « fait sa sauce » en ce qui concerne le maintien à domicile ou l’institutionnel. D’un point de vue national, ces disparités sont injustes, et les Français en sont les victimes.

Ce qu’il faut, c’est une loi homogène, applicable de la même façon à tous. C’est un vœu que j’adresse au Gouvernement, madame la secrétaire d’État. Les gens ne doivent pas être mieux aidés dans un département et moins dans un autre.

Mme la présidente. La parole est à Mme Bérengère Poletti.

Mme Bérengère Poletti. J’apprécie la réponse de Mme la secrétaire d’État, et l’engagement qu’elle a pris. Je retire donc cet amendement.

(L’amendement n382 est retiré.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Michèle Delaunay.

Mme Michèle Delaunay. Parmi les nouvelles missions confiées à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie figure, par exemple, celle d’évaluer et de comparer les politiques publiques, en particulier d’examiner ces problèmes de financement par les départements mais aussi d’évaluer les GIR des départements. Il y a tant de discordances ! Comparaison n’est pas raison, certes, mais elle y mène bien souvent. Lorsque nous disposerons d’une comparaison noir sur blanc de ces politiques, nous disposerons d’un outil incitant puissamment à une homogénéisation.

Article 31

Mme la présidente. La parole est à Mme Bérengère Poletti, inscrite sur l’article 31.

Mme Bérengère Poletti. J’interviens également au nom de M. Denis Jacquat, et mon propos concernera à la fois les articles 31 et 32.

Ces articles abordent le sujet des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens, ou CPOM, et de la tarification des services à domicile. Après la crise que les services à domicile ont vécue et les tensions que leur budget a connues à l’heure où les conseils généraux se trouvaient dans l’impossibilité de compenser financièrement leur déficit, il est devenu clair que les difficultés du service à domicile auxquelles doivent faire face les services à domicile depuis 2008-2009 trouvaient leur source dans plusieurs facteurs. Il y a des raisons conjoncturelles : cette absence de compensation, mais également la suppression des exonérations de charge en 2011. Il y a aussi des raisons structurelles qui requièrent que soient menées des réformes de fond. L’application des règles de tarification est très hétérogène d’un département à un autre, tout comme la gestion du droit d’option par les conseils généraux. Les différences concernent notamment le niveau de compensation des charges, soit par la tarification soit par la valorisation du plan d’aide.

De plus, des efforts budgétaires et un retour à l’équilibre ont dû être demandés aux services à domicile, appuyés par la contribution de deux fonds exceptionnels de 50 millions d’euros décidés à la fin de l’année 2011 par la majorité précédente et à la fin de l’année 2012 par la majorité actuelle.

La meilleure solvabilisation des usagers permise par la revalorisation de l’APA, dont je dois malheureusement souligner qu’elle reste modeste – les dépenses d’APA représentent plus de 5 milliards d’euros, et la revalorisation n’est que de 350 millions d’euros –, ne permettra donc pas, à elle seule, de résoudre les problèmes de tarification de certains services.

Cela dit, j’ai bien noté, madame la secrétaire d’État, que vous faisiez de cette question une priorité. Il faudra permettre aux services à domicile de notre pays, associatifs, privés à but non lucratif ou privés à but lucratif, d’avoir une meilleure vision de leur avenir.

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements, nos 643 rectifié et 661, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

La parole est à Mme la secrétaire d’État, pour les soutenir.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État. Avec l’article 31, nous abordons le chapitre important de la refondation de l’aide à domicile que le Gouvernement a engagé il y a plus d’un an. Je ne le répète pas : la restructuration du secteur, qui est en grande difficulté, est l’une de mes priorités. La refondation s’inscrit dans une démarche qui s’appuie elle-même sur des principes : universalité ; équité de traitement ; continuité ; accessibilité. L’article 31 vise à sécuriser le mandatement au sens de la directive européenne services et à renforcer la régulation.

L’amendement n643 rectifié tend à insérer des mots forts pour fixer la mission des CPOM : « En vue de favoriser la structuration territoriale de l’offre d’aide à domicile et la mise en œuvre [des] missions [des services d’aide et d’accompagnement à domicile] au service du public. » Cet amendement permet donc de préciser dans quelle mission des CPOM s’inscrit tout l’article.

L’amendement n661 vise à clarifier le champ d’application des CPOM-SAAD. L’intention du Gouvernement est de faire que les CPOM-SAAD prévues à l’article 31 soient ouvertes à tous les SAAD, quel que soit leur régime juridique.

(Les amendements nos 643 rectifié et 661, acceptés par la commission, sont successivement adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à M. Patrice Martin-Lalande, pour soutenir l’amendement n198.

M. Patrice Martin-Lalande. Cet amendement, identique à d’autres qui avaient été déposés par des collègues qui ne sont pas présents parmi nous, vise à compléter et à préciser les questions que doivent contribuer à régler les CPOM conclus avec des services d’aide et d’accompagnement à domicile. Il permet de mieux prendre en compte les grands principes de la refondation de l’aide à domicile promue par l’Assemblée des départements de France et les grandes fédérations de services prestataires autorisées. Son dispositif reprend les dispositions phares figurant aux annexes II et II bis du cahier des charges des expérimentations reprises dans l’arrêté interministériel du 22 septembre 2012 pris en application de l’article 150 de la loi de finances pour 2012. Il s’agit, enfin, de mieux reconnaître les missions d’intérêt général pouvant être accomplies par ces services.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Martine Pinville, rapporteure. Défavorable.

Le renvoi préconisé à la grille AGGIR dans le cadre de l’APA n’est pas nécessaire. Cette grille est effectivement utilisée pour établir le classement et le plan d’aide de l’allocation.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État. Défavorable.

(L’amendement n198 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Patrice Martin-Lalande, pour soutenir l’amendement n227.

M. Patrice Martin-Lalande. Je présenterai cet amendement non seulement au nom de ses signataires, mais aussi au nom des signataires des deux amendements identiques non soutenus, nos 58 et 180.

Il s’agit, là aussi, de compléter les dispositions relatives au contenu des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens, pour mieux prendre en compte les principes de la refondation de l’aide à domicile, rappelés tout à l’heure par Mme la ministre. Ces principes sont soutenus par les départements comme par les grandes fédérations de services prestataires.

Je ne répéterai pas les arguments que j’ai avancés en défense du précédent amendement. Je souhaite l’adoption de celui-ci, qui a été déposé par trois ensembles de signataires différents.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Martine Pinville, rapporteure. Avis défavorable : je ne crois pas, monsieur Martin-Lalande, qu’il soit pertinent de faire du plafonnement des heures effectuées à ce titre une clause obligatoire de ces contrats.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État. Avis défavorable, pour les mêmes raisons.

(L’amendement n227 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud Richard, pour soutenir l’amendement n345.

M. Arnaud Richard. Cet amendement important vise à soumettre l’ensemble des services aux mêmes critères de qualité et d’évaluation, qui sont contenus dans le cahier des charges national de l’agrément, afin de limiter les dépenses inutiles et d’assurer l’égalité d’accès au service et l’égalité de traitement des bénéficiaires et des acteurs sur tout le territoire. Selon nous, les contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens doivent donc s’appuyer sur un cahier des charges national.

Je sais bien que ce serait une révolution dans ce secteur, mais alors que les finances publiques sont dans une situation difficile, il serait bon de simplifier l’ensemble des cahiers des charges, plutôt que de garder des disparités entre les différentes parties du territoire français.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Martine Pinville, rapporteure. Monsieur Richard, par cet amendement, vous proposez de supprimer l’alinéa 5 de l’article 31 de ce projet de loi. Cet alinéa prévoit que les contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens définissent « les objectifs poursuivis et les moyens mis en œuvre ». Vous enlevez donc aux contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens toute portée, alors qu’ils visent précisément à améliorer la qualité des services sociaux et médico-sociaux. Les contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens ne sont pas incompatibles avec les règles du cahier des charges. L’avis de la commission est donc défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud Richard.

M. Arnaud Richard. Merci, madame la rapporteure, d’avoir précisé que mon amendement n’est pas parfait. Mais votre refus signifie que vous êtes favorable au fait qu’aux quatre coins de la France, l’ensemble des services se soumette au cahier des charges national.

Mme Martine Pinville, rapporteure et et Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État. Non !

M. Arnaud Richard. Alors cela signifie que vous préférez rester dans un archaïsme historique !

(L’amendement n345 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement n662 du Gouvernement.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État. Cet amendement a pour objet d’introduire dans les contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens pour les services d’aide et d’accompagnement à domicile la possibilité de gérer le ticket modérateur des usagers de l’APA par abonnement forfaitaire. En permettant d’inclure la gestion du ticket modérateur dans les CPOM, cet amendement simplifierait les choses pour les usagers et pour les gestionnaires.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Martine Pinville, rapporteure. Favorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Bérengère Poletti.

Mme Bérengère Poletti. Un bref commentaire, pour éclairer nos collègues : ce que propose Mme la secrétaire d’État a peut-être l’air sympathique, mais il faut rappeler que le passage à un système d’abonnement n’a rien d’anodin ! À l’heure actuelle, en temps normal, lorsque des personnes âgées ayant eu recours à un service à domicile sont hospitalisées, ou s’en vont chez leurs enfants, elles ne doivent pas payer ce service à domicile. Or les nouvelles tarifications – notamment le modèle de l’Association des départements de France, qui a été expérimenté dans les départements du Doubs et de l’Ain – ont mis en place un système d’abonnement.

Avec ce nouveau système, la part de ticket modérateur qui reste à la charge de la personne aidée change : lorsqu’elles sont hospitalisées, ou s’absentent, par exemple, pendant une semaine, elles doivent malgré tout continuer à payer. Tel est l’esprit de ce système d’abonnement, lequel a été mis en place par cette nouvelle tarification pour aider les services à domicile à mieux tenir leur budget, pour leur donner plus de marges de manœuvre budgétaires.

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État. Cette expérimentation, menée dans une quinzaine de départements, fonctionne bien : l’indice de satisfaction est bon. Surtout, l’amendement que nous proposons ne fait qu’ouvrir une possibilité : il ne s’agit pas d’un changement total du mode de prise en charge du ticket modérateur. Les usagers seront donc informés de cette possibilité. Il s’agit d’étendre la possibilité d’expérimentation.

(L’amendement n662 est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Patrice Martin-Lalande, pour soutenir l’amendement n228.

M. Patrice Martin-Lalande. Cet amendement, comme les deux derniers amendements que j’ai défendus, vise à compléter la liste des points qui devront figurer dans les contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens. Il reprend une disposition avec laquelle le gouvernement précédent était d’accord, puisqu’elle figurait dans l’arrêté interministériel du 22 septembre 2012, concernant le cahier des charges des expérimentations.

C’est pourquoi je souhaite l’adoption de cet amendement, qui n’est pas l’œuvre d’un parlementaire isolé, mais reprend des dispositions prévues par le cahier des charges des expérimentations. Je regrette, pour les mêmes raisons, que les deux derniers amendements que j’ai défendus – qui, eux aussi, reprenaient des dispositions de ce cahier des charges – n’aient pas été adoptés.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Martine Pinville, rapporteure. Monsieur Martin-Lalande, votre amendement supprimerait une mention indispensable pour que le CPOM puisse jouer son rôle de mandatement, c’est-à-dire pour qu’il établisse, au regard du droit européen de la concurrence, qu’un service social ou médico-social reçoit des financements publics strictement en contrepartie de missions de service public. Il faut en effet prévoir obligatoirement les modalités de récupération des financements alloués à ces missions de service public, dans le cas où elles ne seraient pas effectives. Or votre amendement supprime cette mention.

L’avis de la commission est donc défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État. L’objet de l’amendement est déjà satisfait par la mention, à l’alinéa 5 de l’article 31 de ce projet de loi, de la négociation des moyens des services d’aide à domicile, de même que par les éléments mentionnés à l’alinéa 4 du même article. L’avis du Gouvernement est donc défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Patrice Martin-Lalande.

M. Patrice Martin-Lalande. Je préfère la réponse de Mme la secrétaire d’État à celle de Mme la rapporteure ! Si mon amendement est satisfait, il n’y a pas de raison de le maintenir. Je le retire donc, sous le bénéfice des éléments donnés par Mme la secrétaire d’État.

(L’amendement n228 est retiré.)

Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud Richard, pour soutenir l’amendement n658.

M. Arnaud Richard. Sans répéter la même démonstration que tout à l’heure, j’ajouterai quelques éléments. Tout d’abord, je retire le mot « archaïque », que j’ai employé il y a quelques instants : il est un peu excessif. Pour autant, on ne sait pas bien quel sera l’avenir des conseils généraux. Vous considérez qu’à l’heure actuelle, tout cela ne peut pas se faire dans le cadre d’un cahier des charges de l’agrément établi au niveau national. Je pense cependant que cette proposition, qui vous paraît aujourd’hui irréaliste, impossible, vous paraîtra nécessaire dans un an ou deux, si vous allez jusqu’au bout de cette réforme, dont nous ne connaissons pas exactement la teneur pour ce qui concerne les conseils généraux.

Il s’agit surtout de fixer des critères de qualité et d’évaluation partagés, afin d’éviter que les différences d’approche entre départements en matière de tarification ou de qualité de service entraînent des aberrations au détriment des utilisateurs – ce que Bérengère Poletti a très bien dit. Je comprends donc que le Gouvernement soit opposé à ces amendements ; malgré cela, peut-être un jour adopterons-nous enfin un tel cahier des charges de l’agrément au niveau national, qui soit partagé par tous.

Madame la présidente, si vous le permettez, cette intervention vaut défense conjointe des amendements nos 658, 659 et 660.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n658 ?

Mme Martine Pinville, rapporteure. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État. Avis défavorable, monsieur le député. En réalité, votre amendement conduirait à limiter le champ du contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens en matière de prévention et de ressources humaines. Je souhaite, à l’inverse, améliorer la qualité de service fournie par les services d’aide à domicile, tant en matière de prévention envers les personnes âgées, que par une plus grande professionnalisation des personnels. Je ne peux donc faire autrement que donner un avis défavorable à votre amendement.

(L’amendement n658 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Patrice Martin-Lalande, pour soutenir l’amendement n230.

M. Patrice Martin-Lalande. Dans la continuité des amendements qui ont déjà été défendus, cet amendement propose d’ajouter, après l’alinéa 7, un alinéa ainsi rédigé : « Les missions d’intérêt général, notamment en matière de prévention de la maltraitance, de prévention de la précarité énergétique, d’éducation et de prévention en matière de santé, de prévention des accidents domestiques, d’aide aux aidants à assurer en lien avec les organismes compétents sur leur territoire d’intervention ».

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Martine Pinville, rapporteure. L’avis de la commission est défavorable. En commission, nous avons enrichi le contenu des CPOM en définissant des clauses obligatoires. Il est vrai que nous pourrions réfléchir à l’aide aux aidants, mais ajouter une composante obligatoire consacrée à cette question, comme vous le proposez, alourdirait un peu plus les contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens. Je laisse Mme la secrétaire d’État exposer son point de vue sur cette question.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État. La notion de « missions d’intérêt général » n’est pas définie par la loi, contrairement à celle de service public. L’amendement n643 rectifié, que j’ai présenté précédemment et qui a été adopté, permet de reconnaître les « missions des structures d’aide à domicile au service du public ». Je crois que cette rédaction est plus précise, et répond à l’intention de l’amendement.

L’avis du Gouvernement est donc défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Patrice Martin-Lalande.

M. Patrice Martin-Lalande. Comment peut-on être certain que le problème de l’aide aux aidants sera pris en compte dans les objectifs et les moyens définis par les contrats ? Nous reconnaissons tous qu’il est nécessaire de tout faire pour que le maintien à domicile, dans toutes ses composantes, soit le plus réussi possible – objectif aussi bien humain que financier. L’aide aux aidants devrait donc faire partie des questions traitées, même de manière limitée, par les contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens.

N’y-a-t-il pas de moyen de s’assurer que cette question sera traitée par ces contrats ? S’il n’est pas possible de créer maintenant une obligation légale en ce sens, serait-il possible de l’inscrire ailleurs ? Je persiste malgré tout à penser qu’il vaudrait mieux créer cette obligation dès à présent, dans le projet de loi !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État. Cette question ne figure pas dans le socle, mais elle y est en puissance car les contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens peuvent définir leur propre cahier des charges, et y inclure leurs propres thèmes. Il n’y a pas de raison de penser qu’ils n’aborderont pas cette question, d’autant que l’aide aux aidants est une dimension très forte de ce projet de loi. La révolution psychologique et culturelle est en marche : elle se fera dans l’ensemble des structures.

M. Patrice Martin-Lalande. C’est un peu paradoxal !

Mme la présidente. Maintenez-vous votre amendement, monsieur Martin-Lalande ?

M. Patrice Martin-Lalande. Je trouve la position de Mme la secrétaire d’État difficile à tenir : elle reconnaît que l’aide aux aidants est un élément important du socle, et, dans le même temps, elle estime qu’il n’est pas nécessaire de la faire figurer dans le texte législatif ! Je vois là un paradoxe : j’espère que nous pourrons le corriger d’une manière ou d’une autre, au cours de cette lecture ou ultérieurement. Je persiste à penser qu’il faut que cet aspect fasse partie de ceux que les contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens doivent traiter obligatoirement.

(L’amendement n230 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Monsieur Richard, vous avez déjà défendu les amendements nos 659 et 660.

M. Arnaud Richard. Tout à fait, madame la présidente.

(Les amendements nos 659 et 660, repoussés par la commission et le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à M. Patrice Martin-Lalande, pour soutenir l’amendement n231.

M. Patrice Martin-Lalande. J’ai bien entendu ce qui a été dit tout à l’heure par Mme Poletti s’agissant des difficultés que peut présenter l’abonnement. De fait, deux solutions sont possibles pour résoudre le problème de financement : la première est la mise en place d’un abonnement permettant de couvrir les coûts fixes existant même pendant les jours sans service ; la seconde est l’augmentation du coût d’intervention unitaire pour compenser le manque à gagner non couvert en cas d’absence d’abonnement. De toute façon, ce coût fixe doit être couvert même lorsqu’il n’y a pas de service. L’abonnement permet de mieux gérer et de façon plus souple la perception des recettes permettant de couvrir l’ensemble des dépenses.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Martine Pinville, rapporteure. Défavorable, car cet amendement est satisfait par l’amendement n662 du Gouvernement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État. Défavorable, pour les mêmes raisons.

Mme la présidente. La parole est à M. Patrice Martin-Lalande.

M. Patrice Martin-Lalande. Je retire mon amendement.

(L’amendement n231 est retiré.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Bérengère Poletti.

Mme Bérengère Poletti. Je m’inquiète de la façon dont est rédigé l’amendement n662 car il laisse sous-entendre que cet abonnement sera proposé partout en France, de manière quasi systématique. Or, vous avez dit tout à l’heure, madame la secrétaire d’État, qu’il serait proposé sur une base volontaire. J’y suis attaché car, dans certains départements très urbains, il existe une grande instabilité des services à domicile. Ce n’est donc pas possible pour le moment, même s’il est peut-être souhaitable que cela se fasse à l’avenir. J’ai donc besoin d’être rassurée sur ce point.

(L’article 31, amendé, est adopté.)

Article 32

Mme la présidente. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, inscrite sur l’article.

Mme Jacqueline Fraysse. J’interviens sur l’article 32 à la demande de MM. Serville, Nilor et Azerot, qui ont dû rentrer en Martinique et en Guyane et qui ne pourront donc pas défendre leur amendement n591.

Je vous fais donc part de leur préoccupation. Ils soulignent que les structures d’aide à domicile relevant du régime de l’agrément ne peuvent actuellement participer aux expérimentations relatives à l’évolution de la tarification des services d’aide à domicile.

Or, les structures agréées, qu’elles soient associatives ou privées et commerciales, sont de plus en plus nombreuses dans le secteur et contribuent donc pleinement aux politiques de maintien à domicile des personnes âgées. L’amendement n591 visait à étendre les expérimentations relatives aux modalités de tarification des services d’aide et d’accompagnement à domicile aux structures agrées, sans distinction de statut juridique. J’aimerais avoir votre avis, madame la secrétaire d’État, sur ce sujet.

Mme la présidente. Nous en venons aux amendements à l’article 32. La parole est à Mme Martine Pinville, pour soutenir l’amendement n631.

Mme Martine Pinville, rapporteure. L’article 32 permet la poursuite pendant un an des expérimentations de tarification particulière des services d’aide à domicile prévues par l’article 150 de la loi de finances de 2012. Ces expérimentations comportent le plus souvent un forfait global de financement, dans le cadre d’une contractualisation pluriannuelle.

Selon un bilan intermédiaire de l’Assemblée des départements de France – l’ADF –, ce forfait global permet aux services de gérer peut-être plus librement des enveloppes fermées et donc de mieux maîtriser leur activité.

Lors d’un déplacement dans la Sarthe dans le cadre de la mission que nous menons avec Mme Poletti au titre du comité d’évaluation et de contrôle sur les services au domicile, nous avons pu constater les difficultés posées par l’expérimentation du forfait global et les améliorations possibles, en particulier dans la gestion. Il semble que les services soient motivés par la reconnaissance de leur mission et par les améliorations qu’elle peut entraîner, non pas uniquement sur les tarifs, mais également sur la qualité des interventions.

Mon amendement vise à aller plus vite en supprimant la prolongation d’un an. Le Gouvernement remettrait ainsi un rapport d’évaluation au plus vite après la promulgation de la loi. En conséquence, les modèles qui ont eu le plus de succès pourraient être repris dans le cadre des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens – les CPOM – prévus par l’article 31.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État. Favorable. Je réponds à Mme Fraysse, qui transmettait les préoccupations de ses collègues repartis en Martinique et en Guadeloupe, que je suis à leur disposition pour les rencontrer et approfondir les éléments qu’ils ont portés à mon attention.

(L’amendement n631 est adopté et les amendements identiques nos 128, 276, 383, 531 et 591 tombent.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Bérengère Poletti.

Mme Bérengère Poletti. Je souhaitais faire part de la satisfaction que certains départements peuvent tirer des expérimentations. Au départ, l’expérimentation menée par l’Assemblée des départements de France et les associations de services à domicile était effectivement fondée sur des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens prévoyant une enveloppe globale, non un comptage des heures prestées à domicile.

Or, les départements satisfaits de cette expérimentation ont tous constaté qu’il était indispensable de mettre en place la télégestion et de comptabiliser les heures prestées à domicile. La tarification proposée au départ est donc une chose, mais la manière dont les départements l’ont appliquée en est une autre. Là aussi, nous pouvons constater la grande diversité de nos territoires et de l’action des conseils généraux. Il sera difficile de proposer un modèle unique sur l’ensemble du territoire à même de satisfaire tout le monde. Madame la secrétaire d’État, répondre à cette demande sera une tâche compliquée.

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Pinville, pour soutenir l’amendement n678.

Mme Martine Pinville, rapporteure. Dans la même logique que mon amendement précédent, cet amendement vise à avancer de six mois la date prévue par le projet de loi pour la remise au Parlement du rapport d’évaluation des expérimentations de tarification. Cette date pourra bien évidemment évoluer en fonction de la date d’examen du texte, mais il serait bon que cela aille vite !

(L’amendement n678, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 32, amendé, est adopté.)

Article 33

Mme la présidente. Nous en venons aux amendements à l’article 33. La parole est à Mme Brigitte Allain, pour soutenir l’amendement n517 rectifié.

Mme Brigitte Allain. Il est important de mettre fin au droit d’option entre agrément qualité et autorisation pour rendre le secteur plus intelligible et garantir des services professionnels et de qualité pour l’intervention auprès de publics fragiles, les bénéficiaires de l’APA et de la PCH. Cet amendement vise à réduire le délai tout en laissant le temps de mettre en œuvre la refondation du secteur.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Martine Pinville, rapporteure. Défavorable. Il faut laisser le temps de voir comment tout cela va s’organiser. J’ajoute que l’amendement n223 propose de prolonger le délai de trois à six ans, et l’amendement n517 propose de le ramener de trois à un an. Je pense que trois ans est la bonne proposition.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État. Votre amendement, madame la députée, rejoint la volonté du Gouvernement d’accélérer la restructuration de l’aide à domicile. Nous pouvons donc réduire le délai. Toutefois, je crains qu’il soit excessif de passer de trois ans à un an, comme vous le proposez. Si vous en êtes d’accord, je propose de rectifier l’amendement en ramenant le délai à deux ans.

Mme la présidente. La parole est à Mme Brigitte Allain.

Mme Brigitte Allain. Je vous remercie de cette proposition, madame la secrétaire d’État. Les personnes fragilisées ne supporteraient pas un accompagnement non sécurisé ou instable. J’accepte cette modification.

Mme la présidente. La parole est à Mme Bérengère Poletti.

Mme Bérengère Poletti. Je ne suis pas du tout d’accord avec la réduction de ce délai. Trois ans est une durée minimum pour permettre aux services agréés de se structurer. De plus, la durée de deux ans me semble aberrante au regard des difficultés actuelles dans le domaine de l’emploi et des modifications territoriales envisagées par le Gouvernement.

Mme Catherine Coutelle, présidente de la délégation de l’Assemblée nationale aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes. Je suis assez d’accord !

(L’amendement n517 rectifié, tel qu’il vient d’être modifié, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Pinville, rapporteure, pour soutenir l’amendement n613.

Mme Martine Pinville, rapporteure. Rédactionnel.

(L’amendement n613, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 384 et 532.

La parole est à Mme Bérengère Poletti, pour soutenir l’amendement n384.

Mme Bérengère Poletti. Cet amendement propose d’offrir aux services d’aide à domicile relevant de l’agrément la possibilité de contractualiser avec les départements, sous la forme de contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens (CPOM), sans nécessairement relever du régime de l’autorisation.

S’engager avec le département dans un contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens relève déjà d’une démarche extrêmement positive. Cela permet au conseil général de fixer des exigences louables en termes de qualité, d’organisation et de présence territoriale.

L’autorisation, en tout cas dans un premier temps, ne doit pas s’imposer : je soutiens donc cet amendement qui offre cette possibilité aux services agréés de pouvoir contractualiser avec les départements.

Mme la présidente. La parole est à Mme Jeanine Dubié, pour soutenir l’amendement n532.

Mme Jeanine Dubié. Pour compléter les explications précédentes, je dirai que la suppression des deux dernières phrases de l’alinéa 1 permet tout à la fois de clarifier et d’unifier les exigences des deux modalités d’exercice, selon que l’association est agréée ou autorisée, ainsi que le préconise le rapport de la commission des affaires sociales du Sénat.

Cet amendement permet également aux associations de conserver le droit d’option en l’état, afin qu’un service à domicile relevant de l’autorisation puisse relever du régime de l’agrément s’il le souhaite, pour tout ou partie de ses activités.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements identiques ?

Mme Martine Pinville, rapporteure. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État. Mesdames les députées, l’article 33 ne remet pas en cause la coexistence des deux régimes, mais il présente l’avantage, pour les services agréés qui interviendraient de manière prépondérante auprès des publics les plus vulnérables, et qui s’approcheraient ainsi des obligations d’intérêt général, d’accéder, de manière simplifiée, au régime de l’autorisation.

Les amendement que vous proposez reviennent en fait à lisser les exigences d’autorisation sur le modèle des services agréés. Au vu des publics concernés, il convient pourtant de prendre comme référentiel la réglementation liée à l’autorisation. Donc l’avis du gouvernement est défavorable.

Mme la présidente. Maintenez-vous votre amendement, madame Poletti.

Mme Bérengère Poletti. Je le retire, madame la présidente.

(L’amendement n532 est retiré.)

Mme la présidente. Retirez-vous le vôtre également, madame Dubié,

Mme Jeanine Dubié. Non, madame la présidente.

(L’amendement n384 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Gilles Lurton, pour soutenir l’amendement n385.

M. Gilles Lurton. Dans sa rédaction actuelle, l’article 33 du projet de loi soumet les structures candidates à l’autorisation à deux obligations, jusqu’alors applicables aux seules structures ayant recours à des financements publics. Ces deux obligations sont la double compatibilité avec les objectifs et les besoins sociaux et médico-sociaux fixés par le conseil général, ainsi qu’avec le programme interdépartemental.

L’ajout de ces obligations est superfétatoire et rend plus complexe la candidature au régime de l’autorisation, alors que l’étude d’impact du projet de loi affirme, à l’article 33, que celui-ci présente « l’avantage pour les services agréés […] d’accéder de manière facilitée au régime d’autorisation ».

C’est pourquoi le présent amendement consiste à sauvegarder le droit d’exercer l’activité d’aide à domicile sous la seule réserve de satisfaire aux obligations légales de qualité relevant des régimes de l’autorisation ou de l’agrément.

(L’amendement n385, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 346 et 386.

La parole est à M. Arnaud Richard, pour soutenir l’amendement n346.

M. Arnaud Richard. Cet amendement vise à conserver le droit d’option pour les structures prestataires d’aide à domicile entre le régime de l’agrément et celui de l’autorisation.

Le projet de loi supprime ce droit pour les structures nouvellement créées. Cette disposition est, selon nous, en contradiction avec la rédaction de l’article 31, qui prévoit des CPOM pour toutes les structures relevant de ce droit d’option, à savoir les structures agréées et celles qui sont autorisées.

Mme la présidente. La parole est à Mme Bérengère Poletti, pour soutenir l’amendement n386.

Mme Bérengère Poletti. Il est défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Martine Pinville, rapporteure. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État. L’idée est bien sûr de maintenir la coexistence des deux régimes, mais en évitant que les structures fassent des allers et retours entre les deux. Le dispositif est déjà peu lisible, assez complexe : le Gouvernement souhaite donc mettre fin à ce mouvement de balancier. Par conséquent l’avis du gouvernement est défavorable sur ces amendements.

Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud Richard.

M. Arnaud Richard. J’entends tout à fait, madame la secrétaire d’État, l’argument du va-et-vient entre les deux régimes. Mais vous initiez un choc entre deux univers, ce qui à notre sens aura des conséquences en termes d’emploi.

(Les amendements identiques nos 346386 ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Bérengère Poletti, pour soutenir l’amendement n161.

Mme Bérengère Poletti. Si tous les présidents de conseils généraux partageaient, madame la secrétaire d’État,votre vision de l’organisation de l’aide à domicile, je comprendrais tout à fait votre position. Il est vrai que le régime de l’autorisation est un bon système. Vous reconnaissez que les services commerciaux agréés – notamment, d’ailleurs, quand ils exercent dans le cadre d’une franchise et s’engagent dans des démarches de qualité – ont une présence reconnue sur le terrain.

Malheureusement, tout cela ne reflète pas la réalité. Dans certains départements, le système ne fonctionne pas bien et les services commerciaux ont avec les conseils généraux des relations tendues, alors même qu’ils exercent leur métier avec une qualité et une compétence reconnues.

M. Arnaud Richard. Très bien !

Mme Bérengère Poletti. Vouloir orienter tout le monde vers le régime de l’autorisation, qui dépend du conseil général, risque de mettre en difficulté un certain nombre d’entreprises, de services commerciaux, et donc d’emplois. La période que nous vivons ne s’y prête pas.

Tant que nous subirons un contexte économique difficile, et compte tenu du nombre d’emplois dans ces entreprises, il nous faut plus de souplesse. Ces services doivent pouvoir contractualiser avec le département, même s’ils ne sont pas placés sous le régime de l’autorisation.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Martine Pinville, rapporteure. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État. Il faut peut-être rappeler, madame la députée, que les structures privées peuvent accéder au régime de l’autorisation. Cette option ne leur est pas interdite. Je partage une partie de vos remarques, et je l’ai dit dans une de mes précédentes interventions : il n’y a pas, d’un côté, la qualité et, de l’autre, le simple goût du profit.

En revanche, la question de la couverture territoriale et de l’obligation de répartir les services dans l’ensemble des départements se pose. Et là, les obligations ne sont pas tout à fait les mêmes. C’est pour cela que j’émets un avis défavorable sur votre amendement.

(L’amendement n161 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Pinville, rapporteure, pour soutenir l’amendement n679.

Mme Martine Pinville, rapporteure. C’est un amendement rédactionnel.

(L’amendement n679, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 33 est adopté.)

Article 34

Mme la présidente. La parole est à Mme Bérengère Poletti, inscrite sur l’article 34.

Mme Bérengère Poletti. L’organisation des services d’aide et l’offre de soins à domicile restent, dans notre pays, complexes. Pour le maintien des personnes âgées à domicile, plusieurs types d’intervention sont possibles.

L’un est médicalisé, dans le cadre des services de soins infirmiers à domicile, ou SSIAD, prescrit par le médecin et financé par la Sécurité sociale. Le mode de tarification de ce SSIAD diffère totalement de celui du service d’aide et d’accompagnement à domicile, ou SAAD. Celui-ci fonctionne selon le nombre de places définies pour le SSIAD : il est donc limitatif. L’autre mode se met en place, à l’initiative du conseil général, qui établit un plan d’aide et fait appel aux services d’aide et d’accompagnement à domicile.

Il n’est pas rare que les deux services se succèdent pour intervenir successivement, le même jour, auprès de la même personne âgée.

Ainsi, la création des services polyvalents d’aide et de soins à domicile, ou SPASAD, répondait à l’objectif de rendre plus performante et plus claire l’organisation du système pour les personnes concernées.

Mais le régime juridique prévu pour les SPASAD est insuffisamment incitatif, et s’apparente, on peut le dire, à une coquille vide, ce qui fait que peu de services les ont rejoints. Ceux qui l’ont fait n’y ont d’ailleurs pas trouvé de bénéfice.

Il est donc indispensable – et je soutiendrai les mesures qui nous sont proposées – d’expérimenter, pour les SPASAD, des dispositifs plus performants.

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements, nos 644, 665 et 664, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

La parole est à Mme la secrétaire d’État, pour les soutenir.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État. Ces trois amendements traduisent la volonté du Gouvernement de faire évoluer les SPASAD. Ils seront complétés par l’amendement suivant n634 de Mme la rapporteure.

J’ai en effet la conviction que le décloisonnement des métiers et des dispositifs du secteur du soin à domicile constitue un enjeu majeur. Les SPASAD existent depuis 2004 et regroupent un SAAD et un SSIAD prestataire. Même si de nombreux « pôles domicile » fonctionnent en offre coordonnée, on ne compte que 81 autorisations SPASAD.

Pourtant, le SPASAD constitue un outil adéquat pour une refondation en profondeur de l’aide à domicile. Il offre un avantage pour les usagers, qui ont besoin à la fois d’une prestation en aide et en soins, mais aussi pour les gestionnaires, qui peuvent mutualiser des fonctions et conduire un projet de service plus ambitieux, et pour les professionnels, qui voient s’ouvrir des possibilités d’évolution dans leurs métiers. Le décloisonnement et le travail d’équipe me paraissent également un des effets extrêmement importants qui découle de cette organisation.

Ces professionnels animent d’ailleurs des blogs très intéressants traitant de l’aide à domicile, et dont l’un des thèmes récurrents est la solitude. Ils se font l’écho, très souvent, de l’absence de liens, de coordination et de travail d’équipe avec les autres intervenants. Pour cette raison, je crois beaucoup à l’avenir des SPASAD.

L’amendement n644 porte sur leur première évolution : il permet de réduire la durée de l’expérimentation du fonctionnement de services intégrés polyvalents d’aide et de soins à domicile de trois à deux ans.

Les amendements nos 665 et 664 portent sur la seconde évolution : rendre les SPASAD éligibles aux actions de prévention financées par la conférence des financeurs, conformément au vote intervenu lors de l’adoption des articles 3 et 4.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Martine Pinville, rapporteure. Favorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Jeanine Dubié.

Mme Jeanine Dubié. Ces trois amendements proposés par le gouvernement constituent une  nette amélioration. Cependant, les SPASAD, qui existent depuis plus de dix ans, facilitent la coordination de la prise en charge autour de la personne. Certaines expériences montrent que la prestation que les services rendent s’en trouve améliorée.

Il aurait donc été intéressant de s’interroger sur les difficultés de leur développement – Bérengère Poletti en a évoqué certaines. L’un des problèmes réside dans la coordination des financements.

Mme Bérengère Poletti. Oui.

Mme Jeanine Dubié. Le fondement même du SPASAD se justifie totalement et correspond tout à fait à l’objectif d’améliorer la prise en charge de la personne.

Il faudrait désormais que nous dépassions les problèmes liés au financement et à la coordination des services. Je compte beaucoup sur la conférence des financeurs – je sais qu’elle traitera avant tout de prévention – pour dépasser les difficultés.

Je regrette qu’on réserve cette possibilité de conclure un CEPOM aux SPASAD expérimentaux, alors que certains autres remplissent de façon satisfaisante leurs missions. C’est dommage – si j’ai bien compris le texte – de les écarter du dispositif.

(Les amendements nos 644, 665664, acceptés par la commission et le Gouvernement, sont successivement adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Pinville, rapporteure, pour soutenir l’amendement n634.

Mme Martine Pinville, rapporteure. Cet amendement propose d’avancer au 30 septembre 2016, au lieu du 30 juin 2017, la date de remise du rapport sur l’expérimentation des SPASAD. Tout à l’heure, madame la ministre y semblait favorable.

(L’amendement n634, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Pinville, pour soutenir l’amendement n680 rectifié.

Mme Martine Pinville, rapporteure. C’est un amendement rédactionnel.

(L’amendement n680 rectifié, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 162 et 533.

La parole est à M. Denis Jacquat, pour soutenir l’amendement n162.

M. Denis Jacquat. La création de services polyvalents d’aide et de soins à domicile doit permettre une meilleure coordination des interventions entre les prestations liées à l’aide aux actes de la vie courante des personnes en situation de perte d’autonomie et celles relatives aux soins, qui sont délivrées par un seul et même service.

Cette coordination par un seul et même acteur doit également constituer une mutualisation des moyens au sein du service, susceptible de générer des économies d’échelle. Dans la négative, le recours aux SPASAD pourrait se révéler contre-productif pour les finances publiques.

De plus, la création de SPASAD peut contrevenir au principe de neutralité entre la prescription et la prestation. Cette démarche nécessite une neutralité certaine.

Aussi, afin de lever toute ambiguïté entre la mission d’évaluation et celle de prescription et de prestation, il est nécessaire de préciser que la mission d’information et de prescription des équipes médico-sociales des SPASAD doit garantir une équité de traitement entre tous les services de prestation du territoire concerné. Le bénéficiaire reste libre du choix du prestataire de services.

Mme la présidente. La parole est à Mme Jeanine Dubié, pour soutenir l’amendement n533.

Mme Jeanine Dubié. J’ai d’autant plus de regrets que nous avions déposé un amendement, déclaré irrecevable, qui aménageait le régime juridique des SPASAD pour les rendre plus attractifs pour les gestionnaires de services et mieux répondre aux besoins multidimensionnels des personnes en perte d’autonomie.

L’amendement n533 tend à préciser que l’évaluation porterait notamment sur l’amélioration de la qualité d’accompagnement des bénéficiaires et les éventuelles économies d’échelle, parce que je suis persuadée que la mutualisation permettra de réduire le coût pour les finances publiques.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements ?

Mme Martine Pinville, rapporteure. Ces problématiques seront naturellement évoquées dans le rapport qui sera remis au Parlement et je ne pense pas utile de les évoquer ici. Je suis donc défavorable à ces amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État. Les évaluations médico-économiques auxquelles seront soumises les expérimentations des SPASAD prendront en compte ces critères. Quant aux économies d’échelle que vous évoquez, je ne suis pas sûre que ce soit totalement de nature législative. Je les espère comme vous, mais je ne préjuge pas.

Mme Bérengère Poletti. Nous non plus !

(Les amendements identiques nos 162 et 533 ne sont pas adoptés.)

(L’article 34, amendé, est adopté.)

Après l’article 34

Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud Richard, pour soutenir l’amendement n331.

M. Arnaud Richard. Cet amendement pourrait être adopté à l’unanimité.

Les services à la personne ont tous en commun de rechercher le mieux-vivre au quotidien et jouent un rôle déterminant en faveur du maintien et du renforcement de la cohésion sociale. Ils ont un poids considérable dans l’économie et dans l’emploi.

Cet amendement, et je crois que Mme la secrétaire d’État, qui est très à l’écoute ce matin, sera favorable à cette proposition, tend à supprimer une appellation totalement désuète et à notre sens impropre, celle d’employés de maison, qui désigne dans notre droit les salariés des particuliers employeurs.

Nous ne ferons pas l’économie d’une clarification de ce secteur qui, je vous l’accorde, madame la secrétaire d’État, reste très complexe mais, si nous pouvions mettre à mal une telle appellation, cela ne coûterait pas cher aux finances publiques, c’est une décision attendue et cela ferait chaud au cœur à un certain nombre de ces salariés.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Martine Pinville, rapporteure. Nous avons déjà supprimé cette appellation au début du texte par amendement. Vous souhaitez, monsieur Richard, modifier également un article du code du travail. Je ne sais si c’est dans le contexte de ce projet de loi qu’il faut le faire et j’émets donc un avis défavorable à votre amendement, mais j’entends bien ce que vous dites. C’est évidemment un terme désuet que l’on ne doit plus employer ainsi.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État. Défavorable.

Sur le fond, nous sommes d’accord, mais, comme vous proposez de modifier le code du travail et que tous les salariés employés par les particuliers ne sont pas des employés de maison, je ne suis pas totalement certaine des conséquences sur d’autres professions d’une telle modification. C’est le principe de précaution, on évite les effets induits auxquels on ne pense pas à l’avance.

Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud Richard.

M. Arnaud Richard. Je comprends votre prudence, madame la secrétaire d’État, mais nous sommes là pour construire la loi. Si l’on change de terminologie, nous en tirerons les conséquences dans les autres codes. Je ne vois pas pourquoi nous ne pourrions pas toucher au code du travail dans ce texte. Je m’étonne que vous soyez favorable à une telle proposition, mais que vous préfériez conserver le terme d’employés de maison, qui est d’un autre siècle.

(L’amendement n331 n’est pas adopté.)

Avant l’article 35

Mme la présidente. Je suis saisie, avant l’article 35, de deux amendements, nos 341 rectifié et 620, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Arnaud Richard, pour soutenir l’amendement n341 rectifié.

M. Arnaud Richard. Il s’agit d’amplifier la mesure de soutien aux aidants que nous avons saluée dans la discussion générale. Cet amendement vise à exonérer de l’impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux le dédommagement perçu par l’aidant.

Mme la présidente. La parole est à M. Xavier Breton, pour soutenir l’amendement n620.

M. Xavier Breton. Un rescrit de l’administration fiscale en date du 24 juillet 2007 précise que les sommes perçues en tant que dédommagement par les aidants familiaux au titre de la prestation de compensation du handicap sont imposables en tant que bénéfices non commerciaux.

Cette imposition abaisse de fait le niveau de dédommagement, déjà faible, de ces derniers. De plus, ce dédommagement est soumis aux prélèvements sociaux, qu’il s’agisse de la CSG ou de la CRDS, ce qui diminue d’autant le montant effectivement perçu par l’aidant ainsi dédommagé.

Par ailleurs, cette fiscalité peut impacter d’autres aides auxquelles peut prétendre la famille, le foyer fiscal. En effet, la prise en compte par la CAF de tous les revenus imposables peut conduire à une réduction, voire une suppression des allocations soumises à conditions de ressources comme l’aide personnalisée au logement ou l’allocation de rentrée scolaire.

Cette prise de position de l’administration fiscale est contraire à l’esprit de la loi du 11 février 2005, qui vise à reconnaître le rôle essentiel qu’assurent les aidants familiaux en permettant à leurs proches handicapés de les dédommager.

Afin de mettre fin à cette situation, il vous est proposé que, comme pour la prestation de compensation en tant que telle, les sommes versées à titre de dédommagement aux aidants familiaux des personnes handicapées par le biais de cette prestation soient explicitement exonérées de l’impôt sur le revenu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements ?

Mme Martine Pinville, rapporteure. Sur le principe, de telles propositions doivent être discutées lors de l’examen du projet de loi de financement de la Sécurité sociale puisqu’il s’agit d’exonérations.

Sur le fond, les sommes perçues par les aidants familiaux dans le cadre de cette prestation de compensation traduisent malgré tout l’exercice d’une forme d’activité, même si l’on peut quelquefois l’envisager autrement, et c’est à ce titre que le dédommagement est soumis à l’impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux.

Pour les aidants familiaux dont les revenus sont faibles, un abattement forfaitaire de 34 % s’applique lorsque la compensation n’excède pas 32 100 euros.

Parce qu’il faut travailler sur le sujet, j’émets un avis défavorable à ces deux amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État. Défavorable.

(L’amendement n341 rectifié n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Maintenez-vous votre amendement, monsieur Breton ?

M. Xavier Breton. J’ai bien retenu que nous en pourrions en discuter dans le PLFSS, et il faudra effectivement y revenir mais, en attendant, je maintiens mon amendement.

Mme la présidente. Je m’étonne d’ailleurs qu’il n’ait pas été frappé par l’article 40 et qu’il ait donc pu atteindre le stade de la discussion en séance.

(L’amendement n620 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

3

Ordre du jour de la prochaine séance

Mme la présidente. Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :

Suite de la discussion du projet de loi relatif à l’adaptation de la société au vieillissement.

La séance est levée.

(La séance est levée à treize heures.)

La Directrice du service du compte rendu de la séance

de l’Assemblée nationale

Catherine Joly