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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIVe législature
Session ordinaire de 2013-2014

Compte rendu
intégral

Deuxième séance du mercredi 09 octobre 2013

SOMMAIRE

Présidence de M. Christophe Sirugue

1. Avenir et justice du système de retraites

Discussion des articles (suite)

Article 3 (suite)

Amendements nos 2957 , 69 , 2324 , 2325 , 2326 , 2335 , 2337 , 1752 , 1753 , 1754 , 1763 , 1765 , 2294 , 2295 , 2296 , 2305 , 2307 , 1722 , 1723 , 1724 , 1735 , 1737 , 1738 , 1739 , 1748 , 1750 , 2219 , 2220 , 2221 , 2230 , 2232

Suspension et reprise de la séance

Amendements nos 1783 , 1784 , 1793 , 1795 , 3017 , 2503 rectifié , 1552 , 3040 , 2250 , 2251 , 2260 , 2262

Rappel au règlement

M. Patrick Hetzel

M. Nicolas Sansu

M. Pascal Terrasse, rapporteur pour avis

Suspension et reprise de la séance

Mme Valérie Rabault, vice-présidente de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

M. Patrick Hetzel

M. André Chassaigne

Article 3 (suite)

Amendements nos 2762 , 3092 (sous-amendement) , 1812 , 1872 , 1873 , 1874 , 1883 , 1885 , 1842 , 52

Rappel au règlement

M. Arnaud Robinet

Suspension et reprise de la séance

Amendements nos 1887 , 1889

Rappel au règlement

M. Arnaud Robinet

Mme Marisol Touraine, ministre

Article 3 (suite)

Amendements nos 1917 , 1960 , 2814 , 19 , 2865 , 1994 , 2866 , 1316 , 1317 , 1326 , 1328 , 2912 , 2008 , 2009 , 2982 , 2914 , 3019 , 2039 , 20 , 107 , 2864 , 2815

Mme Jacqueline Fraysse

M. Arnaud Robinet

M. Philippe Vigier

M. Jean-Marc Germain

Après l’article 3

Amendements nos 193 , 192 , 10 , 191 , 836 rectifié

Article 4

Mme Isabelle Le Callennec

Mme Jacqueline Fraysse

M. André Chassaigne

M. Gilles Lurton

M. Marc Dolez

M. Denis Jacquat

Mme Dominique Nachury

M. Nicolas Sansu

Mme Jeanine Dubié

M. Philippe Vigier

M. Jacques Lamblin

Mme Annie Le Houerou

M. Jean-Pierre Door

M. Dominique Tian

M. Guillaume Chevrollier

M. Xavier Bertrand

M. Francis Vercamer

Mme Véronique Louwagie

M. Arnaud Robinet

M. Michel Liebgott

M. Jean-Marc Germain

M. Thierry Braillard

Rappel au règlement

M. Xavier Bertrand

Article 4 (suite)

Amendements nos 11 , 141 , 743 , 744 , 745 , 1558 , 2862 , 2994

2. Ordre du jour de la prochaine séance

Présidence de M. Christophe Sirugue

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

1

Avenir et justice du système de retraites

Suite de la discussion d’un projet de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion, après engagement de la procédure accélérée, du projet de loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraites (nos 1376, 1400, 1397).

Discussion des articles (suite)

M. le président. Cet après-midi, l’Assemblée a poursuivi l’examen des articles, s’arrêtant à l’amendement n2957 à l’article 3.

Article 3 (suite)

M. le président. La parole est à M. Sergio Coronado, pour soutenir l’amendement n2957.

M. Sergio Coronado. Monsieur le président, madame la ministre des affaires sociales et de la santé, mes chers collègues, lors de l’examen du texte en commission, j’avais déposé avec mon collègue Pouria Amirshahi un certain nombre d’amendements qui visaient à mettre en lumière les difficultés des Français résidant hors de France à accéder à leurs pensions de retraite et rétablir une forme d’égalité.

L’un de ces amendements a été adopté. Nous demandions au Gouvernement d’éclairer le Parlement d’ici à juillet 2014 sur les conditions d’application des conventions bilatérales existantes en matière de retraite et sur les conséquences de leur mise en œuvre pour les Français ayants droit de systèmes étrangers. C’est un premier pas positif pour appréhender un certain nombre de difficultés rencontrées par nos compatriotes dans leurs accès au droit à la retraite – et y répondre, je l’espère.

Les difficultés néanmoins dépassent largement le cadre des conventions bilatérales, vous le savez très bien, madame la ministre, vous qui avez signé il n’y a pas si longtemps une convention avec le Brésil, puisqu’un certain nombre de pays n’ont pas signé de conventions avec la France.

Il existe ainsi une véritable rupture d’égalité entre les Français résidant sur notre territoire et ceux qui résident hors de France. Il n’est qu’à prendre l’exemple du certificat d’existence qui est demandé aux Français résidant à l’étranger, et à eux seuls, pour accéder au versement de pensions de retraite.

Auparavant, ce certificat était requis à des rythmes différents en fonction du pays d’installation et de résidence. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 a procédé à une harmonisation : désormais, il doit être fourni chaque année. C’est une avancée réelle, mais parfois difficilement applicable. Dans un certain nombre de pays, et notamment dans ma circonscription d’Amérique latine, il est très difficile pour nos compatriotes de faire parvenir leur certificat d’existence à la caisse nationale d’assurance vieillesse dans le délai d’un mois imparti, du fait notamment des difficultés matérielles et du mauvais fonctionnement du système postal – je vous rappelle le fiasco du vote par correspondance lors des élections législatives chez les Français de l’étranger. Or le non respect de ce délai entraîne la suspension des versements des pensions de retraite. Chaque année, nos compatriotes sont donc confrontés à ce problème. Chaque année, les versements sont suspendus, les mettant en grave difficulté financière. Les postes consulaires ont déjà rapporté cette situation. Elle a été évoquée également par l’Assemblée des Français de l’étranger et les sénateurs des Français de l’étranger.

Il me paraît nécessaire de mieux la prendre en compte. C’est la raison pour laquelle je propose que le comité de suivi prévu par la présente réforme intègre la situation des Français de l’étranger dans l’étude qu’il devra fournir régulièrement. Il n’y a pas de raison pour que leur situation soit ignorée.

M. le président. La parole est à M. Michel Issindou, rapporteur de la commission des affaires sociales, pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n2957.

M. Michel Issindou, rapporteur de la commission des affaires sociales. Monsieur Coronado, vous avez posé les bonnes questions sur les Français résidant à l’étranger. Nous les avions abordées à l’occasion de l’examen du PLFSS pour 2013, et celle du certificat d’existence a été réglée. Nous sommes conscients des difficultés qu’ils rencontrent, nous les connaissons mal d’ailleurs.

M. Sergio Coronado. On ne les connaît pas.

M. Michel Issindou, rapporteur. C’est la raison pour laquelle nous avons accepté un amendement demandant au Gouvernement de présenter un rapport qui devrait nous éclairer davantage.

Cela dit, le comité de suivi est un comité de pilotage ; il n’a donc pas vocation à analyser toutes les problématiques particulières. Je ne suis donc pas favorable à votre amendement.

M. le président. La parole est à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé, pour donner l’avis du Gouvernement sur cet amendement.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. Monsieur le député, je vous demanderai de retirer votre amendement. Sinon, je lui donnerai un avis défavorable même si, à l’évidence, la question que vous avez posée renvoie à des situations concrètes préoccupantes. Nous avons eu l’occasion d’en débattre en commission ; je soulignerai deux points.

Premièrement, l’article 83 du projet de loi de financement de la sécurité sociale que vous avez voté l’année dernière prévoyait la mutualisation entre les régimes des demandes des certificats d’existence afin que l’on n’ait pas à demander plusieurs fois les mêmes documents. Le décret est actuellement au contreseing et sera donc publié très prochainement, ce qui permettra d’avancer concrètement en la matière.

Deuxièmement, la solution sera trouvée davantage dans le cadre du GIP qui sera créé à l’article 27, c’est-à-dire le règlement des problèmes interrégimes.

Quoi qu’il en soit, à l’évidence, comme l’a souligné M. le rapporteur, le comité de suivi est là non pour régler les problèmes spécifiques d’un régime mais pour faire une évaluation et des recommandations lorsque, globalement, l’on assiste à des difficultés. Par conséquent, si la question que vous posez est fondée, elle ne peut trouver de réponse dans le cadre de ce comité de suivi.

M. le président. La parole est à M. Denis Jacquat.

M. Denis Jacquat. Le sujet a été évoqué en commission, mais je ne sais plus si c’est à propos de l’article 3 ou à l’occasion de l’article 21.

Il y a des pays avec lesquels nous avons des conventions et d’autres avec lesquels nous n’en avons pas, ce qui crée de grandes difficultés. Il est vrai, monsieur le rapporteur, que ce n’est pas le rôle du comité de suivi, mais il faut régler le problème car certains Français ayant travaillé à l’étranger ne parviennent pas à toucher leur retraite en raison de problèmes administratifs, de problèmes de papiers.

M. Sergio Coronado. Tout à fait.

M. Denis Jacquat. Ce dont j’ai peur, c’est qu’en choisissant ce soir une position d’attente, on en reste au vœu pieux, comme cela arrive très souvent.

Il faudrait donc, madame la ministre, que vous nous donniez plus tard des réponses complémentaires. Les Français résidant à l’étranger, qui travaillent très souvent pour des entreprises françaises à l’étranger ou pour leur propre compte, ne doivent plus rencontrer de difficultés pour percevoir leur retraite. Pour certains, c’est la misère quand ils rentrent en France.

M. le président. La parole est à M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Je veux bien entendre qu’il n’est pas dans le rôle du comité de suivi de mener l’enquête sur l’ensemble des régimes et des situations. Néanmoins, je suis d’accord avec le rapporteur quand il reconnaît – à la différence de Mme la ministre – que la situation des retraités à l’étranger est mal connue, méconnue même, et que nous n’avons pas une vision très juste de cette question.

Je reconnais que cet amendement n’est pas opportun, mais cela concerne une population qui va croissant, plus de 2,5 millions de Français à l’étranger. Comme M. Jacquat, l’a rappelé, il y a parfois des situations dramatiques car, si le certificat de vie n’arrive pas dans les délais, la retraite est suspendue et c’est l’engrenage : or cela se produit très souvent. Prenez contact avec votre collègue ministre des affaires étrangères, vous verrez que les postes consulaires regorgent de ce type d’histoires où ils doivent venir en aide à certains de manière urgente, la cause des problèmes étant simplement ce délai qui a été fixé et les difficultés postales ou organisationnelles.

Je veux bien retirer mon amendement, madame la ministre, à condition que vous vous engagiez à traiter cette question et que vous me disiez dans quel cadre elle le sera. Il y a eu des avancées sur les conventions bilatérales puisqu’un amendement a été accepté à l’article 29 bis. J’attends donc des réponses un peu plus précises pour faire preuve de bonne volonté, comme c’est apparemment le cas du Gouvernement.

M. le président. La parole est à M. Dominique Tian.

M. Dominique Tian. Le justificatif d’existence est quelque chose de fondamental car on a assisté, vous le savez, à des phénomènes de fraude considérables. Le problème tient au fait qu’il y a des pays qui ne signent pas de conventions bilatérales. C’est de ce côté, madame la ministre, qu’il faut accélérer les choses car, lorsqu’une convention est signée, il n’y a plus de souci particulier. C’est l’absence de convention pour telle ou telle raison qui entraîne ces difficultés matérielles et administratives. Or nous n’en avons pas signé beaucoup.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marisol Touraine, ministre. Monsieur Coronado, j’ignore d’autant moins le sujet que, vous l’avez vous-même indiqué, je suis fortement impliquée pour accélérer la signature des conventions bilatérales. Comme j’ai eu l’occasion de le dire en commission, l’une des difficultés auxquelles nous sommes confrontés est incontestablement due au fait qu’avec de très nombreux pays, et non des moindres, nous n’avons pas de convention de ce genre, alors qu’un grand nombre de nos concitoyens y travaillent. J’ai engagé un mouvement en direction des pays latino-américains en particulier – vous avez évoqué le Brésil, d’autres pays sont également concernés. C’est donc bien une préoccupation pour moi.

En commission, j’ai indiqué que j’étais favorable à ce qu’un rapport soit présenté sur la situation de ces conventions bilatérales pour voir comment nous devions accélérer le processus et aller plus loin. On pourrait parfaitement concevoir qu’il porte également sur la question que vous posez ce soir, qui ne peut trouver de solution dans le cadre du comité de suivi. Nous pourrions ainsi préciser dans ce sens la disposition adoptée à l’article 29 bis.

M. le président. La parole est à M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Je prends acte de l’engagement de Mme la ministre d’élargir le champ du rapport prévu dans le cadre de l’article 29 bis auquel j’ai fait référence tout à l’heure, qui ne concernait au départ que les conventions bilatérales. Je retire donc mon amendement

(L’amendement n2957 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Decool, pour soutenir l’amendement n69.

M. Jean-Pierre Decool. Cet amendement technique vise à donner au comité la possibilité de soumettre des propositions lorsqu’il rend son avis, tout en respectant les dispositions de l’article L. 111-2-1 :

« La nation affirme son attachement au caractère universel, obligatoire et solidaire de l’assurance maladie.

« Indépendamment de son âge et de son état de santé, chaque assuré social bénéficie, contre le risque et les conséquences de la maladie, d’une protection qu’il finance selon ses ressources.

« L’État, qui définit les objectifs de la politique de santé publique, garantit l’accès effectif des assurés aux soins sur l’ensemble du territoire.

« En partenariat avec les professionnels de santé, les régimes d’assurance maladie veillent à la continuité, à la coordination et à la qualité des soins offerts aux assurés, ainsi qu’à la répartition territoriale homogène de cette offre. Ils concourent à la réalisation des objectifs de la politique de santé publique définis par l’État.

« Chacun contribue, pour sa part, au bon usage des ressources consacrées par la nation à l’assurance maladie. »

C’est donc un amendement de protection de l’assuré.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Issindou, rapporteur. Défavorable. Votre demande, monsieur Decool, est satisfaite par l’alinéa 12, qui précise que la mission du comité de suivi est de rendre un avis sur l’adéquation du système de retraites aux objectifs fixés par l’article L. 111-2-1.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Patrick Hetzel.

M. Patrick Hetzel. Non, l’alinéa 12 ne satisfait pas cet amendement, qui est plus précis. Ce dernier indique en effet clairement que le comité de suivi a la possibilité d’émettre des propositions qui sont des modifications, ce que ne précise pas l’alinéa. Que vous ne vouliez pas accepter cet amendement, soit, mais l’argument consistant à dire qu’il est satisfait à travers l’alinéa 12 est faux.

(L’amendement n69 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’une série d’amendements identiques, nos 2324 à 2338.

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n2324.

Mme Jacqueline Fraysse. Aucune disposition ne prévoit que le comité de suivi puisse étudier, au titre des recommandations qu’il aura la possibilité d’émettre, un retour à l’âge légal à soixante ans et une réduction de la durée de cotisation. Il s’agit donc de remédier à ce manque, car l’alinéa 20, qui indique les recommandations privilégiées en cas d’évolutions économiques ou démographiques plus favorables, mentionne le renforcement de la solidarité du régime « au profit du pouvoir d’achat des retraités les plus modestes, de l’égalité entre les femmes et les hommes et de la prise en compte de la pénibilité et des accidents de la vie professionnelle », autant de mesures auxquelles nous souscrivons, mais qui restent très hypothétiques.

Qui plus est, nous considérons que des mesures de justice telles que le retour à l’âge légal à soixante ans et la réduction de la durée de cotisation ne relèvent pas d’un quelconque lien avec les évolutions économiques ou démographiques, mais d’un choix de société et même de civilisation. Ce choix a été celui de toutes les femmes et de tous les hommes de gauche au cours de notre histoire, jusqu’en 2010, où toute la gauche était encore rassemblée pour défendre de telles mesures. À l’époque, le parti aujourd’hui majoritaire écrivait : « Le maintien de l’âge légal de départ en retraite à soixante ans est pour les socialistes une exigence. »

M. Arnaud Robinet. Mais ça, c’était avant !

Mme Jacqueline Fraysse. C’était un bel objectif, c’était aussi le nôtre ; c’est notre conviction et nous ne l’avons pas abandonnée. Voilà pourquoi nous avons déposé ces amendements.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n2325.

M. André Chassaigne. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Marc Dolez, pour soutenir l’amendement n2326.

M. Marc Dolez. Nous avons la conviction qu’il est possible d’établir un autre financement de notre système de retraites, assis sur un autre partage des richesses, et qui permettrait de revenir à l’âge légal à soixante ans et de réduire la durée de cotisation. Ces amendements font écho à une précédente série, que nous avons défendue hier soir après l’article 2, par laquelle nous demandions que le Gouvernement présente au Parlement un rapport permettant d’étudier l’impact de ces propositions de financement ; dans la mesure où vous n’êtes pas convaincus qu’il faille les adopter d’emblée et nous comprenons bien qu’une étude sérieuse faciliterait la prise de décision. Ces amendements n’ont pas été acceptés ; nous les représentons ce soir car, dès lors qu’est créé un comité de suivi composé d’experts, eh bien, nous acceptons de soumettre nos propositions à l’expertise de ce comité, dans l’élaboration de ses recommandations. Par conséquent, le refus qui nous a été opposé hier sur un rapport parlementaire, ne devrait pas pouvoir nous être opposé ce soir, s’agissant de l’extension du champ de compétences du comité de suivi.

M. le président. La parole est à M. Alfred Marie-Jeanne, pour soutenir l’amendement n2335.

M. Alfred Marie-Jeanne. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Nicolas Sansu, pour soutenir l’amendement n2337.

M. Nicolas Sansu. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements ?

M. Michel Issindou, rapporteur. Défavorable. Mme Fraysse et M. Dolez ont défendu, avec conviction, le retour à la retraite à soixante ans. Nous l’avons partiellement rétablie en juillet 2012 pour les personnes ayant eu des carrières longues ; cette mesure a été prise dès le début de la législature. Si la situation s’améliore, ce que nous espérons tous, en termes d’emploi et donc de recettes, la priorité sera peut-être plutôt de renforcer les dispositifs de solidarité du système ou de diminuer la durée d’assurance, mais pas forcément de revenir à la retraite à soixante ans.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Arnaud Robinet.

M. Arnaud Robinet. Les amendements de Mme Fraysse et de ses collègues du groupe GDR sont relativement intéressants. Dans la mesure où la création de ce comité de suivi a été actée il y a quelques heures, il serait pertinent qu’il étudie les évolutions du système des retraites, et notamment les possibilités, lorsque les conditions le permettent, de revenir à soixante ans ou de baisser la durée de cotisation. Mais il serait tout aussi intéressant, madame Fraysse, qu’il puisse également formuler, lorsque les conditions s’y prêteront, des recommandations quant à la baisse des cotisations salariales et patronales…

M. le président. La parole est à M. Philippe Vigier.

M. Philippe Vigier. À mes yeux également, ces amendements présentent un intérêt certain. Vous avez créé ce comité : donnons-lui donc un sens. M. Dolez a entendu, et compris que la retraite à soixante ans était définitivement enterrée : le parti socialiste n’y reviendra pas. Nos collègues demandent néanmoins si l’on ne pourrait envisager d’y revenir ou diminuer la durée de cotisation, le moment venu. Mais en effet miroir, puisque nous voyons bien qu’un problème de financement et de pérennité du régime par répartition se pose, le champ de la réflexion doit pouvoir être étendu dans l’autre sens et ce comité pourrait faire également des propositions dans le sens de l’allongement de la durée de cotisation et du report de l’âge limite. Nous aurons ainsi les uns et les autres des réponses et cela donnera un vrai sens au comité de suivi.

M. le président. La parole est à M. Marc Dolez.

M. Marc Dolez. J’avoue avoir du mal à vous comprendre, monsieur le rapporteur. Nous faisons des propositions ; on peut ne pas être d’accord avec celles-ci, les considérer comme irréalistes, mais nous persistons à croire qu’elles sont de nature à changer la donne. Par ces amendements, nous ne demandons qu’une chose : c’est que ce comité d’experts puisse les étudier et, les ayant étudiées, faire le cas échéant des recommandations. Je suis donc un peu déçu par votre réponse, car elle revient à dire que nos propositions ne valent même pas la peine d’être étudiées.

M. le président. La parole est à M. Arnaud Robinet.

M. Arnaud Robinet. Je précise que le groupe UMP votera les amendements du groupe GDR.

(Les amendements identiques nos 2324, 2325, 2326, 2335 et 2337 ne sont pas adoptés.)



(Exclamations sur divers bancs.)

M. Marc Dolez. Cela se recompte !

M. Nicolas Sansu. Il faut recompter, monsieur le président !

M. le président. S’il vous plaît, chers collègues, ne commençons pas la soirée comme cela !

Je suis saisi d’une nouvelle série d’amendements identiques, nos 1752 à 1766.

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n1752.

Mme Jacqueline Fraysse. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n1753.

M. André Chassaigne. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Marc Dolez, pour soutenir l’amendement n1754.

M. Marc Dolez. Cette série d’amendements est dans le même esprit que la précédente, mais j’espère ne pas recevoir la même réponse. Il s’agit d’étendre les sujets sur lesquels le comité de suivi peut présenter des recommandations. Nous mettons au débat avec constance et conviction un certain nombre de propositions de nature à changer les problématiques. Nous souhaitons à présent que le comité de suivi puisse aborder le sujet du départ anticipé entre cinquante et cinquante-cinq ans pour les travailleurs exposés à des facteurs de pénibilité, les carrières longues et les personnes handicapées, car les dispositifs en vigueur nous paraissent insuffisants, et formuler des propositions adossées à des mesures de financement.

M. le président. La parole est à M. Alfred Marie-Jeanne, pour soutenir l’amendement n1763.

M. Alfred Marie-Jeanne. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Nicolas Sansu, pour soutenir l’amendement n1765.

M. Nicolas Sansu. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Issindou, rapporteur. Je vais encore être désagréable avec M. Dolez, que j’aime bien par ailleurs, et cela m’ennuie beaucoup. (Sourires.)

M. Denis Jacquat. C’est l’amour vache ! (Sourires.)

M. Michel Issindou, rapporteur. Tout d’abord, vous n’avez pas voulu de ce comité ; à présent qu’il existe, voilà que vous l’assaillez de demandes…

M. Marc Dolez. On s’en sert !

M. Michel Issindou, rapporteur. Il n’est pas encore institué qu’il a déjà du travail pour dix ans ! Sa mission est de garantir la pérennité du système, de vérifier les écarts et l’égalité entre hommes et femmes, de s’assurer que les grands objectifs fixés à l’article 1er sont bien respectés ; mais on ne peut pas lui demander, avant même sa constitution, d’examiner s’il est possible d’étendre la prise en compte de la pénibilité entre cinquante et cinquante-cinq ans. Je vous rappelle, monsieur Dolez, que les articles à venir proposeront une réforme majeure en matière de pénibilité, qui concernera un cinquième des salariés. Nous serons d’accord, je pense, pour considérer que ces mesures sont excellentes. Avis défavorable, j’en suis désolé !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

M. le président. Sur les amendements identiques nos 1752 à 1766, je suis saisi par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

La parole est à M. Thierry Braillard.

M. Thierry Braillard. Le groupe RRDP votera ces amendements, dans la droite ligne de la défense de l’amendement par lequel nous demandions tout à l’heure que des parlementaires siègent dans le comité de suivi. J’ai bien entendu l’explication, très convaincante, de Mme la ministre : dès lors que ce comité est un comité d’experts, je trouverais logique que la question de la pénibilité, qui assurera la transition avec les articles que nous discuterons demain, figure dans le champ de l’expertise de ce comité.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Je relève une certaine contradiction dans vos propos, monsieur le rapporteur.

M. Patrick Hetzel. Très juste !

M. André Chassaigne. Dans votre réponse, vous bottez en touche en affirmant que nous voulons donner trop de pouvoir au comité de suivi, alors que nous souhaitons inscrire dans la loi ses possibilités d’intervention de manière plus précise. Ce faisant, vous vous laissez aller à une omission très importante, eu égard au contenu de l’alinéa 20 : « En cas d’évolutions économiques ou démographiques plus favorables que celles retenues pour fonder les prévisions d’équilibre du régime de retraite par répartition, des mesures permettant de renforcer notamment la solidarité du régime, prioritairement au profit du pouvoir d’achat des retraités les plus modestes, de l’égalité entre les femmes et les hommes et de la prise en compte de la pénibilité et des accidents de la vie professionnelle. »

D’un côté, on esquisse la possibilité pour le comité de suivi d’intervenir dans ce domaine, mais de l’autre, vous dites dans votre réponse à notre amendement que cela ne relève pas du domaine d’intervention du comité de suivi ! Je n’irais pas jusqu’à parler de schizophrénie, mais reconnaissez qu’il y a une forme de contradiction entre vos explications et le contenu du texte. Si vous aviez voulu être plus pertinent, vous auriez pu répondre c’est déjà prévu à l’alinéa 20, mais vous préférez soutenir que cela n’entre pas dans les pouvoirs d’intervention du comité de suivi.

M. Philippe Vigier et M. Thierry Braillard. Très bien !

M. Patrick Hetzel. Bravo !

M. le président. La parole est à M. Patrick Hetzel.

M. Patrick Hetzel. M. Chassaigne a parfaitement raison : il y a bel et bien une contradiction dans l’argumentation développée par le rapporteur. Ces amendements défendus au fur et à mesure sont de fait des amendements de repli ; vous ne pouvez donc, monsieur le rapporteur, vous prévaloir de votre propre turpitude. Vous insistez sur la nécessité du développement de ce nouveau comité ; dont acte, et nous présentons un certain nombre d’amendements qui intègrent désormais l’existence de ce comité – c’est le principe des amendements de repli. Dès lors, l’argumentation que vous nous opposez n’a pas de sens. Il faut comprendre que nous avons travaillé en deux temps : tout d’abord, dans une perspective d’opposition à cette instance ; mais à partir du moment où celle-ci est instaurée par la volonté de la majorité, nous amendons à son sujet. Vous ne pouvez nous reprocher de vouloir confier trop de tâche à votre comité après nous y être opposés ne tient pas : nous ne faisons que suivre une logique dont vous-même êtes responsables. Nos réactions sont parfaitement liées à l’évolution du texte et tirent les conséquences de l’adoptions de dispositions contre lesquelles nous nous sommes effectivement insurgés dans un premier temps ; nous essayons de faire au mieux, et vous ne pouvez nous en faire reproche, pour que ce texte soit moins pire que ce que le Gouvernement voudrait en faire.

Mme Catherine Coutelle, présidente de la délégation de l’Assemblée nationale aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes. Pour charger la barque !

M. le président. La parole est à M. Philippe Vigier.

M. Philippe Vigier. M. Hetzel l’a très bien dit : nous ne voulions pas de ce comité, il a pourtant été créé. On voit bien que c’est un organisme technocratique qui ne répondra qu’à la commande gouvernementale. Ce n’est pas de cela que nous avons besoin. Au contraire, madame la ministre, nous avons besoin d’évaluer cette réforme, d’entendre des propositions constructives et d’élargir leur champ. Expliquez-nous pourquoi vous n’avez de cesse de le rétrécir !

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 1752, 1753, 1754, 1763 et 1765.

(Il est procédé au scrutin.)

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants113
Nombre de suffrages exprimés113
Majorité absolue57
Pour l’adoption43
contre70

(Les amendements identiques nos 1752, 1753, 1754, 1763 et 1765 ne sont pas adoptés.)

M. le président. Nous en venons à une nouvelle série d’amendements identiques, nos 2294 à 2308.

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n2294.

Mme Jacqueline Fraysse. Le comité de suivi peut formuler des recommandations, notamment sur « l’évolution de la durée d’assurance requise pour le bénéfice d’une pension sans décote ». Au regard de l’économie du projet qui nous est présenté et des postulats néolibéraux qui marquent, hélas ! cette contre-réforme,…

M. Arnaud Robinet. Oui, les socialistes sont des néolibéraux !

Mme Jacqueline Fraysse. …on peut s’attendre à ce que le comité poursuive la fuite en avant de l’allongement de la durée de cotisation pour réduire encore les pensions, d’autant que notre rapporteur s’est opposé en commission à l’un de nos amendements visant à restreindre le champ de cette recommandation à la durée de cotisation prévue à l’article 2. Il se prononcera aussi sur les transferts du fonds de réserve des retraites vers les régimes de retraite, sur le niveau du taux de cotisation de l’assurance vieillesse, sur l’affectation d’autres ressources au système de retraite, sur des mesures permettant, en cas de retour à meilleure fortune – et uniquement dans ce cas –, de renforcer la solidarité du régime prioritaire au profit prioritairement du pouvoir d’achat des retraités les plus modestes, de l’égalité femmes-hommes et de la prise en compte de la pénibilité – ce avec quoi je suis d’accord. Reste que le niveau de vie des retraités les plus modestes ne sera pas amélioré, ou seulement si la conjoncture économique le permet.

Pourtant, vous le savez, mes chers collègues, le montant mensuel global moyen de la pension de retraite pleine versée par le régime général en 2012 va de 957 euros pour les femmes à 1 106 euros pour les hommes, avec une moyenne de 1 040 euros. On ne peut vivre correctement avec des pensions si faibles. Nos amendements visent donc à permettre au comité de suivi de se pencher, au titre des recommandations qu’il est censé formuler, sur les pistes de financement susceptibles d’assurer des pensions au moins égales au SMIC sans attendre l’hypothétique retour de la croissance, qui semble mal engagé.

Mme Véronique Louwagie. Là-dessus, on est d’accord !

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n2295.

M. André Chassaigne. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Marc Dolez, pour soutenir l’amendement n2296.

M. Marc Dolez. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Alfred Marie-Jeanne, pour soutenir l’amendement n2305.

M. Alfred Marie-Jeanne. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Nicolas Sansu, pour soutenir l’amendement n2307.

M. Nicolas Sansu. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Issindou, rapporteur. L’avis de la commission est défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Arnaud Robinet.

M. Arnaud Robinet. Les amendements présentés par le groupe GDR sont plus qu’intéressants. Le Gouvernement devrait saisir la balle au bond et en profiter. Nous avons déjà regretté, au début du débat, l’insuffisance des études d’impact en termes de financement des mesures, notamment lorsqu’il s’agissait de prendre en compte les périodes d’études ou de stages. L’élargissement des missions du comité de suivi, grâce aux amendements du groupe GDR, permettrait de disposer d’une étude d’impact a posteriori. C’est pourquoi nous sommes favorables à cette série d’amendements.

M. le président. La parole est à M. Patrick Hetzel.

M. Patrick Hetzel. Je veux revenir sur les arguments développés par le rapporteur et par Mme la ministre. Nos collègues du groupe GDR ont porté un certain nombre d’amendements, ils les ont défendus et ont argumenté, et l’on ne fait que leur opposer un avis défavorable. J’attends d’un débat parlementaire que l’on précise les raisons des avis défavorables du rapporteur et du Gouvernement !

M. Pascal Terrasse, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. On l’a fait dix fois !

M. Patrick Hetzel. Cela montre bien l’état d’impréparation dans laquelle se trouve ce gouvernement. Nous n’avons aucune impact et tout est fait avec une grande légèreté. Nous en avons une nouvelle démonstration ce soir et c’est tout à fait dommage. L’opposition en tout cas aimerait connaître vos arguments à l’appui du rejet de ces amendements.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Je vais répondre à ce qui aurait pu être la réponse du rapporteur et de Mme la ministre. (Rires.)

Mme Véronique Louwagie. C’est extraordinaire !

M. André Chassaigne. Cela exige évidemment de ma part beaucoup d’imagination, et cela m’oblige d’ailleurs à utiliser une formule que j’ai souvent utilisée dans cet hémicycle : vos réponses, monsieur le rapporteur, madame la ministre, sont en quelque sorte des couteaux sans lame qui auraient perdu leur manche. (Rires et applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)



Si vous aviez répondu, vous auriez peut-être redit que nos différents amendements confient au comité de suivi des domaines d’intervention qu’il n’a pas à avoir. Un petit problème de vocabulaire demeure tout de même. À l’alinéa 11, dans la définition que vous donnez, vous utilisez un adverbe de trop : « Le comité rend, au plus tard le 15 juillet, en s’appuyant notamment sur les documents du Conseil d’orientation des retraites […]. » Or si l’on emploie l’adverbe « notamment », cela signifie qu’en plus des documents du Conseil d’orientation des retraites, il y a d’autres domaines d’intervention et d’investigation, sous-entendus dans le texte.

M. Philippe Vigier. Bien sûr !

M. André Chassaigne. Qu’entendez-vous par ce « notamment » ? Est-ce encore un couteau sans manche qui aurait perdu sa lame, ou a-t-il véritablement un sens précis ? Que mettez-vous dans le périmètre de cet adverbe, puisque vous refusez tous les amendements qui vous permettent d’enrichir votre vocabulaire ? (Sourires.)

(Les amendements identiques nos 2294, 2295, 2296, 2305 et 2307 ne sont pas adoptés.)

M. le président. Nous passons à une nouvelle série d’amendements identiques, nos 1722 à 1736.

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n1722.

Mme Jacqueline Fraysse. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n1723.

M. André Chassaigne. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Marc Dolez, pour soutenir l’amendement n1724.

M. Marc Dolez. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Nicolas Sansu, pour soutenir l’amendement n1735.

M. Nicolas Sansu. Ces amendements ont toujours pour objet d’étendre le champ des sujets du comité de suivi. Nous souhaitons que celui-ci émette également des recommandations sur les pistes de financement permettant la prise en compte des années d’études dans la durée de cotisation. Depuis quarante ans, l’âge de la fin des études ne cesse de reculer pour atteindre aujourd’hui un peu plus de vingt-trois ans ; de même pour l’âge du premier emploi stable en CDI qui se situe aux alentours de vingt-huit ans. Dans ces conditions, le déficit des trimestres cotisés à trente ans est criant. La génération de 1958 à trente ans avait cotisé en moyenne quarante trimestres, quand la génération de 1973, au même âge, n’a cotisé que trente trimestres. Cette situation est grave et les jeunes ont perdu toute confiance dans notre système de retraite.

Selon le rapport Moreau, 81 % des jeunes ne sont pas confiants dans l’avenir du système de retraite par répartition – on le serait à moins quand on voit ce qui leur est proposé. Plus grave encore, 66 % des 18-24 ans comptent sur l’épargne individuelle, soit sur la retraite par capitalisation, pour financer leur pension, ce qui pose de graves problèmes relativement au pacte social et au pacte républicain. Ces chiffres sonnent comme un signal d’alarme. L’augmentation des années d’études doit être prise en compte réellement et elle devra être financée par de nouvelles pistes recommandées par le comité de suivi. D’autres pistes sont en effet nécessaires, parce que la proposition de rachat de trimestres par les étudiants n’est à mon sens pas pertinente : cela revient à contraindre les étudiants à entrer dans la vie active avec une dette qui viendrait parfois même s’ajouter à la dette d’un prêt étudiant. Nous savons tous que les organisations étudiantes, et en premier lieu l’UNEF – qui entretient d’ailleurs quelques liens avec une organisation politique de jeunesse que vous connaissez bien –,…

M. Patrick Hetzel et M. Arnaud Robinet. Excellent !

M. Nicolas Sansu. C’est la réalité.

…ont demandé que ces années d’études soient prises en compte. C’est pourquoi nous demandons que le comité de suivi suggère de nouvelles pistes.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Issindou, rapporteur. Je vais cette fois-ci tenter de développer un peu plus ma réponse. Vous refaites à peu près tout le projet de loi dans l’article 3, qui vous est très utile puisque l’on peut y glisser tous les problèmes liés aux retraites. Vous venez en fait d’évoquer l’article 16, qui arrivera très bientôt…

M. Pascal Terrasse, rapporteur pour avis. Et vous aurez votre réponse !

M. Michel Issindou, rapporteur. Nous pourrons alors débattre de la question des stages et du rachat des années d’études.

Je voudrais répondre à M. Chassaigne sur le « notamment ». Le COR rend régulièrement depuis dix ans des rapports très instructifs qui traitent de tous les sujets relatifs à la retraite. Ce « notamment » fait référence à l’alinéa 9 où il est écrit : « Le comité de suivi des retraites fait connaître ses besoins afin qu’ils soient pris en compte dans les programmes de travaux statistiques et d’études de ces administrations, organismes et établissements. »

Rappelons que le comité de suivi est une structure légère, composée de cinq personnes tout au plus : il doit rendre un avis d’expert, il n’a pas vocation à développer une batterie de techniciens. Nous disposons déjà de tous les éléments : le COR en fournit beaucoup, les administrations en fourniront, la direction de la Sécurité sociale aussi, bref, tout le monde est capable de fournir des informations. Le comité de suivi rassemblera ces informations et mènera les études et les analyses à partir de ces documents ; il n’est pas utile de le charger avant même sa naissance en lui demandant de refaire tout ce que font le COR, la DSS, la DREES et les administrations qui nous entourent. Vous qui êtes pour la simplification, n’en demandez pas tant ! Cela n’a aucun sens. Le comité de suivi fera le travail qui est le sien : suivre les objectifs en s’appuyant sur des structures et des documents existants. C’est une structure légère, je le redis, et elle restera légère. L’avis de la commission est donc défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Il est défavorable.

M. le président. La parole est à M. Philippe Vigier.

M. Philippe Vigier. Monsieur le rapporteur, vous venez de nous expliquer à l’instant que le comité de suivi, dans la mesure où ne sera composé que de cinq personnes, aura un champ d’investigation très limité. André Chassaigne l’a bien montré, en nous relisant l’alinéa 11 : c’est le COR qui va faire une grande partie du boulot. Vous parlez de simplification, mais il fallait alors vraiment simplifier ; or votre fameux comité de suivi n’aura aucune utilité.

Deuxième chose : quand des amendements GDR évoquent la prise en compte des stages ou, à l’instant avec Nicolas Sansu, le rachat d’années d’études, j’entends bien l’homme du Sud-Ouest, qui sait très bien placer la balle…

M. Gérard Bapt. Qu’avez-vous contre le Sud-Ouest ?

M. Philippe Vigier. « On est sur l’article 3, nous verrons plus tard à l’article 16 », avez-vous répondu. Vous ne nous l’aviez pas encore fait aujourd’hui… Mais enfin, les jeunes nous regardent, un jeune sur quatre est au chômage, avec des parcours heurtés, et vous parlez d’égalité entre les générations ! On ne vous demande pas grand-chose : acceptez seulement que ce comité de suivi voie comment les études pourraient être rachetées plus facilement – cela ne marche pas actuellement, puisque à peine 10 % des jeunes le font – et les conditions dans lesquelles les stages pourraient compter dans la comptabilisation des trimestres pour la retraite. Franchement, s’ils vous voient répondre comme vous le faites, les jeunes seront fiers de vous !

M. le président. La parole est à M. Patrick Hetzel.

M. Patrick Hetzel. Je vais prolonger l’argumentation développée par notre collègue Philippe Vigier. Aujourd’hui, 2,4 millions de jeunes sont dans l’enseignement supérieur : cela fait quand même du monde… Le groupe GDR soutient cette série d’amendements parce que c’est en effet un vrai sujet. Il y a quelques semaines, juste avant la période estivale, nous avons débattu du texte de loi concernant l’enseignement supérieur et la recherche, présenté par Mme Fioraso. Elle a tenu à y affirmer fortement que l’objectif de la nation est d’atteindre 50 % d’une classe d’âge diplômée de l’enseignement supérieur. Mais nous savons pertinemment qu’il est de plus en plus difficile, pour des jeunes qui font de longues études, d’atteindre le nombre de trimestres nécessaires en termes de cotisation. Il y a donc là une injonction paradoxale de la part du Gouvernement : on pousse les jeunes à poursuivre de plus en plus longtemps leurs études, et, ce faisant, on les pousse inexorablement à ne plus pouvoir toucher de retraites pleines.

Madame la ministre, à un moment donné, il faut que ce Gouvernement ait une vision d’ensemble. Or vous et vos collègues êtes en train de traiter tous les problèmes isolément : d’un côté les retraites, de l’autre l’enseignement supérieur. On a l’impression que les différents membres du Gouvernement n’échangent pas entre eux. Ces amendements soulèvent une vraie question, et la manière dont le Gouvernement l’évacue montre bien le peu de cas que vous faites de ces 2,4 millions de jeunes aujourd’hui dans l’enseignement supérieur. L’opposition en tout cas ne l’entend pas ainsi.

M. le président. La parole est à M. Thierry Braillard.

M. Thierry Braillard. Le groupe RRDP soutient, là encore, cette série d’amendements, et pour une raison très simple : M. le rapporteur renvoie à l’article 16, mais celui-ci ne porte que sur les stages rémunérés qui font l’objet de cotisation. Qui, dans cet hémicycle, n’a pas été saisi d’une demande d’un étudiant en master qui voudrait faire un stage non rémunéré de plusieurs mois à l’Assemblée nationale ?

M. Pascal Terrasse, rapporteur pour avis. Il n’aurait pas le droit.

M. Thierry Braillard. La prise en compte de ce type de stage mérite une réflexion d’expertise. C’est précisément ce que visent ces amendements. Il ne s’agit pas d’ajouter à des rajouts, mais de proposer que des experts indépendants étudient cette question qui nous apparaît extrêmement importante et qui fait l’objet de revendications d’associations étudiantes. C’est la raison pour laquelle le groupe RRDP votera cette série d’amendements.

(Les amendements identiques nos  1722, 1723, 1724 et 1735 ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de quinze amendements identiques, nos  1737 à 1751.

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n1737.

Mme Jacqueline Fraysse. Il est défendu.

M. le président. Monsieur Chassaigne, l’amendement n1738 est-il défendu ?

M. André Chassaigne. Oui, monsieur le président.

M. le président. Monsieur Dolez, l’amendement n1739 est-il défendu ?

M. Marc Dolez. Oui, monsieur le président.

M. le président. Monsieur Marie-Jeanne, l’amendement n1748 est-il défendu ?

M. Alfred Marie-Jeanne. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Nicolas Sansu, pour soutenir l’amendement n1750.

M. Nicolas Sansu. Ces amendements visent précisément à étendre le champ des réflexions du comité de suivi à la prise en compte des périodes de stage des étudiants. Monsieur le rapporteur, vous dites que le comité de suivi sera un collecteur des études des autres organismes – le COR, la DARES, etc. Mais si c’est sa seule fonction, nous n’en avons pas besoin : le comité de suivi ne doit pas être un paravent d’experts derrière lequel celles et ceux qui ont le pouvoir politique se cacheraient pour annoncer les mauvaises nouvelles, comme c’est trop souvent le cas. Ou bien le comité de suivi aura réellement la possibilité d’étudier toutes les pistes de la réforme des retraites pour une bonne retraite par répartition, ou bien il ne sera qu’un paravent. En refusant toutes nos propositions, madame la ministre, monsieur le rapporteur, vous montrez bien quel sera son véritable rôle.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Issindou, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Arnaud Robinet.

M. Arnaud Robinet. Mme la ministre vient d’être prise à son propre piège avec ces amendements…

M. Gilles Lurton. Totalement !

M. Arnaud Robinet. …alors que ce week-end, dans un journal dominical, elle a voulu survendre sa proposition de prise en compte des stages. Premièrement, nous n’avons aucune étude d’impact sur le financement du dispositif ; deuxièmement, on ne sait pas combien de jeunes pourraient en bénéficier ; troisièmement et surtout, je ne suis pas sûr que les stages entreront dans les vingt-cinq meilleures années prises en compte dans le calcul des retraites du secteur privé… Madame la ministre, vous avez voulu faire le buzz, essayer de réconforter une partie de nos concitoyens,…

Mme Isabelle Le Callennec. De réenchanter le rêve !

M. Arnaud Robinet. En effet, ma chère collègue, « réenchanter le rêve », comme disait le président Hollande. Mais on le voit bien, madame la ministre : votre proposition sur les stages ne tient pas du tout la route.

M. le président. La parole est à M. Philippe Vigier.

M. Philippe Vigier. Madame la ministre, on ne vous entend pas. Que se passe-t-il ? J’ai rarement vu cela dans un débat parlementaire.

M. Patrick Hetzel. Silence radio !

M. Christian Paul. Vous n’êtes pourtant pas un débutant, monsieur Vigier !

M. Philippe Vigier. Est-il encore permis de s’interroger, monsieur Paul ? A-t-on encore le droit de poser des questions ? La ministre est restée avec nous pendant trois jours en commission ; sur les stages au moins, nous l’avions entendue, puisque j’avais déposé un amendement avec M. Vercamer, au nom du groupe UDI ; et si nous l’avions déposé, c’était parce que cela répondait à un vrai sujet.

M. Pascal Terrasse, rapporteur pour avis. Mais qui ne figure pas à l’article 3 !

M. Philippe Vigier. J’avais même alors demandé quels étaient les députés qui n’avaient pas employé un jour ou l’autre des stagiaires, et si cette activité ne méritait pas d’être prise en considération. Je vous rappelle, madame la ministre, qu’on leur impose des stages durant leur cursus, et qu’ils en font souvent ensuite, avant de trouver un emploi en CDD ou, si possible, en CDI, rémunéré normalement. Vous avez écarté d’un revers de main mon amendement, puis fait une sortie dans Le Journal du Dimanche en vous mettant à courir après l’idée que nous proposions… Et aujourd’hui, alors que vous êtes au banc du Gouvernement, vous ne répondez plus rien ! C’est pourtant une question majeure. Si le Gouvernement ne veut même pas se prononcer là-dessus, cela amène vraiment à s’interroger, mes chers collègues

M. le président. La parole est à M. Patrick Hetzel.

M. Patrick Hetzel. Madame la ministre, vous avez en effet communiqué dans la presse en indiquant au Journal du Dimanche que les stages seraient pris en compte. Fort bien. Dans le droit fil de ce que vient de dire Philippe Vigier, je vous pose deux questions simples : premièrement, avez-vous une étude d’impact ? Si oui, on aimerait la connaître, ce serait tout de même la moindre des choses. Deuxièmement : quel serait le coût de la mesure ? Si vous n’êtes pas en mesure de fournir ces informations à la représentation parlementaire, cela montrera de toute évidence, une nouvelle fois, l’impréparation du Gouvernement, et qu’il s’agit d’une opération de communication sans véritable travail de fond. Nos concitoyens attendent autre chose de la part d’un gouvernement que quelques effets de paillettes. Les jeunes sont en attente. Vous avez suscité des espoirs : avez-vous conscience qu’ils ne doivent pas être déçus ?

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Je veux revenir sur le sens de nos différents amendements. La démonstration est faite, après l’avis exprimé par Mme la ministre et par M. le rapporteur, et à l’issue des votes : pour vous, le comité de suivi sera une forme de réceptacle qui devra engranger des données pour en tirer une synthèse d’adaptation aux objectifs recherchés – objectifs a minima, évidemment.

Mme Catherine Coutelle, présidente de la délégation aux droits des femmes. Et en tirer aussi des propositions !

M. André Chassaigne. Nous, nous aurions souhaité que ce comité puisse être à l’offensive dans la réflexion. Nos amendements évoquent d’autres pistes de financement parce que nous pensons qu’il faut en trouver d’autres que celles qui nous sont présentées, formatées a priori. C’est la grande différence entre vous et nous. En l’état actuel, au lieu de mettre en place cette structure, madame la ministre, vous auriez pu sous-traiter à une entreprise d’informatique (Exclamations et rires sur les bancs du groupe UMP) qui vous aurait fabriqué un logiciel à même d’engranger toutes les données et de vous sortir, feuille après feuille, ce que vous attendez de votre comité de suivi.

M. Patrick Hetzel, rapporteur pour avis. Excellent !

M. Xavier Bertrand. Voilà que Chassaigne est pour la privatisation maintenant ! (Sourires.)

M. le président. La parole est à M. Nicolas Sansu.

M. Nicolas Sansu. Nous n’avons eu de réponse ni sur la forme, autrement dit sur le comité de suivi, ni sur le fond pour ce qui est des stages. Le rapporteur nous dit qu’on en parlera à l’article 16 et aux amendements après l’article 16, mais j’ai constaté qu’un très bon amendement du Gouvernement – l’amendement n3065 rectifié – avait été retiré avant la discussion. Je me permets d’interroger Mme la ministre pour savoir s’il a été élégamment confié au rapporteur ou s’il a complètement disparu de la discussion…

(Les amendements identiques nos 1737, 1738, 1739, 1748 et 1750 ne sont pas adoptés.)

M. Arnaud Robinet et M. Denis Jacquat. Nous aurions aimé expliquer notre vote, monsieur le président !

M. le président. Chers collègues, je ne vais tout de même pas vous rappeler le règlement : outre les commissions et le Gouvernement, ne peuvent en principe s’exprimer sur les amendements qu’un orateur pour et un orateur contre. Ayant laissé s’exprimer cinq orateurs différents, dont M. Robinet, je considère que chacun a pu très largement exposer sa position.

Nous en venons à une autre série d’amendements identiques, nos 2219 à 2233.

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n2219.

Mme Jacqueline Fraysse. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n2220.

M. André Chassaigne. Défendu.

M. le président. La parole est à M. Marc Dolez, pour soutenir l’amendement n2221.

M. Marc Dolez. Madame la ministre, monsieur le rapporteur, vous serez bien obligés, compte tenu de vos réponses antérieures, de donner un avis favorable à ces amendements. Pour une raison simple : vous avez refusé que le comité de suivi puisse formuler des recommandations visant à revenir à l’âge de la retraite à soixante ans ou à réduire la durée de cotisation ; à la limite, on peut l’entendre. Mais alors, pourquoi prévoir à l’alinéa 18 qu’il puisse faire des recommandations qui viseraient inévitablement à allonger la durée de cotisation ? En effet, celles-ci porteront en particulier sur « l’évolution de la durée d’assurance requise pour le bénéfice d’une pension sans décote, au regard notamment de l’évolution de l’espérance de vie, de l’espérance de vie sans incapacité », etc., autant de critères qui pourraient conduire, comme vous le justifiez aujourd’hui, à une augmentation de la durée de cotisation. Nous demandons donc la suppression de cet alinéa 18, parce qu’il faut accepter que le comité de suivi puisse élaborer des recommandations sur des hypothèses éventuellement différentes en fonction des pistes de financement. Or vous ne retenez qu’une seule hypothèse, celle qui irait dans le sens d’une augmentation de la durée de cotisation.

Enfin, monsieur le rapporteur, si le comité de suivi n’est, comme vous l’avez dit, qu’une structure légère, visant à collecter un certain nombre d’études et d’informations, je ne vois pas pourquoi il est prévu de nommer son président en conseil des ministres.

M. Patrick Hetzel. Mais si, on voit bien pourquoi : pour qu’il soit inféodé au Gouvernement !

M. Marc Dolez. S’il est nommé en conseil des ministres, cela veut dire que cette instance a une légitimité reconnue et une certaine autorité, et qu’elle est donc habilitée à étudier de nombreuses hypothèses, en particulier celles que nous voudrions soumettre à son examen.

M. André Chassaigne. Excellente démonstration !

M. le président. L’amendement n2230 est-il défendu, monsieur Marie-Jeanne ?

M. Alfred Marie-Jeanne. Oui, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n2232 est-il défendu, monsieur Sansu ?

M. Nicolas Sansu. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Issindou, rapporteur. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Arnaud Robinet.

M. Arnaud Robinet. La série d’amendements présentés par le groupe GDR soulève évidemment une question importante, mais j’en reviendrai pour ma part à la question des jeunes.

Nous ne souhaitons pas que les jeunes deviennent les nouveaux pigeons du système, notamment à travers ce projet de loi.

Mme Brigitte Bourguignon. Et les emplois-jeunes ?

M. Arnaud Robinet. Qui vient de roucouler ? (Sourires.)

Mme Brigitte Bourguignon. Je vous rappelais les mesures en faveur de l’emploi des jeunes !

M. Arnaud Robinet. « Les parlementaires veulent accorder une plus grande attention à certaines périodes de stage. Nous allons trouver une solution. Mais à condition de ne pas banaliser les stages », a déclaré Mme la ministre au Journal du dimanche. « Il est nécessaire, précisait-elle également, de répondre à la demande des jeunes qui entrent plus tard dans la vie active », tout en rappelant que le projet de loi « prévoit d’aider au rachat d’années d’études ». Or aucune de ces mesures n’est financée et nous ne recevons aucune réponse à nos questions. Nous voulons savoir combien de jeunes sont concernés par la prise en compte des périodes de stages et quel financement correspond à cette mesure. Il en va bien sûr de la pérennité de notre système de retraites

M. le président. La parole est à M. Patrick Hetzel.

M. Patrick Hetzel. Comme tout à l’heure, nous sommes extrêmement surpris : « avis défavorable », voilà le seul argument que l’on entend, aussi bien de la part du rapporteur que de la ministre !

Alors que le groupe GDR a, de son côté, développé une véritable argumentation, notamment au sujet de la suppression de l’alinéa 18 de cet article, vous n’apportez aucun contre-argument. Effectivement, avec la nomination de son président en conseil des ministres, vous mettez en place un comité à votre dévotion, alors que le COR était indépendant. Vous créez un organisme qui sera totalement sous la coupe du pouvoir exécutif.

M. Philippe Vigier. Exactement !

M. Patrick Hetzel. À cela, vous n’apportez aucune réponse. Nous ne pouvons pas nous contenter d’une telle situation. Le débat parlementaire mérite mieux, à moins que votre mutisme soit un aveu : vous reconnaîtriez en fait la réalité de ce que nous sommes en train de dénoncer. Tel est bien le cas, je le crains.

M. le président. La parole est à M. Philippe Vigier.

M. Philippe Vigier. Comme nous le rappelait cet après-midi le président de l’Assemblée nationale, dans les moments importants, on nous regarde – que ce soit à travers la télévision ou via les réseaux sociaux. Or nous posons des questions majeures sur un texte qui l’est tout autant, car il s’agit de la solidarité nationale. Il s’agit de fournir à tous nos compatriotes une retraite digne.

Or le Gouvernement est muet, de même que le rapporteur. Nous pouvons être en désaccord politique, mais, si vous avez des raisons profondes, le minimum du minimum est de les exposer à la représentation nationale. Or vous cadenassez tout, vous voulez faire nommer le président du comité en conseil des ministres – bref, vous ne voulez rien lâcher.

Je voudrais poser une question au groupe GDR, en particulier à M. Dolez : comment le rapporteur aurait-il pu accepter votre amendement, puisque la pseudo-réforme que nous sommes en train d’étudier prévoit justement l’allongement à quarante-trois annuités à partir de 2020 ? Dans ces conditions, il ne pouvait vous dire oui !

Il est grand temps, madame la ministre, que vous repreniez la main. Vous devez expliquer à la représentation nationale pourquoi vous refusez nos propositions sur ce comité de suivi, alors même qu’elles sont dépourvues de tout dogmatisme ; elles visent à enrichir le dispositif en lui conférant des missions qui me paraissent absolument indispensables.

M. le président. La parole est à M. Arnaud Robinet.

M. Arnaud Robinet. Notre collègue M. Vigier vient de nous le dire : nous sommes à un moment majeur du débat. Nous posons un certain nombre de questions auxquelles nous ne recevons pas de réponses, notamment en ce qui concerne la question de la jeunesse française, ou encore le financement des mesures qui sont annoncées.

Je demande donc une suspension de séance pour permettre à Mme la ministre de préparer des réponses à nos questions. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La suspension est de droit.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt-deux heures trente-cinq, est reprise à vingt-deux heures quarante.)

M. le président. La séance est reprise.

La parole est à M. Jacques Lamblin.

M. Jacques Lamblin. Cela va mal, madame la ministre. En effet, vous êtes encerclée.

M. Patrick Hetzel. Eh oui !

M. Jacques Lamblin. Le PS est encerclé sur ce sujet, puisque le Front de gauche, les radicaux,…

M. Michel Issindou, rapporteur. Sans oublier l’UMP !

M. Jacques Lamblin. …l’UMP, naturellement, et l’UDI, bref, tout le monde est inquiet, en particulier s’agissant des jeunes.

Je me suis livré à un petit calcul pendant la suspension de séance. Tout à l’heure, M. Sansu a pris l’exemple d’un jeune de trente ans ayant seulement cotisé trente trimestres. La perspective pour ce jeune sera une retraite à taux plein à soixante-six ans et demi, si l’on applique vos propres règles.

M. Nicolas Sansu. Eh oui !

M. Jacques Lamblin. Premièrement, cela signifie que, pendant les trente-six ans et demi où il devra continuer à travailler, ce jeune va voir partir à la retraite des personnes ayant soixante ans, soixante et un ans ou soixante-trois ans, alors que, pour lui, lez moment du départ n’arrivera pas avant soixante-six ans et demi.

Deuxièmement, il va travailler plus en cotisant plus – c’est bien ce que vous décidez à travers cette loi, puisque les cotisations augmentent.

Troisièmement, il saura que sa retraite sera plus petite, car vous diminuez les pensions.

Voilà donc un jeune qui, pendant toute sa vie, va cotiser plus, avec la perspective d’une plus petite retraite, en sachant qu’il fait tout cela pour d’autres qui, eux, tirent le plus grand profit de son travail. Pensez-vous que ce soit tenable ? La réponse est non : votre projet n’est absolument pas envisageable sur le long terme.

M. le président. La parole est à M. Michel Liebgott.

M. Michel Liebgott. Si un Persan entrait dans cet hémicycle, il serait peut-être surpris de l’ambiance qui y règne… Quoi qu’il en soit, force est de reconnaître que le parti communiste est cohérent avec lui-même. Il a d’ailleurs la possibilité de déposer demain une proposition de loi visant à mettre en œuvre le projet qu’il veut présenter aux Français. Pourquoi pas ? Après tout, on peut toujours en discuter.

En revanche, je trouve assez extraordinaire ce qui vient d’être dit par quelques orateurs de l’UMP. En effet, si j’ai bien compris, vous voulez, d’une certaine manière, diminuer la durée de cotisation tout en imposant le départ à la retraite à l’âge de soixante-cinq ans… En vérité, votre objectif est d’allonger nos débats.

M. Jacques Lamblin. Pas du tout !

M. Michel Liebgott. Ce disant, je reconnais commettre une faute majeure, du point de vue de ma sensibilité politique : en prenant la parole, je risque d’entraîner une réaction de votre part et, au final, vous atteindriez ainsi votre objectif… J’invite donc mes amis à ne pas m’imiter sous peine de prendre le risque d’allonger les débats ainsi que le souhaite l’opposition, afin que l’on parle le plus longtemps possible de prétendues incohérences du Gouvernement.

On sait bien que l’on doit examiner un projet de loi dans l’ordre et non pas dans le désordre. Même si je viens d’arriver, j’ai cru comprendre que M. le rapporteur nous conseillait de suivre la bonne voie, c’est-à-dire de commencer par l’article 1er et de finir par le dernier, et non l’inverse !

(Les amendements identiques nos 2219, 2220, 2221, 2230 et 2232 ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de plusieurs amendements, nos 1783, 1784, 1793, 1795 et 3017, pouvant être soumis à une discussion commune.

Les amendements nos 1783, 1784, 1793 et 1795 sont identiques.

La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n1783.

M. André Chassaigne. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Marc Dolez, pour soutenir l’amendement n1784.

M. Marc Dolez. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Alfred Marie-Jeanne, pour soutenir l’amendement n1793.

M. Alfred Marie-Jeanne. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Nicolas Sansu, pour soutenir l’amendement n1795.

M. Nicolas Sansu. Cet amendement de repli vise à rédiger ainsi l’alinéa 18 de l’article 3 : « L’évolution, qui ne peut conduire à augmenter au-delà de ce qui est fixé dans la loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraites, la durée d’assurance requise pour le bénéfice d’une pension sans décote, au regard notamment de l’évolution de l’espérance de vie en bonne santé et sans incapacité – l’espérance de vie en elle-même n’a que peu d’intérêt en la matière – et du taux de chômage des jeunes et des seniors, et de la répartition des richesses dégagées par l’activité économique des entreprises entre capital et travail ».

Pourquoi retenir ces trois critères plutôt que ceux de l’espérance de vie, l’espérance de vie en bonne santé, la population active et la productivité ? Je vous renvoie, mais cela ne plaira sans doute pas à nos amis de l’UMP, à un bon petit livre écrit par Pierre-Alain Muet pour la fondation Jean Jaurès, Contre-véritéstriste réalités des années Sarkozy, où il explique, en s’appuyant sur de nombre bons arguments, qu’il est impossible d’allonger la durée de cotisation quand le chômage des jeunes et le chômage total sont très élevés. C’est même totalement inopérant dans la mesure où, en allongeant la durée de cotisation, on laisse un certain nombre de jeunes au chômage, ce qui augmente du même coup les allocations-chômage sans qu’il n’y ait rien à gagner au bout du compte. Il faudrait par conséquent intégrer le taux de chômage dans ce calcul de l’évolution.

Quant à la répartition des richesses dégagées par l’activité économique des entreprises entre capital et travail, ne nous racontons pas d’histoires ! Depuis trente ans, 10 % de la valeur ajoutée, donc de la richesse créée, est passée – j’en appelle sur ce point aux ressorts marxistes et keynésiens de nos collègues socialistes – du travail vers le capital, ce qui ne représente pas moins de 200 milliards d’euros dans notre produit intérieur brut, pour rémunérer les dividendes et les intérêts bancaires. Dans de telles conditions, on ne peut pas espérer dans le même temps développer la protection sociale et les services publics, et augmenter les salaires. Voilà pourquoi nous proposons cette nouvelle écriture de l’alinéa 18.

M. le président. La parole est à Mme Laurence Abeille, pour soutenir l’amendement n3017.

Mme Laurence Abeille. L’amendement n3017 vise à préciser que les recommandations ne peuvent porter sur l’allongement de la durée de cotisation et que le comité de suivi devrait engager une réflexion afin de conduire à une recommandation visant précisément à la réduire.

Le progrès social a été marqué par la réduction du temps de travail et son meilleur partage. Les députés écologistes s’inscrivent dans cette histoire et confirment leur opposition à l’allongement de la durée de cotisation. Ils souhaitent que le comité de suivi engage une réflexion visant à la réduire.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Issindou, rapporteur. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Madame la députée, je comprends de votre amendement qu’il conduirait à apprécier de façon plus large l’ensemble des paramètres dont le comité de suivi peut être amené à se préoccuper. Le Gouvernement partage votre souhait de ne pas disjoindre la durée de cotisation et la situation de l’emploi. Nous nous heurtons néanmoins à une difficulté, celle de ne pouvoir supprimer l’ensemble des autres éléments que le comité de suivi pourrait être amené à prendre en considération. Sous réserve que vous acceptiez de rectifier votre amendement afin de maintenir la mention de la durée de retraite et de la population active, nous pourrions le prendre en considération. Si, en revanche, vous voulez absolument conserver l’idée de n’aller que dans un sens, nous y serons défavorables. Là réside bien la difficulté. Le comité de suivi sera amené à se pencher sur les différents paramètres qui doivent pouvoir évoluer dans un sens ou dans un autre. Votre amendement conduirait au contraire à n’orienter la discussion que dans un sens. Sur le fond, le Gouvernement veut poser un principe de neutralité. Nous ne voulons pas, par principe de neutralité, considérer que la réflexion pourrait avoir lieu seulement dans un sens ou dans un autre. Comprenez-vous ?

M. Philippe Vigier. Non !

Mme Marisol Touraine, ministre. Si vous acceptiez de revenir sur l’idée que l’analyse de ce paramètre ne vaut que dans le sens d’une diminution d’une durée de la cotisation, nous pourrions étudier cet amendement. Si vous souhaitez maintenir cette position, je serai obligée de rendre un avis défavorable.

Avis défavorable sur les amendements précédents.

M. le président. La parole est à Mme Laurence Abeille.

Mme Laurence Abeille. Vous avez en effet bien compris le sens de notre amendement, madame la ministre, que nous souhaitons maintenir en l’état. Tel est bien son sens politique, celui que nous défendons.

M. le président. La parole est à Mme Fanélie Carrey-Conte.

Mme Fanélie Carrey-Conte. Je voudrais intervenir à ce stade du débat car le prochain amendement, même s’il en diffère par une phrase, va dans le même sens que les deux précédents. Il nous semblait également que la rédaction de cet alinéa 18 permettait au comité de suivi de formuler des recommandations allant au-delà des quarante-trois annuités de cotisation. Il nous semblait important que le législateur précise ses intentions en disposant que les recommandations ne pourraient aller au-delà des quarante-trois annuités, d’une part pour laisser la possibilité, en cas de retour à une meilleure fortune, d’une révision à la baisse de la durée de cotisation, mais aussi parce que l’espérance de vie sans invalidité n’est pas exponentielle : elle n’a pas progressé depuis 2006. Je ne reprendrai pas la parole tout à l’heure mais l’amendement qui suit va dans le même sens que ceux sur lesquels nous allons à présent nous prononcer.

M. Sergio Coronado et M. Paul Molac. Très bien !

M. Philippe Vigier. Je n’ai rien compris !

M. le président. La parole est à M. Nicolas Sansu.

M. Nicolas Sansu. Bien évidemment, nous allons soutenir l’amendement de nos collègues écologistes ; reste que je suis tout à la fois surpris et ennuyé. Nous avons, avec Mme Abeille, posé la question du taux de chômage et du partage de la valeur ajoutée sans obtenir de réponse. Il est tout de même extrêmement ennuyeux de ne pas recevoir de réponse à des questions de fond.

M. Patrick Hetzel. Très juste !

M. Nicolas Sansu. Monsieur Hetzel, n’en rajoutez pas, ce n’est pas avec vous que nous allons faire la meilleure réforme ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Jacques Lamblin. Qu’en savez-vous ? En tout cas, ce ne sera pas avec la majorité !

M. Nicolas Sansu. Ce serait tout de même bien que l’on nous réponde sur le taux de chômage et le partage de la valeur ajoutée. Or nous n’avons obtenu de réponse ni sur l’une ni sur l’autre.

M. le président. La parole est à M. Thierry Braillard.

M. Thierry Braillard. Notre amendement n1552 aurait aussi pu faire partie de la discussion commune puisqu’il reprend bien des termes de l’amendement n3017. Nous le retirons pour voter celui de nos collègues écologistes.

(Les amendements identiques nos 1783, 1784, 1793 et 1795 ne sont pas adoptés.)

(L’amendement n3017 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 2503 rectifié et 1552, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à Mme Fanélie Carrey-Conte, pour soutenir l’amendement n2503 rectifié.

Mme Fanélie Carrey-Conte. Je l’ai défendu.

M. le président. M. Braillard a retiré à l’instant l’amendement n1552.

M. Thierry Braillard. En effet.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Issindou, rapporteur. Le comité de suivi ne formule que des propositions et la durée d’assurance, fait nouveau, est désormais inscrite dans la loi, ce qui devrait vous rassurer : elle était jusqu’à présent déterminée par décret après avis du COR qui, souvenez-vous en, décidait ou non de prolonger d’un trimestre en fonction de l’espérance de vie. Cela signifie concrètement qu’aucune augmentation, par rapport à ce qui est prévu dans la loi, ne pourra être décidée sans un passage devant le Parlement. C’est une sacrée sécurité pour nous tous ! Il n’y aura pas d’allongement si nous ne le décidons pas collectivement. Et cette disposition est valable jusqu’en 2035. Nous aurons le temps de voir venir et il est probable que plusieurs d’entre nous ne seront plus là pour en décider.

Nous ne pouvons pour autant empêcher le comité d’examiner l’un des leviers de financement ; sinon, il sera obligé de proposer un effort sur le travail qui pèse sur les actifs ou les jeunes, ou les retraités. Il faut donc lui laisser cette possibilité sachant, c’est une nouveauté, qu’il ne sera pas possible de modifier la durée d’assurance sans passer par le Parlement. On ne peut pas offrir de meilleure garantie que celle-ci qui s’avère beaucoup plus fiable que le décret.

Nous nous reposerons toutes les bonnes questions, d’autres se les reposeront peut-être à notre place mais nous avons voulu que le Parlement reste maître de cette décision. Voilà pourquoi j’émets, à regret, un avis défavorable à l’amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Avis défavorable si vous ne retirez pas votre amendement, madame la députée. La loi marque clairement les limites de l’allongement de la durée de cotisation. Le comité de suivi formule des recommandations, sans prendre de décisions. L’inscription dans la loi est très strictement encadrée qu’il s’agisse du rythme de l’allongement, de la date butoir pour le dernier allongement. Ce n’est pas le cas aujourd’hui où une accélération pourrait être décidée sans aucun contrôle de la représentation nationale. Ce ne sera plus possible avec ce nouveau dispositif qui renforce le pouvoir du Parlement. Aucune modification du calendrier inscrite dans la loi ne sera possible en dehors du Parlement.

M. le président. La parole est à Mme Fanélie Carrey-Conte.

Mme Fanélie Carrey-Conte. Je maintiens mes propos. J’entends bien les réponses qui m’ont été faites, en particulier celle du rapporteur qui a exprimé ses regrets, mais s’il a bien été dit que les recommandations du comité ne pourraient pas aller au-delà des quarante-trois annuités, pourquoi ne pas l’écrire ? Nous venons de nous prononcer sur un amendement similaire voici quelques instants, mais je maintiens tout de même le mien.

(L’amendement n2503 rectifié n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l’amendement n3040.

M. Patrick Hetzel. Nous défendons aussi cet amendement avec Denis Jacquat qui prendra la parole dans un instant. L’aveuglement idéologique du Gouvernement l’incite à créer un comité qui, dès le départ, s’interdit de s’intéresser à la question même de l’âge de départ, ce qui nous paraît incompréhensible.

M. Pascal Terrasse, rapporteur pour avis. C’est précisément le contraire !

M. Patrick Hetzel. Notre amendement n3040 tend au contraire à ouvrir le champ des possibles en permettant que les recommandations du comité puissent porter non seulement, comme le prévoit l’article 3, sur l’évolution de la durée d’assurance requise pour le bénéfice d’une pension sans décote, mais aussi sur l’évolution de l’âge légal de départ à la retraite.

Si nous avons bien suivi les arguments qui viennent d’être avancés par Mme la ministre, cet amendement devrait être accepté par le Gouvernement sans aucun problème, à moins que, là encore, son argumentation ne soit à géométrie variable, selon qu’il s’agit du groupe écologiste ou du groupe UMP.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Issindou, rapporteur. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Même avis.

M. Patrick Hetzel. Sans aucun argument bien sûr !

M. le président. La parole est à M. Denis Jacquat.

M. Denis Jacquat. Il est bien connu que le système des retraites doit être équilibré, ce qui suppose des recettes d’un côté et des dépenses de l’autre. Or, dans le cas des retraites, comme nous l’avons démontré en 2010, seul le déplacement des bornes d’âge rapporte rapidement des recettes très importantes.

Si les bornes d’âge n’avaient pas été dépassées, et ce malgré la crise, jamais les retraités de notre pays n’auraient perçu leur retraite à la date et au montant prévus, comme cela s’est produit dans d’autres pays.

C’est pourquoi il est anormal, comme l’a expliqué M. Hetzel, qu’aucune étude ne soit conduite sur ce point et que le comité de pilotage ne s’en saisisse pas. Si cette question ne relève pas de son champ de compétences, alors elle doit relever du COR. Autrefois, le COR conduisait une réflexion et traçait des pistes ; aujourd’hui, il a perdu de sa puissance, alors que le comité de pilotage est totalement dans le flou.

M. le président. La parole est à M. Philippe Vigier.

M. Philippe Vigier. Je ne vous comprends pas, madame la ministre. Tout à l’heure, je vous ai écoutée d’autant plus attentivement que vous ne vous exprimez que rarement. (« C’est vrai ! » sur les bancs du groupe UMP.)

M. Denis Jacquat. C’est parce qu’elle nous écoute !

M. Philippe Vigier. Vous avez dit ceci : c’est le Parlement qui décide. Pourquoi donc restreindre une fois de plus le champ de réflexion de ce comité ? M. Jacquat l’a dit : l’équilibre financier est le problème essentiel. Or, vous avez soigneusement écarté le comité de l’article 1er . Et pour cause : vous refusez qu’il réfléchisse. Dans ces conditions, madame la ministre, votre comité de suivi n’est qu’un COR sans vie ! (Sourires.)

M. Pascal Terrasse, rapporteur pour avis. Et le COR est sans tête, à vous entendre !

(L’amendement n3040 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de quinze amendements identiques, nos 2249 à 2263.

La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n2250.

M. André Chassaigne. Je doute que nos collègues de l’opposition votent en faveur de cet amendement dans la mesure où il procède d’une approche progressiste, et même humaniste. Ils ont certes voté certains de nos précédents amendements, mais devraient se garder d’en prendre l’habitude et n’en faire que l’exception du genre, à l’image des poissons volants.

M. Denis Jacquat. Cela vaut aussi dans le sens inverse !

M. André Chassaigne. Si l’évolution de l’espérance de vie reste positive, elle doit désormais se mesurer aussi à l’aune de la qualité de la durée de vie supplémentaire. Or, les résultats de l’action conduite par l’Union européenne sur les années de vie en bonne santé, en avril 2013, confirment l’émergence d’un problème plus que préoccupant. En effet, l’un des résultats paradoxaux des progrès de la médecine est que la durée de vie totale augmente plus rapidement que la durée de vie en bonne santé, ce qui provoque mécaniquement une augmentation des personnes âgées souffrant d’incapacités ou de maladies chroniques. Cette situation réduit sensiblement l’intérêt de vivre plus longtemps. Le dossier consacré à ce sujet dans le magazine « Sciences et vie » de juin 2013 se révèle particulièrement alarmant. Aujourd’hui, la part de la vie que l’on peut espérer passer en bonne santé est en forte baisse : elle est par exemple de 74 % pour une femme née cette année contre 77 % pour une femme née en 2004. La première peut donc s’attendre à passer vingt-deux années de sa vie avec des incapacités, contre 15,5 ans pour la seconde. Plus la vie s’allonge et plus elle se passe en mauvaise santé. (Murmures sur les bancs du groupe UMP.) Il faut naturellement prendre ce constat en compte dans l’évaluation de la durée de cotisation. Tel est l’objet de notre amendement.

M. le président. Sur les amendements identiques nos 2249 à 2263, je suis saisi par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

La parole est à M. Marc Dolez, pour soutenir l’amendement n2251.

M. Marc Dolez. L’amendement est défendu.

M. le président. La parole est à M. Alfred Marie-Jeanne, pour soutenir l’amendement n2260.

M. Alfred Marie-Jeanne. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Nicolas Sansu, pour soutenir l’amendement n2262.

M. Nicolas Sansu. J’ajouterai simplement une statistique à l’excellente présentation du président Chassaigne : en 2008, l’espérance de vie en bonne santé et sans incapacité majeure était de 64,6 ans pour les femmes et de 62,8 ans pour les hommes ; en 2010, elle est passée respectivement à 63,5 et à 61,9 ans. Pour la première fois de notre histoire, l’espérance de vie en bonne santé a baissé.

M. Francis Vercamer. C’est vrai.

M. Nicolas Sansu. Ne nous voilons pas la face : c’est, entre autres raisons, parce que la durée de cotisation a été allongée.

M. Denis Jacquat. Mais non !

M. Nicolas Sansu. La précarité et la pauvreté progressent aussi chez les personnes âgées pour qui l’accès aux soins est de moins en moins aisé. Cela mérite d’être dit, car une telle donnée ne saurait être ignorée.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Issindou, rapporteur. Je ne suis pas insensible aux arguments de MM. Chassaigne et Sansu, bien que la commission ait émis un avis défavorable à ces amendements. Cependant, la notion d’espérance de vie en bonne santé est intéressante. À preuve : nous l’avons nous-mêmes introduite dans l’article 1er, à l’initiative de M. Germain, que je tiens à saluer. En l’occurrence, j’avoue un moment de faiblesse dans ma fermeté et je serais ravi d’entendre l’avis de Mme la ministre sur cet amendement.

M. André Chassaigne. Oui, parce que c’est un amendement de gauche !

M. Marc Dolez. N’hésitez pas à avoir d’autres moments de faiblesse, monsieur le rapporteur !

M. André Chassaigne, rapporteur. Essayez de mettre une lame au manche du couteau !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Il est vrai qu’il s’agit là d’amendements progressistes et d’une démarche positive qui consistent à se préoccuper non seulement de l’espérance de vie, mais aussi des conditions dans lesquelles la vie est vécue. Cela dit, l’espérance de vie en bonne santé est une notion assez difficile à apprécier, car plusieurs études divergentes aboutissent à des résultats différents selon l’année de référence. L’espérance de vie en bonne santé semble avoir atteint un palier, alors même que l’espérance de vie simple continue d’augmenter, comme l’a rappelé M. Sansu. En tout état de cause, c’est une notion intéressante qui mérite d’être approfondie, mais elle ne saurait se substituer à la notion d’espérance de vie, ni même à celle d’espérance de vie sans incapacité. Or, s’ils étaient maintenus en l’état, vos amendements aboutiraient à substituer ces deux notions visées à l’alinéa 18 par celle d’espérance de vie à soixante ans en bonne santé. Je pourrais y être favorable si vous le rectifiez afin d’ajouter, et non de substituer, la notion d’espérance de vie en bonne santé de sorte que le texte soit ainsi rédigé : « L’évolution de la durée d’assurance requise d’une pension sans décote, au regard notamment de l’évolution de l’espérance de vie, de l’espérance de vie à soixante ans en bonne santé, de l’espérance de vie sans incapacité », etc.

M. le président. La parole est à M. Denis Jacquat.

M. Denis Jacquat. En qualité de président du groupe d’études de l’Assemblée nationale sur les enjeux du vieillissement, j’ai tenté de comprendre ce qui vient d’être dit : en vain. Je demande solennellement que me soit fourni un décodeur ou un décrypteur, car je ne saisis pas le sens de ce raisonnement.

M. Pascal Terrasse, rapporteur pour avis. C’est normal, vous êtes de droite !

M. Denis Jacquat. Au plan statistique, on ne saurait tirer des conclusions définitives d’une étude ne portant que sur une année : il faut nécessairement comparer plusieurs années. Or, nous avons des raisons d’être fiers de notre pays dont les habitants, comme dans quelques autres dans le monde, ont une espérance de vie générale en progression, tandis que l’espérance de vie en bonne santé poursuite elle aussi sa hausse. Il n’y a pas à ce stade de palier, encore moins de régression. J’invite d’ailleurs tous ceux qui, parmi nous, réfléchissent aux enjeux du vieillissement à rejoindre notre groupe d’études.

M. Jean-Pierre Door. Très bien !

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à M. Patrick Hetzel, pour un rappel au règlement.

M. Patrick Hetzel. Mme la ministre vient de proposer à M. Chassaigne de rectifier son amendement. Or, l’alinéa 4 de l’article 89 du règlement permet à tout député de demander que soit vérifiée la recevabilité financière d’un amendement, fût-il sous-amendé, au regard de l’article 40 de la Constitution. Je souhaite donc que la commission des finances se prononce sur l’amendement en discussion, car il est susceptible d’avoir une incidence financière.

M. le président. La parole est à M. Nicolas Sansu.

M. Nicolas Sansu. Monsieur Hetzel, je ne veux pas répondre à la place de la commission des finances ou du Gouvernement…

M. Patrick Hetzel. Eh bien taisez-vous !

M. Nicolas Sansu. …mais dites-moi où est l’incidence financière alors qu’il s’agit seulement d’ajouter un critère dans le cadre du comité de suivi ! Celui-ci est composé de cinq membres ; qu’ils soient d’accord entre eux ou non, ils n’induiront aucune dépense supplémentaire s’il est ajouté la notion d’espérance de vie en bonne santé. En outre, cet ajout ne changerait rien en termes statistiques, puisque si l’espérance de vie en bonne santé est de soixante-deux ans à la naissance, elle n’est plus que de deux ans à soixante ans. Tant sur le principe qu’en matière financière, rien ne s’oppose donc à la proposition de rectification de Mme la ministre.

M. Denis Jacquat. On n’a rien compris !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Pascal Terrasse, rapporteur pour avis. Mon collègue Sansu, membre de la commission des finances, aurait pu ajouter que cet amendement n’est aucunement frappé d’irrecevabilité au titre de l’article 40, puisqu’il ne s’agit que de prendre en compte le critère d’espérance de vie. J’ajoute que l’espérance de vie à la naissance et l’espérance de vie à soixante ans sont deux choses bien différentes.

M. Xavier Bertrand. M. Sansu vient de dire que cela ne changerait rien !

M. Pascal Terrasse, rapporteur pour avis. En tout état de cause, j’estime que cet excellent amendement, qui est à la fois progressiste et de gauche, est parfaitement recevable, même rectifié tel qu’il a été proposé. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt-trois heures dix, est reprise à vingt-trois heures vingt.)

M. le président. La séance est reprise.

La parole est à Mme Valérie Rabault, vice-présidente de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.

Mme Valérie Rabault, vice-présidente de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, je vous prie d’excuser Gilles Carrez qui préside la commission des finances pour l’examen du projet de loi de finances. L’amendement qui vous est présenté ce soir est recevable, puisqu’il s’agit de recommandations qui ne lient pas l’État en termes d’obligations.

M. Philippe Vigier. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Patrick Hetzel.

M. Patrick Hetzel. Je vous remercie de ces précisions, mais je ne suis pas convaincu pour autant, car je pense qu’il y a un problème de constitutionnalité. En tout cas, ce sera, nous vous le disons clairement, l’un des éléments qui seront invoqués au moment où ce texte sera présenté au Conseil constitutionnel.

M. Pascal Terrasse, rapporteur pour avis. Vous avez perdu ! Il faut vous coucher !

M. Michel Issindou, rapporteur. Quel mauvais perdant !

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Merci pour vos propos, monsieur Hetzel, et pour votre tentative pour que cet amendement ne puisse pas être adopté !

Je m’interroge sur votre comportement depuis quelques heures, car vous avez assez largement soutenu des amendements que nous avons présentés. Vous êtes intervenus en disant que ces amendements allaient dans le bon sens. Mais, dès que l’un d’entre eux peut être adopté, vous avez une sorte de « crampe mentale » – je ne sais plus quel écrivain utilisait cette expression. Votre naturel revient et vous vous dites : « On ne va quand même pas permettre aux députés du Front de gauche de faire adopter un amendement ! ». (Rires sur divers bancs.)

Cela crée chez vous une espèce de crispation. C’est extrêmement dommage !

Ou alors, le comportement que vous aviez en soutenant nos amendements était uniquement politicien. Et ça, ce ne serait pas beau. Pas beau du tout ! (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, SRC, écologiste et RRDP.)

M. Denis Jacquat. Non, ce n’est pas notre genre.

Article 3 (suite)

M. le président. La parole est à M. Arnaud Robinet.

M. Arnaud Robinet. Monsieur Chassaigne, merci pour l’aveu que vous venez de faire : oui, nous avons assisté à un véritable petit arrangement entre amis. Il est vrai que le Gouvernement et Mme la ministre méprisent depuis le début de ces débats tous les amendements du groupe GDR. Il fallait bien faire un geste et la ministre s’est sentie obligée d’accepter cet amendement qui ne veut rien dire.

Car quand on parle de l’espérance de vie en bonne santé…

M. Pascal Terrasse, rapporteur pour avis. Ça vous fait mal de le dire !

M. Arnaud Robinet. Non, monsieur Terrasse, ça ne nous fait pas mal, mais cette notion doit plutôt être prise en compte dans le domaine de la santé, non dans le domaine social. Si nous voulons être vraiment progressistes, mettons en place une politique de prévention pour augmenter l’espérance de vie en bonne santé.

M. Denis Jacquat. Très bien !

M. Arnaud Robinet. Pour mettre en place cette politique de prévention, madame la ministre des affaires sociales, rapprochez-vous de la ministre de la santé, du moins s’il en existe une dans ce pays ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Mme Catherine Coutelle, présidente de la délégation aux droits des femmes. C’est mesquin !

M. le président. Monsieur Sansu, vous confirmez que vous acceptez la rectification de votre amendement qui vous a été proposée ?

M. Nicolas Sansu. Oui. Au nom de mon groupe.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 2250, 2251, 2260 et 2262, tels qu’ils viennent d’être rectifiés.

(Il est procédé au scrutin.)

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants91
Nombre de suffrages exprimés89
Majorité absolue45
Pour l’adoption84
contre5

(Les amendements identiques nos 2250, 2251, 2260 et 2262, tels qu’ils viennent d’être rectifiés, sont adoptés et l’amendement n2980 tombe.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n2762, qui fait l’objet d’un sous-amendement n° 3092.

La parole est à Mme Fanélie Carrey-Conte, pour soutenir l’amendement.

Mme Fanélie Carrey-Conte. Cet amendement est le « deuxième morceau » du précédent qui voulait plafonner les recommandations du comité de suivi en matière d’allongement de la durée de cotisation.

Le premier morceau n’a pas retenu la clémence du rapporteur. Mais peut-être le deuxième morceau la retiendra-t-il ?

Cet amendement vise, dans les paramètres qui sont à prendre en compte dans les recommandations du comité de suivi, à substituer à la notion de population active, qui comprend les chômeurs, la notion de taux de chômage, en particulier des jeunes et des seniors. Cela nous paraît plus juste. En effet, en fonction de l’évolution de ce taux de chômage, les conséquences de l’allongement de la durée de cotisation peuvent être très différentes.

M. le président. La parole est M. Michel Issindou, rapporteur, pour soutenir le sous-amendement n3092, et pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n2762.

M. Michel Issindou, rapporteur. Madame Carrey-Conte, je ne suis qu’à moitié d’accord. Si vous acceptiez un sous-amendement qui permet, non pas de modifier les critères, mais de compléter l’alinéa, votre amendement pourrait recevoir un avis favorable.

Il s’agit, à la fin de l’alinéa 1, de remplacer les mots : « substituer aux mots » par les mots : « après le mot » et, à la fin de l’alinéa 3, de remplacer le mot « par » par le mot « insérer ».

Cet amendement vise à compléter l’alinéa 18 plutôt qu’à remplacer certains critères par d’autres.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Favorable au sous-amendement du rapporteur. Et si Mme Fanélie Carrey-Conte est d’accord pour sous-amender ainsi son amendement, je donnerai également un avis favorable à celui-ci.

Il s’agit de compléter le texte du Gouvernement par la formulation qui se trouve être celle de son amendement, et non de substituer son amendement à la formulation du Gouvernement.

M. le président. La parole est à Mme Fanélie Carrey-Conte.

Mme Fanélie Carrey-Conte. Je ne voudrais pas passer à côté de la clémence de notre rapporteur !

M. Nicolas Sansu. Elle est tellement rare !

Mme Fanélie Carrey-Conte. J’accepte donc volontiers le sous-amendement, et je remercie Mme la ministre de son avis favorable.

(Le sous-amendement n3092 est adopté.)

(L’amendement n2762, sous-amendé, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’une série d’amendements identiques, nos 1812 à 1826.

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n1812.

Mme Jacqueline Fraysse. Le fonds de réserve des retraites a été instauré par le Gouvernement Jospin en 1999 pour faire face au pic démographique attendu après 2020.

Il est alimenté par un prélèvement social de 2 % sur les revenus du patrimoine et des placements.

En 2010, lors de la réforme des retraites, nous nous sommes opposés au versement annuel de 2,1 milliards d’euros à la CADES. Nous considérons que ce fonds ne doit pas être utilisé à d’autres fins que ce pour quoi il a été créé. Nous nous opposons donc au pillage de ce fonds : nous n’avons pas changé d’avis.

C’est pourquoi nous nous opposons au transfert des moyens du fonds de réserve des retraites vers les régimes de retraites.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Issindou, rapporteur. Le fonds de réserve des retraites a été créé pour passer une période difficile et nous y sommes aujourd’hui. Il joue donc son rôle. À raison de 2,1 milliards par an, cela n’épuise pas ses réserves qui sont encore importantes puisqu’elles s’élèvent à environ 32 milliards.

Avis défavorable, donc.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Denis Jacquat.

M. Denis Jacquat. Cette réforme de 2013 est décidément très étonnante. Il y a trois ans, lors du débat du texte de 2010, on trouvait dans cet hémicycle, comme Mme Fraysse l’a fort justement rappelé, des personnes très opposées à une transformation des réserves du FRR, en particulier de nombreux membres du parti socialiste, dont M. Issindou.

M. Pascal Terrasse, rapporteur pour avis. Moi aussi !

M. Denis Jacquat. On vient de nous expliquer à l’instant que l’on peut faire en 2013 ce qu’on ne devait pas faire en 2010. À l’origine, le FRR devait servir à passer le cap de 2020. Face à la crise, nous n’étions pas hostiles à en affecter une partie autrement.

Mme Catherine Coutelle, présidente de la délégation aux droits des femmes. Les trente-cinq heures n’y sont donc pour rien, monsieur Bertrand !

M. Denis Jacquat. Mais ce qui me choque le plus, c’est que les conditions d’un tel transfert seront fixées par décret. Pourquoi ne disposons-nous pas de renseignements à ce propos ? Le texte renvoie à plusieurs reprises à des décrets. Les transferts pourraient tout à fait être fléchés, mais il est prévu de les mettre en œuvre par décret. En d’autres termes, « circulez, il n’y a rien à voir » !

(L’amendement n1812 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’une série d’amendements identiques, nos 1872 à 1886.

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n1872.

Mme Jacqueline Fraysse. Défendu.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n1873.

M. André Chassaigne. Défendu.

M. le président. La parole est à M. Marc Dolez, pour soutenir l’amendement n1874.

M. Marc Dolez. Défendu.

M. le président. La parole est à M. Alfred Marie-Jeanne, pour soutenir l’amendement n1883.

M. Alfred Marie-Jeanne. Défendu.

M. le président. La parole est à M. Nicolas Sansu, pour soutenir l’amendement n1885.

M. Nicolas Sansu. Défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Issindou, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

(Les amendements identiques nos 1872, 1873, 1874, 1883 et 1885 ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d’une série d’amendements identiques, nos 1842 à 1856.

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n1842.

Mme Jacqueline Fraysse. Cet amendement porte lui aussi sur le fonds de réserve des retraites et vise à le sanctuariser jusqu’en 2020, comme cela était prévu lors de sa création.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Issindou, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

(L’amendement n1842 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Barbier, pour soutenir l’amendement n52.

M. Jean-Pierre Barbier. Depuis le début, nos débats éludent le problème principal de la réforme des retraites, qui est l’absence d’équilibre financier à l’horizon 2020. J’entends bien tout ce qui est dit depuis le début mais ce qui m’inquiète le plus, c’est que nous n’avons toujours pas de réponse sur les pistes qui seront suivies d’ici à 2020 pour parvenir à l’équilibre et surtout pour trouver les 13 milliards d’euros manquants. Tel est l’objet de cet amendement. Sur l’utilisation du fonds de réserve des retraites, nous sommes particulièrement vigilants. C’est pourquoi cet amendement rejoint un peu les précédents. Nous demandons que le fonds de réserve des retraites soit utilisé pour aider non pas les régimes mais bien le système de retraites. En effet, si nous sommes aujourd’hui amenés à mettre en œuvre une réforme des retraites, c’est bien pour sauver le système de retraites par répartition et non les régimes de retraites.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Issindou, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Denis Jacquat.

M. Denis Jacquat. Je souhaite apporter une précision. Lors de sa mise en place, le fonds de réserve des retraites était uniquement destiné au régime général. Je ne sache pas que sa définition ait changé, sauf si le décret cache quelque chose. Puis-je avoir une réponse à ce propos ?

(L’amendement n52 n’est pas adopté.)

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à M. Arnaud Robinet, pour un rappel au règlement.

M. Arnaud Robinet. Ce rappel au règlement se fonde sur l’article 58, alinéa 1. La question posée par notre collègue Jacquat est extrêmement importante.

M. Xavier Bertrand. Elle exige une réponse !

M. Arnaud Robinet. Il y va du devenir du fonds de réserve des retraites. Je demande une suspension de séance en vue d’obtenir une réponse à ce sujet.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt-trois heures trente-cinq, est reprise à vingt-trois heures quarante.)

M. le président. La séance est reprise.

Je suis saisi d’une série d’amendements identiques, nos 1887 à 1901.

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n1887.

Mme Jacqueline Fraysse. Défendu.

M. le président. La parole est à M. Marc Dolez, pour soutenir l’amendement n1889.

M. Marc Dolez. Cet amendement du groupe GDR n’étonnera personne ici. En effet, nous en avons beaucoup parlé lors de la discussion de l’article 1er. Afin qu’aucune ambiguïté ne subsiste au sujet du système de retraites par répartition, nous souhaitons voir précisé à chaque fois « à prestations définies », dans la fidélité au système qui a été mis en place à la Libération, et qui signifie que le niveau des pensions ne doit en aucune manière être une variable d’ajustement.

M. Xavier Bertrand. C’est pour les retraites complémentaires que vous dites cela ?

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Issindou, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

(Les amendements identiques nos 1887 et 1889 ne sont pas adoptés.)

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à M. Arnaud Robinet, pour un rappel au règlement.

M. Arnaud Robinet. Ce rappel au règlement se fonde sur l’article 58, alinéa 1. Nous avons posé une question précise et claire à Mme la ministre et n’avons toujours pas de réponse.

M. Xavier Bertrand. L’opposition a des droits, monsieur le président ! Elle doit être écoutée et respectée !

M. Arnaud Robinet. Ou bien c’est un mépris de l’opposition, ce que nous ne pouvons accepter, ou bien Mme la ministre n’a pas la réponse, et dans ce cas nous demandons une suspension de séance afin que M. le ministre du budget, M. Cazeneuve, vienne dans l’hémicycle afin de nous la donner.

M. Pascal Terrasse, rapporteur pour avis. Rien à voir !

M. Christian Hutin. Comme s’il n’avait que ça à faire !

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marisol Touraine, ministre. Je serai extrêmement brève, monsieur Robinet. La réponse que vous attendez, je l’ai donnée à votre collègue Jacquat pendant la suspension de séance. Je pensais qu’il vous l’avait transmise.

M. Philippe Vigier. Nous aimons vous entendre !

Mme Marisol Touraine, ministre. La voici donc : l’affectation des sommes inscrites au fonds de réserve n’est en rien modifiée par rapport aux destinations initialement prévues dans la loi.

M. Xavier Bertrand. C’est-à-dire ?

Article 3 (suite)

M. le président. Je suis saisi d’une série d’amendements identiques, nos 1917 à 1931.

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n1917.

Mme Jacqueline Fraysse. Défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Issindou, rapporteur. Favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

(L’amendement n1917 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’une série d’amendements identiques, nos 1947 à 1961.

La parole est à M. Nicolas Sansu, pour soutenir l’amendement n1960.

M. Nicolas Sansu. La suppression de l’alinéa 21 s’impose selon nous, pour une raison simple. C’est une question de civilisation. La possibilité de modulation du niveau des taux de cotisation d’assurance vieillesse de base et complémentaire ne doit pas relever des recommandations du comité de suivi. On lui interdit de travailler sur tout un ensemble de sujets, mais on lui permettrait d’augmenter, puisque c’est bien de cela qu’il s’agit, le taux de cotisation d’assurance vieillesse de base et complémentaire, et ce en dehors de toute discussion paritaire ! Ce comité est en outre nanti de prérogatives supérieures à celles du COR où siègent organisations syndicales et patronales, parlementaires, représentants des institutions et des ministères, etc. Nous ne pouvons accepter l’attribution d’un tel pouvoir à un comité d’experts quand même particulièrement réduit. Il ne fait aucun doute que des recommandations émises par le comité, même si ce ne sont que des recommandations, risquent de s’imposer au Gouvernement, puis au Parlement. C’est au regard d’un tel danger que nous proposons de supprimer l’alinéa 21.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Issindou, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

(L’amendement n1960 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n2814.

M. Michel Issindou, rapporteur. C’est un amendement rédactionnel.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Favorable.

(L’amendement n2814 est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 19 et 2865.

La parole est à M. Arnaud Robinet, pour soutenir l’amendement n19.

M. Arnaud Robinet. Cet amendement vise à remédier au vice idéologique du présent texte. Il semble en effet incompréhensible que le futur comité d’orientation des retraites ne puisse pas formuler de recommandations fondées en partie ou totalement sur le recul de l’âge légal de départ en retraite, seul paramètre permettant de retrouver l’équilibre financier à court terme. Qu’il s’agisse de l’équité intergénérationnelle, de la prise en compte des données statistiques sur l’augmentation de l’espérance de vie comme de la préservation du pouvoir d’achat des actifs ou de la compétitivité des entreprises, le paramètre démographique est le seul à pouvoir apporter une réponse au besoin de financement du système à court terme sans hausse des cotisations.

Par ailleurs, la France dispose de l’un des âges de départ en retraite les plus précoces des pays développés. Les pays qui nous entourent ont déjà programmé un relèvement de l’âge de départ en retraite au-delà de 65 ans : 67 ans en Allemagne à l’horizon 2029 ; 67 ans en Espagne à l’horizon 2027 ; 68 ans au Royaume-Uni à l’horizon 2046.

M. le président. La parole est à M. Philippe Vigier, pour soutenir l’amendement n2865.

M. Philippe Vigier. L’amendement n2865 vise à ce que le comité de suivi puisse travailler sur la question de l’augmentation de l’âge légal de départ en retraite – mon propos ne vous surprendra pas. D’un côté, madame la ministre, vous acceptez le report de l’âge légal, puisque la réforme de 2010 est en cours ; de l’autre, vous nous dites qu’à partir de 2020, il ne sera plus question de toucher à l’âge légal. C’est le « pas vu pas pris » dont j’ai parlé. Or, avec votre réforme, l’équilibre financier n’est pas au rendez-vous.

Mes chers collègues, je ne résiste pas à la tentation de vous lire quelques lignes, extraites d’une interview accordée par Michel Rocard à France Soir le 24 juin 2010, où il fait référence à l’abaissement de l’âge légal du départ en retraite de 65 à 60 ans : « Tous les ministres en charge de l’économie – même Fabius et, surtout, Delors – étaient effondrés, décomposés. Moi aussi. Mais il s’agissait de faire plaisir au parti communiste et de magnifier le caractère social du Gouvernement ! Le résultat a été la sacralisation de ce chiffre de 60 ans. Depuis, nous sommes encombrés d’un symbole alors que ce chiffre est, au fond, le moins significatif de tous les paramètres, même si c’est le plus visible. »

On a beaucoup parlé du COR depuis le début des débats. Savez-vous, monsieur Terrasse, que dans son onzième rapport, daté de décembre 2012, le COR affirmait qu’il faudrait un décalage supplémentaire de l’âge effectif moyen de départ en retraite d’un an et neuf mois par rapport à 2011 pour atteindre l’équilibre en 2020 sans taxer les retraités, les salariés et les entreprises, et sans baisser le pouvoir d’achat des retraités, comme vous vous apprêtez à le faire avec votre réforme ?

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les amendements identiques nos 19 et 2865 ?

M. Michel Issindou, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

(Les amendements identiques nos 19 et 2865 ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d’une série d’amendements identiques, nos 1992 à 2006, et 2866.

La parole est à M. Marc Dolez, pour soutenir l’amendement n1994.

M. Marc Dolez. Défendu.

M. le président. La parole est à M. Philippe Vigier, pour soutenir l’amendement n2866.

M. Philippe Vigier. J’ai essayé, à l’article 1er, d’évoquer un sujet important pour nous, et auquel le groupe GDR a également fait référence tout à l’heure – par la voix d’André Chassaigne, me semble-t-il. Nos concitoyens sont inquiets pour leurs retraites et expriment, en la matière, une défiance générale à l’encontre des dirigeants politiques – on ne peut leur donner tort, car si l’article 1er pose certains principes, le compte n’y est pas. Considérant que vous défendez un texte important, madame la ministre, il serait tout à votre honneur de poser une règle de confiance afin de tenter de retrouver une majorité la plus large possible.

Je ne vois pas qui pourrait s’opposer à une règle de confiance qui s’appuierait sur trois principes : un taux de cotisation maximum, constituant la meilleure protection que l’on puisse imaginer en matière de pouvoir d’achat et de compétitivité de nos entreprises ; un taux de remplacement minimum, garantissant que lorsqu’il y a eu un travail, il y a un revenu correspondant ; enfin, un montant de pension minimum – n’oublions pas les petites retraites.

Vous l’aurez compris, notre amendement a pour objet de permettre au comité de suivi d’engager une réflexion la plus large possible avant de nous faire des propositions, qui seront soumises au débat avec les partenaires sociaux.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Issindou, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

(Les amendements identiques nos 1994 et 2866 ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d’une série d’amendements identiques, nos 1315 à 1329.

La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n1316.

M. André Chassaigne. Défendu.

M. le président. La parole est à M. Marc Dolez, pour soutenir l’amendement n1317.

M. Marc Dolez. Défendu.

M. le président. La parole est à M. Alfred Marie-Jeanne, pour soutenir l’amendement n1326.

M. Alfred Marie-Jeanne. Défendu.

M. le président. La parole est à M. Nicolas Sansu, pour soutenir l’amendement n1328.

M. Nicolas Sansu. Défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Issindou, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

(Les amendements identiques nos 1316, 1317, 1326 et 1328 ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Germain, pour soutenir l’amendement n2912.

M. Jean-Marc Germain. Défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Issindou, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

(L’amendement n2912 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’une série d’amendements identiques, nos 2007 à 2021.

La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n2008.

M. André Chassaigne. Défendu.

M. le président. La parole est à M. Marc Dolez, pour soutenir l’amendement n2009.

M. Marc Dolez. Défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Issindou, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

(Les amendements identiques nos 2008 et 2009 ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n2982.

M. Michel Issindou, rapporteur. Amendement de précision.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Favorable.

(L’amendement n2982 est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 2914 et 3019, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Jean-Marc Germain, pour soutenir l’amendement n2914.

M. Jean-Marc Germain. Dans la mesure où nous avons déjà évoqué, au début de nos débats, la question soulevée par l’amendement n2914, et où le rapporteur s’est engagé à apporter une nouvelle rédaction destinée à montrer aux jeunes générations qu’elles bénéficieront d’une retraite aussi importante que celle de leurs aînés, je retire cet amendement.

(L’amendement n2914 est retiré.)

M. le président. La parole est à Mme Véronique Massonneau, pour soutenir l’amendement n3019.

Mme Véronique Massonneau. L’amendement n3019 vise à empêcher que le comité de suivi des retraites ne puisse rendre des conclusions tendant à une nouvelle augmentation de la durée d’assurance vieillesse requise pour le départ en retraite sans décote. Nous considérons que la durée de 43 années de cotisations, qui va être mise en œuvre en 2035, constitue un seuil ne devant pas être dépassé. Le comité ne pourra donc recommander un nouvel allongement de la durée de cotisation. Si de nouveaux besoins de financement se font sentir – ce qui, j’en conviens, peut arriver –, exclure l’activation de ce levier obligera le comité de suivi à chercher d’autres pistes pour ses recommandations. Ainsi est-il permis de penser qu’il fera preuve d’une plus grande originalité, notamment en faisant peser le financement sur une autre cible que les ménages.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Issindou, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Jacques Lamblin.

M. Jacques Lamblin. Les amendements que nous voyons passer en ce moment paraissent tous motivés par la volonté désespérée d’essayer de neutraliser les effets néfastes de ce projet de loi, en particulier en direction des jeunes. Je suis convaincu qu’en votre for intérieur, vous savez qu’en sacralisant les 62 ans, en refusant de repousser l’âge légal de départ en retraite – une mesure qui aurait pourtant un effet financier immédiat –, vous êtes obligés de recourir à d’autres mesures pour récupérer de l’argent à court terme. Ces autres mesures, à savoir l’augmentation des cotisations salariales et la baisse du montant des retraites, vont être supportées essentiellement par les jeunes : durant toute leur vie, ils vont payer des cotisations plus importantes et, une fois à la retraite, ils toucheront de plus petites pensions, quelles que soient les carabistouilles que vous nous proposez avec vos amendements – au demeurant tous rejetés par le Gouvernement.

(L’amendement n3019 n’est pas adopté.)

M. le président. Sur l’article 3, je suis saisi par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

Je suis saisi d’une série d’amendements identiques, nos 2039 à 2053.

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n2039.

Mme Jacqueline Fraysse. Défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Issindou, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

(L’amendement n2039 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 20, 107 et 2864.

La parole est à M. Arnaud Robinet, pour soutenir l’amendement n20.

M. Arnaud Robinet. Mme la ministre nous ayant répondu tout à l’heure, je retire l’amendement n20, qui n’a plus lieu d’être.

(L’amendement n20 est retiré.)

M. le président. La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement n107.

Mme Véronique Louwagie. Je le retire également, monsieur le président.

(L’amendement n107 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Vigier, pour soutenir l’amendement n2864.

M. Philippe Vigier. Cet amendement est retiré.

(L’amendement n2864 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n2815.

M. Michel Issindou, rapporteur. Amendement de coordination.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Favorable.

(L’amendement n2815 est adopté.)

M. le président. Nous en venons aux explications de vote sur l’article 3. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour le groupe GDR.

Mme Jacqueline Fraysse. L’article 3 est extrêmement grave, à la fois par son caractère antidémocratique et par la remise en cause qu’il contient de notre système solidaire, par répartition et à prestations définies. Il est antidémocratique, car la nomination des membres du comité de surveillance qu’il crée sera le fait du prince : aucun droit de regard des citoyens, ni même du Parlement, n’est prévu, puisque cette nomination sera faite par décret.

Ensuite, les prérogatives de ce comité, qui aura pour mission, ni plus ni moins, d’assurer l’équilibre financier de notre système de retraite en agissant sur les trois seuls paramètres que sont le montant des cotisations – qui, on l’aura compris, ne devra pas augmenter, ou tout du moins dans des limites très restreintes –, la durée de cotisations – qui, elle, pourra augmenter –, et le taux de remplacement, c’est-à-dire le montant des pensions, qui, elles, pourront baisser, puisqu’elles se trouvent réduites au rôle de variable d’ajustement des comptes, dans la mesure où ce texte ne contient aucune disposition pour élargir l’assiette des cotisations et donc apporter des ressources nouvelles.

Ainsi, ce comité vise clairement à éviter aux gouvernements d’endosser la responsabilité de mesures impopulaires telles que l’allongement de la durée de cotisation ou la baisse des pensions. Il s’inscrit dans la logique technocratique qui est celle de Bruxelles, visant à présenter des mesures autoritaires et impopulaires comme inévitables et nécessaires, en écartant du débat toute proposition alternative.

Plus grave encore : cet article prépare le terrain à une réforme systémique de notre système de retraites, pour le faire passer d’un système solidaire par répartition et à prestations définies, dans lequel le montant des cotisations est ajusté à la durée de cotisation et représente un pourcentage des salaires perçus, à un système à cotisations définies, dans lequel le montant des pensions servira de variable d’ajustement – ce qui, bien sûr, ne donne aucune garantie quant à leur niveau.

Nous ne pouvons évidemment pas accepter un tel engrenage qui, de surcroît, ne dit pas clairement son nom. Nous voterons donc contre cet article, pour lequel nous avons demandé un scrutin public.

M. le président. La parole est à M. Arnaud Robinet, pour le groupe UMP.

M. Arnaud Robinet. Nous avons débattu plusieurs heures au sujet de l’article 3, qui pose un certain nombre de problèmes, soulevés notamment par la création du nouveau comité de suivi. Nous aurions préféré, pour notre part, voir élargir les compétences du Conseil d’orientation des retraites. Le principe du comité de suivi ayant été acté, nous avons voulu, comme nos amis du groupe GDR, lui conférer davantage de missions. Nous avons posé plusieurs questions au Gouvernement, et n’avons pas obtenu toutes les réponses que nous souhaitions ; quant au rapporteur, il s’est parfois un peu emmêlé dans ses réponses – on ne peut pas dire qu’il soit toujours resté droit dans ses bottes. Le groupe UMP votera donc contre l’article 3.

M. le président. La parole est à M. Philippe Vigier, pour le groupe UDI.

M. Philippe Vigier. Je veux dire au groupe GDR que nous voterons également contre l’article 3. Quand nous vous avons soutenus au sujet de certains amendements, monsieur Chassaigne, ce n’était pas une posture : le sujet est trop sérieux.

M. André Chassaigne. Si vous le dites !

M. Philippe Vigier. J’en veux pour preuve le fait que nous ne vous avons pas suivis sur certains amendements, parce que nous étions en désaccord avec leur formulation. Si nous votons contre l’article 3, c’est que nous faisons partie des députés attachés à l’évaluation des politiques : la mission première du Parlement, c’est de contrôler les résultats de l’application des lois qu’il a votées.

Vous avez voulu restreindre le champ d’action du nouveau comité, d’abord par sa composition, mais aussi par le mode de nomination de ses membres – en l’occurrence par le Président de la République. Je me souviens qu’il y a quelques années, vous n’aviez pas de mots assez durs quand un comité Théodule était mis en place et que son président était nommé en conseil des ministres : vous disiez alors que ce n’était pas normal et que le Parlement devait valider ce type de nomination. Aujourd’hui, vous ne dites rien à ce sujet, ce qui semble vouloir dire qu’en passant dans la majorité, vous avez oublié vos convictions – ce qui n’est pas bien.

Pour conclure, je ne comprends pas, madame la ministre, pourquoi vous ne voulez pas doter ce comité de tous les moyens utiles à sa mission – à cet égard, le fait qu’il doive s’appuyer sur le rapport du COR, comme indiqué à l’alinéa 11, est particulièrement révélateur – puisque, quoi qu’il arrive, c’est le Parlement qui est souverain. Alors que vous avez peur de la force de proposition, pour notre part, nous croyons aux vertus de la proposition et du dialogue social.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Germain, pour le groupe SRC.

M. Jean-Marc Germain. Le groupe socialiste va voter cet article.

Le projet de loi a le mérite, à l’article 1er, de fixer des objectifs très clairs. Par ailleurs, il définit – comme cela était nécessaire – une gouvernance qui permette de suivre cette feuille de route, de garantir le régime d’assurance et la solidarité en faveur des femmes, des ouvriers qui ont eu les carrières les plus pénibles et des jeunes. Enfin, le texte a été enrichi – j’en remercie le rapporteur et la ministre – pour prendre en compte la garantie de revenu des plus petites pensions et l’égalité femmes-hommes. Telles sont les raisons pour lesquelles nous voterons cet article.

M. le président. Je mets aux voix l’article 3, tel qu’il a été amendé.

(Il est procédé au scrutin.)

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants110
Nombre de suffrages exprimés103
Majorité absolue52
Pour l’adoption69
contre34

(L’article 3, amendé, est adopté.)

Après l’article 3

M. le président. La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir l’amendement n193.

M. Dominique Tian. Cet amendement a trait au code des pensions civiles et militaires. Les fonctionnaires affectés hors du continent européen bénéficient systématiquement d’une bonification dite de dépaysement. Ainsi, les fonctionnaires affectés en Afrique du Nord ont droit à une année gratuite tous les quatre ans. Ceux qui sont affectés aux États-Unis, au Japon ou dans la plupart des autres pays d’Afrique, gagnent une année gratuite tous les trois ans. Enfin, lorsque le fonctionnaire est appelé dans un pays qui a un lien historique fort avec la France – l’ancienne Indochine, Madagascar, l’ancienne Afrique équatoriale –, il bénéficie d’une année gratuite tous les deux ans. Ces dispositions exceptionnelles ont été instituées au milieu du XIXe siècle, par la loi du 9 juin 1853, afin de favoriser la mobilité internationale des fonctionnaires et de compenser l’effort qu’impliquaient les conditions de transport de l’époque. Madame la ministre, monsieur le rapporteur, il semblerait que, depuis le 9 juin 1853, les conditions de voyage et de transport aient évolué dans le sens d’un plus grand confort : il ne s’agit plus, pour les fonctionnaires, d’une punition, ou d’un acte difficile, que de partir dans ces beaux pays, qui offrent souvent des attraits touristiques. Il nous paraît donc nécessaire de mettre fin à ces avantages exorbitants, afin d’aller dans le sens d’une plus grande égalité entre le privé et le public et de renforcer la nécessaire solidarité, chère à Mme la ministre, entre les différents régimes.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Issindou, rapporteur. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Avis défavorable.

(L’amendement n193 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir l’amendement n192.

M. Dominique Tian. Je regrette tout de même l’absence de réponse à mon intervention précédente, car il s’agit d’un vrai sujet : depuis 1853, les choses ont changé ! Reconnaissez à tout le moins qu’il s’agit d’un avantage accordé aux fonctionnaires, et allez jusqu’au bout de votre raisonnement, en précisant que ce ne sont pas les conditions de transport ou d’hébergement qui posent problème. Cela permettrait à tout le moins d’actualiser la loi.

S’agissant à présent de l’amendement n192, selon les dispositions actuelles, certains agents de la fonction publique peuvent liquider leurs droits dès 57 ans, et même, pour certaines catégories, dès 52 ans. Il convient peut-être de mettre fin à cette faveur, qui constitue l’un des dispositifs les plus inéquitables et les plus arbitraires du régime des retraites. Je vous propose donc de revenir sur ces dispositions, qui sont très mal vécues par beaucoup de nos concitoyens. Partir en retraite à 52 ans, et même à 57 ans, ne se justifie absolument pas, et ce d’autant moins que nous allons voter l’allongement de la durée de cotisation. Aussi je pense que cet amendement serait bien accueilli par nos concitoyens.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Issindou, rapporteur. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Même avis.

(L’amendement n192 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jacques Lamblin, pour soutenir l’amendement n10.

M. Jacques Lamblin. Alors que cet article 3 est passé au forceps, je vous propose d’améliorer quelque peu le texte pour susciter, peut-être, chez quelques-uns d’entre vous, un peu plus d’empathie pour cet article. Je propose simplement de profiter de l’occasion, puisqu’il est question, à cet article 3, du comité de suivi, de l’utiliser pour améliorer la représentation des retraités dans le COR. En effet, actuellement, le COR est composé d’une quarantaine de membres, dont seize représentent les syndicats – on compte à peu près un million et demi de syndiqués en France – et un seul représente quinze millions de retraités. Il ne serait pas complètement absurde d’essayer de rééquilibrer les choses. Par exemple, la Confédération française des retraités, la CFR, qui rassemble un million et demi d’adhérents – ce qui n’est pas rien – pourrait siéger au sein du COR. Cette démarche n’est pas agressive envers le Gouvernement, ni d’ailleurs vis-à-vis de qui que ce soit : elle vise simplement, je le répète, à rééquilibrer les choses, à donner plusieurs voix aux retraités dans cet organisme dont chacun connaît l’importance.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Issindou, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable. La CFR est déjà membre du Comité national des retraités et personnes âgées – le CNRPA –, instance officielle de représentation des retraités, qui rassemble les organismes représentatifs de retraités. Ce CNRPA siégeant au COR, la CFR y est donc déjà indirectement représentée.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Jacques Lamblin.

M. Jacques Lamblin. Vous avez sans doute raison, monsieur le rapporteur, mais il existe actuellement au sein du COR seize représentants des syndicats ; deux syndicats ont, chacun, deux représentants ? Leur nombre d’adhérents – les chiffres diffèrent, comme ceux des manifestations selon qu’on écoute la préfecture de police ou les organisateurs… – est de l’ordre de 200 000 ou 300 000 membres, au mieux, voire beaucoup moins. Et ces syndicats, je le répète, ont deux représentants. Je ne vois pas pourquoi les retraités, qui sont au nombre de quinze millions – et alors que le CNRPA rassemble probablement à lui tout seul plusieurs millions de retraités – n’auraient droit qu’à un seul représentant, tandis que des syndicats infiniment plus faibles numériquement en ont deux.

(L’amendement n10 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir l’amendement n191.

M. Dominique Tian. À l’heure actuelle, il n’existe pas de règles claires de représentativité, notre collègue Lamblin vient de le dire à l’instant. Les organismes paritaires liés à la retraite peuvent ainsi voir leur conseil d’administration composé d’individus – de personnes, de syndicalistes –, qui ne sont pas eux-mêmes, à titre personnel, affiliés au régime concerné. De ce fait, plusieurs syndicalistes attachés à la défense d’intérêts catégoriels – ce qui, malheureusement, est souvent le cas dans notre pays, où les syndicats ne représentent plus grand monde, et en tout cas pas les gens du privé – peuvent siéger dans plusieurs conseils d’administration, et fausser ainsi les principes essentiels de la représentativité. Cette situation étant fondamentalement injustifiée, il est essentiel d’y mettre fin. Il convient donc d’établir une règle de bon sens : il faut être affilié au régime pour siéger dans son conseil d’administration. Cette règle s’applique à peu près partout, sauf, en l’occurrence, dans les caisses de retraite, ce qui est évidemment inacceptable.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Issindou, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable. Les nominations des représentants au conseil d’administration des régimes de retraite relèvent de la compétence des partenaires sociaux. Il faut les laisser s’organiser et choisir les représentants les mieux placés.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

(L’amendement n191 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’une série d’amendements identiques, nos 834 rectifié à 848 rectifié.

La parole est à M. Alfred Marie-Jeanne, pour soutenir l’amendement n836 rectifié.

M. Alfred Marie-Jeanne. Cet amendement reprend un amendement parlementaire adopté à l’unanimité lors de l’examen de la précédente réforme des retraites en 2010 et qui est devenu l’article 13 de la loi de 2010. Pourquoi faut-il le présenter à nouveau ? Tout simplement parce que, malgré ce vote unanime, cet article est resté sans suite : aucun rapport n’a été réalisé et les pensions de retraite du régime général continuent à être mises en paiement le 8 du mois. Les retraités doivent donc toujours faire face aux difficultés provoquées par le décalage entre le versement de leur retraite – qui n’intervient pas avant le 10 du mois, voire le 15 du mois pour les départements d’outre-mer – et les factures qui, elles, doivent être réglées dès les premiers jours du mois. Ces difficultés sont évidemment d’autant plus lourdes que les pensions sont modestes et sont à l’origine de découverts bancaires.

Trois ans après le vote de la réforme de 2010, la date de versement des pensions n’a toujours pas été avancée. J’insiste sur le fait qu’en 2010, nous étions d’accord sur tous les bancs pour que le versement des pensions soit avancé dans le mois. Je citerai simplement deux noms : l’ancien ministre, Xavier Bertrand, et la ministre actuelle, Marisol Touraine. Les retraités, surtout les plus modestes, attendent beaucoup de cette nouvelle tentative : ils souhaitent que ce soit enfin la bonne. Signalons également qu’à partir du 1er janvier 2014 – et c’est cela que l’on ne comprend pas –, les pensions de retraite complémentaire seront, elles aussi, mensualisées et versées, naturellement, dès le premier jour du mois, sauf celles que je viens d’évoquer. En conséquence, j’aurais bien aimé comprendre pourquoi cette contradiction dure depuis des années, alors que la disposition en question figure dans la loi.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Issindou, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

M. Alfred Marie-Jeanne. Vous refusez ce qui est déjà dans la loi !

M. le président. La parole est à M. Nicolas Sansu.

M. Nicolas Sansu. Une question est tout de même posée, ou alors, à tout le moins, demandons au Gouvernement de nous expliquer pourquoi aucun rapport n’a été publié, alors que cela lui est prescrit par la loi. C’est l’occasion pour le Parlement de mettre en œuvre effectivement son pouvoir de contrôle. En effet, il y a ici un problème : ce rapport, prévu par la loi de 2010, n’a jamais été remis au Parlement. Cela pose, je le répète, un vrai problème, et vous ne pouvez vous contenter de dire : «Défavorable ». Nous présentons ici un amendement qui reprend celui adopté en 2010, parce qu’il n’a pas été suivi d’effet. Vous pouvez dire que vous y êtes défavorable parce que la disposition est satisfaite et que le rapport va être très bientôt remis au Parlement, mais vous ne pouvez pas dire seulement « Défavorable ». Ce n’est pas possible !

M. Alfred Marie-Jeanne. L’amendement de 2010 avait été adopté à l’unanimité !

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marisol Touraine, ministre. Vous avez vous-même donné l’explication, monsieur le député : le rapport, qui n’a pas été remis, sera élaboré et vous sera présenté. Il n’est donc pas la peine de revoter quelque chose qui l’a déjà été : ce serait superfétatoire. Je vous livre cette explication, qui me paraissait aller de soi.

M. Nicolas Sansu. Cela va mieux en le disant !

M. le président. La parole est à M. Philippe Vigier.

M. Philippe Vigier. Cette disposition a déjà été votée, comme cela vient d’être dit à l’instant par M. Sansu : elle est prévue par la loi de 2010. Aussi, je ne vois pas pourquoi l’on ne peut pas aller dans le sens souhaité par nos collègues du groupe GDR. Madame la ministre, au moment où, dans votre texte, vous infligez le report de la revalorisation des retraites du 1er avril au 1er octobre, on aurait pu, me semble-t-il, faire un geste pour les retraités, afin qu’ils ne perçoivent pas leur retraite le 15 ou le 20 du mois, mais le 1er. Qu’en pensez-vous ? Cela me paraît assez simple. En fait, vous leur infligez la double peine.

M. le président. La parole est à M. Xavier Bertrand.

M. Xavier Bertrand. Sur ce sujet, tout le monde est d’accord, sur tous les bancs. Je crois même avoir fait voter à l’unanimité, à l’époque, un amendement déposé avec Arnaud Robinet. Le vrai sujet, c’est qu’il faut convaincre Bercy. Il faut convaincre les technocrates que ce sujet n’est pas un sujet mineur pour des millions de retraités. Mais, à Bercy, l’on ne veut pas le faire, pour une simple et bonne raison : il faut emprunter. Or, je le dis en toute franchise : en 2010, quand le problème a été posé, avec la crise des dettes souveraines et de l’euro, il n’était pas possible d’emprunter davantage ; je ne suis pas sûr que cela soit plus possible aujourd’hui. Il y aurait une autre possibilité, en faveur de laquelle je suis intervenu à nouveau dernièrement, c’est que la Caisse des dépôts et consignations puisse consentir cette avance, dans un premier temps, pour quelques jours. Vous avez en effet besoin d’emprunter une somme globale : vous avez donc à payer les intérêts, non sur l’ensemble des pensions, mais simplement sur l’avance.

Mon cher collègue, je ne cherche pas à avoir raison contre vous, mais il s’agit d’un sujet qui me passionne depuis des années, depuis qu’une dame, à Vesoul, m’a dit : « Mon loyer, je le paie le 2, ma pension est versée le 9, comment je fais entre les deux ? » Je ne l’ai jamais oublié et je ne m’en suis jamais tenu pour quitte vis-à-vis de cette dame. Ce sujet avait été repris par Nicolas Sarkozy, dans le cadre de la campagne présidentielle : s’il n’y a pas une impulsion politique au plus haut niveau, jamais cela ne se fera. Jamais. Or, c’est un sujet qui concerne des millions de personnes et pour qui ce décalage est particulièrement préjudiciable.

Soit vous empruntez, mais encore faut-il avoir la possibilité de le faire, soit vous vous arrangez avec les banques pour jouer sur la date de valeur et éviter tout retard de paiement ; j’avais réussi à faire gagner deux jours, ce n’est pas assez. En attendant, une mise en paiement le 1er ou le 2 du mois entraîne un décalage de deux jours, mais quatre ou cinq jours de gagné, pour les retraités, c’est important.

Nous pouvons donc tous nous accorder sur ces bancs : il faut soit convaincre Bercy soit trouver un moyen de permettre à la Caisse des dépôts et consignations de consentir cette avance. Ce sujet, je le dis très clairement, est exempt de toute référence partisane, et je suis prêt à m’associer à toutes celles et à tous ceux qui le souhaiteront pour que nous puissions enfin faire aboutir ce dossier, ce qui constituerait une victoire du politique sur la technocratie. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

M. Thierry Braillard. Très bien !

(L’amendement n836 rectifié n’est pas adopté.)

Article 4

M. le président. Sur l’article 4, plusieurs orateurs sont inscrits.

La parole est à Mme Isabelle Le Callennec.

Mme Isabelle Le Callennec. L’article 4 est celui qui tend à reporter de six mois, du 1er avril au 1er octobre, la revalorisation annuelle des pensions à partir de 2014. La ligne rouge est ici franchie, puisque vous baissez le niveau des pensions.

M. Jean-Patrick Gille, vice-président de la commission des affaires sociales. Mais non !

Mme Isabelle Le Callennec. C’est pourtant ce que vous faites, il faut le dire et le répéter, chers collègues. Non contents d’augmenter les cotisations qui pèsent sur les salariés et sur les retraités, vous opérez un tour de passe-passe : vous faites main basse sur pas moins de 1 milliard d’euros, ce qui réjouit le ministre du budget, qui nous l’a confié tout à l’heure. Cela grève cependant d’autant le pouvoir d’achat des retraités, alors que nombre d’entre eux consomment, épargnent, transmettent à leurs enfants et à leurs petits-enfants. Je devrais plutôt dire : consommaient, épargnaient, transmettaient, car vous prenez le risque de tarir la source.

Avec ce report, les retraités devront supporter dix-huit mois consécutifs sans augmentation. Pour une pension de 1 000 euros et avec un taux d’inflation de 1,2 %, la perte sera de 90 euros en 2014 et de 72 euros ensuite chaque année. C’est votre conception de la justice sociale, ce n’est assurément pas celle de l’UMP.

M. Xavier Breton. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. L’article 4 traite du recul de la date de revalorisation des retraites du 1er avril au 1er octobre pour que les personnes retraitées « participent », comme vous dites, à l’effort de financement. Ainsi, alors que vous parlez d’un texte juste, vous allez exonérer les entreprises de cet effort…

M. Francis Vercamer. Non !

Mme Jacqueline Fraysse. … et ponctionner plus de 2,4 milliards d’euros dans les poches des retraités, y compris des plus modestes d’entre eux. En effet, même ceux qui ne sont pas imposés seront taxés. Ce n’est vraiment pas acceptable quand on connaît le niveau actuel des pensions, que j’ai déjà rappelé à plusieurs reprises.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Avec l’article 4, le Gouvernement reporte à nouveau – un report avait déjà été mis en œuvre par le gouvernement précédent – la date de revalorisation des pensions de retraite. Celles-ci seront revalorisées du taux d’inflation officiel chaque année non plus en avril mais en octobre, un report de six mois qui fait perdre 0,9 % de pouvoir d’achat en moyenne. Cette mesure n’est pas temporaire : elle va entériner une diminution du montant des pensions sur des années. Le montant des pensions sera, les années suivantes, réévalué à partir du niveau réduit, celui fixé par la revalorisation d’octobre 2014. Comme le résume François Bellanger, le président de la Confédération française des retraités : « C’est une désindexation qui ne dit pas son nom… L’an prochain, la revalorisation serait de fait diminuée de la moitié de l’inflation. »

Grâce à cet effort demandé aux retraités, le Gouvernement escompte ainsi économiser 800 millions d’euros l’an prochain et 2,6 milliards d’euros en 2014. Ce dispositif est donc fait pour durer. Ce qui est acté par cette mesure, c’est donc tout simplement une diminution du montant des retraites.

Mais rassurons-nous : le Gouvernement a tout de même souhaité « préserver les petites retraites ». Le report ne concernera pas les retraités percevant le minimum vieillesse, qui touchent moins de 800 euros par mois.

Mme Jacqueline Fraysse. Quelle générosité !

M. André Chassaigne. Nous sommes cependant loin d’une grande mesure de justice sociale. On le constate d’ailleurs sur l’ensemble de ce texte de loi : ce qui n’est en fait qu’une petite atténuation des coups portés est toujours présenté comme une grande victoire.

Enfin, si une hausse des cotisations patronales est prévue, elle s’accompagnera d’une baisse significative des cotisations patronales finançant les allocations familiales afin de faire baisser le coût du travail. Le manque à gagner sera payé pour l’essentiel par les salariés, avec une augmentation de la TVA ou de la CSG. C’est une revendication majeure du patronat que le Gouvernement vient de satisfaire.

On peut toujours se poser la question suivante : la droite aurait-elle vraiment fait pire ?

M. le président. La parole est à M. Gilles Lurton.

M. Gilles Lurton. Ce texte prévoit une augmentation des charges sociales et des impôts. Avec l’augmentation des charges patronales et salariales, la fiscalisation des pensions de certains retraités et l’augmentation des charges à partir de 2012 pour les personnes âgées de soixante ans ayant commencé à travailler avant vingt ans, nous arrivons à un chiffre considérable de 10 milliards d’euros d’augmentation des charges et des impôts.

L’article 4 a donc pour objectif de taxer lourdement les retraités. Votre choix est de baisser le pouvoir d’achat des actifs, d’augmenter le coût du travail et de mettre lourdement à contribution les retraités. L’effort demandé à ces derniers est en effet considérable. D’ici à 2020, ils financeront la réforme à hauteur de 2 milliards d’euros, et ce de deux façons : via le report de six mois de la revalorisation des pensions et par l’inclusion dès 2014 des majorations de pension des retraités ayant élevé trois enfants ou plus dans l’assiette de l’impôt sur le revenu. Cette mesure aura pour conséquence de rendre imposables certains retraités qui ne l’étaient pas ou de faire payer davantage d’impôts à ceux qui le sont, sans rapporter un euro au système de retraites.

Au nom de la solidarité, les retraités sont appelés à participer financièrement à cette réforme. Officiellement, il est hors de question de baisser les pensions. En revanche, il faut coûte que coûte augmenter les prélèvements sur les pensions. Nous pouvons apprécier ici la nuance…

Pour financer la répartition, le Gouvernement préconise donc une contribution des retraités. Jusqu’à présent, la répartition consistait à ponctionner les revenus des actifs pour verser une pension aux retraités ; désormais, il s’agira de ponctionner les retraités pour financer les retraites.

M. le président. La parole est à M. Marc Dolez.

M. Marc Dolez. Avec l’article 4, nous abordons les mesures immédiates de redressement proposées par le Gouvernement pour résorber les déficits. Ces mesures sont présentées comme étant justement réparties entre les actifs, les entreprises et les retraités. Or, ainsi que mes collègues Jacqueline Fraysse et André Chassaigne viennent de le dire, il n’y a évidemment aucune équité dans les propositions qui nous sont faites, et ce pour plusieurs raisons.

Le Gouvernement a déjà annoncé une compensation pour les seules entreprises, qui verront leurs cotisations pour la branche famille diminuer. Il n’y a évidemment aucune contrepartie en vue pour les salariés, ni pour les retraités. La contribution pèsera donc exclusivement sur les épaules des salariés et des retraités, et en priorité sur celles des retraités, par le biais de deux mesures qui sont absolument inacceptables à nos yeux. La première est le décalage de six mois pour la revalorisation des pensions. Ce décalage signifie que les pensions n’auront pas été augmentées pendant dix-huit mois, ce qui équivaut en moyenne à une perte de 144 euros, qui sera ensuite répercutée sur les années ultérieures. La seconde mesure consiste à faire entrer dans le calcul de l’impôt sur le revenu la majoration de retraite pour les retraités ayant élevé trois enfants et plus.

Ces dispositions sont évidemment très néfastes et très malheureuses, alors que, il faut bien le dire, la majorité des pensions de retraite sont inférieures à 1 200 euros et que les retraités sont aujourd’hui confrontés à bien d’autres augmentations ; les augmentations d’impôts et de taxes en tout genre, notamment celle de la TVA au 1er janvier. Par conséquent, ce serait une mesure de justice que de renoncer à cet article 4, qui frappe durement les retraités.

M. le président. La parole est à M. Denis Jacquat.

M. Denis Jacquat. L’article 4 décale de six mois la revalorisation des pensions en la reportant au 1er octobre. Si en 2010 le décalage du 1er janvier au 1er avril était lié à des raisons techniques, dans le cas présent il s’agit d’une recette de poche importante pour combler un trou. Cela est contraire à l’esprit des régimes par répartition. D’ailleurs, pourquoi retenir le 1er octobre ? Pourquoi pas le 1er juillet ? Ou le 1er août ? Comme l’a dit Mme Le Callennec voilà quelques instants, la ligne rouge est franchie.

M. le président. La parole est à Mme Dominique Nachury.

Mme Dominique Nachury. L’article 4 décale de six mois la revalorisation des pensions en fonction de l’inflation. C’est désormais au 1er octobre que le montant des pensions sera revu, permettant ainsi pour 2014 un apport de financement de 600 millions d’euros.

Vous avez, madame la ministre, considéré que les retraités devaient participer à la réduction du déficit et que de toute façon cette mesure de report de la date de revalorisation était minime dans ses conséquences et limitée dans le temps. Je ferai à ce sujet plusieurs observations.

Tout d’abord, une baisse de pouvoir d’achat correspond toujours à un effort, qui du reste ne sera pas compensé dans le temps puisque jamais la perte ne sera rattrapée. Or les retraités accompagnent souvent leurs parents plus âgés et/ou leurs enfants et petits-enfants. En outre, leur impôt augmente : ils financent la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie et certains d’entre eux deviendront éligibles à l’impôt sur le revenu du fait de la fiscalisation du bonus pour trois enfants.

Ensuite, parce qu’elle revient sur un principe, cette mesure jette le doute sur le maintien des conditions garanties aux retraités. Beaucoup d’entre eux font part de leur inquiétude pour l’avenir, alors même que vous promettez, avec ce projet de loi, de le garantir.

Enfin, cet article illustre bien la méthode gouvernementale : vous annoncez une mesure qui fait réagir puis vous apportez des aménagements, dans ce cas particulier en excluant de son champ, ce qui est légitime, les pensions autres que les retraites ainsi que l’allocation de solidarité aux personnes âgées. Vous ne mettez plus alors en avant que les aménagements, ce qui vous permet ainsi de dissimuler ou relativiser artificiellement la mesure générale.

M. le président. La parole est à M. Nicolas Sansu.

M. Nicolas Sansu. L’article 4 prévoit une disposition extrêmement grave : c’est la désindexation des pensions qui est en marche. On nous dira qu’il s’agit d’un simple report de six mois, qui ne se reproduira pas, un peu comme cela avait été annoncé pour le point d’indice des fonctionnaires qui, bon an mal an, est gelé depuis quatre ans. C’est un mauvais signal pour les retraités.

C’est également un mauvais signe pour la consommation et la demande. Je sais bien que la politique de l’offre a vampirisé les décisions gouvernementales et que les cadeaux aux entreprises – je ne prendrai qu’un seul exemple, celui du crédit d’impôt compétitivité emploi – sont aujourd’hui supportés par les ménages, et parmi eux les retraités. En effet, outre cette ponction organisée par le report de la revalorisation, qui représentera une perte sèche de 800 millions d’euros dès 2014, une autre mesure est très défavorable aux retraités : l’inclusion dès 2014 des majorations de pension accordées aux retraités ayant élevé trois enfants ou plus dans l’assiette de l’impôt sur le revenu.

Bien entendu, on nous rétorquera qu’il faut fiscaliser tous les revenus, ce à quoi nous ne pouvons qu’adhérer, mais il faut dans ce cas augmenter les salaires et les pensions, pour compenser. Parce qu’il a l’œil rivé sur la compétitivité, qu’il confond avec le coût du travail, le Gouvernement fait fausse route, madame la ministre.

Il existe une véritable distorsion dans le partage des richesses. À l’heure où l’on parle de plusieurs dizaines de milliards de fraude à la TVA et où les entreprises du CAC 40 ont encore versé 40 milliards d’euros de dividendes, il y avait mieux à faire que de ponctionner les retraités. À l’aune de ce qui se passe et de ce qui remonte du pays, nous le sentons tous : si vous souhaitez agir en responsabilité, il serait raisonnable de ne pas vous entêter.

M. le président. La parole est à Mme Jeanine Dubié.

Mme Jeanine Dubié. Comme nous l’avons déjà exprimé à plusieurs reprises et notamment lors de la discussion générale, le groupe RRDP n’est pas favorable au report de la revalorisation des pensions hors ASPA au 1er octobre.

Nous comprenons, madame la ministre, et nous partageons l’esprit de la réforme, qui vise à rechercher l’équilibre du système de retraite par répartition auquel nous sommes tous très attachés. Nous ne mettons pas en doute l’esprit de justice qui sert de fil conducteur à l’ensemble du texte et qui justifie que les efforts soient équitablement partagés.

Mais le report de cette revalorisation de neuf mois – elle est déjà passée du 1er janvier au 1er avril en 2009 – nous paraît bien trop pénalisant pour les retraités car il s’ajoute quasi simultanément à une augmentation significative de l’impôt sur le revenu pour un grand nombre d’entre eux. L’impact sur le pouvoir d’achat est réel et nous considérons que cette mesure est une désindexation déguisée. Cela va se traduire par un gel des pensions qui va toucher toutes les retraites, y compris les plus modestes, et c’est bien cela que nous trouvons injuste.

Pour toutes ces raisons, le groupe RRDP souhaite le maintien pour l’ensemble des retraités de la revalorisation au 1er avril ou, a minima, que ce maintien s’applique à nos concitoyens les plus modestes, bénéficiaires du minimum contributif ou du minimum garanti dans les fonctions publiques. Nous croyons à la relance de la croissance par la consommation et donc par le maintien du pouvoir d’achat des retraités.

M. le président. La parole est à M. Philippe Vigier.

M. Philippe Vigier. Alors que votre projet de loi contient les mots « avenir » et « justice » dans son intitulé, sa caractéristique est d’être profondément injuste. Il porte cette injustice au plus haut niveau. Et d’ailleurs votre majorité est en train de s’effilocher : le groupe GDR, les radicaux et les écologistes viennent de s’indigner. J’imagine que mes collègues et amis de l’UMP feront la même chose. Il ne reste plus que la minorité agissante.

Madame la ministre, vous en êtes là, à aller chercher 800 millions d’euros dans la poche de tous les retraités, y compris de gens modestes qui ont 800 euros par mois et pour lesquels vous décalez du 1er avril au 1er octobre la revalorisation de leur retraite. À un moment, il y a même eu du flottement entre le Premier ministre et vous : on ne savait plus si c’était le 1er avril, même pour les petites retraites.

C’est un symbole du triple échec de votre réforme : il faudra travailler plus longtemps avec un coût du travail plus important. Surtout, mes chers collègues, nous prenons date pour une nouvelle contradiction au sommet de l’État. Le Président de la République a dit que la pause fiscale était assurée. Réfléchissez une seconde : nous savons d’ores et déjà que l’on ira chercher 0,15 % dans la poche des salariés auxquels vont s’ajouter 0,05 %. Cela veut dire que la pause fiscale en 2014, c’est mort, tout comme en 2015, en 2016 et en 2017.

Vous aurez donc fait les poches de tout le monde, et cette pause fiscale est un grand mensonge, un mensonge d’État, prononcé par le Président de la République, repris par le Premier ministre. Ce soir, nous avons compris qu’il s’agit d’une purge fiscale, d’un matraquage fiscal.

M. le président. La parole est à M. Jacques Lamblin.

M. Jacques Lamblin. Mesdames et messieurs les socialistes, nous sommes dans le vif du sujet et il va vous falloir assumer vos choix et les assumer seuls. Seuls les socialistes soutiennent cela puisque les communistes, les radicaux, les écologistes, les UMP, tout le monde est contre cette idée. Depuis des jours, nous vous avons dit qu’il y avait d’autres solutions qui permettaient de ne pas faire cela. Vous devez donc assumer ce choix ; vous allez devoir avaler la couleuvre.

Outre le fait que des amendements de suppression ont été déposés par tout le monde, vous avez mis le doigt dans un terrible engrenage parce que cela ne suffira pas. Une fois que l’on a pris le pli, on a tendance à continuer. Cette mesure, celle qui est déjà prise, est éternelle, universelle et transmissible : cette perte de 1 % de pouvoir d’achat sera aussi assumée par les jeunes qui sont actuellement au travail et dont les pensions seront également amputées.

Selon le principe si bien dénoncé par ma collègue, vous commencez par annoncer une mauvaise nouvelle, du genre : « Je vais vous casser deux bras ». Et vous annoncez ensuite : « Je ne vous en casse qu’un, finalement », en pensant que nous allons dire « ouf ». Non, car le minimum vieillesse à 786 euros sera peut-être respecté par votre mesure, mais la moyenne de la retraite des femmes s’élève à 830 euros. Toutes ces femmes dont la retraite est de 830 euros subiront la mesure.

Cela va amplifier la mesure d’augmentation de la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie et les impacts de la fiscalisation de nombreux retraités vont également s’ajouter. Certains retraités vont payer l’impôt sur le revenu pour la première fois, donc la taxe d’habitation et la redevance télé. Tout cela va s’accumuler et vous ne l’avez pas mesuré à sa juste importance.

Monsieur Chassaigne, la droite n’aurait pas fait cela. Depuis le début, nous savons que la seule solution viable pour respecter les retraites, pour ne pas toucher à leur montant, c’est de reporter l’âge légal de départ. Vous ne voulez pas y toucher, c’est votre droit, mais assumez-en les conséquences. Surtout, vous en assumerez les conséquences le moment venu, j’en suis certain.

M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou.

Mme Annie Le Houerou. Cette réforme des retraites a l’ambition de rétablir la confiance en consolidant la situation financière de notre système de retraite par répartition. Elle crée de nouveaux droits pour les jeunes apprentis, stagiaires, étudiants. Elle crée des nouveaux droits pour les femmes en reprenant tous les trimestres de maternité, par exemple, ce qui semble évident alors que ce n’était pourtant pas le cas.

Elle crée des droits nouveaux quant à la prise en compte de la pénibilité, qui permettra de réorienter sa carrière professionnelle, d’alléger cette pénibilité en travaillant à temps partiel ou de partir plus tôt en retraite.

Mais l’enjeu est également de garantir le financement de la retraite de la génération du baby boom. Chacun doit donc participer à l’effort : les entreprises, les salariés et les retraités. La proposition du Gouvernement est équilibrée, progressive. Elle concerne l’ensemble des assurés de tous les régimes, privés et publics. Les mesures de redressement financiers s’appliquent de la même manière au public et au privé.

Nous sommes, pour autant, préoccupés par la situation des petites pensions, pour lesquelles il n’est pas possible de peser sur le pouvoir d’achat. Il nous faut donc trouver une solution pour que les retraités pauvres ne perdent pas de pouvoir d’achat. Il y a une très forte attente de nos concitoyens. Pour les retraités agricoles, des avancées importantes sont proposées. Le report de la revalorisation au 1er octobre ne touchera pas les retraités les plus modestes, ni les bénéficiaires de pension d’invalidité.

Je connais votre préoccupation, madame la ministre, que nous sommes nombreux à partager. Nous devons trouver la bonne formulation dans ce texte pour atteindre l’objectif de préserver les retraites les plus modestes.

Des mesures sont prises par ailleurs par le Gouvernement pour préserver le pouvoir d’achat des retraités les plus modestes, je pense notamment aux aides pour faciliter la prise en charge santé.

J’ai noté également que vous avez accepté l’amendement de M. Germain à l’article 3 : le comité de suivi analysera l’évolution du pouvoir d’achat des retraités, avec une attention particulière à ceux dont les revenus sont inférieurs au seuil de pauvreté.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Door.

M. Jean-Pierre Door. Pour financer le régime par répartition, le parti socialiste préconise donc une contribution des retraités. Jusqu’à maintenant, la répartition consistait à prélever sur les actifs pour financer les retraités. Désormais, on prélève sur les retraités pour financer les retraités. Au nom de la solidarité, les retraités sont donc appelés à mettre la main à la poche et, officiellement, il est hors de question de baisser les pensions. En revanche, il faut coûte que coûte augmenter les prélèvements sur les pensions. On apprécie la nuance, mais les retraités ne sont pas abusés. Ils l’ont tout à fait compris et ils le comprendront, c’est clair.

Après les cotisations de 0,15 %, de 0,30 %, vous reportez la revalorisation de leur pension de six mois, donc vous réduisez leur niveau de pension. CQFD. Quid de leur pouvoir d’achat ? Vous qui vous prétendez les défenseurs du pouvoir d’achat, vous donnez dans le mille !

Ce sont les plus faibles, les plus petites retraites qui vont être touchées, ceux qui ont du mal à éponger leurs charges chaque mois, surtout quand ils aident leurs enfants et leurs petits-enfants. Ils seront les grands perdants de votre réforme et il faut le leur dire. C’est pour cela que nous nous opposons fermement à cet article : il faut revenir à la revalorisation au 1er avril et ne pas aller chercher là environ 1 milliard d’euros d’économies. Nous voterons contre cet article.

M. Philippe Vigier. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Dominique Tian.

M. Dominique Tian. Voilà, ça y est : c’est la baisse des retraites. Ce sont les plus pauvres, les plus précaires, ceux qui ont les plus petites retraites qui vont souffrir le plus. Et c’est un gouvernement socialiste qui va le faire. C’est même inouï, quelque chose que personne ne peut vraiment comprendre, tout cela en raison d’un manque de courage absolument évident.

On va prendre individuellement comme victimes ceux qui ne sont pas organisés, ceux qui ne sont pas syndiqués, ceux qui ne peuvent pas bloquer le pays, ceux qui sont seuls et vulnérables.

C’est assez triste. Vous refusez de reporter l’âge légal de départ en retraite, alors que tous les autres pays d’Europe l’ont fait, parce que vous avez peur des réactions, syndicales notamment. Vous ne touchez pas aux régimes spéciaux alors que l’on ne cesse de dire que le régime général compense financièrement le désastre qu’ils représentent. Vous refusez de poser la question de départs à cinquante-deux ans à la retraite à la SNCF, à cinquante-cinq ou cinquante-sept ans dans les autres régimes.

Mais vous touchez aux petites retraites ainsi qu’aux familles : l’inclusion des majorations de pension des retraités ayant élevé trois enfants ou plus, dans l’assiette de l’impôt sur le revenu, comme c’est le cas pour les autres, c’est aussi une mesure contraire à la politique familiale que tout le monde estime exemplaire dans notre pays.

Sur les bancs de l’UMP, c’est vraiment à la fois la stupeur et la tristesse.

M. Jean-Pierre Door. De la tristesse, en effet !

M. Dominique Tian. Nous sommes consternés et nous avons l’impression – et je le dis avec gravité – que c’est un peu le pacte social de notre pays qui est mis en cause. Vous poussez un certain nombre de personnes au désespoir, cela se voit dans les urnes, cela se voit partout. Vous portez une grave responsabilité. Nous sommes assez consternés.

M. le président. La parole est à M. Guillaume Chevrollier.

M. Guillaume Chevrollier. Cet article 4 est à l’image de ce projet de loi et de ce que nous propose ce gouvernement depuis un an : il décale de six mois la revalorisation des pensions. C’est une mesurette très douloureuse pour ceux qui sont concernés, avec la baisse des pensions pour les retraités. Mais c’est une mesurette, un terme qui peut qualifier les autres dispositions de ce projet de loi. Où est la réforme courageuse que vous annonciez ? Est-ce ainsi que vous prétendez garantir l’avenir de notre système de retraite, selon l’intitulé bien présomptueux de ce texte ?

Je rappelle que notre système de retraite ne serait pas dans ce triste état…

M. Michel Issindou, rapporteur et Mme Catherine Coutelle. Sans vous !

M. Guillaume Chevrollier. …sans les socialistes, car notre pays continue de payer l’ineptie des mesures prises en 1981 et 1982.

Mme Catherine Coutelle. Et 1993 ? Et 2003 ? Et 2010 !

Mme Brigitte Bourguignon. Le coupable, ce ne serait pas plutôt Léon Blum ?

M. Christian Assaf. Non, en fait, tout est de la faute de Jaurès.

M. Guillaume Chevrollier. Des réformes idéologiques ont été adoptées en dépit de toute lucidité économique. La réforme des retraites d’alors en était le fleuron. Comment a-t-on pu avancer l’âge de la retraite de soixante-cinq à soixante ans alors que l’espérance de vie ne cessait d’augmenter ? Nous supportons encore les effets de cette démagogie, comme nous allons endurer longtemps les mesures prises par le Gouvernement depuis un an.

L’autre grande prétention de ce projet de loi était de garantir la justice. Comment oser parler de justice dans une réforme qui ne fait aucun pas vers l’harmonisation des régimes des fonctionnaires ni des régimes spéciaux vers le régime des salariés du privé ? À quand un calcul des retraites pour tous sur les vingt-cinq meilleures années ? À quand des taux de cotisation équivalents ? À quand des pensions de réversion calculées pour tous de la même façon ?

De grâce, que ce Gouvernement arrête de nous parler de justice, d’équité et de courage quand il ne fait preuve d’aucune de ces vertus.

M. le président. La parole est à M. Xavier Bertrand.

M. Xavier Bertrand. En matière de retraite, il n’y a que trois leviers : soit on accepte de travailler plus longtemps, soit il y a plus de cotisations à payer, soit les pensions diminuent. À partir du moment où vous ne voulez pas faire le choix de travailler plus longtemps en repoussant l’âge légal, à partir du moment où vous augmentez les cotisations – mais pas trop parce que nous sommes déjà en overdose fiscale et sociale –, vous êtes contraints, sans l’assumer, de toucher au niveau des pensions.

Il y a eu tout un débat au Gouvernement, on le sait bien. Après ce qui s’est passé sur les retraites complémentaires, vous vous êtes posé la question : fallait-il revenir sur ce que nous avions mis en place dans la loi Fillon de 2003, à savoir la garantie du pouvoir d’achat des retraités ? Vous vous êtes posé la question de savoir s’il fallait mettre le taux de la CSG au même niveau pour les retraités que pour l’ensemble des Français. Vous ne l’avez pas fait. Pourquoi ? Parce que vous serez amenés à le faire, c’est votre idée, soit pour financer l’assurance maladie soit pour financer la dépendance. C’est normal : votre réflexe, pour tout problème, pour toute réforme, c’est une cotisation ou un impôt. Donc, vous ne l’avez pas fait.

Mais, en tout cas, avec beaucoup d’hypocrisie, vous avez indiqué que vous alliez décaler la revalorisation. Je remercie la collègue qui a dit tout à l’heure qu’on allait garantir le pouvoir d’achat des petits retraités. Cela veut dire que pour la quasi totalité des retraités il y aura donc une baisse du pouvoir d’achat. L’économie de 800 millions d’euros maintenant, de 1,4 milliard d’euros en 2020, vous la faites sur le dos des retraités, mais vous ne l’assumez pas ! Il a fallu reculer pour ménager les susceptibilités ou tenter de faire croire que vous faisiez dans le social mais, en définitive, parce que, encore une fois, vous n’avez pas eu le courage de repousser l’âge légal, vous faites des économies sur le dos des retraités. Excusez-nous, mais nous ne pouvons pas être d’accord avec cette mesure anti-sociale. (« Très bien ! » sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

M. le président. La parole est à M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. Avec cet article 4, c’est un coup de poignard à la répartition qui est donné. La répartition se fonde sur la solidarité intergénérationnelle : les actifs participent au financement des retraités. Avec cet article 4, vous dérogez à cette règle et vous faites financer la solidarité par les retraités eux-mêmes.

C’est assez curieux, puisque, comme nous avions, en commission, parlé des petites retraites, vous êtes revenus en arrière en annonçant que celles-ci seraient épargnées. Vous avez annoncé un seuil fixé, ai-je cru comprendre, à 800 euros. Je savais que le Président de la République pensait qu’avec 4 000 euros on était riche ; je ne savais pas qu’un retraité était riche avec 800 euros. C’est ce que vous êtes en train de faire : les retraités riches, ceux qui touchent plus de 800 euros, vont financer les petites retraites, celles de moins de 800 euros.

Bien évidemment, le groupe UDI n’est absolument pas d’accord avec cette disposition, et nous avons déposé un certain nombre d’amendements de suppression. Nous estimons que ce n’est pas cela, la solidarité, que ce n’est pas cela, la justice. C’est d’abord de savoir respecter ceux qui ont donné de leur travail, de leur sueur, pour financer la retraite des autres et qui aspiraient à une retraite avec un pouvoir d’achat qui se maintient. Cette disposition va amputer de 0,6 % le pouvoir d’achat d’une grande majorité de retraités, de petits retraités. Je pense que c’est une injustice, et je me battrai contre cette disposition.

M. le président. La parole est à Mme Véronique Louwagie.

Mme Véronique Louwagie. Effectivement, cet article est un vrai tour de passe-passe. Je crois que si ses conséquences n’étaient pas aussi douloureuses, si elles n’étaient pas aussi graves, si cela ne concernait pas des hommes et des femmes, on pourrait parler d’une farce du 1er avril. Mais il, on ne peut pas faire de l’humour, parce que, finalement, ce 1er avril, vous allez faire les poches des retraités, et tout cela au nom de la solidarité.

Il y a effectivement un impact financier. Officiellement, il est « hors de question » de baisser les pensions, mais que faites-vous, qu’allons-nous faire le 1er avril ? Finalement, nous allons prélever les retraites pour financer les retraites. Déjà, lors de l’examen de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, vous avez choisi de prélever sur les retraités la taxe de 0,30 %. C’était l’an dernier. Cette année, ce sont 800 millions d’euros qui vont être prélevés, 1,4 milliard d’euros en 2020.

Madame la ministre, vous dites que ce sont quelques euros par mois pendant six mois. Non, ce n’est pas pendant six mois, c’est pendant des années, et toutes les années à venir.

Derrière cet impact financier, il y a un autre point qui me gêne : le message qui est délivré. Finalement, cela va conduire à créer une inquiétude supplémentaire chez les Français, qui s’inquiètent déjà de la pérennité du système de retraites. Il y a une vraie désillusion des Français sur les retraites, sur la capacité de maintenir ces dispositifs, notamment chez les jeunes, qui ne sont pas du tout confiants. Quel message délivre-t-on avec cet article 4 ? Véritablement un message de défiance sur l’avenir de nos retraites. Comment peut-on donner des messages à nos deux millions de jeunes âgés de quinze à vingt-neuf ans qui, aujourd’hui, ne sont ni à l’école, ni en emploi, ni en formation ? Comment rendre lisible un régime de retraites qui devrait, normalement, rassurer les futurs retraités ? Comment, en intervenant sur le pouvoir d’achat actuel des retraités, ouvrir des perspectives et susciter de l’espoir ? Je suis véritablement inquiète sur le message qui est diffusé. Les mots « garantir » et « justice » figurent dans le titre du projet de loi, mais, vraiment, l’article 4 ne s’en fait pas du tout le reflet.

M. le président. La parole est à M. Arnaud Robinet.

M. Arnaud Robinet. Elle est belle, la justice socialiste ! C’est le cynisme ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Imaginez, mes chers collègues, la réaction du parti socialiste si la revalorisation des salaires dans le secteur privé était repoussée de six mois. Là, les syndicats auraient manifesté. Mais en l’occurrence, vous le savez très bien, mesdames et messieurs de la majorité, les retraités ne se mobiliseront pas.

Oui, la revalorisation le 1er octobre, c’est l’automne des retraites, l’automne des retraités. Il y a une différence entre vous et nous, nous l’assumons, et vous le dites également. Il y a une différence entre la majorité et l’opposition, qui porte notamment sur ce que nous souhaitons : nous appelons, nous, à une vraie réforme des retraites.

En 2010, nous avions un tabou : le pouvoir d’achat des retraités. On aurait pu, comme l’a dit M. Bertrand, augmenter la CSG. On aurait pu désindexer les retraites. Non, nous avons préféré mener une réforme courageuse, c’est-à-dire reculer l’âge du départ en retraite à soixante-deux ans. Vous, votre totem, c’était, à l’époque – je dis bien « à l’époque » –, la retraite à soixante ans. On le voit bien, le reniement est passé par là, puisque vous n’abrogez pas la loi de 2010 et que vous allez augmenter la durée de cotisation, avec les effets néfastes que nous savons sur les pensions des futurs retraités.

Là, je le crois vraiment, les retraités se sentent abandonnés, notamment les retraités qui toucheront moins de 1 000 euros, qui vont peut-être être impactés par la fiscalisation du bonus de 10 % attribué aux parents ayant élevé au moins trois enfants. C’est vraiment la mesure de trop. Ils sont quatre millions, en France, à toucher moins de 1 000 euros.

Selon des études, cette revalorisation reportée va représenter un manque à gagner de 327 euros par an pour les retraités. Oui, mes chers collègues, 327 euros par an ! C’est inacceptable, parce que les retraités seront tous touchés, mais surtout ceux qui touchent de petites retraites, et le pouvoir d’achat va encore diminuer. Ce dont ils vont surtout se priver, et c’est dramatique, c’est de nourriture. Oui, c’est de nourriture qu’ils vont se priver, car il y a des choses auxquelles ils ne pourront pas toucher : le chauffage, l’électricité, qui augmentent, et c’est encore infernal.

Ces petits retraités, mes chers collègues, sont très mécontents car ils se sentent véritablement abandonnés.

M. le président. La parole est à M. Michel Liebgott.

M. Michel Liebgott. On nous fait du Zola, maintenant. Le bal des hypocrites est bien parti. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Arnaud Robinet. C’est inadmissible !

M. Michel Liebgott. Tout à l’heure, j’entendais Mme Louwagie qui disait : « Il faut protéger les jeunes, il faut protéger les actifs, il faut qu’ils ne cotisent pas plus. » À propos de l’article 3 que nous examinions tout à l’heure, nous entendions à peu près le même discours en commission. Et M. Tian vient de nous dire que c’est un véritable scandale, mais il est le premier à ne pas vouloir ponctionner un peu plus les entreprises. Alors que faire lorsqu’il y a un déséquilibre financier ?

M. Jacques Lamblin. Travailler plus !

M. Dominique Tian. C’est vous qui êtes au pouvoir !

M. Michel Liebgott. On ne doit pas toucher les actifs, on ne doit pas toucher les retraités, on ne doit pas toucher les entreprises, c’est-à-dire qu’on ne fait rien. Si, on fait quelque chose ! On reporte l’âge légal de départ en retraite à soixante-cinq ans ; comme ça, on est sûrs que tous les Français seront sanctionnés !

M. Philippe Vigier. Vous aussi, vous reportez l’âge légal !

M. Michel Liebgott. Eh bien, nous pensons effectivement qu’il faut une répartition équilibrée des efforts, qu’ils doivent être faits par les entreprises et par les actifs et qu’ils doivent aussi être partagés avec ceux qui sont aujourd’hui les pensionnés, qui doivent le rester dans le cadre d’un système de répartition juste et équilibré. D’ailleurs, les partenaires sociaux, vous le savez, l’ont fait sur les régimes complémentaires. Il ne fallait pas forcément aller aussi loin qu’eux, ou que le rapport Moreau qui, lui, va beaucoup plus loin. Je réponds aussi, là, à certains qui parlaient de Bercy. Oui, peut-être ne sommes-nous pas toujours à l’écoute de Bercy, ou à l’écoute des rapports.

Nous réfléchissons, nous aménageons, nous n’avons pas appliqué ce que vous sembliez présenter tout à l’heure comme la règle socialiste, à savoir une augmentation systématique de la CSG ou des cotisations.

M. Xavier Bertrand. Bel aveu !

M. Michel Liebgott. Eh bien, oui, nous faisons une juste répartition de l’ensemble des efforts. Ensuite, est-ce politique ou technique ? Cher Denis Jacquat, à l’époque, lorsque l’on reportait du 1er janvier au 1er avril, c’était technique. Quand c’est nous, c’est politique. C’est là une subtilité de l’UMP.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Germain.

M. Jean-Marc Germain. Il faut aussi avoir un peu la mémoire des choses. Qui a organisé la plus grande baisse des pensions dans ce pays ? On ne parle pas de 1 %, on parle de 1 % par an depuis vingt-cinq ans. C’est Édouard Balladur,…

M. Denis Jacquat. Non, c’est Mitterrand !

M. Jean-Marc Germain. …quand il a décidé que les revenus reportés au compte seraient non plus indexés sur les salaires mais sur les prix, et M. Bertrand le sait très bien. Quant à M. Vigier, il rappelle souvent les 6 % d’économies faites grâce aux différentes réformes, mais la moitié de ces 6 % ont été pris sur les retraités via ce mécanisme.

Deuxième point, j’ai écouté, monsieur Bertrand, votre raisonnement, que vous nous aviez déjà tenu hier. Il comporte une erreur. Vous avez, certes, raison de dire qu’il y a trois paramètres pour les régimes de retraites, mais la réalité c’est que, à court terme, il n’y en a que deux.

M. Xavier Bertrand. Non, il y en a trois !

M. Jean-Marc Germain. Les effets démographiques ne jouent qu’à moyen terme, et vous le savez très bien.

M. Xavier Bertrand. C’est faux !

M. Jean-Marc Germain. D’ailleurs, c’est l’une des raisons pour lesquelles vous aviez soutenu, en 2003, un allongement de la durée de cotisation et refusé de reporter l’âge légal. À court terme, il ne faut pas mentir aux Français, soit on augmente les cotisations, ou, plus largement, les prélèvements, éventuellement sur le capital, soit on baisse les retraites,…

M. Xavier Bertrand. Ou on repousse l’âge légal !

M. Jean-Marc Germain. …parce que, quand on repousse l’âge légal, que se passe-t-il ? On sait très bien qu’un Français sur deux autour de soixante ans est au chômage. Cela veut donc dire trois ans au chômage de plus, trois ans de décote en plus, donc 7,5 % de retraite en moins.

M. Xavier Bertrand. C’est faux !

M. Jean-Marc Germain. Donc, à court terme, l’argument démographique ne joue pas.

M. Xavier Bertrand. C’est faux !

M. Jean-Marc Germain. À court terme, on transforme de jeunes retraités en vieux chômeurs. À court terme, on met 600 000 actifs de plus sur le marché du travail. Donc, à court terme, soit on augmente les cotisations, soit on baisse les pensions. Et vous ne pouvez pas dire aux Français que vous refusez une augmentation des cotisations, parce que cela veut dire que, si vous aviez été aux responsabilités, alors, de manière insidieuse, vous auriez baissé les pensions.

Les retraités, quand on parle avec eux,…

M. Xavier Bertrand. Ils vous remercient, peut-être ?

M. Jean-Marc Germain. …qu’est-ce qu’ils nous disent ? Qu’est-ce qui a été insupportable, ces dernières années ? C’est la hausse du coût du logement : 50 % d’augmentation des loyers ! C’est la hausse de l’électricité : 60 % ! C’est la hausse du gaz : 40 % ! C’est ça qui pèse sur leurs revenus. Et c’est vous qui avez inventé ces deux inventions insupportables : le gel du barème et la suppression de la demi-part des veuves ! Et c’est cela qu’ils paient aujourd’hui ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Xavier Bertrand. Vous êtes responsables de la colère qui monte !

M. le président. La parole est à M. Thierry Braillard.

M. Thierry Braillard. Nous sommes un peu gênés par ce débat, parce que si l’on doit réfléchir ensemble aux questions posées par l’article 4, il est gênant de voir l’UMP nous faire la leçon, alors que, si nous en sommes là, c’est peut-être parce que, pendant dix ans, ils n’ont pas été capables, véritablement, de résoudre le problème des retraites, que, pendant dix ans, ils n’ont pas voulu s’occuper de la question de la dépendance. Au passage, on faisait une petite réforme fiscale portant suppression de la demi-part des veufs. Et, ensuite, on vient ici pérorer pour nous faire la leçon !

Ce qui nous gêne, dans cet article 4, c’est qu’on touche de façon aveugle à toutes les retraites, notamment aux petites retraites.

M. Philippe Vigier. C’est vrai !

M. Thierry Braillard. C’est vrai, l’ASPA est un plafond, mais on connaît plein de retraités qui touchent entre 900 et 1 100 euros par mois, et ce sont eux qui vont être touchés, comme ils ont pu l’être par les conséquences de la suppression de la demi-part des veufs. Certains, qui ne payaient pas d’impôts, ont payé cette année 200 ou 300 euros. Ce n’est pas grand-chose mais, quand on gagne 900 à 1 000 euros par mois, c’est énorme. Et six mois de report, cela va faire une perte de pouvoir d’achat extrêmement importante.

Nous avons fait des propositions par voie d’amendement. Je demande vraiment à tous mes collègues de réfléchir à cette question de justice. Souvenez-vous du mot « justice » : quand on prend une décision, on doit garder à l’esprit qu’elle doit être la plus juste possible. Est-ce que vous pensez que cette mesure aveugle, non modulée, est juste ? Je pense qu’il serait bon de réfléchir à la possibilité de restreindre le nombre de retraités ainsi mis à contribution.

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à M. Xavier Bertrand, pour un rappel au règlement.

M. Xavier Bertrand. Monsieur Germain, vous avez la réputation d’être un homme intelligent, et vous connaissez les dossiers. J’ai donc tendance à croire que c’est surtout votre manque de courage que vous avez voulu habiller, parce que quiconque connaît ces dossiers sait que les périodes de chômages sont aujourd’hui prises en compte.

Sauf que, dans le privé, les vingt-cinq meilleures années sont prises en compte. Les années de chômage ne sont pas les meilleures années : elles n’entrent donc pas en compte dans le calcul de la retraite. C’est pourquoi, quand on repousse l’âge légal de départ en retraite, on a aussitôt des recettes. C’est une simple question de bon sens : on ne verse pas de pensions de retraites pendant cette période.

Prenez, par exemple, le rapport de Mme Moreau sur cette question. Il montre bien que si vous repoussez l’âge légal, cela a un effet immédiat sur l’équilibre du système de retraite. Vous savez aussi que repousser d’un an l’âge légal représente deux fois plus de recettes que d’augmenter d’une année la durée de cotisation. Ces chiffres-là ne sont pas les miens ; ils ne sont ni de droite ni de gauche ; ils figurent dans les rapports qui ont été remis au Gouvernement.

Seulement, vous avez trouvé beaucoup plus habile de dire que l’on augmentera un peu la durée de cotisation après 2020, plutôt que de repousser l’âge légal de départ, ce qui risquait de faire des mécontents. Vous avez préféré dire que la durée de cotisation augmentera progressivement de 2020 à 2035 – date à laquelle il paraît que pour des raisons démographiques, tout sera définitivement réglé. Pardonnez-moi : si le sujet n’était pas aussi grave, cette affirmation porterait à sourire !

De deux choses l’une : ou vous vous préoccupez des rapports au sein de la majorité et des intérêts de vos clientèles électorales, ou vous pensez à l’intérêt général. Il y a là une sacrée différence entre nous.

M. le président. Monsieur Bertrand, il ne s’agissait pas vraiment d’un rappel au règlement. Nous allons maintenant passer à l’examen des amendements, sur lesquels chacun pourra intervenir.

Article 4 (suite)

M. le président. Je suis saisi de plusieurs amendements identiques tendant à la suppression de l’article 4.

Sur l’amendement n11 et les amendements identiques tendant à la suppression de l’article 4, je suis saisi par le groupe Union pour un mouvement populaire d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

La parole est à M. Jacques Lamblin, pour soutenir l’amendement n11.

M. Jacques Lamblin. Sans surprise, après ce que nous nous sommes dit les uns aux autres, cet amendement vise à supprimer l’article 4 de ce projet de loi.

Sur ce sujet, nous assumons clairement notre choix politique : nous pensons que la seule façon de ne pas toucher aux retraites est de reporter l’âge légal de départ en retraite. C’est un choix politique, que nous assumons : nous l’avons fait il y a trois ans en repoussant l’âge légal à 62 ans. Il faudrait le faire à nouveau aujourd’hui. Si nous étions en position de décider, c’est ce que nous ferions. Nous assumons tout simplement nos choix.

Vous, vous avez fait un autre choix. En quoi consiste ce choix ? Prenons un exemple : que recevra, au 1er avril prochain, une personne qui perçoit actuellement une retraite mensuelle de 900 euros ? Avec le report de l’indexation, elle ne touchera pas 900 euros, mais 898 euros. En effet, la CASA – contribution de solidarité pour l’autonomie – passera de 0,15 % à 0,3 %. Voilà, exprimé en euros courants, l’impact de votre réforme. C’est tangible : alors que ce retraité devrait percevoir un petit peu plus, il aura la cruelle surprise de percevoir un peu moins. Et 10 à 15 euros de moins par mois pour une personne dont le revenu disponible est de 900 euros, c’est vraiment beaucoup !

Sur le plan philosophique, notre choix d’accorder la priorité au maintien des retraites se justifie par le fait que les retraités n’ont plus la même capacité de se défendre face aux aléas de la vie. Les gens qui sont en pleine activité peuvent décider d’assurer une activité supplémentaire ou de faire quelques heures de travail supplémentaires. À l’inverse, quand on est retraité, on est désarmé.

S’attaquer aux retraites, c’est donc vraiment la dernière des choses à faire. C’est pourtant ce que vous avez choisi. C’est bien dommage pour nos concitoyens retraités, et tout particulièrement pour ceux qui ont une petite retraite.

M. le président. La parole est à M. Arnaud Robinet, pour soutenir l’amendement n141.

M. Arnaud Robinet. Cet amendement demande, bien sûr, la suppression de l’article 4 de ce projet de loi. Nous l’avons dit et redit au cours de la discussion sur l’article 3 : nous refusons cette baisse de pension des retraités.

En fait, c’est une triple peine que vous leur infligez : Véronique Louwagie, Xavier Bertrand et moi-même venons de l’évoquer. Les retraités subiront à partir du 1er avril l’augmentation de cotisation de 0,3 point, l’année d’après, ils subiront une augmentation de cotisation double, de 0,6 point. En plus de cela, les pensions ne seront pas revalorisées. Les retraités subiront donc une triple peine, sans oublier, pour les retraités ayant élevé trois enfants ou plus, la fiscalisation des 10 % de majoration de pension. Sans oublier également la taxe de 0,3 %, perçue soi-disant pour financer la dépendance, alors que de nombreux articles montrent que le produit de cette taxe votée dans le cadre du PLFSS pour 2013 est siphonné.

Nous ne pouvons accepter que le parti socialiste fasse les poches des retraités pour essayer de financer une réforme des retraites qui ne sera en fin de compte pas du tout financée ! Nous dénonçons ce manque de courage, car le véritable courage aurait été de reculer l’âge du départ en retraite.

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n743.

Mme Jacqueline Fraysse. J’ai déjà dit notre indignation de voir reporter la date de revalorisation des pensions de retraite, qui pénalise les retraités, dont l’immense majorité est composée de personnes modestes. S’ajoute à cela l’imposition de la majoration de 10 % du montant des pensions dont bénéficient les parents de trois enfants et plus. Dans le même temps que vous prenez toutes ces mesures qui pénalisent les retraités et les salariés, non seulement vous exonérez les entreprises et le patronat, mais vous refusez de faire contribuer les dividendes, ces centaines de milliards d’euros qui ne participent pas du tout à la solidarité nationale, pas plus qu’ils ne sont investis – hélas ! – pour créer des emplois.

J’entendais M. Bertrand dire, tout à l’heure, qu’il n’y a que trois leviers pour financer les retraites. Eh bien, je regrette que tout le monde, dans cette assemblée, partage cette opinion ! Il existe en effet un quatrième levier dont vous ne parlez jamais, que vous refusez délibérément d’aborder dans le débat : l’élargissement de l’assiette…

M. Xavier Bertrand. C’est le deuxième levier !

Mme Jacqueline Fraysse. …et la contribution des revenus du travail. Parce que, excusez-moi, mais les dividendes sont bien des revenus financiers fournis par la sueur des travailleurs !

Je l’ai déjà dit, et je le répète : si nous n’utilisons pas ce quatrième levier, il est impossible de sauver le système tel qu’il se présente aujourd’hui. C’est donc bien à sa démolition que vous vous attelez en prenant ces mesures. On ne reculera pas indéfiniment l’âge de départ en retraite, on n’augmentera pas indéfiniment le taux de cotisation : il y aura bien une limite à cela !

M. Xavier Bertrand. C’est vrai !

Mme Jacqueline Fraysse. Si l’on n’intervient pas sur le quatrième levier, on ne s’en sortira pas. Le déficit persiste ; tout le monde nous promet qu’il va cesser, mais il persiste au cours du temps.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n744.

M. André Chassaigne. Cet article 4 prévoit de relever les cotisations salariales de 0,15 point en 2014, puis de 0,05 point pour chacune des trois années suivantes. En 2017, la hausse atteindra 0,3 point, et cela dans tous les régimes de retraites. Je ne parle évidemment pas des cotisations patronales qui, elles, seront entièrement compensées. Autant dire que les entreprises ne sont pas touchées : seuls les salariés seront concernés par cette hausse.

Les salariés et les retraités. Ces derniers sont mis à contribution de plusieurs manières, et sans compensation, évidemment. D’abord, en intégrant dès 2014 les majorations de pensions de retraités ayant élevé trois enfants ou plus dans l’assiette de l’impôt sur le revenu. Ensuite, en décalant de six mois la revalorisation des pensions. Résultat : la totalité des retraités verront leur pension diminuer. Certains, en plus, deviendront imposables, ou paieront davantage d’impôts.

Michel Etiévent, historien, relate dans son ouvrage consacré à Ambroise Croizat les souvenirs de Joseph Martinet, pensionné, dont la vie, comme celle de milliers d’autres, venait soudainement de prendre un sens différent : « Je n’oublierai pas – disait-il – avril 1947. Le chiffre au bas du papier de la pension : 15 000 francs. » Il s’agissait, évidemment, d’anciens francs. « Je ne touchais que 7 000 francs quelques mois auparavant. Ça vous doublait d’un coup la vie. »

Il est de nombreux retraités qui n’oublieront pas l’année 2013, car cette année-là, chers collègues, marquera la baisse inéluctable de leurs pensions – à moins que vous ne votiez pour cet amendement de suppression.

M. Philippe Vigier. Bien sûr, que nous voterons pour !

M. André Chassaigne. Ils n’oublieront pas non plus les années 2014, 2015, 2016, 2017 et 2018 ! Chaque année, avec le décalage de six mois de la revalorisation des pensions, ils se souviendront du chiffre au bas du papier de la pension, comme Joseph Martinet s’est souvenu que sa pension avait doublé en 1947.

M. le président. La parole est à M. Marc Dolez, pour soutenir l’amendement n745.

M. Marc Dolez. Je crois que nos différentes interventions ont montré que, contrairement à ce qui est indiqué dans l’exposé des motifs du projet de loi, les mesures qui sont proposées ne reposent pas sur « un effort justement réparti entre tous ». L’essentiel de l’effort pèse sur les retraités, qui sont ponctionnés de 600 à 800 millions d’euros dès l’année 2014. Ce montant atteindra 1,4 milliards d’euros en 2020. Je l’ai dit tout à l’heure : en moyenne, la perte, pour les retraités, atteindra 144 euros. Cela concernera, évidemment les années ultérieures.

Madame la ministre, comment le Gouvernement peut-il écrire dans l’exposé des motifs qu’il « a souhaité préserver les petites retraites », au prétexte que « le report de revalorisation ne concernera pas les retraités au minimum vieillesse » ?

M. André Chassaigne. C’est incroyable ! Indécent !

M. Marc Dolez. Comme vous le savez peut-être, la plupart d’entre ceux qui sont juste au-dessus du minimum vieillesse…

M. Philippe Vigier. Eh oui !

M. Francis Vercamer. Ce sont les riches !

M. Marc Dolez. …ne peuvent plus se soigner,…

M. Philippe Vigier. Et ils n’ont pas l’AME, ceux-là !

M. Marc Dolez. …ne mangent pas à leur faim tous les jours et ne peuvent pas payer leur loyer ni faire face à toutes les factures qui leur parviennent au quotidien. Comment dire, aujourd’hui, que les petites retraites sont épargnées ? Madame la ministre, un gouvernement de gauche ne peut pas dire des choses pareilles ! Je vous demande, dans la fidélité à celles et ceux qui ont permis, en 1981, cette grande conquête qu’a été la retraite à 60 ans, de renoncer à cette mesure injuste et cynique !

M. André Chassaigne. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Jeanine Dubié, pour soutenir l’amendement n1558.

Mme Jeanine Dubié. Par cet amendement, nous demandons l’abandon du report de la revalorisation des pensions au 1er octobre. Comme je l’ai déjà dit, ce décalage peut paraître anodin, mais dans les faits il correspond à un véritable gel des pensions et à une désindexation temporaire par rapport à l’inflation.

Ainsi, en cinq ans, les retraités auront perdu neuf mois de revalorisation, ce qui pèsera sur leur pouvoir d’achat, et notamment sur celui des retraités les plus modestes. Nous estimons donc qu’il est souhaitable de ne pas décaler encore la date de revalorisation des pensions et de la maintenir au 1er avril pour l’ensemble des retraités, et pas seulement pour les bénéficiaires de l’allocation de solidarité aux personnes âgées.

M. le président. La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement n2862.

M. Francis Vercamer. Xavier Bertrand le disait tout à l’heure, il n’y a que trois solutions pour assurer le financement de nos retraites : travailler plus longtemps – vous l’avez refusé –, augmenter les impôts ou baisser les pensions de retraite. Vous utilisez les deux dernières solutions à la fois. Vous augmentez les impôts en augmentant les cotisations des entreprises et des salariés, et vous reportez dans le même temps la revalorisation des pensions de retraite. Cela aura pour conséquence une baisse du pouvoir d’achat.

Vous continuez ainsi votre matraquage fiscal, que l’on subit depuis l’an dernier. La loi de finances pour 2013, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, le projet de loi de finances pour 2014 que nous allons bientôt examiner : avec tous ces textes, vous menez une véritable politique de matraquage fiscal. Vous la poursuivez cette année encore, malgré les annonces du Président de la République. On le voit avec ce projet de loi

En agissant ainsi, vous risquez de tuer le peu de croissance qui était en train de repartir ! En effet, lorsque l’on touche au pouvoir d’achat et à la compétitivité des entreprises, on touche à la croissance : c’est évident. Vous savez que nous sommes très en retard sur les autres, malheureusement, mais nous avons malgré tout un tout petit peu de croissance : vous allez la tuer ! Il me paraît au contraire important de la conforter.

C’est pour cela que le groupe UDI propose de supprimer l’article 4 de ce projet de loi, qui alourdit la fiscalité des entreprises et des salariés, et réduit le pouvoir d’achat des retraités.

M. le président. La parole est à Mme Véronique Massonneau, pour soutenir l’amendement n2994.

Mme Véronique Massonneau. Cet amendement vise à supprimer l’article 4. Nous ne sommes pas fondamentalement opposés à l’idée que les retraités participent à l’effort de solidarité, mais le dispositif actuel prévoit un financement via le report de la revalorisation de pensions du 1er avril au 1er octobre.

Un premier pas a été fait en excluant de ce report les bénéficiaires de l’allocation de solidarité – merci pour eux. Mais d’après l’INSEE, 1,6 million de retraités vivent sous le seuil de pauvreté, et parmi eux, seuls 600 000 bénéficient de l’ASPA.

Il nous semble particulièrement injuste de mettre en place une mesure qui touchera de plein fouet les pensionnés les plus défavorisés.

Le report mis en place en 2010 a déjà eu un impact sur les retraites : maintenir ce report de revalorisation, c’est continuer une politique inéquitable. Un manque à gagner pour une pension de 950 euros mensuels n’a pas le même effet que pour une pension de 2 000 euros mensuels.

M. André Chassaigne. Bien sûr !

Mme Véronique Massonneau. Nous ne pouvons décemment pas mettre en place une mesure qui aura pour véritable conséquence, non pas le financement de notre système de retraite, mais la paupérisation des retraités les plus modestes.

M. André Chassaigne. Bien sûr !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Issindou, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable à ces amendements de suppression.

M. Marc Dolez. C’est un peu court, comme explication !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Le texte que je vous présente repose sur un équilibre, pour ce qui est des enjeux de financement. Le Gouvernement considère que, parce qu’il s’agit d’un enjeu majeur pour l’ensemble de la société, l’ensemble des générations doit apporter une contribution.

C’est pour cela que les retraités sont mis à contribution, alors même qu’ils bénéficient déjà de notre système de retraite.

M. André Chassaigne. C’est une honte !

Mme Marisol Touraine, ministre. Nous avons tenu, dans ce texte, à laisser de côté les bénéficiaires de l’ASPA – l’ancien minimum vieillesse. Notre texte comporte par ailleurs tout un ensemble de mesures – nous aurons l’occasion de les examiner –, qui vont bénéficier aux petits retraités : je pense au relèvement du seuil d’écrêtement du minimum contributif, qui sera réalisé par décret mais qui sera annoncé à cette occasion –, ou encore aux mesures extrêmement importantes en faveur des retraites agricoles.

Pour autant, le Gouvernement est évidemment très sensible à la situation des plus modestes de nos concitoyens. Nous avons eu l’occasion d’aborder ces questions en commission : certains retraités en font partie, mais également certains actifs. Et lorsque l’on compare le niveau de vie global des retraités avec le niveau de vie des actifs, on s’aperçoit que c’est équivalent. (Vives exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

M. Francis Vercamer. Tout à l’heure, on nous a dit que ça baissait ! Il faudrait savoir !

Mme Marisol Touraine, ministre. Nous devons donc faire preuve d’attention à l’égard de l’ensemble de ceux qui ont des revenus modestes.

Je n’ai pas de leçons à recevoir de la part de ceux qui ont mis notre pays dans la situation dans laquelle nous l’avons trouvé. (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

C’est pour cela que des mesures ont d’ores et déjà été prises par le Gouvernement, et que d’autres mesures vont l’être en direction des personnes qui ont des petits revenus.

Plusieurs députés ont insisté sur ce point : je pense notamment à Jean-Marc Germain, au président Christophe Sirugue – qui n’était pas dans sa fonction de président à cette occasion –, et à d’autres membres du groupe socialiste.

Je veux rappeler que nous avons procédé au relèvement du seuil de la CMU et de l’aide à la complémentaire santé. Cela signifie que, depuis le 1er juillet dernier, 750 000 personnes de plus bénéficient d’une aide en matière de complémentaire santé. Ce sont environ 100 000 personnes de plus de 60 ans qui vont pouvoir toucher 500 euros par an : cela représente une aide au pouvoir d’achat tout à fait importante.

Je veux également insister sur les mesures qui vont être prises dans le cadre du projet de loi de finances qui sera prochainement débattu dans l’hémicycle : la remise en cause du gel du barème de l’impôt sur le revenu, qui a pénalisé fortement les petits revenus, en particulier les retraités – mais pas seulement eux.

M. Jacques Lamblin. Vous l’avez maintenu deux années de suite !

Mme Marisol Touraine, ministre. En commission des finances, a été voté ce soir, à la demande du Gouvernement, le relèvement du seuil du revenu fiscal de référence, qui permettra à des personnes ayant de petits revenus de ne pas payer la taxe d’habitation ou la redevance audiovisuelle.

Le Gouvernement présente donc tout un ensemble de mesures en direction de nos concitoyens ayant des petits revenus, qu’ils soient retraités ou actifs. Car c’est bien une démarche de pouvoir d’achat que nous avons engagée, indépendamment de la présente réforme des retraites.

Pour l’ensemble de ces raisons, et parce que notre texte repose sur un équilibre global, je donne un avis défavorable à tous ces amendements de suppression.

M. Arnaud Robinet. Honteux !

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 11, 141, 743, 744, 745, 1558, 2862 et 2994, tendant à la suppression de l’article 4.

(Il est procédé au scrutin.)

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants83
Nombre de suffrages exprimés83
Majorité absolue42
Pour l’adoption44
contre39

(Les amendements identiques nos 11, 141, 743, 744, 745, 1558, 2862 et 2994 sont adoptés et l’article 4 est supprimé ; les amendements nos 3007, 2054 à 2068, 2859, 3008, 1554, 2993, 1555, 1556, 1559, 2732 à 2746, 1557, 2860 et 2861 n’ont plus d’objet.)

(Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI, et sur les bancs du groupe GDR.)

M. Marc Dolez. Bravo !

M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

2

Ordre du jour de la prochaine séance

M. le président. Prochaine séance, aujourd’hui, à neuf heures trente :

Suite de la discussion du projet de loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraites.

La séance est levée.

(La séance est levée à une heure vingt.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance



de l’Assemblée nationale



Nicolas Véron