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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIVe législature
Session ordinaire de 2013-2014

Compte rendu
intégral

Première séance du vendredi 10 janvier 2014

SOMMAIRE

Présidence de M. Denis Baupin

1. Agriculture, alimentation et forêt

Discussion des articles (suite)

Article 10

M. Antoine Herth

M. Stéphane Le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt

Amendement no 99 et 1389

M. Germinal Peiro, rapporteur de la commission des affaires économiques

Amendements nos 1101 , 1168

Après l’article 10

Amendements nos 809 , 100

Article 10 bis

Amendements nos 1672 , 1750 (sous-amendement)

M. Jean-Yves Caullet, rapporteur pour avis de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire

Amendements nos 1713 , 1715 , 260 , 365 , 1189 , 1677

Après l’article 10 bis

Amendements nos 244 , 446 , 12 rectifié , n°s 13 rectifié, 750, 14 rectifié, 748 et 746 , 639 rectifié , 44, deuxième rectification , 366

Article 11

Amendements nos 1395 , 1343 , 846 , 1391 , 1344 , 847 , 921 , 1169 , 1392 , 1345 , 848 , 976 , 101 , 102 , 1346 et 849 , 724 , 988 rectifié

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques

Amendement no 850

Article 11 bis

Article 12

Mme Annie Genevard

M. Dominique Potier

Mme Valérie Pécresse

M. André Chassaigne

Amendements nos 979 , 1487 , 592 et 591 , 137 , 287 , 543 , 594 , 593 , 1554 , 984 , 811 , 1290 , 814 , 991 , 27 , 194 , 655 , 1396

Suspension et reprise de la séance

Article 12 (suite)

Amendements nos 819 , 999 , 252 , 1264 , 1694 , 263 , 506 , 264 , 507 , 542 , 815 , 1182 , 1691 , 367 , 508 , 259 , 425 , 816 , 1190 , 1664 , 817 , 1186 , 1693 , 195 , 509 , 541 , 654 , 1005 , 1397 , 193 , 459 , 656

Suspension et reprise de la séance

Amendements nos 822 , 1015 , 1184 rectifié , 1692 rectifié , 1403 , 1020 , 207 , 1023 , 28 , 288 , 1029 , 820 , 1291 , 138 , 1034 , 1042 , 823 , 1293 , 1044 , 1398 , 1739 rectifié et 1740 (sous-amendements) , 1347

Après l’article 12

Amendements nos 992 rectifié , 461 , 652 , 651 , 1747

Article 13

M. Dominique Potier

M. Jean-Michel Clément

Mme Brigitte Allain

Mme Annie Genevard

M. Germinal Peiro, rapporteur

2. Ordre du jour de la prochaine séance

Présidence de M. Denis Baupin

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

1

Agriculture, alimentation et forêt

Suite de la discussion d’un projet de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt (nos 1548, 1639, 1614, 1604).

Le temps de parole restant pour la discussion de ce texte est de cinq heures cinquante-quatre minutes pour le groupe SRC dont cent quatre-vingt-six amendements sont en discussion, quatre heures vingt-deux minutes pour le groupe UMP dont cinq cent vingt-sept amendements sont en discussion, une heure trente-quatre minutes pour le groupe UDI dont quatre-vingt-sept amendements sont en discussion, cinquante minutes pour le groupe écologiste, dont soixante-treize amendements sont en discussion, une heure et huit minutes pour le groupe RRDP dont vingt-et-un amendements sont en discussion, cinquante-neuf minutes pour le groupe GDR dont soixante-deux amendements sont en discussion, vingt-quatre minutes pour les députés non inscrits.

Discussion des articles (suite)

M. le président. Hier soir, l’Assemblée a poursuivi l’examen des articles, s’arrêtant à l’article 10.

Article 10

M. le président. La parole est à M. Antoine Herth.

M. Antoine Herth. Monsieur le président, je prends la parole pour défendre globalement les amendements que nous avons déposés à cet article, ainsi que nous en avons pris l’habitude hier soir.

Monsieur le ministre, cet article vise à habiliter le Gouvernement à prendre des ordonnances. Or, légiférer par ordonnance, c’est écrire la loi comme on claque une porte. Ce procédé stresse le Parlement sans garantir la qualité de la loi.

Je remarque que, depuis le travail en commission, vous avez écrit l’un des textes concernés et que vous proposerez un amendement, ce qui témoigne de votre bonne volonté même s’il reste de la marge puisque quinze demandes d’ordonnances demeurent. Les retours que nous avons du terrain nous appellent cependant à la vigilance car vos propositions ne correspondent pas aux attentes. La méthode choisie n’est donc pas forcément la bonne.

J’ai bien conscience que nous arrivons au terme d’une semaine bien chargée en discussions et que l’examen en détail de ces quinze textes nous aurait pris une semaine supplémentaire. Je mesure les limites de l’exercice, mais le constat s’impose de lui-même : légiférer par ordonnance n’est jamais un gage de qualité, ce qui explique que le groupe UMP ait déposé sur cet article un certain nombre d’amendements de suppression, soit de l’article, soit de ses différents alinéas. Cette présentation vaut défense de nos amendements.

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt.

M. Stéphane Le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt. Je serai très bref sur ce premier échange de la matinée.

J’avais en effet évoqué en commission le recours aux ordonnances, et je connais les remarques que vous avez faites.

M. Martial Saddier. Vous aviez alors fait une promesse !

M. Stéphane Le Foll, ministre. Je vous renvoie en effet à la page 439 du rapport où vous pourrez lire mon engagement de vous faire prendre connaissance des projets d’ordonnance avant la deuxième lecture. Cela étant, ayant la chance de disposer d’une administration et d’un cabinet efficaces qui travaillent vite et bien, jour et nuit, l’ordonnance relative aux signes d’identification de l’origine et de la qualité est déjà écrite et je suis prêt à en distribuer des photocopies à chaque responsable des groupes qui débattent pour que la transparence soit totale.

Il ne s’agit pas pour nous d’éviter le débat ou d’empêcher les députés de discuter de sujets importants.

M. le président. Les amendements identiques de suppression de l’article, nos 99 et 1389, sont donc défendus.

La parole est à M. Germinal Peiro, rapporteur de la commission des affaires économiques, pour donner l’avis de la commission sur ces deux amendements.

M. Germinal Peiro, rapporteur de la commission des affaires économiques. L’avis de la commission est défavorable, monsieur le président.

(Les amendements identiques nos 99 et 1389, repoussés par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 1101 et 1168.

La parole est à M. Jean-Michel Clément, pour soutenir l’amendement n1101.

M. Jean-Michel Clément. Cet amendement ne tend pas à supprimer tout l’article, mais simplement l’alinéa 6, même si laisser la main aux ordonnances est toujours délicat pour un parlementaire, quelle que soit son appartenance politique. Je note d’ailleurs avec plaisir que le ministre a déjà fait travailler ses services et que nous aurons bientôt entre les mains les projets d’ordonnances, ce qui est une bonne chose.

L’alinéa 6 vise à supprimer par voie d’ordonnance les dispositions relatives à la certification de conformité dans le code rural et de la pêche maritime. Cette mesure me semble aller trop loin. Nous connaissons les cahiers des charges pour les produits sous label, AOP ou IGP mais en l’espèce, nous passerions du tout au rien. Inversement, ne pas disposer de certificat de conformité laisserait en déshérence toute information concernant les produits qui pourraient être identifiés sous des aspects purement commerciaux sans garantie de qualité.

Je crois possible d’améliorer le dispositif par voie réglementaire, mais le supprimer purement et simplement serait préoccupant et contraire au renforcement de l’information du consommateur.

M. le président. La parole est à M. Germinal Peiro, pour soutenir l’amendement n1168.

M. Germinal Peiro, rapporteur de la commission des affaires économiques. Dans le droit fil des propos de M. Clément, j’ai moi-même déposé un amendement identique afin de maintenir la certification de conformité, pour les mêmes raisons. La commission a rendu un avis favorable.

(Les amendements identiques nos 1101 et 1168, acceptés par le Gouvernement, sont adoptés et les amendements nos 25, 123, 157, 192, 286, 653, 971, 1132, 1607 et 824 tombent.)

(L’article 10, amendé, est adopté.)

Après l’article 10

M. le président. L’amendement n809 est défendu.

(L’amendement n809, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Antoine Herth, pour soutenir l’amendement n100.

M. Antoine Herth. Cet amendement n100 est un amendement 100 % intéressant.

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Vous êtes très en forme, monsieur Herth !

M. Antoine Herth. Il est 100 % cohérent avec ce que je vous répète depuis le début de ce débat, monsieur le ministre. Malgré vos promesses, nous avons aujourd’hui la certitude que vous n’êtes toujours pas en mesure de proposer au monde agricole un dispositif assurantiel qui leur donnerait les moyens de répondre en particulier aux enjeux du changement climatique.

Nous vous proposons par conséquent que dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur l’amélioration de la gestion des risques et du système assurantiel des agriculteurs. Cet amendement est 100 % gratuit.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur cet amendement 100 % gratuit ? (Sourires.)

M. Germinal Peiro, rapporteur. La commission a rendu un avis 100 % défavorable, non pas qu’elle se désintéresse de la gestion des risques et du système assurantiel, bien au contraire, mais, le ministre le dira mieux que moi, un groupe de travail ministériel est en cours sur ce sujet.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Même avis. Le système est prévu par la loi, mais il faut l’améliorer car il n’est pas satisfaisant. Je m’y suis engagé et un travail est en cours avec l’ensemble des institutions financières et la profession pour élargir la base afin de couvrir les agriculteurs face aux aléas climatiques. Dès que les travaux seront achevés, nous présenterons cette nouvelle architecture du système assurantiel à la commission des affaires économiques.

(L’amendement n100 n’est pas adopté.)

Article 10 bis

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n1672 qui fait l’objet d’un sous-amendement n1750.

La parole est à M. le ministre, pour soutenir l’amendement.

M. Stéphane Le Foll, ministre. Cet amendement, relatif à une disposition adoptée en commission, porte sur une question qui nous a été signalée : il faut faire en sorte de ne pas engorger l’ensemble du système en précisant les conditions de défense des appellations d’origine protégée et des indications géographiques protégées, pour les rendre compatibles avec les capacités administratives et permettre le traitement de l’ensemble des dossiers.

Tel est l’objet de cet amendement, qui ne vise nullement à remettre en cause les décisions très importantes qui ont été prises pour protéger les IGP et les AOC contre les marques. Il ne s’agit que de tenir compte des capacités que nous avons à traiter les dossiers.

M. le président. La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir le sous-amendement n1750.

M. Dino Cinieri. M. Foulon, élu du Bordelais, Mme Grosskost, élue en Alsace et moi-même, élu de la vallée du Rhône – celle du Saint-Joseph et du Condrieu notamment, mais je n’oublie pas l’ensemble des agriculteurs – estimons que le maintien de la réputation d’une AOC ne peut se faire que dans la durée et grâce au fait que les consommateurs ont pleinement confiance en son authenticité. Les organismes de défense et de gestion, en tant qu’organismes chargés de la protection des AOC, doivent pouvoir imposer des outils d’authentification des produits d’AOC en circulation, comme le font les titulaires d’une marque. De nouvelles technologies existent désormais pour faciliter la démonstration qu’un produit est authentique ou contrefait ; il est urgent de pouvoir les utiliser au bénéfice de la protection des AOC. Certaines AOC italiennes et espagnoles les imposent déjà à leurs opérateurs ; la France doit rattraper son retard !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Avis favorable à l’amendement du Gouvernement et défavorable au sous-amendement n1750.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur le sous-amendement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Défavorable. Je rappelle que grâce au débat qui a eu lieu en commission, nous accomplissons aujourd’hui un progrès très important : l’INPI et l’INAO se sont mis d’accord pour aller dans le sens que nous souhaitions tous, celui de la protection des IGP et des AOC face aux marques commerciales. Cette demande était formulée depuis plusieurs années. La présente loi d’avenir agricole et forestière instaure enfin un rapport nouveau entre les AOP et les IGP d’une part, et les marques commerciales de l’autre. C’est toute la richesse du débat parlementaire que de faire émerger des sujets et de nous permettre de faire pression, grâce au ministre et aux députés tout à la fois !

M. Martial Saddier. Cela vous ferait mal de reconnaître ne serait-ce qu’une seule fois de qui vient ce progrès !

M. le président. La parole est à Mme Annie Genevard.

Mme Annie Genevard. Je viens d’un territoire qui compte d’innombrables IGP et AOC. Il y a quelques mois, monsieur le ministre, vous êtes venu à Déservillers, le berceau du comté, une réussite magnifique et exemplaire à tous égards.

M. Stéphane Le Foll, ministre. Magnifique !

Mme Annie Genevard. Permettez-moi donc de vous rappeler que les attaques peuvent aussi venir de l’étranger. Avec l’absinthe de Pontarlier, les Suisses nous ont fait un mauvais coup. Nous devons donc mener notre combat au niveau national, mais aussi au niveau européen. Il me semble essentiel que vos services puissent constituer une cellule qui se consacrerait à la défense des IGP, des AOP et des AOC à cette échelle.

M. le président. La parole est à M. Martial Saddier.

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Ah, l’absinthe de Bonneville !

M. Martial Saddier. Après l’absinthe, je vous parlerai du reblochon, du beaufort, de la tomme de Savoie, mais aussi des pommes et des poires savoyardes…

M. Stéphane Le Foll, ministre. Nous commençons très fort la matinée !

M. Martial Saddier. …qui avaient, dès les années 1970, fait l’objet des premiers labels régionaux, ancêtres des IGP et des AOP d’aujourd’hui.

Contrairement à vous, monsieur le ministre, il arrive aux députés du groupe UMP de vous remercier et de reconnaître le travail que vous accomplissez. À l’inverse, vous avez quelque peine à reconnaître le travail qu’effectuent les députés UMP…

M. Germinal Peiro, rapporteur. Propos exagéré !

M. Martial Saddier. …notamment M. Herth, Mme Genevard et moi-même, qui avons passé plusieurs heures à vos côtés en commission.

Je vous remercie donc pour le projet d’ordonnance relatif à l’article 10, mais permettez-moi quelques remarques à son sujet. Tout d’abord, puisqu’il s’agit de produits de montagne, je pense pouvoir compter sur vous pour que le Conseil national de la montagne en soit saisi pour avis, comme cela se faisait sous la précédente législature. Ensuite, cette ordonnance donnera tous pouvoirs à l’INAO et dessaisira complètement le Parlement. Pourquoi pas, mais encore faut-il en être bien conscient, monsieur le ministre. Enfin, j’ose espérer – mais je suis certain que c’est le cas – qu’une concertation étroite a été menée avec la filière vinicole, que concerne une partie importante de l’ordonnance.

J’en viens à l’amendement en discussion. Certes, nous avons obtenu de grandes avancées – auxquelles, avec M. Herth, nous avons largement contribué en commission – sur la protection. Si les travaux de la commission furent une avancée, l’amendement du Gouvernement n’est-il pas un recul ? Je ne fais aucun procès d’intention, mais certaines inquiétudes existent, notamment parce que le droit d’opposition n’est ouvert qu’au seul directeur de l’INAO, parce qu’il est restreint dans les seuls cas de produits similaires et, enfin, parce que l’INAO a obligation de couvrir les coûts de la procédure. Aura-t-il les moyens de sa politique, ou devra-t-il expliquer à des groupements de producteurs qu’il ne peut, faute de moyens, engager des poursuites ? Telles sont les remarques que nous souhaitions formuler à ce stade sur le projet d’ordonnance relatif à l’article 10 et sur l’amendement du Gouvernement.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Un point mérite d’être éclairci. En effet, l’exposé sommaire de l’amendement présenté par le Gouvernement ne correspond pas tout à fait à la réalité.

M. Martial Saddier. Nous sommes d’accord !

M. André Chassaigne. Il y est expliqué que la procédure sera engagée lorsque le dépôt d’une marque porte « atteinte au nom, à l’image, à la réputation ou à la notoriété d’une AOP ou IGP reconnue », et que « cette opposition pourra être actionnée si le produit protégé par une AOP ou une IGP est similaire au produit qui fait l’objet de demande de marque ». Il me semblait pourtant qu’il ne s’agissait pas uniquement de « produits similaires ». À titre d’exemple, une demande d’indication géographique peut être faite pour un produit manufacturé qui possède le même nom qu’un produit bénéficiant déjà d’une AOP ou d’une IGP. Dans ce cas, il ne s’agit pas automatiquement d’un produit similaire ; il s’agit davantage d’utiliser un nom déjà protégé au titre d’une AOP.

M. Martial Saddier. Oui, de ce point de vue, l’amendement marque un recul par rapport aux travaux de la commission !

M. André Chassaigne. Deuxièmement, pour couper court à certaines interprétations formulées dans la presse, je précise qu’il va de soi que les décisions que nous prenons aujourd’hui ne sont pas rétroactives. Ainsi, il y a une vingtaine d’années, un industriel a développé avec intelligence et pertinence le nom Laguiole pour une série de produits manufacturés autres que le couteau qui, lui, appartenait déjà au domaine commun ; le présent texte ne permettra naturellement pas de revenir sur cette situation, qui est d’ailleurs déjà validée par plusieurs jugements. Sur ce point, les choses doivent être bien claires, car on lit toutes sortes d’interprétations.

Troisièmement, la procédure d’opposition ne doit pas trop alourdir les choses. Je prendrai pour exemple les fameux couteaux de Thiers : il s’agit d’une production de couteaux régionaux qui portent les noms de différentes villes et régions de France. Les artisans couteliers déposent leur marque en associant généralement le nom de la ville à celui de la coutellerie. Il ne faudrait pas que toute nouvelle fabrication de couteaux qui porteraient le nom d’une ville ou d’une région – car il s’en crée régulièrement – soit sujette à une lourdeur administrative obligeant le producteur à faire la démonstration que le couteau en question ne porte atteinte ni au nom, ni à l’image, ni à la réputation, ni à la notoriété. En clair, il ne faudrait pas que l’INPI et l’INAO soient à couteaux tirés ! (Sourires.)

M. Martial Saddier. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Caullet, rapporteur pour avis de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire.

M. Jean-Yves Caullet, rapporteur pour avis de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire. Puisque nous avons parlé de fromage, monsieur le ministre, je vous parlerai de vin.

M. Philippe Le Ray. Les deux vont de pair !

M. Jean-Yves Caullet, rapporteur pour avis. Je salue avec plaisir la cave coopérative de Chablis, qui vient d’être désignée meilleure coopérative de France. Voilà qui met en train, de bon matin !

J’insiste sur le progrès que nous faisons avec ce texte dont j’entends surtout souligner les lacunes alors qu’il permet tout de même une avancée fondamentale. La restriction du droit d’opposition au seul directeur de l’INAO a aussi un effet dissuasif, car l’INAO est une institution très connue. Les producteurs qui déposeront une marque sauront que l’INAO est susceptible de faire opposition, et cela aura davantage de poids qu’une contre-attaque en ordre dispersé. En outre, la situation évoquée par M. Chassaigne se vérifiera : il peut en effet exister plusieurs produits portant le même nom dont la synergie profite à la notoriété et à la qualité, plutôt que leur nuire.

Cela étant dit, monsieur le ministre, je m’interroge sur l’emploi de la conjonction « et » à la cinquième ligne du second alinéa de votre amendement, qui oblige à cumuler deux conditions – l’atteinte à l’image et le caractère similaire du produit visé. Le directeur de l’INAO ne pourrait-il pas juger si un produit, même non similaire, est susceptible de justifier une opposition ? Une réflexion doit être conduite sur le cumul des deux conditions sous son autorité, puisqu’il a délégation, afin d’éviter l’explosion du nombre de recours tout en en préservant la possibilité. En effet, il peut exister des produits non similaires tout à fait dégradants pour l’image du produit originel.

M. André Chassaigne. Exactement !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Le Foll, ministre. Poursuivons ce débat important.

M. Martial Saddier. Très important !

M. Stéphane Le Foll, ministre. Comme M. Caullet, je tiens à souligner l’avancée qui est en cours. Pourquoi recourir à l’INAO et à son directeur ? La possibilité qui était offerte à chaque organisation IGP, AOP ou AOC de défendre elle-même un problème lié à une marque affaiblit les plus petites d’entre elles. Certes, l’appellation Champagne n’éprouvera aucune difficulté à se défendre seule mais d’autres, plus petites, auront davantage de peine. Il est donc très important de passer par l’INAO, qui exercera une surveillance bien plus forte.

J’entends la proposition de M. Caullet, et nous allons l’étudier, plutôt que de trancher sur-le-champ. Je le rappelle en effet : tout ce qui est décidé est d’abord négocié, et rien n’est décidé contre l’avis des professionnels engagés dans le débat. Je réponds par là à la question qui m’a été posée quant aux décisions prises dans l’ordonnance : tout est négocié !

M. Martial Saddier. Pas sur la montagne !

M. Stéphane Le Foll, ministre. S’agissant de la montagne, l’engagement a été pris – nous verrons cela avec Mme Massat, présidente de l’Association des élus de la montagne – pour que le Conseil national de la montagne ait une discussion et que chacun en prenne connaissance.

Pourquoi recourir à l’INAO, une méthode en effet légèrement en retrait par rapport à ce qu’avait décidé la commission ? Pour la raison suivante : si les conflits se multiplient sur tous sujets, la dynamique de protection cédera le pas à un affaiblissement des acteurs. Le mieux étant parfois l’ennemi du bien, nous nuirons à notre objectif de défense des appellations. Certes, la question des produits similaires fait débat. J’ai entendu l’exemple des couteaux : les IGP industrielles sont un problème différent. En matière agricole et agroalimentaire, nous avons fait le meilleur choix ; aller plus loin pourrait ne pas être opportun. Il y a là une avancée importante, même si je suis naturellement prêt à discuter, notamment sur la proposition de M. Caullet.

Je termine sur un point : le débat a lieu en France, mais surtout à l’international. Car le débat sur la question agricole et agroalimentaire à l’échelle internationale, c’est celui de la conception même de l’agriculture. Tel est le cas face aux États-Unis ou, plus généralement, au monde anglo-saxon : va-t-on vers un système où l’agriculture et l’agroalimentaire seront une question de marques, comme cela existe dans l’industrie, ou va-t-on au contraire défendre l’idée, qui a toujours prévalue en France, de lier les produits agricoles à leur territoire et à leur terroir ? C’est un débat majeur. À l’échelle européenne, nous l’avons gagné en partie, mais à l’échelle internationale, la question reste pendante. C’est même la première question quand je rencontre par exemple mon homologue japonais ou encore le vice-Premier ministre chinois – lequel d’ailleurs connaît parfaitement nos fromages, même d’Auvergne ! Lui aussi réfléchit au sens que peut avoir la notion d’agriculture terroir et territoire. C’est cela, la bataille !

Nous sommes en tout cas vigilants, comme l’est l’INAO à l’échelle internationale.

M. le président. La parole est à M. Martial Saddier.

M. Martial Saddier. Au nom des députés du groupe UMP, monsieur le ministre, je vous remercie pour la clarté et la transparence de vos propos, s’agissant de l’engagement de la concertation avec les professionnels de la filière et de la saisine, soit de l’ANEM – l’association nationale des élus de montagne – soit du CNM – le conseil national de la montagne, lequel me paraît plus adapté, en lien avec l’ANEM, pour ce qui est des produits de montagne.

Lorsque nous émettons des réserves, on peut toujours penser que c’est parce que nous sommes dans l’opposition, mais M. Chassaigne a abondé dans mon sens et a manifesté la même inquiétude face à la petite régression que nous constatons par rapport à nos travaux en commission.

Nous avons entendu vos propos, monsieur le ministre, mais nous souhaitons, au groupe UMP, pouvoir, d’ici à la deuxième lecture, nous approcher au plus près des discussions de fond que nous avons eues en commission avec Antoine Herth sur la nécessité de protéger ces joyaux que sont les produits du terroir en France.

M. Stéphane Le Foll, ministre. Je suis d’accord.

(Le sous-amendement n1750 n’est pas adopté.)

(L’amendement n1672 est adopté.)

M. le président. La parole est à M. le ministre, pour soutenir l’amendement n1713.

M. Stéphane Le Foll, ministre. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Favorable.

(L’amendement n1713 est adopté.)

M. le président. La parole est à M. le ministre, pour soutenir l’amendement n1715.

M. Stéphane Le Foll, ministre. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Favorable.

(L’amendement n1715 est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements identiques, nos 260, 365, 1189 et 1677.

La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir l’amendement n260.

M. Dino Cinieri. Dans le droit-fil des propos d’Antoine Herth et de Martial Saddier, je rappelle qu’en l’état actuel du droit, il n’est possible, en amont de l’enregistrement d’une marque, que de faire de simples observations. Malheureusement, celles-ci ne sont pas toujours suivies par l’INPI. Les organismes de protection des AOC et IGP n’ont alors pas d’autre choix que de former un recours en annulation de la marque devant le juge.

Dès lors qu’il y a un risque, pour une AOP ou une IGP, d’atteinte à son nom, sa notoriété, son image ou sa réputation, les organismes chargés de la protection de ces signes doit pouvoir s’opposer à l’enregistrement de la marque. S’opposer n’est pas nécessairement obtenir le non-enregistrement de la marque, mais c’est engager un débat dans le cadre d’une procédure administrative moins lourde qu’un contentieux.

Par ailleurs, la procédure d’opposition n’est pas gratuite. Elle donne lieu au paiement d’une redevance de 310 euros.

Enfin, cette procédure d’opposition a également été ouverte par le Gouvernement aux futures indications géographiques pour les produits autres qu’agricoles en cours de création dans le projet de loi relatif à la consommation, ainsi qu’aux collectivités territoriales.

M. le président. La parole est à M. Antoine Herth, pour soutenir l’amendement n365.

M. Antoine Herth. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Philippe Le Ray, pour soutenir l’amendement n1189.

M. Philippe Le Ray. Monsieur le ministre, nous en avons rediscuté avec Antoine Herth, Martial Saddier, Annie Genevard et Dino Cinieri, et je voudrais revenir un instant sur l’alinéa 6 : il s’agit du recul de l’État sur la certification, et je crois que nous pouvons en discuter un peu. Je profite donc de la défense de l’amendement n1189 pour compléter ce qu’a dit Dino Cinieri : il faut absolument renforcer les organismes de gestion contre la contrefaçon.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Hélène Fabre, pour soutenir l’amendement n1677.

Mme Marie-Hélène Fabre. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Tous ces amendements portent sur le droit de timbre. Je l’ai dit en commission, j’y suis favorable sur le principe, mais il s’agit d’un dispositif à expertiser et je crois savoir que le Gouvernement souhaite déposer un amendement, peut-être d’ici à la lecture au Sénat, pour étendre le champ de l’ordonnance et prévoir la création d’un tel dispositif d’identification. M. le ministre va sans doute nous en dire plus.

En l’état actuel, avis défavorable.

M. Philippe Le Ray. Qu’en est-il de la certification ?

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur cet amendement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Nous devons prendre un peu de temps pour traiter de cette question. Nous sommes allés très vite pour parler, par exemple, des questions d’embouteillage – qui peuvent ensuite conduire à de réels embouteillages… Nous devons être clairs sur les objectifs et les défendre tous de la même manière, tout en restant opérationnels. Car, une fois que la loi est votée, il faut qu’elle s’applique, et qu’elle s’applique dans le bon sens, et que nous n’ayons pas en retour des résultats contraires à ceux que nous souhaitions.

Pour l’instant, le travail doit être amélioré, ainsi que cela a évoqué par M. Saddier concernant les questions liées notamment à la défense des appellations et au rôle de l’INAO. Mais l’étape que l’on franchit est importante. Notre objectif est d’inscrire dans la loi ce qui est utile mais de ne pas la surcharger quand ce n’est pas nécessaire. Si nous devons aller plus loin, il faut alors que ce soit dans le sens de l’efficacité et de la défense de notre conception de l’agriculture.

Vous l’aurez compris, je suis défavorable à ces amendements.

M. le président. La parole est à M. Martial Saddier.

M. Martial Saddier. Monsieur le ministre, comme l’a excellemment fait mon collègue Le Ray, je tiens à dire, pour que cela figure au compte rendu de nos débats, que l’amendement n1715 du Gouvernement, qui est passé comme une lettre à la poste, était précisément celui qui posait problème. Il faut impérativement y retravailler d’ici à la deuxième lecture.

M. le président. La parole est à M. Philippe Le Ray.

M. Philippe Le Ray. M. le ministre n’a pas répondu à ma question concernant l’alinéa 6 sur la suppression du dispositif relatif à la certification. Nous avons pourtant eu des retours de terrain qui ne correspondaient pas aux souhaits exprimés.

M. Stéphane Le Foll, ministre. C’est fait ! Nous avons supprimé la suppression !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Germinal Peiro, rapporteur. Nous avons adopté la suppression de la suppression. Pour parler clairement, nous avons maintenu la certification.

(Les amendements identiques nos 260, 365, 1189 et 1677 ne sont pas adoptés.)

(L’article 10 bis, amendé, est adopté.)

Après l’article 10 bis

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 244 et 446.

La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir l’amendement n244.

M. Dino Cinieri. Pour faire suite aux propos de Philippe Le Ray et d’Annie Genevard, je vais parler de l’écotaxe pour les poids lourds.

Cette écotaxe a été suspendue et il semble sous-entendu qu’elle ne sera pas rétablie dans la forme actuelle. Elle visait deux principaux objectifs : favoriser le recours aux modes de transports alternatifs à la route pour le transport de marchandises et financer de nouvelles infrastructures, tout particulièrement en matière de transports ferroviaires. Or les professionnels de la filière élevage et viandes française implantés en zone rurale, comme dans mon département de la Loire, n’ont aucune alternative au réseau routier pour assurer le transport de l’alimentation pour le bétail, ainsi que celui des animaux et de la viande.

Par ailleurs, pour les mêmes raisons liées à leur situation géographique et à la spécificité de leur activité, les professionnels du secteur ne bénéficieront en rien des potentiels investissements réalisés grâce aux recettes de l’écotaxe sur de nouveaux projets d’infrastructures ferroviaires.

Enfin, l’écotaxe poids lourds devrait représenter environ 0,5 % du chiffre d’affaires des entreprises du secteur, alors qu’elles dégagent en moyenne entre 1 et 2 % de leur chiffre d’affaires en résultat net. Cette taxe détériorera donc très lourdement leur niveau de rentabilité, alors que ces entreprises, fortement fragilisées par la crise durable qu’elles traversent, doivent faire l’objet d’un soutien prioritaire de la part des pouvoirs publics.

Le projet de loi se donne pour objectif d’améliorer la compétitivité des filières animales. C’est pourquoi cet amendement propose de permettre aux professionnels de la filière élevage et viandes d’être exonérés de l’écotaxe poids lourds au même titre que les professionnels de la filière lait.

M. le président. La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement n446.

M. Martial Saddier. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Je voudrais rappeler à mes collègues que, suite à la proposition du président Claude Bartolone, une mission d’information sur l’écotaxe poids lourds a été mise en place par la Conférence des présidents et qu’elle a tenu sa première réunion constitutive le 4 décembre 2013. Elle a désigné Jean-Paul Chanteguet, président de la commission du développement durable, et le rapporteur de cette mission d’information. Je vous propose donc d’attendre les résultats de la mission d’information.

Pour le moment, j’émets un avis défavorable à ces amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Même avis que celui de la commission, par respect pour la mission d’information.

(Les amendements identiques nos 244 et 446 ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n12 rectifié.

M. Antoine Herth. Si vous le permettez, monsieur le président, je le défendrai ainsi que les cinq suivants.

M. le président. Monsieur Herth, vous n’êtes pas signataire de l’amendement n12 rectifié. Par conséquent, vous ne pouvez pas le défendre, mais vous pourrez intervenir après qu’il aura été défendu.

La parole est M. Martial Saddier.

M. Martial Saddier. L’amendement est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Antoine Herth.

M. Antoine Herth. Monsieur le président, ce n’est pas vous qui présidiez la séance hier soir, mais nous avons alors pris l’habitude de regrouper les défenses d’amendements pour accélérer les débats. En tant que porte-parole du groupe UMP, j’ai ainsi défendu globalement à chaque fois le « paquet » d’amendements UMP, si j’ose dire, et c’est ce que je m’apprêtais à faire tout à l’heure.

En l’occurrence, il s’agit d’amendements qui, techniquement, n’ont pas leur place ici, dans ce débat, puisque ce sont des sujets qui concernent les lois de finances. Cela étant, ils ont toute leur place dans notre réflexion et doivent s’inscrire dans l’agenda du ministre. Ils proposent d’améliorer le dispositif de la déduction pour aléas, outil important qui existe à côté des systèmes assurantiels au sujet desquels vous avez d’ailleurs annoncé, monsieur le ministre, que vous ferez prochainement des propositions à l’Assemblée.

Cet outil, mes chers collègues, a été imaginé par les fonctionnaires du ministère des finances par parallélisme des formes avec les plans d’épargne logement. Il reprend les mêmes dispositifs en matière de réintégration et de taux d’imposition – lesquels sont extrêmement prohibitifs puisqu’ils dépassent 33 %, en matière de modalités de réintégration, ce qui fait qu’au bout du compte, le produit est rédhibitoire. C’est un véritable repoussoir pour le monde agricole.

Nous savons déjà que les agriculteurs ont eu des difficultés à intégrer le fait, par rapport à la déduction pour investissement, qu’il fallait mettre de l’argent de côté, et donc, qu’il fallait, physiquement, sortir de la trésorerie du flux de l’exploitation agricole et la placer sur un compte bancaire où elle n’était pas utilisée au profit même de la production agricole. C’était une première difficulté, mais toutes les conditions qui ont été rajoutées font qu’en définitive, le produit n’est pas attractif.

Il y a là, monsieur le ministre, un argument supplémentaire en faveur de la sécurisation de l’ensemble de la production agricole. Il serait bon que la prochaine loi de finances améliore les dispositifs. Tel est l’objet des amendements, auxquels s’associent l’ensemble de mes collègues cosignataires, en particulier monsieur Le Ray.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Le Foll, ministre. Tout d’abord, nous avons modifié la DPI et la DPA existantes conformément à ce qui était demandé sans succès depuis longtemps. Nous considérons à juste titre, c’est du moins la position que j’ai toujours défendue, qu’en matière d’épargne et d’amortissement dégressif de l’investissement en matériel il faut tenir compte de l’évolution des choses. Favoriser l’investissement en matériel lorsque la modernisation de l’agriculture en dépendait tombait sous le sens, mais il faut maintenant passer à autre chose. L’esprit et la lettre de la réforme de la DPA visent à favoriser la création d’une épargne contre les aléas. Tel est le principe, qui est bon selon moi.

Une première évaluation est certes nécessaire, mais elle ne pourra être faite qu’au terme de la première année. Il faudra en effet déterminer alors ce qui pourra être encore amélioré. Le fourrage, par exemple, est intégré dans la DPA, en particulier les stocks longs et le fourrage pour l’élevage, qui sont très importants. Il faut mener une évaluation. Il va de soi que tout cela fera l’objet d’une discussion dans le cadre de la prochaine loi de finances.

M. Philippe Le Ray. Les économies d’énergie, par exemple !

M. Stéphane Le Foll, ministre. Avis défavorable aux amendements, bien sûr, car ils n’ont pas leur place dans une loi relative à l’agriculture.

M. le président. La parole est à M. Philippe Le Ray.

M. Philippe Le Ray. Nous retirons l’amendement n12 rectifié.

(L’amendement n12 rectifié est retiré.)

M. le président. Je suis saisi de plusieurs amendements, nos 13 rectifié, 750, 14 rectifié, 748 et 746, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

La parole est à M. Philippe Le Ray, pour les soutenir.

M. Philippe Le Ray. Ils sont également retirés, monsieur le président.

(Les amendements nos 750, 14, 748 et 746 sont retirés.)

M. le président. La parole est à M. Antoine Herth, pour soutenir l’amendement n639 rectifié.

M. Antoine Herth. Défendu.

(L’amendement n639 rectifié, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Le Ray, pour soutenir l’amendement n44, deuxième rectification.

M. Philippe Le Ray. Défendu.

M. le président. La parole est à M. Antoine Herth, pour soutenir l’amendement n366.

(L’amendement n44, deuxième rectification, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. Antoine Herth. Défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Le vin fait évidemment partie du patrimoine culturel et gastronomique. Pour autant, nous ne souhaitons pas l’inscrire dans la loi, contrairement au foie gras obtenu par gavage qui est menacé, ce qui n’est nullement le cas du vin. En outre, de l’inscription du vin dans la loi découlerait celle des fromages et de nombreux autres produits. Voilà ce qui fonde l’avis défavorable de la commission.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Même avis. On ne va pas en faire un fromage ! (Sourires.)

(L’amendement n366 n’est pas adopté.)

Article 11

M. le président. La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement n1395 tendant à la suppression de l’article 11.

M. Martial Saddier. Un débat important a eu lieu en commission à propos de la parité et de la cogestion du plan régional d’agriculture durable. Il s’agissait en particulier de déterminer si l’avis rendu par la région doit être simple ou conforme. Ce dernier suscite nos inquiétudes compte tenu du caractère divers, pluriel et souvent instable des majorités de conseils régionaux. Notre amendement de suppression est un amendement d’appel.

Par ailleurs, nous en avons déposé un autre relatif à la montagne afin que les comités de massif soient saisis pour avis. Une telle proposition, monsieur le président Brottes et madame Massat, semblait consensuelle lors de nos travaux en commission.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. La commission estime que le renforcement de la participation des régions est chose normale. Elle s’oppose donc à la suppression de l’article 11 de la loi. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Même avis.

(L’amendement n1395 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 1343 et 846, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n1343.

M. André Chassaigne. Je présenterai conjointement les amendements no1 343 et 1344, à la demande de Mme Huguette Bello. Il s’agit d’amendements de cohérence visant à prendre en compte la répartition spécifique des compétences entre les collectivités régionale et départementale dans les outre-mer et les prochaines évolutions institutionnelles en Martinique et en Guyane. Ainsi, à la Réunion, la compétence agricole relève du conseil général. L’adoption des amendements n’affecterait pas la portée de l’article pour les régions de France métropolitaine car la nouvelle rédaction placerait la conduite du PRAD sous la responsabilité conjointe de l’État et de la collectivité compétente en matière agricole.

M. le président. La parole est à M. Jean-Philippe Nilor, pour soutenir l’amendement n846.

M. Jean-Philippe Nilor. Il s’agit également de tenir compte des réalités de l’outre-mer. En effet, le conseil régional n’y dispose pas seul de la compétence en matière agricole. C’est même plutôt le conseil général qui souvent y dispose de la compétence la plus large en la matière. À titre d’exemple, le conseil général de Martinique est le premier éleveur de bétail de l’île sur ses terres agricoles, où il conduit des expériences innovantes de transferts génétiques. Il est aussi propriétaire d’un abattoir et gère une usine à sucre, des barrages pour l’irrigation agricole et une usine d’eau potable. Il est également engagé dans un pôle d’excellence rural visant à relancer la filière florale.

Bref, son implication en matière agricole, de la constitution de filières diversifiées à l’innovation agricole, est objectivement plus déterminante que celle du conseil régional, en raison d’une histoire héritée de la colonisation. Ce rôle primordial doit être intégré dans la présente loi, en attendant la réunion en 2015 des deux collectivités en une collectivité unique.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Sur le fond, la commission comprend parfaitement ce que veulent dire nos collègues d’outre-mer à propos des compétences des conseils régional et général dans ces territoires. La commission émet pour l’heure un avis défavorable et propose le retrait des amendements, car le Gouvernement prévoit d’intégrer les dispositions proposées dans le titre consacré à l’outre-mer.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Même avis. Afin de conserver la cohérence de la loi tout en tenant compte des situations particulières outre-mer en matière de répartition des compétences entre département et région, indépendamment des choix spécifiques de mettre en place ou non une collectivité unique, je préfère intégrer les dispositifs proposés à l’article 34, dans la grande partie consacrée à l’outre-mer, en l’occurrence en deuxième lecture pour davantage de clarté. Cela permet de prendre en compte les spécificités tout en conservant la cohérence de la loi. En outre, les ordonnances traiteront la question. Si l’on aborde la région de manière globale en France métropolitaine, les situations outre-mer ne sont pas uniformes. Selon qu’il existe ou non une collectivité unique, il nous faut être à même de nous adapter, comme toujours.

M. le président. La parole est à M. Jean-Philippe Nilor.

M. Jean-Philippe Nilor. Bien entendu, je retire mon amendement. Je me permets tout de même de faire remarquer que, à l’instar peut-être d’autres collègues ultramarins, je dois prendre un avion dans deux heures et je ne peux donc que regretter que l’examen de l’article 34 n’ait pas été avancé.

Qu’il me soit en outre permis de déplorer l’intervention inopportune d’une députée de la Guyane, manifestement offusquée d’un traitement qui serait dérogatoire pour l’outre-mer. Celui-ci fait l’objet des derniers articles de la loi : nous sommes donc de fait traités à part ! Que nous le soyons à la fin du texte, au milieu ou en appendice, je ne vois pas la différence, sinon la possibilité ou non pour nous de participer au débat.

M. Martial Saddier. Il a raison !

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Je suis ce matin le porte-voix de Mme Bello, mais je veux bien retirer l’amendement dans la mesure où la question sera étudiée en deuxième lecture de façon plus réfléchie. J’appelle néanmoins votre attention, monsieur le ministre, sur le caractère très scrupuleux et attentif de Mme Bello, que vous connaissez. Je prends donc sur moi de retirer l’amendement mais ne doutez surtout pas que les choses seront suivies de très près, par Mme Bello et par tous les députés d’outre-mer du groupe que j’ai l’honneur de présider.

M. Stéphane Le Foll, ministre. J’en prends l’engagement, monsieur le président Chassaigne.

M. le président. La parole est à Mme Chantal Berthelot.

Mme Chantal Berthelot. La Guyane compte deux circonscriptions, dont l’une a élu un homme. La députée de Guyane sus-évoquée, c’est donc moi.

Je suis parlementaire comme les 576 autres députés de la République française et lorsque nous étudions un texte, nous le faisons titre par titre et nos travaux et temps de parole sont régis par le règlement intérieur de cette assemblée. Le Parlement peut ainsi débattre pendant dix, quinze ou vingt heures, mais chaque sujet vient en son temps. Aussi, demander le déplacement de la discussion du titre VI relatif à l’outre-mer parce qu’on a un avion à prendre, voilà un argument auquel je ne saurai aucunement souscrire, cher collègue. Je ne crois pas que quiconque siège sur les bancs de cette assemblée, à droite, à gauche comme au centre, a été élu par ses électeurs pour faire déplacer le titre ou l’article qui l’intéresse afin de prendre l’avion pour rentrer chez lui.

En revanche, comme je l’ai dit au porte-parole du groupe SRC, M. Dominique Potier, je souhaite qu’il se trouve dans cet hémicycle davantage qu’un ou deux députés d’outre-mer égarés lors de la discussion du titre VI consacré à l’outre-mer. C’est tout ce que je souhaite, au nom de l’égalité républicaine et de la fonction de parlementaire. Inopportuns ou non, j’assume pleinement mes propos.

M. le président. La parole est à M. Dominique Potier.

M. Dominique Potier. Le député de Meurthe-et-Moselle que je suis assume totalement la décision d’accorder aux départements d’outre-mer une place prioritaire, mais pas trop dans la discussion. Le compromis, forgé par les députés de Meurthe-et-Moselle, est tout à fait louable.

M. Philippe Le Ray. Précaution finalement inutile !

M. le président. La parole est à M. Jean-Philippe Nilor.

M. Jean-Philippe Nilor. Le compromis est bien un pas en avant. Je prends acte de la volonté du Gouvernement, du groupe socialiste mais aussi des élus de droite de tenir compte de la réalité.

M. Philippe Le Ray. Merci !

M. Jean-Philippe Nilor. Je ne pratique nullement l’obstruction, et j’ai été très clair en évoquant une députée de Guyane, ce qui exclut toute mise en cause de mon collègue Gabriel Serville.

(Les amendements nos 1343 et 846 sont retirés.)

M. le président. La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement n1391.

Mme Annie Genevard. Monsieur le ministre, vous avez dit qu’il était cohérent d’associer les régions, et nous ne saurions effectivement vous faire le reproche de manquer de cohérence. En revanche, sur le principe, nous pensons que ce n’est pas une bonne idée – et les agriculteurs ne le pensent pas non plus, car ils tiennent à ce que demeure un cadre national. L’idée d’une cogestion du plan régional de l’agriculture durable n’est pas une bonne idée, d’autant que la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche du 27 juillet 2010 garantissait déjà la prise en compte de la spécificité régionale, en précisant : « un plan régional de l’agriculture durable fixe les grandes orientations de la politique agricole, agro-alimentaire et agro-industrielle de l’État dans la région en tenant compte des spécificités des territoires (… ) ». Cette rédaction parfaitement équilibrée permettait à l’État de conserver toutes ses prérogatives.

Nous proposons donc, avec notre amendement n°1391, d’insérer à la fin de l’alinéa 5 de l’article 11, après le mot : « État », les mots : « , après avis exprimé par les conseils régionaux ».

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. La commission a largement débattu de cette question et émis un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Même avis. Vous ne pouvez faire abstraction de la décentralisation, madame Genevard : les collectivités territoriales, notamment les régions, sont amenées à prendre des responsabilités. Il me semble qu’une confiance mutuelle peut et doit prévaloir. Le comité État-région intervient au niveau national, avant que la région et l’État ne participent conjointement à la mise en œuvre de décisions prises de manière cohérente.

Je vous rappelle que nous allons avoir au mois de juin prochain un rendez-vous avec les régions – le Printemps des territoires et des régions – afin de caler le dispositif. La décentralisation existe, et nous devons l’assumer !

(L’amendement n1391 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 1344 et 847, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n1344.

M. André Chassaigne. Défendu, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Jean-Philippe Nilor, pour soutenir l’amendement n847.

M. Jean-Philippe Nilor. Défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Nous avons souhaité que ces amendements soient retirés, monsieur le président.

M. André Chassaigne. Ils sont en effet retirés, en cohérence avec ce qui a été dit précédemment.

(Les amendements nos 1344 et 847 sont retirés.)

M. le président. La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement n921.

M. Martial Saddier. L’amendement n921 est très important, et me donne l’occasion de vous dire que nous ne manquons pas de confiance, et ne refusons pas d’associer les régions, monsieur le ministre : nous sommes évidemment favorables à ce que les régions assument toutes les responsabilités qui leur incombent. Mais dans une coconstruction ou interviennent deux entités, il ne faut pas que l’une des deux ait un avis supérieur à l’autre – si tel est le cas, nous ne sommes plus en présence d’une coconstruction.

Ce qui nous inquiète, c’est le fait que l’article 11 renforce l’échelon régional en prévoyant que lui soit soumis le plan régional d’agriculture durable lors de son élaboration puis lors de son approbation. Comme nous l’avons dit en commission, au sein des régions administratives telles qu’elles sont actuellement dessinées, l’agriculture de montagne pèse bien peu au regard de la totalité de la profession agricole régionale.

En outre, la politique agricole de montagne est bien souvent une politique interrégionale. Ainsi, dans les Alpes, le comité de massif interrégional regroupe deux régions. Nous avons donc suggéré collectivement en commission, avec M. Brottes et Mme Massat, dans l’esprit de ce que Mme Genevard a exposé précédemment, que les comités de massif soient saisis pour avis au sujet du plan régional d’agriculture durable. Tel est l’objet de notre amendement n921, qu’il nous paraît indispensable d’adopter.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. La commission a parfaitement entendu la préoccupation de M. Saddier. La consultation des commissions ou des comités de massif au moment de la préparation du PRAD apparaît effectivement importante dans les zones de montagne.

Je vous invite cependant à retirer votre amendement, monsieur Saddier, en vous indiquant que celui-ci sera satisfait dans quelques instants par un amendement de Mme Massat – avec qui vous avez, je le sais, réalisé un travail en commun –, proposant la consultation des comités de massif, ce qui me semble répondre parfaitement à votre préoccupation.

Mme Frédérique Massat. Un petit geste, monsieur Saddier !

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Qui refuserait d’être satisfait par Mme Massat ? (Sourires.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur cet amendement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Même avis que le rapporteur. Mme Massat présidant l’association des élus de montagne, il me semble qu’elle bénéficie à ce titre d’une sorte de prééminence. Je vous invite donc également, monsieur Saddier, à retirer votre amendement pour vous rallier à celui de Mme Massat.

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Chacun son tour, monsieur Saddier !

M. le président. La parole est à M. Martial Saddier.

M. Martial Saddier. Nous avons déjà débattu de cette question en commission, et l’idée d’être satisfait par Mme Massat n’est évidemment pas pour me déplaire ! (Sourires.) La tradition démocratique veut que, pour la période 2012-2017, les amendements « montagne » soient portés par notre collègue, en sa qualité de présidente de l’association des élus de montagne. Je m’incline donc bien volontiers et retire mon amendement – je suis patient, et nous verrons bien ce que nous réservera l’avenir !

(L’amendement n921 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Le Ray, pour soutenir l’amendement n1169.

M. Philippe Le Ray. L’amendement n1169, que j’ai déposé conjointement avec mes collègues Le Fur, Le Callennec et Lurton, porte sur les alinéas 6 et 7 de l’article 11. Comme cela a déjà été dit, nous ne sommes pas contre le fait que la région donne son avis au sujet du plan régional d’agriculture durable – comme cela a été le cas en Bretagne. En revanche, prévoir que le PRAD soit soumis à l’approbation du conseil régional ne nous paraît pas souhaitable, pour plusieurs raisons.

Ainsi, nous sommes en désaccord avec les orientations exposées par la majorité actuelle au sujet du PRAD breton. Mais il est un autre point qui nous gêne encore davantage, et je profite de mon intervention pour interroger M. le ministre à ce sujet : il s’agit de la participation du public dans le cadre des PRAD, prévue à l’article 39. Pouvez-vous nous dire jusqu’où vous voulez aller sur ce point, monsieur le ministre ?

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Même avis.

M. le président. La parole est à Mme Annie Genevard.

Mme Annie Genevard. Monsieur le ministre, j’ai été conseillère régionale et membre de la commission régionale d’installation pendant huit ans. Durant cette période, j’ai eu l’occasion de prendre connaissance de toutes les propositions de reprise d’exploitations agricoles par des jeunes, et vu évoluer la politique régionale à ce sujet. Au début, le Programme régional à l’installation – le PRI, au sein duquel je siégeais – soutenait massivement les dossiers « classiques » correspondant à la reprise de fermes d’élevage, nombreuses dans notre région.

Cependant, sous l’influence des conseillers régionaux écolos, on a progressivement vu monter en puissance la place prise par des projets de diversification plus modestes. Si ces projets ont, eux aussi, tout à fait voix au chapitre, force est de constater qu’au bout de huit ans, dans la région de Franche-Comté, on ne jurait plus que par ces dossiers, le « must », c’est-à-dire le dossier ayant le plus de chances d’être soutenu, étant celui d’une installation en zone périurbaine, fondé sur un projet de culture de plantes médicinales. Certes, l’agriculture périurbaine mérite d’être soutenue – je préférerais d’ailleurs que l’on parle de territoires périruraux plutôt que de territoires périurbains –, mais il me semble dommage que la région se soit progressivement laissée gagner par des considérations plus écologiques qu’économiques – on en revient au débat du GIEE.

Subordonner la politique agricole à l’approbation des régions me paraît discutable, en ce que cela prive l’État de faire valoir ses propres orientations, qui se trouvent subordonnées à l’approbation d’une région pouvant avoir une sensibilité différente de celle de l’État. Il ne me semble pas normal de voir l’État abandonner une prérogative majeure touchant à l’aménagement de l’espace agricole. Je n’irai pas jusqu’à dire que vous faites entrer le loup dans la bergerie, car les régions sont responsables (Exclamations sur plusieurs bancs), mais vous privez l’État d’une prérogative majeure – ce qui n’est évidemment pas le rôle du Gouvernement.

(L’amendement n1169 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Le Foll, ministre. La politique de l’installation reste une politique nationale. La preuve, c’est que nous avons longuement discuté ici même d’amendements sur l’installation. La décentralisation du deuxième pilier correspond simplement à la mise en œuvre d’un engagement. Pour ce qui est de savoir à qui doit revenir le pilotage – l’État, les régions, les chambres d’agriculture –, je rappelle qu’il existe des syndicats composés de jeunes agriculteurs extrêmement vigilants, et que la question est donc régulièrement débattue.

Je le répète, il existe une politique d’installation nationale mise en œuvre par un comité État-région – la réforme de la PAC a même permis des choix à l’échelle européenne –, qui va de pair avec un pilotage région-État au niveau régional.

M. Martial Saddier. Ce n’est pas un copilotage, puisqu’il est prévu un avis conforme !

M. Stéphane Le Foll, ministre. Si vous dites que, sur un plan régional, la région ne peut même pas donner un avis conforme, c’est qu’il y a un vrai problème de décentralisation !

Mme Annie Genevard. Les régions font ce qu’elles veulent !

M. Stéphane Le Foll, ministre. Non, les régions ne font pas ce qu’elles veulent : il y a des élections, et des débats entre les conseillers régionaux ! Pour ma part, je suis confiant.

M. Martial Saddier. Les Français ne le sont pas !

M. le président. La parole est à M. Philippe Le Ray.

M. Philippe Le Ray. Je comprends bien ce que dit M. le ministre, mais que va-t-il se passer dans les régions ne disposant que d’une majorité relativement fragile ? Si les choix de la région sont complètement opposés aux choix nationaux en matière agricole, on va parvenir à une situation de quasi-blocage. Ainsi, on mettra en œuvre une certaine politique à l’ouest, et une autre à l’est. En ce qui concerne les installations dites progressives, on pourra même voir arriver un schéma susceptible de fragiliser certaines régions sur le plan agricole. Dans ces conditions, où est la cohérence nationale, où est l’équité entre les agriculteurs au niveau national ?

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Germinal Peiro, rapporteur. Monsieur Le Ray, je ne vais pas vous répéter ce qu’a déjà dit le ministre…

M. Stéphane Le Foll, ministre. Ce qu’a très bien dit le ministre ! (Sourires.)

M. Germinal Peiro, rapporteur. …ce qu’a excellemment dit le ministre, voulais-je dire. Il me paraît malvenu de faire des procès d’intention à nos collègues élus des conseils régionaux. J’ai bien entendu ce qu’a dit Mme Genevard, mais ce n’est pas parce qu’on a eu une expérience malheureuse en tant qu’élu d’une collectivité territoriale, ou parce que les choses ne se sont pas passées comme on l’aurait voulu, qu’il faut en tirer des conclusions hâtives. Je ne vois pas comment un plan régional d’agriculture durable pourrait se faire sans que les représentants du territoire concerné donnent leur avis.

Le fait qu’il soit prévu un avis conforme ne doit pas nous gêner. La politique nationale sera toujours définie par le Gouvernement – en l’occurrence, par le ministre de l’agriculture. Sur ce point, rien ne change.

M. Martial Saddier. Nous en reparlerons ! Rendez-vous est pris, monsieur le rapporteur !

M. Germinal Peiro, rapporteur. Je crois que nous devons faire confiance à nos élus, dans l’esprit des lois de décentralisation de François Mitterrand et de Gaston Defferre. Il n’y a pas d’abandon par l’État de ses prérogatives : le préfet de région va exercer son rôle en rappelant la position de l’État, avec l’accord des élus régionaux.

M. le président. La parole est à M. Philippe Le Ray.

M. Philippe Le Ray. Je me vois à nouveau dans l’obligation de réagir pour appeler l’attention de mes collègues. Concernant la politique des régions, je constate que les élus de ma région ont fait un certain nombre de choix lors des assises de l’agriculture. Or, contrairement à ce qu’on a pu dire, ces choix ne sont pas du tout conformes aux intérêts des agriculteurs.

La définition même de la notion d’installation progressive, qui est très large, posera également problème – nous aurons l’occasion d’y revenir. Elle créera des disparités à l’échelle nationale, donc une iniquité que nous ne pouvons pas cautionner.

S’agissant du portage du foncier, la situation sera problématique dans la mesure où certaines régions décideront de porter du foncier – nous verrons d’ailleurs ce qui se passera alors entre les SAFER, les sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural, et les EPFR, les établissements publics fonciers régionaux – tandis que d’autres ne le feront pas. Ce qui pose problème, c’est donc l’absence de cohérence nationale.

M. le président. Nous en venons à l’amendement n1392. La parole est à Mme Annie Genevard, pour le soutenir.

Mme Annie Genevard. Il est défendu.

(L’amendement n1392, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 1345 et 848, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n1345.

M. André Chassaigne. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Jean-Philippe Nilor, pour soutenir l’amendement n848.

M. Jean-Philippe Nilor. En cohérence avec ce qui a été dit tout à l’heure, je retire cet amendement ainsi que les suivants nos 849 et 850, dont le contenu figure déjà dans l’article qui concerne spécifiquement les outre-mer.

(Lamendement n848 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. À l’instar de mon collègue et pour le même motif, je retire l’amendement n1345 ainsi que le suivant, n°1346.

(Lamendement n1345 est retiré.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 976 et 101, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir l’amendement n976.

M. Dino Cinieri. L’obligation d’approbation du PRAD par le conseil régional ne semble pas justifiée, puisque ce dernier est déjà coordinateur de son élaboration, et ne peut donc être à la fois juge et partie. Il est nécessaire pour la profession de maintenir une unité et une continuité des orientations du PRAD pour une meilleure visibilité.

M. le président. La parole est à M. Antoine Herth, pour soutenir l’amendement n101.

M. Antoine Herth. Je retire l’amendement n101, redondant avec celui que vient de défendre mon collègue, pour mieux défendre l’amendement suivant n102, monsieur le président.

(L’amendement n101 est retiré.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n°976 ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Nous avons déjà eu ce débat. L’avis de la commission est défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Défavorable.

(L’amendement n976 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Antoine Herth, pour soutenir l’amendement n102.

M. Antoine Herth. Avec le présent amendement, monsieur le ministre, je vous propose de soumettre le plan à l’avis simple des conseils régionaux. Cette disposition de prudence permettra dans un premier temps d’observer les relations au sein d’un système aujourd’hui essentiellement piloté par les services de l’État et auquel vous souhaitez donner un plus fort ancrage régional.

Ma collègue Mme Genevard évoquait tout à l’heure le conseil régional où elle a longtemps siégé. Je souhaite à mon tour vous faire part de mon expérience au sein du conseil régional d’Alsace, où je suis en charge des transports, monsieur le ministre.

M. Stéphane Le Foll, ministre. Vous faites un excellent travail !

M. Antoine Herth. Alors que l’État tente, avec difficulté, de définir avec les régions le volet mobilité du futur contrat de plan État-régions de nombreuses régions de gauche refusent de discuter avec lui, rejetant par principe l’introduction d’une partie relative aux routes dans le volet mobilité, au motif que les routes ne sont pas une bonne chose. La région Alsace s’est quant à elle rangée à l’avis du Gouvernement et des services de l’État ; les routes ont bien été intégrées au volet mobilité et l’affaire est d’ores est déjà réglée.

Comme vous pouvez le constater, ce n’est pas un problème de couleur politique. Les conseillers régionaux discutent, ils sont élus pour cela, et défendent parfois des positions de principe qui, sur certains sujets, peuvent s’avérer incompatibles avec l’orientation nationale. Le fait de soumettre le plan à un avis conforme pourra créer des situations de blocage dans un certain nombre de régions et cela se fera finalement au détriment du monde agricole, car les dispositions ne pourront pas s’appliquer tant que le blocage ne sera pas levé.

Par conséquent, je propose d’adopter une mesure de bon sens et de commencer par engager la discussion avec un avis simple de la région. Si par la suite votre gouvernement ou un autre souhaite renforcer le dispositif, on pourra toujours revenir à un avis conforme.

M. Philippe Le Ray. Très bien !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. La question a été largement débattue. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Défavorable.

(L’amendement n102 n’est pas adopté.)

M. le président. Les amendements nos 1346 et 849 ont été retirés

Je suis saisi de plusieurs amendements identiques.

La parole est à Mme Frédérique Massat, pour soutenir l’amendement n724.

Mme Frédérique Massat. Nous avons abordé cette question lors de la discussion de l’amendement n921 de M. Saddier, que ce dernier a accepté de retirer. À ce titre, je lui proposerai d’être cosignataire du présent amendement.

M. Germinal Peiro, rapporteur. Voilà un beau geste !

M. Jean-Yves Caullet, rapporteur pour avis. Tout le monde se retrouve au sommet ! Bravo !

Mme Frédérique Massat. Cet amendement permet en effet d’aller dans le même sens que le sien. Toutefois, avant d’expliquer pourquoi j’ai placé dans le mien une exigence supplémentaire quant à l’avis du comité de massif, je tiens à remercier M. le ministre d’avoir accepté d’associer les élus de la montagne à l’élaboration des ordonnances prévues à l’article 10 par l’intermédiaire non seulement du Conseil national de la montagne mais aussi de l’Association nationale des élus de la montagne, l’ANEM.

J’en viens au contenu de l’amendement n724. La législation prévoit la possibilité pour la commission permanente des comités de massif de se saisir des PRAD et d’émettre un avis à leur sujet. Avec cet amendement, nous souhaitons aller plus loin et rendre la saisine du comité de massif obligatoire afin que ce dernier donne son avis sur le plan régional.

M. le président. La parole est à Mme Pascale Got, pour soutenir l’amendement n988 rectifié.

Mme Pascale Got. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Favorable.

M. le président. La parole est à M. Martial Saddier.

M. Martial Saddier. Je tiens à remercier Mme Massat de sa proposition : j’accepte bien volontiers de cosigner cet amendement. Par ce geste, elle prouve que sa réputation d’excellente présidente de l’ANEM n’est pas usurpée. (« Oh ! » sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

M. Stéphane Le Foll, ministre. Le président de la commission n’est pas d’accord !

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques.

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Sans vouloir m’interposer au sein du couple infernal que forment Mme Massat et M. Saddier – ne voyez là aucune jalousie de ma part… même s’il y en a tout de même un peu (Sourires) –, je souhaite appeler l’attention des auteurs des amendements sur deux éléments – il n’y a rien de grave, puisqu’il s’agit de la première lecture de ce texte.

Premièrement, vous utilisez les termes : « le cas échéant ».

Mme Frédérique Massat. Oui, car cela ne vaut que s’il y a des comités de massifs : il n’y en a pas dans toutes les régions !

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Je suis gêné par cette formulation, qui prête à confusion : il ne faut pas laisser entendre que cette consultation se ferait selon le bon vouloir du conseil régional. Je vous propose donc de rectifier l’amendement en supprimant les termes « le cas échéant », car s’il n’y a pas de comité de massif, la question ne se pose pas ; c’est une évidence.

Par ailleurs, d’ici à la deuxième lecture, je pense qu’il faudra préciser les délais dans lesquels cette saisine devra être organisée. Mais c’est un autre sujet.

Madame Massat, je ne voulais pas vous contrarier…

Mme Frédérique Massat. Un peu, quand même ! (Sourires.)

M. le président. Madame Massat, acceptez-vous cette rectification ?

Mme Frédérique Massat. J’accepte bien entendu que mon amendement soit rectifié, si c’est prévu ainsi dans la procédure. Nous en améliorerons ensuite la rédaction en deuxième lecture,… le cas échéant. (Sourires.)

M. le président. En effet, un amendement ne peut être sous-amendé en séance, mais il peut être rectifié par son auteur.

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Je travaille dans l’anonymat !

M. Martial Saddier. Vous n’avez plus besoin de prouver quoi que ce soit, monsieur Brottes ! Ce n’est pas comme nous !

M. le président. L’ensemble de cette discussion sera néanmoins publié au Journal officiel, rassurez-vous, monsieur le président de la commission.

L’amendement n724 est donc ainsi rectifié : supprimer les mots « , le cas échéant, ». 

(Les amendements identiques nos 724 et 988 rectifié, tels qu’ils viennent d’être rectifiés, sont adoptés.)

M. le président. L’amendement n850 a été retiré.

(L’article 11, amendé, est adopté.)

Article 11 bis

(L’article 11 bis est adopté.)

Article 12

M. le président. La parole est à Mme Annie Genevard, sur l’article.

Mme Annie Genevard. Monsieur le ministre, dans votre projet de loi, on passe de la notion de « commission départementale de consommation des espaces agricoles » à celle de « commission départementale de préservation des espaces naturels ». Passer de la consommation à la préservation me paraît être une évolution tout à fait intéressante. L’application de cette disposition suscite néanmoins un certain nombre de questions.

M. Stéphane Le Foll, ministre. Pourquoi ?

Mme Annie Genevard. Parce qu’il est difficile de concilier la légitime préservation des espaces agricoles, à laquelle nous sommes évidemment tous attachés, et le développement local ; nous sommes d’ailleurs un certain nombre à rencontrer cette difficulté. Car il faut aussi promouvoir le développement rural : il faut des petites villes dynamiques pour structurer l’espace rural. On est finalement en permanence déchiré par cette double nécessité de préserver et de développer.

M. Germinal Peiro, rapporteur. Absolument !

Mme Annie Genevard. Je voudrais appeler votre attention sur les parcs naturels régionaux, les PNR, monsieur le ministre. Ils ont été créés à l’origine pour dynamiser les territoires qui étaient en déprise.

Mme Delphine Batho. Par le général de Gaulle !

Mme Annie Genevard. Il faudrait aujourd’hui faire évoluer les critères de labellisation des PNR dans un sens inverse : le PNR doit pouvoir devenir un outil permettant précisément de concilier la préservation de la dimension agricole des territoires et le développement de ces derniers.

Mme Delphine Batho. Mais c’est le cas !

Mme Annie Genevard. En d’autres termes, il faut faire en sorte que le PNR devienne un outil de maîtrise de l’aménagement de l’espace rural.

M. le président. La parole est à M. Dominique Potier.

M. Dominique Potier. Mon intervention sera l’occasion de répondre à Mme Genevard. Les dispositions du texte respectent totalement l’esprit de la loi SRU, du Grenelle de l’environnement et des schémas de cohérence territoriaux. Le groupe SRC pense qu’avec ce texte nous atteignons un point d’équilibre. On peut faire du développement sans consommer de l’espace de façon inconsidérée. Il est de notre devoir à tous d’aboutir à la division par deux de la consommation des terres agricoles à l’échelle nationale. Pour parvenir à ce résultat, nous devons agir autrement, et cela renvoie à d’autres textes de loi, à d’autres questions d’urbanisme sur lesquels nous pourrons reprendre cette discussion au cours de la législature.

Je souhaite par ailleurs appeler l’attention du ministre sur deux propositions que nous souhaitons voir prises en compte comme des jalons, car elles n’ont pu être formulées dans le cadre d’amendements à ce stade de la discussion.

J’aborderai en premier lieu la question de la compensation en cas d’infrastructure. Traditionnellement, des espaces naturels « artificiellement reconstitués » sont créés pour compenser les dégâts causés sur la biodiversité ou l’espace naturel par une infrastructure horizontale, linéaire ou autre. Le monde agricole a parfois à juste titre le sentiment de subir une double peine en termes de consommation d’espaces. Or des pratiques agricoles de production conformes à l’approche agro-écologique que nous partageons peuvent apporter les mêmes aménités environnementales tout en demeurant des pratiques productives.

Nous aimerions que les CDCEA, dans la nouvelle version dont vous faites la promotion, soient force de proposition pour avancer des solutions alternatives plus cohérentes avec les impératifs de production, permettant ainsi que l’on fasse de l’écologie tout en produisant, ce qui correspond à l’esprit du texte.

Cela étant dit, nous comprenons qu’une telle démarche nécessite l’avis d’autres ministères, que ces sujets méritent d’être bien délimités et étudiés. Nous accueillerons avec gratitude toute proposition que vous ferez pour mettre ces sujets à l’étude.

Le second problème sur lequel l’ensemble de la profession nous a interpellés est celui de la compensation économique. Nous savons que depuis de nombreuses années le propriétaire et l’exploitant sont indemnisés lorsque la présence d’une infrastructure a un impact sur l’environnement. Cependant, la filière, la profession, l’économie agricoles du territoire le sont peu. Nous aimons l’idée que cette perte de valeur ajoutée, qui se traduit en montant de cotisations sociales, en nombre de bêtes abattues dans tel abattoir ou de quintaux transportés dans tel silo, puisse être compensée par des mesures qui requalifient l’économie agricole et lui redonne de la valeur ajoutée et de la densité.

Monsieur le ministre, nous serions heureux que, sur ces deux sujets, le présent projet de loi pose des jalons qui leur permettent de trouver un jour un véhicule législatif approprié.

M. le président. La parole est à Mme Valérie Pécresse.

Mme Valérie Pécresse. Depuis dix-huit mois, le Gouvernement a pris des mesures – je pense notamment à la suppression de la TVA compétitivité, que j’avais fait adopter en janvier 2012 – qui ont handicapé la compétitivité d’un certain nombre d’exploitations agricoles.

M. Stéphane Le Foll, ministre. Ah bon ?

Mme Valérie Pécresse. Je ne parlerai pas ici des dispositions budgétaires que vous avez prises qui ont, elles aussi, réduit les financements de nos exploitations, en particulier les aides à l’installation et à la modernisation, dont il a été longuement question dans cet hémicycle.

La déception du monde agricole est immense. L’ensemble des acteurs attendait des mesures concrètes permettant de répondre aux défis auxquels notre agriculture est confrontée, de la moderniser et de renforcer la compétitivité de toutes les filières. Or votre loi va faire peser de nouvelles contraintes sur les exploitations et sur le quotidien des agriculteurs. Le moins que l’on puisse dire est que ce n’était pas exactement ce qu’ils attendaient !

Vous savez que, pour nous, élus franciliens, la préservation des terres agricoles et le développement d’une véritable agriculture périurbaine sont des enjeux majeurs – ils existent d’ailleurs dans toute une série de régions métropolitaines. C’est pourquoi nous avions proposé, avec plusieurs collègues, la création d’un fonds de compensation abondé par une taxe s’élevant à 1 % du prix d’acquisition de terrains nus rendus constructibles.

M. Jean-Yves Caullet, rapporteur pour avis. L’UMP propose de créer des taxes ! Sarkozy, reviens !

Mme Valérie Pécresse. Il s’agissait de permettre à l’agriculture de retrouver, sous une autre forme, la valeur ajoutée qui lui est retirée du fait des emprises subies. Cela aurait permis, par exemple, d’aider à la création de nouvelles filières, de prendre des participations dans des entreprises de transformation, de mettre en place de nouveaux modes de commercialisation, ou encore d’encourager l’utilisation de la biomasse et la création de filières de biomatériaux. Malheureusement, comme vous le savez, nos amendements ont été déclarés irrecevables en vertu de l’article 40 de la Constitution.

M. Stéphane Le Foll, ministre. Eh oui !

Mme Valérie Pécresse. Je le regrette car, du coup, votre projet de loi ne propose aucun mécanisme innovant visant à valoriser les activités agricoles de ce type. Il ne renforce aucun des moyens d’intervention des sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural, les SAFER.

Je ne vous donnerai qu’un seul chiffre, que vous connaissez d’ailleurs sans doute : dans la seule région Île-de-France, ce sont 1 500 hectares de terres agricoles qui disparaissent chaque année du fait de l’urbanisation ou, plus généralement, de l’artificialisation des sols.

Monsieur le ministre, comptez-vous prendre en compte cette réalité ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Oui !

Mme Valérie Pécresse. Qu’allez-vous faire ? Vous, vous n’êtes pas tenu par les règles de l’article 40. Je vous invite donc à vous saisir de ce sujet majeur pour l’avenir de notre agriculture ; reprenez nos amendements. Nos agriculteurs attendent des mesures courageuses pour contrôler l’étalement urbain et maintenir une agriculture forte et compétitive à proximité des métropoles. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Je ne dirai que quelques mots, avec l’objectif de gagner du temps par la suite lors de l’examen des amendements.

On sait bien que la question du foncier est récurrente. Je puis en témoigner, comme d’autres ici : depuis que j’ai été élu député en 2002, nous avons participé à de multiples discussions sur la question foncière, avec le problème de l’expansion urbaine et de l’artificialisation des sols. Année après année, on avance des chiffres. Tous les sept ans, on perd, en terres agricoles, l’équivalent d’un département. Selon les chiffres, entre 50 000 hectares et 70 000 hectares sont artificialisés chaque année. En vingt ans, les terres artificialisées ont connu une augmentation de 43 % environ.

Bref, il y a un réel problème, auquel chaque nouvelle loi sur l’agriculture qui arrive devant l’Assemblée – du fait d’une majorité ou d’une autre, il faut le dire – a essayé d’apporter des solutions. Ainsi, on a créé l’Observatoire national de la consommation des espaces agricoles, destiné à élaborer des outils de mesure du changement de destination des espaces agricoles ; les commissions départementales de la consommation des espaces agricoles qui donnent leur avis sur les projets de SCOT et de PLU. Il existe aussi des instruments tels que les zones agricoles protégées, les ZAP, et les périmètres de protection et de mise en valeur des espaces agricoles et naturels périurbains, les PAEN. Bref, nous avons élaboré un certain nombre de dispositifs. Le présent texte de loi permet d’avancer encore un peu vers la résolution de ce problème ; il n’est en aucun cas parfait, mais force est de constater que le problème est très compliqué.

Tout à l’heure, en écoutant nos collègues de l’Association nationale des élus de la montagne,…

M. Martial Saddier. Excellente association ! (Sourires.)

M. André Chassaigne. …qui se congratulaient, j’ai pensé, en pensant à cette question foncière, il m’est revenu à l’esprit une citation – ce sera peut-être la seule de la journée. Après avoir cité hier René Char, je voudrais évoquer aujourd’hui Nelson Mandela.

Mme Valérie Pécresse. Ce n’était pas un élu de la montagne !

M. André Chassaigne. Celui-ci avait une très belle formule : « J’ai découvert ce secret : après avoir gravi une colline, tout ce que l’on découvre, c’est qu’il reste beaucoup d’autres collines à gravir. » Eh bien, sur la question foncière, nous avons là une avancée, même si elle est petite – à travers des amendements, nous allons d’ailleurs essayer d’aller un peu plus loin. Cependant, ce n’est pas un problème que l’on peut résoudre à travers un simple projet de loi.

M. Stéphane Le Foll, ministre. Quelle sagesse !

M. le président. Sur l’article 12, je suis saisi de plusieurs amendements.

Nous commençons par quatre amendements, nos 979, 1487, 592 et 591, pouvant être soumis à une discussion commune.

Les amendements nos 979 et 1487 sont identiques.

La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir l’amendement n979.

M. Dino Cinieri. L’observatoire national de la consommation des espaces agricoles n’a pas vocation à mesurer le changement de destination des espaces naturels et forestiers, lesquels font l’objet de mesures d’observation et de protection spécifiques. Cet élargissement risque de diluer la problématique des espaces agricoles dans celle de l’ensemble des espaces dits ouverts. Par ailleurs, la nécessité de freiner le grignotage du foncier est bien moindre pour ces espaces…

Mme Delphine Batho. Ce n’est pas vrai !

M. Dino Cinieri. …et sans aucune mesure par rapport aux espaces agricoles, dont l’érosion des surfaces est alarmante et nécessite un suivi spécifique.

M. le président. La parole est à Mme Valérie Pécresse, pour soutenir l’amendement n1487.

Mme Valérie Pécresse. Cet amendement est identique au précédent, mais je souhaite en préciser davantage l’objet.

En étendant le périmètre d’étude de l’Observatoire à tous les espaces naturels et forestiers, il est évident que l’on en dilue aussi sa capacité à remplir cette mission. Ce faisant, on le rend moins efficace.

En tant que vice-présidente d’un parc naturel régional, je suis bien placée pour savoir que les massifs forestiers n’ont rien à voir avec des terrains agricoles exploités – qu’il s’agisse d’ailleurs de grandes cultures ou de cultures maraîchères. En réalité, il faut prendre en compte la problématique spécifique des terres agricoles et non la diluer en l’intégrant à l’ensemble des espaces naturels, au risque de ne pas préserver l’activité agricole dans les zones périurbaines.

M. le président. La parole est à M. Antoine Herth, pour soutenir l’amendement n592.

M. Antoine Herth. Il est défendu, de même que l’amendement n591.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur ces amendements qui visent en réalité à limiter la compétence de l’Observatoire.

Comment préserver les espaces agricoles sans tenir compte des espaces qui sont autour ?

Mme Valérie Pécresse. Mais ils ne sont pas autour !

M. Germinal Peiro, rapporteur. Cette idée est assez curieuse, et cela d’autant plus, madame Pécresse que, comme vous le savez certainement, il existe des interactions, non seulement entre le développement urbain, les espaces périurbains et les espaces agricoles, mais aussi entre les espaces forestiers et les espaces agricoles.

Mme Valérie Pécresse. Pas nécessairement !

M. Germinal Peiro, rapporteur. Je vous rappelle, mes chers collègues, que la surface forestière a doublés en un siècle et triplé en 150 ans. Le fait d’observer l’ensemble de ces espaces va renforcer la connaissance que l’on aura des espaces agricoles.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Même avis que le rapporteur. J’ai d’ailleurs du mal à comprendre ce qui justifierait que l’on sépare la question des espaces naturels et celle des espaces agricoles, à moins que l’on ne considère que les commissions départementales devraient s’intéresser soit aux espaces naturels soit à l’agriculture.

Pour l’élue d’une région comme la vôtre, madame Pécresse, la question est en fait de savoir comment on résiste au grignotage systématique de l’espace naturel et agricole par les infrastructures et l’urbanisation, laquelle comprend d’ailleurs, non seulement le logement, mais aussi – et nous avons, de ce point de vue, des efforts à faire – tout ce qui est lié aux zones commerciales. En France, on a gaspillé l’espace parce que l’on a considéré qu’il y en avait suffisamment. Je n’arrête pas de répéter, par exemple, que, dans d’autres pays, on ne trouve pas un seul parking construit horizontalement ; ils sont tous verticaux. Il est temps que nous réfléchissions à cette question.

J’ajouterai, madame Pécresse, que la France va connaître une évolution démographique importante, puisque nous allons gagner 10 millions d’habitants. En l’espace de dix ou quinze ans, notre population va s’accroître, sur l’ensemble de notre territoire, de l’équivalent de la région parisienne. C’est un atout et une force, mais je peux vous dire que cela va poser un problème si nous continuons à gérer notre urbanisation comme par le passé, c’est-à-dire en gaspillant de l’espace. Il nous faut, par exemple, repenser la question de l’accession à la propriété. On constate en effet, si l’on met de côté la région parisienne – et encore –, que les lotissements et les zones périurbaines se sont développés partout, alors qu’ils sont extrêmement consommateurs d’espace. Le plus gênant pour l’agriculture est d’ailleurs que ces zones se développent de préférence là où les terres sont les meilleures.

M. Jean-Yves Caullet, rapporteur pour avis. Eh oui !

M. Stéphane Le Foll, ministre. Cela pose un vrai problème de rentabilité et de productivité de l’agriculture. C’est particulièrement vrai en Île-de-France : les terres situées autour de la région sont, pour la plupart, d’excellente qualité.

Ne cherchez donc surtout pas à opposer les espaces naturels et l’agriculture, sinon vous allez faire croire qu’il faut faire un choix entre les deux, alors que le débat fondamental pour l’avenir de l’agriculture tourne autour de l’urbanisation et de l’artificialisation. Je vous le dis franchement : si vous voulez rester sur votre position, c’est bien entendu votre droit – il y aura d’ailleurs un vote sur ces amendements –, mais c’est une erreur stratégique fondamentale que je vous invite à ne pas commettre. Si je devais vous donner un conseil, ce serait celui de rejoindre notre position.

M. Germinal Peiro, rapporteur et M. Jean-Yves Caullet, rapporteur pour avis. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Valérie Pécresse.

Mme Valérie Pécresse. Monsieur le ministre, je vous remercie de m’avoir expliqué à quoi ressemble l’Île-de-France. C’était très utile !

M. Germinal Peiro, rapporteur. Ne vous fâchez pas, madame Pécresse !

M. Stéphane Le Foll, ministre. C’est parce que je connais bien la région !

Mme Valérie Pécresse. En réalité, vous ne savez sans doute pas que, à chaque fois qu’il s’agit de préserver des terres agricoles en Île-de-France, se révèle la tentation, pour les services de l’État et certaines collectivités, pour faire bonne mesure, d’ajouter à ces terres agricoles un certain nombre d’espaces que l’on qualifie de « verts » ou de « forestiers ». Du coup, au lieu de préserver les exploitations agricoles et donc la vitalité et la compétitivité de notre agriculture, on crée un territoire composé d’espaces mixtes qui compensent artificiellement la perte d’activité agricole. Voilà ce que je veux que l’on évite.

Il ne s’agit évidemment pas de travailler à la disparition des espaces verts en Île-de-France. Comme je vous l’ai dit, je suis vice-présidente d’un parc naturel – le plus ancien des parcs naturels régionaux d’Île-de-France, celui de la vallée de Chevreuse. Nous avons souhaité l’étendre au département de l’Essonne et à Montfort-l’Amaury. C’est aujourd’hui le parc naturel d’Île-de-France qui a la plus grande vitalité. Si nous l’avons étendu à des dizaines de communes nouvelles, c’est justement pour préserver le caractère naturel de notre région. Ce n’est donc certainement pas vous qui n’allez m’expliquer ce que sont la densification et l’étalement urbain : voilà des années que je me bats contre eux ! Ne soyez pas condescendant.

Je voudrais vous donner un exemple très concret pour que vous compreniez bien le problème.

M. Stéphane Le Foll, ministre. Moi aussi, je vais vous en donner !

Mme Valérie Pécresse. Le plateau de Saclay est un projet que j’ai soutenu pendant des années avant de le porter sur les fonts baptismaux. Nous avions exigé dans la loi que 2 300 hectares de terres agricoles soient préservés. Toutefois, certains espaces naturels doivent l’être aussi. L’équilibre entre espaces agricoles et espaces naturels est toujours un sujet sensible dans ma belle région. On ne peut pas mélanger ces deux éléments. Si on le fait, les agriculteurs s’inquiètent parce qu’ils pensent que vous finirez par mettre les choux avec les carottes, à savoir les espaces forestiers avec les espaces agricoles. Certes, il existe parfois une certaine porosité entre les deux. Toutefois, il arrive que l’État s’en serve pour faire disparaître des exploitations agricoles. Telle est la raison d’être de mon amendement.

M. Stéphane Le Foll, ministre. Quelle agressivité !

M. le président. La parole est à Mme Delphine Batho.

Mme Delphine Batho. J’adopterai pour ma part un ton beaucoup plus mesuré.

Je pense que votre vision, madame Pécresse, comporte une erreur de fond : vous vous situez dans une logique de concurrence entre les espaces agricoles et les espaces naturels, alors que le problème est l’opposition entre, d’un côté, les ensembles agricoles et naturels et, de l’autre, l’artificialisation des sols.

M. Stéphane Le Foll, ministre. Évidemment !

Mme Delphine Batho. J’ai donc un désaccord de fond avec l’approche que vous essayez de développer, qui consiste en fait à accepter une part d’artificialisation et à considérer que le combat oppose l’agriculture aux espaces naturels,…

Mme Valérie Pécresse. Pas du tout ! J’essaie simplement de prendre en compte les différentes causes du phénomène !

Mme Delphine Batho. …alors qu’il faut faire exactement l’inverse.

Ma seconde objection est d’ordre technique. Si Fanny Dombre-Coste, présidente de l’Observatoire, était présente, elle vous expliquerait que l’on rencontre une difficulté avec les données permettant de mesurer l’artificialisation des terres. Il nous faut donc rassembler toutes les données existantes, aussi bien celles qui concernent la consommation des espaces agricoles que celles relatives à la consommation des espaces naturels, qui relèvent aujourd’hui d’organismes différents. Nous avons donc besoin de rassembler tous les savoirs disponibles au lieu d’opposer les uns aux autres.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Jean-Yves Caullet, rapporteur pour avis. Je voudrais saluer l’énergie toute nouvelle de Mme Pécresse dans ce débat. Pour autant, il ne faut pas faire dire à un texte ce qu’il ne dit pas. L’observatoire, comme les commissions, n’observent pas deux espaces fondus, mais bien des espaces séparés dans leur fonctionnalité : l’agriculture, la forêt et les espaces naturels. Il n’y a pas d’amalgame ou de risque de confusion.

Au contraire, je voudrais souligner le progrès qui consiste à mentionner l’espace forestier, car il y a bien dans les espaces ouverts des fonctionnalités de production agricole, de production forestière et des fonctionnalités environnementales. Il serait très dangereux de renvoyer à ces trois fonctions de l’espace ouvert l’arbitrage face à l’urbanisation et à l’artificialisation.

M. Germinal Peiro, rapporteur. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Le Foll, ministre. Je voudrais à mon tour saluer l’énergie matinale déployée par Mme Pécresse, qui prend la parole après quelques jours, déjà, de débat ; ses connaissances en agriculture lui permettent de donner des leçons à tous ceux ici qui viennent tout juste de découvrir le sujet.

Mme Valérie Pécresse. C’est vous le donneur de leçons !

M. Stéphane Le Foll, ministre. Vous aviez proposé que soient préservés 2 300 hectares agricoles sur le plateau de Saclay. Il se trouve que les ministres de l’agriculture et du logement ont signé un décret qui prévoit la protection de 2 600 hectares, soit 300 de plus.

Mme Valérie Pécresse. Qui peut le plus peut le moins !

M. Stéphane Le Foll, ministre. Dans le débat qui nous occupe aujourd’hui, le Gouvernement, comme cette majorité, défendent l’agriculture, les terres agricoles et la question des espaces naturels.

Dans nombre de régions françaises – voire en Île-de-France – on observe une perte de terres agricoles liée à la déprise,…

M. Germinal Peiro, rapporteur. Absolument !

M. Stéphane Le Foll, ministre. …et cette variation de l’espace agricole par rapport à l’espace naturel, c’est-à-dire cette régression de l’agriculture, est donc due non pas à l’urbanisation mais à la progression de la forêt, des taillis. On ne peut résumer la question de l’agriculture et des espaces naturels à la seule question de l’Île-de-France, même si c’est celle qui vous intéresse. Certes, il y a des perspectives électorales,…

Mme Valérie Pécresse. Toutes les régions m’intéressent.

M. Stéphane Le Foll, ministre. …mais je le répète, la question qui est posée est celle de l’agriculture et des espaces naturels face à la progression continue, depuis des années, de l’urbanisation et des infrastructures.

Nous devons changer notre fusil d’épaule. Pour loger les 10 millions d’habitants supplémentaires dans les dix ou quinze ans qui viennent, il nous faudra adopter d’autres manières d’urbaniser que celles que nous avons connues ces trente dernières années.

M. le président. La parole est à Mme Valérie Pécresse.

Mme Valérie Pécresse. Le rapporteur a très bien compris ma préoccupation. Je souhaite que l’observatoire prenne séparément les mesures de l’évolution de la forêt, celles de l’évolution des espaces naturels, et celles de l’évolution des espaces agricole.

Je ne reviendrai pas sur les paroles désobligeantes du ministre, que j’ai trouvées très discourtoises à mon égard. Je parle de l’Île-de-France, monsieur le ministre, car je parle de ce que je connais bien et je ne m’aventure pas à parler de choses que je ne connais pas. Permettez-moi de vous dire que notre combat contre la déforestation en Île-de-France ne date pas d’hier et que nous n’avons pas attendu vos conseils pour nous y lancer !

(Les amendements identiques nos 979 et 1487 ne sont pas adoptés.)

(Les amendements nos 592 et 591, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement n137.

M. Martial Saddier. Cet amendement nous permet de retourner en province, puisqu’il est signé de mon excellent collègue Lionel Tardy, député des Aravis – domaine du bouquetin, du gypaète barbu, du reblochon, du Grand-Bornand, de La Clusaz. Il est réputé attaché à la cohérence et à la simplification : elles sont l’objet de cet amendement.

(L’amendement n137, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté à l’unanimité.)

M. le président. La parole est à Mme Brigitte Allain, pour soutenir l’amendement n287.

Mme Brigitte Allain. Les observatoires régionaux des espaces naturels, agricoles et forestiers connaissent bien les situations locales et accomplissent un travail important. Celui-ci mérite d’être valorisé.

(L’amendement n287, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n543.

M. André Chassaigne. Cet amendement permet de marquer un peu de volontarisme dans la lutte contre l’artificialisation des sols.

Il est vrai que Mme Pécresse s’est montrée particulièrement vive. Je me suis dit demandé : « Si elle seule plume la volaille socialiste, que va-t-il me rester à faire ? » (Rires.) La réponse du ministre de l’agriculture aura au moins montré une chose, madame Pécresse : Stéphane Le Foll est comme ces vieilles poules ; quand on leur gratte la tête, elles pondent des œufs. (Rires.)

Mme Valérie Pécresse. Œufs peu comestibles…

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Cet amendement vise à élargir le rôle de l’observatoire à la définition des objectifs de réduction du rythme de changement d’affectation des espaces. Ce n’est pas à l’observatoire de définir cette politique ; il est là pour observer. Je vous propose, monsieur Chassaigne, de retirer cet amendement. Vous en serez remercié ! (Sourires.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Sans voler dans les plumes de mon ami André Chassaigne, je pense qu’il doit retirer cet amendement.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Vladimir Ilitch Oulianov, dit Lénine, a écrit Un pas en avant, deux pas en arrière. Dans le même ordre d’idée, c’est-à-dire un pas en arrière, deux pas en avant, je retire l’amendement. (Sourires.)

(L’amendement n543 est retiré.)

M. le président. Je suis de quatre amendements, nos 594, 593, 1554 et 984, pouvant être soumis à une discussion commune.

Les amendements nos 593 et 1554 sont identiques.

La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement n594.

M. Martial Saddier. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Antoine Herth, pour soutenir l’amendement n593.

M. Antoine Herth. Il est défendu.

M. le président. La parole est à Mme Valérie Pécresse, pour soutenir l’amendement n1554.

Mme Valérie Pécresse. Il est défendu.

M. le président. La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement n984.

Mme Annie Genevard. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Nous avons déjà eu le débat. La commission a émis un avis défavorable pour l’ensemble de ces amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Même avis.

(L’amendement n594 n’est pas adopté.)

(Les amendements identiques nos 593 et 1554 ne sont pas adoptés.)

(L’amendement n984 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Brigitte Allain, pour soutenir l’amendement n811.

Mme Brigitte Allain. Cet amendement vise à revoir la gouvernance des CDCEA de métropole pour ajouter les organisations nationales de développement agricole et rural et la réorganiser sous forme de quatre collèges de poids identique.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Cela relève du règlement. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Même avis.

M. le président. La parole est à Mme Brigitte Allain.

Mme Brigitte Allain. Je retire l’amendement.

(L’amendement n811 est retiré.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement rédactionnel du rapporteur, n1290.

(L’amendement n1290, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Brigitte Allain, pour soutenir l’amendement n814.

Mme Brigitte Allain. Cet amendement vise à rendre systématique la consultation de la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers, en cas de régression des surfaces agricoles, naturelles ou forestières. Les écologistes, mais aussi de nombreuses instances, comme l’association des régions de France, diverses organisations paysannes et environnementales, et la Cour des comptes le considèrent comme fondamental. Déjà, les commissions des outre-mer ont engagé cette consultation, sans entraîner de situation de blocage significatif. L’extension de cette mesure à l’ensemble du territoire national se révèle donc aussi réalisable que nécessaire.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Nous avons longuement débattu de l’avis conforme de la commission départementale. Celle-ci a un objet spécifique, de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers. Si son avis devient conforme, cela signifie que la préservation s’imposerait. Or nous savons tous qu’il peut exister des intérêts contradictoires. Mme Genevard vient de le souligner, dans le monde rural, on est toujours partagé entre la notion de préservation des terres et celle de développement. Les petites villes, ou même les bourgs ruraux, ont besoin de terrains pour accueillir de nouvelles familles ou des activités artisanales, et se trouvent toujours à cheval entre ces préoccupations.

Rendre conforme l’avis fera que la préservation s’imposera à toute autre possibilité. Parfois, l’intérêt général peut être contraire à l’avis émis par la commission départementale de préservation des espaces. Je vous remercierais infiniment si vous retiriez cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Même avis.

M. le président. La parole est à Mme Brigitte Allain.

Mme Brigitte Allain. Monsieur le rapporteur, ce sont précisément les explications que vous venez de donner qui me confortent dans l’idée qu’il faut un avis conforme !

(L’amendement n814 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement n991.

M. Martial Saddier. Il est défendu.

(L’amendement n991, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements identiques, nos 27, 194, 655 et 1396.

La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement n27.

M. Martial Saddier. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir l’amendement n194.

M. Dino Cinieri. Les terres utilisées dans le cadre de la compensation écologique sont très souvent des terres agricoles. Il semble par conséquent logique que la commission départementale de la consommation de l’espace agricole puisse donner son avis sur les mesures relatives à la mise en œuvre de la compensation écologique qui ont un impact sur les espaces agricoles.

M. le président. La parole est à M. Antoine Herth, pour soutenir l’amendement n655.

M. Antoine Herth. Il est défendu.

M. le président. La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement n1396.

Mme Annie Genevard. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. La commission a estimé que ces amendements méritaient réflexion. Mais en l’état actuel des choses, elle a émis un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Le sujet de la compensation écologique est important. Lorsqu’un espace est écologiquement remarquable, on demande à l’agriculture une compensation, alors que les terres agricoles sont déjà consommées par les infrastructures. Dans le même temps, la volonté de protéger et d’éviter la disparition des zones humides existe.

Le ministère, engagé dans un travail commun avec le ministère de l’écologie, fera des propositions et produira un rapport. Nous devons améliorer ce système. Comme l’a dit tout à l’heure Dominique Potier, il faut éviter qu’à surface perdue à cause des infrastructures on aille chercher une surface égale sur les terres agricoles. Lorsque le rapport aura été rendu, nous pourrons envisager des réponses plus précises.

(Les amendements identiques nos 27, 194, 655 et 1396 ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques.

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, certes, nos travaux avancent bien, mais peut-être serait-il judicieux de suspendre la séance quelques minutes si vous en êtes d’accord.

M. le président. La suspension est de droit.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à onze heures trente, est reprise à onze heures quarante-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

Article 12 (suite)

M. le président. L’amendement n819 est défendu.

(L’amendement n819, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements, nos 999, 252, 1264 et 1694, pouvant être soumis à une discussion commune.

Les amendements nos 252 et 1264 sont identiques.

La parole est à M. Nicolas Dhuicq, pour soutenir l’amendement n999.

M. Nicolas Dhuicq. Défendu, monsieur le président !

M. le président. La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir l’amendement n252.

M. Dino Cinieri. J’associe ma collègue Valérie Pécresse à cet amendement.

Une nouvelle rédaction vient préciser le rôle et les objectifs des commissions départementales de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers mais celles-ci ne peuvent toutefois pas être pleinement efficaces si leurs avis ne sont pas suivis d’effets. Leur composition permet d’intégrer de nombreux acteurs, qui font naître de leurs débats des avis présentant une réelle cohérence territoriale et une vision élargie et diversifiée des territoires ruraux. Afin de garantir un travail utile et pertinent, les avis qu’elles rendent doivent être décisionnels en matière de documents d’urbanisme, le préfet s’y conformant.

M. le président. La parole est à M. Nicolas Dhuicq, pour soutenir l’amendement n1264.

M. Nicolas Dhuicq. Cet amendement vise à protéger les terres agricoles, particulièrement lorsqu’elles produisent des éléments de haute qualité, tout en permettant aux communes rurales de continuer à se développer.

M. le président. La parole est à M. François Pupponi, pour soutenir l’amendement n1694.

M. François Pupponi. Défendu !

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Je ne rouvre pas le débat, monsieur le président. La commission a émis un avis défavorable à l’ensemble des ces amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Même avis.

(L’amendement n999 n’est pas adopté.)

(Les amendements identiques nos 252 et 1264 ne sont pas adoptés.)

(L’amendement n1694 est retiré.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 263 et 506.

La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir l’amendement n263.

M. Dino Cinieri. L’article 12 complète le dispositif de la commission départementale de protection des espaces naturels, agricoles et forestiers, qui rend des avis sur les projets de documents d’urbanisme. Sa composition est renforcée. Outre les représentants des collectivités locales, conseils généraux, communes, syndicats agricoles, associations de protection de l’environnement, le texte prévoit la présence d’un représentant de l’Institut national de l’origine et de la qualité lorsqu’un projet comporte une réduction de l’espace agricole concerné par des signes d’identification de la qualité et de l’origine. Ce représentant aurait une voix délibérative.

La composition de la commission étant de nature très politique, puisqu’elle compte des élus locaux et des élus des organisations professionnelles, la présence d’un représentant administratif de l’INAO peut être une bonne chose pour éclairer ses travaux. Toutefois, le représentant de l’INAO ayant désormais une voix délibérative et non plus seulement consultative, il semble important qu’il soit désigné parmi les professionnels concernés, donc parmi les producteurs. L’avis de la commission est nécessairement le résultat d’une discussion et d’un compromis et un représentant professionnel, compte tenu de sa légitimité, semble mieux à même de participer à l’élaboration d’un compromis qu’un représentant administratif.

Par ailleurs, il est à noter que l’INAO ne sera bientôt plus présent que dans dix-huit sites alors même qu’une soixantaine de départements comportent des vignes AOC. Le vignoble AOC ne représente que 1,5 % de la surface agricole utile mais est majoritairement situé en zone périurbaine. Sur cette petite superficie, la vigne représente 15 % de la valeur de la production agricole et constitue le troisième secteur national le plus exportateur. Voilà qui montre l’extraordinaire valeur de ce patrimoine agricole qu’il convient de protéger.

M. le président. La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement n506.

M. Martial Saddier. J’ai l’honneur d’être maire d’une commune de Haute-Savoie, Bonneville, qui a sur son territoire un vignoble d’appellation contrôlée, l’Ayze, qui s’étend également sur les communes de Marignier et Ayse. Et si j’ai déposé cet amendement, c’est pour défendre le potentiel de production des AOC. Il importe de renforcer la présence du monde viticole dans les commissions départementales lorsque des vignes risquent de perdre leur classement AOC.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Ces amendements prévoient qu’un représentant des professionnels siège dans les commissions départementales dans le cas où il est porté atteinte à la surface d’une zone classée en AOC. Or, ils sont déjà satisfaits par le projet de loi qui dispose qu’un représentant de l’INAO doit siéger en pareil cas. Et il s’agit forcément d’un représentant des professionnels car si cela devait être un représentant administratif, le texte aurait spécifié qu’il s’agissait du directeur de l’INAO. Retirez donc vos amendements, si vous le voulez bien, mes chers collègues, et vous aurez les remerciements du rapporteur.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Même avis.

M. le président. Retirez-vous votre amendement, monsieur Cinieri ?

M. Dino Cinieri. Rien que pour avoir les remerciements de M. le rapporteur, oui !

M. le président. Et vous, monsieur Saddier ?

M. Martial Saddier. Je le retire également.

(Les amendements identiques n263 et n506 sont retirés.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 264, 507 et 542.

La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir l’amendement n264.

M. Dino Cinieri. Cet amendement est la suite logique de l’amendement n263. Le préfet qui préside la commission a une parfaite connaissance des syndicats de défense des appellations et saura associer le représentant le plus pertinent pour exprimer le point de vue des producteurs concernés.

M. le président. La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement n507.

M. Martial Saddier. Défendu.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n542.

M. André Chassaigne. Cet amendement a déjà été défendu par mon camarade Cinieri. (Sourires.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Dans le prolongement des explications que j’ai données précédemment, je précise qu’il y aura bien un représentant des professionnels, qui est aussi représentant d’un organisme de défense et de gestion.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Martial Saddier.

M. Martial Saddier. Je retire mon amendement, monsieur le président.

M. le président. Il en va de même de vos amendements, monsieur Cinieri et monsieur Chassaigne ?

M. André Chassaigne et M. Dino Cinieri. Oui, monsieur le président.

(Les amendements identiques nos 264, 507 et 542 sont retirés.)

M. le président. La parole est à Mme Brigitte Allain, pour soutenir l’amendement n815.

Mme Brigitte Allain. Cet amendement vise à rendre conforme l’avis de la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers, pour toutes les surfaces comportant des productions bénéficiant d’un signe d’identification de la qualité et de l’origine et non plus uniquement pour les zones classées en AOC. Parmi les différents signes d’identification de la qualité et de l’origine, on dénombre environ 118 000 producteurs pour les AOC, 25 000 pour les IGP et 16 500 pour l’agriculture biologique.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable : cet amendement aboutirait à étendre de manière démesurée les surfaces auxquelles l’avis conforme pourrait s’appliquer. Rendez-vous compte : cela engloberait toute l’agriculture biologique, les labels rouges et d’autres signes encore. En réalité, la quasi-totalité du territoire national relèverait de la procédure de l’avis conforme, ce qui n’est pas acceptable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. J’ai bien compris l’esprit de cet amendement mais, l’a souligné le rapporteur, il reviendrait à étendre l’avis conforme à la quasi-totalité des terres agricoles, ce qui rendrait très difficile de faire avancer des projets ayant un intérêt général supérieur. Les AOC ont une délimitation territoriale précise. Lorsque que l’avis conforme est demandé, c’est donc pour un espace précis. L’IGP et les labels recouvrent des aires de production beaucoup plus difficiles à définir, plus diffuses, car c’est le mode de production qui est déterminant. Ils reposent sur une tout autre logique. Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement, madame la députée.

M. le président. Retirez-vous votre amendement, madame Allain ?

Mme Brigitte Allain. Oui, monsieur le président.

(L’amendement n815 est retiré.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 1182 et 1691.

La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement n1182.

M. Martial Saddier. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. François Pupponi, pour soutenir l’amendement n1691.

M. François Pupponi. Je le retire.

(L’amendement n1691 est retiré.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Cet amendement vise à alléger le dispositif prévu à l’article 12 en substituant un avis simple à un avis conforme pour les atteintes substantielles aux zones classées en AOC. Nous considérons que l’avis conforme doit s’imposer si l’on veut mieux protéger les AOC. C’est une préoccupation du Gouvernement comme de la commission, qui a émis un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Même avis.

(L’amendement n1182 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux séries d’amendements identiques, nos 367 et 508, d’une part, nos 259, 425, 816, 1190 et 1664, d’autre part, pouvant être soumises à une discussion commune.

La parole est à M. Nicolas Dhuicq, pour soutenir l’amendement n367.

M. Nicolas Dhuicq. Défendu.

M. le président. La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement n508.

M. Martial Saddier. Défendu.

M. le président. La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir l’amendement n259.

M. Dino Cinieri. La problématique des AOC viticoles est spécifique. Ces zones sont délimitées à la parcelle, en fonction de la qualité des sols et de leur exposition. Elles ne représentent que 1,5 % de la surface agricole utile et sont majoritairement situées en zones périurbaines. C’est pourquoi il importe de compléter la mesure prévue à cet article par une procédure intermédiaire lorsqu’il n’y a pas d’atteinte substantielle, donc pas de nécessité d’avis conforme. Le présent amendement prévoit, par conséquent, que lorsqu’il n’y a pas de réduction ou d’atteinte considérées comme substantielles par le préfet, mais que la commission rend néanmoins un avis défavorable, l’autorité administrative compétente qui approuve le projet doit motiver sa décision dans l’acte d’approbation lui-même. C’est une exigence de transparence de l’action politique et administrative qui est due aux administrés.

M. le président. La parole est à M. Laurent Baumel, pour soutenir l’amendement n425.

M. Laurent Baumel. La notion d’atteinte substantielle se prête moins à la situation des terrains viticoles, davantage confrontés à des mitages progressifs qu’à des projets de grande envergure. Il serait intéressant de prévoir l’obligation pour l’autorité administrative, si elle ne suit pas l’avis de la commission, de motiver sa décision.

M. le président. La parole est à Mme Brigitte Allain, pour soutenir l’amendement n816.

Mme Brigitte Allain. Défendu.

M. le président. La parole est à M. Philippe Le Ray, pour soutenir l’amendement n1190.

M. Philippe Le Ray. Défendu.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Hélène Fabre, pour soutenir l’amendement n1664.

Mme Marie-Hélène Fabre. Défendu

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable, considérant que les décisions de l’autorité administrative sont motivées.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Même avis.

(Les amendements identiques nos 367 et 508 ne sont pas adoptés, non plus que les amendements identiques nos 259, 425, 816, 1190 et 1664.)

M. le président. La parole est à Mme Brigitte Allain, pour soutenir l’amendement n817.

Mme Brigitte Allain. Cet amendement vise à renforcer les prérogatives de la CDCEA. Elle pourra demander des explications aux responsables du projet ou du document sur lequel elle est consultée, faire part de ses inquiétudes et demander de joindre ces explications au dossier d’enquête publique afin d’éclairer au mieux le public sur les conséquences du projet.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Ces explications relèvent du domaine réglementaire. Du reste, elles peuvent être demandées puisque c’est la logique même du débat contradictoire qui doit avoir lieu. Je vous demanderai donc de retirer votre amendement, madame Allain.

Mme Brigitte Allain. Je le retire, monsieur le président.

(L’amendement n817 est retiré.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 1186 et 1693.

La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement n1186.

M. Martial Saddier. Défendu.

M. le président. La parole est à M. François Pupponi, pour soutenir l’amendement n1693.

M. François Pupponi. Défendu.

(Les amendements identiques nos 1186 et 1693, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de plusieurs amendements identiques, nos 195, 509, 541, 654, 1005 et 1397.

La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir l’amendement n195.

M. Dino Cinieri. À l’instar de la compensation écologique, qui prévoit de prendre en compte les dommages subis par l’environnement, il est important de créer une compensation agricole qui indemniserait les pertes collectives induites pour l’économie agricole des territoires impactés du fait des projets d’ouvrages, d’aménagements et des documents de planification, sur les outils de transformation, de commercialisation et plus généralement sur les filières agricoles lorsque l’évitement est impossible à réaliser.

M. le président. La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement n509.

M. Martial Saddier. Défendu.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n541.

M. André Chassaigne. Défendu.

M. le président. La parole est à M. Antoine Herth, pour soutenir l’amendement n654.

M. Antoine Herth. Défendu.

M. le président. La parole est à M. Nicolas Dhuicq, pour soutenir l’amendement n1005.

M. Nicolas Dhuicq. Toujours dans l’idée de préserver les terres agricoles, le présent amendement a pour objet de prévoir des compensations de terres agricoles lorsque certaines disparaissent.

M. le président. La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement n1397.

Mme Annie Genevard. Cet amendement répond à la préoccupation exprimée un peu plus tôt par notre collègue Potier, qui appelait de ses vœux la compensation de la perte de substance économique des territoires touchés. Il serait donc bon que vous souteniez cet amendement, mon cher collègue !

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements identiques ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. La commission a considéré que ces amendements posaient un réel problème. Du reste, chers collègues de l’UMP, ils ont été déposés sur tous les bancs de l’hémicycle. La question de la compensation agricole est donc un véritable sujet qu’il faudra traiter au même titre que celui de la compensation écologique : nous sommes tous d’accord sur ce principe. Toutefois, en l’état actuel des choses, nous ne pouvons pas adopter les amendements que vous avez tous déposés. L’avis est donc défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Ainsi que je l’ai dit tout à l’heure sur la question de la compensation écologique pour les infrastructures, nous avons besoin de discuter avec le ministère de l’écologie et de redéfinir le cadre de ces compensations. Je me suis donc engagé à fournir un rapport sur cette question, qui permettra de mettre à plat ces éléments importants, afin de limiter les compensations écologiques faites sur le domaine agricole et, à l’inverse, de poser la question des compensations que l’on peut demander lorsqu’on perd de la substance en terres agricoles.

Concernant ces amendements, le Gouvernement vous propose donc de reporter ce débat à la remise du rapport qu’il vous remettra. Cela fera l’objet d’un amendement que le Gouvernement présentera après l’article 12.

M. le président. La parole est à M. Antoine Herth.

M. Antoine Herth. Je souhaite prendre date au nom du groupe UMP : il s’agit d’un sujet extrêmement important, ainsi que le ministre et le rapporteur l’ont rappelé. Vous avez dit, monsieur le ministre, que l’étalement urbain est une réalité à laquelle nous sommes tous aujourd’hui confrontés, et qui nous pose à tous des problèmes.

M. Stéphane Le Foll, ministre. En effet !

M. Antoine Herth. Dans certains pays – prenons l’exemple de Hong-Kong, qui est particulièrement flagrant –, lorsqu’il n’y a pas d’espace disponible, on construit en hauteur. Ainsi, pour ce qui est de l’urbanisme, nous savons qu’il existe d’autres solutions ; vous-même avez parlé des parkings en ouvrage pour les supermarchés.

Je voudrais rappeler dans ce débat l’idée que j’avais défendue en commission, afin que vous l’ajoutiez à votre liste de courses en vue du rapport que vous allez remettre : ne pourrait-on procéder de la même façon pour l’environnement, à savoir construire en hauteur, notamment sur le plan qualitatif ? Comme chacun sait, dans la forêt amazonienne, il existe une biodiversité extraordinaire au mètre carré, alors qu’il faudrait des centaines d’hectares dans d’autres espaces naturels pour trouver l’équivalent.

Nous le savons, l’homme est aujourd’hui capable de créer une intensité en matière de biodiversité, de qualité environnementale, sur de la petite surface. Nous devons donc creuser ce sujet car même si nous n’en sommes qu’à un stade conceptuel, la France pourrait devenir pionnière sur ces thématiques, parce que nous sommes particulièrement confrontés à ce problème de rareté de l’espace.

Ainsi, quand vous voulez urbaniser en Corse, terre montagneuse – j’associe mon collègue Camille de Rocca Serra à mon propos –, les espaces disponibles se trouvent en plaine, où l’on entre en concurrence avec l’agriculture. Comment dès lors peut-on raisonner en termes environnementaux, sans ajouter une deuxième couche sur les terres agricoles ? Tel est le problème.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Le Foll, ministre. Je ne souhaite pas allonger excessivement le débat, mais ce sujet est très important. Tout d’abord, vous évoquez l’idée d’une stratégie d’intensification écologique des espaces, permettant de jouer sur la biodiversité ainsi que sur d’autres facteurs. Toutefois, il ne faudrait pas laisser penser que l’on peut continuer à consommer, donc à perdre de l’espace. Une réflexion doit être menée sur ce point, qui est très important.

L’urbanisation en France, comparée à celle d’autres pays européens dont la densité de population est plus importante, comme aux Pays-Bas ou même en Allemagne, a trop longtemps reposé sur l’idée que, parce que la France faisait 550 000 kilomètres carrés, on pouvait consommer de l’espace. De plus, nous devons prendre en compte le fait que la consommation d’espace agricole empiète aujourd’hui sur les terres agricoles les plus productives ; cela a été souligné pour la Corse. Nous faisons ainsi une double erreur stratégique.

Pour revenir sur cette politique, nous devons la repenser complètement, d’une part sur la question de l’urbanisme, tel que nous l’avons conçu jusqu’ici, d’autre part sur la question de l’aménagement du territoire – comment mieux occuper l’espace et mieux répartir l’intensité démographique dans notre pays ? –, afin de préserver tant les espaces agricoles que les espaces écologiques remarquables.

Il y a donc là une vraie réflexion à mener sur l’égalité des territoires. Dans ce but, le ministère de l’écologie, le ministère de l’égalité des territoires et le ministère de l’agriculture et de la forêt doivent mener une négociation, une discussion. Je prends donc l’engagement que le rapport que nous vous remettrons aura pour objectif d’étudier toutes ces hypothèses de travail. Voilà ce qui est important.

(Les amendements identiques nos 195, 509, 541, 654, 1005 et 1397 ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements, nos 193, 459 et 656, pouvant être soumis à une discussion commune.

Les amendements nos 459 et 656 sont identiques.

La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir l’amendement n193.

M. Dino Cinieri. La consommation excessive des terres à usage ou à vocation agricole rend nécessaire l’évaluation du potentiel agricole du territoire non mis en valeur. Pour cela, un inventaire des friches permettrait de connaître les possibilités de reconversion de ces zones. L’agriculture pourrait les utiliser pour la production alimentaire afin de compenser celles qui sont artificialisées.

M. le président. La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement n459.

M. Martial Saddier. Défendu.

M. le président. La parole est à M. Antoine Herth, pour soutenir l’amendement n656.

M. Antoine Herth. Défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements identiques ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. La commission n’avait peut-être pas mesuré l’importance d’une bonne connaissance des surfaces de friches ; elle a donc émis un avis défavorable à ces amendements. Je tiens à préciser cependant qu’à titre personnel j’émets un avis favorable à l’amendement défendu par M. Cinieri.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Le Gouvernement est favorable à la réalisation d’un inventaire des friches. Est-il souhaitable que celui-ci soit réalisé par la commission départementale d’aménagement foncier ? Nous ne le pensons pas : il serait sans doute préférable de confier cette tâche à la commission compétente pour la consommation des espaces.

Je suis d’accord pour un inventaire des friches, car il en existe énormément. Nous devons donc les recenser afin de déterminer comment les reconquérir et avec quels moyens. J’approuve le principe de votre amendement, qui est bon sur le fond, mais je pense qu’il n’est peut-être pas placé au bon endroit. Je souhaite que nous examinions cela rapidement pour pouvoir vous faire une proposition.

M. le président. La parole est à M. Germinal Peiro.

M. Germinal Peiro. Sans vouloir rallonger le débat, je souhaite préciser que si l’inventaire des friches me paraît très important, une autre question taraude les uns et les autres : comme vous le savez, les friches sont exemptées de cotisations sociales à la MSA. De ce fait, on assiste aujourd’hui au développement de friches au milieu d’espaces agricoles cultivés : les propriétaires attendent, ne payent plus de cotisation, ne supportent aucun frais et attendent tranquillement que leurs terrains deviennent constructibles.

M. Philippe Le Ray. C’est vrai !

M. Germinal Peiro. Je pense, mes chers collègues, que nous devrons réfléchir à ce sujet afin de trouver des moyens d’y remédier. Il me semble tout à fait inacceptable que des friches soient exonérées de cotisations sociales.

M. Philippe Le Ray. C’est le cas également sur le littoral et sur les îles !

M. le président. La parole est à M. Caullet.

M. Jean-Yves Caullet, rapporteur pour avis. Pour compléter ce que vient de dire le rapporteur, ces friches posent un autre problème : avec le temps, elles deviennent prétendument forestières, alors qu’elles n’ont aucune productivité forestière, et relèvent ainsi d’un autre régime. De cette façon, petit à petit, on grignote des terres qui n’ont plus d’activité productive.

M. Martial Saddier. Sans compter les risques d’incendie dans certaines régions !

M. Stéphane Le Foll, ministre. Nous sommes bien d’accord !

M. Jean-Yves Caullet, rapporteur pour avis. La productivité peut être agricole ou forestière et, de ce point de vue, le bilan des friches pourrait examiner ces deux aspects. Certaines friches peuvent opter pour la forêt productive ou pour l’agriculture productive ; mais il convient de ne pas rester entre les deux, où l’on n’a finalement que des inconvénients.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques.

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, dans la mesure où nous sommes, à juste titre, en train de revenir sur un vote de la commission, il serait judicieux que nous prenions le temps de la réflexion pour rectifier cet amendement. Je vous demande donc une courte suspension de séance.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à douze heures dix, est reprise à douze heures quinze.)

M. le président. La séance est reprise.

La parole est à M. Dino Cinieri.

M. Dino Cinieri. Monsieur le président, je tiens à remercier le ministre pour sa sagesse ainsi que mes collègues de la majorité et de l’opposition.

Je vous propose donc l’amendement n193 rectifié ainsi libellé : Après l’alinéa 16, insérer les deux alinéas suivants : « I bis. – L’article L. 112-1-1 du code rural et de la pêche maritime est complété par un alinéa ainsi rédigé : « Le représentant de l’État dans le département charge, tous les cinq ans, la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers de procéder à un inventaire des terres considérées comme des friches, qui pourraient être réhabilitées pour l’exercice d’une activité agricole ou forestière. ». (Applaudissements sur tous les bancs.)

(L’amendement n193, tel qu’il vient d’être rectifié, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté et les amendements identiques nos 459 et 656 tombent.)

M. le président. La parole est à Mme Brigitte Allain, pour soutenir l’amendement n822.

Mme Brigitte Allain. Je me réjouis de ce qui vient de se passer parce que, dans un temps pas si lointain, alors que je n’étais pas encore élue, je crois avoir harcelé sur ce sujet mon député préféré qui est aujourd’hui le rapporteur de ce projet de loi. (Sourires.)

Je propose, avec cet amendement, d’aller plus loin et de renforcer le plan de remise en valeur des terres incultes qui est prévu dans le code rural, à travers trois mesures.



Premièrement, le plan devra s’entendre sur une période de neuf ans et ne doit pas se suffire d’une mesure ponctuelle, le broyage par exemple.



Deuxièmement, si le propriétaire reprend au fermier le bail pour une remise en culture, il doit s’inscrire en tant qu’exploitant afin d’être répertorié cotisant et agir véritablement.



Enfin, la bonne application du plan devra être contrôlée chaque année par les chambres d’agriculture ou la commission départementale d’aménagement foncier.



Ces mesures donneraient de la consistance à ce plan.



M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Monsieur le président, je veux tout d’abord confirmer le harcèlement. (Sourires.) Mais ma résistance a des limites.

Madame Allain, vous défendez, à travers cet amendement, une idée à laquelle je souscris. Si je veux que les friches soient comptabilisées dans les cotisations sociales, cela signifie que je souhaite qu’elles soient remises en culture car il existe dans notre pays des exemples scandaleux puisque certains manquent de terres tandis que d’autres les laissent en friche.

Sur le fond, je suis favorable à votre amendement, mais je vous propose de le retirer parce que le rapport qui sera fait sur les friches nous permettra d’examiner la situation de manière globale et de prendre ultérieurement toutes les mesures nécessaires.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Même avis.

M. le président. La parole est à Mme Brigitte Allain.

Mme Brigitte Allain. Monsieur le rapporteur, vous savez que j’ai une grande capacité à revenir sur le sujet. Je retire donc cet amendement.

M. Germinal Peiro, rapporteur. Je vous remercie.

(L’amendement n822 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Nicolas Dhuicq, pour soutenir l’amendement n1015.

M. Nicolas Dhuicq. Il vise à appeler l’attention du Gouvernement et de la représentation nationale sur l’ouverture du champ de préservation à l’ensemble des espaces naturels, agricoles et forestiers. Pour notre part, nous souhaitions qu’elle soit limitée essentiellement aux espaces agricoles. La forêt en France n’a jamais été aussi étendue, son niveau le plus bas ayant été atteint aux alentours du XVIIIsiècle. Nous proposons une rédaction plus simple en remplaçant le mot : « consommation » par le mot « préservation »

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Même sujet, même débat, même avis : défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Même avis que la commission.

(L’amendement n1015 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 1184 rectifié et 1692 rectifié.

La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement n1184 rectifié.

M. Martial Saddier. Le président du Conseil constitutionnel nous rappelait que nous légiférions trop et que les lois étaient trop bavardes.

Le droit de l’urbanisme ne cesse d’évoluer face à des procédures d’urbanisme telles que les PLU, PLUI et SCOT, dont l’élaboration prend parfois quatre, cinq voire six ans. Si nous changeons sans cesse les règles du jeu, comment terminer un PLU, un PLUI ou un SCOT, et surtout comment faire en sorte que cela ne prête pas le flanc à des recours en tous genres qui iraient à l’encontre de ce que nous souhaitons tous, à savoir la préservation du foncier, notamment du foncier agricole ?

Je suis très heureux de voir que M. Pupponi a déposé un amendement identique.

M. le président. La parole est à M. François Pupponi, pour soutenir l’amendement n1692 rectifié.

M. François Pupponi. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Même avis.

(Les amendements identiques nos 1184 rectifié et 1692 rectifié ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement n1403.

Mme Annie Genevard. Il est question, à l’alinéa 24 de l’article 12, d’arrêter par secteur géographique des objectifs chiffrés de consommation, ce qui suscite une interrogation de ma part. En effet, comment s’opérera la délimitation du secteur géographique en question ? Il me semble important d’élargir un peu le prisme. Pour ma part, je suis dans une région à la fois très agricole et où la pression foncière est immense. Si les petits bourgs qui structurent l’espace rural dont je parlais tout à l’heure ne sont pas soutenus, c’est toute la ruralité alentour qui s’en trouve compromise.

Ce qui m’inquiète, c’est que l’on sectorise trop étroitement sans voir les équilibres géographiques. Ce que je pense est un peu compliqué à expliquer, mais, mes chers collègues, je crois que vous le comprenez si vous connaissez cette réalité dans vos territoires.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Mme Genevard propose, à l’alinéa 24, après le mot : « géographique, », d’insérer les mots : « dans une vision plus globale, ». Si je comprends parfaitement ce qu’elle veut dire, la commission a considéré que son amendement était satisfait par l’expression : « par secteur géographique ». Avis défavorable donc.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Même avis.

(L’amendement n1403 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Nicolas Dhuicq, pour soutenir l’amendement n1020.

M. Nicolas Dhuicq. Il est défendu.

(L’amendement n1020, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement n207.

M. Martial Saddier. Il est défendu.

(L’amendement n207, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Nicolas Dhuicq, pour soutenir l’amendement n1023.

M. Nicolas Dhuicq. Il est défendu.

(L’amendement n1023, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 28, 288 et 1029.

La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement n28.

M. Martial Saddier. Il est défendu.

M. le président. La parole est à Mme Brigitte Allain, pour soutenir l’amendement n288.

Mme Brigitte Allain. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Nicolas Dhuicq, pour soutenir l’amendement n1029.

M. Nicolas Dhuicq. Il est défendu.

(Les amendements identiques nos 28, 288 et 1029, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à Mme Brigitte Allain, pour soutenir l’amendement n820.

Mme Brigitte Allain. Cet amendement permet d’éviter que le veto d’une seule commune puisse empêcher la constitution d’un PAEN.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Sagesse.

(L’amendement n820 est adopté.)

M. François Pupponi. Le harcèlement a payé ! (Sourires.)

M. le président. La parole est à M. Germinal Peiro, rapporteur, pour soutenir l’amendement n1291.

M. Germinal Peiro, rapporteur. Amendement rédactionnel.

(L’amendement n1291, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement n138.

M. Martial Saddier. Défendu.

(L’amendement n138, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Nicolas Dhuicq, pour soutenir l’amendement n1034.

M. Nicolas Dhuicq. Il s’agit toujours de la problématique dont nous discutons depuis tout à l’heure. Je retire cet amendement.

(L’amendement n1034 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Nicolas Dhuicq, pour soutenir l’amendement n1042.

M. Nicolas Dhuicq. Il est défendu.

(L’amendement n1042, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Brigitte Allain, pour soutenir l’amendement n823.

Mme Brigitte Allain. Il est défendu.

(L’amendement n823, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Germinal Peiro, rapporteur, pour soutenir l’amendement n1293.

M. Germinal Peiro, rapporteur. Amendement rédactionnel.

(L’amendement n1293, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Nicolas Dhuicq, pour soutenir l’amendement n1044.

M. Nicolas Dhuicq. Défendu.

(L’amendement n1044, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n1398 qui fait l’objet de deux sous-amendements, nos 1739 rectifié et 1740.

La parole est à M. Germinal Peiro, rapporteur, pour soutenir l’amendement.

M. Germinal Peiro, rapporteur. Cet amendement vise à préciser la protection des appellations d’origine.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

La parole est à M. le ministre, pour soutenir les sous-amendements n1739 rectifié et 1740 et pour donner l’avis du Gouvernement sur l’amendement.

M. Stéphane Le Foll, ministre. Avis favorable à l’amendement, sous réserve de l’adoption de ces sous-amendements rédactionnels.

(Les sous-amendements nos 1739 rectifié et 1740, acceptés par la commission, successivement mis aux voix, sont adoptés.)

(L’amendement n1398, sous-amendé, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n1347.

M. André Chassaigne. Il est défendu.

(L’amendement n1347, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

(L’article 12, amendé, est adopté.)

Après l’article 12

M. le président. Je suis saisi de plusieurs amendements tendant à insérer un article additionnel après l’article 12.

La parole est à Mme Pascale Got, pour soutenir l’amendement n992 rectifié.

Mme Pascale Got. Il est défendu.

(L’amendement n992 rectifié, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 461 et 652.

La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement n461.

M. Martial Saddier. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Philippe Le Ray, pour soutenir l’amendement n652.

M. Philippe Le Ray. Il porte sur la construction de bâtiments agricoles dans les espaces littoraux. La loi « littoral » empêche tout développement d’urbanisme dans la bande des cent mètres et hors agglomération. Quand on est hors agglomération, elle interdit toute extension au-delà des cent mètres.

Vous savez également que la construction isolée de bâtiments d’élevage doit bénéficier d’une dérogation. Les autres bâtiments agricoles doivent se faire en continuité de l’urbanisation.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Même avis. J’ai parfaitement entendu ce qui a été dit, mais nous sommes obligés de faire preuve de rigueur s’agissant de la loi « littoral », même s’agissant des bâtiments agricoles, dont on sait qu’ils peuvent ensuite servir d’habitations. Je souhaite que nous soyons parfaitement clairs. Nous sommes défavorables à ces amendements, parce que, même si des problèmes se posent, le littoral français a pu être protégé par la loi « littoral » et il faut rester sur ses principes.

Mme Delphine Batho. Très bien !

M. Martial Saddier. C’est pareil pour les éoliennes !

M. le président. La parole est à M. Philippe Le Ray.

M. Philippe Le Ray. Je me suis sans doute mal exprimé. Nous sommes d’accord sur la protection du littoral, je le dis aussi à Mme Batho. Mais dans le cas de Belle-Île, on est en train de mettre en difficulté les agriculteurs, parce qu’ils ne peuvent tout simplement pas s’étendre. Ils ne peuvent pas construire un bâtiment, parce que la règle sanitaire départementale impose une distance par rapport à l’urbanisation, alors que la loi « littoral » impose une continuité. Ces agriculteurs-là vont devoir quitter l’île ou cesser leur activité. C’est aussi simple que cela : il n’y a dans cet amendement aucune volonté d’urbaniser le littoral à tout va, bien au contraire. Il s’agit surtout d’aider l’agriculture littorale. Nos collègues d’outre-mer nous ont donné des chiffres records : 90 % de perte d’exploitation. La situation est quasi-identique en métropole.

(Les amendements identiques nos 461 et 652 ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à M. Antoine Herth, pour soutenir l’amendement n651.

M. Antoine Herth. Dans la discussion générale, puis sur l’article 1er, nous avons eu une discussion sur les différentes vocations de l’activité agricole. Elle comporte une dimension sociale que personne ne nie, en particulier sur ces bancs.

Nous avons constaté aussi, vous le savez, monsieur le ministre, qu’il existe des formes de dumping social à l’intérieur de la zone euro, auxquelles il convient d’apporter une réponse. Des améliorations sont en perspectives vers l’est, mais il reste beaucoup de difficultés à régler vers le sud : j’ai entendu récemment qu’en Italie, en dépit des lois italiennes, des salariés saisonniers seraient payés deux ou trois euros de l’heure. C’est scandaleux : il y a des gens qui confondent salaire minimum et minimum de salaire, ce qui n’est pas acceptable.

Il y a aussi une question tout à fait pratique : celle du logement des salariés saisonniers. Cet amendement porte sur les zones touristiques : pensons à notre belle Côte d’Azur, à toutes ces zones du sud de la France et je voudrais, si le rapporteur le permet, y inclure la Dordogne, qui est une superbe destination de vacances que les Alsaciens ont appréciée il y a fort longtemps et ils reviennent maintenant régulièrement…

Plus sérieusement, mon amendement concerne l’élaboration des plans locaux d’urbanisme : il prévoit qu’on puisse prévoir des terrains pour y installer des logements destinés aux salariés saisonniers des exploitations agricoles. Je pense que vous avez tout à fait compris le sujet.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Nous avons eu un très long débat en commission à ce sujet et la commission a émis un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Même avis.

M. Martial Saddier. Vous vous étiez engagé à trouver des solutions !

(L’amendement n651 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. le ministre, pour soutenir l’amendement n1747.

M. Stéphane Le Foll, ministre. Il porte sur le fameux rapport relatif à la compensation écologique que je me suis engagé à présenter.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Avis favorable.

M. le président. La parole est à M. Philippe Le Ray.

M. Philippe Le Ray. Je réagis avec un peu de retard sur la problématique du logement. Nous avons parlé du logement temporaire, qui pose de réels problèmes : il faudra bien trouver des solutions. Il faut évoquer aussi le logement des agriculteurs sur le littoral et sur les îles. Nous retrouvons la même problématique : on peut installer de jeunes agriculteurs sur une exploitation, mais ils ne peuvent pas se loger à proximité à cause de la loi « littoral », en particulier dans le cas des éleveurs. On se retrouve dans la situation où l’agriculteur a son exploitation, mais est obligé de se loger en ville, ce qui peut poser des problèmes. Si vous pouvez trouver des solutions, elles seraient les bienvenues pour donner une cohérence globale à la politique d’installation.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Le Foll, ministre. Dans toutes les zones touristiques et littorales, le même principe s’applique. Ce qui n’est pas possible, c’est de créer des habitations en dehors des zones déjà urbanisées. Il n’est pas plus question de créer des habitations isolées pour les saisonniers.

J’ai cherché ce qu’on pouvait faire. Il n’y a pas moyen de sortir des lois qui régissent l’urbanisme. En revanche, il y a tout à fait moyen de construire, dans le cadre qu’elles fixent, des habitations qui puissent accueillir les agriculteurs et les travailleurs occasionnels.

(L’amendement n1747 est adopté.)

Article 13

M. le président. La parole est à M. Dominique Potier, inscrit sur l’article.

M. Dominique Potier. La proposition que fait le groupe SRC est d’avoir une discussion assez générale avec le rapporteur et le ministre sur la question de la maîtrise du foncier, ce qui garantira une plus grande fluidité et une meilleure cohérence de nos débats sur cet article et les suivants.

Il est inutile de répéter ce que nous avons dit dans la discussion générale comme en commission : les politiques foncières sont des politiques mères en matière agricole.

Réguler n’est pas d’abord interdire, mais permettre de garantir la vitalité de l’installation et la création d’emploi en matière agricole. Il y a consensus dans un arc syndical important pour constater que de multiples facteurs ont provoqué un relâchement de la politique des structures, à cause de la loi de 2006 mais pas seulement : on a vu apparaître, de façon marginale mais peut-être exponentielle, un phénomène de démembrement juridique, une absence de transparence sur les capacités d’intervention dans les sociétés, une capacité qui existait avant 2006 mais qui s’est amplifiée de réaliser sur les biens de famille ce qu’on appelle « le fusil à deux coups » dans l’installation et qui peut provoquer des agrandissements non maîtrisés.

On a vu un relâchement des dispositifs de contrôle pour des raisons multiples : peut-être moins de prégnance et de présence syndicales et professionnelles et des moyens administratifs en régression. Et on a vu, pour terminer cet inventaire à la Prévert, les fausses donations servir à échapper à ce contrôle des structures.

Notre attente est forte, parce que nous croyons que chaque pas qu’on fait dans la maîtrise du marché foncier sert à la fois l’installation et le projet agro-écologique que nous partageons tous.

Je voudrais, monsieur le ministre, à ce stade, saluer les progrès contenus dans le projet de loi d’avenir et annoncés par la proposition de loi du groupe socialiste que j’avais déposée avec Christian Paul, Jean-Michel Clément et d’autres, qui visait à rétablir des moyens de contrôle importants. Grâce au dialogue que nous avons eu, des éléments se trouvaient dans le texte initial. Et puis, vous faites des propositions qui sont des avancées importantes : la capacité pour les SAFER d’intervenir sur l’usufruit, la possibilité d’intervenir dans les sociétés à 100 % des parts sociales quand il y a un enjeu d’installation, la redéfinition du contrôle des structures et des seuils de contrôle qui permettront d’éviter les abus que nous avons constatés.

Vous proposez d’organiser, en lien avec nos propositions, une capacité d’observation intense des sociétés quatre ans après leur dernière demande d’autorisation et enfin vous combattez par des dispositions très claires les donations à titre gracieux, qui représentaient une voie marginale mais délétère et potentiellement dangereuse.

Je voudrais saluer ces avancées et vous remercier, mais aussi vous indiquer deux niveaux d’attente. Pour tout de suite, dans l’élaboration de cette loi, des marges de progrès semblent à notre portée : pas aujourd’hui, mais dans les mois qui viennent. Et puis, nous avons un rendez-vous dans le futur. C’est bien de maîtriser l’usufruit, mais au vu de nos analyses, l’enjeu de la nue-propriété est extrêmement important dans les capacités de préemption des SAFER.

Les dispositifs d’intervention tels qu’ils sont mis en place sont certes modernisés et amplifiés mais ils restent peut-être insuffisants. À l’avenir, il conviendrait sans doute de trouver d’autres façons de procéder.

Nous aimerions que la capacité des SAFER à intervenir en maîtrise à 51 % des sociétés soit réenvisagée, comme il en avait été question.

D’ici la deuxième lecture du texte, nous aimerions également vérifier avec vous que les dispositions concernant les biens de famille sont parfaitement claires et sans faille.

Enfin, s’agissant de l’intervention des SAFER, il nous semble que la consolidation d’exploitation pour parvenir à un seuil de structure rentable et économique constitue une priorité aussi respectable que celle qu’est la primo-installation.

Nous devons réfléchir à de tels sujets, qui vont d’ailleurs dans le sens de ce que vous souhaitez faire. Je sais qu’ils se heurtent à des difficultés juridiques et, parfois, administratives que nous ne méprisons pas. Au contraire, nous les avons prises en compte et nous serons toujours très satisfaits des avancées qui pourront être réalisées par le dialogue et la recherche de solutions à travers des expertises croisées.

Lorsque tout cela sera réalisé, nous serons encore confrontés à d’importants risques et périls qui pèseront sur le modèle agricole français. Je pense, en particulier, au développement possible du travail à façon qui peut être certes pertinent mais qui peut aussi miner le modèle agricole du travail et du rapport avec le travail des agriculteurs.

Je souhaite également évoquer le lien qu’il pourrait y avoir entre contrôle des structures et prime de la PAC. Ce sujet n’est pas tabou et sans doute devrons-nous y réfléchir.

Au fond, ces questions nous ramènent à une seule : qu’est-ce qu’un agriculteur en France au XXIe siècle ? Le registre de l’agriculture pourrait sans doute permettre de commencer à y répondre.

Je vous remercie pour le dialogue que vous avez engagé et que nous poursuivons ainsi.

M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Clément.

M. Jean-Michel Clément. Dans le droit fil de ce que vient d’évoquer mon collègue Dominique Potier, je souhaite centrer mon propos sur l’intervention des SAFER puisque c’est d’elle dont traite l’article 13.

Les SAFER ont un double rôle à jouer. Nous connaissons leur rôle traditionnel en termes d’intervention sur le marché foncier mais elles ont également très largement contribué à l’observation de ce dernier. Dans le cadre des missions de service public qui leur sont aujourd’hui assignées, il importe qu’elles disposent des moyens d’exercer cette double fonction.

La connaissance que nous avons de ce que sont les terres et leurs usages est imprécise, les chiffres avancés étant souvent fallacieux. Il importe donc que les SAFER puissent connaître le marché, ce qui suppose de savoir ce qu’il en est, évidemment, des opérations à titre onéreux, mais aussi, à titre gratuit. Cela suppose également de connaître l’état du marché foncier entre personnes physiques et morales.

Nous devons prendre toute la mesure de l’évolution de l’agriculture vers des formes sociétaires multiples. Le foncier, en effet, relève souvent des sociétés qui le portent et pas uniquement des personnes physiques. Le regard que la SAFER doit aujourd’hui avoir sur ce marché doit donc passer par le prisme éclairant des sociétés. En la matière, il est non seulement utile mais nécessaire de faire évoluer l’intervention des SAFER en direction de ces dernières, quelles que soient leurs formes immobilières ou d’exploitation.

Il convient aussi de prendre la mesure du fait qu’avec le temps, des personnes très habiles, profitant des espaces législatifs dans lesquels elles peuvent s’immiscer, ont trouvé et éprouvé toutes les techniques de façon à ce que l’intervention de la SAFER, très souvent, soit juridiquement et donc légalement écartée. Je songe, en particulier, au démembrement de propriétés qui, dans certaines régions de notre pays, constitue un véritable sport provincial – notamment dans les régions viticoles. Autour de Cognac, chez moi, la cession de deux hectares sur trois échappe à la SAFER pour cette raison-là. C’est également vrai, par exemple, en Pays de Loire. Ce sport reste très largement pratiqué dans ces milieux. Il faudra donc veiller scrupuleusement à l’intervention des SAFER.

Je parle d’intervention mais nous savons fort bien que la SAFER se sert de son droit de préemption avec parcimonie et discernement. Ce n’est donc pas parce que demain les techniques le favoriseront qu’elle se jettera sur cette faculté. Elle pourra simplement débusquer ceux qui sont en quête de détournements et de fraudes.

Sur le plan territorial, la loi prévoit d’inscrire l’action des SAFER dans une dimension régionale ou interrégionale. J’alerte simplement le ministre et le rapporteur sur le fait que nous devrons éviter deux écueils : des zones trop petites ou trop grandes qui mettraient à mal la pertinence des interventions. Les territoires de notre beau pays n’épousant pas forcément les délimitations administratives, les périmètres d’intervention chevauchent parfois deux régions et plusieurs départements. La question territoriale mérite donc d’être précisée.

Enfin, s’agissant du champ d’intervention, je souhaite évoquer la question de la rétrocession. Aujourd’hui, des exploitations agricoles se sont additionnées et des bâtiments qui ne sont plus dédiés à un usage agricole pourraient redevenir potentiellement utiles. Cela permettrait d’éviter une consommation intempestive de l’espace ainsi que la construction et l’étalement urbains, ce que nous souhaitons tous. Je préférerais donc qu’il soit possible de réaffecter un certain nombre de bâtiments à l’habitation. Dans ma circonscription, nous disposions d’un grand nombre de métairies et des exploitations sont aujourd’hui constituées de sept ou huit fermes, autant de bâtiments qui pourraient être réaffectés à des usages professionnels ou d’habitation, au grand contentement des maires. Nos amendements ont donc aussi pour but de souligner l’utilité qu’il y aurait à redonner une actualité à l’intervention des SAFER dans ce domaine.

M. Germinal Peiro, rapporteur. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Brigitte Allain.

Mme Brigitte Allain. Ce texte, notamment, l’article 13, favorisent de grandes évolutions s’agissant en particulier de la valorisation du foncier agricole dans une autre dimension, du rôle des SAFER et du contrôle des structures grâce à une gouvernance renouvelée dont les priorités sont claires et inédites : l’installation, la considération de l’emploi, l’implication environnementale.

Le projet n’allait peut-être pas assez loin originellement mais le débat parlementaire a d’ores et déjà permis d’avancer et j’espère qu’il en sera encore de même en ce qui concerne le contrôle des structures – je songe aux sociétés de capitaux, aux sociétés écrans ou spéculatives qui n’ont pas toujours des objectifs territoriaux. Du travail reste encore à accomplir à ce sujet.

Je salue la prise en compte, par cet article, du fait que tous les projets d’installation méritent d’être considérés dans leur dimension économique viable et globale mais, aussi, écologique et sociale – et pas seulement sur le plan strict des surfaces.

Toutefois, je regrette que les seuils minimums risquent d’être relevés en raison de l’instauration d’un seuil régional. Je ferai des propositions pour que nous ne heurtions pas à un tel écueil. J’ai donc confiance dans le travail parlementaire pour que le texte évolue dans le bon sens.

M. le président. La parole est à Mme Annie Genevard.

Mme Annie Genevard. Notre collègue Potier l’a dit, les SAFER peuvent jouer un rôle important dans le cas de la reprise de biens de famille notamment. Un propriétaire peut légitimement reprendre les biens qui lui appartiennent et nul ne lui conteste ce droit, pour autant, on le sait bien, des difficultés économiques extrêmement importantes peuvent en résulter pour un fermier. Même si une telle reprise est limitée à des terres qui sont libres, ces dernières peuvent être précisément libérées parce que le propriétaire a donné congé à son fermier. Dans ce cas, je crois que la SAFER peut jouer un rôle déterminant afin de retrouver la substance agricole qui garantira à nouveau l’équilibre économique de l’exploitation car c’est bien de cela qu’il s’agit dans certains cas de reprises de biens de famille.

Il me semble important de saluer cette dimension de la SAFER : elle n’est pas la seule réponse pour retrouver de la substance agricole mais elle n’en est pas moins intéressante.

M. Martial Saddier. Tout à fait.

M. le président. La parole est à M. Germinal Peiro, rapporteur.

M. Germinal Peiro, rapporteur. Je souhaite intervenir globalement avant l’examen des amendements pour vous faire part de mon état d’esprit sur le sujet qui nous préoccupe.

Je rappelle, tout d’abord, que la question du foncier est centrale et je vous remercie, monsieur le ministre, de l’avoir mise au cœur de la loi d’avenir. Je gage que, sur ce sujet, nous sommes tous d’accord.

Comme l’a fait Dominique Potier, je souhaite également souligner les avancées que nous avons obtenues dans ce texte.

M. Martial Saddier. Article 40 !

M. Germinal Peiro, rapporteur. La première est à mon sens l’une des plus importantes et concerne le seuil de déclenchement du contrôle des structures établi dans le schéma régional des exploitations agricoles. Disons-le entre nous : dans certains départements, ce seuil est tellement haut que l’installation est impossible. Il faut également dire que la profession a sa part de responsabilité dans cette affaire car, même c’est si c’est le préfet qui l’établit, il le fait en concertation avec elle.

De plus, nous avons considérablement renforcé les pouvoirs de la SAFER, comme cela a d’ailleurs déjà été dit, en ce qui concerne l’usufruit et les 100% des parts sociales. J’ajoute que la SAFER sera informée de tous les mouvements de sociétés.

Nous devons également essayer de contrer tous les moyens de détourner le contrôle des structures, et nous les connaissons : le démembrement des propriétés, les transferts de parts de sociétés, qui constituent autant de donations fausses, frauduleuses ou fictives.

Il faut prendre acte de l’ensemble de ces avancées mais des sujets restent en discussion.

Je vous ai dit, monsieur le ministre, que j’étais à titre personnel favorable à ce que l’on travaille sur la possibilité, pour la SAFER, de préempter la nue propriété. C’est là, me semble-t-il, un sujet extrêmement important. Nous devrons aussi avancer sur la question des donations au-delà du sixième degré dans la mesure où elles sont frauduleuses – nous savons comment les choses peuvent se passer.

Enfin, j’insiste sur un point que j’ai développé lors de la discussion générale et qui me tient à cœur : le rôle des collectivités. Mes chers collègues, je pense que la profession agricole doit jouer son rôle dans l’installation, elle le fait et elle doit le faire plus et mieux, mais les collectivités locales ont également leur rôle à jouer dans l’économie agricole.

Nous avons construit des bâtiments pour installer des commerçants dans nos villages ruraux avec les multiples ruraux, nous avons créé des zones artisanales pour conforter l’artisanat et l’installation des entreprises. Eh bien, il faut s’impliquer dans l’économie agricole ! Je ne reprendrai pas les exemples que j’ai cités mais des communautés de communes ont construit des chais pour les viticulteurs et ont construit ou racheté des bâtiments d’élevage. Bien des communes, des communautés de communes et d’agglomérations ont envie de favoriser l’installation des agriculteurs à proximité des villes et « rêvent » de recréer les ceintures vertes qui existaient autrefois. Il faut que la loi le permette et il me semble que la SAFER est l’opérateur tout désigné. Elle doit pouvoir opérer des rétrocessions auprès de communes qui favoriseront l’installation d’agriculteurs.

Voilà ce que je voulais vous dire avant de commencer la discussion des amendements.

M. le président. Avant de lever la séance, je vous informe qu’en accord avec la commission et le Gouvernement, les articles 34 A à 37 inclus relatifs à l’outre-mer qui devaient être examinés après le titre III, soit après l’article 25, le seront finalement selon l’ordre normal du texte.

2

Ordre du jour de la prochaine séance

M. le président. Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :

Suite du projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt.

La séance est levée.

(La séance est levée à treize heures.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance

de l’Assemblée nationale

Nicolas Véron