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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIVe législature
Session ordinaire de 2013-2014

Compte rendu
intégral

Première séance du mercredi 15 janvier 2014

SOMMAIRE

Présidence de M. Claude Bartolone

1. Questions au Gouvernement

Conférence de presse du Président de la République

M. Daniel Fasquelle

M. Pierre Moscovici, ministre de l’économie et des finances

Conférence de presse du Président de la République

Mme Annick Lepetit

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre

Intervention en République centrafricaine

M. Gérard Charasse

M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères

Conférence de presse du Président de la République

M. André Chassaigne

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre

Pacte de responsabilité

M. Éric Alauzet

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué chargé du budget

Conférence de presse du Président de la République

M. Yves Censi

M. Pierre Moscovici, ministre de l’économie et des finances

Pacte de responsabilité

M. Jean-Christophe Fromantin

M. Pierre Moscovici, ministre de l’économie et des finances

Nominations

Mme Annie Genevard

M. Alain Vidalies, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement

Éducation prioritaire

M. Hervé Féron

M. Vincent Peillon, ministre de l’éducation nationale

Intervention en République centrafricaine

M. Pierre Lellouche

M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères

Organisation territoriale

M. Olivier Dussopt

Mme Marylise Lebranchu, ministre de la réforme de l’État, de la décentralisation et de la fonction publique

Filière microélectronique

M. Christian Kert

M. Arnaud Montebourg, ministre du redressement productif

Pôle de compétitivité

M. Charles de Courson

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué chargé du budget

Rythmes scolaires

Mme Sophie Dion

M. Vincent Peillon, ministre de l’éducation nationale

Cambodge

M. Jean-Marie Le Guen

M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères

Suspension et reprise de la séance

Présidence de Mme Laurence Dumont

2. Accès au logement et urbanisme rénové

Discussion des articles (suite)

Rappel au règlement

M. Christian Jacob

Article 1er bis A

Amendement no 626

M. Daniel Goldberg, rapporteur de la commission des affaires économiques

Mme Cécile Duflot, ministre de l’égalité des territoires et du logement

Article 1er bis B

M. Jean-Louis Dumont

M. Michel Piron

M. Daniel Goldberg, rapporteur

M. François Pupponi

Amendements nos 22 , 187 , 200 , 103 , 639, 736 et 737

Article 1er bis

Amendement no 589

Article 1er ter

Article 2

Amendements nos 249 , 115 , 386 , 767 rectifié et 766 (sous-amendements) , 21 , 510 , 638 rectifié , 488 , 385 , 681 , 640 , 62 , 530 , 540 , 188 , 768 (sous-amendement) , 300

Article 3

M. Michel Piron

Amendements nos 63 , 23 , 128 , 129 , 202 , 203 , 388 rectifié

Rappel au règlement

M. Jean-Marie Tetart

Article 3 (suite)

Amendements nos 395 , 651 , 389 , 130 , 265 , 528 , 168 , 24

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques

Suspension et reprise de la séance

Amendements nos 390 , 481 , 354 , 204 , 131 , 248 , 39 , 387 , 205 , 25 , 652 , 391 , 171 , 653 , 132 , 76 , 40 , 393 , 394 , 206 , 392

Article 3 bis

Amendement no 26

Article 4

Amendements nos 396 , 675

Article 4 bis A

Article 4 ter

Amendements nos 133 , 501

Article 4 quater

Amendement no 654

Article 5

Amendements nos 655 , 256 rectifié , 739, 740 et 656 , 657

Articles 5 bis et 6

Article 6 ter

Amendements nos 636 , 762 (sous-amendement) , 780 (sous-amendement)

Article 6 sexies

Amendements nos 356 , 637

Article 7

Amendement no 397

Article 7 ter

Amendement no 521

3. Fait personnel

M. Julien Aubert

Mme la présidente

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques

4. Ordre du jour de la prochaine séance

Présidence de M. Claude Bartolone

M. le président. La séance est ouverte.

1

Questions au Gouvernement

M. le président. L’ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

Nous commençons par une question du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

Conférence de presse du Président de la République

M. le président. La parole est à M. Daniel Fasquelle.

M. Daniel Fasquelle. Monsieur le Premier ministre, à l’occasion de la conférence de presse d’hier, vous avez dû passer un très mauvais moment (Exclamations sur les bancs du groupe SRC).

M. Jean-Claude Perez. Vous êtes jaloux, voilà tout !

M. Daniel Fasquelle. Non seulement le Président a enterré votre réforme fiscale dont il n’a même pas dit un mot, mais surtout, François Hollande a prononcé un terrible réquisitoire contre la politique menée par la majorité depuis deux ans.

Mme Laurence Dumont. Vous n’avez rien compris !

M. Daniel Fasquelle. Il a même remis en cause le fameux crédit d’impôt compétitivité emploi, qui était censé régler tous les problèmes de compétitivité de l’économie française. Deux ans de perdus pour la France !

À entendre le Président de la République, on pourrait même croire que la gauche est enfin guérie de sa boulimie d’impôts et de son incapacité à engager des réformes de fond ; hélas, c’est très loin d’être le cas. Qu’on en juge : ces 30 milliards que les entreprises ne paieront plus pour financer la politique familiale, qui va les payer ? À coup sûr, ce seront les familles, les salariés et les retraités, qui doivent donc se préparer à un nouveau matraquage fiscal.

M. Jean Glavany. Il n’y a qu’à faire des déficits ! Il n’y a qu’à, il n’y a qu’à !

M. Daniel Fasquelle. Quant à vos 50 milliards d’économie… On avait déjà beaucoup de mal à trouver les 15 milliards prévus dans le budget pour 2014, alors 50 milliards ! Quelles économies allez-vous réaliser ? Sur quels budgets ? Et par quelles réformes de fond ?

Mme Laurence Dumont. Il n’a vraiment rien compris !

M. Daniel Fasquelle. Alors, monsieur le Premier ministre, nous avons une proposition simple à vous faire : puisqu’il y a trop d’impôts, renoncez immédiatement aux 12 milliards d’impôts prévus dans le budget pour 2014. Puisque vous voulez simplifier, retirez immédiatement la loi sur la consommation, la loi sur l’agriculture et la loi sur l’immobilier, qui vont créer plus de contraintes pour nos entreprises. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.) Et puisque vous vous souciez enfin des collectivités territoriales, retirez dès cet après-midi la réforme des rythmes scolaires, dont les maires ne veulent pas ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Plutôt que de proposer des mesures non financées et repoussées à 2017, prenez vos responsabilités et dites-nous cet après-midi que vous renoncez aux mesures anti-économiques que vous voulez imposer à la France en 2014 ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme Laurence Dumont. Quelle était au juste la question ?

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie et des finances.

M. Pierre Moscovici, ministre de l’économie et des finances. Monsieur le député Daniel Fasquelle, votre question est marquée tout à la fois par l’aigreur et par la surdité. Vous n’avez pas écouté, ni entendu, contrairement aux Français, ce qu’a dit hier le Président de la République. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Daniel Fasquelle. Nous avons très bien compris, au contraire !

M. Pierre Moscovici, ministre. Pour commencer, on n’y voit aucune forme de reniement ou de tournant par rapport à la politique suivie jusqu’ici. Au contraire, il a été rappelé de manière très précise qu’ayant hérité d’une situation catastrophique laissée par la droite en 2012,… (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. Mes chers collègues, cessez de crier, cela ne sert à rien !

M. Pierre Moscovici, ministre. …nous avons redressé les comptes publics, fait en sorte de relever la compétitivité du pays et engagé des réformes structurelles indispensables, dont nous sommes fiers. Non seulement nous ne les retirons pas, mais nous les assumons totalement. Tel est le cap fixé par le Président de la République.

Vous m’avez également interrogé sur le financement, en faisant preuve, là encore, d’aigreur et de surdité. Le Président de la République a été extrêmement précis… (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP.)

M. Yves Fromion. Vous seuls l’avez compris !

M. Pierre Moscovici, ministre. Il a dit que 50 milliards d’euros d’économies seraient réalisés entre 2015 et 2017, en sus de celles qui ont déjà été votées par le Parlement pour 2014. Il a annoncé une baisse des charges (« Lesquelles ? » sur les bancs du groupe UMP), ou correspondant ou équivalant à la suppression des cotisations familiales.

M. Christian Jacob. Vous ramez !

M. Pierre Moscovici, ministre. C’est ce qu’attendent nos entreprises, c’est ce qu’attend ce pays : un effort pour l’investissement, un effort pour l’embauche, un effort pour l’emploi. Bref, une mobilisation générale.

La politique présentée hier est une politique d’intérêt général, et plutôt que de tomber dans le travers qui consiste à critiquer systématiquement pour rien, vous feriez mieux de l’écouter et de vous y rallier. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Conférence de presse du Président de la République

M. le président. La parole est à Mme Annick Lepetit, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

Mme Annick Lepetit. Monsieur le Premier ministre, le Président de la République – que nous avons écouté avec attention – a annoncé hier aux Français une accélération majeure de la politique menée par votre gouvernement. Nous y adhérons avec enthousiasme car elle correspond pleinement aux intérêts de la France et de nos concitoyens.

Notre majorité, qui a déjà engagé de profondes réformes au cours des derniers mois, va aller encore plus loin. Plus loin pour nos enfants, avec la priorité donnée à l’éducation. Plus loin pour la jeunesse, avec, par exemple, la généralisation du service civique. Plus loin dans l’assainissement de nos comptes, avec la poursuite de la baisse des dépenses publiques. Plus loin sur le chemin de la croissance, avec le pacte de responsabilité pour créer des emplois.

Ce pacte est un appel à la mobilisation générale. Ce pacte poussera chacun d’entre nous : entreprises, salariés, syndicats, mais aussi élus locaux et nationaux, à prendre ses responsabilités pour aider notre pays à sortir de la crise. C’est la meilleure réponse qui soit face à la morosité ambiante.

Ceux qui faisaient hier le choix de l’immobilisme et de la gabegie cherchent aujourd’hui, avec cynisme, à dénigrer la France. Qu’ils gardent leur défaitisme ! Nous, nous regardons vers l’avenir.

Oui, nous prendrons toute notre place dans la mise en œuvre de la feuille de route présidentielle et nous enrichirons le travail du Gouvernement de nos propositions.

M. Daniel Fasquelle. Il y a du boulot !

Mme Annick Lepetit. Monsieur le Premier ministre, pouvez-vous nous dire comment le Gouvernement entend engager cette nouvelle étape ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Daniel Fasquelle. Pourquoi n’a-t-il pas répondu à ma question ? Quel mépris pour l’opposition !

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Madame la députée, comme tous les Français qui ont attentivement suivi la conférence de presse du Président de la République hier, vous avez été frappée par sa détermination, sa volonté de poursuivre et d’approfondir ce qui est engagé au service du redressement de notre pays. Vous avez senti sa préoccupation centrale : tout faire pour qu’au moment où la croissance repart en France et en Europe,…

M. Christian Jacob. Dites-le sans rire !

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. …nous ne manquions en aucun cas ce rendez-vous qui doit redonner espoir et confiance, à savoir la bataille pour la croissance et l’emploi. C’est au cœur de la feuille de route qu’il a fixée au Gouvernement et qui concerne aussi, bien entendu, le Parlement, qui aura beaucoup de travail à faire.

M. Philippe Armand Martin. Baratin !

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Je voudrais ici rappeler l’essentiel : le Président de la République inscrit ce combat et cette mobilisation dans ce que nous avons déjà fait depuis presque vingt mois. Vous vous rappelez qu’un rapport avait été commandé à Louis Gallois, grand chef d’entreprise reconnu sur tous ces bancs, qui avait livré un diagnostic sans complaisance sur l’état de nos entreprises, et en particulier sur leur perte de compétitivité. Depuis dix ans, nos entreprises ont perdu des marges de manœuvres en autofinancement, ce qui s’est traduit par une chute de notre commerce extérieur, par du chômage et de la précarité. Ce sont ces marges qu’il faut absolument reconstituer.

Le Président de la République veut que l’on aille au-delà de ce qui a déjà été engagé et qui va être mis en œuvre dès cette année : la baisse du coût du travail de 4 %, et de 6 % l’année prochaine. Il propose d’aller plus loin et plus fort en discutant un pacte avec les entreprises : le pacte de responsabilité.

M. Alain Marsaud. Oh la la !

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Un pacte de responsabilité, cela veut dire qu’il s’adresse à tous. Il s’adresse bien sûr aux entreprises, ainsi qu’aux partenaires sociaux et au Parlement, et pas uniquement à la majorité mais aussi à vous, mesdames et messieurs les députés de l’opposition. Serez-vous au rendez-vous de ce pacte ?

M. Julien Aubert. Non !

M. Daniel Fasquelle. Commencez par répondre à nos questions !

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Comme le Président de la République l’a proposé et annoncé, je vais rencontrer dès le 27 janvier prochain chaque organisation patronale, chaque organisation syndicale, pour discuter des conditions de mise en œuvre de ce pacte de responsabilité. Parce que ce pacte de responsabilité, je le répète, consiste à donner des marges pour investir, pour innover, pour embaucher, avec des contreparties, que les représentants des salariés sont en droit d’obtenir.

Nous allons donc en discuter, et aussitôt ce processus engagé, j’installerai avec les ministres concernés les assises de la fiscalité des entreprises avant la fin du mois de janvier, ainsi que le groupe de travail sur la remise à plat de la fiscalité des ménages auquel sont associés les parlementaires. Tous ces chantiers se tiennent, et comme l’a dit hier le Président de la République, ils forment un bloc. Ce bloc doit redonner à la France des marges de manœuvres, et il passe par une meilleure utilisation de l’argent public et donc une baisse de la dépense publique de 50 milliards d’euros d’ici la fin du quinquennat.

Mais la question est aussi de savoir pourquoi et comment réduire ces dépenses. Comment, tout d’abord. Il ne s’agit pas du tout de faire la politique du rabot, de couper en appliquant un pourcentage absurde tel ou tel volume de dépense de l’État, de la Sécurité sociale ou des collectivités locales. Il s’agit de réformer en profondeur, parce que l’objectif, c’est de sauver le modèle social et républicain français par la stratégie nationale de santé, et par une nouvelle étape de la réforme des collectivités territoriales pour les rendre plus efficaces, plus performantes et plus lisibles pour les citoyens.

M. Daniel Fasquelle. Baratin !

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Et puis, c’est le chantier de la simplification des normes pour les entreprises, pour les collectivités locales et pour les citoyens. C’est-à-dire, mesdames et messieurs les députés, la réforme dans un esprit social-démocrate, ce qui veut dire prendre en compte la réalité de l’entreprise et de l’économie mais aussi la justice sociale et la solidarité qui sont au cœur du modèle français. Il est de notre devoir de le défendre. Pour le sauver, il faut le réformer, c’est la feuille de route du Président de la République. Je vous invite à mobiliser tous et toutes, et d’abord vous-même, pour réussir cet immense chantier au service de la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRCsur plusieurs bancs des groupes écologiste et RRDP.)

Intervention en République centrafricaine

M. le président. La parole est à M. Gérard Charasse, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.

M. Gérard Charasse. Monsieur le ministre des affaires étrangères, ma question concerne l’opération Sangaris. Nous sommes entrés, avec le départ du Président de Centrafrique, dans une nouvelle phase de cette opération. Ce départ met un terme au désastre entamé en mars dernier, commencé par un pillage organisé à l’échelle d’un pays et continué par une véritable campagne de terreur. Ces dix mois laissent une plaie ouverte, celle de la haine intercommunautaire, qui a enflé depuis, pillant les églises, détruisant les registres d’état civil. Cette plaie vit en chacune et chacun des citoyens de Centrafrique qui tous, sans exception, ont été personnellement touchés par ces événements, de ceux qui ont été déplacés – 800 000 personnes – à ceux qui ont connu, dans leur chair, la violence de ce climat prégénocidaire.

Cette phase se clôt, certes, mais laisse un terrain propice à tous les débordements car le climat de haine communautaire se développe au cœur d’une région de conflits – Doba, le Darfour, l’Ituri, les enclaves – dans un pays convoité pour ses richesses et que la porosité des frontières a transformé en refuge.

Mais surtout, monsieur le ministre, c’est un territoire stratégique. Rappelons la défaite de Fachoda en 1898. Pour les mêmes raisons, ce territoire est stratégique aujourd’hui pour des groupes terroristes par la fermeture de l’arc de cercle formé par les Shebab, AQMI et Boko Haram de l’Océan indien à l’Atlantique.

Le Président de la République a donc eu raison d’engager, comme je l’ai plusieurs fois demandé, la France, nos hommes, nos matériels et nos moyens pour éviter cela. Mais la menace contre laquelle nous luttons aujourd’hui n’est pas seulement adressée à la France mais à l’Europe voire au-delà. Monsieur le ministre, quand l’Europe se joindra-t-elle, pour sa propre sécurité, à la France, au Tchad, au Gabon, au Cameroun et au Burundi, engagés sur ce territoire ?

M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires étrangères.

M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères. Monsieur le député Gérard Charasse, on m’a interrogé plusieurs fois, ces jours-ci, sur la République centrafricaine. Trois aspects doivent être pris en compte : l’aspect sécuritaire – vous y avez fait allusion –, l’aspect politique et l’aspect humanitaire. Votre question portait essentiellement sur l’action européenne.

Sur le plan politique, après la démission de MM. Djotodia et Tiengaye, un nouveau président et un nouveau Premier ministre seront désignés. Comme le Président de la République l’a déclaré hier, la France n’a pas à se substituer au peuple centrafricain : elle doit l’aider. Je pense que ce choix sera effectué dans les jours qui viennent : j’espère, comme vous tous, qu’il contribuera à la réconciliation.

Sur le plan humanitaire, la situation reste très difficile. Lundi prochain, le 20 janvier, une réunion de l’Union européenne et des Nations unies, dans laquelle M. Canfin représentera la France, sera organisée à Bruxelles pour dégager des moyens en matière de développement humanitaire.

Sur le plan sécuritaire enfin, l’opération Sangaris se poursuit avec les soldats africains, qui sont maintenant un peu plus de 4 000. Une résolution sera discutée lundi à Bruxelles, au conseil des affaires étrangères, où je me rendrai : elle vise à impliquer les Européens dans cette partie du problème centrafricain. Une demande a trait à la surveillance de l’aéroport, une autre à la route entre Bangui et le Cameroun. Une troisième demande concernera enfin, à terme, l’aide à la reconstitution de l’armée de Centrafrique, comme nous l’avons fait au Mali.

Je suis prudent, car les décisions ne sont pas encore arrêtées. Je vous dirai simplement qu’elles sont en bonne voie : j’espère pouvoir vous apporter de bonnes nouvelles mardi prochain. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Conférence de presse du Président de la République

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

Plusieurs députés du groupe UMP. Sus au social-démocrate !

M. Jacques Myard. Halte au tournant néo-libéral !

M. le président. Je vous en prie, mes chers collègues !

M. André Chassaigne. Monsieur le Premier ministre, le Président de la République a annoncé hier un programme d’accélération des réformes libérales. Il n’entend plus corriger les excès du marché, comme le veut la traditionnelle posture social-démocrate, mais bel et bien permettre au marché d’asseoir la suprématie de ses intérêts sur l’ensemble de la société.

M. Jacques Myard et M. Michel Herbillon. Bravo !

M. André Chassaigne. Il a ainsi annoncé une baisse de 30 milliards d’euros des cotisations familiales. Il est illusoire de croire que cela créera des emplois, tant nos entreprises sont durablement sous le joug de la finance, qu’il avait justement désignée comme l’ennemi lors de la campagne présidentielle.

Plusieurs députés du groupe UMP. Eh oui !

M. André Chassaigne. Il a, par ailleurs, fixé comme objectif une baisse de 50 milliards d’euros des dépenses publiques, par la réduction des dépenses de santé et le corsetage des collectivités territoriales. Or près d’un quart du pouvoir d’achat des ménages résulte de la prise en charge publique des frais de santé, d’éducation, de logement et de transports.

Ce faisant, le Président de la République inscrit le Gouvernement dans les pas de ses prédécesseurs, reproduisant les mêmes erreurs qui perpétuent la situation de crise. Or des solutions existent, et ce sont des solutions de gauche.

Je pense d’abord à la modulation de l’imposition et des cotisations des entreprises : cela veut dire moins d’impôts pour les entreprises qui investissent et créent de l’emploi, et plus d’impôts pour celles qui versent de juteux dividendes à leurs actionnaires.

Je pense également à l’augmentation des salaires et des pensions pour soutenir la demande intérieure, dans l’intérêt bien compris de tous, y compris des entreprises.

Je pense enfin à l’abaissement du coût du capital qui pèse sur notre économie et pénalise l’investissement. La rémunération excessive des actionnaires est indécente.

Monsieur le Premier ministre, pourquoi ne pas reprendre ces propositions pour conduire une politique de gauche, sortir de la crise, créer des emplois et répondre aux attentes de ceux qui ont voté pour le changement ? (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre. (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP.)

M. Jacques Myard. Social-traître !

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Monsieur le président Chassaigne, vous posez une question importante. Je voudrais vraiment essayer de vous convaincre…

M. Pierre Lellouche. Cela ne va pas être facile !

M. Céleste Lett. Ce n’est pas possible !

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. …que notre action vise à répondre à l’attente, parfois angoissée, de ceux qui sont au chômage et qui veulent aussi préparer l’avenir de leurs enfants.

Tout d’abord, pour moi, la gauche, quel que soit son nom, qu’elle soit socialiste, sociale-démocrate ou communiste, ne signifie pas toujours plus de dette et plus de déficit. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

M. Christian Jacob. Quand même un peu !

M. Régis Juanico. En la matière, l’opposition est experte !

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Je sais que ce n’est pas non plus votre conception, monsieur Chassaigne. Il vous arrive de gérer des collectivités locales : vous le faites souvent très bien, et avec un esprit de responsabilité.

M. Christian Jacob. Non !

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Pourquoi voulons-nous faire reculer les déficits et la dette ? Vous venez justement d’y faire allusion : comme le Président de la République, je ne veux pas que la France soit dans la main des marchés financiers. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Plus nous baisserons les déficits, moins nous emprunterons et plus le niveau des taux d’intérêt sera acceptable. Le Président de la République l’a rappelé hier. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

Mesdames et messieurs les députés de l’opposition, vous pouvez vociférer. Mais quelle est l’origine de cette situation ? D’où viennent les 6 milliards d’euros de dettes supplémentaires, sinon de votre gestion ? (Exclamations sur les bancs du groupe UMP. – Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) D’où vient cette augmentation de la dépense publique à hauteur de quatre points de la richesse nationale, sinon de votre responsabilité ? C’est cela qu’il faut changer !

M. Claude Goasguen. Cause toujours !

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Pourquoi faut-il changer cela ? Parce que je veux que notre pays retrouve de la marge de manœuvre pour financer ses priorités.

M. Philippe Armand Martin. Incapable !

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Le montant que nous dépensons chaque année au titre des intérêts de la dette est supérieur au budget de l’éducation nationale.

Vous avez raison, monsieur Chassaigne, de dire que notre défi est de préparer l’avenir et de financer nos priorités. Parmi nos priorités figure la refondation de l’école. Ce matin, le ministre de l’éducation nationale, Vincent Peillon, présentait un plan contre le décrochage scolaire. Croyez-vous qu’il soit acceptable que 20 % des jeunes enfants subissent l’échec scolaire ?

M. Claude Goasguen. Quel est le rapport avec la question ?

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. C’est un échec pour eux, pour leur famille et pour la France. Pour remonter la pente, il faut des moyens, il faut des marges de manœuvre : c’est comme cela que nous allons les trouver.

Ne dites pas, monsieur Chassaigne, que nous ne luttons pas contre la finance aveugle. La finance aveugle, c’est celle des subprimes, de la spéculation, de ces produits financiers toxiques que nous avons voulu corriger à travers la loi bancaire.

Mme Claude Greff. Arrêtez !

M. Jean-Pierre Gorges. Bla-bla-bla !

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Le premier pays à avoir séparé la gestion des prêts à l’économie et à l’investissement de tous les autres produits spéculatifs, c’est le nôtre. C’est nous qui avons engagé ces réformes ! C’est nous qui voulons que la finance soit au service de l’investissement et de la dépense publique utile ! C’est nous qui avons mis en place la Banque publique d’investissement ! C’est nous qui luttons contre la fraude fiscale et contre les paradis fiscaux ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Oui, monsieur le président Chassaigne, nous pouvons faire un chemin ensemble. Le chemin est difficile, exigeant,…



M. Céleste Lett. Arrêtez-le !

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. …mais il y va de notre responsabilité. Le pacte de responsabilité proposé aux entreprises comme aux partenaires sociaux n’a d’autre but que de donner de l’espoir, de la confiance, et d’abord de l’emploi. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.)

Pacte de responsabilité

M. le président. La parole est à M. Éric Alauzet, pour le groupe écologiste.

M. Éric Alauzet. Monsieur le Premier ministre, dans la poursuite de notre engagement inlassable en faveur de l’emploi, le Président de la République a proposé hier au pays et aux entreprises un pacte de responsabilité. C’est un pari immense dont nous espérons la réussite, un chantier dans lequel la responsabilité même des entreprises est mise en jeu, puisque la baisse des cotisations devra se traduire par des créations d’emplois de qualité. Il serait incompréhensible de ne pas y ajouter la contrepartie d’un engagement clair de transparence fiscale.

C’est indispensable pour la justice, afin que le pacte de responsabilité soit partagé : il serait inconcevable qu’une entreprise puisse bénéficier d’un allégement de charges si elle échappe à ses obligations par la fraude à la TVA ou la pratique de l’évasion fiscale via des prix de transfert opaques.

C’est indispensable au redressement de nos comptes publics : ces fraudes coûtent 50 milliards d’euros par an, soit le montant des économies à réaliser sur la dépense publique pour rembourser la dette. Mais il faut se garder de faire porter tous les efforts sur la dépense publique, au risque de précipiter notre pays dans l’austérité, de nuire à l’économie et à la transition écologique, qui représente, après les révolutions industrielle et informatique, un tournant et une opportunité pour notre économie.

L’enjeu est clair : il s’agit de programmer l’extinction de la fraude fiscale, en complément de la réforme de la fiscalité, pour limiter la baisse de la dépense publique et préserver ainsi des capacités d’investissement dans la transition écologique.

Le Gouvernement est engagé dans cette voie, comme jamais aucun gouvernement auparavant. Il faut amplifier le mouvement. Aussi, monsieur le ministre, comptez-vous inclure dans le pacte de responsabilité l’obligation de transparence fiscale pour les entreprises ? (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé du budget.

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué chargé du budget. Monsieur le député Éric Alauzet, vous avez raison d’insister sur cet objectif très important pour la majorité et, par-delà la majorité, pour le pays : la lutte contre la fraude fiscale.

Je veux profiter de votre question pour rappeler que, depuis le début du quinquennat, plus de soixante propositions ont été adoptées par le Gouvernement, dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2012 et de la loi relative à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière récemment adoptée, afin que ceux qui fraudent soient renvoyés à leurs responsabilités et paient l’impôt qu’ils doivent à la nation.

Faut-il rappeler les dispositions que nous avons prises, avec Christiane Taubira, pour renforcer les sanctions pénales à l’encontre des fraudeurs ? Inversion de la charge de la preuve pour les transferts de bénéfices, prélèvement de 60 % sur les comptes situés à l’étranger qui servent de vecteurs à la fraude fiscale lorsque la traçabilité des sommes placées ne peut pas être établie, autant de dispositions qui montrent la détermination du Gouvernement à lutter contre la fraude.

La circulaire que nous avons publiée au mois de juin, qui invitait les titulaires de comptes à l’étranger à les déclarer, a permis à ce jour, j’ai le plaisir de vous l’annoncer, à 11 000 personnes de régulariser leur situation devant l’administration fiscale. Cela représente une recette potentielle de plus de 1 milliard d’euros, ce qui va bien au-delà de nos prévisions dans le cadre de la loi de finances pour 2014.

Le pacte de responsabilité vise à faire en sorte que nous ayons davantage de compétitivité, davantage d’emplois, davantage de dialogue social. La responsabilité, c’est aussi, pour nos forces économiques, la volonté affirmée de la transparence fiscale, la lutte contre l’optimisation fiscale : autant de causes qui sont au cœur du combat du Gouvernement. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes SRC et écologiste.)

Conférence de presse du Président de la République

M. le président. La parole est à M. Yves Censi, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

M. Yves Censi. Avant de vous poser ma question, monsieur le Premier ministre, je voudrais vous inviter à respecter l’Assemblée et donc à éviter les gestes de mépris à l’égard de l’opposition lorsque vous prenez la parole. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Hier, le Président de la République nous a gratifiés d’un véritable discours de repentance pour dénoncer ses propres décisions, de mauvaises décisions prises par lui depuis bientôt deux ans !

Celles et ceux qui se poussent des coudes pour entrer dans son prochain gouvernement se disputent pour qualifier le prétendu « nouveau Hollande » : serait-il social-démocrate ou plutôt social-libéral ?



Quelle indécence, alors que le candidat Hollande nous avait promis la révolution fiscale, et que le Président Hollande doit faire face à la révolte fiscale ! Quelle indécence, lorsqu’on sait que le pays marche au bord du précipice, asphyxié par un matraquage fiscal sans précédent dans l’histoire et par une situation de l’emploi catastrophique, avec 3,3 millions de chômeurs en France !



M. Jean-Claude Perez. C’est vous la cause de la faillite !

M. Yves Censi. Au-delà, il est un aveu beaucoup plus préoccupant qui a été fait hier par le Président de la République : il a reconnu ne plus disposer d’une vraie majorité pour gouverner. En effet, il a annoncé l’engagement de la responsabilité du Gouvernement sur son pseudo-pacte. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe UMP.)

Cela signifie que vous avez décidé de bâillonner les députés du PS. Le Président de la République a pris acte du fait que M. Le Roux n’était plus capable de faire voter son propre groupe ! (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe UMP. Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Irez-vous jusqu’à utiliser l’article 49, alinéa 3, de notre Constitution ? Messieurs les donneurs de leçons, sachez que jamais sous le précédent quinquennat le Gouvernement n’a eu recours à une telle arme contre sa majorité !

M. Jean Glavany. Quel talent !

M. Yves Censi. Monsieur le Premier ministre, l’heure est grave. Vous avez déjà perdu la confiance des Françaises et des Français ! Avez-vous encore les moyens politiques de gouverner et avez-vous encore la confiance spontanée d’une majorité de députés ? Avez-vous encore une majorité pour tenir vos nouvelles promesses et gouverner à la hauteur des enjeux de la France ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – « Oui ! sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie et des finances.

M. Pierre Moscovici, ministre de l’économie et des finances. Monsieur le député, permettez-moi de vous rappeler, puisque vous vous êtes tourné vers le groupe socialiste, que le seul groupe politique qui s’est divisé en deux dans cette assemblée, c’est le vôtre ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Yves Censi. Nous ne sommes pas au Gouvernement !

M. Pierre Moscovici, ministre. On se souvient bien des circonstances, et je ne sais d’ailleurs pas si tout est arrangé ! (Mêmes mouvements.)

Vous auriez pu écouter davantage le Président de la République. Vous auriez pu suivre ce que disent vos collègues François Baroin, Bruno Le Maire, Jean-Louis Borloo ou Jean-Pierre Raffarin qui considèrent tous que la démarche proposée hier par le Président de la République est utile pour le pays.



M. Yves Censi. Et dans vos rangs ?

M. Pierre Moscovici, ministre. En vérité, vous êtes embarrassés, divisés et vous vous réfugiez dans une critique stérile qui n’a aucun intérêt. Vous auriez vraiment mieux fait d’écouter ce qu’a dit le Président de la République. (« Voilà » sur les bancs du groupe SRC.)

C’est une politique qui est tournée vers les Français, vers l’emploi (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)



C’est une politique qui souhaite l’accélération en faveur de la croissance dans ce pays.



Mme Claude Greff. Bla bla bla.

Mme Laure de La Raudière. C’est faux !

M. Pierre Moscovici, ministre. C’est une politique d’engagement européen, une politique qui souhaite que la France soit au poste de pilotage de l’Europe,…

Mme Claude Greff. Avec le casque ?

M. Pierre Moscovici, ministre. …avec une relance franco-allemande. C’est une politique qui propose un grand compromis social qui mobilise tous les acteurs de la société. C’est une politique de réforme, qui fait le pari de l’entreprise. C’est une politique qui mérite d’être soutenue. Un rendez-vous a été fixé. C’est un engagement de responsabilité du Gouvernement autour du pacte de responsabilité. Pour ma part, je n’ai aucun doute que la majorité sera là. Et puis, qui sait ? Peut-être réfléchirez-vous et vous diviserez-vous à nouveau, mais cette fois-ci positivement pour la France ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et RRDP.)

Pacte de responsabilité

M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Fromantin, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.

M. Jean-Christophe Fromantin. Monsieur le Premier ministre, ma question portera également sur le pacte de responsabilité qui comporte, dans son intitulé, le mot « responsabilité ».

Plusieurs députés du groupe SRC. Eh oui !

M. Bernard Roman. En effet.

M. Jean-Christophe Fromantin. Nous avons tous été intéressés par les objectifs, à savoir remettre les entreprises au cœur de la politique de l’emploi. En préparant ma question, car ce pacte de responsabilité suscite des questions, je m’interrogeais néanmoins sur la question de savoir qui va être responsable. Si je pose ma question sur la doctrine fiscale, vous allez me répondre : attendons les assises de la fiscalité. Si je pose ma question sur la dépense publique pour arriver à la doctrine fiscale, vous allez me répondre : attendons les résultats du conseil stratégique de la dépense publique.

Mme Claude Greff. Excellent !

M. Jean-Christophe Fromantin. Si je pose ma question sur les procédures, les normes et la simplification, vous allez me dire : attendons les résultats du conseil de la simplification. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.)

Si je pose ma question sur la négociation avec les branches et les entreprises, vous allez me répondre : attendons les résultats de l’observatoire des contreparties. Enfin, si je pose ma question…

M. Patrick Lemasle. Et si vous la posiez votre question ?

M. Jean-Christophe Fromantin. …sur la synchronisation de la politique fiscale avec les prélèvements obligatoires, vous allez me répondre : attendons la décision du Haut conseil sur le financement de la protection sociale ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.)

Mettez-vous à notre place, monsieur le Premier ministre. À l’heure où nous avons tous besoin de clarification sur le principe de responsabilité qui est dans l’intitulé de ce pacte, on a envie de vous dire : ne peut-on pas faire un peu plus simple ? Ne pourrait-on pas simplement, comme l’avait proposé l’UDI il y a quelque temps, demander de baisser de 6 % les prélèvements obligatoires dès maintenant,…



M. François Rochebloine. Très bien !

M. Jean-Christophe Fromantin. …et de compenser dès 2016 par une baisse de 10 milliards de la dépense publique ? Pourquoi se contorsionner pour arriver à quelque chose de simple ? À l’heure où le baromètre du Monde nous dit qu’il faut retrouver de la confiance, il me semble que la lisibilité des politiques publiques mériterait des décisions simples, courageuses et assumées. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie et des finances.

M. Pierre Moscovici, ministre de l’économie et des finances. Je vous remercie de votre question, monsieur Fromantin, laquelle me permet de souligner le caractère global de la démarche suivie par le Président de la République et le Gouvernement. Votre énumération…

M. Michel Lefait. Si c’était si simple, il fallait le faire !

M. Pierre Moscovici, ministre. …pourrait prêter à ironie, mais ce qu’elle signifie, de notre point de vue, c’est que nous allons nous attaquer à tous les chantiers. (Vives exclamations et rires sur les bancs du groupe UMP.) Il y aura le chantier de la dépense publique, celui de la simplification de la vie des entreprises, celui du financement de la protection sociale, celui de la simplicité, de la lisibilité, de la visibilité pour les entreprises. Tout cela passe par une démarche qui, en effet, mobilise tous les acteurs : l’État qui donne l’impulsion, les entreprises – car ce sont elles qui créent de la richesse –, les partenaires sociaux pour que ce pacte soit mis en œuvre.

Mon deuxième élément de réponse concerne ce que vous avez laissé entendre sur la simplicité. Il faut agir tout de suite, et le Gouvernement va agir tout de suite. Avec Bernard Cazeneuve, nous allons entamer selon des procédés nouveaux la procédure budgétaire. Un Conseil supérieur de la dépense sera mis en place auprès du Président de la République. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

C’est la première fois dans l’histoire de la République qu’il y a une démarche de cette ampleur.

M. Yves Censi. Et tout ça pourquoi ?

M. Pierre Moscovici, ministre. Pourquoi ? Pour, au final, parvenir – ayez un peu de patience, le budget pour 2014 vient d’être voté – à 50 milliards d’euros d’économies au moins pour la période 2015-2017, ce qui est nécessaire pour rétablir les comptes et donner des marges de manœuvre aux entreprises. Il y aura aussi une baisse des charges qui sera l’équivalent – il faudra voir comment – des 30 milliards d’euros qui correspondent aux cotisations famille. La démarche est globale. Elle est claire, elle est simple, elle est mobilisatrice.

Mme Marie-Christine Dalloz. Cela reste à prouver.

M. Pierre Moscovici, ministre. Aussi, je vous invite à vous y joindre. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.)

Nominations

M. le président. La parole est à Mme Annie Genevard, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

Mme Annie Genevard. Monsieur le Premier ministre, il ne se passe pas une semaine sans que le compte rendu du Conseil des ministres ne nous apprenne la nomination d’amis ou de proches du pouvoir. (Vives protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Ainsi, la présidence du Grand Paris doit-elle revenir à l’un de vos proches conseillers à Matignon ; du coup, on demande à l’actuel président, apprécié de tous, de faire place nette… On se souvient aussi de vos tentatives de mettre fin aux fonctions du directeur du Trésor, haut fonctionnaire pourtant unanimement reconnu pour ses compétences. Je pourrais parler du choix d’un ancien président de région socialiste à un poste clef de la SNCF, ou encore de la fonction créée sur mesure pour Ségolène Royal à la Banque publique d’investissement, chargée de répartir des milliards d’euros. (Mêmes mouvements.) Et que dire du Comité consultatif national d’éthique duquel vous avez évincé ceux qui pouvaient gêner les bouleversements considérables que vous infligez à la société française ?

Que dire, enfin, de la rocambolesque nomination en décembre, annulée en janvier par la ministre de la culture, au jury de la Villa Médicis d’une actrice désormais au centre de l’actualité ? (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Tout cela n’est pas de bonne et belle politique, de celle qui donne confiance et légitimité, de celle qui grandit la fonction présidentielle, de celle qui honore une République que l’on nous annonçait exemplaire.

Alors, monsieur le Premier ministre, vous devez une réponse à la représentation nationale : quels critères prenez-vous en compte dans les nominations auxquelles vous procédez ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement.

M. Alain Vidalies, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement. Madame la députée, vous avez cité plusieurs exemples, dont l’un plus récent. Je pense qu’une lecture attentive de la presse au début de l’après-midi vous aurait évité de vous risquer sur ce terrain, ce qui me paraît un peu maladroit.

En ce qui concerne la nomination du nouveau président de la société du Grand Paris, vous vous étonnez que le président actuel soit remplacé par un collaborateur du Premier ministre.

M. Michel Herbillon. Pur hasard !

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Mais qui remplace-t-on ? M. Guyot, qui fut un excellent préfet – il a été préfet des Landes, ce qui est une référence (Sourires) – et dont les états de service sont assez remarquables : avant d’accéder à cette fonction, il a été successivement collaborateur du cabinet de Mme Idrac, collaborateur du cabinet de M. Sarkozy au ministère de l’intérieur, collaborateur du cabinet de M. de Villepin au ministère de l’intérieur, directeur de cabinet de M. Mercier au ministère de l’aménagement du territoire, et enfin directeur du cabinet de M. Richert au ministère des collectivités territoriales ! (Vifs applaudissements et rires sur les bancs du groupe SRC.)

M. Christian Jacob. Ça ne change rien à la question !

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Je pense que vous auriez dû réfléchir au pedigree de ce monsieur avant de venir ici donner des leçons à un gouvernement qui n’a qu’une seule règle : respecter les procédures qui s’imposent en matière de nomination, notamment pour ce qui est des consultations.

M. Céleste Lett. Moi, président !

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Pour résumer, je reprendrai une expression chère à Laurent Fabius – ne vous en offusquez pas. Il paraît qu’on dit en Normandie : « Quand on monte au mât, il faut l’avoir propre ». (Applaudissements et rires sur les bancs du groupe SRC.)

Éducation prioritaire

M. le président. La parole est à M. Hervé Féron, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

M. Hervé Féron. Monsieur le ministre de l’éducation nationale, le nombre des établissements concernés par la politique d’éducation prioritaire n’a pratiquement fait qu’augmenter globalement depuis l’instauration des zones prioritaires au début des années 1980 et certains établissements scolaires ont vu leur situation se dégrader de manière préoccupante. Cette situation a été aggravée par la dernière majorité qui considérait l’éducation comme un fardeau financier et non un investissement pour l’avenir : la dernière étude PISA a confirmé que, depuis dix ans, les écarts de niveau entre élèves se sont creusés et que le poids des inégalités sociales dans la réussite scolaire s’est alourdi.

Nous nous félicitons donc, monsieur le ministre, de la mise en œuvre d’un nouveau plan de l’éducation prioritaire. Cette dernière a pour objectif de rétablir l’égalité des chances entre les élèves en renforçant l’action éducative là où les conditions sociales, économiques et culturelles constituent un obstacle à la réussite scolaire. Elle vise à faire acquérir aux élèves concernés les connaissances et les compétences du socle commun, en personnalisant les parcours et en individualisant les aides ainsi qu’à insuffler dynamisme et esprit de réussite aux établissements.

Vous l’avez dit, monsieur le ministre, l’éducation prioritaire concerne aujourd’hui 20 % des enfants de France. La qualité des actions éducatives qui ciblent ces enfants va de pair avec la mise en cohérence du travail des différents intervenants, la concertation pédagogique et l’accompagnement des personnels chargés de ces dispositifs.

Pour répondre aux préoccupations des personnels et des familles, pouvez-vous nous dire quelles sont les orientations du ministère pour ce plan et les critères autres que sociaux et économiques sur lesquels vous allez vous fonder pour établir une sélection des établissements et quelles en seront les conséquences pour les personnels concernés. La question qui est posée est bien aussi celle des moyens mis en œuvre. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale.

M. Vincent Peillon, ministre de l’éducation nationale. Monsieur le député, deux chiffres permettent de mesurer collectivement la gravité de la situation : en fin de troisième, hors établissements relevant de l’éducation prioritaire, 79 % des élèves maîtrisent les compétences linguistiques, contre seulement 42 % dans les établissements d’éducation prioritaire. L’écart considérable, il va presque du simple au double. Pour les évaluations menées de 2007 à 2012, le niveau général, hors établissements relevant de l’éducation prioritaire, a baissé de cinq points alors qu’il a diminué de treize points dans les établissements d’éducation prioritaire.

La réponse à cette situation, mauvaise pour l’avenir du pays, mauvaise pour ses jeunes, c’est la refondation de l’école de la République. Au cœur de cette refondation se trouve la lutte contre les injustices dont l’OCDE a rappelé – tous nos rapports l’avaient montré – qu’elles se sont fortement accrues ces dernières années.

Cette politique, vous l’avez adoptée dans la loi du 8 juillet 2013 en fixant à la nation un objectif : à la fin du quinquennat, il doit y avoir la moitié des décrocheurs en moins – nous avons déjà enregistré des progrès dans ce domaine – et seulement dix points d’écart entre les établissements relevant de l’éducation prioritaire et ceux qui n’en relèvent pas.

Cela suppose d’agir sur une multiplicité de facteurs : priorité donnée au primaire, mise en place de nouveaux dispositifs pédagogiques, accueil des moins de trois ans, principe du plus de maîtres que de classes, révision des programmes, remise en place du socle commun de connaissances, de compétences et de culture, introduction du numérique, formation et professionnalisation des enseignants.

Dans le même temps, il fallait mener une refondation de l’éducation prioritaire. Elle porte sur les élèves, les méthodes pédagogiques, la qualité de l’accueil des équipes et de l’accompagnement. C’est un plan global ; il doit permettre une réussite collective. C’est l’avenir de la France qui se joue : au cœur de notre compétitivité, il faut introduire la justice.

Intervention en République centrafricaine

M. le président. La parole est à M. Pierre Lellouche, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

M. Pierre Lellouche. Ma question s’adresse à M. Fabius, mais je tiens à le rassurer : elle ne portera pas sur les proverbes normands. Monsieur Vidalies, sans doute est-ce un effet du climat actuel, mais je trouve que votre métaphore, s’adressant à une femme, n’est vraiment pas terrible ! (« Oh ! » sur divers bancs du groupe SRC. – Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Monsieur Fabius, l’armée française est engagée en Centrafrique depuis un peu plus d’un mois, et le Président de la République avait fixé trois objectifs : désarmer toutes les milices et les groupes armés qui terrorisent les populations, retrouver la stabilité et permettre, le moment venu, la tenue d’élections libres et pluralistes. Depuis un mois, il y a eu 1 000 morts, le désarmement n’a guère commencé et la situation humanitaire est terrible : près de 100 000 réfugiés près de l’aéroport de Bangui. Après le départ du président Djotodia, la solitude de la France dans cette affaire pose problème.

Cela m’avait amené à écrire au président Bartolone dès le 26 décembre dernier pour demander que l’Assemblée nationale envoie sur place une mission pour faire le point et éclairer tant nos concitoyens que le vote de cette assemblée, lequel doit se tenir, selon la Constitution, début avril, soit quatre mois après l’engagement de nos forces. Après bien des difficultés, la Conférence des Présidents, grâce aux efforts du président du groupe UMP, Christian Jacob, a finalement obtenu l’envoi de cette mission. Nous souhaitons, monsieur le président de l’Assemblée nationale, que cette mission se rende sur place très rapidement.

Mais à vous, monsieur Fabius, je voudrais demander ceci : quand pensez-vous réaliste d’atteindre les objectifs fixés par le Président de la République ? Et quand pensez-vous qu’il sera possible de retirer nos forces, qui mènent une opération de police impossible au milieu d’une guerre civile entre chrétiens et musulmans ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires étrangères.

M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères. Monsieur Lellouche, je pense réaliste, pour reprendre votre expression, de considérer, quel que soit le mérite de nos soldats – et il est immense –, qu’il est absolument hors de question, quand on connaît le sujet, comme c’est votre cas, d’estimer qu’au bout d’un mois, la tâche pourrait être accomplie.

M. Claude Goasguen. Bien sûr !

M. Laurent Fabius, ministre. Sangaris : 1 600 hommes. Les buts, extrêmement difficiles à atteindre, n’ont pas changé : le désarmement, l’aspect humanitaire et la préparation de la transition démocratique. C’est très compliqué, mais je pense que c’est l’honneur de la France – personne d’autre ne pouvait le faire – que d’aller là-bas pour faire son travail.

Le Président de la République a répété hier, lors de sa conférence de presse, que 1 600 hommes constituaient notre contribution ; elle est importante. Je vous ai dit tout à l’heure en répondant à l’un de vos collègues que j’espérais, tout en restant prudent, que nous aurions lundi prochain une décision de principe de l’Europe sur ce sujet. Vous savez par ailleurs que nous travaillons à la transformation progressive de l’opération actuelle, avec 4 000 Africains qui bientôt seront 6 000, en une opération de maintien de la paix.

Les buts sont ceux-là, ils n’ont pas changé. Cela prendra du temps parce que la situation est extrêmement difficile, mais je ne voudrais pas laisser croire que nos soldats ne font pas leur travail – ils font un travail magnifique –, ni que l’affaire est facile. Si la France est allée là-bas, c’est parce qu’elle a pensé que tel était son devoir international et non pas parce que c’était facile. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes SRC et écologiste.)

Organisation territoriale

M. le président. La parole est à M. Olivier Dussopt, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

M. Olivier Dussopt. Ma question s’adresse à la ministre de la réforme de l’État, de la décentralisation et de la fonction publique. Hier, madame la ministre, le Président de la République a défini les grandes réformes que notre pays doit conduire pour poursuivre son redressement. Parmi ces réformes, la poursuite de celle de l’action publique et de l’organisation territoriale est essentielle. Essentielle, parce qu’elle concerne le quotidien de nos concitoyens ; essentielle, car nous devons toujours chercher plus d’efficacité.

Il y a quelques semaines déjà, avec vous, nous avons adopté une première loi qui permettra plusieurs avancées : d’abord la création de métropoles efficaces, qui seront à la fois des piliers pour l’aménagement du territoire et des leviers pour le retour de la croissance. Mais cette loi permettra également une meilleure définition des compétences exercées par chaque niveau de collectivités, en incitant celles-ci, de manière forte, à travailler ensemble pour être plus efficaces mais aussi mieux accompagnées financièrement.

Aujourd’hui, et à juste titre, le Président de la République souhaite que nous allions plus loin dans quatre directions : en confiant tout d’abord de nouvelles responsabilités aux régions, et notamment en les dotant d’un pouvoir réglementaire d’adaptation locale ;…

M. Marc Dolez. Ah non, alors ! Certainement pas !

M. Olivier Dussopt. …en incitant ensuite les collectivités locales à se rapprocher, et ce mouvement devra concerner tant les régions que les autres niveaux de collectivités ; en allant plus loin encore dans la clarification des compétences de chaque niveau de collectivités pour plus de lisibilité et moins de doublons ; et enfin en revisitant l’articulation entre départements et métropoles dans les aires urbaines où ces métropoles se sont constituées.

Il s’agit non seulement d’engagements forts, mais également d’un témoignage de confiance envers nos territoires et nos élus, afin d’affirmer leur capacité à participer au redressement de notre pays.

Par les projets de lois que vous portez en matière de décentralisation et de réforme territoriale, par les actions que vous menez au titre de la modernisation de l’État et de la fonction publique, c’est votre ministère qui conduira cette nouvelle étape de modernisation de l’action publique. Aussi, pouvez-vous nous préciser aujourd’hui quels seront le calendrier et la méthode retenus par le Gouvernement pour aborder ces réformes ? (Applaudissements sur quelques bancs des groupes SRC et écologiste.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de la réforme de l’État, de la décentralisation et de la fonction publique.

Mme Marylise Lebranchu, ministre de la réforme de l’État, de la décentralisation et de la fonction publique. Monsieur le député Olivier Dussopt, vous avez raison : depuis dix-huit mois, j’ai en effet le grand honneur de conduire, sous l’autorité du Premier ministre, une politique de modernisation de l’action publique. Je rappelle qu’au cours des huit derniers mois, nous avons, avec Anne-Marie Escoffier mais également grâce à votre travail, fait adopter le texte auquel vous venez de faire référence. Il établit les métropoles de Paris, Lyon et Marseille, il clarifie – c’est important – et rationalise – c’est essentiel – les compétences des collectivités territoriales.

Le Premier ministre, à Rennes, a souhaité que le prochain texte renforce les compétences des régions. Le Président de la République en a fait hier un axe fort de son intervention, affirmant qu’il est important, et nous partageons naturellement son avis, de faciliter la fusion des régions comme celle d’autres collectivités territoriales. Nous avons débattu de ce point la semaine dernière au cours d’un débat au Sénat, après la remise du rapport transpartisan Raffarin-Krattinger.

Avec l’accord du Premier ministre, je vous rappelle également que je me suis engagée ici même à faire une étude d’impact en cas de fusion des départements et de la métropole du Grand Paris. En effet, si cette décision devait être prise, elle devrait être éclairée.

Il est par ailleurs d’ores et déjà inscrit dans le texte, vous y avez également fait référence, la nécessité de faire évoluer la dotation globale de fonctionnement, la DGF, c’est-à-dire les dotations de l’État, afin de prendre en compte la mutualisation des services entre les communes et les intercommunalités. Ce point est essentiel pour nous. L’ensemble de nos concitoyens le réclament.

Pour conclure, je n’oublie pas que le service public est le patrimoine de ceux qui n’en ont pas. Les agents de la fonction publique seront associés à cette démarche, comme nous l’avons toujours fait, de même que les parlementaires, qui seront consultés en amont. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.)

Filière microélectronique

M. le président. La parole est à M. Christian Kert, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

M. Christian Kert. Monsieur le Premier ministre, dans le douloureux cortège des fermetures d’entreprises et des plans sociaux qui frappent désormais l’économie française, le dossier de la microélectronique dans le sud de la France prend des allures ubuesques.

Nous avons entendu la réponse faite par M. le ministre du redressement productif, hier, à une question de notre collègue François-Michel Lambert. Évoquant la possibilité d’une reprise du site électronique de Rousset dans les Bouches-du-Rhône, M. Montebourg répondait : « l’État, comme d’habitude, sera présent ». L’État présent, c’est bien ; l’État partenaire, ce serait beaucoup mieux !

Car à Rousset, l’entreprise LFoundry se trouve dans une situation incompréhensible : alors que pour d’obscures raisons, elle n’a pas eu accès au Fonds de résistance économique, elle vient de faire l’objet d’une décision de liquidation judiciaire avec effet immédiat. D’ailleurs, un liquidateur est déjà à l’œuvre. M. Montebourg nous a assuré hier qu’un délai de trois mois a été obtenu pour permettre d’examiner les propositions de reprise du site. Mais pour que ces propositions puissent avoir le temps d’aboutir, il faut à tout prix maintenir l’outil de travail et pour cela faire assurer une maintenance constante. Cette maintenance a un coût. Or, pour l’instant, l’État ne fait aucune proposition. Disposer d’un délai et ne pas se donner les moyens de l’utiliser, c’est rajouter de l’inutile à de l’inefficace.

Monsieur le Premier ministre, le choix est simple : ou bien vous aidez les collectivités territoriales qui, courageusement, viennent d’avaliser le principe d’une aide financière à la maintenance du site, ou bien vous restez dans le registre incantatoire de M. Montebourg hier et vous faites perdre à toute une région une chance de conserver un pôle important. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre du redressement productif.

M. Arnaud Montebourg, ministre du redressement productif. Monsieur le député, je vous remercie pour la franchise de votre question. Partout sur le territoire, nous organisons la résistance économique : nous le faisons avec succès dans votre région pour Kem One qui a été sauvé – cela concerne tout de même 10 000 emplois entre Lyon et Marseille ; nous le faisons lorsque des entreprises de taille intermédiaire s’affaissent, comme c’est le cas pour Mory Ducros pour lequel nous essayons de réduire les pertes d’emplois avec l’ensemble de la profession…

M. Patrice Carvalho. Et pour Goodyear ?

M. Arnaud Montebourg, ministre. Nous le faisons dans le groupe Gascogne qui annonce de bonnes nouvelles aujourd’hui dans Les Landes ; nous le faisons encore dans le dossier FagorBrandt où nous espérons, là aussi, préserver l’ensemble des sites de fabrication d’électroménager sur le territoire ; enfin, nous souhaitons le faire, y compris au Rousset dans la microélectronique.

Pour quelle raison le Fonds de résistance économique, qui a fait l’objet d’un accord quasi unanime de cette assemblée, avec votre abstention, ce dont je vous ai remercié, n’a-t-il pas été utilisé dans ce dossier alors qu’il l’est dans tous les autres ? Parce que, pour l’instant, nous n’avons pas de repreneur capable d’apporter des financements. Je l’ai déjà dit devant l’Assemblée nationale : l’État ne se substitue pas, il ne remplace pas chaque fois qu’il y a un problème sur un territoire ; il appuie, conforte l’esprit de la politique qui consiste à lutter contre l’impuissance des destructions économiques.

Nous travaillons, y compris avec les organisations syndicales qui ne mâchent pas leurs mots, avec le repreneur qui s’est déclaré le 19 décembre, in extremis, à l’audience de liquidation judiciaire, pour trouver une solution durable, viable ; car je ne veux pas utiliser les fonds publics pour que, dans six mois, on me reproche de l’avoir fait et d’avoir été bien léger en cédant à je ne sais quelle pression de qui, de quoi, de comment.

Monsieur le député, je remercie les collectivités locales ; l’État sera là si nous avons une solution. Je vous le dis : nous avons intérêt à en trouver une, car le pôle de compétitivité microélectronique est un outil de travail très utile, très important pour l’écosystème. Nous y travaillons donc, et avec vous. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)

Pôle de compétitivité

M. le président. La parole est à M. Charles de Courson, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.

M. Charles de Courson. Monsieur le ministre de l’économie et des finances, hier le Président de la République a déclaré : « Nous devons, c’est le sens du pacte de responsabilité, harmoniser les règles fiscales, notamment pour les entreprises, entre la France et l’Allemagne ». Le groupe UDI se félicite de cette repentance du Président de la République (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) ; car nous avions dénoncé sans relâche, mais en vain, pendant les dix-huit derniers mois l’action de l’actuel Gouvernement qui n’a cessé d’accentuer le différentiel de compétitivité entre nos deux pays, en aggravant les charges fiscales et sociales mais aussi administratives pesant sur les entreprises.

M. Céleste Lett. Vous avez bien changé !

M. Charles de Courson. Laissez-moi rappeler quelques chiffres. Pour ce qui est des prélèvements obligatoires, le différentiel de pression fiscalo-sociale entre nos deux pays s’accroît : il représente désormais 6,3 points de la richesse nationale, soit 130 milliards d’euros. Pour ce qui est de la dépense publique, le différentiel s’accroît aussi puisqu’il représente aujourd’hui 12,4 points de la richesse nationale, soit plus de 250 milliards.

Quant au taux de marge des entreprises françaises, il aura atteint, en 2013, son plus bas niveau historique depuis trente ans. Le différentiel représente 6,3 points de valeur ajoutée, soit 125 milliards d’euros.

Qui plus est, vous avez porté le taux de l’impôt sur les sociétés françaises à 38,1 % en 2014 alors qu’il n’est plus que de 30,2 % en Allemagne.

Le groupe UDI se félicite que le Président Hollande reprenne à son compte les travaux engagés par la précédente majorité –rapport de la Cour des comptes à la demande du Président de la République Nicolas Sarkozy en 2012, puis le Livre vert franco-allemand en février 2012.

La suppression des cotisations sociales patronales famille représente un coût brut pour l’État d’une trentaine de milliards d’euros, mais un coût net que de 20 milliards du fait des recettes supplémentaires d’impôt sur les sociétés et d’impôt sur le revenu. Or hier, dans sa conférence de presse, le Président de la République est resté ambigu sur la question de savoir si la suppression des cotisations sociales se substituait ou s’additionnait au CICE.

Je poserai donc deux questions. La suppression des cotisations sociales patronales famille pour un coût net de 20 milliards a-t-elle vocation à se substituer au CICE ou à venir en plus du CICE ? Envisagez-vous une harmonisation de l’assiette et des taux de l’IS ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé du budget.

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué chargé du budget. Monsieur le député, je vous remercie pour votre question. Pour commencer, je veux rappeler les objectifs que poursuit le pacte de compétitivité, notamment dans la perspective du confortement de la relation franco-allemande.

S’il y a ce pacte de responsabilité, s’il y a eu le crédit d’impôt compétitivité emploi, c’est parce que notre appareil productif a décroché depuis dix ans de l’appareil productif allemand. C’est la raison pour laquelle là où le commerce extérieur allemand affiche un excédent de 150 milliards, nous affichons un déficit de 65 milliards. Par conséquent, si nous voulons faire en sorte que ce différentiel de compétitivité à notre détriment soit comblé, il faut prendre des mesures, et vite.

Nous en avons déjà prises : le crédit d’impôt compétitivité emploi représente un allégement net de charges en faveur des entreprises françaises dans une ampleur dont elles n’ont jamais bénéficié au cours des quinze à vingt dernières années.

M. Claude Goasguen. De combien ?

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Ensuite, nous nous sommes engagés dans un certain nombre de réformes extrêmement importantes qui ont un caractère structurel et qui sont des réformes de modernisation : modernisation de la formation professionnelle à travers l’accord signé il y a quelques semaines entre les partenaires sociaux, modernisation à travers l’accord national interprofessionnel de sécurisation des parcours professionnels, modernisation à travers le contrat de génération.

Cela étant, il nous faut aller plus loin en allant davantage vers l’harmonisation fiscale. Cela suppose que nous poursuivions le travail que nous avons engagé cet été qui vise à ce que moins d’impôts pèsent sur la production tandis que davantage pèseraient sur le résultat et que nous puissions pour cela faire un travail sur l’assiette de l’IS qui permette de lutter contre les processus d’optimisation afin de faire baisser le taux de l’impôt sur les sociétés et le rapprocher du taux allemand.

Compétitivité, harmonisation fiscale, financement des entreprises : voilà le chemin !

Rythmes scolaires

M. le président. La parole est à Mme Sophie Dion, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

Mme Sophie Dion. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’éducation nationale. L’aménagement du temps scolaire, en montagne comme ailleurs, soulève de vraies questions. Même si nous vous savons préoccupé par ces difficultés, nous attendons toujours des réponses concrètes. Il ne s’agit pas d’opposer l’intérêt des enfants et l’intérêt économique. Il ne s’agit pas d’opposer les communes urbaines et rurales. Il ne s’agit pas d’opposer les familles aisées et modestes. Il ne s’agit pas d’opposer Paris au reste de la France. Il s’agit d’obtenir des réponses à des situations précises.

En voici deux : celle des rythmes scolaires et celle de la fixation du calendrier des vacances.

L’activité des clubs de sports d’hiver le mercredi matin, en particulier dans les communes rurales et de montagne, est une institution. Cela s’appelle les mercredis de neige. Cet enseignement, couplé à celui de l’éducation nationale, permet aux jeunes de trouver, après leurs études, un travail en montagne. Cet apprentissage ne pourra plus se faire.

M. Jean Glavany. Mais si, enfin !

Mme Sophie Dion. Nous vous avons proposé un projet éducatif territorial avec l’ensemble des acteurs concernés. Vous l’avez refusé. Pourquoi, monsieur le ministre ?

Deuxième question : la fixation du calendrier des vacances scolaires.

Vous le savez bien, fixer les vacances de printemps en glissant sur le mois de mai menace les emplois, menace l’économie locale, menace l’équilibre des territoires de montagne, sans rien apporter aux enfants. Sur ces sujets, monsieur le ministre, vous vous êtes engagé devant la représentation nationale, le 18 décembre dernier, à nous apporter des réponses au mois de janvier. Monsieur le ministre, êtes-vous aujourd’hui en mesure de nous les présenter ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale.

M. Vincent Peillon, ministre de l’éducation nationale. Madame la députée, je souscris pleinement à tout ce que vous avez dit. Je répondrai donc très directement aux questions précises, sans revenir sur des débats qui nous ont déjà occupés.

La première question concerne les activités de ski et des clubs sportifs d’un certain nombre de municipalités situées en montagne. Vous l’avez rappelé – j’ai été saisi de cette question, – ces activités ont souvent lieu le mercredi matin.

Comme vous le savez, le décret pris sur le plan national permet précisément à chaque collectivité de choisir si elle mettra ses activités scolaires le mercredi ou le samedi. L’acceptabilité du projet éducatif de territoire n’est donc pas liée au fait du mercredi matin car il est parfaitement possible – bien des communes le font et sont en train de le faire – de placer les activités scolaires proprement dites le samedi matin, mais à l’ensemble de l’équilibre de ce projet. Personnellement, j’y suis favorable, ce pourquoi nous avons laissé un maximum de souplesse en veillant à concilier traditions locales, intérêt pédagogique pour l’enfant et intérêts économiques.

En outre, s’agissant des engagements que j’ai pris en réponse à une question d’Hervé Gaymard et après avoir reçu un certain nombre de députés dont Mme Massat, M. Giraud et ceux qui les accompagnaient, je précise que le Conseil supérieur de l’éducation se réunira demain matin et que je modifierai donc les deux semaines de vacances de Noël, en particulier du calendrier 2016-2017, lequel prévoyait également d’aller jusqu’à la mi-mai.

Je le répète : je reste disponible pour envisager une réforme plus profonde du temps scolaire sur l’année, à partir de 2015. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.)

Cambodge

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

M. Jean-Marie Le Guen. Ma question s’adresse à M. le ministre des affaires étrangères. Monsieur le ministre, vous avez suivi de près la situation au Cambodge, pays avec lequel nous avons des liens particuliers d’affection, au nom de la francophonie, mais aussi des drames qui s’y sont produits, notamment l’affreuse dictature des Khmers rouges dont ce pays se relève aujourd’hui péniblement.

Monsieur le ministre, des élections se sont tenues au mois de juillet dernier dans des conditions qui n’étaient pas totalement satisfaisantes – c’est le moins que l’on puisse dire – et malgré tout l’opposition, vous le savez, a obtenu des résultats très importants.

Depuis quelques semaines, c’est maintenant le mouvement social qui relaie la contestation démocratique. Les ouvriers des usines de textile manifestent pour obtenir d’autres conditions de travail et de salaires. Ils ont fait face à une répression sanglante qui a fait plusieurs morts et des dizaines de blessés.

Les leaders de l’opposition et, tout particulièrement, M. Sam Rainsy, député à l’Assemblée nationale du Cambodge et, par ailleurs, citoyen français, sont aujourd’hui traduits en justice pour avoir prôné la non-violence et dénoncé les violences policières.

Évidemment, je tiens à condamner très fermement l’utilisation brutale et disproportionnée de la force, qui compromet les chances d’une sortie de crise constructive et apaisée.

Alors, monsieur le ministre, pouvez-vous tout d’abord nous donner votre sentiment sur ce processus électoral mené il y a quelques mois et, ensuite, nous indiquer quelles dispositions le Gouvernement français entend prendre pour renforcer le camp de la démocratie et du progrès social au Cambodge ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires étrangères.

M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères. Monsieur le député, vous avez très bien défini la situation, de même que la position des autorités françaises.

Des élections ont eu lieu au mois de juillet avec une participation très importante. C’est le parti du Premier ministre qui l’a emporté, mais de peu. À la suite de ces événements, une série de troubles s’est produite. Il ne nous appartient évidemment pas de nous substituer au processus électoral mais nous avons appelé à la seule bonne solution, nous semble-t-il, c’est-à-dire à une négociation, qui ne remplacera pas le processus démocratique mais favorisera la stabilité d’un pays qui en a bien besoin.

S’agissant des responsables de l’opposition, la position du Gouvernement français rejoint exactement la vôtre. Hier, ils ont été entendus par le procureur de la Cour de Phnom Penh et je dois dire, au nom du Gouvernement de la République et, j’en suis sûr, en votre nom à tous, que le Gouvernement français est extrêmement attentif aux décisions qui seront prises. Nous pensons qu’il n’y a pas d’autre solution que la prise en compte des mécanismes démocratiques. Nous ne saurions soutenir tout ce qui irait dans le sens d’un affrontement, en particulier, de la part du régime.

Je me résume : nous sommes aux côtés du peuple cambodgien compte tenu de toute une série de raisons que vous avez très bien rappelées dans votre question : nous sommes liés par la culture, l’histoire et bien des engagements communs. Nous ne laisserons pas tomber le peuple cambodgien et nous appelons à une négociation pour apaiser un climat beaucoup trop tendu. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.)

M. Patrice Martin-Lalande. Très bien !

M. le président. Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures dix, est reprise à seize heures vingt, sous la présidence de Mme Laurence Dumont.)

Présidence de Mme Laurence Dumont

vice-présidente



Mme la présidente. La séance est reprise.

2

Accès au logement et urbanisme rénové

Deuxième lecture (suite)

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion, en deuxième lecture, du projet de loi, modifié par le Sénat, pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (nos 1499, 1670).

Le temps de parole restant pour la discussion de ce texte est de trois heures cinquante-neuf pour le groupe SRC, dont deux cent douze amendements sont en discussion ; quatre heures vingt-six pour le groupe UMP, dont cent quatre-vingt-seize amendements sont en discussion ; une heure vingt-trois pour le groupe UDI, dont soixante et un amendements sont en discussion ; quarante-cinq minutes pour le groupe écologiste, dont quarante-deux amendements sont en discussion ; trente-huit minutes pour le groupe RRDP, dont trente amendements sont en discussion ; trente-neuf minutes pour le groupe GDR, dont quarante-trois amendements sont en discussion ; vingt minutes pour les députés non-inscrits.

Discussion des articles (suite)

Mme la présidente. Hier soir, l’Assemblée a commencé la discussion des articles du projet de loi, s’arrêtant à l’article 1er bis A.

Rappel au règlement

Mme la présidente. La parole est à M. Christian Jacob, pour un rappel au règlement.

M. Christian Jacob. Madame la présidente, ce rappel au règlement est fondé sur la base de l’article 58 alinéa 3 et concerne la tenue de nos débats.

Lors de la séance des questions au Gouvernement qui vient d’avoir lieu, l’attitude du ministre chargé des relations avec le Parlement a été inacceptable.

Beaucoup de femmes – vous y compris, madame la présidente – ont pu s’indigner de remarques qui pouvaient parfois être faites dans l’hémicycle, mais quand elles proviennent de l’exécutif, en l’occurrence du ministre chargé des relations avec le Parlement qui s’est permis une métaphore d’une vraie goujaterie – disons-le – à l’égard d’une collègue, cela n’est pas acceptable !

Nous ne pouvons pas ne pas le tolérer d’un côté de l’hémicycle et l’accepter de l’autre. J’espère que l’ensemble des parlementaires, toutes tendances confondues, sauront se rassembler pour soutenir notre collègue et pour exiger des excuses publiques du ministre chargé des relations avec le Parlement. Son attitude est inacceptable, choquante, humiliante et déplacée. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. Je prends acte de vos propos, qui sont enregistrés.

Nous en venons à l’article 1er bis A.

Article 1er bis A

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Goldberg, rapporteur de la commission des affaires économiques, pour soutenir l’amendement n626.

M. Daniel Goldberg, rapporteur de la commission des affaires économiques. Il s’agit d’un simple amendement rédactionnel.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre de l’égalité des territoires et du logement.

Mme Cécile Duflot, ministre de l’égalité des territoires et du logement. Avis favorable

(L’amendement n626 est adopté.)

(L’article 1er bis A, amendé, est adopté.)

Article 1er bis B

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Louis Dumont, premier orateur inscrit sur l’article 1er bis.

M. Jean-Louis Dumont. Il me semble que cet article nous renvoie, une fois de plus, au débat sur l’obligation de doter l’ensemble du patrimoine locatif de détecteurs de fumée et sur la définition de la personne responsable de leur installation. Tous les bailleurs privés ou sociaux qui ont eu à connaître des incendies faisant des victimes mesurent combien ces accidents font payer un lourd tribut, en particulier aux enfants.

Plutôt que de se renvoyer le nombre de victimes à la figure et d’établir telle ou telle responsabilité, il faut savoir comment nous pouvons mettre en place un équipement dont le fonctionnement sera assuré et qui pourra donc, en cas d’alerte, éviter les accidents. Compte tenu de ce que nous avons dit hier, il s’agit donc de savoir qui fait quoi et qui paie, sans alourdir les procédures. Comme nous sommes dans une société marquée chaque jour davantage par la judiciarisation de tous les actes, les juges prendront leurs responsabilités en cas de saisine voire d’auto-saisine, s’ils ont envie de faire des misères à quelqu’un.

Je souhaite que nous puissions trouver une solution entre les différentes formules qui ont déjà été entérinées dans des lois successives, y compris dans une première loi présentée à la suite d’un incendie dont la gravité n’a échappé à personne. Cependant, travailler en réagissant dans l’immédiat n’est pas la meilleure solution pour mettre en place des dispositifs.

Nous pouvons comprendre que, lors de l’entrée dans un logement, le nouvel occupant prenne possession, dirais-je, et assure l’entretien du détecteur de fumée installé et en état de fonctionnement, et que, au moment du changement de locataire, le logement soit à nouveau mis aux normes de sécurité.

Toutefois, cela ne peut être gratuit, sachant en outre que si nous voulons assurer le fonctionnement de l’équipement, il faut pouvoir entrer dans le logement. S’il y a des bailleurs dans la salle, privés ou publics, ils savent ce que cela peut représenter : on frappe à la porte mais il n’est pas obligatoire qu’elle s’ouvre et que l’occupant accepte de faire entrer des personnes. Certes, des règles existent, mais nous pouvons nous heurter à des réticences voire à un refus du locataire.

Ce service ne peut être gratuit car, nous le savons tous, la gratuité fait perdre de sa valeur à un dispositif, même s’il sert à améliorer la sécurité. Celle-ci ne peut être effective qu’à la condition d’une valorisation de l’acte.

En conséquence, je pense – je le dis comme je le ressens – que l’entretien du détecteur de fumée doit être, pour l’occupant qui en bénéficiera, une charge récupérable. L’entretien se fera à cette condition. Or, on l’a vu, la pile de l’équipement a pu parfois servir à un petit garçon pour tout autre chose ! Nous ne devons pas nous fermer les yeux, il faut prendre nos responsabilités en fonction de ce qui se passe réellement dans le patrimoine locatif, voire dans les situations d’accession à la propriété.

Notre débat d’hier sur le gaz et sur le coût du contrôle effectué…

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure de la commission des affaires économiques. N’oubliez pas cher collègue, que nous sommes dans le cadre du temps législatif programmé !

M. Jean-Louis Dumont. Pour aller vite, justement, autant se mettre d’accord. Je défendrai tout à l’heure un amendement, ou je laisserai peut-être un de mes collègues le défendre, mais je souhaitais en préambule souligner que le service en question ne peut pas être gratuit et qu’il doit représenter une charge récupérable. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Piron.

M. Michel Piron. J’ai déposé moi-même un amendement sur ce sujet, mais je voudrais simplement rappeler quelques points qui pourront peut-être éclairer le vote des uns et des autres. Je ne m’étendrai pas davantage lors de la défense de mon amendement.

Ma première observation est la suivante : les bonnes intentions ne suffisent pas pour faire de bonnes lois. En l’occurrence, je me souviens très bien des circonstances de la mise à l’ordre du jour de la question des détecteurs de fumée : la question avait été soulevée suite à un événement dramatique qui avait suscité beaucoup d’émotions – un incendie, je le rappelle à ceux qui l’auraient oublié, qui avait eu lieu dans un immeuble squatté. Est-ce que vous pensez vraiment, mes chers collègues, que les détecteurs de fumée seront posés dans les squats ? Méfions-nous donc des réactions et des lois purement émotionnelles. Ce ne sont certainement pas celles qui seront les plus utiles.

Deuxième observation : nous nous sommes aperçus rapidement en étudiant le sujet, notamment grâce au travail de l’USH, l’Union sociale pour l’habitat, que sur 4 725 000 logements concernés environ nous étions très loin d’être assurés de l’efficience de ces détecteurs de fumée : énormément ne fonctionnaient pas ou ne répondaient pas du tout aux attentes de sécurité que nous étions en droit d’exiger. En conséquence, il a fallu en plus s’assurer de l’efficacité de ces détecteurs.

Troisième et dernière observation : même si les détecteurs sont bons, la question de l’usage n’est pas réglée – je pourrais également soulever la question financière. Si nous étions sûrs de son efficience et de son efficacité, il faudrait certes mettre en place ce dispositif. Or, il reste quelques questions en suspens : le propriétaire fournira-t-il les piles ? Le locataire les remplacera-t-il ? Comment s’assurer que le locataire entretienne bien le détecteur – le mode d’emploi indique qu’il faut dépoussiérer le capot tous les mois à l’aide d’un chiffon humide, et vérifier tous les mois le bon fonctionnement de la pile à l’aide du bouton « test » ? Comment les personnes handicapées et âgées vont-elles entretenir le détecteur au plafond ? Quel est l’impact d’une telle disposition sur les contrats d’assurance propriétaires des bailleurs ? En cas d’incendie, comment sera traité le contentieux entre les assureurs – celui du bailleur, contestant l’entretien fait par le locataire, et celui du locataire, contestant la qualité du détecteur ou de sa pose ? Comment sera appréciée la responsabilité des bailleurs pour les logements dans lesquels ils n’auront pu intervenir ? Actuellement, le taux de pénétration est proche de 85 % et, par ailleurs, le coût pour les bailleurs sociaux représente 150 millions d’euros.

Je ne veux pas avoir l’air de ne pas prendre en compte les inquiétudes sur la sécurité, mais, je le répète, l’efficience du dispositif n’est pas mesurée. J’aimerais qu’on en ait, au minimum, une véritable évaluation avant de légiférer. Je souhaite que, si le détecteur est installé par le bailleur, il puisse être facturé au locataire.

Dans le cadre des conventions existant entre le bailleur et le locataire, le bailleur doit obtenir du locataire qu’il s’engage – à ses risques et périls si je puis dire –au bon entretien du détecteur.

Faute d’y parvenir, et à l’heure où le Président de la République souhaite la simplification, on ajoutera des surcoûts considérables en termes normatifs et, ce qui est grave, sans garantie d’efficacité. Or, un système imparfaitement bordé serait source de nouveaux contentieux. Telles sont les quelques observations liminaires que je souhaitais faire. Je n’ajouterai rien de plus et je considère que mon amendement n200 est défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Ce débat nous a déjà occupés en commission.

Mme Annick Lepetit. Et en première lecture !

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Je rappelle que cet article 1er bis B, portant obligation pour le bailleur d’installer les détecteurs de fumée, a été introduit à l’initiative de nos collègues du groupe socialiste du Sénat. Pour que le débat soit complet et étayé, je tiens donc à préciser, avant que nos collègues Piron et Dumont ne défendent leurs propres amendements, ce que je propose moi-même dans les amendements nos 639, 736 et 737 que je considérerai comme étant défendus, lorsqu’ils seront appelés.

Ces amendements visent à clarifier le partage de responsabilités entre les uns et les autres.

Par l’amendement n639, je suggère de limiter la responsabilité du bailleur à l’installation initiale du détecteur de fumée au moment de la location. La loi exige, aujourd’hui, qu’il y ait un détecteur de fumée dans tous les lieux d’habitation. Il apparaît logique, considérant les débats qui se sont tenus à l’Assemblée et au Sénat, que le propriétaire veille à ce qu’au moment de l’entrée du locataire dans les lieux, il y ait un détecteur de fumée et qu’il fonctionne.

M. Jean-Luc Laurent. Très juste ! C’est nécessaire !

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Pour répondre à une partie de l’argumentation de Jean-Louis Dumont, ce même bailleur ne sera pas tenu, pendant la période de location, de s’assurer du bon fonctionnement ou du renouvellement du détecteur tombé en panne. Cette information figurera, je l’espère, dans l’état des lieux type. À mes yeux, le bailleur doit louer un logement sûr. La présence d’un détecteur de fumée en bon état de fonctionnement est l’un des éléments y participant.

L’amendement n736 précise le dispositif et notamment les obligations du locataire, lequel est donc responsable du bon entretien, du fonctionnement et du renouvellement du détecteur de fumée tant qu’il occupe le logement. Enfin, l’amendement n737 précise les modalités d’installation du détecteur dans les logements déjà occupés à la date de mise en application de l’obligation d’installation, c’est-à-dire le 8 mars 2015. S’il le souhaite, le propriétaire pourra remplir ces obligations en remboursant au locataire l’achat d’un détecteur.

Tel est le compromis que je propose. En résumé, il revient au propriétaire, au moment où il loue le logement, de veiller à ce qu’il y ait un détecteur de fumée en état de marche. Pendant toute la durée du bail, y compris en cas de renouvellements successifs, s’il y a lieu, le locataire est responsable de l’entretien et du renouvellement du détecteur s’il tombe en panne.

Mme la présidente. La parole est à M. François Pupponi.

M. François Pupponi. Je partage l’avis du rapporteur. Ainsi, lorsque le locataire entre dans le logement, le propriétaire doit avoir installé le détecteur, mais pendant toute la période de location, l’entretien est à la charge du locataire.

M. Daniel Goldberg, rapporteur. C’est, en effet, ce que je propose !

M. François Pupponi. Un consensus semble se dessiner sur le fait que l’entretien doit être à la charge du locataire pendant la durée du bail.

M. Daniel Goldberg, rapporteur. C’est le cas aujourd’hui !

M. François Pupponi. Pour autant, doit-on confier une responsabilité aussi sensible aux millions de locataires ? Ne doit-on pas, dans un souci de simplification, demander au propriétaire, car il peut être plus facile pour lui de passer des marchés dans ce domaine, d’assurer le suivi et la maintenance, quitte à ce qu’il en répercute la charge sur le locataire ? Nous sommes, en effet, tous d’accord pour reconnaître que le locataire doit payer l’entretien et la maintenance. Mais pour avoir une certaine expérience du logement social, je suis convaincu que, si on demande aux locataires d’assurer l’entretien et la maintenance, certains ne le feront pas et ne procéderont pas au remplacement éventuel du détecteur. Nous prenons ainsi des risques trop importants sur un sujet aussi sensible.

Ne peut-on pas trouver un accord qui irait dans le sens de la proposition de M. Goldberg, à savoir que les contrats seraient conclus par le propriétaire chargé de la mise en œuvre, le suivi et la maintenance étant inclus dans les charges supportées par le locataire ? Nous serons alors certains qu’il sera procédé au suivi technique, à la mise aux normes et au changement éventuel du matériel.

Mme la présidente. Nous en venons aux amendements à l’article 1er bis B.

La parole est à Mme Marianne Dubois, pour soutenir l’amendement n22, tendant à supprimer l’article.

Mme Marianne Dubois. Il est défendu !

(L’amendement n22, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements, nos 187, 200 et 103, pouvant être soumis à une discussion commune.

Les amendements nos 187 et 200 sont identiques.

La parole est à M. Jean-Louis Dumont, pour soutenir l’amendement n187.

M. Jean-Louis Dumont. On peut considérer que je l’ai déjà défendu. Je tiens toutefois, au regard des discussions qui viennent d’avoir lieu, à rappeler que les locataires doivent payer leur loyer ainsi que des charges dites « récupérables ». Il est effectivement des logements dont les charges ne sont pas récupérées sur le locataire et entrent dans le budget général de l’organisme ou du propriétaire. Or, lorsqu’il s’agit d’un immeuble collectif, c’est l’ensemble de cet immeuble qui peut subir les effets d’un début d’incendie ou d’un incendie. En conséquence – cela a été précisé hier soir –, ces charges doivent être récupérables pour que puissent être menées des actions de formation à la sécurité.

À quoi servirait-il, si ce n’est à se donner simplement bonne conscience, d’installer un appareil si personne ne s’assure de son fonctionnement ? Or, nous ne cherchons pas à avoir bonne conscience, mais à nous assurer de l’efficacité de cette mesure.

Les discussions ont déjà eu lieu à maintes reprises dans cet hémicycle. Mettons-nous d’accord aujourd’hui à l’Assemblée et peut-être, mieux encore demain au Sénat si c’était nécessaire, sur les équipements et considérons que ces charges sont récupérables. Ce sera la seule façon de former et de sensibiliser le locataire qui se sentira alors concerné parce qu’il paie et que ce produit lui appartient. Déjà, s’agissant du gaz, un technicien de proximité ou un technicien chargé d’assurer la maintenance des installations n’a aucune difficulté la plupart du temps à entrer dans les appartements.

Je souhaite, même si cela semble difficile, que cet amendement soit pris en compte par le rapporteur ou, à défaut, par la souveraineté nationale représentée dans cet hémicycle.

En effet, si j’ai bien compris ses récents propos, le président de l’Assemblée nationale a appelé l’Assemblée à discuter, à amender, à enrichir les textes, donc à aller de l’avant. Mme la ministre l’a elle-même également exprimé hier avec beaucoup de vigueur. Il est des moments où l’hémicycle doit décider !

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Piron, pour soutenir l’amendement n200.

M. Michel Piron. Je pense avoir été clair. Cet amendement est défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Tetart, pour soutenir l’amendement n103.

M. Jean-Marie Tetart. Je serai économe du temps programmé qui nous a été alloué. Je me contenterai, en conséquence, de préciser que j’adhère totalement à l’argumentation de principe de notre collègue Dumont, aux démonstrations de détail de notre collègue Piron et aux propositions qui ont été faites.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Chers collègues, comme je l’ai expliqué précédemment, la commission est défavorable à ces trois amendements. Si ces amendements tendant à rédiger cet article étaient adoptés, ils feraient, en effet, tomber les miens. C’est pourquoi j’ai détaillé ma proposition au préalable, afin d’essayer de vous convaincre.

Je partage totalement les propos de notre collègue Jean-Louis Dumont : la représentation nationale fait la loi. Le rapporteur a donc proposé des amendements afin de trouver un compromis entre les inflexions des uns et des autres. À cet égard, l’amendement n639 me semble y parvenir.

La préoccupation qui a été exprimée, à savoir le fait que le bailleur puisse remplir les obligations du locataire par l’intermédiaire de contrats, quitte à les répercuter par la suite dans les charges, est parfaitement acceptable. En revanche, s’agissant des responsabilités des uns et des autres, ma rédaction, vous vous en doutez, a ma préférence.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Nous avons eu longuement ces débats. Je ne les reprendrai donc pas, monsieur Dumont, mais je tiens à répéter ce que j’ai déjà précisé. Le nombre de décès et de blessés dans les incendies en France est, cruellement, beaucoup plus élevé que dans les autres pays européens. Cela tient principalement au taux d’équipement en détecteurs-avertisseurs de fumée. Les décès, notamment ceux des enfants, se produisent, pour l’essentiel, la nuit, donc quand il n’y a pas d’identification rapide. Il y a intoxication par la fumée avant même qu’il y ait conscience d’une difficulté.

Le détecteur-avertisseur de fumée répond à ce problème puisqu’il réveille les occupants avant qu’ils ne soient intoxiqués. Je l’affirme : dans les logements, une l’installation de détecteurs de fumée supérieure à 90 % entraîne une diminution de 50 % des décès et blessés graves. Je sais que cela a donné lieu dans cet hémicycle à de nombreux débats. Je dois vous avouer que je n’étais pas une spécialiste de cette question, et je me suis penchée avec beaucoup d’attention sur plusieurs exemples européens. Certains pays passent par l’obligation, d’autres par des politiques fortement incitatives. Mais il est évident que, dès que le taux d’équipement franchit les 90 % des logements, le taux de décès chute.

Je ne peux donc pas laisser dire ici que les études sur l’efficacité ne seraient pas avérées, monsieur Piron. Je les tiens à votre disposition. J’ai moi-même pu constater les tests d’efficacité. Tous les sapeurs-pompiers de notre pays défendent cette installation parce qu’ils connaissent les dégâts causés par l’intoxication par la fumée. Je pense qu’il n’est pas scandaleux, même si cela ne figurait pas à l’origine dans le projet de loi, que les propriétaires soient responsables de l’installation, même si les locataires sont chargés de son entretien. C’est pourquoi je considère que la position du rapporteur est parfaitement équilibrée. Elle tient compte de l’ensemble de ces points de vue. La rédaction de ses amendements est pertinente.

Je suis donc favorable aux trois amendements du rapporteur et défavorable aux amendements nos 187, 200 et 103. Vous avez toutefois souligné à raison, monsieur Dumont, que l’Assemblée nationale vote la loi. Je souhaite donc qu’elle le fasse en connaissance de cause et que ce sujet ne soit pas banalisé. Je tiens à vous dire que mon ministère et l’ensemble des ministres y sont sensibles. Je travaille, en effet, avec mon collègue Valls à la prévention des décès lors d’incendies. Nous ne pouvons pas accepter la situation française actuelle.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Luc Laurent.

M. Jean-Luc Laurent. Nous prolongeons un débat que nous avons eu longuement en commission. Il est essentiel parce qu’il concerne des vies, comme vient de le rappeler Mme la ministre. De telles situations sont la cause de trop de morts.

Nous devons trouver des solutions équilibrées et efficaces, tenant compte de la durée du bail – trois, six ou neuf ans, ou une plus longue durée pour le logement social. Il doit y avoir une responsabilité du bailleur mais aussi du locataire, avec de la sécurité juridique.

Sur le principe, il faut que des détecteurs soient installés dans tous les appartements. Que ce soit de la responsabilité du bailleur, c’est une évidence, mais ce ne serait ni efficace, ni juste, ni équilibré que le locataire n’ait aucun rôle à jouer. Les amendements du rapporteur – qui fixent le principe, établissent les responsabilités et prévoient la répartition des charges, le bailleur devant installer le détecteur et le renouveler si nécessaire au moment de la signature d’un bail et le locataire étant responsable de l’entretien durant la durée du bail – me semblent à cet égard pertinents et équilibrés.

J’insiste sur ce point avec mon expérience de maire, président d’un office il y a quelques années, qui a été confronté à ce genre de situation. Lorsqu’une difficulté survient et que, malheureusement, quelqu’un perd la vie, il y a des responsabilités à établir avec les assurances et éventuellement devant le juge. Tout doit être d’aplomb et la proposition du rapporteur le permet.

(Les amendements identiques nos 187 et 200 ne sont pas adoptés.)

(L’amendement n103 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Monsieur Goldberg, vous avez défendu vos amendements suivants no639, 736 et 737 ?

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Tout à fait, et je remercie Jean-Luc Laurent de son intervention.

Mme la ministre l’a rappelé, nous sommes tous confrontés à ce type de situation. Une personne est décédée cette nuit même dans l’une des villes dont je suis l’élu, à cause d’une bougie qui n’aurait vraisemblablement pas dû être là. Nous devons donc être efficaces et établir clairement les responsabilités du propriétaire et celles du locataire. C’est le sens de ces trois amendements.

(Les amendements nos 639, 736 et 737, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.)

(L’article 1er bis B, amendé, est adopté.)

Article 1er bis

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n589.

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.

(L’amendement n589, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 1er bis, amendé, est adopté.)

Article 1er ter

Mme la présidente. La commission a maintenu la suppression par le Sénat de l’article 1er ter.

Article 2

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Tetart, pour soutenir l’amendement n249.

M. Jean-Marie Tetart. Il est défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Cet amendement vise à revenir sur une disposition concernant la vente à la découpe adoptée en première lecture, qui représente une avancée, l’extension du champ d’application de la loi de 1989 aux immeubles vendus par lots de plus de cinq logements et non plus dix. La commission y est donc défavorable.

(L’amendement n249, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Lassalle, pour soutenir l’amendement n115.

M. Jean Lassalle. L’article 2 du projet de loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, qui renvoie à un article de la loi de 1989 portant modification de la loi de 1986 dont la rédaction ne précise pas suffisamment les conditions de reconduction d’un bail pour une durée inférieure à celle prévue à l’article 10, fait peser un risque d’arbitraire pour les locataires qui pourraient se voir imposer des conditions de reconduction de bail dangereuses et injustes.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Goldberg, rapporteur. M. Lassalle propose une durée minimale d’un an lors de la reconduction d’un bail. Une telle précision pourrait avoir des effets pervers puisque cette durée pourrait devenir la règle, les locataires concernés ne parvenant pas à obtenir un bail d’une durée supérieure. La commission a donc donné un avis défavorable à cet amendement.

(L’amendement n115, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n386, qui fait l’objet de deux sous-amendements.

M. André Chassaigne. L’objectif de mon amendement, c’est d’essayer de s’opposer aux reprises frauduleuses d’appartements par les propriétaires. Quand un bailleur indélicat souhaite par exemple résoudre un conflit avec un locataire sur un logement insalubre ou augmenter le loyer, il peut toujours donner un congé et ensuite relouer, sans que les raisons invoquées soient réelles. C’est donc une forme de garde-fou que je propose.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour soutenir les sous-amendements nos 767 rectifié et 766, et pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n386.

M. Daniel Goldberg, rapporteur. La commission est favorable à cet amendement, sous réserve de l’adoption de deux sous-amendements : le sous-amendement n766, qui impose au bailleur de justifier du caractère réel et sérieux de sa décision de reprise pour permettre au juge de bien vérifier la réalité de la situation, et le sous-amendement n767 rectifié, qui vise à préciser l’insertion de l’amendement dans le corps du projet de loi et dans la loi de 1989.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement et les sous-amendements ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Le Gouvernement est favorable à l’esprit de l’amendement de M. Chassaigne, qui est opportunément rendu plus efficace par les deux sous-amendements du rapporteur. Il est donc favorable à cet amendement sous réserve de l’adoption des sous-amendements.

Mme la présidente. Monsieur Chassaigne ?

M. André Chassaigne. Je suis très favorable aux sous-amendements du rapporteur.

(Les sous-amendements nos 767 rectifié et 766, successivement mis aux voix, sont adoptés.)

(L’amendement n386, sous-amendé, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Marianne Dubois, pour soutenir l’amendement n21.

Mme Marianne Dubois. Il n’y a aucune raison de diminuer la possibilité pour le nouveau propriétaire de donner congé au terme du bail en cours, puisque le bail n’est pas remis en cause par la vente : l’acquéreur d’un logement occupé est obligé de le respecter et d’aller au terme du bail en cours, et le locataire est protégé par son contrat.

Cette disposition aurait pour but d’instaurer un maintien dans les lieux pendant la durée d’un bail en cas de vente du logement, ce qui induirait une inégalité entre les locataires.

Il convient également de noter qu’en cas de vente à la découpe d’un immeuble, les locataires sont déjà protégés par un certain nombre de mesures comme la reconduction du bail, prévues à l’article 11-1 de la loi du 6 juillet 1989.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Défavorable. Adopter cet amendement conduirait à amoindrir la protection des locataires. Le congé vente est autorisé au terme du premier renouvellement du bail en cours et le congé reprise au terme du bail en cours ou après deux ans. L’équilibre que nous recherchons entre les uns et les autres ne serait plus respecté.

(L’amendement n21, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. François de Rugy, pour soutenir l’amendement n510.

M. François de Rugy. Il est défendu.

(L’amendement n510, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n638 rectifié.

M. Daniel Goldberg, rapporteur. C’est un amendement de précision.

(L’amendement n638 rectifié, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Piron, pour soutenir l’amendement n488.

M. Michel Piron. Notre excellent rapporteur venant à nouveau d’évoquer le nécessaire équilibre entre les bailleurs et les locataires, je lui propose un compromis pour le cas où des personnes acquièrent les biens occupés pour en faire leur résidence principale. Aujourd’hui, il est interdit de donner congé pour la première échéance suivant l’acquisition si cette dernière intervient moins de deux ans après. Je propose de ramener ce délai, qui semble excessif, à un an.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Ce compromis que nous recherchons tous, et je vous en donne acte, monsieur Piron, serait possible si j’avais la même appréciation que vous sur le caractère excessif de la durée de deux ans. Ce n’est pas le cas et la commission a donc donné un avis défavorable à votre amendement. La protection serait en effet moindre pour le locataire dans le cadre d’un congé pour reprise.

(L’amendement n488, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements, nos 385 et 681, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n385.

M. André Chassaigne. Il est défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n681, et pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n385.

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Nous sommes dans la même logique – la rédaction de ces amendements est d’ailleurs très proche. Il s’agit de renforcer les modalités d’intervention du juge lors d’un litige portant sur la délivrance du congé. Néanmoins, j’ai une très légère préférence pour mon amendement, monsieur Chassaigne, qui apporte une précision, sachant toute la difficulté pour le locataire de contester un congé frauduleux. Si vous acceptiez de retirer le vôtre pour vous joindre au mien, nous serions dans une logique commune.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur ces deux amendements ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Même avis que le rapporteur et j’attends la réponse de M. Chassaigne.

Mme la présidente. Monsieur Chassaigne ?

M. André Chassaigne. S’il est possible de créer une convergence, je me précipite dans les bras du rapporteur (Rires), et je retire donc l’amendement n385.

(L’amendement n385 est retiré.)

(L’amendement n681 est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n640.

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Pour conclure nos retrouvailles avec André Chassaigne, cet amendement vise à préciser le dispositif que ce dernier a proposé en première lecture, qui vise à suspendre la possibilité pour le bailleur de donner congé dès lors que la procédure d’insalubrité a été déclenchée. Il apporte plusieurs modifications permettant d’encadrer le dispositif.

D’abord, la suspension de la possibilité de donner congé doit couvrir tous les motifs pour éviter les détournements de l’objectif, juste, de protection du locataire affiché par le texte, donc par l’amendement initial. Or la rédaction du projet laisse la possibilité au bailleur de donner congé pour un motif légitime et sérieux, parmi lesquels la réalisation de travaux, ce qui risque d’en vider la portée. En effet, l’article 15 de la loi de 1989 précise que le congé doit être justifié soit par décision de reprendre ou de vendre le logement, soit par un motif légitime et sérieux. Il est donc proposé de ne pas préciser la nature du congé visé.

Ensuite, alors que la rédaction initiale ne visait que la procédure de constatation de l’insalubrité, il est nécessaire, afin de garantir l’égalité entre les occupants de logements susceptibles d’être déclarés insalubres ou dangereux, d’étendre la portée de votre dispositif. Le présent amendement élargit donc le dispositif initial aux locaux menaçant ruine et potentiellement visés par un arrêté de péril. Il précise également la date à compter de laquelle la suspension prend effet.

Enfin, cet amendement précise les dates mettant fin à la suspension de la possibilité de donner congé pour les deux procédures concernées. La clarification de l’articulation de ces dispositions avec celles figurant à l’article L. 512-2 du code de la construction est également visée.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Favorable.

Mme la présidente. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Jugeant tout à fait pertinentes les évolutions proposées par le rapporteur, je confirme ce mariage de raison. (Sourires.)

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Ce sont ceux qui durent le plus !

(L’amendement n640 est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Mathis, pour soutenir l’amendement n62.

M. Jean-Claude Mathis. Cet article vise à réduire le délais de préavis à un mois dans les zones tendues. Or un tel délai peut s’avérer trop court pour le propriétaire, notamment lorsque le préavis est donné en début d’été. Un délai de deux mois dans les zones tendues permettrait de prendre en compte la diversité et la réalité du marché immobilier, sans pour autant porter atteinte à la situation du propriétaire.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Cet amendement vise à rétablir le délai de préavis à deux mois en zone tendue, alors que notre assemblée a tenu à le porter à un mois dans ces zones où trouver un locataire ne pose aucun problème. Compte tenu de la structuration du marché locatif dans ces zones, du déséquilibre entre l’offre et la demande, la commission a émis un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Tetart.

M. Jean-Marie Tetart. Je confirme qu’il n’y a certainement pas de problème pour trouver un locataire en zone tendue, mais pendant l’été il peut être très difficile de faire venir un artisan pour rafraîchir le logement. Cela fait partie du respect pour le nouveau locataire de lui livrer un logement en bon état. Dites-moi comment vous faites, à Paris au mois d’août, quand vous n’avez qu’un mois, pour appeler des artisans, établir un devis, faire réaliser des travaux avant l’entrée dans les lieux.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Votre préoccupation, cher collègue, est légitime, mais vous parlez du délai une fois que le locataire a quitté les lieux. Le délai de préavis, c’est avant que le locataire ait quitté le logement, donc à un moment où l’état des lieux de sortie n’a pas encore été réalisé et où les travaux ne sont pas engagés. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

(L’amendement n62 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. François de Rugy, pour soutenir l’amendement n530.

M. François de Rugy. Il s’agit d’intégrer la performance énergétique dans les critères ouvrant la possibilité de résilier un bail. Compte tenu des prix, de la difficulté à trouver un logement en zone tendue, certains locataires peuvent être amenés à accepter des logements qui se révèlent à l’usage de véritables passoires thermiques. Ils dépensent alors beaucoup en chauffage pour un confort très mauvais. Par ailleurs, des logements, y compris assez récents, malheureusement, équipés de chauffage électrique, ont de très mauvais rendements, chauffent très mal, offrant ainsi un très mauvais confort, tout en coûtant très cher en termes de factures de chauffage. Cela conduit beaucoup de ménages à une situation de précarité énergétique. Ce n’est d’ailleurs pas uniquement une question de niveau de revenu pour les locataires, mais aussi et d’abord une question de niveau des factures. Il faut s’attaquer à ce problème.

Pour cela, il conviendra de travailler à des dispositifs plus aboutis qui, dans le même esprit que cette loi essayant d’instaurer des rapports équilibrés entre propriétaires et locataires, garantissent un droit à des logements bien isolés. De tels dispositifs méritent d’être travaillés, et nous y reviendrons sans aucun doute en examinant la loi de transition énergétique. En attendant, nous proposons cette disposition assez simple relative au bail.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Cet amendement a été présenté à plusieurs reprises et a reçu chaque fois un avis défavorable. Il ne paraît pas pertinent d’étendre le délai de préavis d’un mois tant que le diagnostic de performance énergétique ne sera pas un outil fiable, ce qui n’est pas encore le cas.

(L’amendement n530, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements, nos 540 et 188, pouvant être soumis à une discussion commune.

L’amendement n188 fait l’objet d’un sous-amendement n768.

La parole est à Mme Laurence Abeille, pour soutenir l’amendement n540.

Mme Laurence Abeille. Le présent amendement a pour objet de préciser les conditions dans lesquelles la commune peut se porter acquéreur d’un logement dans le cadre d’interventions visant à lutter contre la vente à la découpe. La disposition a été introduite en première lecture. Cet amendement complète l’alinéa 41 de l’article 2 en s’inspirant des dispositions du code de l’urbanisme relatives au droit de préemption urbain. En pratique, il impose à la commune de procéder au règlement du prix fixé dans un délai de six mois à compter de sa décision d’acquérir le bien ou de la décision définitive de la juridiction saisie pour déterminer le juste prix. Par ailleurs, il précise qu’à défaut de règlement dans ce délai, le propriétaire récupère l’entière jouissance de son bien, pouvant ainsi le vendre à toute personne se portant candidate à l’acquisition. Ces évolutions contribuent donc à consolider le dispositif envisagé initialement, tout en conservant l’ambition initiale : protéger les locataires des opérations de vente à la découpe, qui conduisent à les jeter à la rue.

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n188 qui fait l’objet d’un sous-amendement n768.

La parole est à Mme Sandrine Mazetier, pour soutenir l’amendement.

Mme Sandrine Mazetier. En première lecture, à l’initiative du groupe socialiste, l’Assemblée a adopté les alinéas 39 à 41 de l’article 2 qui créent une forme de droit de « postemption », c’est-à-dire un dispositif permettant à une commune de se porter acquéreur de lots en cas de vente à la découpe. Quand une commune ne peut pas – Jean-Luc Laurent décrira, je crois, des opérations de vente en bloc d’immeubles – se porter acquéreur de tous les appartements mis en vente par un bailleur, cela lui permet d’intervenir après que des appartements ont été proposés à leurs locataires occupants, certains s’en portant acquéreurs, d’autres ne le pouvant pas.

C’est une très grande avancée, mais nous n’avons pas été très précis – je suis la première à me jeter la pierre –, car nous n’avons pas borné ce droit de « postemption ». Cet amendement propose donc de le borner dans le temps, en portant le délai à six mois, plutôt qu’à quatre, comme le propose l’amendement du groupe écologiste. Pourquoi six mois ? Parce que c’est un délai connu, calé sur le droit de préemption urbain. Cela nous paraît de nature à consolider cette grande avancée que représentent les alinéas 39 à 41, qui avaient recueilli un avis favorable de la commission et du Gouvernement en première lecture.

Je tiens à remercier les services de la commission des affaires économiques de l’Assemblée et à saluer l’extrême vigilance et précision du rapporteur, qui sous-amende cet amendement pour le rendre encore plus performant.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir le sous-amendement n768 et pour donner l’avis de la commission sur les amendements nos 540 et 188.

M. Daniel Goldberg, rapporteur. La démarche de nos deux collègues est similaire. Je donnerai néanmoins la préférence à l’amendement que vient de présenter Sandrine Mazetier car il respecte des délais plus connus en matière de préemption. Mon sous-amendement à cet amendement reprend d’ailleurs une partie des préoccupations exprimées par Mme Abeille puisqu’il ajoute le cas de l’adjudication à ce processus de « postemption ». Comme l’a très bien dit Mme Mazetier, avec cet amendement qui complète l’alinéa 41 adopté par notre assemblée, le dispositif sera plus encadré, plus sûr juridiquement, et rendra l’action des communes plus efficace dans ces cas particuliers. L’avis de la commission est donc favorable à l’amendement n188 si Mme Mazetier accepte le sous-amendement. Je propose à Mme Abeille de se rallier à cette nouvelle rédaction qui reste dans la logique qu’elle partage.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur ces deux amendements et ce sous-amendement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Le complément adopté aux dispositions déjà votées est juste. Je partage, madame Mazetier, votre argumentation, qui reprend les préoccupations exprimées par Mme Abeille, tout en considérant que le sous-amendement est nécessaire.

Mme la présidente. Retirez-vous votre amendement, madame Abeille ?

Mme Laurence Abeille. Oui, madame la présidente. Le travail a été très collaboratif sur cette thématique de la vente à la découpe, qui est une préoccupation importante, en particulier dans les territoires urbains denses et dans nombre de circonscriptions où la spéculation immobilière va grand train. Instaurer des règles comme nous le faisons aujourd’hui, dans un esprit commun, pour protéger les populations, me semble aller dans le bon sens. Je remercie le Gouvernement d’avoir agi sur cette thématique dans le cadre du présent texte.

(L’amendement n540 est retiré.)

Mme la présidente. La parole est à M. Benoist Apparu.

M. Benoist Apparu. La ministre, hier, m’a fait une jolie leçon en m’affirmant que cette loi ne complexifiait rien, qu’il s’agissait seulement de modifications de lois existantes. Chacun comprendra que cet article 2 n’est en rien un élément de complexification ; c’est évidemment une simplification !

Mme Marie-Christine Dalloz. Très bien !

M. Benoist Apparu. Je suis convaincu que le Conseil constitutionnel appréciera à sa juste valeur cette nouvelle idée qui consiste à faire de la préemption après que la vente a été réalisée.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Luc Laurent.

M. Jean-Luc Laurent. Le sujet de la régulation des ventes à la découpe est bien connu, notamment de M. Apparu. Des dispositifs ont été créés sous la précédente législature…

M. Benoist Apparu. Avant !

M. Jean-Luc Laurent. …pour combler un manque de la législation lorsque des institutionnels se retirent, préférant, une fois le bien amorti, réinvestir ailleurs. En effet des locataires pouvaient alors se trouver en difficulté, certains pouvant acquérir, d’autres ne le pouvant pas. Le législateur a ainsi mis en place un dispositif passant par une concertation obligatoire avec la ville et par une charte, celle-ci n’ayant cependant pas de valeur contraignante puisqu’il s’agit d’une charte d’intention.

Ayant eu moi-même à connaître de telles situations, j’ai donc décidé d’être également signataire de l’amendement présenté par Mme Mazetier, qui permet d’instaurer des mesures de régulation et de protection lorsque des occupants locataires, soumis à la réalité d’une vente, n’ont pour seul choix que d’acheter ou de partir – certains, faute de moyens suffisants, devant alors s’adresser à la commune pour être relogés. J’ajoute que le prix de vente, dans ce type d’opération, n’est pas fixé au mètre carré de façon uniforme, mais qu’il varie selon l’appartement, selon l’ancienneté et tout un ensemble de critères de pondération qui nuisent à l’esprit de justice.

Donner un pouvoir d’intervention à la commune qui peut réguler la situation, protéger les occupants et maîtriser le devenir de ce parc, qui pourrait faire l’objet d’une future copropriété dégradée, est particulièrement nécessaire. Je soutiens pleinement ce qui est proposé, y compris l’enrichissement du rapporteur. Je voulais apporter ce témoignage à l’appui de cet amendement qui me semble particulièrement opportun.

Mme la présidente. La parole est à Mme Sandrine Mazetier.

Mme Sandrine Mazetier. M. Apparu me conduit à intervenir de nouveau. En matière de simplicité, notre collègue a en effet des leçons à nous donner !

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. C’est vrai !

Mme Sandrine Mazetier. Qu’avez-vous fait, monsieur Apparu, s’agissant des ventes à la découpe ? Rien ! Il n’y a donc pas plus simple que votre action pour lutter contre la spéculation immobilière et contre la spécialisation sociale et générationnelle de quartiers entiers en zones tendues. Vous avez en effet fait très simple, c’est-à-dire rien !

M. Benoist Apparu. C’était une proposition de loi de Mme Aurillac !

Mme Sandrine Mazetier. Vous avez en revanche passé votre temps – vous et les membres du gouvernement auquel vous apparteniez – à opposer l’intervention privée et l’intervention publique, les locataires et les propriétaires. L’état d’esprit de ce texte et de cette majorité, c’est d’agir concrètement tout en n’opposant pas les uns aux autres et de permettre à un bailleur qui veut se défaire, à un instant T, d’une partie de son patrimoine, parce qu’il en a besoin, de le faire : au locataire occupant de devenir propriétaire s’il le souhaite et s’il le peut ; et à la commune d’intervenir après que tout cela s’est déroulé en bonne intelligence.

C’est donc simple, monsieur Apparu : nous agissons quand vous n’agissiez pas.

Mme Marie-Christine Dalloz. Ce n’est pas lisible !

M. Michel Piron. C’est un peu manichéen !

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Je voudrais répondre à l’interpellation de M. Apparu qui connaît parfaitement ces sujets.

Il ne s’agit pas en l’occurrence d’affaiblir juridiquement une vente, puisqu’elle n’est pas conclue.

Mme Marie-Christine Dalloz. Mais si !

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Il s’agit, au moment où un nouveau propriétaire propose au locataire soit de partir, soit d’acheter, de permettre que la commune puisse elle-même intervenir, comme dans le cas du droit de préemption urbain. Il n’existe donc aucun risque sur le plan constitutionnel, puisqu’il s’agit de dispositions qui poursuivent un motif d’intérêt général évident. Il s’agit de prévoir très précisément – c’est l’actuelle rédaction de l’alinéa – que la commune puisse être informée prioritairement d’une vente et, partant, décider d’acquérir un bien à un prix initialement fixé par le propriétaire.

Il peut y avoir une contestation sur le prix, et l’intérêt de la démarche de Mme Mazetier et de Mme Abeille est de faire en sorte d’asseoir juridiquement le dispositif en fixant à la commune une durée maximale – six mois si nous adoptons l’amendement sous-amendé – pour déterminer le prix de ce bien.

Mme la présidente. La parole est à M. Benoist Apparu.

M. Benoist Apparu. Mme Mazetier a sans doute oublié que Mme Aurillac n’était pas tout à fait une députée de gauche ! Or c’est sa proposition de loi qui a permis de créer le droit qui protège et limite les ventes à la découpe. je ferai toutefois un reproche à son texte : elle est arrivée après le film.

Mme Sandrine Mazetier. Mais non, cela continue !

M. Benoist Apparu. En effet, l’ensemble des ventes à la découpe avaient malheureusement déjà eu lieu, et aujourd’hui sa loi, comme ce que vous rajoutez, madame Mazetier, est un frein au développement de l’offre de logement, notamment à Paris. En effet, tous les institutionnels vous diront que si l’on veut faire revenir les zinzins pour créer du logement intermédiaire à Paris, comme en Île-de-France, il faut deux choses : une rentabilité a minima – peut-être que le produit co-inventé par le ministère et la SNI permettra d’y répondre – ainsi que la liberté d’arbitrage. Tout investisseur veut pouvoir arbitrer son patrimoine au moment où il en a besoin. Or aujourd’hui la loi Aurillac, faite par la droite, comme ce que vous rajoutez là, sont un frein au retour des institutionnels, dont nous avons besoin pour réguler le marché parisien.

M. Jean-Luc Laurent. Eh bien, vous au moins, vous êtes libéral-libéral ! Tout pour le marché !

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Tetart.

M. Jean-Marie Tetart. Je veux simplement vérifier qu’il existe bien une obligation d’informer la mairie dans le cas où il y a non-acceptation de l’achat par le locataire et que si une vente s’est effectuée au profit d’un autre acquéreur sans que l’information ait été fournie à la mairie, elle est annulée.

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Bien sûr !

Mme la présidente. La parole est à Mme Annick Lepetit.

Mme Annick Lepetit. Puisque nous sommes à l’heure de vérité, je voulais rappeler à M. Apparu que si Mme Aurillac siégeait alors sur les bancs de l’UMP, la droite gouvernant le pays, sa proposition de loi – adoptée certes un peu tardivement, mais qui a le mérite d’exister – n’a été présentée que parce que parce que nous-mêmes en avions déposé une et que le gouvernement s’est empressé de demander à son groupe majoritaire de faire la même chose – c’était d’ailleurs tout à son honneur, car il commençait à comprendre qu’il y avait un vrai problème en la matière.

M. Benoist Apparu. Quand il y a une bonne loi de droite, c’est donc grâce à la gauche !

M. Daniel Goldberg, rapporteur. C’est vrai !

Mme Annick Lepetit. Quand vous répondez à Mme Mazetier que seuls les députés UMP auraient lutté contre la vente à la découpe, personne ne peut donc le croire.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz.

Mme Marie-Christine Dalloz. Je relève deux aspects troublants : non seulement on met là un frein à une vente librement consentie, mais on donne six mois à la commune à compter de l’acte ou du jugement d’adjudication ! C’est incroyable !

Par ailleurs, madame Mazetier, si nous connaissons le droit de préemption, voilà que vous venez d’inventer la « postemption ». Je rejoins Benoist Apparu : d’un point de vue constitutionnel, ce nouveau concept me semble vraiment très intéressant !

(Le sous-amendement n768 est adopté.)

(L’amendement n188, sous-amendé, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Christophe Caresche, pour soutenir l’amendement n300.

M. Christophe Caresche. Il s’agit d’un amendement purement technique qui vise à rectifier une erreur matérielle commise au Sénat lors de l’adoption de l’amendement destiné à étendre l’exemption du droit de préemption du locataire. Il semblerait que les références ne sont pas exactes. J’imagine que la commission et le Gouvernement se sont saisis de ce problème. En tout cas, je propose de faire en sorte que cette disposition trouve sa place au bon endroit dans le code.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Cet amendement est de bon aloi et corrige une erreur matérielle adoptée par mégarde, je n’en doute pas, par nos collègues du Sénat, concernant le loyer de référence majoré. Avis favorable.

(L’amendement n300, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 2, amendé, est adopté.)

Article 3

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Piron, inscrit sur l’article.

M. Michel Piron. Je tiens simplement, à l’occasion de cet article relatif à l’encadrement des loyers – ce qui vaudra d’ailleurs, madame la présidente, défense de mon n202 – rappeler quelques-uns des arguments que j’ai essayé de faire partager en commission, vainement certes, mais sans doute n’avais-je pas été suffisamment clair. Je vais donc tenter de l’être un peu plus, voire d’être persuasif, puisque tous les espoirs sont toujours permis dans nos débats.

À quoi l’encadrement des loyers entend-il répondre ? Au fait qu’il y a des loyers trop élevés, beaucoup trop élevés.

M. Marc Goua. Bravo !

M. Daniel Goldberg, rapporteur. C’est bien !

M. Michel Piron. Nous partageons tous ce constat.

M. Jean-Luc Laurent. À la bonne heure !

M. Michel Piron. Mais encore faut-il alors se poser une seconde question : pourquoi ces loyers sont-ils beaucoup trop élevés en zones tendues ? (« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC.) Je précise « en zones tendues », car aujourd’hui dans sept régions de France les loyers baissent depuis deux ans en raison d’un nombre important de logements vacants, notamment dans le Limousin, la Champagne-Ardenne ou en Midi-Pyrénées.

M. Marc Goua. Ce sont des produits financiers !

Mme Annick Lepetit. Grâce à la loi de Robien !

M. Michel Piron. Les zones dites très tendues, avec des loyers beaucoup trop élevés, se trouvent en Île-de-France, dans le Genevois français, en Rhône-Alpes, dans une partie de la région PACA et dans quelques autres métropoles dont Toulouse, Nantes ou Bordeaux. Si les loyers y sont trop élevés, c’est parce qu’il y a une insuffisance de logements…

M. Jean-Luc Laurent. La politique de l’offre ne suffit pas…

M. Michel Piron. ...et cela, de toute évidence, depuis très longtemps – je dédouane Mme la ministre d’une responsabilité qu’elle ne porte certainement pas toute seule.

Mme Annick Lepetit. Cela fait dix ans que nous le disons !

M. Michel Piron. Les experts évoquent à cet égard 800 000 à 1 million de logements. Or quelle réponse vous proposez-nous à cette insuffisance de logements ? Un encadrement des loyers !

Mme Annick Lepetit. Mais non !

M. Michel Piron. Je veux revenir sur l’exemple allemand que j’ai entendu citer à plusieurs reprises. C’est en effet un exemple remarquable de gestion des loyers, qui tournent autour d’une médiane, sachant que la question est gérée à l’échelle des Länder voire, par subsidiarité, des grandes villes. Pour m’être moi-même rendu dans trois villes allemandes, j’ai pu constater que, Berlin mis à part pour des raisons très particulières de reconstruction, il n’y a pas de problème d’insuffisance de logements. C’est vrai à Cologne ou à Düsseldorf, qui ne sont pas de petites villes, où existent, outre de bonnes relations entre locataires et propriétaires, un loyer médian et des observatoires décentralisés – j’insiste sur ce point – de même qu’un triptyque qui repose sur les élus locaux, sur les représentants des locataires et sur ceux des propriétaires.

Je me permets de rappeler, car n’est pas un détail, que dans ce pays, 56,7 % des habitants sont locataires, à l’inverse de la proportion française. Partant donc d’une situation qui n’a rien à voir avec la nôtre, on nous propose de créer des observatoires des loyers qui permettront de calculer des loyers médians pour encadrer les baux.

Première observation : cela ne créera pas un logement supplémentaire. Pire, ce peut même être un signe décourageant pour les investisseurs alors que ceux-ci manquent cruellement dans le domaine du logement, y compris dans les zones dites tendues. C’est donc une mesure qui risque économiquement d’être contre-productive.

Deuxième observation en matière économique : les bailleurs existants risquent, du fait de cet encadrement, de ne plus faire de travaux, du moins ceux dont ils ne pourraient pas répercuter suffisamment le coût dans le loyer. On peut même avoir en conséquence une dégradation du parc. C’est un autre élément négatif

Troisième observation en matière cette fois-ci sociale. Prenons la mécanique de l’encadrement des loyers, sachant que l’on va calculer des médianes sur des périmètres qui, selon M. Goldberg, seront suffisamment fins pour obtenir un maillage du territoire : supposons, même si j’en doute, que ce maillage puisse être réalisé de manière idéale dans les zones tendues au-dessus de 50 000 habitants. Il pourra toujours être contesté dans le cadre d’un contentieux. Ainsi, en Bretagne-Pays-de-Loire, il y a, dans l’agglomération nantaise, des différences de 8 % à 10 % entre Nantes et d’autres communes de la métropole. Dès lors quelle médiane allez-vous prendre ? Si c’est celle de la métropole, vous allez pénaliser Nantes, mais si vous optez pour des périmètres plus étroits, les moyennes seront très peu significatives car il y aura trop peu de loyers à observer.

Mais revenons à Paris, une zone particulièrement tendue. Loyer médian dans la capitale : 23 euros le mètre carré. On peut décider à 20 % au-dessus, soit 28 euros le mètre carré, de faire baisser les loyers, mais j’aimerais savoir combien de ménages peuvent payer ce niveau de loyer. Prenons les 3 % du dernier décile des locataires très aisés – des cadres supérieurs qui se baladent dans le monde entier – : on a des loyers à 40 euros le mètre carré. Ces gens auront les moyens, croyez-moi, de trouver des experts pour savoir si c’est le bon loyer par rapport à la médiane. Ce sont donc les ménages les plus aisés, les mieux informés, qui vont pouvoir alors demander qu’on aligne leur loyer vers la médiane et le feront ainsi baisser. En revanche, si je prends un loyer médian inférieur de 30 %, soit autour de 16 euros, le propriétaire pourra dire à son locataire dont le bail à prix fixe est de 7 euros à 8 euros le mètre carré qu’il est beaucoup trop loin de la médiane et qu’il faut remonter son loyer.

Mme Annick Lepetit. Ça n’existe plus !

Mme Sandrine Mazetier. Regardez la réalité, monsieur Piron !

M. Michel Piron. On risque ainsi d’avoir un effet pervers social : les loyers les plus élevés des ménages les plus aisés baisser, et les loyers les plus bas des ménages les moins aisés monter !

Je ne conteste pas vos bonnes intentions, madame la ministre – je sais très bien qu’au départ, l’encadrement des loyers vise à empêcher des loyers trop élevés –, mais on aboutira à un résultat totalement inverse à celui recherché. Nous ne comprenons pas que vous ne posiez pas la bonne question et que vous apportiez une réponse totalement erronée à la situation très difficile que connaissent les locataires en zone tendue. Dans tout ce projet de loi, c’est vraiment le point qui nous interdit malheureusement de le voter. Nous approuverons beaucoup d’autres dispositions, vous le savez, mais nous avons ici un désaccord total.

Mme la présidente. Nous en venons aux amendements.

La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l’amendement n63 tendant à supprimer l’article 3.

Mme Marie-Christine Dalloz. L’article 3 prévoit les modalités d’encadrement des loyers autour de la création des observatoires locaux des loyers dans les zones tendues, c’est-à-dire les zones d’urbanisation continue de plus de 50 000 habitants faisant l’objet de la taxe sur les logements vacants. D’une part, sur le principe, un tel dispositif risque de décourager les propriétaires et donc les investisseurs, et aura au final un effet contre-productif. Un encadrement des loyers s’apparente en effet à une nationalisation du secteur du logement privé qui serait alors sur-administré au même titre que le logement social.

De plus, cette mesure s’apparente à une ingérence dans la faculté pour le propriétaire de gérer librement son bien. Rien ne justifie une telle privation de liberté alors qu’on constate que durant ces dix dernières années, les loyers ont évolué moins vite que l’inflation. Vous allez par cette mesure, madame la ministre, provoquer une dégradation de la rentabilité des investissements,…

Mme Annick Lepetit. C’est contradictoire !

Mme Marie-Christine Dalloz. …ce qui va remettre en cause la qualité comme la quantité du parc locatif.

Par ailleurs, le mécanisme choisi pour encadrer les loyers risque d’aboutir à une augmentation des loyers actuellement plus bas, c’est-à-dire ceux inférieurs au loyer médian qui servira de référence pour les actions en réévaluation. En outre, ces loyers de référence ont vocation à évoluer puisqu’ils sont déterminés « en fonction de la structuration du marché locatif » selon l’alinéa 11. Il est donc à craindre un effet boule de neige à la hausse, au détriment des locataires aux loyers les plus bas.

Je tiens à rappeler, mes chers collègues, que le marché de l’immobilier a besoin de confiance, y compris de la confiance des ménages.

Mme Annick Lepetit. On l’a bien vu en effet ces dernières années !

Mme Marie-Christine Dalloz. Votre texte, madame la ministre, notamment l’article 3, crée une véritable rupture de confiance. C’est une erreur grave. Pour toutes ces raisons, nous proposons la suppression de cet article.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Je propose de ne pas refaire le débat que nous avons eu en commission au mois de juillet, en séance au mois de septembre, en commission au mois de décembre. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.) Vous avez le droit de vous exprimer autant que vous le souhaitez dans le cadre du temps législatif programmé – que vous avez, chers collègues de l’opposition, imposé à cette assemblée –, mais moi, j’ai celui de ne pas répéter les arguments que j’ai déjà donnés à trois reprises.

Je tiens juste à renvoyer au tableau que vous trouverez dans le rapport qu’Audrey Linkenheld et moi-même avons rédigé en juillet dernier, rapport qui précisait déjà aux pages 127, 129 et 130 le mécanisme de l’encadrement des loyers – montrant qu’on n’est pas du tout dans une nationalisation, madame Dalloz –, et donnait quelques exemples très concrets à l’échelle de tout Paris qui répondent en partie aux interrogations soulevées par Michel Piron. Mais je tiens aussi à apporter quelques chiffres supplémentaires concernant un arrondissement parisien qui connaît aujourd’hui des évolutions en termes de logement et d’habitat avec des personnes qui y résident depuis longtemps et d’autres qui viennent d’arriver et dont les standards de logement sont donc différents.

La question nous a été posée du niveau de la médiane par rapport au niveau des loyers moyens déjà connu, je vais donc préciser que la médiane pour un deux-pièces, dans le XVIIIarrondissement, est de 20,40 euros du mètre carré. Si on avait appliqué le dispositif proposé uniquement sur les relocations, 24 % des logements concernés auraient été impactés par le fait qu’ils dépassent la médiane majorée mais, encore plus intéressant, 67 % des logements à la relocation auraient une différence de loyer supérieure à l’IRL.

Mme Marie-Christine Dalloz. Vous ne parlez que de Paris !

M. Daniel Goldberg, rapporteur. On raisonne beaucoup en termes de médiane majorée ou minorée, mais l’impact touchera plus la relocation en fonction d’une évolution liée à l’IRL.

Je vous rappelle qu’au mois de juillet déjà, j’ai dit que dans les zones tendues, et pas seulement à Paris, le décret qu’a pris Mme la ministre dès son arrivée en 2012 aura un impact significatif pour les ménages en termes de gain de pouvoir d’achat. Ainsi, dans le XVIIIarrondissement, pour un deux-pièces avec une médiane de 20,40 euros du mètre carré, les logements dépassant la médiane majorée produiraient un gain de 112 euros par mois pour le locataire – sauf complément de loyer exceptionnel prévu par la loi –, et de 60 euros par mois en cas de relocation. On voit donc qu’il y aura un impact significatif.

J’insiste sur le fait qu’il ne s’agit pas d’encadrer administrativement. Cécile Duflot ne va pas fixer dans son bureau le montant des loyers pour chaque quartier et pour chaque type de logement. Il s’agit de réguler, en observant la réalité du marché, l’attitude de propriétaires qui, dans un contexte de crise du logement, exigent des montants de loyer qui s’écartent de beaucoup du marché. Pour toutes ces raisons, cet amendement de suppression a reçu un avis défavorable de la commission.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. On peut être d’accord ou pas avec la régulation, c’est une divergence de fond qui peut exister, mais nous pouvons dépasser ce débat idéologique et je tiens à cet égard à préciser deux éléments.

Tout d’abord, je ne peux laisser dire qu’il y aurait un risque d’augmentation des loyers. Cela heurte la raison : pourquoi des loyers augmenteraient-ils plus quand ils sont encadrés que si leur fixation est totalement libre ? Aujourd’hui, un propriétaire peut fixer son loyer en totale liberté. Qui peut croire que si celui-ci était encadré, il le fixerait à un niveau plus élevé ?

Mme Marie-Christine Dalloz. Parce que certains loyers sont bien plus bas que la médiane !

Mme Cécile Duflot, ministre. Assumez votre divergence politique, madame la députée, mais n’usez pas d’arguments qui n’ont aucun sens.

Ensuite, nous avons choisi de doter la France d’un outil qui n’existe jusqu’à présent qu’en Île-de-France, à savoir un observatoire unifié du montant des loyers, dorénavant sur l’ensemble du territoire français. Par souci de précision, nous avons opté pour un modèle qui associe l’ensemble des acteurs – les collectivités locales, l’État, les associations de locataires et les professionnels – car c’est un bon dispositif : l’OLAP – l’observatoire des loyers de l’agglomération parisienne – existe depuis des années et fonctionne bien. J’ajoute qu’un comité scientifique pilote l’élaboration de la méthodologie du recueil des données. Il rassemble des statisticiens de toutes origines, sa composition est publique. Ils n’ont d’ailleurs pas tous un avis tranché sur cette question, mais leur méthode de travail est extrêmement rigoureuse.

Le choix que nous avons fait est d’abord celui du loyer médian, 50 % des loyers lui étant supérieurs, et 50 % inférieurs. Il ne s’agit donc pas de la moyenne qui, elle, serait beaucoup plus sensible aux flux et aux nouveaux loyers. Le loyer médian, lui, s’appuie sur le stock et est donc structurellement plus bas du fait de l’augmentation du loyer moyen ces dernières années. Il a donc une tendance plus forte à la contention puisque la durée des baux étant longue, ceux-ci n’évoluent que lentement.

Notre choix, ensuite, a été celui d’une maille doublement fine, déterminée en fonction du quartier et du type de logement.

Puisque les loyers varient selon les localisations, la maille ne sera donc pas exactement la même dans toutes les agglomérations. En ce qui concerne Paris, par exemple, nous irons même bien au-delà d’un loyer de référence par arrondissement – l’OLAP dispose d’un découpage en nombreux quartiers.

Mme Sandrine Mazetier. Très bien ! Précision très utile !

Mme Cécile Duflot, ministre. Comme l’a indiqué le rapporteur, le maillage tiendra également compte du type de logement. Évidemment, le prix au mètre carré n’est pas le même pour un quatre-pièces ou un studio.

Quand nous avons annoncé la mise en œuvre de cet engagement n22 sur l’encadrement des loyers, un engagement fort du Président de la République, je savais que nous aurions un débat politique assez vif. Mais j’ai relevé des méthodes assez cocasses. Ainsi, le jour, ou le lendemain, de l’annonce de la future mesure, certains ont expliqué de manière tonitruante que, puisque les loyers baissaient, il n’était plus nécessaire de les encadrer.

Si nous nous trouvons dans une zone où les loyers diminuent, ils n’auront aucun mal à se trouver sous le plafond. Illustration : si je décidais, poussée par mon nouveau caractère bolchevique, (Sourires) d’encadrer le prix de la baguette de pain à quatre euros, la mesure ne gênerait sans doute aucun boulanger. Dans une situation où les loyers n’augmentent que très peu, l’encadrement ne pose de problème à personne puisqu’il ne s’agit pas, répétons-le, d’une fixation administrative du prix.

M. Michel Piron. Nous ne sommes pas à ce niveau-là !

Mme Cécile Duflot, ministre. Autre argument entendu : comment un gouvernement de gauche peut-il prendre une mesure qui va faire baisser le loyer des riches et augmenter celui des pauvres ? Je vous avoue que je m’attendais à tout, mais pas à cela. L’argument erroné consiste à penser que ce sont les plus riches qui paient les loyers les plus chers. Or, tous les chiffres démontrent l’inverse. Pourquoi ? D’abord, parce que les moins riches sont logés dans des logements plus petits, ceux dont le coût au mètre carré est le plus élevé.

Mme Annick Lepetit. Eh oui !

Mme Cécile Duflot, ministre. Ce dispositif bénéficiera donc de façon privilégiée à ceux qui paient cher en proportion de leur revenu pour être plus mal logés. Ensuite, parce que plus on est riche, plus on est propriétaire. C’est une situation avérée : le statut de locataire est directement corrélé au niveau de ressources des ménages.

Voilà des arguments contradictoires dont j’ai noté qu’ils avaient porté, certains se laissant convaincre de manière plus sincère que d’autres. C’est pourquoi je voulais reprendre ces éléments, monsieur Chassaigne, après avoir fait l’exercice avec les uns et les autres pour démontrer leur caractère erroné.

Autre argument soulevé : cet encadrement ne touchera que très marginalement quelques loyers. Selon les simulations que nous avons effectuées pour l’Île-de-France, nous estimons que 25 % à 30 % des loyers baisseront de manière significative, sans doute autour d’un quart de leur montant, dès l’application de la mesure d’encadrement des loyers.

Ces derniers temps, j’ai constaté que beaucoup doutaient. Nous avons vécu dans un pays où la dérégulation était tellement la règle que la modération, la régulation et l’intervention de la puissance publique semblent inexistantes ou impossibles. Puisque ce projet de loi va être adopté – je suis heureuse de pouvoir compter sur la majorité pour ce faire – je vous donne rendez-vous.

Nous appliquerons cette loi qui est très simple pour une raison évidente liée au bail type : l’encadrement figurera dans le bail et le locataire pourra vérifier si son loyer le respecte. Qui plus est, grâce aux dispositions qui permettent les simulations sur internet, chacun pourra vérifier très aisément si son loyer se situe ou non dans l’encadrement.

Je ferai, avec le sourire, une dernière observation : comme vous l’avez noté, monsieur Piron, certains loyers commencent à baisser de même que le prix de l’immobilier. Permettez-moi de vous dire que ce n’est pas par l’opération du Saint-Esprit.

Mme Véronique Louwagie. Ce n’est pas grâce à vous et votre texte !

Mme Cécile Duflot, ministre. Je vous remercie, madame Louwagie, parce qu’en général on met les difficultés du marché de l’immobilier sur le compte du projet ALUR. J’ai bien noté que ce texte n’ayant pas été adopté, il ne peut avoir d’effet immédiat sur le marché. Je le noterai parce que tous vous amis considèrent, en général, que les difficultés de l’immobilier proviennent de ce texte qui est encore en débat.

En revanche, cette volonté de modération, cet engagement résolu en faveur de l’encadrement des loyers, notamment par la mise en œuvre du décret, a produit un effet dont je me réjouis.

En conclusion, je crois que l’action publique est non seulement possible, mais aussi légitime et nécessaire quand elle s’applique à un bien de première nécessité comme le logement dans le contexte actuel. C’est le sens de ce projet de loi.

J’invite ceux qui s’y opposent à le faire de manière naturelle, claire et tranquille comme vous, monsieur Tardy, dans le cadre de la discussion générale. Dites simplement que vous y êtes opposés pour des raisons idéologiques, que vous refusez la régulation, l’encadrement et l’intervention de la puissance publique.

Ayons ce débat de manière sereine. C’est tout le sens et tout le sel de la démocratie. C’est en vertu de cette démocratie qu’une majorité de gauche et écologiste à l’Assemblée nationale tient cet engagement majeur. C’est pourquoi je suis défavorable à l’amendement de suppression de cet article. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Piron.

M. Michel Piron. Madame la ministre, contrairement à vos habitudes, vous avez semblé insinuer que certains de nos arguments confinaient à l’absurdité, ce qui me gêne un peu tout de même. Je revendique le droit de ne pas être encore considéré comme complètement indigent d’un point de vue intellectuel – cela me ferait plaisir que vous le concédiez.

Comment la fixation d’un loyer médian inférieur de 30 % pourrait-elle, demandez-vous, contribuer à faire monter les loyers ? Vous trouvez le raisonnement absurde, vous le présentez au mieux comme une facétie, au pire comme une stupidité que je n’ai pas envie d’assumer. Pardonnez-moi, mais j’ai pris la peine de réfléchir, de me renseigner, d’en discuter avec des experts.

Que va-t-il se passer ? Cette médiane inférieure va évidemment être affichée comme une moyenne de référence et elle va être perçue comme telle. Ce n’est qu’une médiane inférieure mais, puisque vous avez pris rendez-vous, nous verrons ses effets. Vous verrez que dans certains cas, j’en suis convaincu, elle sera affichée et revendiquée comme un loyer de référence par certains propriétaires. Je maintiens donc mon objection ou plutôt mes craintes sur ce point.

Ma deuxième remarque, technique et très rapide, concerne la finesse du maillage dont vous avez parlé. J’avais d’ailleurs pris la précaution de dire que mon approche était volontairement synthétique pour Paris, tout en sachant que vous aviez prévu un maillage plus fin. J’ai pris la peine de prendre l’exemple de la métropole de Nantes-Saint-Herblain pour bien m’en expliquer.

Cependant, un maillage très fin, qui allie des critères géographiques et typologiques, produira des moyennes calculées sur des données de moins en moins nombreuses. Cela me rappelle de très vieilles études en logique, lorsque je faisais un peu de philosophie : chacun sait que, lorsqu’elles sont calculées sur des masses insuffisantes ou trop étroites, les moyennes risquent d’être de moins en moins signifiantes. Vous rencontrerez un problème technique de calcul si vous ne voulez pas que les loyers médians soient contestés et contestables.

Enfin, l’idée selon laquelle les riches seraient systématiquement – ou presque – propriétaires demande à être expertisée. En zones tendues, à Paris ou dans le Genevois français, vit tout une clientèle de cadres supérieurs extraordinairement mobiles à l’échelle mondiale qui sont très souvent locataires. C’est à ce point vrai qu’un pays comme la Suisse, qui n’est pas dans les plus pauvres d’Europe, affiche l’un des plus forts taux de locataires.

L’assimilation « riche donc propriétaire » ne va pas de soi. Elle correspond peut-être à une réalité provinciale française mais elle n’est pas forcément juste si l’on se place d’un point de vue hexagonal. Il serait intéressant de regarder les choses d’un peu plus près en ce qui concerne les zones les plus tendues de notre pays.

Voilà les quelques remarques que je voulais faire. Pour le reste, je vous ai bien entendue et nous aurons des occasions de nous rejoindre sur la garantie universelle des loyers et sur le prêt locatif aidé d’intégration. Mais je vous demande d’accepter l’idée que nous ayons pu réfléchir un peu avant d’avancer certains arguments, et que nous ne les avons pas lancés comme cela, n’importe comment.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Tetart.

M. Jean-Marie Tetart. Ayant cru comprendre que le rapporteur, Daniel Goldberg, nous reprochait le temps programmé appliqué à ce débat, je rappelle qu’en l’occurrence ce n’est pas nous qui avons choisi ce mode.

S’agissant des loyers et des prix immobiliers, j’ai constaté comme vous, madame la ministre, que les prix baissaient à Paris. Les acheteurs, notamment particuliers, manifesteraient une certaine réticence, compte tenu de l’ambiance générale du secteur.

Étant intervenu longuement pendant la discussion générale, je ne reviendrai pas sur l’encadrement des loyers, mais je voudrais insister sur un point qui n’a pas été abordé jusqu’à présent : si le loyer est encadré, pourquoi le bailleur ferait-il l’effort de bien aménager le logement puisqu’il n’y aura plus de différence fondée sur ce critère ?

C’est une question de bon sens. Peut-être faut-il le regretter, mais c’est ainsi que se comportent les propriétaires. Il y aura donc un nivellement pas le bas : une dégradation progressive non pas des éléments qui assurent la sécurité d’un logement et qui doivent être aux normes mais de ceux qui concourent à son agrément.

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Goua.

M. Marc Goua. Après l’intervention de mon collègue Piron sur les zones tendues, je voudrais régir en tant que responsable d’une zone qui ne l’est pas mais où le prix de l’immobilier a tout de même augmenté de 100 % en dix ans, alors qu’il progressait de 17 % en Allemagne au cours de la même période. Peut-être faut-il se poser des questions.

Le problème des loyers trop élevés se pose aussi dans les zones non tendues. Au cours des dernières années, nous avons assisté à une dérive totale qui a désolvabilisé une partie de nos concitoyens.

Aujourd’hui nous essayons de réguler et de faire pression. D’ailleurs, il est tout à fait symptomatique que même le prix des constructions neuves est en train de baisser, parce que les menaces sur les loyers libres pèsent un peu le coût de la construction sans nuire à la qualité, contrairement à ce que disent certains collègues.

Pour ma part, je suis donc tout à fait favorable au maintien de cet article.

Mme la présidente. La parole est à M. François de Rugy.

M. François de Rugy. Je n’avais pas forcément prévu d’intervenir, mais comme M. Piron insiste beaucoup sur la situation de Nantes, je ne pouvais pas indéfiniment le laisser parler sans réagir.

M. Michel Piron. C’était un hommage à Nantes !

M. François de Rugy. J’espère qu’il s’agit d’un hommage à Nantes et à la politique du logement qui y est menée depuis de nombreuses années.

S’agissant de cet article, je pense qu’il faut revenir à l’essentiel comme l’ont dit la ministre et le rapporteur. Les interventions successives me confortent dans l’idée que le texte vise trois objectifs.

Le premier – c’est une lapalissade – est d’encadrer les loyers afin d’éviter les excès à la hausse et les dérapages qui sont réels, personne ne peut nier, dans les zones tendues et même parfois ailleurs comme vient de le souligner notre collègue Goua.

Conformément à leurs références et modèles idéologiques, certains pensent qu’il faut laisser faire le marché, et que les hausses et les baisses se compenseront sur la durée. Or les statistiques montrent que ce n’est pas le cas : alors que nous venons de traverser des années de crise économique, les loyers ont seulement stagné et ils ont même continué à progresser dans les zones tendues. Nous ne pouvons donc pas nous en remettre totalement au marché, sauf à prendre le parti d’un nouveau dérapage des loyers.

Dans quel sens vont-ils déraper ? Comme tous les autres biens et services, ils devraient réagir diversement en cas d’inflation ou de déflation. J’ai été étonné d’entendre M. Tetart regretter la baisse – il parlait sans doute du nombre des transactions plus que du montant des loyers – qui serait le signe d’une perte de confiance dans le secteur du logement.

Quand l’inflation que connaît le secteur du logement est très supérieure non seulement à l’inflation en général et à la progression du coût de la vie mais aussi à celle des revenus, eh bien, on le sait, au bout d’un moment, cela pose un problème. Soit c’est une bulle qui va éclater, soit c’est, disons les choses concrètement, une perte de pouvoir d’achat pour les acheteurs ou les locataires. Ces derniers vont devoir louer un logement à un prix de plus en plus élevé, et cette dépense contrainte de plus en plus lourde représentera une part de plus en plus importante de leur revenu, ou ils devront louer un logement de plus en plus petit, de plus en plus inconfortable, qui répond de moins en moins à leurs besoins. Une forte déflation poserait également un problème.

Il en est ainsi dans tous les domaines, et c’est bien pour cela que l’on parle d’encadrement. S’il y a des dérapages totalement incontrôlés, cela finit par déstabiliser non seulement les locataires mais aussi, disons-le, l’ensemble du secteur.

Deuxième point qui me paraît extrêmement intéressant : avec cette disposition, nous allons enfin progresser en termes de connaissance, de transparence sur la réalité du marché.

M. Patrick Hetzel. C’est faux.

M. François de Rugy. À l’occasion des travaux préparatoires de ce texte, on s’est rendu compte qu’on manquait de références dans la plupart des villes de France. Autant pour les ventes et achats de logements nous en disposons grâce aux chiffres fournis par les notaires, autant nous en manquons pour les locations. Cela obligera l’ensemble des acteurs, l’État bien sûr, au niveau national, mais aussi les collectivités locales et les acteurs du marché immobilier, à collecter les données et à les rendre publiques.

Vous parliez tout à l’heure, monsieur Piron, de la métropole de Nantes. Je suis, pour ma part, très heureux que le ministère du logement ait choisi Nantes, parmi d’autres, comme ville pilote en la matière. Il s’agit simplement d’établir les données, de disposer de références.

Troisième et dernier point, j’ai entendu successivement que l’encadrement entraînerait un nivellement des loyers par le bas – c’était le propos de M. Tetart –, ce qui ne serait pas bon, et que cela entraînerait peut-être un nivellement par le haut – c’est M. Piron qui le disait –, ce qui ne serait pas bon non plus. Il faudrait peut-être savoir, parce que les deux mouvements ne peuvent avoir lieu simultanément !

M. Michel Piron. Vous dites n’importe quoi ! ce sont deux mécanismes différents.

M. François de Rugy. En revanche, ce sera une référence pour les locataires. Il est intéressant pour ceux qui cherchent un logement de connaître la médiane, la référence haute, la référence basse. Ils sauront que les choses ne sont pas simplement ce qu’on leur dit qu’elles sont : « Ah, mais, c’est comme ça, vous savez, actuellement, si vous voulez louer ! On est en zone très tendue ; ici, c’est très difficile. » Eh bien, non. On aura des références, et ce sera beaucoup plus transparent.

M. Piron prétend que ce sont les plus aisés qui iront chercher ces références. Eh bien, non : elles seront connues de toutes et de tous, à commencer par les associations de locataires. Ce seront aussi des références pour les propriétaires et, notamment ceux qui désirent faire un investissement locatif et sauront ainsi à quoi s’en tenir. Que de fois des gens, séduits par un de ces dispositifs d’incitation fiscale à l’investissement, – lesquels ont vraiment fait déraper les prix – acheter non pour faire un investissement locatif mais pour profiter de l’avantage fiscal ! Ils se faisaient avoir, disons-le, par d’autres qui leur vendaient un tel avantage, et ils ne se renseignaient même pas sur le niveau des loyers ; aussi, ils n’avaient pas de références. Eh bien, ils en auront désormais, et ils sauront dans quelle mesure un investissement immobilier est valable. Voilà qui contribuera aussi à la maîtrise des prix.

Nous faisons un pari, car c’en est un, et nous pourrons faire le bilan dans quelques années, le pari que cela permettra de réguler un marché totalement dérégulé, où l’on constatait des dérapages.

Mme la présidente. La parole est à Mme Annick Lepetit.

Mme Annick Lepetit. Je veux revenir sur trois points et répondre à notre collègue Piron. Pour ma part, je suis favorable à cette mesure depuis très longtemps, y compris à l’époque où la majorité de cet hémicycle ne l’était pas et où, même dans mon groupe, elle faisait l’objet de discussions, certains d’entre nous n’y étant pas favorables non plus.

Il y a donc débat. Néanmoins, je suis absolument convaincue que, si nous avions pris la décision d’instaurer une telle mesure il y a une petite dizaine d’années, la situation du logement ne serait pas la même aujourd’hui, et pas seulement à Paris.

M. Patrick Hetzel. Elle serait pire !

Mme Annick Lepetit. M. de Rugy a réagi parce qu’on mentionnait Nantes. Pour ma part, je me sens concernée par Paris. Les loyers ne baissent pas à Paris, ils ne le font d’ailleurs jamais.

M. Michel Piron. Je n’ai rien prétendu de tel !

Mme Annick Lepetit. Ils augmentent encore, mais bien moins que ces vingt dernières années ; à l’heure où cette augmentation fait, parfois, la une de certains hebdomadaires, je voulais rétablir la vérité. Tous ceux qui cherchent à louer la connaissent, il suffit de leur demander.

Je n’oppose pas propriétaires et locataires. C’est d’ailleurs ce que j’apprécie dans l’esprit du projet de loi ALUR. Nous n’opposons pas propriétaires et locataires. Les uns ont besoin des autres.

Cela dit, cher collègue Piron, j’ai un peu souri quand vous avez évoqué la Suisse. Je sais que les locataires y sont nombreux, mais, rappelez-vous, celui que vous souteniez en 2007 appelait à construire la France des propriétaires. Cela a d’ailleurs été une grande réussite…

Enfin, l’encadrement des loyers est une mesure parmi les autres. Vous disiez tout à l’heure que le vrai problème, à l’origine de la hausse des loyers, était le manque de constructions, mais, précisément, nous avons pris, dès le début de la législature, des mesures pour permettre de construire davantage, notamment en nous attaquant au prix du foncier. Quand on parle des loyers et de la construction, il faut aussi penser, en effet, que le prix du foncier a énormément augmenté ces derniers temps, particulièrement en zone tendue. Si nous ne nous attelons pas à la tâche de le faire baisser, effectivement, une mesure comme celle-ci ne sera pas vraiment efficace ; mais, précisément, nous avons commencé par cela.

Je tenais à rappeler ce contexte pour mieux éclairer nos débats.

Mme la présidente. La parole est à M. Christophe Caresche.

M. Christophe Caresche. Je serai très rapide, car nous avons eu ce débat à plusieurs reprises, mais je veux quand même répondre aux arguments de M. Piron.

Tout d’abord, je vois le dispositif proposé par le Gouvernement comme un frein à la hausse des prix, mais pas comme une élimination des mécanismes du marché. Celui-ci continuera de jouer son rôle ; simplement, il sera encadré. On peut d’ailleurs espérer que les prix médians puissent baisser en cas de détente du marché. Il n’y a donc pas d’éviction des mécanismes du marché, il y a simplement un encadrement.

Ensuite, on peut espérer que la photographie qui sera faite des prix du marché le sera alors que ceux-ci sont à leur plus haut. On peut espérer que le marché baisse dans les prochaines années. Considérant que les prix ont beaucoup augmenté, je pense donc que ce mécanisme est parfaitement pertinent et utile.

Enfin, je veux répondre à l’interpellation de Michel Piron sur les loyers qui seraient inférieurs, voire très inférieurs au loyer de référence minoré. Mais dans ce cas, rien, en l’état, n’empêche le propriétaire d’aligner le montant du loyer : il en a toute liberté. Si un locataire paye sept ou huit euros de loyer au mètre carré alors que le prix moyen est d’une vingtaine d’euros, lors du renouvellement du bail, le propriétaire a déjà tout à fait la possibilité, sans le mécanisme qui est l’objet de l’article 3, d’aligner le montant du loyer sur la moyenne du marché. Le dispositif proposé par le Gouvernement empêchera précisément une augmentation aussi importante du loyer, puisque le rattrapage ne pourra aller au-delà du loyer de référence minoré. Ce mécanisme est donc assez pertinent.

(L’amendement n63 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement n23.

M. Lionel Tardy. Cet amendement est important. Pour les observatoires des loyers, le parc de référence doit, à mon sens, être limité au secteur privé non réglementé et exclure les logements conventionnés. En effet, le parc privé comprend des logements pour lesquels certains bailleurs privés ont passé des conventions avec l’État et qui ouvrent droit à l’aide personnalisée au logement. Ils pratiquent en conséquence des niveaux de loyer très bas, de l’ordre de 7 euros le mètre carré par mois à Paris, alors que le loyer de marché est dans cette ville de 24,10 euros le mètre carré, selon l’observatoire CLAMEUR.

De même, certains bailleurs privés ont passé des conventions avec l’ANAH et pratiquent également des loyers très bas. Je parle des conventionnements à loyer intermédiaire ou à loyer social.

Les logements en question ne peuvent constituer des références de loyer valables pour le parc privé non réglementé. Ils sont d’ailleurs actuellement exclus du champ couvert par l’OLAP, l’Observatoire des loyers de l’agglomération parisienne.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Je ne sais pas si nous allons, avec M. Tardy, nous retrouver ou tomber dans les bras l’un de l’autre pour reprendre la formule de M. Chassaigne. En tout cas, en ce qui concerne les logements conventionnés et le parc que les observatoires doivent prendre en compte, j’avais moi-même fait cette réflexion. Je ne m’étais pas avancé plus que cela pour une bonne raison qui est que, outre de grands organismes privés ou, disons, parapublics, quantité de bailleurs privés individuels ont des logements conventionnés. Vous citiez vous-même l’exemple, cher collègue, de bailleurs privés qui ont passé des conventions avec l’ANAH. En pareils cas, parfois, ni le locataire ni le propriétaire ne peuvent dire que le logement est conventionné au sens où on l’entend.

Or, je vous le rappelle, dans le cadre de la mise en place de la garantie universelle des loyers, tous les bailleurs devront transmettre leurs données, qu’ils louent par l’intermédiaire d’un professionnel ou non. Si l’on exclut du champ de l’observation des loyers ces logements conventionnés, on se trouvera avec une série de personnes, notamment des bailleurs individuels privés, qui ne sauront pas si elles doivent transmettre ou non.

Pour toutes ces raisons et aussi parce que nous avons le sentiment, après expertise, que l’inclusion ou non des logements conventionnés ne changera pas fondamentalement le niveau de la médiane, la commission a émis un avis défavorable ; mais vous voyez que c’est un sujet auquel j’avais réfléchi.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Même avis.

Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Hetzel.

M. Patrick Hetzel. Cosignataire de cet amendement, je veux revenir sur les arguments qui viennent d’être développés. Si nous défendons cet amendement, comme vous l’avez constaté, c’est parce que nous pensons que cela peut avoir un effet sur la manière dont les informations seront restituées. Cela aura une incidence, aussi, sur les moyennes.

Vous avez évoqué la question de la médiane. Pour ma part, j’évoquerai la moyenne. On va se retrouver dans une situation où le calcul sera influencé par un effet tout à fait spécifique, lié à une politique publique.

Il faut savoir raison garder. Si l’on veut véritablement être objectif, il faut exclure du parc privé qui nous intéresse les logements qui sont, par ailleurs, conventionnés, car il existe une distorsion entre ces derniers et ce que j’appellerai le parc privé classique.

C’est la raison pour laquelle nous défendons cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Juste une précision, monsieur Hetzel : pour ce qui concerne l’observation des loyers et leur encadrement, notre raisonnement porte bien sur le loyer médian, et pas sur le loyer moyen. Parler de moyenne plutôt que de médiane relève d’une conception totalement différente.

M. Michel Piron. C’est vrai !

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Deuxièmement, je souhaite répondre précisément à un autre argument que vous avez avancé : le nombre de logements conventionnés par rapport à celui de logements privés non conventionnés est tel que la médiane ne varie que très faiblement selon qu’on les prend en compte ou non.

Enfin, il est facile de repérer les logements conventionnés dont le propriétaire est, par exemple, une grande maison bien connue pour s’occuper de questions de logement. En revanche, c’est beaucoup plus compliqué quand il s’agit de propriétaires individuels dont les logements sont conventionnés parce qu’ils ont fait appel à l’ANAH pour les rénover. Ces logements font partie du logement diffus et ni les locataires ni les propriétaires n’ont forcément conscience du fait qu’ils sont conventionnés.

Pour toutes ces raisons, je maintiens donc un avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Hetzel. Veuillez vous exprimer brièvement, s’il vous plaît, monsieur le député.

M. Patrick Hetzel. Je serai bref, madame la présidente.

Vous avez compris notre préoccupation. Vous avez raison de demander comment, à ce moment-là, collecter l’information. Afin de ne pas créer de difficultés ex ante, peut-être faudrait-il faire en sorte qu’une fois les données collectées, les loyers des logements conventionnés par l’ANAH ne soient pas pris en compte dans le calcul de la médiane. Nous pourrions nous accorder, faire converger nos points de vue sur ce point, qui mérite une attention particulière. Je souhaite que cet aspect figure au compte rendu de nos débats.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Cécile Duflot, ministre. Je suis défavorable à cet amendement. Nous avons longuement débattu cette question en première lecture et en commission : je n’y reviendrai pas. Je profite simplement de cette prise de parole pour vous conseiller la lecture des travaux de Loïc Bonneval, maître de conférences à l’université Lyon-II, qui a fait sa thèse sur les agents immobiliers. Il a réalisé une étude très intéressante sur l’encadrement des loyers et la rentabilité. Je suis sûre qu’elle vous passionnera, monsieur Piron.

M. Michel Piron. Si je peux la comprendre ! (Sourires sur les bancs du groupe UMP.)

Mme Cécile Duflot, ministre. Oui, bien sûr, c’est un travail très simple à comprendre, qui met en relation l’encadrement des loyers, la rentabilité, ainsi que l’investissement et les travaux réalisés dans les immeubles. M. Bonneval a eu accès, pour cela, à des archives très précieuses, qui portent sur les logements de soixante-quatre immeubles lyonnais, de 1860 à 1968. L’étude porte donc sur des périodes très différentes, certaines d’encadrement des loyers, d’autres de non-encadrement des loyers.

Les résultats prouvent que l’encadrement des loyers a un effet sur la rentabilité, c’est-à-dire qu’il entraîne une correction des prix de l’immobilier. Ils montrent aussi, en revanche, que les stratégies d’investissement dans les immeubles ne sont absolument pas liées à la rentabilité. Les marchands de sommeil en donnent une preuve éclatante : la rentabilité des logements indignes qu’ils louent dépasse tout ce qu’on peut imaginer, alors que leur budget d’investissement est quasiment égal à zéro.

(L’amendement n23 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement n128.

M. Lionel Tardy. Avec cet amendement, je reviens à la question de la transmission des données à l’observatoire des loyers. Je rappelle que le but de cet encadrement des loyers est idéologique. La première phrase de l’alinéa 5 de cet article 3 précise que les observatoires devront respecter des « prescriptions méthodologiques émises par une instance scientifique indépendante ». Il s’agit de donner une assise pseudo-scientifique à cette collecte d’information. Je regrette, mais cela ne renforce en rien sa légitimité ; c’en est même ridicule ! J’ai des doutes non seulement sur la réalité du caractère scientifique de cette démarche, mais aussi sur l’indépendance de cette instance, qui me semble vide de sens. Jugez plutôt : elle ne sera chargée que de conseiller le ministre dans des conditions fixées par décret. Reconnaissez que tout cela n’est pas très sérieux : le seul but est de faire bonne impression.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Goldberg, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable à cet amendement. Il apparaît important de renforcer le dispositif en l’appuyant sur le travail de scientifiques indépendants qui permettront de valider le travail mené par les observatoires des loyers. Ce n’est pas d’ordre idéologique – pour moi, ce mot prête à discussion : que faisons-nous d’autre qu’avancer nos idées respectives ? – mais pratique. Les observatoires observeront et définiront, comme madame la ministre l’a dit tout à l’heure, des montants médians de loyer au mètre carré par type de logement et par emplacement. Les scientifiques qui entoureront les observatoires des loyers vérifieront si les choses se passent correctement. C’est important, car le niveau de ces loyers médians aura des conséquences pour les locataires et les propriétaires : vous l’avez dit vous-même avec force tout à l’heure.

Tel est le but de cette instance scientifique, qui me paraît nécessaire. La commission est donc défavorable à cet amendement.

(L’amendement n128, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement n129.

M. Lionel Tardy. Même question qu’à l’article 1er : pour quelle raison prévoir une transmission des données à l’Agence nationale d’information pour le logement ? Qu’en fera-t-elle ? En outre, est-il vraiment raisonnable de prévoir, par décret, la transmission à des tiers ? Si oui, de quels tiers s’agit-il ? J’ai déjà posé cette question. Encore une fois, quelle est la finalité de cette transmission de données ?

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Je crois que tous les députés, sur tous les bancs de cette assemblée, reconnaissent que l’ANIL accomplit un travail important. Il faut reconnaître sa mission de conseil et d’expertise en matière de logement. Les observatoires des loyers pourront transmettre leurs données à l’ANIL, notamment parce qu’au moyen de son réseau, elle est chargée de conseiller les élus en matière de politique de logement. Je rappelle que nous avons tenu, justement pour éviter le reproche que vous nous faites, à préciser que les observatoires des loyers ne sont pas liés à la politique de l’habitat. On aurait pu imaginer leur confier un rôle de conseil, mais ils ne seront pas dirigés par des élus. en revanche l’ANIL, elle, peut conseiller utilement les élus, et les données recueillies par les observatoires sur la structure du marché locatif seront sans doute de nature à l’y aider.

L’avis de la commission est donc défavorable.

(L’amendement n129, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n202 de M. Piron a déjà été défendu.

M. Michel Piron. Je l’ai défendu en m’appuyant sur les travaux d’un autre universitaire : chacun ses références !

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Comme quoi il est utile d’avoir des références scientifiques !

(L’amendement n202, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Piron, pour soutenir l’amendement n203.

M. Michel Piron. Défendu.

(L’amendement n203, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n388 rectifié.

M. André Chassaigne. Je le défendrai très brièvement. Avant cela, madame la présidente, je voudrais faire une observation sur la tournure de nos débats. Nous sommes en deuxième lecture. Nous avons débattu ce texte en première lecture en commission et dans l’hémicycle, puis en commission en deuxième lecture. Très franchement, je pense que reprendre les débats tels qu’ils ont été conduits en première lecture et en commission n’est pas une bonne chose ! Il suffit de regarder le nombre de députés présents dans l’hémicycle à cette heure ! Nous avions d’ailleurs prévu de terminer l’examen de ce texte au plus tard jeudi midi. Étant donné la manière dont les débats ont commencé, il est bien évident que cela risque de durer plus tard que cela – il sera intéressant de faire le compte des députés qui seront toujours présents !

Je ne vois pas ce que la répétition de propos déjà tenus dans cet hémicycle peut apporter.

Mme Marie-Christine Dalloz. Rappel au règlement !

M. André Chassaigne. Je vous dis cela très tranquillement. Je sais que cette deuxième lecture est régie par la procédure du temps législatif programmé. Je sais aussi que certains prendront la parole et s’en iront après. Je tiens simplement à dire que je ne vois pas l’intérêt de redire toujours la même chose. Je ne comprends pas le sens de débats qui n’apportent rien de plus que les débats précédents.

Cela ne veut pas dire qu’on ne peut pas défendre brièvement des amendements, y compris des amendements déjà déposés en première lecture. C’est précisément ce que je suis en train de faire. Par respect pour les députés et par honnêteté intellectuelle, M. le rapporteur et Mme la ministre répondent toujours avec beaucoup de précision ; ce faisant, il leur arrive parfois d’ouvrir la boîte de Pandore. S’ils continuent ainsi, on ne pourra pas s’en sortir !

J’en reviens à l’amendement n388 rectifié. Il ne s’agit pas, comme c’est le cas pour plusieurs amendements que j’ai déposés, de marquer une opposition à l’encadrement des loyers. Il s’agit plutôt de vous interroger sur les effets pervers de ce dispositif. Hier, par exemple, Mme la ministre et moi n’avions pas le même avis sur le contrat de location. Je considérais que le loyer de référence majoré peut avoir un effet pervers ; elle m’opposait qu’il s’agit d’un plafond. Vous ne m’avez pas complètement convaincu, madame la ministre, mais ce n’est pas la peine d’en faire un point d’opposition systématique.

Le présent amendement concerne le loyer de référence minoré. Là non plus, je n’attends même pas de vous que vous me répondiez, puisque vous l’avez déjà fait en première lecture. Je rappelle simplement quel est mon sentiment : je crains que le loyer de référence minoré ait pour seule conséquence de tirer les loyers vers le haut. Je ne comprends pourquoi on veut à tout prix mettre en place un loyer de référence minoré, alors que cela peut entraîner des effets pervers.

Mme la présidente. Monsieur le président Chassaigne, j’ai bien compris votre remarque. Je vous rappelle – vous l’avez précisé vous-même – que nous sommes en temps législatif programmé. Chaque groupe gère donc son temps de parole comme il l’entend : ce rôle ne revient pas à la présidence.

Rappel au règlement

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Tetart, pour un rappel au règlement.

M. Jean-Marie Tetart. Ce rappel au règlement est fondé sur l’article 58, alinéa 1 de notre règlement.

Je suis tout à fait d’accord avec ce que vous indiquez, madame la présidente : dans le cadre du temps législatif programmé, un temps de parole défini nous a été attribué, dont nous pouvons user à notre guise. Je ne vois pas comment un de nos collègues pourrait déterminer si nos interventions sont stériles et ne font que ralentir le débat, ou permettent au contraire de le faire avancer.

M. André Chassaigne. Vous avez tout compris !

M. Christian Assaf. Vos interventions ne font rien avancer du tout !

M. Jean-Marie Tetart. Je le répète, ce n’est à personne de juger si nos interventions font avancer les choses ou pas ! Nous avons décidé de n’intervenir que pendant un temps limité sur l’article : nous pouvons bien prendre le temps nécessaire pour défendre un à un les amendements que nous pensons opportuns.

Article 3 (suite)

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n388 rectifié présenté par M. Chassaigne ?

M. Daniel Goldberg, rapporteur. L’avis de la commission est défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Je n’ai pas bien compris si M. Chassaigne souhaite réellement que le Gouvernement ne réponde pas à ses remarques, ce qui serait, pour moi, très frustrant. Il retire parfois des amendements quand on ne lui demande pas de le faire : peut-être est-ce que son refus des réponses est en réalité une invitation à lui répondre quand même ! (Sourires.) Je suis dans l’expectative – voyez, monsieur Piron, cela m’arrive aussi !

Je vous répondrai donc en trois mots, monsieur Chassaigne. D’abord, moins de 7 % des loyers sont inférieurs au loyer de référence minoré. Deuxième élément, ce projet de loi prévoit un encadrement des loyers à la relocation. Cela signifie que s’il n’y a pas de travaux, il n’y a pas de possibilité d’alignement automatique sur le loyer de référence minoré. Ainsi il est possible de louer, à un niveau de loyer correspondant aux travaux réalisés, des logements ayant fait l’objet de travaux importants après une longue location à un niveau de loyer très bas. Troisième élément : comme je vous l’ai déjà indiqué, il s’agit d’un loyer de référence, pas d’un loyer d’alignement. L’avis du Gouvernement est donc défavorable.

(L’amendement n388 rectifié n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n395.

M. André Chassaigne. Défendu.

(L’amendement n395, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Goldberg, pour soutenir l’amendement n651.

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Notre commission a modifié la dénomination des loyers servant de référence. L’article 3 ne parle plus de « loyer médian de référence » mais de « loyer de référence ». Il fallait donc préciser – c’est l’objet de cet amendement n651 – que les loyers constatés par les observatoires sont des loyers médians.

(L’amendement n651, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n389.

M. André Chassaigne. Défendu.

(L’amendement n389, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement n130.

M. Lionel Tardy. Le loyer de référence majoré ne pourra être fixé à un montant supérieur de 20 % au loyer de référence, alors que la variation prévue pour le loyer de référence minoré est de 30 %. Pourquoi, encore une fois, ne pas rechercher l’équilibre et l’équité en fixant cet écart à 20 %, ou même à 30 %, dans les deux cas ? Cette différence me paraît difficilement justifiable et tout à fait superficielle.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Pour revenir au débat que nous avons eu tout à l’heure avec nos collègues de l’UMP et de l’UDI, si l’on vous suivait, monsieur Tardy, en relevant le loyer de référence minoré à 80 % du loyer de référence au lieu de 70 %, l’encadrement serait moindre. Par conséquent, les risques que vous avez pointés, même s’ils ne nous semblent pas réels, s’en trouveraient aggravés. Nous ne croyons pas, pour notre part, que l’encadrement des loyers présente un risque, mais si l’on s’en tient à votre logique, alors relever le montant du loyer de référence minoré accroît ce risque. J’ai donc du mal à suivre votre raisonnement.

En tout état de cause, la commission a estimé, au cours de ses travaux du mois de juillet, que pour atteindre son objectif, il était équilibré de fixer le loyer de référence majoré à 20 % au-dessus du loyer de référence, et le loyer de référence minoré à 30 % en dessous. La commission a donc émis un avis défavorable à votre amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Piron.

M. Michel Piron. Je voterai contre cet amendement. Tout à l’heure, Mme la ministre m’expliquait qu’il n’y avait aucune raison que le loyer médian inférieur serve de référence et que, les propriétaires pouvant déjà augmenter leur loyer, cette disposition n’avait aucune importance. Si tel est le cas, j’ai du mal à comprendre l’opposition du Gouvernement et du rapporteur à la proposition de M. Tardy, qui risque tout au plus d’être inefficiente – c’est en tout cas ce que je pense, et c’est la raison pour laquelle je voterai contre.

(L’amendement n130 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Dominique Nachury, pour soutenir l’amendement n265.

Mme Dominique Nachury. Je voudrais d’abord m’excuser d’avoir malmené la grammaire dans l’exposé sommaire de cet amendement et de ne pas y avoir apporté de correction.

Je voudrais appeler l’attention sur les petits logements d’une surface inférieure à 14 mètres carrés dans les territoires soumis à une forte demande. Cet amendement propose que, pour la fixation du loyer desdits logements, il soit pris en considération le loyer de référence minoré, afin d’assurer des loyers corrects et de garantir l’accès à un logement digne et décent.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Votre amendement, madame Nachury, dont nous avons déjà discuté, vise à limiter au loyer de référence minoré le loyer des logements dont la surface est inférieure à 14 mètres carrés. Je partage bien évidemment votre volonté d’agir résolument contre les loyers qui sont complètement déconnectés de la qualité du logement. D’ailleurs, c’était déjà l’objectif de la taxe qui porte le nom de notre collègue Benoist Apparu, autrefois ministre du logement, que de lutter contre les excès de certains bailleurs.

Néanmoins, votre amendement présente un certain nombre de difficultés. Limiter le loyer de ces logements au loyer minoré paraît beaucoup trop strict et le choix du loyer médian de référence semble préférable. En effet, il ne faut pas négliger le risque de voir ces logements délaissés par leurs bailleurs et devenir indécents, voire indignes, alors qu’ils n’offrent déjà souvent que des conditions de vie pour le moins rustiques.

Le phénomène bien connu de l’effet de seuil risque ici d’être important entre les loyers des logements de moins de 14 mètres carrés et ceux de 14,5 mètres carrés, qui demeurent pourtant des micrologements.

Par ailleurs, le dispositif d’encadrement des loyers permettra de faire baisser ces loyers, dans la mesure, je le rappelle, où les loyers de référence seront fixés par type de logement, au mètre carré. Or, nous le savons tous, les petites surfaces présentent souvent les loyers au mètre carré les plus élevés. Pour toutes ces raisons, la commission a émis un avis défavorable à votre amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Défavorable.

(L’amendement n265 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Michèle Bonneton, pour soutenir l’amendement n528.

Mme Michèle Bonneton. Défendu.

(L’amendement n528, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Tetart, pour soutenir l’amendement n168.

M. Jean-Marie Tetart. Les deux débats en commission et le débat en séance ne m’ont pas permis, sans doute par inattention, de saisir si, lorsqu’un appartement neuf est loué pour la première fois, il est automatiquement plafonné au loyer médian majoré. Si tel est le cas, c’est un vrai problème. Car les logements neufs, qui respectent la réglementation thermique 2012 et toutes les autres normes, ont peut-être un loyer d’équilibre incompatible avec le loyer médian majoré. Je vous pose cette question, car j’aimerais savoir de quelle manière vous avez traité ce problème dans le texte.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Les logements neufs sont encadrés comme les autres et ne font l’objet d’aucun traitement différencié.

Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Tetart.

M. Jean-Marie Tetart. Je suggérerais tout de même que les observatoires examinent si les prix d’équilibre résultant d’une opération immobilière sont bien compatibles avec les loyers médians majorés. Dans le cas contraire, les promoteurs, qu’ils soient institutionnels ou privés, devront tenir compte, pour leur budget, de cette nouvelle contrainte que constitue le loyer médian majoré. On verra si cela ne décourage pas un certain nombre d’opérations !

(L’amendement n168 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Dominique Nachury, pour soutenir l’amendement n24.

Mme Dominique Nachury. Défendu.

(L’amendement n24, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques.

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Madame la présidente, je souhaiterais vous demander une brève suspension de séance.

Suspension et reprise de la séance

Mme la présidente. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-huit heures trente-cinq, est reprise à dix-huit heures cinquante-cinq.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n390.

M. André Chassaigne. Il est défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Cet amendement a reçu un avis défavorable de la commission puisqu’il vise à supprimer le complément exceptionnel de loyer qui me semble justement faire l’intérêt de ce dispositif.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Avis défavorable.

(L’amendement n390 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Isabelle Attard, pour soutenir l’amendement n481.

Mme Isabelle Attard. Cet amendement a pour objet de supprimer le critère de localisation pour justifier un complément de loyer exceptionnel. Seules les caractéristiques exceptionnelles intrinsèques du logement devraient être prises en compte. Le principe d’encadrement des loyers dans une zone devrait connaître le moins d’exceptions possible afin d’éviter les contournements de la loi. Le loyer maximum est déjà fixé pour chaque zone géographique. Il paraît inutile de permettre le dépassement des loyers au-delà du plafond autorisé pour des raisons de localisation. Cela reviendrait à créer des sous-quartiers plus chers que d’autres, ce qui est totalement nuisible au principe de mixité sociale.

M. Jean-Marie Tetart. C’est pourtant la réalité !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Goldberg, rapporteur. La localisation nous paraît décisive, l’avis de la commission est donc défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Avis défavorable.

(L’amendement n481 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Tetart, pour soutenir l’amendement n354.

M. Jean-Marie Tetart. Mme la ministre nous a indiqué qu’il existait une corrélation entre la baisse des loyers, qui est le but recherché par cette loi, et les prix de l’immobilier. Si c’est la vérité, il faut tenir compte des conséquences du projet de loi que nous sommes en train d’étudier. Il y aura donc, pour les propriétaires qui sont soumis à un encadrement des loyers, une baisse de la valeur de leur bien. Nous demandons qu’elle soit prise en compte dans le calcul de l’impôt de solidarité sur la fortune par les services fiscaux.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Évidemment, la commission ne peut pas donner un avis favorable à cet amendement qui tend à accorder une protection supplémentaire à nos concitoyens assujettis à l’impôt de solidarité sur la fortune, qui s’applique aux patrimoines supérieurs à 1,3 million d’euros au 1er janvier 2013. Les personnes assujetties à cet impôt ne verraient pas forcément la majorité de leurs revenus affectée par l’encadrement des loyers. Avis défavorable.

(L’amendement n354, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Piron, pour soutenir l’amendement n204.

M. Michel Piron. Il est défendu.

(L’amendement n204, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement n131.

M. Lionel Tardy. Nos doutes sur l’encadrement des loyers ont été confirmés par la note publiée en octobre 2013 par le conseil d’analyse économique, rattaché au Premier ministre. Il confirme qu’en plus de tout le reste, ce dispositif risquerait « d’engendrer des inefficacités dans le parc locatif privé. »

Puisque vous semblez tant y tenir, je propose de suivre une autre recommandation du Conseil d’analyse économique : « Avant toute généralisation, il serait indispensable de procéder à une expérimentation dans les zones pilotes. »

C’est le sens de mon amendement qui prévoit une expérimentation dans certaines zones, puis une évaluation sur les conséquences de ce dispositif afin de bien soupeser tous les arguments en faveur d’une généralisation.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Notre collègue se réfère à une note émanant de certains experts du conseil d’analyse économique. Si cet organisme est effectivement rattaché au Premier ministre, cette note n’est pas validée, loin de là, par les services du Gouvernement. Jusqu’à présent, la représentation nationale n’a pas partagé cet avis. Quelle que soit la compétence des experts, c’est encore au sein de la représentation nationale que se fait la loi. Prendre appui sur cette note pour faire une expérimentation me paraît non justifié, l’avis est donc défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Avis défavorable.

(L’amendement n131 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n248.

M. André Chassaigne. Je pourrais limiter la défense de cet amendement à deux vers d’Aragon, dans La Rose et le Réséda : « Quand les blés sont sous la grêle, / Fou qui fait le délicat. »

M. Michel Piron. C’est vrai !

M. André Chassaigne. On constate aujourd’hui une hausse vertigineuse des loyers. Certaines personnes connaissent de grandes difficultés et perçoivent des petits salaires. Des retraités ont de plus en plus de mal à payer des loyers représentant plus de 50 % de leurs revenus. Notre société est marquée par le chômage et la précarité. Dans une telle situation, prenons une mesure forte en gelant les loyers pendant trois ans dans les zones tendues. Cette proposition peut paraître ambitieuse, voire idéaliste, mais pour ma part, je considère qu’il s’agit d’une mesure d’urgence.

M. Michel Piron. Aragon écrivit aussi : « Il n’y a pas d’amour heureux. »

(L’amendement n248, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Tetart, pour soutenir l’amendement n39.

M. Jean-Marie Tetart. Nous avons déjà abordé ce sujet à l’article 1er : il s’agit de maintenir un équilibre entre locataires et propriétaires. Le rapporteur nous a déjà montré à plusieurs reprises son attachement à cette question ; or la clause triennale n’est pas appliquée de manière symétrique. Le locataire constatant qu’il a payé des montants indus peut les réclamer pendant trois ans ; en revanche, le propriétaire distrait ou ne suivant pas bien ses affaires qui aurait oublié d’appliquer les clauses de révision du contrat ne peut solliciter le paiement des sommes dues que pendant une durée d’un an. Il s’agit là d’un manquement au principe d’équilibre défendu en permanence par M. le rapporteur.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Monsieur Tetart, je vous remercie d’avoir noté cette recherche d’équilibre, qui correspond effectivement à ma volonté. Néanmoins, cet amendement, qui avait déjà reçu un avis défavorable en première lecture, prévoit que la prescription du droit du bailleur à réviser le loyer au bout d’un an s’il ne s’est pas manifesté vise précisément à assurer l’équilibre dont nous parlions à l’instant. Je suis sûr que vous pouvez me suivre sur cette recherche d’équilibre.

Par ailleurs, c’est bien le bailleur qui est responsable de la non-révision du loyer. Je rappelle que cette révision est annuelle : décaler cette possibilité dans un autre sens serait donc négatif de mon point de vue. La commission a donc émis un avis défavorable.

(L’amendement n39, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n387.

M. André Chassaigne. Bien qu’elle puisse paraître coercitive, la mesure proposée est de bon sens. Lorsque la révision annuelle du loyer a été normalement effectuée, il faudrait empêcher toute augmentation de ce loyer à la relocation ou au renouvellement du bail. On constate en effet des abus considérables : lorsqu’un locataire quitte un logement après la révision du loyer, il arrive que le locataire suivant subisse une nouvelle augmentation, ce qui apparaît exagéré.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Goldberg, rapporteur. L’idée est séduisante, mais elle pourrait, de mon point de vue, entraîner des effets pervers. Elle pourrait notamment, comme nous l’avons souligné tout à l’heure, décourager les bailleurs de réaliser des travaux entre deux locataires. Afin de trouver cet équilibre dont nous parlons beaucoup – à mon grand plaisir ! –, la commission a émis un avis défavorable.

(L’amendement n387, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Piron, pour soutenir l’amendement n205.

M. Michel Piron. Il s’agit simplement de prendre en compte le droit du bailleur à un complément de loyer dès lors qu’il a effectué des travaux supplémentaires dans le logement. Cette disposition serait balisée, puisqu’elle ne s’appliquerait que lorsque le rapport du coût des travaux à la valeur de ce logement serait supérieur ou égal à 10 %.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Nous avons déjà eu ce débat en commission, et en séance en première lecture. Si votre objectif est louable, cher collègue, il conduirait néanmoins à contourner le dispositif d’encadrement des loyers. Certains bailleurs peu scrupuleux pourraient être tentés d’investir dans des logements de faible qualité, et donc peu chers, pour réaliser des travaux correspondant à 10 % du prix d’achat et escompter ainsi un complément de loyer. En conséquence, l’avis de la commission ne peut être que défavorable.

(L’amendement n205, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement n25.

M. Lionel Tardy. Lors du renouvellement du bail, la possibilité pour le locataire d’engager, dans les zones couvertes par un observatoire, une action en diminution du loyer de base doit être supprimée, car elle entraîne une incertitude juridique inacceptable pour le bailleur.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Goldberg, rapporteur. La commission a donné un avis défavorable à cet amendement, puisqu’il vise à supprimer la possibilité d’engager une action en diminution de loyer, ce qui est contraire à l’objectif recherché par ce dispositif.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Lionel Tardy.

M. Lionel Tardy. Imaginons un investisseur immobilier qui achète un appartement et doit rembourser une partie de son prêt tous les mois. Aujourd’hui, il sait qu’il percevra un loyer garanti à un certain montant. Demain, à cause de ce projet de loi, ce montant sera minoré. L’écart entre le revenu de la location et la somme à rembourser suite à l’achat de l’appartement posera problème, mais a priori, cela n’inquiète personne.

(L’amendement n25 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n652.

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Amendement de précision, madame la présidente.

(L’amendement n652, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n391.

M. André Chassaigne. J’avais déjà présenté un amendement afin de souligner l’effet pervers que pouvait comporter le loyer de référence minoré. Mais mon amendement ne se justifiait pas, puisque ce constat est fait dans l’article 3, dont l’alinéa 32 dispose : « Sur ces mêmes territoires, lors du renouvellement du contrat, une action en réévaluation de loyer peut être engagée dès lors que le loyer est inférieur au loyer de référence minoré. » Je propose donc la suppression de cet alinéa.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Puisque nous parlons de miroirs de loyers, je répondrai en miroir à mon explication de tout à l’heure.

M. Michel Piron. C’est la galerie des glaces ! (Sourires.)

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Je ne sais pas qui est Louis XIV !

La suppression de cette possibilité d’engager une action en réévaluation de loyer me paraît contraire à la logique défendue par cet encadrement. L’avis de la commission est donc défavorable.

(L’amendement n391, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Tetart, pour soutenir l’amendement n171.

M. Jean-Marie Tetart. Il est défendu.

(L’amendement n171, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n653.

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Rédactionnel.

(L’amendement n653, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement n132.

M. Lionel Tardy. Par amendement adopté en commission, le Gouvernement a souhaité détailler à l’alinéa 55 la définition des zones de l’article 232 du code général des impôts. Pour ma part, je considère qu’il est préférable de s’en tenir à un simple renvoi afin de ne pas alourdir la loi, puisque cette définition est relativement dense et qu’elle existe déjà à un endroit bien précis. Ce détail est d’autant plus surprenant que le Gouvernement n’a pas jugé nécessaire de supprimer le renvoi quelques alinéas plus haut.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Je pense que M. Tardy s’en souvient parfaitement : je l’avais suivi en première lecture au sujet d’un renvoi au code pénal dans l’article 1er, s’agissant de la définition de la discrimination.

Nous évoquons ici un sujet différent. La commission n’est pas favorable à cet amendement, car il apparaît nécessaire de rappeler avec précision les critères que doivent remplir les zones dans lesquelles s’applique le dispositif d’encadrement, afin de consacrer le caractère exceptionnel de la situation du marché locatif et de justifier ainsi la mise en œuvre de mesures exceptionnelles par rapport aux zones non tendues. Il est donc important de mentionner dans ce texte, y compris pour garantir sa stabilité juridique, les zones précises dans lesquelles le dispositif pourra s’appliquer.

Si le renvoi à l’article 232 du code général des impôts subsiste à un autre endroit du texte – vous avez sans doute raison, monsieur Tardy, et je salue votre cohérence –, je ne doute pas que nos collègues sénateurs veilleront à apporter les modifications nécessaires.

M. Lionel Tardy. Bien sûr !

(L’amendement n132, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Fasquelle, pour soutenir l’amendement n76.

M. Daniel Fasquelle. Cet amendement important vise à maintenir le caractère exceptionnel et temporaire du blocage des loyers. Comme l’ont dit des organismes indépendants – mais vous ne voulez malheureusement entendre personne –, la généralisation du blocage des loyers découragera les investisseurs et créera un climat de défiance à leur égard dans notre pays. Elle provoquera aussi une dégradation progressive du parc immobilier. Ne pouvant pas faire évoluer les loyers, un certain nombre de propriétaires modestes seront empêchés d’investir pour maintenir en état le logement qu’ils louent.

La bonne solution consiste évidemment à augmenter le nombre de logements : c’est ce qui permettra d’atteindre l’équilibre. Puisque vous êtes convertis à l’économie de marché depuis hier après-midi, allez au bout de votre logique, et abandonnez cette approche extrêmement dirigiste et rigide du marché locatif au profit d’une approche un peu plus ouverte et dynamique ! Favorisez la construction de logements ! Mais Mme la ministre a des amis qui, à travers des associations, multiplient les recours partout sur le territoire national – j’en ai été la victime dans ma commune et dans ma circonscription. En multipliant les recours et en utilisant ces lois qui se multiplient, on nous empêche d’ouvrir certains espaces à la création de logements supplémentaires. On nous dit ensuite qu’il n’y a pas assez de logements, et qu’il faut encadrer les loyers parce que le déséquilibre entre l’offre et la demande provoque une augmentation de ceux-ci. Tout cela n’est pas très cohérent !

L’encadrement des loyers peut parfois être utile : il est déjà prévu dans la loi, mais il doit demeurer exceptionnel et temporaire.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Monsieur Fasquelle, je vous rejoins sur un point : la loi prévoit le caractère exceptionnel et temporaire, non du blocage, mais de l’obligation instituée par notre assemblée de procéder à un encadrement des loyers à la relocation par voie de décret annuel dans des situations exceptionnelles de déséquilibre de l’offre et de la demande. De ce point de vue, votre volonté est pleinement satisfaite par la rédaction des alinéas 56 à 58 : dans le contexte exceptionnel que connaissent un certain nombre de zones de notre pays qui subissent un déséquilibre entre l’offre et la demande et où des locataires ne trouvent pas à se loger à un niveau de loyer correspondant à leurs ressources, nous demandons au Gouvernement de prolonger ce dispositif tant que cette situation perdure, de manière tout à fait exceptionnelle, afin d’éviter un certain nombre d’abus à la relocation que nous connaissons tous.

J’en viens à vos autres arguments. Il n’y a pas du tout de blocage des loyers ; d’ailleurs, à la fin de votre intervention, vous avez parlé d’encadrement. Nous pourrons en rediscuter si vous le souhaitez.

S’agissant des recours, vous avez sans doute parfaitement compris que ce Gouvernement et cette majorité ont prévu de lutter, par voie d’ordonnances, contre les recours abusifs contre les permis de construire.

M. Daniel Fasquelle. Cela ne marche pas pour les associations !

M. Daniel Goldberg, rapporteur. La majorité poursuit cet objectif afin de débloquer la construction de logements. Les recours abusifs pénalisent à la fois ceux qui souhaitent se loger et un certain nombre de professionnels de l’immobilier qui veulent construire des logements dans les délais impartis.

Pour toutes ces raisons, la commission a donné un avis défavorable à cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Le rapporteur a été très clair sur les arguments en faveur du maintien de la rédaction actuelle du texte.

Dans la mesure où M. Jacob, à la reprise de nos débats, est venu donner des leçons de bienséance à mon collègue Alain Vidalies, je m’interroge. Je m’honore en effet d’être à l’origine de l’ordonnance qui va permettre de lutter contre les recours abusifs et mafieux, ces personnes qui font des recours contre les permis de construire en monnayant leur retrait. Or avec une aisance qui pose question, monsieur le député, vous avez procédé à un amalgame avec ceux qui seraient mes amis et qui déposeraient ce type de recours. Je voudrais savoir, monsieur le député, si vous sous-entendez que mes amis sont mafieux. Comme vous avez fait le lien avec les associations de protection de l’environnement, je me pose des questions. Mais cela ne m’étonnerait pas compte tenu de la nature de vos méthodes que nous avons découvertes depuis le début de la semaine.

M. Daniel Fasquelle. Intéressant !

Mme Cécile Duflot, ministre. Je vous invite cependant, monsieur le député, à modérer vos propos. Nous avons réussi, alors que le gouvernement précédent s’était engagé à le faire, mais qu’il ne l’a pas fait, à enrayer la dynamique des recours mafieux qui s’était emparée d’une partie de notre pays. Il n’est dans l’esprit de personne de confondre le travail légitime d’un certain nombre d’associations de protection de l’environnement avec des pratiques mafieuses.

Mme Michèle Bonneton. Bravo !

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Fasquelle.

M. Daniel Fasquelle. J’aimerais savoir ce que vous entendez par mes méthodes, madame la ministre. De telles allusions sont graves. C’est vous qui pratiquez l’amalgame. Vous me prêtez des propos que je n’ai pas tenus. Vos amis, ce sont ces associations de protection de l’environnement, mais je n’ai jamais dit qu’elles avaient un caractère mafieux. Au demeurant, lorsque vous avez présenté votre projet de loi à la commission des affaires économiques, je me suis félicité de ce texte que j’ai pour partie soutenu. Nous sommes tous victimes de recours de la part d’individus – doit-on les appeler mafieux ? – qui exercent des recours dans l’espoir de percevoir de l’argent. C’est tout à fait scandaleux et nous pouvons être d’accord sur ce point. Cela étant, ne me prêtez pas des propos que je n’ai pas tenus. Ça, c’est scandaleux et condamnable du point de vue de la méthode.

En ce qui concerne les associations de protection de l’environnement, certaines font parfaitement leur travail, mais d’autres multiplient les recours abusifs. Je connais des familles qui ont eu à souffrir de tels recours, alors que ces derniers n’étaient en rien fondés. Je vous invite volontiers dans le Pas-de-Calais, madame la ministre, pour vous faire rencontrer des familles qui ont été les victimes de recours abusifs, qui les ont profondément déstabilisées. Heureusement que nous nous sommes organisés pour les soutenir. Voilà ce que j’ai voulu dire, rien d’autre. C’est pourquoi je vous demande de retirer votre allusion à mes prétendues méthodes. En tant que parlementaire, j’ai la liberté de prendre la parole dans cet hémicycle et de vous faire un certain nombre de remarques. Apparemment, cela vous déplaît quand elles ne vont pas dans votre sens. En tout cas, cessez de me prêter des propos que je n’ai pas tenus.

Mme la présidente. La parole est à M. Julien Aubert.

M. Julien Aubert. Permettez-moi de revenir sur ce qui me semble être un malentendu. Mon collègue Fasquelle a fait remarquer, je l’ai bien écouté, qu’il existait deux types de recours. Il y a celui émanant d’individus qui ont un intérêt lucratif dans l’utilisation du droit et sur lequel notre avis est unanime. Mais il a également appelé votre attention – et je peux témoigner que le problème ne se pose pas uniquement dans le Pas-de-Calais – sur l’existence d’associations environnementales – dont on pourrait dire qu’elles sont vos amies, madame la ministre, que vous les connaissiez ou non – qui partagent une vision de l’urbanisme et poursuivent systématiquement en justice toute action visant à construire des bâtiments. Cela pose un problème à la fois au niveau des tribunaux qui se retrouvent engorgés, et aux citoyens qui sont visés par ces mesures.

Pour autant, on ne peut parler de mafia, ce terme n’étant pas approprié. En revanche, lorsqu’on en vient à réfléchir à l’état du droit, je pense qu’il faut responsabiliser les associations. La meilleure manière de protéger l’environnement est de s’attaquer aux vrais problèmes.

M. Philippe Bies. Oui.

M. Julien Aubert. Dans certains cas, ces recours sont pertinents et nous sommes heureux d’avoir des associations, environnementales ou non, qui s’y attaquent. Mais ils ne doivent pas systématiquement se transformer en arme. Tel était le sens de l’intervention de mon collègue.

(L’amendement n76 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Tetart, pour soutenir l’amendement n40.

M. Jean-Marie Tetart. Lorsqu’un locataire conteste l’évolution du loyer, il peut saisir la commission départementale de conciliation avant, éventuellement, de saisir la juridiction compétente. Dans la loi actuelle, ce processus prévoit un délai à cette fin. Dans votre projet, ce délai a disparu. Il semblerait judicieux de le rétablir. Notre amendement propose de le fixer à trois mois afin que la commission de conciliation puisse être saisie.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Goldberg, rapporteur. La commission n’a pas suivi votre logique. Afin d’assurer la sécurité juridique, il convient précisément de prévoir que la commission de conciliation puisse être saisie à tout moment dès lors que le bailleur enfreint des dispositions législatives. Par ailleurs, le projet de loi prévoit que la saisine de la commission constitue un préalable à la saisine du juge. Pour faciliter les échanges et le rôle de la commission de médiation, il convient de limiter l’engorgement des juridictions.

Le fait que le texte dans sa rédaction actuelle ne prévoit pas de limitation de durée permet cela afin que la conciliation, le dialogue organisé par la commission de conciliation entre le bailleur et le locataire puisse se faire le plus en amont et de la manière la plus amiable possible avant de saisir la justice.

Avis défavorable.

(L’amendement n40, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n393.

M. André Chassaigne. L’amendement est défendu.

(L’amendement n393, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n394.

M. André Chassaigne. Défendu également.

(L’amendement n394, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Piron, pour soutenir l’amendement n206.

M. Michel Piron. Il s’agit d’une mesure technique. La pratique révèle qu’il y a un contentieux de plus en plus abondant et une difficulté croissante de justifier des charges récupérables compte tenu de ce que la liste limitative des charges fixée réglementairement n’a jamais été révisée depuis près de quarante ans. Il est donc proposé d’introduire la pratique alternative du forfait sur charges locatives pour remédier à la croissance de contentieux.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Je vous proposerai un jour, monsieur Piron, un débat philosophique sur ce qui est technique et ce qui ne l’est pas. (Sourires.)

Pour moi, il ne s’agit pas d’une mesure technique. C’est la généralisation du forfait sur charges locatives, nous en avons déjà discuté. La mise en place d’un forfait risque de détourner le dispositif d’encadrement des loyers que, contrairement à nous, vous n’approuvez pas.

M. Michel Piron. C’est une contestation épistémologique !

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Pour ces raisons, la commission a émis un avis défavorable.

(L’amendement n206, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n392.

M. André Chassaigne. Le débat est récurrent depuis 2009 et le Grenelle de l’environnement. Depuis lors, le coût des travaux d’amélioration des logements en matière énergétique est reporté pour partie sur le locataire. Nous avions eu de nombreux échanges sur cette question. Le texte de loi considère que le locataire doit contribuer. Or la mention de partage des économies de charge est ambiguë. Un logement loué est valorisé par la location. Il doit offrir au locataire le plus de confort possible et répondre à des critères d’efficacité énergétique eu égard au loyer.

De nombreux dispositifs fiscaux aident les propriétaires. Or l’économie d’énergie n’est pas forcément effective pour le locataire. On peut trouver des cas où le locataire aura payé une partie des travaux – or pour nombre d’entre eux, ils connaissent de grandes difficultés – dont il n’aura pas forcément le bénéfice.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Nous avons eu ce débat à plusieurs reprises. Les travaux d’économies d’énergie vont profiter au locataire. De ce point de vue, on peut légitimement penser qu’il peut y participer. Chacun souhaite que les travaux soient réellement engagés, or ils ne sont pas obligatoires pour la plupart d’entre eux. C’est pourquoi la participation du locataire est souhaitable.

Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Julien Aubert.

M. Julien Aubert. Je veux soutenir l’amendement de mon collègue communiste. Lors d’une vente d’appartement, le degré de déperdition énergétique est évalué. Cette évaluation a un impact sur la valeur du bien. Les travaux réalisés par un propriétaire en matière d’efficacité énergétique font évaluer à la hausse ou à la baisse le prix du bien lorsqu’il est remis sur le marché. Par conséquent, il est plus logique que seul le propriétaire assure cette charge car c’est lui qui en retirera un gain et non le locataire. Sinon, l’on pourrait considérer que le locataire participe de manière déguisée à une évolution du prix du bien. L’amendement de notre collègue est tout à fait logique. Dans le rapport de forces financier entre propriétaire et locataire, c’est tout de même le propriétaire qui selon toute vraisemblance dispose de plus de moyens pour investir dans la rénovation énergétique du bien.

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Vous devriez le dire à vos collègues.

(L’amendement n392 n’est pas adopté.)

(L’article 3, amendé, est adopté.)

Article 3 bis

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Fasquelle, pour soutenir l’amendement n26 tendant à supprimer l’article 3 bis.

M. Daniel Fasquelle. S’agissant de mon échange avec Mme la ministre à propos de l’action de certaines associations, je voudrais lui faire part de mon expérience. Avec des maires de droite et de gauche, je suis en train d’élaborer un schéma de cohérence territoriale. Or une association nous a fait savoir qu’elle exercerait un recours quoi qu’il arrive considérant qu’il ne fallait ouvrir aucun espace nouveau à l’urbanisation. À la question de savoir comment j’allais loger les personnes que l’on n’arrive pas à loger et comment on allait lutter contre l’augmentation des loyers qui découle de ce déséquilibre, elle a répondu que ces gens devaient aller se loger ailleurs.

Mme Cécile Duflot, ministre. Ceux qui ont dit cela sont supposés être mes amis ?

M. Daniel Fasquelle. Ces associations se revendiquent de votre mouvement.

Mme Cécile Duflot, ministre. Arrêtez !

M. Daniel Fasquelle. Les militants de ces associations, on les retrouve malheureusement au moment des campagnes électorales aux côtés de vos candidats. Ce ne sont peut-être pas vos amis, mais ils votent pour vous, distribuent vos tracts, collent vos affiches.

J’en viens à mon amendement qui concerne le dépôt de garantie. Le projet de loi demande un rapport, mais il faut éviter la multiplication des rapports. Nous ne pouvons qu’être d’accord sur cette position de principe.

Quant au dépôt de garantie, nous considérons qu’il est légitime qu’il revienne au bailleur afin qu’il puisse en conserver la jouissance dans la mesure où il s’agit d’une contrepartie de la mise à disposition du logement. Nous ne voyons pas l’intérêt qu’il y aurait à sanctuariser ce dépôt de garantie comme la loi le prévoit.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Comme souvent je partage une partie du raisonnement de M. Fasquelle, mais pas la totalité. (Sourires.)

Je suis d’accord avec lui sur le fait qu’il faut éviter de multiplier les rapports. Quant à mon désaccord, il porte sur la question de savoir qui a la maîtrise du dépôt de garantie. Rapporte-t-il des intérêts oui ou non et à qui ?



De ce point de vue, la possibilité d’étudier cette question me paraît judicieuse. Avis défavorable donc.



Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Défavorable.

(L’amendement n26 n’est pas adopté.)

(L’article 3 bis est adopté.)

Article 4

Mme la présidente. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n396.

M. André Chassaigne. Défendu.

(L’amendement n396, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Goldberg, rapporteur, pour soutenir l’amendement n675.

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Amendement de cohérence.

(L’amendement n675, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 4, amendé, est adopté.)

Article 4 bis A

(L’article 4 bis A est adopté.)

Article 4 ter

Mme la présidente. La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement n133.

M. Lionel Tardy. En matière de location de meublés de tourisme, je persiste à dire que l’obligation d’information du loueur est suffisante. Une déclaration sur l’honneur ne ferait qu’ajouter de la paperasse et serait compliquée à gérer pour les intermédiaires numériques dont il est implicitement question.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Goldberg, rapporteur. En première lecture, nous avons adopté un amendement prévoyant que les sites internet participant à la location touristique de biens immobiliers, notamment de manière temporaire, recueillent une déclaration sur l’honneur du loueur indiquant que les obligations auxquelles il est soumis sont remplies. Compte tenu des dérives constatées sur le terrain, ces précisions me semblent utiles.

Par ailleurs, ce n’est pas à vous, monsieur Tardy, qui êtes un fin connaisseur du numérique, que j’apprendrai que cette déclaration peut être transmise par voie dématérialisée.

Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Défavorable également.

Mme la présidente. La parole est à M. Julien Aubert.

M. Julien Aubert. Je n’ai pas très bien compris ce qu’apportait cette déclaration sur l’honneur, en dehors de son caractère symbolique. Qu’en attendez-vous concrètement ?

M. Lionel Tardy. Rien !

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Nous avons déjà débattu de cette question en commission, mais je vous réponds bien volontiers.

En tant que législateurs, nous devons prendre en compte les évolutions de l’économie numérique. Cette déclaration sur l’honneur permet de dégager de leurs responsabilités les plateformes qui servent d’intermédiaire entre un locataire et un propriétaire en attestant que la personne qui met un bien en location remplit toutes les obligations correspondantes. Par exemple, elles peuvent s’assurer que les personnes qui sous-louent un bien ont reçu l’autorisation de leur propriétaire. Cela apporte une sécurité.

(L’amendement n133 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Piron, pour soutenir l’amendement n501.

M. Michel Piron. Défendu !

(L’amendement n501, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

(L’article 4 ter est adopté.)

Article 4 quater

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Goldberg, rapporteur, pour soutenir l’amendement n654, de suppression de l’article.

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Chers collègues de l’opposition, vous voyez qu’il m’arrive aussi de vouloir supprimer certains dispositifs de ce projet de loi. Et je vais vous en expliquer la raison.

L’article 4 quater impose la publication de la surface Carrez dans les annonces locatives proposées sur les sites internet. Si l’idée poursuivie paraît de bon sens, sa traduction législative pourrait prêter à confusion.

D’abord, se référer à la surface Carrez ne paraît pas forcément la solution la plus pertinente en matière de rapports locatifs. En effet, cette surface est obligatoire en matière de vente mais, en matière de location, c’est avant tout la notion de surface habitable qui prévaut.

Par ailleurs, la rédaction même de l’article est imprécise : il englobe l’ensemble des biens proposés à la location. Or, pour les terrains, la surface Carrez est peu pertinente.

Enfin, le dernier alinéa de l’article est clairement d’ordre réglementaire.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. J’avais donné un avis favorable à l’adoption de l’amendement qui a donné lieu à cet article au Sénat mais après vérification, il nous a semblé que nous nous étions un peu emballés. Il nous semble sage de supprimer cette disposition. Avis favorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Julien Aubert.

M. Julien Aubert. Monsieur le rapporteur, s’agissant des terrains, votre raisonnement paraît tout à fait logique. En revanche, pour les logements, je vous suis moins. Pourquoi maintenir deux unités de mesure ? La surface Carrez est un moyen de définir un périmètre dans lequel on peut vivre puisque ce calcul permet de déduire les caves, les dessous d’escaliers et autres surfaces du même type. N’aurions-nous pas pu profiter de l’occasion pour appliquer la même unité, quelle que soit la destination du bien, location ou vente ? Cela aurait permis d’établir des moyens de comparaison.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Comme nous avons déjà eu cette discussion en commission au mois de juillet, je me permets de vous renvoyer aux pages 62 et 63 du rapport rédigé pour la première lecture. Nous avions établi la nécessité de maintenir la distinction entre surface habitable et surface dite loi Carrez selon que les biens sont à louer ou à vendre.

(L’amendement n654 est adopté et l’article 4 quater est supprimé.)

Article 5

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Goldberg, rapporteur, pour soutenir l’amendement n655.

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Cet amendement précise les dispositions de la loi de 1989 applicables aux logements conventionnés.

(L’amendement n655, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement n256 rectifié.

M. Martial Saddier. Défendu.

(L’amendement n256 rectifié, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements, nos 739, 740 et 656, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

La parole est à M. Daniel Goldberg, rapporteur, pour les soutenir.

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Il s’agit d’amendements de coordination.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Favorable.

(Les amendements nos 739, 740, 656 sont successivement adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Goldberg, rapporteur, pour soutenir l’amendement n657.

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Il vise à corriger une erreur matérielle.

(L’amendement n657, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 5, amendé, est adopté.)

Articles 5 bis et 6

(Les articles 5 bis et 6 sont successivement adoptés.)

Article 6 ter

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n636 qui fait l’objet des sous-amendements nos 762 et 780.

La parole est à M. Daniel Goldberg, rapporteur, pour soutenir l’amendement n636.

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Cet amendement propose une nouvelle rédaction de l’article 6 ter afin de préciser le dispositif relatif à la location de courte durée de meublés touristiques qui a occupé nombre de nos débats.

Premièrement, l’article L. 631-7 n’est plus modifié. Cet article, qui prévoit une autorisation préalable de changement d’usage dans les communes de plus de 200 000 habitants ou celles situées dans les départements de la première couronne francilienne pour tout type de changement d’usage, ne vise pas seulement les locations touristiques. La rédaction adoptée en première lecture pourrait prêter à confusion.

Deuxièmement, le présent amendement procède à la création d’un nouvel article L. 631-7-1-A dans le code de la construction et de l’habitation afin de définir un régime d’autorisation temporaire de changement d’usage permettant la location d’un logement pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n’y élit pas domicile, ce qui correspond à la définition de la location touristique. En pratique, il appartiendra à la commune de fixer, par une délibération du conseil municipal, les modalités de délivrance des autorisations temporaires et ce qu’elles recouvrent, notamment la durée de location et les caractéristiques du local. Par ailleurs, il est précisé que la location touristique par un bailleur occupant de sa résidence principale n’est pas soumise à autorisation.

Troisièmement, le présent amendement procède à la modification de l’article L. 631-9 du code de la construction et de l’habitation afin d’assouplir le régime encadrant la possibilité pour les communes autres que celles que j’ai citées de mettre en place un régime d’autorisation préalable au changement d’usage.

Depuis le vote de la LME, le droit prévoit que cette extension peut se faire par décision de l’autorité administrative, sur proposition du maire de la commune. Il est proposé par le présent amendement que dans les zones d’urbanisation continue, cette extension soit possible sur simple décision de la commune, par la voie d’une délibération du conseil municipal.

En somme, cet amendement clarifie et précise le dispositif initialement prévu, tout en respectant intégralement l’objectif poursuivi.

Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Pellois, pour soutenir le sous-amendement n762.

M. Hervé Pellois. Une fois n’est pas coutume, ce sous-amendement vise à défendre les provinciaux qui possèdent un pied-à-terre dans une grande ville. Il prévoit, sous certaines conditions, que la première résidence secondaire, et elle seule, puisse être considérée comme un local destiné à l’habitation, à l’instar de la résidence principale.

Dans le souci d’une meilleure régulation de la location meublée de courte durée, l’exonération de la résidence secondaire du régime de changement d’usage ne doit concerner pour chaque propriétaire qu’un seul appartement en dehors de sa résidence principale. Celui-ci devra néanmoins effectuer une déclaration préalable en mairie pour la location de courte durée de sa première présidence secondaire, à la différence de la procédure qui prévaut pour la résidence principale. Afin d’encadrer ce type de location, ce régime serait limité à quatre mois de location maximum dans l’année. Cela permettrait de limiter l’intérêt financier d’un pur investissement sans occupation et d’éviter les abus qui consistent pour des propriétaires de multiples résidences à faire de la location meublée touristique un véritable commerce.

Mme la présidente. La parole est à Mme Laure de La Raudière, pour soutenir le sous-amendement n780.

Mme Laure de La Raudière. Mon sous-amendement repose sur la même logique que celui de M. Pellois, à quelques nuances près.

Premièrement, la région ne me semble pas constituer un bon cadre car les mêmes difficultés qu’aujourd’hui pourraient se poser pour une commune située à la limite de deux régions. Je préférerais que soit inscrit un critère de distance. En l’occurrence, j’ai choisi cinquante kilomètres parce que cela correspond à la petite heure de voiture qui dicte généralement la localisation d’un pied-à-terre. Cela pourrait être 100 kilomètres, si vous le souhaitez. Cela permet régler tous les problèmes alors que le critère de la région ne permet de régler que le cas de Paris ou de certaines villes dans la structure actuelle des régions.

Le deuxième point sur lequel je diverge un peu de l’amendement de M. Pellois est la durée : je propose pour ma part six mois car, souvent, les propriétaires ont la possibilité de louer ces pied-à-terre plus de deux jours par semaine. Si l’on part sur une moyenne de trois jours de location par semaine, cela fait cent cinquante jours par an, soit plus de quatre mois. Encore une fois, je ne suis pas attachée à une durée précise – quatre ou six mois – mais j’aimerais que nous en débattions.

Dernier point, qui n’est pas nul : je propose dans mon sous-amendement d’instaurer une pénalité, une amende, qui créera une contrainte très forte pour éviter que le système soit dévoyé – c’est le risque en effet avec ce régime réservé aux pied-à-terre, pour lesquels on n’a pas besoin d’une autorisation. Il faut donc, selon moi, prévoir une amende pour faire respecter le dispositif législatif que je propose ; elle est du reste conséquente puisqu’elle s’élèverait à 25 000 euros, garantissant ainsi le respect de ce dispositif.

M. François Pupponi. Oui, ça refroidit.

Mme la présidente. Monsieur le rapporteur, quel est l’avis de la commission sur ces deux sous-amendements ?

M. Daniel Goldberg, rapporteur. C’est un débat que nous avons déjà eu, et j’ai pu échanger avec vous, madame de La Raudière, ainsi qu’avec Hervé Pellois, sur vos préoccupations. J’émets toutefois un avis défavorable à vos deux sous-amendements, qui relèvent de la même logique, pour la raison suivante : ce n’est pas à l’Assemblée nationale de définir la politique de l’habitat de chaque commune. Il appartient à chaque conseil municipal, indépendamment de toute autorité administrative – c’est aussi l’objet de cet article 6 ter, dans la rédaction que je vous propose –, de définir sa propre politique d’habitat. Le conseil municipal pourra ainsi recourir à la procédure de l’autorisation temporaire, beaucoup plus souple que le changement d’usage introduit dans la loi en première lecture et clarifié par la rédaction que je vous propose de l’article 6 ter. Il pourra dès lors, dans sa délibération, autoriser ou ne pas autoriser ce que vous proposez.

Dans le droit fil de la conception de la décentralisation rappelée hier encore par le Président de la République, et qui pourra contenter quelques-uns dans cet hémicycle, je considère que si un conseil municipal décide d’autoriser ce que vous proposez, il pourra très bien le faire : ce n’est pas forcément à la représentation nationale de trancher.

Je rappelle que, dans certains quartiers ou certaines parties de notre territoire national, les meublés touristiques temporaires provoquent une forme d’embolisation qui ne permet plus à des familles de trouver des locations pour se loger, les locations temporaires de meublés touristiques étant finalement plus rentables. Il faut donc limiter cette dérive, tout en permettant à certaines communes de l’autoriser si elles le décident. Telle est la raison de mon avis défavorable à vos deux sous-amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement du rapporteur et les deux sous-amendements ?

Mme Cécile Duflot, ministre. L’avis du Gouvernement est favorable à l’amendement du rapporteur et défavorable aux deux sous-amendements.

(Les sous-amendements nos 762 et 780, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

(L’amendement n636 est adoptél’article 6 ter est ainsi rédigé.)

Article 6 sexies

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Tetart, pour soutenir l’amendement n356.

M. Jean-Marie Tetart. Défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Nous souhaitons conserver un équilibre sur cette question. Aussi les copropriétaires doivent-ils avoir voix au chapitre. L’avis est donc défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Julien Aubert.

M. Julien Aubert. Je voudrais pour ma part soutenir cet amendement, car nous savons tous comment fonctionne une copropriété. Je pense que le présent article porte atteinte au droit de propriété. En effet, lorsque vous possédez un bien, vous devez pouvoir en choisir librement l’usage : tant que vous respectez la loi et les autorisations administratives qui peuvent être exigées dans certaines agglomérations, je ne vois pas sur quelles bases votre voisin pourrait décider de l’usage que vous voulez faire de votre bien, qu’il s’agisse de location ou de location à courte durée.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Tetart.

M. Jean-Marie Tetart. Bien qu’ayant déjà défendu mon amendement, je souhaite ajouter que votre façon de procéder condamne indirectement, dans les faits, ce type d’usage de courte durée, car aucune copropriété n’acceptera de changer la destination d’un logement dans ces conditions. Il est certes très utile d’imposer une majorité pour transférer un logement dans une activité de type commerciale ou libérale, ce qui peut entraîner nombre de désagréments avec la venue de patients ou de clients. Mais dans le cas présent, la situation est différente, et cet article offre le moyen d’interdire ce type de changement d’affectation. Je partage donc l’avis de mon collègue sur la limitation de la liberté individuelle de disposer de son bien.

(L’amendement n356 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Goldberg pour soutenir l’amendement n637.

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Je souhaite, en présentant la défense de l’amendement n637, répondre aux observations de nos deux collègues. L’amendement n637, en modifiant la rédaction de l’article 6 sexies, vise à permettre à l’assemblée générale d’autoriser les changements d’usage pour une location de courte durée à la majorité de l’article 25. Écoutez bien, monsieur Tetart, si vous me permettez de vous dire cela : si l’assemblée générale des copropriétaires souhaite décider que chaque demande de changement d’usage lui sera soumise, elle doit le décider à la majorité de l’article 25, dont on sait qu’elle n’est pas forcément simple à atteindre. Si elle prend cette décision, alors c’est la majorité prévue à l’article 24 de la loi de 1965 sur les copropriétés qui sera requise pour autoriser le changement d’usage.

M. Jean-Marie Tetart. Cela ne change rien : la majorité sera très facilement atteinte !

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Par ailleurs, pour répondre à votre observation, monsieur Tetart, les résidences principales ne sont pas concernées : elles sont sorties du champ d’application de l’article, lequel ne vise donc que les biens qui ne sont pas occupés en tant que résidence principale par leurs propriétaires.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Avis favorable à l’amendement du rapporteur et défavorable aux sous-amendements.

Mme la présidente. La parole est à M. Julien Aubert.

M. Julien Aubert. Je crois que nous ne parlons pas de la même chose. Vous nous avancez des arguments relatifs à la majorité : vous dites par exemple qu’il sera difficile d’obtenir cette majorité, raison pour laquelle vous avez créé des filtres, etc. Permettez-moi d’en revenir à la question de principe : quel est le rôle d’une copropriété ? Peut-être me contredirez-vous, mais le rôle d’une copropriété est de gérer collectivement le bien commun, et notamment les parties communes. Comment le fait de demander l’accord de vos voisins pour disposer librement de votre bien, dont vous avez la légitime propriété, comment cette faculté accordée désormais par la loi n’enfreindrait-elle pas la libre disposition de votre bien et le droit de propriété ?

Ce n’est pas une question de majorité, monsieur le rapporteur, mais de droit constitutionnel : le droit à la propriété, reconnu depuis 1789, est protégé par la Constitution. Quand bien même une quasi-unanimité serait requise au sein de la copropriété, je ne vois pas sur quelles bases votre voisin pourrait mettre son nez dans vos affaires et vous imposer d’utiliser votre appartement de telle ou telle façon. Il s’agirait d’un véritable détournement du rôle d’une copropriété, et je crains même que cela ne tende les relations entre copropriétaires dans certains endroits : en effet, si vous commencez à permettre à votre voisin de décider pour vous, les relations seront ensuite nettement moins faciles à gérer lorsqu’il s’agira de décider de l’implantation des locaux pour les poubelles, ou que sais-je encore.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Je voudrais répondre très précisément sinon aux accusations, du moins au réquisitoire de M. Aubert. Nous verrons ainsi qui défend sur ce point les copropriétaires, et notamment les petits copropriétaires qui ne possèdent qu’un seul bien et souhaitent vivre tranquillement.

Quelle est la situation ? Vous évoquez le droit de propriété ; je vous réponds par le droit de propriété dans le cadre d’une copropriété, puisque le sujet est le changement d’usage d’un bien qui n’est pas la résidence principale du propriétaire, et ce pour une très courte durée, dans le but de loger des touristes, par exemple.

Dans l’hypothèse la plus extrême, avec un changement d’occupant tous les jours pendant 365 jours par an, ou même tous les deux jours, certains logements peuvent être loués de cette façon avec des rotations très fréquentes. Le droit de propriété et le droit de libre usage ont donc des conséquences pour les copropriétaires, qui voient passer ces occupants dans les parties communes de l’immeuble. Leur propre libre jouissance peut ainsi être remise en cause du fait des nuisances sonores ou des saletés constatées dans l’immeuble ; ils peuvent supporter des charges supplémentaires ; le droit de propriété des familles habitant l’immeuble peut être battu en brèche du fait de ces changements d’usage.

Je rappelle que le changement d’usage signifie que l’on change l’usage d’un bien, par exemple en transformant un lieu d’habitation en appartement destiné à procurer des revenus locatifs. Si le bien est situé au milieu d’un champ, cela ne dérangera personne et l’autorisation temporaire sera suffisante. Mais nous nous situons dans le cadre d’une copropriété, dans laquelle les autres copropriétaires peuvent être gênés par une activité de nature commerciale ne relevant pas de l’autorisation temporaire, dispositif plus souple dont je parlais tout à l’heure. Il est donc nécessaire que, s’ils le souhaitent et à la majorité de l’article 25, les copropriétaires décident de se saisir du sujet. C’est une vraie difficulté dans un certain nombre de quartiers, à Paris, mais pas seulement à Paris.

Pour toutes ces raisons, il faut adopter ce dispositif qui permet d’encadrer les changements d’usage tout en répondant par ailleurs à une autre préoccupation : celle des 10 000 à 15 000 logements à Paris transformés en meublés touristiques temporaires, et qui sont autant de logements en moins pour les familles cherchant des locations de durée classique – un an, ou trois ans en bail privé classique.

Mme la présidente. La parole est à M. Julien Aubert.

M. Julien Aubert. Je vous entends bien, monsieur le rapporteur : nous connaissons le problème, et nous ne le sous-estimons pas, notamment en ce qui concerne l’impact sur le logement étudiant.

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Cela ne concerne pas le logement étudiant !

M. Julien Aubert. Dans une ville comme Paris, il est aujourd’hui plus facile, quand vous possédez un logement de trente mètres carrés, de le faire tourner tous les jours ou toutes les semaines à 700 euros la semaine, plutôt que de le louer à l’année à un étudiant désargenté. Cela a donc bel et bien un impact sur les conditions dans lesquelles les étudiants peuvent venir étudier à Paris.

La question est la suivante : est-ce aux copropriétaires de gérer ce type de problèmes ? Ma conviction profonde est que cela ne relève pas de la copropriété : c’est à l’État d’autoriser ou non, c’est à l’État d’intervenir ou non, et c’est éventuellement aux collectivités territoriales de prendre des mesures pour autoriser ou non, selon telle ou telle condition. Nous devons atteindre l’objectif que vous avez fixé : celui-ci n’est pas contestable, car les problèmes existent réellement. Ce que je critique, en revanche, monsieur le rapporteur, c’est la possibilité offerte à votre voisin de décider pour vous : c’est un tout autre sujet !

(L’amendement n637 est adoptél’article sexies est ainsi rédigé.)

Article 7

Mme la présidente. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n397.

M. André Chassaigne. Défendu.

(L’amendement n397, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

(L’article 7 est adopté.)

Article 7 ter

Mme la présidente. La parole est à Mme Michèle Bonneton, pour soutenir l’amendement n521.

Mme Michèle Bonneton. Le présent amendement porte sur le dispositif de défiscalisation Censi-Bouvard, qui concerne les résidences touristiques, les résidences pour personnes âgées et les résidences étudiantes. Cette défiscalisation est importante. Le Sénat a introduit cet article 7 ter afin de demander des précisions sur le nombre de logements de chaque catégorie.

Je propose, par cet amendement, de préciser le contenu de ce rapport, notamment l’importance et l’impact économique de ce dispositif « Censier-Bouvard ».

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Goldberg, rapporteur. J’entends les arguments de Mme Bonneton, mais j’ai dit tout à l’heure que j’avais peu d’appétence pour demander au Gouvernement qu’il rédige un rapport. Les précisions que vous demandez vont de soi. Aussi, je considère que votre demande est satisfaite. Je vous propose donc de retirer votre amendement. À défaut, j’y suis défavorable.

Mme la présidente. Madame Bonneton, retirez-vous cet amendement ?

Mme Michèle Bonneton. Non, parce que le rapport, tel qu’il est demandé, ne porte que sur le nombre de logements de chaque catégorie ayant bénéficié du dispositif de défiscalisation. Je propose qu’il précise le coût qu’une telle mesure entraîne pour l’État. La défiscalisation a une grande portée. Or nous sommes dans une période où chaque euro dépensé doit être un euro utile. Il me semble donc important de pouvoir disposer de ces informations étant donné que ce dispositif n’a jamais été évalué.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. On entend beaucoup dire que les lois sont bavardes. Si on allait au bout de votre logique, madame la députée, il faudrait préciser l’ordre et le sommaire du rapport dans la loi. Je prends solennellement l’engagement que l’ensemble des questions seront traitées puisqu’il s’agit bien d’une évaluation budgétaire de ce dispositif et de son impact. Si je suis favorable à ce que les éléments que vous demandez figurent dans le rapport, et ils y seront, il n’est pas nécessairement utile qu’ils figurent dans la loi. Aussi, comme le rapporteur, je vous demande de retirer cet amendement, sur la lettre pas sur le fond.

Mme la présidente. Madame Bonneton, retirez-vous maintenant cet amendement ?

Mme Michèle Bonneton. Mme la ministre m’ayant donné de grandes assurances, je le retire.

(L’amendement n521 est retiré.)

(L’article 7 ter est adopté.)

Mme la présidente. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

3

Fait personnel

Mme la présidente. En application de l’article 58, alinéa 4 du règlement, M. Julien Aubert a demandé la parole pour un fait personnel.

Vous avez la parole, cher collègue.

M. Julien Aubert. Madame le président, hier a eu lieu la discussion générale sur le présent texte. La présidente de séance ayant décidé de lever la séance de l’après-midi à vingt heures, la discussion générale s’est poursuivie en soirée. Pour ma part, je suis passé vers vingt-deux heures trente, ce qui a chamboulé une partie de mes plans. Puis j’ai dû quitter l’hémicycle. J’ai été extrêmement surpris, pour ne pas dire choqué, d’apprendre que M. le rapporteur avait, à plusieurs reprises, cru bon de souligner que je n’étais pas resté en séance. Je remarque qu’aujourd’hui je suis venu pour assister au débat et qu’à de nombreuses reprises, lorsque je suis intervenu, on m’a expliqué que le sujet que j’abordais avait déjà été traité en première lecture et qu’on ne pouvait donc pas en débattre. Je ne sais donc pas quelle est la bonne attitude à adopter.

En tout cas, ce dont je suis sûr c’est que je ne suis pas l’un des membres de la commission les moins actifs. Je suis spécialisé sur l’énergie et je suis le dossier de la transition énergétique qui est un gros dossier. Nous avons tous une série de travaux à réaliser par ailleurs. Il se trouve que ce soir-là j’avais pris d’autres engagements. J’aurais aimé que M. le rapporteur ne m’utilise pas comme bouc émissaire tout au long du débat,…

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure de la commission des affaires économiques. Non ! Ce n’est pas son genre !

M. Julien Aubert. …d’autant que je n’étais pas là pour me défendre.

Mme le président avait cru bon de m’interpeller en me disant : « Monsieur la députée, vous étiez la dernière oratrice inscrite », sarcasme qui, à mon avis, ne concourt pas non plus garantir la sérénité de nos débats…

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Quand vous dites : Mme « le » président, vous ne la garantissez pas non plus !

M. Julien Aubert. …puisque cela porte atteinte à mon identité et surtout à l’impartialité de la présidence. Si la présidence souhaite arbitrer sereinement les débats, il ne faut pas qu’elle fasse de geste offensif ou agressif à l’égard de tel ou tel car cela ne conduit pas au respect de la présidence dont nous avons tous besoin pour que les débats soient courtois.

Mme la présidente. Quand vous dites : Mme « le » président, la présidente a la même réaction que lorsqu’on dit : Mme « le » député à une députée. Cela dit, je prends acte de votre fait personnel qui ne sera pas décompté de votre temps de parole.

La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques.

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. C’est aussi désobligeant de dire à la ministre « madame le ministre » que de dire à un député « monsieur la députée ». La formulation qui a été utilisée hier pour s’adresser à vous est une façon de dire que l’on ne doit pas dire « madame le président » quand c’est une femme qui préside ou « madame le ministre » quand c’est une ministre qui est sur les bancs du Gouvernement. Les choses sont claires désormais.

M. Julien Aubert. La présidente, c’est la femme du président !

4

Ordre du jour de la prochaine séance

Mme la présidente. Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :

Suite de la deuxième lecture du projet de loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové.

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt heures cinq.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance

de l’Assemblée nationale

Nicolas Véron