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Texte du projet de loi – n° 1395
MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES
ET DISPOSITIONS SPÉCIALES
AUTORISATIONS BUDGÉTAIRES POUR 2014 –
CRÉDITS ET DÉCOUVERTS
Il est ouvert aux ministres, pour 2014, au titre du budget général, des autorisations d’engagement et des crédits de paiement s’élevant respectivement aux montants de 410 458 992 562 € et de 407 409 515 462 €, conformément à la répartition par mission donnée à l’état B annexé à la présente loi.
ÉTAT B
(Article 44 du projet de loi)
Répartition, par mission et programme, des crédits du budget général
BUDGET GÉNÉRAL
(En euros) | ||
Mission |
Autorisations d’engagement |
Crédits |
Administration générale et territoriale de l’État |
2 819 745 907 |
2 717 467 710 |
Administration territoriale |
1 727 912 075 |
1 726 252 093 |
Dont titre 2 |
1 532 116 999 |
1 532 116 999 |
Vie politique, cultuelle et associative |
285 357 667 |
285 998 406 |
Dont titre 2 |
29 548 000 |
29 548 000 |
Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur |
806 476 165 |
705 217 211 |
Dont titre 2 |
391 910 811 |
391 910 811 |
ADMINISTRATION GÉNÉRALE ET TERRITORIALE DE L’ÉTAT
I. – La loi n° 77-729 du 7 juillet 1977 relative à l’élection des représentants au Parlement européen est ainsi modifiée :
1° L’article 17 est ainsi rédigé :
« Art. 17. – Quinze jours avant le scrutin, il est institué dans chaque département, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, dans les îles Wallis-et-Futuna, à Mayotte, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon une commission de propagande chargée d’assurer l’envoi et la distribution des bulletins de vote de chaque liste de candidats dans chaque mairie de la circonscription.
« La commission électorale mentionnée à l’article 7 de la loi organique n° 76-97 du 31 janvier 1976 relative aux listes électorales consulaires et au vote des Français établis hors de France pour l’élection du Président de la République est chargée d’assurer l’envoi et la distribution des bulletins de vote de chaque liste de candidats dans chaque ambassade ou poste consulaire de la circonscription.
« Les commissions de propagande et la commission électorale mentionnée à l’alinéa précédent mettent également en ligne les bulletins de vote ainsi que la circulaire et son enregistrement sonore pour chacune des listes de candidats de la circonscription, sur les sites internet désignés par le ministre de l’Intérieur.
« Pendant la campagne électorale, des exemplaires des circulaires et bulletins de vote sont tenus à la disposition des électeurs dans les mairies, selon des modalités fixées par décret.
« Chaque liste de candidats désigne un mandataire qui participe aux travaux des commissions mentionnées aux alinéas précédents avec voix consultative. »
2° L’article 18 est ainsi modifié :
a) Au deuxième alinéa, les mots : « , affiches, circulaires » sont remplacés par les mots : « et affiches » ;
b) Au troisième alinéa, les mots : « des bulletins, affiches et circulaires » sont remplacés par les mots : « des bulletins et affiches ».
3° L’article 23 est ainsi modifié :
a) Après le premier alinéa, il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« II. – Toutefois, pour l’application du 1° de l’article 10 de la même loi organique, « l’envoi ou la remise aux électeurs des circulaires ou des bulletins de vote » s’entend de la mise en ligne des circulaires et des bulletins de vote des listes de candidats prévue à l’article 17 de la présente loi. » ;
b) Au deuxième alinéa devenu troisième, les mots : « II. – Toutefois, par dérogation », sont remplacés par les mots : « III. – Par dérogation » ;
c) Le III et le IV deviennent respectivement le IV et le V.
II. – Les dispositions du I sont applicables en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis-et-Futuna.
Amendements identiques :
Amendements n° 20 présenté par Mme Auroi, M. Alauzet, Mme Sas, Mme Abeille, Mme Allain, Mme Attard, M. Baupin, Mme Bonneton, M. Cavard, M. Coronado, M. de Rugy, M. François-Michel Lambert, M. Mamère, Mme Massonneau, M. Molac, Mme Pompili et M. Roumegas, n° 239 présenté par M. Abad, Mme Le Callennec, Mme Schmid, M. Audibert Troin, Mme Nachury, M. Vitel, M. de La Verpillière, M. Alain Marleix, Mme Pons, M. de Ganay, Mme Fort, M. Gandolfi-Scheit, M. Dassault, M. Voisin et M. Darmanin et n° 373 présenté par M. Molac, rapporteur pour avis au nom de la commission des lois.
Supprimer cet article.
ÉTAT B
(Article 44 du projet de loi)
Répartition, par mission et programme, des crédits du budget général
BUDGET GÉNÉRAL
(En euros) | ||
Mission |
Autorisations d’engagement |
Crédits |
Politique des territoires |
282 999 845 |
295 377 623 |
Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire |
245 871 550 |
257 048 348 |
Dont titre 2 |
10 415 000 |
10 415 000 |
Interventions territoriales de l’État |
37 128 295 |
38 329 275 |
ÉTAT B
(Article 44 du projet de loi)
Répartition, par mission et programme, des crédits du budget général
BUDGET GÉNÉRAL
(En euros) | ||
Mission |
Autorisations d’engagement |
Crédits |
Égalité des territoires, logement et ville |
8 256 162 433 |
8 071 802 834 |
Prévention de l’exclusion et insertion des personnes vulnérables |
1 313 268 421 |
1 313 268 421 |
Aide à l’accès au logement |
5 065 683 259 |
5 065 683 259 |
Urbanisme, territoires et amélioration de l’habitat |
579 941 631 |
406 870 131 |
Politique de la ville |
492 688 099 |
481 400 000 |
Conduite et pilotage des politiques de l’égalité des territoires, du logement et de la ville |
804 581 023 |
804 581 023 |
Dont titre 2 |
804 581 023 |
804 581 023 |
ÉGALITÉ DES TERRITOIRES, LOGEMENT ET VILLE
I. – Par dérogation aux dispositions du septième alinéa de l’article L. 351-3 du code de la construction et de l’habitation ainsi qu’aux dispositions du troisième alinéa de l’article L. 831-4 du code de la sécurité sociale, les paramètres de calcul de l’aide personnalisée au logement et ceux de l’allocation de logement sociale ne sont pas révisés pour l’année 2014.
II. – Après le sixième alinéa de l’article L. 351-3 du code de la construction et de l’habitation est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L’évaluation des dépenses accessoires retenues forfaitairement peut faire l’objet de dispositions particulières, afin de tenir compte de l’existence d’un conventionnement spécifique, pour les logements ayant bénéficié des ressources apportées par le fonds instauré par l’article L. 302-9-3. »
Amendement n° 163 présenté par M. Chassaigne, Mme Buffet et les membres du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Supprimer cet article.
Amendement n° 223 présenté par M. Goldberg, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires économiques, Mme Linkenheld, Mme Lepetit, Mme Maquet et M. Pupponi.
Supprimer l’alinéa 1.
Amendement n° 648 présenté par M. Caresche.
Substituer à l’alinéa 1 les deux alinéas suivants :
« I. - À la fin de la première phrase du septième alinéa de l’article L. 351-3 du code de la construction et de l’habitation, le mot : « janvier » est remplacé par le mot : « octobre ».
« I. bis À la fin de la première phrase du troisième alinéa de l’article L. 831-4 du code de la sécurité sociale, le mot : « janvier » est remplacé par le mot : « octobre ».
Amendement n° 616 présenté par le Gouvernement.
À l’alinéa 1, substituer aux mots :
« pour l’année »
les mots :
« au 1er janvier ».
Amendement n° 213 présenté par M. Caresche, rapporteur spécial au nom de la commission des finances.
Compléter cet article par l’alinéa suivant :
« III.- Le Gouvernement remet au Parlement, au plus tard le 31 août 2014, un rapport présentant les réformes envisageables pour améliorer l’efficacité sociale des régimes de l’aide personnalisée au logement, de l’allocation de logement familiale et de l’allocation de logement sociale à enveloppe budgétaire constante. »
I. – Le IV de l’article 43 de la loi n° 2012-1509 du 29 décembre 2012 de finances pour 2013 est ainsi rédigé :
« IV. – L’Union d’économie sociale du logement mentionnée à l’article L. 313-18 du code de la construction et de l’habitation verse une contribution de 300 millions d’euros en 2014 et 150 millions d’euros en 2015 au comptable public compétent. À cette fin, l’Union appelle des ressources auprès des organismes agréés aux fins de collecter la participation des employeurs à l’effort de construction mentionné à l’article L. 313-1 du même code qui lui sont associés, au prorata des versements des employeurs encaissés au titre de l’année précédant celle au cours de laquelle le versement est dû.
« Cette contribution est versée par quarts au plus tard les 16 mars, 16 juin, 16 septembre et 16 décembre. Elle est affectée au Fonds national d’aide au logement mentionné à l’article L. 351-6 du même code. Elle est liquidée, ordonnancée et recouvrée selon les modalités prévues pour les recettes des établissements administratifs de l’État. »
II. – Avant le 20 janvier 2014, chaque organisme agréé aux fins de collecter la participation des employeurs à l’effort de construction transmet au ministre chargé du logement un état récapitulatif des acomptes effectués en 2013 en application du troisième alinéa du IV de l’article 43 de la loi n° 2012-1509 du 29 décembre 2012 de finances pour 2013 dans sa rédaction antérieure à la publication de la présente loi, ainsi qu’un état récapitulatif des versements des employeurs mentionnés au premier alinéa de ce même IV.
Le ministre notifie à chaque organisme la contribution définitivement due au titre de 2013. Si la contribution notifiée excède les acomptes effectués par l’organisme au titre de 2013, le solde est acquitté au plus tard le 1er mars 2014. En cas de trop-perçu, celui-ci est remboursé à l’organisme au plus tard à cette même date.
Le solde et le trop-perçu sont liquidés, ordonnancés et recouvrés selon les modalités prévues pour les recettes des établissements administratifs de l’État.
Amendement n° 480 présenté par M. Caresche, rapporteur spécial au nom de la commission des finances.
À la fin de l’alinéa 2, substituer aux mots :
« celle au cours de laquelle le versement est dû » :
les mots :
« l’année au titre de laquelle la contribution est due ».
Amendement n° 495 présenté par M. Caresche, rapporteur spécial au nom de la commission des finances.
À l’alinéa 4, supprimer les mots :
« la publication de ».
I. – L’article 7-1 de la loi n° 92-125 du 6 février 1992 relative à l’administration territoriale de la République est abrogé.
II. – Les communes et groupements ayant bénéficié en 2013 de l’assistance technique prévue par l’article 7-1 de la loi n° 92-125 du 6 février 1992 relative à l’administration territoriale de la République peuvent obtenir, au plus tard jusqu’au 31 décembre 2015, l’appui des services de l’État pour l’achèvement des missions d’assistance technique qui le nécessiteraient, selon des modalités définies par une convention signée entre le représentant de l’État et, selon le cas, le maire ou le président du groupement.
III. – Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2014.
Amendement n° 437 présenté par Mme Bonneton et Mme Allain.
À l’alinéa 2, substituer aux mots :
« ayant bénéficié en 2013 de l’assistance technique prévue par l’article 7-1 de la loi n° 92-125 du 6 février 1992 relative à l’administration territoriale de la République peuvent obtenir, au plus tard jusqu’au 31 décembre 2015 »
les mots :
« peuvent bénéficier pour les années 2014 et 2015 de l’assistance technique prévue par l’article 7-1 de la loi n° 92-125 du 6 février 1992 relative à l’administration territoriale de la République et peuvent obtenir, au plus tard jusqu’au 31 décembre 2017 ».
Amendement n° 481 présenté par M. Caresche, rapporteur spécial au nom de la commission des finances.
À l’alinéa 2, après la seconde occurrence du mot :
« État »
insérer les mots :
« dans le département ».
Amendement n° 438 présenté par Mme Bonneton et Mme Allain.
À la fin de l’alinéa 3, substituer à l’année :
« 2014 »
l’année :
« 2016 ».
Amendement n° 426 présenté par Mme Delga, Mme Rabault, M. Fauré, M. Vergnier, M. Sauvan, Mme Massat, Mme Rabin, M. Potier et M. Calmette.
À la fin de l’alinéa 3, substituer à l’année :
« 2014 »
l’année :
« 2015 ».
Compte rendu de la commission élargie du mercredi 30 octobre 2013
(Application de l’article 120 du Règlement)
Administration générale
et territoriale de l’État
La réunion de la commission élargie commence à seize heures vingt, sous la présidence de M. Gilles Carrez, président de la commission des finances, et de M. Dominique Raimbourg, vice-président de la commission des lois puis de M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois.
M. le président Gilles Carrez. Nous sommes heureux d’accueillir M. Manuel Valls, ministre de l’intérieur, pour cette nouvelle commission élargie.
Je rappelle que, pour conserver à nos échanges toute leur vivacité, les rapporteurs disposeront de cinq minutes chacun. M. le ministre leur répondra, et nous entendrons ensuite les porte-parole des groupes puis les collègues qui souhaiteront intervenir.
M. Dominique Raimbourg, président. Je suis, moi aussi, très heureux d’accueillir M. le ministre de l’intérieur, que nous retrouverons d’ailleurs demain matin, dans le cadre de la commission élargie consacrée aux crédits de la mission « Sécurité ». Cette année, la commission des lois a désigné deux rapporteurs : M. Michel Zumkeller, pour les programmes « Administration territoriale » et « Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur », et M. Paul Molac, pour le programme « Vie politique, cultuelle et associative ». M. Zumkeller a consacré son avis, qui fourmille de détails intéressants, au nouveau permis de conduire sécurisé, sujet important pour nos concitoyens pour le ministère de l’intérieur et pour la sécurité routière. M. Molac, pour sa part, s’est penché sur le traitement des comptes de campagne des élections présidentielle et législatives de 2012, autre sujet très actuel.
Mme Hélène Vainqueur-Christophe, rapporteure spéciale. Les crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État » progresseront l’an prochain de 6 %, en raison surtout des prochaines élections européennes et municipales. À cette fin, les crédits du programme 232, « Vie politique, cultuelle et associative », sont doublés pour atteindre 286 millions d’euros. En revanche, les crédits destinés à l’administration territoriale et aux services transversaux du ministère de l’intérieur ne progresseront que de 0,8 %, pour se conformer à la logique de réduction générale de nos déficits publics, dont le niveau avait atteint un niveau insoutenable sous la précédente législature.
La masse salariale sera allégée par la suppression de 366 ETPT dans les préfectures et sous-préfectures – soit un taux de non-remplacement de 58 % des départs en retraite –, et de 48 ETPT dans les services transversaux et fonctions support du ministère. En contrepartie de ces économies, l’État s’engage à conforter certains emplois précaires ou mal rémunérés, et à financer des mesures catégorielles au profit des personnels en place. Dans le même esprit, les efforts consentis en matière de gestion immobilière, notamment par le regroupement sur deux sites de services centraux du ministère actuellement dispersés en onze endroits, permettront de financer des actions prioritaires. J’ai moi-même pu constater sur le terrain combien la question de la réduction des effectifs au sein du réseau préfectoral pouvait être délicate. Si le maintien du service public préfectoral peut souvent s’en accommoder, notons tout de même que, sous les deux précédentes législatures, les moyens et l’organisation du réseau ont considérablement souffert de la RGPP et de la RéATE (réforme de l’administration territoriale de l’État), celle-ci ayant renforcé le rôle des préfets de région et prévu de transformer celui des sous-préfets sans accompagner convenablement les agents dans cette mutation. À cet égard, je me félicite que le Gouvernement ait décidé d’augmenter de 2,2 % le budget alloué à l’action sociale et à la formation des personnels du ministère, répondant ainsi à l’attente des agents.
Il est temps, ainsi que s’y est engagé le Gouvernement, de procéder à une véritable modernisation de notre réseau préfectoral. L’adaptation de la carte des sous-préfectures ne doit pas obéir à la seule logique financière ; elle doit aussi veiller à préserver une représentation efficace de l’État au plus près des citoyens, tant il est vrai que, selon la formule du sous-préfet de Montdidier, une sous-préfecture c’est « l’État à qui l’on peut serrer la main », un État proche et accessible qui aide les citoyens et les entreprises à résoudre leurs difficultés administratives. Mieux faire correspondre le périmètre des arrondissements urbains et périurbains à celui des intercommunalités et prendre en compte les évolutions socio-démographiques des territoires, tel est l’enjeu de cette réforme. Cette dernière est attendue depuis si longtemps que les personnels en ont conçu de l’anxiété, et les administrés une peur d’abandon. J’approuve l’expérimentation, menée en concertation avec les acteurs locaux en Alsace-Moselle, sur une réorganisation territoriale du réseau. C’est à la lumière des résultats obtenus, et en prenant en compte les caractéristiques propres à chacun des territoires que la démarche pourra être acceptée et étendue.
L’État doit mettre tout en œuvre pour améliorer l’accueil des usagers en préfecture. Si la dématérialisation des procédures est positive, elle ne peut pas entièrement se substituer au contact humain. Il faudra donc améliorer l’organisation des fonctions de guichet pour éviter certaines démarches administratives inutiles, telles les remises de récépissés à répétition qui conduisent trop souvent les usagers étrangers à se déplacer plus que nécessaire pour les demandes de titres. Il faudra également œuvrer à l’uniformisation des procédures en préfecture, et définir clairement l’ensemble des pièces justificatives nécessaires à la constitution d’un dossier. Les disparités entre préfectures sont en effet telles qu’elles pourraient remettre en cause l’égalité de traitement entre usagers.
J’en viens à l’article 61 qui prévoit la dématérialisation de la propagande électorale pour les élections européennes. Cette démarche devrait permettre une économie de plus de 27 millions, et va donc dans le bon sens. Toutefois, j’ai cru comprendre que le Gouvernement envisageait un report, et j’espère qu’on n’ira pas chercher les 27 millions manquants sur d’autres lignes budgétaires de la mission, notamment sur la masse salariale. Je suis favorable à une dématérialisation partielle de l’organisation des élections, notamment s’agissant de l’envoi des bulletins de vote aux électeurs. Le ministère a-t-il prévu d’étendre cette dématérialisation à d’autres scrutins ? Si oui, selon quelles modalités et à quelle échéance ?
Par ailleurs, pour l’évolution du rôle des sous-préfectures, il importe de tenir compte des fragilités particulières de certains territoires ruraux ou isolés qui manquent souvent d’expertise juridique face à la complexification croissante de leur environnement légal. Si les sous-préfectures concentrent leur action sur le développement local – notion assez large –, comment fera-t-on évoluer les compétences des personnels en place, qui sont habitués à accueillir le public dans le cadre de fonctions de guichet ?
M. Michel Zumkeller, rapporteur pour avis de la commission des lois, pour les programmes « Administration territoriale » et « Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur ». Je me suis plus particulièrement intéressé cette année au nouveau permis de conduire sécurisé, piloté par le ministère de l’intérieur et mis en œuvre par l’Agence nationale des titres sécurisés (ANTS).
Appelé à remplacer le traditionnel permis en papier rose à trois volets, ce nouveau permis de conduire, au format carte de crédit, comporte une puce électronique. Il est mis en œuvre via l’application informatique FAETON, qui a vocation à être interconnectée avec l’ensemble des acteurs concernés. Les premiers permis au nouveau format sont délivrés depuis le 16 septembre 2013. Pour l’instant, ils concernent principalement les nouveaux conducteurs. Mais pourquoi a-t-on pris un tel retard, alors qu’il s’agit de se conformer à une directive européenne de 2006 ?
Dans quelle mesure le nouveau permis permettra-t-il de lutter contre la fraude ? Confirmez-vous les estimations selon lesquelles 5 à 10 % des permis de conduire seraient falsifiés ?
Le renouvellement du permis de conduire nécessite la remise de l’ancien titre à la préfecture sans délivrance immédiate du nouveau : pendant quelques jours, l’usager se trouve ainsi privé du droit de conduire, ce qui peut être très pénalisant pour les professionnels de la route, soumis à l’obligation de renouveler périodiquement leur permis. Pour ces personnes, la préfecture pourrait-elle délivrer un récépissé autorisant la conduite, le temps d’obtenir le nouveau permis de conduire ?
Pour le commun des automobilistes, les nouveautés apportées par le nouveau permis de conduire sont encore limitées. Les usagers n’ont pas la possibilité de connaître via internet l’état d’avancement de la production de leur permis de conduire. Alors que la puce informatique intégrée au nouveau permis le permettrait, ils ne peuvent pas non plus consulter leur solde de points ni leur relevé d’information intégral, voire disposer d’informations nouvelles, telles que la date à laquelle ils récupéreront l’intégralité de leurs points en l’absence de nouvelle infraction. Pourquoi ?
Quant à la nouvelle application informatique FAETON 2, dont les documents budgétaires indiquent vaguement qu’elle entrera en application au premier semestre 2014, quelles nouvelles fonctionnalités offrira-t-elle ?
Selon quel calendrier sera remplacé le stock de 40 millions d’anciens permis, qui resteront valables jusqu’à 2033 ?
Quelques questions encore sur d’autres aspects de la mission « Administration générale et territoriale de l’État ». Où en est la redéfinition du rôle et du réseau des sous-préfectures ? Les crédits du PLF pour 2014 intègrent-ils d’ores et déjà des économies liées à la fermeture de certaines d’entre elles ? Un calendrier est-il arrêté pour les prochains mois ? Par ailleurs, où en est la procédure de redécoupage des cantons, en vue des élections départementales de 2015 ?
(M. le président Jean-Jacques Urvoas remplace M. Dominique Raimbourg à la présidence.)
M. Paul Molac, rapporteur pour avis de la commission des lois, pour le programme « Vie politique, cultuelle et associative ». Je me suis intéressé cette année au traitement des comptes de campagne des élections présidentielle et législatives de 2012, question brûlante dont les braises n’ont pas encore tout à fait refroidi.
Le Conseil constitutionnel n’a achevé le traitement de ce contentieux qu’en mai 2013 pour ce qui concerne les élections législatives et en juillet pour ce qui concerne l’élection présidentielle, confirmant le rejet du compte de campagne de M. Nicolas Sarkozy. La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) rend compte de ses travaux pour ces mêmes campagnes de 2012 dans son quinzième rapport d’activité publié le 15 octobre dernier.
Monsieur le ministre, quel bilan dressez-vous de la première application des lois du 14 avril 2011, dites « paquet électoral » ? S’agissant des candidats ayant méconnu la législation sur le financement de la campagne, quel usage le Conseil constitutionnel a-t-il fait de son nouveau pouvoir de ne pas prononcer une inéligibilité systématique en cas de rejet des comptes de campagne ? Il semble que le Conseil ait quelques réticences à moduler dans le temps la durée de cette inéligibilité : qu’en pensez-vous ?
Des difficultés spécifiques se sont révélées s’agissant du financement des campagnes législatives à l’étranger, qui ont conduit à l’invalidation et à l’inéligibilité de deux de nos collègues, Mmes Corinne Narassiguin et Daphna Poznanski-Benhamou. Au-delà de ces deux cas, les statistiques témoignent de très grandes différences dans le traitement contentieux des comptes absents ou rejetés par la CNCCFP entre l’étranger et les autres circonscriptions : 26 % pour l’étranger, soit 32 comptes sur 123, contre 5 % en moyenne pour l’ensemble des élections législatives de 2012. Peut-être faudrait-il réfléchir à la possibilité d’ouvrir des comptes bancaires à l’étranger.
Plus largement, quelles évolutions législatives ou réglementaires seraient de nature à améliorer le déroulement de ces élections ? Selon quel calendrier ? Il faudrait éviter que les règles changent sans que les candidats en aient eu connaissance suffisamment en amont ou alors que les campagnes ont déjà commencé. Ne serait-il pas opportun d’introduire, pour les députés, la notion de bonne foi inscrite dans le code régissant les élections locales ?
S’agissant des comptes de campagne de l’élection présidentielle, les candidats ayant méconnu les règles de financement n’encourent pas la sanction d’inéligibilité, ce qui est considéré comme une anomalie par les professeurs que j’ai auditionnés. Mais il est vrai qu’une telle sanction serait assez irréaliste, a fortiori si elle devait concerner un candidat élu. La meilleure solution serait sans doute, comme l’a préconisé la commission Jospin en 2012, d’inviter le Parlement à tirer les conséquences du rejet du compte de campagne dudit candidat : à lui de décider si les irrégularités constituent « un manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat », au sens de l’article 68 de la Constitution, ce qui justifierait la réunion du Parlement en Haute Cour, en vue, le cas échéant, de prononcer la destitution du chef de l’État. Encore faudrait-il, pour que cette solution puisse fonctionner, que la loi organique organisant la procédure de destitution du chef de l’État, en attente depuis 2007, soit enfin votée. Quand le Gouvernement compte-t-il s’y employer ?
La parité est un autre aspect du programme « Vie politique, cultuelle et associative ». Dans le cadre du financement public des partis politiques, le projet de loi pour l’égalité entre les femmes et les hommes prévoit de doubler les sanctions financières pour non-respect de la parité. Ce texte précise également les règles de rattachement à un parti politique des candidats aux élections législatives, en prévoyant que « lorsqu’un candidat s’est rattaché à un parti ou à un groupement politique qui ne l’a pas présenté, il est déclaré n’être rattaché à aucun parti » en vue de la répartition de l’aide publique aux partis. Mais comment seraient contrôlées les investitures des candidats aux législatives ?
S’agissant toujours de parité, le mécanisme de sanction actuellement prévu ne prend en compte que le nombre brut de femmes présentées. Or, certaines formations politiques présentent des femmes dans des circonscriptions plus difficilement gagnables afin de faire remonter artificiellement leur quotient de parité. Ne serait-il pas légitime d’instaurer, pour la deuxième tranche de financement public, un dispositif prenant en compte les députés et sénateurs effectivement élus, et non les candidats ? Un tel dispositif serait également de nature à favoriser la parité au Sénat.
L’article 61 du projet de loi de finances prévoit de dématérialiser la propagande électorale aux élections européennes. Je comprends la nécessité de s’adapter aux nouveaux moyens de communication ; je suis également conscient des contraintes budgétaires qui s’imposent à nous et de l’intérêt que peut représenter l’économie attendue de 27,6 millions. Pour autant, faut-il vraiment introduire cette nouveauté à l’occasion des élections qui battent tous les records d’abstention ? Rappelons qu’aux élections européennes de juin 2009, l’abstention a atteint 59,4 %, soit, à ce jour, le record absolu de non-participation à une élection au suffrage universel en France.
M. Manuel Valls, ministre de l’intérieur. Parlons d’abord des sous-préfectures. Je crois à la pertinence d’un échelon infra-départemental de l’État et à la nécessité d’une réforme des sous-préfectures aussi pragmatique que possible. La carte des arrondissements a peu évolué depuis 1926. En procédant à des ajustements de sorte que chacun d’entre eux corresponde à un bassin de vie, économique et d’habitat, on maintiendrait un maillage efficace, répondant au sentiment d’abandon qui existe parfois, et permettant de préserver l’égal accès aux services publics. Ces constats sont partagés par les rapports de la mission IGA-Datar-Conseil supérieur de l’administration territoriale (Csate) et de la mission Rebière-Weiss.
Dans ce contexte, j’ai confié une mission de rénovation de la carte des sous-préfectures dans les départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin aux préfets des régions Alsace et Lorraine, à l’échéance du 1er janvier 2015. La conduite d’une expérimentation dans ces trois départements, qui comptent un nombre important d’arrondissements, a pour objectif de définir une méthode pour la rénovation de la carte de nos sous-préfectures. La gestion des équipes, les aspects budgétaires et immobiliers devront donc être traités. Des fusions ou des redécoupages d’arrondissements pourront être proposés ainsi que des regroupements de services au sein des maisons de l’État. L’organisation administrative actuelle, les contraintes géographiques, les difficultés économiques feront aussi partie des critères à intégrer.
Au-delà des questions d’effectifs, il faut relativiser l’impact strictement budgétaire : l’État n’est généralement pas propriétaire de l’immobilier, et les dépenses de fonctionnement sont réduites – en moyenne 100 000 euros par an et par sous-préfecture. L’enjeu est d’abord la qualité du service public rendu sur l’ensemble du territoire et la présence de l’État qui tend la main – j’aime la symbolique de cette expression citée par Mme Vainqueur-Christophe.
Je partage avec vous, madame, le souci de remédier à la disparité des exigences des pièces justificatives dans les procédures de guichet, en particulier pour les étrangers qui ont parfois le sentiment que la liste des pièces s’allonge sans cesse. L’année dernière, j’avais fait de l’accueil des étrangers en préfecture ma priorité. Jusqu’à présent, chaque préfecture établit sa propre liste de pièces justificatives – et parfois au-delà de ce qui est prévu par la réglementation. Un chantier de simplification et d’uniformisation est engagé afin de constituer, à partir des strictes indications données en matière de documents exigibles par le Ceseda, des listes synthétiques et uniformes étayées d’exemples de documents permettant de satisfaire au besoin de preuve. Ce chantier aboutira au début de 2014.
Cela s’accompagnera d’un plan de formation spécifique. En cours d’élaboration, il a pour vocation d’accompagner les équipes dans la mise en œuvre des mesures d’organisation préconisées et dans l’application des évolutions réglementaires en cours et à venir. À l’occasion de déplacements dans des préfectures, j’ai constaté des améliorations tout à fait significatives, même s’il y a encore du travail à faire.
L’article 61 du projet de loi de finances prévoit, dans une logique de simplification, de modernisation de la vie publique, de réduction de l’impact écologique du fonctionnement de l’administration et d’adaptation du droit électoral aux nouveaux moyens de communication, la dématérialisation de la propagande électorale à destination des électeurs. En remplaçant l’envoi de la propagande papier par une mise à disposition des électeurs, sur les sites internet désignés par le ministère de l’intérieur, des documents de propagande, la mesure aurait pour effet de diminuer le coût de ces élections de 32,6 millions. Une telle dématérialisation est déjà en vigueur pour les élections des représentants des Français de l’étranger, en vertu de la loi du 23 juillet 2013, et a été validée par le Conseil constitutionnel. La généralisation d’internet, diffusé à 70 %, et les autres moyens de communication déployés par l’État, notamment les campagnes audiovisuelles et l’affichage électoral, permettraient une alternative à l’expédition par voie papier sans laisser de côté les personnes non encore équipées d’un accès à internet. Signalons du reste que la France fait figure d’exception dans l’Union européenne, en étant l’un des deux seuls pays, avec le Royaume-Uni, à adresser des documents électoraux au domicile des électeurs.
Tel était donc l’esprit de l’article 61. Toutefois, certains ont fait part de leurs réserves sur la mise en œuvre de cette mesure à une date trop proche des prochaines échéances électorales. L’application aux seules élections européennes, qui souffrent déjà d’une certaine désaffection pourrait également être interprétée négativement.
Le Gouvernement souhaite donc engager une concertation avec les différentes formations politiques pour examiner les modalités d’adaptation de la diffusion de l’information électorale aux nouvelles technologies. Comme élu ou candidat, je sais l’importance qu’on peut attacher au papier, à ces objets de propagande électorale sur lesquels nous travaillons tous avec fébrilité. Mais nous devons ouvrir cette réflexion le plus vite possible, d’ici à la fin de l’année 2013, et la faire porter sur l’ensemble des scrutins. C’est ainsi que nous préparerons sereinement cette évolution nécessaire du droit électoral. J’invite le Parlement à y participer, notamment en effectuant des comparaisons avec les pratiques des autres pays. Dans l’immédiat, je vous proposerai, si vous le souhaitez, de supprimer l’article 61.
Je propose également d’intégrer dans la concertation que je viens d’évoquer une réflexion sur la suppression, à compter de 2015, de l’envoi au domicile des électeurs du bulletin de vote pour les scrutins uninominaux.
L’évolution des missions des sous-préfectures impose en effet, madame la rapporteure spéciale, une réorientation des compétences des agents : de l’accueil du public vers le conseil et l’accompagnement des collectivités territoriales. Ce sujet a été bien identifié, dès l’élaboration de la dernière directive nationale d’orientation des préfectures en 2010. Les programmes de formation proposés par la direction des ressources humaines du ministère de l’intérieur doivent permettre une évolution des compétences des agents en adéquation avec les missions des structures. Cette réorientation constitue un défi, mais également une chance pour les agents des préfectures : ils pourront voir leurs responsabilités évoluer.
Vous avez enfin évoqué, madame la rapporteure spéciale, les suppressions d’emplois dans les préfectures et les sous-préfectures. Entre 2009 et 2011, 2 200 postes ont été supprimés, ce qui a correspondu au non-remplacement de 80 % des agents partant à la retraite. Puis, 450 postes ont été supprimés en 2013 et 550 le seront en 2014, ce qui correspond au non-remplacement d’un agent sur deux partant à la retraite. Vous mesurez ainsi l’effort d’adaptation qui est demandé à notre réseau territorial au titre du redressement – nécessaire – des comptes publics.
Vous avez posé des questions très précises, monsieur Zumkeller, sur le passage au nouveau permis de conduire et le retard qui a été pris en la matière. La troisième directive européenne relative au permis de conduire harmonise les règles de gestion de ce titre au sein de l’Union européenne : caractère renouvelable du permis, dont la durée de validité sera de quinze ans au maximum ; instauration de nouvelles catégories ; délivrance sécurisée du permis de conduire au format unique à partir du 19 janvier 2013 ; reprise de l’intégralité des permis de conduire actuels avant le 19 janvier 2033. Les difficultés rencontrées dans la mise au point de la nouvelle application informatique FAETON ont été surmontées. Avec l’accord de la Commission européenne et après avoir informé les États membres afin de garantir les droits à conduire dans l’espace européen, la France a délivré des permis temporaires tenant compte des nouvelles règles de gestion à partir du 19 janvier 2013, date fixée par la directive. Depuis le 16 septembre 2013, l’application FAETON fonctionne et les préfectures délivrent des permis de conduire conformes à la directive. La France a donc respecté ses engagements vis-à-vis de la Commission européenne et des États membres. En parallèle, nous avons poursuivi les travaux de modernisation de l’application FAETON, qui entrera en service dans le courant de l’année 2014, lorsque toutes les garanties de fiabilité et de sécurité auront été réunies, notamment au regard de la préservation des droits à conduire des usagers.
Le nouveau permis sécurisé au format carte bancaire sera réalisé par l’Imprimerie nationale dans des conditions de sécurité maximales : il sera doté, d’une part, d’une puce électronique sans contact – contenant les seules informations figurant sur le titre et permettant aux forces de l’ordre d’en vérifier l’authenticité – et, d’autre part, d’une bande à lecture optique – facilitant la reconnaissance automatique du numéro du titre. Le renouvellement périodique, tous les quinze ans, représentera un réel avantage en termes de vérification de l’identité et des droits à conduire : à chaque renouvellement, la photographie de l’usager sera changée et un justificatif de domicile sera demandé pour la mise à jour de l’adresse.
De plus, la connexion de l’application FAETON à d’autres systèmes informatiques et la création de modules de connexion avec l’application destinée aux auto-écoles, aux centres de sensibilisation à la sécurité routière, aux médecins agréés et aux magistrats permettra des échanges d’information plus rapides et plus sécurisés. En effet, tous les documents papier contenus dans les dossiers informatisés de permis de conduire seront dématérialisés, et les agents des préfectures – seuls habilités à accéder au cœur de FAETON au moyen de leur carte nominative – pourront les valider directement à l’écran. Enfin, la version modernisée de FAETON offrira des téléprocédures adaptées aux différents types d’usagers et simplifiera ainsi leurs démarches.
Les anciens titres seront échangés contre les permis sécurisés au format carte bancaire à partir de 2020. À cette occasion, les agents des préfectures vérifieront les droits à conduire des usagers lors d’un entretien face-à-face. Cette procédure permettra de retirer ou d’invalider les permis falsifiés, estimés à 10 % du stock. Des instructions très précises ont été données aux préfectures afin que la reprise de l’ancien titre ne se fasse qu’au moment de la remise du nouveau permis de conduire. Les préfectures ne pourront délivrer aucun récépissé : celui-ci n’aurait aucune valeur juridique, ni en France ni à l’étranger. Si ces instructions sont appliquées correctement, la délivrance du nouveau permis et la reprise concomitante de l’ancien titre ne devraient porter aucun préjudice aux usagers. Quant aux professionnels, ils devront préalablement passer une visite médicale d’aptitude.
Vous avez estimé, monsieur Zumkeller, que la délivrance du nouveau permis de conduire ne s’était accompagnée, à ce stade, que d’améliorations limitées pour les usagers. Néanmoins, depuis le 16 septembre, l’Agence nationale des titres sécurisés a ouvert un centre d’appels. Il traite environ 1 800 appels par jour, qui portent, pour l’essentiel, sur la production du titre et sur son acheminement. En outre, dès le 4 novembre prochain, les courriers d’accompagnement des nouveaux titres comporteront un code « Télépoints », qui facilitera l’accès au solde de points sur l’application « telepoints.fr ». Dans le cadre des mesures de modernisation de l’action publique, il est également prévu que les usagers puissent obtenir ce code au moyen d’une simple procédure en ligne à partir du début de l’année 2014. La consultation en ligne devra être fortement sécurisée, afin d’éviter toute dérive. Certains employeurs, notamment les transporteurs routiers et les entreprises de transport en commun, souhaiteraient avoir accès aux relevés de points. Nous devrons trouver un équilibre entre leur souci de sécurité et la protection des données personnelles. Rappelons qu’actuellement, les conducteurs reçoivent un courrier les informant de la reconstitution de leur capital de points au terme de la période probatoire, qui peut aller de un à dix ans.
S’agissant du calendrier, la reprise des 38 millions de permis actuels débutera vers 2020 pour s’échelonner jusqu’à 2027. Le processus sera industrialisé, ce qui permettra de traiter plusieurs millions de titres par an. Les usagers n’auront besoin de se rendre qu’une seule fois à la préfecture, pour l’entretien que j’ai mentionné. C’est également en 2027 que les premiers permis délivrés cette année seront renouvelés, au terme de leur période de validité de quinze ans.
Le redécoupage des cantons en vue des élections départementales de 2015 découle de la loi du 17 mai 2013, qui a instauré la parité aux élections départementales et garantit l’égalité devant le suffrage. Les critères de ce redécoupage sont connus : ils ont été définis par le Conseil constitutionnel dans sa jurisprudence, notamment dans sa décision du 16 mai 2013. Le Conseil a rappelé la prééminence du critère démographique, auquel il admet néanmoins certaines exceptions de portée limitée. En outre, les limites des nouveaux cantons ne devront pas nécessairement respecter celles des arrondissements ou des circonscriptions législatives. Le Gouvernement travaille sur la base de ces principes. Il ne s’écarte de l’application du critère démographique que de manière limitée, afin de tenir compte de spécificités géographiques incontournables. Le redécoupage s’appuie autant que possible sur la carte des EPCI, lorsque les départements disposent d’un schéma départemental de coopération intercommunale. À défaut, il tient compte en priorité de la carte cantonale existante, ainsi que de la carte des bassins de vie établie par l’INSEE pour l’année 2010. Les principes du redécoupage sont donc transparents.
Quant au calendrier, il est également connu. Dans chaque département, les préfets ont consulté, à ma demande, les principaux élus, le président du conseil général et les parlementaires – le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement l’a rappelé hier lors de la séance des questions au Gouvernement. Toutes les propositions de redécoupage ont ensuite été remises au ministère de l’intérieur, qui élabore actuellement, sur cette base, les projets de décrets. À ce jour, quarante projets ont été adressés aux conseils généraux afin de recueillir leur avis. Vingt-trois d’entre eux ont fait l’objet d’un vote, et quinze ont été transmis au Conseil d’État. Celui-ci examinera chacun des projets au regard des principes qui figurent dans la loi et dans la décision du Conseil constitutionnel. Lorsque le Conseil d’État aura rendu un avis positif, le décret sera publié. Le redécoupage de notre carte cantonale était nécessaire pour renforcer la légitimité démocratique de l’institution départementale. Le Gouvernement y travaille dans le strict respect du droit.
Le « paquet électoral », monsieur Molac, a notamment instauré deux nouvelles règles : les candidats ayant recueilli moins de 1 % des suffrages et n’ayant bénéficié d’aucun don sont désormais dispensés de déposer un compte de campagne ; tous les candidats sont tenus de présenter, au moment du dépôt de leur candidature, les pièces nécessaires à la désignation de leur mandataire financier. Ces deux réformes ont réduit le volume du contentieux traité par le Conseil constitutionnel : sur les 6 603 candidats qui se sont présentés aux élections législatives de 2012, 2 221 ont été dispensés de déposer un compte. D’autre part, le Conseil n’a plus recensé aucun cas d’absence de désignation de mandataire financier par les candidats, ce qui a également contribué à la baisse du nombre de saisines.
En outre, la loi organique du 14 avril 2011 a réformé le régime des sanctions que peut prononcer le Conseil constitutionnel en cas de méconnaissance par les candidats de leurs obligations en matière de dépôt des comptes et de financement de la campagne. L’article L.O. 136-1 du code électoral prévoit désormais que le Conseil peut déclarer un candidat inéligible dans trois cas : si son compte de campagne fait apparaître un dépassement du plafond des dépenses électorales ; s’il n’a pas déposé son compte dans les formes et les délais prescrits ; si son compte été rejeté à bon droit par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) pour un manquement d’une particulière gravité. Ces nouvelles dispositions permettent au Conseil de mieux adapter les sanctions à la situation réelle des candidats et vont donc dans le sens d’une justice plus équitable. Dans le cadre du contentieux des élections législatives de 2012, le Conseil a utilisé dans trente-sept cas la faculté de ne pas prononcer d’inéligibilité. Pour ce qui est de la durée des sanctions, le Conseil a proposé d’en revenir à une inéligibilité forfaitaire de deux ans, avec effet à compter de la date du scrutin. Cette adaptation permettrait de rétablir l’égalité entre les candidats ; en outre, les décisions d’inéligibilité conserveraient ainsi un réel effet sur les élections locales. Toutefois, il conviendra de trouver un véhicule législatif adapté.
S’agissant de l’élection des onze députés des Français établis hors de France, la CNCCFP a rendu des décisions sur 113 comptes de campagne et en a réformé 52, signe que les candidats ont éprouvé des difficultés à comprendre et à respecter la législation. Peu d’entre eux ont utilisé les règles spécifiques applicables dans leurs circonscriptions, notamment la possibilité pour le mandataire financier de désigner, dans chaque pays de la circonscription, une personne autorisée à engager et payer des dépenses en son nom. Dès lors, certains candidats ont réglé eux-mêmes des dépenses de campagne. Dix comptes de campagne rejetés par la CNCCFP sur vingt-deux l’ont été pour ce motif.
En outre, les candidats ont parfois mal interprété les dispositions relatives aux comptes bancaires à l’étranger. En sus du compte du mandataire financier, le code électoral permettait d’ouvrir un compte bancaire dans les pays dont la monnaie n’était pas convertible. Cette possibilité était toutefois réservée non pas au mandataire lui-même, mais aux personnes autorisées par le mandataire à régler certaines dépenses. La CNCCFP a rejeté quatre comptes de campagne pour ce motif, dont celui de Mme Corinne Narassiguin. En effet, le fonctionnement concomitant de deux comptes bancaires ouverts par le mandataire financier contrevenait aux dispositions des articles L. 52-6 et L. 330-7 du code électoral, qui imposent l’ouverture d’un compte unique, en France.
Dans ses observations, le Conseil constitutionnel a appelé à clarifier les règles applicables dans les circonscriptions des Français établis hors de France. Si elle était autorisée, l’ouverture d’un compte bancaire dans chacun des pays où se déroule la campagne faciliterait le paiement des dépenses, en évitant notamment les conversions en devises. Cette piste, envisagée par la CNCCFP dans son dernier rapport d’activité, devra faire l’objet d’une étude plus approfondie au cours des prochains mois. Une telle disposition dérogerait à la règle du compte bancaire unique, qui découle elle-même d’un principe essentiel du droit électoral : celui de l’unicité du compte de campagne. L’application de ce principe, qui facilite le contrôle des dépenses et des recettes des candidats, n’est aujourd’hui écartée – je le répète – que dans les pays dont la monnaie n’est pas convertible.
Enfin, une mauvaise lecture des textes a conduit plusieurs candidats à convertir leurs dépenses selon le taux de change applicable le jour de leur remboursement par le mandataire financier, ce qui a entraîné la réformation de quatre comptes de campagne.
Le Gouvernement étudiera l’opportunité d’une évolution des règles applicables au financement des campagnes dans les circonscriptions des Français établis hors de France. S’il s’engage dans cette voie, des modifications législatives seront nécessaires. Elles seraient alors soumises au Parlement dans des délais suffisants pour que les candidats puissent s’approprier les nouvelles règles avant le prochain renouvellement général de l'Assemblée nationale.
J’en viens à l’élection présidentielle. C’est la seule élection pour laquelle le législateur organique n’a pas prévu que le Conseil constitutionnel puisse prononcer l’inéligibilité d’un candidat ou du président élu, en cas de rejet de son compte de campagne. Pour ma part, je partage l’avis exprimé par la commission Jospin : bien qu’une telle situation ne se justifie pas sur le plan des principes, il n’existe pas d’alternative satisfaisante. On comprend les difficultés que créerait l’organisation de deux élections présidentielles rapprochées, a fortiori si la deuxième élection devait donner lieu à une cohabitation en tout début de mandat et susciter la convocation de nouvelles élections législatives !
Comme vous l’avez indiqué, monsieur Molac, la commission Jospin a proposé que le Parlement soit appelé à statuer sur les suites à donner à une décision de rejet du compte de campagne d’un candidat à l’élection présidentielle. Cette proposition doit encore être expertisée. Quant au projet de loi organique portant application de l’article 68 de la Constitution, il a été adopté par l’Assemblée nationale en première lecture le 24 janvier 2012, mais n’a pas encore été inscrit à l’ordre du jour du Sénat.
Le projet de loi pour l’égalité entre les femmes et les hommes prévoit un renforcement des sanctions financières applicables aux partis politiques qui ne présentent pas un nombre équivalent de femmes et d’hommes aux élections législatives. Cela suppose que les partis maîtrisent la liste des candidats qui souhaitent se rattacher à eux. En effet, le système actuel donne la possibilité aux candidats de se rattacher à un parti de leur choix, ce qui peut créer un déséquilibre entre le nombre d’hommes et de femmes présentés par ce parti, même si celui-ci entendait respecter la parité. Le projet de loi prévoit donc qu’un candidat ne puisse pas se rattacher à un parti qui ne l’a pas préalablement présenté.
La procédure de contrôle, qui doit être précisée par décret, pourrait être la suivante. Avant la période de dépôt des candidatures aux élections législatives, il reviendra à chaque parti d’établir une liste des candidats qu’il présente. Le ministère de l’intérieur centralisera ensuite les déclarations de rattachement faites par les candidats lors du dépôt de leur candidature – chacune est saisie dans l’application Élections – et les comparera avec les listes établies par les partis. Dans le cas où un candidat aura déclaré vouloir se rattacher à un parti qui ne l’aura pas fait figurer sur sa liste, il ne sera pas tenu compte de ce candidat pour le calcul de la modulation de l’aide publique versée au parti. Afin de prévenir toute tentative de manœuvre, le décret fixera une date limite pour le dépôt des listes par les partis.
Quant à une éventuelle modulation de la deuxième fraction de l’aide publique en fonction du nombre de parlementaires de chaque sexe effectivement élus, elle n’apparaît guère opportune. D’une part, la loi n’a pas à prendre en compte les caractéristiques politiques des différentes circonscriptions. D’autre part, ce dispositif reviendrait à sanctionner le suffrage des électeurs et serait donc probablement inconstitutionnel.
Mme Cécile Untermaier. La mission « Administration générale et territoriale de l’État » regroupe trois programmes, qui correspondent aux responsabilités fondamentales du ministère de l’intérieur : assurer la présence et la continuité de l’État sur 1’ensemble du territoire de la République ; garantir aux citoyens l’exercice du droit de vote.
Le programme « Administration territoriale » porte la marque des nombreuses mesures arrêtées dans le cadre du programme ministériel de modernisation et de simplification du ministère de l’intérieur. Trois priorités stratégiques ont ainsi été fixées : la sécurité et la garantie de l’ordre public ; la territorialisation des politiques publiques et l’appui aux collectivités territoriales ; le contrôle de légalité. La simplification des relations avec les usagers et l’allégement des tâches des agents constituent également des priorités.
Rompant avec la RGPP aveugle conduite par le Gouvernement précédent, notre majorité a fixé des priorités en matière de services publics régaliens : la police et la gendarmerie ; la justice ; l’éducation. Pour autant, l’administration centrale et territoriale du ministère de l’intérieur n’échappe pas à la réduction des effectifs. Ainsi, au sein de l’administration centrale, 87 emplois seront supprimés, dont 20 au bureau des cultes d’Alsace-Moselle – ce qui constitue une première. Néanmoins, les crédits de fonctionnement seront stabilisés. Au sein de l’administration territoriale, 550 emplois ne seront pas remplacés en 2014, contre 450 en 2013. En comparaison, entre 2009 et 2011, 2 200 emplois avaient été supprimés par le précédent Gouvernement, soit 700 à 750 emplois par an. La réduction des effectifs est donc moins brutale qu’auparavant, ce qui permet à l’administration de se réorganiser dans de meilleures conditions. Elle n’en est pas moins source de difficultés réelles, ce qui devrait nous inciter à une plus grande modération en la matière dans les années à venir.
La réorganisation de l’administration, notamment territoriale, constitue un défi : il s’agit de travailler mieux avec moins de personnel, ce qui suppose de très sérieux efforts de rationalisation et de mutualisation des services. D’autant qu’il est nécessaire de conserver un État fort, plus particulièrement en période de crise. Il nous faut donc trouver un juste équilibre entre la réduction des dépenses publiques et le maintien d’une administration efficace au service des citoyens.
Il est notamment indispensable de rationaliser le réseau territorial. Les trois départements d’Alsace-Moselle comptent, par exemple, dix-huit sous-préfectures. Cela étant, il conviendrait sans doute que les suppressions de sous-préfectures touchent moins les territoires ruraux que les zones urbaines. Il importe en effet de préserver la présence de l’État dans les territoires qui ont vu disparaître de nombreux services publics : leurs habitants ont un sentiment d’abandon ; ils doivent pouvoir s’adresser à un interlocuteur de proximité. En tout état de cause, il convient de mener une étude d’impact sérieuse préalablement à toute suppression. Monsieur le ministre, vous aviez prôné l’année dernière, dans cette même enceinte, une approche adaptée aux spécificités des différents territoires. Je ne doute pas que vous soyez toujours attaché à cet engagement.
La recentralisation de la politique d’immigration au sein du ministère de l’intérieur constitue un autre aspect de la réorganisation. En effet, en vertu du décret du 12 août 2013, le secrétariat général à l’immigration et à l’intégration a été remplacé par une direction générale des étrangers en France. Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous exposer la manière dont s’est réalisée cette transformation ? Pouvez-vous, en outre, décrire les objectifs et le fonctionnement de la nouvelle direction générale, sachant que d’autres ministères – en particulier ceux de la justice, de l’éducation, du travail et de l’emploi – sont amenés à intervenir dans ce domaine ?
Le deuxième programme, « Vie politique, cultuelle et associative », tient une place particulière en cette année d'élections. Il assure l'exercice de la vie démocratique et participe à la garantie de l'exercice des cultes et de la liberté d'association. Ce programme rassemble les crédits nécessaires au financement des partis et groupements politiques, au contrôle de leurs comptes ainsi que des comptes de campagne. En 2014, plusieurs scrutins seront organisés : élections municipales, européennes, sénatoriales et élections territoriales de Nouvelle-Calédonie. Ce programme inclut également les crédits liés au développement et à la mise en œuvre du référendum d'initiative populaire, qui est sur le point d'être adopté à notre initiative.
Deux mesures d'économie sont prévues. Il s'agit tout d'abord de la diminution de 10 % des dotations aux partis politiques, soit 7 millions d'euros. Mais n'aurait-on pas pu aller plus loin en accroissant l'effort des partis politiques en faveur de la solidarité nationale ? Et n'aurait-il pas été utile d'augmenter la sanction financière des partis politiques qui ne respectent pas l'obligation de parité aux élections législatives ?
Ensuite, le projet de loi prévoit la dématérialisation de la propagande électorale aux élections européennes, soit une économie de l'ordre de 32 millions. Si, à terme, cette mesure, sujet récurrent des débats parlementaires et qui a été adoptée pour l'élection des députés des Français de l'étranger, doit être mise en place, il convient, pour l’heure, d'attendre une meilleure couverture numérique du territoire national. En l'état, la dématérialisation provoquerait une rupture d'égalité entre les électeurs. Je ne suis évidemment pas opposée à cette mesure, qui est pertinente d'un point de vue strictement budgétaire et écologique. Pour autant, cette réforme implique une approche globale et une réflexion partagée avec l'ensemble des partis politiques. C’est la raison pour laquelle je présenterai un amendement de suppression de l’article 61.
M. Olivier Marleix. J’observe une baisse des effectifs de la mission : 550 ETPT supprimés en 2014 après 450 en 2013. Cela correspond au maintien de la règle du non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux qui, en d’autres temps, aurait ému la majorité actuelle. Mais les émotions d’hier ne sont pas nécessairement celles d’aujourd’hui…
Ces suppressions de postes ne pourront être supportées que si elles s’accompagnent d’une réforme structurelle de l’administration territoriale de l’État. Or, avec tout le respect que je vous dois, monsieur le ministre, nous restons sur notre faim après votre réponse absconse sur le devenir des sous-préfectures.
Un rapport vous a été remis sur ce sujet au printemps, mais il n’a pas encore été publié. Je veux bien croire que les échéances électorales rendent la divulgation de son contenu délicate. Mais nous devons savoir à quoi correspond le budget que nous votons. D’après certains, les 550 ETPT correspondraient exactement à la suppression des cinquante sous-préfectures que recommande le rapport.
Je veux souligner le fort sentiment d’abandon qu’éprouvent les territoires ruraux et périurbains, sentiment que vous avez exacerbé avec la suppression des cantons ruraux, et que vous risquez d’aggraver encore avec la disparition des sous-préfectures. Pourtant, c’est bien en milieu rural que les sous-préfectures sont les plus utiles à l’action quotidienne des élus locaux.
Je m’interroge sur votre conception de l’administration préfectorale. Les perspectives tracées par les rapports de MM. Rebière et Weiss ou de Mme Michèle André sont inquiétantes pour l’évolution du corps préfectoral. Elles augurent d’une « sous-préfetisation » du préfet de département. À trop vouloir renforcer l’échelon régional – que vous avez par ailleurs affaibli en le privant de la gestion des fonds structurels – vous menacez l’existence du préfet de département.
L’idée de rattacher les préfets au Premier ministre au nom de la dimension interministérielle de leurs fonctions, est pour le moins contestable. Il est vrai que ceux-ci apparaissent parfois comme les porte-parole du Gouvernement. Mais ce rattachement irait à l’encontre de leur mission première qui est d’assurer le respect de l’ordre public. Pouvez-vous me rassurer à ce sujet ?
Les décrets relatifs au redécoupage cantonal doivent être publiés début 2014 pour ne pas perturber le calendrier électoral. Mais leur éventuelle annulation nous priverait de l’année nécessaire pour garantir la sécurité juridique des comptes de campagne notamment ? Pensez-vous pouvoir tenir les délais ?
Enfin, je m’inquiète du retard pris en matière d’accessibilité des préfectures et sous-préfectures. L’obligation de rendre accessibles les bâtiments s’imposera à compter du 1er janvier 2015. Or, les crédits prévus à cet effet dans le budget – 120 000 euros – sont encore dérisoires. Il serait pour le moins gênant que le préfet n’obéisse pas à une loi qu’il est par ailleurs chargé de faire respecter. En 2012, 15 % seulement des établissements recevant du public étaient accessibles aux personnes handicapées. Combien de bâtiments des préfectures et sous-préfectures sont aujourd’hui accessibles ?
M. Thierry Benoit. Je n’ai pas de doute sur votre volonté de bien faire, monsieur le ministre, et nous savons combien vous êtes actif. Mais, depuis dix-huit mois que vous êtes en fonction, les choses n’avancent guère.
Il y a un an, nous avions déjà évoqué la réorganisation des arrondissements, l’implantation des sous-préfectures ainsi que la modernisation de l’action publique (MAP). Je vous avais alors invité à venir constater la reconfiguration d’un arrondissement autour des villes de Fougères et Vitré, qui est un succès indéniable.
Contrairement à ma collègue, je pense que les études d’impact ne sont pas indispensables. Il faut privilégier les propositions des acteurs de terrain. Si vous attendez 2015 et les résultats de l’expérimentation en Alsace et en Lorraine sur la réorganisation des arrondissements, aucune réforme ne sera faite sous cette législature. Vous faites erreur sur la méthode.
À défaut d’être renseigné sur les intentions du Président de la République et du Premier ministre sur la réorganisation des services de l’État, je souhaiterais connaître les vôtres. La modernisation de l’action publique ne peut ignorer la réorganisation territoriale. Nous restons dans l’inconnu quant aux projets du Gouvernement en matière de décentralisation. Les événements en Bretagne révèlent une difficulté de gouvernance. Il n’est pas normal de devoir solliciter le Premier ministre pour régler des problèmes relevant de la région. Quelles sont vos propositions en la matière ? Je milite pour qu’en Bretagne puisse être expérimenté un nouvel acte de la décentralisation dans lequel la région se verrait confier des pouvoirs nouveaux, y compris en matière réglementaire.
Dans le cadre de la poursuite de la réorganisation des services de l’État, quelle évolution envisagez-vous pour l’application du droit des sols et l’instruction des permis de construire ? Je peux entendre la nécessité du recentrage de l’État, à charge pour les collectivités territoriales de s’organiser et de prendre en charge l’application du droit des sols. Dans ce domaine, nous n’avons pas besoin de nouvelles études mais de propositions émanant du terrain.
Enfin, s’agissant de l’accueil des populations étrangères, quel est le délai moyen d’instruction des demandes d’asile ? Nous savons combien ce sujet est délicat. La lenteur de l’instruction des demandes rend impossible, de fait, le renvoi de populations installées durablement sur notre sol dans l’attente d’une réponse, comme en témoigne l’affaire Léonarda.
M. Paul Molac. Je plaide comme M. Benoît pour l’attribution d’un pouvoir réglementaire aux régions. Le système centralisé que nous connaissons, dans lequel toutes les décisions remontent au Premier ministre, est inefficace.
L’introduction de la notion de bonne foi pour les élections législatives, à l’instar des élections locales, permettrait de régler de nombreux problèmes. Elle aurait permis d’éviter des déconvenues comme l’inéligibilité de Mme Narassiguin.
Enfin, la loi organique devrait prévoir la possibilité de destituer le Président de la République. Il est arrivé dans le passé qu’un Président soit contraint d’abandonner ses fonctions, comme Paul Deschanel, et il me semble nécessaire de disposer d’une procédure, aussi exceptionnelle soit-elle. Un président sain d’esprit peut ne pas le rester pendant toute la durée de son mandat.
M. Philip Cordery. Plusieurs membres de la commission des affaires européennes ont travaillé sur l’article 61 et la dématérialisation de la propagande pour les élections européennes. Nous sommes favorables à la suppression de cet article.
Il ne s’agit pas de fermer la porte à toute dématérisalisation, qui présente des avantages financiers et écologiques. Mais la dématérialisation doit donner lieu à une réflexion de l’ensemble des partis politiques portant sur tous les scrutins. Alors que de nombreux foyers n’ont pas accès à internet, nous devons trouver une solution qui nous prémunisse contre une rupture d’égalité et contre la fracture numérique.
Mais il importe d’abord de ne pas singulariser les élections européennes qui souffrent déjà d’une grande désaffection. Supprimer l’envoi postal ne ferait que l’aggraver. Nous avons besoin d’un Parlement européen fort et légitime pour porter les choix de nos concitoyens. Tout ce qui peut améliorer le taux de participation doit être entrepris.
M. Didier Quentin. S’agissant de l’avenir des sous-préfectures, je souhaite me faire l’écho de l’inquiétude des territoires ruraux sur le désengagement de l’État. J’ai noté que la carte des sous-préfectures serait révisée début 2015, et Rochefort, en Charente-Maritime, semble menacée. Or, l’arrondissement compte 185 000 habitants – nombre qui est multiplié par trois ou quatre en été – et la sous-préfecture a une compétence en matière maritime et littorale pour l’ensemble du département. Quelles mesures comptez-vous prendre pour maintenir la présence de l’État dans de tels arrondissements ? Les citoyens ne réclament pas « moins d’État » mais « mieux d’État ».
Quels sont les crédits prévus pour financer la carte nationale d’identité électronique ? Il ne faudrait pas que cette charge échoie aux collectivités territoriales qui subissent déjà le gel des dotations de l’État.
Dans l’attente de la révision de la loi Besson de 2000 sur les gens du voyage, quelles instructions entendez-vous donner aux préfets pour mieux organiser les grands passages ? Peut-on envisager de réquisitionner des terrains domaniaux comme pour les rave parties ?
Enfin, peut-on attendre une évolution du concours de l’État aux communes pour leur équipement en vidéoprotection ?
Mme Françoise Descamps-Crosnier. Dans son rapport du mois de juillet dernier, la Cour des comptes souligne une gestion des ressources humaines inadaptée dans nos préfectures et sous-préfectures.
Le ministère de l'Intérieur a engagé une profonde réorganisation territoriale de l'État, qui se traduit pour les sous-préfectures par une refonte de leurs missions et bientôt de leur implantation. Parallèlement, le cadre législatif évolue sous l'impulsion des réformes en cours – modernisation de l'action publique et affirmation des métropoles, accès au logement et un urbanisme rénové, travail sur les normes. Comment le ministère de l'Intérieur compte-t-il accompagner ses agents dans les profonds bouleversements qui s’annoncent ?
Le programme de simplification et de modernisation de votre ministère prévoit qu’une « rationalisation des fonctions transversales, à l'échelon central comme territorial sera mise en œuvre afin de redéployer les ressources, notamment humaines, vers les missions situées au cœur des métiers, telle la garantie de la sécurité. Les fonctions budget/achat, communication, expertise juridique, SIC et activité internationale, seront substantiellement réorganisées dans le sens de la suppression des doublons, de la mutualisation interservices et de la clarification des responsabilités ». Quels efforts de formation spécifiques sont envisagés ?
Plusieurs programmes de la mission budgétaire incluent des dépenses informatiques. L'annexe précise notamment que « le ministère de l’intérieur poursuit ses efforts dans le domaine de la sécurité de ses infrastructures de réseaux et de télécoms avec la fin du déploiement du système de sécurisation aux accès des sites parisiens du ministère de l'intérieur mais également la sécurisation des accès aux données » et qu’il « poursuit un effort d'investissement dans le support de logiciels libres et dans les logiciels anti-malveillance. »
Monsieur le ministre, à la lumière des récentes révélations sur les écoutes dont la France aurait fait l'objet de la part de la NSA, estimez-vous que l'équipement prévu de vos services, aussi bien centraux que décentralisés, atteigne un niveau de sécurité suffisant et satisfaisant ? Quelle politique comptez-vous suivre en matière d'équipements informatiques et de communication ?
M. Guillaume Larrivé. Les agents des préfectures sont soumis à des rudes efforts puisque vous supprimez 1000 postes en 2013 et en 2014. Dont acte. Vous devez néanmoins prendre garde à ne pas les surcharger de nouvelles tâches administratives.
À cet égard, pouvez-vous préciser combien d’agents des préfectures et sous-préfectures sont chargés des questions relatives à l’entrée et au séjour des étrangers ainsi qu’au droit d’asile ? Ensuite, quelles ont été les conséquences pour l’activité des services de la mise en œuvre de votre circulaire de novembre 2012 sur la régularisation ? Combien de demandes ont été adressées ? Combien de dossiers ont été instruits et combien le sont encore ? Combien de titres de séjour ont été délivrés ?
M. Pascal Popelin. Mon collègue Marleix déplorait le renforcement de l’échelon régional de l’administration territoriale de l’État ; or, celui-ci constituait l’alpha et l’omega de la RGGP soutenue par la majorité à laquelle il appartenait.
S’agissant des sous-préfectures, monsieur le ministre, je partage votre objectif d’optimisation de la dépense publique et de rationalisation du réseau préfectoral. Vous avez raison de dire que l’arrondissement doit correspondre à un bassin de vie et que la carte des arrondissements a peu évolué.
Mais ce n’est le cas pour les territoires franciliens, où certains arrondissements cumulent les difficultés économiques et sociales qui favorisent le sentiment d’exclusion exprimé par la population. L’autorité préfectorale y est particulièrement garante de la cohésion. Le rôle des préfets est décisif pour mettre en œuvre les objectifs fixés par le Gouvernement – rétablissement de l’ordre républicain, rénovation urbaine, lutte contre l’exclusion. Je le mesure au quotidien.
Parmi les nombreux rapports qui vous ont été remis, figure la proposition d’une suppression des sous-préfectures de la première couronne parisienne. Aucune décision n’a été prise à ce jour, mais pouvez-vous me dire où en est votre réflexion ?
M. Lionel Tardy. Je m’interroge sur l’objectif de diminuer le coût des échéances électorales, notamment sur l’article 61. Cette disposition pose le problème de l’égalité d’accès au numérique. Je pensais qu’un amendement du Gouvernement devait traduire l’arbitrage rendu en faveur du maintien du support papier. Pouvez-vous me le confirmer ? Quelles autres mesures envisagez-vous pour diminuer le coût de l’organisation des élections ?
Dans le programme « Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur », les crédits consacrés aux infrastructures et télécommunications passent de 13 à 22 millions sans que cette hausse soit expliquée, à moins qu’un projet de grande ampleur ne la justifie.
Enfin, l’allongement à quinze ans de la durée de validité de la carte nationale d’identité avait été annoncé parmi les mesures du choc de simplification. Je ne trouve pas trace de ce projet pourtant générateur d’économies dans le budget. Qu’en est-il ? Pouvez-vous estimer son impact budgétaire ?
M. Dominique Baert. Je souhaite connaître votre avis sur deux propositions du rapport remis par Mme André. La première consiste à privilégier la passation de marchés publics locaux pour l’entretien des bâtiments préfectoraux afin de favoriser l’accès des PME à la commande publique. La seconde préconise d’encourager l’alternance des carrières entre l’administration territoriale et centrale afin de maintenir l’administration centrale en phase avec la réalité du travail en préfecture. Nous sommes nombreux à considérer qu’une meilleure connaissance des territoires serait également utile à leur administration. Seriez-vous prêts à faciliter les transferts, dans les deux sens, entre l’administration préfectorale et l’administration des directions générales des collectivités territoriales ?
Mme Marie-Christine Dalloz. Je note dans le programme 307, malgré la diminution des effectifs, une progression de 20 millions d’euros des crédits consacrés aux dépenses de personnels. Une partie d’entre eux, 4,3 millions, corresponde au coût de la suppression du jour de carence. Cela confirme que cette mesure, qui a été décidée sans aucune étude préalable, est loin d’être neutre.
Je vois que 866 ETPT sont dédiés à l’animation et au soutien du réseau préfectoral. Pouvez-vous nous préciser la fonction de ces agents, dont le nombre croît substantiellement entre 2013 et 2014 ?
Les différentes interventions soulignent un déficit de pilotage dans la réorganisation territoriale de l’État. Le secrétariat général pour la modernisation de l’action publique, qui aurait vocation à conduire cette réforme, est rattaché au secrétariat général du Gouvernement et non au ministère de l’Intérieur. Pouvez-vous donc me préciser qui, au sein du Gouvernement, est le véritable porteur de cette réforme ?
M. Pierre Morel-A-L'Huissier. Selon le rapport d’information de Michèle André, le renforcement de l’autorité du préfet de région et la montée en puissance du secrétaire général pour les affaires régionales (SGAR) affaiblissent l’autorité du préfet de département. Celui-ci, les élus locaux le constatent tous les jours, n’a plus aucune prise sur les agences régionales de santé – devenues une sorte d’État dans l’État –, les directions régionales des affaires culturelles, les directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement – qui imposent l’inflation normative que l’on sait – et France Domaine, dont les évaluations foncières sont farfelues. Où est la crédibilité de la parole de l’État ? Que comptez-vous faire pour assurer une coordination minimale de son action dans les départements ?
M. le président Gilles Carrez. Les services de Bercy ont toujours eu du mal à se ranger sous la bannière des préfectures !
M. Manuel Valls, ministre de l’intérieur. L’idée de faire mieux avec moins d’agents n’est pas nouvelle, madame Untermaier : c’est toute la difficulté de la réorganisation administrative de l’État. Dans ce vieux pays qu’est la France, monsieur Marleix, le besoin d’État ne s’est jamais démenti. Les Français sont les premiers à critiquer le niveau des dépenses publiques, mais, dans le même temps, ils demandent toujours plus de policiers, de gendarmes ou d’infirmières.
Je veux réaffirmer le rôle essentiel du préfet de département. Des choix ont été faits, comme le rappelait M. Popelin, notamment en 2010. Si affaiblissement de l’échelon départemental il y a, il date cependant de 2004 : la RéAT a conforté l’échelon régional, ce qui me semble au demeurant fondé pour les fonctions support. Toutefois, malgré les questions soulevées par M. Morel-A-L’Huissier, qui ne sont pas nouvelles, je ne crois pas à l’affaiblissement de l’autorité des préfets départementaux. Hier encore, dans la Drôme et dans l’Ardèche, j’ai pu mesurer les attentes placées en eux, notamment dans le cadre des procédures d’indemnisation. L’engagement du préfet Videlaine dans le Finistère montre à quel point ils restent présents, quand bien même la décentralisation a fait évoluer leur rôle, comme elle a fait évoluer celui des sous-préfets dans le soutien qu’ils apportent aux collectivités en matière d’ingénierie économique ; c’est pourquoi je les avais rencontrés à Lorient, il y a quelques mois, avec l’ensemble des préfets de la région.
Le préfet de département doit, comme je le fais valoir auprès de mes collègues du Gouvernement, continuer à piloter l’action de l’État : loin d’affaiblir son autorité, nous devons au besoin la renforcer – je le dis aussi en tant qu’ancien élu local. Le CIMAP préconise d’ailleurs une meilleure coordination entre le préfet de département et certaines administrations, comme la jeunesse et les sports ou la culture, dont les moyens sont fragilisés par la décentralisation et la dégradation des finances publiques.
Le rattachement des préfectures à Matignon est une vieille antienne. Le Président de la République, le Premier ministre et l’ensemble des ministres peuvent évidemment avoir des contacts directs avec les préfets, mais nul ne songe à remettre en cause leur rattachement au ministère de l’intérieur. Quant à la modernisation de l’action publique, c’est un sujet interministériel qui concerne aussi, par exemple, le ministère de l’égalité des territoires.
Les fermetures de sous-préfectures sont devenues un « marronnier » médiatique. Seul le pragmatisme doit prévaloir, d’autant que les marges financières sont modestes, puisque l’État, le plus souvent, n’est pas propriétaire de l’immobilier. Je suis tout particulièrement sensible au sentiment d’abandon ressenti dans les départements ruraux ou périurbains, comme l’Aveyron, l’Ardèche, le Cantal ou le Finistère. Sans doute les maisons de l’État ou les maisons de service public constituent-elles des modèles à suivre ; à Aubusson, dans la Creuse, différents services publics sont regroupés dans les murs de la sous-préfecture – et je ne manquerai pas, monsieur Benoit, de répondre à votre invitation au cours du quinquennat. Je me refuse cependant à entrer dans le petit jeu des listes : dans les zones rurales et périurbaines, je le répète, la présence de l’État, à travers les sous-préfectures, est essentielle. Reste que des évolutions sont possibles dans les zones urbaines : c’est le sens de la mission que j’ai confiée aux préfets de Lorraine et d’Alsace. En Île-de-France, monsieur Popelin, le rôle des sous-préfectures – accueil des publics étrangers et remise des titres de séjour, notamment – doit être clairement distingué de celui des préfectures. La préfecture de Bobigny fait déjà face à un afflux considérable : il serait absurde de vouloir tout y concentrer. Je rappelle aussi l’existence, dans votre département, du chantier de Saint-Denis. Ces évolutions demandent du temps, et il serait naïf d’ignorer l’impact des échéances électorales. Quoi qu’il en soit, dans de nombreuses villes, la sous-préfecture matérialise la présence de l’État : nous avancerons donc avec pragmatisme.
S’agissant de la nouvelle Direction générale des étrangers en France, madame Untermaier, nous avons tiré les conséquences de la disparition du ministère de l’immigration en 2011. Au sein de chaque ministère, un seul secrétaire général mutualise désormais les fonctions support, et la Direction générale des étrangers en France, au-delà des vaines polémiques que l’on entend ici ou là, coordonne les différents aspects de la politique d’immigration – régulation des flux migratoires, lutte contre l’immigration clandestine, accueil des étrangers, naturalisations ou droit d’asile.
Chacun doit contribuer à l’effort de redressement des finances publiques : les cultes n’y échappent pas, y compris en Alsace-Moselle. Le montant de l’enveloppe annuelle, inchangé depuis 1995, a diminué de 5 % – soit 4 millions d’euros – dans la loi de finances pour 2012, et, après être demeuré stable en 2013, il sera réduit de 7,6 millions en 2014, pour atteindre 68,6 millions ; cependant, la dépense totale ayant atteint 70 millions en 2013, la baisse devrait se limiter à 3 %.
Au vu du rythme de la discussion par les conseils généraux et de la procédure d’examen en Conseil d’État, monsieur Marleix, le redécoupage cantonal devrait être achevé au début de 2014 ; mais il ne faudra pas perdre de temps.
La quasi-totalité des espaces d’accueil en préfecture obéissent aux normes d’accessibilité. Quelques exceptions demeurent, en raison du caractère historique des bâtiments. Une augmentation de 33 % des crédits de paiement est prévue en ce domaine, les trois principales préfectures concernées étant celles de Bobigny, de Poitiers et de Besançon ; s’y ajoutent les opérations de droit commun intégrant la mise aux normes. Le souci du ministère, au-delà de l’investissement même, est de mettre en œuvre une politique en externe – pour l’accueil – comme en interne, avec un taux d’emploi des personnes handicapées atteignant, en 2013, un taux inédit de 6 %.
Nous aurons l’occasion de revenir sur le droit d’asile lors de l’examen des crédits dédiés, monsieur Benoit. Le Gouvernement a lancé une concertation sur la mise en œuvre du droit existant : M. Jean-Louis Touraine et Mme Valérie Létard, qui travaillent en concertation avec les préfets et les élus locaux de Nancy, Besançon, Rennes et Mulhouse, me remettront leurs conclusions à la mi-novembre. Le premier objectif est de réduire à moins de dix mois les délais de réponse, qui atteignent aujourd’hui seize à vingt mois ; le second, plus complexe, est d’améliorer l’accueil en le rendant plus directif, et ce sur l’ensemble du territoire. J’ajoute que la France est, après l’Allemagne désormais, la seconde terre d’accueil pour le droit d’asile en Europe. Les demandes proviennent, pour une large part, de ressortissants de pays qui, candidats à l’entrée dans l’Union européenne – Kosovo, Macédoine ou Albanie, par exemple –, sont pourtant jugés parfois comme non sûrs par le Conseil d’État, ce qui accroît d’autant les délais : des exemples récents l’illustrent…
La France arrive sans doute au terme du processus de décentralisation engagé en 1982 : la demande croissante d’État, les difficultés financières des collectivités et l’enchevêtrement des compétences expliquent les hésitations qui se font jour, si bien que le mot même de « décentralisation » n’est plus connoté aussi positivement que naguère. Dans ces conditions, une nouvelle phase de décentralisation ne me semble pas pouvoir signifier autre chose qu’une clarification des compétences : la suppression d’échelons, souvent réclamée du haut des estrades des campagnes électorales, est évidemment bien plus complexe qu’il y paraît. Je crois aux vertus de l’expérimentation locale, mais, sur de tels sujets, un consensus national me semble indispensable.
L’approche d’échéances électorales, monsieur Cordery, a sans doute empêché certaines anticipations sur la dématérialisation de la propagande électorale, ce que je déplore. La disposition visée sera supprimée par amendement, monsieur Tardy, mais j’organiserai une concertation avec les formations politiques sur le sujet. On a parfois l’impression, pendant les campagnes électorales, que les boîtes aux lettres débordent de tracts ; mais, pour vous dire le fond de ma pensée, les électeurs qui se déplacent pour les élections européennes ne sont sans doute pas ceux qui ont le plus besoin de propagande électorale, et celle-ci, à l’inverse, ne convaincra sans doute pas les abstentionnistes de se rendre dans les bureaux de vote ; quoi qu’il en soit, on gardera le système habituel pour les prochaines européennes.
L’effort en matière de vidéoprotection reste soutenu, monsieur Quentin, puisque une enveloppe de 20 millions d’euros lui est dédiée, comme l’an dernier, au titre de l’aide aux communes. Tous les ministères doivent participer au financement du Fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD). Comme vous le savez, les taux sont d’ailleurs majorés jusqu’à 50 % dans les zones de sécurité prioritaires.
S’agissant des gens du voyage, une proposition de loi de M. Raimbourg est en préparation. J’y suis favorable, et souhaite un consensus sur le sujet. J’avais annoncé, avec Cécile Duflot, les orientations du Gouvernement : fin du statut discriminatoire issu de la loi de 1969 et garanties données quant à la mise en œuvre effective des schémas départementaux, sachant que 57 % des aires d’accueil sont à ce jour réalisées – et 35 % seulement des aires de grand passage. Des parlementaires de tous bords, réunis sur le sujet, avaient conclu à la nécessité d’un équilibre : le rappel à l’application de la loi Besson si nécessaire et, pour les communes qui l’appliquent, des moyens pour faciliter l’évacuation en cas d’occupation illicite. Une mission parlementaire, associant un élu de l’opposition et un élu de la majorité, est également consacrée aux grands rassemblements. Souhaitons, en tout cas, que les événements de cet été ne se reproduisent plus, et que chacun se garde de toute instrumentalisation : j’en appelle, sur ce point, à la responsabilité des élus comme des associations de gens du voyage.
En ce qui concerne le projet de carte nationale d’identité électronique, le rapport rendu par l’IGA en mai 2013 est très réservé, estimant qu’il est plus important de sécuriser le processus de fabrication du titre que le titre lui-même. La biométrie n’est utilisée que pour le dispositif de passage automatisé rapide aux frontières extérieures (PARAFE). La délivrance des passeports biométriques est insuffisamment sécurisée et peut conduire au blanchiment d’une fausse identité. La traçabilité du titre est largement perfectible, notamment en cas de perte et de vol. Aussi ai-je arrêté un plan d’action en étroite collaboration avec le ministère de la justice pour sécuriser les documents d’état civil en généralisant la procédure de communication électronique des données de l’état civil (COMEDEC) ; les fraudes à l’état civil détectées par la PAF ont été multipliées par douze ces deux dernières années. La possibilité de falsifier un acte de naissance est aujourd’hui très importante. De plus, les communes se contentent en général de contrôler la conformité des pièces justificatives mais pas leur authenticité. Il est donc impératif de décloisonner les services chargés de l’état civil et ceux chargés de la délivrance des titres, de sécuriser la production des justificatifs de domicile et des photos numériques, et d’améliorer la traçabilité des titres en assurant que l’invalidité de ceux déclarés perdus ou volés est systématiquement signalée par les services dans les fichiers internationaux.
Madame Descamps-Crosnier, le ministère de l’intérieur accompagne ses agents dans l’évolution des missions de l’administration territoriale par le biais du plan national de formation en vigueur jusqu’à la fin de 2014. Ce plan s’articule autour du renforcement des compétences de base des agents, du développement de leur compétence métier, de l’encouragement de la promotion professionnelle et de l’accompagnement du changement. Ce dispositif a été complété par une action spécifique à destination des personnels des sous-préfectures particulièrement concernées. Un plan de formation, expérimenté avec succès dans onze sous-préfectures, a vocation à être généralisé en 2014. Il comprend des modules intéressant le corps de métier des sous-préfectures, l’ingénierie territoriale, les relations avec les entreprises et la connaissance des acteurs locaux de la sécurité – manière de conforter le réseau des sous-préfectures.
Aux agents des sous-préfectures d’Alsace et de Moselle concernés par cette expérimentation, sera proposé un accompagnement approfondi et individualisé en fonction des besoins exprimés par les deux préfets. Un nouveau plan national de formation est en cours d’élaboration pour 2015-2017. Il prendra en compte les évolutions envisagées par le programme ministériel de modernisation et de simplification (PMMS) qui induisent la mise en place de formations d’expertise ainsi que des formations de consolidation des connaissances de base afin de faciliter l’orientation d’agents de l’administration centrale et territoriale vers de nouvelles missions.
La protection périmétrique – celle des accès internet – est efficace pour parer aux attaques contre le cœur des réseaux du ministère. Les communications les plus sensibles s’appuient sur les systèmes d’information labellisés par l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (ANSSI). Les révélations que vous avez évoquées incitent à approfondir notre effort concernant les communications quotidiennes des services entre eux ainsi qu’avec nos partenaires administratifs, les usagers et le monde professionnel. Face à ces menaces, deux axes sont privilégiés : la protection des communications par la cryptographie et la maîtrise de la localisation des données de l’administration. Le réseau de la gendarmerie permet déjà la transmission d’informations chiffrées avec un certain degré de protection. La messagerie d’autorité de la police nationale (RESCOM) le permet également. Cette protection doit être transparente pour l’utilisateur. Nous étudions la possibilité de la généraliser pour tous les services du ministère. Nous souhaitons y procéder dans un cadre interministériel car de nombreux échanges parmi les plus sensibles comme celui concernant la fraude documentaire s’effectuent entre différents ministères. Le recours au système de l’administration pour héberger et transmettre l’information doit devenir la règle ; les recours non maîtrisés aux plates-formes grand public de Cloud et l’usage généralisé des smartphones non protégés doivent être limités à un usage très restreint et particulièrement contrôlé.
Je précise à M. Larrivé que sur quelque 12 000 ETPT, 2 300 sont chargés de la délivrance des titres aux étrangers et des naturalisations. Il est évident qu’un titre pluriannuel permettrait de stabiliser les étrangers qui, de toute façon, voient leur titre renouvelé chaque année, et d’alléger l’activité des agents.
Vous avez raison, monsieur Baert, d’encourager l’évolution de carrière des agents entre les collectivités et l’État. L’administration a tout à y gagner. La France est un pays décentralisé, à sa manière, avec un État qui veut rester fort.
J’ai déjà répondu à M. Tardy au sujet de la carte nationale d’identité. Le passage de la durée de validité de dix à quinze ans aura un impact très faible sur le budget 2014.
La masse salariale des préfectures, madame Dalloz, augmente du fait de la progression de la carrière des agents, de mesures catégorielles récompensant leur engagement et de la hausse des dépenses de retraites. Avec d’autres ministères, nous avons lancé des missions d’évaluation. Les 866 ETPT « Animation et soutien du réseau » recouvrent les systèmes d’information et de communication (SIC), l’immobilier, le corps préfectoral et les agents de l’administration centrale qui pilotent le réseau préfectoral. Nous voulons rendre plus efficace l’administration centrale – qui voit aussi ses ETPT diminuer – pour favoriser l’action sur le terrain.
M. le président Gilles Carrez. Nous vous remercions, monsieur le ministre.
La réunion de la commission élargie s’achève à dix-huit heures trente.
Compte rendu de la commission élargie du jeudi 31 octobre 2013
(Application de l’article 120 du Règlement)
Politique des territoires
La réunion de la commission élargie commence à quinze heures cinq, sous la présidence de M. Dominique Baert, vice-président de la commission des finances et de M. Jean-Paul Chanteguet, président de la commission du développement durable.
M. le président Dominique Baert. Jean-Paul Chanteguet, président de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, et moi-même sommes heureux d’accueillir Mme Cécile Duflot, ministre de l’égalité des territoires et du logement, pour examiner, en commission élargie, les crédits du projet de loi de finances pour 2014 consacrés à la mission « Politique des territoires ».
Je rappelle que la conférence des présidents a décidé que, cette année, l’ensemble des missions serait discuté en commission élargie, procédure destinée à favoriser les échanges aussi interactifs que possible entre les ministres et les députés.
Selon les règles des commissions élargies, le rapporteur spécial et le rapporteur pour avis prendront la parole les premiers pour une durée de cinq minutes, sous forme de questions adressées aux ministres. Les porte-parole des groupes s’exprimeront ensuite à raison de cinq minutes chacun. Tous les députés qui le souhaitent pourront enfin interroger la ministre, la durée de leurs interventions étant limitée à deux minutes.
M. le président Jean-Paul Chanteguet. J’ai hâte d’entendre nos rapporteurs Michel Vergnier et Alain Calmette.
M. Michel Vergnier, rapporteur spécial. Il est vrai que, par son volume de crédits – 282,9 millions d’euros en autorisations d’engagement et 295,3 millions de crédits de paiement en 2014 –, la mission « Politique des territoires » fait figure aujourd’hui de petite mission, mais son ancrage dans l’architecture budgétaire devrait être renforcé dans le prochain budget pour 2015. En baisse de 8 % par rapport à 2013, la mission prend sa part de contribution au redressement de nos comptes publics.
L’année dernière, madame la ministre, dans les mêmes circonstances, vous nous aviez présenté pour 2013 un budget de transition. En 2014, celui-ci entre dans une phase plus opérationnelle, avec des crédits finançant des actions nouvelles, issues des réflexions menées tout au long du premier semestre de cette année. La généralisation de l’expérimentation « Plus de services au public », en fait partie, avec près de 13 millions d’euros en AE destinés à favoriser la création d’espaces mutualisés d’offre de services publics. Si je soutiens pleinement la démarche, permettez-moi de rappeler que son succès ne tient pas seulement aux moyens financiers. Les moyens humains, qui recouvrent tant la qualité de l’accueil que la formation des personnels sur place, sont des aspects essentiels auxquels il faut réellement veiller.
Pouvons-nous nous appuyer sur des expérimentations évaluées préalablement ? Quels contours dessinent-elles ?
Autre mesure emblématique, la création du Commissariat général à l’égalité des territoires – le futur CGET. Celui-ci regrouperait les services de la DATAR, de l’Agence nationale de la cohésion sociale et de l’égalité des chances, et du Secrétariat général du comité interministériel des villes. L’objectif de cette création est d’en finir avec la dichotomie entre urbain et rural, qui a marqué la conduite des politiques en faveur des territoires ces dernières années, et de doter l’État d’une structure lui permettant de concevoir ces politiques de façon plus globale et donc plus cohérente. La DATAR, administration rattachée aux services du Premier ministre, bénéficiait pourtant déjà d’un statut interministériel censé lui permettre de conduire ses missions avec la même transversalité que celle recherchée aujourd’hui. Précisons qu’au sein du CGET, le pôle ville restera bien identifié, un préfigurateur délégué ayant même été nommé au côté du préfigurateur de la DATAR.
Dans ces conditions, pouvez-vous nous éclairer sur la plus-value que vous attendez de la création du CGET pour la conduite des politiques menées en faveur des territoires ? Quelle sera l’articulation de cette instance avec le Haut Conseil des territoires tel qu’il est prévu dans le projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, si ce dernier est adopté ? Quel sera son impact sur la présentation budgétaire de la mission l’année prochaine : renforcement ou disparition par intégration dans une mission existante ?
Les zonages sont un sujet de préoccupation partagé. Vous avez engagé, et vous avez eu raison, une réflexion pour les faire évoluer – je pense notamment aux ZRR (Zones de revitalisation rurale) et aux AFR (Aides à finalité régionale). Où en est cette réflexion ? Un calendrier a-t-il été défini ? Quelle méthode de concertation comptez-vous mettre en œuvre pour ne laisser personne de côté ?
J’en profite pour saluer la décision du Gouvernement de reconduire pour 2014, à niveau de crédits constant – près de 40 millions d’euros –, la prime à l’aménagement du territoire (PAT). En dépit des critiques récurrentes de différents corps de contrôle, en particulier la Cour des comptes et la mission d’évaluation sur les aides aux entreprises, cette prime joue un rôle essentiel dans le soutien à l’emploi dont le Gouvernement a fait une de ses priorités. J’attends l’assurance que des progrès suffisants ont été effectués dans le suivi de l’octroi de cette prime et dans le contrôle a posteriori de la réalisation des projets financés. En cas de contrôle négatif, comment faire en sorte que la prime n’ait pas été versée pour rien ?
Comme beaucoup d’entre nous ici, j’attache une importance particulière aux mesures assurant à tous nos territoires un égal accès aux nouvelles technologies de l’information et de la connaissance : vous menez, en collaboration avec la ministre de l’économie numérique, le pilotage du plan national de déploiement du très haut débit. Comment envisagez-vous d’informer les différents acteurs de la conduite du dispositif ?
Je souhaiterais également évoquer l’avenir de l’Agence française pour les investissements internationaux (AFII), dont le travail d’accompagnement des entreprises étrangères souhaitant investir en France contribue au maintien de plus de 12 000 emplois par an en moyenne, et ce en dépit de restrictions budgétaires particulièrement fortes. Entre 2010 et 2015, l’Agence verra en effet ses subventions versées par l’État diminuer de 17 %, passant de 23,8 à 19,7 millions d’euros. Dans quelle mesure les missions de l’AFII seront-elles facilitées par le rapprochement envisagé avec Ubifrance ? Ses moyens seront-ils en adéquation avec l’objectif d’atteindre mille décisions annuelles d’investissement étranger à l’horizon 2017, contre 700 en moyenne actuellement, et d’accueillir chaque année 300 entreprises non encore implantées en France ?
Enfin, pour la création des pôles territoriaux de coopération économique (PTCE), confirmez-vous la méthode d’appel à projet, alors que celle-ci a déjà montré toutes ses limites et qu’elle engendre nombre d’inégalités ? Comment éviter ces écueils ?
M. Alain Calmette, rapporteur pour avis de la commission du développement durable. La création d’un ministère de l’égalité des territoires symbolise la volonté du Gouvernement de lutter contre la fracture territoriale qui s’est aggravée ces dernières années. Un changement d’approche et d’outils opérationnels nécessite une réflexion approfondie et partagée pour redéfinir les axes d’une politique tournée vers l’objectif d’égalité des territoires, et ce dans le contexte budgétaire que l’on connaît.
La mission « Politique des territoires » ne représente que 5 % de l’engagement financier de l’État en faveur de l’aménagement du territoire. Dans la logique de la création du Commissariat général à l’égalité des territoires, la fusion de cette mission avec la mission « Égalité des territoires, logement et ville » permettrait d’avoir une déclinaison budgétaire plus lisible et cohérente d’une partie des programmes traitant de la politique des territoires.
Le programme 162 « Interventions territoriales de l’État », dit PITE, est conçu comme un outil financier regroupant dans un programme unique l’ensemble des crédits consacrés à une politique territoriale interministérielle donnée. Ainsi, le PITE ne crée pas de dépenses supplémentaires pour l’État. Dans ce cadre, quatre actions sont inscrites cette année. Ce programme présente l’intérêt de pouvoir intégrer de nouvelles actions, comme celles dont les préfets de région ont été chargés par le ministère de l’intérieur en 2012. À cet égard, je regrette que le dossier « Dynamisation de la filière bois en Auvergne-Limousin-Bourgogne », qui est le plus avancé, ne soit pas inclus dans le PLF 2014, contrairement à ce qui avait été indiqué l’année dernière lors de cette même commission élargie. Compte tenu de son intérêt et de son état d’avancement, est-il encore possible de l’intégrer ?
Pour 2014, le programme 112 initie de nouveaux outils mieux adaptés. Ce sont d’abord les contrats de plan État-régions pour la période 2014-2020, qui font suite aux contrats de projets. Espérons que ce changement sémantique illustre une autre approche de l’aménagement du territoire, abandonnant une logique de compétition entre territoires au profit de l’accompagnement d’une stratégie régionale équilibrée. Sachant que les inégalités territoriales sont souvent plus affirmées au sein même des régions qu’entre régions, je forme le vœu que ces CPER soient conçus comme des outils de résorption des inégalités infrarégionales, notamment à travers les volets territoriaux.
D’un point de vue général, il faudrait progressivement rompre avec la logique libérale de l’appel à projet qui crée parfois des inégalités supplémentaires alors qu’il est censé les réduire : faute de moyens et d’ingénierie, certaines collectivités ne peuvent y répondre, si bien que les territoires les plus fragiles en sont souvent exclus.
Autre bonne nouvelle pour l’année 2014 : la création du Commissariat général à l’égalité des territoires. Nous nous félicitons de cette création qui permettra une meilleure mobilisation des moyens en dépassant le clivage habituel entre urbain et rural, et en prenant en compte des zones périurbaines souvent déstructurées et sans repère.
S’agissant du milieu rural, et compte tenu du contexte budgétaire, il conviendrait, à l’image de l’évolution prévisible de la politique de la ville, de concentrer les efforts sur les zones les plus fragiles qui cumulent les handicaps : déprise démographique, enclavement, retrait des services publics.
Le Commissariat général à l’égalité des territoires devra revisiter les outils opérationnels d’aménagement du territoire, et notamment la politique de zonage. Les zonages de la politique de la ville vont être revus et simplifiés ; le zonage des aides européennes à finalité régionale va également évoluer. Quant aux zones de revitalisation rurale, une concertation va être lancée en vue d’une évolution de ce dispositif, dont on a bien vu la nécessité au cours de l’été 2013. Par ailleurs, la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire vient de créer une mission d’information sur ce sujet, dont je serai le co-rapporteur avec M. Jean-Pierre Vigier, député de la Haute-Loire.
J’en viens au numérique qui participe de façon essentielle à l’égalité des territoires. Les redéploiements du très haut débit resteront dynamiques en 2014 : 57 % de la population concentrée dans les 3 400 communes les plus denses seront fibrées sur fonds propres des opérateurs privés. Ailleurs, les collectivités locales seront mises à contribution avec un fort soutien de l’État, qui interviendra dans le cadre du plan « France très haut débit ». Vingt milliards d’euros seront ainsi investis au cours des prochaines années. À cet égard, il faut se féliciter de l’effort de péréquation de l’État, dont le taux de soutien varie entre 33 % et 62 %, avec un appui renforcé aux territoires les plus ruraux où l’habitat est dispersé.
Les territoires ruraux attendent beaucoup d’une meilleure prise en considération de leurs besoins dans notre pays. Reviennent, en particulier, de façon récurrente les sujets de l’aménagement numérique, mais surtout de l’accès aux services publics – élément incontournable d’un cadre de vie acceptable – ainsi que de l’attractivité des territoires. Un deuxième volet de l’approfondissement de la décentralisation est annoncé, intitulé « loi de mobilisation des régions pour la croissance et l’emploi et de promotion de l’égalité des territoires ». Certains aspects de ce texte ont à voir avec la mission qui nous intéresse aujourd’hui. Dans quelle mesure la problématique fondamentale de l’accès aux services publics y sera-t-elle traitée ? Ce projet de loi contiendra-t-il des dispositions de nature à renforcer l’égalité territoriale ?
Mme Cécile Duflot, ministre de l’égalité des territoires et du logement. Je remercie MM. les rapporteurs d’avoir souligné que, pour limité qu’il soit, le budget de la mission « Politique des territoires » a un fort effet de levier sur les territoires. C’est d’ailleurs dans cet état d’esprit que j’ai proposé de maintenir en 2014 le dispositif de la prime à l’aménagement du territoire (PAT), qui a vocation à soutenir des initiatives privées et à maintenir l’emploi dans les entreprises. S’agissant d’une aide directe, cette prime constitue un outil fort utile en période de crise puisqu’il permet à la DATAR qui instruit les dossiers d’être très réactive. En lien étroit avec le ministère du redressement productif, le ministère de l’égalité des territoires s’efforce d’affermir la vocation territoriale de la PAT, d’en faire un outil de structuration des territoires et de renforcement du tissu en ciblant en priorité les PME. Ce ciblage renforcé est l’évolution la plus significative que je souhaite imprimer à ce dispositif, en cohérence avec l’évolution du zonage AFR, dont les modalités d’application seront modifiées en 2014.
Le Commissariat général à l’égalité des territoires, dont je salue le préfigurateur M. Éric Delzant, permettra de mettre en cohérence les interventions de l’État sur les territoires, trente ans après le début de la décentralisation. Les outils que l’État avait conservés avaient certes une utilité mais, au lieu d’être utilisés à des fins de co-élaboration et de soutien aux dynamiques territoriales, ils étaient concentrés sur certains territoires ou certaines problématiques. Le CGET aura pour mission d’œuvrer à la réduction des inégalités territoriales et des inégalités infrarégionales qui se sont accrues ces dernières années. Cette mission, il la remplira en appuyant certains projets, en travaillant sur la nouvelle génération des contrats de plan État-régions qui sera caractérisée par deux éléments importants : les volets territoriaux, dont une partie est dédiée aux territoires meurtris ou plus fragiles vis-à-vis desquels la solidarité nationale doit s’exercer ; la transition énergétique et écologique des territoires, pour laquelle l’association de l’État et des différentes collectivités sera décisive.
S’agissant du zonage ZRR, le bug de cet été était la conséquence d’une concertation sur les critères avec l’ensemble des associations d’élus, dont l’impact direct et l’effet de masse potentiel sur certains territoires n’avaient pas été mesurés. La concertation se poursuivra sous l’égide de la DATAR et de mon ministère, et une mission inter-inspections va être lancée pour éviter que de telles révisions de zonage n’aboutissent à malmener des territoires. Devrait également être soumise à réflexion la possibilité d’une sortie progressive du système que la loi ne prévoit pas. Une phase intermédiaire pourrait se révéler opportune pour des territoires qui, ayant bénéficié du dispositif, sont en train de s’inscrire dans une dynamique autonome. Or une telle phase est impossible aujourd’hui : nous avons choisi de maintenir le dispositif dans son intégralité pour l’année 2014, afin de ne pas risquer de voir basculer des territoires qui avaient utilement bénéficié du dispositif pendant ces années. Nous devons avoir cette réflexion sur la nécessaire évolution du dispositif et sur la question de la sortie progressive, et nous souhaitons qu’un consensus se dégage, même s’il est toujours compliqué à obtenir.
Le rapprochement entre l’AFII et Ubifrance ne met pas en péril la mission d’attractivité des territoires. L’AFII a été chargée de rechercher des entreprises internationales dans des domaines en rapport avec les territoires ruraux à des fins de développement. C’est ainsi que le vaste travail engagé par le Gouvernement autour de la filière bois peut trouver des prolongements dans des partenariats à l’international. Le démarchage des entreprises en lien avec les activités des territoires ruraux n’était certes pas inscrit au patrimoine culturel commun des deux agences, mais c’est un aspect sur lequel travaillons. Nous nous attachons également à leur faire intégrer que la mission d’attractivité concerne tous les territoires, quelles que soient leurs spécificités. Il est inimaginable que l’attractivité de nos seules métropoles puisse être un facteur de développement durable et soutenable pour l’ensemble de notre pays. Si une attention particulière doit effectivement être portée aux métropoles, nous devons également être très conscients de la complémentarité et des potentialités autonomes de développement de territoires qui peuvent apparaître aujourd’hui comme délaissés. Nous ne pouvons pas considérer que les territoires ruraux ou hyper-ruraux, voire les villes moyennes n’aient qu’un statut récréatif ou de seconde zone. Il est essentiel que chaque territoire ait les moyens et les capacités de son développement, et nous y travaillons.
Je m’étais d’ailleurs engagée devant vous, l’année dernière, à travailler sur la problématique spécifique des bourgs ruraux. Le travail arrive à son terme et il fera l’objet d’une communication du Premier ministre. De même que, à une échelle différente bien sûr, l’ANRU intervient sur les quartiers relevant de la politique de la ville, nous devons agir contre la nécrose et la déprise des bourgs ruraux, qui placent certains territoires dans des situations malaisées et leurs élus dans une très grande solitude. Cela implique de traiter les questions d’ingénierie globale, y compris en matière d’habitat, et l’appui à ces territoires.
S’agissant des pôles territoriaux de coopération économique, les deux rapporteurs ont souligné les limites de l’appel à projet. Celui-ci n’est pas au cœur de la mission « Égalité des territoires, logement et ville », nous lui avons préféré des dispositifs très ouverts. Néanmoins, nous l’avons choisi comme une première étape. Ces pôles territoriaux de coopération vont permettre d’appuyer des dynamiques naissantes sur les territoires – à condition, effectivement, que ces dynamiques existent. Si nous constatons que le dispositif peut aller plus loin, nous le ferons. Les PTCE sont d’ailleurs inscrits dans le projet de loi relatif à l’économie sociale et solidaire comme un nouveau mode d’irrigation du territoire, en complémentarité avec les pôles de compétitivité. C’est une autre logique qui fonctionne, qui donne des résultats, et qui permet aux PME de tisser beaucoup de relations sur le territoire.
La présence des services publics est un élément primordial dans l’amélioration de la qualité de vie quotidienne des populations, qui figure parmi les objectifs majeurs que je me suis fixés. Le Gouvernement a poursuivi le travail autour du dispositif « Plus de services au public », qui a fait l’objet d’une évaluation positive. Après la phase d’expérimentation, nous devons passer à la généralisation d’un maillage de services publics sur l’ensemble du territoire, en intervenant selon deux modalités. Il faut d’abord se fonder sur le deuxième projet de loi porté par Marylise Lebranchu, qui introduit un schéma de services publics départementaux et s’appuie sur une vision territoriale, et non plus en silos – opérateur par opérateur, service public par service public –, à l’origine de bien des dégâts. Après avoir travaillé sur une carte et un maillage à l’échelle du territoire, nous inviterons les collectivités qui le souhaiteront à participer à l’établissement des schémas départementaux avant que la loi ne les y oblige. C’est une nouvelle méthode de travail législatif que nous expérimentons déjà dans le cadre de la loi ALUR s’agissant de la garantie universelle des loyers. Le travail ainsi mené avec les départements volontaires viendra nourrir utilement la discussion parlementaire qui suivra. Outre les conseils généraux, nous discutons également avec l’ensemble des opérateurs que je réunirai lundi 4 novembre avec, à l’ordre du jour, la généralisation des maisons de services au public et l’établissement d’un calendrier de travail pour la création et l’alimentation du fonds consacré à la mise en œuvre de ces maisons. J’échangerai également avec eux sur les limites et les bénéfices de la mutualisation.
L’idéal serait d’avoir une maison de services au public au moins dans chaque chef-lieu de canton, de manière à instaurer une véritable proximité. Celle-ci serait assurée par une présence humaine et par l’accès au haut débit ou au très haut débit et aux nouveaux usages du numérique. Tout le sens des schémas départementaux d’accès aux services publics est de reposer non pas sur la carte électorale ou sur une quelconque carte existante, mais sur un maillage pertinent qui permet de répondre aux difficultés géographiques et d’accès rencontrées par les usagers. C’est aussi de basculer d’une logique opérateur par opérateur à une logique de lien entre habitants et services publics en mixant présence humaine et généralisation des guichets vidéonumériques qui permettent d’avoir accès directement à un interlocuteur de l’opérateur demandé de bon niveau, sans avoir besoin de parcourir des kilomètres.
Si nous nous engageons avec succès dans cette démarche, nous répondrons à un enjeu majeur : celui du retour des services publics. Il s’agit non pas de revenir à un modèle antérieur, mais de construire l’avenir, en tirant le meilleur parti du maillage à très haut débit, d’une part, et en rapprochant physiquement les services publics des citoyens, d’autre part. Nous avons cru, à tort, que l’accès individuel aux services publics depuis le domicile de chacun grâce au très haut débit constituerait une solution. Or, un rapport du Conseil économique, social et environnemental l’a montré : le contact humain est indispensable. Nous devons développer les maisons de services au public qui permettent d’insuffler une nouvelle vie dans les territoires où elles s’installent, notamment dans les bourgs ruraux. La simple présence, au cœur d’un bourg, d’un bâtiment sur lequel figurent les logos de plusieurs services publics, fait toute la différence.
S’agissant de l’action « Dynamisation de la filière bois en Auvergne-Limousin-Bourgogne », elle sera inscrite au PITE non pas en 2014, mais en 2015.
Les grandes orientations en matière de déploiement du très haut débit ont été annoncées par le Président de la République le 20 février dernier. L’objectif est de couvrir l’ensemble du territoire le plus rapidement possible et, au plus tard, d’ici à dix ans. Le total des investissements publics et privés s’élèvera à 20 milliards d’euros. Un tiers de ce montant sera consacré aux zones denses, où le déploiement sera financé exclusivement par les opérateurs privés. L’État veillera à ce que les opérateurs respectent les engagements qu’ils ont déjà pris à cet égard. Un autre tiers concernera les zones moins denses, où le déploiement sera cofinancé par les opérateurs, les collectivités territoriales et l’État. Le derniers tiers sera dédié aux zones les moins denses, en particulier aux territoires hyper-ruraux, où le déploiement sera pris en charge par l’État et les collectivités territoriales.
Dans les zones peu denses, la participation de l’État sera modulée selon un mécanisme de péréquation très favorable aux territoires ruraux : elle représentera 33 à 62 % du financement public en fonction des départements – la moyenne s’établissant à 50 %. En outre, une bonification permettra de prendre en compte les contraintes spécifiques des outre-mer. Un bonus sera également accordé aux projets pluridépartementaux. Au total, d’ici à 2017, 4,3 milliards d’euros de financements publics seront mobilisés pour le déploiement du très haut débit.
Par ailleurs, Claudy Lebreton, président de l’Assemblée des départements de France, m’a remis un rapport sur les usages du numérique. Il me paraît essentiel que les collectivités territoriales puissent anticiper ces usages.
M. Jean-Yves Caullet. La recherche de l’égalité entre les territoires procède non seulement d’un impératif de justice, mais également d’un souci d’efficacité collective : nous devons donner des moyens aux territoires, afin qu’ils soient en mesure de contribuer à la performance globale de la nation. C’est à ce titre qu’ils revendiquent à bon droit l’accès aux services essentiels, en particulier aux services publics et à l’offre de soins.
La création du CGET est une excellente nouvelle : elle va permettre d’améliorer la cohérence des politiques menées. Il est cependant nécessaire de stabiliser les dispositifs, afin que l’ensemble des acteurs puisse se les approprier ; des changements trop fréquents sont nuisibles. Par ailleurs, je suis très satisfait que les CPER intègrent à nouveau une dimension stratégique et rompent avec une certaine mise en concurrence des territoires, qui paralyse ceux d’entre eux qui n’ont pas la capacité de faire émerger assez rapidement des projets.
Quant aux technologies numériques, elles doivent être développées en priorité dans les territoires où elles permettent de lever des facteurs limitants. De même, c’est en priorité dans les zones rurales isolées qu’il convient de rapprocher les services publics des citoyens. Cela réduira les déplacements individuels et améliorera le bilan carbone. Ce que vous avez dit à ce sujet est très juste, madame la ministre : il convient de privilégier un accès collectif aux services publics, et non un accès depuis le domicile de chacun. C’est essentiel tant pour le lien social que pour le dynamisme des bourgs qui forment l’armature du territoire national. Ce raisonnement vaut également pour le télétravail : les expériences individuelles en la matière se sont souvent soldées par des échecs en raison de l’isolement social et technologique des intéressés. À l’opposé, le regroupement des télétravailleurs dans des bourgs où ils peuvent trouver un meilleur accès aux nouvelles technologies renforce en même temps la cohésion sociale.
S’agissant de l’action « Dynamisation de la filière bois en Auvergne-Limousin-Bourgogne », je comprends les contraintes qui s’imposent à nous en 2014 et me réjouis, du reste, de son inscription au PITE en 2015. Mais il ne faudrait pas que le projet pâtisse d’une année d’attente. L’État et les collectivités territoriales disposent probablement des moyens suffisants pour maintenir la mobilisation autour de ce projet.
Enfin, les collectivités territoriales ne pourraient-elles pas, en mutualisant leurs moyens, assurer certaines missions des sous-préfectures ?
M. Claude de Ganay. Nous sommes nombreux à représenter les territoires ruraux au sein de cette commission élargie. Malgré nos divergences politiques, nous pouvons nous accorder sur un point : dans beaucoup de nos territoires, les populations se sentent abandonnées, en marge du développement et du progrès. Les choix économiques et fiscaux du Gouvernement ne font d’ailleurs qu’amplifier ce sentiment. De plus, les élus locaux s’inquiètent pour l’avenir financier de leurs collectivités : le PLF pour 2014 prévoit une baisse des dotations aux collectivités territoriales de 1,5 milliard d’euros, dont une grande part – 800 millions d’euros – sera supportée par les communes.
En réalité, deux France se côtoient : une France métropolitaine, qui concentre environ 40 % de la population et produit les deux tiers du PIB, et une France de la périphérie, majoritairement rurale, qui regroupe 60 % de la population et produit un tiers du PIB. Or un constat s’impose : notre politique des territoires est en panne. Il est urgent d’agir !
Certes, le problème ne date pas d’aujourd’hui, mais les politiques que mène actuellement le Gouvernement ne contribuent guère à réduire cette fracture – pas plus la politique des territoires que les autres.
Le précédent gouvernement avait adopté, dès 2010, une série de mesures ambitieuses s’inspirant des préconisations du comité interministériel d’aménagement et de développement du territoire. Allez-vous poursuivre cette dynamique, madame la ministre ? J’en doute. Malgré l’urgence, la lutte contre les fractures territoriales ne semble pas constituer une priorité de votre gouvernement.
Ainsi, les autorisations d’engagement de la mission « Politique des territoires » baisseront de 281 millions d’euros en 2014. En deux ans, elles auront diminué de 17 % ! C’est bien le signe que votre politique manque d’ambition. La baisse de 18 % des crédits de l’action « Développement solidaire et équilibré des territoires », en particulier, ne laisse pas de nous inquiéter. Ces crédits financent en effet l’amélioration de l’accès des citoyens aux services publics, notamment dans les zones rurales.
J’alerte également nos collègues sur le financement insuffisant du plan de développement des maisons de santé en milieu rural : les crédits de paiement qui doivent permettre le règlement d’une partie des engagements réalisés entre 2011 et 2013 ne seront reconduits qu’à hauteur de 1,9 million d’euros en 2014, alors que 6 à 7 millions auraient été nécessaires.
En outre, la DATAR prévoit que le taux de réalisation des objectifs de création d’emplois des bénéficiaires de la PAT s’établira à 58 % en 2014, contre 71 % en 2013. Elle impute cette baisse à la conjoncture. Mais ne conviendrait-il pas plutôt de définir plus rigoureusement les objectifs de la PAT, pour rendre cette politique plus cohérente et la doter d’une véritable stratégie ?
Enfin, l’extension des zones AFR, telle qu’elle est prévue pour juillet 2014, n’est pas assez ambitieuse : ces zones ne concerneront que 21 % de la population française, alors qu’elles devraient englober la totalité de la France de la périphérie, même si la Commission européenne s’y oppose. Cela apporterait à nos entreprises l’appui dont elles ont besoin dans le contexte économique actuel.
Pour ce qui est de la réforme de la DATAR, opérateur pivot de la politique des territoires, nous ne pouvons qu’approuver la création du CGET, qui regroupera, outre celle-ci, le Secrétariat général du comité interministériel des villes et l’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances.
En tant qu’élu local, je suis parvenu à mutualiser un certain nombre de politiques dans le cadre intercommunal. L’objectif était d’améliorer le service rendu aux citoyens tout en réduisant les coûts de fonctionnement au profit de l’investissement. Hélas, nous constatons une tendance contraire en ce qui concerne le programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire » : les dépenses d’intervention passeront – en autorisations d’engagement – de 235 millions d’euros en 2013 à 219 millions en 2014, alors que les dépenses de fonctionnement augmenteront dans le même temps. Vous réussissez là un véritable tour de force ! Je sollicite d’ailleurs votre commentaire sur ce point, madame la ministre.
Quant au programme 162 « Interventions territoriales de l’État », il est marqué par le même manque d’ambition. En particulier, la baisse des autorisations d’engagement de l’action « Eau - Agriculture en Bretagne » par rapport à 2013 n’est pas justifiée. En effet, il est indispensable de continuer à protéger la population contre la pollution des eaux par les nitrates et d’accompagner les professionnels bretons concernés.
En définitive, ce budget ne permettra ni de redynamiser les territoires ruraux, ni d’assurer un développement équilibré et solidaire des territoires, que ce soit en matière d’emploi ou d’accès de nos concitoyens aux services publics et à l’offre de soins. C’est pourquoi le groupe UMP ne votera pas les crédits de la mission « Politiques des territoires ».
M. Thierry Benoit. Le budget de la mission « Politique des territoires » – environ 300 millions d’euros – peut sembler modeste, mais ce sont des crédits stratégiques, dont l’effet de levier est réel ! Quant à leur diminution, hélas inéluctable, elle doit nous inciter à travailler autrement.
La création du CGET va dans le bon sens : à l’instar de vos prédécesseurs, madame la ministre, vous mettez de l’ordre dans les services de l’État. Mais quel sera l’impact de cette réforme au niveau local ? On retire de nos débats l’impression qu’il existe de très nombreux outils pour accompagner les territoires ruraux : en matière d’accès aux services publics et à l’offre de soins, de mobilité, d’énergie ou encore de développement économique. Mails la réalité dans nos territoires est bien différente : il y a donc beaucoup de perte en ligne ! Que comptez-vous faire, madame la ministre, pour améliorer la visibilité, la lisibilité et l’efficacité de la politique des territoires ? L’important est de répondre aux préoccupations concrètes du terrain.
Le zonage AFR sera revu en détail au niveau régional. Ce travail impliquera notamment les préfets de région et les présidents de conseils régionaux. Pouvez-vous préciser la manière dont il sera conduit ?
Lors de son audition, hier, le ministre de l’intérieur a évoqué la modernisation de l’action publique. J’en retiens qu’il y aura peu de changements pour ce qui est des sous-préfectures au cours du quinquennat. Quel doit être, selon vous, le rôle de l’État dans le domaine de l’urbanisme, notamment pour l’application du droit des sols et l’instruction des permis de construire ? Quelles sont vos propositions de modernisation en la matière ?
S’inscrivant dans la continuité de son prédécesseur, le Premier ministre a évoqué le plan de développement des maisons de santé en milieu rural. Disposez-vous des crédits nécessaires pour financer ce plan ? Comment comptez-vous coordonner l’action des agences régionales de santé – qui accompagnent les professionnels de santé et les élus dans l’élaboration des projets – et les préfets de région – qui accordent les crédits nécessaires à la réalisation de ces projets ?
Par ailleurs, comment comptez-vous articuler les crédits de la mission « Politique des territoires » avec les fonds européens, les CPER et les contrats de pays ?
Enfin, allez-vous confier la conduite de l’action « Eau - Agriculture en Bretagne » au conseil régional de Bretagne ?
M. Denis Baupin. Les élus des circonscriptions urbaines se soucient également de l’égalité des territoires.
Le groupe écologiste se réjouit de la création du CGET en 2014, ainsi que de la relance des CPER. Nous sommes très attachés à cette forme de contractualisation, qui conforte le chef de filat des régions. En outre, les CPER peuvent être un outil très efficace au service de la transition écologique et énergétique. Ils peuvent notamment favoriser le développement des transports collectifs, la production des énergies renouvelables ou les politiques d’efficacité énergétique. Les territoires sont les moteurs de la transition énergétique. C’est d’ailleurs dans les pays fédéraux que cette transition progresse le plus vite. De plus, les territoires défavorisés ont souvent des atouts à faire valoir en matière de production d’énergie éolienne, solaire, marine ou tirée de la biomasse. À cet égard, je rejoins M. Caullet sur l’importance de la filière bois : c’est le potentiel le plus important dans notre pays pour le développement des énergies renouvelables. Enfin, le développement des « écoterritoires » permet de lutter contre l’étalement urbain.
Notre politique énergétique actuelle nous conduit à dépenser près de 70 milliards d’euros par an pour importer des énergies fossiles. Si nous réorientions une partie de cet argent pour l’investir dans les politiques d’efficacité énergétique dans nos territoires, nous serions doublement gagnants ! Cela nous permettrait notamment de créer des emplois non délocalisables.
Dans les territoires insulaires, en particulier en Corse, nous avons atteint le maximum de ce que nous pouvons faire en matière de production d’électricité d’origine renouvelable compte tenu des limites imposées par les réseaux électriques. Pourtant, le potentiel de développement des énergies renouvelables est important en Corse. Il conviendrait de desserrer cette contrainte.
Enfin, nous aurons à examiner prochainement le projet de loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine. Il est tout à fait légitime de faire évoluer le zonage sur lequel s’appuie la politique de la ville. Toutefois, cela ne doit pas nous conduire à négliger certains quartiers, y compris à Paris : la suppression des dispositifs relevant de la politique de la ville aggraverait la situation sociale dans ces quartiers et nuirait à leur attractivité. Je me permets d’appeler votre attention sur ce point, madame la ministre.
M. Frédéric Reiss. Les objectifs du programme 112 sont tout à fait pertinents : soutenir la compétitivité et l’attractivité des territoires ; accompagner les mutations économiques tout en renforçant la cohésion sociale ; concevoir une action publique efficace en matière d’aménagement du territoire. Cependant, le budget de ce programme ne permettra ni de redynamiser les territoires ruraux, ni d’assurer un développement équilibré et solidaire des territoires. Je regrette en particulier la diminution des crédits consacrés à l’amélioration de l’accès de nos concitoyens aux services publics et à l’offre de soins.
Plusieurs principes doivent guider la politique des territoires : la décentralisation ; une concertation approfondie avec les régions ; le travail interministériel. À cet égard, les élus locaux ont bien compris les contraintes, mais aussi les avantages, qui résultent de l’adaptation, voire de la révision des schémas de cohérence territoriaux.
Vous accordez à juste titre une grande importance, madame la ministre, au déploiement du très haut débit, afin de réduire la fracture numérique. En revanche, vous n’avez guère évoqué les transports en commun, dont l’absence peut être tout aussi problématique. Or l’État s’est désengagé de certains projets d’infrastructures de transport qui avançaient pourtant bien. Ainsi, le contrat de projets entre l’État et la région Alsace pour les années 2007 à 2013 prévoyait la rénovation d’une voie ferrée dans le nord de la région. Sur un budget total de 24 millions d’euros, l’État devait contribuer à hauteur de 8 millions, mais il n’a pas tenu parole. Grâce à la mobilisation de la région Alsace et de Réseau ferré de France – qui sont parvenus à réunir 10 millions d’euros, auxquels s’ajoutera un million supplémentaire débloqué par le ministre des transports –, la première tranche de travaux pourra finalement être lancée en 2014. Il est d’autant plus indispensable de rénover cette ligne qu’elle dessert les entreprises Vossloh – spécialiste mondial en matière d’infrastructures ferroviaires – et Alstom – constructeur des rames Régiolis ! Dans ce dossier, comme dans d’autres, le travail interministériel est – je le répète – un impératif.
Enfin, je signale qu’une expérimentation, très suivie au niveau national, est actuellement conduite dans ma circonscription : les deux sous-préfectures qu’elle comporte ont été placées sous la direction d’un seul sous-préfet. D’une manière générale, on ne saurait trop insister sur l’importance de la présence de l’État au niveau local, en particulier pour les maires des petites communes.
Mme Gisèle Biémouret. Lancés en 2005, les pôles d’excellence rurale (PER) ont permis de réaliser des projets d’investissement locaux en fédérant les acteurs publics et privés.
Deux générations de PER se sont succédé. Au titre de la première, entre 2006 et 2012, 379 projets ont été labellisés. Très peu d’entre eux ont été abandonnés. La deuxième génération de PER a été lancée à la fin de l’année 2009 et 263 projets ont été retenus. Leur mise en œuvre s’achèvera en 2015, c’est-à-dire à la moitié du quinquennat.
Ce dispositif a répondu aux attentes en matière de développement économique des territoires ruraux et de maintien des services au public. Il a suscité des investissements publics utiles au développement des territoires. Ainsi, dans le département du Gers, les neufs projets labellisés ont eu des retombées significatives. Toutefois, les appels à projet ont mis les territoires en concurrence.
Quelle part des crédits dédiés à la seconde génération de PER a été engagée à ce jour, madame la ministre ? Envisagez-vous d’évaluer les PER ? Le Gouvernement a-t-il l’intention de renouveler ce dispositif ? Le cas échéant, ne conviendrait-il pas de définir des thématiques plus précises ou de fixer l’échelle pertinente de ces projets pour mieux les répartir ?
M. Yannick Favennec. Je souhaite, à mon tour, souligner l’attachement de l’UDI aux territoires ruraux, qui représentent 80 % du territoire national et sont occupés par 11 millions de nos concitoyens. Ces territoires, qui bénéficient pourtant d’une démographie dynamique depuis plusieurs décennies, ont le sentiment d’être abandonnés par les politiques publiques nationales.
La modeste enveloppe consacrée à cette mission – 300 millions d’euros – en est la meilleure preuve. Les crédits déjà dérisoires sont en baisse alors que, vous l’avez reconnu, madame la ministre, leur effet de levier est important pour les territoires ruraux.
Ces crédits sont insuffisants au regard des besoins en matière de services publics de proximité, d’accès aux soins et d’outils de télécommunications. Sur ce dernier point, je souhaite vous interpeller sur la dégradation manifeste de l’accès à la téléphonie mobile. En Mayenne, l’impossibilité de téléphoner suscite le mécontentement croissant de nombreux élus locaux et habitants de communes et de cantons qui sont mal desservis, voire pas du tout.
Alors que le déploiement de la 4G est annoncé à grands renforts de publicité, certains territoires n’ont pas encore accès à la 3G. Or, la couverture du réseau de téléphonie mobile comme la couverture numérique sont des facteurs incontournables d’attractivité et de développement économique dont les territoires ruraux ne peuvent légitimement pas être privés.
Quelles mesures entendez-vous prendre pour éviter une fracture numérique entre les zones urbaines et rurales ? Comment comptez-vous solliciter les opérateurs de téléphonie et les associer à l’aménagement du territoire ?
S’agissant des zones de revitalisation rurale, l’article 78 du projet de loi de finances prévoit le recentrage de l’exonération des cotisations employeurs relative à l’embauche de salariés au sein d’organismes d’intérêt général et d’associations. Cette disposition a pour conséquence une diminution de 25 % des aides à ces emplois en zone rurale et un manque à gagner de 30 millions d’euros pour les associations qui créent pourtant du lien social. Quel est avenir des zones de revitalisation rurale dont vous semblez annoncer une réforme dans la future loi de décentralisation ? Peut-on imaginer la création de zones franches rurales sur le modèle des zones franches urbaines ?
Vous souhaitez l’installation d’une maison de services au public par chef-lieu de canton. Mais s’agit-il des cantons actuels ou de ceux qui survivront à la réforme du scrutin départemental ?
Mme Cécile Duflot, ministre de l’égalité des territoires et du logement. Monsieur Caullet, comme vous le savez, le PITE relève du ministère de l’intérieur. En revanche, mon ministère est mobilisé en faveur du développement de la filière bois. Nous entendons notamment travailler sur ses débouchés en promouvant le bois comme matériau de construction.
En matière de transports, la multimodalité et l’accès aux transports en commun les plus proches, y compris les transports à la demande en territoires ruraux, sont des sujets essentiels sur lesquels nous travaillons, avec la SNCF notamment. Nous devons saisir les opportunités et être attentifs aux expérimentations qui sont menées.
Je souhaite souligner à quel point l’abondement de l’Agence de financement des infrastructures de transport est décisif pour l’amélioration du réseau ferroviaire secondaire qui souffre d’un déficit chronique d’investissement. Au-delà des débats qui nous occupent actuellement, le financement des infrastructures et ses modalités – la contribution du transport routier au financement des transports en commun, par exemple – sont un sujet crucial pour les territoires.
Par ailleurs, au-delà de l’exercice des missions de l’État, les préfectures sont aussi des lieux de médiation, d’accueil et de structuration du territoire. Cet aspect ne doit pas être mésestimé, j’ai eu l’occasion de le dire au ministre de l’intérieur.
Monsieur de Ganay, les crédits du programme 112 pour 2014 – 245,9 millions en autorisations d’engagement – correspondent à l’exécution en 2012. Il me semble donc abusif de parler de baisse. En outre, les dépenses de fonctionnement sont stables entre la loi de finances de 2013 et le PLF pour 2014. Enfin, une part significative des crédits n’apparaît pas dans le projet de loi de finances : 415 millions d’euros de crédits dédiés à l’égalité des territoires et à la transition écologique figurent en effet dans le deuxième plan d’investissements d’avenir au titre des territoires à énergie positive et de la ville durable – cette notion générique recouvrant aussi les territoires ruraux. La question des territoires à énergie positive suscite de nombreuses initiatives locales qui sont bénéfiques pour tous : collectivités territoriales, entreprises et habitants.
Monsieur Benoit, vous avez souligné l’ordre mis au sommet de l’État. Je vous en remercie d’autant que ce qualificatif est rarement accolé à mon action …
Cette nouvelle organisation répond d’abord à la volonté d’adapter les structures à la réalité, à savoir que des problèmes similaires se posent aux territoires ruraux et aux territoires dépendant de la politique de la ville, par exemple l’accès aux services publics ou aux services de santé. Elle a vocation à améliorer le dialogue entre l’État et les collectivités locales et à coordonner les différentes interventions. L’État doit conserver sa mission de solidarité envers les territoires qui en ont le plus besoin tout en encourageant la déclinaison territoriale d’objectifs communs.
Monsieur Baupin, vous avez également approuvé la création du CGET. Je me félicite des nombreuses appréciations positives que celui-ci recueille. Elles s’expliquent probablement par le fait que cette structure rompt avec la vision de la DATAR, davantage centralisatrice, en prenant en compte les compétences désormais développées par les collectivités.
Les prochains CPER sont sous-tendus par un objectif stratégique pendant toute la durée du contrat, là où les précédents contrats, dans leur exécution, ont privilégié une approche strictement budgétaire.
La définition de cinq axes stratégiques, parmi lesquels la transition écologique et énergétique et les mobilités multimodales, permettra à l’État de nouer un dialogue stratégique avec les collectivités locales. Les CPER intégreront les priorités européennes en y ajoutant des priorités nationales et parfois régionales. L’attribution de la gestion des fonds européens aux régions participe de la même logique que celle qui préside à ces contrats : l’État définit une stratégie partagée sur l’ensemble du territoire tandis que sa déclinaison territoriale est portée par les acteurs locaux.
Le calendrier est connu : les préfets et les présidents de conseils régionaux doivent remettre un document stratégique en février 2014. La négociation et la rédaction des contrats s’engageront au printemps en vue d’une signature à l’été 2014.
Monsieur Reiss, j’ai entendu avec plaisir vos propos sur l’utilité des SCoT et des PLU intercommunaux. Ces derniers permettront que les collectivités territoriales se saisissent pleinement de la compétence d’application du droit des sols (ADS) et que celle-ci soit mieux exercée.
Cette compétence est théoriquement résiduelle pour l’État depuis 1982. Nous souhaitons la faire évoluer afin qu’elle soit exercée au plus proche des territoires tout en maintenant une compétence régalienne de l’État. Celui-ci doit ainsi soutenir les territoires les plus fragiles et vulnérables. Il doit également intervenir en appui à l’élaboration des documents d’urbanisme, notamment pour les intercommunalités rurales, à l’instar du club PLUi. Enfin, le Centre d’expertise pour les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (CEREMA) offre une compétence d’ingénierie rare dont de nombreuses collectivités ne peuvent pas se doter.
Si l’État doit assumer ses missions que je viens de rappeler, les collectivités territoriales doivent aussi exercer pleinement leur compétence en matière de droit des sols. Je rappelle que 40 % des communes ne sont couvertes par aucun document d’urbanisme et sont donc régies par le règlement national d’urbanisme. Les EPCI comptant moins de 10 000 habitants sur leur territoire conservent la compétence ADS car les communes n’ont pas les moyens de l’exercer.
S’agissant des zones franches rurales, je crois être la ministre la plus richement dotée en zonages, avec le logement et les territoires ruraux. Ce sujet est complexe car, par nature, le zonage exclut et favorise les effets d’aubaine. Il me semble préférable de chercher les outils capables d’appréhender la variété des territoires et de leurs problématiques – je pense au plan très haut débit dans lequel la mutualisation joue à plein pour les territoires en difficulté ou pour les territoires spécifiques comme la montagne ou les outre-mer – plutôt que d’inventer de nouveaux zonages.
Le dispositif de zones de revitalisation rurale sera maintenu en 2014, mais sa prochaine révision sera l’occasion de réfléchir, entre autres sujets, aux modalités de sortie du dispositif, aujourd’hui trop brutales. On peut imaginer une possibilité de sortie en sifflet et un appui plus ou moins fort selon les territoires. Nous devons moduler l’intervention de l’État en fonction de la sensibilité des territoires ou de difficultés exceptionnelles qu’ils traverseraient. Ce sujet n’est pas nouveau pour le ministère puisqu’il a en charge la revitalisation des zones de défense.
Cinquante nouvelles maisons de santé ont été créées en 2013, ce qui porte leur nombre à 300 depuis le début du programme. Là encore, il n’y a pas de réponse univoque pour tous les territoires. L’État doit soutenir les initiatives locales plutôt qu’imposer un modèle à l’ensemble du territoire. Le plan de lutte contre les déserts médicaux, présenté par Marisol Touraine, fera l’objet d’une évaluation sur la base de laquelle d’éventuelles évolutions pourront être envisagées. À ce jour, nous nous en tenons au mécanisme incitatif que nous avons décidé.
Madame Biémouret, le Gouvernement assumera tous les engagements pris dans le cadre de la seconde génération de CPER pour les pôles d’excellence rurale : 114 millions d’euros sur les 154 prévus pour l’année 2013 sont déjà engagés. Les crédits inscrits pour 2014 permettront de répondre aux besoins des projets en cours de réalisation. Pour l’avenir, nous devons réfléchir à des dispositifs qui opposent moins les territoires. Nous devons peut-être sortir de la logique de l’appel à projet, car celle-ci peut fragiliser les territoires qui ne sont pas en mesure d’y répondre alors qu’ils pourraient utilement bénéficier du soutien aux dynamiques d’initiative locale.
La réunion de la commission élargie s’achève à seize heures vingt-cinq.
Compte rendu de la commission élargie du mercredi 30 octobre 2013
(Application de l’article 120 du Règlement)
Égalité des territoires, logement et ville
La réunion de la commission élargie commence à neuf heures, sous la présidence de M. Gilles Carrez, président de la commission des finances, de M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques et de Mme Martine Carrillon-Couvreur, vice-présidente de la commission des affaires sociales.
M. le président Gilles Carrez. Nous sommes heureux de vous accueillir, madame la ministre, monsieur le ministre, avec François Brottes, président de la commission des affaires économiques et Martine Carrillon-Couvreur, vice-présidente de la commission des affaires sociales, pour cette réunion de la commission élargie consacrée aux crédits du projet de loi de finances pour 2014 affectés à la mission « Égalité des territoires, logement et ville ».
Cette année, la Conférence des présidents a décidé que toutes les missions feraient l’objet d’un examen en commission élargie avant d’être examinées dans l’hémicycle. Cela avait déjà été le cas, l’année dernière, s’agissant de l’égalité des territoires, du logement et de la ville ; aussi, madame la ministre, monsieur le ministre, êtes-vous accoutumés à cet exercice. Pourquoi a-t-on généralisé les commissions élargies ? Je le dis à l’intention de nos collègues qui assisteraient pour la première fois à l’examen d’un budget : il a semblé utile à la conférence des présidents d’organiser, à travers ces commissions, des débats précis, concis, interactifs avec les ministres, sous la forme de questions et d’interventions, en évitant les tunnels dans lesquels pourraient nous engager les discours lus de façon interminable. Aussi allons-nous tout faire pour respecter cette règle du jeu.
Si vous en êtes d’accord, la séance va se dérouler de la manière suivante. Nous entendrons d’abord les cinq rapporteurs – les rapporteurs spéciaux puis les rapporteurs pour avis –, qui présenteront leurs travaux, pour cinq minutes chacun. Madame la ministre, monsieur le ministre, vous répondrez à leurs observations et à leurs questions. Puis, nous donnerons la parole aux orateurs des groupes qui auront droit, pour chacun d’eux, à cinq minutes maximum. Enfin, les collègues souhaitant intervenir pourront le faire pendant deux minutes.
Mme Martine Carrillon-Couvreur, présidente. Monsieur le président, vous avez fort bien présenté l’organisation de nos travaux. J’ajoute un mot pour demander aux membres de la commission des affaires sociales de rester jusqu’au terme de la commission élargie, car nous procéderons à un vote à son issue.
M. le président François Brottes. Madame la ministre, monsieur le ministre, cette importante mission budgétaire s’inscrit dans un contexte riche et ambitieux. Le Gouvernement a en effet érigé le logement et la politique de la ville au rang de chantiers prioritaires. De fait, la commission des affaires économiques, qui suit ces questions, a déjà adopté deux textes de loi, l’un pour mobiliser le foncier public plus rapidement que cela n’a été le cas par le passé, l’autre autorisant le Gouvernement à accélérer, par ordonnances, un certain nombre de procédures et à limiter les recours qui empêchent la construction de logements. Par ailleurs, nous examinerons bientôt, en deuxième lecture, un texte – dit « ALUR », acronyme de « pour l’accès au logement et un urbanisme rénové », – extrêmement ambitieux. Nous n’avons donc pas chômé.
J’ajouterai que la commission des affaires économiques étudiera, le 14 novembre prochain, le texte relatif à la politique de la ville, dont le rapporteur est M. Pupponi, qui met en place un soutien mieux ciblé et plus qualitatif. Le ministre nous en dira certainement deux mots tout à l’heure. Cela permet de rappeler que le logement, s’il renvoie au béton – et les artisans se réjouiront certainement du fait que la TVA sur tout ce qui a trait, de manière très générale, à la réhabilitation thermique des bâtiments, passe à 5 % –, concerne aussi des habitants, des mal-logés et des sans-logement.
M. Christophe Caresche, rapporteur spécial de la commission des finances, pour l’égalité des territoires et le logement. En premier lieu, je qualifierais le budget qui nous est proposé de courageux. Courageux parce que, dans le contexte de crise que connaît notre pays, il se donne les moyens de mieux répondre aux besoins humanitaires : le programme 177, qui finance les dispositifs d'hébergement et d'inclusion sociale, voit ainsi ses dotations progresser de 108 millions d'euros, pour atteindre un total de 1,3 milliard. Le programme 109, en l’état, assure, pour 5 milliards d'euros, le bouclage financier d'un dispositif d'aides personnelles au logement qui bénéficie à plus de 6,4 millions de ménages modestes. L'association de ces deux hausses fait croître l'ensemble du budget du logement de plus de 222 millions en autorisations d'engagement en 2014.
C’est aussi un budget ingénieux car, pour compenser l’effort budgétaire – qui se traduit notamment par une diminution de 47 millions en autorisations d'engagement et de 155 millions en crédits de paiement du programme 135, qui finance en particulier les aides à la pierre –, le Gouvernement actionne plusieurs autres puissants leviers, fiscaux ou partenariaux – je pense en particulier à Action logement –, pour assurer la réussite de ses ambitions en matière de construction, notamment sociale, et de rénovation énergétique des logements.
Ce budget constitue dans le même temps un défi, au regard de l’urgence sociale, qui progresse très fortement, et de la nécessité de conduire une action de long terme, en particulier dans le domaine de la construction, domaine dans lequel nous connaissons une situation difficile et qui constitue l’une des priorités du Gouvernement.
Il faut s’efforcer de concilier la réponse à l’urgence sociale et les dépenses de long terme. J’ai quelques questions à vous poser à ce sujet, madame la ministre.
Les dépenses d’urgence, les dépenses sociales, si elles revêtent une grande importance pour nos concitoyens, doivent, à mon sens, faire l’objet d’une réflexion, afin que d’accroître leur efficacité et mieux les cibler. Je pense à deux dispositifs. Il s’agit d’abord des aides au logement. Le projet de loi de finances pour 2014 prévoit le gel des barèmes de calcul des aides personnelles au logement. Si cette mesure peut donner lieu à débat, elle s’inscrit dans un contexte de progression très forte des aides au logement, qui atteste un effort important du Gouvernement. Par ailleurs, ces aides pourraient faire l’objet d’une réévaluation et d’une nouvelle discussion. Un rapport à ce sujet vous a d’ailleurs été remis, madame la ministre, peu après votre nomination. Il me semble que le moment est venu pour le Gouvernement d’ouvrir cette discussion, cette évaluation, pour mieux cibler ces dispositifs. On sait, en particulier, qu’un problème pourrait se poser s’agissant des étudiants : la Cour des comptes nous alerte régulièrement à ce sujet. C’est pourquoi j’ai déposé un amendement demandant au Gouvernement qu’il nous remette un rapport sur cette question, afin que l’on puisse engager l’évaluation des aides au logement.
Le deuxième facteur pesant considérablement sur le budget est l’hébergement d’urgence. La situation sociale dégradée nous impose d’agir : la progression très importante du budget est donc parfaitement justifiée. Néanmoins, le préfet Régnier nous alerte régulièrement sur la question particulière des déboutés du droit d’asile. Dans le cadre de la réforme du droit d’asile que le Gouvernement met en place, il faudra évidemment tenir compte du poids que représentent ces personnes sur le dispositif d’hébergement d’urgence, afin, peut-être d’instituer des mesures spécifiques.
Nous connaissons les efforts accomplis par le Gouvernement en matière de rénovation énergétique – je pense en particulier à la TVA. Le Gouvernement entend-il donner une suite aux propositions de la Caisse des dépôts et consignations, relatives, en particulier, au développement de formules de tiers financement des collectivités territoriales ou à la création d'un dispositif national de garantie ?
J’avais conduit avec M. Piron une mission sur le logement social, qui constitue l’une des priorités du Gouvernement. L’un des moyens de développer ce type de logements est d’accroître les fonds propres des organismes de logements sociaux. À cette fin, nous avions proposé de simplifier et d’améliorer la capacité des organismes d’HLM de vendre les logements sociaux, même de manière limitée dans le temps ; ce levier pourrait être aujourd’hui utilisé. Quel avis portez-vous sur ces propositions ?
Enfin, s’agissant du logement intermédiaire, inscrit dans la loi, quelles informations pouvez-vous nous communiquer sur la date de parution de l’ordonnance y afférente et, plus généralement, sur le dispositif de création de 10 000 logements mis en place dans le projet de loi de finances et évoqué par le Gouvernement ?
M. Dominique Baert, rapporteur spécial de la commission des finances, pour la politique de la ville. Madame la ministre, monsieur le ministre, si, du point de vue de la méthode de travail, le rapporteur spécial de la politique de la ville ne peut qu'afficher sa déception quant au calendrier bien trop tardif de retour des questionnaires parlementaires – nous en avions reçu à peine 62 % à la date limite du 10 octobre – je ne peux en revanche que manifester une certaine satisfaction à l'égard de l'évolution des crédits budgétaires consacrés à la dotation du programme 147 « Politique de la ville », fussent-ils en baisse apparente de 2,4 % en autorisations d'engagements et de 4,4 % en crédits de paiement.
Pourquoi cette satisfaction ? D'abord, parce que cette situation contraste heureusement avec la litanie des baisses régulières et considérables de crédits qui ont eu lieu sous la législature précédente : ceux-ci sont passés de 853 millions d'euros en 2008 à 512 millions en 2012, soit une baisse de 340 millions – soit 40 % – en cinq ans.
Aussi la quasi-stabilisation des crédits en 2014 constitue-t-elle un plateau salutaire et appréciable, surtout dans un contexte de redressement des finances publiques.
La diminution des crédits de paiement n'est d’ailleurs qu’un effet d'optique lié à la diminution des crédits des exonérations dans les ZFU, les zones franches urbaines. En réalité, les moyens financiers d'intervention du programme sont en l'état consolidés, voire même confortés sur certaines priorités telles que les emplois francs.
De même, alors que l'an dernier votre rapporteur avait plaidé avec force pour une réorganisation simplificatrice des structures – je me souviens avoir dit : « l'ANRU, l'ACSé, l'EPARECA et le SG-CIV : ce sont au moins deux structures de trop » – et déploré combien, « du strict point de vue budgétaire, le ministère de la ville est un nain par rapport à ses opérateurs », il se félicite cette année d'avoir été entendu et que vous ayez engagé le rapprochement entre le SG-CIV, le secrétariat général du Comité interministériel des villes, et l'ACSé, l’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances. Cela laisse, à votre examen, madame, monsieur les ministres, la problématique de l'ANRU, l’Agence nationale pour la rénovation urbaine, et de l'EPARECA, l’Établissement national public d’aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux.
Mais puisqu'il me faut être concis dans mon intervention, je me limiterai à poser cinq questions.
Tout d'abord, précisément sur les questions de structure, pouvez-vous, monsieur le ministre, nous indiquer selon quel calendrier le rapprochement entre le SG-CIV et l'ACSé se fera et dans quel lieu la nouvelle structure sera implantée ; nous espérons qu’elle se situera sur un site en rapport avec l'objet de ces établissements, et non pas, comme il est de tradition pour les ministères et administrations, dans un arrondissement parisien.
Ma deuxième série de questions concerne l’ANRU. Nonobstant le devenir de l’Agence, ce qui me préoccupe, c'est l'évolution de son financement. Dans les prévisions de l'ANRU, il est prévu d'assécher la trésorerie, qui était de 472 millions d'euros à la fin de l’année 2012, en deux ans. Celle-ci passerait en effet à 336 millions d’euros en 2013, à 121 millions d’euros à la fin de l’année 2014 et atteindrait 2 millions d’euros à la fin de l’année 2015. Pour 2014 et 2015, au-delà de la participation souhaitée de 800 millions d’euros chaque année de l'UESL, l’Union des entreprises et des salariés pour le logement, les perspectives financières évoquent en recette une dotation dite « de péréquation » de l’État de 200 millions d’euros en 2015 et 2016 ; de quoi s'agit-il ? Par ailleurs, pourquoi la consommation effective de crédits en 2012 et 2013 est-elle inférieure aux prévisions ? Enfin, alors que, comme je l’indiquais à l’instant, la trésorerie de l’Agence était de 472 millions d’euros fin 2012, ses capitaux propres avaient un solde négatif de 2 445 millions d’euros. Comment ce déficit va-t-il être résorbé ?
La troisième série de questions concerne la régulation budgétaire du ministère, qui m’interpelle. Ces dernières années, les mesures de gel, voire de « surgel » des crédits budgétaires ont affecté régulièrement et de manière significative la politique de la ville, ce qui réduit en exécution la masse affichée en prévision ; le 27 septembre dernier, un décret a ainsi annulé encore 15 millions d’euros de crédits. Pourquoi procéder à une telle régulation et comment est mise en œuvre une telle capacité d'absorption ? Pour être plus précis, sur quelles opérations portent ces suppressions de crédits et comment affectent-elles la bonne exécution des programmes ?
La quatrième série de questions est relative aux zones franches urbaines, dispositif qui doit disparaître d’ici à la fin de l’année 2014. Plusieurs rapports, notamment d’origine parlementaire, ont mis en avant le rôle structurant majeur de la ZFU pour le redéveloppement des quartiers ou des villes concernés ; je pense bien évidemment, monsieur le ministre délégué, et cela ne vous surprendra pas, à la ZFU de Roubaix, que vous connaissez bien, et dont vous savez l'effet de levier déterminant qu'elle a eu pour le renouveau d'une ville qui conserve pour autant de lourdes difficultés. Le Gouvernement peut-il, va-t-il envisager une forme de reconduction de ce dispositif accompagnateur déterminant après le 31 décembre 2014 ?
Enfin, sur les emplois francs, et je salue à cette occasion l’élargissement de l’expérimentation de ce dispositif à de nouvelles zones géographiques, ma question se veut, monsieur le ministre, davantage une supplique : le Gouvernement peut-il envisager au plus vite de ne plus se caler sur les seules zones urbaines sensibles, les ZUS, qui datent de plus de vingt ans pour déterminer l’éligibilité aux emplois francs et de privilégier au contraire, de manière dérogatoire, progressive peut-être, et ciblée sur les bassins d'emplois les plus durement frappés par le chômage sans doute, les zones de la prochaine géographie prioritaire ? En effet, pour lutter contre le chômage, pour offrir des réponses à nos jeunes, il faut plus que jamais être intelligents et efficaces, en adéquation avec son temps et avec la réalité sociale du terrain, et donc des quartiers de nos villes. Je ne doute pas que c’est également votre ambition, monsieur le ministre.
M. Daniel Goldberg, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour les crédits du logement. Si nous devons aborder la question du logement d’un point de vue budgétaire, car c’est l’exercice du jour, je voudrais néanmoins rappeler que la crise du logement touche notre société, de nombreuses familles aux niveaux de revenu différents. Le manque de logements et le mal-logement affectent également la compétitivité de notre pays : les salariés rencontrent des difficultés pour se loger, les entreprises fonctionnent plus difficilement et le placement de l’épargne de la façon la plus utile pour le redressement économique de notre pays n’est pas aisé. C’est la raison pour laquelle, en temps que rapporteur, j’approuve la démarche du Gouvernement de lutter de façon résolue contre le logement rare et cher et, dans le même temps, pour un urbanisme maîtrisé, afin de permettre un choc d’offre foncier en mobilisant l’ensemble des acteurs concernés.
M. le président de la commission des affaires économiques rappelait que ce budget se discute dans un cadre législatif en évolution : la loi du 18 janvier 2013 prévoit d’ores et déjà la mise à disposition des terrains publics – je me félicite que, en Île-de-France, le préfet ait établi une liste de soixante-douze terrains disponibles à la construction – et le projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, le projet de loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, et le projet de loi de réforme de la politique de la ville feront de la question du logement un enjeu capital.
Nous sommes confrontés à plusieurs enjeux, notamment celui de construire plus et plus vite. En sus des points qui ont déjà été cités, je voudrais mettre en avant la question de la réforme des plus-values immobilières. Nous avons eu ce débat lors de la discussion de la première partie du budget : nous allons revenir sur un dispositif qui favorisait la rétention foncière. Madame, monsieur les ministres, la première observation que je ferai vous concerne directement : ne faut-il pas aller plus loin de ce point de vue-là, après la mise à disposition d’un maximum de terrains publics ? Comment peut-on au mieux mobiliser le terrain constructible privé dans les zones tendues ?
Il nous faut également construire plus et plus vite du point de vue du logement social, pour lequel les crédits budgétaires sont un peu en baisse par rapport à l’année dernière. Surtout, les crédits doivent permettre la réalisation de l’engagement de construire 150 000 logements sociaux d’ici à la fin de la mandature. Cet engagement se traduit non seulement sur le plan budgétaire mais aussi par la mobilisation des acteurs : le 27 août 2013 a été publié le décret relatif à l’engagement mutuel avec Action logement. Nous sommes ainsi sortis d’une période qui donnait à l’UESL le sentiment que ses ressources étaient ponctionnées de manière aveugle et que son modèle budgétaire était mis en péril. L’accord mutuel du 8 juillet 2013 avec l’USH, l’Union sociale pour l’habitat, met également fin à la ponction sur le potentiel financier des offices, qui mettait ces derniers en difficulté, et prévoit un fonds de mutualisation de 280 millions d’euros pour la construction. Enfin, la TVA au taux réduit de 5,5 %, qui était une revendication des acteurs du logement, permettra de construire plus et de rénover plus encore.
J’ai là aussi une question : relativement à l’engagement de construire 150 000 logements locatifs sociaux, ne faut-il pas revoir les objectifs en termes de PLAI, prêts locatifs aidés d’intégration, de PLUS, prêts locatifs à usage social, et de PLS, prêts locatifs sociaux ? C’était l’objectif de la loi du 18 janvier 2013. Je considère que, dans l’enveloppe budgétaire, la répartition n’est pas complètement adéquate aux besoins.
Il faudra également suivre la façon dont le nouveau statut du logement intermédiaire se mettra en place, car cela a des incidences budgétaires sur la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2014. Nous attendons de connaître les conditions qui seront fixées par ordonnance pour cette partie du marché.
Débloquer la construction repose enfin sur des outils fiscaux importants : environ 1,4 million d’euros sont alloués à l’incitation pour l’investissement locatif dans le budget pour 2014. Il faudra bien entendu tirer le bilan des dispositifs passés et du dispositif en cours relatif à la mobilisation sur les différents secteurs géographiques ; je sais maintenant qu’il porte votre nom contre votre gré, madame la ministre.
Pour terminer, je reviendrai sur la question des aides personnelles au logement. La Cour des comptes et l’Inspection générale des affaires sociales ont, dans leurs rapports, traité de ce sujet, qui représente une masse budgétaire très importante ; 17 milliards d’euros d’aide au total, dont 5 milliards d’euros pesant sur le budget de l’État. Si la maîtrise des dépenses publiques est une nécessité, je considère que le gel pur et simple de la revalorisation de ces aides, qui sont depuis la loi du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable indexées sur l’évolution de l’indice de référence des loyers, ne va pas dans la bonne direction. C’est le sens de l’amendement que plusieurs collègues et moi-même avons déposé et qui sera discuté tout à l’heure. J’espère que d’ici à la discussion en séance nous pourrons trouver un terrain d’entente entre la nécessaire maîtrise des fonds publics et le fait de faire peser sur le montant des loyers acquittés par de nombreux locataires le gel pur et simple des APL.
Je dirai juste un mot sur le financement de la Société du Grand Paris, qui fait partie de cette mission et pour lequel il n’y a pas de crédit budgétaire. Comme vous l’aviez demandé vous-même, monsieur le président, un dispositif d’écrêtement de ces ressources est prévu et permettra de financer complètement les besoins du réseau de transport de la SGP en 2014 et en 2015.
M. François Pupponi, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour les crédits de la ville. Monsieur le ministre, le vaste chantier que vous avez engagé au printemps 2012 a fait l'objet d'une très large concertation nationale, « Quartiers, engageons le changement », qui s'est conclue justement ici, à l'Assemblée nationale, le 31 janvier dernier.
La loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine, qui en est le prolongement, rénove en profondeur les outils, les méthodes et surtout l'esprit de la politique de la ville. Nous aurons l'occasion d'y revenir longuement dans quelques semaines.
Le programme 147 « Politique de la ville » de la mission « Égalité des territoires, logement et ville » est donc cette année encore un budget de transition, dans l'attente de la nouvelle géographie prioritaire. Mais avec 492 millions d’euros d'autorisations d'engagement et 481 millions d’euros de crédits de paiement, il bénéficie d'une relative stabilité de ses crédits d'intervention, ce qu'il convient de saluer au vu du contexte financier très contraint dans lequel doit s'inscrire le projet de loi de finances pour 2014.
Un effort particulier a notamment été réalisé avec le report, pour les deux tiers, des crédits afférents aux dispositifs d'exonération fiscale qui prennent fin cette année, en particulier les zones franches urbaines, sur le dispositif des emplois francs. Ces crédits auraient normalement dû être rendus au budget général.
Je m'en félicite d'autant plus que je défends, à l'instar de mon collègue Daniel Goldberg, très engagé sur ce point, l'idée d'une prise en compte de la discrimination dans l'emploi que subissent les habitants des quartiers populaires et de la mise en place de mesures correctives spécifiques.
En effet, le développement économique est indispensable pour améliorer la vie quotidienne des habitants de nos quartiers et l'image de ces territoires. Le programme adultes-relais prévoit ainsi une action spécifique envers les jeunes sans emploi. Pourriez-vous, monsieur le ministre, nous en dire plus ?
Le maintien des crédits de la mission en 2014 permettra à l'ACSé de maintenir ses actions comme en 2013, même si le fléchage amorcé vers les quartiers prioritaires 1 contribue à anticiper la réforme à venir et aura pour conséquence que dans certains territoires les crédits diminueront.
Au demeurant, ces crédits budgétaires du programme 147 ne regroupent pas l'ensemble des actions de la politique de la ville, et c'est bien cohérent avec la volonté de revenir au droit commun dans ces quartiers, une volonté clairement inscrite dans le projet de loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine que vous portez, monsieur le ministre.
Ainsi, le PLF pour 2014 poursuit la montée en puissance des outils de péréquation, tout en en corrigeant certains défauts. Avec la montée en charge du FPIC, le fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales, et du FSRIF, le fonds de solidarité des communes d’Île-de-France, l'augmentation de la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale et le maintien de la dotation de développement urbain, ce sont ainsi 290 millions d'euros supplémentaires qui vont être redistribués dans ces territoires en difficulté, pour leur permettre de mettre en œuvre les politiques indispensables afin de réduire les inégalités.
Quant à l'ANRU, son financement est aujourd'hui garanti jusqu'à l'achèvement du programme national pour la rénovation urbaine. En outre, un nouveau programme national de renouvellement urbain va être lancé. Le financement de l'ANRU pour ce dernier est assuré lui aussi, à hauteur de 5 milliards d’euros, permettant ainsi 20 milliards d’euros de travaux, du moins si la participation qu'Action logement prévoit de faire reste bien entièrement fléchée vers ce PNRU. Il faudra y être attentif.
De même, l'ANRU se voit confier de nouvelles missions, via le programme d'investissements d'avenir lancé en juillet dernier, puisque 335 millions d’euros sont inscrits à cet effet dans le projet de loi de finances pour 2014 au programme 414 « Villes et territoires durables ». Pourriez-vous en détailler l'affectation, monsieur le ministre délégué, car je dois reconnaître que ce dispositif est un peu opaque ?
Madame la ministre, les crédits budgétaires inscrits au programme 177 « Prévention de l'exclusion et insertion des personnes âgées vulnérables », qui concerne à la fois, pour votre rapporteur, la politique de la ville et celle du logement, et sans doute plus celle-ci que celle-là, sont en augmentation de 9 % à périmètre constant, ce qui correspond à une hausse de près de 110 millions d’euros.
Par ailleurs, le cadre réglementaire et législatif qui structure l'hébergement et le logement, et le lien de l'un vers l'autre sont en cours de profonde rénovation avec le projet de loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, pour mieux prendre en compte les besoins.
Tout en se félicitant de la poursuite de l'effort budgétaire, indispensable pour apporter une réponse aux quelque 700 000 personnes privées de domicile personnel dans notre pays et alors que 440 864 demandes d'hébergement adressées aux services intégrés d’accueil et d’orientation sont restées insatisfaites en 2012, votre rapporteur souligne la forte hausse des crédits en faveur de l'hébergement depuis 2007 ; elle représente plus de 500 millions d’euros.
Il note également que les crédits inscrits pour 2014 représentent l'équivalent de ceux qui seront consommés en 2013, voire un peu moins si les crédits complémentaires apportés par le décret d'avance ouvert en septembre pour régler les arriérés dus aux associations pour les nuitées d'hôtel s'avèrent insuffisants.
Les efforts notables menés par le Gouvernement sur le programme 177 se heurtent en effet à un écueil, l’impossibilité pour une partie de la population bénéficiaire des dispositifs d'hébergement d’accéder à un logement décent en raison du caractère inconditionnel de celui-ci.
En effet, l'absence de statut régulier au regard de la réglementation sur le droit au séjour leur interdit l'accès au logement social. Les bénéficiaires qui ne peuvent être ni régularisés ni expulsés vont donc rester sur notre territoire. Or, compte tenu du coût du logement hors logement social, ces derniers ne pourront se tourner que vers les logements offerts par les marchands de sommeil, ce qui est en contradiction même avec la philosophie qui sous-tend notre dispositif.
Plus qu'une augmentation continuelle des crédits, certes nécessaire pour apporter une réponse immédiate à des situations d'urgence intolérables dans un pays comme le nôtre, c'est donc à une réflexion globale sur la politique du logement et la politique de l'immigration et de l'asile qu'il me semble urgent de procéder pour tenter d'enrayer un processus qui semble voué à l'échec, ou, à tout le moins, à l'absurde : les crédits budgétaires pour l'hébergement d'urgence représentent aujourd'hui presque trois fois les aides à la pierre. Madame la ministre, pouvez-vous nous apporter des éléments complémentaires sur ce point ?
Pour conclure, je salue de nouveau le travail que vous avez réalisé, dans ce contexte budgétaire complexe, afin de proposer un budget ambitieux et qui permettra une transition vers la nouvelle politique de la ville que nous nous apprêtons à mettre en place dans les prochaines semaines, monsieur le ministre.
Mme Dominique Orlice, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, pour les crédits relatifs à la prévention de l’exclusion. En premier lieu, c’est avec satisfaction que je constate qu’en 2014, les crédits du programme 177 vont atteindre un niveau réaliste dès la loi de finances initiale. Il s'agit vraiment d'une rupture avec les années précédentes, qui étaient marquées par une insincérité budgétaire chronique sur ce programme. En effet, pour la première fois, les crédits initiaux prévus en 2014 sont supérieurs aux crédits effectivement consommés lors du dernier exercice budgétaire connu.
Dans le cadre de mon rapport pour avis, j'ai choisi de m'intéresser plus précisément cette année aux centres d'hébergement et de réinsertion sociale, structures d'hébergement qui offrent le plus de places – plus de 39 000 – sur l'ensemble du territoire. Pour tenter de faire face à l'urgence sociale et au poids croissant des personnes ne trouvant pas à se loger, le nombre de places d'hébergement a fortement progressé depuis 2008. Cette tendance a été confirmée par l'actuel gouvernement dans le cadre du plan de lutte contre la pauvreté de janvier 2013, qui a prévu de créer ou de pérenniser 5 000 places d'hébergement.
Toutefois, j'ai constaté que les nouvelles places d'hébergement ont concerné uniquement les structures de pure urgence, qui visent à mettre à l’abri les personnes de façon immédiate, au détriment des places d'insertion en CHRS, qui offrent pourtant un meilleur service rendu et surtout permettent d’obtenir de meilleurs résultats en terme d'insertion. Ainsi, entre 2008 et 2012, le nombre de nuitées d'hôtel a progressé de près de 100 %, tandis que le nombre de places en CHRS a quasiment stagné.
Madame la ministre, pouvez-vous nous indiquer les raisons pour lesquelles le plan de lutte contre la pauvreté ne prévoit pas la création de places d'insertion en CHRS et si vous envisagez à l'avenir de substituer aux places de pure urgence des places d'insertion ?
Par ailleurs, l'ensemble des acteurs du secteur déplore que la politique de mise à l'abri des personnes à la rue continue à être marquée par une forte saisonnalité. Or, selon toutes les enquêtes sur le sujet, notamment le baromètre 115 de la FNARS, la Fédération nationale des associations d’accueil et de réinsertion sociale, les besoins en places d'hébergement ne sont pas moindres en été. La gestion « au thermomètre » des centres d'hébergement est contre-productive en termes d'insertion, car elle nuit à la continuité de la prise en charge.
Madame la ministre, quelles mesures avez-vous mises en œuvre pour mettre fin au caractère saisonnier de l’hébergement des personnes sans abri et serez-vous de nouveau obligée de prendre des mesures spécifiques l'hiver prochain ?
Le projet de loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles prévoit que ces dernières pourront se voir déléguer « la gestion de la veille sociale, de l'accueil, de l'hébergement et de l'accompagnement au logement de toute personne ou famille sans domicile ou éprouvant des difficultés particulières d'accès au logement […] ainsi que le financement des organismes et dispositifs qui y contribuent […]. » Ces dispositions constituent un pas important vers une décentralisation des politiques en faveur de l'insertion par le logement.
Madame la ministre, pouvez-vous nous indiquer si vous êtes favorable à ce que tout ou partie des compétences de l'État en matière de prise en charge des personnes sans-abri ou mal logées soient déléguées aux collectivités locales ?
Pour terminer, je souhaiterais poser deux questions plus techniques.
La première a trait à l'accompagnement social dans et vers le logement. Créé en 2011, le Fonds national d'accompagnement dans et vers le logement est compétent, depuis la loi de finances pour 2013, pour le financement d'actions d'accompagnement en faveur de toutes les personnes éprouvant des difficultés à accéder à un logement. Pourtant, le programme 177 prévoit de nouveau en 2014 de financer à hauteur de 4 millions d'euros de telles actions.
Madame la ministre, pouvez-vous expliquer pourquoi des actions d'accompagnement dans et vers le logement pourront être prises en charge en 2014, soit par le Fonds national, soit par le programme 177, sans que l'on sache précisément qui fait quoi ?
Ma seconde question est relative au Fonds de coopération pour la jeunesse et l'éducation populaire. Le programme 177 participe à l'animation des politiques d'insertion par le biais de ce dispositif qui finance des postes d'animateurs qualifiés. Or en 2011 la précédente majorité a décidé de diminuer drastiquement – de 50 % – les dotations pour ce dispositif pour une économie au final relativement modeste de moins de 5 millions d'euros. Cette baisse unilatérale a conduit à la suppression de postes et à la diminution du montant unitaire d'un poste. Désormais, les postes FONJEP financés sur le programme 163 « Jeunesse et vie associative » sont d'un montant supérieur – de l'ordre de 30 % – à ceux financés sur le programme 177, ce qui n'est ni juste ni compréhensible.
Madame la Ministre, ne pourrait-on pas réévaluer les dotations au FONJEP via le programme 177 pour revenir à des montants plus proches de ceux qui existaient avant 2011 ? L'enjeu financier est relativement limité – 4 ou 5 millions d'euros pour un programme de 1,3 milliard d'euros – compte tenu de la grande qualité du travail réalisé, notamment par les centres sociaux. Enfin, et ce pourrait être une raison supplémentaire pour que vous décidiez, madame la ministre, d’aller dans ce sens, les crédits supplémentaires pourraient être gagés par une suppression des crédits d'accompagnement dans et vers le logement évoqués précédemment.
Mme Cécile Duflot, ministre de l'égalité des territoires et du logement. Comme vous l’avez noté, le budget de la mission « Égalité des territoires, logement et ville » bénéficie, dans un contexte difficile, de financements renforcés : à périmètre constant, ce budget est en hausse de près de 100 millions d’euros. Cela démontre que le logement, l’égalité des territoires et les politiques de la ville sont des priorités pour le Gouvernement, et cela dans la durée.
Je remercie Mme Orlice d’avoir souligné que, pour la première fois depuis longtemps, nous avons répondu à la critique récurrente de la Cour des comptes concernant la sous-estimation des crédits de l’hébergement d’urgence. Aujourd’hui, ces crédits sont à la hauteur des besoins, même si nous devons faire face à une situation qui s’aggrave, notamment sur des territoires qui étaient auparavant peu concernés par des tensions dans ce domaine.
Monsieur Caresche, vous avez évoqué la question du ciblage des aides au logement et l’impact de la désindexation. Comme chacun peut le constater, le budget des aides au logement est en forte augmentation dans le PLF pour 2014. De fait, la difficulté sociale dans laquelle se trouvent un certain nombre de nos concitoyens les conduit à faire appel à cette aide qui se révèle pour eux décisive. Le rapport remis au printemps 2012 auquel vous avez fait référence démontre que les aides au logement sont un filet de sécurité absolument décisif pour lutter contre la pauvreté. Elles permettent notamment aux familles monoparentales – je pense en particulier aux femmes élevant seules leurs enfants – de continuer à se loger dignement. Nous avons donc décidé de consacrer les moyens nécessaires aux aides au logement. Il est vrai – je réponds également, à cet égard, à M. Goldberg – que nous avons fait le choix de la désindexation, mais son impact est limité pour les ménages, puisque, à situation identique, il n’y aura aucune diminution de l’aide par rapport à cette année. Cependant, comme vous le savez, tous les ministères doivent consentir un effort significatif. Nous avons choisi, pour notre part, de faire porter l’effort sur ce dispositif. Ainsi, l’impact est le plus limité possible. Cela nous permet également de ne pas amputer les aides et de déployer des budgets, notamment en faveur de la construction de logements sociaux de tous types.
À cet égard, nous avons pour objectif de financer 150 000 logements locatifs sociaux en 2014, conformément à l’engagement qu’a pris le Président de la République. Pour ce faire, nous utilisons les aides à la pierre, tout en faisant en sorte que la mobilisation exceptionnelle d’Action logement soit possible dans la durée, avec un équivalent en subventions de près de 1 milliard d’euros par an. Surtout, et je pense que cela contribue à répondre à la question de M. Caresche sur les fonds propres des organismes, un dispositif permet de mutualiser les fonds propres d’organismes différents.
Cette mesure est plus efficace dans la durée que la vente de patrimoine, même si celle-ci peut être utile, notamment dans le cadre de l’accession sociale à la propriété. Ce sont souvent les bailleurs devant faire face à davantage de demandes sur les secteurs les plus tendus qui ont besoin de fonds propres, alors qu’ils doivent continuer, dans le même temps, à disposer d’un patrimoine locatif. Il nous semble donc que le choix de la mutualisation des fonds propres disponibles des organismes, organisée au sein de la fédération des ESH, est une bonne solution. Le gouvernement précédent avait instauré le prélèvement sur le potentiel foncier des organismes, dont les conséquences en matière d’arbitrages financiers étaient assez négatives. Le présent dispositif permet, quant à lui, dès l’année 2014, de dégager 280 millions d’euros, soit un apport de fait en fonds propres aux organismes constructeurs de près de 1 300 euros pour chaque logement supplémentaire en zone tendue. Ce dispositif, s’il donne satisfaction – ce dont je ne doute pas – a également vocation à monter en puissance, de façon à ce que les fonds propres dormants des organismes qui n’ont pas besoin de construire sur certains territoires de notre pays puissent bénéficier à ceux qui, eux, doivent bâtir et sont en situation de tension.
Sur la question de l’hébergement d’urgence, au-delà de l’augmentation des crédits, vous avez été plusieurs à vous interroger sur la situation des déboutés du droit d’asile. Cette question s’inscrit naturellement dans le cadre de la réflexion sur la réforme du droit d’asile. Nous devons actuellement faire face à l’hébergement inconditionnel d’un certain nombre de personnes à qui leur statut et les droits afférents ne permettent pas d’avoir accès à un logement. Cela ne va pas, d’ailleurs, sans poser un certain nombre de questions, puisqu’il est à la fois juridiquement impossible de reloger ces familles et obligatoire de les héberger. La situation est donc évidemment difficile à gérer pour les organismes d’accueil. En même temps, c’est une réponse aux exigences posées par la loi. En effet, je vous rappelle que l’État a été régulièrement condamné pour non-respect de ses obligations en matière d’hébergement inconditionnel, lequel se comprend bien sûr au regard de la détresse de certaines familles.
Bref, une partie de la réponse réside dans la réforme du droit d’asile et une autre dans un hébergement spécifique. Cela dit, je crois assez juste de garder, pour l’hébergement inconditionnel, des lieux d’accueil inconditionnels. Il serait difficile de considérer qu’il y a des lieux d’hébergement spécifiques pour les déboutés du droit d’asile, lesquels, théoriquement, n’ont pas vocation à demeurer sur le territoire, quand bien même une partie d’entre eux le font et certains ne sont pas expulsa blés. Une fois encore, nous sommes dans un entre-deux complexe à gérer.
La gestion hôtelière, qui représentait 120 millions d’euros en 2013, constitue une source d’économies importantes sur le budget opérationnel de programme 177. Le dispositif représente un budget considérable. Or aucun accompagnement social n’est prévu, ce qui risque d’entraîner la précarisation des familles, avec des conséquences, notamment, sur la santé : on sait bien qu’une des questions principales, au-delà de leur scolarisation, est celle de l’alimentation des enfants hébergés en hôtels, car la situation dans laquelle ils se trouvent est très complexe.
Le choix du Gouvernement, annoncé par le Premier ministre lors de la conférence nationale contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale, est de sortir de la double gestion – à la fois hôtelière et au thermomètre –, ce qui va nous permettre de disposer des meilleures réponses possibles sur les différents territoires. En effet, madame Orlice, les solutions doivent être très variées, de l’hébergement d’urgence classique, sous forme de mise à l’abri – c’est parfois le seul recours – aux dispositifs plus pérennes impliquant des lieux d’accueil d’urgence, mais aussi – ce sera possible quand la loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové aura été votée – des logements mis à disposition par les organismes HLM, lesquels pourront se voir confier une mission d’hébergement. Cela permettra de donner de la souplesse et de favoriser la fluidité du parcours entre hébergement et logement. C’est la raison pour laquelle l’accompagnement dans et vers le logement sera poursuivi, ce qui est souvent déterminant pour que les bailleurs acceptent le relogement. Voilà pourquoi nous avons consacré une partie importante de nos crédits au budget opérationnel de programme 177, qui participe d’une politique d’hébergement satisfaisante, c'est-à-dire permettant le relogement au lieu de maintenir les personnes en question dans des lieux d’hébergement d’urgence.
En ce qui concerne le logement intermédiaire, la rédaction de l’ordonnance est en cours. Le projet de loi d’habilitation nous oblige à ce qu’elle soit signée avant le mois de mars. La concertation avec les différents partenaires commence et l’objectif est de procéder à la signature avant la fin de l’année. Comme vous l’avez noté, le logement intermédiaire, au-delà du cadre juridique dont nous allons désormais disposer, se verra affecter le cadre financier lui permettant de se déployer, notamment avec l’accès à la TVA intermédiaire au taux de 10 %. L’usage de la TVA à 5 % pour l’ensemble du logement social régi par le prêt social de location accession, dit PSLA, c'est-à-dire incluant l’accession sociale à la propriété, est un autre élément décisif de relance de la construction.
Sur la rénovation énergétique, vous le savez, des moyens importants sont consacrés au soutien à un plan très important de rénovation énergétique. Le logement collectif, notamment social, est concerné – avec des prêts à très bas consentis par la Caisse des dépôts et consignations pour l’écoper logement social, ce qui permettra d’engager un plan massif de rénovation thermique du logement social –, mais, au-delà, l’ensemble des ménages de notre pays a dès aujourd’hui accès à des dispositifs d’accompagnement et de financement simples et efficaces.
La question du tiers financement est toujours ouverte. Nous avons décidé, notamment par le vote d’un amendement dans le cadre de la loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, d’accompagner les collectivités locales qui se sont déjà mises en situation d’apporter une réponse de ce type. Le travail de la Caisse des dépôts et consignations sera lui aussi extrêmement utile pour que, une fois passée la phase d’amorçage du plan de rénovation thermique, le dispositif gagne en efficacité. En effet, le tiers financement n’est pas encore pleinement efficace. On a vu dans d’autres pays européens – je pense en particulier à la Grande-Bretagne –, que certaines limites peuvent exister. Quoi qu’il en soit, c’est un enjeu décisif pour atteindre l’objectif, fixé par le Président de la République, d’une diminution par deux de notre consommation énergétique d’ici à 2050.
Je tiens enfin à souligner, comme le président Brottes, le lien qui existe entre le travail sur la loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové – laquelle vise à réformer en profondeur un certain nombre de mécanismes relatifs au logement et à l’urbanisme, tout en apportant une réponse à la situation d’urgence que connaît le secteur de la construction – et le plan visant à construire 500 000 logements par an que nous allons bientôt lancer avec l’ensemble de la profession. Depuis maintenant un an, un comité de pilotage se réunit tous les mois, sous ma présidence : avec l’ensemble des professionnels, nous travaillons sur tous les sujets qui, sans nécessiter forcément un travail législatif, supposent la mobilisation de tous.
À ce titre, la pause en matière normative annoncée par le Président de la République le 21 mars dernier est utile pour que nous travaillions sur un enjeu qui est lui aussi décisif et qui aura des conséquences, non seulement en matière de construction, mais aussi, d’une manière plus globale, sur le budget de l’État : la baisse des coûts de construction. Je rappelle que le lancement de la construction d’un logement équivaut à deux emplois. Nous sommes, à cet égard, dans une situation différente d’autres pays européens et nous pouvons avancer dans ce domaine. Si nous parvenons tous, collectivement, à nous mobiliser sur ce sujet, un meilleur usage sera fait de l’argent consacré à la construction de logements sociaux. En effet, en diminuant le coût de construction, nous arriverons, avec le même budget, à construire davantage de logements.
Telles sont, en résumé, les ambitions du Gouvernement, qui sont très fortes en matière de logement et s’accompagnent d’un travail sur les structures. Comme l’a indiqué M. Baert, le rapprochement entre l’ACSé et le SG-CIV précède le travail sur le Commissariat général à l’égalité des territoires, qui a vocation à aborder de manière globale ces différentes politiques. François Lamy vous répondra de façon plus détaillée, au-delà des aspects législatifs, sur les moyens que nous accordons à la politique de la ville dans le cadre du projet de loi de finances pour 2014.
M. François Lamy, ministre délégué chargé de la ville. Le budget de la politique de la ville est stable, ce qui nous permettra de reconduire l’intégralité des crédits d’intervention de l’ACSé, destinés au monde associatif et aux actions menées avec les collectivités dans le cadre des contrats urbains de cohésion sociale. Nous poursuivons le rééquilibrage opéré l’année dernière à destination de certains départements en grande difficulté – j’avais ainsi augmenté les crédits des Bouches-du-Rhône, de la Seine-Saint-Denis, du Nord et du Pas-de-Calais. Cet effort sera poursuivi en 2014 et étendu aux départements dont on a pu constater, avec les premières simulations de la nouvelle géographie prioritaire, qu’ils concentraient eux aussi une grande pauvreté. Je pense, entre autres, au Vaucluse et à quatre des cinq départements de la région Languedoc-Roussillon, à savoir l’Hérault, l’Aude, les Pyrénées-Orientales et le Gard.
Le rapprochement entre le SGCIV et l’ACSé est en cours. Au côté de M. Delzant, chargé de la préfiguration du CGET, M. Raphaël Le Méhauté est chargé de la politique de la ville. La fusion devrait être réalisée au printemps 2014, après une étude des missions et des moyens pouvant être mis en commun, ce qui suppose naturellement de discuter avec les personnels et leurs représentants. Quoi qu’il en soit, la disparition de l’ACSé interviendra le 1er janvier 2015 et il importe de ne pas empêcher les versements des crédits au monde associatif. Cela dit, les choses se passent plutôt bien. En ce qui concerne l lieu d’implantation du CGET, nous sommes en train d’y réfléchir. Je ne sais pas si nous pourrons satisfaire entièrement le souhait, exprimé par l’un des rapporteurs, d’installer cet établissement dans une zone en difficulté, dans la mesure où l’égalité des territoires concerne la banlieue en difficulté et le territoire rural et qu’il serait difficile d’associer les deux. Nous nous efforcerons avant tout de trouver un lieu permettant d’accueillir l’ensemble des services et le plus adapté possible au travail des personnels.
S’agissant du financement de l’ANRU et du plan national de rénovation urbaine, nos chiffres ne sont pas les mêmes, mais le ministère a encore des efforts à faire sur la réponse au questionnaire budgétaire pour faciliter le travail des rapporteurs. Les recettes de l’ANRU en 2013 avoisinaient 1 milliard d’euros, ce qui est assez compréhensible puisque les décaissements se font en fonction de l’avancement des opérations. Nous devrions retrouver le même montant en 2014, avec 900 millions d’euros provenant de l’UESL, 30 millions de la Caisse de garantie du logement locatif social, le reste étant financé par une partie du produit de la taxation des plus-values immobilières – la taxe « Eckert », votée l’an dernier en loi de finances – et par la Caisse des dépôts. La trésorerie, fin 2015, ne s’élèvera donc pas à 2 millions d’euros, comme vous l’indiquiez, mais à 100 millions d’euros.
Effectivement, le ministère de la ville a participé à l’effort de réduction des déficits souhaité par le Président de la République et le Premier ministre. Cette régulation s’est effectuée sur l’ensemble des programmes. Toutefois, j’ai tenu à ce que les crédits d’intervention consacrés au monde associatif de proximité, durement touchés sous la précédente législature, soient préservés. Dans le courant de l’année, nous avons même été en mesure de répondre à toutes les demandes émanant du monde associatif, plus particulièrement lors des vacances, moment difficile pour les populations qui ne partent pas.
Vous avez fait référence au rapport de MM. Sordi et Jibrayel sur les zones franches urbaines, une contribution au débat sur ce dispositif dont le précédent gouvernement avait annoncé la disparition fin 2014. Un rapport, que j’ai commandé au Conseil économique, social et environnemental, me sera remis d’ici le mois de janvier. Je dispose encore de quelques mois pour décider, avec Bernard Cazeneuve, de la mise en place éventuelle d’un dispositif de remplacement.
Si, dans certains territoires, les ZFU ont bien fonctionné, permettant de créer des emplois dans les quartiers et de soutenir le développement économique, cela n’a pas été le cas partout. Comme l’ont souligné MM. Sordi et Jibrayel, des effets d’aubaine sont apparus, les professions libérales ont afflué et d’aucuns ont pu parler d’effet « boîte aux lettres ».
Si dispositif de remplacement il devait y avoir, il nécessiterait de travailler sur les facteurs d’installation d’une entreprise sur un territoire prioritaire : lorsqu’un quartier n’est pas sécurisé, lorsqu’il demeure enclavé, lorsque l’espace public n’est pas de qualité et lorsque les salariés ne peuvent trouver à se loger, les entreprises, quelles que soient les exonérations dont elles pourraient disposer, ne s’installent pas. Il faudra donc renforcer les obligations et réfléchir à un dispositif de soutien aux commerces de proximité, qui jouent un rôle de lien social très important et parfois même, de service public.
Sur les emplois francs, je répondrai positivement à votre demande. Nous examinons avec Michel Sapin comment assouplir les règles permettant à un jeune d’accéder à un emploi franc. Actuellement, l’obligation de justifier d’une recherche d’emploi d’une durée de douze mois ne prend pas en compte les périodes d’intérim ou de stage, qui sont souvent le lot commun de ces publics. Latitude sera laissée aux préfets de sortir des périmètres des actuelles zones urbaines sensibles – les ZUS – pour se rapprocher de la future géographie prioritaire, dont les critères seront un jour adoptés par le Parlement. On peut imaginer que les préfets étendent ainsi le dispositif aux contrats urbains de cohésion sociale de priorité 1, de façon à éviter tout effet de seuil ou « effet de trottoir ».
M. Pupponi m’a interrogé sur les adultes-relais. Nous aurons la capacité de financer les 500 postes supplémentaires annoncés par le Président de la République lors de son déplacement à Auch début août. S’ajoutant aux 3 500 postes existants, ces adultes-relais auront trois missions : détecter les jeunes hors de tout dispositif, qui pourraient pourtant prétendre aux emplois francs ou aux emplois d’avenir, mener des actions de tranquillité publique et agir sur la participation citoyenne, en préfiguration de ce qui est annoncé dans le projet de loi de programmation « ville et cohésion urbaine ».
Les 335 millions d’euros du programme Investissements d’avenir permettront à l’ANRU de répondre aux surcoûts qu’entraînent les exigences environnementales dans les opérations de rénovation urbaine et de participer, sur ses fonds propres, à tout ce qui a trait au développement économique, création de pépinières d’entreprises ou soutien à l’activité commerciale par exemple.
M. Dominique Baert, rapporteur spécial. Monsieur le ministre, vous avez répondu sur le financement de l’ANRU pour les années 2014 et 2015, mais j’avais posé une question complémentaire sur le stock, sur la nature de l’impasse financière de l’ANRU : ses capitaux propres sont négatifs de 2,445 milliards d’euros, nonobstant une trésorerie de 472 millions d’euros fin 2012. C’est une réalité financière qu’il faut prendre en considération. L’ANRU pourra-t-elle sortir de cette impasse avec le temps ?
M. le président Gilles Carrez. Monsieur le ministre, pouvez-vous répondre à cette question importante, qui porte sur la différence entre les engagements et les moyens financiers identifiés à ce jour, ce que l’on appelle la « bosse » de l’ANRU ?
M. François Lamy, ministre délégué chargé de la ville. Il n’y a pas d’impasse ou de difficulté de l’ANRU en la matière. Il s’agit d’une simple question de trésorerie. Je vous transmettrai tous les chiffres.
M. le président Gilles Carrez. Il faudra vous mettre d’accord, car vous ne semblez pas avoir la même appréciation de cet écart.
Je vais maintenant donner la parole aux porte-parole des groupes.
Mme Annick Lepetit, pour le groupe SRC. Je tiens d’abord à souligner l’augmentation globale du budget du logement. Les autorisations d'engagement dépassent les 8,2 milliards d’euros, soit près de 2,4 % de hausse par rapport à 2013. En cette période difficile, où la contrainte budgétaire est particulièrement forte, ce chiffre est la traduction financière de la volonté politique forte et assumée qui nous anime : le logement est une priorité pour le Gouvernement et la majorité.
Ce budget est d'ailleurs une étape de plus dans la refondation globale de la politique du logement. Il est en cohérence avec les mesures législatives et réglementaires prises depuis plusieurs mois : loi relative à la mobilisation du foncier, pour accroître la production de logements sociaux, loi habilitant le Gouvernement à procéder par ordonnances, pour simplifier les procédures et faciliter la construction de logements, ou encore projet de loi « ALUR » pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, que nous examinerons bientôt en deuxième lecture.
Ces ressources supplémentaires bénéficient tout particulièrement à l'hébergement et à l'accès au logement des personnes sans abri. Les 111 millions d’euros supplémentaires affectés aux moyens d'intervention pour répondre aux situations de vulnérabilité sont à mettre en rapport avec le renforcement du rôle des systèmes intégrés d’accueil et d’orientation – SIAO –, prévu par le projet de loi ALUR.
Cette politique est l'application concrète du plan pluriannuel de lutte contre la pauvreté et pour l'inclusion sociale, adopté en janvier. La lutte contre l'habitat indigne et le traitement des copropriétés dégradées font également partie des domaines dans lesquels les efforts se poursuivront en 2014.
Si le montant des aides à la pierre est inférieur de 50 millions d’euros à celui de l'année dernière, il doit être replacé dans la politique globale. Il faut ainsi y ajouter les 950 millions d’euros de la contribution d'Action Logement et, surtout, l’abaissement de la TVA sur la construction de logements sociaux à 5,5 %, soit près de 400 millions d’euros supplémentaires pour loger les classes moyennes et populaires.
Je tiens d'ailleurs à souligner qu’un amendement socialiste, adopté dans la première partie du projet de loi de finances pour 2014, étend ce taux réduit de TVA aux travaux d'amélioration de la performance énergétique des logements de plus de deux ans.
Je terminerai en saluant le budget de la politique de la ville, qui a été préservé cette année encore avec 492 millions d’euros d'autorisations d'engagement. La sanctuarisation des crédits d'intervention de l'ACSé est une bonne chose, puisqu'ils bénéficient à 7 000 associations qui agissent directement dans les quartiers pour la cohésion sociale. L'autre grand pôle est l'emploi et le développement économique : 5 000 emplois francs seront ainsi financés en 2014 pour des jeunes issus de quarante agglomérations.
Mais la politique de la ville ne se limite pas à ces chiffres, car elle est par nature interministérielle. Pour en avoir une vision globale, il faut également prendre en compte les créations de postes d'enseignants, fléchés sur les quartiers les plus en difficulté, les milliers d'emplois d'avenir financés en priorité dans ces villes, le renforcement des services publics, qui permettent à l'État de reprendre pied dans des zones qu'il a malheureusement abandonnées les années passées.
Étant donné la situation financière de notre pays, les impératifs de réduction de la dépense publique et le besoin de combler les dettes abyssales que nous a léguées la majorité précédente, les budgets pour le logement et la politique de la ville sont le meilleur équilibre qu'il était possible de trouver entre financement des priorités et contrôle de la dépense. C'est pourquoi les députés socialistes les soutiendront et les voteront.
M. Jacques Alain Bénisti, pour le groupe UMP. Avec une stagnation de ses crédits, mais toujours en baisse importante par rapport à 2012, la mission aurait dû s’appeler « renforcement des inégalité des territoires ». (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Vous creusez encore un peu plus un déséquilibre chronique et vous mettez en grande difficulté les quelques collectivités qui ont pour noble mission d’accueillir les populations en grande précarité. Ces collectivités n’ont plus les moyens d’assumer ce sacerdoce, puisque vous diminuez leur DGF tout en les accablant de nouvelles missions, comme la réforme des rythmes scolaires, l’accueil des sans-logis ou l’obligation d’insérer des demandeurs DALO dans leurs quartiers sensibles, accentuant un peu plus la création de ghettos, désormais ingérables.
En diminuant les crédits de la politique de la ville – 540 millions d’euros en 2012, 492 millions en 2014 –, vous enfoncez un peu plus les collectivités pauvres, vous freinez la volonté de certains ménages d’accéder à un logement, faisant passer la TVA à 10 % pour la construction PLS, vous baissez les crédits relatifs à l’habitat indigne, alors même que votre gouvernement s’était engagé de faire de ce sujet une priorité dans le cadre du projet de loi ALUR.
Êtes-vous conscients que ces baisses auront des effets catastrophiques sur les collectivités les plus pauvres, d’autant que les villes classées entre la 350e et la 600e place des dotations de DSU – dotation de solidarité urbaine – n’auront plus aucun soutien pour mener à bien leur politique de la ville ? De la même manière, ces villes sont contraintes d’avancer les fonds nécessaires à leur PRU – projet de rénovation urbaine –, donc d’emprunter, tant les crédits manquent. Il faut ajouter à cela le dessaisissement des attributions de logement – le projet des créations de métropoles retire aux villes la compétence du logement –, qui accentue un peu plus l’iniquité du système : des foyers venant de départements voisins, ayant formulé leur demande depuis quelques mois seulement, passent devant des familles qui attendent depuis cinq ou six ans.
De plus, vous continuez à concentrer les logements sociaux dans des villes qui dépassent déjà largement les 30 %, en épargnant toujours celles qui n’en ont pas.
L’encadrement des loyers, la garantie universelle des loyers, le déséquilibre des relations bailleurs-locataires que vous instaurez, sans parler des allers-retours incohérents sur la TVA, sont des mesures de nature à dissuader les investisseurs et les particuliers. Vous accentuerez ainsi la crise du logement, qui s’ajoute à la pénurie d’emplois et touche en priorité les quartiers sensibles et les villes pauvres.
Madame la ministre, quand prendrez-vous les mesures qui s’imposent ? Quand présenterez-vous un plan de lutte contre les inégalités territoriales et une politique de la ville digne de ce nom, à même de prévoir la distribution des richesses dans un territoire ? Ou bien concédez-vous que les belles promesses du candidat Hollande n’étaient qu’une manière de se faire élire ?
M. Thierry Benoit, pour le groupe UDI. Madame la ministre, chacun de nous sait que vous êtes une pragmatique. Je suis convaincu que vous vous êtes battue, comme le ministre de la ville, pour que le périmètre de votre ministère conserve les crédits nécessaires à une action ambitieuse.
Compte tenu du contexte, je suis convaincu aussi que, malgré les crédits affichés, et sincères, je n’en doute pas, vous allez devoir faire mieux avec moins d’argent. Ce sera plus difficile encore en 2015. N’est-il pas de votre responsabilité de proposer un big bang, qui redéfinirait les rôles et les missions de chacun dans le domaine du logement ?
Entre les politiques et les opérateurs, ne serait-il pas nécessaire de proposer une remise à plat afin d’utiliser au mieux chaque euro pour atteindre les objectifs que vous vous êtes fixés ? M. Benisti évoquait l’inégalité des territoires. En effet, depuis une trentaine d’année, quels que soient les Gouvernements qui se sont succédés aux affaires, les inégalités en matière de logement n’ont cessé de se creuser entre tous les territoires, qu’il s’agisse de Nantes, de Toulouse, de Drancy, de Limoges, d’Aime ou de Fougères.
Une politique est aujourd’hui spécifiquement dédiée au domaine urbain, suivie par l’ANRU. Allez-vous mettre en place un dispositif équivalent pour les territoires ruraux en déprise ? Beaucoup de nos régions accueillent de nouvelles populations, lesquelles se concentrent sur des pôles que vous avez certainement identifiés puisque vous êtes aux affaires depuis dix-huit mois. Que proposez-vous pour répartir l’accueil de ces nouvelles populations sur l’ensemble du territoire national ?
S’agissant de l’énergie, une question grave se pose : quel accès aux énergies, au sens large, sur les territoires peu densément peuplés, pour l’habitat mais aussi les entreprises qui souhaitent s’installer en milieu rural ? Quelles sont vos propositions ? De surcroît, la politique que vous menez, madame la ministre, s’articule-t-elle avec celle d’autres ministères ? Il n’y a pas si longtemps, la politique du logement était intégrée au sein d’un grand ministère, celui du développement durable, qui avait également en charge les problèmes de l’énergie. Ma réflexion est valable aussi pour d’autres sujets comme la mobilité ou Internet.
Enfin, je suis très sensible à la question du taux réduit de TVA sur les activités du développement durable, l’écoconstruction. Avez-vous chiffré la proposition de Jean-Louis Borloo et de quelques-uns du groupe UDI de généraliser un taux réduit sur un temps défini – deux ou trois ans – en matière de logement, pour soutenir la construction de logements, l’emploi et un certain nombre de secteurs d’activité comme les travaux publics ou les artisans du bâtiment ?
Pour ce qui concerne plus spécifiquement la politique de la ville, c’est Francis Vercamer qui, au sein de notre groupe, interviendra.
Mme Michèle Bonneton, pour le groupe écologiste. Depuis l’examen du précédent projet de loi de finances, notre pays s’est doté d’une série de mesures importantes et ambitieuses dans le domaine du logement et de l’aménagement du territoire. Nous voici à présent dotés d’une grande partie des outils qui nous permettront de relancer la construction et d’accélérer les réalisations.
En plus de la baisse de la TVA à 5,5% pour la construction des logements sociaux et les opérations de rénovation énergétique, le budget de la mission « Égalité des territoires, logement et ville », progresse d’un peu plus de 1 %, ce qui n’est pas négligeable dans un contexte de contraction des finances de l’État. Madame la ministre, pourriez-vous nous rappeler comment cette hausse a-t-elle été possible ? J’ai bien noté par ailleurs que vous étiez déterminée à faire construire 500 000 logements par an, dont 150 000 logements sociaux.
Les moyens alloués au logement social ont nettement augmenté, grâce notamment à un emprunt d’un milliard d’euros pour les trois prochaines années, ce qui permettra de doubler la somme affectée à Action Logement, qui passe ainsi à 950 millions d’euros. Comment comptez-vous pérenniser ces moyens sur le plus long terme ?
Alors que le coût de l’énergie augmente et que le climat est en pleine mutation, la qualité de l’isolation et de la rénovation énergétique des logements existants et du neuf est une autre priorité. Pouvez-vous rappeler les objectifs tant en termes de moyens que de nombre de logements concernés par la rénovation énergétique ?
Quant à la politique territoriale, plusieurs actions sont prévues dans ce programme, notamment pour soutenir les territoires ruraux et les quartiers en difficulté, où les habitants accèdent de plus en plus difficilement aux services publics et aux services de santé. L’on peut déplorer que certains services de l’État s’en éloignent, comme les directions départementales des territoires, que d’autres disparaissent, comme l’ATESAT – Aide technique de l’État pour raison de solidarité et d’aménagement du territoire – en janvier prochain, que d’autres encore ne soient plus capables de rendre les mêmes services, à l’image du CEREMA – Centre d’études et d’expertises sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement – sans parler des aménagements souvent différés, en particulier l’accès au très haut débit pour les communications Internet.
Pouvez-vous rappeler, madame la ministre, les objectifs de la lutte contre les inégalités spatiales, aussi bien en milieu urbain que rural, revenir sur la création de mille maisons de services au public dont se chargera la DATAR avec un budget de plus de 250 millions, ainsi que sur le contenu de la révision du zonage pour mieux cibler les territoires dont les besoins sont les plus importants ? Je vous remercie.
Mme Dominique Orliac, pour le groupe RRDP. Je voudrais aborder deux sujets qui me paraissent essentiels, madame la ministre.
Tout d’abord, faut-il mettre fin à la saisonnalité de l’hébergement des personnes sans abri, sachant que les besoins en places d’hébergement ne sont pas moindres en été et que cette gestion irrégulière est contreproductive en termes d’insertion en ce qu’elle nuit à la continuité de la prise en charge ? Que comptez-vous faire pour la prochaine saison ?
S’agissant par ailleurs des centres sociaux, qui réalisent un travail d’insertion remarquable, les dotations, via le programme 177, pourraient se retrouver à un niveau proche de celui que nous avons connu avant 2011. L’enjeu financier n’étant pas considérable, il serait peut-être important de leur donner les moyens nécessaires à la réalisation de leur mission, en leur accordant 4 à 5 millions d’euros supplémentaires sur un programme total de 1,3 milliard. Ce serait une excellente mesure pour les quartiers.
M. André Chassaigne, pour le groupe GDR. Je voulais tout d’abord m’arrêter aux mots, aux verbes, voire aux envolées lyriques, mais j’ai sorti mon couteau de Thiers et j’ai gratté. J’ai trouvé des chiffres ! Le premier est celui des objectifs : construire 500 000 logements par an, dont 150 000 sociaux. Or, cette ambition devrait se réduire à 102 000 logements sociaux agréés en 2013, ce qui représente, soyons honnêtes, une petite progression de 5 % par rapport à 2012.
Les chiffres, ce sont encore les besoins de financement, et j’ai fait six constats.
Premier constat : le taux de TVA portant sur les opérations de construction et de rénovation des logements sociaux et les opérations d’accession à la propriété pour les ménages modestes est relevé à 5,5 %, ce qui représente une ponction de 80 millions d’euros sur le mouvement HLM – en Auvergne, 1,16 millions pour les quinze bailleurs qui ont investi 233 millions d’euros en 2012. À quoi sera destinée cette ponction ? À financer le CICE, cadeau au patronat d’un montant de 20 milliards compensé par une hausse de l’impôt le plus injuste, la TVA.
Deuxième constat : baisse des aides à la pierre. Les acteurs du logement sont également indignés par la diminution de 20% des aides à la construction des logements sociaux actée par ce budget. L’Union sociale pour l’habitat dénonce une diminution de 50 millions d’euros des aides à la pierre : 450 millions contre 500 en 2013, soit un trou de 10 %. Si je fais le calcul, entre la TVA et les aides à la pierre, les aides budgétaires à la construction de logements sociaux baissent de 20 % !
Troisième constat : gel des aides au logement. Les assauts contre le pouvoir d’achat populaire continuent ! Ainsi, les aides au logement seront gelées en 2014, du fait de la désindexation, ce qui est très préoccupant pour des milliers de ménages déjà étranglés financièrement. Faut-il rappeler que ces aides ciblent les personnes dont les revenus sont les plus faibles ainsi que les étudiants ! En moyenne, les bénéficiaires reçoivent 212 euros par mois, ce qui en fait la prestation la plus importante pour les ménages modestes. Si le Gouvernement avait poursuivi la revalorisation habituelle, il aurait dû dégager 350 millions d’euros supplémentaires quand il n’en prévoit, dans ce budget, que 173. C’est donc une économie de 177 millions d’euros qui est réalisée sur le dos des ménages et du pouvoir d’achat.
Quatrième constat : nouveau prélèvement sur la caisse de garantie du logement locatif social. La commission des finances a introduit un prélèvement de 78 millions d’euros sur le fonds de roulement de la CGLLS en 2014. Permettez-moi de vous citer Jean-Louis Dumont, président de l’USH : « C’est un très mauvais signal, décidé sans concertation, qui rappelle l’instauration par le précédent Gouvernement en 2011 du prélèvement arbitraire sur le potentiel financier des organismes HLM. »
Cinquième constat : poursuite de la RGPP. Les effectifs du ministère de l’égalité des territoires et du logement seront amputés de 681 postes avec, il est vrai, la création de 16 postes dans ses établissements publics, mais la suppression de 697 postes dans les services de l’État.
Sixième constat, « fric-frac » du livret A. Cet été, les banquiers ont obtenu, à l’issue de leur rencontre avec François Hollande, de pouvoir garder pour eux une partie des sommes collectées par l’intermédiaire du livret A et non de les remettre à la Caisse des dépôts. Entre 25 et 30 milliards d’euros seraient concernés. Or, ces sommes permettent à la CDC de financer la construction de logement social grâce à des prêts à très long terme. Offrir ces sommes à la finance, c’est encourager la spéculation aux dépens du logement social. Pourquoi relever le plafond du livret A – mesure que nous avons votée avec enthousiasme – si c’est pour livrer cette manne non à des causes utiles et constructives mais à la voracité de certains banquiers ?
Au total, ce budget marque une baisse de 20 % des aides budgétaires à la production de logement social. Mes propos vont paraîtront peut-être durs, mais ce sont simplement des constats qui s’appuient sur des chiffres. Je me suis contenté, pour l’essentiel, de me faire le porte-voix de la mobilisation des organismes HLM.
Mme Cécile Duflot, ministre de l’égalité des territoires et du logement. M. Chassaigne et Mme Lepetit se sont appuyés tous deux sur les mêmes chiffres, qu’ils ont traduits différemment cependant.
Monsieur Chassaigne, s’agissant du financement du logement et des efforts réalisés sur cette mission, nous sommes à 100 millions de plus. Vous pourrez tourner les chiffres dans tous les sens, la réalité est bien celle d’un effort significatif.
S’agissant du travail en faveur de l’hébergement, Mme Lepetit a eu raison de souligner l’effort considérable que nous avons consenti et qui vise en effet, madame Orliac, à répondre à la question de la saisonnalité, en sortant de la gestion « au thermomètre » qui n’était pas sans poser problème. Quand des gens sont hébergés six mois durant, puis remis à la rue, ils reviennent dans un état encore plus dégradé, ce qui anéantit les efforts, en termes budgétaires et d’accompagnement social, consacrés à ce dispositif qui n’a pas fait ses preuves.
Monsieur Benisti, je ne répondrai pas à la polémique que vous soulevez, mais je vous signalerai simplement que, s’agissant des crédits alloués à l’habitat indigne, votre argumentation est fausse puisque les crédits de l’ANAH, principalement destinés au financement de la lutte contre l’habitat indigne et de la remise en état des copropriétés, augmentent d’environ 30 millions d’euros entre 2013 et 2014, les crédits de 2013 étant stables par rapport à 2012 : 176 millions en 2014 contre 131 millions en 2013. La situation est claire : cette priorité se traduit financièrement mais aussi, M. Goldberg l’a souligné, dans les propositions du projet de loi ALUR, très utiles pour l’ensemble des élus qui doivent notamment affronter la prolifération des marchands de sommeil.
Monsieur Benoit, vous avez posé la question d’un taux réduit de TVA sur l’ensemble du logement. Elle peut en effet se poser mais l’effort du Gouvernement, que vous ne pouvez nier, de ramener le taux de TVA de 7 % à 5,5 %, est réellement significatif. Nous avons ciblé cette mesure sur le logement social et la rénovation thermique grâce à un amendement présenté par différents groupes et adopté dans le cadre du PLF, qui vise à déployer, dans un contexte budgétaire contraint, des moyens importants sur ce secteur dont le Gouvernement a fait sa priorité.
Madame Bonneton, vous avez évoqué un certain nombre de sujets, notamment les questions de ZRR et de DATAR, qui font l’objet du programme 112 que nous examinerons demain. Je puis cependant vous assurer d’ores et déjà que les efforts sont maintenus et que, concernant la révision des zonages, qui ne change pas les moyens d’intervention, nous avons déjà travaillé en lien avec l’ensemble des associations d’élus. La discussion se poursuit, tant sur le zonage des ZRR que sur celui du dispositif d’incitation fiscale.
Pour ce qui est de l’augmentation de la mission et des moyens qui la permettent, ce sont évidemment ceux décidés dans le cadre du budget général, où la priorité a été accordée à ce secteur. Secteur essentiel pour la vie de nos concitoyens, le logement est aujourd’hui l’un des principaux postes de dépenses et l’une des plus grandes inquiétudes de ceux qui sont confrontés à des difficultés sociales.
Madame Orliac, vous avez eu raison de me rappeler à l’ordre sur la question du FONJEP. Le ministère finance le FONJEP mais il n’est pas le seul à le faire, puisqu’il faut tenir compte, outre le programme 177, du programme 163, le FONJEP étant également cofinancé au niveau local.
Les centres sociaux sont des dispositifs très utiles, dont l’action sociale de proximité très décloisonnée s’adresse à tous les publics, d’où l’idée d’un financement émanant de différents programmes et d’un effet de levier permettant de mobiliser aussi des financements complémentaires sur le plan local, ces projets étant tout d’abord portés localement. Tel est le sens de l’action du Gouvernement.
Les services déconcentrés sont mobilisés pour travailler sur la répartition locale de ces enveloppes et leur trouver la plus grande utilité. Si ces fonds n’augmentent pas, ils ne diminuent pas non plus puisqu’ils se répartissent sur l’ensemble de ces programmes.
A vous entendre, monsieur Chassaigne, on croirait que la priorité accordée au logement ne se traduit pas dans les faits ; en réalité, si. La diminution de 50 millions d’euros que subissent dans le budget de l’État les aides à la pierre est en effet surcompensée par la prime des fonds d’épargne – une aide supplémentaire de 120 millions qui sera versée jusqu’à la fin mars 2014 et dont le montant est très élevé – ainsi que par le passage du taux de TVA de 7 % à 5,5 % – qui permettra de consacrer 400 millions à la construction et 600 millions à la rénovation thermique, soit un effort total considérable d’un milliard d’euros – et enfin par la mobilisation d’Action Logement pour plus de 450 millions, élément décisif pour le financement des opérations de construction, de même que la baisse du taux du livret A qui permet de dégager des moyens financiers supplémentaires.
J’en viens à l’usage d’une partie des fonds d’épargne à destination des banques. Le Gouvernement s’est engagé en toute clarté à ce que le logement social et certaines missions pour lesquelles ces fonds sont décisifs – comme l’investissement de 26 milliards d’euros prévu par l’accord entre l’État et la région pour financer la Société du Grand Paris – soient absolument prioritaires ; ce n’est que de manière subsidiaire que les fonds d’épargne peuvent être alloués aux banques pour financer l’investissement productif. La part de ces fonds consacrée au logement n’est donc nullement amputée, d’autant qu’elle est abondée par l’augmentation de la collecte du livret A.
La réforme en cours de l’ATESAT, madame Bonneton, est un sujet complexe : il s’agit de maintenir une mission d’appui – de caractère résiduel – établie en 1982 afin d’aider les collectivités territoriales à exercer leur compétence en matière de droit des sols. Le Gouvernement a décidé de recentrer cette mission en faveur des plus petites collectivités pour favoriser la transition en incitant les autres collectivités à exercer pleinement leurs compétences relatives à l’instruction des documents d’urbanisme. Cela étant dit, 450 emplois nouveaux seront exclusivement consacrés à cette mission ; certains d’entre eux seront pourvus par des agents précédemment affectés aux missions de l’ATESAT. Nous avons également prévu des mesures d’accompagnement qui permettront aux collectivités locales de recruter des agents pour exercer les missions actuellement accomplies par des fonctionnaires d’État. Ceux-ci auront priorité pour prendre des postes vacants correspondant à leur grade, à niveau égal de rémunération, y compris indemnitaire, et aucune mobilité géographique ne sera imposée. Si une collectivité souhaite que soit détaché auprès d’elle l’un de ces agents, l’État remboursera pendant deux ans le surcoût lié à la différence des taux de cotisation entre les fonctions publiques afin de ne pas empêcher de tels recrutements, parfois souhaités tant par l’agent que par la collectivité. Je le répète donc : toutes les mesures d’accompagnement nécessaires ont été prises pour que cette réforme ait lieu dans le plus grand respect des agents – respect qui n’avait pas été de mise en d’autres temps, lorsque la réforme, non assumée sur le fond, avait entraîné la suppression de nombreux postes et contraint les agents à exercer les mêmes missions avec des moyens considérablement réduits.
M. François Lamy, ministre délégué chargé de la ville. Je remercie Mme Lepetit et d’autres membres du groupe socialiste d’avoir rappelé que les crédits de la politique de la ville sont sanctuarisés en dépit d’un contexte budgétaire très contraint. Au contraire, M. Benisti aurait-il donc hiberné pendant cinq ans pour tenir des propos aussi datés et peu nuancés ? (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Par rapport à leur niveau de 2012, les crédits de la politique de la ville sont stables en 2013 et le resteront en 2014, alors qu’ils avaient baissé de plus de 30 % au cours des cinq années précédentes.
Le budget actuel sanctuarise les crédits d’intervention des associations et des collectivités ; il permettra d’augmenter le nombre d’emplois francs et de créer 500 nouveaux postes d’adultes-relais, portant ainsi à plus de 4 000 leur nombre total.
S’agissant des territoires ruraux, monsieur Benoit, la réforme des zonages prévue dans le projet de loi sur la ville dont votre assemblée se saisira en novembre adopte une méthodologie qui permettra d’intégrer des zones urbaines situées en territoire rural. Je pense par exemple à Auch, à Guéret ou encore à Villeneuve-sur-Lot, autant de villes moyennes qui irriguent leurs territoires et qui pourront désormais bénéficier des différents dispositifs liés à la politique de la ville, y compris les mécanismes de contractualisation et de mobilisation de droit commun.
M. le président François Brottes. Avant de donner la parole à ceux de nos collègues qui le souhaitent, je tiens à préciser au président Chassaigne que l’affectation d’une partie des fonds d’épargne aux banques locales et régionales était une impérieuse nécessité pour permettre aux établissements concernés de débloquer des moyens en faveur de l’économie réelle dans le respect des ratios imposés en matière de fonds propres, en évitant qu’elles n’aient plus la capacité de prêter. Il fallait en effet trouver un juste équilibre entre le logement social et l’économie locale mais, en tout état de cause, ces fonds n’ont nullement été consacrés à des activités de spéculation.
M. Philippe Kemel. Le budget de la politique de la ville s’inscrit dans la continuité de l’effort de rééquilibrage qui a été consenti en faveur des territoires pauvres, comme je peux en témoigner comme élu du Pas-de-Calais. Ma question porte plus particulièrement sur le financement des actions aidées par l’ACSé concernant l’insertion des jeunes sans emploi et sans qualification, dont les parcours de désocialisation posent de nombreuses difficultés dans ces territoires.
Étant interministérielle, la politique de la ville doit permettre de combiner les financements des emplois d’avenir avec ceux des aides aux secteurs difficiles. Or, la mise en œuvre de vos politiques se heurte souvent au problème du croisement des financements. Serait-il par exemple possible de faire en sorte que les emplois francs, lorsqu’ils concernent des personnes qui peinent à se resocialiser, soient combinés avec des emplois aidés ? De manière plus générale, comment mettre en pratique le caractère interministériel de la politique de la ville afin de garantir la complémentarité des budgets ?
M. Jean-Claude Mathis. La future garantie universelle des loyers doit entrer en vigueur le 1er janvier 2016, mais ses modalités et son coût restent à préciser. Destinée à sécuriser le risque d’impayé et à faciliter l’accès au logement, cette garantie universelle des loyers devrait se substituer à la garantie du risque locatif et aux garanties de loyers impayés proposées par les assureurs privés. Un temps évoqué, le financement par une taxe sur les revenus locatifs acquittée à parts égales par les bailleurs et les locataires et ne dépassant pas 1,5 à 2 % du loyer annuel, n’a pas été confirmé, les modalités d’application de ce dispositif ayant été renvoyées à un décret. Il va de soi qu’un tel mécanisme présente un risque financier particulièrement lourd pour l’État, de l’ordre de deux milliards d’euros par an. En outre, cette mesure risque de déresponsabiliser les locataires et de bloquer un marché immobilier déjà très tendu. Où en sont donc les modalités de financement de la garantie universelle des loyers, et qui en supportera la charge ?
M. Éric Alauzet. Je salue l’effort consenti par le Gouvernement concernant le budget de cette mission, en hausse de 0,9 %, qui témoigne, après le projet de loi ALUR, de ses priorités dans un contexte pourtant très difficile.
Ma première question porte sur le gel des aides personnelles au logement, dans une période où les impayés augmentent pourtant beaucoup – selon l’USH, ils seraient passés dans le parc social de 5,4 à 6,7 % entre fin 2008 et fin 2010 et, dans le parc privé, l’UNPI constate une forte augmentation de l’ordre de 30 000 dossiers par an. Ne craignez-vous pas que le taux d’effort accru ne fragilise les ménages, d’autant que 76 % des bénéficiaires des aides personnelles au logement ont un revenu inférieur au SMIC et sont souvent en situation de précarité ?
Vous avez déjà donné des éléments d’information sur les actions concernées par la baisse du programme 135 et son impact sur les zones rurales.
Autre question : les 130 millions d’euros destinés à pallier la forte diminution – 50 millions – des crédits de paiement des aides à la pierre sont-ils pérenne ?
Enfin, en dépit des efforts importants qui lui sont consacrés, le parc d’hébergement d’urgence est vite saturé, en raison notamment de l’afflux de personnes migrantes, qui n’ont d’autre moyen d’entrer en France que de demander l’asile politique.
Mme Gisèle Biémouret. L’État consent un effort considérable en augmentant de 9,8 % le budget destiné à l’hébergement des personnes en situation de vulnérabilité. En septembre, vous avez déjà dû débloquer par décret, sans attendre, 107 millions d’euros. Le projet de loi ALUR comprend lui aussi des dispositions qui renforceront la prévention des expulsions. Pourtant, malgré tous ces efforts, le secteur de l’accueil et de l’hébergement connaît de très fortes tensions dues à la progression importante des demandes. Vous avez annoncé en septembre, madame la ministre, votre souhait d’effectuer une double réforme structurelle visant à abandonner, d’une part, la « gestion au thermomètre » et, de l’autre, la gestion hôtelière, ainsi qu’à réévaluer l’action du 115, lequel est en effet en situation de crise. Les associations reconnaissent aujourd’hui un essoufflement du 115 et tirent le signal d’alarme face à une gestion devenue inhumaine par manque de cohérence. Il en découle certaines situations dramatiques, notamment dans les zones très tendues comme l’Île-de-France, où des familles sans cesse déplacées doivent reprendre leurs démarches à zéro au gré des interlocuteurs, de l’assistante sociale à la PMI, de l’école au centre de loisirs, ce qui ruine leurs efforts d’intégration et de socialisation. Il faut en finir avec cette logique dans laquelle l’urgence prévaut sur l’insertion. Aussi, dans la perspective de transformer en profondeur le secteur de l’hébergement par la politique volontariste que vous avez su mettre en place, pouvez-vous nous préciser dès aujourd’hui les premières conclusions des diagnostics territoriaux « à 360 degrés », expérimentés dans quatre départements avant leur généralisation sur l’ensemble du territoire à la fin de l’année ?
M. Francis Vercamer. La politique de la ville est un outil déterminant de l’action de l’État et des communes en faveur des territoires qui souffrent et des populations qui y vivent. C’est pourquoi, dans un contexte difficile et à la veille de l’examen du projet de loi sur la ville, on aurait pu s’attendre à trouver dans le projet de budget des signes forts, concernant notamment l’accès à l’emploi et le développement économique dans les quartiers difficiles. Depuis 1996, les politiques de zones franches ont démontré leur efficacité, même si certains effets d’aubaine n’ont pas manqué de servir à leurs détracteurs. Aujourd’hui, les 100 zones franches urbaines de France accueillent 62 000 entreprises et 305 000 emplois. Que serait devenue Roubaix sans zone franche urbaine ? Comme M. Baert, je me pose la question.
Le dispositif des zones franches arrive à son terme en fin d’année. Les emplois aidés seront certes importants dans la période ultérieure, mais il est également essentiel que les entreprises de proximité soient incitées à s’implanter dans les quartiers difficiles, qui ont besoin d’animation. Je plaide donc pour le maintien du dispositif de zones franches urbaines – j’avais d’ailleurs présenté avec M. Pupponi un amendement visant à en prolonger la durée jusqu’en 2016, à quoi le Gouvernement d’alors a préféré retenir la date de 2014 – ou, à défaut, l’adoption d’un dispositif comparable.
A ce stade, les emplois francs ont montré leurs limites et, malgré les modifications qui leur ont été apportées, ils manquent de lisibilité dans les contrats aidés qui se télescopent avec les contrats d’avenir d’autres ministères.
Je salue votre détermination, monsieur le ministre, concernant la question des mobilisations de droit commun, mais il est très difficile d’en faire l’évaluation car les périmètres varient en fonction des ministères, et le nombre de policiers ou d’enseignants varie en fonction des territoires. Autant dire que le compte n’y est pas, alors que c’est un sujet dont on parle depuis de nombreuses années dans les quartiers concernés, où les policiers et les enseignants ne sont pas plus nombreux et où les crédits alloués aux différentes structures sont souvent en baisse.
M. Patrick Lebreton. Je tiens d’emblée à féliciter le Gouvernement pour son action en faveur du logement outre-mer. La défiscalisation permettant la construction de logements sociaux a été maintenue en première partie du projet de loi de finances et la ligne budgétaire unique a été augmentée. L’enjeu majeur du logement dans les outre-mer réside principalement dans la résorption de l’habitat insalubre, mais un enjeu plus local, qui concerne principalement le département de La Réunion, tient à l’accroissement démographique. La population réunionnaise s’accroîtra de près de 20 % d’ici 2030 pour atteindre un million d’habitants dans un espace géographique restreint. Cette évolution démographique aura lieu dans un contexte social très dégradé puisque le quart de la population est sans emploi et que plus de la moitié vit sous le seuil de pauvreté.
Assurer un logement décent pour les futures générations de Réunionnais sans sombrer dans une massification urbanistique dont on connaît les effets dans l’Hexagone est donc un véritable défi. C’est ainsi que, depuis les années 1990, le dispositif du logement évolutif social – LES – a été mis en place. Il permet l’accession à la propriété des personnes les plus modestes en livrant les produits à faible coût et fortement subventionnés.
Le LES est un outil permettant le logement des plus modestes, mais il s’agit également d’un véritable instrument d’émancipation sociale durable. A ce titre, je considère qu’il fait partie du logement social car il remplit un véritable objectif de mixité. Or il n’est pas comptabilisé comme tel selon la définition de la loi SRU. Je sais que le sujet est sensible, car source de clivages nationaux entre formations politiques, mais vous, dans l’Hexagone, vous n’avez pas de LES...
Ma question est simple, madame la ministre : pensez-vous opportun d’envisager de réfléchir à l’inclusion des logements évolutifs sociaux, spécifiques aux DOM, pour l’application du taux de 25 % fixé par la loi SRU ?
M. William Dumas. Madame la ministre, le projet de loi de finances pour 2014 s’inscrit dans la continuité des mesures d’urgences et des réformes structurelles entreprises depuis mai 2012. La question du logement est un axe prioritaire de notre gouvernement, car il est au cœur de notre ambition commune : la justice sociale, l’égalité territoriale et humaine et la solidarité.
L’augmentation de votre budget est un début de réponse à la crise du logement. Elle est aussi une réponse aux attentes des Françaises et des Français. Plusieurs axes ont appelé mon attention, et d’abord la question du développement du logement très social pour loger les ménages les plus modestes et protéger ainsi leur pouvoir d’achat.
Il s’agit de renforcer notre action auprès des ménages les plus fragilisés à travers des subventions exceptionnelles apportées par le Fonds de développement d’une offre de logements locatifs très sociaux. Avec un objectif de 2 000 logements très sociaux par an dès 2014, la description de cette avancée dans le budget 2014 est, pour l’élu gardois que je suis, un appui considérable pour lutter contre la précarité.
Le département du Gard subit la crise du logement avec violence, car il est frappé par un taux élevé de personnes en grande difficulté. Il a d’ailleurs été, en 1991, le premier département à lancer un programme social thématique. En vingt ans, ce programme a remis sur le marché locatif des bailleurs privés et plus de 600 logements réhabilités, économes en énergie et conventionnés à des loyers très sociaux.
J’ai également porté, madame la ministre, une attention toute particulière à la poursuite des efforts engagés pour lutter contre l’habitat indigne. Sous la précédente législature, j’avais présenté une proposition de loi pour lutter contre les marchands de sommeil. Il fallait rénover les relations entre locataires et propriétaires. C’est pourquoi je me réjouis des avancées de la loi ALUR. Pour autant, je reste convaincu que le meilleur moyen de lutter contre les logements indignes est d’instaurer un certificat de décence avant tout versement d’allocations par la CAF aux propriétaires.
M. Michel Heinrich. Le zonage pour l’investissement locatif dans le neuf a été créé en 1992 pour encourager la production de logements. Ce dispositif a été modifié à plusieurs reprises et s’applique actuellement de droit dans les zones A et B1, ainsi que, par dérogation et sur agrément, dans les zones B2.
Il est bien entendu que l’objectif n’est pas seulement la production de logements sociaux, mais essentiellement celle de logement locatif privé intermédiaire dans les zones où le besoin en logements de ce type est le plus avéré. C’est le cas dans la zone B1, mais aussi dans la zone B2.
Toutefois, compte tenu de l’application des nouvelles règles, les territoires classés en zone B2 seront désormais exclus du dispositif dit « Duflot », sauf dérogation. Ainsi, tous les investisseurs privés qui avaient des projets d’investissements sur ces zones vont se retirer faute d’incitation fiscale, où les locataires potentiels à faible revenu n’auront d’autre alternative que de se tourner vers les logements sociaux, renforçant la place de ce type de logement au détriment de la mixité d’habitat.
En outre, le risque est d’empêcher une partie de la population non éligible aux logements sociaux de trouver des locations dans des opérations récentes aux conditions abordables imposées par la loi Duflot. Il est également de se passer de la réalisation d’un parc privé de qualité à destination d’un public modeste présent sur le territoire. Il est enfin de restreindre la dynamique du marché de la construction.
Je souhaitais appeler votre attention sur ces dérives en proposant que les territoires classés en zone B2 puissent accéder d’office à la défiscalisation ou, le cas échéant, réviser les classements des villes centres qui disposent d’un important parc de logements sociaux supérieur, par exemple, à 30 %, en les classant en zone B1 pour contribuer à cette mixité d’habitat, donc à la mixité sociale, et permettre ainsi la réalisation de nouvelles opérations privées.
M. Marcel Rogemont. De tous temps, le développement autonome des villes a été marqué par le fait que les centres mangeaient les faubourgs. Aujourd’hui, les faubourgs sont les quartiers construits dans la deuxième partie du XXe siècle. Dès lors, le risque existe que les opérations ANRU ne fassent qu’accompagner ce mouvement historique du développement des villes.
C’est pourquoi je pose la question suivante : pouvons-nous mettre en place des financements, des critères financiers incitatifs ou pénalisants, qui favorisent la création du logement social dans le cadre des opérations ANRU dans les centres villes, de sorte que la notion de mixité sociale n’intéresse pas seulement les quartiers HLM, mais l’ensemble du territoire communal, y compris les centres-villes.
Ma deuxième question porte sur la centralisation du livret A, et je remercie au passage Mme la ministre de la réponse qu’elle a faite sur la vente du patrimoine HLM, d’autant que la question se pose ainsi : soit on vend, soit on reconstruit.
Pour en revenir à la centralisation du livret A, je rappelle que la vocation de ce livret est de financer le logement social ainsi que d’assurer des missions d’intérêt général. On peut donc envisager d’autres mesures, au-delà de celles qui ont été prises et dont je vous remercie, afin de diminuer les loyers des logements HLM et, partant, de préserver le pouvoir d’achat des familles, les APL ne connaissant pas une forte revalorisation.
Ma troisième question porte sur les zonages A, B et C. Serait-il possible que ces zonages correspondent aux limites territoriales des EPCI ? Si tel n’est pas le cas, vous allez créer une difficulté supplémentaire, non pas tant pour l’élaboration des PLH que dans leur acceptation.
M. Philippe Armand Martin. Madame la ministre, monsieur le ministre, puisque nous parlons d’égalité des territoires, d’égalité devant un même service public, je souhaite appeler votre attention sur les faiblesses des services offerts par les opérateurs internet, particulièrement en milieu rural. Les opérateurs, en effet, ne sont pas tenus d’ouvrir leurs services dans certaines communes pourtant desservies par la fibre optique, mais qui représentent pour eux un marché moins intéressant que celui des zones urbaines. Ils proposent des connexions de 20 mégaoctets par seconde au maximum, alors que le débit moyen sur l’ensemble du territoire atteignait déjà 25,66 mégaoctets en 2011.
Les opérateurs ne sont pas tenus de proposer des services de télévision par la fibre optique dans les zones où le nombre de lignes est inférieur à 1 000 si leurs concurrents n’y sont pas présents. Or, Internet et le développement du très haut débit constituent aujourd’hui un enjeu majeur du développement économique pour tous nos territoires. Il est plus qu’essentiel d’inciter les opérateurs à s’installer partout, y compris dans les zones rurales.
Pourriez-vous nous indiquer les moyens que le Gouvernement entend consacrer à l’accélération de l’installation du réseau de fibre optique dans les milieux ruraux ?
M. Guillaume Chevrollier. Madame la ministre, les artisans du bâtiment ont montré de manière forte leur mécontentement. En effet, il est rare de les voir quitter leur chantier pour manifester comme ils l’ont fait il y a quelques semaines. Ils sont inquiets pour l’avenir de leurs entreprises : qu’ils soient en zone rurale ou en zone urbaine, ils sont à égalité face à la crise. Je voulais vous alerter sur la situation de ces professionnels du logement.
La rénovation thermique, si importante qu’elle soit, ne suffira pas à relancer ce secteur essentiel dans notre pays, en particulier en zone rurale. J’ajoute que les 150 000 logements sociaux seront principalement construits en zone urbaine. Les zones rurales ne bénéficieront donc pas d’un plan de relance.
Mme Véronique Louwagie. Ma première question porte sur les droits de mutation. L’article 58 du projet de loi de finances donne aux départements la faculté temporaire de relever le taux des droits de mutation à titre onéreux. Les conseils généraux pourront ainsi porter le plafond des taux de 3,8 % à 4,5 % pour les mutations intervenues entre le 1er mars 2014 et le 29 février 2016. On peut regretter que cette mesure soit en réalité une augmentation d’impôts, qui affectera le pouvoir d’achat des Français souhaitant acquérir un logement. Nous avons bien compris que cette disposition est, en réalité, une contrepartie de la diminution de 476 millions d’euros de la dotation globale de fonctionnement des départements. La mesure est présentée comme temporaire, mais le texte donne la possibilité aux conseils généraux, de maintenir le taux à 4,5 % au-delà du 1er mars 2016. Qu’en est-il réellement, madame la ministre ? Cette mesure est-elle temporaire ou définitive ?
Ma seconde question concerne la baisse des crédits, en particulier celle des aides à la pierre, mentionnée par un certain nombre de mes collègues. Elles diminuent en effet de 50 millions d’euros, tandis que d’autres aides sont en hausse, comme les aides personnelles au logement. Alors que la loi ALUR semble dissuasive pour les propriétaires privés, il convient de regretter que le Gouvernement ne fasse pas avantage pour l’accession à la propriété. La crise du logement que connaît notre pays depuis dix-huit mois se traduit aussi par une baisse de l’achat de nombre de logements anciens par les particuliers qui veulent les louer. Cette diminution est de l’ordre de 5,8 % par an. Quelles mesures comptez-vous prendre pour remédier à cette situation qui pénalise aujourd’hui et qui pénalisera demain la location dans notre pays ?
Mme Laurence Abeille. Nous avons eu, au sein de la commission du développement durable, de nombreuses auditions sur l’égalité des territoires, et je pense que la création du Commissariat général à l’égalité des territoires, annoncé pour les prochains mois, est une bonne chose. Ce commissariat, je le rappelle pour mémoire, regroupera la DATAR, le SG-CIV et l’ACSé. Lors des auditions, nous nous étions interrogés sur les missions à lui confier et sur la notion même d’égalité des territoires, qui demeure assez mal appréhendée et parfois floue.
Je m’interroge également sur la cohérence entre la notion d’égalité des territoires et un certain nombre de projets de loi, dont celui sur les métropoles, qui sont fondés, non sur la notion d’égalité, mais plutôt sur celles de compétitivité et de compétition.
Le rapport de l’économiste Eloi Laurent a mis en évidence le fait que les inégalités sont plurielles, ce qui signifie que tous nos territoires pourraient entrer dans le champ d’action du CGET, certains au titre de l’égalité économique, d’autres au titre de l’égalité environnementale, de l’égalité sanitaire, de l’égalité des infrastructures, notamment numériques, etc.
Il me semble que le futur Commissariat général devrait être guidé par une logique nouvelle, plus globale, qu’il ne devrait pas seulement s’agir de fusionner trois agences pour des raisons budgétaires, mais de réfléchir aux moyens de réduire globalement l’ensemble des inégalités, qu’elles soient sociales, économiques, environnementales ou autres. Je reconnais que la tâche est compliquée et qu’elle implique beaucoup d’acteurs. De même, l’échelle pertinente pour agir sur les inégalités territoriales peut être plus ou moins fine, aller du quartier à la région ou même à la rue.
Par ailleurs, aucun financement spécifique ne figure au budget pour 2014. J’aimerais donc obtenir des informations sur ce qui est prévu quant aux modalités, au périmètre d’action et au financement du CGET.
M. Olivier Carré. J’ai deux remarques et trois questions. Première remarque : je me félicite que nous allions progressivement vers une harmonisation des intervenants dans le domaine de la politique de la ville, et la rationalisation des moyens est également une bonne chose. Ma deuxième remarque est que l’on pourrait aller encore plus loin, comme l’a signalé mon collègue Benoit, dans la gestion des aides à la pierre, mais cela dépasse nos débats de ce matin.
J’en viens à ma première question. J’ai cru comprendre, dans l’intervention de M. le rapporteur Pupponi, que le PNRU 2 serait essentiellement financé, comme le PNRU 1, par Action Logement. Madame la ministre, confirmez-vous cette vision, sachant que ses responsables eux-mêmes considèrent avoir un contrat à durée déterminée avec le Gouvernement et sont focalisés sur la date de la fin de ces engagements ?
Ma deuxième question concerne votre réaction à tous les deux, madame et monsieur les ministres, sur la décision de ramener de 500 à 300 mètres autour des zones ANRU le périmètre de la TVA à taux réduit dans les constructions autour des zones ANRU, ce qui est, selon moi, une modification significative, car les 500 mètres permettaient une bonne continuité avec les zones limitrophes. Bercy explique très peu dans ses documents, et en particulier dans l’étude d’impact, les raisons pour lesquelles cette mesure à été proposée.
Ma troisième question est plus pointue : elle a trait à la fin du Crédit immobilier de France et concerne la répartition des réserves et des boni de liquidation de cette institution, et des SACICAP – sociétés anonymes coopératives d'intérêt collectif pour l'accession à la propriété – en particulier. Ces sociétés avaient en effet une mission sociale qui va se trouver considérablement compromise. Qu’en pensez-vous, madame, monsieur le ministre ?
M. Marc Goua. Madame la ministre, monsieur le ministre, je voudrais tout d’abord vous remercier pour cette concertation préalable sur la politique de la ville, et en saluer la simplification et la concentration, notamment la prise en compte plus importante du revenu des habitants. J’apprécie de même le renforcement de la péréquation à travers le FPIC – Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales –, et l’augmentation de la DSU et de la DSR. J’approuve également que la DSC – dotation de solidarité communautaire – soit obligatoire pour les communautés urbaines et les métropoles, mais j’ai tout de même une inquiétude quant aux critères de répartition, car il serait souhaitable, tout en préservant l’autonomie des collectivités, qu’il y ait tout de même certaines règles.
Reste un sujet de vigilance : la gouvernance, puisque le transfert de la politique de la ville aux EPCI ne doit pas priver les élus de proximité et les maires de la gestion quotidienne. Et quid de la répartition des sommes consacrées à la politique de la ville qui transiteront par l’EPCI ? Qui sera le garant d’une répartition équitable au bénéfice des quartiers en difficulté plutôt que de collectivités qui n’en feraient peut-être pas exactement le même usage ?
Pour reprendre ce qui a été dit sur le logement, je fais mienne la demande de bien vouloir revoir la possibilité de revaloriser l’APL, à un moment où nos populations se paupérisent.
M. Jonas Tahuaitu. Madame la ministre, les constructions de logements sociaux sont cruciales pour nos départements et collectivités d’outre-mer. C’est un problème commun à tous ces territoires. Je vais intervenir ici au nom de la Polynésie française que je connais particulièrement.
Le logement est de la compétence du pays, du fait de son statut d’autonomie interne. Cependant, nous avons un besoin urgent de l’aide et de la solidarité de l’État pour le financement de ces logements sociaux, étant donné l’état catastrophique dans lequel se trouve aujourd’hui le pays, économiquement et financièrement, après dix ans d’instabilité politique.
Un autre problème se pose : celui du foncier disponible. Comme vous le savez, les forces armées, en quittant le pays du fait de la fin des essais nucléaires, ont laissé derrière elles des sites et des propriétés disponibles pour la construction de logements sociaux, et ce dans le cadre du CNSD – le contrat de redynamisation des sites de la défense – passé entre l’État et les communes concernées.
Madame la ministre, pourriez-vous intervenir auprès des autres instances de l’État, du ministère de la défense et de celui du budget en particulier pour que soit accélérée la cession de ces sites au profit des communes et du pays, afin de pouvoir réaliser en urgence le programme de construction de logements sociaux si attendu par un très grand nombre d’habitants de la Polynésie française ?
M. Michel Liebgott. Je souhaite appeler l’attention du Gouvernement sur trois points. Le premier, c’est le 115 et les demandeurs d’asile. Une initiative, qui me semble assez pertinente, a été prise dans le département de la Moselle. Elle permet d’accélérer l’examen des dossiers des demandeurs d’asile, donc de réduire le temps d’hébergement. Ainsi, les responsables de l’OFPRA sont venus examiner sur place les dossiers des demandeurs d’asile, auxquels on demande en général de se déplacer.
Deuxièmement, il me paraît nécessaire de porter une attention particulière aux copropriétés dégradées situées dans les quartiers relevant de la politique de la ville. La loi du 25 mars 2009 s’avère en effet insuffisante et les situations de blocage complet sont fréquentes, les propriétaires étant introuvables ou en liquidation. Il a fallu, à Thionville, que la somme des dettes d’une copropriété située au beau milieu d’un quartier rénové s’élève à 1,7 million d’euros et qu’un incendie se déclare pour qu’un arrêté préfectoral vienne enfin dresser un constat de carence.
Enfin, je me félicite de la redéfinition du zonage de la politique de la ville. C’est une bonne chose. Comme le dit notre rapporteur général Christian Eckert, il faudra mettre en concordance la DSU et la DDU avec les nouveaux critères de pauvreté, bien plus pertinents que ceux qui s’accumulent depuis trente ans au point de ne plus correspondre parfois à la réalité.
Mme Marie-Christine Dalloz. Je souhaite faire deux remarques. On baisse les crédits du programme 135 consacrés aux aides à la pierre ainsi que les crédits relatifs à l’habitat indigne, alors même qu’il s’agit d’une priorité. En revanche, on augmente les crédits affectés à la création des observatoires des loyers, contrairement à ce qui avait été dit dans l’hémicycle à ce propos lors de la discussion de la loi ALUR. Je note que 5 millions d’euros y sont affectés. Voilà la réalité. Cela me semble vraiment dommage.
S’agissant du programme 147, relatif à la politique de la ville, je crains sérieusement que la vôtre, monsieur le ministre, n’accentue l’inégalité entre les territoires. Pendant cinq ans, en dépit de la crise que nous avons connue lors de la précédente législature, les crédits de la ville ont toujours été maintenus. Aujourd’hui, que se passe-t-il ? Ils s’élèvent à 492 millions d’euros pour 2014 alors qu’ils étaient de 504 millions en 2013 et de 540 millions en 2012. Je ne vois là nulle augmentation des crédits. Je regrette de devoir le dire, mais la politique de la ville fait l’objet d’une baisse de crédits bien réelle, et cela me semble incohérent.
Enfin, on nous a beaucoup parlé, lors de la discussion de la première partie du budget, du taux de TVA à 5,5 % sur la rénovation énergétique. Or, je constate aujourd’hui que le chauffage est exclu des travaux éligibles au crédit d’impôt « développement durable ». Or celui-ci constitue la première masse budgétaire pour aider les ménages désireux de réduire les coûts d’entretien de leur logement, en particulier les ménages les plus modestes. Il est donc franchement dommage de l’exclure du CIDD.
Mme Sophie Rohfritsch. Je souhaite, à la suite de Mme Abeille et quitte à m’éloigner un peu de la discussion budgétaire proprement dite et à reprendre un débat qui a eu lieu en commission du développement durable, évoquer la création du Commissariat général à l’égalité des territoires, annoncée pour le début de l’année 2014. On lui assigne la tâche d’assurer l’accessibilité égale et équitable aux services publics sur l’ensemble du territoire national, ce que chacun appelle de ses vœux. Il me semble cependant que nous n’avons pas intégré la nécessité de prendre en compte les nouvelles logiques territoriales. Celles-ci ne sont plus celles en vigueur à l’époque de la DATAR, ou même il y a une dizaine d’années. La logique actuelle est celle du développement économique, à partir de pôles de compétitivité, de réseaux, de clusters, autour d’universités, de laboratoires de recherche et d’entreprises associés pour un développement de l’économie de la connaissance et appelés à mener dans nos territoires des actions concrètes.
Il ressort des propos que nous a tenus le délégué interministériel Éric Delzant en commission du développement durable qu’une telle logique n’est pas vraiment prise en compte. Elle suppose en effet de comprendre que les territoires n’ont pas évolué de la même façon et que certains se développeront et se trouveront en situation de compétition plus rapidement que d’autres. Si l’on n’admet pas cela, on n’admet pas non plus que notre pays puisse retrouver un jour le chemin de la croissance à partir de territoires se développant plus vite que d’autres en raison de leur excellence, elle-même due aux investissements d’avenir, aux plans campus et aux pôles de compétitivité.
Si le Commissariat général à l’égalité des territoires doit vraiment voir le jour, la première question qui se pose est celle de son utilité réelle, car il existe déjà un certain nombre d’outils à même de prendre en charge les différents aspects de sa mission. Il faut en tout cas bien comprendre que les territoires ne pourront plus se développer à la même vitesse. Cela n’a rien de pénalisant pour ceux qui se développeront moins vite, mais assurera in fine au pays une croissance certainement plus durable que si l’on a éternellement pour objectif le développement de tous à la même allure.
Mme Monique Orphé. La Réunion est confrontée à un défi majeur en matière de construction de logements, en raison de sa croissance démographique encore élevée. En voici quelques chiffres : 22 000 ménages sont en attente d’un logement social, 25 % des logements sont suroccupés, 10 % des logements sont répertoriés comme insalubres. La mission « Outre-mer » prévoit la construction de 10 000 logements sociaux par an pour répondre à la demande, et nous affichons l’ambition de répondre à l’attente de nombreux ménages, mais encore faudrait-il lever les freins à la réalisation des objectifs avancés.
Le premier d’entre eux, dans notre département, c’est la mise à disposition de foncier aménageable. Je suis l’élue d’un territoire contraint, où le foncier est rare et cher. Les coûts d’aménagement pèsent de plus en plus lourd sur le budget des collectivités, ce qui a un impact non négligeable sur le prix des loyers. Nous disposons d’un établissement public foncier qui fonctionne et accompagne les collectivités et les sociétés d’économie mixte, mais qui n’a pas les moyens de ses ambitions. Vous avez décidé, madame la ministre, de généraliser cet outil. Quels moyens lui donnerez-vous pour en faire un vrai outil d’aménagement de nos territoires ?
Le deuxième frein, ce sont les contraintes pesant sur la construction. Les normes imposées aujourd’hui pèsent en effet sur le montant des loyers. Ne peut-on les assouplir afin de faciliter la réalisation des projets et des logements sociaux ?
Le troisième frein, c’est la garantie d’emprunt. À La Réunion, en raison du désengagement du département, les bailleurs doivent trouver quatre garants pour financer les opérations. N’existe-t-il pas une solution pour simplifier la procédure et faciliter la réalisation des opérations ? La garantie d’emprunt fragilise le secteur du BTP, créateur d’emplois. Je rappelle que la CGLLS – Caisse de garantie du logement locatif social – n’a pas la capacité financière de se substituer aux garants.
Enfin, les ménages aux revenus modestes, voire faibles ne peuvent accéder à un logement en raison de loyers trop élevés, même dans le secteur du logement social. L’échelle du barème risque d’aggraver encore un peu plus leur situation. Une réflexion sur une attribution plus juste des aides s’impose, madame la ministre, afin de rendre une dignité à ces familles en leur permettant d’accéder à un logement.
Mme Martine Carrillon-Couvreur, présidente. Je remercie le Gouvernement, au nom de la commission des affaires sociales, pour les engagements pris et les propositions formulées au cours de nos échanges tout au long de la matinée. Ils portent sur des sujets extrêmement importants qui touchent à la cohésion sociale de notre pays. Nous avons pu mesurer les efforts réalisés en sa faveur en période de forte contrainte budgétaire.
Je m’adresse plus particulièrement à vous, madame la ministre, pour appeler votre attention, comme je l’ai déjà fait l’an dernier à la même occasion, sur la question de l’accès au logement des personnes en perte d’autonomie. Nous en parlons souvent dans le cadre de la commission des affaires sociales. Comme vous le savez, une loi pour l’adaptation de la société au vieillissement est en préparation. À propos des logements en particulier, dont le temps législatif prévoit que nous débattions bientôt avec vous, je souhaite attirer votre attention sur la nécessité de prendre vraiment en considération la question du maintien à domicile des personnes âgées, handicapées mais aussi accidentées, de manière temporaire ou durable. Il s’agit d’une question importante qui mobilisera sans doute au cours des années à venir nos efforts et notre attention.
Je voulais simplement ce matin vous rappeler, madame la ministre, que nous devons rester vigilants. Comme vous le savez, le Premier ministre, dans le cadre d’une circulaire de septembre 2012, a rappelé à l’ensemble du Gouvernement que toute loi doit désormais comporter un volet « handicap ». Le débat budgétaire est l’occasion de nous redire entre nous que nous devons rester très attentifs à ces questions.
Mme Cécile Duflot, ministre de l'égalité des territoires et du logement. Je réserve pour la fin de mon intervention la réponse aux questions de MM. Kemel, Vercamer et Liebgott, qui portent spécifiquement sur la politique de la ville.
Vous m’interrogez, monsieur Mathis, sur la garantie universelle des loyers. Je souhaite d’emblée préciser le montant nécessaire à son financement, que l’on trouve par ailleurs dans plusieurs publications récentes. Le montant de 2 milliards d’euros est une invention, ce qui a été démontré à plusieurs reprises. L’évaluation du rapport de l’Inspection générale des finances le situe aujourd’hui entre 245 millions, hypothèse basse, et un peu moins d’un milliard, hypothèse très haute comprenant un montant de garantie des loyers très élevé pour les propriétaires pendant trente-six mois, mais aussi le remboursement d’une partie, voire de la totalité, des frais de justice.
Le scénario retenu par le Gouvernement situe le coût de la GUL à quelque 745 millions d’euros. Un certain nombre d’amendements à la loi ALUR ont été adoptés au Sénat en sa première lecture, ce qui montre que, sur ce sujet, le Gouvernement a fait le choix de la coopération avec le Parlement, et que les choses avancent grâce à la discussion avec l’ensemble des parlementaires. C’est dans cet état d’esprit, le président de la commission des affaires économiques du Sénat a constitué un groupe de travail associant des parlementaires de toutes tendances.
Il a été démontré que les deux risques les plus saillants, l’aléa moral et la déresponsabilisation, ne sont pas avérés, pour la bonne et simple raison que l’exercice du privilège du Trésor public par la caisse de garantie rendra les opérations de recouvrement nettement plus efficaces que celles des propriétaires, parfois un peu abandonnés en cas d’impayé, en particulier s’il s’agit d’un impayé de mauvaise foi. Je le redis ici devant vous, même s’il ne s’agit pas à proprement parler d’un débat budgétaire : la GUL n’est pas seulement un outil de garantie des loyers impayés, mais d’abord un outil d’accès au logement, en particulier pour les jeunes qui en sont aujourd’hui de plus en plus exclus, y compris s’ils ont la caution de leurs parents.
Le troisième élément essentiel, lié d’ailleurs à la question de l’hébergement, c’est la prévention des expulsions. L’identification très précoce des situations d’impayé évite de laisser les uns et les autres, en particulier les élus locaux, face à des situations de grande détresse sociale assorties de dix-huit ou vingt mois d’impayés. Ces situations sont, en effet, très difficiles à résorber, et leur identification précoce évite l’aggravation des difficultés.
Quant au financement, compte tenu des limites de l’enveloppe financière, nous avons réfléchi à d’autres modalités, faisant appel à l’UESL – Union des entreprises et des salariés pour le logement. J’en profite pour répondre à M. Carré : l’engagement de l’UESL à financer à long terme des dispositifs participant de l’intérêt général, y compris après 2018, est de 500 millions d’euros, dans le cadre d’une contractualisation. La loi ALUR prévoit en effet le retour à la contractualisation, qui implique bien sûr un échange entre l’État et les partenaires sociaux d’Action Logement. L’actuelle contribution d’Action Logement à la GUL sera donc maintenue dans le cadre du nouveau dispositif, qui a vocation à être un dispositif universel englobant les dispositifs existants, avec leurs limites. Votre question, monsieur le député, porte plus spécifiquement sur l’ANRU, donc sur les financements relatifs au PNRU 2 ; M. Lamy y répondra donc de manière plus détaillée.
J’ai déjà eu l’occasion de répondre à la question posée par M. Alauzet sur la désindexation des aides personnalisées au logement. Il s’agit, dans le cadre d’un budget en augmentation, d’un choix douloureux mais nécessaire du Gouvernement, dû à la période budgétaire contrainte que nous vivons. Ce n’est pas une décision facile. Je vous assure néanmoins qu’aucun allocataire ne verra son APL diminuer. Il est en revanche décidé pour cette année d’en contraindre l’évolution, déjà très importante dans le budget de l’État mais aussi dans celui de la sécurité sociale au titre du FNAL – Fonds national d’aide au logement. Telle est la situation à laquelle nous devons faire face.
Comme vous l’avez dit, monsieur le député, j’ai déjà répondu à la question relative à l’ATESAT – assistance technique fournie par l'État aux collectivités pour des raisons de solidarité et d'aménagement du territoire. Quant aux aides à la pierre, une partie des ressources pérennes sera alimentée dès l’année prochaine par la surtaxe sur les plus-values immobilières, qui s’élèvera à quelque 80 millions d’euros. Nous avons donc assuré l’affectation de ressources pérennes aux aides à la pierre, élément décisif de la construction de logement social. Je ne reviendrai pas sur ma réponse au président Chassaigne relative aux différents moyens complétant les aides à la pierre. Ils sont de même nature, puisqu’il s’agit d’argent ne faisant pas l’objet d’intérêts. La mutualisation des fonds propres, la prime de la Caisse des dépôts et consignations ou encore l’aide exceptionnelle d’Action Logement, sont donc à l’origine d’une augmentation très significative des aides à la construction de logements sociaux, ce qui nous permettra d’atteindre le plus rapidement possible, je l’espère, l’objectif annuel de 150 000 logements sociaux fixé par le Président de la République.
Vous avez parlé, madame Biémouret, de la saturation du 115. C’est vrai, nous faisons face à une situation difficile. Cela explique l’augmentation conséquente des crédits du programme 177 visant à améliorer la situation dans l’ensemble du territoire. Quant à la méthode des diagnostics territoriaux « à 360 degrés », elle est actuellement en cours d’expérimentation. Elle consiste à travailler avec tous les acteurs et identifier toutes les structures existantes et tous les besoins afin de disposer d’une vision globale du territoire et des acteurs. Dans quatre territoires, les diagnostics seront terminés en janvier 2014. L’objectif est de les généraliser à l’été 2014, au profit d’une vision moins verticale, plus horizontale, territoire par territoire. Cela nous permettra sans doute d’améliorer les dispositifs ainsi que le dialogue entre certains intervenants.
Vous avez parlé, monsieur Lebreton, du logement social à La Réunion et, plus généralement, outre-mer. Cette mission est aujourd’hui spécifiquement confiée au ministre des outre-mer et figure dans son budget. Comme vous l’avez noté, nous avons maintenu les dispositifs, en particulier la défiscalisation. Il s’agit du programme 123, relatif aux aides destinées aux outre-mer, y compris les aides à la pierre. Dans ce cadre, le Gouvernement entend réfléchir à tous les dispositifs susceptibles d’être plus particulièrement efficaces ou adaptés aux situations des outre-mer. Nous avons longuement discuté de ces sujets dans le cadre de la loi ALUR, afin d’y intégrer des dispositions correspondant à la situation spécifique des outre-mer.
Monsieur Dumas, vous avez évoqué en des termes très justes la question du conventionnement du logement existant. Comme vous l’avez dit, les actions contre les marchands de sommeil, qui résultent de divers travaux de collectivités locales et du Parlement, ont été intégrés au projet de loi ALUR, et nous permettront de disposer de moyens d’agir beaucoup plus importants, mais aussi de favoriser le développement de logements existants conventionnés, ce qui constitue une réponse à l’obligation, pour les communes de plus de 3 500 habitants, de présenter un taux de logements locatifs sociaux d’au moins 25 %. Le conventionnement de logements existants constitue une réponse à la difficulté posée dans certains territoires par le manque de foncier disponible pour construire.
Dans cette optique, nous avons travaillé sur l’idée d’un « super-PLAI » comprenant des prêts bonifiés grâce aux recettes provenant des amendes collectées auprès des communes ne respectant pas leurs obligations en matière de logement social. Cette mesure s’accompagnera d’un doublement du forfait « charges », afin de parvenir à un allégement très significatif de la quittance des ménages les plus modestes qui, aujourd’hui, risqueraient d’être écartés du logement social en raison du montant de leurs ressources – une situation que l’on ne peut évidemment accepter.
Monsieur Heinrich, vous êtes revenu sur la question du zonage, qui est l’objet d’un vaste débat, et pas seulement en matière de logement – nous aurons sans doute l’occasion, demain, d’évoquer le sujet extrêmement complexe des ZRR – zones de revitalisation rurale. L’objectif du Gouvernement est qu’à terme il n’y ait plus besoin de définir des zonages commune par commune, et que les chiffres issus des observatoires permettent, au regard de certains critères, d’appliquer simultanément les différents dispositifs, qu’ils soient fiscaux ou relatifs au niveau de loyer ou à la typologie de logements sociaux à construire.
J’en profite pour faire observer à Mme Dalloz je n’ai jamais dit que les observatoires ne seraient pas financés : ils sont financés à la même hauteur que l’an dernier, à savoir 5 millions d’euros. Il s’agit d’apporter, sur certains territoires, une aide aux collectivités locales. Le choix que nous avons fait n’est pas de créer un nouveau dispositif, mais de nous appuyer sur les dispositifs existants, ce qui passe par une aide financière à certaines collectivités, sous l’égide d’un comité scientifique travaillant, avec des statisticiens, à l’homogénéisation des données entre observatoires.
La question de l’application automatique des incitations fiscales aux zones D2 a posé des problèmes dans le cadre du précédent dispositif, notamment celui de la construction de logements dans des zones qui n’en avaient pas besoin, à des fins exclusives de défiscalisation, avec des effets secondaires néfastes. Nous avons donc choisi de mettre en place un dispositif resserré, plus contraint, mais supportant des exceptions si les caractéristiques du territoire le justifient, après instruction des dossiers et décision prise par le préfet.
Monsieur Rogemont, vous avez également évoqué la question des zonages, à laquelle nous travaillons de manière plus globale. Je sais que l’un des problèmes qui se posent est celui du zonage qui ne recoupe pas les limites d’une intercommunalité. Théoriquement, les zonages reposent sur un certain nombre de critères qui sont liés non au périmètre des intercommunalités, mais aux caractéristiques de la commune. La multiplication des opérateurs devrait nous permettre de résoudre ce problème assez rapidement.
S’agissant des centres-villes et des dispositifs de type ANRU qui pourraient s’y appliquer, le ministère travaille actuellement, pour les bourgs ruraux, à l’élaboration de dispositifs d’appui aux collectivités faisant face à une désertification et à une nécrose de leurs centres-bourgs, en particulier en zones rurales, où le patrimoine bâti se révèle parfois inadapté aux nouveaux besoins de logement, ce qui entraîne l’abandon de petits immeubles. Nous devons chercher des solutions financières, mais aussi techniques et architecturales, pour reconquérir les centres-bourgs, dont la déprise n’est pas sans poser certaines difficultés aux élus et aux habitants.
Monsieur Martin, vous avez évoqué le haut débit. Ma collègue Fleur Pellerin travaille actuellement à ce que l’ensemble du territoire soit couvert par le très haut débit dans les dix ans qui viennent. Cet objectif, qui devra néanmoins être atteint, se heurte à certaines difficultés dans les négociations avec les opérateurs. Parallèlement, le ministère de l’égalité des territoires travaille à la question des futurs usages destinés aux professionnels ou relevant du service public, en anticipant la couverture par le réseau à très haut débit.
J’aurai l’occasion de revenir longuement sur ce point demain, ainsi que de répondre à Mme Rohfritsch sur la fonction du Commissariat général à l’égalité des territoires – qui, je le répète, n’est pas une nouvelle structure, mais résulte de la fusion de trois organismes, dans le respect des fondamentaux et missions préexistants, avec un pilier « ville » dirigé par un commissaire général délégué à cette fonction. Il s’agit de réinventer la manière de tisser des relations entre l’État et les collectivités locales, non plus dans la logique des années 1960 et 1970, quand l’État décidait à la place des territoires, mais plutôt dans celle d’un accompagnement des initiatives et des potentialités de développement des territoires.
Monsieur Chevrollier, vous avez évoqué la proposition de généraliser la TVA à taux réduit à tout le secteur de la construction. Je rappelle que, dans l’hypothèse où 500 000 logements seraient construits chaque année, cela représenterait pour l’État une moins-value de 9 milliards d'euros, impossible à envisager tant sur le plan financier qu’en raison des effets d’aubaine, non corrélés à une baisse des prix, qu’elle entraînerait. Au lieu de cela, nous permettons aux opérateurs du logement social de déployer leurs fonds propres de manière plus efficace, sur davantage d’opérations.
Madame Abeille, vous avez bien résumé l’esprit du Commissariat général à l’égalité des territoires, dont nous aurons sans doute l’occasion de parler plus longuement demain, dans le cadre de l’examen du volet « Égalité des territoires ». Au-delà des questions financières, c’est une illustration de la façon dont l’État va désormais devoir travailler avec les collectivités locales.
Monsieur Tahuaitu, vous avez évoqué la redynamisation des zones de défense en Polynésie française. Ce sujet important, relevant du programme qui sera étudié demain, pose des questions juridiques actuellement étudiées avec le ministère des collectivités locales, étant donné le statut particulier du territoire. Je vous propose de vous mettre en relation avec mon cabinet afin d’étudier cette question de manière plus approfondie : du fait du statut des patrimoines de l’État et de la Polynésie, la situation est très spécifique.
Monsieur Goua, je crois vous avoir répondu sur l’APL. J’assume devant vous le budget de cette mission, qui constitue une partie du budget général porté par l’ensemble du Gouvernement, qui a nécessité des efforts de la part de tous les ministres. En dépit des contraintes, ce budget demeure toutefois un budget prioritaire, bénéficiant d’une augmentation de 100 millions d’euros.
Je crois, madame Dalloz, que M. Lamy pourra vous répondre utilement sur les crédits relatifs à la politique de la ville, qui ne sont pas en baisse, mais bénéficient d’une sanctuarisation. Par ailleurs, il est inexact d’affirmer que les appareils de chauffage sont exclus du crédit d’impôt « développement durable » – le CIDD –, puisque les chaudières performantes bénéficient toujours du dispositif de ce dispositif, comme toutes les dépenses liées à l’isolation.
Enfin, Mme Orphé a évoqué la question du foncier et des établissements publics fonciers. Nous avons souhaité harmoniser le statut de ces établissements, ainsi que leur articulation avec les EPF locaux, qui devrait permettre un meilleur fonctionnement, mais ne résout évidemment pas les questions de pression foncière. Comme je l’ai dit lors de plusieurs débats parlementaires, la question de la maîtrise du foncier et de l’évaluation du coût et de l’anticipation d’un certain nombre de programmes d’aménagement ou de construction de logements est loin d’être réglée : nous aurons donc à y réfléchir encore.
Madame la vice-présidente de la commission des affaires sociales, je suis très sensible à la question de l’accès au logement des personnes en perte d’autonomie ou en situation de handicap. Comme vous le savez, une mission a été créée dans le cadre de la loi de 2005. Le Gouvernement, qui attache une grande importance au fait que l’accès au logement se fasse sans aucune discrimination, a ouvert une grande réflexion, notamment dans le cadre du logement social, sur le rôle que pourront jouer les opérateurs dans l’adaptation des logements aux besoins des personnes concernées, qui disposent souvent de revenus limités. En 2014, les crédits de l’ANAH financeront l’adaptation de 15 000 logements aux besoins de personnes âgées ou en situation de handicap.
M. François Lamy, ministre délégué chargé de la ville. Je veux tout d’abord confirmer à Mme Dalloz que les crédits d’intervention de la politique de la ville, qui permettent de financer à la fois le monde associatif et les actions des collectivités dans le cadre des contrats urbains de cohésion sociale, sont restés au même montant que ceux de l’année dernière. Pour ce qui est des crédits consommés au titre de la politique de la ville, je rappellerai les chiffres suivants : 852 millions d’euros en 2008, 788 millions en 2009, 632 millions en 2010, 570 millions en 2011 et 512 millions en 2012, ce qui représente une baisse de 31 % sous la précédente législature.
Pour répondre à M. Liebgott, je confirme la prise en compte de la situation des copropriétés dégradées dans le cadre des opérations de rénovation urbaine prévues par le nouveau plan national de renouvellement urbain. Les critères permettant de déterminer les zones prioritaires ont été modifiés par rapport à ceux appliqués en 1996, qui définissaient les zones urbaines sensibles en fonction du logement social. En intégrant le critère de pauvreté, nous pourrons globaliser l’ensemble des interventions du ministère de la ville à destination des quartiers en grande difficulté, que les personnes concernées occupent un logement social ou un appartement situé dans une copropriété dégradée.
M. Goua a posé plusieurs questions relatives au contrat de ville, au cadre intercommunal et à la dotation de solidarité urbaine, auxquelles je répondrai plutôt lors de l’examen du budget en séance publique, qui me paraît constituer un cadre plus approprié.
Je confirme à M. Carré la réponse que lui a déjà faite Mme la ministre quant à l’engagement d’Action Logement en matière de rénovation urbaine, en particulier dans le cadre du nouveau plan national de rénovation urbaine. Je puis vous assurer, monsieur le député, que je n’ai aucune inquiétude sur cet engagement.
S’agissant de la réduction des périmètres de 500 à 300 mètres autour des zones ANRU, je veux rappeler que l’ancienne règle pouvait créer un certain effet d’aubaine. Joint à la réduction du taux de TVA de 7 à 5,5 %, ce dispositif visant à favoriser la mixité sociale en marge des quartiers prioritaires de la politique de la ville doit nous permettre d’atteindre les mêmes objectifs que ceux fixés précédemment.
Monsieur Vercamer, vous avez raison de dire qu’il y a moins de policiers et d’enseignants dans les quartiers, mais dois-je avoir la cruauté de vous rappeler que c’est le gouvernement précédent, celui que vous souteniez, qui a supprimé 12 000 postes de policiers et 80 000 postes d’enseignants, et que la situation actuelle n’est que le résultat de la politique que vous avez soutenue lors des cinq dernières années ? Pour ma part, je m’efforce de relancer une mobilisation des politiques publiques et du droit commun. La plupart des zones de sécurité prioritaire – toutes celles se trouvant en zone urbaine, sauf une – se trouvent dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville. Il s’ensuit une concentration de moyens, voire d’effectifs, quand cela est possible en ZSP.
Par ailleurs, comme vous le savez sans doute, je suis en train de négocier des conventions avec l’ensemble de mes collègues concernés, afin que des moyens précis soient fléchés. Ainsi, pour ce qui est du nombre d’enseignants, nous avons conventionné avec le ministre de l’éducation nationale des créations de postes dans le cadre du dispositif « plus de maîtres que de classes » et de la préscolarisation des enfants de deux à trois ans : 25 % des postes sont d’ores et déjà fléchés vers les quartiers prioritaires. Chacun peut d’ailleurs vérifier sur le site internet du ministère que plusieurs conventions et engagements précis ont été pris. Certes, ces engagements devront trouver une traduction concrète sur le terrain, mais ils ont le mérite d’exister. Je vous rappelle, par ailleurs, que les futurs contrats de ville seront signés non seulement par les maires et les présidents d’intercommunalité, mais aussi par les caisses d’allocations familiales, Pôle Emploi, les recteurs ou directeurs des services académiques, les procureurs de la République – pour ce qui est des questions de prévention – et encore d’autres acteurs. Tout cela aura aussi pour effet de mobiliser les dispositifs de droit commun.
J’ai déjà répondu sur les zones franches urbaines, et me bornerai à vous rappeler, monsieur Vercamer, que, si vous n’aviez pas voté la disparition du système en 2014, cette question ne se poserait pas. Quand on soutient une politique, il faut l’assumer globalement.
M. Francis Vercamer. Vous êtes bien placé pour le savoir !
M. François Lamy, ministre délégué chargé de la ville. Tout à fait. Cela dit, je sais que nous devons travailler au soutien du développement économique des quartiers, en continuant à soutenir à la fois les employés et la création d’emplois – par la création d’entreprises.
Enfin, monsieur Kemel, s’agissant de l’emploi, j’insiste sur le fait que l’interministériel est mobilisé sur le terrain. Je pense qu’il ne faut pas opposer les emplois d’avenir aux emplois francs, les deux dispositifs ayant vocation à toucher des publics différents. Alors que les emplois d’avenir sont plutôt destinés aux jeunes peu ou pas qualifiés – avec une possibilité de dérogation dans les zones urbaines sensibles, où il peut concerner les jeunes jusqu’à « bac plus trois » –, les emplois francs visent à remédier à la stigmatisation « à l’adresse » qui touche les jeunes venant de tel ou tel quartier de mauvaise réputation, qui fait que certaines candidatures ne sont même pas étudiées. Nous sommes en train d’évaluer les deux dispositifs et, surtout, de renforcer les moyens correspondants.
Comme je le disais tout à l’heure, bon nombre des jeunes potentiellement concernés ne savent même pas qu’ils pourraient en bénéficier. Avec Michel Sapin, nous réfléchissons, s’agissant en particulier des emplois d’avenir, à la façon de renforcer les moyens humains des missions locales pour l’emploi, afin de leur permettre d’agir plus en profondeur à l’intérieur des quartiers. En matière de politique de la ville, une partie des 500 postes d’adultes-relais qui viennent d’être créés – ce qui ne s’était pas vu depuis longtemps – sera orientée vers la détection des jeunes en grande difficulté, qui n’ont même plus le réflexe de se rendre dans les agences de Pôle Emploi et dans les missions locales.
Par ailleurs, j’ai confié à Jean-François Carenco, préfet de la région Rhône-Alpes, la mission de réfléchir à l’élaboration d’un pacte « deuxième chance » mettant en œuvre les moyens de droit commun existants – qu’il s’agisse des EPIDE – les établissements publics d’insertion de la défense –, des écoles de la deuxième chance ou d’autres dispositifs encore – afin de repérer, quartier par quartier et individuellement, les jeunes risquant de basculer du côté de la petite délinquance, et de les prendre en charge dans le cadre d’un dispositif de coaching ou de parrainage. Nous pensons qu’un tel dispositif, répondant à vos attentes, serait de nature à améliorer grandement la situation dans les quartiers.
M. le président Gilles Carrez. Mes chers collègues, en l’absence d’autres questions, nous allons libérer les ministres et poursuivre par la réunion successive des trois commissions concernées.
La réunion de la commission élargie s’achève à midi.
Annexes
DÉPÔT D'UN PROJET DE LOI
M. le président de l'Assemblée nationale a reçu, le 8 novembre 2013, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté, par le Sénat, relatif à l'économie sociale et solidaire.
Ce projet de loi, n° 1536, est renvoyé à la commission des affaires économiques, en application de l'article 83 du règlement.
TEXTES TRANSMIS EN APPLICATION DU PROTOCOLE SUR L’APPLICATION DES PRINCIPES DE SUBSIDIARITÉ ET DE PROPORTIONNALITÉ ANNEXÉ AU TRAITÉ SUR L’UNION EUROPÉENNE ET AU TRAITÉ SUR LE FONCTIONNEMENT DE L’UNION EUROPÉENNE
La Commission européenne a transmis, en application du protocole (no 2) sur l'application des principes de subsidiarité et de proportionnalité, annexé au traité sur l'Union européenne et au traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, à M. le Président de l'Assemblée nationale, le texte suivant :
Communication du 8 novembre 2013
Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 94/62/CE relative aux emballages et aux déchets d’emballages pour réduire la consommation de sacs en plastique légers à poignées [COM(2013) 761 final].