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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIVe législature
Session ordinaire de 2014-2015

Compte rendu
intégral

Deuxième séance du mercredi 01 avril 2015

SOMMAIRE

Présidence de Mme Laurence Dumont

1. Modernisation du système de santé

Discussion des articles (suite)

Article 4 (suite)

Mme Martine Pinville

M. Martial Saddier

M. Guillaume Larrivé

M. Gilles Lurton

M. Michel Piron

Mme Véronique Louwagie

M. Dino Cinieri

Mme Catherine Vautrin

M. Élie Aboud

M. Julien Aubert

M. Jacques Krabal

Mme Dominique Orliac

M. Arnaud Robinet

M. Yves Fromion

M. Frédéric Reiss

M. Paul Giacobbi

M. Christian Kert

M. Patrice Verchère

M. Antoine Herth

M. Jean-Pierre Door

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes

Suspension et reprise de la séance

Article 4 (suite)

Amendement no 592

M. Olivier Véran, rapporteur de la commission des affaires sociales

Amendements nos 1640 , 1522 , 1261 rectifié , 1423 , 1426 , 187 , 2442 , 2 , 49 , 190 , 192 , 211 , 252 , 586 , 707 , 785 , 808 , 1157 , 1707

Mme Bernadette Laclais, rapporteure de la commission des affaires sociales

Amendements nos 1784 , 2295 , 1217

Après l’article 4

Amendements nos 1664, 1665, 1666, 1667, 1668, 1669, 1670, 1671 , 1504 , 1663

Article 4 bis

M. Dino Cinieri

M. Bernard Perrut

M. Arnaud Robinet

M. Denys Robiliard

M. Julien Aubert

Amendement no 2443

Après l’article 4 bis

Amendement no 1514

Article 5

M. Nicolas Dhuicq

Mme Michèle Delaunay

M. Dino Cinieri

M. Arnaud Robinet

M. Bernard Perrut

Amendements nos 845 , 333 , 1712 , 1486 , 1867 , 196 , 197 , 373 , 2280 , 1450 , 1453

Après l’article 5

Amendements nos 1440 , 741 deuxième rectification, 737 , 1904 , 777 , 1272 deuxième rectification , 445 , 925 , 451 , 458 , 1118 , 378 , 2283 , 375 , 2281 , 198 rectifié , 370 , 2279 , 2264 , 1502 , 439 , 1336, 1307 , 376 , 2282

Article 5 bis

Amendement no 1352

Après l’article 5 bis

Amendements nos 1343 , 446 , 1899 , 459 , 461, 440, 319, 315

Article 5 ter

Amendement no 2105

Après l’article 5 ter

Amendement no 1933

Article 5 quater

Amendement no 1019

Après l’article 5 quater

Amendements nos 1766 , 1052

2. Ordre du jour de la prochaine séance

Présidence de Mme Laurence Dumont

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

1

Modernisation du système de santé

Suite de la discussion d’un projet de loi

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion, après engagement de la procédure accélérée, du projet de loi de modernisation de notre système de santé (nos 2302, 2673).

Discussion des articles (suite)

Mme la présidente. Cet après-midi, l’Assemblée a poursuivi la discussion des articles, s’arrêtant à Mme Pinville, oratrice inscrite à l’article 4.

Article 4 (suite)

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Pinville.

Mme Martine Pinville. Compte tenu des débats que nous avons pu avoir sur l’article 4, je tiens à rappeler l’objectif important de cet article, qui est de lutter contre les pratiques d’alcoolisation massive des jeunes. En effet, on sait que la consommation d’alcool a des conséquences importantes sur le développement cérébral : retarder les usages précoces de l’alcool et réduire les alcoolisations ponctuelles importantes des plus jeunes permet de limiter ces dommages difficilement réversibles.

Je salue la volonté du Gouvernement et de Mme la ministre de lutter contre le binge drinking et cette consommation excessive. Certains ont remis en cause la loi Evin ; au nom des députés du groupe SRC, j’indique qu’il n’est pas nécessaire de remettre en question l’équilibre de cette loi en la durcissant ou en l’assouplissant. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes SRC et UMP.)

M. Yves Fromion. Très bien !

M. Élie Aboud. Ce n’était pas votre position en commission !

Mme la présidente. La parole est à M. Martial Saddier.

M. Martial Saddier. Comme beaucoup de mes collègues du groupe UMP, je tiens à rappeler ma volonté sans faille de lutter contre les comportements excessifs en matière de consommation d’alcool, notamment pour protéger la jeunesse de notre pays. La loi Evin avait permis d’atteindre un équilibre en matière de consommation d’alcool, équilibre qui a d’ailleurs été défendu par le Président de la République lors du salon de l’agriculture.

À l’occasion de la discussion sur l’article 4, je tiens à exprimer ma reconnaissance aux viticulteurs de France, notamment dans les départements de Savoie, première destination touristique mondiale, qui comprend 2 000 hectares de vignes et autant d’ambassadeurs. Aussi, je suis en désaccord avec l’amendement adopté en commission des affaires sociales qui vise à rompre l’équilibre de la loi Evin. Il convient ce soir de préserver cet équilibre en refusant tout assouplissement ou durcissement. Or, accorder au ministère de la santé le droit de modifier les règles d’étiquetage en matière de consommation d’alcool est de nature à le rompre.

M. Paul Giacobbi. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Larrivé.

M. Guillaume Larrivé. Député de l’Yonne, j’ai l’honneur et la joie d’être le député d’Irancy, de Coulanges-la-Vineuse, des côtes d’Auxerre, du Coulangeois, mais aussi de Chablis, de Vézelay,…

M. Paul Giacobbi. Arrêtez, vous nous faites rêver !

M. Guillaume Larrivé. Autant de noms évocateurs, qui sont l’une des fiertés du patrimoine français. Je voudrais me faire le porte-parole des viticulteurs, des vignerons, mais aussi des professionnels de l’œnotourisme de notre territoire : laissez-les travailler, madame la ministre ! Nous sommes fiers d’être ce que nous sommes. Nous sommes Bourguignons, région où tous les terroirs de France sont représentés, et notre message est simple : laissez la viticulture rayonner, ne touchez pas à l’équilibre de la loi Evin, qui est stable depuis des années. Tant reste à faire en France pour surmonter des difficultés immenses ; ne portons pas atteinte à nos atouts ! Défendons vaillamment et ardemment la viticulture française, notamment bourguignonne.

Mme la présidente. La parole est à M. Gilles Lurton.

M. Gilles Lurton. Nous sommes bien sûr tous opposés à une consommation excessive d’alcool, notamment d’alcool fort, et favorables aux campagnes de consommation, en particulier à l’attention des plus jeunes, visant à diminuer ce type de consommation et à informer sur les risques qu’elle peut faire peser sur la santé mais également sur la sécurité routière.

En commission des affaires sociales, madame la ministre, vous avez accepté un amendement du rapporteur visant à donner au seul ministre de la santé les pleins pouvoirs de définition du contenu du message sanitaire qui figure sur les bouteilles de vin. Il s’agit d’une décision en totale contradiction avec les engagements du Président de la République et du Premier ministre qui, lors du dernier salon de l’agriculture, ont réaffirmé que les dispositions de la loi Evin concernant le vin ne seraient pas renforcées. Mais nous ne sommes pas à une contradiction près !

Cet amendement suscite de vives inquiétudes dans l’ensemble de la filière viticole et laisse craindre un durcissement du message sanitaire.

M. Olivier Véran, rapporteur de la commission des affaires sociales. Fantasmes !

M. Gilles Lurton. Il laisse craindre notamment la suppression de la référence : « L’abus d’alcool est dangereux pour la santé » et son remplacement par une mention comme « L’alcool est dangereux pour la santé ». Madame la ministre, comment peut-on détruire ainsi tout ce qui fonctionne bien dans notre pays ? Qui d’entre vous n’a pas, à un moment, apprécié de déguster autour d’une table une bonne bouteille de vin de nos terroirs, du Bordelais, de la Bourgogne et des autres régions évoquées à l’instant par mes collègues ? (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Mme Martine Pinville. Ce n’est pas le sujet !

M. Gilles Lurton. Qui d’entre vous n’a pas éprouvé une certaine fierté à se retrouver en famille le dimanche autour d’une bonne table et d’une bonne bouteille ? Pourquoi vouloir toujours détruire ce qui fait nos traditions, ce lien qui peut nous unir à certains moments de la vie ? Au contraire, nous devrions passer notre temps à mettre en valeur les qualités de la production de nos terroirs, une culture qui fait la fierté de notre pays.

M. Yves Fromion. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Piron.

M. Michel Piron. Avant d’examiner les amendements à l’article 4, je tiens à souligner les conséquences néfastes de certaines confusions. Premièrement, il est indispensable de rappeler que réduire le vin à l’alcool qu’il peut contenir témoigne d’une immense inculture. En effet, le vin est non seulement un produit de culture, au sens où il relève au moins du ministère de l’agriculture, mais également un produit hautement culturel. Il n’est peut-être pas indispensable de rappeler – mais je le ferai quand même – qu’il s’agit au minimum de l’alliance de données naturelles – terroir, microclimat – et de données culturelles, comme le choix du cépage, qui dépendra du terroir, et le savoir de l’homme.

M. Yves Fromion. C’est vrai !

M. Michel Piron. C’est un produit hautement élaboré et culturel ! Faut-il s’imposer en permanence de communiquer de manière honteuse sur un tel produit ? Manifestement, certains amendements à l’article 4 passent complètement à côté de l’objectif qu’ils cherchent à atteindre. Cette confusion et cette réduction du vin à l’alcool me semblent tout à fait erronés.

En second lieu, certains amendements entretiennent une confusion entre l’usage et l’abus. Doit-on condamner l’usage parce qu’il donnerait lieu à des abus ? Cela reviendrait à interdire demain l’usage du beurre parce que sa consommation excessive pourrait éventuellement produire du cholestérol. On voit bien à quels excès une telle logique peut conduire ! Il s’agit véritablement d’une espèce de dévoiement de l’interdit. Plus largement, il y a une forme d’hygiénisme, que je ne qualifierais pas de puritaine mais qui est tellement excessive qu’on en perd le but ultime. Le vin, de toute évidence, requiert les compétences de plusieurs ministères : celui de la santé pour lutter contre les abus, certes, mais certainement aussi celui de l’agriculture, des affaires étrangères qui, je crois le savoir, se félicite de l’image du vin français dans le monde entier et se préoccupe de sa promotion, et même celui de la culture, qui pourrait s’en emparer.

M. Jean-Marie Sermier. Cela dépend du Premier ministre !

M. Michel Piron. En conclusion, je répète que si l’on devait durcir les règles de communication ou d’information, on obtiendrait le contraire du résultat espéré. Les amendements proposés en commission dévoient complètement le message de modération ; ce serait une grave erreur de les adopter.

Mme la présidente. La parole est à Mme Véronique Louwagie.

Mme Véronique Louwagie. Avec l’article 4, vous dites vouloir lutter contre les pratiques de la jeunesse en matière d’alcoolisation massive et nous ne pouvons que vous rejoindre sur ce point : l’alcool est la deuxième cause de mortalité et crée des dommages importants. Dans ce cadre, vous envisagez de modifier le contenu du message actuel, qui a été défini par le législateur en 1991 et est en totale cohérence avec l’objectif de la loi Evin, qui est de lutter contre l’excès. Avec cette nouvelle loi, les messages pourront différer selon les situations et seront définis par un arrêté du ministre de la santé. Les avantages du message actuel, « l’abus d’alcool est dangereux pour la santé », sont son unicité et sa simplicité, qui assurent une lisibilité et une visibilité.

La multiplication des messages à destination des consommateurs risque de les rendre inaudibles. Or, en matière de communication, nous savons que la répétition est le meilleur moyen d’assurer la transmission de l’information. Vous risquez, en définitive, de brouiller complètement le message relatif à l’excès de la consommation d’alcool, de contribuer à anéantir la communication et à rompre l’équilibre entre la consommation modérée et la lutte contre l’excès. Pourquoi remettre en cause l’équilibre de la loi Evin ? Sans pour autant répondre véritablement à votre objectif, votre dispositif concernera tous les alcools – le vin, le cidre ou encore le calvados –, qui représentent, d’une part, un patrimoine culturel de nos territoires, d’autre part, une activité économique.

Mme la présidente. La parole est à M. Dino Cinieri.

M. Dino Cinieri. Nous sommes tous d’accords pour lutter contre l’alcoolisation massive des jeunes. C’est pourquoi nous avons soutenu l’amendement de notre collègue Jean-Pierre Door visant à rendre obligatoire la vérification de l’âge de toute personne achetant de l’alcool fort. Néanmoins, madame la ministre, j’aimerais que vous précisiez à la représentation nationale ce que vous considérez être un objet incitant directement à la consommation excessive d’alcool. Avouez que les alinéas 15, 17 et surtout l’alinéa 11 peuvent laisser perplexe. Mais là où nous ne vous suivons vraiment plus, madame la ministre et monsieur le rapporteur, c’est quand vous autorisez la modification par arrêté ministériel du contenu du message sanitaire qui doit figurer dans la publicité.

Nous ne pouvons accepter cette dérive prohibitionniste, dont les effets seraient dramatiques, tant pour l’image que pour l’avenir d’une filière viticole qui contribue largement à l’économie de notre pays et à son rayonnement à travers le monde. Il s’agit du patrimoine culturel et touristique de nos territoires, ainsi que d’un pan de notre économie que vous pourriez mettre en difficulté.

L’esprit de loi Evin, qui fête ses vingt-quatre ans, est d’abord d’encadrer la publicité et non d’interdire toute forme de communication. Je vous rappelle, madame la ministre, toute l’importance de la vigne et du vin dans notre pays. L’inscription au patrimoine mondial de l’UNESCO de la bonne table et de ses produits français conforte mon propos.

Dans le département de la Loire, les syndicats viticoles et les organismes de défense et de gestion de Chavanay, Condrieu, Château-Grillet, Côte-Rôtie, Saint-Joseph...

Plusieurs députés du groupe UMP. Très bien. (Sourires.)

M. Dino Cinieri. …eh oui, mes chers collègues, comme ceux des trois vignobles du Forez roannais et de la vallée du Rhône, sans oublier les vins de pays, comme les viticulteurs de ce département, sont très inquiets. Ils investissent, emploient, forment et empruntent. J’espère, madame la ministre, que le bon sens sera cette nuit au rendez-vous. Comme mes collègues Jean-Pierre Decool et Bernard Gérard, respectivement président et vice-président du groupe d’études sur la filière brassicole, j’estime qu’il est essentiel de maintenir des boissons alcoolisées. L’abus est, quant à lui, un problème de comportement auquel il faut apporter les bonnes réponses : la solution n’est pas de stigmatiser les produits de notre terroir comme le vin, la bière, le cidre, ou la poire chère à notre collègue Marc Le Fur. (Sourires.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Vautrin.

Mme Catherine Vautrin. Le projet de loi que nous examinons, et plus particulièrement cet article 4, a trait à la santé publique. Dans ce cadre, il faut dire que nous voulons lutter contre l’abus d’alcool : chacun ici l’entend et personne ne dira le contraire.

En revanche, je crois qu’il faut, très simplement, que nous revenions à nos fondamentaux : oui, l’abus d’alcool est dangereux, mais le produit lui-même, dès lors qu’on le consomme avec modération, est excellent, surtout, bien sûr, s’il s’agit de champagne. (Rires et applaudissements sur divers bancs.)

Il est tout à fait important de dire que notre code de la santé publique contient déjà un article, issu de la loi Evin, adoptée il y a vingt-quatre ans, qui explique précisément cette notion d’abus d’alcool. Quand on veut parler de santé publique et d’avertissement du public, il faut s’en tenir à cela : nous condamnons l’abus, en aucun cas le produit. C’est d’autant plus vrai que les professionnels l’appliquent absolument loyalement, qu’il s’agisse de l’œnotourisme ou des produits qu’ils mettent en vente : ils ont partout à cœur d’appliquer cette législation.

Ceci dit, ayons maintenant à l’esprit ce que représente la filière viticole dans notre pays : 10 milliards d’euros d’exportations, c’est-à-dire le deuxième poste excédentaire de notre balance commerciale, 10 millions de touristes qui viennent, dans toutes nos régions, pratiquer l’œnotourisme, et 600 000 emplois. Il n’est pas question d’opposer cette filière d’excellence à la santé publique, mais simplement de respecter les uns et les autres et de garder une position d’équilibre. Celle-ci mérite que nous puissions travailler ensemble et clarifier certaines situations. Très concrètement, il y a nécessité aujourd’hui de discuter et de regarder comment être plus clair en matière de publicité. Un seul message doit nous réunir : seul l’abus est dangereux. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Michel Piron. Et l’usage recommandable.

Mme Sophie Errante et Mme Cécile Untermaier. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Élie Aboud.

M. Élie Aboud. Madame la ministre, je vais me montrer indulgent envers vous. Bien avant vous, d’autres ministres, de gauche comme de droite, ont subi cette pression latente et sous-jacente de certaines personnes de l’administration. Celles-ci veulent entretenir une confusion entre les alcools durs et le vin. Or c’est inacceptable : mes collègues, je pense notamment à ceux de la majorité, l’ont dit. Personne ne peut, sur ces bancs, accepter l’alcoolisme ou l’alcoolisation chez les jeunes. Mais pourquoi s’en prendre à la viticulture ? Je ne veux pas citer, comme l’ont fait mes collègues, tout ce qui se passe dans ce domaine en Languedoc-Roussillon… (Sourires.)

Mes chers collègues, je ne le ferai pas. Je vais néanmoins, madame la ministre, développer trois arguments. Un argument économique d’abord : il s’agit du seul secteur en France qui n’est pas délocalisable et qui enregistre un excédent commercial. Deuxième argument : l’Agence française de l’ingénierie touristique a effectué une enquête rétrospective, sur la base de données claires. Il en ressort qu’un touriste sur deux vient chez nous – car la France reste la première destination touristique au monde – pour la gastronomie et pour le vin.

Troisième argument : sur le terrain médical, un journal connu et reconnu a publié les résultats d’une méta-analyse qui conclut que toute consommation modérée et constante de vin peut entraîner une baisse de la morbidité et de la mortalité.

Madame la ministre, j’adresse à certains intégristes qui sont présents et qui le seront toujours, un message : ne faites pas de confusion entre les alcools durs et le vin.

Mme la présidente. La parole est à M. Julien Aubert.

M. Julien Aubert. Je voudrais également me faire l’écho de l’inquiétude des producteurs de vin…

Plusieurs députés du groupe SRC. Ah.

M. Julien Aubert. …en particulier ceux du Vaucluse qui travaillent dans le cadre des appellations d’origine contrôlée Luberon, Ventoux et Côtes du Rhône.

Mme Martine Pinville. C’est insupportable !

M. Julien Aubert. Madame, nous n’aurions pas à le supporter si nous n’avions pas pénétré sur le terrain délicat de la modification des messages sanitaires, en essayant de toucher aux équilibres de la loi Evin !

Nous parlons premièrement d’une filière fragile : je vous rappelle que, d’après une étude de 2012, les Français buvaient 160 litres de vin par an en 1965, et qu’ils n’en boivent plus aujourd’hui que 57. Le nombre de consommateurs réguliers n’est, en 2015, que de 13 %. Les équilibres évoluent donc. En outre, cette modification a été opérée sans concertation.

Deuxièmement, passer de la modération à la prohibition déresponsabilise quelque part l’individu qui doit, lui aussi, porter une part de responsabilité dans sa propre santé.

Troisièmement, cette évolution est, en termes de marketing et de publicité, un contresens. En effet, la marque « l’abus d’alcool est dangereux pour la santé » est connue. Les gouvernements successifs ont essayé pendant plus de vingt ans d’améliorer sa notoriété : en changer aujourd’hui serait à mon avis contre-productif. Madame le ministre, il y a effectivement une rupture de l’esprit de loi Evin. Je vous rappelle que si l’eau n’est pas dangereuse pour la santé, son abus, lui, l’est : cela s’appelle une noyade. (Sourires.)

Cela veut bien dire qu’il y a une différence entre l’abus et le produit lui-même.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Krabal.

M. Jacques Krabal. En commission, j’ai défendu un amendement visant à clarifier tout ce qui concerne la publicité et la communication autour du vin, produit culturel et atout de notre patrimoine. Bien évidemment, il nous été dit que cela revenait à mettre en cause la loi Evin. N’étant pas élu en 1990, j’ai consulté le compte rendu publié au Journal officiel afin de me rendre compte de la façon dont s’étaient engagés les débats autour de cette loi. J’ai donc lu certaines interventions.

Le ministre disait notamment : « Les dispositions concernant le tabac et l’alcool diffèrent, car la consommation modérée d’alcool ne présente pas de réel risque médical et est au cœur des traditions culturelles ». J’aimerais qu’on s’en souvienne.

J’ai poursuivi ma lecture. Le rapporteur de cette loi, Jean-Marie Le Guen avait notamment déclaré : « les effets économiques négatifs méritent d’être pris en considération ». Or, en 1990, la France ne connaissait pas un niveau de chômage comparable au niveau actuel : elle connaissait même la croissance ! La préoccupation économique imprégnait donc déjà, les débats autour de cette loi. Le même Jean-Marie Le Guen ajoutait : « plutôt que la consommation, c’est l’excès de consommation lui-même qui doit être visé. » En matière de publicité, il indiquait qu’il importait « de permettre une information adaptée à la réalité culturelle, sans pour autant inciter à la consommation ».

Les quelques éléments que je viens de livrer nous incitent donc, bien évidemment, à revenir à l’intention originelle de la loi Evin. Mais il faut aussi profiter de cette occasion pour la revisiter, parce que, depuis vingt ans, la société a changé. Il faut donc soutenir ce qui est, comme cela a été rappelé, un des atouts et un des fleurons essentiels de notre économie, la filière viticole. On nous dit qu’elle représente le deuxième excédent de notre balance commerciale : c’est une erreur, car il s’agit du premier. En effet, dans le secteur aéronautique, on fabrique des avions dans toute l’Union européenne, tandis que le vin ne peut faire l’objet d’une délocalisation. Madame la ministre, il faut donc maintenir la loi Evin mais profiter de l’occasion pour revoir ses dispositions en matière de publicité.

Mme la présidente. La parole est à Mme Dominique Orliac.

M. Michel Issindou. Un peu de Cahors ? (Sourires.)

Mme Dominique Orliac. Nous sommes, bien sûr, tous attachés à la lutte contre l’alcoolisme. Mais les viticulteurs, notamment du Cahors, ont dénoncé un durcissement de la loi Evin. Celle-ci semble devoir être remise en cause en raison de quelques condamnations qui ont inquiété la filière viti-vinicole comme les journalistes. La sagesse serait de revenir à l’équilibre qu’elle avait permis d’atteindre en retirant les amendements qui suscitent ces inquiétudes.

Madame la ministre, la sagesse voudrait aussi, peut-être, que vous vous engagiez, en seconde lecture, à soutenir des mesures allant dans ce sens. En fait, il semble nécessaire de rassurer notre filière viti-vinicole afin que les journalistes ne puissent plus, lorsqu’ils ils communiquent sur la richesse de nos territoires, se faire l’écho de ses inquiétudes. Mais il nous faut garantir, bien sûr, une politique sanitaire efficace.

Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud Robinet.

M. Arnaud Robinet. Lutter contre l’alcoolisme ou l’abus d’alcool chez les jeunes est un devoir qui doit être soutenu par l’action publique que nous devons mener. Mais je crois que nous ne devons pas nous tirer une balle dans le pied. La France est connue pour sa gastronomie et pour son patrimoine gastronomique, mais également pour la qualité de ses vins.

M. Philippe Armand Martin. Et de son champagne.

M. Arnaud Robinet. Effectivement, également pour celle de son champagne, qui est le roi des vins.

La France était le seul pays dans lequel, lors d’un grand prix de Formule 1, le vainqueur n’avait pas le droit de célébrer sa victoire en débouchant une bouteille de champagne ! Les Italiens, qui confectionnent un pseudo-vin effervescent, disent à leurs clients : achetez nos vins, les Français eux-mêmes disent que les leur sont mauvais pour la santé. On le voit, avec cet article 4, nous touchons presque à l’absurdité.

Il existe véritablement deux types d’alcool. Certes, il faut lutter contre le binge drinking, contre les mélanges d’alcool, mais il faut également protéger cette culture et cette tradition qu’est la viticulture, car il s’agit de l’étendard de notre pays.

J’ai également une question relative à un amendement du rapporteur concernant l’affichage et la publicité consacrés aux boissons alcoolisées à proximité des établissements scolaires. En tant que député-maire de Reims, ville ô combien célèbre grâce à son vin, j’éprouve quelques difficultés à son égard car un certain nombre d’établissements scolaires, publics ou privés, s’y trouvent situés à proximité immédiate de maisons de champagne. Tel établissement est installé en face de la maison Krug, tel autre à côté de la maison Roederer ou de la maison Lanson.

Que dois-je donc faire ? Déplacer ces établissements scolaires, ou demander aux maisons de champagne de se délocaliser, d’aller ailleurs ou de s’installer à la campagne pour leur éviter d’exercer leurs activités à proximité d’un établissement scolaire ?

M. Michel Issindou. On a compris…

M. Arnaud Robinet. Il faut donc faire extrêmement attention aux amendements proposés. Nous sommes ici, certes, pour lutter contre l’alcoolisme, mais aussi pour défendre une tradition et une culture : nous le devons aux viticulteurs qui effectuent un travail formidable.

M. Élie Aboud. Excellent !

Mme la présidente. La parole est à M. Yves Fromion.

M. Yves Fromion. Madame le ministre, les vignerons de Sancerre, de Menetou-Salon, de Reuilly, de Quincy, de Coteaux du Giennois et de Pouilly, nous écoutent ce soir, (Exclamations sur certains bancs du groupe SRC.) et ils sont extrêmement inquiets de ce qui se déroule dans cet hémicycle. Madame la ministre, beaucoup de choses extrêmement intelligentes ont été dites et je ne veux pas les répéter. Je voudrais vous rappeler que deux notions sont inséparables : la liberté et la responsabilité. Depuis la loi Evin, il a été demandé aux viticulteurs et aux vignerons – un mot très noble, qu’ils aiment – de faire preuve de responsabilité. Personne ici ne peut dire qu’ils n’ont pas fait tous les efforts qui étaient nécessaires pour effectivement donner de leur merveilleuse profession l’image d’une grande responsabilité dans la qualité des produits comme dans leur mise en marché et leur vente.

Avec cette idée qui consiste à vouloir encadrer les messages de prévention, qui sont nécessaires, on retire au diptyque son autre volet, c’est-à-dire la liberté. On ne considère plus les vignerons comme des personnes libres, capables de dire et de voir par elles-mêmes ce qui est nécessaire pour éviter des excès que tout le monde dénonce.

On les rend incapables et cela, madame la ministre, est inimaginable. Cette disposition de votre texte, introduite par voie d’amendement, ne peut avoir sa place dans le rapport de liberté et de responsabilité qui est établi depuis des années entre nos vignerons, nos viticulteurs et l’ensemble de la société française. Les producteurs de vin sont libres et responsables : ils doivent le rester ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Frédéric Reiss.

M. Frédéric Reiss. Aujourd’hui, le message indiquant quel est le risque d’une consommation excessive de boissons alcoolisées a le mérite de la simplicité et de la clarté. « L’abus d’alcool est dangereux pour la santé », tout le monde comprend. L’alinéa 11 de l’article 4, c’est la porte ouverte à tous les abus, avec un blanc-seing donné à la puissance administrative, et on peut redouter la diabolisation de l’alcool sous toutes ces formes.

Pour le développement de la gastronomie française et de l’excellence de notre filière viticole, l’article 4 tel qu’il a été rédigé par la commission, pourrait entraîner une régression sans pareille. L’œnotourisme connaîtrait un coup de frein dont les conséquences pourraient être désastreuses. Que serait l’Alsace sans sa route du vin ?

Plusieurs députés du groupe UMP. Ça, c’est vrai !

M. Frédéric Reiss. La filière viticole est très inquiète, et avec raison, car on passe d’une logique d’information et de prévention visant à lutter contre l’abus d’alcool à l’objectif de lutter contre la consommation d’alcool en général. Or les bienfaits du vin consommé avec modération sont de plus en plus avérés.

Il me semble nécessaire de préserver la publicité et l’information sur le vin dans l’esprit initial de la loi Evin. Les encadrer, oui, mais les interdire, non ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Paul Giacobbi.

M. Paul Giacobbi. Évidemment, madame la ministre, je ne saurais résister, face à ce florilège des terroirs de France, à la tentation d’y mêler rapidement le mien. La Corse est aussi un producteur avec différents terroirs.

Plus sérieusement, encore que l’avenir d’une filière ait de l’importance, il y a d’abord de la confusion. Un grand médecin, le professeur Jean Bernard, qui a été le pionnier de l’hématologie au niveau international et avait écrit un livre admirable, Le sang et l’histoire, avait rédigé un rapport sur la consommation de vin fondé sur l’idée que la consommation de vin, du moment qu’il s’agissait de vin de qualité, participait de la culture et n’altérait pas la santé. Je vous invite à relire ses livres.

Il y a par ailleurs une contradiction évidente. Nous passons notre temps à vouloir promouvoir nos produits, leur excellence, y compris le vin, et le ministère des affaires étrangères, M. Piron l’a souligné, participe de cette promotion. Nous revendiquons une reconnaissance internationale, et sur nos tables ministérielles et présidentielle, on trouve les meilleurs vins, même lorsque nous avons des hôtes musulmans.

Aujourd’hui, madame la ministre, je crois comprendre que, face aux excès de certains membres de la commission, vous êtes dans la renonciation. Je m’en réjouis. Pour autant, nous ne vous donnerons pas l’absolution si facilement. La renonciation ne suffit pas, il faudra une certaine confession. Je n’ai pas parlé de contrition, encore que cela ne serait pas mal. Que les choses soient claires et nettes, et nous vous donnerons la complète absolution. (Rires et applaudissements sur de nombreux bancs des groupes UMP et UDI.)

Mme la présidente. La parole est à M. Christian Kert.

M. Christian Kert. Madame la ministre, puisque nous avons la chance d’être à peu près tous d’accord pour lutter contre ce fléau qu’est l’alcoolémie, profitons-en pour essayer de réfléchir au fond de la démarche.

Le texte proposé par la commission stigmatise deux professions : la viticulture et la publicité.

Dans la viticulture, et vous soulignez vous-même qu’une charte est en train de porter ses fruits, reconnaissons que nous trouvons des gens extrêmement responsables, qui ont pris conscience des enjeux de la santé.

Quant au monde de la publicité, ceux d’entre nous qui s’en préoccupent savent combien c’est une profession taxée, encadrée, à la liberté de laquelle on a déjà mis un certain nombre de freins.

Cette démarche très contraignante nous laisse penser qu’on voudrait substituer au travail de fond contre l’abus de l’alcool une pratique administrative contraignante, liberticide, sur la publicité. Pour nous, ce n’est pas le fond du problème.

Nous souhaitons donc vraiment que vous preniez conscience du sens de notre démarche, qui est une démarche responsable, de même que les viticulteurs et les publicitaires sont des gens responsables.

Mme la présidente. La parole est à M. Patrice Verchère.

M. Patrice Verchère. Nous sommes là pour défendre une certaine identité de nos terroirs et, si nous intervenons, c’est vraiment pour insister sur ce point car, s’il est essentiel de maintenir la distinction entre une consommation responsable des boissons alcoolisées et l’abus, qui est un problème de comportement, auquel, il est vrai, il faut apporter de bonnes réponses, il ne faut pas pour autant stigmatiser les produits.

Il est vrai qu’un grand nombre de viticulteurs de nos terroirs régionaux, comme ceux du Beaujolais et des Coteaux du Lyonnais, sont inquiets d’une éventuelle suppression du message actuel, qui est pourtant simple, lisible, compréhensible par tous, et qui fait autorité depuis de nombreuses années, une disposition qui fait consensus.

En laissant à l’administration toute latitude pour fixer le message, on risque d’ouvrir la boîte de Pandore. Pourquoi ne pas imaginer à terme des bouteilles neutres sans aucune étiquette ? Faisons donc attention, quand il y a consensus, à ne pas le briser.

Mme la présidente. La parole est à M. Antoine Herth.

M. Antoine Herth. Je ne vais pas vous faire l’apologie des vins d’Alsace, Frédéric Reiss l’a fait excellemment. Je voudrais simplement revenir sur nos travaux parlementaires.

Nous avons examiné il y a quelques mois dans cet hémicycle le projet de loi d’avenir pour l’agriculture et la forêt et, à cette occasion, avec l’accord d’ailleurs du ministre de l’agriculture et une approbation sur tous les bancs, nous avons modifié le code rural pour préciser qu’un certain nombre de produits du terroir, en particulier les produits vitivinicoles, font partie du patrimoine gastronomique de la France. En écho, en quelque sorte, le Gouvernement nous a annoncé qu’à l’occasion de l’exposition universelle de Milan, qui va s’ouvrir dans un mois exactement, le 1er mai, il axerait ses efforts sur la gastronomie française, et j’imagine que les produits vitivinicoles y auront une place de choix.

C’est tout simplement dans un esprit de cohérence que nous souhaitons ce soir avoir un texte équilibré, pour ne pas gâcher le message que nous voulons envoyer sur le patrimoine gastronomique français, le savoir-vivre, et le vendre à l’étranger.

Je crois que c’est l’esprit de l’ensemble de ces interventions que je peux résumer ainsi.

M. Élie Aboud. Très bien résumé !

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Door.

M. Jean-Pierre Door. Le Gouvernement a raison de lutter contre l’alcoolisation en toutes circonstances, en particulier celle des jeunes, surtout lors de certaines rave parties ou certaines séances de bizutage. Tout cela est effectivement contestable. Le rapporteur, M. Véran, a accepté en commission un amendement du groupe UMP imposant aux jeunes de prouver qu’ils étaient majeurs pour pouvoir acheter de l’alcool, qui a été adopté.

Cela dit, nous voulons faire la différence entre l’abus et la modération. Hippocrate, quatre siècles avant Jésus-Christ, avait déjà trouvé que le vin avait des vertus médicinales et permettait d’éviter les maladies cardiovasculaires. Il y a des spécialistes ici, ils savent ce qu’est le french paradox, dont on parle depuis les années 90 en France. Grâce aux polyphénols, qui sont des antioxydants puissants, on peut réduire par trois la mortalité par infarctus dès lors que, dans les régimes, on accorde quelques verres de bon vin rouge.

Le vin est un bon remède. C’est ce que disent d’ailleurs des thèses médicales. Nous devons donc le défendre.

Boire un peu de vin rouge et manger un peu de chocolat, ce sont des signes de bonne santé, madame la ministre, et cela donne le moral. Merci pour le chocolat... (Sourires.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes. Vous vous êtes exprimés de manière fort convergente. Je remercie ceux qui auraient souhaité s’exprimer dans un autre sens et ont laissé Martine Pinville parler pour eux.

Nous abordons l’article 4, article important, qui a donné lieu à toute une série d’amendements. Il concerne les risques liés à l’alcoolisation excessive des jeunes, ce qu’on appelle dans le langage commun le binge drinking.

La position du Gouvernement n’est ni une renonciation ni de la contrition, il suffit de se référer au compte rendu des débats en commission pour voir que j’ai rappelé à cette occasion que le Gouvernement ne souhaitait pas une remise en cause du cadre de la loi Evin. C’est cette position que je souhaite ce soir réaffirmer.

L’objectif du projet de loi tel que je l’ai déposé est de nous donner les moyens de lutter contre l’alcoolisation excessive des jeunes, dont le développement est préoccupant.

M. Yves Fromion. C’est vrai !

Mme Marisol Touraine, ministre. Il n’y a d’ailleurs pas eu de contestation sur ce point en commission.

L’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé a publié hier des données statistiques montrant que cette pratique est en développement préoccupant. Ainsi, près d’un jeune sur deux a connu un état d’ivresse au cours de l’année écoulée. En dix ans, on est passé de 33 % à 46 % des jeunes, et la part de ceux qui ont connu au moins trois ivresses dans l’année a presque doublé, passant de 15 à 29 %. Cette tendance à la hausse s’observe plus particulièrement chez les jeunes femmes, notamment chez les étudiantes, puisque 28 % d’entre elles déclarent au moins trois ivresses dans l’année en 2014 alors qu’elles n’étaient que 19 % au tournant des années 2010 et 8 % seulement en 2005.

J’ai eu l’occasion de rappeler hier dans mon intervention liminaire l’apport considérable de la loi Evin de 1990 pour nos politiques de prévention et d’ailleurs, plus largement, pour notre système de santé. Cette loi est un texte d’équilibre, respecté depuis des années.

Plusieurs députés du groupe UMP. Très bien !

M. Élie Aboud. Nous sommes d’accord !

Mme Marisol Touraine, ministre. Cet équilibre a permis de lutter contre l’alcoolisme, de protéger alors les jeunes, mais les jeunes, aujourd’hui, sont confrontés à des tentations nouvelles. Cet équilibre, le Gouvernement y tient, je le répète, puisqu’il s’agit de lutter contre l’alcoolisme sans pour autant pénaliser les producteurs. Comme je l’ai annoncé en commission, il n’a pas l’intention de rompre cet équilibre.

Plusieurs amendements d’initiative parlementaire ont été adoptés, qui ont suscité des craintes chez l’ensemble des acteurs concernés. Mesdames, messieurs les députés de l’opposition, je vous ai surtout entendus relayer les inquiétudes des uns, mais d’autres acteurs se sont exprimés au cours de ces derniers jours, en particulier des acteurs de santé publique, comme l’Institut national de lutte contre le cancer, pour faire état de l’inquiétude que suscitait chez eux l’adoption d’un amendement venant redéfinir les règles en matière de publicité.

Deux amendements ont été adoptés, qui viennent déséquilibrer le texte. Le premier est devenu l’alinéa 11 de l’article 4, qui vise à renvoyer à un arrêté ministériel les messages sanitaires relatifs à l’alcool, aujourd’hui définis par la loi. Le second amendement, devenu l’article 4 bis, modifie sensiblement les règles en matière de publicité. En voulant les préciser, nous courons le risque de les dénaturer. La loi Evin dit que la publicité est permise sur un nombre somme toute important de supports, mais que la jeunesse doit en être protégée. C’est pourquoi les journaux, pour ne citer qu’eux, à l’exception des publications destinées à la jeunesse, peuvent comporter de la publicité pour l’alcool. Ces journaux ont, par ailleurs, le droit de publier des critiques œnologiques, mais il faut respecter certaines règles. On peut parler d’alcool, mais tout dépend de la manière dont on le fait.

La Cour de cassation, en 2004, a estimé que les limitations à la liberté d’expression prévues par la loi Evin n’étaient pas disproportionnées avec l’objectif de protection de la santé publique. C’est cet équilibre que la loi a su concilier entre deux objectifs, que le Gouvernement veut préserver. Au-delà de ces deux amendements qui ont d’ores et déjà été adoptés, un autre, concernant l’outre-mer, est porté par Mme Orphé. Je tiens à vous dire, madame la députée, que, s’agissant de l’alcoolisme, la spécificité des outre-mer est bien identifiée et qu’elle fait partie des priorités que j’assigne aux agences régionales de santé de ces territoires. Dans ce cadre, je vous demanderai de bien vouloir retirer l’amendement que vous avez présenté.

Pour ce qui est des deux premiers amendements, le Gouvernement a pour sa part déposé un amendement de suppression, au nom du respect du principe d’équilibre. C’est pourquoi, mesdames et messieurs les députés, si nous parvenons de cette manière-là à rétablir l’équilibre du projet de loi, tel qu’il vous a été présenté en début de discussion, il me semble que nous pourrions éviter de fausses discussions ou de fausses accusations et progresser de manière positive dans l’examen de ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mme Cécile Untermaier. Excellent !

Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud Robinet.

M. Arnaud Robinet. Je ne peux pas accepter que Mme la ministre parle de fausses discussions !

Mme la présidente. Vous ne pouvez pas reprendre la parole sur l’article, monsieur Robinet !

M. Arnaud Robinet. Je voulais demander une suspension de séance, madame la présidente.

Mme la présidente. La suspension est de droit.

Suspension et reprise de la séance

Mme la présidente. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt-deux heures vingt, est reprise à vingt-deux heures vingt-cinq.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

Article 4 (suite)

Mme la présidente. La parole est à M. Nicolas Dhuicq, pour soutenir l’amendement n592, visant à supprimer l’article.

M. Nicolas Dhuicq. Madame la ministre, j’ai commencé mes études à un moment où l’on nous apprenait qu’il n’y avait au monde qu’en France que l’on souffrait de cirrhose. Ici, le sujet est bien celui de l’alcoolisation aiguë et massive des adolescents qui recherchent une ivresse et un paradis artificiel immédiat, un véritable assommoir. Ce comportement signe la défaite des adultes et l’incapacité de notre société à projeter la jeunesse de France dans l’avenir et à lui offrir une espérance. L’objet de cet amendement est de vous alerter sur plusieurs points, notamment sur celui des publicités que vous voulez limiter. La question des publicités à l’abord des écoles nous inquiète particulièrement.

Cependant, je voudrais également parler un peu du principe de plaisir. Vos amendements sont extrêmement puritains, mes chers collègues. Celui qui s’alcoolise de manière massive cherche l’assommoir, la destruction, il joue avec la mort et n’est pas dans le principe de plaisir. Mais, madame la ministre, n’oubliez pas que, dans cette société qui est extrêmement dure, douloureuse et difficile pour nos adolescents, il est important de leur offrir une espérance, une ouverture vers l’avenir et vers le monde, un travail. Il faut donc aussi préserver la possibilité d’un avenir, en particulier à ces jeunes qui vont s’engager dans les métiers agro-viticoles. C’est pour cela que je tiens à défendre également ce principe de plaisir qui fait partie de la vie.

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Véran, rapporteur de la commission des affaires sociales, pour donner l’avis de la commission.

M. Olivier Véran, rapporteur de la commission des affaires sociales. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Même avis.

Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud Robinet.

M. Arnaud Robinet. Suite à la suspension de séance, je voudrais résumer la situation dans laquelle nous nous trouvons. Nous avons bien noté, madame la ministre, votre amendement de suppression de l’alinéa 11, qui vise à supprimer les amendements déposés notamment par Olivier Véran et Monique Orphé, concernant l’affichage de la publicité consacrée aux boissons alcoolisées à proximité de tout établissement scolaire.

M. Olivier Véran, rapporteur. Oui !

M. Arnaud Robinet. Nous avons également noté la suppression de l’amendement voté en commission et déposé par notre collègue Robiliard, qui constituait l’article 4 bis. Nous demandons en contrepartie la constitution d’un groupe de travail au plus vite, avant la lecture au Sénat, pour étudier et redéfinir tout ce qui concerne la publicité et la communication.

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Piron.

M. Michel Piron. Madame la ministre, je prends également acte, très volontiers, des amendements que vous avez signalés. Je me joins à la demande qui vient d’être formulée concernant une meilleure définition de la publicité. Vous le savez, il y a aujourd’hui une certaine marge d’incertitude juridique, et même une incertitude jurisprudentielle, qui rend parfois difficile l’information, notamment sur les réseaux. Le risque juridique encouru par ceux qui essaient de communiquer de manière responsable sur le vin mérite d’être étudié sérieusement. Tout le monde a conscience qu’il est très difficile de savoir à partir de quel moment on passe de l’information à la communication et de la communication à la publicité. Cela n’est pas si simple et peut même relever d’un droit un peu mou. C’est une raison supplémentaire pour apporter un peu de sécurité.

Enfin, madame la ministre, vous avez évoqué le binge drinking, soit cette espèce d’anti-culture du vin, qui, vous l’avez bien dit, a saisi de plus en plus de jeunes qui consomment des alcools extrêmement durs, parfois frelatés, dans des délais extrêmement brefs.

C’est l’antinomie absolue de la culture du vin. Je souhaite donc que quand évoque le vin, on ne passe pas insensiblement et si facilement de cette culture que nous défendons aux modes de protection contre des pratiques qui n’ont rien à voir. Je serais d’ailleurs très curieux de savoir si des études précises ont été menées sur le type de boisson que prennent ces jeunes, sur leur profil et sur leur éducation…

M. Christian Hutin. Il en existe.

M. Michel Piron. …car le vin, lui, est un produit culturel qui s’apprend, sans aucun rapport avec les produits que vous avez justement dénoncés. Il faut être clair dans ce domaine.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Krabal.

M. Jacques Krabal. Madame la ministre, nous avons pris bonne note que vous souhaitiez la suppression des amendements à l’article 4, et c’est une bonne chose. Mais le statu quo par rapport à la loi Evin ne me semble pas aujourd’hui la solution. Je rappelle que cette loi n’a jamais fait l’objet d’une évaluation. Il serait temps de la mener. Le groupe de travail peut être une solution à partir du moment où la définition de la publicité qui en sortira ne sera pas un handicap. Notre pays a retrouvé la première place mondiale dans la filière viticole. Ne la perdons pas face à la concurrence effrénée qui arrive, qu’il s’agisse des vins italiens ou des vins espagnols. Il est donc absolument indispensable de s’engager vers une définition de la publicité qui permette la promotion de notre culture et de notre territoire. Je demande que cette clarification soit faite.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marisol Touraine, ministre. Je répète, de la manière la plus claire qui soit, le fond du propos que j’ai tenu tout à l’heure : pour maintenir l’équilibre que représente la loi Evin, je ne souhaite pas que des amendements, qu’ils aillent dans un sens ou dans l’autre, soient adoptés. Ainsi, les amendements adoptés en commission feront l’objet d’amendements de suppression de la part du Gouvernement, les autres d’une demande de retrait, les députés concernés s’y étant par ailleurs engagés. On a beaucoup entendu l’opposition, mais je souligne que les parlementaires de la majorité se sont fortement impliqués, et ce dans de multiples directions, certains plus sensibles à des arguments de santé publique, d’autres au besoin de clarification du droit en vigueur – je pense à l’amendement défendu en commission par M. Denys Robiliard, fruit d’un travail extrêmement approfondi, à l’article 4 bis. Dès lors que son amendement ne serait pas voté, je sais qu’il souhaite qu’un travail de clarification juridique soit mené. Quel doit en être le cadre ? À nous d’en discuter dans les jours qui viennent. Ce peut être un cadre strictement parlementaire s’il s’agit de votre commission, ou d’un groupe de travail qui comprendra des membres de la majorité et de l’opposition, pour réfléchir aux éventuelles difficultés d’interprétation juridique que poserait la loi Evin. Je suis ouverte aux propositions à ce sujet.

(L’amendement n592 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Orphé, pour soutenir l’amendement n1640.

Mme Monique Orphé. M. Letchimy en est l’auteur. Les alinéas 4 et 5 modifient le premier alinéa de l’article 227-19 du code pénal en renforçant les peines infligées pour le fait de provoquer directement un mineur à la consommation excessive d’alcool ou pour le fait de le provoquer directement à la consommation habituelle d’alcool. L’amendement vise ainsi à compléter la dimension coercitive du dispositif détaillé à l’article 4 par un volet éducatif. En effet, au-delà de la punition, il apparaît déterminant de sensibiliser les personnes condamnées aux conséquences de l’alcoolisme en les confrontant directement aux victimes et en leur montrant les situations dramatiques auxquelles leur comportement peut conduire. Cette disposition à visée éducative semble d’autant plus pertinente que les personnes responsables de tels actes sont susceptibles d’être de jeunes adultes, pas nécessairement beaucoup plus vieux que leurs victimes, et pas forcément conscients de la gravité de leur comportement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Olivier Véran, rapporteur. Madame Orphé, je vous demande de retirer cet amendement car il contrevient au principe de la proportionnalité des peines, même si la commission avait donné un avis favorable. À défaut, l’avis serait défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Même avis

Mme la présidente. Madame Orphé ?…

Mme Monique Orphé. Je le retire.

(L’amendement n1640 est retiré.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Anne-Yvonne Le Dain, pour soutenir l’amendement n1522.

Mme Anne-Yvonne Le Dain. Il faut considérer la question des addictions dans leur ensemble et non pas une par une – le tabac d’un côté, l’alcool de l’autre, et par ailleurs les substances illicites. Je propose une rédaction qui permettrait de toutes les réunir en une seule formulation : « À l’alinéa 10, après le mot : "alcoolisme", insérer les mots : "et du tabagisme". En conséquence, compléter le même alinéa par la phrase suivante : "Ces campagnes [de lutte contre l’alcoolisme et le tabagisme] portent également sur la consommation de substances illicites." » De même, à l’alinéa 11, seraient insérés les mots : « produits et substances concernés » car il n’y a pas que des substances qui sont en cause.

J’entends par produit par exemple la marijuana, vendue aujourd’hui sur la place publique à des jeunes. La moitié de ceux âgés de dix-sept ans en ont fumé au moins une fois dans l’année, et les quatorze-quinze ans sont plus de 30 % à en consommer. J’ajoute que maintenant on ne leur vend pas seulement du shit, mais aussi les petites machines pour le broyer. C’est une véritable industrie qui s’installe. Il serait bon que cette loi rappelle que tout le monde est concerné et qu’il faut mener un travail d’éducation sur ces différents points. Mes chers collègues, c’est extrêmement important car la jeunesse est, elle aussi, touchée. Je conclurai par une statistique : 50 % de la population âgée de quinze ans à soixante-quinze ans a fumé une fois dans l’année du cannabis. Cela concerne toute la population, la ruralité autant que le monde urbain et périurbain. Je rappelle qu’alcoolisme, tabagisme et consommation de substances illicites relèvent tous de l’addiction et qu’il faut par conséquent traiter tout ensemble.

M. Philippe Vitel. Il ne faut tout de même pas tout mélanger !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Olivier Véran, rapporteur. On peut partager, madame Le Dain, votre ambition de lutter contre toutes les formes de poly-addiction ou de poly-toxicomanie. Cela étant, nous sommes en train de débattre d’un article sur la prévention de l’alcoolisme, notamment à destination des plus jeunes, et y insérer les multiples vecteurs de lutte contre le tabac ou contre les produits stupéfiants lui ferait véritablement perdre en visibilité et même en cohérence. L’avis est donc défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Même avis.

Mme la présidente. La parole est à M. Nicolas Dhuicq.

M. Nicolas Dhuicq. Je partage la préoccupation de ma collègue Anne-Yvonne Le Dain, mais on peut tous se demander si notre addiction à la politique et au travail est néfaste... L’addictologie ne concerne pas uniquement des substances ou des produits, mais aussi des comportements.

M. Christian Hutin. C’est vrai.

M. Nicolas Dhuicq. J’ajoute qu’associer un produit culturel qui peut avoir des effets psychotropes, à savoir le vin, aux autres produits évoqués dans l’amendement créerait une confusion extrêmement dangereuse. Je peux vous dire que je n’avais pas un patient de moins de trente ans qui n’était pas consommateur de cannabis, et cela fait trente ans que le phénomène se développe dans tous les sens. Les Scandinaves ont bien montré qu’on a six fois plus de risque de rentrer en schizophrénie, contrairement à ce que d’anciens ministres français ont déclaré publiquement.

Je veux mener ce combat avec vous, ma chère collègue mais, de grâce ne confondons pas les produits, par exemple les psychotropes illicites, avec le vin.

Mme la présidente. Madame Le Dain ?…

Mme Anne-Yvonne Le Dain. Je retire l’amendement, madame la présidente.

(L’amendement n1522 est retiré.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements, nos 1261 rectifié et 1423, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n1261 rectifié.

M. Olivier Véran, rapporteur. Je le retire, madame la présidente.

(L’amendement n1261 rectifié est retiré.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Orphé, pour soutenir l’amendement n1423.

Mme Monique Orphé. Je vais le retirer, mais…

Mme la présidente. Madame Orphé, vous ne pouvez prendre la parole sur un amendement s’il est retiré. Mais vous pourrez vous exprimer sur l’amendement suivant.

(L’amendement n1423 est retiré.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Orphé, pour soutenir l’amendement no 1426.

Mme Monique Orphé. Je rappelle, madame la ministre, qu’un rapport de l’OMS, publié en 2014, estime que l’alcool serait à l’origine de 3,3 millions de décès en 2012, et responsable de 200 maladies différentes. L’alcool est une des premières causes de mortalité prématurée. À La Réunion, on est confrontés à une publicité omniprésente, avec des pics selon les périodes, notamment lors des fêtes, et les sanctions prévues ne sont pas appliquées. Il n’y a de prévention. J’ai entendu des réticences du côté de l’UMP à durcir la législation et j’ai bien compris qu’il y avait chez ces collègues d’en face une certaine forme d’apologie, mais j’ai surtout retenu la proposition de constituer un groupe de travail. Je veux bien retirer cet amendement, mais j’espère vraiment que ce groupe de travail fera évoluer les choses parce que je ne peux pas accepter que l’alcoolisme cause de tels dégâts dans mon département, où il est la première cause de mortalité.

(L’amendement n1426 est retiré.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Boyer, pour soutenir l’amendement n187.

Mme Valérie Boyer. Il est défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Même avis, mais je veux à revenir sur l’intervention de Mme Orphé. Je tiens à lui dire que je comprends la préoccupation qu’elle a exprimée pour la santé outre-mer. Il y a dans ces territoires des enjeux de santé publique qui ne concernent pas uniquement l’alcool, des enjeux à la fois spécifiques et préoccupants. Un rapport de la Cour des comptes a mis en évidence les spécificités de la situation, avec des caractéristiques différentes selon les territoires ultramarins, ce qui nous oblige à avoir une approche plus différenciée que ne le pensent certains. Les outre-mer ne peuvent être réunis en un seul bloc.

Je vous ai informée, madame la député, de la création d’un groupe de travail pour élaborer une stratégie pour les outre-mer.

Je crois que dans le cadre de cette stratégie, tous les enjeux liés à la prévention de l’alcoolisme pourront être abordés et discutés. Mais je comprends, madame Orphé, votre préoccupation compte tenu des caractéristiques de votre territoire.

Mme la présidente. Auriez-vous un regret, madame Boyer ?

Mme Valérie Boyer. Si c’est possible, madame la présidente, je souhaiterais prendre de nouveau la parole sur l’amendement n187.

Mme la présidente. Mais je vous en prie.

Mme Valérie Boyer. Merci, madame la présidente.

La rédaction actuelle de la loi Evin ne permet pas aux marques de boissons alcoolisées de diffuser dans leur publicité un message de consommation responsable et, de ce fait, d’informer les consommateurs sur les risques liés à une consommation excessive ou inappropriée d’alcool. Des actions judiciaires ont ainsi été intentées à l’encontre de publicités de boissons alcooliques portant un message de modération, ce qui a eu pour effet d’empêcher les opérateurs de la filière de communiquer auprès des consommateurs sur la notion pourtant essentielle de consommation responsable.

On se retrouve aujourd’hui dans une situation paradoxale, dans la mesure où la majorité des consommateurs français ne connaissent pas les critères d’une consommation responsable établis par l’Organisation mondiale de la santé en vue d’informer les consommateurs sur les niveaux de consommation d’alcool à ne pas dépasser et de réduire au maximum les risques liés à une consommation excessive. D’après une enquête récente, ces seuils ne seraient connus que par moins d’un tiers des personnes interrogées. Pourtant, ils sont facilement communicables.

Notre amendement propose donc de reconnaître aux producteurs, fabricants ou distributeurs de boissons alcoolisées le droit de faire apparaître dans leurs publicités un message de prévention en matière de consommation d’alcool, comment cela existe dans les autres grands pays occidentaux. Les opérateurs pourraient ainsi compléter l’action des pouvoirs publics en matière d’éducation du consommateur, à leurs frais et non à ceux du contribuable. En effet, comme le souligne la stratégie en matière d’alcool adoptée par l’Union européenne, l’industrie des boissons alcoolisées et les détaillants peuvent jouer un rôle important en faveur d’une consommation responsable. Encore faudrait-il que la loi le permette dans notre pays.

Il serait notamment important de relayer les informations de l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé. Aujourd’hui, cela n’est pas possible – et c’est dommage.

(L’amendement n187 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’une série d’amendements identiques, nos 2442, 2, 49, 190, 192, 211, 252, 586, 707, 785, 808, 1157, 1707, 1784 et 2295.

Sur cette série d’amendements, je suis saisie par le groupe de l’Union pour un mouvement populaire d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement n2442.

Mme Marisol Touraine, ministre. Il s’agit de l’amendement évoqué précédemment, qui vise à supprimer l’alinéa 11.

Mme la présidente. La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir l’amendement n2.

M. Dino Cinieri. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Suguenot, pour soutenir l’amendement n49.

M. Alain Suguenot. Je précise d’ores et déjà qu’au nom du parallélisme des formes, il faudra aussi revenir sur l’article 4 bis.

Nous avons pris bonne note de votre engagement, madame la ministre, de confier à un groupe de travail le soin de réfléchir à une nouvelle définition de la publicité. Mais permettez-moi de vous rappeler qu’un groupe de travail existait par le passé, qui avait été institué par la loi : le conseil de modération et de prévention. Il a été supprimé ! Nous allons donc réinventer l’eau chaude, car il faudra bien trouver un moyen de mettre tout le monde autour de la table. Pourquoi avoir supprimé le conseil de modération et de prévention en 2014 si c’est pour le rétablir aujourd’hui ?

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Perrut, pour soutenir l’amendement n190.

M. Bernard Perrut. Le respect des dispositions existantes nous semble une solution de sagesse. Il faut que la loi, et elle seule, s’applique et que la viticulture continue à s’exprimer, notamment à travers les messages publicitaires, dans le respect de celle-ci.

Je souhaiterais toutefois, madame la ministre, que nous puissions un jour dresser le bilan de la loi Evin, et qu’à partir de cet état des lieux, nous réfléchissions à la manière dont nous pourrions consolider la loi, avec l’objectif de lutter contre les excès et tout ce qui peut nuire à la santé, mais aussi dans le respect de la communication raisonnable et de la consommation avec modération.

Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Menuel, pour soutenir l’amendement n192.

M. Gérard Menuel. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour soutenir l’amendement n211.

M. Jean-Pierre Door. Lui aussi est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. La parole est à M. Frédéric Reiss, pour soutenir l’amendement n252.

M. Frédéric Reiss. Défendu !

Mme la présidente. La parole est à M. Florent Boudié, pour soutenir l’amendement n586.

M. Florent Boudié. Je le retire au profit de celui du Gouvernement et je remercie la ministre pour son écoute.

(L’amendement n586 est retiré.)

Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud Robinet, pour soutenir l’amendement n707.

M. Arnaud Robinet. Défendu !

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Armand Martin, pour soutenir l’amendement n785.

M. Philippe Armand Martin. Nous nous félicitons que Mme la ministre ait accepté de supprimer les dispositions prévoyant que les messages sanitaires seraient définis par le ministère de la santé. Il reste que la définition de la notion de « publicité » fait problème, pour le monde du journalisme comme pour les jeunes et le monde de la viticulture. C’est pourquoi nous souhaiterions, madame la ministre, un engagement de votre part sur quelque chose de sérieux.

Mme Catherine Quéré. Il a été pris !

M. Philippe Armand Martin. Qui participera au groupe de travail ? Ce dernier comprendra-t-il des représentants du monde de la viticulture et des parlementaires – de la majorité ou de l’opposition ? Comme l’a noté notre collègue, il est regrettable que vous ayez supprimé le conseil de modération et de prévention, auquel j’ai participé pendant dix ans, qui nous permettait d’échanger avec les différents ministères afin de trouver des solutions sur les messages sanitaires.

Mme la présidente. La parole est à M. Gilles Lurton, pour soutenir l’amendement n808.

M. Gilles Lurton. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Hélène Fabre, pour soutenir l’amendement n1157.

Mme Marie-Hélène Fabre. Je le retire au profit de l’amendement du Gouvernement.

(L’amendement n1157 est retiré.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Bernadette Laclais, rapporteure de la commission des affaires sociales, pour soutenir l’amendement no 1707.

Mme Bernadette Laclais, rapporteure de la commission des affaires sociales. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Louis Roumegas, pour soutenir l’amendement n1784.

M. Jean-Louis Roumegas. Défendu !

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Krabal, pour soutenir l’amendement n2295.

M. Jacques Krabal. Nous avons pris bonne note de la volonté de la ministre d’aboutir, ainsi que de sa proposition de constituer un groupe de travail. Le groupe RRDP qui, jusqu’à preuve du contraire, est toujours membre de la majorité – ce qui ne s’est pas forcément entendu tout à l’heure – est prêt à la soutenir. Il importerait toutefois de savoir suivant quelles modalités et quel calendrier cette clarification sera réalisée. Car si le retour au statu quo nous semble une avancée, nous estimons que toutes les occasions doivent être saisies pour faire évoluer la loi Evin et répondre aux attentes qui ont été exprimées.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur l’ensemble de ces amendements identiques ?

M. Olivier Véran, rapporteur. Vu les débats que nous avons eus, et faute de pouvoir donner l’occasion à la ministre de la santé de faire inscrire prochainement sur des bouteilles d’alcool, en concertation avec les acteurs, à la place de « L’abus d’alcool est dangereux pour la santé, à consommer avec modération », la formule « Pour être aidé et s’informer : www.alcool-info-service.fr » ou « Réduire sa consommation d’alcool, c’est réduire les risques pour sa santé », ou encore – troisième et dernière version – « Savoir dire non au verre de trop, c’est protéger sa santé », je donnerai à ces amendements un avis favorable.

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. Très bien !

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 2442, 2, 49, 190, 192, 211, 252, 707, 785, 808, 1707, 1784 et 2295.

(Il est procédé au scrutin.)

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants76
Nombre de suffrages exprimés75
Majorité absolue38
Pour l’adoption74
contre1

Mme Kheira Bouziane-Laroussi. Mon vote contre était une erreur !

(Les amendements identiques nos 2442, 2, 49, 190, 192, 211, 252, 707, 785, 808, 1707, 1784 et 2295 sont adoptés et l’amendement no 1500 tombe.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n1217 qui fait l’objet de deux sous-amendements identiques, nos 2441 et 2446.

La parole est à M. Olivier Véran, rapporteur, pour soutenir l’amendement.

M. Olivier Véran, rapporteur. Je le retire.

(L’amendement n1217 est retiré et les sous-amendements identiques nos 2441 et 2446 tombent.)

(L’article 4, amendé, est adopté.)

Après l’article 4

Mme la présidente. La parole est à Mme Anne-Yvonne Le Dain, pour soutenir l’amendement n1664.

Mme Anne-Yvonne Le Dain. Il fait partie d’une série d’amendements, qui portent les numéros 1664 à 1671, que je souhaiterais présenter en même temps, madame la présidente.

Mme la présidente. Faites donc, chère collègue.

Mme Anne-Yvonne Le Dain. Il me semble pertinent de les proposer dans le cadre du présent projet de loi, bien qu’ils tendent à modifier le code pénal.

Aujourd’hui, lorsqu’une personne en tue une autre à la suite d’un accident de voiture, parce qu’elle conduisait sous l’emprise de l’alcool ou de substances illicites, ce drame est qualifié pénalement d’« homicide involontaire ». Les peines peuvent être lourdes, mais, pour les victimes, la notion d’homicide involontaire est difficile à accepter : le conducteur a tué quelqu’un, mais il ne l’aurait pas fait exprès !

C’est pourquoi je propose, à travers cette série d’amendements, une palette de qualifications, allant de « crime sans intention » jusqu’à « homicide par altération volontaire du discernement ». Je sais bien qu’il ne s’agit pas d’un projet de loi pénale, mais il existe d’autres exemples de passage d’un code à l’autre – dans ce même texte, on modifie notamment le code de l’éducation.

M. Philippe Gosselin. Ce n’est pas pour autant que l’on doit réécrire le code pénal !

Mme Anne-Yvonne Le Dain. Je précise que ma préférence va très nettement à la formulation « homicide par altération volontaire du discernement », proposée par l’amendement n1663, qui sera examiné juste après celui de Mme Orphé. Pour l’heure, je souhaiterais avoir l’opinion du rapporteur et de la ministre sur la question.

Mme la présidente. Vous avez donc défendu les amendements nos 1664 à 1671, madame Le Dain ?

Mme Anne-Yvonne Le Dain. Absolument, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements ?

M. Olivier Véran, rapporteur. Madame Le Dain, comme vous l’avez vous-même souligné, vous proposez une modification sensible du code pénal, par l’introduction d’une nouvelle catégorie, le « crime sans intention », que vous estimez moins traumatisante pour les victimes que l’homicide involontaire, même avec circonstances aggravantes. Ce projet de loi n’est pas le bon vecteur pour revoir les qualifications pénales applicables aux accidents mortels survenant alors que le conducteur du véhicule fautif est sous l’emprise d’alcool ou de substances illicites.

M. Philippe Gosselin. En effet, ce n’est pas son objet !

M. Olivier Véran, rapporteur. J’ajoute que l’article 121-3 du code pénal prévoit déjà le cas de la mise en danger délibérée de la personne d’autrui et indique qu’il y a délit en cas de faute, d’imprudence ou de négligence. Il n’y a donc pas aujourd’hui d’obstacle de droit ou de fait à la répression des comportements fautifs en cas de conduite en état d’ivresse ou sous l’effet de stupéfiants. Avis défavorable à l’ensemble des amendements, donc.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Même avis. Ce texte n’est pas l’endroit pour redéfinir la qualification pénale applicable à certains actes commis sous l’emprise de l’alcool.

Mme la présidente. La parole est à Mme Anne-Yvonne Le Dain.

Mme Anne-Yvonne Le Dain. Puisque j’ai eu une réponse, je retire l’ensemble des amendements.

(Les amendements nos 1664, 1665, 1666, 1667, 1668, 1669, 1670 et 1671 sont retirés.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Orphé, pour soutenir l’amendement n1504.

Mme Monique Orphé. Je le retire.

(L’amendement n1504 est retiré.)

Mme la présidente. L’amendement n1663 est retiré, madame Le Dain ?

Mme Anne-Yvonne Le Dain. Tout à fait, madame la présidente.

(L’amendement n1663 est retiré.)

Article 4 bis

Mme la présidente. La parole est à M. Dino Cinieri, premier orateur inscrit sur l’article.

M. Dino Cinieri. En France, les régions viticoles sont des destinations touristiques importantes, qui proposent une grande diversité de produits liés à la vigne et au vin. Un tiers des touristes citent d’ailleurs le vin et la gastronomie comme motivation de choix d’un séjour. Les enjeux liés à l’économie du tourisme vinicole sont donc importants, tant pour accroître la fréquentation des régions viticoles que pour stimuler la vente des vins.

Dans ce contexte, les professionnels se sont engagés dans une démarche volontaire de définition et de valorisation du tourisme vinicole comme produit touristique et les pouvoirs publics ont mis en place, dans une démarche participative, le label national de l’œnotourisme Vignobles 

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Perrut.

M. Bernard Perrut. Cet article nous a effectivement conduits à examiner en commission la définition de la publicité pour les boissons alcooliques. Il s’agissait tout simplement de combler un vide, puisque la loi Evin encadrant cette publicité ne précisait pas ce qui était ou n’était pas de la publicité, il s’agissait aussi de ne pas laisser la possibilité d’interprétations jurisprudentielles aléatoires, qui contreviennent parfois à l’objectif de la loi Evin et de faire en sorte que des journaux ne soient pas condamnés. Il ne faut pas que des journalistes qui parlent non seulement du vin mais aussi de nos communes, de l’œnotourisme, de ce qui fait notre territoire soient traduits en justice parce que, finalement, cela nuit à notre viticulture et à nos territoires.

Il est donc nécessaire de mettre un terme au vide juridique actuel, qui laisse les juges se substituer au législateur pour définir la publicité. Il faut ainsi clarifier les frontières entre, d’une part, ce qui relève réellement de la publicité, d’autre part, ce qui relève tout simplement de l’information, du divertissement, de la création artistique et culturelle. C’est pour cette raison que nous étions à vos côtés, monsieur le rapporteur, chers collègues : il fallait trouver la meilleure solution possible.

Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud Robinet.

M. Arnaud Robinet. Je serai bref, compte tenu de la position qui est celle de Mme la ministre.

En commission, un amendement a été adopté, qui avait été déposé par notre collègue Robiliard, pour préciser ce qui relève de la publicité au sens de la loi Evin. Comme l’a rappelé notre collègue Perrut, la jurisprudence a une interprétation très large de la notion de publicité, à tel point que cela crée une insécurité juridique qui met en cause la liberté d’expression des journalistes et entraîne, chez les journalistes et un certain nombre d’opérateurs, une forme d’autocensure. Nous avons retenu, bien sûr, que la ministre est favorable à la création de ce groupe de travail, qui se réunira dans un délai assez bref et associera notamment des professionnels et un certain nombre de responsables politiques aux fins de revoir et, pourquoi pas, de redéfinir le cadre juridique applicable à cette publicité et à la communication dont les produits de nos terroirs peuvent être l’objet.

Mme la présidente. La parole est à M. Denys Robiliard.

M. Denys Robiliard. Puisque la cause est acquise, et puisque, sur tous les bancs, nous sommes d’accord pour nous en tenir, pour le moment, au droit actuellement en vigueur, même si nous ne l’approuvons pas nécessairement, je ne prends la parole que pour un mot d’explication, qui porte sur le sens de cet article 4 bis issu d’un amendement que j’avais déposé.

Soyons bien clairs : nous visons un équilibre, annoncé par Mme la ministre, et qui sera réalisé.

Un amendement avait été déposé. Pourquoi ? Je pense qu’il est important de l’expliquer, parce que, sinon, ceux qui liraient, à l’avenir, nos débats pourraient avoir des doutes quant au problème qui se pose.

Ce n’est pas la loi Evin qui nous pose un problème, c’est l’interprétation qu’en a faite la chambre criminelle de la Cour de cassation dans un arrêt du 3 novembre 2004. Lisons-le pour comprendre l’enjeu du débat. Que dit la Cour de cassation ? « Qu’en effet, on entend par publicité illicite au sens des articles L. 3323-2, L. 3323-3 et L. 3351-7 du Code de la santé publique », issus de la loi Evin, « tout acte en faveur d’un organisme, d’un service, d’une activité, d’un produit ou d’un article ayant pour effet, quelle qu’en soit la finalité, de rappeler une boisson alcoolique sans satisfaire aux exigences de l’article L. 3323-4 du même code », c’est-à-dire les exigences et le formalisme qui s’imposent à la publicité pour les boissons alcooliques.

Qu’est-ce que ça veut dire ? Cela veut dire que, la publicité au sens de la Cour de cassation, ce n’est pas la publicité au sens de tout un chacun. Autrement dit, la publicité, c’est plus que la réclame. Ou, plus exactement, la publicité illicite, c’est plus, si vous me passez cette facilité de langage, que la réclame. Et ça va très loin ! Je ne sais d’ailleurs pas où ça s’arrête, même si je dois reconnaître que les poursuites ont été relativement rares. Simplement, le fait que des poursuites aient été intentées entraîne une autocensure chez les journalistes et sur les chaînes de télévision. Je prendrai un exemple ou deux, pour bien montrer jusqu’où cela pourrait aller.

Mme la présidente. Un seul exemple, cher collègue !

M. Denys Robiliard. Un seul ? Eh bien, prenons-le dans la peinture, avec les natures mortes de Cézanne. Que croyez-vous qu’il y ait, dans les bouteilles ? De l’eau ? Certainement pas ! De l’absinthe ou du vin. Eh bien, les Cézanne, quand vous les exposez, n’êtes-vous pas en train de commettre un acte…

Mme la présidente. Merci, cher collègue !

M. Denys Robiliard. …qui est en faveur d’un produit et qui rappelle une boisson alcoolique ? Donc vous entrez dans le champ de la publicité illicite tel que l’a défini la Cour de cassation.

Je tiens également à ce qu’on puisse, à l’avenir, relire Alcools d’Apollinaire sans craindre les foudres de la Cour de cassation. (Applaudissements sur de nombreux bancs.)

Mme la présidente. La parole est à M. Julien Aubert.

M. Julien Aubert. Mes chers collègues, je rappellerai brièvement que, à ce jour, même si on parle beaucoup de publicité, aucune étude scientifique n’a prouvé de manière irréfutable l’impact de la publicité sur la consommation d’alcool.

Mme Marisol Touraine, ministre. À quoi sert la publicité alors ?

M. Julien Aubert. Une récente étude publiée par un collectif de chercheurs, Cochrane Review, l’a montré au mois de novembre dernier – c’est une revue scientifique internationale et indépendante de tout financement d’origine privé, consacrée exclusivement au domaine de la santé.

Ensuite, les modes de publicité ont évolué. Les réseaux sociaux et l’internet n’avaient pas le même poids au moment du vote de la loi Evin.

Enfin, si on ne veut pas d’un gouvernement des juges, si on ne veut pas d’une jurisprudence qui excède très largement l’intention du législateur, il convient effectivement de mettre en place le groupe de travail dont il est question. Je souhaite qu’on poursuive sur la voie qui avait été ouverte par l’amendement dont est issu l’article 4 bis. À titre personnel, je regrette qu’on le supprime, et, par conséquent, je souhaite qu’un équilibre soit retrouvé au Sénat, un équilibre qui soit extrêmement rigoureux et qui permette de préserver notre filière de cette jurisprudence beaucoup trop agressive.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement n2443.

Mme Marisol Touraine, ministre. Par cet amendement, le Gouvernement propose la suppression de l’article 4 bis.

(L’amendement n2443 est adopté, l’article 4 bis est supprimé et l’amendement n1295 tombe)

Après l’article 4 bis

Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Orphé, pour soutenir l’amendement n1514.

Mme Monique Orphé. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis défavorable, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Le Gouvernement demande le retrait de cet amendement. À défaut, il émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Orphé.

Mme Monique Orphé. Je retire l’amendement, madame la présidente.

(L’amendement n1514 est retiré.)

Article 5

Mme la présidente. La parole est à M. Nicolas Dhuicq, premier orateur inscrit sur l’article.

M. Nicolas Dhuicq. Je suis heureux, pour nos descendants, de voir que la culture aura encore une place dans les années à venir, et je remercie mon collègue socialiste Robiliard de sa belle intervention.

Votre but, madame la ministre, est tout à fait louable : il est de maintenir la liberté et de lutter contre l’esclavage que représente la dépendance à un produit. Je voudrais cependant rappeler que nous sommes les uns et les autres tout à fait inégaux face au risque de dépendance. Certains d’entre nous ont des vulnérabilités plus grandes que d’autres – génétiques ou épigénétiques –, et la dépendance se déclare lorsque se rencontrent un produit, une personnalité et une culture. Ce triptyque est un invariant, et, à force de vouloir, par puritanisme hygiéniste, renforcer les interdits dans certains domaines et supprimer tout principe de plaisir dans notre société, vous parviendrez à l’inverse des effets recherchés.

Je l’ai redit il y a quelques heures, et c’est tout à fait sérieux : les campagnes de prévention chez les adolescents ont parfois des effets totalement inverses de ceux recherchés. Il arrive que l’on constate une recrudescence de la consommation de toxiques à la suite d’interventions d’adultes auprès de ces adolescents qui sont à la recherche d’un cadre et de repères, ces adolescents qui se construisent. Celles des dispositions du projet de loi que vous défendez qui concernent le paquet de cigarette ne serviront en rien votre lutte contre le tabagisme, madame la ministre, et c’est pour cela que je vous mets en garde, encore une fois, à propos de cette volonté de toujours laver plus blanc que blanc qui est la vôtre. Cette pureté absolue n’existe pas. Il faut que nos compatriotes, en particulier nos adolescents, aient la possibilité de se construire, qu’ils aient la possibilité de prendre des risques mesurés quand il le faut et que des interdits s’imposent lorsque c’est absolument nécessaire pour leur avenir.

Mme la présidente. La parole est à Mme Michèle Delaunay.

Mme Michèle Delaunay. Mon intervention concerne le tabac qui, de tous les produits que nous connaissons, est le plus toxique. Et, de tous les toxiques, c’est le plus addictif et le plus carcinogène…

Mme la présidente. Pardonnez-moi, chère collègue, mais je crois que vous avez pris quelque avance. Nous examinons maintenant l’article 5.

Mme Michèle Delaunay. Pardon, je voulais m’exprimer sur des articles que nous examinerons ultérieurement.

Mme la présidente. Je vous redonnerai donc la parole.

La parole est à M. Dino Cinieri.

M. Dino Cinieri. Oui, cet article transpose en droit français des dispositions réglementaires européennes visant à la réduction des inégalités sociales en matière d’accès à une alimentation équilibrée par l’introduction d’un principe d’information nutritionnelle volontaire et accessible à tous, sous forme de graphique ou symbole. Comme pour l’alcool, le message sanitaire sur les boissons sucrées et produits manufacturés pourra être modifié par arrêté.

On imagine facilement les dérives. Vous ouvrez une boîte de Pandore, madame la ministre. On pense spontanément aux sodas et aux fast-foods, mais allez-vous aussi faire écrire sur des œufs au chocolat de Pâques qu’ils sont dangereux pour la santé ? Plus sérieusement, est-ce un pas de plus vers une taxe ? On se souvient notamment de la taxe Nutella – c’était il n’y a pas très longtemps.

M’inquiète par ailleurs vivement un amendement de notre collègue Orphé, qui procède des mauvaises idées que vous appliquez déjà au tabac. Vouloir mettre des images choc sur des bouteilles est une aberration. L’étiquette comprend déjà huit mentions obligatoires. Un nouveau logo ou un visuel ne ferait donc qu’alourdir et rendre illisibles les informations d’ores et déjà inscrites. Une telle disposition paraît également discriminatoire puisque, dans tous les cas, c’est l’abus qui est dangereux, non la simple consommation. Si cet amendement était adopté, alors, il faudrait exiger que fassent l’objet d’un étiquetage analogue le beurre, l’huile, le sel, la viande, le chocolat, etc. puisqu’une consommation excessive de tous ces aliments comporte également des risques.

Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud Robinet.

M. Arnaud Robinet. L’article 5 aborde l’étiquetage nutritionnel. Cette proposition d’étiquetage, que nous trouvons simpliste, est-elle vraiment de nature à lutter contre l’obésité ? L’équilibre alimentaire de l’individu ne peut se réduire à une pastille de couleur sur un produit, et ces systèmes de notation nutritionnelle ignorent les déterminants fondamentaux d’une alimentation équilibrée que sont la prise en compte de la taille de la portion consommée, le moment et la fréquence de la consommation et, surtout, les associations d’aliments au cours d’un repas.

Je reviens en outre sur votre méthode, madame la ministre. Vous avez convoqué, la semaine du 26 mars dernier, une prétendue réunion de concertation, que vous avez quittée au bout d’une heure, laissant tous les participants face au directeur général de la santé. Un communiqué de presse a été publié, qui donne l’impression que tout a été décidé dans la concertation, mais ce n’était vraiment pas le cas.

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Perrut.

M. Bernard Perrut. Cet article 5 pourrait être quelque peu dénaturé, puisque nos collègues ont déposé un amendement dont l’objet est d’ouvrir la possibilité d’appliquer sur les emballages et les bouteilles des boissons alcoolisées un visuel destiné à informer les acheteurs des risques encourus en cas de consommation excessive.

Je tiens à dire qu’une telle disposition se heurte aux dispositions déjà applicables aux bouteilles de vin. Sur celles-ci doivent en effet figurer huit mentions obligatoires. Un nouveau logo ne ferait qu’alourdir et rendre illisibles les informations qui figurent d’ores et déjà sur les bouteilles.

Cette disposition est par ailleurs contraire au droit européen, puisque les boissons alcoolisées sont exclues par le règlement européen. De plus, un tel visuel remettrait en cause la libre circulation des marchandises au sein du marché intérieur : les producteurs italiens ou espagnols seraient en effet contraints d’apposer un logo supplémentaire sur leurs produits. On voit bien les nombreuses difficultés auxquelles on s’exposerait.

Il y a quelques instants, madame la ministre, nous avons eu un débat apaisé, au terme duquel certaines dispositions ont été supprimées. Si je prends la parole dès maintenant, c’est pour que l’amendement dont je viens de parler soit retiré, puisqu’il va à l’encontre de ce que nous avons convenu il y a quelques instants. Ces dispositions seraient discriminantes et stigmatisantes.

C’est l’abus de certains produits qui est dangereux, et ce n’est pas un tel étiquetage qui permettra de résoudre cette difficulté ! On pourrait d’ailleurs, pourquoi pas, l’appliquer également au beurre, à l’huile, au sel ou à la viande, puisque la consommation excessive de ces produits présente également des dangers.

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l’amendement de suppression n845.

M. Bernard Accoyer. Il y a lieu, effectivement, de supprimer cet article. Malgré ce que le Gouvernement a annoncé, il s’agit bien d’aller au-delà du règlement européen qui régit l’étiquetage des produits alimentaires ; c’est une sur-transposition ! Non seulement l’initiative du Gouvernement ne présente aucun intérêt sur le plan de la prévention, mais elle mettrait l’industrie agroalimentaire française en difficulté vis-à-vis des producteurs étrangers.

Mes chers collègues, au terme de cette démarche, tous les produits issus de l’industrie agroalimentaire et de l’agriculture seront concernés : produits laitiers, fromages, etc. Votre volonté d’aller au-delà des exigences européennes est tout de même assez étonnante, madame la ministre. Dans bien des domaines, le Gouvernement ne considère pas la convergence comme une nécessité, mais dans celui-là, il entend donner des leçons à la terre entière. Cela ne nous réussit malheureusement pas ; in fine, cela ne fera qu’aggraver les difficultés de notre économie et de notre agriculture, et alourdira votre principal échec : le chômage ! Il y a donc lieu de supprimer cet article.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Olivier Véran, rapporteur de la commission des affaires sociales. Défavorable. Les aliments ayant fait l’objet d’une transformation industrielle représentent aujourd’hui plus de 80 % des achats alimentaires. Leur consommation contribue au surpoids, qui atteint aujourd’hui près d’un tiers des adultes et 15 % des enfants. Une signalétique simplifiée, complémentaire de la déclaration nutritionnelle, représente potentiellement une grande avancée dans la lutte contre le surpoids. Des repères simples, fondés sur des données scientifiques solides, bénéficiant des recommandations des pouvoirs publics, ne peuvent que répondre aux aspirations du plus grand nombre.

J’ajoute que cette démarche repose sur le volontariat des producteurs et des distributeurs. On peut donc espérer qu’ils s’y rallieront d’eux-mêmes – en tout cas, nous avons toutes les raisons de le croire. C’est pourquoi l’avis de la commission est défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Cet article est important, puisqu’il propose un outil d’information pour lutter contre la progression de l’obésité dans notre pays. Même si la France est relativement moins touchée que d’autres pays, développés ou non, il n’en reste pas moins que ce fléau y progresse. Comme j’ai eu l’occasion de le dire, le nombre de jeunes concernés par l’obésité augmente régulièrement depuis une quinzaine d’années. À cette augmentation s’ajoute un accroissement des inégalités sociales : aujourd’hui, le risque de devenir obèse est dix fois plus élevé pour un enfant d’ouvrier que pour un enfant de cadre. En 2002, le rapport n’était que de un à quatre.

M. Bernard Accoyer. Mais cet article n’y changera rien, vous le savez bien !

Mme Marisol Touraine, ministre. Pour enrayer ce phénomène, il nous faut multiplier les instruments. D’ailleurs, l’Organisation mondiale de la santé réfléchit à ce sujet. Jusqu’à présent, la France a agi de manière volontaire et a obtenu des résultats dans ce domaine, grâce à l’engagement de professionnels, d’experts, de médecins de santé publique et d’autres spécialités, dans le cadre du PNNS, le programme national nutrition santé. C’est au cours de l’élaboration de ce programme que l’idée d’un logo nutritionnel s’est fait jour.

M. Bernard Accoyer. Arrêtez d’handicaper les entreprises françaises, enfin ! C’est ridicule !

Mme Marisol Touraine, ministre. Les industriels pourront, s’ils le souhaitent, apposer un logo nutritionnel sur les emballages de produits alimentaires transformés. Ce logo devra être global, car les consommateurs estiment que les informations qui figurent actuellement sur les emballages alimentaires sont incompréhensibles, illisibles. Si l’on donne d’une part la teneur en sucre, d’autre part la teneur en sel, il est difficile d’interpréter ces deux données ! Il est donc important d’avoir un logo unique, donnant une information globale. Cela permettra de comparer les produits, grâce à une grille de lecture simple – par exemple, un code couleur. D’autres critères pourraient encore être envisagés.

Cet article permet aux industriels d’adopter ce système sur la base du volontariat. La seule obligation définie par cet article est la suivante : l’ensemble des industriels et des distributeurs devront utiliser le même logo. Si les différentes marques utilisent différents systèmes de repérage, en effet, il ne sera pas possible de comparer les produits. J’ai formé il y a quelques jours un groupe de travail pour définir la nature précise du logo qui sera proposé aux industriels.

Je tenais à donner ces éléments sur cet article relatif à l’information nutritionnelle. La bonne alimentation passe par une information de qualité, transparente et fiable. Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement de suppression.

M. Arnaud Robinet. Qui peut croire tout cela ?

(L’amendement n845 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Baumel, pour soutenir l’amendement n333.

M. Philippe Baumel. Il est défendu.

(L’amendement n333, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Hélène Fabre, pour soutenir l’amendement n1712.

Mme Marie-Hélène Fabre. Défendu.

(L’amendement n1712, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement n1486.

Mme Véronique Louwagie. Cet amendement me permet de répondre aux propos tenus par Mme la ministre lorsqu’elle a donné l’avis du Gouvernement sur l’amendement de suppression n845. Vous avez le souci de prendre en compte la question de l’obésité : c’est effectivement très important. À ce titre, vous proposez un logo nutritionnel avec un code couleur ; ce logo devra être identique pour tous les produits.

Il faut cependant reconnaître l’inquiétude actuelle de l’industrie agroalimentaire. J’ai moi-même rencontré des entreprises ayant déjà travaillé sur ce sujet : elles proposent des solutions pour répondre aux problèmes de santé, ou pour prendre en compte les comportements en matière d’alimentation, mais leurs travaux n’aboutissent pas nécessairement à des solutions semblables à celle proposée par cet article.

Quoi qu’il en soit, l’important est que la mise en place d’un tel système devrait faire l’objet d’une concertation approfondie ; il faudrait expérimenter, dans les conditions réelles, ses effets sur les achats ; enfin, il conviendrait de réaliser une étude d’impact. Ainsi, l’on pourrait mesurer l’efficacité et la pertinence de ce système par rapport aux objectifs de santé publique visés.

Madame la ministre, vous avez évoqué un groupe de travail. Cet amendement propose de mener une expérimentation, de réaliser une étude d’impact et de conduire un débat public avant la publication officielle du système choisi. Cette expérimentation serait utile, car elle permettrait de vérifier qu’il n’y ait pas d’effets contraires aux objectifs de santé publique visés. Ces logos pourraient en effet causer ce que l’on pourrait appeler une peur alimentaire, des interdits alimentaires et des troubles des comportements alimentaires.

Dernier point : comme l’ont dit certains de mes collègues, cet article provoquera une distorsion de concurrence entre les industries agroalimentaires de nos différents pays. Les règles seront différentes selon les pays européens : ce sera très dommageable à notre industrie. Si vous acceptiez cet amendement, nos industriels seraient rassurés. Cela serait par ailleurs conforme à la démarche que vous avez adoptée en constituant un groupe de travail.

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Véran.

M. Olivier Véran. Ce système a déjà été testé à de nombreuses reprises. C’est d’ailleurs sur la base de travaux internationaux que l’Union européenne invite les États membres à recommander un système d’information nutritionnelle simplifiée. J’ajoute que le règlement prévoit une consultation très large avant la mise au point de la forme d’expression complémentaire. De fait, l’expérimentation que vous proposez me paraît redondante avec la très grande concertation avec les acteurs ainsi qu’avec la mise en place progressive du dispositif. Elle me semble donc inutile : l’avis de la commission est défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Même avis.

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer. Je trouve que les conséquences de ces dispositions, incluses au pied levé, par amendement, dans ce projet de loi, sont préoccupantes. Le problème des amendements, madame la ministre, qu’ils soient d’origine gouvernementale ou parlementaire, tient au fait qu’ils ne sont pas accompagnés par une étude d’impact sérieuse. Nous regrettons donc de n’avoir pas d’étude chiffrée quant aux conséquences de ces dispositions sur l’industrie, l’emploi et les exportations.

Je pense, madame la ministre, que vous avez décidé d’inclure cette mesure dans ce texte pour cacher sa mesure centrale : le tiers payant généralisé. Vous cherchez seulement à faire du buzz, avec cette prétendue lutte contre quelques dérapages nutritionnels ! Mais ce faisant, vous allez répandre dans notre pays une véritable phobie alimentaire – après la phobie administrative que nous avons découverte ici même, il y a quelque temps, grâce à l’un de nos collègues. C’est bien la peur que vous cherchez à inspirer : peur de manger, peur de boire. Notre collègue Dhuicq, qui est un spécialiste, vous dira mieux que moi les conséquences de cette attitude qui devient quelque peu excessive ! (Rires et exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Mme Catherine Lemorton. Il y a des médecins qui feraient mieux de se soigner eux-mêmes !

M. Bernard Accoyer. C’est pourquoi cet amendement, qui propose une expérimentation et une étude d’impact, me paraît indispensable.

(L’amendement n1486 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Louis Roumegas, pour soutenir l’amendement n1867.

M. Jean-Louis Roumegas. Nous sommes, bien entendu, favorables à l’article 5 de ce projet de loi. Il ne révolutionne en rien l’information donnée aux consommateurs : il s’agira toujours, comme aujourd’hui, d’une information nutritionnelle. Cependant, il simplifiera la lecture de ces informations ; il sera plus pédagogique. Il est, de plus, tout à fait conforme au règlement européen.

Cet amendement vise à tenir compte du fait que les consommateurs, aujourd’hui, ne demandent pas uniquement des informations concernant les valeurs nutritionnelles.

En effet, de plus en plus de consommateurs souhaitent connaître les additifs alimentaires contenus dans les aliments qu’ils consomment, puisqu’il s’agit de produits industriels, d’agroalimentaire. Aujourd’hui, les additifs se sont multipliés, qu’il s’agisse des édulcorants, qui posent problème pour certaines personnes, des colorants, déjà bien connus, des exhausteurs de goût ou des conservateurs.

Nous proposons d’adopter le principe d’un étiquetage plus lisible, comme vous le proposez pour les valeurs nutritionnelles, en ce qui concerne les additifs alimentaires. Bien entendu, la forme que devra revêtir cet affichage devra être définie après concertation avec les parties concernées, y compris les fabricants, les distributeurs et les associations de consommateurs, mais nous pouvons d’ores et déjà en adopter le principe. Il ne me paraît pas suffisant de développer aujourd’hui une information simplement nutritionnelle en omettant de mentionner les additifs qui, en termes de santé, posent également des problèmes.

M. Bernard Accoyer. À quand le paquet de biscuits neutre ?

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Olivier Véran, rapporteur. Monsieur Roumegas, vous confondez présentation complémentaire et présentation supplémentaire. Nous sommes en train d’examiner un système d’information nutritionnelle synthétique, simple, accessible à tous, pour tous, qui doit permettre d’améliorer l’information du consommateur sur la qualité nutritionnelle des aliments et faciliter la compréhension des informations qui font déjà l’objet d’une déclaration nutritionnelle obligatoire.

L’objectif n’est pas de donner des informations supplémentaires sur d’autres composants, à moins de multiplier les logos, les paramètres, et de compliquer le dispositif pour les consommateurs, ce qui irait à l’encontre de ce que nous cherchons à faire. Avis défavorable.

M. Bernard Accoyer. Il n’y a qu’à prévoir un petit livret !

(L’amendement n1867, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour soutenir l’amendement n196.

M. Jean-Pierre Door. La saisine de l’ANSES – l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail – qui a précédé nos travaux sur cette proposition portait uniquement sur la faisabilité d’un système, sans réelle interrogation sur la pertinence et l’intérêt scientifique de ce système.

Nous savons qu’il n’existe aucun dispositif idéal. Il convient donc de préciser clairement les étapes permettant d’évaluer les différents systèmes et leur intérêt respectif pour le consommateur avant de définir la mécanique et la faisabilité d’un dispositif unique. L’amendement tend donc à ajouter à l’alinéa 4 une référence à la pertinence des recommandations prévues.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Olivier Véran, rapporteur. J’ai déjà évoqué précédemment les travaux qui ont préfiguré le règlement européen et la recommandation de l’Union européenne pour avancer en matière d’information nutritionnelle adaptée aux consommateurs.

J’ajoute à cette explication que la Commission européenne doit présenter au Parlement européen et au Conseil, au plus tard le 13 décembre 2017, un rapport sur l’utilisation des logos, sur leur effet sur le marché intérieur et sur l’opportunité de poursuivre l’harmonisation de ces formes d’expression et de présentation. La Commission pourra accompagner ce rapport d’une proposition de modification des dispositions de la législation européenne en la matière. C’est la même raison qui justifiera l’avis défavorable de la commission aux amendements suivants, donc je n’y reviendrai pas. Avis défavorable.

(L’amendement n196, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud Robinet, pour soutenir l’amendement n197.

M. Arnaud Robinet. Cet amendement tend à demander, en plus de celui de l’ANSES, l’avis du Conseil national de l’alimentation sur la mesure proposée en raison de l’approche socio-économique qu’il développe.

Permettez-moi de revenir sur les amendements précédents, notamment de notre collègue Roumegas, et sur l’ensemble de la stratégie développée ici par ces étiquetages simplistes. Je reste persuadé que ce n’est pas de cette façon que l’on arrivera à lutter contre l’obésité, un certain nombre d’informations étant déjà mentionnées sur les différents produits alimentaires.

Comme le soulignait notre collègue Accoyer, à quand le paquet de biscuits neutre barré de la mention : « Manger tue », et accompagné de quelques photos de personnes obèses pour faire comprendre aux gens que manger peut aboutir à certaines pathologies et certaines maladies, et qu’il faut faire extrêmement attention ? À quand l’obligation d’apporter le menu chez son médecin généraliste pour qu’il valide l’ensemble des aliments que l’on souhaite proposer à ses convives ?

M. Paul Molac. Un peu d’humour, c’est bien !

(L’amendement n197, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 373 et 2280.

La parole est à M. Fernand Siré, pour soutenir l’amendement n373.

M. Fernand Siré. Je voudrais que l’on ajoute à l’alinéa 4 la phrase suivante : « Avant la mise en œuvre du dispositif, une étude comparative avec les systèmes d’informations nutritionnelles existants en Europe et dans le monde ainsi qu’une étude expérimentale limitées à certains produits sont menées. » En effet, tous les produits ne sont pas identiques, nous évoquons des produits élaborés.

Nous assistons dans notre pays au développement du surpoids et de maladies chroniques, mais un tiers de la population mondiale meurt de faim. Cela fait mal au cœur de voir que, alors même qu’ils sont, d’une façon générale, poussés à la consommation, les Français seraient dissuadés de consommer certains produits. Nous ferions mieux de transporter ces derniers dans les pays où l’on meurt de faim.

Mme la présidente. La parole est à Mme Jeanine Dubié, pour soutenir l’amendement n2280.

Mme Jeanine Dubié. Cet amendement a pour objet de proposer une meilleure information des consommateurs quant à la qualité nutritionnelle des produits alimentaires. Nous assistons en effet au développement du surpoids, de maladies chroniques telles que le diabète et l’obésité ou des maladies coronariennes.

(Les amendements identiques nos 373 et 2280, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement n1450.

Mme Véronique Louwagie. Cet amendement tend à rappeler l’importance du modèle alimentaire français, reconnu sur le plan de la santé publique, fondé sur la diversité, la convivialité et le plaisir. Il nous paraît important que le décret en Conseil d’État mentionné à l’alinéa 4 prenne en compte l’ensemble de ces caractéristiques.

Il faut rappeler que le modèle alimentaire français se caractérise par un équilibre nutritionnel structuré autour de la prise de quatre repas par jour, du petit-déjeuner au dîner, en portions raisonnables et avec un équilibre sur plusieurs jours. Il mérite d’être préservé. Il contribue en effet à la richesse du patrimoine culinaire français et doit être pris en compte.

Nos produits d’alimentation s’inscrivent dans le modèle alimentaire et sont l’incarnation d’un véritable patrimoine, qui a d’ailleurs été reconnu en 2012 puisque l’UNESCO a classé le repas gastronomique des Français comme patrimoine culturel immatériel de l’humanité.

Les informations nutritionnelles complémentaires doivent impérativement être de nature à aider le consommateur à conforter de bonnes pratiques alimentaires et le bon usage des aliments. C’est pourquoi il nous paraît important que le décret en Conseil d’État prenne en compte l’applicabilité d’une telle mesure, sans préjudice de la préservation et de la valorisation du modèle alimentaire français et de l’image d’excellence et de qualité de la filière alimentaire française.

M. Bernard Accoyer. Pitié pour notre filière !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Olivier Véran, rapporteur. Madame Louwagie, j’ai presque envie de vous proposer le retrait de l’amendement tant il est satisfait par le texte. Justement, la signalétique contribuera à renforcer l’excellence de la filière alimentaire française. Nous allons améliorer l’information sur la qualité nutritionnelle, à produit manufacturé identique, surgelé ou frais, nous allons proposer aux consommateurs des informations qui leur permettront de choisir celui qui correspond le plus à leurs appétences en matière de qualité nutritionnelle, et ça ne changera pas les arts de la table à la française, ni la convivialité, ni la manière de le consommer.

Mme Véronique Louwagie. Vous n’en savez rien !

M. Olivier Véran, rapporteur. Finalement, nous allons plutôt améliorer l’information des consommateurs et renforcer la filière d’excellence de l’industrie alimentaire. Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Nicolas Dhuicq.

M. Nicolas Dhuicq. Il y a deux aspects différents. Pensons à Brillat-Savarin, Escoffier et d’autres grands noms : d’un côté se trouve notre culture et notre grande cuisine, et un bon poulet de Bresse ou un bon turbot n’ont pas besoin d’étiquetage quand ils arrivent dans l’assiette.

D’un autre côté, nous parlons de l’industrie agroalimentaire. L’Allemagne est maintenant première sur le continent européen en matière de production de protéines animales. Le Danemark n’a plus d’abattoirs. La nouvelle politique agricole commune, le traité de libre-échange transatlantique, et la nouvelle loi sur l’agriculture vont être néfastes pour nos locomotives céréalières.

Avec nos collègues, nous cherchons à préserver les emplois dans la filière agroalimentaire, qui rapporte de l’argent à notre économie et qui, pour le moment du moins, exporte. Ce que nous redoutons, avec votre étiquetage, ce n’est pas tant l’atteinte au modèle culturel et gastronomique français que j’évoquais précédemment, mais plutôt de voir à nouveau imposer des semelles de plomb à nos entreprises, qui existent encore dans ce pays. Il y a encore une classe ouvrière dans le pays – qui a voté dernièrement, mais pas comme vous le souhaitiez – et il y a encore des jeunes, des chefs d’entreprise, qui cherchent à travailler.

Nous ne souhaitons pas porter atteinte aux préoccupations tout à fait saines de nos collègues écologistes, qui ont parfaitement raison mais qui devraient être plus précis dans leurs amendements. Nos propositions représentent un soutien très fort à notre économie nationale, et c’est pourquoi je pense qu’il serait sage de les adopter.

(L’amendement n1450 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Orphé, pour soutenir l’amendement n1453.

Mme Monique Orphé. Je vis dans un département où sévit le diabète, une maladie qui favorise des maladies cardio-vasculaires et peut conduire à des amputations. Je tiens donc à ce que l’information nutritionnelle soit plus claire et plus précise. Le projet de loi propose de créer des pictogrammes sur les emballages des produits alimentaires pour informer les consommateurs de leur qualité nutritionnelle. De même, je propose de faire figurer des pictogrammes sur les bouteilles d’alcool et les boissons sucrées pour informer les acheteurs des risques encourus avec la consommation excessive de telles boissons.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Olivier Véran, rapporteur. Madame Orphé, il existe pour les boissons sucrées, mais également pour l’alcool – nous avons effleuré le sujet tout à l’heure – des messages de prévention adaptés. Apposer des messages supplémentaires sur ce type de boissons ne semble donc pas répondre à un besoin identifié, et c’est pourquoi la commission avait donné un avis défavorable à votre amendement.

Toutefois, s’il s’agissait de prendre en compte un problème particulier identifié dans les territoires d’outre-mer, votre préoccupation pourrait s’intégrer à la réflexion proposée par Mme la ministre. Dans l’immédiat, je vous propose de retirer cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Je vous ferai la même demande, madame la députée, parce que la rédaction de votre amendement manque de précision. Laissons de côté les boissons alcoolisées qui, de toute façon, ne peuvent pas être concernées. Au fond, s’agit-il d’apposer sur les boissons sucrées le même logo nutritionnel que sur les biscuits, les pizzas, les lasagnes, ou n’importe quel autre type de produit, ou s’agit-il d’un dispositif spécifique ? Cela n’apparaît pas dans votre amendement. C’est pourquoi je rejoindrai le rapporteur pour demander le retrait de cet amendement, en attendant d’examiner vos préoccupations de plus près – d’autant qu’elles peuvent concerner un public beaucoup plus large que les seuls ultramarins.

Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Orphé.

Mme Monique Orphé. Je retire l’amendement.

(L’amendement n1453 est retiré.)

(L’article 5 est adopté.)

Après l’article 5

Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Boyer, pour soutenir l’amendement n1440.

Mme Valérie Boyer. La perte des repères nutritionnels complique le choix du consommateur. Dans les rayons des supermarchés, il n’est pas aisé d’identifier les produits alimentaires adaptés aux besoins d’une alimentation équilibrée, surtout si l’on appartient à un foyer modeste ou défavorisé.

Afin de remédier au déficit d’information nutritionnelle, cet amendement vise à créer un logo « label PNNS », qui permettra aux consommateurs d’identifier facilement les produits alimentaires et boissons présentant une qualité nutritionnelle intéressante. Ce label doit aider le consommateur à faire des choix alimentaires équilibrés en lui indiquant les produits strictement nécessaires à un régime alimentaire équilibré par un logo immédiatement et visuellement identifiable, qu’il ne nous appartient pas de définir mais qui pourra être fixé par décret. Sur le modèle de la clé verte suédoise, ce label sera attribué par arrêté du ministre chargé de la santé après avis de l’ANSES.

Le label PNNS peut également être un outil d’encadrement de la publicité sur les écrans destinés à la jeunesse. Les enfants, prescripteurs des achats des parents, n’ont pas le discernement suffisant pour faire des choix alimentaires équilibrés. Or, actuellement, la grande majorité des publicités alimentaires diffusées sur les écrans destinés à la jeunesse encouragent la consommation d’aliments et de boissons à haute densité énergétique. Bien sûr, le lien entre publicité et obésité n’est pas directement établi, mais personne n’a non plus prouvé son absence. On sait très bien qu’il faut éloigner les enfants de produits alimentaires qui ne sont pas bons pour leur santé.

La France a choisi de privilégier une démarche partenariale en demandant aux chaînes de télévision et à l’industrie agroalimentaire de retirer volontairement leurs publicités des programmes destinés à la jeunesse. Cependant, malgré les efforts de la profession, trois gros annonceurs refusent toujours de jouer le jeu et mettent en péril l’engagement volontaire des autres. L’autorégulation a montré ses limites. Pour autant, l’interdiction pure et simple de toute publicité portant sur des produits alimentaires ou des boissons sur les écrans destinés à la jeunesse n’est pas souhaitable. On déconseille bien la violence ou le sexe sur les écrans pour les enfants ; pourquoi ne pas encadrer la publicité pour les produits alimentaires dont on sait que la consommation excessive peut avoir des conséquences sur la santé ?

S’il n’y a pas de bons ou de mauvais produits, il y a des produits qui sont meilleurs que d’autres. On pourrait parfaitement accepter leur promotion auprès des enfants sans diaboliser les autres…

Mme la présidente. Merci, madame la députée.

Mme Valérie Boyer. …s’ils ne sont ni trop gras, ni trop sucrés, ni trop salés. C’est pourquoi je propose de mettre en place des mesures d’autorisation de la publicité sur les écrans destinés à la jeunesse strictement limitées aux produits alimentaires et boissons qui ont obtenu un label PNNS. Il s’agirait donc d’un double label, qui concerne à la fois les produits alimentaires et les écrans destinés à la jeunesse.

(L’amendement n1440, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements, nos 741 deuxième rectification et 737, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

La parole est à M. Jean-Marie Tetart, pour les soutenir.

M. Jean-Marie Tetart. On l’a déjà souligné : l’obésité et le diabète sont deux pathologies, deux nouveaux fléaux de notre société, dus à une mauvaise alimentation et touchant d’ailleurs les plus précaires. En 2010, 3 millions de Français étaient affectés par le diabète. Aujourd’hui, près d’un Français sur huit est obèse dans notre pays. Cette situation pèse très lourd dans les dépenses de santé publique, du fait de la prise en charge et de la prévention qu’il faut d’ailleurs renforcer. Elle pèse lourd, aussi, en part de PIB.

Dans les pays en voie de développement, la dénutrition se conjugue au développement rapide de maladies non transmissibles, parmi lesquelles l’obésité et le diabète. Ainsi, 80 % des décès par diabète se produisent dans des pays à revenus faibles ou intermédiaires.

Chez nous comme dans les pays en voie de développement, une telle situation relève largement d’une détérioration des conditions d’alimentation. Ici comme en Afrique, le recours aux boissons sucrées s’accélère au gré des campagnes publicitaires effrénées qui encouragent leur consommation. Convenez que ces boissons sucrées ne sont associées ni à des traditions culturelles, ni à des productions de terroir. Elles sont malheureusement proposées dès le plus jeune âge et sont, plus tard, souvent associées à la consommation d’alcools forts conduisant à l’enivrement rapide et extrême dont nous avons parlé tout à l’heure.

Alors que l’aide française au développement a baissé de 20 % depuis 2010 et que la part du PIB consacrée à la santé baisse encore plus vite, il est nécessaire de poursuivre un double objectif. D’une part, il faut réduire la consommation de ces boissons sucrées, qui ne font pas l’objet des mêmes mesures de restriction de publicité que celles qui s’acharnent contre le vin, par exemple, alors qu’elles ont des effets dévastateurs en termes de surpoids et d’obésité. D’autre part, il convient de prélever sur la commercialisation de ces boissons sucrées une participation qui permette de financer l’aide au développement, en vue de lutter contre la sous-nutrition et la malnutrition.

L’amendement n741 deuxième rectification vise donc à augmenter le taux de TVA applicable à ces boissons et d’affecter le produit du supplément de recettes à l’Agence française de développement afin de développer des programmes de lutte contre la sous-nutrition. Cette proposition est d’ailleurs tout à fait dans la ligne du rapport Hercberg qui recommande d’accompagner les mesures d’étiquetage et de restriction de publicité par des mesures fiscales. Je sais bien que le Président de la République a annoncé qu’il ne créerait pas d’impôts nouveaux et n’augmenterait pas les impôts existants. S’il devait faire une exception, celle-ci lui serait certainement pardonnée.

Plusieurs députés du groupe UMP. Non !

M. Jean-Marie Tetart. En adoptant ces deux amendements nos 741 deuxième rectification et 737, nous nous honorerions de mener de manière solidaire ce combat contre la malnutrition. J’ai bien conscience de mener un combat solitaire, mais ce combat correspond à mes engagements.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements ?

M. Olivier Véran, rapporteur. La commission a donné un avis défavorable à ces deux amendements, qui visent à augmenter une taxe portant sur la consommation de boissons sucrées et édulcorées susceptibles de provoquer ou de participer à provoquer l’obésité ou des troubles nutritionnels en France. Vous voulez affecter les recettes supplémentaires à l’Agence française de développement. Or il n’y a pas de lien logique entre la diffusion des boissons sucrées et édulcorées en France et les problèmes de sous-nutrition ou de malnutrition dans les pays moins ou peu développés. L’aide au développement est financée sur fonds publics ou par des dons privés. Si l’on peut envisager d’instaurer des financements supplémentaires, il faut qu’il y ait un lien avéré entre le produit de la recette et l’utilisation qui en serait faite.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Door.

M. Jean-Pierre Door. Monsieur Tetart, l’objectif d’aider les pays confrontés à la malnutrition par l’intermédiaire de l’Agence française de développement est certainement louable. Cependant, je vois de façon un peu négative la création d’une nouvelle taxe et le passage de 5,5 % à 20 % du taux de TVA applicable aux boissons sucrées et édulcorées. Pour les entreprises produisant ces boissons, le surcoût s’élèverait à plus de 600 millions d’euros par an. La taxe a déjà été augmentée en 2011, il y a moins de trois ans, ce qui a généré des coûts supplémentaires de 300 millions d’euros par an. Par ailleurs, ces entreprises ont signé un accord prévoyant la réduction d’environ 5 % du taux de sucre dans leurs boissons : elles ont donc déjà pris des engagements. Laissons donc une certaine visibilité à ces entreprises. Ne revenons pas, trois ans plus tard, sur une augmentation de taxe incroyable !

Par ailleurs, le groupe UMP n’est pas très favorable aux taxes – vous non plus, monsieur Tetart. Il y a suffisamment de taxes et d’impôts en France…

M. Bernard Accoyer. Surtout depuis trois ans !

M. Jean-Pierre Door. …pour éviter d’en ajouter là où il n’en faut pas. Si ces amendements poursuivent effectivement un objectif louable, le groupe UMP ne peut donc pas les accepter.

M. Daniel Fasquelle. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud Robinet.

M. Arnaud Robinet. Je suis désolé pour notre collègue Jean-Marie Tetart, mais le groupe UMP n’est pas solidaire de ces amendements,…

M. Jean-Marie Tetart. Je le savais déjà !

M. Arnaud Robinet. …pour les raisons qu’a rappelées notre collègue Door. La taxation proposée nuirait à un certain nombre d’entreprises de l’industrie agroalimentaire. En outre, ce sujet relève davantage du projet de loi de financement de la sécurité sociale que d’un projet de loi relatif à la santé.

(Les amendements nos 741 deuxième rectification et 737, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Louis Roumegas, pour soutenir l’amendement n1904.

M. Jean-Louis Roumegas. Cet amendement vise à augmenter le montant de la taxe sur les huiles de palme. En raison de leur richesse en acides gras saturés, ces huiles sont utilisées dans la fabrication de la margarine ou comme corps gras de friture. Elles sont également utilisées de manière excessive dans la restauration collective et l’industrie agroalimentaire, notamment dans la biscuiterie et l’alimentation salée ou sucrée à destination des enfants. Or l’ANSES a mis en évidence le fait que ces acides gras saturés sont consommés en excès par la population française – vous trouverez les chiffres dans le rapport de l’Agence –, qu’ils contribuent au développement de la malnutrition et favorisent l’obésité et les maladies cardiovasculaires.

Cette taxe additionnelle permettrait, d’une part, d’envoyer un signal aux industriels qui abusent de ces huiles de palme pour des raisons économiques, et d’autre part, d’abonder un fonds visant à lutter contre la sous-nutrition.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Olivier Véran, rapporteur. Monsieur Roumegas, nous avons déjà eu ce débat dans le cadre de la discussion du PLFSS pour 2013.

S’agissant de l’huile de palme, l’information nutritionnelle sera déjà un progrès pour les consommateurs : a priori, les produits sans huile de palme devraient bénéficier d’un meilleur score nutritionnel.

Comme vous l’avez souligné, l’utilisation d’huile de palme constitue avant tout un problème de développement durable. La production de ces huiles détruit des forêts primaires, notamment en Indonésie.

L’instauration d’une taxation supplémentaire, au-delà de la taxe spéciale déjà existante, peut être envisagée dans le cadre de la coopération internationale pour le développement mais dépasse clairement l’objet du texte que nous examinons. C’est pourquoi la commission a donné à votre amendement un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Même avis.

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer. Nous avons déjà débattu l’année dernière, à l’occasion de l’examen d’un texte voisin, de « l’amendement Nutella ». C’est une rechute, en quelque sorte, une maladie récurrente chez nos collègues du groupe écologiste.

M. Jean-Louis Roumegas. C’est bien vrai !

M. Bernard Accoyer. Nous avons déjà longuement débattu de ce sujet l’année dernière. La France doit-elle donner des leçons au monde entier ? C’est aussi une question récurrente.

M. Daniel Fasquelle. Les écologistes aiment donner des leçons !

(L’amendement n1904 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l’amendement n777.

M. Bernard Accoyer. Il s’agit d’une recommandation de santé publique. Vous l’avez compris, nous sommes favorables à ce que l’éducation sanitaire et diététique prévale sur toutes les contraintes et les étiquetages qui complexifient encore un peu plus la production dans notre pays sans que des résultats évidents aient été scientifiquement démontrés pour autant.

En revanche, l’insuffisance d’hydratation d’une grande partie de la population, en particulier des plus jeunes et des plus âgés, est un problème réel. Il est donc recommandé d’insérer, dans le titre du chapitre III du titre III du livre Ier de la deuxième partie du code de la santé publique, les mots « et hydratation » après le mot « alimentation ». Cela ne coûtera pas cher et cela fera du bien à la santé des Français.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Olivier Véran, rapporteur. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

M. Bernard Accoyer. Tout à l’heure, vous vouliez taxer le vin, et là, vous ne voulez pas qu’on parle de la flotte ! Nous finirons déshydratés !

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. Mettez un peu d’eau dans votre vin, monsieur Accoyer ! (Sourires.)

(L’amendement n777 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements, nos 1272 deuxième rectification et 445, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Arnaud Richard, pour soutenir l’amendement n1272 deuxième rectification.

M. Arnaud Richard. Cet amendement a pour objectif de lutter contre l’obésité infantile. Il vise à interdire la pratique du « free refill », qui consiste, pour une enseigne, à proposer des sodas à volonté et qui se développe aujourd’hui en France. L’un de mes collègues me disait tout à l’heure que la pratique était habituelle aux États-Unis et au Canada : on en voit les résultats ! Face à ce phénomène, nous devons avoir des préconisations en matière de santé publique.

Vous le savez, ces sodas apportent des calories en nombre et favorisent le surpoids. La France a été pionnière pour la mise en place d’une politique publique de santé nutritionnelle effective et durable dès 2001. À l’époque, le programme national nutrition santé fixait l’objectif d’une réduction de 25 % de la proportion d’enfants consommant plus d’un demi-verre de boissons sucrées par jour, et promouvait la consommation d’eau.

L’amendement n1272 deuxième rectification vise à donner un cadre contraignant à cette pratique commerciale, sans toucher à la possibilité de vente fondée sur une unité de volume ; il interdit de mettre un surplus à la disposition du consommateur. Soyons bien clairs : il ne s’agit pas de toucher aux fontaines à eau ou aux distributeurs de boissons qui existent un peu partout dans les lieux publics.

À notre sens, c’est le rôle de la loi de fixer un cadre pour protéger la population contre une surenchère commerciale qui fait de la gratuité du surplus d’une offre alimentaire payante un argument pour attirer le consommateur et l’inciter à des consommations excessives et néfastes pour la santé.

Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Boyer, pour soutenir l’amendement n445.

Mme Valérie Boyer. Je propose d’insérer, après l’article 5, l’article suivant : « L’offre de boissons sucrées en libre-service, à titre gratuit, est interdite dans les débits de boissons et dans tous les commerces ou les lieux publics. »

Même si je souscris totalement aux propos de mon collègue Richard, je souhaite rappeler que les boissons sucrées ou les sodas contiennent environ sept morceaux de sucre par verre de 250 millilitres. Il est donc important de limiter leur consommation pour prévenir l’obésité, le diabète de type 2 ou l’addiction au sucre.

C’est la raison pour laquelle je souhaite que l’on interdise la pratique du libre-service et du service à volonté de boissons sucrées dans les débits de boissons, les commerces et les lieux publics.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur les deux amendements ?

M. Olivier Véran, rapporteur. La commission a donné un avis favorable à l’excellent amendement de M. Arnaud Richard. Il est important d’établir un cadre pour la consommation de boissons sucrées ou avec ajout d’édulcorants de synthèse.

La rédaction initiale de l’amendement posait problème car elle donnait à penser que l’on allait interdire l’accès illimité à l’eau. La nouvelle rédaction, quant à elle, paraît tout à fait adaptée. Elle est en outre plus satisfaisante que la celle de l’amendement n445, qui ne vise pas les produits avec édulcorants de synthèse.

Avis favorable à l’amendement n1272 rectifié et défavorable à l’amendement n445.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Même avis. Lorsque M. Richard a présenté son amendement en commission, j’étais d’accord sur le principe, mais dubitative quant à la rédaction. Je m’étais donc engagée à en rediscuter en séance publique. Cet article additionnel étant désormais fort bien rédigé, je lui donne un avis favorable, car il permet de lutter contre une pratique qui, certes, n’est pas habituelle en France, contrairement à ce qui se passe dans d’autres pays, mais tend à se répandre, d’autant qu’elle est particulièrement attractive pour les jeunes. Ces derniers se voient ainsi proposer, dans des lieux divers, le service à volonté de boissons comportant soit du sucre en quantité excessive, soit des édulcorants, ce qui n’est pas non plus satisfaisant selon l’ANSES.

Je partage l’avis exprimé par le rapporteur, à savoir que la rédaction de l’amendement n1272 rectifié est plus complète que celle de l’amendement n445 de Mme Boyer, auquel je suis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Boyer.

Mme Valérie Boyer. Si partage les arguments de notre collègue Richard sur les boissons sucrées, je ne comprends pas pourquoi les édulcorants de synthèse ou naturels sont visés par cette mesure, dès lors que les boissons qui les contiennent ne comportent pas de sucres.

L’objectif est bien évidemment de lutter contre l’addiction aux sucres et l’obésité. J’ai ainsi rappelé que les boissons sucrées ou les sodas contenaient environ sept morceaux de sucre par verre de 250 millilitres. Dès lors, je le répète, je ne comprends pas pourquoi il faudrait s’en prendre aux édulcorants de synthèse ou aux édulcorants naturels.

Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud Robinet.

M. Arnaud Robinet. À titre personnel, je suis totalement opposé à ces deux amendements, aussi bien celui de notre collègue Richard que celui de notre collègue Boyer. Il faut laisser la responsabilité aux parents qui accompagnent les enfants dans des lieux où les boissons sont gratuites.

M. Gérard Bapt. Cela s’appelle botter en touche.

M. Arnaud Robinet. En outre, dans les clubs de vacances qui proposent des formules « all inclusive », les boissons sont comprises dans le forfait. Comment fait-on ? Cela signifie-t-il que ces formules sont interdites ?

M. Arnaud Richard. Ce n’est pas le même problème !

M. Arnaud Robinet. Si, dans la mesure où il y a des distributeurs de boissons sucrées gratuites à la disposition des enfants toute la journée.

M. Gérard Bapt. Ce n’est pas gratuit !

M. Arnaud Robinet. Comment fait-on ? Interdit-on ces formules ?

Et dans un restaurant, c’est la même chose.

Mme Catherine Quéré. Les enfants ne vont pas au restaurant sans leurs parents !

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. C’est un faux débat !

M. Arnaud Robinet. Cette disposition est inapplicable !

(L’amendement n1272 rectifié est adopté et l’amendement no 445 tombe.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Boyer, pour soutenir l’amendement n925.

Mme Valérie Boyer. L’amendement vise à donner un caractère obligatoire aux recommandations relatives à la nutrition en restauration scolaire et à le transposer dans le code de la santé plutôt que dans le code rural.

Cela doit permettre d’améliorer, à coût constant, la qualité nutritionnelle des repas servis en restauration scolaire. Je rappelle que 6 millions d’élèves fréquentent la cantine et que, de la maternelle au lycée, un milliard de repas sont servis chaque année dans les restaurants scolaires. Au terme de sa scolarité, un demi-pensionnaire pourra ainsi y avoir mangé plus de 2 000 fois. La restauration scolaire peut – et doit – jouer un rôle important dans l’éducation nutritionnelle des enfants, surtout si cette dernière est également présente dans les enseignements obligatoires, comme la mission d’information le propose.

De telles dispositions ont en outre davantage leur place dans le code de la santé publique que dans le code rural. En commission, on avait même eu du mal à les trouver...

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

Mme Valérie Boyer. Pour quelles raisons ?

M. Olivier Véran, rapporteur. Celles évoquées en commission.

M. Nicolas Dhuicq. On est dans l’hémicycle !

(L’amendement n925 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Boyer, pour soutenir l’amendement n451.

Mme Valérie Boyer. Tout à l’heure, lorsque j’ai présenté un amendement sur le label PNNS, on n’a même pas eu la courtoisie de dire pourquoi il avait été rejeté.

M. Denys Robiliard. Parce qu’il était mauvais !

Mme Valérie Boyer. Maintenant, on ne m’apporte aucune réponse au motif que la question a été évoquée en commission. Une telle attitude n’est pas acceptable. Lorsqu’une disposition sur les cantines scolaires figure dans le code rural, que l’on a bien du mal à l’y trouver, et que je propose de la transposer dans le code de la santé publique, la moindre des choses serait de répondre. Nous sommes ici pour écrire la loi et l’équilibre nutritionnel a sa place dans le code de santé publique. Ce n’est pas une façon de travailler.

S’agissant de l’amendement n451, je propose de compléter l’article L. 2323-1 du code de la santé publique par un alinéa ainsi rédigé :

« Dans les maisons d’enfants, les maternités et l’ensemble des lieux à caractère sanitaire, une information sur les vertus de l’allaitement maternel est systématiquement délivrée aux parents ».

On sait que l’allaitement maternel, s’il est appliqué pendant au moins six mois, a un rôle protecteur contre l’obésité. Il est donc essentiel de le développer dès la naissance et de le prolonger aussi longtemps que possible. Aujourd’hui, cependant, cette information n’est pas donnée ou insuffisamment donnée. L’allaitement maternel ne présente pourtant que des avantages pour les parents puisque il est gratuit !

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. Pour les femmes qui travaillent, c’est pratique !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Avis également défavorable. Cette mesure qui ne relève pas du domaine législatif figure déjà dans le Programme national nutrition santé.

(L’amendement n451 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Boyer, pour soutenir l’amendement n458.

Mme Valérie Boyer. Le présent amendement vise à permettre aux crèches de nourrir les nourrissons au lait maternel lorsque les parents le souhaitent. C’est pourquoi je propose de compléter le quatrième alinéa de l’article L. 2324-1 du code de la santé publique par la phrase suivante : « À la demande des parents, les nourrissons accueillis dans lesdits établissements ou services sont nourris au lait maternel. »

J’ai évoqué les vertus de l’allaitement. Cependant, en France, si l’allaitement est largement pratiqué pendant les premières semaines, il est, la plupart du temps, arrêté dès la fin du congé maternité, au moment où il commence à produire ses effets. Or le relais n’est que rarement assuré par les crèches, notamment par les crèches publiques.

Il faut donc favoriser la poursuite de l’allaitement le plus longtemps possible, autant que les parents le souhaitent, en particulier dans les structures d’accueil collectif.

Aujourd’hui, ces dispositifs sont rares, en tout cas mal appliqués. C’est la raison pour laquelle il est nécessaire de les faire apparaître dans le code de la santé publique.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Olivier Véran, rapporteur. Pour les mêmes raisons évoquées en commission, avis défavorable.

(L’amendement n458, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Chaynesse Khirouni, pour soutenir l’amendement n1118.

Mme Chaynesse Khirouni. Je propose de renforcer la démocratie sanitaire. Le présent amendement inscrit l’Union nationale des caisses d’assurance maladie et l’Union nationale des organismes complémentaires d’assurance maladie dans la concertation préalable à l’élaboration du Programme national nutrition santé. Ce sont en effet des acteurs importants des politiques de prévention, et ils ont une expérience, une expertise à faire valoir lors de l’élaboration du PNNS.

Je rappelle que la stratégie nationale de santé telle que définie à l’article 1er du projet de loi n’intègre pas les organismes complémentaires d’assurance maladie.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Olivier Véran, rapporteur. L’avis est défavorable, madame Khirouni, pour les raisons évoquées en commission. Le PNNS va s’inscrire dans la stratégie nationale de santé, il en est une des composantes. Son élaboration va résulter de la concertation et la cohérence doit être recherchée avec l’action des caisses de Sécurité sociale ou des organismes complémentaires.

Figer cela dans un article du code de la santé publique ne paraît pas nécessaire.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Ce serait la première fois que serait inscrite de façon formelle la contribution des organismes obligatoires et complémentaires à l’élaboration de politiques de prévention. Une telle démarche n’est pas neutre. Elle me semble présenter un certain intérêt, y compris sur le plan symbolique. Compte tenu des réserves du rapporteur, je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée.

(L’amendement n1118 est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 378 et 2283.

La parole est à M. Fernand Siré, pour soutenir l’amendement n378.

M. Fernand Siré. Au premier alinéa de l’article L. 3231-1 du code de la santé publique, après le mot : « nutrition », sont insérés les mots : « à l’hydratation ». On peut vivre longtemps sans manger, mais on ne peut pas vivre sans boire.

La politique de lutte contre l’obésité se focalise sur la limitation de la consommation de boissons sucrées, qui contiennent de nombreux additifs. Or il est aussi nécessaire de promouvoir l’absorption d’eau, un produit qui non seulement ne fait pas grossir, mais est essentiel pour la vie, et de surcroît naturel et gratuit. L’amélioration de l’hydratation serait donc un pas important pour la santé.

Mme la présidente. La parole est à Mme Jeanine Dubié, pour soutenir l’amendement n2283.

Mme Jeanine Dubié. L’amendement est défendu.

(Les amendements identiques nos 378 et 2283, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie de plusieurs amendements, nos 375, 2281, 198 rectifié, pouvant être soumis à une discussion commune.

Les amendements nos 375 et 2281 sont identiques.

La parole est à M. Fernand Siré, pour soutenir l’amendement n375.

M. Fernand Siré. L’amendement est défendu. Comme j’en ai déjà parlé cet après-midi, je laisse à Mme Dubié le soin de le présenter.

Mme la présidente. La parole est à Mme Jeanine Dubié, pour soutenir l’amendement n2281.

Mme Jeanine Dubié. Après le troisième alinéa de l’article L. 3231-1 du code de la santé publique, il est proposé d’insérer un alinéa ainsi rédigé : « - la promotion du modèle alimentaire français fait de trois repas : petit-déjeuner, déjeuner et dîner ; »

Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud Robinet, pour soutenir l’amendement n198 rectifié.

M. Arnaud Robinet. Il tend à insérer, dans le même article et après le même alinéa, les mots suivants : « - la promotion du modèle alimentaire français ; ».

L’amélioration de l’information de nos concitoyens sur la qualité nutritionnelle des produits qu’ils consomment est un objectif partagé par tous. Force est de reconnaître pour autant qu’il n’existe aucun dispositif idéal et que chaque système possède ses avantages et ses inconvénients.

Au moment d’aborder le débat sur les moyens d’améliorer l’information du consommateur sur son alimentation, il est essentiel de rappeler l’importance du modèle alimentaire français ainsi que ses atouts.

Ainsi, on peut sans doute trouver dans notre approche de l’alimentation des éléments permettant d’expliquer pourquoi la France connaît, parmi les pays de l’OCDE, un des taux d’obésité les plus faibles.

L’objet de cet amendement est donc de valoriser cet apport essentiel.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur les trois amendements en discussion commune ?

M. Olivier Véran, rapporteur. Avis défavorable. Le PNNS contribue à la promotion du modèle alimentaire français. Il ne semble pas nécessaire d’aller plus loin dans la description législative de la composition des repas.

(Les amendements identiques nos 375 et 2281, repoussés par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

(L’amendement n198 rectifié, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 370 et 2279.

La parole est à M. Fernand Siré, pour soutenir l’amendement n370.

M. Fernand Siré. Il est défendu. Je laisse à Mme Dubié le plaisir de faire retoquer elle aussi son amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Jeanine Dubié, pour soutenir l’amendement n2279.

Mme Jeanine Dubié. Cet amendement tend à compléter l’article L. 3232-3 du code de la santé publique par une phrase ainsi rédigée : « Les bienfaits du petit déjeuner en matière de santé publique doivent apparaître dans les programmes de prévention et d’éducation pour la santé élaborés par l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES). »

On a en effet constaté que de nombreux enfants se rendent à l’école sans avoir pris leur petit-déjeuner. Il importe donc de sensibiliser les parents à la nécessité de donner à manger à leurs enfants avant qu’ils partent à l’école le matin.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Olivier Véran, rapporteur. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Madame la députée, je ne peux que partager votre objectif. Il faut évidemment que les enfants partent à l’école en ayant pris un petit-déjeuner et, si possible, que les grands aussi partent travailler avec un petit-déjeuner dans le ventre. Croyez-vous cependant que c’est parce qu’on aura écrit cela dans la loi que les enfants prendront leur petit-déjeuner ?

Cet objectif, auquel je souscris, fait partie des préconisations de l’Institut national de la prévention et d’éducation pour la santé et ne relève pas du niveau législatif. Je vous invite donc à retirer votre amendement, à défaut de quoi j’émettrai un avis défavorable.

Mme la présidente. Madame Dubié, retirez-vous votre amendement ?

Mme Jeanine Dubié. Je le maintiens.

Mme la présidente. Et vous, monsieur Siré ?

M. Fernand Siré. Je le maintiens moi aussi.

(Les amendements identiques nos 370 et 2279 ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Krabal, pour soutenir l’amendement n2264.

M. Jacques Krabal. Cet amendement a fait l’objet d’un avis défavorable en commission, mais je voudrais le présenter à nouveau, en insistant sur un élément qui me semble essentiel. Il s’inscrit bien sûr dans le cadre du PNNS, qui souligne la nécessité de réduire le surpoids, l’obésité des enfants et la consommation du sel et du sucre, et d’accroître la consommation de fruits et de légumes.

La décision prise le 9 août 2004 touche particulièrement les collèges et lycées. Dans les écoles primaires et maternelles, en effet, de nombreuses actions sont engagées, comme la « récré fruitée », pour que nos enfants puissent goûter dès le plus jeune âge au plaisir de déguster fruits et légumes, mais on ne trouve pas au collège et au lycée, malgré les politiques mises en œuvre, une attention aussi soutenue pour la découverte de ces produits, ni la volonté d’atteindre l’objectif affiché d’une consommation de cinq fruits et légumes par jour.

La suppression des distributeurs automatiques avait pour objet d’éviter la consommation de sucre et de barres chocolatées. Nous pensons cependant qu’il faudrait réintroduire dans les collèges et lycées la possibilité de consommer des fruits, frais ou sous la forme de jus, par l’installation de distributeurs automatiques. Tel est l’objectif de cet amendement, qui compléterait l’arsenal du PNNS en ciblant davantage les collèges et des lycées, où cette consommation est impossible, alors qu’il s’agit d’un pan important de l’éducation à la santé et à l’alimentation.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Olivier Véran, rapporteur. Monsieur Krabal, je me souviens que, lorsque j’étais sur les bancs de la faculté de médecine, le Pr Chouraqui, professeur de pédiatrie et de nutrition pédiatrique au CHU de Grenoble, nous racontait le combat qu’il avait mené pendant plus de quinze ans pour faire sortir les distributeurs automatiques des établissements scolaires, face à tous les lobbys de l’agroalimentaire. Or, j’ai aujourd’hui l’impression que l’on essaie de faire rentrer par la fenêtre ce qui est sorti par la porte au prix de difficultés qui ont duré des années.

Les jus de fruits sont, par définition, des produits riches en sucre et, si saine que soit votre intention de diversifier l’alimentation des enfants avec des fruits et des légumes, le principe même de réintroduire des distributeurs automatiques dans les écoles serait une régression totale par rapport aux combats qu’ont menés les médecins à la fin du XXsiècle et au début du XXIe. Avis défavorable, donc.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Même avis.

(L’amendement n2264 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Orphé, rapporteure, pour soutenir l’amendement n1502.

Mme Monique Orphé, rapporteure. Il est défendu.

(L’amendement n1502, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Boyer, pour soutenir l’amendement n439.

Mme Valérie Boyer. Cet amendement très simple tend à faire de la lutte contre l’épidémie d’obésité et de surpoids une grande cause nationale en 2016.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Olivier Véran, rapporteur. Comme cela a été indiqué en commission, cette décision ne relève pas de la loi mais, depuis 1977, du Premier ministre. Même si l’objectif peut être intéressant, la mesure n’est pas du niveau législatif. Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Même avis.

(L’amendement n439 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements, nos 1336 et 1307, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

La parole est à Mme Valérie Boyer, pour les soutenir.

Mme Valérie Boyer. Cet amendement porte encore sur l’hydratation. Il tend à faire en sorte que le repère nutritionnel : « Boire de l’eau à volonté » du programme national nutrition santé est remplacé par le repère quantitatif : « Boire au moins 1,5 litre d’eau par jour ».

Une étude du Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie – le CREDOC – précise en effet que 80 % des Français, tous âges confondus, ne boivent pas assez d’eau. Certaines catégories de la population sont davantage touchées : 90 % des enfants et 86 % des adolescents ne s’hydratent pas correctement. La consommation d’eau a diminué entre 2007 et 2013 : elle est en très nette baisse chez les enfants et les adolescents, ainsi que chez les adultes, et n’est en hausse que chez les personnes âgées.

Conseiller d’avoir des apports hydriques suffisants est une règle d’hygiène de vie au même titre que d’avoir une alimentation équilibrée et de pratiquer une activité physique. Bien que le PNNS recommande de « boire de l’eau à volonté », force est de constater que ce repère n’est pas correctement compris par les Français. Il serait donc intéressant de modifier les repères nutritionnels du PNNS.

M. Michel Issindou. Cela ne relève pas de la loi !

Mme Valérie Boyer. L’amendement n1307 tend quant à lui à remplacer le repère nutritionnel : « Boire de l’eau à volonté » du programme national nutrition santé par des repères quantitatifs plus précis qui figurent dans l’exposé sommaire accompagnant cet amendement.

(Les amendements nos 1336 et 1307, repoussés par la commission et le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 376 et 2282.

La parole est à M. Fernand Siré, pour soutenir l’amendement n376.

M. Fernand Siré. Je reviens encore sur le petit-déjeuner, mais j’ai bien compris que cette loi est faite pour interdire la consommation de certains produits, et non pas pour favoriser intelligemment des produits qui n’ont pas à être interdits et qui sont nécessaires à la santé. Je défends donc cet amendement, mais je ne comprends pas la position de ce gouvernement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Dominique Orliac, pour soutenir l’amendement n2282.

Mme Dominique Orliac. Il est soutenu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Olivier Véran, rapporteur. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Je demande le retrait de ces amendements, pour les mêmes raisons que précédemment, à défaut de quoi, avis défavorable.

Mme la présidente. Madame Orliac, retirez-vous votre amendement n2282 ?

Mme Dominique Orliac. Je le maintiens.

Mme la présidente. Et vous, monsieur Siré ?

M. Fernand Siré. Je le maintiens également.

(Les amendements identiques nos 376 et 2282 ne sont pas adoptés.)

Article 5 bis

Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Boyer, pour soutenir l’amendement n1352.

Mme Valérie Boyer. Cet amendement vise à supprimer la possibilité pour les annonceurs et les promoteurs de messages publicitaires, concernant les boissons avec ajouts de sucres, de sel ou d’édulcorants de synthèse ou de produits alimentaires manufacturés, de s’exonérer de l’obligation d’ajouter dans les messages une information à caractère sanitaire comme « Manger, bouger » ou « cinq fruits et légumes par jour ».

Ces informations sont des mesures de santé publique qui visent à sensibiliser le public, en particulier les enfants, et à donner des repères nutritionnels issus du PNNS. Cette mesure contribue également à la prévention des maladies liées à une alimentation déséquilibrée.

Selon une étude de l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé, 87 % des Français accueillent favorablement les messages sanitaires insérés dans les publicités alimentaires, 71 % d’entre eux disent les avoir mémorisés et 79 % pensent que c’est un bon moyen de sensibiliser les personnes à l’importance d’une alimentation équilibrée.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Olivier Véran, rapporteur. En commission, vous étiez signataire d’un amendement qui tendait à porter le taux de la taxe de 1,5 % 5 % si les industriels ne mettaient pas en place de message sanitaire. Vous retirez maintenant aux industriels la possibilité de déroger à l’insertion de ce message : ils auront donc désormais le message et la taxe. Je suis perdu et j’émets donc un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

M. Olivier Véran, rapporteur. Je précise que l’amendement a été adopté en commission.

(L’amendement n1352 n’est pas adopté.)

(L’article 5 bis est adopté.)

Après l’article 5 bis

Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Boyer, pour soutenir l’amendement n1343.

Mme Valérie Boyer. Cet amendement me permettra de clarifier la situation, car il tend à supprimer la possibilité pour les annonceurs de messages publicitaires concernant les aliments manufacturés et les boissons sucrées de s’exonérer de l’obligation d’ajouter dans les messages une information à caractère sanitaire, comme « Manger, bouger » ou « cinq fruits et légumes par jour », moyennant une taxe de 1,5 % affectée à l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé et à rendre obligatoire l’assujettissement à cette taxe.

La suppression de la possibilité de déroger à l’obligation d’information sanitaire permettra de renforcer l’information en matière d’équilibre nutritionnel, d’éducation à la santé et de prévention de l’obésité. Cela contribuerait à promouvoir l’équilibre nutritionnel. Dans ce même esprit, l’obligation d’acquitter la taxe permettra d’accroître les moyens d’information et de prévention de l’INPES.

(L’amendement n1343, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements, nos 446 et 1899, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à Mme Valérie Boyer, pour soutenir l’amendement n446.

Mme Valérie Boyer. Cet amendement vise à renforcer la protection des enfants et des adolescents par l’encadrement strict de la publicité en faveur des produits à forte teneur en sucres ou en matière grasse. Il offre un triple bénéfice : pour les enfants, qui seront encouragés à manger des produits plus sains, pour l’industrie alimentaire, qui sera fortement incitée à améliorer les recettes des produits les plus déséquilibrés, et pour les chaînes de télévision, qui verront une pérennisation de leurs recettes publicitaires issues de l’agroalimentaire.

Alors même que, dans son dernier rapport de février 2015, l’OMS alerte une fois de plus sur les effets néfastes du marketing d’aliments hautement énergétiques, riches en matières grasses, en sucre ou en sel, sur l’enfant, en entraînant une propension à préférer les aliments et modes d’alimentation peu sains, et favorisant l’obésité, il convient que la loi régule l’influence néfaste de ces publicités, dont le PNNS recommande également la limitation.

La France, vous le savez et nous l’avons déjà dit aujourd’hui, n’est pas épargnée par la pathologie de l’obésité. L’obésité infantile reste la plus problématique, avec 60 % des enfants qui regardent le petit écran tous les jours en rentrant de l’école, les trois quarts d’entre eux avouant préférer les produits promus à la télévision plutôt que ceux ne bénéficiant d’aucune publicité. Les parents sont plus de 80 % à acheter les produits vus à la télévision et réclamés par les enfants. La charte d’engagement publiée par les régies publicitaires n’offre aucune protection pour les enfants. Elle ne propose en effet que des spots de sensibilisation à caractère très général, sans imposer la moindre limitation aux publicités pour les produits les plus caloriques.

L’amendement tend donc à compléter le chapitre III du titre III du livre Ier de la deuxième partie du code de la santé publique par un article L. 2133-2 ainsi rédigé :…

Mme la présidente. Merci, madame Boyer. Nous avons le texte de l’amendement.

La parole est à M. Jean-Louis Roumegas, pour soutenir l’amendement n1899.

M. Jean-Louis Roumegas. Défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements en discussion commune ?

M. Olivier Véran, rapporteur. La question soulevée par ces amendements est importante : il s’agit des supports des messages publicitaires auxquels les enfants et les adolescents sont potentiellement soumis. Mais cette mesure devrait être proportionnée, tenir compte de l’âge des enfants, de leur niveau d’exposition. Toutes les publicités en faveur des produits manufacturés ne sont pas forcément néfastes par nature ; de plus, les enfants bénéficient de messages de prévention qui sont largement connus – on ne va pas les répéter ici tous en chœur, mais on les connaît tous –, repris par de multiples médias lors des promotions alimentaires. Pour cette raison, la commission a rejeté ces amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Boyer.

Mme Valérie Boyer. Il est très compliqué, pour les adultes comme pour les enfants, d’être ainsi confronté à des oxymores, à des signaux complètement contradictoires : d’un côté, une publicité pour un produit trop gras, trop sucré ou trop salé et, de l’autre, un message sanitaire.

Il serait temps, alors que cela fait des années que nous parlons de ce sujet, de prendre des mesures à la fois fortes et courageuses. Puisque nous examinons un texte de santé publique, arrêtons de faire comme si certains messages n’étaient pas dangereux pour la santé des enfants comme des adultes ! Je ne comprends pas que l’on se contente d’adopter des mesures totalement superficielles alors qu’avec cette loi de santé publique, nous avons l’occasion, – que nous attendons depuis des années ! –, de traiter de ces sujets, de délivrer des messages forts, de participer de manière active à l’éducation pour la santé. Nous en avons la possibilité, mais nous ne le faisons pas !

L’examen d’un texte de santé publique ne se représentera pas une nouvelle fois pendant ce mandat : faudra-t-il encore attendre la législature suivante pour pouvoir discuter de ces questions, alors que chacun s’accorde à dire que c’est nécessaire ? La Société française de pédiatrie et l’UFC-Que Choisir le disent ; nous sommes soutenus par de nombreuses associations qui pensent que ces mesures sont absolument indispensables.

Lorsque nous avions examiné des amendements similaires lors du précédent mandat, plusieurs d’entre vous, sur les bancs de la droite comme de la gauche, y étaient favorables. Je ne vois pas pourquoi aujourd’hui, alors que cela fait des années que nous traitons de ces sujets, nous n’avancerions pas sur ce thème.

(Les amendements nos 446 et 1899, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

Mme Valérie Boyer. Tout le monde finit par céder aux lobbies !

Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Boyer, pour soutenir l’amendement n459.

Mme Valérie Boyer. Il s’agit toujours de la publicité ; mais permettez-moi tout d’abord de vous dire que je suis assez triste de constater que nous n’avançons pas sur ces sujets. Je sais ce que c’est que de subir des pressions de la part de l’industrie agroalimentaire, mais je pense que depuis le temps que nous en parlons, il serait temps de prendre enfin des mesures courageuses, et j’avoue que je suis assez déçue de la façon dont les choses se passent ! J’espérais mieux – cela prouve que, quand on fait de la politique, on vit toujours dans l’espérance !

L’amendement n459, puisqu’il faut continuer sur ce sujet, vise à prévoir l’indication, dans les messages publicitaires pour les produits alimentaires transformés, du contenu calorique des produits. Il s’agit d’améliorer l’information du consommateur afin de lui permettre d’effectuer des choix éclairés favorables à l’équilibre nutritionnel. Cela reviendrait à porter de 6,5 % à 10 % la part prise par la prévention dans les dépenses de santé et à faire de la lutte contre l’obésité une priorité de santé publique.

Pour cette raison, je souhaite que, au 1° de l’article 27 de la loi n86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, après le mot : « publicité », soient insérés les mots : « l’indication dans les messages publicitaires du contenu calorique des produits pour les produits alimentaires transformés ».

Cette information me semble absolument indispensable, notamment pour les plus vulnérables d’entre nous : souvent, le consommateur est obligé de prendre une calculette pour faire la différence entre les produits.

(L’amendement n459, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme Valérie Boyer. On peut connaître la raison de vos avis défavorables ? Quelle en est la motivation ?

Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements, nos 461, 440, 319 et 315, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

La parole est à Mme Valérie Boyer, pour les soutenir.

Mme Valérie Boyer. Je comprends qu’on ne soit pas d’accord avec moi, mais j’aimerais quand même avoir une explication – c’est la moindre des choses ! – plutôt qu’un simple avis défavorable sur des sujets aussi sensibles que ceux-là.

L’amendement n461 vise à prévoir l’obligation, pour l’ensemble des chaînes publiques et privées de radio et de télévision, de diffuser gratuitement les messages de l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé – l’INPES –, notamment concernant la nutrition et la lutte contre l’obésité et le surpoids. Les modalités d’application de cette disposition seraient fixées par décret en Conseil d’État.

Compte tenu des enjeux de santé publique, économiques et sociaux que représente la prévention de la surcharge pondérale, l’INPES, qui est un organisme d’État, doit pouvoir communiquer sur les chaînes de télévision afin de diffuser plus largement ses messages de prévention et de santé. L’idée est de rééquilibrer l’information sur les produits alimentaires en matière d’équilibre nutritionnel.

Je rappelle que les moyens de l’industrie agroalimentaire sont totalement disproportionnés par rapport à ceux de l’INPES : il faudrait quand même faire en sorte que les messages soient à égalité ou, du moins, que le déséquilibre soit moins fort qu’il ne l’est aujourd’hui.

L’amendement n440 concerne les conventions conclues entre le CSA et les opérateurs privés, qui fixent les mesures en faveur de l’information et l’éducation pour la santé, l’équilibre nutritionnel et la lutte contre le surpoids et l’obésité. Il s’agit de favoriser la diffusion d’émissions d’éducation populaire à la santé, à la cuisine et à la nutrition, par exemple le samedi matin, puisque tous les enfants n’ont pas classe à ce moment, ou le mercredi après-midi.

Je me permets de vous signaler tout de même que les amendements nos 461 et 440 présentent une différence : l’un vise à favoriser les messages de santé publique sur les chaînes de télévision, tandis que l’autre porte sur le contenu des programmes télévisés. La nature des deux amendements est donc extrêmement différente.

Cela étant, je continue avec l’amendement n319, qui vise à prévoir que les sociétés du secteur public de la communication audiovisuelle mènent des actions en faveur de l’information et l’éducation pour la santé, l’équilibre nutritionnel et la lutte contre l’obésité. Il s’agit, comme pour l’amendement précédent, de favoriser la diffusion d’émissions d’éducation populaire à la santé, à la cuisine et à la nutrition, par exemple le samedi matin.

Enfin, l’amendement n315 vise à prévoir l’utilisation d’un temps d’antenne libéré par la suppression de la publicité sur les chaînes de télévision publiques pour diffuser des messages ou des programmes d’information et d’éducation à la santé concernant la lutte contre le surpoids et l’obésité et la promotion de l’activité physique.

Les contrats d’objectifs et de moyens détermineront les modalités d’application de ce principe. Afin de fiabiliser l’information délivrée, il est prévu de donner à l’INPES la possibilité de labelliser les messages et les programmes concernés. Tout à l’heure, je n’ai pas obtenu de réponse sur le label PNNS, mais je pense qu’il serait très intéressant, notamment pour les messages télévisés, ainsi que je le proposais dans l’amendement précédent, qu’un label INPES puisse être délivré à certaines émissions télévisées ou à certains programmes.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces quatre amendements ?

M. Olivier Véran, rapporteur. Je vois dans le regard de mes collègues qu’ils trouvent ces amendements intéressants ! Il est vrai qu’il est intéressant de permettre la communication de la part de l’INPES sur des sujets aussi importants que la nutrition ou la lutte contre l’obésité et le surpoids.

La commission a donné un avis défavorable à ces amendements parce qu’ils font obligation aux chaînes publiques de diffuser les messages de prévention ; il est donc à prévoir une perte de recettes pour les chaînes publiques, dans un moment où il n’est pas évident pour elles de trouver leur financement. Il faudrait pouvoir mettre de nouvelles ressources en parallèle.

Cela étant, à titre personnel, je serais tenté de proposer la sagesse pour l’amendement n461, en attendant la réponse du Gouvernement sur l’enjeu et surtout les tenants et les aboutissants d’une telle mesure si jamais elle était adoptée.

Mme la présidente. Et pour les autres amendements, monsieur le rapporteur ?

M. Olivier Véran, rapporteur. L’amendement n440 est satisfait : je vous demande donc de le retirer, si vous en êtes d’accord, madame Boyer.

Mme Valérie Boyer. Non, il n’est pas satisfait !

M. Olivier Véran, rapporteur. Vous avez le droit de dire non ! À défaut de retrait, l’avis est défavorable. Cet amendement est satisfait parce que vous proposez des ajouts qui ne paraissent pas utiles dans la liste des sujets traités par les conventions entre le CSA et la personne qui demande une autorisation d’usage de la ressource électronique ; nous tenons à votre disposition un article du 30 septembre 1986, si vous le souhaitez.

Concernant l’amendement n319, la commission a donné un avis défavorable puisque l’article 43-11 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication mentionne, parmi les sujets majeurs traités par les chaînes du service public audiovisuel, qu’elles assurent une mission d’information sur la santé et la sexualité. Cet amendement paraît donc satisfait.

Enfin, nous avons déjà examiné la question soulevée par l’amendement n315 sous un autre angle : il ne nous revient pas ici de modifier la gestion du temps d’antenne par l’audiovisuel public. La commission a donc émis un avis défavorable, qui est renouvelé.

En conclusion, il y a un avis de sagesse sur l’amendement n461, une demande de retrait de l’amendement n440 et un avis défavorable pour les amendements nos 319 et 315.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur ces quatre amendements ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Je donne un avis défavorable à l’ensemble de ces amendements, y compris l’amendement n461. En effet, si l’on peut se dire a priori qu’il est plutôt de bonne politique que de permettre la diffusion de messages de l’INPES sur les chaînes de télévision privées et publiques, l’amendement impose une obligation. Or il existe déjà des régimes dérogatoires pour la diffusion des messages de l’INPES : soit la gratuité dans certaines situations – par exemple, en période de canicule, des accords avec les chaînes permettent la diffusion de messages –, soit des tarifs préférentiels.

Il existe d’autres campagnes qui peuvent avoir trait à la santé publique ou à d’autres causes d’intérêt général – la sécurité routière, la lutte contre les violences faites aux femmes –, et l’on ne voit pas pourquoi on définirait un régime de prix particulier pour les campagnes de l’INPES, car on pourrait alors dire que c’est exactement la même chose pour la sécurité routière ou pour les violences faites aux femmes.

D’autres démarches ont donc été engagées, dont on peut discuter, débattre de l’ampleur ou de la manière de les améliorer ; mais sur la méthode, je vous dis clairement que le Gouvernement ne peut pas demander à France Télévisions de répondre à l’ensemble des attentes du corps social. Le bon exercice de la tutelle implique d’éviter les injonctions sinon contradictoires, du moins multiples, et de concentrer les missions de France Télévisions sur un nombre limité d’objectifs clairs et cohérents.

Je comprends parfaitement la démarche portée par ces amendements ; je comprends parfaitement qu’ils intéressent ; mais dès lors que l’on commence à regarder les conditions d’application, on s’aperçoit que les choses sont moins simples. Encore une fois, les campagnes de lutte contre les violences faites aux femmes – et je serais, en tant que ministre des droits des femmes, directement concernée –, qui sont éminemment légitimes, pourraient demander exactement le même tarif, à savoir la gratuité. Ensuite, secteur par secteur, on verrait se multiplier les demandes.

Cela ne veut pas dire qu’il n’existe pas, d’une part, des tarifs préférentiels et, d’autre part, des possibilités de gratuité – des possibilités, oui, mais pas une obligation, comme cela est prévu dans ces amendements. L’avis est donc défavorable pour les quatre amendements.

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Véran, rapporteur.

M. Olivier Véran, rapporteur. Je me range à l’avis de Mme la ministre sur l’amendement n461 : avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Boyer.

Mme Valérie Boyer. Vous avez évoqué la gratuité des messages en cas de canicule : il s’agit de communication de crise en situation d’urgence et non de politique de santé publique.

Quant aux violences faites aux femmes, le sujet n’est pas du tout le même.

On ne peut comparer les moyens de l’INPES à ceux de l’industrie agroalimentaire quand elle assure la promotion de produits trop gras, trop sucrés ou trop salés. Il s’agit de rééquilibrer les messages. Or, vous savez parfaitement que la présence d’un bandeau portant le message « Mangez, bougez » n’est pas satisfaisante : pour les industriels, elle ne sert qu’à s’exonérer de la taxe.

Nous n’avons pas réussi, sous la législature précédente, à résoudre ce problème et je le regrette personnellement. Aujourd’hui, nous avons la possibilité de le faire : on ne la saisit pas, alors que vous-même, quand vous étiez députée, aviez voté mes amendements.

On ne peut comparer avec les violences faites aux femmes, qui ne font l’objet d’aucune campagne de promotion. Aucun industriel n’achète des milliers d’écrans publicitaires en faveur des violences faites aux femmes !

En revanche, il y a plein d’industriels qui ne respectent pas la charte et les trois principaux ne l’ont pas signée. Ils diffusent des messages en faveur de produits trop gras, trop sucrés, trop salés en disposant d’une puissance financière sans comparaison avec celle de l’INPES. On ne peut pas laisser l’État se payer lui-même, c’est-à-dire payer les chaînes publiques avec de l’argent public, et s’accommoder de cette inégalité financière.

Mme la présidente. Merci, madame la députée. Nous allons mettre l’amendement aux voix.

Mme Valérie Boyer. Ces arguments n’ont pas été évoqués !

(L’amendement n461 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Acceptez-vous de retirer l’amendement n440, madame Boyer ?

Mme Valérie Boyer. Non, et j’aimerais en expliquer la raison…

(Les amendements nos 440, 319 et 315, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

Article 5 ter

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Véran, pour soutenir l’amendement n2105.

M. Olivier Véran. Il est rédactionnel.

(L’amendement n2105, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 5 ter, amendé, est adopté.)

Après l’article 5 ter

Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Boyer, pour soutenir l’amendement n1933.

Mme Valérie Boyer. Dans tous les lieux publics et établissements recevant du public, il est proposé d’apposer au pied des escaliers, des escaliers mécaniques et des ascenseurs un panneau d’information conseillant aux personnes n’ayant pas de problème de mobilité d’emprunter les escaliers.

Cette mesure ferait la promotion de l’activité physique, puisqu’il est démontré que celle-ci augmente la dépense énergétique et permet de rester en bonne santé.

Je voudrais rappeler le rapport intitulé « Retrouver sa liberté de mouvement » remis fin 2008 par le professeur Jean-François Toussaint au Gouvernement, qui propose de mettre en place un programme « Retrouver la forme en trois escaliers ».

De telles mesures peuvent paraître anecdotiques, mais elles permettent de promouvoir l’activité physique.

(L’amendement n1933, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Article 5 quater

Mme la présidente. La parole est à Mme Colette Capdevielle.

Mme Colette Capdevielle. Cet article porte sur la lutte contre les troubles du comportement alimentaire, qui touchent principalement les jeunes filles, puisque ce sont 90 % de nos adolescentes qui sont touchées.

Il y a beaucoup de non-dits dans ces comportements à risque. C’est véritablement un sujet difficile que nous abordons à travers cet article. Les troubles de l’anorexie et de la boulimie atteindraient 1 % des adolescentes de 12 à 18 ans. C’est une maladie très solitaire, difficile à détecter. Beaucoup de jeunes filles doivent être hospitalisées et les décès n’ont pas toujours lieu chez le médecin.

Cette situation vient principalement de la valorisation de mannequins au corps décharné et du choix fait par des marques à la mode de ne vendre que des vêtements de petites tailles : passé le 40, on est une grosse dame.

Autour de cette question, il y a tout un marché des coupe-faim en vente libre, y compris sur Internet, avec un ensemble de produits dérivés plus fous les uns que les autres : des pilules-miracles, des sites prônant l’anorexie.

Cet article doit être mis en relation avec celui qui viendra plus tard concernant la lutte contre le tabagisme, puisque beaucoup de jeunes filles fument de plus en plus, utilisant le tabac en guise de coupe-faim.

Élue près de l’Espagne, je peux vous assurer que ce pays a été le premier à mener des campagnes très volontaristes de sensibilisation et à modifier sa législation concernant l’indice de masse corporelle des mannequins.

Madame la ministre, je vous demande de vous rapprocher de Mme la ministre de l’éducation, de manière à faire des campagnes très ciblées en direction des écolières, des collégiennes et des lycéennes. Plus tôt on s’y prend, plus vite on aura des effets dans la lutte contre ce véritable fléau.

Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Boyer, pour soutenir l’amendement de suppression n1019.

Mme Valérie Boyer. L’anorexie mentale est un réel problème de santé publique. En France, cette maladie grave et invalidante touche entre 30 000 et 40 000 personnes, essentiellement des jeunes femmes : neuf fois sur dix, la personne concernée est une femme.

Elle apparaît majoritairement au cours de l’adolescence, mais ne fait pas systématiquement l’objet d’un diagnostic précoce.

Comme l’ont montré un certain nombre de drames récents, les conséquences de ce trouble alimentaire peuvent être fatales. Je ne reviendrai pas sur le taux de mortalité de cette maladie. On sait que l’image du corps, telle qu’elle est véhiculée par certains médias, peut jouer un rôle très néfaste, de même que la valorisation à outrance d’une image filiforme de la femme. À cet égard, on ne peut que s’alarmer de la maigreur excessive de certains mannequins défilant sur les podiums. Mais le monde de la mode et de la beauté n’est pas seul concerné.

Soucieux de combattre ce fléau, les pouvoirs publics ont engagé dès 2007 un dialogue avec l’ensemble des professionnels sur ce sujet. Un groupe de travail pluri-professionnel, associant médecins, agences de mannequins, représentants de la mode, annonceurs, médias, associations et agences de conseil en communication, a été constitué sous la présidence des professeurs Marcel Rufo et Jean-Pierre Poulain. Les travaux ont débouché sur la rédaction d’une charte d’engagement volontaire sur l’image du corps.

Cette initiative constitue une première étape vers une prise de conscience de ce problème majeur et ouvre la voie à une modification des comportements.

Les troubles du comportement alimentaires doivent être traités de manière globale dans le code de la santé publique. C’est pourquoi j’ai déposé un autre amendement qui vise à associer l’obésité et le surpoids à l’extrême maigreur.

Dans la loi « Hôpital, patients, santé et territoires », un de mes amendements avait permis d’ouvrir un livre sur l’obésité qui comportait quatre chapitres. Je propose d’ouvrir un autre livre sur l’extrême maigreur, afin que les troubles du comportement alimentaires soient traités dans un texte bien écrit et équilibré.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Olivier Véran, rapporteur. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Même avis.

Mme Valérie Boyer. Pour quelle raison ?

(L’amendement n1019 n’est pas adopté.)

(L’article 5 quater est adopté.)

Après l’article 5 quater

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements, nos 1766 et 1052, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à Mme Valérie Boyer, pour soutenir l’amendement n1766.

Mme Valérie Boyer. Cet amendement concerne encore l’anorexie, qui constitue un réel problème de santé publique. Je ne vais pas revenir sur la prévalence de cette maladie en France, mais je voudrais rappeler que, soucieux de combattre ce fléau, les pouvoirs publics ont engagé dès 2007 un dialogue avec l’ensemble des professionnels concernés.

Aujourd’hui, en tant que législateurs, nous devons agir et aller plus loin. Certaines personnes, à travers différents moyens comme des sites Internet, des blogs, des magazines, incitent des personnes à se priver de nourriture pour maigrir de manière excessive, voire font ouvertement l’apologie de l’anorexie. Ces dérives, comme le mouvement pro-ana, doivent être sanctionnées. Ces attitudes et contenus médiatiques constituent de véritables provocations à la maigreur excessive et mettent en danger la santé des personnes fragiles.

Il paraît aujourd’hui indispensable de sanctionner l’incitation à la maigreur excessive. C’est la raison pour laquelle je vous propose de voter de nouveau le dispositif d’une proposition de loi que j’avais défendue et qui avait été votée à l’Assemblée nationale : elle visait à faire en sorte que le code pénal permette de sanctionner ceux qui incitent d’autres personnes à maigrir de façon excessive, jusqu’à altérer leur santé.

Ce texte, voté en 2008, s’inspirait de la législation contre l’incitation au suicide.

Aujourd’hui, cet amendement est soutenu par le groupe UMP. Je présente de nouveau cette disposition, mais je vous signale qu’elle a déjà été votée en 2008.

Mme Michèle Delaunay. Pourquoi la revoter alors ?

Mme Valérie Boyer. Comme le Sénat ne l’avait pas adoptée, il faut la voter de nouveau pour l’inscrire dans notre texte.

Mme la présidente. La parole est à Mme Fanélie Carrey-Conte, pour soutenir l’amendement n1052.

Mme Fanélie Carrey-Conte. Cet amendement de ma collègue Maud Olivier va dans le même sens. Il vise à combattre les troubles alimentaires tels que l’anorexie ou la boulimie dont mes collègues viennent de rappeler les dangers.

Cet amendement vise donc à les combattre en réprimant l’incitation à la maigreur excessive. Sont notamment visés les fameux sites dits « pro-ana » qui peuvent entraîner des personnes, et en particulier des jeunes filles, dans le cercle vicieux de l’anorexie sans être inquiétés par l’autorité publique.

Il s’agit de créer un nouveau délit dans le code pénal, en considérant qu’en prônant la maigreur excessive, certaines personnes mettent en danger la vie d’autrui. Les dispositions actuelles du code pénal ne permettent pas d’agir efficacement contre ces sites.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Olivier Véran, rapporteur. L’amendement n1052 aborde un vrai sujet, celui qui consiste à pénaliser la provocation à l’amaigrissement excessif.

Madame Carrey-Conte, vous avez exposé un certain nombre de situations. Nous avons eu une ébauche de débat sur ce point en commission. Contre l’incitation, nous devons aller de l’avant, mais il faudra faire attention à la manière de combattre les sites pro-ana : certains sont tenus par des jeunes femmes souffrant elles-mêmes d’anorexie et coupées de leur environnement, qui se servent d’un blog comme d’un exutoire et d’une façon de communiquer. En revanche, il y a d’autres sites qui font clairement l’apologie des méthodes à utiliser pour maigrir le plus possible jusqu’à disparaître, ce qui doit poser un certain nombre de questions.

On sait que la liberté d’expression est très grande dans notre pays et que la liberté d’expression sur internet ne sera pas remise en question par cet article : il permettra d’agir, dans la vie réelle comme sur internet.

Le délit que vous proposez de créer répond à une nécessité et je donne un avis favorable à l’amendement n1052. Avis défavorable à l’amendement n1766.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Même avis.

Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Boyer – rapidement, s’il vous plaît.

Mme Valérie Boyer. Je veux bien, madame, mais tout de même…

Nous sommes dans un hémicycle où chacun a été élu de la même manière, ce qui doit nous inciter à un respect mutuel pendant nos débats.

Je veux bien que l’on reprenne intégralement – comme cela fut le cas en commission – et qui plus est sans citer le nom de son auteur – mais ce n’est pas grave, tant pis – une proposition de loi que j’avais déposée et fait voter ici même, je veux bien que l’on modifie cet amendement, mais quelle est la différence avec celui que je défends ?

En l’occurrence, il vise à sanctionner tous ceux qui incitent à faire maigrir une personne jusqu’à ce que sa santé en soit altérée, que ce soit à travers des blogs pro-ana ou d’une toute autre manière dès lors que leur influence peut être néfaste sur une personne fragile.

De surcroît, il s’inspire du code pénal et de ce qui relève de la provocation au suicide. Son champ d’action est donc vaste et englobe toutes les situations.

L’amendement soutenu par M. le rapporteur est quant à lui beaucoup plus restrictif – mais il est vrai qu’il est proposé par le groupe SRC ou peut-être est-ce M. Véran qui l’a inspiré, peu importe.

M. Olivier Véran, rapporteur. Je ne l’ai pas signé. Ça suffit, les procès d’intention à une heure du matin ! On n’entend que vous !

Mme Valérie Boyer. Pourquoi ne choisit-on pas un dispositif qui permettrait de sanctionner plus largement ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marisol Touraine, ministre. Je vais répondre à votre question afin d’expliquer très clairement pourquoi je ne suis pas favorable à l’adoption de votre amendement et pourquoi je soutiens celui qu’a défendu Mme Carrey-Conte.

Le montant des peines, en l’occurrence, n’est pas le même. Au regard du droit pénal, la disproportion est totale entre le montant des sanctions et des peines que vous prévoyez et la nature de ces dernières.

Votre amendement a été examiné jusqu’à la Chancellerie, dont l’avis est défavorable pour cette raison-là.

La construction de l’amendement soutenu par un ensemble de parlementaires et porté par Mme Fanélie Carrey-Conte est mieux proportionnée, mieux assurée, mieux assise.

Votre objectif est sans doute identique mais votre amendement ne peut pas y répondre de manière satisfaisante.

Mme Valérie Boyer. Pourtant, vous l’avez voté en 2008 !

(L’amendement n1766 n’est pas adopté.)

(L’amendement n1052 est adopté.)

2

Ordre du jour de la prochaine séance

Mme la présidente. Prochaine séance, demain, à neuf heures trente :

Proposition de résolution sur la saisine et les compétences de la Cour européenne des droits de l’homme en matière de sécurité et de terrorisme ;

Proposition de loi sur la perte de la nationalité française et le crime d’indignité nationale ;

Proposition de loi relative à la légitime défense des policiers.

La séance est levée.

(La séance est levée, le jeudi 2 avril 2015 à une heure.)

La Directrice du service du compte rendu de la séance

de l’Assemblée nationale

Catherine Joly