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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIVe législature
Session ordinaire de 2014-2015

Compte rendu
intégral

Deuxième séance du mercredi 27 mai 2015

Présidence de M. David Habib

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heure quarante-cinq.)

1

Dialogue social et emploi

Suite de la discussion d’un projet de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion, après engagement de la procédure accélérée, du projet de loi relatif au dialogue social et à l’emploi (nos 2739, 2792, 2770, 2773).

Discussion des articles (suite)

M. le président. Cet après-midi, l’Assemblée a poursuivi la discussion des articles du projet de loi, s’arrêtant à l’article 3.

Article 3

M. le président. La parole est à M. Denys Robiliard, pour soutenir l’amendement n606.

M. Denys Robiliard. C’est un amendement de cohérence avec la modification du titre du chapitre II et les autres amendements déjà adoptés.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur de la commission des affaires sociales, pour donner l’avis de la commission.

M. Christophe Sirugue, rapporteur de la commission des affaires sociales. Il s’agit bien d’un amendement de cohérence. Avis favorable.

M. le président. La parole est à M. le ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, pour donner l’avis du Gouvernement.

M. François Rebsamen, ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. Même avis.

(L’amendement n606 est adopté.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n349.

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Amendement rédactionnel.

(L’amendement n349, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 3, amendé, est adopté.)

Article 4

M. le président. La parole est à M. Alain Chrétien, pour soutenir l’amendement n645.

M. Alain Chrétien. Cet amendement tend à supprimer l’article 4, qui dispose que les salariés dont le nombre d’heures de délégation dépasse 30 % de leur temps de travail bénéficieront automatiquement – je dis bien automatiquement – d’une évolution de rémunération égale à l’évolution moyenne des salariés qui sont dans une situation comparable.

Le Gouvernement entend enrayer par cette mesure le soi-disant déficit de vocations. L’étude d’impact du projet de loi décrit même la crainte d’être pénalisé dans sa carrière comme un frein à l’engagement syndical. Si c’est là la seule raison que vous trouvez à ce phénomène, demandez-vous plutôt pourquoi seulement 8 % des salariés sont syndiqués et une proportion encore plus faible assume des responsabilités dans les organisations syndicales !

Si nous souhaitons supprimer cet article, c’est parce que vous voulez transformer un droit, le droit syndical, en un privilège.

Mme Jacqueline Fraysse. Oh !

M. Alain Chrétien. En effet, l’automaticité de l’évolution salariale en fait bien un privilège et non pas une simple protection – qui, elle, serait légitime car il est bien normal que ceux qui s’engagent pour les autres aient davantage de droits. Arrêtez d’infantiliser les rapports sociaux dans les entreprises, monsieur le ministre ! Faites confiance au dialogue entre le chef d’entreprise et ses salariés : c’est cette confiance qui rétablira la volonté d’embaucher et cette fameuse croissance que vous réclamez tant et qui n’arrive pas !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Il est un peu choquant de parler de privilège, monsieur Chrétien,…

Mme Jacqueline Fraysse, Mme Véronique Massonneau et plusieurs députés du groupe SRC. Oui !

M. Christophe Sirugue, rapporteur. …alors que tous les rapports et toutes les études montrent – et personne ne le conteste – que la différence de rémunération entre un salarié qui assume une responsabilité syndicale et les autres salariés se situe aux alentours de 10 %. Le terme de privilège me paraît donc particulièrement déplacé, je me permets de vous le dire !

C’est du reste à cause de ce constat, largement partagé, que nous avons considéré qu’il était important de reconnaître les parcours d’engagement syndical. Si, comme je n’en doute pas, vous êtes attaché au dialogue social, vous savez bien qu’il faut que des personnes assument une représentation pour permettre ce dialogue. C’est tout l’enjeu de la démocratie sociale et des évolutions intervenues depuis la Libération pour reconnaître l’engagement et les mandats syndicaux.

Parce que cette différence d’évolution salariale existe, nous avons estimé nécessaire d’élaborer ce dispositif qui, loin d’avoir les conséquences contestables que vous invoquez, corrigera la disparité qui existe au-delà des augmentations générales. Du reste, le sujet ne fait pas débat. Dans les auditions que j’ai menées, aucune organisation patronale et, bien entendu, aucune organisation syndicale n’a remis ce point en cause.

Vraiment, je trouve que le terme que vous avez employé est inapproprié. Avis très défavorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Rebsamen, ministre. Le rapporteur a tout dit, et fort bien. Ce n’est pas la peine d’en rajouter. Nous n’avions pas encore entendu le mot privilège dans ce débat. Je vous invite à le faire disparaître de votre vocabulaire, monsieur le député.

M. Alain Chrétien. Je dis ce que je veux, monsieur le ministre !

M. François Rebsamen, ministre. Avis défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. Le mot privilège est vraiment inacceptable. Il s’agit de rétablir un droit !

Mais je veux réagir à un autre terme employé par M. Chrétien : « automatiquement ». C’est apparemment cette automaticité qui lui déplaît. Je me permets de lui faire observer qu’elle est déjà de règle dans le cas du congé de maternité,…

M. Alain Chrétien. Quel est le rapport ?

Mme Jacqueline Fraysse. …qui donne lieu à une remise à niveau systématique du salaire de la personne arrêtée lorsque celle-ci reprend son travail, si des augmentations sont intervenues pendant son absence. Il s’agit d’une disposition légale.

Bref, le caractère obligatoire, voire automatique, n’est pas une nouveauté et je crois que le dispositif est légitime.

M. Alain Chrétien. Je ne vois pas le rapport entre être enceinte et être syndicaliste !

M. Gérard Cherpion. On peut être les deux à la fois, mon cher collègue… (Sourires.)

(L’amendement n645 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n287.

Mme Jacqueline Fraysse. Sans revenir sur un débat que nous avons déjà eu longuement, je pense que, dans le cas précis de la rémunération des salariés, l’injustice que je dénonçais cet après-midi est d’autant plus grande. Prévoir un rattrapage évitant aux représentants syndicaux d’être pénalisés est une bonne chose, mais, encore une fois, pourquoi ce seuil de 30 % ?

Parmi les arguments avancés, ce qui me dérange n’est évidemment pas que l’on protège les salariés les plus exposés, mais que l’on considère que ceux qui sont moins exposés peuvent perdre de l’argent du fait de leur engagement syndical. C’est profondément injuste et dissuasif. Nous proposons donc de supprimer le seuil de 30 %.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Nous avons en effet déjà eu un échange au sujet de ce seuil, madame Fraysse. J’ajouterai seulement que les 30 % ne se déclinent pas de la même de la même manière selon que l’on travaille à temps plein ou à temps partiel. Pour une quotité de 100 % de temps de travail, ils correspondront effectivement à 30 %, mais à seulement 15 % pour une quotité de 50 %. Dans ce deuxième cas, le salarié à temps partiel bénéficiera d’une revalorisation salariale à partir de 15 % de décharge, contre 30 % si l’on adoptait votre amendement. Je crois que nous devons être vigilants, c’est pourquoi j’émets un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Rebsamen, ministre. Même avis, ce qui ne vous surprendra pas, monsieur le président !

M. le président. La parole est à M. Alain Chrétien.

M. Alain Chrétien. Certains peuvent s’émouvoir de la sémantique et trouver l’emploi de certains mots excessif, mais le débat est réel. Se porter candidat aux élections syndicales est un choix libre. Et, quand on travaille pour le syndicat, on ne travaille pas pour l’entreprise.

Mme Jacqueline Fraysse. Et alors ?

M. Alain Chrétien. Vous ne défendez que la position des salariés.

M. François Rebsamen, ministre. Et vous celle du patronat !

M. Alain Chrétien. Vous devriez défendre tous les Français ! Car il y a aussi des Français qui sont chefs d’entreprise,…

Mme Jacqueline Fraysse. Bien sûr !

M. Alain Chrétien. …qui embauchent des gens pour qu’ils produisent, fassent du chiffre d’affaires et permettent à l’entreprise de continuer à se développer et à embaucher. Essayez aussi de vous mettre à leur place. Pardon, mais on peut aussi en parler, des chefs d’entreprise !

M. Lionel Tardy. C’est vrai ! On n’en parle pas !

M. Alain Chrétien. Ils ont besoin d’une base salariale pour produire. Les 30 % de temps que le salarié passe à défendre ses collègues, ce qui est tout à fait honorable, constitutionnel, républicain, démocratique,…

Mme Brigitte Bourguignon. N’en faites pas trop quand même…

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Ah ! Quand même !

M. François Rebsamen, ministre. Très bien, monsieur Chrétien !

M. Alain Chrétien. …il ne les passe pas à produire pour l’entreprise. Essayez de comprendre le point de vue du chef d’entreprise : pour lui, ces salariés exercent un droit syndical qui est certes incontestable, mais ils ne participent pas, pendant ce temps, à la production et à la richesse de l’entreprise.

Je souhaiterais donc que le débat soit plus équilibré. Pour qu’il y ait dialogue social, il faut deux parties : les salariés et les chefs d’entreprise. Or, du côté gauche, on ne parle que des salariés. J’aimerais que l’on parle aussi des chefs d’entreprise et des contraintes que ces dispositions peuvent représenter pour eux !

En disant cela, je n’insulte en rien les salariés et ne porte aucune atteinte au droit syndical ; je vous rappelle simplement que nous devons avoir un débat équilibré. Or, dans le dialogue social, il y a les salariés et les chefs d’entreprise : nous avons la légitimité pour parler des chefs d’entreprise au même titre que des salariés. Pardon de vous choquer, mais nous pouvons également débattre de ce sujet très intéressant, même si, parfois, la sémantique peut vous paraître un peu excessive.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Monsieur Chrétien, pendant des heures, au cours de ce débat qui a débuté hier après-midi – et même avant, en commission –, nous avons évoqué la question non pas exclusivement des chefs d’entreprise, comme vous le faites, mais des chefs d’entreprise et des salariés. Aussi, quand on arrive à ce stade du débat, on évite la posture consistant à accuser les autres de ne pas prendre en considération l’ensemble de l’entreprise !

Mme Catherine Coutelle. Très bien !

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Je me permets de vous le dire car telle n’est pas la nature des échanges que nous avons eus depuis le début de l’examen de ce texte. Je suis très surpris par votre propos parce que nous avons été attentifs, en particulier dans l’article 1er, à l’équilibre entre les représentants des chefs d’entreprise et ceux des salariés.

Même si nous sommes heureux de vous compter parmi nous, vous ne pouvez pas faire fi de tout ce qui a été dit avant, je me permets de vous le dire ! Or vous intervenez sur un alinéa de l’article qui est scrupuleusement positionné sur la question de la représentation des salariés. Il est donc fort normal que, dans les échanges que nous avons à cet instant, nous traitions de cette thématique. Nous aurons l’occasion, à propos des délégations uniques du personnel, de revenir sur des sujets dans lesquels les deux sont parties prenantes ; mais, de grâce, épargnez-nous vos leçons !

M. Michel Issindou. Très bien !

M. Alain Chrétien. Je ne donne de leçon à personne ! Pourquoi tant d’agressivité ?

(L’amendement n287 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de plusieurs amendements, nos 30, 99, 389 et 626, pouvant être soumis à une discussion commune.

Les amendements nos 30 et 99 d’une part, et 389 et 626 d’autre part, sont identiques.

La parole est à M. Gérard Cherpion, pour soutenir l’amendement n30.

M. Gérard Cherpion. L’amendement n30 peut servir de médiation, vu l’état d’esprit dans lequel nous sommes à cet instant ! L’article 4 vise à garantir une absence de discrimination salariale à l’encontre des titulaires d’un mandat de représentation du personnel. Le seuil de 30 % retenu peut paraître insuffisant ; M. le rapporteur en a d’ailleurs fait la démonstration un peu plus tôt en prenant l’exemple d’une personne à temps partiel. On pourrait donc envisager de remplacer ce seuil de 30 % par un seuil de 50 %, qui pèsera alors très fortement par rapport à l’emploi de cette personne et à son engagement syndical. Le présent amendement permet de trouver un juste milieu entre ce que proposait Mme Fraysse et ce que proposait mon collègue et ami Alain Chrétien, en remontant ce seuil de 30 % à 50 % du temps consacré au mandat pour l’application de la garantie salariale prévue par cet article.

M. le président. La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement identique n99.

M. Lionel Tardy. Les garanties évoquées sont, en l’état, réservées aux élus dont le nombre d’heures de délégation sur l’année dépasse 30 % de la durée de travail fixée dans leur contrat de travail. Très clairement, ce seuil est trop large : en toute logique, il faut limiter ces garanties au cas où ces heures sont au moins égales à la moitié du temps de travail. C’est à partir de ce seuil en effet que l’évaluation professionnelle peut devenir plus compliquée à réaliser et nécessite d’être corrigée par cette garantie.

M. le président. Dans cette discussion commune, nous en venons à la deuxième série d’amendements identiques. La parole est à Mme Véronique Massonneau, pour soutenir l’amendement n389.

Mme Véronique Massonneau. Défendu.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Coutelle, pour soutenir l’amendement identique n626.

Mme Catherine Coutelle. C’est la même chose. Alors que nous traitions un peu plus tôt de l’entretien, il s’agit ici de la valorisation du parcours. J’insiste sur le fait que si l’on veut que des femmes s’investissent dans les syndicats, il serait bon que cet amendement soit adopté car on voit bien qu’il existe des freins, des difficultés pour dégager du temps et même pour oser franchir le pas. Mais j’ai entendu les arguments du rapporteur, et je ne lui demande pas de me les répéter – merci, monsieur le rapporteur !

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces quatre amendements ?

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Ainsi que Mme la présidente Coutelle vient de le dire, nous avons déjà beaucoup échangé tout à l’heure, avant le dîner, sur l’ensemble de ces arguments – 50, 30 ou 10, je ne reprendrai pas les argumentaires que j’ai développés.

Mme Catherine Coutelle. C’est un peu différent !

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Si les amendements ne sont pas retirés, j’émettrai un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Rebsamen, ministre. J’ai entendu également ce qu’a dit Mme la présidente. Même avis, même position.

(Les amendements identiques nos 30 et 99 ne sont pas adoptés.)

(Les amendements identiques nos 389 et 626 ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement n62.

M. Lionel Tardy. Soyons honnêtes : le mandat syndical doit être assorti de contreparties pour éviter toute discrimination. En revanche, et comme l’a très bien décrit Alain Chrétien dans son amendement, il y a des abus et il ne faut pas forcément aller trop loin. Ici, on offre des garanties en termes d’évolution de la rémunération à ces salariés : je considère qu’on les surprotège ; or ce ne devrait pas être le but. Il faut simplement qu’ils puissent exercer correctement leur mandat.

En ce qui concerne l’évolution des rémunérations, l’employeur doit pouvoir fixer librement la part qui concerne la présence effective du salarié dans son entreprise. Autrement, on va vers la création de salariés au statut privilégié : il faut distinguer la partie « temps dans l’entreprise » de la partie « mandat syndical », et ne prévoir des garanties salariales que pour cette dernière. La marge d’appréciation de l’employeur doit être maintenue. Du reste, et par cohérence, je proposerai un peu plus loin que l’évolution de la rémunération de ces salariés soit calculée sur la base d’objectifs appréciés à due proportion du temps consacré à l’activité de l’entreprise. Tel est le sens de cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Nous revenons sur cette question de la rémunération. Il est clair que, pour que le dispositif soit opérant, il faudrait que le salarié bénéficie d’augmentations individuelles sur la partie ne correspondant pas à l’exercice de son mandat. Or c’est justement sur cette partie que le constat est fait que le salarié absent de l’entreprise pendant le temps de sa délégation ne bénéficie pas de ces augmentations individuelles.

Le texte que nous proposons a donc pour objectif de corriger cet élément. Personne ne pouvant dire si le salarié bénéficierait de cette augmentation individuelle s’il était dans l’entreprise – c’est simplement du fait de sa délégation syndicale qu’il est absent et qu’il ne peut donc prétendre à cette évolution –, nous avons considéré qu’il était nécessaire de tenir compte de la moyenne des augmentations individuelles. Cela ne créera pas de situation d’injustice, la moyenne des augmentations individuelles signifiant que certains touchent plus que cette moyenne : nous récupérons donc le différentiel de 10 % constaté entre ceux qui ont un engagement syndical et ceux qui n’en ont pas. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Rebsamen, ministre. Même position et même avis.

(L’amendement n62 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Gilles Lurton, pour soutenir l’amendement n104.

M. Gilles Lurton. Il nous paraît normal qu’un salarié disposant d’un mandat voie l’augmentation de sa rémunération déterminée en fonction de l’évaluation portée sur son travail effectif au sein de l’entreprise. C’est pourquoi cet amendement propose de compléter l’alinéa 2 par une phrase clarifiant les termes de l’article L. 2141-5-1 du code du travail.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Avis défavorable : l’argumentation est la même que celle que je viens de développer.

(L’amendement n104, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Christophe Cavard, pour soutenir l’amendement n388.

M. Christophe Cavard. J’indique d’emblée à M. le ministre et à M. le rapporteur que le présent amendement a été légèrement modifié pour tenir compte du débat que nous avons eu en commission et des arguments qui ont été avancés concernant les évolutions de rémunération visant à protéger les salariés qui consacrent du temps à la représentation salariale.

En outre, nous sommes désireux de prendre en compte la question de l’évolution de carrière, même si cela ne concerne que quelques personnes. Nous avions échangé sur les modalités parfois compliquées de l’évolution de carrière. L’amendement, qui a donc été rectifié par rapport au débat en commission, propose de prendre en compte cette évolution de carrière et de renvoyer à un décret la définition de ses modalités, celle-ci pouvant faire l’objet d’une négociation et d’un accord préalables avec l’ensemble des partenaires sociaux.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Cher collègue Cavard, la modification de l’amendement ne change pas le problème de fond !

M. Michel Issindou. Bien tenté !

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Pour ma part, j’ai beaucoup de mal à définir ce qu’est une évolution de carrière identique à la moyenne de l’entreprise. Je comprends bien l’esprit qui vous anime mais, autant je vois comment on peut évaluer l’évolution de la rémunération, autant l’évolution de carrière est liée à beaucoup de choses – apprentissage de nouvelles pratiques, de nouveaux gestes. Comment établit-on ces éléments ? Dès lors qu’on n’arrive pas à en donner une définition précise, cela risque d’être totalement inopérant. Si vous deviez maintenir votre amendement, j’émettrais un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Rebsamen, ministre. Je comprends tout à fait votre raisonnement, monsieur le député Cavard mais, comme cela vient d’être fort bien expliqué, et comme vous le savez vous-même, ce que vous demandez est extrêmement difficile à mettre en place car il n’existe aucune possibilité aujourd’hui d’objectiver la moyenne des évolutions. Je vous demande donc de retirer votre amendement ; sinon, l’avis sera défavorable.

M. le président. La parole est à M. Christophe Cavard.

M. Christophe Cavard. Je vous trouve très pessimistes, monsieur le ministre et monsieur le rapporteur : je comprends bien la difficulté, et je n’ai pas plus que vous la solution (Sourires.), mais le présent amendement renvoie à un décret. Nous sommes très confiants, monsieur le ministre, dans la capacité de l’ensemble de vos services à trouver les bonnes solutions techniques que nous-mêmes ne maîtrisons pas toujours, dans le cadre d’un décret, surtout si on y mêle le dialogue social avec les partenaires sociaux.

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Pas mal !

M. Christophe Cavard. Je maintiens donc cet amendement parce que je vous trouve très pessimistes quant à la capacité à trouver de bonnes solutions techniques pour répondre à notre souhait, que vous trouvez vous-mêmes intéressant.

M. le président. La parole est à M. Alain Chrétien.

M. Alain Chrétien. Tout arrive à qui sait attendre ! On aurait aimé que vous ayez la même réflexion sur le compte pénibilité, monsieur le ministre ! D’un seul coup, cela paraît très complexe de personnaliser les parcours professionnels des uns et des autres, avec des arguments subjectifs, etc. – c’est exactement le même débat que celui que nous avons eu sur le compte pénibilité ! Bref, l’amendement va sans doute être repoussé cette fois-ci,…

M. Christophe Cavard. Ça dépend ! Vous pouvez voter pour !

M. Alain Chrétien. …mais les arguments étaient pertinents, tout comme ils l’étaient concernant le compte pénibilité lorsque vous l’avez adopté. Il faut parfois savoir écouter la minorité qui a raison ! Le rapporteur a commis un rapport très intéressant qui éclaire les contradictions et les complexités de ce que vous pouvez parfois voter.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. François Rebsamen, ministre. Je souhaite dire à M. Cavard que je comprends le maintien de son amendement, et à M. Chrétien qu’on parlera de la pénibilité le moment venu, à l’article 19 – si vous êtes toujours là, ce que nous souhaitons !

M. Alain Chrétien. Merci, monsieur le ministre !

M. François Rebsamen, ministre. Ce sera avec plaisir !

M. Alain Chrétien. Avec plaisir, en plus ! Et avec sincérité, espérons-le !

(L’amendement n388 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement n116.

M. Lionel Tardy. Amendement de cohérence.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Avec la même cohérence, avis défavorable.

(L’amendement n116, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Gilles Lurton, pour soutenir l’amendement n131.

M. Gilles Lurton. L’article 4 du projet de loi fixe une garantie inconditionnelle d’évolution de salaire : quelle que soit la situation du salarié, il doit bénéficier d’une évolution de rémunération indépendante du travail fourni. Nous sommes tout à fait d’accord pour qu’un salarié ne soit pas discriminé à raison de ses activités syndicales ou de ses mandats électifs au sein de l’entreprise, mais la marge de manœuvre de l’employeur en termes de politique salariale ne peut être réduite à néant. C’est pourquoi le présent amendement ouvre à l’employeur la possibilité de justifier d’une politique salariale différente à l’égard de ces salariés, en apportant la preuve de raisons professionnelles objectives et non discriminatoires justifiant la différence de traitement salarial.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Si l’on veut fluidifier le dialogue social, il faut veiller à ne pas introduire dans la loi des nids à contentieux, tels que vos « raisons professionnelles objectives ». Faire dépendre l’évolution d’une rémunération de « raisons professionnelles objectives » serait faire courir des risques très importants de contentieux. Je préfère l’augmentation automatique proposée par l’article à la solution que vous préconisez. C’est pourquoi j’émets un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Rebsamen, ministre. Même position.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz.

Mme Marie-Christine Dalloz. Vous n’avez pas répondu à l’argument avancé à l’appui de cet amendement, monsieur le rapporteur. Vous parlez de la nécessité de « fluidifier le dialogue social », alors que ce texte propose une augmentation quasi systématique de toutes les rémunérations, quelle que soit la catégorie des salariés, qu’elle relève ou non du dialogue social. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Mme Jacqueline Fraysse. Mais non ! Vous dites n’importe quoi !

Mme Marie-Christine Dalloz. Vous imposez une nouvelle contrainte aux entreprises, voilà la réalité. Vous refusez à ce point toute distinction que vous favorisez une augmentation systématique.

Mme Catherine Coutelle. Elle n’a pas lu le texte !

Mme Marie-Christine Dalloz. Quelle est cette vision de l’entreprise ?

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Madame Dalloz, je vais essayer de vous expliquer ce que contient le texte car si vous l’aviez lu, vous n’auriez pas fait cette intervention. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.) C’est pourquoi je me permets de compléter votre information.

Nulle part n’est prévue une augmentation systématique des rémunérations versées par l’entreprise. Les mots ont un sens : il y est dit que les personnes dont nous parlons, c’est-à-dire celles qui consacrent 30 % ou plus de leur temps de travail à exercer un mandat syndical, bénéficieront d’une augmentation égale à la moyenne des augmentations individuelles. Le texte ne prévoit aucune augmentation automatique, contrairement à ce que vous affirmez. (« Si ! » sur les bancs du groupe UMP.)

(L’amendement n131 n’est pas adopté.)

(L’article 4 est adopté.)

Article 5

M. le président. La parole est à Mme Catherine Coutelle, pour soutenir l’amendement n621.

Mme Catherine Coutelle. Monsieur le ministre, je vous félicite pour votre volonté d’introduire de la parité dans la représentation syndicale tout en ayant un vrai différend avec vous, et pas qu’avec vous.

Depuis l’inscription en 1999 du principe de parité dans la Constitution, de nombreux progrès ont été faits. La loi du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes a ainsi renforcé encore la parité en politique, dans les instances professionnelles et dans les instances sociales. Pour nous la parité signifie l’égalité : l’objectif est qu’un même nombre d’hommes et de femmes soit présent, comme ils le sont dans la société. Les femmes ne sont pas une catégorie : elles sont la moitié de l’humanité et de la société.

C’est pourquoi je vous propose de modifier l’alinéa 4 de l’article afin qu’à la deuxième élection des délégués du personnel, les listes électorales comportent 40 % de femmes, et 50 % à la troisième. Nous serons alors en 2021.

C’est ainsi que nous favoriserons l’engagement des femmes dans le syndicalisme et que nous irons vers une mixité des métiers, afin que les femmes ne soient plus cantonnées à certains métiers, alors que d’autres restent éminemment masculins.

Nous proposons le même mécanisme pour l’élection des comités d’entreprise.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Vous allez être largement satisfaite, madame la présidente, car le dispositif que nous avons adopté en commission permet la parité des élus dès le premier scrutin, alors que vous nous proposez de l’atteindre en trois scrutins. La rédaction retenue par la commission est donc bien plus favorable que celle que vous préconisez. J’imagine que vous allez la retirer : je ne comprendrai pas que vous défendiez un amendement moins favorable à la cause que vous défendez que ce que la commission a adopté.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Rebsamen, ministre. Je partage la position du rapporteur. Vous conviendrez, madame la présidente, qu’en prévoyant des listes composées alternativement d’un homme et d’une femme, ce texte permet une avancée importante. Je n’emploierai pas l’expression du rapporteur : je la laisse à la postérité !

M. le président. Les explications du rapporteur vous ont-elles convaincue de retirer votre amendement, madame Coutelle ?

Mme Catherine Coutelle. Non.

(L’amendement n621 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Christophe Cavard, pour soutenir l’amendement n390.

M. Christophe Cavard. Dans l’état actuel du texte, si la composition de la liste n’est pas conforme aux exigences légales, elle ne peut être modifiée qu’après coup. Je propose par cet amendement que l’autorité administrative, c’est-à-dire les services déconcentrés de l’État, puisse corriger l’irrégularité dans les trois jours précédant l’élection, plutôt que des candidats voient leur élection annulée par le juge.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Je rappelle que le texte n’enlève pas la possibilité d’un recours préélectoral visant à contester la régularité d’une liste électorale, qui est de droit. Je vous demanderai donc de retirer votre amendement, puisqu’il est satisfait par les textes existants.

(L’amendement n390 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Gérard Cherpion, pour soutenir l’amendement n29.

M. Gérard Cherpion. En remplaçant le mot « postérieurement » par le mot « antérieurement », cet amendement vise à permettre au juge de statuer avant que l’élection n’ait lieu, ce qui éviterait d’annuler l’élection. C’est tout à fait possible dans les délais impartis.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Le problème posé par votre amendement, monsieur Cherpion, c’est qu’il revient à laisser à l’employeur le soin de constater si une liste est recevable ou pas, puisque c’est auprès de lui que les listes sont déposées.

Par ailleurs, à partir du moment où le contentieux post-électoral est maintenu, vous ne pouvez pas interdire à quelqu’un de déférer telle ou telle liste devant le tribunal administratif parce qu’il estime qu’elle ne satisfait pas aux exigences légales en matière de parité ou en d’autres domaines.

L’avis est donc défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Rebsamen, ministre. Le dispositif de contrôle prévu pour les élections politiques n’est pas facilement transposable aux élections professionnelles mais, en l’occurrence, la solution retenue est simple et sûre : si le juge se prononce avant les élections, il peut invalider la liste ; s’il se prononce après, il annule les sièges des élus du sexe surreprésenté sans pour autant annuler l’élection.

M. le président. La parole est à M. Alain Chrétien.

M. Alain Chrétien. Au risque de vous agacer, je vous rappelle que vous prônez la simplification ; vous avez même un secrétaire d’État à la simplification, et quand on lit l’alinéa 18, il faut s’y reprendre à trois fois avant de le comprendre !

Vous nous mettez en garde contre le risque de générer du contentieux, et vous êtes en train d’accumuler les usines à gaz ! Vous simplifiez d’un côté, et au nom de cette sacro-sainte parité (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Mme Chaynesse Khirouni. Sacro-sainte !

Mme Catherine Coutelle. Heureusement qu’il y a la « sacro-sainte » parité !

M. Alain Chrétien. Vous allez créer un dispositif que personne ne va comprendre ! (« Rétrograde ! » sur les bancs du groupe SRC.) Attendez ce que vont dire les chefs d’entreprise quand il va leur falloir mettre en place cette usine à gaz. Dans six mois, vous reviendrez ici pour voter des dérogations à ce dispositif, comme pour le compte pénibilité, parce que personne ne s’y retrouvera.

Je vous invite donc à aller directement à la simplification en évitant d’imposer aux chefs d’entreprise tout un tas de règles qui sont totalement en décalage par rapport à la réalité. (Vives protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Il n’y aura jamais 50 % de femmes dans une usine de chaudronnerie : vous aurez forcément plus d’hommes que de femmes !

Mme Elisabeth Pochon. Parce que, pour vous, une femme ne peut pas représenter un homme ?

M. Alain Chrétien. Comment ferez-vous dans ce cas pour constituer des listes paritaires ?

M. Christophe Sirugue, rapporteur. C’est prévu.

M. Alain Chrétien. Soyez un peu réalistes ! (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Excusez-moi de rappeler ce qui a été adopté par la commission. La commission n’a pas voté l’exigence d’une liste paritaire, mais d’une tête de liste paritaire,…

M. Alain Chrétien. Qu’est-ce que cela veut dire ?

M. Thierry Mariani. Un candidat bicéphale ?

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Cela signifie ceux qui sont en tête de liste.

Le texte prévoit que la liste sera ensuite complétée, soit par des candidats masculins si l’environnement de travail compte principalement des hommes, soit par des candidats féminins s’il compte principalement des femmes.

M. Thierry Mariani. C’est bien une usine à gaz.

M. Christophe Sirugue, rapporteur. C’est ce qui me permettait de dire à Mme la présidente Coutelle que nous assurions par ce biais une élection de représentants et de représentantes sous une forme paritaire, tout en tenant compte du fait que certains métiers, certaines branches professionnelles sont plus féminisés ou plus masculinisés que d’autres.

Si je devais retenir ce que vous venez d’évoquer…

M. Thierry Mariani. Cela vaudrait mieux !

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Je ne suis pas sûr, car cela reviendrait à contester le principe de la parité, dont je rappelle qu’il est inscrit dans notre Constitution. Pour ma part, mes chers collègues, je pars du principe que des hommes ou des femmes peuvent tout à fait représenter des salariés, quel que soit leur sexe.

M. Alain Chrétien. Alors pourquoi ces règles ?

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Je pense qu’il faut à la fois que le processus électoral contribue à cet objectif de parité vers lequel nous voulons tendre, tout en tenant compte de la réalité de la composition du corps électoral de certains métiers. C’est notre solution. De là à contester le principe même de parité comme vous venez de le faire, je ne peux bien évidemment pas vous suivre sur ce terrain.

(L’amendement n29 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Christophe Sirugue, rapporteur, pour soutenir l’amendement n665.

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Après avoir évoqué la question du contentieux préélectoral, nous en venons à celle du contentieux post-électoral.

Les nouvelles dispositions de l’article L. 2314-24-1 introduisent dans les élections professionnelles le principe d’une représentation équilibrée des femmes et des hommes, au regard de la composition sexuée du corps électoral – c’est ce que je viens de vous rappeler. À l’initiative de la commission des affaires sociales, elles imposent en outre que les listes de candidats présentent alternativement un candidat de chaque sexe selon les modalités que je viens de vous rappeler.

Afin d’assurer une pleine effectivité à ce dispositif et de compléter le nouveau mécanisme de sanction institué au stade post-électoral, le présent amendement prévoit l’annulation de l’élection des candidats dont le positionnement rendrait la liste de candidatures irrégulière.

Cette possibilité d’annulation doit inciter les organisations syndicales à présenter des listes conformes, ce qui est notre objectif.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Rebsamen, ministre. Avis tout à fait favorable.

(L’amendement n665 est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Christophe Sirugue, rapporteur, pour soutenir l’amendement n350.

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Il est rédactionnel.

(L’amendement n350, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Christophe Sirugue, rapporteur, pour soutenir l’amendement n354.

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Il est rédactionnel.

(L’amendement n354, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Christophe Sirugue, rapporteur, pour soutenir l’amendement n685.

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Il a le même objet que l’amendement n665, au niveau du comité d’entreprise cette fois.

(L’amendement n685, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Catherine Coutelle, pour soutenir l’amendement n627.

Mme Catherine Coutelle. Il vise à abaisser d’un an à six mois la condition d’ancienneté pour devenir membre des institutions représentatives du personnel, toujours en vue d’encourager la prise de responsabilité des femmes : elles ont souvent des emplois plus précaires.

C’est donc un amendement favorable à la parité, chers collègues. Mais je comprends, vu vos rangs, que vous n’y soyez pas favorables…

M. Thierry Mariani. Qu’est-ce que cela veut dire ?

Mme Marie-Christine Dalloz. Quel sectarisme !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Sirugue, rapporteur. L’amendement déposé par Mme la présidente Coutelle est un amendement dont je comprends parfaitement la philosophie. J’ai simplement une réticence, car je pense que, pour pouvoir être candidate, il faut tout de même bien connaître l’entreprise dans laquelle on travaille. Un délai de six mois est, objectivement, relativement court. Je serais donc tenté, madame la présidente, de vous demander de retirer cet amendement, parce que je pense que le dispositif est plus protecteur que celui que vous suggérez. Sinon, j’émettrai un avis défavorable.

M. Alain Chrétien. Vous contestez la parité, monsieur le rapporteur !…

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Rebsamen, ministre. Même avis.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Coutelle.

Mme Catherine Coutelle. Je retire mon amendement.

(L’amendement n627 est retiré.)

(L’article 5, amendé, est adopté.)

Après l’article 5

M. le président. Je suis saisi de deux amendements tendant à insérer un article additionnel après l’article 5.

La parole est à Mme Catherine Coutelle, pour soutenir l’amendement n690.

Mme Catherine Coutelle. Il s’agit de préciser la loi du 18 décembre 2014 sur les conseils de prud’hommes, pour mettre de nouveau de la parité dans la désignation des conseillers prud’homaux.

(L’amendement n690, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Catherine Coutelle, pour soutenir l’amendement n622.

Mme Catherine Coutelle. Il vise de même à garantir la parité au sein du CHSCT, de manière progressive.

Monsieur le rapporteur, je suis d’accord avec votre liste paritaire alternée au début jusqu’à épuisement des possibilités. J’entends les contraintes des entreprises où il peut y avoir une majorité d’hommes ou de femmes. Toute la liste ne peut être paritaire, mais votre proposition sur le début de liste est excellente.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Par le dispositif que nous avons adopté, nous envoyons dans les instances un nombre paritaire d’élus. Partant de là, on peut leur faire confiance pour considérer que le CHSCT doit être constitué de manière paritaire. Je pense que vous avez satisfaction, du moins dans l’esprit.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Rebsamen, ministre. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Gérard Cherpion.

M. Gérard Cherpion. Je voudrais revenir sur l’amendement précédent, concernant les prud’hommes. Il ne faut pas confondre désignation et élection. Par ailleurs, nous savons que la formation des conseillers prud’homaux est assez longue, si bien que, dans certaines sections, on manque de conseillers. Il faut faire attention qu’à cause de la parité, que je respecte et que je souhaite, il n’y ait pas des défections : nous manquerions de conseillers prud’homaux.

M. le président. La parole est à M. Christophe Sirugue, rapporteur.

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Je peux simplement vous dire que, lorsqu’il y a peu nous avons abaissé le seuil à partir duquel, dans les élections politiques et en particulier municipales, nous préconisions la parité, j’ai entendu exactement les mêmes choses. Et puis, dans la circonscription dont je suis l’élu comme je l’imagine dans les autres, chacun a pu faire le constat que nous avons réussi à faire figurer autant d’hommes que de femmes sur les listes qui ont été soumises au suffrage universel.

Je ne dis pas que l’exercice est toujours facile, mais nous avons réussi et c’est le même objectif que nous nous sommes donnés pour les prud’hommes, avec cette volonté de considérer que, dans des instances chargées de juger des situations inhérentes à l’ensemble de la vie active, avoir le même nombre d’hommes que de femmes constitue une avancée importante.

M. le président. La parole est à M. Gérard Cherpion.

M. Gérard Cherpion. Il faut faire la différence entre élection et désignation. Je n’ose pas imaginer que les délégués syndicaux, se réunissant pour procéder aux désignations, ne respectent pas la parité.

Mme Marie-Françoise Clergeau. Si la loi ne le dit pas, ce sera difficile !

Mme Catherine Coutelle. Je ne répondrai pas à cette provocation. L’amendement est retiré.

(L’amendement n622 est retiré.)

Article 6

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n288.

Mme Jacqueline Fraysse. Ce texte ouvre aux délégués syndicaux la possibilité de prendre part à des négociations ou des concertations à un autre niveau que celui de leur entreprise et c’est une très bonne mesure : elle prend en compte la réalité du travail militant. C’est une mission nouvelle qui doit être reconnue comme telle : nous sommes favorables à cette disposition.

En même temps, il s’agit d’un travail complémentaire. Nous pensons que le temps consacré par ces délégués à discuter au dehors ne doit pas être décompté au détriment du temps dont ils disposent pour s’occuper des salariés de leur entreprise. C’est la raison pour laquelle cet amendement vise à prévoir qu’un complément d’heures soit accordé à ces délégués, s’ils négocient à l’extérieur de l’entreprise. Nous proposons qu’il soit annuel pour que le dispositif soit souple : ces discussions peuvent durer plusieurs jours une certaine année, alors qu’elles n’auront pas lieu à d’autres moments.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Madame Fraysse, vous savez qu’en fait, l’article 6 va permettre de couvrir une situation déjà existante. Il n’est pas juste de dire qu’il s’agit d’une mission nouvelle. Il n’y a pas de mission nouvelle, mais des missions déjà exercées que nous voulons couvrir par cet article. J’émets donc un avis défavorable.

(L’amendement n288, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Catherine Coutelle, pour soutenir l’amendement n631.

Mme Catherine Coutelle. Par cet amendement, nous demandons l’abrogation de l’article L. 3123-29 du code du travail. En effet, selon cet article, le temps de travail d’un salarié à temps partiel ne peut être réduit de plus d’un tiers par l’utilisation de crédits d’heures auxquels il peut prétendre pour l’exercice des mandats qu’il détient au sein de l’entreprise.

Nous considérons que cet article du code du travail est discriminatoire pour les femmes, qui sont majoritairement à temps partiel : 80 % des salariés à temps partiel sont des femmes. La réduction de leur temps de travail au titre d’un mandat est plafonnée, ce qui n’est pas le cas pour un salarié à temps plein. Nous souhaitons donc supprimer cette discrimination.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Je pense qu’en allant au bout du raisonnement, on prendrait un vrai risque. Aujourd’hui, quand on travaille à temps partiel, on ne peut consacrer plus de 30 % de son temps à l’exercice d’un mandat syndical. Si vous faites sauter cette limite-là, on peut se trouver dans cette situation assez folle où une personne à temps partiel utilise la totalité de son temps, à l’intérieur de l’entreprise, à exercer un mandat syndical. Je ne suis pas sûr que ce soit le meilleur moyen de conserver le lien entre l’entreprise et le mandat syndical. Je ne pense pas que ce soit ce que vous vouliez, car l’esprit de ce que vous proposez, je l’ai bien compris, est de permettre de s’impliquer aux femmes, qui sont il est vrai nombreuses à travailler à temps partiel. Les conséquences de cet amendement pourraient être assez préjudiciables, c’est pourquoi j’émettrais un avis défavorable si jamais vous le mainteniez.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Rebsamen, ministre. Même avis : le rapporteur a raison.

M. le président. La parole est à Mme Sandrine Mazetier.

Mme Sandrine Mazetier. Il y a tout de même quelque chose de choquant dans cette limitation apportée à l’exercice d’un mandat. Il n’y a pas de limite quand on est à temps plein, mais on ne peut pas consacrer plus de 30 % de son temps de travail en heures de délégation syndicale quand on est à temps partiel.

Pour avancer, une solution a été formulée que nous avons du mal à écrire, mais je suis sûre que les services du ministère sauraient faire cela très bien : ce serait que le solde permette de compléter le temps de travail.

Je m’explique. Si quelqu’un est titulaire de trois mandats syndicaux, ce qui excède naturellement 30 % de son temps partiel, alors le solde de son temps devrait être considéré comme du temps de travail, venant compléter son temps partiel.

C’est une possibilité, que vous pourriez construire. Si l’exécutif s’engage à y réfléchir, nous pourrions songer à retirer cet amendement. Sinon, je le dis, il y a tout de même quelque chose de choquant à ce qu’un salarié à temps partiel soit limité dans l’exercice des mandats qui lui ont été confiés par ses collègues.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Sirugue, rapporteur. J’avoue ma perplexité…

M. Thierry Mariani. En fait, les entreprises devraient embaucher à temps plein !

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Si je comprends bien ce que l’on m’explique – Mme Mazetier me précisera si c’est bien de cela qu’il s’agit – 30 % du temps dédié à l’organisation syndicale dans le cadre d’un temps partiel requerrait un complément de 30 % de temps de travail, ce qui reviendrait à comptabiliser un temps de 60 % ?

J’avoue ma perplexité…

Très courageusement, je me tourne donc vers M. le ministre (Sourires) car, si j’ai bien compris la mécanique suggérée, je vois mal comment la mettre en place.

Mme Marie-Christine Dalloz. En effet ! Il n’y a qu’à l’Assemblée nationale que l’on peut voir de telles choses !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre se précipite pour prendre le micro… (Sourires)

M. François Rebsamen, ministre. Notre entente avec le rapporteur est très bonne, ce dont je le remercie (Sourires). Le brouillard tombe, en effet… (Sourires.)

Je dispose de quelques arguments mais qui doivent être vérifiés.

Je considère que nous aurons l’occasion de revenir sur cette question lors de la deuxième lecture et qu’en l’état, le dispositif que vous proposez n’est visiblement pas au point.

Mme Sandrine Mazetier, rapporteure. Pour nous, c’est très clair !

M. François Rebsamen, ministre. C’est très clair, c’est très clair… Je ne peux pas acter cela sans en avoir une claire intellection.

Ainsi, pour une salariée à temps partiel dont la durée contractuelle de travail est de 24 heures par semaine, soit 104 heures mensuelles – nous sommes d’accord jusque-là – la limite de 30 % correspond à 31,2 heures par mois ce qui représente deux mandats, comité d’entreprise et déléguée du personnel, 20 et 15 heures, soit 35 heures.

Mme Sandrine Mazetier, rapporteure. Cela dépasse les 30 %.

M. François Rebsamen, ministre. Vous voulez donc que cette personne bénéficie d’une rémunération supplémentaire ?

Mme Catherine Coutelle. Il s’agit en fait de lutter contre le travail à temps partiel.

M. François Rebsamen, ministre. En l’état, je ne peux émettre un avis favorable à l’adoption de cet amendement. Je suis donc réservé et je vous propose que l’on retravaille cette question.

Mme Isabelle Le Callennec. Il fallait y travailler en commission des affaires sociales.

M. François Rebsamen, ministre. Nous avons encore un peu de temps pour vérifier ce qu’il en est concrètement. Vous comprendrez que je ne veuille pas rompre l’équilibre du texte qui a été trouvé avec l’ensemble des partenaires sociaux.

Mme Isabelle Le Callennec. Je propose un renvoi en commission !

M. François Rebsamen, ministre. Je ne sais pas du tout ce que le dispositif que vous proposez peut donner, pas plus que mes services ou quiconque.

Je vous propose donc, en l’état, de ne pas retenir cet amendement – ce qui ne signifie pas un rejet définitif. Nous aurons l’occasion d’en rediscuter plus précisément.

M. le président. La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani. J’avoue que, nous aussi, nous sommes assez perplexes.

Je tiens néanmoins à saluer l’imagination de notre collègue la présidente Mazetier car si l’on connaissait le travail forcé, elle nous propose maintenant l’embauche forcée puisqu’un salarié à temps partiel serait presque obligatoirement embauché à temps plein par son entreprise.

Comme l’un de mes collègues l’a fait remarquer, je me demande si tout cela ne s’achève pas en travail fictif. Or, une embauche forcée débouchant sur un travail fictif, voilà qui mérite une réflexion au long cours !

M. le président. La parole est à Mme Sandrine Mazetier, rapporteure.

Mme Sandrine Mazetier, rapporteure. Je prends acte de l’engagement du ministre s’agissant des échanges avec son cabinet, lesquels doivent aller au-delà de la petite fiche qui a été élaborée.

Cette disposition du code du travail, dont nous proposons la suppression, empêche un salarié pourtant élu pour exercer des responsabilités de les assumer effectivement – vous l’avez démontré, monsieur le ministre, puisque n’importe quel titulaire des deux mandats que vous avez évoqués, qui travaille à temps plein, a le droit de les exercer.

En revanche, le code du travail interdit à un salarié – en l’occurrence, la plupart du temps, une salariée – à temps partiel…

M. François Rebsamen, ministre. D’être plus payé. Ce n’est pas la même chose !

Mme Sandrine Mazetier, rapporteure. …d’exercer les mandats pour lesquels il ou elle a été élu.

Une solution existe forcément. Je ne doute pas que l’excellence de votre cabinet parviendra à la définir d’ici la deuxième lecture.

J’entends bien que nous travaillerons à cette question. En conséquence, je retire cet amendement.

(L’amendement n631 est retiré.)

(L’article 6 est adopté.)

Après l’article 6

M. le président. La parole est à M. Denys Robiliard, pour soutenir l’amendement n605 portant article additionnel après l’article 6.

M. Denys Robiliard. Je souhaite poser à nouveau la question que j’avais soulevée en commission concernant l’articulation d’une fonction d’élu du personnel avec son syndicat.

Un élu s’appuie sur son syndicat, il y passe le temps nécessaire lequel, trop souvent, fait l’objet de contestations dans le cadre des heures de délégation.

Vous savez en effet que si leur utilisation est présumée conforme au mandat, elle peut aussi être contestée.

L’idée est donc d’établir la présomption que, dans la limite d’un tiers du temps de délégation, le temps passé avec le syndicat est considéré de plein droit comme étant utilisé dans le cadre de la mission, donc, comme satisfaisant à la définition des heures de délégation.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Je comprends d’autant plus M. Robiliard que nous avons déjà discuté de cette question en commission.

Force est de constater, néanmoins, qu’il n’est pas anormal que l’employeur ait le droit de contester l’utilisation du temps passé par le représentant du personnel ou le délégué syndical. Cela me semble juste.

Le problème, dans votre amendement, c’est l’adverbe « irréfragablement », qui contredit ce que je viens dire.

Vous avez toutefois raison en ceci que la jurisprudence est abondante à ce sujet mais le dialogue social impose selon moi la transparence quant à l’utilisation des heures accomplies et je crains que votre amendement, de ce point de vue-là, ne soulève des difficultés.

Je suis donc assez tenté de vous demander son retrait. À défaut, je serai défavorable à son adoption.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Rebsamen, ministre. Comme l’a rappelé M. le rapporteur, nous avons déjà débattu de cette question en commission, monsieur le député Robiliard.

Pourquoi suis-je défavorable à l’adoption de votre amendement ?

Il est bien entendu tout à fait normal que l’employeur puisse contester l’usage des heures de délégation. La charge de la preuve lui incombe mais, s’il l’apporte, il n’y a aucune raison de ne pas la prendre en compte.

Le code du travail, sans équivoque aucune, protège le libre exercice du mandat syndical mais je pense que, dans le cadre du dialogue social, ce ne serait pas rendre un service au salarié, en l’occurrence, de le placer au-dessus de la loi lorsqu’il exerce son mandat syndical.

Malgré de bonnes intentions, le caractère « irréfragable » du temps passé avec l’organisation syndicale me semble plus porter atteinte à l’exercice du temps de délégation qu’autre chose, le mieux étant l’ennemi du bien. Je suis donc défavorable à l’adoption de cet amendement.

J’ai entendu les propos qui ont été tenus, je comprends leur intention mais en plaçant le salarié au-dessus de la loi et en protégeant « irréfragablement », en partie, son temps passé avec l’organisation syndicale, nous irions à l’encontre de ce que l’on veut, soit, un dialogue social équilibré.

M. le président. La parole est à M. Denys Robiliard.

M. Denys Robiliard. En entendant les argumentations de M. le rapporteur et de M. le ministre, je me demande si nous nous comprenons bien.

Il est évident que l’employeur a le droit de contester l’usage des heures de délégation.

En l’occurrence, il s’agit simplement de préciser qu’en cas de contestation, si le délégué du personnel justifie qu’il était avec son syndicat, il n’a pas à justifier ce qu’il faisait dans ce cadre-là – je précise qu’il s’agit d’un délégué du personnel, un membre du comité d’entreprise ou du CHSCT, et non d’un délégué syndical, la problématique étant en l’occurrence différente.

On présume donc que le temps passé dans la limite d’un tiers des heures de délégation avec le syndicat correspond à un temps passé dans l’intérêt du personnel dans le cadre du mandat de représentation du salarié.

Il s’agit ainsi de sécuriser le lien entre le représentant du personnel et le syndicat qui l’a présenté. L’argumentation selon quoi le représentant du personnel serait placé au-dessus de la loi dans la limite d’un tiers de ses heures – libre à lui de faire ce qu’il en veut sans avoir en rendre compte – ne tient pas.

En cas de contestation, il devra bien rendre compte de ce qu’il faisait à ce moment-là mais non du contenu de son action au syndicat.

M. Gérard Cherpion. C’est déjà ce qui est prévu par la loi.

M. Denys Robiliard. Voilà simplement ce que je souhaitais affirmer.

Si le ministre maintient son point de vue, je retire mon amendement pour que la réflexion se poursuive et que, si le terme « irréfragable » vous semble difficilement acceptable, nous puissions trouver une rédaction satisfaisante dans le cadre de la navette.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. François Rebsamen, ministre. Je vous remercie, monsieur Robiliard, d’avoir répondu à mon interrogation. Je ne relancerai pas le débat puisque vous avez pris une position dont je vous remercie également.

Néanmoins, le 3° de votre article propose d’inscrire ceci dans le code du travail – alors que vous comme nous souhaitons introduire un peu de souplesse dans les rouages : « Dans la limite de deux heures mensuelles pour les établissements de moins de 300 salariés, de trois heures mensuelles pour les établissements de 300 à 499 salariés, de cinq heures mensuelles, etc. le temps passé avec l’organisation syndicale ayant présenté sa candidature ou dont il est adhérent est irréfragablement présumé relever de l’exercice de son mandat. »

Cela constitue une complexification inutile. Je suis prêt à discuter avec vous de cette question mais ne prêtons pas le flanc à l’accusation d’une complexification supplémentaire, un peu rigide, du code du travail !

M. Gérard Cherpion. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Denys Robiliard.

M. Denys Robiliard. Je retire l’amendement.

(L’amendement n605 est retiré.)

Article 7

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Germain, pour soutenir l’amendement n586 rectifié.

M. Jean-Marc Germain. Monsieur le président, chers collègues, nous abordons maintenant la question des administrateurs salariés.

Je défendrai plusieurs amendements, qui rejoignent d’ailleurs ceux que d’autres collègues ont déposés.

Au fond, la loi de sécurisation de l’emploi a engagé une étape importante, celle de la citoyenneté d’entreprise, idée selon quoi les entreprises sont mieux gérées lorsque les salariés sont associés aux décisions qui sont prises.

Elle l’a fait d’une manière décidée mais limitée puisqu’elle s’adresse aux entreprises de plus de 5 000 salariés en France ou 10 000 dans le monde avec un ou deux représentants au conseil d’administration.

Ce soir, nous devons progresser ensemble : tout d’abord en étendant le nombre d’entreprises concernées, ensuite, en augmentant le nombre de représentants – les exemples étrangers montrent que, lorsque les salariés sont présents dans une proportion importante, leur influence est plus forte au sein des conseils d’administration – enfin, et c’est l’objet de cet amendement, en faisant en sorte qu’ils soient mieux formés.

La loi prévoit un certain nombre d’heures de formation – 20 par an au minimum. Mon amendement prévoit quant à lui leur renforcement en disposant que le minimum de formation soit de 20 jours sur l’exercice d’un mandat et que ces jours puissent être concentrés en début de mandat, les études réalisées sur la formation des administrateurs salariés et les auditions que j’ai menées en leur temps montrant que nombre d’administrateurs salariés sont très peu formés – deux ou trois jours par an – et qu’ils ne peuvent pas bénéficier de ces formations au début de l’exercice de leur mandat, au moment où cet effort de formation, pourtant, s’impose.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Sirugue, rapporteur. La question de la formation constitue un élément essentiel – l’article 7 y est d’ailleurs consacré.

Je n’arrive pas, toutefois, à comprendre pourquoi cette formation serait impérativement fixée en début de mandat.

M. Jean-Marc Germain. Ce n’est pas ce qui est dit.

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Pourquoi l’utilisation des heures que nous mentionnons doit-elle être encadrée à ce point ?

C’est aux administrateurs salariés de dire quel est le moment le plus approprié pour eux pour bénéficier des heures de formation prévues par ce texte. Leur profil n’est jamais le même, non plus que leur parcours – certains ont déjà été administrateurs salariés. Les cas de figure sont donc nombreux et je ne vois pas pourquoi il serait impératif de dispenser cette formation en début de mandat.

Je ne saisis pas vraiment l’objectif de ce qui est suggéré. S’il s’agit de la formation, aucun problème ; s’il s’agit de la situer en début de mandat, outre que je ne vois pas ce qui l’interdirait, je ne vois pas ce que cela apporterait de plus.

Si j’ai bien compris le sens de cet amendement, je suis plutôt défavorable à son adoption.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Rebsamen, ministre. Comme l’a dit M. le rapporteur, la formation de ces salariés – de ces administrateurs salariés, devrais-je dire – est un sujet très important, monsieur le député Jean-Marc Germain.

Le projet de loi, pour le moment, fixe une durée minimale de vingt heures par an.

Mais il a été décidé, dans la loi de sécurisation de l’emploi, que les conditions dans lesquelles un administrateur pourra bénéficier de cette formation seront définies par voie réglementaire, précisément par un décret publié en Conseil d’État.

Je vous pose donc la question : n’est-il pas plus sécurisant de prévoir un crédit d’heures annuel minimal, étant donné que la durée du mandat des administrateurs peut varier, selon les statuts de l’entreprise, et aller jusqu’à six ans ? Il nous semble potentiellement plus intéressant de fixer une formation minimale de vingt heures par an, plutôt que vingt jours sur la durée totale du mandat – sachant, je le répète, que cette durée peut être modifiée ou atteindre jusqu’à six ans. La formation étant plus intéressante au début qu’à la fin du mandat, il ne nous paraît pas nécessaire d’imposer cette obligation, et il paraît préférable de laisser une liberté de choix. Telle est la position du Gouvernement, et son avis est défavorable.

M. le président. La parole est à M. Christophe Cavard.

M. Christophe Cavard. J’aurais tendance, et même une forte tendance, à soutenir cet amendement, et j’aimerais m’en expliquer. Nous savons tous, monsieur le ministre, que la disposition proposée est une conséquence de la loi de sécurisation de l’emploi, que M. Germain connaît bien, puisqu’il était rapporteur du texte. Mais, contrairement à ce que vous avez indiqué, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, l’amendement ne crée aucunement l’obligation de suivre cette formation en début de mandat. Il ouvre seulement une possibilité, puisqu’il est indiqué que, « à leur demande », les administrateurs « peuvent » utiliser ce droit.

Cet amendement donne une sécurité au salarié dans le cadre d’éventuelles négociations avec l’employeur. Notre collègue Jean-Marc Germain nous a dit qu’il a constaté, par les auditions qu’il a faites et les retours qu’il a eus depuis que la loi de sécurisation de l’emploi a été votée, que les administrateurs salariés ressentent souvent le besoin de recevoir une formation au début de leur mandat, afin de jouer pleinement leur rôle. Ils peuvent aussi se former en cours de route, c’est certain, mais ils risquent d’être moins efficaces que s’ils avaient reçu une formation initiale.

J’y insiste : vous vous trompez, lorsque vous repoussez cet amendement au motif qu’il créerait une obligation. L’amendement dit clairement que la chose est possible, si l’administrateur salarié en fait la demande. Chers collègues, cet amendement améliore le dispositif que nous avons défini ensemble et que nous avons voté dans la loi de sécurisation de l’emploi.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Germain.

M. Jean-Marc Germain. Si l’amendement disait que ce que vous décrivez, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, je l’aurais retiré immédiatement. Il est bien évident qu’il n’est pas question d’imposer automatiquement une formation de vingt jours à tout le monde. Et l’exemple que vous avez cité, monsieur le rapporteur, est excellent : un administrateur reconduit n’aura pas besoin de ces vingt jours.

Pour répondre à vos observations, monsieur le ministre, cet amendement ne supprime pas le plancher de vingt heures par an. Nous ajoutons simplement une possibilité, qui n’est d’ailleurs pas très éloignée du dispositif existant, même si elle le renforce un peu.

Lorsqu’une entreprise de 5 000 salariés compte un ou deux administrateurs, la question du coût ne se pose pas : il est infinitésimal pour l’entreprise. En revanche, les consultations très nombreuses que j’ai pu mener et les études qui ont été faites montrent que cette demande de formation initiale s’exprime très fortement chez nombre de nouveaux administrateurs salariés. Il s’agit donc de leur donner la possibilité, s’ils en font la demande, de bénéficier de cette formation, tout en conservant leur droit à vingt heures par an. Cela ne coûtera rien mais, à entendre les administrateurs salariés, cela les aidera grandement à exercer leur mandat dans de bonnes conditions. J’espère donc, monsieur le ministre, au vu de ces explications, que vous apporterez votre soutien à cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. Cet amendement est assez intéressant, et il nous donne l’occasion de reconstituer une ligue dissoute qui s’était formée à l’occasion d’un texte précédent, monsieur Germain. Pour ma part, je soutiendrai cet amendement. Nous parlons d’administrateurs salariés, c’est-à-dire de salariés qui vont entrer au conseil d’administration de grands groupes, sans avoir nécessairement connaissance du fonctionnement des comptes d’exploitation, ni de certains chiffres ou éléments qui sont fournis dans ces conseils d’administration.

M. François Rebsamen, ministre. C’est vrai.

M. Francis Vercamer. Il me paraît important que l’administrateur salarié qui vient de prendre son poste soit le mieux formé possible, dès le départ, ce qui ne veut pas dire qu’il va prendre ses vingt jours de formation dès la première semaine.

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. Vingt jours dès la première semaine, ce serait difficile ! (Sourires.)

M. Francis Vercamer. Il est vrai que vingt jours, cela ferait trois semaines… (Mêmes mouvements.) Ce que je veux dire, c’est qu’il aura peut-être besoin d’une ou deux semaines de formation au départ, pour apprendre ce qu’il est essentiel de savoir lorsqu’on siège dans un conseil d’administration. Je trouve cet amendement très intelligent et je le voterai avec plaisir.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz.

Mme Marie-Christine Dalloz. Je suis très étonnée de cet amendement. Le mieux est l’ennemi du bien. Or vous voulez pour ainsi dire imposer au nouvel administrateur d’utiliser tout son temps de formation au début de son mandat. C’est à peu près ce que vous proposez.

M. Jean-Marc Germain et M. Francis Vercamer. Non !

Mme Marie-Christine Dalloz. Vous voulez en tout cas qu’il ait la possibilité de l’utiliser totalement au début de son mandat.

M. Jean-Marc Germain. En effet.

Mme Marie-Christine Dalloz. Mais, étant donné le rythme assez soutenu avec lequel vous modifiez aussi bien le droit du travail que le dialogue social ; étant donné les modifications régulières, récurrentes et profondes que vous leur imposez, il va falloir que les administrateurs se forment régulièrement, tout au long de leur mandat. Or vous vous apprêtez à leur enlever cette possibilité, puisque vous leur laissez la liberté de se former totalement au début de leur mandat. Après cela, ils n’auront plus de possibilité de se former, et ils ne pourront donc pas s’adapter à une législation qui évolue sans cesse, de votre fait. Ce faisant, vous allez donc pénaliser l’ensemble des administrateurs salariés dans les entreprises. Je vous invite à réfléchir à ce problème.

(Mme Laurence Dumont remplace M. David Habib au fauteuil de la présidence.)

Présidence de Mme Laurence Dumont

vice-présidente

Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Cherpion.

M. Gérard Cherpion. En général, les salariés qui deviennent administrateurs ont  une certaine expérience de l’entreprise. Ce sont des gens qui ont déjà un vécu dans l’entreprise et qui ont déjà reçu une formation. L’exposé des motifs, du reste, dit bien que ce temps de formation n’est pas imputable sur le crédit d’heures prévu à l’article L. 225-30-1. Cela signifie bien que ces gens, en règle générale, ont déjà un niveau de formation minimal pour faire ce travail.

Vous citez les études réalisées par le Collège des Bernardins et l’Institut français des administrateurs. Mais il est certains administrateurs qui vont apprendre par l’expérience, à la fois celle qu’ils auront déjà acquise et celle qu’ils acquerront sur le terrain. Ils pourront avoir besoin, à un moment donné, de conforter leurs connaissances sur un point particulier, d’ordre administratif ou financier. D’autres pourront également apprendre en observant le fonctionnement du système.

Il faut, à mon sens, laisser l’entière liberté à ces administrateurs de gérer ce temps de formation comme ils l’entendent. Il me paraît inutile de préciser de quelle manière ce temps doit être utilisé, ou de faire des préconisations en la matière. Tous les administrateurs sont différents et ont un parcours différent. Laissons-les s’adapter et utiliser comme ils l’entendent la possibilité qui leur est offerte.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marc Germain.

M. Jean-Marc Germain. Monsieur Cherpion, je serais d’accord avec vous s’il s’agissait d’une contrainte, mais c’est une liberté que nous créons, une possibilité, qui répond à l’attente de tous les administrateurs salariés.

M. Gérard Cherpion. Cette possibilité existe déjà. Pourquoi l’écrire dans la loi sous cette forme ?

M. Jean-Marc Germain. Des étudiants qui se destinent à gérer des conseils d’administration étudient pendant deux ans dans une business school, et on refuserait à des salariés qui en font la demande une formation de vingt jours, ou même seulement de quelques jours ? Vingt heures, cela représente trois ou quatre jours. Quand vous arrivez au conseil d’administration d’un grand groupe, vous avez votre expérience, c’est sûr – et c’est précisément ce qui est précieux – mais il faut aussi avoir des connaissances sur la gestion financière, sur la gouvernance de l’entreprise, autant de nouveaux domaines à découvrir. Nous offrons cette possibilité aux nouveaux administrateurs.

Vous rappeliez, monsieur le ministre, que ces mandats durent généralement six ans. Ce que prévoit actuellement la loi, c’est environ vingt-quatre jours de formation, à raison de quatre jours par an. Ce que nous proposons, ce n’est pas d’augmenter le nombre de jours de formation, mais de donner la possibilité aux nouveaux administrateurs de concentrer cette formation en début de mandat.

M. Jean-Luc Laurent. Il n’y a pas de péril avec cet amendement !

M. Jean-Marc Germain. Il serait donc vraiment raisonnable, en suivant notre collègue Francis Vercamer, d’adopter cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Je vous ai bien écouté, monsieur Germain, mais je voudrais revenir sur une chose que je ne comprends pas. Premièrement, votre amendement pose un vrai problème d’inégalité, puisque vous proposez une formation de vingt jours par mandat, alors que la durée de ces mandats est variable, puisqu’elle peut être de quatre ou de six ans.

M. Jean-Marc Germain. Cela ne se substitue pas aux vingt heures par an !

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Pourquoi fixer vingt jours de formation par mandat, à partir du moment où on ne connaît pas la durée du mandat ?

Je préfère la rédaction actuelle du texte, qui prévoit vingt heures par an. Cela me semble beaucoup plus juste que ce que vous suggérez.

M. Jean-Marc Germain. Mais ce n’est pas la même chose !

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Deuxièmement, vous nous dites que le fait de recevoir cette formation en début de mandat est une simple possibilité. Très bien, mais pourquoi vouloir l’inscrire dans la loi ?

M. Jean-Marc Germain. Pour que l’employeur ne puisse pas refuser !

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Je comprends, mais ce qui me paraît extraordinaire, c’est que nous examinons un texte qui doit favoriser le dialogue social et que, à force de l’encadrer, nous risquons d’empêcher que ce dialogue ait lieu. Je comprends le sens de votre amendement, mais je le trouve, à certains égards, contraire à l’esprit même de ce projet de loi et à notre conception du dialogue social. Je maintiens donc mon avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. François Rebsamen, ministre. Au fil du débat, les choses avancent et s’éclaircissent. Merci à vous, monsieur le rapporteur, monsieur Germain, pour les précisions que vous avez apportées.

J’ai fait un rapide calcul, et l’inégalité que vous introduisez me semble effectivement problématique. Vous fixez une durée de formation de vingt jours par mandat, quelle que soit la durée du mandat – trois ou six ans – alors que nous, nous garantissons vingt heures par an. Pourquoi, par ailleurs, préciser que les administrateurs peuvent utiliser ce temps de formation « sans limitation » ? Cela revient à leur suggérer d’utiliser immédiatement l’intégralité de leurs jours de formation.

Vingt heures par an sur un mandat de six ans, cela fait dix-huit jours. Et vous, vous proposez vingt jours, sans tenir compte de la durée du mandat. Ce qui me gêne, c’est l’obligation que vous introduisez malgré tout, avec les termes « sans limitation », qui enserrent un peu les choses. Voilà ce qui nous sépare : chacun comprend que ce n’est pas majeur, puisque cela ne fait que deux jours de différence. Je ne pense pas, du reste, que les administrateurs aient intérêt à prendre leurs vingt jours de formation immédiatement. S’ils veulent les utiliser sans limitation, ils le feront, mais ce qui a été dit n’est pas faux : c’est tout au long de son mandat que l’on a besoin de se former. On n’a pas affaire à des administrateurs salariés qui seraient des débutants complets et qui ne connaîtraient rien aux règles.

Mme Jacqueline Fraysse. Cela peut arriver !

M. François Rebsamen, ministre. Cela peut arriver, mais c’est assez rare. Je plaide pour davantage de souplesse. Nos positions ne me semblent pas très éloignées, et je soutiens, monsieur le député, que notre formulation est meilleure que la vôtre.

Mme la présidente. La parole est à M. Christophe Cavard.

M. Christophe Cavard. Tous les arguments peuvent se valoir, mais il me semble que nous avons un dialogue de sourds, ou du moins que nous avons du mal à nous comprendre. Il faut arrêter d’’opposer les vingt jours et les vingt heures, car ce qui est proposé n’est pas de substituer une solution à l’autre. Cela fait quatre fois qu’on le répète, et il serait temps de clore ce débat.

Je rappelle, par ailleurs, que cet amendement s’inscrit dans la continuité du projet de loi de sécurisation de l’emploi, que nous avons écrit ensemble, que cette majorité a voté, et qui a renforcé le rôle des administrateurs salariés. Ce n’est pas quelque chose qui date d’il y a dix ans, qui fonctionne déjà… Le débat d’aujourd’hui s’inscrit dans la continuité d’un texte qui a été voté il y a un an à peine, et qui est en train d’entrer en application. Le dispositif monte en puissance et la proposition qui est faite vise à protéger le salarié dans le dialogue social.

Monsieur le rapporteur, je vous le dis très franchement, nous sommes tous favorables au dialogue social mais, cela a été dit en commission, l’employeur et le salarié ne sont pas exactement sur un pied d’égalité lorsqu’ils dialoguent. Le texte fait en sorte que, si le salarié fait une demande de formation, son employeur ne puisse pas la lui refuser. Mais, cela a été dit, cette disposition ne coûtera pas plus cher.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marc Germain.

M. Jean-Marc Germain. En deux mots, pour éclairer nos collègues avant de voter, il n’y a aucune réduction de ce qui était prévu puisque cette disposition vient s’ajouter à l’existant. Le seuil de vingt heures par an reste valable, c’est bien un plancher.

Il n’y a pas de rupture d’égalité, toutes les lois fixent des planchers, et ensuite des éléments variables en fonction de la durée du mandat. Si, pour réunir tout le monde, il faut supprimer les mots « sans limitation », et qu’ainsi cet amendement puisse être voté à l’unanimité, nous aurions fait œuvre utile.

Encore une fois, cet amendement n’est pas tombé du ciel, il est issu de consultations avec ceux qui exercent ces mandats et de la constatation que dans 30 % des cas, il n’y a aucune formation des administrateurs salariés.

Vous parlez du dialogue social, monsieur le rapporteur, et dans beaucoup de cas, le dialogue social se passe très bien. Mais justement, dans ces cas, on constate que les heures de formation se concentrent plutôt en début de formation pour les nouveaux venus, et qu’il y a un nombre substantiel d’heures de formation.

(L’amendement n586 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Sandrine Mazetier, pour soutenir l’amendement n689.

Mme Sandrine Mazetier. Il s’agit d’étendre aux administrateurs salariés les dispositions adoptées pour toutes les instances ou institutions représentatives du personnel à l’article 5. Dans des entreprises de plus de 5 000 salariés – et demain de plus de 1 000 –, les ressources existent pour que les femmes et les hommes soient représentés parmi les administrateurs salariés.

(L’amendement n689, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 7, amendé, est adopté.)

Article 7 bis

Mme la présidente. Je suis saisie de plusieurs amendements, nos 326 rectifié, 519 rectifié, 694 deuxième rectification, 391 rectifié et 352 rectifié, pouvant être soumis à une discussion commune.

Les amendements nos 326 rectifié, 519 rectifié et 694 deuxième rectification sont identiques.

La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement n326 rectifié.

M. Francis Vercamer. Le rapport Gallois préconisait d’introduire au moins quatre représentants des salariés dans les conseils d’administration ou de surveillance des entreprises de plus de 5 000 salariés, sans dépasser le tiers des membres avec voix délibérative, y compris dans les comités des conseils.

La loi du 14 juin 2013 a institué ces administrateurs salariés en fixant un certain nombre de seuils, c’est-à-dire en indiquant que dans les entreprises de plus 5 000 salariés, il pouvait y avoir des administrateurs salariés, je vous épargne les détails de la loi.

J’estime que les administrateurs salariés sont un avantage qui va bien au-delà du dialogue social, car cela place dans la gestion même de l’entreprise des salariés qui n’ont pas forcément connaissance de la manière dont les choses fonctionnent, ce qui leur permet de voir les difficultés de gestion dont ils n’ont pas connaissance. Cette disposition est donc intéressante.

Néanmoins, si prévoir un seuil de 5 000 salariés est une bonne chose, je propose par cet amendement d’abaisser le seuil à 1 000 salariés, et à 5 000 pour les groupes ayant plusieurs établissements.

(M. David Habib remplace Mme Laurence Dumont au fauteuil de la présidence.)

Présidence de M. David Habib

vice-président

M. le président. La parole est à Mme Fanélie Carrey-Conte, pour soutenir l’amendement identique, n519 rectifié.

Mme Fanélie Carrey-Conte. Le groupe socialiste est très attaché à cet amendement, puisqu’il est présenté et défendu par plusieurs d’entre nous. Comme l’a régulièrement répété le ministre, le fil conducteur de ce texte est que le développement du dialogue social constitue un enjeu majeur pour la démocratie au sein de l’entreprise, comme pour l’amélioration de sa compétitivité et de ses performances économiques.

Nous avons l’occasion d’aller plus loin que ce qui a déjà été fait dans le cadre de la loi de sécurisation de l’emploi du 14 juin 2013 sur la fixation du seuil pour la mise en place des administrateurs salariés. Il vous est donc proposé de passer 5 000 à 1 000 salariés pour les sociétés dont le siège social est situé sur le territoire national, et de 10 000 à 5 000 pour celles dont le siège social est situé sur le territoire français et à l’étranger.

Ce texte nous offre l’occasion de faire de nouveaux progrès pour améliorer encore substantiellement le dialogue social dans notre pays et la place des salariés dans la prise de décision sur l’ensemble des sujets concernant l’entreprise, ne laissons pas passer cette chance !

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Germain, pour soutenir l’amendement identique, n694 deuxième rectification.

M. Jean-Marc Germain. Je défends cet amendement au nom de mes collègues du groupe socialiste, car il est important. Je ne reviendrai pas sur le fond, mon amendement est identique à ceux que viennent de présenter nos collègues. Il vous est proposé de réduire le seuil de 5 000 à 1 000 salariés pour les entreprises dont le siège est en France, et de 10 000 à 5 000 pour les autres.

Ce serait un mouvement important, monsieur le ministre, et je sais que vous y êtes sensible. J’attends donc votre réponse avec impatience, car cette mesure permettrait, si mes statistiques sont exactes, de doubler le nombre de salariés concernés. Ce quinquennat restera celui au cours duquel nous avons fait un grand pas en avant en matière de démocratie d’entreprise. Ce pas a montré son efficacité, si aujourd’hui nous en faisions un second, nous serions à la hauteur des attentes des salariés de notre pays.

M. le président. La parole est à M. Christophe Cavard, pour soutenir l’amendement n391 rectifié.

M. Christophe Cavard. Cet amendement est légèrement différent des précédents car les chiffres ne sont pas les mêmes, mais l’esprit est identique. Je dis à nos collègues qui, apparemment, refusent ces amendements, que nous sommes un certain nombre à avoir travaillé en série sur ces textes, notamment la loi de 2013, et nous étions nombreux, y compris dans cet hémicycle, à avoir défendu et voté ces dispositions sur les administrateurs salariés.

Il n’y a pas de posture des uns et des autres, d’ailleurs je me réjouis car sur deux amendements consécutifs, notre collègue Francis Vercamer et les membres du groupe UDI nous ont rejoints. D’un point de vue concret et pratique, sans posture, nous voyons bien qu’il faut améliorer le texte que nous avons voté en 2013, y compris sur la question des seuils, afin de donner toute leur place aux administrateurs salariés.

Le problème n’est pas tant d’abaisser le seuil de 5 000 à 1 000 – cela me semble très bien, notre amendement proposait de le porter à 2 000 – mais d’améliorer tout simplement les dispositions en vigueur. J’appelle donc nos collègues à ne pas rejeter cette proposition, et j’espère que le ministre nous soutiendra car nous sommes dans la continuité de la loi de 2013.

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Laurent, pour soutenir l’amendement n352.

M. Jean-Luc Laurent. À mon tour de présenter un amendement tendant à abaisser le seuil qui a été fixé par la loi de sécurisation de l’emploi de 2013 dans le cadre de l’accord national interprofessionnel, dit ANI.

À cette occasion, nous avions fixé le seuil à 5 000 salariés, et 10 000 lorsqu’il y a des filiales. Il avait été considéré – malgré les demandes de plusieurs députés dont je faisais partie avec d’autres députés du Mouvement républicain et citoyen – qu’il fallait prendre un peu de temps et commencer par les grandes entreprises.

Par la suite, lorsque votre collègue, le ministre de l’économie, a proposé sa loi en première lecture, j’étais intervenu pour dire qu’il fallait franchir une deuxième étape en abaissant le seuil fixé par la loi de 2013, comme nos collègues le proposent.

Pourquoi ? Parce que la participation des salariés à la vie de l’entreprise n’est pas un gadget et ne concerne pas simplement le dialogue social, cela a été dit par notre collègue de l’UDI. Cela permet de reconnaître la place des salariés dans la vie de l’entreprise et dans son devenir, et de faire en sorte que, à côté des actionnaires et de leurs représentants, les salariés puissent être reconnus dans leur rôle d’acteurs ayant un intérêt dans l’avenir de l’entreprise. Voilà pourquoi j’insiste, monsieur le ministre, sur le fait qu’une deuxième étape est nécessaire, en abaissant les seuils qui ont été fixés par la loi de 2013.

J’ajoute que l’accord national interprofessionnel, qui avait prévu cette présence des salariés dans les conseils d’administration, a été imparfaitement traduit dans le texte de loi. On y évoque les entreprises françaises, situées en France. Pourquoi met-on ce verrou ? Pourquoi ne prévoit-on pas que toute entreprise de plus de 5 000 ou 10 000 salariés peut avoir des administrateurs salariés ?

Je propose donc par cet amendement de supprimer l’obligation, inscrite dans la loi de 2013, d’avoir un comité d’entreprise ou un siège social en France. Je pense que nous ferions ainsi un pas décisif, en plus de l’abaissement à 1 000 du seuil du nombre de salariés qui déclenche la représentation des salariés au sein des conseils d’administration ou de surveillance.

M. le président. La parole est à M. Michel Liebgott.

M. Michel Liebgott. Je voulais apporter un complément aux différentes interventions, notamment à l’interpellation indirecte de M. Cavard : qu’il se rassure, nous considérons que ce n’est pas un paquet cadeau, ce n’est pas parce qu’il est question des administrateurs que nous allons tout voter ou tout rejeter...

M. le président. Excusez-moi monsieur Liebgott, je vous redonnerai la parole plus tard : je pensais que vous souhaitiez demander une suspension de séance.

La parole est à M. le rapporteur, pour donner l’avis de la commission sur cette série d’amendements.

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Ils sont extrêmement importants. Depuis le début des débats sur ce texte, nous sommes vigilants à ce que le dialogue social soit le plus abouti possible. Nous l’avons fait sur les TPE lorsque nous avons examiné l’article 1er, et je pense qu’aujourd’hui nous avons une étape supplémentaire à franchir, avec les administrateurs salariés, concernant la représentation dans les plus grandes entreprises.

Je partage une grande partie de ce qui a été dit. J’indique à notre collègue Laurent que nous avons déjà intégré en commission la suppression du comité d’entreprise comme l’un des éléments qui permet de renforcer ces avancées, surtout afin de contrecarrer ceux qui l’ont utilisé pour se soustraire à la volonté du législateur. Je me permets d’ailleurs de rappeler à notre collègue Cavard que cet amendement a été déposé en commission à mon initiative.

Je pense que l’abaissement des seuils est aujourd’hui une étape nécessaire. Donc, pour ce qui me concerne, j’émettrai un avis extrêmement favorable aux trois amendements identiques qui prévoient d’abaisser les seuils à 5 000 et 1 000 salariés. Ils me paraissent aller dans l’esprit que je mentionnais tout à l’heure. Il faut tenir compte de l’existant et renforcer la place des administrateurs salariés.

Je rejoins M. Vercamer, car je ne pense pas qu’il faille considérer que la présence d’un administrateur salarié au sein d’un conseil d’administration soit négative, bien au contraire. Ça doit être considéré comme un élément de la participation à la vie de l’entreprise. Pour y participer pleinement, il vaut mieux disposer de tous les éléments, et c’est ce qui avait été à l’origine de la décision d’introduire ces administrateurs salariés. C’est cette volonté qui doit aujourd’hui nous animer pour étendre ce dispositif aux entreprises de 1 000 salariés en France, et de 5 000 salariés en France et à l’étranger. Cela me paraît intéressant, j’émets donc un avis favorable sur les trois amendements identiques.

S’agissant des deux autres amendements en discussion commune, je ne sais pas si les collègues qui les présentent se rallieront aux trois amendements que je viens de mentionner, mais je pense qu’ils tomberont si, comme je le souhaite, les trois amendements identiques sont adoptés.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Rebsamen, ministre. Je sens une concentration…

M. Jean-Luc Laurent. Une convergence !

M. François Rebsamen, ministre. Une convergence, effectivement. Si tous les socialistes, par des amendements divers, convergent, il faut le prendre en compte. (Exclamations et rires sur les bancs du groupe UMP.)

M. Philippe Gosselin. C’est historique, monsieur le ministre !

M. Jean-Luc Laurent. Ce sont les vrais républicains !

M. François Rebsamen, ministre. Mais ce n’est pas de cela dont je veux parler. Le fond est plus intéressant. La mise en place des représentants des salariés dans les conseils d’administration est une grande avancée, issue d’un accord national interprofessionnel majoritaire, qui a été transposé par vous-même dans la loi du 14 juin 2013.

Je rappelle que la loi du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi, qui a transposé l’ANI, avait donné aux entreprises un délai de deux ans – jusqu’à la fin du mois de juin 2015 – pour procéder à ces changements. Un premier bilan, d’ailleurs positif, a pu être tiré de l’application de ce dispositif. Les peurs et les craintes attisées par les uns et les autres, dont témoignent les comptes rendus des débats de l’époque, ne se sont pas du tout concrétisées.

M. Jean-Luc Laurent. Très juste !

M. François Rebsamen, ministre. Près de quatre-vingt-dix grands groupes de plus de 5 000 salariés en France sont aujourd’hui visés par cette disposition. Avec les partenaires sociaux, j’ai initié un premier bilan, et il est apparu que la condition d’existence d’un comité d’entreprise, évoquée tout à l’heure par le député Jean-Luc Laurent, avait conduit à dispenser beaucoup de ces groupes de l’obligation de présence de salariés au sein du conseil d’administration de la société de tête. Je vais vous donner des informations très précises : parmi les 113 entreprises du SBF 120 dont le siège social est implanté en France, 48 ont désigné un ou plusieurs représentants des salariés au sein de leur conseil d’administration ou de surveillance, 36 n’entrent pas dans le champ de la loi parce qu’elles ne sont pas soumises à l’obligation d’avoir un comité d’entreprise, et 13 sont des filiales qui entrent individuellement dans le champ de la loi bien que la tête de groupe ne soit pas directement concernée. Nous sommes à la fin du mois de mai : à un mois de la date limite, le bilan fait donc état de 97 entreprises concernées. Il leur reste un peu de temps pour accélérer le mouvement…

Force est de reconnaître que ni les uns ni les autres n’avions anticipé cet écart, pas plus le Gouvernement que le rapporteur et l’Assemblée – j’ai relu les comptes rendus des débats de l’époque. Peut-être certains l’avaient-ils fait, mais cela n’apparaît pas clairement.

Je vois que certains se concertent… En tout cas, il me semble une bonne chose de revenir à l’esprit de l’ANI. Nous en avons parlé avec le rapporteur en commission : le Gouvernement est favorable à la suppression de la condition d’existence d’un comité d’entreprise dans la société de tête. Cette suppression conduira automatiquement à un élargissement significatif du nombre d’entreprises concernées. En même temps, elle nous permettra de revenir à l’ANI de 2013. L’ANI, tout l’ANI, rien que l’ANI !

M. Gérard Cherpion. C’est ce que vous avez dit !

M. François Rebsamen, ministre. J’ai bien écouté les uns et les autres, mais vous voyez vers quoi je chemine...

M. Denys Robiliard. Vers la synthèse !

M. François Rebsamen, ministre. Il y a des chaussures qui sont très belles… (Sourires.)

En revanche, une baisse du seuil d’application de la mesure serait contraire à une disposition d’un accord majoritaire interprofessionnel, avant même la fin de sa période d’application. Les partenaires sociaux me l’ont redit, et ils n’ont pas formulé les choses autrement. Ils se sont peut-être exprimés différemment lors d’autres rencontres, mais la crédibilité de la démarche de dialogue tient quand même à quelques principes clairs, comme le respect des engagements. Or je n’ai pas encore engagé de concertation sur la baisse des seuils, parce que les partenaires sociaux n’ont pas encore achevé leur évaluation paritaire de l’ANI du 11 janvier 2013.

M. Philippe Gosselin. Dans ce cas, le texte arrive trop vite !

M. François Rebsamen, ministre. Pour ce faire, ils se sont donné jusqu’au 8 juin prochain. Vous me direz que c’est demain…

M. Philippe Gosselin. Levons donc la séance et voyons cela demain !

M. François Rebsamen, ministre. Sur la méthode, et indépendamment de mon avis personnel sur ces amendements, le Gouvernement ne peut être favorable à une modification brutale de l’accord du 11 janvier 2013.

Sur le fond, nous avons déjà fait un grand pas en faveur de la présence des salariés au sein des conseils d’administration des grands groupes. Il n’y a pas de quoi en avoir peur. Cependant, en abaissant le seuil à 1 000 salariés, le nombre de groupes concernés passerait de 90 à 400. Alors que cette mesure devait concerner, dans l’esprit de l’ANI, les multinationales, elle s’appliquerait désormais aux grosses ETI familiales. Dans le cadre de réformes où le fantasme entretenu par certains prend parfois le pas sur le réel, il faut faire attention. Je souhaite donc que l’on progresse par étapes, dans le dialogue.

M. Gérard Cherpion. C’est laborieux !

M. François Rebsamen, ministre. Aussi, à cet instant, le Gouvernement serait favorable à une baisse progressive du seuil, et peut-être seulement après avoir engagé une concertation avec les partenaires sociaux.

Les amendements proposés sont très larges et ne prévoient pas de délai de mise en œuvre. Il n’est donc pas possible de décider ici, du jour au lendemain, sans aucune concertation avec les partenaires sociaux, d’abaisser brutalement le seuil à 1 000 salariés sans laisser aux entreprises concernées le temps d’adaptation nécessaire.

M. le président. Sur les amendements identiques nos 326 rectifié, 519 rectifié et 694 deuxième rectification, je suis saisi par le groupe écologiste d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

La parole est à M. Michel Liebgott.

M. Michel Liebgott. Nous sommes au cœur de la démocratie politique, mais aussi de la démocratie sociale. Sur ces questions, nous avançons pas à pas. J’ai bien compris que la loi relative à la sécurisation de l’emploi avait permis de faire un premier pas l’année dernière, et que nous n’étions pas tenus de respecter les ANI.

Mme Isabelle Le Callennec. Et le respect des partenaires sociaux ? C’est tragique !

M. Michel Liebgott. Nous pouvons aller plus loin, et nous l’avons déjà fait de façon significative en commission.

Monsieur Cavard, parmi les amendements qui émanent du groupe SRC, certains sont des propositions collectives, mais d’autres sont des initiatives individuelles. Ces dernières sont légitimes, mais elles ne sont pas censées être portées par le groupe.

Ce qui fait la qualité de nos discussions, c’est qu’à un moment donné, il y a débat, à différents stades, en commission puis dans l’hémicycle. Évidemment, il est préférable que nous prenions le temps de travailler en commission, afin que nous arrivions en séance publique avec un texte à peu près présentable. Sur ce point, néanmoins, une étape supplémentaire nous paraît pouvoir être franchie. D’une part, nous sommes nombreux à penser que cette étape ne constitue pas une révolution – vous l’avez dit à l’instant, monsieur le ministre, en donnant le nombre d’entreprises concernées. D’autre part, nous enverrions un signe à celles qui, jusqu’à présent, n’appliquent pas ces dispositions, parce qu’elles considèrent sans doute qu’elles peuvent encore résister à leur mise en œuvre, et qui s’y verront contraintes.

Avant que nous ne passions au vote et que chacun ne s’exprime à titre individuel, je tiens à rappeler que la position du groupe SRC est favorable aux trois amendements identiques dont nous parlons.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. François Rebsamen, ministre. La demande de scrutin public est un peu brutale. Sur la méthode, je le répète, il faut absolument prévoir un étalement dans le temps de la mise en œuvre d’une telle mesure. Nous aurons besoin de temps ! Vous ne pouvez pas décider cela du jour au lendemain, sans concertation avec les partenaires sociaux. Vous pouvez le décider par un vote, certes, mais encore faut-il que la mesure adoptée soit applicable.

Mme Isabelle Le Callennec. C’est mieux !

M. François Rebsamen, ministre. Trop de mesures votées s’avèrent inapplicables.

M. Gilles Lurton. En matière de pénibilité, par exemple.

M. François Rebsamen, ministre. J’invite donc la représentation nationale, notamment la majorité, à réfléchir à l’applicabilité dans le temps des dispositions qu’elle s’apprête à voter.

M. Gilles Lurton. Ce qu’elle aurait dû faire depuis trois ans !

M. le président. La parole est à M. Gérard Cherpion.

M. Gérard Cherpion. À un moment ou un autre, on peut se faire plaisir en prévoyant d’ajouter des administrateurs dans une entreprise, sans s’occuper d’ailleurs de ce qui s’y passe. Mais il y a très peu de temps, monsieur le ministre, j’avais déposé une proposition de loi, et vous m’aviez reproché de vouloir modifier cette même loi ratifiant l’ANI de 2013 alors que son encre était, disiez-vous, à peine sèche. Aujourd’hui, nous sommes exactement dans le même cas de figure. L’encre de la loi du 14 juin 2013 est à peine sèche. Nous sommes en train de mettre en place un système de façon progressive, et cette progressivité est logique. Nous ne sommes même pas arrivés au terme des deux années de mise en place du premier dispositif, et nous sommes déjà en train de vouloir augmenter le nombre d’administrateurs salariés.

Je ne suis pas systématiquement opposé à la présence d’administrateurs salariés, bien au contraire. Je connais même des entreprises qui ne répondent pas aux critères du texte qui nous est proposé et qui comptent pourtant des administrateurs salariés. Elles n’en ont pas forcément un seul, mais parfois plusieurs, et ce ne sont pas de très grandes entreprises. Ce dispositif fonctionne donc, et je suis tout à fait ouvert à cette solution.

Toutefois, comme l’a dit M. le ministre, les amendements qui nous sont proposés concernent environ quatre-vingt-dix entreprises. Vous voulez prendre une décision qui s’appliquerait à ces quatre-vingt-dix entreprises, comme cela, au milieu de la nuit, sans attendre la fin de la mise en place du premier dispositif, et au moment où nous devons traiter de problèmes bien plus importants que celui du nombre d’administrateurs salariés dans une entreprise. Nous pourrions passer à ces questions-là, plutôt que de rester sur les présents amendements. C’est la raison pour laquelle nous voterons contre les amendements identiques nos 326 rectifié, 519 rectifié et 694 deuxième rectification.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Germain.

M. Jean-Marc Germain. J’ai apprécié l’ouverture de notre ministre. On comprend bien qu’il est, sur le fond, extrêmement favorable à nos amendements. Cependant, en tant que ministre non seulement du travail, mais aussi du dialogue social, il souhaite respecter le temps de ce dialogue social. Je souhaite faire deux observations.

Tout d’abord, monsieur Cherpion, ce que nous faisons aujourd’hui n’est une surprise pour personne. Nous avions dit que la loi de 2013 ne constituait qu’une première étape, et qu’il y en aurait une deuxième en 2015 – notre collègue Vercamer avait voté l’amendement en ce sens. Or nous n’allons pas examiner un nouveau projet de loi sur le dialogue social et la participation des salariés au mois de juin ! À quelques jours près, les partenaires sociaux pourraient donc comprendre que nous soyons au rendez-vous que nous avions fixé. Tout le monde considère d’ailleurs cette mesure comme une avancée, à l’exception d’une organisation syndicale qui n’a jamais défendu cette forme de gouvernance.

En outre, nous décidons du mode de gouvernance des sociétés françaises de plus de 1 000 salariés. Je vous invite d’ailleurs, chers collègues, à regarder quel code nous modifions : il ne s’agit pas du code du travail, mais du code de commerce. La décision que nous allons prendre aujourd’hui dépend donc fondamentalement de la représentation nationale.

M. Gérard Cherpion. C’est la représentation nationale qui vote la loi dans tous les domaines, que cela relève du code du travail ou du code de commerce !

M. Jean-Marc Germain. Même dans l’esprit de la loi Larcher et de l’article L. 1 du code du travail, il est de notre responsabilité, et non de celle des partenaires sociaux, de décider de la façon dont les entreprises de France se gouvernent.

La première étape a fonctionné : c’est un vrai succès, que je ne minimise pas du tout. Mais je ne minimise pas non plus la portée du geste que nous allons faire ce soir. Bien sûr, notre ministre a raison, on ne va pas demander aux entreprises de plus de 1 000 salariés de mettre en place le système dès le 1er juin, puisqu’il faut que les assemblées générales se réunissent, qu’elles décident du mode d’élection et qu’elles mettent ces nouvelles dispositions en place. En termes de calendrier, les décisions seront prises en 2015 dans les sociétés dont l’assemblée générale se tiendra en 2015, ou avant avril 2016 dans celles qui convoqueront leur assemblée nationale en 2016. Les nouvelles dispositions entreront en vigueur dans la foulée, c’est-à-dire, raisonnablement, au second semestre de l’année 2016. Mais cela devra être précisé, soit par un amendement du Gouvernement si nous adoptons ces amendements ce soir, soit au cours de la navette.

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Laurent.

M. Jean-Luc Laurent. Je veux ajouter trois éléments à notre débat.

Effectivement, monsieur le rapporteur, c’est un amendement que j’avais déposé avec Christian Hutin qui m’avait amené, en commission, à garder en tête la contrainte du comité d’entreprise. Dont acte : cette affaire est réglée, et bien réglée. Tant mieux.

Pour autant, mon amendement n352 rectifié mentionne l’implantation du siège social de l’entreprise sur le territoire français, un critère qu’il conviendrait de supprimer. Puisque pour M. le ministre, c’est « l’ANI, tout l’ANI, rien que l’ANI », je lui dis : chiche ! Revenons au texte de l’accord ! Sur ce point, notre amendement ne peut que le satisfaire, dans la mesure où ce critère relatif à l’implantation du siège ne figure pas dans l’ANI.

Enfin, si les trois amendements faisant l’objet d’un scrutin public sont adoptés, nous en serons, pour ce qui nous concerne avec mes collègues MRC, en particulier Christian Hutin, très satisfaits dans la mesure où nous proposons également d’abaisser le seuil d’effectif de mise en place des administrateurs salariés.

Par ailleurs, je comprends mal pourquoi vous nous demandez, monsieur le ministre, d’attendre le mois de juin, soit l’échéance prévue dans le cadre de l’accord interprofessionnel. Ici, nous votons la loi et celle-ci deviendra exécutoire lors de sa promulgation. C’est donc après le mois de juin qu’elle deviendra une réalité tangible, ce qui vous laisse tout loisir de mener la concertation à son terme.

M. le président. La parole est à M. Christophe Cavard.

M. Christophe Cavard. Je serai bref dans la mesure où nous sommes à peu près tous d’accord et que l’ensemble des groupes se sont largement exprimés.

Nous ne sommes pas, monsieur Cherpion, en train de nous faire plaisir. Nous prenons nos responsabilités en tant que législateur. Lors de la discussion générale, certains – y compris vous-même qui en êtes convaincu – ont insisté sur le rôle positif des administrateurs salariés.

M. Gérard Cherpion. Je l’ai dit.

M. Christophe Cavard. C’est pour cette raison que je le rappelle, mon cher collègue.

Nous ne faisons ici que compléter la loi de juin 2013, sur un dispositif dont vous reconnaissez vous-même qu’il représente une plus-value pour les entreprises. Nous ne touchons pas au nombre d’administrateurs salariés – un autre amendement sera l’occasion de se demander s’ils doivent être au moins deux – ni au rôle qui doivent jouer, qui restera plein et entier. C’est pourquoi je m’étonne de votre refus d’élargir le champ des entreprises concernées : celles-ci ne vont pas subir, mais bénéficier de la présence de ces salariés, qui comprennent les logiques entrepreneuriales et la façon dont on gère une entreprise, et sont donc en mesure de participer avec les autres membres du conseil d’administration à la définition de ses orientations.

Nous permettons à un plus grand nombre d’entreprises de bénéficier de cette plus-value. J’invite donc nos collègues du groupe UMP à revenir sur leur décision un peu brutale et à nous accompagner dans ce choix.

M. Jean-Luc Laurent. Soyez républicains. Et progressistes !

M. le président. La parole est à M. Michel Liebgott.

M. Michel Liebgott. Je le redis, il ne s’agit pas d’une révolution, même si certains, en France, semblent penser le contraire. Il suffit de regarder ce qui se passe de l’autre côté de nos frontières : ma circonscription est frontalière de l’Allemagne, un pays où, à partir de 500 salariés, cela fonctionne très bien.

Mme Marie-Christine Dalloz. C’est totalement différent !

M. Michel Liebgott. Ce n’est pas tout à fait la cogestion, mais cela s’y apparente. Or même si je ne prétends pas qu’un tel système soit parfait, il reste que nous ne sommes pas en avance dans ce domaine.

Nous sommes à l’Assemblée nationale : ce n’est pas une révolution que nous proposons, mais une évolution législative favorable à la démocratie. Comme l’a excellemment dit notre collègue Laurent, cela n’empêchera pas d’évaluer la situation dans les entreprises déjà concernées par le dispositif et qui, soit dit en passant, n’ont pas été très correctes puisqu’elles n’ont pas respecté la loi. Si aujourd’hui, on pousse un peu la porte, ce n’est pas forcément gênant Cela constituera un moyen de pression pour leur faire connaître notre volonté, notre détermination.

Mme Marie-Christine Dalloz. Et on va créer des emplois ainsi ?

M. Michel Liebgott. Je pourrais d’ailleurs dire que certains dirigeants s’y sont préparés depuis longtemps et qu’ils ne craignent rien de ce point de vue. Il en est même un qui a donné dans la provocation en proclamant que l’on ferait de cet administrateur salarié, un banquier ! N’ayez crainte, ils sauront s’adapter. Cela se pratique dans d’autres pays. Quoi qu’il en soit, ces entreprises seront tout aussi bien gérées lorsque les administrateurs salariés y siégeront. Ils y apporteront même un peu de fraîcheur.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 326 rectifié, 519 rectifié et 694 deuxième rectification. Je rappelle qu’ils ont reçu un avis favorable de la commission et, de la part du Gouvernement, ce que je peux interpréter comme un avis de sagesse. C’est bien ça, monsieur le ministre ?

M. François Rebsamen, ministre. Oui.

(Il est procédé au scrutin.)

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants40
Nombre de suffrages exprimés40
Majorité absolue21
Pour l’adoption33
contre7

(Les amendements identiques nos 326 rectifié, 519 rectifié et 694 deuxième rectification sont adoptés et les amendements nos 391 rectifié et 352 rectifié tombent.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements, nos 393 rectifié, 579 rectifié et 353 rectifié, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Christophe Cavard, pour soutenir l’amendement n393 rectifié.

M. Christophe Cavard. Le présent amendement prévoit un seuil minimal de représentation des salariés. Nous avons déjà longuement débattu du rôle que peuvent jouer des administrateurs salariés au sein du conseil d’administration. Or, ce rôle resterait incomplet si cette représentation se limitait à une personne, laquelle serait alors trop isolée. Il doit y en avoir au moins deux : ce n’est pas énorme, mais les administrateurs salariés auraient ainsi la possibilité de se concerter et d’apporter, ensemble, une véritable plus-value à l’entreprise.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Germain, pour soutenir l’amendement n579 rectifié.

M. Jean-Marc Germain. Après les dispositions sur la formation et l’avancée très importante que nous venons d’accomplir – et dont nous pouvons être fiers – en adoptant les amendements sur les seuils de mise en place des administrateurs salariés, l’augmentation du nombre de ces administrateurs est le troisième moyen de renforcer la démocratie d’entreprise.

Ce nombre avait été fixé à un ou deux selon la taille de l’entreprise ; il est temps de passer à une proportion plus raisonnable. En Allemagne, elle est de 50 %, avec voix prépondérante du chef d’entreprise. Avec cet amendement, je propose qu’en France, cette proportion soit d’un tiers.

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Laurent, pour soutenir l’amendement n353 rectifié.

M. Jean-Luc Laurent. Le présent amendement, cosigné par mes collègues Hutin et Bechtel, vise à augmenter le nombre de représentants au sein des conseils d’administration et de surveillance. Il reprend la proposition présentée dans le cadre du rapport Gallois, à savoir passer de deux à quatre représentants.

M. Gérard Cherpion. Encore une couche !

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements ?

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Je suis un peu surpris que mon amendement n378 rectifié ne soit pas en discussion commune avec les trois précédents. Si vous le permettez, monsieur le président, je le présenterai en même temps.

M. le président. Je vous en prie, monsieur le rapporteur.

M. Christophe Sirugue, rapporteur. S’ils sont formulés de façon différente, tous ces amendements partagent en effet le même objectif : renforcer le nombre d’administrateurs salariés dans les conseils d’administration et s’assurer qu’il n’y ait pas qu’un seul représentant comme cela était le cas jusqu’à présent. Les amendements de M. Cavard et de M. Germain proposent de retenir une proportion d’un tiers, ce qui me paraît élevé. M. Laurent, quant à lui, propose de porter à quatre le nombre d’administrateurs salariés lorsque le nombre total d’administrateurs est supérieur à douze.

Ma position est plus simple : je propose un plancher de deux administrateurs salariés dans l’ensemble des entreprises concernées, sans distinguer si leur conseil d’administration ou de surveillance comporte ou non plus de douze membres.

Si mon amendement pouvait recueillir l’adhésion et faire consensus, car il participe de la volonté de conforter l’implantation des administrateurs salariés dans les entreprises, j’invite les auteurs des autres amendements à les retirer au profit du mien. Avec l’amendement de Mme Mazetier relatif à la parité qui a été adopté tout à l’heure, nous disposerions ainsi d’une panoplie complète pour assurer une bonne représentation des salariés dans les entreprises de plus de 1000 salariés – et non plus de 5000.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Rebsamen, ministre. J’aurais voulu savoir si la proposition du rapporteur faisait l’unanimité car, en fait, c’est par elle que j’aurais souhaité commencer. Je me suis jusqu’à présent toujours calé sur ses propositions, même s’il peut arriver que sur tel ou tel point, nous ne soyons pas d’accord.

Là encore, les parlementaires ont toute liberté de modifier le nombre de représentants des salariés dans les conseils d’administration : cela ne changerait pas la face du monde. Cela étant, je rappelle que certaines grandes sociétés, se mettant ainsi en conformité avec la loi que vous aviez votée il y a peu de temps, viennent juste de désigner leurs administrateurs.

Une fois de plus, j’invite les parlementaires à prendre en compte la situation réelle des entreprises. On ne peut modifier ainsi la composition de leurs conseils alors que certaines n’ont pas encore tiré toutes les leçons de la loi que vous avez votée il y a deux ans.

M. Gilles Lurton et M. Thierry Mariani. Très bien.

M. François Rebsamen, ministre. Certaines se sont mises en conformité, d’autres, on l’a vu, n’ont pas encore procédé à ce changement. Songez au moins à la situation des premières ! Il convient de laisser aux administrateurs en place le temps de finir leur mandat avant que les dispositions que vous préconisez n’entrent en application. On ne modifie pas, du jour au lendemain, la composition des conseils d’administration ou les mandats des administrateurs : telle est la remarque que je voulais faire. Pour autant, je sais ce qui va se passer.

M. le président. J’ai cru comprendre que M. Cavard était d’accord pour retirer son amendement au profit de l’amendement de M. le rapporteur.

(L’amendement n393 rectifié est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Laurent.

M. Jean-Luc Laurent. Les arguments de M. le ministre et la proposition de notre rapporteur m’ont convaincu. Cela me semble être sage même si nous devrions adopter une perspective plus large, sans toutefois aller jusqu’au tiers des représentants comme cela existe dans les entreprises publiques depuis une loi Auroux de 1984.

(L’amendement n353 rectifié est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Germain.

M. Jean-Marc Germain. Pour ce qui me concerne, je vais également retirer mon amendement n579 rectifié car il est important d’avancer dans le consensus et de soutenir l’excellent travail de notre rapporteur, tout en tenant compte des observations du Gouvernement.

Il faut avancer : je ne voudrais pas attendre six ans pour voir les conseils se doter de deux ou trois représentants des salariés. Pour autant, il faut reconnaître que, pour une entreprise, le renouvellement du conseil d’administration représente un changement important. Nous devons donc avancer par étapes et étaler dans le temps l’application du dispositif, mais l’objectif reste une progression régulière vers un seuil plus important.

La proportion d’un tiers me paraît un minimum pour que les choses soient équilibrées et que l’entreprise redevienne ce qu’elle devrait être vraiment : pas simplement la chose de ses actionnaires, en termes de décisions, mais un outil partagé entre des actionnaires qui apportent de l’argent, des salariés qui apportent leur force de travail et des territoires qui permettent la compétitivité. C’est cela qui se joue à l’arrière-plan des avancées que nous faisons.

(L’amendement n579 rectifié est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. C’est une chose que de diminuer le seuil au-delà duquel la présence de représentants des salariés est obligatoire, élargissant la mesure aux entreprises de plus de 1 000 salariés, au lieu de 5 000 précédemment, et c’en est une autre que de modifier la composition du conseil d’administration. Dans votre amendement, monsieur le rapporteur, vous ne préjugez pas du nombre des administrateurs existants. Or, une entreprise peut avoir trois administrateurs – personne ne l’oblige à en avoir douze. On est donc bien au-dessus du tiers, ce qui peut avoir une influence immédiate sur la direction de l’entreprise et sur sa présidence.

Les entreprises ayant de 1 000 à 5 000 salariés se doutaient que le seuil serait abaissé un jour ou l’autre, et cela avait du reste été annoncé en 2013, mais ce que vous proposez ici n’a pas été annoncé et ne figurait pas dans les accords nationaux interprofessionnels qui ont été signés.

Je ne souscris donc bien évidemment pas à cet amendement, qui est une erreur. Qu’un dialogue social ait lieu et que les partenaires sociaux se mettent d’accord sur un autre nombre, je n’y vois pas d’inconvénient, mais qu’on décide ici de nommer deux administrateurs sans même savoir ce qui se passe dans l’entreprise ni combien d’administrateurs il y a aujourd’hui, c’est une erreur fondamentale, et même une erreur de gestion. Je voterai donc contre cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Gérard Cherpion.

M. Gérard Cherpion. Je rejoins la position de M. Vercamer : nous sommes en train de prendre des décisions en fonction d’éléments que nous ne connaissons pas et allons déséquilibrer complètement certains conseils d’administration. Nous pourrions éventuellement aller dans le sens de M. Sirugue si cet amendement prévoyait au moins une barrière de sécurité, un cadre tenant compte à la fois du renouvellement des conseils d’administration et d’un délai minimum. En revanche, si nous prenons aujourd’hui cette position, nous déséquilibrerons certains conseils d’administration. Ce serait, selon moi, une profonde erreur.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Je n’imagine pas un instant que, si le risque de déséquilibre que vous évoquez existait, la composition des conseils d’administration ne serait pas modifiée par les entreprises elles-mêmes, sans que cela signifie pour autant que ce serait facile à faire.

M. Gérard Cherpion. Précisément.

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Objectivement, si l’on considère que deux administrateurs modifient les équilibres – ce qui reste à prouver –, il y a toute latitude, dans le temps, pour modifier ces éléments.

M. Jean-Marc Germain. Très juste !

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Je tenais à apporter cette précision.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. François Rebsamen, ministre. J’ai entendu ce qui a été dit à la suite de mon intervention. M. Germain et le rapporteur ont tenu compte de ma position, mais la représentation nationale ne peut modifier le nombre de représentants sans tenir compte de la réalité de certains conseils d’administration.

M. Gérard Cherpion. Bien sûr !

M. François Rebsamen, ministre. Cette modification peut en effet changer la direction de certains groupes. Certains conseils d’administration ne comptent en effet que trois administrateurs.

M. Christophe Sirugue, rapporteur. La ficelle est un peu grosse !

M. François Rebsamen, ministre. J’invite donc à réfléchir sur le nombre de deux administrateurs salariés.

Nous ne pratiquons pas encore, en effet, la cogestion à l’allemande – on peut le regretter, mais c’est un autre sujet et, du reste, certains syndicats n’en voudraient pas, ce qui est également un autre problème.

M. Gérard Cherpion. Tout à fait !

M. François Rebsamen, ministre. Nous sommes confrontés à la diversité du nombre de membres des conseils d’administration : avant de fixer uniformément le nombre d’administrateurs à trois, quatre ou deux, réfléchissons à en fixer la proportion en fonction de la composition du conseil d’administration. On ne peut en effet pas nommer deux administrateurs salariés si ce conseil comporte trois membres, car cela risque de changer du jour au lendemain la composition des groupes. De fait, c’est ainsi que cette décision sera interprétée demain. (Exclamations sur divers bancs.)

Mais si ! Certes, elle reviendra et le calme se rétablira, mais peut-être faut-il tenir compte du nombre d’administrateurs, comme cela a été évoqué tout à l’heure.

M. Thierry Mariani. C’est la sagesse !

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Germain.

M. Jean-Marc Germain. Monsieur le rapporteur, je souscris à vos arguments. Dans l’exemple que vous citez, en effet, le conseil d’administration a la majorité, car il dispose au moins de deux voix sur trois. Il peut donc décider de passer à cinq membres, dont deux administrateurs salariés, et conserver sa majorité.

Vous avez en revanche parfaitement raison, monsieur le ministre, de dire que ce processus prend du temps et qu’il n’est pas question pour nous de l’imposer du jour au lendemain. En effet, si cela s’est bien passé dans la loi de sécurisation de l’emploi, c’est précisément parce que nous avons donné du temps pour que les conseils d’administration et les assemblées générales puissent choisir les bons modes de désignation et que les structures puissent évoluer. Donnons donc du temps, mais conservons l’objectif.

M. le président. La parole est à M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. Quelqu’un a dit tout à l’heure, au cours du débat – peut-être était-ce M. le ministre – qu’une entreprise de 1000 salariés était une grosse PME. J’ajouterai qu’il s’agit souvent même d’une PME familiale, dont les administrateurs sont des frères et sœurs, qui ne s’entendent du reste pas forcément entre eux, car il ne suffit pas, pour cela, d’être de la même famille – regardez chez vous, au Parti socialiste : vous êtes de la même famille, mais vous ne vous entendez pas pour autant.

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Si cela n’arrivait qu’au PS, cela se saurait !

M. Francis Vercamer. Il suffit que 30 % des administrateurs ne soient pas d’accord ! Si le conseil d’administration comporte trois administrateurs et que deux nouveaux y entrent, il suffit que trois se mettent d’accord pour que la présidence bascule. Vous avez là un exemple précis de PME familiale qui tombe le jour même. Souvent, en effet, les PME familiales tiennent à un homme : le président, qui est souvent le fondateur. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Mme Catherine Coutelle. Un homme !

M. Francis Vercamer. Il faut savoir comment fonctionnent les PME, madame Coutelle ! Il n’y a pas que de grands groupes, dont les dirigeants sont administrateurs les uns pour les autres. Certaines PME ont une croissance et s’en sortent tant bien que mal – ce qui n’est parfois pas facile avec les lois que vous produisez. N’alourdissez pas la barque !

En outre, changer le nombre des administrateurs n’est pas si facile, car il faut changer les statuts de la société, ce qui suppose la réunion d’une assemblée générale extraordinaire. Ce n’est pas simple. Il faut prendre diverses mesures et cela ne se fait pas en cinq minutes.

Du reste, il ne faut pas seulement augmenter le nombre des administrateurs, mais il faut aussi les trouver. De fait, dans une PME familiale, s’il n’y a que deux enfants pour trois administrateurs, on est contraint de faire entrer des personnes extérieures dans la société et le fondateur n’y est pas toujours favorable.

Mme Sandrine Mazetier. Ce n’est pas comme ça qu’il y aura plus d’entreprises de taille intermédiaire !

M. le président. La parole est à M. Gérard Cherpion.

M. Gérard Cherpion. M. Germain a du bon sens lorsqu’il dit que nous devons nous donner du temps, tout en conservant l’objectif.

Ce n’est pas cela qui met en péril le dialogue social ou le reste du texte. Donnons-nous du temps, laissons passer un peu de temps et cette partie pourra alors revenir, avec une réflexion et un dialogue qui sera établi avec les différentes entreprises. Nous pourrons alors avoir une vision plus saine. Rallions-nous à la position de Monsieur Germain.

M. le président. Monsieur le ministre, pouvez-vous préciser l’avis du Gouvernement ?

M. François Rebsamen, ministre. J’ai compris le principe de l’amendement, mais j’y suis défavorable dans son application.

(L’amendement n378 rectifié est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 518 rectifié et 573 rectifié.

La parole est à Mme Fanélie Carrey-Conte, pour soutenir l’amendement n518 rectifié.

Mme Fanélie Carrey-Conte. Afin d’entrer un peu plus dans le détail de la représentation des salariés, cet amendement tend à préciser qu’un administrateur salarié doit être présent dans tous les comités des conseils de surveillance et des conseils d’administration, notamment dans les comités d’audit et de rémunération, qui sont des lieux de discussion et d’élaboration particulièrement stratégiques, où l’on débat notamment d’expertise, de gestion des risques, de contrôle des comptes ou de rémunération des dirigeants. Il est essentiel que, sur tous ces sujets, les salariés puissent avoir pleinement la garantie d’y accéder.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Germain, pour soutenir l’amendement n573 rectifié.

M. Jean-Marc Germain. Mon amendement n573 rectifié, identique au précédent, porte sur le même sujet, mais je tiens à insister sur le fait qu’il importe que les salariés soient présents dans un certain nombre de comités stratégiques. En effet, depuis 2012, dans la fonction publique en plafonnant la rémunération des dirigeants d’entreprises publiques et, dans le privé, avec un code de bonne gouvernance de l’Association française des entreprises privées – AFEP –, ce gouvernement s’est efforcé d’éviter les rémunérations exorbitantes qui choquent à juste titre, non seulement l’opinion publique, mais aussi nos consciences à tous.

Une façon moderne de réguler notamment les rémunérations, ainsi que plusieurs autres questions stratégiques, est d’assurer la transparence, avec la présence des administrateurs salariés et leur vision de ces questions de rémunération, qui me paraît très importante.

Enfin, monsieur Vercamer, une entreprise qui atteint la taille de 1 000 salariés ne peut plus rester une affaire strictement familiale. Je crois beaucoup au capitalisme familial, qui est bien implanté dans les territoires, mais le temps est peut-être venu de considérer – je songe à un grand dirigeant d’une grande organisation patronale – que, quand on atteint cette taille, il faut avoir un regard extérieur, parce qu’on a la responsabilité de 1 000 salariés, de 1 000 familles et, parfois, de la survie d’une commune et d’un territoire, et il faut s’ouvrir, comme l’a très bien dit tout à l’heure le ministre.

M. Thierry Mariani. Ce n’est pas une incitation à embaucher !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Sirugue, rapporteur. J’entends la préoccupation de nos collègues, mais nous entrons là dans l’organisation même du conseil d’administration, dans sa structuration et dans les choix des différentes instances. De même que j’avais défendu ce principe sur les autres strates de l’entreprise que nous avons évoquées, je ne pense pas que la loi doive aller jusqu’à organiser la présence des administrateurs salariés au sein de cette organisation. J’émettrai donc plutôt un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.

Même argument : avis défavorable.

M. le président. Madame Carrey-Conte, maintenez-vous votre amendement n518 rectifié ?

Mme Fanélie Carrey-Conte. Oui, monsieur le président.

M. le président. Et vous, monsieur Germain, votre amendement n573 rectifié ?

M. Jean-Marc Germain. Moi aussi, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Gérard Cherpion.

M. Gérard Cherpion. Monsieur Germain, je ne sais pas quelle sera demain la réaction des sociétés familiales, qui – et c’est tant mieux – sont relativement nombreuses sur notre territoire, et peut-être même pas assez nombreuses, mais vos propos sont assez graves. Ils le sont d’autant plus que la loi Macron, que nous n’avons pas votée – car le recours à l’article 49-3 en a, je ne sais pas vraiment pourquoi, décidé ainsi –, a créé des sociétés de projets, prévoyant notamment la vente d’une partie de notre industrie d’armement, Nexter, à une société allemande que l’on nous a décrite au cours des débats comme excellente, puisqu’il s’agissait d’une société familiale, employant largement plus de 1 000 salariés.

Comment peut-on penser que des entreprises familiales de 1 000 salariés devraient ouvrir leur capital ou que leur existence n’est pas normale, voire pas morale – j’ignore jusqu’où vous voulez aller –, alors que, dans le même temps, le Gouvernement propose de vendre notre industrie d’armement à une société familiale allemande ?

M. le président. La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani. Monsieur Germain, j’ai eu – je le dis sans aucune agressivité – la même surprise que Monsieur Cherpion en entendant vos propos. Si je comprends bien, en effet, lorsqu’une société familiale réussit, qu’elle embauche et qu’elle dépasse le seuil de 1 000 personnes, elle ne doit plus rester une société familiale ? Cela signifie-t-il qu’il faut lui imposer un certain nombre de membres dans son conseil d’administration ?

Monsieur le ministre, je ne suis pas un spécialiste du droit social, mais je vous ai entendu tout à l’heure nous appeler à nous situer, non dans le fantasme, mais dans le réel. Or, dans la circonscription dont je suis élu, je suis confronté à des entrepreneurs français qui ont quitté la France parce qu’ils ne trouvaient pas la compétitivité au rendez-vous dans notre pays.

Il y a quelques semaines, à Shenzhen, des entrepreneurs français en plasturgie – des entreprises familiales – m’ont expliqué qu’ils s’étaient implantés dans le sud de la Chine, non parce que cela leur coûtait moins cher d’y fabriquer des moules – le prix était le même, pour une qualité équivalente –, mais parce que les contingences sociales en France étaient telles que, faute de souplesse, leur seule manière de pouvoir continuer de travailler était de rester en Chine.

Sincèrement, quand je vois ce texte, où même le ministre est débordé par sa propre majorité, où une frénésie administrative pousse à rajouter des seuils et des administrateurs, je me dis que nous sommes vraiment mal partis pour retrouver cette fameuse compétitivité et faire en sorte que des entrepreneurs viennent recréer des emplois en France !

M. Gilles Lurton et Mme Marie-Christine Dalloz. Très bien !

M. Gérard Sebaoun. Et vive le modèle chinois !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. François Rebsamen, ministre. Je voudrais apporter quelques réserves aux propos qui viennent d’être tenus. La participation de salariés au conseil d’administration des entreprises ne constitue pas, au contraire, un handicap pour la compétitivité… sauf à considérer que les grands pays, que vous citez toujours en exemple, sont relégués au rang de pays de seconde zone !

J’ai fait passer le message, avec succès je l’espère, qu’il fallait procéder par étapes et pas du jour au lendemain. Un bilan de l’accord national interprofessionnel de 2013 sera dressé à la fin du mois de juin. Il faut donner à tout le monde le temps de se retourner !

La question des entreprises patrimoniales a été évoquée, et elle est importante. Il s’agit en général d’entreprises de taille intermédiaire qui ont réussi, et nous en sommes fiers, car elles créent de l’emploi, restent et se développent dans notre pays et portent l’image de la France. Il faut prendre en compte cette sensibilité. Pour le reste, qu’un ou plusieurs salariés siègent au conseil d’administration est souvent une chance pour l’entreprise !

M. Christophe Sirugue, rapporteur et et, M. Jean-Marc Germain. Très bien !

(Les amendements identiques nos 518 rectifié et 573 rectifié ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à M. Gérard Cherpion, pour soutenir l’amendement n198 rectifié.

M. Gérard Cherpion. L’Institut français des administrateurs indique que les administrateurs salariés, par leur connaissance de l’entreprise, de ses activités et de la réalité de ses métiers, enrichissent les débats des conseils d’administration et de surveillance ; ils sont un véritable facteur d’efficacité de la gouvernance d’entreprise et d’une meilleure compréhension des risques auxquels les entreprises sont confrontées.

Je partage ce sentiment : les administrateurs salariés représentent un véritable atout de gouvernance. Mais à partir du moment où leur nombre est supérieur à un, il faut faire une place aux cadres, aux ingénieurs, aux chefs de service et assimilés. L’amendement prévoit donc la représentation de ces catégories.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Bien évidemment, je ne nie pas l’apport des cadres, des ingénieurs et des chefs de service dans un conseil d’administration. Mais je pense qu’il vaut mieux laisser les salariés s’organiser et désigner qui représente la diversité de l’entreprise.

Mme Marie-Christine Dalloz. Et la parité ?

M. Christophe Sirugue, rapporteur. La question de la parité a déjà été réglée, madame la députée. Si vous aviez été présente, vous l’auriez constaté. Avis défavorable.

Mme Marie-Christine Dalloz. La parité n’est pas que sexuelle !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Rebsamen, ministre. Voilà une position courageuse. Vous étiez opposé, monsieur le député, à ce que le nombre d’administrateurs salariés soit porté à deux. À moins qu’avec le rapporteur, vous ne vous soyez concertés par avance, un tel amendement montre que vous aviez déjà prévu qu’il y aurait deux sièges et qu’il fallait réserver l’un d’entre eux aux cadres ou ingénieurs – ou bien que seul un cadre ou ingénieur siégerait. Vous avez raison, ceux-ci apportent leur connaissance de l’entreprise, mais au même titre que les autres salariés. Laissons les salariés choisir ceux qui les représentent le mieux !

M. le président. La parole est à M. Gérard Cherpion.

M. Gérard Cherpion. À aucun moment je n’ai dit, monsieur le ministre, que s’il n’y avait qu’un administrateur salarié, ce serait un cadre ! Il est bien indiqué dans mon amendement que si le nombre des administrateurs salariés est supérieur à un, les sièges sont répartis entre le collège des cadres et celui des salariés. Il n’est pas choquant, monsieur le ministre, que la diversité de l’entreprise soit représentée !

Mme Marie-Christine Dalloz. Chaque collège, en somme !

(L’amendement n198 rectifié n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Germain, pour soutenir l’amendement n574 rectifié.

M. Jean-Marc Germain. Nous avons évoqué la question de la formation des administrateurs salariés. Il s’agit ici du nombre d’heures de délégation qui leur est accordé pour qu’ils puissent exercer leur mandat. Il ressort des auditions que nous avons menées et des études qui ont été réalisées que ce temps doit être important. Dans les très grands groupes, certains administrateurs salariés disposent d’un mi-temps, voire de trois quarts de temps – même s’ils tiennent conserver dans tous les cas une part d’activité salariée. Cet amendement prévoit un minimum de vingt-cinq heures par mois, ce qui est modeste pour exercer une fonction d’une telle importance.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Traditionnellement, les crédits d’heures sont définis par décret. Nous avons besoin d’un dispositif souple, et qui reflète la diversité de l’entreprise. L’avis est défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Rebsamen, ministre. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Germain.

M. Jean-Marc Germain. Je retire l’amendement.

(L’amendement n574 rectifié est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Christophe Cavard, pour soutenir l’amendement n392 rectifié.

M. Christophe Cavard. Je le retire.

(L’amendement n392 rectifié est retiré.)

(L’article 7 bis, amendé, est adopté.)

Article 7 ter

M. le président. La parole est à M. Christophe Sirugue, rapporteur, pour soutenir l’amendement n443.

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Il est rédactionnel.

(L’amendement n443, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 7 ter, amendé, est adopté.)

Avant l’article 8

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 327 et 328, portant article additionnel avant l’article 8. Ils peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

La parole est à M. Francis Vercamer, pour les soutenir.

M. Francis Vercamer. Ces amendements tirant les conséquences de dispositions qui n’ont pas été votées à l’article 1er, je vais les retirer. Je saisis cette occasion pour faire remarquer que, de la même manière que l’UDI soutient le passage du seuil de 5 000 à 1 000 salariés, le ministre et le rapporteur auraient pu approuver que l’on porte les seuils de 10 à 20 ou de 50 à 60 et que l’on modifie ceux concernant la délégation unique du personnel !

(Les amendements nos 327 et 328 sont retirés.)

Article 8

M. le président. La parole est à M. Lionel Tardy, inscrit sur l’article.

M. Lionel Tardy. Si je ne me prive pas de pointer les aspects négatifs de ce texte, je sais aussi en souligner les trop rares points positifs. L’article 8 relève le seuil à partir duquel l’employeur peut réunir les instances dans une délégation unique du personnel, la DUP. Celle-ci intégrera désormais le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, le CHSCT.

Mais là encore, ce n’est qu’un tout petit pas ; profitons-en pour aller plus loin ! Le groupe UMP propose que la mise en place d’une DUP ne soit plus optionnelle, mais systématique. Voilà le genre de mesures de simplification attendues, et qui ne pénalisent personne ! Cette politique de petits pas bloque des avancées plus grandes, qui sont à notre portée. Cette frilosité est regrettable. On remet à plus tard des mesures qui n’ont l’air de rien, mais qui permettraient de soulager les entreprises, dans un contexte où elles en auraient bien besoin.

M. le président. La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani. Comme mon collègue, je pense que l’article 8 renferme l’une des rares mesures que l’on puisse soutenir, puisqu’il prévoit d’élargir la possibilité de mettre en place une DUP. Le regroupement des instances en une instance unique représente un avantage intéressant, puisqu’il permettra aux membres de jouir d’une vision globale des enjeux de l’entreprise ; ils pourront ainsi formuler des recommandations plus équilibrées !

Cette mesure, qui apporte plus de souplesse aux entreprises, constitue une avancée. Toutefois, cet article aurait pu être amélioré et je regrette que quelques points restent en suspens : pourquoi ne pas aller au bout de la simplification en regroupant les attributions des différentes instances constitutives de la DUP, plutôt que de les laisser ainsi juxtaposées ? Pourquoi maintenir un seuil, certes porté à 300 salariés, rendant possible la constitution d’une DUP ? Estimant que l’accès à ce mode de représentation ne devait pas être soumis à un seuil, j’ai cosigné l’amendement de Gérard Cherpion qui va dans ce sens.

M. le président. La parole est à M. Jean Lassalle.

M. Jean Lassalle. J’interviendrai, avec la souplesse que vous me connaissez, sur un sujet qui sera abordé plus tard, car je serai absent demain. (Sourires.) C’est une bonne chose que de prendre en compte la pénibilité du travail. Mais le problème est de savoir comment l’évaluer. Je ne suis pas certain que nous ayons aujourd’hui les outils pour le faire – ce qui est vrai aussi pour le suivi de l’entreprise en général. Monsieur le ministre, il faudrait aller plus loin et doter l’entreprise de moyens d’évaluation, de grilles de lecture qui permettent de se situer par rapport aux temps dans lesquels nous évoluons.

On a l’impression que l’entreprise évolue – comme la politique d’ailleurs – tel un avion des années 1930, sans radar pour prévoir les orages ou la ligne de vol, sans plan pour atterrir à Singapour – où, au demeurant, on n’allait pas. Il faudrait pouvoir intégrer tout cela afin de parvenir, sans trop de difficultés, à trier ceux qui peuvent bénéficier du compte pénibilité et ceux qui n’y ont pas droit.

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n394 tendant à supprimer l’article. La parole est à Mme Eva Sas pour le soutenir.

Mme Eva Sas. Cet amendement peut paraître abrupt, mais je voudrais redire ici toute l’importance qu’ont les CHSCT dans l’entreprise et le rôle prépondérant qu’ils jouent pour la santé au travail et la prévention des risques psychosociaux, de l’exposition aux produits toxiques et des accidents du travail.

L’article 8 permet à l’employeur d’imposer une DUP unique, regroupant le comité d’entreprise et le CHSCT par simple consultation des institutions représentatives du personnel dans l’entreprise. Une telle décision unilatérale ne pourra que créer des tensions dans l’entreprise et n’est pas de nature à favoriser le dialogue social. Au contraire, la DUP pourrait être utilement créée dans ces entreprises de 200 à 300 salariés par accord d’entreprise.

Cet article concerne 3 890 entreprises, dont le nombre de salariés est compris entre 200 et 300 salariés. Cela s’ajoute aux 28 854 entreprises dont les effectifs sont compris entre 50 et 200 salariés.

Avec une telle disposition, ce sont donc les CHSCT de 80 % des entreprises de plus de cinquante salariés qui pourraient être regroupés avec les comités d’entreprise. Nous souhaitons au contraire, par cet amendement, favoriser le dialogue social et rendre possible la délégation unique mais sur la base du volontariat et d’un accord d’entreprise. Il pourrait aller de pair avec un amendement que nous déposons à l’article 9 pour permettre aux entreprises de créer une délégation unique du personnel par accord collectif à partir de cinquante salariés, ce qui permettra de favoriser le dialogue social.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer la possibilité de mettre en place la délégation unique du personnel dans les entreprises jusqu’à 300 salariés. Or, je n’ai jamais rencontré personne, au cours de mes auditions, qui se soit montrée hostile à ce dispositif, ni dans les organisations syndicales, ni dans les organisations patronales, même si des interrogations demeurent quant aux différentes composantes de ces délégations uniques du personnel.

Cela étant, il me semble comprendre que la question du CHSCT motive en grande partie votre amendement, madame Sas. Nous aurons l’occasion d’y revenir mais, puisque nous en sommes au premier amendement déposé à cet article, je voudrais rappeler quelques éléments importants. La délégation unique du personnel a beau regrouper les délégués du personnel, les comités d’entreprise et les CHSCT, elle n’est en rien une fusion de ces différentes instances. S’il s’agissait d’une fusion, nous pourrions craindre, en effet, pour les prérogatives de chacune d’entre elles, en particulier celles des CHSCT dont on connaît le rôle bien particulier.

Vos inquiétudes, à mon avis, ne justifient pas de supprimer l’article qui permet des avancées significatives sur l’organisation des institutions représentatives du personnel dans les différentes entreprises. D’ailleurs, beaucoup d’entreprises de moins de 300 salariés n’ont pas d’IRP.

Pour toutes ces raisons, avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Rebsamen, ministre. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Christophe Cavard.

M. Christophe Cavard. L’amendement de suppression que vient de vous présenter ma collègue Mme Sas fait référence à l’amendement n409, déposé à l’article 9, et qui tend à recréer la DUP pour les entreprises entre 50 et 300 salariés avec l’accord des deux parties, les salariés et les employeurs. Selon l’article 8, en effet, dans les entreprises de moins de 300 salariés, seul l’accord de l’employeur créé cette DUP, ce qui déséquilibre le dialogue social.

Pas de faux débat : loin de nous la volonté de mettre fin à la possibilité de regrouper, à condition que la décision appartienne aussi bien aux salariés qu’à l’employeur.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. François Rebsamen, ministre. La loi va permettre à des milliers de salariés de disposer d’une instance qui traite des conditions de travail. Selon les chiffres de la DARES, la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques, en 2011, seuls 58 % des établissements de cinquante à quatre-vingt-dix-neuf salariés étaient couverts par un CHSCT, ce qui signifie que, dans près d’un établissement sur deux, aucune instance ne traite des conditions de travail, ne réfléchit à leur amélioration ou ne joue un rôle de prévention.

Précisons par ailleurs que, lorsqu’il est possible de créer cela, il y a moins de CHSCT que de comités d’entreprise ou de délégués du personnel dans les petites entreprises. La loi améliorera incontestablement la situation en élevant le seuil de la DUP jusqu’à 300 salariés et en intégrant le CHSCT. Ce n’est pas une fusion qui l’amènerait à disparaître mais une intégration.

Nombre de PME qui ne disposaient pas, jusqu’à présent, de CHSCT, en auront un, désormais, dans le cadre de la DUP, laquelle recevra toutes les attributions du CHSCT. Quatre réunions par an seront au minimum consacrées à ces sujets. C’est une avancée considérable.

M. le président. La parole est à Mme Eva Sas.

Mme Eva Sas. Un tiers des entreprises entre 200 et 300 salariés comptent un CHSCT. Il est très important qu’existe une instance dédiée car ses compétences sont extrêmement spécifiques. Elles traitent de l’organisation du travail, de l’ergonomie, de la santé au travail, des accidents au travail, des risques psychosociaux. Il s’agit de compétences très différentes de celles habituellement exercées par le comité d’entreprise qui traite de l’emploi, des questions économiques et sociales. L’exercice de ses missions requiert de surcroît une certaine formation.

Certes, les compétences demeurent mais comment seront-elles exercées ? Il me paraît dommage que, dans ce tiers d’entreprises qui comptent un CHSCT, le CHSCT soit regroupé avec d’autres alors que si la décision de créer une DUP s’était faite sur la base du volontariat, elles auraient pu conserver leur instance dédiée et leur CHSCT qui fonctionne, dont les élus sont présents, et qui permet d’améliorer le droit du travail et la qualité de vie des salariés, en abordant des questions aussi essentielles que celle, par exemple, de l’aptitude au travail des salariés âgés. Il est dommage que la loi oblige à regrouper des instances qui, aujourd’hui, fonctionnent bien. Je regrette que nous n’ayons pas choisi la voie du volontariat. Nous aurions dû, au contraire, chercher à développer le nombre de CHSCT dont les compétences spécifiques pourraient être noyées dans un ensemble beaucoup plus vaste.

(L’amendement n394 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Eva Sas, pour soutenir l’amendement n395.

Mme Eva Sas. Cet amendement de repli vise à regrouper uniquement les délégués du personnel et les comités d’entreprise, sans les CHSCT. Après avoir rencontré de nombreux acteurs de terrain, il nous est apparu pertinent, en effet, de créer une délégation unique qui regrouperait les délégués du personnel et le comité d’entreprise, dans les entreprises comptant entre 200 et 300 salariés. En revanche, le CHSCT ayant des compétences très spécifiques, il serait préférable de lui conférer une instance spécifique et de ne regrouper que les DP et les CE.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Sirugue, rapporteur. C’est bien ce qu’il m’avait semblé comprendre et que j’avais expliqué à M. Cavard. J’ai bien vu qu’il n’était pas signataire de l’amendement mais l’argumentation reprend celle que j’ai exposée tout à l’heure.

Il me semble important de rappeler que les prérogatives de chacune des instances seront préservées.

Par ailleurs, nous avons prévu dans le texte que quatre des six réunions annuelles seraient réservées aux questions relatives au CHSCT. Cette disposition devrait rassurer tous ceux qui émettent encore des doutes.

Surtout, grâce au regroupement de ces instances au sein d’une DUP, des représentants des salariés devraient pouvoir traiter en même temps que des questions relatives aux conditions de travail, d’hygiène et de sécurité, d’autres liées à la stratégie ou à la situation financière de l’entreprise. Une entreprise ne se résume pas en, d’un côté, les orientations stratégiques, et de l’autre les conditions de travail des personnels. Nous le savons, tous ces éléments sont imbriqués les uns dans les autres. Il est essentiel que nous rendions possible cette confrontation, que les spécialistes du comité d’entreprise s’ouvrent sur les questions jusque-là débattues au sein du CHSCT. De même, il serait bon que des spécialistes du CHSCT puissent aussi se préoccuper des questions relatives aux orientations stratégiques et aux questions financières.

Il est par conséquent très avantageux de disposer d’une telle unité qui permette les échanges, sans supprimer pour autant les prérogatives du CHSCT.

Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Rebsamen, ministre. Même avis.

M. le président. La parole est à Mme Eva Sas.

Mme Eva Sas. S’il est si favorable de regrouper le comité d’entreprise et le CHSCT de façon à ouvrir les esprits, pourquoi s’arrêter à 300 salariés ? Si vous suivez une logique d’ouverture et de cohérence, vous pourriez aller au-delà.

M. Lionel Tardy. Nous sommes bien d’accord ! Votez donc nos amendements. Supprimons les seuils !

Mme Eva Sas. Je vous crois plutôt dans une logique de simplification mais au moins assumez-la !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Personne ne parle de s’arrêter à 300 salariés ! Cette possibilité est toujours offerte, dans des conditions différentes, aux entreprises de plus de 300 salariés.

Il ne me semble pas pertinent de résumer la question du regroupement à une simple mesure de simplification, même si une telle préoccupation n’est pas neutre. Avoir cette seule approche du problème serait une erreur. La spécialisation sera très utile dans la confrontation qui naîtra inéluctablement du fait que siègent dans une même instance l’ensemble des représentants du personnel. C’est un atout.

(L’amendement n395 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de plusieurs amendements, nos 27, 63, 173 rectifié, 28 et 64, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Gérard Cherpion, pour soutenir l’amendement n27.

M. Gérard Cherpion. Ce projet de loi prévoit d’étendre de 200 à 300 salariés le seuil d’effectifs rendant possible la mise en place de la délégation unique du personnel, la DUP.

Dans l’intervention qu’il a faite à l’instant concernant l’amendement de Mme Sas, M. le ministre a bien montré qu’il faut en fin de compte avoir une vision très large et ouverte de la simplification et du nombre de salariés concernés. Nous le rejoignons sur ce point : la constitution de la DUP ne doit pas être subordonnée à un seuil d’effectifs. Il s’agit en effet d’un dispositif simplifié de représentation du personnel qui ne supprime pour autant – certains éprouvaient cette crainte, qui vient d’être levée – aucune des attributions reconnues aux trois instances, qui demeurent au sein de cette DUP.

Quelle que soit la taille de l’entreprise, l’employeur doit pouvoir avoir accès à ce mode de représentation s’il convient mieux à son organisation. L’amendement vise donc à ouvrir beaucoup plus largement la DUP.

M. le président. La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement n63.

M. Lionel Tardy. Dans le même ordre d’idées que l’amendement présenté par M. Cherpion, cet amendement propose une avancée qui suppose de ne franchir qu’un pas très mince : il s’agit d’ouvrir la possibilité d’une DUP sans limite de seuil, au lieu de la limiter au seuil de 300 salariés. La formule de la DUP est évidemment plus souple que celle du regroupement des IRP, car la volonté du chef d’entreprise suffit. Cela ne signifie pas qu’il n’en aura pas discuté avec les salariés.

En toute franchise, cette mesure représenterait un choc de simplification et, à en juger par les différents textes que nous examinons, nous croyons tous que c’est ce que souhaite le Gouvernement dans tous les domaines. Allons-y !

M. le président. La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement n173 rectifié.

M. Francis Vercamer. Cet amendement vise à ouvrir la possibilité d’une DUP à partir du seuil de cinquante salariés et sans limite supérieure. Autrement dit, il sera possible de regrouper – et de regrouper seulement, car j’ai bien entendu le message de M. le rapporteur – les instances que sont le comité d’entreprise, les délégués du personnel et le CHSCT, qui conservent toutes leurs fonctions au sein d’une seule et même structure, ce qui permet de limiter le nombre de réunions.

Plutôt que d’imposer un seuil de 300 salariés, je propose que cette possibilité soit ouverte à partir de cinquante salariés et jusqu’à la taille des plus grandes entreprises existant en France.

Cette disposition ne serait pas contraire à l’article 9, puisqu’il prévoit un accord et est donc légèrement différent. Ici, il ne s’agit que d’une simplification du nombre de réunions qui ne passe pas par ledit accord.

M. le président. La parole est à M. Gérard Cherpion, pour soutenir l’amendement n28.

M. Gérard Cherpion. N’étant pas certain que M. le ministre accepterait l’absence de limite proposée par M. Vercamer, j’ai déposé cet amendement qui vise à fixer un seuil supérieur de mille salariés, même si je préfère la proposition de M. Vercamer.

M. le président. La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement n64.

M. Lionel Tardy. Il s’agit également d’un amendement de repli. Vous conviendrez qu’il est léger de ne rehausser que de 200 à 300 le seuil au-delà duquel la DUP n’est plus possible. Faites une avancée plus grande : portez ce seuil de 200 à 500, comme le propose cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Deux cents, trois cents, cinq cents, mille, pas de seuil : les amendements que vous venez de nous présenter nous offrent toute la palette des options. Je répète à M. Cherpion que son premier amendement ramène certes le seuil à 200 salariés, mais que son second amendement, qui le porte à 1 000, illustre l’esprit dans lequel il les a formulés.

Le texte a abouti à un équilibre important : jusqu’à 300 salariés, la mise en place de la DUP se fait à l’initiative de l’employeur – ce que contestait tout à l’heure Mme Sas. Au-delà de 300 salariés, elle doit faire l’objet d’un accord. Ce seuil de 300 salariés me semble être respectueux des considérations qui diffèrent selon la taille des entreprises.

M. Gérard Cherpion. Quelles considérations ?

M. Christophe Sirugue, rapporteur. Cependant, l’esprit est le même. Il faut tout à la fois tâcher de préserver ce que représentent aujourd’hui les instances tout en simplifiant précisément la mise en place de la DUP. Je ne crois pas que vouloir faire voler en éclats ces seuils comme vous le proposez afin d’étendre la DUP à toutes les entreprises et avec les mêmes modalités corresponde à l’esprit d’équilibre de ce texte. La commission est donc défavorable à l’ensemble de ces amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Rebsamen, ministre. Je reprendrai pour vous répondre les arguments qui viennent d’être présentés. Pourquoi ce seuil de 300 salariés ? Nous augmentons le seuil de la DUP de 200 à 300 salariés ; vous proposez quant à vous de passer de la délégation unique du personnel à la délégation universelle du personnel ! Nous ne pouvons pas aller jusque-là ; au-delà du seuil fixé, les accords majoritaires s’imposent.

Au fond, la représentation syndicale est différente dans les entreprises de plus de 300 salariés, car elle est plus forte. Nous donnons donc la possibilité – qui a d’ailleurs été critiquée, vous le savez bien – aux entreprises de plus de 300 salariés d’organiser le dialogue social comme elles l’entendent par accord majoritaire. Ainsi, le texte – je le défends – est bien équilibré et je souhaite que nous nous en tenions là.

M. le président. La parole est à M. Gérard Cherpion.

M. Gérard Cherpion. Pardonnez-moi, monsieur le ministre, mais le fait que les entreprises de plus de 300 salariés aient davantage de délégués du personnel ne change rien ! En effet, vous ne faites qu’un regroupement, et non une fusion. On pourrait en effet penser qu’une fusion changerait la donne, mais ce n’est pas le cas : il ne s’agit que d’un regroupement. Je ne vois pas ce que cela change ! Vous n’acceptez pas le fait que même si les entreprises sont différentes, le mode de mise en place de la DUP peut être identique dans la mesure où l’on ne fait que regrouper sans fusionner. On peut d’ailleurs regretter l’absence de fusion – mais c’est un autre problème.

M. le président. La parole est à M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. Je rebondis sur les propos de M. Cherpion : M. le rapporteur nous répète depuis le début du débat qu’il ne s’agit pas d’une fusion, mais d’un simple regroupement – et même davantage, puisque les uns et les autres se nourriront de la réflexion conduite par les autres IRP. En clair, le CHSCT se nourrira des réflexions des délégués du personnel, qui se nourriront eux-mêmes de celles du comité d’entreprise, et c’est pourquoi la DUP constitue un avantage. Si elle est un avantage dans les entreprises de moins de 300 salariés, alors elle l’est aussi dans les entreprises de plus de 300 salariés ! C’est pourquoi je propose qu’à partir de cinquante salariés, toutes les entreprises puissent bénéficier de cet avantage que nous a présenté M. le rapporteur.

(Les amendements nos 27, 63, 173 rectifié, 28 et 64, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 289 et 290, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour les soutenir.

Mme Jacqueline Fraysse. Jusqu’à présent, les DUP ne comprenaient que les délégués du personnel et le comité d’entreprise. Ce projet de loi prévoit d’y intégrer les CHSCT.

C’est un sujet extrêmement préoccupant, dont nous avons déjà discuté ce soir. Nous ne souhaitons pas ce regroupement. Nous souhaitons au contraire que les CHSCT restent en dehors de la délégation unique du personnel, car ce que vous proposez constitue un véritable recul dans la mesure où les mêmes élus traiteront de tous les aspects économiques, du droit du travail, des conventions collectives ou encore des aspects relatifs à la santé et à la sécurité. Ils ne pourront pas connaître chaque sujet de manière approfondie.

Vous nous dites qu’ils ne nourriront mutuellement, mais en conservant un CHSCT séparé, rien n’interdit d’organiser des réunions à l’initiative des uns ou des autres et auxquelles sont invités les représentants du personnel des autres instances. La question de se nourrir mutuellement est donc ouverte et n’est pas contradictoire avec notre proposition.

De plus, la DUP diminue le nombre d’élus et le nombre d’heures de délégation et est inférieure à ce qu’elle serait avec le maintien des différentes instances.

Surtout, la spécificité et la place essentielle des CHSCT doivent être préservées : je pense à leur pouvoir d’enquête en matière d’accidents du travail et de maladies professionnelles ou en cas de danger imminent – en clair, autant de sujets qui exigent des compétences fortes.

Pour conclure, j’ai entendu avec intérêt les remarques de M. le ministre qui indiquait que ce regroupement – car il ne faut surtout pas dire que c’est une fusion, puisque ce n’en est pas une – permettra aux entreprises qui n’ont pas de CHSCT de s’en doter enfin. Nous n’en avons pourtant aucune garantie ! En effet, il n’y a aucune garantie que dans les entreprises sans CHSCT, les employeurs, qui sont seuls à décider de la mise en place de la nouvelle DUP, décideront précisément de le faire ! Pour éviter l’expertise d’un CHSCT, peut-être décideront-ils de ne pas créer de DUP. Par conséquent, cet argument ne répond pas à ma préoccupation.

C’est pourquoi l’amendement n289 vise à supprimer la fin de l’alinéa 3.

M. le président. Je considère que vous avez également présenté l’amendement n290, madame Fraysse. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Sirugue, rapporteur. J’hésite à reprendre une nouvelle fois l’argumentation que je viens de présenter, et qui consiste à rappeler en toute clarté combien les CHSCT sont importants – personne ne le conteste.

Encore une fois, cependant, personne ne m’a fait à ce jour la démonstration que l’existence d’une délégation unique du personnel nuira de quelque manière que ce soit aux prérogatives du CHSCT, qui sont d’ailleurs rappelées dans le projet de loi. Il n’y aura aucune diminution des capacités d’intervention de cette instance extrêmement importante.

Je le répète : ces prérogatives doivent être préservées, mais elles doivent l’être au sein d’une délégation unique du personnel dans laquelle la commission a choisi de permettre l’annualisation et la mutualisation des heures. Cela permettra à ceux qui siègent dans cette instance d’exercer leur libre choix pour considérer qu’ils doivent se concentrer davantage sur certaines missions que sur d’autres et qu’ils doivent travailler davantage à certains ordres du jour qu’à d’autres en fonction des compétences qu’ils ont acquises. En outre, je rappelle que la commission a également proposé la mise en place d’un secrétaire adjoint dans la délégation unique du personnel : c’est un facteur supplémentaire de liberté – ou à tout le moins peut-on le concevoir comme tel – et une possibilité – même si je ne souhaite pas l’inscrire dans la loi – de répartir les tâches entre le ou la secrétaire plus compétent en matière d’orientations stratégiques et de finances et celui ou celle qui connaîtrait davantage le CHSCT.

Quoi qu’il en soit, je pense que nous avons, dans le cadre de nos débats en commission et grâce aux amendements que nous avons adoptés, mis en place les conditions permettant de rassurer les uns et les autres sur la question des moyens, car c’est bien celle qui se pose. D’autres amendements, que nous examinerons plus loin, permettront d’ailleurs de rassurer ceux qui s’inquiètent encore au sujet des capacités d’expertise et des missions des CHSCT.

Encore une fois, j’entends les craintes qui se sont exprimées mais je ne crois pas qu’elles soient totalement fondées compte tenu des éléments contenus dans le texte et de ceux que nous avons ajoutés et que nous allons encore ajouter. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Rebsamen, ministre. Même argumentation et même position que le rapporteur.

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. Je donne acte à notre rapporteur qu’au regard des préoccupations que j’ai exprimées des améliorations ont indiscutablement été apportées, mais je considère que ce n’est pas suffisant.

En tout état de cause, il est préoccupant que l’employeur, même s’il demande l’avis des institutions représentatives du personnel, soit le seul qui décide en dernier lieu. C’est la raison pour laquelle nous avons déposé l’amendement n290, qui est en quelque sorte un amendement de repli et qui tend à ce que l’employeur ne puisse mettre en place la DUP tant que les institutions représentatives du personnel n’ont pas donné un avis conforme, c’est-à-dire leur accord.

(Les amendements nos 289 et 290, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

2

Ordre du jour de la prochaine séance

M. le président. Prochaine séance, ce matin, à neuf heures trente :

Suite de la discussion du projet de loi relatif au dialogue social et à l’emploi.

La séance est levée.

(La séance est levée, le jeudi 28 mai 2015, à une heure.)

La Directrice du service du compte rendu de la séance

de l’Assemblée nationale

Catherine Joly