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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIVe législature
Session ordinaire de 2015-2016

Compte rendu
intégral

Deuxième séance du lundi 11 janvier 2016

Présidence de M. David Habib

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

1

Débat sur l’évaluation de la politique d’accueil touristique

M. le président. L’ordre du jour appelle le débat sur le rapport du Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques sur l’évaluation de la politique d’accueil touristique.

La Conférence des Présidents a décidé d’organiser ce débat en deux parties.

Dans un premier temps, nous entendrons les orateurs des groupes, puis le Gouvernement.

Nous procéderons ensuite à une série de questions-réponses. La durée des questions et des réponses est limitée à deux minutes, sans droit de réplique.

La parole est à Mme Jeanine Dubié, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste, premier orateur inscrit.

Mme Jeanine Dubié. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, chers collègues, le tourisme est un secteur en plein essor à l’échelle mondiale qui représente une chance que la France ne doit pas laisser passer. Notre territoire bénéficie en effet d’atouts géographiques, historiques et culturels considérables, qui sont autant de moteurs dans le choix de la destination des visiteurs étrangers. Ils constituent un levier économique et une source de devises dont notre pays ne saurait se priver.

C’est la raison pour laquelle le Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques a décidé de lancer un travail d’évaluation des forces et des faiblesses de la politique d’accueil touristique. Notre collègue Philippe Le Ray et moi-même avons conduit ce rapport, que nous avons rendu en juillet 2015 et dans lequel nous avons formulé des propositions visant à améliorer notre politique d’accueil afin qu’elle soit à la hauteur de notre statut de première destination touristique mondiale.

Je veux faire part ici de ma satisfaction que le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste ait choisi ce thème pour débattre ce soir. Il nous donne ainsi l’occasion de valoriser et de soutenir un secteur qui, tout primordial qu’il soit pour notre économie, rencontre actuellement d’importantes difficultés. Outre les effets de la baisse de la fréquentation touristique liée aux attentats de Paris, les professionnels du tourisme doivent faire face à la concurrence internationale, aux bouleversements climatiques ou encore à la multiplication des normes qui freinent leurs investissements. Dans un tel contexte, il est urgent de réfléchir à notre politique d’accueil touristique, devenue cruciale lorsqu’il s’agit d’attirer les visiteurs étrangers, de les inciter à prolonger leur séjour et de les inviter à consommer sur place.

Si le tourisme international est, en effet, en plein essor avec un nombre de visiteurs internationaux en augmentation de 27,7 % depuis 2008 et des recettes au niveau mondial qui atteignent 1 500 milliards de dollars en 2014, force est de constater que notre pays ne profite pas suffisamment du dynamisme de cette demande. Si la France reste la première destination touristique avec 83,8 millions de visiteurs étrangers en 2014, notre pays perd régulièrement des parts de marché. En matière de recettes, tirées du tourisme international notamment, nous occupons désormais la quatrième position, derrière les États-Unis et l’Espagne et, maintenant, la Chine.

Ces pertes de terrain sont inquiétantes lorsque l’on connaît le poids du secteur touristique dans notre économie. Rappelons que le tourisme, qui dégage 157 milliards d’euros de recettes, dont un tiers provient des touristes étrangers, représente 7,3 % de notre PIB, 1 million d’emplois directs et 2 millions d’emplois indirects non délocalisables, 4 milliards d’euros de recettes de TVA ou encore 11 milliards de devises. Mes chers collègues, ne perdons pas de vue que l’industrie touristique pèse lourd dans notre économie, davantage que l’agroalimentaire ou l’aéronautique. Or ce poids économique reste encore trop méconnu. Il est donc primordial que nous en prenions conscience collectivement afin de considérer l’activité touristique comme une activité économique à part entière et non plus comme une économie de cueillette.

Conscient de l’enjeu, le Gouvernement a fait du tourisme une priorité et s’est fixé le cap de 100 millions de visiteurs étrangers à l’horizon 2020. Je veux à ce sujet saluer les efforts et le positionnement du ministère des affaires étrangères, ainsi que sa volonté de promouvoir le tourisme français au sein de nos ambassades. Nous pensons en effet que le tourisme français a besoin d’une mobilisation de l’ensemble des acteurs pour améliorer son image, sa qualité et son poids économique.

Nous savons pouvoir compter sur votre action, monsieur le secrétaire d’État, pour continuer à fédérer autour de vos initiatives les différents acteurs de la filière. Je pense notamment aux efforts en matière de promotion à l’étranger, qui seront concentrés autour d’une vingtaine de destinations inspirées des contrats de destination, qui ont vocation à rendre plus lisible notre offre touristique. Vous le savez, notre pays présente mille facettes différentes : si cela fait son charme aux yeux des touristes du monde entier, nous devons renforcer le ciblage de cette promotion et capitaliser sur la notoriété de marques qui sont déjà bien établies. Cette stratégie marketing pourra bien entendu être révisée périodiquement et affinée pour adapter les messages selon les cibles de clientèle.

Dans cette perspective, l’agence Atout France dispose d’un budget de 70 millions d’euros pour renforcer la place de la France au sein du tourisme mondial. Mais Atout France, confrontée aux contraintes budgétaires, nous impose de réfléchir à une consolidation de son modèle économique. Cela nous a amenés à proposer de sécuriser les ressources d’Atout France en lui affectant le produit des droits sur les visas de tourisme. Nous accueillons à ce titre avec satisfaction l’annonce de l’affectation de 5 millions d’euros de recettes des visas au budget d’Atout France en 2016.

Après avoir attiré les visiteurs internationaux, nous devons également travailler à ce qu’ils prolongent leur séjour sur notre territoire en concentrant nos efforts sur la qualité de l’accueil touristique, notamment du premier accueil. La qualité de l’accueil est souvent évaluée de manière subjective par les visiteurs : c’est pourquoi nous devons faciliter leurs premières démarches sur le territoire français, dans les aéroports ou les gares notamment. C’est la raison pour laquelle nous avons formulé des propositions pour fluidifier les arrivées des vols internationaux. À Roissy, ce sont 30 avions de 500 passagers, soit 15 000 personnes, qui débarquent en même temps entre six heures et neuf heures du matin. Il convient donc d’adapter les effectifs de la police aux frontières en fonction des besoins, notamment aux heures de pointe, et de mobiliser du personnel formé pour accueillir ces visiteurs étrangers.

Si de nombreux efforts ont été faits pour prendre en compte les besoins de ces visiteurs étrangers, c’est aussi à la sortie de l’aéroport que nous devons porter nos efforts. Dans cette perspective, des progrès restent à faire pour améliorer la liaison entre Paris et ses aéroports. À ce titre, nous soutenons le Gouvernement dans sa volonté de mettre en service la liaison Charles-de-Gaulle Express en 2023, tout en regrettant que ce projet ne puisse être réalisé plus tôt. Par ailleurs, monsieur le ministre, où en est la voie de circulation réservée aux taxis après la décision du tribunal administratif de Montreuil et dans quelle mesure ce dispositif pourrait-il être effectif ?

Je tiens aussi à insister sur la nécessité de favoriser l’intermodalité, afin d’assurer une meilleure répartition du tourisme sur l’ensemble du territoire. Pour cela, nous avons proposé que les aéroports régionaux puissent accueillir plus de lignes internationales afin de faciliter la découverte des richesses de nos régions.

La sécurité est également essentielle dans l’attractivité des territoires. Si d’importants efforts en la matière semblent commencer à porter leurs fruits, il s’agit de lutter avec vigueur contre les vols à la tire, notamment dans les lieux très fréquentés comme les gares, les transports et les sites touristiques prisés. Il faut également communiquer régulièrement sur les résultats des plans de sécurisation des touristes en France.

Un autre sujet a beaucoup appelé notre attention : la qualité de l’offre d’hébergement. Élue dans la circonscription des Hautes-Pyrénées qui comprend Lourdes, deuxième ville hôtelière de France, je veux profiter de cette occasion pour souligner les difficultés grandissantes rencontrées par les professionnels de l’hébergement touristique. Ces derniers sont confrontés à un effritement des nuitées touristiques, pour la plus grande part lié à la désaffection de la clientèle européenne traditionnelle, dont les attentes ont évolué tant en termes de qualité que de diversification dans la demande d’hébergement.

L’apparition d’offres locatives proposées par des particuliers notamment via la plate-forme Airbnb séduit de plus en plus et pèse sur l’activité hôtelière classique. Au-delà des mesures nécessaires à prendre pour lutter contre une concurrence déloyale, l’hôtellerie classique doit s’adapter et prendre de plus en plus en considération les aspirations de la clientèle. Il faut ainsi répondre au souhait de montée en gamme afin de s’adapter aux standards internationaux. Nous devons donc aider ces entreprises à investir dans une offre de qualité qui nous permettra d’attirer la clientèle des pays émergents tels que les BRICS – Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud. Il serait également opportun d’alléger les sujétions administratives auxquelles ces entreprises doivent faire face et qui freinent leur capacité de modernisation.

Au-delà des prestations de base que les touristes sont en droit d’attendre, notre pays doit se mobiliser pour améliorer les conditions d’accueil proprement dites. Si cette mobilisation concerne d’abord les professionnels du tourisme, elle doit également impliquer l’ensemble de la population, qui doit modifier son regard sur l’esprit de service et retrouver les bons réflexes de l’hospitalité. Je tiens d’ailleurs à saluer l’initiative de CCI France qui lancé le programme High Hospitality Academy visant à améliorer la qualité de l’accueil touristique, avec le soutien de l’État.

Modifier notre regard sur le tourisme passe tout d’abord par une meilleure valorisation des métiers de l’hôtellerie et du tourisme. Trop souvent ces emplois sont perçus comme des sous-emplois, mal considérés et pouvant être exercés sans qualification. C’est une erreur grossière. Il nous faut donc mettre l’accent sur la formation initiale et continue pour valoriser la notion de service, mieux connaître les différentes clientèles et s’adapter à leurs attentes. Un effort tout particulier doit être porté sur l’apprentissage des langues étrangères, en lien avec l’éducation nationale, afin d’améliorer la maîtrise de ces langues par les professionnels du tourisme et de l’accueil.

L’accueil par la population française est souvent un point faible des enquêtes internationales. Dans le rapport, nous avons souhaité encourager le développement d’associations de bénévoles, qu’on appelle les greeters et qui accueillent les touristes. Il serait aussi intéressant que les pouvoirs publics puissent valoriser leurs actions sur les sites Internet des offices du tourisme par exemple.

Il nous faut également prévenir les phénomènes de saturation qui peuvent toucher certains sites touristiques, comme la tour Eiffel ou le Louvre. Dans cette perspective, il est indispensable de détendre les contraintes qui encadrent ces monuments et sites touristiques et de donner la possibilité d’étendre les horaires d’ouverture, de supprimer le jour hebdomadaire de fermeture ou de mettre en place des billetteries automatiques.

Enfin, la France, qui a inventé la Fête de la musique, la Nuit des musées ou encore la Fête des lumières doit continuer à innover dans l’événementiel. À ce titre, nous saluons la volonté du Gouvernement d’organiser des manifestations sportives de haut niveau et de grandes expositions qui font et continueront de faire la réputation de la France.

Pour terminer, j’aimerais rappeler que la situation de notre économie touristique est actuellement délicate. Vous le savez, après une bonne saison d’été, l’année 2015 s’est achevée dans un climat plus que morose en raison tant des attentats du 13 novembre que de l’absence de neige dans les stations durant les vacances de Noël. Je tiens donc à profiter de ce débat pour relayer les paroles de notre ministre des affaires étrangères et rappeler que le tourisme n’est pas seulement une question de clientèle internationale. Notre secteur touristique repose également sur la clientèle française, qui a encore de nombreux sites et lieux de tourisme à découvrir en France. Après le succès du « Fabriqué en France », nous ne pouvons qu’inviter l’ensemble de nos concitoyens à « Voyager en France » ! (Applaudissements sur les bancs du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste, du groupe socialiste, républicain et citoyen et du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.)

M. le président. La parole est à M. Patrice Carvalho, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

M. Patrice Carvalho. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, chers collègues, la France demeure la première destination touristique du monde. Elle a, en effet, accueilli sur son sol 83,7 millions de visiteurs en 2014, soit une légère hausse de 0,1 % après une année 2013 elle-même favorable, puisqu’elle avait enregistré une progression de 2 % du nombre de touristes étrangers par rapport à l’année précédente.

Ce secteur, qui est le premier contributeur à la balance des paiements puisqu’il a dégagé un solde positif de plus de 11 milliards en 2012, représente 7,3 % du produit intérieur brut et pèse près de 2 millions d’emplois directs et indirects. C’est dire l’importance qu’il revêt pour notre économie en même temps que pour le rayonnement de la France dans le monde.

La consommation touristique, estimée à 157 milliards d’euros, provient pour les deux tiers des nationaux et pour un tiers des étrangers, dont les dépenses augmentent plus rapidement depuis plusieurs années. Ainsi, en 2013, la dépense des touristes étrangers dans les cafés et restaurants a fortement augmenté en volume, à hauteur de 6,2 %, alors que celle des Français a reculé de 1,1 %.

Les hôtels souffrent surtout de la désaffection des Français. En 2014, le secteur hôtelier a été fragilisé par une baisse de 1,5 % du nombre de nuitées, due à un recul de 2,2 % de la demande des touristes français que n’a pas compensé celle des non-résidents.

Il serait tentant d’en conclure qu’il faudrait chercher la croissance du secteur auprès des visiteurs étrangers, en particulier des nouvelles clientèles qui offrent les perspectives les plus prometteuses. Nul ne saurait s’opposer à des mesures permettant d’accueillir davantage de touristes étrangers. Néanmoins, le recul du tourisme national doit nous faire réfléchir. Il ne représente pas seulement un manque à gagner : il reflète surtout l’évolution du pouvoir d’achat de nos concitoyens qui, lorsqu’ils partent en vacances, privilégient la famille et les amis, faute de moyens suffisants.

Près des deux tiers des Français – 66 % – déclaraient partir en vacances au milieu des années quatre-vingt-dix. Le taux de départ en vacances a ensuite diminué, jusqu’à tomber à 52 % en 2008.

En 2014, près de la moitié de nos concitoyens – 46,5% – déclaraient ne pas envisager de partir en vacances dans les prochains mois pour des raisons financières. La même année, 40 % des personnes aux revenus inférieurs à 1 200 euros mensuels ont quitté leur domicile pour des congés, contre 86 % de celles dont les revenus mensuels sont supérieurs à 3 000 euros. Ainsi, 82 % des cadres supérieurs partent en congés, contre 47 % des ouvriers. Ces chiffres attestent d’une rupture avec ce qui a été, depuis des décennies, l’un des éléments du modèle social français.

En 1950, 15 % des Français pouvaient partir en vacances. Ils étaient, je l’ai dit, 66 % au milieu des années quatre-vingt-dix. Cette augmentation était la conséquence directe de politiques ambitieuses de soutien au départ en vacances des Français, par le développement du tourisme social, avec l’appui des pouvoirs publics, de la Caisse nationale d’allocations familiales, d’associations investies dans ce domaine, des collectivités territoriales et des comités d’entreprise.

Le départ en vacances était devenu la norme sociale, un vecteur d’intégration sociale et d’égalité. Or, la situation s’est dégradée. Pourtant, les rapports et les propositions formulées en matière de développement du tourisme ne font que peu de place à la nécessité de dynamiser le tourisme social eu égard aux inégalités, qui se creusent et affectent le droit aux vacances pour tous.

Comme tous les secteurs d’activité, le tourisme s’évalue aujourd’hui à l’aune exclusive de la marchandisation. Dès lors, le tourisme social devient résiduel, quand il devrait être central au regard de l’évolution à la baisse du pouvoir d’achat des familles populaires.

Un contrat d’objectifs et de performance couvrant la période 2013-2016 a été conclu entre l’État et l’Agence nationale pour les chèques-vacances, l’ANCV. Il élargit l’attribution du chèque-vacances, créé en 1982, aux entreprises de moins de 50 salariés dépourvues de comité d’entreprise. Cette disposition est positive, bien sûr, même s’il faut prendre la mesure des effets de la désindustrialisation et des fermetures de grandes entreprises sur l’accès de nombre de salariés aux chèques-vacances.

Parallèlement, il a été convenu de la création d’un fonds « Tourisme social investissement », avec la Caisse des dépôts et consignations et d’autres investisseurs, pour permettre la modernisation des équipements du tourisme à vocation sociale. L’ANCV contribuera à ce fonds à hauteur de 25 millions d’euros sur cinq ans. Elle poursuivra en outre son propre programme d’aides aux équipements de tourisme de loisirs à vocation sociale, qui vise à la modernisation de 30 à 40 équipements par an.

Toutes ces mesures sont salutaires, mais sont-elles à la mesure des défis quand le droit aux vacances pour tous régresse ?

Je l’ai dit : la question centrale est celle du recul du pouvoir d’achat des familles, dont nous voyons les conséquences directes sur l’activité touristique et les résultats de ce secteur. C’est aussi la politique d’austérité, ainsi que les reculs de l’investissement public, tant de l’État que des collectivités territoriales, dont l’engagement est décisif.

Enfin, le tourisme social ne semble plus être une priorité, alors que son développement était historiquement un marqueur identitaire de la gauche. De ce point de vue, le rattachement du tourisme au ministère des affaires étrangères est significatif. Il sera intéressant que le Gouvernement nous dise, au cours de ce débat, quelles sont ses intentions en la matière.

M. le président. La parole est à Mme Pascale Got, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

Mme Pascale Got. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je voudrais souligner plusieurs éléments. Le tourisme est mieux considéré : érigé en grande cause nationale, il a trouvé un nouvel élan. Le Conseil de promotion du tourisme a été mis en place, et les grands axes de sa feuille de route ont été respectés. La crise économique conduit les uns et les autres à considérer le tourisme comme une économie réelle, et non comme une économie de substitution. La loi NOTRe organise l’action des collectivités dans ce secteur, tout en respectant la pluralité des acteurs sur les territoires. Ici même, dans cet hémicycle, nous sommes plus souvent amenés à discuter du tourisme, comme nous le faisons ce soir. Je crois que tous ces éléments convergent dans le bon sens.

Les chiffres sont aussi là pour le démontrer. La hausse de la fréquentation est confirmée au troisième trimestre 2015, en particulier pour les nuitées hôtelières des clients étrangers et pour les hébergements touristiques collectifs. Les annonces de fréquentation record faites cet été ont été suivies d’effet. D’ailleurs, le littoral joue toujours en France un rôle moteur d’attractivité : il connaît une hausse de fréquentation de 5 % par rapport à 2014. Il faut également souligner l’importance du tourisme en outre-mer, que 1’on n’évoque jamais assez.

Ces bons chiffres découlent aussi des efforts de valorisation de nos territoires, dans toute leur diversité, autour des atouts touristiques très spécifiques de la France, qu’il s’agisse de la gastronomie, de l’œnologie, de l’hôtellerie ou des paysages. Les contrats de destination y participent, monsieur le secrétaire d’État. Ce sont des outils très prometteurs : ils fédèrent, coordonnent et engagent de nouvelles dynamiques autour de marques fortes. C’est le cas en Gironde, avec la marque Bordeaux articulée autour de l’œnotourisme et de l’itinérance, notamment fluviale. Vous avez pu en juger par vous-même, monsieur le secrétaire d’État, lors de votre déplacement en Gironde : vous avez annoncé, entre autres, les dernières-nées des routes des vins. Nos espaces naturels et nos savoir-faire doivent aussi être au centre du jeu touristique.

Nous gardons toutefois des maillons faibles. Nous devons améliorer notre politique d’accueil – cela a été dit – et la qualité de nos hébergements, souvent anciens. Nous devons aussi requalifier nos services en meilleure adéquation avec les nouvelles pratiques des visiteurs français ou étrangers. Je pense par exemple à la couverture réseau, qu’il convient d’intensifier dans le cadre du développement du e-tourisme. Mais je sais aussi que le Gouvernement travaille en ce sens.

Je note aussi que l’information touristique et l’offre de transports, en particulier dans les aéroports, ont été fortement améliorées. Plusieurs chantiers ont été engagés, notamment celui de la ligne Charles-de-Gaulle Express qui est attendue depuis vingt ans.

Permettez-moi d’ajouter quelques mots au sujet des événements tragiques du mois de novembre dernier, qui doivent nous aider à maintenir et à affiner notre vigilance sur les dispositifs de sécurité visant à rassurer non seulement les touristes étrangers, mais aussi les touristes français. Le succès de l’organisation de la COP21 et, dans quelques mois, de l’Euro 2016 de football prouve bien que la France peut poursuivre l’accueil d’événements mondiaux. Je salue l’ensemble des services de l’État qui y participent.

Il reste toutefois des efforts à faire, notamment en termes de consommation touristique. Même si cette dernière a progressé de près de 2 %, avec certainement une augmentation plus forte pour les touristes étrangers, à hauteur de 3,7 %, la France, première destination mondiale, reste toujours au troisième ou quatrième rang en termes de recettes. Il y a là un différentiel à combler. Il faudra d’ailleurs examiner avec attention le bilan des douze zones touristiques internationales issues de la loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques.

De nombreuses mesures ont été mises en œuvre en 2015, autour de quatre axes prioritaires : l’accueil, la formation, le numérique et l’investissement. Je me réjouis notamment de la création de la Conférence des formations d’excellence, qui était appelée de ses vœux par le groupe de travail que j’ai piloté sur l’école de tourisme. J’aimerais vous interroger, monsieur le secrétaire d’État, sur l’état d’avancement de ce projet majeur et prometteur.

Un autre chantier important mérite d’être mentionné : celui de la régulation des nouveaux modes d’hébergement, avec l’entrée sur le marché de l’hébergement particulier. De nombreuses orientations apparaissent : je pense notamment au recouvrement de la taxe de séjour par la plate-forme de location et à l’obligation d’information sur les déclarations fiscales. Il faut poursuivre cette réflexion : des attentes existent de part et d’autre.

Enfin, ce bilan positif en matière de tourisme doit susciter de nouvelles initiatives. Comment mieux articuler la promotion internationale du tourisme français et le soutien aux métiers du tourisme ? Comment simplifier le droit du travail pour améliorer l’apprentissage, la formation et la situation des travailleurs saisonniers ? Je vous invite à saisir à nouveau les propositions du rapport Nogué sur le développement de l’emploi dans le secteur du tourisme : plusieurs pistes de simplification y sont proposées.

Après la remise, en juin dernier, du rapport général du Conseil de promotion du tourisme, je ne doute pas que la nouvelle feuille de route de cette instance pour 2016 pourra éclairer ces différents points et que vous pourrez, monsieur le secrétaire d’État, nous en donner la confirmation. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen, du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste et du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.)

M. le président. La parole est à M. Yves Foulon, pour le groupe Les Républicains.

M. Yves Foulon. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le tourisme représente plus de 7 % de notre PIB, soit autant que le secteur automobile. Avec le numérique, cette véritable industrie constitue donc un enjeu de développement stratégique pour notre pays.

En 2014, la France était le pays le plus visité au monde, avec près de 84 millions de touristes. Toutefois, nous le savons tous, ce chiffre prend en compte les touristes qui traversent notre pays sans s’y arrêter, comme les Européens du Nord qui vont en Espagne ou au Portugal.

Contrairement à ce que l’on peut entendre, la France perd des parts de marché en termes de recettes, faute d’un rapport qualité-prix concurrentiel et d’infrastructures attractives, alors que le tourisme mondial est en forte croissance – il a progressé de 4 % au premier semestre 2015. Actuellement, un touriste dépense environ 650 euros en France, 1 000 euros en Espagne, en Italie et en Chine, 1 300 euros en Allemagne et au Royaume-Uni, et même 2 300 euros dans le pays leader, les États-Unis, qui ont fait du tourisme une priorité économique. Ce n’est pas tant le nombre de touristes qui constitue le critère pertinent : c’est surtout le chiffre d’affaires et les recettes.

Depuis le 13 novembre, notre pays, frappé par le terrorisme, est devenu moins attractif, notamment aux yeux des Américains et des Asiatiques pour qui la sécurité est un élément déterminant dans le choix de la destination. On a déploré un grand nombre d’annulations de réservation et de voyage : il est donc impératif d’agir pour rétablir la confiance et la sécurité, et éviter ainsi un nouveau drame, économique.

À court terme, il n’est bien sûr pas possible d’agir sur le tourisme international autrement que par une communication adaptée et responsable. En revanche, il est permis d’intervenir sur le tourisme des Français en France, qui représente, rappelons-le, les deux tiers des consommations touristiques, soit 106 milliards d’euros et 5 % de notre PIB. Le Gouvernement pourrait prendre des initiatives en la matière, développer les chèques-vacances ou offrir aux entreprises la possibilité de verser à leurs salariés une prime exceptionnelle ciblée et défiscalisée.

Par ailleurs, monsieur le secrétaire d’État, l’industrie touristique est très malmenée par l’ubérisation de l’économie. Nous assistons en effet à une révolution des modes de consommation. Pour les entreprises traditionnelles, encadrées par toutes sortes de contraintes, de normes, de charges fiscales et sociales, il y a un véritable sentiment d’impuissance et d’injustice. Avec le principe « C to C » – de consommateur à consommateur –, c’est une nouvelle forme de concurrence que subissent de plein fouet les hôteliers, restaurateurs et autres entrepreneurs. En effet, les règles n’existent pas : pas de normes de sécurité, pas de normes d’hygiène, pas de normes d’accessibilité, pas d’obligations sociales, pas de fiscalité…

On nous promet que la loi Macron 2 arrangera les choses, mais aujourd’hui, les entreprises se sentent menacées, d’autant que l’Asie connaîtra certainement une grave crise économique en 2016 et que la France sera frappée de plein fouet. Il est donc urgent de créer un cadre réglementaire permettant aux entreprises traditionnelles de se battre à armes égales avec celles de la nouvelle économie dite collaborative.

Lors du congrès de l’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie – l’UMIH, ce syndicat qui représente 220 000 entreprises et un million de salariés – à Bordeaux, en novembre dernier, on nous a démontré comment on peut vivre hors de l’économie traditionnelle sans aucune fiscalité.

Prenons un exemple simple : deux touristes atterrissent à Roissy. Ils réservent deux places en covoiturage avec BlaBlaCar – c’est très bien – et ils louent un appartement via Airbnb. Ils n’ont pas rencontré le propriétaire de l’appartement – d’après le site, il s’agit de « Marie-Sophie, 22 ans, étudiante », mais il possède en fait dix appartements.

Pour visiter Paris by night, ces deux touristes avaient réservé une voiture pour deux jours sur Drivy pour 150 euros. Le soir, pour faire connaissance avec nos amis parisiens, ils sont allés dîner chez l’habitant grâce au site Internet VizEat, avec la possibilité de faire une dégustation pour 40 euros par personne. Ensuite, sur Internet, ils ont trouvé pour se délasser un peu une soirée en discothèque éphémère, dans l’appartement d’un particulier, qui, visiblement, n’a jamais entendu parler de licence IV, d’ERP, de Sacem ou encore de SPRÉ, la Société de perception de la rémunération équitable. Le matin, grâce à une application qu’ils ont sur leur portable, ils se sont fait livrer un petit-déjeuner, avant de rejoindre Roissy par un VTC Uber pour repartir chez eux.

C’est une histoire anecdotique mais réelle, qui démontre que, sans dépenser un centime dans une entreprise, sans faire travailler un seul salarié, un touriste a passé trois jours à Paris sans que l’État perçoive la moindre recette fiscale.

Sur le plan de l’organisation territoriale, l’application de l’article 68 de la loi NOTRe, qui entend transférer automatiquement la compétence du tourisme aux seuls EPCI, suscite une vive inquiétude chez de nombreux maires de communes touristiques.

Le tourisme est un secteur clé, pourvoyeurs de nombreux emplois, notamment non qualifiés. Pour l’emploi notamment, il doit devenir une priorité gouvernementale. Il est plus que jamais nécessaire d’en prendre la pleine mesure. C’est ce que nous attendons de votre gouvernement, monsieur le secrétaire d’État.

Mme Sophie Dion. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Maina Sage, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.

Mme Maina Sage. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, permettez-moi, en ce jour de rentrée parlementaire, de vous adresser mes meilleurs vœux ainsi qu’aux membres de nos équipes qui sont présents ce soir avec nous. Ia orana i te matahiti api.

Nous sommes réunis ce soir pour parler de l’accueil touristique. L’accueil, c’est l’entrée en matière, ce sont les premières secondes, la découverte d’une destination. C’est fondamental pour que le séjour de nos clients soit réussi.

La France est un pays extrêmement bien positionné pour la politique touristique : le secteur du tourisme a représenté 7,4 % du PIB en 2014. Néanmoins nous sommes concurrencés par d’autres destinations, notamment en Europe pour la France hexagonale. Nous devons donc tenir la distance et améliorer l’accueil, en France hexagonale mais aussi dans les outre-mer.

Nos territoires d’outre-mer sont souvent oubliés dans les politiques touristiques nationales et je tiens à remercier le ministère en charge du tourisme d’avoir intégré au sein du Conseil de promotion du tourisme un atelier consacré aux outre-mer. Cela a été pour Gabriel Serville, député de Guyane, et pour moi l’occasion de travailler sur ce sujet pendant plusieurs mois avec vos équipes, d’identifier, comme l’ont fait nos collègues rapporteurs, les forces et les faiblesses de nos territoires et de voir de quelle manière nous pouvions mieux intégrer une stratégie nationale.

Nos territoires d’outre-mer font bel et bien partie de la France mais, de là-bas, nous avons souvent l’impression que nous ne sommes pas intégrés dans les politiques publiques. Néanmoins, dans les bilans dressés par mes prédécesseurs, on retrouve de nombreux points communs sur les problématiques rencontrées, les objectifs à atteindre, les points à développer. Dans nos territoires d’outre-mer, nous passons aussi un peu à côté du développement actuel dans notre espace régional puisque nous sommes tout de même proches de ces destinations émergentes que représentent les BRICS.

Ce que je souhaite vous demander ce soir, monsieur le secrétaire d’État, c’est une mise à jour sur les conclusions du rapport que nous avons rendu. Elles ont fait l’objet de 27 propositions qui ont été actées par M. Fabius et doivent faire l’objet de mesures très concrètes. Pourriez-vous nous tenir informés plus régulièrement de l’avancée des travaux ?

Nous avons mis en exergue le désenclavement de nos territoires, le problème de l’obtention des visas, notamment pour le tourisme de croisière, l’accueil dans les aéroports, les infrastructures aéroportuaires, les infrastructures routières, les quais, qui font partie des outils nécessaires à un meilleur accueil au sein de nos destinations.

Il y a aussi la place que doit jouer le cluster Atout France. Nous avons souhaité que, dans une réflexion plus globale, il puisse assister les acteurs locaux dans la mise en œuvre de stratégies cohérentes par bassins régionaux et que cela soit relayé beaucoup plus facilement au niveau national, avec une cohérence globale pour établir une stratégie presque ultramarine du développement touristique.

Enfin, le dernier point, qui concerne plus particulièrement la Polynésie française, porte sur la formation, point qui a aussi été retenu au niveau national. Nous avons appuyé l’idée de créer des écoles régionales d’excellence. La Polynésie possède d’ores et déjà un lycée hôtelier, avec des formations au BTS et à une licence professionnelle. Nous souhaiterions bénéficier du fameux fonds Fabius qui a été annoncé pour transformer cette école au niveau régional, améliorer les formations et assurer finalement l’excellence hôtelière à la française.

Il ne faut pas négliger la force que peuvent représenter nos territoires pour contribuer au rayonnement international de la France. C’est un point majeur. Nous souhaitons que l’on aide les territoires d’outre-mer mais nos territoires peuvent aussi contribuer à la stratégie nationale. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l’étranger.

M. Matthias Fekl, secrétaire d’État chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l’étranger. Monsieur le président, mesdames, messieurs, je veux tout d’abord remercier le groupe RRDP d’avoir pris l’initiative d’organiser ce débat, qui permet de faire un point très précis sur la politique touristique à partir du rapport documenté et très approfondi de Jeanine Dubié et Philippe Le Ray en juillet 2015.

Comme nombre d’entre vous l’ont souligné, le Gouvernement a décidé de faire de la politique touristique une priorité, tout simplement parce que le tourisme est un secteur essentiel, stratégique, pour notre pays. Vous avez été nombreux à rappeler les chiffres relatifs à l’emploi et à la richesse nationale, je ne m’y attarde donc pas, si ce n’est pour souligner une nouvelle fois l’importance de ce secteur pour la France.

C’est un enjeu majeur pour notre pays, et ce dans un contexte de concurrence mondiale de plus en plus exacerbée. Selon l’Organisation mondiale du tourisme, il y a un milliard de touristes dans le monde aujourd’hui et, en 2030, ils seront presque deux fois plus nombreux, 1,8 milliard d’après ses projections. C’est la raison pour laquelle le Quai d’Orsay, autour de Laurent Fabius, est totalement mobilisé sur ce sujet.

De nombreuses décisions ont été annoncées par Laurent Fabius lors des Assises du tourisme au mois de juin 2014 puis le 8 octobre 2015 à l’occasion de la Conférence annuelle sur le tourisme, avec plusieurs objectifs, notamment accueillir 100 millions de touristes en France en 2020, c’est-à-dire demain, et augmenter les recettes issues du tourisme, y compris les recettes par touriste accueilli dans notre pays car, comme l’a souligné M. Foulon, la France est devancée en ce domaine par plusieurs pays.

La plupart des améliorations évoquées dans les rapports que vous avez cités, notamment celui qui sert de base à ce débat, rejoignent totalement les préoccupations du Gouvernement, et un certain nombre de décisions très précises ont été prises. Permettez-moi d’y revenir ici, de manière pas trop fastidieuse, je l’espère.

Plusieurs grands axes structurent notre travail : renforcer l’attractivité de la destination France dans le contexte mondial qui a été évoqué, faciliter le parcours des touristes et ses conditions, la qualité d’accueil, et accompagner les entreprises, les salariés et tous les acteurs de ce secteur.

Concernant les mesures visant à renforcer l’attractivité des destinations françaises, nous avons pris un certain nombre de décisions visant à mieux structurer l’offre. C’était indispensable.

Vingt contrats de destination ont ainsi été signés au Quai d’Orsay au cours des derniers mois, avec la volonté de bâtir des marques lisibles dans le monde entier et de les structurer comme telles, avec une multiplicité d’acteurs qui, à chaque fois, doivent se fédérer pour porter ces contrats de destination. Cela fait partie des critères pour être retenu.

Des pôles d’excellence ont été constitués et ils sont au travail, dans l’œnotourisme, cher à nombre d’entre vous, Mme Got en a parlé, le tourisme de nuit, le tourisme de savoir-faire, le tourisme de montagne l’été et l’écotourisme.

Des stratégies spécifiques ont été mises en place pour l’appui et le développement du tourisme d’affaires – secteur à part entière, très important –, du tourisme des croisières fluviales et maritimes, ou du tourisme dans les outre-mer.

Sur ce point, madame Sage, je vous remercie pour votre contribution aux travaux du Conseil de promotion du tourisme. Beaucoup de choses ont été engagées et nous les suivons, Laurent Fabius et moi, avec la ministre des outre-mer, selon la philosophie que vous avez indiquée, à savoir que les outre-mer font évidemment pleinement partie de la France et sont donc totalement concernés par la politique touristique mise en œuvre pour notre pays.

De nombreuses actions d’envergure ont été menées dans le cadre de la convention entre Atout France et le ministère des outre-mer.

Des études sur l’hôtellerie, sur des diagnostics, des besoins chiffrés aussi pour bien connaître la réalité ont été menées. Une évaluation des nouvelles formes d’hébergement en développement, notamment la location chez l’habitant, a été conduite. Des analyses de marchés ont été effectuées, notamment pour mieux identifier les besoins des clientèles.

Par ailleurs, j’associe dans mes déplacements internationaux les destinations ultramarines qui le souhaitent. À titre d’exemple, lors de mon déplacement en Afrique du Sud, les représentants du tourisme de l’île de La Réunion étaient présents. Plus récemment, ceux de la Polynésie française ont été invités à m’accompagner en Chine. Il s’agit à chaque fois de présenter l’offre auprès des prescripteurs, et c’est possible pour tous les territoires d’outre-mer qui le souhaitent.

Enfin, un travail très important est engagé pour renforcer les destinations de la Caraïbe française et renforcer les liens avec ces pays autour de la mise en place d’offres de croisières multidestinations.

Comme vous le soulignez, 27 propositions ont été identifiées dans le cadre du Conseil de promotion du tourisme. Les premières actions sont d’ores et déjà en train d’être mises en œuvre et devraient s’accélérer au cours de ce semestre.

Je citerai à titre d’exemple le renforcement de l’attractivité des territoires ultramarins à travers l’assouplissement des conditions d’obtention de visa touristique et la signature de contrats de destination, la restructuration progressive du cluster outre-mer d’Atout France en lien avec les acteurs de terrain, chantier en cours, la valorisation de l’offre gastronomique ultramarine, dans le cadre notamment de l’opération « Goût de France », l’accroissement des dessertes aériennes, la création d’une section spécifique sur le site France.fr, et, enfin, un point précis sur les outre-mer dans les nouveaux outils de financement de la Caisse des dépôts et consignations et de la Banque publique d’investissement.

Lorsque les spécificités des outre-mer l’exigent, un ajustement est fait ; sinon, ce sont les politiques de droit commun qui s’appliquent, comme en France métropolitaine. Mais nous avons toujours la volonté d’associer pleinement les outre-mer à cette politique ambitieuse.

Nous avons aussi mis en place des mesures pour renforcer la promotion des destinations et des marques territoriales. Il a déjà été question des contrats de destination. Je souligne aussi l’importance de l’opération gastronomique « Goût de France » qui a remporté un très grand succès et qui, suite à la décision de Laurent Fabius, sera reconduite en 2016.

Nous mettons également en place avec Atout France le nouvel outil Internet de promotion de la destination France : le site France.fr. Nous avons bon espoir de pouvoir bientôt disposer du site France.com. Ce seront des portes d’entrée simples, faciles d’accès et compréhensibles pour le monde entier. Pour qu’Atout France puisse assurer concrètement ces missions, le Gouvernement, sur la proposition de Laurent Fabius, a décidé de renforcer ses moyens, en abondant son budget notamment grâce aux recettes des visas, à hauteur de 5 millions d’euros.

Par ailleurs, puisque vous avez été plusieurs à interroger le Gouvernement à ce sujet, j’en viens aux actions spécifiques post-attentats. Bien évidemment, les attentats tragiques qui ont frappé notre pays en 2015 ont également eu un impact touristique. La première mesure prise est relative à la sécurité. Elle a été renforcée sur l’ensemble du territoire, qu’il s’agisse ou non de sites touristiques. De nombreuses décisions spécifiques ont également été prises en faveur du tourisme.

Des messages en sept langues ont été communiqués dès le 20 novembre, pour répondre aux questions les plus fréquemment posées dans le monde entier par les opérateurs, les professionnels du tourisme ou les publics susceptibles de vouloir venir en France. Ils ont été massivement relayés par Atout France et nos ambassades, ainsi que par tous les professionnels et postés sur les sites Internet destinés aux voyageurs.

Un plan de communication pays par pays a été défini. Il sera déployé pendant toute l’année 2016 avec des actions ciblées en fonction des tendances de réservation des clientèles et sur tous les types de support, notamment sur les réseaux sociaux. C’est du sur-mesure en fonction des préoccupations et des questions qui se font jour dans les différents pays. Nous répondrons très précisément, en visant en priorité les professionnels et les relais d’opinion.

Laurent Fabius et moi-même recevons régulièrement des délégations étrangères et rencontrons les prescripteurs en France ou lors de nos déplacements à l’étranger. Cette semaine, Laurent Fabius interviendra au China Workshop, salon des tours opérateurs chinois, tandis que j’accueillerai au Quai d’Orsay une délégation de grands acteurs du tourisme japonais, l’un des marchés qui a le plus annulé ses séjours suite aux attentats.

S’agissant des mesures visant à améliorer la qualité de service et d’accueil de l’offre touristique, nous avons fait en sorte de faciliter la venue des touristes et leur parcours. C’est la démarche des visas en 48 heures qui existe déjà pour de nombreux pays, notamment en Chine. Laurent Fabius a annoncé ce matin la mise en place progressive des visas en 24 heures pour les groupes de touristes venant de Chine. À leur arrivée, les touristes pourront constater que l’accueil à Roissy a été amélioré de manière très importante, même si des progrès restent à faire. Des équipes d’accueil sont déployées. Le Wi-fi est gratuit depuis le mois de juillet. Le réaménagement de la gare du Nord est également en cours, ce qui n’est pas un luxe.

Une diffusion de messages de bienvenue est aussi prévue dans les gares et les aéroports, y compris par SMS, notamment pour les touristes chinois qui y trouveront un certain nombre d’informations dès leur arrivée en France. À moyen et long terme, le Charles-de-Gaulle Express devra relier Roissy et la capitale. Les travaux commenceront au début de l’année 2017. Nous les attendons depuis longtemps, car ils sont plus que nécessaires.

Dans le cadre du parcours des touristes, je voudrais souligner le renforcement de la sécurité sur les principaux sites touristiques parisiens. Les résultats sont significatifs, puisque la délinquance a diminué de 20 % pour les vols avec violence et de 30 % pour les vols à la tire. Une attention particulière est apportée au plan « Qualité tourisme » porté par l’État, qui se traduit par l’attribution de la marque « Qualité tourisme ».

Nous lancerons dans les mois à venir des campagnes visant à améliorer encore la qualité de l’accueil en France, notamment dans le cadre de l’Euro 2016. Des démarches comme celle de la High Hospitality Academy, au lancement de laquelle j’avais participé, sont tout à fait exemplaires. Des actions sont également prévues, en lien avec le ministère de la culture, en 2016, pour améliorer encore l’accueil dans les établissements culturels, lesquelles convergent tout à fait avec les propositions formulées dans le rapport de Jeanine Dubié et de Philippe Le Ray.

Laurent Fabius a également annoncé plusieurs mesures concernant la formation, sur laquelle vous avez beaucoup travaillé, madame Got. En lien avec la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, une Conférence des formations d’excellence du tourisme a été créée. Elle devrait permettre de mettre en réseau les principales écoles et universités proposant des formations dans le secteur touristique. Les statuts de l’association ont été déposés et le financement d’amorçage est assuré. L’association se chargera aussi de la création de la nouvelle chaire d’enseignement supérieur et de recherche consacrée au tourisme.

Atout France développe divers moyens pour assurer des cours en ligne ouverts à tous, avec un ciblage prioritaire sur l’accueil et les langues. Pour bien accueillir, il est essentiel de se faire comprendre par les clientèles étrangères.

Ces mesures sont efficaces, selon l’étude de TCI Research pour 2015. Toutes ces mesures et tous ces efforts, mis bout à bout, sont payants en termes d’amélioration de l’accueil et de la qualité de service. Votre rapport, madame Dubié, avait pour titre : L’Accueil : un blason à redorer. Nous y avons travaillé et je voudrais souligner que le diagnostic publié aujourd’hui par le cabinet TCI Research permet de constater que les mesures prises par le Gouvernement portent leurs fruits.

Il reste bien sûr de nombreux points à améliorer, comme le constate cette enquête, notamment sur les achats dans les magasins, sur le rapport qualité-prix et sur l’association des citoyens français à l’ensemble de ces démarches. Mais, là encore, les priorités que vous avez soulignées, les décisions que vous avez proposées et celles mises en œuvres vont dans le bon sens.

Enfin, s’agissant des mesures visant à faciliter la vie des entreprises et des salariés du secteur, une grande partie de la stratégie mise en place à la suite des Assises du tourisme a consisté à encourager le dynamisme des entreprises du secteur. Nous avons agi pour simplifier le cadre législatif et réglementaire, avec l’ordonnance du 26 mars 2015, ratifiée en juin, et le décret du 18 août 2015. Au-delà de la simplification, d’autres textes ont modifié le droit du tourisme, qu’il s’agisse de la réforme de la taxe de séjour ou de la révision des modalités de calcul de la garantie financière des agents de voyages et autres opérateurs de la vente de voyages et de séjours.

Monsieur Foulon, vous avez interrogé le Gouvernement sur la loi NOTRe. Sur ce dernier point, lors du Conseil national de la montagne en date du 25 septembre dernier, le Premier ministre a demandé au secrétaire d’État à la réforme territoriale, M. Vallini, de mener une concertation afin d’identifier d’éventuels freins à la mise en œuvre de cette loi en matière de promotion du tourisme et, le cas échéant, d’émettre des propositions pour en faciliter l’application.

Je sais que vous êtes nombreux sur ces bancs à vous interroger sur ce sujet que vous suivez très précisément. La dernière réunion de concertation avec les associations d’élus a eu lieu cet après-midi. Mon souhait est naturellement que nous puissions trouver de bonnes solutions pour permettre la meilleure promotion possible de ces territoires.

S’agissant de l’investissement et de la diversification de l’offre d’hébergement, un fonds d’investissement conjoint de la Caisse des dépôts et consignations et de la Banque publique d’investissement a été annoncé par Laurent Fabius lors de la première conférence annuelle du tourisme du 8 octobre. La Caisse des dépôts et BPI France ont travaillé à un grand fonds d’investissement pour le tourisme d’un montant consolidé d’environ 1 milliard d’euros. Les services du Quai d’Orsay sont en contact régulier avec ces deux établissements financiers et ils procèdent actuellement à l’identification de projets susceptibles d’être financés.

Le plan d’investissement d’avenir, PIA 3, est lui aussi mobilisé. Le commissaire général à l’investissement, M. Schweitzer, travaille également avec les services du Quai d’Orsay à la définition d’une enveloppe financière qui sera dévolue spécifiquement au tourisme. Sur la question de la réhabilitation de l’immobilier de loisirs en montagne, le Gouvernement a fait de ce sujet une thématique essentielle de sa feuille de route pour la reconnaissance de la montagne, lors du Conseil national de la montagne à Chamonix à la fin de l’année 2015.

Sur le tourisme social, monsieur Carvalho, le Gouvernement a également renforcé son action en faveur du tourisme de tous les Français. C’est un sujet que suit plus particulièrement ma collègue Martine Pinville, mais vous avez raison d’en souligner toute l’importance. De multiples actions ont été mises en œuvre pour favoriser le départ en vacances du plus grand nombre possible de nos concitoyens. L’Agence nationale des chèques-vacances a notamment augmenté le déploiement de ces chèques dans les entreprises de plus de 50 salariés. En 2012, on comptait 3,7 millions de bénéficiaires pour plus de 4 millions aujourd’hui. Elle a également développé la diffusion du chèque-vacances dans les entreprises de moins de 50 salariés.

De nouveaux instruments ont été mis en place comme le dispositif en faveur des jeunes, « Départ 18 :25 ». Le Gouvernement a aussi poursuivi les travaux en faveur de l’investissement. Le fonds « Tourisme social investissement » est aujourd’hui pleinement opérationnel. Il a pour vocation d’accompagner les opérateurs de tourisme social qui souhaitent rénover ou reconfigurer leurs centres de vacances ou de loisirs.

Il vise à participer au financement d’environ 300 millions d’euros de travaux sur dix ans, conformément à l’évaluation des besoins du secteur. Un dispositif d’assistance ingénierie a été mis en place par Atout France afin d’accompagner les porteurs de projet. Enfin, la BPI modernise un prêt spécifique à la rénovation, destiné initialement aux structures hôtelières, qui sera maintenant ouvert aux structures de tourisme social.

Le Gouvernement poursuit et poursuivra sa politique en 2016 pour consolider une offre de tourisme plus inclusive. Nous continuerons de soutenir les acteurs traditionnels qui fédèrent le tissu associatif du tourisme social, comme l’UNAT, l’Union nationale des associations de tourisme. La direction générale des entreprises vient de lancer, en partenariat avec la Caisse des dépôts et le ministère des affaires sociales, une étude sur le tourisme social, qui devrait aboutir mi-2016 à des décisions opérationnelles avant mise en œuvre.

Par ailleurs, l’État souhaite développer la marque « Tourisme et Handicap ». Un travail important de simplification du dispositif, au profit des structures touristiques candidates, va s’achever au premier semestre. La marque « Destination pour tous » va être relancée début 2016 avec un nouvel appel à candidatures. Un important travail de préparation et d’amélioration de l’offre accessible a été mené avec les territoires pouvant prétendre au label.

Enfin, je ne peux pas conclure sans évoquer l’enjeu majeur de l’économie collaborative. Nous aurons l’occasion d’y revenir plus précisément, mais le numérique a transformé la façon dont les touristes voyagent et consomment, et il continuera de le faire. La numérisation et l’émergence de ce qu’on appelle l’économie collaborative touchent tous les secteurs. Tenter de freiner ce mouvement serait illusoire et même impossible.

M. Guy-Michel Chauveau. Évidemment !

M. Matthias Fekl, secrétaire d’État. Nous devons l’accompagner et anticiper ses évolutions, d’autant qu’il répond, dans le domaine du tourisme, à la demande d’une certaine clientèle, en forte croissance. Nous ne pourrons pas accueillir 100 millions de touristes en 2020, sans avoir recours à cette forme d’économie. En 2015, un quart des visiteurs étrangers en séjour dans notre pays ont utilisé au moins un service lié à l’économie collaborative.

Mais le Gouvernement est très attentif au fait que ne se développe pas une concurrence déloyale au détriment des autres acteurs du tourisme. À cet égard, il a été question de l’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie qui a par ailleurs réalisé une carte de vœux apparemment amusante – mais elle ne l’est pas en réalité – qui retrace exactement le parcours de certains touristes, renvoyant aux problèmes très sérieux que cela soulève, qu’il s’agisse de loyauté de la concurrence, de fiscalité, de normes, de sécurité et d’équité. C’est un sujet très suivi bien sûr par le ministre de l’économie, par la secrétaire d’État chargée notamment du commerce et de l’artisanat, et par la secrétaire d’État chargée du numérique. Cette problématique touche en effet tous les secteurs, pas seulement le secteur touristique. Mais soyez assurés que s’agissant de ce dernier, le Gouvernement est totalement au fait de ce qu’il en est, qu’il le suit de très près, et que nous serons présents dans tous les débats qui se tiendront devant vous dans les mois à venir pour accompagner l’émergence de cette forme de tourisme tout en restant dans le cadre d’une concurrence loyale. Je rappelle que votre collègue Pascal Terrasse travaille, lui aussi, sur le sujet, dans le cadre d’une mission que lui a confiée le Gouvernement.

Voilà, mesdames, messieurs les députés, le tableau et le diagnostic de la politique touristique menée aujourd’hui. J’espère avoir apporté les réponses les plus complètes possible aux différentes remarques et interrogations que les intervenants ont formulées, et aussi avoir fait le point sur les différentes actions en cours au regard de leurs diverses propositions. Je sais en effet que vous êtes toutes et tous extrêmement impliquées dans les questions relatives au tourisme. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen, du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste et du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.)

M. le président. Nous en venons aux questions.

La parole est à M. Joël Giraud, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.

M. Joël Giraud. Monsieur le secrétaire d’État, avec ma collègue Bernadette Laclais, députée de Savoie, et à son initiative, je viens d’adresser, en qualité de président de la commission permanente du Conseil national de la montagne, une lettre à M. le Premier ministre au sujet de l’économie touristique dans ces territoires. En effet, cette année, la situation économique du tourisme hivernal est préoccupante en raison des aléas climatiques et du manque crucial de neige en début de saison. Je souligne que les vacances de Noël représentent 15 % à 20 % du chiffre d’affaires annuel des remontées mécaniques, soit, notamment pour les stations moyennes, bien plus que leur marge bénéficiaire le restant de l’année. La situation économique de tous les acteurs du tourisme hivernal est grave. Selon le principal syndicat hôtelier, 75 % des établissements déclarent des annulations, celles-ci pouvant toucher plus de 50 % des réservations. Et que dire des loueurs de ski et autres commerçants ? Le début du mois de janvier n’annonce pas une inversion de cette tendance, loin s’en faut.

Aussi, ma question sera triple.

Premièrement, il est indispensable d’alerter d’ores et déjà les divers services de l’État, via les préfets, que les collectes de taxes et de cotisations doivent permettre aux acteurs concernés de bénéficier d’un calendrier bienveillant en fonction des situations locales, des évolutions de la météorologie et de la fréquentation des massifs, dont les situations sont bien différentes parfois d’une vallée à l’autre, d’un type d’entreprise à un autre, bref, de bénéficier d’un travail d’accompagnement cousu main. Qu’en sera-t-il ?

Deuxièmement, la clientèle étrangère, importante pour les grands domaines et les zones frontalières, effrayée par les attentats dont Paris a été la victime, doit retrouver confiance en notre territoire. Atout France a-t-il envisagé une campagne de communication rassurante pour l’été et l’hiver prochains, mais aussi, d’ores et déjà, pour cet hiver avec le retour de la neige ?

Troisièmement, il est capital de nous mobiliser sur la question du chômage partiel – dénommé maintenant « activité partielle » – car d’un département à l’autre les salariés en bénéficient de manière différenciée. Là, seules les stations de ski à gestion privée sont prises en compte, ailleurs, on y ajoute les régies intéressées ou parfois les régies publiques ; bref, aux aléas climatiques s’ajoute un aléa administratif qui est une catastrophe sociale, le plus souvent d’ailleurs au détriment des plus faibles, c’est-à-dire des régies des stations-villages déjà les plus touchées économiquement. Peut-on enfin procéder à une harmonisation et ne laisser aucun salarié sur le gazon d’un début d’hiver sans neige ? (Applaudissements sur les bancs du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste et du groupe socialiste, républicain et citoyen.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Matthias Fekl, secrétaire d’État. Tout d’abord, je vous indique, monsieur le député, que le Premier ministre a bien reçu le courrier que vous lui avez adressé avec Mme la députée Bernadette Laclais. Je sais que ce sont des sujets que vous suivez au long cours.

Vous avez raison de souligner que le manque d’enneigement a ralenti fortement l’activité touristique et que les situations sont toutefois très hétérogènes d’un massif à l’autre, parfois même quand ceux-ci sont proches. Nous ne disposons pas encore de toutes les données chiffrées, mais il semblerait, d’après les retours que nous avons des professionnels, qu’en dehors des domaines skiables, les autres acteurs des stations auraient fait un début de saison acceptable car il n’y a pas eu d’annulations massives, et ce grâce aux efforts de diversification pour proposer d’autres types d’activité. C’est un point très important. Néanmoins, le retard pris ne sera sans doute pas rattrapable, même si le retour de la neige depuis le début du mois de janvier devrait contribuer, nous l’espérons, à sauver la saison d’hiver – sous réserve bien sûr de la météo dans les semaines à venir.

J’ai beaucoup travaillé, vous le savez, avec bien sûr la ministre de l’éducation nationale et le ministre des affaires étrangères, pour que le calendrier scolaire soit le plus possible en adéquation avec l’intérêt des enfants mais aussi avec les réalités climatiques. En effet, idéalement, quand on va passer ses vacances à la montagne, il doit y avoir de la neige. Cette mesure est très importante, elle était attendue par les professionnels depuis des années et c’est ce gouvernement qui l’a prise.

S’agissant de votre première demande, je ne peux pas vous donner immédiatement une réponse, mais je suis à votre disposition pour faire le point tout au long de la saison sur l’évolution des choses. Le ministère étudie toutes les demandes qui lui sont adressées en matière de délais de paiement, de recouvrement de taxe et de cotisation pour les professionnels.

Pour ce qui est de l’impact des attentats, un plan de communication a été élaboré par Atout France et il s’appliquera aussi, bien sûr, à la montagne. Il est ciblé pays par pays, marché par marché, pour tenir compte de la réalité des situations.

Enfin, je note que le dispositif de l’activité partielle peut être une solution pour les établissements qui y sont éligibles. Les entreprises peuvent en effet bénéficier d’un certain nombre de droits supplémentaires lorsque les conditions, appréciées au cas par cas, sont remplies. L’impact sur l’emploi de l’enneigement en montagne mobilise le Gouvernement. C’est pourquoi les services du ministère du travail et ceux du ministère dont relève mon secrétariat d’État proposeront, dans les semaines à venir, aux collectivités concernées par une baisse d’activité de leurs remontées mécaniques en régie non dotée de la personnalité morale de travailler à des solutions alternatives très concrètes : appui à la diversification et au changement de statut des régies ; appui de Pôle emploi aux saisonniers concernés pour que ceux-ci retrouvent rapidement un emploi ; approche prospective du contenu des emplois et des compétences pour mieux anticiper le problème que vous avez évoqué dans les années à venir.

Le Gouvernement pense ainsi répondre aux préoccupations que vous avez formulées dans votre question ainsi que dans le courrier adressé au Premier ministre.

M. Joël Giraud. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Patrice Carvalho, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

M. Patrice Carvalho. Ma question concerne l’offre touristique en direction des jeunes à travers les auberges de jeunesse. Celles-ci ne sont pas une spécificité française : on en compte 4 000 réparties dans 81 pays au sein du réseau Hostelling International, dont 160 en France au sein de la fédération unie des auberges de jeunesse – la FUAJ –, maillon français du réseau international que je viens d’évoquer. La Ligue française pour les auberges de jeunesse constitue un autre réseau, et il y en a aussi un certain nombre indépendantes.

Les auberges de jeunesse sont apparues en France sous l’impulsion d’un humaniste, Marc Sangnier, et de Léo Lagrange, sous-secrétaire d’État à la jeunesse et aux sports du Front populaire, qui en a favorisé l’essor. Elles ont été des lieux privilégiés d’accueil lors des premiers congés payés. Elles offrent toujours le cadre d’un hébergement accessible au plus grand nombre et créent les conditions de la rencontre et de l’échange interculturel en permettant à ceux qui y séjournent de s’enrichir des différences de l’autre. Elles sont, de ce point de vue, le vecteur d’une culture de fraternité et de paix.

Plus que jamais, nous avons besoin d’aider au développement de ces lieux d’accueil et au déploiement des valeurs qu’ils incarnent. La FUAJ a de nombreux projets et prend de multiples initiatives : après une période difficile qui aura vu la fermeture de vingt-huit auberges depuis 2008, de nouvelles sont programmées à Rouen, à Lille et à Paris. Tous les ans sont par ailleurs organisées des rencontres interculturelles. Il reste néanmoins beaucoup à faire pour dynamiser cette offre. Paris compte 5 000 lits en auberge de jeunesse contre 16 000 à Berlin, tandis qu’Amsterdam et Rome sont à cet égard en cours d’aménagement.

Que compte faire le Gouvernement afin d’intensifier l’hébergement touristique en direction des jeunes, en particulier par le développement du modèle des auberges de jeunesse ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Matthias Fekl, secrétaire d’État. Monsieur le député, vous avez souligné l’importance des auberges de jeunesse. Avant de parler de leur avenir, je rappellerai qu’elles ont aussi une histoire puisqu’elles sont nées au début du XXe siècle, autour d’une idée belle, généreuse et novatrice : permettre aux jeunes de découvrir le monde en apprenant à se connaître les uns les autres. Elles ont été les lieux privilégiés des premiers congés payés sous le Front populaire et, vous l’avez rappelé, Léo Lagrange, alors sous-secrétaire d’État aux sports et à l’organisation des loisirs, a favorisé leur essor.

Initialement réservées aux jeunes, elles sont désormais ouvertes à tous les voyageurs qui cherchent une atmosphère conviviale et des prix attractifs, et constituent une alternative pour de nombreux groupes d’étudiants, d’amis, pour beaucoup de familles et de couples. Les dortoirs ont disparu au profit de chambres, plus conviviales mais aussi plus confortables – chambres pour quatre personnes, chambres doubles, avec salle de bain.

La jeunesse qui voyage est particulièrement sensible aux pratiques écologiques et favorisant le développement durable. Les auberges les plus récentes ont intégré cette exigence. On pourrait à cet égard citer de nombreux exemples.

Ce mode d’hébergement aux principes éthiques et responsables valorise l’environnement et les territoires ; il met en œuvre des modes de gestion respectueux de tous, favorise les rencontres, le brassage social, les vacances pour tous. Il s’inscrit donc aussi dans l’économie sociale et solidaire.

Parfois, plusieurs types d’offre sont combinés au sein d’un même établissement : une auberge de jeunesse peut ainsi proposer à la fois une offre classique d’hébergement en chambre collective, de l’hôtellerie et des suites. Le Gouvernement soutient totalement cette évolution. Elle plaît et incite à s’approprier ce mode d’hébergement. Ainsi, l’auberge Les Piaules, récemment ouverte à Belleville, constitue l’un des tout premiers projets touristiques innovants soutenus par la Banque publique d’investissement, en totale cohérence avec le souhait du Gouvernement que les investissements se renforcent dans le secteur du tourisme en général comme dans celui du tourisme social. Les auberges de jeunesse s’inscrivent donc pleinement, monsieur le député, dans la priorité accordée au tourisme par ce gouvernement.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

Mme Marie-Noëlle Battistel. Monsieur le secrétaire d’État, la loi NOTRe prévoit le transfert obligatoire de la compétence « promotion du tourisme », dont les offices du tourisme, des communes aux intercommunalités au 1er janvier 2017 par la création d’offices du tourisme communautaires. Jusqu’à présent, les communes décidaient librement d’organiser cette compétence, soit en conservant leur office communal, soit en le transférant à l’intercommunalité, ce qui ne posait pas véritablement un problème car la gestion de l’office s’appuyait sur un projet de territoire partagé pour élaborer une stratégie touristique fondée sur la promotion d’une destination globale. Je rappelle que 60 % des offices du tourisme sont déjà sous gouvernance intercommunautaire. Toutefois, ce modèle, aussi vertueux soit-il, ne peut s’appliquer dans tous les territoires – je pense tout particulièrement à la spécificité montagnarde. En effet, certaines communes, supports de station, se trouvent face à une situation difficile alors qu’elles sont de véritables entreprises qui impliquent acteurs privés et publics agissant ensemble dans le cadre d’un office du tourisme pour assurer la promotion, l’animation et la commercialisation, missions indispensables à leur compétitivité. Bien que membres d’une même intercommunalité, elles constituent des destinations touristiques concurrentes et pourraient alors perdre un outil efficace pour assurer ces missions vitales.

Conscient que le transfert de cette compétence pose problème dans certains territoires, le Premier ministre a annoncé, le 25 septembre dernier, à Chamonix, lors du Conseil national de la montagne, vous l’avez rappelé, une concertation sur l’interprétation à donner à la loi pour que l’on trouve une solution, soit dans le cadre de la loi actuelle en décidant de l’interprétation nécessaire, soit en faisant évoluer les textes s’il le faut. La concertation avec les représentants du Gouvernement et des associations d’élus, dont l’ANEM – l’Association nationale des élus de montagne –, l’ANETT – l’Association nationale des élus des territoires touristiques –, l’ANMSM – l’Association nationale des maires des stations de montagne – a bien eu lieu. Mais force est de constater que, malgré la volonté partagée des parties de parvenir à un accord, aucune solution technique convenable sur le plan juridique n’a pu être trouvée permettant aux communes de conserver un office du tourisme de plein exercice.

Aussi, monsieur le secrétaire d’État, pouvez-vous assurer les élus et les acteurs du tourisme de montagne de votre volonté de faire évoluer ce texte, conformément aux engagements du Premier ministre lors du Conseil national de la montagne, et ainsi les rassurer ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Matthias Fekl, secrétaire d’État. Madame la députée, vous interrogez le Gouvernement sur un sujet qui vous tient à cœur et sur lequel vous menez un important travail de fond. Je sais que vous l’alertez régulièrement sur les enjeux spécifiques à la problématique de la montagne.

En l’occurrence, vous avez rappelé que la loi NOTRe prévoit de généraliser le transfert de la compétence « promotion du tourisme » à l’intercommunalité. Vous avez aussi insisté sur les spécificités de la montagne à cet égard. Vous avez aussi évoqué le Conseil national de la montagne du 25 septembre dernier. Aux côtés du Premier ministre, nous étions alors de nombreux membres du Gouvernement à être présents à Chamonix. À cette occasion, il a demandé au secrétaire d’État à la réforme territoriale de mener une concertation pour identifier les éventuels freins à la mise en œuvre de cette loi en matière de promotion du tourisme, et, le cas échéant, d’émettre des propositions.

Quatre réunions ont été organisées, avec l’ensemble des associations d’élus concernées – l’Association nationale des élus de la montagne, l’Association nationale des maires de stations de montagne, l’Association de maires des communes thermales et l’Association nationale des élus des territoires touristiques.

D’autres réunions ont rassemblé les membres des cabinets compétents sur ce sujet au sein du Gouvernement et des administrations. La dernière s’est d’ailleurs tenue cet après-midi même.

La prochaine réunion de la commission permanente du Conseil national de la montagne, prévue le 20 janvier, devrait aborder ce point. M. Vallini précisera à cette occasion les solutions que le Gouvernement aura retenues.

Je veux vous assurer que le Gouvernement est attaché à ce sujet et conscient de votre mobilisation, madame la députée, afin de trouver les solutions qui permettent de promouvoir le mieux possible les territoires touristiques, notamment ceux de la montagne. Un travail très important est en cours, même si je ne peux pas faire d’annonce à ce sujet ici. Cependant, la prochaine commission permanente du CNM, prévue le 20 janvier, abordera ce point.

M. le président. La parole est à Mme Fanny Dombre Coste, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

Mme Fanny Dombre Coste. Comme nous l’avons vu il y a quelques mois avec le face-à-face entre les chauffeurs de taxi et l’entreprise Uber, l’essor de l’économie collaborative pose de réelles questions sur la stabilité de certains secteurs. En effet, même si cette nouvelle forme d’économie constitue un réel progrès pour de nombreux utilisateurs et une vraie opportunité de développement, elle n’est pas sans effet pour les professionnels.

Les sites d’hébergement en ligne comme Airbnb permettent à de nombreuses personnes de partir en vacances, de visiter des villes dans lesquelles l’offre de logement disponible jusqu’alors n’était pas toujours abordable. Pour un grand nombre de Français, ils sont aussi un moyen d’arrondir leurs fins de mois. Pour autant, les risques de dérive existent, et le modèle collaboratif pourrait se transformer peu à peu en activité commerciale vorace. En effet, ce site Internet héberge de nombreuses annonces de multipropriétaires, louant leur logement à l’année par ce biais, afin d’augmenter la rentabilité de leur bien.

Cela pose un double problème : pour les professionnels, qui doivent faire face à cette concurrence, d’une part ; du point de vue du logement, d’autre part. Cela pourrait impliquer, à terme, de réelles tensions sur le marché de l’immobilier, avec de graves répercussions sur l’offre de logement dans nos villes. Sans remettre en cause l’efficacité de ce type d’offre, il convient d’en encadrer les pratiques, en limitant par exemple le nombre de nuitées de location par an. Ne devons-nous pas également envisager de soumettre à l’impôt les gains générés au-delà d’un certain montant ?

Il est un deuxième point que je voudrais aborder, celui de la taxe de séjour. Suite au décret publié début août par le Gouvernement, des négociations ont été menées entre Airbnb et la ville de Paris. Depuis le 1er octobre, la taxe de séjour, soit 86 centimes par nuitée, est automatiquement prélevée par Airbnb, puis reversée. Chacun ici sait combien cette manne financière – 5 millions d’euros par an pour la capitale – est essentielle au financement de l’offre touristique de nos villes. Or Paris ne représente que 30 % de l’offre totale présente sur le site Airbnb.

Je souhaiterais donc connaître l’avancement des discussions avec Airbnb, afin que le dispositif mis en place à Paris soit généralisé à l’ensemble du territoire français et permette aux collectivités territoriales, aux stations littorales et de sport d’hiver, à tous les sites touristiques de bénéficier de cet apport essentiel pour investir et rendre notre offre touristique compétitive.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Matthias Fekl, secrétaire d’État. Vous avez raison de souligner, madame la députée, l’importance de l’économie collaborative et son incidence en matière touristique, que j’ai évoquée brièvement tout à l’heure. Nous souhaitons à la fois accompagner l’essor de ces nouvelles formes de tourisme et de services offerts, tout en respectant un cadre de concurrence loyal et équitable. Un certain nombre de réflexions sont en cours à ce sujet. À cet égard, je citais notamment la mission sur l’économie collaborative, que le Premier ministre a confiée à votre collègue, M. Pascal Terrasse.

S’agissant en particulier de la location d’appartements meublés touristiques, plusieurs dispositions législatives et réglementaires ont été prises afin d’améliorer et d’aménager le cadre juridique. La location de meublés de tourisme fait notamment l’objet d’un encadrement juridique et fiscal, qui a été aménagé par la loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové. Cette réglementation, peu respectée, nécessite cependant de nouveaux systèmes de contrôle.

La loi de finances pour 2016, que vous avez votée, apporte de premiers éléments de réponse à ces questions. Son article 87, notamment, impose de fournir, lors de chaque transaction, une information loyale, claire et transparente, sur les obligations fiscales et sociales incombant aux personnes qui réalisent des transactions commerciales par l’intermédiaire de tels sites. Nous nous sommes beaucoup mobilisés sur ce point.

Mais le projet de loi de finances oblige également les utilisateurs de ces sites à fournir, en janvier de chaque année, un document récapitulant le montant brut des transactions dont ils ont eu connaissance et qui ont été perçues par leur intermédiaire au cours de l’année précédente. Ainsi, nul ne pourra s’exonérer de ses obligations. Nous faisons un point avec les professionnels pour que toutes ces dispositions soient effectivement respectées.

Concernant la taxe de séjour, madame la députée, vous avez très justement rappelé l’état du droit, ainsi que le fait qu’Airbnb, depuis le 1er octobre dernier, prélève automatiquement la taxe de séjour. Cela vaut non seulement pour Paris, mais également pour Chamonix. Nous sommes donc mobilisés, ce qui suppose de travailler sur les fichiers, en transmettant l’évolution des données, afin que ce dispositif puisse être transposé dans d’autres villes, que nous souhaitons les plus nombreuses possibles. Ce travail est en cours.

M. le président. La parole est à Mme Sophie Dion, pour le groupe Les Républicains.

Mme Sophie Dion. La montagne française, chacun le sait, apporte beaucoup à la France : 9 milliards d’euros par an de chiffre d’affaires, 5 milliards d’euros d’investissements touristiques, 100 000 emplois et 15 % du chiffre d’affaires du secteur touristique français.

Mais la montagne française souffre : elle souffre beaucoup en ce moment, non seulement du manque de neige mais aussi du transfert de la compétence des offices de tourisme. La valorisation de notre patrimoine, de notre art de vivre, de l’authenticité, de la beauté de nos territoires, le renforcement et la formation aux métiers du tourisme, le développement des classes de neige et de découverte, la préservation des capacités d’investissement des communes touristiques, la promotion de la montagne, été comme hiver, le développement de l’agrotourisme sont autant de pistes à suivre pour conforter notre place de leader.

La réhabilitation de l’hébergement et l’accès aux stations sont deux des sujets qui tiennent particulièrement à cœur les députés de ces bancs. Pour répondre aux attentes de la clientèle internationale, nous devons impérativement aider les communes à lutter contre les lits froids et le vieillissement de l’hébergement : il nous faut étendre notre offre et monter en gamme.

Mais nous devons aussi soutenir l’hôtellerie familiale, qui, là encore, peine terriblement. Il faut impérativement accompagner ses acteurs, les aider à se moderniser et à répondre aux normes d’accessibilité. Ils sont l’histoire et l’âme de nos territoires de montagne.

S’agissant de l’accès à la montagne, le train, moyen de transport collectif et propre, doit être privilégié pour acheminer la clientèle. Tout le monde s’accorde sur ce point, sauf la SNCF, qui supprime les trains de nuits, par exemple entre Paris et Saint-Gervais. La SNCF réduit également les dessertes vers nos stations alpines, vers la Vallée de l’Arve et le Pays du Mont-Blanc. Il lui arrive aussi de promouvoir la Suisse, l’un de nos principaux concurrents. Or Genève, faut-il le rappeler, n’est pas la France ! La SNCF a une mission de service public, de desserte de tous les territoires, une mission au service de ceux qui y vivent et de ceux qui veulent y venir.

Je souhaiterais donc connaître la position du Gouvernement sur ces deux aspects.

M. Joël Giraud. Bravo !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Matthias Fekl, secrétaire d’État. Nous avons déjà évoqué plusieurs sujets se rapportant à la montagne, tels que l’enneigement ou les problématiques plus générales évoquées par le Conseil national de la montagne, sur lesquels je ne reviendrai pas.

S’agissant de la réhabilitation de l’immobilier de loisirs en montagne, question importante sur laquelle vous travaillez, madame la députée, le Premier ministre a eu l’occasion d’annoncer plusieurs mesures lors du Conseil national de la montagne, qui se tenait à Chamonix.

Il s’agit tout d’abord, dès 2017, de réorienter les moyens actuellement consacrés à la montagne par le dispositif Censi-Bouvard aux résidences de tourisme, pour mieux soutenir leur réhabilitation. Une concertation sera organisée sur ce point, pour concevoir, en 2016, les modalités de cette décision.

S’agissant de la réhabilitation de l’immobilier de loisir en montagne, le Premier ministre a par ailleurs décidé d’expérimenter le dispositif aidé dans trois stations. Au-delà de l’aspect fiscal, plusieurs mesures concrètes ont été mises en œuvre : un pôle de ressources a notamment été consacré à la réhabilitation et à la remise en tourisme de l’immobilier de loisir en montagne, avec Atout France, la région Rhône-Alpes et le comité régional du tourisme Rhône-Alpes, afin de mieux répondre à certains enjeux concrets.

Concernant enfin l’accessibilité et la mobilité, qui sont essentielles car chacun doit pouvoir se rendre à la montagne, là encore, l’État s’est fortement engagé, notamment dans le cadre des contrats de plan signés avec les régions, qui courront jusqu’à 2020 : 720 millions d’euros seront consacrés à la modernisation et au développement des réseaux. Au total, l’effet de levier s’élève à 1,74 milliard d’euros d’investissements publics.

Cela signifie plus précisément que l’État mobilisera 520 millions d’euros pour mettre à niveau certains axes routiers structurants – en 2016, les principaux d’entre eux feront l’objet d’une étude de planification de leur aménagement, pour aboutir à un plan de désenclavement. Par ailleurs, 200 millions d’euros seront engagés pour accompagner les collectivités locales et SNCF Réseau, sur les réseaux ferroviaires de montagne français.

Concernant l’hôtellerie familiale, un sujet fondamental, à la montagne comme ailleurs, les efforts massifs d’investissement du Gouvernement, à travers le plan d’investissement d’avenir ou le fonds mis en place avec la Caisse des dépôts et la Banque publique d’investissement s’adressent également à l’hôtellerie familiale, aux projets portés par eux qui intègrent un ensemble de problématiques de mise aux normes et d’adaptation.

M. le président. La parole est à Mme Marianne Dubois, pour le groupe Les Républicains.

Mme Marianne Dubois. Ma question concerne le tourisme rural et le tourisme avec handicap. La mise en accessibilité de tous les établissements accueillant du public, dont les établissements touristiques, est en cours de réalisation sur l’ensemble de notre territoire. Le coût de ces mises aux normes est parfois insupportable pour les restaurants, les hôtels, les gîtes, notamment dans les territoires ruraux où de nombreux petits établissements n’ont malheureusement pas pu relever le défi, comme je peux le constater dans le Loiret.

Rappelons qu’en juin 2015, ces établissements ruraux ont déjà dû subir l’obligation réglementaire de mettre fin à la signalisation de leurs établissements grâce aux pré-enseignes : les préjudices sont importants. Notons également que la mise en accessibilité vise autant la population vieillissante que les porteurs de handicap : nous parlons naturellement d’accessibilité pour tous.

Une campagne de communication sur la marque Qualité Tourisme, menée en 2015, avec l’achat de bannières publicitaires sur Internet, a été un vif succès. Peut-on espérer la même action pour valoriser la marque d’État « Tourisme et Handicap » ? Il est à noter que les territoires réalisent des efforts importants pour monter des partenariats et accompagner les parties prenantes dans leur démarche. Ils se sentent toutefois seuls et peu valorisés au niveau national.

L’accompagnement de l’État serait une juste contribution aux efforts considérables consentis par les métiers de l’hébergement et de la restauration. Plus généralement, quelles actions sont envisagées pour valoriser nos territoires ruraux ou aboutir à leur mise en marché touristique ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Matthias Fekl, secrétaire d’État. Madame la députée, vous appelez l’attention du Gouvernement sur un sujet essentiel, qui retient déjà toute notre attention. Je vous réponds là à la fois en tant que membre du Gouvernement et qu’élu d’un territoire rural, avec la volonté non seulement de prendre en compte la réalité mais encore d’offrir un tourisme qui s’adresse à tous. En effet, on mesure aussi l’état d’avancement d’un pays à la manière dont il accueille les personnes en situation de handicap et leur permet de voyager, de se déplacer, et de connaître, au même titre que les autres personnes, des expériences touristiques.

Beaucoup a été fait dans ce domaine, et les avancées sont nombreuses. À l’heure actuelle, le Gouvernement souhaite déployer et renforcer le label « Tourisme et Handicap », afin de mettre en valeur les territoires et les acteurs privés exemplaires en la matière. Nous souhaitons aussi que les acteurs soient les plus nombreux possibles à s’inscrire dans cette démarche. De nombreux travaux ont été réalisés, notamment pour la mise aux normes des établissements recevant du public.

Il a aussi été constaté que les obligations faites aux établissements recevant du public ne pouvaient pas toujours être réalisées et ne rencontraient parfois pas des décisions adéquates. En 2015, le Premier ministre a ainsi demandé à la sénatrice Claire-Lisse Campion de mener une concertation pour faire évoluer le cadre juridique proposé par la loi du 11 février 2005. Ce rapport, qui avait été remis au Gouvernement, a préconisé un dispositif d’agenda d’accessibilité programmée, permettant parfois de prolonger le délai de mise en conformité, dans un cadre contraint et avec un ajustement de l’environnement normatif.

Pour permettre la mise en œuvre la plus rapide possible du dispositif préconisé, le Gouvernement a décidé de procéder par voie d’ordonnance. Les différents textes, qui concernent principalement les établissements recevant du public, la construction de logements, la voirie, le stationnement et le transport, traduisent une nouvelle approche de la réglementation. L’objectif est de simplifier et d’actualiser de nombreuses normes et dispositions réglementaires, et de les compléter afin de mieux prendre en compte l’ensemble des formes de handicap, sans en retenir une plutôt qu’une autre. Au premier semestre de l’année dernière, plus de 330 000 établissements recevant du public s’étaient déjà engagés dans ce dispositif : c’est très encourageant.

Une convention a été signée en 2014 avec Atout France et la direction générale des entreprises afin d’accompagner les entreprises dans la réalisation des programmes d’accessibilité. Cette action se poursuivra bien évidemment en 2016. Il s’agit d’une cause nationale fondamentale, et nous aiderons les acteurs du tourisme à la défendre.

M. le président. Le débat est clos.

2

Ordre du jour de la prochaine séance

M. le président. Prochaine séance, demain, à neuf heures trente :

Questions orales sans débat.

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt-trois heures.)

La Directrice du service du compte rendu de la séance

de l’Assemblée nationale

Catherine Joly