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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIVe législature
Session ordinaire de 2015-2016

Compte rendu
intégral

Deuxième séance du mercredi 25 mai 2016

Présidence de M. François de Rugy

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

1

Questions sur l’avenir de la continuité territoriale Corse-Continent

M. le président. L’ordre du jour appelle les questions sur l’avenir de la continuité territoriale Corse-Continent dans le contexte de reprise de l’ex-SNCM. Je vous rappelle que la Conférence des présidents a fixé à deux minutes la durée maximale de chaque question et de chaque réponse.

Les quatre premières questions seront posées par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

La parole est à M. Gaby Charroux.

M. Gaby Charroux. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche, chers collègues, je regrette que cette séance de questions, demandée par le groupe GDR, ne comprenne pas de discussion générale alors même que l’enjeu est majeur.

Vous connaissez, monsieur le secrétaire d’État, mon attachement à la continuité territoriale et au fait que celle-ci soit assurée par une compagnie qui respecte le droit social français, l’environnement et la sécurité des passagers et des marchandises. La Société nationale maritime Corse-Méditerranée, SNCM, a été placée en redressement judiciaire en novembre 2014 à la demande – fait unique – de son actionnaire majoritaire public-privé Transdev, dirigé par M. Jean-Marc Janaillac, qui a lui-même déclaré l’état de cessation de paiement de sa société.

Pour le Gouvernement, il s’agissait d’un passage obligé pour obtenir la levée des sanctions anti-services publics prises par la Commission européenne et traduites en amendes aussi excessives qu’extravagantes, comprenant le remboursement de 440 millions d’euros d’aides publiques. D’une part, en effet, le service complémentaire incriminé a été validé en 2007 et effectué par la SNCM et, d’autre part, les conditions de la privatisation de la SNCM en 2005 ont relevé exclusivement de la responsabilité du Gouvernement de l’époque et n’ont enrichi que M. Butler, comme l’a démontré la commission d’enquête parlementaire sur les conditions de la privatisation de la SNCM.

Ce bref rappel est d’autant plus nécessaire qu’il éclaire la réalité actuelle qui pousse à la déréglementation au détriment de l’intérêt général et donc au bénéfice des opérateurs low-cost, plus particulièrement de la compagnie italo-genevoise Corsica-Ferries France, qui a capté 82 % du marché passagers et 30 % du fret, ce qui s’apparente à un abus de position dominante.

Monsieur le secrétaire d’État, alors que la période de redressement judiciaire a démontré la viabilité économique de la SNCM, pourquoi avoir accepté, voire encouragé, le processus aléatoire et dangereux du redressement judiciaire ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche. Monsieur le député, je tiens à faire une déclaration préalable. Votre groupe a choisi, c’est son droit, d’inscrire un débat et donc d’interpeller le Gouvernement sur la continuité territoriale. Or ce sujet heurte aujourd’hui deux principes constitutionnels que le Gouvernement doit respecter.

Le premier principe a trait à plusieurs questions que vous avez évoquées et qui relèvent de procédures judiciaires en cours. Le Gouvernement entend respecter strictement l’indépendance de la justice. Les déclarations que je pourrais faire ce soir au nom du Gouvernement pouvant évidemment se retrouver dans les débats judiciaires, vous comprendrez, je l’espère du moins, que je n’en ferai pas. Si je respecte le choix du sujet, vous devez savoir que mes réponses seront très contraintes.

Le deuxième principe constitutionnel est la libre administration des collectivités territoriales. De nombreuses questions que j’ai aperçues ou qui m’ont été signalées tendent à inciter le Gouvernement à porter une appréciation sur la délibération d’une collectivité territoriale.

M. Paul Giacobbi. Cela me paraît difficile.

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. Je n’en ferai rien. Je suis désolé de vous le dire : mes réponses pourront vous paraître, à un moment donné, succinctes ou incomplètes, en revanche personne ne comprendrait que je déroge au respect de ces principes et je n’y dérogerai pas. Vous nous mettez dans une situation difficile, jusqu’à nous demander de commenter a posteriori des décisions de justice. Vous suivez depuis longtemps cette affaire : autant je vous ai répondu dans le cours des procédures sur ce qui relevait de ma responsabilité, autant le choix de ce sujet nous met, je le répète, dans une grande difficulté. C’est pourquoi je tenais à faire cette déclaration préalable. J’entrerai aussi loin que je le pourrai dans mes réponses.

M. Paul Giacobbi. Très bien.

M. le président. La parole est à M. Gaby Charroux, pour poser sa deuxième question.

M. Gaby Charroux. Monsieur le secrétaire d’État, je comprends et respecte votre déclaration. Nous pensons toutefois que le sujet est important et qu’il continue de concerner, par-delà les restrictions fort légitimes que vous avez annoncées, les députés que nous sommes. C’est pourquoi je continuerai de vous poser mes questions, même si, je le répète, je vous comprends.

Vous vous doutez bien que mes questions sont liées les unes aux autres. C’est pourquoi il est important de revenir dans le détail sur ce qui fonde désormais les enjeux et l’avenir même de la continuité territoriale et de la délégation de service public, qui relève pour son organisation de la collectivité territoriale de Corse tout en restant, du point de vue des principes républicains, une responsabilité d’État.

Si, d’une part, nous considérons que c’est uniquement au regard des amendes infligées par l’Union européenne que la compagnie a été mise en liquidation judiciaire avec une reprise en discontinuité, nous affirmons d’autre part clairement – vous connaissez ma position sur le sujet – que l’Union européenne, en décidant de faire droit aux demandes et recours des opérateurs low-cost, a agi en vue de couler ce fleuron national du transport maritime. C’est difficilement acceptable puisque ces amendes ne seront pas payées et que je crois même savoir que le Gouvernement français se l’est vu confirmer par un courrier officiel du directeur général de la concurrence le 24 septembre 2015.

Finalement, le constat pourrait être que plus personne ne voulait de la SNCM et que l’Union européenne qui, dans ses pratiques libérales de concurrence libre et non faussée, encourage le dumping social et les sociétés low-cost, a fourni l’arme fatale à sa liquidation. D’autant que, dans le même temps, Corsica-Ferries a perçu 180 millions d’euros d’aide sociale individuelle au transport de passagers versés par l’État français, alors qu’elle était mise en cause pour fraude à la taxe transports, affaire que la Commission européenne a décidé de classer sans suite.

Pouvez-vous confirmer, monsieur le secrétaire d’État, et ce dans le cadre des restrictions que vous avez annoncées, que l’Union européenne a définitivement renoncé aux sanctions financières prévues ? Pourquoi n’a-t-on pas cherché d’autres voies pour les annuler ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. Permettez-moi au passage, monsieur le président, de vous rendre hommage à l’occasion de la première séance que vous présidez.

M. le président. Merci, monsieur le secrétaire d’État.

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. Monsieur le député, nous n’allons pas refaire l’histoire, à savoir, pour la société, onze années successives de déficit engendrant un passif considérable.

S’agissant des recours contre les amendes décidées par l’Europe, je tiens à souligner qu’à la suite de la mise en liquidation judiciaire de la SNCM, la discontinuité entre la SNCM et la nouvelle société, un des principes clés, a été validée par la commissaire européenne le 27 novembre 2015. Toutefois deux contentieux communautaires perdurent et visent et doivent viser principalement la SNCM. Le premier concerne la décision de la Commission européenne du 2 mai 2013, portant condamnation pour un montant de 350 millions – 250 millions en principal et 100 millions en intérêts – relativement au service complémentaire dans le cadre de la délégation de service public ; le second vise la décision du 20 novembre 2013, portant condamnation pour un montant de 320 millions sur la restructuration de l’entreprise en 2002 et la privatisation de 2006.

Les autorités françaises ont introduit divers recours contre ces décisions. S’agissant de celle du 2 mai 2013, comme mon prédécesseur s’y était engagé, les autorités françaises ont mis en œuvre l’ensemble des recours légaux permis par les textes. Ces recours sont purgés, sauf en ce qui concerne la demande principale d’annulation pour laquelle une audience du tribunal de l’Union européenne se tiendra le 14 juin 2016. S’agissant de la décision du 20 novembre 2013, les autorités françaises ont également introduit un recours en annulation. Elles mettent tout en œuvre dans la défense des intérêts et s’attachent à ce que les décisions concernent bien la société SNCM qui a été mise en liquidation afin que ni la nouvelle entreprise ni l’État français ne soient condamnés pécuniairement si ces recours sont rejetés.

Si les autorités françaises s’abstenaient de mettre en œuvre cette tentative de récupération, l’État et les collectivités territoriales corses pourraient voir leur responsabilité engagée et se voir reporter le paiement des amendes.

M. le président. La parole est à M. Gaby Charroux, pour poser sa troisième question.

M. Gaby Charroux. Il ne s’agit évidemment pas, monsieur le secrétaire d’État, de revenir sans cesse en arrière au travers de cette séance de contrôle du Gouvernement sur la continuité territoriale et ce qu’il convient d’appeler aujourd’hui l’ex-SNCM. Toutefois, l’expérience de la commission d’enquête parlementaire de 2013 a démontré combien il était important de mesurer tous les actes – ce que nous avons fait près de dix ans après la privatisation – et, surtout, de ne pas commettre les mêmes erreurs.

Néanmoins, chaque étape, en 2002, puis en 2005 et 2007 et, enfin, en 2014, a été marquée par des plans sociaux lourds et des réductions successives tant du périmètre du service public de continuité territoriale et de l’emploi que des actifs stratégiques de la compagnie nationale, au bénéfice d’intérêts particuliers, avec une perte sèche de 1 500 emplois directs sur le territoire national.

Cette politique à courte vue, fondée sur la promotion du dumping fiscal et social et sur la légalisation de la concurrence déloyale, ainsi que les plans sociaux qu’elle a provoqués ont conduit à une division de la flotte de la SNCM par deux alors que les besoins en navires sur la continuité territoriale – je l’espère du moins – et sur les lignes du Maghreb sont toujours aussi importants.

Vous comprenez bien que la question de l’emploi est centrale, qu’il s’agisse des emplois directs ou indirects à Marseille, Nice ou dans les ports corses. Sur la dernière période, de 2014 à aujourd’hui, nous sommes passés d’un plan de relance industriel comprenant huit navires et un renouvellement de flotte au GNL – gaz naturel liquéfié – assuré par les chantiers navals de Saint-Nazaire, plan accepté par les syndicats, à cette aberration du redressement judiciaire, alors que, durant cette procédure sous la protection du tribunal de commerce en lieu et place des dirigeants nommés par l’État et Transdev, la compagnie a pu faire la démonstration de sa viabilité.

Monsieur le secrétaire d’État, quelle action le Gouvernement entend-il conduire pour que les liaisons restent au niveau des besoins de continuité territoriale et soient assumées dans le respect du droit social, de la sécurité pleine et entière des passagers et de l’environnement, lequel, dans le plan préconisé par votre prédécesseur avec les navires GNL, se voyait renforcé ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. Je tiens à rappeler, pour nourrir le débat, qu’il ne saurait être reproché au Gouvernement de ne pas s’être impliqué dans le plan de sauvegarde qui a été signé par l’ensemble des organisations syndicales : j’ai moi-même mené les négociations. C’est légitime. En termes financiers, c’est probablement le plan le plus important qui ait été signé en France. Les sommes mises à disposition étaient très élevées et 845 emplois, représentant 60 % des salariés, avaient été maintenus. Ces décisions sont aujourd’hui derrière nous.

Vous avez évoqué les dotations financières. L’enveloppe budgétaire de l’État en matière de continuité territoriale au bénéfice de la Corse est essentielle : je tiens en effet à rappeler qu’elle reste stable depuis 2009 et s’élève à 187 millions d’euros par an, ce qui est normal, puisqu’il s’agit d’assurer la continuité territoriale avec la Corse. Sur ces 187 millions, la part de la desserte maritime s’est élevée en 2015 à 95 millions.

Pour vous rassurer, je tiens à vous affirmer que l’État souhaite continuer à jouer son rôle. Je vous rappellerai en revanche que l’action que vous me demandez de conduire ne relève pas du rôle de l’État. L’État contrôlera la bonne application du droit du travail – c’est de son ressort en tant que responsable de l’inspection du travail – et veillera au respect des règles fiscales.

M. Paul Giacobbi. Bien sûr.

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. Manifestement, je l’ai compris, vous regrettez un schéma ancien. Je le conçois, mais nous devons faire aujourd’hui avec un nouveau schéma et de nouvelles règles. Vous conviendrez que je ne saurais répondre à vos aspirations même si elles se conjuguent à des regrets.

M. le président. La parole est à M. Gaby Charroux, pour poser la quatrième et dernière question du groupe GDR.

M. Gaby Charroux. Monsieur le secrétaire d’État, le 20 novembre 2015, le tribunal de commerce de Marseille a choisi par défaut entre un repreneur avec une offre réputée insuffisante et la liquidation pure et simple. Pourtant, il était encore possible de prolonger de six mois la période d’observation.

Contre toute attente, au lieu de mettre un terme à cette mascarade coûteuse pour les deniers publics et de revenir à une situation où l’État assumerait ses responsabilités à l’égard de la Corse et au titre de la continuité territoriale, la SNCM a été bradée pour un montant ridicule de 8 millions d’euros alors que ses actifs, constitués pour partie grâce à l’argent du contribuable, étaient proches de 300 millions d’euros. Mais visiblement, cela aurait été encore trop que d’appliquer le plan industriel prévu, qui aurait préservé près de 900 emplois.

Dès le 5 janvier 2015, date à laquelle MCM – c’est le nom de l’ex-SNCM reprise par M. Patrick Rocca – devait commencer son activité, le consortium CM Holding a ouvert une ligne commerciale, au mépris de la clause de non-concurrence signée par l’ensemble des candidats à la reprise. Ce faisant, CM Holding voulait conduire MCM au dépôt de bilan à travers un processus de faillite organisée.

Condamné par le tribunal, à la demande des élus du comité d’établissement de MCM, et soumis à une astreinte de 150 000 euros par infraction constatée, le consortium a changé de stratégie pour conduire avec le repreneur, M. Patrick Rocca, une acquisition tout aussi irrespectueuse du tribunal de commerce, puisqu’elle prévoyait qu’aucune modification substantielle du plan ne pouvait être décidée dans les deux années suivant la cession. Le comité d’entreprise a dû déposer une nouvelle plainte devant le tribunal de commerce pour demander l’annulation de cette opération. Je vous rappelle que l’offre de CM Holding avait été jugée comme un « projet mal ficelé » à la « gouvernance mal établie » et aux « données chiffrées manquant de robustesse ».

Monsieur le secrétaire d’État, ces faits me font craindre que l’histoire ne soit pas finie, malgré la création de Corsica Linea. Ces péripéties ne sont pas de nature à nous garantir un fonctionnement répondant aux exigences actuelles. Quelle est donc la position du Gouvernement sur cette succession de reprises ?

M. Paul Giacobbi. Le tribunal de commerce a été saisi : il lui appartiendra donc d’en juger ! Ce n’est pas le rôle du Gouvernement !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. Que dire ? La meilleure réponse serait de me taire.

M. Dominique Tian. Ce serait un 49.3 ! (Sourires.)

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. Sans critiquer les décisions de justice, vous avez le droit de les commenter. Mais ce n’est pas mon cas ! Ma seule responsabilité est de garantir le fait que les décisions de justice soient prises en toute indépendance. C’est ce que je fais.

Vous avez rappelé l’historique du dossier. Le tribunal de commerce a prononcé une décision d’attribution, que nous avons enregistrée. À aucun moment le Gouvernement n’a fait connaître aucune préférence dans cette affaire. Ne confondons pas le Gouvernement avec le parquet, qui est indépendant. Je ne sais pas si j’ai déjà eu l’occasion de le dire publiquement : le Gouvernement n’a naturellement donné aucune instruction au parquet, lorsque le procureur de Marseille a émis une préférence – c’est son rôle, son droit de magistrat. Je le répète : le Gouvernement s’est contenté d’enregistrer la décision.

M. Gaby Charroux. Je n’ai jamais dit autre chose !

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. Vous nous faites part d’une suspicion sur ce qui s’est passé par la suite. Or nous sommes dans un État de droit, et un recours a été déposé : le comité d’entreprise a engagé une procédure devant le tribunal de commerce. Une audience est prévue le 28 juin. Vous comprendrez, monsieur le député, que je ne peux guère faire plus que rappeler l’état de la procédure, sauf à violer un certain nombre de principes constitutionnels. Or je vous ai dit dès le début de cette séance que je veillerai à les respecter.

M. le président. Nous en venons aux questions du groupe socialiste, écologiste et républicain.

La parole est à Mme Françoise Dubois.

Mme Françoise Dubois. Monsieur le secrétaire d’État, ma question est très précise, et elle a l’avantage d’être brève. Quel est le partage des compétences entre l’État et la Corse s’agissant de la continuité territoriale maritime ? Faut-il le faire évoluer ?

M. Dominique Tian. Vaste programme !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. Madame la députée, je vous remercie de cette question précise, à laquelle je pourrai répondre précisément. (Sourires.)

L’article L. 4424-18 du code général des collectivités territoriales a codifié la loi de 1976 sur la continuité territoriale qui permet à la collectivité territoriale de Corse de définir « sur la base du principe de continuité territoriale destiné à atténuer les contraintes de l’insularité et dans les conditions de l’article L. 4425-4, les modalités d’organisation des transports maritimes et aériens entre l’île et toute destination de la France continentale ». Pour éviter une interruption du service en basse saison ou l’application de prix trop élevés, l’autorité organisatrice peut établir des obligations de service public, dites OSP, qui garantissent une activité continue sur l’année et portent sur la régularité, la fréquence et le prix.

Je le répète : la dotation de continuité territoriale de la Corse s’élève à 187 millions d’euros par an – elle est fixe depuis 2009 –, et la part de la desserte maritime est de 95 millions d’euros.

La collectivité territoriale de Corse a fait part de son intention de racheter les navires de l’ex-SNCM – quatre cargos mixtes et deux ferries –, ainsi que ceux de la Méridionale. Elle invoque l’article 40 de la délégation de service public actuelle, qui dispose que la collectivité « peut proposer d’acquérir, au terme de la durée de la convention ou en cas de fin anticipée, les navires utilisés dans le cadre de la convention et qui sont la propriété du ou des codélégataires concernés ». En l’occurrence, la convention de délégation de service public viendra à son terme le 1er octobre.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Quéré.

Mme Catherine Quéré. Je suis moi aussi ravie, monsieur le président, d’être présente lors de votre première prestation. (Sourires.)

M. le président. Merci !

Mme Catherine Quéré. Monsieur le secrétaire d’État, ma question sera courte, et vous y avez déjà répondu en partie. Pouvez-vous nous rappeler les règles qui prévalent au financement de la continuité territoriale et les perspectives de ce financement ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. Madame la députée, j’aimerais revenir sur la continuité territoriale avec les différentes îles françaises, qui procède de dispositions prévues dans le code des transports et dans le code général des collectivités territoriales.

De façon générale, jusqu’à ce qu’elle soit transférée à la région par la loi NOTRe, la compétence était exercée par le département, ou par la commune si l’île faisait partie du territoire de cette dernière. En Corse, toujours en avance, un principe de continuité territoriale destiné à atténuer les contraintes de l’insularité a été institué depuis 1976 ; il est géré non par le département ou les communes, mais par la collectivité territoriale de Corse depuis 1991.

Lorsque l’autorité organisatrice délègue la gestion de la desserte, elle doit respecter le règlement communautaire de 1992, qui prévoit un accès des navires communautaires au cabotage et l’application de la législation sur la mise en concurrence pour l’octroi des services d’intérêt économique général.

Le financement de ces divers dispositifs est assuré par l’État, notamment dans le cadre de la dotation de continuité territoriale dont j’ai déjà parlé. Cette dotation s’élève chaque année à 187 millions d’euros ; son montant est fixe depuis 2009. La part destinée aux compagnies maritimes est de 95 millions d’euros. Deux compagnies en bénéficient à ce jour : la Méridionale et la SNCM, aujourd’hui Corsica Linea. Les autres dessertes ne bénéficient pas d’une indemnisation et sont effectuées dans les conditions du marché. Jusqu’en 2012, une aide sociale aux passagers était versée à l’ensemble des sociétés, en fonction du nombre de passagers transportés.

Depuis 2001, il n’y a plus de délégation de service public, mais la collectivité territoriale de Corse a lancé une consultation pour la remplacer par des obligations de service public à Bastia et Ajaccio, qui représentent 90 % du fret corse. La collectivité jugera si les conditions posées permettent des réponses positives à cette consultation ou si elles l’amènent au contraire à passer de nouveau par une délégation de service public au même niveau de dotation.

M. le président. Nous passons aux questions du groupe Les Républicains.

La parole est à M. Dominique Tian.

M. Dominique Tian. Vous le savez parfaitement, monsieur le secrétaire d’État : l’évolution du dossier de reprise de l’ex-SNCM suscite de nombreuses inquiétudes relatives à la préservation de l’emploi, à la qualité de la desserte entre le continent et la Corse et au rôle économique que joueront les futurs acteurs, notamment sur le port de Marseille. Ces dernières années, la ville de Marseille a souligné à de nombreuses reprises, par la voix de son sénateur-maire Jean-Claude Gaudin, toute l’attention qu’elle porte à ce dossier. C’est aussi le cas de l’ensemble des parlementaires du département, notamment de notre collègue Gaby Charroux.

J’ai bien compris, monsieur le secrétaire d’État, que vous ne pouviez pas répondre à toutes nos interrogations. Mais à ce stade, plusieurs questions restent ouvertes, notamment celles de la validité juridique du nouvel actionnariat, du maintien du siège de la compagnie à Marseille, de la préservation du nombre maximum d’emplois sur le port de Marseille, et de la fiabilité des liaisons entre le continent et la Corse. Pour la ville de Marseille et les élus des Bouches-du-Rhône, ces questions sont très importantes.

Or, comme Gaby Charroux l’a dit plusieurs fois, nous ne sommes pas rassurés. Six mois après le jugement du tribunal de commerce qui a validé la reprise des activités de l’ex-SNCM par une autre compagnie dirigée par M. Rocca, nous sommes toujours dans l’incertitude la plus totale. Le changement d’actionnariat au profit de Corsica Maritima, en dehors du périmètre de compétence du tribunal de commerce, fait planer une ombre sur les salariés. Je rappelle d’ailleurs que seuls 900 emplois ont été préservés sur les 1 500 qui existaient antérieurement, ce qui a été vécu comme un drame à Marseille – chacun en est bien conscient.

Nous ne sommes donc pas rassurés quant à l’avenir du dispositif actuel. L’ex-SNCM se nomme maintenant Corsica Linea et a pour actionnaire unique CM Holding, une structure regroupant quinze actionnaires, dont Patrick Rocca, détenant 95 % du capital – les 5 % restants sont détenus par 120 petites ou grandes entreprises corses. Avec ses six navires, la compagnie dessert les ports de Marseille, de Bastia, de l’Île Rousse, d’Ajaccio, de Porto-Vecchio, d’Alger et de Tunis.

Comme Gaby Charroux l’a indiqué, les comités d’entreprise ont saisi le tribunal de commerce pour contester ce nouveau montage. La date de l’audience est fixée au 28 juin.

M. le président. Merci de conclure, monsieur le député.

M. Dominique Tian. Monsieur le secrétaire d’État, gouverner, c’est prévoir. Que se passera-t-il si le tribunal invalide la cession des parts de Patrick Rocca à CM Holding ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. Monsieur le député, le jugement du tribunal de commerce du 20 novembre 2015 prévoit que le repreneur « s’engage à maintenir de manière pérenne le siège social de la société nouvelle à Marseille ». C’est aujourd’hui le cas : le siège et les principaux bureaux, où travaillent environ 188 personnes, sont localisés dans cette ville. Ce maintien n’est assuré que dans un premier temps, puisque le nouveau repreneur, Corsica Maritima, a annoncé que le siège social devrait être transféré à Ajaccio courant 2017. Il s’agit d’une décision de l’actionnaire, que le Gouvernement n’a pas à commenter, pour autant que le siège soit situé en France et bien géré. Cependant, j’entends votre argument.

M. Dominique Tian. Quand même !

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. Je vous vois protester. Donnez-moi donc la base juridique permettant au Gouvernement de choisir la localisation du siège social d’une société ! Je serais très étonné que vous soyez favorable à une telle disposition, monsieur Tian. Et à moins de puiser dans le droit de la Corée du Nord, je pense que vous aurez beaucoup de difficultés à la trouver. (Sourires.) Je n’ai donc pas à commenter cette décision. Cependant, j’entends vos arguments, et le Gouvernement est très attentif à ce que toutes les procédures touchant les salariés soient parfaitement respectées dans cette affaire.

La préservation d’un nombre maximum d’emplois dépend également des entreprises et des salariés travaillant autour de la desserte de la Corse. C’est avant tout le redémarrage de l’activité qui permettra de maintenir un maximum d’emplois. Aujourd’hui, tout porte à croire que les efforts du grand port maritime de Marseille, qui assure le transit des deux tiers du fret, et des acteurs portuaires, aux côtés des entreprises de transport, permettront de préserver voire de développer cette chaîne logistique.

M. le président. La parole est à M. Dominique Tian, pour une seconde question.

M. Dominique Tian. À ce stade, monsieur le secrétaire d’État, je souhaite vous poser deux autres questions sur des sujets d’inquiétude. Elles sont un peu plus politiques, mais que personne n’y voie de sous-entendus !

Ma première question porte sur l’hypothèse de création d’une compagnie régionale corse – que Paul Giacobbi et Sauveur Gandolfi-Scheit ne s’affolent pas ! La continuité territoriale entre le continent et la Corse n’est tout de même pas une affaire devant relever exclusivement d’une compagnie régionale corse. Je note d’ailleurs que la collectivité territoriale est désormais présidée par des autonomistes, qui ont une vision un peu différente de la nôtre. L’État doit donc se poser un certain nombre de questions ! Je ne veux évidemment pas faire de procès d’intentions, mais vous comprendrez qu’une compagnie régionale corse dirigée par des autonomistes puisse poser problème, alors qu’il s’agit de relier deux points de notre territoire national. Mais je pense que vous ne me répondrez pas sur ce point, monsieur le secrétaire d’État.

Ma deuxième question concerne la délégation de service public. La collectivité territoriale de Corse est légitime et parfaitement maître de son destin – M. Giacobbi le sait –, mais s’agissant d’une compagnie telle que l’ex-SNCM, qui opérait sous DSP pour la continuité territoriale entre le continent et la Corse, et dont le poids économique est essentiel à la survie du port de Marseille, nous souhaitons que l’État joue son rôle. Vous nous dites depuis un petit moment, monsieur le secrétaire d’État, que l’État ne joue plus aucun rôle ; or il s’agit ici d’un intérêt stratégique national. Il faut peut-être que l’État s’exprime sur ce sujet.

J’ajoute une troisième question, un peu plus générale et déjà évoquée par Gaby Charroux. J’aurais aimé que vous fassiez un point juridique sur les sanctions financières colossales frappant l’ex-SNCM. Tout à l’heure, vous avez déjà apporté des indications précises sur ce sujet ; néanmoins, l’hypothèque que constituent les sanctions financières décidées par l’Europe n’est pas levée, et c’est un sujet très important pour nous.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. Dans cette affaire sur laquelle je me suis souvent exprimé, notamment dans le cadre des questions au Gouvernement, en réponse à M. Giacobbi ou à M. Charroux, le Gouvernement a pleinement joué son rôle. J’ai toujours dit que les décisions qui seraient prises devaient mettre un terme définitif au problème posé. Nous étions ainsi favorables au dépôt de bilan – le Premier ministre l’avait indiqué et nous avons assumé cette politique. Nous avons toujours dit que nous voulions un plan social exemplaire – ce qu’il a été du point de vue du financement, personne ne pourra dire le contraire – et que nous souhaitions la meilleure solution possible en termes de sauvegarde des emplois de marins français, dans le respect des règles communautaires. Je tenais à le rappeler.

La collectivité territoriale de Corse a souhaité étudier, vous l’avez dit, monsieur le député, la faisabilité d’une compagnie régionale. À cet effet, l’assemblée de Corse a, le 25 février 2016, adopté une délibération confiant à une commission spéciale le soin de procéder « à une analyse exhaustive des différentes solutions visant à garantir la pérennité de la continuité territoriale entre les ports de Corse et le continent […] parmi lesquelles, entre autres hypothèses, les modalités de création d’une compagnie maritime corse rassemblant acteurs publics et privés, maîtrisée par la CTC, notamment sous la forme d’une société d’économie mixte locale d’investissement et d’une société d’économie mixte locale d’exploitation. »

Cette délibération précise que doit être vérifiée « la compatibilité de chacune de ces hypothèses avec le droit communautaire ». Vous comprendrez que je n’ai pas à me prononcer sur ce projet qui relève de la libre administration des collectivités territoriales.

M. le président. La parole est à M. Sauveur Gandolfi-Scheit.

M. Sauveur Gandolfi-Scheit. Cette séance de questions sur l’avenir de la continuité territoriale entre la Corse et le continent me permet d’aborder une question qui m’a toujours préoccupé et que je défends sur ces bancs depuis mon élection en 2007.

Je ne cesse de clamer l’urgence et la nécessité de redéfinir les conditions de mise en œuvre de la continuité territoriale, dont le but premier, je le rappelle, était de gommer les handicaps de l’insularité en alignant le prix du kilomètre maritime et aérien sur celui du ferroviaire.

Ce principe, inscrit dans les textes depuis déjà quarante-six ans, n’a en effet jamais été appliqué, ou si peu. Or il est important non seulement pour la Corse, mais également pour la bonne intelligence des rapports entre la Corse et le continent. La continuité territoriale vaut également en matière de continuité de service public.

Si la Corse est une île, elle ne fait pas moins partie intégrante de la France métropolitaine ! On parle de l’égalité des citoyens sur tout le territoire, mais cette égalité suppose que les citoyens bénéficient des mêmes garanties, en matière de continuité du service public, qu’ils se rendent de Bastia à Marseille ou de Marseille à Lyon.

Or la Corse ne dispose pas, en termes de transport maritime, d’un véritable « service minimum garanti » comparable à celui qui s’exerce dans le transport terrestre.

La continuité territoriale, principe fondamental, passe pourtant par celle du service public, ce qui implique l’existence d’un service minimum. En effet, quelle que soit la légitimité d’une grève, on ne peut pas permettre qu’elle conduise systématiquement à prendre les passagers en otage, empêcher le fret ou compromettre le développement du tourisme, un secteur majeur de l’économie insulaire.

M. Dominique Tian. Absolument.

M. Sauveur Gandolfi-Scheit. Monsieur le secrétaire d’État, ma question sera simple et directe : à quand la mise en place d’une véritable continuité territoriale entre Corse et continent, fondée sur l’alignement du prix du transport maritime et aérien sur celui du ferroviaire, comme cela était prévu en 1976 ?

Quant à la question de la continuité de service public, elle est essentielle et doit impérativement faire partie des conditions de la reprise de l’ex-SNCM. Quel que soit le repreneur, un service maritime minimum garanti doit être rendu obligatoire entre le continent et la Corse, sinon l’activité de la compagnie ne saurait être pérenne, les mêmes causes produisant les mêmes effets. Nous en avions d’ailleurs déjà parlé, monsieur le secrétaire d’État.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. Monsieur le député, j’ai entendu votre critique – qui n’est pas nouvelle – de la continuité territoriale. Je ne peux que constater notre désaccord à ce sujet, car le Gouvernement n’entend pas remettre en cause ce principe de nature législative.

Afin d’éclairer le débat, permettez-moi de dépasser le cadre de votre question et d’évoquer l’ensemble des lignes maritimes assurant la liaison entre la Corse et le continent. Trois compagnies – Corsica ferries, CMN, SNCM – assuraient cette activité à caractère fortement saisonnier depuis les ports de Toulon, Nice, Marseille à destination d’Ajaccio, de Bastia et des ports dits secondaires – Calvi, l’Île-Rousse, Porto Vecchio et Propiano. En 2015, 6,8 millions de passagers ont ainsi pris les ferries – dont 78 % à bord des navires de Corsica ferries – et 1,5 million de tonnes de marchandises ont été acheminées – 40 % par La Méridionale et 33 % par la SNCM.

La desserte a été restructurée de fait suite à l’arrêt de l’exploitation de la SNCM le 5 janvier 2016. Trois acteurs assurent actuellement les liaisons maritimes – Corsica Linéa et deux acteurs devenus historiques, Corsica ferries et La Méridionale. Quant à la création d’une compagnie régionale, je ne vais pas m’appesantir sur le sujet.

M. Dominique Tian. Si, je vous en prie !

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. Je rappelle que la contribution de l’État, via la dotation de continuité, atteint 187 millions d’euros, sans même faire mention des exonérations de charges décidées pour préserver la compétitivité de notre pavillon ni du programme exceptionnel d’investissement qui lie la Corse à l’État sur la période 2002-2017 pour un montant avoisinant les 2 milliards d’euros. L’ensemble de ces chiffres méritaient d’être mentionnés.

M. Dominique Tian et M. Sauveur Gandolfi-Scheit. Et le service minimum ?

M. le président. Nous en venons aux deux questions du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.

La parole est à M. Paul Giacobbi.

M. Paul Giacobbi. Monsieur le président, permettez-moi d’abord de vous adresser, à l’instar de mes collègues, mes félicitations pour votre nomination au perchoir. J’en profite pour vous demander l’autorisation de réunir mes deux questions dans une seule intervention, ce qui non seulement ne m’empêchera pas de respecter mon temps de parole, mais nous fera même gagner du temps.

M. le président. Dans la mesure où vous ne dépassez pas votre temps de parole, je vous y autorise.

M. Paul Giacobbi. M. le secrétaire d’État a, en fait, tout dit en invoquant la compétence de la collectivité territoriale de Corse et en refusant d’intervenir sur des procédures judiciaires en cours.

Rappelons que la collectivité territoriale de Corse est l’autorité organisatrice des transports entre la Corse et le continent et qu’elle finance les politiques publiques en la matière – notamment les délégations de services publics – grâce à la dotation de continuité territoriale, elle-même assimilable à un élément de la dotation générale de décentralisation puisqu’elle est la contrepartie financière d’un transfert de compétences.

Comme nos collègues s’en souviennent – en particulier Dominique Tian, Sauveur Gandolfi-Scheit et Gaby Charroux –, notre assemblée a déjà débattu de ce sujet. M. le secrétaire d’État Vidalies s’en souvient également, et d’autant mieux qu’il a dû à cette occasion subir les récriminations venues de tous bords, y compris de ma part. (Sourires.)

Mais à l’époque, la situation était différente : l’État était, directement ou indirectement, d’abord l’actionnaire principal jusqu’à la privatisation de 2006, puis à tout le moins un actionnaire de référence.  Or il ne l’est plus. L’évolution de la compagnie, quant à elle, a donné lieu à bien des débats, et même à une commission d’enquête, dont j’ai été le rapporteur.

Depuis, les choses ont changé. La SNCM a été reprise à la suite d’une décision du tribunal de commerce de Marseille, suite à un dépôt de bilan dont chacun connaît l’origine – problèmes de gestion, mais également sanctions financières de la Commission de l’Union européenne, au demeurant confirmées par la Cour de justice des communautés. Certes, elles ne l’ont pas été à titre définitif, mais la Cour s’étant prononcée sur l’ensemble, il y a peu de chances, monsieur le secrétaire d’État, que les recours présentés puissent changer grand-chose à la décision prise – mais vous connaissez ces sujets aussi bien et probablement mieux que moi.

Ce n’est donc pas, à ce stade, à l’Assemblée nationale de débattre de l’utilisation de l’enveloppe de continuité territoriale ou même de la définition de la politique des transports entre la Corse et le continent, mais à une collectivité décentralisée de la République, la collectivité territoriale de Corse. Je vous indique que dès demain, sur proposition de son nouvel exécutif, un débat y aura lieu sur le sujet, qui apportera peut-être plus de réponses que le débat de ce soir, car il permettra de trancher, au moins à titre provisoire, un certain nombre de points.

Reste que l’on peut poser quelques questions à M. le secrétaire d’État, ne serait-ce que pour justifier l’exercice de ce soir. La première est simple : la dotation de continuité territoriale ne devrait-elle pas être rendue plus fongible afin de permettre, au-delà de la politique de transport et des investissements portuaires et aéroportuaires en Corse, le financement, par exemple, des réseaux routiers qui relient les différents ports et aéroports entre eux ? Je signale que l’excédent constaté par l’office des transports s’élève pour 2016 à 33 millions d’euros.

Deuxièmement, j’imagine que l’État continuera – mais je pose la question – à veiller au contrôle de légalité dans ce domaine.

Troisièmement, le Gouvernement peut-il rappeler que la dotation de continuité territoriale est effectivement la contrepartie financière d’un transfert de compétences de l’État vers la collectivité territoriale de Corse ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. Monsieur le député, la dotation est un concours financier au sein de la dotation générale de décentralisation. Il s’agit d’une dotation juridiquement affectée, destinée à financer le transport maritime. La question de son évolution est posée aux élus corses et, même si le modèle de financement reste à préciser, le Gouvernement n’est pas hostile à ce qu’une plus grande marge de manœuvre soit laissée dans son utilisation.

En l’état du droit, les reliquats ont vocation à être utilisés pour consolider les infrastructures existantes, c’est-à-dire les sept ports et les quatre aéroports. La CTC doit se rapprocher de leurs gestionnaires – les chambres de commerce et d’industrie notamment – pour réfléchir à l’utilisation de ces fonds pour le développement de l’île.

S’agissant du statut de l’office des transports de la Corse, dont la mission est de gérer les subventions, l’article 74 de la loi du 13 mai 1991, qui l’a créé, vient compléter l’article L. 4424-18 du code général des collectivités territoriales que j’ai déjà cité.

Sur d’autres inquiétudes relatives à la dotation de service public provisoire, le Gouvernement n’entend pas donner une quelconque réponse par anticipation. À ce stade, il partage les interrogations qui ont conduit l’assemblée de la collectivité territoriale de Corse à organiser, dans les jours qui viennent, un débat sur ce sujet. Mais, soucieux de rester fidèle au principe de neutralité, auquel chacun aura compris que je n’ai pas la possibilité de déroger, il n’entrera pas plus avant dans les détails de ce dossier.

M. Dominique Tian. Qu’en est-il du service minimum ?

M. le président. Nous avons terminé les questions sur la continuité territoriale Corse-Continent.

2

Ordre du jour de la prochaine séance

M. le président. Prochaine séance, demain, à neuf heures trente :

Proposition de loi visant à encadrer les rémunérations dans les entreprises ;

Proposition de loi pour tendre à l’autonomie des femmes étrangères ;

Proposition de loi relative à la réhabilitation collective des fusillés pour l’exemple de la guerre de 1914-1918 ;

Proposition de loi visant à garantir le revenu des agriculteurs.

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt-deux heures quinze.)

La Directrice du service du compte rendu de la séance

de l’Assemblée nationale

Catherine Joly