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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIVe législature
Session ordinaire de 2016-2017

Compte rendu
intégral

Première séance du lundi 05 décembre 2016

SOMMAIRE

Présidence de M. David Habib

1. Projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2017

Présentation

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

M. Christian Eckert, secrétaire d’État chargé du budget et des comptes publics

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure de la commission des affaires sociales

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales

Discussion générale

Mme Jacqueline Fraysse

Mme Bernadette Laclais

M. Gilles Lurton

M. Arnaud Richard

Mme Dominique Orliac

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales

Texte adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture

Vote sur l’ensemble

2. Projet de loi de finances rectificative pour 2016

Présentation

M. Christian Eckert, secrétaire d’État chargé du budget et des comptes publics

M. Dominique Lefebvre, suppléant Mme Valérie Rabault, rapporteure générale de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Discussion générale

Mme Dominique Orliac

M. Nicolas Sansu

M. Jean-Claude Buisine

Mme Claudine Schmid

M. Philippe Vigier

Mme Bernadette Laclais

M. Alain Rodet

M. Christian Eckert, secrétaire d’État

Suspension et reprise de la séance

Avant la première partie

Article liminaire

Première partie

Article 1er

M. Ibrahim Aboubacar

Après l’article 1er

Amendement no 370

Article 2

Amendements nos 593 rectifié , 125

Article 3

Amendements nos 197 , 107 , 282, 283 , 108 , 284 , 109 , 459 , 285

Après l’article 3

Amendements nos 75 rectifié , 76 rectifié , 594 rectifié

Articles 4 à 6

Article 7 et état A

Amendement no 605

Vote sur l’ensemble de la première partie du projet de loi de finances rectificative pour 2016

Seconde partie

Article 8 et état B

Amendements nos 601 , 602

Article 9 et état D

Articles 10 et 11

Article 12

Amendements nos 110 , 595

Article 13

Amendements nos 232 , 233 , 286

Après l’article 13

Amendement no 585

Article 14

Amendements nos 159 , 234 , 235 , 236 , 160 , 237

Article 15

Amendements nos 287 , 288

Article 16

Amendement no 289

Article 17

3. Ordre du jour de la prochaine séance

Présidence de M. David Habib

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à seize heures.)

1

Projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2017

Lecture définitive

M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion, en lecture définitive, du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2017 (n4273).

Présentation

M. le président. La parole est à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État chargé du budget, madame la présidente de la commission des affaires sociales, mesdames, messieurs, nous sommes aujourd’hui réunis pour la lecture définitive du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2017.

Nous arrivons au terme d’un long chemin parlementaire, et je tiens tout d’abord à saluer la qualité du travail mené ces dernières semaines.

Je remercie d’abord les rapporteurs, qui ont montré un engagement sans faille pour améliorer le texte et l’enrichir. Plus largement, je tiens à remercier chacune et chacun d’entre vous, sur tous les bancs, pour votre participation active, votre mobilisation, et à saluer la qualité des échanges qui ont été les nôtres.

Ce dernier PLFSS du quinquennat montre la cohérence de la politique conduite depuis 2012. C’est un projet de justice, qui fait progresser les droits de nos concitoyens tout en garantissant l’équilibre de nos comptes sociaux.

Ce texte montre d’abord la cohérence en matière de redressement des comptes. La fin des déficits sociaux restera l’une des marques de ce quinquennat. En quatre ans seulement, nous avons ramené le déficit du régime général de 17,5 milliards d’euros à 3,7 milliards d’euros en 2016, avec la perspective d’un quasi-équilibre pour 2017.

Ces résultats, nous les devons à des réformes de structure, c’est-à-dire des réorganisations de fond, engagées depuis maintenant plus de quatre ans, qui portent leurs fruits. Ce PLFSS poursuit et amplifie la dynamique.

Je pense évidemment aux mécanismes de régulation des prix du médicament. C’est un chantier majeur pour notre Sécurité sociale et notre système de santé. Parce que l’innovation est une promesse pour l’avenir, nous devons mettre en place des mécanismes de régulation pour garantir à chaque Français qu’il pourra continuer demain à avoir accès aux dernières innovations médicales dans un cadre financier soutenable pour les budgets de la Sécurité sociale.

Au-delà des médicaments, il y a également eu comme réformes de fond la mise en place des parcours ambulatoires, chirurgie mais aussi médecine ambulatoire, l’amélioration de la gestion des hôpitaux, un plus grand encadrement des prescriptions médicales, ce qu’on appelle la maîtrise médicalisée.

Le redressement nous permet d’aller de l’avant et de garantir de nouveaux droits aux Français.

Je pense notamment à l’extension de la retraite progressive, à la mise en place d’une agence nationale de recouvrement des pensions alimentaires, à l’allégement des cotisations sociales des indépendants et à l’amélioration de leur recouvrement.

Je pense aussi au renforcement de l’accompagnement des personnes âgées et des personnes handicapées avec 590 millions d’euros de mesures nouvelles, qui permettront la création de 4 000 places supplémentaires à destination des personnes âgées et de 4 100 places supplémentaires à destination des personnes handicapées.

Comment ne pas citer aussi le renforcement de la protection universelle maladie, la PUMA, qui permet de mieux protéger ceux qui changent souvent de situation professionnelle ? Cette année, il y a notamment des avancées pour les travailleurs saisonniers.

Avec ce PLFSS, nous renforçons donc la continuité de la prise en charge de tous les Français. C’est l’un des axes principaux de l’action menée depuis 2012.

Ce PLFSS permet aussi de franchir une étape importante dans l’amélioration de l’accessibilité aux soins dentaires, grâce à un plan ambitieux qui permettra de réduire le coût restant à la charge des patients, en particulier pour les prothèses.

Au-delà de son contenu, sur lequel je ne m’attarde pas davantage, je tiens à souligner le rôle de votre assemblée pour enrichir le texte tout au long de son examen.

Je pense d’abord à la vaccination contre la grippe. Chaque année, 3 à 6 millions de Français sont victimes de la grippe. La vaccination antigrippale est le moyen de prévention le plus efficace. Ce PLFSS prévoit ainsi la mise en place de deux expérimentations qui débuteront pour la prochaine campagne de vaccination, en septembre 2017, pour trois ans. Les pharmaciens qui le souhaiteront pourront administrer le vaccin contre la grippe saisonnière dans leur officine et les médecins qui le souhaiteront pourront avoir des vaccins dans leur cabinet. Les conditions d’application de ces mesures seront définies par décret, notamment les modalités de formation des pharmaciens et les conditions de sécurité exigées pour le stockage des vaccins chez les médecins.

Je veux ensuite parler du renforcement de la lutte contre les déserts médicaux, avec l’amplification de la dynamique d’incitation. Ce PLFSS finance l’aide à l’installation négociée dans le cadre de la convention médicale, en contrepartie d’une installation en zone sous-dotée et d’une maîtrise tarifaire. L’amendement que vous avez adopté permettra de constituer des équipes de médecins libéraux remplaçants auprès des agences régionales de santé, qui viendront soutenir les médecins libéraux installés dans les zones sous-denses. C’était une mesure attendue par les jeunes professionnels et je me réjouis qu’elle ait fait consensus sur les bancs de cette Assemblée.

Enfin, d’autres amendements de qualité ont été adoptés, je ne les citerai pas tous, qui ont permis notamment de renforcer les droits des travailleurs indépendants, notamment en matière d’invalidité, de simplifier les démarches des bénéficiaires de pensions de retraite résidant à l’étranger en permettant la dématérialisation de l’envoi des certificats d’existence, de réduire la complexité des démarches pour obtenir l’aide à la complémentaire santé et à la CMU, d’améliorer le dispositif de prise en charge des victimes du terrorisme ou encore de compléter le « Pass santé jeunes », qui figurait dans le texte initial, pour améliorer l’accès des enfants et des jeunes adultes aux consultations de psychologues.

Mesdames, messieurs, le texte que vous allez adopter constitue une étape supplémentaire dans le redressement continu des comptes sociaux engagé depuis 2012 et dans la modernisation de notre système de protection sociale. Il s’inscrit dans une dynamique lancée depuis quatre ans, celle d’une nouvelle donne sociale, qui protège mieux les Français et leur accorde de nouveaux droits, tout en faisant preuve de responsabilité sur le plan financier.

Ce bilan, c’est celui de ce gouvernement, celui de ce quinquennat et c’est celui que nous entendons défendre dans les prochains mois. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé du budget et des comptes publics.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État chargé du budget et des comptes publics. Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission des affaires sociales, madame la rapporteure, mesdames, messieurs, le Sénat a rejeté la semaine dernière le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2017. Celui-ci vous revient donc tel qu’il a été adopté lundi dernier en nouvelle lecture. Les équilibres sont inchangés par rapport à la semaine dernière. Les articles restant en discussion appellent quant à eux les mêmes votes.

Les mesures que vous allez adopter garantissent que les objectifs proposés par le projet de loi initial seront atteints.

Le premier objectif de ce texte est de ramener notre système de Sécurité sociale à un niveau très proche de l’équilibre financier. C’est un objectif que chacun ici devrait partager. Je sais que nombre d’entre vous, et pas seulement au sein de la majorité, reconnaissent la réalité de cette amélioration et se réjouissent d’un tel redressement. Ce texte permet en effet, grâce à une maîtrise renforcée des dépenses, de revenir à 400 millions d’euros de déficit pour le régime général l’année prochaine, et 3,8 milliards d’euros pour le Fonds de solidarité vieillesse, le FSV, soit le meilleur résultat depuis quinze ans.

J’ai eu l’occasion la semaine dernière d’expliquer en détail pourquoi la prévision de solde 2017 associée au texte initial était maintenue tout en tenant compte, d’une part, du léger ajustement de la trajectoire macroéconomique associé au projet de loi de finances rectificative, qui n’a pas d’impact significatif, et, d’autre part, de la mesure concernant la CSG et de la création en projet de loi de finances rectificative d’un acompte de contribution sociale de solidarité des sociétés – C3S. Dans les deux cas, l’impact de ces dispositions sera neutralisé pour la Sécurité sociale.

C’est ce redressement financier qui permet de financer nos priorités, d’améliorer les prestations et la qualité de service des organismes de Sécurité sociale et de renforcer la compétitivité de nos entreprises.

Vous avez approuvé en première, puis en nouvelle lecture, les principales mesures de ce texte : la réforme du régime social des indépendants, qu’on oublie trop souvent, une baisse des cotisations sociales en faveur des travailleurs indépendants, la création d’une taxe spécifique sur les fournisseurs agréés de tabac, la création du fonds de financement de l’innovation pharmaceutique.

Au cours de l’examen du texte, des modifications ont été apportées à l’initiative des parlementaires, principalement des députés.

Nous avons ainsi retenu les propositions du rapporteur à l’article 6 et augmenté le niveau d’exonération dont bénéficient les créateurs d’entreprise jusqu’à un revenu de 30 000 euros.

À l’article 10, plusieurs modifications ont conduit à fixer dans la loi un seuil pour les locations de biens, à accorder un abattement plus favorable pour les activités de location saisonnière et à donner la possibilité de déclarer une activité professionnelle complémentaire au régime général.

Nous avons également relevé de 3 % le plafond d’exonération et le plafond de perte du taux réduit de contribution sociale généralisée sur les revenus de remplacement. Cette mesure permettra une baisse de CSG pour 550 000 personnes, notamment des retraités, dès janvier prochain, comme j’ai pu vous le confirmer la semaine dernière. Le Gouvernement va assurer le financement de cette mesure afin qu’elle n’ait pas d’impact sur les recettes de la Sécurité sociale.

Enfin, l’article 16 a été modifié pour assurer une relation plus équitable entre les fournisseurs agréés et les fabricants et éviter une répercussion de la nouvelle taxe qui serait défavorable aux plus petits parmi ces derniers.

Ces mesures ont été adoptées sans que nous ayons à dévier de notre trajectoire financière. Ainsi, le texte adopté par la majorité parlementaire en première et en nouvelle lecture a conforté les prévisions financières du projet initial.

L’attitude de l’opposition au Sénat, peu compréhensible, conduit nos concitoyens à s’interroger légitimement sur ses intentions à l’égard du système de protection sociale. Le rapporteur général du Sénat reconnaît la réduction du déficit, mais le Sénat a refusé d’approuver les objectifs financiers pour 2016 et 2017. Pire, ses votes en première lecture ont dégradé le résultat financier de près de 500 millions d’euros. Mieux valait dans ces conditions qu’il n’approuvât pas les équilibres.

La Commission européenne a reconnu il y a peu que la France serait en dessous de 3 % de déficit public l’année prochaine. Pourtant, le Sénat et l’opposition à l’Assemblée, sans doute mieux informés que tous les instituts et organismes indépendants, continuent de contester la sincérité de nos prévisions.

Nous sommes sereins face à ces accusations à l’emporte-pièce puisque, l’année dernière, les mêmes prévisions faisaient l’objet des mêmes reproches et que, comme l’année précédente, elles avaient été respectées, et même dépassées de plus de 2 milliards d’euros.

En revanche, je ne peux que déplorer ces propos qui ne font pas honneur à ceux qui les tiennent. Nous allons nous engager bientôt dans un débat politique important, lors duquel nos concitoyens auront à choisir entre plusieurs visions, plusieurs programmes politiques. Dans ce débat, il est nécessaire de faire preuve de clarté.

Nos valeurs, nos choix sont clairs et nous l’avons démontré chaque jour de ce quinquennat. Ces choix ont eu des résultats. L’accès aux soins a été élargi, l’âge de départ à la retraite a été abaissé pour nombre de nos concitoyens et la prise en compte de la pénibilité a permis d’apporter de nouveaux droits aux assurés. Les droits des indépendants ont été rapprochés de ceux des salariés. Les charges des entreprises ont été réduites et, avec ce texte, la CSG sur les revenus de remplacement sera réduite.

Je regrette que face à ces résultats, l’opposition se réfugie derrière une mise en cause des chiffres, pourtant incontestables, et refuse lorsqu’elle en a la possibilité, notamment à la chambre haute du Parlement, d’adopter les mesures qui figurent dans le programme de son candidat. Face à la clarté, elle fait le choix d’entretenir la confusion. Cette attitude est indigne du débat qui s’engage et ne correspond pas à ce que nos concitoyens sont en droit d’attendre.

Derrière les prétextes, les deux visions de l’avenir qui s’opposent sont en réalité très clairement définies. Il ne faut pas mentir aux Français. Personne n’a le droit de faire peur aux électeurs en agitant le spectre de la déroute financière pour faire avaler des réformes inutilement punitives – comme le recul de l’âge de la retraite – alors qu’il s’agit seulement de faire financer par les assurés des baisses de charges aux employeurs. Il n’est pas non plus admissible de prétendre réduire le champ de l’assurance maladie pour la sauver alors qu’il s’agit plutôt de desserrer la contrainte sur les prix du médicament ou de développer le recours à des assurances privées. Ce serait une escroquerie !

Maintenant que la Sécurité sociale est revenue à l’équilibre ou quasiment, et que cet équilibre est durable, la seule question qui mérite de concentrer tout le débat, c’est de savoir ce que nous voulons faire, pour l’avenir, de notre système de protection sociale. Celle-ci doit se montrer plus adaptée aux besoins de son temps. Elle doit faire place à l’émergence de nouveaux besoins.

Ainsi, les mesures prises pour permettre l’accès aux traitements les plus innovants sont un engagement fort, gage de confiance dans l’excellence de notre système. La Sécurité sociale devra aussi prendre en compte les changements dans le monde du travail et les modes de vie.

Depuis 2012, la fluidité des parcours a été améliorée pour que les changements de situation professionnelle et personnelle ne se traduisent plus par une interruption des droits sociaux. C’est tout le sens de la protection universelle d’assurance maladie. En matière de retraite, avec le cumul emploi-retraite, la retraite progressive et la prise en compte de la pénibilité, plusieurs solutions sont désormais offertes pour que chacun puisse organiser au mieux sa carrière et son retrait de la vie active. Ces réformes sont des jalons importants pour l’évolution de notre système.

Mesdames et messieurs les députés, la gauche a prouvé depuis cinq ans qu’elle savait comme personne concilier responsabilité financière et progrès social, et prendre date pour l’avenir en ouvrant des perspectives nouvelles pour le système de sécurité sociale. Nous continuerons dans cette voie.

Pour conclure, je voudrais remercier toutes celles et tous ceux qui ont participé à nos travaux, l’ensemble des rapporteurs sur le texte, notamment le rapporteur pour les recettes et l’équilibre général, la présidente de la commission, l’ensemble des orateurs de la majorité comme de l’opposition. Je voudrais également remercier les présidents de séance, les services de l’Assemblée et les collaborateurs des groupes. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure de la commission des affaires sociales.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, madame la présidente de la commission, mes chers collègues, une semaine après avoir adopté en nouvelle lecture le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2017, nous voici à nouveau réunis pour examiner le même texte en lecture définitive. Le Sénat a en effet rejeté le texte que nous lui avons transmis, en adoptant une question préalable le 1er décembre dernier. Il a motivé l’adoption de cette question préalable essentiellement par un désaccord de fond sur la réalité du retour à l’équilibre de nos comptes sociaux.

Sans ouvrir de nouvelle polémique au moment où nous allons clore ce débat, je me dois de dire que les critiques du Sénat sont difficilement audibles compte tenu de la position qu’il a retenue en première lecture. Je vous rappelle en effet qu’il avait rejeté les articles d’équilibre, sans proposer de trajectoire alternative, mais en ne se privant pas d’adopter de nouvelles « niches sociales »…

Quelles sont, en résumé, les principales modifications que l’Assemblée a apportées en nouvelle lecture et qui ont abouti au texte dont nous sommes saisis aujourd’hui ?

S’agissant tout d’abord de la partie « Recettes et équilibre général », rapportée par notre collègue Gérard Bapt, j’insisterai sur quelques points, au-delà, bien évidemment, du rétablissement des articles d’équilibre supprimés par le Sénat.

Nous avons adopté une nouvelle version de l’article 10 qui apporte de premières réponses aux défis posés par le développement de l’économie numérique. Elle prévoit l’affiliation à la Sécurité sociale des personnes percevant, au-delà de certains seuils permettant de les considérer comme d’activité, des revenus issus de la location de biens meubles ou immeubles. Pour tenir compte des principales critiques adressées au dispositif d’origine, le Gouvernement et la majorité ont prévu différentes dispositions : tout d’abord, le maintien d’une distinction entre deux seuils d’affiliation, respectivement de 23 000 euros pour la location d’immeubles et environ 800 euros pour location de biens meubles ; ensuite, un abattement spécifique en faveur des locations de gîtes ruraux ; enfin, une option en faveur de l’affiliation au régime général, au lieu d’une affiliation systématique au régime social des indépendants.

Soucieuse du rétablissement de nos comptes publics et de la protection de la santé de nos concitoyens, l’Assemblée a également rétabli l’article 16, supprimé par le Sénat. Cet article met à la charge des fournisseurs de tabac une nouvelle contribution assise sur leur chiffre d’affaires. Elle doit produire une recette de 130 millions d’euros, affectée à la lutte contre le tabagisme. À l’initiative du Gouvernement, nous avons adopté une disposition spécifique qui doit en principe permettre une répartition équitable du produit de cette contribution sur les fournisseurs. Les effets réels de cette disposition devront être examinés de près une fois la loi promulguée.

À l’article 20, nous avons rétabli la réorganisation du Fonds de solidarité vieillesse souhaitée par le Gouvernement. Le Sénat contestait la suppression de la deuxième section du FSV et le transfert subséquent vers les régimes de base du financement du minimum contributif.

Nous avons par ailleurs supprimé plusieurs articles additionnels adoptés par le Sénat, qui, pour l’essentiel, créaient ou élargissaient des niches sociales.

S’agissant de la branche maladie, rapportée par notre collègue Michèle Delaunay, la nouvelle lecture a permis de clarifier plusieurs dispositions. Il en est ainsi de l’article 51. Sur la proposition du Gouvernement, nous avons adopté un amendement qui rétablit et clarifie le dispositif de plafonnement du prix librement fixé des médicaments bénéficiant d’une autorisation temporaire d’utilisation.

En toute logique, notre assemblée a également rétabli plusieurs articles dans la rédaction issue de ses travaux en première lecture. Je pense notamment à l’article 49, qui crée le Fonds pour le financement de l’innovation pharmaceutique, ou encore à l’article 18, qui crée les taux « Lv », applicable en ville, et « Lh », pour l’hôpital, et proroge d’une année la contribution « W ». Tous ces dispositifs de régulation sont en effet indispensables pour assurer la pérennité et la soutenabilité de la prise en charge des médicaments et pour garantir à tous les patients un accès précoce aux médicaments innovants.

L’Assemblée a également rétabli les articles 5, 54 et 55, respectivement relatifs aux objectifs de dépenses de l’assurance maladie pour 2016 et pour 2017 et à l’objectif national de dépenses d’assurance maladie, l’ONDAM, pour 2017.

Nous avons aussi rétabli l’article 52 bis, adopté par l’Assemblée nationale à l’initiative du Gouvernement et visant à créer une procédure de négociation relative à la prise en charge des forfaits techniques destinés à couvrir les frais d’investissement et d’exploitation des équipements d’imagerie médicale.

L’Assemblée a exprimé son désaccord avec le Sénat en supprimant six articles qu’il avait introduits, dont l’article 42 ter relatif à la suppression du tiers payant généralisé. De manière cohérente, notre majorité ne souhaite pas dévier de cette position depuis l’adoption de la loi de modernisation de notre système de santé.

Concernant plus spécifiquement le secteur médico-social, je tiens à souligner le rétablissement de l’article 46 bis relatif à la prévention des départs non choisis de Français en situation de handicap vers la Belgique, à l’initiative de notre collègue rapporteur Philip Cordery.

Dans une démarche d’ouverture, nous avons également adopté certaines des améliorations apportées par le Sénat. Je pense à certaines dispositions relatives à la branche vieillesse, rapportée par notre collègue Annie Le Houérou : nos deux chambres se sont notamment retrouvées sur les articles relatifs à la retraite anticipée des travailleurs handicapés, au régime de retraite des travailleurs indépendants ou à la simplification des démarches des retraités résidant à l’étranger.

Des désaccords persistent néanmoins au sujet de l’assurance vieillesse, qu’il s’agisse de la date d’entrée en vigueur de la liquidation unique des régimes alignés ou du transfert du service de l’allocation de solidarité aux personnes âgées à la Mutualité sociale agricole.

Concernant enfin la branche famille, dont je suis la rapporteure, l’Assemblée a supprimé l’article 28 bis, introduit par le Sénat, qui entendait revenir sur la réforme du congé parental adoptée en 2015. Cette réforme incite à une plus juste implication de chaque parent dans les premières années de leur enfant. Elle doit, à terme, contribuer à favoriser l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.

Au-delà de ce désaccord entre les deux assemblées, nous pouvons nous féliciter de l’adoption de l’article 27, qui a fait l’objet d’un large consensus à l’Assemblée nationale comme au Sénat. La mise en place de l’Agence de recouvrement des pensions alimentaires constitue une avancée majeure, qui s’inscrit d’ailleurs dans le prolongement des mesures déjà mises en œuvre par la majorité en faveur des parents isolés confrontés à des impayés de pension alimentaire.

Pour finir, nous avons rétabli les articles 29, 35, 37 et 56, qui fixent respectivement les objectifs de dépenses des branches famille, vieillesse, accidents du travail et maladies professionnelles, et du Fonds de solidarité vieillesse.

Nous arrivons donc au terme d’un débat qui, comme chaque année, fut riche et souvent constructif. Le projet de loi soumis à notre examen aujourd’hui signe le redressement de nos comptes sociaux, engagement fort du Président de la République, du Gouvernement et de la majorité. Je vous invite, bien évidemment, à l’adopter.

M. Gilles Lurton. Applaudissements nourris ! (Sourires.)

M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires sociales.

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteure – dont je salue les propos –, mes chers collègues, le projet de loi de financement de la sécurité sociale détermine les changements que nous voulons porter pour notre système de protection sociale. Je n’entrerai pas dans les détails : cela a été fait en première lecture et en nouvelle lecture par les ministres et par les rapporteurs.

Il est cependant un chiffre incontournable. Quand nous avons récupéré – je dis bien « récupéré » ! – la sécurité sociale, le déficit du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse s’élevait à 17,4 milliards d’euros. En 2015, ce déficit s’est établi à 10,8 milliards. En 2016, la loi de financement de la sécurité sociale initiale fixait un objectif de réduction du déficit à 9,7 milliards d’euros.

L’opposition, quant à elle, revient sans cesse sur le FSV et sur la dette sociale. Pourtant, il n’est pas nécessaire d’être prix Nobel d’économie pour comprendre que pour réduire cette dette, il faut à un moment donné réduire le déficit. Je ne vois pas comment on y arriverait autrement. C’est la réalité, mais je sais que vous prendrez la parole après moi, mes chers collègues, en axant encore votre propos sur ces sujets.

M. Gilles Lurton. Pas du tout !

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. Je le répète afin que nous n’y revenions pas : nous avons bien récupéré la sécurité sociale avec un déficit de 17,4 milliards d’euros, nous en sommes aujourd’hui à 9,7 milliards et les projections nous conduisent à 400 millions en 2017, même s’il faut être évidemment prudent.

Je ne reviendrai pas sur toutes les avancées obtenues en termes de prévention, d’aide aux familles et de politique du médicament – je pense aux mécanismes de régulation qui ont été mis en place pour que tout patient puisse bénéficier des innovations thérapeutiques même si leur coût est très élevé.

Nous arrivons au bout d’un cycle de cinq années de réformes structurelles qui ont su allier avancées sociales et rigueur budgétaire.

En revanche, certains propos entendus dans le cadre de la primaire qui s’est tenue dans l’autre camp politique m’inquiètent. J’ai écouté avec attention le candidat François Fillon, qui a dit vouloir « focaliser l’assurance publique universelle sur les affections graves et de longue durée » et laisser le reste à l’assurance privée. J’insiste sur ce « et ».

Je vais vous citer quelques exemples qui ont, à juste titre, de quoi inquiéter nos concitoyens – ce ne sont pas de fausses peurs. Font actuellement partie des affections de longue durée les diabètes de type 1 et de type 2. Ce sont des maladies chroniques qui, dès lors qu’elles sont stabilisées grâce aux traitements dont nous disposons, peuvent être considérées comme n’étant plus graves. Le diabète de type 1 – et/ou de type 2, car nous n’en sommes qu’aux prémices des discussions – passera-t-il dans les mains de l’assurance privée ?

Autre exemple, celui des affections psychiatriques de longue durée. Dans le cadre de mon métier, j’ai vu des gens stabilisés parce qu’ils prenaient des psychotropes – stabilisés parce que suivis. Dès lors que les personnes prendront des psychotropes, une maladie psychiatrique chronique sera-t-elle toujours considérée comme une affection grave ? Non ! C’est pourquoi ce « et » m’inquiète.

Le risque peut être décliné pour les maladies chroniques actives du foie et les cirrhoses. Nous disposons aujourd’hui de médicaments innovants, Mme la ministre ayant instauré des mécanismes de régulation afin que tout un chacun puisse y accéder. Lorsque l’on diagnostiquera une hépatite, notamment une hépatite C, considérera-t-on, au motif qu’il existe des médicaments innovants susceptibles de soigner les personnes atteintes de cette maladie, qu’elle n’est plus une affection de longue durée et qu’elle peut, de ce fait, sortir du cadre de l’assurance publique universelle pour être mise entre les mains des assurances privées ? Les hépatites resteront-elles dans le champ de la sécurité sociale ?

J’ai envie de vous dire que je connais presque la réponse, parce que votre majorité avait déjà ouvert une porte, en juin 2011, en excluant des affections de longue durée l’hypertension artérielle sévère, ce qui avait inquiété les cardiologues.

Au-delà de ces exemples, on sait très bien qu’une personne atteinte d’une pathologie chronique, qui représente pour elle un handicap, se fait suivre beaucoup plus sérieusement si sa maladie est considérée comme une affection de longue durée. Cela donne un caractère sérieux à sa maladie et lui permet de suivre un parcours quasi-automatique. Ce n’est pas le cas pour les pathologies qui sont entre les mains des assurances complémentaires.

Si d’aventure M. Fillon devait être Président de la République, sachant qu’une graine a été semée en juin 2011, je crains fort que la liste des affections de longue durée dont bénéficient actuellement nos concitoyens ne devienne pour l’assurance maladie une arme de déremboursement, ce qui permettrait de remettre les comptes à l’équilibre – mais à quel prix, en termes de santé publique ?

Le débat ne fait que commencer, mais je vous invite, mes chers collègues, à vous poser ces questions.

Je voterai naturellement en faveur de ce PLFSS. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Nous voilà rassurés !

Discussion générale

M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. À l’issue de cette dernière lecture du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2017, notre groupe demeure extrêmement défavorable à son contenu, à la philosophie qui le sous-tend et à la manière mensongère dont vous le présentez.

Vous persistez, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, à affirmer devant nos concitoyens qu’il n’y a plus de déficit de la sécurité sociale. Le Président de la République lui-même a osé dire jeudi dernier que « la sécurité sociale est à l’équilibre », ce qui est un mensonge puisque le déficit global, certes réduit, persiste : il s’élève à 4,2 milliards d’euros pour 2017. Des chiffres incontestables.

Nous ne pouvons donc pas soutenir cette présentation non sincère des comptes de la sécurité sociale, qui vise à tromper nos concitoyens et ne risque pas de réhabiliter à leurs yeux le Gouvernement et le Président, bien au contraire.

Nous ne pouvons pas davantage adhérer aux choix politiques qui consistent à faire supporter le poids d’économies toujours plus importantes à nos concitoyens, notamment les plus modestes, sans chercher de nouvelles recettes, sans se soucier prioritairement des besoins en matière de prévention et de santé, et alors que vous continuez à distribuer des milliards d’argent public aux milieux de la finance en élargissant, par exemple, les exonérations de cotisations sociales patronales pour plus de 44 milliards d’euros en 2016.

Pour ce faire, vous avez dû, évidemment, réduire les dépenses sociales dans tous les domaines – prestations familiales non revalorisées en 2014 et 2015, modulation des allocations familiales, sacrifice des salariés qui, avec votre réforme de 2014, doivent travailler plus longtemps pour bénéficier d’une retraite à taux plein, sous-déclaration des accidents et maladies professionnelles qui sont, de ce fait, supportés par la branche maladie.

Cette branche maladie qui doit réaliser 4 milliards d’euros d’économies en 2017, dont 1,5 milliard de restrictions supplémentaires pour les hôpitaux publics dont vous connaissez pourtant la situation très préoccupante.

Mais, décidément, vous ne reculez devant rien – et je pèse mes mots. J’ai donc décidé de prendre quelques minutes pour vous parler du scandale de l’hôpital de Nanterre.

Cette entité médico-sociale unique dans le pays qu’est le Centre d’accueil et de soins hospitaliers, le CASH, reçoit dans ses structures sociales plus d’un millier de personnes – personnes désargentées, réfugiés – dont 250 sans-abris qui sont amenés chaque soir, toute l’année, par les cars de la Préfecture de police de Paris de la Porte de la Villette, et dont vous imaginez sans peine, mes chers collègues, l’état sanitaire.

Eh bien, l’Agence régionale de santé a décidé autoritairement, malgré toutes nos alertes, y compris auprès de votre ministère, de fermer la totalité des activités chirurgicales, et prochainement les services de cardiologie et de diabétologie, en attendant la suite – sans doute la fermeture totale de cet hôpital. Où seront traitées ces personnes démunies et en détresse ? Là n’est manifestement pas la préoccupation des femmes et des hommes « de gauche » qui nous gouvernent !

Ce qui compte, c’est d’abord d’économiser de l’argent, peu importe la souffrance humaine. Elle n’a pas de valeur auprès de ce petit monde qui ne manque de rien, qui coupe et qui tranche !

Vous me pardonnerez d’employer ce ton qui n’est pas dans mes habitudes, mais il y a des scandales qu’il faut dénoncer et mettre sur la place publique.

Je ferme cette parenthèse et j’en reviens au texte qui nous occupe.

Les quelques mesures positives que mon groupe a soutenues, telles que la prise en charge de la souffrance psychique chez les jeunes, celle des victimes du terrorisme, le recouvrement des pensions alimentaires non payées, l’amélioration du pouvoir d’achat de quelque 500 000 retraités modestes, l’ajout du Sénat permettant aux travailleurs de faire valoir leurs droits à une retraite anticipée par la prise en compte a posteriori de leur handicap, sont loin de compenser, hélas, la gravité des autres dispositions de ce texte.

Pour conclure, veiller à l’équilibre des comptes sociaux est une préoccupation légitime que nous partageons, mais cela ne peut se faire en orchestrant le recul des protections et prestations sociales pour l’ensemble de la population, dans un pays pourtant capable de mobiliser des milliards d’euros du jour au lendemain, comme l’a fait la droite lors de la crise de 2008 pour renflouer les banques, et comme vous l’avez fait vous-mêmes avec votre « pacte de responsabilité » dédié aux grandes entreprises, qui ne cessent pourtant de licencier… Cela représente beaucoup d’argent, qui pourrait être mobilisé pour la santé.

Ces décisions sont indignes d’un gouvernement se réclamant de la gauche. C’est pourquoi nous ne pouvons que voter contre ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2017. (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

M. le président. La parole est à Mme Bernadette Laclais.

Mme Bernadette Laclais. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, madame la présidente de la commission, madame la rapporteure, chers collègues, je ne vous surprendrai pas en vous disant que le groupe socialiste, écologiste et républicain proposera d’adopter ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, le dernier de ce mandat, qui traduit la solidité de nos engagements et de notre action.

De 2012 à 2017, la santé financière de nos régimes de protection sociale se sera très nettement améliorée, au point d’être revenue quasiment à l’équilibre. En 2012, ce n’était qu’un vœu. Année après année, nous avons su redonner de la solidité à notre sécurité sociale, notamment en luttant contre la fraude aux cotisations sociales, qui, infiniment plus que la fraude issue des usagers, pénalise lourdement et durablement la pérennité de notre protection sociale.

Fidèles à nos engagements, nous avons fait ce travail de redressement en maintenant et en améliorant la qualité du service, en accroissant son universalité, en diminuant le reste à charge des usagers, avec une vision sociale et financière, les deux n’étant pas incompatibles.

Ainsi, au travers de son article 39, ce PLFSS ouvre enfin une porte aux saisonniers et aux pluriactifs de la montagne et d’ailleurs, et instaure la fameuse « caisse pivot » qui évite à chaque contrat de migrer d’un régime social à l’autre, dépendant un mois de la MSA, un autre du régime général, en passant même parfois par la case du RSI.

Nous offrons, toujours en accord avec nos promesses, une grande simplification aux travailleurs saisonniers qui enchaînent contrats et statuts tout au long de l’année : leur dossier peut désormais être traité par la même caisse, sans en changer le temps d’un contrat court.

C’est un pas important pour les travailleurs des zones touristiques et une mesure économiquement efficace pour l’emploi dans ces régions.

Dans le même esprit, l’extension de la retraite progressive aux salariés dépendant de plusieurs employeurs est une belle mesure d’équité sociale.

Efficacité économique et sociale aussi à l’article 10 de ce PLFSS, qui traite de la problématique des stations d’altitude et du bord de mer et de la mise en location de l’immense patrimoine de résidences secondaires édifié ces dernières décennies.

L’économie numérique ou « collaborative » est devenue depuis quelques années une nouvelle méthode de mise en relation entre clients et hébergeurs. Les plateformes concernées se développant de manière exponentielle, nous devions en encadrer le fonctionnement, pour que, là aussi, une certaine équité sociale et fiscale règne entre des acteurs économiques qui proposent des services équivalents, mais avec des statuts et des charges très différents.

Nos débats ont permis d’avancer sans mettre à mal les formes anciennes de location. Je me réjouis que nous ayons su définir ensemble de nouvelles règles qui, sans entraver le développement de nouvelles activités économiques, permettent de les intégrer dans le financement de notre protection sociale. Nous avons aussi permis à ceux que l’on qualifie de « professionnels » de bénéficier de nouveaux droits, afin que les cotisations ne soient pas versées à fonds perdus.

La situation des zones de montagne et des zones rurales se lit aussi en filigrane de l’article 43 bis, relatif aux médecins remplaçants dans les zones en sous-densité médicale. Sans coercition, nous contribuons, là encore, à maintenir la présence médicale dans nos zones rurales. C’est un signe d’efficacité, de solidarité et de pragmatisme.

Solidarité avec nos anciens, puisque l’amélioration des comptes permet de diminuer, voire de supprimer les cotisations de CSG sur les plus faibles pensions. C’est un moyen de redonner un peu de pouvoir d’achat à des retraités modestes.

Solidarité aussi aux articles 18 et 49, avec l’accès aux médicaments et la création du Fonds de financement de l’innovation pharmaceutique.

Solidarité enfin à l’article 38 bis, avec la simplification de l’accès à la CMU-C – couverture maladie universelle complémentaire – et à l’ACS – l’aide au paiement d’une complémentaire santé –, ou encore à l’article 40 qui traite des souffrances psychiques chez l’enfant.

Pour toutes ces raisons, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, nous voterons ce PLFSS.

Je tiens à vous remercier l’un et l’autre pour l’écoute dont vous avez fait preuve tout au long de ce débat, qui a permis de faire progresser les idées que notre groupe a bien voulu émettre pour promouvoir la solidarité, l’équité et l’équilibre. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

M. le président. La parole est à M. Gilles Lurton.

M. Gilles Lurton. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, madame la présidente de la commission, madame la rapporteure, mes chers collègues, rejeté sans débat en deuxième lecture : voilà le sort que vient de réserver le Sénat à votre projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2017. C’est dire le peu de foi de la Haute assemblée quant à la sincérité et au réalisme de votre projet.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Oh là là !

M. Gilles Lurton. Alors, puisque nous arrivons à la conclusion de ce parcours parlementaire et que je n’espère pas une seconde retenir votre attention sur le fond du texte, permettez-moi d’insister sur le bilan de ce quinquennat désastreux.

Tout d’abord, contrairement à l’idée que vous tentez de répandre dans le pays, il n’existe pas ici de partisans ou d’opposants à notre système de Sécurité sociale. Nous la défendons tous.

Prévoir une protection pour tous ceux qui se trouvent, à un moment ou à un autre de leur vie, menacés par la maladie, le handicap, la pauvreté, l’exclusion ou l’instabilité de notre société est, selon nous, un devoir de notre communauté.

Depuis plus de soixante-dix ans, notre Sécurité sociale a permis aux Françaises et aux Français de bénéficier d’un système très protecteur auquel nous tenons, auquel je tiens particulièrement. Mais, d’un système de protection contre les aléas de la vie, nous sommes passés, depuis cinq ans, à un système d’assistanat et de soi-disant redistribution des richesses.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. On ne peut pas laisser dire cela !

M. Gilles Lurton. Certes, vous êtes parvenus à l’équilibre de la branche famille. Mais à quel prix ? Au prix de la réduction des droits.

Mme Bernadette Laclais. C’est cela, l’assistanat ?

M. Gilles Lurton. Au prix de la fin de l’universalité de la politique familiale.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Il n’y a pas d’universalité, puisqu’elle ne concerne pas toutes les familles !

M. Gilles Lurton. En bref, vous avez fait de la politique familiale une véritable politique sociale. Des milliards d’euros ont été économisés sur le dos des familles au cours du quinquennat.

Vos réformes de l’assurance maladie ont aussi été dictées par votre idéologie. Toutes vos décisions ont résulté d’une mauvaise appréhension de la nature du problème posé par le maintien de la santé et de la vie.

M. Arnaud Richard. Oui !

M. Gilles Lurton. Parce qu’il n’existe pas de critère objectif pour estimer ce que coûtera le traitement d’une situation individuelle, parce que plus la médecine progresse, plus l’espérance de vie augmente et plus notre système de soins tend à orienter ses efforts vers l’allégement de la souffrance et le prolongement de l’existence, pour ces raisons, votre objectif principal aurait dû être la prévention en matière de santé. Il n’en a rien été !

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. Lisez le rapport de l’INSEE !

M. Gilles Lurton. Tous les équilibres auxquels vous êtes parvenus à la fin de ce quinquennat ont été atteints au prix d’une hausse des prélèvements sur les cotisants et d’une baisse des prestations aux assurés. Durant ces cinq ans, ceux qui cotisent ont trinqué sans jamais percevoir la contrepartie des efforts qui leur étaient demandés.

Le problème est que vos attaques ont systématiquement porté sur les classes moyennes, qui se battent au quotidien pour pouvoir, par le fruit de leur travail, faire face aux charges qui sont les leurs. C’est cela, l’insupportable.

Comme vous ne nous écoutez pas, comme vous n’entendez pas la colère qui monte, et dont les partis les plus extrêmes font leur miel, écoutez au moins la Cour des comptes : « L’érosion masquée des niveaux de remboursements des dépenses de santé par l’Assurance maladie obligatoire et l’accroissement des écarts de traitement qu’ils entraînent entre catégories d’assurés compromettent la capacité de la Sécurité sociale à assurer une protection suffisante et équitable contre le risque de la maladie. » Les Français, eux, ne s’y trompent pas. Ils se rendent bien compte du résultat de votre politique.

Comme d’habitude, vous allez me répondre que le reste à charge a diminué, mais nous savons tous que les augmentations constantes de prises en charge à 100 % en affection de longue durée font mécaniquement remonter la moyenne de la prise en charge.

Je rappellerai enfin quelques points du PLFSS qui auraient mérité plus de considération.

Je pense à l’article 43 octies supprimé par le Sénat et que vous avez rétabli en deuxième lecture. Il proposait un alignement des conditions de délivrance de lentilles de contact et des verres correcteurs. Nous vous avons alertés sur les complications médicales qu’une délivrance non contrôlée des lentilles peut provoquer chez des patients. Nos observations ont été balayées d’un revers de la main. Je reste pourtant convaincu de leur bien-fondé pour la santé.

Je pense aussi à la prévention des conflits d’intérêts entre la position de fabricants d’équipements, dispositifs médicaux ou médicaments, et celle de la gestion d’activités sanitaires et médico-sociales.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Ce qu’il ne faut pas entendre !

M. Gilles Lurton. J’ai tenté de la proposer par voie d’amendement, mais vous nous avez répondu qu’un arrêté allait être publié pour instaurer un contrôle de l’État. J’estime que c’est insuffisant et que nous risquons de ne jamais le voir sortir. Inscrire la disposition dans la loi aurait eu un impact immédiat. C’est pourquoi M. Bapt n’aurait jamais dû retirer son amendement identique au mien.

Et que dire de votre volonté de prévoir une clause de désignation dans les contrats de prévoyance, qui prive les entreprises de leur liberté de choisir la mutuelle de leur choix ?

M. Arnaud Richard. En effet !

M. Gilles Lurton. Pour ce dernier projet de loi de financement de la Sécurité sociale et à l’approche des élections, vous tentez par ce biais d’acheter la complaisance syndicale. Ce ne sera cependant pas suffisant pour faire oublier ce quinquennat désastreux. Vous caricaturez le programme développé par vos concurrents, notamment celui de François Fillon.

Oui, madame Lemorton, il y avait un déficit important de la Sécurité sociale en 2012, mais, malgré une crise économique sans précédent depuis 1929, la majorité d’alors a tenu bon pour protéger nos concitoyens et notre pays, notamment notre système de protection sociale, qui a été maintenu.

Les Françaises et les Français ne sont pas dupes. Ils savent que leur protection sociale a un coût.

M. le président. Il faut conclure.

M. Gilles Lurton. Ils comprennent parfaitement la nécessité de redresser la situation que vous allez nous laisser, tout en maintenant la protection que nous leur devons.

Nous réaffirmons notre attachement au caractère universel, obligatoire et solidaire de l’assurance maladie. « Indépendamment de son âge et de son état de santé, chaque assuré social bénéficie, contre le risque et les conséquences de la maladie, d’une protection qu’il finance selon ses ressources. » C’est ce que proclame l’article 1er de la loi du 13 août 2004 relative à l’assurance maladie, et c’est exactement ce que nous voulons faire. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.)

M. le président. La parole est à M. Arnaud Richard.

M. Arnaud Richard. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, madame la présidente de la commission et chère Catherine, madame la rapporteure, chers collègues, malgré les annonces répétées du Gouvernement et de la majorité, c’est bien un budget en trompe-l’œil que l’Assemblée nationale s’apprête à voter.

Non, la Sécurité sociale n’est pas sauvée. Non, chers collègues de la majorité, le sauvetage du système de retraite n’est pas votre victoire. L’équilibre de la branche est le fruit des réformes courageuses conduites par les gouvernements qui ont précédé celui que vous soutenez. Et peut-on se satisfaire de l’équilibre du seul régime général, alors que les régimes spéciaux coûtent toujours plus cher à l’État et aux contribuables ?

Non, le solde positif de la branche famille n’est pas dû aux mesures structurelles. Il a été atteint au prix d’un effort sans précédent consenti par les familles et surtout, comme l’a très dit M. Lurton, de la fin de l’universalité de la politique familiale.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Il n’y a pas d’universalité, puisque cette politique ne concerne pas toutes les familles !

M. Arnaud Richard. Non, chers collègues, l’avenir de l’assurance maladie n’est pas garanti. Le déficit est transféré vers les hôpitaux et les autres branches ou dissimulé, cette année, par l’installation d’un fonds pour l’innovation.

Alors, quel bilan retenir ? Un reste à charge qui alourdit toujours plus le budget des ménages…

M. Michel Issindou. C’est faux !

M. Arnaud Richard. …et l’extension de la désertification médicale sur tout le territoire. Là-dessus, mon cher collègue, vous ne pourrez pas me contredire !

Non, madame la ministre, vous ne pouvez nier que l’accès aux soins se dégrade pour nos concitoyens. Entre 2012 et 2016, l’accès à moins de trente minutes du domicile aux médecins généralistes s’est réduit pour plus du quart de la population.

Pire, l’accès aux médecins spécialistes a diminué pour 38 % des Français en ce qui concerne les ophtalmologistes, pour 40 % en ce qui concerne les pédiatres et pour 59 % en ce qui concerne les gynécologues.

Dans ce projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2017, les mesures bienvenues – il y en a – ne permettront malheureusement pas de faire oublier votre triste bilan. Si l’on peut saluer la création de l’Agence de recouvrement des impayés de pensions alimentaires ou l’expérimentation de la vaccination par les pharmaciens, des désaccords de fond subsistent.

Permettez-moi à ce propos de revenir quelques instants sur l’article 10, qui a concentré de longues heures de débats.

Nous reconnaissons le chemin parcouru depuis le texte initial, mais nos remarques émises alors gardent toute leur cohérence. En effet, si nous souscrivons à la clarification du droit applicable aux revenus tirés des activités de location, nous estimons toujours que ces évolutions – vous en conviendrez – auraient dû faire l’objet d’une étude d’impact.

Par ailleurs, cet article a fait ressurgir des difficultés réelles de notre système de protection sociale, sa complexité, notamment pour celles et ceux, de plus en plus nombreux, qui exercent de multiples activités, et son coût. La seule question qui vaille, chers collègues, concerne l’intégration de ces formes d’activité ou d’emploi au financement de notre modèle de protection sociale.

Nous regrettons que plusieurs dispositions adoptées par le Sénat n’aient pas reçu un accueil favorable dans notre hémicycle, qu’elles concernent les médecins retraités en zones sous-denses ou l’extension de l’avantage maternité pour les femmes médecins. En revanche, nous nous faisions moins d’illusions sur la suppression de la généralisation du tiers payant, disposition qui, je le rappelle, suscite toujours l’opposition des médecins sur le terrain.

En définitive, la situation en 2017 ne sera malheureusement pas meilleure qu’en 2012. Il y a pire. Cet été, les suicides de plusieurs soignants ont mis en lumière la souffrance grandissante de cette profession. Il y a une semaine à peine, l’association Soins aux professionnels de santé a mis en place un numéro vert et une structure d’hospitalisation pour les soignants en situation de détresse. Actuellement, la moitié des médecins estiment avoir déjà souffert de burn out, et leur taux de suicide est deux fois et demi supérieur à la moyenne nationale.

Enfin, j’espère que vous entendrez les propos si justes de notre collègue sur la situation de l’hôpital de Nanterre, que j’ai visité avec elle.

Pour toutes ces raisons, vous comprendrez que les députés du groupe UDI ne voteront pas ce qu’ils espèrent être le dernier budget de votre majorité. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.)

M. Michel Issindou. Comme chaque année ! C’est toujours la même chose.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Quel dommage ! Ils avaient une occasion de revenir à la raison.

M. le président. La parole est à Mme Dominique Orliac.

Mme Dominique Orliac. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, madame la présidente de la commission et chère Catherine, madame la rapporteure, chers collègues, le Sénat ayant rejeté ce projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2017 en nouvelle lecture, il nous revient de nous prononcer en lecture définitive sur un texte identique à celui que nous avons voté la semaine passée.

Ce PLFSS devant ramener le déficit cumulé du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse à 4,2 milliards d’euros en 2017 avec désormais trois branches sur quatre à l’équilibre, le régime général de la Sécurité sociale devrait bientôt présenter un déficit de seulement 400 millions d’euros.

Avec une progression de l’ONDAM fixée à 2,1 % pour l’an prochain, près de 4 milliards d’euros d’économies sont attendus sur le secteur de la santé et concernent principalement le médicament, les dépenses de ville et les dépenses hospitalières.

Nous l’avons dit à maintes reprises, madame la ministre, nous déplorons singulièrement que, pour la cinquième année consécutive, d’importantes économies portent sur l’industrie pharmaceutique, mettant ainsi à mal la croissance, l’emploi et créant un risque de perte de brevets.

En outre, cette année encore, les hôpitaux seront fortement mis sous pression : plus encore qu’en 2016, des efforts leur seront demandés en 2017, avec notamment une réduction de dépenses de 845 millions d’euros, engendrés par le développement des groupements hospitaliers de territoire. C’est énorme !

Un effort supplémentaire demandé sur la prescription de médicaments de la liste en sus, à hauteur de 260 millions d’euros, complétera cet arsenal de mesures financières visant à faire des économies. En outre, le taux très bas de l’ONDAM aura des conséquences sur les territoires, particulièrement sur nos territoires ruraux.

Si le texte contient désormais des dispositions visant à encadrer la façon dont la contribution sera répercutée par les fournisseurs de tabac, nous regrettons les fortes taxes prélevées sur cette industrie, qui rapporte des milliards d’euros à l’État. J’ajoute que ces nouvelles taxes contredisent vos déclarations et la promesse faite lors de l’adoption du paquet neutre qu’aucune nouvelle taxe ne ciblerait cette industrie.

Nous regrettons amèrement la suppression de l’article 43 octies.

M. Gilles Lurton. Oui !

Mme Dominique Orliac. Celui-ci prévoyait un encadrement plus strict de la délivrance de lentilles de contact, actuellement moindre que pour les verres correcteurs, alors qu’elles présentent plus de risques de complications traumatiques et infectieuses. Nous ne comprenons pas votre obstination à méconnaître les risques sanitaires que cette mesure peut engendrer. Vous en porterez la responsabilité. Il est regrettable que le travail minutieux effectué par Dominique Voynet pour l’Inspection générale des affaires sociales, l’IGAS, relatif à l’élaboration d’une filière visuelle, n’ait pas été pris en compte.

Nous déplorons également que les femmes médecins en secteur 2 soient exclues de la protection maternité, alors que le Sénat avait ouvert ces nouveaux droits sociaux, estimant qu’ils ne pouvaient être réservés qu’à certains professionnels en fonction de leur secteur conventionnel d’exercice ou de leur pratique tarifaire.

Enfin, notre groupe regrette également la réintroduction de l’article 52 bis autorisant la CNAM, à titre dérogatoire, à modifier en 2017, de façon unilatérale, le tarif des forfaits techniques complémentaires en radiologie, alors que ces mesures appartiennent au registre conventionnel.

Toutefois, madame la ministre, votre PLFSS contient des avancées que nous tenons à saluer. Nous sommes satisfaits de l’introduction par le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste et par le groupe socialiste, écologiste et républicain d’une mesure qui permettra à 290 000 nouveaux ménages retraités de bénéficier d’un taux zéro de CSG, pour un gain moyen mensuel de 46 euros, et à 260 000 ménages de bénéficier d’un taux réduit de CSG, pour un gain moyen mensuel de 38 euros. Cette mesure s’inscrit dans la philosophie de l’action menée, de manière constante, par les radicaux de gauche en faveur des retraités bénéficiant d’une petite pension. Notre groupe aura particulièrement défendu les retraités depuis le début de cette législature, notamment en réussissant à exempter du report de la revalorisation des pensions les retraités vivant sous le seuil de pauvreté – cela a été décidé lors de la réforme des retraites de 2013 – ou encore, en faisant bénéficier de cette exemption, en plus des bénéficiaires de l’allocation de solidarité aux personnes âgées, les retraités dont les pensions sont exonérées de la CSG.

En outre, nous soutenons également les mesures concernant la prévention de l’aggravation du mal-être et la survenue de troubles mentaux chez les jeunes, la création d’une agence de recouvrement des impayés de pensions alimentaires et le développement généralisé à tout le territoire de la télémédecine, ce qui permettra de pallier les déficiences de l’offre de soins et de favoriser l’accès aux soins, particulièrement dans nos territoires ruraux. Nous saluons également la mise en place d’un contrat de praticien territorial médical de remplacement, qui renforcera, de fait, la lutte contre les déserts médicaux, tout comme l’introduction du dispositif permettant la prise en charge des soins dentaires.

Enfin, nous sommes satisfaits d’avoir rétabli la possibilité, désormais offerte aux pharmaciens, de pouvoir administrer eux-mêmes le vaccin contre la grippe au plus grand nombre de personnes…

M. Arnaud Richard. Très bien !

Mme Dominique Orliac. …grâce à un amendement déposé par notre groupe en nouvelle lecture, qui met fin à une vision trop restrictive de l’article 39 quinquies, voté au Sénat.

Pour toutes ces raisons, le groupe des radicaux de gauche et apparentés votera, dans sa majorité, ce PLFSS en lecture définitive. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires sociales.

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. Monsieur Lurton, je ne peux pas vous laisser dire que l’on a mené une politique d’assistés. Croyez-vous vraiment que le fait d’augmenter de 10 % le RSA en cinq ans conduise à créer des assistés ?

M. Arnaud Richard. Il n’y a pas que le RSA !

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. Si vous pensez vraiment que les allocataires du RSA sont dans une situation aussi confortable, je vous invite à vivre quelques semaines avec ce revenu : vous verrez si on a la sensation d’être un assisté !

Par ailleurs, soit vous n’avez pas bien compris le principe de la prime d’activité, soit vous faites exprès de ne pas comprendre.

M. Gilles Lurton. Peut-être les deux ! (Sourires.)

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. Je vais envisager la première hypothèse ! La prime d’activité a précisément pour objet d’éviter l’assistanat. Elle est versée à celui ou celle qui va travailler et qui perçoit un revenu inférieur à 1,3 SMIC – il ne s’agit donc pas de salaires mirobolants. On accorde pour ainsi dire une plus-value, si petite soit-elle, pour encourager les gens à reprendre une activité.

Vous dites également que l’on n’a rien fait en matière de prévention. Tout de même, monsieur Lurton ! Il me semble que la politique menée contre le tabac a été on ne peut plus courageuse, quand on sait ce que représente le lobby du tabac aux niveaux européen et français.

M. Gilles Lurton. Vous le leur expliquerez !

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. Mme la ministre et les députés de la majorité ont eu un grand mérite. Dans le même sens, l’action menée dans le domaine de l’agroalimentaire, et plus précisément du marquage nutritionnel, constitue une vraie bataille : cela s’appelle de la prévention – contre l’obésité, les triglycérides, l’hypercholestérolémie…

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Pas d’attaque personnelle, je vous prie, madame la présidente ! (Sourires.)

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. Je n’attaque personne, monsieur le secrétaire d’État ! (Sourires.)

Ce sont des problèmes de santé publique rencontrés fréquemment ; Mme la ministre a d’ailleurs mis en place l’année dernière, dans le cadre du PLFSS pour 2016, la prise en charge, par un couple constitué d’un psychologue et d’un diététicien, des enfants de 3 à 8 ans qui présentent déjà des troubles du comportement alimentaire. Qu’a-t-on fait pour le cancer du sein ? On a avancé. Pour l’accès à l’IVG ? On a avancé. Le remboursement à 100 % de la contraception pour les mineures de 15 à 17 ans inclus constitue aussi, indéniablement, une avancée. Sans prétendre me mettre à la place des jeunes filles, il me semble que l’on ne doit pas être tout à fait heureuse de tomber enceinte à 15 ans ; cela ne me paraît pas être une situation très confortable. Venir dire que l’on n’a rien fait me semble donc déplacé.

Je pourrais également citer les salles de consommation et le traitement de l’addiction chez les jeunes. Nous avons enfin institutionnalisé les consultations jeunes consommateurs pour le cannabis. C’est important. Allez les rencontrer, allez rencontrer la Fédération addiction, et vous verrez ce qu’ils diront sur la politique qui a été menée depuis cinq ans.

J’en oublie, bien sûr – beaucoup de choses ont été faites. Mais en tout cas, une politique de prévention a été menée. Il n’y a pas eu de gabegie, beaucoup moins, par exemple, que s’agissant de la prévention de la grippe H1N1, qui avait entraîné une dépense d’un milliard d’euros en vaccins.

M. Arnaud Richard. Elle est en forme !

M. le président. La discussion générale est close.

Texte adopté par l’Assemblée nationale

en nouvelle lecture

M. le président. J’appelle maintenant, conformément à l’article 114, alinéa 3, du règlement, le projet de loi dans le texte voté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture.

Vote sur l’ensemble

M. le président. Je mets aux voix l’ensemble du projet de loi, tel qu’il résulte du texte voté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture.

(Le projet de loi est adopté.)

(Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

2

Projet de loi de finances rectificative pour 2016

M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2016 (nos 4235, 4272).

Présentation

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé du budget et des comptes publics.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État chargé du budget et des comptes publics. Monsieur le président, monsieur le vice-président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, mesdames, messieurs les députés, si le collectif de fin d’année est un exercice traditionnel, il n’est cependant pas un exercice convenu, cette année moins que jamais. Certes, ce texte vient procéder à l’ensemble des ajustements qui permettront de tenir nos objectifs budgétaires. Mais il vient surtout conforter le redressement de nos comptes publics, qui a été l’un des fers de lance de la politique conduite par ce gouvernement depuis 2012.

Ce projet de loi de finances rectificative vient prolonger le projet de loi de finances 2017 à travers un volet fiscal très substantiel, sur lequel je reviendrai. Il tient également compte des éléments nouveaux dont nous avons pu avoir connaissance depuis le dépôt du PLF 2017 et qui ont conduit le Gouvernement à ajuster légèrement sa prévision de croissance pour 2016 à 1,4 %. Cette révision modifie légèrement la décomposition des recettes fiscales, mais elle ne modifie en rien – permettez-moi d’insister sur ce point – la cible de déficit 2016, qui est maintenue à 3,3 %. Et les informations comptables dont nous disposons à ce stade de l’année, tant en matière de recettes que de dépenses, confirment que cet objectif sera tenu. Sur ce point, vous avez tous pris connaissance de l’avis du Haut conseil des finances publiques – une autorité indépendante, il est important de le souligner –, qui salue le réalisme et la crédibilité des prévisions du Gouvernement sur ce point. Je vous rappelle qu’il y a un peu plus d’un an, ce même conseil estimait, dans son avis sur le PLF 2016, qu’il existait des « risques significatifs » de ne pas atteindre la cible que nous avions fixée. Ceux qui demeurent incrédules peuvent également, pour dissiper leurs doutes, se reporter à la prévision de déficit public que la Commission européenne a récemment publiée et qui est identique à celle du Gouvernement, à 3,3 %. Contrairement à ce que certains voudraient laisser croire, le sérieux de notre action en matière de maîtrise des comptes publics se trouve donc confirmé. Madame de l’opposition, ce n’est pas servir l’intérêt général que de systématiquement traiter les projets gouvernementaux d’insincères.

Ce projet de loi confirme les engagements que nous avons pris sur le budget de l’État. Premier constat, la remise en ordre des comptes publics se poursuit et se traduit à nouveau par une amélioration du solde budgétaire par rapport à celui de l’année précédente. Nous vous présentons un solde à 69,9 milliards d’euros, après une exécution à 70,5 milliards d’euros en 2015. Ce solde est en amélioration de 2,4 milliards par rapport à celui de la loi de finances initiale de 2016. Ainsi, comme en 2015, l’exécution du budget de l’État sera meilleure que la prévision initiale ; je dis souvent que le passé éclaire l’avenir, et c’est encore le cas cette année, grâce à nos prévisions prudentes et malgré les Cassandre qui prévoyaient – je me tourne vers M. le président de la commission des finances – des dérapages sur le solde budgétaire. Cette remise en ordre des comptes repose, vous le savez, sur la maîtrise des dépenses, ce qui ne signifie en rien que nous aurions renoncé à financer nos priorités, bien au contraire !

Et, comme les années précédentes, toutes les dépenses nouvelles sont financées par redéploiement, en respectant la cible de dépenses de l’État fixée en loi de finances initiale. Les redéploiements prévus par ce PLFR comme par le décret d’avance, qui vient d’être publié, représentent, au total, 4,5 milliards d’euros ; ils complètent ceux intervenus à l’occasion des deux décrets d’avance de juin et d’octobre, qui avaient notamment permis de financer le plan emploi annoncé en début d’année. Nos priorités sont connues. Elles n’ont jamais eu d’autre visée que d’accroître la solidarité et de renforcer la qualité de notre action publique. Nous avons déjà eu l’occasion de les évoquer en cours d’année : la politique de l’emploi a été confortée, les agriculteurs ont bénéficié d’un soutien exceptionnel, le traitement de nos agents publics a enfin été revalorisé – je rappelle que ces derniers ont contribué pendant six ans au redressement de nos comptes publics à travers le gel de leur point d’indice – et les mesures à destination des jeunes ont été amplifiées, notamment à travers la garantie jeunes et les bourses de l’enseignement supérieur.

En outre, les principaux aléas à financer sont les suivants : classiquement, les surcoûts résultant des opérations extérieures et intérieures – OPEX et OPINT – du ministère de la défense, et ce, pour 800 millions d’euros ; la montée en charge plus rapide qu’anticipé de la prime d’activité et l’augmentation du nombre de bénéficiaires de l’allocation aux adultes handicapés – AAH –, pour un total de 800 millions d’euros ; le coût des refus d’apurement de certaines aides agricoles par la Commission européenne, pour 300 millions d’euros.

Les ouvertures de crédits sont d’abord compensées par des annulations à hauteur de 1,7 milliard, essentiellement sur la réserve de précaution, dont je rappellerai que nous l’avions portée par prudence – c’est le bon mot, qui ne semble malheureusement pas partagé par tous – à un niveau particulièrement élevé en 2016. Nous avons ainsi pu disposer des leviers nécessaires pour construire ce PLFR.

Par ailleurs, les prélèvements sur recettes seront réduits de 1,9 milliard, grâce notamment à une sous-exécution du budget de l’Union européenne en 2016, et le plafond des taxes affectées aux opérateurs sera abaissé de 200 millions d’euros par plusieurs prélèvements sur fonds de roulement. Si l’on tient compte, comme chaque année, du fait que les crédits ouverts ne seront pas dépensés à 100 %, nous avons donc un équilibre qui permettra de respecter notre cible de dépenses en exécution, comme je l’ai indiqué.

En outre, les économies réalisées sont complétées par des annulations importantes sur la charge de la dette, pour 2,9 milliards d’euros. Sur le champ de la norme de dépenses, y compris la charge de la dette et les pensions, nous sommes en baisse : 3,1 milliards d’euros d’économies seront constatés par rapport à la loi de finances initiale.

Et ces économies sur la charge de la dette ne sont pas le fruit du hasard ; ce ne sont pas de simples économies de constatation. Elles traduisent la confiance que, désormais, les investisseurs nous font. Ce n’était pas gagné au début de ce quinquennat, vous vous en souvenez certainement.

C’est la preuve, une fois de plus, que les résultats sont là : nous continuons de maîtriser la dépense, comme nous le faisons depuis 2012. Nous vous avions annoncé de nouvelles priorités en cours d’année 2016 et un financement par redéploiements : vous en trouvez ici la traduction concrète. Et financer ces priorités ne nous empêche pas de respecter notre trajectoire et les engagements pris en loi de finances initiale.

En ce qui concerne les recettes et les comptes spéciaux, les recouvrements sont en phase avec ce que nous vous présentons. Des ajustements ont été opérés à la baisse sur les recettes fiscales, notamment au titre de l’impôt sur les sociétés, et à la hausse pour les recettes non fiscales et le solde des comptes spéciaux. M. Carrez doit être déçu, lui qui au mois de juin dernier nous avait annoncé que manqueraient 10 milliards d’euros de recettes.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. C’était l’an dernier !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Vous nous avez refait le coup cette année, monsieur le président ! J’ai bonne mémoire !

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Cette année, je suis beaucoup plus sérieux !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Je vous retrouverai les articles, monsieur le président.

Ce sont des évolutions que nous avions annoncées dès la présentation du projet de loi de finances pour 2017 et les chiffres ont peu varié, si ce n’est pour intégrer l’opération exceptionnelle de recapitalisation de l’Agence française de développement, qui est globalement neutre sur le solde, monsieur le président.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Je le confirme ! Neutre sur le solde budgétaire !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Vous le confirmez, mais peut-être faudrait-il le dire à vos copains, qui ne sont pas là aujourd’hui pour l’entendre.

Mme Claudine Schmid. Si, si ! Laissez-moi donc le temps de regagner ma place, monsieur le secrétaire d’État !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Je vous remercie, madame Schmid, vous êtes la plus fidèle des membres de l’opposition, qui ne sont pas nombreux aujourd’hui.

Des dépenses tenues, des recettes qui rentrent, cela se traduit naturellement par un solde budgétaire qui s’améliore et le respect de notre objectif de 3,3 % de déficit public.

Ce projet de loi de finances rectificative comprend également plusieurs dispositions fiscales importantes. Je voudrais d’abord évoquer celles qui concernent la lutte contre la fraude, laquelle a été combattue sans relâche sous ce quinquennat, grâce à la mobilisation des administrations.

Depuis 2012, le Parlement a en effet adopté pas moins de soixante-dix mesures législatives spécifiques, pour la plupart sur proposition du Gouvernement. Et les résultats sont là : les recettes issues des redressements fiscaux ont atteint 21,2 milliards d’euros en 2015, contre 16 milliards d’euros en moyenne du temps de nos prédécesseurs. Une différence d’un tiers, ce n’est pas rien !

Les résultats enregistrés nous encouragent à prolonger notre action dans ce domaine. L’enjeu est fondamental pour la vie quotidienne des Français comme pour l’autorité et l’efficacité de la puissance publique. C’est pourquoi, afin d’amplifier cette lutte, et conformément à ce qui a été annoncé lors du comité national de lutte contre la fraude du 14 septembre dernier, le projet de loi de finances rectificative pour 2016 comporte de nouvelles mesures qui renforceront l’efficacité du contrôle fiscal tout en garantissant au contribuable une plus grande prévisibilité.

Sans les détailler ici, je rappellerai que nous prévoyons de nouvelles dispositions afin d’amplifier la lutte contre l’optimisation en matière d’impôt sur la fortune. Le projet de loi de finances prévoit déjà de contrer les montages qui, de façon tout à fait artificielle, augmentent le plafonnement de cet impôt. Certains abus ayant également été constatés sur l’exonération des biens professionnels, nous prenons dans cette loi de finances rectificative les dispositions qui permettront d’y mettre fin.

Ce texte trouve également des réponses appropriées à différentes décisions du Conseil constitutionnel, principalement sur deux points. Premièrement, les contribuables qui ne déclaraient pas un compte à l’étranger étaient jusqu’ici soumis à une amende, indépendamment d’un éventuel redressement fiscal. Cette amende était exprimée soit en montants forfaitaires, soit en proportion des avoirs ; 5 % lorsque ceux-ci dépassaient 50 000 euros. Le Conseil constitutionnel a récemment censuré cette amende proportionnelle. La non-déclaration d’un compte à l’étranger restant une infraction grave, les pénalités fiscales en cas de redressement effectif seront désormais automatiquement de 80 % si les fonds figurent sur un compte non déclaré à l’étranger, contre 40 % la plupart du temps aujourd’hui.

Deuxièmement, le Conseil constitutionnel a censuré, pour rupture du principe d’égalité, l’exonération – je dis bien l’exonération – de la taxe de 3 % dont bénéficiaient les groupes fiscalement intégrés ; en effet, les filiales de groupes étrangers détenues dans des conditions comparables en étaient privées. Pour épargner aux grandes entreprises françaises une hausse d’impôt de 3,6 milliards d’euros tout en respectant le principe d’égalité, l’exonération sera étendue aux distributions des filiales françaises de groupes étrangers dès lors que le critère de détention de 95 % sera respecté. La neutralité budgétaire de la réforme sera assurée par la création d’un acompte de contribution sociale de solidarité des sociétés – C3S – sur les plus grandes entreprises.

Ce projet de loi renforce également des politiques publiques en matière de développement économique, de logement et d’environnement. Je ne mentionnerai que deux mesures. Ce projet de loi de finances rectificative met en place le compte PME innovation, qui vise à inciter les entrepreneurs vendant les titres de leur société à réinvestir le produit de leur vente dans des PME ou des entreprises innovantes, et à les accompagner en apportant à la fois leurs capitaux, leur expérience d’entrepreneur et leur réseau. La contrepartie fiscale à cet accompagnement sera un report de la taxation des plus-values, jusqu’à la sortie du compte, avec une compensation entre les plus-values et les moins-values.

Suivant les orientations de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte de 2015, ce projet de loi de finances rectificative fixe aussi une trajectoire jusqu’en 2025 de la composante de la TGAP – taxe générale sur les activités polluantes – relative aux déchets. Il est particulièrement utile de donner aux opérateurs économiques une visibilité à moyen terme, comme nous l’avons fait avec la contribution climat énergie.

Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, le texte dont vous allez débattre se situe dans la droite ligne de la politique que ce gouvernement mène depuis près de cinq ans. Les lignes de force de notre action demeurent les mêmes : nous souhaitons redresser les comptes publics tout en demeurant fidèles à nos valeurs de solidarité et de justice.

C’était un véritable défi. Nous l’avons relevé. Et aujourd’hui, nous pouvons regarder sereinement le chemin parcouru depuis 2012, car nous savons que nous sommes parvenus, dans le même temps, à sauvegarder notre modèle social et à conforter l’activité économique de notre pays.

C’est pourquoi, à l’heure où certains voudraient saper les fondements de la république sociale, je ne peux que m’élever contre ceux qui souhaitent dilapider les efforts auxquels la nation a consenti depuis quatre ans. Soyez rassurés, cependant : à gauche, nous ne permettrons jamais que l’intérêt général soit confisqué au profit de quelques-uns.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. À droite non plus, nous ne le permettrons pas, monsieur le secrétaire d’État ! Vous n’avez pas le monopole de l’intérêt général !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Et pour cela, nous continuerons à nous battre, comme nous l’avons toujours fait. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

M. le président. La parole est à M. Dominique Lefebvre, suppléant Mme Valérie Rabault, rapporteure générale de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.

M. Dominique Lefebvre, suppléant Mme Valérie Rabault, rapporteure générale de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État chargé du budget et des comptes publics, monsieur le président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, mes chers collègues, nous engageons la discussion de la dernière loi de finances de cette législature, une loi de finances rectificative pour l’exercice 2016.

Je le dirai d’emblée, comme vous, monsieur le secrétaire d’État : quoi qu’en aient dit les Cassandre, les engagements pris dans la loi de finances initiale auront été tenus. C’est donc pour moi l’occasion de souligner à quel point ce quinquennat aura été le quinquennat du sérieux budgétaire et du redressement des comptes publics ; bref, de la responsabilité.

Je voudrais vous rappeler quelques chiffres que l’opposition feint généralement d’oublier. Nous avions en 2012 hérité d’un déficit public, toutes administrations publiques confondues, supérieur à 5 % du PIB, soit 105 milliards d’euros ; d’une situation, qui s’est prolongée deux quinquennats durant, dans laquelle les dépenses publiques croissaient de 3,6 % par an ; d’un déficit du régime général de la sécurité sociale hors Fonds de solidarité vieillesse de 13,3 milliards d’euros. J’ai même le souvenir d’avoir entendu un Premier ministre dire dès 2007 – et cela ne s’est pas arrangé ensuite – qu’il était à la tête d’un État en faillite. Voilà l’héritage que nous avions reçu de la précédente majorité : tel était l’état de nos finances publiques voilà maintenant cinq ans.

Année après année, le Gouvernement, en lien avec notre majorité, a œuvré pour le redressement de nos finances publiques tout en finançant nos priorités en faveur de l’emploi, de l’éducation et de la jeunesse. Nous avons également lancé un plan de grande ampleur de baisse du coût du travail pour les entreprises, avec en particulier le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE, tout en améliorant le caractère redistributif de notre système fiscal pour plus de justice sociale.

Tout ceci n’avait pas été fait dans notre pays jusqu’alors. Et les résultats sont là aujourd’hui : d’aucuns diront qu’ils sont insuffisants, mais ils sont là.

En 2016, le déficit public sera de 3,3 points de PIB, conformément à l’engagement pris en loi de finances initiale et à la trajectoire tracée dans la loi de programmation des finances publiques que nous avons adoptée en 2014 ; et je crois que nul ici ne conteste aujourd’hui ce chiffre – n’est-ce pas, monsieur le président de la commission des finances ? –, qui a en tous les cas été jugé crédible tant par le Haut conseil des finances publiques que par la Commission européenne, comme vous l’avez rappelé, monsieur le secrétaire d’État.

En 2017, le régime général de la sécurité sociale sera à l’équilibre et le déficit public en dessous de la barre des 3 %. C’est ce qu’a confirmé la Commission européenne, écartant de ce fait les doutes émis au début de l’automne par le Haut conseil des finances publiques, et c’est bien loin des 4,7 % prévus par le programme du candidat issu des primaires de la droite et du centre.

La comparaison des bilans est donc cruelle pour l’opposition. Celle des promesses de campagne pourrait également l’être. Avec la droite, le déficit public avait progressé de 55 milliards d’euros entre 2007 et 2011. Avec la gauche, le déficit public a baissé de 40 milliards d’euros en cinq ans. Avec la droite, le déficit public reviendrait en 2017 à son niveau de 2012, effaçant cinq années de bonne gestion de nos comptes publics. Avec la gauche, la France sortira de la procédure de déficit excessif en 2017. La droite a accumulé 900 milliards d’euros de dette entre 2002 et 2012. La gauche aura réussi à stabiliser le ratio de la dette publique.

Oui, ainsi que je l’ai dit dans l’exercice d’autres fonctions dans cet hémicycle, la gauche gère mieux les finances publiques que la droite dans ce pays : c’est un fait désormais durablement établi. Et c’est au moment où nos finances publiques sont enfin redressées que la droite propose de laisser à nouveau filer les déficits, de détruire notre modèle social et de mettre à mal nos services publics.

Ce projet de loi de finances rectificative est donc à l’image du quinquennat. Nous atteignons nos objectifs, et faisons même mieux que prévu. Comme en 2015, l’exécution est meilleure que la prévision sur le budget de l’État. Je rappelle que le déficit budgétaire prévu en loi de finances initiale était alors de 74,4 milliards d’euros ; il atteint 70,5 milliards d’euros en exécution. En 2016, le solde budgétaire de l’État sera amélioré de 2,4 milliards d’euros par rapport aux prévisions de la loi de finances initiale.

Ce résultat a été obtenu alors même que nous avons décidé d’engager de nouvelles dépenses au cours de l’exercice actuel : plan d’urgence pour l’emploi, plan de soutien exceptionnel aux agriculteurs, mesures en faveur des jeunes, augmentation du point d’indice dans la fonction publique, création d’un fonds d’urgence pour les départements, surcoûts liés aux opérations extérieures et aux opérations intérieures menées par le ministère de la défense, apurements communautaires agricoles, montée en charge plus rapide que prévu de la prime d’activité.

Les normes de dépenses de l’État seront pourtant à nouveau tenues en 2016, car nous avons eu le courage de financer ces nouvelles dépenses, celles que nous avons choisies et celles qui nous ont été imposées par les circonstances, notamment le contexte international, en les gageant sur de nouvelles économies.

Ces redéploiements de crédits entre ministères ont fait l’objet de trois décrets d’avance qui ont été examinés au cours de l’exercice par notre commission des finances, y donnant chaque fois un avis favorable.

Je voudrais d’ores et déjà répondre aux propos que pourraient tenir le président de la commission des finances, puisqu’il les répète, ou d’autres collègues. Il y a bien sûr, comme chaque année, des économies non pérennes ; il y a toutefois également des dépenses non pérennes. Les premières sont souvent des économies sur la charge de la dette. Cependant, si nous pouvons réaliser de telles économies, c’est parce que nous avons établi une prévision extrêmement prudente en loi de finances initiale. Nous aurions pu inscrire d’autres crédits alors, mais nous ne l’avons pas fait. Nous utilisons donc ces aléas de gestion, que vous connaissez bien, monsieur le président de la commission, vous qui avez été rapporteur général du budget pendant dix ans, mais cela ne veut pas dire que cette situation pourrait se reproduire. Nous savons très bien en effet quel risque il y aurait à laisser dériver la dette, car les taux remonteront un jour. Ces éléments illustrent donc davantage la prudence de nos prévisions que des artifices de fin de gestion, et vous ne sauriez blâmer un tel comportement.

Je ne mentionnerai qu’une dépense non pérenne ; elle a déjà été évoquée, et vous avez vous-même admis, monsieur le président de la commission des finances, que son effet sur le solde budgétaire était neutre. Il s’agit du renforcement des fonds propres de l’Agence française de développement. Cela représente 2,4 milliards d’euros d’ouvertures de crédits sur les 5,4 milliards d’euros prévus dans le projet de loi de finances rectificative. Je le précise, car j’ai entendu parler, ici ou là, de 7 milliards d’euros de dépenses nouvelles. Il ne s’agit que des épures habituelles ; elles sont peut-être un peu accentuées au regard des circonstances dont j’ai parlé, mais leur niveau reste acceptable, en particulier s’agissant des dépenses non reconductibles. Les ajustements de fin de gestion ne sont donc guère plus importants que d’habitude.

Le propre de la bonne gestion consiste précisément à prendre en compte ces éléments imprévus ou exogènes et à les intégrer dans la construction du budget afin de tenir la trajectoire que l’on se fixe. C’est ce que nous faisons depuis près de cinq années, comme l’illustre ce dernier projet de loi de finances rectificative. Nous verrons bien ce qui se passera en 2017, monsieur le président de la commission des finances, mais annoncer autant que vous le faites que le déficit ne sera pas tenu en 2017 et qu’il dérapera exonère à l’avance le prochain gouvernement des efforts qu’il convient habituellement de faire en cours de gestion pour tenir ses objectifs !

Tel est le danger : profiter d’une alternance pour tout mettre sur le dos de ses prédécesseurs tout en s’affranchissant de la rigueur de gestion qu’il est pourtant parfaitement possible d’atteindre !

C’est ce que nous avons fait et bien fait, depuis cinq ans, en termes de dépenses. Ce projet de loi finances rectificative, non seulement prend acte des orientations de notre majorité à propos de la trajectoire de redressement des comptes publics, mais comprend également un important volet relatif aux procédures fiscales. Je rappelle que la lutte contre l’évasion fiscale est un objectif à valeur constitutionnelle. De nouvelles procédures, plus rapides, moins intrusives et mieux adaptées au contexte des entreprises sont créées. Des aménagements sont prévus afin de faciliter les investigations de l’administration fiscale tout en préservant les garanties accordées au contribuable. La notion de bien professionnel est précisée afin de lutter contre l’optimisation abusive en matière d’ISF. La sanction du délit de non-déclaration de compte à l’étranger est renforcée. Nous débattrons de ces mesures et procéderons probablement à quelques ajustements en dialoguant avec le Gouvernement, mais elles vont dans le bon sens.

Afin de tenir compte des jurisprudences constitutionnelles et européennes, le projet de loi de finances rectificative prévoit également une extension de l’exonération de la taxe à 3 % sur les dividendes des filiales détenues à 95 % par des groupes étrangers et une mise en conformité du régime mère-fille. Il fallait procéder à ces ajustements au profit de la neutralité budgétaire. Même si nous en débattrons, nous soutiendrons cette mesure. La mise en place d’un compte PME innovation dépourvu de plafond constitue la mesure fiscale majeure du PLFR. Nous aurons l’occasion d’en débattre et avons déjà adopté certains amendements et procédé à des auditions en commission. Ce dispositif de report de l’imposition des plus-values incitera les entrepreneurs vendant une société à réinvestir le produit de leur vente dans des jeunes PME ou des entreprises innovantes.

Il faudra veiller à l’articulation du dispositif pour lui donner toute sa force sans pour autant ouvrir la porte à des optimisations fiscales, mais il ne faut pas que cette préoccupation l’empêche de prendre toute son ampleur. Les cibles seront les PME de moins de sept ans et de moins de dix ans si elles sont innovantes. Je ne doute pas que la discussion qui s’engage permettra d’améliorer encore le dispositif. Nous discuterons également d’autres mesures fiscales comme l’exonération facultative de contribution économique territoriale des disquaires indépendants ou encore de la trajectoire de la composante « Déchets » de la taxe générale sur les activités polluantes.

Enfin, nous autoriserons trois nouvelles garanties de l’État, l’une, habituelle, à l’Unédic et deux autres à des projets industriels situés en Nouvelle-Calédonie. Même s’il faut être vigilant sur ce point, ces garanties semblent essentielles au soutien à l’activité économique et à la préservation de l’emploi dans ce territoire. Ainsi, le PLFR illustre le redressement de nos finances publiques. Il est riche et nous l’enrichirons encore au cours de notre discussion ! Notre commission a d’ailleurs commencé à l’enrichir en examinant mercredi dernier 255 amendements, dont 66 ont été adoptés. Les amendements adoptés précisent et rééquilibrent certaines mesures relatives au contrôle fiscal, notamment les articles 13 et 14, et proposent des évolutions, par exemple du compte PME innovation.

Certains de ces amendements permettront également d’engager le dialogue avec le Gouvernement sur quelques sujets chers aux membres de la commission des finances sur lesquels un tel dialogue nous a semblé opportun, tels que la déclaration automatique des revenus des utilisateurs de plateformes collaboratives à l’administration fiscale ou la création d’une taxe sur la diffusion en vidéo physique et en ligne de contenus audiovisuels, même si nous avons déjà débattu de ce dernier point dans le cadre du PLF pour 2017. À titre personnel, j’estime qu’il n’est pas très raisonnable de revenir sur des débats que nous venons de clore. Nous évoquerons à nouveau ces sujets, mais j’estime pour ma part qu’il faut respecter ce qu’a voté l’Assemblée nationale dans le cadre du PLF.

Enfin, le sujet des collectivités territoriales a nourri de riches débats en commission, comme toujours. Il a donné lieu, par exemple, à un amendement déposé par notre collègue Nicolas Sansu visant à traiter le problème des effets de bord de l’exonération de taxe d’habitation en faveur des ménages à revenus modestes. Nous connaissons parfaitement ce débat. L’amendement a été rejeté par notre commission pour des raisons bien compréhensibles, mais nous sommes tous convenus qu’il faut approfondir le débat. Notre collègue a donc déposé à nouveau son amendement en application de l’article 88. Il a de nouveau fait l’objet d’un avis défavorable de Mme la rapporteure générale, mais le débat aura lieu dans l’hémicycle. Compte tenu de l’ensemble de ces modifications, la commission des finances a adopté le projet de loi de finances rectificative pour 2016 et je vous invite, mes chers collègues, à faire de même.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur général par intérim (Sourires.), mes chers collègues, le collectif budgétaire de fin d’année 2016 donne une première idée de l’exécution du budget de l’État en 2016, et plus généralement des comptes publics. Le déficit effectif devrait atteindre la cible de 3,3 % du PIB. L’objectif devrait donc être tenu. Vous venez de vous en glorifier, monsieur le secrétaire d’État, et je suis sûr que vous continuerez ! Pourtant, à l’examen des chiffres du collectif budgétaire sur lequel je concentrerai mon propos, l’exploit n’a rien d’extraordinaire. Rappelons que l’exécution du budget a abouti en 2015 à un déficit de 3,5 %, soit 76,5 milliards d’euros, et de 3,3 % en 2016, soit 73,6 milliards d’euros. Il s’agit donc d’une amélioration de 2,9 milliards d’euros, si je calcule bien. Il n’y a vraiment pas…

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Et la Sécu ?

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. J’évoque les comptes publics en général, y compris ceux de la Sécurité sociale et l’excédent probable des comptes des collectivités locales. La marche sera beaucoup plus haute et beaucoup plus difficile à franchir en 2017. L’objectif étant de 2,7 % du PIB, il faudrait que le déficit diminue de 11,5 milliards d’euros !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Je croyais que vous parliez du PLFR !

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Surtout, les conditions d’exécution des comptes publics en 2016 laissent planer le plus grand doute sur la fiabilité des prévisions budgétaires pour 2017. Tout d’abord, la croissance de 2016 est revue à la baisse, à 1,4 % et non 1,5 % comme prévu, soit 3 à 4 milliards d’euros de recettes fiscales en moins ! Surtout, …

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. 0,1 % du PIB, 3 à 4 milliards d’euros de recettes fiscales ? Mais ce n’est pas vrai !

M. Nicolas Sansu. Plutôt 2 milliards !

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Plutôt 3 milliards ! Nous y viendrons dans un instant, monsieur le secrétaire d’État, et je vous donnerai les chiffres au cas où vous les auriez vous-même oubliés ! Nous ferons les calculs ensemble. J’évoque ici les recettes fiscales.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Moi aussi !

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Ce qui est préoccupant, c’est l’effet base pour 2017, car vous maintenez pour 2017 une prévision de croissance de 1,5 % qui, de l’avis général, est surévaluée. Surtout, le solde budgétaire des comptes de l’État proprement dit s’établit à 69,9 milliards d’euros, et le solde d’exécution pour 2016 est atteint uniquement grâce à des caractéristiques exceptionnelles. La première préoccupation – et je réponds à votre question, monsieur le secrétaire d’État, c’est l’évolution des recettes fiscales en 2016 par rapport aux prévisions de la loi de finances initiale. Il manque 2,6 milliards d’euros, dont 2,4 milliards d’euros d’impôt sur les sociétés, ce qui est très inquiétant. La prévision des résultats des entreprises, qui en définit l’assiette, s’avère très excessive. Quant à l’impôt sur le revenu, il a rapporté 600 millions d’euros de moins que prévu, ce qui, me direz-vous, s’explique par le CITE – crédit d’impôt pour la transition énergétique –, qu’il vous faut d’ailleurs surveiller comme le lait sur le feu, comme au temps jadis le CIDD – crédit d’impôt développement durable. La TVA a rapporté 300 millions d’euros de moins que prévu, même si l’on constate des effets de tuyauterie avec la Sécurité sociale.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Ah !

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Vous êtes sauvé par les droits de mutation à titre gratuit, les donations et les successions rapportant 1 milliard d’euros de plus que prévu. Par conséquent, en termes de recettes fiscales, j’ai bien raison, monsieur le secrétaire d’État : il manque 2,6 milliards d’euros de recettes fiscales proprement dites. Cela signifie d’ailleurs que l’économie ne repart pas, ce qui est inquiétant. Ces 2,6 milliards d’euros de recettes fiscales manquantes,…

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Et les recettes non fiscales ?

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Elles s’élèvent en effet à 900 millions d’euros, je vais y venir dans un instant.

M. le président. Laissons parler M. le président de la commission des finances.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Ce manque de recettes fiscales est compensé par des mesures exceptionnelles qu’on a peu de chances de réitérer à l’avenir. On réalise tout d’abord 1,9 milliard d’euros d’économies sur les prélèvements sur recettes, ce qui, de mémoire du rapporteur général que j’ai été pendant dix ans, est presque du jamais vu ! Presque 2 milliards d’euros de prélèvement sur recettes de l’Union européenne et des collectivités locales, merci le prélèvement sur recettes ! L’excédent sur les comptes spéciaux de 1,7 milliard d’euros est aussi assez unique. Il est dû notamment au compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État », qui a bénéficié de la cession des aéroports de Nice et de Lyon et de la vente de quelques actions de Safran.

Et AREVA ? Et EDF ? Il faudra les recapitaliser pour 5 milliards d’euros ! On fait apparaître artificiellement 1,7 milliard d’euros tout en sachant qu’il faudra dépenser 5 à 6 milliards d’euros dans les prochains mois ! Une telle présentation relève vraiment de l’illusionnisme ! Quant aux recettes non fiscales de 900 millions d’euros, elles peuvent faire l’objet des mêmes considérations. Mentionnons aussi l’économie de constat sur les intérêts de la dette de 2,9 milliards d’euros, sur laquelle je n’insiste pas car Dominique Lefebvre vient de le faire pour moi. Je tombe d’accord avec lui qu’il s’agit d’une prévision prudente, mais la nouveauté, monsieur Lefebvre, c’est que les taux que vous avez eu la chance de voir baisser commencent à remonter. Croyez-moi, l’avenir sera bien plus difficile si nous sommes confrontés à une remontée des taux !

J’en viens aux dépenses. 5 milliards d’euros d’ouvertures de crédit, c’est un record, atteint grâce à trois décrets d’avance dont le dernier en date porte sur la bagatelle de 1,7 milliard d’euros ! Même si on constate 5 milliards d’euros d’annulations de crédits en contrepartie, ce qui est frappant, c’est la dissymétrie entre les ouvertures de crédit destinées à financer des dépenses récurrentes, qui traduisent des sous-budgétisations parfaitement conscientes, et les annulations dont je dirai un mot dans un instant. Parmi les ouvertures de crédits, mentionnons les 800 millions d’euros destinés aux OPEX – opérations extérieures –, dont je ne dirai rien car voici quinze ans que ça dure, sinon que ces dépenses atteignent là des proportions considérables relevant du changement d’échelle. Cela étant, un accord a été conclu avec M. le ministre de la défense visant à inscrire les dépassements de budget dus aux OPEX dans un cadre interministériel. Dont acte.

Mentionnons également 900 millions d’euros supplémentaires pour les interventions sociales telles que l’hébergement d’urgence, l’AAH – allocation aux adultes handicapés, l’AME – aide médicale de l’État – et la prime d’activité et un crédit nouveau de 700 millions d’euros supplémentaires pour la masse salariale, dont 600 millions d’euros destinés à l’éducation nationale. Nous retrouvons ici la préoccupation principale soulevée par le projet de loi de finances pour 2017, dans lequel la progression de la masse salariale repart au rythme de 4 %, soit un taux très supérieur à ce que vous avez connu lorsque vous assuriez au Gouvernement le suivi de ce sujet, madame Lebranchu. Enfin, le plan emploi représente 300 millions d’euros.

Quant aux 5 milliards d’euros d’annulation de crédits, il s’agit pour l’essentiel de crédits gelés, donc en général de crédits pilotables, donc de dépenses d’investissement ! En particulier, le Gouvernement procède à un tour de passe-passe qui n’a pas échappé à tous les membres de la commission des finances, consistant à annuler près de 700 millions d’euros de crédits destinés à la défense dans le décret d’avance et à les rétablir dans le collectif budgétaire, ce qui signifie en clair qu’on augmente les reports sur l’année 2017 et témoigne en fait de la difficulté qu’a le Gouvernement à réaliser de véritables économies. Pour résumer, je citerai un seul chiffre du collectif budgétaire, relatif au seul budget de l’État : entre l’exécution probable du budget en 2016, dont ce collectif budgétaire donne une bonne idée, et celle constatée en 2015, le solde budgétaire de l’État ne s’améliore que de 600 millions d’euros. Je répète ce chiffre afin que chacun l’ait en tête : l’exploit de la diminution du déficit entre 2015 et 2016 consiste à passer de 70,5 milliards d’euros à 69,9 milliards d’euros, soit 600 millions d’euros !

Ce collectif de fin d’année confirme toutes nos craintes sur le projet de loi de finances pour 2017 : entre les sous-budgétisations manifestes et les surestimations de recettes, l’objectif d’un déficit public à 2,7 % du PIB n’a aucune chance d’être respecté. C’est la Commission européenne, qui a déjà chiffré le déficit à 2,9 % du PIB, qui le dit. Quant au Haut conseil des finances publiques, il explique qu’il est hautement improbable que l’on se situe sous la barre des 3 % en 2017. Je pense pour ma part qu’un audit révélera un déficit se situant entre 3,2 et 3,5 % du PIB.

M. Lefebvre parlait des 4,7 % qu’entraînerait le programme de la droite. Mais, chers collègues, il faut prendre en compte les engagements qui pèsent sur 2018 !

M. Dominique Lefebvre, suppléant Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Les engagements de 2018, ce n’est pas le déficit pour 2017 !

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Le budget de 2017 a été construit en reportant des dépenses sur 2018 et en anticipant des recettes de 2018 sur 2017. Il y en a pour 10 à 15 milliards, soit 0,5 à 0,7 point de PIB, ce qui nous amène entre 3,2 et 3,5 % du PIB.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Vous parlez du résultat 2017 ou du résultat 2018 ?

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Des deux, mon capitaine ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.) Nous en reparlerons lors de la nouvelle lecture. Toutes choses égales par ailleurs, c’est l’évaluation de ce qu’il restera en 2017, en 2018, et peut-être au-delà.

Les débats au sein de la commission des finances ont été très constructifs. Nous proposons donc quelques amendements fort utiles – appréciez ma démarche positive ! Les conditions d’entrée dans l’excellent dispositif du compte PME innovation sont quelque peu difficiles. Mme Bernadette Laclais, ainsi que Mme la rapporteure générale et moi-même, avons proposé des amendements pour les assouplir. J’espère, monsieur le secrétaire d’État, que vous y serez attentif.

M. Pascal Cherki a proposé un amendement, que la commission a adopté à l’unanimité et dont je sais, monsieur le secrétaire d’État, que vous l’approuvez. Il vise à ce que les services fiscaux se voient communiquer les recettes perçues par les loueurs de meublés au travers des plates-formes numériques. C’est une mesure indispensable pour rétablir des conditions loyales de concurrence, notamment avec l’hôtellerie, et qui participe pleinement de l’amélioration du contrôle fiscal, que vous appelez de vos vœux.

Un amendement de Mmes Marie-Christine Dalloz et Véronique Louwagie, adopté par la commission, concerne les procédures de contrôle fiscal. Nous estimons qu’il faut conserver, pour les PME, la possibilité d’un débat contradictoire en maintenant les échanges personnels avec les vérificateurs. Il serait dommageable de s’engager dans une voie où le contrôle fiscal ne s’exercerait qu’à distance, à partir d’échanges d’informations financières par voie numérique. Tout le monde est d’accord, ainsi que vient de le dire M. Dominique Lefebvre.

La solution que propose le Gouvernement pour remédier à la suppression de la taxe de 3 % sur les dividendes, suite à la décision du Conseil constitutionnel et au risque de contentieux budgétaire, me paraît bonne, et elle est gagée. Le risque de contentieux nous impose d’être plus attentifs à ces sujets. L’ancien gouvernement s’était engagé dans une retenue à la source sur les OPCVM, qui posait problème. La solution apportée en août 2012 fut cette taxe, dont nous avions dit qu’elle était fragile et sur laquelle, monsieur le secrétaire d’État, vous aviez émis des doutes en tant que rapporteur général. Nous avons tous intérêt à nous efforcer de mettre en place des procédures fiscales qui ne nous valent pas des contentieux, parfois très lourds, auprès de la Commission européenne. C’est un sujet dont nous débattons souvent au sein de la commission des finances.

Je conclus en exprimant, à nouveau, mes très grands doutes sur l’année 2017.

Discussion générale

M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à Mme Dominique Orliac.

Mme Dominique Orliac. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur général suppléant, monsieur le président de la commission des finances, nous débutons l’examen en séance du projet de loi de finances rectificative pour 2016, adopté en conseil des ministres le 18 novembre. Ce texte confirme que les économies prévues dans le cadre du plan triennal d’économies 2015-2017 ont bien été réalisées. Par rapport à l’évolution tendancielle de la dépense, elles s’élèvent en 2016, pour l’État et ses opérateurs, à 7 milliards d’euros. Dans le même temps, notre action dans les secteurs clés est préservée, ce que l’opposition n’était pas parvenue à réaliser. Nous retenons tout particulièrement les réformes engagées sur les dépenses d’intervention, la limitation globale des dépenses des agences, la réduction des effectifs dans les ministères non prioritaires et la participation des collectivités territoriales à l’effort de redressement, laquelle sera revue à la baisse pour 2017.

Pour autant, le Gouvernement nous propose des ouvertures de crédits dans les domaines prioritaires, notamment sur les missions comportant des prestations sociales et des dispositifs de solidarité financés par l’État, à hauteur d’un milliard d’euros, les dépenses de personnel – particulièrement au ministère de l’éducation nationale –, les opérations extérieures et intérieures du ministère de la défense, ainsi que l’agriculture, au titre des refus d’apurements relatifs à certaines aides européennes.

Du fait d’une inflation plus basse que prévue cet été – le Gouvernement prévoyant en loi de finances initiale 1 %, au lieu des 0,2 % constatés dans ce PLFR – ainsi que des intérêts décaissés, le collectif prévoit une annulation de crédits de presque 3 milliards d’euros sur la charge de notre dette, ce dont il faut se féliciter.

Nous tenons également à saluer la prévision de déficit public pour 2016, confortée à 3,3 %, malgré la révision de la croissance à la baisse de 0,1 point à + 1 % et le tout, sans avoir engagé de politique d’austérité durant le quinquennat.

Le solde budgétaire de l’État en 2016 a progressé de 2,4 milliards d’euros par rapport à la prévision de la loi de finances initiale, pour atteindre près de 70 milliards d’euros.

Dans ce contexte satisfaisant de gestion de nos comptes publics, il faut toutefois apporter un bémol. En effet, les recettes de l’État en 2016 s’établissent à 302 milliards, en baisse de 1,7 milliard d’euros par rapport aux prévisions. Cela est dû en partie à l’allégement drastique de l’impôt sur les sociétés, en baisse de 2,5 milliards, décidé par notre majorité pour relancer l’économie et l’emploi.

J’en viens aux mesures fiscales du collectif. La majorité a décuplé les moyens accordés à la lutte contre la fraude fiscale, puisque plus de 70 mesures ont été adoptées, ce qui a contribué à des résultats en forte hausse : 21,2 milliards d’euros de redressements en 2015, contre 16 milliards d’euros en moyenne sous le quinquennat précédent. Ce PLFR contient des avancées nouvelles, puisqu’il donne aux administrations des outils juridiques plus efficaces et améliore les droits des contribuables contrôlés. La notion de bien professionnel est mieux définie, afin de lutter contre l’optimisation abusive sur l’ISF. Enfin, les pénalités fiscales en cas de dissimulation d’un compte à l’étranger sont renforcées.

Comme l’a expliqué M. Joël Giraud en commission des finances le 23 novembre, nous regrettons que notre majorité n’ait pas mieux cerné les « États et territoires non coopératifs », afin de leur appliquer notre arsenal dissuasif en matière d’abus. Il va sans dire que nous soutenons le Gouvernement dans sa décision de maintenir en 2017 le Panama dans la liste des États et territoires non coopératifs, et de ne pas reproduire ainsi le scénario de début de quinquennat, qui avait vu Bercy retirer Jersey et les Bermudes de la liste, après seulement six mois de présence. Nous regrettons cependant qu’il ait fallu attendre avril 2016 pour que Panama y figure. Nous remarquons en outre que la liste française ne compte que huit pays, alors que la liste dite Moscovici, qui se base, pour l’Europe, sur des évaluations strictement identiques, en compte trente !

La création du compte PME innovation incitera les entrepreneurs à réinvestir le produit de la vente de leurs titres de société dans des jeunes PME ou des entreprises innovantes et à les accompagner, en apportant leurs capitaux, leur expérience d’entrepreneur et leur réseau. Dans le secteur de la culture, la réforme du dispositif Malraux donnera plus de souplesse à la réalisation de travaux de restauration et ouvrira le bénéfice de la réduction d’impôt à tous les locaux destinés, après travaux, à l’habitation. En matière environnementale, la poursuite de la trajectoire de la composante « déchets » de la taxe générale sur les activités polluantes accompagnera la mise en œuvre des objectifs de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte. Enfin, nous saluons la création d’un fonds d’urgence de 200 millions d’euros en faveur des départements, pour assurer les dépenses sociales qui leur sont imparties.

Le groupe RRDP a déposé des amendements auxquels il tient particulièrement, et dont plusieurs ont été adoptés en commission des finances le 30 novembre. Le premier concerne le régime du micro-BA, afin qu’il ne soit pas préjudiciable aux exploitations fragiles qui se trouvent dans les zones agricoles défavorisées – zones de montagne et zones défavorisées simples –, pour lesquelles les exploitants perçoivent des indemnités compensatoires de handicap naturel. Nous proposons, en accord avec les membres de la commission des finances, de ne pas tenir compte de ces aides dans l’assiette du bénéfice imposable au micro-BA et ce, dès le mois de janvier.

Dans un deuxième amendement, nous proposons, avec la commission, d’étendre, pour les collectivités qui le souhaitent, les exonérations de taxe foncière et de cotisation foncière des entreprises aux installations de méthanisation agricole. Nous proposons aussi de simplifier le régime applicable aux immobilisations industrielles en matière de taxe foncière. Toujours en accord avec la commission, nous souhaitons instituer, pour les plates-formes en ligne, l’obligation de déclaration automatique sécurisée des revenus de leurs utilisateurs à l’administration fiscale. Enfin, nous proposons d’aménager la contribution au profit de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire, afin de financer l’accroissement des travaux résultant de l’activité des exploitants d’installations nucléaires de base du secteur civil.

Dans d’autres amendements, nous requérons, avec certains de nos collègues et amis du groupe socialiste, écologiste et républicain, une plus juste répartition territoriale de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises – CVAE – entre activités de siège et unités de production, afin d’améliorer le rendement de l’impôt au profit des territoires industriels. Nous proposons également d’encourager les collectivités territoriales à opter pour le transport souterrain des lignes Très Haute Tension, en élargissant l’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux – IFER – à leur profit, pour les canalisations de transport d’électricité présentes sur leur territoire.

Nous souhaitons aussi assurer la pérennité des fermes ou stations expérimentales réalisant des opérations de recherche dans de nombreux secteurs agricoles de France. Nous sommes également mobilisés pour autoriser les petites entreprises soumises à un régime réel d’imposition à déduire de leurs résultats une provision constituant une réserve de précaution pour risque lié à un contentieux prud’homal.

Nous défendrons également d’autres amendements, concernant par exemple le crédit d’impôt pour les services à la personne, le crédit d’impôt recherche en matière d’archéologie préventive ou encore l’exclusion des dépenses des collectivités concernant la location longue durée de véhicules du fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée – FCTVA.

Pour conclure, je souhaite appeler votre attention sur les amendements déposés après l’article 31, sur la viticulture. Pour avoir travaillé sur ce sujet avec les organisations professionnelles et les syndicats lotois concernés, je mesure l’importance, voire la nécessité pour la profession d’adopter ces dispositions. Je souhaiterais particulièrement vous sensibiliser sur l’amendement n148, qui vise à mettre en place une réserve de précaution en nature, afin de couvrir la survenance de tout aléa frappant l’exploitation viticole et d’encourager les investissements.

Quant à l’amendement n152, il tend à assouplir les changements d’option à la moyenne triennale – trois ans au lieu de cinq ans –, afin de répondre à la forte variabilité du revenu viticole. Les viticulteurs rencontrent de lourds problèmes de trésorerie et ce, depuis de nombreuses années. L’adoption de ces amendements permettrait de répondre en partie aux attentes de la profession, laquelle ne cesse de nous alerter, à juste titre, sur ces problématiques.

M. le président. La parole est à M. Nicolas Sansu.

M. Nicolas Sansu. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur général suppléant – tout arrive ! –, mes chers collègues, le projet de loi de finances rectificative pour 2016 intervient dans un contexte que l’on peut qualifier d’instable – je parle de l’économie, vous l’aurez compris.

Disons-le d’emblée, un certain nombre de dispositions reçoivent l’assentiment des députés du groupe de la Gauche démocrate et républicaine, que ce soit le soutien accru à l’éducation nationale, l’effort en faveur des dispositifs de solidarité nationale ou, dans un autre registre, les mesures relatives à la fraude et à l’optimisation fiscales. Nous ne serons pas de ceux qui vous reprocheront, monsieur le secrétaire d’État, de préparer l’avenir par la formation, d’assurer la cohésion sociale autant que faire se peut et de tenter de combattre la scandaleuse soustraction de milliards d’euros à l’impôt.

Nous ne souhaitons pas non plus nous appesantir, pour ne pas dire nous perdre, dans une bataille de chiffres pour savoir si la croissance du PIB de 1,5 point, finalement révisée à 1,4 point, serait l’alpha et l’oméga de la politique économique et budgétaire. Le mal est, à notre sens, beaucoup plus profond. C’est parce que cette législature aura été celle du refus de remettre en cause des normes inefficaces et injustes que nous sommes dans une atonie économique mortifère. Le Royaume-Uni, le Japon, les États-Unis se permettent, eux, un déficit compris entre 3,5 et 5 % de leur PIB sans que cela semble leur poser problème.

Le choix exclusif d’une politique de l’offre non ciblée, contrebalancée par une contraction des dépenses, elle aussi mal ciblée, aura conduit la France dans les difficultés. Le résultat, c’est une France divisée, une France qui aura vu le nombre de chômeurs s’accroître de plus d’un million, toutes catégories confondues ; une France qui aura vu la fracture territoriale s’aggraver entre des métropoles qui aspirent les capitaux privés et publics et des territoires qui ont le sentiment d’être laissés en déshérence. C’est enfin une France à l’orée d’une fracture démocratique que l’on ne pensait pas revoir et qui abîme notre République. Dans le pays de la liberté, de l’égalité et de la fraternité, comment accepter ces divisions, ces marques de haine, cette volonté d’exclure, d’interdire, qui, si elles ne sont pas le fait du Gouvernement, se nourrissent de l’échec de sa politique ?

Or, depuis plusieurs mois, voire une année, des organismes internationaux comme l’OCDE, le FMI, voire même la Commission européenne, plaident en faveur d’une véritable relance de l’investissement public, moteur d’une croissance novatrice, dans trois grands domaines, et d’abord dans la transition écologique. Je vous rappelle que depuis le 8 août nous vivons à crédit sur les ressources naturelles de notre planète et que cette dette écologique est bien plus préoccupante qu’une dette financière parce qu’elle ne pourra jamais être étalée, restructurée ni annulée.

Le deuxième domaine est l’amélioration de notre système d’éducation, de formation et d’innovation, notamment par le déploiement du très haut débit sur tout le territoire. Le troisième domaine concerne bien sûr les transports publics dont les infrastructures ne permettent pas de répondre aux besoins de déplacement.

Le plan Juncker, qui devait apporter des réponses dans ces trois domaines, a en fait montré ses limites. Nous sommes bien en deçà des besoins ; surtout le ratio attendu de quatorze euros privés investis pour un euro public est très loin d’être atteint.

Dans le même temps, la contraction des ressources des collectivités territoriales, d’abord sous le coup de la suppression en 2010 de la taxe professionnelle puis de la diminution sans précédent de la dotation globale de fonctionnement, aura été extrêmement pénalisante pour le maintien et le développement du patrimoine public. Selon une étude de l’Observatoire français des conjonctures économiques – l’OFCE –, l’accent a été tellement mis sur la question de la dette publique que la dépréciation du patrimoine public a été occultée.

Entre 2009 et 2015, l’investissement public a reculé de 4,2 à 3,5 points de PIB. Mais si on prend en compte l’usure et la dépréciation des infrastructures – nos routes, notre réseau ferré, nos bâtiments publics – l’accumulation d’actifs nets représentant le stock de capital public français atteint un point bas de 0,2 point du PIB en 2015 et cela alors même que les réductions de DGF n’en étaient qu’aux balbutiements. A force de vous focaliser sur le passif, vous en avez oublié l’actif et finalement, comme le note l’OFCE, la situation des administrations publiques se dégrade, leur niveau d’endettement augmentant en même temps que leurs actifs non financiers diminuent.

Pendant ce temps des centaines de milliards d’euros de liquidités sont déversées par la Banque centrale européenne sans que l’économie réelle en tire un quelconque bénéfice faute d’un nouveau modèle de croissance. Quand face au robinet monétaire grand ouvert, il y a l’austérité budgétaire prônée par l’ordolibéralisme allemand, relayé par les dogmes européens, on ne marche pas sur ses deux jambes. Tel est l’échec de la zone euro et du Gouvernement en matière de croissance.

D’ailleurs quand on voit les recettes de l’impôt sur les sociétés s’effondrer, on peut mesurer combien des choix comme celui de créer un crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi – CICE – favorisent peu l’investissement privé et la relance de la production.

C’est pourquoi je dis à nos collègues de l’opposition, qui aspirent à devenir la majorité, que lorsqu’ils prônent à qui mieux mieux une rigueur excessive au risque d’étouffer la croissance, ils font fausse route. Les préconisations des organisations internationales vont à l’encontre des méthodes de Père Fouettard, que M. Fillon, leur nouveau champion, voudrait imposer à la France. Cent dix milliards de dépenses publiques en moins, ce sont des drames sociaux, économiques et territoriaux à venir. C’est plus de fragilité pour les plus faibles, plus d’inégalités, plus de division.

L’urgence est a contrario de retrouver des marges de manœuvre par le biais d’une fiscalité plus juste et plus efficace, plus égalitaire aussi, grâce à une vraie réforme fiscale, celle que le Gouvernement a malheureusement abandonnée.

C’est pourquoi nous réitérons nos propositions pour aller beaucoup plus loin en matière de lutte contre la fraude, l’évasion et l’optimisation fiscales. Les scandales à répétition, qui touchent tous les domaines – les multinationales, les GAFA – Google, Apple, Facebook, Amazon – comme le football, sapent le contrat social et amoindrissent les capacités des États.

Durant ces quatre années et demie, il aurait été judicieux de faire sauter le verrou de Bercy, d’interdire vraiment l’utilisation de paradis fiscaux par les banques, de créer un délit d’incitation à la fraude fiscale. C’est avec de telles mesures que l’on combat la spoliation de richesses par une petite caste sans scrupule. Dois-je rappeler qu’au niveau européen, selon les chercheurs, les organisations non gouvernementales et les travaux parlementaires, ce sont mille milliards d’euros qui sont soustraits à l’effort collectif.

Ce combat n’est pas seulement moral, il est démocratique ! Comment avoir confiance dans notre système démocratique si le règlement des dossiers des tricheurs reste dans le flou ? Je n’ai pas besoin de vous rappeler l’adage qui dit que quand c’est flou c’est qu’il y a un loup.

M. Jean-Luc Laurent. Un gros loup même !

M. Nicolas Sansu. À cet égard, quelle sera l’issue du traitement par Bercy des infractions révélées par les Panama Papers ? Cela ne peut pas être laissé au libre arbitre de Bercy ! Le dernier mot doit revenir aux tribunaux si l’on veut que le soupçon laisse place à la transparence.

De même, nous ne comprenons pas le choix de revenir sur la contribution additionnelle de 3 % sur les dividendes versés, contribution additionnelle, soit dit en passant, qui n’a jamais empêché notre pays d’être champion toutes catégories en matière de versement de dividendes ! Bien que cette mesure puisse être étendue pour répondre aux injonctions de l’Union européenne – le rapport du Gouvernement le montre – vous préférez vous ranger du côté des financiers en accroissant le nombre des dérogations et des exonérations. Vous revenez ainsi sur une mesure à forte charge symbolique puisque votée dans le cadre de l’examen du PLFR pour 2012, soit le seul texte financier qui respectait le contrat passé avec les Français par le Président de la République.

Enfin vous me permettrez d’évoquer le sujet de l’article 75 du PLF pour 2016 et de ses conséquences. Alors que nous avions proposé, avec d’autres, de rétablir le principe de la demi-part des veuves, supprimée par le gouvernement Fillon, le Gouvernement a choisi, pour corriger une injustice, de relever le revenu fiscal de référence. Or cette disposition a fait sortir de nombreux contribuables du champ de l’impôt sur le revenu – et c’est justice, je le redis. Mais ceux-ci ont de ce fait aussi été exonérés de la taxe d’habitation.

Le calcul réalisé à l’époque par notre rapporteure générale concluait à une perte moyenne de 2 % des bases de taxes d’habitation. Mais ce n’est qu’une moyenne : votre abdomen peut être à 37 ° C si vous avez les pieds dans le frigo et la tête dans le four. C’est ce qui se passe avec cette mesure qui est très pénalisante pour les communes et les établissements publics de coopération intercommunale comptant beaucoup de foyers modestes et met en péril des budgets communaux : les services fiscaux ont livré en mars 2016 des données bien différentes de la réalité. Notre rapporteur du jour l’a d’ailleurs évoqué à juste titre et je l’en remercie.

Cette mesure vient s’ajouter aux difficultés causées par l’exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties pour les bailleurs sociaux et aux diminutions de la dotation globale de fonctionnement, d’autant plus insupportables quand on traverse des difficultés.

Monsieur le secrétaire d’État, il est impérieux de trouver une solution à ce problème sur l’existence duquel j’ai alerté tous nos collègues et les associations d’élus. l’Association des maires de France, l’AMF, vient d’ailleurs de communiquer sur ce sujet. Ce n’est pas par particularisme ou par régionalisme : c’est parce que, à la suite de la métropolisation et de la réfaction du soutien public, les politiques publiques ne viennent plus corriger les inégalités, qu’elles soient sociales ou territoriales, mais les aggravent, introduisant malheureusement le poison de la division et de la haine.

Monsieur le secrétaire d’État, ce PLFR pour 2016 vient corriger à la marge une trajectoire que les Français ont manifestement rejetée, une trajectoire qui n’a pas su rassembler, même pas la gauche, une trajectoire qui est venue percuter des engagements de campagne que nos compatriotes estiment non tenus.

Les députés du groupe de la Gauche démocrate et républicaine ont élaboré des propositions sur les sujets de la fraude et de l’évasion fiscales comme en matière d’égalité territoriale : leur sort conditionnera notre vote final.

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Buisine.

M. Jean-Claude Buisine. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, chers collègues, je débuterai cette intervention par un détour par le cinéma. Sully, le dernier film de Clint Eastwood, met en scène un pilote d’avion qui, confronté à une situation critique, décide avec sang-froid, courage et pragmatisme d’amerrir en urgence, sauvant ainsi la vie de ses passagers. En matière de finances publiques, cette majorité a réussi l’atterrissage malgré des vents contraires. Nous avons tenu la trajectoire quand vous, chers collègues de l’opposition, préconisez l’asphyxie budgétaire.

Ce dernier collectif budgétaire traduit l’engagement de la majorité à redresser les comptes publics tout en gardant le cap de la justice sociale. À aucun moment de ce quinquennat nous n’avons voulu punir nos concitoyens les plus vulnérables. Nous nous sommes attachés depuis trois ans à faire sortir les contribuables les plus fragiles du champ de l’impôt sur le revenu.

Les estimations, tant en matière de croissance économique que de niveau de déficit public, ont été validées par le Haut conseil des finances publiques. Le projet de loi de finances pour 2017 a été jugé conforme par la Commission européenne. Ce sont là deux institutions indépendantes, dont le jugement n’est éclairé que par la vérité des chiffres : nous avons réduit le déficit, stabilisé la dette et encadré la dépense.

Ce collectif budgétaire porte bien son nom. Il est le fruit d’une collaboration confiante entre un gouvernement et sa majorité qui, dans sa diversité, s’est pleinement reconnue dans ce projet.

Celui-ci s’articule autour de quatre axes : la lutte contre la fraude fiscale, les mesures en faveur de l’innovation, dont la mise en place attendue du compte PME innovation, les mesures de mise en conformité avec la jurisprudence du Conseil constitutionnel et celles visant à adapter la fiscalité locale à la nouvelle carte intercommunale.

Moi qui, comme vous le savez, ai été inspecteur des impôts pendant de nombreuses années, je ne peux que me féliciter des moyens donnés aux agents de la direction générale des finances publiques, la DGFIP, et à ceux de la direction des douanes et droits indirects, la DGDDI, notamment, pour lutter plus efficacement contre l’optimisation et la fraude fiscales. Il ne s’agit pas d’engager une chasse aux sorcières contre les riches : il s’agit de rapatrier ces ressources fiscales plutôt que fermer des hôpitaux, réduire les moyens des écoles, casser les services publics. Il ne me semble pas que les soutiens du candidat Fillon s’activent sur ce thème.

Non, mesdames et messieurs de l’opposition, il n’y a pas qu’une alternative. Vos propositions en matière fiscale sont dangereuses, non seulement pour les finances publiques mais aussi et surtout pour les Français. Vous mettriez en péril l’indépendance financière de la France avec vos coupes budgétaires et vos cadeaux fiscaux non financés. Vous ne respectez pas les efforts consentis par les plus modestes. Vous avez vos priorités : vous voulez supprimer l’impôt sur la fortune tout en augmentant la TVA de deux points quand nous avons augmenté l’ISF et stabilisé la TVA. Avec un tel projet, ce n’est pas demain qu’on réduira les inégalités en matière fiscale.

M. Alain Rodet. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Claudine Schmid.

Mme Claudine Schmid. Monsieur le Président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général suppléant, mes chers collègues, ce projet de loi de finances rectificative, qui vient clôturer l’année 2016, reflète malheureusement les désillusions de votre politique, qui a préféré des choix de court terme aux réformes d’ampleur et aux économies réelles sur la dépense publique.

Malgré les propos du Président de la République, rappelés par notre collègue Dominique Lefebvre, vos échecs sont nombreux : la dette explose, la croissance est encore très faible, la réduction du déficit reste modeste et l’absence de résultats économiques et sociaux ne peut que nous inquiéter.

La croissance est toujours sous-estimée par le Gouvernement. Si celui-ci a modifié sa prévision pour 2016 – celle-ci est désormais de 1,4 % au lieu de 1,5 % – son hypothèse de croissance pour 2017 frôle l’irréalisme. En effet elle reste de 1,5 %, supérieure aux prévisions les plus récentes des organisations internationales et des instituts de conjoncture. Elle ne tient pas compte non plus des évolutions qui marquent le contexte économique, comme le vote britannique en faveur du Brexit ou le ralentissement des échanges commerciaux au niveau mondial.

Le niveau du déficit public est confirmé à 3,3 % en 2016. Selon le Haut conseil des finances publiques, cette prévision est réaliste mais elle est conditionnée à une stricte gestion des dépenses en fin d’année. Là encore, il faut rappeler qu’un tel niveau de déficit distingue la France du reste de l’Europe puisqu’il reste nettement supérieur à la moyenne de la zone euro et de l’Union européenne.

En 2015, la France comptait parmi les quatre derniers États de la zone euro à afficher un déficit public supérieur à 3 % du PIB aux côtés de la Grèce, de l’Espagne et du Portugal. À en croire les dernières prévisions de la Commission européenne, il devrait en aller de même en 2016 voire, possiblement, en 2017, la Commission anticipant un déficit public effectif, respectivement, de 3,3 % et 2,9 % pour ces deux années en France – mais de 3,1 % en 2018.

Je tiens à rappeler que, certes, le niveau du déficit était élevé en 2012 mais qu’il avait été contenu suite à la crise de 2008, la plus grave depuis 1929.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Quatre ans, tout de même !

Mme Claudine Schmid. Vos satisfecit sur vos résultats budgétaires me conduisent à dénoncer votre politique, qui consiste à boucler un budget sans véritable économie structurelle. Le Haut conseil des finances publiques rappelle à ce titre que, malgré les nombreuses mesures nouvelles annoncées au cours de l’année 2016 et l’ampleur des sous-budgétisations, le Gouvernement réussirait à tenir son objectif de dépenses de l’État uniquement grâce à des économies non pérennes telle que, comme cela a été rappelé à plusieurs reprises, les rentrées fiscales suite à la lutte contre la fraude – dont nous nous félicitons, mais ces rentrées demeurent exceptionnelles.

Les quelques 5 milliards de crédits ouverts sont aussi financés par des économies non récurrentes : 2,9 milliards au titre des intérêts de la dette et 1,9 milliard au titre des prélèvements sur recettes au profit de l’Union européenne et des collectivités territoriales, en raison d’une révision à la baisse des versements effectués au titre du Fonds de compensation de la TVA.

En clair, le budget qui nous est présenté est extrêmement fragile, la baisse des dépenses publiques étant très relative.

Puisqu’il me reste quelques instants, monsieur le secrétaire d’État, je terminerai en rappelant que vous vous êtes félicité des progrès accomplis en matière de justice fiscale. Mais qu’en est-il pour les non-résidents, dont l’imposition a augmenté d’au moins 77 % en 2012 ? Tout à l’heure, des amendements seront présentés en séance ; j’espère qu’ils seront acceptés afin que la justice fiscale soit effectivement rétablie.

M. Philippe Vigier. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Philippe Vigier.

M. Philippe Vigier. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le vice-président de la commission des finances, rapporteur général suppléant – si je ne me trompe pas (Sourires) – mes chers collègues, ce projet de loi de finances rectificative pour 2016, dernière année de plein exercice de la législature, révèle l’ampleur de l’échec de François Hollande.

Pour la quatrième année consécutive, la politique des finances publiques du Gouvernement reste dépourvue de vision. Seule ambition ? Dissimuler les mauvais résultats du quinquennat. En effet, monsieur le secrétaire d’État, le Président de la République a renié chacune de ses promesses les unes après les autres : les objectifs de réduction des déficits publics ne sont pas respectés, le poids de la dette publique continue à s’aggraver, le poids des prélèvements obligatoires n’a pas été réduit et les dépenses publiques ne sont pas tenues – évidemment, cela fait mal, mais c’est ainsi !

Tout d’abord, il convient de rappeler que les hypothèses macro-économiques de croissance du produit intérieur brut permettant de calculer les recettes restent manifestement surévaluées. Certes, le projet de loi de finances rectificative se fonde sur une hypothèse de croissance du PIB que vous avez ramenée de 1,5 % à 1,4 % mais, malgré une révision à la baisse, cette prévision de croissance se trouve encore selon le Haut conseil des finances publiques, « dans le haut de la fourchette des prévisions disponibles », qui table plutôt sur une croissance située entre 1,2 % et 1,3 %.

Les années précédentes, monsieur le secrétaire d’État, le Gouvernement avait pris l’habitude de retenir la moyenne du consensus des économistes, ce qui était raisonnable – nous l’en avions d’ailleurs félicité. Nous regrettons qu’il s’en éloigne désormais. En effet, une croissance moindre que prévue comporte des conséquences non négligeables en termes de recettes, de l’ordre de 4 à 6 milliards pour 2016 – et, bien entendu, de déficit – que le Gouvernement passe totalement sous silence dans ce projet de loi.

Rappelons l’engagement n9 de François Hollande : « Le déficit sera ramené à 3 % en 2013 et l’équilibre sera atteint en 2017 ». Il ne faut pas l’oublier ! L’objectif de 3 %, loin d’avoir été réalisé en 2013, ne le sera toujours pas en 2016 puisque le déficit devrait s’élever à 3,3 %.

À la fin du quinquennat, en tenant compte des surestimations de recettes, des économies qui ne seront pas réalisées, des anticipations en 2017 de recettes prévues normalement en 2018 ainsi que des « bombes budgétaires » laissées par le Gouvernement à la prochaine majorité, ce ne sont pas loin de 18 milliards qui manqueront…

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Cela ne va pas ? Achetez un boulier !

M. Philippe Vigier. Nous verrons, monsieur le secrétaire d’État ! Nous ferons les comptes, un jour ! Cela signifie que le déficit pour 2017 se situerait plutôt aux alentours de 3,5 %. Quoi qu’il en soit, monsieur le secrétaire d’État, vous ne pouvez pas me reprendre s’agissant de mon propos sur l’engagement n9 du Président…

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Un boulier !

M. Philippe Vigier. …car c’est ce qu’il a écrit.

La dette publique, quant à elle, a augmenté de 275 milliards entre 2012 et 2016 – contre 600 milliards auparavant – et, monsieur le secrétaire d’État, dépasse en réalité les 100 % de PIB…

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Cela ne va pas, non ?

M. Philippe Vigier. …puisque le Gouvernement a reporté environ 90 milliards d’euros de dette sur les années futures grâce au mécanisme des primes d’émissions…

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Ce n’est pas vrai !

M. Philippe Vigier. …qui existait auparavant mais que vous avez amplifié.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. 90 milliards… Où êtes-vous allé chercher ces chiffres ?

M. le président. Vous aurez l’occasion de répondre tout à l’heure, monsieur le secrétaire d’État. Laissez monsieur Vigier poursuivre son propos !

M. Philippe Vigier. Les chiffres ont la vie dure et, moi, je vous ai écouté !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Vous n’étiez pas là !

M. Philippe Vigier. Les prélèvements obligatoires, quant à eux, n’ont cessé d’augmenter depuis 2012 et continueront à progresser en 2016. Au total, c’est une augmentation de près de 78 milliards qui a été décidée en quatre ans, impactant les ménages à hauteur de 65 milliards d’euros et, les entreprises, de 13 milliards.

Ainsi, les déclarations du ministre des finances – votre collègue Michel Sapin – selon lesquelles « depuis le printemps 2014 le Gouvernement s’est efforcé de ne plus proposer au vote du Parlement de nouvelles hausses d’impôt ou de charges » sont démenties par les faits. Le seul impôt sur le revenu aura augmenté de 13 milliards d’euros alors que vous déclariez, monsieur le secrétaire d’État – ou peut-être était-ce Michel Sapin – que « l’ensemble des mesures prises depuis 2012 n’auront pas conduit à augmenter les recettes de l’impôt sur le revenu, elles les auront même réduites ».

Enfin, les dépenses publiques ne sont pas tenues : entre 2012 et 2016, elles auront augmenté de 73 milliards d’euros.

Je prendrai l’exemple du pacte de responsabilité, qui prévoyait 50 milliards d’économies de 2015 à 2017 – c’était une promesse de François Hollande pour la fin de son quinquennat. Compte tenu des 73 milliards de dépenses supplémentaires, je vous laisse faire l’opération, que vous avez bien comprise. Permettez-moi donc de douter que la promesse de 50 milliards d’économie sera tenue ! Au contraire ! En 2017, la hausse de la dépense publique sera de 20 milliards.

Rappelons que, pour 2015, la Cour des comptes – pas moi, la Cour des comptes ! – a jugé que l’effort d’économies réalisé s’est élevé à 12 milliards d’euros – j’espère que vous conviendrez au moins de ce chiffre. S’il est donc réel, il reste sensiblement inférieur à celui affiché dans le programme de stabilité, d’environ 18 milliards. Pour 2016, cette situation devrait naturellement se reproduire puisque le Gouvernement s’obstine à refuser toute réforme structurelle. Ainsi, les réductions de dépenses proprement dites devraient avoisiner les 6 milliards d’euros seulement sur les 16 milliards promis.

Vous surévaluez les économies réalisées sur l’ONDAM, vous attribuez des économies dues aux décisions prises par les partenaires sociaux alors même qu’il n’y a aucun accord sur l’Unédic et vous prétendez effectuer 800 millions d’économies sur la masse salariale alors que, pour la première fois depuis trois ans, vous augmentez les effectifs : en 2016, l’augmentation de la masse salariale sera de 4 % !

En outre, sur les fameux 5 milliards d’économies prévues par l’État, seul 1,5 milliard d’économie serait réellement réalisé.

J’ajoute qu’en loi de finances initiale, vous avez continué de ponctionner les agences de l’eau, les chambres de commerce et d’industrie, l’agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, l’agence de financement des infrastructures de transport de France ou, encore, la caisse de garantie du logement locatif social. Dans ce projet de loi de finances rectificative, voilà que vous allez chercher des ressources dans le fonds de prévention des risques naturels majeurs, de l’office national de l’eau et des milieux aquatiques ou, encore, du fonds de compensation des risques de l’assurance de la construction.

Il en va de même en ce qui concerne la baisse de 3,5 milliards des dotations aux collectivités territoriales. Comment ces dernières réagiront-elles à une telle baisse, puisque cette année sera encore l’occasion de ponctions importantes alors que des transferts de charges toujours plus importants sont opérés ? Chacun aura compris les conséquences de cette politique : une baisse – constatée – de l’investissement local et, malheureusement, une hausse des impôts locaux.

Enfin, vous multipliez les artifices comptables, notamment en anticipant en 2017 des recettes qui auraient dû être perçues en 2018. Dans le cadre du PLF pour 2017, c’est 1 milliard d’euros que vous avez ainsi prélevé. Le PLFR continue dans cette voie en anticipant 400 millions d’euros, qui manqueront donc au budget de l’État en 2018 – il s’agit de cette fameuse partie de la C3S, la contribution sociale de solidarité des sociétés, acompte qui sera demandé aux grandes entreprises alors que le Président de la République – c’est ce que j’avais compris – avait indiqué que cet impôt serait totalement supprimé en 2017 dans le cadre du pacte de responsabilité.

Je dirai également un mot des crédits de la défense. J’imagine que vous m’expliquerez tout à l’heure dans votre réponse, monsieur le secrétaire d’État, pourquoi un décret d’avance annule 672 millions de crédits de paiement puis, quasi immédiatement, 672 millions sont réinscrits.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. C’est vrai.

M. Philippe Vigier. J’avoue ne pas comprendre mais j’imagine que vous voudrez bien m’apporter des explications, naturellement.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Je ne vous répondrai pas. Je ne vous parle plus.

M. Philippe Vigier. Seul le prononcé fait fois.

Pour les opérations extérieures, pourquoi prévoir 450 millions d’euros en loi de finances initiale lorsque l’on sait que la dépense sera d’un milliard ? En tant que béotien, je souhaite simplement comprendre.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Là, vous avez raison ! Vous en êtes un !

M. Philippe Vigier. Gérant une collectivité depuis quelques années sans augmenter les impôts, je suis prêt à vous défier en la matière ! Les béotiens éclairés, cela existe aussi !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Vous êtes encore dans les ténèbres !

M. Philippe Vigier. Les chiffres, monsieur le secrétaire d’État, sont très clairs : 450 millions d’inscription budgétaire alors que la dépense sera d’un ou 1,2 milliard, circulez ! Il n’y a rien à voir ! Tout est parfait !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. M. Lefebvre a expliqué tout cela lorsque vous n’étiez pas là !

M. Philippe Vigier. J’étais dans les embouteillages, et vous savez pour qui !

Mes chers collègues, avec cette dernière année de plein exercice, le seul choix que fait François Hollande est celui d’un immobilisme coupable en attendant que son successeur prenne à sa place les mesures nécessaires au redressement de notre pays.

M. Jean-Luc Laurent. On verra !

M. Philippe Vigier. Vous avez souvent été durs dans le passé et, monsieur le secrétaire d’État, il est dommage que vous ne vouliez pas entendre un certain nombre de chiffres dont vous aurez du mal à dire qu’ils sont faux.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Un boulier !

M. Philippe Vigier. Nous vous avons demandé de faire le choix du courage en revenant sur les erreurs commises depuis le début de ce quinquennat et en engageant sans tarder les chantiers structurels que nous appelons tous de nos vœux. Nous n’avions pas d’illusion mais nous savons maintenant que ce Gouvernement, comme il l’a fait depuis le début du quinquennat, reste sourd à nos propositions. C’est pourquoi, je ne vous surprendrai pas, le groupe UDI votera contre ce projet de loi.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Cela nous honore. Pour une fois, je suis heureux que vous ne le votiez pas !

M. le président. La parole est à Mme Bernadette Laclais.

Mme Bernadette Laclais. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général suppléant, chers collègues, comme je l’ai fait les années précédentes lors de la discussion des PLF ou des PLFR, je viens aujourd’hui plaider la cause de l’épargne de proximité en faveur de nos PME et de ce que l’on appelle les investisseurs providentiels.

Vous connaissez le constat : en France, une épargne citoyenne importante est disponible – plus de 4 000 milliards d’euros en placements financiers, dont 37 % en assurance vie, principalement en placements non risqués. Nous savons tous, que, particulièrement en France, cette épargne est orientée vers la rente et non vers l’investissement productif : l’investissement en non coté au capital des PME est totalement marginal, or, les PME sont vecteur de croissance économique et les emplois se créent principalement dans les entreprise naissantes. Le PEA-PME a non seulement difficilement démarré mais il concerne quasiment uniquement les ETI cotées en bourse car sa gestion est plus naturelle pour les banques et les Français, il faut bien le reconnaître, ont une véritable aversion envers le risque.

Les PME non cotées éprouvent donc les plus grandes difficultés à se financer en fonds propres. Il est fondamental de favoriser une épargne citoyenne de proximité. C’est le rôle des business angels ou investisseurs providentiels qui non seulement investissent dans le non coté mais, aussi, accompagnent les entreprises dans lesquelles ils investissent. Ce rôle a été reconnu par la mission Carré-Caresche de septembre 2015 : « La mission a acquis la conviction que ce rôle des business angels, qui est probablement en proportion plus crucial en France que chez plusieurs de nos voisins, doit absolument être conforté car il relève d’une mission que le législateur pourrait qualifier « d’intérêt général ».

Toutefois, il faut distinguer sans les opposer – ils sont tous utiles à l’économie – les business angels, investisseurs de proximité, de ceux que l’on appelle les « super angels », dont les moyens financiers sont bien supérieurs.

Ces investisseurs de proximité s’engagent dans la durée sans maîtriser le niveau de risque, qui est très important à ce stade de la vie de l’entreprise – on estime que le niveau de perte totale représente entre 40 et 50 % des investissements réalisés –, ni la liquidité, à terme, de leurs investissements, puisqu’en général la sortie, et le mode de sortie, leur sont imposés. Leur participation est en principe minoritaire, et ils accompagnent bénévolement le chef d’entreprise en le faisant profiter de leur expérience et de leurs réseaux. Les amendements que je vous proposerai concernent principalement cette première catégorie d’investisseurs, qui a besoin de mesures législatives, tant pour limiter son risque financier, que pour faciliter sa relation avec l’entreprise – et pour l’inciter à prendre des risques.

Le développement du crowdfunding, ou finance participative, que nous avons favorisé depuis trois ans, accélère la possibilité d’accès des particuliers à la souscription en capital, de plus en plus souvent, d’ailleurs, en co-investissement avec des associations de business angels. Les sociétés cibles sont en général des PME ayant moins de dix ans d’âge. Ces investisseurs ont un rôle majeur dans le développement des start-up et la garantie de leur pérennité. Les mesures gouvernementales prises en faveur du développement de celles-ci – je prendrai pour exemple le grand succès de l’initiative French Tech – nécessitent des mesures d’accompagnement et d’incitation. La relation entre investisseur et entrepreneur doit être organisée dans l’intérêt commun des deux parties.

Je vous proposerai donc plusieurs amendements en ce sens, dont certains ont déjà reçu l’avis favorable de la commission. J’espère que mes autres amendements pourront recueillir votre assentiment, monsieur le secrétaire d’État, et celui de mes collègues. Permettez-moi d’insister particulièrement sur l’un d’entre eux. Comme vous le savez, le développement du crowdfunding, ainsi que l’activité des business angels, a pour effet de multiplier le nombre de petits actionnaires, ce qui alourdit considérablement la gestion de l’entreprise et limite ses possibilités de refinancement et de changement stratégique.

Il est nécessaire, tant dans l’intérêt des investisseurs et du chef d’entreprise, que pour la pérennité de la PME, de regrouper ces actionnaires au sein de structures simples de gestion. C’est pourquoi je milite depuis plusieurs années pour que les sociétés en participation soumises à l’impôt sur le revenu, transparentes fiscalement, donnent droit aux mêmes avantages fiscaux que ceux dont bénéficient leurs homologues soumises à l’impôt sur les sociétés, ou les sociétés anonymes faisant office d’holding financières, car elles sont toutes bien plus onéreuses en coût de fonctionnement et plus complexes à gérer dans la durée.

Je tiens enfin, monsieur le secrétaire d’État, à saluer le compte PME innovation – CPI – dont chacun sait qu’il répond à un besoin. Néanmoins, s’il veut atteindre son but, il ne doit pas être réservé à une tranche totalement marginale d’investisseurs, mais être étendu à tous les business angels. Tel est l’objet de plusieurs des amendements que j’ai déposés.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Ce sont d’excellents amendements !

Mme Bernadette Laclais. Je vous remercie, chers collègues, de votre attention et de votre patience à mon égard, car j’ai été très présente en commission, et j’ai beaucoup insisté pour faire valoir mes idées : j’espère maintenant être entendue.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Vous serez entendue par la commission, en tout cas !

M. le président. La parole est à M. Alain Rodet.

M. Alain Rodet. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général par intérim, Dominique Lefebvre, mes chers collègues, ce projet de loi de finances rectificative pour 2016 permet d’envoyer un signal très clair à la majorité sénatoriale qui, à l’instigation du président de la Chambre haute et du président du groupe Les Républicains, n’a pas daigné accomplir l’acte le plus essentiel de toute assemblée parlementaire, à savoir l’examen d’un projet de loi de finances.

En effet, nos débats d’aujourd’hui mettent en valeur les efforts consentis par le Gouvernement et sa majorité pour remettre nos finances publiques sur de bons rails. Le projet en discussion confirme des résultats déjà enregistrés, à savoir que, pour la deuxième année consécutive, le déficit se réduit, en même temps que les prélèvements obligatoires – du jamais vu depuis l’an 2000 ! Cet objectif a été atteint grâce un effort partagé de l’ensemble des administrations. Dans le même temps, l’objectif national de maîtrise des dépenses d’assurance maladie – ONDAM – est respecté, ainsi que la dépense des collectivités locales.

Les informations comptables disponibles à ce stade de l’année renforcent la crédibilité d’une cible de déficit public pour 2016 maintenue à 3,3 % du produit intérieur brut. Autrement dit, le texte que nous examinons aujourd’hui permet de vérifier le sérieux et la sincérité du projet de loi de finances initiale voté l’an dernier à la même époque.

De la même manière, l’examen, au début du mois de juillet, de la loi de règlement rendant compte de l’exécution du budget de l’année 2015, nous avait permis de constater la convergence des résultats d’une gestion marquée par l’amélioration des comptes. Le Haut conseil des finances publiques, dans son avis du 18 novembre, a reconnu cette consolidation, en notant que le solde structurel prévu pour 2016 respectait l’objectif de la loi de programmation du 29 décembre 2014.

Alors, que faut-il de plus aux sénateurs engagés derrière MM. Gérard Larcher et Bruno Retailleau, puisqu’en une année, quatre textes budgétaires soulignent, tant en prévision qu’en exécution, la maîtrise coordonnée de nos finances publiques ?

Sans donner plus d’importance qu’il n’en a au mouvement d’humeur de la droite sénatoriale, nous mesurons malgré tout le légitime embarras de nos collègues de l’opposition à l’Assemblée nationale qui, notamment au sein de notre commission des finances, ont participé activement au débat budgétaire, en défendant leurs positions critiques sur le projet de loi de finances pour 2017, ainsi que sur ce projet de loi de finances rectificative.

Une assemblée parlementaire dont la majorité déclare forfait au moment d’exercer l’une de ses compétences essentielle, l’examen du budget de la nation, sous de fallacieux prétextes, ne met-elle pas gravement en cause le bicamérisme ? En relisant les comptes rendus des débats qui se sont tenus au Sénat en 2009 et 2010 à l’occasion de l’examen des projets de loi de finances, on s’aperçoit que le président Gérard Larcher et ses amis ont approuvé sans sourciller des documents budgétaires signés par le Premier ministre de l’époque, M. François Fillon, et ses ministres de l’économie et du budget. Or nul n’ignore ici que ces lois de finances, votées par la majorité parlementaire soutenant le gouvernement Fillon, avaient été bouclées avec des déficits frôlant les 140 milliards d’euros, ce qui représentait, pour 2009, un déficit égal à 7,2 % du PIB, qui fut ramené à 6,8 % l’année suivante, soit plus du double du résultat obtenu cette année.

On nous annonce, après les échéances électorales du printemps prochain, de grandes réformes institutionnelles, qui affecteraient notamment les effectifs des deux chambres de notre Parlement. Dans ce contexte, on aurait pu penser que la raison aurait fini par l’emporter dans l’enceinte du palais du Luxembourg. L’un de nos collègues du groupe de l’Union des démocrates et indépendants a dit l’essentiel, d’une façon un peu sévère, et mezzo voce, en nous rappelant que n’est pas le sénat des États-Unis qui veut.

M. le président. La discussion générale est close.

La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Nous allons passer sans tarder à l’examen des articles. Le Gouvernement y est prêt, et il est ouvert sur un certain nombre de points : il sera, comme d’habitude, respectueux et attentif dans le dialogue. Permettez-moi, avant cela, de revenir rapidement sur quelques points.

Monsieur le président de la commission, vous avez dit que la révision à la baisse de notre prévision de croissance, à 1,4 %, allait représenter entre 3,4 et 3,6 milliards de recettes en moins. Je voudrais citer des propos que vous avez tenus le 18 octobre 2016 : « Je ne critiquerai pas davantage votre prévision de croissance, parce que nous savons tous combien il est difficile de prévoir un taux de croissance à 0,2 ou 0,3 point près. Début juin, le consensus des économistes et des instituts de prévision s’établissait d’ailleurs autour de 1,5 %. Qui nous dit qu’il n’y sera pas à nouveau au mois de janvier ou de février prochain – en tout cas je l’espère. »

Nous avons une règle, assez approximative, qui veut que 0,1 % de croissance en moins représente, grosso modo, 1 milliard de recettes en moins. Comment arrive-t-on à ce chiffre ? Sur 2 000 milliards de richesses, on a environ 1 000 milliards de prélèvements obligatoires. Or si vous prenez 0,1 % de cette somme, vous arrivez à 1 milliard. C’est pour cela que vos chiffres de 3,4 ou 3,6 milliards m’ont fait réagir.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Mais il manque 2,6 milliards d’euros de recettes fiscales !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Ce n’est pas la croissance qui peut l’expliquer. Et, s’agissant de l’impôt sur les sociétés, il faudra attendre le cinquième acompte pour voir exactement quelles sont les réalisations – vous le savez aussi bien que moi.

Je voudrais revenir d’un mot sur quelques interventions qui ont posé la question de la lutte contre la fraude, et notamment sur la vôtre, monsieur Sansu. Je voudrais nous inviter à un peu plus de modération dans nos propos. Je suis prêt à ce que nous discutions de la pénalisation systématique – puisque c’est ce que vous avez appelé de vos vœux. Nous pouvons débattre du rythme d’avancement des affaires, comme du niveau des sanctions. Mais vous avez tenu, à propos des Panama Papers, des propos que je ne comprends pas bien. J’ai communiqué la semaine dernière sur le nombre de dossiers en cours, et nous verrons bien la suite qui sera donnée à ces affaires. Enfin, puisque j’ai pris connaissance de vos amendements, je voudrais nous mettre en garde collectivement contre ce que j’appellerai de « fausses bonnes idées ».

Qu’est ce qui est le plus important ? Le plus important, c’est que l’administration fiscale dispose des moyens nécessaires pour conduire ces contrôles. Aujourd’hui, je crois pouvoir dire que c’est très largement le cas, alors que ce n’était pas vrai auparavant. Et je dis cela sans vouloir polémiquer avec qui que ce soit : c’est seulement que le contexte, les outils à notre disposition et la législation ne permettaient pas de le faire. L’essentiel, c’est que nous disposions aujourd’hui des moyens nécessaires. Et je ne voudrais pas que les discours parfois excessifs que l’on entend sur ce sujet donnent l’impression que nous faisons preuve de modération dans notre action contre les systèmes de fraude ou d’optimisation fiscale agressive.

S’agissant du compte PME innovation, que vous avez évoqué avec d’autres, madame Laclais, veillons à ce que notre volonté d’atteindre quelques objectifs louables ne nous conduise pas à des excès qui pourraient créer des effets d’aubaine inacceptables. Cela a déjà été le cas par le passé, et il faudra être attentifs à cette question dans la construction de ce compte PME innovation.

Je dirai un mot sur la taxe à 3 %. Pardon de vous le dire, monsieur Sansu, mais vous avez mal présenté le sujet. Il n’est pas question pour nous de supprimer cette taxe, mais de tenir compte de la décision du Conseil constitutionnel qui a repoussé une exonération de cette taxe. Pour des raisons de constitutionnalité et de conformité avec la législation européenne, nous avons fait une proposition : elle est financièrement neutre et équilibrée, compte tenu de la compensation que nous lui avons apportée budgétairement, à hauteur de 300 millions d’euros.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. En 2017 !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. En 2017, en effet, mais vous savez, monsieur le président, puisque nous avons échangé en privé sur cette question, qu’il est possible de reconduire le dispositif.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. C’est une bonne solution.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Je dirai un dernier mot, car M. Nicolas Sansu a évoqué cette question, sur la compensation des exonérations et des dégrèvements des collectivités locales. Nous aborderons ce sujet tranquillement et sereinement. Il faut, monsieur le député, avoir en tête toute la chronologie, vous le savez. J’ai repris l’exemple de Vierzon, mais cela est vrai aussi dans d’autres localités. Un dégrèvement n’est pas une exonération. Les exonérations sont compensées l’année suivante, avec un taux qui n’est pas le même, puisqu’il s’agit du taux « historique ». Les dégrèvements, eux, sont compensés intégralement, au cours de l’année.

Pour faire des comparaisons – et il faut en faire – il ne faut pas comparer l’année 2016 avec l’année 2015, mais prendre en compte la période qui va de 2014 à 2017, parce qu’en 2015 nous avons procédé à des dégrèvements, et non à des exonérations. Or les recettes des collectivités locales, avec les inégalités et l’hétérogénéité que vous soulignez à juste titre, ont connu un pic en 2015, du fait de ces dégrèvements. Et il n’y a pas eu de remboursement d’exonérations en 2016, puisque celles-ci n’avaient pas eu lieu… Je ne veux pas m’étendre trop longuement sur ce sujet dans le cadre de cette réponse à la discussion générale, mais nous aurons un débat de fond à l’occasion de l’examen de vos amendements.

À ce stade de la discussion, je souhaiterais, monsieur le président, que nous puissions faire une courte suspension de séance.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-huit heures quarante-cinq, est reprise à dix-huit heures cinquante-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

Avant la première partie

M. le président. J’appelle maintenant les articles du projet de loi de finances rectificative pour 2016.

Article liminaire

(L’article liminaire est adopté.)

Première partie

M. le président. Nous abordons l’examen de la première partie du projet de loi de finances rectificative pour 2016.

Article 1er

M. le président. La parole est à M. Ibrahim Aboubacar, qui est inscrit sur l’article.

M. Ibrahim Aboubacar. Cet article contient une disposition extrêmement importante pour le département de Mayotte. Chacun se rappelle que je me suis souvent plaint ici de la manière dont le processus de départementalisation de Mayotte a été fait, notamment de l’insuffisance de la compensation budgétaire des charges transférées. La Cour des comptes s’est exprimée sur ce point. L’article 1er prévoit le versement, au titre de l’année 2016, d’une somme de 41 872 264 euros correspondant à la régularisation, au titre – tenez-vous bien – des années 2009 à 2015, de la compensation des charges nettes résultant du transfert de la compétence en matière d’aide sociale prévue par l’ordonnance du 28 août 2008.

Cela s’ajoute au dispositif de l’article 59 du projet de loi de finances, qui prévoit le versement, au titre de la compensation des compétences régionales, d’une somme forfaitaire fixée au prorata des compétences exercées, qui s’élève à 804 000 euros. Au total, le Gouvernement aura procédé à une régularisation de près de 10,4 millions d’euros au titre des compétences transférées dans le processus de départementalisation, qui n’avaient pas été compensées. En plus de cette régularisation, cet article prévoit également le versement au département de 9 594 939 millions d’euros au titre du droit à la compensation de la politique d’aide sociale à l’enfance.

Je tiens à le dire, y compris au président du conseil départemental, il est temps pour le département de Mayotte de penser très sérieusement à une refonte de la politique d’aide sociale à l’enfance, afin de hisser ses ambitions à la hauteur des efforts réalisés par le Gouvernement. La reconnaissance par le Gouvernement d’erreurs passées est suffisamment rare pour être souligné ici. Je vous en remercie, monsieur le secrétaire d’État.

(L’article 1er est adopté.)

Après l’article 1er

M. le président. La parole est à M. Nicolas Sansu, pour soutenir l’amendement n370.

M. Nicolas Sansu. Monsieur le secrétaire d’État a déjà évoqué cet amendement, dont j’ai fait état lors de la discussion générale. Il avait également fait l’objet d’une discussion en commission et j’ai, de plus, saisi à son sujet il y a quelque temps déjà les services du secrétariat d’État chargé du budget ainsi que le président de la commission et la rapporteure générale. Pourquoi ?

L’article 75 de la loi de finances pour 2016, en rehaussant le revenu fiscal de référence, a fait sortir de nombreux foyers modestes de l’impôt sur le revenu, ce qui les a, de facto, exonérés de taxe d’habitation. Or, lorsque les services fiscaux, qui relèvent du ministère des finances, ont notifié aux collectivités les bases fiscales, elles ont annoncé une diminution possible de quelque 2 % – j’ai la lettre –, prévision imaginée également par Mme la rapporteure générale dans son rapport d’information n3973 du 19 juillet 2016 sur l’application des mesures fiscales. C’est en tenant compte de ces notifications provisoires que les communes et les établissements publics de coopération intercommunale – EPCI –, notamment les plus fragiles, ont établi leur budget.

Or les bases définitives qui ont été communiquées récemment indiquent des disparités considérables en fonction de la sociologie de la population des communes concernées. Je rappelle que, selon le rapport de Mme Rabault, 400 millions d’euros devraient être à la charge des collectivités cette année, après une compensation intégrale en 2015 de 248 millions d’euros : les ordres de grandeur de ces deux chiffres sont très différents. Surtout, M. le secrétaire d’État a souligné qu’il en est de même une série d’années : or cela ne se vérifie pas pour toutes les collectivités. Si je prends en compte le produit de la taxe d’habitation et les allocations compensatrices d’une commune que je connais bien, l’augmentation est de 360 000 euros en 2015 par rapport à 2014, tandis que c’est bien à une baisse de 543 000 euros que nous assistons en 2016 par rapport à 2015 : telle est la réalité des chiffres. Enfin, entre les bases notifiées en mars 2016 et les bases définitives de novembre 2016, la différence, négative, s’élève à 400 000 euros – une baisse nette des recettes de fonctionnement qui n’est pas sans poser de réels problèmes pour une ville comme la mienne : je vous laisse les imaginer !

Le problème étant réel, cet amendement vise à prolonger cette année la disposition adoptée l’an passé. Je sais que cela ne serait pas sans poser des difficultés, mais c’était la seule solution à ma portée pour déposer un amendement d’appel, visant à encadrer des disparités qui mettent en grande difficulté des territoires fragiles.

M. le président. Je vous remercie, monsieur le député.

M. Nicolas Sansu. Je termine, monsieur le président, car cette situation intéresse beaucoup de monde.

M. Philippe Vigier. C’est très important.

M. Nicolas Sansu. Nous examinerons le PLF et le PLFR en deuxième lecture. Tout est donc possible. De plus, l’Association des maires de France, l’AMF, a publié un communiqué vendredi dernier sur le sujet. La protestation monte dans les territoires les plus fragiles : monsieur le secrétaire d’État, il faut faire attention au risque démocratique qui pourrait se profiler derrière ces difficultés.

M. Philippe Vigier. Très bien.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Lefebvre, suppléant Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Comme Nicolas Sansu l’a lui-même souligné, il s’agit d’un amendement d’appel, que nous lui avions demandé de retirer en commission – je parle sous son contrôle – afin qu’il le dépose de nouveau en séance publique. Il aurait en effet été difficile à la commission des finances d’adopter un amendement dont les conséquences financières se chiffrent en plusieurs centaines de millions d’euros.

Nous avons pensé qu’il serait utile que cette question fasse l’objet d’une clarification dans l’hémicycle afin, tout d’abord, que tout le monde sache de quoi il retourne. Il convient de préciser que ce débat ne change rien pour le contribuable exonéré : ce sont les modalités de compensation aux collectivités qui sont concernées. Nous avons déjà débattu dans le PLF de ces mesures : il fallait en effet, pour les financer, procéder à une révision des variables d’ajustements.

Nous attendons, monsieur le secrétaire d’État, vos explications sur la manière dont les collectivités locales se verront appliquer des mesures rendues nécessaires par les conséquences sous l’actuel quinquennat de mesures adoptées sous le précédent. Votre intervention éclairera le débat.

À titre personnel, je ne peux qu’émettre qu’un avis défavorable sur cet amendement, compte tenu de ses conséquences financières.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Premièrement, cette question ne concerne que la taxe d’habitation : elle ne concerne pas le foncier bâti. Je tiens à le souligner parce que, si la compensation a été immédiatement calculable pour le foncier bâti, c’est pour des raisons techniques que, l’année dernière, nous avons pris les mesures que M. Lefebvre a rappelées et qui ne concernent que la taxe d’habitation. Sur le reste, ce furent les dégrèvements et les compensations habituelles.

Deuxièmement, cette question n’est pas affectée par le taux qui résulte du calcul des variables d’ajustement. Comme je l’ai déjà rappelé, en matière d’exonération de taxe d’habitation, l’État verse l’année suivante à la collectivité une compensation qui est calculée sur la base des taux historiques de 1991, dans la mesure où la position de l’État, qui peut être contestée, n’en est pas moins constante : il a toujours estimé qu’il n’a pas à compenser les hausses de fiscalité que les collectivités territoriales ont pu décider.

M. Nicolas Sansu. Ici, ce n’est pas une décision des collectivités.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. C’est la pratique de l’État depuis des années. Je ne dis pas qu’il ne faudra pas la réviser un jour, du fait que nous en arrivons désormais à des écarts importants.

Les exonérations de taxe d’habitation sont donc toujours compensées à un taux inférieur, qui est lié, non pas au taux de réfaction lié aux variables d’ajustement, mais à la différence entre le taux actuel et le taux de 1991.

Troisièmement, comme je l’ai également rappelé, il a été décidé l’an dernier de procéder pour des raisons techniques à des dégrèvements, si bien qu’en 2015 les budgets des collectivités ont été compensés intégralement. En 2016, elles n’ont donc pas perçu de compensation au titre des exonérations de taxe d’habitation puisque, je le répète, leurs budgets avaient été compensés dès 2015 sous forme de dégrèvements.

Je prendrai l’exemple d’une collectivité que vous connaissez bien, monsieur le député. Nous nous sommes livrés à des simulations sur une quinzaine d’entre elles – il n’est pas possible de le faire sur toutes de manière aussi simple, je vous dirai pourquoi. En 2014, cette commune a bénéficié au titre de la taxe d’habitation d’une compensation de quelque 841 000 euros et en 2015 de 931 000 – un chiffre bien supérieur, puisqu’elle a alors bénéficié de dégrèvements et non pas d’une compensation pour exonérations. En 2016, la compensation est retombée à 740 000, du fait qu’il n’y avait pas à compenser les exonérations de 2015. En 2017, selon les simulations de nos services, la commune en question sera compensée de 984 000 euros, puisqu’elle bénéficiera des compensations au titre de 2016 versées en 2017. Le niveau sera donc très largement supérieur à celui de 2014, voire de 2015.

M. Nicolas Sansu. Non.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Si, puisque la commune touchera en 2017 des compensations qu’elle aurait dû toucher en 2016 et qu’elle avait touchées de la même manière en 2015 – je vous prie de m’excuser du caractère technique de la question mais je crois que vous connaissez parfaitement le sujet.

Cet historique rend possible un effet de trésorerie.

S’agissant de l’impact possible des 2 % signalés sur les notifications des bases prévisionnelles par nos services, je tiens à souligner que ce calcul résultait de la moyenne nationale. Pour vous dire la vérité, in fine, la variation moyenne s’élève exactement à 2,24 % – un chiffre légèrement supérieur. Toutefois, suivant la typologie des collectivités, c’est-à-dire compte tenu de la nature de la concentration, dans certaines communes, des populations pauvres – cet adjectif n’a rien de péjoratif – ou modestes, ce taux peut être encore supérieur, alors qu’il peut être voisin de zéro dans d’autres collectivités.

En 2017, les collectivités qui ont été plus affectées que prévu verront leur compensation substantiellement majorée. Elles peuvent, c’est vrai, connaître un problème de trésorerie ou de résultat de compte administratif – il faut dire les choses de manière objective. Nos services sont prêts à examiner les problèmes des communes qui seraient significativement affectées. Pour une toute petite commune de cinquante habitants, l’exonération d’un ou deux foyers fiscaux peut évidemment provoquer un bouleversement du pourcentage prévu. S’agissant de communes bien plus importantes, nous sommes prêts éventuellement à anticiper le versement des compensations dès le premier mois de 2017 si cela pouvait résoudre des problèmes de trésorerie.

Toujours est-il que l’impact de votre amendement serait de l’ordre de 300 millions d’euros : c’est hors de portée. Nos services, je le répète, sont donc prêts, comme ils l’ont déjà fait, à examiner les situations au cas par cas. Chaque fois que des maires ou des députés nous ont consultés, nous retrouvons le même phénomène…

M. Nicolas Sansu. Non.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Si, monsieur le député : un pic de recette en 2015. Comme disait ma grand-mère : « bouchée avalée n’a plus de saveur ». C’est vrai que les résultats de la comparaison de 2015 avec 2016 peuvent surprendre. La situation sera complètement corrigée, voire surcompensée dès 2017. Donc, avis défavorable à cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Nicolas Sansu.

M. Nicolas Sansu. Vous avez évoqué les allocations compensatrices : quid de la notification définitive des bases ? La différence entre les notifications provisoires transmises en mars 2016 par les services fiscaux, alors que le revenu fiscal de référence était déjà connu, et les notifications définitives qui sont transmises en ce moment aux communes et aux EPCI est considérable. La grosse difficulté, ce n’est pas seulement le niveau de l’allocation compensatrice de la taxe d’habitation, c’est cette erreur considérable pour des communes où résident des foyers modestes en grand nombre.

L’AMF a demandé, dans son communiqué, que cette situation qui pose de réelles difficultés soit corrigée. Quant à moi, monsieur le secrétaire d’État, je vous saisirai de nouveau de ce problème, car je me rends bien compte que cet amendement sera aujourd’hui rejeté. Il est vrai que je ne me faisais pas beaucoup d’illusion. Régler les situations au cas par cas, plutôt que de faire un geste ou de conduire une réflexion globale, n’est pas la meilleure des solutions. Alors que la baisse de la dotation globale de fonctionnement atteint déjà, en 2016, 1,89 % des recettes réelles de fonctionnement, cette diminution considérable du montant notifié de la taxe d’habitation par rapport au montant attendu posera de vraies difficultés à de nombreuses collectivités.

(L’amendement n370 n’est pas adopté.)

Article 2

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 593 rectifié et 125, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement n593 rectifié.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Cet amendement vise à résoudre un problème qui concerne l’ajustement des modalités de calcul de la compensation liée à la perte de recettes constatée par les autorités organisatrices de transport, les AOT, du fait du relèvement d’assujettissement des employeurs au versement transport de neuf à onze employés – c’est un sujet que la plupart des parlementaires connaissent pour l’avoir suivi.

Les travaux relatifs à cette compensation n’étaient pas complètement achevés au moment où l’article 2 a été préparé. Pour tenir compte des dernières informations disponibles, le Gouvernement propose de faire de 2015 l’année de référence, au lieu de 2014 comme initialement prévu. La mission avait en effet commencé ses travaux sur les données de 2014 alors que les évaluations ont été faites sur l’année 2015. L’amendement prévoit également un versement distinct pour les compensations au titre du versement transport collecté et reversé respectivement par l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale – ACOSS – et par la caisse centrale de la mutualité sociale agricole – CCMSA –, de façon à ce que les autorités organisatrices de la mobilité – AOM – puissent suivre plus facilement l’évolution de la compensation.

L’amendement vise enfin à retenir comme modalité de calcul un ratio de compensation appliqué au flux trimestriel de versement, puisque la compensation est prévue trimestriellement.

Cet amendement reprenant des demandes contenues dans d’autres amendements, je souhaite dès à présent que leurs auteurs se rallient à l’amendement du Gouvernement qui, je crois, les satisfait.

M. le président. La parole est à M. Philippe Vigier, pour soutenir l’amendement n125.

M. Philippe Vigier. L’intervention de M. le secrétaire d’État était très claire, tant sur les modalités de compensation que sur les modalités de revalorisation. Les parties se sont mises d’accord pour prendre 2015 comme année de référence et mettre en place un versement trimestriel. Nous sommes donc satisfaits par l’amendement n593 rectifié du Gouvernement.

M. le président. Dois-je en déduire, monsieur Vigier, que vous retirez votre amendement ?

M. Philippe Vigier. Tout à fait, monsieur le président.

(L’amendement n125 est retiré.)

(L’amendement n593 rectifié, accepté par la commission, est adopté. En conséquence, l’amendement n561 rectifié tombe.)

(L’article 2, amendé, est adopté.)

Article 3

M. le président. La parole est à Mme Claudine Schmid, pour soutenir l’amendement n197 tendant à la suppression de l’article 3.

Mme Claudine Schmid. L’article 3 prévoit, pour l’année 2016, un prélèvement supérieur à 205 millions d’euros sur les ressources et fonds de roulement de trois organismes exerçant des missions de service public, à savoir le Fonds de prévention des risques naturels majeurs, l’Office national de l’eau et des milieux aquatiques, ainsi que le Fonds de compensation des risques de l’assurance de la construction. Il convient de supprimer cet article visant à boucler un budget sans véritable économie structurelle.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Lefebvre, suppléant Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Cet amendement de suppression de l’article 3 entraînerait la suppression des prélèvements sur fonds de roulement du Fonds de prévention des risques naturels majeurs, à hauteur de 55 millions d’euros, de l’Office national de l’eau et des milieux aquatiques – ONEMA –, à hauteur de 90 millions d’euros, et du Fonds de compensation des risques de l’assurance de la construction, à hauteur de 60 millions d’euros, soit un total de 205 millions d’euros. Or ces prélèvements contribuent à l’équilibre du budget pour 2016. J’aurai l’occasion de revenir en détail sur la situation de chaque établissement concerné, car d’autres amendements proposent la suppression de chacun de ces trois prélèvements.

La commission est défavorable à cet amendement. En effet, ces trois organismes disposent de trésoreries importantes : les prélèvements prévus ne les empêchent donc pas de continuer à faire face aux besoins liés à leurs activités.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Même avis. Nous reviendrons, le cas échéant, sur la situation de chacun des organismes concernés lors de la discussion des amendements suivants.

De manière générale, lorsque des opérateurs de l’État financés sur fonds publics, par le biais de versements budgétaires ou de taxes affectées, disposent de trésoreries abondantes – je n’irai pas jusqu’à parler de « dodu dormant », mais les auteurs de cette expression se reconnaîtront – et que l’exécution de leurs missions ne nécessite pas de fonds de roulement ou de trésoreries surabondantes, il est logique, en période de nécessité budgétaire, que nous récupérions ces excédents. C’est pourquoi le Gouvernement est défavorable à cet amendement de suppression de l’article 3.

(L’amendement n197 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Vigier, pour soutenir l’amendement n107.

M. Philippe Vigier. J’ai bien entendu l’explication de M. le secrétaire d’État. D’ailleurs, lors de la discussion générale, j’ai évoqué les différents prélèvements opérés par le Gouvernement sur les chambres de commerce, sur l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie – ADEME –, qui mène pourtant des actions importantes en matière de protection de l’environnement, sur l’Agence de financement des infrastructures de transport de France – AFITF –, sur le Fonds de prévention des risques naturels majeurs, sur l’Office national de l’eau et des milieux aquatiques – ONEMA – ou sur le Fonds de compensation des risques de l’assurance de la construction.

Si ces opérateurs ont les moyens nécessaires pour fonctionner, vous nous invitez, monsieur le secrétaire d’État, à ponctionner leurs ressources. Mais ne croyez-vous pas aussi que notre intervention nuirait à ceux qui ont bien géré leur budget ? Si ces organismes ont perçu des dotations trop importantes, à un moment ou à un autre, il existe d’autres moyens de corriger le tir. Mais si ces fonds propres sont le produit d’une bonne gestion, le fait de les ponctionner d’une manière trop importante aura des conséquences négatives.

Vous m’accorderez, monsieur le secrétaire d’État, que la situation des chambres de commerce et d’industrie concernées par ces prélèvements est très différente, sur le terrain, de celles qui ont été épargnées. Ainsi, tout le monde expliquait que la chambre de commerce et d’industrie de Paris disposait de fonds propres considérables, mais elle a dû engager des opérations de restructuration très lourdes dont les effets commencent à se faire sentir sur le terrain.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Lefebvre, suppléant Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Notre collègue Philippe Vigier a parlé d’autre chose que de la situation du Fonds de prévention des risques naturels majeurs, qui est l’objet de son amendement. Lors des dernières années, ce fonds a perçu environ 200 millions d’euros de recettes annuelles, alors que ses dépenses se situaient autour de 140 millions d’euros – entre 113 millions en 2012 et 170 millions en 2013. Son fonds de roulement, qui s’élevait à 77 millions d’euros en 2011 puis à 154 millions en 2012, a été porté à 299 millions d’euros en 2015. Il sera probablement encore plus élevé en 2016 : selon nos prévisions, il s’établira à 316 millions d’euros à la fin de l’exercice. Le prélèvement de 55 millions d’euros prévu à l’article 3 ramènera donc le fonds de roulement de l’opérateur à son niveau de 2012. Dans ces conditions, il est difficile de soutenir que le Fonds de prévention des risques naturels majeurs ne pourrait pas faire face à ses obligations. Compte tenu de ses ressources et de l’écart entre ses recettes et ses dépenses, il est assez probable qu’il pourra s’en sortir. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Même avis. M. Lefebvre a parfaitement décrit la situation.

(L’amendement n107 n’est pas adopté.)

M. le président. Les amendements nos 282 et 283, déposés par Mme Rabault, ont été examinés par la commission des finances. Souhaitez-vous les reprendre, monsieur Lefebvre ?

M. Dominique Lefebvre, suppléant Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Oui, monsieur le président. Ces deux amendements sont rédactionnels.

(Les amendements nos 282 et 283, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Vigier, pour soutenir l’amendement n108.

M. Philippe Vigier. Je serai bref, car j’imagine que la réponse sera la même… L’article 3 prévoit une ponction très importante, de 90 millions d’euros, sur les ressources de l’ONEMA. Or, dans les territoires, nous avons engagé ces dernières années des politiques de reconquête ambitieuses, qui nécessitent des cofinancements avec un certain nombre d’organismes, parfois avec des agences de l’eau. Pour ma part, j’ai eu l’occasion de monter un programme pluriannuel sur six ans, mais l’agence s’est en partie désengagée. J’attendais des financements provenant de l’ONEMA, mais qu’en sera-t-il demain ? Je pose la question. Si l’Office perçoit 50 millions d’euros de recettes, vous direz peut-être que seuls 4, 5, 10 ou 20 millions d’euros ont été consommés et qu’il reste donc un « matelas » de 30 millions d’euros. Cependant, certains programmes ont été bouclés, sont en train de l’être ou vont faire l’objet d’avenants. Les prélèvements que vous prévoyez sur les ressources de l’ONEMA nous mèneront alors dans une impasse.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Lefebvre, suppléant Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Même chose que pour l’amendement n107. Nous parlons encore une fois d’un opérateur de l’État dont les recettes annuelles sont toujours supérieures aux dépenses, ce qui signifie que les besoins dont parle M. Vigier n’arrivent pas forcément très vite. Le fonds de roulement de l’ONEMA est passé de 52 millions d’euros en 2012 à 144 millions aujourd’hui. En 2015, l’excédent de recettes par rapport aux dépenses était de 20 millions d’euros. Ainsi, le prélèvement opéré à l’article 3 ramène le fonds de roulement à son niveau de 2012. C’est pourquoi la commission a donné un avis défavorable à l’amendement n108.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Philippe Vigier.

M. Philippe Vigier. J’ai entendu l’argument de M. Lefebvre. Mais, mon cher collègue, quand les critères de financement par l’ONEMA sont modifiés en cours d’année, il est facile de diminuer la participation de cet office pour préserver son fonds de roulement ! Vous affirmez qu’on revient à son niveau de 2012 : dont acte. Mais parallèlement, l’ONEMA se désengage d’un certain nombre d’opérations locales, car il craint les prélèvements à venir. Lorsque ces opérations ont fait l’objet d’une contractualisation dans la durée entre plusieurs collectivités territoriales, comment faites-vous ? Nous servons de variable d’ajustement. Nous ne pouvons pas mener des politiques ambitieuses en matière environnementale lorsqu’au détour d’un projet de loi de finances rectificative, une telle disposition empêche ces politiques de se décliner de façon pluriannuelle sur le terrain. Aussi, je le répète : il est très facile de diminuer la dépense de l’ONEMA si ses critères d’intervention sont réduits en permanence.

(L’amendement n108 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n284, déposé par Mme Valérie Rabault et repris par M. Dominique Lefebvre. Vous avez la parole pour le soutenir, mon cher collègue.

M. Dominique Lefebvre, suppléant Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Il s’agit d’un amendement rédactionnel, monsieur le président.

(L’amendement n284, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 109 et 459.

La parole est à M. Philippe Vigier, pour soutenir l’amendement n109.

M. Philippe Vigier. Peut-être aurai-je un peu plus d’écoute et de succès avec cet amendement, monsieur le secrétaire d’État…

L’alinéa 3 prévoit un prélèvement de 60 millions d’euros sur les ressources du Fonds de compensation des risques de l’assurance de la construction. Cette mesure est totalement inacceptable, pour plusieurs raisons.

Premièrement, les ressources de ce fonds proviennent des entreprises. Ces dernières ont-elles vocation à financer les dépenses publiques ?

Deuxièmement, une partie des ressources de ce fonds financent trois programmes : le programme d’action pour la qualité de la construction et la transition énergétique – je ne sais pas si Mme Royal, dont on connaît l’attachement à la transition énergétique, s’est rendu compte que ce projet de loi de finances rectificative allait permettre à l’État de faire main basse sur une partie de ces crédits –, le plan de transition numérique dans le bâtiment, qui me paraît pour le moins important, et le programme de recherche et de développement pour le traitement de l’amiante, un programme indispensable qui touche à une politique de prévention sanitaire.

L’article 3 vise à faire main basse sur ce bas de laine, si tant est qu’il existe, constitué par des entreprises pour financer des dépenses publiques. Monsieur le secrétaire d’État, nous vous demandons de réfléchir avant de maintenir cette mesure.

M. le président. La parole est à M. Daniel Goldberg, pour soutenir l’amendement n459.

M. Daniel Goldberg. Je partage le point de vue que vient d’exprimer Philippe Vigier : le Fonds de compensation des risques de l’assurance de la construction est dans une situation particulière, car il est financé par des contributions des entreprises : il ne s’agit donc pas d’argent public. Il faut bien reconnaître que ce fonds était alimenté par les artisans du bâtiment, jusqu’à la loi de finances rectificative pour 2003, si je me souviens bien, et qu’il devait prévenir un certain nombre de risques datant de longtemps.

Lors de la discussion du projet de loi Sapin 2, nous avons eu un échange, dans cet hémicycle, sur les travaux de conception-réalisation. Un certain nombre de nos collègues s’étaient émus de la situation des artisans ; j’ai échangé avec leurs représentants, qui m’ont alerté sur ce sujet.

Si le Gouvernement proposait que les 60 millions d’euros dégagés de ce fonds de compensation soient consacrés à la montée en compétences des professionnels de la construction, notamment des PME et TPE de ce secteur, sur un certain nombre de sujets comme la transition énergétique, je pourrais entendre qu’il y ait un fonds dormant qu’il faut mieux utiliser.

Mais en l’occurrence, la situation est différente : les 60 millions d’euros correspondant à des cotisations des entreprises vont rejoindre le budget de l’État et ne serviront ni à la transition énergétique ni à la recherche d’amiante.

Je souhaiterais avoir un échange avec M. le secrétaire d’État sur un fléchage différent de ces sommes qui correspondent, je le répète, à des cotisations des petites entreprises du bâtiment.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements identiques ?

M. Dominique Lefebvre, suppléant Mme Valérie Rabault, Rapporteure générale. Ces amendements visent à clarifier la situation. Le Fonds de compensation des risques de l’assurance construction – FCAC – est financé par les contributions des assurés – en français, cela s’appelle un prélèvement obligatoire. En 2003, il a été décidé de supprimer cette contribution, les missions de ce fonds arrivant à leur terme.

La question qui se pose est de savoir si ce prélèvement de 60 millions d’euros permettra à ce Fonds d’honorer les derniers engagements qui consistent en des indemnisations pour des sinistres survenus avant 1983 et à contribuer au financement d’actions de prévention, promotion de la qualité de la construction. En l’état actuel des informations, la trésorerie du Fonds représente près de 143 millions d’euros au 31 décembre, avec des fonds propres de 65 millions d’euros. Parallèlement, la provision pour sinistres, actions de prévention s’élève à 78 millions d’euros. Le prélèvement effectué sur le fonds de roulement à hauteur de 60 millions d’euros est proche de la situation nette. Il n’obère pas la capacité du Fonds à honorer ses engagements.

Je crois comprendre, mais M. le secrétaire d’État répondra, que notre collègue Daniel Goldberg propose d’utiliser cet argent à d’autres fins que celles qui avaient été initialement prévues. Selon moi, les missions de ce Fonds doivent être clairement définies. La commission a donc émis un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Je confirme les chiffres qui ont été présentés. Le FCAC dispose d’une trésorerie qui s’élève à 143 millions d’euros. Il a provisionné 77 millions d’euros pour ses actions. Les dépenses liées aux trois plans de recherche évoqués par le président Philippe Vigier se déclinent ainsi : 20 millions d’euros pour le développement des techniques en matière de détection et d’extraction de l’amiante ; 20 millions d’euros pour le plan de transition numérique du bâtiment et 30 millions d’euros pour le programme d’action pour la qualité de la construction et de la rénovation énergétique.

Après le prélèvement de 60 millions, les dépenses seront couvertes puisqu’il restera plus de 82 millions d’euros de trésorerie. Je rappelle que les dépenses du FCAC ont été de 1,3 million d’euros en 2015, de 0,8 million d’euros en 2014 pour des recettes d’un peu plus de 2 millions d’euros en 2015 et de 800 000 euros en 2014. Ce prélèvement ne remet en cause ni les missions ni l’équilibre financier du FCAC.

À quoi servira ce prélèvement ? On peut ouvrir le débat sur les aides à la pierre si vous le souhaitez, monsieur le député.

M. Daniel Goldberg. Tout à fait.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. L’unicité du budget aussi bien en recettes qu’en dépenses permettrait de le faire.

Dire que le Fonds est uniquement constitué par les contributions obligatoires des assureurs ou des entreprises, je veux rappeler que le Fonds a démarré grâce à des dotations importantes de l’État, notamment un versement en 2004 de 2,25 milliards, mais il est vrai que c’était des francs et non des euros. (Sourires.) Il n’empêche que l’on s’y retrouve assez largement. Avis défavorable donc.

M. Daniel Goldberg. Je retire l’amendement n459.

(L’amendement n459 est retiré.)

(L’amendement n109 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Dominique Lefebvre, pour soutenir l’amendement n285.

M. Dominique Lefebvre, suppléant Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Amendement rédactionnel.

(L’amendement n285, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 3, amendé, est adopté.)

Après l’article 3

M. le président. Je suis saisi de trois amendements, nos 75 rectifié, 594 rectifié et 76 rectifié, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Patrick Bloche, pour soutenir l’amendement n75 rectifié.

M. Patrick Bloche. Permettez-moi, monsieur le président, de présenter en même temps mon amendement n76 rectifié.

M. le président. Je vous en prie. Vous avez la parole pour défendre les deux amendements n75 rectifié et n76 rectifié.

M. Patrick Bloche. Ces deux amendements ont le même objet : le plafond du Centre national de la chanson, des variétés et du jazz, le CNV, lequel est pour la musique l’équivalent du CNC pour le cinéma. Nous avons eu ce débat en première partie du projet de loi de finances pour 2017. À l’issue du débat, je m’étais permis de vous donner rendez-vous pour l’examen du PLFR 2016 en redéposant, ce que j’ai fait, les deux amendements.

Ces deux amendements poursuivent le même objectif : le 75 rectifié propose un déplafonnement total, le 76 rectifié un plafonnement rehaussé de 30 à 35 millions d’euros. Depuis, le Gouvernement a bougé ce dont je me félicite. Lors de l’examen du budget de son ministère pour 2017, la ministre de la culture et de la communication avait annoncé que le Gouvernement déposerait un amendement, ce qu’il a fait, proposant que ce plafonnement passe de 30 à 39 millions d’euros.

De ce fait, il faut évidemment voter l’amendement du Gouvernement et, en responsabilité, je vais retirer mes deux amendements.

Permettez-moi cependant un dernier mot, monsieur le président. Il s’agit d’une mesure juste. Je dis cela parce que le plafonnement est actuellement de 30 millions d’euros. Pour le CNV, il est prévu un rendement de la taxe sur les spectacles de variétés qui va dépasser ces 30 millions d’euros, a fortiori en 2017. Or le problème qui se pose au CNV, c’est qu’il est obligé de redistribuer tous les fonds qu’il collecte via cette taxe. Si l’on maintenait le plafond à 30 millions d’euros, et que les recettes soient de 32 millions d’euros pour cette année 2016 comme c’est prévisible, cela voudrait dire que le CNV serait conduit à redistribuer 2 millions d’euros qu’il a collectés, mais qui ont été reversés au budget de l’État. De ce fait, il serait obligé de prendre sur sa trésorerie et à l’arrivée, la pérennité de l’équilibre financier du CNV serait dramatiquement mise en cause.

Aussi, je me réjouis de l’amendement n594 rectifié déposé par le Gouvernement, qui propose de relever le plafond du CNV à 39 millions d’euros. En conséquence, je retire mes deux amendements.

(Les amendements nos 75 rectifié et 76 rectifié sont retirés.)

M. le président. La présentation par M. Bloche de l’amendement n594 rectifié me fait penser que l’amendement est défendu.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. En effet, il l’est.

(L’amendement n594 rectifié, accepté par la commission, est adopté.)

Articles 4 à 6

(Les articles 4, 5 et 6 sont successivement adoptés.)

Article 7 et état A

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement n605.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Il s’agit de prendre en compte le vote de l’amendement précédent, l’amendement n594 rectifié qui était gagé par un ajustement des ressources allouées au plan d’accompagnement des téléspectateurs au changement de norme de diffusion – qui accompagnait la libération de la bande 700 mégahertz – via un prélèvement de 9 millions d’euros pour conserver l’équilibre.

(L’amendement n605, accepté par la commission, est adopté.)

(L’article 7 et l’état A, modifiés, sont adoptés.)

Vote sur l’ensemble de la première partie du projet de loi de finances rectificative pour 2016

M. le président. Je mets aux voix l’ensemble de la première partie du projet de loi de finances rectificative pour 2016.

(L’ensemble de la première partie du projet de loi de finances rectificative pour 2016 est adopté.)

Seconde partie

M. le président. Nous abordons l’examen de la seconde partie du projet de loi de finances rectificative pour 2016.

Article 8 et état B

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement n601.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Le présent amendement procède à l’ouverture de crédits sur le programme « Énergie, climat et après-mines » à hauteur de 2,5 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement afin d’abonder le budget de l’Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs ; elle correspond à la charge financière au titre de la prorogation jusqu’au 1er juin 2017 du dispositif d’indemnisation des mineurs licenciés pour faits de grève en 1948 et 1952. Cette prorogation est permise par un amendement du Gouvernement qui sera soumis au vote dans la suite de l’examen du présent projet de loi de finances. On anticipe sur le vote d’un amendement ultérieur concernant des mineurs injustement pénalisés en 1948 et 1952. Cela avait fait l’objet d’une proposition de loi ou d’une disposition dans une loi de finances antérieure.

(L’amendement n601, accepté par la commission, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement n602.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. L’amendement est défendu dans la mesure où il est le symétrique de l’amendement précédent.

(L’amendement n602, accepté par la commission, est adopté.)

(L’article 8 et l’état B, modifiés, sont adoptés.)

Article 9 et état D

(L’article 9 et l’état D sont adoptés.)

Articles 10 et 11

(Les articles 10 et 11 sont successivement adoptés.)

Article 12

M. le président. La parole est à M. Philippe Vigier, pour soutenir l’amendement n110.

M. Philippe Vigier. L’amendement est défendu.

(L’amendement n110, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement n595.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Il s’agit, comme c’est l’usage, de ratifier le décret d’avance de fin de gestion que votre commission a examiné il y a quelques jours.

(L’amendement n595, accepté par la commission, est adopté.)

(L’article 12, amendé, est adopté.)

Article 13

M. le président. La parole est à M. Dominique Lefebvre, pour soutenir l’amendement n232.

M. Dominique Lefebvre, suppléant Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. La commission a repris un amendement déposé par notre collègue Dalloz. L’article 13 du projet de loi de finances rectificative instaure de nouvelles procédures de contrôle fiscal qui concerneront les entreprises qui tiennent une comptabilité informatisée. Cette procédure d’examen de comptabilité permettra à l’administration de contrôler à distance le fichier des écritures comptables que lui aura transmis l’entreprise. La commission a abordé favorablement cette question.

Actuellement, ce type de contrôle a lieu sur place dans les locaux de l’entreprise. Cette nouvelle procédure sera donc moins intrusive pour les entreprises. L’inconvénient, relevé par un certain nombre de collègues de la commission, est que le dialogue oral et contradictoire entre l’entreprise et l’administration risquerait d’en pâtir. Nous avons donc adopté deux amendements pour y remédier, les amendements no232 et 233. L’amendement n232 prévoit que l’entreprise pourra demander que le contrôle ait lieu sur place, dans ses locaux, dans le cadre d’une vérification de comptabilité. La commission a voulu garantir la possibilité de dialogue avec le vérificateur pendant le contrôle. Certaines entreprises préfèrent le contact direct pour dialoguer sur certaines spécificités de leur activité.

Quant à l’amendement n233, il tend à allonger de dix à quinze jours le délai de remise du fichier des écritures comptables, les membres de la commission ayant jugé qu’un délai de dix jours était trop court, notamment pour les petites entreprises, par exemple en cas d’arrêt de maladie pendant les ponts du mois de mai.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. L’objet de cet article est de proposer une nouvelle forme de contrôle fiscal moins intrusive, ce contrôle pouvant être effectué à distance, ce qui permet de moins perturber le fonctionnement de l’entreprise. Il ne s’agit en aucun cas d’interrompre ou de refuser une procédure de dialogue qui est, de toute façon, toujours la règle – un contrôle fiscal est en effet toujours une procédure contradictoire.

Je ne comprends donc pas très la finalité de cet amendement, car la méthode proposée pour cette nouvelle forme de contrôle consiste précisément à alléger celui-ci et à ne pas imposer la présence du contrôleur à l’intérieur de l’entreprise, en évitant des demandes récurrentes souvent mal vécues par les entreprises, lesquelles ont souvent protesté contre les formes existantes de contrôle fiscal. Le Gouvernement est donc défavorable à l’amendement n232.

Il ne voit en revanche pas d’inconvénient à l’amendement n233, qui tend à porter de dix à quinze jours, le délai de transmission des pièces demandées – ce n’est en effet pas une grande affaire ! Le Gouvernement émet donc sur cet amendement un avis de sagesse bienveillante, voire un avis favorable.

M. le président. La parole est à M. Dominique Lefebvre, suppléant Mme Valérie Rabault, rapporteure générale.

M. Dominique Lefebvre, suppléant Mme Valérie Rabault, Rapporteure générale. Je retire l’amendement n232.

(L’amendement n232 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Dominique Lefebvre, suppléant Mme Valérie Rabault, rapporteure générale, pour soutenir l’amendement n233.

M. Dominique Lefebvre, suppléant Mme Valérie Rabault, Rapporteure générale. Il est défendu.

(L’amendement n233, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Dominique Lefebvre, suppléant Mme Valérie Rabault, rapporteure générale, pour soutenir l’amendement no 286.

M. Dominique Lefebvre, suppléant Mme Valérie Rabault, Rapporteure générale. Il est rédactionnel.

(L’amendement n286, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 13, amendé, est adopté.)

Après l’article 13

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement n585, portant article additionnel après l’article 13.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Cet amendement tend à dématérialiser certaines procédures de recouvrement, notamment dans le cas des procédures de fluidification ou de simplification. Il prévoit tout d’abord la généralisation de l’obligation de déposer par voie dématérialisée les déclarations de salaires, honoraires et revenus assimilés, pensions et revenus de capitaux mobiliers. Il tend également à la généralisation de la télédéclaration et du télépaiement des déclarations de prélèvements et retenues à la source sur les revenus de capitaux mobiliers, ainsi que la télédéclaration de la déclaration récapitulative des réductions et crédits d’impôt.

Il tend aussi à supprimer la possibilité de payer par l’apposition de timbres mobiles le droit de timbre prévu à l’article 1635 bis P du code général des impôts et dû par les parties à l’instance lorsque la constitution d’avocat est obligatoire devant la cour d’appel, en proposant aux représentants des justiciables – qui sont exclusivement des avocats – de bénéficier d’un mode de paiement unique, simplifié et rapide.

L’amendement a enfin pour objet de permettre la dématérialisation, puis l’envoi par tous moyens, y compris par voie dématérialisée, des avis des sommes à payer – ASAP –, que M. Buisine connaît bien, adressés aux débiteurs de produits locaux, et de sécuriser leur notification.

M. le président. La parole est à M. Dominique Lefebvre, suppléant Mme Valérie Rabault, rapporteure générale, pour donner l’avis de la commission.

M. Dominique Lefebvre, suppléant Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Monsieur le secrétaire d’État, comme vous en doutez pour avoir exercé précédemment les fonctions qui m’échoient dans l’hémicycle, la commission n’a pas pu examiner dans de bonnes conditions cet amendement, qui lui a été soumis tardivement au titre de l’article 88, et a donc émis un avis de principe défavorable. À titre personnel cependant, je considère que ces procédures de dématérialisation doivent être encouragées.

Je souhaite toutefois vous interroger sur l’obligation de télédéclaration des salaires, honoraires et pensions, qui ne s’applique aujourd’hui qu’aux déclarants ayant souscrit une déclaration comportant moins de 200 bénéficiaires, ce qui représente chaque année 1 250 000 formulaires papier. Nous nous sommes demandé, sans trouver de réponse, ce qu’il en était des particuliers employeurs. Il s’agit en effet d’une question sensible. De fait, si la dématérialisation atteint 99 % pour Pajemploi, elle n’est que de 70 % pour le chèque emploi service universel – CESU. Le dispositif proposé par l’amendement s’appliquera-t-il et, si tel est le cas, comment conviendra-t-il de procéder ? Certaines catégories d’employeurs très particuliers, que vous connaissez bien par ailleurs, pourraient en effet se trouver en difficulté.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Je comprends bien les arguments du rapporteur, mais je tiens à rappeler que ces formalités s’appliquent à partir du 1er  janvier 2018, ce qui nous laisse un an supplémentaire. À cette date, tous les particuliers employeurs devraient recourir au CESU, car c’est maintenant devenu la règle. Il en adviendra donc comme pour Pajemploi, pour lequel, comme vous l’avez rappelé, 99 % des déclarations sont dématérialisées, ce dispositif étant en outre en cours d’extinction. L’application de cette disposition au 1er  janvier 2018, que propose l’amendement, ne devrait donc pas poser de problème.

(L’amendement n585 est adopté.)

Article 14

M. le président. La parole est à M. Dominique Lefebvre, suppléant Mme Valérie Rabault, rapporteure générale, pour soutenir l’amendement n159.

M. Dominique Lefebvre, suppléant Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Il est rédactionnel.

(L’amendement n159, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Dominique Lefebvre, suppléant Mme Valérie Rabault, rapporteure générale, pour soutenir l’amendement n234.

M. Dominique Lefebvre, suppléant Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Cet amendement tend à préciser que les agents pourront procéder à l’instruction sur place des demandes de crédit de TVA des entreprises.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Je tiens à insister sur l’importance de cet article. J’ai en effet évoqué tout à l’heure le contrôle fiscal et, alors que la question de la TVA a souvent été débattue – parfois avec passion – dans cet hémicycle, l’article 14 a précisément pour objet d’introduire une procédure systématique de contrôle des remboursements de TVA, en fixant du reste des délais brefs afin de ne pas pénaliser les entreprises.

Pour ce qui est du grade des personnes susceptibles d’effectuer ces contrôles, la décision allait de soi. J’ignore si cette question relève spécifiquement du domaine législatif, car elle aurait également pu être traitée dans le cadre réglementaire, mais l’amendement de la commission peut recevoir un avis de sagesse bienveillante du Gouvernement.

M. Dominique Lefebvre, suppléant Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. C’est déjà la pratique !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Cela figure déjà en effet dans les pratiques, mais le Gouvernement est prêt, pour rassurer la commission des finances, à accepter un doublon. Sagesse bienveillante, donc.

(L’amendement n234 est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Dominique Lefebvre, suppléant Mme Valérie Rabault, rapporteure générale, pour soutenir l’amendement n235.

M. Dominique Lefebvre, suppléant Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Cet amendement, adopté par la commission, vise à encadrer les horaires et les locaux de l’entreprise où les agents des impôts pourront intervenir au titre de la nouvelle procédure d’instruction sur place des demandes de remboursement des crédits de TVA. Il s’agit ainsi de faire respecter les droits des personnes assujetties sans alourdir pour autant cette procédure. Comme le précédent, cet amendement est directement inspiré des termes de l’article L. 80 F du livre des procédures fiscales en matière de droit d’enquête. J’ai bien compris vos réponses et je sais qu’un grand nombre de membres de la commission sont très attentifs à ce que la TVA soit parfaitement contrôlée. Or, dès lors qu’on dispose d’un dispositif de contrôle, on en vient à s’interroger sur les droits des contribuables.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Si je comprends bien, il s’agit d’interdire de procéder aux contrôles durant la nuit – pourquoi pas ? mais la loi en devient quelque peu bavarde. Le Gouvernement s’en remet à la sagesse de l’Assemblée.

(L’amendement n235 est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Dominique Lefebvre, suppléant Mme Valérie Rabault, rapporteure générale, pour soutenir l’amendement n236.

M. Dominique Lefebvre, suppléant Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Cet amendement de précision, introduit par la rapporteure générale, tend à stipuler que « la décision rejetant tout ou partie de la demande de remboursement est motivée. » Des textes de valeur réglementaire prévoient déjà que l’administration doit motiver ses décisions lorsqu’elles sont défavorables. Il s’agit ici, pour cette procédure et au vu des montants financiers importants susceptibles d’être engagés, d’assurer une garantie élevée. Il est donc proposé de la faire figurer cette obligation dans la loi.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Cette précision figure déjà à l’alinéa 3 de l’article R. 198-10, qui s’applique aux situations visées par l’article 14. L’ajout de cette précision dans l’article 14 lui-même ne me semble cependant pas soulever de difficultés. Sagesse.

(L’amendement n236 est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Dominique Lefebvre, suppléant Mme Valérie Rabault, rapporteure générale, pour soutenir l’amendement n160.

M. Dominique Lefebvre, suppléant Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Il est rédactionnel.

(L’amendement n160, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Dominique Lefebvre, suppléant Mme Valérie Rabault, rapporteure générale, pour soutenir l’amendement n237.

M. Dominique Lefebvre, suppléant Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. La commission a adopté cet amendement, proposé par nos collègues de l’opposition, qui tend à ce que les PME ne fassent pas l’objet, au cours d’une même période de douze mois, de procédures d’instruction sur place à répétition. La visite d’agents des impôts dans les locaux d’une entreprise n’est en effet pas anodine. Elle peut représenter une charge pour cette dernière et affecter son activité si elle se produit d’une façon répétée.

Pour autant qu’il m’en souvienne, la discussion en commission exprimait l’idée que, si le contrôle n’avait rien trouvé et que tout allait bien, il n’était pas nécessaire de revenir le lendemain matin et qu’il fallait attendre un peu. Ainsi, lorsqu’une première procédure a été ouverte et qu’elle ne fait pas apparaître de difficultés, il n’est peut-être pas nécessaire d’engager immédiatement une autre procédure, notamment pour les PME.

Il importe de rappeler que cette nouvelle procédure est entièrement indépendante de celle, beaucoup plus globale et plus lourde, de la vérification de comptabilité, qui restera toujours possible si l’administration pense qu’il existe une fraude.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Le Gouvernement n’est pas favorable cet amendement. Nous avons eu un débat sur la fraude à la TVA, notamment à propos de l’amendement dit « Dosière », qui introduit selon moi des complexités et des lourdeurs bien plus importantes que celles que vise l’article 14 – nous aurons, me semble-t-il, l’occasion d’y revenir en deuxième lecture du projet de loi de finances. Je comprends bien ce point de vue mais, souvent, les carrousels et fraudes à la TVA sont le fait de petites structures et ont un caractère répétitif. Inscrire dans la loi la certitude de ne pas procéder à un nouveau contrôle avant douze mois ne me semble donc pas être très protecteur des intérêts de l’État ni de l’efficacité du contrôle.

Il est un peu contradictoire qu’après avoir déclaré tout à l’heure, alors que nous proposions des contrôles non intrusifs, qu’il fallait ménager la possibilité que les contrôleurs puissent débarquer, vous recommandiez maintenant qu’ils ne puissent plus débarquer pendant les douze mois qui suivent un contrôle. Le Gouvernement, après en avoir débattu avec l’administration, est franchement défavorable à cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Dominique Lefebvre, suppléant Mme Valérie Rabault, rapporteure générale.

M. Dominique Lefebvre, suppléant Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. J’ai indiqué tout à l’heure par erreur que cet amendement émanait de nos collègues de l’opposition, mais il s’agit en réalité d’un amendement de la rapporteure générale, que je supplée aujourd’hui. Je ne le retire donc pas, mais j’invite mes collègues à voter en conscience, compte tenu de l’avis du Gouvernement. (Sourires sur plusieurs bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

(L’amendement n237 n’est pas adopté.)

(L’article 14, amendé, est adopté.)

Article 15

M. le président. La parole est à M. Dominique Lefebvre, pour soutenir l’amendement n287.

M. Dominique Lefebvre, suppléant Mme Valérie Rabault, Rapporteure générale. Amendement de précision.

(L’amendement n287, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Dominique Lefebvre, pour soutenir l’amendement n288.

M. Dominique Lefebvre, suppléant Mme Valérie Rabault, Rapporteure générale. Amendement de correction.

(L’amendement n288, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 15, amendé, est adopté.)

Article 16

M. le président. La parole est à M. Dominique Lefebvre, pour soutenir l’amendement n289.

M. Dominique Lefebvre, suppléant Mme Valérie Rabault, Rapporteure générale. Amendement de précision.

(L’amendement n289, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 16, amendé, est adopté.)

Article 17

(L’article 17 est adopté.)

M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

3

Ordre du jour de la prochaine séance

M. le président. Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :

Suite de la discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2016.

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt heures.)

La Directrice du service du compte rendu de la séance

de l’Assemblée nationale

Catherine Joly