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PROJET DE LOI

habilitant le Gouvernement à simplifier les relations entre l’administration et les citoyens

NOR : RDFX1309049L/Bleue-1

ETUDE D’IMPACT

29 avril 2013

Le projet de loi habilitation le Gouvernement à simplifier les relations entre l’administration et les citoyens autorise le Gouvernement à adopter des ordonnances sur trois séries de sujets : en premier lieu, pour instituer le droit des usagers de saisir les administrations par voie électronique ainsi que d’autres mesures de simplification et de transparence administratives ; en deuxième lieu pour adopter la partie législative d’un code relatif aux relations entre les administrations et le public ; en dernier lieu, pour modifier le code de l’expropriation pour cause d’utilité publique. Il s’agit, en effet, à travers ces projets : 

- de simplifier et d’améliorer l’accès aux règles régissant les relations entre les administrations et le public ;

- de faciliter les démarches effectuées auprès des administrations et de débloquer les projets publics et privés, notamment afin de restaurer des marges de croissance ;

- d’assurer la modernisation de l’action des administrations, ce qui passe, notamment, par la refondation des relations entre l'administration et le public.

I - L’HABILITATION A PRENDRE PAR ORDONNANCE DES MESURES DE SIMPLIFICATION ADMINISTRATIVE (ARTICLE 1ER)

L’article d’habilitation du projet de loi a pour objet d’habiliter le Gouvernement à :

- instaurer par ordonnance un droit des usagers à saisir les autorités administratives et à leur répondre par voie électronique et à en préciser les modalités techniques ;

- prévoir que, sauf exception liée à la protection d’un secret ou aux contraintes inhérentes à l’instruction des dossiers, les avis préalables recueillis sur une demande présentée à l’administration sont communicables avant l’intervention de la décision administrative, en particulier dans les cas où la communication de ces avis est de nature à permettre à la personne concernée de modifier ou compléter sa demande et de réduire le délai de réalisation de son projet ;

- à élargir les possibilités de recours aux technologies permettant aux autorités administratives collégiales de délibérer à distance.

A. Droit de saisir l’administration ou de lui répondre par courriel

Etat du droit

En France

L’ordonnance n° 2005-1516 du 8 décembre 2005 a créé un cadre général pour les échanges électroniques entre les usagers et les autorités administratives. Son chapitre II concerne les « démarches administratives accomplies par voie électronique » sans distinguer entre l’organisation d’une télé-procédure disposant d’un système d’information dédié et le simple envoi d’un courriel à une adresse électronique. Son article 3 dispose que lorsqu’un usager s’est adressé à l’administration par voie électronique, celle-ci est régulièrement saisie si elle en accuse réception et que l’administration « peut » répondre par voie électronique à toute demande d’information qui lui a été adressée par cette voie. L’article 5 indique que l’administration est tenue d’accuser réception des demandes électroniques, mais sans que les modalités n’aient été définis par voie réglementaire.

Dans d’autres pays

Deux modèles principaux se détachent.

D’une part, un modèle anglo-saxon où aucune législation spécifique n’a, généralement, été adoptée pour obliger les administrations à répondre à des saisines par voie électronique, notamment par courriel, et pour encadrer ce type de saisine. Cette possibilité existe de fait. Il est largement admis, au Royaume-Uni ou aux États-Unis, qu’une absence de réponse à une saisine électronique est un cas de mauvaise administration pouvant donner lieu à des actions auprès de structure de types Ombudsmen.

D’autres pays ont mis en place un cadre normatif encadrant les saisines de l’administration par voie électronique mais créant, en contrepartie, un véritable droit de l’administré à pouvoir saisir et répondre à l’administration par voie électronique. L’Espagne, l’Italie ou la Pologne ont adopté des textes régissant spécifiquement cette matière et prévoyant parfois des délais à partir desquels certaines administrations sont tenues de mettre en place de tels systèmes. On peut notamment citer le « Code de l’administration digitale » italien (decreto Legislativo 7 marzo 2005, n. 82) dont l’article 3 dispose que « Les citoyens et les entreprises ont le droit de demander et d’obtenir l’utilisation de technologies télématiques pour leurs communications avec les administrations publiques (…)1, dans les limites prévues par le présent code ». En pratique, ce droit de saisine électronique passe par l’utilisation d’une palette d’instruments permettant d’assurer la notification des envois et la conservation des preuves par les deux parties. L’utilisation de boîte électronique certifiée est privilégiée, mais il existe aussi des interfaces comprenant des espaces de stockage consultables par les deux parties, qui s’apparentent à la plateforme française mon.service-public.fr

Option envisagée

La volonté du Gouvernement est d’instaurer un droit à saisir les autorités administratives par voie électronique, y compris en utilisant un simple courriel lorsqu’une télé-procédure spécifique n’a pas été mise en place. Lorsque la présence physique de l’usager n’est pas requise, celui-ci disposerait également d’un droit de répondre par voie électronique à une sollicitation de l’administration.

Toutefois, la mise en œuvre d’un tel principe doit se nourrir des retours d’expériences des initiatives de certaines administrations qui ont, notamment, d’ores et déjà mis en place des systèmes performants de télé-procédures ou de réception et de traitement des demandes par courriel. A ce titre, il conviendra de recenser les bonnes pratiques : l’on peut citer par exemple certaines initiatives comme les plateformes « Ebourgogne », et s’agissant des marchés publics en Bretagne « Emegalis ». La mesure proposée vise à systématiser des dispositifs analogues en obligeant l’ensemble des administrations à mettre à disposition des usagers un télé-service, soit sous forme d’une télé-procédure, soit en mettant en place une adresse de messagerie électronique permettant de joindre les services par courriel, assorties d’un mécanisme d’accusés de réception ou d’enregistrement électroniques. L’administration ne sera pas tenue de donner suite aux demandes abusives, notamment par leur caractère répétitif.

B. Communiquer les avis rendus préalablement à l’adoption d’une décision administrative prise sur demande

Etat du droit

En l’état du droit, les avis rendus au cours de la procédure, considérés comme des actes préparatoires à la décision administrative à intervenir, ne sont communicables ni au demandeur ni aux tiers. A titre d’illustration, s’agissant des demandes de permis de construire en site classé, l’avis de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites, qui est très souvent suivi par l’autorité administrative chargée de la délivrance du permis, ne peut être connu avant l’issue de la procédure, qui intervient au bout d’un délai maximum d’un an. Faute de connaître l’avis de la commission, le pétitionnaire n’est dès lors pas mis en mesure de modifier son projet s’il y a lieu et s’expose à une décision de refus plusieurs mois après l’intervention de cet avis, ce qui peut engendrer une importante perte de temps dans la conduite de son projet. D’autres exemples procèdent de la même logique s’agissant de l’avis de la commission consultative départementale de sécurité et d’accessibilité pour les établissements recevant du public, ou encore de l’avis de la commission départementale de la consommation des espaces agricoles.

Option envisagée

Pour accélérer ces procédures de délivrance d’autorisation, il y a lieu de permettre, dans certains domaines, la communication des avis donnés par une autorité au cours de l’instruction d’un dossier pour permettre aux usagers d’améliorer leur projet et prévenir l’intervention d’une décision défavorable.

Une telle mesure d’application générale pourrait en principe trouver à s’appliquer à tout avis pris au cours de l’instruction d’une décision administrative prise sur demande afin de permettre à la personne concernée de modifier ou compléter sa demande et de réduire le délai de réalisation de son projet. Une telle mesure permettrait également en renforçant la transparence de l’élaboration de la décision administrative de limiter les risques contentieux. Afin de conférer sa pleine portée à cette mesure, il est envisagé de limiter au maximum le champ des exceptions qui ne pourront intervenir que pour des raisons liée à la protection d’un secret ou aux contraintes inhérentes à l’instruction des dossiers.

C. Faciliter les délibérés à distance des organismes administratifs collégiaux, consultatifs ou autres

Etat du droit

Quelques textes spéciaux contiennent des dispositions relatives aux possibilités de délibérer à distance (à titre d’exemple le décret n° 2003-86 du 31 janvier 2003 modifiant le décret n° 87-152 du 6 mars 1987 fixant les règles d'organisation et de fonctionnement de la Caisse de la dette publique a introduit une procédure de consultation par écrit et individuelle des membres du conseil d'administration). Il apparaît important que le droit positif prenne en compte les nouvelles technologies de l’information afin de faciliter et généraliser un tel procédé, tout en respectant le principe de neutralité technologique. De telles mesures sont ainsi sources de souplesse et conduisent à accélérer la prise de décision.

Option envisagée

Le premier Comité interministériel pour la modernisation de l’action publique (CIMAP) du 18 décembre 2012 invitait les administrations à recourir à des procédés de délibération à distance dans un but d’accélération et d’allégement des formalités administratives. Une telle consultation pourrait par exemple prendre la forme de visioconférences. Cette disposition pourrait avoir un champ d’application général et concernerait alors l’ensemble des organismes collégiaux consultatifs ou décisionnels.

D. Calendrier

Cette ordonnance devra être prise au plus tard dans un délai de douze mois suivant la publication de la loi d’habilitation. Un projet de loi de ratification sera ensuite déposé devant le Parlement au plus tard dans un délai de trois mois à compter de la publication de l’ordonnance.

E. Consultation

Le projet de loi ne doit être soumis à aucune consultation obligatoire. Il n’a pas fait l’objet de consultation.

II - L’HABILITATION A PROCEDER PAR ORDONNANCE À L’ADOPTION DE LA PARTIE LÉGISLATIVE D’UN CODE RELATIF AUX RELATIONS ENTRE LES ADMINISTRATIONS ET LE PUBLIC (ARTICLE 2 )

A. Etat du droit

En France

La relance de la codification a débuté en 1989. Le projet d’un code de l’administration a été inscrit dans la circulaire du Premier ministre du 30 mai 1996 sur la codification des textes législatifs et réglementaires et a été retenu par la Commission supérieure de codification dans le programme d’action qu’elle a adopté le 4 décembre 1996. L’objectif était alors de regrouper les dispositions générales non encore codifiées relatives, d’une part, à la procédure administrative non contentieuse, d’autre part, à l’organisation administrative. L’article 84 de la loi n°2004-1343 du 9 décembre 2004 de simplification du droit avait habilité le Gouvernement à adopter le code de l’administration, avec un périmètre ainsi défini. Toutefois, ce périmètre soulevant des questions de cohérence, le projet a finalement été abandonné en janvier 2006.

Dans d’autres pays

De nombreux pays se sont dotés d’un code de l’administration. En Europe, tel a été le cas de l’Autriche, la Bulgarie, la Croatie, la République tchèque, le Danemark, l’Estonie, la Finlande, l’Allemagne, la Grèce, la Hongrie, l’Italie, le Luxembourg, les Pays-Bas, la Norvège, la Pologne, le Portugal, la Serbie, l’Espagne, la Suède, la Suisse. Hors Europe, le Chili, le Japon, le Pérou, la Corée du Sud, Taiwan et les Etats-Unis ont adopté une démarche identique.

Seuls quelques pays, à l’instar de la France, ne disposent pas d’un tel code. L’on peut noter, à titre d’exemple, outre plusieurs pays relevant de la « common law », dont le Royaume Uni mais à l'exception notable des Etats-Unis, Israël, la Chine, ou le Paraguay.

Les précurseurs, tels l’Espagne ou l’Autriche, ont constitué des modèles, en particulier s’agissant de l’Autriche, pour plusieurs autres pays d'Europe centrale. L'après-guerre a été caractérisé par la mise en place de ce qui allait devenir les deux modèles les plus influents : États-Unis et Allemagne. Enfin, après 1989, la codification de la procédure administrative a été l'un les outils de réforme des pays d’Europe de l’Est.

Le processus d’élaboration de ces codes s’inscrit généralement dans la durée. Il s’est déroulé entre 1939 et 1946 aux Etats-Unis mais a pris près de vingt années en Allemagne.

L’émergence de tels codes n’est donc pas récente :

- avant-guerre, l’Espagne a adopté un tel code en 1889, avec une nouvelle version en 1992, l’Autriche en 1925, la Pologne et la République tchèque en 1928 avec une nouvelle version, respectivement, en 1961 et en 2004, la Croatie en 1931, avec de nouvelles versions en 1956 et en 2009, l'Estonie en 1936 avec un nouveau code en 2001 ;

- après-guerre, les États-Unis en 1946, puis, à partir de la fin des années 1960, d’autres pays ont suivi la voie de la codification : la Norvège et le Pérou en 1967, la Suisse en 1968, l'Allemagne en 1976, avec une nouvelle version en 1999, la Bulgarie en 1979 avec une nouvelle version en 2006, le Luxembourg en 1978, la Finlande en 1982 avec une nouvelle version en 2003, la Suède en 1986, le Danemark en 1987,

- enfin, depuis le début des années 1990, la Grèce, la Hongrie et l’Italie en 1990, le Portugal en 1991, les Pays-Bas en 1994, le Japon, la Serbie et la Corée du Sud en 1996, Taiwan en 1999 et enfin le Chili en 2008, ont également adoptés de tels codes.

Dans le cadre de l’Europe

Plusieurs textes ont été adoptés ces dernières années dans le cadre de l’Union européenne et du Conseil de l’Europe dans le domaine des droits des administrés dans leurs relations avec les administrations.

Ainsi la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, qui s’inscrit dans la démarche d’un « droit-cadre », consacre-t-elle, au sein de son titre V intitulé « Citoyenneté », un ensemble cohérent de normes sur la protection des citoyens à l’égard de l’administration : l’article 41 relatif aux garanties fondamentales de la bonne administration, l’article 42 relatif au droit d’accès aux documents publics et l’article 43 relatif à la saisine du Médiateur européen. L’article 41 pose en particulier le principe d’un traitement administratif impartial et équitable des demandes dans un délai raisonnable ; il se décline à travers le principe du contradictoire, le droit d’accès au dossier et l’obligation de motivation des décisions.

Dans ce cadre, le Médiateur européen a, quant à lui, établi en 2005 un « code européen de bonne conduite administrative », approuvé par le Parlement européen, applicable, mais sans caractère contraignant, aux institutions et organes de l’Union européenne.

Par ailleurs, l’Union européenne s’est dotée, pour ses propres institutions, du règlement 1049/2001 du 30 mai 2001 relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (ci-après le règlement 1049/2001), qui définit les principes, conditions et limites du principe d’accès aux documents détenus par ces trois institutions. Les citoyens de l’Union ainsi que toute personne physique ou morale résidant ou ayant son siège sur le territoire d’un État membre disposent d’un droit d’accès aux documents détenus par le Parlement européen, le Conseil et la Commission. Les documents concernés sont non seulement ceux élaborés par ces institutions mais également ceux qui leur sont adressés par les États membres. Tenue de tirer les conséquences nécessaires de l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, la Commission a présenté le 21 mars 2011 une proposition de modification de ce règlement. En effet, dans sa rédaction telle qu’issue du traité de Lisbonne (article 15 TFUE), le droit d’accès du public aux documents est étendu à l’ensemble des institutions, organes et organismes de l’Union (il convient toutefois de noter que les documents détenus par la Cour de justice, la Banque centrale européenne et la Banque européenne d’investissement ne sont concernés que dans la mesure où ils se rapportent à leur activité administrative). Ce projet s’ajoute à celui présenté au Parlement et au Conseil le 7 mai 2008 qui avait pour objet de prendre en compte d’une part, l’entrée en vigueur du règlement 1367/2006 du 6 mars 2006 concernant l’application aux institutions et organes de la Communauté européenne des dispositions de la convention d’Aarhus et, d’autre part, la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne en matière d’accès aux documents.

En revanche, aucun texte de l’Union européenne ne régit actuellement de manière générale et transversale les relations entre l’administration et le public au niveau des Etats-membres.

Quant au Conseil de l’Europe, il a adopté plusieurs recommandations relatives aux droits des administrés, dont une recommandation relative à la bonne administration CM/Rec(2007)7 qui comporte en annexe un « code de l’administration ». Dans sa recommandation, le Conseil de l’Europe invite les Etats membres à promouvoir le droit à la bonne administration « en adoptant, le cas échéant, les normes établies dans le code modèle annexé à la présente recommandation, en garantissant leur application effective par les agents des Etats membres et en faisant tout ce qui est acceptable, compte tenu de la structure constitutionnelle et juridique de l’Etat, pour s’assurer que les pouvoirs locaux et régionaux adoptent les mêmes normes ». Cette recommandation incite les Etats membres à adopter dans leur droit national un code similaire à celui annexé, mais elle prend en compte les spécificités nationales qui peuvent conduire à prévoir d’autres modalités que l’adoption d’un code, à travers l’insertion de dispositions dans leur législation ou dans leur pratique.

B. Option envisagée

Lors du premier Comité interministériel pour la modernisation de l’action publique (CIMAP) du 18 décembre 2012, il a été décidé d’élaborer un code des relations entre les administrations et le public. Ce code, dont la préparation a été confiée au secrétaire général du Gouvernement, en lien avec la Commission supérieure de codification, a pour objet de rendre plus accessibles les règles qui régissent ces relations.

Méthode

Tirant les leçons de la précédente tentative, il est proposé de faire un code destiné au public et centré sur la seule question de ses relations avec les administrations. Dans ce cadre, le code pourrait constituer la « lex generalis » des relations entre les administrations et le public. Il aurait ainsi vocation à rassembler les seuls textes généraux et transversaux, à l’exclusion des dispositions propres à certains champs particuliers de l’action administrative.

Un tel exercice conduira assez naturellement à la codification d’une grande partie des dispositions des grandes lois relatives aux droits des administrés de 19782, 19793, 20004, sans pour autant s’y résumer.

Il n’est pas exclu qu’au regard de son objet, un tel exercice amène également, mais seulement sur des sujets ponctuels (par exemple, la question des retraits des actes administratifs), à codifier certaines règles jurisprudentielles et plus généralement à simplifier et harmoniser l’état du droit, aux fins de le rendre plus lisible et moins complexe. Il n’est cependant nullement envisagé de revenir sur des dispositifs spécifiques (comme celui que l’on trouve, par exemple, en matière de délai de retrait des autorisations d’urbanisme, à l’article L.424-5 du code de l’urbanisme). Ce faisant, il s’agit seulement de permettre, dans le cadre de l'habilitation, de toiletter des dispositifs isolés que le travail de codification ferait émerger, qui dérogeraient sans raison à la règle générale.Le nouveau code n’a pas vocation non plus à attraire dans son champ les dispositions déjà codifiées.

Il est également proposé de supprimer les dispositions devenues sans objet ou dont la pratique a révélé le caractère inadéquat.Enfin, ce travail d’élaboration conduira sans doute à voir émerger des projets d’innovations susceptibles d’entraîner des améliorations substantielles dans les modes de relations de l’administration avec le public, en particulier s’agissant de la participation du public à l’élaboration des décisions administratives ou de l’adaptation des procédures aux évolutions technologiques.

Périmètre

Ainsi qu’il a été dit, un tel code a vocation à rassembler les règles relatives aux droits du public dans ses relations avec les administrations – correspondant pour l’essentiel aux procédures administratives non contentieuses – et non de reprendre l’ensemble des règles de la procédure administrative, ou encore celles régissant l’organisation des administrations et la répartition de leurs attributions.

Le champ du code pourrait comprendre les services de l’Etat, des collectivités territoriales, et de leurs établissements publics, ainsi que les organismes chargés d’une mission de service public, et s’agissant du « public », les personnes physiques, les entreprises, les associations, etc. Si le code n’est pas destiné à régir les relations des administrations avec leurs agents, il est néanmoins envisagé qu’en présence d’une règle de portée générale qui leur aurait été rendue applicable, il le soit mentionné, à l’instar de l’article 18 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations.

Calendrier

Compte tenu de l’ampleur des travaux à réaliser, du caractère très technique et très interministériel de la matière, de la nécessité de rédiger de manière simultanée la partie législative et la partie réglementaire de code compte tenu de l’importance des règles de nature réglementaire, il est proposé de retenir, comme délai pour prendre l’ordonnance adoptant la partie législative de ce code, un délai de vingt-quatre mois.

Outre mer

Le code relatif aux relations entre les administrations et le public aura vocation à régir la procédure administrative non contentieuse applicable aux administrations de l’Etat, des collectivités territoriales, de leurs établissements publics ainsi que des organismes chargés d’une mission de droit public.

La procédure administrative non contentieuse est actuellement soumise, s’agissant des collectivités territoriales relevant de l’article 74 de la Constitution :

- au principe d’identité législative à Saint Pierre-et-Miquelon (articles LO 6413-1 du code général des collectivités territoriales5), Saint-Barthélemy (articles LO 6213-1 du même code) et à Saint-Martin (articles LO 6313-1 du même code), ainsi que dans les Territoires australes et antarctiques françaises (TAAF)6 ;

- au principe de spécialité législative dans les îles Wallis et Futuna.

S’agissant de la Polynésie française7 et de la Nouvelle-Calédonie8, les dispositions relatives aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations de l’Etat sont applicables de plein droit. En revanche, le législateur national n’est compétent que pour les administrations de l’Etat, les communes et leurs établissements publics.

Ainsi, à l’exception des îles Wallis et Futuna, il n’est pas nécessaire de prévoir une extension du nouveau code qui sera de plein droit applicable outre-mer, sous réserve des spécificités de la Polynésie française et de la Nouvelle Calédonie.

Par le projet de loi, il est envisagé :

- d’une part, d’étendre les dispositions qui ne seraient pas encore applicables dans les collectivités relevant de l’article 73 de la Constitution, et, sous réserve d’un recensement exhaustif des dispositions législatives ayant vocation à être codifiées, principalement pour Mayotte ;

d’autre part, comme le permet l’article 73 de la Constitution pour ces collectivités, de pouvoir adapter la procédure dans les quatre départements et régions d’outre-mer (Guadeloupe, Guyane, Martinique et Réunion) et à Mayotte, pour tenir compte des spécificités locales, et de faire de même pour la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie.

Consultation

- Le projet de loi ne doit être soumis à aucune consultation obligatoire. Il n’a pas fait l’objet de consultation.

III - L’HABILITATION A PROCEDER PAR ORDONNANCE À LA MODIFICATION DU CODE DE L’EXPROPRIATION POUR CAUSE D’UTILITÉ PUBLIQUE (ARTICLE 3)

A. Etat du droit

De nombreux textes sont venus régir le droit de l’expropriation depuis 1810. La codification de l’ensemble des textes législatifs et réglementaires en la matière n’est intervenue qu’en 1977, à la suite de deux décrets n°77-392 et n°77-393 du 28 mars 1977 publiés au Journal officiel le 14 avril de la même année. Depuis lors, la matière a connu des évolutions importantes (loi n°83-630 du 12 juillet 1983 et ses décrets du 23 avril 1985 pris pour son application ; loi n°2002-276 du 27 février 2002, décret n° 2005-467 du 13 mai 2005 et enfin, plus récemment, loi n°2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement).

Par ailleurs, la jurisprudence récente du Conseil constitutionnel9 a mis en évidence l’inconstitutionnalité de certaines dispositions du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, qui présente, en outre, des imperfections techniques entravant sa maniabilité et sa lisibilité. Ce code nécessite un toilettage afin de lui donner une plus grande efficacité tout en assurant une sécurité juridique accrue.

Dans ce cadre, le projet d’habilitation a pour objet de modifier le code de l’expropriation pour cause d’utilité publique afin d’y inclure les dispositions de nature législative qui n’avaient pas été codifiées, de prendre en compte la jurisprudence du Conseil constitutionnel, d’améliorer le plan du code et de donner compétence en appel à la juridiction de droit commun.

B. Option envisagée

Cette codification doit être principalement réalisée à droit constant. Les modifications à envisager s’avèrent toutefois non négligeables et très techniques. A titre d’illustration, s’agissant de la structure du code, il est vraisemblable qu’il conviendra, d’une part, de substituer une subdivision en livres à la subdivision actuelle en partie et, d’autre part, de créer une partie relative à l’outre-mer, jusqu’alors inexistante. Le plan devra se conformer aux exigences nouvelles de légistique afin de permettre une lecture plus aisée, tant par les professionnels et entités en charge des expropriations, que par les juridictions compétentes. Conformément au précédent projet – découlant de l’habilitation donnée au Gouvernement par l’article 197 de la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 portant simplification et amélioration de la qualité du droit et que la Commission supérieure de codification avait approuvé le 9 mars 2007 – le plan d’un nouveau code de l’expropriation pour cause d’utilité publique devrait être structuré en cinq livres couvrant les thèmes principaux de l’expropriation pour cause d’utilité publique : utilité publique (livre I), transfert judiciaire de propriété et prise de possession (livre II), indemnisation (livre III), suites de l’expropriation (livre IV) et procédures spéciales (livre V).

Dans le présent projet, l’appel est désormais porté devant la juridiction de droit commun, c’est-à-dire devant une chambre de la cour d’appel, composée d’un président et de deux magistrats de la cour, et non plus d’un président assisté de deux juges de l’expropriation de première instance.

Par ailleurs, s’agissant des collectivités d’outre-mer, le Gouvernement s’attachera à étendre les dispositions codifiées ou certaines d’entre elles compte tenu du statut constitutionnel des différents territoires, dans les limites des compétences qui sont celles de l’Etat, en application de l’article 74-1 de la Constitution et en prenant par ailleurs en compte le nouveau statut du Département de Mayotte. Ce travail très technique justifie le recours à l’habilitation de procéder par voie d’ordonnance.

C. Calendrier

Cette ordonnance devra être prise au plus tard dans un délai de douze mois suivant la publication de la loi d’habilitation. Un projet de loi de ratification sera ensuite déposé devant le Parlement au plus tard dans un délai de trois mois à compter de la publication de l’ordonnance.

D. Outre-mer

1) Etat du droit:

a) Dans les collectivités relevant de l’article 73 de la Constitution :

Le code de l’expropriation pour cause d’utilité publique est applicable de plein droit en Guadeloupe, Guyane, Martinique et à La Réunion en vertu de l’article 73 de la Constitution.

Mayotte est soumise à l’article 73 depuis la départementalisation mais en ce qui concerne l’expropriation, le décret du 6 janvier 1935 portant réglementation de l'expropriation pour cause d'utilité publique à Madagascar est toujours applicable au Département de Mayotte.

b) Dans les collectivités relevant de l’article 74 de la Constitution et en Nouvelle-Calédonie :

Il résulte de l’article 74 de la Constitution que les collectivités d’outre-mer en relevant ne peuvent fixer elles-mêmes les règles applicables en matière de libertés publiques.

- En Polynésie Française : le droit de l’expropriation est une compétence de l’Etat mais soumise au principe de spécialité en application de l’article 7 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d’autonomie de la Polynésie Française. À ce jour, le code de l’expropriation est partiellement applicable en Polynésie Française (cf loi n° 93-1 du 4 janvier 1993 portant dispositions diverses relatives aux départements d'outre-mer, aux territoires d'outre-mer et aux collectivités territoriales de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon et décret n°95-323 du 22 mars 1995 portant extension et adaptation de la deuxième partie (réglementaire) du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique dans le territoire de la Polynésie française).

- A Saint-Pierre et Miquelon, Saint-Barthélemy et à Saint-Martin : en vertu des articles LO 6413-1, 6213-1 et 6313-1 du code général des collectivités territoriales, le code de l’expropriation s’applique de plein droit dans ces collectivités, le cas échéant avec adaptations (cf. article 47 de la loi n° 93-1 du 4 janvier 1993 portant dispositions diverses relatives aux départements d'outre-mer, aux territoires d'outre-mer et aux collectivités territoriales de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon adapte le code à st Pierre et Miquelon).

- A Wallis et Futuna: le code de l’expropriation n’étant pas expressément étendu aux îles Wallis et Futuna, il ne s’applique pas dans cette collectivité qui est régie par le principe de spécialité (article 4 de la loi n° 61-814 du 29 juillet 1961 conférant aux îles Wallis et Futuna le statut de territoire d'outre-mer ) ;

- Dans les Terres australes et antarctiques françaises (TAAF) et l’île de Clipperton : le code de l’expropriation n’étant pas expressément étendu, il ne s’applique pas dans ces collectivités régies par le principe de spécialité (article 1er de la loi n° 55-1052 du 6 août 1955 portant statut des Terres australes et antarctiques françaises et de l'île de Clipperton).

- En Nouvelle-Calédonie, il résulte d’un avis n° 385-207 du Conseil d’Etat en date du 7 juin 2011 que « sont à exclure du transfert de compétences à la Nouvelle-Calédonie, en application du 1° du I de l’article 21 de la loi organique statutaire, même s’ils relèvent ou sont susceptibles de relever du droit civil, le droit de la nationalité et le régime juridique des garanties des libertés publiques, dans l’ensemble de leurs composantes de fond, de forme et de procédure. Au rang de ces dernières figurent notamment, dans le code civil, les dispositions de l’article 9 sur le respect de la vie privée, celle des articles 16 et suivants sur le respect du corps humain, celles des articles 544 et 545 sur le caractère fondamental du droit de propriété ». L’expropriation est donc une compétence de l’Etat mais soumise au principe de spécialité.

A ce jour, à défaut de mention expresse, le code de l’expropriation pour cause d’utilité publique n’est pas applicable à la Nouvelle-Calédonie.

2) Option envisagée :

a) Dans les collectivités relevant de l’article 73 de la Constitution :

Le nouveau code sera applicable dans toutes les collectivités de l’article 73 de la Constitution. En particulier, il le sera immédiatement à Mayotte, sous réserve d’adaptations qui pourraient être nécessaires eu égard aux spécificités locales.

b) Dans les collectivités relevant de l’article 74 de la Constitution et en Nouvelle-Calédonie :

Le nouveau code sera applicable aux collectivités de l’article 74 de la Constitution. Il sera adapté à la Polynésie Française, à Saint-Pierre et Miquelon, Saint-Barthélemy et à Saint-Martin.

Il est en outre prévu de l’étendre en Nouvelle Calédonie et dans les îles Wallis et Futuna.

En revanche aucune extension n’est prévue pour les TAAF.

E. Consultations

Le projet de loi ne doit être soumis à aucune consultation obligatoire. Il n’a pas fait l’objet de consultation.

1 Ce droit n’est pas instauré par le décret au profit de toutes les administrations publiques italiennes.

2 Loi n°78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses dispositions d’amélioration des relations entre l’administration et le public et diverses dispositions d’ordre administratif, social et fiscal

3 Loi n°79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l’amélioration des relations entre l’administration et le public

4 Loi n°2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations

5 La procédure administrative non contentieuse ne fait pas partie des matières de la compétence de la collectivité territoriale (article LO 6414-3 du CGCT) ; elle est donc soumise au principe de l’identité législative (article LO 6413-1 du même code). Ce raisonnement est applicable aux deux autres collectivités.

6 Voir le 8° de l’article 1-1 de la loi n° 22-1052 du 6 août 1955 portant statut des Terres australes et antarctiques françaises et de l’île de Clipperton.

7 Voir le 7° de l’article 7 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française

8 Voir le 7° de l’article 6-2 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie.

9 Par exemple, décision n° 2012-226 QPC du 06 avril 2012 relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des dispositions des articles L. 15-1 et L. 15-2 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique.


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