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PROJET DE LOI

autorisant la ratification de l’accord établissant une association entre l’Union européenne

et ses Etats membres d’une part, et l’Amérique centrale d’autre part

NOR : MAEJ1401259L/Bleue-1

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ÉTUDE D’IMPACT

I. Situation de référence et objectifs de l’accord

L’Accord établissant une association entre l’Union européenne et ses États membres d’une part, et les pays du Système d’intégration centre-américain ou SICA (Costa Rica, El Salvador, Guatemala, Honduras, Nicaragua et Panama) d’autre part (ci-après l’accord), a été signé le 29 juin 2012 à Tegucigalpa, à l’occasion du 29ème sommet des Chefs d’État et de gouvernement du SICA. Les négociations avaient préalablement abouti à Madrid en mai 2010 lors du 6ème sommet Union européenne - Amérique latine et Caraïbes.

Les pays signataires de l’accord côté centre-américain sont les cinq membres de l’ex-Marché Commun Centraméricain (MCCA : Costa Rica, Guatemala, Honduras, Nicaragua, El Salvador, fondé par le traité de Managua en 1960 et transformé en SICA en 1991) auxquels s’est joint le Panama. Ce dernier pays n’avait intégré les négociations, commencées en octobre 2007, qu’en mars 2010 après son adhésion au système d’intégration régional. De ce fait, ce traité est le cas le plus abouti à ce jour d'accord favorisant la coopération régionale en Amérique latine.

Il repose sur trois volets : un volet politique, un volet de coopération et un volet commercial.

Les objectifs de l’accord sont les suivants :

- Développer un partenariat politique privilégié, fondé sur des valeurs, des principes et des objectifs communs, en particulier le respect et la promotion de la démocratie et des droits de l’Homme, du développement durable, de la bonne gouvernance et de l’État de droit, avec l’engagement de promouvoir et de protéger ces valeurs et ces principes sur la scène internationale, de manière à contribuer au renforcement du multilatéralisme ;

- Favoriser la coopération birégionale (soit la coopération entre les régions parties à l’accord) dans tous les domaines d’intérêt commun, afin de rendre le développement économique et social plus équitable et plus durable dans les deux régions ;

- Développer et diversifier les relations commerciales birégionales entre les parties dans le respect des règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) afin de contribuer au renforcement de la croissance économique, à l’amélioration progressive de la qualité de vie dans les deux régions et à une meilleure intégration des deux régions dans l’économie mondiale ;

- Renforcer et approfondir le processus progressif d’intégration régionale dans des domaines d’intérêt commun ;

- Renforcer les relations de bon voisinage et le principe de règlement amiable des différends ;

- Maintenir, et de préférence rehausser le niveau des normes de bonne gouvernance, des normes environnementales et des normes du travail, par la mise en œuvre efficace des conventions internationales auxquelles les parties à l’accord sont parties au moment de l’entrée en vigueur de cet accord ;

- Favoriser l’intensification des échanges commerciaux et des investissements entre les parties, en appliquant un traitement spécial et différencié afin de réduire les asymétries structurelles existant entre les deux régions.

Pour l’Union européenne et ses États membres, il s’agissait, dans ces négociations :

- d’ouvrir de nouveaux débouchés à l’exportation vers l’Amérique centrale dans un contexte économique difficile ;

- de rééquilibrer une balance commerciale structurellement déficitaire depuis plusieurs années avec les pays d’Amérique centrale ;

- de promouvoir de nouveaux domaines de coopération, correspondant à des enjeux globaux tels que le développement durable ou la paix et la sécurité, la démocratie et les droits de l’Homme ainsi que le développement social ;

- d’obtenir des garanties quant à la protection de la propriété intellectuelle, ainsi qu’en matière de protection des indications géographiques.

Sur le volet commercial

L’accord ouvre des perspectives majeures de développement des relations entre les deux régions :

- Il prévoit la libéralisation des échanges pour 95% des lignes tarifaires, dont 100% pour les produits industriels. Le calendrier de diminution des droits de douane est asymétrique afin de prendre en compte les différences de développement économique des deux régions ;

- En complément aux démantèlements tarifaires, l’accord prévoit des engagements pour une élimination progressive de certains obstacles techniques au commerce et une facilitation de la circulation des marchandises ;

- Il couvre la plupart des sujets commerciaux non tarifaires d’intérêt offensif européen, parmi lesquels les mesures sanitaires et phytosanitaires, les services, les marchés publics et la propriété intellectuelle, qui font l’objet de chapitres spécifiques. L’accord prévoit ainsi la reconnaissance et la protection de plus de 200 indications géographiques européennes.

Sur le volet politique

Le dialogue engagé entre l’Union européenne et ses États membres et l’Amérique centrale connaît une nouvelle impulsion. Le volet politique ajoute plusieurs articles à l’accord-cadre de coopération signé en 2003 entre les partenaires, en particulier sur la lutte contre les armes de destruction massive, le désarmement, la lutte contre le terrorisme et les crimes graves de portée internationale.

L’accord prévoit :

- la mise en œuvre d’un partenariat politique privilégié, fondé sur le respect et la promotion de la démocratie, de la paix, des droits de l’Homme, de l’État de droit, de la bonne gouvernance et du développement durable ;

- la défense des valeurs, des principes et des objectifs communs en œuvrant à leur promotion au niveau international, en particulier dans le cadre des Nations unies ;

- le renforcement l’Organisation des Nations unies en tant qu’élément central du système multilatéral, de sorte qu’elle puisse traiter efficacement les questions dont l’enjeu est mondial ;

- l’intensification du dialogue politique afin de permettre un large échange de vues, de positions et d’informations, aboutissant à l’élaboration d’initiatives conjointes au niveau international ;

- la coopération dans le domaine de la politique étrangère et de sécurité, dans le but de coordonner les positions et de prendre des initiatives conjointes d’intérêt mutuel au sein des enceintes internationales compétentes.

Sur le volet de coopération

L’accord d’association vise à renforcer la coopération entre l’Union européenne et ses États membres et l’Amérique centrale, ainsi qu’à soutenir l’entrée en vigueur de l’accord. Les parties souhaitent instaurer un partenariat efficace grâce à des ressources, des mécanismes, des outils et des procédures qui faciliteront la mise en œuvre de l’accord. A cette fin, les principaux objectifs du volet coopération sont les suivants :

- renforcer la paix et la sécurité ;

- contribuer au renforcement des institutions démocratiques, à la bonne gouvernance et à la pleine applicabilité de l’État de droit, à l’égalité entre les hommes et les femmes, à la diversité culturelle, à la promotion et au respect des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, à la transparence et à la participation des citoyens ;

- favoriser la cohésion sociale en luttant contre la pauvreté, les inégalités, l’exclusion sociale et toutes les formes de discrimination, de manière à améliorer la qualité de vie des populations d’Amérique centrale, mais aussi de l’Union européenne ;

- promouvoir la coopération culturelle notamment via un protocole relatif à la coopération dans le domaine culturel, en annexe à l’accord ;

- promouvoir la croissance économique ;

- approfondir le processus d’intégration régionale en Amérique centrale ;

- ouvrir de nouvelles perspectives de commerce et d’investissement à tous les acteurs économiques et sociaux des deux régions.

II. Conséquences estimées de la mise en œuvre de l’accord

- Conséquences économiques

L’article 2 point d) de l’accord prévoit le développement et la diversification des relations commerciales birégionales entre les parties dans le respect des règles de l’OMC, ainsi que des objectifs et engagements spécifiques prévus par la partie IV, ce qui devrait contribuer au renforcement de la croissance économique, à l’amélioration progressive de la qualité de vie dans les deux régions et à une meilleure intégration des deux régions dans l’économie mondiale.

L’entrée en vigueur de l’accord ouvre des perspectives prometteuses de développement des relations économiques entre les deux régions. Les échanges commerciaux pourraient connaître une augmentation de l’ordre de 20%1, soit une valeur de plus d’un milliard d’euros.

Le volet commercial de l’accord contient en effet un ensemble de stipulations couvrant l’accès aux marchés, la protection de la propriété intellectuelle (dont les indications géographiques), l’harmonisation des procédures douanières (avec un objectif, à terme, de mise en place d’une union douanière centraméricaine), les règles d’origine, les normes sanitaires et phytosanitaires, les obstacles techniques au commerce, les services, les investissements, les marchés publics, le commerce et le développement durable. Ce dernier chapitre inclut le respect de normes internationales en matière de droit du travail et la mise en œuvre de politiques de protection de l’environnement.

En 2012, l’Union européenne était le troisième partenaire commercial de ces pays, derrière les États-Unis et les autres pays d’Amérique centrale. Au total, les échanges de biens entre les deux régions ont atteint plus de 6 milliards d’euros. La progression est de 3,75% par rapport à 2011.

Selon la DG Trésor, les exportations de l’Amérique centrale vers l’Union européenne ont progressé de 6,6% (3,4 Mds d’euros en 2012) et les importations ont stagné à 2,7 Mds d’euros (+0,3%). L’Union européenne compte pour 13,4% des exportations de l’Amérique centrale (13,1% en 2011) et 6% de ses importations (6,3% en 2011). Les échanges entre les deux régions ont représenté 8,7% du commerce de l’Amérique centrale en 2012 contre 8,8% en 2011. Le taux de couverture est passé de 117% en 2011 à 124% en 2012, traduisant un accroissement de l’excédent commercial de l’Amérique centrale. Sur la période 2007-2012, la part de l’Union européenne dans les importations centraméricaines a diminué de 2,5%, passant de 8,5% à 6%.

Les exportations européennes vers l’Amérique centrale se composent essentiellement de machines, d’appareils électriques et électroménagers (37%) ainsi que de produits issus de l’industrie chimique (28%). Les équipements de transport comptent pour 11% du total des exportations et les produits plastiques pour près de 7%.

Au terme de la libéralisation tarifaire, les droits de douane seront éliminés pour les produits industriels et les produits issus de la pêche. Dès l’entrée en vigueur de l’accord, l’Amérique centrale prévoit la suppression immédiate des droits de douane pour 48% des lignes tarifaires, soit 67 % des exportations européennes actuelles vers la région en valeur. L’économie annuelle pour les exportateurs européens est estimée à 87 millions d’euros.

Cet effet devrait également être particulièrement favorable au secteur agricole pour lequel les droits de douane seront largement éliminés. Dans ce dernier secteur, la libéralisation sera immédiate pour certains intérêts offensifs de l’Union européenne tels que les vins et alcools (à l’exclusion du rhum, du whisky2, de la vodka et de la bière), les produits laitiers (à l’exception du lait en poudre et du fromage), les huiles d’olives et olives et certains fruits (pommes, cerises, raisins). L’économie annuelle pour les exportateurs européens de vins et spiritueux devrait avoisiner les 6 millions d’euros.

Pour certains secteurs sensibles, les produits ne sont pas libéralisés mais des contingents tarifaires à droits nuls et accroissement annuel sont accordés. Sur ce dernier point, les exportations européennes vers l’Amérique centrale seront soumises à des quotas à droits de douane réduits :

§ Jambons crus, lard et viande de porc : quota annuel de 900 tonnes à droit zéro, avec une augmentation annuelle de 45 tonnes.

§ Produits laitiers :

o Lactosérum : 100 tonnes par an à droit nul avec une augmentation annuelle de 10 tonnes.

o Fromages : contingent total accordé de 3 000 tonnes à droit zéro, augmenté chaque année de 16 à 30 tonnes selon les pays.

o Poudre de lait : quota total de 1 900 tonnes (entre 200 et 500 t selon les pays) soumis à droit zéro qui correspondent aux flux actuels et qui seront augmentés chaque année (entre 10 et 25 tonnes).

Par ailleurs, l’Amérique centrale obtiendra pour de nombreux produits agricoles un accès préférentiel et permanent au marché européen, à des conditions améliorées par rapport à celles accordées de manière temporaire dans le cadre du Système de préférences généralisées (SPG) dont les pays de la région ont bénéficié jusqu’au 31 décembre 2013 et du nouveau SPG (SPG+) depuis le 1er janvier 2014 pour le Costa Rica, le Guatemala et le Salvador qui en ont fait la demande. Un nombre restreint de produits « sensibles » resteront cependant soumis à un régime de quotas :

§ Ail : l’UE accorde un quota annuel de 550 tonnes à droit zéro aux pays d’Amérique centrale.

§ Amidon de manioc : un contingent de 5 000 tonnes à droit nul est accordé à l’Amérique centrale.

§ Maïs doux : 1 440 tonnes à droit zéro sont accordées par l’UE, avec une augmentation annuelle de 120 tonnes.

§ Champignons : l’UE concède 275 tonnes par an à droit zéro à son partenaire commercial.

§ Viande de bœuf : 500 tonnes (équivalent carcasse) ont été allouées sans droit de douane au Nicaragua seulement, avec une augmentation annuelle de 25 tonnes. L’UE a par ailleurs concédé un quota régional à droit nul de 9 500 tonnes par an, augmenté chaque année de 475 tonnes.

§ Sucre : l’UE concède un contingent de 12 000 tonnes (équivalent sucre) par an au Panama. Par ailleurs, elle offre aux 5 autres pays membres de la zone 150 000 tonnes. Ces deux contingents ne seront pas soumis à un droit de douane et se verront augmentés de 3% chaque année.

§ Riz : l’UE accorde 20 000 tonnes par an à l’Amérique centrale, sans droit de douane, avec une augmentation annuelle de 5%.

§ Rhum en vrac : un contingent de 1 000 hl à droit zéro a été concédé par l’UE au Panama, augmenté de 50 hl chaque année. Les 5 autres pays membres se voient attribuer un quota de 7 000 hl à droit nul, avec une croissance annuelle de 300 hl.

§ Bananes : l’Union européenne accorde un quota initial d’exportation de 1 512 000 tonnes avec un droit de douane préférentiel de 145€/tonne. En 2017, le droit sera réduit à 114€/tonne pour atteindre 75€/tonne en 2020 sans restriction quantitative.

Par ailleurs, un mécanisme de sauvegarde a été inclus afin de protéger les productions ultramarines françaises de bananes. Il permet à la Commission de déclencher :

(i) une clause de sauvegarde classique permettant de suspendre (pour deux ans maximum) les droits de douane préférentiels en cas d’augmentation inattendue des importations de bananes et une détérioration de la situation des producteurs européens ;

(ii) un mécanisme de stabilisation, permettant de suspendre les droits de douane préférentiels (pendant 3 mois) lorsque les exportations des pays latino-américains dépassent les volumes maximum prévus dans les accords.

Ce mécanisme de sauvegarde a fait l’objet d’un règlement européen3 destiné à mettre en œuvre la clause de sauvegarde et le mécanisme de stabilisation prévus par ces accords, qui revêtent par ailleurs un enjeu économique important pour la France.

En complément aux démantèlements tarifaires, l’accord prévoit des engagements pour une élimination progressive de certains obstacles techniques au commerce et une facilitation de la circulation des marchandises. Des engagements sont pris par les pays d’Amérique centrale en matière d’harmonisation et de simplification des procédures douanières, d’unification au niveau régional des procédures d’enregistrement des produits (agroalimentaires, produits pharmaceutiques et chimiques), des règlements sanitaires et phytosanitaires et de la simplification de l’étiquetage des produits.

L’accord devrait également permettre d’aboutir à une union douanière centraméricaine impliquant un paiement de droit de douane unique dans le pays de première entrée. L’accord prévoit la mise en place, dans un délai de deux ans après son entrée en vigueur, d’un mécanisme de remboursement de droit de douane pour éviter un double paiement dans le cas d’une circulation intra régionale d’un produit et, dans un délai de trois ans, l’introduction d’un document douanier unique pour la région.

La propriété intellectuelle, la reconnaissance et la protection d’indications géographiques, sujets-clés pour l’Union européenne, ont constitué un des principaux points durs des négociations. Ainsi, l’entrée en vigueur du volet commercial de l’accord était conditionnée, pour chaque pays, à l’enregistrement d’une liste d’indications géographiques (IG) européennes prioritaires. Sur la liste de 224 IG annexée à l’accord, 114 étaient prioritaires et devaient être protégées avant l’entrée en vigueur de l’accord. La procédure d’enregistrement de ces 114 IG au Panama, au Honduras et au Nicaragua a permis une application provisoire de l’accord le 1er août 2013. Au Costa Rica et au Salvador, des oppositions ont été enregistrées concernant respectivement six et dix IG. Ceci a conduit à reporter l’application provisoire de l’accord au 1er octobre. Le retard pris par le Guatemala pour enregistrer les IG européennes et les oppositions concernant huit IG ont conduit à une application provisoire de l’accord à partir du 1er décembre 2013.

Les échanges entre l’Union européenne et l’Amérique centrale devraient être favorisés avec l’amélioration de l’accès aux marchés publics, aux marchés des services et aux investissements. En matière de services, l’accord garantit aux opérateurs européens un accès au marché au moins identique à celui dont bénéficiaient déjà les entreprises américaines. Les opérateurs européens bénéficient également avec cet accord d’un accès privilégié aux marchés de ces pays, notamment dans le domaine des services de télécommunications et des services de transports (notamment maritimes). Enfin, les transferts de personnels intra-groupes ou de stagiaires diplômés sont facilités au Honduras et au Panama. L’accord prévoit également une plus grande ouverture des marchés publics aux entreprises européennes, notamment au Panama.

D’une manière générale, les conséquences économiques de l’accord devraient être favorables à toutes les parties. En effet, l’Amérique centrale devrait procéder à un renforcement de son intégration économique régionale dans les domaines de l’harmonisation et de la simplification des procédures douanières, de l’unification des procédures d’enregistrement des produits et dans l’harmonisation des règlements sanitaires et phytosanitaires. Ces mesures devraient permettre l’établissement et la mise en œuvre d’un marché commun dans le but de parvenir à la création d’une union économique. L’intégration régionale contribuera également à la réduction des divergences réglementaires actuelles entre les pays d’Amérique centrale dans le secteur des services, en particulier dans le domaine du transport maritime.

- Conséquences financières

D’un point du vue financier, l’accord ne devrait pas avoir de conséquences négatives, notamment sur le plan de la souveraineté fiscale. Son article 350 prévoit une application des conventions fiscales existantes et futures.

Le titre IV de la partie IV de l’accord, relatif aux paiements courants et mouvement de capitaux, prévoit une libéralisation des mouvements de capitaux et paiements courants entre les parties, conforme aux engagements pris dans le cadre des institutions financières internationales et tenant compte de la stabilité monétaire de chaque partie. Ainsi l’article 207 prévoit des mesures de sauvegarde en cas de circonstances exceptionnelles où les mouvements de capitaux entre les parties causeraient ou menaceraient de causer de graves difficultés dans le fonctionnement de la politique des taux de change ou de la politique monétaire d’un ou de plusieurs États membres de l’Union européenne et d’une ou plusieurs républiques d’Amérique centrale. Ces derniers peuvent prendre des mesures de sauvegarde en matière de circulation des capitaux pendant une période ne dépassant pas un an, mais qui peut être prolongée dans des circonstances exceptionnelles.

S’agissant des services financiers, l’article 195 prévoit une exception qui stipule que chaque partie peut adopter ou maintenir, pour des raisons prudentielles, des mesures visant à garantir l’intégralité et la stabilité de son système financier. Il prévoit également qu’aucune stipulation de l’accord ne peut être interprétée comme obligeant une partie à révéler tout renseignement confidentiel ou exclusif en la possession d’entités publiques. L’article 199.2 stipule enfin que l’accord ne peut s’appliquer aux activités exercées par une banque centrale ou une autorité monétaire ou par toute autre entité publique dans le cadre de l’application de politiques monétaires ou de taux de change.

S’agissant de la lutte anti-blanchiment, l’accord prévoit dans son article 196.3 une mise en œuvre par les parties de « normes internationales de réglementation et de surveillance du secteur des services financiers et en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux ou autres actifs, et en matière de lutte contre la fraude et l’évasion fiscales ».

S’agissant du traitement des données à caractère financier, l’article 198 de l’accord prévoit que chaque partie autorise les fournisseurs de services financiers de l’autre partie à transférer des informations sous forme électronique ou sous toute autre forme à l’intérieur et en dehors de son territoire. Le même article prévoit néanmoins des mesures de sauvegarde afin d’assurer la protection de la vie privée et des droits fondamentaux, ainsi que la liberté des individus, en particulier en ce qui concerne le transfert de données à caractère personnel.

- Conséquences juridiques

L’accord d’association porte à la fois sur des matières relevant de la compétence de l’Union européenne et sur des matières relevant de celle des États membres. Il en va notamment, s’agissant de la partie politique, des clauses en matière de protection des droits de l’Homme et de non-prolifération, mais également, s’agissant de la partie commerciale, des sanctions pénales prévues pour la protection du droit d’auteur (article 217). L’accord est donc de nature mixte et doit, pour entrer en vigueur, être ratifié par tous les États membres.

L’accord doit faire l’objet d’une approbation parlementaire en vertu de l’article 53 de la Constitution : sa partie IV relève de la qualification de traité de commerce. En outre, certaines stipulations relevant de la compétence des États membres, sont de nature législative. C’est notamment le cas de la coopération en matière de lutte contre les armes de destruction massive (article 15).

Pour l’Union européenne :

Il est à noter que la partie commerciale de l’accord, en tant qu’elle concerne les compétences de l’Union, à l’exception de l’article 217, est d’application provisoire depuis le 1er août 2013 avec le Honduras, le Nicaragua, et le Panama ; depuis le 1er octobre 2013 avec le Salvador et le Costa Rica et depuis le 1er décembre 2013 avec le Guatemala (cf. décision du Conseil n° 2012/734/UE du 25 juin 2012)

S’agissant de la conformité avec les engagements internationaux déjà souscrits par la France et l’Union européenne, il est à noter que l’accord a vocation à se substituer à l’accord de dialogue politique et de coopération signé en 2003. Ainsi, l’article 353.8 de la partie V stipule qu’ « à compter de la date de son entrée en vigueur conformément au paragraphe 2, le présent accord remplace les accords de dialogue politique et de coopération en vigueur entre les républiques de la partie Amérique centrale et la partie Union européenne ». En matière financière, l’article 195 permettant aux parties d’adopter des mesures visant à garantir l’intégralité et la stabilité de son système financier est compatible avec les réformes européennes du MES (mécanisme européen de stabilité) entré en vigueur le 27 septembre 2012. En matière environnementale, l’accord est conforme aux engagements de la France souscrits au titre de la Convention sur la diversité biologique (CDB) et le protocole de Nagoya.

En matière de propriété intellectuelle (article 229 du chapitre 1, Titre IV), l’accord précise que les coopérations mises en œuvre dans ce domaine s’effectuent dans le respect des législations nationales et des obligations internationales des parties, préservant ainsi les engagements de la France auprès de l’OMPI comme les spécificités de la législation française sur les indications géographiques et le droit d’auteur.

- Conséquences administratives

L’accord prévoit la mise en place d’un « conseil d’association » chargé du contrôle de la réalisation des objectifs de l’accord et de sa mise en œuvre. Il se réunit au niveau ministériel à intervalles réguliers et lors de réunions extraordinaires si nécessaire.

Il est assisté par un « comité d’association » composé de représentants de l’Union européenne et de chacune des républiques de la partie Amérique centrale. Il se réunit une fois par an pour procéder à un examen de la mise en œuvre de l’accord, alternativement à Bruxelles et en Amérique centrale. La présidence du comité d’association est exercée à tour de rôle par un représentant de chacune des deux zones. Le comité d’association est assisté par des sous-comités thématiques. Les États membres de l’UE ne devraient pas être associés à ces comités.

- Conséquences sociales

L’accord s’inscrit dans la perspective selon laquelle le développement social doit aller de pair avec le développement économique afin d’assurer le renforcement de la cohésion sociale et lutter contre la pauvreté, les inégalités, les injustices et l’exclusion sociale. En conséquence, l’article 25 point c) stipule que « les parties s’attachent à promouvoir la participation de la société civile et des autorités locales à leurs politiques de développement et à leur coopération ». L’accord prévoit notamment la mise en œuvre d’un forum de dialogue avec la société civile (article 295) sur les différents aspects de la relation commerciale « afin d’engager un dialogue ouvert dans lequel les parties prenantes dans les domaines économique, social et environnemental sont représentées de manière équilibrée ».

Par ailleurs, dans la perspective de réalisation des Objectifs du millénaire pour le développement, l’accord met l’accent sur le respect des normes sociales internationales. Ainsi, les parties réaffirment leur engagement au renforcement des cadres institutionnels, à l’élaboration et à la mise en œuvre de politiques et de programmes relatifs aux principes et droits fondamentaux au travail, ainsi « qu’à l’application et au respect des conventions de l’Organisation internationale du travail » (article 63.2 point e) que les États membres de l’Union européenne et les républiques d’Amérique centrale ont tous ratifiées.

- Conséquences environnementales

La promotion du développement durable constitue un objectif majeur de l’accord d’association, à la fois en Amérique centrale et au sein de l’Union européenne, en tenant compte des spécificités de chaque région. Cet objectif est incorporé dans toutes les sections de l’accord et notamment dans la partie commerciale dont un chapitre est consacré au lien entre les politiques commerciales, sociales et environnementales.

Ce chapitre reconnaît le droit et la responsabilité des parties à adopter des réglementations sociales et environnementales dans la poursuite d’objectifs légitimes et met l’accent sur l’application effective de la législation du travail et de l’environnement. Les parties s’engagent également à encourager et à promouvoir le commerce et les programmes de marketing fondés sur des critères de durabilité et à œuvrer pour une gestion durable des ressources naturelles sensibles.

En outre, des engagements sont pris en matière d’application de normes environnementales, en particulier quant à la mise en œuvre des conventions internationales dans ce domaine. Ainsi, les parties réaffirment « leur engagement à mettre effectivement en œuvre dans leurs législations et pratiques, les accords multilatéraux en matière d’environnement auxquels elles sont parties » (article 287.2) et à procéder à la ratification « d’ici à la date d’entrée en vigueur du présent accord, de l’amendement à l’article XXI de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction, ou CITES, adopté à Gaborone (Botswana) le 30 avril 1983, ainsi que la convention de Rotterdam relative à l’utilisation de certains produits chimiques et pesticides dangereux.

Historique des négociations

Lancé en 1984, le dialogue de San José a constitué la base des relations entre l'Union européenne et l'Amérique centrale. Son objectif était de trouver des solutions aux conflits armés par la voie de la négociation.

Les négociations pour la mise en œuvre d’un accord d'association entre l'Union européenne et l'Amérique centrale visant à remplacer l’accord-cadre de coopération signé en 1993, et l’accord de dialogue politique et de coopération signé en 2003, ont officiellement été lancées en juin 2007 suite au mandat donné par le Conseil à la Commission en avril 2007 pour ces négociations. À noter que le mandat précédant l’adoption du traité de Lisbonne, l’accord ne prévoit pas de chapitre relatif à l’investissement.

Les pays participants étaient le Costa Rica, le Guatemala, le Salvador, le Nicaragua et le Honduras. Le Panama a rejoint les négociations en tant que membre à part entière à la fin du processus.

Les négociations ont été conclues en mai 2010 lors du sommet Union européenne-ALC (Amérique latine et Caraïbes) à Madrid. Après une phase d’analyse juridique, le texte de l’accord a été paraphé par les deux parties le 22 mars 2011.

III. État des signatures et ratifications

L’accord a été signé par les parties le 29 juin 2012 à Tegucigalpa à l’occasion du 29ème sommet des Chefs d’État et de Gouvernement du SICA (Système d’intégration centraméricain) et publié au JOCE le 15 décembre 2012.

Il prévoit une application provisoire du volet commercial, à l’exception de l’article 271 de l’accord, c’est-à- dire une application anticipée avant l’entrée en vigueur, qui n’interviendra qu’à l’issue du processus de ratification par l’ensemble des parties.

Le volet commercial de l’accord est appliqué provisoirement entre l’Union européenne d’une part, le Honduras, la Nicaragua et le Panama d’autre part depuis le 1er août 2013. L’application provisoire a été étendue au Costa Rica et au Salvador le 1er octobre 2013 et au Guatemala le 1er décembre 2013.

Le 18 juillet 2013, la Commission européenne a indiqué que chaque république d’Amérique centrale avait procédé à la ratification de l’accord. Le Costa Rica l’a ratifié le 17 juillet 2013, le Guatemala le 27 juin 2013, le Honduras le 1er juillet 2013, le Nicaragua le 31 mars 2013, le Panama le 6 mai 2013 et le Salvador le 19 juillet 2013.

Du côté européen, l’Estonie a ratifié l’accord le 14 novembre 2012, la République tchèque le 23 août 2013 et l’Allemagne le 18 septembre 2013.

IV. Déclarations ou réserves

Il n’est pas envisagé que la France fasse de déclaration ou de réserve.

1 Les données citées dans cette partie sont extraites de l’étude publiée par la Direction générale du Trésor en juillet 2013 : http://www.tresor.economie.gouv.fr/File/388466

2 Libéralisation immédiate pour les exportations vers le Panama et en 6 ans pour les autres pays de la zone.

3 Règlement (UE) no 20/2013 du Parlement européen et du Conseil du 15 janvier 2013 portant mise en œuvre de la clause de sauvegarde bilatérale et du mécanisme de stabilisation pour les bananes prévus par l'accord établissant une association entre l'Union européenne et ses États membres, d'une part, et l'Amérique centrale, d'autre part


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