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PROJET DE LOI

autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse modifiant le protocole additionnel à la convention entre la France

et la Suisse du 9 septembre 1966 modifiée, en vue d’éliminer les doubles

impositions en matière d’impôts sur le revenu et sur la fortune

et de prévenir la fraude et l’évasion fiscales

NOR : MAEJ1502242L/Bleue-1

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ÉTUDE D’IMPACT

I- Situation de référence et objectifs de l’accord

La France et la Suisse sont liées par la Convention en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune signée le 9 septembre 1966 (et son protocole additionnel) modifiée par les avenants du 3 décembre 1969, du 2 juillet 1997 et du 27 août 20091.

Depuis le 4 novembre 2010, date de l’entrée en vigueur de l’avenant du 27 août 2009, l’article 28 de la Convention, relatif à l’échange de renseignements, fixe des règles conformes à ce qui est préconisé par le modèle de convention de l’organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). En outre, un nouveau point XI au protocole additionnel à la Convention précise les modalités d’application de ce dispositif d’assistance administrative.

Enfin, pour permettre côté suisse la ratification de l’avenant de 2009, les administrations fiscales française et suisse ont dû convenir le 11 février 2010 d’un échange de lettres afin d’encadrer les modalités des demandes de renseignements de nature bancaire formulées en application des dispositions conventionnelles susmentionnées.

En 2012, les modifications des commentaires de l’OCDE portant sur l’article d’échange de renseignements sont venus clarifier le l’interprétation à donner à cet article. Or, ces modifications ont rendu certaines des dispositions contenues au point XI du protocole additionnel, et plus encore l’interprétation qui en était faite par la partie suisse, contraire à cette norme internationale. En effet, les autorités suisses considéraient que la rédaction retenue au point XI du protocole de la convention franco-suisse de 1966 et l’échange de lettre mentionné ci-dessus faisaient obstacle aux demandes relatives à des contribuables dont les autorités françaises ne disposaient ni du nom, ni d’une adresse, ainsi qu’aux demandes sur des groupes de contribuables.

Partant, les autorités française et suisse sont alors convenues de négocier un accord intergouvernemental dont l’objectif était d’adapter le dispositif conventionnel existant afin de prévoir un échange de renseignements conforme aux standards actuels de l’OCDE.

Pour ce faire, il avait été envisagé dans un premier temps, de modifier les règles obsolètes de la Convention de 1966 à l’occasion de la négociation, menée en 2012, d’une nouvelle convention en matière de droits de succession. Ainsi, le protocole additionnel au projet de nouvelle convention franco-suisse, signée le 11 juillet 2013, sur les successions visait à introduire des dispositions portant sur l’ensemble des impôts et venant amender les modalités pratiques de l’échange de renseignements prévues au protocole additionnel à la Convention de 1966.

Mais, au premier semestre 2014, le Parlement suisse a rejeté le projet de loi autorisant l’approbation par la Suisse de cette nouvelle convention, ce qui a par la suite conduit à la dénonciation, par la France, de la convention du 31 décembre 1953 en vue d’éviter les doubles impositions en matière d’impôts sur les successions.

Dans ce contexte, les autorités des deux États ont élaboré un nouveau texte ayant pour seul objet de modifier, en matière d’échange de renseignements, le protocole annexé à la convention franco-suisse du 9 septembre 1966. Ce nouveau projet, conçu comme un avenant à la convention de 1966, reprend les avancées présentes initialement dans la convention franco-suisse sur les successions signée le 11 juillet 2013. L’accord intergouvernemental issu de ces discussions constitue le présent accord. Il a été signé à Berne, le 25 juin 2014. 

Une évolution positive concerne tout d’abord la problématique de l’identification du contribuable. En effet, conformément aux préconisations figurant dans la version de 2012 du modèle de l’OCDE, l’accord franco-suisse du 25 juin 2014 prévoit que les demandes d’assistance administrative pourront porter sur des groupes de contribuables sans qu’il soit nécessaire de fournir leurs noms et adresses (permettant notamment les demandes dites « groupées »).

Par ailleurs, cet accord clarifie les modalités de mise en œuvre de l’échange de renseignements bancaires, en n’exigeant plus l’identification de l’établissement détenteur des avoirs du contribuable. Il met fin sur ce point aux règles interprétatives résultant de l’échange de lettres du 11 février 2010.

Cet accord doit permettre un renforcement du dispositif juridique de la coopération bilatérale avec la Suisse, notamment sur le sujet sensible des renseignements bancaires.

II- Conséquences estimées de la mise en œuvre de l’accord

- Conséquences économiques et financières

En mettant l’échange de renseignements entre la France et la Suisse en conformité avec les standards de l’OCDE, le présent accord favorise la lutte contre l’évasion et la fraude fiscales.

Il est à noter que le renforcement de la coopération administrative permettra d’améliorer l’efficacité des contrôles, mais revêt également un aspect dissuasif. Ce dernier apparaît notamment dans le résultat du service de traitement des déclarations rectificatives mis en place par l’administration fiscale française, dont le ministre a annoncé, sur l’année 2014, qu’il dépassait 1,8 milliards d’euros au 19 septembre dernier.

Pour autant, il n’est pas possible d’estimer, même en termes d’ordre de grandeur, les montants de la fraude et de l’évasion fiscale, par définition inconnus, qui impliqueraient des opérateurs profitant des lacunes actuelles de l’échange de renseignements avec la Suisse.

- Conséquences juridiques

Articulation du texte avec les accords ou conventions internationales existantes

L’accord franco-suisse signé le 25 juin 2014 amende le protocole additionnel à la convention entre la France et la Suisse du 9 septembre 1966 modifiée en vue d’éliminer les doubles impositions en matière d’impôts sur le revenu et sur la fortune et de prévenir la fraude et l’évasion fiscales.

Sans modifier dans son ensemble la convention de 1966, le présent accord permet une meilleure coopération administrative entre autorités françaises et suisses. Les modalités de mise en œuvre de l’échange de renseignements seront ainsi conformes aux derniers standards de l’OCDE.

Par ailleurs, le traitement et la protection des données à caractère personnel et des autres informations fournies par les Etats seront, pour la France, assurées conformément à :

- la loi n° 78-17 2 modifiée du 6 janvier 1978 dite « Informatique et Libertés » ;

- la directive 95/46/CE3 du Parlement européen et du Conseil du 24 octobre 1995, relative à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, en particulier l’article 26 ;

- la convention du Conseil de l’Europe pour la protection des personnes à l’égard du traitement automatisé des données à caractère personnel, adoptée à Strasbourg le 28 janvier 19814.

Il convient de noter à cet égard que la Suisse dispose d'une législation sur la protection des données adéquate et équivalente à celle de la France5.

Articulation du texte avec les dispositions européennes

La Suisse n’est membre ni de l’UE, ni de l’Espace économique européen. Elle n’entre donc notamment pas dans le champ d’application de la directive 2011/16/UE6 du Conseil du 15 février 2011 relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal.

Un accord du 26 octobre 20047 conclu entre la Communauté européenne et la Confédération suisse prévoit cependant l’application, dans cet Etat, de mesures équivalentes à celles de la directive 2003/48/CE8 du Conseil du 3 juin 2003 en matière de fiscalité concernant les seuls revenus de de l’épargne sous forme de paiements d’intérêts. Il comporte une clause d’assistance administrative, laquelle permet en substance aux Etats membres de l’UE de requérir la communication d’informations fiscales auprès de la Suisse, mais seulement sur le champ restreint des situations susceptibles d’être qualifiées de fraude au sens du droit suisse et sur les seuls revenus visés par cet accord, soit les revenus de l’épargne payés sous forme d’intérêts.

La directive 2003/48/CE a été révisée le 24 mars 2014 par la directive 2014/48/UE9 afin d’étendre son champ à certains revenus tirés de l’assurance-vie. Dans le cadre de cette révision, les Etats membres ont mandaté la Commission européenne pour renégocier avec la Suisse l’accord du 26 octobre 2004, et en particulier y inclure une clause d’échange d’informations sur demande à des fins fiscales de portée générale, conformément aux standards internationaux, et explorer les voies de progression vers un échange automatique d’informations.

A la suite de ces négociations, un protocole modifiant l’accord entre la Communauté européenne et la Confédération suisse prévoyant des mesures équivalentes à celles prévues dans la directive 2003/48/CE du Conseil en matière de fiscalité des revenus de l’épargne sous forme de paiements d’intérêts a été paraphé le 19 mars 2015. La Présidence lettone de l’UE devrait les soumettre pour adoption au Conseil Ecofin le 26 mai 2015, date à laquelle est également prévue la signature.

Ce protocole introduit 11 articles issus du modèle d’accord administratif de l’OCDE, dont l’article 5 qui reprend les dispositions de l’article 26, qui définit l’échange de renseignements, du modèle 2012 de convention de double imposition de l’OCDE. En outre, le mémorandum d’entente, qui fait corps avec le protocole, reprend les derniers commentaires de l’OCDE qui prévoient la possibilité de faire des demandes groupées sous réserve qu’elle ne constituent pas une pêche aux renseignements.

Même si ces avancées sont positives pour l’échange d’information entre la Suisse et les pays de l’Union européenne, ce texte n’est pas en vigueur à ce jour. Le présent avenant à la convention fiscale entre la France et la Suisse dispose d’un champ plus large que l’accord du 26 octobre 2004 signé entre la Confédération suisse et l’Union européenne qui ne concerne que l’échange de renseignement relatifs aux revenus de l’épargne. Il concerne l’échange de renseignements relatif à tout type d’impôts, y compris ceux qui ne sont pas visés par la convention, et n’est pas limité aux situations susceptibles d’être qualifiées de fraude au sens du droit suisse.

- Conséquences administratives

La direction générale des finances publiques (DGFiP), administration responsable de l’application des conventions fiscales conclues par la France, sera en charge de celle du présent accord.

Plus précisément, la mise en œuvre de l’échange de renseignements entre la France et la Suisse est conduite par le service du contrôle fiscal de la DGFiP et par les directions de contrôle fiscal nationales et interrégionales au niveau déconcentré. Ils sont en charge de l’assistance administrative dans le cadre européen ou en application des conventions fiscales bilatérales.

Une évaluation de l’effectivité de l’échange de renseignements est présentée chaque année lors de l’examen du projet de loi de finances (annexe « Rapport annuel du Gouvernement portant sur le réseau conventionnel de la France en matière d’échange de renseignements »).

III – Historique des négociations

En 2012, dans le cadre de la négociation d’une nouvelle convention en matière de droits de succession, la France a obtenu parallèlement l’introduction, dans le protocole additionnel à la Convention de 1966, les stipulations du présent accord portant sur l’ensemble des impôts, afin de faciliter l’échange d’informations et de se conformer aux standards les plus récents de l’OCDE. Une nouvelle convention franco-suisse relative aux droits de succession a été signée le 11 juillet 2013. Mais, au premier semestre 2014, le Parlement suisse a rejeté le projet de loi autorisant l’approbation par la Suisse de cette nouvelle convention. Le rejet par les Suisses de cette nouvelle convention a ensuite entrainé la dénonciation, par la France, de la convention du 31 décembre 1953 en vue d’éviter les doubles impositions en matière d’impôts sur les successions.

Dans ce contexte, les autorités des deux États ont rapidement élaboré un nouveau texte ayant pour seul objet de modifier, en matière d’échange de renseignements, le protocole annexé à la convention franco-suisse du 9 septembre 1966 en matière d’impôts sur le revenu et la fortune. Cet accord reprend les avancées présentes initialement dans la convention franco-suisse signée le 11 juillet 2013 sur les successions. Il a été signé à Berne le 25 juin 2014, à la suite du refus des parlementaires suisses. 

IV – Etat des signatures et ratifications

L’accord entre le Gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse modifiant le protocole additionnel à la convention du 9 septembre 1966 en matière d’impôts sur le revenu et sur la fortune a été signé à Berne le 25 juin 2014.

Relevant du domaine législatif, cet accord doit faire l’objet d’une autorisation parlementaire d’approbation en vertu de l’article 53 de la Constitution. Du côté suisse, le Parlement n’a pas à ratifier l’accord, ayant donné à l’administration un mandat général sur le sujet.

V - Déclarations ou réserves

Sans objet

1 http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000878011&fastPos=9&fastReqId=1922121171&categorieLien=id&oldAction=rechTexte ; http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000849765&fastPos=6&fastReqId=700064409&categorieLien=id&oldAction=rechTexte ; http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000206725&fastPos=4&fastReqId=1354373146&categorieLien=id&oldAction=rechTexte ; http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000023218006&fastPos=2&fastReqId=1981495058&categorieLien=id&oldAction=rechTexte ;

2 http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000886460&fastPos=1&fastReqId=898062854&categorieLien=id&oldAction=rechTexte

3 http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=CELEX:31995L0046:fr:HTML

4 http://conventions.coe.int/Treaty/fr/Treaties/Html/108.htm

5 Voir le site Internet de la CNIL : http://www.cnil.fr/pied-de-page/liens/les-autorites-de-controle-dans-le-monde/

6 http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:L:2011:064:0001:0012:FR:PDF

7 http://www.lexfind.ch/dta/27481/3/0.632.401.23.fr.pdf

8 http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:L:2003:157:0038:0048:fr:PDF

9 http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=uriserv:OJ.L_.2014.111.01.0050.01.FRA


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