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N° 323

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 24 octobre 2012.

PROPOSITION DE LOI

tendant à encadrer le financement public
des plans sociaux pour les entreprises bénéficiaires,

(Renvoyée à la commission des affaires sociales, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Jean-Christophe LAGARDE,

député.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le plan de sauvegarde de l’emploi, également connu sous son ancien nom de plan social ou sous le sigle PSE, est un dispositif visant à limiter les conséquences des licenciements collectifs. Instauré par la loi « Soisson » du 2 août 1989, le plan social a été renommé « plan de sauvegarde de l’emploi » par la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002.

Les entreprises d’au moins cinquante salariés qui envisagent de licencier pour motif économique au moins dix salariés dans une période de trente jours doivent établir un « plan de sauvegarde de l’emploi » (article L. 1233-61 et suivants du code du travail).

Ce document regroupe un ensemble de mesures destinées à limiter le nombre des licenciements et à favoriser le reclassement des salariés dont le licenciement est inévitable. Il est obligatoirement communiqué à la direction départementale du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle (DDTEFP). Les représentants du personnel doivent être réunis, informés et consultés sur le contenu du plan de sauvegarde de l’emploi. A défaut, la procédure de licenciement est nulle.

Un certain nombre de mesures figurant dans le plan de sauvegarde de l’emploi peuvent donner lieu à l’attribution des aides du fonds national de l’emploi (FNE) qui sont négociées avec la direction départementale du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle (article L. 5111-1 du code du travail).

Ces dispositifs publics d’accompagnement des licenciements pour motif économique nécessitent la signature de conventions entre l’État et l’entreprise. Il s’agit par exemple :

– des conventions de formation et d’adaptation ;

– des conventions de congé de conversion ;

– des conventions de cellule de reclassement ;

– des conventions d’allocations temporaires dégressives ;

– des conventions d’aide à la mobilité géographique ;

– des conventions d’aide à la création d’entreprise ;

– et des conventions de cessation d’activité de certains salariés ayant connu des conditions d’emploi pénibles (cessation anticipée d’activité des salariés ou préretraites).

Pour certains de ces dispositifs, la prise en charge financière de l’État est variable. C’est le cas pour l’allocation temporaire dégressive pour lequel le taux de participation de l’État est négocié au cas par cas et modulé en fonction notamment de la situation économique de l’entreprise. À titre d’exemple, pour les entreprises confrontées à de graves difficultés ou situées dans des zones confrontées à de graves déséquilibres de l’emploi, le ministre chargé de l’emploi et le ministre chargé du budget peuvent accorder une prise en charge totale par l’État.

Les contrôles exercés sur les plans de sauvegarde de l’emploi sont de deux types:

– Le plan de sauvegarde de l’emploi doit être communiqué à la direction départementale du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle (DDTEFP) qui doit s’assurer que l’obligation d’établir le plan et de le mettre en œuvre a été respectée et contrôler la conformité du plan. À ce titre, le directeur départemental du travail doit s’assurer que des mesures de reclassement sont prévues, qu’elles sont clairement adaptées à leur objectif et ont une consistance réelle qui fonde leur crédibilité (article L. 1233-53 du code du travail). Il peut faire des propositions destinées à compléter ou modifier le plan de sauvegarde de l’emploi en tenant compte de la situation économique de l’entreprise (article L. 1233-57 du code du travail). En l’absence de mesures de reclassement, l’autorité administrative compétente dresse un constat de carence qui doit être notifié au plus tard dans les huit jours suivant la notification du projet de licenciement. Selon l’administration, ce constat doit conduire l’employeur à recommencer la procédure à ses débuts.

– Le juge peut être amené, sur saisine du comité d’entreprise, d’un syndicat ou d’un salarié, à se prononcer sur la validité du plan de sauvegarde de l’emploi.

Aucun contrôle ne s’exerce à ce jour concernant l’attribution d’aides financières de l’État à une entreprise lorsqu’elle procède à un licenciement économique et met en œuvre un plan de sauvegarde de l’emploi.

Ainsi, depuis quelques années on constate que de nombreuses entreprises qui mettent en place un plan de sauvegarde de l’emploi obtiennent de l’État une participation de ce dernier alors même qu’elles enregistre des bénéfices.

Aussi, afin d’éviter que les entreprises qui font des bénéfices ne puissent voir leur plan social payé en tout ou partie par l’État, la présente proposition de loi envisage que le directeur départemental de l’emploi leur refuse l’attribution des aides du fonds national de l’emploi pour la mise en œuvre de leur plan de sauvegarde de l’emploi.

Le dispositif prévu implique évidemment que les directions départementales de l’emploi aient accès aux dossiers fiscaux des entreprises. Ceci pourrait être une difficulté. C’est pourquoi, la présente proposition indique qu’un refus de transmettre un dossier fiscal laisse présager des bénéfices.

De plus, le directeur départemental de l’emploi est en mesure d’apprécier la situation économique de l’entreprise car il est le destinataire de tous les éléments relatifs au plan de sauvegarde de l’entreprise.

Enfin, il convient de souligner que ces aides, qu’elles transitent financièrement par l’entreprise (c’est le cas par exemple des cellules de reclassement) ou qu’elle soient attribuées directement aux salariés (c’est le cas de l’allocation temporaire d’activité), bénéficient in fine aux salariés. La suppression des aides de l’État impliquera donc nécessairement que l’entreprise finance elle-même l’intégralité de ces dispositifs puisque sa situation économique le permet.

Par ailleurs, afin de sanctionner financièrement une entreprise qui procède à un licenciement économique alors qu’elle déclare des bénéfices nets, il serait possible de prévoir que le juge puisse accorder aux salariés licenciés une indemnité supplémentaire de licenciement versée par l’employeur. Celle-ci serait alors au minimum égale à 50 % de l’indemnité de licenciement que l’entreprise doit déjà verser en vertu de l’article L. 1234-9 du code du travail.

La procédure serait la même que celles prévues aux articles L. 1235-10 à L. 1235-17 du code du travail et qui permettent au juge d’accorder aux salariés licenciés une indemnité ou une réintégration en fonction des irrégularités qui ont été constatée dans la procédure de licenciement ou dans la mise en œuvre du plan de sauvegarde de l’entreprise.

Telles sont les principales orientations de la présente proposition de loi qu’il vous est demandé, Mesdames, Messieurs, de bien vouloir adopter.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

Après l’article L. 1233-57 du code du travail, il est inséré un article L. 1233-57-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 1233-57-1. – Lorsque l’entreprise qui procède à un plan de sauvegarde de l’emploi déclare aux services fiscaux un bénéfice net ou refuse de communiquer son dernier avis d’imposition à l’autorité administrative compétente, aucune aide du fonds national de l’emploi pour la mise en œuvre du plan de sauvegarde de l’emploi ne peut lui être attribuée. Dans ce cas, la totalité du financement de ce dernier est à la seule charge de l’entreprise.

« La décision de refus de l’autorité administrative est rendue avant la dernière réunion du comité d’entreprise. Elle est communiquée à l’employeur et au comité d’entreprise ou, à défaut, aux délégués du personnel.

« En l’absence de représentants du personnel, cette décision est portée à la connaissance des salariés par voie d’affichage sur les lieux de travail. »

Article 2

Après l’article L. 1235-17 du code du travail, il est inséré un article L. 1235-18 ainsi rédigé :

« Art. L. 1235-18. – Lorsqu’une entreprise de cinquante salariés et plus procède au licenciement de dix salariés ou plus sur une même période de trente jours alors qu’elle déclare aux services fiscaux des bénéfices nets, le juge peut accorder à chaque salarié licencié une indemnité supplémentaire de licenciement à la charge de l’employeur pour compenser le préjudice subi. Elle est au minimum égale à 50 % de l’indemnité de licenciement mentionnée à l’article L. 1234-9 et se cumule avec celle-ci. »


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