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N° 372

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 13 novembre 2012.

PROPOSITION DE LOI

relative aux licenciements collectifs pour motif économique,

(Renvoyée à la commission des affaires sociales, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Jean-Noël CARPENTIER, Thierry BRAILLARD, Ary CHALUS, Gérard CHARASSE, Jeanine DUBIÉ, Olivier FALORNI, Paul GIACOBBI, Annick GIRARDIN, Joël GIRAUD, Jacques KRABAL, Jacques MOIGNARD, Dominique ORLIAC, Thierry ROBERT, Stéphane SAINT-ANDRÉ, Roger-Gérard SCHWARTZENBERG et Alain TOURRET,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Confrontée comme la plupart des pays européens à une grave crise économique et financière, la France connaît une forte progression du chômage. Cette conjoncture, marquée en 2012 par trois trimestres consécutifs de croissance zéro, dissuade la création d’emplois et provoque des licenciements collectifs.

L’entreprise joue évidemment un rôle déterminant dans l’activité économique de notre pays et les difficultés qu’elle rencontre dans le contexte actuel ne peuvent être méconnues.

Mais, sans s’ingérer dans la gouvernance des entreprises, l’État doit être particulièrement attentif à la sauvegarde de l’emploi dans cette période très critique pour nos concitoyens.

Il apparaît donc utile de préciser certaines dispositions actuelles du code du travail (article L. 1235-10) pour clarifier les conditions d’application des procédures de licenciement collectif pour motif économique, dont l’article L. 1233-3 donne la définition suivante :

« Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d’une suppression ou transformation d’emploi ou d’une modification, refusée par le salarié d’un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques ».

Par ailleurs, le licenciement collectif pour motif économique est régi par l’article L. 1235-10 :

« Dans les entreprises d’au moins cinquante salariés, lorsque le projet de licenciement concerne au moins dix salariés dans une même période de trente jours, la procédure de licenciement est nulle tant que le plan de reclassement des salariés prévu à l’article L. 1233-61 et s’intégrant au plan de sauvegarde de l’emploi n’est pas présenté par l’employeur aux représentants du personnel, qui doivent être réunis, informés et consultés.

La validité du plan de sauvegarde de l’emploi est apprécié au regard des moyens dont dispose l’entreprise ou l’unité économique ou sociale ou le groupe.

Le premier alinéa n’est pas applicable aux entreprises en redressement ou liquidation judiciaires. »

L’interprétation jurisprudentielle de cet article donne souvent lieu à une distinction quant au prononcé éventuel de la nullité de licenciement.

Si la procédure de licenciement prévue à l’article L. 1235-10 (obligation pour l’employeur de « présenter le plan de reclassement des salariés s’intégrant au plan de sauvegarde de l’emploi aux représentants du personnel ») n’a pas été respectée, l’article L. 1235-11 dispose :

« Le juge peut ordonner la poursuite du contrat de travail ou prononcer la nullité du licenciement et ordonner la réintégration du salarié à la demande de ce dernier, sauf si cette réintégration est devenue impossible, notamment du fait de la fermeture de l’établissement ou du site ou de l’absence d’emploi disponible ».

En revanche, généralement, le juge ne s’autorise pas à vérifier si le motif économique invoqué par l’entreprise justifie effectivement le plan de sauvegarde de l’emploi qu’elle met en œuvre et à prononcer la nullité si tel n’est pas le cas.

Bref, la nullité du licenciement peut être prononcée en cas d’irrégularité de la procédure, mais non pas en cas de défaut de justification économique réelle.

Toutefois, dans l’affaire Viveo, la Cour d’appel de Paris dans un arrêt du 12 mai 2011 a estimé que « le défaut de motif économique », c’est-à-dire l’absence de justification réelle, peut conduire, lui aussi, à prononcer la nullité du licenciement.

Mais cette décision de la Cour d’appel, consacrant la possibilité d’une nullité au fond, a été cassée par la Cour de cassation par un arrêt du 3 mai 2012, ainsi motivé :

« Vu l’article L. 1235-10 du code du travail,

Attendu qu’en vertu de ce texte seule l’absence ou l’insuffisance du plan de sauvegarde de l’emploi soumis aux représentants du personnel entraîne la nullité de la procédure de licenciement pour motif économique… »

Cette position de la Cour de cassation a été souvent critiquée par la Doctrine. Par ailleurs, deux décisions récentes ont procédé à la même analyse que la Cour d’appel de Paris dans l’affaire Viveo : un arrêt de la Cour d’appel de Reims du 3 janvier 2012 (Sodimecal) et un jugement du Tribunal de grande instance de Créteil du 22 mai 2012 (Leader Price).

Toutefois, la position de la Cour de cassation pouvant s’appuyer sur l’adage « pas de nullité sans texte », il paraît utile, tout en conservant sa rédaction actuelle, de compléter l’article L. 1235-10 par un membre de phrase relatif au défaut de motif économique.

Cette précision unifierait la jurisprudence en apportant une clarification opportune pour les juridictions qui seraient ainsi habilitées à apprécier la validité du licenciement collectif pour motif économique au regard, à la fois, de la procédure suivie par l’employeur et de l’exactitude du motif économique indiqué par celui-ci.

PROPOSITION DE LOI

Article unique

Au premier alinéa de l’article L. 1235-10 du code du travail, après le mot : « nulle », sont insérés les mots : « en cas de défaut de motif économique défini par l’article L. 1233-2 ou ».


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