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N° 394

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 13 novembre 2012.

PROPOSITION DE LOI

relative au paiement des salaires et des loyers,

(Renvoyée à la commission des affaires économiques, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Thierry BRAILLARD, Jean-Noël CARPENTIER, Ary CHALUS, Gérard CHARASSE, Olivier FALORNI, Paul GIACOBBI, Annick GIRARDIN, Joël GIRAUD, Jacques KRABAL, Jacques MOIGNARD, Dominique ORLIAC, Thierry ROBERT, Stéphane SAINT-ANDRÉ, Roger-Gérard SCHWARTZENBERG et Alain TOURRET,

députés.


EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le pouvoir d’achat des Français n’a cessé de diminuer depuis de nombreuses années, avec pour point d’orgue les cinq dernières années au cours desquels le gouvernement précédent n’a fait qu’aggraver la situation des classes moyennes et populaires.

Le chômage n’a, dans le même temps, cessé de croître, atteignant malheureusement un niveau très élevé.

L’une des grandes fractures de la société française qui est apparue encore plus nettement au cours des dix dernières années oppose les Français propriétaires et les Français locataires – il ne s’agit pas ici du cas des propriétaires de plusieurs logements mis en location mais de ceux qui n’ont pour patrimoine que leur résidence principale.

Au vu de la situation économique et budgétaire de la France, il paraît difficile de revaloriser sensiblement le pouvoir d’achat des Français, nonobstant la récente augmentation du SMIC ou des mesures ponctuelles comme la revalorisation de l’allocation de rentrée scolaire.

Dans l’attente de la profonde réforme fiscale annoncée et de la reprise économique incertaine, la présente proposition constitue une initiative forte en faveur des Français, issus de classes populaires ou moyennes et qui connaissent des difficultés permanentes de trésorerie, avec le paiement d’agios bancaires et pour certains, des cas de surendettement dramatiques.

Selon une enquête IPSOS-Logica Consulting pour Femme actuelle publiée le 15 octobre 2012, près d’une mère célibataire sur deux avoue terminer le mois à découvert et près d’une sur cinq craint de basculer dans la précarité.

Cette proposition revient principalement à remettre en cause deux mécanismes tellement ancrés dans les habitudes que, d’une part, leur fondement est oublié et, d’autre part, l’on ne pense aucunement à les modifier.

Il s’agit des dates auxquelles le loyer doit être payé par un locataire et le salaire versé par un employeur.

Le salaire est en effet versé à tout employé en fin de mois alors que la prestation de travail a été réalisée. Quant au loyer, il doit être payé par le locataire en début de mois alors même que la prestation caractéristique du contrat de bail, à savoir la mise à disposition de la jouissance des lieux, ne fait que débuter.

Cela s’explique par des considérations historiques.

Le code civil de 1804 est un code où la propriété est sacrée - comme d’ailleurs dans la Déclaration des droits et du citoyen de 1789 - ce qui s’explique dans le contexte historique de l’époque, et où les droits des propriétaires sont protégées, comme en témoignent de nombreuses dispositions dudit code – qu’il s’agisse du droit de propriété (Livre I du code civil) ou du droit commun du bail (Livre III).

Après de multiples lois, le régime des baux d’habitation tente d’établir un équilibre entre les droits du propriétaire et ceux du locataire, ces derniers ayant été améliorés au fil des années.

Pour autant la loi du 6 juillet 1989, modifiée par la loi du 12 juillet 2010, ne fixe que des dispositions supplétives relatives aux modalités de paiement du loyer, sans préciser la date à laquelle celui-ci devra être payé.

De fait, les contrats d’habitation contiennent tous des clauses types en vertu desquelles le loyer doit être payé par le locataire dans les cinq ou les dix premiers jours du mois.

Quant au droit du travail, il résulte également d’une lente sédimentation de textes qui ont accordé un peu plus de droits aux salariés.

Cependant, le code du travail définit le salaire comme la contrepartie de la prestation de travail réalisée, et depuis la loi du 19 janvier 1978, il a instauré la mensualisation du salaire sans envisager le moment auquel cette rémunération doit être versée.

Ainsi, la tradition a voulu que le paiement du salaire intervienne en fin de mois, une fois la prestation effectuée.

Ces usages sont tellement ancrés dans les habitudes que personne ne songe à les remettre en cause.

Il n’y a aucune raison pour que la partie faible à ces deux contrats, c’est-à-dire le locataire et le salarié, soit placée dans des situations différentes selon le type de contrat.

C’est pourquoi un vrai changement consisterait, par des dispositions impératives insérées dans la loi de 1989 et dans le code du travail, à prévoir que le paiement du loyer et le versement du salaire se fassent au quinzième jour de chaque mois.

Une telle mesure permettrait à de très nombreux Français pour lesquels le loyer représente une part significative de leurs dépenses de bénéficier d’un décalage immédiat de trésorerie particulièrement bienvenu pour toutes celles et tous ceux dont le pouvoir d’achat est modeste et qui rencontrent des difficultés financières récurrentes.

Des exceptions seront envisagés pour les contrats précaires ou lors de rupture du contrat de travail tout comme lorsque le locataire donnerait son congé en vue de mettre un terme à son contrat de bail.

Des aménagements pour l’application de cette loi dans le temps pourront être adoptés pour les artisans, commerçants et les TPE.


PROPOSITION DE LOI

Article 1er

Après le troisième alinéa de l’article L. 3242-1 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le paiement de la rémunération est versé le 15 de chaque mois. »

Article 2

Le sixième alinéa de l’article 3 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Le paiement mensuel intervient le 15 de chaque mois. »

Article 3

Au a) de l’article 7 de la loi n° 89-462 précitée, les mots : « aux termes convenus » sont supprimés.


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