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N
° 661

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 30 janvier 2013

AVIS

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES SUR LE PROJET DE LOI de séparation et de régulation des activités bancaires (n° 566),

PAR M. Philippe KEMEL,

Député.

——

Voir les numéros :

Assemblée nationale : 566, 666, 670 et 707.

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 7

I.— L’ÉVIDENTE OPPORTUNITÉ D’UN PROJET DE LOI RELATIF À LA SUPERVISION ET À LA RÉSOLUTION BANCAIRES 9

A.— LES BANQUES, ACTEURS ESSENTIELS AU FONCTIONNEMENT DE L’ÉCONOMIE 9

1. Les établissements bancaires sont placés au centre du circuit économique 9

2. L’importance des banques s’avère particulièrement prégnante en France 11

B.— UNE PRISE DE CONSCIENCE À CONCRÉTISER 12

II.— LA NÉCESSITÉ DE RECENTRER L’ACTION DES ÉTABLISSEMENTS BANCAIRES 14

A.— UN PROJET DE LOI QUI S’INSCRIT DANS UN CONTEXTE PROPICE AUX RÉFORMES 14

1. Le développement des mesures d’encadrement des activités bancaires 14

2. La multiplication des options possibles 16

a) La règle de Volcker 16

b) Le rapport Vickers 17

c) Le rapport Liikanen 18

B.— UN PROJET DE LOI POUR RESTAURER LA CONFIANCE ENVERS LE SYSTÈME BANCAIRE 19

1. Une vraie séparation des activités utiles au financement de l’économie par rapport aux activités spéculatives 19

2. La constitution d’un maillage de mécanismes de supervision et de résolution du système financier 21

C.— LA SITUATION DU CONSOMMATEUR DANS SES RELATIONS AVEC LE MONDE FINANCIER 22

TRAVAUX EN COMMISSION 23

I.— DISCUSSION GÉNÉRALE 23

II.— EXAMEN DES ARTICLES 41

TITRE IER : SÉPARATION DES ACTIVITÉS UTILES AU FINANCEMENT DE L’ÉCONOMIE DES ACTIVITÉS SPÉCULATIVES 41

Article 1er (articles L. 511-47 à L. 511-50 [nouveaux] du code monétaire et financier) : Le principe de la filialisation des activités bancaires spéculatives 41

Article 2 (article L. 612-33-1 [nouveau] du code monétaire et financier) : Renforcement des compétences de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution 48

Article 3 (article L. 531-2-2° du code monétaire et financier) : Interdiction de l’exemption d’agrément pour les filiales 49

Article 4 (article L. 531-2-2° du code monétaire et financier) : Mise en œuvre du Titre Ier 49

TITRE II :MISE EN PLACE DU RÉGIME DE RÉSOLUTION BANCAIRE 51

Chapitre Ier : Institutions en matière de prévention et de résolution bancaires 51

Article 5 (articles L. 612-1, L. 612-4, L. 612-8-1 [nouveau], L. 612-33 et L. 612-38 du code monétaire et financier) : Création de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) 51

Article 6 (articles L. 312-4, L. 312-5, L. 312-15 et L. 312-16 du code monétaire et financier) : Création du Fonds de garantie des dépôts et de résolution 56

Article 7 (articles L. 613-31-11 à L. 613-31-18 [nouveaux] du code monétaire et financier) : Mesures de prévention et de résolution des crises bancaires 59

Article 8 (articles L. 517-5, L. 612-2, L. 612-16, L. 612-24, L. 612-27 et L. 612-34 du code monétaire et financier) : Mesures de coordination 64

Chapitre III : DISPOSITIONS TRANSITOIRES 65

Article 9 : Mesures de coordination 65

TITRE III : SURVEILLANCE MACRO-PRUDENTIELLE 65

Article 10 (article L. 141-5-1 [nouveau] du code monétaire et financier) : Nouvelle mission dévolue à la Banque de France 65

Article 11 (articles L. 631-2, L. 631-2-1, L. 631-2-2, L. 631-2-3 [nouveau] du code monétaire et financier) : Le Conseil de stabilité financière 66

TITRE IV : RENFORCEMENT DES POUVOIRS DE L’AUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS ET DE L’AUTORITÉ DE CONTRÔLE PRUDENTIEL ET DE RÉSOLUTION 69

Chapitre Ier : Dispositions relatives à l’autorité des marchés financiers 69

Article 12 (articles L. 621-2, L. 621-8-4 [nouveau], L. 621-10, L. 621-10-1 [nouveau], L. 621-11, L. 621-12, L. 621-15 et L. 621-18 du code monétaire et financier) : Le renforcement des pouvoirs de l’Autorité des marchés financiers 69

Article 13 (articles L. 465-1 et L. 465-2 du code monétaire et financier) : Extension du champ des manquements susceptibles d’être incriminés 72

Chapitre II : dispositions relatives à l’autorité de contrôle prudentiel et de résolution 72

Article 14 (articles L. 511-10-1, L. 532-2-1, L. 511-47-1, L. 612-23-1 [nouveaux], L. 612-24, L. 612-25, L. 612-33 et L. 612-39 du code monétaire et financier) : Pouvoirs de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution à l’encontre des dirigeants et organes dirigeants des établissements financiers 72

Chapitre III : Supervision des chambres de compensation 76

Article 15 (articles L. 141-4, 440-1 à L. 440-3, L. 440-7 à L. 440-9 du code monétaire et financier) : Supervision des chambres de compensation 76

TITRE V : DISPOSITIONS RELATIVES AUX SOCIÉTÉS OU CAISSE D’ASSURANCE ET DE RÉASSURANCE MUTUELLES AGRICOLES 78

Article 16 (articles L. 322-27-1 et L. 322-27-2 [nouveaux] du code des assurances) : Dispositions relatives aux sociétés ou caisse d’assurance et de réassurance mutuelles agricoles 78

TITRE VI : PROTECTION DES CONSOMMATEURS ET ÉGALITÉ ENTRE LES HOMMES ET LES FEMMES 80

Chapitre Ier : Plafonnement des frais d’incident et offre de services bancaires pour la clientèle en situation de fragilité 80

Article 17 (article L. 312-1-3 [nouveau] du code monétaire et financier) : Plafonnement des commissions perçues en cas d’irrégularité de fonctionnement d’un compte bancaire et offre de moyens de paiement aux clients en situation de fragilité 80

Chapitre II : assurance-emprunteur 84

Article 18 (articles L. 311-4, L. 311-4-1 et L. 312-6-1 [nouveaux], L. 312-9 et L. 313-2-1 [nouveau] du code de la consommation) : Dispositions relatives à l’assurance-emprunteur 84

Chapitre III : Mesures relatives aux intermédiaires bancaires et financiers 88

Article 19 (articles L. 341-2, L. 341-17, L. 519-5 et L. 612-41 du code monétaire et financier) : Mesures relatives aux intermédiaires bancaires et financiers 88

Chapitre IV : Référentiel de place 90

Article 20 (articles L. 241-23-2 [nouveau] et L. 214-24-1 du code monétaire et financier) : Mise en place d’un référentiel de place relatif aux OPCVM 90

Chapitre V : Mesures de simplification 91

Article 21 (article L. 312-1 du code monétaire et financier) : Droit au compte 91

Après l’article 21 93

Article 22 (articles L. 331-3-1, L. 331-6, L. 331-7 et L. 331-7-1 du code monétaire et financier) : Dispositions relatives à la procédure de surendettement 93

Article 23 (article L. 312-1-3 [nouveau] du code monétaire et financier) : Dispositions relatives aux frais d’obsèques 95

Article 24 (article L. 311-9 du code de la consommation) : Consultation du fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers 96

Chapitre VI : Égalité entre les femmes et les hommes en assurance 97

Article 25 (article L. 111-7 du code des assurances) : Égalité tarifaire entre hommes et femmes en matière d’assurances 97

TITRE VII : DISPOSITIONS RELATIVES À L’OUTRE-MER 98

Article 26 : Dispositions relatives à l’Outre-mer 98

CONCLUSION 99

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION 101

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 107

« Qu’est-ce que vous me chantez là ? Je ne veux pas leur demander onze cents francs, à aucun prix ! Ce serait vraiment trop bête et trop simple… Comprenez donc que, dans ces questions de crédit, il faut toujours frapper l’imagination. L’idée de génie, c’est de prendre dans la poche des gens l’argent qui n’y est pas encore. Du coup, ils s’imaginent qu’ils ne le donnent pas, que c’est un cadeau qu’on leur fait. Et puis, vous ne voyez pas l’effet colossal de ce bilan anticipé paraissant dans tous les journaux, de ces trente-six millions de gains annoncés d’avance, à toute fanfare !… La Bourse va prendre feu, nous dépassons le cours de deux mille, et nous montons, et nous montons, et nous ne nous arrêtons plus ! »

Émile Zola, L’Argent

MESDAMES, MESSIEURS,

La plus grande crise financière depuis la Grande crise d’octobre 1929 est née voilà maintenant six ans pour engendrer une crise économique. Cette dernière est toujours aussi prégnante, peut-être même davantage qu’il y a quelques années.

En vérité, les crises financières et économiques n’ont jamais vraiment quitté notre horizon.

Au fil des années 1990, ce sont les crises monétaires qui se succèdent : au Mexique à la fin de l’année 1994, en Thaïlande à l’été 1997 (puis, dans les mois qui suivent, dans plusieurs autres pays d’Asie), en Russie un an plus tard, en Argentine en 2001 puis au Brésil en 2002… Même si les difficultés de change occupent alors le devant de la scène, cette époque voit également chuter certains géants de la finance : la faillite du « hedge fund » LTCM (Long Term Capital Management) qui, en quelques mois perdit plus de 50 % de sa valeur (soit 2,5 Mds$) avant de déposer son bilan en 2000 en est un exemple topique. Crise de change suivie, très rapidement, d’une crise boursière provoquée notamment par l’éclatement de la bulle Internet, avant que le funeste enchaînement des années 2007 – 2008 ne survienne.

Au début du mois de février 2007, on ne prend pas garde à la situation même si l’indicateur ABX-HE baisse dangereusement, révélant ainsi que des actifs immobiliers, jusqu’alors considérés comme des placements sans risque, sont désormais cotés en-dessous de leur valeur nominale. Quelques mois plus tard, au début du mois de mai, ce sont d’autres produits financiers (les CDO, collateralized debt obligations) qui ne trouvent plus preneur sur les marchés financiers. Faute d’acheteur, les banques se voient donc obligées de conserver ces produits dans leurs bilans afin de ne pas subir de pertes trop importantes : pour autant leur valeur ne cesse de chuter. Fort logiquement, au mois de juin 2007, la liquidité s’avère relativement difficile à trouver à tel point que certaines banques constituent rapidement des surliquidités (des réserves) au cas où ; c’est notamment à cette époque que les banques européennes se tournent vers la Banque centrale européenne pour que celle-ci leur octroie des liquidités leur permettant de continuer à financer l’économie. Outre-Atlantique, les monolines américaines (compagnies d’assurances qui fournissent aux banques une garantie portant sur le risque de perte afférent à certains produits structurés) sont pour leur part fortement dégradées par les agences de notation et peinent à assumer leurs obligations.

En mars 2008, premier coup de semonce, la Banque américaine Bear Stearns (cinquième banque d’affaires sur la place de Wall Street) est la première banque de taille mondiale à être directement affectée par la désormais fameuse crise des subprimes : la Fed lui accorde en urgence un prêt mais la banque, dont la valeur a chuté en quelques jours, sera finalement rachetée en catastrophe par JP Morgan. En Europe, c’est la banque anglaise Northern Rock qui doit être renflouée par le Gouvernement avant d’être nationalisée en février 2008 pour un montant de 1,6 Mds€.

L’annonce par le Secrétaire au Trésor Henry Paulson du refinancement des fonds américains Freddie Mac et Fannie Mae en juillet 2008 précède de peu la faillite, le 15 septembre 2008, de la banque Lehmann Brothers puis, en quelques semaines, de Merrill Lynch (rachetée par Bank of America), de la compagnie d’assurances AIG (rachetée par l’État américain), de Washington Mutual (la première banque de détail américaine), cet enchaînement marquant le début d’une spirale dont nos économies ne se sont toujours pas sorties.

Or, ce qui frappe immédiatement à la lecture d’une telle rétrospective, c’est que cette dernière crise est particulièrement financière et que le système bancaire en est à la fois le cadre et l’acteur principal.

À cet égard, il était plus que jamais nécessaire de faire évoluer les comportements bancaires, compte tenu du nouvel environnement international et de la volonté de recentrer l’action des banques au service du financement de l’économie autour de leur métier : mettre l’épargne et gérer la monnaie au service des ménages et de l’investissement des entreprises.

C’est dans cette optique que M. François Hollande, alors candidat à la Présidence de la République, avait proposé de séparer les activités de crédit des banques de leurs opérations spéculatives (1). C’est naturellement dans cette optique que le projet de loi est aujourd’hui discuté à l’Assemblée nationale.

I.— L’ÉVIDENTE OPPORTUNITÉ D’UN PROJET DE LOI RELATIF À LA SUPERVISION ET À LA RÉSOLUTION BANCAIRES

La question de l’opportunité de ce projet de loi aurait pu se poser au moment où des réformes sont en cours de discussion au plan européen, alors que les décrets d’application de la loi américaine sur ce sujet sont en cours de rédaction, et alors que des réflexions sur ce même sujet se font jour dans divers pays comparables au nôtre.

Mais, très rapidement, le caractère essentiel du projet se fait jour.

Tout d’abord, l’entrée en vigueur des réformes avancées devrait se faire encore attendre, qu’il s’agisse des projets britanniques (les préconisations du rapport Vickers ne devant être mises en œuvre au mieux qu’en 2019) ou des projets européens (dont la concrétisation sera inévitablement repoussée dans le temps en raison du renouvellement de la Commission européenne et des élections au Parlement européen qui doivent tous deux intervenir en 2014). Surtout, la place essentielle des banques dans le paysage économique et politique d’aujourd’hui justifie que leur encadrement ne soit pas une nouvelle fois reporté.

A.— LES BANQUES, ACTEURS ESSENTIELS AU FONCTIONNEMENT DE L’ÉCONOMIE

Contrairement à ce que certains peuvent penser un peu rapidement, les banques ne sont évidemment pas responsables de tous les maux de notre économie (2). Elles en ont pourtant la capacité ! En effet, les banques sont placées au centre des économies et cette prégnance s’avère d’ailleurs très importante en France, où l’intermédiation financière est particulièrement forte.

1. Les établissements bancaires sont placés au centre du circuit économique

En 1365, l’économiste Nicolas Oresme évoquait déjà « … les changeurs et banquiers qui sçavent où l’or a cours à plus hault pris… »…

Même si le mot de « banquier » est ancien, la profession en tant que telle l’est plus encore. De tout temps, il a en effet fallu des intermédiaires pour permettre de prêter aux uns ce que les autres ne possédaient pas (ou pas encore) afin de financer des achats ou des investissements. Si le statut de banquier est donc ancien et recherché (au XVe siècle, « tenir banque » signifie « faire commerce de l’argent »), les banques en tant qu’institutions sont néanmoins plus récentes. Ainsi, c’est la Banque d’Amsterdam qui passe pour être la plus ancienne banque du monde occidental : « La Banque d’Amsterdam, qui est la plus considérable et la plus riche de celles qui font en Europe, fut établie le 31 janvier 1609 sous l’Autorité de Messieurs les États Généraux, par Messieurs les Bourguemaîtres et Regens de ladite Ville, qui est la principale de la Province de Hollande, de laquelle la Ville de Dordrecht est la capitale » (3).

Depuis cette date, les établissements se sont multipliés et leurs activités se sont diversifiées. On distingue aujourd’hui deux grands types de banques :

– les banques de dépôt (également parfois appelées « banques commerciales ») : elles reçoivent de l’argent de leurs clients, le gère et s’en servent pour accorder des prêts. On les subdivise parfois en banques de détail (qui, s’adressant aux particuliers, aux TPE et aux PME, proposent à leur clientèle des activités de crédit, des produits de placement et quelques produits spécialisés) et banques d’affaires (qui, s’adressant plus spécifiquement aux grandes entreprises, accordent des crédits généralement à long terme et proposent des produits financiers personnalisés) ;

– les banques d’investissement (également appelées « banques de financement et d’investissement » ou « banques de marché ») : contrairement aux précédentes, elles ne reçoivent pas de dépôts (notamment de la part de particuliers) mais se financent plutôt auprès d’autres banques via le marché interbancaire, auprès du marché monétaire ou auprès de la Banque centrale de leur pays. Elles soutiennent généralement les grands acteurs de l’économie par le biais de financements mais aussi de conseils et d’opérations de financement de haut de bilan.

Au-delà des différences intrinsèques existant entre les différents modèles, les banques ont avant tout une grande fonction qui consiste en un rôle d’intermédiaire. Les banques collectent l’épargne de certains agents économiques et la transforment en prêts pour permettre à d’autres agents d’effectuer des investissements. Or, il y a là un hiatus inévitable entre le besoin de ressources (qui relève d’une problématique de court terme) et la fonction de prêteur (qui s’effectue plutôt à moyen et long terme). Les banques doivent donc continuellement gérer ce décalage en recourant à des fonds qu’elles ne possèdent pas, ce qui les pousse notamment à recourir aux marchés financiers, places d’échanges de titres et de valeurs.

2. L’importance des banques s’avère particulièrement prégnante en France

Si la fragilité récente des banques a suscité de vives inquiétudes à travers le monde, la France a été particulièrement attentive à leur situation puisque le financement bancaire y est essentiel. Cette caractéristique, maintes fois rappelée (4), se mesure principalement au travers d’un indicateur, le taux d’intermédiation financière.

L’intermédiation financière (5)

L’intermédiation financière consiste à lever les fonds nécessaires pour couvrir un besoin de financement auprès d’un établissement spécialisé plutôt que de s’adresser directement aux détenteurs de patrimoine susceptibles d’apporter leurs capitaux propres (notamment par souscription d’actions ou d’obligations).

La définition du taux d’intermédiation retenue par la Banque de France est la part des financements provenant des institutions financières résidentes parmi l’ensemble des financements obtenus par les agents non financiers. Alors que le taux d’intermédiation au sens strict tient uniquement compte des crédits distribués par les institutions financières résidentes, le taux d’intermédiation dans son acception la plus large intègre également les fonds qu’elles apportent aux agents non financiers par l’achat de titres émis par ces derniers.

Or, en France, ce taux est notablement plus important que dans les autres pays de l’OCDE. Ainsi, l’Allemagne a, par exemple, vu son taux de croissance annuel d’encours des crédits aux entreprises baisser de 3,4 % en rythme annuel en 2009 ; quant à l’Italie, sur cette période, elle a même subi un taux de croissance négatif de – 0,7 %. En France, en revanche, et selon les statistiques effectuées par l’Autorité de contrôle prudentiel, les concours du secteur bancaire à l’économie ont connu une hausse de 1,8 % sur l’année 2009, représentant même 2 008 Mds€ à la fin de l’année 2010 (soit une hausse de 6,5 % par rapport à l’année précédente), encours qui a de nouveau progressé de plus de 90 Mds€ en 2011 (soit une hausse de 5,3 %). Il apparaît clairement que cette évolution se situe au-dessus de la croissance du PIB national (en 2010, la croissance du PIB n’a été que de 1,6 %) et qu’elle est également supérieure à la moyenne de la zone euro. Cette tendance de long terme (qui a culminé avec une offre de crédits bancaires extrêmement large en 2004 – 2005) s’est, en outre, conjuguée avec une baisse des taux d’intérêt (2,26 % en 2010 en moyenne pour les prêts supérieurs à un million d’euros, contre 2,61 % en moyenne sur le reste de la zone euro) qui ont contribué à faciliter le financement de l’économie nationale.

Pour autant, les entreprises et, de manière générale l’ensemble des agents économiques en besoin de financement, ont éprouvé des difficultés à bénéficier de certains crédits, les banques s’étant montrées, depuis quelques années, plus frileuses que par le passé. Les difficultés financières des États ayant en effet pesé sur la crédibilité de la garantie publique qu’ils étaient prêts à accorder aux banques, la fragilisation du résultat de nombre d’établissements qui détenaient notamment des titres de dette grecque, la nécessité pour les banques d’augmenter leurs fonds propres (principalement sous l’effet de « Bâle III ») sont autant d’éléments qui ont lourdement pesé sur l’intermédiation bancaire (6). Ce sont ces éléments qui, conjugués avec la crise de confiance née de la chute de Lehman Brothers en 2008, ont conduit sept banques centrales à travers le monde (dont la Banque centrale européenne, la Federal Reserve, la Bank of England) à baisser leur taux directeur d’un demi-point afin de faciliter le financement de l’économie dans un cadre extrêmement contraint.

Cette tendance à dépendre étroitement des facilités accordées par les banques a été d’autant plus marquée que les entreprises françaises, hormis les plus grandes, ne vont que trop rarement se financer sur les marchés, structures d’ailleurs inadaptés à leur taille. Ainsi, les études mettent en évidence le fait que les PME et les ETI qui sont cotées sur les compartiments B et C d’Euronext et sur Alternext ne représentent que 0,3 % des 164 600 entreprises de plus de dix salariés alors que, pour leur part, près de 60 % des 200 grandes entreprises françaises sont cotées. À cet égard, il convient d’exploiter au mieux les préconisations du rapport rédigé par MM. Gérard Rameix (qui était alors Médiateur du crédit) et Thierry Giami (président de l’Observatoire du financement des entreprises par le marché) qui milite notamment en faveur de la création d’une bourse PME-ETI (7). De fait, en l’état actuel de notre économie, les entreprises s’avèrent extrêmement dépendantes du financement bancaire qui, notamment à la faveur d’un éventuel « credit crunch » (rationnement de crédit), peut les contraindre fortement.

B.— UNE PRISE DE CONSCIENCE À CONCRÉTISER

Le principal but de ce projet de loi consiste non seulement à faciliter cette intermédiation bancaire mais, plus fondamentalement à l’accompagner dans les meilleures conditions possibles.

Cette nécessité vient tout d’abord du fait que, depuis quelques années, les banques n’ont plus joué leur rôle premier de financeurs de l’économie réelle.

Alors que l’on a maintenant un peu de recul sur la crise de 2007 – 2008 générée par les subprimes américains, le constat est évident : les banques ont indéniablement failli dans leurs missions premières au cours des années récentes.

Les désormais célèbres subprimes sont des crédits à taux d’intérêt bas pendant une durée de généralement deux ans, puis à taux variable, généralement indexé sur le taux du marché. Les facilités initiales que ce type de placements recèle néanmoins un risque important en cas de retournement de conjoncture puisqu’il peut conduire à de grandes difficultés de remboursement. Or, on l’a malheureusement trop souvent vu, celles-ci conduisent dans bien des cas à des saisines immobilières par centaines, plongeant autant de ménages dans des situations sociales déplorables. Pourtant, le niveau extrêmement bas des taux d’intérêt américains dans les années 2002 – 2004 a permis, avec l’encouragement d’ailleurs de l’État fédéral qui voulait développer à grande échelle l’accession à la propriété, à nombre de ménages de s’endetter pour acheter leur logement. La hausse du prix du pétrole et le développement de l’inflation qui s’en est suivie a conduit la Réserve fédérale à augmenter ses taux d’intérêt à partir de 2007 alors que, dans le même temps, les prix de l’immobilier se sont mis à diminuer fortement. En effet, nombre d’emprunteurs, même non solvables, avaient pu contracter des prêts immobiliers de plus en plus complexes. Si, dans les premières années, les taux étaient bas et les emprunteurs pouvaient rembourser facilement, un retournement est survenu dès 2007 : les taux ont augmenté et les mensualités sont devenues de plus en plus lourdes de telle sorte que nombre de personnes n’ont au bout du compte plus pu rembourser leur emprunt immobilier. Contraints de vendre leurs biens, y compris à perte, ils ont déclenché immédiatement une chute de l’immobilier qui s’est ensuite propagé à l’ensemble de la sphère réelle.

Cet effet de ciseaux s’est d’autant plus facilement propagé à l’ensemble de la sphère économique que les banques américaines avaient par ailleurs, dans une recherche de profits faciles et rapides, accordé très généreusement des prêts en les adossant à des prêts hypothécaires préexistants. Dès le 29 octobre 2007, Merrill Lynch, banque d’investissement américaine, annonçait 2 Mds$ de pertes. De plus, la crise américaine s’est ensuite propagée à l’ensemble de la planète financière puisque nombre de banques ou organismes de placement européens avaient acheté des titres adossés à des subprimes souscrits auprès de banques américaines. C’est d’ailleurs ce type de comportements qui a par exemple conduit la banque allemande IKB, spécialisée dans le crédit aux PME, à la déroute. Sous l’impulsion des pouvoirs publics, un consortium de banques allemandes a dû voler à son secours ; en France, plusieurs gestionnaires de fonds ont également été touchés, tels AXA IM ou Oddo.

Ainsi, dans un contexte de crise hypothécaire, qui s’est ensuite développée en crise financière puis, plus largement, en crise économique, Lehman Brothers a fait faillite. Beaucoup d’autres banques se sont trouvées fortement fragilisées, ce qui a conduit les États, et in fine le contribuable, à les sauver par le biais de refinancements et de recapitalisations. On peut donc se demander, à ce stade, s’il est légitime de continuer à faire potentiellement peser sur les citoyens la stratégie hasardeuse de ces banques qui ont ainsi doublement affecté la croissance économique : en puisant, par le biais de sauvetages publics, sur le patrimoine des ménages (affectant de ce fait la consommation qui, en France tout du moins, est le principal moteur de la croissance) et en générant l’émergence d’un désordre, puis d’une dépression économique sans précédent.

Parallèlement, dans un contexte où la situation économique permettait d’accorder assez facilement des crédits, certaines banques ont fortement investi sur les actifs de matières premières dont les cours erratiques ont parfois conduit à des pertes de grande importance. D’autres ont par ailleurs investi massivement dans le secteur de l’immobilier, à la demande des collectivités territoriales, notamment en Espagne ou en Belgique ; mais là aussi, le retournement de situation a été durement ressenti. Face aux faillites bancaires et au resserrement généralisé du crédit, plusieurs États ont subi une importante récession (empêchant les acteurs publics de rembourser leurs emprunts, dont certains ont parfois pu s’avérer hautement toxiques) tandis que d’autres ont nécessité, certes sous conditions, des plans de sauvetage de grande ampleur. Ainsi, on peut citer pour mémoire l’Irlande qui a bénéficié d’un plan de 85 Mds€ en novembre 2010, du Portugal, qui a bénéficié de 78 Mds€ en mai 2011 ou, surtout, de l’Espagne dont les banques ont reçu des prêts de plus de 100 Mds€ en juin 2012 afin de leur permettre de faire fonctionner l’économie, fût-ce a minima.

II.— LA NÉCESSITÉ DE RECENTRER L’ACTION DES ÉTABLISSEMENTS BANCAIRES

L’histoire récente a mis en évidence les errements des banques qui ont, pour certaines d’entre elles, privilégié la recherche de profits à court terme sur le soutien à l’économie sur les moyens et long termes.

Face à cette dérive qui, à bien des égards, a causé et amplifié la crise financière puis la crise économique qui frappent le monde depuis maintenant plus de cinq ans, les États ont souhaité davantage encadrer l’activité des établissements bancaires.

A.— UN PROJET DE LOI QUI S’INSCRIT DANS UN CONTEXTE PROPICE AUX RÉFORMES

Compte tenu des inquiétudes que les citoyens ont pu éprouver à l’égard des banques et des rancœurs que les contribuables ont pu, dans le même temps, manifester face au sauvetages publics coûteux mais inévitables de certains établissements bancaires, il était important de réfléchir au respect de nouvelles règles sur ce secteur.

1. Le développement des mesures d’encadrement des activités bancaires

À la fin du mois de septembre 2008, il était déjà possible d’évaluer les pertes subies par les grandes banques mondiales à la suite du déclenchement de la crise quelques mois plus tôt : Citigroup avait ainsi perdu plus de 55 Mds$, Merrill Lynch plus de 52 Mds$, UBS plus de 44 Mds$ et HSBC plus de 27 Mds$. En France, le Crédit agricole perdait déjà 9 Mds$, la Société Générale 6,7 Mds$ et BNP-Paribas 3,9 mds$.

Face aux faillites et recapitalisations de très nombreuses banques, les dirigeants des pays les plus industrialisés ont très légitimement décidé, lors du Sommet du G 20 de Pittsburgh (septembre 2009), de lancer une vaste réflexion en vue de sécuriser davantage le système financier mondial. Dans la droite ligne des recommandations faites à cette occasion, le Comité de Bâle a établi de nouvelles règles, dites de « Bâle III », qui furent entérinées à Séoul en novembre 2010. Prenant en compte non seulement le risque de crédit mais aussi le risque de marché et le risque opérationnel, les Accords de « Bâle III » instaurèrent trois règles principales :

– une hausse des exigences en matière de fonds propres : c’est certainement la mesure la plus emblématique qui fut alors actée. Il a ainsi été décidé de passer le ratio minimal de fonds propres des banques (rapport entre le montant des engagements consentis par la banque et celui de ses fonds propres au sens strict du terme) de 8 à 10,5 %. Pouvant être composés d’instruments financiers extrêmement divers et, de ce fait, ne possédant pas tous la même sécurité, il a également été décidé de renforcer les critères de sélection de ces fonds propres ;

– l’adoption par les banques d’un coussin contracyclique obligatoire, à la demande du régulateur national, d’un montant allant de 0 à 2,5 % du capital. Ces résultats mis en réserve en cycle haut pourront ainsi être utilisés en cas de crise financière, la banque pouvant ensuite reconstituer son coussin lorsque la situation se sera rétablie ;

– l’introduction d’un ratio d’effet de levier (rapport entre le montant de ses actifs et de ses fonds propres).

Depuis cette date, les règles de « Bâle III » ont néanmoins subi un important assouplissement. Les exigences de liquidité imposées sont desserrées, les banques bénéficiant d’un délai de quatre ans supplémentaires pour s’y conformer : le « liquidity coverage ration » (LCR) devra ainsi être progressivement mis en œuvre à partir de 2015 seulement pour être finalement appliqué à partir de 2019. Il n’en demeure pas moins que ces exigences en termes de ratio de liquidité (calculé sur le court terme) et de solvabilité (apprécié sur le long terme) constituent un cadre réglementaire contraignant pour les banques.

Outre l’encadrement supranational que constituent les règles de « Bâle III », l’activité bancaire a également été, depuis quelques années, au centre de plusieurs projets ou de plusieurs mesures d’ores et déjà adoptées. C’est donc dans ce cadre que les dispositions du présent projet doivent être appréciées.

2. La multiplication des options possibles

Le présent projet de loi n’est donc pas isolé : il s’inscrit bien au contraire dans le cadre d’un ensemble de réflexions ou de mesures qui ont pu être prises dans d’autres États.

À ce titre, la France pouvait, avant de proposer son propre système, examiner trois grandes options.

a) La règle de Volcker

La « règle de Volcker » tient son nom de l’ancien directeur de la Réserve fédérale américaine (Federal Reserv) et constitue la section 619 « Prohibitions on proprietary trading and certain relationships with hedge funds and private equity funds » de la fameuse loi Dodd – Frank de juillet 2010 (8). Cet ensemble de dispositions, élaborées dans l’ombre par Paul Volcker, ont été intégrées dans le texte de loi initial par le biais d’un amendement porté par deux sénateurs, Jeff Merkley et Carl Levin.

Modifiant profondément le Bank Holding Company Act qui datait de 1956, les recommandations de Paul Volcker portent sur quatre points principaux qui touchent à la fois aux activités conduites et aux structures bancaires :

– l’interdiction faite aux banques de faire des activités de « trading pour compte propre ».

Cette mesure interdit aux banques de dépôt de faire du « trading pour compte propre », c’est-à-dire des opérations commerciales pour leur bénéfice propre et qui sont sans lien avec leurs clients. L’objectif est de lutter contre les conduites à risque des banques en leur interdisant toute activité spéculative qui serait trop aléatoire, comme de posséder des participations dans des fonds spéculatifs ou de capital-investissement. Pour autant, il n’est pas question de l’interdire totalement, ces activités pouvant continuer d’être exercées en vertu d’une autorisation légale spécifique. En d’autres termes, la règle Volcker permet aux banques commerciales d’exercer des activités de marché dès lors qu’elles vont dans l’intérêt de l’économie réelle.

– l’interdiction du sponsoring et des investissements au sein d’un hedge fund ou d’un fond de private equity.

La règle Volcker interdit à tout établissement de dépôt bénéficiant de la garantie publique ou à toute entreprise contrôlant un tel établissement de dépôt le sponsoring ainsi que les investissements dans un hedge fund ou un fond de private equity. Cette interdiction n’est, là encore, pas absolue puisque de telles opérations peuvent être envisagées si elles sont réalisées conformément aux règles régissant les marchés et si elles correspondent à un certain nombre de situations précisément définies (vente de titres ou d’actifs, fourniture de services en vertu d’un contrat…).

– les restrictions apportées à la concentration bancaire.

La réforme Volcker souhaite enfin limiter le phénomène de concentration bancaire en interdisant notamment à une société financière de fusionner avec une autre société financière ou de l’acquérir si le total consolidé du passif de la société absorbante excède 10 % du total consolidé du passif de toutes les sociétés financières à la fin de l’année civile précédente. À l’instar des mesures précédentes, il existe certaines exceptions qui ne font pas de cette règle un absolu : ainsi, cette mesure ne s’applique pas si l’une des banques est en défaut ou en danger de défaut de paiement, ou si l’absorption envisagée peut être assimilée à une mesure d’assistance destinée à prévenir le défaut d’une banque.

b) Le rapport Vickers

Outre-Manche, le Chancelier de l’Échiquier George Osborne a créé une commission de cinq membres (ICB ou Independant Commission on Banking) le 16 juin 2010, dont la présidence a été confiée à Sir John Vickers, professeur d’économie à Oxford et ancien président de l’Autorité de la concurrence britannique. L’objectif fixé a été de proposer les pistes d’une réforme permettant d’assurer une plus grande stabilité du système financier contre les chocs économiques à venir, une plus grande sécurité des épargnants et un coût moindre pour résoudre toute crise financière éventuelle. Le rapport, remis le 12 septembre 2011 et qualifié de « très impressionnant » par George Osborne, préconise plusieurs mesures dont l’entrée en vigueur ne se ferait, au mieux, qu’en 2019 :

– la plus importante est de toute évidence celle qui prévoit le cantonnement (ring-fencing) de la partie banque de détail.

Il s’agirait de faire des banques de détail des entités économiques spécifiques, dotées de leur propre conseil d’administration et de ratio prudentiels renforcés ; elles seules bénéficieraient d’une garantie publique de la part de l’État. Dans ce cadre, la banque d’investissement serait également séparée et ne pourrait plus utiliser les dépôts des épargnants pour réaliser des opérations sur compte propre ou dans un but purement spéculatif.

Il faut tout de suite préciser que, ce faisant et contrairement à ce que l’on a parfois pu lire, il ne s’agit pas de mettre fin au modèle de banque universelle mais bien davantage de cloisonner, d’isoler les deux types d’activités (9). Dans ce cadre, certaines activités seraient réservées à la partie banque de détail certaines seraient cantonnées à la banque d’investissement et certaines, enfin, pourraient être exercées par chacune des deux entités (financement de projet, financement à l’export…).

– les banques de détail seraient par ailleurs contraintes de conserver à tout moment un ratio de fonds propres de 10 % par rapport à la globalité de leurs actifs pondérés en fonction du risque, et ce pour limiter les risques d’insolvabilité en cas de pertes importantes ou de nouvelle crise financière. Les banques cantonnées, qui ont des actifs pondérés (ou RWA) supérieurs à 3 % du PIB anglais, devront se doter d’un ratio fonds propres / RWA d’au moins 10 %. En revanche, celles qui auront un ratio RWA / PIB compris entre 1 et 3 %, pourront ne détenir un ratio fonds propres / RWA que de 7 à 10 %.

c) Le rapport Liikanen

Au mois de novembre 2011, le commissaire européen Michel Barnier, Commissaire européen au Marché intérieur et aux Services, annonce la création d’un groupe de onze experts de haut niveau (« High-level Expert Group on reforming the structure of the EU banking sector ») pour réfléchir aux mesures permettant de réformer le secteur bancaire au plan européen. Le mandat confié au groupe de travail lui demandait notamment de réfléchir à la manière de réduire les risques pesant sur le système bancaire, de réduire l’aléa moral, de promouvoir la compétitivité des banques européennes et de veiller à la stabilité du système financier dans son ensemble. Présidé par le Gouverneur de la Banque de Finlande et ancien membre de la Commission européenne, Erkki Liikanen, le groupe remit son rapport le 2 octobre 2012, suscitant alors de très fortes réactions.

Les principales recommandations sont les suivantes (10) :

– la négociation pour compte propre et les autres activités de négociation d’une certaine importance devraient être séparées des autres et affectées à une entité juridique distincte, dès lors qu’elles représentent une part significative de l’activité de la banque. Cette mesure garantirait ainsi que les activités de négociation supérieures au seuil fixé soient exercées de manière autonome, indépendamment de la banque de dépôt. Ainsi, les dépôts, et la garantie explicite et implicite dont ils bénéficient, ne serviraient plus à financer directement des activités de négociation risquées. Toutefois, le modèle de la banque universelle établi de longue date en Europe ne serait nullement affecté, puisque ces activités, même séparées, seraient exercées au sein du même groupe bancaire. Les banques pourraient ainsi continuer de fournir à leur clientèle une gamme étendue de services financiers ;

– le groupe de travail a également insisté sur la nécessité pour les banques d’établir et de tenir à jour des plans de redressement et de résolution concrets et réalistes, comme l’a proposé la Commission dans la proposition de directive sur le redressement des banques et la résolution de leurs défaillances. L’autorité de résolution devra à ce titre exiger une séparation plus large que la séparation obligatoire évoquée ci-dessus, si cela paraît nécessaire pour assurer la résolution et la continuité opérationnelle des fonctions critiques de l’établissement ;

– le groupe est également très favorable à l’affectation d’instruments spécifiques au renflouement interne. Les banques devraient ainsi constituer un volant suffisamment important de dettes qui puissent servir à un renflouement interne et dont il conviendrait de définir clairement la nature, de manière à ce que leur position dans la hiérarchie des engagements figurant au bilan de la banque soit sans ambiguïté et que les investisseurs sachent quel traitement leur serait réservé en cas de résolution. Ces dettes devraient être détenues en dehors du système bancaire. Ces instruments (ou leur équivalent en fonds propres) augmenteraient la capacité d’absorption globale des pertes, réduiraient les incitations à la prise de risques et amélioreraient la transparence et l’évaluation du risque.

B.— UN PROJET DE LOI POUR RESTAURER LA CONFIANCE ENVERS LE SYSTÈME BANCAIRE (11)

Face à ces trois types de propositions, le projet de loi dévoilé le 19 décembre 2012 par M. Pierre Moscovici, Ministre de l’économie et des finances, a choisi de ne pas mettre fin au modèle de la banque universelle à laquelle les Français et les professionnels sont attachés et, au contraire, de le renforcer en le sécurisant.

Plutôt que d’interdire purement et simplement certaines activités, le projet a ainsi préféré les cantonner dans des structures spécifiques (certains parlent à cet égard de « ségrégation ») tout en renforçant les dispositifs de supervision et de résolution bancaires.

1. Une vraie séparation des activités utiles au financement de l’économie par rapport aux activités spéculatives

C’est l’objet du Titre Ier du projet de loi : il consiste à effectuer une séparation au sein des activités des banques entre celles qui pourront être poursuivies normalement comme utiles à l’économie réelle, et celles qui, sans être interdites, devront être réalisées dans le cadre de filiales spécialisées. L’interdiction, qui peut d’ailleurs être levée, ne porte finalement que sur un nombre très limité d’activités (le « trading haute fréquence » et certaines opérations sur les matières premières agricoles, dont les cours sont particulièrement volatiles depuis plusieurs années). En outre, les ratios prudentiels devront s’appliquer non plus de manière consolidée mais de façon séparée afin que tant l’établissement que sa ou ses filiales soient soumis aux mêmes exigences.

On ne peut que saluer ce retour aux fondamentaux : une banque est là pour financer l’économie réelle et pas pour se livrer à des activités où la spéculation s’étaie sur des aléas, des approches virtuelles, où la recherche de profit est transformée en jeu de casino. Cette activité hasardeuse est potentiellement déstabilisatrice tant pour les épargnants que pour le système financier dans son ensemble.

C’est également la raison pour laquelle les dispositions de ce projet de loi sont pertinentes. Elles ne cherchent nullement, hors les deux cas précis d’interdiction (sous réserve qu’elles n’aient aucun lien avec l’économie réelle), à définir parfaitement ce qu’il convient d’entendre par « activité utile à l’économie ». Il faut appréhender cette notion avec pragmatisme et se défier de toute frontière a priori ; ce n’est qu’au regard des activités financées que les autorités de contrôle et de supervision pourront dire si l’activité bancaire contrôlée revient ou non à financer l’économie réelle. Ce faisant, le projet de loi consacre le modèle de la « banque universelle », c’est-à-dire des banques qui exercent à la fois des activités relevant des banques de dépôt et des banques d’investissement, voire des banques privées (qui s’occupent notamment de la gestion des grandes fortunes).

Les réactions au dispositif défini notamment par l’article 1er du projet de loi ont été assez variées, certains estimant que l’on n’allait pas assez loin, d’autres au contraire, y voyant une cause de la future perte de compétitivité des banques françaises dans un environnement très largement concurrentiel. En vérité, le coût pour les banques ne doit en rien être exagéré puisque, ainsi que plusieurs personnes auditionnées ont eu l’occasion de le dire à votre rapporteur, les banques françaises ont d’ores et déjà drastiquement réduit leurs activités de marché, à la fois pour des raisons stratégiques (ces activités étant marquées par une forte instabilité, elles pouvaient s’avérer extrêmement dangereuses pour le bilan des banques) et par contrainte (les exigences inhérentes aux accords de « Bâle III » ayant notamment conduit les banques à augmenter leur niveau de fonds propres à compter du 1er janvier 2013).

L’audition par la Commission des finances de l’Assemblée nationale de plusieurs dirigeants de banques françaises a été particulièrement éclairante à cet égard. Ainsi M. Frédéric Oudéa, président directeur général de la Société Générale a-t-il déclaré : « nous estimons que, si en 2006-2007, 15 % des activités relevaient des activités de marché, parmi lesquelles 15 % à 20 % pouvaient être classées comme déconnectées de la clientèle, et par conséquent transférées à une filiale, cette proportion est désormais inférieure à 10 %, se situant autour de 3,5 % à 5 % en moyenne. Moins de 10 % des 15 % du total que représentent les activités de marché pourraient donc être filialisés » (12). Sachant par ailleurs que ces activités représentent environ 15 % des revenus totaux de la Société Générale, cela signifie que la filialisation ne concernerait donc que 0,75 % des revenus totaux de la banque !

La question qui peut alors légitimement se poser consiste à savoir ce qu’il adviendra des 99 % restants : ne seront-ils pas affectés par les dispositions du présent projet de loi ? Évidemment il n’est est rien car l’objet de la loi, au-delà de la séparation des activités, consiste surtout à restaurer une confiance entre les banques et leurs clients qui, à la suite de la crise financière de 2007 – 2008, avait disparu. On ne peut qu’être convaincu du fait que ce lien de confiance sera de nouveau tissé à la faveur du nouveau regard que les particuliers et les entreprises porteront sur le monde bancaire, sachant que les activités purement spéculatives des établissements financiers seront désormais soit inexistantes, soit très fortement encadrées et sans risque ni pour les déposants ni pour les contribuables qui sauront ne pas être appelés à la rescousse pour sauver un établissement bancaire de la faillite comme ça a pu être le cas par le passé.

2. La constitution d’un maillage de mécanismes de supervision et de résolution du système financier

La confiance du citoyen dans les banques passe non seulement par un recentrage de leurs opérations mais aussi par un contrôle plus efficace sur leur activité : c’est un des leitmotivs de ce projet de loi.

Dans une étude parue en septembre 2009, Mme Sheila C. Bair, alors présidente de la toute puissante Federal Deposit Insurance Corporation (FDIC), l’équivalent américain de notre Fonds de garantie des dépôts, écrivait : « La principale priorité [face à la crise financière] doit être la création d’une nouvelle autorité chargée de la gestion des difficultés des établissements financiers revêtant une importance systémique. Il convient également de modifier la régulation et la supervision afin d’inciter les entreprises à limiter leur taille et leur complexité » (13). Pour cet auteur, l’échec patent de la régulation et de la supervision que l’on était en droit d’attendre aux États-Unis (à titre informatif, on peut indiquer que la FDIC dispose néanmoins d’un budget annuel de 95 Mds$ et qu’elle compte 8 200 employés) vient de la complexité des montages financiers mais aussi de l’incapacité des autorités compétentes à bien identifier les risques qui pouvaient entraîner les conséquences les plus graves.

Le projet de loi qui nous est proposé insiste au contraire avec force sur cette supervision.

Il importe à cet égard de relever que deux niveaux de surveillance qui sont instaurés. Il existe d’une part une surveillance micro-prudentielle qui s’exerce sur les établissements financiers et sur l’information qui circule au niveau d’un marché donné ; elle est respectivement confiée à une nouvelle entité, l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), et à l’Autorité des marchés financiers, qui voit également ses pouvoirs accrus. D’autre part, le projet de loi instaure une surveillance macro-prudentielle qui concerne, cette fois-ci, l’ensemble du système financier et qui est dévolue à la Banque de France (en liaison avec le SEBC, Système européen de banques centrales) et à un nouvel organe, le Conseil de stabilité financière (CSF). Le fait que le projet de loi instaure deux niveaux de contrôle, appelés à se compléter tout en facilitant la circulation et l’échange d’informations, devrait également permettre au système bancaire français de retrouver la confiance des agents économiques.

Autant d’éléments qui ne peuvent, notamment au regard des incertitudes et atermoiements existants au-delà de nos frontières, que renforcer la crédibilité de notre système bancaire et, de ce fait, renforcer les banques françaises dans la compétition mondiale.

C.— LA SITUATION DU CONSOMMATEUR DANS SES RELATIONS AVEC LE MONDE FINANCIER

Enfin, le projet de loi comporte plusieurs dispositions relatives aux relations que les particuliers peuvent entretenir avec le monde de la banque, de l’assurance et, plus largement, du crédit.

Même si un certain nombre de règles ont été adoptées depuis quelques années en faveur des particuliers (réflexion et mesures relatives aux frais bancaires, charte d’accessibilité bancaire, mesures prise dans le cadre de la lutte contre le surendettement…), celles-ci demeurent trop souvent mal appliquées et inconnues du grand public, celui-ci ne pouvant donc faire valoir ses prétentions ou ses droits.

Dans une optique qui vise à tisser de nouveau un vrai lien de confiance entre les banques et leurs clients, il faut donc saluer les mesures prises ici, qu’il s’agisse du plafonnement des commissions d’intervention en faveur des personnes les plus fragiles ou de certaines mesures de simplification (procédure de surendettement, renforcement du droit au compte…). Bien que ponctuelles, et ne demandant donc qu’à être enrichies, on ne peut néanmoins qu’en souligner l’importance, ces dispositions concrétisant une nouvelle fois la volonté de ce projet de loi d’être au service de l’économie réelle.

TRAVAUX EN COMMISSION

I.— DISCUSSION GÉNÉRALE

Lors de sa réunion du 30 janvier 2013, la commission a examiné pour avis, sur le rapport de M. Philippe Kemel, le projet de loi de séparation et de régulation des activités bancaires (n° 566).

*

* *

M. le président François Brottes. Le projet de loi relatif à la séparation et à la régulation des activités bancaires, que nous examinons ce matin, est particulièrement lourd de conséquences et devrait faire de la France un État précurseur sur ce sujet en Europe. J’ai souhaité que, comme la commission des lois, notre Commission s’en saisisse pour avis. La commission des finances est, quant à elle, chargée de l’examiner au fond et la commission des affaires européennes s’y intéresse également. Le sujet étant à la fois important et difficile à appréhender, notre rapporteur pour avis, M. Philippe Kemel, introduira la présentation de son rapport par un exposé général.

M. Philippe Kemel, rapporteur pour avis. Merci, monsieur le président. Je commencerai par évoquer l’objectif du projet de loi et les raisons pour lesquelles il est opportun de l’adopter dès maintenant. Puis je présenterai son économie générale et les amendements que je vous proposerai d’y apporter.

Ce texte a pour objectif de mettre l’ensemble des structures et institutions financières – et en particulier les établissements bancaires – au service de l’économie réelle. Si le principe est simple, les moyens d’y parvenir sont plus complexes à appréhender.

Les banques ont principalement un rôle d’intermédiation, collectant les dépôts des ménages afin de financer l’investissement des industries, des petites et moyennes entreprises (PME) et des artisans, mettant ainsi l’épargne au service de l’activité économique. Elles doivent aussi faire en sorte que les titulaires de dépôts disposent des meilleures conditions de paiement possibles tout en évitant les risques liés aux opérations bancaires. Or la durée des dépôts ne coïncidant pas toujours avec celle de leur usage, les banques doivent élaborer des systèmes permettant de transformer ces dépôts de court terme en investissements de moyen et de long terme.

Les banques ayant failli à leur mission au cours des années récentes – comme l’a illustré la crise anglo-saxonne des subprimes –, les États se sont trouvés dans la nécessité de consacrer des moyens considérables au redressement de la structure bancaire et du fonctionnement du marché des liquidités bancaires, pour rétablir la confiance et éviter un effondrement complet du système.

Tous les groupes ici présents conviennent de la nécessité de réagir à une telle situation. Les engagements et les mesures proposées par le Président de la République sont très clairs : le système financier français doit être réorienté vers le financement de l’économie réelle. Et, par l’exemple qu’elle donnera, la France favorisera indéniablement les avancées sur ce sujet en Europe et dans le reste du monde.

Pourquoi examiner ce texte aujourd’hui, alors que des réflexions sont en cours et que des propositions, parfois plus ambitieuses que celles du texte que nous examinons, ont été déjà formulées, que ce soit par le rapport Liikanen au niveau européen, par le rapport Vickers en Grande-Bretagne ou par le rapport Volcker aux États-Unis ? L’élaboration de ces rapports s’inscrit dans des processus de décision de long terme et les premières décisions qu’ils inspireront ne seront pas prises, au mieux, avant 2017. Le présent texte traduit donc la volonté du Gouvernement de réagir au plus vite. Notre expérience nous permettra ensuite de formuler des propositions au niveau européen et d’acquérir une position de force dans le cadre des futures négociations.

L’économie générale du texte repose sur trois objectifs.

Le premier consiste à distinguer les activités qui sont au service de l’économie réelle des activités spéculatives – et donc virtuelles. La frontière entre les unes et les autres est d’ailleurs difficile à établir a priori.

Le deuxième objectif est de circonscrire l’aléa moral et de faire en sorte qu’il cesse de peser sur les autorités publiques. Parce que la confiance est au fondement du système monétaire et bancaire, les établissements de crédit, lorsqu’ils prennent des risques, savent qu’on ne peut pas les abandonner et que l’on recourra aux deniers publics pour les abriter derrière un rideau défensif. Désormais, certains types d’activités ne feront plus l’objet de protection publique et seront du ressort de la seule responsabilité des établissements bancaires.

Le troisième objectif consiste à rendre notre système bancaire plus transparent – qu’il s’agisse des services qu’il propose ou de la tarification qu’il applique –, et par conséquent plus égalitaire pour tous les citoyens.

Le premier principe est donc la séparation des activités finançant l’économie réelle et des activités spéculatives. La principale disposition du titre Ier du projet de loi interdit aux banques d’effectuer certaines opérations sur compte propre, c’est-à-dire d’utiliser les dépôts des épargnants pour s’enrichir sur les marchés grâce à des activités risquées qui ne sont pas au service de leurs clients, autrement que par le biais de filiales dédiées à ces activités et soumises aux mêmes coefficients de régulation et de réserves que les sociétés mères dont elles dépendent. Actuellement, les coefficients de fonds propres et de liquidité qu’imposent les directives dites « Bâle II », « Bâle II et demi » et « Bâle III » sont consolidés. Demain, cette consolidation disparaîtra et l’on appliquera les mêmes coefficients aux activités portant sur l’économie réelle et aux activités financières. Les banques seront contraintes de faire des arbitrages, car les frais de structure qui pèseront sur les opérations d’ordre essentiellement financier amoindriront leur rentabilité. Il s’agit en outre de conserver notre modèle français de banque universelle et de le mettre véritablement au service des acteurs économiques. Plus original que les modèles anglo-saxons, ce modèle français permet à la fois les activités d’investissement et de dépôt.

Il est cependant difficile de déterminer le seuil à partir duquel une activité financière se trouve déconnectée de l’économie réelle. Les interlocuteurs que nous avons auditionnés estiment qu’ils ont parfois besoin d’une couverture, mais parfois aussi d’une régulation de marché. Et les SICAV monétaires jouent incontestablement un rôle de stabilisation, à moyen ou long terme, des financements de court terme. C’est pourquoi le projet de loi prévoit que seules les activités liées à l’économie réelle seront permises à la société mère tandis que les opérations de spéculation devront obligatoirement relever de sa filiale à haut risque. Je proposerai à ce sujet un amendement visant à instaurer davantage de transparence dans les activités liées à l’économie réelle. À l’heure actuelle, chaque banque connaît à peu près le niveau de ses activités de trading – même si le cas de la Société Générale montre qu’il existe des exceptions – et s’avère donc en mesure d’indiquer chaque soir, à titre individuel, à quel niveau de risque elle s’est engagée. Cependant, le niveau de risque des différents traders ne fait l’objet d’aucune consolidation. Nous proposons donc d’obliger les banques à informer chaque mois l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) sur le niveau de leurs engagements financiers dans des activités de couverture de marché ayant un aspect spéculatif dit « au service de l’économie réelle ». L’ACPR sera ainsi en mesure d’établir un ratio entre le niveau d’engagement et les fonds propres de tout établissement bancaire et donc d’évaluer son niveau de risque. Le législateur en sera par ailleurs également informé.

Le deuxième volet du texte concerne les activités de contrôle des établissements bancaires : l’ACPR voit son contrôle micro-prudentiel renforcé, puisqu’elle exercera une fonction de résolution. En cas de dérive, les correctifs qu’elle proposera auront un caractère coercitif. Le contrôle systémique des banques sera assuré par le Conseil de stabilité financière (CSF) et par la Banque de France qui évalueront régulièrement l’état de fonctionnement de notre système monétaire et financier. Ici encore, je proposerai un amendement visant à ce que ces deux instances aient des rôles bien distincts et complémentaires : leurs observations et leurs réflexions, fondées sur la volonté de proposer aux instances monétaires une politique corrective, doivent s’approfondir mutuellement et ne pas faire double emploi avec les autres contrôles opérés par ailleurs.

Le troisième et dernier point porte sur la protection de l’usager. Le projet de loi ayant pour objet d’orienter l’activité des banques vers l’économie réelle, je vous proposerai ultérieurement un amendement visant le financement des PME, des entreprises artisanales et des très petites entreprises (TPE). En effet, leur traitement par les banques est souvent insatisfaisant, car elles ne sont pas toujours prises pour ce qu’elles sont : des acteurs investissant dans l’économie réelle. Qu’il s’agisse de leurs crédits de trésorerie ou de la constitution de leurs fonds propres, elles présentent, elles aussi, une certaine fragilité.

Les usagers les plus fragiles sont ceux qui ont de faibles revenus. Ils subissent une tarification bancaire aux visages multiples. Les établissements bancaires ont d’ailleurs beaucoup d’imagination en la matière et les commissions d’intervention surgissent à tout moment et de manière incohérente. L’activité bancaire est assez originale puisque les établissements de crédit sont parmi les seuls à ne vous adresser une facture qu’après avoir effectué un prélèvement sur votre compte ! Afin d’inverser cette logique, le projet de loi souhaite plafonner ce type de commissions. Il faudra sûrement réfléchir à la manière de mieux définir les « populations fragiles » – une notion qui peut être source de discriminations et qui nécessiterait que l’on recoure à un système de fichier que la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) ne verrait pas d’un bon œil.

Nous présenterons également un amendement en faveur des emprunteurs, qui, pressés par la recherche d’un bien et d’un crédit, n’ont souvent pas le temps de faire jouer la concurrence pour négocier le contrat d’assurance couvrant leur emprunt. La banque le leur impose donc aisément à des tarifs élevés. Notre amendement prévoit donc la possibilité, pour les emprunteurs, de renégocier ce contrat tous les ans, trois mois avant l’annuité de l’emprunt souscrit.

Par ailleurs, nous proposons d’organiser les contrats d’assurance sur les prêts en fonction des catégories de risques qu’ils couvrent. L’ACPR en sera informée et publiera ces informations sur un site internet.

Notre dernier amendement vise à ce que les artisans et les petites entreprises ne soient plus considérés comme appartenant à la catégorie des particuliers. Ils pourraient ainsi bénéficier d’une gamme de services universels pour les artisans, commerçants et PME.

M. le président François Brottes. Je vous remercie, monsieur le rapporteur, et je donne maintenant la parole aux représentants des groupes.

Mme Clotilde Valter. Ce projet de loi traduit celui des engagements du Président de la République qui a le plus frappé une opinion publique choquée par une crise financière aux mécanismes irrationnels et par la menace qui a pesé sur les dépôts des particuliers et obligé l’État – et donc le contribuable – à intervenir pour sauver le système. Ce texte, qui prévoit des solutions concrètes et opérationnelles pour lutter contre ces dérives, est donc une manière de répondre : « Plus jamais ça ! »

En instaurant une séparation étanche entre les activités utiles à l’économie et les activités spéculatives des banques, il vise tout d’abord à protéger les dépôts des particuliers, qui ne pourront plus faire l’objet d’opérations de spéculation.

Afin de protéger l’État et le contribuable, il confie à l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) des pouvoirs de contrôle efficaces et de nature préventive : cette autorité aura la faculté de révoquer des dirigeants, de nommer des administrateurs provisoires, et d’exercer un contrôle sur les produits toxiques.

Le Conseil de stabilité financière (CSF) voit ses pouvoirs étendus aux fonds propres additionnels et se voit chargé d’encadrer la politique d’octroi des crédits des banques afin d’éviter les crises systémiques.

Le projet de loi met ainsi un terme à la socialisation des pertes en plaçant les actionnaires devant leurs responsabilités : en cas de crise, c’est avant tout sur eux que pèseront les pertes consécutives aux faillites. Le secteur bancaire sera également mis à contribution, via la constitution de fonds de garantie, afin de venir en aide aux banques en difficulté.

Par ailleurs, le projet de loi met un terme aux pratiques bancaires abusives, notamment à l’égard des publics les plus fragiles, et permet aux banques de jouer pleinement leur rôle de financement de l’économie réelle, tout comme le projet de loi instituant la Banque publique d’investissement.

Ce texte traduit aussi notre volonté de maîtriser la finance. Si l’on se souvient des discours prononcés en 2008 et des décisions très volontaristes prises par le G 20, on a cependant l’impression que certains États marquent le pas : la Grande-Bretagne ne prévoit pas de mettre des mesures en œuvre avant 2019. Quant aux États-Unis, ils ont affiché leur fermeté au moment de la crise mais leur volonté semble aujourd’hui faiblir.

Il est donc nécessaire que la France aille de l’avant. Premier pays à engager une réforme de structure de son système bancaire, elle doit être précurseur et marquer sa volonté de maîtriser la finance afin de pousser l’Union européenne à en faire autant. Ces jours derniers, l’Allemagne préparait elle aussi un texte. Notez d’ailleurs que le présent projet de loi comprend des mesures qui ne figurent pas dans les projets européens en cours et qu’il importe donc d’adopter et de mettre en œuvre rapidement – qu’il s’agisse des pouvoirs confiés à l’ACPR vis-à-vis des produits toxiques, du renforcement du contrôle des activités de marché des banques, des mesures d’interdiction visant le trading à haute fréquence et la spéculation pour compte propre ou des pouvoirs de contrôle accordés au Conseil de stabilité financière sur la politique d’octroi des crédits des banques.

M. Michel Piron. L’Europe tente aujourd’hui de faire converger les positions des États membres en matière financière : c’est ce que l’on appelle « la marche vers l’Union bancaire », mais on est encore loin du but !

Ma principale observation porte sur les recettes bancaires. Une banque ayant par définition un rôle d’intermédiation, transforme une partie de ces recettes de court terme en produits de long terme. La seule question qui se pose véritablement est celle des ratios de solvabilité et de liquidité, comme l’ont illustré les crises bancaires successives qui se sont ensuite transformées en crises financières. Songez donc que les ratios d’avant la crise étaient de 4 ou 5 et qu’ils sont désormais de 9 ou 10 ! Cela équivaut à exiger des banques qu’elles doublent leurs fonds propres, ce qui n’est pas sans conséquence.

Dès lors, la seule question qui nous préoccupe est la suivante : est-il possible de réguler, et, dans l’affirmative, quelle régulation mettre en place ? Dans une économie dématérialisée, le contrôle a ses limites. Quel ratio de fonds propres la majorité actuelle entend-elle imposer ? Certaines banques souhaiteraient l’application de ratios plus faibles, d’autres, de plus élevés. Ce débat est au cœur des accords de « Bâle III ».

Quant à la séparation entre les activités des banques qui sont liées à l’économie réelle et leurs activités spéculatives, c’est un thème qui interpelle tous les pays. Le principe même est consensuel : personne n’ira défendre l’idée qu’il faut soutenir des activités spéculatives ! Mais la question est plus complexe : il s’agit de déterminer où se situe la frontière entre ces deux types d’activité, alors que le risque est inhérent à la notion même d’entreprise. Cette frontière n’est donc pas tout à fait étanche. Or il existe plusieurs écoles en la matière : l’école anglaise, par exemple, préconise la séparation entre banques de dépôt et banques d’investissement, mais en fixant à 2019 l’échéance de cette séparation. Ainsi promet-on la vertu à condition que ce ne soit pas pour demain ! Quant à la France, elle suit un modèle intégré très fortement soutenu. Reconnaissons d’ailleurs que les banques françaises ont plutôt mieux résisté que les banques anglo-saxonnes.

Cependant, l’un des problèmes majeurs n’est-il pas la capacité à gouverner des ensembles tellement importants qu’ils ne peuvent plus faire faillite – le fameux « too big to fail » ? Le risque systémique dépend en effet de la taille de certains organismes financiers. Il me semble illusoire de privilégier une solution strictement française : elle devrait, pour le moins, être européenne.

Quant à l’ACPR, si la distinction entre les fonctions de supervision, de prévention et de gestion de crise est bien connue, quelles seront réellement les capacités de contrôle de cette autorité ? Serons-nous vraiment en mesure de mettre en place le fonds de garantie du Conseil de stabilité financière ? Rappelons que, dans le cadre européen, l’Allemagne a exigé que ses caisses d’épargne soient exclues du Mécanisme européen de stabilité. Or elles drainent des masses financières de l’ordre de 50 à 70 % du secteur bancaire allemand : cela signifie donc que des pans entiers du secteur bancaire échapperont au système de régulation européen !

Enfin, si le Gouvernement souhaite prendre les devants, a-t-il tenu compte du projet de directive européenne en cours de rédaction ? Ne serons-nous pas contraints de rectifier le tir une fois la position européenne définitivement arrêtée ?

M. André Chassaigne. Ce projet de loi poursuit des objectifs louables et traduit un engagement ferme du Président de la République. Il prévoit de séparer les activités utiles au financement de l’économie des activités spéculatives des banques, d’instaurer un régime de résolution des crises bancaires, d’élargir les missions du Conseil de régulation financière et du risque systémique et de renforcer la protection du consommateur. Je n’ai déposé aucun amendement sur ce texte, préférant laisser à mon collègue Nicolas Sansu le soin de le faire auprès de la commission saisie au fond. Je souhaiterais néanmoins pointer les insuffisances nécessitant une évolution de ce projet de loi.

Premièrement, l’article 1er exige des banques qu’elles cantonnent certaines activités spéculatives dans une filiale sans remettre en cause leur structure de holding. Ainsi, lorsqu’une filiale fera faillite, ce sont les autres filiales qui devront assumer les pertes induites. Certes, le projet de loi prévoit un système de résolution bancaire – d’ailleurs peu détaillé – assorti de clauses applicables en cas de faillite. Il reste que la responsabilité des différentes filiales mérite d’être clarifiée.

Deuxièmement, le nombre d’activités cloisonnées reste très limité : ainsi la BNP a-t-elle fait savoir que la réforme prévue ne concernerait que 2 % de son chiffre d’affaires ! En outre, le cloisonnement des activités spéculatives les plus lucratives demeure insuffisant. Les banques pourront donc continuer à utiliser les dépôts de leurs clients pour favoriser le développement de produits dérivés. On n’atteint donc la cible que très partiellement ! Il conviendra de limiter le risque d’absorption des dépôts en cas de faillite bancaire, d’étendre la liste des activités jugées spéculatives et d’interdire la revente sur les marchés des créances détenues par les banques commerciales.

Troisièmement, le projet de loi limite le trading haute fréquence (THF), mais à l’exclusion du THF de tenue de marché et des opérations effectuées à une rapidité supérieure à une demi-seconde. On peut donc estimer que 80 à 90 % des opérations de THF resteront autorisées. Encore une fois, ces mesures devront être renforcées.

En instaurant dès à présent un régime de régulation bancaire, le projet de loi anticipe sur l’agenda de la Commission européenne. Nous sommes donc dubitatifs. Une telle anticipation vise-t-elle à tirer vers le bas les propositions susceptibles d’être formulées par le commissaire Barnier à la suite du rapport Liikanen ? Ce rapport est d’ailleurs plus exigeant que le projet de loi en termes de séparation entre activités de dépôt et activités spéculatives. Si jamais le texte de la commission européenne s’avérait plus ambitieux que le présent projet de loi, devrions-nous le modifier de façon à élever le niveau d’intervention des pouvoirs publics ?

Enfin, je souhaiterais répondre aux objections formulées par la Fédération française des banques – organisme dont le lobbying n’a d’ailleurs pas été particulièrement discret, ce qui est compréhensible puisqu’il s’agit de défendre le grisbi !

En premier lieu, les banques de dépôt-crédit séparées de leur département d’investissement sur les marchés ne seront nullement privées de liquidités. En effet, les départements de crédit, notamment destinés aux PME et aux particuliers, ne se financent que grâce aux dépôts et ne recourent absolument pas aux marchés pour récolter des liquidités. C’était le cas avant 2007 avec la titrisation — avec les résultats que l’on sait ! Gardons-nous d’avancer des tels arguments : il est tout à fait possible de renforcer la séparation sans porter un coup au développement économique ni aux PME.

En deuxième lieu, la FBF déplore que le projet de loi nuise aux banques d’investissement. C’est effectivement le cas, et c’est l’objectif recherché. Aujourd’hui, le mélange des genres est tel que l’État est obligé d’intervenir pour protéger les clients des banques. Une telle limitation permettra donc d’éviter que l’État ne soit pris en otage.

En troisième lieu, la FBF objecte que les banques mixtes à la française ont mieux résisté à la crise que les autres. Or ce n’est pas toujours le cas. Dexia a coûté 12 milliards d’euros aux Français. Si elles ont mieux résisté, c’est parce que l’État est intervenu pour assurer la sécurité des clients bancaires.

En conclusion, le vote des députés du Front de gauche dépendra des améliorations apportées au projet de loi.

Mme Michèle Bonneton. Ce projet de loi très attendu par les TPE et les PME – qui ont encore aujourd’hui beaucoup de mal à se faire financer par les banques – et par la société dans son ensemble est emblématique de notre comportement vis-à-vis du monde de la finance. Notre responsabilité est d’autant plus importante qu’il s’agit du premier projet de loi de ce type à être examiné en Europe.

Ce texte vise à remettre de l’ordre dans les activités du secteur bancaire et financier, et à le rendre plus transparent. Il limite les activités spéculatives des banques et renforce la surveillance et le contrôle du secteur bancaire. Toutefois, en dépit des annonces qui ont été faites, il demeure bien loin de séparer strictement les banques de dépôt des banques spéculatives. Le modèle français de banque universelle n’étant pas remis en cause, l’activité spéculative des banques est telle que le risque que des clients perdent certains de leurs actifs demeure : ce projet de loi ne permettra d’isoler que 2 % de l’activité des banques, alors que leurs activités de marché pèsent de 15 à 25 fois plus dans leur bilan. Les opérations de spéculation risquent donc de rester au même niveau qu’actuellement. Les banques pourront continuer à utiliser l’argent de leurs clients pour spéculer et à bénéficier d’une garantie implicite de leurs activités de marché – l’État couvrant les dépôts de leurs clients. La séparation entre la maison mère et ses filiales ainsi qu’entre les différentes filiales restera perméable. Ces garde-fous sont insuffisants !

Nous souhaitons donc que le projet de loi fasse l’objet d’améliorations de fond. La séparation des activités de crédit et de marché doit être renforcée. Nous souhaitons notamment que l’activité de tenue de marché ne fasse plus partie des exceptions autorisées, mais des activités encadrées des filiales. Ce type d’activité est en effet susceptible de mobiliser une part importante des liquidités d’une banque alors que son utilité économique est limitée. Afin d’interdire les produits les plus toxiques, nous préconisons d’instaurer un contrôle et une autorisation obligatoires de l’ACPR pour tout produit financier proposé par une banque ou sa filiale. Nous souhaiterions que deux représentants du Parlement nommés par les présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat et un représentant de la société civile nommé par le président du Conseil économique, social et environnemental intègrent le collège de cette autorité. Nous proposons que les bonus ne puissent représenter plus de 50 % de la rémunération des traders et que chaque banque ait l’obligation de publier un rapport annuel sur les crédits accordés aux TPE et aux PME.

La question de l’accessibilité aux banques n’est que partiellement traitée. Actuellement, seule la Banque postale assure cette accessibilité. À ce titre, elle est dédommagée par l’État français – c’est-à-dire par le contribuable – à hauteur de 240 millions d’euros par an. Puisque les banques gagnent de l’argent sur les dépôts des clients, sans doute peut-on exiger que, en retour, elles assurent un service bancaire universel gratuit assorti de prestations de base telles que la tenue du compte, l’information sur le compte, certaines opérations courantes et la mise à disposition de moyens de paiement gratuits tels que le chéquier ou la carte bancaire.

La question des paradis fiscaux – pourtant fondamentale – n’est pas traitée non plus. Il avait été annoncé que les dépôts des banques détenant des filiales dans un paradis fiscal ne seraient plus garantis par l’État. Nous regrettons qu’aucune mesure de ce type ne figure dans le projet de loi et souhaitons une action forte en ce domaine. Il serait également possible d’obliger les banques à déclarer les avoirs qu’elles détiennent à l’étranger, de même que les opérations qui y sont menées par leurs clients. Les États-Unis eux-mêmes se sont déjà engagés sur cette voie.

En conclusion, nous souhaitons que cette réforme soit considérablement améliorée, comme le Président de la République l’a d’ailleurs laissé entendre.

M. le président François Brottes. Je ne pense pas que la Banque postale soit dédommagée pour le travail qu’elle accomplit !

M. Joël Giraud. Le groupe RRDP est favorable à un texte reprenant un engagement présidentiel qu’il a particulièrement soutenu.

Le projet se décline en différents volets tendant à répondre à une préoccupation qui alimente nos débats : comment protéger le mieux possible l’économie réelle, les entreprises et les consommateurs, et comment s’assurer que l’économie financière, une nouvelle fois, ne mettra pas en péril nos emplois ? C’est en fonction de tels critères qu’il doit être examiné.

La séparation des activités bancaires a-t-elle pour objectif de protéger l’économie réelle ? Assurément. Permettra-t-elle d’éviter d’autres crises bancaires ? Assurément pas. En reprenant une définition très large des activités utiles à l’économie, on a un peu dénaturé ce texte. Ne conviendrait-il pas d’aller plus loin en cantonnant par exemple la tenue de marché au sein d’une filiale, comme le recommande d’ailleurs le rapport Liikanen ?

On peut se demander s’il ne serait pas préférable d’attendre la mise en place de mesures au niveau européen, mais, à force de courir après les rapports et les études, on en vient à ne plus prendre de décision. En l’occurrence, le Gouvernement n’a pas tort de vouloir appliquer le principe de précaution face aux risques bancaires et d’avoir décidé d’agir, pour donner l’exemple.

Certains reprocheront à ce texte de ne pas aller assez loin, d’autres le jugeront trop contraignant. En ce qui nous concerne, nous aurions été favorables à une séparation beaucoup plus stricte des activités bancaires, conformément aux conclusions du rapport Liikanen.

Le renforcement de la capacité d’intervention des autorités publiques lors d’une crise bancaire constitue un objectif ambitieux du projet. Les pouvoirs conférés à l’ACPR sont réels, puisqu’elle pourra obliger les banques en crise à prendre des mesures contraignantes et à faire supporter les pertes par les actionnaires et par certains créanciers.

Des voix s’élèvent contre l’étendue des possibilités d’action conférées au pouvoir administratif mais le cadre très strict de la résolution n’est-il pas la nécessaire contrepartie d’une séparation des activités par trop timorée ? Il est normal que les banques dont les dépôts sont garantis par l’État soient soumises à un contrôle étendu de la puissance publique lorsque les circonstances l’exigent. De ce point de vue, le texte est extrêmement positif, ce pouvoir d’intervention permettant de s’assurer qu’une crise bancaire pourra être résolue avant même qu’elle ne se propage à l’économie réelle.

Le projet remplace le Conseil de régulation financière et du risque systémique par le Conseil de stabilité financière qui, à titre préventif, pourra imposer des exigences de fonds propres additionnels à certaines banques. Pour autant, je m’étonne que sa composition soit si restreinte puisqu’en sont membres des représentants d’institutions pouvant avoir un intérêt à ne pas augmenter ces exigences. Il me semble souhaitable que des personnalités qualifiées en fassent également partie tant il importe de sortir de cet « entre soi » financier qui est aussi à l’origine des crises bancaires. Évitons la reproduction des espèces par mariages consanguins !

Les dispositions relatives à la protection du consommateur bancaire relèvent du bon sens. Il est en effet intolérable que les banques continuent à appliquer des frais inclus pour toute assurance souscrite dans une autre compagnie que celle du groupe bancaire dans lequel le crédit est contracté. Les frais pratiqués à l’encontre des plus fragiles sous le terme doux et élégant de « commission d’intervention » doivent être à l’évidence plafonnés. Le droit au compte doit être également facilité.

Enfin, même si le texte ne traite pas de la question des clauses de surendettement, la simplification de la procédure de surendettement est bienvenue, tant pour l’État que pour les personnes surendettées.

M. le président François Brottes. Je vous remercie. Je laisse maintenant la parole à chaque intervenant, le rapporteur répondra ensuite à l’ensemble.

M. Alain Suguenot. Je souhaite revenir sur la comparaison avec la situation aux États-Unis et au Royaume-Uni ainsi que sur le rapport Liikanen.

Pouvons-nous aller plus vite ? En étant les premiers à agir, ne risquons-nous pas de fragiliser nos banques ? A-t-on les moyens de nous montrer précurseurs ? L’est-on d’ailleurs vraiment lorsque l’on sait que le texte européen risque d’être plus clair quant à la séparation des activités bancaires ? En effet, les partisans d’une stricte séparation des activités de dépôt et de spéculation s’inquiètent un peu en raison d’un certain flou lié à la notion de banque universelle, à laquelle nous sommes au demeurant tous attachés, mais qui accroît les difficultés de séparation.

Certains ont compris que la spéculation, notamment sur les dérivés de matière première agricole, ainsi que le THF, seraient interdits. Or tel n’est pas forcément le cas. D’autres ont compris que ces activités seraient filialisées, mais la filialisation ne constitue pas une protection absolue, comme le montrent les risques inhérents aux holdings.

La grande inconnue du texte réside principalement dans la nature des activités qui seront cantonnées dans les filiales séparées. Toutes les activités de marché qui ne sont pas directement dédiées au financement de l’économie sont-elles visées ? Quid du market making, de l’animation de marché ?

Mme Frédérique Massat. J’évoquerai essentiellement le dernier volet de ce texte, relatif à la protection du consommateur.

Lors de la précédente législature, plusieurs députés avaient déposé des amendements au projet de loi visant à renforcer les droits, la protection et l’information des consommateurs, et je me réjouis que M. le rapporteur pour avis soit soucieux de cette question-là.

Néanmoins, nous devrions aller plus loin. Un comparatif des tarifs bancaires pratiqués par 143 établissements a été récemment effectué, montrant qu’ils peuvent varier de 1 à 15 en fonction des profils, notamment pour les actifs et les plus jeunes, le manque de transparence étant par ailleurs évident.

Certes, nous débattrons plus tard d’un texte spécifiquement dédié à la consommation mais nous pouvons d’ores et déjà proposer des avancées : je songe notamment aux dates de valeur, à l’information du consommateur et aux prélèvements parfois abusifs qui sont effectués sans que l’avis de ce dernier ait été demandé, ce qui est inacceptable. Nous défendrons des amendements à ce propos, car le consommateur, qui est souvent le grand perdant, dispose de peu de moyens pour se défendre face à de tels abus.

Mme Laure de La Raudière. Ce texte vise à séparer les activités utiles au financement de l’économie de celles qui relèvent de la spéculation et, donc, à mieux financer l’économie, objectif que nous partageons.

Or, selon l’étude d’impact annexée au projet de loi, « la combinaison de ces impacts devrait avoir pour conséquences de réduire significativement la profitabilité et in fine l’importance des activités de marché pour compte propre sans lien avec le client au sein des banques. Les pertes de revenu correspondantes pour les banques devraient cependant rester acceptables, compte tenu du périmètre envisagé. » Vous noterez le conditionnel.

En outre, l’étude ne mentionne aucune trace d’un impact positif sur le financement de l’économie et sur le service client. Je n’ai donc pas l’impression que ce texte réponde à l’objectif fixé.

Nous travaillons à des mesures franco-française alors qu’une directive européenne est en voie d’élaboration. Le législateur procède-t-il de la manière la plus judicieuse ?

Enfin, quel sera l’impact du projet en matière d’emplois – première préoccupation des Français – dans le secteur bancaire ? L’amélioration du financement de l’économie pour recréer les postes qui ont été perdus sera-t-elle effective ?

Je le répète, l’étude d’impact ne dit rien sur ces enjeux majeurs.

M. Dominique Potier. Je concentrerai mon intervention sur les activités spéculatives et délictueuses des banques européennes et françaises ainsi que sur les emplois conséquemment détruits dans l’économie réelle, ici et ailleurs.

Je souhaite que notre commission se saisisse autant que possible de la question de l’interdiction des paradis fiscaux pour les banques. En Europe, une filiale sur quatre est située dans l’un de ces paradis fiscaux – dont 574 filiales françaises, contre 474 seulement en 2010. Malgré les grandes déclarations et l’élaboration d’une liste des États et territoires non coopératifs, l’échec est patent.

De surcroît, en France, sur 80 milliards d’euros de fraude fiscale, 30 à 36 milliards sont liés à ces placements dans des pays où la fraude, si j’ose dire, est monnaie courante et où les économies sont corrompues.

Nous soutenons, quant à nous, l’économie réelle et le développement de relations commerciales justes. Je souhaite donc que notre commission défende les propositions visant à assurer à court terme la transparence afin de favoriser, à moyen terme, un meilleur discernement des opérateurs privés et publics quant au choix des banques avec lesquelles ils travaillent et, à long terme, l’interdiction des paradis fiscaux.

M. Alain Marc. Comment définir l’économie réelle et la séparer de l’économie spéculative ? Normera-t-on et nommera-t-on ces activités-là ? Ce sera très difficile, d’autant plus que certaines entreprises pourraient être elles aussi spéculatives.

Qu’en est-il de la réflexion sur le plan européen ? Des banques qui disposent de filiales étrangères pourront éventuellement y transférer des dépôts nationaux et, ainsi, contourner ce projet de loi. Qu’avez-vous prévu à cet égard ?

Mme Marie-Lou Marcel. Je salue les avancées de ce texte, notamment s’agissant de l’interdiction faite aux banques de mener des activités engageant leur propre bilan ainsi que des mesures qui renforcent la capacité d’intervention des autorités publiques visant à protéger le consommateur. Cependant, sans doute aurions-nous pu aller un peu plus loin en ce qui concerne le droit au compte. Depuis le mois d’avril 2006, toute personne physique dépourvue de compte de dépôt peut donner mandat à l’établissement qui lui refuse l’ouverture d’un tel compte de transmettre à la Banque de France sa demande d’exercice du droit au compte. Généralement, la Banque de France la traite en désignant la Banque postale comme établissement bancaire. Alors même que cette dernière tend à devenir une banque comme les autres, il me semble qu’il aurait été bon de contraindre des établissements financiers particulièrement prospères à ouvrir des comptes pour les personnes les plus fragiles. Quelqu’un qui a été fragilisé par un accident de la vie, en effet, ne dispose pas d’un accès aux services bancaires égal à celui des autres citoyens. À ce titre, le fait que les établissements de crédit aient pour unique obligation de remettre au demandeur une attestation de refus d’ouverture de compte me paraît être bien en deçà d’un légitime droit au compte.

M. Jean-Charles Taugourdeau. La majorité œuvrant à la moralisation des relations avec l’argent, c’est notre Commission qui devrait être saisie au fond d’un tel texte. Nous nous intéressons en effet aux activités créatrices de richesses, dont il appartient à la commission des finances de réfléchir à la fiscalisation et à l’utilisation.

L’objectif du texte est louable. D’aucuns considèrent que les banques ne devraient pas bénéficier de quelque protection publique que ce soit, mais, si tel était le cas, la situation serait encore pire.

Vous verrez aux pages 16 et 17 de l’étude d’impact citée par Mme de La Raudière que chaque mesure que vous envisagez de prendre entraîne des surcoûts pour les banques. Vous ne croyez tout de même pas qu’elles en feront cadeau aux particuliers ou aux entreprises ?

Tout le monde a considéré qu’il importait d’assouplir les préconisations de « Bâle II ». Or, après le déclenchement de la crise, « Bâle III » a été plus contraignant et le texte que vous proposez l’est davantage encore pour nos banques. Je rappelle que les mesures de « Bâle III » sont appliquées par une dizaine de banques américaines seulement, alors que 7 500 d’entre elles continuent de financer les PME. Nos entreprises sont donc fragilisées et nous n’avons pas les moyens de nous montrer précurseurs.

J’ajoute que, lorsqu’une entreprise dépose le bilan, l’État s’est déjà servi, mais que la banque prêteuse, elle, ne récupère en général jamais son argent. Sans doute faudrait-il regarder les banquiers un peu différemment. Si nous souhaitons qu’ils prêtent un peu plus facilement, peut-être conviendrait-il aussi qu’ils puissent récupérer leur argent plus aisément.

M. le président François Brottes. La commission des finances comptant littéralement les « banques » parmi son champ de compétences, je ne peux pas lutter. C’est d’ailleurs l’ancienne majorité qui avait décidé qu’il en serait ainsi.

M. Razzy Hammadi. Depuis le Glass-Steagall Act de 1933, aucun pays au monde, ni dans le cadre de la Volcker Rule américaine, ni dans les rapports Liikanen ou Vickers, n’a à ce jour proposé une réforme comme la nôtre. Je défie quiconque de donner l’exemple du contraire. La réforme que nous proposons est donc la première en Europe. Elle ne s’oppose pas aux principes qui pourraient être défendus par le groupe Liikanen et inscrits dans le cadre d’une réforme européenne.

On ne peut à la fois vouloir anticiper les réformes Liikanen en se référant au principe de subsidiarité et renvoyer à « Bâle III ». Je rappelle que, au mois de décembre, c’est le Gouvernement qui a demandé le report de son application compte tenu de l’efficacité non prouvée des différents ratios et de la difficulté à réguler le shadow financing, le THF ainsi que la titrisation et les produits dérivés, notamment en matière agricole.

La dizaine de banques américaines à laquelle il a été fait allusion n’applique pas les préconisations de « Bâle III » puisqu’elles fonctionnaient déjà selon ces principes. Les États-Unis ne les appliquent donc pas et assurent qu’ils continueront à ne pas les appliquer.

Pas un seul syndicat n’a défendu la remise en cause du principe de banque universelle.

Nous avons voulu essentiellement répondre à la question de l’aléa moral et de la déresponsabilisation.

J’ajoute qu’un travail réglementaire important devra être accompli sur les décrets relatifs aux niveaux envisagés, le travail parlementaire d’amendement demeurant quant à lui très ouvert en matière d’accessibilité bancaire et sur la typologie des produits dérivés.

Entre titrisation et filialisation, il faut se rappeler que le groupe américain AIG est tombé à cause de l’une de ses filiales qui représentait 0,3 % de son bilan.

M. le président François Brottes. Monsieur le rapporteur, je vous laisse la parole.

M. le rapporteur pour avis. On pourrait dire, pour simplifier, que l’activité bancaire consiste à prêter à des taux d’intérêt fixes sans activité de termes. Or cela seul ne permettrait pas au système de fonctionner. Dès lors qu’on introduit des opérations de transformation du court terme en long terme, l’activité comporte un risque de dérive. C’est toute la difficulté à laquelle ce texte tente de répondre.

Les différents rapports qui ont été évoqués montrent que des orientations ont été définies, mais elles ne sont pas prêtes à être appliquées. En ce qui nous concerne, nous tenons à clarifier ce qui relève de l’activité économique réelle et ce qui n’en relève pas.

Certes, certaines activités déstabilisent l’économie réelle. Parce que la transparence de l’information est impérative s’agissant des paradis fiscaux, nous proposerons un amendement – que je convie M. Potier à co-rédiger – disposant que toutes les banques doivent transmettre, selon des normes bien définies, les informations concernant les activités de leurs filiales dans ces paradis fiscaux. L’esprit du texte tend à accroître la transparence de l’information et à la normer afin que les instances de régulation puissent jouer pleinement leur rôle.

Cela produira-t-il des effets sur l’économie réelle ? Les différents acteurs que nous avons rencontrés – représentants des chambres de commerce et du monde de l’artisanat, mais aussi de l’Autorité des marchés financiers (AMF) – ont considéré que cette loi favorisera un recentrage des activités, lequel a d’ailleurs déjà été effectué par le système bancaire français lui-même.

En effet, seuls 4 ou 5 % des activités bancaires demeurent à haut risque. Outre que notre système bancaire a fait preuve de prudence, des repositionnements sont intervenus depuis 2007 et 2008, le marché ayant opéré une régulation suite aux pertes qui ont été enregistrées.

Tout le problème est de ne pas relancer les activités spéculatives lorsque le marché se retournera. Les autorités de régulation, dont l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, considèrent que, en dernière analyse, l’arbitrage est rendu par le niveau de rentabilité. On est en droit de s’interroger lorsqu’il s’élève à 16 ou 18 %, car une activité économique normale parvient exceptionnellement à un taux de 5 %. Le niveau de rentabilité peut donc constituer une ligne de démarcation. Notre travail consiste à accroître également la transparence sur ce plan-là.

Cet arbitrage permet donc de contribuer à ramener les activités bancaires sur le plan de l’économie réelle et, avec les autres instruments que le Gouvernement met en place – Banque publique d’investissement, pacte de compétitivité, stratégies d’investissement par branches d’activité –, assure et conforte la cohérence de l’ensemble du projet.

J’ajoute que les améliorations que ce texte vise à apporter s’inscrivent dans le cadre du principe de la banque universelle, que nous revendiquons.

S’agissant de la défense des consommateurs, des progrès peuvent certes être encore accomplis. Les représentants d’associations de défense des consommateurs nous ont indiqué, par exemple, qu’il conviendrait de limiter le nombre et le coût des commissions d’intervention. Cela pourrait néanmoins comporter des effets pervers, puisqu’une régulation des tarifs, par exemple, pourrait entraîner un alignement du montant des commissions vers le haut comme ce fut déjà le cas en 2008. La commission des finances a, quant à elle, émis l’idée, ce matin, d’une limitation de leur nombre. Les commissions d’intervention doivent-elles perdurer ? En ce qui nous concerne, nous proposons la mise en place du service bancaire universel, ce qui reviendrait à les supprimer.

Le système bancaire connaît des déséquilibres financiers. La gestion des espèces et celle des chèques coûtant chacune 3 milliards d’euros, il est compréhensible que les banques aient cherché les financements nécessaires dans des produits facturés de manière opaque. Nous allons donc accroître la transparence, mais il conviendra de nous montrer vigilants quant aux dérives qui peuvent exister par ailleurs.

Oui, monsieur Chassaigne, nous nous montrerons également vigilants s’agissant des limites de la filialisation, le cantonnement des activités spéculatives ne garantissant pas l’absence de risques. La faillite d’une filiale peut avoir des conséquences sur les fonds propres de la société mère. J’en conviens : nous devrons réfléchir aux garde-fous qu’il est possible de mettre en place.

Peut-être une plus grande clarté rédactionnelle est-elle nécessaire, mais il existe parfois des confusions entre le collège de supervision de l’ACPR, qui comprend dix-neuf membres – dont des personnalités qualifiées – et le collège de résolution, qui ne comporte quant à lui que cinq membres. Un amendement vise d’ailleurs à ce que deux professionnels du monde bancaire leur soient adjoints. Peut-être est-il possible d’aller plus loin ? Nous en discuterons.

Nous savons que les réflexions qui ont cours, notamment dans le cadre du rapport Liikanen, s’inscrivent dans le calendrier européen, lequel ne permettra pas vraiment de résoudre la question des rapports de l’activité économique réelle et de la spéculation avant 2016 ou 2017, après les élections européennes. Aux États-Unis, les décisions n’interviendront pas avant 2019.

Avec ce texte, la France confortera quant à elle son exemplarité. Je rappelle que l’ancienne majorité avait souhaité que l’on travaille sur la rémunération des banquiers, que ce sujet a été abordé au sommet de Pittsburgh et que les comportements ont commencé à évoluer.

II.— EXAMEN DES ARTICLES

TITRE IER

SÉPARATION DES ACTIVITÉS UTILES AU FINANCEMENT DE L’ÉCONOMIE DES ACTIVITÉS SPÉCULATIVES

Article 1er

(articles L. 511-47 à L. 511-50 [nouveaux] du code monétaire et financier)

Le principe de la filialisation des activités bancaires spéculatives

A.— LE CANTONNEMENT DES ACTIVITÉS SANS LIEN AVEC LE FINANCEMENT DE L’ÉCONOMIE RÉELLE

L’article 1er est certainement l’article le plus emblématique de ce projet de loi dans la mesure où il met très directement en œuvre le principe de séparation entre les activités qui servent l’économie réelle et celles qui, relevant davantage de la recherche d’un profit à la fois pur et rapide, s’avèreraient perturbatrices pour le fonctionnement de l’économie et la stabilité du système financier.

1. Le principe du cantonnement de certaines activités au sein de filiales spécifiques

Comme on l’a indiqué précédemment, les options qui s’offraient au Gouvernement étaient assez diversifiées compte tenu des expériences et des préconisations qui ont pu être faites dans tel ou tel pays, et pouvaient relever soit de l’interdiction pure et simple de pratiquer certaines opérations, soit d’une séparation plus souple entre les activités.

Le projet de loi a donc été décidé de cantonner certaines activités sans les interdire totalement.

Le nouvel article L. 511-47 du code monétaire et financier dispose ainsi que tout établissement de crédit (ou compagnie financière) dont les activités de marché dépasseraient un seuil donné (celui-ci ayant vocation à être ultérieurement défini par décret en Conseil d’État) ne pourra désormais exercer un certain nombre d’activités que par l’intermédiaire de filiales qui leur seront dédiées. Il s’agit d’une part des activités sur compte propre qui ne revêtent pas d’utilité réelle pour l’économie et, d’autre part, des activités financières effectuées avec des « hedge funds » ou des véhicules d’investissement similaires.

En revanche, lorsque les activités considérées auront une utilité avérée pour l’économie réelle, elles pourront continuer d’être réalisées directement par les établissements de crédit. Comme l’énonce l’article L. 511-47, il s’agit de :

– la fourniture de services d’investissement à la clientèle, qu’il s’agisse des services d’investissement proprement dits tels qu’énoncés à l’article L. 321-1 du code monétaire et financier (réception et transmission d’ordres pour le compte de tiers, exécution d’ordres pour le compte de tiers, conseil en investissement) ou des services connexes dont la liste figure à l’article L. 321-2 (tenue de compte-conservation d’instruments financiers pour le compte de tiers, fourniture de conseil aux entreprises en matière de structure de capital ou de stratégie industrielle…). Comme le précise l’article L. 511-47-III-1 du code monétaire et financier, ces services visent à répondre à la sollicitation des agents économiques, qu’il s’agisse de leurs besoins de couverture (couvrir par exemple un risque de change ou de taux lors d’une opération financière effectuée par un particulier ou une entreprise), de leurs besoins de financement ou de leurs besoins d’investissement. Les banques retrouvent donc ici pleinement leur rôle de facilitateur économique et d’intermédiaire de confiance : il est donc normal qu’elles puissent remplir ces fonctions directement, sans qu’il leur soit nécessaire d’agir par le biais de filiales ou d’entités spécifiques. En outre, et bien que les termes méritent peut-être d’être davantage circonscrits, l’article L. 511-47-III-2° précise utilement que ces services ont vocation à être rémunérés par la clientèle qui en bénéficiera et que les risques afférents devront faire l’objet d’une gestion à la fois saine et prudente de la part des établissements bancaires ; il y a là incontestablement une garantie qui justifie que ce type d’activités puisse être effectué sans recourir à une filiale dédiée ;

– la compensation d’instruments financiers, c’est-à-dire l’activité qui consiste à diminuer les risques liés à des opérations financières nécessaires au financement de l’économie réelle en calculant les positions nettes des acteurs opérant sur ces marchés ;

– la couverture des risques de l’établissement de crédit ou du groupe auquel il appartient (au sens de l’article L. 511-20 du code monétaire et financier), la couverture permettant notamment au vendeur d’une option d’être couvert (protégé) contre les mouvements du marché, que celui-ci soit à la hausse ou à la baisse. Ici, encore, on ne peut que se féliciter de constater que le texte même du projet de loi précise que les instruments qui peuvent être utilisés pour couvrir ce risque de couverture doivent présenter « une relation économique avec les risques identifiés », ce qui permet d’exclure, a priori, l’utilisation de tels instruments dans un simple but spéculatif. Le lien avec la sphère économique réelle est ici très clairement réaffirmé ;

– à la tenue de marché (« market making ») : cette activité est essentielle pour assurer un niveau de liquidité élevé sur les marchés et des écarts de prix peu importants entre contreparties. On ne peut que se féliciter de voir la tenue de marché non filialisée, contrairement à ce qu’a par exemple préconisé le rapport Liikanen qui souhaitait, pour sa part, instaurer une séparation entre activités de tenue de marché et activités de banque de dépôt : aucune raison ne milite en ce sens à partir du moment où la tenue de marché non filialisée permettra de réaliser des activités relevant de l’économie réelle. Pour certains observateurs, en effet, les activités de tenue de marché peuvent parfois conduire à prendre des positions risquées de nature à mettre en péril la liquidité de la banque de dépôt. La tenue de marché, qui consiste donc en l’achat et la vente de titres, devrait conserver toute son importance pour permettre aux agents économiques de se refinancer sur les marchés sans courir de risque important de liquidité. Néanmoins, il s’agit de bien définir leur importance ;

– à la gestion saine et prudente de la trésorerie du groupe (article L. 511-20 préc.). Cette règle, qui peut paraître de simple bon sens, est néanmoins un signal important envoyé au système bancaire français, quelques mois après l’affaire qui a durement frappé la banque américaine J.P. Morgan en juillet 2012, occasionnant pour l’établissement des pertes de plusieurs milliards de dollars. Connaissant un excédent de trésorerie par rapport aux prêts qu’elle consentait, cette banque avait en effet souhaité investir le surplus de trésorerie dont elle disposait (environ 400 Mds $) mais les positions risquées prises par un de ses traders ont finalement conduit la banque à subir une perte de 6,2 Mds €. La précision qui figure à cet effet à l’article 1er ne peut donc qu’être accueillie avec satisfaction ;

– aux opérations d’investissement du groupe (il peut notamment s’agit d’achat de titres sur le moyen ou long terme).

Par ailleurs, et c’est là également une novation importante, certaines activités ne pourront à l’avenir même plus être exercées par des filiales : elles sont totalement interdites, à partir du moment néanmoins où elles sont là encore déconnectées de l’économie réelle.

Il s’agit tout d’abord des activités de « trading haute fréquence » qui, dans le monde de la banque et de la spéculation, symbolisent plus que tout autre la folie qui peut s’emparer des marchés. Ces activités, qui consistent à échanger le plus vite possible des produits financiers sur les marchés grâce à des algorithmes ultra-performants afin de tirer parti du moindre écart de prix, sont, pour la plupart des observateurs, potentiellement très perturbatrices pour le fonctionnement des marchés et la stabilité du système financier. Elles ne se fondent en effet sur aucune donnée économique réelle et jouent bien davantage sur les anticipations et les hypothèses (à la hausse comme à la baisse) afin d’engranger un profit maximal en un minimum de temps, condition sine qua non pour courir le moindre risque possible. Ainsi, dans une étude qu’elle avait réalisée en 2010 sur ce sujet (14), l’Autorité des marchés financiers (AMF) avait déterminé que, lors d’une séance du CAC 40, jusqu’à 600 messages avaient pu être passés au cours d’une seule seconde (dont 190 provenaient d’un même acteur de marché), que le temps minimal entre deux messages consécutifs avait été de 7 microsecondes et que la plus courte durée de vie d’un ordre (qui avait été annulé avant de recevoir une quelconque exécution) avait été de 25 microsecondes ! Aussi caricatural puisse-t-il être, le trading haute fréquence représente un poids extrêmement important dans les ordres et les transactions puisque, toujours selon cette même étude, il a pu représenter entre 30 et 35 % des transactions réalisées en Europe et même entre 50 et 60 % des transactions réalisées aux États-Unis. Or, certains ont pointé le risque de saturation du marché qui pouvait s’en suivre (celui-ci ne pouvant pas être certain d’absorber et de traiter des millions d’ordres lancés en quelques secondes), le risque d’aggravation des tendances (d’où de possibles déséquilibres de grande ampleur) et l’impossibilité matérielle d’opérer un quelconque contrôle sur ces opérations.

Il s’agit également d’interdire aux filiales des établissements de crédit de réaliser des opérations sur instruments financiers à terme dont l’élément sous-jacent serait une matière première agricole. On sait que, depuis de nombreuses années maintenant, les matières premières représentent une nouvelle classe d’actifs dont le rendement, bien supérieur aux obligations, attire de nouveaux investisseurs. Cette tendance de fond est notamment illustrée par la disproportion croissante que l’on constate entre les volumes échangés sur les marchés dérivés organisés et la taille des marchés physiques. Ainsi, sur les marchés à terme agricoles, le rapport entre les volumes négociés et le total de la production physique s’élève à 39 pour le blé et 26 pour le maïs sur le seul marché américain (15). Même si ces marchés ne représentent que 5 % environ de l’ensemble des transactions de produits dérivés (soit 400 Mds $), il n’en demeure pas moins qu’ils revêtent une importance croissante et d’autant plus déstabilisatrice qu’ils accentuent une volatilité des prix agricoles déjà avérée.

Aussi, le projet de loi a-t-il prévu, à l’article L. 511-48-II que les filiales des établissements financiers ne pourraient plus, sauf en cas d’utilité à l’économie avérée, réaliser de « trading haute fréquence », ni fournir de dérivées agricoles.

2. Le contrôle opéré sur les filiales

Une fois établi le principe du cantonnement de certaines activités au sein de filiales dédiées, l’article L. 511-48 en établit le statut.

Pour exercer leur activité, ces filiales doivent tout d’abord recueillir l’agrément de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) prévu par les articles L. 532-1 et suivants du code monétaire et financier. À cet effet, elles peuvent être agréées soit comme étant une « entreprise d’investissement » (c’est-à-dire, aux termes de l’article L. 531-4 du code monétaire et financier, une personne morale qui fournit « des services d’investissement à titre de profession habituelle »), soit comme un « établissement de crédit » (c’est-à-dire une personne morale qui effectue, selon l’article L. 511-1 du même code, des opérations de banques, également « à titre de profession habituelle »).

La mesure la plus importante prévue à leur égard par le projet de loi consiste à soumettre ces filiales, quelle que soit la nature de leur agrément, à des normes de gestion strictes. Celles-ci, visées à l’article L. 511-41 du code monétaire et financier, visent notamment le respect de normes prudentielles qui sont par ailleurs applicables aux banques elles-mêmes. En d’autres termes, chaque entité (maison-mère ou filiale) devra désormais respecter individuellement les ratios prudentiels applicables afin de garantir leur bonne santé financière et, de ce fait, tant leur liquidité que leur solvabilité à l’égard de leurs déposants. En outre, le fait que ce respect doive être assuré le cas échéant « de manière sous-consolidée » permet dans l’hypothèse où, par exemple, une filiale créerait elle-même ses propres filiales, de surveiller l’ensemble (structure faîtière et filiales propres) et non une seule partie de celui-ci. Par ailleurs, comme le précise d’ailleurs ce même article L. 511-48, les établissements de crédit auxquels sont rattachées les filiales doivent également par eux-mêmes respecter les prescriptions de l’article L. 511-41 : le respect des normes prudentielles est désormais très largement étendu et sera de nature à rassurer l’ensemble des opérateurs.

Outre les contraintes « extérieures » que le projet de loi fait peser sur les filiales des établissements financiers, ces dernières se voient contraintes par un certain nombre de prescriptions relatives à leur propre organisation interne. Tel est l’objet de l’article L. 511-49 nouveau du code monétaire et financier qui oblige tant les établissements financiers que leurs filiales à adopter des règles internes d’organisation propres à assurer le respect des dispositions précédemment énoncées aux articles L. 511-47 et L. 511-48. Il s’agit tout d’abord du respect de l’article L. 511-41 en vertu duquel les établissements de crédit doivent être dotés d’un système de contrôle interne « leur permettant notamment de mesurer les risques et la rentabilité de leurs activités » (16). L’article L. 511-49 impose également à ces entités de veiller à ce que les règles de bonne conduite et les obligations professionnelles qui sont adressées en interne à leurs services soient conformes aux dispositions de l’article L. 621-7 du code monétaire et financier en vertu duquel le règlement général de l’Autorité des marchés financiers détermine un certain nombre de principes devant être respectés par divers acteurs mentionnés notamment à l’article L. 621-9-II (prestataires de services d’investissement agréés, entreprises de marché, chambres de compensation d’instruments financiers…).

Enfin, le dernier alinéa de l’article L. 511-49 prévoit que ces établissements de crédit ou d’investissement doivent communiquer à l’ACPR et, le cas échéant, à l’AMF, la description de l’organisation qu’ils ont instaurée et les règles de fonctionnement qu’ils ont assignées à leurs différentes entités. Loin d’être anodine, cette transmission est au contraire fondamentale puisque, comme en dispose ensuite l’article L. 511-50 nouveau, l’ACPR peut, sur la base des informations ainsi délivrées, refuser de donner son agrément. Une telle décision est lourde de conséquences puisqu’elle entraîne notamment l’impossibilité pour l’établissement d’effectuer des activités bancaires et financières à compter de la date de refus dudit agrément.

B.— LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Compte tenu des effets perturbateurs de certaines activités spéculatives, on ne peut qu’approuver cet article, qui marque une évolution fondamentale dans l’organisation du paysage bancaire de notre pays.

À ce titre, l’équilibre qui a ainsi été atteint marque incontestablement une avancée structurelle qui aura des effets importants sur la stratégie et les comportements des banques françaises.

Condamner l’anticipation de l’activité bancaire et de couverture de marché de court terme, et l’assimiler à de la spéculation comme si elle était fatalement négative et perturbatrice pour l’économie, serait un grave contresens. Plusieurs études l’ont mis en évidence : l’anticipation est une sorte de pari sur l’avenir. Or, ce comportement est fréquent en économie et justifie que l’on attende par exemple la baisse d’un taux d’intérêt ou la hausse de son pouvoir d’achat. De plus, l’anticipateur apparaît bien souvent comme celui qui accepte de prendre des risques (recherchant certes des profits pour son propre compte) tandis que, dans le même temps, d’autres acteurs économiques, motivés par la prudence ou par d’autres préoccupations, resteront à l’écart. Or, c’est bien souvent celui qui anticipe qui, en se proposant d’acheter des titres sur un marché donné, permettra à un investisseur de bénéficier de liquidités lui permettant, par la suite, de réaliser un investissement ou une opération de couverture. Comme l’écrit par ailleurs Nicholas Kaldor dans un article célèbre, « ce qui distingue achats et ventes spéculatifs des autres achats et ventes est que leur seul motif est l’anticipation d’un changement imminent du prix en vigueur » (17).». Cette anticipation peut être acceptée lorsqu’elle est fondée sur des actifs réels et qu’elle n’alimente pas un effet de bulle, ce qui ne fut pas le cas dans la période récente mais on conviendra que la séparation est délicate.

Dans ce cadre, définir d’emblée les activités permises et les activités interdites aux banques revêt une particulière complexité, la frontière à tracer entre les deux pouvant s’avérer particulièrement mouvante. En préférant cantonner les activités de marchés sur compte propre au sein des filiales des banques dédiées à cet effet à partir du moment où elles ne seraient pas utiles pour l’économie (article L. 511-47-I-1°) et les opérations financières effectuées avec des « hedge funds » ou assimilés (article L. 511-47-I-2°), le Gouvernement laisse une plus grande latitude d’action aux établissements de crédit et d’investissement qui, dans les faits, sera plus bénéfique à l’économie.

Faute de pouvoir définir précisément la notion de « hedge fund » au sein de cet article, il est proposé d’instaurer davantage de transparence dans les rapports que les banques entretiennent avec ces fonds. À cet effet, la commission des affaires économiques a adopté un amendement ayant pour objet de demander aux établissements de crédit de transmettre chaque mois l’état des engagements qu’ils ont contractés auprès de ces fonds. De la sorte, l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) pourra, le cas échéant, réagir si elle constate que le volume des engagements contractés apparaîtrait trop important au regard des fonds propres de la banque ou lui sembleraient trop hasardeux. L’ACPR pourra ainsi intervenir préventivement à l’encontre des établissements de crédit, tout en contribuant à instaurer une culture d’une plus grande transparence qui ne peut être que bénéfique pour l’ensemble des acteurs en présence. Cette proposition reflète la ligne directrice des préconisations de ce rapport, afficher l’information, créer plus de transparence sur l’activité des banques pour permettre aux instances de régulation de favoriser une atmosphère, des conventions et des règles propices au financement de l’économie réelle.

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* *

La Commission examine l’amendement CE 22 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Cet amendement vise à ce que les banques qui travaillent avec des « hedge funds » doivent transmettre chaque mois à l’ACPR l’état des engagements consolidés qu’elles ont souscrits auprès de ces derniers. Il importe en effet de ne pas s’engager dans des activités spéculatives – vers lesquelles les « hedge funds » peuvent tendre –, mais de rester dans le cadre de l’économie réelle grâce à une telle surveillance.

La Commission adopte l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CE 11 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Il s’agit de corriger une erreur de vocabulaire et de rétablir une cohérence rédactionnelle au sein de l’article 1er en supprimant la première occurrence du mot « holding ».

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 1er modifié.

Article 2

(article L. 612-33-1 [nouveau] du code monétaire et financier)

Renforcement des compétences de l’Autorité de contrôle prudentiel
et de résolution

À l’instar d’autres dispositions du projet de loi, l’article 2 instaure une mesure d’ordre préventif car, comme nous l’avons déjà vu, il importe davantage de prévenir toute atteinte au système financier que de la traiter, parfois avec difficulté, a posteriori.

L’article L. 612-1 du code monétaire et financier détermine les personnes qui relèvent de la surveillance de l’ACPR, que ce soit dans le secteur de la banque, de l’investissement, de l’assurance ou autre. En l’espèce, en ajoutant un nouvel article à la section 6 « Mesures de police administrative » du chapitre II (relatif à l’ACPR) du Titre Ier du Livre VI du code monétaire et financier, l’article 2 permet à l’ACPR de limiter ou de suspendre certaines activités menées par une personne soumise à son contrôle dans deux grandes hypothèses.

D’une part, elle peut intervenir dès qu’il apparaît qu’à ses yeux, l’activité de cette personne serait susceptible de porter atteinte « à la stabilité financière » même si, comme nous le verrons ultérieurement, là n’est pas la compétence principale dévolue à l’ACPR.

D’autre part, elle peut limiter ou suspendre certaines activités lorsqu’une situation d’urgence, au sens où l’entend le Règlement n° 1093/2010 du Parlement européen et du Conseil (18), le justifie. De façon assez précise, l’article 18 du Règlement, spécifiquement relatif à l’« Action en situation d’urgence », définit l’urgence comme étant le cas où « des circonstances défavorables risquent de compromettre gravement le bon fonctionnement et l’intégrité des marchés financiers ou la stabilité globale ou partielle du système financier de l’Union ». C’est à ce titre que le Règlement précise, en préalable à ses dispositions directement normatives, que « L’Autorité [européenne] devrait pouvoir exiger des autorités nationales de surveillance qu’elles prennent des mesures spécifiques pour remédier à une situation d’urgence ». On ne peut que se réjouir de constater que le projet de loi, loin d’être isolé, s’inscrit dans un cadre propre à garantir plus efficacement le système financier et bancaire tant européen que national.

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La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 2 sans modification.

Article 3

(article L. 531-2-2° du code monétaire et financier)

Interdiction de l’exemption d’agrément pour les filiales

L’article L. 531-2 du code monétaire et financier dispose que certaines entités (au nombre desquelles l’État, la Banque de France, l’Institut d’émission d’outre-mer mais aussi les entreprises d’assurance et de réassurance régies par le code des assurances ou certains organismes de placement collectif) peuvent fournir des services d’investissement sans pour autant devoir se soumettre à la procédure d’agrément diligentée par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution. La contrepartie de cette facilité procédurale consiste à ne pas pouvoir bénéficier des dispositions figurant aux articles L. 532-16 à L. 532-27 du même code relatifs au libre établissement et à la libre prestation de services sur le territoire des États parties à l’accord sur l’Espace économique européen (EEE).

Le présent article vise seulement à préciser que les filiales d’établissements de crédit ou d’entreprises d’investissement visées par l’article L. 511-47 nouveau (créé par l’article 1er du projet de loi) ne peuvent bénéficier de l’exemption prévue à l’article L. 531-2.

Cette disposition s’avère tout à fait conforme à la philosophie du projet de loi qui consiste à mieux contrôler les entités exerçant des activités potentiellement perturbatrices pour la stabilité financière et bancaire.

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La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 3 sans modification.

Article 4

(article L. 531-2-2° du code monétaire et financier)

Mise en œuvre du Titre Ier

Cet article met en œuvre les précédentes dispositions en trois points.

En premier lieu, il précise le périmètre des dispositions visées, énonçant ainsi que le Titre Ier (articles 1 à 3) n’a pas vocation à s’appliquer à la gestion extinctive des portefeuilles d’instruments financiers existant à la date de publication de la présente loi. L’AMF a précisé que la gestion extinctive excluait par définition toute gestion active et que « seuls les actes de gestion destinés à préserver l’intérêt des porteurs et à assurer la liquidation du fonds dans les meilleures conditions » étaient autorisés (19). En d’autres termes, ce premier alinéa précise la manière dont il convient de gérer certains portefeuilles d’instruments hérités de la crise, notamment certains actifs toxiques. Au regard de l’article 1er du projet de loi, la logique voudrait que ces actifs soient transférés à une filiale, ce qui engendrerait immédiatement des pertes pour celle-ci, contribuant ainsi à la fragiliser considérablement. Telle est la raison pour laquelle il est préférable de ne pas appliquer l’article 1er à ce type de gestion, le but étant plutôt de détenir ces titres soit jusqu’à leur extinction, soit jusqu’à ce qu’un moment propice existe afin de les vendre en perdant le moins possible.

En deuxième lieu, cet article établit le calendrier de la filialisation des activités telle qu’elle est établie par l’article 1er. Ainsi, le projet de loi ambitionne que les établissements de crédit visés à l’article L. 511-47 aient identifié, au plus tard au 1er juillet 2014 les activités qui devront être confiées à une filiale. C’est également à cette échéance que les établissements devront avoir adopté les règles internes d’organisation imposées par l’article L. 511-49. Enfin, le transfert effectif des activités devra avoir lieu le 1er juillet 2015 au plus tard.

Enfin, en troisième lieu, l’article 4 précise les effets juridiques d’une telle filialisation. Le fait de cantonner certaines activités au sein de filiales entraîne par là même le transfert de tous les biens, droits et obligations liées à ces activités. Cette transmission vaut notamment pour les contrats qui restent valables quand bien même ils seraient en cours d’exécution, l’évolution organique des structures étant ainsi traitée de manière totalement indépendante.

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La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 4 sans modification.

TITRE II

MISE EN PLACE DU RÉGIME DE RÉSOLUTION BANCAIRE

Chapitre Ier

INSTITUTIONS EN MATIÈRE DE PRÉVENTION ET DE RÉSOLUTION BANCAIRES

Article 5

(articles L. 612-1, L. 612-4, L. 612-8-1 [nouveau], L. 612-33 et L. 612-38

du code monétaire et financier)

Création de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR)

A.— LE RENFORCEMENT DE L’AUTORITÉ DE CONTRÔLE PRUDENTIEL

Une fois le périmètre des activités parfaitement défini, il importait ensuite d’en déterminer la régulation.

À cet effet, le chapitre Ier du Titre II du projet de loi renforce considérablement deux institutions qui font chacune l’objet d’un article spécifique : l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (article 5) et le Fonds de garantie des dépôts et de résolution (article 6).

1. L’extension des compétences de l’ACPR à la résolution des crises bancaires

Avec l’article 5, l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) succède ainsi à l’Autorité de contrôle prudentiel (ACP). Il importe dès à présent d’indiquer que cet article doit être rapproché des articles 7 et 14 qui sont également relatifs aux compétences de l’ACPR. Votre rapporteur ne peut que regretter, à ce titre, que l’organisation interne du projet de loi ne soit pas plus claire car, comme nous le verrons, la diversification des autorités et des compétences dont elles sont chacune investies tend à masquer la cohérence du dispositif de régulation, de supervision et de résolution du monde bancaire dans notre pays.

L’ACP est née de la fusion de plusieurs autorités préexistantes qui s’occupaient à la fois de l’agrément et du contrôle des secteurs de l’assurance et de la banque : il s’agissait du Comité des entreprises d’assurance et du Comité des établissements de crédit et des entreprises d’investissement (côté agrément), et de l’Autorité de contrôle des assurances et des mutuelles, ainsi que de la Commission bancaire (côté contrôle). La fusion fut opérée par l’ordonnance n° 2010-76 du 21 janvier 2010 prise en application de l’article 152 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie (20). Dans le but de renforcer la supervision du secteur financier, l’ACP, dotée du statut d’autorité administrative indépendante, fut notamment chargée (actuel article L. 612-1 du code monétaire et financier) de l’agrément et du contrôle des établissements bancaires et des organismes d’assurance tout en veillant à la préservation de la stabilité financière et à la protection des clients des banques, des assurés et bénéficiaires des contrats d’assurance.

L’article 5 crée notamment un nouvel alinéa 4° au sein de l’article L. 612-1 du code monétaire et financier, qui détaille les compétences de l’ancienne ACP. Désormais, l’ACPR a également pour mission de « veiller à l’élaboration et à la mise en œuvre des mesures de prévention et de résolution des crises bancaires », mesures détaillées à l’article 7 du projet de loi, et ce dans un triple but : préserver la stabilité financière, assurer la continuité des activités (contrairement à ce qui s’est passé lors de la crise de 2008, il n’est pas question de laisser les banques faire faillite sans réagir) et préserver les contribuables en évitant de recourir au soutien financier public pour sauver un établissement bancaire donné.

2. La réorganisation de la gouvernance de l’ACPR

L’article L. 612-4 dispose que l’ACP est composée d’un Collège de 19 membres, qui peut statuer en formation plénière, restreinte (il comprend alors 8 membres aux termes de l’article L. 612-6) ou en sous-collège sectoriel (l’ACP comprenant deux sous-collèges selon l’article L. 612-7, l’un assurantiel, l’autre bancaire, chacun d’entre eux comprenant 8 membres), et d’une Commission des sanctions de 6 membres (article L. 612-9).

En transformant l’ACP en ACPR, l’article 5 du projet de loi a modifié sa composition puisqu’elle comprend désormais deux collèges :

– un collège de supervision qui reprend les fonctions de l’ancien collège de l’ACP (le nouvel article L. 612-4 disposant, dans son alinéa 1er, que « sauf disposition contraire, les attributions confiées à l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution sont exercées par le collège de supervision ») et dont la composition ne subit aucun changement : celui-ci conserve 19 membres tels qu’ils sont énumérés à l’article L. 612-5 et son président demeure le Gouverneur de la Banque de France (ou le sous-gouverneur qu’il désigne pour le représenter à cet effet). Leur situation statutaire n’est pas davantage modifiée : ainsi, les membres de l’ACPR sont nommés pour un mandat de 5 ans renouvelable une fois par arrêté du ministre chargé de l’économie et ils ne doivent se trouver dans aucune situation propre à faire douter de leur indépendance. Il est par ailleurs précisé que, à l’image du précédent collège, le collège de supervision peut siéger en différentes formations (plénière, restreinte, ou en sous-collège sectoriel) ;

– un collège de résolution, instance créée par le nouvel article L. 612-8-1 du code monétaire et financier. Comprenant 5 membres (le Gouverneur de la Banque de France ou son représentant, le directeur général du Trésor ou son représentant, le président de l’Autorité des marchés financiers ou son représentant, le sous-gouverneur désigné par le Gouverneur de la Banque de France ou son représentant, le président du directoire du Fonds de garantie des dépôts et de résolution ou son représentant), c’est lui qui se voit explicitement confier la nouvelle compétence définie par l’article L. 612-1-4°. Ne pouvant délibérer que si la majorité des membres est présente, le collège de résolution prend ses décisions à la majorité des voix, celle du directeur du Trésor ou de son représentant étant nécessaire lorsque le collège décide de mesures pouvant entraîner un appel à des concours publics.

B.— LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

De manière plus générale, on salue, avec la Commission des affaires économiques dans son ensemble, la création d’une véritable instance de résolution bancaire en France. En outre, on ne peut que se satisfaire de voir ainsi créée une institution qui s’inscrit dans la droite ligne de ce qui existe, évitant ainsi tout coût supplémentaire superflu ; c’est suffisamment rare pour mériter d’être souligné.

À la lecture du projet de loi, on se rend compte que la stabilité du système financier et la supervision bancaire sont le fait de plusieurs institutions : il est cependant important que l’on perçoive davantage la cohérence de l’ensemble et le fait qu’il n’existe pas, contrairement à ce que l’on pourrait éventuellement penser au premier abord, de chevauchement entre les compétences dévolues aux différents organes. L’ACPR n’agit pas indépendamment de l’AMF (Autorité des marchés financiers), de même que le FGDR (Fonds de garantie des dépôts et de résolution) n’ignore en rien ce que fait la Banque de France : si l’ensemble fait donc système, il importe néanmoins de mieux le mettre en évidence et de qualifier les missions décrites pour que les rôles se complètent et n’interfèrent pas les uns avec les autres, ce qui générerait beaucoup de confusion.

En matière de surveillance et de résolution bancaire, il existe en vérité deux niveaux à prendre en considération :

– il existe tout d’abord une surveillance micro-prudentielle qui est principalement du ressort de l’ACPR et de l’AMF. En pratique, l’ACPR exerce une action de surveillance avant tout à l’égard des établissements de crédit puisqu’elle examine les demandes individuelles d’autorisation et de dérogation qui lui sont adressées, elle exerce une « surveillance permanente » de leur situation financière (contrôlant notamment le respect de leurs exigences de solvabilité) et elle veille au respect par les personnes soumises à son contrôle des règles destinées à assurer la protection de leur clientèle. De son côté, l’AMF veille à la protection de l’épargne investie dans les instruments financiers, à l’information des investisseurs et au bon fonctionnement des marchés d’instruments financiers. Il importe à ce stade de rappeler les propos du président de l’AMF, M. Jean-Pierre Jouyet, qui justifiait ainsi de n’avoir pas en France d’autorité unique chargée à la fois de la régulation prudentielle, bancaire et assurantielle, ainsi que de la régulation des marchés financiers : « ce fut une sage décision (…) Cela équivaut en effet à posséder deux cœurs : autant, pour le régulateur des marchés, la transparence s’impose, autant les activités du régulateur prudentiel répondent à des exigences de discrétion et de confidentialité » (21) ;

– il existe par ailleurs une surveillance macro-prudentielle, d’ordre systémique, qui vise, pour sa part, à s’assurer de la stabilité du système financier dans son ensemble. C’est cette hauteur de vue qui justifie que cette mission d’importance soit confiée au Conseil de stabilité financière (nouvelle institution créée par l’article 11 du présent projet de loi) et à la Banque de France, cette dernière fonction étant pour sa part introduite par l’article 10 du projet de loi.

Compte tenu de ce partage des compétences, il peut sembler assez peu compréhensible que l’article L. 612-1 du code monétaire et financier, relatif à la mission générale dévolue à l’ACP (désormais l’ACPR), ne soit pas modifié. En effet, sa formulation entraîne une véritable confusion en énonçant que « l’Autorité de contrôle prudentiel, autorité administrative indépendante, veille à la préservation de la stabilité du système financier… ». Il ne fait aucun doute que, à sa mesure, l’APC et plus encore la future ACPR contribuent à assurer cette stabilité, ainsi que le précise également le 4° nouveau de l’article L. 612-1 créé par le présent article : pour autant, ce n’est pas là sa fonction première. Si l’on se reporte à l’article 2 du projet de loi, son alinéa 3 indique sans ambiguïté que l’ACPR peut prendre certaines mesures à l’égard « d’une personne soumise à son contrôle » lorsque l’activité de cette dernière « est susceptible de porter [notamment] atteinte à la stabilité financière ». L’ACPR se voyant confier une surveillance micro-prudentielle, votre rapporteur a ainsi proposé à la commission des affaires économiques, qui l’a adopté, un amendement énonçant que l’ACPR « contribue à la préservation de la stabilité du système financier en protégeant les clients, assurés, adhérents et bénéficiaires des personnes soumises à son contrôle », la stabilité financière n’étant que le but ultime de son action, concurremment avec celle conduite par les autres autorités de régulation ou de supervision en présence.

Sans vouloir conduire à établir des collèges pléthoriques, il est par ailleurs souhaité, pour rendre le système micro-prudentiel plus opérationnel, une légère modification de la composition du collège de résolution de l’ACPR.

Le collège de résolution ayant pour principale fonction de définir si un établissement bancaire est défaillant ou non et, dans l’affirmative, de prendre toute mesure propre à rétablir sa situation (ainsi que le spécifie l’article L. 613-31-16 nouveau du code monétaire et financier), il semble essentiel que des membres du monde économique y siègent. Sans évidemment contester la compétence des autres membres appartenant à ce collège, ce sont surtout les professionnels du monde bancaire et économique qui peuvent porter une appréciation d’ordre pratique sur la faisabilité de certaines mesures et sur leur mise en œuvre dont chacun souhaite qu’elle soit effective et efficace.

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* *

La Commission examine l’amendement CE 12 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Le texte crée ou renforce plusieurs institutions, dont l’ACP, qui devient l’ACPR. Une telle diversité dans les contrôles effectués ne doit pas être source de confusion.

La surveillance micro-prudentielle est exercée par l’ACPR et par l’AMF, laquelle surveille plutôt le placement des fonds et le bon fonctionnement d’un marché donné. En revanche, la surveillance macro-prudentielle – la stabilité du système financier – est du ressort de la Banque de France, en liaison avec le Système européen de banques centrales, et du Conseil de stabilité financière.

Il convient de modifier la rédaction du premier alinéa de l’article L. 612-1 du code monétaire et financier en précisant que l’ACPR ne fait que contribuer à « la préservation de la stabilité du système financier ». Elle est donc un élément « rapporteur », mais non décisionnel.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle étudie l’amendement CE 20 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Cet article modifie l’organisation de l’ACP, laquelle compte actuellement un collège qui peut se réunir en formation plénière ou restreinte, une commission des sanctions, trois commissions consultatives ainsi qu’un comité scientifique. La future ACPR comprendra quant à elle un collège de supervision, un collège de résolution et une commission des sanctions, les commissions consultatives et le comité scientifique restant en place.

Cet amendement propose d’ajouter deux membres au collège de résolution qui aura notamment pour fonction d’imposer des mesures de restructuration, de changement ou d’abandon d’activités aux banques. Cet élargissement et cette professionnalisation permettront de limiter l’« entre soi » dont il a été question.

M. Razzy Hammadi. Le texte évoque les scénarios ex ante de résolution de crise que les banques doivent proposer à l’ACPR lors de la filialisation. En prévoyant que le collège de résolution comprendra deux personnalités issues du monde bancaire, ne risque-t-on pas des conflits d’intérêts ?

Mme Laure de La Raudière. Le choix des personnes permettra précisément d’éviter ce type de conflit. Un sous-amendement faisant référence à des personnes issues du monde économique contribuerait également à prévenir un tel risque.

M. le rapporteur pour avis. Il importe de définir les garanties permettant d’éviter les conflits d’intérêts. La présence de personnes issues du monde économique serait en effet de bonne politique, mais je crois que, en l’état de notre discussion, nous devons faire preuve de prudence rédactionnelle.

Mme Michèle Bonneton. Afin de sortir de l’« entre soi », je propose que trois personnes – élues du Parlement et représentants de la société civile – soient également membres du collège de résolution.

M. le président François Brottes. Un banquier ne fait-il pas partie de la société civile ?

M. le rapporteur pour avis. Je rappelle qu’il est ici question du collège de résolution et que nous devons nous adresser à ceux qui sont susceptibles de porter cette dernière, ce qui ne relève pas d’une démarche participative.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 5 modifié.

Article 6

(articles L. 312-4, L. 312-5, L. 312-15 et L. 312-16

du code monétaire et financier)

Création du Fonds de garantie des dépôts et de résolution

A.— L’EXTENSION DES COMPÉTENCES DU FONDS DE GARANTIE DES DÉPÔTS ET DE RÉSOLUTION

Les fonds de garantie des dépôts existent dans de nombreux pays, que ce soit au sein de l’Union européenne ou, par exemple, aux États-Unis où a été créée, en 1933, la FDIC (Federal Deposit Insurance Corporation). Même si leur fonction commune consiste à garantir les dépôts des épargnants en les indemnisant, le cas échéant, en cas de faillite d’un établissement bancaire, certains établissements ont plus de pouvoirs que d’autres. Ainsi, la FDIC participe pleinement à la supervision du système bancaire américain aux côtés notamment du Trésor américain et de la Banque centrale (Federal Reserv).

En France, le Fonds de garantie des dépôts (FGD) a été créé par l’article 65 de la loi sur l’épargne et la sécurité financière (22), les dispositions le concernant figurant aujourd’hui pour l’essentiel aux articles L. 312-4 et suivants du code monétaire et financier. Personne morale de droit privé soumise au contrôle de l’Inspection générale des finances, il est également régi par le règlement n° 99-05 du 9 juillet 1999 modifié relatif à la garantie des dépôts ou autres fonds remboursables reçus par les établissements de crédit ayant leur siège social en France ainsi que dans la Principauté de Monaco.

La mission principale du FGD consiste à indemniser aussi rapidement que possible les déposants, sous certaines conditions (dont la principale consiste à instaurer un plafond de 100 000 € pour toute indemnisation (23)), lorsque l’établissement auquel ils ont confié leurs avoirs ne peut plus faire face à ses engagements. Outre la garantie des dépôts bancaires, le FGD assure également la garantie des titres au bénéfice des clients des entreprises d’investissement (dans ce cas, le montant de la garantie demeure plafonné à 70 000 €) et la garantie des cautions au bénéfice des clients des organismes délivrant des cautions obligatoires.

L’article 6 du projet de loi renforce considérablement les compétences du FGD puisque celui-ci peut désormais participer à une résolution bancaire, justifiant pleinement qu’il soit désormais dénommé FGDR (Fonds de garantie des dépôts et de résolution). Ainsi, il permet désormais au FGDR d’intervenir, à la demande de l’ACPR, auprès d’un établissement bancaire qui sera déclaré défaillant, c’est-à-dire ne pouvant plus faire face à ses engagements financiers. Sur intervention de l’ACPR, le FGDR peut également intervenir auprès de la personne agréée qui aurait repris ou poursuivi des activités anciennement détenues par l’établissement en difficulté et qui auraient été transférées à cette personne en application de l’article L. 613-31-17 du code monétaire et financier.

Afin de lui permettre d’exercer pleinement ses nouvelles compétences, le projet de loi a considérablement accru les pouvoirs de l’ancien FGD. Celui-ci peut désormais acquérir des actions ou des parts sociales de l’établissement bancaire concerné, souscrire à une augmentation de son capital, lui consentir des financements (le cas échéant sous forme de garanties)… Enfin, le nouvel article L. 312-15 du code monétaire et financier accorde au FGDR certaines facilités en lui permettant, toujours par le biais de l’ACPR, d’avoir accès à des documents d’ordre administratif, comptable ou juridique, y compris ceux qui peuvent être couverts par le secret professionnel, afin de lui permettre de mener à bien ses missions.

B.— LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Le souci constant de clarifier le rôle de chaque institution afin de montrer en quoi l’ensemble fait véritablement système, dans l’optique de mieux réguler et mieux superviser le secteur bancaire.

C’est cette même préoccupation qui a conduit à présenter un amendement précisant que le FGDR, par le biais de cette action renforcée, « participe [également] à la préservation de la stabilité du système financier ». Aussi, dans la même optique que celle qui a conduit à préciser les compétences de l’ACPR, il est important de préciser que le FGDR contribue, à un niveau micro-prudentiel, à assurer à sa mesure la stabilité du système financier en garantissant les dépôts des épargnants.

Une des caractéristiques importantes de l’action menée par le FGDR est qu’elle est effectuée à la demande de l’ACPR, notamment de son collège de résolution. Or, en l’état actuel de la législation, aucune disposition n’impose au collège de résolution de demander un avis au FGDR sur les mesures qu’il devra mettre en œuvre dans le cadre d’une résolution bancaire. Si celui-ci ne fait que donner un avis qui ne lie pas le collège, une telle consultation semble néanmoins aller de soi dans la mesure où le FGDR est une personne morale de droit privé dont l’action est ici mise en œuvre à l’initiative des pouvoirs publics. Le fait que l’ACPR soit une autorité administrative indépendante, agissant donc au nom et pour le compte de l’État, justifie que le Fonds donne un avis sur la décision de recourir aux mesures spécifiées par ailleurs dans le code monétaire et financier. À cet effet, la commission des affaires économiques a adopté un amendement spécifiant que le FGDR intervient selon des modalités déterminées conjointement avec l’ACPR. Cette précision est d’autant plus logique que l’avis, non obligatoire, du FGDR est par ailleurs prévu par le projet de loi, notamment au titre des mesures que le collège de résolution peut prendre à l’égard d’un établissement dans le cadre d’une procédure de résolution (article L. 613-31-16-7°).

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La Commission examine l’amendement CE 13 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Nous souhaitons intégrer le Fonds de garantie des dépôts et de résolution (FGDR) dans le circuit de surveillance de la stabilité du système financier.

Cet organisme, ayant forcément connaissance des dysfonctionnements bancaires et pouvant mesurer les niveaux de risque, peut ainsi jouer un rôle utile d’information et de veille.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement CE 16 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Le projet de loi prévoit que le FGDR, institution de droit privé financée par les banques, peut être appelé à l’aide par l’ACPR, autorité administrative indépendante agissant pour le compte et au nom de l’État. Nous entendons préciser que, lorsque l’ACPR sollicite ainsi le FGDR, celui-ci doit être consulté afin d’émettre un avis, mais un avis simple et non pas un avis de portée obligatoire.

Mme Laure de La Raudière. Avec cet amendement, les deux autorités se trouvent contraintes de s’accorder. N’institue-t-on pas ainsi une forme de contrôle du FGDR sur l’ACPR ?

M. le rapporteur pour avis. Non, car il ne s’agit que d’un avis simple, formule déjà prévue par ailleurs dans le code monétaire et financier.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 6 modifié.

Chapitre II

PLANIFICATION DES MESURES PRÉVENTIVES DE RÉTABLISSEMENT ET DE RÉSOLUTION BANCAIRES ET MISE EN PLACE DU RÉGIME DE RÉSOLUTION BANCAIRE

Article 7

(articles L. 613-31-11 à L. 613-31-18 [nouveaux]

du code monétaire et financier)

Mesures de prévention et de résolution des crises bancaires

Cet article est un des plus importants du présent projet de loi puisqu’il est au cœur de la préoccupation du Gouvernement : la sécurité des établissements de crédit. Afin d’éviter les errements qui ont pu être connus par le passé, le présent article impose plusieurs mesures d’ordre plus ou moins coercitif en vue de sauver les établissements financiers lorsqu’ils sont confrontés à une défaillance grave, permettant ainsi de préserver au mieux les déposants et le financement de l’économie qui s’en suit.

A.— LES MESURES DE PRÉVENTION DES CRISES BANCAIRES

1. Les mesures pouvant être prises par les établissements bancaires eux-mêmes

L’alinéa 1er de l’article L. 613-31-11 nouveau du code monétaire et financier pose le principe selon lequel les établissements de crédit et les entreprises d’investissement dont le bilan dépasse un certain seuil (dont le niveau est déterminé par décret) doivent élaborer un plan préventif de rétablissement comportant les mesures qu’ils envisagent de mettre en œuvre afin, en cas de détérioration de leur situation financière, de rétablir cette dernière. Ce plan doit être suffisamment solide puisque, comme le précise par ailleurs l’alinéa 7, les mesures qu’il comporte doivent être établies indépendamment de tout soutien à l’action publique, qu’elle soit actionnée par l’État ou par le FGDR. En d’autres termes, le plan préventif de rétablissement doit se suffire à lui-même.

Par ailleurs, l’ACPR se garde néanmoins le droit, pour les établissements financiers autres que ceux dont le bilan est déterminé au regard du précédent alinéa, de leur demander d’élaborer également un plan préventif de rétablissement dans la mesure où leur activité présenterait un risque spécifique au regard de la stabilité financière.

2. Les mesures pouvant être prises par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution

Afin que le maillage soit le plus complet possible, l’article 7 a également prévu que des mesures pouvaient être prises non seulement par les établissements de crédit eux-mêmes mais également par les autorités de contrôle et de régulation, au premier rang desquelles l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution.

L’article L. 613-31-12 dispose ainsi que l’ACPR élabore de son côté, pour chaque établissement de crédit ou entreprise d’investissement, un plan préventif de résolution mettant en œuvre les mesures qui sont énumérées, quelques alinéas plus loin, à l’article L. 613-31-16. Là aussi, lorsque l’établissement considéré fait partie d’un groupe au sens de l’article L. 511-20, le plan préventif est établi sur une base consolidée.

Les mesures pouvant être prises par l’ACPR concernent également, le cas échéant, la structure même de l’établissement de crédit. En effet, le nouvel article L. 613-31-13 dispose que celle-ci peut, au regard tant du plan préventif de résolution que du plan préventif de rétablissement, imposer à l’établissement de prendre toute mesure qui s’opposerait à la mise en œuvre effective et efficace des mesures énoncées à l’article L. 613-31-16. Au surplus, si les mesures décidées par l’établissement devaient s’avérer insuffisantes aux yeux de l’ACPR, cette dernière pourrait, au terme d’une procédure contradictoire engagée avec l’établissement en question, lui ordonner de prendre certaines mesures particulièrement fortes puisqu’elles peuvent concerner tant l’organisation de ses activités que celle de sa structure interne.

B.— LES MESURES DE RÉSOLUTION DES CRISES BANCAIRES

1. L’initiative de la mise en œuvre des mesures de résolution bancaire

Les mesures de résolution bancaire sont mises en œuvre par le Collège de résolution de l’ACPR comme l’a expressément énoncé le 4° de l’article L. 612-1 du code monétaire et financier.

Les mesures qui permettent de saisir le Collège de résolution peuvent être le fait de deux autorités différentes aux termes de l’article L. 613-31-14 : le Gouverneur de la Banque de France ou le directeur général du Trésor. Leur désignation est parfaitement logique dans la mesure où, tout d’abord, elles sont toutes deux membres du Collège de résolution (article L. 612-8-1) dont une des principales fonctions consiste à veiller à l’élaboration et à la mise en œuvre des mesures de résolution prévues aux articles L. 613-31-11 à L. 613-31-16. En outre, tant la Banque de France (l’article 10 du présent projet de loi consacre d’ailleurs cette compétence qui n’existait jusqu’alors pas dans le code monétaire et financier) que le Trésor (donc l’État) ont comme responsabilité de veiller à la stabilité du système financier dans son ensemble, exerçant là comme on l’a déjà précisé, une surveillance macro-prudentielle du système financier.

À l’égalité de compétence ainsi établie, l’article L. 613-31-14 apporte néanmoins un tempérament puisque, si la défaillance de l’établissement financier est de nature à requérir un soutien financier exceptionnel des pouvoirs publics (ainsi que le prévoit l’article L. 613-31-15-II-3°), seul le directeur général du Trésor peut saisir le collège de résolution afin qu’il se penche sur le cas de cet établissement. Cette exclusivité se comprend parfaitement au regard des missions dévolues à la Direction générale du trésor et qui consistent notamment à gérer la trésorerie et la dette de l’État (24).

Une fois saisi, le collège de résolution de l’ACPR doit apprécier si l’établissement dont la situation lui est soumise est défaillant ou non. La « défaillance » étant sujette à de multiples définitions possibles, l’article L. 613-31-15-II a choisi d’en cerner le concept à travers trois situations possibles qui sont le non-respect des exigences de fonds propres auxquelles l’établissement est soumis et qui conditionnent par ailleurs l’agrément dont il a fait l’objet de la part de l’ACPR, l’impossibilité pour l’établissement d’assurer ses paiements à court terme et la nécessité pour lui de faire appel à un soutien financier exceptionnel des pouvoirs publics. Si la défaillance est constatée, le collège doit ensuite déterminer si elle est passagère ou durable, la mise en œuvre des mesures de résolution pouvant, dans la première hypothèse, ne pas être nécessaire.

2. Les mesures de résolution pouvant être décidées par l’ACPR

L’article L. 613-31-16 est emblématique à la fois de la volonté du Gouvernement de donner aux autorités compétentes tous les pouvoirs possibles pour résoudre une crise bancaire et de la diversité des solutions qui peuvent être requises à cet effet.

Les mesures pouvant être prises sont, pour certaines, relativement légères, qu’il s’agisse de la demande adressée aux établissements financiers de fournir au collège de résolution de l’ACPR tout document lui permettant de mettre en œuvre efficacement la procédure de résolution (1°) ou de l’estimation des pertes subies par l’établissement compte tenu de sa situation financière (8°).

D’autres mesures sont, en revanche, plus importantes : le collège de résolution peut ainsi nommer un administrateur provisoire qui aura, aux termes de l’article L. 612-34 du code monétaire et financier, des pouvoirs étendus afin de reprendre en mains l’établissement (2°), de demander au FGDR d’intervenir (6°) ou de lui transférer des actions ou des parts sociales émises par la personne soumise à la procédure de résolution (7°), de limiter ou d’interdire la distribution d’actions ou de parts sociales aux actionnaires de l’établissement financier (13°).

Le collège de résolution de l’ACPR peut enfin prendre des mesures particulièrement coercitives à l’égard de l’établissement dont il met en œuvre la procédure de résolution. Outre la révocation de ses dirigeants (3°), le collège peut ainsi « décider du transfert d’office de tout ou partie d’une ou plusieurs branches d’activité de la personne en cause (…) sans qu’il soit besoin d’aucune formalité » (4°), « limiter ou interdire temporairement l’exercice de certaines opérations par cet établissement » (12°), décider de recourir à un établissement-relais qui recevra « de plein droit et à la date fixée par l’Autorité et sans qu’il soit besoin d’aucune formalité » tout ou partie des droits, obligations et biens de la personne soumise à la procédure de résolution. On ne peut que remarquer l’importance caractérisée de ces mesures qui, en l’absence de toute procédure contradictoire, pouvaient porter atteinte au droit de propriété. Or il convient immédiatement de tempérer les critiques qui peuvent être formulées à l’encontre de ce dispositif pour deux séries de raisons :

– d’une part, les mesures de résolution qui peuvent être prises au titre de l’article L. 613-31-16 le sont dans des buts précis énoncés au 4° de l’article L. 612-1 nouvellement créé par l’article 5 du projet de loi : il peut ainsi s’agir aussi bien de la volonté d’assurer la stabilité du système financier que de préserver la continuité des activités, des services et des opérations des établissements dont la défaillance aurait de fait de graves conséquences pour l’économie, pour les dépôts des épargnants ou d’éviter au maximum un recours au soutien financier public. Les mesures décidées ne le seraient donc que dans des hypothèses particulièrement graves et urgentes, justifiant à cet effet que la procédure ne soit pas contradictoire ab initio (article L. 613-31-17, al. 1er). Ce qui importe, c’est que le caractère contradictoire ne soit pas totalement absent : or, il n’en est rien puisque le 2e alinéa de ce même article dispose que la procédure contradictoire « est engagée dès que possible aux fins de lever, d’adapter ou de confirmer ces mesures ». En outre, il va de soi que, même si cela n’est pas explicitement précisé par le texte, un dialogue s’instaurera entre les différentes parties en présence (État, ACPR, établissement financier soumis à la procédure de résolution notamment) et les mesures qui seront décidées seront naturellement proportionnées à la situation qu’il conviendra de régler ;

– d’autre part, le juge a toujours admis que des atteintes puissent être portées au droit de propriété à partir du moment où elles étaient proportionnées et prises dans un but d’intérêt général ce qui est à l’évidence le cas ici. La jurisprudence ne laisse aucun doute à cet égard (25). Or, en l’espèce, le but d’intérêt général justifiant le recours à une des mesures énoncées à l’article L. 313-31-16 est particulièrement évident, au surplus si l’on se réfère aux conséquences que le non-sauvetage de certaines banques américaines a pu avoir sur la situation économique mondiale.

Votre rapporteur ne peut donc qu’approuver les mesures extrêmement fortes qui sont décidées par le présent projet de loi et qui sont de nature à apporter des réponses aux situations qui peuvent se présenter.

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La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 7 sans modification.

Article 8

(articles L. 517-5, L. 612-2, L. 612-16, L. 612-24, L. 612-27 et L. 612-34

du code monétaire et financier)

Mesures de coordination

Cet article comporte en premier lieu plusieurs dispositions de coordination avec les articles précédents :

– il est prévu que, lorsque l’ACPR soumet à son contrôle une des personnes visées par le II de l’article L. 612-2 du code monétaire et financier (il s’agit principalement des intermédiaires en opération de banque et en services de paiement), les mesures prévues par la section 2 du chapitre III s’appliquent (articles L. 613-24 à L. 613-31-10). Il est ainsi possible, lorsque certaines conditions sont réunies, de nommer un liquidateur, de lancer une procédure de liquidation judiciaire, de prononcer des mesures d’assainissement à l’égard de l’établissement de crédit ; par ailleurs, l’ACPR peut, après avoir recueilli l’avis du FGDR, saisir le tribunal de grande instance afin que celui-ci ordonne la cession des actions détenues par un ou plusieurs dirigeants de droit ou de fait rémunérés ou non, de cet établissement ;

– la disposition figurant au III de l’article L. 612-16 du code monétaire et financier disposant que « les décisions relevant de la compétence du collège peuvent faire l’objet d’un recours en annulation devant le Conseil d’État dans un délai de deux mois suivant leur notification ou leur publication » est abrogée.

En second lieu, cet article comporte un certain nombre de dispositions relatives aux administrateurs provisoires. Il indique tout d’abord que la rémunération de l’administrateur doit être déterminée par l’ACPR et doit être mise à la charge de la personne auprès de laquelle celui-ci est désigné. Si les fonds de l’établissement ne permettent pas de couvrir l’ensemble des frais et de la rémunération de l’administrateur provisoire, c’est le Trésor public qui y supplée de manière temporaire, à charge pour celui-ci de diligenter ensuite les mesures nécessaires afin de se rembourser lui-même. Une disposition similaire est d’ailleurs prévue par ce même article au droit de l’éventuel liquidateur qui viendrait à être nommé en application des dispositions précédentes. En outre, l’article L. 612-34 prévoit désormais que tout avantage normalement dû au dirigeant de l’établissement auprès duquel est nommé un administrateur provisoire cesse d’être perçu pendant toute la durée de l’accomplissement de sa mission.

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La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 8 sans modification.

Chapitre III

DISPOSITIONS TRANSITOIRES

Article 9

Mesures de coordination

Le présent article dispose que les mesures figurant aux articles 7 et 8 du projet de loi sont applicables aux contrats en cours (et non pas seulement aux contrats à venir) et ce en dépit de toute éventuelle stipulation contraire.

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La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 9 sans modification.

TITRE III

SURVEILLANCE MACRO-PRUDENTIELLE

Article 10

(article L. 141-5-1 [nouveau] du code monétaire et financier)

Nouvelle mission dévolue à la Banque de France

La Banque de France voit ses missions définies par le chapitre Ier du Titre IV du Livre Ier du code monétaire et financier (articles L. 141-1 à L. 141-9). Dans le cadre du SEBC (Système européen de banques centrales), la Banque de France se voit avant tout confier la mission de veiller à la stabilité des prix et, même si elle est une personne publique sui generis (donc ne dépendant pas de l’État), elle a également la tâche d’apporter « son soutien à la politique économique générale du Gouvernement » (article L. 141-1). La Banque de France veille par ailleurs au bon fonctionnement et à la sécurité des systèmes de paiement (article L. 141-4) ; elle est également « seule habilitée », sur le territoire national, à émettre des billets ayant cours légal. Enfin, parmi ses missions les plus importantes, elle accomplit un certain nombre de prestations demandées par l’État ou réalisées pour des tiers avec l’accord de ce dernier (L. 141-7).

L’article 10 confie désormais à la Banque de France le soin de veiller, « conjointement avec le Conseil de stabilité financière, à la stabilité du système financier ».

Cette nouvelle compétence est une sécurité :

– d’une part, il était important d’apporter cette précision dans notre législation nationale alors que celle-ci figure déjà explicitement au sein du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. Ainsi, il convient de rappeler que, aux termes de son article 127-5, « le SEBC [et, par conséquent, les Banques centrales nationales] contribue à la bonne conduite des politiques menées par les autorités compétentes en ce qui concerne le contrôle prudentiel des établissements de crédit et la stabilité du système financier ». De plus, l’article 141-2, alinéa 5, rappelle également que la Banque centrale européenne peut consulter les autorités nationales « sur des questions qui relèvent de la compétence des banques centrales nationales et affectent la stabilité des établissements et marchés financiers » (26). Enfin, votre rapporteur signale également que le Protocole n° 4 annexé au traité sur l’Union européenne rappelle à son tour les responsabilités qui incombent au SEBC en matière de stabilité financière (27) ;

– d’autre part, cette précision démontre une fois encore qu’il existe dans ce projet de loi deux niveaux de surveillance qu’il importe de parfaitement différencier. Si la surveillance micro-prudentielle (c’est-à-dire qui concerne très directement les établissements bancaires eux-mêmes) est du ressort de l’ACPR et de l’AMF, la surveillance macro-prudentielle, qui vise l’ensemble du secteur financier, revient à la Banque de France et au Conseil de stabilité financière.

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La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 10 sans modification.

Article 11

(articles L. 631-2, L. 631-2-1, L. 631-2-2, L. 631-2-3 [nouveau]

du code monétaire et financier)

Le Conseil de stabilité financière

A.— LA CRÉATION DU CONSEIL DE STABILITÉ FINANCIÈRE

Les mesures de résolution bancaire sont mises en œuvre par le collège de résolution de l’ACPR comme l’a expressément énoncé le 4° de l’article L. 612-1. En réalité, le Conseil de stabilité financière (CSF) est bien davantage le fruit d’une transformation que d’une création à proprement parler puisqu’il succède au Conseil de régulation financière et du risque systémique (CORÉFRIS).

La loi relative aux nouvelles régulations économiques avait initialement créé le Collège des autorités de contrôle des entreprises du secteur financier (CACES) (28). Cette instance, présidée par le ministre des finances ou son représentant devait se réunir au moins trois fois par an afin de faciliter les échanges d’informations entre les grandes autorités en charge de la surveillance du système financier national (Banque de France, Commission bancaire, Autorité de contrôle des assurances et des mutuelles, Autorité des marchés financiers). Le CACES remplissait également la fonction d’interlocuteur de ses homologues européens, dans le cadre de la coopération en cas de crise systémique qui avait été décidée par les ministres des finances européens en 2005 (un nouveau mémorandum, plus complet, ayant par la suite été signé en juin 2008).

Le CACES n’ayant pas fait montre d’une très grande activité, il a été décidé, dans le cadre de la loi de régulation bancaire et financière de 2010, de le remplacer par une institution plus solide (29). Suivant ainsi les préconisations du rapport qui avait été commandé à l’ancien Gouverneur de la Banque de France, Jacques de Larosière, et qui souhaitait renforcer de manière volontariste la surveillance macro-prudentielle du système financier dans l’ensemble de l’Union européenne (30), le législateur a créé le CORÉFRIS (articles L. 631-2 à L. 631-2-2 du code monétaire et financier). Composé de huit membres et présidé par le ministre en charge de l’économie, le CORÉFRIS avait vocation à devenir une véritable « institution transversale » (31) chargée de veiller à un échange fructueux d’informations, à examiner la situation du secteur financier, et à en évaluer les risques systémiques.

Compte tenu des difficultés économiques et financières subies par les États et les banques depuis la chute de Lehman Brothers en septembre 2008, un surcroît de régulation et de surveillance macro-prudentielle était plus que jamais nécessaire. C’est dans ce cadre et pour répondre à de nouvelles exigences que le CSF succède au CORÉFRIS.

Sans rien changer à sa composition, plusieurs dispositions ont néanmoins trait à certains membres du CSF. Ainsi, les trois personnalités qualifiées (nommées en raison de leurs compétences dans les domaines monétaire, financier ou économique) qui y siègent (article L. 631-2-5°) doivent remplir un certain nombre de conditions en termes de probité et de désintéressement, qui sont énumérées à l’article L. 631-2-3 nouveau. Elles doivent ainsi informer le ministre en charge de l’économie, qui préside le CSF, des fonctions et mandats qu’elles ont pu détenir avant leur nomination afin de prévenir tout éventuel conflit d’intérêt. Par ailleurs, si un tel conflit devait risquer d’intervenir, tout membre du CSF (et, donc, pas seulement les trois personnalités qualifiées visées au 5°) doivent s’abstenir de délibérer ou de participer aux travaux du CSF lorsque celui-ci est appelé à statuer sur la situation d’un établissement de crédit dans lequel ils auraient un intérêt ou pour lequel ils auraient travaillé.

B.— LES MISSIONS DÉVOLUES AU CONSEIL DE STABILITÉ FINANCIÈRE

Les nouvelles dispositions relatives au CSF sont avant tout relatives à un renforcement des compétences dont disposait auparavant le CORÉFRIS.

La nouvelle rédaction de l’article L. 631-2-1 du code monétaire et financier énonce en premier lieu les missions générales dévolues au CSF : celui-ci, conjointement avec la Banque de France ainsi que l’a spécifié l’article 10 du projet de loi vu précédemment, « exerce la surveillance du système financier dans son ensemble, dans le but d’en préserver la stabilité et la capacité à assurer une contribution soutenable à la croissance économique ». Comme votre rapporteur a déjà eu l’opportunité de le souligner à plusieurs reprises, le CSF est donc investi d’une surveillance macro-prudentielle du système financier, surveillance d’ailleurs soulignée à plusieurs reprises (alinéas 10, 13 et 15) : il ne peut, à ce titre, que se féliciter de voir cette mission clairement énoncée ici.

Pour mener à bien ces missions, le CSF se voit doté de plusieurs nouveaux pouvoirs :

– complétant la rédaction de l’ancien article L. 631-2-1-1°, le CSF veille non seulement à la bonne circulation des informations entre les différentes institutions qu’il représente mais également entre ces institutions (Banque de France, ACPR, AMF, Autorité des normes comptables) et le CSF lui-même qui, effectivement, est lui aussi une institution à part entière dont l’objet est, comme on l’a vu, différent de celui des institutions avec lesquelles il travaille. À ce titre, l’ACPR peut désormais lui donner des informations habituellement couvertes par le secret professionnel ;

– le CSF a également pour tâche d’identifier et d’évaluer la nature et l’ampleur de l’éventuel risque systémique qui peut affecter le secteur financier ; à cet effet, il peut rendre des avis ou des recommandations pour parer ce risque ainsi que toute menace à la stabilité financière ;

– sur proposition du Gouverneur de la Banque de France, le CSF peut également imposer à des établissements de crédit ou des entreprises d’investissement de remplir certaines obligations en termes de fonds propres ou d’octroi de crédit afin, à titre préventif, de prévenir tout risque aggravé de déstabilisation financière ;

– enfin, en lien avec les institutions européennes, le CSF peut adresser aux établissements de crédit et aux entreprises d’investissement des avis leur recommandant des mesures propres à prévenir tout risque systémique menaçant la stabilité financière française.

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La Commission adopte l’amendement rédactionnel CE 14 du rapporteur pour avis et émet un avis favorable à l’adoption de l’article 11 modifié.

TITRE IV

RENFORCEMENT DES POUVOIRS DE L’AUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS ET DE L’AUTORITÉ DE CONTRÔLE PRUDENTIEL ET DE RÉSOLUTION

Chapitre Ier

DISPOSITIONS RELATIVES À L’AUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS

Article 12

(articles L. 621-2, L. 621-8-4 [nouveau], L. 621-10, L. 621-10-1 [nouveau],

L. 621-11, L. 621-12, L. 621-15 et L. 621-18 du code monétaire et financier)

Le renforcement des pouvoirs de l’Autorité des marchés financiers

A.— DISPOSITIONS RELATIVES À LA MANIÈRE DE FONCTIONNER DE L’AUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS

Le présent article est relatif à l’Autorité des marchés financiers (AMF) et débute par une simple mesure technique relative à la suppléance de son président.

Aux termes de l’article L. 621-2 du code monétaire et financier, le président de l’AMF est nommé par décret pour un mandat non renouvelable d’une durée de cinq ans. Or, si son alinéa 17 a prévu une procédure spécifique permettant de remplacer un membre du collège de l’AMF « en cas de vacance d’un siège de membre du collège autre que le président pour quelque cause que ce soit », rien n’était spécifié en revanche quant au remplacement éventuel du président lui-même. Ce silence était d’autant plus étonnant que des dispositions existent, en revanche, pour les présidents d’autres autorités administratives indépendantes (32) et que, eu égard à l’importance stratégique de l’AMF pour la vie économique, une vacance ne peut être durablement permise. Désormais, et c’est l’objet de la première disposition du présent article, le président de l’AMF désigne, après avis du collège de l’AMF, un membre de celui-ci qui le supplée en cas de vacance ou d’empêchement.

Une autre disposition vise à doter une des compétences de l’AMF d’une base juridique solide qui lui faisait jusqu’alors défaut. Il s’agit de permettre à l’AMF de demander à l’ensemble des entités régulées (établissements de crédit, entreprises d’investissement, compagnies financières…) tout document ou information nécessaire au bon accomplissement de « sa mission de veille et de surveillance ». Plusieurs textes européens (33) ont souhaité que cette surveillance soit renforcée au sein des différents États membres afin de sécuriser notamment les informations relatives aux marchés financiers et aux produits qui y sont proposés. Or, en l’état actuel de la législation française, toute entité susceptible d’être contrôlée par l’AMF peut lui opposer un refus d’accéder aux informations qu’elle détient sans que l’AMF ne dispose du moindre recours en la matière, même si le secret professionnel ne peut lui être opposé ou si certaines visites peuvent se faire sur place (cf. respectivement articles L. 621-9-3 et L. 621-10 du code monétaire et financier). Désormais, l’article L. 621-8-4 nouveau offre à l’AMF un fondement juridique sans équivoque pour lui permettre d’effectuer au mieux sa mission de veille et de surveillance.

B.— DISPOSITIONS RELATIVES AUX CONTRÔLEURS ET ENQUÊTEURS

L’essentiel de l’article 12 du projet de loi concerne les pouvoirs d’enquête et de contrôle de l’AMF.

Au sein de l’Autorité coexistent notamment deux types d’agents, qui ont des fonctions différentes : les enquêteurs et les contrôleurs (l’AMF compte actuellement 27 enquêteurs et 23 contrôleurs, hors management et hors support). Les enquêteurs travaillent sur des faits qui sont susceptibles de constituer des infractions boursières (opération d’initié, diffusion d’une fausse information…) ou de nature à porter atteinte au bon fonctionnement des marchés. Les contrôleurs, pour leur part, s’assurent que les professionnels des marchés (sociétés de gestion de portefeuille, infrastructures de marché, chambres de compensation…) respectent les règles qui leur sont applicables.

La philosophie de ces dispositions consiste à étendre au bénéfice des contrôleurs des compétences qui n’existent aujourd’hui que pour les enquêteurs.

Les enquêteurs peuvent, au titre de leurs fonctions, se faire communiquer tous documents, quel que soit leur support, mais aussi convoquer et entendre toute personne susceptible de leur fournir des informations. Ils peuvent également accéder aux locaux à usage professionnel sans que l’on ne puisse à aucun moment leur opposer le secret professionnel. Ils peuvent enfin, sur autorisation du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance dans le ressort duquel sont situés les locaux à visiter, effectuer des visites sur place (actuellement, 7 à 8 visites de ce type sont effectuées chaque année) afin d’y saisir les documents qui leur apparaissent utiles. Ces compétences sont désormais offertes aux contrôleurs.

En outre, afin de faciliter leurs investigations, les contrôleurs et enquêteurs se voient également offrir la possibilité, lorsqu’ils effectuent une enquête à propos d’un acteur agissant sur Internet, d’user d’une identité d’emprunt sans que cela ne soit pénalement répréhensible (article L. 621-10-1). Une telle possibilité est d’ores et déjà offerte à plusieurs administrations, qu’il s’agisse des agents des douanes (article 67 bis-1-3° du code des douanes) ou des agents des services spécialisés de renseignement (article L. 2371-1 du code de la défense). Compte tenu du caractère aujourd’hui fréquemment immatériel des opérations financières, on ne peut que saluer cette disposition qui va indéniablement dans le sens d’un renforcement des pouvoirs de l’AMF au service d’un meilleur fonctionnement des marchés financiers.

Enfin, cet article a prévu que la commission des sanctions pouvait, après le respect d’une procédure contradictoire, prononcer une sanction à l’encontre de toute personne qui, sauf le cas où le secret professionnel le justifie, se serait opposée à un enquêteur en refusant de lui donner une pièce d’un dossier, de le laisser accéder à un local ou de répondre à une convocation.

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La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 12 sans modification.

Article 13

(articles L. 465-1 et L. 465-2 du code monétaire et financier)

Extension du champ des manquements susceptibles d’être incriminés

Les articles L. 465-1 et L. 465-2 du code monétaire et financier punissent toute personne qui réaliserait ou permettrait à une autre personne de réaliser des opérations en bénéficiant, avant que celles-ci ne soient divulguées publiquement, d’informations privilégiées sur les perspectives ou la situation d’un émetteur dont les titres sont négociés sur un marché réglementé.

Le présent article du projet de loi vise à étendre le champ des articles L. 465-1 et L. 465-2 aux marchés non réglementés, qui n’étaient jusqu’alors pas concernés.

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La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 13 sans modification.

Chapitre II

DISPOSITIONS RELATIVES À L’AUTORITÉ DE CONTRÔLE PRUDENTIEL ET DE RÉSOLUTION

Article 14

(articles L. 511-10-1, L. 532-2-1, L. 511-47-1, L. 612-23-1 [nouveaux],
L. 612-24, L. 612-25, L. 612-33 et L. 612-39 du code monétaire et financier)

Pouvoirs de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution à l’encontre des dirigeants et organes dirigeants des établissements financiers

A.— UN NOTABLE ACCROISSEMENT DES POUVOIRS DE L’AUTORITÉ DE CONTRÔLE PRUDENTIEL ET DE RÉSOLUTION

L’article 5 du projet de loi a transformé l’ACP (Autorité de contrôle prudentiel) en ACPR (Autorité de contrôle prudentiel et de résolution). Outre l’extension de ses compétences en matière de surveillance des marchés et des établissements bancaires, le projet de loi a souhaité, dans le présent article, renforcer les compétences et les pouvoirs de l’ACPR à l’égard des organes dirigeants des établissements de crédit et des entreprises d’investissement.

Le nouvel article L. 612-23-1 du code monétaire et financier impose tout d’abord aux établissements de crédit et aux entreprises d’investissement (autres que les sociétés de gestion de portefeuille) de notifier à l’ACPR la nomination et le renouvellement de leurs dirigeants. Cette mesure complète fort utilement l’article L. 532-2 qui conditionne l’agrément de l’ACPR à la vérification par cette dernière du fait que l’établissement financier est dirigé par deux personnes au moins « possédant l’honorabilité nécessaire et l’expérience adéquate à leur fonction, en vue de garantir [la] gestion saine et prudente » dudit établissement. À l’issue d’un débat contradictoire avec les intéressés, l’ACPR peut ainsi s’opposer aux nominations et aux renouvellements qui lui sont présentés s’il lui semble que les personnes dont les noms lui sont proposés ne remplissent pas les conditions de professionnalisme, d’honorabilité et d’expérience souhaitées. Cette appréciation consiste non seulement à effectuer, aux termes des nouveaux articles L. 511-10-1 (pour les établissements de crédit) et L. 532-2-1 (pour les entreprises d’assurance), une sorte de contrôle de proportionnalité entre la formation et l’expérience des personnes d’une part et leurs attributions d’autre part, mais aussi à apprécier les mérites d’une personne par rapport aux compétences et attributions des autres membres de l’organe auxquels elle appartient.

Par ailleurs, l’article L. 612-23-1 permet, de façon plus large, à tout établissement de crédit ou à tout établissement remplissant des conditions fixées par décret en Conseil d’État de saisir par eux-mêmes l’ACPR pour recueillir son avis sur toute proposition de nomination ou de renouvellement de leurs dirigeants ou des membres de leurs organes de direction. Une fois nommées, ces personnes peuvent néanmoins être suspendues de leurs fonctions si elles venaient à ne plus remplir les conditions qui leur ont permis d’être nommées et que cette nouvelle situation soit de nature à mettre fin à la gestion saine et prudente que l’on est en droit d’attendre.

Cette compétence de l’ACPR ne doit pas étonner puisque nombre d’autorités de contrôle (en Allemagne et aux États-Unis notamment) disposent également d’une telle compétence. En outre, la directive européenne « Solvabilité II » relative au secteur de l’assurance a également spécifié que les personnes qui dirigent effectivement l’entreprise ou qui sont affectées à des postes importants doivent être « fit and proper » (compétentes et honorables), leur nomination devant en outre être notifiée à l’autorité de contrôle.

L’article L. 511-47-1 traite, pour sa part, de la situation où l’ACPR refuse de donner son aval à la nomination d’un dirigeant, d’un membre de conseil d’administration ou de surveillance. Dans cette hypothèse, l’organe dirigeant compétent est autorisé à procéder à des nominations à titre provisoire. Lorsque l’opposition de l’ACPR conduit à avoir un nombre de membres du conseil inférieur soit au minimum légal, soit au minimum statutaire, l’autorité compétente (assemblée générale ordinaire dans le premier cas, conseil d’administration ou conseil de surveillance dans le second) procède aux nominations à titre provisoire qui restent à effectuer.

B.— LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

La Commission des affaires économiques a souhaité apporter plusieurs précisions à cet article.

Tout d’abord, elle a adopté à l’unanimité un amendement qui permet à l’ACPR d’informer les collectivités territoriales. En effet, celles-ci ont été très durement touchées par la crise financière puisqu’elles ont parfois eu recours à des emprunts structurés qui se sont avérés hautement toxiques dont elles n’ont pas toujours pu analyser l’agencement et les conséquences aussi finement qu’il aurait peut-être été souhaitable. Face à la complexité des produits financiers qui sont présentés par les banques ou tout autre acteur financier aujourd’hui, cet amendement vise à permettre aux collectivités territoriales qui le souhaiteraient de demander à l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (en charge de la régulation micro-prudentielle) de procéder à l’analyse des produits financiers auxquels elles envisageraient de recourir.

Elle a ensuite adopté deux amendements permettant de renforcer les compétences de l’ACPR :

– il s’agit, d’une part, de prévoir que les contrôleurs agissant dans le cadre d’un contrôle décidé par l’ACPR peuvent recourir à une identité d’emprunt afin d’effectuer les enquêtes et vérifications nécessaires sur internet sans être pénalement condamnables pour autant ;

– il s’agit, d’autre part, de permettre à l’ACPR d’étendre son contrôle aux filiales et succursales d’un établissement de crédit qui seraient situées à l’étranger. En effet, cette option n’existe pas à l’heure actuelle et peut, en certaines circonstances, soit s’opposer à ce que l’ACPR conduise des investigations supplémentaires, soit conduire à l’annulation de certaines procédures pour lesquelles l’ACPR ne possédait pas de base légale. Désormais, l’ACPR pourra diligenter des enquêtes hors du territoire français, contribuant ainsi à rendre son contrôle plus efficace et plus dissuasif.

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La Commission examine l’amendement CE 23 du rapporteur pour avis.

M. le président François Brottes. Je crains que cet amendement ne franchisse pas l’obstacle de l’article 40.

M. le rapporteur pour avis. Les nouveaux types de crédit que proposent les banques doivent faire l’objet d’un examen, notamment de prévention, par l’ACPR. Si elles avaient eu les moyens d’en mesurer le niveau de risque, si elles en avaient connu la nocivité, les collectivités territoriales n’auraient sûrement pas souscrit d’emprunts structurés. Aux termes de cet amendement, les emprunteurs pourront donc, s’ils le souhaitent, demander à l’ACPR d’analyser les produits auxquels ils envisagent de recourir.

M. Razzy Hammadi. Le projet de loi prévoit déjà une disposition semblable et je crains que cet amendement n’ait pour effet de transférer la responsabilité des banques à une structure dont ce n’est pas la mission. Dans ces conditions, celles-ci pourraient s’abriter derrière le travail de l’ACPR et s’exonérer de leur responsabilité naturelle.

M. le rapporteur pour avis. Il ne s’agit que de renforcer l’information des emprunteurs, notamment des collectivités territoriales qui, dans un passé récent, ont été victimes de l’opacité bancaire et qui n’auraient pas contracté les mêmes emprunts si elles avaient pu agir en connaissance de cause. La conception même du produit proposé aux emprunteurs permettait aux banques de se couvrir sur les marchés sans que leurs débiteurs en sachent rien, croyant qu’ils ne courraient aucun risque.

M. Alain Suguenot. Si nous adoptions cet amendement, les banques pourraient, en cas de contentieux, faire valoir qu’une autorité publique et indépendante a validé leur démarche, les dégageant ainsi de leur responsabilité. Mais, hormis ce cas, l’amendement me semble profitable, ne serait-ce que pour alerter les collectivités territoriales.

La Commission adopte l’amendement à l’unanimité.

Puis elle en vient à l’amendement CE 18 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Afin de rendre plus efficaces les contrôles de l’ACPR, cet amendement propose de permettre à ses agents d’intervenir sur internet de façon confidentielle, sous une identité d’emprunt, en vue de mieux collecter les informations nécessaires et, éventuellement, de mettre à jour certains comportements répréhensibles sans encourir de condamnations pénales.

Mme Laure de La Raudière. On réserve généralement ce genre de pouvoirs dérogatoires aux officiers de police judiciaire et aux délégataires de la puissance publique investis d’un pouvoir de police. Les agents de l’ACPR entrent-ils dans ce cadre ? Ne risque-t-on pas d’ouvrir une boîte de Pandore et d’entraîner bien des dérives en la matière ?

M. le rapporteur pour avis. La possibilité visée existe déjà pour les agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) et pour ceux de l’AMF.

Mme Laure de La Raudière. Ne s’agit-il pas d’agents rattachés à l’administration des douanes ?

M. le président François Brottes et M. le rapporteur pour avis. Le Gouvernement apportera les précisions nécessaires.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle en vient à l’examen de l’amendement CE 19 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Cet amendement permettrait à l’ACPR d’enquêter aussi sur les succursales et les filiales de banques situées à l’étranger.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 14 modifié.

Chapitre III

SUPERVISION DES CHAMBRES DE COMPENSATION

Article 15

(articles L. 141-4, 440-1 à L. 440-3, L. 440-7 à L. 440-9 du code monétaire et financier)

Supervision des chambres de compensation

Le développement des chambres de compensation est une conséquence directe de la crise financière qui a débuté en 2007-2008. Face aux errements des marchés de gré à gré de produits dérivés, les chefs d’État réunis lors du sommet du G 20 à Pittsburgh, les 24 et 25 septembre 2009, ont posé le principe selon lequel, à l’avenir, « tous les contrats de produits dérivés de gré à gré normalisés [seront] échangés sur des plates-formes d’échanges ou via des plates-formes de négociation électronique selon le cas et compensés par des contreparties centrales d’ici la fin 2012 au plus tard ». Ces principes ont été transcrits dans la législation américaine par la loi Dodd-Frank en juillet 2010 et, deux ans plus tard, par le règlement EMIR (34) au sein de l’Union européenne. Entré en vigueur le 16 août 2012, ce texte pose le principe de l’obligation de compenser dans des chambres de compensation (35) tout dérivé de gré à gré (un contrat sur produit dérivé de gré à gré est une transaction négociée entre deux parties et dont la valeur dépend de celle d’un ou de plusieurs actifs, taux ou indices de référence sous-jacents) considéré comme éligible par l’ESMA (European Securities and Markets Authority), nouvelle Autorité européenne des marchés financiers qui a succédé à l’ancien CESR (Committee of European Securities Regulators) au 1er janvier 2011. Or, compte tenu de l’importance des chambres de compensation, il importe de les encadrer d’autant que, prenant à leur compte la majorité des risques, elles déplacent le risque sans le faire disparaître. Ainsi qu’a pu le dire M. Michel Pébereau, ancien président de BNP – Paribas, « les chambres devront être régulées comme des banques ou des prestataires d’investissement et soumises à la même supervision, avec en outre de très fortes exigences en capital » (36).

Telles sont très directement les raisons pour lesquelles cet article 15 figure au sein du présent projet de loi.

En premier lieu, l’article L. 141-4 du code monétaire et financier se voit complété par un III qui permet à la Banque de France d’effectuer des contrôles sur pièce et sur place afin de parfaitement remplir les missions qui lui sont confiées par le I (veiller au bon fonctionnement et à la sécurité des systèmes de paiement) et le II (veiller à la sécurité des systèmes de compensation, de règlement et de livraison des instruments financiers) du même article. Pour ce faire, la Banque de France pourra également effectuer des expertises et se faire communiquer toute information qu’elle estimerait utile par les chambres de compensation et par les gestionnaires de systèmes et de moyens de paiement.

En second lieu, l’article 5 procède à une réécriture de l’article L. 440-1 pour tenir compte des apports du règlement EMIR auquel on a déjà fait référence. Ainsi, une chambre de compensation est désormais définie comme étant une contrepartie centrale au sens où l’entend l’article 2 du règlement n° 648/2012, (une contrepartie centrale étant « une personne morale qui s’interpose entre les contreparties à des contrats négociés sur un ou plusieurs marchés financiers, en devenant l’acheteur vis-à-vis de tout vendeur et le vendeur vis-à-vis de tout acheteur »). Une chambre de compensation doit ensuite être agréée par l’ACPR après consultation de la Banque de France et de l’AMF, toute modification de leur agrément devant donner lieu à une nouvelle consultation de ces deux autorités. Quant aux règles de fonctionnement des chambres, elles doivent être approuvées par l’AMF.

L’article 5 procède ensuite à la réécriture des deux derniers alinéas de l’article L. 440-2 du code monétaire et financier en précisant que les relations entre une chambre de compensation et leurs adhérents « sont de nature contractuelle ». Cette précision est importante dans la mesure où elle consacre ici la notion de contrat d’adhésion : une partie (la chambre de compensation) voit ses statuts approuvés par l’AMF et l’adhérent a le choix entre accepter les conditions qui lui sont offertes ou les refuser sans pouvoir en négocier le contenu.

La nouvelle rédaction du premier alinéa de l’article L. 440-3 permet à l’AMF d’interdire à une entreprise de marché ou une personne gérant un système multilatéral de négociation d’accéder à une chambre de compensation si cela risque de mettre en péril « le fonctionnement harmonieux et ordonné des marchés ou d’aggraver le risque systémique ». Ce faisant, la réglementation nationale poursuit son adaptation au droit communautaire puisqu’il s’agit là, au mot près, des termes énoncés à l’article 7 du règlement EMIR.

Enfin, la réécriture de l’article L. 440-9 est relative aux cas d’ouverture d’une procédure collective d’insolvabilité et aux cas de défaillance d’un adhérent d’une chambre de compensation. Dans une telle hypothèse, la chambre de compensation peut transférer chez un autre adhérent les dépôts effectués par le défaillant (possibilité qui figurait déjà au 1 de l’ancienne rédaction de l’article L. 440-9), ou les positions enregistrées pour elle par le défaillant (ancien 2 de l’article L. 440-9). Elle peut également prendre désormais toutes les mesures autorisées par ses règles de fonctionnement afin de limiter ou de supprimer le risque auquel l’expose la défaillance, y compris en liquidant les actifs et positions du défaillant. Il convient de préciser que, contrairement à l’ancien article L. 440-9, la nouvelle rédaction prévoit que la chambre de compensation peut désormais prendre ces décisions « de plein droit et sans formalité », ce qui constitue un changement extrêmement important par rapport à l’ancienne procédure.

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La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 15 sans modification.

TITRE V

DISPOSITIONS RELATIVES AUX SOCIÉTÉS OU CAISSE D’ASSURANCE
ET DE RÉASSURANCE MUTUELLES AGRICOLES

Article 16

(articles L. 322-27-1 et L. 322-27-2 [nouveaux] du code des assurances)

Dispositions relatives aux sociétés ou
caisse d’assurance et de réassurance mutuelles agricoles

Le présent article vise à constituer, par le biais de Groupama SA, un organe central des caisses d’assurances et de réassurances mutuelles agricoles.

Formellement parlant, Groupama, qui est aujourd’hui le deuxième groupe généraliste d’assurance français, est né en 1986 de la fusion de plusieurs sociétés d’assurances préexistantes : l’AMA (qui représentait les caisses d’assurances mutuelles agricoles), la SAMDA (une filiale des Assurances Mutuelles Agricoles qui s’est vu confier comme mission la couverture de tous les risques de dommages non agricoles), la SORAVIE (créée en 1972, elle avait vocation à offrir des produits d’assurance-vie) et la SOREMA (créée en 1978, il s’agit d’une compagnie spécialisée dans la réassurance de dommages).

Dans le but de rapprocher l’organisation du groupe d’assurances de celle des groupes bancaires coopératifs, l’ACPR a proposé de renforcer la gouvernance de Groupama en dotant le groupe d’un organe central, Groupama SA, qui sera chargé de veiller à la cohésion du groupe.

L’article L. 322-27-1 prévoit que, désormais, l’organe central Groupama SA aura le statut de société anonyme d’assurance ou de réassurance agréée par l’ACPR sur le fondement des articles L. 321-1 et L. 321-1-1 du code des assurances. Il est par ailleurs précisé que la majorité des droits de vote de l’organe central doit être, directement ou non, conjointement détenue par les sociétés ou caisses d’assurances et de réassurances mutuelles agricoles à compétence départementale ou régionale. Cette disposition permet de préserver le modèle actuel de Groupama dans lequel ce sont les caisses régionales qui contrôlent l’organe central.

L’article L. 322-37-2 détaille ensuite les compétences dévolues à l’organe central, ainsi que ses manières de fonctionner.

Celui-ci est tout d’abord en charge de la cohésion et du bon fonctionnement du réseau : il exerce à cet effet un contrôle administratif, technique et financier sur l’organisation et la gestion des organismes du réseau. Il fixe également les orientations stratégiques de ce dernier et veille à leur application effective. Il garantit enfin la solvabilité et le respect des engagements de chacun des organismes du réseau comme de l’ensemble du groupe.

Il est également précisé que la nomination des directeurs généraux des organismes du réseau est soumise à l’approbation de l’organe central. De manière quelque peu parallèle, il est prévu, au III de l’article L. 322-37-2, que l’organe central pourra révoquer le directeur général de l’organisme du réseau si celui-ci en vient à prendre des mesures non-conformes aux dispositions législatives ou réglementaires relatives aux sociétés d’assurance ou de réassurance. Enfin, dans la même veine, le IV prévoit qu’une caisse régionale peut, après avis de l’organe central, procéder à la révocation collective des membres du conseil d’administration d’une caisse locale qui aurait pris des décisions « portant atteinte à la cohésion et au bon fonctionnement du réseau ».

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La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 16 sans modification.

TITRE VI

PROTECTION DES CONSOMMATEURS
ET ÉGALITÉ ENTRE LES HOMMES ET LES FEMMES

Chapitre Ier

PLAFONNEMENT DES FRAIS D’INCIDENT ET
OFFRE DE SERVICES BANCAIRES
POUR LA CLIENTÈLE EN SITUATION DE FRAGILITÉ

Article 17

(article L. 312-1-3 [nouveau] du code monétaire et financier)

Plafonnement des commissions perçues en cas d’irrégularité de fonctionnement d’un compte bancaire et offre de moyens de paiement aux clients en situation de fragilité

L’essentiel de l’article 12 du projet de loi concerne les pouvoirs d’enquête. Le présent projet de loi arrive en discussion à l’Assemblée nationale alors qu’une des principales associations de consommateurs en France, la CLCV (Consommation, Logement et Cadre de Vie) vient de faire paraître une étude très complète sur la manière dont les Français « vivent leur banque » (37).

Au travers de l’analyse de quelques 26 000 lignes tarifaires, la CLCV a de nouveau, comme d’autres associations d’ailleurs, pointé du doigt les fameuses « commissions d’intervention » (également appelées « frais de forçage ») perçues par les banques sur les particuliers en cas d’incident de paiement.

A.— LA PERCEPTION DE COMMISSIONS EN CAS D’IRRÉGULARITÉ DE FONCTIONNEMENT D’UN COMPTE BANCAIRE

La loi permet d’ores et déjà aux banques de percevoir des commissions d’intervention à partir du moment où elles acceptent une opération de débit sur un compte bancaire qui ne serait pas suffisamment approvisionné. Ce système n’existe pas dans tous les pays européens. Ainsi, une comparaison a montré que, aux Pays-Bas par exemple, les commissions d’intervention n’existent pas « mais la tarification des découverts et des incidents représentent 34 % des revenus de la banque au quotidien contre 17 % en France » (38). En France, ces commissions sont justifiées au nom des procédures et des frais de gestion qui incombent aux banques dans de telles hypothèses.

Face aux excès qui ont pu exister en ce domaine, il a été décidé, en 2007, de plafonner les frais bancaires applicables aux particuliers, que ce soit à l’occasion d’incidents relatifs aux chèques ou à d’autres moyens de paiement (39), cette réglementation étant entrée en vigueur le 16 mai 2008. La réglementation distingue donc deux hypothèses :

– le troisième alinéa de l’article D. 131-25 du code monétaire et financier a tout d’abord prévu que les frais bancaires perçus par un particulier à l’occasion du rejet d’un de ses chèques ne pourraient excéder un montant de 30 € pour les chèques d’un montant inférieur ou égal à 50 € et un montant de 50 € pour les chèques d’un montant supérieur à 50 € ;

– en outre, l’article D. 312-4-2 a prévu que, pour les incidents de paiement autres que le rejet d’un chèque, les frais bancaires perçus par la banque du payeur au titre d’un incident ne pourraient cette fois-ci excéder le montant de l’ordre de paiement rejeté, dans la limite d’un plafond de 20 €.

Or, bien que généreux dans sa philosophie, ce décret a entraîné des effets pervers puisque nombre d’établissements bancaires, qui adoptaient des tarifs bancaires inférieurs aux plafonds qui ont été déterminés par le décret de 2007, en ont profité pour porter les tarifs de leurs commissions d’intervention auxdits plafonds. Dans son étude, la CLCV a ainsi relevé que « seuls 6 établissements facturent des frais inférieurs au plafond, à savoir 50 euros pour le rejet d'un chèque d’un montant de plus de 50 euros ». Il s’agit en l’occurrence de Boursorama (30 €), Monabanq (45 €), la Banque Postale et sa filiale Outre-Mer (43,66 €), la Banque des Antilles Françaises (45 €) et le Crédit Agricole Nord-Est (48 €).

En l’espèce, le projet de loi établit une troisième série de plafonnements qui concernent, cette fois-ci, non plus des incidents de paiement, mais qui sont afférents au « traitement des irrégularités de fonctionnement d’un compte bancaire », ce qui vise principalement les commissions d’intervention qui sont débitées par une banque à chaque émission de créance depuis un compte non provisionné (8,53 € en moyenne selon l’étude de la CLCV).

Les conditions d’application de cette nouvelle disposition sont néanmoins précisément définies puisqu’elles ne valent que pour les « clients en situation de fragilité eu égard, notamment, au montant de leurs ressources ». Le fait que l’ensemble de la population ne soit pas concerné par un tel plafonnement est compréhensible dans la mesure où une telle mesure aurait pu entraîner des pertes réelles pour le secteur bancaire, ce qui l’aurait sans doute poussé à augmenter par ailleurs ses tarifs sur d’autres opérations. Le Gouvernement s’en est donc tenu aux « clients en situation de fragilité ». Contrairement à ce que l’on pourrait peut-être penser, la population fragile est presque aussi bancarisée que la population française dans son ensemble : 94 % contre 98,4 % selon le rapport Pauget-Constans. Même si, à l’occasion de cette étude, on a pu définir quelques critères pour cerner la notion de « population fragile », le présent texte renvoie au décret le soin de définir les conditions d’application de cet article. C’est une solution de sagesse puisque la « population fragile » ne vise pas seulement les revenus les plus bas mais, plus fondamentalement, les revenus erratiques. En effet, les études montrent que de nombreux clients des banques, aux revenus variables d’un mois sur l’autre, sont fréquemment victimes d’un incident de fonctionnement concernant leur compte : la faiblesse des revenus ne doit donc pas être fatalement considérée comme étant le critère de définition à privilégier.

B.— L’OFFRE DE MOYENS DE PAIEMENT SPÉCIFIQUES AUX POPULATIONS FRAGILES

L’article 17 du présent projet de loi suggère également aux établissements de crédit de proposer aux populations fragiles des moyens de paiement spécifiques qui soient à la fois adaptés à leur situation particulière et qui permettent d’éviter la multiplication des incidents de paiement ou de fonctionnement de leur compte bancaire.

Dès à présent, ce type de moyens de paiement existe : c’est la « GPA » (« gamme de moyens de paiement alternatifs aux chèques »). Si un consommateur n’approvisionne pas suffisamment son compte en banque, il ne pourra plus utiliser de chéquier au risque d’être inscrit au FCC (Fichier central des chèques) ; la GPA lui offre ainsi une solution lui permettant de continuer à utiliser son compte par d’autres moyens, qu’il s’agisse d’une carte bancaire à autorisation systématique (40), de virements ou de TIP (titres interbancaires de paiement). Le recours à cette gamme de moyens de paiement permet, sans pour autant être stigmatisante à l’égard de ses utilisateurs, d’éviter en principe tout nouvel incident de paiement et, par voie de conséquence, de réduire fortement les frais bancaires pour le particulier (commissions d’intervention, frais de rejet de paiement…).

À la suite de la publication du rapport Pauget-Constans sur la tarification des services bancaires, les établissements de crédit ont pris, dans le cadre du Comité consultatif du secteur financier (CCSF), plusieurs engagements tendant à améliorer les offres de gamme de moyens de paiement alternatifs au chèque (41). Ces engagements se sont rapidement traduits par de bons usages professionnels établis par la Fédération bancaire française (FBF), applicables à compter du 30 juin 2011 afin de faire évoluer un certain nombre de critères relatifs à la GPA. Ainsi, les établissements de crédit ont veillé à intégrer un plafonnement du nombre d’occurrences par jour et par mois des frais d’incidents, un plafond pour les frais d’incident, une adaptation de leur offre commerciale au public éventuellement visé… Au final, en juillet 2001, plus de 93,7 % des établissements bancaires avaient mis en place des plafonds d’intervention, contribuant à développer la GPA au profit notamment des populations les plus exposées.

C.— LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

La commission des affaires économiques a largement approuvé le principe d’un plafonnement du montant des commissions d’intervention qui seraient liées à une irrégularité dans le fonctionnement d’un compte bancaire. De même, elle a souligné l’utilité parfaitement avérée de la GPA dont le développement ne peut qu’être souhaitable. À ce titre, et même s’il n’existe pas de chiffre officiel disponible (42), la GPA est aujourd’hui utilisée par toutes les personnes interdites de chéquiers auxquelles les banques proposent systématiquement de recourir à la GPA ; il faudrait donc que ce type de proposition se développe plus largement.

Pour autant, la définition de la notion de « clients en situation de fragilité » pose une difficulté, qui conditionne l’applicabilité de cet article de loi : le décret prévu par le présent article devra être précis sur ce point. Il serait souhaitable qu’une définition puisse être trouvée en évitant, autant qu’il est possible, de recourir à des faits objectifs (perception du RSA, existence d’un certain nombre d’incidents bancaires recensés au cours d’une même période…) qui pourraient s’avérer stigmatisants pour les populations considérées.

Afin de lutter contre la multiplication des incidents de paiement ou d’irrégularités affectant le fonctionnement d’un compte bancaire, il est proposé, comme l’a d’ailleurs développé M. Georges Pauget lors de son audition (43), de mettre l’accent et de développer à l’avenir un véritable « volet éducation financière et budgétaire ». Gérer un compte s’apprend : il faut y aider les plus fragiles. C’est, sans conteste, une piste importante pour remédier au nombre d’irrégularités dans le fonctionnement des comptes bancaires. À cet égard, il faut s’appuyer sur les initiatives locales et régionales existantes : elles doivent sans aucun doute se développer, leur financement pouvant peut-être passer par le biais de fonds de concours qui seraient en partie alimentés par les banques elles-mêmes.

En outre, la multiplication des incidents de paiement ou d’irrégularités affectant le fonctionnement d’un compte bancaire milite sans aucun doute dans le sens d’un développement et la consécration d’un véritable service bancaire de base universel. Si celui-ci est dès à présent consacré par les articles L. 312-1 et D. 312-5 du code monétaire et financier relatifs aux « services bancaires de base », sa mise en œuvre reste aléatoire selon les établissements considérés et, bien souvent, incomplète. Des initiatives devront sans aucun doute être prises en ce sens, en liaison avec les associations de protection des consommateurs, afin de rendre le service bancaire universel véritablement effectif.

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La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 17 sans modification.

Chapitre II

ASSURANCE-EMPRUNTEUR

Article 18

(articles L. 311-4, L. 311-4-1 et L. 312-6-1 [nouveaux], L. 312-9 et L. 313-2-1 [nouveau] du code de la consommation)

Dispositions relatives à l’assurance-emprunteur

Une assurance-emprunteur désigne classiquement une assurance souscrite par un particulier à l’occasion soit d’un emprunt immobilier, soit d’un crédit à la consommation. Elle vise à couvrir le risque de crédit en cas de décès ou d’invalidité du souscripteur, qui aurait ainsi pu être conduit à cesser tout ou partie de son activité professionnelle. L’assurance-crédit étant assimilable à un produit d’assurance-vie, elle est soumise à des règles prudentielles propres qui protègent les assurés contre tout risque de défaillance de la compagnie.

Si elle est facultative lors de la signature d’un crédit à la consommation, elle est, en revanche, obligatoire lors de la souscription d’un crédit immobilier (d’ailleurs, elle est bien souvent proposée par l’établissement bancaire concomitamment à l’offre de prêt, celui-ci ayant bien souvent signé une convention avec une compagnie d’assurance partenaire qui la rémunère en retour pour service rendu). Depuis la loi Lagarde sur le crédit à la consommation (44), le souscripteur bénéficie d’une liberté de choix en matière d’assurance lui permettant ainsi de faire jouer la concurrence : si l’article L. 312-8-4° bis du code de la consommation en pose le principe (« l’emprunteur peut souscrire auprès de l’assureur de son choix une assurance dans les conditions fixées à l’article L. 312-9 »), le prêteur peut néanmoins refuser une offre alternative d’assurance si celle-ci ne présente pas de garantie équivalente à celle qu’il offre à l’emprunteur (l’article L. 312-10 énonçant à cet effet que « le prêteur ne peut pas refuser en garantie un autre contrat d’assurance dès lors que ce contrat présente un niveau de garantie équivalent au contrat d’assurance de groupe qu’il propose »).

Or les effets escomptés de la loi Lagarde ne sont pas évidents sur ce point : le projet de loi, sans vouloir modifier les dispositions au risque de créer une instabilité législative que personne ne souhaite, a souhaité agir à la marge.

Ainsi, dans un premier temps, il améliore l’information qui doit être délivrée aux consommateurs qui souhaitent souscrire une assurance-emprunteur. L’article L. 311-4-1 nouveau indique ainsi que toute publicité en matière assurantielle doit préciser le coût de l’assurance sur la base d’un exemple représentatif tel que visé par le premier alinéa de l’article L. 311-4 du code de la consommation (« Toute publicité, quel qu’en soit le support, qui porte sur l’une des opérations visées à l’article L. 311-2 et indique un taux d’intérêt ou des informations chiffrées liées au coût du crédit mentionne de façon claire, précise et visible les informations suivantes à l’aide d’un exemple représentatif »). En outre, ce coût doit être exprimé de plusieurs façons : en TAEA (taux annuel effectif de l’assurance), en montant total dû en euros ainsi qu’en montant mensuel en euros. Il convient de préciser que cette obligation d’information s’imposera désormais tant pour les crédits à la consommation (article L. 311-4-1 nouveau) que pour les crédits immobiliers (article L. 312-6-1 nouveau). Le souscripteur pourra ainsi facilement comparer le coût de son assurance par rapport au taux annuel effectif global (TEG) du crédit et, de la sorte, négocier certains avantages tarifaires. La seule véritable différence qui existe entre les deux types d’information porte sur le support : ainsi, si l’information de l’emprunteur ayant souscrit un crédit à la consommation doit figurer dans une publicité diffusée par le prêteur (article L. 311-4-1, alinéa 1er) ou dans une brochure d’information destinée à l’emprunteur (nouvel article L. 311-6-III du code de la consommation), celle qui doit être adressée à une personne ayant souscrit un crédit immobilier peut être écrite dans « tout document » transmis à l’emprunteur préalablement à la formulation de l’offre (nouvel article L. 312-6-1, alinéa 1er).

Dans un second temps, l’article 18 du projet de loi modifie le sixième alinéa de l’article L. 312-9 du code de la consommation (relatif au « contrat de crédit »), alinéa qui traite spécifiquement des crédits immobiliers puisqu’il dispose qu’il interdit au prêteur de modifier les conditions de taux du prêt prévues dans l’offre définie à l’article L. 312-7 (ce dernier article renvoyant lui-même à l’article L. 312-2 relatif aux prêts immobiliers). Sur ce point, le projet de loi vise à limiter les « frais de délégation » qui sont facturés par le prêteur à l’emprunteur qui choisirait une assurance proposée par un autre organisme (dénommé « assureur délégué »).

Comme l’a souligné le Comité consultatif du secteur financier dans un avis rendu le 20 mars 2012, « la pratique des établissements de crédit en matière de frais de délégation est hétérogène. Certains établissements ne prennent aucun frais de délégation, d’autres des frais forfaitaires calculés par dossier de financement. D’autres enfin calculent le montant des frais par prêt et/ou par assuré, aboutissant ainsi à multiplier le montant demandé par deux ou trois. Quelques cas de frais très élevés ont été signalés » (45).

La présente disposition vise à limiter toute dérive et, à terme, à faire disparaître tout abus en la matière, levant ainsi un obstacle non négligeable dans la liberté de choix des emprunteurs souhaitant recourir à une assurance moins chère que celle qui lui serait proposée par le prêteur.

Afin de développer la transparence dont les particuliers doivent pouvoir bénéficier en ce domaine, il semble opportun de réfléchir à une possible classification des produits d’assurances offerts par les établissements bancaires en quelques grandes catégories, chacune étant fondée sur les mêmes caractéristiques. Les particuliers souhaitant souscrire un contrat d’assurance, à l’occasion d’un crédit à la consommation ou d’un crédit immobilier, pourraient ainsi effectuer plus facilement une comparaison entre les formules qui leur seraient offertes, leur permettant par la même occasion de souscrire une assurance à un tarif des plus avantageux. La centralisation de l’information et la communication relatives à la nomenclature des produits d’assurance par classes seraient faites par l’ACPR.

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La Commission est saisie de l’amendement CE 21 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Les associations de consommateurs, d’usagers et les compagnies d’assurances que nous avons auditionnées s’accordent à considérer que les intérêts et le coût des assurances pèsent trop lourds lors du remboursement d’un emprunt. C’est pourquoi je propose que tout emprunteur ayant contracté un crédit assorti d’une clause d’assurance puisse renégocier annuellement le taux de celle-ci.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement CE 10 de M. Michel Zumkeller.

M. Michel Zumkeller. Les statistiques tenues par la Banque de France, très précieuses et très suivies, spécialement pour les PME, n’intègrent que leurs encours de crédits, y compris de trésorerie, mais non leurs découverts. Or ceux-ci constituent aujourd’hui l’essentiel du soutien bancaire aux entreprises, représentant presque sept fois le montant des autres types de crédit. Il serait donc souhaitable de les faire également apparaître afin de disposer d’une vision complète de la réalité économique.

M. le rapporteur pour avis. Votre amendement voudrait donc que l’on détaille les encours de crédits par catégories. Mais il est difficile d’appréhender les découverts, dont le montant change chaque jour…

M. Michel Zumkeller. Certes, mais c’est également vrai des crédits de trésorerie. Si l’on rejette ma proposition, il ne faut pas prétendre ensuite que l’on prête une attention particulière aux TPE, premières bénéficiaires des découverts bancaires.

M. le président François Brottes. Votre objectif me semble légitime, mais prenons garde à ce que sa mise en œuvre n’aboutisse à l’effet inverse en mettant sous le projecteur la totalité de l’endettement des TPE.

M. Michel Zumkeller. Si les banques faisaient cette analyse, elles auraient depuis longtemps intégré les découverts dans les statistiques fournies à la Banque de France.

M. Alain Suguenot. La disposition proposée par cet amendement n’emporterait-elle pas des conséquences sur les procédures collectives ? Le découvert bancaire, expédient de court terme, ne saurait être confondu avec un crédit de trésorerie : cela pose la question – redoutable en cas de cessation de paiement – de la solvabilité apparente des entreprises. Nous sommes ici pour aider à la survie et au développement de nos entreprises, ce qui nécessite une certaine souplesse dans leur gestion financière.

M. le président François Brottes. Judicieuse remarque !

M. le rapporteur pour avis. Le libellé de l’amendement me conduit à lui être défavorable puisqu’il ne s’insère nullement dans le code dans lequel vous voulez le mettre. Mais nos discussions sur la meilleure façon d’aider les TPE sont loin d’être terminées. La question pourra donc être abordée de nouveau.

L’amendement est retiré.

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 18 modifié.

Chapitre III

MESURES RELATIVES AUX INTERMÉDIAIRES
BANCAIRES ET FINANCIERS

Article 19

(articles L. 341-2, L. 341-17, L. 519-5 et L. 612-41 du code monétaire et financier)

Mesures relatives aux intermédiaires bancaires et financiers

La première disposition de cet article (1°) exclut du démarchage bancaire ou financier la diffusion d’une simple information publicitaire, quel qu’en soit le support, qui n’aurait aucun caractère contractuel ou précontractuel. L’article L. 341-1 du code monétaire et financier définit effectivement le démarchage bancaire ou financier comme étant constitué par une « prise de contact non sollicitée (…) avec une personne physique ou une personne morale déterminée, en vue d’obtenir, de sa part, un accord » sur une prestation donnée. Or, l’envoi d’une simple information publicitaire, qui plus est dépourvue de près ou de loin de toute dimension contractuelle, ne répond pas à cette définition : il est donc logique de l’exclure en ajoutant cette hypothèse à l’article L. 341-2.

Le 2° de l’article étend les sanctions disciplinaires applicables en cas de manquement aux lois, règlements et obligations professionnelles applicables au démarchage bancaire ou financier aux « agents liés ». La définition d’« agent lié » qui figure à l’article L. 545-1 du code monétaire et financier (auquel renvoie d’ailleurs l’article L. 341-17, modifié par le présent article 19) est établie par la directive communautaire relative aux marchés d’instruments financiers. Ainsi, son article 4-25 définit l’agent lié comme étant :

« toute personne physique ou morale qui, sous la responsabilité entière et inconditionnelle d’une seule et unique entreprise d’investissement pour le compte de laquelle elle agit, fait la promotion auprès de clients ou de clients potentiels de services d’investissement et/ou de services auxiliaires, reçoit et transmet les instructions ou les ordres de clients concernant des instruments financiers ou des services d’investissement, place des instruments financiers et/ou fournit à des clients ou à des clients potentiels des conseils sur ces instruments ou services » (46).

Or, le démarchage bancaire ou financier étant permis aux agents liés (47), il était logique que ceux-ci soient également passibles des peines encourues en cas de violation des règles applicables à ce type d’opérations. Tel est l’objet de la présente disposition.

Le 3° du présent article précise la réglementation applicable aux intermédiaires en opérations bancaires et en services de paiement (IOBSP) dans leur activité de démarchage bancaire ou financier. En l’état actuel du droit, l’article L. 519-5 du code monétaire et financier prévoit que, lorsqu’ils effectuent leur activité de démarchage, les IOBSP « sont soumis aux dispositions des articles L. 341-4 à L. 341-17 et L. 353-1 à L. 353-5 ». Le 3° affine le régime auquel sont soumis les IOSB puisque, désormais, ils ne sont soumis qu’aux règles spécifiques suivantes :

– à la section 3 du chapitre IX du Titre Ier du Livre V du code monétaire et financier, relative aux « Règles de bonne conduite » (articles L. 519-4-1 à L. 519-6 inclus) ;

– à l’article L. 341-10 énumérant les produits ne pouvant pas faire l’objet d’un démarchage bancaire ou financier ;

– à l’article L. 341-12 qui énumère les obligations d’information qui pèsent sur le démarcheur ; ne doivent désormais être respectées que les dispositions spécifiques figurant aux 5° (conditions de l’offre contractuelle, notamment en matière de prix), 6° (existence ou absence d’un droit à rétractation) et 7° (loi applicable aux relations précontractuelles ainsi qu’aux contrats) ;

– à l’article L. 341-13 qui, en quelque sorte, fixe le périmètre d’action du démarcheur, celui-ci ne pouvant proposer des produits, instruments financiers et services autres que ceux pour lesquels il a reçu des instructions expresses de la ou des personnes pour le compte desquelles il agit ;

– à l’article L. 341-16 relatif aux modalités d’exercice du droit de rétractation ;

– à l’article L. 341-17 qui énonce le principe selon lequel tout manquement aux lois, règlements et obligations professionnelles applicables au démarchage bancaire ou financier peuvent être sanctionnées.

Enfin, le 4° corrige une erreur au sein de l’article L. 612-41 du code monétaire et financier qui énumère les sanctions pouvant être prononcées par l’Autorité de contrôle prudentiel. Alors que l’ordonnance du 21 janvier 2010 créant l’Autorité de contrôle prudentiel a prévu que celle-ci devait notamment contrôler les mutuelles et les unions de mutuelles ainsi que les personnes qui s’entremettent avec des mutuelles ou des unions, ainsi que les intermédiaires en assurance et les intermédiaires en opérations de banque et en services de paiement, elle n’avait pas prévu en revanche que l’ACP puisse sanctionner leurs éventuels comportements. C’est l’objet de la présente disposition.

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La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 19 sans modification.

Chapitre IV

RÉFÉRENTIEL DE PLACE

Article 20

(articles L. 241-23-2 [nouveau] et L. 214-24-1 du code monétaire et financier)

Mise en place d’un référentiel de place relatif aux OPCVM

En octobre 2010, le Haut comité de place avait rappelé l’intérêt pour la France de se doter d’un référentiel de place pour les OPCVM qui permettrait de bénéficier de toutes les informations utiles au marché. Il était ainsi écrit : « En revanche, l’intérêt est unanime pour la mise en œuvre d’un référentiel de place, sous réserve que le coût de cette mise en œuvre soit jugé supportable, que le référentiel soit exhaustif et que les informations qu’il contiendra soient opposables aux tiers » (48).

Ce projet avait été mis en sommeil, faute notamment de véhicule législatif adéquat. Il est désormais mis en œuvre par le présent article afin de recenser l’ensemble des OPCVM. À cet effet, le premier alinéa du nouvel article L. 214-23-2 prévoit la création d’un organisme doté de la personnalité morale qui aura pour fonction d’enregistrer les OPCVM moyennant le paiement de frais d’inscription annuels permettant son financement.

Enfin, il est prévu que ce référentiel de place soit créé à compter du 1er janvier 2015, laissant ainsi le temps nécessaire aux différents acteurs de s’organiser pour mener à bien ce projet.

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La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 20 sans modification.

Chapitre V

MESURES DE SIMPLIFICATION

Article 21

(article L. 312-1 du code monétaire et financier)

Droit au compte

L’article L. 312-1 du code monétaire et financier consacre la procédure dite du « droit au compte », qui permet à toute personne physique ou morale domiciliée en France, dépourvue d’un compte de dépôt, d’obtenir l’ouverture d’un tel compte dans un établissement de crédit. En effet, en France, une banque peut refuser à une personne l’ouverture d’un compte sans, d’ailleurs, être tenue de donner la raison d’un tel refus. Dans ce cas, la banque délivre au demandeur une « lettre de refus » qu’il doit présenter à la Banque de France, celle-ci désignant un établissement de crédit qui est cette fois-ci tenu d’ouvrir un compte. Néanmoins, dans cette hypothèse, l’établissement bancaire ainsi désigné peut éventuellement limiter les prestations offertes aux services bancaires de base (article D. 312-5 du code monétaire et financier).

Le présent article précise les modalités de ce droit qui a été qualifié par le Préambule de la Charte d’accessibilité bancaire en vigueur (49) de « principe fondamental » :

– tout d’abord, l’établissement qui a opposé un refus à l’ouverture d’un compte bancaire doit remettre « systématiquement et sans délai au demandeur » une attestation de refus d’ouverture du compte afin de faciliter les démarches de ce dernier pour obtenir l’ouverture d’un compte dans un autre établissement. Il convient d’ailleurs de préciser que cette attestation pourra être définie par l’Association française des établissements de crédit et des entreprises d’investissement (AFECEI) qui a adopté la Charte d’accessibilité bancaire ;

– en l’état actuel de la réglementation, l’établissement ayant opposé un refus peut proposer au particulier d’effectuer les démarches nécessaires auprès de la Banque de France pour poursuivre la procédure ; le présent article, en complétant l’alinéa 3 de l’article L. 312-1 ouvre la possibilité pour un département (en pratique, les services sociaux du conseil général), un CCAS ou une CAF d’agir également en lieu et place du particulier pour effectuer l’ensemble de ces démarches qui, dans bien des cas, peuvent effectivement s’avérer stigmatisantes ;

– enfin, l’article procède à la nouvelle rédaction des alinéas 5, 6 et 8 de l’article L. 312-1, consacrant à cette occasion l’obligation pour les établissements de crédit désignés par la Banque de France d’offrir au titulaire du compte les « services bancaires de base » tels qu’ils figurent actuellement à l’article D. 312-5 du code monétaire et financier.

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La Commission est saisie de l’amendement CE 5 de M. Michel Zumkeller.

M. Michel Zumkeller. Cet amendement, comme ceux qui le suivent, vise à rééquilibrer la relation entre les banques et les TPE qui devrait, en théorie, être une relation de fournisseur à client. En réalité, le banquier dicte ses conditions à l’entreprise.

Plusieurs formules s’offrent pour corriger cette situation, notamment celles du conventionnement, du droit à changer de compte, etc. Ce n’est pas parce qu’une entreprise souffre, de façon plus ou moins passagère, d’un découvert bancaire qu’elle se porte mal : elle peut subir, par exemple, des retards de paiement de ses clients, situation extrêmement courante aujourd’hui et que les banquiers ne veulent pas toujours comprendre. On menace ainsi parfois la survie d’entreprises ainsi que les emplois correspondants.

Je propose simplement ici que les banques traitent les TPE comme elles traitent leurs clients particuliers, par une convention précisant notamment le montant du droit à découvert, son taux d’intérêt, ses délais et ses modalités de remboursement.

M. le rapporteur pour avis. Avis défavorable. Au cours de nos auditions, le président de l’Assemblée permanente des chambres de métiers et de l’artisanat (APCMA), M. Alain Griset, a souhaité que les particuliers et les petites entreprises fassent l’objet de traitements bien distincts, alors qu’on a trop souvent tendance à les confondre financièrement. Or l’amendement procède au contraire à une assimilation.

M. Michel Zumkeller. Tout dépend du contenu de la convention, qui, seule, peut éviter que l’entrepreneur soit totalement asservi à sa banque. Si vous avez conscience du problème et s’il ne subsiste qu’une difficulté rédactionnelle, proposez un sous-amendement !

M. le rapporteur pour avis. Nous y viendrons en séance puisque nous allons proposer, spécialement pour les petites entreprises fragiles, un nouveau dispositif.

M. Alain Suguenot. Nos bonnes intentions ne doivent pas se retourner contre les entreprises. Préservons les formules qui, aujourd’hui, présentent l’avantage de la souplesse. Nous ne sommes pas en train de légiférer sur les créanciers chirographaires ni de traiter la question des entreprises en difficulté.

M. le président François Brottes. Je ne suis pas certain, en effet, que l’amendement proposé ici améliore vraiment la protection des TPE.

M. Michel Zumkeller. Les TPE sont aujourd’hui fragiles et menacées. Qu’on remette sans cesse à plus tard les dispositifs qui pourraient contribuer à les soutenir ne me rassure pas quant à l’avenir de notre économie. Agissons maintenant, sans attendre un énième rapport !

M. le rapporteur pour avis. Certes, mais tenons compte des positions exprimées par les chambres de commerce et les chambres des métiers.

M. Razzy Hammadi. Je ne crois pas opportun d’assimiler une banque à un fournisseur ordinaire. Des effets pervers pourraient en découler. Et bien des banques pratiquent déjà le conventionnement avec leurs entreprises clientes.

L’amendement est retiré.

M. le président François Brottes. Vous pourrez bien sûr le redéposer en commission des finances. Mais gardons-nous de rendre trop rigides les relations entre banques et entreprises : l’économie a d’abord besoin de souplesse pour se montrer réactive.

M. Michel Zumkeller. Les amendements qui suivent relèvent tous de la même logique.

Les amendements CE 7, CE 6 et CE 9 de M. Michel Zumkeller sont retirés.

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 21 sans modification.

Après l’article 21

L’amendement CE 8 de M. Michel Zumkeller, tendant à introduire un article additionnel après l’article 21, est retiré.

Article 22

(articles L. 331-3-1, L. 331-6, L. 331-7 et L. 331-7-1 du code monétaire et financier)

Dispositions relatives à la procédure de surendettement

Les articles L. 331-1 et suivants du code de la consommation sont relatifs à la procédure devant être suivie devant la commission de surendettement des particuliers.

Il existe, dans chaque département, une telle commission qui a vocation à traiter, à la demande du débiteur, les situations de surendettement des particuliers visées au premier alinéa de l’article L. 330-1. Elle examine à cet effet le dossier pour déterminer la recevabilité de la demande, établit ensuite l’état de l’endettement de la personne visée (après l’avoir auditionnée ainsi que toute personne, notamment débitrice y ayant intérêt), peut prendre des mesures d’urgence (pour éviter, par exemple, son expulsion du logement qu’elle occupait) et réunit les parties en présence afin d’élaborer un « plan conventionnel de redressement » qui satisfasse à la fois le débiteur et ses créanciers.

Le présent article vise à compléter la réforme établie par la loi de 2010 portant réforme de la consommation :

– tout d’abord, l’article L. 331-6-II vise à accélérer la procédure de surendettement. L’article L. 330-1 du code de la consommation prévoit deux situations qui figurent respectivement à ses alinéas 2 et 3 :

→ hypothèse où les ressources ou l’actif réalisable du débiteur le permettent : dans ce cas, des mesures de traitement peuvent être prescrites devant la commission de surendettement des particuliers dans les conditions prévues aux articles L. 331-6, L. 331-7, L. 331-7-1 et L. 331-7-2 ;

→ hypothèse où le débiteur se trouve dans une situation irrémédiablement compromise caractérisée par l’impossibilité manifeste de mettre en œuvre des mesures de traitement visées à l’alinéa précédent : dans ce cas, la commission de surendettement peut mettre en œuvre un certain nombre de mesures qui sont énoncées par la suite (recommander un rétablissement personnel sans liquidation, saisir avec l’accord du débiteur le juge du tribunal d’instance aux fins d’ouverture d’une procédure de rétablissement personnel…).

Or, dans le premier cas, l’article L. 331-3 prévoit que la commission de surendettement doit entamer une procédure de conciliation afin d’établir un plan conventionnel de redressement, qui a vocation à être approuvé par le débiteur et les créanciers (L. 331-6). En cas d’échec, la commission peut, à la demande du débiteur et après avoir mis les parties en mesure de fournir leurs observations, imposer (L. 331-7) ou recommander (L. 331-7-1) certaines mesures. Or, la Banque de France s’est aperçue du fait que la procédure de conciliation échouait le plus souvent, allongeant inutilement les délais et provoquant des coûts inutiles. C’est la raison pour laquelle l’article L. 331-6-II nouveau autorise la commission de surendettement à prendre directement certaines mesures lorsque la situation du débiteur (sans qu’elle soit considérée pour autant comme étant irrémédiablement compromise) ne permet pas de prévoir le remboursement de la totalité de ses dettes et que la mission de conciliation paraît de ce fait manifestement vouée à l’échec. Elle peut ainsi imposer directement, sans attendre le résultat de la conciliation, la suspension de l’exigibilité des créances autres qu’alimentaires pour une durée qui ne peut excéder deux ans (L. 331-7-4°). Cet article l’autorise également à recommander les mesures prévues aux articles L. 331-7-1 et L. 331-7-2.

– ensuite, l’article 22 prévoit que les créances qui figurent dans l’état d’endettement du débiteur ne peuvent générer d’intérêts ou de pénalités de retard.

Cette disposition est tout à fait logique dans la mesure où il s’agit de ne pas aggraver la situation du débiteur déjà sous le coup d’une procédure de surendettement. Cette situation est d’autant plus difficile à comprendre que, lors d’une procédure de surendettement, le débiteur ne peut rembourser ses dettes jusqu’à l’approbation du plan conventionnel de redressement (L. 331-3-1) ce qui, potentiellement, contribue de nouveau à alourdir la charge de sa dette.

Il s’agit donc ici de ne permettre la prise en considération des intérêts qu’à compter de la date de mise en œuvre des décisions de la commission de surendettement prises au titre de l’article L. 330-1-2° et 3°.

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La Commission adopte l’amendement rédactionnel CE 17 du rapporteur pour avis.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 22 modifié.

Article 23

(article L. 312-1-3 [nouveau] du code monétaire et financier)

Dispositions relatives aux frais d’obsèques

À ce jour, le code civil estime que, si une personne décédée est mariée, c'est à son conjoint d’organiser les obsèques. À défaut, ce seront les parents, frères ou les enfants qui auront cette charge. Sans famille ni amis, c’est au maire de la commune où la personne est décédée de les organiser (articles L. 2223-1 s. du code général des collectivités territoriales). Il est par ailleurs prévu que les sociétés de pompes funèbres peuvent être réglées à hauteur de 3050 € en puisant sur le compte du défunt.

Le premier alinéa de l’article L. 312-1-3 énonce la règle selon laquelle la personne qui pourvoit aux obsèques d’une personne décédée peut obtenir le remboursement des frais ainsi engagés en puisant sur les comptes bancaires du défunt, dans la limite d’une part du solde créditeur du ou des comptes en banque lui appartenant, d’autre part d’un montant fixé par arrêté du ministre en charge de l’économie. Même si cette pratique est admise depuis longtemps, elle était jusqu’alors dépourvue de toute base légale : la présente disposition permet de mettre fin à cette lacune.

Dans la même logique, l’article L. 312-1-3-II permet à tout successible en ligne directe qui déclarerait qu’il n’existe, à sa connaissance, ni testament ni contrat de mariage, de débiter du compte du défunt les sommes qui
ont été nécessaires au règlement des actes purement conservatoires visés par l’article 784-1° du code civil (règlement des frais funéraires et de dernière maladie, des impôts dus par le défunt, des loyers et autres dettes successorales dont le règlement est urgent).

Enfin, tout successible en ligne directe, justifiant de sa qualité d’héritier notamment par la production d’un acte de naissance, pourra obtenir la clôture du ou des comptes du défunt et le versement des sommes qui y figurent. Les conséquences étant potentiellement très importantes, ce dispositif est néanmoins fortement encadré :

– le successible doit justifier sa qualité d’héritier par un acte de naissance ;

– le successible doit remettre un document signé de l’ensemble des héritiers attestant qu’à leur connaissance, il n’existe ni testament ni d’autres héritiers, qu’il n’existe pas de contrat de mariage et par lequel ils autorisent le porteur du document à percevoir pour leur compte les sommes figurant sur le compte de la personne décédée.

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La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 23 sans modification.

Article 24

(article L. 311-9 du code de la consommation)

Consultation du fichier national des incidents de remboursement
des crédits aux particuliers

L’article L. 311-9 du code de la consommation dispose que tout prêteur doit, avant de conclure un contrat de crédit, vérifier la solvabilité de l’emprunteur à partir d’un certain nombre d’informations qui ont pu lui être fournies par l’emprunteur lui-même, ou par le biais d’instruments divers, notamment le fichier national recensant les informations sur les incidents de paiement caractérisés liés aux crédits accordés aux personnes physiques pour des besoins non professionnels (FICP) visé à l’article L. 333-4.

Or, la consultation de ce fichier n’est, en principe, réservée qu’à un petit nombre d’acteurs limitativement énumérés par le deuxième alinéa de l’article L. 333-4 : les établissements de crédit mentionnés au Titre Ier du Livre V du code monétaire et financier, les établissements de monnaie électronique et les établissements de paiement mentionnés au Titre II du Livre V susmentionné, ainsi que certaines associations sans but lucratif et certaines fondations reconnues d'utilité publique.

L’article 24 du projet de loi vise donc à supprimer la contradiction qui existe entre ces deux articles et qui, dans les faits, empêchent les entreprises consentant des délais et avances de paiement de procéder à l’obligation prévue par l’article L. 311-9. Aussi, il est désormais prévu que les entreprises ne seront plus soumises à l’obligation de consulter le FICP, à l’instar de ce qui a été fait pour les organismes à but non lucratif qui accordent des prêts à conditions préférentielles à leurs ressortissants (article L. 511-6-1 du code de la consommation).

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La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 24 sans modification.

Chapitre VI

ÉGALITÉ ENTRE LES FEMMES ET LES HOMMES EN ASSURANCE

Article 25

(article L. 111-7 du code des assurances)

Égalité tarifaire entre hommes et femmes en matière d’assurances

L’alignement des tarifs pour les hommes et les femmes est désormais une obligation européenne. Pourtant, jusqu’à il y a peu, la directive européenne 2004/114/CE du 13 septembre 2004 sur l’égalité de traitement entre hommes et femmes prévoyait, pour les activités d’assurance, un principe d’égalité des primes et des prestations sauf possibilité de les différencier si le sexe s’avérait être un facteur déterminant. L’association belge de consommateurs « Test-Achats » a introduit, il y a quelques années, devant la Cour constitutionnelle belge une requête en annulation contre une loi belge transposant cette directive. Cette dernière a alors posé alors une question préjudicielle à la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) qui, au nom de l’égalité de traitement entre les femmes et les hommes, a déclaré illégale la pratique de tarif différencié sur le fondement du sexe par les assureurs à compter du 21 décembre 2012 (50).

La loi française, qui a transposé cette directive, avait, pour sa part, indiqué qu’une discrimination était possible « lorsque des données actuarielles et statistiques pertinentes et précises établissent que le sexe est un facteur déterminant dans l’évaluation du risque d'assurance ». Une telle différenciation existait notamment dans le domaine des assurances, de la mutualité et de la sécurité sociale. Elle était généralement favorable aux femmes pour les tarifs d’assurance automobiles (les hommes ayant statistiquement davantage d’accidents) mais, en revanche, elle leur était défavorable pour les contrats de rente, car les femmes ont une espérance de vie plus longue que celle des hommes.

À la suite de l’arrêt de la CJUE, la France a dû aligner sa législation sur ce principe européen par le biais, notamment, d’un arrêté du 18 décembre 2012 qui a modifié les codes des assurances, de la mutualité et de la sécurité sociale pour supprimer la possibilité de différencier les tarifs selon le sexe dans ces trois domaines.

Le présent article vise donc à mettre en conformité l’article L. 111-7 du code des assurances avec la décision de la CJUE. Pour autant, il est également prévu que les contrats déjà conclus avant le 21 décembre 2012 resteront inchangés, même s’ils sont reconduits après cette date. On peut également préciser que, pour les produits de rente, compte tenu des mécanismes de réversion et de l’obligation de reverser aux assurés un pourcentage minimal des bénéfices, l’impact global de cet arrêt devrait être limité.

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La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 25 sans modification.

TITRE VII

DISPOSITIONS RELATIVES À L’OUTRE-MER

Article 26

Dispositions relatives à l’Outre-mer

Le dernier article du projet de loi vise à autoriser le Gouvernement à prendre par ordonnance, dans un délai de 18 mois à compter de la publication de la loi et dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, des mesures relevant du domaine de la loi permettant d’étendre et d’adapter les dispositions de la présente loi aux Outre-mer.

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La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 26 sans modification.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’ensemble du projet de loi modifié.

CONCLUSION

Ce projet de loi était attendu : il est indéniablement novateur.

Sans vouloir faire de la France une « donneuse de leçons », il va néanmoins s’agir du premier texte mis en œuvre sur ce sujet si crucial de la séparation des activités bancaires et sur la résolution des crises bancaires. Nul doute qu’il servira ainsi d’étalon pour les réformes qui verront le jour dans d’autres pays et qu’il constituera une référence incontournable dans le cadre de la future réglementation qui devrait être adoptée au niveau de l’ensemble de l’Union européenne.

La très large consultation à laquelle le Gouvernement a procédé en amont de ce projet de loi ainsi que les échanges qui ont déjà eu lieu entre le Gouvernement et le Parlement par l’intermédiaire du ministre de l’Économie et des finances ont permis de tracer une frontière assez précise entre les activités reconnues utiles à l’économie réelle et celles relevant de la pure spéculation. Le juste équilibre auquel on est parvenu devrait permettre d’améliorer le fonctionnement et le comportement des banques à l’avenir.

Enfin, tout indique que ces règles vont dans le sens d’une plus grande transparence, gage d’un contrôle par ailleurs plus efficace. Nul doute, là aussi, qu’elles constitueront une digue particulièrement robuste contre d’éventuelles nouvelles folies des marchés et des hommes qui les animent, contre les errements qui, dans un passé récent, ont pu affecter durement la vie économique de nos pays.

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION

Amendement CE 5 présenté par M. Michel Zumkeller :

Article 21

Compléter cet article par l’alinéa suivant :

A la première phrase de l’alinéa 2 de l’article L 312-1-1 du code monétaire et financier, supprimer « des personnes physiques n’agissant pas pour des besoins professionnels ».

Amendement CE 6 présenté par M. Michel Zumkeller :

Article 21

Compléter cet article par l’alinéa suivant :

Rédiger ainsi l’alinéa 1 de l’article L 313-12 du code monétaire et financier : « Tout concours à durée indéterminée, autre qu’occasionnel, qu’un établissement de crédit consent à une entreprise, fait l’objet d’une convention. Ce concours ne peut être réduit ou interrompu » (le reste sans changement)

Amendement CE 7 présenté par M. Michel Zumkeller :

Article 21

Compléter cet article par les deux alinéas suivants :

« Après l’article L 313-4 du code monétaire et financier, est inséré l’article suivant :

« Article L. - 313-4-1.- L’enregistrement comptable d’une transaction excédant le découvert autorisé constitue une opération de crédit complémentaire. La rémunération éventuellement perçue à cette occasion entre dans le calcul du taux effectif global des crédits tel que défini à l’article L 313-4 du chapitre III du présent titre. Le taux effectif global ainsi calculé est trimestriellement porté à la connaissance du titulaire du compte ».

Amendement CE 8 présenté par M. Michel Zumkeller :

Article additionnel après l’article 21

Insérer l’article suivant :

« Après l’article L 312-1 du code monétaire et financier, est inséré l’article suivant :

« Article L. 312-1 bis

Toute personne physique ou morale domiciliée en France, titulaire d’un seul compte de dépôt sur lequel le tiré a refusé le paiement d’un chèque pour défaut de provision suffisante, a droit à l’ouverture d’un autre compte de dépôt dans l’établissement de crédit de son choix. Toute personne physique de nationalité française résidant hors de France bénéficie d’un droit identique.

L’ouverture d’un tel compte intervient après remise auprès de l’établissement de crédit d’une déclaration sur l’honneur attestant le fait que le demandeur ne dispose que d’un seul compte de dépôt et selon les mêmes modalités que celles applicables au droit au compte.

L’Association française des établissements de crédit et des entreprises d’investissement, mentionnée à l’article L. 511-29, adopte une charte de mobilité bancaire afin de renforcer l’effectivité du droit au changement de compte. Cette charte précise les délais et les modalités de transmission, par les établissements de crédit à la Banque de France, des informations requises pour assurer le portage d’un compte. »

Amendement CE 9 présenté par M. Michel Zumkeller :

Article 21

Compléter cet article par les deux alinéas suivants :

« L’article L 313-12-1 du code monétaire et financier est complété par l’alinéa suivant :

« Lorsque le prêt sollicité fait l’objet d’un refus de la part de l’établissement de crédit, ce dernier en informe l’entreprise par écrit dans les 48 heures de la prise de décision. Cet écrit mentionne les outils mis à disposition par les pouvoirs publics pour pallier les difficultés financières et dynamiser les entreprises selon une liste définie par arrêté du ministère de l’économie. »

Amendement CE 10 présenté par M. Michel Zumkeller :

Article 18

Compléter cet article par l’alinéa suivant :

Après la dernière phrase de l’alinéa 2 de l’article L 313-12-2 du code monétaire et financier, après les mots « un document faisant apparaître », insérer la phrase suivante : « Les données font apparaître le volume des encours consentis sous forme de crédits de trésorerie ainsi que, en les distinguant, ceux accordés sous forme de découvert en compte ».

Amendement CE 11 présenté par M. Philippe Kemel, rapporteur pour avis

Article 1er

À l’alinéa 33, supprimer la première occurrence du mot : « holding ».

Amendement CE 12 présenté par M. Philippe Kemel, rapporteur pour avis :

Article 5

Après l’alinéa 2, insérer l’alinéa suivant :

« L’alinéa 1er de l’article L. 612-1 du code monétaire et financier est ainsi rédigé :

« I. – L’Autorité de contrôle prudentiel, autorité administrative indépendante, contribue à la préservation de la stabilité du système financier en protégeant les clients, assurés, adhérents et bénéficiaires des personnes soumises à son contrôle ». »

Amendement CE 13 présenté par M. Philippe Kemel, rapporteur pour avis :

Article 6

Après l’alinéa 5, insérer l’alinéa suivant :

« Au début de l’article L. 312-5 du code monétaire et financier, après les mots : "Le fonds de garantie", sont insérés les mots : "qui participe à la préservation de la stabilité du système financier,". »

Amendement CE 14 présenté par M. Philippe Kemel, rapporteur pour avis :

Article 11

À l’alinéa 11, substituer aux mots : « du A de l’article L. 612-2-1 », les mots : « du A du I de l’article L. 612-2 ».

Amendement CE 16 présenté par M. Philippe Kemel, rapporteur pour avis :

Article 6

À l’alinéa 10, substituer au mot : « par », les mots : « conjointement avec ».

Amendement CE 17 présenté par M. Philippe Kemel, rapporteur pour avis :

Article 22

Après l’alinéa 8, insérer les deux alinéas suivants :

« 2° bis La première phrase du sixième alinéa de l’article L. 331-7 est remplacée par une phrase ainsi rédigée :

« "Si, à l’expiration de la période de suspension, le débiteur saisit de nouveau la commission, celle-ci réexamine sa situation."».

Amendement CE 18 présenté par M. Philippe Kemel, rapporteur pour avis :

Article 14

Compléter cet article par les deux alinéas suivants :

« L’article L. 612-24 du code monétaire et financier est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque les personnes et entités mentionnées aux I, II et III de l’article L. 612-2 fournissent leurs services sur internet, les contrôleurs peuvent, pour accéder aux informations et éléments disponibles sur ces services, faire usage d’une identité d’emprunt sans en être pénalement responsables. » ».

Amendement CE 19 présenté par M. Philippe Kemel, rapporteur pour avis :

Article 14

Compléter cet article par les deux alinéas suivants :

« Le dernier alinéa de l’article L. 612-26 du code monétaire et financier est ainsi rédigé :

« Les contrôles sur place peuvent également être étendus aux succursales ou filiales, installées à l’étranger, d’entreprises assujetties au contrôle de l’Autorité soit, pour les contrôles dans un État partie à l’accord sur l’espace économique européen en application de l’article L. 632-12, soit pour les autres États, dans le cadre de conventions bilatérales prévues par l’article L. 632-13 ou avec un accord exprès pour le déroulement de cette extension recueilli auprès de l’autorité compétente chargée d’une mission similaire à celle confiée en France à l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, à condition que cette autorité soit elle-même soumise au secret professionnel. Pour les pays avec lesquels n’a pas été conclue une des conventions bilatérales prévue par l’article L. 632-13, le Secrétaire général est chargé de recueillir l’accord de l’autorité compétente concernée et de préciser avec elle, s’il y a lieu, les conditions d’extension du contrôle sur place d’une personne assujettie déterminée à ses filiales ou succursales. Ces conditions sont portées à la connaissance de cette personne et de ces entités. » ».

Amendement CE 20 présenté par M. Philippe Kemel, rapporteur pour avis :

Article 5

Après l’alinéa 15, insérer l’alinéa suivant :

« 6° Deux personnalités choisies en raison de leurs compétences en matière d’opérations de banque, de services de paiement ou de services d’investissement ».

Amendement CE 21 présenté par M. Philippe Kemel, rapporteur pour avis :

Article 18

Après l’alinéa 9, insérer les deux alinéas suivants :

« 3° bis Après l’article L. 311-21, il est inséré un article L. 311-21-1 ainsi rédigé :

« Chaque année, l’emprunteur peut renégocier avec le prêteur le montant de son taux débiteur afin de l’ajuster au montant du capital restant dû. Sa demande doit être formulée trois mois au moins avant l’échéance de l’annuité du prêt. » ».

Amendement CE 22 présenté par M. Philippe Kemel, rapporteur pour avis :

Article 1er

Compléter l’alinéa 10 par la phrase suivante :

« À cet effet, l’établissement de crédit transmet chaque mois à l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution l’état des engagements consolidés qu’il a souscrits auprès de ces organismes ».

Amendement CE 23 présenté par M. Philippe Kemel, rapporteur pour avis :

Article 14

Après l’alinéa 1er, insérer les deux alinéas suivants :

« 1°A Il est inséré, après le septième alinéa de l’article L. 612-1, un alinéa ainsi rédigé :

« L’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution peut également, à la demande des collectivités territoriales, procéder à l’analyse des produits financiers auxquels ces collectivités souhaitent recourir en vue d’assurer le financement de leurs opérations. » ».

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Cabinet du ministre - Ministère de l’économie et des finances

M. Alexis Zajdenweber, conseiller au cabinet du Ministre, chargé du secteur financier

M. Thomas Philippon, conseiller économique au cabinet du Ministre

M. Cédric O, conseiller au cabinet du ministre, chargé des relations avec le Parlement et des affaires réservées

Mme Maeva Level, conseillère parlementaire au cabinet du ministre

Mme Magali Cesana, cheffe du bureau des services bancaires et des moyens de paiement à la direction générale du Trésor

Mme Maylis Coupet, administratrice de l’INSEE, cheffe du bureau de l’épargne et du marché financier

M. Jean-François Juery, adjoint au chef de bureau, direction générale du Trésor

M. Yann Pouezat, chef du bureau des banques et des établissements de crédit de la direction générale du Trésor

M. Jerôme Reboul, adjoint au chef de bureau à la direction du Trésor

M. Anthony Requin, sous-directeur du financement des entreprises et du marché financier à la direction générale du Trésor

Assurance Emprunteur Citoyen (AEC)

M. Bernard Establie

AFI – ESCA

M. Jean-Claude Jégou, directeur général

M. Olivier Sanson, directeur général adjoint

Mme Mélanie d’Hem, responsable juridique

Association française des usagers des banques (AFUB)

M. Serge Maître, secrétaire général

M. Bernard Schaudel, administrateur délégué

Association permanente des chambres de métiers et de l’artisanat (APCMA)

M. Alain Griset, président

Mme Béatrice Saillard, directrice des relations institutionnelles

Autorité de contrôle prudentiel

M. Édouard Fernandez-Bollo, secrétaire général adjoint

Mme Véronique Bensaid, conseillère parlementaire auprès du Gouverneur de la Banque de France

Autorité des marchés financiers

M. Benoit de Juvigny, secrétaire général

M. Édouard Vieillefond, secrétaire général adjoint en charge de la direction de la régulation et des affaires internationales

Mme Laure Tertrais, conseillère législation et régulation à la direction des affaires juridiques

Autorité des normes comptables

M. Jérôme Haas, président

Banque de France

M. Jean-Luc Vatin, direction des particuliers

Mme Véronique Bensaid, conseillère parlementaire auprès du Gouverneur

Comité consultatif du secteur financier

M. Emmanuel Constans, président

Chambres de commerce et d’industrie de France (CCI de France)

M. André Marcon, président

M. Jérôme Pardigon, responsable des relations institutionnelles

Association Consommation Logement et Cadre de Vie (CLCV)

Mme Reine-Claude Mader, présidente

Crédit agricole S.A.

M. Alexis Petijean, analyste stratégique groupe

M. Jérôme Brunel, directeur des affaires publiques

Crédit social des fonctionnaires

M. Jean-Marie Alexandre, président

M. G. James Walker, directeur général

Fédération bancaire française

Mme Ariane Obolensky, directrice générale,

M. Jean-Paul Caudal, directeur du département Supervision bancaire et comptable

M. Pierre Bocquet, directeur du département banque de détail et banque à distance

Mme Séverine de Compreignac, directrice des relations institutionnelles

Fonds de garantie et de dépôt

M. Thierry Dissaux, membre du directoire

M. François de Lacoste Lareymondie, membre du directoire

Médiation du crédit

Mme Jeanne-Marie Prost, Médiateur

Mme Alexia Demirdjian, directrice de cabinet

M. Renaud Rodenas, analyste

Syndicat FO – Banques

M. Sébastien Busiris, secrétaire fédéral

M. Pascal Lagrue, secrétaire adjoint

UFC – Que Choisir

Mme Nicole Perez, administratrice

M. Maxime Chipoy, chargé de mission banques

Personnalités qualifiées

M. Georges Pauget, consultant, économiste

M. David Thesmar, professeur à HEC et à l’École d’économie de Paris.

© Assemblée nationale

1 () « Maîtriser la finance commencera ici par le vote d’une loi sur les banques qui les obligera à séparer leurs activités de crédit de leurs opérations spéculatives. Aucune banque française ne pourra avoir de présence dans les paradis fiscaux. Les produits financiers toxiques, c’est-à-dire sans lien avec les nécessités de l’économie réelle, seront purement et simplement interdits. Les stock-options seront supprimés », Discours du Bourget du 22 janvier 2012 (engagement repris à la proposition n° 7 de ses 60 engagements pour la France)

2 () Bien qu’il s’agisse au contraire d’un éloquent plaidoyer, qui a également le mérite de mettre les événements des années récentes en perspective, le titre de l’ouvrage de Georges Pauget « Faut-il brûler les banquiers ? » est on ne peut plus éloquent !

3 () Le Négoce d’Amsterdam ou le Traité de sa banque par le Moine de l’Espine, Pierre Brunel éditeur, 1710, Chapitre Ier, p 1

4 () Cf notamment « L’État et le financement de l’économie », Cour des comptes, Rapport public thématique, juillet 2012

5 () Ibid, p 28

6 () Cette attitude s’étant assez généralement répandue dans l’Union européenne, la Banque centrale européenne a d’ailleurs été conduite à accorder à plus de 520 banques européennes un total de 489 Mds€ de prêts sur trois ans au mois de décembre 2011 avant, en février 2012, d’accorder un nouveau prêt de plus de 529,5 Mds€ à 800 banques de l’Union

7 () Rapport sur le financement des PME-ETI par le marché financier, novembre 2011

8 () Dodd – Frank Act du 22 juillet 2010

9 () Comme Sir John Vickers a d’ailleurs eu l’occasion de le dire dans le cadre d’un entretien, « Nous ne voulons pas de séparation totale. Nous préconisons une banque universelle structurée plutôt que non structurée », entretien accordé au journal Les Échos (cf lecercle.lesechos.fr/economie-societe/politique-eco-conjoncture/politique-economique/221149452/hollande-separation-banque)

10 () Rapport final du groupe d’experts présidé par M. Erkki Liikanen, introduction, pp III s.

11 () Sur la confiance des Français à l’égard de leur banque, on se reportera utilement au livre de Georges Pauget, Faut-il brûler les banquiers ?, Jean-Claude Lattès, octobre 2009, 251 pages, pp 193 s

12 () Audition ouverte à la presse, de M. Jean-Paul Chifflet, président de la Fédération bancaire française directeur général de Crédit agricole SA, M. Frédéric Oudéa, président directeur général de la Société générale, et M. Jean-Laurent Bonnafé, administrateur directeur général de BNP Paribas, sur le projet de loi de séparation et de régulation des activités bancaires (n° 566), Compte rendu n° 60, p 10

13 () Sheila C. BAIR : « Gérer la transition vers un système financier plus sûr », Banque de France, Revue de la stabilité financière n° 13 « Quel avenir pour la stabilité financière ? », septembre 2009, p 12

14 () Arnaud OSEREDCZUK, Le trading haute fréquence vu de l’AMF (http://www.amf-france.org/documents/general/9905_1.pdf)

15 () Pascale GOT, Catherine VAUTRIN, François LOOS : Marchés des matières premières : volatilité des prix, spéculation, régulation (Rapport d’information n° 3863 au nom de la Commission des affaires économique, octobre 2011), p 133

16 () Pour sa mise en œuvre, renvoyée à un arrêté du ministre en charge de l’économie, il faut se reporter au Règlement n° 97-02 du 21 février 1997 modifié relatif au contrôle interne des établissements de crédit et des entreprises d’investissement

17 () Nicholas Kaldor : Spéculation et stabilité économique (1939), reproduit dans Revue française d’économie, 1987, vol. 2, n° 2-3, p 115

18 () Règlement n° 1093/2010 du Parlement européen et du Conseil du 24 novembre 2010 instituant une Autorité européenne de surveillance (Autorité bancaire européenne)

19 () AMF, Position – Recommandation AMF n° 2011-25 Guide de suivi des OPC, p 11

20 () Ordonnance n° 2010-76 du 21 janvier 2010 portant fusion des autorités d’agrément et de contrôle de la banque et de l’assurance

21 () René DOSIÈRE et Christian VANNESTE, Les autorités administratives indépendantes : pour une indépendance sous la garantie du Parlement, Rapport d’information n° 2925 réalisé au nom du Comité d’évaluation et de contrôle (novembre 2010), tome II, p 35

22 () Loi n° 99-532 du 25 juin 1999 sur l’épargne et la sécurité financière

23 () Le plafond était précédemment de 70 000 € mais il a été porté à 100 000 € par l’arrêté du ministre de l’économie en date du 29 septembre 2010 transposant la directive 2009/14/CE du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 94/19/CE relative aux systèmes de garantie des dépôts en ce qui concerne le niveau de garantie et le délai de remboursement

24 () Article 2-6° du décret n° 2004-1203 du 15 novembre 2004 modifié portant création d’une direction générale du Trésor au ministère de l’Économie, de l’industrie et de l’emploi

25 () On peut ainsi se référer, en dernier lieu, à la décision rendue le 28 septembre 2012 où le Conseil constitutionnel a encore une fois énoncé le principe selon lequel « il résulte néanmoins de l’article 2 de la Déclaration de 1789 que les limites apportées à son exercice doivent être justifiées par un motif d’intérêt général et proportionnées à l’objectif poursuivi », Décision QPC 2012-274 du 28 septembre 2012, Consorts G, al. 11

26 () Version consolidée du Traité sur l’Union européenne, Journal Officiel de l’Union européenne du 30 mars 2010, C 83/47

27 () Cf notamment articles 3.3 et 25.1 du Protocole n° 4 sur les statuts du Système européen de Banques centrales et de la Banque centrale européenne

28 () Loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques (NRE)

29 () Article 1er de la loi n° 2010-1249 du 22 octobre 2010 de régulation bancaire et financière

30 () Rapport du groupe de travail présidé par M. Jacques DE LAROSIÈRE sur la supervision financière dans l’Union européenne, 25 février 2009

31 () Jérôme CHARTIER, Rapport n° 2550 du 26 mai 2010 sur la loi de régulation bancaire et financière, p 53

32 () Ainsi, le 4ème alinéa de l’article R. 461-1 du code de commerce précise que, « Le président de l’Autorité de la concurrence est suppléé, en cas d’absence ou d’empêchement, par un vice-président. En cas de vacance du poste de président, le vice-président dont la nomination dans cette fonction est la plus ancienne assure l’intérim »

33 () On peut notamment citer l’article 50 de la directive 2004/39/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 avril 2004 concernant les marchés d’instruments financiers (« Les autorités compétentes sont investies de tous les pouvoirs de surveillance et d’enquête nécessaires à l’exercice de leurs fonctions ») ainsi que plusieurs dispositions de la directive 2009/65/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 juillet 2009 portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant certains organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM)

34 () Règlement n° 648/2012 du Parlement européen et du Conseil du 4 juillet 2012 sur les produits dérivés gré à gré, les contreparties centrales et les référentiels centraux

35 () Cf articles L. 440-1 s. du code monétaire et financier

36 () « Chambres de compensation : pour un système financier plus sûr », L’Info AMAFI n° 98, février 2011,
pp 2-3

37 () Enquête annuelle : Mieux vivre votre argent, CLCV, 25 janvier 2013

38 () Georges PAUGET et Emmanuel CONSTANS : Rapport sur la tarification des services bancaires, juillet 2010, p 22

39 () Décret n° 2007-1611 du 15 novembre 2007 relatif au plafonnement des frais bancaires applicables aux incidents de paiement, pris en application de l’article 70 de la loi n° 2007-290 du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale

40 () On distingue classiquement trois types de cartes de paiement : les cartes à autorisation systématique (le montant est effectivement débité ou non selon que le compte est créditeur ou débiteur), les cartes à débit immédiat et les cartes à débit différé

41 () Rapport pour l’exercice 2011, Observatoire des tarifs bancaires, pp 19 s. ; Rapport pour l’exercice 2010-2011, Comité consultatif du secteur financier, pp 16 s.

42 () Lors de son audition, M. Emmanuel CONSTANS a estimé à environ 3 millions de personnes le nombre de personnes ayant recours en France à la GPA (29 janvier 2013)

43 () Audition de M. Georges PAUGET (23 janvier 2013)

44 () Loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 portant réforme du crédit à la consommation

45 () Avis du Comité consultatif du secteur financier sur le bilan de la réforme de l’assurance-emprunteur par la loi Lagarde du 1er juillet 2010, 20 mars 2012, p 2

46 () Article 4-25 de la directive 2004/39/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 avril 2004 concernant les marchés d’instruments financiers

47 () Article 36 de la loi n° 2010-1249 du 22 octobre 2010 de régulation bancaire et financière

48 () Rapport au Haut Comité de Place, octobre 2010, p 4

49 () Cf annexe de l’arrêté du 18 décembre 2008 portant homologation de la Charte d’accessibilité pour renforcer l’effectivité du droit au compte

50 () Arrêt Association belge des Consommateurs Test-Achats ASBL e.a., CJUE, 1er mars 2011, C-236/09