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Amendements  sur le projet ou la proposition

N° 1172

——

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 26 juin 2013.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE SUR LA PROPOSITION DE LOI DE
M. JEAN-JACQUES URVOAS (N° 1145)
relative à l’élection des conseillers de Paris,

PAR M. Pascal POPELIN,

Député.

——

INTRODUCTION 5

I. – MODIFIER LA RÉPARTITION DES CONSEILLERS DE PARIS : UNE DOUBLE NÉCESSITÉ DÉMOGRAPHIQUE ET CONSTITUTIONNELLE 6

A.  TENIR COMPTE DES IMPORTANTES ÉVOLUTIONS DE LA POPULATION PARISIENNE DEPUIS 1982 7

1.  La répartition actuelle des conseillers de Paris repose sur des bases démographiques anciennes et non actualisées 7

2.  Les déséquilibres initiaux ont été aggravés par des évolutions démographiques contrastées 8

B.  RESPECTER LA JURISPRUDENCE CONSTITUTIONNELLE RELATIVE À L’ÉGALITÉ DEVANT LE SUFFRAGE 11

1.  L’obligation d’une élection faite « sur des bases essentiellement démographiques » 11

2.  Des tempéraments à la règle de plus en plus limités 13

C.  COMBLER RAPIDEMENT LE VIDE JURIDIQUE LAISSÉ PAR LA CENSURE CONSTITUTIONNELLE 15

1.  Une censure qui confirme la rigueur de la jurisprudence constitutionnelle récente 16

2.  Une décision qui porte également sur le tableau actuel de répartition des conseillers de Paris 16

II. – LA RÉPARTITION PROPOSÉE CONCILIE LES EXIGENCES LIÉES À LA DÉMOGRAPHIE PARISIENNE ET L’ORGANISATION ACTUELLE DU CONSEIL DE PARIS, DANS LE RESPECT DU PRINCIPE D’ÉGALITÉ DEVANT LE SUFFRAGE 17

A.  UNE RÉPARTITION NOUVELLE QUI NE BOULEVERSE PAS L’ORGANISATION ADMINISTRATIVE DE LA COMMUNE DE PARIS, NI LES PRINCIPES DE LA LOI « PLM » 17

B.  LA NÉCESSITÉ D’APPLIQUER UN CORRECTIF DÉMOGRAPHIQUE POUR RESPECTER AU MIEUX LA JURISPRUDENCE CONSTITUTIONNELLE 18

CONTRIBUTION DE M. PHILIPPE GOUJON, CO-RAPPORTEUR SUR LA MISE EN APPLICATION DE LA LOI QUI SERAIT ISSUE DE L’ADOPTION DÉFINITIVE DE LA PROPOSITION DE LOI (NOMMÉ EN APPLICATION DE L’ARTICLE 145-7 DU RÈGLEMENT) 25

DISCUSSION GÉNÉRALE 29

EXAMEN DES ARTICLES 31

Article 1er  (Annexe tableau n° 2 au code électoral) : Modification du tableau des secteurs pour l’élection des membres du conseil de Paris 31

Article 2  (Art. L. 2511-25 du code général des collectivités territoriales) : Élection du maire d’arrondissement et de ses adjoints 43

Article 3 : Entrée en vigueur de la loi à compter du prochain renouvellement général des conseils municipaux 44

TABLEAU COMPARATIF 46

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION 49

MESDAMES, MESSIEURS,

La commission des Lois est saisie de la proposition de loi relative à l’élection des conseillers de Paris (n° 1145) présentée par le président Jean-Jacques Urvoas. Cette proposition a pour objet de combler le vide juridique né de la décision n° 2013-667 du Conseil constitutionnel qui a déclaré contraire à la Constitution le tableau fixant la répartition, par arrondissement, des conseillers de Paris.

L’élection des membres du conseil de Paris, formation tantôt municipale, tantôt départementale de l’assemblée délibérante de la capitale, repose sur des règles établies en 1982. Ses 163 membres, élus au sein de chaque arrondissement, sont répartis entre les vingt secteurs parisiens en application d’une méthode de calcul proposée, à l’occasion de l’examen du projet de loi déposé en octobre 1982 portant modification de certaines dispositions du code électoral relatives à l’élection des membres du conseil de Paris et des conseillers municipaux de Lyon et de Marseille, dite loi « PLM », par le député Alain Billon.

Deux principes guident alors la répartition des sièges de conseillers de Paris entre les arrondissements (1) : l’attribution d’un minimum de trois sièges par arrondissement, pour assurer à chacun une représentation minimale au sein du conseil de Paris, et la volonté de se rapprocher autant que possible de la démographie parisienne. Pour concilier ces deux objectifs, 60 sièges sont attribués de façon égale aux vingt arrondissements, à raison de trois sièges par arrondissement. Les 103 sièges restants sont, quant à eux, répartis proportionnellement à la population de chaque arrondissement (cf. infra, examen de l’article 1er).

Des évolutions de fait et de droit rendent aujourd’hui cette répartition particulièrement inadaptée.

Cette règle de répartition qui, dans le silence du Conseil constitutionnel lors de l’examen de la constitutionnalité de la loi « PLM », était présumée constitutionnelle, s’est progressivement heurtée à une jurisprudence évolutive. En effet, le principe d’égalité devant le suffrage n’a été dégagé que tardivement par le Conseil constitutionnel, à partir de 1985, et s’est construit petit à petit. Un dispositif qui était approprié au moment de son vote est devenu, au fil du temps, inadapté. Qui plus est, des circonstances de fait ont accru cette divergence entre le dispositif imaginé en 1982 et la jurisprudence constitutionnelle. La démographie parisienne a en effet évolué de façon contrastée selon les arrondissements et ces évolutions ont rendu la répartition des membres du conseil de Paris de plus en plus inégalitaire.

C’est la prise en compte de ces circonstances nouvelles, tant démographiques que juridiques, qui a conduit à la décision du Conseil constitutionnel du 16 mai dernier (2), censurant non seulement les modifications apportées à la répartition des sièges de conseillers de Paris par le projet de loi qui lui était soumis, mais également le tableau de répartition actuellement en vigueur. Si le Gouvernement a tenté de remédier aux déséquilibres flagrants de représentativité entre les conseillers de Paris par l’article 30 de la loi relative à l’élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral, la règle de calcul attribuant au minimum trois sièges de conseillers de Paris à chaque arrondissement, quelle que soit sa population, dont la constitutionnalité n’avait jamais été mise en cause jusqu’alors, demeurait, quant à elle, inchangée. L’invalidation complète du tableau de répartition des sièges de conseillers de Paris par le juge constitutionnel oblige ainsi le législateur non seulement à modifier la répartition des sièges, mais aussi à repenser la règle elle-même.

I. – MODIFIER LA RÉPARTITION DES CONSEILLERS DE PARIS : UNE DOUBLE NÉCESSITÉ DÉMOGRAPHIQUE ET CONSTITUTIONNELLE

Plusieurs impératifs conduisent à proposer une nouvelle répartition des membres du conseil de Paris entre les arrondissements parisiens : la prise en compte de la démographie actuelle de la capitale ; le respect de la jurisprudence constitutionnelle en matière d’égalité devant le suffrage ; et, enfin, la nécessité d’agir au plus vite pour combler le vide juridique laissé par la censure du Conseil constitutionnel avant les élections municipales de mars 2014.

A.  TENIR COMPTE DES IMPORTANTES ÉVOLUTIONS DE LA POPULATION PARISIENNE DEPUIS 1982

L’objet de la nouvelle répartition des sièges des membres du conseil de Paris est, en premier lieu, de prendre en compte les évolutions démographiques ayant affecté les arrondissements parisiens au cours des trente dernières années.

1.  La répartition actuelle des conseillers de Paris repose sur des bases démographiques anciennes et non actualisées

La répartition des sièges de conseillers de Paris entre arrondissements a été réalisée, en 1982, sur la base du dernier recensement disponible. Depuis cette date, alors que des changements sont intervenus au plan démographique, la répartition des conseillers de Paris n’a connu aucune actualisation.

Au plan démographique, la population parisienne a crû depuis 1982, passant de 2 176 243 habitants en 1982 à 2 243 833 en 2013, soit une croissance nette de 67 590 habitants. Si l’augmentation globale n’est que de 3,11 %, les arrondissements ont connu des évolutions contrastées entre ces deux dates.

Un certain nombre d’entre eux ont vu le nombre de leurs habitants décroître. C’est le cas du 4e arrondissement, qui accuse une perte de 17,6 %, mais aussi des 6e, 7e et 8e arrondissements, qui connaissent une diminution respective de 11,2 %, 14,1 % et 11 %. À l’inverse, la population de certains arrondissements a fortement augmenté, en particulier dans les 2e, 10e, 18e, 19e et 20e arrondissements (cf. tableau ci-après). Ces trois derniers arrondissements, déjà très peuplés en 1982 en comparaison des autres, ont de surcroît bénéficié des plus fortes hausses de population en valeur absolue.

ÉVOLUTION DE LA POPULATION PARISIENNE PAR ARRONDISSEMENT ENTRE 1982 ET 2013

Arrondissement

Population en 1982

Population en 2013

Évolution en %

1er

18 509

17 308

- 6,49 %

2e

21 203

23 009

+ 8,52 %

3e

36 094

35 652

- 1,22 %

4e

33 990

28 012

- 17,59 %

5e

62 173

60 938

- 1,97 %

6e

48 905

43 451

- 11,15 %

7e

67 461

57 974

- 14,06 %

8e

46 403

41 280

- 11,04 %

9e

64 134

60 139

- 6,23 %

10e

86 970

95 394

+ 9,69 %

11e

146 931

153 202

+ 4,27 %

12e

138 015

144 262

+ 4,53 %

13e

170 818

181 532

+ 6,27 %

14e

138 596

138 299

- 0,21 %

15e

225 596

236 715

+ 4,93 %

16e

179 446

171 124

- 4,64 %

17e

169 513

169 325

- 0,11 %

18e

186 866

202 685

+ 8,46 %

19e

162 649

186 652

+ 14,76 %

20e

171 971

196 880

+ 14,48 %

Total

2 176 243

2 243 833

3,11 %

Source : INSEE.

2.  Les déséquilibres initiaux ont été aggravés par des évolutions démographiques contrastées

Ces évolutions démographiques ont conduit à accroître les déséquilibres initiaux, principalement liés à l’attribution de trois sièges minimum par arrondissement.

Ainsi, le 1er arrondissement de Paris, dont le nombre d’habitants par conseiller de Paris était déjà inférieur de 53,8 % à la moyenne parisienne en 1982, connaît, en 2013, un écart de 58,1 % à la moyenne.

En outre, le 4e arrondissement de Paris, déjà surreprésenté en 1982 avec 11 330 habitants par élu (contre 13 351 en moyenne pour l’ensemble des arrondissements), atteint, en 2013, un écart à la moyenne de 32,2 %, chacun de ses conseillers de Paris ne représentant plus que 9 337 habitants.

Par ailleurs, alors qu’en 1982, les 18e, 19e et 20e arrondissements disposaient d’un nombre d’habitants par élu très proche de la moyenne parisienne, en 2013, des écarts à la moyenne significatifs sont apparus, atteignant respectivement 5,2 %, 13 % et 10 % dans ces arrondissements, en raison de l’augmentation de leur population.

Au-delà de ces évolutions démographiques, c’est aussi la méthode du recensement qui a été modifiée depuis 1982.

En effet, depuis 2003 (3), la notion de « population municipale » guide les recensements de population. Contrairement à la notion de « population sans double compte » prise en considération en 1982, la « population municipale » recense, dans la commune, les étudiants majeurs vivant en internat dans un établissement d’enseignement situé dans la commune, les personnes logées au sein d’un établissement militaire situé sur le territoire de la commune, les personnes détenues au sein d’un établissement pénitentiaire de la commune et, enfin, les élèves ou étudiants mineurs ayant leur résidence familiale dans la commune mais logés dans une cité universitaire ou un foyer situé dans une autre commune. Les modifications introduites peuvent avoir un impact non négligeable au niveau local, en particulier dans les arrondissements qui accueillent un internat, une caserne ou une prison. C’est pourquoi il importe de répartir les sièges de conseillers de Paris sur la base du concept qui est aujourd’hui utilisé pour recenser la population.

LES DÉSÉQUILIBRES DE LA RÉPARTITION DES SIÈGES DE CONSEILLERS DE PARIS EN 1982 ET EN 2013

 

Situation en 1982

Situation en 2013

Arr.

Nombre de sièges

Population

Nombre d’habitants par élu

Écart à la moyenne*

Population

Nombre d’habitants par élu

Écart à la moyenne*

1er

3

18 509

6 169

- 53,79 %

17 308

5 769

- 58,09 %

2e

3

21 203

7 067

- 47,07 %

23 009

7 669

- 44,29 %

3e

3

36 094

12 031

- 9,89 %

35 652

11 884

- 13,67 %

4e

3

33 990

11 330

- 15,14 %

28 012

9 337

- 32,17 %

5e

4

62 173

15 543

16,42 %

60 938

15 234

10,66 %

6e

3

48 905

16 301

22,10 %

43 451

14 483

5,21 %

7e

5

67 461

13 492

1,06 %

57 974

11 595

- 15,77 %

8e

3

46 403

15 467

15,85 %

41 280

13 760

- 0,04 %

9e

4

64 134

16 033

20,09 %

60 139

15 035

9,22 %

10e

6

86 970

14 495

8,57 %

95 394

15 899

15,49 %

11e

11

146 931

13 357

0,05 %

153 202

13 927

1,17 %

12e

10

138 015

13 801

3,37 %

144 262

14 426

4,79 %

13e

13

170 818

13 139

- 1,59 %

181 532

13 964

1,44 %

14e

10

138 596

13 859

3,80 %

138 299

13 830

0,46 %

15e

17

225 596

13 270

- 0,61 %

236 715

13 924

1,15%

16e

13

179 446

13 803

3,39 %

171 124

13 163

- 4,38 %

17e

13

169 513

13 039

- 2,34 %

169 325

13 025

- 5,38 %

18e

14

186 866

13 347

- 0,02 %

202 685

14 477

5,16 %

19e

12

162 649

13 554

1,52 %

186 652

15 554

12,99 %

20e

13

171 971

13 228

- 0,91 %

196 880

15 145

10,02 %

Total

163

2 176 243

13 351

-

2 243 833

13 766

-

* Un écart à la moyenne négatif signifie qu’un élu représente moins d’électeurs que la moyenne des élus et que, par conséquent, les habitants de cet arrondissement disposent de plus de représentants, par rapport à leur population, que les habitants d’arrondissements dont l’écart à la moyenne est positif.

Si la population des arrondissements parisiens, comme leur mode de recensement, ont évolué depuis 1982, la répartition est, elle, demeurée inchangée. L’on peut s’étonner de cette inertie législative, ce d’autant plus que la répartition des conseillers municipaux de Marseille a, quant à elle, été revue dès 1987 (4). Par ailleurs, la jurisprudence constitutionnelle, de plus en plus contraignante depuis 1985, rend cette évolution nécessaire depuis déjà un certain nombre d’années.

B.  RESPECTER LA JURISPRUDENCE CONSTITUTIONNELLE RELATIVE À L’ÉGALITÉ DEVANT LE SUFFRAGE

Le Conseil constitutionnel a développé, depuis 1985, une jurisprudence encadrant étroitement l’action du législateur en matière de délimitation des circonscriptions électorales comme de répartition des sièges. Le principe d’égalité devant le suffrage a été progressivement dégagé par le Conseil constitutionnel, pour les élections politiques, à compter de 1985 (5). Il se fonde alors sur la lecture combinée de plusieurs articles de la Constitution et de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen pour faire naître le principe d’égalité devant le suffrage :

––  l’article 1er de la Constitution, qui pose en ces termes un principe général d’égalité devant la loi : la République « assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion » ;

––  l’article 3 de la Constitution, relatif au suffrage, qui est « toujours universel, égal et secret » ;

––  l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, qui dispose que la loi « doit être la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse ».

Le principe d’égalité devant le suffrage, qui implique que les élections se fassent « sur des bases essentiellement démographiques », est ainsi « une composante du principe d’égalité devant la loi. […] Le suffrage serait une matière dans laquelle l’égalité prendrait un sens particulier » (6).

1.  L’obligation d’une élection faite « sur des bases essentiellement démographiques »

Ce principe constitutionnel a été précisé, par la suite, par deux décisions de 1986 relatives à l’élection des députés. Le Conseil constitutionnel a ainsi indiqué, à l’occasion de l’examen de la constitutionnalité de la loi relative à l’élection des députés et autorisant le Gouvernement à délimiter par ordonnance les circonscriptions électorales, que l’Assemblée nationale, « désignée au suffrage universel direct, doit être élue sur des bases essentiellement démographiques ; que, si le législateur peut tenir compte d’impératifs d’intérêt général susceptibles d’atténuer la portée de cette règle fondamentale, il ne saurait le faire que dans une mesure limitée » (7). Quelque mois plus tard, le Conseil constitutionnel ajoute que ces tempéraments ne peuvent être justifiés qu’« en fonction d’impératifs précis » (8).

Si le Conseil constitutionnel accepte que certains départements conservent deux députés, conduisant ainsi à la surreprésentation de leurs habitants à l’Assemblée nationale, c’est à la condition que ces déséquilibres ne soient pas aggravés par une autre mesure et qu’ils soient limités à un faible nombre de départements. La nécessité de maintenir un « lien étroit entre l’élu d’une circonscription et les électeurs » (9) constitue ainsi un impératif d’intérêt général que le législateur peut avancer pour justifier une entorse limitée à l’égalité démographique, de même que la volonté « de tenir compte des " réalités naturelles que constituent certains ensembles géographiques " et des " solidarités qui les unissent " » (10).

Par ailleurs, le Conseil constitutionnel admet, à cette occasion puis à plusieurs autres reprises (11), qu’il est possible de s’éloigner de plus ou moins 20 % de la moyenne, si cela est justifié par la prise en compte d’impératifs d’intérêt général. En effet, il a considéré que la règle, posée par le législateur lui-même, autorisant le Gouvernement à s’écarter de plus ou moins 20 % de la moyenne dans la délimitation des circonscriptions à l’intérieur d’un département, ne procédait pas, en elle-même, d’une erreur manifeste d’appréciation, mais que la mise en œuvre de cet écart maximum de 20 % devait être « réservée à des cas exceptionnels et dûment justifiés » (12).

Le Conseil constitutionnel a également précisé, dans une décision de 1987 (13), que le principe d’égalité devant le suffrage nécessite de recourir à un recensement récent de la population pour délimiter les circonscriptions et répartir les sièges. Ainsi, il est clair qu’une répartition de sièges qui se ferait sur la base d’un recensement datant de trois décennies serait inconstitutionnelle.

La densité des débats parlementaires portant sur l’équilibre démographique des découpages électoraux ou de la répartition de sièges d’élus montre l’intérêt que porte le Parlement au respect du principe d’égalité devant le suffrage. Notamment, lors des débats sur le projet de loi relatif à l’élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral, votre rapporteur, à l’unisson du Gouvernement, n’avait eu de cesse de rappeler la nécessité de fonder toute modification des circonscriptions ou des sièges sur ce principe. Le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 16 mai dernier, n’a fait que confirmer le bien-fondé de cette analyse en confortant sa jurisprudence par des éléments concernant les conseillers de Paris.

2.  Des tempéraments à la règle de plus en plus limités

Des décisions ultérieures ont contribué à affermir cette jurisprudence. Une décision du 8 janvier 2009 est notamment revenue sur la possibilité laissée au législateur de prévoir l’attribution d’un minimum de deux sièges de députés par département. En effet, compte tenu de l’existence d’un nombre de députés fixé par la Constitution, de l’augmentation de la population de certains départements, de la création de sièges de députés représentant les Français établis hors de France, le principe d’égalité devant le suffrage implique que certains départements voient le nombre de leurs députés réduit à un : « le maintien d’un minimum de deux députés pour chaque département n’est plus justifié par un impératif d’intérêt général susceptible d’atténuer la portée de la règle fondamentale selon laquelle l’Assemblée nationale doit être élue sur des bases essentiellement démographiques » (14).

Le Conseil constitutionnel a également indiqué, à l’occasion de cette décision, « qu’aucun impératif d’intérêt général n’impose que toute collectivité d’outre-mer constitue au moins une circonscription électorale » (15). C’est la raison pour laquelle les collectivités de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy sont regroupées en une circonscription électorale unique. Ainsi, les collectivités peu peuplées ont naturellement vocation à être regroupées en une circonscription électorale unique, sauf à ce que leur particulier éloignement ne le permette pas (16). L’isolement de Saint-Pierre-et-Miquelon, seul territoire ultramarin situé en Amérique du Nord, justifie également que cette collectivité d’outre mer bénéficie d’une circonscription électorale unique.

Cette même décision précise en outre que les exceptions au principe d’égalité devant le suffrage sont « réservées à des cas exceptionnels et dûment justifiés ; qu’il ne pourra y être recouru que dans une mesure limitée et en s’appuyant, au cas par cas, sur des impératifs précis d’intérêt général ; que leur mise en œuvre devra être strictement proportionnée au but poursuivi ; que toute autre interprétation serait contraire à la Constitution ». Le caractère exceptionnel de l’entorse au principe d’équilibre démographique, comme sa stricte proportionnalité au but poursuivi, s’ajoutent aux critères précédemment dégagés. Tout déséquilibre arbitraire doit également être regardé comme contraire à la Constitution. En outre, cette décision crée une exigence forte à l’égard du législateur, qui doit respecter « au mieux » (17) le principe d’égalité devant le suffrage. Pour Guy Carcassonne, « ce " au mieux " traduit une exigence élevée : il ne suffit pas que le découpage soit à peu près égalitaire ; il faut qu’il soit le plus égalitaire possible » (18).

Le contrôle du Conseil constitutionnel se limite toutefois à l’erreur manifeste d’appréciation. Ainsi, en 1986, il indique que « la Constitution ne confère pas au Conseil constitutionnel un pouvoir général d’appréciation et de décision identique à celui du Parlement ; qu’il ne lui appartient donc pas de rechercher si les circonscriptions ont fait l’objet de la délimitation la plus équitable possible ; qu’il ne lui incombe pas davantage de faire des propositions en ce sens, comme peut être amené à le faire le Conseil d’État dans l’exercice de ses fonctions administratives » (19).

Cependant, cela n’empêche pas le Conseil constitutionnel de formuler certaines observations et de regretter le résultat de certains découpages électoraux. Notamment, dans une décision n° 2010-602 du 18 février 2010 (20), il indique : « Considérant que la Constitution ne confère pas au Conseil constitutionnel un pouvoir général d’appréciation et de décision de même nature que celui du Parlement ; qu’il ne lui appartient donc pas de rechercher si les circonscriptions ont fait l’objet de la délimitation la plus juste possible ; qu’à la différence de la commission prévue à l’article 25 de la Constitution et, comme il peut être amené à le faire dans l’exercice de ses fonctions administratives, du Conseil d’État, il ne lui appartient pas davantage de faire des propositions en ce sens ; […] Considérant que, quel que puisse être le caractère discutable des motifs d’intérêt général invoqués pour justifier la délimitation de plusieurs circonscriptions, notamment dans les départements de la Moselle et du Tarn, il n’apparaît pas […] que cette délimitation méconnaisse manifestement le principe d’égalité devant le suffrage ; considérant que, dans ces conditions, il n’y a pas lieu, pour le Conseil constitutionnel, de déclarer contraire à la Constitution l’article unique de la loi déférée ».

Par ailleurs, son contrôle, pour « restreint » qu’il soit, n’en est pas moins concret et précis. Il considère d’ailleurs, à l’occasion du contrôle de constitutionnalité de la loi de réforme des collectivités territoriales de 2010, qu’il lui revient de « procéder à l’examen des écarts de représentation » (21) entre les départements d’une même région selon une méthode de calcul qui n’est pas celle ayant présidé à l’adoption de la loi. Sa décision précise ainsi que, pour examiner les écarts à la moyenne régionale, il convient de « ne pas prendre en compte les départements dans lesquels le nombre de conseillers territoriaux a été fixé, en raison de leur faible population, en application de ce seuil » et « que, dans la région Lorraine, le rapport du nombre des conseillers territoriaux du département de la Meuse à sa population s’écarte de la moyenne régionale dans une mesure qui est manifestement disproportionnée ; qu’il en va de même dans la région Auvergne, s’agissant du Cantal, dans la région Languedoc-Roussillon, s’agissant de l’Aude, dans la région Midi-Pyrénées, s’agissant de la Haute-Garonne, dans la région Pays de la Loire, s’agissant de la Mayenne, et dans la région Rhône-Alpes, s’agissant de la Savoie ; qu’ainsi la fixation du nombre de conseillers territoriaux dans ces départements méconnaît le principe d’égalité devant le suffrage » (22).

En outre, cette décision comporte plusieurs précisions susceptibles de guider l’action du législateur de façon plus nette qu’auparavant :

––  d’une part, le Conseil constitutionnel a considéré que la volonté de ne pas bouleverser de façon trop importante le nombre antérieur de conseillers par département ne pouvait constituer un impératif d’intérêt général compte tenu du fait, qu’en l’occurrence, la loi déférée procédait à une réforme profonde des systèmes de représentation des collectivités territoriales ;

––  d’autre part, la possibilité laissée au législateur de s’écarter de plus ou moins 20 % de la moyenne est interprétée de façon stricte (23) : le Conseil constitutionnel a censuré les répartitions qui conduisaient à ce que certains départements s’écartent de la moyenne régionale de - 20,24 %, en Haute-Garonne, ou de + 20,31 % en Savoie (24;

Cependant, le Conseil constitutionnel a admis, à l’occasion de cette décision, que la nécessité d’assurer le fonctionnement des assemblées délibérantes par la fixation d’un seuil minimal de 15 conseillers constituait un impératif d’intérêt général pouvant justifier un écart limité à la moyenne.

C.  COMBLER RAPIDEMENT LE VIDE JURIDIQUE LAISSÉ PAR LA CENSURE CONSTITUTIONNELLE

C’est l’application de cette jurisprudence qui a conduit le Conseil constitutionnel à déclarer, le 16 mai 2013, le tableau n° 2 annexé au code électoral fixant la répartition des sièges de conseillers de Paris par arrondissement non-conforme au principe constitutionnel d’égalité devant le suffrage.

1.  Une censure qui confirme la rigueur de la jurisprudence constitutionnelle récente

L’article 30 de la loi relative à l’élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral, qui lui était alors soumise fixait une nouvelle répartition pour l’élection des membres du conseil de Paris. Tout en conservant la règle de trois sièges minimum par arrondissement, le législateur s’était efforcé de respecter au mieux le principe de proportionnalité.

Toutefois, d’importants écarts subsistaient pour les 1er, 2e et 4e arrondissements, dont les écarts à la moyenne se situaient respectivement à - 57,16 %, - 45,52 % et - 31,44 %. C’est pourquoi le Conseil constitutionnel a censuré la disposition contestée : « Considérant qu’en fixant un nombre minimal de trois conseillers de Paris par secteur, le législateur a entendu assurer une représentation minimale de chaque secteur au conseil de Paris ; que, toutefois, dans les 1er, 2e et 4e arrondissements, le rapport du nombre des conseillers de Paris à la population de l’arrondissement s’écarte de la moyenne constatée à Paris dans une mesure qui est manifestement disproportionnée ; qu’il s’ensuit que l’article 30 et le tableau annexé à la loi, qui constituent des dispositions inséparables, doivent être déclarés contraires à la Constitution » (25).

Le commentaire de cette décision est plus précis encore sur les motivations qui ont conduit le Conseil à censurer l’article 30 de la loi déférée : « En admettant que le législateur puisse prévoir un écart maximal de plus ou moins 20 % pour un secteur déterminé par rapport à ce quotient, cela conduit à une fourchette comprise entre 11 092 et 16 320 habitants. Or les 1er, 2e et 4e arrondissements comptent chacun trois conseillers de Paris avec un ratio respectivement de 5 871, 7 467 et 9 397 habitants par élu, très éloigné à chaque fois de l’écart maximal admissible. De tels écarts par rapport à la moyenne sont manifestement disproportionnés et ne permettent pas de respecter le principe d’égalité devant le suffrage » (26).

2.  Une décision qui porte également sur le tableau actuel de répartition des conseillers de Paris

Toutefois, afin de ne pas laisser subsister, dans l’ordre juridique, de dispositions inconstitutionnelles, le Conseil constitutionnel a fait application d’une jurisprudence dégagée en 1985 (27) qui lui permet de contrôler la constitutionnalité de lois déjà entrées en vigueur, et a censuré le tableau que la loi entendait modifier : « la conformité à la Constitution d’une loi déjà promulguée peut être appréciée à l’occasion de l’examen des dispositions législatives qui la modifient, la complètent ou affectent son domaine ; […] en l’espèce, les dispositions contestées de l’article 30 déclarées contraires à la Constitution avaient pour effet de remplacer le tableau n° 2 annexé au code électoral qui fixe la répartition par arrondissement des conseillers de Paris ; […] pour les mêmes raisons, ce tableau doit également être déclaré contraire à la Constitution » (28).

Si le tableau déclaré contraire à la Constitution n’est pas abrogé, comme peuvent l’être les dispositions examinées dans le cadre d’une question prioritaire de constitutionnalité, la décision d’inconstitutionnalité prise par le juge constitutionnel s’impose « aux pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives et juridictionnelles », en application du dernier alinéa de l’article 62 de la Constitution. Dès lors, des élections qui conduiraient à répartir les conseillers de Paris en application de ce tableau devraient sans doute être invalidées par le juge électoral. Il importe donc que le législateur intervienne avant le renouvellement du conseil de Paris prévu en mars 2014.

II. – LA RÉPARTITION PROPOSÉE CONCILIE LES EXIGENCES LIÉES À LA DÉMOGRAPHIE PARISIENNE ET L’ORGANISATION ACTUELLE DU CONSEIL DE PARIS, DANS LE RESPECT DU PRINCIPE D’ÉGALITÉ DEVANT LE SUFFRAGE

La répartition retenue par la présente proposition de loi constitue véritablement un optimum compte tenu des contraintes, tant juridiques que politiques, qui pèsent sur le législateur. C’est sans nul doute la répartition la plus respectueuse possible du principe d’égalité devant le suffrage, à effectifs et à secteurs constants.

A.  UNE RÉPARTITION NOUVELLE QUI NE BOULEVERSE PAS L’ORGANISATION ADMINISTRATIVE DE LA COMMUNE DE PARIS, NI LES PRINCIPES DE LA LOI « PLM »

Deux principes ont présidé à la répartition qui est aujourd’hui proposée par le président Jean-Jacques Urvoas : d’une part, la prise en compte de la décision du Conseil constitutionnel du 16 mai dernier et l’abandon de la règle selon laquelle chaque arrondissement bénéficie de trois sièges minimum, quelle que soit sa population ; d’autre part, la préservation des autres principes qui ont régi la répartition des conseillers de Paris depuis 1982.

En effet, si le législateur ne peut s’extraire de la décision du Conseil constitutionnel, il lui appartient cependant de ne pas bouleverser, à quelques mois des élections, le régime électoral parisien.

Dès lors, cela justifie que la commune de Paris reste divisée en vingt secteurs correspondant à ses vingt arrondissements, au sein desquels les conseillers d’arrondissements et de Paris continueront d’être élus. L’attachement des Parisiens à leur arrondissement, et à leur maire d’arrondissement, rend indispensable le maintien de la sectorisation actuelle. À ce titre, la définition des secteurs que met en œuvre le tableau objet de la présente proposition de loi n’est pas modifiée.

Le maintien de l’organisation administrative parisienne et la cohérence des régimes électoraux de Paris, Lyon et Marseille implique également que le nombre total de conseillers de Paris, comme le mode de scrutin des élections parisiennes, demeurent inchangés. Là encore, la proposition de loi ne modifie pas le nombre total de conseillers de Paris, qui est de 163 membres.

Tout autre changement serait trop important pour pouvoir être sereinement mis en œuvre à une échéance aussi proche des élections municipales de mars 2014. Pour se garder de toute interprétation politicienne de la réforme, il convient de légiférer en modifiant le moins de variables possible.

B.  LA NÉCESSITÉ D’APPLIQUER UN CORRECTIF DÉMOGRAPHIQUE POUR RESPECTER AU MIEUX LA JURISPRUDENCE CONSTITUTIONNELLE

Une fois ces préalables posés, la répartition des sièges doit théoriquement faire une application pleine et entière de la proportionnelle à la plus forte moyenne, qui a également prévalu à la répartition des sièges des conseillers municipaux de Lyon et Marseille.

Alors qu’auparavant cette règle ne trouvait à s’appliquer que sur 103 des 163 sièges d’élus parisiens, elle s’appliquerait désormais à l’intégralité des sièges. La répartition des sièges serait alors la suivante :

VARIATION DU NOMBRE DE SIÈGES ET D’HABITANTS PAR ÉLU ENTRE LA RÉPARTITION ACTUELLE ET UNE RÉPARTITION À LA PROPORTIONNELLE À LA PLUS FORTE MOYENNE (SANS CORRECTIF DÉMOGRAPHIQUE)

 

Répartition actuelle

Répartition proportionnelle à la plus forte moyenne sans correctif démographique

Arr.

Sièges

Nombre d’habitants par élu

Écart à la moyenne

Sièges

Variation du nombre de sièges

Nombre d’habitants par élu

Écart à la moyenne

1er

3

5 769

- 58,09 %

1

- 2

17 308

25,73 %

2e

3

7 669

- 44,29 %

1

- 2

23 009

67,14 %

3e

3

11 884

- 13,67 %

2

- 1

17 826

29,49 %

4e

3

9 337

- 32,17 %

2

- 1

14 006

1,74 %

5e

4

15 234

10,66 %

4

0

15 234

10,66 %

6e

3

14 483

5,21 %

3

0

14 483

5,21 %

7e

5

11 595

- 15,77 %

4

- 1

14 493

5,28 %

8e

3

13 760

- 0,04 %

3

0

13 760

- 0,04 %

9e

4

15 035

9,22 %

4

0

15 034

9,21 %

10e

6

15 899

15,49 %

7

+ 1

13 628

- 1,00 %

11e

11

13 927

1,17 %

11

0

13 927

1,17 %

12e

10

14 426

4,79 %

11

+ 1

13 114

- 4,74 %

13e

13

13 964

1,44 %

13

0

13 964

1,44 %

14e

10

13 830

0,46 %

10

0

13 830

0,46 %

15e

17

13 924

1,15%

18

+ 1

13 150

- 4,47 %

16e

13

13 163

- 4,38 %

13

0

13 163

- 4,38 %

17e

13

13 025

- 5,38 %

12

- 1

14 110

2,50 %

18e

14

14 477

5,16 %

15

+ 1

13 512

- 1,85 %

19e

12

15 554

12,99 %

14

+ 2

13 332

- 3,15 %

20e

13

15 145

10,02 %

15

+ 2

13 125

- 4,66 %

Total

163

13 766

-

163

0

13 766

-

Ainsi, en faisant une application stricte de la répartition des sièges à la proportionnelle, six arrondissements perdraient un ou plusieurs sièges – les 1er et 2e arrondissements perdraient chacun deux sièges, les 3e, 4e, 7e et 17e en perdraient chacun un – et six arrondissements en gagneraient – notamment les 10e, 18e, 19e et 20e qui ont connu de fortes hausses de leur population respective.

Cependant, cette répartition à la proportionnelle à la plus forte moyenne des sièges est loin d’être satisfaisante et nécessite d’être corrigée. C’est d’ailleurs la méthode qu’avait suggérée, en 1982, M. Jacques Toubon (29) lors des débats entourant l’amendement de M. Alain Billon. Dans le cas présent, une répartition strictement proportionnelle placerait plusieurs arrondissements au-delà des limites fixées par le Conseil constitutionnel. Les 1er, 2e et 3e arrondissements s’écarteraient respectivement de + 25,7 %, + 67,1 % et + 29,5 % de la moyenne de 13 766 habitants par élu et seraient, dès lors, sous-représentés au conseil de Paris. Une telle répartition, dont les conséquences en matière d’égalité démographique ne seraient pas si éloignées de la précédente proposition du Gouvernement, entraînerait vraisemblablement la même censure de la part du Conseil constitutionnel.

C’est pourquoi un correctif démographique doit nécessairement être appliqué, afin de respecter au mieux la jurisprudence constitutionnelle. Le choix a ainsi été fait de réattribuer le siège supplémentaire du 12e arrondissement et l’un des deux sièges supplémentaires du 20e arrondissement – les deux derniers arrondissements à avoir bénéficié d’un siège supplémentaire en application de la plus forte moyenne – aux 2e et 3e arrondissements, les plus éloignés de la moyenne.

Comme le montre le tableau ci-après, seul le 1er arrondissement se trouve encore en dehors du « tunnel » constitutionnel, puisqu’il s’écarte de 25,7 % de la moyenne.

Le Conseil constitutionnel a validé, par le passé, la modification marginale des résultats d’une répartition purement proportionnelle. Ainsi, en 1987, il a considéré que « même si le législateur n’a pas jugé opportun, pour deux des cent un sièges à attribuer, de faire une stricte application de la répartition proportionnelle à la plus forte moyenne, les écarts de représentation entre les secteurs selon l’importance respective de leur population telle qu’elle ressort du dernier recensement, ne sont ni manifestement injustifiables ni disproportionnés de manière excessive » (30). Qui plus est, alors que dans le cas de Marseille, le correctif n’était pas motivé par des considérations démographiques précises tendant à diminuer les écarts de représentation, l’application d’un correctif vise ici à diminuer nettement ces écarts, ce qui justifie pleinement qu’il y soit fait recours.

RÉPARTITION PROPORTIONNELLE DES SIÈGES À LA PLUS FORTE MOYENNE AVEC APPLICATION D’UN CORRECTIF DÉMOGRAPHIQUE

Arrondissement

Sièges

Nombre d’habitants par élu

Écart à la moyenne

1er

1

17 308

25,73 %

2e

2

11 504

- 16,43 %

3e

3

11 884

- 13,67%

4e

2

14 006

1,74 %

5e

4

15 234

10,66 %

6e

3

14 483

5,21 %

7e

4

14 493

5,28 %

8e

3

13 760

- 0,04 %

9e

4

15 034

9,21 %

10e

7

13 628

- 1,00 %

11e

11

13 927

1,17 %

12e

10

14 426

4,79 %

13e

13

13 964

1,44 %

14e

10

13 830

0,46 %

15e

18

13 150

- 4,47 %

16e

13

13 163

- 4,38 %

17e

12

14 110

2,50 %

18e

15

13512

- 1,85 %

19e

14

13 332

- 3,15 %

20e

14

14 063

2,16 %

Total

163

13 766

 

Compte tenu des contraintes précédemment rappelées, la répartition proposée par le président Jean-Jacques Urvoas est celle qui s’approche le plus de l’égalité démographique. En effet, si le 1er arrondissement de Paris est encore sous-représenté, l’attribution d’un siège supplémentaire aurait pour effet de l’écarter encore plus des limites définies par le Conseil constitutionnel : son écart à la moyenne passerait de + 25,7 % à – 37,1 %. Il faudrait par ailleurs retirer un siège au 15e arrondissement. Dès lors, cette répartition constitue la meilleure réponse possible aux évolutions démographiques parisiennes, tout en préservant le régime électoral de la capitale.

Qui plus est, il convient de noter que cette répartition est porteuse de progrès considérables par rapport à celle qui a prévalu jusqu’ici. Alors que trois arrondissements étaient précédemment en dehors des marges définies par le Conseil constitutionnel, seul le 1er arrondissement aurait un écart à la moyenne légèrement supérieur à 20 %. En ce qui concerne les autres arrondissements, et même si le Conseil constitutionnel n’a pas examiné, jusqu’ici, les écarts à la moyenne situés à l’intérieur des limites fixées, il convient de noter que la situation s’en trouverait également améliorée. Notamment, les 7e, 10e, 17e, 18e, 19e et 20e arrondissements verraient leur écart respectif à la moyenne réduit, parfois de façon importante, par la nouvelle répartition. Et, même en ce qui concerne le 1er arrondissement, son écart à la moyenne, précédemment de - 58 %, se trouverait largement diminué par le passage de 3 sièges à un seul. Au final, cette nouvelle répartition assure un net resserrement des écarts de représentativité autour de la moyenne (cf. graphiques ci-après).

ÉCARTS À LA MOYENNE PAR ARRONDISSEMENT EN APPLICATION DE LA RÉPARTITION ACTUELLE

ÉCARTS À LA MOYENNE PAR ARRONDISSEMENT EN APPLICATION DE LA RÉPARTITION PROPOSÉE

Votre rapporteur n’ignore pas que la situation du 1er arrondissement, dont l’écart à la moyenne est supérieur aux écarts actuellement tolérés par le Conseil constitutionnel, peut soulever des questions au regard de la jurisprudence de ce dernier.

Cependant, comme cela a été démontré, c’est l’unique solution envisageable au regard des contraintes qui pèsent sur le législateur. Par ailleurs, votre rapporteur estime que, comme le Conseil constitutionnel a pu le faire par le passé (31), il faut tenir compte des progrès réalisés par cette nouvelle répartition en matière d’égalité devant le suffrage.

En outre, le Conseil constitutionnel a validé, en 2003, une répartition des sièges de sénateurs entre les départements qui laissait plusieurs départements surreprésentés, au sein de la chambre haute, par rapport à leur population respective : « Considérant, en premier lieu, que, si l’application d’un système de répartition par tranches maintient certaines disparités démographiques, les modifications qui résultent de la loi déférée n’en réduisent pas moins sensiblement les inégalités de représentation antérieures ; considérant, en second lieu, qu’en conservant aux départements de la Creuse et de Paris leur représentation antérieure, le législateur a apporté une dérogation au mode de calcul qu’il avait lui-même retenu ; que, toutefois, pour regrettable qu’elle soit, cette dérogation, qui intéresse quatre sièges, ne porte pas au principe d’égalité devant le suffrage une atteinte telle qu’elle entacherait d’inconstitutionnalité la loi déférée » (32). Cette entorse à la règle constitutionnelle ne concernant qu’un faible nombre de sièges, le Conseil constitutionnel n’a pas jugé opportun d’invalider une réforme qu’il avait lui-même appelée de ses vœux à plusieurs reprises et qui constituait, au total, un progrès en matière d’égalité devant le suffrage.

Pourtant, les écarts de représentativité demeuraient importants, notamment dans la Creuse qui, avec 62 235 habitants par sénateur, se trouvait très largement en dessus de la moyenne métropolitaine (33). Dès lors, il est loisible de penser que le Conseil constitutionnel sera d’autant plus enclin à accepter l’écart à la moyenne représenté par le 1er arrondissement que celui-ci est nettement moins important que ce qu’il a pu considéré comme constitutionnel par le passé. Qui plus est, comme en 2003, l’écart ne concerne qu’un faible nombre de sièges, la répartition nouvelle est, prise dans son ensemble, meilleure et son entrée en vigueur est nécessaire pour mener à bien une réforme que le Conseil constitutionnel a lui-même suscitée et ce, à quelques mois du scrutin municipal en cause.

CONTRIBUTION DE M. PHILIPPE GOUJON,

CO-RAPPORTEUR SUR LA MISE EN APPLICATION DE LA LOI

qui serait issue de l’adoption définitive de la proposition de loi

(nommé en application de l’article 145-7 du Règlement)

Le 16 mai 2013, le Conseil Constitutionnel, dans sa décision n° 2013-667, censurait l’article 30 de la loi relative à l’élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires et modifiant le calendrier électoral, ainsi que le tableau n° 2 annexé au code électoral que cet article modifiait.

Votre co-rapporteur avait déjà dénoncé la tentative de manipulation, aux fondements démographiques douteux, de la répartition des conseillers de Paris qu’opérait l’article susmentionné, en transférant 3 sièges d’arrondissements administrés par l’opposition (7e, 16e, 17e arrondissements) à des arrondissements administrés par l’actuelle majorité (10e, 19e, 20e arrondissements). Le verdict des sages n’avait pas manqué de souligner que cette modification était « manifestement disproportionnée », le nombre d’habitants représentés par un conseiller de Paris pouvant aller d’un arrondissement à l’autre du simple au triple, le nouveau tableau proposé par le Gouvernement laissant subsister, dans les trois arrondissements les moins peuplés (1er, 2e et 4e), un nombre d’habitants par élu inférieur respectivement de 57 %, 45 % et 31 % à la moyenne parisienne.

Par cette censure, le Conseil Constitutionnel avait fait apparaître l’objectif réel d’un redécoupage qui s’inscrivait dans le remodelage électoral global mené par le Gouvernement depuis son avènement, révélant l’inquiétude de la majorité quant à l’issue des élections municipales à Paris.

La nouvelle répartition des conseillers de Paris proposée par ce texte risquerait de produire mécaniquement un solde en faveur de la gauche de 3 à 5 sièges supplémentaires.

Or, si l’argument démographique primait réellement, la répartition des conseillers aurait dû être modifiée simultanément à Paris, Lyon et Marseille, les trois villes étant régies par le même statut fixé par la loi du 31 décembre 1982. Si les secteurs de Marseille ont, il est vrai, été modifiés en 1987, c’était il y a vingt-six ans, ce qui les rend tout aussi obsolètes que ceux de Lyon, qui n’a pas évolué depuis trente ans, et de Paris, alors même que sept recensements ont eu lieu depuis lors. Méconnaître cette évolution démographique en refusant d’harmoniser simultanément les règles régissant la représentation des trois plus grandes villes françaises, comme le fait la présente proposition de loi en ne traitant que de Paris, porte ainsi une atteinte caractérisée au principe d’égalité devant le suffrage - principe constamment confirmé par le Conseil constitutionnel -  entre les citoyens de Lyon et de Marseille et ceux de Paris.

En outre, la nouvelle répartition proposée ne tient pas compte de l’impact de projets d’urbanisme majeurs qui la condamnera rapidement à l’obsolescence. On peut ainsi citer, concernant deux arrondissements qui perdent un siège de conseiller de Paris dans la nouvelle répartition, l’implantation de la ZAC des Batignolles dans le 17e arrondissement, qui va y drainer des milliers de nouveaux habitants (12 000) alors que sa population est restée stable durant trente ans (- 0,6 %), ou encore le site Laennec dans le 7e arrondissement.

Il est également regrettable que la Commission indépendante prévue par l’article 25 de la Constitution, experte en matière électorale puisque compétente pour connaître des redécoupages des circonscriptions de députés et sénateurs, dont l’avis aurait pu être utilement recueilli, comme il l’a été lors de l’élaboration de la loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales, n’ait été consultée ni par l’auteur, ni par le rapporteur de cette proposition de loi.

Surtout, et c’est là le point essentiel, l’adoption de cette proposition de loi est une occasion manquée de réformer le mode de scrutin de la capitale et de le rendre clair et transparent aux yeux des Parisiens en l’alignant sur le droit commun municipal. Le mode de scrutin actuellement en vigueur a ainsi abouti à ce que Bertrand Delanoë, le maire de Paris, ait été directement élu par seulement 3 % des Parisiens, 35 861 électeurs du seul 18e arrondissement sur les 1,2 million que compte la capitale. Ce système est d’autant plus paradoxal qu’il aboutit à ce que les maires d’arrondissement, qui ne sont pas des maires de plein exercice comme l’a reconnu le Conseil Constitutionnel dans sa décision DC n° 82-149 du 28 décembre 1982, sont élus par la population du territoire qu’ils administreront, l’échelle infra-municipale de l’arrondissement, alors que le maire de Paris, qui est le maire de plein exercice détenant les pouvoirs décisionnels, n’est quant à lui pas élu à l’échelle administrative qu’il administrera, celle de la commune de Paris.

En outre, le mode de scrutin actuel ne permet pas de dissocier l’élection du maire d’arrondissement de celle du maire de Paris : un électeur parisien souhaitant élire un maire d’arrondissement d’un parti différent de la personnalité qu’il souhaiterait voir élue maire de Paris ne pourra exprimer ce choix par la voie du scrutin actuellement en vigueur.

On pourrait par ailleurs expliquer la timidité de la présente proposition de loi, qui n’envisage pas de réformer le mode de scrutin Parisien pour le rendre plus démocratique, par la méfiance que le pouvoir central a de tout temps entretenue vis-à-vis du peuple de Paris. Il est en effet surprenant que Paris n’ait pas été rétablie dans son autonomie administrative à la Libération, alors même que les Parisiens y avaient pris une part active.

Il fallut en effet attendre la loi du 31 décembre 1975 portant réforme du régime administratif de la ville de Paris pour que soit rétablie la fonction de maire de Paris et la loi du 31 décembre 1982 pour créer les maires d’arrondissement. L’article L. 261 du code électoral consacre ainsi la commune comme circonscription unique de l’élection municipale pour déroger à cette règle concernant Paris, Lyon et Marseille, où la circonscription électorale devient l’échelle infra-municipale du secteur, constitué d’un arrondissement à Paris et Lyon, et de deux à Marseille.

Votre co-rapporteur de l’application considère que ce texte devrait être l’occasion de permettre aux Parisiens d’élire directement leur maire, avec sa liste, sur la base d’une circonscription unique, comme dans toutes les villes de France, ce qui renforcera la légitimité démocratique de l’Assemblée délibérante élue comme celle du maire de Paris.

La proposition de loi présentée en commission sous forme d’amendement par notre collègue Bernard Debré prévoit ce saut qualitatif. Loin des calculs électoralistes, elle ne modifie pas la répartition des conseillers de Paris puisqu’ils seront élus – et par conséquent le maire de Paris également – sur une circonscription unique, la commune de Paris ; elle ne modifie pas non plus le nombre des conseillers d’arrondissement, dont elle fixe le statu quo dans un tableau annexé au code électoral. Respectueuse de l’existence administrative des arrondissements, elle maintient le mode de scrutin régissant l’élection des élus d’arrondissement, sans rompre le lien les unissant aux conseillers de Paris puisque ces derniers figureront également sur les listes municipales d’arrondissement. Les Parisiens pourront aussi alors élire, lors de la même consultation électorale, d’une part leurs élus d’arrondissement et d’autre part, la tête de liste qu’ils souhaitent voir élue maire de Paris ainsi que l’exécutif municipal. Cette proposition évite enfin les accusations de calculs électoralistes auxquels n’échappe pas la présente proposition de loi qui avantage un seul parti.

Pour toutes ces raisons, votre co-rapporteur est défavorable à la présente proposition de loi.

DISCUSSION GÉNÉRALE

Au cours de sa réunion du mercredi 26 juin 2013, la Commission examine, sur le rapport de M. Pascal Popelin, la proposition de loi relative à l’élection des conseillers de Paris (n° 1145).

M. Pascal Popelin, rapporteur. À l’occasion de l’examen du projet de loi portant réforme des modes de scrutin locaux, le Gouvernement avait souhaité corriger les déséquilibres démographiques portant atteinte au principe constitutionnel d’égalité du suffrage pour l’élection des conseillers de Paris. Cette adaptation démographique, le Gouvernement l’avait faite en respectant à la lettre les principes posés par la loi relative à l’organisation administrative de Paris, Lyon et Marseille, dite « PLM », notamment en maintenant un minimum de trois conseillers de Paris par arrondissement. Cette disposition a été censurée par le Conseil constitutionnel, saisi par le groupe UMP, dans sa décision du 16 mai dernier.

Plusieurs enseignements peuvent être tirés de cette décision. En annulant le tableau de répartition des conseillers de Paris par arrondissement établi en 1982, le juge constitutionnel conforte le bien-fondé d’une modification de la répartition du nombre de ces conseillers par arrondissement, afin de prendre en compte les évolutions démographiques. En se prononçant contre le maintien de la règle d’une représentation minimale de trois conseillers par arrondissement, le juge constitutionnel a renforcé sa jurisprudence, de plus en plus stricte s’agissant du respect du principe d’égalité du suffrage. Les longs débats que nous avons eus sur les critères du prochain redécoupage cantonal montrent combien il serait vain d’ignorer ou de contourner une telle contrainte, devenue incontournable.

Le Conseil constitutionnel nous invite donc, s’agissant de Paris, à aller plus loin encore dans le respect des équilibres démographiques : tel est le sens de la proposition de loi déposée par notre président Jean-Jacques Urvoas. Elle vise à combler dans les meilleurs délais un vide juridique, puisqu’il n’existe plus, en droit, de tableau de répartition du nombre des conseillers de Paris par arrondissement ; pour ce faire, elle respecte pleinement, bien entendu, la nouvelle jurisprudence du Conseil constitutionnel. Compte tenu de la proximité des futures élections municipales, qui se tiendront en mars prochain, nous souhaitons également modifier le moins possible un édifice électoral connu de tous les Parisiens, et dont le fonctionnement a fait ses preuves depuis plus de trente ans dans les trois principales villes de notre pays. C’est la raison pour laquelle nous ne proposons ni révolution du mode de scrutin, ni évolution du nombre total de membres du Conseil de Paris, ni modification de la sectorisation par arrondissement.

Ainsi, l’article 1er dispose que seuls six sièges sur cent soixante-trois feront l’objet d’une nouvelle répartition. Le 1er arrondissement perdra deux sièges, les 2e et 4e en perdront chacun un, de même que les 8e et 17e. Les 10e, 15e, 18e, 19e et 20e arrondissements se verront attribuer ces sièges. Les modifications sont cohérentes avec les évolutions démographiques opposées qu’ont connues ces arrondissements : le 4e a par exemple perdu 17 % de sa population, quand les 19e et 20e ont vu la leur croître de 14 %.

Le changement proposé est donc de portée limitée. Néanmoins, au regard de la jurisprudence constitutionnelle, il constitue un indispensable progrès. En effet, le nombre d’habitants par conseiller se situe, pour trois arrondissements, très loin des limites admises. De l’avis du Conseil constitutionnel, je le rappelle, ces limites ne doivent pas excéder 20 % de la moyenne constatée à Paris. La répartition proposée par le président Urvoas permet de réduire considérablement ces écarts, comme en témoignent les graphiques annexés à mon projet de rapport. Au regard du nombre d’habitants par élu et par arrondissement, l’ancienne répartition engendre des écarts à la moyenne allant de moins 15 % à plus 58 % ; la répartition proposée, elle, ramène ces écarts de moins 4,47 % à plus 25,7 %.

Chaque élu parisien représentera désormais un nombre d’habitants très proche, de sorte que les voix de tous les Parisiens auront, dès les prochaines élections municipales, à peu près le même poids, conformément au principe d’égalité devant le suffrage. Par la réattribution de six sièges seulement, nous nous rapprochons donc considérablement de l’idéal démocratique.

Il n’aura échappé à personne que le 1er arrondissement se trouve, dans cette répartition, légèrement sous-représenté puisque son unique élu représentera 17 308 électeurs, pour une moyenne de 13 766 habitants par élu dans l’ensemble de la capitale. Mais le principe d’égalité du suffrage se heurte ici aux mathématiques : si l’on attribuait un conseiller de Paris supplémentaire pour le 1er arrondissement, l’écart à la moyenne serait, non plus de plus 25 %, mais de moins 37 %. Cela supposerait en outre de retrancher un siège au 15e arrondissement, le dernier à avoir bénéficié de l’attribution d’un siège à la plus forte moyenne. Une telle solution n’est donc pas envisageable.

En conservant le nombre actuel de conseillers de Paris et la sectorisation par arrondissement, à laquelle les Parisiens sont très attachés, la répartition envisagée par le président Urvoas est la seule solution possible, et celle qui se rapproche le plus de nos obligations constitutionnelles. Pour nous en rapprocher davantage encore, il faudrait porter le nombre de conseillers de Paris à 207 au minimum ; or la proposition de loi ne créera qu’une dizaine de sièges de conseillers d’arrondissement.

L’autre solution eût été de regrouper certains arrondissements, ce qui aurait eu pour conséquence de les faire disparaître administrativement, faute de conseil d’arrondissement et de maire. La solution proposée est donc fondée sur le bon sens, la simplicité et l’équité.

La Commission en vient à l’examen des articles de la proposition de loi.

EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er

(annexe tableau n° 2 au code électoral)


Modification du tableau des secteurs
pour l’élection des membres du conseil de Paris

L’article 1er de la proposition de loi vise à modifier l’ensemble du tableau annexé au code électoral fixant la répartition des sièges de conseillers de Paris, mentionné à l’article L. 261 du code électoral.

1.  Une répartition proportionnelle des 163 sièges à la plus forte moyenne, avec application d’un correctif démographique

La méthode retenue pour répartir les sièges des membres du conseil de Paris est la même qu’en 1982, si ce n’est qu’elle s’applique cette fois à l’ensemble des sièges, non à une partie d’entre eux. La répartition proportionnelle à la plus forte moyenne repose sur le suivi de plusieurs étapes :

––  la détermination du quotient électoral, soit le nombre total d’habitants de Paris divisé par le nombre total de sièges ; en d’autres termes, il s’agit du nombre d’habitants nécessaires à l’obtention d’un siège ;

––  une première répartition est opérée de façon proportionnelle, en divisant le nombre d’habitants de chaque arrondissement par la quotient électoral : lorsque le résultat obtenu n’est pas entier, le nombre de sièges est obtenu en arrondissant au nombre entier inférieur ;

––  les sièges restants sont quant à eux répartis en fonction de la règle de la plus forte moyenne. Chaque siège non pourvu est fictivement attribué à chacun des arrondissements et sert de base au calcul du nombre d’habitants par élu pour chacun d’entre eux. L’arrondissement qui a la plus forte moyenne se voit attribuer le siège restant. L’opération est réitérée jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de siège à attribuer.

Pour ce qui est de la ville de Paris, qui compte, au 1er janvier 2013, 2 243 833 habitants (34), le quotient électoral est de 13 766 habitants par conseiller de Paris. Au cours de la première étape du calcul, 155 sièges peuvent être attribués. Les 8 sièges restants sont attribués, dans l’ordre, au 8e, au 10e, au 18e, au 19e, au 16e, au 15e, au 20e et au 12e arrondissement (cf. tableau ci-après).

DÉTAIL DU CALCUL DE LA RÉPARTITION PROPORTIONNELLE DES SIÈGES À LA PLUS FORTE MOYENNE

Arr.

Population au 1er janvier 2013

Population/ Quotient électoral

Sièges attribués à la proportionnelle

Moyennes pour le 1er siège restant

Moyennes pour le 2e siège restant

Moyennes pour le 3e siège restant

Moyennes pour le 4e siège restant

Moyennes pour le 5e siège restant

Moyennes pour le 6e siège restant

Moyennes pour le 7e siège restant

Moyennes pour le 8e siège restant

1er

17 308

1,3

1

8 654

8 654

8 654

8 654

8 654

8 654

8 654

8 654

2e

23 009

1,7

1

11 504

11 504

11 504

11 504

11 504

11 504

11 504

11 504

3e

35 652

2,6

2

11 884

11 884

11 884

11 884

11 884

11 884

11 884

11 884

4e

28 012

2,03

2

9 337

9 337

9 337

9 337

9 337

9 337

9 337

9 337

5e

60 938

4,4

4

12 187

12 187

12 187

12 187

12 187

12 187

12 187

12 187

6e

43 451

3,2

3

10 862

10 862

10 862

10 862

10 862

10 862

10 862

10 862

7e

57 974

4,2

4

11 594

11 594

11 594

11 594

11 594

11 594

11 594

11 594

8e

41 280

2,99

2

13 760*

10 320

10 320

10 320

10 320

10 320

10 320

10 320

9e

60 139

4,4

4

12 027

12 027

12 027

12 027

12 027

12 027

12 027

12 027

10e

95 394

6,9

6

13 627

13 627*

11 924

11 924

11 924

11 924

11 924

11 924

11e

153 202

11,2

11

12 766

12 766

12 766

12 766

12 766

12 766

12 766

12 766

12e

144 262

10,5

10

13 114

13 114

13 114

13 114

13 114

13 114

13 114

13 114*

13e

181 532

13,2

13

12 966

12 966

12 966

12 966

12 966

12 966

12 966

12 966

14e

138 299

10,1

10

12 572

12 572

12 572

12 572

12 572

12 572

12 572

12 572

15e

236 715

17,2

17

13 150

13 150

13 150

13 150

13 150

13 150*

12 458

12 458

16e

171 124

12,4

12

13 163

13 163

13 163

13 163

13 163*

12 223

12 223

12 223

17e

169 325

12,3

12

13 025

13 025

13 025

13 025

13 025

13 025

13 025

13 025

18e

202 685

14,7

14

13 512

13 512

13 512*

12 667

12 667

12 667

12 667

12 667

19e

186 652

13,6

13

13 332

13 332

13 332

13 332*

12 443

12 443

12 443

12 443

20e

196 880

14,3

14

13 125

13 125

13 125

13 125

13 125

13 125

13 125*

12 305

* L’arrondissement concerné enlève le siège.

Cependant, l’application d’un correctif démographique conduit, pour assurer au mieux l’égalité devant le suffrage, à retirer deux sièges aux 20e et 12e arrondissements, afin de les attribuer aux 2e et 3e arrondissements. Sans cela, ces deux arrondissements connaîtraient des écarts à la moyenne supérieurs aux marges de 20 % fixées par le Conseil constitutionnel. Par ailleurs, le retrait de ces sièges aux deux arrondissements concernés n’a pas pour effet d’aggraver leur écart à la moyenne. Dans le cas du 20e arrondissement, l’écart à la moyenne, précédemment de - 4,6 %, se trouve même réduit à 2,2 %. La répartition obtenue est donc la suivante :

RÉPARTITION DES SIÈGES DES CONSEILLERS DE PARIS

TELLE QUE MODIFIÉE PAR L’ARTICLE 1ER

Arrondissement

Sièges

1er

1

2e

2

3e

3

4e

2

5e

4

6e

3

7e

4

8e

3

9e

4

10e

7

11e

11

12e

10

13e

13

14e

10

15e

18

16e

13

17e

12

18e

15

19e

14

20e

14

Total

163

2.  Les conséquences de ce nouveau mode de calcul

En tout, six sièges seulement feraient l’objet d’une nouvelle répartition : les 1er, 2e, 4e, 7e et 17e arrondissements perdraient des sièges au profit des 10e, 15e, 18e, 19e et 20e arrondissements. Ainsi, la moitié des arrondissements ne subirait pas les conséquences de cette nouvelle répartition.

VARIATION DU NOMBRE DE SIÈGES PAR ARRONDISSEMENT LIÉE À LA RÉPARTITION PROPOSÉE

Trois arrondissements éliraient, en application de la nouvelle répartition, moins de trois conseillers de Paris : le 1er arrondissement ne compterait plus qu’un conseiller de Paris, tandis que les 2e et 4e n’en éliraient plus que deux chacun. Cela n’est pas sans conséquence sur le mode de scrutin qui sera de facto appliqué dans ces arrondissements. En effet, bien qu’un scrutin proportionnel avec prime majoritaire soit prévu par l’article L. 262 du code électoral, il aura un effet équivalent à un scrutin purement majoritaire dans les arrondissements où les citoyens auront à élire un ou deux conseillers de Paris. La liste qui arrivera en tête dans ces arrondissements remportera automatiquement le ou les sièges en jeu.

Par ailleurs, bien que le nombre total d’élus au conseil de Paris ne soit pas modifié, la nouvelle répartition a un impact indirect sur le nombre de conseillers d’arrondissement. L’article L. 2511-8 du code général des collectivités territoriales énonce la règle de calcul applicable aux conseillers d’arrondissement : le nombre de conseillers d’arrondissement est le double de celui des conseillers municipaux, avec un minimum de 10 et un maximum de 40 conseillers d’arrondissement. De ce fait, l’attribution de sièges de conseillers de Paris supplémentaires à certains arrondissements, du fait de la taille de leur population, conduit mécaniquement à une hausse proportionnelle du nombre de leurs conseillers d’arrondissement, puisque ces derniers doivent représenter le double des conseillers de Paris élus dans l’arrondissement. Cependant, du fait de l’application d’un seuil minimum de dix conseillers d’arrondissement, nécessaire au bon fonctionnement de ces assemblées, la hausse que connaissent certains arrondissements n’est pas compensée par la baisse du nombre de conseillers dans les arrondissements qui voient à l’inverse le nombre de leurs conseillers de Paris diminuer.

Au total, la nouvelle répartition conduit à ce que dix sièges de conseillers d’arrondissement soient créés dans les arrondissements soumis à d’importantes hausses démographiques (cf. tableau ci-après). C’est ce qu’a indiqué le Gouvernement, favorable à cette proposition de loi, lors de la réunion de la commission des Lois du 18 juin, qui a procédé à la nomination de votre rapporteur : « Cette proposition de loi n’aura aucun impact sur le nombre de conseillers de Paris ; néanmoins, pour la clarté du débat, je tiens à préciser qu’elle entraînera mécaniquement la création d’une dizaine de sièges de conseillers d’arrondissement. Le Gouvernement y est évidemment favorable dans la mesure où cette disposition conditionne l’application de la future loi. Je tenais à donner cette précision ».

IMPACT DE LA NOUVELLE RÉPARTITION
SUR LE NOMBRE DE CONSEILLERS D’ARRONDISSEMENT

 

Répartition actuelle

Répartition proposée

 Variation du nombre de conseillers d’arrondissement

Arr.

Conseillers
de Paris

Conseillers d’arrondissement

Conseillers
de Paris

Conseillers d’arrondissement

1er

3

10

1

10

-

2e

3

10

2

10

-

3e

3

10

3

10

-

4e

3

10

2

10

-

5e

4

10

4

10

-

6e

3

10

3

10

-

7e

5

10

4

10

-

8e

3

10

3

10

-

9e

4

10

4

10

-

10e

6

12

7

14

+ 2

11e

11

22

11

22

-

12e

10

20

10

20

-

13e

13

26

13

26

-

14e

10

20

10

20

-

15e

17

34

18

36

+ 2

16e

13

26

13

26

-

17e

13

26

12

24

- 2

18e

14

28

15

30

+ 2

19e

12

24

14

28

+ 4

20e

13

26

14

28

+ 2

Total 1

163

354

163

364

+ 10

Total 2

517

527

 

*

* *

La Commission est saisie de l’amendement CL 1 de M. Bernard Debré.

M. Philippe Goujon. Le Gouvernement échoue dans tous les domaines, sauf dans le tripatouillage électoral. En la matière, c’est la première fois qu’il est pris la main dans le pot de confiture par le Conseil constitutionnel qui a jugé que « le rapport du nombre des conseillers de Paris à la population de l’arrondissement », tel que le prévoyait l’article 30 du projet de loi relatif à l’élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des délégués communautaires et modifiant le calendrier électoral, « s’écarte de la moyenne constatée à Paris dans une mesure qui est manifestement disproportionnée ». De fait, il s’agissait de diminuer le nombre de conseillers des arrondissements tenus par la droite pour augmenter celui des arrondissements tenus par la gauche.

Plutôt que de présenter son propre texte, le Gouvernement a utilisé la facilité qui consiste à passer par une proposition de loi du président de la commission des Lois. En tout état de cause, la majorité ne s’attendait sans doute pas à devoir réactualiser l’actuel tableau des conseillers de Paris.

Bien sûr, depuis 1982, Paris a connu des évolutions démographiques, et politiques. Les électeurs, par exemple, ne perçoivent plus les mairies d’arrondissement de la même façon qu’au moment de leur création. Reste que l’on se demande pourquoi les évolutions démographiques n’ont été prises en compte qu’une seule fois à Marseille, en 1987, et jamais à Lyon. Nous sommes logiquement amenés à penser que cette proposition de loi n’est motivée que par votre crainte de perdre la mairie de Paris, d’autant que vous n’avez sans doute pas choisi la meilleure candidate pour conduire vos listes…

La commission indépendante prévue par l’article 25 de la Constitution aurait pu être consultée, bien qu’elle soit d’abord compétente pour l’élection des députés et des sénateurs : nous y aurions gagné en objectivité. Surtout, la nouvelle répartition conduira, si l’on se réfère à la situation politique actuelle, à l’attribution automatique de trois à cinq sièges supplémentaires pour la gauche, petit matelas opportun au vu de résultats qui s’annoncent serrés. La manœuvre est au demeurant la même que pour les élections sénatoriales et le futur redécoupage des circonscriptions des députés.

La nouvelle répartition est de surcroît promise à l’obsolescence. S’il est regrettable qu’aucune modification ne soit intervenue entre 1982 et 2013, il n’est pas moins regrettable que celle qui nous est proposée ne tienne aucun compte de projets d’urbanisme en cours comme celui de la zone d’aménagement concerté (ZAC) des Batignolles, où sont attendus 12 000 nouveaux habitants – soit presque l’équivalent d’un siège de conseiller – alors même que la population du 17e arrondissement est stable depuis trente ans, ou celui du site de l’ancien hôpital Laennec dans le 7e arrondissement.

La proposition de loi, enfin, aurait pu clarifier l’élection du maire de Paris. L’article L. 261 du code électoral dispose que « la commune forme une circonscription électorale unique » : seuls les membres du conseil de Paris et des conseils municipaux de Lyon et de Marseille sont, par dérogation, élus par secteur. On pourrait dire, en caricaturant un peu, que le maire de Paris actuel n’a été élu que par 3 % des Parisiens, c’est-à-dire par 35 861 électeurs du 18e arrondissement. Dans cet arrondissement comme dans d’autres, pourtant, beaucoup d’électeurs auraient pourtant aimé voter directement pour Bertrand Delanoë, comme ils voudront voter pour Nathalie Kosciusko-Morizet. Le système actuel modifie le sens du résultat final – mais c’est évidemment ce que vous souhaitez. Quoi qu’il en soit, un système électoral identique à celui des autres communes françaises serait plus clair et plus logique. Telles sont les raisons pour lesquelles nous sommes défavorables à la proposition de loi.

M. Claude Goasguen. Dans les années 80, des raisons électoralistes ont conduit à instaurer à Paris le même mode de scrutin qu’à Lyon et à Marseille. Ce fut une erreur, car ces trois villes ont des traditions politiques très différentes. Alors que des élus siégeaient déjà à Lyon et à Marseille autour de l’an 1000, Paris n’a jamais connu de tradition démocratique ; les pouvoirs du préfet de police, aujourd’hui encore, en témoignent. Ce déficit démocratique, que n’ont jamais comblé les maires élus dans les conditions que l’on vient de rappeler, tient aux pouvoirs du préfet de police – pourtant bien en peine d’assurer le maintien de l’ordre – et au poids d’une administration pléthorique, si on la compare par exemple à celle de Marseille. Issue de la tradition préfectorale, cette administration ne compte pas moins de 52 000 agents, face auxquels les élus, en dépit de leur bonne volonté, ne font guère le poids.

Nous suggérons en somme, par cet amendement, d’appliquer à Paris le système électoral démocratique de presque toutes les communes de France, tout en préservant le découpage par arrondissements. Le pouvoir des élus face à la mainmise administrative s’en trouverait renforcé. On ne peut se réclamer de la démocratie de proximité tout en défendant un système qui l’étouffe. L’amendement tire les conséquences de la lenteur des progrès démocratiques à Paris, en dépit des promesses et, sans doute, de la bonne volonté initiale de l’actuel maire de Paris. Il est temps d’opérer, au-delà de nos clivages partisans, un saut qualitatif en ce domaine, en permettant aux Parisiens de choisir directement leur tête de liste.

M. Bernard Debré. Très ancien, le système électoral parisien se caractérise par son extrême complexité. Au moment de la réélection de Bertrand Delanoë, les Parisiens interrogés affirmaient voter pour lui ; pourtant, on n’élit pas le maire de Paris en votant dans un arrondissement, et cette ambiguïté antidémocratique demeurera aux prochaines élections municipales. Non seulement les électeurs ne savent pas pour qui ils votent, mais ils se trompent également en pensant que les maires d’arrondissement détiennent tous les pouvoirs. On leurre donc les électeurs en les empêchant de voter pour la candidate à la mairie de Paris, et en leur faisant élire des maires d’arrondissement sans réel pouvoir.

Notre amendement reprend une proposition de loi que j’avais déposée en août 2007 ; à cette époque, en l’absence de raison constitutionnelle de modifier le mode de scrutin à Paris, elle n’a pas été retenue. Avec la loi du 17 avril 2013, le Parti socialiste a souhaité changer le nombre de conseillers de Paris, mais cette tentative grossière – on retirait des conseillers de Paris dans trois arrondissements de droite pour les transférer vers trois arrondissements de gauche – a heureusement été censurée par le Conseil constitutionnel. Les dispositions antérieures ayant elles aussi été déclarées contraires à la Constitution, Paris se retrouve face à un vide législatif.

Après avoir envisagé de fusionner les 1er, 2e, 3e et 4e arrondissements – ce qui aurait bouleversé la ville –, vous avez finalement opté pour une mesure qui ne tient pas compte des futures évolutions démographiques des différents arrondissements. Comme l’a souligné Philippe Goujon, le 17e arrondissement comptera, dans les semaines et les mois à venir, au moins 12 000 électeurs supplémentaires ; et les autres arrondissements connaîtront également des modifications. En lieu et place d’une loi pérenne, capable de durer vingt ou trente ans, vous ne proposez donc qu’une mesure conjoncturelle qui favorise à nouveau la gauche. Nous avons peut-être agi de même lorsque nous étions au pouvoir, et vous l’aviez alors dénoncé avec force ; permettez-moi donc de dénoncer à mon tour votre attitude qui tranche avec les principes de morale et de transparence dont vous vous réclamez.

En 2008, Bertrand Delanoë a été élu par 35 861 électeurs du 18e arrondissement ; seuls 3 % de Parisiens ont donc directement voté pour une liste sur laquelle figurait son nom. Plus choquant encore : Bertrand Delanoë a remporté sa première élection tout en étant minoritaire en voix. Peut-on dès lors encore parler de démocratie ?

Il ne faudrait pas, dites-vous, changer les règles à un an de l’élection ; c’est pourtant ce que vous faites. Nous voulons, affirmez-vous, modifier la répartition des conseillers de Paris ; mais c’est le Conseil constitutionnel qui vous y oblige. En revanche, contrairement à ce que j’ai entendu dire, nous ne voulons pas supprimer les mairies d’arrondissement.

Les mesures que nous proposons cherchent à rendre la législation plus claire et plus démocratique : Paris doit devenir une commune, afin que le maire de Paris et son équipe de 163 conseillers – représentant peu ou prou les arrondissements – soient élus au suffrage direct. Les Parisiens pourront alors enfin voter pour leur maire, choisissant entre Nathalie Kosciusko-Morizet et Anne Hidalgo. Prétendre que ce mode de scrutin ne serait pas démocratique, c’est douter du caractère démocratique du suffrage universel. Une autre élection permettra d’élire les maires d’arrondissement et leurs équipes, dont les membres pourront d’ailleurs également appartenir à l’équipe du maire de Paris.

Votre proposition de loi contient une coquille révélatrice. L’exposé des motifs de l’article 2 évoque en effet «  deux conseillers d’arrondissement » alors qu’il s’agit en fait de deux conseillers de Paris. Cela montre bien le caractère confus et antidémocratique du dispositif.

Notre amendement n’a aucun caractère partisan. Il pourrait en effet se révéler favorable à Nathalie Kosciusko-Morizet comme à Anne Hidalgo, puisque personne ne peut aujourd’hui prévoir le résultat d’un vote direct des Parisiens et des Parisiennes. Il représente simplement une avancée démocratique dont on peine à comprendre en quoi elle vous gêne.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet. Je souscris aux arguments développés par mes collègues, ainsi qu’à l’amendement proposé par Bernard Debré. Ce débat n’aurait pas dû avoir lieu, car il n’est jamais opportun de modifier les modes de scrutin à un an de l’élection. Le tripatouillage du tableau des conseillers de Paris auquel s’est livrée la majorité socialiste – qui n’a pas tardé à être annulé – nous a pourtant obligés à réagir.

Dans ce contexte, la seule solution consiste à adopter des dispositions inattaquables ; or une modification du tableau des conseillers de Paris, quelle qu’elle soit – les échanges viennent de le montrer –, peut prêter le flanc aux critiques. Il faut donc abandonner ce tableau pour choisir un mode de scrutin au principe indiscutable, qui permette d’éviter ces mauvais débats.

Le mode de scrutin actuellement en vigueur est fondé sur la méfiance à l’égard du peuple de Paris. Pendant longtemps, le pouvoir central a refusé à la capitale le droit de disposer d’un maire ; pis, en dépit de l’insurrection et de l’attitude remarquable du peuple de Paris, cette institution n’a pas été rétablie à la Libération. Dans les années 70, on a enfin permis à l’ensemble des Parisiens d’élire un maire de Paris, mais le pouvoir central, avec la loi PLM, a très vite confisqué cette légitimité naturelle dont jouissent tous les autres maires de France.

Aujourd’hui, ces dispositions n’ont plus de sens, sauf à avoir peur du suffrage universel – que certains sont, il est vrai, allés jusqu’à qualifier de ringard. Pour notre part, nous voyons dans le suffrage universel un gage de transparence, de clarté et de modernité. Alors que nous sommes obligés de discuter d’une loi électorale à moins d’un an d’une élection, nous le tenons pour seul choix possible.

M. Daniel Vaillant. Revenons à la proposition de loi. Même si l’on peut le regretter, la loi PLM précise que, contrairement aux autres communes, le nombre de conseillers de Paris par arrondissement doit être adapté à l’évolution démographique par une loi. Jamais entreprise depuis, cette adaptation n’est pas pour autant illégitime. Le Conseil constitutionnel l’a d’ailleurs confirmé en censurant non seulement la disposition prévue par la loi actuelle, mais également celle de 1982, qui n’avait pas permis la prise en compte des évolutions démographiques. Le Conseil constitutionnel aurait pu censurer le tableau actuel des conseillers de Paris à l’occasion de n’importe quelle question prioritaire de constitutionnalité (QPC) ; il apparaît donc raisonnable de légiférer pour s’adapter à sa décision.

La proposition de loi initiale n’avantageait personne en particulier, car nul ne connaît par avance le résultat d’un vote. Dans le 20e arrondissement – qui ne compte aujourd’hui aucun élu de l’opposition –, le conseiller supplémentaire aurait pu être l’un des vôtres. La nouvelle proposition de loi de Jean-Jacques Urvoas, rapportée par Pascal Popelin, propose un bon équilibre : elle respecte la demande du Conseil constitutionnel sans bouleverser le mode de scrutin – contrairement à l’amendement de Bernard Debré. Équitable, le dispositif proposé réalise tout ce qui pouvait être fait sans augmenter le nombre de conseillers de Paris. Renonçant à une telle augmentation – que vous rejetteriez d’ailleurs au nom de l’économie budgétaire –, nous proposons de garder les 163 conseillers de Paris, tout en procédant à quelques changements à la marge dont personne ne peut dire qui ils avantageront.

Le nouveau tableau permettra en revanche de respecter l’évolution démographique. Pourquoi des arrondissements qui perdent des habitants garderaient-ils le même nombre de conseillers de Paris et d’arrondissement ? Pourquoi ceux dont la démographie progresse – comme le 18e qui, depuis ma victoire face à Jean-Louis Debré en 1995, a gagné 20 000 habitants – ne le verraient-ils pas augmenter ? Cette évolution – désormais prise en compte dans la nouvelle proposition de loi – m’apparaît à la fois raisonnable et inattaquable.

À l’inverse, monsieur Debré, votre proposition d’opération chirurgicale est loin de présenter ce caractère. Pas un maire de France n’est élu au suffrage universel direct. De surcroît, le maire de Paris occupe également la fonction de président du conseil général. On ne peut pas devenir conseiller de Paris si l’on n’est pas élu conseiller d’arrondissement, et cette relation entre les arrondissements et le conseil de Paris me semble bénéfique. La loi PLM a d’ailleurs permis de progressivement révéler l’identité d’arrondissements – tout comme à Lyon et à Marseille. En 1995, six arrondissements sont passés à gauche et le maire de Paris de l’époque, M. Tiberi, a éprouvé quelques difficultés à s’adapter à cette nouvelle cohabitation. Aujourd’hui, le maire de Paris est élu par l’assemblée qu’il préside, et ce mode d’élection me paraît pleinement satisfaisant. Le fait d’être élus au suffrage indirect ne rend pas les présidents du Sénat ou de l’Assemblée nationale moins légitimes que s’ils avaient été directement désignés par les électeurs. Créer une césure entre l’arrondissement et l’échelon parisien constituerait une grave erreur.

Enfin, quel qu’il soit, un maire de Paris élu au suffrage universel direct présenterait un caractère dangereux. Je n’adhère pas à votre vision bonapartiste de la société et de la République.

M. Claude Goasguen. Nous le dirons aux Parisiens ! L’élection du maire de Paris au suffrage universel vous fait peur !

M. Daniel Vaillant. Les Parisiens restent attachés au vote dans l’arrondissement et à la représentation au conseil de Paris ; ils n’accepteront pas de vider les arrondissements de leur substance, comme vous proposez de le faire. L’équilibre entre les arrondissements et l’échelon parisien leur convient parfaitement, et il ne faudrait pas le détruire. Cette proposition de loi permet de conserver les arrondissements intacts, tout en assurant la diversité au sein de chacun d’entre eux. Voilà pourquoi je voterai sans réserve pour la proposition de loi et contre l’amendement ubuesque de l’opposition.

Mme Annick Lepetit. Contrairement à ce que l’ambiguïté de vos propos a pu laisser entendre, chers collègues de l’opposition, le Conseil constitutionnel n’a jamais exigé la suppression du vote par arrondissement. Il a en revanche rejeté le nombre minimal de trois conseillers de Paris par arrondissement, qu’il avait pourtant validé en 1982. Vous voilà pris à votre propre piège, puisque le Conseil constitutionnel demande désormais que l’on aille au bout de la réforme en adaptant le nombre de conseillers de Paris par arrondissement en fonction de l’évolution démographique.

Et vous profitez de l’occasion pour déposer un amendement qui avait déjà fait l’objet d’une proposition de loi en 2007, à la veille du scrutin municipal de 2008. Est-ce la proximité des scrutins qui vous fait agir ? Pourquoi n’avoir pas davantage défendu cette mesure depuis 2007 alors que vous disposiez de la majorité au Parlement ? Vous nous accusez aujourd’hui de « tripatouillage » électoral, tandis que nous voulons simplement tenir compte de l’évolution du nombre d’habitants par arrondissement.

Enfin, vous avez raison, monsieur Goujon, d’affirmer qu’avec la ZAC Cardinet-Batignolles, le 17e arrondissement accueillera entre 10 000 et 12 000 nouveaux habitants – ce phénomène concerne aussi 18e et 19e arrondissements où des terrains importants sont en cours d’aménagement. Mais lorsque j’avais fait valoir un tel argument en 2010 à propos du redécoupage électoral des circonscriptions parisiennes, dont trois ont été supprimées pour aboutir aux dix-huit circonscriptions actuelles, vous l’aviez alors écarté et il a fallu que le Conseil d’État s’en mêle ! C’est l’ironie de l’histoire ! C’est la deuxième fois que vous marchez sur le râteau : sinon, Mme de Panafieu serait aujourd’hui assise à vos côtés.

Enfin, je n’ai absolument jamais entendu dire que le maire de Paris – l’actuel ou ses prédécesseurs – ait été élu par effraction. Les Parisiens ont toujours eu le sentiment, en votant dans leur arrondissement, de participer à une élection démocratique.

Vos arguments d’aujourd’hui me paraissent donc superficiels. Vous vous plaignez de notre prétendue volonté de changer le mode de scrutin à un an des élections – alors que nous nous contentons d’un rééquilibrage entre arrondissements – mais vous ressortez, bien tardivement, une vieille proposition de loi pour proposer l’élection du maire au suffrage direct ! Cela n’a aucun sens.

M. Bernard Debré. J’ai déposé cette proposition de loi en août 2007, mais l’occasion de l’inscrire à l’ordre du jour ne s’est pas présentée : aujourd’hui, grâce à la décision du Conseil constitutionnel, il y en a une !

Quand les Français votent aux élections municipales, ils votent pour un maire et son équipe ; ils savent pour qui ils votent. À Paris, ce n’est pas le cas : on votera non pas pour Mme Hidalgo ou pour Mme Kosciusko-Morizet, mais pour des conseillers d’arrondissement.

Ce que nous vous proposons est une avancée démocratique, et j’aime les avancées démocratiques : j’ai été élevé dans le respect de la République.

M. le rapporteur. Je donne un avis défavorable à cet amendement CL 1. Le système des éléments de langage fonctionne à plein : quand on parle de transparence, vous pilonnez l’argument Cahuzac ; quand on parle d’élections, vous ne parlez plus que de tripatouillage ! En l’occurrence, respecter le principe constitutionnel d’égalité du suffrage, ce serait du tripatouillage !

Monsieur Goujon, vous avez parlé de « fiasco constitutionnel » : c’est l’hôpital qui se moque de la charité… Faut-il vous rappeler que, sous la précédente législature, le tableau des conseillers territoriaux a été censuré à deux reprises ?

L’amendement CL 1 n’en est vraiment pas un : c’est un contre-projet, d’ailleurs parfaitement respectable comme tel. Mais il vise à « changer radicalement »  – ce sont les termes de l’exposé sommaire – les règles du jeu, à un an des élections, ce qui n’est pas la tradition républicaine.

Vous proférez au passage des contrevérités manifestes : les Parisiens choisiraient directement leur maire, dites-vous. Mais, dans toutes les villes de France, on élit des conseillers municipaux, qui à leur tour élisent un maire, et juridiquement, ce n’est pas forcément la tête de liste. Il arrive que le maire élu ne soit pas la tête de liste. Allez-vous nous faire croire que les Parisiens n’auront pas compris qui sont les candidates, ou les candidats, à la mairie ? C’est une élection qui est médiatisée ! Ce sont là des propos de circonstance : vous essayez de faire croire aux citoyens quelque chose qui ne correspond pas à la réalité.

Vous dites pis que pendre du scrutin actuel, mais, pour que votre démarche soit cohérente, votre proposition de loi devrait concerner aussi Lyon et Marseille.

En outre, vous proposez deux votes, l’un pour les conseillers de Paris, l’autre pour les conseillers d’arrondissement. Mais par cette déconnexion, vous affaiblissez la démocratie de proximité !

Enfin, si vous tenez tant à ce système, pourquoi ne pas avoir inscrit cette proposition de loi à l’ordre du jour en 2007 ? Vous n’étiez pas obligés d’attendre une décision du Conseil constitutionnel !

M. Philippe Goujon. Monsieur le rapporteur, vous n’êtes visiblement pas familier du mode de scrutin à Paris, Lyon et Marseille : les situations ne sont pas comparables.

Pourquoi ne pas voter directement pour le maire de Paris ? Ce serait plus clair ; cela permettrait en outre aux électeurs qui le désireraient de voter pour M. Vaillant comme maire d’arrondissement, et pour Mme Kosciusko-Morizet comme maire de Paris !

Notre proposition vise simplement à faire de la commune de Paris une circonscription unique. Nous n’avons jamais dit qu’il s’agissait d’élire directement le maire ! Sur le plan démocratique, les conseillers de Paris auraient ainsi plus de pouvoir.

Vous supprimez le seuil minimal de trois conseillers de Paris par arrondissement, pour des raisons démographiques et pour tenir compte de la décision du Conseil constitutionnel, mais, pour les conseillers d’arrondissement, vous maintenez un seuil minimal. Je ne mets pas en cause cette évolution, mais c’est une incohérence supplémentaire.

La Commission rejette l’amendement CL 1.

Puis elle adopte l’article 1er sans modification.

Article 2

(art. L. 2511-25 du code général des collectivités territoriales)


Élection du maire d’arrondissement et de ses adjoints

L’article L. 2511-25 du code général des collectivités territoriales définit les règles relatives à l’élection des maires d’arrondissement et à la désignation de leurs adjoints applicables à Paris, Lyon et Marseille. En l’état actuel du droit :

––  l’alinéa 1er de l’article L. 2511-25 dispose que le maire d’arrondissement est élu au sein du conseil d’arrondissement parmi les membres du conseil de Paris. Il est donc nécessairement choisi parmi les élus arrivés en tête de liste, à qui sont attribués les sièges de conseillers de Paris ;

––  le troisième alinéa de l’article précité dispose que les adjoints au maire sont également désignés par le conseil d’arrondissement ; ils peuvent être conseillers d’arrondissement ou conseillers de Paris, mais l’un d’eux au moins doit être membre du conseil de Paris.

En application de la nouvelle répartition prévue à l’article 1er de la proposition de loi, le 1er arrondissement de Paris ne disposerait plus que d’un siège au sein du conseil de Paris.

Dès lors, si les dispositions du premier alinéa de l’article L. 2511-25 n’étaient pas modifiées, le conseiller de Paris de cet arrondissement serait le seul à pouvoir se présenter à l’élection du maire d’arrondissement. Or, une élection à laquelle un seul candidat pourrait légalement se présenter serait inconstitutionnelle. C’est pourquoi le 1° de l’article 2 de la proposition de loi supprime cette condition. Mais l’effet de cette suppression ne se limite pas au 1er arrondissement de Paris, dont la situation particulière rend nécessaire cette modification. Les maires d’arrondissement de Paris, Lyon et Marseille ne seraient plus obligatoirement conseillers municipaux.

En outre, la rédaction actuelle de l’article L. 2511-25 aurait conduit à une situation ubuesque en application de cette nouvelle répartition. Le conseiller de Paris du 1er arrondissement aurait été automatiquement maire de son arrondissement, mais également adjoint au maire.

Aussi, afin d’assurer une désignation libre des candidats aux fonctions d’adjoint au maire, le 2° de l’article 2 de la proposition de loi prévoit la suppression de l’obligation, pour l’un des adjoints, d’être conseiller municipal en application du 3e alinéa de l’article L. 2511-25. Là encore, cette modification concernera l’ensemble des conseils d’arrondissement de Paris, Lyon et Marseille.

*

* *

La Commission est saisie de l’amendement CL 2 de M. Bernard Debré.

La Commission rejette l’amendement CL 2.

Puis elle adopte l’article 2 sans modification.

Article 3

Entrée en vigueur de la loi à compter du prochain renouvellement général des conseils municipaux

L’article 3 de la proposition de loi prévoit une entrée en vigueur différée pour la loi. Celle-ci n’entrerait en vigueur qu’à compter du prochain renouvellement général des conseils municipaux qui suit sa promulgation.

Une loi entre par défaut en vigueur le lendemain de sa publication au Journal officiel. Cependant, afin de ne pas permettre l’application des dispositions de la proposition de loi à d’éventuelles désignations aux fonctions de maire d’arrondissement ou d’adjoint au maire qui interviendraient avant le renouvellement général de mars 2014, il est possible de fixer une date d’entrée en vigueur différée en application de l’article 1er du code civil modifié par l’ordonnance n° 2004-164 du 20 février 2004 relative aux modalités et effets de la publication des lois et de certains actes administratifs.

Cet article a donc pour but d’assurer une cohérence minimale des règles applicables aux élus de Paris, Lyon et Marseille.

*

* *

La Commission adopte l’article 3 sans modification.

Puis elle adopte l’ensemble de la proposition de loi sans modification.

*

* *

En conséquence, la commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République vous demande d’adopter la proposition de loi (n° 1145) relative à l’élection des conseillers de Paris.

TABLEAU COMPARATIF

___

Texte en vigueur

___

Texte de la proposition de loi

___

Texte adopté par la Commission

___

 

Proposition de loi relative à l’élection des conseillers de Paris

Proposition de loi relative à l’élection des conseillers de Paris

Code électoral

Article 1er

Article 1er

Article annexe, tableau n°2

Le tableau n° 2 annexé au code électoral est ainsi rédigé :

(Sans modification)

Tableau des secteurs pour l’élection des membres du conseil de Paris.

Désignation des secteurs ; arrondissement constituant les secteurs ; nombre de sièges

 

1er secteur ; 1er arrondissement ;
3 sièges

1er secteur ; 1er arrondissement ;
1 siège

 

2e secteur ; 2e arrondissement ;
3 sièges

2e secteur ; 2e arrondissement ;
2 sièges

 

3e secteur ; 3e arrondissement ;
3 sièges

3e secteur ; 3e arrondissement ;
3 sièges

 

4e secteur ; 4e arrondissement ;
3 sièges

4e secteur ; 4e arrondissement ;
2 sièges

 

5e secteur ; 5e arrondissement ;
4 sièges

5e secteur ; 5e arrondissement ;
4 sièges

 

6e secteur ; 6e arrondissement ;
3 sièges

6e secteur ; 6e arrondissement ;
3 sièges

 

7e secteur ; 7e arrondissement ;
5 sièges

7e secteur ; 7e arrondissement ;
4 sièges

 

8e secteur ; 8e arrondissement ;
3 sièges

8e secteur ; 8e arrondissement ;
3 sièges

 

9e secteur ; 9e arrondissement ;
4 sièges

9e secteur ; 9e arrondissement ;
4 sièges

 

10e secteur ; 10e arrondissement ; 6 sièges

10e secteur ; 10e arrondissement ; 7 sièges

 

11e secteur ; 11e arrondissement ; 11 sièges

11e secteur ; 11e arrondissement ; 11 sièges

 

12e secteur ; 12e arrondissement ; 10 sièges

12e secteur ; 12e arrondissement ; 10 sièges

 

13e secteur ; 13e arrondissement ; 13 sièges

14e secteur ; 14e arrondissement ; 10 sièges

13e secteur ; 13e arrondissement ; 13 sièges

14e secteur ; 14e arrondissement ; 10 sièges

 

15e secteur ; 15e arrondissement ; 17 sièges

15e secteur ; 15e arrondissement ; 18 sièges

 

16e secteur ; 16e arrondissement ; 13 sièges

16e secteur ; 16e arrondissement ; 13 sièges

 

17e secteur ; 17e arrondissement ; 13 sièges

17e secteur ; 17e arrondissement ; 12 sièges

 

18e secteur ; 18e arrondissement ; 14 sièges

18e secteur ; 18e arrondissement ; 15 sièges

 

19e secteur ; 19e arrondissement ; 12 sièges

19e secteur ; 19e arrondissement ; 14 sièges

 

20e secteur ; 20e arrondissement ; 13 sièges

20e secteur ; 20e arrondissement ; 14 sièges

 

Total : 163 sièges

Total : 163 sièges

 
 

Article 2

Article 2

Code général des collectivités territoriales

L’article L. 2511-25 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

(Sans modification)

Art. L. 2511-25. –  Le conseil d’arrondissement est présidé par le maire d’arrondissement. Le maire d’arrondissement est élu au sein du conseil d’arrondissement parmi les membres du conseil municipal. Les fonctions de maire de la commune et de maire d’arrondissement sont incompatibles.

1° À la fin de la deuxième phrase du premier alinéa, les mots : « parmi les membres du conseil municipal » sont supprimés ;

 

L’élection du maire d’arrondissement qui suit le renouvellement général du conseil municipal a lieu huit jours après celle du maire de la commune. Le conseil d’arrondissement est, à cette occasion, exceptionnellement convoqué par le maire de la commune.

   

Le conseil d’arrondissement désigne également en son sein, parmi les conseillers municipaux et les conseillers d’arrondissement, un ou plusieurs adjoints. Le nombre de ceux-ci ne peut excéder 30 % du nombre total des membres du conseil d’arrondissement sans pouvoir toutefois être inférieur à quatre. L’un des adjoints au moins doit être conseiller municipal.

2° La dernière phrase du troisième alinéa est supprimée.

 

Sous réserve des dispositions des alinéas précédents, sont applicables au maire d’arrondissement et à ses adjoints les dispositions des articles L. 2122-4 à L. 2122-7-2, des premier et deuxième alinéas de l’article L. 2122-8, des premier et troisième alinéas de l’article L. 2122-10, des articles L. 2122-12, L. 2122-15, L. 2122-16, du second alinéa de l’article L. 2122-18 de l’article L. 3122-3 et de l’article L. 4133-3. En cas d’application de l’article L. 2122-15, le représentant de l’Etat dans le département informe le maire de la commune de la démission du maire d’arrondissement ou de ses adjoints.

   

L’élection du maire d’arrondissement et de ses adjoints peut être arguée de nullité dans les conditions, formes et délais prescrits pour les réclamations contre les élections du conseil municipal. Lorsque l’élection est annulée ou que, pour toute autre cause, le maire d’arrondissement ou ses adjoints ont cessé leurs fonctions, le conseil d’arrondissement est convoqué pour procéder au remplacement dans le délai de quinzaine.

   
 

Article 3

Article 3

 

La présente loi entre en vigueur à compter du prochain renouvellement général des conseils municipaux suivant sa promulgation.

(Sans modification)

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION

Amendement CL1 présenté par M. Debré, M. Fillon, M. Goasguen, M. Goujon, M. Lamour, M. Lellouche et Mme Kosciusko-Morizet

Article premier

Rédiger ainsi cet article :

I. L’article L. 261 du code électoral est ainsi modifié :

1° À la première phrase du deuxième alinéa, les mots : « du conseil de Paris et » sont supprimés ;

2° À la deuxième phrase du deuxième alinéa, la référence « 2 », est supprimée.

II. Le tableau n° 2 annexé au code électoral est supprimé.

III. Après l’article L. 272-1 du code électoral, est insérée une section intitulée « Section 1. Dispositions particulières applicables à Paris » comprenant quatre articles ainsi rédigés :

Art. L. 272-1-1. –  La commune forme une circonscription électorale unique pour l’élection des membres du conseil de Paris, qui comprend 163 membres. Les conseillers d’arrondissement sont élus par arrondissement.

Art. L. 272-1-2 –  Pour être complète, une liste doit comprendre autant de candidats qu’il y a à pourvoir de sièges de membres du Conseil de Paris et, par arrondissement, de sièges de conseiller d’arrondissement.

Art. L. 272-1-3 – Est interdit l’enregistrement d’une déclaration de candidature ne répondant pas aux dispositions des articles L. 272-1-2 et L. 272-2-3.

Art. L. 272-1-4 – Le candidat venant sur une liste immédiatement après le dernier élu conseiller d’arrondissement est appelé à remplacer le conseiller d’arrondissement élu sur cette liste dont le siège devient vacant pour quelque cause que ce soit. La constatation par la juridiction administrative de l’inéligibilité d’un ou plusieurs candidats n’entraîne l’annulation de l’élection que du ou des élus inéligibles. La juridiction saisie proclame en conséquence l’élection du ou des suivants de liste. Lorsque dans un arrondissement, les dispositions des deux alinéas précédents ne peuvent plus être appliquées, et si le conseil d’arrondissement a perdu le tiers de ses membres, il est, dans un délai de deux mois à dater de la dernière vacance, procédé au renouvellement intégral du conseil d’arrondissement.

IV. 1° Avant l’article L. 272-2 du code électoral, est insérée une section 2 intitulée « Section II. Dispositions applicables à Lyon et à Marseille » ;

2° L’article L. 272-3 du code électoral est ainsi modifié : les mots « du conseil de Paris ou » sont supprimés ;

3° Aux première et seconde phrases de l’article L. 272-5 du code électoral, les mots « du conseil de Paris sont supprimés » ;

4° L’article L. 272-6 du code électoral est ainsi modifié :

a) Au 1er alinéa, les mots : « du Conseil de Paris ou » sont supprimés ;

b) Au 2ème alinéa, les mots : « le conseiller de Paris ou » sont supprimés ;

c) Au dernier alinéa, les mots : « du conseil de Paris ou » sont supprimés.

V. 1° Le code général des collectivités territoriales, est complété par un article L.2511-8-1 nouveau ainsi rédigé : « Les dispositions de la présente sous-section sont applicables aux conseils d’arrondissement de Paris, sous réserve des dispositions du présent article. Le nombre des conseillers d’arrondissement est déterminé par le tableau du nombre de sièges par arrondissement pour l’élection des conseillers d’arrondissement de Paris annexé au code général des collectivités territoriales. »

2° Il est inséré une annexe au code général des collectivités territoriales ainsi rédigée :

« Tableau du nombre de sièges par arrondissements pour l’élection des conseillers d’arrondissement de Paris »

Arrondissement

Nombre de sièges de conseillers d’arrondissement

1er

10

2e

10

3e

10

4e

10

5e

10

6e

10

7e

10

8e

10

9e

10

10e

12

11e

22

12e

20

13e

26

14e

20

15e

34

16e

26

17e

26

18e

28

19e

24

20e

26

Total

354

3° Après l’article L. 2511-25 du code général des collectivités territoriales, est inséré un article L. 2511-25-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 2511-25-1. – Les dispositions de la présente sous-section sont applicables aux conseils d’arrondissement de Paris, sous réserve des dispositions du présent article.

« Le maire d’arrondissement est élu parmi les conseillers d’arrondissement.

« L’élection du maire d’arrondissement qui suit le renouvellement général du conseil de Paris a lieu concomitamment à celle du maire de la commune.

« Les adjoints au maire d’arrondissement sont désignés parmi les conseillers d’arrondissement. » 

Amendement CL2 présenté par M. Debré, M. Fillon, M. Goasguen, M. Goujon, M. Lamour, M. Lellouche et Mme Kosciusko-Morizet

Article 2

Supprimer cet article.

© Assemblée nationale

1 () Propos tenus par M. le député Alain Billon au cours de la deuxième séance du 23 octobre 1982: « Premièrement, cette répartition se rapproche de plus près d’une répartition rigoureusement proportionnelle à la population des arrondissements. Deuxièmement, en accordant trois sièges au moins aux arrondissements les moins peuplés, elle permettra un meilleur fonctionnement du mode de scrutin en laissant dans ces circonscriptions deux sièges à attribuer à la représentation proportionnelle ».

2 () Décision du Conseil constitutionnel n° 2013-667 du 16 mai 2013 portant sur la loi relative à l'élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral.

3 () Décret n° 2003-485 du 5 juin 2003 relatif au recensement de la population.

4 () Loi n° 87-509 du 9 juillet 1987 modifiant l’organisation administrative et le régime électoral de la ville de Marseille.

5 () Décision du Conseil constitutionnel n° 85-196 du 8 août 1985 portant sur la loi sur l'évolution de la Nouvelle-Calédonie, considérant n° 14.

6 () Catherine Castor, « L’égalité devant le suffrage », Revue française de droit constitutionnel, P.U.F., 2012/2, n° 90.

7 () Décision du Conseil constitutionnel n° 86-208 du 2 juillet 1986 portant sur la loi relative à l'élection des députés et autorisant le Gouvernement à délimiter par ordonnance les circonscriptions électorales, considérant n° 21.

8 () Décision du Conseil constitutionnel n° 86-218 du 18 novembre 1986 portant sur la loi relative à la délimitation des circonscriptions pour l'élection des députés, considérant n° 7.

9 () Décision du Conseil constitutionnel n° 86-208 du 2 juillet 1986 portant sur la loi relative à l'élection des députés et autorisant le Gouvernement à délimiter par ordonnance les circonscriptions électorales, considérant n° 22.

10 () Id., considérant n° 23.

11 () Décision du Conseil constitutionnel n° 2008-573 du 8 janvier 2009 portant sur la loi relative à la commission prévue à l'article 25 de la Constitution et à l'élection des députés, considérant n° 26.

12 () Décision du Conseil constitutionnel n° 86-208 du 2 juillet 1986 portant sur la loi relative à l'élection des députés et autorisant le Gouvernement à délimiter par ordonnance les circonscriptions électorales, considérant n° 24.

13 () Décision du Conseil constitutionnel n° 87-227 du 7 juillet 1987 portant sur la loi modifiant l'organisation administrative et le régime électoral de la ville de Marseille.

14 () Décision du Conseil constitutionnel n° 2008-573 du 8 janvier 2009 portant sur la loi relative à la commission prévue à l'article 25 de la Constitution et à l'élection des députés, considérant n° 23.

15 () Id, considérant n° 24.

16 () Id.

17 () Id., considérant n° 21.

18 () Guy Carcassonne, « Découpage électoral : pas de démocratie sans l’égalité des citoyens devant le suffrage », JCP, n° 36, 31 août 2009.

19 () Décision du Conseil constitutionnel n° 86-218 du 18 novembre 1986 portant sur la loi relative à la délimitation des circonscriptions pour l'élection des députés, considérant n° 10.

20 () Décision du Conseil constitutionnel n° 2010-602 du 18 février 2010  portant sur la loi ratifiant l'ordonnance n° 2009-935 du 29 juillet 2009 portant répartition des sièges et délimitation des circonscriptions pour l'élection des députés, considérants n°s 20 et suivants.

21 () Décision du Conseil constitutionnel n° 2010-618 du 9 décembre 2010 portant sur la loi de réforme des collectivités territoriales, considérant n° 39.

22 () Id., considérants n°s 39 et 41.

23 () Le commentaire aux Cahiers de cette décision indique ainsi que « le Conseil a consacré le caractère en principe indépassable du seuil de 20 % d’écart à la moyenne. En retenant ce seuil de 20 %, le Conseil a repris à son compte les limites que le législateur lui-même s’était assigné en 1986 puis en 2009 en vue de la réalisation de la délimitation des circonscriptions électorales pour l’élection des députés au sein d’un même département ».

24 () « Décision n° 2010-618 DC – 9 décembre 2010 », Les nouveaux cahiers du Conseil constitutionnel, Cahier n° 30.

25 () Décision du Conseil constitutionnel n° 2013-667 du 16 mai 2013 portant sur la loi relative à l'élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral, considérant n° 51.

26 () Conseil constitutionnel, commentaire de la décision n° 2013-667 du 16 mai 2013 portant sur la loi relative à l'élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral, p. 25-26.

27 () Décision du Conseil constitutionnel n° 85-187 du 25 janvier 1985 portant sur la loi relative à l’état d’urgence en Nouvelle-Calédonie, considérant n° 10.

28 () Décision du Conseil constitutionnel n° 2013-667 du 16 mai 2013 portant sur la loi relative à l'élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral, considérant n° 51.

29 () Propos tenus par M. le député Jacques Toubon au cours de la deuxième séance du 23 octobre 1982 : « Selon nous, la justice et l’arithmétique veulent qu’on applique d’abord la proportionnelle sur la totalité de l’effectif du conseil puis, comme nous l’avons fait pour les deux situations aberrantes […] on fasse des corrections minimes ».

30 () Décision du Conseil constitutionnel n° 87-227 du 7 juillet 1987 portant sur la loi modifiant l'organisation administrative et le régime électoral de la ville de Marseille, considérant n° 6.

31 () Dans une décision n° 2010-602 du 18 février 2010 portant sur la loi ratifiant l’ordonnance n° 2009-935 du 29 juillet 2009 portant répartition des sièges et délimitation des circonscriptions pour l’élection des députés, le Conseil constitutionnel a jugé, à l’appui de la constitutionnalité du dispositif, « que, s'agissant de la délimitation des circonscriptions électorales sur le territoire national, il ressort de l'ordonnance dont la loi de ratification est soumise à l'examen du Conseil constitutionnel […] que les écarts de population entre circonscriptions ont été réduits dans des conditions qui garantissent un meilleur respect de l'égalité devant le suffrage ».

32 () Décision du Conseil constitutionnel n° 2003-475 du 23 juillet 2003 sur la loi portant réforme de l’élection des sénateurs, considérants n°6 et 7.

33 () En 2003, le dernier recensement des populations légales comptait 60 185 831 habitants, pour 326 sénateurs, soit une moyenne d’habitants par sénateur de 184 619.

34 () INSEE, population légale 2010 de Paris, entrée en vigueur le 1er janvier 2013.