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Amendements  sur le projet ou la proposition

N° 1230

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 9 juillet 2013.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE SUR LE PROJET DE LOI (N° 1227), MODIFIÉ PAR LE SÉNAT, relatif aux attributions du garde des Sceaux et des magistrats du ministère public en matière de politique pénale et de mise en œuvre de l’action publique,

PAR M. Jean-Yves LE BOUILLONNEC,

Député.

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Voir les numéros :

Assemblée nationale : 845, 1047 et T.A. 145.

Sénat : 626 rect., 675, 676 et T.A. 187 (2012-2013).

LES PRINCIPALES MODIFICATIONS APPORTÉES AU PROJET DE LOI PAR LA COMMISSION DES LOIS 5

INTRODUCTION 7

I. – LES PRINCIPALES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LES DEUX ASSEMBLÉES EN PREMIÈRE LECTURE 8

A. LES APPORTS ISSUS DES TRAVAUX DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE 8

1. L’information annuelle du Parlement et des magistrats sur l’application de la politique pénale 8

2. La publicité des instructions générales de politique pénale adressées par le garde des Sceaux 9

3. La consécration du principe d’impartialité dans l’exercice de l’action publique par les magistrats du parquet 9

B. LES PRINCIPALES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LE SÉNAT 10

1. Une tentative avortée de préciser le rôle du ministère public 10

2. L’affaiblissement des modalités d’information des magistrats sur l’application de la politique pénale 11

II. – LA POSITION DE VOTRE COMMISSION EN DEUXIÈME LECTURE 12

A. LE RÉTABLISSEMENT DE LA PROHIBITION SANS EXCEPTION DE TOUTE INSTRUCTION INDIVIDUELLE DU GARDE DES SCEAUX 12

B. UNE PUBLICITÉ MIEUX ENCADRÉE DES INSTRUCTIONS GÉNÉRALES DE POLITIQUE PÉNALE 12

C. LA RÉAFFIRMATION DE L’EXIGENCE D’IMPARTIALITÉ DANS L’EXERCICE DE L’ACTION PUBLIQUE PAR LES MAGISTRATS DU PARQUET 13

D. LE RÉTABLISSEMENT DU PRINCIPE D’UNE INFORMATION ANNUELLE DE L’ENSEMBLE DES MAGISTRATS SUR L’APPLICATION DE LA POLITIQUE PÉNALE DANS LEUR RESSORT 14

DISCUSSION GÉNÉRALE 15

EXAMEN DES ARTICLES 23

Article 1er (article 30 du code de procédure pénale) : Attributions du ministre de la Justice dans la conduite de la politique pénale déterminée par le Gouvernement 23

Article 1er bis A (nouveau) (intitulés du livre premier et du titre Ier du livre premier du code de procédure pénale) : Mise en cohérence des intitulés du code de procédure pénale 27

Article 1er bis (article 31 du code de procédure pénale) : Principe d’impartialité dans l’exercice de l’action publique par les magistrats du ministère public 28

Article 2 (article 35 du code de procédure pénale) : Attributions des procureurs généraux en matière de politique pénale 29

Article 2 bis (supprimé) (article 36 du code de procédure pénale) : Précision du pouvoir d’instruction des procureurs généraux dans les affaires individuelles 31

Article 3 (articles 39-1 et 39-2 [nouveau] du code de procédure pénale) : Attributions des procureurs de la République en matière de politique pénale 32

Article 4 : Champ d’application territoriale de la présente loi 34

TABLEAU COMPARATIF 37

LES PRINCIPALES MODIFICATIONS APPORTÉES
AU PROJET DE LOI PAR LA COMMISSION DES LOIS

Au cours de séance du mardi 9 juillet 2013, la commission des Lois a adopté le projet de loi (n° 1227), modifié par le Sénat, relatif aux attributions du garde des Sceaux et des magistrats du ministère public en matière de politique pénale et de mise en œuvre de l’action publique, en apportant à ce dernier les principales modifications suivantes :

—  Sur l’initiative du rapporteur, la Commission a rétabli, à l’article 1er, le principe de la publicité des instructions générales de politique pénale adressées par le garde des Sceaux, en prévoyant toutefois qu’il puisse y être dérogé pour des motifs liés à la sûreté de l’État, à la sécurité publique ou au déroulement des procédures engagées devant les juridictions ou des investigations préliminaires à de telles procédures.

—  À l’article 1er, la Commission a également, sur proposition du rapporteur, rétabli la prohibition faite au ministre de la Justice d’adresser des instructions individuelles dans les affaires individuelles.

—  Toujours sur proposition du rapporteur, la Commission a prolongé cette interdiction ainsi réaffirmée de toute instruction individuelle du garde des Sceaux, en rétablissant l’article 1er bis dans sa rédaction issue des travaux en première lecture de l’Assemblée nationale, afin de rappeler l’exigence d’impartialité, pour les magistrats du ministère public, dans l’exercice de l’action publique et l’application de la loi.

—  Par cohérence avec l’information annuelle du Parlement au niveau national, la Commission a adopté, aux articles 2 et 3, deux amendements du rapporteur, prévoyant au niveau local l’information annuelle de l’ensemble des magistrats du siège et du parquet de la cour d’appel et du tribunal de grande instance sur l’application, dans leur ressort, de la politique pénale.

MESDAMES, MESSIEURS,

Votre Commission est aujourd’hui saisie, en deuxième lecture, du projet de loi relatif aux attributions du garde des Sceaux et des magistrats du ministère public en matière de politique pénale et de mise en œuvre de l’action publique. Ce texte a été adopté en première lecture, le 4 juin 2013, par l’Assemblée nationale, puis par le Sénat, le 4 juillet dernier.

Le présent projet de loi a pour objectif, comme le préconisait déjà en juillet 1997 la commission de réflexion sur la justice, présidée par M. Pierre Truche, alors premier président de la Cour de cassation, « d’éliminer tout soupçon qui affecte l’indépendance de la justice tout entière du fait de la subordination statutaire des magistrats du parquet au garde des Sceaux » (1).

La fin du soupçon passe, d’une part, par la restitution au garde des Sceaux de la responsabilité de conduire et d’animer la politique pénale et, d’autre part, par le renforcement de l’indépendance du parquet, lequel se voit garantir, notamment avec la suppression des instructions du ministre de la Justice dans des affaires individuelles, le plein exercice de l’action publique.

À l’issue de ce premier examen par les deux chambres, votre rapporteur regrette que d’importantes divergences de vues subsistent entre elles. L’article 1er, article central du texte puisqu’il entend prohiber sans exception toute instruction du ministre de la Justice dans des affaires individuelles, a été privé par le Sénat d’une grande partie de sa portée.

Si le Sénat a souscrit, sous réserve de quelques adaptations, au dispositif proposé par l’Assemblée nationale, sur l’initiative de votre rapporteur, d’une information annuelle du Parlement sur la conduite de la politique pénale, il n’a pas fait siennes, en revanche, les modalités d’information des magistrats du siège et du parquet, au niveau de chaque cour d’appel et de chaque tribunal de grande instance, sur l’application de cette politique pénale.

Les deux assemblées ne sont pas davantage parvenues à s’accorder sur la publicité des instructions générales adressées par le garde des Sceaux. De la même manière, le rappel du principe d’impartialité dans l’exercice de l’action publique et l’application de la loi par les magistrats du parquet a fait l’objet d’appréciations divergentes entre l’Assemblée nationale et le Sénat.

Dans ces conditions, votre Commission est aujourd’hui saisie d’un texte qui s’éloigne dans une très large mesure de celui adopté, en première lecture, par notre Assemblée. Avant de présenter la position adoptée par votre Commission en deuxième lecture (II), votre rapporteur se propose de présenter les principales modifications apportées au texte en première lecture par chacune des deux assemblées (I).

*

* *

I. – LES PRINCIPALES MODIFICATIONS APPORTÉES
PAR LES DEUX ASSEMBLÉES EN PREMIÈRE LECTURE

A. LES APPORTS ISSUS DES TRAVAUX DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE

1. L’information annuelle du Parlement et des magistrats sur l’application de la politique pénale

Sur l’initiative de votre rapporteur, la Commission a complété, en première lecture, l’article 1er du présent projet de loi pour prévoir l’information annuelle du Parlement sur l’application de la politique pénale déterminée par le Gouvernement ainsi que sur la mise en œuvre des instructions générales adressées à cette fin par le ministre de la Justice aux magistrats du ministère public.

Dans cette perspective, le dispositif initialement envisagé par l’Assemblée nationale faisait obligation au garde des Sceaux de publier, chaque année, un rapport de politique pénale et, sur cette base, d’informer le Parlement, par une déclaration pouvant être suivie d’un débat, des conditions de mise en œuvre de la politique pénale déterminée par le Gouvernement et des instructions générales adressées à cette fin.

Par cohérence avec cette information annuelle, au niveau national, du Parlement, votre Commission avait également adopté, en première lecture, deux amendements de votre rapporteur complétant les articles 2 et 3 du présent projet de loi, pour organiser l’information annuelle, au niveau local, de l’ensemble des magistrats de la cour d’appel et du tribunal de grande instance sur l’application, dans leur ressort, de la politique pénale. Dans cette perspective, il revenait au procureur général et au procureur de la République de communiquer le rapport annuel de politique pénale respectivement au premier président de la cour d’appel et au président du tribunal de grande instance. Ce rapport devait ensuite faire l’objet d’un débat lors de la plus prochaine assemblée générale des magistrats du siège et du parquet au sein de chaque ressort.

2. La publicité des instructions générales de politique pénale adressées par le garde des Sceaux

Dans un souci de transparence, votre Commission avait, en première lecture, adopté un amendement de votre rapporteur, inscrivant à l’article 1er du présent projet de loi, le principe de la publicité des instructions générales de politique pénale, qui sont adressées par le garde des Sceaux aux magistrats du ministère public. En effet, votre rapporteur avait alors considéré que « la fin du soupçon, auquel le présent texte entend mettre fin, exige que chaque citoyen puisse avoir connaissance des choix de politique pénale arrêtés par le ministre de la Justice et qui seront désormais débattus, chaque année, au Parlement » (2).

3. La consécration du principe d’impartialité dans l’exercice de l’action publique par les magistrats du parquet

Dans le prolongement de la prohibition de toute instruction individuelle, notre Assemblée avait, en première lecture, inséré un nouvel article 1er bis ayant pour objet de rappeler, à l’article 31 du code de procédure pénale (3), le principe d’impartialité dans l’exercice de l’action publique et l’application de la loi par les magistrats du ministère public.

Le rappel de ce principe d’impartialité, lequel s’applique, sous certaines réserves, aux magistrats du parquet, membres de l’autorité judiciaire au sens de l’article 64 de la Constitution, dans l’exercice de leur mission, entend tirer les conséquences du fait que le garde des Sceaux ne peut exercer l’action publique, compétence désormais réservée aux seuls magistrats du ministère public.

En effet, dans le respect de l’organisation hiérarchique, fruit de notre histoire judiciaire et caractéristique du « parquet à la française », l’Assemblée nationale a estimé, en première lecture, qu’il existait, pour reprendre les termes employés par la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), un intérêt général consistant à « maintenir la confiance des citoyens dans l’indépendance et la neutralité politique des autorités de poursuite d’un État » (4). Telle était l’ambition poursuivie par le rappel, à l’article 31 du code de procédure pénale relatif à l’exercice de l’action publique, de l’exigence d’impartialité.

B. LES PRINCIPALES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LE SÉNAT

1. Une tentative avortée de préciser le rôle du ministère public

En première lecture, la commission des Lois du Sénat, sur l’initiative de son rapporteur, M. Jean-Pierre Michel, a souhaité préciser le rôle du ministère public à plusieurs égards.

À l’initiative de son rapporteur, la commission des Lois du Sénat a tout d’abord introduit dans le présent projet de loi un nouvel article 1er bis A, article qui modifie deux intitulés du livre premier du code de procédure pénale, afin de les mettre en cohérence avec la nouvelle répartition des compétences entre le garde des sceaux et les magistrats du ministère public.

Toujours sur proposition de son rapporteur, M. Jean-Pierre Michel, la commission des Lois du Sénat avait complété l’article 1er bis, introduit par notre assemblée afin de consacrer l’exigence d’impartialité du ministère public, par la référence au souci de l’intérêt général qui anime le parquet dans l’exercice de ses fonctions.

La commission des Lois du Sénat, à l’initiative de son rapporteur, avait également introduit dans le projet de loi un nouvel article 2 bis, destiné à encadrer les instructions adressées par le procureur général, en application de l’article 36 du code de procédure pénale, aux procureurs de la République dans des affaires individuelles, en substituant l’appréciation en opportunité du procureur général par une appréciation fondée sur les instructions générales de politique pénale.

Cependant, lors de l’examen en séance publique du présent projet de loi, le Sénat est revenu sur plusieurs de ces précisions – pour certaines bienvenues – apportées au rôle du ministère public. Ainsi, les sénateurs ont fait le choix, sur proposition du Gouvernement, de supprimer l’article 1er bis – que le rapporteur du Sénat avait pourtant lui-même enrichi en Commission –, au motif que l’introduction du principe d’impartialité à l’article 31 du code de procédure pénale pour les seuls magistrats du parquet nécessiterait parallèlement l’introduction de cette même référence dans tous les articles de ce code concernant les magistrats du siège.

Sur l’initiative du Gouvernement et avec un avis favorable du rapporteur, qui en était pourtant l’auteur, le Sénat a également supprimé, en séance publique, l’article 2 bis, au motif que la formulation retenue, dans un système comme le nôtre fondé sur l’opportunité des poursuites, restreignait à l’excès les possibilités d’instructions du procureur général.

Enfin, alors que la commission des Lois du Sénat avait, dans un premier temps, préféré s’en tenir à la rédaction initiale du projet de loi, qui supprimait les instructions du garde des Sceaux dans des affaires individuelles, et permettre ainsi une répartition claire des compétences entre le garde des Sceaux et les magistrats du parquet, qui ont seuls la charge de mettre en oeuvre l’action publique, le Sénat a fait le choix, en séance publique, de ne pas inscrire à l’article 1er la prohibition des instructions du ministre de la Justice dans les affaires individuelles, alors même que cette prohibition est au cœur de la réforme qui anime le présent projet de loi.

Dans le prolongement de ce recul, dont votre rapporteur ne peut se satisfaire (cf. infra), le Sénat, toujours lors de l’examen en séance publique, a supprimé le principe, consacré en première lecture par notre assemblée, de la publicité des instructions générales de politique pénale.

2. L’affaiblissement des modalités d’information des magistrats sur l’application de la politique pénale

À l’initiative de son rapporteur, la commission des Lois du Sénat a modifié le dernier alinéa de l’article 1er concernant l’information annuelle du Parlement. Cette disposition, introduite en première lecture par notre assemblée, prévoyait initialement l’organisation, chaque année, d’« une déclaration pouvant être suivie d’un débat ».

Or, M. Jean-Pierre Michel a considéré qu’« une telle disposition portait atteinte aux modalités de fixation de l’ordre du jour des assemblées parlementaires, telles que déterminées par l’article 48 de la Constitution » (5), le législateur ordinaire ne pouvant lier à l’avance l’ordre du jour parlementaire.

Partageant l’analyse de son rapporteur, la commission des Lois du Sénat a modifié, en première lecture, ces modalités d’information dans le respect des exigences constitutionnelles, en prévoyant à cet effet la transmission au Parlement du rapport public établi par le garde des Sceaux sur l’application de la politique pénale, rapport qui, le cas échéant, pourra être suivi d’un débat.

Si le Sénat a conservé le principe d’une information annuelle du Parlement sur la conduite de la politique pénale et l’application des circulaires générales adressées à cette fin par le ministre de la Justice, il n’a pas fait siennes, en revanche, les modalités d’information au niveau local des assemblées générales de magistrats.

Par conséquent, la commission des Lois du Sénat a supprimé le dernier alinéa des articles 2 et 3, introduits en première lecture par notre assemblée, qui prévoyait que le rapport annuel du procureur général et du procureur de la République était transmis respectivement au premier président de la cour d’appel et au président du tribunal de grande instance et faisait ensuite l’objet d’un débat lors de la plus prochaine assemblée générale des magistrats du siège et du parquet de leur juridiction respective.

Bien que « souscrivant à ce dispositif introduit par la commission des Lois de l’Assemblée nationale, qui permet aux magistrats du parquet de la juridiction, mais également aux magistrats du siège, de débattre de la politique pénale du Gouvernement, ce qui renforce la conception unitaire française de l’ordre judiciaire » (6), la commission des Lois du Sénat a estimé qu’il avait davantage sa place dans la partie réglementaire du code de l’organisation judiciaire qu’au sein du code de procédure pénale.

II. – LA POSITION DE VOTRE COMMISSION EN DEUXIÈME LECTURE

A. LE RÉTABLISSEMENT DE LA PROHIBITION SANS EXCEPTION DE TOUTE INSTRUCTION INDIVIDUELLE DU GARDE DES SCEAUX

La prohibition sans exception des instructions du ministre de la Justice dans les affaires individuelles a une valeur symbolique très forte, puisqu’elle marque la volonté du législateur de garantir, en toutes circonstances, l’impartialité des décisions des magistrats du parquet et de lever tout soupçon quant à une éventuelle motivation politique des interventions du ministre de la Justice.

Conformément aux engagements pris par le président de la République lors de la campagne de l’élection présidentielle (7), la présente réforme a également le mérite de graver, dans le marbre de la loi, l’interdiction des instructions individuelles à laquelle la garde des Sceaux s’est astreinte en pratique depuis sa prise de fonction en mai 2012.

En supprimant cette interdiction de toute instruction du garde des Sceaux dans des affaires individuelles, le Sénat a privé le présent projet de loi d’une grande partie de sa portée, ce dont votre rapporteur ne peut nullement se satisfaire. Par conséquent, la Commission a adopté, en deuxième lecture, un amendement de votre rapporteur rétablissant, à l’article 1er, la prohibition sans exception de toute instruction du garde des Sceaux dans les affaires individuelles.

B. UNE PUBLICITÉ MIEUX ENCADRÉE DES INSTRUCTIONS GÉNÉRALES DE POLITIQUE PÉNALE

En première lecture, le Sénat, à l’invitation du Gouvernement, n’a pas souhaité retenir la publicité des instructions générales de politique pénale. Loin d’être hostile par principe à la publicité des circulaires de politique pénale, la garde des Sceaux s’est, en effet, montrée réservée, à la faveur de l’examen d’un amendement de M. Jacques Mézard, sur l’opportunité de déroger à cette règle pour « motif impérieux d’ordre public ».

Estimant que ce critère était trop flou, la ministre de la Justice a proposé, dans l’attente d’une solution plus satisfaisante, la suppression de toute publicité. Le rapporteur de la commission des Lois du Sénat, M. Jean-Pierre Michel, a estimé, pour sa part, que les instructions générales « doivent pouvoir être rendues publiques sauf si l’intérêt général s’y oppose » (8).

Conscient des préoccupations légitimes exprimées par la garde des Sceaux et les sénateurs sur la nécessité d’encadrer les règles de publicité des circulaires de politique pénale, la Commission, sur l’initiative de votre rapporteur, a réaffirmé, à l’article 1er, le principe de publicité, tout en veillant à l’encadrer : ainsi, cette publicité pourra être écartée, dès lors qu’elle portera atteinte à la sûreté de l’État, à la sécurité publique ou au déroulement des procédures engagées devant les juridictions ou des investigations préliminaires à de telles procédures.

C. LA RÉAFFIRMATION DE L’EXIGENCE D’IMPARTIALITÉ DANS L’EXERCICE DE L’ACTION PUBLIQUE PAR LES MAGISTRATS DU PARQUET

Alors qu’en commission, le rapporteur Jean-Pierre Michel s’était montré favorable à l’inscription, à l’article 31 du code de procédure pénale, du principe d’impartialité des magistrats du parquet et avait même consacré, à ce même article, la référence à l’intérêt général qui doit animer le parquet dans l’exercice de ses fonctions, le Sénat, sur l’invitation du Gouvernement, est revenu en séance publique sur la consécration de ces deux principes et a supprimé, en conséquence, l’article 1er bis du présent texte.

Le Sénat a, en effet, estimé que le rappel de ces exigences pour les seuls magistrats du ministère public aurait parallèlement nécessité l’introduction de ces mêmes références dans tous les articles pertinents du code de procédure pénale concernant les magistrats du siège. Loin de partager cette analyse, votre rapporteur considère au contraire que le rappel législatif de cette exigence d’impartialité constitue le signe d’une première convergence, quand bien même elle serait relative, entre les approches constitutionnelle et conventionnelle concernant le rôle et le statut du « parquet à la française ».

Ayant rétabli à l’article 30 du code de procédure pénale la prohibition de toute instruction individuelle (cf. supra), votre Commission a logiquement adopté en deuxième lecture, dans le prolongement de cette interdiction désormais faite au garde des Sceaux, un amendement de son rapporteur, réaffirmant, à l’article 31 de ce même code, l’exigence d’impartialité qui est au fondement de l’exercice de l’action publique et de l’application de la loi par les magistrats du ministère public.

D. LE RÉTABLISSEMENT DU PRINCIPE D’UNE INFORMATION ANNUELLE DE L’ENSEMBLE DES MAGISTRATS SUR L’APPLICATION DE LA POLITIQUE PÉNALE DANS LEUR RESSORT

Estimant que ces règles relevaient non pas du domaine législatif, mais de la partie réglementaire du code de l’organisation judiciaire, partie dans laquelle figurent les dispositions relatives à l’ordre du jour des assemblées générales de magistrats, la commission des Lois du Sénat a supprimé, en première lecture, les dispositions – introduites par l’Assemblée nationale – relatives à l’information de l’ensemble des magistrats du siège et du parquet au niveau local, invitant par la même occasion le Gouvernement à les mettre en œuvre par voie réglementaire.

Afin de conserver le principe de l’information annuelle des magistrats au niveau de chaque cour d’appel et de chaque tribunal de grande instance sur la politique pénale conduite dans leur ressort, tout en répondant aux préoccupations légitimes exprimées par les sénateurs, la Commission a adopté, en deuxième lecture, un amendement de votre rapporteur, faisant peser sur les procureurs généraux une seule obligation de résultats – à savoir informer, au moins une fois par an, les magistrats du siège et du parquet de l’application de la politique pénale. Il ne s’agit en aucun cas d’une obligation de moyens, dans la mesure où votre Commission a fait le choix, en deuxième lecture, de ne pas préciser dans la loi les modalités de mise en œuvre de cette information, renvoyant ainsi implicitement au pouvoir réglementaire le soin de les définir.

DISCUSSION GÉNÉRALE

Au cours de sa séance du mardi 9 juillet 2013, la Commission examine, en deuxième lecture, le projet de loi, modifié par le Sénat, relatif aux attributions du garde des Sceaux et des magistrats du ministère public en matière de politique pénale et de mise en œuvre de l’action publique (n° 1227).

M. le président Jean-Jacques Urvoas. Nous examinons, en deuxième lecture, le projet de loi relatif aux attributions du garde des Sceaux et des magistrats du ministère public en matière de politique pénale et de mise en œuvre de l’action publique.

Je regrette, une fois de plus, les conditions dans lesquelles nous sommes contraints de travailler. Le Sénat a examiné ce texte en séance publique, jeudi dernier, et nous a transmis vendredi la version votée. Pour sa part, notre Commission pourra produire le texte issu de nos travaux en fin d’après-midi, après la présente séance. La réunion prévue à l’article 88 du Règlement a été fixée demain à quatorze heures trente. Cependant, le dépôt des amendements sera accepté jusqu’à l’ouverture de la séance publique à quinze heures.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec, rapporteur. Notre Commission est aujourd’hui saisie, en deuxième lecture, du projet de loi relatif aux attributions du garde des Sceaux et des magistrats du ministère public en matière de politique pénale et de mise en œuvre de l’action publique. Ce texte, adopté en première lecture par l’Assemblée nationale le 4 juin 2013, puis par le Sénat le 4 juillet dernier, a pour objectif d’éliminer tout soupçon affectant l’indépendance de la justice tout entière du fait de la subordination statutaire des magistrats du parquet au garde des Sceaux.

La fin du soupçon passe, d’une part, par la restitution au garde des Sceaux de la responsabilité de conduire et d’animer la politique pénale, et, d’autre part, par le renforcement de l’indépendance du parquet, lequel se voit garantir, notamment avec la suppression des instructions du ministre de la Justice dans des affaires individuelles, le plein exercice de l’action publique.

À l’issue de ce premier examen par les deux chambres, je constate et, dans le même temps, ne peux que regretter que d’importantes divergences de vues subsistent entre l’Assemblée nationale et le Sénat.

Ainsi l’article 1er, article central du texte puisqu’il visait initialement à prohiber sans exception toute instruction du ministre de la Justice dans des affaires individuelles, a été privé par le Sénat d’une grande partie de sa portée.

De la même manière, si le Sénat a souscrit au dispositif proposé par l’Assemblée nationale d’une information annuelle du Parlement sur la conduite de la politique pénale, il n’a pas fait siennes les modalités d’information – introduites par notre Commission – des magistrats du siège et du parquet, au niveau de chaque cour d’appel et de chaque tribunal de grande instance, sur l’application de cette politique.

Les deux assemblées ne sont pas davantage parvenues à s’accorder sur la publicité des instructions générales adressées par le garde des Sceaux. Enfin, le rappel du principe d’impartialité dans l’exercice de l’action publique a fait l’objet d’appréciations divergentes.

Notre Commission est donc saisie, en deuxième lecture, d’un texte qui s’éloigne dans une trop large mesure de celui que l’Assemblée nationale a adopté en première lecture.

En conséquence, je me propose de vous présenter brièvement les amendements que je défendrai au cours de la discussion afin de rétablir et de conserver l’esprit – à défaut de la lettre – de nos travaux en première lecture.

En premier lieu, je rappelle que l’ambition originelle du texte est de prohiber toute instruction du garde des Sceaux à l’occasion d’une affaire individuelle.

Cette prohibition sans exception des instructions individuelles a une valeur symbolique très forte : elle marque la volonté du législateur de garantir, en toutes circonstances, l’impartialité des décisions des magistrats du parquet et de lever tout soupçon quant à une éventuelle motivation politique des interventions du ministre de la Justice.

J’entends dire ici et là que les instructions individuelles seraient en nombre infime et qu’il n’y aurait donc pas lieu de les prohiber. Mais le principe même de l’instruction individuelle constitue une immixtion directe du pouvoir exécutif dans une procédure juridictionnelle et porte atteinte à la séparation des pouvoirs.

Dans le respect de l’engagement n° 53 du futur président de la République – « J’interdirai les interventions du Gouvernement dans les dossiers individuels » –, la présente réforme porte l’ambition de graver, dans le marbre de la loi, l’interdiction des instructions individuelles, interdiction à laquelle l’actuelle garde des Sceaux s’est astreinte en pratique depuis sa prise de fonction en mai 2012.

Dès cette date en effet, Christiane Taubira, soucieuse d’assurer l’indépendance de l’institution judiciaire, a décidé non seulement de renouer avec la pratique de ses prédécesseurs sous le gouvernement de Lionel Jospin – pratique dont je signale qu’elle fut, hélas, abandonnée par les gouvernements suivants –, mais également de l’inscrire expressément dans la loi. Tel doit être l’objet du présent projet de loi, si l’on veut en faire une avancée majeure dans le fonctionnement indépendant et impartial de notre justice.

En supprimant l’interdiction de toute instruction du garde des Sceaux dans des affaires individuelles, le Sénat a privé le texte d’une grande partie de sa portée. Nous ne pouvons en aucune manière nous en satisfaire. Je vous proposerai donc, à l’article 1er, de rétablir cette prohibition.

Le deuxième axe du texte est d’organiser, dans un souci de transparence, l’information des magistrats et, plus largement, des citoyens sur la conduite et l’application de la politique pénale sur l’ensemble de notre territoire.

En première lecture, par cohérence avec l’information annuelle du Parlement au niveau national, notre Commission, sur ma proposition, avait estimé nécessaire d’organiser, au niveau local, l’information annuelle de l’ensemble des magistrats des cours d’appel et des tribunaux de grande instance sur l’application, dans leur ressort, de la politique pénale.

Estimant que ces modalités d’information au niveau local ne relevaient pas du domaine législatif mais de la partie réglementaire du code de l’organisation judiciaire, le Sénat a supprimé ces dispositions, invitant par la même occasion le Gouvernement à les mettre en œuvre par voie réglementaire.

Afin de conserver le principe d’une information annuelle des magistrats au niveau de chaque cour d’appel et de chaque tribunal de grande instance sur la politique pénale conduite dans leur ressort, tout en répondant aux préoccupations légitimes exprimées par les sénateurs, je vous inviterai à adopter un amendement ne faisant peser sur les procureurs généraux qu’une obligation de résultat : informer, au moins une fois par an, les magistrats du siège et du parquet de l’application de la politique pénale. Il ne s’agit en aucune manière d’une obligation de moyens, dans la mesure où le présent projet de loi ne précisera pas les modalités de mise en œuvre de cette information, renvoyant implicitement le soin de les définir au pouvoir réglementaire.

Mais la connaissance de la politique pénale ne peut pas, à mon sens, être réservée à la seule représentation nationale et aux seuls magistrats, elle doit aussi s’ouvrir à tous les justiciables.

Je considère en effet que la fin du soupçon, qui est l’objectif de ce texte, exige que chaque citoyen puisse avoir connaissance des choix de politique pénale arrêtés par le ministre de la Justice, choix qui seront désormais débattus chaque année au Parlement.

C’est dans ce souci de transparence – souci qui a constamment guidé nos travaux – que notre Commission a, sur ma proposition, inscrit en première lecture, dans la lettre même du code de procédure pénale, le principe de la publicité des instructions générales de politique pénale adressées par le garde des Sceaux.

Le Sénat n’a pas souhaité retenir cette publicité. Loin d’y être hostiles par principe, la garde des Sceaux et le rapporteur du Sénat ont tous deux estimé que les instructions générales devaient pouvoir être rendues publiques, sauf si l’intérêt général s’y opposait.

Conscient des préoccupations exprimées sur la nécessité d’encadrer les règles de publicité des circulaires de politique pénale, je vous proposerai de réaffirmer ce principe de publicité tout en veillant à l’encadrer : la publicité des instructions générales pourra ainsi être écartée dès lors qu’elle porte atteinte à la sûreté de l’État, à la sécurité publique ou au déroulement des procédures engagées devant les juridictions ou des investigations préliminaires à de telles procédures.

Le troisième point sur lequel il est nécessaire d’améliorer le texte est la reconnaissance, dans le code de procédure pénale, de l’exigence d’impartialité dans l’exercice de l’action publique par le parquet.

En première lecture, dans le prolongement de la prohibition de toute instruction individuelle, notre Assemblée, après en avoir longtemps débattu, avait estimé nécessaire que ce principe soit rappelé à l’article 31 du code de procédure pénale.

Alors qu’en commission des Lois du Sénat, le rapporteur Jean-Pierre Michel s’était montré favorable à l’inscription du principe d’impartialité des magistrats du parquet et avait consacré, à l’article 31 du code de procédure pénale, la référence à l’intérêt général qui doit animer le parquet dans l’exercice de ses fonctions, le Sénat est revenu en séance publique sur la consécration de ces deux principes et a supprimé, en conséquence, l’article 1er bis du texte.

Or, le rappel législatif de cette exigence d’impartialité constitue le signe d’une première convergence indispensable entre les approches constitutionnelle et conventionnelle concernant le rôle et le statut du « parquet à la française », qu’il ne s’agit nullement de remettre en cause mais bien de conforter.

Par cohérence avec le rétablissement, à l’article 1er, de la prohibition de toute instruction individuelle, je vous proposerai d’adopter un amendement rétablissant l’article 1er bis et réaffirmant cette exigence d’impartialité sur laquelle doivent se fonder l’exercice de l’action publique et l’application de la loi par les magistrats du ministère public.

Dans le respect de l’organisation hiérarchique, fruit de notre histoire judiciaire et caractéristique du « parquet à la française », je suis personnellement convaincu qu’il existe, pour reprendre les termes employés par la Cour européenne des droits de l’homme, un intérêt général consistant à « maintenir la confiance des citoyens dans l’indépendance et la neutralité politique des autorités de poursuite d’un État ». Telle est l’ambition que je poursuis en voulant rappeler l’exigence d’impartialité qui s’impose à l’exercice de l’action publique par les magistrats du parquet.

Je vous demanderai, naturellement, d’adopter en deuxième lecture ce projet de loi, dans le respect de l’économie générale des amendements que je viens de présenter et qui avaient recueilli une large approbation en première lecture dans l’hémicycle.

M. Sébastien Denaja. Au préalable, je voudrais dire combien il est difficile de mener un travail parlementaire satisfaisant dans des délais aussi serrés. Comme vous, monsieur le président, je regrette qu’il soit accordé si peu de considération au travail parlementaire et, in fine, au droit que nous sommes censés élaborer.

Sur le fond, ce texte était en cohérence avec le projet de loi constitutionnelle portant réforme du Conseil supérieur de la magistrature (CSM), qui défendait une conception indépendante de la justice, à l’opposé de la position traditionnelle de la droite, qui considère comme normale la soumission de la justice au pouvoir politique. Je déplore que le Sénat n’ait pas voté cette réforme dans des termes proches de ceux de l’Assemblée nationale. Son report est un mauvais coup porté à l’institution judiciaire, à son indépendance et, plus généralement, à la démocratie. Une fois de plus, la Haute assemblée semble être le théâtre d’une basse politique.

Je considère cependant que le présent texte possède une cohérence propre et mérite d’être voté, moyennant les modifications que nous y apporterons en deuxième lecture.

Il est en effet indispensable de modifier plusieurs points de ce projet de loi, d’abord en consacrant l’interdiction, pour le ministre de la Justice, de donner des instructions au parquet dans des affaires individuelles. Nous constatons, chaque jour, le flot incessant de ces affaires que la justice doit pouvoir traiter avec sérénité et sans faire l’objet d’une pression quelconque de la part du pouvoir politique. Il est vital que les Français retrouvent confiance dans leur justice à cet égard.

Il convient également de clarifier la définition de la politique pénale. En 2011, les tribunaux recevaient près d’une circulaire générale de politique pénale tous les trois jours. Une telle frénésie n’incite pas à la sérénité dans l’administration de la justice !

Bref, nous devons revenir aux fondamentaux d’une politique déterminée par le garde de Sceaux et appliquée par les parquets dans le sens de l’intérêt général.

Il faut aussi œuvrer à la sécurisation de notre droit vis-à-vis des règles européennes. Il suffit de relire l’arrêt Medvedyev rendu par la Cour européenne des droits de l’homme en 2010, pour comprendre qu’une grande partie de nos procédures judiciaires pourraient être mises en péril, si nous ne précisons pas la place du parquet comme entité hiérarchisée, certes, mais exempte de toutes pressions dans les affaires individuelles.

Je rejoins le rapporteur sur la nécessité de travailler à la transparence et à la publicité des instructions générales, même si je ne souscris pas aux dérogations à la publicité que prévoit son amendement CL 1.

Notre assemblée doit également revenir sur la nécessaire information du Parlement. Je ne partage pas les craintes constitutionnelles émises par le Sénat. L’instauration d’un débat annuel au Parlement sur la politique pénale de notre pays serait une marque importante de transparence vis-à-vis de nos concitoyens.

Le Sénat apporte souvent d’utiles précisions légistiques et des amendements de sagesse, mais il a procédé, en l’espèce, à un écrémage complet du texte que nous avons voté en première lecture. Nous ne pouvons évidemment pas nous en satisfaire. Il est de notre responsabilité de parlementaires et de législateurs de rétablir le texte dans l’équilibre que nous avions trouvé à l’issue de la première lecture. Au nom du groupe SRC, je réaffirme donc notre attachement à une définition claire de la politique pénale générale, à la transparence et au respect de l’intérêt général, à une évaluation des politiques ressort par ressort. Nous soutiendrons plusieurs des amendements déposés par le rapporteur en ce sens.

M. Patrick Devedjian. Comment, monsieur le rapporteur, concilier le principe d’impartialité que vous défendez à travers un amendement avec le principe d’opportunité des poursuites ? Ce dernier n’implique-t-il pas une part de subjectivité ?

La défense est-elle, à vos yeux, tenue à l’impartialité ? Si, comme je l’imagine, vous répondez par la négative, la considérez-vous comme étant le symétrique de l’accusation ?

M. Georges Fenech. Il est un peu agaçant, je le dis sans agressivité, d’entendre les représentants de la majorité donner sans cesse des leçons de morale. L’expression de « basse politique », appliquée à la Haute assemblée, ne laisse pas de me choquer. Toutes les opinions sont respectables : celles de l’opposition méritent, comme les autres, d’être considérées sans encourir la suspicion de protéger je ne sais quels intérêts.

Le titre de procureur de la République marque bien que celle-ci est une et indivisible. Comment, de ce point de vue, entendez-vous assurer l’égalité des justiciables face à des procureurs qui, s’agissant de l’opportunité des poursuites, n’auront plus de comptes à rendre qu’à eux-mêmes ? Ils deviendront plutôt des roitelets de la République ayant le pouvoir de décider, chacun dans son ressort, de la politique pénale, puisque les circulaires générales ne sont pas juridiquement contraignantes. L’article 20 de la Constitution dispose pourtant que « le Gouvernement détermine et conduit la politique de la nation », dont la politique pénale est un volet essentiel. Quelle légitimité le procureur de la République aurait-il pour en décider ? La seule légitimité que je connaisse est celle que l’on tire du suffrage universel : responsable de la politique pénale, le garde des Sceaux doit avoir la possibilité d’adresser au parquet des instructions individuelles écrites et versées au dossier – comme l’avait voulu la réforme « Méhaignerie » – afin d’harmoniser l’action publique sur l’ensemble du territoire.

La majorité, avec ce texte comme avec d’autres, ne cesse de jeter la suspicion. En quoi le garde des Sceaux serait-il suspect d’exprimer, en toute transparence, le point de vue du Gouvernement de la nation ? Au demeurant, la suppression des instructions individuelles écrites n’empêchera jamais les appels téléphoniques ou les rencontres dans les couloirs de la chancellerie et des parquets généraux, d’autant que le garde des Sceaux conserve un pouvoir de proposition pour la nomination de ces magistrats, même si elle requiert l’avis conforme du CSM.

L’article 30 du code de procédure pénale, je le rappelle, dispose que le garde des Sceaux peut donner des instructions de poursuite, mais non de classement. Les instructions individuelles, qui sont et doivent rester rarissimes, peuvent s’avérer utiles, par exemple lors de conflits syndicaux sans lien avec la situation particulière du ressort et susceptibles de troubler l’ordre public. Comment entendez-vous, après les avoir supprimées, assurer l’égalité des justiciables sur l’ensemble du territoire ?

M. Guillaume Larrivé. Je me réjouis en la circonstance du bicamérisme car, en vidant le texte de son contenu, le Sénat a respecté l’esprit des institutions de la Ve République. Il est sain, en effet, que le garde des Sceaux demeure l’autorité hiérarchique de plein exercice du parquet.

L’opposition du Sénat au projet de loi constitutionnelle portant réforme du CSM me donne une autre occasion de me féliciter de notre système bicaméral, le ministre chargé des relations avec le Parlement ayant annoncé l’abandon de ce texte funeste, que nous avions combattu en première lecture.

Enfin, je m’étonne que le président de la Conférence nationale des procureurs de la République ait écrit à plusieurs députés pour les inviter à voter le projet de loi. Ce qui constitue de véritables « instructions individuelles » me semble peu conforme au principe de séparation des pouvoirs.

M. le président Jean-Jacques Urvoas. Je vous rappelle que trois membres du CSM ont signé, dans un journal fort respectable, une tribune libre pour défendre la position inverse.

M. Guillaume Larrivé. La garde des Sceaux leur a écrit ; j’imagine qu’elle rappellera également le président de la Conférence nationale des procureurs à ses devoirs.

M. Marc Dolez. Je déplore moi aussi les conditions d’examen de ce texte, et plus généralement celles de la présente session extraordinaire : nous nous en étions d’ailleurs ouverts en conférence des présidents.

Il est tout aussi regrettable que les conditions ne soient pas réunies pour mener la réforme du CSM à son terme, d’autant qu’elle prend sens par rapport au texte que nous examinons.

Enfin, je souscris à l’analyse du rapporteur sur la nécessité de rétablir, pour l’essentiel, le texte que nous avions voté en première lecture, à commencer par l’interdiction des instructions individuelles.

M. le rapporteur. Les termes du débat n’ont pas changé depuis l’examen en première lecture. Nous avions alors évoqué, monsieur Devedjian, le principe d’impartialité au regard de l’opportunité des poursuites, principe qui n’a pas le même contenu pour les magistrats du siège et ceux du parquet, bien qu’il soit défini pour les premiers comme pour les seconds par l’ordonnance de 1958. L’impartialité est, selon la définition qu’en donnent de nombreux spécialistes, le principe par lequel tout magistrat exerce ses fonctions sans considération des contingences extérieures à sa responsabilité judiciaire : en ce sens, elle n’est nullement incompatible avec le principe de l’opportunité des poursuites. Nul d’entre nous, je pense, ne défend d’ailleurs le principe de la légalité des poursuites. Reste que l’appréciation, non seulement de l’opportunité, mais aussi de la nature de l’action publique, peut en effet requérir l’exigence d’impartialité.

La défense et l’accusation ne relèvent évidemment pas du même régime : l’avocat de la défense représente une personne dont il a reçu mandat de défendre les intérêts ; le procureur de la République engage les poursuites au nom de la société dans le cadre défini par la loi. Certains spécialistes, il est vrai, souhaitent que l’un et l’autre disposent de capacités d’agir strictement analogues. En tout état de cause, monsieur Devedjian, nous pouvons nous retrouver sur la nécessité de mieux assurer l’égalité entre les droits de la défense et de l’accusation.

En ce qui concerne enfin l’autonomie des procureurs, nous n’altérons nullement le principe selon lequel le garde des Sceaux conduit la politique pénale déterminée par le Gouvernement, mais nous instaurons un dispositif selon lequel le procureur général et le procureur de la République rendent compte de la mise en œuvre de la politique pénale dans leur ressort, y compris au regard de la cohérence de fonctionnement, puisque le procureur général veille à l’application de cette politique en fonction des spécificités du ressort et engage les procureurs à faire de même dans leurs ressorts respectifs. Nous en avons déjà parlé en première lecture.

La Commission en vient à l’examen des articles.

EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er

(article 30 du code de procédure pénale)


Attributions du ministre de la Justice dans la conduite
de la politique pénale déterminée par le Gouvernement

Le présent article réécrit, dans son intégralité, l’article 30 du code de procédure pénale, afin de définir les attributions du ministre de la Justice dans la conduite de la politique pénale déterminée par le Gouvernement.

Il présente, à cette fin, un double objet. Il reprend et consacre, en premier lieu, la possibilité pour le ministre de la Justice, dans la conduite de la politique pénale, d’adresser aux magistrats du ministère public des instructions générales. Il supprime, en second lieu, la possibilité aujourd’hui reconnue au garde des Sceaux d’adresser à ces mêmes magistrats des instructions dans des affaires individuelles.

En première lecture, dans un souci légitime de transparence, votre Commission avait adopté un amendement de votre rapporteur, consacrant le principe de la publicité des instructions générales de politique pénale, qui sont adressées par le garde des Sceaux aux magistrats du ministère public. Votre rapporteur avait, en effet, considéré que la fin du soupçon, auquel le présent texte entend conduire, exigeait que chaque citoyen puisse avoir connaissance des choix de politique pénale arrêtés par le ministre de la Justice et qui seront désormais débattus, chaque année, au Parlement.

Lors de l’examen en séance publique du présent projet de loi, le Sénat a adopté, en première lecture, un amendement du Gouvernement supprimant la publicité des instructions générales de politique pénale. Lors des débats, Mme Christiane Taubira, ministre de la Justice, a indiqué que « ces circulaires ne sont pas confidentielles – elles sont publiées au Bulletin officiel – mais il peut être justifié, dans certains cas, que le garde des Sceaux donne des instructions qui ne soient pas rendues publiques. Cela est de nature à rendre l’action de la justice plus efficace sur un certain nombre de contentieux » (9).

Loin d’être hostile par principe à la publicité des circulaires de politique pénale, la garde des Sceaux s’est, en revanche, montrée réservée, à la faveur de l’examen d’un amendement de M. Jacques Mézard, sur l’opportunité de déroger à cette règle pour « motif impérieux d’ordre public ». Estimant que ce critère était sujet à controverse, la ministre de la Justice a proposé, dans l’attente d’une solution plus satisfaisante, la suppression de toute publicité. Le rapporteur de la commission des Lois du Sénat, M. Jean-Pierre Michel, a estimé, pour sa part, que les instructions générales « doivent pouvoir être rendues publiques sauf si l’intérêt général s’y oppose » (10).

Conscient des préoccupations légitimes exprimées par la garde des Sceaux et les sénateurs sur la nécessité d’encadrer les règles de publicité des circulaires de politique pénale, votre rapporteur a proposé à votre Commission, en deuxième lecture, de consacrer au présent article le principe de la publicité, tout en prévoyant que celle-ci puisse être écartée, dès lors qu’elle est de nature à porter atteinte à la sûreté de l’État, à la sécurité publique ou au déroulement des procédures engagées devant les juridictions ou des investigations préliminaires à de telles procédures. Cette rédaction s’inspire des règles encadrant actuellement la communication de certains documents administratifs, en application de l’article 6 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d’amélioration des relations entre l’administration et le public.

En première lecture, sur proposition de votre rapporteur, la Commission avait également complété le présent article, pour prévoir l’information annuelle du Parlement sur l’application de la politique pénale déterminée par le Gouvernement.

Dans sa rédaction issue des travaux en première lecture de notre assemblée, le présent article faisait obligation au garde des Sceaux d’informer le Parlement par une déclaration, laquelle pouvait être suivie d’un débat, des conditions de mise en œuvre de la politique pénale et des instructions générales adressées à cette fin par le ministre de la Justice.

La commission des Lois du Sénat, sur proposition de son rapporteur, a fait le choix, en première lecture, de réécrire les dispositions relatives à l’information du Parlement, afin d’en assurer la conformité aux exigences constitutionnelles. En effet, si le débat prévu au Parlement sur la politique pénale était facultatif, la déclaration présentait, pour sa part, un caractère impératif. Or, comme l’a souligné à juste titre M. Jean-Pierre Michel, « le législateur ordinaire ne peut lier à l’avance l’ordre du jour parlementaire, sans porter atteinte aux modalités de fixation de l’ordre du jour des assemblées, déterminées par l’article 48 de la Constitution » (11). En 2010, à l’occasion de l’examen de la loi organique relative au Conseil économique, social et environnemental, le Conseil constitutionnel a ainsi censuré des dispositions prévoyant que la remise d’un rapport annuel donnait obligatoirement lieu à un débat (12).

Pour éviter tout risque de censure constitutionnelle, la commission des Lois du Sénat a prévu la transmission automatique du rapport de politique pénale du garde des Sceaux au Parlement, tout en veillant, d’une part, à supprimer la déclaration obligatoire du garde des Sceaux et, d’autre part, à rendre facultatif le débat sur ce rapport. Il appartiendra ainsi au Gouvernement et aux instances compétentes des deux assemblées de le rendre systématique.

Enfin, lors de l’examen en séance publique du présent projet de loi, le Sénat a adopté, en première lecture, un amendement de M. Jean-Jacques Hyest, supprimant le troisième alinéa de l’article 30 du code de procédure pénale – tel que réécrit par le présent article –, lequel disposait expressément, dans sa rédaction initiale, que le garde des Sceaux « ne peut adresser aux magistrats du ministère public aucune instruction dans des affaires individuelles ».

La prohibition sans exception des instructions du ministre de la Justice dans les affaires individuelles a une valeur symbolique très forte, puisqu’elle marque la volonté du législateur de garantir l’impartialité des décisions des magistrats du parquet et de lever tout soupçon quant à une éventuelle motivation politique des interventions du ministre de la Justice. Elle consacre également dans la loi l’interdiction des instructions individuelles à laquelle la garde des Sceaux s’est astreinte en pratique depuis sa prise de fonction en mai 2012.

En supprimant cette interdiction de toute instruction du garde des Sceaux dans les affaires individuelles, le Sénat a privé le présent projet de loi d’une grande partie de sa portée, ce dont votre rapporteur ne peut nullement se satisfaire. Par conséquent, il a proposé à votre Commission d’adopter, en deuxième lecture, un amendement rétablissant, au troisième alinéa de l’article 30 du code de procédure pénale, la prohibition sans exception de toute instruction du garde des Sceaux dans les affaires individuelles.

*

* *

La Commission est saisie de l’amendement CL 1 du rapporteur.

M. le rapporteur. Je propose de rétablir la publicité des instructions générales ; mais, afin de tenir compte des risques qui pourraient en découler, nous nous inspirons de la rédaction de la loi du 17 juillet 1978 en soustrayant à l’obligation de publicité les éléments dont la communication est de nature à porter atteinte à la sûreté de l’État, à la sécurité publique ou au déroulement des procédures engagées devant les juridictions ou des investigations préliminaires à de telles procédures.

Nous nous contentons ainsi d’inscrire dans le code de procédure pénale les motifs que tout citoyen pourrait se voir opposer au titre de la loi de 1978, s’il demandait communication d’une instruction générale donnée par voie de circulaire, laquelle constitue un acte administratif.

M. Sébastien Denaja. Je salue la réintroduction du principe de publicité des instructions générales, mais je suis plus dubitatif quant à l’utilité des dérogations qui lui sont apportées – à rebours de votre souhait en première lecture, monsieur le rapporteur.

Si la mention de ces dérogations ne fait que reprendre l’article 6 de la loi de 1978, elle est inutilement redondante dès lors que les instructions générales sont considérées comme des documents administratifs. Mais, en réalité, elle ne le reprend pas intégralement, puisque le secret de la défense nationale ou la conduite de la politique extérieure de la France, entre autres motifs de non-publicité, ne sont pas indiqués. Pour quelle raison ?

Enfin, ces exceptions sont-elles justifiées dès lors qu’il s’agit d’instructions générales qui ne mettent personne en cause nommément ? Le rapporteur pourrait-il citer des exemples, même hypothétiques, de cas dans lesquels une instruction générale en matière de terrorisme serait de nature à porter atteinte aux intérêts de l’État ?

M. le rapporteur. En nous inspirant de la loi de 1978 en matière de restrictions à la communication des documents administratifs, nous avons voulu tenir compte des observations formulées en séance publique, notamment par la garde des Sceaux elle-même, sur les conséquences de la publicité des instructions générales dans certaines situations : lorsque la sûreté de l’État ou la sécurité publique sont en jeu ou lorsque des procédures sont engagées ou sur le point de l’être.

Je rappelle que l’instruction générale n’est actuellement communiquée que dans le cadre de la procédure de transmission des documents administratifs, qui prévoit la saisine de la Commission d’accès aux documents administratifs (CADA) en cas de refus.

Des restrictions énumérées par la loi de 1978, nous n’avons mentionné que celles qui sont directement liées aux enjeux de la politique pénale et de sa mise en œuvre sur un territoire donné, par exemple l’appui, dans certaines zones, à la lutte contre le trafic international de stupéfiants ou contre les réseaux terroristes. Dans ces cas, le garde des Sceaux doit pouvoir transmettre des instructions générales et les rendre publiques, en en soustrayant les seuls éléments de nature à altérer l’efficacité des poursuites ou des investigations préliminaires en cours.

Par cet amendement, j’ai tenté de parvenir à un compromis entre la position de l’Assemblée nationale et celle du Sénat, après être revenu également vers la chancellerie, elle aussi gênée par le dispositif.

M. Dominique Raimbourg. On peut citer l’exemple d’une instruction générale qui organiserait le transfert de terroristes arrêtés sur le territoire pour les déférer au parquet de Paris par hélicoptère depuis des aérodromes militaires. De telles informations n’ont pas à être communiquées. L’amendement institue un principe, la publicité, et l’assortit prudemment d’exceptions qui correspondent à des cas tout à fait particuliers, dans lesquels l’organisation même de la répression serait mise en danger.

M. Guillaume Larrivé. Le débat entre le rapporteur et l’orateur du groupe SRC démontre par contraste que la meilleure version est celle du Sénat, qui pose en principe l’absence de publicité mais permet l’application de la loi de 1978, y compris des garanties procédurales de respect du contradictoire qu’apporte l’intervention de la CADA.

Nous poursuivons tous le même objectif : il est raisonnable que certaines instructions soient rendues publiques et que d’autres ne le soient pas. Pour y parvenir, la rédaction la plus satisfaisante me paraît être celle du Sénat.

M. Sébastien Denaja. Je tiens à rassurer notre collègue Larrivé : l’orateur du groupe SRC est parfaitement en phase avec le rapporteur, qui se trouve être socialiste, et même avec la chancellerie, puisque je me suis contenté de reprendre les arguments initiaux de l’un et de l’autre.

Malgré les délais très contraints qui nous sont impartis, il est permis de prendre quelques minutes pour s’expliquer. Mais soyez sans inquiétude, monsieur Larrivé : les députés du groupe SRC voteront l’amendement du rapporteur, dussent-ils se donner une nuit de réflexion pour s’assurer qu’ils ne se sont pas trompés d’ici à l’examen en séance publique !

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement CL 2 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement tend à rétablir la prohibition de toute instruction du garde des Sceaux dans les affaires individuelles, supprimée en première lecture par le Sénat.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 1er modifié.

Article 1er bis A (nouveau)

(intitulés du livre premier et du titre Ier du livre premier du code de procédure pénale)


Mise en cohérence des intitulés du code de procédure pénale

Issu d’un amendement adopté en première lecture par la commission des Lois du Sénat, sur proposition de son rapporteur, M. Jean-Pierre Michel, le présent article tire les conséquences de la clarification, opérée à l’article 30 du code de procédure pénale (cf. supra), des compétences respectives du ministre de la Justice et des magistrats du ministère public, la conduite de la politique pénale étant réservée au premier et l’exercice de l’action publique confié exclusivement aux seconds.

Il modifie, à cette fin, les titres des deux divisions concernées du code de procédure pénale, à savoir le titre Ier « Des autorités chargées de la conduite de la politique pénale, de l’action publique et de l’instruction » du livre premier « De la conduite de la politique pénale, de l’exercice de l’action publique et de l’instruction » de ce code.

La Commission adopte l’article sans modification.

Article 1er bis

(article 31 du code de procédure pénale)


Principe d’impartialité dans l’exercice de l’action publique
par les magistrats du ministère public

Le présent article a pour objet, dans le prolongement de la prohibition de toute instruction individuelle (cf. supra), de rappeler à l’article 31 du code de procédure pénale (13) le principe d’impartialité dans l’exercice de l’action publique et l’application de la loi par les magistrats du ministère public.

Issu d’un amendement de votre rapporteur, adopté en première lecture par votre Commission, le présent article faisait initialement référence aux « principes d’indépendance et d’impartialité » auxquels le parquet est tenu dans l’exercice de l’action publique et l’application de la loi.

Toutefois, les débats au sein de votre Commission avaient montré, en première lecture, la difficulté à apprécier la portée réelle de l’indépendance des magistrats du parquet, dès lors que ces derniers s’inscrivent dans le cadre d’une organisation hiérarchique avec à son sommet le garde des Sceaux. En outre, la notion d’indépendance fait aujourd’hui l’objet d’appréciations divergentes entre les jurisprudences constitutionnelle et conventionnelle.

Dans ces conditions, l’Assemblée nationale, sur l’initiative de votre rapporteur, avait adopté, lors de l’examen en séance publique du présent projet de loi en première lecture, un amendement proposant de ne pas faire figurer, à l’article 31 du code de procédure pénale, la référence au principe d’indépendance dans la conduite de l’action publique par les magistrats du ministère public, tout en conservant la référence au seul principe d’impartialité.

En commission des Lois du Sénat, son rapporteur, M. Jean-Pierre Michel, s’était montré « favorable à l’inscription, à l’article 31 du code de procédure pénale, de la référence à l’impartialité des magistrats du parquet dans l’exercice de leurs fonctions, prévue par l’Assemblée nationale » (14) et avait également consacré, à ce même article, la référence au souci de l’intérêt général qui anime le parquet dans l’exercice de ses fonctions.

Cependant, lors de l’examen en séance publique du présent projet de loi, le Sénat a adopté, en première lecture, un amendement du Gouvernement, ayant reçu un avis favorable du rapporteur, supprimant le présent article, au motif que l’introduction du principe d’impartialité à l’article 31 du code de procédure pénale pour les seuls magistrats du parquet nécessiterait parallèlement l’introduction de cette même référence dans tous les articles de ce code concernant les magistrats du siège.

Votre rapporteur ne partage pas cette analyse et considère que le rappel législatif du principe d’impartialité constitue le signe d’une première convergence, quand bien même elle serait relative, entre les approches constitutionnelle et conventionnelle concernant le rôle et le statut du « parquet à la française ». Ayant rétabli à l’article 30 du code de procédure pénale la prohibition de toute instruction individuelle (cf. supra), votre Commission a logiquement adopté en deuxième lecture, dans le prolongement de cette interdiction désormais faite au garde des Sceaux, un amendement de son rapporteur, rappelant le principe d’impartialité qui doit être au fondement de l’exercice de l’action publique et de l’application de la loi par les magistrats du ministère public.

*

* *

La Commission est saisie de l’amendement CL 3 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement tend à rétablir l’article 1er bis, supprimé en première lecture par le Sénat, afin de réintroduire la notion d’impartialité.

La Commission adopte l’amendement.

L’article 1er bis est ainsi rétabli.

Article 2

(article 35 du code de procédure pénale)


Attributions des procureurs généraux en matière de politique pénale

Le présent article modifie l’article 35 du code de procédure pénale, afin de clarifier les attributions des procureurs généraux en matière de politique pénale, sous l’angle, d’une part, de la déclinaison locale des orientations nationales définies par le garde des Sceaux et, d’autre part, de l’information de la chancellerie sur l’application de ces orientations par les magistrats du ministère public.

S’il ne modifie pas les premier et quatrième alinéas de l’article 35 du code de procédure pénale, le présent article en réécrit intégralement les deuxième et troisième alinéas, en vue de :

—  reconnaître aux procureurs généraux un pouvoir de déclinaison locale des instructions générales de politique pénale définies par le ministre de la Justice ainsi qu’un pouvoir d’évaluation de leur application par les procureurs de la République de leur ressort ;

—  organiser la « remontée de l’information » entre les procureurs généraux et le garde des Sceaux sur la mise en œuvre locale de la politique pénale.

À l’initiative de votre rapporteur, la Commission avait précisé, en première lecture, que les fonctions incombant aux procureurs généraux en matière d’animation et de coordination de l’action des procureurs de la République, au sein d’un même ressort de cour d’appel, s’exercent tant en matière de prévention que de répression des infractions à la loi pénale.

Votre Commission avait également adopté, en première lecture, un amendement de votre rapporteur, précisant la périodicité annuelle du rapport que le procureur général établira sur l’activité et la gestion des parquets de son ressort.

Par cohérence avec l’information annuelle du Parlement prévue au niveau national (cf. supra), votre Commission, sur l’initiative de votre rapporteur, avait complété le présent article, en première lecture, par un nouvel alinéa organisant, au niveau de chaque cour d’appel, l’information annuelle de l’ensemble des magistrats du siège et du parquet sur l’application, dans le ressort, de la politique pénale.

À cette fin, le texte issu des travaux en première lecture de l’Assemblée nationale faisait obligation au procureur général de communiquer au premier président de la cour d’appel le rapport annuel de politique pénale établi à l’attention du garde des Sceaux. Ce rapport devait ensuite faire l’objet d’un débat lors de la plus prochaine assemblée générale des magistrats du siège et du parquet au sein de chaque ressort de cour d’appel.

Le rapporteur au nom de la commission des Lois du Sénat, M. Jean-Pierre Michel, tout en reconnaissant « le bien fondé d’un dispositif destiné à permettre aux magistrats du parquet de la juridiction, mais également aux magistrats du siège, de débattre de la politique pénale du Gouvernement, ce qui renforce la conception unitaire française de l’ordre judiciaire », s’est cependant interrogé « sur l’opportunité d’introduire une telle disposition au sein du code de procédure pénale plutôt que dans le code de l’organisation judiciaire, qui fixe les règles relatives aux assemblées générales de magistrats » (15).

Estimant que ces règles relevaient non pas du domaine législatif, mais de la partie réglementaire du code de l’organisation judiciaire, partie dans laquelle figurent les dispositions relatives à l’ordre du jour des assemblées générales de magistrats, la commission des Lois du Sénat a supprimé, en première lecture, les dispositions relatives à l’information de l’ensemble des magistrats de la cour d’appel, invitant par la même occasion le Gouvernement à les mettre en œuvre par voie réglementaire.

Afin de conserver le principe d’une information annuelle de l’ensemble des magistrats de la cour d’appel sur la politique pénale conduite dans le ressort, tout en répondant aux préoccupations légitimes exprimées par les sénateurs, votre Commission a adopté, en deuxième lecture, un amendement de son rapporteur, faisant peser sur les procureurs généraux une seule obligation de résultats – à savoir informer, au moins une fois par an, les magistrats du siège et du parquet de l’application de la politique pénale. Il ne s’agit en aucun cas d’une obligation de moyens, dans la mesure où votre Commission a fait le choix, en deuxième lecture, de ne pas préciser dans la loi les modalités de mise en œuvre de cette information, renvoyant ainsi implicitement au pouvoir réglementaire le soin de les définir.

*

* *

La Commission examine l’amendement CL 4 du rapporteur.

M. le rapporteur. Il s’agit d’organiser les conditions dans lesquelles le procureur général informe les magistrats du parquet et du siège de la teneur de son rapport de politique pénale. La saisine de l’assemblée générale des magistrats du siège et du parquet est supprimée au motif que le code de l’organisation judiciaire, dans sa partie réglementaire, permet de parvenir aux mêmes fins : les magistrats du parquet pourvoiront aux conditions dans lesquelles le rapport du procureur général est débattu. Mais le principe de l’information des magistrats de la cour d’appel est maintenu. Cette rédaction devrait nous permettre de trouver un terrain d’entente avec nos collègues sénateurs.

M. le président Jean-Jacques Urvoas. Le Sénat avait prévu une faculté ; ici, la logique est plutôt celle d’une obligation. Nous en débattrons en séance ; je ne suis pas certain que la garde des Sceaux soit enchantée par cette perspective, mais l’Assemblée nationale est cohérente par rapport à la première lecture.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 2 modifié.

Article 2 bis (supprimé)

(article 36 du code de procédure pénale)


Précision du pouvoir d’instruction des procureurs généraux
dans les affaires individuelles

Issu d’un amendement du rapporteur au nom de la commission des Lois du Sénat, M. Jean-Pierre Michel, le présent article visait à préciser les contours des instructions que le procureur général peut adresser aux procureurs de la République dans des affaires individuelles, en application de l’article 36 du code de procédure pénale.

Dans sa rédaction actuelle, cet article reconnaît au procureur général la faculté, dans des affaires individuelles, d’adresser aux procureurs de la République des instructions, écrites et versées au dossier de la procédure, ayant pour objet d’enjoindre « d’engager ou de faire engager des poursuites ou de saisir la juridiction compétente de telles réquisitions écrites que le procureur général juge opportunes ».

Sans remettre en cause l’existence de ces instructions aux fins de poursuites ou de réquisitions, le présent article cherchait à mieux les encadrer, en remplaçant l’actuelle appréciation en opportunité du procureur général par une appréciation fondée sur le respect des instructions générales de politique pénale adressée par le ministre de la Justice, en application du nouvel article 30 du code de procédure pénale. Il cherchait également, comme l’a précisé le rapporteur du Sénat, à tirer les conséquences de « la clarification de la répartition des compétences voulue par le projet de loi, qui fait du procureur général le relais de la politique pénale au niveau régional et du procureur de la République l’autorité chargée d’apprécier l’opportunité des poursuites, conformément à l’article 40 du code de procédure pénale » (16).

Dans cette perspective, le présent article disposait que le procureur général pouvait enjoindre aux procureurs de la République de saisir la juridiction compétente de réquisitions écrites conformes aux instructions générales de politique pénale du garde des Sceaux.

Cependant, lors de l’examen en séance publique, la garde des Sceaux a estimé que, dans le cadre du système français fondé sur l’opportunité des poursuites, la formulation initialement retenue par le présent article « restreignait à l’excès les possibilités d’instructions légitimes du procureur général, qui peuvent très souvent ne pas trouver leur fondement dans des instructions générales préexistantes émanant du ministre de la Justice » (17). Partageant cette analyse, le Sénat a adopté en première lecture, avec un avis favorable en opportunité du rapporteur, un amendement du Gouvernement, supprimant le présent article.

La Commission maintient la suppression de l’article 2 bis.

Article 3

(articles 39-1 et 39-2 [nouveau] du code de procédure pénale)


Attributions des procureurs de la République en matière de politique pénale

Le présent article réécrit l’article 39-1 du code de procédure pénale, afin de clarifier les attributions des procureurs de la République dans la mise en œuvre territoriale de la politique pénale, définie au niveau national par le garde des Sceaux et précisée, voire adaptée le cas échéant, au niveau régional par les procureurs généraux.

Réécrivant intégralement l’article 39-1 du code de procédure pénale, le présent article en reprend les dispositions actuelles, sans les modifier, pour les faire désormais figurer au sein d’un nouvel article 39-2.

En première lecture, votre Commission avait adopté un amendement de votre rapporteur, précisant la périodicité annuelle du rapport que le procureur général établira sur l’activité et la gestion des parquets de son ressort.

Par cohérence avec l’information annuelle du Parlement au niveau national et des magistrats du siège et du parquet au niveau de chaque cour d’appel (cf. supra), votre Commission, sur l’initiative de votre rapporteur, avait également complété le présent article, en première lecture, par un nouvel alinéa organisant, au niveau de chaque tribunal de grande instance, l’information annuelle de l’ensemble des magistrats du siège et du parquet sur l’application, dans le ressort, de la politique pénale.

À cette fin, le texte issu des travaux en première lecture de l’Assemblée nationale faisait obligation au procureur de la République de communiquer au président du tribunal de grande instance le rapport annuel de politique pénale établi à l’attention du procureur général. Ce rapport devait ensuite faire l’objet d’un débat lors de la plus prochaine assemblée générale des magistrats du siège et du parquet au sein de chaque ressort de tribunal de grande instance.

Pour les mêmes raisons que celles évoquées à l’article 2 du présent projet de loi (cf. supra), le rapporteur du Sénat a estimé « qu’une telle disposition aurait davantage sa place au sein du code de l’organisation judiciaire, dans sa partie réglementaire » (18) et la commission des Lois, sur sa proposition, a adopté, en première lecture, un amendement supprimant, au présent article, les dispositions relatives à l’information de l’ensemble des magistrats du tribunal de grande instance.

À l’instar des nouvelles dispositions qu’elle a introduites à l’article 2 (cf. supra), votre Commission a adopté, en deuxième lecture, un amendement de son rapporteur, faisant peser sur les procureurs de la République une seule obligation de résultats – à savoir informer, au moins une fois par an, les magistrats du siège et du parquet de l’application de la politique pénale. Il ne s’agit pas, là encore, d’une obligation de moyens, dans la mesure où votre Commission a décidé de ne pas préciser dans la loi les modalités de mise en œuvre de cette information, renvoyant ainsi implicitement au pouvoir réglementaire le soin de les définir.

*

* *

La Commission est saisie de l’amendement CL 5 du rapporteur.

M. le rapporteur. La rédaction est la même que pour l’amendement précédent, mais à propos, cette fois, de l’information des magistrats des tribunaux de grande instance.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 3 modifié.

Article 4

Champ d’application territoriale de la présente loi

Cet article précise le champ d’application territorial de la présente loi.

Dans sa rédaction initiale, il précisait que l’ensemble des dispositions de la présente loi – à savoir les articles 1er à 3 – était applicable « sur l’ensemble du territoire de la République » et, par conséquent, également dans les collectivités d’outre-mer régies par un principe de spécialité législative en application de l’article 74 de la Constitution – à savoir les îles Wallis et Futuna, la Polynésie française – ainsi qu’en Nouvelle-Calédonie.

En première lecture, la commission des Lois du Sénat a, pour sa part, estimé « préférable, pour étendre l’application d’une disposition, d’énumérer expressément les collectivités visées par cette extension, à savoir, la Polynésie française, la Nouvelle-Calédonie et les îles Wallis et Futuna » (19) et a adopté un amendement de son rapporteur réécrivant le présent article en ce sens.

Votre rapporteur est favorable à l’adoption du présent article sans modification.

*

* *

M. Sébastien Denaja. Le fait que le Sénat ait précisé que la présente loi était applicable « en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna » modifie-t-il la portée de l’article par rapport à la rédaction initiale, qui parlait de « l’ensemble du territoire de la République » ?

M. le rapporteur. Nullement, mon cher collègue.

L’article 4 est adopté sans modification.

La Commission adopte l’ensemble du projet de loi modifié.

*

* *

En conséquence, la commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République vous demande d’adopter le projet de loi (n° 1230), modifié par le Sénat, relatif aux attributions du garde des Sceaux et des magistrats du ministère public en matière de politique pénale et de mise en œuvre de l’action publique, dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.

TABLEAU COMPARATIF

___

Texte adopté par l’Assemblée nationale

___

Texte adopté par le Sénat

___

Texte adopté par la Commission

___

Projet de loi relatif aux attributions du garde des sceaux et des magistrats du ministère public en matière de politique pénale et de mise en œuvre de l’action publique

Projet de loi relatif aux attributions du garde des sceaux et des magistrats du ministère public en matière de politique pénale et de mise en œuvre de l’action publique

Projet de loi relatif aux attributions du garde des sceaux et des magistrats du ministère public en matière de politique pénale et de mise en œuvre de l’action publique

Article 1er

Article 1er

Article 1er

L’article 30 du code de procédure pénale est ainsi rédigé :

(Alinéa sans modification)

(Alinéa sans modification)

« Art. 30. – Le ministre de la justice conduit la politique pénale déterminée par le Gouvernement. Il veille à la cohérence de son application sur le territoire de la République.

« Art. 30. – (Alinéa sans modification)

« Art. 30. – (Alinéa sans modification)

« À cette fin, il adresse aux magistrats du ministère public des instructions générales, qui sont rendues publiques.

… générales.

… générales, qui sont rendues publiques, sauf si cette publicité est de nature à porter atteinte à la sûreté de l’État, à la sécurité publique ou au déroulement des procédures engagées devant les juridictions ou des investigations préliminaires à de telles procédures.

amendement CL1

« Il ne peut leur adresser aucune instruction dans des affaires individuelles.

Alinéa supprimé

« Il ne peut leur adresser aucune instruction dans des affaires individuelles.

amendement CL2

« Chaque année, il publie un rapport sur l’application de la politique pénale déterminée par le Gouvernement et informe le Parlement, par une déclaration pouvant être suivie d’un débat, des conditions de mise en œuvre de cette politique et des instructions générales adressées en application du deuxième alinéa. »

« Chaque année, il publie un rapport sur l’application de la politique pénale déterminée par le Gouvernement, précisant les conditions de mise en œuvre de cette politique et des instructions générales adressées en application du deuxième alinéa. Ce rapport est transmis au Parlement. Il peut donner lieu à un débat à l’Assemblée nationale et au Sénat. »

(Alinéa sans modification)

 

Article 1er bis A (nouveau)

Article 1er bis A

 

Le livre Ier du code de procédure pénale est ainsi modifié :

(Sans modification)

 

1° Au début de l’intitulé du livre Ier, sont ajoutés les mots : « De la conduite de la politique pénale, » ;

 
 

2° Dans l’intitulé du titre Ier, après les mots : « Des autorités chargées », sont insérés les mots : « de la conduite de la politique pénale, ».

 

Article 1er bis (nouveau)

Article 1er bis

Article 1er bis

Au début de l’article 31 du même code, sont ajoutés les mots : « Dans le respect du principe d’impartialité auquel il est tenu, ».

Supprimé

L’article 31 du même code est complété par les mots : « , dans le respect du principe d’impartialité auquel il est tenu » .

amendement CL3

Article 2

Article 2

Article 2

Les deuxième et troisième alinéas de l’article 35 du même code sont remplacés par trois alinéas ainsi rédigés :

Les deuxième et troisième alinéas de l’article 35 du code de procédure pénale sont ainsi rédigés :

… sont remplacés par trois alinéas ainsi …

« Il anime et coordonne l’action des procureurs de la République, tant en matière de prévention que de répression des infractions à la loi pénale. Il précise et, le cas échéant, adapte les instructions générales du ministre de la justice au contexte propre au ressort. Il procède à l’évaluation de leur application par les procureurs de la République.

(Alinéa sans modification)

(Alinéa sans modification)

« Outre les rapports particuliers qu’il établit soit d’initiative, soit sur demande du ministre de la justice, le procureur général adresse à ce dernier un rapport annuel de politique pénale sur l’application de la loi et des instructions générales ainsi qu’un rapport annuel sur l’activité et la gestion des parquets de son ressort.

(Alinéa sans modification)

(Alinéa sans modification)

« Après avoir été adressé au ministre de la justice en application du troisième alinéa, le rapport annuel de politique pénale établi par le procureur général est communiqué par celui-ci au premier président de la cour d’appel et fait l’objet d’un débat lors de la plus prochaine assemblée générale des magistrats du siège et du parquet. »

Alinéa supprimé

« Il informe, au moins une fois par an, l’assemblée des magistrats du siège et du parquet, des conditions de mise en œuvre, dans le ressort, de la politique pénale et des instructions générales adressées à cette fin par le ministre de la justice en application du deuxième alinéa de l’article 30. »

amendement CL4

 

Article 2 bis (nouveau)

Supprimé

Article 2 bis

Suppression maintenue

Article 3

Article 3

Article 3

L’article 39-1 du même code devient l’article 39-2 et l’article 39-1 est ainsi rétabli :

L’article 39-1 du code de procédure pénale devient …

(Alinéa sans modification)

« Art. 39-1. – Le procureur de la République met en œuvre dans son ressort la politique pénale définie par les instructions générales du ministre de la justice, précisées et, le cas échéant, adaptées par le procureur général, en tenant compte du contexte propre au ressort.

« Art. 39-1. – En tenant compte du contexte propre à son ressort, le procureur de la République met en œuvre la politique pénale définie par les instructions générales du ministre de la justice précisées et, le cas échéant, adaptées par le procureur général.

« Art. 39-1. – (Alinéa sans modification)

« Outre les rapports particuliers qu’il établit soit d’initiative, soit sur demande du procureur général, le procureur de la République adresse à ce dernier un rapport annuel de politique pénale sur l’application de la loi et des instructions générales ainsi qu’un rapport annuel sur l’activité et la gestion de son parquet. 

(Alinéa sans modification)

(Alinéa sans modification)

« Après avoir été adressé au procureur général en application du deuxième alinéa, le rapport annuel de politique pénale établi par le procureur de la République est communiqué par celui-ci au président du tribunal de grande instance et fait l’objet d’un débat lors de la plus prochaine assemblée générale des magistrats du siège et du parquet. » 

Alinéa supprimé

« Il informe, au moins une fois par an, l’assemblée des magistrats du siège et du parquet, des conditions de mise en œuvre, dans le ressort, de la politique pénale et des instructions générales adressées à cette fin par le ministre de la justice en application du deuxième alinéa de l’article 30. »

amendement CL5

Article 4

Article 4

Article 4

La présente loi est applicable sur l’ensemble du territoire de la République.

La présente loi est applicable en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna.

(Sans modification)

© Assemblée nationale

1 () Rapport de la commission de réflexion sur la justice, présidée par M. Pierre Truche, au président de la République, juillet 1997, p. 30.

2 () Rapport n° 1047, (XIVe législature, session ordinaire 2012-2013) de M. Jean-Yves Le Bouillonnec, fait au nom de la commission des Lois de l’Assemblée nationale, déposé le 21 mai 2013, sur le projet de loi relatif aux attributions du garde des Sceaux et des magistrats du ministère public en matière de politique pénale et de mise en œuvre de l’action publique, p. 27.

3 () Article 31 du code de procédure pénale : « Le ministère public exerce l’action publique et requiert l’application de la loi ».

4 () CEDH, gr. ch., 12 février 2008, Guja c/ Moldova, § 90.

5 () Rapport n° 675 (2012-2013) de M. Jean-Pierre Michel, fait au nom de la commission des Lois du Sénat, déposé le 19 juin 2013, sur le projet de loi relatif aux attributions du garde des Sceaux et des magistrats du ministère public en matière de politique pénale et de mise en œuvre de l’action publique, p. 19.

6 () Ibid.

7 () Engagement n° 53 de M. François Hollande, alors candidat à la présidence de la République : « Je garantirai l’indépendance de la justice et de tous les magistrats : les règles de nomination et de déroulement de carrière seront revues à cet effet ; je réformerai le Conseil supérieur de la magistrature. J’interdirai les interventions du gouvernement dans les dossiers individuels. Je remettrai à plat la procédure pénale pour la rendre efficace dans le respect des principes fondamentaux de l’État de droit. L’accès à la justice de proximité pour tous les litiges portant sur des aspects essentiels de la vie quotidienne des Français sera facilité. Les peines prononcées seront toutes effectivement exécutées et les prisons seront conformes à nos principes de dignité ».

8 () Compte rendu analytique officiel du Sénat, séance du 4 juillet 2013.

9 () Compte rendu analytique officiel du Sénat, séance du 4 juillet 2013.

10 () Ibid.

11 () Op. cit., p. 30.

12 () Conseil constitutionnel, n° 2010-608 DC du 24 juin 2010, Loi organique relative au Conseil économique, social et environnemental : « en revanche, que l’article 10 de la loi organique prévoit qu’à l’issue d’une période de quatre ans puis tous les dix ans, le Gouvernement remet au Parlement, après avis du Conseil économique, social et environnemental, un rapport relatif à l’actualisation de sa composition ; qu’il dispose que ce rapport doit faire l’objet d’un débat devant le Parlement ; (…) que, d’autre part, en exigeant un débat devant le Parlement sur ce rapport, il porte atteinte aux modalités de fixation de l’ordre du jour des assemblées parlementaires telles que déterminées par l’article 48 de la Constitution ; que, par suite, il doit être déclaré contraire à la Constitution. »

13 () Article 31 du code de procédure pénale : « Le ministère public exerce l’action publique et requiert l’application de la loi ».

14 () Op. cit., p. 33.

15 () Op. cit., p. 37.

16 () Op. cit., p. 38.

17 () Compte rendu analytique officiel du Sénat, séance du 4 juillet 2013.

18 () Op. cit., p. 40.

19 () Op. cit., p. 40.