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Amendements  sur le projet ou la proposition

N° 1275

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 17 juillet 2013.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L’ÉDUCATION SUR LE PROJET DE LOI relatif à l’indépendance de l’audiovisuel public,

PAR M. Marcel ROGEMONT,

Député.

——

Voir le numéro :

Assemblée nationale : 1114.

INTRODUCTION 7

I.- L’INDÉPENDANCE DE L’AUDIOVISUEL PUBLIC 11

A. LA FIN D’UNE ANOMALIE 11

1. Un mode de nomination incompatible avec les exigences d’une démocratie moderne 11

2. Une mesure contestée 14

3. Des arguments contestables 15

B. UN NOUVEAU MODE DE NOMINATION QUI OFFRE DE MEILLEURES GARANTIES D’INDÉPENDANCE ET DE BONNE GESTION DES ENTREPRISES CONCERNÉES 17

C. L’OPPORTUNITÉ DE CONFIER AU CSA, À L’APPUI DE SON POUVOIR DE NOMINATION, UN RÔLE DE CONTRÔLE DE L’EXÉCUTION DES CONTRATS D’OBJECTIFS ET DE MOYENS 19

D. LA GARANTIE DU MAINTIEN DE LA PUBLICITÉ EN JOURNÉE : ÉLÉMENT DE L’INDÉPENDANCE DE FRANCE TÉLÉVISIONS 19

1. Le bilan négatif de la suppression de la publicité après 20 heures 20

a) Pour le téléspectateur 20

b) Pour l’indépendance de France Télévisions 21

c) Pour les finances publiques : une réforme qui a coûté 745 millions d’euros 22

2. L’augmentation de la redevance et le lancement d’une réflexion sur son avenir par la nouvelle majorité 23

3. La nécessité de lever l’incertitude sur la présence de la publicité en journée 24

II.- UNE RÉFORME AMBITIEUSE DU CSA 25

A. DES COMPÉTENCES ÉTENDUES ET ÉVOLUTIVES QUI APPELLENT UNE ADAPTATION DE L’INSTITUTION 25

1. Un pouvoir de nomination conforté par le présent projet de loi 26

2. Un pouvoir de gestion et d’attribution des fréquences qui s’est accru 26

3. Des pouvoirs de contrôle étendus 27

4. Des pouvoirs de sanction adoptés par le présent projet de loi 27

5. Un large pouvoir consultatif 28

6. Autres compétences 28

B. UN NOUVEAU MODE DE DÉSIGNATION INÉDIT, AU SERVICE DE L’INDÉPENDANCE ET DE L’EFFICACITÉ DE L’INSTITUTION 29

1. Un mode de désignation inédit 29

2. Un mode de désignation au service de l’indépendance et de la compétence 32

3. La question de la nomination du président de l’autorité 33

C. UN COLLÈGE RÉDUIT : GAGE D’UNE PLUS GRANDE COHÉRENCE DE L’ACTION DE L’AUTORITÉ 33

D. LA NÉCESSITÉ DE RENFORCER LES RÈGLES D’INCOMPATIBILITÉ ET DE DÉONTOLOGIE 36

III.- ALLER PLUS LOIN DANS LA RESPONSABILISATION DU CSA 39

A. L’OPPORTUNITÉ DE DOTER LE CSA D’UN STATUT D’AUTORITÉ PUBLIQUE INDÉPENDANTE 39

1. La garantie d’une plus grande autonomie financière adaptée à son statut 40

2. Un gage de meilleure maîtrise de ses moyens financiers et humains 40

B. FAVORISER L’AMÉLIORATION DE LA COHÉRENCE DE L’ACTION DU CSA, EN PARTICULIER EN MATIÈRE ÉCONOMIQUE 41

1. L’insuffisante prise en compte par le CSA de la dimension économique de son action 41

2. Renforcer la pertinence économique des décisions du CSA 42

3. Une exigence de responsabilité accrue du CSA du fait de ses décisions 44

TRAVAUX DE LA COMMISSION 45

I.- AUDITION DE LA MINISTRE 45

II.- DISCUSSION GÉNÉRALE 59

II.- EXAMEN DES ARTICLES 79

Article 1er A (nouveau) : Attribution au CSA du statut d’autorité publique indépendante 79

Article 1er : Composition du CSA et mode de désignation de ses membres 81

Article 2 Modification des règles de majorité lors des délibérations du CSA relatives à des manquements aux règles d’incompatibilités ou de conflit d’intérêt 93

Article 3 Impartialité de la procédure de sanction mise en œuvre par le CSA 102

Article 4 Coordination 117

Article 5 : Réforme du mode de nomination des présidents des sociétés nationales de programme 117

Article 6 : Réforme du mode de révocation des présidents des sociétés nationales de programme 133

Après l’article 6 133

Article 6 bis (nouveau) : Protection du secret des affaires dans le cadre de la procédure de règlement des différends devant le CSA 135

Article 6 ter (nouveau) Modification des dispositions relatives au rapport public annuel du CSA 136

Article 6 quater (nouveau) : Création d’une commission de la modernisation de la diffusion audiovisuelle 141

Après l’article 6 143

Article 6 quinquies (nouveau) : Obligation pour le CSA d’effectuer une étude d’impact avant d’autoriser une modification de convention 143

Article 6 sexies (nouveau) Possibilité de réserver l’accès d’un appel à candidature pour le lancement d’un service national de télévision en haute définition à des chaînes nationales déjà autorisées en diffusion standard 144

Article 6 septies (nouveau) Obligation d’une étude d’impact et possibilité de différer le lancement d’un appel à candidatures pour l’utilisation de la ressource radioélectrique 145

Après l’article 6 148

Article 6 octies (nouveau) Agrément par le CSA des modifications du contrôle des sociétés titulaires d’une autorisation d’usage de la ressource radioélectrique 151

Après l’article 6. 153

Article 6 nonies (nouveau) Maintien de la publicité entre 6 heures et 20 heures sur les chaînes de France Télévisions 156

Après l’article 6 161

Article 6 decies (nouveau) Abrogation des canaux compensatoires de la télévision numérique terrestre 161

Article 7 Dispositions transitoires relatives à la composition du CSA 164

Après l’article 7. 166

Article 8 Application du nouveau mécanisme de sanction 166

Article 9 Coordination 167

Article 10 Application sur l’ensemble du territoire de la République 167

TABLEAU COMPARATIF 169

ANNEXE LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 185

INTRODUCTION

Le présent projet de loi marque la première étape, essentielle, d’une adaptation attendue du cadre juridique de l’audiovisuel. Il poursuit deux objectifs : approfondir les garanties de l’indépendance de l’audiovisuel public et réformer en profondeur l’institution chargée de la régulation du secteur.

Il répond à l’engagement du Président de la République de rendre au Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) son pouvoir de désignation des présidents de France Télévisions, Radio France et de la société en charge de l’audiovisuel extérieur de la France.

Ce projet de loi ordinaire s’accompagne d’un projet de loi organique, soumis à la Commission des lois, dont l’article 1er tend à abroger la loi organique n° 2009-257 du 5 mars 2009 prévoyant la nomination par le Président de la République, selon la procédure prévue à l’article 13 de la constitution, des présidents des sociétés France Télévisions et Radio France et de la société en charge de l’audiovisuel extérieur de la France et l’article 2 vise à supprimer les mentions de France Télévisions, Radio France et de la société en charge de l’audiovisuel extérieur de la France figurant en annexe à la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution.

Le texte propose également une réforme ambitieuse du CSA.

Avancée démocratique majeure, il est proposé que les membres du collège désignés par les présidents de l’Assemblée et du Sénat le soient après avis conforme des Commissions des affaires culturelles des deux assemblées à une majorité des trois cinquièmes. Ce mode de désignation, salué par l’ensemble des opérateurs du secteur entendus par le Rapporteur, doit favoriser le choix, non partisan, de personnalités susceptibles de dégager le consensus le plus large. Un tel choix ne pourra se fonder que sur la recherche objective de la compétence, indispensable pour exercer la mission de régulation d’un secteur en mutation constante et qui doit faire face à des enjeux juridiques, économiques et technologiques de plus en plus complexes.

L’article 3 réforme en profondeur la procédure de mise en œuvre par le CSA de son pouvoir de sanction pour la mettre en conformité avec les exigences d’impartialité, telles qu’elles résultent des évolutions récentes de la jurisprudence constitutionnelle et européenne. L’instauration d’un rapporteur indépendant permet de répondre à cet objectif. Le déroulement de la procédure opérera désormais une distinction nette entre le titulaire des fonctions de poursuite et d’instruction, qui seront de la responsabilité exclusive du rapporteur indépendant, et le titulaire du prononcé de la sanction qui reste l’apanage du collège du CSA, comme l’exige la jurisprudence.

Ainsi que l’indique l’exposé des motifs, le projet de loi poursuit également l’objectif de « renforcer la cohérence de l’action du Conseil. » La réduction de l’effectif du collège de neuf à sept y contribuera grandement mais le rapporteur souhaite approfondir ce volet du texte, en favorisant notamment une meilleure prise en compte par l’autorité de régulation de la dimension économique de son action.

Comme l’a indiqué la ministre de la culture et de la communication lors de son audition, le 3 juillet 2013, par la Commission des affaires culturelles et de l’éducation de l’Assemblée nationale, « ce projet de loi constitue une réforme majeure de l’audiovisuel : il était en effet prioritaire de restaurer et d’approfondir toutes les garanties d’indépendance de l’audiovisuel public avant toute autre chose. Elle constitue un socle, une première étape essentielle d’une profonde réforme du cadre juridique d’ensemble du secteur audiovisuel pour l’adapter aux mutations du secteur et notamment au développement du numérique. »

En août 2012, le Premier ministre avait souhaité engager une réflexion sur l’opportunité d’un rapprochement entre l’autorité de régulation du secteur audiovisuel, le CSA, et l’autorité de régulation du secteur des communications électroniques et des postes (ARCEP). Ce temps de réflexion a été nécessaire. Cette analyse, confiée au ministre du redressement productif, à la ministre de la culture et de la communication et à la ministre déléguée chargée des PME, de l’innovation et de l’économie numérique, visait à déterminer les mesures à mettre en œuvre pour répondre au phénomène de convergence des infrastructures numériques, des services et des contenus qu’elles acheminent. Plus particulièrement, il s’agissait de déterminer, compte tenu de cette évolution majeure, le meilleur moyen de réguler des contenus accessibles à partir de supports de diffusion multiples.

À l’issue du travail de réflexion qui a donné lieu à l’audition des professionnels de la communication mais également à des échanges avec les parlementaires, un consensus est apparu pour considérer que les bouleversements actuels n’appelaient pas une réponse strictement institutionnelle. C’est en effet une adaptation de la réglementation applicable au secteur de la communication audiovisuelle qui est apparu nécessaire pour répondre aux enjeux nouveaux auxquels ce secteur est confronté. Comme l’indique l’ARCEP dans le rapport rendu en octobre 2012 sur le rapprochement avec le CSA, « la convergence à l’œuvre aujourd’hui est celle existant entre les contenus audiovisuels et les autres contenus, les uns et les autres étant acheminés de façon plus ou moins similaire sur internet jusqu’à l’utilisateur final. Cette convergence est donc celle des contenus entre eux et non celles des contenus et des contenants. La convergence pose ainsi essentiellement la question, extrêmement délicate, de la mise en cohérence de la régulation entre les différents contenus acheminés sur internet ».

Ce constat a été partagé par la mission sur l’« Acte II de l’exception culturelle » présidée par M. Pierre Lescure, dont les propositions ouvrent des perspectives nouvelles d’adaptation de la régulation à l’ère numérique.

Cette réforme appellera une seconde étape de refondation de la législation. Comme l’a annoncé la ministre de la culture et de la communication aux « Assises de l’audiovisuel » organisées le 5 juin dernier, cette adaptation, qui sera nourrie des réflexions de la mission Lescure, et de la consultation – prévue à l’automne 2013 – des professionnels sur les pistes envisagées, se concrétisera lors d’une deuxième étape législative avec la présentation d’un projet de loi dès la fin de l’année 2013.

I.- L’INDÉPENDANCE DE L’AUDIOVISUEL PUBLIC

A. LA FIN D’UNE ANOMALIE

1. Un mode de nomination incompatible avec les exigences d’une démocratie moderne

La loi n° 2009-258 du 5 mars 2009 relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision et la loi organique n° 2009-257 du 5 mars 2009 relative à la nomination des présidents des sociétés France Télévisions et Radio France et de la société en charge de l’audiovisuel extérieur de la France (AEF) ont retiré au Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) son pouvoir de nomination des dirigeants de ces sociétés pour le confier au Président de la République. Ce dernier exerce ce pouvoir après avis conforme du CSA, ainsi privé de toute capacité d’initiative, et sous réserve qu’une majorité des trois cinquièmes des membres des commissions parlementaires chargées des affaires culturelles ne s’y soit pas opposée dans les conditions prévues par l’article 13 de la Constitution.

Si le Conseil constitutionnel a considéré que ce dispositif de nomination « ne privait pas de garanties légales les exigences constitutionnelles résultant de l’article 11 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 » (1), qui proclame la liberté de communication, il a incontestablement entraîné une régression importante de ces garanties.

Il convient également de souligner que la révocation des présidents des sociétés nationales de programme ne fait même pas intervenir le droit de veto des commissions chargées des affaires culturelles du Parlement. Le retrait du mandat des présidents de ces sociétés peut ainsi intervenir par simple décret motivé, après avis, également motivé du CSA émis à la majorité des membres qui le composent et l’avis public des commissions chargées des affaires culturelles des deux assemblées. Le projet de loi prévoyait initialement la possibilité pour les commissions parlementaires de s’opposer à la révocation à une majorité des trois cinquièmes, précision qui a toutefois été censurée par le Conseil constitutionnel au motif qu’un tel droit de veto n’a été attribué aux commissions parlementaires, par l’article 13 de la Constitution qu’à l’égard des décisions de nomination du Président de la République et non des décisions de révocation (2).

Un tel mode de nomination, qui fait peser un doute sur l’indépendance des personnes désignées à l’égard du pouvoir exécutif, constitue une anomalie à laquelle le Président de la République avait promis, lors de sa campagne électorale, de mettre fin.

Conformément à cet engagement, après la démission de M. Alain de Pouzilhac de ses fonctions de président-directeur général de l’AEF, le Président de la République, M. François Hollande, a refusé d’exercer le pouvoir d’initiative que lui confère la loi et demandé au CSA, le 31 juillet 2012, de l’éclairer sur le choix de la personnalité qu’il estimait la plus apte à occuper cette fonction. Il a suivi l’avis du Conseil qui, réuni en assemblée plénière le 6 septembre 2012, a considéré que Mme Marie-Christine Saragosse, directrice générale de TV5 Monde, paraissait particulièrement apte à exercer la présidence de la société publique.

Procédure issue de l’époque de l’ORTF, la nomination des dirigeants de la télévision française a été une compétence du gouvernement et la décision prise en conseil des ministres jusqu’en 1982. La loi n° 82-652 du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle a mis fin à ce système en créant une Haute autorité de la communication audiovisuelle, « corps de sages chargés de constituer un écran entre les pouvoirs publics, d’un côté, la télévision et la radio de l’autre » (3). Ce principe fondamental n’a pas été remis en cause par les lois qui se sont succédé après 1982, comme le montre l’encadré ci-après, jusqu’à la loi du 5 mars 2009, qui constitue à cet égard un véritable retour en arrière.

De l’ORTF à la loi du 5 mars 2009 : évolution du mode de nomination des dirigeants de l’audiovisuel public

La loi n° 72-553 du 3 juillet 1972 portant statut de la radiodiffusion-télévision française crée le poste de président-directeur général de l’Office de radiodiffusion-télévision française (ORTF), lequel « est nommé pour une durée de trois ans, par décret pris en conseil des ministres, parmi les membres du conseil d’administration ».

La loi n° 74-696 du 7 août 1974 relative à la radiodiffusion et à la télévision, qui supprime l’ORTF et qui confie l’exécution des missions de service public et l’exercice du monopole de la télévision et de la radiodiffusion à un établissement public de l’État à caractère industriel et commercial (Télédiffusion de France-TDF) et à des sociétés nationales de programme (Radio France, TF1, Antenne 2 et France Régions 3-FR3), confirme la compétence de l’exécutif pour nommer leurs présidents (4). En ce qui concerne la société française de production (SFP), société anonyme dont les capitaux publics doivent rester majoritaires, la nomination de son président est soumise « à l’approbation du Premier ministre ou du membre du Gouvernement délégué par lui à cet effet » conformément à l’article 13 de la même loi.

La loi n° 82-652 du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle marque une avancée déterminante dans l’histoire de l’audiovisuel. Elle crée la Haute autorité de la communication audiovisuelle, autorité chargée de nommer des administrateurs dans les conseils d’administration des établissements publics et des sociétés du service public de radiodiffusion sonore et de télévision et de désigner parmi eux les présidents des sociétés de radiodiffusion sonore et de télévision, le président-directeur général de TDF restant, quant à lui, nommé pour trois ans par décret en conseil des ministres.

La loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication procède notamment à la privatisation de TF1 et au remplacement de la Haute autorité de la communication audiovisuelle par la Commission nationale de la communication et des libertés (CNCL). Toutefois, le mode de nomination des présidents des sociétés nationales de programme (désormais Radio France, Antenne 2, FR3, Réseau France Outre-mer-RFO et Radio France Internationale-RFI), n’est pas remis en cause. Ainsi, à l’exception du président de RFI, qui est nommé par la CNCL parmi les représentants de l’État, les présidents des autres sociétés nationales de programme sont nommés par la CNCL parmi les quatre personnalités qualifiées qu’elle a nommées à leur conseil d’administration respectif. En revanche, les présidents de TDF (5) et de la SFP sont dorénavant nommés dans les conditions du droit commun des sociétés anonymes.

La loi n° 89-25 du 17 janvier 1989 modifiant la loi du 30 septembre 1986 crée le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA). Elle est complétée par la loi n° 89-532 du 2 août 1989 qui organise la présidence commune des sociétés nationales de programme Antenne 2 et FR3 : le CSA nomme une personnalité qualifiée « administrateur commun aux deux sociétés pour remplir les fonctions de président ». La loi maintient les modalités de nomination des présidents de Radio France, RFO et RFI tout en procédant au transfert du pouvoir de nomination de la CNCL au CSA. La loi renforce également les modalités de délibération du CSA lorsque celui-ci nomme les présidents de Radio France et de RFI, la majorité des membres du Conseil étant requise au lieu de la majorité des membres présents (article 1er de la loi modifiant l’article 47 de la loi du 30 septembre 1986).

La loi n° 2000-719 du 1er août 2000 crée le groupe France Télévisions composé des sociétés nationales de programme France 2, France 3 et La Cinquième et le cas échéant de filiales ayant pour objet d’éditer des services de télévision en mode numérique ne donnant pas lieu à paiement de la part de l’usager. Elle prévoit que le président du conseil d’administration de la société France Télévisions, qui est nommé par le CSA pour cinq ans à la majorité des membres qui le composent parmi les quatre personnalités qualifiées qu’il a préalablement désignées à son conseil d’administration, est également président des conseils d’administration des sociétés France 2, France 3 et La Cinquième (6). Les présidents des sociétés RFO et Radio France sont nommés selon les mêmes modalités que le président de la société France Télévisions, tandis que celui de la société RFI est nommé par le CSA parmi les représentants de l’État au conseil d’administration.

La loi du 1er août 2000 introduit également dans la loi de 1986 un article prévoyant que les mandats des présidents peuvent leur être retirés dans les mêmes formes que celles dans lesquelles ils leur ont été confiés, ainsi qu’un article obligeant le CSA à motiver ses décisions de nomination des présidents des conseils d’administration des sociétés nationales de programme (7).

2. Une mesure contestée

Le mode de nomination institué par la loi du 5 mars 2009 figure parmi les mesures à la fois les plus emblématiques et les plus fortement contestées du quinquennat de M. Nicolas Sarkozy. Dans un sondage CSA publié le 6 juillet 2008 (8), sept Français sur dix se disaient opposés à la nomination du président de la télévision publique par l’exécutif au motif qu’elle « pourrait entraîner un contrôle politique des chaînes publiques. » De même, à la veille de la nomination du nouveau président de France Télévisions, le magazine Télérama publiait un « manifeste pour libérer l’audiovisuel public » signé par cent personnalités, dont le nombre et la diversité (anciens présidents du CSA ou de la Haute Autorité, anciens Premiers ministres, anciens ministres de la culture ou de la communication, dirigeants politiques, dirigeants actuels ou anciens de l’audiovisuel public, personnalités du monde de la culture de toutes sensibilités politiques) témoignaient de l’inquiétude suscitée par ce procédé de nomination.

Rappelons que cette réforme s’est même imposée contre les recommandations de la commission pour la nouvelle télévision publique, présidée par M. Jean-François Copé et chargée par M. Nicolas Sarkozy de faire des propositions pour rénover l’audiovisuel public. Le rapport de la « commission Copé » avait en effet préconisé que le PDG de France Télévisions soit désigné par le conseil d’administration de l’entreprise sur une liste de trois à cinq noms proposée par le CSA, « autorité garante de son indépendance vis-à-vis du pouvoir politique, » qui aurait ainsi gardé le pouvoir d’initiative.

De fait, comme l’indique l’exposé des motifs du présent projet de loi, le mode de nomination actuel a fait peser l’ombre du doute sur l’indépendance des personnes désignées à l’égard du pouvoir exécutif.

À titre d’exemple, lors d’un entretien publié le 7 juillet 2010 dans Le Point par M. Emmanuel Berreta, M. Hervé Bourges, ancien président du CSA, estimait que « la nouvelle procédure de nomination qui fait du chef de l’État l’élément central du dispositif, n’[était] pas le reflet de ce que doit être une démocratie moderne. » « C’est un retour en arrière tout à fait déplorable » indiquait-il. « Carolis (9) a un bilan. On peut bien sûr le critiquer sur tel ou tel aspect. Mais si Nicolas Sarkozy avait la culture du résultat, comme il le prétend, il aurait reconduit Carolis. Il paie le fait de lui avoir tenu tête. »

De même, premier président nommé selon cette procédure, M. Jean-Luc Hees, président de Radio France, a dû faire face à de vives critiques, notamment au moment de la refonte de la grille des programmes de France Inter, car il était suspecté d’agir pour le compte du Président de la République. Des décisions, qui ont pu avoir pour cause des choix éditoriaux ou des mésententes personnelles (comme par exemple l’éviction de M. Stéphane Guillon) ont ainsi été analysées comme émanant du politique. Peu importe que des pressions aient ou non été exercées dès lors que l’opinion publique soupçonne ou redoute leur existence.

3. Des arguments contestables

Deux arguments ont été avancés pour « justifier » ce mode de nomination.

Le premier, qui ne manque pas de cynisme, était qu’il convenait de mettre fin à l’hypocrisie, consistant à faire croire qu’il n’y avait pas d’intervention du politique dans le choix des présidents de l’audiovisuel public. Or, le choix qui a été fait consistait à mettre fin à une prétendue hypocrisie en lui en substituant une autre, plus grave. À cet égard, le présent projet de loi fait le choix de rendre au CSA sa compétence de nomination tout en renforçant considérablement les garanties de l’indépendance de cette autorité.

On notera que M. Nicolas Sarkozy, dans la présentation qu’il avait faite de sa réforme de l’audiovisuel public, n’avait cessé de s’appuyer sur l’exemple de la BBC, modèle de service public audiovisuel moderne, qui ne diffuse pas de publicité, ou encore de l’Allemagne, qui a supprimé la publicité après 20 heures. Il lui avait sans doute échappé que ces deux modèles de service public moderne se caractérisent avant tout par une volonté d’autonomie farouche vis-à-vis de l’exécutif, comme le montre l’encadré ci-après.

Mode de nomination des présidents de l’audiovisuel public
dans les principaux pays européens

Le Royaume-Uni

Le directeur général de la BBC, désigné par le BBC Trust, a fonction d’éditeur en chef et préside le Conseil exécutif de la BBC.

Le BBC Trust est chargé de protéger l’indépendance de la BBC, garantie par une charte royale. Il définit la stratégie de la BBC et évalue la performance du Conseil exécutif.

Les membres du Trust sont nommés par la Reine sur avis du gouvernement et suivant une procédure publique de sélection. Les « trustees » sont au nombre de 12 : un président ; un vice-président ; un représentant de chacune des quatre nations du Royaume-Uni ; quatre autres personnalités et deux places vacantes actuellement.

L’Allemagne

Il existe deux organes de chaînes publiques : l’ARD, qui s’appuie sur une fédération de dix entreprises audiovisuelles publiques régionales, et la ZDF.

Le Président de l’ARD est désigné par un conseil des représentants des dix médias publics régionaux.

Le directeur (« Intendant ») de la ZDF est élu par le conseil « Télévision », qui donne aussi son accord sur le budget alors que la gestion de la chaîne est supervisée par le conseil d’administration.

Le conseil« Télévision » est composé de 77 membres : seize représentants de chaque État régional ; trois représentants du gouvernement fédéral ; douze représentants des partis politiques ; deux représentants de l’Église protestante ; deux représentants de l’Église catholique ; un représentant du conseil central des juifs d’Allemagne et un dernier membre qui est choisi par les autres membres.

Le conseil d’administration de la ZDF est composé de 14 membres : cinq représentants des États régionaux ; un représentant du gouvernement fédéral ; les huit autres membres n’ayant pas le droit ni de travailler pour le gouvernement ni pour aucune autre entité publique.

L’Espagne

Le gouvernement envisage de changer le mode de désignation du président de l’audiovisuel public espagnol (RTVE), qui était jusqu’à présent soumis à l’approbation des deux tiers du Parlement. En l’absence d’accord entre le parti populaire au pouvoir et l’opposition socialiste, le siège est vacant depuis plusieurs mois, et les comptes de la RTVE ne peuvent être approuvés. Le gouvernement souhaite imposer une approbation à la majorité absolue, tout en garantissant que celle-ci continuera à se faire « par la voie parlementaire ».

L’Italie

Le conseil d’administration élit le président de la RAI et les directeurs des trois principales chaînes. Ce conseil est composé de 9 membres : sept sont nommés par une commission parlementaire ; deux (dont le président) sont nommés par le principal actionnaire, le ministère du développement économique. Le conseil nomme le directeur général.

Le deuxième argument avancé était qu’il était nécessaire de rapprocher France Télévisions du fonctionnement habituel d’une entreprise, sans tenir compte du fait que la télévision publique ne fait absolument pas le même métier que la SNCF, EDF ou la RATP. Dans cette logique, il convenait de rendre à l’État, actionnaire unique et financeur principal de la société, la responsabilité de la nomination du président, c’est-à-dire la capacité à juger et, le cas échéant, sanctionner celui qui la gère.

Outre que cette logique aurait dû conduire à confier le pouvoir de nomination au gouvernement et non au Président de la République, la pratique a montré combien cet argument était fallacieux.

Incompatible avec les exigences d’une démocratie contemporaine, le mode de nomination ne l’est pas davantage avec celles de la gestion d’une entreprise moderne. Tout d’abord, en faisant peser l’ombre du doute sur les décisions des dirigeants, il est extrêmement préjudiciable à la bonne marche de l’entreprise, conditionnée par la légitimité de son président et des décisions qu’il prend.

Surtout, au-delà des effets pervers liés à ce climat de suspicion, le grand échec de la procédure instituée par la précédente majorité tient à ce que le choix est exclusivement celui d’une personnalité par une autre personnalité, sans choix de projet, ni même lettre de mission du Président de la République, en contradiction totale avec l’argument de la responsabilité de l’État actionnaire.

Le président de France Télévisions a ainsi pu modifier radicalement des options que son prédécesseur avait décidées avec l’aval de l’État au détriment de la nécessaire continuité dans la conduite des chantiers de modernisation.

Comme le relevait la Cour des comptes dans son rapport d’octobre 2009 sur France Télévisions et la nouvelle télévision publique, « Au cours des dernières années, la coexistence d’objectifs malaisément conciliables et la multiplicité des initiatives stratégiques se sont traduites par un pilotage heurté, essentiellement politique, qui n’a pas aidé l’entreprise à opérer sa modernisation. C’est-à-dire qu’avant d’être un remède, la réforme entreprise en 2008 et portée par la loi du 5 mars 2009 aura été un symptôme. »

B. UN NOUVEAU MODE DE NOMINATION QUI OFFRE DE MEILLEURES GARANTIES D’INDÉPENDANCE ET DE BONNE GESTION DES ENTREPRISES CONCERNÉES

Le présent projet de loi rend au CSA la responsabilité de désigner les présidents des trois sociétés nationales de programme, conformément au principe qui a prévalu jusqu’en 2009.

Cependant, le projet de loi va beaucoup plus loin dans l’exigence d’indépendance puisqu’il modifie en profondeur le mode de nomination des membres du collège du CSA, chargés de cette nomination.

On peut certes relever que la participation, plus théorique que réelle, des commissions parlementaires à la procédure de nomination au travers de leur droit de veto n’est plus requise.

Cependant, la soumission de la désignation des présidents des sociétés nationales de programme à un avis des commissions parlementaires n’est pas compatible avec le principe d’une nomination par le CSA.

Elle aurait d’ailleurs été constitutive d’une atteinte au principe constitutionnel de séparation des pouvoirs : cette solution aurait en effet conditionné l’exercice des prérogatives d’une autorité administrative indépendante à l’avis du pouvoir législatif. S’agissant d’une formalité encore moins substantielle, le Conseil constitutionnel a d’ailleurs rappelé récemment que « le principe de la séparation des pouvoirs fait obstacle à ce que, en l’absence de disposition constitutionnelle le permettant, le pouvoir de nomination par une autorité administrative ou juridictionnelle soit subordonné à l’audition par les assemblées parlementaires des personnes dont la nomination est envisagée » (10).

Cependant, doit-on vraiment le regretter tant il est vrai que ce droit de veto cantonnait les commissions à un rôle de figuration peu valorisant, compte tenu de la difficulté, pour ne pas dire l’incapacité, à dégager un vote négatif à une majorité des trois cinquièmes ?

En revanche, le présent projet de loi renforce de manière inédite le pouvoir des commissions parlementaires dans la désignation des membres de l’autorité chargée de la nomination des présidents de l’audiovisuel public.

De plus, l’association des commissions parlementaires au processus de nomination des présidents de l’audiovisuel public n’est pas écartée puisqu’il est prévu que les présidents des sociétés nationales de programme récemment nommés par le CSA transmettent, dans un délai de deux mois, un rapport présentant leur projet pour la société concernée aux assemblées parlementaires et aux commissions compétentes (article 5 du projet de loi modifiant l’article 47-4 de la loi du 30 septembre 1986). Ces dernières sont libres, le cas échéant, d’auditionner les personnes choisies par le CSA sur la base de ce rapport.

Au-delà d’une plus grande garantie d’indépendance résultant de décisions collégiales prises par une instance dont l’indépendance est elle-même renforcée, le mode de nomination proposé par l’article 5 du présent projet de loi présente l’immense avantage, par rapport au précédent, d’obliger les candidats à présenter un projet formalisé assorti d’une stratégie de moyens. Le mode de désignation proposé est donc beaucoup plus conforme que l’actuel tant aux exigences démocratiques qu’aux exigences de bonne gestion des entreprises concernées.

Le service public audiovisuel souffre aujourd’hui essentiellement d’un manque de continuité stratégique. Réformer de telles entreprises publiques prend nécessairement plusieurs mandats et les changements de dirigeants ne doivent s’accompagner de ruptures des orientations stratégiques que si les pouvoirs publics le décident.

Parmi les critères d’examen des candidatures, le CSA pourra veiller à la continuité des politiques publiques et des choix stratégiques validés par les contrats d’objectifs et de moyens (COM) conclus entre l’État et les sociétés de l’audiovisuel public.

À cet égard, la volonté de calquer la durée des COM sur celle des mandats des présidents directeurs généraux est apparue comme une forte incitation à des ruptures stratégiques en encourageant la volonté d’appropriation de « son » COM par chaque président. Les sociétés de l’audiovisuel public doivent cesser d’être considérées comme des outils au service de visions trop personnelles, voire comme une sorte de « fief concédé à un féodal ».

C. L’OPPORTUNITÉ DE CONFIER AU CSA, À L’APPUI DE SON POUVOIR DE NOMINATION, UN RÔLE DE CONTRÔLE DE L’EXÉCUTION DES CONTRATS D’OBJECTIFS ET DE MOYENS

Alors que la responsabilité de nommer les dirigeants des sociétés nationales de programme, et partant éventuellement de les reconduire, est confiée au CSA, il peut paraître paradoxal que les pouvoirs du Conseil soient moins importants sur les sociétés de l’audiovisuel public qu’ils ne le sont sur leurs homologues du secteur privé. En particulier, alors qu’il est chargé d’élaborer avec les chaînes privées des conventions définissant leurs obligations et de contrôler leur application, le CSA demeure en retrait du processus de contrôle des COM sociétés nationales de programme (France Télévisions, Radio France, Audiovisuel extérieur de la France).

Dans la perspective d’une meilleure association du CSA à l’avenir du service public audiovisuel, le Conseil, dans son rapport annuel 2012, suggère de prévoir obligatoirement la saisine pour avis motivé du CSA sur les projets de COM, ainsi que sur tout projet d’avenant.

En second lieu, il propose que le respect des engagements souscrits dans les COM soit contrôlé annuellement par le CSA qui en ferait rapport devant les commissions compétentes du Parlement.

Si le rapporteur est très réservé sur l’association du CSA à l’élaboration des COM, qui doivent résulter d’un dialogue entre l’entreprise et ses tutelles, il estime que l’association du CSA au contrôle de l’exécution des COM est une idée intéressante. Elle permettrait en tout cas au Conseil de disposer des informations susceptibles de l’éclairer sur l’opportunité de reconduire un dirigeant à la tête d’une entreprise de l’audiovisuel public.

D. LA GARANTIE DU MAINTIEN DE LA PUBLICITÉ EN JOURNÉE : ÉLÉMENT DE L’INDÉPENDANCE DE FRANCE TÉLÉVISIONS

La garantie des ressources étant indéniablement une composante de l’indépendance, le rapporteur estime que ce projet de loi doit être l’occasion de faire un choix définitif sur le sort de la publicité en journée pour favoriser la visibilité de la trajectoire commerciale et financière de France Télévisions.

1. Le bilan négatif de la suppression de la publicité après 20 heures

L’annonce par M. Nicolas Sarkozy, le 8 janvier 2008, d’une « rénovation sans précédent de l’audiovisuel public », fondée sur la suppression de la publicité sur les antennes de France Télévisions après 20 heures dans l’immédiat puis en totalité à compter de 2011, a surpris l’ensemble des observateurs et profondément déstabilisé l’entreprise. Le bilan négatif de cette suppression a été dressé tant par les avis rendus au nom de notre Commission par Mme Martine Martinel sur les crédits en faveur de l’audiovisuel dans les projets de loi de finances pour 2011 et 2012 que par le rapport rendu au nom de la Commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois en mai 2012 par les sénateurs David Assouline et Jacques Legendre.

a) Pour le téléspectateur

Sur le plan éditorial, deux conséquences étaient attendues de la suppression de la publicité : elle devait, d’une part, faciliter le virage éditorial du groupe en le libérant de la contrainte de l’audience et, d’autre part, créer une spécificité du service public en termes d’horaires, avec l’avancement des programmes de première et de deuxième parties de soirée.

Comme l’indiquent les sénateurs Jacques Legendre et David Assouline dans le rapport précité, « la loi n’a pas réussi à réellement donner un nouveau visage éditorial à France Télévisions : le « recentrage » sur les missions de service public, avait été commencé avant la réforme, et n’a pas forcément été approfondi par la suite. » Comme on pouvait s’y attendre, la réforme a déstabilisé le service public sans conduire à une rénovation de son modèle culturel.

Plus fondamentalement, l’objectif du service public étant de fédérer le plus grand nombre de téléspectateurs autour d’une offre de programmes diversifiés, l’audience doit rester l’un des objectifs guidant la télévision publique. À cet égard on relèvera d’ailleurs qu’à travers le COM conclu après l’entrée en vigueur de la réforme, l’État a fixé un objectif d’audience cumulée à la société.

Par ailleurs, en novembre 2008, M. Jean-François Copé affirmait devant l’Assemblée nationale : « ce qui changera la vie des téléspectateurs, c’est que les programmes commenceront à 20 h 30 et non plus à 21 heures, et que la seconde partie de soirée sera à 22 h 15 et non plus à 23 h 15. » (11)

Cet objectif est loin d’être atteint. Sur France 2, la chaîne du groupe qui réunit le plus de téléspectateurs en soirée, l’horaire de début de programmation (20 h 44 en moyenne en 2012) est à peine inférieur à ce qu’il était avant la réforme. S’agissant des deuxièmes parties de soirée, même si leur début a été avancé de près de 15 minutes en moyenne entre 2008 et 2011, la société reconnaît n’avoir globalement pas été en mesure de respecter l’objectif, inscrit au cahier des charges, de les débuter entre 22 heures et 22 h 30.

b) Pour l’indépendance de France Télévisions

Le rapporteur estime que l’équilibre antérieur à la réforme, fondé sur un financement dépendant pour les deux tiers de la « redevance » et pour un tiers de la publicité, était un équilibre satisfaisant, qui garantissait l’indépendance de France Télévisions.

Une réforme mise en œuvre dans le mépris le plus total
de l’indépendance du service public audiovisuel

Rappelons que la suppression de la publicité n’avait été ni anticipée, ni préparée avec France Télévisions et ses administrations de tutelle. Le modèle de financement de France Télévisions, stable depuis 2001, avait d’ailleurs été conforté par la signature, quelques mois plus tôt, en avril 2007, du COM 2007-2010 ! Et si des réflexions s’étaient engagées à la fin de l’année 2007 sur le financement du « média global », il était plutôt envisagé de s’appuyer sur une augmentation de la redevance ou une augmentation de la publicité…

La publicité a été supprimée entre 20 heures et 6 heures à partir du 5 janvier 2009. Il n’est pas inutile de rappeler qu’au mépris total de l’indépendance du groupe, cette suppression est intervenue, de manière irrégulière, avant le vote définitif de la loi, en vertu d’une simple délibération du conseil d’administration du 16 décembre 2008, faisant suite à une simple lettre de la ministre de la culture et de la communication demandant au PDG de France Télévisions d’arrêter la commercialisation d’espaces publicitaires sur les chaînes du groupe entre 22 heures et 6 heures.

Dans une décision du 11 février 2010, le Conseil d’État a annulé cette décision, estimant que la suppression de la publicité pendant une part substantielle du temps d’antenne était une mesure qui avait pour effet de priver France Télévisions d’une part significative de ses recettes et d’affecter la garantie de ses ressources, qui constitue un élément de son indépendance. Or, les règles concernant l’indépendance des médias relèvent, aux termes de l’article 34 de la Constitution, du pouvoir législatif. Une telle mesure ne pouvait donc être prise que par le législateur, comme l’a d’ailleurs également souligné le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2009-577 DC du 3 mars 2009 sur la loi relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision.

Le rapporteur public déplorait même à ce titre « l’ingérence » des pouvoirs publics dans le travail du législateur et « la piètre gestion d’un dossier sensible mettant en cause l’avenir du service public de l’audiovisuel » (12).

Comme l’avait signalé l’opposition au moment de l’examen du projet de loi, les sénateurs David Assouline et Jacques Legendre constatent que « le choix de financement opéré par la loi du 5 mars 2009 a été plus complexe et moins favorable à l’indépendance du groupe. » En soumettant le groupe à un financement de l’État, et donc de la tutelle politique, la loi a réduit l’indépendance financière de France Télévisions.

Tout d’abord, le financement de la réforme devait conduire à une compensation par le budget de l’État, « à l’euro près », du manque à gagner de recettes publicitaires du groupe.

Ce principe repose sur une erreur d’analyse car il est impossible d’évaluer, que ce soit a priori ou a posteriori, le montant de recettes que France Télévisions n’a pas obtenu en raison de la suppression de la publicité. Les effets de la disparition des écrans publicitaires deviennent en outre de plus en plus complexes à évaluer au fur et à mesure que l’on s’éloigne dans le temps de la décision.

De plus, le remplacement de ressources publicitaires par une dotation du budget de l’État, loin de sécuriser le financement de l’entreprise, comme n’ont cessé de l’affirmer les défenseurs de la réforme, a exposé France Télévisions aux ajustements effectués sur le budget de l’État, d’autant que les taxes mises en place pour financer cette dotation ne produisent pas le rendement escompté, loin s’en faut.

Illustration frappante de ce phénomène, les engagements du COM 2011-2015 de France Télévisions, signé en novembre 2011 avec le précédent gouvernement ont été remis en cause par ce dernier, quelques semaines seulement après sa signature, à travers une réduction de 15 millions d’euros de la dotation budgétaire en loi de finances initiale, suivie d’une réduction de 6 millions d’euros en première loi de finances rectificative pour 2012, et enfin de 6 millions d’euros supplémentaires par gel de la réserve de précaution…

c) Pour les finances publiques : une réforme qui a coûté 745 millions d’euros

Le deuxième principe que la précédente majorité s’était engagée à respecter était la compensation « à l’euro près » de l’impact de la réforme pour les finances de l’État.

Se refusant à augmenter la redevance au-delà de son indexation, elle a donc mis en place deux taxes : une taxe sur la publicité diffusée par les chaînes de télévision, justifiée économiquement par « l’effet d’aubaine » dont bénéficient les chaînes privées en raison du report sur leurs écrans de la publicité auparavant diffusée sur France Télévisions, et une taxe sur le chiffre d’affaires des opérateurs de télécommunication.

Si l’on doit se féliciter de la récente validation par la Cour de justice de l’Union européenne de la taxe dite « télécoms », qui permet d’éviter une véritable catastrophe pour les finances publiques, là encore l’objectif est loin d’être atteint. Compte tenu d’un rendement de ces taxes très inférieur aux prévisions, force est de constater que la réforme a malheureusement eu un coût important pour les finances de l’État.

Le tableau ci-après montre que le coût de cette réforme peut aujourd’hui être estimé à 745,7 millions d’euros, ce qui est un montant considérable, eu égard notamment à la situation très dégradée des finances publiques.

Bilan de la suppression de la publicité pour le budget de l’État

(en millions d’euros)

   

2009

2010

2011

2012

2013 prévisionnel

Total sur la période

Ressources

Taxe sur la publicité

27,7

17,8

13,2

13

13

84,7

Taxe « télécoms »

185,9

255

251

179,7

190

1 061,6

total

213,6

272,8

264,2

192,7

203

1 146,3

Dotation budgétaire à France Télévisions

415

423,3

361,9

435,9

255,9

1 892

Manque à gagner pour l’État

201,4

150,5

97,7

243,2

52,9

745,7

2. L’augmentation de la redevance et le lancement d’une réflexion sur son avenir par la nouvelle majorité

Si le service public audiovisuel ne saurait être dispensé des obligations d’économies qui s’imposent à l’ensemble des services publics, la nouvelle majorité a considéré que son financement pérenne était prioritaire.

C’est pourquoi, dès la loi de finances initiale pour 2013, fidèle à l’idée que le financement le plus naturel et le plus protecteur de l’indépendance de l’audiovisuel public est la redevance, acquittée par les contribuables, elle a décidé de porter son montant, avant indexation, à 129 euros en métropole et à 83 euros en outre-mer, contre respectivement 127 euros et 82 euros dans le projet initial du gouvernement.

Cette augmentation a permis d’apporter 50 millions d’euros de recettes supplémentaires de redevance au compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public » en 2013.

En outre, le gouvernement a créé un groupe de travail, associant six parlementaires, chargé de réfléchir à la modernisation de la redevance et notamment à l’opportunité d’élargir son assiette à l’ensemble des appareils connectés permettant de recevoir la télévision.

3. La nécessité de lever l’incertitude sur la présence de la publicité en journée

La loi du 5 mars 2009 avait initialement prévu l’arrêt complet de la publicité à compter de l’extinction de la télévision analogique, cette échéance étant programmée fin 2011. La crise budgétaire et l’incapacité à trouver un mode de financement ont incité le gouvernement à revenir sur sa propre réforme un an seulement après son adoption : le 17 septembre 2010, le ministre en charge de la culture annonçait un probable moratoire de deux ans avant la suppression totale de la publicité. L’article 76 du projet de loi de finances pour 2011, intitulé « report de l’échéance de suppression de la publicité sur les antennes de France Télévisions », visait ainsi à décaler la suppression de la publicité avant 20 heures au début de l’année 2014 « dans un contexte budgétaire difficile consécutif à la crise économique ».

Ce délai était contesté, quelques jours plus tard, par le groupe de travail relatif à la publicité sur France Télévisions, co-présidé par Mme Michèle Tabarot, alors présidente de la Commission des affaires culturelles et de l’éducation de l’Assemblée nationale, et M. Jean-François Copé, qui proposait un moratoire de cinq ans renouvelables. Le 16 novembre 2010, la solution du moratoire était totalement remise en cause par le vote à l’Assemblée nationale d’un amendement autorisant le maintien définitif de la publicité en journée sur France Télévisions, vote contredit le 5 décembre 2010 par le Sénat qui revenait à un simple moratoire prévoyant que la publicité serait entièrement supprimée sur les antennes de France Télévisions à compter du 1er janvier 2016… In fine, cette date a été retenue dans la loi de finances pour 2011.

Ces hésitations révèlent la difficulté de la précédente majorité, qui n’a jamais cru à la possibilité d’une suppression de la publicité en journée, à assumer un retour en arrière. Il est grand temps, pour favoriser l’indépendance du groupe, sa visibilité sur ses ressources et l’avenir de sa régie publicitaire, de clore ce débat.

II.- UNE RÉFORME AMBITIEUSE DU CSA

A. DES COMPÉTENCES ÉTENDUES ET ÉVOLUTIVES QUI APPELLENT UNE ADAPTATION DE L’INSTITUTION

Depuis sa création, le Conseil supérieur de l’audiovisuel a vu ses compétences considérablement évoluer afin d’adapter régulièrement ses missions et ses prérogatives aux évolutions du secteur qu’il régule, lui-même en mutation constante. Centrées initialement sur le contrôle des contenus et des programmes, les missions du Conseil comportent une dimension de plus en plus économique et technique.

L’activité du CSA le conduit, de manière croissante, à gérer de très importants dossiers touchant aux équilibres économiques du secteur audiovisuel et à la prise en compte des nouveaux usages permis par la convergence des technologies. En 2009, la loi a ainsi confié au Conseil la régulation d’un nouveau secteur par l’extension de ses compétences aux services de médias audiovisuels à la demande (SMAd) c’est-à-dire essentiellement la télévision de rattrapage et la vidéo à la demande.

Les missions du CSA sont définies à l’article 3-1 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication :

« Le Conseil supérieur de l’audiovisuel, autorité indépendante, garantit l’exercice de la liberté de communication audiovisuelle par tout procédé de communication électronique, dans les conditions définies par la présente loi.

Il assure l’égalité de traitement ; il garantit l’indépendance et l’impartialité du secteur public de la communication audiovisuelle ; il veille à favoriser la libre concurrence et l’établissement de relations non discriminatoires entre éditeurs et distributeurs de services, quel que soit le réseau de communications électroniques utilisé par ces derniers, conformément au principe de neutralité technologique ; il veille à la qualité et à la diversité des programmes, au développement de la production et de la création audiovisuelles nationales ainsi qu’à la défense et à l’illustration de la langue et de la culture françaises. Il peut formuler des propositions sur l’amélioration de la qualité des programmes. Il veille au caractère équitable, transparent, homogène et non discriminatoire de la numérotation des services de télévision dans les offres de programmes des distributeurs de services.

Le Conseil supérieur de l’audiovisuel contribue aux actions en faveur de la cohésion sociale et à la lutte contre les discriminations dans le domaine de la communication audiovisuelle. Il veille, notamment, auprès des éditeurs de services de communication audiovisuelle, compte tenu de la nature de leurs programmes, à ce que la programmation reflète la diversité de la société française et contribue notamment au rayonnement de la France d’outre-mer. Il rend compte chaque année au Parlement des actions des éditeurs de services de télévision en matière de programmation reflétant la diversité de la société française et propose les mesures adaptées pour améliorer l’effectivité de cette diversité dans tous les genres de programmes.

Le Conseil supérieur de l’audiovisuel veille à ce que le développement du secteur de la communication audiovisuelle s’accompagne d’un niveau élevé de protection de l’environnement et de la santé de la population.

Le conseil peut adresser aux éditeurs et distributeurs de services de communication audiovisuelle des recommandations relatives au respect des principes énoncés dans la présente loi. Ces recommandations sont publiées au Journal officiel de la République française. ».

1. Un pouvoir de nomination conforté par le présent projet de loi

Le présent projet de loi rend au CSA sa prérogative traditionnelle de nomination des sociétés nationales de programme de l’audiovisuel public (cf. supra).

Le CSA nomme également, à raison de leurs compétences, pour des mandats de cinq ans, les personnalités indépendantes aux conseils d’administration des sociétés nationales de programme (France Télévisions, Radio France et la société en charge de l’audiovisuel extérieur de la France) et à l’Institut national de l’audiovisuel.

2. Un pouvoir de gestion et d’attribution des fréquences qui s’est accru

Les responsabilités du CSA dans la gestion du spectre hertzien sont considérables et se sont accrues, notamment en télévision avec le passage à la diffusion numérique.

La planification des bandes radio MF et MA, tout comme l’attribution de canaux de diffusion aux télévisions (résorption de zones d’ombre, extension de réseaux), repose sur le Conseil.

Pour l’ensemble des fréquences dont il assure la gestion, le CSA participe aux procédures de coordination internationales. Celles-ci portent, chaque année, sur plusieurs milliers de canaux de télévision et de fréquences radio. De plus, il revient au CSA d’apporter des solutions aux problèmes de réception que rencontrent les usagers sur leurs postes de télévision ou de radio. Il est ainsi saisi, chaque année, de milliers de réclamations émanant de téléspectateurs et d’auditeurs.

Le CSA délivre les autorisations d’usage de la ressource radioélectrique pour les services diffusés par voie hertzienne terrestre, publics et privés, à la demande du gouvernement pour les premiers et après une procédure d’appel à candidatures pour les seconds. Il autorise également l’usage des fréquences assignées à la radiodiffusion par satellite.

Il conclut avec les opérateurs privés une convention définissant les obligations applicables à la programmation de chaque service.

3. Des pouvoirs de contrôle étendus

La mise en œuvre des lois et règlements ainsi que des engagements et obligations des opérateurs est subordonnée à la possibilité d’en contrôler le respect. Le contrôle a pour but de veiller à la sauvegarde de principes fondamentaux comme, par exemple, le respect de la dignité de la personne humaine et de l’ordre public.

Il a également pour objectif d’assurer le respect, par les diffuseurs, de leurs obligations en matière de programmes.

Ces obligations portent essentiellement sur six domaines : pluralisme et honnêteté de l’information ; régime de diffusion des œuvres cinématographiques et audiovisuelles ; contribution des chaînes de télévision à la production cinématographique et audiovisuelle ; protection de l’enfance et de l’adolescence ; publicité, parrainage et téléachat ; langue française. Depuis 1994, le contrôle porte également sur le respect de l’obligation faite aux radios privées de diffuser un minimum de chansons francophones.

Ce contrôle porte, de façon quasi exhaustive, sur le programme des chaînes hertziennes nationales, et, par sondage, sur celui des chaînes hertziennes régionales et locales, des chaînes diffusant sur les autres réseaux ainsi que sur celui des radios publiques et privées.

Enfin, chargé par la loi de veiller à la qualité des programmes, le CSA dispose, dans le domaine de l’éthique des programmes, d’un large pouvoir de recommandation. Il en fait usage régulièrement dans les domaines tant de l’information que de la protection de l’enfance et de l’adolescence (images violentes, propos racistes, horaire de diffusion des films interdits aux mineurs…).

Depuis 1996, le CSA a mis en place un dispositif de protection des mineurs : la signalétique jeunesse.

4. Des pouvoirs de sanction adoptés par le présent projet de loi

Les pouvoirs de sanction du CSA sont décrits par le commentaire de l’article 3 du présent projet de loi. Cet article réforme en profondeur la procédure de mise en œuvre par le CSA de son pouvoir de sanction pour la mettre en conformité avec les exigences d’impartialité, telles qu’elles résultent des évolutions récentes de la jurisprudence constitutionnelle et européenne.

L’instauration d’un rapporteur indépendant permet de répondre à cet objectif. Le déroulement de la procédure opérera désormais une distinction nette entre le titulaire des fonctions de poursuite et d’instruction, qui seront de la responsabilité exclusive du rapporteur indépendant, et le titulaire du prononcé de la sanction qui reste l’apanage du collège du CSA. Ces modifications sont détaillées dans le commentaire de l’article 3.

Le CSA dispose également d’un pouvoir de règlement des différends : il peut être saisi d’un litige relatif à la distribution d’un service audiovisuel lorsque ce litige porte atteinte à l’un des principes dont l’instance de régulation doit assurer le respect.

5. Un large pouvoir consultatif

Sur l’ensemble des activités relevant de sa compétence, le CSA peut être saisi de demandes d’avis ou d’études par le gouvernement, les présidents de l’Assemblée nationale ou du Sénat et les commissions compétentes de ces deux assemblées.

En application de l’article 9 de la loi du 30 septembre 1986, le CSA est consulté par le gouvernement sur les projets de loi et d’actes réglementaires relatifs au secteur de la communication audiovisuelle.

Il est également consulté sur la définition de la position de la France dans les négociations internationales qui portent sur la radio et la télévision (on citera à titre d’exemple les négociations internationales relatives à l’usage du spectre qui ont lieu dans le cadre de l’Union internationale des télécommunications).

Les avis du CSA sont par ailleurs requis sur l’élaboration des spécifications techniques applicables aux signaux émis par les radios et télévisions utilisant la voie hertzienne. Ainsi, en application de l’article 12 de la loi du 30 septembre 1986, le CSA est consulté sur tout projet visant à rendre obligatoires les normes relatives aux matériels et techniques de diffusion ou de distribution des services de communication audiovisuelle par un réseau de communications électroniques. Il peut formuler toute recommandation concernant ces normes.

Lors de la définition par le Premier ministre des fréquences ou bandes de fréquences radioélectriques qui sont attribuées aux administrations de l’État (défense par exemple) et celles dont l’assignation est confiée au CSA ou à l’ARCEP (13), l’avis du CSA est requis au même titre que celui de l’ARCEP.

Enfin, il est également consulté par l’Autorité de la concurrence sur des pratiques restrictives de la concurrence et les concentrations économiques intervenant dans le secteur audiovisuel.

6. Autres compétences

Le CSA fixe les règles concernant les conditions de production, de programmation et de diffusion des émissions relatives aux campagnes électorales que les radios et télévisions publiques sont tenues de produire et de programmer en vertu d’un texte législatif. Par ailleurs, le CSA adresse, pour la durée des campagnes électorales, des recommandations aux radios et aux télévisions privées.

Il fixe les modalités selon lesquelles un temps d’émission est accordé chaque année aux formations politiques représentées par un groupe au Sénat ou à l’Assemblée nationale, ainsi qu’aux organisations syndicales et professionnelles représentatives à l’échelle nationale.

Le CSA fixe également les modalités du droit de réplique aux émissions du gouvernement. Celui-ci peut en effet faire programmer à tout moment par les radios et télévisions publiques les déclarations ou communications qu’il juge nécessaires.

B. UN NOUVEAU MODE DE DÉSIGNATION INÉDIT, AU SERVICE DE L’INDÉPENDANCE ET DE L’EFFICACITÉ DE L’INSTITUTION

1. Un mode de désignation inédit

Qualifié d’autorité administrative indépendante par la décision du Conseil constitutionnel n° 88−248 DC du 17 janvier 1989, le CSA est composé de membres dont le mode de désignation et le statut sont prévus par le titre Ier de la loi du 30 septembre 1986, modifiée par la loi du 17 janvier 1989.

Troisième instance de régulation de l’audiovisuel depuis 1982, la composition du Conseil est calquée sur celle du Conseil constitutionnel.

Les instances de régulation de l’audiovisuel avant le CSA

La Haute autorité de la communication audiovisuelle, instituée par la loi n° 82-625 du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle, est historiquement la première autorité de régulation de l’audiovisuel en France.

La loi du 29 juillet 1982 ayant proclamé la liberté de la communication audiovisuelle et abrogé le monopole d’État sur la radio-télévision, il est apparu nécessaire de créer une autorité indépendante, conçue comme un « écran protecteur » entre le pouvoir exécutif et le secteur audiovisuel, chargée notamment de garantir l’indépendance du service public de la radio-télévision en nommant les dirigeants des sociétés du secteur public.

La composition et le mode de nomination de la Haute autorité étaient semblables à ceux retenus pour le Conseil constitutionnel : neuf membres dont le mandat durait neuf ans avec un renouvellement par tiers tous les trois ans.

Ses membres étaient nommés par décret du Président de la République, trois étant désignés par ce dernier parmi lesquels le président de la Haute autorité, trois par le Président de l’Assemblée nationale et trois par le président du Sénat. Les membres ne pouvaient être nommés au-delà de l’âge de 65 ans.

*

Créée par la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, la Commission nationale de la communication et des libertés (CNCL) a succédé à la Haute autorité. Comme la Haute autorité, il s’agissait d’une autorité administrative indépendante mais ce statut était expressément mentionné par la loi.

Elle comprenait treize membres nommés pour neuf ans par décret : deux membres désignés par le Président de la République ; deux membres désignés par le président de l’Assemblée nationale ; deux membres désignés par le président du Sénat ; un membre ou membre honoraire du Conseil d’État élu par ses pairs ; un magistrat ou magistrat honoraire de la Cour de cassation élu par ses pairs ; un magistrat ou magistrat honoraire de la Cour des comptes élu par ses pairs ; un membre de l’Académie française élu par ses pairs et trois personnalités qualifiées cooptées par les dix membres précédents (une qualifiée dans le secteur de la création audiovisuelle, une dans le secteur des télécommunications et une dans celui de la presse écrite). La Commission élisait son président parmi ses membres.

Aux termes de l’article 4 de la loi du 30 septembre 1986, le CSA comprend neuf membres désignés par tiers tous les deux ans respectivement par le Président de la République (dont le président de l’autorité), le président de l’Assemblée nationale et le président du Sénat.

Les neuf membres du CSA sont désignés pour six ans par décret du Président de la République (14). L’alinéa 2 de l’article 4 de la loi du 30 septembre 1986 fixe en outre à 65 ans, la limite d’âge au-delà de laquelle les membres ne peuvent être nommés.

La seule évolution du mode de nomination intervenue depuis la création du Conseil a concerné son président à la suite de la révision constitutionnelle de 2008 (15).

En effet, en application de la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution, le président du CSA est nommé par le Président de la République après avis public de la commission permanente compétente de chaque assemblée et sous réserve de l’absence d’opposition de la majorité des trois cinquièmes des membres des deux commissions (16).

Composition actuelle du CSA

Conseillers

Début du mandat

Échéance du mandat

Conseillers désignés par le Président de la République

Françoise Laborde

24 janvier 2009

23 janvier 2015

Francine Mariani-Ducray

24 janvier 2011

23 janvier 2017

Olivier Schrameck, président

24 janvier 2013

23 janvier 2019

Conseillers désignés par le président du Sénat

Christine Kelly

24 janvier 2009

23 janvier 2015

Nicolas About

24 janvier 2011

23 janvier 2017

Memona Hintermann-Afféjee

24 janvier 2013

23 janvier 2019

Conseillers désignés par le président de l’Assemblée nationale

Emmanuel Gabla

24 janvier 2009

23 janvier 2015

Patrice Gélinet

24 janvier 2011

23 janvier 2017

Sylvie Pierre-Brossolette

24 janvier 2013

23 janvier 2019

Avancée démocratique majeure, le présent projet de loi propose de confier aux Commissions des affaires culturelles de chaque assemblée un rôle capital dans la désignation des six membres du CSA désignés par les présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat.

Ces commissions devront en effet rendre un avis conforme sur ces désignations, dans des conditions de majorité (trois cinquièmes) qui garantissent un consensus très large entre les principales formations politiques qui les composent.

Comme le montre l’encadré ci-après, la procédure d’avis conforme des Commissions des affaires culturelles de chaque assemblée parlementaire sur la désignation des membres du CSA par les présidents de ces assemblées est inédite.

Une procédure inédite

Il existe une grande diversité dans le mode de désignation des membres des autorités administratives indépendantes (AII).

En règle générale, les nominations sont toutefois effectuées par décret. Il s’agit souvent, lorsque ces membres occupent un emploi public permanent ou simplement pour marquer l’indépendance de l’autorité concernée, d’un décret du Président de la République. C’est notamment les cas des neuf membres du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), du président de l’Autorité des marchés financiers (AMF) ou de trois des sept membres de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP).

En outre, depuis la réforme constitutionnelle de 2008 (17), les présidents de certaines AAI (président du CSA, de l’ARCEP, de l’AMF, etc.) sont nommés, « en raison de leur importance pour la garantie des droits et libertés ou la vie économique et sociale de la Nation », selon la procédure du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution par le Président de la République après avis public de la commission permanente compétente de chaque assemblée et sous réserve de l’absence d’opposition de la majorité des trois cinquièmes des membres des deux commissions (18).

Dans d’autres cas, les nominations peuvent être faites par décret en conseil des ministres (commission des sondages, comité national d’évaluation des établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel), par décret du Premier ministre (membres de la commission d’accès aux documents administratifs-CADA) ou par arrêté d’un ministre.

D’autres membres nommés par décret le sont sur proposition ou désignation des présidents des deux assemblées, qu’il s’agisse de parlementaires ou non. C’est le cas notamment pour trois membres du CSA ou encore du député et du sénateur siégeant à la CADA.

On remarquera toutefois que dans tous les cas de figure, aucune composition d’AAI ne fait l’objet d’une procédure de décision et de nomination par le Parlement ou les commissions permanentes compétentes de chaque assemblée.

2. Un mode de désignation au service de l’indépendance et de la compétence

La procédure de nomination proposée par le présent projet de loi permet de renforcer le rôle exercé par le Parlement en associant l’opposition parlementaire au processus de désignation des membres du CSA. Ce nouveau mécanisme conférera une plus grande légitimité à l’instance de régulation de l’audiovisuel et devrait éviter tout caractère partisan des nominations.

Les opérateurs du secteur audiovisuel entendus par le rapporteur se félicitent unanimement de ce mode de nomination, gage d’indépendance mais aussi de compétence, elle-même garantie d’indépendance.

La nécessité de réunir une majorité des trois cinquièmes des commissions parlementaires devrait inciter au choix de personnalités susceptibles de dégager le consensus le plus large. Cette règle devrait par conséquent pousser à sélectionner des personnalités en raison de leurs compétences techniques, juridiques et économiques, ce qui est hautement souhaitable s’agissant d’une autorité de régulation dont les missions en matière technique et économique sont d’importance croissante.

3. La question de la nomination du président de l’autorité

Il convient de souligner que la désignation du président du CSA par le Président de la République ne peut pas être soumise à la même procédure d’avis conforme des commissions parlementaires.

Le principe constitutionnel de séparation des pouvoirs interdit en effet de soumettre le choix du Président de la République à un avis conforme du Parlement par une procédure différente de celle de l’article 13 de la Constitution.

Les commissions parlementaires ne peuvent dès lors être associées à la désignation du président du CSA que dans le cadre de la procédure de l’article 13 de la Constitution qui prévoit une faculté d’opposition à la majorité des trois cinquièmes.

L’option retenue par le projet de loi permet de concilier le renforcement du rôle des commissions et de l’opposition parlementaire avec le respect de la séparation des pouvoirs.

Une autre option aurait pu consister à supprimer la nomination du président du CSA par le Président de la République et à la confier aux présidents des assemblées parlementaires ou au collège du CSA. Cette solution aurait évité la mise en œuvre de deux procédures distinctes de contrôle parlementaire.

Toutefois, cette option a été écartée. En effet, alors même que le Président de la République ne nommera plus qu’un membre au lieu de trois, il a été jugé opportun de maintenir la disposition selon laquelle il nomme le président du CSA.

À l’instar des autres emplois publics figurant en annexe de la loi organique d’application de l’article 13 de la Constitution, et notamment de la plupart des présidents autorités administratives indépendantes, le président du CSA occupe en effet une place particulière justifiant sa désignation par le Président de la République.

C. UN COLLÈGE RÉDUIT : GAGE D’UNE PLUS GRANDE COHÉRENCE DE L’ACTION DE L’AUTORITÉ

Le présent projet de loi propose de faire passer le nombre de membres du collège du CSA de neuf à sept. Le rapporteur se félicite de cette mesure qui favorisera une plus grande cohésion au sein du collège.

Le nombre de membres d’une instance influe en effet sur le fonctionnement de celle-ci. L’organisation du travail est plus délicate à mettre en œuvre au sein d’une autorité composée de nombreux membres qu’au sein d’un collège plus restreint.

Une grande diversité dans l’effectif des collèges des AAI

Le législateur a doté la quasi-totalité des AAI d’une structure collégiale. Il existe toutefois quatre exceptions : le Défenseur des droits, le médiateur du cinéma, le médiateur national de l’énergie et le Contrôleur général des lieux de privation de liberté. Mais ces exceptions sont justifiées par la reprise du modèle scandinave de l’Ombudsman et la volonté de facilité l’identification de ces autorités.

L’effectif des collèges varie très sensiblement d’une autorité à l’autre : de trois (pour la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité par exemple) à 64 (Commission nationale consultative des droits de l’Homme).

La plupart des AAI ont toutefois un collège comprenant entre sept et onze membres : sept membres à l’ARCEP, neuf au CSA et à l’Agence française de lutte contre le dopage, onze à la CADA.

Selon son domaine d’intervention, une AAI dispose d’un collège plus ou moins nombreux.

Les autorités dont l’activité exige le respect de garanties de confidentialité très fortes et une capacité de décision rapide ont été dotées par le législateur d’un collège restreint (par exemple, la commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité compte trois membres et la commission consultative du secret de la défense nationale en compte cinq).

En sens inverse, celles qui disposent d’un champ de compétence étendu ou pour lesquelles il convenait d’assurer le respect du pluralisme en intégrant le maximum de courants de pensée, d’experts ou de représentants des secteurs concernés ont été dotées d’un collège plus nombreux. Tel est le cas de la CNIL (qui compte 17 membres), ou encore de l’AMF (qui en compte 16).

Les difficultés occasionnées par un grand nombre de conseillers peuvent être les suivants : segmentation importante des attributions au détriment de la transversalité et de la cohérence du travail du collège, chevauchement de compétences entre conseillers, répartition inégale des dossiers, etc.

Comme l’indique l’étude d’impact jointe au projet de loi, le choix de sept membres, calqué sur le modèle de l’ARCEP, « semble le plus approprié, notamment sur le plan de la répartition de dossiers que l’autorité de régulation est appelée à traiter. »

Le collège du CSA a en effet institué vingt groupes de travail, quatre missions et deux commissions.

Tableau de répartition des dossiers entre les membres du collège du CSA

 

Nom

Président(e)

Vice-président(e)

Groupes de travail

Accessibilité aux personnes handicapées

Nicolas About

Mémona Hintermann-Affejee

Audiovisuel et éducation

Mémona Hintermann-Affejee

Patrice Gélinet

Audiovisuel extérieur et coopération internationale

Emmanuel Gabla

Françoise Laborde et

Mémona Hintermann-Affejee

Déontologie de l’information et des programmes audiovisuels

Nicolas About

Mémona Hintermann-Affejee

Diversité

Mémona Hintermann-Affejee

Nicolas About

Droits des femmes

Sylvie Pierre-Brossolette

Françoise Laborde

Économie de l’audiovisuel et affaires européennes

Emmanuel Gabla

Francine Mariani-Ducray

Ressources et technologies de la télévision numérique, nouveaux services internet

Emmanuel Gabla

Nicolas About

Jeunesse et protection des mineurs

Françoise Laborde

Christine Kelly

Musique

Francine Mariani-Ducray

Sylvie Pierre-Brossolette

Outre-mer

Patrice Gélinet

Sylvie Pierre-Brossolette

Pluralisme et campagnes électorales

Christine Kelly

Francine Mariani-Ducray

Production audiovisuelle

Francine Mariani-Ducray

Christine Kelly

Publicité et protection des consommateurs

Christine Kelly

Sylvie Pierre-Brossolette

Radio analogique et numérique

Patrice Gélinet

Nicolas About

Santé et développement durable

Christine Kelly

Mémona Hintermann-Affejee

Télévisions locales

Nicolas About

Patrice Gélinet

Télévisions payantes

Françoise Laborde

Sylvie Pierre-brossolette

Télévisions nationales privées

Emmanuel Gabla

Francine Mariani-Ducray

Télévisions nationales publiques

Sylvie Pierre-Brossolette

Christine Kelly

Missions

Mission Associations

Sylvie Pierre-Brossolette

 

Mission Cinéma

Francine Mariani-Ducray

 

Mission Langue française et francophonie

Patrice Gélinet

 

Mission Sport

Christine Kelly

 

Commissions

Commission de réflexion prospective sur l’audiovisuel

Françoise Laborde

Nicolas About

Commission de réflexion sur l’évolution des programmes

Francine Mariani-Ducray et Françoise Laborde (co-présidentes)

 

Le nombre de groupes de travail pourrait utilement être réduit. Les thèmes « Santé et développement durable » n’exigent par exemple pas nécessairement un groupe de travail ad hoc mobilisant deux conseillers. Il en est de même de la thématique « Associations », qui fait l’objet d’une mission particulière.

Depuis de nombreuses années, des critiques ont été émises sur l’inadéquation entre le nombre de membres de l’instance et la charge réelle de travail au sein du collège.

La répartition des dossiers au sein de ce CSA rénové constitue cependant une décision d’organisation interne qui relève de la compétence de son collège.

D. LA NÉCESSITÉ DE RENFORCER LES RÈGLES D’INCOMPATIBILITÉ ET DE DÉONTOLOGIE

Les conditions de l’indépendance ne se réduisent pas au mode de nomination. C’est pourquoi la loi impose aux membres du CSA des règles d’incompatibilité et de déontologie.

Non renouvelable, le mandat des membres du CSA est irrévocable et ne peut être interrompu par la limite d’âge (19). Toutefois, la loi prévoit la possibilité d’une révocation des membres du Conseil par leurs pairs en cas de non-respect du régime d’incompatibilité prévu par la loi : le membre du CSA qui manque à ces obligations est déclaré démissionnaire d’office par le CSA statuant à la majorité des deux tiers de ses membres (20).

Afin de prévenir d’éventuels conflits d’intérêts et de garantir l’indépendance des membres du CSA, l’article 5 de la loi du 30 septembre 1986 prévoit que les fonctions de membres du Conseil sont incompatibles avec tout mandat électif (national et local), tout emploi public et toute autre activité professionnelle.

S’agissant de cette dernière interdiction, le législateur a précisé son étendue pour les activités professionnelles liées au secteur de la communication. Le deuxième alinéa de l’article 5 de la loi du 30 septembre 1986 prévoit en effet que les membres du CSA ne peuvent « directement ou indirectement, exercer des fonctions, recevoir d’honoraires, sauf pour des services rendus avant leur entrée en fonction, ni détenir d’intérêts dans une entreprise de l’audiovisuel, du cinéma, de l’édition, de la presse, de la publicité ou des télécommunications. ». Le membre qui se trouverait dans une de ces situations dispose d’un délai de trois mois pour se mettre en conformité avec les prescriptions de la loi. À défaut, il peut faire l’objet d’une sanction administrative (prononcé de sa démission d’office) et pénale (peines prévues à l’article 432-12 du code pénal).

En outre, cette obligation de ne pas exercer d’activité liée au secteur s’applique aux membres durant une période d’un an après la fin de leur mandat (21).

Les membres du CSA sont également, au cours de leur mandat et pendant une période d’un an à compter de la fin de leurs fonctions, tenus à un devoir de réserve. Ils ont ainsi obligation de « s’abstenir de toute prise de position publique sur les questions dont le conseil a ou a eu à connaître ou qui sont susceptibles de lui être soumises dans l’exercice de sa mission. » (22).

Enfin, les membres du CSA sont tenus au secret professionnel « pour les faits, actes et renseignements dont ils ont pu avoir connaissance en raison de leurs fonctions » (23), dans les conditions et sous les peines prévues à l’article 75 du code pénal.

Le présent projet de loi prévoit un renforcement du régime des incompatibilités.

La réduction du nombre de membres du CSA de neuf à sept impose en effet de modifier l’article 5 de la loi du 30 septembre 1986, pour adapter les règles de majorité dans deux hypothèses dans lesquelles le collège est appelé à voter à la majorité des deux tiers, c’est-à-dire six membres sur neuf :

– pour prononcer la démission d’office d’un membre qui aurait manqué à ses obligations en matière de conflit d’intérêt ou d’incompatibilité ;

– pour faire cesser la rémunération d’un ancien membre qui viendrait à détenir des intérêts dans une entreprise du secteur de la communication.

Ces décisions feront désormais l’objet d’un vote à la majorité simple, soit quatre membres sur sept, ce qui est un peu moins strict que la majorité des deux tiers actuellement en vigueur.

Le rapporteur souhaite que ce projet de loi soit l’occasion d’approfondir les règles d’incompatibilité et de déontologie des membres du CSA.

Il lui paraît à cet égard hautement souhaitable d’interdire clairement le maintien d’un un contrat de travail avec une entreprise du secteur audiovisuel car cela peut conduire les membres concernés à prendre en considération leur futur retour dans l’entreprise à l’occasion de prises de position au sein du collège.

Il souhaite également qu’une réflexion soit engagée sur le devoir de réserve. L’interdiction faite aux membres par le cinquième alinéa de l’article 5 de la loi de 1986, pendant la durée de leurs fonctions, de « s’abstenir de toute prise de position publique sur les questions dont l’autorité a ou a eu à connaître ou qui sont susceptibles de lui être soumises dans l’exercice de sa mission » est, par sa généralité, irréaliste. Le CSA doit évidemment communiquer et doit pouvoir le faire par le truchement de son président ou de ses membres. La disposition précitée, trop draconienne, peut conduire à des déboires contentieux. Les membres d’une AAI ne peuvent être « des muets du sérail ». En revanche, il est légitime que leur expression soit coordonnée et que, même coordonnée, cette expression se garde de gêner l’action de l’instance de régulation, notamment en laissant douter de l’impartialité de ses délibérations.

III.- ALLER PLUS LOIN DANS LA RESPONSABILISATION DU CSA

A. L’OPPORTUNITÉ DE DOTER LE CSA D’UN STATUT D’AUTORITÉ PUBLIQUE INDÉPENDANTE

Depuis l’apparition de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) en 1978, 40 autorités ont été qualifiées par la loi ou la jurisprudence d’autorité administrative indépendante (AAI), d’autorité indépendante ou d’autorité publique indépendante (API).

La loi n° 2003-706 du 1er août 2003 sur la sécurité financière a créé la catégorie des « autorités publiques indépendantes » dotées de la personnalité morale (Agence française de lutte contre le dopage, Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet (HADOPI), AMF, Haute autorité de santé etc.).

Ce statut traduit en général la volonté du législateur de mieux affirmer l’indépendance d’un organisme intervenant dans le domaine économique et s’accompagne alors de l’attribution de la personnalité morale et de ressources propres.

S’agissant du Conseil supérieur de l’audiovisuel, le passage du statut d’autorité indépendante à celui d’autorité publique indépendante permettrait de mettre en cohérence l’organisation fonctionnelle, administrative et financière du Conseil avec l’indépendance qui imprime l’exercice de sa mission de régulation conformément aux exigences de nature constitutionnelle.

Le CSA n’ayant pas de personnalité juridique distincte de celle de l’État, le statut d’autorité publique indépendante le rendrait responsable sur le plan juridique et financier de toutes ses décisions.

Un renforcement de l’autonomie de gestion permettrait au Conseil, sur les bases des orientations définies par son collège, d’adapter de façon plus réactive l’allocation de ses moyens et de son mode d’intervention aux mutations de l’audiovisuel.

Face à de telles mutations, le Conseil doit en effet pouvoir rapidement, sans être lesté par les procédures actuelles contraignantes, engager des études et des missions d’expertise, faire appel à des personnalités qualifiées externes et des compétences pointues ou rares ou encore financer des projets techniques ou informatiques rendus indispensables par l’évolution du mode de régulation.

1. La garantie d’une plus grande autonomie financière adaptée à son statut

Au plan budgétaire l’indépendance du Conseil est actuellement relative. Il dépend budgétairement du programme 308 « protection des droits et libertés », de la mission « direction de l’action du gouvernement », dont le responsable est le Secrétaire général du Gouvernement. Ainsi, le Conseil doit-il appliquer les procédures d’élaboration et d’exécution de son budget auxquelles sont soumises les administrations « classiques », alors même que le législateur lui a conféré un statut distinct.

Le statut d’API, grâce à l’attribution de la personnalité morale, permettrait au Conseil :

- de fonctionner sur la base d’une dotation annuelle, négociée annuellement avec l’État, permettant la souplesse et la flexibilité nécessaires à une autorité contrainte d’adapter son mode d’intervention à un environnement très évolutif ;

- de disposer d’un fonds de roulement nécessaire à la conduite d’actions pluriannuelles ;

- de se voir affecter, le moment venu, des ressources propres, ce qui lui permettrait de diversifier ses ressources budgétaires, dans un contexte où le budget de l’État est fortement contraint et où les missions du CSA devraient s’étendre.

2. Un gage de meilleure maîtrise de ses moyens financiers et humains

Actuellement, le Conseil n’échappe ni aux « gels » budgétaires initiaux, ni aux « surgels » en gestion. Il est de plus en plus soumis au contrôle de ses effectifs dans le flux des entrées et sorties. À la contrainte du plafond d’autorisation des emplois en loi de finances s’ajoute celle du respect du schéma d’emplois arrêté lors de la notification des lettres plafonds.

Or, les API, si elles sont soumises à autorisation d’emplois, ne sont pas soumises dans les faits au schéma d’emplois et conservent ainsi la maîtrise des entrées et sorties de leur personnel.

Loin d’exonérer le CSA de la contrainte budgétaire globale, les souplesses de gestion dont bénéficient les API lui permettraient d’assurer une meilleure maîtrise de ses moyens, en matière de :

- de recrutement, de gestion des carrières, de rémunération (modification facilitée du règlement de gestion) ;

- de fongibilité des crédits entre titre II (personnels), titre III (fonctionnement) et titre V (investissement), sous réserve d’acceptation du collège, autorité délibérante ;

- de passation de marchés publics ;

- de gestion de ses moyens.

Le Conseil resterait bien entendu soumis au contrôle de la Cour des Comptes et disposerait à temps plein d’un agent comptable nommé par le gouvernement chargé, d’une part, de l’ensemble des opérations de paiement, et, d’autre part, de la tenue des documents financiers de l’institution.

B. FAVORISER L’AMÉLIORATION DE LA COHÉRENCE DE L’ACTION DU CSA, EN PARTICULIER EN MATIÈRE ÉCONOMIQUE

Plusieurs dispositions du présent projet de loi poursuivent l’objectif, comme l’indique l’exposé des motifs, d’« améliorer la cohérence de l’action de l’autorité de régulation. » Il s’agit tout d’abord de la réduction du nombre de membres du collège mais également de la nouvelle procédure de désignation, qui doit permettre de favoriser le choix de personnalités en raison de leurs compétences.

Le rapporteur souhaite aller plus loin dans l’ambition d’améliorer la cohérence de l’action de l’autorité de régulation, notamment en matière économique.

1. L’insuffisante prise en compte par le CSA de la dimension économique de son action

L’avis rendu au nom de notre Commission par notre collègue Martine Martinel sur les crédits en faveur de l’audiovisuel dans le projet de loi de finances pour 2013 a mis en lumière l’insuffisante prise en compte par le CSA de la dimension économique du secteur audiovisuel dans ses décisions.

Ce reproche a pu être adressé au CSA dans la gestion de nombreux dossiers, à commencer par le lancement en 2012, dans un contexte de ralentissement du marché publicitaire, de six nouvelles chaînes en haute définition gratuites sur la TNT, représentant une augmentation de 30 % de l’offre nationale gratuite disponible, décision qui n’a été précédée d’aucune étude d’impact, ni d’une consultation publique préalable.

Or, de nombreux acteurs et observateurs redoutaient à juste titre les conséquences de cet élargissement de la TNT sur la fragmentation des audiences, le marché publicitaire et le financement de la création, lequel repose sur les recettes publicitaires des diffuseurs. Des interrogations se sont également exprimées sur la viabilité économique de certaines chaînes sélectionnées.

La même critique a pu être formulée à l’égard de la gestion du dossier de la radio numérique terrestre, du lancement de nombreuses chaînes locales ou encore de la TNT payante.

Ce dernier exemple est frappant et, là encore, on peut s’étonner de l’absence d’étude d’impact préalable, le CSA ayant, comme pour les télévisions locales, principalement justifié ses diverses tentatives de « relance » de la TNT payante par le fait qu’elle est « un succès dans d’autres pays ».

En complément de l’offre gratuite, 11 chaînes payantes étaient proposées à l’origine en 2005 : des chaînes « premium » (Canal+, Canal+ Cinéma, Canal+ Sport et TPS Star) et des chaînes thématiques (Eurosport, LCI, Paris Première, TF6, Planète, AB1 et Canal J).

Les chaînes AB1 et Canal J ont cessé leur diffusion TNT respectivement fin octobre 2008 et début mai 2009 en raison de l’absence de rentabilité sur la TNT payante. Par ailleurs, dans le cadre d’un accord conclu entre les groupes France Télécom et Canal+, TPS Star a cessé définitivement sa diffusion au printemps 2012, tant sur la TNT que sur les autres supports.

À la suite d’une consultation publique sur l’usage de la ressource libérée par ces deux services, le CSA a choisi de lancer deux appels à candidatures en 2010, qui l’ont conduit à sélectionner, d’une part, en décembre 2010, le projet présenté par la Ligue de football professionnel intitulé CFoot, dont la diffusion commencée le 28 juillet 2011 s’est arrêtée définitivement au printemps 2012 à la fin de la saison de football ; et d’autre part, en mai 2011, le projet d’offre de vidéo à la demande SelecTV présenté par TV Numéric qui a fait faillite avant d’avoir démarré

Pour justifier ces décisions dénuées de toute pertinence économique, le CSA a tendance à « s’abriter » derrière l’obligation, que lui impose la loi de 1986, au nom de la liberté de communication, de lancer un appel à candidature dès lors qu’une fréquence est disponible.

Ce que le CSA ne précise pas, c’est que la jurisprudence ne l’oblige cependant pas à délivrer une autorisation, en l’absence de viabilité économique des candidats. Néanmoins, le rapporteur estime que le législateur peut favoriser une meilleure prise en compte, par le régulateur, de l’impact économique de ses décisions.

2. Renforcer la pertinence économique des décisions du CSA

Le constat est unanimement partagé par les acteurs du secteur : le CSA ne tient pas suffisamment compte de l’impact économique de ses décisions d’attribution de la ressource radioélectrique, tant en matière de radio que de télévision ou de services de médias audiovisuels à la demande.

La protection de la liberté de communication, qui conduit à l’obligation d’attribuer les fréquences disponibles, est au cœur de la loi de 1986 qui a été élaborée dans un contexte de rareté des fréquences et à une époque où internet n’existait pas.

Dans le contexte marqué par le développement des contenus sur internet et la profusion des médias et des nouveaux usages, se pose de manière croissante la question de leur viabilité économique et de leur survie. Cette dimension doit donc être mieux intégrée à la loi de 1986.

En premier lieu, le rapporteur souhaite que le CSA rénové systématise le recours à des études d’impact, préalablement au lancement d’un appel à candidatures, afin de mesurer les éventuelles conséquences d’un tel appel pour le secteur audiovisuel, notamment au plan économique.

Il convient également que le Conseil ne puisse plus se dispenser de lancer une consultation publique préalablement à un appel à candidatures lorsqu’il a déjà procédé à une telle consultation dans une zone géographique semblable il y a moins de trois ans, comme l’y autorise l’article 31 de la loi de 1986.

En second lieu, il convient d’assurer au CSA un plus large pouvoir de gestion des fréquences dont l’assignation lui est confiée

Comme l’indique le Conseil, dans son rapport annuel 2012, « les fréquences radioélectriques dont le CSA autorise l’usage sont des biens du domaine public de l’État affectés à la liberté de communication. En conséquence de cette affectation, les restrictions d’accès à la ressource hertzienne sont strictement interprétées et le CSA ne dispose pas des pouvoirs de gestion, habituellement larges, reconnus à l’administration en matière d’occupation du domaine public. Cette situation peut s’avérer préjudiciable dès lors que la compétence liée du régulateur pour allouer des fréquences aux services de communication audiovisuelle peut l’amener à prendre des décisions qui ne tiennent pas suffisamment compte des aspects économique ou technologique du secteur. »

Dans ces conditions, il paraît opportun de permettre au Conseil de différer le lancement d’un appel à candidatures pour des raisons économiques ou techniques

Cela répondrait au vœu du CSA qui, dans le même rapport annuel 2012 mentionne qu’« il ressort actuellement de la jurisprudence du Conseil d’État issue du principe de liberté de communication que lorsqu’une ressource radioélectrique suffisante pour accueillir un service de télévision ou de radio devient disponible et qu’un éditeur en demande l’usage, le CSA est tenu de lancer un appel aux candidatures pour l’attribution de cette fréquence. Or, l’autorisation de nouveaux services peut s’avérer parfois peu opportune, notamment en raison d’un contexte économique tendu (marché publicitaire atone insusceptible de permettre le financement adéquat d’un service) ou encore en raison de changements techniques prévisibles et imminents (modification de la norme de diffusion ou de la répartition de fréquences entre différents secteurs par le Gouvernement par exemple). Cette insuffisante prise en compte de critères pourtant déterminants peut s’avérer néfaste à la viabilité d’un projet et contraire aux exigences de bonne gestion des fréquences. »

Dans l’hypothèse où l’étude d’impact, ainsi que la consultation publique qu’il aura réalisée, montreraient que la conjoncture économique n’est pas favorable au lancement de nouveaux services, le CSA pourrait décider de différer le lancement de cet appel à candidatures.

3. Une exigence de responsabilité accrue du CSA du fait de ses décisions

Le rapport d’information de l’Assemblée nationale, présenté en octobre 2010 par MM. René Dosière et Christian Vanneste, sur les autorités administratives indépendantes (AAI) estimait à juste titre que l’indépendance de ces autorités ne pouvait plus s’entendre sans un rapprochement avec le Parlement. « L’obligation de rendre compte au Parlement est la contrepartie nécessaire de l’indépendance ».

Le contrôle du Parlement doit être renforcé tant en amont, à travers la procédure de nomination des membres, qu’en aval, à travers une évaluation de l’action menée par l’autorité.

L’approfondissement du contrôle du Parlement pourrait passer par la présentation obligatoire du rapport annuel d’activité du Conseil avec audition obligatoire de son président, devant les commissions des affaires culturelles de l’Assemblée nationale et du Sénat.

Il est notamment indispensable que le CSA rende compte, dans son rapport annuel, de l’impact économique des décisions d’autorisation qu’il délivre aux services de communication audiovisuelle diffusés par voie hertzienne. Le CSA doit ainsi évaluer chaque année la pertinence de ses choix et leur impact sur l’économie du secteur audiovisuel.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I.- AUDITION DE LA MINISTRE

La Commission des affaires culturelles et de l’éducation procède à l’audition, ouverte à la presse, de Mme Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication, sur le projet de loi relatif à l’indépendance de l’audiovisuel public lors de sa séance du 3 juillet 2013.

M. le président Patrick Bloche. Madame la ministre, soyez la bienvenue. Le projet de loi relatif à l’indépendance de l’audiovisuel public, que vous allez nous présenter, est attendu depuis bientôt un an. En plus de redonner au Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) le pouvoir de nommer les dirigeants de l’audiovisuel public, il modifie la composition de cette instance afin de renforcer l’indépendance des médias, fondement de notre démocratie garanti par la Constitution. Je rappelle que notre Commission poursuit ses auditions sur ce texte, sous la conduite de son rapporteur, M. Marcel Rogemont.

Nous examinerons le rapport de M. Rogemont mercredi prochain, puis, le 16 juillet, en présence de Mme la ministre, les articles du projet de loi, dont la discussion en séance est prévue le 24 juillet.

Parallèlement, la Commission des lois est saisie d’un projet de loi organique ayant pour objet de retrancher de la liste des emplois soumis à la procédure de nomination visée par l’article 13 de la Constitution la nomination des dirigeants de l’audiovisuel public. J’avais souhaité qu’une commission spéciale soit constituée pour cette réforme, comme pour la précédente, mais cette demande n’a pas abouti.

Mme Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication. Je suis heureuse de vous présenter les dispositions du projet de loi relatif à l’indépendance de l’audiovisuel public. Ce texte répond à l’engagement pris par le Président de la République devant les Français de conforter l’indépendance de France Télévisions, de Radio France et de la société en charge de l’audiovisuel extérieur de la France.

Qualifiée d’« hypocrisie » en 2008, la désignation des dirigeants de l’audiovisuel public par le CSA me semble au contraire une garantie républicaine fondamentale. Or, comme vous le savez, le mode de désignation actuel de ces dirigeants est empreint de suspicion et rend plus difficile l’exercice de leurs missions. Le texte que je vous présente permet de rétablir une garantie républicaine en confiant cette nomination à l’autorité indépendante de régulation.

Cette garantie sera d’autant mieux assurée que l’instance chargée des nominations verra son indépendance accrue. La procédure de nomination des membres du collège du CSA renforce en effet le rôle du Parlement, en particulier celui des Commissions des affaires culturelles des deux assemblées, et associe l’opposition parlementaire à cette décision.

Le collège du CSA passera de neuf à sept membres, dont le Président de la République ne nommera plus que le président. Les six autres membres, désignés par les présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat, le seront désormais après avis conforme à la majorité des trois cinquièmes des Commissions des affaires culturelles de chacune de ces chambres.

Cette avancée démocratique majeure, inédite pour une autorité indépendante, témoigne de l’esprit de confiance qui nous anime. Le renforcement du rôle du Parlement donnera une plus grande légitimité démocratique à l’instance de régulation et permettra d’empêcher toute nomination partisane. La présente réforme marque en ce sens notre attachement au secteur audiovisuel et à son indépendance.

Certains craignent des blocages dans le processus de nomination, mais ce mécanisme, certes inédit dans les institutions de la Ve République, existe dans plusieurs pays européens et constitue une garantie nouvelle et forte ; il est la marque d’une démocratie moderne, où majorité et opposition peuvent s’entendre en se fondant sur le critère objectif de la compétence, au service de l’intérêt général. Le succès de cette procédure, dont je ne doute pas, sera une preuve de la maturité de nos institutions.

Le projet de loi ordinaire, comme vous l’avez rappelé, monsieur le président, s’accompagne d’un projet de loi organique tendant à supprimer les fonctions de présidents de l’audiovisuel public de la liste des emplois pour lesquels le Président de la République exerce un pouvoir de nomination dans les conditions prévues à l’article 13 de la Constitution.

Enfin, le projet de loi modifie la procédure de sanction suivie par le CSA afin de satisfaire aux exigences d’impartialité applicables aux autorités administratives en la matière, conformément à l’évolution récente des jurisprudences constitutionnelle et européenne. Ainsi, un rapporteur sera désormais chargé de la poursuite et de l’instruction, le prononcé de la sanction demeurant l’apanage exclusif des membres du collège : les deux fonctions seront clairement séparées.

Ce projet de loi constitue une réforme majeure de l’audiovisuel. Il était en effet prioritaire de restaurer et d’approfondir toutes les garanties d’indépendance de l’audiovisuel public avant toute autre chose. Elle constitue un socle, une première étape essentielle d’une profonde réforme du cadre juridique d’ensemble du secteur audiovisuel pour l’adapter aux mutations du secteur et notamment au développement du numérique. La seconde étape sera donc une refonte de la législation : plusieurs travaux de réflexion ont été entrepris à ce sujet. Le gouvernement considère en effet, avec le Président de la République, que les enjeux qui se posent à l’audiovisuel appellent des décisions mûrement réfléchies et concertées, notamment avec les parlementaires, et non des effets d’annonce. Sur l’éventualité d’un rapprochement entre le CSA et l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP), une analyse a été engagée l’an dernier, à la demande du Premier ministre, sous l’égide du ministre du redressement productif, de la ministre en charge de l’économie numérique et de moi-même. Elle a permis de déterminer les mesures à mettre en œuvre pour répondre au phénomène de convergence des infrastructures numériques, des services et des contenus qu’elles acheminent. Cette évolution majeure du secteur de la communication nous a conduit à nous interroger sur le meilleur moyen de réguler des contenus accessibles à partir de supports de diffusion multiples.

De ce travail, auquel furent évidemment associés les professionnels de la communication et les parlementaires, est ressorti le constat unanime que les bouleversements en cours n’appellent pas une réponse strictement institutionnelle, mais bel et bien une réforme de fond. La mission Lescure sur l’ « acte II de l’exception culturelle » partage elle aussi cette analyse : elle propose, dans son rapport, des pistes au sujet desquelles le gouvernement recueille l’opinion des acteurs concernés. C’est dans cet esprit que j’ai ouvert les Assises de l’audiovisuel au début du mois de juin. Elles ont révélé le besoin d’une réforme globale et partagée et permis d’identifier les mesures envisageables : des expertises et des concertations ont ainsi été engagées afin d’adapter le cadre juridique de la régulation audiovisuelle aux mutations profondes du secteur, liées notamment à l’essor des terminaux connectés à internet. Il nous faudra, dans un second projet de loi, réfléchir à la régulation des contenus audiovisuels sur internet, au soutien à la création sur tous les supports de diffusion ou encore à l’organisation du partage de l’espace hertzien entre la télévision et la téléphonie mobile. Afin de préparer ce texte, je mènerai de nombreuses concertations au début de l’année prochaine, auxquelles vous serez bien entendu associés.

M. Marcel Rogemont, rapporteur. Ce projet de loi relatif à l’indépendance de l’audiovisuel public donne corps à l’engagement de campagne 51 du Président de la République. Sans revenir sur les débats de décembre 2008 relatifs à la précédente réforme de l’audiovisuel, il faut réaffirmer la nécessité de cette indépendance afin de casser l’image désastreuse laissée, non seulement par certaines décisions, mais aussi par les déclarations selon lesquelles l’audiovisuel public n’a qu’un seul actionnaire, auquel il revient de nommer les présidents de ses différentes sociétés. Certes, ces nominations par le Président de la République devaient être avalisées par les commissions compétentes du Parlement ; mais les majorités nécessaires pour s’y opposer étant introuvables, la procédure était de pure forme. Avec ce projet de loi, le gouvernement rappelle clairement que l’audiovisuel public n’appartient pas à une personne, fût-elle Président de la République. Cette conception fait écho à votre jugement selon lequel « l’audiovisuel a trop souvent été considéré en France comme un jouet dans les mains du pouvoir ».

Il ne s’agit pas seulement de revenir à la situation antérieure à la loi de 2009, mais aussi d’aller plus loin dans les garanties d’indépendance et de transparence. Ainsi, la désignation de six des sept membres du CSA par les présidents de l’Assemblée et du Sénat sera conditionnée par l’accord d’une majorité des trois cinquième des commissions compétentes. Convenons que cette procédure nouvelle et audacieuse constitue une avancée démocratique sans précédent. Les majorités successives ne pourront plus faire comme si leur choix était celui de tous : elles devront, dans un échange démocratique que chacun espère paisible, discuter avec l’opposition de la façon la plus transparente. Quoi de plus naturel, au demeurant, si l’indépendance correspond à un objectif réel et non à un effet d’annonce ?

Le texte tend également à consolider la procédure de sanction du CSA. Cette proposition, utile en elle-même, permettra aussi de conformer notre droit à la jurisprudence européenne. Dans cet esprit, et « pour améliorer la cohérence de l’action de l’autorité de régulation », comme l’indique l’exposé des motifs, il est possible de revoir quelques aspects du fonctionnement de cette institution. Les auditions en cours m’inspirent quelques questions sur ce point.

Ne pensez-vous pas que le CSA, autorité administrative indépendante, gagnerait à devenir une autorité publique indépendante ? Une autorité administrative est sous la dépendance directe du Premier ministre, notamment sur le plan financier. Un statut d’autorité publique indépendante offrirait encore plus de garanties d’indépendance, et le fonctionnement administratif de l’institution s’en trouverait simplifié et mieux adapté.

Les décisions d’attribution de fréquences, comme les autorisations de modification des conventions, ne devraient-elles pas être précédées d’études d’impact ? Celles-ci conforteraient la responsabilité économique du CSA et permettraient d’éclairer ses décisions sur ce plan, au-delà de l’aspect juridique. L’exemple malheureux de l’attribution d’une chaîne à la Ligue 1 de football montre en effet que certaines décisions peuvent être prises sans analyse économique sérieuse.

Pour les autorisations susceptibles de « modifier de façon importante le marché en cause », le CSA ne devrait-il pas être astreint à une consultation publique – je rappelle qu’il en est actuellement dispensé si celle-ci a eu lieu dans les trois années qui précèdent ? Si une telle consultation avait été menée pour les affectations récentes de chaînes de la télévision numérique terrestre (TNT), les décisions auraient peut-être été différentes.

J’envisage de déposer des amendements sur ces trois sujets ; aussi aimerais-je recueillir votre sentiment.

Je n’entends cependant pas confondre ce projet de loi avec celui qui tirera les conséquences du « rapport Lescure ». Il ne s’agit que de la première étape d’une refonte de la politique de l’audiovisuel à l’ère du numérique, et d’une étape de plaine : les étapes de montagne, auxquelles nous nous préparons sans les anticiper, sont à venir. L’ouvrage, d’ailleurs, doit être en permanence remis sur le métier afin de tenir compte des évolutions technologiques, mais aussi politiques, comme le montre encore le débat sur l’exception culturelle.

Sans dévoiler les termes de mon futur rapport, je puis d’ores et déjà vous dire, madame la ministre, que nous accueillons favorablement ce projet de loi exemplaire pour le respect de tous, donc pour la démocratie. Nous aurons également à cœur de l’enrichir, notamment pour améliorer le fonctionnement du CSA.

Mme Colette Langlade. Nous avons bien noté, madame la ministre, l’esprit de confiance qui vous anime, et vous pouvez compter sur le soutien total des députés SRC, dont je me fais aujourd’hui la porte-parole.

Le projet de loi redonne une place prépondérante au Parlement : les présidents des deux assemblées pourront proposer la nomination de six des sept membres du collège du CSA, le Président de la République ne nommant plus que le président de cette instance. La place de l’opposition sera enfin reconnue, puisque la majorité des trois cinquièmes des commissions compétentes des deux chambres sera requise, non plus pour exercer un droit de veto, mais pour valider la candidature. Je salue ce pari qui consiste à faire confiance aux parlementaires de la majorité comme de l’opposition : le choix, désormais loin de toute logique partisane, se fera sur des critères pérennes, en fonction de l’expérience et de la motivation des candidats.

Le CSA, c’est là le cœur du projet de loi, aura de nouveau le pouvoir de nommer et de révoquer les présidents des sociétés de l’audiovisuel public, comme c’était le cas avant la loi du 5 mars 2009. Ces derniers ne pourront donc plus être accusés d’entretenir des liens avec le pouvoir en place.

Nous sommes aussi sensibles, madame la ministre, à la création d’un poste de rapporteur qui, nommé pour quatre ans par le vice-président du Conseil d’État, se verra confier les fonctions de poursuite et d’instruction des dossiers dans la procédure de sanction suivie par le CSA. Une césure nette séparera ainsi ceux qui décident de l’enquête de celui qui l’instruit.

Pour toutes ces raisons, le groupe SRC vous apporte son soutien sur ce texte synonyme d’indépendance pour l’audiovisuel public ; il sera aussi à vos côtés dans les travaux préparatoires au futur projet de loi qui traitera, entre autres, de la radio numérique terrestre (RNT) et du financement de la création télévisuelle.

M. Christian Kert. Heureusement que nous avons de la sympathie pour vous, madame la ministre… Le projet de loi, qui détricote une fois de plus un texte de la précédente majorité, ne nous inspire en effet pas le même enthousiasme qu’à M. le rapporteur.

Parler de l’indépendance de l’audiovisuel public sans évoquer son financement nous semble être une erreur. La procédure de nomination des présidents que nous avions instituée, et sur laquelle vous vous êtes focalisée, était au demeurant légitime. L’article 13 de la Constitution précise en effet que le pouvoir de nomination du Président de la République s’exerce pour les emplois et fonctions revêtant une « importance pour la garantie des droits et libertés ou la vie économique et sociale de la nation », ce qui est bien le cas en l’occurrence. Ce pouvoir est d’ailleurs encadré, puisque le CSA participe à la décision et que la nomination n’intervient qu’après avis public des commissions compétentes de chaque assemblée, lesquelles peuvent s’y opposer par un veto à la majorité des trois cinquièmes de leurs membres.

Le mécanisme proposé remet cet équilibre en cause, en dépit de louables intentions quant à la modernisation et aux garanties d’indépendance : il sera en réalité moins transparent, puisque les présidents des chaînes nationales seront nommés par le collège du CSA, dont le président restera lui-même nommé par le Président de la République. Cette procédure n’empêchera donc pas les soupçons d’une intervention de l’Élysée. La présomption de dépendance à l’égard de l’exécutif n’est d’ailleurs pas liée au mode de nomination des présidents de chaîne : si l’exécutif veut faire pression sur eux, il pourra toujours le faire, même après avoir transféré son pouvoir de nomination au CSA.

Le projet de loi fera également régresser les droits du Parlement, qui exerçait jusqu’à présent un contrôle sur la nomination par le Président de la République, de surcroît co-décidée par le CSA : désormais, ce dernier décidera seul des nominations, sans que les deux commissions compétentes du Parlement, qui jusqu’alors pouvaient statuer à la majorité des trois cinquièmes, n’aient leur mot à dire, de sorte que les droits de l’opposition s’en trouveront eux aussi diminués.

Enfin, vous entendez baisser la voilure sur la procédure de sanction du CSA.

Comme nous l’avions par ailleurs souligné lors de la dernière réforme, l’indépendance de l’audiovisuel public passe par son financement. Sur ce point, vous avez été contrainte à des manœuvres dilatoires après l’adoption du contrat d’objectifs et de moyens (COM) de France Télévisions, passant le rabot budgétaire par deux fois au mépris des engagements. Quelles garanties le texte peut-il offrir pour éviter cette situation à l’avenir ? Pourquoi ne proroge-t-il pas la publicité en journée, qu’un amendement voté en 2010 au Sénat prévoit de supprimer à partir de 2016 ? Le temps me semble venu d’affirmer la volonté du Parlement de pérenniser cette ressource indispensable pour le groupe et son indépendance.

Mme Isabelle Attard. M. Nicolas Sarkozy avait décidé, en 2008, que les présidents de l’audiovisuel public seraient nommés par le Président de la République, en arguant alors de l’hypocrisie de l’ancien système, que votre projet de loi, madame la ministre, ne rétablit cependant pas à la lettre, dès lors que les nominations seront décidées à la majorité des membres du CSA. M. Christian Kert critique le texte au motif que le Parlement ne sera plus associé à la procédure de nomination. Celle qu’avait instauré M. Nicolas Sarkozy incluait, il est vrai, un avis du CSA et des Commissions des affaires culturelles des deux chambres, mais cet avis n’étant pas obligatoirement conforme, il n’avait rien de contraignant.

Le nouveau président de chaque société de l’audiovisuel public devra par ailleurs remettre, dans un délai de deux mois, un rapport d’orientation au Parlement. On peut envisager de renforcer le contrôle de ce dernier ; mais le risque est alors de redonner un caractère politique aux nominations, quand bien même elles sont décidées collégialement.

Le Parlement nommera cependant, de façon paritaire entre les deux assemblées, six des sept membres du collège du CSA, après avis conforme des commissions compétentes à la majorité des trois cinquièmes. L’opposition aura donc un pouvoir accru, puisqu’elle pourra bloquer la nomination d’un candidat : c’est là une deuxième avancée.

Le président du CSA restera nommé par le Président de la République, comme le veut l’article 13 de la Constitution. D’après l’étude d’impact, il serait inconstitutionnel, compte tenu de la séparation des pouvoirs, de soumettre cette nomination à l’avis conforme du Parlement.

Bref, le texte démocratise bel et bien la nomination des membres du CSA et des dirigeants de l’audiovisuel public. Le Président Sarkozy avait renforcé son pouvoir en prétendant mettre fin à l’hypocrisie ; le projet de loi fait tout l’inverse, conformément aux promesses de M. François Hollande.

Ces changements sont d’autant plus profonds que le CSA pourrait aussi se voir confier la régulation d’internet, comme le préconise le « rapport Lescure ». Vous avez annoncé, madame la ministre, un deuxième train de mesures législatives portant notamment sur la régulation des contenus audiovisuels diffusés sur internet, la taxation de la revente des chaînes de la TNT, le financement de la création audiovisuelle et la publicité sur les chaînes publiques. Pouvez-vous nous préciser vos intentions en la matière ? La logique de contrôle et de réglementation qui est celle du CSA nous paraît, de fait, très éloignée des usages d’internet.

M. Rudy Salles. Dans son discours de politique générale, le Premier ministre avait promis un projet de loi sur l’audiovisuel avant la fin de l’année. Lors de votre audition par notre Commission le 11 juillet 2012, madame la ministre, vous aviez fixé les cinq axes de cette réforme : modification du mode de désignation des membres du CSA pour les rendre plus indépendants de l’exécutif ; nomination des présidents de l’audiovisuel public par cette nouvelle instance ; consolidation du financement de l’audiovisuel public ; réforme de l’audiovisuel extérieur de la France (AEF) – l’annonce de l’arrêt définitif de la fusion des rédactions de Radio France internationale (RFI) et de France 24 ayant alors entraîné, le 12 juillet, la démission de M. Alain de Pouzilhac, président-directeur général de l’AEF – ; rapprochement, enfin, des rédactions de France 2 et de France 3, avec le maintien de leurs identités respectives et la mise en commun de certains moyens pour éviter les doublons. Pour l’heure, seuls deux volets sur cinq ont été présentés – mais l’année n’est pas terminée…

Le projet de loi qui nous est soumis trace sa petite route sans gêner personne ; d’ailleurs, il ne trouve guère d’écho dans les médias. Cette normalité doit cependant nous alerter. Le texte améliore le système existant de façon mécanique. L’exemple le plus frappant, de ce point de vue, est la création d’un poste de rapporteur permanent auprès du CSA. Le bien-fondé de cette mesure apparaît de façon claire, et peut-être trop claire : il s’agit d’améliorer la transparence et de sanctuariser les espaces de pouvoir au sein du CSA, comme pour la nomination des responsables des sociétés audiovisuelles publiques. Mais en matière culturelle, on sait ce qu’il faut penser de la sanctuarisation… En l’occurrence, un petit espace de liberté est incontestablement gagné. Mais est-ce vraiment le plus important ?

Au-delà des intentions convenues sur l’indépendance, qui rappellent le monopole du cœur, il fallait introduire du sang neuf. Pour la composition du CSA, le pouvoir de l’exécutif sera notamment limité par l’exigence d’un accord aux trois cinquièmes des commissions parlementaires compétentes. Il faut s’en féliciter, mais vous ne changez rien à l’identité même du pouvoir concerné. Pourquoi ne pas associer à la procédure de nomination d’autres acteurs, qui ont une part majeure dans la vie culturelle et audiovisuelle, comme les sociétés d’auteurs, à commencer par la Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD), la Société civile des auteurs multimédia (SCAM) ou la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SACEM) ?

La nomination des présidents des sociétés publiques a évidemment quelque chose d’un peu hypocrite : quand tous les pouvoirs sont entre les mêmes mains, le choix sera toujours celui du pouvoir en place – nonobstant les alternances –, dont les responsables desdites sociétés ont toujours été proches : le projet de loi n’y changera rien. Comment le CSA pourrait-il nommer des responsables dont l’État, qui a la tutelle budgétaire sur ce secteur, ne veut pas ?

Vos promesses de campagne, indifférentes aux réalités, vous contraignent aujourd’hui au mensonge et à l’hypocrisie : hypocrisie avec le limogeage du président du Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC), remplacé par une ancienne de la « promotion Voltaire » de l’École nationale d’administration à qui l’on ne connaît pas de compétences particulières pour ce poste ; hypocrisie encore, avec la nomination, par le Président de la République, de l’ancien directeur de cabinet de M. Lionel Jospin à la présidence du CSA, alors qu’il n’a aucune expérience reconnue dans l’audiovisuel. N’y a-t-il pas un hiatus entre ces pratiques et les mesures que vous défendez aujourd’hui ? Au fond, le projet de loi ne change pas les pratiques mais, à la faveur d’une configuration politique qui vous est favorable, il entretient l’illusion.

Nous regrettons l’absence de deux sujets majeurs. Le premier est le rapprochement entre le CSA et l’ARCEP, auquel vous dites réfléchir : espérons que l’on y verra plus clair avant la fin de l’année. Le second est la réforme du mode de financement de l’audiovisuel public, qui nous paraît essentielle.

Vos déclarations en trompe-l’œil ne sauraient masquer que le lien entre l’audiovisuel et le pouvoir n’est en aucun cas rompu : vous perpétuez ainsi la tradition de vos prédécesseurs, notamment socialistes… On ne peut que déplorer votre manque d’audace, car l’indépendance de l’audiovisuel est la garantie d’une démocratie moderne.

M. Thierry Braillard. « Nous vivons dans un siècle sans mémoire », a dit M. Valéry Giscard d’Estaing, ce qui justifie que j’esquisse un bref un rappel historique à l’intention de M. Christian Kert et de M. Rudy Salles. À l’origine, tant par ses structures que par le mode de nomination de ses responsables, l’audiovisuel français a été placé sous le contrôle du pouvoir politique.

Il a fallu attendre la « loi Fillioud » du 29 juillet 1982 pour que soit instaurée la Haute Autorité de la communication audiovisuelle, composée de neuf membres nommés comme ceux du Conseil constitutionnel. Cette instance chargée de veiller à l’indépendance de l’information désignait les présidents des chaînes publiques, prérogative qui échappait pour la première fois au pouvoir exécutif. Le cordon ombilical reliant celui-ci à l’audiovisuel était rompu. Ce système s’est prolongé jusqu’en 2009, même si différentes autorités de régulation de l’audiovisuel se sont succédé : la loi du 30 septembre 1986 a mis en place la Commission nationale de la communication et des libertés (CNCL) ; celle du 17 janvier 1989 a remplacé la CNCL par le CSA.

Par la loi organique du 5 mars 2009, M. Nicolas Sarkozy est revenu trente ans en arrière en transférant vers l’Élysée la nomination des présidents de Radio France, de France Télévisions et de la société en charge de l’audiovisuel extérieur de la France, créée en 2008. Cette loi a été intégrée à la loi organique du 23 juillet 2010 relative à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution, qui comporte en annexe la liste des fonctions concernées par la procédure de nomination par le Président de la République. Comment parler d’indépendance de l’audiovisuel dans ces conditions ?

Pour rendre le CSA plus autonome, il importait de revenir sur le mode de nomination de ses membres. Vous le faites en prévoyant qu’ils seront désignés par le Parlement à une majorité qualifiée de trois cinquièmes des commissions compétentes, ce qui garantira une composition pluraliste, ouverte à des personnalités capables de recueillir un large consensus.

Je l’ai dit lors de l’audition de M. Olivier Schrameck par notre Commission : le plus grand scandale des dernières années a été, plus que la nomination des présidents des chaînes publiques, les conditions d’attribution des six nouvelles chaînes de la TNT. Absence de transparence, passage obligé des intéressés par les cabinets occultes de l’Élysée, non-respect du cahier des charges : on a vu à cette occasion tout ce qu’il ne faut pas faire. Pour rompre avec ce système, votre réforme, qui vise à rendre les chaînes de télévision plus indépendantes du pouvoir politique, est la bienvenue.

M. Jean-Pierre Le Roch. Il y a quelques semaines, lors d’une séance de questions au gouvernement, j’ai souligné l’importance du projet de loi sur l’indépendance de l’audiovisuel public. Ce texte, qui concrétise l’engagement 51 du candidat François Hollande, souligne votre ambition d’une politique audiovisuelle et d’une République exemplaires.

L’article 3, qui instaure un rapporteur indépendant du collège du CSA, prend en compte l’évolution de la jurisprudence tant européenne que constitutionnelle, puisqu’il sépare strictement la poursuite et l’instruction, du prononcé de la sanction. Nommé par le vice-président du Conseil d’État, après avis du CSA, le rapporteur voit son indépendance à l’égard du collège du CSA et du secteur audiovisuel garantie tant par son statut que par les modalités prévues pour sa nomination. Ceux-ci constituent un gage d’impartialité et un levier préservant le caractère dissuasif de la sanction.

La modification structurelle de la procédure s’accompagne enfin d’une dimension contradictoire. Les parties mises en cause peuvent présenter des observations écrites ou orales lors de l’instruction. Elles sont entendues par le CSA. Reste à savoir quel cheminement amène à engager une procédure de sanction et quelle autonomie possède le rapporteur dans la décision.

M. Patrick Hetzel. En termes de méthode, je regrette, comme M. Rudy Salles, qu’il y ait un tel décalage entre vos paroles et vos actes. Vous avez inscrit deux projets de loi à notre calendrier et programmé pour l’automne un texte sur le transfert de la réponse graduée vers le CSA. Vous annoncez pour 2014 une loi concernant l’exception culturelle à l’heure du numérique. Bref, vous nous présentez un dispositif en tuyaux d’orgue, dépourvu de toute vision d’ensemble. Cet éparpillement est préjudiciable au travail parlementaire. De plus, alors qu’il engage un long cycle législatif sur l’audiovisuel, le gouvernement n’a même pas convié les parlementaires de l’opposition aux Assises de l’audiovisuel, ce qui prouve qu’il n’est pas prêt à engager avec eux un échange constructif.

Pour réviser la procédure de sanction du CSA, vous privilégiez une solution coûteuse en créant le poste de rapporteur, auquel le texte attribue des moyens humains et financiers. À combien se monte le surcoût de cette mesure, qui n’est pas chiffrée dans l’étude d’impact ?

M. Pierre Léautey. Madame la ministre, je vous remercie pour ce projet de loi, dont l’objectif est de renforcer l’indépendance de l’audiovisuel face à l’exécutif. Celle des différents pouvoirs – justice, presse, audiovisuel – est une des valeurs fortes de la gauche. Je souhaite que notre discussion soit à la hauteur d’une loi qui, bien que courte, fera partie des grands textes de la législature. Le rôle que jouera le Parlement dans la désignation des membres du CSA constitue une avancée décisive dans la protection des libertés publiques. Les nominations n’apparaîtront plus comme le fait du prince. La majorité des trois cinquièmes que devront recueillir les candidats au CSA garantira leur indépendance, leur pluralisme et leur compétence. La procédure opère un transfert de responsabilité vers le Parlement. Il me tarde que nous rompions avec le climat de suspicion que généraient les anciennes pratiques.

M. Franck Riester. La montagne accouche d’une souris ! Après dix ans d’opposition où vous avez eu tout loisir de réfléchir et plus d’un an en responsabilité, le seul texte que vous proposiez au Parlement est une loi d’affichage, qui frise l’imposture. Car au moment même où il prétend défendre l’indépendance de l’audiovisuel public, le gouvernement procède en fait à une véritable purge politique, particulièrement dans le domaine culturel. Il évince systématiquement tous les responsables d’établissements publics ou d’administrations nommés par le pouvoir sortant ou ayant travaillé avec lui. C’est ainsi que, la semaine dernière, M. Éric Garandeau, dont le travail était reconnu par toute la profession, a été écarté de la présidence du CNC. L’indépendance que vous proclamez est d’autant plus illusoire que vous maintenez, voire que vous renforcez le lien entre le pouvoir politique et la nomination des présidents de l’audiovisuel public – sans le dire, tandis que M. Nicolas Sarkozy, du moins, l’assumait.

Vous n’évoquez pas la question des financements, mais, depuis votre arrivée, vous avez effectué des coupes claires dans le budget. Vous ne transférez plus en totalité la compensation de la suppression de la publicité sur France Télévisions, que le gouvernement précédent s’était engagé à sanctuariser. La taxe visant à financer cette compensation a pourtant été confortée par Cour de justice de l’Union européenne. Pourquoi être revenue sur cet engagement ? Allez-vous enfin vous révolter contre la diminution de votre budget, même si l’actualité politique n’incite pas à le faire ? Est-il exact que, contrairement à ce qu’ont laissé entendre le Président de la République et le Premier ministre, la durée des mandats des présidents actuels de l’audiovisuel public sera réduite ?

M. Michel Françaix. M. Franck Riester est si jeune qu’il n’a pas connu l’époque où M. Alain Peyrefitte, sous un gouvernement de droite, était ministre de l’information. Il a fallu attendre 1982 pour que la gauche mette en place une Haute Autorité de la communication audiovisuelle indépendante. Dès que la droite est revenue aux affaires, M. François Léotard a instauré la CNCL – fausse autorité –, que, dans un souci de reconstruction, nous avons remplacée par le CSA. Heureusement que nous sommes quelquefois au pouvoir !

Admettons que nous soyons un peu hypocrites et que les présidents de l’audiovisuel puissent être influencés par le pouvoir en place – ce qui reste à prouver –, notre collègue ne fait-il aucune différence entre le projet envisagé et l’époque où les neuf membres du CSA étaient tous du même bord politique ? En dehors de leur nomination, n’accorde-t-il aucune valeur au travail qui s’effectue au quotidien ? Ne voit-il pas que l’obligation d’une majorité des trois cinquièmes pour leur nomination permettra à l’opposition de jouer le rôle de contre-pouvoir ?

M. Franck Riester, pour lequel j’ai beaucoup d’estime, doit réviser son argumentaire sur la purge politique. Ceux qui nous reprochent de ne pas régler tous les problèmes en une fois doivent savoir que ce serait le meilleur moyen de ne rien faire. Certes, il faudra réfléchir dans les six mois qui viennent au financement de l’audiovisuel public, mais mieux vaut prendre les problèmes les uns après les autres que n’en résoudre aucun.

Mme Martine Martinel. Je suis surprise d’entendre M. Franck Riester parler d’hypocrisie, alors que la loi témoigne d’une volonté de rendre le CSA plus transparent. J’avais été frappée par l’opacité des propos, par l’engagement à droite et par le refus de communiquer les chiffres dont avait fait preuve son précédent président, M. Michel Boyon, quand nous l’avions auditionné. Par conséquent, sachons raison garder. D’ailleurs, ces derniers temps, je n’ai constaté aucun assassinat politique ni dans l’audiovisuel ni ailleurs, et les personnalités nommées, notamment au CNC, ne se signalent pas par leur incompétence. Si la loi est courte, elle ne manque pas d’ampleur. Il me semble plus sage de réfléchir et de présenter une grande loi, que de prendre des décisions sporadiques en laissant le Président de la République nommer les présidents de l’audiovisuel public.

Mme la ministre. Monsieur Riester, l’expression de purge politique est inacceptable, mensongère et insultante. Ignorez-vous quelle réalité elle a désigné au cours du XXsiècle ? Je suis d’autant moins disposée à la tolérer que je n’ai limogé ni évincé personne. La seule décision de cet ordre que j’ai prise, je la revendique : c’est d’avoir remplacé, dès mon arrivée au ministère, la présidente du Centre des monuments nationaux, responsable du délabrement de l’institution et de la souffrance des personnels, par M. Philippe Bélaval, alors directeur général des patrimoines. L’un des quatre directeurs généraux de mon administration, Mme Laurence Franceschini, ici présente, chargée des médias et des industries culturelles, vous confirmera qu’elle continue de servir le ministère de la culture comme elle le faisait sous mon prédécesseur.

Le projet de loi associera l’opposition parlementaire à la nomination des membres du CSA. C’est sans précédent. La formule que vous avez mise en place pour la nomination des présidents de l’audiovisuel public, effectuée par le Président de la République, n’avait laissé au Parlement qu’un droit de veto. Encore fallait-il, pour l’exercer, réunir la majorité des trois cinquièmes. En concertation avec les parlementaires, que je remercie pour leur travail, le gouvernement initie une démarche de confiance, sûr que, dans l’intérêt général, nous pourrons trouver les personnalités les plus aptes à mener les réformes et assumer les missions du CSA. Ce texte est court, mais j’en suis fière, parce qu’il marque une véritable avancée. Merci à M. Michel Françaix de nous avoir fait bénéficier du recul que lui donne l’expérience. Je sais d’avance que l’opposition ne reviendra pas sur notre réforme, car elle profitera à l’ensemble de la société.

Le rapporteur a suggéré de donner au CSA le statut d’autorité publique indépendante. Forte d’une personnalité juridique distincte de celle de l’État, l’institution serait responsable de ses décisions sur le plan juridique et bénéficierait d’une plus grande autonomie de gestion. C’est une bonne proposition, que le gouvernement reprendra sous forme d’amendement.

Moi aussi, je regrette que le CSA n’ait pas établi d’études d’impact avant de procéder à l’attribution des fréquences, car il doit pouvoir s’appuyer sur des données permettant d’évaluer l’opportunité économique de ses décisions.

Plusieurs députés, dont le rapporteur, m’ont interrogée sur les conséquences à tirer du « rapport Lescure ». Le texte qui vous est présenté définit la structure organique du CSA, qu’il faudra doter de capacités élargies afin de réfléchir au nouvel environnement numérique. Pour ménager la part de la concertation et de l’expertise, il faudra procéder en deux temps. Le travail sera plus cohérent et plus lisible si l’on isole le projet de loi garantissant l’indépendance du CSA, de mesures plus techniques. Dans la continuité du « rapport Lescure », nous étudierons le cas des distributeurs des services audiovisuels. Nous devrons en effet poser la question du must carry – l’obligation de distribution des chaînes –, en nous demandant quels programmes sont concernés et quelles solutions envisager. Nous devrons aussi étendre les compétences du CSA à la régulation de l’univers numérique. Ce sera l’objet de la seconde étape législative.

M. Christian Kert, M. Patrick Hetzel et M. Franck Riester ont soulevé le problème de l’indépendance financière. Ne confondons pas la tutelle budgétaire, qui s’exerce dans n’importe quelle entreprise publique, et le contrôle éditorial, qui mettrait en cause l’indépendance organique du service public de l’audiovisuel et de l’autorité qui le contrôle. C’est celle-ci que nous défendons, sachant que la contribution à l’audiovisuel public est votée par les parlementaires lors de l’examen de la loi de finances. L’an dernier, nous avons augmenté cette « redevance » de 6 euros, ce que la précédente majorité n’a jamais voulu faire. « Moi vivant, la redevance n’augmentera pas », avait lancé M. Jean-François Copé… Il est vrai qu’il a plus récemment avoué que l’apprentissage de la démocratie était assez nouveau à l’UMP. Ce sont précisément des procédures démocratiques que nous voulons mettre en place.

Mme Isabelle Attard l’a expliqué : les présidents nouvellement désignés transmettront au Parlement un rapport d’orientation, dans un délai de deux mois après le début de leur mandat. Sur ce fondement, les commissions parlementaires pourront les auditionner. Pour répondre à M. Franck Riester s’agissant des mandats en cours des présidents de l’audiovisuel public, nous avons été très clairs là-dessus : le texte ne s’applique pas aux mandats en cours, nous les laisserons se terminer et la nouvelle procédure de nomination interviendra à l’issue de chacun des mandats en cours.

Le rapporteur du CSA aura autorité pour décider si les faits dont il a connaissance justifient qu’on engage devant le collège une procédure de sanction. Le cas échéant, il dirigera l’instruction avec l’aide des services du CSA. Il disposera dans cette mission d’une large autonomie. Le poste sera occupé par un juriste désigné par le vice-président du Conseil d’État. Les frais qu’entraînera sa création seront réduits, puisqu’il s’appuiera sur les services du CSA. Quoi qu’il en soit, le dispositif sera moins onéreux qu’un contentieux auprès de la Cour européenne des droits de l’homme, auquel nous expose la jurisprudence européenne et constitutionnelle.

Sous la précédente majorité, nous avions dénoncé la suppression brutale de la publicité, qui a déstabilisé le groupe France Télévisions. Pour offrir à celui-ci une visibilité sur son avenir, il faut annoncer le plus rapidement possible que, contrairement à ce qui avait été décidé, la publicité ne sera pas supprimée avant vingt heures à partir de 2016. Dans la même perspective, j’ai indiqué clairement notre ligne budgétaire. Compte tenu de l’état des finances publiques, l’État réduira de 2 % sur trois ans la dotation du groupe, effort que celui-ci doit pouvoir supporter.

Je remercie tous les orateurs qui sont intervenus pour soutenir ce texte lequel, n’en déplaise à certains esprits chagrins, vise à défendre tant l’indépendance de l’audiovisuel public que le rôle du Parlement.

M. le président Patrick Bloche. Je vous remercie.

II.- DISCUSSION GÉNÉRALE

La Commission des affaires culturelles et de l’éducation procède à la discussion générale sur le projet de loi, après engagement de la procédure accélérée, relatif à l’indépendance de l’audiovisuel public lors de sa séance du 10 juillet 2013.

M. le président Patrick Bloche. Nous poursuivons notre travail sur le projet de loi relatif à l’indépendance de l’audiovisuel public. Nous avons entendu, la semaine dernière, la ministre de la culture et de la communication. Le rapporteur désigné par notre Commission pour ce projet de loi, M. Marcel Rogemont, va aujourd’hui nous présenter son rapport. Nous procéderons ensuite à la discussion générale.

Nous examinerons les articles et les amendements mardi prochain en présence de la ministre. J’indique que le gouvernement a engagé la procédure accélérée sur ce projet de loi.

M. Marcel Rogemont, rapporteur. Il nous revient aujourd’hui de donner corps à l’engagement n° 51 pris par M. François Hollande lors de la campagne présidentielle, en mettant fin à l’une des mesures les plus contestées du quinquennat de M. Nicolas Sarkozy : la nomination des présidents de l’audiovisuel public par le Président de la République.

Selon un sondage publié le 6 juillet 2008, sept Français sur dix se disaient opposés à cette réforme, qui allait même à l’encontre des recommandations de la « commission Copé », laquelle avait proposé un système de nomination tout à fait différent.

Force est de constater que le mode de nomination actuel jette un doute sur l’indépendance des personnes ainsi désignées à l’égard du pouvoir exécutif. En juillet 2010, M. Hervé Bourges, ancien président du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), estimait : « Carolis – alors président de France Télévisions – a un bilan. On peut bien sûr le critiquer sur tel ou tel aspect. Mais si Nicolas Sarkozy avait la culture du résultat, comme il le prétend, il aurait reconduit Carolis. Il paie le fait de lui avoir tenu tête. » De même, M. Jean-Luc Hees, président de Radio France, a pu être accusé d’agir pour le compte du Président de la République, notamment au moment de la refonte de la grille des programmes de France Inter. Peu importe que des pressions aient été exercées ou non, dès lors que l’opinion publique soupçonne ou redoute leur existence.

Deux arguments ont été avancés pour justifier, si c’était possible, ce mode de nomination. Il s’agissait d’abord de mettre fin à l’hypocrisie consistant à faire croire qu’il n’y avait pas d’intervention politique dans le choix des présidents de l’audiovisuel public. Or la réforme lui a substitué une hypocrisie plus grave encore. Il convenait d’autre part de rendre à l’État actionnaire la responsabilité de nommer les présidents et, partant, lui donner la capacité de juger et, le cas échéant, de sanctionner les personnes ainsi nommées. La pratique a montré combien cet argument était fallacieux.

En effet, l’échec de la procédure actuelle tient pour beaucoup à ce que le choix est exclusivement celui d’une personnalité par une autre personnalité, sans considération pour un projet. D’ailleurs, le Président de la République, qui représentait prétendument l’État actionnaire, n’a même pas adressé de lettre de mission aux personnes nommées, en contradiction avec le principe de responsabilité dudit État actionnaire.

C’est pourquoi le présent projet de loi rend au CSA la responsabilité de désigner les présidents des trois sociétés de l’audiovisuel public. Mais il va beaucoup plus loin dans l’exigence d’indépendance : il modifie en profondeur le mode de désignation des membres du CSA, chargé de nommer les présidents.

Certes, les commissions parlementaires n’interviennent plus dans la nomination des présidents de l’audiovisuel public : ce serait incompatible avec leur désignation par le CSA. Cependant, doit-on vraiment le regretter ? Le droit de veto condamnait les commissions à chercher des majorités improbables et les cantonnait, in fine, à un rôle de pure forme. En outre, les commissions ne seront pas écartées, dans la mesure où chaque président nommé leur transmettra un rapport présentant son projet. En effet, le mode de nomination proposé donne non seulement une meilleure garantie d’indépendance, mais il oblige les candidats à présenter un véritable projet assorti d’une stratégie des moyens. C’est un avantage notable par rapport à la procédure actuelle.

La deuxième partie du projet de loi vise à réformer le fonctionnement du CSA. Ainsi, l’article 3 modifie en profondeur la procédure de sanction devant le conseil, afin de la rendre conforme au principe d’impartialité, tel qu’il résulte de l’évolution récente des jurisprudences constitutionnelle et européenne.

Depuis la création du CSA, ses compétences se sont considérablement développées, parallèlement aux évolutions du secteur audiovisuel. Centrées initialement sur le contrôle des programmes et des contenus, les missions du CSA comportent une dimension de plus en plus économique et technique.

Avec ce projet de loi, le gouvernement propose une avancée démocratique majeure : soumettre la désignation des six membres du CSA par les présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat à un avis conforme des commissions des affaires culturelles à la majorité des trois cinquièmes. Les nombreux opérateurs du secteur audiovisuel que j’ai auditionnés se félicitent unanimement de ce mode de nomination, gage d’indépendance, mais aussi de compétence.

Je le dis à nos collègues de l’opposition : la nécessité de réunir une majorité des trois cinquièmes devrait inciter au choix de candidats susceptibles de recueillir le consensus le plus large. Elle devrait conduire à sélectionner des personnalités en raison de leurs compétences, ce qui est hautement souhaitable pour une autorité de régulation dont les missions de nature technique et économique sont d’importance croissante.

Il est également proposé de faire passer le nombre de membres du collège du CSA de neuf à sept, ce qui favorisera une plus grande cohésion au sein de ce collège. Un nombre trop élevé de membres crée en effet des difficultés : segmentation des attributions au détriment de la transversalité et de la cohérence du travail du collège ; chevauchement de compétences entre conseillers ; répartition inégale des dossiers, etc.

Mais les conditions de l’indépendance ne se réduisent pas au mode de nomination. Elles passent aussi par des règles d’incompatibilité et de déontologie. Le projet de loi renforce ce régime en prévoyant une délibération à la majorité simple et non plus des deux tiers pour prononcer la démission d’office d’un membre qui aurait manqué à ses obligations. Je souhaite que ce projet de loi soit également l’occasion d’approfondir les règles d’incompatibilité et de déontologie des membres du CSA.

En outre, je propose d’aller plus loin dans la responsabilisation du CSA, en lui conférant le statut d’autorité publique – et non plus administrative – indépendante, ce qui lui donnerait une plus grande autonomie fonctionnelle, administrative et financière.

Surtout, il convient de rendre son action plus cohérente en tant qu’autorité de régulation, principalement en matière économique. Les acteurs du secteur audiovisuel le constatent unanimement : le CSA ne tient pas suffisamment compte de l’impact économique de ses décisions d’attribution de la ressource radioélectrique.

Ce reproche a été adressé au CSA dans la gestion de nombreux dossiers – je vous invite à lire mon rapport à ce sujet. En 2012, il a ainsi décidé le lancement, dans un contexte de ralentissement du marché publicitaire, de six nouvelles chaînes gratuites en haute définition sur la télévision numérique terrestre (TNT), sans étude d’impact ni consultation publique préalable. Or de nombreux acteurs et observateurs redoutaient, à juste titre, qu’une telle opération ne conduise à une fragmentation des audiences qui aurait eu des répercussions sur le marché publicitaire et, partant, sur le financement de la création, laquelle repose sur les recettes publicitaires des diffuseurs. Des interrogations se sont également exprimées et s’expriment encore sur la viabilité économique de certaines chaînes sélectionnées.

La même critique a pu être formulée à propos de la gestion du dossier de la radio numérique terrestre (RNT), du lancement de nombreuses chaînes locales ou encore du développement de la TNT payante. Ce dernier exemple est parlant : la chaîne CFoot, lancée par la ligue de football le 28 juillet 2011, a cessé d’émettre dès le printemps 2012 ; la chaîne de vidéos à la demande SelecTV, présentée par TV Numeric, a fait faillite avant même de commencer à diffuser ses programmes. Là encore, on peut s’étonner de l’absence d’étude d’impact préalable, notamment sur les aspects économiques.

Pour justifier ces décisions dénuées de toute pertinence économique, le CSA a eu tendance à « s’abriter » derrière l’obligation, que lui impose la loi de 1986 au nom de la liberté de communication, de lancer un appel à candidatures dès lors qu’une fréquence est disponible.

Le législateur doit favoriser une meilleure prise en compte, par le régulateur, de l’impact économique de ses décisions. À cet égard, je souhaite que le CSA rénové systématise le recours à des études d’impact, préalablement au lancement des appels à candidatures. Dans l’hypothèse où l’étude d’impact montrerait que la conjoncture économique n’est pas favorable au lancement d’un nouveau service, le CSA pourrait différer le lancement d’un appel.

Quant aux contrats d’objectifs et de moyens (COM) des sociétés de l’audiovisuel public, le CSA n’a pas à être associé à leur élaboration, même s’il a déjà dans le passé, en l’absence de texte, émis des avis sur ces documents. Je suis réservé sur ce point, pour ne pas dire hostile : les COM doivent résulter du dialogue entre l’entreprise et ses tutelles, et le CSA n’a pas à juger du travail de ces dernières. En revanche, je suis tout à fait favorable à ce que le CSA contrôle l’exécution des COM. Cela lui permettrait de disposer d’éléments susceptibles de l’éclairer sur l’opportunité de reconduire ou non tel ou tel dirigeant de l’audiovisuel public.

En contrepartie de ces prérogatives élargies, le CSA doit être responsabilisé quant aux décisions qu’il prend. À cette fin, le contrôle du Parlement doit être renforcé tant en amont, à travers la procédure de nomination de ses membres, qu’en aval, à travers une évaluation de l’action qu’il mène. À cet égard, il aurait été utile que le président du CSA ou son équipe justifie, dans les rapports publiés par l’autorité, les attributions de fréquences que j’ai évoquées précédemment. Je souhaite que tel soit le cas à l’avenir : la pertinence économique des décisions devra être évaluée et faire l’objet d’un chapitre particulier dans les rapports du CSA.

En somme, il s’agit de rendre le CSA plus indépendant et plus transparent, et de renforcer les garanties prévues à cet effet.

J’en viens à la question de la publicité sur France Télévisions. Lorsque la ministre de la culture et de la communication a présenté le projet de loi, plusieurs collègues lui ont posé des questions à ce sujet. En même temps que nous devons garantir l’indépendance de l’audiovisuel public vis-à-vis du pouvoir politique, nous devons assurer à France Télévisions, au titre de son indépendance financière, une certaine prévisibilité en matière de gestion. C’est un élément de stabilisation de son projet. Cela passe par une garantie de ses ressources.

En particulier, ce projet de loi doit être l’occasion de statuer définitivement sur le sort de la publicité en journée. Je ne rappellerai pas les tergiversations de certains d’entre nous sur le moment opportun pour supprimer en totalité la publicité sur France Télévisions. La suppression de la publicité après vingt heures était censée faciliter le virage éditorial du groupe et permettre d’avancer l’heure du début des programmes de première et de deuxième parties de soirée. Or la réforme a échoué sur ces deux points. Comme on pouvait s’y attendre, elle a déstabilisé le service public sans conduire à une rénovation de son modèle culturel ni à la modification attendue de sa grille de programmes. En prévoyant que le groupe serait désormais en partie financé par une dotation budgétaire de l’État, c’est-à-dire de sa tutelle politique, la loi a au contraire réduit l’indépendance financière de France Télévisions.

La majorité d’alors s’était engagée à respecter un second principe : la compensation « à l’euro près » de la dotation budgétaire par le produit des taxes. Or, là encore, l’objectif est loin d’être atteint : compte tenu d’un rendement de ces taxes inférieur aux prévisions, la réforme a coûté 745,7 millions d’euros à l’État sur les cinq dernières années, comme le montre le tableau inséré dans mon rapport. L’État aurait pu utilement dépenser ces sommes à d’autres fins !

La loi du 5 mars 2009 avait initialement prévu l’arrêt complet de la publicité sur France Télévisions à la fin de l’année 2011. La crise budgétaire, probablement, et l’incapacité à trouver un mode de financement alternatif, certainement, ont incité le gouvernement à revenir sur sa propre réforme un an seulement après son adoption. Après des hésitations et des revirements nombreux, la date du 1er janvier 2016 a finalement été retenue.

Il est grand temps de clore ce débat non seulement pour garantir l’indépendance de France Télévisions, mais surtout pour lui donner une certaine visibilité sur ses ressources et assurer l’avenir même de sa régie publicitaire. Je propose donc de maintenir la publicité en journée sur France Télévisions telle qu’elle existe aujourd’hui.

M. Franck Riester. Si vous ne l’aviez pas proposé, nous l’aurions fait !

M. le rapporteur. Je l’avais bien compris. Vous exécutez cependant une véritable danse de saint Guy : à chaque réunion, vous défendez une position différente sur cette question ! Je me réjouis néanmoins que vous rejoigniez aujourd’hui la nôtre.

La présentation que je viens de faire de mon rapport ne vous dispense pas de sa lecture attentive : riche en informations, il vous permettra de comprendre que ce projet de loi n’est qu’une étape de la nécessaire adaptation de nos dispositifs de régulation à l’ère du numérique. Nous ne traiterons donc pas, à ce stade, du « rapport Lescure ».

Mme Colette Langlade. Je vous remercie, monsieur le rapporteur, pour votre travail très approfondi.

Le projet de loi relatif à l’indépendance de l’audiovisuel public est un grand projet de loi, qui vise à renforcer l’indépendance du CSA et de l’audiovisuel public, principe crucial mis à mal par la majorité précédente. Bien que qualifiée parfois de « petite loi », ce texte est en réalité une grande loi, qui rétablira les équilibres nécessaires et permettra au CSA d’exercer ses prérogatives de manière libre et démocratique.

Quelles sont les principales avancées de ce texte ?

Premièrement, il modifie la loi du 5 mars 2009 relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision. Cette loi du gouvernement Fillon avait retiré au CSA le pouvoir de nomination des dirigeants de l’audiovisuel public pour le confier au Président de la République. Il convient en effet de rappeler que l’autorité de régulation du secteur de la communication audiovisuelle a été, de 1982 jusqu’à 2009, l’autorité de nomination des présidents des chaînes de télévision et de radio publiques : c’était une garantie d’indépendance du point de vue du juge constitutionnel. C’est également l’analyse qu’a faite M. François Hollande lorsqu’il était candidat à la Présidence de la République, d’où son engagement n° 51.

Deuxièmement, le nombre de membres du CSA sera réduit de neuf à sept : seul son président demeurera nommé par le Président de la République ; trois membres seront désignés par le président de l’Assemblée nationale et trois autres par le président du Sénat. En outre, les commissions des affaires culturelles de chaque assemblée devront rendre un avis conforme sur ces désignations, à la majorité des trois cinquièmes. C’est une mesure clé : elle associera plus étroitement les chambres à la désignation des membres du CSA. Surtout, comme l’a dit le rapporteur, c’est une concession majeure faite à l’opposition : nous faisons le pari qu’un consensus émergera après des tractations préalables entre majorité et opposition. Ainsi, le projet de loi vise implicitement à favoriser la désignation de personnalités consensuelles, moins politisées et reconnues pour leurs compétences. Nous sommes bien au cœur même de l’indépendance de l’audiovisuel.

De plus, réduire le nombre de membres du CSA de neuf à sept revient à aligner sa composition sur celle de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) et à préparer, peut-être, un rapprochement ultérieur avec elle, dans le cadre d’un second projet de loi relatif à l’audiovisuel.

La réforme de la procédure de sanction applicable devant le CSA constitue une autre innovation majeure de ce projet de loi. Ainsi, l’article 3 modifie en profondeur l’actuel article 42-7 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication : il institue un rapporteur permanent auprès du CSA, qui sera chargé des fonctions de poursuite et d’instruction. Conformément aux exigences de la jurisprudence européenne, la nouvelle procédure de sanction séparera strictement les fonctions de poursuite et d’instruction, d’une part, et de prononcé de la sanction, d’autre part. Le CSA demeurera compétent pour prononcer la sanction, mais il ne pourra le faire que sur saisine du rapporteur. L’indépendance de celui-ci à l’égard du collège du CSA et du secteur audiovisuel sera garantie par son statut et par les modalités prévues pour sa nomination.

Ces dernières avancées sont à mes yeux les plus significatives. Ce texte est un projet de loi court, au périmètre volontairement restreint.

Le groupe SRC déposera des amendements, tout en respectant l’objectif premier du renforcement de l’indépendance de l’audiovisuel et en se cantonnant à ce strict périmètre. Néanmoins, le texte peut rapidement acquérir une portée très politique, comme le montrent certains amendements, notamment ceux relatifs au renouvellement des mandats des présidents de l’audiovisuel public.

Quant aux sujets qui sortent de ce périmètre – compétences du CSA, attribution de fréquences dans la bande des 700 mégahertz, télévisions locales, rapprochement avec l’ARCEP –, ils feront l’objet d’une prochaine « grande » loi relative à l’audiovisuel.

La présente réforme est ambitieuse et nécessaire. La méthode employée doit être graduelle, ne le perdons pas de vue. La discussion de ce texte aux enjeux significatifs intervient en toute fin de session. J’en appelle à chacun d’entre vous : nous devons être nombreux en séance, le 24 juillet, pour voter ce texte et donner ainsi corps à une réforme emblématique promise par le Président de la République.

M. Franck Riester. Je salue le travail approfondi du rapporteur, même si nous ne partageons pas toutes ses conclusions, ni son analyse.

L’audiovisuel public porte une ambition essentielle : il est placé au cœur du débat public et la question de son indépendance est centrale pour notre démocratie. Mais, au lieu de prendre cette exigence au sérieux, le gouvernement s’en sert comme prétexte pour revenir, comme à son habitude, sur une réforme réalisée au cours du précédent quinquennat. C’est tout à fait affligeant.

Ce texte comporte une avancée – il faut en convenir – : la sécurisation de la procédure de sanction devant le CSA, avec l’instauration d’un rapporteur indépendant, chargé des fonctions de poursuite et d’instruction. Mais, s’agissant de l’indépendance de l’audiovisuel public, sur le plan institutionnel comme sur le plan financier, il n’est porteur d’aucun progrès.

Cette indépendance passe d’abord par l’indépendance financière des sociétés de l’audiovisuel public, principe que le précédent gouvernement avait toujours affirmé et appliqué. En particulier, nous avions préservé les ressources de France Télévisions malgré l’arrêt de la publicité après vingt heures, notamment en introduisant la taxe sur les opérateurs de télécommunications.

Au contraire, l’actuelle majorité – qui avait, à l’époque, vivement critiqué cette taxe, validée depuis par la Cour de justice de l’Union européenne – n’a pas hésité à infliger l’an dernier à France Télévisions une baisse historique de la dotation qui lui est versée par l’État. On est loin de la prévisibilité en matière de gestion que vous avez évoquée, monsieur le rapporteur !

Aujourd’hui, il est grand temps de se pencher sur les moyens d’assurer l’indépendance financière de l’audiovisuel public. Il convient, premièrement, de pérenniser la publicité en journée. Vous avez indiqué, monsieur le rapporteur, que vous feriez une proposition en ce sens. Nous y serons favorables, sous réserve d’un examen plus approfondi. Il est nécessaire, deuxièmement, de repenser la contribution à l’audiovisuel public. Pourtant, cette dimension est totalement absente du projet de loi. De plus, nous regrettons que les parlementaires de l’opposition ne soient pas associés au groupe de travail créé par la ministre sur cette question.

Nous déplorons que le gouvernement, qui a pourtant disposé de plus d’un an pour analyser le secteur audiovisuel – sans compter les dix années précédentes passées dans l’opposition –, nous présente un projet de loi a minima, qui n’aborde en rien les grands enjeux du secteur. Cependant, ce n’est guère surprenant : ce texte a avant tout une fonction d’affichage politique.

D’ailleurs, le gouvernement ne craint pas de nous parler d’indépendance, alors même que sa politique de nominations dans le domaine culturel est loin d’être exemplaire : le seul tort de M. Éric Garandeau, qui quitte la présidence du Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC), est d’avoir travaillé pour le précédent Président de la République.

Je le répète : cette loi ne renforce en rien l’indépendance de l’audiovisuel public. La première conséquence du changement de procédure sera de mettre fin au pouvoir de contrôle exercé par le Parlement : les commissions des affaires culturelles des deux chambres n’interviendront plus directement dans la nomination des présidents de l’audiovisuel public. Après avoir organisé des Assises de l’audiovisuel sans y convier les parlementaires de l’opposition, le gouvernement confirme par ce dessaisissement sa volonté de mettre le Parlement à l’écart de ses projets concernant l’audiovisuel public. Il est pourtant essentiel que les représentants de la nation y soient étroitement associés, le service public de l’audiovisuel concernant tous les Français.

Surtout, le fait de transférer au CSA – dont les membres sont eux-mêmes nommés par le pouvoir politique – la responsabilité de nommer les présidents des sociétés de l’audiovisuel public ne rompt en rien le lien entre le pouvoir politique et l’audiovisuel public. C’est là le point essentiel, monsieur le rapporteur.

Le système de nomination actuel, par le Président de la République, a au moins le mérite de la transparence. Le projet de réforme du gouvernement, ce n’est pas davantage d’indépendance, mais davantage d’hypocrisie !

C’est pourquoi le groupe UMP propose un mode de nomination des dirigeants de l’audiovisuel public réellement indépendant du pouvoir politique.

Plusieurs commissaires du groupe SRC. Que ne l’avez-vous fait plus tôt !

M. Franck Riester. Allons jusqu’au bout de cette indépendance ! Nous souhaitons la création d’un Haut Conseil de l’audiovisuel public, garant de l’indépendance du service public de la communication audiovisuelle et du respect de ses obligations fondamentales devant la société française. Ce Haut Conseil serait chargé de nommer les responsables de l’audiovisuel public. Ce modèle a déjà fait ses preuves dans d’autres grandes démocraties européennes, notamment au Royaume-Uni et en Allemagne – vous le rappelez d’ailleurs dans votre rapport, monsieur le rapporteur. La composition du Haut Conseil refléterait la réalité des territoires et de la société civile : il comprendrait des représentants des salariés et du monde associatif – notamment des associations de consommateurs –, issus du Conseil économique, social et environnemental. Ainsi, la société française pourrait se réapproprier le service public de l’audiovisuel.

La création de ce Haut Conseil permettrait également d’éviter que le CSA, organisme chargé de la régulation du secteur audiovisuel, ne désigne les dirigeants des sociétés publiques de ce même secteur. Cette anomalie, prévue par le projet de loi, ne se retrouve dans aucun autre domaine : ni les télécommunications, ni les transports, ni l’énergie. Il serait impensable que l’ARCEP nomme le président d’Orange ou que la Commission de régulation de l’énergie (CRE) nomme le président d’EDF ! Dès lors, même si cela a été le cas dans le passé, pourquoi le CSA devrait-il nommer les présidents de France Télévisions, de Radio France et de France Médias Monde ?

Si l’on prétend fonder une réforme de l’audiovisuel public sur le principe d’indépendance, il convient de promouvoir une réforme ambitieuse, d’inventer une procédure nouvelle. Se contenter d’une loi d’affichage, comme le fait aujourd’hui le gouvernement, c’est non seulement faire preuve d’hypocrisie, mais c’est surtout manquer singulièrement d’ambition pour l’audiovisuel public, service public au cœur de la vie des Français.

Mme Isabelle Attard. Comme je l’ai indiqué la semaine dernière lors de l’audition de Mme la ministre, nous sommes satisfaits de ce projet de loi. La modification du mode de désignation des membres du CSA dans un sens plus démocratique importe d’autant plus que le CSA disposera à terme de pouvoirs renforcés pour réguler internet.

D’autre part, le CSA jouera-t-il un rôle accru dans le développement des chaînes locales et associatives – BDM TV, Cinaps TV, Télé Bocal –, jusqu’à présent plutôt marginalisées ? Actuellement, la diffusion de ces chaînes est assurée par les fournisseurs d’accès à internet, qui ne sont cependant pas tenus de le faire. Les chaînes le déplorent et demandent l’instauration d’une obligation de diffusion. Avez-vous l’intention, monsieur le rapporteur, de déposer des amendements en ce sens ? J’ignore en outre si ces chaînes ont été associées aux Assises de l’audiovisuel.

S’agissant de la publicité, nous avons évoqué, lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2013, la BBC, qui est un modèle d’indépendance tant à l’égard de l’État que des annonceurs publicitaires. Certes, la redevance audiovisuelle britannique est d’un montant supérieur à celle prélevée en France aujourd’hui. Mais elle garantit l’existence d’une télévision nationale reconnue, diffusant des programmes de qualité et engagée dans la création audiovisuelle. Vous avez indiqué, monsieur le rapporteur, que vous ne rétabliriez pas la publicité après vingt heures. Pour notre part, nous ferons des propositions concernant la publicité en journée, aux heures où sont diffusés les programmes pour enfants. Quelle est votre position à ce sujet ?

M. Thierry Braillard. Je vous félicite, monsieur le rapporteur, pour la clarté et la concision de votre rapport.

Je comprends, à sa lecture, que les membres du CSA ne seront renouvelés qu’à partir de 2017. Est-ce bien le cas ?

D’autre part, j’ai beaucoup apprécié le passage de votre rapport portant sur la publicité. M. Franck Riester a rappelé que le précédent gouvernement avait créé une taxe sur les opérateurs de télécommunications. Il est donc un peu facile de dénoncer aujourd’hui un matraquage fiscal ! Quoi qu’il en soit, la réforme de 2009 s’est soldée par un manque à gagner de 745,7 millions d’euros pour l’État. Ces sommes ont-elles été économisées par les annonceurs publicitaires ou ont-elles été réorientées vers d’autres chaînes, notamment celles qui étaient proches du pouvoir de l’époque – TF1 et M6 ? Disposez-vous d’études à ce sujet, monsieur le rapporteur ? Je rappelle que, en 2009, la durée des messages publicitaires a été augmentée de quelques secondes, ce qui a également profité aux chaînes privées.

Enfin, vous estimez, monsieur le rapporteur, que le CSA doit davantage contrôler l’exécution des COM. Ce serait en effet une excellente disposition. D’une manière générale, vous plaidez pour un renforcement de l’autorité et des prérogatives du CSA. Je rappelle que, lors de l’attribution des fréquences de la TNT, les candidats devaient obligatoirement passer par l’Élysée, s’ils voulaient avoir une chance d’en obtenir une.

M. Franck Riester. Avez-vous des preuves de ce que vous avancez ?

M. Thierry Braillard. Oui, je peux même vous dire dans quel bureau il fallait passer !

Ce projet de loi va dans le bon sens, celui de l’indépendance. Nous sommes satisfaits tant du texte que du rapport.

M. Yves Durand. Je vous félicite à mon tour, monsieur le rapporteur, pour la clarté et le caractère pédagogique de votre rapport : il résume bien les enjeux de ce projet de loi et permet de comprendre ce qu’il est et, surtout, ce qu’il n’est pas. En effet, avec ce texte, nous n’entreprenons pas une refondation du paysage audiovisuel français, mais posons uniquement le problème, très important, de l’indépendance de l’audiovisuel public.

À cet égard, je lance un appel à nos collègues de l’opposition : nous pouvons, nous devrions trouver un accord sur cette question. Certes, des divergences s’expriment, mais il s’agit surtout de polémiques sur le bilan du précédent quinquennat. En réalité, nous sommes tous favorables à l’indépendance de l’audiovisuel public et nous regrettons tous certaines pratiques antérieures, même si nous ne le disons pas de la même manière.

De même que nous nous accordons sur la question de la publicité, nous pourrions nous entendre sur les moyens de garantir l’indépendance de l’audiovisuel public, à partir des propositions du rapporteur. Nous aurons à débattre ultérieurement, dans le cadre d’un autre projet de loi, de la conception que nous avons de l’audiovisuel. Il sera alors plus compliqué de trouver un accord. Mais, sur le présent projet de loi – qui est non pas une « petite loi », mais un texte très important –, nous devrions pouvoir le faire, en cette fin de session extraordinaire.

M. Christian Kert. Le verbe du rapporteur est plus mesuré que sa plume : il a employé, à l’oral, une terminologie moins agressive que dans son rapport.

Il est paradoxal de présenter un texte sur l’indépendance de l’audiovisuel public qui n’aborde par la question de son financement. C’est même une erreur.

De plus, le rapport, par ailleurs très documenté, minimise certains aspects relatifs au financement. Ainsi, il passe très rapidement sur la diminution brutale de la dotation budgétaire à France Télévisions : alors qu’elle s’établissait à environ 400 millions d’euros entre 2009 et 2012, elle n’a été que de 256 millions en 2013. Vous avez d’ailleurs annoncé que cette dotation continuerait à baisser dans les trois ans qui viennent dans le cadre du COM. Vous omettez également de préciser que le mécanisme d’indexation de la redevance audiovisuelle a été instauré par la précédente majorité. Enfin, vous passez sous silence la crise du marché publicitaire. La baisse des recettes publicitaires, qui affecte particulièrement France Télévisions, n’est donc pas uniquement imputable à la suppression de la publicité après vingt heures.

D’autre part, vous semblez regretter, dans votre rapport, que l’audiovisuel public coûte de l’argent à l’État : c’est inouï, s’agissant d’un rapporteur socialiste ! D’ailleurs, vous diminuez la dotation à France Télévisions, progressivement mais très sensiblement, alors même que vous envisagez de réduire de 7 à 5 % la TVA sur les offres de télévision payantes autodistribuées – Canal Plus, Numericable –, au lieu de l’augmenter à 10 % comme vous l’aviez annoncé. Où est la cohérence, monsieur le rapporteur ?

Vous avez affirmé, madame Langlade, que ce texte renforçait les prérogatives du Parlement. Comme l’a démontré M. Franck Riester, il n’en est rien : nous allons au contraire être privés d’une partie de nos moyens de contrôle, nous devons en être conscients. En outre, vous avez indiqué que le choix des candidats à la présidence des sociétés de l’audiovisuel public se ferait sur la base d’un projet. Or le projet de loi ne prévoit rien de tel, même s’il ne l’interdit pas. Dans le cadre de la procédure actuelle, en revanche, le Président de la République avait pris le soin de recevoir tous les candidats et de les interroger sur leur projet.

Monsieur Braillard, il convient de ne pas stigmatiser des chaînes privées. Nous souhaitons tous défendre l’audiovisuel public, mais le paysage audiovisuel français est composé de chaînes tant privées que publiques. Lors de la réforme de 2009, vous nous aviez accusés de défendre plus particulièrement certaines chaînes. Cependant, face à certaines exigences, monsieur le rapporteur, vous serez peut-être amenés, par souci d’équilibre, à défendre telle ou telle position des chaînes privées. Nous le verrons au cours de nos débats.

M. le président Patrick Bloche. Je rappelle que vous avez été, monsieur Kert, le rapporteur de la loi du 5 mars 2009.

M. Michel Ménard. Je soutiens ce projet de loi qui renforce la légitimité du CSA tout en lui confiant des responsabilités supplémentaires : la prépondérance sera en effet désormais accordée au Parlement dans la désignation des membres de ce conseil, dont seul le président sera nommé par le Président de la République, au lieu de trois membres actuellement, ce qui lève ainsi toute suspicion sur ces nominations. L’avis conforme des commissions des affaires culturelles à la majorité des trois cinquièmes sera en outre nécessaire pour valider la désignation des six membres nommés par les présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat. L’opposition sera ainsi associée au choix des vigies de la liberté audiovisuelle. Dans le même temps, la séparation des pouvoirs pour la nomination du président sera également respectée.

En instaurant un processus de nomination aussi exemplaire, le projet de loi garantit l’indépendance du CSA – ce qui justifie que lui soit à nouveau confiée la mission de nommer les dirigeants des entreprises de l’audiovisuel public, mission qu’il a exercée sans discontinuer jusqu’en 2009.

Je soutiens également la proposition, formulée par le rapporteur, de maintien définitif de la publicité en journée sur France Télévisions. L’incertitude pesant actuellement sur son financement nuit en effet à la visibilité de ses ressources.

Enfin, je suis heureux que nos collègues de l’opposition plaident en faveur de l’indépendance de l’audiovisuel public après avoir autorisé le Président de la République à en nommer les dirigeants. On ne peut que se satisfaire d’une évolution conduisant lesdits collègues à vouloir laver plus blanc que blanc.

M. Patrick Hetzel. Nous divergeons sur plusieurs points des orientations prises par le gouvernement. Sur un tel sujet, il importe d’adopter une vision d’ensemble. Or le gouvernement procède par saucissonnage : à la suite de ce premier texte, il nous faudra en examiner un deuxième sur le volet numérique, puis un troisième en 2014. Cela ne me paraît pas une bonne méthode législative.

Quant au fond, on décèle un véritable décalage entre les ambitions affichées et la réalité. Le rapporteur vient ainsi de déplorer que la précédente majorité ait fait évoluer les pouvoirs de nomination du Président de la République. Mais, avec ce projet de loi, le gouvernement propose en réalité de faire régresser les pouvoirs du Parlement. Je suis donc extrêmement surpris que l’on puisse considérer ce texte comme une avancée démocratique et je ne peux que dénoncer ce double langage.

Enfin, il paraît très clair que, sur les sujets liés à la culture, la majorité souhaite détricoter les mesures adoptées sous la précédente législature à l’initiative de M. Nicolas Sarkozy. Mais un tel « détricotage » ne saurait constituer une politique en soi. Non seulement ce n’est pas rendre service à l’audiovisuel en général, mais nos concitoyens ne comprennent pas cette démarche.

M. le président Patrick Bloche. Le rapporteur et moi-même avons vraiment du mal à saisir en quoi ce texte entraînerait une régression des pouvoirs du Parlement…

M. Michel Françaix. Si nos collègues de l’UMP réfléchissaient à ce qui va se passer dans les cinq ou dix prochaines années, ils verraient que, pour la première fois, les décisions d’une autorité de régulation de l’audiovisuel seront enfin incontestables. Pour cela, il aura fallu attendre trente-deux ans. On considérait en effet jadis la Haute Autorité de la communication audiovisuelle comme imparfaite, puisque le président François Mitterrand s’en occupait un peu tout en ne s’en occupant pas vraiment. De même la Commission nationale de la communication et des libertés (CNCL) mise en place par M. François Léotard a-t-elle été jugée catastrophique. Ainsi, à chaque débat sur l’audiovisuel, les parlementaires de l’opposition, quelle qu’ils soient, ont contesté les décisions prises par l’instance de régulation, au motif qu’elles émanaient de personnes qu’ils estimaient moyennement respectables ou franchement partisanes.

En revanche, pas un seul des convives présents à un dîner auquel nous étions plusieurs à assister hier – et qui provenaient pourtant d’horizons fort différents – n’a accusé le CSA de ne pas représenter l’avenir. Il s’agit là d’un combat d’arrière-garde. Je sais bien que les conservateurs ont tendance à résister à tout ce qui s’apparente à un progrès : ce qui est sûr, c’est que plus jamais vous n’aurez l’occasion de répéter que le CSA ne représente pas la réalité, car, pour la première fois, il comprendra obligatoirement des membres de toutes les sensibilités politiques. Pour la première fois, il sera un véritable lieu de démocratie, comportant une majorité et une opposition, et dont le président devra rechercher un certain consensus pour que des décisions qui engageront l’avenir soient incontestables.

L’argument selon lequel il aurait fallu regrouper l’ensemble de la réforme de l’audiovisuel au sein d’un seul et même texte me fait sourire. Si nous l’avions fait, vous auriez qualifié le projet de loi d’usine à gaz. Je ne pense pas que vous soyez de mauvaise foi, mais, lorsque vous affirmez que c’est sur la base d’un projet précis que M. Nicolas Sarkozy a désigné des présidents de chaîne, on ne peut que vous souhaiter de remporter le prix de l’humour ! Sans doute, il avait ses raisons, qui correspondaient à une conception bonapartiste – ce qui est d’ailleurs tout à fait son droit. Il est certain, toutefois, qu’il ne raisonnait pas en termes de projet, mais en termes d’efficacité.

Enfin, ne soyons pas désobligeants à l’égard de nos collègues de l’opposition, qui sont en phase d’apprentissage de ce qu’est l’indépendance : indépendance de la justice, indépendance du Conseil constitutionnel et indépendance du CSA – et ils font le même apprentissage dans le processus d’élection des responsables de l’UMP !

Si des amendements sont déposés sur ce texte, nous serons bien sûr prêts à les examiner, voire à les adopter.

M. Franck Riester. Cessez de nous donner des leçons d’indépendance au moment où les récentes nominations effectuées par le gouvernement évoquent une véritable purge dans tous les secteurs – comme le prouve la nomination à la tête du CNC de l’une des membres de la promotion Voltaire de l’École nationale d’administration (ENA) – une de plus ! – dont est issu le Président de la République.

C’est bien entendu à propos de la nomination des présidents des sociétés de l’audiovisuel public que nous avons parlé de dessaisissement : en effet, si le Parlement est aujourd’hui consulté sur ce point et dispose d’un pouvoir de blocage de ces nominations, ce ne sera plus le cas demain.

Il n’est nullement question de remettre en cause le CSA qui constitue bien sûr une institution d’avenir. Il conviendra cependant d’en faire évoluer le périmètre et les missions – ce qu’a d’ailleurs annoncé le gouvernement qui souhaite inclure parmi ses compétences des missions de régulation de l’internet aujourd’hui exercées par la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet (HADOPI). Nous sommes pour notre part convaincus de la nécessité de changer de paradigme, comme l’ont fait l’Allemagne et la Grande-Bretagne, car, dans la mesure où vous maintenez le lien entre les pouvoirs exécutif et législatif, d’une part, et le CSA d’autre part – le Président de la République et le Parlement étant chargés d’en nommer les membres –, cette institution revêtira une dimension très politique, davantage même qu’hier. Il convient au contraire de créer un Haut Conseil composé de personnalités sans lien avec le pouvoir politique, issues de la société civile et de nos territoires. Ce Haut Conseil serait chargé de la nomination des présidents d’entreprises publiques de l’audiovisuel et de vérifier que celles-ci assurent bien leurs missions de service public. Le CSA jouerait, quant à lui, un rôle de régulateur, ce qui éviterait le mélange des genres entre mission de régulation et nomination des chefs d’entreprises du secteur régulé.

Mme Isabelle Attard. Notre Commission a effectivement été consultée sur ces nominations, mais il ne s’agissait nullement pour elle d’émettre un avis conforme. À l’inverse, le projet de loi prévoit l’obligation pour les commissions des affaires culturelles d’approuver une nomination par un vote aux trois cinquièmes.

Par ailleurs, la publicité ne permet en aucun cas à une chaîne de disposer de revenus stables, puisque le montant des recettes publicitaires dépend par définition de la conjoncture, des événements et du nombre de chaînes qui se partagent la ressource. Ainsi la BBC, véritable modèle de stabilité, n’est-elle pas financée par les recettes publicitaires mais bien par l’État.

M. Franck Riester. La BBC est certes financée sur ressources publiques, mais pas par l’État, puisque ces ressources sont issues d’une redevance !

M. le président Patrick Bloche. L’indépendance de l’audiovisuel public revêt deux dimensions : la première, d’ordre politique, fait l’objet du projet de loi. Je laisserai donc le rapporteur répondre à ceux qui perçoivent dans ce texte une régression des droits du Parlement. La seconde, moins évidente, est d’ordre financier et a été remise en cause lors de la réforme de 2008-2009. Car, à vrai dire, le ver est dans le fruit !

Certains ont déclaré le week-end dernier, sur les chaînes publiques et privées du petit écran, que l’ancien Président de la République, après avoir ruiné la France, avait ruiné son propre parti : je pourrais ajouter qu’il a aussi ruiné France Télévisions ! Portant la responsabilité majeure de la funeste réforme de 2009, il a en effet mis l’audiovisuel public dans un état de dépendance totale à l’égard de l’État actionnaire. Avant cette réforme, France Télévisions n’était financée que par la redevance audiovisuelle et les recettes publicitaires. Or l’ancien Président de la République a décidé, pour son bon vouloir et croyant jouer un bon tour politique en prenant la gauche sur sa gauche, de rayer d’un trait de plume 450 millions d’euros de recettes publicitaires en soirée sur France Télévisions, établissant ensuite un contrat d’objectifs et de moyens prévoyant pour ces chaînes en 2009 des recettes publicitaires de 450 millions d’euros en journée. Or elles n’ont atteint que 340 millions d’euros, une somme qui ne pourra que continuer à diminuer à l’avenir.

Afin de compenser ces pertes, le gouvernement a donc pris pour cette année une décision politique extrêmement courageuse, qu’aucun de ses prédécesseurs n’avait prise depuis longtemps, en augmentant de 4 euros le montant de la redevance, au-delà des 2 euros d’augmentation dus à l’inflation. Et nous nous sommes collectivement réjouis, au nom de l’intérêt national, que la Cour de justice de l’Union européenne n’ait pas annulé la taxe sur les opérateurs de télécommunications. Celle-ci ne rapporte cependant à l’heure actuelle que 250 millions d’euros, quand les ressources publicitaires de France Télévisions s’élevaient en soirée à 450 millions d’euros au moment de la réforme de 2009. C’est pourquoi le budget de l’État est contraint de compenser les 200 millions d’euros manquants.

L’audiovisuel public étant déstabilisé pour un bon moment, nous essayerons, par le biais d’un avenant au contrat d’objectifs et de moyens de France Télévisions, de revenir si possible à l’équilibre financier dans les deux ans qui viennent. Mais nous n’avons pas la garantie d’y parvenir. Alors que nous nous apprêtons à modifier le mode de désignation des présidents de l’audiovisuel public, le mal le plus grave que nous ayons à supporter collectivement réside dans cette dépendance budgétaire de France Télévisions à l’égard de l’État – effet le plus néfaste, selon moi, de la réforme de 2009.

M. le rapporteur. Vous trouverez dans mon rapport une présentation du produit des taxes censé combler les 450 millions d’euros de recettes publicitaires non perçus par France Télévisions : le produit de la taxe sur les télécommunications est évalué à 190 millions d’euros en 2013, ce qui signifie qu’une part importante de la compensation nécessaire sera financée sur le budget de l’État et donc que le dispositif adopté en 2009 n’a fait qu’accroître notre niveau d’endettement, puisque l’État, n’ayant plus d’argent, est obligé d’emprunter. Représentant un coût de 745 millions d’euros sur cinq ans, cette réforme est fort dommageable pour nos finances publiques, alors même que le rapporteur de la loi de 2009 s’était à l’époque engagé à ce qu’elle ne coûte rien à l’État, la compensation à l’euro près étant censée être assurée par des taxes.

Les réflexions qui ont été menées sur un éventuel rapprochement de l’ARCEP et du CSA s’appuyaient sur l’idée d’une certaine convergence entre les régulations portant respectivement sur les contenants et sur les contenus, et donc sur la volonté de disposer d’une appréhension globale de ces deux aspects. Or il résulte de ces réflexions que ce sont les mutations technologiques affectant la manière dont les produits culturels circulent en France et dans le monde, par voie hertzienne ou filaire, qui impliquent de repenser la régulation. C’est pourquoi il est envisagé d’étendre la responsabilité du CSA à tous les contenus, quel que soit leur véhicule. Et c’est aussi pourquoi la question du rapprochement entre l’ARCEP et le CSA n’est pas à l’ordre du jour, même s’il existe actuellement un groupe de travail réunissant les deux autorités, qui mériterait d’être réuni plus souvent.

On aurait pu se demander si, avec la nomination du président du CSA par le Président de la République, le pouvoir politique ne s’installait pas dans le fauteuil principal du conseil. N’oubliez jamais, toutefois, que le CSA fonctionne selon la règle de la collégialité, ce qui signifie qu’il n’existe aucun rapport hiérarchique entre ses membres. La collégialité implique de recueillir une majorité avant de prendre une décision. De facto, cette majorité se rapproche le plus souvent de l’unanimité.

La question de l’obligation de diffusion des chaînes mérite effectivement d’être posée non seulement pour les chaînes régionales et associatives, mais aussi pour l’audiovisuel public, afin d’éviter que les distributeurs de services télévisés utilisant d’autres moyens que les faisceaux hertziens ne « fassent leur marché ». Cependant, elle ne sera pas traitée dans ce projet de loi, mais dans le suivant.

Je constate que, lorsque nous proposons de modifier la loi de 2009, l’opposition nous accuse de la détricoter, mais que, lorsqu’elle propose de créer un Haut Conseil de l’audiovisuel, ce qui revient à bouleverser la philosophie de cette même loi, elle ne fait pour sa part que l’améliorer ! Concédez donc à la majorité la possibilité de le faire, elle aussi !

En ce qui concerne l’indépendance financière de l’audiovisuel public, je ne reviendrai pas sur le coût pour le budget de l’État de la suppression de la publicité sur les antennes de France Télévisions, lequel devait être compensé à l’euro près. Mais je rappellerai qu’à peine le COM fut-il signé en novembre 2011 que la loi de finances réduisait la dotation budgétaire de 15 millions d’euros pour 2012. Une loi de finances rectificative la réduisait encore de 6 millions d’euros, et 6 millions d’euros ont par la suite été gelés.

M. Franck Riester. Une telle décision fut motivée par la hausse des recettes publicitaires…

M. le rapporteur. Absolument pas, puisqu’elles ont au contraire diminué. Si elles avaient augmenté, nous l’aurions remarqué !

Parlons de la manière dont ont été désignés les présidents des sociétés de l’audiovisuel public. Lors de son audition, M. Jean-Luc Hees nous a indiqué que, s’il se doutait de la raison de sa convocation à l’Élysée, sa nomination à la tête de Radio France fut tout de même une surprise pour lui, le Président de la République de l’époque ne lui en ayant rien dit auparavant. Voilà qu’un homme sans le moindre projet s’est rendu auprès d’un actionnaire qui n’en avait pas non plus. Et l’on peut supposer qu’ils se sont quittés sans en avoir davantage après cet entretien, ce qui illustre bien l’inconséquence totale d’un pouvoir de nomination intuitu personæ de ce type et la nécessité d’un minimum de réflexion préalable. Car, lorsque le conseil d’administration d’une société nomme son président-directeur général, il lui confie des orientations, ce qui n’a pas été le cas en l’occurrence puisqu’aucune lettre de mission n’a été adressée à M. Jean-Luc Hees. Nous ignorons par conséquent comment la politique de l’audiovisuel est élaborée dans le cadre du dispositif que vous avez mis en place.

Quant à votre proposition de création d’un Haut Conseil de l’audiovisuel, je vous accorde que l’ARCEP ne nomme pas le président d’Orange, ni la Commission de régulation de l’énergie, celui d’EDF. Mais il s’agit là de cas fort différents de celui dont nous traitons en l’occurrence, puisque nous souhaitons garantir l’indépendance de l’audiovisuel public. Lorsque l’ARCEP régule le secteur des télécommunications, sa mission ne porte nullement sur des contenus, contrairement au CSA qui, lui, s’intéresse aux contenus diffusés.

Il ne nous semble pas, quant à nous, que le Parlement soit dessaisi de ses pouvoirs quant à la nomination des présidents de l’audiovisuel public. L’objectif est de garantir l’indépendance de l’audiovisuel public et non de renforcer les pouvoirs du Parlement. Le dispositif adopté en 2009 confiait aux commissions des affaires culturelles des deux assemblées la possibilité de rendre un avis sur la nomination des présidents de l’audiovisuel public sans que le Président de la République soit contraint de le suivre.

M. Franck Riester. Bien au contraire ! L’Assemblée nationale disposait d’un droit de veto. Or, contrairement à ce qu’a cru Mme Isabelle Attard, ce ne sera plus le cas avec ce projet de loi !

M. le rapporteur. L’objectif du projet de loi n’est pas de faire en sorte que le Parlement participe à la nomination des présidents de l’audiovisuel public, mais d’assurer leur indépendance. Or nous considérons que le meilleur moyen d’y parvenir consiste à redonner au CSA l’autorité pour le faire et à s’assurer qu’il soit plus indépendant dans ses nominations. C’est pourquoi le texte prévoit que toute désignation d’un membre du CSA par le président du Sénat ou de l’Assemblée nationale soit soumise à un avis confirme à la majorité positive des trois cinquièmes des commissions des affaires culturelles – mesure qui constitue un gage d’indépendance pour les décisions que le CSA sera conduit à prendre.

M. le président Patrick Bloche. C’est dans le cadre de notre mission de contrôle parlementaire du pouvoir exécutif que nos commissions des affaires culturelles ont été consultées, après la réforme de 2009, sur la nomination par le pouvoir exécutif de présidents d’entreprises de l’audiovisuel public. Dès lors que ce n’est plus lui mais une autorité indépendante qui nomme ces présidents, notre prérogative de contrôle disparaît tout naturellement.

M. le rapporteur. Ajoutons que la loi de 2009 visait tant leur nomination que leur révocation – ce qui explique pourquoi le Président Sarkozy n’a pas ressenti le besoin de fournir à M. Jean-Luc Hees la moindre ligne à suivre : l’épée de Damoclès a pesé sur sa tête dès sa nomination, d’autant que nous ne disposions d’aucun droit de veto en cas de révocation.

Je note que M. Thierry Braillard s’est déclaré favorable à ce que le CSA rende un avis sur l’exécution des COM avant que nos commissions n’auditionnent les présidents de l’audiovisuel public sur cette exécution.

Les 745,7 millions d’euros dont j’ai parlé précédemment correspondent à la différence entre ce que l’État a versé à France Télévisions pour compenser la suppression de la publicité et le rendement des taxes créées pour compenser ce coût et dont le rendement s’est avéré très inférieur aux prévisions initiales.

Le renouvellement des membres du CSA débutera le 23 janvier 2015 et concernera notamment Mme Françoise Laborde.

Si ce texte est important, comme le souligne notre collègue Yves Durand, c’est parce que nous sommes en train de modifier la loi de 1986 qui avait marqué un certain nombre d’avancées.

Si M. Christian Kert trouve mon propos plus incisif dans mon rapport qu’aujourd’hui, c’est sans doute parce que ma réflexion évolue. En effet, en décembre 2008, à l’occasion d’une question orale au gouvernement, j’exprimais notre opposition à « l’ORTS », c’est-à-dire à « l’Office de radio-télévision Sarkozy ».

M. Christian Kert. Avec vous, c’est l’ORPS !

M. le rapporteur. Cette évolution de ton me paraît tout à fait salutaire, dans la mesure où nous travaillons aujourd’hui sur la seule question qui nous intéresse : à savoir l’indépendance de l’audiovisuel public.

Si ce projet de loi n’est qu’une première étape d’une réforme du cadre juridique de l’audiovisuel, c’est parce que la ministre de la culture et de la communication a pris l’initiative de lancer plusieurs missions afin d’alimenter la réflexion du gouvernement. Pour disposer d’une vision d’ensemble, il faut se doter de fondements stables, sûrs et compétents. C’est pourquoi nous souhaitons instituer un CSA qui soit à la fois plus responsable – notamment sur les plans économique et industriel – et plus utile. Nous déclinerons notre vision d’ensemble dans des textes ultérieurs.

Le 8 janvier 2008, lorsqu’a été annoncée la suppression de la publicité sur France Télévisions, la ministre de la culture discutait avec M. Patrick de Carolis de la deuxième coupure de publicité : c’est dire si on l’avait tenue informée du dossier ! À l’époque, cette décision prise à l’emporte-pièce avait surpris la majorité autant que l’opposition. Non seulement la « commission Copé » s’est réunie bien après le 8 janvier, mais les décisions du gouvernement ont fait fi de ses préconisations, en matière de nomination du président de France Télévisions. La « commission Copé » suggérait en effet que ce soit le CSA qui propose une liste de trois ou quatre noms aux conseils d’administration des entreprises audiovisuelles publiques. Or les dispositions que vous avez finalement adoptées n’ont rien à voir avec cette préconisation. Nous n’avons donc aucune leçon à recevoir en matière de nominations !

Je remercie enfin M. Michel Françaix de nous avoir rappelé très utilement l’historique de la régulation de l’audiovisuel et le fait que des organismes ont été institués l’un après l’autre, afin de garantir l’indépendance de l’audiovisuel public. L’audiovisuel n’a rien à voir avec l’électricité ou les télécommunications. En effet, l’indépendance des médias est garantie par la Constitution. Mais il est bien vrai que certains d’entre nous sont toujours en phase d’apprentissage de l’indépendance – comme de la démocratie d’ailleurs.

III.- EXAMEN DES ARTICLES

La Commission des affaires culturelles et de l’éducation procède à l’examen des articles du projet de loi, après engagement de la procédure accélérée, relatif à l’indépendance de l’audiovisuel public lors de ses séances du 16 juillet 2013.

Chapitre Ier

Disposition modifiant la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative
À la libertÉ de communication

Article 1er A (nouveau)

Attribution au CSA du statut d’autorité publique indépendante

Afin de renforcer l’indépendance du Conseil supérieur de l’audiovisuel, autorité administrative indépendante, le présent article issu d’un amendement du rapporteur adopté par la Commission a pour objet de modifier son statut en lui conférant celui d’autorité publique indépendante.

Interrogée, le 3 juillet 2013, sur l’opportunité de ce changement de statut lors de son audition par la Commission des affaires culturelles et de l'éducation, la ministre de la culture et de la communication a affirmé : « Le rapporteur a suggéré de donner au CSA le statut d’autorité publique indépendante. Forte d’une personnalité juridique distincte de celle de l’État, l’institution serait responsable de ses décisions sur le plan juridique et bénéficierait d’une plus grande autonomie de gestion. C’est une bonne proposition, que le gouvernement reprendra sous forme d’amendement. »

Depuis la création du CSA, le législateur a attribué la qualification d’autorité publique indépendante, catégorie qui est apparue pour la première fois pour l’autorité des marchés financiers dans la loi n° 2003-706 du 1er août 2003 sur la sécurité financière, à plusieurs autorités de régulation: l’Agence française de lutte contre le dopage, la Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet (HADOPI), l’Autorité des marchés financiers (AMF), la Haute Autorité de santé.

Ce statut traduit la volonté du législateur de mieux affirmer l’indépendance d’un organisme intervenant dans le domaine économique et s’accompagne alors de l’attribution de la personnalité morale et de ressources propres.

Actuellement, le CSA ne dispose pas de personnalité juridique distincte de celle de l’État. Le statut d’autorité publique indépendante lui permettra de disposer de la personnalité morale, ce qui le rendra responsable sur le plan juridique et financier de toutes ses décisions. En outre, l’autonomie de gestion de l’autorité de régulation sera accrue.

L’ensemble des implications de ce changement de statut sont analysées dans l’exposé général du présent rapport.

*

La Commission examine deux amendements identiques, AC 66 du rapporteur et AC 93 du Gouvernement, portant article additionnel avant l’article 1er.

M. Marcel Rogemont, rapporteur. L’amendement AC 66 vise à doter le Conseil supérieur de l’audiovisuel, le CSA, du statut d’autorité publique indépendante, ce qui lui permettrait de disposer de la personnalité morale et d’une plus grande autonomie juridique et financière. Cette proposition a recueilli l’approbation de Mme la ministre, au point que le gouvernement a déposé un amendement identique.

Mme Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication. L’amendement AC 93, que je m’étais effectivement engagé à vous proposer, vise dans les mêmes termes à transformer le CSA en une autorité publique indépendante. Cela lui permettra d’être doté d’une personnalité juridique distincte de celle de l’État : il sera seul responsable de ses décisions sur le plan juridique et son autonomie de gestion sera accrue. Cette transformation est un gage supplémentaire d’une indépendance renforcée du régulateur, en cohérence avec les objectifs de ce texte.

M. Patrick Hetzel. Vos propos montrent l’impréparation qui a présidé à l’élaboration du projet de loi. En effet, une proposition aussi essentielle que celle de faire du CSA une autorité publique indépendante, dotée de la personnalité morale, aurait dû être formulée d’emblée par le gouvernement. Le fait qu’il n’ait pas eu conscience de lui-même de l’intérêt d’une telle disposition montre combien le gouvernement agit dans la précipitation et combien ce texte est perfectible.

M. Franck Riester. Si nous sommes favorables à l’évolution proposée par cet amendement, nous sommes choqués que le gouvernement n’ait pas eu de lui-même conscience de l’intérêt d’une disposition aussi importante pour l’indépendance de l’audiovisuel, comme Mme la ministre vient de le reconnaître. Plus largement, on mesure combien ce texte, dont on nous avait dit qu’il ne réformerait que des points mineurs, concerne des enjeux majeurs, qui auraient mérité que nous ayons le temps d’en discuter, en concertation avec les acteurs du secteur. Or de nombreuses mesures, susceptibles de remettre en cause de façon significative les équilibres du secteur audiovisuel, nous sont parvenues par voie d’amendements déposés à la dernière minute.

M. le rapporteur. Je veux préciser qu’il s’agit là d’une proposition parlementaire, l’amendement gouvernemental ne visant qu’à garantir que cette disposition ne tombe pas sous le coup de l’irrecevabilité financière posée par l’article 40 de la Constitution. Par ailleurs, monsieur Hetzel, vous avez raison de dire que ce texte est perfectible, et l’examen de nos amendements vous le confirmera.

Mme la ministre. Il convient de saluer dans cet amendement une réussite de la coproduction législative, le gouvernement ayant décidé d’assumer le léger surcoût budgétaire que la proposition du Parlement représente.

Par ailleurs, les sujets évoqués dans le cadre des « Assises de l’audiovisuel » que j’ai lancées au début du mois de juin dernier nourriront un second projet de loi relatif à l’audiovisuel, qui devrait vous être soumis à la fin de l’année, du moins je l’espère. Loin d’être un texte mineur, ce premier projet de loi, en garantissant l’indépendance du secteur, constitue une loi fondamentale, qui servira de socle aux futures améliorations du système de régulation.

La Commission adopte ces amendements à l’unanimité.

Article 1er

Composition du CSA et mode de désignation de ses membres

Le présent article tend à modifier l’article 4 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication afin de réformer le mode de nomination et le nombre des membres du collège du Conseil supérieur de l’audiovisuel.

1. Les dispositions du projet de loi, dans sa rédaction proposée par le gouvernement

Le premier alinéa de l’article 4 précité dispose que « Le Conseil supérieur de l’audiovisuel comprend neuf membres nommés par décret du Président de la République. Trois membres sont désignés par le Président de la République, trois membres sont désignés par le président de l’Assemblée nationale et trois membres par le président du Sénat. »

Le deuxième alinéa précise qu’« Ils ne peuvent être nommés au-delà de l’âge de soixante-cinq ans. »

Le du présent article remplace ces deux alinéas par deux nouveaux alinéas qui font passer les membres du collège du CSA de neuf à sept (troisième alinéa du présent article) et modifient leur mode de nomination (quatrième alinéa du présent article).

Le rapporteur se félicite de la réduction de la taille du collège qui favorisera à la fois une plus grande cohésion et une plus grande efficacité de l’autorité.

Le quatrième alinéa propose de confier aux commissions chargées des affaires culturelles de chaque assemblée un rôle capital dans la désignation des six membres du CSA désignés par les présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat.

Ces commissions devront en effet rendre un avis conforme sur la désignation des trois membres nommés par le président de l’Assemblée nationale et des trois membres nommés par le président du Sénat, dans des conditions de majorité (trois cinquièmes) qui garantissent un consensus très large entre les principales formations politiques qui les composent.

Les avantages de ce nouveau mécanisme sont analysés précisément supra dans l’exposé général du présent rapport.

La procédure d’avis conforme des commissions chargées des affaires culturelles de chaque assemblée parlementaire sur la désignation des membres du CSA par les présidents de ces assemblées est inédite.

Il existe en revanche des exemples de procédures associant les commissions parlementaires à la désignation de personnalités par les présidents des assemblées parlementaires.

L’article 56 de la Constitution prévoit ainsi que les nominations des membres du Conseil constitutionnel effectuées par le président de chaque assemblée sont soumises au seul avis de la commission permanente compétente de l’assemblée concernée.

Par ailleurs, le Conseil constitutionnel a déjà admis que le législateur confie aux commissions permanentes des assemblées un rôle consultatif dans une procédure de nomination. Dans sa décision n° 2008-573 DC du 8 janvier 2009 rendue à propos de la loi relative à la commission prévue à l’article 25 de la Constitution et à l’élection des députés, le Conseil a jugé que n’est pas contraire à la Constitution l’article L. 567-1 du code électoral qui prévoit que les membres de la commission précitée, désignés par le président de chaque assemblée, le soient après avis de la commission permanente chargée des lois électorales de l’assemblée concernée.

Plus récemment, le Conseil constitutionnel a jugé qu’est conforme à la Constitution l’audition par les commissions parlementaires des membres nommés par les présidents des assemblées au Haut conseil des finances publiques (décision n° 2012-658 DC du 13 décembre 2012).

À l’instar de l’hypothèse pouvant se produire en cas de vote négatif des commissions parlementaires empêchant le Président de la République de procéder à une nomination en vertu de l’article 13 de la Constitution, en cas d’absence d’avis conforme de la commission chargée des affaires culturelles d’une assemblée parlementaire, le président de cette assemblée devra renoncer à son choix et proposer une autre personnalité aux fonctions de membre du CSA.

Le deuxième alinéa du 2° du présent article adapte la règle de renouvellement à la nouvelle composition du collège. Il est précisé que le conseil se renouvelle par tiers tous les deux ans, à l’exception de son président. Deux nouveaux membres seront donc nommés tous les deux ans, l’un désigné par le président de l’Assemblée nationale, l’autre par celui du Sénat. L’article 7 prévoyant que les mandats en cours ne seront pas interrompus, les premières nominations selon la procédure instaurée par le présent projet de loi interviendront en janvier 2015.

Le troisième alinéa du 2° constitue la reprise de l’actuel deuxième alinéa de l’article 4 de la loi du 30 septembre 1986, qui dispose que les membres du CSA « ne peuvent être nommés au-delà de l’âge de soixante-cinq ans. »

Le du présent article adapte la règle du quorum pour les délibérations du CSA, règle prévue par le septième alinéa de l’article 4, afin de tenir compte de la réduction du nombre de membres. En application de cet alinéa, le CSA ne peut actuellement délibérer que si six au moins de ses neuf membres sont présents. Dans sa nouvelle composition, il est proposé que le CSA ne puisse délibérer que si quatre au moins de ses sept membres sont présents.

2. Les modifications apportées par la Commission

Outre plusieurs amendements rédactionnels, la Commission a adopté un amendement précisant que les membres du CSA désignés par le président de l’Assemblée nationale et le président du Sénat après avis conforme à la majorité des trois cinquièmes des commissions chargées des affaires culturelles le sont « en raison de leurs compétences en matière économique, juridique ou technique ou de leur expérience professionnelle dans le domaine de la communication ».

Depuis dix ans, le secteur audiovisuel a connu de profonds bouleversements avec l’arrivée de la TNT, la multiplication du nombre d’opérateurs, l’émergence des acteurs d'internet et désormais, de la télévision connectée.

Si la régulation du CSA a très longtemps été essentiellement celle des contenus, son champ d’action s’est désormais élargi à des questions beaucoup plus techniques, juridiques et économiques.

Dès lors, à l’instar de ce qui est prévu pour les membres de l’ARCEP, la Commission a souhaité que les membres du CSA soient nommés en raison de leur qualification économique, juridique et technique ou de leur expérience professionnelle dans le secteur de la communication.

Cette disposition, en orientant le choix des présidents des deux assemblées, renforce le caractère non partisan du mode de désignation des membres du CSA proposé par le projet de loi et l’objectif de faire émerger des personnalités incontestables.

*

La Commission examine l’amendement AC 69 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement vise à ce que le CSA soit composé de personnalités à la qualification et à l’expérience reconnues sur le plan économique, juridique ou technique, sur le modèle de ce qui prévaut pour l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP). Outre qu’elle garantira une plus grande diversité dans la composition du Conseil, cette disposition vise à encadrer le choix des présidents des assemblées parlementaires lors de l’exercice de leur pouvoir de nomination.

Mme la ministre. Favorable.

M. Thierry Braillard. Je suis favorable à cette proposition, sous réserve que le terme de « compétence » soit substitué à celui de « qualification ».

M. Franck Riester. Nous sommes plutôt favorables à cette proposition qui, comme notre amendement AC 35, va dans le sens d’un accroissement de la représentativité du CSA.

M. Patrick Hetzel. Le terme de compétence est en effet plus élégant que celui de qualification, à condition que l’on parle d’une « compétence en matière » économique, juridique ou technique.

M. le président Patrick Bloche. Je synthétise la modification proposée qui consiste donc à remplacer, dans l’amendement, les mots : « qualification économique » par les mots : « compétence en matière économique ».

M. le rapporteur. J’approuve tout à fait cette modification.

Mme la ministre. J’y suis également favorable.

La Commission adopte à l’unanimité l’amendement ainsi rectifié.

Elle adopte ensuite l’amendement de précision AC 91 du rapporteur.

La Commission examine l’amendement AC 10 de M. Lionel Tardy.

M. Lionel Tardy. La substitution d’un mécanisme d’approbation parlementaire des nominations à la majorité des trois cinquièmes à un dispositif de veto aux trois cinquièmes, s’il est conforme à une des promesses de campagne du candidat Hollande, constitue néanmoins un recul démocratique. En effet, le droit de veto permet un contrôle parlementaire des nominations : si l’exécutif reste maître des nominations, il ne peut cependant pas faire n’importe quoi et doit écouter sa majorité. C’est notamment grâce à ce système que M. Jack Lang n’a pu être nommé nulle part entre 2007 et 2012. Au contrôle, ce texte propose de substituer un mécanisme de codécision, en particulier avec l’opposition, enlevant ainsi au pouvoir exécutif la maîtrise de ces nominations. Une atteinte aussi caractérisée à un des équilibres de la Ve République mériterait un débat approfondi, qui n’a pas été engagé. Aucune étude d’impact n’évalue les conséquences de cette proposition, qui risque de favoriser le retour de l’opacité et des arrangements entre copains en matière de nomination : l’opposition aurait droit à un certain nombre de postes en échange de son silence sur les autres nominations, à rebours de l’exigence de transparence et de moralisation de la vie publique affichée par ce gouvernement. Je rappelle que l’opposition est là non pas pour cogérer, mais pour contrôler la politique du gouvernement.

M. le rapporteur. Il est quand même surprenant de voir comme un recul démocratique l’obligation faite aux commissions parlementaires d’approuver les choix des présidents des assemblées parlementaires pour la nomination des membres du CSA. À nos yeux, l’avis des commissions doit impliquer l’ensemble de leurs membres, car nous ne confondons pas, pour notre part, majorité et unanimité. Une telle disposition est une avancée démocratique, beaucoup plus satisfaisante qu’un droit de veto des assemblées parlementaires, la majorité des trois cinquièmes requise pour son exercice n’étant par construction jamais réunie.

Mme la ministre. Je suis moi aussi surprise par vos arguments, monsieur Tardy. Je vous suis sur un point : il s’agit effectivement d’une nouveauté, mais cette innovation constitue une avancée significative en matière d’indépendance du secteur audiovisuel puisqu’elle associe l’opposition à la désignation des membres du CSA. Certes, cette avancée dépendra du sens de la responsabilité de la majorité et de l’opposition, mais faire confiance dans la capacité des parlementaires d’assumer leurs responsabilités est précisément un signe de maturité démocratique. Ce mode de désignation des membres du CSA, ajouté aux critères de compétences introduits dans le texte à l’initiative du rapporteur, confortera la légitimité et l’assise du Conseil.

M. Rudy Salles. Le groupe UDI, très attaché à un mode de nomination des membres du CSA transparent et démocratique, considère que l’obligation d’un avis conforme des commissions compétentes de l’Assemblée et du Sénat constitue un progrès incontestable de ce point de vue. Cela étant, nous regrettons que les membres du CSA restent nommés par les autorités politiques. On en voit le résultat : M. Olivier Schrameck doit sa nomination à la tête du CSA par le Président de la République à son profil très politique plutôt qu’à une quelconque compétence en matière d’audiovisuel. Nous regrettons en outre que le CSA ne soit pas ouvert aux professionnels de l’audiovisuel, comme ont pu l’être certaines des autorités de régulation qui l’ont précédé. C’est ce que nous vous proposerons et nous ne voterons ce texte que si cette proposition est adoptée.

M. Franck Riester. Il faut distinguer entre la nomination des présidents des sociétés de l’audiovisuel public et celle des membres du CSA. S’agissant des premiers, le texte dessaisit le Parlement de son droit de veto. Quant au CSA, dont le président sera nommé par le Président de la République et les autres membres par les assemblées parlementaires, il est incontestable qu’il présentera une dimension politique bien plus marquée et que le risque d’arrangement entre majorité et opposition sera accru. Nous préférons cependant courir ce risque plutôt que de réserver à la majorité la désignation des six membres du Conseil. C’est la raison pour laquelle nous sommes défavorables à votre amendement, monsieur Tardy.

M. Lionel Tardy. Quant à moi, je préfère un droit de veto à une faculté de codécision et aux risques qui s’y attachent.

M. le président Patrick Bloche. Je me permets de rappeler que le président et les autres membres du CSA resteront désignés respectivement par le Président de la République et les assemblées parlementaires : sur ce plan la loi ne changera pas. Cependant, la réforme du mode de désignation permettra d’éviter, comme cela s’est produit – la précédente majorité, au pouvoir pendant dix ans, ayant été amenée à nommer les neuf membres du CSA –, qu’on puisse reprocher à l’autorité de régulation son caractère monocolore.

M. le rapporteur. Je vous signale, monsieur Salles, que l’amendement AC 69, que nous avons adopté précédemment, vise à garantir que le choix des présidents des assemblées parlementaires obéira à des critères de compétence.

Par ailleurs, monsieur Tardy, il y a bien une suppression du droit de veto des commissions des affaires culturelles du Parlement en ce qui concerne la nomination des présidents de l’audiovisuel public, conséquence directe de la suppression de leur nomination par le Président de la République : c’est précisément l’objectif du texte.

M. Franck Riester. C’est bien ce que nous dénonçons.

M. le rapporteur. A contrario, le projet accroît le pouvoir du Parlement dans la nomination des membres du CSA. Vous conviendrez qu’il y a une profonde différence entre le mode de désignation actuel des membres du CSA et celui qui nous est proposé ici, où le Parlement joue pleinement son rôle.

Mme la ministre. Le critère de compétence est satisfait par l’amendement AC 69 rectifié du rapporteur qui vient d’être adopté, monsieur Salles. Les présidents des assemblées et les commissions en charge des affaires culturelles veilleront d’ailleurs au respect de ce critère – comme de la diversité que vous appelez de vos vœux – dans leurs choix et dans leurs votes.

Vous savez comme moi que réunir une majorité des trois cinquièmes sur un veto est impossible, monsieur Tardy. Au lieu de ce pouvoir impossible à exercer, le projet de loi donne aux parlementaires le pouvoir – qui pourra être réellement exercé – de donner un avis conforme – toujours à la majorité des trois cinquièmes – à la désignation des membres du CSA. Il s’agit donc non pas de lâcher la proie pour l’ombre, mais en quelque sorte de lâcher l’ombre pour la proie.

M. Rudy Salles. Je me réjouis qu’un critère de compétence ait été introduit pour le choix des membres du CSA, mais il aurait fallu aller plus loin. Les nominations restent en effet aux mains des autorités politiques. On aurait pu – comme nous le proposions – en confier le soin à d’autres instances – sociétés d’auteurs, Institut de France, journalistes – afin d’ouvrir davantage le système.

La Commission rejette l’amendement AC 10.

Elle examine l’amendement AC 26 de M. Rudy Salles.

M. Rudy Salles. Cet amendement vise à répondre aux situations de blocage qui pourraient naître d’un avis non conforme des commissions en charge des affaires culturelles. Celles-ci proposeraient alors conjointement, à la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés, une nouvelle liste de membres, soumise au vote définitif des assemblées qui se prononceraient à la majorité simple.

M. le rapporteur. Je crains que ce dispositif ne soit très compliqué à mettre en œuvre. Celui proposé par le projet de loi est simple : le président de l’Assemblée nationale ou du Sénat proposera aux commissions permanentes un nom, sur lequel les membres de celles-ci se prononceront à une majorité des trois cinquièmes. Bref, on sait qui fait la proposition et qui vote.

Le dispositif que vous proposez suppose d’abord que les commissions se mettent d’accord sur une liste de trois noms, ce qui sera inévitablement compliqué, puis que le choix soit ratifié par un vote définitif des assemblées. L’Espagne a instauré un dispositif de ce type, mais elle envisage de le modifier en raison de l’incapacité à procéder à une nomination depuis plusieurs mois.

La procédure prévue par le projet de loi me paraît à la fois plus lisible, plus simple et opérationnelle : en cas de blocage, le président de l’Assemblée nationale ou du Sénat fera une nouvelle proposition, et il est probable que celle-ci sera acceptée. L’esprit de ce texte est de faire confiance aux parlementaires. Je ne puis donc que vous inviter, monsieur Salles, à retirer votre amendement.

Mme la ministre. Avis défavorable, pour les mêmes raisons. En outre, l’amendement revient à tabler sur une situation d’échec, alors que le projet de loi repose justement sur la confiance dans la maturité du processus décisionnel à l’intérieur des commissions chargées des affaires culturelles.

M. Rudy Salles. Il s’agit non pas de se mettre en situation d’échec, mais d’envisager toutes les éventualités. Il n’y a malheureusement aucune raison pour que le cas ne se produise jamais. Néanmoins, je suis sensible aux arguments du rapporteur. Je retire donc l’amendement.

L’amendement AC 26 est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement AC 35 de M. Franck Riester.

M. Franck Riester. Dans le même esprit que celui qui a été adopté tout à l’heure, cet amendement vise à affirmer notre préoccupation que la composition du CSA tienne compte de la diversité des acteurs du paysage audiovisuel français. Je constate que les journalistes sont assez nombreux au sein du CSA. Il serait souhaitable d’assurer davantage de diversité dans les nominations.

M. le rapporteur. Je vous rejoins sur le constat et sur la nécessité d’assurer une plus grande diversité dans les nominations au CSA. J’observe toutefois que l’amendement AC 69 rectifié que nous avons adopté tout à l’heure va au-delà de votre préoccupation, puisqu’il vise à la fois la « compétence en matière économique, juridique ou technique » des personnalités et leur « expérience professionnelle dans le domaine de la communication ». N’oublions pas non plus que les commissions en charge des affaires culturelles votent, et que leurs membres auront à cœur d’assurer cette diversité dans les nominations. Je considère donc que l’amendement est satisfait.

Mme la ministre. Le Parlement doit éviter de se contraindre à l’excès dans ses choix à venir : il faut qu’il se laisse une marge d’appréciation. Je ne doute pas qu’il saura assurer cette diversité – qui est une nécessité – dans les nominations.

M. Franck Riester. La compétence et la diversité sont deux choses différentes. Vous êtes favorables à la diversité ; cela devrait vous conduire à soutenir cet amendement, d’autant que nous avons voté celui du rapporteur sur les compétences des personnalités nommées. Il s’agit non pas de nous contraindre nous-mêmes, mais de veiller à ce que cette diversité s’exprime. Votre soutien à cet amendement serait un signe fort à cet égard.

M. le rapporteur. L’amendement que nous avons adopté tout à l’heure vise « l’expérience professionnelle dans le domaine de la communication ».

M. Franck Riester. Soit. Mais encore une fois, compétence et diversité sont deux choses différentes.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement AC 42 de Mme Isabelle Attard.

Mme Isabelle Attard. Il manque une voix importante au CSA : celle des téléspectateurs. Par cet amendement, nous suggérons donc qu’un représentant des spectateurs et un représentant de la société civile figurent parmi les membres du Conseil. En 2004, M. François Hollande et M. Jean-Marc Ayrault avaient signé la pétition intitulée « Un citoyen au CSA ». Différents collectifs agissent aujourd’hui en ce sens. Faut-il rappeler que ce sont souvent eux qui révèlent de graves défauts dans le traitement de l’information, comme par exemple la diffusion par TF1 d’un faux reportage sur la délinquance urbaine ?

M. le rapporteur. Je ne suis guère favorable à cet amendement. La société civile ne se limite pas aux associations : nous en faisons tous partie. Je ne doute d’ailleurs pas que les sept personnalités qui seront nommées au CSA seront toutes des citoyens. Votre proposition soulève également une question pratique : comment désigner un représentant des téléspectateurs autrement qu’en mandatant une association ? Il me semble enfin qu’il faut éviter d’assigner un rôle de représentation défini à chaque membre du CSA. Le choix des commissions doit au contraire être le plus éclairé et le plus large possible.

Mme la ministre. Je comprends le souci de Mme Isabelle Attard, mais rien n’empêche qu’une personnalité issue par exemple d’une association représentant les téléspectateurs figure parmi les candidats dont la nomination sera proposée au vote des commissions permanentes. Par ailleurs, il ne faut pas trop contraindre a priori le choix des parlementaires. Enfin, il me semble qu’un représentant « ès qualités » des téléspectateurs a davantage sa place dans les instances représentatives des différentes entités qu’au CSA. Il existe un comité des téléspectateurs à France Télévisions, et il est envisagé d’associer ceux-ci au conseil d’administration. Si un représentant des téléspectateurs entrait au CSA, il perdrait du reste toute légitimité comme tel du seul fait de sa nomination.

Mme Isabelle Attard. Le rôle du CSA est de réfléchir aux programmes qui sont proposés aux téléspectateurs. Il est tout de même problématique que ces derniers ne soient pas associés formellement aux choix qui sont faits et aux décisions qui sont prises en la matière. Après tout, c’est pour eux que le CSA a été créé. Certes, rien n’empêche un représentant des téléspectateurs de figurer parmi ses membres, mais cela peut aussi bien ne pas être le cas. Je conçois que la position du Président de la République ait pu évoluer depuis 2004, mais je tiens à rappeler qu’il avait soutenu cette pétition sans ambiguïté. Je maintiens donc l’amendement.

M. Rudy Salles. Cet amendement est inspiré par les mêmes considérations que celui qui m’a conduit à défendre l’ouverture du CSA tout à l’heure. C’est donc un amendement de bon sens. Il se peut qu’il y ait des représentants des téléspectateurs parmi les membres du Conseil, mais il se peut tout aussi bien qu’il n’y en ait pas. Je regrette donc que l’on « ferme » à ce point le CSA. C’est la raison pour laquelle le groupe UDI soutiendra cet amendement.

M. le rapporteur. Le texte ne « ferme » pas le CSA. Nous espérons que les personnalités nommées seront des personnalités ayant quelque intérêt à suivre ces questions. Et je précise à Mme Isabelle Attard que le CSA ne propose pas de programmes ; il assure une régulation.

Je maintiens par ailleurs qu’il n’est pas souhaitable d’assigner un rôle de représentation défini à chaque membre du CSA. Non seulement cela entame le pouvoir de désignation des présidents des assemblées, mais le processus n’est plus maîtrisable. Pour ma part, je fais confiance aux parlementaires pour choisir des personnalités diverses, à la fois dans l’approche professionnelle et dans les champs couverts.

Mme Isabelle Attard. Je conviens qu’il ne faut pas ouvrir le CSA à un nombre excessif de membres. Je propose de l’ouvrir non pas à tels métiers ou représentations, mais simplement aux principaux intéressés. Quant au choix d’un représentant des téléspectateurs, il n’est pas si complexe. Des propositions avaient d’ailleurs été faites au Président de la République. Je ne crois pas que l’on puisse se contenter d’espérer qu’il y ait des personnes qui s’intéressent à ces questions, monsieur le rapporteur : cela va toujours mieux en l’écrivant.

M. Christian Kert. Toutes les chaînes de télévision ont voulu avoir leurs représentants des téléspectateurs. Mais définir le téléspectateur moyen est à peu près aussi difficile que dresser le portrait du Français moyen, qui mesure 1,72 mètre et chausse du 39, mais dont le costume ne va à personne. Mieux vaut admettre que chaque membre du CSA est un citoyen en lui-même.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AC 80 du rapporteur.

L’amendement AC 25 de M. Rudy Salles est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement AC 24 de M. Rudy Salles.

M. Rudy Salles. Cet amendement prévoit que « le mandat d’un membre prend fin d’office lorsqu’il atteint l’âge légal de la retraite. »

M. le rapporteur. L’exposé sommaire de l’amendement est un peu curieux : vous présentez cette disposition comme une exigence liée notamment à la capacité des personnes désignées « à maîtriser les enjeux » d’un secteur en pleine mutation. Cela sous-entend qu’au-delà de soixante ou soixante-deux ans, on n’a plus cette capacité. Avis défavorable.

Mme la ministre. Même avis défavorable. Le texte prévoit que l’on ne pourra pas nommer de personnes de plus de soixante-cinq ans. Votre préoccupation me semble donc satisfaite, monsieur Salles.

M. Rudy Salles. Je maintiens l’amendement. J’ai pris soin de parler de l’âge légal de la retraite, dans la mesure où tout cela peut changer…

La Commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, elle rejette ensuite l’amendement AC 23 de M. Rudy Salles.

La Commission en vient à l’amendement AC 22 de M. Rudy Salles.

M. Rudy Salles. Cet amendement devrait être approuvé par une majorité d’entre nous puisqu’il tend à préciser, à l’instar de la plupart des textes de loi désormais, que « la composition du Conseil vise à la parité » – la formulation se justifiant par le nombre impair de ses membres –, « dans les conditions fixées par un décret ».

M. le rapporteur. Le CSA est l’une des rares institutions où les femmes sont actuellement plus nombreuses que les hommes. De ce point de vue, l’amendement est satisfait. En outre, un texte global sur la parité dans les institutions de la République devrait nous être présenté d’ici à la fin de l’année. Mme la ministre nous en dira davantage.

Je vous suggère donc de retirer votre amendement, mon cher collègue.

Mme la ministre. L’amendement est en effet doublement satisfait : dans les faits et dans la loi en préparation. D’une part, le CSA est la seule autorité administrative plus que paritaire, si l’on peut dire, puisque cinq de ses neuf membres sont des femmes, ce dont nous nous réjouissons. D’autre part, un projet de loi présenté le 3 juillet en Conseil des ministres par Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre des droits des femmes, dispose dans son article 23 que toutes les autorités administratives indépendantes devront, dans un délai de douze mois à compter de la publication de la loi, favoriser l’égal accès des femmes et des hommes aux postes de responsabilité. Il autorise le gouvernement à prendre par voie d’ordonnance les mesures relevant de la loi qui seraient nécessaires pour atteindre cet objectif. Cette disposition s’appliquera à de nombreuses instances qui ont chacune leurs propres règles, dont le CSA.

M. le président Patrick Bloche. Notre Commission se saisira pour avis de ce projet de loi.

M. Thierry Braillard. Je suis tout à fait d’accord avec Mme la ministre : c’est par le futur projet de loi que l’on parviendra à la parité. L’amendement est techniquement inenvisageable : il supposerait, puisque les six membres désignés par les présidents des assemblées parlementaires sont renouvelés par tiers, que le président de l’Assemblée nationale et celui du Sénat se concertent à chaque nouvelle désignation pour nommer qui un homme, qui une femme, en fonction de la composition du Conseil.

Mme Isabelle Attard. Pour ma part, j’approuve entièrement l’amendement. S’il y avait aujourd’hui beaucoup plus de femmes que d’hommes au CSA, je jugerais cela anormal : se battre pour la parité, c’est vouloir l’égalité, non la sur-représentation des femmes au sein d’une institution. C’est essentiel au pluralisme de vues au sein du Conseil. Aujourd’hui, la composition du Conseil est satisfaisante de ce point de vue, mais qu’en sera-t-il demain ?

En outre, je ne vois pas ce que l’amendement a de si complexe. La formule « vise à la parité » est tout à fait satisfaisante.

M. Benoist Apparu. Si j’ai bien compris, madame la ministre, l’article 23 du futur texte de loi requiert des autorités administratives qu’elles favorisent la parité – dans les nominations qui dépendent d’elles, j’imagine. Mais comment peut-on demander à une autorité qui ne se nomme pas elle-même de favoriser la parité ? N’est-ce pas au gouvernement de veiller à la parité dans les nominations ?

M. Rudy Salles. Madame la ministre, la parité, dites-vous, irait de soi puisque le CSA compte aujourd’hui cinq femmes et quatre hommes. J’estime que cela va mieux en le disant.

Quant au futur projet de loi, il en est bien d’autres que nous avons votés dernièrement, alors qu’il en était déjà question, et où le principe de parité est inscrit. Pourquoi ne pas faire de même dans celui dont nous discutons ? D’ailleurs, si mon amendement était irréalisable, pourquoi aurait-on ainsi inscrit la même exigence de parité dans ces autres textes ?

Je maintiens mon amendement.

Mme la ministre. Je confirme que le projet de loi présenté par Mme Najat Vallaud-Belkacem autorisera le gouvernement à prendre par ordonnance les mesures nécessaires pour favoriser l’égal accès des femmes et des hommes aux autorités administratives indépendantes. C’est aux autorités chargées des nominations que s’imposeront les dispositions destinées à permettre la parité.

M. Franck Riester. Mais ce ne sont pas les autorités administratives indépendantes qui procéderont aux nominations.

Mme la ministre. Il s’agira des autorités qui exercent le pouvoir de nomination.

M. Franck Riester. Ce sont le Parlement et le Président de la République qui nomment les membres du CSA. Veut-on que la composition du CSA soit paritaire ? Telle est la question. Cela n’a rien à voir avec les autorités administratives indépendantes.

J’approuve cet amendement propice à la parité, que nous devrions tous appeler de nos vœux. De ce point de vue, les avis de la ministre et du rapporteur sont surprenants. Aujourd’hui, la composition du CSA est paritaire ; mais qu’en sera-t-il demain ?

Mme la ministre. Sur le principe, je suis évidemment très favorable à la parité ; simplement, l’amendement est aujourd’hui satisfait, et il le restera puisque toutes les instances qui procéderont aux nominations des membres de ces autorités devront veiller à la parité.

M. Franck Riester. Y compris le Parlement ?

M. Rudy Salles. Le CSA sera non plus une autorité administrative indépendante, mais une autorité publique indépendante. Ne mélangeons pas tout. La disposition que je propose devrait être inscrite dans la loi afin de garantir la parité.

M. le rapporteur. Monsieur Riester, les désignations auxquelles procèdera le Parlement seront naturellement soumises à l’exigence de parité. Le cas échéant, un mécanisme permettra donc de veiller à la nomination soit d’une femme, soit d’un homme par le président du Sénat ou par celui de l’Assemblée. Il s’agit bien là d’une contrainte, qui donnera corps à l’amendement de M. Rudy Salles.

La Commission rejette l’amendement AC 22.

Puis elle adopte l’article 1er modifié.

Article 2

Modification des règles de majorité lors des délibérations du CSA relatives à des manquements aux règles d’incompatibilités ou de conflit d’intérêt

Le présent article modifie l’article 5 de la loi du 30 septembre 1986, relatif aux règles d’incompatibilité et de déontologie applicables aux membres du Conseil supérieur de l’audiovisuel.

1. Les dispositions du projet de loi, dans sa rédaction proposée par le gouvernement

L’article 5 de la loi du 30 septembre 1986

« Les fonctions de membre du Conseil supérieur de l’audiovisuel sont incompatibles avec tout mandat électif, tout emploi public et toute autre activité professionnelle.

Sous réserve des dispositions de la loi n° 57-298 du 11 mars 1957 sur la propriété littéraire et artistique, les membres du conseil ne peuvent, directement ou indirectement, exercer de fonctions, recevoir d’honoraires, sauf pour des services rendus avant leur entrée en fonctions, ni détenir d’intérêts dans une entreprise de l’audiovisuel, du cinéma, de l’édition, de la presse, de la publicité ou des télécommunications. Toutefois, si un membre du conseil détient des intérêts dans une telle entreprise, il dispose d’un délai de trois mois pour se mettre en conformité avec la loi.

Le non-respect des dispositions de l’alinéa précédent est passible des peines prévues à l’article 432-12 du code pénal.

Le membre du conseil qui a exercé une activité, accepté un emploi ou un mandat électif incompatible avec sa qualité de membre ou manqué aux obligations définies au deuxième alinéa du présent article est déclaré démissionnaire d’office par le conseil statuant à la majorité des deux tiers de ses membres.

Pendant la durée de leurs fonctions et durant un an à compter de la cessation de leurs fonctions, les membres du conseil sont tenus de s’abstenir de toute prise de position publique sur les questions dont le conseil a ou a eu à connaître ou qui sont susceptibles de lui être soumises dans l’exercice de sa mission.

Après la cessation de leurs fonctions, les membres du Conseil supérieur de l’audiovisuel sont soumis aux dispositions de l’article 432-13 du code pénal et, en outre, pendant le délai d’un an, sous les peines prévues au même article, aux obligations résultant du deuxième alinéa du présent article.

Le président et les membres du Conseil supérieur de l’audiovisuel reçoivent respectivement un traitement égal à celui afférent aux deux catégories supérieures des emplois de l’État classés hors échelle. À l’expiration de leur mandat, les membres du Conseil supérieur de l’audiovisuel continuent de percevoir leur traitement pendant une durée maximum d’un an. Toutefois, si les intéressés reprennent une activité rémunérée, perçoivent une retraite ou, pour les fonctionnaires ou les magistrats, sont réintégrés, le versement de ce traitement cesse. Il cesse également sur décision du conseil statuant à la majorité des deux tiers de ses membres après que les intéressés ont été mis à même de présenter leurs observations, si ceux-ci manquent aux obligations prévues au deuxième alinéa.

Lorsqu’il est occupé par un fonctionnaire, l’emploi permanent de membre du Conseil supérieur de l’audiovisuel est un emploi conduisant à pension au titre du code des pensions civiles et militaires de retraite. »

Le du présent article correspond à une simple mise à jour d’un renvoi à un texte législatif. La référence à la loi n° 57-298 du 11 mars 1957, au deuxième alinéa de l’article, est remplacée par une référence au code de la propriété intellectuelle aujourd’hui en vigueur.

La réduction du nombre de membres du CSA de neuf à sept impose également de modifier l’article 5 de la loi du 30 septembre 1986, pour adapter les règles de majorité dans deux hypothèses dans lesquelles le collège était appelé à voter à la majorité des deux tiers, c’est-à-dire six membres sur neuf :

– pour prononcer la démission d’office d’un membre qui aurait manqué à ses obligations en matière d’incompatibilités (2° du présent article modifiant le quatrième alinéa de l’article 5) ;

– pour faire cesser la rémunération d’un ancien membre qui viendrait à détenir des intérêts dans une entreprise du secteur de la communication (3° du présent article modifiant le septième alinéa de l’article 5).

Ces décisions feront désormais l’objet d’un vote à la majorité simple, soit quatre membres sur sept, ce qui est un peu moins strict que la majorité des deux tiers actuellement en vigueur. L’alternative aurait été une majorité de cinq sur sept, plus stricte que le système actuel et difficile à mettre en œuvre.

L’article 7 du présent projet de loi prévoit que ces nouvelles règles de majorité entreront en vigueur à l’échéance du mandat du membre nommé par le Président de la République en 2011, soit en 2017. De 2015 à 2017, la majorité des deux tiers (d’abord six membres sur neuf de 2013 à 2015, puis six membres sur huit de 2015 à 2017) continuera donc de s’imposer.

2. Les modifications apportées par la Commission

 Le renforcement des règles d’incompatibilités

La Commission a adopté un amendement visant à compléter le premier alinéa de l’article 5 de la loi de 1986 (1° A nouveau du présent article) afin d’introduire une nouvelle règle d’incompatibilité entre les fonctions de membre du CSA et « le maintien d’un contrat de travail avec une entreprise de l’audiovisuel, du cinéma, de l’édition, de la presse, de la publicité ou des télécommunications. »

Le maintien d’un contrat de travail entre un membre du CSA et une entreprise du secteur n’est pas suffisamment explicitement prohibé par l’article 5 de la loi de 1986, dont le deuxième alinéa prévoit néanmoins qu’un membre du CSA ne peut, directement ou indirectement, détenir d’intérêts dans une entreprise de ces secteurs.

Ainsi a-t-on pu constater que certains membres avaient obtenu la simple suspension de leur contrat de travail avec une entreprise du secteur régulé dont ils étaient issus.

Le maintien d’un contrat de travail, et partant d’un lien de subordination, avec une entreprise du secteur régulé doit être strictement interdit car il fait peser un doute sur l’indépendance des membres concernés et peut les conduire à prendre en considération leur futur retour dans l’entreprise à l’occasion de prises de position au sein du collège.

Dès lors qu’ils demanderont à être réintégrés à l’issue de la période de carence obligatoire qui va suivre leur mandat, l’autonomie de leurs votes peut être regardée comme entachée de risque de partialité du fait du maintien de ce lien comme de leur intérêt à être réintégrés dans cette entreprise dans de bonnes conditions.

Il est important que la loi précise cette incompatibilité. En effet, une entreprise du secteur, liée par un contrat de travail avec une personne désignée membre du collège de l’autorité de régulation, ne saurait, sans que la loi l’y oblige, être incitée à mettre fin à ce contrat : le maintien de ce lien est susceptible de lui être favorable, la rupture du contrat à son initiative est susceptible d’avoir l’effet inverse…

Alors que le texte proposé par le gouvernement prévoyait qu’un membre en situation d’incompatibilité puisse être déclaré démissionnaire d’office, la Commission a également adopté un amendement précisant qu’un membre en situation d’incompatibilité « est » déclaré démissionnaire d’office par le collège.

 Le renforcement du devoir de réserve

Actuellement, le cinquième alinéa de l’article 5 de la loi du 30 septembre 1986 pose une interdiction très générale de prise de position publique des membres du Conseil « sur les questions dont le conseil a ou a eu à connaître ou qui sont susceptibles de lui être soumises. » Cette obligation se prolonge durant un an à compter de la cessation de leurs fonctions.

Cette disposition, par sa généralité, n’est ni réaliste ni respectée. Or les membres du CSA doivent pouvoir s’exprimer sur les activités du Conseil, sur la stratégie de ce dernier et expliquer les décisions adoptées sans pour autant intervenir publiquement sur des questions en cours d’examen ni trahir le secret des délibérations.

Afin de rendre cette interdiction plus effective, la Commission a adopté un amendement tendant à resserrer son champ en précisant que l’absence de prise de position publique porte seulement sur les questions en cours d’examen et à renforcer le cadre actuel en mentionnant expressément que les membres sont tenus au secret des délibérations.

Concernant les anciens membres, la Commission a adopté un amendement qui maintient durant un an à compter de la cessation de leurs fonctions l’interdiction de prise de position publique mais en la limitant également aux questions qui se trouveraient encore en cours d’examen. Par ailleurs, l’amendement renforce là aussi le texte actuel en faisant en sorte que les anciens membres demeurent, de manière permanente, assujettis au secret des délibérations.

Pour rendre plus effectif le devoir de réserve et de protection du secret des délibérations qui s’impose aux membres du CSA en application du cinquième alinéa de l’article 5 de la loi du 30 septembre 1986, la Commission a adopté un amendement visant à introduire la possibilité d’une sanction du manquement à ces dispositions. Un membre qui aurait manqué à ses obligations pourrait ainsi être déclaré démissionnaire d’office par le collège statuant à la majorité de ses membres. 

Les anciens membres du CSA sont également tenus à un devoir de réserve et au secret des délibérations. La Commission a adopté un amendement prévoyant la possibilité, pour le collège du CSA, de sanctionner les éventuels manquements à ces obligations en prononçant la cessation, partielle ou totale, du versement du traitement perçu par les membres après l’expiration de leur mandat.

*

La Commission est saisie de l’amendement AC 71 du rapporteur.

M. le rapporteur. Il s’agit de compléter le premier alinéa de l’article 5 de la loi de 1986 pour interdire le maintien d’un contrat de travail entre un membre du CSA et une entreprise de l’audiovisuel, du cinéma, de l’édition, de la presse, de la publicité ou des télécommunications », ce qui n’est pas assez explicitement prohibé par cet article 5. Ainsi a-t-on pu constater que certains membres avaient obtenu la suspension de leur contrat de travail avec l’entreprise dont ils étaient issus.

Le maintien d’un contrat de travail, et partant d’un lien de subordination, avec une entreprise du secteur régulé doit être strictement interdit, car il jette un doute sur l’indépendance des membres concernés et peut les conduire à tenir compte de leur éventuel retour dans l’entreprise à l’occasion de prises de position au sein du collège. Dès lors qu’ils demanderont à être réintégrés à l’issue de la période de carence obligatoire qui va suivre leur mandat, l’autonomie de leurs votes peut être mise en question et ils peuvent être soupçonnés de partialité du fait du maintien de ce lien comme de leur intérêt à être réintégrés dans cette entreprise dans de bonnes conditions.

Mme la ministre. Le gouvernement est favorable à cet amendement qui précise le régime des incompatibilités et souligne la nécessité de garantir mieux encore l’impartialité des membres du CSA.

M. Christian Kert. Plus grave qu’un doute, c’est un soupçon que l’existence d’un contrat de travail peut jeter sur l’indépendance des membres. Cet amendement est conforme à la sagesse et à la raison.

La Commission adopte l’amendement à l’unanimité.

Elle en vient ensuite à l’amendement AC 74 du rapporteur.

M. le rapporteur. Il s’agit de préciser que le non-respect par un membre du conseil supérieur de l’audiovisuel des règles d’incompatibilité emporte de plein droit la cessation de ses fonctions.

De deux choses l’une : soit la personne concernée rompt le contrat de travail qui la lie à l’entreprise, soit, conformément à la loi, sa situation devrait entraîner la cessation de ses fonctions. En effet, l’article 5 de la loi du 30 septembre 1986 impose aux membres du CSA des règles d’incompatibilité, précisant que « les fonctions de membre du Conseil supérieur de l’audiovisuel sont incompatibles avec tout mandat électif, tout emploi public et toute autre activité professionnelle ».

Cependant, l’effectivité de ces incompatibilités n’est pas garantie par la loi. En effet, alors que la constatation d’une incompatibilité devrait entraîner de plein droit la cessation de fonctions du membre concerné, le quatrième alinéa de l’article 5 prévoit que le membre du Conseil qui a exercé une activité, accepté un emploi ou un mandat électif incompatible avec sa qualité de membre peut être déclaré démissionnaire d’office par le Conseil statuant à la majorité des deux tiers de ses membres. En outre, à ma connaissance, cette disposition n’a jamais été appliquée.

Mme la ministre. Sur ce point, le texte me paraît déjà clair, a fortiori après l’adoption de l’amendement précédent. Le collège doit constater les incompatibilités et en tirer les conséquences. L’amendement est donc satisfait. Je vous suggère par conséquent de le retirer, monsieur le rapporteur.

M. Franck Riester. Dans la mesure où un membre peut être déclaré démissionnaire d’office, il faut lui laisser le temps de se mettre en conformité avec les règles d’incompatibilité. De ce point de vue, l’automaticité ne risque-t-elle pas de porter préjudice à des membres qui auraient précédemment exercé des fonctions dans l’audiovisuel ?

M. le rapporteur. Une personne nommée au CSA et qui tombe sous le coup d’une incompatibilité doit la faire cesser avant d’y entrer. Rien n’empêche celui ou celle qui serait dans cette situation au moment où la présente loi entrera en vigueur de se mettre en conformité avec elle juste avant. Je ne vise personne en particulier, je ne demande aucune tête ; je souhaite simplement que les règles d’incompatibilité s’appliquent normalement et qu’une personne qui serait concernée puisse faire le nécessaire pour s’y conformer. À elle d’assumer ses responsabilités. D’ailleurs, puisque, selon la ministre, l’article 5 de la loi de 1986 suffit à y pourvoir, cette situation ne devrait même pas exister ! En somme, aucun membre du CSA ne devrait avoir le moindre lien avec une quelconque entreprise du secteur audiovisuel, car cela alimente la suspicion, leur contrat fût-il suspendu.

Cela dit, si vous pensez, madame la ministre, que la force de vos propos et des miens suffira à l’éviter, alors je retire mon amendement.

Mme la ministre. Je le pense en effet. Merci, monsieur le rapporteur.

L’amendement AC 74 est retiré.

La Commission en vient à l’amendement AC 3 de Mme Colette Langlade.

Mme Martine Faure. Pour renforcer l’indépendance du CSA et éviter tout conflit d’intérêts à ses membres, il convient de ne pas autoriser la détention de certaines SICAV ou certains FCP. Nous proposons donc de préciser que « les membres du Conseil ne peuvent détenir de parts dans une société d’investissement à capital variable ou un fonds commun de placement dès lors que ceux-ci entretiennent une relation directe ou indirecte avec les secteurs économiques de l’audiovisuel, du cinéma, de l’édition, de la presse, de la publicité et des télécommunications ».

M. le rapporteur. Votre préoccupation est légitime, mais l’article 5 de la loi de 1986 dispose déjà que « les membres du Conseil ne peuvent, directement ou indirectement, […] détenir d’intérêts dans une entreprise de l’audiovisuel, du cinéma, de l’édition, de la presse, de la publicité ou des télécommunications ». Votre amendement étant donc satisfait par la loi, je vous suggère de le retirer.

Mme la ministre. Je ferai la même suggestion que le rapporteur. L’amendement soulève un problème technique : sans être spécialiste des placements financiers, il me semble qu’il est très difficile de savoir au jour le jour où sont placées les parts que l’on possède dans une SICAV ou un FCP. En outre, l’amendement est effectivement satisfait par la loi de 1986, qui définit très strictement les règles d’incompatibilité.

Mme Martine Faure. Je retire l’amendement.

L’amendement AC 3 est retiré.

L’amendement AC 75 est devenu sans objet.

La Commission examine ensuite l’amendement AC 77 du rapporteur.

M. le rapporteur. Afin de rendre plus effectif le devoir de réserve et de protection du secret des délibérations qui s’impose aux membres du CSA en application du cinquième alinéa de l’article 5 de la loi du 30 septembre 1986, cet amendement propose qu’un membre ayant manqué à ses obligations pourrait être déclaré démissionnaire d’office par le collège statuant à la majorité de ses membres.

Mme la ministre. Avis favorable. À l’heure actuelle, le devoir de réserve est formulé de manière trop stricte pour être respecté. Toutefois, paradoxalement, la méconnaissance de cette obligation fondamentale ne donne lieu à aucune sanction.

M. Franck Riester. Dans l’hypothèse évoquée, comment, avant de recourir à une procédure aussi violente que la démission d’office, garantir le droit de la défense ? Quelles preuves du manquement convient-il de requérir ?

M. le rapporteur. C’est le collège qui constate l’incompatibilité et statue à la majorité. Il n’est pas question d’une procédure automatique déclenchée par une sorte de Big Brother.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement AC 21 de M. Rudy Salles.

M. Rudy Salles. Aux termes de cet amendement, serait déclaré démissionnaire d’office tout membre du CSA qui exercerait une activité, accepterait un emploi ou un mandat électif incompatible avec sa qualité de membre. Il s’agit donc de faire d’une faculté une obligation pour le collège de prononcer cette décision d’office.

M. le rapporteur. Avis favorable.

Mme la ministre. Même avis.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement AC 76 du rapporteur.

M. le rapporteur. Actuellement, le cinquième alinéa de l’article 5 de la loi du 30 septembre 1986 interdit en termes très généraux toute prise de position publique des membres du Conseil « sur les questions dont le Conseil a ou a eu à connaître ou qui sont susceptibles de lui être soumises ». Cette interdiction est valable durant un an à compter de la cessation de leurs fonctions. Du fait de sa généralité, cette disposition n’est ni réaliste ni respectée. Or les membres du CSA doivent pouvoir s’exprimer sur les activités du Conseil, sur sa stratégie, et expliquer les décisions adoptées sans pour autant intervenir publiquement sur des questions en cours d’examen ni trahir le secret des délibérations.

Afin de rendre cette interdiction effective, le présent amendement en resserre le champ en précisant que l’absence de prise de position publique ne porte que sur les questions en cours d’examen et la renforce en mentionnant expressément que les membres sont tenus au secret des délibérations.

Concernant les anciens membres, la validité de l’interdiction pendant un an à compter de la cessation de leurs fonctions est maintenue, mais limitée aux questions qui seraient encore en cours d’examen. En outre, l’interdiction actuelle est là encore durcie puisque le secret des délibérations s’imposera désormais à eux de manière permanente.

Mme la ministre. Avis favorable.

M. Franck Riester. Permettez-moi une question quelque peu provocatrice. Les membres qui ne respecteront pas cette obligation seront-ils « démissionnés » d’office ? On peut le craindre, monsieur le rapporteur, tant chacun de vos amendements durcit un peu plus les conditions d’exercice de leurs fonctions. Pourquoi limiter exagérément le pouvoir d’intervention des membres du CSA qui peuvent fournir aux parlementaires et aux acteurs du secteur audiovisuel un point de vue éclairant sur l’évolution de ce dernier à moyen et long terme. Par de telles dispositions, ne risque-t-on pas de museler le CSA ?

M. le rapporteur. On ne peut parler de démission « d’office » puisque la décision est prise par le collège.

L’amendement que je défends propose un système beaucoup moins contraignant que celui qui est en vigueur. En l’état, c’est en effet le black out total puisque les membres du CSA sont tenus de s’abstenir de toute prise de position publique sur les questions dont le Conseil a ou a eu à connaître ou qui sont susceptibles de lui être soumises durant l’exercice de leur mission pendant la durée de leur fonction et durant un an à compter de sa cessation.

En l’occurrence, nous restreignons le champ des questions sur lesquelles les membres du CSA ne peuvent pas s’exprimer, ce qui favorise une prise de parole encadrée et va dans le sens que vous souhaitez, monsieur Riester.

Mme la ministre. C’est en effet seulement après le passage devant le collège du CSA que la sanction s’applique.

En l’état, la règle est très générale et très dure, mais inapplicable et inappliquée en raison de l’absence de sanction : les membres du CSA ne peuvent parler de rien, mais il ne se passe rien s’ils parlent de tout. Désormais, ils n’auront pas le droit de parler des affaires en cours non plus que de dévoiler le secret des affaires, la contrepartie du non-respect de cette règle plus circonscrite étant la sanction prononcée par le collège du CSA. Cela me semble plus raisonnable.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AC 20 de M. Rudy Salles.

M. Rudy Salles. Il convient de réduire à six mois la période pendant laquelle les membres du CSA ayant terminé leur mandat sont rémunérés. Alors que l’argent public manque, il n’est ni possible ni souhaitable de la maintenir à un an.

De surcroît, les membres du CSA connaissent la date d’échéance de leur mandat et sont à même de prévoir leur reconversion.

M. le rapporteur. Cette durée de rémunération est la contrepartie des exigences à l’endroit des personnes quittant le CSA. En effet, celles-ci ne doivent pas pouvoir retrouver dans des délais trop brefs une activité dans les sociétés qu’elles ont contrôlées. Une mise à distance d’un an est nécessaire.

Je suis d’accord avec vous s’agissant de l’utilisation de l’argent public, mais l’indépendance a un coût. Donc, avis défavorable.

Mme la ministre. Je vous remercie de vous soucier de l’argent public mais, en l’occurrence, la durée d’un an s’explique par des incompatibilités extrêmement strictes : outre les incompatibilités de droit commun qui s’appliquent à tous les agents publics pendant trois ans – ne pas aller travailler dans une entreprise qu’ils ont contrôlée –, il est interdit, pendant une année, aux membres du CSA d’être embauché dans une entreprise de l’audiovisuel, du cinéma, de l’édition, de la presse, de la publicité ou des télécommunications, ce qui complique leur reconversion. Si, en revanche, ils retrouvent un emploi avant un an dans un autre domaine que ceux que je viens de citer, le versement de leur traitement est bien entendu interrompu.

M. Rudy Salles. Une année suffit-elle à garantir l’indépendance ? Un an et un jour après, le profil de la personne en question n’a pas varié et celle-ci peut fort bien trouver un emploi dans l’une des sociétés qui lui aura été interdite. Je comprends, toutefois, qu’il soit difficile d’allonger le délai. Que cesse la rémunération de la personne qui retrouve un emploi dans l’année constitue en revanche un point beaucoup plus satisfaisant.

Je retire l’amendement.

L’amendement AC 20 est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement AC 78 du rapporteur.

M. le rapporteur. Les anciens membres du CSA sont tenus à un devoir de réserve et au secret des délibérations. Nous proposons que le collège du CSA puisse sanctionner les éventuels manquements à ces obligations en prononçant la cessation partielle ou totale du versement du traitement perçu par les membres après l’expiration de leur mandat.

Mme la ministre. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 2 modifié.

Article 3

Impartialité de la procédure de sanction mise en œuvre par le CSA

Le présent article modifie en profondeur l’actuel article 42-7 de la loi du 30 septembre 1986 pour instituer un rapporteur permanent auprès du Conseil supérieur de l’audiovisuel, qui sera chargé des fonctions de poursuite et d’instruction dans le cadre de la mise en œuvre d’une procédure de sanction.

1.  La situation actuelle

a) Les pouvoirs de sanction du CSA

Le CSA dispose d’un pouvoir de sanction administrative à l’égard des éditeurs, distributeurs de services de communication audiovisuelle et opérateurs de réseaux satellitaires, qui s’exerce après mise en demeure. Les sanctions administratives sont susceptibles d’être mises en œuvre à l’occasion de manquements des diffuseurs à leurs obligations et engagements. Pour les opérateurs privés, la gamme des sanctions est la suivante :

– suspension de la diffusion du programme ;

– réduction de la durée de l’autorisation ;

– sanction pécuniaire, éventuellement assortie d’une suspension de la diffusion ;

– retrait de l’autorisation, dans les cas les plus graves.

Le CSA peut également demander la diffusion à l’antenne d’un communiqué.

Il dispose en outre d’un pouvoir de sanction conventionnel pour les engagements de nature conventionnelle négociés avec les éditeurs de services.

Il peut encore mettre en œuvre un dispositif de sanction pénale, par exemple saisir le procureur de la République d’infractions pénalement sanctionnées (émissions « pirates » de radio ou de télévision, non-respect, par une station de radio, des conditions techniques de son autorisation).

b) Un exercice limité de ces pouvoirs

Les rapports élaborés annuellement par le conseil en application de l’article 18 de la loi du 30 septembre 1986 permettent d’établir un bilan de la mise en œuvre par le CSA de son pouvoir de sanction, au cours des quatre dernières années.

Il en résulte tout d’abord que le CSA prononce très peu de sanctions : moins de cinq sont prononcées chaque année (comme le montre le tableau 1). Sur la période 2009-2012, le conseil a engagé 31 procédures de sanctions – 12 en télévision et 19 en radio – et 14 sanctions ont été effectivement prononcées – 7 en télévision et 7 en radio. À l’inverse, le CSA prononce de très nombreuses mises en demeure : 354 entre 2009 et 2012 notamment en matière radiophonique, secteur pour lequel il a prononcé 233 mises en demeure sur la même période.

Il peut également être relevé que l’intégralité des procédures de sanction engagées – ainsi que la quasi-totalité des mises en demeure – visent des éditeurs de services de communication audiovisuelle : les distributeurs de services et les opérateurs satellitaires n’ont fait l’objet d’aucune sanction.

Tableau 1 : Bilan du pouvoir de sanction

 

TNT

Câble/sat/ADSL

Radio

Autres
(opérateurs satellitaires/chaînes locales/opérateurs de multiplex)

MED*

Procédures engagées

Sanctions

MED

Procédures engagées

Sanctions

MED

Procédures engagées

Sanctions

MED

Procédures engagées

Sanctions

2012

27

1

2

1

0

0

63

8

4

0

0

0

2011

16

2

0

11

0

0

68

7

2

3

0

0

2010

24

1

4

11

1

0

41

4

0

4

0

0

2009

12

6

1

6

1

0

61

0

1

6

0

0

Total

79

10

7

29

2

0

233

19

7

13

0

0

(*MED = mise en demeure)

Source : Direction générale des médias et des industries culturelles.

Si les mises en demeure prononcées par le CSA concernent des manquements à l’ensemble des obligations légales, réglementaires et conventionnelles des éditeurs de services, les sanctions s’articulent principalement autour de quelques thématiques. Sur la période 2009-2012, la majorité des procédures de sanction a été engagée pour des manquements à des obligations déontologiques, publicitaires, aux quotas de diffusion ou pour non-respect des conditions techniques des autorisations délivrées (comme le montre le tableau 2, étant précisé que les chiffres de 2012 n’ont pas été publiés par le CSA pour les procédures engagées en matière radiophonique). 12 des 14 sanctions prononcées sur la même période concernent logiquement ces trois thématiques, les dernières ayant été rendues à l’encontre d’un service de radio dont la diffusion n’était plus assurée et d’un service ne respectant pas ses obligations de programmation locale (tableau 3).

Tableau 2 : Procédures engagées

 

Publicité

Déontologie

Conditions techniques

Obligations de diffusion

Communication de document

Programmation locale

Diffusion du service

Obligations de production

2011

2

2

2

0

1

1

1

0

2010

0

0

2

1

2

0

1

0

2009

0

3

0

3

0

0

0

1

Total

2

5

4

4

3

1

2

1

Source : DGMIC

Tableau 3 : Sanctions prononcées

 

Déontologie

Conditions techniques

Obligations de diffusion

Diffusion du service

Publicité

Programmation locale

2012

2

1

0

0

2

1

2011

0

1

0

1

0

0

2010

3

0

1

0

0

0

2009

0

1

1

0

0

0

Total

5

3

2

1

2

1

Source : DGMIC

Les 14 sanctions prononcées par le CSA sur la période 2009-2012 sont enfin d’ampleur variable.

Sept sanctions ont été prononcées à l’encontre de chaînes de télévision hertziennes :

- 20 janvier 2009 : insertion d’un communiqué sur NRJ 12 (obligations de diffusion) ;

- 2 mars 2010 : sanction pécuniaire de 75 000 euros à l’encontre de NRJ 12 (obligations de diffusion) ;

- 2 mars 2010 : insertion d’un communiqué sur TF1 (honnêteté de l’information) ;

- 2 mars 2010 : insertion d’un communiqué sur Canal+ (honnêteté de l’information) ;

- 7 décembre 2010 : sanction pécuniaire de 100 000 euros à l’encontre de France Télévisions (honnêteté de l’information) ;

- 3 juillet 2012 : suspension de la publicité sur BFM TV (dépassement de la durée de la publicité) ;

- 10 juillet 2012 : insertion d’un communiqué sur France Télévisions (publicité clandestine).

Sept sanctions ont été prononcées à l’encontre de services radiophoniques :

- 6 janvier 2009 : sanction pécuniaire de 1 368 euros à l’encontre de Gold FM (émission depuis un site non autorisé) ;

- 17 mai 2011 : sanction pécuniaire de 10 000 euros à l’encontre de Radio Bonheur (non-respect de la puissance maximale autorisée) ;

- 22 novembre 2011 : réduction de six mois de la durée de l’autorisation de Beur FM (absence d’émission) ;

- 7 février 2012 : sanction pécuniaire de 10 000 euros à l’encontre de Radio Évasion (durée de la programmation locale) ;

- 17 juillet 2012 : insertion d’un communiqué sur Radio Ici et Maintenant (maîtrise de l’antenne) ;

- 8 novembre 2012 : insertion d’un communiqué sur Radio Contact (déontologie) ;

- 11 décembre 2012 : sanction pécuniaire de 4 438,17 euros à l’encontre de Radio Oxygène (caractéristiques techniques).

Ce faible nombre de procédures de sanction engagées et de sanctions prononcées s’explique principalement par l’efficacité et le caractère dissuasif du mécanisme de mise en demeure préalable. C’est en effet par l’adoption d’une mise en demeure que le CSA parvient la plupart du temps à obtenir des professionnels du secteur audiovisuel qu’ils se conforment à leurs obligations légales et réglementaires. Dans la majorité des cas, le CSA n’a donc pas besoin de déclencher une procédure de sanction. Le faible nombre de sanctions prononcées peut cependant avoir pour effet de réduire le caractère dissuasif de ces dernières.

c) Le déroulement de la procédure de sanction

L’article 42-7 de la loi du 30 septembre 1986 précise les conditions de mise en œuvre de son pouvoir de sanction par le CSA : « Le Conseil supérieur de l’audiovisuel notifie les griefs à l’éditeur ou au distributeur du service de communication audiovisuelle qui peut consulter le dossier et présenter ses observations écrites dans le délai d’un mois. En cas d’urgence, le président du Conseil supérieur de l’audiovisuel peut réduire ce délai sans pouvoir le fixer à moins de sept jours.

L’éditeur ou le distributeur de services est entendu par le Conseil supérieur de l’audiovisuel. Il peut se faire représenter. Le Conseil supérieur de l’audiovisuel peut également entendre toute personne dont l’audition lui paraît susceptible de contribuer utilement à son information. »

La procédure de sanction applicable devant le CSA confie au même organe le déclenchement des poursuites, l’instruction de l’affaire et le prononcé de la sanction. Il résulte en effet du règlement intérieur du CSA, qui précise les dispositions de l’article 42-7 précité, que ces trois étapes résultent d’une décision du collège de l’instance de régulation : c’est en premier lieu le collège qui décide d’engager une procédure de sanction ; c’est ensuite le collège qui décide, à l’issue de la présentation des observations écrites de l’éditeur, de clore la procédure ou de poursuivre ; c’est enfin le collège qui décide de prononcer une sanction.

L’ensemble de la procédure de sanction est donc mené sous le contrôle de la même formation du conseil, par les mêmes personnes.

d) Une procédure qui ne répond pas aux exigences du principe d’impartialité

Certaines des modalités de mise en œuvre par les autorités administratives indépendantes (AAI) de leur pouvoir de sanction ont fait l’objet d’une récente remise en cause par les juridictions nationales et européenne en raison de leur non-conformité au principe d’impartialité. En effet, si ce principe a été étendu depuis longtemps aux AAI lorsqu’elles exercent un pouvoir de sanction (24), la Cour européenne des droits de l’homme (25) (Cour EDH) et le Conseil constitutionnel (26) considèrent désormais qu’il implique nécessairement que les fonctions de poursuites et de jugement soient séparées lorsque ces autorités mettent en œuvre leur pouvoir de sanction.

L’application de ce principe a conduit à s’interroger sur la mise en œuvre des pouvoirs de sanction de plusieurs AAI, dont la Commission bancaire, devenue Autorité de contrôle prudentiel, et l’Autorité de la concurrence.

S’agissant de la Commission bancaire, le Conseil d’État considérait initialement que ni son pouvoir d’auto-saisine (27), ni la confusion en son sein des fonctions de poursuites, d’instruction et de jugement en matière disciplinaire (28) ne constituaient des violations de l’article 6§1 de la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH). Ce raisonnement du juge administratif a cependant été remis en cause par la Cour EDH (29). Dans cette décision, la Cour apporte tout d’abord une double confirmation des principes consacrés par le Conseil d’État : elle estime ainsi que ni le cumul de fonctions administratives et disciplinaires par la Commission bancaire (30), ni la possibilité de cette dernière de s’auto-saisir des affaires qu’elle traite ne constituent en soi des violations de la CEDH. La Cour considère en revanche que la procédure disciplinaire mise en œuvre par la Commission bancaire n’apporte pas les garanties nécessaires au respect du principe d’impartialité, notamment en ce qu’elle ne permet pas de distinguer clairement les fonctions de poursuites, d’instruction et de jugement (31). Cette procédure a donc été déclarée contraire à l’article 6§1 de la CEDH.

À la suite de cette condamnation, le Conseil d’État a considéré qu’une modification de la pratique de son pouvoir de sanction par la Commission bancaire ne suffirait pas à se conformer aux exigences du principe d’impartialité et a, à son tour, déclaré l’article L. 613-21 du code monétaire et financier contraire à l’article 6§1 de la CEDH (32).

Entre-temps, le gouvernement avait tiré les conséquences de cette condamnation de la France par la Cour EDH, en adoptant l’ordonnance n° 2010-756 du 21 janvier 2010 portant fusion des autorités d’agrément et de contrôle de la banque et de l’assurance. Cette ordonnance crée ainsi l’Autorité de contrôle prudentiel (ACP) au sein de laquelle les fonctions de poursuites et de sanction sont bien séparées : le pouvoir de sanction est exclusivement dévolu à une commission des sanctions (33), dont le rôle se limite strictement à la mise en œuvre de cette prérogative. Aucune confusion avec les autres compétences administratives du régulateur ou avec la décision de déclencher des poursuites n’est donc possible. Dans ce schéma, c’est le collège de l’autorité qui décide d’ouvrir une procédure de sanction et transmet la liste des griefs à la commission des sanctions, qui désigne un rapporteur en son sein. Les fonctions de poursuites sont ainsi bien distinctes des fonctions de jugement.

En dépit de cette évolution, le fonctionnement du pouvoir de sanction de la Commission bancaire, tel qu’il était mis en œuvre avant l’ordonnance de 2010, a fait l’objet d’une nouvelle censure, par le Conseil constitutionnel. À l’occasion d’un contentieux portant sur une sanction prise par l’ex Commission bancaire, le Conseil d’État a transmis une question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité des articles pertinents du code monétaire et financier à l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Dans sa décision (34), le Conseil reprend à l’identique le raisonnement déjà soutenu par la Cour EDH et le Conseil d’État.

S’agissant de l’Autorité de la concurrence et dans le cadre du contentieux introduit devant le Conseil d’État par le groupe Canal + contre la décision de l’Autorité du 20 septembre 2011 de retirer l’autorisation de rapprochement entre TPS et Canal Satellite, le Conseil constitutionnel saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité a estimé que la procédure de sanction prévue devant l’Autorité (35) ne portait aucune atteinte aux principes d’indépendance et d’impartialité, compte tenu des garanties légales dont sont assorties les règles de composition et de délibération de l’Autorité de la concurrence prévues par le code de commerce (36) :

– d’une part, le juge souligne l’existence de dispositions propres à garantir l’indépendance et l’impartialité des membres du collège de l’Autorité. À cet égard, il pointe notamment les obligations d’ordre déontologique auxquelles sont tenus les membres de l’Autorité de la concurrence (37) ;

– d’autre part, le juge relève que le législateur a veillé à ce que la saisine de l’Autorité de la concurrence n’opère pas de confusion entre les fonctions de poursuite et d’instruction et les pouvoirs de sanction conformément aux principes d’indépendance et d’impartialité. Ainsi, l’article L. 461-4 du code de commerce prévoit que les services d’instruction de l’Autorité de la concurrence sont dirigés par un rapporteur général qui est nommé par arrêté ministériel après avis du collège (38). En outre, une fois la saisine de l’Autorité décidée, la phase de poursuites et d’instruction respecte l’indépendance des services d’instruction, qui travaillent sous la direction du rapporteur général et non du collège. Cette instruction est contradictoire et les entreprises peuvent consulter le dossier.

2. Les dispositions du projet de loi, dans sa rédaction proposé par le du gouvernement

Le présent article 3 du projet de loi modifie l’article 42-7 de la loi du 30 septembre 1986 afin de réformer les modalités de mise en œuvre par le CSA des pouvoirs de sanction que lui attribuent les articles 42-1, 42-3, 42-4, 42-15, 48-2 et 48-3 de la loi.

Les pouvoirs de sanction du CSA dans la loi du 30 septembre 1986

Article 42-1 : « Si la personne faisant l’objet de la mise en demeure ne se conforme pas à celle-ci, le Conseil supérieur de l’audiovisuel peut prononcer à son encontre, compte tenu de la gravité du manquement, une des sanctions suivantes :

1° La suspension de l’édition, de la diffusion ou de la distribution du ou des services d’une catégorie de programme, d’une partie du programme, ou d’une ou plusieurs séquences publicitaires pour un mois au plus ;

2° La réduction de la durée de l’autorisation ou de la convention dans la limite d’une année ;

3° Une sanction pécuniaire assortie éventuellement d’une suspension de l’édition ou de la distribution du ou des services ou d’une partie du programme ;

4° Le retrait de l’autorisation ou la résiliation unilatérale de la convention. »

Article 42-3 : « L’autorisation peut être retirée, sans mise en demeure préalable, en cas de modification substantielle des données au vu desquelles l’autorisation avait été délivrée, notamment des changements intervenus dans la composition du capital social ou des organes de direction et dans les modalités de financement. »

Article 42-4 : « Dans tous les cas de manquement aux obligations incombant aux éditeurs de services de communication audiovisuelle, le Conseil supérieur de l’audiovisuel peut ordonner l’insertion dans les programmes d’un communiqué dont il fixe les termes et les conditions de diffusion. Le Conseil supérieur de l’audiovisuel demande à l’intéressé de lui présenter ses observations dans un délai de deux jours francs à compter de la réception de cette demande. La décision est ensuite prononcée sans que soit mise en œuvre la procédure prévue à l’article 42-7. Le refus du titulaire de se conformer à cette décision est passible d’une sanction pécuniaire dans les conditions fixées à l’article 42-2. »

Article 42-15 : « Lorsqu’une partie au litige ne se conforme pas dans les délais fixés à la décision prise en application de l’article 17-1, le Conseil supérieur de l’audiovisuel peut prononcer à son encontre une sanction pécuniaire dans les conditions fixées aux articles 42-2 et 42-7. Ces décisions sont motivées. Elles sont notifiées à l’intéressé. Elles peuvent faire l’objet d’un recours de pleine juridiction devant le Conseil d’État, qui a un effet suspensif. »

Article 48-2 : « Si une société mentionnée à l’article 44 ne se conforme pas aux mises en demeure qui lui ont été adressées, le Conseil supérieur de l’audiovisuel peut prononcer à son encontre la suspension d’une partie du programme pour un mois au plus ou une sanction pécuniaire dans les limites définies à l’article 42-2. La partie de programme peut notamment être une catégorie de programme ou une ou plusieurs séquences publicitaires. »

Article 48-3 : « Dans tous les cas de manquement aux obligations incombant aux sociétés mentionnées à l’article 44, le Conseil supérieur de l’audiovisuel peut ordonner l’insertion dans les programmes d’un communiqué dont il fixe les termes et les conditions de diffusion. Le Conseil supérieur de l’audiovisuel demande à la société de lui présenter ses observations dans un délai de deux jours francs à compter de la réception de cette demande. La décision est alors prononcée sans que soit mise en œuvre la procédure prévue à l’article 48-6. Le refus de se conformer à cette décision est passible d’une sanction pécuniaire dans les limites définies à l’article 42-2. Le refus de la société de se conformer à cette décision est passible d’une sanction pécuniaire dans les limites définies à l’article 42-2. »

Le 1° de l’article 42-7 modifié confie la prérogative de déclenchement des poursuites et d’instruction de l’affaire à un rapporteur indépendant du collège du CSA, titulaire de ces seules prérogatives. Cette option correspond à celle qui a été adoptée s’agissant du pouvoir de sanction de l’Autorité de la concurrence, dont le Conseil constitutionnel a eu l’occasion d’affirmer qu’il permet d’assurer une séparation effective entre les fonctions de poursuites et de sanction (39).

L’indépendance du rapporteur à l’égard du collège du CSA est garantie par les modalités de sa nomination. Il est en effet proposé qu’il soit désigné par le vice-président du Conseil d’État parmi les membres des juridictions administratives. Compte tenu du statut des magistrats administratifs, il s’agit là en effet d’une garantie d’indépendance et de compétence.

Sa nomination intervient après avis du CSA. Cet avis, qui existe à l’Autorité de la concurrence, paraît utile afin de s’assurer qu’il n’y ait pas d’incompatibilité d’humeur caractérisée entre le rapporteur et le collège.

Le rapporteur est nommé pour une durée de quatre ans, renouvelable une fois. Cette durée permet d’assurer un équilibre entre la nécessité de nommer ce rapporteur pour une durée assez longue qui garantit l’expérience et la continuité de l’action et l’exigence d’indépendance, qui suppose que le mandat ne soit pas trop long. Une durée de quatre ans a l’avantage de permettre une sortie au bout de quatre ans en cas de problème qui se révélerait en cours de mandat.

En application des 2° et 3° du l’article 42-7 modifié, le rapporteur dispose d’une compétence exclusive pour déclencher les poursuites, c’est-à-dire décider si les faits portés à sa connaissance, notamment par le CSA, mais dont il peut également s’autosaisir, justifient l’engagement d’une procédure de sanction.

En application du deuxième alinéa du 3°, « S’il estime que les faits justifient l’engagement d’une procédure, le rapporteur notifie les griefs aux personnes mises en cause, qui peuvent consulter le dossier et présenter leurs observations dans un délai d’un mois suivant la notification, qui peut être réduit jusqu’à sept jours en cas d’urgence. Il adresse une copie de la notification au Conseil supérieur de l’audiovisuel ».

Comme le fait actuellement le CSA, le rapporteur doit donc respecter la règle du contradictoire. Les délais proposés pour permettre aux personnes mises en cause de présenter leurs observations sont identiques à ceux qui sont appliqués actuellement par le CSA en application de l’article 42-7.

Le 4° de l’article 42-7 modifié est relatif à la procédure d’instruction du dossier. Cette dernière est de la responsabilité exclusive du rapporteur qui peut procéder à toutes les auditions et consultations qu’il estime nécessaires. Dans l’exercice de cette prérogative, l’indépendance du rapporteur à l’égard du collège du CSA est assurée par la mise à disposition des moyens humains, financiers et techniques nécessaires à l’exécution de cette mission.

Selon les informations transmises par la DGMIC, « compte tenu du faible nombre de procédures de sanction engagées chaque année, il n’apparaît pas nécessaire pour le CSA d’affecter au rapporteur des moyens permanents. Ce sont donc les agents et les moyens techniques de la direction juridique du CSA qui seront mis à sa disposition en tant que de besoin. Lorsqu’ils agiront dans le cadre des missions du rapporteur, ces agents seront placés sous son autorité et non sous celle du président du CSA. »

En application du 5° de l’article 42-7 modifié, « au terme de l’instruction, le rapporteur communique son rapport, accompagné des documents sur lesquels il se fonde, à la personne mise en cause et au Conseil supérieur de l’audiovisuel. »

Puis, en application du premier alinéa du 6° de l’article 42-7 modifié, « le rapporteur expose devant le Conseil supérieur de l’audiovisuel, lors d’une séance à laquelle est convoquée la personne mise en cause, son opinion sur les faits dont il a connaissance et les griefs notifiés. Le cas échéant, il propose au Conseil d’adopter l’une des sanctions prévues aux articles 42-1, 42-3, 42-4, 42-15, 48-2 et 48-3. »

Comme le prévoit l’article 42-7, dans sa rédaction actuelle, « Au cours de cette séance, la personne mise en cause, qui peut se faire assister par toute personne de son choix, est entendue par le conseil, qui peut également entendre, en sa présence, toute personne dont l’audition lui paraît susceptible de contribuer à son information. »

Le prononcé de la sanction appartient exclusivement au collège du CSA. La séparation fonctionnelle implique que le rapporteur n’assiste pas au délibéré, comme le prévoit le deuxième alinéa du 6° de l’article 42-7 modifié.

Le dispositif présente l’avantage de concilier le respect du principe d’impartialité et la préservation des compétences du CSA en matière de sanction, notamment leur dimension dissuasive : le collège reste en effet titulaire de la prérogative de mise en demeure ainsi que de la prérogative de sanction.

Le troisième alinéa du 6° de l’article 42-7 modifié reprend les dispositions de l’actuel article 42-6 de la loi du 30 septembre 1986 que le 1° de l’article 4 du présent projet de loi propose de supprimer. Cet article dispose que « Les décisions du Conseil supérieur de l’audiovisuel sont motivées. Elles sont notifiées aux personnes visées par la décision et, en cas de suspension de la diffusion d’un service, aux opérateurs satellitaires qui assurent la diffusion du service en France et qui devront assurer l’exécution de la mesure. Sous réserve des secrets protégés par la loi, elles sont publiées au Journal officiel de la République française ». Il est proposé d’intégrer son contenu dans l’article 42-7 modifié.

En application de l’article 42-10 de la loi du 30 septembre 1986, le président du CSA peut saisir en référé le Conseil d’État, notamment afin de pouvoir faire prononcer des injonctions. Aux termes de cet article, « en cas de manquement aux obligations résultant des dispositions de la présente loi et pour l’exécution des missions du Conseil supérieur de l’audiovisuel, son président peut demander en justice qu’il soit ordonné à la personne qui en est responsable de se conformer à ces dispositions, de mettre fin à l’irrégularité ou d’en supprimer les effets. Cette demande peut avoir pour objet de faire cesser la diffusion, par un opérateur satellitaire, d’un service de télévision relevant de la compétence de la France dont les programmes portent atteinte à l’un au moins des principes mentionnés aux articles 1er, 3-1 ou 15. La demande est portée devant le président de la section du contentieux du Conseil d’État qui statue en référé et dont la décision est immédiatement exécutoire. Il peut prendre, même d’office, toute mesure conservatoire et prononcer une astreinte pour l’exécution de son ordonnance. »

Dans ce cas, en application du 7° de l’article 42-7 modifié, la procédure de sanction sera suspendue et pourra reprendre après la décision du Conseil d’État.

Enfin, le 8° de l’article 42-9 modifié dispose que les modalités de son application seront précisées par le règlement intérieur du CSA. Ce dernier doit notamment préciser les aspects concrets de la collaboration des services du CSA : les informations qui doivent être transmises au rapporteur, leur périodicité, l’organisation matérielle des moyens mis à sa disposition etc.

3. Les modifications apportées par la Commission

Outre plusieurs modifications rédactionnelles, la Commission a adopté un amendement prévoyant que le rapporteur est nommé parmi les seuls membres en activité des juridictions administratives et non parmi leurs membres honoraires.

Afin de faciliter la mission d’instruction du rapporteur, la Commission a également adopté un amendement visant à assurer une meilleure protection du secret des affaires, sur le modèle de ce qui est prévu par l’article L. 463-4 du code de commerce dans le cadre de la procédure applicable à l’Autorité de la concurrence. Sauf dans les cas où la communication ou la consultation de ces documents serait nécessaire à l’exercice des droits de la défense de la personne mise en cause, le rapporteur pourrait lui refuser la communication ou la consultation de pièces ou de certains éléments contenus dans ces pièces mettant en jeu le secret des affaires d'autres personnes. Dans ce cas, une version non confidentielle et un résumé des pièces ou éléments en cause lui seraient accessibles.

Enfin, la Commission a adopté un amendement prévoyant que la séance au cours de laquelle le rapporteur expose devant le collège du CSA son opinion à l’issue de la procédure d’instruction se tienne dans un délai de deux mois suivant la transmission de son rapport au collège et à la personne mise en cause. L’instruction étant terminée, il apparaît en effet important que le dossier soit jugé dans un délai raisonnable.

*

La Commission est saisie de l’amendement AC 55 de M. Christian Kert.

M. Christian Kert. Cet amendement vise à élargir le champ d’application de la nouvelle procédure contentieuse devant le CSA à la mise en demeure. Il s’agit de rendre effective la conformité avec les principes de la garantie des droits et de la séparation des pouvoirs telle que rappelée par le Conseil constitutionnel dans sa récente décision sur les pouvoirs de sanctions des autorités administratives. Ni la mise en demeure prévue à l’article 42 de la loi du 30 septembre 1986 ni les pénalités conventionnelles résultant de l’article 28 ne peuvent donc être tenues hors du champ de cette avancée.

M. le rapporteur. La décision du Conseil constitutionnel concernant le pouvoir de sanction de l’ARCEP ne remet pas en cause le mécanisme de sanction du CSA tel que nous l’avons réformé. Que le collège du CSA conserve à la fois la compétence de mise en demeure et de prononcé de la sanction n’est pas incompatible avec le principe d’impartialité.

La prérogative de mise en demeure est laissée au collège du CSA – c’est un élément important pour son rôle de régulateur –, mais les sanctions prononcées par celui-ci portent sur des faits distincts de ceux ayant fait l’objet de la mise en demeure. Par exemple, en matière de respect des règles de déontologie, après mise en demeure, la procédure de sanction n’est déclenchée qu’en cas de répétition du comportement fautif. Il n’y a donc pas de pré-jugement au stade de la mise en demeure.

Je vous prie de bien vouloir retirer votre amendement.

Mme la ministre. Avis défavorable pour les raisons que M. le rapporteur vient d’indiquer.

Je comprends le souci de M. Christian Kert quant à la séparation des pouvoirs. C’est d’ailleurs ce qui a motivé la rédaction de cet article, puisque nous avons voulu nous mettre en conformité avec les exigences de la jurisprudence conventionnelle et constitutionnelle.

Le dispositif que nous proposons est le seul qui permette de concilier le respect du principe de l’impartialité résultant de cette jurisprudence et le caractère pédagogique des mises en demeure du CSA, qu’il convient de préserver afin que les décisions de celui-ci soient respectées.

Les pénalités conventionnelles sont prévues par les conventions signées entre le CSA et les chaînes, qui stipulent systématiquement que ces pénalités sont mises en œuvre dans les conditions prévues pour la procédure de sanction. Le préciser serait inutile.

M. Christian Kert. Je maintiens mon amendement, car je ne comprends pas les craintes de Mme la ministre et M. le rapporteur face à une telle précision.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AC 30 de M. Thierry Braillard.

M. Thierry Braillard. Le rapporteur du CSA qui aura un rôle prépondérant en matière d’opportunité des poursuites, doit être un membre en activité, et non honoraire, d’une juridiction administrative.

M. le rapporteur. Avis favorable.

Mme la ministre.  Même avis. Nous avons suffisamment de bons magistrats administratifs en activité pour que le vice-président du Conseil d’État nomme un rapporteur parmi eux.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AC 79 du rapporteur.

La Commission est saisie de l’amendement AC 31 de M. Thierry Braillard.

M. Thierry Braillard. Le rapporteur ayant la liberté de juger de l’opportunité des poursuites, il doit motiver devant le CSA son éventuelle décision de ne pas engager une procédure de sanction.

M. le rapporteur. L’idée est intéressante. Qu’en pensez-vous, madame la ministre ?

Mme la ministre. Avis défavorable. Outre que la décision du rapporteur ne fait pas grief, une telle justification irait à l’encontre de l’exigence conventionnelle et constitutionnelle d’une séparation étanche entre le rapporteur chargé de l’instruction et le collège du CSA chargé du prononcé des sanctions.

M. Thierry Braillard. Mme la ministre a su trouver les bons mots pour me convaincre. Je retire mon amendement.

L’amendement AC 31 est retiré.

La Commission adopte successivement l’amendement de précision AC 81 et les amendements rédactionnels AC 82 et AC 83 du rapporteur.

Puis elle examine l’amendement AC 32 de M. Thierry Braillard.

M. Thierry Braillard. Le projet de loi prévoit que le CSA mettra à la disposition du rapporteur des agents qui seront placés sous son autorité. Or, ces derniers ont un lien de subordination avec le CSA, pas avec le rapporteur qui doit disposer de moyens en personnels indépendants afin de garantir une étanchéité totale, pour reprendre la formule de Mme la ministre. Nul ne doit être à la fois juge et partie.

M. le rapporteur. Aux termes de l’alinéa 8 de l’article 3, le CSA « met à la disposition du rapporteur, dans les conditions prévues par une convention, tous les moyens nécessaires à l’accomplissement de ses fonctions », et votre amendement vise à ajouter : « y compris des moyens en personnel. » En quoi ce complément importe-t-il ?

M. Thierry Braillard.  Je retire l’amendement, mais j’en proposerai un autre en vue de la séance publique en veillant à ce qu’il ne tombe pas sous le coup de l’article 40 de la Constitution. Je suis en effet convaincu que des moyens administratifs supplémentaires sont nécessaires.

L’amendement AC 32 est retiré.

La Commission adopte l’amendement de précision AC 84 du rapporteur.

Puis elle est saisie de l’amendement AC 58 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement vise à faciliter la mission d’instruction du rapporteur du CSA en assurant une meilleure protection du secret des affaires sur le modèle de ce qui est prévu par l’article L. 463-4 du code de commerce dans le cadre de la procédure applicable à l’Autorité de la concurrence. Sauf dans les cas où la communication ou la consultation de ces documents serait nécessaire à l’exercice des droits de la défense de la personne mise en cause, le rapporteur pourrait lui refuser la communication ou la consultation de pièces ou de certains éléments contenus dans ces pièces mettant en jeu le secret des affaires d’autres personnes. Dans ce cas, une version non confidentielle et un résumé des pièces ou éléments en cause lui seraient accessibles. En fait, il s’agit de faciliter l’accès aux informations tout en évitant qu’elles circulent trop.

Mme la ministre. Avis favorable dès lors que le secret des affaires et le principe du contradictoire sont respectés.

M. Thierry Braillard. Le principe du contradictoire implique que chaque partie ait connaissance d’un document qui figure dans l’instruction. Or, il me semble que l’Autorité de la concurrence peut choisir les documents qui sont disponibles ou non. Cette question mérite à tout le moins d’être retravaillée.

M. le rapporteur. Nous en rediscuterons.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AC 85 du rapporteur.

La Commission est saisie de l’amendement AC 34 de M. Thierry Braillard.

M. Thierry Braillard. L’instruction étant terminée, il est important que le dossier soit jugé dans un délai bref, en l’occurrence dans le mois qui suit la notification aux parties du rapport par le rapporteur.

M. le rapporteur. Avis favorable à condition de porter ce délai à deux mois, ce qui serait plus compatible avec le fonctionnement du CSA.

Mme la ministre. Même avis.

M. Thierry Braillard.  Soit.

La Commission adopte l’amendement AC 34 ainsi rectifié.

Puis elle adopte l’amendement de précision AC 87 du rapporteur.

La Commission adopte l’article 3 modifié.

Article 4

Coordination

Le présent article tire les conséquences de la nouvelle procédure de sanction dans plusieurs articles de la loi du 30 septembre 1986.

Le supprime l’article 42-6 de la loi du 30 septembre 1986, qui dispose que « Les décisions du Conseil supérieur de l’audiovisuel sont motivées. Elles sont notifiées aux personnes visées par la décision et, en cas de suspension de la diffusion d’un service, aux opérateurs satellitaires qui assurent la diffusion du service en France et qui devront assurer l’exécution de la mesure. Sous réserve des secrets protégés par la loi, elles sont publiées au Journal officiel de la République française », son contenu étant intégré dans l’article 42-7 modifié.

Il supprime également les articles 48-6 et 48-7 de la même loi, relatifs à la procédure de sanction applicable aux sociétés nationales de programme. En effet, la procédure de sanction applicable à l’encontre de ces organismes est, même avant l’entrée en vigueur du projet de loi, la procédure de droit commun, désormais prévue à l’article 42-7 modifié. Ces dispositions sont donc redondantes.

Par coordination avec la suppression de cet article, le supprime la référence qui est faite à l’article 48-6 dans l’article 48-3.

*

La Commission adopte l’article 4 sans modification.

Article 5

Réforme du mode de nomination des présidents
des sociétés nationales de programme

Le présent article tend à modifier l’article 47-4 de la loi du 30 septembre 1986 afin de réformer le mode de nomination des présidents des sociétés nationales de programme de l’audiovisuel public, à savoir la société France Télévisions, la société Radio France et la société en charge de l’audiovisuel extérieur de la France.

1. Les dispositions du projet de loi, dans sa rédaction proposée par le gouvernement

Dans sa rédaction actuelle issue de la loi du 5 mars 2009 relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision, l’article 47-4 dispose que « les présidents des sociétés France Télévisions et Radio France et de la société en charge de l’audiovisuel extérieur de la France sont nommés par décret pour cinq ans après avis conforme du Conseil supérieur de l’audiovisuel et après avis des commissions parlementaires compétentes conformément à la loi organique n° 2009-257 du 5 mars 2009 relative à la nomination des présidents des sociétés France Télévisions et Radio France et de la société en charge de l’audiovisuel extérieur de la France. Pour l’application du présent article, la commission parlementaire compétente dans chaque assemblée est celle chargée des affaires culturelles. »

Les problèmes soulevés par ce mode de nomination relevant du Président de la République dans la mesure où la loi organique du 5 mars 2009 fait entrer les nominations des présidents de l’audiovisuel public dans la catégorie de celles qui sont soumises aux dispositions du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution – nomination par le Président de la République sous réserve d’un droit de véto des commissions parlementaires compétentes – sont rappelés en détail supra dans l’exposé général du présent rapport.

Le premier alinéa de l’article 47-4, dans la rédaction proposée au deuxième alinéa du présent article, prévoit désormais la nomination des présidents de ces sociétés par le Conseil supérieur de l’audiovisuel, statuant à la majorité des membres qui le composent.

Cette disposition est complétée par le projet de loi organique relatif à l’indépendance de l’audiovisuel dont l’article 1er tend à abroger la loi organique du 5 mars 2009 et l’article 2 tend à supprimer les mentions de France Télévisions, Radio France et de la société en charge de l’audiovisuel extérieur de la France figurant en annexe à la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution.

Le présent article n’aura pas d’impact immédiat dans la mesure où il n’est pas mis fin aux mandats des présidents actuels.

Il produira ses effets progressivement, à l’échéance des mandats en cours.

Ainsi, la nouvelle procédure s’appliquera-t-elle à la nomination des prochains présidents des sociétés nationales de programme au terme des mandats de leur président actuel :

- s’agissant de la société Radio France, le mandat de M. Jean-Luc Hees arrivera à échéance le 11 mai 2014 ;

- s’agissant de la société France Télévisions, le mandat de M. Rémy Pflimlin arrivera à échéance le 21 août 2015 ;

- s’agissant de la société en charge de l’audiovisuel extérieur de la France, le mandat de Mme Marie-Christine Saragosse arrivera à échéance le 4 octobre 2017.

Le deuxième alinéa de l’article 47-4, dans la rédaction proposée au troisième alinéa du présent article, introduit une procédure permettant l’information du Parlement à l’issue de la nomination. Dans un délai de deux mois après le début de leur mandat, il est proposé que les présidents des sociétés nationales de programme transmettent au Parlement de chaque assemblée parlementaire et aux commissions permanentes compétences de ces mêmes assemblées un rapport d’orientation.

L’impact de ces modifications est analysé supra dans l’exposé général du présent rapport.

2. Les modifications apportées par la Commission

Outre plusieurs amendements rédactionnels, la Commission a adopté un amendement inscrivant dans la loi le principe selon lequel les nominations des présidents des sociétés de l’audiovisuel public par le CSA font l’objet d’une décision motivée. La motivation des décisions de nomination des présidents des sociétés de l’audiovisuel public, qui était prévue par la loi n° 2000-719 du 1er août 2000 modifiant la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, participe d’un souci de transparence.

La Commission a également adopté un amendement précisant que les candidatures aux postes de présidents des sociétés de l’audiovisuel public sont « présentées au Conseil supérieur de l’audiovisuel et évaluées par ce dernier sur la base d’un projet stratégique. »

*

La Commission examine l’amendement AC 39 de M. Franck Riester.

M. Franck Riester.  Ce projet de loi n’est pas à la hauteur des enjeux. Mme la ministre a évoqué la possibilité de discuter d’un nouveau texte en 2014, mais les élections municipales et européennes contraindront fortement le calendrier parlementaire alors que nous sommes confrontés à des urgences. Nous regrettons donc une loi a minima qui vise seulement à détricoter ce qui a été fait par la précédente majorité et par le Président Nicolas Sarkozy sans régler la question du manque d’indépendance supposé du service de l’audiovisuel public.

En effet, vous maintenez le lien avec le pouvoir politique puisque c’est lui qui nommera les membres du CSA et que cet article confie à ces derniers le pouvoir de nomination des présidents des sociétés nationales de programme.

Nous proposons quant à nous de créer un Haut conseil de l’audiovisuel public qui, comme en Allemagne ou en Grande-Bretagne, favoriserait une réelle indépendance en coupant le lien entre pouvoir politique et pouvoir de nomination. Ce Haut conseil comporterait des membres du Conseil économique, social et environnemental (CESE) ou des régions ; il aurait une mission de contrôle de la bonne utilisation de l’argent public, veillerait au respect des missions de service public et nommerait les présidents de l’audiovisuel public. Cela permettrait, en outre, d’éviter le mélange des genres. En effet, dans quel secteur autre que celui de l’audiovisuel l’autorité de régulation nomme-t-elle les présidents des entreprises publiques ? Le président de la Commission de régulation de l’énergie (CRE) nomme-t-il celui d’EDF ? Celui de l’ARCEP nomme-t-il le président d’Orange ? Bien sûr que non ! Enfin, la création d’un Haut conseil de l’audiovisuel public permettrait de recentrer le CSA sur sa mission de régulation de l’ensemble du paysage audiovisuel français. Toutefois, le gouvernement n’ayant pas souhaité nous éviter de passer sous les fourches Caudines de l’article 40 de la Constitution, nous avons déposé cet amendement de suppression de l’article.

J’ajoute que votre projet dessaisit le Parlement de ses prérogatives puisque les députés et les sénateurs n’auront plus leur mot à dire sur la nomination des présidents de l’audiovisuel public.

Ce texte est hypocrite, car vous maintenez le lien entre pouvoir politique et pouvoir de nomination sans assumer pour autant les responsabilités du pouvoir politique en maintenant une nomination directe, à l’exemple de ce qu’a fait la précédente majorité.

M. le rapporteur. Avis très défavorable.

Choisissez clairement une ligne d’attaque ou de défense ! On ne peut pas dire une chose et son contraire ! Vous voulez supprimer l’article 5 parce que vous considérez que le dispositif prévu par la loi de 2009 est satisfaisant et vous proposez en même temps la création d’un Haut conseil de l’audiovisuel public qui heurte de plein fouet la logique de la même loi de 2009. En outre, si votre amendement était adopté, que resterait-il des prérogatives du Parlement dont vous nous accusez pourtant de le dessaisir ? Si vous êtes d’accord pour changer radicalement la loi de 2009, vous ne pouvez nous accuser de la détricoter ! Nous restons quant à nous dans le paradigme « CSA » – dont nous changeons quelques-unes des modalités de fonctionnement –, mais vous vous situez, vous, dans un cadre complètement différent.

De plus, la disposition selon laquelle le Parlement pourrait formuler un avis sur les nominations effectuées par le CSA n’est pas constitutionnelle, car elle porterait atteinte à la séparation des pouvoirs. Le projet de loi prévoit d’ailleurs des dispositions visant à maintenir un lien, lors de la nomination, entre les présidents de l’audiovisuel public et le Parlement, mais dans des formes adaptées et compatibles avec la Constitution.

Mme la ministre. Le gouvernement est défavorable à l’amendement.

Monsieur Riester, je ne peux pas vous laisser dire que nous dessaisissons le Parlement ; celui-ci sera au contraire associé, comme il ne l’a jamais été, à la désignation des membres du CSA, lesquels nommeront les présidents des sociétés de l’audiovisuel public.

J’indique que le futur projet de loi sur la régulation du secteur de l’audiovisuel traitera de questions techniques, et son impact symbolique sera à l’évidence moins fort que celui du texte que nous examinons. Sa discussion devrait intervenir à beaucoup plus brève échéance que ce que vous annoncez, soit avant la fin de l’année 2013 et non en 2014.

L’autorité de régulation de l’audiovisuel a nommé les présidents des sociétés de l’audiovisuel public entre 1982 et 2009. Ce système a fonctionné en garantissant aux personnalités nommées une indépendance bien supérieure à celle des présidents désignés après 2009. La procédure de nomination directe par le Président de la République a jeté le discrédit et la suspicion sur les personnes concernées – cela a été reconnu sur plusieurs bancs des assemblées. Je constate d’ailleurs que vous ne souhaitez pas que ce système perdure puisque vous nous proposez la création d’un Haut conseil de l’audiovisuel public. Je note aussi que, si l’on suit votre propre logique, cette solution donnerait lieu au dessaisissement du Parlement que vous dénoncez ; quel paradoxe !

M. Franck Riester. Il n’y a aucune contradiction dans notre position. La majorité précédente avait fait le choix de laisser les nominations à la tête des sociétés de l’audiovisuel public entre les mains du pouvoir politique tout en posant deux conditions : en finir avec l’hypocrisie, et associer le Parlement. Vous revenez sur ces deux éléments !

Vous prétendez vouloir renforcer l’indépendance de l’audiovisuel public ; chiche ! Nous vous proposons de créer un dispositif totalement différent qui, à l’instar de ce qui se passe en Allemagne ou en Grande-Bretagne, coupe définitivement le lien entre le pouvoir politique et les nominations dans l’audiovisuel public. Vous permettrez ainsi à la société française de se réapproprier son audiovisuel public. Ce dispositif sera sans doute plus exigeant en termes d’utilisation de l’argent public et de respect des missions de service public. Comme certains de nos collègues de la majorité l’ont demandé, il associera aussi davantage la société dans sa diversité – associations, chefs d’entreprises, ouvriers… –, et celles et ceux qui représentent les téléspectateurs.

Allez jusqu’au bout de votre logique plutôt que de revenir à un dispositif du passé et de rester dans la posture, dans l’affichage et dans l’hypocrisie ! Votre proposition n’est d’ailleurs absolument pas cohérente avec les pratiques mises en place dans d’autres secteurs comme l’énergie, les transports ou les télécommunications. Elle signe le retour caché à des nominations très politiques.

Mme Martine Martinel. Vous parlez d’hypocrisie et de posture mais, depuis 2009, les choses étaient-elles transparentes et équilibrées ? Le Parlement a-t-il eu le moindre poids sur la nomination de M. Rémy Pflimlin ou sur celle de M. Jean-Luc Hees ? Vous utilisez tous les arguments possibles pour critiquer le projet de loi, parmi lesquels votre idée de créer un Haut conseil de l’audiovisuel public. Quant à vos appels en faveur de l’indépendance de l’audiovisuel, nous aurions aimé les entendre lors de la précédente législature !

M. Franck Riester est un fin connaisseur du secteur et il est intelligent, mais je crains que la posture ne soit plutôt dans son camp ; je pense même que l’on pourrait parler d’une imposture !

M. le président Patrick Bloche. Monsieur Riester, votre raisonnement pose problème quand vous nous dites que le Parlement est dessaisi. Celui-ci tient directement les pouvoirs que lui attribuait la loi de 2009 de la nomination des présidents de l’audiovisuel par l’exécutif. Le fait que l’exécutif se dessaisisse du pouvoir de nomination ne peut qu’entraîner la disparition du vote destiné à entériner les choix du chef de l’État…

M. Franck Riester. Il n’en demeure pas moins que jusqu’à ce jour le Parlement donne son avis sur la nomination des présidents de l’audiovisuel public, et que ce ne sera plus le cas demain !

M. le président Patrick Bloche. Le projet de loi vise précisément à renforcer l’indépendance des médias par rapport au pouvoir politique, qu’il s’agisse du Parlement ou du gouvernement. Vous apportez de l’eau à notre moulin !

M. le rapporteur. Vous déplorez que le Parlement ne donne plus son avis, monsieur Riester : c’est au moins qu’il n’y a pas d’hypocrisie ! Vous savez parfaitement que la majorité des trois cinquièmes qui permet au Parlement, selon la loi de 2009, de s’opposer à une nomination par le Président de la République est introuvable !

Lorsque M. Jean-Luc Hees avait été choisi, j’avais parlé d’un président sans projet nommé par un « actionnaire » sans projet ; c’était bien normal car le projet de l’époque se trouvait non dans la nomination, mais dans la révocation – qui n’était soumise à aucun droit de veto du Parlement.

Vous considérez que le projet de loi n’est pas bon parce qu’il dessaisit le Parlement, mais vous voulez aller encore plus loin en retirant à ce dernier tout rôle en matière de nomination au CSA : ce n’est pas cohérent. Il faut choisir !

Tous vos arguments ne servent qu’à défendre la loi de 2009 à laquelle nous ne sommes pas favorables. Mes deux voisins, M. Patrick Bloche et Mme Aurélie Filippetti, l’ont combattue dans l’hémicycle avec moi, et nous y avons passé suffisamment de temps à l’époque pour que notre volonté d’en finir avec ce texte soit ferme !

M. Rudy Salles. Depuis trente ans les réformes se succèdent. Plus ou moins réussies, elles permettent de progresser pas à pas, mais elles sont immanquablement contestées par l’opposition du moment, quelle qu’elle soit. Pourtant, sur un sujet majeur pour la démocratie, je rêve que nous parvenions à trouver un consensus sur un système transparent et démocratique. Monsieur le rapporteur, nous n’en prenons malheureusement pas le chemin ! Au regard du déroulement de nos débats et du peu d’intérêt porté par votre majorité et par le gouvernement aux amendements de l’opposition, vous devrez assumer ce texte sans nous. Nous comptions voir si la majorité et le gouvernement étaient prêts à s’ouvrir aux propositions de l’opposition ; au point où nous en sommes – mais les choses peuvent encore changer –, je constate que ce n’est pas le cas !

M. Christian Kert. Il me semble qu’un malentendu persiste entre M. Frank Riester et le rapporteur.

Nous estimons que le « petit » projet de loi qui nous est proposé ne permettra pas d’assurer efficacement l’indépendance de l’audiovisuel public qui passe plus, à notre sens, par la pérennité du financement que par les nominations. Nous voyons plus loin que votre opération de « détricotage » de la loi de 2009 : nous voulons servir l’audiovisuel public. Pour y parvenir, nous avons besoin de sérénité. Croyez-vous changer vraiment la donne en transférant le pouvoir de nomination du Président de la République au président du CSA, nommé par le même Président de la République ?

M. Franck Riester a imaginé un dispositif différent de celui qui est proposé ; rien d’étonnant à cela ! L’hypothèse qu’il retient avait été étudiée par la « commission Copé » au sein de laquelle, monsieur le président Bloche, nous avions ensemble – du moins durant un certain temps – cherché des solutions.

Madame la ministre, l’objectif du texte que vous nous proposez est relativement restreint ; nous aurions souhaité que ce projet de loi porte une bien plus grande ambition en termes de réflexion et d’action.

M. le président Patrick Bloche. Lors des débats de la « commission Copé », nous étions convenus qu’il ne fallait surtout pas modifier le mode de désignation des présidents de l’audiovisuel public par le CSA.

M. Franck Riester. Le rapport de la « commission Copé »  ne préconise pas que le CSA continue de nommer les présidents de l’audiovisuel public : il suggère que cela soit fait par les conseils d’administration des chaînes, sur proposition du CSA.

M. le président Patrick Bloche. Dans la grande sagesse dont il a su faire preuve, M. Jean-François Copé considérait qu’il n’était pas opportun d’ouvrir le débat sur la question. Le Président de la République avait surpris tout le monde lors de la remise du rapport en décidant de changer le mode de désignation des présidents de l’audiovisuel public.

M. Franck Riester. Je maintiens cependant que la « commission Copé » ne concluait pas qu’il fallait conserver les modes de désignation en l’état !

M. le président Patrick Bloche. En tout état de cause, M. Jean-François Copé ne proposait pas de modifier le mode de désignation, contrairement à ce qui a été fait.

M. le rapporteur. Monsieur Salles, mes propos plaidant en faveur du rejet de l’amendement AC 39 ont pu vous paraître un peu abrupts, mais la suppression de l’article remettrait profondément en cause le dispositif du projet de loi.

Monsieur Riester, la « commission Copé » souhaitait que le Conseil supérieur de l’audiovisuel, « garant de l’indépendance de l’audiovisuel », propose plusieurs candidats aux conseils d’administration des entreprises publiques concernées. La nouvelle procédure mise en place pour la désignation des membres du CSA – qui fait intervenir les commissions permanentes compétentes des deux chambres – préservera et même confortera ce rôle de « garant ». Le dispositif proposé ne peut donc que vous donner entière satisfaction.

La Commission rejette l’amendement AC 39.

Elle est saisie de l’amendement AC 38 de M. Franck Riester.

M. Franck Riester. Cet amendement vise à prévoir la remise au Parlement, par le gouvernement, d’un rapport sur la création d’un Haut conseil de l’audiovisuel public.

M. le rapporteur. Défavorable.

Mme la ministre. Défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

L’amendement AC 37 tombe.

La Commission adopte l’amendement rédactionnel AC 88 du rapporteur.

Elle examine ensuite l’amendement AC 19 de M. Rudy Salles.

M. Rudy Salles. La suppression à l’article 5 de la mention de « la société en charge de l’audiovisuel extérieur de la France » que propose cet amendement vise, non pas à supprimer cette mission du service public audiovisuel, mais à l’intégrer dans un projet global, qui pourrait voir le jour au sein de Radio France.

M. le rapporteur. Défavorable. Je comprends votre préoccupation, mais il me semble qu’elle n’entre pas dans le champ du projet de loi.

Mme la ministre. Défavorable. La société en charge de l’audiovisuel extérieur de la France, qui porte désormais le nom de France Médias Monde, bénéficie du travail extrêmement satisfaisant effectué par les équipes de Mme Marie-Christine Saragosse, à la suite du rapport remis en juin 2012 par M. Jean-Paul Cluzel. Il montre la pertinence de la décision de créer une nouvelle dynamique pour cette société. Votre amendement n’améliorerait pas la situation, bien au contraire. Il créerait même un vide juridique concernant la nomination du président d’une entreprise qui se remet sur les rails et se porte beaucoup mieux qu’il y a un an.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement AC 1 de M. Patrick Bloche.

M. le président Patrick Bloche. Comme l’avait souhaité alors M. Didier Mathus, rapporteur de la loi du 1er août 2000 modifiant la loi du 30 septembre 1986, nous proposons, dans un souci de transparence, que les décisions de nomination des présidents des sociétés de l’audiovisuel public soient motivées par le CSA.

M. le rapporteur. Avis favorable.

Mme la ministre. Favorable. Cet amendement va dans le sens de la jurisprudence du Conseil constitutionnel. Dans le même esprit, le gouvernement sera également favorable aux amendements du rapporteur visant à renforcer l’obligation pour le CSA de rendre compte de ses décisions.

La Commission adopte l’amendement à l’unanimité.

La Commission en vient à l’amendement AC 16 de M. Rudy Salles.

M. Rudy Salles. Nous regrettons vivement que le Parlement n’ait plus son mot à dire sur la nomination des présidents de chaînes… Cet amendement vise à y remédier.

M. le rapporteur. Défavorable. Compte tenu du dispositif mis en place et du principe de séparation des pouvoirs, il est constitutionnellement impossible que le Parlement donne un avis sur les nominations effectuées par le CSA.

Mme la ministre. Défavorable. Dans un délai de deux mois suivant sa nomination par le CSA, la personnalité concernée pourra, à l’invitation de la commission des affaires culturelles de chaque chambre, présenter son projet devant ladite commission. Le dialogue existera bien, mais, pour les raisons constitutionnelles que M. le rapporteur vient d’énoncer, il sera postérieur à la désignation.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est saisie de l’amendement AC 17 de M. Rudy Salles.

M. Rudy Salles. Les candidatures devraient être présentées au CSA et évaluées par ce dernier sur la base d’un projet de contrat d’objectif pour la durée du mandat. Tel est l’objet de cet amendement.

M. le rapporteur. Le contrat d’objectif naît d’une relation entre la tutelle et le responsable de l’opérateur public concerné. Comment imaginer qu’un candidat non encore désigné puisse en disposer ? En revanche, il ne me semblerait pas choquant que les candidats soient « cadrés » par une lettre de mission rédigée par le gouvernement. Les sociétés de l’audiovisuel public ont besoin de continuité stratégique et les candidats doivent s’inscrire dans la stratégie définie par l’actionnaire.

Mme la ministre. M. le rapporteur a raison : le contrat d’objectif ne peut être passé qu’entre la société publique concernée et la tutelle, notamment sur la base d’éléments financiers dont un simple candidat ne dispose pas. En revanche, monsieur Salles, votre amendement deviendrait pertinent si l’on remplaçait la notion de « contrat d’objectif » par celle de « projet stratégique ».

M. le président Patrick Bloche. Le nouvel alinéa inséré à l’article 47-4 de la loi de 1986 serait donc ainsi rédigé : « Les candidatures sont présentées au Conseil supérieur de l’audiovisuel et évaluées par ce dernier sur la base d’un projet stratégique. » Monsieur Salles, acceptez-vous que votre amendement soit ainsi rectifié ?

M. Rudy Salles. Cette version me convient.

La Commission adopte à l’unanimité l’amendement AC 17 ainsi rectifié.

Elle en vient à l’amendement AC 18 de M. Rudy Salles.

M. Rudy Salles. Dans un souci d’indépendance, les nominations à la tête des entreprises publiques de l’audiovisuel doivent exclusivement se fonder sur une compétence reconnue, ce qui exclut tout type d’engagement politique connu.

M. le rapporteur. Le dispositif que nous avons mis en place permettra de garantir la compétence et l’indépendance. Vous semblez indiquer que la compétence est incompatible avec l’engagement politique ! Avis défavorable.

Mme la ministre. Défavorable. Nous sommes tous la preuve vivante que l’engagement politique n’est pas infamant. On peut aussi avoir eu un engagement politique et ne plus en avoir. Cet amendement nous amènerait à nous mêler de ce qui ne nous regarde pas nécessairement, et il n’est pas compatible avec la liberté de conscience et d’engagement.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AC 15 de M. Rudy Salles.

M. Rudy Salles. Cet amendement tend à supprimer l’alinéa 3 de l’article 5 du projet de loi, qui ne permet aucunement au Parlement de peser sur la nomination des présidents de chaînes publiques, pas plus que d’émettre des analyses susceptibles d’une traduction sur les orientations stratégiques de ces sociétés.

M. le rapporteur. Il est intéressant que les personnes nommées s’engagent sur un rapport d’orientation devant le Parlement. Avis défavorable.

Mme la ministre. La transmission d’un rapport par les présidents nouvellement nommés est important pour la bonne information du Parlement. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements de précision AC 89 et AC 90 du rapporteur.

Elle est alors saisie de l’amendement AC 2 de M. Patrick Bloche.

M. le président Patrick Bloche. Mme Sylvie Tolmont et M. Jean-Pierre Allossery m’ont fait part de leur intention de cosigner cet amendement, ce qui porte à vingt-quatre le nombre de signataires.

Le projet de loi prévoit de rendre au CSA le pouvoir de désignation des présidents des sociétés de l’audiovisuel public, mais les présidents qui seront en fonction après l’adoption de ce texte auront été désignés selon l’ancienne formule, ce qui posera un problème évident de légitimité, voire de crédibilité, très pénalisant pour ces dirigeants et pour leurs entreprises.

L’amendement, qui prévoit qu’il est mis fin aux mandats en cours dans les trois mois suivant la promulgation de la loi, vise donc en quelque sorte à « remettre les compteurs à zéro » : le nouveau mode de désignation offre une occasion aux dirigeants dont le mandat est en cours, ou à d’autres candidats, de repasser devant le CSA avec un nouveau projet stratégique et de nouvelles idées. Ce serait un précieux facteur de dynamisation, surtout en une période où certaines sociétés de l’audiovisuel public connaissent les incertitudes que vous savez. Cet amendement a reçu, au-delà même du groupe socialiste, un excellent accueil dont j’ai moi-même été surpris.

M. le rapporteur. Pourrions-nous entendre Mme la ministre ?

Mme la ministre. Je comprends le souci des parlementaires de vouloir laver les présidents des sociétés de l’audiovisuel public de la suspicion inhérente à la loi du 5 mars 2009. Je rappelle cependant que l’objectif du projet de loi qui vous est soumis est l’indépendance de l’audiovisuel public, garantie par le mode de nomination des membres du CSA et des présidents des sociétés. Démettre ces derniers de leurs fonctions serait contradictoire avec cette volonté d’indépendance sans précédent, pour laquelle la loi entend poser un socle de principes très fort.

Par ailleurs, nous travaillons avec les trois dirigeants de l’audiovisuel public. L’avenant au contrat d’objectifs et de moyens (COM) de France Télévisions a été présenté le 11 juillet au conseil d’administration de cette société. À France Médias Monde, les choses sont en très bonne voie : Mme Marie-Christine Saragosse, nommée depuis moins d’un an, remet l’entreprise dans le bon chemin et travaille sur un COM qui pourra être signé avec l’État et permettra de définir des priorités très fortes. Quant à M. Jean-Luc Hees, à la tête de Radio France, il a très bien réalisé jusqu’à présent les objectifs de son COM et les résultats de l’entreprise, notamment en termes d’audience, sont très satisfaisants. Il semblerait donc délicat de fragiliser des entreprises qui ont été soumises à une forte instabilité du fait de la loi de mars 2009.

L’objectif du gouvernement est d’assurer l’indépendance, la sécurité et la stabilité de ces entreprises. Je vous demande donc de retirer cet amendement.

M. Christian Kert. Monsieur le président, le ton patelin avec lequel vous avez présenté votre amendement cache une manœuvre : le président de France Télévisions ne plaît pas dans vos rangs – non que vous remettiez en cause son degré de compétence, mais parce qu’il a été nommé par le précédent gouvernement. Cette démarche n’est guère compatible avec le grand intérêt que vous avez manifesté jusqu’à présent pour l’audiovisuel public et pour celles et ceux qui le dirigent.

Je me réjouis d’observer que – par souci de neutralité, je suppose – le rapporteur n’a pas cosigné cet amendement, ce qui témoigne de certaines réserves à l’égard d’une proposition attentatoire au travail réalisé par les présidents de France Télévisions et de Radio France et par l’ensemble des personnels. En voulant ainsi mettre un terme à un mandat engagé et parfaitement rempli, vous alimentez vous-même un climat de suspicion. Nous tenons à vous exprimer notre étonnement de vous voir adopter cette démarche.

M. Franck Riester. J’ajouterai aux propos de M. Christian Kert que cet amendement interromprait par une décision politique un mandat dont la durée était précisément fixée par la loi. Ce procédé est loin de l’objectif affiché de renforcer l’indépendance de l’audiovisuel public. Il ne suffit pas, madame la ministre, de répéter ce message pour en faire la réalité : nous n’y croyons pas et pensons que vous revenez à un système qui manquait de clarté. L’adoption de cet amendement irait à l’inverse de l’objectif consistant à dissocier la décision politique et l’exercice des mandats des présidents de l’audiovisuel public.

M. Guénhaël Huet. Je fais miens les arguments de MM. Christian Kert et Franck Riester et souscris bien volontiers à une partie de l’argumentation de Mme la ministre, selon laquelle, au nom même de l’indépendance, il ne faudrait pas aller trop loin. En outre, sur le plan pratique, ce ne serait pas la première fois que, lors de l’instauration d’un nouveau système de nomination, on laisserait ceux qui ont été nommés précédemment achever leur mandat. Bien que la mesure proposée ne s’apparente pas vraiment à de la rétroactivité, la sagesse voudrait qu’on laisse les mandats aller à leur terme.

M. Franck Riester. J’observe que le rapporteur n’est pas cosignataire de l’amendement et je m’étonne qu’il ne s’exprime pas sur cette question.

M. le président Patrick Bloche. Le rapporteur n’a signé aucun des amendements du groupe socialiste : celui-ci n’est donc pas une exception.

Chers collègues, vos arguments ne m’ont pas convaincu. En effet, vous parlez d’hommes, alors que je parle des entreprises : ce qui compte, c’est l’avenir des trois sociétés de l’audiovisuel public visées et de leur personnel, le contenu de leurs programmes, leur visibilité et, à terme, leur équilibre financier.

Deux des trois présidents actuels de l’audiovisuel public ont été nommés par M. Nicolas Sarkozy. Je sais que l’un d’entre eux a très mal vécu la suspicion dont il a fait l’objet lors de sa nomination. Le mot de « suspicion » a été employé à juste titre et je me souviens de ce qui a été dit à l’époque, notamment à propos de la matinale de France Inter et des humoristes qui ont alors été remerciés. Je n’ai aucun compte à régler ni aucun contentieux avec les personnes visées, notamment avec l’une d’entre elles, que vous avez particulièrement ciblée – peut-être parce que son mandat doit aller jusqu’à l’été 2015. C’est l’entreprise qui compte.

Vous demandez de la stabilité et de la sécurité mais, pour France Télévisions, par exemple, où M. Rémy Pflimlin a été nommé en 2010 et a signé son COM en 2011, quelle stabilité et quelle visibilité peut-on attendre ? Je rappelle au sujet de ce COM – que nous avions dénoncé comme insincère en 2011 et qui prévoyait des recettes publiques et publicitaires irréalisables – que le gouvernement actuel, au bout de deux années seulement, a dû engager une longue discussion avec l’entreprise pour parvenir à l’adoption d’un avenant qui en modifie fondamentalement la nature.

Il serait simple de « remettre les compteurs à zéro ». Le CSA pourrait, si nous le voulions, dans les trois mois suivant la promulgation de la loi, se prononcer sur un nouveau projet stratégique donnant une nouvelle visibilité aux trois entreprises, notamment à la plus importante d’entre elles en termes budgétaires, et articulant un COM sincère et réalisable dans les cinq ans à venir. Ayant l’honneur de représenter notre assemblée au conseil d’administration de France Télévisions, je me réjouis que celui-ci ait adopté l’avenant au COM, mais il l’a fait avec des clauses d’aléa et l’on sait bien qu’il s’agissait avant tout de corriger un COM qui n’avait plus aucun sens.

Plus encore que le changement de mode de désignation des présidents, ce qui importe est que nous permettions à chacune des sociétés de l’audiovisuel public de retrouver l’indépendance budgétaire. La vraie clé de l’indépendance, c’est être indépendant à l’égard de la dotation budgétaire de l’État, comme l’était France Télévisions voilà cinq ans, alors qu’elle n’avait pour ressources que la redevance et les ressources publicitaires. Or, nous savons tous les conséquences de la suppression de la publicité en soirée, intervenue en 2009. Nous sommes tous, sur tous les bancs, attachés à l’audiovisuel public, et je ne conteste à personne cet attachement. L’enjeu est donc de faire en sorte que la dotation budgétaire de l’État baisse tendanciellement et que les ressources propres, les recettes publicitaires et la redevance permettent à France Télévisions de retrouver cette indépendance budgétaire. Cela suppose de la conviction et de la détermination. Il faut avoir le courage de faire des économies réelles qui ne conduisent pas, comme cela a été présenté jeudi dernier en conseil d’administration, à une baisse tendancielle du coût des programmes – même si certaines économies peuvent être une preuve de bonne gestion.

Mon attachement à l’audiovisuel public et à l’indépendance des médias vaut le vôtre. Cet amendement n’est pas destiné à couper une tête ou à régler des comptes. Il n’y a aucune stratégie d’empêchement : rien n’empêcherait M. Rémy Pflimlin de présenter à nouveau sa candidature devant le CSA pour un nouveau mandat. Mais si nous ne saisissons pas l’occasion qui s’offre dans les trois mois suivant la promulgation de la loi et l’entrée en vigueur du nouveau mode de désignation, je crains que nous ne mesurions, hélas trop tard, les conséquences de ce que nous n’aurons pas fait aujourd’hui.

M. Franck Riester. Comme M. Christian Kert, je pense que cet amendement est une manœuvre destinée à couper des têtes. Nous constatons partout cette attitude : dans les établissements publics culturels, dans les administrations culturelles. J’ai dénoncé, lors de la discussion générale, les pratiques de nomination de ce gouvernement et de cette majorité, qui visent à couper les têtes de toutes celles et tous ceux qui ont pour seul tort d’avoir été nommés par l’ancienne majorité ou d’avoir travaillé de près ou de loin avec elle. Cela vous déplaît de l’entendre, mais c’est la vérité. Que vous le vouliez ou non, c’est ainsi que cela sera perçu !

Par ailleurs, je ne peux pas laisser dire que la décision de supprimer la publicité a été dramatique pour les finances de France Télévisions, car la loi a prévu des compensations qui ont protégé l’entreprise du retour de flamme qu’ont connu tous les acteurs de l’audiovisuel lorsque la crise a réduit les recettes publicitaires. De plus, nous avions garanti les dotations versées à France Télévisions, même s’il a fallu procéder à un petit réajustement de 15 millions d’euros en 2011 du fait d’une augmentation de la publicité.

Si France Télévisions connaît aujourd’hui des difficultés, monsieur le président, c’est parce que le gouvernement que vous et vos collègues de la majorité soutenez a pris la grave décision de couper en 2012 la dotation budgétaire de plus de 150 millions d’euros. Cette décision inacceptable fragilise les finances de France Télévisions et n’a été que partiellement compensée par l’augmentation de la contribution à l’audiovisuel public.

Ne nous faites donc pas le procès d’avoir mis en danger les finances de l’audiovisuel public, car nous nous étions engagés à procéder à des compensations et nous l’avons fait.

M. le rapporteur. Je ne me suis, en effet, pas exprimé sur cet amendement, car j’étais favorable à une « remise à zéro » qui aurait touché à la fois le CSA et les présidents de l’audiovisuel public, mais qui s’est révélée impossible pour des raisons constitutionnelles. Il n’est pourtant pas inutile de marquer un « temps zéro » pour la compréhension d’un nouveau dispositif législatif.

Par ailleurs, il est indéniable que des garanties ont été apportées à France Télévisions par le budget de l’État : pour ce dernier, la réforme a coûté 745,7 millions d’euros, malgré les deux taxes que vous avez créées pour assurer l’équilibre financier et qui n’ont pas suffi ! Quant aux 15 millions d’euros que vous évoquez, n’oubliez pas que la loi de finances rectificative pour 2011 a enlevé encore 6 millions d’euros alors que les recettes publicitaires étaient inchangées, sans parler des 6 millions supplémentaires du gel qui a suivi.

M. Guénhaël Huet. Quel que soit le président d’une société de l’audiovisuel public et quel qu’en soit le mode de nomination, les réalités financières s’imposeront à lui. Je comprends donc mal le lien que vous faites, monsieur le président, entre les aspects financiers et la nomination du président. Je crains qu’il n’y ait autre chose derrière votre argumentation, ce qui ne serait pas de bon augure et, pour tout dire, serait surprenant de votre part.

M. le président Patrick Bloche. Respecter les convictions des autres n’interdit pas d’avoir ses propres convictions et de les défendre avec passion.

M. Rudy Salles. Monsieur le président, je ne voudrais pas que cet amendement vous fasse apparaître comme un coupeur de têtes. La chasse aux sorcières ne vous ressemble pas. On peut concevoir une remise des compteurs à zéro, mais à condition de pouvoir reconduire les mêmes dirigeants pour qu’ils puissent achever leur mandat.

Je présenterai tout à l’heure à ce propos l’amendement AC 13, qui tend à préciser que les mandats des membres du CSA sont interrompus du fait de l’entrée en vigueur de la présente loi mais qu’ils peuvent néanmoins être reconduits dans leurs fonctions dans les conditions prévues par la présente loi. Votre amendement pourrait être sous-amendé dans le même sens par l’ajout de la phrase suivante : « Ils peuvent néanmoins être reconduits dans leurs fonctions, dans les conditions prévues par la présente loi, pour terminer leur mandat ». On éviterait ainsi d’interrompre les fonctions de présidents qui n’ont pas démérité. Je ne comprendrais pas que vous procédiez à une manœuvre ne visant qu’à se débarrasser de certains d’entre eux.

M. Christian Kert. Une question technique se pose : « exécuterez »-vous deux membres du CSA dès la promulgation de la loi qui modifie le nombre des membres de ce conseil – sachant qu’un tiers de ceux-ci sont élus jusqu’en 2015, un autre tiers jusqu’en 2017 et le troisième tiers jusqu’en 2019 ? Les présidents de l’audiovisuel public seront-ils nommés par un CSA qui ne serait pas conforme à l’esprit de la loi ?

Mme Martine Martinel. Je m’exprimerai d’autant plus librement que j’ai rédigé un rapport à charge sur France Télévisions et que je ne suis pas cosignataire de l’amendement AC 2. Il est insupportable d’entendre des mots tels qu’« exécution » ou « coupeur de têtes ».

Il est par ailleurs étonnant d’entendre affirmer avec un tel lyrisme que France Télévisions est particulièrement bien gérée, que la suppression de la publicité lui a apporté une manne financière et que la majorité actuelle a, depuis son arrivée, creusé un trou financier. Dire que France Télévisions est bien gérée, c’est vivre au pays des Bisounours ou de la poupée Barbie.

M. le président Patrick Bloche. Je le répète : il n’existe aucune stratégie d’empêchement. Mon amendement permet aux dirigeants qui le souhaitent de se présenter à nouveau devant le CSA.

Mme la ministre. Monsieur Riester, je n’accepte pas qu’on puisse parler de « coupeur de têtes ». Je n’ai nommé aucun de mes amis – copains ou coquins – dans quelque établissement public que ce soit, mais j’ai mis en place des commissions qui travaillent, dans l’immense majorité des cas, en bonne intelligence avec les collectivités locales. J’ignorais que, dans notre pays, on nommait les gens à vie ! Certains mandats arrivaient à leur terme et leurs titulaires ont été prévenus un an à l’avance lorsqu’ils avaient atteint la limite d’âge ou avaient exercé un nombre suffisant de mandats successifs. Il n’y a aucune chasse aux sorcières. Les seules personnes renvoyées de leurs fonctions à ma demande – et je l’assume –l’ont été parce qu’elles avaient mis les entreprises où elles travaillaient dans un état de délabrement social, avec du harcèlement – moral, voire sexuel. Je n’accepte donc pas que l’on puisse tenir de tels propos.

M. Franck Riester. Peut-être ne l’acceptez-vous pas, madame la ministre, mais nous continuerons à le faire.

Je ne citerai qu’un exemple : le président du Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC), qui avait pour seul tort d’avoir été le conseiller culturel du précédent Président de la République, a vu, au mépris de la tradition, son mandat raccourci alors qu’il s’en acquittait à la satisfaction de tous et a été remplacé par une ancienne ministre socialiste appartenant à la promotion Voltaire de l’École nationale d’administration – celle même dont est issu le Président de la République. Une telle nomination est commandée davantage par l’amitié que par l’intérêt général et c’est là un exemple typique de la manière dont ce gouvernement nomme les responsables d’administrations et les présidents d’établissements publics.

M. le président Patrick Bloche. Je retire cet amendement, mais comme je suis persuadé de son intérêt pour les trois entreprises publiques, notamment pour France Télévisions, je poursuivrai mes efforts pour convaincre l’exécutif en attendant l’examen du texte en séance publique, le mercredi 24 juillet.

L’amendement AC 2 est retiré.

La Commission adopte l’article 5 modifié.

Article 6

Réforme du mode de révocation des présidents
des sociétés nationales de programme

Dans sa rédaction actuelle, issue de la loi du 5 mars 2009 relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision, l’article 47-5 de la loi du 30 septembre 1986 précise que le retrait du mandat des présidents des sociétés nationales de programme peut intervenir par décret motivé, après avis, également motivé, du Conseil supérieur de l’audiovisuel émis à la majorité des membres qui le composent et avis public des commissions chargées des affaires culturelles des deux assemblées.

Contrairement à la procédure de nomination, la révocation des présidents des sociétés nationales de programme ne fait donc pas intervenir le droit de veto des commissions chargées des affaires culturelles du Parlement. Le projet de loi prévoyait initialement la possibilité pour les commissions parlementaires de s’opposer à la révocation à une majorité des trois cinquièmes, précision qui a toutefois été censurée par le Conseil constitutionnel au motif qu’un tel droit de veto n’a été attribué aux commissions parlementaires, par l’article 13 de la Constitution qu’à l’égard des décisions de nomination du Président de la République et non des décisions de révocation (40).

Par cohérence avec la réforme de la procédure de nomination proposée par l’article 5 du présent projet de loi, le présent article propose que le mandat des présidents des sociétés nationales de programme puisse leur être retiré dans des conditions identiques à celles qui président à leur nomination, prévues au premier alinéa de l’article 47-4, à savoir par décision motivée du CSA, statuant à la majorité des membres qui le composent.

La rédaction proposée pour le premier alinéa de l’article 47-5 de la loi du 30 septembre 1986 correspond à celle qui était applicable avant l’entrée en vigueur de la loi du 5 mars 2009.

*

La Commission adopte l’article 6 sans modification.

Après l’article 6

La Commission est saisie de l’amendement AC 54 de Mme Isabelle Attard.

Mme Isabelle Attard. L’offre gratuite sur la télévision numérique terrestre (TNT) est large ; cet amendement vise à ce qu’elle le soit également sur la radio numérique terrestre (RNT), en empêchant notamment que s’y substituent des formules d’abonnement payantes.

M. Marcel Rogemont, rapporteur. L’idée de garantir une offre gratuite existe déjà pour la télévision à travers l’article 30-1 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de consommation. Je propose donc à Mme Isabelle Attard de retirer son amendement pour le réécrire, afin de mieux l’insérer dans cette loi.

Mme Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication. Je partage l’avis du rapporteur.

Mme Isabelle Attard. Je retire l’amendement, pour le retravailler d’ici à l’examen en séance.

M. le président Patrick Bloche. Je suis en tout cas favorable à cette disposition : comme vous, madame Attard, je pense que la radio sera numérique ou ne sera pas.

L’amendement AC 54 est retiré.

La Commission examine l’amendement AC 43 de Mme Isabelle Attard.

Mme Isabelle Attard. Dans l’esprit du travail engagé au Sénat par M. André Gattolin et le groupe écologiste, cet amendement tend à réglementer les messages publicitaires diffusés au cours des programmes destinés à la jeunesse sur les chaînes publiques. Ces messages sont loin d’être anodins, car ils s’adressent à un public qui, âgé de moins de douze ans, n’est en mesure ni de les décrypter ni de faire des choix de consommation éclairés.

La Suède a tenté en 2001 d’étendre à l’Union européenne, dont elle assurait la présidence, sa propre réglementation, laquelle interdit la diffusion d’écrans publicitaires au cours des émissions pour la jeunesse. Sur la Radio-Télévision belge francophone (RTBF), de tels écrans sont interdits cinq minutes avant et après ces émissions et, en Allemagne, ils ne peuvent les interrompre. En France, la mesure du problème n’a été prise que dans le cadre de la lutte contre l’obésité : le temps est sans doute venu de s’y pencher à nouveau.

M. le rapporteur. Mme la ministre a lancé une consultation sur la réglementation en ce domaine. Une réflexion me paraît effectivement nécessaire, mais l’article 14 de la loi de 1986 répond à vos préoccupations, madame Attard, puisqu’il permet au Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) d’exercer un contrôle vigilant sur les émissions publicitaires. L’Autorité de régulation professionnelle de la publicité joue également son rôle. Avis défavorable.

Mme la ministre. Aux termes de la loi de 1986, les règles concernant la publicité peuvent être fixées par décret en Conseil d’État, décret qui peut évidemment encadrer la publicité destinée aux jeunes publics. Je reste ouverte à la réflexion sur le sujet, mais celle-ci me semble plutôt devoir être menée dans le cadre de la consultation sur la publicité que j’ai lancée lors des « Assises de l’audiovisuel ».

Mme Isabelle Attard. La France, comme les États-Unis, a toujours privilégié l’autorégulation du secteur et les chartes de bonnes pratiques, au détriment de mesures plus incitatives ; mais, puisqu’un futur projet de loi comportera des dispositions sur la publicité, je retire l’amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission en vient à l’amendement AC 44 de Mme Isabelle Attard.

Mme Isabelle Attard. Nous traiterons de la mesure proposée dans le cadre d’un débat plus large ; je retire donc cet amendement. Cependant, nous ne devons pas seulement veiller au contenu des messages publicitaires, mais aussi aux moyens de leur diffusion : différents procédés permettent en effet de contourner la réglementation, qu’il s’agisse de l’utilisation des basses pour le volume sonore ou du nombre d’images à la seconde.

L’amendement est retiré.

Article 6 bis (nouveau)

Protection du secret des affaires dans le cadre de la procédure de règlement des différends devant le CSA

Le présent article issu d’un amendement du rapporteur adopté par la Commission vise à renforcer le respect du secret des affaires dans le cadre de la procédure de règlement des différends devant le Conseil supérieur de l’audiovisuel. 

L’objectif est de faciliter l’accès du CSA aux informations susceptibles de l’éclairer tout en s’assurant que les documents confidentiels des entreprises qui mettent en cause le secret des affaires ne soient pas divulgués.

*

La Commission examine l’amendement AC 73 du rapporteur.

M. le rapporteur. L’amendement tend à compléter la première phrase du deuxième alinéa de l’article 17 de la loi de 1986 relatif à la procédure de règlement des différends devant le CSA par les mots : « , dans le respect du secret des affaires ». Nous avons déjà adopté un amendement qui participe du même esprit.

Mme la ministre. Certains enjeux économiques justifient cet amendement, auquel je suis donc favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Article 6 ter (nouveau)

Modification des dispositions relatives au rapport public annuel du CSA

Le présent article issu de plusieurs amendements adoptés par la Commission modifie les dispositions relatives au rapport public annuel du Conseil supérieur de l’audiovisuel figurant à l’article 18 de la loi du 30 septembre 1986.

Aux termes de cet article, « Le Conseil supérieur de l'audiovisuel établit chaque année un rapport public qui rend compte de son activité, de l'application de la présente loi, du respect de leurs obligations par les sociétés et l'établissement public mentionnés aux articles 44 et 49 de la présente loi. Ce rapport est adressé au Président de la République, au Gouvernement et au Parlement avant la fin du premier trimestre. Dans ce rapport, le Conseil supérieur de l'audiovisuel peut suggérer les modifications de nature législative et réglementaire que lui paraît appeler l'évolution technologique, économique, sociale et culturelle des activités du secteur de l'audiovisuel. Il peut également formuler des observations sur la répartition du produit de la redevance et de la publicité entre les organismes du secteur public. »

La Commission a souhaité approfondir le contrôle du Parlement en prévoyant (au 3° du présent article) la présentation obligatoire du rapport annuel d’activité du CSA par son président, en audition publique devant les commissions chargées des affaires culturelles de l’Assemblée nationale et du Sénat. « Chaque commission pourra adopter un avis sur l’application de la loi, qui sera adressé au Conseil supérieur de l’audiovisuel et rendu public. Cet avis peut comporter des suggestions au Conseil supérieur de l’audiovisuel pour la bonne application de la loi ou l’évaluation de ses effets. »

Le rapport d’information de l’Assemblée nationale, présenté en octobre 2010 par MM. René Dosière et Christian Vanneste, sur les autorités administratives indépendantes (AAI) estimait à juste titre que l’indépendance de ces autorités ne pouvait plus s’entendre sans un rapprochement avec le Parlement. L’obligation de rendre compte au Parlement est la contrepartie nécessaire de l’indépendance.

Le contrôle du Parlement doit ainsi être renforcé tant en amont, à travers la procédure de nomination des membres, qu’en aval, à travers une évaluation de l’action menée par l’autorité.

Dans cet esprit, la Commission a prévu (au 1° du présent article) que le CSA rend compte, dans son rapport annuel, de l’impact économique des décisions d’autorisation qu’il délivre aux services de communication audiovisuelle diffusés par voie hertzienne.

Compte tenu de la situation concurrentielle et économique des marchés du secteur audiovisuel, pour assurer une gestion optimale du domaine public de l’État dont elle a la charge, l’instance de régulation de l’audiovisuel doit en effet tenir compte de l’intérêt du public mais également de la pertinence économique et industrielle de ses choix.

Cette prise en compte doit être effective avant le lancement d’un appel à candidatures mais également a posteriori. Le CSA devra ainsi évaluer chaque année la pertinence de ses choix et leur impact sur l’économie du secteur audiovisuel.

La Commission a également adopté (au 2° du présent article) une disposition visant à assurer une restitution annuelle du CSA, dans son rapport d’activité, de l’évolution de la concentration et du pluralisme dans le secteur privé de l’audiovisuel radio et télévision. 

Il s’agit notamment de dissiper l’incertitude actuelle sur la situation des principaux groupes radiophoniques à l’égard du plafond d’habitants desservis par leurs réseaux. Ce plafond applicable à la diffusion de la radio en mode analogique est inscrit à l’article 41 de la loi du 30 septembre 1986. Il fixe à 150 millions le nombre total d’habitants pouvant être desservis par un même groupe pour l’exploitation de ses réseaux radiophoniques, seuil au-delà duquel une nouvelle autorisation ne peut plus lui être délivrée. Ce plafond de 150 millions résulte de la loi n° 94-88 du 1er février 1994.

Il convient de rappeler que le CSA n’a rendu public aucun chiffre sur la couverture des réseaux nationaux de radios entre 2003 et 2010, et qu’il a refusé de communiquer  tout chiffre à la rapporteure pour avis de la Commission des affaires culturelles et de l’éducation sur les crédits de l’audiovisuel public dans le cadre du projet de loi de finances pour 2013. En décembre 2012, le CSA a publié deux séries de chiffres contradictoires sans indiquer laquelle faisait foi. De 2003 à ce jour, il a pourtant attribué aux principaux groupes privés un millier de fréquences FM supplémentaires sans que leur impact sur le pluralisme ait pu être mesuré.

Une telle publication dans le rapport public annuel rendant compte de l’activité du CSA éviterait une situation nuisible au travail du législateur sur l’évaluation de l’application de la loi et l’opportunité de la faire évoluer.

Enfin, la Commission a prévu (également au 2° du présent article) que le rapport annuel public d’activité du CSA rend compte du développement des télévisions locales et de leurs moyens de financement.

Les télévisions à vocation locale se développent en France grâce au soutien financier des collectivités territoriales. En 2012 plus de la moitié de leurs recettes provenaient en moyenne de ces collectivités.

Si l’article 1426-1 du code général des collectivités territoriales fait obligation à ces services de télévision locale de transmettre au CSA les COM passés avec les collectivités, d’autres contrats avec ces collectivités contribuent à procurer des ressources publiques aux télévisions à vocation locale.

Il convient que le Parlement soit informé non seulement du devenir de ces services de télévision à vocation locale mais aussi des sources de financement, notamment publiques, assurant le développement de chacun d’entre eux.

*

La Commission examine l’amendement AC 62 du rapporteur.

M. le rapporteur. Le CSA a attribué une fréquence à la Ligue 1 de football, qui ne l’a utilisée que pendant six ou sept mois ; il en a même attribué une autre à une société qui a fait faillite avant de commencer d’émettre ! Nous sommes donc fondés à lui demander d’évaluer l’impact de ses décisions, dans le cadre de son rapport annuel, en prenant en compte leurs effets économiques. Tel est l’objet de cet amendement.

Mme la ministre. Favorable : il est en effet souhaitable que le CSA évalue l’impact de ses décisions, ex ante et ex post, et que les parlementaires en soient informés.

L’amendement est adopté.

La Commission examine les amendements identiques AC 4 de Mme Colette Langlade et AC 53 de Mme Isabelle Attard.

Mme Colette Langlade. Le CSA n’a rendu public aucun chiffre sur la couverture des réseaux nationaux de radios entre 2003 et 2010 ; il a même refusé de communiquer tout chiffre à la rapporteure pour avis de notre Commission sur les crédits de l’audiovisuel public du projet de loi de finances pour 2013.

L’amendement vise à lever les incertitudes sur la situation des principaux groupes radiophoniques à l’égard du plafond de 150 millions d’habitants desservis par leurs réseaux.

La publication de ces données dans le rapport annuel du CSA permettrait de remédier à une situation nuisible à l’évaluation de l’application de la loi par le législateur.

Mme Isabelle Attard. Je n’ai rien à ajouter aux arguments de Mme Langlade.

M. le rapporteur. Avis favorable.

Mme la ministre. Je suis également favorable à ces amendements susceptibles d’éclairer les parlementaires sur une compétence essentielle du CSA, le respect de la garantie du pluralisme. La publication, dans le rapport annuel du CSA, de données actualisées sur les seuils de concentration du secteur permettra de dissiper certains doutes et de lever des obstacles à une réflexion éclairée du législateur. Toutefois, il serait techniquement plus pertinent d’insérer ces amendements après le deuxième alinéa de l’article 18 de la loi de 1986, et de viser les articles 39 à 41-4 de la même loi.

M. le président Patrick Bloche. Les amendements identiques seraient donc ainsi rédigés :

« Après le deuxième alinéa de l’article 18 de la même loi, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

“Ce rapport comporte une présentation des mesures prises en application des dispositions des articles 39, 40, 41, 41-1, 41-1-1, 41-2, 41-2-1, 41-3 et 41-4 visant à limiter la concentration et à prévenir les atteintes au pluralisme. Il comporte notamment un état détaillé présentant la situation des entreprises audiovisuelles concernées à l’égard des limites qui y sont fixées.” »

M. Franck Riester. Nous sommes favorables à ces amendements identiques comme nous l’étions à l’amendement précédent, sous réserve d’une vérification de la rectification proposée.

Une plus grande transparence est en effet souhaitable pour le contrôle de l’application de la loi, même si nous pouvons nous interroger sur son contenu, notamment sur des règles un peu trop contraignantes en matière de seuils de concentration – nous formulerons des propositions sur ce point à l’avenir.

La Commission adopte à l’unanimité les amendements ainsi rectifiés.

Puis elle examine l’amendement AC 5 de Mme Martine Martinel.

Mme Martine Martinel. Les télévisions locales se développent grâce au soutien financier des collectivités territoriales ; nous souhaitons que, dans un souci de transparence, le rapport public du CSA rende compte du développement de ces services durant l’année précédente et de tous les financements publics qu’ils ont reçus.

M. le rapporteur. Mme Martine Martinel a raison. Dans le rapport pour avis qu’elle a établi sur le projet de loi de finances pour 2013, la citation de la réponse du CSA sur ce sujet est suivie d’un tableau sur la « part des financements publics dans les recettes des télévisions locales » : les rubriques relatives au chiffre d’affaires, aux subventions d’exploitation et aux prestations aux collectivités locales y sont toutes renseignées par la mention « NC ». En somme, le CSA ne fait pas son travail de contrôle de la situation financière des télévisions locales : je comprends donc la pugnacité dont elle fait preuve à travers cet amendement. Avis favorable.

Mme la ministre. Plus de cinquante autorisations pour des chaînes locales ont été délivrées depuis le lancement de la TNT. Un bilan est donc en effet nécessaire ; néanmoins, je crains que le CSA ne dispose pas des moyens nécessaires pour obtenir les données concernées auprès des collectivités territoriales. Je propose donc une autre rédaction, telle que celle-ci :

« Le rapport visé au premier alinéa fait le point sur le développement et les moyens de financement des services de télévision à vocation locale. »

Mme Martine Martinel. Je suis d’accord avec cette rectification. Le CSA devrait à tout le moins demander, de façon régulière, ces données aux collectivités, et les télévisions locales devraient préciser les subventions qu’elles ont reçues. Certains financements arrivent en effet par des voies indirectes, d’où la fréquence de la mention « NC » au sein du tableau évoqué.

M. le rapporteur. Je suis également favorable à la rectification proposée.

La Commission adopte l’amendement ainsi rectifié.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements AC 61 du rapporteur, AC 57 de M. Christian Kert et AC 50 de Mme Isabelle Attard.

L’amendement AC 50 fait l’objet d’un sous-amendement AC 95 de Mme Martine Martinel.

M. le rapporteur. Je retire mon amendement, pour me rallier à l’amendement AC 50, qui me semble plus complet ; j’invite également M. Christian Kert et M. Franck Riester à retirer le leur, pour les mêmes raisons.

M. Franck Riester. Je retire l’amendement AC 57.

Mme Isabelle Attard. Puisque le projet de loi renforce les compétences des commissions des affaires culturelles du Sénat et de l’Assemblée, je propose que celles-ci interrogent le CSA sur son rapport public annuel. Cela me semble être un minimum pour exercer notre pouvoir de contrôle et formuler des suggestions.

M. le président Patrick Bloche. Chaque année, nous serions donc amenés à auditionner le président du CSA.

Mme Martine Martinel. L’audition du seul président, qui représente le CSA et assume la responsabilité de ses décisions, me semble suffire : tel est l’objet de mon sous-amendement. Lorsqu’une commission auditionne le Premier président de la Cour des comptes, par exemple, elle ne lui demande pas forcément de venir avec les présidents des différentes chambres. Au reste, en général, plus les intervenants sont nombreux, moins les auditions sont claires.

Mme Isabelle Attard. Je souscris à ce sous-amendement.

M. Franck Riester. Nous considérons nous aussi que la rédaction de l’amendement AC 50 est la plus pertinente. Nous sommes également favorables au sous-amendement défendu par Mme Martine Martinel.

Mme la ministre. Le gouvernement est favorable à l’amendement ; quant à décider s’il vaut mieux que les commissions entendent tous les membres du CSA ou son seul président, il s’en remet à la sagesse de la Commission.

Les amendements AC 61 et AC 57 sont retirés.

La Commission adopte le sous-amendement AC 95.

Puis elle adopte à l’unanimité l’amendement AC 50 sous-amendé.

Article 6 quater (nouveau)

Création d’une commission de la modernisation de la diffusion audiovisuelle

Cet article issu d’un amendement adopté par la Commission porte création d’une « commission de la modernisation de la diffusion audiovisuelle » et a trait à la gestion du spectre des fréquences hertziennes, laquelle est au cœur des missions du Conseil supérieur de l’audiovisuel.

L’article 21 de la loi de 1986 prévoit que le CSA et l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) rendent un avis sur la répartition des fréquences entre l’audiovisuel et les télécommunications. Conformément à l’objectif du présent projet de loi de « renforcer la cohérence de l’action » du CSA, comme l’indique l’exposé des motifs, il importe dans ce domaine qu’il se concerte systématiquement avec l’ARCEP sur ces questions, ce que ne prévoit pas la loi de 1986, en l’absence d’instance commune aux deux autorités.

C’est pourquoi le présent article prévoit la création d’une commission de la modernisation de la diffusion audiovisuelle comprenant un représentant du CSA, un représentant de l’ARCEP ainsi que quatre députés et quatre sénateurs désignés dans leur assemblée respective par les deux commissions permanentes chargées des affaires culturelles et des affaires économiques, à parité parmi leurs membres, tous les membres exerçant leurs fonctions à titre bénévole.

Il est proposé que cette commission puisse faire connaître à tout moment ses observations et ses recommandations sur les mesures nécessaires à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et leur mise en œuvre. 

Le spectre hertzien, en tant que bien public, appartient à la nation qui doit en décider les grands usages. Il s’agit d’une ressource rare et stratégique à l’ère de la révolution numérique, qui possède, à ce titre, de fortes potentialités économiques et sociales.

Par voie de conséquence, toute décision d’en modifier substantiellement l’usage devrait faire l’objet d’un débat et d’une concertation impliquant les autorités de régulations et les parlementaires pour en éclairer les finalités et les modalités.

Cette commission pourrait ainsi se prononcer aussi bien sur la réaffectation des fréquences de la bande des 700 Mhz que sur le processus de migration de la TNT vers les nouvelles normes de diffusion (DVB-T2) et de compression (extinction du MPEG 2, généralisation du MPEG 4 et introduction du HEVC).

*

La Commission examine l’amendement AC 6 de M. Patrick Bloche.

M. le président Patrick Bloche. Cet amendement devrait être adopté à l’unanimité tant l’inquiétude qui lui a donné naissance nous est commune : il s’agit du sort des fréquences la bande des 700 MHz. Nous souhaiterions que ces fréquences ne soient pas cédées dans leur totalité aux opérateurs de télécommunications et que certaines soient réaffectées aux sociétés audiovisuelles afin de leur permettre d’améliorer la qualité de leur diffusion, via notamment la migration de la TNT vers de nouvelles normes de diffusion et de compression. Le gouvernement devant très prochainement rendre ses arbitrages, il m’a semblé opportun que la représentation nationale engage une réflexion sur l’utilisation de cette bande des 700 MHz dans le cadre d’une nouvelle version de la « commission du dividende numérique ». J’insiste sur la nécessité d’adopter cet amendement dès cette première lecture, la commission mixte paritaire sur le projet de loi ne devant intervenir qu’à l’automne.

La commission de la modernisation de la diffusion audiovisuelle dont je vous propose la création associerait des représentants du CSA et de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP), quatre députés et quatre sénateurs désignés par chacune des commissions compétentes, issus de la majorité et de l’opposition.

M. le rapporteur. Je suis plutôt favorable à la création d’une telle instance.

Mme la ministre. Je comprends tout à fait les préoccupations des signataires de cet amendement quant à la préservation de l’espace hertzien. Il y a en tout état de cause un problème de calendrier, le gouvernement devant prendre sa décision en septembre. C’est pourquoi je vous propose de réunir immédiatement, sans attendre la promulgation de la loi, un groupe de travail afin d’associer le Parlement aux décisions relatives à l’avenir de la TNT.

M. Franck Riester. La question de la réaffectation de la bande des 700 MHz est d’autant plus importante que les élus locaux et les acteurs de l’audiovisuel se sont beaucoup impliqués dans la mise en place de la TNT, afin non seulement d’accroître la qualité de la diffusion télévisuelle et la diversité de l’offre de chaînes gratuites, mais aussi de libérer des fréquences au bénéfice d’une montée en gamme du secteur audiovisuel. Nous avons donc été très surpris d’apprendre que le gouvernement s’apprêtait à aller contre cet objectif. C’est la raison pour laquelle nous sommes favorables à votre proposition, monsieur le président, même si nous aurions préféré ne pas la découvrir au dernier moment, comme beaucoup d’autres. Nous sommes également favorables à la proposition de Mme la ministre de créer un groupe de travail, à la condition que l’opposition parlementaire y soit associée. En tout état de cause, l’un n’empêche pas l’autre et notre Commission enverrait un signal fort en affirmant à l’unanimité son adhésion à la création d’une telle instance.

Mme la ministre. L’opposition serait bien évidemment représentée au sein du groupe de travail. Celui-ci pourra se réunir sans délai afin d’éclairer la décision que le gouvernement doit prendre en septembre.

M. le président Patrick Bloche. Je pense que le vote de cet amendement et la mise en place d’un tel groupe de travail sont deux démarches complémentaires : il nous sera loisible, si l’existence d’une telle instance s’avérait sans objet du fait de la mise en place du groupe de travail, de supprimer cette disposition.

La Commission adopte l’amendement à l’unanimité.

Après l’article 6

La Commission examine l’amendement AC 7 de M. Patrick Bloche.

M. le président Patrick Bloche. Le présent amendement vise à insérer dans la loi du 30 septembre 1986 un article 24-1 qui ouvrira au CSA la possibilité d’apprécier l’opportunité économique et technologique des autorisations d’usage du domaine public hertzien.

M. le rapporteur. J’ai la faiblesse de penser que l’amendement AC 64, que je vais vous présenter dans quelques instants, satisfait mieux l’objectif, tout à fait justifié, poursuivi par votre amendement. C’est pourquoi je vous demande de le retirer.

L’amendement AC 7 est retiré.

Article 6 quinquies (nouveau)

Obligation pour le CSA d’effectuer une étude d’impact avant d’autoriser une modification de convention

Cet article résulte d’un amendement du rapporteur adopté par la Commission.

La délivrance des autorisations d'usage de la ressource radioélectrique pour chaque nouveau service diffusé par voie hertzienne terrestre est subordonnée à la conclusion d’une convention passée entre le Conseil supérieur de l’audiovisuel au nom de l’État et la personne qui demande l’autorisation. Ces conventions portent notamment sur la durée et les caractéristiques générales du programme, les obligations de diffusion et de contribution au développement de la production.

La Commission a prévu que toute autorisation de modification d’une convention susceptible d’avoir un impact significatif sur le marché en cause, soit précédée d’une étude d’impact réalisée par le CSA et rendue publique.

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La Commission examine l’amendement AC 92 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement vise à renforcer la responsabilité économique du CSA. Il prévoit en effet que toute autorisation de modification de l’une des conventions qui encadrent les autorisations d’usage de la ressource radioélectrique est précédée d’une étude d’impact, rendue publique, lorsqu’elle est susceptible d’avoir une incidence significative sur le marché en cause.

Mme la ministre. De même que nous sommes favorables à l’obligation de conduire une étude d’impact préalable au lancement de nouveaux services audiovisuels, nous pensons qu’une telle étude s’impose quand la modification de l’une des conventions encadrant les services diffusés par voie hertzienne peut avoir un impact sur les conditions de la concurrence, par exemple.

La Commission adopte l’amendement.

Article 6 sexies (nouveau)

Possibilité de réserver l’accès d’un appel à candidature pour le lancement d’un service national de télévision en haute définition à des chaînes nationales déjà autorisées en diffusion standard

Le présent article issu d’un amendement du rapporteur adopté par la Commission vise à permettre au Conseil supérieur de l’audiovisuel de réserver un appel à candidatures pour le lancement d’un service national de télévision en haute définition (HD) à des chaînes existantes en définition standard (SD).

Le passage en HD des chaînes actuellement diffusées en SD constitue un impératif qu’il convient de faciliter.

On sait que l’usage des fréquences hertziennes ne peut être autorisé qu’après appel à candidatures. Or la solution consistant à réserver un appel à candidatures aux seules chaînes, payantes ou gratuites, existantes en diffusion standard pour privilégier un passage en haute définition est juridiquement très fragile et le risque contentieux est important.

En effet, à droit constant, le respect du principe d’égalité constitue un obstacle difficilement surmontable à une telle limitation de l’appel à candidatures dès lors qu’un appel doit respecter le principe d’égalité, en étant ouvert à tous les candidats, quelle que soit leur qualité, sans discrimination.

C’est pourquoi le présent article modifie l’article 30-1 de la loi de 1986 afin de permettre au CSA de procéder à un appel aux candidatures en vue de l’usage d’une ressource radioélectrique pour un service de télévision à vocation nationale, diffusé par voie hertzienne terrestre en mode numérique et en haute définition, en substituant ou en ajoutant une diffusion en haute définition à une définition standard d’un service de télévision déjà autorisé.

*

La Commission examine l’amendement AC 67 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement vise à permettre au CSA de réserver un appel à candidatures pour le lancement d’un service national de télévision en haute définition (HD) à des chaînes existantes en définition standard (SD), le passage en HD des chaînes actuellement diffusées en SD constituant un objectif prioritaire.

Mme la ministre. Favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Article 6 septies (nouveau)

Obligation d’une étude d’impact et possibilité de différer le lancement d’un appel à candidatures pour l’utilisation de la ressource radioélectrique

Le présent article résultant de deux amendements du rapporteur adoptés par la Commission modifie l’article 31 de la loi du 30 septembre 1986 afin de préciser les conditions de lancement d’appels à candidatures pour des autorisations d’usage de la ressource radioélectrique susceptibles de modifier de façon importante le marché en cause.

En application de l’article 31 de la loi du 30 septembre 1986, « si les décisions d'autorisation d'usage de la ressource radioélectrique sont susceptibles de modifier de façon importante le marché en cause, le Conseil supérieur de l'audiovisuel procède, préalablement au lancement des procédures prévues aux articles 29, 30, 30-1, 30-5 et 30-6, à une consultation. »

La loi n° 2009-1572 du 17 décembre 2009 relative à la lutte contre la fracture numérique a modifié l'article 31 pour dispenser le CSA de procéder à une nouvelle consultation publique lorsqu'il a déjà procédé, dans les trois ans qui précèdent, à une consultation publique portant sur un champ géographique semblable pour des services de télévision ou de radio de même nature.

Comme l’exposé des motifs de l’amendement du sénateur Retailleau dont cette disposition est issue l’indiquait, il s’agissait de « ne pas retarder inutilement le lancement de radios ou télé locales » et certainement pas d’autoriser le CSA à s’abstenir de lancer de telles consultations pour des appels à candidature à l’échelle nationale.

Néanmoins, lors du lancement, en 2012, de six nouvelles chaînes gratuites en haute définition sur la TNT, représentant une augmentation de 30 % de l'offre nationale gratuite disponible, le CSA, en s'appuyant sur cette disposition, n’a pas procédé à une consultation publique.

Il apparaît pourtant indispensable que le CSA procède systématiquement à des consultations publiques lorsque des autorisations sont susceptibles de modifier de façon importante le marché concerné. C’est pourquoi la Commission a supprimé cette disposition (1° du présent article).

La Commission a également souhaité (au 2° du présent article) renforcer la prise en compte par le CSA de l’impact, notamment économique, de ses décisions d’attribution de la ressource radioélectrique, tant en matière de radio que de télévision ou de services de médias audiovisuels à la demande.

Il est ainsi prévu que le conseil devra, préalablement au lancement d’un appel à candidatures, réaliser une étude d’impact permettant de mesurer les éventuelles conséquences d’un tel appel pour le secteur audiovisuel, notamment au plan économique.

Dans l’hypothèse où cette étude d’impact, ainsi que la consultation publique qu’il aura réalisées, montreraient que la conjoncture économique n’est pas favorable au lancement de nouveaux services, le CSA pourrait décider de différer le lancement de cet appel pour deux ans maximum. Il pourrait, dans les mêmes conditions, après étude d’impact et consultation publique, proroger ce délai pour une durée maximum de deux ans. 

*

La Commission est saisie de l’amendement AC 63 du rapporteur.

M. le rapporteur. Tirant les leçons du lancement des six chaînes gratuites de la TNT, nous proposons que le CSA ne puisse plus délivrer des autorisations d’usage de la ressource radioélectrique susceptibles de modifier de façon importante le marché en cause sans procéder au préalable à une consultation publique.

Mme la ministre. Je suis tout à fait favorable à votre proposition. Dans un marché marqué par des mutations extrêmement rapides, il est nécessaire que l’instance de régulation dispose d’évaluations actualisées. Ajoutées aux études d’impact préalables, ces consultations permettront au CSA de fonder ses décisions.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement AC 64 du rapporteur.

M. le rapporteur. L’objet du présent amendement est de renforcer la prise en compte par le CSA de l’impact, notamment économique, de ses décisions d’attribution de la ressource radioélectrique, tant en matière de radio que de télévision ou de services de médias audiovisuels à la demande. Il prévoit que le CSA devra, préalablement au lancement d’un appel à candidatures, réaliser une étude d’impact permettant de mesurer les éventuelles conséquences d’un tel appel pour le secteur audiovisuel, notamment au plan économique.

Dans l’hypothèse où cette étude d’impact, ainsi que la consultation publique qu’il aura réalisée, montreraient que la conjoncture économique n’est pas favorable au lancement de nouveaux services, le CSA pourrait décider de différer pendant deux ans le lancement de cet appel, ce délai pouvant être prorogé, dans les mêmes conditions, pour une durée maximale de deux ans. Il serait excessif de fixer une durée supérieure, l’objectif de la loi étant que ces fréquences soient utilisées.

Mme la ministre. Je suis favorable à cette innovation importante, qui permettra d’aligner le régime des décisions du CSA sur celles des autres autorités publiques. Cette faculté de différer pendant deux ans le lancement d’un appel à candidatures garantira contre tout risque de lancement précipité de nouveaux services audiovisuels, comme cela a été le cas pour le lancement des six nouvelles chaînes de la TNT, alors que les conditions économiques n’étaient pas optimales. En permettant notamment au CSA de proroger ce délai de deux ans après une nouvelle étude d’impact, votre proposition satisfait à la fois les exigences du développement de l’audiovisuel et celles de la liberté de communication.

M. le président Patrick Bloche. Il me semble, à la réflexion, que la rédaction de mon amendement AC 7, précédemment retiré, complète le vôtre. Il est probable en conséquence que je le redéposerai en vue de la séance publique.

M. Franck Riester. La faculté de différer ainsi l’attribution des fréquences disponibles me semble dangereuse pour la vitalité du secteur audiovisuel et contraire au principe de la loi de 1986. Elle me paraît en outre s’opposer à notre souci de réaffecter les « fréquences en or » à l’audiovisuel. Je vous rappelle que de nombreuses radios ont besoin de ces fréquences. L’argument du contexte économique, avancé par certains acteurs, ne me semble pas pertinent : depuis que je suis né, j’ai toujours vu notre pays dans une situation économique difficile.

M. le rapporteur. Nous ne remettons pas en cause le principe selon lequel les fréquences doivent être utilisées : nous nous contentons d’en moduler l’application. On peut se demander si l’existence des six chaînes supplémentaires de la TNT participe à la vitalité économique du secteur audiovisuel… Deuxièmement, cette possibilité de différer l’attribution des fréquences ne pourra pas excéder une durée de quatre ans.

Mme la ministre. Par rapport à votre amendement, monsieur le président, la rédaction proposée par le rapporteur a l’avantage, en complétant l’article 31 de la loi de 1986 plutôt que de proposer un nouvel article 24-1, de préserver la faculté de préemption des pouvoirs publics.

La Commission adopte l’amendement.

Après l’article 6

La Commission est saisie de l’amendement AC 51 de Mme Isabelle Attard.

Mme Isabelle Attard. Cet amendement vise à conforter l’indépendance, notamment éditoriale, des chaînes audiovisuelles vis-à-vis des compagnies transnationales vivant de la commande publique. Toute compagnie détenant au moins 10 % des parts d’une société de service de télévision serait exclue des procédures de soumission aux marchés publics au-delà d’un seuil fixé par décret.

M. le rapporteur. Défavorable.

Mme la ministre. Le gouvernement est défavorable à cet amendement. Une telle mesure ne doit être décidée qu’à l’issue d’une concertation sereine avec toutes les parties en cause. Surtout, elle excède le champ de ce premier projet de loi. La deuxième étape législative que je vous ai annoncée me semble plus opportune pour développer de telles réflexions.

M. Franck Riester. Je note le malaise que cet amendement suscite et j’ai hâte de voir ce futur projet de loi sur l’audiovisuel. Nous déplorons en tout état de cause que le débat sur de nombreux sujets essentiels soit ainsi repoussé à une échéance que vous-même ignorez.

Mme Isabelle Attard. Je retire cet amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement AC 52 de Mme Isabelle Attard.

Mme Isabelle Attard. Cet amendement vise à préserver la pluralité du secteur audiovisuel en interdisant à une même personne, physique ou morale, de détenir plusieurs chaînes quand leur audience cumulée dépasse un plafond déterminé.

M. le rapporteur. Les dispositifs anti-concentration seront abordés dans le cadre d’un autre projet de loi. Par ailleurs, il en existe déjà.

Mme la ministre. Cet amendement reprend une proposition phare de la « commission Lancelot » sur la concentration des médias. Je suis sensible aux interrogations qu’il soulève, mais elles méritent une discussion approfondie, qui viendra en son temps.

Mme Isabelle Attard. Je retire l’amendement. Nous le redéposerons en séance publique ou dans le cadre du prochain projet de loi sur l’audiovisuel.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement AC 8 de M. Patrick Bloche.

M. le président Patrick Bloche. J’ai déposé cet amendement pour susciter le débat sur un sujet important. Le texte renforce les pouvoirs et l’indépendance du CSA, et donc ses moyens de régulation. Le paysage audiovisuel ne cesse d’évoluer : les chaînes qui ont été lancées sur un mode payant peuvent rencontrer des obstacles liés au contexte économique ou à un nombre insuffisant d’abonnés, et souhaiter être diffusées en clair. Inversement, des chaînes diffusées en clair peuvent souhaiter faire évoluer leur offre en faisant appel à la rémunération des usagers. Or, en l’état actuel de la jurisprudence, un tel changement de catégorie est regardé comme une modification substantielle de l’autorisation accordée par le CSA, si bien que celui-ci ne peut que refuser toute demande en ce sens. Afin de renforcer ses pouvoirs de régulation, cet amendement propose donc de modifier l’article 42-3 de la loi du 30 septembre 1986 pour permettre au CSA de donner son agrément au passage d’une chaîne de TNT de la diffusion payante à la diffusion gratuite.

On pourrait considérer que cet amendement privilégie les intérêts de certains, mais, comme il s’agit de ceux que j’ai malmenés dans d’autres débats sur l’audiovisuel, ma démarche est au-dessus de tout soupçon : elle n’est motivée que par l’intérêt général. Sans doute le pluralisme de l’information ne serait-il guère renforcé si l’une des trois chaînes privées d’information venait à disparaître. Je ne me fais guère d’illusions sur le destin de cet amendement : du moins le débat aura-t-il été lancé.

M. le rapporteur. Je comprends l’esprit de cet amendement. Convenons néanmoins que le passage d’une diffusion payante à une diffusion gratuite est, plus qu’une modification substantielle, un changement de paradigme et de nature. En autorisant le CSA à agréer un tel changement, on met à mal le principe même de l’autorisation. Rien n’interdisait à TF1 ou à M6 de transformer leur chaîne payante en chaîne gratuite lorsque le CSA a autorisé les six nouvelles chaînes de la TNT en 2012. Il leur suffisait de présenter la candidature de LCI ou de Paris Première, au lieu de développer les concepts de HD1 et de 6ter. Il est dommage qu’ils n’aient pas su tirer parti de cette opportunité. Qu’ils assument les décisions qu’ils ont prises !

Mme la ministre. Je comprends le souci de l’intérêt général et du respect du pluralisme qui est le vôtre, monsieur le président. Néanmoins, il s’agit d’attribuer une nouvelle compétence au CSA, ce qui est plus qu’une modification substantielle. Par ailleurs, et comme l’a dit le rapporteur, les chaînes concernées avaient l’occasion de modifier le statut de leurs chaînes au moment de l’appel à candidatures pour les six nouvelles chaînes de la TNT. L’avenir de la TNT fait actuellement l’objet d’une large concertation avec l’ensemble des acteurs concernés. Il convient d’évaluer les impacts de la mesure proposée sur l’ensemble du paysage audiovisuel. Tout cela exige du temps ; je suis donc défavorable à l’amendement.

M. Christian Kert. Le passage de l’opposition à la majorité entraîne bien des révélations. Que n’aurait-on dit, monsieur le président, si nous avions osé tenir le discours sur l’intérêt général des chaînes privées que nous venez de prononcer ! Voter contre cet amendement, ce serait, pour nous, combattre à front renversé, et nous n’irons pas jusque-là, car nous comprenons la nécessité d’assurer la pérennité d’une grande chaîne d’information. Mais ce n’est pas sans une certaine délectation que nous vous avons entendu évoquer le sujet. Je comprends les hésitations de Mme la ministre. Quant à nous, nous nous contenterons sans doute de nous abstenir…

M. Franck Riester. Au-delà du ton patelin que vous avez employé, monsieur le président, je salue la subtilité de votre présentation. Vous n’en soulevez pas moins une vraie question, et l’enjeu pour le pluralisme et la diversité de l’information dans notre pays est important. Le sujet méritait donc un travail en profondeur ; il eût fallu organiser des auditions, rencontrer les principaux acteurs du système, et non traiter le problème au détour d’un amendement déposé à la hâte ce matin. Une fois encore, nous regrettons que le gouvernement n’ait pas jugé bon de présenter une grande loi sur l’audiovisuel, et se borne à cette loi d’affichage, alors même que les enjeux sont de taille et que l’avenir de LCI – pour ne pas la nommer – se joue dans quelques mois. Nous venons d’affirmer que le CSA ne peut prendre de décisions sans étude d’impact. Le législateur ne peut pas davantage en prendre sans y réfléchir à deux fois. C’est la raison pour laquelle nous nous abstiendrons sur cet amendement – même s’il soulève une grave question.

M. le président Patrick Bloche. Je vais retirer l’amendement. Je voulais susciter le débat : il a eu lieu, et je m’en réjouis. J’ai été conduit, en des temps qui ne sont pas si anciens, à exprimer une vive réaction à la suite de l’accord que le CSA avait donné à TF1 pour acquérir NT1 et TMC, les deux chaînes du groupe AB, et à Canal Plus pour acquérir Direct 8 et Direct Star, les deux chaînes du groupe Bolloré. Cela a provoqué un phénomène de concentration, mais aussi un déséquilibre, puisqu’un grand groupe audiovisuel, qui joue un rôle irremplaçable pour la création cinématographique dans notre pays et a pour cœur de cible des abonnés, a mis un pied dans la diffusion en clair. Pour préserver les grands équilibres et maîtriser ce phénomène de concentration, nous avons donc intérêt à conduire d’abord une réflexion de nature économique. L’avenir de LCI est menacé ; à moyen terme, nous n’aurons sans doute plus que deux chaînes d’information. Et je pourrais aussi évoquer le cas de Paris Première, qui souffre de sa diffusion sous forme payante.

Je tiens à préciser que l’amendement visait simplement à donner au CSA un pouvoir qu’il n’a pas aujourd’hui et qu’il aurait été le seul à exercer, sachant qu’il le fait déjà pour les radios.

M. le rapporteur. Il est certain qu’il serait préférable d’avoir trois chaînes d’information. Encore faut-il qu’elles puissent vivre. Le bénéfice d’une troisième chaîne d’information en continu gratuite ne va pas de soi ; je dirais même que, sur ce point, l’incertitude subsiste. En tout état de cause, le débat n’est pas tranché.

Permettez-moi de revenir sur un autre point. Lors de l’autorisation des six nouvelles chaînes de la TNT en 2012, le CSA a décidé que TF1 et M6 bénéficieraient chacune d’une chaîne. Elles avaient la liberté de définir ces chaînes. Sur ce point, vous conviendrez que l’on aurait pu faire mieux en termes de diversité. Encore une fois, les opérateurs privés ont pris des décisions : qu’ils assument leurs choix.

L’amendement est retiré.

Article 6 octies (nouveau)

Agrément par le CSA des modifications du contrôle des sociétés titulaires d’une autorisation d’usage de la ressource radioélectrique

Cet article est issu d’un amendement du rapporteur adopté par la Commission.

Le premier alinéa de l’article 42-3 de la loi du 30 septembre 1986 prévoit la possibilité pour le Conseil supérieur de l’audiovisuel de retirer des autorisations, sans mise en demeure préalable, en cas de modification substantielle des données au vu desquelles elles ont été délivrées, notamment des changements intervenus dans la composition du capital social des titulaires des autorisations. Les modalités de mise en œuvre de ce retrait sont modifiées par l'article 3 du présent projet de loi.

Lorsque le CSA décide de ne pas retirer l’autorisation, une procédure d’agrément n’est à ce jour explicitement prévue que dans le seul cadre d’un changement du titulaire de l’autorisation d’exploiter un service de radio au profit de la société mère ou de la société filiale éventuellement accompagné d’un changement de catégorie (deuxième alinéa de l’article 42-3).

Le présent article a pour objet de conforter la base juridique de la procédure d’agrément mise en œuvre par le conseil en cas de modification de la composition du capital social d’une société titulaire d’une autorisation d’exploiter un service de radio ou de télévision. Une telle disposition est nécessaire afin d'instituer une taxe sur les reventes de fréquences.

Le Conseil constitutionnel dans sa décision relative à la loi de finances rectificative pour 2012 (décision n° 2012-654 DC du 9 août 2012) a annulé l’article créant une telle taxe au motif que l’élargissement des compétences du CSA qu’il prévoyait à cet effet n’avait « pas sa place » dans une loi de finances.

L’article 8 bis de la loi de finances rectificative pour 2012 modifiait en effet l’article 42-3 de la loi de 1986 pour prévoir que tout éditeur de service détenteur d’une autorisation délivrée en vertu des articles 29, 29-1 et 30-1 devait obtenir un agrément du CSA en cas de transfert du contrôle direct ou indirect, au sens de l’article L. 233-3 du code de commerce, de la société titulaire de l’autorisation.  

C’est pourquoi le présent article prévoit explicitement une procédure d’agrément dans le cas d’une modification du contrôle du titulaire d’une autorisation délivrée en application des articles 29, 29-1, 30-1 et 96.

Une telle modification permettra d’organiser l’information du CSA sur les modifications susceptibles de donner lieu au prononcé d’une mesure de retrait et de donner une base législative aux agréments que le conseil délivre aux modifications n’apparaissant pas de nature à remettre en cause les choix opérés lors de l’appel aux candidatures.

Le CSA appréciera si les modifications envisagées sont de nature à compromettre l’impératif de pluralisme et l’intérêt du public eu égard, le cas échéant, aux engagements pris par les opérateurs intéressés pour en atténuer ou en compenser les effets notamment économiques et en matière de concurrence. Ainsi, cet agrément devra-t-il notamment tenir compte des conditions économiques et financières du secteur.

*

La Commission est saisie de l’amendement AC 59 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement vise à prévoir une procédure d’agrément par le CSA en cas de modification de la composition du capital social d’une société titulaire d’une autorisation d’exploiter un service de radio ou de télévision. Une telle disposition est nécessaire pour pouvoir instituer une taxe sur les reventes de fréquences. Dans sa décision du 9 août 2012 relative à la loi de finances rectificative pour 2012, le Conseil constitutionnel a en effet annulé l’article créant une telle taxe au motif que l’élargissement des compétences du CSA qu’il prévoyait à cet effet n’avait pas sa place dans une loi de finances. Nous mettons donc en place un dispositif qui permettra ensuite de taxer les reventes de fréquences.

Mme la ministre. Je vous avais annoncé que j’étais favorable à l’instauration d’un mécanisme de taxation de la revente des fréquences. Celle-ci nécessite la mise en place d’une procédure d’agrément par le CSA, qui est prévue par cet amendement. J’y suis donc favorable. La seconde étape consistera à instaurer le dispositif fiscal en loi de finances.

La Commission adopte l’amendement.

Après l’article 6.

La Commission examine, en discussion commune, les amendements AC 46 et AC 47 de Mme Isabelle Attard.

Mme Isabelle Attard. Certaines publicités s’adressent directement aux enfants. Or la psychologie enfantine nous enseigne que, avant huit ans, un enfant perçoit nécessairement la publicité comme une vérité. Nous nous devons donc de protéger nos enfants – qui passent plus de trois heures par jour devant les écrans – des effets de la publicité. L’amendement AC 46 vise à prévoir que « les messages publicitaires diffusés par les services de télévision ne peuvent être conçus de manière à attirer l’attention des enfants et des adolescents de moins de douze ans. » L’amendement AC 47 tend à interdire la publicité clandestine ou le placement de produit – qui consiste à faire référence à un produit, à un service ou à une marque dans un programme, moyennant paiement ou toute autre contrepartie – dans tous les programmes destinés à la jeunesse. Un tribunal a ainsi interdit la diffusion de chansons à la gloire des Pokémon. Cependant, compte tenu de ce qu’a dit Mme la ministre, je retire ces amendements. Nous en reparlerons dans le cadre du prochain projet de loi.

Les amendements sont retirés.

La Commission est saisie de l’amendement AC 49 de Mme Isabelle Attard.

Mme Isabelle Attard. L’amendement AC 49 est défendu.

M. le rapporteur. Avis défavorable. Les préoccupations dont cet amendement fait état sont déjà prises en compte dans le cahier des charges et dans les COM des chaînes publiques.

Mme la ministre. Même avis.

L’amendement est retiré.

La Commission examine ensuite, en discussion commune, les amendements AC 9 de M. Patrick Bloche et AC 70 du rapporteur.

M. le président Patrick Bloche. Loin de moi l’idée de vous inviter à un échange de bons procédés, monsieur le rapporteur, mais il me serait agréable que vous vous ralliiez à mon amendement. Nos amendements ont en effet le même objectif : ils visent à permettre aux commissions permanentes chargées des affaires culturelles à l’Assemblée nationale et au Sénat de bénéficier d’un avis public du CSA sur l’exécution des COM de France Télévisions, de Radio France, de la société chargée de l’audiovisuel extérieur et de l’Institut national de l’audiovisuel (INA) avant de procéder à l’audition des présidents de l’audiovisuel public. Chaque année, ces derniers viennent présenter l’exécution de leur COM à la Commission des finances et à notre Commission. Nous exercerions notre fonction de contrôle de manière plus pertinente, nous aurions une vision plus complète et plus objective de la situation, si nous pouvions être éclairés par un avis du CSA. Mon amendement prévoit également la saisine pour avis motivé du CSA sur les projets de COM, ainsi que sur tout projet d’avenant des sociétés nationales de programme et de l’INA.

M. le rapporteur. Même s’il existe une forme d’autosaisine du CSA, il est difficile de lui demander de donner un avis sur les projets de COM, qui résultent d’une discussion entre l’autorité de tutelle et chaque opérateur.

En revanche, je vous rejoins avec mon propre amendement en ce qui concerne l’exécution des COM. Il est d’autant plus intéressant pour les commissions permanentes de disposer de l’avis du CSA que ce dernier est également saisi du renouvellement éventuel d’un président de l’audiovisuel public. Pour résumer, je suis favorable à ce que le CSA nous transmette ses rapports annuels sur l’exécution des COM, mais non à ce qu’il donne un avis sur les projets de COM et d’avenants. France Télévisions et Radio France produisent déjà un rapport sur l’exécution de leur COM, qui devrait faciliter d’autant le travail du CSA.

Mme la ministre. Je pense pour ma part qu’il est tout à fait possible de soumettre les projets de COM et les projets d’avenants des sociétés nationales de programme et de l’INA au CSA, afin que celui-ci se prononce sur les axes stratégiques des sociétés et leur articulation avec les obligations fixées par les cahiers des charges.

Cependant, j’ai quelques doutes en ce qui concerne le contrôle de l’exécution des COM, qui ne relève pas à proprement parler des compétences du CSA. Le rapport d’exécution rédigé chaque année par les sociétés est transmis aux tutelles : c’est à elles qu’il revient d’assurer le suivi des COM. Je vous propose donc de modifier l’amendement pour que l’avis du CSA porte sur le rapport annuel d’exécution du COM adopté par le conseil d’administration des sociétés. Cela vous permettra de disposer d’un avis du CSA sans empiéter sur les compétences de la tutelle.

M. le président Patrick Bloche. Vous n’êtes donc favorable ni à mon amendement ni à celui du rapporteur en ce qui concerne l’avis sur l’exécution des COM. Ayant été parlementaire, vous comprenez néanmoins l’intérêt que présenterait pour nous cet avis motivé du CSA dans la perspective de l’audition annuelle des présidents de l’audiovisuel public sur l’exécution des COM.

Dans un esprit de conciliation, je m’apprêtais à renoncer à la saisine du CSA sur les projets de COM et les projets d’avenant – à laquelle vous êtes favorable.

M. Franck Riester. Il est essentiel, nous le répétons, de distinguer et de clarifier les compétences des différents organes qui s’occupent d’audiovisuel. Voilà pourquoi nous sommes favorables à un Haut conseil de l’audiovisuel public chargé de nommer les présidents des entreprises publiques et de veiller à ce que celles-ci se conforment à leurs missions de service public. Le CSA resterait chargé de la régulation du secteur, acteurs privés et publics confondus ; l’État, de sa tutelle ; et le Parlement de son contrôle, en particulier en matière financière.

Pour éviter toute confusion, il ne faut pas que le CSA rende un avis sur le COM en amont. En revanche, si, comme le suggère la ministre, il se prononçait en aval sur le rapport d’exécution établi par les entreprises de l’audiovisuel public, cela permettrait d’éclairer l’audition que les parlementaires doivent eux-mêmes tenir.

M. le rapporteur. Il ressort de notre débat que le CSA ne devrait pas émettre un avis sur le COM en amont. Sur ce point, nous ne sommes pas loin d’être unanimes. Reste à savoir si le CSA doit se prononcer sur l’exécution du COM ou sur le rapport d’exécution du COM fourni par France Télévisions et Radio France. Avant de trancher, je propose que nous prenions le temps nécessaire pour rédiger un nouvel amendement au profit duquel je retire le mien.

M. le président Patrick Bloche. Et moi le mien ; peut-être pourrons-nous rédiger un amendement commun, monsieur le rapporteur.

Les amendements sont retirés.

La Commission en vient à l’amendement AC 56 de M. Christian Kert.

M. Christian Kert. Il est nécessaire d’informer le Parlement de façon complète sur la répartition effective du produit de la contribution à l’audiovisuel public. Car, entre ce que nous votons et la réalité, il existe parfois des marges d’ajustement qui nous échappent. Nous proposons donc un dispositif de contrôle et d’information. Pour ne heurter aucune susceptibilité, nous ne parlons pas, dans l’exposé sommaire, de « dessaisissement », mais de « perte d’influence » du Parlement.

M. le rapporteur. Avis défavorable, car l’affectation de la ressource publique figure dans les lois de finances, qu’il s’agisse de la loi de finances initiale, des lois de finances rectificatives ou de la loi de règlement.

M. Christian Kert. Que faites-vous de la volonté du Parlement d’être mieux informé ?

M. le rapporteur. Je veux croire que le Parlement est informé lorsqu’il vote la loi de finances et les lois de finances rectificatives.

Mme la ministre. Avis également défavorable. Le Parlement est en effet informé lors de l’examen de la loi de finances et, en cas de modifications substantielles, lors de l’examen de la loi de finances rectificative. Les ajustements qui ne font pas l’objet d’une loi de finances rectificative sont marginaux et relèvent de la régulation budgétaire courante.

M. le président Patrick Bloche. Monsieur Kert, la répartition du produit de la contribution publique à l’audiovisuel est décidée par le Parlement. Ainsi avons-nous choisi par amendement de procéder en loi de finances pour 2013 à une augmentation exceptionnelle de 2 euros qui s’ajoutait à celle déjà prévue par le gouvernement, et, par un second amendement, d’affecter entièrement à France Télévisions les 50 millions d’euros ainsi dégagés. N’est-ce pas plutôt du gel que vous voulez parler, comme en témoigne votre exposé sommaire ?

M. Christian Kert. Non seulement du gel, mais aussi de certains retards de paiement, par exemple celui qui affecte le versement de la contribution. Plus généralement, nous avons l’impression que l’exécution de la loi de finances n’est pas tout à fait conforme au vote du Parlement, sans que nous en soyons informés. Pourquoi ne pas prévoir un dispositif de contrôle, que ne permet pas la loi de finances ?

M. Franck Riester. Il s’agit là d’un bon amendement. Nous subissons en effet des changements d’attribution dont il conviendrait que les commissions soient alertées. Monsieur le rapporteur, pourquoi ne retenez-vous pas ceux des amendements de l’opposition qui paraissent pertinents au lieu de tous les rejeter d’une main de fer ?

M. le rapporteur. Nous avons déjà une connaissance complète de la répartition grâce aux lois de finances et, en cas de modifications substantielles, aux lois de finances rectificatives. Les modifications mineures et ponctuelles ne sont pas de nature à altérer la répartition définie dans les lois de finances. Si vous avez en tête des exemples précis de changements substantiels qui ne figureraient pas dans une loi de finances rectificative, n’hésitez pas à les citer !

La Commission rejette l’amendement.

Article 6 nonies (nouveau)

Maintien de la publicité entre 6 heures et 20 heures sur les chaînes de France Télévisions

Cet article résultant de deux amendements identiques adoptés par la Commission supprime les dispositions de l’article 53 de la loi du 30 septembre 1986 qui prévoient la suppression de la publicité dans les programmes diffusés par France Télévisions entre 6 heures et 20 heures à compter du 1er janvier 2016.

La garantie des ressources étant une composante de l’indépendance, le présent projet de loi doit être l’occasion de faire un choix définitif sur le sort de la publicité en journée pour favoriser la visibilité de la trajectoire commerciale et financière de France Télévisions et assurer l'avenir de sa régie publicitaire.

Le bilan de la suppression de la publicité après 20 heures, détaillé dans l’exposé général du présent rapport, est en effet très négatif. Pour le téléspectateur, ni la rénovation du modèle culturel du service public ni l’avancement annoncé des horaires des premières et deuxièmes parties de soirée ne se sont concrétisés.

Le remplacement des ressources publicitaires par une dotation du budget de l’État, loin de sécuriser le financement de France Télévisions, a exposé le groupe aux ajustements effectués sur le budget de l’État, d’autant que les taxes mises en place pour compenser « à l'euro près » le coût de cette dotation ne permettent pas son financement, loin s’en faut. Contrairement aux engagements pris par la précédente majorité, la suppression de la publicité en soirée a donc déjà eu un coût qui peut être estimé à 745 millions d'euros pour les finances de l’État.

*

La Commission est saisie de deux amendements identiques AC 60 du rapporteur et AC 40 de M. Christian Kert.

M. le rapporteur. La suppression de la publicité sur France Télévisions après 20 heures aura coûté 745,7 millions d’euros au budget de l’État. Les taxes instaurées pour la financer ne compensent pas les 450 millions de recettes qu’elle a fait perdre à France Télévisions. Il serait aujourd’hui difficile de trouver de nouvelles taxes pour financer la suppression de la publicité avant vingt heures. En 2009, il a d’abord été prévu que la suppression de la publicité diurne sur France Télévisions aurait lieu à la fin de 2011, avant qu’un amendement du Sénat ne la reporte au 1er janvier 2016. Je propose de supprimer purement et simplement cette date et de maintenir la publicité en journée, afin de garantir à France Télévisions la visibilité nécessaire et l’indépendance financière vis-à-vis des dotations d’État, lesquelles ne sont pas toujours conformes à ce qui serait souhaitable.

M. Christian Kert. Si mon amendement est identique, mes arguments ne sont pas tout à fait les mêmes. Il faut donner des gages de pérennité aux équipes de France Télévisions, qui ont besoin de savoir ce qui va se passer après 2016. La suppression de la publicité le soir a posé des problèmes à la régie publicitaire. Rappelons néanmoins que Mme Catherine Trautmann projetait, lorsqu’elle était ministre de la culture, de supprimer totalement la publicité. À l’époque, nous n’étions pas loin de nous retrouver sur cette disposition. Voyez combien le fait de passer de la majorité à l’opposition, et inversement, peut rafraîchir les mémoires !

Mme la ministre. Ne boudons pas notre plaisir à cette heure tardive. Tout à l’heure, l’opposition ironisait sur le gouvernement et la majorité parlementaire ; notre tour est venu de sourire des revirements de l’opposition.

M. le président Patrick Bloche. Qui se disent sur un ton patelin !

Mme la ministre. Après les multiples atermoiements qui ont fait suite à la loi de 2009, de la brutale décision initiale au revirement relatif à son application avant 20 heures, nous devons aux équipes de France Télévisions la sécurité juridique, la clarté et la lisibilité à moyen terme des mesures adoptées. En outre, les ressources budgétaires dont l’État dispose sont contraintes. Nous ne supprimerons donc pas la publicité avant 20 heures ; il est bon de le dire dès à présent. Le gouvernement prend ses responsabilités en cette matière, comme il l’a fait en décidant à l’automne dernier de proposer l’augmentation de la contribution à l’audiovisuel public, afin d’apporter plus de sécurité et d’indépendance au service public de l’audiovisuel.

Mme Isabelle Attard. Ce qui me gêne dans ce débat, c’est que l’on a tendance à considérer la publicité comme une recette financière garantissant l’indépendance au même titre que la redevance. Or la publicité poursuit un objectif précis, vise une cible déterminée. Nous devrions faire preuve de plus de discernement à ce sujet. Les dépenses publicitaires s’élèvent à 32 milliards d’euros par an, tous médias confondus, dont plus de 4 milliards pour la télévision. Mais ce n’est pas un cadeau : en réalité, qui finance ces dépenses, sinon les consommateurs ? Ainsi, 5 à 25 % du prix d’achat du produit consommé sert à financer la publicité. Celle-ci n’est donc rien de moins qu’un impôt caché payé par le consommateur. Il coûte aujourd’hui environ 2 000 euros par an à un couple avec deux enfants. Cessons de considérer la publicité de manière simpliste, comme une simple taxe qui pourrait compenser la disparition d’une autre : il s’agit de commerce, de business, de profit.

M. le président Patrick Bloche. Si vous supprimez toute recette publicitaire de l’audiovisuel public, vous allez vous faire de nouveaux amis, madame Attard !

M. Rudy Salles. Sans être publiphobe, j’estime que, dans un monde idéal, il n’y aurait pas de publicité sur les chaînes publiques de télévision, sur le modèle de la BBC ou de la radio publique en France. Et j’ai applaudi à la suppression de la publicité à partir de 20 heures, qui permet de ne plus se préoccuper uniquement de l’audimat sur les chaînes publiques, et donc de programmer à des heures de grande écoute des émissions jusqu’alors reléguées à des horaires plus tardifs en raison de leur faible audience.

Mais soyons réalistes : nous avons besoin d’argent pour financer le service public de la télévision. Je ne serais donc pas hostile à un « tunnel publicitaire » sur les chaînes publiques à la mi-temps des grands matchs, car il ne compromettrait pas la diffusion d’émissions de qualité sur le service public, qui resterait protégée après 20 heures.

M. Franck Riester. Madame Attard, heureusement qu’il y a dans notre pays du commerce, du business, et de la publicité pour les dynamiser ! Il est toutefois légitime de s’interroger, comme le fait M. Rudy Salles, sur la place de la publicité au sein du service public. À la radio, on entend la différence, comme le rappelait un slogan de France Inter. Nous sommes aujourd’hui parvenus à un compromis satisfaisant : en journée, la publicité, qui s’adresse à une audience importante, apporte des recettes complémentaires à l’audiovisuel public ; le soir, les émissions proposées par France Télévisions sont déconnectées de son « diktat ».

Monsieur le rapporteur, cessez, je vous en prie, de ressasser la prétendue catastrophe des 745 millions d’euros non compensés. Si nous n’avions pas réduit la part des recettes publicitaires dans les ressources de France Télévisions en supprimant la publicité après 20 heures, le financement du service public, comme de l’audiovisuel privé d’ailleurs, aurait posé un grave problème, puisque le chiffre d’affaires de la publicité s’est effondré à cause de la crise. Il s’agit d’un choix de politique budgétaire, qui a permis de préserver le financement public de l’audiovisuel public.

En revanche, comme l’a dit M. Christian Kert lors de la discussion générale, nous nous étonnons de voir une majorité socialiste, un gouvernement de gauche refuser d’allouer les moyens nécessaires aux missions de service public et sabrer le budget de France Télévisions comme il l’a fait en 2012 et 2013. Le budget de la culture, qui a augmenté de 20 % pendant le quinquennat de M. Nicolas Sarkozy, devrait, dit-on, diminuer de 7 % en 2014 – mais attendons le projet de loi de finances puisqu’on nous parle tantôt de 3 %, tantôt de 7 % ! La majorité, monsieur le rapporteur, doit prendre ses responsabilités et allouer de l’argent public à l’audiovisuel public.

Mme Isabelle Attard. Je vous saurais gré de ne pas caricaturer mes propos, monsieur Riester. Je n’ai jamais dit que le business était sale. Parce que nous sommes capables de maturité et de discernement, et pour éviter tout simplisme, j’ai rappelé qu’il ne faut pas confondre les différents revenus de France Télévisions et que la publicité n’est pas une recette anodine.

Mme Martine Martinel. Monsieur Riester, votre mauvaise foi me désole. La gauche ne sacrifie pas la culture, elle ne sacrifie pas France Télévisions. Ce procès est insensé. D’où viennent les chiffres que vous avez cités ? Quant à la suppression de la publicité après 20 heures, c’est un échec complet : les émissions commencent plus tard, il y a des tunnels de programme courts parrainés, le parrainage est omniprésent et la réforme n’a eu aucune conséquence positive concrète. En outre, en tant que rapporteure pour avis sur le projet de loi de finances pour 2013, j’ai constaté que France Télévisions avait continué d’embaucher, notamment des personnels d’encadrement, alors que la baisse des revenus publicitaires était connue, comme le montraient les chiffres figurant dans les documents fournis – tardivement, certes – par France Télévisions. N’attribuez pas au gouvernement des pertes qui découlent des décisions assumées de la droite, comme certains d’entre vous le reconnaissent volontiers lorsqu’ils abandonnent leur posture politique.

M. le rapporteur. La publicité diurne représente environ 340 millions d’euros. Nous en serons tous d’accord, il n’est pas possible de prévoir une dotation équivalente pour en compenser la suppression.

Le financement de France Télévisions était auparavant assuré par la publicité et par la redevance, de sorte que le Parlement pouvait envisager de jouer sur cette dernière – sur son assiette, son taux – si le contexte publicitaire était défavorable. Alors qu’il ne l’avait pas suffisamment fait par le passé, la majorité actuelle s’y est employée avec courage dans le cadre du projet de loi de finances pour 2013. Mais, dans le dispositif actuel, les difficultés auxquelles France Télévisions est confrontée résultent à la fois du marché de la publicité et du budget de l’État. Nous n’avons donc pas de leçons à recevoir sur ce point.

Si, en 2009, nous n’étions pas favorables à la suppression de la publicité après 20 heures, ce n’était pas par idéologie : celle-ci nous aurait plutôt incités à prôner la suppression totale, comme l’a rappelé M. Christian Kert de manière pateline. Au point où nous en sommes, renonçons, à l’unanimité, à la mention du 1er janvier 2016 et restons-en là.

Mme la ministre. Contrairement à la précédente majorité, nous avons résolument pris nos responsabilités en mettant à contribution la seule source de financement du service public de l’audiovisuel qui soit véritablement garante de son indépendance : la redevance, gage de sécurité, de modernité – car elle est évolutive –, de justice – puisque certaines catégories de Français en sont exonérées. Tel est le sens de l’augmentation supplémentaire de 2 euros, entièrement affectée à France Télévisions.

Comment peut-on prétendre que le gouvernement a mis France Télévisions en péril ? La diminution des ressources de France Télévisions s’explique pour 70 millions d’euros par le niveau des recettes publicitaires, inférieur à ce qui était prévu par le COM et dont nous avions bien dit, comme l’a rappelé le président Patrick Bloche, qu’il était surestimé. Si la contraction du marché publicitaire, qui touche tous les opérateurs de l’audiovisuel, a plus durement frappé France Télévisions, c’est parce que ces ressources avaient été surévaluées a priori.

Mesdames et messieurs les députés de l’opposition, la situation des finances publiques que vous nous avez léguée exige des efforts de tous les opérateurs de l’État. Celui qui est demandé à France Télévisions représente 2 % sur trois ans, bien loin des chiffres délirants qui ont été cités : il est substantiel, mais surmontable ; le gouvernement y a veillé, notamment en augmentant la redevance.

Quant au budget de la culture pour 2014, je l’annoncerai en octobre. Tous les chiffres qui peuvent circuler et qui ont été évoqués sont farfelus. Le ministère de la culture participera à l’effort de redressement des finances publiques, mais n’est pas davantage mis à contribution, malgré l’aggravation de la crise économique cette année. Les économies seront ciblées sur les secteurs qui pourront les consentir.

La Commission adopte les amendements.

Après l’article 6

La Commission examine les amendements AC 45 et AC 48 de Mme Isabelle Attard, qui peuvent faire l’objet d’une présentation commune.

Mme Isabelle Attard. Il convient, d’une part, d’interdire les messages publicitaires quinze minutes avant et après la diffusion de programmes destinés à la jeunesse et, d’autre part, de ne permettre qu’une seule interruption publicitaire dans les programmes audiovisuels, et aucune dans les programmes destinés à la jeunesse, comme c’est le cas en Allemagne et sur les chaînes flamandes belges.

Comme nous aurons l’occasion de discuter de cette question plus tard, je retire ces amendements.

Les amendements sont retirés.

Article 6 decies (nouveau)

Abrogation des canaux compensatoires de la télévision numérique terrestre

Cet article issu d’un amendement du rapporteur adopté par la Commission abroge les dispositions de la loi du 30 septembre 1986 (articles 103 et 104) prévoyant l’attribution de « canaux compensatoires» en conséquence du processus d’extinction de la diffusion analogique de la télévision au profit de la diffusion numérique.

Le principe de cette attribution au bénéfice des éditeurs des trois services nationaux de télévision TF1, Canal+ et M6 a été posé par la loi du 5 mars 2007 relative à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et a été contesté par la Commission européenne.

Même si, en l’absence de publication du décret d’application nécessaire à l’entrée en vigueur de l’article 103 de la loi de 1986, aucun canal compensatoire n’a été attribué à ce jour en application de ces dispositions, la Commission européenne a adressé, le 24 novembre 2010, une mise en demeure à la France, estimant que ce dispositif n’est pas compatible avec le droit de l’Union européenne. Par avis motivé adressé à la France le 29 septembre 2011, elle a enjoint aux autorités françaises de prendre toutes les mesures requises pour mettre fin à ce manquement.

Le présent article tire les conséquences de l’avis motivé de la Commission européenne en abrogeant le dispositif d’attribution des canaux compensatoires prévu par l’article 103 de la loi du 30 septembre 1986 et en modifiant corollairement l’article 104 de la même loi en tant qu’il exclut toute forme de réparation au titre des dispositions de la loi relatives à l’extinction anticipée de la diffusion analogique terrestre. L’adoption rapide de ces modifications législatives est indispensable dès lors qu’elles permettent d’assurer la sécurité juridique des opérateurs et de l’État.

En effet, la décision de la Commission européenne d’engager une procédure en manquement a créé une situation d’incertitude juridique pour les opérateurs comme pour l’État. L’absence d’intervention législative revient à nouer le contentieux communautaire et expose la France à des sanctions financières si la Cour de justice de l’Union européenne confirmait la contrariété au droit communautaire du dispositif des canaux compensatoires. L’abrogation du dispositif permet de mettre fin à la procédure en manquement.

*

La Commission examine l’amendement AC 68 du rapporteur.

M. le rapporteur. Le principe de l’attribution de « canaux compensatoires » a été posé par la loi du 5 mars 2007 relative à la modernisation de la diffusion audiovisuelle. Considérant que ce dispositif n’est pas compatible avec le droit de l’Union européenne, la Commission européenne a adressé une mise en demeure à la France le 24 novembre 2010. L’abrogation du dispositif proposée par cet amendement permettra donc de mettre fin à la procédure en manquement.

M. le président Patrick Bloche. Il s’agit d’un toilettage, un projet de loi poursuivant le même objet ayant été déposé à la fin de la précédente législature afin d’adresser un signal à la Commission européenne.

De surcroît, la création des six dernières chaînes de la TNT a déjà constitué un bonus.

Mme la ministre. Avis favorable.

M. Franck Riester. C’est plus qu’un toilettage.

M. le rapporteur. C’est un détricotage.

M. le président Patrick Bloche. Non. Six nouvelles chaînes de TNT ont été autorisées avant l’alternance, bénéficiant notamment à TF 1 et M6, Canal + ayant racheté D8 et D17, ces trois chaînes ayant donc été servies et même doublement puisque des « chaînes bonus » ont été attribuées à deux reprises. Il s’agit donc bien d’un toilettage et non d’un détricotage.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle est saisie des amendements AC 11 et AC 12 de M. Guénhaël Huet, qui peuvent faire l’objet d’une présentation commune.

M. Guénhaël Huet. À la suite du rapport d’information sur le financement du football professionnel que j’ai rédigé avec M. Thierry Braillard, M. Pascal Deguilhem et Mme Marie-George Buffet, d’aucuns nous ont fait part de leurs craintes, le football professionnel français étant très « télédépendant ».

De plus, la diffusion des principales rencontres échappe aux chaînes gratuites, ce dont le CSA semble d’ailleurs se soucier.

Ces deux amendements d’appel visent donc, d’une part, à faire en sorte qu’un lot au moins soit réservé à des chaînes gratuites dans les appels d’offres de la Ligue nationale de football, par exemple à travers la diffusion d’extraits longs de rencontres qui se seraient déroulées la veille au soir et, d’autre part, à assurer la diffusion à un public aussi large que possible des événements sportifs mettant en présence des équipes ou des athlètes français ou qui se déroulent sur notre territoire.

M. le rapporteur. Ce sujet intéressant ne concerne pas directement ce projet et mériterait d’être abordé dans le cadre d’une proposition de loi ou d’un autre dispositif législatif.

Le sport est en effet « télédépendant » en ceci que la vente de la retransmission des événements sportifs aux chaînes contribue largement à son financement.

Mme la ministre. Ces amendements ne concernent pas directement le texte. Une concertation s’impose en la matière avec les acteurs du monde sportif et du secteur de l’audiovisuel. Nous y travaillons avec Mme Valérie Fourneyron, ministre des sports, et nous veillerons à ce que vous soyez associés notamment aux réflexions sur le décret dit « décret TSF » définissant la liste des événements sportifs d’importance majeure et donc nécessairement accessibles sur les chaînes en clair.

M. Pascal Deguilhem. Je soutiens bien évidemment ces deux amendements d’appel qui pourraient sans doute être rapprochés de votre amendement AC 8, monsieur le président. Il serait souhaitable que le CSA puisse donner son agrément pour la diffusion en clair des émissions de beIN SPORT, car cette chaîne assurera demain la totalité de la retransmission des émissions sportives et il n’est pas normal que le public français ne puisse plus accéder à des spectacles sportifs – que beIN SPORT vend à perte – concernant en particulier des équipes nationales. Il est donc indispensable de toiletter le « décret TSF » et d’augmenter le nombre de spectacles télédiffusés, cette dernière question relevant de la compétence du CSA. Il y a urgence.

Mme la ministre. La modification de la liste des événements sportifs diffusés permettra également de mieux diffuser le sport féminin.

M. le rapporteur. Les compétitions de football féminin sont retransmises sur France Télévisions.

S’agissant des ventes à perte sur beIN SPORT, nous sommes probablement confrontés à un problème de distorsion de concurrence qui dépasse la stricte compétence du CSA. Soyons attentifs à l’évolution de la situation dans les deux ou trois prochaines années.

M. Guénhaël Huet. Je sais que ces amendements ne concernent pas directement ce texte et je les retire donc, mais je souhaitais attirer l’attention du gouvernement sur cet important sujet qui devra bien être traité un jour, faute de quoi les chaînes gratuites et, notamment, le service public, ne diffuseront plus d’événements sportifs.

M. le président Patrick Bloche. Nous sommes en effet conscients d’un problème sur lequel il conviendra inévitablement de se pencher.

Les amendements sont retirés.

Chapitre II

dispositions diverses, transitoires et finales

Article 7

Dispositions transitoires relatives à la composition du CSA

1. Le passage à sept membres du CSA

Le CSA est actuellement composé de neuf membres nommés pour six ans par décret du Président de la République. L’article 1er du présent projet de loi prévoit la diminution du nombre de ses membres de neuf à sept.

La réduction du nombre de membres du CSA implique l’introduction d’une disposition transitoire, de façon à ne pas interrompre les mandats des membres actuels du CSA au moment de l’entrée en vigueur de la loi, afin de garantir la continuité de l’action de l’institution.

Il est proposé que la réduction du nombre de membres se fasse de manière progressive à partir de 2015 et jusqu’en 2017.

Le premier alinéa du présent article 7 introduit une disposition transitoire précisant que les mandats en cours des membres du CSA ne sont pas interrompus. En l’absence d’une telle précision, il aurait été nécessaire de mettre fin immédiatement aux mandats de deux membres. Il prévoit en revanche que les membres désignés par le Président de la République, à l’exception du président du CSA, ne seront pas remplacés en cas de vacance. Ainsi le passage à sept membres du CSA pourrait-il éventuellement intervenir avant 2017.

En tout état de cause, à l’échéance du mandat de Mme Françoise Laborde (le 23 janvier 2015), le collège du CSA comprendra huit membres. Il sera de sept membres à l’échéance du mandat du second membre du CSA nommé par le Président de la République en dehors du président du CSA, c’est-à-dire Mme Francine Mariani-Ducray, dont le mandat s’achève le 23 janvier 2017.

2. Quorum et règles de majorité

La réduction progressive du nombre de membres entre 2015 et 2017 rend nécessaire une adaptation concomitante des règles de quorum et de majorité pour les délibérations du CSA.

La règle de quorum prévue à l’article 4 de la loi du 30 septembre 1986 est modifiée et passe de six à quatre membres. À l’article 5 de la loi du 30 septembre 1986 relatif aux conflits d’intérêts et incompatibilités des membres du CSA, le passage à sept membres impose la modification des règles de majorité pour prononcer les démissions d’office : la règle de la majorité des deux tiers est remplacée par une majorité simple (quatre sur sept).

Le deuxième alinéa de l’article 7 du projet de loi prévoit que la modification de ces règles n’interviendra qu’en 2017, au moment du passage à sept membres, sauf dans l’hypothèse d’une vacance du mandat du membre désigné par le Président de la République en 2011. Il en résulte qu’entre 2015 et 2017, le CSA ne sera composé que de huit membres, le quorum pour les prises de décision restera de six membres et la règle de la majorité des deux tiers prévue à l’article 5 de la loi du 30 septembre 1986 relatif aux conflits d’intérêts et incompatibilités des membres du CSA trouvera toujours à s’appliquer (soit six pour un collège de huit membres).

Fonctionnement du CSA

Nombre de membres

Quorum

Majorité

2014

9

6

6

2015

8

6

6

2016

8

6

6

2017

7

4

4

*

La commission examine l’amendement AC 13 de M. Rudy Salles.

M. Rudy Salles. Il s’agit d’un amendement qui met fin au mandat des membres du CSA, par parallélisme avec l’amendement « Pflimlin » sur les présidents de chaînes. Comme ce dernier a été retiré, je retire également le mien, mais je suis prêt à le redéposer en séance si l’amendement « Pflimlin » devait réapparaître, ce parallélisme étant nécessaire.

L’amendement AC 13 est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement AC 72 du rapporteur.

M. le rapporteur. L’article 2 du projet de loi modifie les règles de majorité au sein du CSA pour prononcer des démissions d’office en cas de conflit d’intérêt ou de non-respect des règles d’incompatibilités par un membre du conseil : la règle de la majorité des deux tiers est remplacée par une majorité simple. Il est proposé que cette modification s’applique, non pas en 2017 comme le prévoit le projet de loi, mais dès la promulgation de la loi.

Mme la ministre. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 7 modifié.

Après l’article 7.

La Commission examine l’amendement AC 41 de M. Franck Riester.

M. Franck Riester. Cet amendement prévoit explicitement la continuation des mandats des présidents des audiovisuels publics. Nous le retirons et nous verrons si nous le redéposons ou non en séance publique en fonction de la réflexion que vous aurez menée, monsieur le président.

L’amendement est retiré.

Article 8

Application du nouveau mécanisme de sanction

Le présent article prévoit que seules les procédures de sanction engagées après la promulgation de la loi se verront appliquer la nouvelle procédure faisant intervenir un rapporteur.

En effet, les procédures déjà engagées (moins d’une dizaine) ne seraient pas « purgées de leur vice » si on les transférait au rapporteur, ayant déjà été lancées par le collège, qui décide de la sanction.

*

La Commission adopte l’article 8 sans modification.

Article 9

Coordination

Le présent article tend, par coordination avec la modification de la procédure de nomination des présidents des sociétés nationales de programme de l’audiovisuel public, à supprimer les références à ces sociétés dans l’annexe à la loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010 relative à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution. On rappellera que cette annexe détermine les commissions parlementaires compétentes pour se prononcer au préalable sur les propositions de nomination par le Président de la République.

*

La Commission adopte l’article 9 sans modification.

Article 10

Application sur l’ensemble du territoire de la République

Le présent article tend à rendre la loi applicable sur l’ensemble du territoire de la République.

Comme l’indique l’étude d’impact, les présidents des sociétés nationales de programme dirigent des services de communication audiovisuelle diffusés par voie hertzienne terrestre dans les territoires d’outre-mer. Ainsi, certains services de communication audiovisuelle édités par France Télévisions, Radio France et la société en charge de l’audiovisuel extérieur de la France sont diffusés par voie hertzienne terrestre dans les territoires ultramarins. Ce faisant, la modification du mode de nomination des présidents des sociétés nationales de programme trouvera une application en outre-mer.

En outre, le CSA tient sa compétence de la loi du 30 septembre 1986 qui est applicable aux départements d’outre-mer, aux collectivités d’outre-mer régies par l’article 74 de la Constitution et en Nouvelle Calédonie, en vertu de son article 108. Les dispositions du présent projet de loi relatives au pouvoir de sanction mis en œuvre par le CSA sont donc applicables aux services de communication audiovisuelle établis en outre-mer.

En conséquence, la loi doit être rendue applicable en outre-mer.

*

Puis elle adopte l’ensemble du projet de loi modifié.

En conséquence, la commission des affaires culturelles et de l’éducation demande à l’Assemblée nationale d’adopter le projet de loi relatif à l’audiovisuel public, dans le texte figurant en annexe du présent rapport.

TABLEAU COMPARATIF

___

Dispositions en vigueur

Texte du projet de loi

Texte adopté par la Commission

 

Projet de loi relatif à l'indépendance de l'audiovisuel public

Projet de loi relatif à l'indépendance de l'audiovisuel public

 

Chapitre ier

Division

Loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication

Dispositions modifiant la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication

et intitulé sans modification

   

Article 1er A (nouveau)

Art. 3-1. – Le Conseil supérieur de l'audiovisuel, autorité indépendante, garantit l'exercice de la liberté de communication audiovisuelle par tout procédé de communication électronique, dans les conditions définies par la présente loi.

 

Au premier alinéa de l’article 3-1 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, le mot : « indépendante » est remplacé par les mots : « publique indépendante dotée de la personnalité morale ».

Amendements AC66 et AC93

 

Article 1er

Article 1er

 

L’article 4 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication est ainsi modifié :

L’article 4 de la même loi est ainsi modifié :

 

1° Les deux premiers alinéas sont remplacés par deux alinéas ainsi rédigés :

1° Les deux premiers alinéas sont ainsi rédigés :

Art. 4. – Le Conseil supérieur de l'audiovisuel comprend neuf membres nommés par décret du Président de la République. Trois membres sont désignés par le Président de la République, trois membres sont désignés par le président de l'Assemblée nationale et trois membres par le président du Sénat.

« Le Conseil supérieur de l’audiovisuel comprend sept membres nommés par décret du Président de la République.

Alinéa sans modification

Ils ne peuvent être nommés au-delà de l'âge de soixante-cinq ans.

« Trois membres sont désignés par le président de l’Assemblée nationale et trois membres par le président du Sénat. Dans chaque assemblée parlementaire, ils sont désignés après avis conforme de la commission chargée des affaires culturelles statuant à la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés. » ;

« Trois …

… désignés en raison de leurs compétences en matière économique, juridique ou technique ou de leur expérience professionnelle dans le domaine de la communication, après …

… commission permanente chargée …

… exprimés. » ;

Amendements AC69 et AC91

.................................................................

   
 

2° Le cinquième alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

Alinéa sans modification

En cas de vacance survenant plus de six mois avant l'expiration du mandat, il est pourvu à la nomination, dans les conditions prévues au présent article, d'un nouveau membre dont le mandat expire à la date à laquelle aurait expiré le mandat de la personne qu'il remplace. Son mandat peut être renouvelé s'il a occupé ces fonctions de remplacement pendant moins de deux ans.

« À l'exception de son président, le Conseil supérieur de l’audiovisuel se renouvelle par tiers tous les deux ans.

« À …

… l’audiovisuel est

renouvelé par tiers tous les deux ans.

Amendement AC80

 

« Les membres du conseil ne peuvent être nommés au-delà de l’âge de soixante-cinq ans. » ;

Alinéa sans modification

.................................................................

   

Le Conseil supérieur de l'audiovisuel ne peut délibérer que si six au moins de ses membres sont présents. Il délibère à la majorité des membres présents. Le président à voix prépondérante en cas de partage égal des voix.

3° Au septième alinéa, devenu le huitième, le mot : « six » est remplacé par le mot : « quatre ».

3° À la première phrase de l’avant-dernier alinéa, le mot ...

      … « quatre ».

.................................................................

   
 

Article 2

Article 2

 

L'article 5 de la même loi est ainsi modifié :

Alinéa sans modification

Art. 5. – Les fonctions de membre du Conseil supérieur de l'audiovisuel sont incompatibles avec tout mandat électif, tout emploi public et toute autre activité professionnelle.

 

1° A (nouveau) Le premier alinéa est complété par les mots : « , y compris le maintien d’un contrat de travail avec une entreprise de l’audiovisuel, du cinéma, de l’édition, de la presse, de la publicité ou des télécommunications. » ;

Amendement AC71

Sous réserve des dispositions de la loi n° 57-298 du 11 mars 1957 sur la propriété littéraire et artistique, les membres du conseil ne peuvent, directement ou indirectement, exercer de fonctions, recevoir d’honoraires, sauf pour des services rendus avant leur entrée en fonctions, ni détenir d’intérêts dans une entreprise de l’audiovisuel, du cinéma, de l’édition, de la presse, de la publicité ou des télécommunications. Toutefois, si un membre du conseil détient des intérêts dans une telle entreprise, il dispose d’un délai de trois mois pour se mettre en conformité avec la loi.

1° À la première phrase du deuxième alinéa, la référence : « de la loi n° 57-298 du 11 mars 1957 sur la propriété littéraire et artistique » est remplacée par la référence : « du code de la propriété intellectuelle » ;

Alinéa sans modification

…..............................................................

 

2° Le quatrième alinéa est ainsi modifié :

Le membre du conseil qui a exercé une activité, accepté un emploi ou un mandat électif incompatible avec sa qualité de membre ou manqué aux obligations définies au deuxième alinéa du présent article est déclaré démissionnaire d’office par le conseil statuant à la majorité des deux tiers de ses membres.

2° Au quatrième alinéa, les mots : « est déclaré démissionnaire d’office par le conseil statuant à la majorité des deux tiers » sont remplacés par les mots : « peut être déclaré démissionnaire d’office par le conseil statuant à la majorité » ;

a) (nouveau) Après le mot : « alinéa », sont insérés les mots : « ou au cinquième alinéa » ;

b) Les mots …

…mots : «  est déclaré …

… majorité » ;

Amendements AC77 et AC21

 Pendant la durée de leurs fonctions et durant un an à compter de la cessation de leurs fonctions, les membres du conseil sont tenus de s'abstenir de toute prise de position publique sur les questions dont le conseil a ou a eu à connaître ou qui sont susceptibles de lui être soumises dans l'exercice de sa mission.

 

bis (nouveau) Après le mot : « questions », la fin du cinquième alinéa est ainsi rédigée : « en cours d’examen. Les membres et anciens membres du conseil sont tenus de respecter le secret des délibérations. » ;

Amendement AC76

.................................................................

   

Le président et les membres du Conseil supérieur de l'audiovisuel reçoivent respectivement un traitement égal à celui afférent aux deux catégories supérieures des emplois de l'État classés hors échelle. À l'expiration de leur mandat, les membres du Conseil supérieur de l'audiovisuel continuent de percevoir leur traitement pendant une durée maximum d'un an. Toutefois, si les intéressés reprennent une activité rémunérée, perçoivent une retraite ou, pour les fonctionnaires ou les magistrats, sont réintégrés, le versement de ce traitement cesse. Il cesse également sur décision du conseil statuant à la majorité des deux tiers de ses membres après que les intéressés ont été mis à même de présenter leurs observations, si ceux-ci manquent aux obligations prévues au deuxième alinéa.

3° À la dernière phrase de l’avant-dernier alinéa, les mots : « des deux tiers » sont supprimés.

3° L’avant-dernier alinéa est ainsi modifié :

a) À la dernière phrase, les mots : « des deux tiers » sont supprimés ;

b) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée :

« Il cesse également, partiellement ou totalement, dans les mêmes conditions, en cas de manquement aux obligations résultant du cinquième alinéa. »

Amendement AC78

     
 

Article 3

Article 3

 

L’article 42-7 de la même loi est ainsi rédigé :

Alinéa sans modification

Art. 42-7. – Les sanctions prévues aux 2°, 3° et 4° de l'article 42-1 ainsi que celles de l'article 42-3 sont prononcées dans les conditions prévues au présent article.

Le Conseil supérieur de l'audiovisuel notifie les griefs à l'éditeur ou au distributeur du service de communication audiovisuelle qui peut consulter le dossier et présenter ses observations écrites dans le délai d'un mois. En cas d'urgence, le président du Conseil supérieur de l'audiovisuel peut réduire ce délai sans pouvoir le fixer à moins de sept jours.

« Art. 42-7. – Les sanctions prévues aux articles 42-1, 42-3, 42-4, 42-15, 48-2 et 48-3 sont prononcées dans les conditions suivantes :

« 1° L’engagement des poursuites et l’instruction préalable au prononcé des sanctions prévues par les dispositions précitées sont assurés par un rapporteur nommé par le vice-président du Conseil d’État, après avis du Conseil supérieur de l’audiovisuel, parmi les membres des juridictions administratives en activité ou honoraire, pour une durée de quatre ans renouvelable une fois ;

Alinéa sans modification

« 1° L’engagement …

… en activité, pour …

… fois.

Amendement AC30

L'éditeur ou le distributeur de services est entendu par le Conseil supérieur de l'audiovisuel. Il peut se faire représenter. Le Conseil supérieur de l'audiovisuel peut également entendre toute personne dont l'audition lui paraît susceptible de contribuer utilement à son information.

« 2° Le rapporteur peut se saisir de tout fait susceptible de justifier l’ouverture d’une procédure de sanction ;

« 2° Le …

… l’engagement d’une …

… sanction.

Amendement AC79

 

« 3° Le rapporteur décide si les faits dont il a connaissance justifient l’engagement d’une procédure de sanction.

Alinéa sans modification

 

« S’il estime que les faits justifient l’engagement d’une procédure, le rapporteur notifie les griefs aux personnes mises en cause, qui peuvent consulter le dossier et présenter leurs observations dans un délai d’un mois suivant la notification, qui peut être réduit jusqu’à sept jours en cas d’urgence. Il adresse une copie de la notification au Conseil supérieur de l’audiovisuel ;

« S’il …

… procédure de sanction,

le rapporteur …

… notification. Ce délai peut …

… d’urgence. Le rapporteur adresse …

… l’audiovisuel ;

Amendements AC81, AC82 et AC83

 

« 4° L’instruction est dirigée par le rapporteur qui peut procéder à toutes les auditions et consultations qu’il estime nécessaires.

Alinéa sans modification

 

« Le Conseil supérieur de l’audiovisuel met à la disposition du rapporteur, dans les conditions prévues par une convention, tous les moyens nécessaires à l’accomplissement de ses fonctions. Par dérogation à l’article 7, les agents mis à la disposition du rapporteur sont placés sous son autorité pour les besoins de chacune de ses missions ;

« Le …

… article 7,

les personnels mis …

… missions ;

Amendement AC84

 

« 5° Au terme de l’instruction, le rapporteur communique son rapport, accompagné des documents sur lesquels il se fonde, à la personne mise en cause et au Conseil supérieur de l’audiovisuel ;

Alinéa sans modification

   

« Sauf dans les cas où la communication ou la consultation de ces documents est nécessaire à l’exercice des droits de la défense de la personne mise en cause, le rapporteur peut lui refuser la communication ou la consultation de pièces ou de certains éléments contenus dans ces pièces mettant en jeu le secret des affaires d’autres personnes. Dans ce cas, une version non confidentielle et un résumé des pièces ou éléments en cause lui sont accessibles.

Amendement AC58

 

« 6° Le rapporteur expose devant le Conseil supérieur de l’audiovisuel, lors d’une séance à laquelle est convoquée la personne mise en cause, son opinion sur les faits dont il a connaissance et les griefs notifiés. Le cas échéant, il propose au conseil d’adopter l’une des sanctions prévues aux articles 42-1, 42-3, 42-4, 42-15, 48-2 et 48-3. Au cours de cette séance, la personne mise en cause, qui peut se faire assister par toute personne de son choix, est entendue par le conseil, qui peut également entendre, en sa présence, toute personne dont l’audition lui paraît susceptible de contribuer à son information.

« 6° Le …

… entendre, en présence de la personne mise en cause, toute …

… information. Cette séance se tient dans un délai de deux mois suivant la notification du rapport par le rapporteur.

Amendements AC85 et AC34

 

« Le rapporteur n’assiste pas au délibéré.

Alinéa sans modification

 

« La décision du conseil prise au terme de cette procédure est motivée et notifiée aux personnes qu’elle vise et, en cas de suspension de la diffusion d’un service, aux distributeurs ou aux opérateurs satellitaires qui assurent la diffusion du service en France et qui doivent assurer l’exécution de la mesure. Sous réserve des secrets protégés par la loi, elle est également publiée au Journal officiel ;

« La …

… loi, la décision du conseil est … … officiel ;

Amendement AC87

 

« 7° La procédure de sanction est suspendue lorsque le Conseil supérieur de l'audiovisuel décide de mettre en œuvre la procédure prévue à l’article 42-10 ;

Alinéa sans modification

 

« 8° Le règlement intérieur du Conseil supérieur de l'audiovisuel précise les modalités d’application du présent article. »

Alinéa sans modification

 

Article 4

Article 4

 

La même loi est ainsi modifiée :

Sans modification

Art. 42-6. – Les décisions du Conseil supérieur de l'audiovisuel sont motivées. Elles sont notifiées aux personnes visées par la décision et, en cas de suspension de la diffusion d'un service, aux opérateurs satellitaires qui assurent la diffusion du service en France et qui devront assurer l'exécution de la mesure. Sous réserve des secrets protégés par la loi, elles sont publiées au Journal officiel de la République française.

1° Les articles 42-6, 48-6 et 48-7 sont abrogés ;

 

Art. 48-6. – Les sanctions pécuniaires prévues à l'article 48-2 sont prononcées dans les conditions prévues au présent article.

Le Conseil supérieur de l'audiovisuel notifie les griefs à la société concernée qui peut consulter le dossier et présenter ses observations écrites dans le délai d'un mois. En cas d'urgence, le président du Conseil supérieur de l'audiovisuel peut réduire ce délai sans pouvoir le fixer à moins de sept jours.

Le président de la société concernée ou son représentant est entendu par le Conseil supérieur de l'audiovisuel. Ce dernier peut également entendre toute personne dont l'audition lui paraît susceptible de contribuer utilement à son information.

   

Art. 48-7. – Les décisions du Conseil supérieur de l'audiovisuel sont motivées. Elles sont notifiées à la société concernée et publiées au Journal officiel de la République française.

   

Art. 48-3. – Dans tous les cas de manquement aux obligations incombant aux sociétés mentionnées à l'article 44, le Conseil supérieur de l'audiovisuel peut ordonner l'insertion dans les programmes d'un communiqué dont il fixe les termes et les conditions de diffusion. Le Conseil supérieur de l'audiovisuel demande à la société de lui présenter ses observations dans un délai de deux jours francs à compter de la réception de cette demande. La décision est alors prononcée sans que soit mise en œuvre la procédure prévue à l'article 48-6. Le refus de se conformer à cette décision est passible d'une sanction pécuniaire dans les limites définies à l'article 42-2. Le refus de la société de se conformer à cette décision est passible d'une sanction pécuniaire dans les limites définies à l'article 42-2.

2° À la fin de la troisième phrase de l’article 48-3, la référence : « 48-6 » est remplacée par la référence : « 42-7 ».

 
 

Article 5

Article 5

 

L'article 47-4 de la même loi est ainsi rédigé :

Alinéa sans modification

Art. 47-4. – Les présidents des sociétés France Télévisions et Radio France et de la société en charge de l'audiovisuel extérieur de la France sont nommés par décret pour cinq ans après avis conforme du Conseil supérieur de l'audiovisuel et après avis des commissions parlementaires compétentes conformément à la loi organique n° 2009-257 du 5 mars 2009 relative à la nomination des présidents des sociétés France Télévisions et Radio France et de la société en charge de l'audiovisuel extérieur de la France.

Pour l'application du présent article, la commission parlementaire compétente dans chaque assemblée est celle chargée des affaires culturelles.

« Art. 47-4. – Les présidents des sociétés France Télévisions et Radio France et de la société en charge de l’audiovisuel extérieur de la France sont nommés pour cinq ans par le Conseil supérieur de l'audiovisuel, à la majorité des membres qui le composent.

« Art. 47-4. – Les présidents de la société France Télévisions, de la société Radio France et …

… composent.

Ces nominations font l’objet d’une décision motivée.

Amendements AC88 et AC1

   

« Les candidatures sont présentées au Conseil supérieur de l’audiovisuel et évaluées par ce dernier sur la base d’un projet stratégique.

Amendements AC17

 

« Dans un délai de deux mois après le début de leur mandat, ils transmettent au président de chaque assemblée parlementaire et aux commissions permanentes compétentes un rapport d’orientation. »

« Dans …

… mandat, les présidents

mentionnés au premier alinéa transmettent …

… compétentes

de ces mêmes assemblées un rapport d’orientation.

Amendements AC89 et AC90

 

Article 6

Article 6

 

Le premier alinéa de l'article 47-5 de la même loi est ainsi rédigé :

Sans modification

Art. 47-5. – Le mandat des présidents des sociétés France Télévisions et Radio France et de la société en charge de l'audiovisuel extérieur de la France peut leur être retiré par décret motivé, après avis conforme, également motivé, du Conseil supérieur de l'audiovisuel, émis à la majorité des membres le composant, et avis public des commissions parlementaires compétentes.

« Le mandat des présidents des sociétés France Télévisions et Radio France et de la société en charge de l’audiovisuel extérieur de la France peut leur être retiré, par décision motivée, dans les conditions prévues au premier alinéa de l’article 47-4. »

 

.................................................................

   
   

Article 6 bis (nouveau)

Art. 17-1. – ..................................

Le conseil se prononce dans un délai de deux mois, qu'il peut porter à quatre mois s'il l'estime utile, après avoir mis les parties à même de présenter leurs observations. Dans le respect des secrets protégés par la loi, il peut également inviter les tiers intéressés à présenter des observations utiles au règlement du différend.

 

La première phrase du deuxième alinéa de l'article 17-1 de la même loi est complétée par les mots : « , dans le respect du secret des affaires ».

Amendements AC73

.................................................................

   
   

Article 6 ter (nouveau)

   

L’article 18 de la même loi est ainsi modifié :

Art. 18. – Le Conseil supérieur de l'audiovisuel établit chaque année un rapport public qui rend compte de son activité, de l'application de la présente loi, du respect de leurs obligations par les sociétés et l'établissement public mentionnés aux articles 44 et 49 de la présente loi. Ce rapport est adressé au Président de la République, au Gouvernement et au Parlement avant la fin du premier trimestre. Dans ce rapport, le Conseil supérieur de l'audiovisuel peut suggérer les modifications de nature législative et réglementaire que lui paraît appeler l'évolution technologique, économique, sociale et culturelle des activités du secteur de l'audiovisuel. Il peut également formuler des observations sur la répartition du produit de la redevance et de la publicité entre les organismes du secteur public.

 

1° Au premier alinéa, après la première occurrence du mot : « loi, », sont insérés les mots : « de l’impact, notamment économique, de ses décisions d’autorisation d'usage de la ressource radioélectrique délivrées en application des articles 29, 29-1, 30-1, 30-5 et 30-6, » ;

Amendement AC62

.................................................................

   
   

2° Après le deuxième alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

   

« Ce rapport comporte une présentation des mesures prises en application des articles 39, 40, 41, 41‑1, 41‑1‑1, 41‑2, 41‑2‑1, 41-3 et 41-4 visant à limiter la concentration et à prévenir les atteintes au pluralisme. Il comporte notamment un état détaillé présentant la situation des entreprises audiovisuelles concernées à l’égard des limites qui y sont fixées. »

Amendements AC4 et AC53

   

« Le rapport visé au premier alinéa fait le point sur le développement et les moyens de financement des services de télévision à vocation locale. » ;

Amendement AC5

   

3° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

   

« Le rapport visé au premier alinéa est présenté chaque année par le président du Conseil supérieur de l’audiovisuel en audition publique devant les commissions chargées des affaires culturelles de chaque assemblée parlementaire, dans le mois suivant sa publication. Chaque commission peut adopter un avis sur l’application de la loi, qui est adressé au Conseil supérieur de l’audiovisuel et rendu public. Cet avis peut comporter des suggestions au Conseil supérieur de l’audiovisuel pour la bonne application de la loi ou l’évaluation de ses effets. »

Amendement AC50 et sous-amendement AC95

   

Article 6 quater (nouveau)

   

I. – L’article 21 de la même loi est ainsi modifié :

Art. 21. – Ainsi qu'il est dit à l'article L. 41 du code des postes et des communications électroniques, le Premier ministre définit, après avis du Conseil supérieur de l'audiovisuel et de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, les fréquences ou bandes de fréquences radioélectriques qui sont attribuées aux administrations de l'État et celles dont l'assignation est confiée au conseil ou à l'autorité.

 

1° Au premier alinéa, les mots : « et de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, », sont remplacés par les mots : « , de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes ainsi que de la commission de la modernisation de la diffusion audiovisuelle, » ;

   

2° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

   

« La commission de la modernisation de la diffusion audiovisuelle comprend un représentant du Conseil supérieur de l’audiovisuel, un représentant de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes ainsi que quatre députés et quatre sénateurs désignés dans leur assemblée respective par les deux commissions permanentes chargées des affaires culturelles et des affaires économiques, à parité parmi leurs membres. Elle peut faire connaître à tout moment ses observations et ses recommandations sur les mesures nécessaires à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et leur mise en œuvre. »

Code des postes et communications électroniques

   

Art. L.41 – Le Premier ministre définit, après avis du Conseil supérieur de l'audiovisuel et de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, les fréquences ou bandes de fréquences radioélectriques qui sont attribuées aux administrations de l'Etat et celles dont l'assignation est confiée au conseil ou à l'autorité.

 

II. – À l’article L. 41 du code des postes et communications électroniques, les mots : « et de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes » sont remplacés par les mots : « , de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes et de la commission de la modernisation de la diffusion audiovisuelle ».

Amendement AC6

Loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication

 

Article 6 quinquies (nouveau)

Art. 28. – La délivrance des autorisations d'usage de la ressource radioélectrique pour chaque nouveau service diffusé par voie hertzienne terrestre autre que ceux exploités par les sociétés nationales de programme, est subordonnée à la conclusion d'une convention passée entre le Conseil supérieur de l'audiovisuel au nom de l'Etat et la personne qui demande l'autorisation.

 

L'article 28 de la même loi est complété par un alinéa ainsi rédigé :

   

« Toute autorisation de modification de convention susceptible d’avoir un impact significatif sur le marché en cause est précédée d’une étude d’impact, rendue publique. »

Amendement AC92

   

Article 6 sexies (nouveau)

Art. 30-1. – Sous réserve des dispositions de l'article 26, l'usage de ressources radioélectriques pour la diffusion de tout service de télévision par voie hertzienne terrestre en mode numérique est autorisé par le Conseil supérieur de l'audiovisuel dans les conditions prévues au présent article.

I.- Le Conseil supérieur de l'audiovisuel définit des catégories de services et lance un appel aux candidatures dont la zone géographique équivaut à l'ensemble du territoire métropolitain pour les services à vocation nationale. Pour les services à vocation locale, les zones géographiques sont préalablement déterminées par le Conseil supérieur de l'audiovisuel. Celui-fixe le délai dans lequel les candidatures doivent être déposées et publie la liste de fréquences pouvant être attribuées dans la zone considérée, accompagnée des indications concernant les zones dans lesquelles peuvent être implantées des stations d'émission et la puissance apparente rayonnée. Celle-ci doit tendre, dans la limite des contraintes techniques et économiques, à la prise en compte des différents modes de réception de la télévision numérique terrestre, et notamment à favoriser le développement de la télévision mobile personnelle, mode de diffusion des services de télévision destinés à être reçus en mobilité par voie hertzienne utilisant des ressources radioélectriques principalement dédiées à cet effet et de la télévision en haute définition.

 

Après le premier alinéa du I de l'article 30-1 de la même loi, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

   

« Afin de favoriser le développement de la télévision en haute définition et d’optimiser la gestion de la ressource radioélectrique qui lui est assignée, le Conseil supérieur de l’audiovisuel peut, à l’occasion d’appels à candidatures en vue de l’usage de ressources radioélectriques par un service de télévision à vocation nationale diffusé par voie hertzienne terrestre en mode numérique et en haute définition, en restreindre l’accès à des services à vocation nationale déjà diffusés par voie hertzienne terrestre en mode numérique. »

Amendement AC67

.................................................................

   
   

Article 6 septies (nouveau)

Art. 31. – Si les décisions d'autorisation d'usage de la ressource radioélectrique sont susceptibles de modifier de façon importante le marché en cause, le Conseil supérieur de l'audiovisuel procède, préalablement au lancement des procédures prévues aux articles 29, 30, 30-1, 30-5 et 30-6, à une consultation publique.

...............................................................

 

L’article 31 de la même loi est ainsi modifié :

Le conseil n'est pas tenu de procéder à une nouvelle consultation en application du présent article ou de l'article 28-4 lorsque le lancement de l'une des procédures visées au premier alinéa a pour objet d'autoriser une nouvelle personne morale à utiliser une part de la ressource radioélectrique à la suite du retrait de l'autorisation de la personne morale précédemment autorisée ou lorsqu'il a déjà procédé, dans les trois ans qui précèdent le lancement de l'une des procédures visées au premier alinéa, à une consultation publique portant sur un champ géographique semblable à celui de cette procédure pour des services de télévision ou de radio de même nature.

 

1° Après le mot : « autorisée », la fin du dernier alinéa est supprimée ;

   

2° Sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :

   

« Lorsqu’il procède aux consultations publiques prévues au premier alinéa et à l’article 28-4, le Conseil supérieur de l’audiovisuel procède également à une étude d’impact, notamment économique, des décisions d’autorisation d'usage de la ressource radioélectrique. Cette étude est rendue publique.

   

« Si la consultation publique prévue au premier alinéa ou à l’article 28-4 et l’étude d’impact prévue à l’avant-dernier alinéa du présent article font apparaître que la situation économique du marché des services de communication audiovisuelle concernés n’est pas favorable au lancement des procédures prévues aux articles 29, 29-1, 30-1, 30-5 et 30-6, le Conseil supérieur de l’audiovisuel peut différer ce lancement pour une durée maximale de deux ans, renouvelable une fois dans les mêmes conditions. »

Amendements AC63 et AC64

   

Article 6 octies (nouveau)

Art. 42-3. – L'autorisation peut être retirée, sans mise en demeure préalable, en cas de modification substantielle des données au vu desquelles l'autorisation avait été délivrée, notamment des changements intervenus dans la composition du capital social ou des organes de direction et dans les modalités de financement.

................................................................

 

L'article 42-3 de la même loi est complété par un alinéa ainsi rédigé :

   

« Sans préjudice de l’application du premier alinéa, tout éditeur de service détenteur d’une autorisation délivrée en application des articles 29, 29-1, 30-1 et 96 doit obtenir un agrément du Conseil supérieur de l’audiovisuel en cas de modification du contrôle direct ou indirect, au sens de l’article L. 233-3 du code de commerce, de la société titulaire de l’autorisation. Le conseil apprécie si les modifications envisagées sont de nature à compromettre l’impératif de pluralisme et l’intérêt du public eu égard, le cas échéant, aux engagements pris par les opérateurs intéressés pour en atténuer ou en compenser les effets, notamment économiques et en matière de concurrence. »

Amendement AC59

   

Article 6 nonies (nouveau)

Art. 53. –.....................................

 

Le premier alinéa du VI de l’article 53 de la même loi est ainsi modifié :

   

1° Les deuxième et troisième phrases sont remplacées par une phrase ainsi rédigée :

VI. - Sous réserve des contraintes liées au décalage horaire de leur reprise en outre-mer, les programmes diffusés entre vingt heures et six heures des services nationaux de télévision mentionnés au I de l'article 44, à l'exception de leurs programmes régionaux et locaux, ne comportent pas de messages publicitaires autres que ceux pour des biens ou services présentés sous leur appellation générique. Cette disposition s'applique également aux programmes diffusés par ces services entre six heures et vingt heures à compter du 1er janvier 2016. Elle ne s'applique pas aux campagnes d'intérêt général. Le temps maximal consacré à la diffusion de messages publicitaires s'apprécie par heure d'horloge donnée. À l'extinction de la diffusion par voie hertzienne terrestre en mode analogique des services de télévision sur le territoire d'un département d'outre-mer, d'une collectivité d'outre-mer ou de Nouvelle-Calédonie, et au plus tard le 30 novembre 2011, les programmes des services régionaux et locaux de télévision de la société mentionnée au même I diffusés sur le territoire de la collectivité en cause ne comportent pas de messages publicitaires entre vingt heures et six heures autres que ceux pour des biens ou services présentés sous leur appellation générique, sous réserve de l'existence d'une offre de télévision privée à vocation locale diffusée par voie hertzienne terrestre en clair. Sous cette même réserve, cette disposition s'applique également à ces programmes, entre six heures et vingt heures, à compter du 1er janvier 2016.

.................................................................

 

« Cette disposition ne s’applique pas aux campagnes d’intérêt général. »

2° La dernière phrase est supprimée.

Amendements AC60 et AC40

   

Article 6 decies (nouveau)

Art. 103. – À l'extinction complète de la diffusion par voie hertzienne en mode analogique d'un service national de télévision préalablement autorisé sur le fondement de l'article 30, le Conseil supérieur de l'audiovisuel accorde à l'éditeur de ce service qui lui en fait la demande, sous réserve du respect des articles 1er, 3-1, 26 et 39 à 41-4, un droit d'usage de la ressource radioélectrique pour la diffusion d'un autre service de télévision à vocation nationale, à condition que ce service ne soit lancé qu'à compter du 30 novembre 2011 et qu'il remplisse les conditions et critères énoncés aux deuxième et troisième alinéas du III de l'article 30-1, souscrive à des obligations renforcées de soutien à la création en matière de diffusion et de production d'œuvres cinématographiques et audiovisuelles européennes et d'expression originale française fixées par décret en Conseil d'État et soit édité par une personne morale distincte, contrôlée par cet éditeur au sens du 2° de l'article 41-3.

 

Les articles 103 et 104 de la même loi sont abrogés.

Amendement AC68

Art. 104. – La mise en œuvre du présent titre n'est pas susceptible d'ouvrir droit à réparation.

   
 

CHAPITRE II

Division

 

Dispositions diverses, transitoires et finales

et intitulé sans modification

 

Article 7

Article 7

 

Les mandats des membres du Conseil supérieur de l'audiovisuel ne sont pas interrompus du fait de l'entrée en vigueur de la présente loi. Les membres qui ont été désignés par le Président de la République, autres que le président du conseil, ne sont pas remplacés en cas de vacance.

Alinéa sans modification

 

Le 3° de l'article 1er et l'article 2 de la présente loi entrent en vigueur à l'échéance du mandat du membre du Conseil supérieur de l'audiovisuel désigné par le Président de la République en 2011.

Le 3° de l'article 1er de la présente loi entre en …

… 2011.

Amendement AC72

 

Article 8

Article 8

 

L'article 3 est applicable aux procédures de sanction ouvertes à compter du lendemain de la publication de la présente loi.

Sans modification

     

Loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010 relative à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution

   

Art. 1er. – Les commissions permanentes de chaque assemblée parlementaire compétentes pour émettre un avis sur les nominations aux emplois et fonctions pour lesquels le pouvoir de nomination du Président de la République s'exerce dans les conditions fixées au cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution sont celles figurant dans la liste annexée à la présente loi.

   

.................................................................

   

ANNEXE

Article 9

Article 9

EMPLOI OU FONCTION 

COMMISSION PERMANENTE COMPÉTENTE AU SEIN DE CHAQUE ASSEMBLÉE 

...............................

.................................

Président de France Télévisions

Commission compétente en matière d’affaires culturelles

...............................

.................................

Président de Radio France

Commission compétente en matière d’affaires culturelles

...............................

.................................

Président de la société en charge de l’audiovisuel extérieur de la France

Commission compétente en matière d’affaires culturelles

...............................

.................................

Les trente et unième, quarante-troisième et quarante-sixième lignes du tableau annexé à la loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010 relative à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution sont supprimées.

Sans modification

 

Article 10

Article 10

 

La présente loi est applicable sur tout le territoire de la République.

Sans modification

     
     

ANNEXE
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

(par ordre chronologique)

Ø Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) – M. Olivier Schrameck, président, M. Jean-Baptiste Gourdin, directeur de cabinet et M. Jean-Pierre Camby, conseiller auprès du Président

Ø Radio France – M. Jean-Luc Hees, président-directeur général

Ø Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) –  M.  Jean-Luc Silicani, président, M. Benoît Loutrel, directeur général et M. Christian Guénod, conseiller auprès du président

Ø Canal + – Mme Peggy le Gouvello, directrice des relations extérieures, M. Olivier Zegna-Rata et M. Laurent Vallée, secrétaire Général

Ø Ministère de la culture et de la communication, Direction générale des médias et des industries culturelles –Mme Laurence Franceschini, directrice générale, M. Roland Husson, sous-directeur de l'audiovisuel public à la DGMIC, Mme Alexandra Laffitte, chef de bureau du régime juridique de l'audiovisuel, et M. Samir Ouachtati, chargé de mission au bureau du régime juridique de l'audiovisuel

Ø ARTE France – Mme Véronique Cayla, présidente du directoire, Mme Anne Durupty, directrice générale, et Mme Clémence Weber, chargée des relations avec le Parlement

Ø Autorité de la concurrence – M. Bruno Lasserre, président et Mme Liza Bellulo, chef du service du président

Ø Groupe NRJ – Mme Maryam Salehi, directeur délégué à la direction générale, M.  Yves Taïeb

Ø SIRTI – M. Philippe Gault, président, M. Tarek Mami, secrétaire national, et M. Kevin Moignoux, chargé de mission

Ø Association « Les locales TV » – M. Christophe Musset, président du syndicat des télévisions locales, président et directeur général de TV Sud Nîmes et Montpellier, président de LCM

Ø TF1 – M. Jean-Michel Counillon, secrétaire générale et Mme Nathalie Lasnon, directrice adjointe des études réglementaires et concurrence

Ø NextRadio TV – M.  Alain Weil, président, et M. Aurélien Pozzana, conseiller

Ø France Télévisions – Mme Françoise Miquel, chef de la mission de contrôle général économique et financier

Ø TLSP (Union des télévisions locales de service public) –M. Dominique Renauld, président, et Mme Mylène Ramm, permanente

Ø France Télévisions –  M.  Rémy Pflimlin, président ; M. Martin Ajdari, secrétaire général, directeur général délégué aux ressources et Mme Anne Grand d’Esnon, Directrice des relations institutionnelles

Ø Groupe M6 – Mme Karine Blouët, secrétaire général et Mme Marie Grau-Chevallereau, directeur des études réglementaires

Ø Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) – M. Olivier Schrameck, président

Ø Lagardère – M. Richard Lenormand, directeur général du Pôle Radio-TV, et Mme Cécile Durand, directrice des affaires réglementaires, secrétariat général, Pôle Radio-TV

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1 () Conseil constitutionnel, décision n° 2009-577 DC du 3 mars 2009.

2 () Ibid.

3 () Jean-Noël Jeanneney, « Une histoire des médias, des origines à nos jours » aux éditions du Seuil.

4 () S’agissant des sociétés nationales de programme, l’article 11 de la loi de 1974 prévoit que « le président, choisi parmi les membres du conseil d’administration, est nommé pour trois ans par décret en conseil des ministres. Il organise la direction et en nomme les membres », le président et le directeur général de l’établissement public de diffusion étant nommés selon les mêmes modalités en application de l’article 5 de la même loi.

5 () La loi de 1986 organisait notamment la transformation de TDF en société anonyme et son article 103 disposait initialement que « jusqu’à la date à laquelle l’État aura cédé 10 % au moins du capital de la société, la composition de son conseil d’administration sera régie par les mêmes règles que celles qui s’appliquent à l’Institut national de l’audiovisuel-INA » et « son président sera nommé par décret en conseil des ministres ». Le Conseil Constitutionnel, dans sa décision n° 86-217 DC du 18 septembre 1986, a considéré que les termes « en conseil des ministres » étaient contraires à la Constitution. En effet, l’inscription du président-directeur général de Télédiffusion de France par le décret n° 85-834 du 6 août 1985 pris sur le fondement de l’article 1er de l’ordonnance organique n° 58-1136 du 28 novembre 1958, dans la liste des emplois auxquels il est pourvu en conseil des ministres concerne l’établissement public de diffusion et ne saurait concerner la société anonyme en laquelle celui-ci est transformé du fait de la loi.

6 () En 1998, un projet de loi relatif notamment au secteur public de la communication audiovisuelle envisageait la création de la société France Télévision avec un conseil de surveillance et un directoire. Toutefois ce projet n’a pas abouti, le Conseil d’État ayant considéré, en Assemblée générale lors de sa séance du 5 novembre 1998, que le projet privait de garanties légales des exigences à caractère constitutionnel. À cette occasion, il avait recommandé que la société France Télévision soit dotée d’un conseil d’administration, dont le président, président de droit du conseil d’administration des sociétés filiales, serait nommé par le CSA et assurerait la responsabilité de la programmation des émissions de télévision.

7 () Initialement, la décision du CSA devait, en plus d’être motivée, être « assortie de la publication des auditions et débats du Conseil qui s’y rapportent ». Le Conseil Constitutionnel a considéré dans sa décision n° 2000-433 DC du 27 juillet 2000 que la garantie d’indépendance des sociétés nationales de programme qui résulte de la nomination de leur président par une autorité administrative indépendante « ne serait plus effective si l’intégralité des procès-verbaux des auditions et débats du Conseil supérieur de l’audiovisuel devait être rendue publique ; qu’en effet, ne serait plus assurée en pareil cas l’entière liberté de parole tant des candidats que des membres du Conseil eux-mêmes, condition nécessaire à l’élaboration d’une décision collégiale éclairée, fondée sur la seule prise en compte de l’intérêt général et du bon fonctionnement du secteur public de l’audiovisuel dans le respect de son indépendance ; qu’en outre, la publication intégrale de ces auditions et débats pourrait porter atteinte à la nécessaire sauvegarde du respect de la vie privée des personnes concernées ».

8 () Sondage publié dans Le Parisien-Aujourd’hui-en-France.

9 () Président de France Télévisions de 2005 à 2010.

10 () Conseil constitutionnel, décision n° 2012-658 DC du 13 décembre 2012 sur la loi organique relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques, cons. 39.

11 () Assemblée nationale, séance du 28 novembre 2008.

12 () David Assouline et Jacques Legendre, La loi du 5 mars 2009 à l’heure du bilan, Sénat, rapport n° 572 (2012-2013), Commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois.

13 () Article 41 du code des postes et des communications électroniques et article 21 de la loi du 30 septembre 1986.

14 () Trois premiers alinéas de l’article 4 de la loi du 30 septembre 1986 : « Le Conseil supérieur de l’audiovisuel comprend neuf membres nommés par décret du Président de la République. Trois membres sont désignés par le Président de la République, trois membres sont désignés par le président de l’Assemblée nationale et trois membres par le président du Sénat.

Ils ne peuvent être nommés au-delà de l’âge de soixante-cinq ans.

Le président est nommé par le Président de la République pour la durée de ses fonctions de membre du conseil. En cas d’empêchement du président, pour quelque cause que ce soit, la présidence est assurée par le membre du conseil le plus âgé. »

15 () Loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008 de modernisation des institutions de la Ve République.

16 () 5e alinéa de l’article 13 de la Constitution : « Une loi organique détermine les emplois ou fonctions, autres que ceux mentionnés au troisième alinéa, pour lesquels, en raison de leur importance pour la garantie des droits et libertés ou la vie économique et sociale de la Nation, le pouvoir de nomination du Président de la République s’exerce après avis public de la commission permanente compétente de chaque assemblée. Le Président de la République ne peut procéder à une nomination lorsque l’addition des votes négatifs dans chaque commission représente au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés au sein des deux commissions. La loi détermine les commissions permanentes compétentes selon les emplois ou fonctions concernés. »

17 () Loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008 précitée.

18 () 5e alinéa de l’article 13 de la Constitution précité.

19 () 4e alinéa de l’article 4 de la loi du 30 septembre 1986 : « Le mandat des membres du conseil est de six ans. Il n’est ni révocable, ni renouvelable. Il n’est pas interrompu par les règles concernant la limite d’âge éventuellement applicables aux intéressés. »

20 () 4e alinéa de l’article 5 de la loi du 30 septembre 1986 : « Le membre du conseil qui a exercé une activité, accepté un emploi ou un mandat électif incompatible avec sa qualité de membre ou manqué aux obligations définies au deuxième alinéa du présent article est déclaré démissionnaire d’office par le conseil statuant à la majorité des deux tiers de ses membres. »

21 () 6e alinéa de l’article 5 de la loi du 30 septembre 1986.

22 () 5e alinéa de l’article 5 de la loi du 30 septembre 1986.

23 () Article 8 de la loi du 30 septembre 1986 : « Les membres et les agents du conseil sont astreints au secret professionnel pour les faits, actes et renseignements dont ils ont pu avoir connaissance en raison de leurs fonctions, dans les conditions et sous les peines prévues à l’article 75 du code pénal et, sous réserve de ce qui est nécessaire à l’établissement du rapport annuel prévu à l’article 18 de la présente loi, à l’article 226-13 du même code. »

24 () Voir, pour la Commission bancaire : Conseil d’État, 29 novembre 1999, Société Rivoli Exchange, n° 194721.

25 () Sur le fondement de l’article 6§1 de la CEDH : « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial… »

26 () Sur le fondement de l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789: « Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution. » Pour la déduction du principe d’impartialité de cet article, voir par exemple : Conseil constitutionnel, décision n° 2006-545 DC du 28 décembre 2006, loi pour le développement de la participation et de l’actionnariat salarié et portant diverses dispositions d’ordre économique et social, cons. 24.

27 () CE, 20 octobre 2000, Société Habib Bank limited, n° 180122.

28 () CE, 30 juillet 2003, Société Dubus SA, n° 240884 : « aucun principe général du droit, non plus que les stipulations du premier paragraphe de l’article 6 de la CEDH, n’impose la séparation des phases d’instruction et de jugement au sein d’un même procès ».

29 () Cour EDH, 11 septembre 2009, Dubus SA c/ France, n° 5242/04.

30 () Laquelle remplit, à l’instar du CSA, une double mission de régulateur sectoriel et d’organe disciplinaire.

31 () Cons. 57 de la décision du 11 septembre 2009 : « il ne ressort pas du code monétaire et financier, ni d’un éventuel règlement intérieur, de distinction claire des fonctions de poursuite, d’instruction et de sanction dans l’exercice du pouvoir juridictionnel de la Commission bancaire. Or, si le cumul des fonctions d’instruction et de jugement peut être compatible avec le respect de l’impartialité garanti par l’article 6§1 de la Convention (…), ce cumul est subordonné à la nature et à l’étendue des tâches du rapporteur durant la phase d’instruction, et notamment à l’absence d’acte d’accusation de sa part ».

32 () CE, 8 novembre 2010, Caisse nationale des caisses d’épargne et de prévoyance, n° 329384. Le Conseil précise ainsi que « la circonstance que les mêmes personnes se prononcent sur la décision de poursuivre, d’une part et sur la sanction, d’autre part, était de nature à faire naître un doute objectivement justifié sur l’impartialité de cette juridiction ».

33 () Article L. 612-9 du code monétaire et financier. La commission des sanctions est composée de six membres : deux membres du Conseil d’État, un membre de la Cour de Cassation et trois personnalités nommées par le ministre en charge de l’économie.

34 () Conseil constitutionnel, décision n° 2011-200 QPC du 2 décembre 2011, Banque populaire Côte d’Azur : « les dispositions contestées, en organisant la Commission bancaire sans séparer en son sein, d’une part, les fonctions de poursuites des éventuels manquements des établissements de crédit aux dispositions législatives et réglementaires qui les régissent et, d’autre part, les fonctions de jugement des mêmes manquements, qui peuvent faire l’objet de sanctions disciplinaires, méconnaissent le principe d’impartialité des juridictions et, par suite, doivent être déclarées contraires à la Constitution ».

35 () Articles L. 461−1 et L. 461−3 du code de commerce.

36 () Conseil constitutionnel, décision n° 2012-280 QPC du 12 octobre 2012, Société Groupe Canal Plus et autre.

37 () Article L. 461-2 du code de commerce : « Tout membre de l’Autorité doit informer le président des intérêts qu’il détient ou vient à acquérir et des fonctions qu’il exerce dans une activité économique. – Aucun membre de l’Autorité ne peut délibérer dans une affaire où il a un intérêt ou s’il représente ou a représenté une des parties intéressées ».

38 () Ce rapporteur général nomme ensuite les rapporteurs généraux adjoints, les rapporteurs permanents ou non permanents ainsi que les enquêteurs des services d’instruction.

39 () Conseil constitutionnel, décision n° 2012-280 QPC précitée.

40 () Conseil constitutionnel, décision n° 2009-577 DC du 3 mars 2009.