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N
° 1734

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 29 janvier 2014

AVIS

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE SUR LE PROJET DE LOI d’orientation et de programmation relative à la politique de développement et de solidarité internationale (n° 1627).

PAR M. Philippe NOGUÈS

Député

——

Voir les numéros : 1627, 1719.

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 5

I. VERS UNE POLITIQUE DE DÉVELOPPEMENT ET DE SOLIDARITÉ INTERNATIONALE PLUS EFFICACE, PLUS COHÉRENTE ET PLUS TRANSPARENTE 7

A. UNE REFONDATION NÉCESSAIRE 7

B. VERS UN MEILLEUR CONTRÔLE DÉMOCRATIQUE DE LA POLITIQUE D’AIDE AU DÉVELOPPEMENT 9

II. UNE REMISE À PLAT DES OBJECTIFS ET DES PRINCIPES RÉGISSANT LA POLITIQUE DE DÉVELOPPEMENT 12

A. DES OBJECTIFS CLARIFIÉS ET MIEUX ÉVALUÉS AU SERVICE D’UNE POLITIQUE DE DÉVELOPPEMENT PLUS EFFICACE ET PLUS TRANSPARENTE 12

B. L’IMBRICATION DE LA POLITIQUE DE DÉVELOPPEMENT AVEC LES ENJEUX DU DÉVELOPPEMENT DURABLE 16

C. VERS UNE MEILLEURE RECONNAISSANCE DU RÔLE DES ACTEURS NON-ÉTATIQUES 17

TRAVAUX DE LA COMMISSION 21

I. AUDITION DU MINISTRE 21

II. DISCUSSION GÉNÉRALE 35

III. EXAMEN DES ARTICLES 51

TITRE IER : ORIENTATIONS DE LA POLITIQUE DE DÉVELOPPEMENT ET DE SOLIDARITÉ INTERNATIONALE DE LA FRANCE 51

Chapitre Ier – Objectifs de la politique de développement et de solidarité internationale 51

Article 1er : Principes directeurs et objectifs de la politique de développement et de solidarité internationale de la France 51

Article 2 : Approbation du rapport annexé au projet de loi 53

Chapitre II – Principes de la politique de développement et de solidarité internationale 62

Article 3 : Mise en cohérence de la politique de développement et de solidarité internationale et des autres politiques publiques 62

Article 4 : Principes gouvernant les partenariats et l’allocation de ressources publiques 63

Article 5 : Prise en compte de la responsabilité sociale et environnementale dans la politique de développement et de solidarité internationale 63

Article additionnel après l’article 5 65

TITRE II : ORGANISATION GÉNÉRALE DE LA POLITIQUE DE DÉVELOPPEMENT ET DE SOLIDARITÉ INTERNATIONALE 65

Article 6 : Définition et actualisation des orientations de la politique de développement et de solidarité internationale 65

Article 7 : Priorités de la France au sein des institutions multilatérales en charge du développement 66

TITRE III : EXPERTISE INTERNATIONALE 67

Article 8 : Opérateurs de l’expertise technique internationale 67

TITRE IV : ACTION EXTÉRIEURE DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES 67

Article 9 (article L. 115-1 du code général des collectivités territoriales) : Action extérieure des collectivités territoriales 67

TITRE V : MISE EN œUVRE, ÉVALUATION ET RAPPORT 68

Article 10 (article 44 de la loi de finances rectificatives pour 1998) : Évaluation de la politique de développement et de solidarité internationale et information du Parlement 68

LISTE DES AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION 69

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 71

INTRODUCTION

Le présent projet de loi d’orientation et de programmation relative à la politique de développement et de solidarité internationale (ci-après dénommé, « projet de loi DSI ») marque la volonté de l’actuelle majorité de donner plus de clarté, plus de cohérence et plus de transparence – en un mot, une nouvelle impulsion – à la politique française d’aide au développement.

Il s’agit d’une « loi de programmation déterminant les objectifs de l'action de l'État », catégorie prévue par les dispositions de l’article 34, alinéa 20 de la Constitution dans sa rédaction issue de la loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008 de modernisation des institutions de la Ve République. À ce titre, ce texte n’a pas pour objectif premier d’intégrer des dispositions non normatives présentant des objectifs et orientations de l’action de l’État, et ne modifie qu’à la marge l’ordonnancement juridique interne. Seuls les articles 8 à 10 du projet, consacrés notamment à l’expertise internationale et à l’action extérieure des collectivités territoriales, sont véritablement normatifs. Ce texte vise en revanche à améliorer la lisibilité et la transparence de la politique de développement et de solidarité internationale de l’État, aux yeux des parlementaires mais aussi des citoyens et des acteurs de la société civile.

Aussi, ce texte ne contient pas de programmation financière : les orientations et lignes programmatiques qui y sont présentées s’appuieront donc, chaque année, sur les moyens inscrits dans les lois de finances successives.

Il est toutefois utile de replacer ce texte dans son contexte budgétaire. La politique d’aide au développement de la France est ambitieuse malgré un cadre budgétaire contraint.

Il s’agit pour la France d’un engagement fort et ancien. Plus de vingt programmes budgétaires participent à la politique de développement et de solidarité internationale, en particulier les programmes « Aide économique et financière au développement » et « Solidarité à l’égard des pays en développement ». Un document de politique transversale relatif à la politique française en faveur du développement est annexé chaque année au projet de loi de finances, conformément à l’article 128 de la loi n° 2005-1720 du 30 décembre 2005 de finances rectificatives pour 2005.

En 2012, la France a consacré 0,45 % de son revenu national brut (RNB) en 2012 à l’aide publique au développement (APD), soit 9,36 milliards d’euros. La France est ainsi le quatrième contributeur mondial en volume, après les États-Unis, l’Allemagne et le Royaume-Uni, et le deuxième pays du G7 après le Royaume-Uni en termes d’effort rapporté à sa richesse nationale.

ÉVOLUTION DE L’AIDE PUBLIQUE AU DÉVELOPPEMENT 2008-2012

En % RNB

2008

2009

2010

2011

2012

France

0,39

0,47

0,5

0,46

0,45

Allemagne

0,38

0,35

0,39

0,39

0,38

Royaume-Uni

0,43

0,51

0,57

0,56

0,56

Japon

0,19

0,18

0,2

0,18

0,17

États-Unis

0,19

0,21

0,21

0,2

0,19

Italie

0,22

0,16

0,15

0,2

0,13

Canada

0,33

0,3

0,34

0,32

0,32

Ensemble CAD (1)

0,3

0,31

0,32

0,31

0,29

Source : annexe au projet de loi de finances pour 2014

Cet effort devrait être porté à 0,48% du RNB en 2014. Les moyens accordés à l’APD sont donc préservés et même légèrement rehaussés. Dans un contexte budgétaire contraint, cet effort mérite d’être souligné. En mars 2013, le Président de la République a par ailleurs réaffirmé la volonté de la France de reprendre une « trajectoire ascendante vers les objectifs internationaux » dès le retour de la croissance. L’ONU fixe en effet comme objectif général de consacrer 0,7% du RNB à l’aide au développement.

S’agissant de politique étrangère et de dispositions budgétaires, les discussions relatives à l’aide publique au développement dans le débat parlementaire reviennent en premier lieu à la commission des affaires étrangères, saisie au fond sur ce texte, et à la commission des finances pour l’examen des projets de loi de finances.

Toutefois, plusieurs dispositions de ce projet de loi concernent la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire. Ainsi, le texte précise dès son article 1er que « la France met en œuvre une politique de développement et de solidarité internationale qui a pour objectif général de promouvoir un développement durable dans les pays en développement, dans ses trois composantes économique, sociale et environnementale ». Le rapport annexé confirme cet accent mis sur le développement durable. L’article 5 entend également promouvoir la responsabilité sociale et environnementale (RSE). Toutes ces raisons justifient une saisine pour avis de la commission du développement durable.

Votre rapporteur pour avis note avec satisfaction que l’environnement, le développement durable et la lutte contre le changement climatique sont pleinement reconnus comme des dimensions centrales du développement. Les auditions auxquelles votre rapporteur a procédé, conjointement avec le rapporteur pour avis de la Commission des affaires économiques, ont confirmé la pertinence de ce projet de loi.

Votre rapporteur pour avis a néanmoins estimé que le projet pouvait être amélioré sur plusieurs points. Sur sa proposition, la Commission du développement durable a donc adopté une série d’amendements portant sur trois grands axes insuffisamment mis en avant dans le texte initial : i) la responsabilité sociale et environnementale (RSE) des acteurs publics et privés, et notamment la responsabilité sociale des maisons-mères vis-à-vis de leurs filiales à l’étranger ; ii) la valorisation du rôle des syndicats comme acteurs du développement ; et iii) la nécessaire prise en compte des questions fiscales et de la lutte contre les flux illicites de capitaux pour une politique de développement véritablement globale.

I. VERS UNE POLITIQUE DE DÉVELOPPEMENT ET DE SOLIDARITÉ INTERNATIONALE PLUS EFFICACE, PLUS COHÉRENTE ET PLUS TRANSPARENTE

A. UNE REFONDATION NÉCESSAIRE

1. Répondre aux faiblesses de la politique actuelle d’aide au développement pour la moderniser

a. La politique d’aide au développement de la France fait l’objet de critiques récurrentes

Malgré son ambition et son importance sur la scène internationale, la politique de développement et de solidarité internationale de la France fait néanmoins l’objet de critiques récurrentes, et ce depuis l’émergence même du concept de coopération dans les années 50 et 60.

Sous des formes, des finalités et des intensités très variables, ces critiques émanent alternativement des milieux politiques, du monde universitaire, des organisations non-gouvernementales et des institutions d’évaluation des politiques publiques. Elles peuvent être d’inspirations idéologiques antagonistes (du néomarxisme au néolibéralisme). Traditionnellement, elles portent aussi bien sur les rapports de domination entretenus entre les pays donateurs et bénéficiaires, sur les effets pervers de l’aide sur les économies et sociétés concernées, sur les outils et la nature des allocations budgétaires de l’APD, que sur les objectifs mêmes affichés par les décideurs publics.

Néanmoins, l’ensemble de ces critiques – qu’elles émanent des cercles universitaires, des organisations non gouvernementales ou des institutions publiques – insistent sur la nécessité de maintenir une aide au développement ambitieuse en volume. Elles appellent avant tout une refonte d’envergure de la politique de développement, une meilleure transparence et une clarification de ses principes et modes d’action, ce qui est précisément l’objet de ce texte.

b. Le récent rapport de la Cour des Comptes reprend certaines de ces critiques

Un rapport de la Cour des comptes de 2012 consacré à la politique française d’aide au développement, dresse ainsi un constat sévère dénonçant « des objectifs peu réalistes, trop nombreux et peu hiérarchisés », qui affaiblissent l’efficacité de la politique d’aide au développement. Par ailleurs, la cour pointe les défauts du modèle français, fondé sur une double tutelle du ministère de l’économie et de celui des affaires étrangères. Cette répartition des rôles budgétaires entre les deux ministères présente l’inconvénient principal de répartir les actions par instrument et non par finalité. Le réseau local d’aide apparaît également complexe et éclaté entre les ambassades, les agences de l’AFD et les services de la direction générale du Trésor. Par voie de conséquence, les frais administratifs présentent un niveau plus élevé que chez les autres grands donateurs : ainsi, 3,4 % de l’aide française part en coûts de gestion, contre 2,8 % au Royaume-Uni et 3 % en Allemagne.

Ce même rapport de 2012 épingle également le système d’évaluation de l’aide française, placé sous la responsabilité de trois acteurs, dépourvus de liens organiques : le pôle de l’évaluation de la direction générale de la mondialisation, du développement et des partenariats du ministère des affaires étrangères, l’unité d’évaluation des activités de développement de la direction du trésor du ministère chargé de l’économie, enfin, la division de l’évaluation et de la capitalisation de l’Agence française de développement. Ces trois entités assurent avant tout un rôle de programmation, de coordination et d’appui méthodologique et confient les évaluations elles-mêmes à des organismes extérieurs. Cette fonction d’évaluation se trouve également fragilisée par la modestie des moyens qui lui sont affectés. Selon la Cour, le coût total de la fonction d’évaluation s’élevait en 2009 à moins de trois millions d’euros, dont les deux tiers au titre de l’Agence française de développement, soit moins de 0,1 % de l’aide bilatérale programmable française. L’absence de toute grille d’objectifs et d’indicateurs visant à évaluer l’impact des actions engagées a notamment suscité des interrogations, parfois fondées, sur la crédibilité et les finalités de cette politique de développement.

Ce constat établi par la Cour des comptes se double de critiques d’ordre plus politique. Plusieurs observateurs issus du monde de la politique, de l’économie ou de la presse ont ainsi dénoncé les relations croisées, parfois douteuses, qui ont pu s’établir entre des responsables français, de très grandes entreprises du secteur extractif et les élites politiques et économiques des pays récipiendaires de l’aide.

B. VERS UN MEILLEUR CONTRÔLE DÉMOCRATIQUE DE LA POLITIQUE D’AIDE AU DÉVELOPPEMENT

1. Un projet de loi issu d’une large concertation avec les acteurs du développement

Le projet de loi s’inscrit dans la continuité des Assises du développement et de la solidarité internationale organisées par le ministre des affaires étrangères, M. Laurent Fabius, et le ministre délégué auprès du ministre des affaires étrangères, chargé du développement, M. Pascal Canfin de novembre 2012 et mars 2013.

Ces assises ont représenté un moment essentiel de réflexion collective aboutissant à une redéfinition des objectifs, des priorités et des moyens. Elles ont en effet réuni l’ensemble des acteurs de la coopération ─ État, collectivités territoriales, parlementaires, organisations non gouvernementales (ONG), syndicats, entreprises, fondations, organismes de recherche ─ dans un dialogue d’une ampleur inédite depuis 1997 et leurs travaux ont porté sur cinq thèmes : la vision du développement post-2015, la transparence et l’efficacité de l’aide, la cohérence des politiques publiques en faveur du développement, les partenariats avec les acteurs non-gouvernementaux, la recherche et les innovations technologiques et sociales en faveur du développement. Ces thèmes constituent précisément le socle de la nouvelle vision de la politique française de développement que le projet de loi DSI entend porter.

Ces Assises ont été suivies d’une réunion du Comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID), qui s’est tenue le 31 juillet 2013. Le Gouvernement y a formalisé ses premières décisions, notamment en matière de priorités géographiques de la politique de développement et de solidarité internationale de la France. Le Comité a également adopté la stratégie « genre et développement », qui définit les priorités de la France dans le domaine de la promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes et constitue un cadre d’action pour tous les partenaires du développement et dont l’évaluation est confiée au Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes.

Comme le Président de la République s’y était engagé le 31 mars 2013, lors de la clôture des Assises, le présent projet de loi est appelé à devenir la première loi de programmation de la politique de développement et de solidarité internationale de l’histoire de la Ve République. Il intègre les avancées des Assises et les décisions du CIDID dans un souci de cohérence et de rationalisation et s’inscrit dans une démarche visant à rendre la politique française de développement et de solidarité internationale plus cohérente, plus transparente et plus efficace.

2. Une loi de programmation pour une meilleure implication du Parlement

Dans une très large mesure, ce projet de loi marque une rupture dans la gouvernance de la politique de développement française, historiquement fondée sur une prévalence de l’exécutif. Les parlementaires pourront désormais débattre et contrôler non seulement le budget – comme c’est le cas aujourd’hui – et le cadre institutionnel – comme ce fut le cas lors de la réforme de la coopération en 1998 –, mais aussi le contenu, les principes, les finalités et les priorités de la politique de développement. Le ministre délégué auprès du ministre des affaires étrangères, chargé du développement, M. Pascal Canfin, a ainsi pu déclarer : « Cette loi […] permet de sortir la politique de développement du monopole de l’exécutif pour passer à une logique de transparence et de contrôle démocratique ».

L’article 10 organise les conditions dans lesquelles le Gouvernement rendra désormais compte, plus régulièrement et plus complètement, des résultats de sa politique de développement. Afin de donner aux contribuables et aux parlementaires davantage d’informations pour apprécier la bonne utilisation des moyens qui y sont consacrés, il est ainsi prévu :

– que la politique de développement et de solidarité internationale fera l’objet d’évaluations régulières sur la base d’indicateurs tels ceux mentionnés à l’annexe 2 du rapport annexé au projet de loi, que ce programme d’évaluation sera communiqué au Parlement et que, sur demande de l’une des commissions permanentes compétentes, le président de l’Assemblée nationale ou le président du Sénat pourront proposer une ou des évaluations similaires ;

– que le Gouvernement transmettra tous les deux ans aux commissions permanentes compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat ainsi qu’au Conseil national du développement et de la solidarité internationale (CNDSI) un rapport faisant la synthèse de la politique de développement et de solidarité internationale conduite par la France dans un cadre bilatéral et multilatéral, d’une part, et des évaluations dont elle fait l’objet, d’autre part. Cette mesure fait directement écho à la décision n° 27 du Comité interministériel de la coopération internationale et du développement du 31 juillet 2013.

Du fait de la présentation de ce rapport bisannuel, qui a vocation à se substituer au rapport sur les institutions financières internationales (Fonds monétaire international, banques multilatérales de développement, etc.) transmis annuellement aux commissions du Parlement chargées des finances et des affaires étrangères sur le fondement du paragraphe III de l’article 44 modifié de la loi n° 98-1267 du 30 décembre 1998 de finances rectificatives pour 1998, cette dernière disposition est abrogée.

3. Une clarification du cadre de l’action extérieure des collectivités territoriales

L’action extérieure des collectivités territoriales est une dimension fondamentale du processus de modernisation de la politique de développement et de solidarité internationale de la France. Selon le rapport annexé, 4 800 collectivités territoriales françaises mènent des actions de développement à l’étranger, avec plus de 10 000 collectivités locales partenaires, totalisant près de 12 500 projets dans 141 pays. Leur action valorise une approche territoriale du développement.

L’action extérieure des collectivités territoriales est aujourd’hui régie, à titre principal, par les dispositions du chapitre V du titre unique du livre Ier de la première partie du code général des collectivités territoriales, consacré à la coopération décentralisée. Dans sa rédaction actuelle, l’article L. 1115-1 prévoit ainsi que les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent, dans le respect des engagements internationaux de la France, conclure des conventions avec des autorités locales étrangères pour mener des actions de coopération ou d'aide au développement. Ces conventions précisent l'objet des actions envisagées et le montant prévisionnel des engagements financiers. Par ailleurs et seulement si l'urgence le justifie, les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent mettre en œuvre ou financer des actions à caractère humanitaire.

L’article 9 du projet de loi substitue une nouvelle rédaction aux dispositions actuelles de l’article L. 1115-1 précité : conservant l’économie générale des textes antérieurs intervenus dans ce domaine depuis la loi n° 92-125 du 6 février 1992 relative à l’administration territoriale de la République, qui avait introduit en notre droit positif la coopération décentralisée, il vise à clarifier les modalités de l’action extérieure des collectivités territoriales. La notion retenue dans cet article est ainsi celle « d’actions de coopération ou d’aide au développement » des collectivités territoriales et de leurs groupements, plus large et plus englobante que celle de « coopération décentralisée ».

L’article 9 fait ainsi apparaître, de manière implicite, qu’à côté des coopérations dans le cadre des conventions expressément visées par l’article L. 1115-1, un nombre croissant d’actions de coopération et d’aide au développement sont désormais menées suivant d’autres modalités, faisant une large place à des opérations partenariales ou mutualisées, par exemple dans le cadre de réseaux généralistes ou thématiques de collectivités territoriales.

Votre rapporteur pour avis se félicite de ce que la nouvelle rédaction de l’article L. 1115-1 se situe dans la continuité du parti pris choisi par le législateur en 1992, c’est-à-dire de ne pas créer de régimes différents selon le niveau de collectivité territoriale concerné – régions, départements, communes – afin de permettre à ces différents niveaux et à leurs groupements de coopérer ensemble.

II. UNE REMISE À PLAT DES OBJECTIFS ET DES PRINCIPES RÉGISSANT LA POLITIQUE DE DÉVELOPPEMENT

A. DES OBJECTIFS CLARIFIÉS ET MIEUX ÉVALUÉS AU SERVICE D’UNE POLITIQUE DE DÉVELOPPEMENT PLUS EFFICACE ET PLUS TRANSPARENTE

1. Une redéfinition des objectifs

a. Objectifs transversaux

Selon le rapport de la Cour des comptes de 2012, le trop grand nombre d’objectifs affichés et leur absence de hiérarchisation contraste avec la pratique de plusieurs partenaires étrangers, en particulier le Royaume-Uni et l’Allemagne. Si la France a longtemps cherché à définir ses priorités selon un critère géographique et dans le but de concentrer son effort d’aide au développement, l’établissement d’une zone de solidarité prioritaire avec 55 pays n’a pas réellement permis de concentrer l’aide sur la région qui en avait le plus besoin. Ainsi, la France ne consacrait que 36 % de son aide bilatérale à l’Afrique subsaharienne en 2011. En revanche, la France a consacré une part croissante de son aide aux pays émergents en utilisant l’effet de levier des prêts bonifiés, par exemple à la Chine, en escomptant un bénéfice pour ses entreprises. Ces interventions se sont révélées coûteuses pour le budget de l’État, avec un effet incertain.

Après avoir défini l’objectif général de la politique de développement et de solidarité internationale (« promouvoir un développement durable dans les pays en développement, dans ses trois composantes économique, sociale et environnementale »), l’article 1er du projet de loi décline ensuite cette orientation de principe en une série d’objectifs thématiques :

– objectifs politiques : promouvoir la paix, la stabilité et les droits de l’Homme, défendre les libertés fondamentales, promouvoir les valeurs de la démocratie et de l’État de droit ;

– objectifs économiques : favoriser un développement économique équitable et riche en emplois, assurer la continuité entre les phases d’urgence, de reconstruction et de développement ;

– objectifs sociaux : lutter contre la pauvreté extrême, réduire les inégalités sociales ou territoriales, promouvoir la diversité culturelle, l’égalité entre les hommes et les femmes et le travail décent ;

– objectifs environnementaux : préserver les biens publics mondiaux, lutter contre le changement climatique, promouvoir la responsabilité sociale et environnementale.

Le rapport annexé, approuvé par l’article 2, approfondit ces principes, en fixant les priorités transversales, sectorielles et géographiques de la politique de développement de la France.

b. Un meilleur ciblage géographique

Dans son rapport sur la politique française d’aide au développement (2012), la Cour des comptes a néanmoins observé que le choix d’un nombre élevé de pays (61 en 1999, ramené à 55 en 2002) était progressivement entré en contradiction avec l’objectif de sélectivité. Elle a également constaté que l’objectif de flexibilité n’avait pas davantage été atteint, les contours de la zone n’ayant jamais été revus entre 2002 et 2009. Elle a enfin souligné que le champ d’intervention de l’Agence française de développement avait été formellement étendu en juillet 2003 à des pays n’appartenant pas à cette zone et que les instruments bilatéraux gérés par le ministère de l’Économie et des Finances restaient exclus de cette logique.

De manière presque concomitante, le Comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID) a développé la notion de « partenariats différenciés », qui vise à adapter aux spécificités de chaque zone les moyens utilisés parmi la palette d’instruments du dispositif français de coopération au développement. Cette notion établit ainsi une correspondance entre les catégories de pays, les catégories d’instruments et les catégories d’enjeux. Elle conduit notamment à favoriser un accès privilégié des pays pauvres prioritaires aux financements les plus concessionnels et débouche sur la sanctuarisation d’une enveloppe de subventions pour pouvoir intervenir de manière significative dans les pays en crise.

Cette approche a été validée par le document-cadre de coopération pour le développement de la France (2011), qui a cependant modifié deux des quatre « espaces de cohérence » établis en 2009 : il a ainsi remplacé les « pays pauvres prioritaires » et les « pays intermédiaires entretenant des relations privilégiées avec la France » par deux catégories purement géographiques, l’Afrique subsaharienne et le bassin méditerranéen.

Le Gouvernement actuel a décidé de concentrer encore davantage l’aide, en redéfinissant les priorités géographiques de la politique de développement lors de la réunion du CICID du 31 juillet 2013. Le concept de « zone de solidarité prioritaire » est abandonné et l’attribution des ressources se fera sur la base sur de « partenariats différenciés », qui reposent eux-mêmes sur le niveau de revenu et la proximité géographique, culturelle et linguistique avec la France.

Conformément à cette orientation de principe, la décision n° 2 du CICID du 31 juillet 2013 annonce ainsi que  le Gouvernement « décide de consacrer au moins 85% de l’effort financier de l’État en faveur du développement en Afrique subsaharienne et dans les pays voisins du Sud et de l’Est de la Méditerranée. »

Aussi, l’article 4 du projet de loi prévoit qu’afin d’assurer son efficacité, la politique de développement et de solidarité internationale devra se fonder sur une logique de « partenariats différenciés », tenir compte des priorités des politiques publiques des pays partenaires et favoriser la transparence.

Par ailleurs, l’article 4 prévoit que l’allocation des ressources publiques devra non seulement tenir compte des besoins des pays bénéficiaires et de leur évolution, de leurs capacités d’absorption et de l’impact attendu de l’aide, mais aussi favoriser la concentration géographique et sectorielle et la prévisibilité des ressources et prévenir la dispersion de l’aide française.

c. Une matrice d’indicateurs de résultats

Le rapport annexé au projet de loi contient une matrice des indicateurs de résultats. Cette matrice comprend 30 indicateurs répartis comme suit :

– 16 indicateurs de l’aide apportée par l’AFD

– 14 indicateurs de l’aide apportée par l’institution internationale.

Classés par domaines et – fait nouveau – communs à tous les acteurs de l’État impliqués dans la politique de développement, ces indicateurs ont vocation à permettre une meilleure évaluation de l’efficacité de l’aide publique au développement.

2. Face au caractère intrinsèquement transversal du développement international, un effort accru de cohérence

a. Cohérence entre les politiques publiques

L’article 3 qui porte sur la cohérence des politiques publiques entre elles, reconnait qu’au-delà de la politique de développement, d’autres politiques publiques peuvent avoir des effets importants, positifs ou négatifs, sur les pays en développement.

L’existence de telles externalités positives entre diverses politiques sectorielles invite donc à rechercher une cohérence entre les objectifs de la politique de développement et de solidarité internationale et ceux des autres politiques publiques susceptibles d’avoir un impact dans le domaine du développement, en particulier les politiques commerciale, agricole, migratoire, sociale, ou les politiques relatives à la recherche et l’enseignement supérieur, à l’éducation, à la santé, à l’environnement et la lutte contre le changement climatique, à la paix et la sécurité, à l’économie sociale et solidaire ou aux outre-mer.

Votre rapporteur pour avis regrette que la politique fiscale ne soit pas intégrée à cet objectif général de cohérence entre les politiques publiques, alors même que l’évasion fiscale constitue un frein au développement des pays en développement.

L’article 6 du projet de loi rappelle quant à lui les exigences d’adaptabilité et de flexibilité qui pèsent sur la politique de développement et de solidarité internationale. Les orientations de cette politique devront être définies et actualisées régulièrement, à l’aune de deux exigences : d’une part, en veillant à la cohérence globale des politiques suivies ; d’autre part, en cherchant à développer les complémentarités, tant entre les composantes bilatérale et multilatérale qu’entre les priorités géographiques et les priorités sectorielles.

b. Cohérence entre l’aide bilatérale et multilatérale

L’aide publique au développement transite par ces trois canaux que sont l’aide bilatérale, l’aide multilatérale et la contribution française à la politique européenne de développement. Bien que l’APD distribuée par la France est majoritairement bilatérale (65% en 2011), notre pays contribue activement à la politique européenne de développement et aux institutions multilatérales. Ainsi, la France est le second contributeur au Fonds Européen de Développement (FED) et l’aide multilatérale représente près de 20% de l’APD nette française en 2011.

La Cour des comptes a attiré l’attention sur le problème de l’efficacité de cette aide multilatérale, invitant les pouvoirs publics à « définir une stratégie en matière d’aide multilatérale » et à rechercher une meilleure articulation avec l’aide bilatérale. L’article 7 du projet de loi parachève cette évolution en confirmant l’identité des objectifs, des priorités et des principes de l’aide au développement française, quelle qu’en soit la forme et quel qu’en soit le cadre de déploiement. Plus précisément, l’article 7 du projet de loi pose les deux principes qui doivent structurer l’action de l’État :

– dans les institutions multilatérales de développement dont elle est partie prenante, la France défend les priorités, objectifs et principes de sa politique de développement et de solidarité internationale, énoncés aux chapitres Ier et II du projet de loi et dans le rapport qui lui est annexé ;

– la France promeut l’amélioration de la coordination, de l’efficience et de la transparence du système multilatéral.

L’article 4 prévoit que la France devra également promouvoir au sein de l’Union européenne la programmation conjointe de l’aide apportée par les États membres ainsi que l’harmonisation et la coordination des actions d’aide avec les autres bailleurs de fonds bilatéraux et multilatéraux.

L’étude d’impact annexée au projet de loi indique par ailleurs que, conformément à ses engagements internationaux, la France élaborera en 2014 une stratégie portant sur les orientations de son aide multilatérale. Cette stratégie couvrira de manière cohérente, mais différenciée, les diverses familles d’institutions (onusiennes, européennes, financières internationales). Elle visera à renforcer la cohérence de la politique d’aide au développement de la France, à mieux articuler les instruments de son aide bilatérale et multilatérale, à contribuer à une plus grande rationalisation du paysage multilatéral ainsi qu’à limiter la dispersion de l’aide française.

c. Cohérence avec l’action des opérateurs de l’expertise technique internationale

L’article 8 du projet de loi inscrit les opérateurs de l’expertise technique internationale dans le cadre de la politique de développement et de solidarité internationale de la France : il rappelle que ces opérateurs contribuent, le cas échéant dans le cadre de conventions passées avec l’État, à la mise en œuvre des priorités, objectifs et principes de cette politique, dans le respect de leurs mandats et objectifs respectifs. L’article complète ainsi les dispositions de la loi n° 2010-873 du 27 juillet 2010 relative à l’action extérieure de l’État.

Dans son discours de clôture des Assises du développement et de la solidarité internationale, le Président de la République avait explicitement demandé au Gouvernement de « prendre rapidement les mesures qui s’imposent pour faire que l’expertise devienne encore plus performante » et le comité interministériel pour la modernisation de l’action publique a donc diligenté, au printemps dernier, une évaluation sur la rationalisation du dispositif français d’expertise internationale.

Le rapport de la Cour des comptes sur la politique française d’aide au développement regrettait déjà un éclatement entre le dispositif du ministère des affaires étrangères en appui aux administrations des gouvernements étrangers, une trentaine d’opérateurs spécialisés rattachés à différents ministères de tutelle qui entretiennent un vivier d’experts, des agences publiques qui - en complément de leur activité principale - répondent à des appels d’offre, un secteur privé très dynamique déployant des ingénieries spécialisées sur le marché international de l’expertise technique.

La multiplicité des opérateurs français d’expertise nuit, à l’évidence, à la visibilité et à l’efficacité de l’action extérieure de la France – en particulier, en matière d’accès aux financements internationaux.

Votre rapporteur pour avis espère que les dispositions de l’article 8, qui n’appellent pas d’autres commentaires particuliers, constitueront bien la matrice dans laquelle pourra s’inscrire une volonté de donner plus de clarté et de cohérence aux actions françaises en faveur du développement.

B. L’IMBRICATION DE LA POLITIQUE DE DÉVELOPPEMENT AVEC LES ENJEUX DU DÉVELOPPEMENT DURABLE

L’article 1er du projet de loi fixe l’objectif général de la politique de développement et de solidarité internationale de la France : promouvoir un développement durable dans les pays en développement, dans ses trois composantes économique, sociale et environnementale. L’importance accordée à la dimension environnementale est ensuite précisée dans le rapport annexé.

Dès le préambule, ce rapport considère que « l’élimination de la pauvreté et la garantie à tous d’une vie décente ne pourront être atteints sans un renforcement de la gouvernance mondiale, ainsi qu’une transition vers des modèles de développement, de consommation et de production plus durables. […] Il s’agit de favoriser l’épanouissement d’une société inclusive […] ». De manière très explicite, le rapport considère avec raisons que la lutte contre le changement climatique et le développement économique et social sont intrinsèquement liés. Cette dimension fait partie des deux priorités transversales définies dans la première partie du rapport.

La préservation de l’environnement et des biens publics mondiaux occupe une place de choix dans la définition des finalités de la politique de développement et de solidarité de la France, notamment la lutte contre les dérèglements climatiques, la protection de la biodiversité, et l’amélioration de la prévention des risques sanitaires et environnementaux.

Outre ces priorités transversales, le rapport liste dix priorités sectorielles, parmi lesquelles : agriculture et sécurité alimentaire et nutritionnelle, promotion de la responsabilité sociale et environnementale, développement des territoires, environnement et énergie, eau et assainissement.

Votre rapporteur pour avis salue cette prise en compte transversale du développement durable, de la lutte contre le réchauffement climatique et de la préservation de l’environnement.

C. VERS UNE MEILLEURE RECONNAISSANCE DU RÔLE DES ACTEURS NON-ÉTATIQUES

a. Organisations non-gouvernementales (ONG)

Le chapitre 3.2 du rapport annexé (article 2 du projet de loi), précise les contours des interactions avec les acteurs non-étatiques, à commencer par les ONG qu’elles soient françaises, internationales, ou locales dans les pays destinataires de l’aide au développement.

Le rapport reconnaît d’une part l’expérience des organisations de la société civile du Nord, et leur rôle en matière d’accompagnement et de renforcement des capacités des sociétés civiles du Sud.

Selon le rapport de la Cour des comptes, la collaboration avec les ONG est restreinte : seule 0,15% de l’aide passe par leur canal en 2010, contre 2% en moyenne dans l’OCDE. Le rapport annexé précise que le Gouvernement s’est engagé à doubler, d’ici la fin du quinquennat, la part de l’aide française transitant par les ONG.

Votre rapporteur pour avis se réjouit de la meilleure prise en compte de ces acteurs incontournables du développement. Il souligne toutefois le rôle joué par les syndicats de travailleurs, catégorie particulière d’organisations non-gouvernementales, et a déposé des amendements visant à valoriser plus explicitement leur rôle et leur importance.

b. Le secteur privé apporte une contribution décisive au développement et sa responsabilité doit être reconnue et précisée

Si la part des investissements directs à l’étranger (IDE) mondiaux investis dans les pays les moins avancés (PMA) reste inférieure à 2 %, les IDE à destination des pays en développement se sont élevés à 703 milliards de dollars en 2012 (52 % du volume total d’IDE dans le monde). En comparaison, le volume total de l’aide publique au développement à destination de ces mêmes pays émergents versée par les pays membres du Comité d’aide au développement (CAD) de l’OCDE représente 125,6 milliards de dollars, soit un montant environ cinq fois inférieur au volume total des IDE vers ces pays.

Partant du principe que les objectifs du millénaire pour le développement (OMD) ne peuvent être atteints que dans le cadre d’une croissance économique soutenue et soutenable dans les pays bénéficiaires, le rapport annexé fixe dix « secteurs prioritaires d’intervention », parmi lesquels – à juste titre – le développement du secteur privé et la promotion de la responsabilité sociale et environnementale (RSE).

Ce même rapport annexé indique que le gouvernement travaille, en concertation avec la plateforme nationale d’actions globales pour la responsabilité sociétale des multinationales dont votre rapporteur pour avis est membre, à une meilleure responsabilisation des entreprises multinationales et des donneurs d’ordre vis-à-vis de leurs filiales et de leurs fournisseurs situés dans les pays en développement. La catastrophe du Rana Plaza au Bangladesh (2) a malheureusement illustré l’impérieuse nécessité de faire avancer le cadre normatif sur cette question.

Votre rapporteur pour avis souhaite souligner l’importance de cette question, qui fait écho à l’émergence d’un cadre normatif international sur ces questions, élaboré au niveau de l’OCDE et de l’ONU. Ainsi, depuis 1976, l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) élabore et publie des Principes directeurs à l'intention des entreprises multinationales, établissant des recommandations et des objectifs en matière de droits de l'homme, d'emploi, de protection de l'environnement, de lutte contre la corruption, de protection des consommateurs, de respect de la concurrence et de fiscalité. Ces principes directeurs de l’OCDE ont été mis à jour en mai 2011. Par ailleurs, le Conseil des droits de l'homme de l'ONU a adopté, le 17 juin 2011, des principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l'homme (principes dits « De Ruggie », du nom de l’ambassadeur de l’ONU les ayant négociés), qui prévoient que les entreprises font preuve de diligence raisonnable pour s'assurer de ne pas porter atteinte aux droits de l'homme et mettent en œuvre des mesures de réparation en cas d'atteinte aux droits de l'homme.

Le rapport fait également de la gouvernance et de la lutte contre la corruption une des dix priorités sectorielles de l’aide publique au développement, en cohérence avec la décision du gouvernement d’engager le processus formel d’adhésion à l’initiative sur la transparence dans les industries extractives (ITIE) et à l’annonce du Président de la République lors du sommet du G8 d’engager la transposition par la France des directives européennes concernant les obligations des entreprises extractives européennes de publier pays par pays et projets par projets les revenus tirés de l’exploitation des ressources extractives versés à des États,

Dans les pays en développement, la fuite des capitaux réduit considérablement les recettes fiscales des États, et prive ces pays de ressources qui pourraient autrement être affectées à des programmes de développement et de lutte contre la pauvreté. Sur ce sujet, le rapport détaille notamment les engagements de la France en matière de coopération administrative visant à renforcer les capacités administratives des partenaires et accompagner le renforcement des cadres législatifs et réglementaires.

Votre rapporteur pour avis estime toutefois que le projet de loi et le rapport annexé n’accordent pas suffisamment d’importance à la lutte contre l’opacité financière et les flux illicites de capitaux. En particulier, il note avec regret que l’effort de mise en cohérence de la politique de développement et de la politique fiscale ne fait pas partie des objectifs établis par ce projet de loi.

Plus généralement, l’article 5 du projet de loi impose la prise en compte de l’exigence de responsabilité sociale et environnementale dans la politique de développement et de solidarité internationale : l’importance centrale de la RSE dans les orientations futures de cette politique se trouve ainsi marquée de manière plus nette.

Votre rapporteur pour avis juge tout à fait souhaitable que la politique de développement de la France prenne mieux en compte les enjeux de la RSE, dans le double objectif de limiter les impacts négatifs résultant de l’activité économique des entreprises françaises à l’étranger et de tirer vers le haut les standards appliqués localement par les entreprises des pays en voie de développement.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. AUDITION DU MINISTRE

La Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a entendu, le mardi 12 mars 2013, M. Pascal Canfin, ministre délégué chargé du développement, sur les négociations climatiques et les aides au développement.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Je souhaite la bienvenue à M. Pascal Canfin, ministre délégué chargé du développement, pour une audition sur les négociations climatiques internationales et les aides au développement.

M. Pascal Canfin, ministre délégué chargé du développement. C’est déjà un symbole que le ministre chargé du développement vienne s’exprimer devant votre commission – on m’a d’ailleurs plusieurs fois attribué dans la presse le titre de ministre du développement durable !

Je voudrais évoquer deux questions principales : la façon dont nous intégrons le développement durable dans la politique de développement et l’action de la diplomatie française pour réussir l’accord sur le climat de Paris 2015, qui est conduite conjointement par les ministères chargés de l’écologie et des affaires étrangères.

Sur le premier sujet, je rappelle qu’existent, d’une part, un agenda du développement et de la solidarité internationale sur l’éducation, la santé ou les infrastructures, et, d’autre part, un agenda du développement durable, du climat, de la biodiversité et de la lutte contre la diversification, et que les deux ne sont pas spontanément convergents. Tel est l’enjeu des grandes négociations qui ont commencé à s’ouvrir dans le cadre de l’ONU sur les Objectifs du millénaire pour le développement (OMD) – à savoir les huit objectifs de lutte contre la pauvreté – et ceux du développement durable, à la suite du sommet de Rio+20, qui doivent être respectivement renouvelés et définis en 2015.

La position française a été affinée avec la société civile dans le cadre des Assises du développement et de la solidarité internationale, conclues le 1er mars dernier, et les positions européennes sont en train de se stabiliser. Je me rendrai demain à New York pour deux jours de réunions de travail à l’ONU sur la définition des futurs objectifs du développement durable. Nous partageons notre siège avec l’Allemagne – ce qui est une première, dont je me réjouis – et la Suisse sur ce sujet.

La France et l’Europe plaident pour une convergence entre ces deux agendas : il s’agit d’un point majeur des négociations internationales des trois années à venir. Il est inenvisageable de poursuivre une politique de développement n’intégrant pas les questions de soutenabilité. C’est d’ailleurs ce que dit la Banque mondiale dans un récent rapport publié juste avant la conférence de Doha sur le climat, dans lequel elle précise qu’un monde connaissant une température de 4 degrés supplémentaires aurait plus d’enfants mourant avant l’âge de cinq ans à cause de l’insécurité alimentaire et de la sécheresse. Au Sahel, il pleut aujourd’hui en moyenne 30 % de moins qu’il y a dix ans ; au Sénégal, à Saint-Louis, l’érosion côtière commence à grignoter la ville. Les pays les plus pauvres sont les plus touchés et les plus vulnérables. Il est illusoire de penser qu’on puisse continuer à se développer avec 9 milliards d’habitants en 2050 comme on l’a fait jusqu’ici.

J’ai pris plusieurs mesures pour intégrer la soutenabilité environnementale dans les politiques de développement – la soutenabilité sociale l’étant par essence dans celles traitant d’éducation ou de santé.

En matière énergétique, nous avons modifié en octobre dernier la stratégie de l’Agence française de développement (AFD) – qui est notre troisième banque publique après la Caisse des dépôts et la Banque publique d’investissement (BPI) –, de façon à faire des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique les deux priorités de notre intervention. Cet organisme va prêter entre 5 et 6 milliards d’euros dans les trois prochaines années à des pays du Sud, émergents ou en développement, pour favoriser des investissements dans ce secteur. Le Président de la République a annoncé à cet égard, lors de la clôture des Assises du développement et de la solidarité internationale, que nous arrêterons de financer des centrales à charbon sans dispositif de type CCS (capture et stockage de carbone) : nous considérons que soutenir de telles infrastructures est incompatible avec notre agenda de transition énergétique et de lutte contre le changement climatique.

Dans le domaine agricole, nous sommes en train de revoir la doctrine de l’AFD, de manière à donner la priorité, dans nos investissements sous forme de prêts mais aussi de dons, à l’agriculture paysanne, c’est-à-dire à des formes d’agriculture peu intensives en carbone, et à des circuits courts sur des marchés locaux – plutôt qu’à une agriculture d’exportation sur le marché mondial, qui a sa raison d’être mais ne doit pas forcément être financée par des fonds publics. Nous avons achevé la concertation avec une soixantaine d’organisations de la société civile, du Nord comme du Sud, et allons adopter un texte lors du prochain conseil d’administration de l’AFD fin mars.

S’agissant de la biodiversité, la doctrine évoluera au cours du second semestre 2013 en vue de renforcer sa prise en compte dans les projets financés par l’AFD.

En outre, deux éléments transversaux ont été mis en place.

D’abord – cela est à l’œuvre pour la première fois sous une forme pilote ce mois-ci, avant une instauration définitive en octobre pour tous les projets de l’AFD –, chaque projet fera l’objet, au-delà d’un premier avis bancaire et financier, d’un avis « développement durable » – qui intégrera une méthodologie permettant d’évaluer le projet et de le noter –, au vu duquel le conseil d’administration prendra sa décision. Cela donnera un système de références communes à l’ensemble des projets financés par l’agence.

Deuxièmement, la France s’est donnée pour objectif de porter à 50 % les projets financés ayant des « co-bénéfices » climat – nous allons d’ailleurs atteindre un taux de 45 %.

Notre action est aussi conduite au niveau européen. Le dernier budget européen en matière de politique de développement pour les sept prochaines années est de 27 milliards d’euros. Nous souhaitons intégrer dans cette politique l’objectif de 20 % de projets favorables au climat au travers du Fonds européen de développement (FED) – il n’y a pas aujourd’hui d’objectif de soutenabilité en la matière.

Par ailleurs, la France a proposé d’organiser en 2015 la grande conférence sur le climat. Lorsque j’ai annoncé cette nouvelle dans le cadre du forum des économies majeures, le négociateur chinois a déclaré « vous voulez faire Copenhague sur Seine ! », ce qui montre la difficulté de la tâche ! Cela donne à l’ensemble des acteurs politiques français une responsabilité particulière. Je gère ce dossier pour le ministère des affaires étrangères, sous l’autorité de Laurent Fabius.

Nous devons éviter l’erreur du « tout ou rien » de la Conférence de Copenhague, où l’on a voulu obtenir un accord qui allait changer le monde pour finalement aboutir à peu de chose – ce qui a créé une sorte de « climate blues » freinant toutes les mobilisations. Il convient d’être modeste : la logique voudrait qu’il n’y ait pas d’accord, même si nous allons tout faire pour que ce soit le cas.

Nous commençons à travailler sur plusieurs pistes. D’abord, nous essayons de savoir pourquoi les agendas en vigueur échouent. On voit qu’on est dans un imaginaire du « burden sharing » ou partage du fardeau. Or la capacité de l’humanité à se mettre d’accord sur un tel partage de manière coopérative et pacifique sans que rien ne l’impose est aujourd’hui à peu près nulle, même si l’on peut toujours espérer une forme de sursaut à Paris en 2015. Il y a donc lieu de construire autre chose : d’où l’importance de travailler sur un imaginaire positif en termes de technologies ou de financements et des bonus de coopération pour chaque pays. Nous devons trouver des alliés, au Nord comme au Sud, pour prendre des initiatives à cet égard.

Deuxièmement, on peut se demander si les 100 milliards de dollars que les pays riches ont décidé de consacrer aux pays en développement lors de la Conférence de Copenhague sont publics et additionnels aux actions en cours en matière d’aide publique au développement ou intègrent les fonds privés et ce qui est déjà entrepris. Même si l’on se situait dans le premier cas, l’objectif serait très difficile à atteindre dans le contexte budgétaire actuel, et s’il l’était, cela ne changerait pas grand-chose dans la mesure où ce montant constitue une goutte d’eau par rapport à celui consacré à l’ensemble des infrastructures – au mieux 2 à 3 % – et ne permettrait pas de vraiment lutter contre le changement climatique. Il faut essayer de construire un agenda à la fois plus réaliste politiquement et plus ambitieux, ce qui suppose de faire de l’investissement favorable au climat la norme. On pourrait déjà orienter en ce sens les 100 milliards actuels consacrés à l’aide publique au développement sans qu’il en coûte un euro de plus, autrement dit faire en sorte que les fonds finançant des centrales à charbon ou des modèles agricoles ou énergétiques n’intégrant pas la question climatique le fassent.

La France a une responsabilité particulière car elle dispose d’un appareil diplomatique lui permettant d’être présente à peu près partout dans le monde pour faire avancer ce dossier au cours des trois années à venir. Je compte sur vos idées et vos initiatives pour nous y aider et obtenir un succès diplomatique à Paris en 2015.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. J’ai lu que dix fois plus de moyens étaient consacrés par l’AFD à lutter contre le réchauffement climatique que contre la perte de biodiversité : est-ce toujours le cas ?

M. Jean-Yves Caullet. Au nom du groupe SRC, je retiens de votre propos, monsieur le ministre, la nécessité d’intégrer la responsabilité environnementale et sociale dans la politique publique de développement. On peut en effet difficilement soutenir une divergence entre les agendas que vous avez évoqués, qui serait un grave échec.

S’agissant des outils à mettre en place, notamment dans le cadre de l’AFD, que pouvons-nous envisager comme saut technologique dans l’énergie comme dans l’agriculture, permettant d’offrir un développement ne passant pas par des consommations énergétiques, des investissements ou des dépendances industrielles mettant à mal les efforts en termes de durabilité ? Quand aurons-nous un pilotage numérique solaire pour les instruments de traction agricole ou des matériaux composites allégés pour améliorer les performances d’un certain nombre de paysans pauvres, plutôt que de voir la traction animale diminuer de moitié ?

De nombreux établissements publics français mènent des politiques de coopération en matière de formation vis-à-vis des pays en développement, mais la coordination de leurs actions n’est pas la règle : comment unir davantage ces efforts ?

Concernant l’avis sur le développement durable que vous souhaitez généraliser, comment s’assurer que l’on disposera des compétences nécessaires à cet effet ?

Enfin, nous avons pensé qu’un travail parlementaire pouvait être nécessaire pour préparer la conférence de Paris de 2015, afin de faire converger les positions : comment pourrions-nous coordonner les actions du Parlement et du Gouvernement dans ce domaine ?

M. le président Jean-Paul Chanteguet. À cet égard, je rappelle que nous avons créé une antenne du forum interparlementaire Globe international – une première rencontre de Globe Europe a eu lieu il y a quelques semaines à Paris – et que nous sommes prêts à prendre dans ce cadre des initiatives en la matière.

M. Bertrand Pancher. L'éradication de la pauvreté et le droit au développement sont les deux messages prioritaires adressés par les pays en développement aux pays riches depuis le Sommet de la Terre de 1972. De plus, la conférence de Rio+20 a démontré que l’on ne pouvait plus aborder les questions environnementales sans parler de développement et de progrès social. Je rappelle que la première réunion du Fonds vert pour le climat de l'ONU s'est déroulée à Genève en août dernier et que ce fonds est hébergé en Corée du Sud. Selon l'accord de Copenhague de 2009, il devait mobiliser 100 milliards d'euros d'ici 2020.

Or ce fond est actuellement vide et les nations sont confrontées à la crise. En outre, le mécanisme technologique et le comité d'adaptation – les deux autres institutions onusiennes d'aide au développement – ne sont pas encore opérationnels. L'urgence est d'abord de donner des signaux politiques sur les financements de ce fonds vert.

La France consacre 0,46 % de son revenu national brut (RNB) à l'aide aux pays pauvres, ce qui a représenté 9,35 milliards d'euros en 2012. Le 1er mars, lors des Assises du développement et de la solidarité internationale, le Président de la République a affirmé que, malgré les difficultés actuelles, nous conserverions une « politique ambitieuse de développement ». Il a également annoncé une loi d'orientation, la création d'un Conseil national du développement et de la solidarité et le doublement de la part de l'aide au développement délivrée par les organisations non gouvernementales (ONG).

Les moyens préconisés sont de trois ordres : une part importante de la taxe sur les transactions financières, la taxe de solidarité sur les billets d'avion, qui sera réactualisée, et les moyens supplémentaires qu’auront les collectivités territoriales pour financer leur coopération décentralisée. En outre, la loi Oudin-Santini pourra être appliquée aux déchets – j’avais déposé à cet égard un amendement, qui a été adopté par notre commission mais non repris malheureusement lors du débat budgétaire.

Toutefois, selon les ONG, les enveloppes budgétaires ne correspondent pas aux annonces du Président de la République et la Coordination Sud regrette que la politique de développement n’ait pas intégré la responsabilité sociale et environnementale, qui pourrait être développée au travers de mécanismes nouveaux.

Je souhaite, dans ces conditions, vous poser plusieurs questions au nom du groupe UDI : quelle mobilisation française est exactement prévue ? Comment s'organisera-t-elle ?

Les ONG demandent que la France tende vers l'objectif mondial fixé par l'ONU de consacrer 0,7 % du PIB à l'aide au développement : qu'en sera-t-il ?

Par ailleurs, quel est le calendrier prévu pour permettre aux collectivités territoriales de disposer de moyens supplémentaires pour financer leur coopération décentralisée ? Combien rapportera le mécanisme envisagé, qui ne devrait être qu'incitatif ?

Beaucoup de problèmes et d'interrogations subsistent également sur la gouvernance du Fonds vert : le choix de son directeur, la transparence des réunions du conseil d’administration, le mandat et la sélection des observateurs actifs en son sein. Quelle est la position de la France en la matière ?

Concernant la lutte contre la déforestation, quelles sont vos préconisations ? Je rappelle que les chances de mise en place d'un mécanisme de réduction contre la déforestation, effectif au niveau international, sont malheureusement faibles, le financement de l’initiative REDD étant fortement conditionné à l'élargissement du mécanisme de Kyoto.

Enfin, n'est-il pas temps de réfléchir au conditionnement de certaines de nos réductions d'impôts à des pratiques en faveur d'un développement international partagé – je pense aux actions des fondations d'entreprises et aux placements des produits des assurances-vie en faveur de l'épargne responsable ?

M. Denis Baupin. Les politiques de développement et d’environnement sont en effet extrêmement liées. Tant qu’on ne sera pas capable d’apporter une réponse commune dans ces domaines, on n’aboutira pas.

Le fait que le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) ait obtenu le Prix Nobel de la paix montre que le dérèglement climatique est bien plus qu’une question environnementale : il soulève celle de savoir si nous serons capables de concevoir l’avenir des 9 milliards d’habitants de la planète en 2050.

2015 sera une année très importante, au cours de laquelle sont prévus à la fois un accord planétaire sur le dérèglement climatique, la réévaluation des objectifs du Millénaire pour le développement et l’élaboration des objectifs de développement durable issus de la conférence de Rio+20. Cette tâche très lourde peut constituer une opportunité de sortir de l’équation complexe à laquelle nous sommes confrontés dans le cadre d’un accord global.

Cela implique que nous modifiions la façon dont nous abordons les choses : il faut en effet apporter un imaginaire positif, qu’il convient d’assortir d’une négociation de droits et de devoirs pour l’ensemble des acteurs, qu’il s’agisse des efforts en termes d’émissions de CO2 ou d’aide au développement. Les 100 milliards de dollars évoqués ne représentent qu’un quinzième des dépenses planétaires annuelles d’armement : si l’on regarde les enjeux géopolitiques liés à une mauvaise gestion du dérèglement climatique, il ne serait pas absurde que cette somme serve à prévenir les conflits.

Il faut essayer d’élaborer de nouvelles réponses sur les mesures mises en place au niveau planétaire. On observe à cet égard une évolution positive en matière de développement des énergies renouvelables, de l’efficacité énergétique, des fiscalités de lutte contre le dérèglement climatique ou des marchés du carbone.

Quels sont les alliés privilégiés de la France pour mener les négociations en vue de 2015 ? Quelle posture l’Europe peut-elle prendre en termes de propositions pour aller au-delà de l’objectif des « trois fois vingt » et le porter par exemple à « trois fois quarante-cinq » à l’horizon de 2030 ? Quelle analyse faites-vous de l’évolution des États-Unis avec la nouvelle équipe présidentielle américaine ? Observe-t-on un changement de posture de leur part pouvant permettre de débloquer la situation ?

Je suis également favorable, au nom du groupe écologiste, à associer le plus grand nombre d’acteurs aux niveaux national et international, notamment les parlementaires pour la réussite de la conférence de Paris en 2015.

M. Olivier Falorni. Au nom du groupe RRDP, je suis heureux, monsieur le ministre, de votre présence parmi nous aujourd’hui.

S’agissant de l’aide au développement, j’aborderai l’exemple du Mali. Les forces françaises sont intervenues avec succès afin de mettre un coup d'arrêt au fondamentalisme : nous pouvons saluer leur courage et leur détermination. Mais Tombouctou, Gao et bien d'autres villes et villages sont un champ de ruines : il va falloir reconstruire.

Les collectivités locales sont un relais essentiel pour la dynamisation des rapports économiques bilatéraux. En ce sens, la coopération décentralisée est un levier extraordinaire pour l'essor des contrats passés par les entreprises françaises et l'aide à la pénétration du marché national par les entreprises maliennes. Si les associations sont actives dans ce domaine – particulièrement dans mon département –, elles sont aussi au bord de l'asphyxie : les aides provenant des régions et des collectivités locales sont de moins en moins nombreuses en raison du contexte budgétaire et elles ne peuvent prétendre à une aide de l'État dans le cadre de la coopération décentralisée.

Vous avez repris un certain nombre de mesures du rapport Laignel, notamment la continuité du budget, la tenue chaque année d'une conférence « Diplomatie et Territoires » et la création d'un fonds d'urgence. Dans quelles conditions prendront-elles concrètement forme et selon quel calendrier ?

Le 1er mars, lors de la clôture des Assises du développement et de la solidarité internationale, le Président François Hollande a fixé trois objectifs, dont celui de contribuer à l'essor des pays en développement, en donnant au Mali toutes les conditions nécessaires pour assurer son développement une fois les opérations militaires terminées.

Malgré tout, l'aide française d'aide publique au développement stagne et, en dépit de taux de concentration croissants en faveur de l'Afrique, on ne peut que constater la diminution des moyens en subventions. Nous pouvons cependant saluer l'attribution de l'enveloppe de 150 millions d'euros gelée après le coup d'État de mars 2012, dont la distribution se fera en fonction de la feuille de route qui a été établie : pouvez-vous nous donner des précisions sur ce point ?

La mise en place de la taxe sur les transactions financières, dont 10 % des recettes seront affectés au développement, est une bonne chose. La Commission européenne ainsi que les onze pays engagés dans la voie de la coopération renforcée s'attendent à des recettes de l'ordre de 35 milliards d'euros pour 2014 : qu'en est-il réellement ? Les ONG ont fait part de leur inquiétude sur le manque d'engagement concernant la réalisation des Objectifs du millénaire, et ce malgré la promesse de porter la part de l'aide de la France transitant par les ONG de 1 à 2 %.

En matière climatique, il y a urgence : la Banque mondiale redoute une hausse de la température de la planète de 4 degrés d'ici 2100, voir 2060, si rien n'est engagé d'ici là. Alors que les pays en développement en subiront les plus forts effets, la France ne sera pas en reste : l'effort que doit fournir notre pays pour s'adapter à ces changements est considérable. Les politiques publiques évoluent depuis quelques années et le budget alloué au changement climatique est de plus en plus conséquent, se situant à 33,4 millions d’euros ; cette action, bien que modeste au regard des enjeux, est louable. Or vous êtes un ministre très engagé dans la solidarité climatique et le programme mis en route au Cambodge sur la compensation en CO2, permettant de réduire les dépenses dans les pays du Nord afin d'aider les pays du Sud, est prometteur. Pensez-vous engager d'autres actions de ce type dans différents pays ?

M. Philippe Plisson. Alors que le processus de changement climatique évolue plus rapidement que le plus pessimiste des scénarios du GIEC, il est inquiétant que les plus grandes nations restent dans la logique du « tout pour la croissance » : la dernière conférence des Nations unies sur le changement climatique a été fortement critiquée par les organisations environnementales, qui ont parlé de fiasco absolu. Il aura fallu pas moins de 18 réunions internationales de cette organisation pour se mettre d’accord sur le minimum : une extension de huit années du protocole de Kyoto, qui expirait le 31 décembre 2012. Si les 190 pays participant à la conférence mondiale ont décidé de poursuivre leurs efforts pour trouver une solution en 2015 à la conférence de Paris, vers quel type d’accord nous dirigeons-nous ? Quel est le programme de travail pour y arriver ? Vous semblez afficher une ambition limitée pour éviter d’être déçu : face à l’urgence, ne sommes-nous pas déçus de n’avoir que des ambitions limitées ? (Sourires)

Qu’en est-il des 100 milliards du Fonds vert pour le climat ? Qu’adviendra-t-il de l’article stipulant que ses engagements financiers ne seront honorés que lorsque les circonstances financières des pays le permettront ? Quelles sont les solutions prévues pour les pays insulaires et les perspectives pour la protection de l’environnement et le développement des énergies renouvelables en Afrique ?

M. Guillaume Chevrollier. Je souhaiterais vous alerter sur la question des déchets dans les pays les moins avancés (PMA), notamment en Afrique. Nombre de ces pays récupèrent en effet des pays occidentaux des déchets en leur donnant une deuxième, voire une troisième vie ; comment sont-ils traités quand ils sont transformés, sachant que certains peuvent contenir des produits dangereux ? Quelle est votre position sur ce sujet, qui pourrait constituer un véritable enjeu de coopération entre le Nord et le Sud ?

M. Yann Capet. Je salue la feuille de route du Gouvernement tendant à lier négociations sur le développement durable et aide au développement. On sait que la trilogie lutte contre la pauvreté, développement et développement durable, est une condition du succès. Il est essentiel de consacrer la participation de l’ensemble des acteurs contribuant à celui-ci, qu’il s’agisse des ONG, des parlementaires ou des collectivités territoriales. Ces dernières sont souvent en avance, y compris dans les États les plus climatosceptiques, notamment les États-Unis : leur rôle dans le cadre des coopérations décentralisées et des transferts d’expérience et de technologie – au travers des projets de coopération à l’initiative du ministère des affaires étrangères –, leurs compétences propres – facilitant ce transfert de savoir-faire vers les collectivités étrangères –, et leur échelle – permettant des changements de comportement et une meilleure association des citoyens, y sont pour beaucoup. Elles disposent à cet effet d’outils tels que les conventions de coopération ou la loi Oudin-Santini : comment envisagez-vous de renforcer leur rôle dans le cadre des négociations à venir ?

M. Yannick Favennec. La Conférence de Doha s’est achevée le 8 décembre par un accord a minima, insuffisant mais nécessaire, dans la mesure où il permet de prolonger le protocole de Kyoto jusqu’en 2020 dans les conditions souhaitées par l’Union européenne : renforcer la mobilisation politique vers un accord mondial en 2015 et répondre aux pays en développement en matière de réparation des pertes et dommages dus au changement climatique – sans pour autant céder à leurs demandes de compensation financière. La France a notamment fait valoir la mobilisation de la taxe sur les transactions financières et la poursuite de son soutien aux actions de lutte contre le réchauffement climatique, notamment par le biais de l’AFD, dont la moitié d’entre elles est consacrée à cette fin.

Avez-vous l’intention de mobiliser le Parlement français en vue de la conférence de Paris en 2015 ? Si oui, comment ?

M. Christophe Priou. Lors des Assises du développement et de la solidarité internationale, on a parlé d’une loi d’orientation qui pourrait être débattue au Parlement au début de 2014 : qu’en est-il exactement ?

Un rapport de la Cour des comptes de juin 2012 a souligné trois travers de la politique française d’aide au développement : l’absence de priorités géographiques, l’éparpillement des responsabilités entre ministères et l’usage croissant des prêts – au détriment des dons – certes coûteux budgétairement mais plus adaptés aux capacités des États les plus démunis.

Comment à cet égard mieux coordonner les actions de coopération mises en place par les collectivités territoriales ? Dans ma région, nous avons par exemple un partenariat avec des pays africains à travers des producteurs de sel. Ce partenariat fonctionne bien, sans mobiliser des crédits importants : il faut savoir se nourrir de ce type d’expériences qui ont fait leurs preuves depuis des décennies !

M. Philippe Noguès. Je suis d’accord pour intégrer la responsabilité sociale et environnementale des entreprises dans le cadre de la refonte de la politique française d’aide au développement, à condition de prendre les dispositions nécessaires pour ne pas exclure les PME locales des appels d’offre.

Le conseil d’administration de l’AFD a validé en octobre dernier le principe selon lequel, dorénavant, l’ensemble des appels d’offre comportera des clauses sociales et environnementales. Les opérations financées par Proparco peuvent par ailleurs être soumises à une démarche de maîtrise des risques environnementaux et sociaux. Ces mesures sont-elles concrètement mises en place ? La prise en compte des critères sociaux et environnementaux est-elle aujourd’hui systématique dans les appels d’offre et les décisions de l’AFD ?

Le Gouvernement a annoncé, lors de la Conférence environnementale, la création d’une plateforme interministérielle, qui semble tarder à se mettre en place : quand sera-t-elle effective ?

Mme Catherine Quéré. Lorsque les projets soumis à l’AFD répondent à tous les critères requis, les aides sont-elles attribuées quel que soit le pays concerné ?

Mme Brigitte Allain. Concernant la biodiversité, quelles mesures internationales doit-on mettre en place pour lutter contre les effets nocifs de la brevetabilité du vivant – de nombreuses plantes ayant été accaparées dans des pays en voie de développement ?

Par ailleurs, les semenciers réussissent à proposer leurs semences génétiquement modifiées aux pays en développement, en risquant de placer les paysans dans une position de soumission mais aussi de porter gravement atteinte à l’environnement – je pense notamment aux plantes insensibles aux désherbants ou aux OGM insecticides qui risquent de déséquilibrer la biodiversité animale. Par ailleurs, les pays en développement subissent une concurrence déloyale de nos produits industriels. Une réforme de fond de la politique agricole commune n’est-elle pas indispensable pour permettre un réel développement intracontinental ? L’Organisation mondiale du commerce (OMC) ne doit-elle pas se conformer aux droits de l’homme et au respect de l’environnement ?

M. Christian Assaf. Les modifications environnementales, qu’il s’agisse du réchauffement climatique ou de la raréfaction de certaines ressources, ont des implications importantes sur le développement de certains États. Les pays en développement se trouvent souvent démunis autant face aux crises ponctuelles que vis-à-vis de ces évolutions de long terme – je pense par exemple aux événements climatiques extrêmes à répétition, qui font peser de lourdes menaces sur la sécurité alimentaire de certaines régions du monde, ou à la situation préoccupante de pays insulaires, sans parler de la difficulté croissante à pratiquer certaines activités comme la pêche, en raison de l’épuisement des écosystèmes. Ces phénomènes touchent les populations les plus pauvres, dont l’indigence ne fait qu’aggraver la situation : comment, dans ce contexte, l’aide française au développement accompagne-t-elle ces évolutions ? De quelle façon aidons-nous ces pays à faire face à ces changements ? S’il est important de lutter contre le changement climatique, il est également nécessaire de s’adapter à ses conséquences.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Lors de la conférence d'Hyderabad, des engagements ont été pris de doubler les fonds consacrés à l’aide à la lutte contre la perte de biodiversité à l’horizon de 2015 : comment cet objectif sera-t-il atteint ?

M. le ministre. S’agissant de la responsabilité sociale des entreprises, vous avez raison de dire qu’elle constitue un axe déterminant. C’est la raison pour laquelle nous avons doté l’AFD d’une nouvelle doctrine en octobre dernier pour que tous les appels d’offre comportent des critères sociaux et environnementaux définis et contrôlés ; nous sommes en train de la mettre en place.

La question est de savoir si l’on doit continuer à faire du « moins-disant », en ayant en amont sélectionné les entreprises sur la base du respect de ces critères, ou si l’on passe au « mieux-disant », sachant que l’AFD cofinance la plupart de ses projets, ce qui suppose de faire partager notre point de vue par les autres partenaires. C’est ce que nous sommes en train de faire auprès de l’Union européenne et de la Banque mondiale – dont les règles sont en cours de révision –, mais cela prend du temps. Si les règles de l’AFD seront modifiées au milieu de cette année, elles n’entreront pleinement en vigueur que lorsque nos partenaires auront adopté la même position.

En ce qui concerne le rôle du Parlement, je vous invite à nous faire part de vos propositions – votre commission a un rôle particulier à jouer dans ce domaine – ; nous les prendrons en compte.

À travers le partenariat que constitue Globe international, que j’ai rencontré à Doha, vous pouvez identifier les obstacles au déploiement des énergies renouvelables. Dans les pays du Sud, on butte d’abord dans ce domaine sur des obstacles techniques et réglementaires – le fait par exemple que les sociétés d’électricité ne sont pas en mesure de gérer une source intermittente sur des réseaux extrêmement faibles ou saturés. Les analyser nécessite souvent une volonté politique locale en complément des financements internationaux. Nous avons suivi avec beaucoup d’attention le travail réalisé par la Norvège et le PNUD sur ce sujet : il donnera lieu à un rapport qui sera publié dans quelques semaines. La gouvernance d’une société d’électricité demande la plupart du temps des évolutions managériales, réglementaires ou législatives : les parlementaires des pays concernés ont donc un rôle primordial à jouer en la matière et votre action peut être utile à cet égard. Nous pourrions vous faire parvenir la liste des pays dans lesquels nous travaillons. Nous allons déployer par exemple dix assistants techniques sur une plateforme intitulée « Énergies durables pour tous », qui permettront de lever ces obstacles : nous pourrions indiquer dans leur feuille de route qu’ils auront à travailler avec les parlementaires ; Globe international serait une instance appropriée pour une telle coopération.

Concernant l’innovation, nous pensons que l’aide publique au développement doit s’inscrire dans une logique d’innovation d’ensemble – technologique ou non. Pour les Kenyans, le mobile banking – ou paiement mobile – est ce qui a le plus changé leur vie ces dernières années. De même, la microassurance permet, à côté du microcrédit, d’assurer contre les changements climatiques les petites organisations paysannes ou coopératives qui n’ont pas accès au marché international de l’assurance. C’est la raison pour laquelle j’avais fait de l’innovation l’un des cinq chantiers des Assises du développement et de la solidarité internationale.

Dans l’agenda climatique, nous pourrions gagner à identifier une quinzaine à une trentaine de technologies – ou d’objectifs impliquant des changements technologiques – constituant des passages obligés pour réussir les négociations et piloter ensuite notre aide publique au développement – qui contribue à financer ces technologies – par les résultats. La Fondation Bill & Melinda Gates a par exemple lancé un appel d’offre international auprès de centres de recherche pour trouver les toilettes du futur, conciliant les contraintes financières et écologiques pour les populations qui en manquent : si le prototype n’est pas encore déployable, compte tenu de son coût, de l’ordre de 1 200 dollars, une réponse technique a pu être élaborée. Nous pourrions ainsi adopter une gouvernance des projets, non seulement par les moyens, mais aussi par les résultats et les objectifs.

Nous avons aujourd’hui 4 000 chercheurs au sein de l’Institut de recherche pour le développement (IRD) et du Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD) qui sont mobilisés pour le développement et la recherche au Sud : nous pourrions plus clairement leur indiquer ce qu’on leur demande de trouver – ce que nous avons d’ailleurs commencé à faire.

Quant à la taxe sur les transactions financières, je rappelle que la France a été le premier pays à l’instaurer au plan national et à affecter 10 % de son produit au développement. Cette année, cette part a été consacrée à l’accès à l’eau et à la santé, notamment au Sahel et, l’an prochain, elle le sera pour moitié au Fonds vert – sachant que nous attendions que les règles de celui-ci soient fixées pour le faire, ce qui a permis de peser davantage sur leur définition.

Vous avez un rôle à jouer dans la négociation européenne en la matière. L’étude de la Commission européenne a évalué le montant des recettes à 35 milliards d’euros, ce qui est considérable. Il serait paradoxal, alors que cette taxe a vocation à financer les biens publics mondiaux, dont le développement, la lutte contre le changement climatique, la pauvreté ou le Sida, qu’aucune recette ne soit affectée à ce qui l’a historiquement légitimée. Or certains pays comme l’Espagne, l’Italie ou l’Autriche sont assez réservés, voire hostiles, à ce qu’une partie de cette taxe européenne soit consacrée au développement. Le Président de la République a pourtant redit le 1er mars dernier qu’il souhaitait qu’une part significative de celle-ci le soit. J’ai essayé moi-même de convaincre différents partenaires de l’intérêt de cette mesure. Nous pourrions avoir dans ce domaine une action commune en raison de votre capacité à peser sur les décisions prises par les autres parlements européens. Si la France est pilote sur ce sujet, nous avons besoin d’alliés car nous ne sommes pas majoritaires.

Au sujet du Mali, la stratégie française repose sur trois piliers : le pilier militaire, le pilier politique – faire en sorte qu’il y ait un dialogue politique menant à des élections et à un gouvernement démocratique, ce qui est de la responsabilité des Maliens – et le pilier du développement. Mon objectif est de contribuer à gagner la paix, ce qui veut dire, par exemple, faire en sorte que les élections puissent se tenir, ce qui suppose que les 400 000 réfugiés et déplacés rentrent chez eux et que les conditions matérielles de ce retour soient réunies.

Je me concentre sur ce qui n’est ni l’humanitaire ni le développement stricto sensu, ce que l’on appelle la réhabilitation – que la plupart du temps on rate. En effet, nous savons mener des missions humanitaires – d’ailleurs les ONG nous disent qu’au Mali, la situation humanitaire est à peu près sous contrôle – de même que de grands projets de développement sur deux à trois ans, mais il faut réussir les « six mois » de reconstruction, ce qui veut dire par exemple rétablir l’eau à Tombouctou, l’électricité à Gao ou faire en sorte que le centre de santé de Kidal fonctionne à nouveau. Nous nous sommes mis d’accord sur une liste de priorités avec l’Union européenne et la Banque mondiale, après en avoir discuté avec le gouvernement malien, pour nous répartir le travail. Je rappelle qu’aujourd’hui, à Tombouctou et à Gao, les habitants vont chercher leur eau dans le fleuve Niger, ce qui présente des risques pour la santé. La responsabilité de la France – la mienne en particulier – a été de mettre tous les donateurs autour de la table pour gagner ces « six mois ». Nous organiserons d’ailleurs mi-mai à Bruxelles une grande conférence internationale des donateurs présidée par la France et l’Union européenne, en présence du Président de la République, afin de mobiliser le monde entier.

Les collectivités territoriales ont un rôle important à jouer à cet égard. Nous organiserons le 19 mars à Lyon une réunion ayant vocation à mobiliser les 100 collectivités locales ayant un partenariat avec le Mali pour définir le type de coopération que nous voulons, ses priorités et la répartition des rôles. Les élus locaux pourront écouter à cette occasion des représentants de la société civile, de l’État malien et des grandes organisations internationales, afin de mieux comprendre la situation sur place.

Nous souhaitons qu’une partie substantielle de l’aide passe par ces collectivités, dont le rôle est en effet de plus en plus marqué. Cela nous paraît correspondre à une logique de décentralisation, qui constitue une part de la solution politique dans ce pays. De plus, cette approche donne lieu à des circuits financiers plus directs et mieux contrôlés.

Vous avez cité, monsieur Falorni, le rapport Laignel : je rappelle que 5 000 collectivités locales ont des actions de coopération décentralisée. Plusieurs mesures ont été retenues dans ce domaine : la sanctuarisation des crédits budgétaires pour la coopération décentralisée – ce qui n’était pas évident –, la transformation du concept de coopération décentralisée en un dispositif davantage lié à l’action extérieure des collectivités, ainsi que, après une étude d’impact, l’extension de la loi Oudin-Santini à la gestion des déchets.

En ce qui concerne les négociations climatiques, je souhaite vous faire part de premiers éléments – je vous répondrai après mon audition personnellement sur les points que je n’aurais pas eu le temps d’aborder.

Nous souhaitons écrire un nouvel agenda nous permettant de lever les obstacles actuels, de manière à réussir à Paris là où toutes les autres conférences ont échoué auparavant.

On observe un petit changement aux États-Unis : les discussions entre Laurent Fabius et John Kerry le laissent penser. Mais sur la question, par exemple, d’un accord légalement contraignant tel que nous l’entendons en Europe, la position américaine reste inchangée. Ce pays reste attaché à une approche « bottom-up » – reposant sur des engagements nationaux – en invoquant l’absence de majorité politique pour ratifier ce type d’accord. Or cette approche a montré ses limites : elle est très en deçà de ce qu’il faudrait opérer pour limiter une augmentation de la température à deux degrés. Nous devons trouver un compromis entre ces deux conceptions : la pure approche inverse – « top-down » – se heurterait très vite à un refus, non seulement des États-Unis, mais aussi de la Chine ou du Brésil.

À la mi-avril, un forum des économies majeures se tiendra sur ce sujet : il permettra de voir si les États-Unis entrouvrent de nouvelles portes.

Quant à nos alliés, ils sont de trois ordres. En premier lieu, les pays riches, contributeurs financiers, qui auront à prendre des engagements fermes – nous travaillons par exemple avec les Norvégiens sur les questions énergétiques ou avec les Britanniques sur l’agenda du financement et les marchés de carbone. La France est à cet égard passée dans le camp des États européens qui soutiennent des règles plus ambitieuses – par exemple autoriser la Commission européenne à modifier le nombre de quotas en circulation pour augmenter le prix du carbone. Deuxième catégorie d’alliés : les progressistes au sein du G77 et des pays émergents, comme le Mexique, l’Indonésie ou l’Afrique du Sud, avec lesquels nous devons construire des agendas communs – l’agenda technologique ou celui du financement par exemple. Enfin, les pays les plus vulnérables, avec lesquels nous devons également élaborer un agenda commun et à qui nous devons aussi proposer quelque chose d’acceptable, de plus ambitieux que ce qui leur a été proposé à Copenhague, notamment en matière de financement.

Cela implique une diplomatie active de la part de la France. C’est la raison pour laquelle nous avons un nouvel ambassadeur sur le climat, que les services des ministères de l’écologie et des affaires étrangères travaillent ensemble, ou que nous avons envisagé d’organiser une session entière consacrée à la négociation climatique lors de la prochaine journée des ambassadeurs, de façon à ce que ceux-ci soient sensibilisés à cette priorité.

Mais nous avons aussi besoin de vos initiatives ainsi que des collectivités locales. Nous réfléchissons à cet égard à la forme que pourrait prendre l’association de celles-ci à la négociation de 2015 – cela correspond à une grande revendication des réseaux internationaux des collectivités. Vous pourriez également participer à ce travail.

(Applaudissements sur divers bancs)

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Je vous remercie pour cet échange fructueux et intéressant.

II. DISCUSSION GÉNÉRALE

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Notre commission s’est saisie pour avis de l’intégralité du projet de loi d’orientation et de programmation relative à la politique de développement et de solidarité internationale (n° 1627) et elle a nommé rapporteur pour avis M. Philippe Noguès. Ce texte sera examiné mardi 4 février 2014 par la commission des affaires étrangères et a été inscrit à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale, lundi 10 février à partir de 16 heures.

À l’issue du dépôt des amendements, 61 amendements avaient été déposés. A été déclaré irrecevable au titre de l’article 40 de la Constitution, l’amendement CD 5 à l’article 9 de MM. Bertrand Pancher et Stéphane Demilly. Par ailleurs, l’amendement CD 1 des mêmes auteurs à l’article 10 contient une injonction au Gouvernement et je laisserai à notre rapporteur le soin de donner son avis.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. Le projet de loi que nous examinons est un texte d’orientation et de programmation : il a vocation, malgré sa portée normative limitée, à fixer les principes, les priorités et la gouvernance de la politique de développement et de solidarité internationale de la France. Son ambition est donc réelle.

Je suis de ceux qui considèrent que la politique de développement et de solidarité internationale participe du rayonnement et de la responsabilité de la France. Notre pays se doit de conduire, dans ce domaine, une politique à la fois ambitieuse, efficace, cohérente et exemplaire.

Nul n’ignore la part d’ombre de l’aide au développement, y compris dans son histoire récente – en particulier, les mélanges politico-financiers douteux qu’elle a pu dissimuler. Notre politique de coopération a fait l’objet de critiques. La Cour des comptes a publié en 2012 un rapport sévère sur la politique française d’aide au développement, dénonçant notamment le trop grand nombre d’objectifs affichés et leur absence de hiérarchisation, contrastant avec les pratiques observées au Royaume-Uni et en Allemagne, une gouvernance trop complexe et une collaboration avec les ONG insuffisamment développée. Elle en appelait inversement à la réintroduction d’une cohérence, passant par une clarification des objectifs et des moyens mobilisables pour les atteindre.

D’autres critiques, émanant par exemple du Comité d’aide au développement de l’OCDE dans le cadre des exercices habituels de « revue par les pairs », sont allées dans le même sens.

Mais je veux surtout retenir de notre politique de développement et de solidarité internationale sa générosité, son impact et son ambition. L’un des objectifs de ce texte est d’ailleurs de mettre définitivement fin aux pratiques opaques, voire dans certains cas néfastes pour les populations concernées, que cette politique a pu couvrir. À ce titre, le simple fait que nous ne parlions plus de « coopération » mais de « développement et de solidarité internationale » est bien le symbole de ce changement fondamental dans l’esprit de notre politique de développement.

M. Yves Albarello. Paroles, paroles…

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. Les chiffres sont connus, mais il n’est pas inutile de les rappeler : la France a consacré, en 2012, 0,45 % de son revenu national brut (RNB) à l’aide publique au développement, c’est-à-dire que la France se situait, à cette date, au deuxième rang des membres du G7 en matière d’effort rapporté à sa richesse nationale, immédiatement après le Royaume-Uni. Sur la période 2013-2014, l’effort français d’aide publique au développement (APD) s’inscrirait sur une trajectoire légèrement ascendante, représentant 0,47 % du RNB en 2013 et 0,48 % du RNB en 2014.

Si l’on prend maintenant des données en volume, on constate que la France demeure parmi les grands contributeurs mondiaux : avec 9,4 milliards d’euros d’APD nette, la France constituait en 2012 le quatrième contributeur mondial en volume, après les États-Unis, l’Allemagne et le Royaume-Uni.

Dans un contexte budgétaire particulièrement contraint, l’effort mérite d’être noté. Toutefois, nous n’avons pas encore atteint les 0,7 % d’APD par rapport au RNB, objectif pourtant fixé par la plupart des instances internationales – notamment l’OCDE, l’ONU et l’Union européenne – et auquel la France adhère. Il faut d’ailleurs, à ce titre, regretter l’absence de toute disposition budgétaire dans le texte. Je note toutefois que le Président de la République a pris l’engagement, en conclusion des Assises du développement, de renouer avec cet objectif de 0,7 % dès que notre pays aura retrouvé des marges de manœuvre budgétaires.

Le Gouvernement a pris l’initiative d’organiser, entre les mois de novembre 2012 et mars 2013, des Assises du développement et de la solidarité internationale.

Ces assises ont constitué un moment important de réflexion collective aboutissant à une redéfinition des objectifs, des priorités et des moyens. Elles ont réuni l’ensemble des acteurs de la coopération – État, collectivités territoriales, parlementaires, organisations non gouvernementales (ONG), syndicats, entreprises, fondations, organismes de recherche – dans un dialogue d’une ampleur inédite depuis 1997.

Les travaux ont porté sur cinq thèmes : la vision du développement post-2015, la transparence et l’efficacité de l’aide, la cohérence des politiques publiques en faveur du développement, les partenariats avec les acteurs non-gouvernementaux, la recherche et les innovations technologiques et sociales en faveur du développement. Ces thèmes constituent précisément le socle de la nouvelle vision de la politique française de développement que le présent projet de loi entend porter.

Ces Assises ont été suivies d’une réunion du Comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID), qui s’est tenue le 31 juillet 2013. Le Gouvernement y a formalisé ses premières décisions, notamment en matière de priorités géographiques de la politique de développement et de solidarité internationale de la France.

En d’autres termes, le texte que nous nous apprêtons à examiner est l’aboutissement d’un travail de concertation de quinze mois. Conformément à l’engagement pris par le Président de la République le 31 mars 2013, lors de la clôture des Assises, le présent projet de loi est appelé à devenir la première loi de programmation de la politique de développement et de solidarité internationale de l’histoire de la Ve République. C’est d’ailleurs là l’un des principaux intérêts du texte : nous passons d’une politique de coopération, monopole de l’exécutif, à une politique de développement et de solidarité placée sous le contrôle relatif du Parlement. Le cadre commun est désormais défini par la loi : j’y vois l’amorce de ce changement profond de conception dont notre pays avait besoin.

Le titre Ier du projet de loi décrit les orientations de la politique de développement et de solidarité internationale de la France.

Les titres II, III et IV décrivent l’organisation institutionnelle de la politique de développement et de solidarité internationale, et reconnaissent l’action des acteurs centraux de cette politique que sont : le Gouvernement, qui définit et actualise régulièrement les orientations de cette politique tout en veillant à la cohérence des composantes bilatérale et multilatérale dans le cadre des priorités géographiques et sectorielles qui ont été arrêtées ; les opérateurs de l’expertise technique internationale qui, bien qu’intervenant dans des domaines très divers, doivent veiller à inscrire leur action dans le cadre commun défini par la loi ; les collectivités territoriales, dont l’action extérieure prend des formes de plus en plus diverses et dont le régime est, ici, clarifié et renforcé.

Le titre V organise quant à lui les conditions dans lesquelles le Gouvernement rendra compte plus régulièrement et plus complètement des résultats de sa politique de développement, afin de donner aux contribuables et aux parlementaires davantage d’informations pour apprécier la bonne utilisation des moyens qui y sont consacrés.

Les auditions auxquelles j’ai procédé conjointement avec notre collègue Dominique Potier, rapporteur pour avis de la Commission des affaires économiques, m’ont convaincu de sa pertinence. Ce qui, jusqu’à présent, relevait essentiellement de pratiques et de décisions plus ou moins formalisées, se trouve désormais placé dans un cadre législatif qui assurera plus de cohérence et plus de lisibilité… mais qui imposera également, tous les deux ans, au Gouvernement de se livrer à un exercice salutaire de transparence et de responsabilité devant le Parlement.

Je me félicite que l’environnement, le développement durable et la lutte contre le changement climatique aient une place de choix dans ce texte et je ne doute pas que notre commission y sera sensible. Je tiens également à souligner l’importance qui est accordée aux droits de l’homme, une dimension centrale du développement qui est fermement réaffirmée.

Il m’est néanmoins apparu que ce projet pouvait être amendé et amélioré sur certains points. Je vous proposerai ainsi de le compléter par des amendements portant sur trois grands axes.

En premier lieu, la responsabilité sociale et environnementale (RSE) – un thème qui m’est cher, puisque je préside le groupe d’études de notre Assemblée sur la RSE et que je suis membre de la plateforme nationale d’actions globales pour la RSE. Tout en reconnaissant l’importance de la responsabilité sociale et environnementale, le projet de loi ne précise pas les modalités de participation des entreprises à la politique de développement et de solidarité internationale. Je vous proposerai donc de préciser cette question, notamment sous l’angle de la responsabilité sociale des maisons-mères vis-à-vis de leurs filiales à l’étranger, en complémentarité des travaux de la Commission des affaires économiques également saisie pour avis. Plus généralement, je vous proposerai de reconnaître que les entreprises s’imposent comme des acteurs cruciaux du développement.

Ensuite, il me semble important de valoriser le rôle des syndicats comme acteurs du développement.

En troisième lieu, plusieurs amendements viendront au soutien de l’idée selon laquelle les questions fiscales constituent une dimension centrale du développement.

Le projet de loi qui nous est aujourd’hui soumis comporte un certain nombre d’avancées, qui tiennent moins à l’introduction dans notre droit de concepts ou d’instruments totalement nouveaux qu’au souci de donner à l’ensemble des acteurs un cadre de référence stable et cohérent. Il me semble que le projet de loi répond bien à cet objectif et, sous le bénéfice de quelques modifications, je vous inviterai donc à l’adopter.

Mme Geneviève Gaillard. L’aide au développement et la solidarité internationale représentent des enjeux de taille, qui se résument en un impératif majeur : adopter un regard différent sur le développement économique.

Les Européens sont de moins en moins influents dans les grandes négociations internationales, non seulement parce qu’ils sont moins compétitifs, mais également parce qu’un certain nombre de pays ont bien compris que, contrairement à eux, nous n’avions pas de ressources naturelles et qu’ils disposaient de la plus grande part de ces ressources et de la biodiversité. Ces pays estiment que, si nous insistons tant sur l’économie des ressources, c’est parce que nous n’en avons pas. Si nous souhaitons l’adoption de nouveaux concepts comme le développement durable, l’économie verte ou le changement des modes de production et de consommation – voire la responsabilité sociale et environnementale des entreprises – ou si nous poussons au développement du commerce équitable, ce serait pour essayer de prendre le contrôle de leurs propres ressources ou pour écrêter leur compétitivité.

Dans ce contexte, la probabilité de voir apparaître des conflits face à ces nouveaux enjeux est très forte. Le risque est encore accru du fait du changement climatique, paradoxalement lié au développement économique et industriel irraisonné que les pays du nord n’ont cessé d’alimenter.

Les changements climatiques constituent une menace à long terme, susceptible de compromettre les efforts et les objectifs en matière de développement international. Continuer à faire du développement « comme avant » pourrait bien contribuer à la fragilité climatique, si le développement n’intègre pas et n’anticipe pas les bouleversements écologiques et les risques naturels. L’adaptation climatique devrait être intégrée dans les stratégies de développement courantes.

Comme le soulignent tous les rapports publiés dans ce domaine, les effets du réchauffement climatique se font d’ores et déjà sentir, avec des gagnants – par exemple, les pays qui se préparent à accéder aux ressources libérées par le recul de la banquise – et aussi des perdants. Or cette situation ne peut qu’exacerber les égoïsmes : pourquoi les premiers feraient-ils le moindre effort pour limiter leurs émissions ? Comment convaincre les seconds de continuer à coopérer, plutôt, par exemple, que de tenter l’expérience à haut risque de la géo-ingénierie ?

La France, sur la scène internationale, est un bailleur de fonds majeur qui aide les pays en développement à réduire leurs émissions et à s’adapter aux impacts du changement climatique.

Ne pensez-vous pas, chers collègues, que la seule issue possible est de garantir que les coûts du changement climatique – qu’il s’agisse d’atténuation, d’adaptation ou de compensation des dégâts – seront portés équitablement par l’ensemble de la communauté internationale et qu’ils entreront dans les programmes d’aide au développement ?

Sans changement de cap, le risque de conflits majeurs augmentera, sur fond de rivalités internationales pour capter les ressources disponibles. La rareté affectera peut-être tout d’abord l’énergie, mais la liste des ressources minérales rares et non renouvelables s’allonge de jour en jour.

Par ailleurs, la croissance démographique, dont l’ampleur pourrait également déclencher un conflit, n’est toujours pas prise en compte dans les négociations internationales – c’est d’ailleurs un sujet sur lequel aucun consensus ne prévaut au sein même de l’Union européenne.

Pour réduire le risque potentiel de conflit, il faut donc rechercher de nouveaux modes de production et de consommation, qui permettront de produire des quantités plus importantes qu’aujourd’hui avec des ressources beaucoup plus rares. Il faut aussi permettre à une fraction de plus en plus grande de la population mondiale de sortir de la pauvreté et d’amorcer la transition démographique.

C’est le propre d’une aide au développement éclairée et d’une solidarité internationale. C’est également l’objet du texte que nous examinons aujourd’hui. Je me félicite du rappel des enjeux environnementaux comme un aspect déterminant de la géopolitique et de l’économie mondiale. Mais les paramètres environnementaux, s’ils jouissent d’une reconnaissance symbolique, ne me semblent pas suffisamment soulignés et intégrés dans leur dimension pratique et concrète. J’aurai donc l’occasion de soumettre, en séance publique, un certain nombre d’amendements en ce sens.

Si la portée normative du projet de loi apparaît limitée, comme l’a indiqué le rapporteur, il peut néanmoins nous permettre de repositionner nos priorités et de contribuer ainsi à la réduction des risques de conflit.

M. Jean-Marie Sermier. La France a une responsabilité particulière, dans le monde, en matière de politique de développement : c’est l’un des donateurs les plus importants, aux côtés de la Belgique, du Canada ou du Royaume-Uni. C’est le résultat de la mobilisation constante et ancienne du Gouvernement et du Parlement, mais également des entreprises et des collectivités territoriales.

Même si beaucoup reste encore à faire, des progrès ont été enregistrés : l’extrême pauvreté recule, puisqu’elle affectait 21 % de la population mondiale en 2010 contre 43 % de celle-ci en 2000. Des actions ont été engagées, qui ont rencontré des succès réels : près de dix millions de personnes, vivant dans des pays à revenu extrêmement faible, ont désormais accès aux traitements antirétroviraux – contre trois cent mille il y a dix ans.

La nécessité d’un développement harmonieux est une évidence. Il est donc difficile de ne pas être d’accord sur le constat et les objectifs qui inspirent le projet de loi. L’intérêt de l’humanité et la stabilité de nos territoires appellent une politique de développement et de solidarité internationale réfléchie.

Le texte présenté n’est pas avare de mots et d’orientations, mais il y manque du concret. Au-delà de l’habillage, des données et des engagements beaucoup plus précis étaient attendus – par exemple, l’effort que notre pays consentira, dans les années à venir, en faveur du développement international.

Alors que la France est engagée au Mali et en Centrafrique, il ne faudrait pas laisser croire aux pays en difficulté que notre présence militaire va de pair avec une loi ayant pour objectif une meilleure gestion du développement : les deux questions sont bien distinctes et il convient de l’affirmer clairement.

Contrairement à son intitulé, cette loi n’est pas une loi de programmation : le rapporteur l’a d’ailleurs reconnu. Car au-delà de l’État, la politique de développement repose largement sur les initiatives des collectivités territoriales et des entreprises. S’agissant de la responsabilité sociale de celles-ci, je crains qu’une préoccupation par ailleurs légitime ne se transforme en ingérence dans des États aux moyens par définition modestes, auxquels on ne saurait imposer des obligations identiques à celles auxquelles les opérateurs français sont assujettis.

Le groupe UMP s’abstiendra sur ce texte.

M. Bertrand Pancher. Évidemment, nous soutenons une politique de développement et de solidarité internationale très ambitieuse. Nous pensons que cette ambition doit avoir d’autant plus d’ampleur que la crise économique mondiale a d’acuité, à l’image de ce que fait le Royaume-Uni en matière d’aide au développement. Dans ce contexte, les pays pauvres se trouvent en effet fragilisés, notamment parce que leurs ressources peuvent faire l’objet de pillages et que leurs populations font l’objet d’importants transferts dont la gestion s’avère problématique pour les États.

Nous pensions qu’il était nécessaire de s’engager dans une loi d’orientation, de façon à hiérarchiser les objectifs, élargir la gouvernance et mieux analyser les impacts, les objectifs que remplit ce projet de loi. Ceci dit, il faut prendre garde à ne pas trop mettre en avant l’art de cultiver les symboles, comme l’a fait le rapporteur, parce qu’à trop travailler la forme on en oublie le fond, c’est-à-dire les moyens consacrés à l’aide au développement. Le groupe UDI regrette qu’un éclairage n’ait pas été porté sur ce point, d’autant que l’objectif de porter cette aide au niveau de 0,7 % du revenu national brut constituait l’un des engagements du président de la République lors de la campagne en vue de l’élection présidentielle. Il ne s’agit donc certainement pas d’un projet de loi de programmation.

Beaucoup d’idées auraient pu être travaillées à l’occasion de son examen, et notamment les solutions permettant d’atteindre cet objectif de 0,7 %, alors que nous atteignons aujourd’hui 0,45 %, chiffre qui comprend un taux élevé de crédits recyclés : je pense aux programmes destinés aux outre-mer, à la formation des migrants qui se trouvent sur le territoire, et aux remises de dette ! Certaines pistes auraient pu être explorées, d’autant plus qu’elles ont été évoquées par la majorité actuelle, comme la taxe sur les transactions financières, engagée par la précédente majorité – dont le projet de loi de finances a prévu un plafonnement à 15 % des crédits pouvant être fléchés vers l’aide au développement –, ou l’élargissement des moyens financiers que peuvent consacrer les collectivités locales à la solidarité internationale.

Il paraît à cet égard incompréhensible que nos amendements relatifs aux déchets soient systématiquement « retoqués ». La question des fondations d’entreprises doit faire l’objet d’un réexamen, afin de dégager des moyens supplémentaires, tout comme celle du fléchage des assurances-vie défiscalisées, notamment dans le domaine de l’épargne responsable, et de la taxe sur les billets d’avions, dont le produit abonde, via le Fonds mondial, l’aide publique au développement.

On voit bien qu’une réelle ambition aurait permis de lister les nouveaux moyens financiers permettant d’aboutir à cet objectif de 0,7 %, et donc de donner une toute autre image de la politique menée par notre pays en matière d’aide publique au développement.

M. François-Michel Lambert. Le choix du président de la République de rebaptiser l’ancien ministère de la coopération, ministère du développement a permis de changer l’angle de notre politique de solidarité internationale. Il était nécessaire qu’un texte vienne, pour la première fois devant cette Assemblée, concrétiser ce changement de cap, n’en déplaise à une certaine droite qui estime que ce n’est pas le moment ou qu’il ne s’agit que d’une politique d’habillage… (Murmures)

M. Laurent Furst. Quel mépris pour la droite !

M. Yves Albarello. Vous êtes une certaine gauche !

M. François-Michel Lambert. …et le groupe écologiste s’en réjouit.

Nous devons avoir en tête que le développement durable et soutenable doit, dans ses trois composantes économique, sociale et environnementale, devenir la finalité de l’aide publique au développement. Cela passe par l’amélioration de la politique de responsabilité sociale et environnementale des entreprises (RSE) et des organisations sur l’entièreté de leur chaîne de valeur, y compris dans les pays qui ne l’appliquent pas. Il n’y a pas là d’ingérence : juste de la cogérance, par rapport à notre engagement politique et à son sens, et de la cohérence avec les objectifs de notre politique de développement et de solidarité internationales ainsi qu’avec les enjeux environnementaux. Ceux-ci nous empêchent de financer tout projet « climaticide » comme le charbon, les énergies fossiles, le gaz de schiste, même avec une technique d’extraction dite propre, le fluoropropane, mais aussi les OGM et la déforestation, au moment où la France s’apprête à accueillir, au Bourget, la conférence des parties en 2015.

Je veux souligner l’importance des indicateurs figurant en annexe II du projet de loi : une bonne politique a besoin d’être évaluée efficacement. Or aujourd’hui rien ne permet de connaître le nombre d’enfants scolarisés grâce à un programme. Il s’agit d’un moyen de re-légitimer, aux yeux de nos concitoyens, l’aide publique au développement, ce qui paraît indispensable dans la période de crise que nous connaissons. Ils doivent se réapproprier cette politique.

Le groupe écologiste veillera à enrichir ce projet de loi, notamment en introduisant le devoir de vigilance des entreprises françaises ou de leurs filiales : Danielle Auroi, Dominique Potier et Philippe Noguès travaillent dans ce sens, et je les en remercie. Les entreprises devront faire la preuve qu’elles se sont assuré qu’aucun de leurs partenaires ne fait travailler des enfants. Introduire de l’économie circulaire fera également partie de nos préoccupations : il faut veiller à ce que les pays-cible ne reproduisent pas nos erreurs issues d’un développement linéaire et non soutenable, tout en renforçant, sur de bonnes bases, leur décollage économique. Afficher l’objectif de la souveraineté alimentaire des peuples nous paraît par ailleurs important.

Le projet de loi ne comporte aucune programmation financière de l’aide au développement : nous le regrettons, car il devrait prendre la forme d’un projet de loi de programmation militaire pour permettre au Parlement, tous les cinq ans, d’en réviser les dispositions. En accord avec les recommandations de l’ONU, il devrait mentionner cet objectif de 0,7 %, promesse présidentielle. Assurer la cohérence de l’État dans sa politique d’aide nous semble primordial : ainsi la COFACE doit cesser d’assurer le financement des projets d’usines à charbon d’Alstom à l’étranger.

Enfin, ce texte doit permettre, en matière de coopération décentralisée, et tout en respectant le principe de libre administration des collectivités territoriales, une réelle coopération entre nos régions et les collectivités équivalentes dans les pays-cible, surtout sur les projets d’infrastructures de transport. Il doit y avoir une cohérence des politiques d’aide nationales.

M. Jacques Krabal, pour le groupe RRDP. L’examen d’un projet de loi d’orientation et de programmation relative à la politique de développement et de solidarité internationale ne doit pas être si commun au cours d’une mandature. Aussi suis-je particulièrement heureux qu’il nous donne l’occasion d’échanger sur ce sujet. Je vois déjà, à titre personnel, dans son intitulé, l’ambition qui se rattache aux principes et aux idéaux du XVIIIe siècle inscrits dans notre tradition républicaine autant que dans notre histoire. Je suis de ceux qui pensent que la France a vocation à initier et à montrer l’exemple.

Certes, nous consacrons à l’aide au développement des moyens financiers qui ne sont pas minces, mais que nous souhaiterions voire renforcés. Mais il ne faut pas sous-estimer le poids des lois que nous élaborons ni du projet qu’elles sous-tendent.

L’approche par les droits demeure notre marque distinctive, même si les collectivités locales, qui prennent une part importante dans notre politique d’aide au développement et de solidarité internationale, devraient y être davantage associées. C’est la position défendue par l’association Cités Unies France, que je partage.

Je prends quelques exemples sur le territoire. À Château-Thierry, l’association Kinyami a mis en œuvre, au Rwanda, un programme d’accès à l’eau et à l’assainissement pour des écoles, et l’association Asatanana agit, dans plusieurs hameaux de Madagascar, dans les domaines du micro-crédit et de la formation agricole orientée vers l’élevage domestique et les cultures maraîchères locales. Ces associations ont reçu l’appui d’acteurs du territoire comme l’agence de l’eau, l’USESA, le Syndicat d’assainissement de la région de Château-Thierry et le conseil régional de Picardie et d’autres collectivités. Ces initiatives participent à la fois de l’aide au développement durable et de l’action internationale, et elles doivent leur existence, dans chaque cas, à l’engagement des bénévoles, qui exercent la responsabilité du contrôle et de la vérification concrète des projets sur le terrain. Ils essaiment, grâce à un réseau d’associations locales, la prise de conscience quant aux moyens et aux méthodes à mettre en œuvre pour initier des dynamiques de développement autonomes et démocratiques.

Aussi je suis persuadé que l’État doit entreprendre une véritable concertation avec les collectivités territoriales pour déterminer les conditions d’une coopération encore plus efficace, grâce à l’élaboration de documents-cadres de partenariat. Nous avons besoin d’une plus juste considération des capacités de ces collectivités, de leurs capacités, mais aussi de plus de cohérence et de coordination, pour permettre l’extension des échanges solidaires.

Ainsi, pour ce qui me concerne, même si le texte est sur la bonne voie, il me semble nécessaire d’approfondir différents points, notamment – le rapporteur l’a rappelé tout à l’heure – le rôle de la société civile dans la conception des politiques de développement, la programmation budgétaire de celles-ci, et le pilotage effectif de l’aide et du contrôle de leurs effets. Il me semble également indispensable de considérer la francophonie à la fois comme un cadre et comme un vecteur d’influence des idées contenues dans ce projet de loi.

Pour toutes ces raisons, le groupe RRDP soutiendra activement ce texte.

M. Franck Montaugé. Le projet de loi que nous examinons ce matin a une réelle importance, ne serait-ce que parce que, comme vient de le dire notre collègue, il permet de traduire dans notre législation l’esprit des Lumières et les aspirations à plus d’égalité entre les individus et de solidarité entre les peuples. Il s’agit donc là, incontestablement, d’un acte politique de première importance, qui honorera notre République.

Petite observation technique : si les politiques d’aide au développement doivent faire, en fonction de critères quantitatifs précisément définis dans le projet de loi, l’objet d’évaluations, il faut à mon sens enrichir ces dernières en y insérant des critères qualitatifs. Ces évaluations s’avèrent nécessaires, et permettront une évaluation objective des politiques publiques d’aide et de solidarité internationales, notamment par les collectivités locales dont le rôle en matière de coopération décentralisée n’est plus à démontrer.

J’aurais souhaité, dans une perspective que j’oserais qualifier d’universaliste, mais peut-être que des amendements répondront à ce souhait, que nous introduisions des indicateurs plus agrégés et notamment l’indicateur de développement humain (IDH), en dépit du fait qu’il intègre le produit intérieur brut dont on connaît aujourd’hui les limites, et qui ne prend pas en comptes les inégalités de revenu ou de salaire à l’intérieur d’une population donnée, ou le critère de Gini, qui comporte également quelques imperfections. Les principaux organismes internationaux, à partir desquels la gouvernance de la solidarité internationale s’organise, les utilisent. Ils mériteraient donc de figurer dans le projet de loi dont nous débattons.

M. Guillaume Chevrollier. Le projet de loi qui nous réunit aujourd’hui devrait faire consensus : nous sommes tous d’accord pour apporter aide et solidarité aux pays qui en ont besoin, et pour donner plus de cohérence à notre politique d’aide au développement et de solidarité internationale. Mais nous devons dépasser les vœux pieux – en matière d’efficacité, le risque est grand – pour constater que rien dans ce texte ne permet de rationaliser cette politique, ni de regrouper ou de fédérer les innombrables intervenants qui la mettent en œuvre. Or, compte tenu de l’état des finances publiques, il s’agit là d’une impérieuse nécessité.

L’accent devrait être mis, en termes de priorités, sur la santé, le soutien aux enfants et l’environnement. Dans ce dernier domaine, il faut traiter en priorité la question des déchets urbains ménagers, dont la Banque mondiale prévoit une augmentation de 70 % d’ici à 2025, et celle de la forte hausse du coût de leur traitement dans des pays à faibles revenus, notamment en Afrique. La mise en place de décharges, solutions privilégiées par ces mêmes pays, a les répercussions, notamment sanitaires, que l’on connaît. Aussi la France devrait mettre à leur service son savoir-faire et son expertise en matière de traitement pour favoriser le recyclage.

M. Yannick Favennec. Même si ce texte n’a effectivement pas de valeur normative, il va dans le bon sens et devrait faire l’objet d’un consensus. Toutefois, nous nous inquiétons des moyens à trouver pour atteindre l’objectif de 0,7 % du PIB pour l’aide au développement. Je rejoins les propos de M. Bertrand Pancher en ce qui concerne les pistes à suivre : les fondations d’entreprise, les assurances-vie défiscalisées dans le domaine de l’épargne responsable, les taxes sur les transactions financières, l’augmentation du prix des billets d’avion, etc. Nous aimerions en savoir un peu plus sur la façon dont seront financés les objectifs affichés.

Je me réjouis des amendements déposés par le groupe UDI pour donner davantage de cohérence au texte, pour renforcer la participation des publics concernés, et pour mieux intégrer les préoccupations environnementales.

Mme Florence Delaunay. Je me félicite du dépôt de ce projet de loi, qui va inscrire pour la première fois les orientations de la politique française de développement dans la loi. Ceci répond, très logiquement, à la nomination en 2012 d’un ministre chargé à temps plein de la politique de développement, et concrétise un engagement de campagne du Président de la République.

J’ai noté avec satisfaction que l’aide au développement n’est pas dissociée de l’aide humanitaire. Ce projet de loi envisage des interventions qui vont de l’urgence, par exemple dans les camps de réfugiés, à l’aide à l’après-conflit ou à l’aide aux pays en voie de développement, sous la forme d’un continuum dont la finalité est de lutter contre l’extrême pauvreté. L’accent est mis sur la lutte contre la faim, la santé publique et l’éducation.

En ce qui concerne la sécurité alimentaire et nutritionnelle, il conviendrait de prévoir une meilleure valorisation du rôle des femmes, actrices essentielles du développement au sein des exploitations agricoles familiales. Malgré les difficultés d’accès à la terre, elles sont souvent les productrices des cultures vivrières.

Que ce soit en matière de santé ou d’alimentation, les politiques d’accès à l’eau et à l’assainissement sont essentielles et devraient donc être classées dans les priorités.

Concernant la lutte contre le changement climatique, je n’ai pas noté de mention des lieux où la biodiversité est le plus en danger ou a déjà régressé. À l’avenir le monde devra probablement faire face à des réfugiés climatiques, à l’image des peuples des îles déjà submergées qui doivent trouver un refuge.

Les entreprises sont des partenaires importants de la politique de développement et de solidarité internationale. Leur responsabilité sociale et environnementale doit être précisée et renforcée, notamment pour ce qui concerne les pratiques de leurs sous-traitants et de leurs filiales. Il s’agit là d’enjeux essentiels de développement, par exemple pour la lutte contre le travail des enfants.

Les actions des organisations syndicales autour des thèmes du dialogue social, du travail décent ou de la promotion sociale doivent être reconnues comme facteur de développement.

Nos actions doivent prendre racine dans nos valeurs de démocratie, des droits de l’Homme et de l’enfant, de l’égalité femme-homme, et des principes de la laïcité, qui nous permettent de vivre ensemble.

Mais l’aide au développement ne consiste pas à dupliquer notre culture et nos façons de faire dans les pays les plus pauvres. Elle consiste à les accompagner afin qu’ils sortent de la pauvreté, qu’ils deviennent des pays émergents, puis des pays en autonomie. Le premier principe de la solidarité internationale, c’est de respecter les peuples auxquels elle s’adresse, leur culture et leurs ressources.

M. Julien Aubert. Je vais être un peu plus critique que mes collègues car je suis inquiet de la multiplication des textes non normatifs, qui n’ont pas grand sens au regard de ce que doit faire un Parlement. (Murmures sur divers bancs)

La structuration de ce projet de loi montre que des enjeux importants ne sont pas mis en avant : premièrement, le fait que l’aide publique au développement est de plus en plus multilatérale et notamment européenne, ce qui soulève le problème de l’articulation entre les objectifs nationaux et les objectifs fixés par l’Union européenne. Plus l’aide publique au développement passe par des canaux internationaux, moins nous avons une capacité d’action directe et de choix des zones et des objectifs considérés comme prioritaires.

Deuxièmement, il me semble que la francophonie est absente du projet de loi. Les zones prioritaires devraient quand même être les zones francophones, et les instruments existants mériteraient d’être cités. De ce point de vue, c’est une occasion manquée. (Approbations)

Troisièmement, le texte manque de clarté sur la stabilité dans le temps et la continuité des objectifs. De nombreux pays peuvent faire varier les secteurs à financer d’une année sur l’autre, alors que les pays du Sud ont besoin d’une aide continue et de long terme.

Enfin, il y a aujourd’hui un phénomène de cannibalisation de l’aide française privée par les causes humanitaires au détriment des actions de long terme. Il aurait été intéressant de réfléchir à l’articulation entre l’aide publique au développement et la mobilisation de la charité privée, pour qu’elles soient complémentaires sans phénomènes de compensation ou de cannibalisation.

M. Jean-Pierre Vigier. La France doit retrouver un rôle leader dans la politique internationale de développement et de solidarité. Il faut pour cela une grande cohérence, et la transparence dans l’utilisation des crédits. Les acteurs et structures sont trop nombreux et éparpillés. Ne faut-il pas possible de les regrouper en une seule agence, comme c’est le cas dans d’autres pays européens ?

M. Laurent Furst. J’entends mes collègues dire que la France devrait en faire plus, mais c’est faire fi de la situation de notre pays, où la dette par habitant atteint 30 000 euros et qui ne respecte quasiment aucun des critères de Maastricht. Notre générosité et notre ambition sont grandes mais nos moyens ne sont pas à la hauteur. Je voudrais invoquer un principe de réalité, et souligner qu’il n’y aura pas d’amélioration à court terme.

Et quand on parle des collectivités locales, que restera-t-il de leurs ambitions quand leurs moyens auront été rabotés, notamment suite aux 4,5 milliards d’euros de dotations dont elles vont être rapidement privées ? (Murmures divers)

Il faut voir les réalités économiques avec une certaine lucidité.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. Je me félicite que, globalement, tout le monde semble en phase avec la philosophie générale du texte. Celui-ci est une étape. Il n’est sans doute pas parfait, et nous sommes là pour l’enrichir en l’amendant.

J’ai cité les collectivités locales, je ne les ai pas oubliées, et des amendements seront discutés à ce sujet, notamment par la commission des affaires étrangères.

Fallait-il inclure dans la loi des chiffres précis ? Le ministre a considéré que ce n’est pas là qu’il fallait les mettre, même si l’objectif final de 0,7 % du PIB reste valide. Il faut être lucide : le ratio actuel est de 0,45 % du PIB. Se fixer des contraintes chiffrées dans la loi serait très difficile, c’est bien pour cela que ça n’a pas été prévu, ce qui n’empêche pas d’essayer de développer l’aide publique au développement. Il faut noter qu’en la matière, parmi les grands pays, la France est quasiment dans le peloton de tête. C’est une étape pour aller plus loin. L’aide vise les pays les plus pauvres, la liste des seize pays les plus pauvres, auxquels la plus grande partie de l’aide sera attribuée, figure d’ailleurs dans le rapport annexé.

Les problématiques de développement durable sont citées dans le texte, mais il est bien évident que ce n’est pas le projet de loi, que nous appelons tous de nos vœux, sur la transition énergétique et climatique. Beaucoup d’amendements vont venir enrichir ce texte, ici et dans les autres commissions.

Regrouper les acteurs en une agence unique, pourquoi pas, mais cela constituerait une autre étape.

Sur le rôle des femmes, qui est une grande question, je note que des amendements présentés par Mme Catherine Coutelle seront examinés par la commission des affaires étrangères. La question se pose de savoir si, dans les droits humains, on doit distinguer les droits des hommes, des femmes, des enfants. Le but est d’obtenir un texte lisible, accessible, fixant des orientations.

Le fait que nous soyons très présents sur l’aide en Afrique n’est absolument pas lié aux interventions militaires, puisque notre aide a toujours été orientée vers ces pays.

Sur la responsabilité sociale des entreprises, il n’est pas question de « charger la barque » des entreprises, mais de faire en sorte que les entreprises françaises contribuent au rayonnement de la France dans ce domaine aussi, en ayant un devoir de vigilance vis-à-vis des actions qu’elles mènent dans ces pays-là en particulier.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Nous en venons maintenant à l’examen des amendements aux articles du projet de loi.

III. EXAMEN DES ARTICLES

TITRE IER
ORIENTATIONS DE LA POLITIQUE DE DÉVELOPPEMENT
ET DE SOLIDARITÉ INTERNATIONALE DE LA FRANCE

Chapitre Ier
Objectifs de la politique de développement
et de solidarité internationale

Article 1er
Principes directeurs et objectifs de la politique de développement
et de solidarité internationale de la France

L’article 1er de loi fixe les objectifs de la politique de développement et de solidarité internationale rénovée qu’entend promouvoir le projet de loi.

*

* *

La Commission examine l’amendement CD3 de M. Bertrand Pancher.

M. Bertrand Pancher. Cet amendement vise à introduire, après l’alinéa 2 de l’article 1er qui précise la façon dont est conduite la politique de développement, la notion de participation aux programmes de développement des populations locales, notamment les plus défavorisées. En effet, l’implication de tous les acteurs concernés est non seulement un facteur essentiel de réussite de ces programmes, mais elle permet aussi une utilisation plus judicieuse des crédits. Le coût du creusement en Afrique d’un puits pour l’accès à l’eau potable peut ainsi varier du simple au double, voire du simple au triple, selon que le projet est conçu depuis Paris ou bien directement sur place.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. Je ne peux que souscrire à votre proposition, cher collègue. Avis favorable.

M. Jean-Marie Sermier. Je suis évidemment très favorable également à cet ajout qui renforce le co-développement et constitue un facteur clé de réussite des projets.

La Commission adopte l’amendement à l’unanimité.

Puis elle examine l’amendement CD25 de Mme Florence Delaunay.

Mme Florence Delaunay. Je précise d’emblée que j’ai déposé trois amendements similaires, qui visent tous à compléter les droits de l’Homme par la mention explicite des droits de l’enfant.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. Cette question s’est posée au cours de la préparation de l’avis dont j’ai la charge, et, si l’on ne peut que souscrire sur le fond à cette idée, je rappelle néanmoins que l’expression « droits de l’Homme » recouvre la notion de droits humains, et donc par conséquent inclut les droits de l’enfant. Aussi, je vous propose de retirer cet amendement – ainsi que les amendements CD26 et CD27 – au profit de l’amendement CD28, auquel je donnerai un avis favorable lorsque nous examinerons le rapport annexé à l’article 2.

Mme Florence Delaunay. Il me semblait important de faire, par cette mention, référence à la Convention internationale des droits de l’enfant, tout comme la mention des droits de l’Homme fait référence à la déclaration universelle des droits de l’Homme. Nous pouvons le faire dans le rapport puisque vous m’annoncez que vous serez favorable à l’amendement CD28, aussi je retire les amendements CD25, CD26 et CD27.

Les amendements CD 25, CD26 et CD27 sont retirés.

La Commission examine l’amendement CD36 du rapporteur pour avis.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. Cet amendement apporte une précision utile quant aux acteurs – publics et privés – de la responsabilité sociale et environnementale, qui n’a de sens qu’appliquée par les entreprises et les organisations.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement de précision CD37 du rapporteur pour avis.

La Commission examine l’amendement CD39 du rapporteur pour avis.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. C’est là aussi un amendement de précision, car il me semble tautologique de dire que la politique de développement promeut le développement, même si on peut y entendre une référence à des notions usitées dans ce domaine.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 1er ainsi modifié.

Article 2
Approbation du rapport annexé au projet de loi

Cet article approuve le rapport annexé au projet de loi.

*

* *

La Commission examine l’amendement CD29 de Mme Florence Delaunay.

Mme Florence Delaunay. La question de la sécurité alimentaire, qui concerne un milliard d’êtres humains, doit tenir compte de la lutte contre la malnutrition chronique. Tel est le sens de l’ajout du mot « nutritionnelle » à l’alinéa 3.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. Cet ajout est en effet très pertinent, qui permet de distinguer sous-nutrition et malnutrition. Il faut veiller à ce que nos politiques de développement ne contribuent pas à la malnutrition. J’y suis donc favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CD47 du rapporteur pour avis.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. Le détournement de l’aide publique au développement a un effet doublement néfaste : il entretient les réseaux de corruption dans les pays en développement et il décrédibilise les politiques de développement aux yeux des populations locales. Il est donc important de rappeler que la France se fixe pour objectif de limiter ce phénomène et d’exiger une meilleure transparence et une plus grande traçabilité des aides versées aux pays en développement.

M. Bertrand Pancher. J’approuve complètement cette proposition et cette exigence de transparence. Mais ne faudrait-il pas aller plus loin encore et mettre en place des mécanismes de gouvernance dans l’attribution des aides, sur le modèle de ce qui existe par exemple dans le volet du commerce équitable avec l’introduction de la notion de bonne gouvernance du fonctionnement des coopératives ?

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CD48 du rapporteur pour avis.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. Comme je l’ai dit lors de la discussion générale, je souhaite que l’on aborde la question de la fiscalité, quel que soit le sort qui sera réservé à cette initiative dans la suite de la procédure législative. Cet amendement vise donc à reconnaître l’importance des questions fiscales dans la politique de développement.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CD28 de Mme Florence Delaunay.

Mme Florence Delaunay. Défendu.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. Favorable, même si je réitère ma réserve quant à la valeur ajoutée finale de cet amendement.

M. Jean-Marie Sermier. Sur le fond, je pense que tout le monde partage cette ambition, mais je m’interroge sur le caractère éventuellement contreproductif de cet ajout. Quid, par exemple, des adolescents, qui ne sont plus des enfants ?

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. Tout à fait, d’où mes réserves.

La Commission adopte l’amendement.

Elle adopte ensuite l’amendement de précision CD50 du rapporteur pour avis.

Puis elle examine l’amendement CD23 de Mme Florence Delaunay.

Mme Florence Delaunay. L’alinéa 39 énumère trois grands enjeux en matière de santé : l’amélioration de la santé maternelle et infantile ; l’adaptation des systèmes de santé et de protection sociale le renforcement de la surveillance épidémiologique. Il me semble indispensable d’y ajouter le renforcement des moyens matériels de protection des femmes et des enfants hébergés dans les camps provisoires de réfugiés, car ces femmes et ces enfants y sont victimes d’agressions physiques. Tel est l’objet de cet amendement.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. Je suis une fois encore d’accord sur le fond, tout en m’interrogeant sur l’emplacement de l’insertion – à mon avis, peu judicieuse à cet endroit – ainsi que sur la formulation – celle-ci m’apparaît restrictive puisqu’elle se limite aux agressions physiques, d’une part, et qu’il me semble que les hommes sont aussi concernés par l’insécurité liée aux conditions matérielles de vie dans ces camps provisoires, d’autre part. Il est néanmoins vrai que le projet de loi n’aborde qu’assez peu les questions de l’aide d’urgence et des réfugiés. Aussi, je vous propose de retirer votre amendement à ce stade de nos travaux et de le retravailler en vue de la séance publique.

Mme Florence Delaunay. Je le retire avec regret.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. L’amendement CD23 est donc retiré. Par conséquent, l’amendement CD24 de Mme Florence Delaunay tombe.

La Commission examine l’amendement CD20 de Mme Florence Delaunay.

Mme Florence Delaunay. Par cet amendement, je vous propose de modifier l’ordre des priorités sectorielles que se fixe notre pays dans ce projet de loi, en mettant en deuxième position la question de l’accès à l’eau et à l’assainissement, pour en souligner l’importance.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. La liste des dix priorités sectorielles dressée dans le rapport annexé ne correspond en aucune manière une hiérarchisation : elles ont toutes la même valeur et je m’en suis assuré auprès du Gouvernement. Adopter cet amendement aboutirait au contraire à leur conférer une plus ou moins grande importance. Je vous propose donc de le retirer.

Mme Florence Delaunay. Je le retire, puisqu’il n’y a pas de hiérarchie des priorités.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CD19 de Mme Florence Delaunay.

Mme Florence Delaunay. Le droit à l’alimentation est un droit inaliénable et, pour en assurer l’effectivité, il est essentiel de protéger l’agriculture familiale et vivrière face au développement – au détriment de la sécurité alimentaire – de l’agriculture de plantation à destination de l’exportation ou de la production de biocarburants.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. Un amendement identique a été rejeté en commission des affaires économiques. Je pourrais y être favorable mais avec une certaine réserve, car je ne pense pas souhaitable de donner l’impression que la France s’opposerait au développement de l’agriculture commerciale dans les pays en développement.

M. Jean-Marie Sermier. J’attire votre attention, mes chers collègues, sur l’impact de cet ajout, car l’agriculture vivrière n’est pas productrice de richesse et d’emplois et nous risquons donc de déséquilibrer le projet de loi.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. C’est un risque en effet. Je vous propose d’adopter cet amendement aujourd’hui, afin d’avoir ce débat en présence du Gouvernement, qui pourra nous éclairer utilement sur ce point.

La Commission adopte l’amendement.

M. Laurent Furst. Monsieur le Président, je ne suis pas certain que cet amendement ait recueilli une majorité de suffrages, nous étions plusieurs à voter contre.

M. le Président Jean-Paul Chanteguet. Mon cher collègue, cet amendement a bien été adopté. J’entends néanmoins votre inquiétude et nous allons donc revoter pour nous en assurer.

Le second vote confirme l’adoption de l’amendement CD19.

La Commission examine l’amendement CD51 du rapporteur pour avis.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. Amendement de précision. L’agriculture pouvant avoir des impacts, positifs ou négatifs, sur la biodiversité au sens large, il est donc important de citer la biodiversité dans ce texte.

La Commission adopte l’amendement.

Mme Catherine Quéré remplace le Président Jean-Paul Chanteguet à la présidence.

La Commission examine l’amendement CD10 de M. Bertrand Pancher.

M. Yannick Favennec. Avec la stratégie nationale pour la création et la gestion des aires marines protégées définie en avril 2012, la France s'est engagée à ce que 20 % des eaux françaises soient classées en aires marines protégées d'ici 2020, dont la moitié en réserves halieutiques. Cet amendement vise à promouvoir la mise en place de telles aires marines et réserves halieutiques.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. Il s’agit là d’une précision tout à fait utile. Avis favorable sous réserve d’une rectification, en remplaçant les mots « zones de conservation » par les mots « réserves halieutiques », puisque c’est le terme consacré.

M. Bertrand Pancher. En tant qu’auteur de l’amendement, j’accepte bien évidemment cette rectification.

La Commission adopte l’amendement CD10 ainsi rectifié.

Puis elle examine l’amendement CD21 de Mme Florence Delaunay.

Mme Florence Delaunay. L’aide au développement ne consiste pas en la duplication de notre culture et de nos façons de faire dans les pays les plus pauvres, je l’ai dit lors de la discussion générale. Néanmoins, elle doit prendre racine dans les valeurs de démocratie, des droits de l’homme et d’égalité entre les hommes et les femmes, ainsi que de laïcité. C’est la raison de l’ajout, par cet amendement, de la promotion de la démocratie, des principes laïques et de l’État de droit, dans cet alinéa 45 qui traite de l’éducation et de la formation, toutes deux au cœur des processus de développement.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. La laïcité est un des éléments de notre pacte républicain et c’est une des valeurs fondamentales de notre pays, mais le débat sur son caractère universel ou non nous emmènerait loin du sujet de ce projet de loi. Des pays industrialisés ou en développement ont choisi un modèle différent, un tel ajout pourrait être perçu comme une ingérence. Enfin, la liberté de conscience fait partie des droits de l’Homme. Pour toutes ces raisons j’émets un avis défavorable à cet amendement.

M. Bertrand Pancher. Le rapporteur est sage.

Mme Florence Delaunay. Je m’en remets à la sagesse de notre rapporteur et je retire cet amendement.

L’amendement CD21 est retiré.

La Commission adopte l’amendement de précision CD52 rectifié du rapporteur pour avis, puis elle examine l’amendement CD55 du même auteur.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. C’est un amendement rédactionnel, mais auquel s’attache une certaine importance car il permet de citer les parties prenantes dans ce texte.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CD54 du rapporteur pour avis.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. Il s’agit d’un amendement de précision, visant à reprendre le titre exact de la plateforme RSE, dans la mesure où celle-ci est déjà instituée.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine examine l’amendement CD56 du rapporteur pour avis.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à rappeler que les syndicats sont des acteurs importants de la politique de développement et de solidarité internationale. Si la France intègre le secteur privé et la promotion de la RSE dans ses dix priorités transversales, elle se doit donc de reconnaître également le rôle des syndicats dans le développement.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CD9 de M. Bertrand Pancher.

M. Bertrand Pancher. Dans un souci de cohérence entre l'aide publique au développement et les autres politiques publiques, la France doit mettre fin à son soutien public aux centrales à charbon et aux mines de charbon via les banques de développement multilatérales et régionales et l'agence publique de crédits aux exportations (COFACE), à l'exception des centrales à charbon équipées d'une technologie de captage et stockage du carbone opérationnelle. Cette idée est notamment soutenue par WWF-France.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. Je souscris à cette idée sur le fond, mais l’amendement prend la forme d’une injonction au Gouvernement, ce que la Constitution proscrit. Par ailleurs, le rapport qu'il s'agit d'amender n'est que l'annexe non normative d'un projet de loi d'orientation et de programmation : autrement dit, par excellence, ce que les juristes appellent du « droit mou », non créateur d'obligations opposables et dont la portée est essentiellement symbolique.

Je crois savoir que le Gouvernement travaille sur cette question et qu’il devrait présenter des propositions en ce sens, soit devant la Commission des affaires étrangères, soit en séance publique. Dans cette attente, je suggère le retrait de l’amendement.

Mme Catherine Quéré, vice-présidente. Maintenez-vous votre amendement CD9 ?

M. Bertrand Pancher. Je le maintiens.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CD57 du rapporteur pour avis.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. Il s’agit de réaffirmer l’importance de la question fiscale dans les politiques de développement.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CD31 de Mme Florence Delaunay.

Mme Florence Delaunay. Il s’agit d’insérer une référence à la protection de l’enfance dans un alinéa relatif aux possibilités d’action en matière de gouvernance démocratique.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. Avis favorable, avec les mêmes réserves que précédemment.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CD58 du rapporteur pour avis.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. L’amendement vise à donner toute sa place à la qualité du dialogue social, facteur de démocratisation des sociétés dans lesquelles il est pratiqué.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CD59 rectifié du rapporteur pour avis.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. Il convient de souligner que la France ne se contente pas de « mobiliser » les entreprises, mais qu’elle s’efforce de jouer un rôle d’influence dans la définition des standards applicables en Europe en matière de RSE. L’harmonisation par le haut des standards applicables dans les différents pays européens doit constituer un objectif diplomatique et économique.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CD2 de M. Bertrand Pancher.

M. Yannick Favennec. Au travers de l’article 3, le projet de loi fait de la cohérence un principe majeur et définit des mécanismes de coordination : c’est un progrès important. Mais il est indispensable de rendre opérationnelles ces dispositions en complétant la loi par un plan d’actions pour renforcer concrètement la cohérence de toutes les politiques publiques susceptibles d’avoir un impact dans le domaine du développement.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. La proposition est intéressante, mais peut sans doute être encore améliorée. Je suis sensible à l’idée d’un mécanisme de recours pour les populations concernées – pourquoi d’ailleurs ne pas l’étendre également aux entreprises, dans le cadre d’une « diligence raisonnable » ?

Je suggère que l’amendement soit retiré, pour être retravaillé en vue de la séance publique.

M. Yannick Favennec et M. Bertrand Pancher. Nous le retirons.

L’amendement CD2 est retiré.

La Commission examine l’amendement CD63 du rapporteur pour avis.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à assurer une totale transparence au moment de la transcription, par la France, des dispositions des directives comptables de l'ITIE.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CD30 de Mme Florence Delaunay.

Mme Florence Delaunay. Comme précédemment, il s’agit de faire référence à l’aide alimentaire et nutritionnelle.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. Favorable, bien que la ligne budgétaire concernée s’intitule « Aide alimentaire ». Je suggère donc de prendre date pour que cet intitulé soit modifié lors de l’examen du prochain projet de loi de finances.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine alors l’amendement CD33 de Mme Florence Delaunay et le sous-amendement CD64 du rapporteur pour avis.

Mme Florence Delaunay. Il s’agit de souligner le rôle essentiel de l’UNICEF, aux côtés des autres agences de l’Organisation des Nations-Unies.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. Favorable, sous réserve d’un sous-amendement de précision.

La Commission adopte le sous-amendement CD64 et l’amendement CD33 ainsi modifié.

Puis elle examine l’amendement CD22 de Mme Florence Delaunay.

Mme Florence Delaunay. Retiré, car les amendements CD56 et CD60 du rapporteur me paraissent préférables.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. Je vous en remercie. (Sourires)

L’amendement CD22 est retiré.

La Commission examine l’amendement CD61 du rapporteur pour avis.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. Les entreprises françaises sont présentes dans les pays en développement à travers toute leur chaîne de production. Il convient donc d’ajouter leurs partenaires économiques – sous-traitants, clients, etc. – à leurs filiales.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CD60 du rapporteur pour avis.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. La France doit pleinement reconnaître le rôle des syndicats dans le développement.

M. Jean-Marie Sermier. Il faut se garder de ce que le texte n’en finisse par donner des injonctions à des pays démocratiques, qui choisissent eux-mêmes les modalités de leur représentation. Ne rajoutons donc pas à tous les articles que les syndicats sont des partenaires essentiels, car il existe bien d’autres acteurs fondamentaux dans la vie démocratique.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. Je ne crois pas conférer une importance démesurée aux syndicats. Il faut néanmoins leur donner acte de leur volonté de s’investir sur les problématiques du développement.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CD62 du rapporteur pour avis.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. Il s’agit de promouvoir l’idée de « performance globale », dans ses dimensions politique, économique, sociale et environnementale.

La Commission adopte l’amendement.

La Commission examine alors l’amendement CD65 du rapporteur pour avis.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à renforcer la coopération de la France avec les pays en voie de développement dans la lutte contre la fraude fiscale et la fuite des capitaux dont ils souffrent particulièrement.

La Commission adopte l’amendement.

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CD68 du rapporteur pour avis et CD32 de Mme Florence Delaunay.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. Cet amendement propose d’ajouter, dans la liste des divisions de l’indicateur n° 5, le « nombre d’enfants ayant achevé le cycle scolaire primaire ».

Mme Florence Delaunay. Même argumentaire. Le sujet est particulièrement important pour les filles, qui sont souvent inscrites en primaire mais ne terminent pas leur scolarité.

Mme Martine Lignières-Cassou. La seule différence entre ces amendements, c’est la place d’un nouvel indicateur dans la liste. D’autres amendements sur ces indicateurs seront d’ailleurs déposés pour la séance publique.

Mme Catherine Quéré, vice-présidente. Madame Delaunay, maintenez-vous votre amendement ?

L’amendement CD32 est alors retiré et la Commission adopte l’amendement CD68.

La Commission examine l’amendement CD69 du rapporteur pour avis.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. Il convient, parmi les indicateurs de résultats, de valoriser les entreprises engagées dans une démarche vertueuse de responsabilité sociale et environnementale.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 2 ainsi modifié.

Chapitre II
principes de la politique de développement
et de solidarité internationale

Article 3
Mise en cohérence de la politique de développement et de solidarité internationale et des autres politiques publiques

Cet article vise à renforcer la cohérence de la politique de développement et de solidarité internationale et des autres politiques publiques.

*

* *

La Commission examine l’amendement CD40 du rapporteur pour avis.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. Il convient que la politique fiscale de la France soit, elle aussi, cohérente avec les objectifs de développement international.

La Commission adopte l’amendement.

La Commission examine les amendements identiques CD41 du rapporteur pour avis et CD6 de M. Bertrand Pancher.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. Retiré au bénéfice de l’amendement CD6, dont l’exposé des motifs est beaucoup plus détaillé.

M. Bertrand Pancher. J’en suis gêné ! (Sourires). L’objectif est d’inclure la politique énergétique parmi les politiques publiques susceptibles d’avoir un impact dans le domaine du développement.

L’amendement CD41 est retiré et la Commission adopte l’amendement CD6.

Elle examine ensuite l’amendement CD42 du rapporteur pour avis.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. Il s’agit de réaffirmer l’engagement de la France en matière d’amélioration de la transparence du secteur financier.

La Commission adopte l’amendement CD42.

Puis elle examine l’amendement CD7 de M. Bertrand Pancher.

M. Bertrand Pancher. Il convient que la France mette fin au financement des projets soutenant l’industrie du charbon, quelques mois avant que Paris n’accueille les participants à la COP 2015.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. L’amendement CD8, avec les mêmes signataires, me semble préférable.

L’amendement est retiré.

La Commission examine ensuite l’amendement CD8 de M. Bertrand Pancher et le sous-amendement CD67 du rapporteur pour avis.

M. Yannick Favennec. La France se doit d’être cohérente et exemplaire en matière de financement des énergies fossiles. Il conviendrait donc qu’elle publie une stratégie visant à réduire progressivement les soutiens publics à ces énergies et à y mettre fin à l’échéance de 2020.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. Je partage l’orientation d’ensemble, mais je propose par le sous-amendement CD67 de supprimer l’échéance de 2020, qui risque de ne pouvoir être tenue.

La Commission adopte le sous-amendement CD67 puis l’amendement CD8 ainsi modifié.

Elle émet alors un avis favorable à l’adoption de l’article 3 ainsi modifié.

Article 4
Principes gouvernant les partenariats et l’allocation de ressources publiques

Cet article détaille les principes gouvernant les partenariats et l’allocation de ressources publiques.

*

* *

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 4 sans modification.

Article 5
Prise en compte de la responsabilité sociale et environnementale
dans la politique de développement et de solidarité internationale

Cet article loi impose la prise en compte de l’exigence de responsabilité sociale et environnementale dans la politique de développement et de solidarité internationale.

*

* *

La Commission examine les amendements CD43 du rapporteur pour avis et CD17 de Mme Florence Delaunay pouvant être soumis à une discussion commune.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. Amendement de précision.

Mme Florence Delaunay. Je retire l’amendement CD 17.

L’amendement CD17 est retiré et la Commission adopte l’amendement CD43.

Puis la Commission examine l’amendement CD44 du rapporteur pour avis.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à réaffirmer les engagements internationaux de la France en matière de RSE et de prise en compte par les entreprises transnationales des enjeux sociaux, environnementaux et de respect des droits de l’Homme.

Depuis 1976, l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) élabore et publie des Principes directeurs à l'intention des entreprises multinationales, établissant des recommandations et des objectifs en matière de droits de l'homme, d'emploi, de protection de l'environnement, de lutte contre la corruption, de protection des consommateurs, de respect de la concurrence et de fiscalité. Ces principes directeurs de l’OCDE ont été mis à jour en mai 2011.

Par ailleurs, le Conseil des droits de l'homme de l'ONU a adopté, le 17 juin 2011, des Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l'homme, dits « De Ruggie », qui prévoient que les entreprises font preuve de diligence raisonnable pour s'assurer de ne pas porter atteinte aux droits de l'homme et mettent en œuvre des mesures de réparation en cas d'atteinte à ces droits.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CD45 du rapporteur pour avis.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. En cohérence avec la loi sur les nouvelles régulations économiques de 2001, avec les discussions sur la RSE au moment de l'examen et du vote de la loi « Grenelle II » ainsi qu'avec les dispositions de l’article L. 225-102-1 du code du commerce, cet amendement s’inspire très largement, dans sa rédaction, de la terminologie habituellement employée par l’AFD : il s’agit donc de promouvoir et de mettre en valeur ce qui est déjà fait et de reconnaître la qualité de la prise en compte de la RSE par le groupe AFD.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 5 ainsi modifié.

Article additionnel après l’article 5

La Commission examine l’amendement CD46 du rapporteur pour avis créant un article additionnel après l’article 50.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. Le projet de loi ne précise pas les modalités de participation des entreprises à la politique de développement et de solidarité internationale.

Les entreprises sont pourtant des acteurs cruciaux du développement. Sans préempter les travaux menés dans le cadre de la concertation de la plateforme nationale RSE et mentionnés à l'alinéa 49 du rapport, l’amendement vise à préciser la contribution des entreprises à la politique française de développement. Il instaure une obligation, pour ces entreprises, de mettre en place des procédures d'identification, de prévention et d'atténuation des dommages sanitaires et environnementaux, dont les modalités sont pour l'heure laissées à leur discrétion.

Ce dispositif permettra de donner une première base légale aux travaux de la plateforme RSE sur la responsabilisation des entreprises multinationales et des donneurs d'ordre vis-à-vis de leurs filiales et de leurs sous-traitants situés dans des pays en développement, et de préparer les entreprises à un éventuel renforcement de leurs obligations en matière de responsabilité sociale et environnementale.

La Commission adopte l’amendement.

TITRE II
ORGANISATION GÉNÉRALE DE LA POLITIQUE
DE DÉVELOPPEMENT ET DE SOLIDARITÉ INTERNATIONALE

Article 6
Définition et actualisation des orientations de la politique de développement
et de solidarité internationale

Cet article rappelle les exigences d’adaptabilité et de flexibilité qui pèsent sur la politique de développement et de solidarité internationale.

*

* *

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 6 sans modification.

Article 7
Priorités de la France au sein des institutions multilatérales
en charge du développement

L’article 7 du projet de loi pose le principe de cohérence des objectifs, des priorités et des principes de l’aide au développement française, quelle qu’en soit la forme et quel qu’en soit le cadre de déploiement.

*

* *

La Commission examine l’amendement CD4 de M. Bertrand Pancher.

M. Bertrand Pancher. Il convient que le CICID, présidé par le Premier ministre, puisse définir un mécanisme de pilotage fonctionnel de la coopération, afin notamment de mieux planifier les allocations budgétaires annuelles. De nombreux rapports ont en effet relevé le défaut de pilotage de l’aide, sa rare complexité institutionnelle et son caractère dispersé et non hiérarchisé, mais le projet de loi ne fait aucune proposition pour remédier à ces carences.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. Avis défavorable, car le rapport annexé au projet de loi mentionne bien les rôles respectifs du CICID et du CNDSI et l’amendement peut être considéré comme une injonction au Gouvernement

Mme Catherine Quéré, vice-présidente. M. Pancher, retirez-vous l’amendement ?

M. Bertrand Pancher. Je le maintiens.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 7 sans modification.

TITRE III
EXPERTISE INTERNATIONALE

Article 8
Opérateurs de l’expertise technique internationale

Cet article inscrit les opérateurs de l’expertise technique internationale dans le cadre de la politique de développement et de solidarité internationale de la France.

*

* *

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 8 sans modification.

TITRE IV
ACTION EXTÉRIEURE DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Article 9
(article L. 115-1 du code général des collectivités territoriales)

Action extérieure des collectivités territoriales

Cet article substitue une nouvelle rédaction aux dispositions actuelles de l’article L. 1115-1 du code général des collectivités territoriales.

*

* *

La Commission examine l’amendement CD18 de Mme Florence Delaunay.

Mme Florence Delaunay. Il est demandé aux collectivités territoriales de jouer un rôle croissant dans les dynamiques territoriales de développement. Cet amendement vise à assurer la cohérence entre les différentes politiques publiques de solidarité.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. Avis favorable sur le fond, sous réserve néanmoins de substituer au mot « coopération » le mot « développement », conformément à la terminologie aujourd’hui en usage.

Mme Catherine Quéré, vice-présidente. Avec l’accord de Mme Delaunay, je mets aux voix l’amendement CD18 ainsi rectifié.

La Commission adopte l’amendement ainsi rectifié.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 9 ainsi modifié.

TITRE V
MISE EN œUVRE, ÉVALUATION ET RAPPORT

Article 10
(article 44 de la loi de finances rectificatives pour 1998)

Évaluation de la politique de développement et de solidarité internationale
et information du Parlement

Cet article organise les conditions dans lesquelles le Gouvernement rendra désormais compte des résultats de sa politique de développement.

*

* *

La Commission examine l’amendement CD1 rectifié de M. Bertrand Pancher.

M. Bertrand Pancher. Il s’agit de préciser que le Gouvernement définit le contenu et les modalités de mise en œuvre des différents volets de la politique de développement et de solidarité internationale et qu’il élabore un plan d’actions pour veiller à la cohérence de toutes les politiques publiques susceptibles d’avoir un impact dans le domaine du développement.

M. Philippe Noguès, rapporteur pour avis. Avis défavorable, car cet amendement me semble satisfait par l’alinéa 102 du rapport.

M. Bertrand Pancher. Je le retire.

L’amendement est retiré puis la Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 10 sans modification.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption du projet de loi ainsi modifié.

LISTE DES AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION

Les amendements déposés en Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire sont consultables sur le site internet de l’Assemblée nationale. (3)

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Les représentants d’intérêts suivis d’un astérisque (*) ont procédé à leur inscription sur le registre de l’Assemblée nationale, s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale.

AFEP

• Mme Stéphanie Robert, directrice

• Mme Élisabeth Gambert, responsable de la responsabilité sociétale des entreprises et des affaires internationales

Les Amis de la Terre

• Mme Juliette Renaud, chargée de campagne RSEE et industries extractives

Amnesty International France

• Mme Geneviève Garrigos, présidente

CCFD -Terre solidaire

• M. Antonio Manganella, chargé de mission plaidoyer RSE

CFDT

• M. Patrick Pierron, secrétaire national à la Commission exécutive, président de la Plateforme RSE

• M. Olivier Berducou, secrétaire confédéral en charge de la RSE

CFE-CGC

• M. Alexandre Grillat, secrétaire national confédéral

• Mme Chantal Guiolet, déléguée nationale

CFTC

• M. Joseph Thouvenel, vice-président confédéral

• M. Geoffroy de Vienne, conseiller du président de la confédération

• M. Anthony Ratier, conseiller technique IRES / International /RSE

CGT

• M. Pierre Coutaz, responsable Espace Europe/International

MEDEF*

• M. Robert Durdilly, président du comité RSE, président de l’Union française de l’électricité

• Mme Céline Azaïs, chargée de mission à la direction du développement durable

• Mme Ophélie Dujarric, chargée de mission à la direction des affaires publiques

Sherpa

• M. William Bourdon, président

© Assemblée nationale

1 () Le Comité d’aide au développement a été créé au sein de l'OCDE par une résolution ministérielle en date du 23 juillet 1961 et réunit les 29 membres de l’Organisation principaux pourvoyeurs d’aide au développement. La Banque mondiale, le Fonds monétaire international et le Programme des Nations Unies pour le développement y disposent d’un statut d’observateur.

2 () Le 24 avril 2013, l'effondrement de l'immeuble Rana Plaza, situé dans un faubourg de Dacca (Bangladesh), a provoqué la mort d'au moins 1 127 personnes. Cet édifice de huit étages abritait notamment plusieurs ateliers de confection, employant un total d'environ cinq mille salariés et approvisionnant plusieurs grandes marques européennes de confection. Des étiquettes de grandes marques françaises et internationales avaient été retrouvées dans les décombres.

3 () http://www2.assemblee-nationale.fr/recherche/amendements?NUM_INIT=1627&LEGISLATURE=14&ORGANE=%22Développement%20durable%22