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N° 2303

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 16 octobre 2014.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES SUR LE PROJET DE LOI de financement de la sécurité sociale pour 2015 (n° 2252),

TOME I

RECETTES ET ÉQUILIBRE GÉNÉRAL

Par M. GÉrard BAPT,

Député.

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Les commentaires et les débats en commission sur les articles 1 et 2, 5, 7 à 9, 11 à 28, 65 et 66 figurent dans le rapport de M. Gérard Bapt, sur les recettes et l’équilibre général (n° 2303, tome I).

Les commentaires et les débats en commission sur les articles 3 et 4, 6, 10, 29 à 55 figurent dans le rapport de M. Olivier Véran, sur l’assurance maladie (n° 2303, tome II).

Les débats en commission après l’article 53 figurent dans le rapport de Mme Martine Pinville, sur le secteur médico-social (n° 2303, tome III).

Les commentaires et les débats en commission sur les articles 56 et 57, 63 et 64 figurent dans le rapport de M. Michel Issindou, sur l’assurance vieillesse (n° 2303, tome IV).

Les commentaires et les débats en commission sur les articles 58 à 60 figurent dans le rapport de M. Denis Jacquat, sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (n° 2303, tome V).

Les commentaires et les débats en commission sur les articles 61 et 62 figurent dans le rapport de Mme Marie-Françoise Clergeau, sur la famille (n° 2303, tome VI).

Le tableau comparatif figure dans le fascicule n° 2303, tome VII.

SOMMAIRE

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Pages

INTRODUCTION 7

TRAVAUX DE LA COMMISSION 15

AUDITION DES MINISTRES 15

EXAMEN DES ARTICLES RELATIFS AUX RECETTES ET À L’ÉQUILIBRE GÉNÉRAL 55

PREMIÈRE PARTIE : DISPOSITIONS RELATIVES À L’EXERCICE 2013 55

Article 1er : Approbation des tableaux d’équilibre relatifs à l’exercice 2013 55

Article 2 : Approbation du rapport annexé sur le tableau patrimonial et la couverture des déficits de l’exercice 2013 (annexe A) : 63

DEUXIÈME PARTIE : DISPOSITIONS RELATIVES À L’EXERCICE 2014 65

Article 5 (loi n° 2013-1203 du 23 décembre 2013 de financement de la sécurité sociale pour 2014) : Rectification des prévisions et objectifs relatifs à 2014 65

TROISIÈME PARTIE : DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES ET À L’ÉQUILIBRE FINANCIER DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 2015 74

TITRE IER : DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES, AU RECOUVREMENT ET À LA TRÉSORERIE 74

Chapitre I – Rationalisation de certains prélèvements au regard de leurs objectifs 74

Article 7 (art. L. 130-1, L. 131-1, L. 131-1-1 [nouveau], L. 131-2, L. 131-3, section II du chapitre Ier du titre III du livre Ier, art. L. 133-10, L. 136-2, L. 136-5, L. 136-8, L. 137-11-1, L. 241-3, L. 242-13, L. 243-2, L. 244-1, L. 244-11, L. 244-14 et L. 612-9 du code de la sécurité sociale, art. L. 14-10-4 du code de l’action sociale et de la famille, art. 154 quinquies du code général des impôts, art. L. 761-10 du code rural et de la pêche maritime et art. 14 de l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996) : Modification des règles relatives aux contributions sociales sur les revenus de remplacement 74

Après l’article 7 87

Article 8 (art. L. 311-3 du code de la sécurité sociale, art. 13 de la loi n° 98-546 du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d’ordre économique et financier) : Affiliation des personnes participant de façon occasionnelle à des missions de service public 88

Après l’article 8 92

Article additionnel après l’article 8 (art. L. 241-10 du code de la sécurité sociale) : Réduction forfaitaire de cotisations patronales pour l’emploi à domicile 93

Article additionnel après l’article 8 (art. L. 241-10 du code de la sécurité sociale) : Précision du champ de l’exonération de cotisations pour l’emploi au domicile des personnes fragiles 96

Après l’article 8 97

Article 9 (art. L. 242-4-4 [nouveau] du code de la sécurité sociale) : Encadrement des assiettes forfaitaires 97

Après l’article 9 102

Article 11 (art. 1600-0 O, 1600-0 Q et 1647 du code général des impôts, art. L. 166 D du livre des procédures fiscales, art. L. 138-9-1, L. 138-20, L. 165-5, L. 241-2 et L. 245-5-5-1 [nouveau] du code de la sécurité sociale et art. L. 5121-18 du code de la santé publique) : Simplification du recouvrement de certaines contributions pharmaceutiques 102

Article 12 (art. L. 171-4, L. 171-5 [nouveaux], L. 376-1, L. 454-1, L. 613-21, L. 643-9 [nouveau], L. 644-4 [nouveau], L. 645-5-1 [nouveau], L. 723-13-1 [nouveau] et L. 723-21-1 [nouveau] du code de la sécurité sociale, art. L. 733-1 [nouveau], L. 761-16, L. 761-19, L. 762-14 et L. 762-26 du code rural et de la pêche maritime) : Dispositions relatives au recours contre tiers 106

Après l’article 12 111

Chapitre II – Simplification du recouvrement 113

Article 13 (art. 995 et 1001 du code général des impôts et art. L. 131-8, L. 137-6, L. 137-7, L. 137-9, L. 138-20, L. 862-3 et L. 862-4 du code de la sécurité sociale) : Rationalisation de la fiscalité des contrats d’assurance maladie complémentaire et des contrats d’assurance automobile 113

Article 14 (art. L. 136-5 et L. 243-1-3 du code de la sécurité sociale) : Versement des cotisations dans les secteurs soumis à l’obligation de mutualisation des congés payés 124

Article 15 (art. L. 243-6-5 [nouveau], L. 243-7, L. 243-13 et L. 652-3 du code de la sécurité sociale et art. L. 724-7-1 [nouveau], L. 724-7, L. 725-26 [nouveau] et L. 725-12 du code rural et de la pêche maritime) : Dispositions relatives au contrôle et au recouvrement des cotisations et contributions sociales 131

Après l’article 15 140

Article 16 (art. L. 243-6 du code de la sécurité sociale) : Simplification des modalités de contestation des cotisations AT-MP 141

Article 17 (art. L. 723-35 et article L. 731-13-2 [nouveau] du code rural et de la pêche maritime) : Modernisation du recouvrement des cotisations du régime de la mutualité sociale agricole 146

Article 18 (art. 35 de la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012 relative à la simplification du droit et à l’allégement des démarches administratives ; art. L. 136-5, et art. L. 241-6-2 [nouveau], L. 752-4 du code de la sécurité sociale ; art. L. 5427-1 et L. 6331-53 du code du travail) : Création d’un guichet unique pour les prestations familiales des marins 151

Article additionnel après l’article 18 (art. L. 613-4 du code de la sécurité sociale) : Simplification des règles de détermination du régime servant les prestations aux indépendants pluriactifs 157

Après l’article 18 157

Chapitre III : Relations financières entre les régimes et entre ceux-ci et l’État 161

Article 19 (art. L. 225-1-4 du code de la sécurité sociale et article L. 731-5 du code du code rural et de la pêche maritime) : Financement des besoins de trésorerie du régime des exploitants agricoles 161

Article 20 (ord. n° 2002-149 du 7 février 2002, ordonnance n° 96-1122 du 20 décembre 1996, art. L. 762-1-2 du code rural et de la pêche maritime, art. 33 de la loi n° 2003-1199 du 18 décembre 2003) : Organisation comptable et budgétaire de la Caisse de sécurité sociale de Mayotte 166

Article 21 (art. L. 131-7, L. 131-8, L. 136-8 et L. 651-2-1 du code de la sécurité sociale et art. L. 14-10-5 du code de l’action sociale et des familles) : Réaffectation de la taxe sur les salaires, des droits de consommation sur les tabacs et de la contribution sociale de solidarité des sociétés dans le cadre de la compensation des mesures du pacte de responsabilité 169

Après l’article 21 180

Article 22 (art. L. 136-6 du code de la sécurité sociale) : Modalités de versement de l’État à la sécurité sociale des prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine au titre de l’« exit tax » 180

Article 23 : Approbation du montant de la compensation des exonérations mentionnées à l’annexe 5 183

TITRE II CONDITIONS GÉNÉRALES DE L’ÉQUILIBRE FINANCIER DE LA SÉCURITÉ SOCIALE 187

Article 24 : Approbation du tableau d’équilibre de l’ensemble des régimes obligatoires pour 2015 187

Article 25 : Approbation du tableau d’équilibre du régime général pour 2015 195

Article 26 : Approbation du tableau d’équilibre des organismes concourant au financement des régimes obligatoires (FSV) :, détermination de l’objectif d’amortissement de la dette sociale et des prévisions de recettes du FRR et de la section 2 du FSV pour 2015 196

Article 27 : Habilitation des régimes de base et des organismes concourant à leur financement à recourir à l’emprunt 201

Article 28 : Approbation du rapport sur l’évolution pluriannuelle du financement de la sécurité sociale (annexe B) : 207

Après l’article 28 211

QUATRIÈME PARTIE : DISPOSITIONS RELATIVES AUX DÉPENSES POUR L’EXERCICE 2015 219

TITRE VI : DISPOSITIONS RELATIVES À LA GESTION DES RÉGIMES OBLIGATOIRES DE BASE ET DES ORGANISMES CONCOURANT À LEUR FINANCEMENT AINSI QU’AU CONTRÔLE ET À LA LUTTE CONTRE LA FRAUDE 219

Avant l’article 65 219

Article additionnel avant l’article 65 : Rationalisation de l’organisation informatique de la branche famille 219

Article 65 (art. L. 114-17 du code de la sécurité sociale) : Proportionnalité des sanctions prononcées en cas de fraude aux prestations famille et vieillesse 220

Article 66 (art L. 242-1-3 du code de la sécurité sociale et art L. 725-12-2 [nouveau] du code rural et de la pêche maritime) : Régulation des déclarations à la suite d’un contrôle 226

Article additionnel après l’article 66 (art L. 114-12-1 du code de la sécurité sociale) : Intégration du montant des prestations dans le répertoire national commun de la protection sociale 228

Article additionnel après l’article 66 (art. L. 133-4-2 du code de la sécurité sociale) : Annulation des exonérations de cotisations en cas de travail dissimulé 229

ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR 231

INTRODUCTION

La présentation du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 intervient dans un contexte économique difficile, pour la France comme pour l’Europe. L’écart entre les prévisions sur lesquelles la loi de financement rectificative de l’été dernier a été bâtie et la situation actuelle est aussi important qu’inattendu. Les finances sociales en pâtissent particulièrement, car la plupart des recettes sont assises sur la masse salariale qui augmente très faiblement, tandis que les mesures de gel prévues n’auront pas les effets escomptés puisque l’inflation est proche de zéro. Malgré cela, le déficit de l’ensemble de la sécurité sociale est contenu en 2014.

Bien que le redressement des comptes sociaux marque le pas en 2014, le travail accompli depuis juin 2012 est considérable. De plus de 22,6 milliards d’euros fin 2011, le déficit de la sécurité sociale et du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) a été ramené à 15,4 milliards d’euros fin 2014.

À ce stade, votre rapporteur souhaite rappeler qu’il est indispensable de poursuivre les efforts entamés vers la voie du rétablissement des comptes sociaux. À cet égard, le projet de loi de financement pour 2015 est un projet de loi responsable, qui prévoit de réels efforts en dépenses, c’est-à-dire des économies, mais ce n’est pas un budget d’austérité : les prestations continuent d’augmenter. En outre, il s’inscrit dans le prolongement de la loi de financement rectificative de cet été mettant en œuvre le Pacte de responsabilité et de solidarité qui doit permettre de restaurer la compétitivité de nos entreprises.

Le redressement des comptes est une nécessité ; il en va de la pérennité de notre modèle social, auquel 32 % du PIB est consacré, record mondial. Nous avons le devoir de ne pas reporter la charge des dépenses courantes actuelles (dépenses de santé, prestations familiales, pensions versées aux retraités d’aujourd’hui) sur les générations futures.

Par ailleurs, les charges financières générées par l’emprunt sont autant de dépenses publiques qui ne bénéficient pas à la protection sociale. Si les taux d’intérêt sont très bas en ce moment, et nous permettent de financer nos déficits à moindre coût, nous nous sommes placés dans une situation de dépendance totale à leur égard.

Le présent projet de loi de financement prend donc les mesures nécessaires à l’inscription des comptes sociaux sur une trajectoire pluriannuelle de redressement.

Un important effort de redressement a été accompli depuis 2012, dans un contexte économique très dégradé

L’actuelle majorité a entrepris de redresser les comptes sociaux année après année, rompant avec la tendance de la législature précédente.

Les lois de finances rectificative d’août 2012 et de financement de la sécurité sociale pour 2013 ont permis de mettre un coup d’arrêt à la dérive financière qui menaçait la pérennité́ de notre système social. Ces deux lois ont apporté plus de 8 milliards d’euros de recettes nouvelles et 2,4 milliards d’euros d’économies, permettant de réduire le déficit du régime général et du FSV à 17,5 milliards d’euros fin 2012 puis à 15,4 milliards d’euros fin 2013.

Fin 2014, le déficit du régime général seul devrait s’établir à 11,7 milliards d’euros.

La réforme des retraites portée par la loi n° 2014-40 du 20 janvier 2014 garantissant l’avenir et la justice du système de retraites permet de ramener la branche vieillesse du régime général à l’équilibre en 2017. 2,2 milliards d’euros de recettes nouvelles ont été apportées en 2014 par l’augmentation des cotisations. L’augmentation est progressive et continue de générer de l’ordre de 0,6 milliards d’euros supplémentaires par an de 2015 à 2017.

Cependant, en 2014, le redressement des comptes est freiné par la conjoncture économique. Si le déficit est stabilisé, il est de 1,9 milliard d’euros plus élevé que ce que prévoyait la loi de financement, en raison de la persistance d’un niveau très élevé du chômage qui creuse les comptes du Fonds de solidarité vieillesse en particulier.

Les recettes sont plus dynamiques en 2014 qu’en 2013, mais elles sont inférieures de 3,2 milliards d’euros aux objectifs de la loi de financement initiale, avec une croissance de la masse salariale nettement inférieure à la prévision (1,6 % contre 2,2 % attendus).

La loi de financement rectificative du 8 août 2014 avait prévu une mesure d’économie de plus d’un milliard d’euros, correspondant à l’absence de revalorisation en 2014 des pensions de retraite de base des retraités dont la pension totale est supérieure à 1 200 euros brut mensuels. Cette économie était calculée par rapport à une prévision de revalorisation de 0,6 % au 1er octobre 2014. Toutefois, la révision à la baisse des prévisions d’inflation pour 2014 (1) a eu pour corollaire de conduire à une revalorisation spontanée nulle en 2014 (2). Aucune économie par rapport à la revalorisation normale n’est donc finalement réalisée.

Le Pacte de responsabilité et de solidarité, mis en œuvre par la loi de financement rectificative de la sécurité sociale du 8 août 2014, marque un nouvel élan dans la politique économique du Gouvernement. La poursuite de l’allégement du coût du travail doit permettre d’améliorer la compétitivité des entreprises et de créer des emplois, à travers les mesures suivantes :

– renforcement des allégements généraux de cotisations sociales sur les bas salaires (jusqu’à 1,6 SMIC), afin de supprimer les charges sociales au niveau du SMIC à compter du 1er janvier 2015 ;

– exonération de cotisations patronales famille jusqu’à 1,6 SMIC ;

– exonération partielle de cotisations famille des travailleurs indépendants (agricoles et non agricoles) ;

– création d’un abattement d’assiette sur la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) due au titre de l’exercice 2015, première étape d’une démarche qui verra la suppression de cette contribution à l’horizon 2017. La C3S assurant jusqu’à présent l’équilibre financier du régime social des indépendants (RSI), la loi de financement de la sécurité sociale rectificative a organisé l’intégration financière du RSI au régime général.

Par ailleurs, le Pacte de responsabilité s’inscrit pleinement dans la trajectoire globale de soutenabilité des finances publiques.

Les mesures du pacte ayant pour objet d’améliorer la compétitivité des entreprises par des baisses de charges ont un impact sur les recettes de la sécurité sociale de 5,9 milliards d’euros en 2015 – et de 6,3 milliards d’euros en y incluant la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA).

Toutefois, les projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2015 prévoient une compensation intégrale de ces pertes de recettes, comme le Gouvernement s’y était engagé.

Le projet de loi de financement pour 2015 poursuit résolument la voie du redressement, faisant porter les efforts sur les dépenses

Le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale est certes contraint, mais ce n’est pas un budget d’austérité. Les dépenses de chaque branche sont en augmentation (y compris celles de la branche famille à périmètre constant).

C’est un projet de loi responsable : les engagements du Gouvernement sont tenus et les mesures d’économies nécessaires au redressement des comptes sont réparties de façon équitable. Grâce à cela, le déficit du régime général sera ramené à 10,5 milliards d’euros fin 2015, celui de l’ensemble des régimes obligatoires de base à 10,3 milliards d’euros, et celui du FSV à 2,9 milliards d’euros.

Les pertes de recettes liées au Pacte de responsabilité sont intégralement compensées par le transfert à l’État de la charge des allocations logement et par la mesure prévue à l’article 14 qui instaure un prélèvement des cotisations à la source sur les versements effectués par les entreprises aux caisses de congés payés. Le détail de cette compensation est présenté dans le commentaire des articles 14 et 21.

Le Gouvernement a également respecté son engagement de reverser à la sécurité sociale le produit de la fiscalisation des majorations de pensions pour enfants, instaurée dans la loi de finances pour 2014. Ce produit permet d’augmenter les recettes du FSV de 1,2 milliard d’euros.

Les prévisions de recettes tiennent compte d’un transfert de 0,45 milliard d’euros de la sécurité sociale à l’État, en application de l’article 22 qui modifie les modalités de recouvrement des prélèvements sociaux au titre de l’exit tax.

Le redressement est aussi le fruit des réformes passées. Ainsi, l’augmentation de 0,05 point des cotisations prévue par la loi du 20 janvier 2014 garantissant l’avenir et la justice du système de retraites pour l’année 2015 apporte 0,6 milliard d’euros de recettes nouvelles à la branche vieillesse (3).

Mais c’est sur les dépenses que portent les principaux efforts en 2015. Avec un objectif national de dépenses d’assurance maladie fixé à 2,1 %, la branche maladie doit faire 3,2 milliards d’euros d’économies par rapport à l’évolution tendancielle de ses dépenses (c’est-à-dire l’augmentation spontanée des dépenses si aucune mesure nouvelle n’était prise). Ces économies constituent un effort historique, alors que la population âgée augmente et que le progrès médical entraîne de nouvelles dépenses, en particulier dans le domaine des médicaments. Toutefois, cet effort ne pèsera pas sur les assurés qui ne subiront aucune baisse des remboursements. Des économies doivent être dégagées de l’amélioration du système, à travers : l’efficience accrue de la dépense hospitalière, la promotion de la pertinence des pratiques et des prescriptions, la rémunération des produits de santé à leur juste prix, et le développement du recours aux soins ambulatoires.

Des économies sur la branche famille sont également prévues, à hauteur de 0,9 milliard d’euros. Cet effort est à mettre en perspective avec l’ensemble des prestations familiales, qui s’élèvent à plus de 42 milliards d’euros en 2015 (hors prestations logement). La branche famille peut et doit participer à l’effort de redressement de la sécurité sociale, sans que soit remise en cause sa dimension redistributive. En l’absence de mesures nouvelles, le déficit de la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) augmenterait par rapport à 2014.

En définitive, l’effort de redressement par rapport à la tendance atteint 5,6 milliards d’euros sur le champ du régime général et du FSV (13,4 milliards d’euros de déficit au lieu de 19,0 milliards), soit 1,2 % des 477 milliards d’euros de dépenses de la sécurité sociale.

Ces prévisions reposent sur l’hypothèse d’une croissance du PIB de 1,0 % et d’une progression de la masse salariale de 2,0 % en 2015.

Le projet de loi ne prévoit pas d’augmentation des prélèvements sociaux. Par contre, plusieurs articles permettent de les simplifier et de les rendre plus justes :

– l’article 7 substitue un critère de revenu fiscal au critère actuel de montant d’impôt sur le revenu mis en recouvrement pour l’assujettissement au taux normal de CSG sur les revenus de remplacement (pensions de retraite et d’invalidité, allocations chômage et préretraites), afin de limiter les effets de seuil et de fixer ceux-ci de façon plus équitable ;

– l’article 13 rationnalise la fiscalité sur les contrats d’assurance, notamment les contrats d’assurance complémentaire santé ;

– l’article 21 simplifie la répartition des taxes affectées à la sécurité sociale en compensation des exonérations de cotisations.

Par ailleurs, l’article 15 propose des mesures destinées à améliorer les relations entre cotisants et organismes de recouvrement, notamment à travers la création d’un cadre juridique clair pour la transaction.

Enfin, l’article 19 permet au régime agricole de bénéficier des conditions de financement de la trésorerie de l’agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS), concrétisant une demande ancienne des gestionnaires de ce régime.

Vers le retour à l’équilibre des comptes

Les prévisions pluriannuelles figurant à l’annexe B confirment la volonté du Gouvernement de résorber les déficits.

Grâce à l’ensemble des réformes menées, en particulier la réforme des retraites et le déploiement de la stratégie nationale de santé, la réduction des déficits devrait se poursuivre.

Dans un environnement économique difficile, le Gouvernement a reporté son objectif de retour à l’équilibre, auparavant fixé à 2017, afin de ne pas peser sur la reprise économique attendue en 2015. D’ici à 2018, le déficit du régime général et du FSV devrait être ramené à 2,9 milliards d’euros (contre 15,4 milliards d’euros en 2014).

La branche vieillesse devrait être à l’équilibre en 2017. Toutefois, le déficit du Fonds de solidarité vieillesse atteindra encore 1,6 milliard d’euros en 2018.

Avec la fixation d’un ONDAM à 2,1 % en 2015, 2,0 % en 2016 et 1,9 % en 2017, – en deçà des prévisions retenues dans la loi de programmation des finances publiques en 2013 –, le déficit de l’assurance maladie devrait être réduit à 1,4 milliard d’euros en 2018.

La branche famille verrait son déficit réduit à 0,7 milliard d’euros à l’horizon 2018, et la branche accidents du travail et maladies professionnelles devrait voir son excédent se confirmer et même s’accroître sur l’ensemble de la période.

La reprise par la CADES des déficits de la branche vieillesse et du FSV ainsi que, dans la limite de 10 milliards d’euros par an et de 62 milliards d’euros au total à l’horizon 2017, d’une part des déficits des branches famille et maladie, devrait permettre le transfert de la majeure partie des déficits d’ici 2017.

Toutefois, la révision de la trajectoire de retour à l’équilibre, et le report de cet objectif au-delà de 2017 conduiront l’ACOSS à supporter un déficit dont le transfert à la CADES n’est pas prévu. Fin 2018, l’ACOSS devrait encore gérer 28,5 milliards d’euros de déficit, d’après les prévisions pluriannuelles figurant à l’annexe B.

Si l’on veut éviter un report de l’échéance de l’amortissement de la dette sociale au-delà de 2024, il faudrait transférer dès 2015 et chaque année les déficits de l’ACOSS vers la CADES, en lui attribuant les financements nécessaires (d’un montant équivalent à une hausse de la CRDS de l’ordre de 0,07 point par tranche de 10 milliards, d’après les calculs de la CADES en 2014).

Les modifications apportées par votre commission au projet de loi

Souhaitant relancer l’emploi à domicile, qui connaît un « décrochage » depuis plusieurs années, votre commission a adopté un amendement portant de 0,75 euro à 1,50 euros l’abattement forfaitaire de cotisations patronales par heure déclarée.

Le nombre de salariés à domicile déclarés et la masse salariale afférente sont en baisse depuis bientôt trois ans (12 000 emplois en équivalents temps plein ont été perdus en 2012, 16 000 en 2013, et la baisse se poursuit en 2014). Dans le même temps, les cotisations applicables aux particuliers employeurs ont fait l’objet d’augmentations successives : après la suppression de l’abattement de 15 points sur les cotisations patronales au 1er janvier 2012, le régime de la déclaration au forfait a été supprimé au 1er janvier 2013 afin de protéger les droits des salariés concernés.

Afin de compenser partiellement cette hausse du coût du travail, une déduction forfaitaire de cotisations employeur de 75 centimes par heure déclarée a été mise en place au 1er janvier 2013 à l’initiative du rapporteur général d’alors, M. Christian Eckert. Votre commission propose de porter cette déduction à 1,50 euro. Le coût de cette mesure, estimé toutes choses égales par ailleurs à 132 millions d’euros de pertes de recettes pour la sécurité sociale, devrait être compensé par l’augmentation du nombre d’heures déclarées.

Dans le domaine des exonérations de cotisations, votre commission a adopté un amendement proposant une réécriture de l’article 9. Cet article encadre les assiettes forfaitaires que le Gouvernement est autorisé à créer par la loi. Il limite à 30 % le taux d’abattement pouvant être appliqué à la rémunération réelle afin de protéger les droits des assurés. Si cet article va dans le bon sens, il fait apparaître un cas d’« incompétence négative » de la loi. En effet, la détermination de l’assiette d’un prélèvement obligatoire relève du domaine de la loi.

L’amendement de votre commission encadre davantage la possibilité pour le pouvoir réglementaire de fixer des assiettes forfaitaires par décret (et non plus par arrêté).

Concernant le Régime social des indépendants (RSI), plusieurs modifications techniques devraient permettre une meilleure mise en œuvre du régime simplifié créé par la loi du 18 juin 2014 relative à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises. Un amendement de votre commission simplifie la règle déterminant le régime qui sert les prestations en nature des travailleurs indépendants exerçant par ailleurs une autre activité non indépendante (dits pluriactifs) en leur permettant de rester attachés, s’ils le souhaitent, au régime dont ils relevaient précédemment.

Il serait également opportun de fixer la date d’affiliation au régime simplifié à la date de début d’activité et non à la date de déclaration du premier chiffres d’affaires, afin d’alléger la gestion du dispositif par le RSI et d’éviter les affiliations opportunistes. Toutefois, l’article 40 de la Constitution ne permet p as de déposer un tel amendement.

En matière de gestion des organismes de sécurité sociale, votre commission a adopté un amendement de votre rapporteur tendant à rationaliser l’organisation informatique de la branche famille.

Enfin, dans le domaine de la lutte contre la fraude, la commission a adopté un amendement de M. Pierre Morange, co-président de la mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (MECSS), visant à ce que le montant des prestations sociales versées figure dans le répertoire national commun de la protection sociale (RNCPS). Il s’agit d’une recommandation de longue date de la MECSS qui n’est pas encore appliquée.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

AUDITION DES MINISTRES

La Commission des affaires sociales a entendu Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, M. Christian Eckert, secrétaire d’État chargé du budget, et Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État chargée de la famille, des personnes âgées et de l’autonomie, sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015, au cours de sa séance du 8 octobre 2014.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Je voudrais remercier madame la ministre, madame et monsieur les secrétaires d’État d’être parmi nous pour nous présenter le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 adopté ce matin par le conseil des ministres.

Je les remercie également de nous avoir fait parvenir le texte suffisamment tôt pour que nous puissions le faire reproduire et l’adresser par courrier électronique dans la matinée aux membres de la Commission. C’est un fait assez rare pour être souligné.

En revanche, je suis obligée de déplorer une nouvelle fois les faibles taux de réponse aux questions que nos rapporteurs ont envoyées au Gouvernement en juillet dernier. Selon le relevé arrêté hier à 18 h 30, ils s’établissent à 71 % pour la branche accidents du travail et maladies professionnelles, à peine 50 % pour le secteur médico-social et les retraites, 40 % pour l’assurance maladie et 31 % pour la branche famille. Certes, le caractère tardif des derniers arbitrages a pu rendre cet exercice difficile dans certains cas et quelques réponses sont arrivées ce matin, notamment pour la branche vieillesse et le secteur médico-social, mais il n’en reste pas moins que ces taux particulièrement faibles ne facilitent pas le travail des rapporteurs qui, rappelons-le, ne disposent pour travailler que des deux semaines qui séparent le moment où ils prennent connaissance du texte et le passage en commission.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. Nos concitoyens sont attachés à leur modèle de protection sociale. Une récente enquête a montré qu’ils plaçaient la sécurité sociale parmi les éléments constitutifs de l’identité française. À travers elle, la solidarité nationale vient soutenir ceux qui en ont le plus besoin à un moment donné de leur vie. Il nous appartient de la pérenniser et de la conforter car si nous voulons que les Français continuent d’y adhérer, il est nécessaire qu’elle réponde chaque jour mieux aux attentes qu’ils formulent. Cela implique une action résolue pour réduire le déficit des comptes sociaux.

Depuis deux ans, j’ai défini deux orientations affirmées : efficacité et justice. Efficacité pour maîtriser nos dépenses mais aussi adapter notre système de protection sociale à l’évolution des besoins ; justice dans la répartition des efforts, mais justice surtout dans la mise en œuvre des politiques de solidarité et de protection sociale.

Les résultats sont là, malgré la conjoncture économique qui rend plus difficile que jamais l’œuvre de redressement. Nous stabilisons le déficit du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) en 2014. Nous l’améliorons de 800 millions d’euros pour le régime général et pour l’ensemble des régimes obligatoires de base : il se situe désormais à 11,7 milliards d’euros.

La préservation de notre modèle social passe tout d’abord par la préservation de ses ressources. Conformément aux engagements que le Gouvernement a pris, les pertes de recettes liées aux exonérations décidées dans le cadre du pacte de responsabilité seront intégralement compensées à la sécurité sociale. J’insiste fortement sur ce point.

La préservation de notre modèle social passe aussi par l’engagement de réformes structurelles destinées à en accroître l’efficacité et la justice.

C’est ce que nous avons fait en matière de retraites à travers la loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraites que vous avez votée en janvier dernier. Elle consacre des droits nouveaux, comme le compte personnel de prévention de la pénibilité, mesure dont les décrets d’application seront publiés au Journal officiel dans quarante-huit heures. D’autre part, elle assure l’avenir de nos régimes de retraite. L’amélioration de la trajectoire des comptes des régimes de retraite nous permet d’envisager un retour à l’équilibre des comptes de la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV) en 2017, sous réserve de la réalisation des hypothèses économiques retenues. Cela résulte en partie d’une mesure inscrite dans le projet de loi de finances en application de la réforme des retraites : l’affectation du produit de la fiscalisation des majorations de pensions, décidée l’an dernier dans le cadre de la réforme des retraites, au Fonds de solidarité vieillesse (FSV) à partir de 2015.

Pour 2015, le déficit des régimes de retraite de base et du FSV se réduira de 1 milliard d’euros, passant de 15,4 milliards d’euros à 14,2 milliards d’euros. Ce redressement nous permet de financer des mesures de justice comme la revalorisation de l’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) à 800 euros depuis le 1er octobre ou le versement d’une prime exceptionnelle de 40 euros.

Concernant l’assurance maladie, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) met en œuvre à la fois des orientations structurelles à travers la stratégie nationale de santé et un plan d’économies que j’ai déjà présenté il y a près de six mois. Il ne s’agit pas d’opposer plan d’économies et mesures de réorganisation. Efficacité et justice sont indissociables : c’est parce que nous engageons la réorganisation de notre système de santé que nous serons à même de dégager des économies. La majorité précédente avait fait le choix de ne pas engager de réformes de structure et de pénaliser les assurés en multipliant les franchises et les déremboursements. Le choix que nous avons fait depuis deux ans et demi, qui sera accentué à partir de 2015, consiste à mieux répondre aux besoins des Français tout en procédant à des réorganisations destinées à améliorer la maîtrise de nos dépenses.

Ainsi que je l’ai annoncé au printemps dernier, l’ONDAM progressera, en 2015, de 2,1 %, ce qui représente un effort historique de trois milliards d’euros d’économies alors que la population augmente et vieillit et que le coût de l’innovation est élevé. Il est utile de rappeler que les dépenses de santé sont structurellement dynamiques, du fait de la démographie et de l’innovation, et que les objectifs d’évolution que nous nous fixons supposent des réorganisations de structure.

Celles-ci s’appuient sur quatre piliers.

Il s’agit, tout d’abord, de garantir un usage pertinent des soins et d’éviter les actes inutiles ou redondants, autrement dit de faire la « chasse au gaspi ». Les professionnels de santé sont mobilisés pour évaluer les économies de dépenses de santé susceptibles d’être réalisées. En 2015, nous attendons près de 1,2 milliard d’économies à ce titre.

Nous allons doter les agences régionales de santé d’outils nouveaux qui leur permettront d’agir sur le comportement d’établissements qui recourent de manière non pertinente à certaines pratiques et certaines prescriptions. Ces outils seront gradués : fixation d’objectifs contractualisés, mise sous observation, mise sous accord préalable, puis mesures plus contraignantes.

Par la lutte contre les actes redondants, nous contribuons à l’amélioration de la qualité de notre système de santé, que nous continuons de soutenir. Cette action est complétée par la mise en place d’une incitation financière à l’amélioration de la qualité des soins dans les établissements de santé. Nous investirons près de 35 millions d’euros dès 2015 dans l’amélioration de la qualité des soins à l’hôpital. Nous consacrerons 15 millions au déploiement des équipements d’imagerie médicale, afin de réduire les délais d’attente. Nous financerons les actions du plan « cancer », comme l’expérimentation de l’hébergement des patients. Nous faciliterons la prise en charge des actes innovants et des actes issus d’expérimentations. Nous financerons le déploiement de la télémédecine. Autant de réalisations concrètes qui permettront d’améliorer au quotidien la qualité de la prise en charge de nos concitoyens.

Le deuxième axe structurant consiste à agir sur le prix des produits de santé et à développer les génériques. Nous attendons de cet ensemble de mesures 1,1 milliard d’économies en 2015.

L’objectif que nous nous fixons pour les années qui viennent montre notre ambition de maîtrise et donne de la visibilité aux industriels, dont je comprends les préoccupations. Nous visons la stabilité des dépenses d’assurance maladie au titre des médicaments entre 2015 et 2017. Cela suppose d’adapter les prix, parfois de les faire baisser, mais pas de manière uniforme. Nous continuerons à soutenir l’innovation ; nous ferons baisser les prix des médicaments qui ne présentent pas d’amélioration du service médical rendu pour les patients.

Nous développerons les génériques en incitant les médecins, en ville comme à l’hôpital, à les prescrire et en renforçant la confiance du public. Je présenterai prochainement de façon plus détaillée les actions que j’entends mener dans ce domaine à travers un plan « génériques ».

Par ailleurs, face à la progression exponentielle des dépenses de traitement de l’hépatite C, nous nous devons d’adopter des mesures très fortes de refonte de la régulation globale des dépenses de produits de santé. Je veux avant tout rappeler que si les traitements de l’hépatite C constituent un défi financier, ils représentent avant tout une excellente nouvelle de santé publique. Des hommes et des femmes, qui naguère n’avaient pas de perspective d’amélioration, peuvent aujourd’hui espérer être guéris – dans 90 % des cas.

Permettre à tous nos concitoyens d’accéder à l’innovation thérapeutique suppose que nous nous donnions les moyens de soutenir les dépenses qu’elle engendre. Dès 2014, pour répondre à l’enjeu spécifique du virus de l’hépatite C, nous proposons la création d’un mécanisme de régulation pour les seuls médicaments destinés au traitement de l’hépatite C. Il permettrait de faire supporter un éventuel dépassement de l’enveloppe de traitement de cette maladie aux seuls laboratoires concernés, sans le moindre contingentement pour les patients.

Tel est notre choix face à une situation aussi exceptionnelle que celle de l’hépatite C : choix de responsabilité, car nous ne pouvons pas laisser les comptes de l’assurance maladie se dégrader face à un tel niveau de dépenses ; choix de solidarité et de santé, car nous devons garantir l’accès à l’innovation à tous les malades qui en ont besoin ; choix d’équité, car nous ne demandons ni à l’ensemble du secteur pharmaceutique ni aux autres acteurs de la santé d’être mis à contribution pour couvrir l’intégralité de ces dépassements.

La troisième orientation stratégique passe par l’amélioration de l’efficience de la dépense hospitalière. Plus de 500 millions sont attendus de l’optimisation des achats hospitaliers et de la mutualisation des fonctions autres que les soins. La loi de santé donnera, à travers les groupements hospitaliers de territoire obligatoires, les outils pour que les hôpitaux puissent réaliser ces transformations.

Enfin, quatrième orientation, nous engageons le virage ambulatoire de notre système de soins qui doit permettre d’améliorer la qualité de la prise en charge tout en maîtrisant les dépenses. Cet enjeu de qualité des soins doit générer des économies à hauteur de 400 millions d’économies en 2015, effort appelé à s’amplifier de manière significative dans les années suivantes, je tiens à le souligner.

Pour cela, nous poursuivons la réforme du financement des hôpitaux : la définition d’un financement spécifique pour les hôpitaux de proximité les confortera dans leur rôle dans la coordination entre ville, hôpital et médico-social. Nous poursuivons également la démarche du pacte territoire-santé qui vise à favoriser l’installation des médecins en zone sous-dense. En 2013, nous avons créé une prise en charge du congé maternité pour les médecins généralistes qui s’engagent à une installation durable dans ces zones. Ce dispositif incitatif donne de bons résultats. Nous allons l’étendre à d’autres médecins, y compris des spécialistes.

Ce choix du virage ambulatoire et du renforcement des soins primaires de premier recours se traduit aussi par la fixation pour la deuxième année consécutive d’un taux de progression de l’ONDAM des soins de ville à 2,2 %, soit un taux plus élevé que l’ONDAM des établissements de santé, qui est de 2 %.

Au-delà des dispositions du texte, j’ai demandé aux directeurs généraux des agences régionales de santé de se mobiliser pour organiser, dans les territoires, ce virage ambulatoire et faire progresser la chirurgie ambulatoire selon un objectif de 50 % des actes à l’horizon 2017. À ce titre, des aides sont budgétisées dans le Fonds de modernisation des établissements de santé (FMESPP) pour accompagner ces derniers dans leurs projets de développement de la chirurgie ambulatoire.

Dans le cadre contraint qui est le nôtre, nous continuons avec Laurence Rossignol et Ségolène Neuville d’investir dans la prise en charge des personnes âgées en perte d’autonomie et des personnes handicapées.

Nous continuons de soutenir la création de places dans les établissements et services pour personnes handicapées à hauteur de 145 millions d’euros au titre des plans passés, auxquels viennent s’ajouter 21,4 millions d’euros au titre le plan autisme. Nous investissons dans la création d’unités de consultation en ville garantissant aux personnes handicapées un accès aux soins courants dans un cadre adapté – locaux mis en accessibilité, matériel spécifique et professionnels formés.

Nous continuons à financer les engagements au titre des plans « grand âge » et « Alzheimer » et nous amorçons la réalisation du plan « maladies neuro-dégénératives » pour près de 50 millions d’euros de mesures nouvelles.

Nous continuons de renforcer le niveau d’encadrement en soins des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) dans le cadre de la médicalisation, à hauteur de 100 millions d’euros. En 2015, nous investissons 20 millions d’euros en faveur des parcours des personnes âgées en risque de perte d’autonomie (PAERPA) dont j’ai lancé, il y a quelques jours dans la région Centre, la première des huit expérimentations mises en place cette année. Très concrètement, cela correspond à l’organisation d’une offre d’hébergement temporaire gratuit en sortie d’hospitalisation en cas de nécessité et à la création d’un numéro unique pour aider les professionnels à orienter leurs patients vers le bon intervenant.

Au-delà, comme vous le savez, 2015 sera marquée par l’adoption de la loi d’adaptation de la société au vieillissement. Cet engagement important, plusieurs fois reporté par la précédente majorité, nous le tenons : ce texte a déjà franchi une première étape avec la première lecture à l’Assemblée nationale, et poursuivra son parcours législatif.

En 2015, nous le savons, les dépenses seront limitées du fait du calendrier d’adoption et de mise en œuvre de cette réforme. Toutefois, la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie (CASA), destinée à financer cette réforme, sera bien affectée à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA). La part de ces ressources non consommée en 2015 servira à la prise en charge de la perte d’autonomie des personnes âgées et financera un plan pluriannuel d’aide à l’investissement pour la période 2015-2017.

J’insisterai maintenant sur la priorité accordée à la prévention dans ce projet de loi.

La mise en place, en 2012, de la rémunération sur objectifs de santé publique (ROSP) du forfait médecin traitant et l’instauration, en 2013, de la majoration pour personnes âgées a d’ores et déjà conduit à accorder des ressources accrues pour conforter les actions de prévention réalisées par le médecin traitant, en cohérence avec le rôle confié à ce dernier dans la stratégie nationale de santé.

L’investissement en faveur de la prévention est soutenu. Les crédits de prévention du régime général progresseront. Nous augmentons les moyens dédiés à la prévention du régime général, nous investissons dans le dépistage des cancers, nous déployons des équipes de liaison et de soins en addictologie, notamment dans les départements d’outre-mer qui n’en sont pas pourvus aujourd’hui.

Par ailleurs, nous réformons le dispositif de dépistage du VIH et des maladies sexuellement transmissibles afin de lui donner plus de visibilité et de mieux organiser la continuité entre dépistage et prise en charge.

En outre, nous allons mettre en place la prise en charge par l’assurance maladie des vaccins dispensés dans les centres de vaccination dans les mêmes conditions que les vaccins réalisés en ville. Nous aidons les centres de vaccination à développer leur activité de vaccination gratuite.

Enfin, est instauré un dispositif spécifique de financement de la démocratie sanitaire.

Ce texte s’inscrit dans la continuité de l’engagement qui est le mien en faveur de l’accès aux soins. Depuis deux ans, j’ai refusé toute mesure de transfert de charges vers les patients : ni déremboursement, ni forfait, ni franchise. Ce choix se traduit déjà dans les chiffres. Les résultats sont au rendez-vous : la part des dépenses de soins à la charge des ménages a reculé, passant de 9,2 % en 2011 à 8,8 % en 2013. C’est exactement le chemin inverse de celui de la majorité précédente.

Nous poursuivons dans cette voie avec une mesure fondamentale : la mise en place du tiers payant intégral au 1er juillet 2015 pour les bénéficiaires de l’aide à l’acquisition d’une complémentaire santé (ACS).

Cette logique de renforcement des droits, nous l’appliquons au-delà des seuls soins, par exemple en étendant le bénéfice des indemnités journalières en cas d’accident du travail aux conjoints et aides familiaux d’exploitants agricoles. C’est une mesure d’équité, qui reconnaît la contribution de ces 45 000 travailleurs, le plus souvent des femmes, et vise à en faire des assurés sociaux à part entière.

Mesdames, messieurs les députés, si j’ai souhaité être précise sur les mesures relatives à la retraite et à l’assurance maladie, c’est qu’à entendre certains, j’ai le sentiment que ce projet de loi de financement de la sécurité sociale se résumerait aux mesures relatives à la politique familiale. Ils veulent se focaliser sur 700 millions d’économies ; nous pourrions, de notre côté, mettre l’accent sur les 52 milliards d’euros investis dans cette politique. Je les engage à s’intéresser plus largement à la totalité des mesures de ce texte qui porte sur 370 milliards d’euros.

La gauche, depuis 2012, a prouvé son engagement en faveur de toutes les familles. Elle l’a prouvé en augmentant de 25 % l’allocation de rentrée scolaire, qui bénéficie à 3 millions de familles ; en augmentant de 50 % le complément familial, qui bénéficie à 385 000 familles de trois enfants ou plus ; en augmentant progressivement de 25 % l’allocation de soutien familial, qui bénéficie à 737 000 familles monoparentales ; en relevant le plafond de ressources de la couverture maladie universelle complémentaire et de l’ACS, pour respectivement 306 000 et 244 000 bénéficiaires. Depuis deux ans, 2,5 milliards supplémentaires ont été apportés à la politique familiale dont 1 milliard au titre des seules prestations.

Nous considérons que c’est en réformant et en modernisant notre modèle social que nous parviendrons à le pérenniser. C’est dans cette perspective que nous faisons le choix de maîtriser les dépenses de la politique familiale, démarche qui repose sur quatre orientations.

La première consiste à préserver le pouvoir d’achat des familles qui continueront à percevoir le montant des prestations familiales qu’elles reçoivent actuellement. Les mesures que nous proposons ne valent que pour l’avenir, pour des prestations ou des majorations de prestations que les familles ne perçoivent pas aujourd’hui. Ainsi, les familles dont les enfants ont quinze ans aujourd’hui continueront de percevoir la majoration des prestations familiales.

La politique familiale ne se résume pas au versement de prestations. Notre deuxième orientation consiste à promouvoir l’articulation entre vie professionnelle et vie familiale, condition de l’émancipation individuelle et de l’égalité entre femmes et hommes, mais aussi du maintien de la natalité française. À cet égard, je souhaite rappeler l’investissement important qui est réalisé dans le cadre de la convention d’objectifs et de gestion de la branche famille, grâce à la dynamique des ressources du Fonds national d’action sociale qui contribue à l’objectif du Gouvernement d’offrir aux familles 275 000 solutions d’accueil supplémentaires. Cet effort permet d’accompagner la réforme du congé parental votée dans la loi du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes, en vue d’un partage mieux équilibré.

La troisième orientation consiste à renforcer le soutien aux familles les plus modestes, en rééquilibrant les aides selon les niveaux de revenus. Dans le cadre des économies nécessaires pour l’avenir de la branche, la modulation du complément du mode de garde en fonction des ressources sera accrue par la création d’une quatrième tranche.

Enfin, quatrième orientation, nous entendons préserver l’universalité de la politique familiale en garantissant le soutien de la nation à l’ensemble des familles.

Partage du congé parental, modulation du complément du mode de garde, report de la majoration des allocations familiales de quatorze à seize ans, modulation du montant de la prime de naissance à partir du deuxième enfant nourriront sans doute notre discussion en commission et en séance publique. Je tiens toutefois à rappeler ici que l’objectif d’économies que nous poursuivons est indispensable à l’équilibre de ce projet de loi.

Mesdames et messieurs les députés, tel est le sens de notre démarche : réaliser résolument des économies tout en procédant à des réorganisations de structure et en préservant notre niveau de couverture sociale.

Tout au long de la discussion, nous serons attentifs à vos amendements et aux enrichissements du texte que vous pourrez apporter. Nous garderons toujours à l’esprit que la modernisation et l’adaptation de notre protection sociale est la condition sine qua non de sa pérennisation.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État chargé du budget. La maîtrise globale des dépenses est incontournable si nous voulons garantir notre souveraineté et préserver notre modèle de protection sociale.

Le déficit de la sécurité sociale dépassait, en 2010, 20 milliards d’euros et avoisinait même 30 milliards d’euros en prenant en compte le déficit du FSV. Il sera cette année deux fois inférieur, se situant à 11,7 milliards d’euros pour le régime général et 15,4 milliards en incluant le FSV, alors même que nous nous situons dans un contexte de très faible croissance depuis trois ans. Rappelons aussi que les dépenses de protection sociale augmentent plus vite que la richesse nationale sur une longue période. Que la part des dépenses de santé dans le PIB ait tendance à s’élever est normal dans un pays développé comme le nôtre ; pour autant, cela ne signifie pas que l’on ne doive pas en maîtriser l’évolution.

Le Président de la République, le Premier ministre, le ministre des finances et moi-même l’avons dit à plusieurs reprises : toutes les économies prévues doivent être réalisées pour atteindre l’objectif de 50 milliards d’euros d’économies sur trois ans, dont 21 milliards d’euros dès l’année prochaine.

Où trouver des marges de manœuvre ? Par la richesse des travaux de votre commission, vous avez démontré qu’il existait des possibilités d’en dégager sans pour autant diminuer le versement des prestations.

J’aimerais revenir sur une question qui nous a beaucoup occupés cet été : la compensation du coût du pacte de responsabilité qui obéit au principe selon lequel l’État compense au bénéfice de la protection sociale la diminution de ressources provoquée par ses décisions.

Seront ainsi compensés les 4,6 milliards de baisse de prélèvements sociaux au titre du dispositif « zéro charge » pour un employeur d’un salarié au SMIC, bientôt effectif, le milliard d’euros d’allégements en faveur des indépendants, pris en compte pour les appels à cotisations pour 2015, et le milliard d’euros de baisse de la contribution sociale de solidarité sur les sociétés (C3S) pour les PME et les entreprises de taille intermédiaire.

Cette compensation reposera, d’une part, sur un transfert des dépenses de la sécurité sociale vers l’État. En pratique, la fraction des aides personnalisées au logement (APL) aujourd’hui financée par la branche famille sera supportée par le budget de l’État qui finançait 40 % du dispositif. Cette opération n’a bien évidemment pour les bénéficiaires aucune conséquence. Les règles d’attribution, de calcul, de gestion par les caisses d’allocations familiales ne sont en aucune façon modifiées. Ce transfert permettra du reste une meilleure lisibilité du financement puisque, désormais, il y aura un financeur unique, en l’occurrence l’État.

D’autre part, le projet de loi transfère à la sécurité sociale l’intégralité du produit des prélèvements sociaux sur les revenus du capital, dont le taux cumulé s’élève à 4,5 %. Le prélèvement de solidarité, dont le taux s’élève à 2 %, est aujourd’hui affecté à trois fonds : le Fonds national des solidarités actives (FNSA), le Fonds national d’aide au logement (FNAL) et le Fonds de solidarité, qui perçoivent par ailleurs des dotations de l’État. Ils feront désormais l’objet de dotations sur le budget de l’État tandis que l’affectation à la sécurité sociale de l’intégralité de cette ressource – 2,5 milliards d’euros – assurera une forme d’unité et de cohérence.

En outre, le coût en 2015 des allégements de cotisations est réduit par la mobilisation des ressources des caisses de congés payés propres à certains secteurs. La modification du rythme de versement des cotisations aux organismes sociaux permet générer une ressource de près de 2 milliards d’euros pour la sécurité sociale, sans aucun impact pour les entreprises et les salariés.

Comme le prévoyait la loi de réforme des retraites, la loi de finances assure le transfert au FSV du produit de la fiscalisation des majorations de pension, soit 1,2 milliard d’euros de recettes supplémentaires, ce qui améliorera significativement le solde du fonds à partir de 2015.

Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale ne contient aucune mesure d’accroissement des prélèvements mais le Gouvernement a prévu des mesures de rationalisation et de simplification dans le domaine des prélèvements obligatoires.

Il s’agit tout d’abord de mesures d’équité et de justice, dont la première concerne les ménages. Nous entendons modifier le critère en fonction duquel est déterminé si un retraité ou un chômeur doit payer la CSG au taux réduit de 3,8 % ou au taux plein – respectivement 6,6 % et de 6,2 %. Le critère actuel est fondé sur le montant d’impôt dû et non sur le niveau de revenu. Autrement dit, un retraité touchant une pension de 1 200 euros mais qui ne bénéficie pas de réduction d’impôt paie selon un taux de 6,6 % alors qu’un autre, recevant une pension de 1 600 euros et bénéficiant de réductions d’impôt, se voit appliquer un taux inférieur. Cela n’est ni juste ni compréhensible. Nous allons donc engager cette réforme, déjà évoquée à plusieurs reprises, notamment dans le rapport Lefebvre-Auvigne remis au printemps 2014. Elle n’affectera pas les taux en vigueur et n’aura pas d’incidence sur les prélèvements.

Une autre série de mesures concerne les entreprises. Le projet de loi de finances prévoit ainsi la suppression d’un premier ensemble de petites taxes à faible rendement. Le PLFSS comprend lui aussi un ensemble de mesures de simplification, plus nombreuses que les années précédentes : taxe due sur les premières ventes de dispositifs médicaux ; rationalisation du recouvrement de la taxe sur les contrats d’assurance maladie et les contrats d’assurance automobile à l’horizon 2016, dans un souci de gain d’efficacité dans les relations entre les administrations compétentes, l’URSSAF et la direction générale des finances publiques. D’autres mesures visent à améliorer les relations entre les entreprises et les URSSAF, notamment lors des contrôles, ou encore à moderniser les modalités de recouvrement des cotisations à la Mutualité sociale agricole.

Nous poursuivrons les efforts nécessaires pour parvenir à réduire le déficit du régime général et du FSV à 13,4 milliards d’euros, efforts qui seront prolongés au-delà de 2015 conformément aux grandes orientations annoncées au printemps. La situation macroéconomique défavorable que nous connaissons comme d’autres pays en Europe doit nous responsabiliser collectivement.

M. Gérard Bapt, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. La présentation de ce projet de loi intervient dans un contexte économique difficile au niveau international et européen. L’écart entre les prévisions du dernier projet de loi rectificative de financement de la sécurité sociale et la réalité qu’a fait apparaître les comptes de la sécurité sociale pour 2014 le montre. La France en pâtit particulièrement s’agissant des finances sociales puisque la baisse des recettes liées aux diverses cotisations et à la CSG est significative. Notre pays ne constitue toutefois pas un cas isolé : pour 2014, le Fonds monétaire international a ramené les prévisions de croissance à 0,4 % pour la France et 0,5 % pour l’Allemagne et a conclu à un recul de 0,2 % pour l’Italie. Des chiffres qui permettent de nuancer certaines critiques portées contre le Gouvernement.

Ce projet de loi nous paraît responsable et juste : il protège les acquis sociaux, lutte contre les inégalités, propose des mesures audacieuses à travers des réformes de structure de la politique du médicament et de l’organisation des soins.

Ce projet est responsable car à travers lui, les engagements sont tenus. Nous avions voté une disposition indiquant le souhait de notre assemblée de voir compenser à la sécurité sociale les exonérations de cotisations liées au pacte de responsabilité à l’euro près. C’est chose faite pour un montant de 6,3 milliards d’euros.

Nous prenons également acte de l’affectation au Fonds de solidarité vieillesse du produit de la fiscalisation des majorations de pensions comme de celle de la CASA au FNSA pour le financement de l’accompagnement de la perte d’autonomie des personnes âgées.

Ce projet est juste car il propose des mesures d’économies raisonnables et mesurées.

Les 3,2 milliards d’économies effectuées dans la branche maladie ne pèsent absolument pas sur les assurés et n’obèrent pas la mise en œuvre des mesures nouvelles que vient de citer madame la ministre de la santé.

Les réels efforts demandés à la branche famille sont à mettre en perspective avec le total des prestations versées aux familles : 42 milliards d’euros en 2015. Le Gouvernement sait que ces mesures ont suscité quelques préoccupations et j’aimerais connaître les marges de manœuvre dont pourrait disposer notre commission pour apporter des améliorations. Au-delà des effets des économies issues des réformes adoptées, je pense à l’évolution des droits sur le tabac, qui viendrait de surcroît approfondir l’excellent plan de lutte contre le tabagisme récemment présenté par madame la ministre de la santé.

J’en viens à des questions précises.

À quelle hauteur contribue la sécurité sociale aux 21 milliards d’économies nécessaires à la maîtrise de notre déficit public, annoncées pour 2015, et comment cet effort se décline-t-il ?

Peut-on envisager un transfert de gestion la dette, à court ou moyen terme, à la CADES ou restera-t-elle cantonnée à l’ACOSS ?

Ma troisième question concerne le contrôle des niches sociales. L’article 9 propose de limiter à 30 % les réductions d’assiettes forfaitaires, lesquelles sont fixées par arrêté. Ne serait-il pas opportun de faire en sorte qu’elles soient encadrées de manière plus stricte, par voie législative ?

Enfin, madame la ministre, pourrait-on envisager d’encourager l’emploi à domicile grâce la mise en place d’un abattement qui viendrait effacer l’impact catastrophique de la suppression de l’abattement de 15 points décidée en 2011 par le ministre de l’économie d’alors ? Nous avons parcouru une partie du chemin avec les 75 centimes d’abattement par heure mis en œuvre à votre initiative, monsieur le secrétaire d’État, lorsque vous étiez rapporteur général. Pensez-vous qu’il serait possible d’aller plus loin ?

M. Olivier Véran, rapporteur pour l’assurance maladie. Le PLFSS pour 2015 propose de fixer l’ONDAM à 182,3 milliards d’euros, en progression de 2,1 % par rapport à la prévision d’exécution de l’ONDAM 2014. Il s’agit d’un objectif volontariste dans la mesure où la croissance tendancielle des dépenses pour 2015 est estimée à 3,9 %, principalement du fait de la hausse des soins de ville estimée à 5 %. Le montant des économies prévues s’élève ainsi à 3,2 milliards d’euros, soit un montant supérieur aux 2,4 milliards d’euros d’économies prévues par l’ONDAM 2014. Précisons que cet effort se manifeste non par des réductions des dépenses de santé mais par une maîtrise de la hausse de ces dépenses.

Ces économies concernent principalement les dépenses de médicaments en ville comme à l’hôpital, qu’il s’agisse de baisse de prix, de maîtrise des prescriptions ou de promotion des génériques. En cas d’augmentation plus importante des dépenses de médicaments, la rénovation du mécanisme de la clause de sauvegarde – l’actuel taux K, qui devient le taux L – va accroître l’incitation à négocier des remises conventionnelles ou des baisses de prix avec le Comité économique des produits de santé (CEPS).

Ces économies proviennent également de l’optimisation des dépenses des établissements de santé et du virage ambulatoire.

L’assurance maladie se place à la hauteur des efforts demandés pour redresser les finances publiques, en pleine cohérence avec le projet de loi de santé que nous examinerons très bientôt. Aucune mesure de déremboursement, aucune augmentation des franchises médicales, aucune nouvelle taxe comportementale n’est prévue : pour la troisième année consécutive, il n’y aura aucun recul de l’accès aux soins pour les Français.

Un éventail de mesures vise à faciliter la proximité et la qualité des soins. Citons la rénovation du Fonds d’intervention régional (FIR), l’articulation de l’outil tarifaire des établissements de santé avec la qualité et la sécurité ou encore la lutte contre les déserts médicaux. À cela s’ajoutent la reconnaissance du rôle des hôpitaux de proximité, le contrat de praticien territorial de médecine ambulatoire qui incitera les médecins libéraux à s’installer dans des zones sous-dotées en contrepartie d’avantages ou encore les mesures de soutien à l’activité ambulatoire en zones de montagne.

Le projet de loi de financement va également contribuer à l’amélioration de la qualité des soins, notamment en matière de prévention des infections sexuellement transmissibles. Il comporte plusieurs mesures de simplification visant à soutenir les actes innovants et crée de nouveaux droits pour les usagers.

Je souhaiterais tout d’abord interroger le Gouvernement sur le tiers payant intégral pour les bénéficiaires de l’ACS. Cette mesure contribuera rapidement, et de façon importante, à l’accès aux soins ambulatoires de patients dont les ressources annuelles sont inférieures à 11 670 euros pour une personne, 17 505 euros pour deux personnes, plus que d’autres susceptibles de renoncer aux soins. C’est une véritable avancée, mais il me semble que nous pourrions aller plus loin. Contrairement à la CMU complémentaire, l’ACS ne dispense pas du paiement de la participation forfaitaire de 1 euro et des franchises, prélèvements que nous savons tous injustes et inefficaces. Ne pourrait-on pas étendre la dispense de franchise aux bénéficiaires de l’ACS dans le cadre du tiers payant ?

Ma deuxième question concerne le prix des nouveaux traitements de l’hépatite C. Nous le savons, les exigences affichées par certains laboratoires s’affranchissent complètement des coûts initiaux de recherche et développement et des coûts de production. Nous devons garantir un accès à tous les malades aux traitements les plus innovants mais il faut aussi trouver une voie raisonnable pour assurer dans la durée leur financement. Les dispositions prévues dans le projet de loi répondent pleinement à cet objectif puisque tous les malades qui en ont besoin pourront être soignés, sans que cela grève le budget de la sécurité sociale et pèse sur le financement d’autres traitements.

J’aimerais également connaître la position du Gouvernement sur l’amélioration de la pertinence des soins, dispositif précieux et attendu qui associe l’établissement de santé à l’Agence régionale de santé (ARS) et à l’assurance maladie dans une démarche contractuelle, dont la réussite dépend de l’implication des praticiens hospitaliers. Comment les y inciter et comment créer une émulation autour de ces objectifs ?

S’agissant du secteur hospitalier, l’amélioration de la coopération entre établissements de santé est vécue, de plus en plus, comme une nécessité absolue pour concilier, dans la durée, proximité, qualité et sécurité des soins. Vous avez accéléré, madame la ministre, les mécanismes de coopération entre hôpitaux, notamment pour les fonctions support et les achats. Pensez-vous possible et souhaitable d’aller plus loin dans la constitution, par exemple, d’équipes médicales de territoire ou dans l’évolution des règles de gouvernance des communautés hospitalières au sein d’un territoire ?

Concernant l’accès à l’innovation, enjeu majeur tant pour les usagers du soin que pour le dynamisme de notre filière industrielle, l’article 41 restreint le champ d’application du forfait innovation aux produits de santé ayant un impact clinique médico-économique majeur. Vous avez rendu deux décisions en 2014, ce dont nous pouvons nous féliciter puisqu’aucun recours n’avait abouti depuis la création de ce forfait en 2008. Le dispositif actuel n’a pas permis de faire émerger rapidement des dispositifs ou actes innovants. Qu’est-ce qui a motivé l’évolution que vous voulez lui imprimer ?

Ma dernière question concerne le sous-objectif relatif au Fonds d’intervention régional (FIR) dont le projet refonde les missions. Pouvez-vous nous rappeler le contenu des missions financées au titre du FIR ainsi que les améliorations prévues par le texte ?

Mme Martine Pinville, rapporteure pour le secteur médico-social. Je veux saluer ce PLFSS dont le but est de préserver notre modèle social en procédant à des réformes structurelles.

L’année 2014 a été marquée pour le secteur médico-social par l’adoption de la loi pour la mise en accessibilité des établissements recevant du public et l’examen en première lecture, dans notre assemblée, du projet de loi relatif à l’adaptation de la société au vieillissement, longtemps annoncé.

Ce PLFSS offre d’autres motifs de satisfaction en ce domaine : je veux souligner la progression satisfaisante de l’ONDAM et me réjouir du rétablissement de l’intégralité de la fraction de CSG attribuée au médico-social, de l’affectation de l’intégralité de la CASA à la CNSA comme de la part non consommée de ces ressources à la prise en charge de la perte d’autonomie, notamment à travers le financement du plan pluriannuel d’aide à l’investissement de 2015 à 2017.

Par ailleurs, l’examen à venir du projet de loi de santé nous offrira l’occasion de promouvoir l’articulation naturelle, mais encore difficile à mettre en place, entre le sanitaire et le médico-social et d’instaurer des mesures de simplification très attendues dans ce secteur.

Je tiens à saluer l’affectation de 145 millions d’euros à la création de places d’accueil pour personnes handicapées, qui sera certainement bien accueillie par les familles, qui nous sollicitent beaucoup, du fait des difficultés auxquelles elles se heurtent pour trouver de telles places. Je me félicite également des 21 millions d’euros consacrés en 2015 au troisième plan autisme 2015-2017 et de l’ouverture à la rentrée dans chaque région d’une unité d’enseignement de maternelle pour enfants autistes. Ce programme important reflète une volonté politique forte du Gouvernement.

Pour finir, j’aurai deux questions.

La CASA va apporter des ressources nouvelles mais il faut que la CNSA soit en mesure d’utiliser ces financements dès 2015. Pouvez-vous nous préciser le calendrier de mise en œuvre de la loi, madame la ministre ?

Ne pourrait-on pas mettre en place, dans le cadre de ce projet de loi, des mesures de soutien aux aidants ?

M. Michel Issindou, rapporteur pour l’assurance vieillesse. Je me réjouis, madame la présidente, que mon temps de parole ne soit pas proportionnel à la place qu’occupent dans le projet de loi les mesures relatives à l’assurance vieillesse. Mais si seulement deux articles y sont consacrés, je ne peux m’en offusquer : l’année 2014 a été marquée par la belle réforme garantissant l’avenir et la justice du système de retraites. C’est une particularité de la branche vieillesse : nous agissons par soubresauts successifs tous les trois ou quatre ans. J’espère toutefois que ce que nous avons mis en place permettra d’éviter que de nouvelles réformes, toujours anxiogènes pour nos concitoyens, n’aient à être mises en place trop rapidement.

Les premiers effets de cette réforme commencent à être tangibles. Certains décrets d’application étaient particulièrement attendus et je me félicite de l’annonce que vous venez de faire, madame la ministre. Beaucoup de personnes seront rassurées de savoir que les décrets concernant les comptes de pénibilité sont sur le point de paraître et qu’ils prennent en compte les dix facteurs de pénibilité et leur application progressive. Il était important que le Gouvernement montre sa volonté de mettre en œuvre cette partie de la réforme.

Mais venons-en aux quelques éléments concernant la branche vieillesse de ce PLFSS.

Ce projet de loi introduit une disposition visant à faciliter le rachat de trimestres à un tarif préférentiel par les enfants des anciens harkis au titre des périodes passées dans des camps d’hébergement entre 1962 et 1975.

S’agissant des comptes de la branche, le texte comporte peu de mesures nouvelles. Les dépenses devraient demeurer contenues du fait de la faible inflation tandis que les recettes resteront dynamiques grâce aux réformes de 2012 et 2014.

Le déficit prévisionnel pour 2015 devrait ainsi s’établir à 1,5 milliard d’euros pour la branche vieillesse du régime général, ce qui est remarquable, compte tenu du niveau qu’il atteignait en 2012. Nous nous réjouissons, madame la ministre, que vous prévoyiez un rétablissement de l’équilibre pour 2017.

Cela prouve que la trajectoire de réduction des déficits que nous soutenons est la bonne. L’intégration financière du RSI à la CNAV, votée dans la loi rectificative de financement d’août dernier, ne devrait pas peser significativement sur les comptes de la branche grâce au transfert d’une fraction de la C3S.

Le FSV souffre encore pour sa part de sa forte sensibilité à la conjoncture économique et au niveau du chômage. Il est également fragilisé par la diminution progressive de la C3S, qui devrait entraîner une dégradation préoccupante de son déficit à 4,3 milliards d’euros en 2015. Quelles mesures comptez-vous prendre à l’avenir pour contenir, voire réduire, ce déficit ?

Enfin, la non-revalorisation des pensions des retraités les plus modestes fait débat, mais elle n’est qu’une conséquence mécanique du faible niveau d’inflation de notre économie. Elle sera partiellement compensée par la revalorisation du minimum vieillesse et par le versement d’une prime exceptionnelle de 40 euros par le FSV. Pouvons-nous être certains que le versement de cette prime interviendra rapidement ?

M. Denis Jacquat, rapporteur pour les accidents du travail et les maladies professionnelles (AT-MP). S’agissant de la branche AT-MP, ce PLFSS ne s’écarte pas de l’usage : peu de mesures nouvelles mais des dépenses de transfert qui ont tendance à augmenter d’année en année. Je tiens à souligner tout de même la relative bonne santé financière de la branche AT-MP et les efforts d’amélioration de sa gestion interne, matérialisés cette année par la certification des comptes de la branche par la Cour des comptes.

Mon premier point concerne l’article 16 du présent projet de loi, qui doit permettre de simplifier les modalités de contestation des accidents du travail et maladies professionnelles. Je me félicite sur ce point que le Gouvernement ait entendu le message que nous lui avions transmis l’an dernier par la voie d’un amendement, adopté en commission, demandant l’interruption du délai de prescription du remboursement des cotisations AT-MP en cas de recours contre les décisions de tarification. Cette question a fait l’objet d’une jurisprudence abondante de la Cour de cassation ces deux dernières années, de sorte qu’il était devenu impératif de fixer une règle afin de sécuriser juridiquement ces dispositions.

J’en viens maintenant à l’augmentation du montant de la contribution versée par la branche AT-MP à la branche assurance maladie, au titre de la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles, prévue à l’article 58 de ce PLFSS.

Ce versement atteindrait en 2015 le montant symbolique de un milliard d’euros – « 1 000 millions » selon le projet ! –, soit le milieu de la fourchette déterminée par la commission instituée par 1’article L. 176-2 du code de la sécurité sociale, qui a rendu son rapport au printemps dernier. Il repose sur des estimations que d’aucuns jugent élevées, et d’autres en deçà de la réalité, avec un constat néanmoins partagé : le montant de la sous-déclaration des accidents du travail et maladies professionnelles ne peut être déterminé avec précision.

Je m’interroge par conséquent sur cette augmentation significative du montant du transfert, qui pèse lourdement sur les employeurs. Elle me paraît être une mauvaise réponse, car elle ne permet aucunement d’endiguer le phénomène de la sous-déclaration.

Je souhaiterais par conséquent connaître les intentions du Gouvernement pour renforcer la lutte contre la sous-déclaration des accidents du travail et maladies professionnelles.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure pour la branche famille. La dégradation des perspectives de croissance a fortement fragilisé le redressement des comptes de la Caisse nationale d’allocations familiales (CNAF) pourtant engagé avec courage par les deux dernières lois de financement.

Les recettes ont crû moins vite qu’attendu, alors même qu’en deux années, la CNAF a bénéficié de l’affectation de nouvelles recettes pérennes à hauteur de 1,8 milliard d’euros, tendance en contraste flagrant avec la politique menée les années précédentes, marquée par la désinvolture à l’égard de la politique familiale et des familles.

Cette année, vous compensez, à l’euro près, la perte de recettes occasionnée par les allégements de cotisation patronales familiales décidées dans le cadre du pacte de responsabilité et de solidarité. Le Fonds national d’aide au logement, actuellement cofinancé par l’État et la CNAF, sera rebudgétisé : son financement sera désormais intégralement à la charge de l’État, comme le prévoit l’article 28 du projet de loi de finances.

Pour redresser les comptes de la branche famille, nous avons eu le courage d’adopter l’an passé des mesures d’économies qui occasionnent cette année une moindre croissance des dépenses – effort de 200 millions d’euros cette année et de 760 millions d’euros en 2017. Notons que les réformes de l’an passé ont amélioré, à divers titres, le caractère redistributif des prestations familiales.

Aujourd’hui, afin de tenir le cap et de permettre à la branche famille de retrouver enfin cet équilibre si gravement compromis entre 2007 et 2012, il nous revient de prendre des mesures d’économies supplémentaires : vous nous avez annoncé un ensemble de dispositions qui porte l’effort à 900 millions d’euros dès 2015, en tenant compte des moindres dépenses engagées au titre de l’action sociale. Cette démarche est pleinement justifiée : dans la sphère de la sécurité sociale, tous les secteurs sont sollicités, et la branche famille doit participer à l’effort commun.

Toutefois, si chacune de ces mesures, prises isolément, peut trouver une justification, il convient de bien faire apparaître la ligne d’ensemble. D’autre part, si nous demandons un nouvel effort aux familles cette année, nous devons être certains que nous ne serons pas amenés à en modifier les paramètres dans les prochains mois. Pouvez-vous nous indiquer, madame la ministre, sur quels éléments se fonde la trajectoire de redressement des comptes de la CNAF que vous nous proposez ?

Parmi les mesures que vous présentez, une seule relève, de prime abord, du domaine de la loi. Les autres seront mises en œuvre par voie réglementaire. Formellement, le Parlement ne sera appelé à se prononcer que sur la modulation en fonction du rang de l’enfant du montant de la prime de naissance de la prestation d’accueil du jeune enfant.

Les autres mesures annoncées peuvent être prises par décret, mais vous le savez, c’est la loi elle-même qui a renvoyé au décret la définition des modalités de partage entre les parents des allocations versées pendant le congé parental, de même que la fixation de l’âge de majoration des allocations familiales. La loi peut toujours modifier le cadre de ces dispositifs et l’examen du PLFSS, jusqu’au vote de l’article fixant l’objectif de dépenses de la CNAF, doit permettre au Parlement de lever toutes les incertitudes sur la portée des différentes mesures annoncées.

Le Gouvernement peut-il nous indiquer comment ont été évaluées les conséquences d’une modification du partage de la prestation partagée d’éducation de l’enfant (PreParE) ? Disposez-vous d’indication sur la répartition des bénéficiaires de ce congé en fonction des niveaux de revenus ? Comment seront pris en compte les effets d’une moindre utilisation de ce congé sur les besoins de solutions d’accueil du jeune enfant, mais aussi sur l’emploi des femmes ? Quelles seront les mesures d’accompagnement ?

Pouvez-vous également nous indiquer à partir de quel niveau de revenu serait appliquée la quatrième tranche du complément de mode de garde et combien de bénéficiaires seraient concernés ? Je souligne que vous prévoyez de maintenir intégralement l’avantage provenant du paiement par les CAF des cotisations sociales, qui représente plus de la moitié des dépenses au titre du complément de libre choix du mode de garde (CMG).

Pouvez-vous nous préciser les raisons du choix de l’âge de seize ans pour déclencher la majoration des allocations familiales ? Ne constate-t-on pas une augmentation des dépenses au moment de l’entrée au lycée qui a lieu le plus souvent dès quinze ans ? En outre, cette majoration, aujourd’hui accordée à toutes les familles quels que soient leurs niveaux de revenus, n’est-elle pas particulièrement utile pour les familles modestes dont les enfants sont adolescents ?

Pouvez-vous, par ailleurs, nous confirmer que, conformément au plan pluriannuel de lutte contre la pauvreté, le complément familial et l’allocation de soutien familial vont bien faire l’objet d’un nouveau coup de pouce en 2015 ainsi que les années suivantes, afin de parvenir à une hausse de 50 % du complément familial et de 25 % de l’allocation de soutien familial ?

Enfin, l’article 18 confie aux caisses d’allocations familiales la gestion des prestations familiales des familles de marins, qui relève aujourd’hui d’une caisse spécifique, la Caisse maritime d’allocations familiales (CMAF). Pouvez-vous préciser les conditions de redéploiement des personnels actuels de cette caisse ainsi que la façon dont va être poursuivie une politique d’action sociale adaptée aux besoins des familles de marins ?

Mme la présidente Catherine Lemorton. Nous en venons aux orateurs des groupes.

Mme Sylviane Bulteau. Le budget de la sécurité sociale est le budget qui suscite le plus d’intérêt parmi nos concitoyens car il touche beaucoup d’aspects de leur vie quotidienne : santé, famille, retraite. C’est un budget courageux, efficace et juste, fondé sur la volonté de préserver notre modèle social. Il répond à l’une de nos valeurs : l’accès aux soins pour tous, qui vient renforcer l’égalité des chances.

L’héritage de la précédente majorité a rendu la marge de manœuvre étroite : il faut trouver les moyens de renforcer l’efficience de notre système sans remettre en cause ses fondements. Exercice difficile, mais exercice réussi.

Ce PLFSS est marqué par des réformes structurelles destinées à lutter contre l’immobilisme et contre les effets des attaques frontales de la précédente majorité – déremboursements, franchises, remise en cause des indemnités journalières – qui ont contribué à éloigner les plus fragiles de l’accès aux soins.

Quant aux nouvelles mesures prises en matière de politique familiale, qui ont suscité tant d’agitation dans les médias, il est important de rappeler qu’elles n’affecteront pas le pouvoir d’achat des familles. Nous nous réjouissons de l’accent mis sur l’articulation entre vie professionnelle et vie familiale, gage d’amélioration de la vie des femmes. Nous saluons la volonté d’un rééquilibrage en faveur des personnes les plus en difficulté et la réaffirmation de l’universalité de la politique familiale.

Il importe de garder à l’esprit les multiples attaques dont la politique familiale avait fait l’objet avant 2012 : mise en place de vingt-quatre taxes supplémentaires venues entamer le pouvoir d’achat des familles ; suspension des allocations familiales pour les parents d’enfants en décrochage scolaire ; fin de la scolarisation des tout-petits et suppressions de postes dans l’éducation nationale, véritable arme de destruction massive contre le système éducatif et donc l’égalité des chances.

Mme Bérengère Poletti. Jamais depuis 2011, un Gouvernement ne s’était fixé un objectif de réduction des déficits de la sécurité sociale aussi peu ambitieux : seulement 1,4 milliard d’euros.

Les objectifs prévus par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 n’ont pas été respectés. Le retour à l’équilibre que vous nous avez promis pour 2017 est un mirage. Il est repoussé à 2018 ou 2019 alors même qu’en 2013 et en 2014, les déficits ont largement excédé ce qui était prévu en loi de financement initiale. Vous laissez filer les déficits et vous montrez incapables de tenir vos engagements : nous sommes inquiets !

Le Haut conseil des finances publiques est tout aussi sévère et constate à la lecture de votre texte que l’objectif que vous vous êtes fixé « sera difficile à atteindre pour certains postes », notamment s’agissant des dépenses sociales pour lesquelles il souligne que les mesures d’économies n’ont pas été portées dans leur totalité à sa connaissance.

Nous avons beau compter et recompter, nous ne trouvons pas les 9,6 milliards d’euros d’économies promises sur trois ans : 3,2 milliards d’euros au titre de l’assurance maladie, 700 millions au titre de la branche famille, 500 millions au titre de la gestion des organismes de protection sociale, cela ne fait jamais que 4,4 milliards d’euros. Où sont les 5,2 milliards restants ?

Nous cherchons partout – mais peut-être avons-nous mal cherché ? – la compensation promise des 6,3 milliards d’euros d’allégements de charges que vous nous avez fait voter cet été. Certes, vous dégagez la sécurité sociale du paiement de 4,75 milliards d’euros d’aides au logement, qui devront désormais être assumées par l’État, et vous transférez vers la sécurité sociale l’intégralité du produit des prélèvements sociaux sur les produits du capital à hauteur de 2,5 milliards d’euros. Mais la question reste la même : comment l’État va-t-il compenser ces transferts ? Toujours par la dette ? Nous sommes là face à une simple opération de tuyauterie comptable. À cela s’ajoute une autre difficulté : ces 2,5 milliards visent à compenser le coût du dispositif d’allégements de charges sur les bas salaires, voté cet été dans le cadre du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale, que le Conseil constitutionnel a censuré.

Sur l’article 21, particulièrement technique, nous avons besoin d’éclaircissements. La CASA sera affectée dans son intégralité à la CNSA : mais n’était-ce pas déjà le cas l’année dernière ? Mme Pinvile a indiqué qu’il n’y aurait pas de reprise sur la CSG : je n’en vois nulle part la trace.

Les conseils de la Caisse nationale de l’assurance maladie (CNAM) et de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie (UNCAM) ainsi que celui de la CNAF ont rejeté jeudi dernier votre projet à la quasi-unanimité. Pour justifier leur vote, les deux premières entités mettent en avant la forte contrainte qui pèse aujourd’hui sur l’ONDAM, notamment sur les dépenses relatives aux nouveaux médicaments, et font part de leur inquiétude. Elles veulent appeler l’attention du Gouvernement sur la nécessité de concilier maîtrise des coûts et pérennité de l’accès aux soins afin de garantir l’accès aux médicaments innovants. Vous réussissez le tour de force d’inquiéter tout le monde.

L’ONDAM voit son taux d’évolution abaissé certes, mais sans les réformes nécessaires. Il ne sera respecté qu’au prix d’un bricolage qui ne manquera pas de peser sur la qualité de notre système de santé.

Le mécanisme de type « clause de sauvegarde » pour les dépenses de nouveaux médicaments dans le cadre de la prise en charge de l’hépatite C constitue une réponse à la va-vite pour les années 2014 et 2015. Vous n’apportez pas de solution au problème crucial que posera l’arrivée de nouvelles molécules dans les années à venir. Comment permettre à tous d’accéder à l’innovation thérapeutique au juste prix sans mettre à mal les capacités d’innovation de l’industrie pharmaceutiques ?

Votre PLFSS pour 2015 ressemble beaucoup aux deux précédents : de la tuyauterie, quelques coups de rabot, des augmentations de taxe. Où en sont les réformes de structure pourtant indispensables à une réelle inflexion ? Réformes recommandées par la Cour des comptes dans son dernier rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale : « C’est prioritairement en pesant sur les dépenses pour ralentir leur progression que le redressement des comptes sociaux doit s’accélérer. […]  Il convient de mettre en œuvre des réformes structurelles, seules à même d’infléchir durablement les dépenses »

Je finirai par les mesures d’économies que vous prévoyez en matière de politique familiale. Quel mensonge que de dire qu’elles ne concernent que les familles les plus favorisées ! La baisse des allocations familiales, prestation universelle, pour les enfants entre quatorze et seize ans va toucher toutes les familles et beaucoup plus fortement, proportionnellement, les plus pauvres. Quant à l’allocation de base et la prime naissance, ce sont des allocations versées sous condition de ressources. Vos amis politiques ne s’y sont pas trompés.

M. Francis Vercamer. Depuis votre arrivée au pouvoir, la trajectoire de réduction des déficits est interrompue : le déficit reste fixé à 15,4 milliards d’euros. On peut donc douter des prévisions pour 2015 alors même que rien dans votre politique économique ne permet de prévoir une amélioration sensible de l’activité.

Le Haut conseil des finances publiques n’a pas manqué de noter que la prévision de croissance de 1 % du PIB en 2015 était un scénario optimiste. Les recettes de la sécurité sociale étant assises sur la masse salariale, il est difficile de considérer les grands équilibres présentés pour 2015 comme sérieux.

Le Gouvernement nous présente une équation budgétaire impossible, résultat des choix fiscaux opérés en début de mandat et d’une absence de réforme structurelle du financement de notre protection sociale. Nous ne voyons toujours pas, dans ce PLFSS, la traduction d’un changement de paradigme en matière de financement de la protection sociale : celui-ci repose principalement sur le travail, ce qui pénalise la compétitivité de nos entreprises et avantage en quelque sorte les produits importés. Le rejet de la réforme engagée par la majorité précédente en faveur d’une TVA sociale – idée défendue de longue date par les centristes – est, de ce point de vue, une erreur lourde dont la compétitivité de notre économie n’a pas fini de supporter les conséquences néfastes.

Pour tenter de combler les déficits ou de résorber les dérapages, le Gouvernement et la majorité ont recours aux expédients. La source de ces expédients résidait, lors des deux années précédentes, dans votre créativité fiscale. L’effet de saturation que celle-ci a produit chez nos concitoyens se traduit, cette année, par des tours de passe-passe budgétaires et des économies disparates, sans cohérence, dont on peut douter qu’elles soient empreintes de considérations de justice sociale. Pour ce qui est des tours de passe-passe, citons le choix de compenser les mesures du pacte de responsabilité et de solidarité par des transferts au budget de l’État ; pour ce qui est des mesures portant atteinte à la justice sociale, la transformation du capital décès en prestation forfaitaire.

J’en viens à l’accès aux soins, qui doit être un droit réel pour nos compatriotes.

La généralisation du tiers payant qui est annoncée dans le cadre de la loi de santé publique n’a de sens que si elle s’accompagne de la possibilité, pour nos concitoyens, de trouver facilement un professionnel de santé à proximité de leur domicile. Or, la problématique des déserts médicaux reste à ce jour entière. Le dispositif de praticien territorial de médecine générale, s’il constitue une initiative intéressante, n’en est pas moins timide : il ne semble pas en mesure d’inverser la tendance à la baisse de la démographie médicale. Et l’on peut craindre que votre projet de réforme de la profession de pharmacien d’officine, qui prévoit notamment une liberté installation des officines dans un cadre concurrentiel, n’amplifie cette désertification.

Alors que ce PLFSS continue, à l’instar des exercices précédents, à faire porter sur le médicament l’effort de réduction des dépenses, il reste très en deçà de ce que la situation du secteur hospitalier exige en termes d’amélioration de la répartition de l’offre sur le territoire. Vous encouragez les mutualisations, vous définissez le rôle et les missions des hôpitaux de proximité, mais c’est d’une véritable refonte de la carte hospitalière que nous avons besoin. Elle permettrait notamment de construire des synergies et des complémentarités entre établissements, quel que soit leur statut. Le rapport de la Cour des comptes a été accablant et il vous faudra beaucoup de courage, madame la ministre, pour agir.

À défaut d’une réflexion d’ensemble sur l’offre de soins englobant l’hôpital, nous continuerons à discuter de mesures partielles et de pure opportunité visant à trouver des économies là où cela est possible, sans cohérence d’ensemble.

C’est le cas cette année avec les mesures concernant la branche famille. Les modifications apportées à la prime à la naissance et au congé parental cachent mal leur véritable objectif : réaliser des économies aux dépens des familles et des classes moyennes. C’est également le cas avec la mise à contribution des 460 000 retraités qui verront leur CSG augmenter. Après le gel des retraites et la non-revalorisation au 1er octobre, vous vous servez à nouveau des pensions de retraites comme variable d’ajustement budgétaire.

Faute de réformes structurelles, ce sont toujours les classes moyennes et les familles qui supportent le poids d’un effort toujours plus lourd pour assurer un retour à l’équilibre budgétaire dont la perspective, logiquement, s’éloigne chaque année.

M. Jean-Louis Roumegas. Madame la ministre, madame la secrétaire d’État, monsieur le secrétaire d’État, l’enjeu est bien la pérennité de notre modèle social, auquel les Français sont très attachés. Au cours des deux dernières années, le groupe écologiste a soutenu la réduction des déficits et la maîtrise des dépenses parce qu’elles lui paraissaient nécessaires, et réalisées dans un souci de justice dès lors que le niveau des prestations sociales était maintenu, voire augmenté pour les plus faibles. Mais, depuis l’application du pacte de responsabilité dans le cadre du projet de loi de finances rectificative pour 2014, la logique a changé. Le Gouvernement s’est en effet engagé dans une politique de relance qui se traduit par des exonérations de cotisations sociales, à hauteur de 6,3 milliards d’euros, pour les entreprises, sans contrepartie ni condition. Nous contestons ces mesures, que nous ne croyons ni efficaces ni justes. Telle est également, du reste, l’opinion de nos concitoyens, qui considèrent qu’il s’agit là de cadeaux inefficaces ; au demeurant, ces mesures n’ont produit aucun résultat.

Certes, l’État compensera ces pertes de recettes pour la sécurité sociale mais, pour ce faire, il sacrifiera certains budgets. Or, à l’heure où les besoins croissent en raison de la crise, la diminution des moyens publics d’intervention dans le domaine de la solidarité n’est pas un message approprié. Vous avez ainsi annoncé une baisse des prestations familiales – report de quatorze à seize ans de la majoration de l’allocation familiale, diminution de la prime de naissance dès le deuxième enfant, réforme du complément de libre choix dans le mode de garde et du congé parental – qui s’inscrit dans une pure logique d’économies. Ces mesures ne comportent en effet aucune réforme structurelle, en dépit des discours quelque peu hypocrites que l’on peut entendre. En réalité, il s’agit uniquement de faire des économies !

À la crise sociale s’ajoute une crise sanitaire : la multiplication de maladies chroniques non transmissibles grève durablement et de manière importante les comptes de l’assurance maladie. Ces réalités sanitaires doivent donc être non seulement prises en compte, mais aussi prévenues. Or une telle prévention exigerait des moyens supplémentaires, que vous vous refusez à lui consacrer de par vos choix budgétaires.

Bien entendu, nous saluons certaines des mesures contenues dans ce PLFSS, qu’il s’agisse de l’extension du tiers payant ou de l’accès garanti à une complémentaire santé pour les plus modestes. Mais pourquoi ne pas faire progresser davantage encore l’accès aux soins en revenant sur les franchises médicales, que vous combattiez lorsqu’elles ont été instaurées par la droite ? Nous nous félicitons également de la volonté d’assurer la prise en charge du nouveau médicament contre l’hépatite C, sans en limiter l’accès. En revanche, on peut se demander si l’industrie pharmaceutique – qui est déjà fortement soutenue par ailleurs, notamment grâce au CICE et aux nouvelles dispositions du pacte de responsabilité – consentira un jour à modérer son appétit. Quand on voit en effet le fameux plafond de chiffre d’affaires, en W – 450 millions en 2014, 700 millions en 2015 –, au-delà duquel les laboratoires seront mis à contribution, on se dit que l’industrie pharmaceutique sera de toute façon très grassement payée de ses investissements dans la recherche ; il faudra lui demander davantage d’efforts.

En conclusion, nous avons besoin, dans un contexte de crise sociale et sanitaire, de moyens supplémentaires. Si certaines des mesures du PLFSS vont dans le bon sens, nous ne pouvons pas approuver les mesures budgétaires globales qui consistent à réduire les prestations sociales pour financer des exonérations de cotisations au bénéfice des entreprises.

Mme Jacqueline Fraysse. Madame la ministre, madame la secrétaire d’État, monsieur le secrétaire d’État, la compensation des mesures prises dans le cadre du pacte de responsabilité est certes effective, comme en témoigne ce budget, mais j’appelle votre attention sur le fait qu’il ne s’agit que de transferts financiers entre le budget de l’État et celui de la sécurité sociale : transfert de dépenses – les APL, par exemple, seront désormais entièrement à la charge de l’État – et de recettes, puisque la sécurité sociale se voit octroyer l’intégralité du produit du prélèvement de solidarité. Ces mesures alourdissent donc les dépenses de l’État ou le privent de certaines recettes. Dès lors se pose la question de savoir quels sont les ministères dont les budgets seront réduits. La compensation du pacte de responsabilité demeure ainsi une véritable préoccupation.

S’agissant des médicaments soignant l’hépatite C, je crois savoir que des négociations sont en cours avec le Comité économique des produits de santé en vue d’obtenir un prix plus raisonnable. En attendant, il est proposé, dans le PLFSS, d’instaurer une contribution de l’industrie pharmaceutique au-delà d’un certain chiffre d’affaires annuel. Si cette mesure me paraît positive, elle ne règle pas tout. Or, selon certaines associations, les conditions d’autorisation de la production immédiate d’un générique par l’émission d’une licence d’office sont aujourd’hui réunies. Peut-on espérer, madame la ministre, que cette autorisation sera accordée ?

Quant à la fraude aux cotisations sociales, c’est-à-dire leur non-paiement, elle est estimée par la Cour des comptes entre 20 milliards et 25 milliards d’euros pour l’année 2012. La lutte contre cette fraude participe donc de la réponse au problème du déficit de la sécurité sociale. À cet égard, le PLFSS prévoit une extension du périmètre de contrôle, ce qui constitue une avancée indiscutable, mais, dans le même temps, vous diminuez le seuil minimal des pénalités financières pouvant être prononcées, vous limitez la durée du contrôle dans les entreprises de moins de dix salariés et vous étendez la possibilité de conclure des transactions avec les employeurs. De telles mesures sont d’autant moins compréhensibles que la Cour des comptes recommande d’aligner les dispositifs en matière de fraude aux cotisations sur ceux qui sont prévus en matière de fraude fiscale. Allez-vous réellement renforcer l’arsenal à la disposition des inspecteurs des URSSAF ?

S’agissant de la branche famille, je ne détaillerai pas les mesures annoncées, qui sont injustes en ce qu’elles pénalisent surtout les plus modestes d’entre elles. En revanche, je m’arrêterai plus longuement sur le congé parental. Selon ce dispositif – qui n’apparaît pas en tant que tel dans le PLFSS, puisqu’il est un prolongement de la loi sur l’égalité entre les hommes et les femmes qui vient d’être adoptée –, les parents ne pourront bénéficier de l’intégralité du congé que si chacun d’eux en prend intégralement sa part. Puisqu’il est prévu que ce soit le Gouvernement qui définisse les parts par décret, pouvez-vous nous donner des indications sur ce que vous envisagez de décider ? En tout état de cause, il n’échappe à personne qu’on prend ainsi, au nom de la défense de l’égalité entre les hommes et les femmes, une mesure d’économies. En effet, les salaires des hommes étant plus élevés que ceux des femmes, on peut imaginer que des hommes renonceront à prendre ce congé ; c’est certainement, hélas ! le calcul que vous avez fait.

Par ailleurs, je m’interroge sur les raisons de la baisse des dotations au Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante.

Enfin, Mme Bulteau a raison de souligner toutes les mesures que la droite a prises pour porter atteinte à notre modèle de protection sociale, mais il est fort dommage qu’aucune de ces mesures n’ait été remise en cause par ce gouvernement…

Mme Catherine Coutelle, présidente de la Délégation aux droits des femmes. Je veux tout d’abord vous féliciter, madame la ministre, madame la secrétaire d’État, pour les mesures déjà prises en faveur des femmes, puisque le remboursement à 100 % de la contraception pour les mineures et de l’IVG ainsi qu’une revalorisation des tarifs destinée à éviter la fermeture des centres, ont été décidés – le site ivg.gouv.fr permet d’ailleurs une meilleure information, plus objective et neutre sur ces sujets. Je me réjouis également que vous commenciez à appliquer la loi sur l’égalité entre les hommes et les femmes, qui a été promulguée le 4 août, en mettant en place à titre expérimental dans vingt départements la garantie contre les impayés de pension alimentaire. Cette mesure importante, madame Poletti, bénéficiera aux femmes qui se trouvent dans une situation précaire en raison du non-versement des pensions. Nous attendons donc avec impatience les résultats de cette expérimentation afin de savoir s’il est envisageable d’étendre le dispositif.

Le budget de la branche famille, qui est celui qu’examine la Délégation aux droits des femmes, comporte des mesures d’économies, et nous le comprenons. Au titre de ces économies, le congé parental, qui est visé à l’article 2 de la loi pour l’égalité entre les hommes et les femmes, pourrait être concerné. Je rappelle que lors de l’examen de ce texte, nous avions décidé, au terme d’un long débat, de réformer le congé parental afin de faire évoluer les représentations sociales, ce qui est une grande nouveauté. En effet, seulement 18 000 des 530 000 bénéficiaires d’un congé parental sont des pères. Parce que nous voulons améliorer l’articulation entre vie familiale et vie professionnelle, en renforçant le partage des tâches et l’implication des pères dans l’éducation des enfants, nous avons décidé que le congé parental serait partagé : deux ans et demi pour la mère et six mois pour le père.

Néanmoins, la Délégation aux droits des femmes est favorable à un congé parental plus court, car un congé long – et il est actuellement trop long en France – éloigne les femmes du monde du travail, de sorte qu’elles ont des carrières heurtées et de petites retraites. Mais pour que le congé soit plus court, il doit être mieux rémunéré, afin que le père prenne sa part, et l’offre de garde doit être suffisante lorsque le congé prend fin. En l’absence de telles conditions, nous avions accepté que le congé parental soit composé, pour le premier enfant, de deux périodes de six mois – une pour la mère, une pour le père – et, à partir du deuxième enfant, de deux périodes de deux ans et demi pour l’un des parents, de six mois pour l’autre. Si nous avons accepté ce compromis, c’est parce que nous connaissions l’état du marché de l’emploi, la situation précaire d’un certain nombre de femmes et leurs difficultés à retrouver le monde du travail. Nous souhaitons donc une évolution progressive du congé parental, qui s’accompagne de mesures d’évaluation. Les décisions qui seront prises en la matière doivent l’être par décret, mais nous souhaiterions que le Parlement y soit associé. C’est en effet une mesure importante en matière d’égalité, qui doit permettre aux femmes de rester dans le monde du travail et de concilier vie professionnelle et vie familiale.

M. Gilles Lurton. Certes, l’ensemble du projet de loi de financement de la sécurité sociale ne se résume pas à la politique familiale, mais je dois vous dire au nom du groupe UMP que, cette fois, la coupe est pleine : nous ne pouvons accepter une telle politique pour les familles. Vous voulez nous faire accroire que les mesures les concernant ne représentent que 700 millions sur les 20 milliards investis par notre pays pour soutenir les familles, mais vous verrez que ce sera, dès cette année, beaucoup plus. Chaque année, les familles trinquent ! À cause de mesures telles que l’abaissement du quotient familial, la réforme des majorations familiales de pension ou la diminution de la prestation d’accueil du jeune enfant, la politique de la gauche a pris au bas mot 4 milliards d’euros aux familles depuis le mois de mai 2012.

Vous justifiez cette nouvelle ponction par la nécessité de moderniser notre politique familiale, alors que celle-ci est efficace et qu’elle nous est enviée par nos voisins européens. Grâce à elle, en effet, notre taux de natalité reste particulièrement élevé, tout en permettant à un très grand nombre de femmes de conserver leur emploi. Pourquoi vouloir toujours détruire ce qui fonctionne bien ?

Il s’agit de moderniser en redistribuant aux familles les plus pauvres, nous dites-vous. Mais la baisse des allocations familiales pour les enfants âgés de 14 à 16 ans va toucher toutes les familles et en premier lieu les plus pauvres d’entre elles. Pis, vous nous expliquez que les parents se sont déjà équipés à la naissance du premier enfant et qu’ils n’ont pas donc besoin de racheter certains équipements pour les enfants suivants. Mais comment expliquer cela aux familles de notre pays ?

Nous estimons, quant à nous, que la véritable modernisation consiste à laisser aux familles le libre choix de l’organisation qui leur convient, soit le contraire de ce que vous faites. En réduisant de fait la longueur du congé parental et en diminuant les aides accordées aux familles pour l’embauche d’une assistante maternelle à domicile, vous allez placer les familles dans une situation insoluble qui obligera de nombreuses femmes à arrêter leur activité professionnelle pour s’occuper de leur enfant. Le résultat de votre politique est donc parfaitement inégalitaire. Une fois encore, les familles vont trinquer alors que le bon sens commanderait de sanctuariser une politique familiale qui a fait ses preuves et qui allège le fardeau déjà fort lourd que représente le financement d’un nombre croissant de seniors. Nous ne pouvons pas accepter une telle politique !

Mme Véronique Massonneau. Madame la ministre, madame la secrétaire d’État, monsieur le secrétaire d’État, vous nous annoncez, à propos de la réforme du congé parental, dont nous partageons l’analyse faite par Catherine Coutelle, une mesure qui s’inscrit dans le prolongement de la loi sur l’égalité entre les femmes et les hommes, en instaurant un partage égal de ce congé entre les deux parents. Or, la réforme que vous proposez ne permettra pas d’atteindre cet objectif ; en revanche, elle permettra sans doute de faire des économies. En effet, si le congé parental est actuellement pris dans 97 % des cas par des femmes, c’est parce que le substitut de salaire qu’il propose est beaucoup trop faible. Les femmes ayant souvent, hélas ! des revenus moins élevés que ceux des hommes, un simple calcul financier bien compréhensible les conduit, plutôt que ces derniers, à choisir ce congé.

Les écologistes, quant à eux, défendent une profonde refonte de ce dispositif. Nous proposons à la fois de raccourcir la durée du congé, pour éviter de trop longues ruptures avec le monde du travail, de revaloriser le salaire de substitution, afin que la perte soit supportable pour le salaire le plus élevé du couple, et de créer des places d’accueil pour les jeunes enfants. Si ces conditions sont réunies, alors sans doute les femmes ne connaîtront-elles plus le long éloignement du monde du travail qui les empêche bien souvent d’avoir des perspectives de carrière, et les enfants auront-ils la chance d’avoir un père aussi impliqué que leur mère dans leur éducation.

M. Bernard Perrut. Madame la ministre, madame la secrétaire d’État, monsieur le secrétaire d’État, nous ne doutons pas de votre volonté mais lorsqu’on voit les atteintes que vous portez à la politique familiale, et qui ont du reste été dénoncées sur tous les bancs, on ne peut que s’interroger. Vous prétendez moderniser la politique familiale en la fléchant désormais vers les plus pauvres. Or, je crains que ce ne soit l’inverse. Non seulement de nombreuses politiques sociales répondent déjà aux besoins légitimes des familles les plus pauvres, mais les prestations visées par la réforme contenue dans le PLFSS pour 2015 sont soit universelles, soit déjà plafonnées. Ainsi, lorsque vous vous attaquez à la prime de naissance, qui sera divisée par trois à partir du deuxième enfant, il est faux de dire que les ménages les plus défavorisés ne seront pas touchés puisque, cette prestation étant versée sous condition de ressources, seuls les foyers dont les revenus n’excèdent pas un certain montant y ont droit. Je pourrais également citer le versement de l’allocation de base de la PAJE, qui débutera au début du mois suivant la naissance de l’enfant et non plus à la date de sa naissance, ou le montant de l’aide à l’embauche d’une assistante maternelle, qui sera réduit de moitié pour les familles dont les ressources dépassent un certain seuil.

Enfin, j’ai pu lire dans la presse, ce matin, qu’un membre éminent du parti socialiste proposait de remplacer la mesure relative au congé parental par la mise sous condition de ressources des allocations familiales, une alternative semble-t-il approuvée par un certain nombre de députés de la majorité. Allez-vous les suivre dans cette voie, madame la ministre, et quelles propositions ferez-vous en la matière ?

M. Gérard Sebaoun. Madame la ministre, ma question porte sur le volet recettes du PLFSS, en particulier sur son article 14, qui prévoit le paiement immédiat par les caisses de congés payés des montants correspondant à la fraction des cotisations de sécurité sociale qu’elles perçoivent des employeurs. Je rappelle que ces caisses de congés payés collectent les cotisations obligatoires des entreprises du bâtiment, des travaux publics, de manutention et de transport notamment. Si le salarié acquiert des droits jusqu’au 31 mars de l’année n +1, les caisses commencent à décaisser à partir de juillet ; elles disposent donc d’une trésorerie importante, et c’est là que le bât blesse. Non seulement nombre d’entreprises estiment qu’il s’agit d’un système obsolète, mais les frais de fonctionnement de ces caisses seraient trop importants, certaines de leurs dépenses étant difficilement justifiables. Dans le dossier de presse qui nous a été transmis, la ressource exceptionnelle pour la sécurité sociale qui résulterait de ce dispositif est évaluée à 1,5 milliard d’euros.

Les caisses vont-elles continuer à gérer ces fonds dédiés ? Et si tel est le cas, qu’en est-il de leurs frais de gestion ? Si comme il est indiqué dans l’exposé des motifs, « la retenue à la source s’impose comme le modèle le plus cohérent » – et je partage ce point de vue – ces caisses sont-elles vouées à disparaître ? Ce que la loi a fait, elle peut le défaire.

Mme Isabelle Le Callennec. Madame la ministre, madame la secrétaire d’État, monsieur le secrétaire d’État, tout d’abord, le PLFSS prévoit que nombre de dépenses prises en charge jusqu’à présent par la sécurité sociale le seront désormais par le budget de l’État. Néanmoins, ces dépenses restent des dépenses publiques. Ensuite, vous n’empêcherez pas les familles de comparer les 700 millions dont la branche famille est amputée au budget de l’aide médicale d’État, qui, lui, ne cesse d’augmenter. Par ailleurs, vous étendez le tiers payant aux bénéficiaires de l’Aide à l’acquisition d’une complémentaire (ACS), avant de le généraliser. Or, vous savez, madame la ministre, que cette généralisation ne fait pas l’unanimité.

À l’article 37, vous créez un statut ainsi qu’un modèle de financement spécifique pour les hôpitaux de proximité, mais vous en excluez les hôpitaux qui comprennent des services de chirurgie et d’obstétrique. C’est dommage, car ils ont également besoin de financements spécifiques. L’article 40, quant à lui, restructure les missions du Fonds d’intervention régional (FIR) et les étend aux structures médico-sociales. Quel sera le montant alloué au fonds en 2015 et quelle sera la répartition des enveloppes par région ? Par ailleurs, l’article 53 fixe le montant des crédits alloués au Fonds de modernisation des établissements de santé publics et privés : 280,6 millions d’euros, contre 263,34 millions d’euros. Toutefois, vous savez que le PLFRSS pour 2014, a privé ce fonds de 160 millions d’euros. Doit-on s’attendre à la même ponction en 2015 ? Enfin, et ce sujet me tient à cœur, le décret sur le cumul de l’Allocation de solidarité pour les personnes âgées (ASPA) et d’un revenu d’activité n’a pas encore été publié : quand cette publication est-elle prévue ?

M. Denys Robiliard. Madame la ministre, madame la secrétaire d’État, monsieur le secrétaire d’État, tout d’abord, je me félicite que le montant alloué au FIR augmente de 2,1 % en 2015, après une augmentation de 2,4 % en 2014. Ce dispositif étant en effet l’un de ceux qui peuvent nous permettre de changer les méthodes de la sécurité sociale, il me paraît intéressant de le valoriser davantage que l’ONDAM général. Je me félicite également que l’ONDAM médico-social augmente de 2,2 %, après une hausse de 3 % en 2014, car c’est un secteur sur lequel il convient de mettre l’accent.

Par ailleurs, je souhaiterais vous interroger sur l’article 4 et la dotation de l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux (ONIAM). Vous proposez de ramener cette dotation, qui était de 138 millions en 2014, à 118 millions en 2015. Or, il est indiqué dans l’exposé des motifs que la dépense envisagée pour 2014 est de 137,2 millions. Dès lors, pourquoi ne pas maintenir la dotation à 138 millions ?

Enfin, je m’associe aux propos de Mme Clergeau s’agissant de la réforme des prestations familiales.

M. Rémi Delatte. Madame la ministre, je souhaiterais vous interroger sur l’article 3, qui porte création du dispositif de régulation appliqué aux laboratoires pharmaceutiques commercialisant les médicaments destinés à la prise en charge de l’hépatite C. Ce dispositif consiste en effet à soumettre ces laboratoires au versement d’une contribution progressive dès lors que leur chiffre d’affaires lié à ces médicaments atteindrait un plafond annuel. Or, je m’interroge sur les conséquences d’une telle mesure, qui exclut une partie de la prise en charge du système de protection des Français. Le fait que le marché du médicament soit très largement mondialisé et que les stratégies d’approvisionnement des entreprises pharmaceutiques soient arrêtées en fonction du prix des médicaments fixé dans chaque pays me conduit à vous poser trois questions.

Tout d’abord, le dispositif de régulation que vous proposez est-il appliqué par l’ensemble des pays solvables – je pense en particulier au Royaume-Uni et à l’Allemagne, où le Sovaldi est également distribué ? Ensuite, a-t-on évalué l’impact de cette mesure sur l’accès à cette molécule en France ? Pour être plus précis, ne craignez-vous pas que le Sovaldi soit livré en priorité aux pays qui n’auront pas limité son prix de vente ? Une telle stratégie aurait évidemment des conséquences sur l’approvisionnement en France. Enfin, quelle stratégie thérapeutique retiendrez-vous pour l’hépatite C : généralisera-t-on la prescription innovante à tout porteur du virus de l’hépatite C ou la réservera-t-on aux porteurs pour lesquels le protocole actuel, moins coûteux, aura échoué ?

Mme Michèle Delaunay. J’aborderai, pour ma part, un sujet qui a trait aux recettes de la sécurité sociale et à la prévention. Je veux parler du tabac, dont nous savons qu’il cause des dégâts sanitaires extrêmement coûteux pour notre société qui plombent lourdement les comptes de la sécurité sociale. L’étude la plus fiable dont on dispose, mais qui devra être précisée, les évalue à 47 milliards d’euros, c’est-à-dire trois fois le déficit de la sécurité sociale, qu’il ampute ainsi de toute marge de manœuvre. Aussi devons-nous réfléchir à la possibilité – qui s’imposera un jour, si nous n’avons pas gagné la partie avant – de fixer le prix du tabac en fonction du surcoût sanitaire et social qu’il fait supporter à la société. Une telle mesure serait bénéfique à la fois d’un point de vue budgétaire et en matière de prévention, puisqu’on sait que le coût du tabac est le meilleur moyen de dissuader les fumeurs.

M. Jean-Pierre Barbier. Madame la ministre, le PLFSS pour 2015 est, une nouvelle fois, incantatoire ; il ne comporte aucune réforme structurelle. Vous le démontrez, du reste, en énonçant les quatre axes de votre politique. Pour 2015, hormis un prélèvement de 700 millions d’euros sur la politique familiale, vous usez des mêmes recettes que d’habitude. Une fois encore, vous consacrez un système hospitalo-centré, malgré un ONDAM en trompe-l’œil. En effet, vous ne demandez que 500 millions d’euros d’économie au secteur hospitalier, ce qui reste très marginal comparé au budget global. En revanche, au médicament, qui représente 15 % des dépenses, vous demandez 50 % des économies, usant là encore de vieilles recettes – 500 millions d’euros sur les princeps et 500 millions d’euros sur les génériques – sans que l’on sache vraiment s’il s’agit d’une baisse de prix ou d’une promotion. Cette mesure, qui s’appliquera durant trois années, mettra en péril tout un secteur de l’industrie pharmaceutique pourvoyeur de richesses et de recettes pour le budget de la nation. Enfin, vous parlez d’innovation, mais j’ai peur que celle-ci ne soit l’arbre qui cache la forêt, puisque ne seront concernés qu’une seule molécule, une seule pathologie, et deux laboratoires. Il faudrait s’interroger, dans les années à venir, sur le financement de ces innovations et prendre en compte les économies qu’elles engendreront si nous voulons avoir une vision juste des choses. L’innovation doit rester en France, car c’est essentiel pour notre industrie. Or, les perspectives que vous tracez sont funestes, pour ne pas dire funèbres, pour l’industrie pharmaceutique dans notre pays. Mais, après tout, cela participe de la volonté du Gouvernement de démanteler tout ce qui fonctionne bien en France, tout ce qui produit de la richesse. À ce propos, j’ai rencontré hier des responsables de la fédération du bâtiment, qui se demandent bien comment ils pourront appliquer le compte pénibilité, dont les inconvénients compensent largement les avantages tirés du CICE.

Mme Monique Iborra. Madame la ministre, j’ai bien compris que pour certains, nous faisons trop d’économies et que, pour d’autres, nous n’en faisons pas assez. En tout état de cause, le budget de l’assurance maladie traduit depuis deux ans une véritable volonté de maîtriser les dépenses sans pour autant prévoir, comme le faisait l’ancienne majorité, des déremboursements ou une taxation des malades. Ainsi, le reste à charge diminue pour nos concitoyens. Nous soutenons ce choix politique.

Autre point fort de votre budget : l’amélioration de l’accès aux soins, en cohérence avec ce qui a été fait depuis deux ans. Je ne citerai que l’extension du tiers payant – qui concernera plus d’un million de personnes à partir du 1er juillet 2015, avant sa généralisation en 2017 – et celle du dispositif territorial de médecine générale, qui a permis de conférer un nouveau statut au praticien territorial de médecine générale pour lutter contre les déserts médicaux. Je n’ai pas souvenir que l’ancienne majorité ait pris des mesures aussi innovantes que celles qui ont été prises ces deux dernières années. Par ailleurs, alors que la loi HPST, que nous n’avions pas votée, avait supprimé la catégorie des hôpitaux locaux, nous confortons les hôpitaux de proximité, en cohérence avec la lutte contre les déserts médicaux.

Madame la ministre, le budget de l’assurance maladie prévu dans le PLFSS pour 2015 répond aux préoccupations de nos concitoyens quant à l’accès aux soins, tout en maîtrisant les dépenses de santé. J’ai cependant deux questions à vous poser. Tout d’abord, vous avez annoncé un certain nombre de mesures de rationalisation des dépenses de gestion des hôpitaux et vous insistez sur le développement de la chirurgie ambulatoire. Les économies escomptées sont-elles chiffrées ? Ensuite, dispose-t-on d’informations ou d’évaluations sur la situation des territoires classés déserts médicaux ayant pu bénéficier de l’installation du praticien territorial ?

Mme Bernadette Laclais. On a parlé, à propos de la politique familiale, de « bouc émissaire ». Il faudrait savoir raison garder : l’effort demandé à cette branche représente 700 millions d’euros sur 50 milliards, soit 1,3 %. Certes, c’est toujours trop et l’effort doit être le plus juste possible – le débat est ouvert – mais il faut mesurer son expression. J’ai également entendu que le PLFSS pour 2015 ne comportait aucune mesure structurelle. Faut-il rappeler l’extension du tiers payant, la réforme du premier recours, les mesures concernant les soins ambulatoires ou la politique du médicament ? Je ne citerai que trois articles du projet. L’article 37 contribue aux réformes structurelles que je viens d’évoquer en prévoyant des modalités de financement spécifiques pour les hôpitaux de proximité. L’article 38 étend l’avantage accordé en cas de congé maternité aux praticiennes territoriales de médecine générale (PTMG) à l’ensemble des médecins généralistes ou spécialistes de secteur 1 ou 2. Enfin, madame la ministre, je vous remercie, ainsi que l’ensemble des élus de montagne, pour l’article 39, qui marque une avancée majeure pour les zones touristiques qui connaissent des évolutions très sensibles de leur population au cours de l’année et qui ont besoin de maintenir un accès aux soins de proximité et de qualité.

Mme Annie Le Houérou. Le volet du PLFSS pour 2015 consacré à l’assurance vieillesse ne comporte pas de mesures exceptionnelles, mais il prend en compte les effets de la loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraite. Même si les recettes sont fragiles dans le contexte économique difficile actuel, nous devons nous réjouir de l’évolution de la masse salariale de 1,2 % et donc du maintien des recettes alimentant le régime des retraites. Je tiens à souligner deux éléments importants dans la mise en œuvre de la loi d’avenir pour le système de retraites. Tout d’abord, celle-ci se traduit, pour les agriculteurs, ou plutôt les agricultrices, par un gain annuel de 269 euros pour 477 300 personnes bénéficiaires ; cet effort significatif, qui profite à de nombreuses femmes, doit être reconnu par la profession. Par ailleurs, les décrets relatifs à la pénibilité sont en cours de publication. Pouvez-vous nous en préciser le calendrier ? Ces mesures sont rejetées par certains agriculteurs. Pourtant, la MSA mène un important travail de prévention et de promotion de la reconnaissance de la pénibilité afin de développer l’attractivité de ces métiers. Ces mesures constituent un outil intéressant pour favoriser la prévention et contribuer ainsi à une meilleure maîtrise des comptes de la sécurité sociale. Nous devons néanmoins veiller à la simplification de leur mise en œuvre.

Enfin, s’agissant du versement de la prime de 40 euros pour les retraites inférieures à 1 200 euros par mois, les caisses ont-elles les moyens techniques, compte tenu du nombre important de poly-pensionnés, d’évaluer ce seuil et donc de bien identifier les bénéficiaires ?

Mme Monique Orphé. Madame la ministre, je souhaite appeler votre attention sur la situation sanitaire des départements et collectivités d’outre-mer qui, en dépit d’un rattrapage au cours des dernières années, reste dégradée par rapport à celle de la métropole. C’est en tout cas le constat que révèle le rapport de la Cour des comptes de juin 2014, rapport qui dresse un tableau presque alarmant s’agissant de la prévalence dans ces territoires de certaines pathologies, notamment les maladies cardio-vasculaires ou le diabète. Celles-ci sont dues à l’exposition de la population à la précarité et à la persistance des inégalités. Face aux enjeux auxquels nous sommes confrontés, le système de santé paraît à la peine, pour reprendre les termes utilisés par la Cour des comptes. L’un des dysfonctionnements les plus graves affecte la médecine de ville. Dans chacun des territoires ultramarins, la densité des cabinets médicaux, généralistes ou spécialistes, est en effet nettement inférieure à celle de la métropole, de sorte que, dans certains territoires, l’hôpital devient l’armature du dispositif de soins. Or, la gestion parfois déficiente des établissements hospitaliers ne leur permet pas de relever les défis. Aussi la création de maisons de santé pluridisciplinaires ou de maisons médicales de garde, à condition qu’elles disposent des moyens financiers nécessaires, peut-elle être une solution pour désengorger les hôpitaux.

Nous comprenons que des économies doivent être faites pour maîtriser les dépenses de santé, mais elles ne peuvent se faire au détriment des territoires dont la situation sanitaire est la plus grave. Les outre-mer font-ils partie de vos priorités, madame la ministre, pour améliorer la qualité et la pertinence des soins ? Par ailleurs, si le tiers payant est une réalité, notamment à La Réunion, une partie de la population, notamment les personnes qui bénéficient de la CMU, souffre de discrimination dans l’accès aux soins. Des mesures sont-elles prévues pour remédier à cette situation ? Enfin, les mesures prises en matière de transfert des patients par les entreprises de taxi auront-elles une incidence sur le transport des malades des territoires ultramarins vers la métropole – je pense notamment aux enfants qui doivent se faire opérer ?

Mme la présidente Catherine Lemorton. Tout d’abord, je me félicite – car c’était une préoccupation partagée par de nombreux députés et par la ministre – de la compensation des exonérations de cotisations sociales, qui est prévue dans le PLF pour 2015, ainsi que du taux de régulation appliqué dans le cadre des innovations thérapeutiques. Il permettra de mettre fin à l’avidité des laboratoires pharmaceutiques et favorisera l’accès d’un plus grand nombre de malades à ces innovations, tout en préparant celles qui sont à venir. Puisqu’il s’agira de traitements ciblés de plus en plus chers, il faut en effet assurer leur prise en charge tout en garantissant la pérennité de notre système de santé.

À propos du médicament et plus particulièrement du répertoire des génériques, qui empêche de généraliser leur usage, ne pensez-vous pas, madame la ministre, qu’il faudrait modifier l’ensemble de notre modèle ? Il existe en effet dans ce domaine un gisement d’économies importantes, une fois que les habitudes auront changé. En matière d’évaluation des médicaments, ne pensez-vous pas que l’on pourrait améliorer l’index thérapeutique, en permettant au Comité économique des produits de santé (CEPS) de prendre rapidement des décisions de baisse de prix concernant les médicaments dont le service médical rendu (SMR) aurait fait l’objet d’une évaluation négative par la Haute autorité de santé ? Une telle mesure permettrait, me semble-t-il, de faire des économies rapides et de grande ampleur.

Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes. Je veux tout d’abord remercier l’ensemble des députés qui sont intervenus, en particulier ceux qui, au-delà des amendements qu’ils pourront proposer, ont apporté leur soutien au texte, aux mesures qu’il contient et aux principes qui ont guidé son élaboration.

S’agissant de la compensation des exonérations de cotisations sociales, je précise, madame la présidente, qu’elle apparaît dans le PLF et le PLFSS, puisqu’elle se traduit par un transfert d’argent du premier vers le second. Vous avez également évoqué la question des médicaments, qui a été abordée à de très nombreuses reprises dans les interventions des uns et des autres. Je rejoins votre analyse selon laquelle les mesures que nous proposons visent à soutenir l’innovation et à la rendre largement accessible. Certains orateurs se sont demandé s’il ne s’agissait pas au fond d’un expédient, puisque nous prévoyons un mécanisme d’encadrement du coût des médicaments destinés à soigner l’hépatite C pour la seule année 2015, au lieu d’apporter des réponses structurelles de nature à assurer la prise en charge pérenne de l’innovation par notre sécurité sociale. C’est évidemment la question qui se pose, et nous en discutons en ce moment même avec l’industrie pharmaceutique. Or, ses représentants ne souhaitent pas un dispositif qui soit d’emblée pérenne ; ils préfèrent que nous évaluions l’impact de la mesure proposée pour 2015 et que nous étudiions la mise en œuvre d’un tel dispositif dans le cadre de la convention qui doit être renégociée l’année prochaine entre l’industrie pharmaceutique et l’État. Car des mécanismes conventionnels existent, madame Poletti, pour encadrer les prix du médicament. En l’espèce, il s’agit de garantir dans l’urgence à ceux qui sont atteints d’une hépatite C qu’ils pourront bénéficier d’un traitement à un coût qui ne pèsera pas excessivement sur les finances de la sécurité sociale. En tout état de cause, je ne prétends pas apporter, par ce mécanisme, une réponse qui s’inscrive dans la durée. Au demeurant, il ne s’agit pas d’une expérimentation, puisque nous avons réactivé un dispositif qui existe depuis 1999 et que nous l’avons fait dans le cadre de discussions avec les industriels. Ma priorité, mon exigence, c’est que les Français qui ont besoin de ce traitement puissent y avoir accès. Mais si nous laissons les prix s’envoler, nous nous retrouverons avec des dépenses insoutenables pour la sécurité sociale : il s’agit de centaines de millions, voire de milliards d’euros.

Puisqu’on m’a interrogé sur la manière dont les autres pays réagissent, je précise que j’ai lancé une initiative à l’échelle européenne pour que nous puissions coordonner nos réponses. Cependant, la France est, avec l’Italie, l’un des pays d’Europe les plus concernés, car elle compte un grand nombre de malades atteints de l’hépatite C. Mon homologue britannique, par exemple, m’a indiqué que son pays était moins touché et que ce traitement ne représentait pas un enjeu financier aussi important qu’en France. Je précise également que, comme pour tout médicament, c’est la Haute autorité de santé qui définira la prescription et le protocole de soins de ce traitement et qui déterminera donc le profil des patients dont il est recommandé qu’ils en bénéficient.

Mme Fraysse m’a interrogée, toujours au sujet de ce traitement, sur la licence d’office. Celle-ci est un dispositif qui a été élaboré en 1992 et qui n’a jamais – je dis bien jamais – été mis en œuvre, alors qu’il aurait pu l’être pour le SIDA par exemple. Il prévoit la possibilité, pour un médicament innovant dont le laboratoire demande un prix très élevé, de recourir à une licence d’office en autorisant d’emblée la « générication » du produit. C’est un dispositif très lourd, qui suppose que la négociation tarifaire ait échoué. Or, nous n’en sommes pas là ; la négociation est en cours. Par ailleurs, ce dispositif dépend, non pas du ministère de la santé, mais de celui qui est chargé de la propriété industrielle, donc du ministère de l’économie. Avant d’envisager de recourir à une telle solution, il nous faut explorer les voies d’une négociation classique et, si possible, esquisser les termes d’un compromis. Il convient néanmoins d’examiner les solutions dont nous disposerions en cas d’échec de la négociation. Je vous rappelle à cet égard que le ministère de la santé a la possibilité de fixer unilatéralement le prix d’un médicament. Quoi qu’il en soit, recourir d’emblée à la licence d’office nous placerait sans doute dans un rapport de force difficile avec le laboratoire et provoquerait un contentieux juridique qui serait susceptible de faire courir des risques à l’approvisionnement de notre pays et donc à la santé de nos concitoyens.

Vous avez évoqué, madame la présidente, la question des génériques. Le débat sur le répertoire générique doit être ouvert, et il le sera dans le cadre de la préparation du plan « génériques ». Il présente des avantages et des risques. L’effet financier le plus positif, à court terme, de la « générication » des médicaments est lié au développement de la prescription en dénomination commune internationale (DCI). Évoquée à de nombreuses reprises depuis plusieurs années, celle-ci sera obligatoire à compter du 1er janvier 2015. Aujourd’hui, le taux de prescription en DCI est de l’ordre de 16 %. On voit donc le chemin qu’il nous reste à parcourir et la marge d’économie dont nous pourrons disposer.

Je remercie Michel Issindou pour son engagement dans les travaux effectués sur la branche vieillesse. La revalorisation de l’allocation de solidarité pour les personnes âgées est effective depuis le 1er octobre et sera donc versée aux bénéficiaires à la fin du mois. Quant à la prime exceptionnelle de 40 euros, elle sera versée en même temps que les pensions fin janvier, compte tenu des délais opérationnels de gestion nécessaires.

Mme Le Houérou m’a interrogée sur la situation des agriculteurs. Les décrets relatifs à la pénibilité s’appliqueront dans les mêmes termes quels que soient les secteurs concernés. Ils seront publiés dans 48 heures et renvoient aux discussions menées avec les partenaires sociaux. Leur mise en application se fera en deux temps : ouverture du compte dès le 1er janvier 2015 et prise en compte, à partir de l’année 2015, des quatre facteurs de pénibilité qui donnent le moins de place à l’appréciation, notamment le travail de nuit, le travail posté et le travail en caisson hyperbare ; puis évaluation, au cours de l’année 2015, des six autres critères de pénibilité afin d’en établir une appréciation plus précise qui garantisse la simplicité du dispositif, de son application et de sa compréhension, pour une mise en œuvre à compter du 1er janvier 2016. Quant au décret relatif au cumul de l’Allocation de solidarité pour les personnes âgées (ASPA) et du revenu d’activité, il est actuellement devant le Conseil d’État et nous espérons qu’il pourra revenir de la section sociale, qui a été fortement sollicitée durant la préparation du PLFSS, d’ici à la fin du mois.

S’agissant de la branche accidents du travail, je veux dire à M. Jacquat que les transferts répondent aux préconisations du rapport de la commission, selon un processus classique, et, comme il l’a lui-même relevé, que le montant retenu correspond au milieu de la fourchette.

Plusieurs questions ont été posées par votre rapporteur Olivier Véran, notamment sur le FIR, dont les crédits s’élèveront à 3,1 milliards en 2015. Créé en 2012, ce fonds regroupe au sein d’une même enveloppe des crédits qui étaient auparavant dispersés et destinés à des politiques de proximité. Comme je souhaite lui donner davantage de lisibilité, le nombre des missions qu’il peut financer sera ramené de huit à quatre, dans une logique de stratégie nationale de santé. Ces quatre missions sont les suivantes : prévention et promotion de la santé, promotion des parcours et coordination de l’offre de soins, permanence des soins et répartition des professionnels de santé sur le territoire et, enfin, efficience des structures sanitaires et médico-sociales. Cependant, je ne suis pas en mesure, à ce stade, de vous indiquer la répartition régionale des enveloppes, laquelle interviendra lorsque la loi aura été votée.

S’agissant des coopérations hospitalières, les groupements hospitaliers de territoire ont vocation à favoriser une meilleure coordination des fonctions support, mais à l’intérieur d’un projet médical identifié sur un territoire. Ce que je souhaite, c’est encourager le développement sur un territoire de projets médicaux communs – ce qui ne signifie pas équipes médicales communes –, de logiques médicales, celles-ci devant être servies par des fonctions support qui peuvent être mises en commun.

Une question m’a été posée sur le sujet très particulier de la caisse maritime des allocations familiales. Le processus est engagé depuis un certain temps déjà et, vous le savez, Madame Clergeau, les trois quarts des marins passent par la CAF pour percevoir leurs allocations familiales. Concrètement, l’ensemble du personnel de l’actuelle caisse maritime sera conservé – j’y insiste – et pourra intégrer la caisse des allocations familiales de l’Établissement national des invalides de la marine (ENIM), qui est aujourd’hui la caisse de référence pour les retraites et la maladie ; elle s’occupera désormais du recouvrement.

J’en viens maintenant à trois observations plus générales.

Tout d’abord, je veux dire à Mme Poletti que l’on peut toujours considérer que les efforts consentis sont insuffisants. Mais alors, il ne faut pas se contenter de critiquer les économies que nous réalisons – puisque, selon vous, nous en faisons trop dans certains secteurs – et il faut faire preuve d’imagination, avancer des propositions. « Il faudra un pilotage exigeant pour atteindre les objectifs qui sont fixés par le PLFSS assurance maladie, car l’ONDAM 2015 est ambitieux. » Cette phrase est issue d’un avis du comité d’alerte sur l’évolution des dépenses de l’assurance maladie, dont je rappelle qu’il est composé de trois personnalités indépendantes, dont certaines ont été nommées par l’ancienne majorité. L’effort, qui est salué par des autorités indépendantes, sera difficile à réaliser, très exigeant et supposera donc un pilotage rapproché de l’assurance maladie.

Ensuite, je vous remercie, monsieur Roumegas, pour la tonalité de votre propos. Je sais, pour en débattre avec vous, nos points d’accord et de désaccord. Mais je ne peux pas vous laisser dire que nous faisons financer par la branche famille les exonérations de cotisations prévues dans le cadre du pacte de responsabilité, puisque ces exonérations sont compensées. Les politiques de solidarité figurent dans le PLFSS et sont donc garanties. Par ailleurs, vous me demandez quelles sont les politiques – que vous qualifiez de solidarité mais qui ne le sont pas forcément – relevant du budget de l’État qui seront mises à contribution. Un effort d’économies est demandé au budget de l’État ; nous ne le cachons pas, et M. Eckert y reviendra plus en détail. Au reste, l’examen du projet de loi de finances, qui a débuté en commission, porte notamment sur ce point. Il n’y a donc pas de réduction cachée, d’effort insidieux ou qui ne s’avouerait pas comme tel. Je reconnais volontiers que des économies sont demandées, y compris à la branche famille, à la branche assurance maladie ou à la branche vieillesse. Mais ces économies doivent être les plus structurantes et les plus justes possible, afin de poursuivre simultanément un assainissement qui est le corollaire indispensable de l’exigence de justice. Car si nous voulons que les Français continuent d’adhérer à notre modèle social, nous devons faire en sorte que celui-ci soit viable.

Enfin, je veux dire à Marie-Françoise Clergeau que j’ai entendu certaines de ses observations sur la manière de concevoir la majoration des allocations familiales ou sur la possibilité de faire évoluer certains des dispositifs proposés, voire d’envisager des dispositifs différents – nous en débattrons à livre ouvert : l’évaluation des différentes options sera connue. Il est vrai qu’une seule des mesures proposées est de nature législative, mais les mesures réglementaires emportant évidemment des conséquences budgétaires qui sont inscrites dans nos équilibres financiers, aucune d’entre elles ne sera prise sans que vous en ayez été informés ou sans que la proposition vous ait été soumise. La transparence sera complète. Le fait qu’il s’agisse de mesures réglementaires ne change rien quant à la nature de la discussion politique que nous avons, car c’est bien une discussion politique que vous avez engagée, et je vous en remercie.

Mme la secrétaire d’État chargée de la famille, des personnes âgées et de l’autonomie. Je veux à mon tour remercier les députés membres de la commission non seulement pour la qualité de leurs interventions, mais aussi pour n’avoir pas exclusivement parlé de la politique familiale.

À Mme Pinville, qui a évoqué le calendrier du projet de loi sur l’adaptation de la société au vieillissement, je réponds que l’année 2015 sera bien celle de l’examen de ce texte. La montée en charge des dépenses liées au projet de loi dépendra bien entendu de la date d’adoption, de promulgation et de mise en application de celui-ci. Il m’est donc difficile de répondre plus précisément sur ce point. En tout état de cause, la totalité du produit de la Contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie (CASA) de 2015 sera bien affecté à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA).

Madame Poletti, votre intervention illustre à la fois votre habileté politique et la limite de l’exercice. En effet, l’opposition nous reproche systématiquement de réaliser des économies moindres que celles qu’elle-même souhaiterait – lorsque nous annonçons 50 milliards d’économies, elle en propose 150 milliards –, mais dès que nous examinons l’une de ces économies, elle s’y déclare hostile. Je comprends l’intérêt politique d’une telle ambivalence, mais je ne suis pas certaine que ce soit la meilleure façon de contribuer collectivement à sortir le pays des difficultés liées à la situation de nos comptes publics. Les économies réalisées sur la branche famille correspondent à la part que prend cette dernière dans le volume d’économies global. Au demeurant, la mobilisation des budgets publics en faveur des familles et de l’accueil de l’enfant ne se résume pas aux prestations familiales qui sont versées mensuellement aux familles. Le montant annuel des crédits consacrés à ce secteur – qu’il s’agisse des mesures fiscales, des prestations familiales ou des dépenses d’investissement et de fonctionnement des collectivités locales en faveur de la petite enfance – est évalué entre 80 milliards et 120 milliards, sans compter le secteur de l’éducation. Je ne dis pas que les 700 millions d’euros d’économies réalisés cette année sont anecdotiques, mais je vous invite à les rapporter à la totalité des dépenses consenties en faveur de l’enfance et de la famille. Certes, il s’agit de mesures d’économie, mais nous avons opté pour celles qui nous semblaient les plus justes et les plus cohérentes avec les dispositions précédentes, c’est-à-dire celles qui ont été prises dans le cadre du plan « pauvreté » en faveur des familles les plus en difficulté, lesquelles continueront de bénéficier des augmentations prévues.

Je rappelle que le Complément de libre choix d’activité (CLCA) a été conçu, en 1985, pour le parent de trois enfants et pour une durée de deux ans, après un débat au sein de la majorité. Le choix de ces modalités n’est donc pas le fruit du hasard : la période de deux années correspondait à la durée maximale d’éloignement des femmes du marché du travail pour qu’elles puissent retrouver un emploi et le nombre de trois enfants avait été retenu car cette prestation était réservée aux familles nombreuses. Dix ans plus tard, son bénéfice a été étendu, puisqu’elle pouvait être demandée dès le deuxième enfant et pour une durée de trois ans ; 150 000 femmes sont alors sorties du monde du travail. À ce sujet, je veux dire à Mme Clergeau que nous n’ignorons pas le risque important que comporte ce dispositif en matière d’exclusion durable des femmes du monde du travail, d’évolution des carrières et de niveau de salaire. C’est pourquoi nous avons signé une convention avec Pôle Emploi afin d’accompagner les femmes concernées un an avant la fin de leur CLCA.

Je comprends que l’on soit attaché à cette prestation, et j’entends la proposition de Catherine Coutelle d’un congé parental plus court et mieux rémunéré, mais n’oublions pas que nous réfléchissons dans un contexte d’économies. Et nous pouvons en profiter pour réduire la trappe à pauvreté que constitue actuellement ce dispositif. J’ajoute qu’au-delà de sa répartition entre le père et la mère, il nous faut également nous pencher sur sa durée globale et le nombre d’enfants qui peut y donner droit. Quant aux statistiques portant sur les revenus, elles montrent que plus le nombre d’enfants est important, plus la prestation se situe sur les premiers déciles et, de manière générale, qu’elle est répartie de manière égale sur les huit premiers déciles – mais je vous apporterai davantage de précisions par écrit.

S’agissant de la majoration des allocations familiales pour les enfants âgés de 14 ans, je rappelle qu’elle résulte de la fusion, en 2008, dans un souci d’économies, de deux majorations qui intervenaient respectivement à 11 ans puis à 16 ans. Quant à la question de savoir si elle ne serait pas plus utile aux familles modestes, elle relève de la réflexion que vous avez ouverte sur la modulation des prestations, réflexion qui transcende les clivages politiques. À ce propos, je rappelle, ainsi que l’a indiqué Marisol Touraine, que l’ensemble des mesures relatives à la famille, qui doivent être cohérentes et défendues collectivement, seront discutées, qu’elles relèvent du domaine législatif ou réglementaire. Ce débat nous permettra de nous interroger à nouveau sur ce qui fait la qualité de notre politique familiale. Pour ma part, je pense que c’est en partie la qualité de l’accueil des jeunes enfants.

Enfin, le Fonds national d’action sociale de la CAF continuera d’augmenter en moyenne de 7,5 % par an. Nous tiendrons l’objectif de 275 000 places supplémentaires : 100 000 assistantes maternelles, 100 000 places en crèche et 75 000 places pour l’accueil des enfants de moins de trois ans. Demain, le Haut conseil de la famille nous remettra un rapport sur l’accueil en crèche que le Gouvernement étudiera avec toute l’attention qu’il mérite, car nous voulons conforter le plan « crèches ». Nous ne savons pas encore si le ralentissement que l’on observe est conjoncturel et lié aux années électorales, qui ne sont jamais propices à l’investissement dans les collectivités locales, ou s’il s’explique par des raisons structurelles.

M. le secrétaire d’État chargé du budget. À cette heure de l’après-midi, il n’est peut-être guère utile de lancer des débats polémiques mais, si j’ai noté que l’on nous reprochait une absence de réformes structurelles, je n’ai pas entendu de propositions en la matière. Mais réservons cette discussion pour la séance publique.

Monsieur Bapt, les marges de manœuvre sont à la mesure des gages disponibles. Vous connaissez la situation de nos comptes publics, l’absence de croissance, la difficulté de réduire plus rapidement nos déficits et la nécessité de nous adapter à ce rythme plus lent. Il est donc difficilement envisageable de décider des dépenses sans les compenser par des mesures d’économies.

Un mot sur la compensation, qui a pu susciter des craintes. Je vous rappelle, madame Fraysse, qu’elle est prévue à l’article 28 du projet de loi de finances et à l’article 21 du PLFSS ; vous en trouverez les détails dans les études d’impact.

Monsieur Bapt, vous m’avez interrogé sur la situation de la CADES et de l’ACOSS. Conformément à ce qui était prévu, la CADES aura repris 10 milliards de dettes accumulées à l’ACOSS ; elle devrait en amortir près de 13 milliards grâce aux ressources qui lui sont réservées, ce qui porte à 100 milliards le total des dettes remboursées par la CADES. Cela signifie que l’endettement global de la sécurité sociale est presque stabilisé, puisque le déficit devrait s’établir en 2014 à environ 15,4 milliards d’euros et le total des remboursements à 13 milliards. Nous sommes donc quasiment – à deux milliards près – dans une phase de décélération de l’endettement. Il est vrai que l’ACOSS a très peu de difficultés à se financer à court terme ; la MSA a même souhaité qu’elle assure une partie de son financement. Il n’y a donc aucune urgence à revoir ces dispositifs, mais nous pourrons en reparler si vous le souhaitez. En ce qui concerne l’emploi à domicile, le Gouvernement est ouvert aux propositions, sous réserve qu’elles respectent les équilibres, ainsi que je l’ai indiqué tout à l’heure, et l’impérieuse nécessité de ne pas dégrader le solde budgétaire.

M. Sebaoun a évoqué la caisse de congés payés. Ce dispositif ancien, qui date des années 1930, permettait de mutualiser le paiement des congés payés lorsque les salariés étaient très mobiles et changeaient souvent d’employeur. Il peut être contesté. Il est vrai que la Cour des comptes a relevé des difficultés liées à ses coûts de gestion. Pour l’instant, nous nous en tenons à un paiement effectif des cotisations de CSG au fur et à mesure, mais s’il est effectivement possible d’améliorer l’efficacité de la gestion de ces caisses, il ne sera pas interdit d’y travailler. Nous cherchons d’ailleurs à améliorer l’efficacité de l’ensemble des gestionnaires de ces services.

À propos de la CSG, M. Vercamer a indiqué qu’il y aurait 460 000 perdants, mais il a omis de préciser qu’il y aurait 700 000 gagnants. En outre, ce n’est pas une nouveauté, et je veux être clair, car j’ai lu des choses inexactes à ce sujet. Lorsque vous payez la CSG au taux maximal, votre revenu fiscal diminue et vous payez donc moins d’impôt. De ce fait, vous bénéficiez parfois du taux réduit, de sorte que, l’année suivante, votre revenu fiscal augmente et vous êtes à nouveau assujetti à un taux élevé de CSG. C’est le phénomène que, dans leur rapport, MM. Lefebvre et Auvigne ont désigné sous le sobriquet de « retraités yo-yo ». En nous basant sur le revenu fiscal de référence, nous rendons le dispositif plus juste. Du reste, quelle que soit la majorité, cet élément est de plus en plus souvent retenu comme le critère le plus pertinent.

Mme Fraysse s’est interrogée sur la lutte contre la fraude et les dispositions de l’article 15. En ce qui concerne les URSSAF, la transaction – il est vrai le mot peut créer une confusion entre le travail de ces dernières et celui des services fiscaux – n’est pas impossible, mais elle n’est actuellement pas encadrée. Elle l’est en revanche dans le domaine fiscal, et on s’est aperçu que cet encadrement avait contribué à assainir les relations entre contrôleurs et contrôlés. La transaction permet alors de régler des litiges dans des délais plus courts que s’il fallait attendre la fin de procédures extrêmement longues, l’objectif étant tout de même de faire rentrer les cotisations. Bien souvent, en cas de fraude, les entreprises disparaissent au moment où il faudrait liquider les cotisations qui n’ont pas été versées.

Telles sont, mesdames, messieurs les députés, les réponses que je peux apporter à vos interrogations. En tout état de cause, je m’efforcerai d’être le plus souvent possible présent en séance publique afin de compléter ces réponses le cas échéant.

EXAMEN DES ARTICLES RELATIFS
AUX RECETTES ET À L’ÉQUILIBRE GÉNÉRAL

La Commission a procédé à l’examen des articles du présent projet de loi au cours de ses séances des mardi 14 et mercredi 15 octobre 2014.

PREMIÈRE PARTIE
DISPOSITIONS RELATIVES À L’EXERCICE 2013

Article 1er

Approbation des tableaux d’équilibre relatifs à l’exercice 2013

Conformément aux dispositions organiques, le présent article tend à approuver les tableaux d’équilibre par branche du dernier exercice clos des régimes obligatoires de base de sécurité sociale, du régime général et des organismes concourant au financement de ces régimes, les dépenses relevant du champ de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM) constatées lors de cet exercice ainsi que les montants correspondants aux recettes affectées aux organismes chargés de la mise en réserve de recettes au profit des régimes obligatoires de base de sécurité sociale et ceux correspondant à l’amortissement de leur dette, c’est-à-dire les recettes affectées respectivement au Fonds de réserve pour les retraites (FRR) et au Fonds de solidarité vieillesse (FSV) ainsi que le montant de la dette amortie par la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES).

En vertu de ces mêmes dispositions, la Cour des comptes a pour mission de présenter un avis sur les tableaux d’équilibre et de certifier les comptes des régimes et branches.

1.  La cohérence des tableaux d’équilibre de l’exercice 2013

L’avis de la Cour des comptes sur la cohérence des tableaux d’équilibre relatifs au dernier exercice clos est présenté chaque année dans son rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale. Comme pour les exercices précédents, elle estime que les tableaux d’équilibre pour 2013 « fournissent une image cohérente du résultat (« solde ») des produits (« recettes ») et des charges (« dépenses ») » des organismes concernés, sous quatre réserves :

– l’information donnée par les tableaux d’équilibre reste partielle, en raison de la présentation distincte des résultats du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) de ceux des régimes obligatoires de base et du régime général ;

– des contractions de produits et de charges excessives et contraires à la loi organique relative aux lois de financement (principe de non-compensation) induisent des distorsions significatives dans l’évolution des montants figurant dans les tableaux d’équilibre ;

– l’information du Parlement reste insuffisante s’agissant de l’évolution, d’un exercice sur l’autre, des produits et des charges (annexe 4), ce qui rend impossible toute comparaison de ces derniers d’une année sur l’autre ;

– la qualité perfectible des comptes sociaux, compte tenu de l’insuffisance des dispositifs de contrôle interne et de difficultés comptables, rejaillit sur la fiabilité des données des tableaux d’équilibre.

2.  La certification des comptes pour 2013

Conformément aux dispositions organiques, la Cour des comptes a arrêté le 23 juin dernier son rapport de certification des comptes du régime général. Parallèlement, les autres régimes et organismes ont fait certifier leurs comptes par un commissaire aux comptes, dont les rapports sont remis au plus tard le 1er juin. La Cour dispose ainsi, pour l’ensemble des régimes obligatoires de base, d’une vision complète de la qualité des comptes sociaux.

Comme chaque année, elle se prononce sur les comptes des quatre établissements publics nationaux du régime général (CNAMTS, CNAF, CNAV, ACOSS), des quatre branches (maladie, accidents du travail et maladies professionnelles, famille, vieillesse) et de l’activité de recouvrement.

Pour la première fois, la Cour certifie les comptes de la totalité des entités du régime général, mais avec des réserves qui se renforcent sur les branches famille et maladie. Les états financiers des autres régimes ont aussi été certifiés par des commissaires aux comptes, à l’exception du Régime social des indépendants (RSI).

La Cour certifie les comptes combinés 2013 de l’activité de recouvrement sous quatre réserves (contre six en 2012) et les comptes annuels de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) sous trois réserves (comme en 2012).

Désormais, la totalité des produits et une part prépondérante des créances sont correctement justifiées. En revanche, des difficultés demeurent en matière d’estimations comptables et de contrôle interne. Malgré de nouveaux progrès significatifs dans leurs processus de gestion, une incertitude de portée générale affecte encore en 2013 les prélèvements sociaux sur les travailleurs indépendants.

S’agissant de la branche maladie et de la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM), la Cour certifie respectivement leurs comptes avec quatre et deux réserves (contre quatre et trois en 2012).

Elle souligne les insuffisances du dispositif de contrôle interne, tout particulièrement l’incidence financière des erreurs qui affectent les règlements de prestations en nature aux professionnels de santé et aux assurés, au détriment de l’assurance maladie. Elle appelle la CNAMTS à fiabiliser dès 2014 l’évaluation financière de ces erreurs (ainsi que celles portant sur les indemnités journalières) et à mettre en œuvre des mesures correctives fortes.

Alors qu’elle s’était trouvée dans l’impossibilité de certifier les comptes 2012 de la branche AT-MP, la Cour les certifie pour 2013, compte tenu de la fiabilité accrue du recensement des contentieux à provisionner, avec toutefois cinq réserves.

La Cour certifie les comptes 2013 de la branche famille sous six réserves (contre quatre en 2012) et les comptes annuels de la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) sous trois réserves (contre deux en 2012).

En raison d’une conception pour partie inadaptée, le dispositif de contrôle interne n’a pas été en mesure de prévenir une forte augmentation en 2013 de l’incidence financière des anomalies et erreurs affectant les prestations légales, estimée à 1,4 milliard d’euros au total, contre 1,15 milliard d’euros pour 2012. La Cour appelle la CNAF à mettre en œuvre dès 2014 des mesures correctives fortes.

Enfin, la Cour certifie les comptes combinés 2013 de la branche vieillesse sous quatre réserves (contre six en 2012) et les comptes annuels de la Caisse nationale d’assurance vieillesse des travailleurs salariés (CNAVTS) sous deux réserves (contre trois en 2012).

Les erreurs qui affectent le calcul des pensions de retraite nouvellement attribuées ou révisées sont revenues à leur niveau de 2011 (en 2013, 7,2 % des pensions sont affectées par une erreur de portée financière contre 9,1 % en 2012 et 7,5 % en 2011) mais restent trop nombreuses. La Cour appelle la CNAVTS à accentuer encore en 2014 les actions visant à les réduire.

3.  L’analyse des données pour 2013

Le tableau d’équilibre de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale

Le du présent article porte approbation du tableau d’équilibre, par branche, de l’ensemble des régimes obligatoires de base, excluant donc les résultats des organismes concourant à leur financement, en l’occurrence le seul FSV.

Le tableau suivant rapproche les montants que l’article 1er soumet à l’approbation du Parlement de ceux des prévisions initiales (article 32 de la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012 de financement de la sécurité sociale pour 2013) ou révisées (article 6 de la loi n° 2013-1203 du 23 décembre 2013 de financement de la sécurité sociale pour 2014).

TABLEAU D’ÉQUILIBRE 2013 DE L’ENSEMBLE DES RÉGIMES OBLIGATOIRES DE BASE

(en milliards d’euros)

 

Prévisions initiales
(LFSS 2013)

Prévisions révisées
(LFSS 2014)

Réalisé
(PLFSS 2015)

Recettes

Dépenses

Solde

Recettes

Dépenses

Solde

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

185,0

190,1

-5,1

181,7

189,4

-7,7

182,2

189,1

-6,9

Vieillesse

213,1

218,6

-5,5

212,1

216,2

-4,1

212,2

215,8

-3,6

Famille

55,9

58,6

-2,6

55,2

58,0

-2,8

54,9

58,2

-3,3

AT-MP

13,7

13,3

0,4

13,2

12,9

0,4

13,5

12,8

0,7

Total*

457,0

469,9

-12,8

449,4

463,6

-14,2

449,8

462,9

-13,1

* Hors transferts entre branches.

Sources : LFSS 2013, LFSS 2014 et PLFSS 2015.

Le résultat définitif pour 2013 fait apparaître un déficit de 13,1 milliards d’euros, contre 15,1 milliards d’euros en 2012, 19,1 milliards d’euros en 2011 et 25,5 milliards d’euros en 2010. Le mouvement de redressement des comptes se confirme donc, malgré une croissance de la masse salariale limitée à + 1,2 % en 2013 contre une prévision initiale de 2,3 %, affectant lourdement les recettes.

Le déficit du régime général et du FSV constitue en réalité la quasi-totalité du déficit des régimes obligatoires de base (96 %) : cette situation s’explique par le fait que le régime général contribue à la réduction des déficits de nombreux autres régimes, soit par le biais de la compensation démographique généralisée, soit parce qu’il finance intégralement la compensation (compensations bilatérales maladie et AT-MP), voire prend en charge l’intégralité des déficits de certains régimes (comme celui des salariés agricoles et de la branche maladie du régime des exploitants agricoles). En outre, il existe des mécanismes de rééquilibrage des résultats, en l’occurrence pour le régime social des indépendants (RSI).

Le rapport présenté le 29 septembre dernier à la Commission des comptes de la sécurité sociale permet de disposer de données sur les régimes autres que le régime général.

Pour 2013, le déficit de la branche vieillesse du régime des exploitants agricoles, qui s’est établi à 609 millions d’euros, a constitué une part prépondérante des déficits des régimes autres que le régime général et qui ne sont pas équilibrés ou intégrés à lui. Son déficit s’est néanmoins réduit en 2013, grâce à une diminution du montant total des prestations versées, dû à la réduction de la population retraitée de ce régime, ainsi qu’à une augmentation des recettes de cotisations.

Bien que structurellement déficitaire, la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) a vu son déficit limité à 0,1 milliard d’euros en 2013 grâce à un transfert d’une partie (200 millions d’euros) des réserves du fonds pour l’emploi hospitalier (FEH).

Enfin, comme l’a rappelé la Cour des comptes, pour appréhender la situation des comptes sociaux dans son intégralité, il convient d’ajouter le déficit du FSV au déficit des régimes obligatoires. Le rapport de la Commission des comptes de la sécurité sociale (CCSS) indique ainsi que le déficit de l’ensemble des régimes de base et du FSV a atteint 16 milliards d’euros en 2013, contre 19,2 milliards d’euros en 2012 et 22,6 milliards d’euros en 2011.

Le tableau d’équilibre du régime général

Le porte approbation du tableau d’équilibre du seul régime général ; comme pour l’ensemble des régimes, le tableau suivant rapproche les montants que l’article 1er soumet à l’approbation du Parlement de ceux des prévisions initiales de la loi de financement pour 2013 ou rectifiées par la loi de financement pour 2014.

TABLEAU D’ÉQUILIBRE 2013 DE L’ENSEMBLE DU RÉGIME GÉNÉRAL

(en milliards d’euros)

 

Prévisions initiales
(LFSS 2013)

Prévisions révisées
(LFSS 2014)

Réalisé
(PLFSS 2015)

Recettes

Dépenses

Solde

Recettes

Dépenses

Solde

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

159,8

165,0

– 5,1

157,5

165,1

– 7,6

158,0

164,8

– 6,8

Vieillesse

111,3

115,3

– 4,0

111,3

114,6

– 3,3

111,4

114,6

– 3,1

Famille

55,5

58,1

– 2,6

54,8

57,6

– 2,8

54,6

57,8

– 3,2

AT-MP

12,2

11,9

0,3

11,8

11,5

0,3

12,0

11,3

0,6

Total

329,0

340,5

– 11,4

323,5

336,9

– 13,3

324,0

336,5

– 12,5

Le déficit du régime général s’établit à 12,5 milliards d’euros en 2013, contre 13,3 milliards d’euros en 2012, 17,4 milliards d’euros en 2011 et 23,9 milliards d’euros en 2010.

La faible augmentation de la masse salariale par rapport à l’évolution prévue initialement a privé le régime général de près de 2 milliards d’euros de recettes.

Malgré la dégradation de la conjoncture économique, la trajectoire de redressement des comptes est cependant confirmée.

Le ralentissement de l’activité économique a conduit à l’adoption de mesures de recettes dans la loi de financement pour 2013, dont 2,2 milliards d’euros affectés au régime général. L’incidence en année pleine de la loi de finances rectificative d’août 2012 a aussi contribué au maintien de la trajectoire de redressement.

La branche maladie a vu son solde se dégrader à nouveau, après une amélioration entre 2010 et 2012. De 8,6 milliards d’euros en 2011 et 5,9 milliards d’euros en 2012, le déficit de la branche maladie se creuse à – 6,8 milliards d’euros, alors que la loi de financement tablait sur sa réduction. L’augmentation des recettes a été plus faible qu’attendu, avec un ralentissement fort du produit de la CSG (+ 0,7 % après + 4,0 % en 2012) et une croissance des cotisations sociales ralentie (+ 2 %) par l’atonie de la masse salariale.

Après plusieurs années de déficits, la branche AT-MP a enregistré un excédent de 0,6 milliard d’euros en 2013.

Le déficit de la branche famille, qui ne s’était pas dégradé depuis 2010, s’est creusé de 0,7 milliard d’euros en 2013.

Enfin, le déficit de la branche vieillesse a continué de se réduire. La forte augmentation du nombre de départs en retraite a été compensée par la limitation de la revalorisation moyenne par rapport à ce que la loi de financement avait anticipé, et par une augmentation importante des recettes de la branche.

Le tableau d’équilibre des organismes concourant au financement des régimes obligatoires de base

Le porte approbation du tableau d’équilibre du seul organisme de cette catégorie, à savoir le FSV.

Depuis 2009, le Fonds est largement déficitaire : son déficit s’établissait à 3,2 milliards d’euros à cette date ; il est passé à 4,1 milliards d’euros en 2010, s’est ensuite réduit à 3,4 milliards d’euros en 2011, avant d’enregistrer une nouvelle détérioration de ses comptes en 2012, avec – 4,1 milliards d’euros.

En 2013, le déficit a été réduit à 2,9 milliards d’euros, grâce à un apport très significatif de recettes supplémentaires, avec le versement exceptionnel du produit de la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie (CASA), le relèvement de des prélèvements sociaux sur les travailleurs indépendants et grâce au rendement élevé de plusieurs contributions (notamment l’impact en année pleine du relèvement du taux du forfait social de 8 % à 20 % par la loi de finances rectificative pour 2012).

Ces ressources nouvelles ont plus que compensé l’augmentation des charges. Tirées par la hausse du nombre de chômeurs (+ 5,5 %), les prises en charge de cotisations au titre du chômage ont augmenté de 7,4 %.

L’objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM)

Le du présent article porte approbation du montant des dépenses constatées en 2013 entrant dans le champ de l’ONDAM. Ce montant s’élève à 173,8 milliards d’euros, soit une sous-exécution d’environ 1,7 milliard d’euros par rapport à l’objectif voté. L’ONDAM progresse de 2,2 % par rapport à 2012, contre une progression annoncée de 2,7 %.

Les dépenses de soins de villes ont été inférieures de 1,3 milliard d’euros à l’objectif fixé, avec un taux de progression de 1,7 %. Les dépenses hospitalières ont progressé de 2,3 %, en atteignant néanmoins un montant inférieur de 0,4 milliard d’euros à l’objectif. Les dépassements hospitaliers ont été compensés par des moindres dépenses des cliniques privées et par l’annulation de crédits mis en réserve.

Dans le rapport d’application des lois de financement de septembre 2014, la Cour des comptes réitère ses remarques sur la construction de l’ONDAM, estimant que l’apparente maîtrise des dépenses est trompeuse, car l’ONDAM initialement voté est surestimé. En effet, le montant voté pour l’année n est estimé à partir du montant des dépenses prévisionnelles de l’année n – 1 et décorrélé de l’exécution réelle, ce qui crée un « effet de base ». Depuis 2009, l’écart entre le montant retenu en base et l’exécution se cumule et a atteint, en 2013, 800 millions d’euros.

Toutefois, pour réduire cet effet, la base de référence pour le calcul de l’ONDAM 2013 concernant les soins de ville a été diminuée de 350 millions d’euros.

Les recettes affectées au Fonds de réserve pour les retraites

Le du présent article porte approbation du montant de la dotation au FRR, qui est nul depuis 2011.

En effet, en application de la loi du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites, le Fonds a été mis en extinction : aucune recette ne lui est plus affectée, tandis que le Fonds décaisse chaque année 2,1 milliards d’euros au profit de la CADES.

Au 31 décembre 2013, la valeur des actifs du FRR était de 36,3 milliards d’euros, contre 36,6 milliards d’euros un an auparavant. Ce montant tient compte du troisième versement de 2,1 milliards d’euros effectué vers la CADES.

En 2013, le FRR a dégagé un résultat financier en hausse de 0,6 milliard d’euros par rapport à 2012, à hauteur de 1,95 milliard d’euros, sa performance moyenne globale annuelle s’étant élevée à 5,03 %.

Conformément à l’allocation stratégique définie par le conseil de surveillance du Fonds, son portefeuille se composait, au 31 décembre 2013, de 43,8 % d’actifs de performance (actions, matières premières, immobilier, dette des pays émergents) et de 56,2 % d’actifs de couverture (actifs obligataires et de trésorerie). Ces proportions ont évolué durant l’année du fait des variations de marché, sans réallocation entre les deux « poches ».

Les recettes mises en réserve par le Fonds de solidarité vieillesse

Le article porte approbation du montant des recettes mises en réserve par le FSV, conformément à la loi du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites qui a créé, au sein du Fonds, une section 2 dédiée à la mise en réserve de recettes qui seront affectées, à compter de 2016 au financement du maintien à 65 ans de l’âge de départ à la retraite des parents de trois enfants ou plus ou, sous certaines conditions, des parents d’enfant handicapé. Ces recettes se sont élevées à 0,1 milliard d’euros, pour une prévision de 0,2 milliard dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013. À fin 2013, le montant de la réserve constituée s’élève à 0,9 milliard d’euros.

La dette amortie par la Caisse d’amortissement de la dette sociale

Le porte approbation du montant de la dette amortie par la CADES en 2013, à savoir 12,4 milliards d’euros.

Au cours de l’année 2013, la CADES a repris 7,7 milliards d’euros de dette correspondant aux déficits de la branche vieillesse et du FSV au titre de 2012, soit 8,9 milliards d’euros, desquels ont été déduits 1,2 milliard d’euros au titre de la régularisation du transfert intervenu en 2012.

La Caisse a bénéficié de 15,8 milliards d’euros de recettes en 2013. La CADES est désormais affectataire non plus seulement du produit des contributions pour le remboursement de la dette sociale (CRDS) qui a représenté 6,5 milliards d’euros en 2013 et d’une fraction de 0,48 point de CSG pour des recettes de 5,8 milliards d’euros en 2013, mais également, depuis 2011, du produit de 1,3 point du prélèvement social sur les revenus du capital, qui a généré un rendement de 1,4 milliard d’euros en 2013, et du versement annuel par le FRR de 2,1 milliards d’euros.

À la fin 2013, il restait à la Caisse 132,7 milliards d’euros de dette sociale à rembourser pour un montant total de dette reprise depuis sa création de 84 milliards d’euros.

*

* *

La Commission adopte l’article 1er sans modification.

Article 2

Approbation du rapport annexé sur le tableau patrimonial et la couverture des déficits de l’exercice 2013 (annexe A)

Conformément aux dispositions organiques applicables aux lois de financement de la sécurité sociale, article prévoit l’approbation d’un rapport dont l’objet est désormais double :

– depuis la loi de financement pour 2012 (4), le rapport retrace la situation patrimoniale, au 31 décembre du dernier exercice clos, soit 2013, des régimes obligatoires de base et des organismes concourant à leur financement, à l’amortissement de leur dette ou à la mise en réserve de recettes à leur profit ;

– il décrit les mesures prévues pour l’affectation des excédents ou la couverture des déficits constatés au titre du dernier exercice clos.

1.  Le tableau présentant la situation patrimoniale de la sécurité sociale

Dans son rapport consacré à l’application des lois de financement de la sécurité sociale de septembre 2014, la Cour des comptes juge que le tableau patrimonial figurant à l’annexe A au présent projet « fournit une image cohérente de la situation patrimoniale de la sécurité sociale au 31 décembre 2013 ».

En outre, elle lève deux des quatre réserves qu’elle avait émises l’an dernier, remarquant que les explications fournies dans l’annexe 9 du présent projet constituent une « information appropriée sur la ventilation de l’actif et du passif circulant par catégorie d’organismes » et que « les écarts entre les actifs et les passifs réciproques des entités entrant dans le champ du tableau patrimonial ont désormais un caractère non significatif ». Elle se satisfait aussi du fait que « la dissociation des actifs et des passifs relatifs aux régimes complémentaires maladie et vieillesse du régime agricole par rapport aux régimes de base de ce même régime est désormais correctement documentée ».

En revanche, elle maintient deux réserves :

– les éléments d’information communiqués par le Régime social des indépendants (RSI) pour justifier les montants pris en compte au titre des régimes de base qu’elle gère, qui entrent seuls dans le champ du tableau patrimonial, à l’exclusion donc des régimes complémentaires, sont insuffisants ;

– la Cour (pour le régime général) et les commissaires aux comptes (pour les autres régimes de base de sécurité sociale) continuent de souligner la qualité perfectible des comptes des régimes de sécurité sociale intégrés au tableau patrimonial, en raison des insuffisances des dispositifs de contrôle interne et de la persistance de difficultés comptables.

L’endettement financier net de la sécurité sociale, soit la différence entre le passif et l’actif financiers, a continué à augmenter, quoiqu’à un rythme ralenti (118 milliards d’euros au 31 décembre 2013 contre 116,2 milliards d’euros fin 2012) ; cette évolution résulte de la conjugaison de deux effets :

– l’endettement financier net du régime général a fortement augmenté (28,3 milliards d’euros contre 20,5 milliards fin 2012), du fait de l’absence de reprise par la CADES au 31 décembre 2013 des déficits des branches maladie et famille pour l’exercice 2012, qui demeurent donc financés par l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) ;

– l’endettement financier net de la CADES a diminué (132,9 milliards d’euros fin 2013 contre 139,5 milliards d’euros fin 2012) grâce à la poursuite du remboursement de la dette sociale (6,6 milliards d’euros remboursés).

2.  La description des mesures prévues pour la couverture des déficits constatés

Les déficits du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) ont respectivement atteint 12,5 milliards d’euros et 2,9 milliards d’euros en 2013.

Les déficits de l’année 2013 de la branche vieillesse et du FSV (6 milliards d’euros) ont été transférés à la CADES, en application de la loi de financement pour 2011 et dans le cadre de la réforme des retraites de 2010.

En outre, la loi de financement pour 2014 a intégré les déficits 2012 à 2018 des branches maladie et famille dans le champ de la reprise prévue par la loi de financement pour 2011, sans modification des plafonds (10 milliards d’euros par an et 62 milliards au total), les déficits de la branche vieillesse et du FSV restant prioritaires. Dans ce cadre, le déficit 2012 de la branche maladie a été repris en 2014 à hauteur de 4 milliards d’euros (sur 5,9 milliards d’euros).

Le portage par l’ACOSS des déficits du régime général non transférés à la CADES a conduit à la fixation d’un plafond d’emprunt de 29,5 milliards d’euros pour l’exercice 2013, plafond qui a été respecté.

S’agissant des autres régimes de base, la plupart d’entre eux présentent par construction des résultats annuels équilibrés, par les cotisations ou par une subvention. Toutefois, certains régimes ne bénéficiant pas de tels mécanismes d’équilibrage ont enregistré en 2013 des résultats déficitaires.

La branche retraite des exploitants agricoles, structurellement déficitaire, a enregistré un déficit de 0,6 milliard d’euros en 2013, s’ajoutant aux déficits 2011 et 2012 (les déficits antérieurs ayant été repris par la CADES), portant le montant des déficits cumulés à 2,6 milliards d’euros. Le présent projet de loi de financement prévoit que désormais ces déficits pourront être financés par des avances de l’ACOSS.

La Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL), proche de l’équilibre en 2012, a enregistré un déficit de 0,1 milliard d’euros en 2013. Cela dit, l’équilibre de 2012 avait été obtenu par un transfert exceptionnel des réserves de plusieurs fonds à hauteur de 0,7 milliard d’euros, tandis que le résultat 2013 résulte d’une augmentation pérenne des taux de cotisations.

Quant au régime des mines, il est en déficit de l’ordre de 0,2 milliard d’euros fin 2013. La loi de financement pour 2013 a permis le recours à des avances de trésorerie de l’ACOSS à hauteur de 250 millions d’euros, possibilité étendue jusqu’en 2017 par la loi de financement pour 2014.

*

* *

La Commission adopte l’article 2 sans modification.

Puis elle adopte la première partie du projet de loi.

DEUXIÈME PARTIE
DISPOSITIONS RELATIVES À L’EXERCICE 2014

Article 5
(loi n° 2013-1203 du 23 décembre 2013 de financement de la sécurité sociale pour 2014)

Rectification des prévisions et objectifs relatifs à 2014

Conformément aux dispositions organiques, l’article 5 propose de rectifier les prévisions de recettes, les objectifs de dépenses, et les tableaux d’équilibre pour 2014, par branche, de l’ensemble des régimes obligatoires de base et du régime général, ainsi que les prévisions de recettes, les objectifs de dépenses et le tableau d’équilibre du Fonds de solidarité vieillesse (FSV).

Il arrête par ailleurs l’objectif assigné aux organismes chargés de l’amortissement de la dette des régimes obligatoires de base et les prévisions de recettes affectées aux fins de mise en réserve à leur profit. Il s’agit respectivement de l’objectif d’amortissement de la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES), des prévisions de recettes du Fonds de réserve pour les retraites (FRR), et des prévisions de recettes mises en réserve par le Fonds de solidarité vieillesse (FSV).

S’agissant de ces dernières, le II du présent article réaffecte la fraction du forfait social qui les abondait vers la section 1 du FSV ; il n’y a donc pas de nouvelle mise en réserve par le FSV en 2014.

Au titre des prévisions de recettes et des tableaux d’équilibre, cet article rectifie ainsi trois articles de la loi de financement pour 2014 : l’article 22, fixant les prévisions de recettes et le tableau d’équilibre, par branche, de l’ensemble des régimes obligatoires de base, l’article 23, fixant les prévisions de recettes et le tableau d’équilibre, par branche, du régime général et l’article 24 approuvant les recettes et le tableau d’équilibre du FSV.

S’agissant des objectifs de dépenses, sont modifiés, outre les articles 22 et 23 pour les tableaux d’équilibre, les articles 64 (branche maladie, maternité, invalidité et décès), 68 (branche vieillesse), 72 (branche accidents du travail et maladies professionnelles) et 78 (branche famille) de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014.

Concernant l’objectif d’amortissement de la CADES et les prévisions de recettes mises en réserve par le FRR et du FSV, cet article porte modification de l’article 24 de la loi de financement pour 2014.

1.  Les régimes obligatoires de base

Le 1° du I rectifie, pour l’ensemble des régimes obligatoires de base, les prévisions de recettes de la loi de financement pour 2014, les objectifs de dépense afférents et le tableau d’équilibre, ces données étant mises en regard, dans le tableau ci-après, des rectifications que propose d’y apporter le présent article.

TABLEAU D’ÉQUILIBRE 2014 DE L’ENSEMBLE DES RÉGIMES OBLIGATOIRES DE BASE

(en milliards d’euros)

 

Prévisions initiales pour 2014
(LFSS 2014)

Prévisions révisées pour 2014
(PLFSS 2015)

Recettes

Dépenses

Solde

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

188,0

194,0

– 6,0

186,4

193,8

– 7,4

Vieillesse

219,4

221,0

– 1,7

218,1

219,9

– 1,7

Famille

56,9

59,2

– 2,3

56,2

59,1

– 2,9

AT-MP

13,5

13,3

0,2

13,5

13,2

0,3

Total (*)

464,6

474,5

– 9,8

461,2

472,9

– 11,7

(*) Hors transferts entre branches

Sources : LFSS 2014 et PLFSS 2015.

a.  Des recettes moins dynamiques que prévu

Les recettes des régimes obligatoires de base devraient croître de 2,6 % en 2014 pour atteindre 461,2 milliards d’euros. Si les recettes sont plus dynamiques en 2014 qu’en 2013, elles sont cependant inférieures de 3,2 milliards d’euros aux prévisions de la loi de financement initiale, avec une croissance de la masse salariale nettement inférieure à la prévision (1,6 % contre 2,2 % attendus).

Les cotisations nettes des régimes de base devraient s’élever à 251,8 milliards d’euros, soit une hausse de 2,4 %, supérieure à celle de la masse salariale du secteur privé. Cette plus forte progression s’explique principalement par la hausse des taux de cotisations vieillesse (0,1 point pour la cotisation plafonnée et 0,3 point pour la cotisation déplafonnée), dont l’impact est toutefois atténué par la baisse de 0,15 point du taux de la cotisation famille prévue par la loi de financement pour 2014.

Les recettes de CSG devraient atteindre 91,5 milliards d’euros en 2014 (+0,8 % par rapport à 2013). Le rendement de la CSG sur les revenus du capital continue à diminuer.

La hausse des recettes fiscales enregistrée en 2013 s’accélère en 2014, pour atteindre 54,4 milliards d’euros. Les droits de consommation sur les tabacs affectés au régime général ont augmenté à la fois du fait de l’augmentation des taux de taxation, et du fait de l’augmentation de la part affectée au régime général en 2013 (96,85 % des droits totaux contre 94,86 % en 2012).

Le produit des contributions sociales (17,6 milliards d’euros) devrait marquer le pas en 2014 (– 1,6 % pour le régime général et le FSV et – 0,4 %, pour l’ensemble des affectataires). En effet, comme en 2013, l’évolution spontanée des différentes assiettes serait négative en ce qui concerne les revenus du capital, les stock-options, les avantages retraite ou encore les jeux et paris, ou peu dynamique en ce qui concerne le forfait social.

b.  Des dépenses maîtrisées

Le montant total des dépenses de l’ensemble des régimes en 2014 est révisé à la baisse par rapport aux prévisions de la loi de financement
(
– 1,6 milliard d’euros, soit – 0,3 %).

La révision à la baisse porte principalement sur les dépenses de la branche vieillesse.

En 2014, les dépenses dans le champ de l’ONDAM devraient connaître un léger dépassement (environ 100 millions d’euros) par rapport à l’objectif révisé à la baisse par la loi de financement rectificative pour 2014. Cette dernière prévoyait une sous-exécution de 0,8 milliard d’euros par rapport à l’objectif voté en loi de financement initiale. Compte tenu de la révision à la baisse de la base de dépenses 2013, le taux de progression des dépenses exécutées dans le champ de l’ONDAM s’élèverait à 2,7 % en 2014 contre 2,4 % initialement attendus.

c.  Le tableau d’équilibre

Le déficit 2014 de l’ensemble des régimes obligatoires de base devrait diminuer à 11,7 milliards d’euros (contre 13,1 milliards fin 2013), le redressement étant cependant moins élevé que prévu (– 1,9 milliard d’euros d’écart).

Le déficit de la branche maladie s’aggrave de 0,5 milliard d’euros par rapport à 2013, tandis que celui de la branche vieillesse est divisé par deux, en ligne avec les prévisions de la loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraite. Le déficit de la branche famille se réduit de 0,4 milliard d’euros. Quant à la branche AT-MP, elle enregistre un résultat positif, mais de 0,4 milliard d’euros inférieur à la prévision de la loi de financement initiale.

2.  Le régime général

Le du I porte rectification, pour le régime général, des prévisions de recettes, fixées par la loi de financement pour 2014, des objectifs de dépenses afférents et du tableau d’équilibre, ces données étant mises en regard, dans le tableau ci-après, des rectifications que propose d’y apporter le présent article.

TABLEAU D’ÉQUILIBRE 2014 DU RÉGIME GÉNÉRAL

(en milliards d’euros)

 

Prévisions initiales pour 2014
(LFSS 2014)

Prévisions révisées pour 2014
(PLFSS 2015)

Recettes

Dépenses

Solde

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

163,8

169,8

-6,0

161,4

168,8

-7,3

Vieillesse

116,0

117,2

-1,2

115,1

116,7

-1,6

Famille

56,9

59,2

-2,3

56,2

59,1

-2,9

AT-MP

12,1

12,0

0,1

12,0

11,8

0,2

Total (*)

336,6

346,1

-9,5

332,7

344,3

-11,7

(*) Hors transferts entre branches

Source : LFSS 2014 et PLFSS 2015.

Les principales tendances décrites pour les dépenses de l’ensemble des régimes valent évidemment aussi pour celles du régime général.

3.  Le Fonds de solidarité vieillesse, la Caisse d’amortissement de la dette sociale et le Fonds de réserve pour les retraites

a.  Le Fonds de solidarité vieillesse

Le 3° du I porte rectification, pour les organismes concourant au financement des régimes obligatoires de base (c’est-à-dire le seul FSV), du tableau d’équilibre, tel qu’approuvé par l’article 24 de la loi de financement pour 2014, ces données étant mises en regard, dans le tableau ci-après, des rectifications que propose d’y apporter le présent article.

TABLEAU D’ÉQUILIBRE 2014 DES ORGANISMES CONCOURANT
AU FINANCEMENT DES RÉGIMES OBLIGATOIRES DE BASE

(en milliards d’euros)

 

Prévisions initiales pour 2014
(LFSS 2014)

Prévisions révisées pour 2014
(PLFSS 2015)

Recettes

Dépenses

Solde

Recettes

Dépenses

Solde

FSV

17,0

20,4

– 3,4

16,9

20,6

– 3,7

Source : LFSS 2014 et PLFSS 2015.

Le déficit du FSV en 2014 serait de 0,3 milliard d’euros supérieur à l’objectif fixé en loi de financement pour 2014, et aggravé de 0,7 milliard d’euros par rapport à 2013.

Cette dégradation résulterait principalement d’une progression de 0,6 milliard d’euros des dépenses liées à la prise en charge des cotisations des chômeurs, ainsi que d’une détérioration des recettes de 0,1 milliard d’euros, malgré un surcroît de recettes lié à des résultats meilleurs qu’attendu du Régime social des indépendants (RSI) qui dégagent des ressources supplémentaires de contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) au profit du FSV.

En 2014, 4,1 milliards d’euros de déficits 2013 ont été repris par la CADES dans le cadre de la loi de financement pour 2011 qui prévoit que chaque année de 2011 à 2018 (et dans la limite globale de 62 milliards d’euros), la dette de la branche retraite du régime général et du FSV sera transférée à la CADES dans la limite de 10 milliards d’euros.

La consolidation des chiffres rectifiés de l’ensemble des régimes obligatoires de base avec ceux des recettes et dépenses des organismes concourant au financement des régimes obligatoires de base permet d’appréhender la situation financière prévisionnelle pour l’exercice 2014 de l’ensemble de la sécurité sociale au sens de la loi de financement. Si les dispositions organiques ne rendent pas obligatoire le calcul de ce total, le rapport de la Commission des comptes de la sécurité sociale ne manque pas de le présenter.

La somme du solde de l’ensemble des régimes (– 11,7 milliards d’euros) et de celui du FSV (– 3,7 milliards d’euros) révèle un déficit total de 15,4 milliards d’euros en 2014, soit le même niveau qu’en 2013. Ce niveau stabilisé est à comparer à 11,2 milliards d’euros en 2008, 24,9 milliards d’euros en 2009, 29,6 milliards d’euros en 2010, 22,6 milliards d’euros en 2011 et 19,2 milliards d’euros en 2012 et 17,3 milliards d’euros en 2013.

Le 6° du I rectifie le montant des recettes mises en réserve par le FSV, en les annulant. Ces recettes alimentaient la section 2 du fonds, réserve destinée à financer le maintien du départ à la retraite à 65 ans pour les parents de trois enfants, prévu par la loi du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites.

Fin 2013, le montant de la réserve constituée s’élevait à 0,9 milliard d’euros. Or, au vu des projections statistiques réalisées, le besoin de financement jusqu’en 2020 (280 millions d’euros) n’excédera pas cette réserve déjà constituée. Celle-ci sera suffisante pour financer le dispositif jusqu’à son extinction, sachant que le pic de dépense sera atteint en 2024. En effet, les mesures financées par la section 2 s’appliquent aux générations 1951 à 1955, qui en bénéficieront lors de la liquidation de leurs droits entre 2016 et 2020, ce qui explique le caractère résiduel des dépenses qui seront engagées à partir de 2023 et la situation durablement excédentaire de cette section.

Les II et III procèdent donc à la réaffectation de la fraction du forfait social et de la contribution sociale sur les revenus de placement et du patrimoine dont bénéficiait la section 2 du FSV, vers sa section 1.

Le IV ajoute dans les missions du FSV, prévues à l’article L. 135-2 du code de la sécurité sociale, le financement d’avantages non contributifs au bénéfice des retraités définis par décret. Il s’agit de deux mesures annoncées par le Gouvernement : la revalorisation du minimum vieillesse à 800 euros et le versement d’une prime exceptionnelle de 40 euros aux retraités modestes.

Le coût de ces deux mesures est estimé à 250 millions d’euros environ. Or, la section 2 du FSV a accumulé jusqu’ici plus de 900 millions d’euros.

b.  La Caisse d’amortissement de la dette sociale

Le du I prévoit que l’objectif 2014 d’amortissement initialement fixé pour la CADES, soit 12,8 milliards d’euros, est légèrement revu à la baisse, à 12,7 milliards d’euros.

L’amortissement cumulé s’élèverait ainsi, fin 2014, à 96,7 milliards d’euros. L’ensemble des dettes sociales reprises par la CADES depuis sa création en 1996 se montant, à la même date, à 226,7 milliards d’euros, 130 milliards d’euros resteraient donc à amortir (contre 132,6 milliards d’euros fin 2013).

L’annexe 8 au présent projet de loi indique que, pour 2014, le programme de financement de la CADES devrait atteindre un montant de 27 milliards d’euros, dont 18 milliards d’euros d’émissions à moyen et long terme et 9 milliards d’euros d’encours au 31 décembre d’émissions à court terme, de nature à assurer les reprises de dette prévues par le législateur. Pour les deux tiers, il fait appel au marché de l’euro, le reste étant réalisé en devises étrangères (très majoritairement en dollar américain, mais aussi, dans une stratégie de diversification géographique, en livre sterling ou en dollar australien par exemple).

Dans un contexte exceptionnellement favorable, le taux global de refinancement de la CADES est historiquement bas, à 2,44 %.

c.  Le Fonds de réserve pour les retraites

Depuis que la loi du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites a transformé le FRR en fonds fermé, aucune recette ne lui est affectée, ce que confirme le 5° du I présent article.

La mission du FRR est désormais de verser à la CADES, en avril de chaque année, 2,1 milliards d’euros (en nominal), de 2011 à 2024, soit un total (non actualisé) de 29,4 milliards d’euros.

L’annexe 8 précise qu’au 31 juillet dernier, la valeur de marché du portefeuille du FRR s’élevait à 36 milliards d’euros, déduction faite du quatrième versement de 2,1 milliards d’euros à la CADES effectué le 25 avril 2014.

*

* *

La Commission est saisie des amendements identiques AS4 de M. Jean-Pierre Door et AS22 de M. Francis Vercamer.

M. Jean-Pierre Door. Alors que le projet de loi de financement de la sécurité sociale initiale pour 2014 prévoyait un déficit de 9,6 milliards d’euros, nous dépassons les 10 milliards : nous sommes donc loin des engagements pris par le Gouvernement, et les choses ne font qu’empirer. Aujourd’hui, vous essayez de modifier le cap à coups de rabot et de bricolage de tuyauterie avec la loi de financement rectificative de la sécurité sociale adoptée au mois de juillet dernier. Nous demandons donc la suppression de l’article 5, tout aussi insincère que les précédentes lois de financement.

M. Francis Vercamer. Vous avez par deux fois touché au pouvoir d’achat des retraités, en repoussant la revalorisation des retraites et en modifiant l’imposition sur le revenu des retraités ayant élevé plus de trois enfants. La revalorisation du minimum vieillesse et la prime exceptionnelle que vous proposez ne sont qu’un rideau de fumée ! Notre système de retraite a besoin d’une réforme structurelle. L’espérance de vie de nos concitoyens augmente d’un trimestre par an, et il est donc urgent de prendre des mesures de fond.

M. Gérard Bapt, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Vous rejetez cet article d’équilibre au motif qu’il signe l’échec du Gouvernement. Je vous rappelle qu’en 2011, le déficit de la sécurité sociale atteignait 22,6 milliards d’euros ; à la fin de cette année, il ne sera plus que de 15,4 milliards. Le déficit de la branche vieillesse a été divisé par deux depuis le vote de la loi sur les retraites, malgré les mesures de justice qui ont été adoptées. Avis défavorable à ce qui s’apparente à une profession de foi.

M. Michel Issindou. Laissons vivre la réforme des retraites que nous avons votée il y a moins de dix mois et qui comportait des mesures de financement courageuses, assises notamment sur l’allongement de la durée de cotisation. Attendons ce qu’en dira le Comité de suivi des retraites, qui se prononcera, le moment venu, sur le redressement de notre système. Le déficit prévu pour le régime général de la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV) n’est que de 1,5 milliard d’euros, ce qui ne s’était jamais vu depuis des années. Les mesures prises commencent donc à porter leurs fruits. L’effort a été réparti équitablement entre les retraités, les salariés et les employeurs.

Mme Véronique Louwagie. L’article 5 est inquiétant à plus d’un titre. D’abord parce qu’avec un déficit s’élevant à 11,7 milliards d’euros, nous sommes loin des 10 milliards annoncés. Au passage, je signale une erreur dans le tableau présenté à la page 27 du commentaire des articles, qui fait état de prévisions révisées pour le PLF 2015 au lieu, me semble-t-il de 2014. Ensuite, l’article remet en cause la perspective d’un retour à l’équilibre pour 2017. Enfin, et c’est le plus inquiétant, il montre que ce sont nos recettes qui diminuent, ce qui traduit une diminution de l’activité et une dégradation de la situation économique de notre pays. Il se confirme donc que le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2014 était insincère, à moins qu’il ne s’agisse d’improvisation et d’amateurisme.

M. Denis Jacquat. Désormais, le pouvoir d’achat des retraités diminue de mois en mois, tandis qu’auparavant toutes les retraites promises étaient versées au jour et au montant promis. Un bon régime de retraite doit être pérenne et lisible : quand on a promis des prestations à des personnes ayant travaillé et cotisé, elles doivent leur être versées.

M. Bernard Accoyer. La situation des retraites est catastrophique, et le semblant de réforme conduite l’an dernier – qui a consisté pour l’essentiel, selon un engagement irresponsable du candidat Hollande, à ramener de soixante-deux à soixante ans l’âge du départ en retraite – n’a pas résolu le problème. Quoi que vous en disiez, le déficit du régime général reste important. Celui du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) atteint 15,4 milliards d’euros pour 2014. Or le FSV rentre totalement dans le financement des retraites, sans parler des régimes que vous n’évoquez pas ou du non-provisionnement du régime des fonctionnaires.

Nous ne pouvons donc nous satisfaire de cet article qui semble acter le déficit structurel de notre système de retraite.

M. Dominique Dord. Vous avez peut-être le sentiment, parce que vous avez levé des cotisations supplémentaires cette année, que vous êtes parvenus à régler la question du déficit abyssal de notre régime de retraite. Malheureusement, le problème des retraites n’est pas un problème de conjoncture mais un problème structurel et, dès l’année prochaine, il se posera de nouveau, et encore les années suivantes.

M. Élie Aboud. On ne peut pas laisser croire que le problème des retraites est réglé. Selon les données officielles, nous sommes le pays où l’on entre le plus tard dans la vie active, le pays où l’on travaille le moins et le pays où l’on sort le plus tôt du cycle actif professionnel. Les solutions que vous proposez sont palliatives – mot auquel vous ne pouvez rester insensible, monsieur le rapporteur. Et je n’évoque même pas les avantages dits sociaux, avec le compte de pénibilité et l’usine à gaz qui sera, à ce sujet, mise en route à partir du 1er janvier 2015.

M. Michel Issindou. On peut penser que le système des retraites n’est pas sauvé et, si nous avons dû le retoucher en 2013, c’est parce que vous n’avez pas su saisir trois opportunités : en 2003, 2008 et 2010. Vous revenez sur le fait que nous n’avons pas reporté l’âge légal de départ à la retraite – nous verrons bien ce que vous allez retenir de grandiose des propositions multiples et variées des trois favoris à l’élection de la présidence de l’UMP. Notre choix est, en effet, différent du vôtre et nous avons décidé de ne pas changer l’âge légal de départ à la retraite en allongeant la durée de cotisation – ce qui d’ailleurs revient à peu près au même. Je le répète : l’âge légal n’a pas de sens. Si l’on demande à chacun de travailler quarante-trois annuités, certains partiront à la retraite au-delà de soixante-cinq ans. Nous avons décidé de réduire les déficits sociaux jusqu’à 2020, après quoi l’allongement de la durée de cotisation nous mènera, en 2035-2040 à une situation satisfaisante.

J’ai l’honnêteté de rappeler que, pour atteindre ces objectifs, il ne faut pas que la situation économique se dégrade trop – mais ce qui vaut pour nous, vaut pour vous, tous les systèmes étant bâtis sur des prévisions de croissance économique correcte.

M. Jacquat a souligné que, jusque-là, toutes les retraites ont été payées. Certes, mais à crédit, ce qui a alourdi la dette publique et la dette sociale – il n’y a pas de quoi être fier. Nous sommes en train de rétablir les équilibres. Laissons donc vivre la réforme des retraites telle qu’elle a été bâtie l’an dernier. Elle donne ses premiers résultats financiers et, dans un an, nous tirerons les conséquences d’un premier bilan.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Il n’y a pas d’erreur à la page 27, madame Louwagie : il s’agit des prévisions révisées pour 2014, dans le cadre du PLFSS pour 2015.

Je rappelle, par ailleurs, qu’en 2011 le déficit de la sécurité sociale et du FSV était de 22,6 milliards d’euros ; en 2014, malgré les difficultés actuelles, il ne sera que de 11,7 milliards d’euros.

Les amendements sont rejetés.

La Commission adopte l’article 5 sans modification.

TROISIÈME PARTIE
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES ET À L’ÉQUILIBRE FINANCIER DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 2015

TITRE IER
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES, AU RECOUVREMENT ET À LA TRÉSORERIE

Chapitre I
Rationalisation de certains prélèvements au regard de leurs objectifs

Article 7
(art. L. 130-1, L. 131-1, L. 131-1-1 [nouveau], L. 131-2, L. 131-3, section II du chapitre Ier du titre III du livre Ier, art. L. 133-10, L. 136-2, L. 136-5, L. 136-8, L. 137-11-1, L. 241-3, L. 242-13, L. 243-2, L. 244-1, L. 244-11, L. 244-14 et L. 612-9 du code de la sécurité sociale, art. L. 14-10-4 du code de l’action sociale et de la famille, art. 154 quinquies du code général des impôts, art. L. 761-10 du code rural et de la pêche maritime et art. 14 de l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996)

Modification des règles relatives aux contributions sociales
sur les revenus de remplacement

Afin de limiter les effets du franchissement des seuils relatifs à la contribution sociale sur les revenus de remplacement, le présent article substitue un critère de revenu fiscal au critère actuel de montant d’impôt sur le revenu mis en recouvrement pour l’assujettissement au taux normal de CSG sur les revenus de remplacement (pensions de retraite et d’invalidité, allocations chômage et préretraites).

En effet, le rapport du groupe de travail sur la fiscalité des ménages, présidé par MM. Dominique Lefebvre et François Auvigne, remis en mai 2014, a mis en évidence l’importance des effets de seuils puisque le franchissement de certains seuils commande l’obtention ou la perte de plusieurs avantages sociaux et fiscaux à la fois, notamment s’agissant de la CSG précomptée sur les revenus de remplacement. Une de ses préconisations consiste à faire du revenu fiscal de référence l’unique critère pour l’octroi d’un avantage fiscal ou social.

Le présent article procède par ailleurs à un toilettage des dispositions qui régissent le recouvrement de la CSG sur les revenus de remplacement afin de les rendre plus lisibles et d’en simplifier la gestion.

1.  La CSG sur les revenus de remplacement

La CSG est un impôt proportionnel qui s’applique tant aux revenus d’activité qu’aux revenus du patrimoine et aux revenus de remplacement, affectée au financement de la sécurité sociale.

L’article L. 136-1 du code de la sécurité sociale indique que sont assujettis à la contribution sociale sur les revenus d’activité et de remplacement les personnes physiques considérées comme domiciliées en France pour l’établissement de l’impôt sur le revenu et à la charge d’un régime obligatoire d’assurance maladie français.

a.  Certains revenus de remplacement bénéficient d’une exonération et de taux réduits de CSG

Sont traités dans cet article les revenus de remplacement suivants :

– les allocations de chômage et les indemnités journalières maladie, maternité et AT-MP, qui sont soumis au taux normal de CSG de 6,2 % et à un taux réduit de 3,8 % ;

– les pensions de retraite et les pensions d’invalidité, qui sont soumises à un taux normal de 6,6 % et un taux réduit de 3,8 %.

Ces taux restent inférieurs au taux normal de CSG qui s’applique sur les revenus d’activité (7,7 %).

Les revenus exclus de l’assiette de la CSG

Créée en 1991 au taux unique de 1,1 %, la CSG a d’emblée fait l’objet d’un mécanisme d’exclusion d’assiette pour les pensions et allocations de retraite ou de chômage perçues par des personnes dont les derniers revenus fiscaux connus (n-1) étaient inférieurs au seuil d’assujettissement à la taxe d’habitation des personnes de plus de 60 ans et des veufs.

Ce seuil de perte d’exonération de CSG, maintenu et revalorisé depuis lors, correspond toujours au seuil d’exemption de la taxe d’habitation, prévu à l’article 1417 du code général des impôts, à savoir, en 2014, un revenu fiscal de référence (RFR) de 10 224 euros pour la première part de quotient familial, majoré de 2 839 euros pour chaque demi-part supplémentaire.

Ce seuil permet aussi l’exclusion de l’assiette de la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS).

Pour les personnes percevant une allocation de chômage, l’application de la règle d’« écrêtement » conduit à lisser le montant de CSG précomptée par l’UNEDIC afin que celui-ci ne réduise pas le revenu net disponible après prélèvements sociaux en deçà du SMIC brut. Cette règle conduit en pratique à appliquer des taux nuls sur la très grande part des allocations de chômages, ceux-ci étant progressifs au-delà.

Les revenus bénéficiant d’un taux réduit de CSG

À compter de 1997 et dans le cadre de la hausse du taux de la CSG à 3,4 %, un mécanisme de taux réduits s’est ajouté aux règles d’exclusion d’assiette, pour les pensions de retraites et allocations de chômage : un taux réduit de 1 % (porté à 3,8 % à compter de 1998) s’est appliqué à ceux de ces revenus perçus par des personnes non assujetties à l’impôt sur le revenu ou redevables d’un montant d’impôt, calculé après application des réductions d’impôts et avant imputation d’éventuels crédits d’impôt, inférieur au seuil de mise en recouvrement de celui-ci.

Ainsi, en vertu du III de l’article L. 136-8 du code de la sécurité sociale, sont assujetties à la CSG au taux réduit de 3,8 % les pensions de retraite, d’invalidité et allocations chômage perçus par les personnes dont la cotisation d’impôt sur le revenu de l’année précédente est inférieure au seuil de recouvrement de l’impôt sur le revenu (montant mentionné au I bis de l’article 1657 du code général des impôts) et dont le revenu fiscal de référence excède les seuils déterminés à l’article 1417 du même code.

Les revenus soumis au taux normal de la CSG sur les revenus de remplacement

Les bénéficiaires de revenus de remplacement dont le montant de la cotisation d’impôt sur le revenu excède le seuil de mise en recouvrement de l’impôt sur le revenu sont assujettis à la CSG aux taux de 6,2 % (chômage et indemnités journalières) ou 6,6 % (retraites et pensions d’invalidité).

Ce seuil de recouvrement de l’impôt sur le revenu est également celui qui a été retenu pour l’assujettissement des pensions de retraite à la contribution de solidarité pour l’autonomie (CASA), en application de l’article L. 14-10-4 du code de l’action sociale et des familles.

b.  Les problèmes posés par les seuils d’éligibilité

Des effets de seuil importants, surtout pour les retraités

Le rapport précité de MM. Dominique Lefebvre et François Auvigne a montré que ces règles entraînaient des effets de seuil très importants.

Le franchissement du seuil du revenu fiscal de référence défini à l’article 1417 du code général des impôts conduit à la fois à l’assujettissement à la taxe d’habitation et à l’assujettissement à la CSG et à la CRDS.

Pour les retraités ayant de faibles revenus, un euro supplémentaire déclaré peut engendrer une perte de revenu de 4,3 % du montant total de la pension en cas de franchissement du seuil conduisant au taux réduit de CSG (3,8 %) et à l’assujettissement à la CRDS (0,5 %) – à laquelle s’ajoute l’effet de l’assujettissement à la taxe d’habitation.

Le passage d’une situation « taux réduit de CSG + CRDS » (4,3 %) à une situation « taux normal de CSG + CRDS + CASA » (7,4 %) entraîne quant à lui une perte de 3,1 % des revenus toutes choses égales par ailleurs.

Ces effets de seuil sont moins forts pour les allocataires du chômage qui bénéficient de la règle d’écrêtement.

La déductibilité du revenu imposable complique la compréhension des seuils et crée des effets de va-et-vient entre les seuils

En vertu de l’article 154 quinquies du code général des impôts, la CSG est déductible de l’assiette de l’impôt sur le revenu à hauteur de 5,1 % pour les revenus d’activité et 3,8 % pour les revenus de remplacement. La déductibilité est portée à 4,2 % pour la CSG sur les pensions à un taux de 6,6 %.

De ce fait, l’assujettissement à la CSG rétroagit en matière fiscale : le passage du taux nul au taux réduit au titre d’une pension versée au cours d’une année N peut conduire à nouveau à un assujettissement au taux nul de la même pension en N+1 si la déductibilité a fait passer le revenu imposable sous la barre du RFR fixée à l’article 1417 du code général des impôts, puis à un nouvel assujettissement au taux réduit deux ans plus tard : un effet de « va-et-vient », ou « effet de yoyo », est ainsi observé, qui peut faire varier tous les deux ans le revenu disponible après CSG – alors même que le montant de revenu de remplacement est inchangé.

Du fait de la progressivité du barème de l’impôt sur le revenu, cette déductibilité, qui conduit les ménages concernés à bénéficier d’une diminution globale d’impôt sur le revenu de 10,5 milliards d’euros par an, confère un avantage croissant avec le revenu, jusqu’à la limite du seuil d’assujettissement à l’impôt sur le revenu.

Le passage du taux réduit au taux normal permet également, en ce qui concerne les pensions de retraite, de minorer le revenu fiscal de référence de 0,4 point supplémentaire (la fraction de CSG déductible passant de 3,8 points avec le taux réduit à 4,2 points avec le taux normal).

L’étude d’impact fournit des exemples concrets de ces situations.

Le seuil de l’assujettissement à la CSG à taux réduit favorise les personnes qui bénéficient de réductions d’impôt

La référence à un montant de cotisation d’impôt pour l’assujettissement au taux réduit de CSG (3,8 %) conduit à retarder l’entrée dans le taux normal de CSG de contribuables qui bénéficient de réductions d’impôts grâce auxquelles leur montant d’impôt est inférieur au seuil. Les réductions d’impôt confèrent en effet aux contribuables un avantage pouvant atteindre 10 000 euros (5).

De ce fait, deux retraités ayant des revenus identiques peuvent être traités de manière différente au regard de la CSG. En pratique, un retraité ayant des revenus élevés peut même bénéficier d’un taux de CSG moins élevé qu’une personne ayant des revenus plus faibles.

Par ailleurs, ces situations fiscales ne sont souvent pas calculées, et constituent un effet d’aubaine ponctuel (par exemple, à l’occasion de la réalisation de travaux d’amélioration de l’efficacité énergétique du logement) d’autant moins compris qu’il apparaît l’année n+1 et disparaît en n+2.

En définitive, du fait de la conjonction de ces différents facteurs, près de 10 % des retraités changent chaque année de taux (soit 1,32 million de personnes sur un total de 13,5 millions de pensionnés du régime général), ce qui est particulièrement élevé pour une population dont les revenus sont en général plutôt stables.

Le rapport sur la fiscalité des ménages préconise de faire du revenu fiscal de référence l’unique critère pour l’octroi d’un avantage fiscal ou social. Il présente l’avantage d’être beaucoup moins volatile que le montant d’imposition, et, en l’espèce, le fait d’avoir le même critère pour les deux seuils serait beaucoup plus lisible pour les assurés. C’est ainsi que le présent article propose de mettre en œuvre cette préconisation.

1.  Les nouveaux seuils proposés

a.  Le dispositif proposé

Le présent article substitue au seuil de recouvrement de l’impôt sur le revenu fixé pour l’assujettissement au taux normal de CSG de 6,2 % sur les allocations de chômage ou 6,6 % pour les pensions de retraite, un critère de revenu fiscal.

Pour l’exclusion d’assiette

Le F du I du présent article modifie l’article L. 136-8 du code de la sécurité sociale relatif aux taux des contributions sociales.

Les 1° et 2° du II de l’article L. 136-8, qui fixent les taux s’appliquant pour l’un aux allocations de chômage et aux indemnités journalières maladie, maternité et AT-MP, pour l’autre aux pensions de retraite et aux pensions d’invalidité, sont modifiés afin que les deux taux apparaissent, le taux fort et le taux réduit. Ainsi, on n’affiche plus un taux normal et un taux réduit mais deux taux qui s’appliquent en fonction des revenus et des seuils commentés ci-après.

Le III de l’article L. 136-8 qui actuellement fixe les seuils haut et bas encadrant l’éligibilité au taux réduit est modifié.

Le 1° de ce III fixe désormais le seuil d’éligibilité au taux fort (6,2 % pour les allocations chômage, 6,6 % pour les pensions) : le critère du seuil de recouvrement de l’impôt sur le revenu est remplacé par le critère du revenu fiscal de référence de l’année n-2 qui excède 13 900 euros pour la première part du quotient familial, majoré de 3 711 euros par demi-part supplémentaire. Des seuils plus élevés s’appliquent pour les départements d’outre-mer.

Ce seuil de 13 900 euros équivaut à une retraite brute mensuelle de 1 456 euros pour un célibataire de plus de 65 ans. Il est fixé à un niveau qui permet aux retraités et chômeurs aux revenus moyens de bénéficier de l’effet de la réduction d’impôt de 2014 sur leur taux de CSG. Ce seuil est proche du nouveau seuil d’imposabilité applicable en 2014, désormais rehaussé à 13 834 euros du fait de la réduction d’impôt exceptionnelle (dans le cas d’une personne n’ayant aucune autre réduction d’impôt).

Le 2° du III de l’article L. 136-8 fixe désormais le seuil d’éligibilité au taux bas (3,8 % pour les allocations chômage comme pour les pensions), et par défaut, le seuil d’exemption. Les allocations éligibles au taux de 3,8 % sont celles des personnes dont le revenu fiscal de référence de l’année n-2 est inférieur aux seuils définis à l’alinéa précédent, et supérieur à 10 633 euros pour une personne seule, majoré de 2 839 euros par demi-part supplémentaire. Ce seuil est donc légèrement supérieur à celui qui permet d’être exonéré de taxe d’habitation (10 224 euros en 2014, 10 633 euros en 2015 du fait de la revalorisation de 4 % du seuil). Ce sont donc désormais deux seuils bien distincts, et l’éligibilité à la taxe d’habitation n’entraînera plus en elle-même éligibilité à la CSG sur les revenus de remplacement.

Le D du I modifie les 1° et 2° de l’article L. 136-2 relatifs aux revenus exclus de l’assiette de la CSG : sont exclues de cette assiette les pensions et allocations chômage des personnes dont le montant du revenu fiscal de référence de l’avant-dernière année n’excède pas les seuils mentionnés au 2° de l’article L. 136-8, c’est-à-dire 10 633 euros pour une personne seule.

Par défaut, les allocations des personnes dont le revenu fiscal de référence est inférieur au dernier seuil (10 633 euros pour une personne seule) ne sont pas soumises à la CSG, ni à la CRDS.

Ces montants sont fixés pour l’année 2015. Le quatrième alinéa du III de l’article L. 136-8 précise en effet que ces seuils seront revalorisés au 1er janvier de chaque année en fonction de l’inflation. Concrètement, un arrêté ministériel devra fixer chaque année les seuils applicables au revenu fiscal de référence de l’année n-2, en respectant la clé d’évolution fixée par l’article L. 136-8, à savoir l’évolution en moyenne annuelle des prix à la consommation hors tabac pour l’année n-2.

Les nouveaux seuils, y compris ceux applicables dans les DOM, sont présentés dans le tableau suivant.

(en euros)

 

Seuil de passage de l’exonération
au taux réduit de CSG

Seuil de passage du taux réduit
au taux normal de CSG

Nombre de parts fiscales

Métropole

Guadeloupe, Martinique, Réunion

Guyane, Mayotte

Métropole

Guadeloupe, Martinique, Réunion

Guyane, Mayotte

1re part de coefficient familial

10 633

12 582

13 156

13 900

15 207

15 930

1re demi-part supplémentaire

2 839

3 123

3 265

3 711

4 082

4 268

Demi-parts suivantes

2 839

2 839

2 839

3 711

3 711

3 711

Le II du présent article applique ces nouveaux seuils à la contribution de solidarité pour l’autonomie (CASA), due au titre des avantages de retraite et d’invalidité ainsi que des allocations de préretraite non assujetties à la contribution de solidarité autonomie sur les revenus d’activité, au taux de 0,3 %. Ainsi, le 1 bis de l’article L. 14-10-4 du code de l’action sociale et des familles est modifié. Le seuil d’assujettissement, actuellement fixé en fonction de la cotisation d’impôt sur le revenu (sont assujetties les pensions des personnes dont le montant de la cotisation d’impôt est supérieur au seuil de recouvrement de l’impôt sur le revenu, fixé à l’article 1657 du code général des impôts), est remplacé par le seuil d’éligibilité au taux haut de CSG, défini au 1° de l’article L. 136-8 du code de la sécurité sociale, soit un revenu fiscal de référence supérieur à 13 900 euros pour une personne seule.

Le III modifie par coordination l’article 154 quinquies du code général des impôts relatif aux seuils de déductibilité du revenu imposable de la CSG sur les revenus de remplacement.

b.  L’estimation de l’impact des changements de seuils pour les redevables

Afin de limiter l’impact pour les ménages, le changement des seuils d’assujettissement à la CSG est réalisé à rendement financier global inchangé par rapport aux prévisions faites pour 2015 avant prise en compte de cette réforme.

Le rapport de la Commission des comptes de la sécurité sociale indique que les recettes de la CSG sur les revenus de remplacement (toutes assiettes confondues, y compris les indemnités journalières qui ne sont pas impactées par le présent article) s’élèvent à 16,9 milliards en 2013, 17,2 milliards en 2014 (prévision) et 17,9 milliards en 2015 (prévision).

Ces prévisions de recettes 2015, qui ne tiennent pas compte des conséquences qu’aurait eues par ailleurs la réduction d’impôts exceptionnelle sur les revenus 2014, ne sont pas affectées par la mesure proposée.

Le total des gains pour les gagnants est donc entièrement compensé par le total des pertes pour les perdants.

Les gagnants

La réforme aura tout d’abord pour effet d’augmenter légèrement le nombre de personnes exemptées de la CSG sur leurs revenus de remplacement. En effet, le seuil d’exemption est légèrement supérieur à celui de l’exemption de la taxe d’habitation (cf. ci-dessus), si bien que les personnes qui se situent juste au-dessus du seuil d’éligibilité à la CSG à 3,8 % vont devenir exemptées en 2015.

Ensuite, certaines personnes dont les revenus de remplacement étaient auparavant soumis au taux normal de la CSG (6,6 % pour les retraites et 6,2 % pour les allocations chômage), vont désormais bénéficier du taux réduit et de l’exonération de CASA. C’est le cas pour environ 420 000 personnes. Il s’agit de personnes qui ne bénéficient actuellement pas de réductions d’impôts, et pour lesquelles le nouveau seuil devient donc plus favorable que l’ancien et ce, quel que soit le nombre de parts fiscales du foyer : en effet, dans le système actuel, une personne célibataire n’ayant aucune réduction d’impôt en 2013 ne bénéficie pas du taux réduit de CSG en 2014 dès lors que ses revenus 2012 excèdent 12 144 euros, soit une pension brute de plus de 1 248 euros, tandis que le nouveau seuil est fixé à 13 900 euros en 2015.

Au total, 700 000 personnes, soit plus de 3 % des bénéficiaires de revenus de remplacement, situées à 80 % dans les 3e, 4e et 5e déciles de niveau de vie, deviendront éligibles au taux réduit de CSG et à l’exonération de CASA en 2015.

Le gain moyen mensuel pour les ménages gagnants est estimé à 46 euros, (soit environ 34 euros par personne en moyenne).

Les perdants

À l’inverse, certains ménages bénéficiant d’une ou plusieurs réductions d’impôt vont perdre le bénéficie du taux réduit de CSG, le critère n’étant plus le montant d’imposition mais le revenu fiscal de référence.

460 000 personnes, réparties entre le 4e et le 10e décile de revenus et dont le montant de pension brut est toujours supérieur à 1 456 euros par mois pour un célibataire, perdront le bénéfice du taux réduit de CSG et ne seront plus exonérées de CASA. Il s’agit pour la plupart de personnes appartenant à des foyers bénéficiant de réductions d’impôt sur le revenu (autres que la réduction exceptionnelle de 2014 sur les bas revenus). Cela représente un peu moins de 2,3 % des bénéficiaires de revenus de remplacement. La perte moyenne pour ces ménages augmente avec le niveau de vie. Elle s’élève en moyenne à 51 euros par mois et par personne tous déciles de revenus confondus.

Enfin, certaines personnes actuellement soumises à la CSG à taux normal mais qui auraient bénéficié du taux réduit en 2015 grâce à la réduction d’impôt exceptionnelle de 2014 qui les a rendus non imposables (parce que cette réduction d’impôt s’ajoute dans leur cas à d’autres réductions d’impôts auxquelles elles étaient déjà éligibles) ne bénéficieront pas, pour leur part, de la baisse du taux de CSG qui leur aurait profité en l’absence de changement de critère. Leur situation est donc inchangée par rapport à 2014 (en revanche, ceux qui ne bénéficiaient pas de réductions d’impôts et deviennent non imposables du fait de la réduction d’impôt sur le revenu, font partie des « gagnants » qui passeront au taux réduit de CSG, le nouveau seuil ayant été fixé au niveau de « l’imposabilité » – cf. ci-dessus).

De même, la suppression de la première tranche d’impôt sur le revenu n’aura pas d’effet sur l’assujettissement à la CSG dans la mesure où cela ne change pas le revenu fiscal de référence.

Le tableau ci-après présente la répartition des gagnants et des perdants par décile de revenu fiscal de référence (par part fiscale).

RÉPARTITION DES PERSONNES IMPACTÉES PAR LES CHANGEMENTS DE SEUIL

(Nombre de personnes)

Décile de RFR
par part fiscale

Répartition
des personnes perdantes

Répartition
des personnes gagnantes

1

   

2

   

3

 

35 000

4

50 600

455 000

5

92 000

77 000

6

110 400

140 000

7

87 400

 

8

59 800

 

9

46 000

 

10

18 400

 

Total

460 000

700 000

Au total, il y aura donc davantage de gagnants que de perdants.

Le tableau suivant présente le nombre total de personnes bénéficiant de la CSG à 3,8 % actuellement, et après prise en compte des nouveaux critères d’assujettissement proposés par le présent article.

 

Avant réforme

Après réforme

 

Nombre de personnes

Proportion

Nombre de personnes

Proportion

Retraites 3,8 %

1 800 000

12 %

2 080 000

14 %

Chômage 3,8 %

160 000

3 %

200 000

4 %

Ainsi, 240 000 retraités et 40 000 demandeurs d’emploi supplémentaires bénéficieront du taux réduit de CSG en 2015.

Ce bilan doit être comparé avec les changements de taux qui conduisent de façon automatique, chaque année, en l’absence de réforme, à ce que près de 4,2 % des retraités voient augmenter le niveau de la CSG dont ils sont redevables (1,3 % passent de l’exonération au taux réduit et 2,9 % passent de l’exonération ou du taux réduit au taux normal). Ces mouvements créent annuellement des perdants en nombre important parmi les ménages appartenant aux déciles de revenus modestes, alors que les perdants de la mesure proposée seront exclusivement situés dans les déciles moyens et supérieurs. En outre, grâce à la mesure, le nombre de foyers affectés par ces changements sera considérablement réduit.

2.  Dispositions relatives au recouvrement

Le présent article procède par ailleurs à un toilettage des dispositions, actuellement éparses et insuffisamment mises à jour, qui régissent le recouvrement des cotisations et contributions sociales sur les revenus de remplacement afin de les rendre plus lisibles et d’en simplifier la gestion, sans impact pour les redevables. Elles sont regroupées au sein de la section première du chapitre premier du titre III du livre premier du code de la sécurité sociale.

L’article L. 130-1, qui est sans lien avec cette matière, est déplacé dans une section nouvelle du chapitre du code de la sécurité sociale consacré aux déclarations sociales (nouvel article L. 133-10 et nouvelle section 6 relative aux règles d’arrondis). Il est précisé à cette occasion que les règles d’arrondis ainsi visées (arrondi à l’euro près) s’appliquent bien aux déclarations adressées aux organismes, les calculs individuels des cotisations figurant sur les bulletins de paie restant eux en centimes comme cela a toujours été le cas. Par coordination sont modifiés les articles L. 137-11-1 et L. 241-3.

Le 4° du A du I du présent article crée un nouvel article L. 131-1 dans le code de la sécurité sociale (après avoir transformé l’actuel en article L. 131-1-1), prévoyant que les cotisations et contributions dues sur les revenus de remplacement, précomptées au moment du versement de ces revenus par l’organisme débiteur de ces revenus, seraient désormais versées dans tous les cas à l’organisme de recouvrement dont relève l’organisme débiteur. Par coordination, l’article L. 612-9 est abrogé et l’article 14 de l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 est modifié.

Ces dispositions sont à rapprocher de l’abrogation par le E du I du présent article des trois premières phrases du III de l’article L. 136-5 qui prévoyaient un recouvrement par l’ACOSS (et non par les organismes locaux) de la CSG sur revenus de remplacement, à l’exception des allocations chômage et des retraites agricoles.

Ces mesures permettront de mettre en place, à la fois pour les cotisations et les contributions, des modalités de gestion entre le niveau central et le niveau local plus adaptées et efficientes. Ces dispositions n’étaient pas appliquées systématiquement, mais leur suppression aura un impact non négligeable sur les montants recouvrés par l’ACOSS.

Le 5° du A du I modifie l’article L. 131-2 du même code, relatif aux cotisations maladies prélevées sur les revenus de remplacement pour tenir compte de la recodification du code du travail et du code rural, ainsi que des évolutions législatives intervenues depuis.

Les K et L du I qui modifient les articles L. 244-1 et L. 244-11 élargissent le champ des organismes qui peuvent être poursuivis à tout « cotisant ». Cela permettra de poursuivre les organismes débiteurs des revenus de remplacement devant le tribunal de police et d’appliquer à l’action civile en recouvrement intentée à leur encontre la prescription de cinq ans à compter du délai imparti par la mise en demeure ou l’avertissement.

De même, la nouvelle rédaction de l’article L. 244-14 (M du I) intègre les organismes débiteurs de contributions dues au titre des revenus de remplacement dans le champ de la sanction pénale applicable aux agents des organismes de sécurité sociale qui acceptent un avantage en vue en vue de faire obtenir à un cotisant une remise totale ou partielle des sommes dont il est redevable aux organismes de sécurité sociale.

Enfin, le I du I et le IV modifient les articles L. 242-13 du code de la sécurité sociale et L. 761-10 du code rural et de la pêche maritime qui permettent au régime local d’Alsace-Moselle d’exonérer certains assurés de CSG sur les revenus de remplacement en cas d’insuffisance des ressources « conformément aux principes énoncés à l’article L. 136-2 » du code de la sécurité sociale, lequel n’énonce pas de principes mais une liste de revenus de remplacement inclus et une liste de revenus exclus de l’assiette de la CSG. La référence à l’article L. 136-2 est donc supprimée. En pratique, le régime d’Alsace-Moselle applique les exonérations prévues à l’article L. 136-2.

*

* *

La Commission est saisie des amendements identiques AS6 de M. Jean-Pierre Door et AS23 de M. Francis Vercamer.

M. Jean-Pierre Door. Nous souhaitons supprimer l’article 7 car, pour près de 500 000 personnes, en particulier des retraités, vous allez faire passer le taux de CSG de 3,8 % à 6,6 %, soit un doublement de leur imposition, alors, prétendiez-vous, que le PLFSS ne taxerait pas les assurés sociaux. Or les pensionnés, les bénéficiaires des allocations chômages sont bien des assurés sociaux que vous taxez trop lourdement.

M. Francis Vercamer. Vous annoncez que 700 000 personnes sont concernées par une réduction et 460 000 par une augmentation du taux de CSG. Or, à budget égal, il va de soi que ces derniers voient leur imposition augmenter deux fois plus que les premiers voient la leur diminuer. C’est mathématique !

M. Bernard Perrut. Sous couvert de justice fiscale, on va de nouveau taxer, parmi nos concitoyens, ceux qui ne sont pas parmi les plus riches. Nous sommes très inquiets.

M. Jean-Pierre Barbier. Je n’ai pas retrouvé, sur le site de l’Assemblée, le compte rendu de la réunion de la Commission au cours de laquelle madame la ministre a affirmé que le PLFSS pour 2015 ne prévoirait aucune augmentation de cotisation. Je suis donc très gêné par cet article, car il signifierait qu’on nous aurait menti lors de la présentation du texte : les cotisations semblent bien devoir augmenter pour les retraités et pour les personnes âgées. Quand on prétend relancer l’économie par le pouvoir d’achat, on ne peut pas penser y parvenir en procédant de la sorte.

En outre, la création de tous les dispositifs mis en place, comme le compte pénibilité, et toutes les charges que vous faites peser sur les entreprises vont provoquer une baisse des recettes inquiétante et une diminution du pouvoir d’achat des plus faibles.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Le compte rendu de l’audition de Mme Touraine sera mis en ligne en fin d’après-midi. Vous verrez que M. Eckert s’est montré très clair à propos des effets « yoyo » affectant les retraités.

M. Michel Issindou. On ne modifie pas les taux et madame la ministre a raison quand elle l’affirme. Seulement, reconnaissez que calculer le taux de CSG sur le revenu fiscal de référence est beaucoup plus juste que de le calculer après déductions fiscales. C’est donc une vraie mesure de justice fiscale et sociale.

M. Francis Vercamer. Ce serait vrai si, dans le revenu fiscal de référence, figurait la totalité des allocations et des revenus de remplacement. Aussi, vous ne comparez pas ce qui est comparable. Entre deux retraités, dont l’un touche des allocations et l’autre pas, vous allez créer une injustice fiscale.

Mme Véronique Louwagie. Pour près de 700 000 personnes, le taux de la CSG va baisser et, pour environ 460 000, il va au contraire augmenter.

Le 10 octobre dernier, journal Le Monde s’est fait l’écho d’un chiffre intéressant établi par le Trésor : ces dernières années, 20 % des foyers ont supporté 75 % des hausses d’impôts. La question de l’égalité devant l’impôt est donc posée. À force de concentrer l’impôt sur quelques foyers fiscaux, vous allez vous heurter à un vrai problème de constitutionnalité.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Je ne vous comprends pas du tout, madame Louwagie : la concentration que vous évoquez n’a aucun rapport avec le revenu fiscal de référence qui est de 10 224 euros pour une première part. Il n’est pas question ici des hauts revenus.

Le rapport Lefebvre-Auvigne a très bien montré que, chaque année, près de 10 % des retraités changent de taux de CSG. En effet, à revenus de remplacement constants, le simple fait de passer d’un taux à l’autre peut vous rendre imposable, certes non recouvré, mais vous assujettit à un autre taux de CSG. C’est le « yoyo » évoqué : le retraité ne perçoit pas de revenus de remplacement supplémentaires mais il paie davantage de CSG. Substituer le revenu fiscal de référence au montant de l’impôt sur le revenu pour déterminer le taux de CSG permettra d’éviter ce phénomène.

Certains retraités, ne bénéficiant d’aucune déduction fiscale, étaient juste au-dessus du plafond et payaient une CSG à taux plein, quand d’autres, tout en percevant des revenus plus importants parce que bénéficiant de réductions fiscales tout à fait légales, étaient soumis à un taux minoré de CSG. Est-ce juste ? Le texte vise à corriger cet effet de yoyo.

Au reste, les retraités ne sont pas les seuls concernés par cet article : il touche également tous ceux qui perçoivent des revenus de substitution : allocations chômage, indemnités journalières de maladie, de maternité, rentes d’accident du travail et maladie professionnelle (ATMP). M. Vercamer a néanmoins raison de souligner que certaines allocations ne sont pas prises en compte : les allocations familiales et l’allocation logement, qui sont des allocations de versement universel.

Certes, quelque 420 000 personnes qui percevaient des revenus plus importants mais qui n’étaient pas pris en compte parce que leur impôt était minoré par des déductions fiscales, vont y perdre – mais à rendement constant : il n’y aura pas de modification de la recette de CSG après la mise en œuvre de cette réforme qui ne mérite pas le torrent d’indignité que vous déversez sur elle.

Les amendements sont rejetés.

La Commission adopte l’article 7 sans modification.

Après l’article 7

La Commission est saisie de l’amendement AS47 de M. Francis Vercamer.

M. Arnaud Richard. La perte d’autonomie est un défi financier qui engage la préservation de notre modèle social. Elle pourrait engendrer des dépenses supplémentaires de l’ordre de deux à trois points de PIB d’ici à 2025. Les dépenses de l’aide personnalisée d’autonomie (APA) devraient doubler au cours des vingt prochaines années et atteindre 15 à 20 milliards d’euros par an en 2040. Dès lors, les financements de 645 millions d’euros, dont 375 millions pour revaloriser l’APA, prévus par le Gouvernement sont vraiment dérisoires au regard des enjeux. Soulignons par ailleurs que, pour 2014, le Gouvernement a d’ores et déjà affecté 600 millions d’euros à la contribution additionnelle de solidarité autonomie, destinée au FSV.

Le groupe UDI défend ici un amendement de principe et entend prendre date afin de répondre à ce défi et, dans la perspective de renforcer l’autonomie fiscale des collectivités territoriales, propose qu’une fraction de la CSG soit affectée aux conseils départementaux.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Le problème que vous posez, monsieur Richard, est bien réel. J’espère néanmoins que, même dans deux ou trois ans, nous n’en serons pas là. Un prochain projet de loi répartira les compétences et un autre texte concernera les ressources des collectivités locales – régions, départements et bloc communaux. Je ne souhaite pas qu’à cette occasion on diversifie le partage de la CSG, aujourd’hui réservée à la sécurité sociale et au FSV.

Nous réclamons la clarté pour le citoyen afin qu’il connaisse mieux les compétences des collectivités territoriales et les financements affectés aux missions qui leur seront confiées. Or la CSG, à mon avis, doit rester dans le secteur social.

Je vous propose donc de retirer votre amendement, sinon avis défavorable.

M. Élie Aboud. Cette question concerne l’avenir des conseils départementaux, et il est évident, monsieur le rapporteur, qu’il faudra la clarifier dans un ou deux mois. Aujourd’hui, un vent de panique souffle sur les territoires au sujet des prestations et du médico-social.

Mme Isabelle Le Callennec. Notre collègue Arnaud Richard pose, en effet, un vrai problème. Je profite de la présence parmi nous de Mme Delaunay qui avait engagé tout un travail sur l’autonomie. L’Assemblée a voté en première lecture le projet de loi relatif à l’adaptation de la société au vieillissement, mais la question du financement de la perte d’autonomie subsiste. La présente proposition a déjà été formulée au sein de l’Assemblée des départements de France. Nous devons trouver des pistes. Celle d’un cinquième risque semble abandonnée ; où en est-on ?

L’amendement est rejeté.

Article 8
(art. L. 311-3 du code de la sécurité sociale, art. 13 de la loi n° 98-546 du 2 juillet 1998
portant diverses dispositions d’ordre économique et financier)

Affiliation des personnes participant de façon occasionnelle
à des missions de service public

Cet article vise à créer un cadre social adapté à certaines activités occasionnelles accomplies par des professionnels, en général à titre accessoire, sous forme de concours à des missions de service public, notamment dans le domaine sanitaire et social.

Par ailleurs, il supprime l’exonération dont bénéficiaient jusqu’alors les indemnités versées aux membres des chambres des métiers et de l’agriculture ainsi que celle applicable aux indemnités pour perte de gain que perçoivent les administrateurs des caisses de sécurité sociale ayant la qualité de travailleur indépendant.

1.  La collaboration occasionnelle au service public

a.  Le cadre juridique existant

L’affiliation à un régime de sécurité sociale obligatoire et l’assujettissement à cotisations de l’ensemble des rémunérations perçues en lien avec l’exercice d’une activité professionnelle sont des principes fondamentaux du droit social français. L’article L. 311-2 du code de la sécurité sociale prévoit l’affiliation obligatoire au régime général de tous les salariés et personnes rémunérées par un employeur, indépendamment de la dénomination donnée aux rémunérations concernées et sans considération des contreparties directes, en termes de droits contributifs, qui peuvent être éventuellement attendues des cotisations dues.

L’article L. 311-3 indique une liste de personnes qui entrent dans le champ de l’article L. 311-2 précité, même si elles sont rémunérées sous forme de pourboire.

Le 21° de l’article L. 311-3, ajouté par la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999, prévoit l’affiliation au régime général des collaborateurs occasionnels du service public, soit les « personnes qui exercent à titre occasionnel pour le compte de l’État, d’une collectivité territoriale ou d’un de leurs établissements publics administratifs, d’une autorité publique indépendante dotée de la personnalité morale ou d’un organisme privé chargé de la gestion d’un service public à caractère administratif, une activité dont la rémunération est fixée par des dispositions législatives ou réglementaires ou par décision de justice ».

Ce dispositif, entré en vigueur le 1er août 2000, permet à l’État, aux collectivités territoriales, aux établissements publics administratifs ainsi qu’aux autorités administratives indépendantes de recourir à des experts fournissant un travail occasionnel qui ne peut être réalisé par leurs moyens propres.

Il permet à l’employeur de déclarer les sommes versées aux URSSAF en bénéficiant d’un abattement du taux des cotisations patronales de sécurité sociale de 20 %. Si le collaborateur occasionnel est un travailleur indépendant, il a la possibilité de déclarer la somme qui lui est versée au régime social des indépendants (RSI), dont il relève à titre principal, afin d’éviter une double-affiliation au régime général et au régime des indépendants au seul titre de cette activité occasionnelle. Pour certaines activités, une assiette forfaitaire est prévue. Les cotisations ou assiettes forfaitaires applicables sont fixées par l’arrêté du 21 juillet 2000.

Le décret n° 2000-35 du 17 janvier 2000 portant rattachement de certaines activités au régime général, modifié par le décret n° 2008-484 du 22 mai 2008, dresse une liste de collaborateurs occasionnels au service public. Parmi eux, on trouve des experts et traducteurs interprètes, des personnes chargées d’une mission de médiation, des experts judiciaires, des médecins consultés par les commissions départementales d’aide sociale, etc.

Or, la définition de cette catégorie d’assujettis ne permet pas en pratique d’affilier l’ensemble des personnes participant de façon occasionnelle à l’exécution d’une mission de service public, en particulier dans le secteur de la santé.

b.  De nouveaux modes de collaboration occasionnelle au service public se développent en dehors de tout cadre juridique

L’étude d’impact cite un certain nombre d’exemples d’activités occasionnelles de service public non mentionnées par le décret de 2000, et pour lesquelles le statut juridique et social de l’indemnité est incertain. Ainsi en va-t-il des indemnités pédagogiques versées par les universités aux médecins accueillant dans leur cabinet des étudiants en médecine stagiaires, ou des indemnités forfaitaires versées, au titre de leurs fonctions électives, aux administrateurs des associations de gestion agréée et des centres de gestion agréée.

L’absence de solution d’affiliation pour certaines personnes qui participent à une mission de service public, notamment dans l’organisation et la délivrance des soins, pour des activités occasionnelles dont le nombre va en se multipliant, constitue un enjeu en termes de simplification administrative et d’atteinte des objectifs des politiques publiques qui s’appuient sur ces activités.

En l’absence de cadre juridique adéquat, les URSSAF déterminent au cas par cas le régime qui doit s’appliquer à telle ou telle indemnité. Par exemple, il a pu être demandé à des médecins accueillant des stagiaires de s’affilier au Régime social des indépendants, ce qui nécessite des démarches administratives pour eux-mêmes et pour l’organisme qui leur verse l’indemnité (les universités par exemple) et peut générer des craintes quant au statut des indemnités antérieures à l’affiliation, avec in fine le risque que des médecins renoncent à accueillir des stagiaires (alors que le développement des stages constitue l’un des axes de la stratégie nationale de santé).

Un précompte par l’employeur principal (dans l’exemple cité, l’université), sous réserve de son accord et de celui du salarié, pourrait permettre de simplifier un certain nombre de cas (en l’espèce, l’université verserait une prime d’encadrement au centre de santé qui verserait l’indemnité au médecin en précomptant les cotisations dues au régime général).

c.  Le dispositif proposé

Le 1° du I du présent article propose une réécriture du 21° de l’article L. 311-3 du code de la sécurité sociale afin d’élargir la notion de collaborateurs occasionnels aux « personnes qui contribuent à l’exécution d’une mission de service public pour le compte d’une personne publique ou privée, lorsque cette activité revêt un caractère occasionnel au regard du temps qu’elles y consacrent et des revenus qu’elles en tirent ».

Un décret précisera les sommes, activités et employeurs visés.

Trois possibilités d’affiliation sont ouvertes :

– affiliation au régime général avec paiement des cotisations par l’administration, la personne publique ou l’organisme qui a recours au professionnel ;

– affiliation au Régime social des indépendants et intégration par le professionnel dans ses revenus non salariaux sur lesquels sont assis ses cotisations sociales de la rémunération versée par l’administration, la personne publique ou l’organisme ;

– versement de la rémunération due au titre de la collaboration occasionnelle à l’employeur « habituel » lorsque celui-ci maintient tout ou partie du salaire pendant l’activité occasionnelle. Il versera alors la rémunération nette au salarié en même temps que son salaire habituel, et précomptera les cotisations en même temps.

Pour chaque activité, le décret indiquera laquelle ou lesquelles de ces possibilités de gestion sont ouvertes au regard notamment de la nature de l’activité considérée.

Ce décret devra être publié avant la fin 2014 afin de permettre l’entrée en vigueur de l’article au 1er janvier 2015.

En ce qui concerne les personnes publiques faisant appel à des collaborateurs occasionnels, une expertise menée en 2014 par l’administration a déjà permis de faire des préconisations opérationnelles concernant les procédures et circuits à mettre en place pour organiser le précompte des cotisations.

2.  Des situations pour lesquelles l’exonération de cotisations sociales ne se justifie plus

Depuis la suppression de l’exonération de cotisations sociales des indemnités de mandat des élus locaux par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, l’exonération de certaines indemnités électives ne se justifie plus.

a.  Le régime social actuel

Les indemnités versées aux élus de chambres d’agriculture et de métiers, ainsi que celles versées aux administrateurs élus des organismes de sécurité sociale lorsqu’ils ont la qualité de travailleur indépendant, bénéficient d’une exonération de cotisations de sécurité sociale en application de la loi du 2 juillet 1998 portant diverses mesures d’ordre économique et financier.

La création de ce mécanisme dérogatoire avait été motivée par la volonté de traiter les élus des organismes consulaires (à l’exception des chambres de commerce et d’industrie) et les élus locaux de façon identique quant au régime social de leurs indemnités de fonction. Ainsi, la normalisation du régime social des indemnités de fonction des élus locaux implique inversement de normaliser la situation des élus consulaires.

b.  Le dispositif proposé

Ainsi, le II du présent article supprime l’exonération de cotisations dont bénéficient les indemnités versées aux élus des chambres d’agriculture, des chambres de métiers et les indemnités pour perte de gain des administrateurs des caisses de sécurité sociale ayant la qualité de travailleur indépendant.

L’assiette totale des indemnités qui cesseraient de bénéficier d’une exonération intégrale est évaluée à 35 millions d’euros par l’étude d’impact. La recette supplémentaire estimée à 13 millions d’euros par an correspond à l’application à cette assiette du taux global des cotisations patronales et salariales de sécurité sociale du régime général, hors CSG et CRDS qui sont déjà précomptées, soit un prélèvement de 36,8 % en 2015.

c.  Entrée en vigueur

Le III dispose que le présent article s’applique aux sommes versées à compter du 1er janvier 2015.

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* *

La Commission adopte l’article 8 sans modification.

Après l’article 8

La Commission est saisie de l’amendement AS27 de M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. Je reviens sur le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) qui a fait couler beaucoup d’encre, même parmi certains députés de la majorité – qui ont malheureusement quitté la Commission.

Ce CICE est une usine à gaz. On a annoncé 20 milliards d’euros pour les entreprises, puis 16 milliards et 8,7 milliards aujourd’hui – mais beaucoup moins en réalité. Je propose, par conséquent, de suivre le rapport Gallois, donc de supprimer le CICE pour développer une autre politique de compétitivité consistant à alléger les charges des entreprises, notamment les charges familiales.

M. Gérard Bapt, rapporteur. M. Vercamer sait bien que le débat qu’il entame dépasse les compétences de la commission des affaires sociales et qu’il doit être mené en commission des finances où a été voté le CICE. Par ailleurs, supprimer totalement les cotisations patronales familiales irait à l’encontre des idées du MEDEF lui-même. Je vous propose de retirer votre amendement, faute de quoi j’émettrai un avis défavorable.

M. Francis Vercamer. J’entends bien que la question dépasse les attributions de notre commission, mais si l’on ne peut évoquer, au cours de l’examen du PLFSS, la manière dont on finance la protection sociale, que faisons-nous ici ?

Ce financement repose quasi exclusivement sur le travail, et le Président de la République et le Premier ministre eux-mêmes reconnaissent que la compétitivité des entreprises est pénalisée par cette charge. Je propose, par conséquent, de changer de paradigme puisque le CICE ne s’applique, de surcroît, pas à toutes les entreprises et notamment pas à celles qui créent des emplois, les TPE. Il s’agit d’alléger, de manière unilatérale, l’ensemble des charges patronales pour diminuer le coût du travail. Pendant que vous répondez que c’est impossible, les entreprises meurent et le chômage augmente.

M. Jean-Pierre Door. M. Vercamer a raison : nous parlons sans cesse de ce problème et nous ne faisons rien. Le rapport Gallois mais aussi le Haut Conseil pour le financement de la protection sociale, sans oublier la mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (MECSS), évoquent ces pistes. Pour le groupe UMP, il convient également de réfléchir au financement de la protection sociale et de revenir sur le CICE et les charges patronales. C’est pourquoi nous voterons cet amendement.

Mme Isabelle Le Callennec. Nous avons évoqué en préambule l’idée de travailler, au sein de notre commission, sur la réforme du financement de la protection sociale. C’est une nécessité. Je suis assez surprise d’entendre le rapporteur se réfugier derrière les positions du MEDEF. Il est, en effet, intéressant de savoir si les cotisations familiales doivent continuer à peser sur le travail. Je pense qu’il revient vraiment à notre commission d’enrichir cette réflexion.

M. Gérard Bapt, rapporteur. M. Vercamer souhaite supprimer le CICE, comme recommandé par le rapport Gallois. Or le CICE fait suite au rapport Gallois. Ensuite, les entreprises sont d’accord pour assurer une partie des charges familiales. Enfin, puisque la suppression du CICE ne suffira pas à compenser la suppression des cotisations patronales familiales, M. Vercamer propose l’augmentation de la TVA. C’est dire si le débat est large et qu’il dépasse le champ de notre commission. Du reste, il n’est pas nouveau.

L’amendement est rejeté.

Article additionnel après l’article 8
(art. L. 241-10 du code de la sécurité sociale)

Réduction forfaitaire de cotisations patronales pour l’emploi à domicile

La Commission examine ensuite, en discussion commune, les amendements identiques AS5 de M. Jean-Pierre Door et AS29 de M. Francis Vercamer, et les amendements identiques AS249 de M. Gérard Bapt et AS30 de M. Francis Vercamer.

M. Jean-Pierre Door. Je souhaite interpeller la majorité sur les mesures néfastes affectant le régime des cotisations des particuliers-employeurs – baisse du plafonnement des avantages fiscaux, suppression de la déclaration au forfait –, qui ont eu pour conséquence la suppression de milliers de postes dans ce secteur au cours des deux dernières années. Or le texte prévoit une nouvelle mesure négative, avec la baisse ou la suppression du complément de mode de garde pour les familles qui disposent d’un certain revenu et qui embauchent des assistantes maternelles.

Pour compenser la hausse de près de 12 % des charges pesant sur les ménages, et pour tenter d’endiguer le recours au travail au noir qui s’est développé, une réduction de cotisation de 75 centimes par heure déclarée a été décidée en 2013, après de nombreux débats – il me semble que le Gouvernement n’en voulait pas. Nous demandions, pour notre part, beaucoup plus.

Nous réitérons notre démarche par le biais de cet amendement et proposons de porter cette déduction forfaitaire à 2 euros par heure déclarée. Cette mesure permettrait de limiter le travail au noir dans un domaine très sensible pour de nombreuses familles qui parfois ne perçoivent pas des revenus importants.

M. Francis Vercamer. Compte tenu des 29,5 millions d’heures en moins déclarées en 2013, soit près de 16 000 emplois équivalents temps pleins détruits, cet amendement vise à porter l’exonération de 75 centimes à 2 euros.

M. Gérard Bapt, rapporteur. À la suite de la censure par le Conseil constitutionnel, pour des raisons de forme, de mon amendement au projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale, je propose à nouveau, avec l’amendement AS249, de porter de 75 centimes à 1,50 euro l’abattement sur les charges sociales pour les employeurs particuliers à domicile. Après la mesure Baroin de suppression de l’abattement forfaitaire de quinze points sur les charges sociales, le nombre d’heures travaillées avait déjà diminué. La nouvelle majorité a supprimé la possibilité de déclarer au forfait ; cette mesure s’est ajoutée à la précédente, alors qu’il aurait sans doute mieux valu supprimer le forfait tout en conservant l’abattement forfaitaire. La mesure que je propose n’a pas l’accord formel du Gouvernement, mais le ministre du budget, ici même, a laissé la porte entrebâillée en répondant à ma question. Cette mesure aurait un coût de 120 millions d’euros.

M. Francis Vercamer. Cet amendement du rapporteur est le même que mon amendement de repli. Voter cette proposition serait un pas en avant, mais un abattement de 2 euros est tout de même préférable.

M. Jean-Louis Costes. Ce domaine est une source d’emplois inépuisable en milieu rural. Il concerne beaucoup de personnes peu qualifiées, notamment des femmes, il participe à l’action que mènent les gouvernements successifs pour le maintien des personnes âgées à domicile, et c’est sans doute le secteur où le travail au noir est le plus élevé. Passer à 2 euros serait donc envoyer un message fort à ces personnels.

M. Dominique Tian. Le rapporteur parle à titre personnel, car il ne connaît pas l’avis du Gouvernement. Ce dernier est si peu soucieux de la question, malgré la dégradation de l’emploi familial, qu’il a oublié de l’inscrire dans le PLFSS. M. le rapporteur joue donc le rôle du pompier de service. La proposition a été censurée le 6 août par le Conseil constitutionnel, et l’urgence de la situation le conduit à présent à lancer cette petite bouée de sauvetage, insuffisante. Le Gouvernement a-t-il l’intention, toutefois, d’y donner un avis favorable ? Comme elle l’a oublié dans le PLFSS, je ne pense pas que Mme Touraine se soit exprimée sur le sujet en commission.

Mme Bérengère Poletti. Le coût affiché par le rapporteur est à emplois constants. Or le secteur de l’emploi à domicile connaît, dès lors que les charges augmentent, un phénomène important de travail clandestin conduisant à des pertes de recettes. En outre, contrairement aux entreprises et aux associations, les particuliers employeurs ne bénéficient ni du CICE ni des mesures sur les bas salaires. À côté de ces dispositifs, la mesure à 2 euros est même faible, en réalité ; 1,50 euro, ce ne peut être efficace.

M. Jean-Pierre Barbier. Si ces amendements vont dans le bon sens, 1,50 euro n’est pas suffisant, et nous pourrions même aller au-delà de 2 euros. Ce sont les recettes qui posent problème, avec le travail au noir. Le Portugal attire sur son territoire des retraités aux revenus relativement importants, en les exonérant d’impôt sur le revenu. À la question de savoir si cela ne créait pas un sentiment d’injustice dans le pays, la réponse a été non : ces retraités dépensent leur argent, font vivre le commerce, et les recettes de TVA ont augmenté de 20 % au Portugal en 2014. Vous voulez toujours taxer ceux que vous considérez comme les plus riches, avec pour résultat que ces personnes ne consomment plus, ne créent plus de richesses.

M. Jean-Pierre Door. La loi Borloo sur les services à la personne est un excellent texte qui a permis d’aider des personnes âgées ou en difficulté, tout en renforçant la lutte contre le travail au noir. Je suis satisfait que M. Bapt présente un amendement dans le même sens que nous, même si sa proposition n’a pas la même ampleur. Nous étions tous deux présents, l’an dernier, à la commission mixte paritaire où tous ont souhaité porter l’exonération à 1,50 euro, mesure retoquée par le Conseil constitutionnel. Nous n’avons pas, comme M. Vercamer, présenté d’amendement de repli, mais nous sommes prêts à accepter un amendement commun de la Commission portant l’exonération à 1,50 euro, pour en débattre avec le Gouvernement.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Pour connaître la position du Gouvernement, monsieur Tian, vous aviez l’occasion d’interroger les ministres en audition. M. le secrétaire d’État chargé du budget, vous l’aurez remarqué, a été attentif à mon point de vue. Vous pourrez interroger le Gouvernement dans l’hémicycle.

Mme Poletti a eu des vibratos dans la voix pour expliquer combien cette mesure était indispensable, mais elle a voté, en son temps, la mesure Baroin.

Mme Bérengère Poletti. Non !

M. Gérard Bapt, rapporteur. J’invite la Commission à repousser la proposition à 2 euros, la mienne étant déjà très significative. Nous en attendons un retour sur investissement, dans la mesure où les chutes de recettes constatées sont supérieures au coût de l’amendement.

M. Francis Vercamer. J’accepte de me rallier à la proposition de M. le rapporteur.

La Commission adopte les amendements identiques AS249 et AS30 à l’unanimité.

En conséquence, les amendements AS5 et AS29 tombent.

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Article additionnel après l’article 8
(art. L. 241-10 du code de la sécurité sociale)

Précision du champ de l’exonération de cotisations
pour l’emploi au domicile des personnes fragiles

La Commission examine l’amendement AS250 du rapporteur.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Il existe deux types de prise en charge de l’emploi à domicile, selon que l’employeur est un employeur direct ou qu’il fait intervenir à son domicile le salarié d’une structure externe. Dans ce dernier cas, la prise en charge est définie dans le cadre de l’ONDAM, ce qui a donné lieu à des litiges. Cet amendement précise donc que l’exonération ne s’applique pas aux activités effectuées par des personnes dont le salaire est pris en charge par la dotation globale de l’assurance maladie.

M. Jean-Pierre Door. M. le rapporteur peut-il préciser la situation dont il s’agit ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. Dans les deux cas en question, il s’agit de salariés : les uns sont des salariés directs de l’employeur à domicile, les autres sont salariés par des associations. Dans le second cas, le dispositif entre dans le cadre de l’ONDAM au titre des personnes âgées dépendantes.

Mme Isabelle Le Callennec. Quelles ont été les difficultés rencontrées avec les salariés des structures ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. Certaines structures prises en charge dans le cadre de l’ONDAM ont de surcroît demandé le bénéfice de l’abattement dont nous venons de parler, qui est réservé aux employeurs particuliers.

Mme Véronique Louwagie. En proposant que l’exonération ne s’applique pas aux activités effectuées par les personnes dont le salaire est versé par une association, vous supprimez l’exonération pour ces derniers : est-ce bien cela ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. Non, nous précisons que l’exonération ne s’applique qu’aux employeurs particuliers.

La Commission adopte l’amendement.

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Après l’article 8

Puis elle examine l’amendement AS117 de M. Dominique Tian.

M. Élie Aboud. Le nombre d’heures déclarées ayant fondu en 2013, et près de 20 000 emplois ayant été détruits, cet amendement tend à rétablir la déclaration au forfait.

M. Gérard Bapt, rapporteur. J’en demande le retrait, compte tenu de l’amendement portant l’exonération à 1,50 euro que la Commission a adopté à l’unanimité.

L’amendement est retiré.

La Commission en vient à l’amendement AS31 de M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. Cet amendement vise à concentrer les allègements de charges sur les bas salaires, afin de favoriser l’emploi des jeunes, l’emploi des seniors et les TPE-PME. Ces allégements représentent un manque à gagner de 23 milliards d’euros par an et profitent essentiellement aux grands groupes, notamment de la distribution, sans avoir d’effet avéré sur l’emploi, tout en étant susceptibles de constituer des trappes à bas salaires. C’est pourquoi nous proposons, en portant cette exonération de 1,6 à 1,5 fois le SMIC, de la concentrer sur les bas salaires.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Cet amendement revient sur les mesures générales d’allègement et non sur le seul pacte de responsabilité : il remet en question, entre autres, les allègements Fillon. C’est un large débat. Pour l’heure, je demande à la Commission de le repousser. Vous interrogerez la ministre en séance.

M. Francis Vercamer. Chaque fois qu’une décision importante doit être prise, le rapporteur renvoie à la ministre. Quel est l’intérêt du travail en commission ?

La Commission rejette l’amendement.

Article 9
(art. L. 242-4-4 [nouveau] du code de la sécurité sociale)

Encadrement des assiettes forfaitaires

Cet article vise à limiter à 30 % le taux d’abattement pouvant être appliqué à la rémunération réelle dans les cas où les cotisations sociales sont calculées sur une assiette forfaitaire, dans un souci de protection des droits sociaux. Pour ne pas pénaliser l’emploi dans les secteurs dans lesquels la demande de travail des entreprises ou des associations est particulièrement sensible à son coût, cet encadrement ne concernerait que les rémunérations supérieures à 1,5 fois le montant du plafond de la sécurité sociale.

1.  Les assiettes forfaitaires de cotisations sociales

Comme l’indique le premier alinéa de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, l’assiette des cotisations de sécurité sociale du régime général recouvre l’ensemble des salaires et avantages versés au salarié en contrepartie ou à l’occasion de son travail.

La partie législative du code de la sécurité sociale renvoie à des arrêtés ministériels le soin de fixer, pour certaines catégories d’assujettis, des assiettes forfaitaires de cotisations de sécurité sociale.

Ainsi, les articles qui régissent les cotisations pour chacune des branches du régime général, soit les articles L. 241-2 (risque maladie), L. 241-3 (vieillesse), L. 241-5 (AT-MP), L. 241-6 (famille) comprennent chacun une phrase ainsi rédigée : « Des cotisations forfaitaires peuvent être fixées par des arrêtés ministériels pour certaines catégories de salariés ou assimilés. »

Les assiettes forfaitaires sont calculées par référence au SMIC ou au plafond de la sécurité sociale selon les activités, et souvent en fonction de la durée d’activité.

De nombreuses catégories d’emplois sont concernées, par exemple les vendeurs colporteurs de presse, les correspondants de presse, les artistes et mannequins, les ouvreuses de théâtre, les chansonniers, les gardiens auxiliaires des monuments publics, les personnes travaillant dans un centre de vacances et de loisirs pour mineurs, les cadets de golfs... On les retrouve dans l’annexe 5 des projets de loi de financement de la sécurité sociale qui dresse la liste et donne le coût des exonérations et exemptions d’assiette. Cependant, le coût pour la sécurité sociale des assiettes forfaitaires reste difficile à évaluer car par définition, les sommes exemptées ne sont pas déclarées par les employeurs.

Il s’agit d’assiettes tendant à préserver l’acquisition de droits aux assurances sociales (celles fixées par des arrêtés tendant à l’inverse à réduire les cotisations et droits sociaux qui peuvent par ailleurs être acquis dans le cadre d’une activité principale, dans une logique relevant de l’optimisation).

Les assiettes forfaitaires sont parfois supérieures au salaire réel, dans le but d’améliorer la couverture sociale des personnes concernées, et parfois inférieures, dans le but de favoriser leur emploi. Seules les faibles rémunérations sont concernées par le premier cas (6). En revanche, les niveaux de rémunérations sont beaucoup plus variés dans le cas des assiettes forfaitaires inférieures au salaire.

Parmi les emplois pouvant donner lieu à des rémunérations supérieures au plafond de la sécurité sociale (3 129 euros par mois), l’étude d’impact cite en exemple les formateurs occasionnels entrant dans le champ d’application de l’arrêté du 28 décembre 1987 modifié, pour lesquels les cotisations sont assises sur une assiette abattue de 69 % à 37 % (l’abattement d’assiette disparaît lorsque la rémunération dépasse 1 700 euros par jour). Cette assiette dérogatoire conduit, pour une intervention d’une journée rémunérée forfaitairement 1 500 euros, à acquitter les cotisations sur une assiette de 751 euros. Son utilisation est limitée à 30 jours par an et par employeur : un formateur intervenant auprès de plusieurs employeurs peut ainsi en bénéficier au-delà de 30 jours.

Les assiettes forfaitaires inférieures au salaire versé, même si elles répondent à un objectif d’intérêt général, peuvent poser problème dans la mesure où elles ont pour effet de diminuer les recettes de la sécurité sociale et de réduire les droits des salariés (du moins en matière de retraite et d’indemnités journalières).

Elles peuvent aussi créer des distorsions de concurrence entre travailleurs d’un même secteur selon le type de contrat (par exemple entre un formateur salarié et un formateur occasionnel).

Elles peuvent parfois se cumuler avec d’autres dispositifs d’exonérations. Par exemple, une même personne peut se voir appliquer l’assiette forfaitaire des personnes exerçant une activité dans le cadre d’une association sportive et bénéficier également d’une exemption totale d’assiette pour les sommes qu’elle perçoit en sus, au titre de sa participation à une manifestation sportive (120 euros par manifestation dans la limite de cinq manifestations par mois).

L’étude d’impact évoque aussi un problème d’« information du Parlement » dans la mesure où ces dispositifs sont créés par arrêté (7). Il ne s’agit pourtant pas tant d’un problème d’information, puisque l’annexe 5 des projets de loi de financement y remédie, que d’un problème de dessaisissement du pouvoir législatif.

2.  Le dispositif proposé

Afin de limiter les abus, le présent article crée un article L. 242-4-4 dans le code de la sécurité sociale disposant que les assiettes forfaitaires ne peuvent être inférieures à 70 % de la rémunération réelle lorsque celle-ci est supérieure à 1,5 fois le plafond de la sécurité sociale.

Ainsi, lorsque la rémunération atteint 4 693,50 euros (1,5 x 3 129), l’assiette des cotisations est 3 285,45 euros (soit 70 % de 4 693,50).

L’étude d’impact indique que la mesure concernera les formateurs occasionnels et les personnes rémunérées par des associations sportives, dès lors pour ces dernières que les sommes perçues, après abattement de 120 euros par manifestation, dépassent le seuil de 1,5 fois le plafond de la sécurité sociale.

Les arrêtés du 28 décembre 1987 (formateurs occasionnels) et du 27 juillet 1994 (personnes exerçant une activité dans le cadre d’une personne morale à objet sportif, d’une association de jeunesse ou d’éducation populaire) devront être modifiés. Les autres avantages existant dans le domaine sportif et dérogeant au droit commun (exonération propre aux arbitres et exonération à l’occasion des manifestations sportives) ne sont pas remis en cause.

L’étude d’impact chiffre à 10 millions d’euros l’économie générée en 2015 par la catégorie des formateurs occasionnels. Avec 5 000 formateurs concernés, la masse salariale totale, de l’ordre de 114 millions d’euros, générerait 32,6 millions d’euros de cotisations de sécurité sociale (au taux global de 36,89 %) après limitation à 30 % de l’abattement d’assiette, contre 22 millions d’euros actuellement (ces deux montants sont à comparer aux 44 millions d’euros de cotisations qui seraient dues en l’absence d’assiette forfaitaire).

En outre, la fixation d’une assiette forfaitaire minimale pour les personnes exerçant une activité dans le cadre d’une personne morale à objet sportif rapporterait 5 millions d’euros.

Le chiffrage de cet impact repose sur les hypothèses suivantes : on retient un nombre de 60 000 bénéficiaires effectifs correspondant aux personnes exerçant une activité dans le champ concerné une fois exclues toutes les personnes dont les rémunérations ne sont pas éligibles à l’assiette forfaitaire (personnels administratifs, dirigeants et administrateurs salariés).

Au total, la mesure rapporterait 15 millions d’euros en 2015.

L’étude d’impact évalue également les conséquences pour les personnes concernées. Dans le cas des formateurs occasionnels, pour une rémunération journalière de 500 euros par exemple, le montant des cotisations passera de 73 euros à 116 euros (ce montant serait de 193 euros pour un salarié affilié du régime général soumis aux taux normaux de cotisations).

3.  La nécessité de mieux encadrer les assiettes forfaitaires

Votre rapporteur s’étonne du fait que la partie législative du code de la sécurité sociale renvoie à des arrêtés ministériels le soin de fixer des assiettes forfaitaires, qu’elles soient plus larges ou plus restreintes que la rémunération de la personne concernée.

La détermination de l’assiette d’un prélèvement obligatoire relève du pouvoir législatif en vertu de l’article 34 de la Constitution.

Le présent article va dans le bon sens, mais il serait souhaitable d’encadrer davantage la possibilité pour le pouvoir réglementaire de moduler l’assiette des cotisations. Aussi votre commission a-t-elle adopté, à l’initiative de votre rapporteur, un amendement (n° 152) créant un cadre plus strict à ces exceptions, afin de mettre fin à la situation actuelle d’« incompétence négative » de la loi.

L’amendement proposé encadre la possibilité pour le pouvoir réglementaire de fixer des assiettes forfaitaires par décret (et non plus par arrêté) :

– l’existence des assiettes « protectrices » en vigueur sera expressément prévue par une disposition précisant que des assiettes forfaitaires peuvent être créées pour les salariés ou assimilés non soumis au SMIC ainsi que pour ceux entrant dans le champ d’application de l’article L. 311-3 du code de la sécurité sociale (8) ;

– le dispositif prévu par le présent article est conservé en ce qui concerne les assiettes forfaitaires « à vocation d’optimisation sociale » : il limite à 30 % l’abattement d’assiette pouvant être prévu par décret, lorsque la rémunération est supérieure à 1,5 fois la valeur du plafond de la sécurité sociale correspondant à la durée du travail ;

– une disposition transitoire permet de maintenir applicables celles des assiettes fixées par arrêtés qui ne seraient pas conformes aux dispositions du code de la sécurité sociale tel que modifié par l’article 9, jusqu’au 31 décembre 2015 au plus tard.

Si cet amendement est adopté, le Gouvernement devra modifier les arrêtés mentionnés dans l’étude d’impact ainsi que les autres arrêtés existants (dans un délai, pour ces derniers, pouvant aller jusqu’au 31 décembre 2015).

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La Commission est saisie de l’amendement AS251 du rapporteur.

M. Gérard Bapt, rapporteur. L’article 9 encadre les assiettes forfaitaires de cotisations que le Gouvernement est autorisé à créer par la partie législative du code de la sécurité sociale. Il limite à 30 % le taux d’abattement pouvant être appliqué à la rémunération réelle afin de protéger les droits des assurés. Ce pouvoir réglementaire est extrêmement large, alors que la détermination de l’assiette d’un prélèvement obligatoire relève du domaine de la loi. C’est pourquoi le présent amendement crée un cadre législatif à ces exceptions en conditionnant davantage la possibilité pour le pouvoir réglementaire de fixer des assiettes forfaitaires par décret, et non plus par arrêté.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 9 modifié.

Après l’article 9

La Commission est saisie de l’amendement AS33 de M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. Cet amendement vise à taxer les parachutes dorés dès le premier euro dépassant le plafond de la sécurité sociale. Aujourd’hui, une exonération est prévue jusqu’à dix fois le plafond, ce qui paraît anormal compte tenu de certains chiffres très bas : minimum contributif de 628,99 euros, alors que le plafond est à 37 548 euros par an, ou encore minimum vieillesse. Il serait logique que les parachutes dorés contribuent à la solidarité nationale dès le premier euro après le plafond.

M. Gérard Bapt, rapporteur. M. Vercamer semble oublier que les indemnités de rupture ne sont exonérées que dans la limite de deux fois le plafond de la sécurité sociale et que, de deux à dix fois, une progressivité est prévue. Quand le plafond est dépassé de dix fois, ces indemnités sont assujetties dès le premier euro. Sa proposition représente un alourdissement considérable. Vous la présenterez en séance, cher collègue. Je propose, pour l’heure, de la repousser.

La Commission rejette l’amendement.

Article 11
(art. 1600-0 O, 1600-0 Q et 1647 du code général des impôts, art. L. 166 D du livre des procédures fiscales, art. L. 138-9-1, L. 138-20, L. 165-5, L. 241-2 et L. 245-5-5-1 [nouveau] du code de la sécurité sociale et art. L. 5121-18 du code de la santé publique)

Simplification du recouvrement de certaines contributions pharmaceutiques

Cet article a pour objet de simplifier le recouvrement des contributions pharmaceutiques sur les dispositifs médicaux, afin d’alléger les démarches administratives des entreprises de ce secteur qui crée des emplois en France.

Le seuil d’assujettissement à la taxe sur les premières ventes de dispositifs médicaux serait rehaussé, et, pour les redevables restants, la déclaration et le paiement de cette taxe seront concomitants à ceux de la contribution sur les dépenses de publicité.

En outre, l’article 11 prévoit la dématérialisation de certaines démarches.

1.  Le relèvement du seuil d’exonération pour la taxe sur les premières ventes de dispositifs médicaux

a.  La taxe sur les premières ventes de dispositifs médicaux

La taxe sur les premières ventes de dispositifs médicaux concerne les assujettis à la TVA qui effectuent la première vente en France de dispositifs médicaux ou de dispositifs médicaux de diagnostic in vitro. La « première vente en France » s’entend de la première vente intervenant après fabrication en France, ou après introduction en France du dispositif en provenance de l’étranger.

Instituée par la loi de financement pour 2012, elle est régie par l’article 1600-0 O du code général des impôts, et remplace la taxe auparavant définie à l’article L. 5211-5-2 du code de la santé publique qui était directement affectée à l’ancienne Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé – AFFSAPS (devenue Autorité nationale de sécurité du médicament – ANSM).

La taxe sur les premières ventes de dispositifs médicaux est assise sur le chiffre d’affaires hors taxe réalisé au cours de l’année n-1, déclarée et versée annuellement par le biais de la déclaration annexe à la déclaration de TVA et recouvrée par l’administration fiscale.

La recodification de la taxe dans le code général des impôts a conduit à la suppression, par défaut de coordination, du seuil d’exonération auparavant appliqué pour la taxe affectée à l’AFFSAPS qui était fixé à 763 000 euros. L’article 12 de la loi de finances rectificative pour 2013 a toutefois introduit une dispense de paiement et de déclaration de la taxe sur les premières ventes de dispositifs médicaux lorsque le montant de la taxe due est inférieur ou égal à 300 euros (article 1600-0 Q), soit pour un chiffre d’affaires annuel égal à 103 450 euros. Ce seuil est donc significativement inférieur à celui qui préexistait.

Or, la plupart des professionnels (par exemple, un podologue délivrant des semelles orthopédiques à sa patientèle) qui entrent dans le champ de la taxe sur les premières ventes de dispositifs médicaux sont considérés comme assujettis à la TVA mais n’en sont néanmoins pas redevables ; ils ne déposent donc pas de déclaration de TVA. Dans ces conditions, l’assujettissement de ces professionnels à la taxe représente une réelle contrainte de gestion tant pour eux-mêmes que pour les services des impôts, pour un rendement faible.

Parallèlement, en vertu des articles L. 245-5-1 et suivants du code de la sécurité sociale, sont redevables auprès de l’URSSAF d’une contribution portant sur les dépenses de promotion des dispositifs médicaux : les entreprises assurant la fabrication, l’importation ou la distribution en France de dispositifs médicaux à usage individuel, de tissus et cellules issus du corps humain et de leurs dérivés, de produits de santé autres que les médicaments mentionnés à l’article L. 162-171 ou de prestations de services et d’adaptation associées inscrits aux titres Ier et III de la liste prévue à l’article L. 165-12 du code de la sécurité sociale. Ces redevables sont donc quasiment les mêmes que les redevables de la taxe sur les premières ventes de dispositifs médicaux.

b.  Les modifications proposées

Dans un souci de rationalisation de l’action de recouvrement et de contrôle et de simplification de la fiscalité pour les petits redevables, le présent article propose, moyennant un impact financier limité, de relever le seuil d’exonération de la taxe sur les premières ventes de dispositifs médicaux et de confier son recouvrement aux URSSAF.

La taxe n’entre donc plus dans le champ du code général des impôts mais dans celui du code de la sécurité sociale. Le 1° du I supprime donc l’article 1600-0 O du code général des impôts.

Le 2° du I toilette l’article 1600-0 Q relatif à la taxe sur les premières ventes de dispositifs médicaux (art. 1600-0 O) et à la taxe sur les premières ventes de produits cosmétiques (art. 1600-0 P) pour supprimer les références à la première.

La référence à l’article 1600-0 O précité est également supprimée de l’article 1647 du même code relatif aux frais d’assiette et de recouvrement de cette taxe.

Enfin, le II supprime l’article L. 166 D du livre des procédures fiscales relatif aux relations entre les services des finances publiques et l’ANSM.

En conséquence, la taxe sur les premières ventes de dispositifs médicaux est introduite dans le code de la sécurité sociale, par la création d’un article L. 245-5-5-1 (6° du III).

Le V de ce nouvel article précise que « la contribution n’est pas exigible lorsque le montant total des ventes mentionnées au III du présent article n’a pas atteint, au cours de l’année civile précédente, un montant hors taxes de 500 000 euros ».

La contribution est versée selon les mêmes modalités celles prévues à l’article L. 245-5-5 pour la contribution sur les dépenses de promotion des dispositifs médicaux, à savoir : versement provisionnel le 1er juin pour 75 % du montant dû au titre de l’année précédente, régularisation au 1er mars, recouvrement par l’ACOSS. Les majorations et pénalités sont précisées par décret.

Le B du V précise que la taxe sur les premières ventes de dispositifs médicaux telle qu’elle existe actuellement demeure exigible au titre des ventes des dispositifs médicaux réalisées jusqu’au 31 décembre 2014. La nouvelle contribution est applicable aux ventes réalisées à compter du 1er janvier 2015.

2.  La dématérialisation des déclarations et paiements pour certaines contributions pharmaceutiques

Les contributions pharmaceutiques recouvrées par les URSSAF sont les suivantes :

– contribution sur les dépenses de promotion des médicaments (articles L. 245-1 et suivants du code de la sécurité sociale) ;

– contribution sur les dépenses de promotion des dispositifs médicaux (articles L. 245-5-1 et suivants) ;

– contribution sur le chiffre d’affaires (article L. 245-6) ;

– contribution sur les ventes en gros (articles L. 138-1 à L. 138-9-1) ;

– contribution dite ONDAM (articles L. 138-10 et suivants).

L’article 26 de la loi de financement pour 2013 a harmonisé les dates limites d’exigibilité de ces cinq contributions (versements des acomptes provisionnels et versement des régularisations), et le décret du 18 octobre 2013 a harmonisé les dates limite de remise des documents déclaratifs.

Actuellement, les déclarations de ces contributions se font par voie de formulaire papier, ce qui nécessite un envoi préalable des formulaires par l’URSSAF en charge du recouvrement. Par ailleurs, aucun texte n’impose le paiement par voie dématérialisée. Ces modalités sont potentiellement source d’erreurs, de retards et de confusion dans les versions des formulaires à utiliser et sont coûteuses en matière de traitement administratif.

Le II prévoit une obligation de déclaration et de paiement par voie dématérialisée, obligatoire dès le premier euro pour les contributions pharmaceutiques recouvrées par les URSSAF. Cette obligation sera assortie de sanctions en cas de défaut d’utilisation de la procédure dématérialisée. Cette mesure est rendue possible par le fait que les petits redevables ont été exclus du périmètre de la taxe.

La référence aux « formes » de la déclaration est ajoutée dans l’article L. 138-9-1 du code de la sécurité sociale relatif à la contribution sur les ventes en gros (1° du III).

L’article L. 138-20 du même code relatif aux dispositions communes aux contributions recouvrées par les URSSAF et par l’administration fiscale est modifié afin d’y inclure la référence à la taxe sur les premières ventes de dispositifs médicaux désormais prévue à l’article L. 245-5-7 (a du 2° du III).

Deux alinéas sont ajoutés à l’article L. 138-20 (b du 2° du III) afin de préciser que les déclarations et versements afférents aux contributions pharmaceutiques précitées, ainsi que les déclarations spécifiques que sont tenus de faire les laboratoires pharmaceutiques, les grossistes-répartiteurs et fabricants ou distributeurs de dispositifs médicaux auprès du comité économique des produits de santé et de l’ANSM, sont effectuées par voie dématérialisée.

Le deuxième alinéa fixe la limite de la sanction applicable (0,2 % des sommes dues dont la déclaration ou le versement n’a pas été effectué par voie dématérialisée) ; un décret simple viendra préciser les montants exacts des sanctions.

Le A du V du présent article prévoit que la dématérialisation des déclarations et paiements s’applique à compter du 1er janvier 2015.

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La Commission adopte l’article 11 sans modification.

Article 12
(art. L. 171-4, L. 171-5 [nouveaux], L. 376-1, L. 454-1, L. 613-21, L. 643-9 [nouveau], L. 644-4 [nouveau], L. 645-5-1 [nouveau], L. 723-13-1 [nouveau] et L. 723-21-1 [nouveau]
du code de la sécurité sociale, art. L. 733-1 [nouveau], L. 761-16, L. 761-19, L. 762-14 et L. 762-26
du code rural et de la pêche maritime)

Dispositions relatives au recours contre tiers

Cet article vise à parachever l’extension, à l’ensemble des régimes de sécurité sociale, des dispositions applicables dans le régime général en matière de recours contre les tiers responsables de dommages corporels aux assurés.

Par ailleurs, il prévoit la possibilité pour les caisses nationales de conclure entre elles des conventions visant à confier la mise en œuvre des recours contre tiers à certaines caisses locales des régimes concernés.

1.  Le recours contre tiers

a.  Principes

Lorsqu’une personne subit accidentellement des dommages corporels, la sécurité sociale l’indemnise immédiatement en lui versant diverses prestations : prise en charge des frais de soins ou d’hospitalisation, versement d’indemnités journalières en cas d’arrêt de travail.

Quand un accident est imputable à un tiers, les caisses de sécurité sociale du régime général et celles du régime agricole pour les salariés agricoles sont habilitées à récupérer auprès de celui-ci ou de son assureur les sommes correspondant aux dépenses qu’elles ont engagées au bénéfice de la victime.

Les articles L. 376-1 (régime général) et L. 454-1 (salariés agricoles) du code de la sécurité sociale définissent les conditions dans lesquelles la caisse de sécurité sociale qui a versé des prestations à un assuré victime d’un dommage corporel dont un tiers est responsable en tout ou en partie, peut exercer contre ce tiers un recours tendant à obtenir le remboursement des prestations versées à l’assuré.

Ce droit d’agir a un caractère subrogatoire (la caisse se substitue à l’assuré) et il s’agit d’un droit propre qui peut être engagé même lorsque la victime reste inactive (9). Il s’agit de récupérer, sur l’indemnité que le tiers responsable ou sa compagnie d’assurance doit verser à la victime, pour chaque poste de préjudice ayant occasionné des dépenses de sécurité sociale (10), les sommes qu’ils ont versées à cette dernière au titre du dommage subi.

Une indemnité forfaitaire est mise à la charge des tiers responsables d’accident, en contrepartie des frais de gestion engagés par les caisses de sécurité sociale pour obtenir le remboursement des prestations qu’elles ont versées aux victimes.

Ce mécanisme suppose toutefois que les circonstances de l’accident soient portées à la connaissance de la caisse. Il va donc de pair avec une obligation d’information. L’article L. 376-1 précité prévoit que la victime, le tiers responsable et son assureur, ainsi que les établissements de santé, sont tenus d’informer la caisse de sécurité sociale de la victime en cas de lésions causées par un tiers. Une sanction est prévue pour l’assureur du tiers responsable qui ne déclare pas l’accident. L’assureur qui ne respecte pas cette obligation d’information peut être contraint à verser à la caisse, outre les sommes obtenues par celle-ci au titre du recours subrogatoire, une pénalité qui est fonction du montant de ces sommes et de la gravité du manquement à l’obligation d’information, dans la limite de 50 % du remboursement obtenu.

En application de l’article L. 376-1 (septième alinéa) du même code, la victime est également tenue, dans le cadre des procédures juridictionnelles en cours contre le responsable, de mettre en cause l’organisme de sécurité sociale qui lui a versé des prestations à ce titre (ou d’informer la caisse en cas de procédure amiable, art. L. 376-3) ; à défaut sa demande de réparation est irrecevable (ou la transaction inopposable).

L’assureur du responsable est également débiteur envers les caisses d’une obligation d’information sur les circonstances de l’accident et, depuis 2012, sur les transactions qu’il a conclues avec les victimes (articles L. 376-4 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale).

b.  Certains régimes ne sont pas couverts par ces dispositions

Ces dispositions concernent l’essentiel des prestations de sécurité sociale. Elles sont applicables aux prestations servies par :

– les branches maladie, accidents du travail et vieillesse du régime général ;

– les branches maladie et accidents du travail des régimes agricoles (exploitants et salariés) ;

– la branche vieillesse du régime des salariés agricoles ;

– les branches maladie et vieillesse du Régime social des indépendants (RSI).

Cependant, elles ne concernent pas, en tout ou partie :

– les prestations servies au titre de l’assurance vieillesse et invalidité-décès des régimes des professions libérales et d’avocats ;

– les prestations d’assurance vieillesse et allocation veuvage du régime des exploitants agricoles ;

– s’agissant des sanctions encourues par l’assureur (imprescriptibilité de la créance de la caisse et pénalité), les prestations d’assurance maladie et vieillesse du RSI, les prestations servies à raison d’un accident du travail survenu à des salariés agricoles relevant du régime d’Alsace-Moselle et les prestations servies au titre des assurances sociales aux exploitants agricoles des départements d’outre-mer, de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin.

En effet, si ces régimes exercent déjà des recours contre tiers sur la base du code civil ou de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l’amélioration de la situation des victimes d’accidents de la circulation et à l’accélération des procédures d’indemnisation, ils ne disposent notamment pas de la possibilité de recevoir une indemnité de gestion pour couvrir leurs frais de recouvrement, du bénéfice des obligations d’information et de leurs sanctions en cas de non-respect dans les procédures tant amiables que contentieuses.

2.  L’élargissement du dispositif à tous les régimes

Le présent article a pour objet de parachever l’extension à l’ensemble des régimes des dispositions relatives au recours contre tiers applicables dans le régime général afin d’assurer que la victime du sinistre, quel que soit le régime dont elle relève, ne soit pas indemnisée pour un même préjudice à la fois par un assureur et par un régime de sécurité sociale.

À ce titre, le présent article propose de rendre applicables l’ensemble de ces dispositions :

– aux prestations servies au titre de l’assurance vieillesse de base et complémentaire et de l’assurance invalidité-décès du régime des professions libérales (art. L. 643-9 et L. 644-4 [nouveaux] du code de la sécurité sociale) et du régime des avocats (art. L. 723-13-1 et L. 723-21-1 [nouveaux]) ;

– aux prestations d’assurance vieillesse de base et complémentaire et d’allocation veuvage du régime des exploitants agricoles (art. L. 733-1 [nouveau] du code rural et de la pêche maritime) ;

– aux prestations d’AT-MP des salariés (art. L. 761-16 du même code) et des exploitants agricoles (art. L. 761-19) du régime d’Alsace-Moselle ;

– aux prestations maladie invalidité (art. L. 762-14) et vieillesse veuvage (art. L. 762-26) servies aux exploitants agricoles des départements d’outre-mer, de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin.

Ces prérogatives seront étendues également aux régimes spéciaux, via une modification de leurs décrets, qui font déjà application de l’article 29 de la loi n° 58-677 du 5 juillet 1985 tendant à l’amélioration de la situation des victimes de la circulation et à l’accélération des procédures d’indemnisation.

D’autre part, le présent article rend applicable les dispositions spécifiques aux assureurs (11) aux prestations d’assurance maladie et vieillesse du RSI (art. L. 613-21 du code de la sécurité sociale).

3.  La délégation du recouvrement contre tiers à certaines caisses locales

La mise en œuvre du recours contre tiers obéit à une procédure relativement longue et compliquée.

Lorsque le directeur de l’organisme de sécurité sociale entend engager la procédure de pénalité, il le notifie à l’assureur. L’assureur dispose d’un délai d’un mois à compter de la réception de la notification pour demander à être entendu, s’il le souhaite, et pour présenter des observations écrites. Si, après réception des observations écrites ou audition de l’organisme d’assurance ou en l’absence de réponse de celui-ci à l’expiration du délai d’un mois, le directeur décide de poursuivre la procédure, il fixe le montant de la pénalité et le notifie dans un autre délai d’un mois à l’assureur par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception.

À défaut de paiement dans un délai de deux mois ou après notification de la décision de la commission de recours amiable, le directeur adresse à l’assureur une mise en demeure par tout moyen permettant de déterminer sa date de réception. Cette mise en demeure mentionne l’existence et le montant de la majoration de 10 % prévue par l’article L. 162-1-14 du code de la sécurité sociale et appliquée en l’absence de paiement dans ce délai. La contestation de la décision de la caisse de sécurité sociale relative au versement de cette pénalité relève du contentieux de la sécurité sociale.

Ainsi, afin de favoriser la mutualisation des compétences et de la gestion en matière de recours contre tiers, le 1° du I du présent article insère dans le code de la sécurité sociale un article L. 171-4 qui prévoit que les caisses nationales peuvent conclure entre elles des conventions pour déléguer seulement à certaines des caisses locales la mise en œuvre des recours contre tiers responsables d’accidents.

Les caisses nationales mentionnées sont la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAMTS), la caisse nationale du RSI, la Caisse centrale de la Mutualité sociale agricole, la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV), la Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales et la Caisse nationale des barreaux français.

Ce type de mutualisation existe déjà aujourd’hui. Ainsi, l’article 34 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l’amélioration de la situation des victimes d’accidents de la circulation prévoit que l’organisme chargé du remboursement des soins représente l’ensemble des organismes de sécurité sociale auprès du responsable des dommages ou de son assureur. Dans ce cadre, la CNAV et la CNAMTS ont signé le 1er octobre 1986 une convention, toujours en vigueur, qui définit les modalités d’application de l’article 34 de la loi précitée. Le présent article entérine ainsi cette convention.

4.  Entrée en vigueur

Les caisses qui seront nouvellement destinataires de signalements de dommages corporels avec tiers responsable et bénéficiaires d’indemnités forfaitaires de gestion (MSA, CNAVPL, CNBF) ainsi que les caisses nouvellement bénéficiaires de pénalités pour non-respect d’obligation d’information des assureurs (RSI), devront adapter leur système d’information ou mettre en place des procédures ad hoc.

Le III du présent article propose donc une entrée en vigueur décalée au 1er juillet 2015.

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* *

La Commission adopte ensuite l’article 12 sans modification.

Après l’article 12

La Commission est saisie de l’amendement AS102 de Mme Isabelle Le Callennec.

Mme Isabelle Le Callennec. Cet amendement vise à exclure du périmètre de la contribution perçue sur les boissons et préparations liquides pour les boissons destinées à la consommation humaine, les boissons à base de soja contenant au minimum 2,9 % de protéines issues de la graine de soja. Les boissons à base de soja ont avant tout une finalité nutritionnelle. Consommées presque exclusivement à domicile, elles ne peuvent être assimilées aux sodas et autres boissons à usage plus convivial ou festif.

M. Gérard Bapt, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Je rappelle que c’est la majorité précédente qui a créé la taxe sur les boissons sucrées. J’imagine que si celle-ci a choisi de taxer les boissons à base de soja, c’est au titre de leur teneur en sucre. Peut-être pourriez-vous retirer cet amendement et le redéposer en séance publique, le temps d’en faire l’expertise. Sinon, j’y serai défavorable.

Mme Isabelle Le Callennec. Qui dira s’il s’agit de boissons sucrées ou non ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. La Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) se réfère aux critères fixés par la loi. Elle le fait déjà, par exemple, pour les boissons énergisantes qui sont taxées en fonction de leur taux en caféine. Depuis le mois d’avril dernier, la marque qui représente les trois quarts du marché de ces boissons a d’ailleurs fait passer le taux de caféine de son produit sous la limite déclenchant la taxation. La DGCCRF a très vite répercuté la disparition de cette taxe. Disons que le résultat de l’action du législateur a été positif en termes de santé publique, même s’il l’est moins sur le plan des recettes pour la sécurité sociale !

Mme Isabelle Le Callennec. Les boissons à base de soja dont je parle n’ont rien à voir avec les sodas !

M. Dominique Tian. Le Gouvernement décidera donc si les boissons au soja sont sucrées et si elles sont bonnes pour la santé. C’est tout de même étonnant ! Pour taxer les boissons énergisantes, je me souviens que l’argument principal se résumait à la mort d’un sportif effectuant un raid en Australie après qu’il avait bu du Red Bull. Qu’aurait-on fait s’il avait bu un verre d’eau ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. Monsieur Tian, ce que vous faites n’est pas bien. L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) et de nombreuses études cliniques publiées dans des revues médicales à comité de lecture ont montré les dangers sanitaires des boissons caféinées. Moi, je ne plaisante pas avec l’extrasystolie ventriculaire constatée chez des sujets soumis à des tests par une étude allemande.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Lorsqu’elle était ministre de la santé, Mme Roselyne Bachelot avait opposé une véritable résistance à l’arrivée du Red Bull sur le territoire national.

M. Dominique Tian. La réalité, c’est qu’on taxe ces boissons parce que cela rapporte. S’il y avait un réel problème de santé publique, on ne reporterait pas sans cesse la loi qui s’y rapporte. Si le Red Bull présente un réel danger pour la santé, qu’on l’interdise ! Tout cela n’est qu’un habillage pour taxer à tout va. La preuve en est, monsieur Bapt, que vous n’avez arrêté de jouer avec les taux de sucre et de caféine qu’en vous apercevant que votre amendement multiplierait le prix du café au comptoir par cent ou mille.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Monsieur Tian, les producteurs de boissons rafraîchissantes sans alcool se sont engagés à ne plus faire de publicité télévisée durant les plages horaires fréquentées par un public comprenant plus de 35 % d’enfants de moins de douze ans. Cet engagement obtenu par le Gouvernement montre qu’une politique de santé publique existe bien et qu’elle ne sert pas de prétexte à la fiscalité. Il indique aussi clairement que les industriels eux-mêmes comprennent qu’une consommation excessive des boissons dont vous parlez par les enfants constitue bien un danger, contrairement à ce que vous dites.

Mme Michèle Delaunay. Monsieur Tian, au cours de la législature précédente, nous avons attendu la loi de santé publique comme l’Arlésienne.

M. Dominique Tian. Et on l’attend encore !

Mme Michèle Delaunay. Elle est prête !

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS32 de M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. Il s’agit de relever les taux de contribution des employeurs au financement de la solidarité sur les retraites dites chapeaux, afin d’augmenter les montants des pensions modestes. Cette proposition va dans le sens de celle que Mme Touraine avait faite, en 2010, de supprimer l’exonération de CSG et de cotisations sociales prévue pour les contributions des employeurs au financement de ces retraites.

M. Michel Issindou. Les retraites chapeaux ont mauvaise réputation à cause des pactoles abusifs qu’elles ont parfois pu représenter, mais il existe deux millions de très faibles retraites de ce type. Ces retraites « surcomplémentaires » ont déjà été taxées, et je trouve que M. Vercamer y va fort. Si l’on doit en arriver là, autant proposer de les supprimer.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Avis défavorable. Monsieur Vercamer, en tout état de cause, il faut réécrire votre amendement : il fait référence à un taux de 48 % qui n’a plus lieu d’être puisque l’article 33 du projet de loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraites, examiné en 2013, visait à interdire les régimes de retraites gérés en interne.

L’amendement est retiré.

Chapitre II
Simplification du recouvrement

Article 13
(art. 995 et 1001 du code général des impôts et art. L. 131-8, L. 137-6, L. 137-7, L. 137-9, L. 138-20, L. 862-3 et L. 862-4 du code de la sécurité sociale)

Rationalisation de la fiscalité des contrats d’assurance maladie complémentaire et des contrats d’assurance automobile

Cet article vise à simplifier la fiscalité sur les contrats d’assurance complémentaire santé et sur les contrats d’assurance automobile.

Ces deux types de contrats, qui semblent sans rapport l’un avec l’autre, sont tous deux soumis à deux taxes distinctes assises sur les mêmes éléments mais recouvrées l’une par l’URSSAF, l’autre par le centre des finances publiques, et affectées l’une à la sécurité sociale, l’autre aux départements.

Le présent article permet de n’imposer chacun de ces deux types de contrats d’assurance qu’à une seule taxe, recouvrée par un seul organisme. Ainsi, les complémentaires santé seraient désormais soumises à la taxe de solidarité additionnelle (TSA), recouvrée par l’URSSAF et affectée à la sécurité sociale (dont le fonds de financement de la couverture maladie universelle, dit fonds CMU). Les contrats d’assurance sur les véhicules terrestres à moteur seraient uniquement soumis à la taxe sur les conventions d’assurance (TSCA), recouvrée par le centre des finances publiques et affectée à la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) et aux départements. Quant à la contribution sur les véhicules terrestres à moteurs, elle serait supprimée.

Ces mesures ont leur place dans une loi de financement de la sécurité sociale car les deux taxes concernées sont affectées à des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale.

1.  Le dispositif actuel

a.  La fiscalité sur les contrats d’assurance complémentaire santé

Les contrats d’assurance complémentaire santé sont soumis à deux taxes distinctes et pourtant proches : la taxe sur les conventions d’assurance (TSCA) et la taxe de solidarité additionnelle (TSA).

La taxe sur les conventions d’assurance

Appelée aussi « taxe spéciale sur les conventions d’assurance », la TSCA est régie par les dispositions des articles 991 à 1004 du code général des impôts. Elle s’applique à toutes les conventions d’assurance conclues avec une société ou compagnie d’assurance ou avec tout autre assureur français ou étranger dès lors que le risque est situé en France ou que la personne concernée y a son domicile ou sa résidence habituelle.

– assiette

La taxe est perçue sur le montant des sommes stipulées au profit de l’assureur et de tous les accessoires dont celui-ci bénéficie directement ou indirectement du fait de l’assuré.

– recouvrement

La TSCA est déclarée et payée mensuellement par les sociétés d’assurance, les mutuelles et les institutions de prévoyance auprès des services de la direction générale des finances publiques.

– taux

Le taux de la TSCA, fixé par l’article 1001 du code général des impôts, varie selon les types de contrats. Depuis la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014, il est de 9 % sur les contrats d’assurance maladie complémentaire dits « solidaires et responsables » (12), et de 14 % pour ceux qui sont dits « non solidaires et responsables ».

– affectation

Le produit de la TSCA est affecté aux départements, à l’exception du produit de la taxe sur les contrats solidaires et responsables, qui est affecté à parts égales à la Caisse nationale des allocations familiales et à la Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS), et à l’exception du produit des 5 points supplémentaires s’appliquant aux contrats non solidaires et responsables qui sont affectés en totalité à la CNAMTS.

Le produit de la TSCA sur les contrats solidaires et responsables s’élève à 2,2 milliards d’euros en 2014, et à 0,2 milliard en ce qui concerne les contrats non responsables.

La taxe de solidarité additionnelle aux cotisations d’assurances complémentaires santé

La TSA, prévue à l’article L. 862-4 du code de la sécurité sociale, est assise sur le montant des primes ou cotisations destinées au financement de l’ensemble des remboursements de soins de santé qui ne sont pas pris en charge légalement par un régime obligatoire d’assurance maladie.

– assiette

La taxe est assise sur les primes ou cotisations hors taxe afférentes aux garanties de protection complémentaire en matière de frais de soins de santé, quels que soient la nature du contrat (individuel ou collectif, obligatoire ou facultatif, solidaire ou non, souscrits à titre professionnel ou dans un cadre privé) et le mode de financement (employeur ou assuré).

– taux

Le taux de la taxe est fixé à 6,27 %.

– affectation

Le produit de la TSA est intégralement affecté au fonds de financement de la couverture maladie universelle (CMU).

– recouvrement

À la charge des assurés, la taxe est déclarée et payée trimestriellement par les sociétés d’assurance, mutuelles et institutions de prévoyance auprès de l’URSSAF d’Île-de-France, après imputation du montant de remboursement forfaitaire de la prise en charge des dépenses pour leurs propres bénéficiaires de la CMU complémentaire et de l’aide à l’acquisition d’une complémentaire santé (ACS).

Les recettes de la TSA s’élèvent à 2 milliards d’euros en 2013 et 2014.

b.  La fiscalité sur les contrats d’assurance de véhicules terrestres à moteur

La taxe sur les conventions d’assurance

La TSCA s’applique aux conventions d’assurance contre les risques de toute nature relatifs aux véhicules terrestres à moteur.

– assiette

La taxe est perçue sur le montant des sommes stipulées au profit de l’assureur et de tous les accessoires dont celui-ci bénéficie directement ou indirectement du fait de l’assuré.

– taux

L’article 1001 du code général des impôts fixe le taux de la TSCA :

– à 18 % pour les assurances contre les risques de toute nature relatifs aux véhicules terrestres à moteur si la garantie en cause correspond à des risques couverts par les assurances de responsabilité civile ou de dommages garantissant les risques nés de l’usage d’un véhicule terrestre à moteur ;

– au taux de droit commun de 9 % pour la garantie « défense recours » et la garantie « assistance aux personnes » prévoyant l’assistance médicale et le rapatriement du conducteur et des passagers du véhicule ;

– à un taux de 7 %, 24 % ou 30 % pour la garantie « incendie » selon l’affectation du véhicule.

– exonération

Certains contrats sont exonérés de TSCA. C’est notamment le cas pour :

– les contrats garantissant les risques de toute nature relatifs aux poids lourds de plus de 3,5 tonnes ;

– les contrats garantissant les risques de toute nature afférents aux camions, camionnettes, fourgonnettes à utilisations exclusivement utilitaires des exploitations agricoles et exclusivement nécessaires au fonctionnement de celles-ci.

– recouvrement

La TSCA est déclarée et payée mensuellement par les sociétés d’assurance auprès des services de la direction générale des finances publiques.

– affectation

Le produit de la TSCA afférente aux assurances contre les risques de toute nature relatifs aux véhicules terrestres à moteur est affecté aux départements.

Son rendement est estimé à 2,8 milliards d’euros en 2014.

La contribution sur les véhicules terrestres à moteur

La contribution sur véhicules terrestres à moteur est régie par les articles L. 137-6 à L. 137-9 du code de la sécurité sociale. Elle a pour objet de faire supporter par leurs propriétaires une partie du coût, à la charge de la collectivité, des risques liés aux accidents de la circulation.

– assiette

La contribution sur les véhicules terrestres à moteur est due par toute personne physique ou morale qui est soumise à l’obligation d’assurance en matière de circulation de véhicules terrestres à moteur instituée par l’article L. 211-1 du code des assurances. L’assiette de la contribution correspond au montant des primes, cotisations ou fractions de prime ou de cotisations d’assurance émises (c’est-à-dire appelées) au cours de chaque bimestre, déduction faite des annulations et remboursements constatés durant la même période et après déduction d’un prélèvement destiné à compenser les frais de gestion (actuellement 0,80 % du produit brut de la cotisation).

Les primes visées sont celles afférentes à l’assurance obligatoire susmentionnée. Est donc exclue de l’assiette la part des primes afférente à la couverture de tout autre risque que celui de la responsabilité civile obligatoire (vol, incendie, garanties complémentaires au bénéfice des personnes transportées).

– taux

Le taux de la contribution est fixé à 15 %.

– recouvrement

Le fait générateur est constitué par l’émission des primes par l’organisme assureur. La contribution est perçue par les entreprises d’assurance, dans les mêmes conditions et en même temps que ces primes, et recouvrée par les URSSAF.

– affectation

Le produit de la contribution sur les véhicules terrestres à moteur est affecté à la CNAF.

Il s’élève à 1 milliard d’euros en 2014.

Les sociétés d’assurance de véhicules terrestres à moteur qui proposent des contrats d’assurance responsabilité civile obligatoire doivent donc actuellement déclarer et verser à deux échéances différentes, auprès de deux organismes différents (direction générale des finances publiques et URSSAF), deux taxes distinctes pourtant assises sur des assiettes très largement similaires.

2.  La rationalisation proposée

Dans un souci de simplification, le présent article propose de supprimer la contribution sur les véhicules terrestres à moteur, d’augmenter la TSCA sur les contrats d’assurance des véhicules terrestres à moteur et de ne soumettre les contrats de complémentaire santé qu’à la taxe de solidarité additionnelle (et de les exonérer TSCA).

a.  L’imposition des contrats d’assurance relatifs aux véhicules terrestres à moteur uniquement à la TSCA

Le I du présent article modifie le code général des impôts afin de créer deux taux de TSCA applicables aux véhicules terrestres à moteur pour prendre en compte la suppression de la contribution sur les véhicules terrestres à moteur.

L’article 995 du code général des impôts relatif aux exonérations de TSCA est modifié (1° du I) afin de soumettre à la TSCA les contrats d’assurance responsabilité civile obligatoires relatifs aux poids lourds de plus de 3,5 tonnes (11° de l’article 995 précité), aux véhicules agricoles (12°), et les complémentaires santé des agriculteurs (13°).

En revanche, est introduite une exonération de TSCA pour les contrats d’assurance maladie complémentaire soumis à la taxe de solidarité additionnelle modifiée par le présent article (18° de l’article 995).

Le 2° du I du présent article modifie l’article 1001 du même code relatif aux taux de la TSCA.

Le a) du 2° supprime les taux de TSCA sur les contrats de complémentaire santé.

Le b) et le c) modifient les taux des contrats d’assurance des véhicules terrestres à moteur. Les nouveaux taux sont la somme des taux actuels de TSCA et contribution sur les véhicules terrestres à moteur. Le coût ne change donc pas pour les assurés. Les taux proposés sont les suivants :

– 33 % (18 % + 15 % contribution sur les véhicules terrestres à moteur) pour les contrats afférents à l’obligation d’assurance en matière de véhicules terrestres à moteur instituée par l’article L. 211-1 du code des assurances ;

– 15 % (correspondant au seul taux de l’actuelle contribution sur les véhicules terrestres à moteur) pour les contrats qui sont actuellement exonérés de TSCA, à savoir, les assurances obligatoires concernant les véhicules utilitaires d’un poids total autorisé en charge supérieur à 3,5 tonnes et les assurances obligatoires concernant les camions, camionnettes, fourgonnettes à utilisation exclusivement utilitaire des exploitations agricoles.

Le d) du 2° du I modifie l’affectation de la TSCA sur les contrats d’assurance de véhicules terrestres à moteur. La part de TSCA venant en remplacement de la contribution sur les véhicules terrestres à moteur sera affectée à la CNAF. Il convient néanmoins d’en affecter une part aux départements en compensation de la part de la TSCA sur les contrats d’assurance maladie non solidaires et responsables actuellement affectée aux département et qui, dans le cadre de la mesure de fusion de la TSCA et de la TSA sera désormais affectée à parts égales à la CNAF et à la CNAMTS. Seront donc affectés à la CNAF le produit correspondant à 13,3 points du taux de 33 % et la totalité de la TSCA au taux de 15 % concernant les contrats d’assurances des poids lourds, camions, camionnettes et fourgonnettes à usage exclusivement utilitaire des exploitations agricoles.

Le A du II du présent article modifie l’article L. 138-1 du code de la sécurité sociale relatif aux impôts et taxes affectés à la sécurité sociale, afin de prévoir qu’une fraction de TSCA est affectée à la CNAF.

La nouvelle répartition de la TSCA sur les contrats d’assurance des véhicules terrestres à moteur est présentée dans le tableau suivant, tiré de l’étude d’impact.

Le B du II supprime les articles du code de la sécurité sociale relatifs à la contribution sur les véhicules terrestres à moteur, et le C supprime la référence à cette taxe dans l’article L. 138-20 du même code relatif aux dispositions communes à la URSSAF et à la direction générale des finances publiques.

b.  La modification de la taxe de solidarité additionnelle sur les contrats de complémentaire santé

Il est proposé, pour les contrats d’assurance maladie complémentaire, de regrouper la TSCA (auxquels ils ne seraient plus soumis) et la TSA par la mise en place d’une TSA modifiée dont les taux sont modulés en fonction des caractéristiques des contrats.

Le D du II modifie l’article L. 862-3 du code de la sécurité sociale afin de préciser que le fonds CMU est bénéficiaire non plus de l’intégralité des recettes de la TSA mais « d’une fraction » de cette taxe.

Le E du II modifie l’article L. 862-4 du même code relatif à la taxe de solidarité additionnelle sur les complémentaires santé.

Le a) du 1° du E supprime la mention relative à l’affectation de la TSA au fonds CMU.

– assiette

Le b) du 1° modifie l’assiette de la TSA, afin de l’aligner sur celle de la TSCA qui comprend, outre le montant des primes, tous les accessoires dont le gestionnaire du contrat d’assurance bénéficie directement ou indirectement du fait de l’assuré. Cette clarification de l’assiette de la TSA évitera toute optimisation sociale visant à basculer l’ensemble des frais de gestion entrant actuellement dans l’assiette vers des frais d’avenant ou d’autres frais accessoires qui en sont quant à eux actuellement exclus. Cet élargissement d’assiette aura (à taux inchangés) un impact mineur sur le rendement de la taxe et en permettra une meilleure lisibilité.

– taux

Le 2° du E fixe le taux normal de la TSA modifiée à 13,27 %. Ce taux s’applique aux contrats solidaires et responsables.

Le prévoit des taux dérogatoires, afin de reporter sur la TSA la modulation actuelle des taux de TSCA en fonction du caractère responsable ou non du contrat. Les taux proposés sont les suivants :

– 6,27 % pour les contrats actuellement exonérés de TSCA mais assujettis à la TSA : les collectifs dont moins de 20 % des garanties visent des dépenses de santé (il s’agit des contrats d’assurance maladie de groupe dont 80 % au moins de la prime ou de la cotisation globale sont affectés à des garanties liées à la durée de la vie humaine, à l’invalidité, à l’incapacité de travail ou au décès par accident), et pour les contrats solidaires et responsables souscrits par les exploitants agricoles et leurs salariés ;

– 7 % pour les contrats relatifs aux indemnités journalières maladie solidaires ainsi que pour les contrats « au 1er euro » (c’est-à-dire les contrats des personnes expatriées non prises en charges par l’assurance maladie obligatoire), qui sont actuellement soumis à la TSCA au taux de 7 % mais exonérés de TSA ;

– 14 % pour les contrats relatifs aux indemnités journalières « non solidaires » (7 % + 7 points) ;

– 20,27 % pour les contrats santé « non solidaires » (13,27 % + 7 points).

En l’état actuel, le projet de loi conduit à taxer à 6,27 % les garanties IJ des contrats de groupe obligatoires d’entreprises alors qu’elles sont aujourd’hui hors champ de la TSA. Votre commission a adopté un amendement (n° 156) afin de les en soustraire.

Le 5° du E complète l’article L. 862-4 par un paragraphe relatif à la répartition du produit de la TSA modifiée. Dans un souci de cohérence et de lisibilité, la totalité de la nouvelle TSA est affectée à la sécurité sociale, y compris l’équivalent de la TSCA sur les contrats non « solidaires et responsables » actuellement affectée aux départements (la compensation a déjà été présentée : il s’agit de l’affectation d’une part de la TSCA complémentaire créée sur les contrats d’assurance des véhicules terrestres à moteur).

Cette mesure permet de flécher plus simplement l’affectation des recettes de TSA :

– les 6,27 points des recettes de la taxe sur les contrats solidaires au taux normal de 13,27 %, ainsi que les recettes des contrats imposés à 6,27 % vont au fonds CMU ;

– le reste est affecté à parts égales à la CNAF et la CNAMTS.

La TSA ainsi modifiée continuera à être recouvrée par la seule URSSAF d’Ile-de-France.

En supprimant la duplication de coûts de collecte et de contrôle, cette mesure doit permettre de réduire les frais de gestion de l’impôt. La bonne application des dispositions relatives aux contrats responsables est en effet un enjeu important compte tenu des dispositions prises récemment (généralisation de la couverture santé en entreprise, renforcement des règles applicables aux contrats responsables) ; il est préférable qu’une seule administration soit spécialisée sur ce sujet compliqué.

À ce propos, le Haut conseil pour l’avenir de l’assurance maladie soulignait, dans son rapport relatif à la généralisation de la complémentaire santé de juillet 2013, qu’« en ce qui concerne les contrats individuels, le contrôle du caractère solidaire et responsable justifiant d’un régime favorable de TSCA, ressort des services fiscaux mais sa technicité sur le fond exige une adaptation et une formation adéquates ». Pourtant, les avantages fiscaux et sociaux attachés à ces contrats justifient un contrôle accru de la puissance publique des critères qui leur sont attachés.

Le tableau suivant synthétise les modifications prévues au présent article (seuls les montants transférés y figurent, pas les recettes totales).

SYNTHÈSE DES MODIFICATIONS PRÉVUES PAR L’ARTICLE 13

(en millions d’euros)

 

Situation actuelle

Transferts induits par la réforme (montants 2014)

 

Recouvrement

Taux

Prévision 2014

Affectataires

Réforme

CNAM

CNAF

Fonds CMU

Départements

Contribution VTM

URSSAF

15 %

1 081

CNAF

suppression

 

-1 081

   

TSCA additionnelle / contrats automobiles

DGFiP

15 %

   

création

 

955

 

126

TSCA / contrats maladie solidaires

DGFiP

7 %

2 163

50 % CNAM

50 % CNAF

suppression

-1 082

-1 082

   

TSCA / contrats maladie non solidaires

DGFiP

9 %

126

départements

suppression

     

-126

5 %

70

CNAM

-70

     

TSA complémentaire / contrats solidaires

URSSAF

7 %

   

création

1 082

1 082

   

TSA complémentaire / contrats non solidaires

14 %

   

création

98

98

   
         

TOTAL

28

-28

0

0

3.  Entrée en vigueur

Le III dispose que l’ensemble des mesures proposées s’applique aux primes et cotisations pour lesquelles un fait générateur d’imposition intervient à compter du 1er janvier 2016, afin de laisser le temps nécessaire aux redevables pour adapter leurs systèmes d’information et bien prendre en compte l’ensemble des effets de la mesure.

Toutefois, le deuxième alinéa du III prévoit une exception pour traiter les cas de taxe due postérieurement au 1er janvier 2016 mais concernant des primes ou cotisations dont le fait générateur d’imposition est antérieur au 1er janvier 2016 (soit le cas des contrats à cheval sur les années 2015 et 2016). Ainsi, pour ce qui concerne les contrats d’assurance relatifs aux véhicules terrestres à moteur, les primes ou cotisations dont le fait générateur de la contribution sur les véhicules terrestres à moteur (soit la date de prise d’effet de la garantie) est antérieur au 1er janvier 2016 ont été soumises en totalité à la contribution sur les véhicules terrestres à moteur alors que potentiellement, en matière de TSCA, seules les fractions de prime ou cotisation ayant été payées avant le 1er janvier 2016 ont été soumises à la TSCA. Aussi, il convient de préciser que dans ces cas, les fractions de prime ou cotisation versées postérieurement au 1er janvier 2016 ne doivent être soumises qu’au taux de 18 % correspondant au taux de la TSCA en vigueur antérieurement au 1er janvier 2016 (à l’exception des dispositions applicables aux poids lourds).

De la même manière, pour ce qui concerne les contrats de complémentaire santé, les primes ou cotisations dont le fait générateur de la TSA est antérieur au 1er janvier 2016, seul une fraction de TSA peut avoir été payée puisqu’il existe une tolérance permettant aux redevables de verser la taxe due par quart et, également, seule une fraction de la TSCA a potentiellement été déclarée et versée, en application des possibilités de fractionnement du paiement offertes, induisant, pour la TSCA seule, un fractionnement de fait générateur. Dans ce cas, la TSCA disparaît au 1er janvier 2016 puisque ces contrats en deviennent exonérés. Il convient alors de permettre le paiement, selon les modalités prévues par le présent article et au taux fusionné applicable, des fractions de taxe restant dues alors même que le fait générateur de la TSA a déjà eu lieu, sous l’empire des anciennes règles d’assiette et de l’ancien taux. Ces modalités de recouvrement pourront être précisées par une circulaire.

*

* *

La Commission est saisie de l’amendement AS254 du rapporteur.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Le présent amendement veut assurer la neutralité, sur le coût des contrats de complémentaire santé, de la fusion entre la taxe spéciale sur les contrats d’assurance et la taxe additionnelle à la taxe sur les conventions d’assurance prévue par l’article 13. Les nouveaux taux fixés par cet article visent à ce que la simplification de la fiscalité sur les contrats d’assurance complémentaire santé soit neutre d’un point de vue budgétaire. Or la rédaction actuelle conduit à pénaliser les contrats collectifs obligatoires, pour ce qui concerne la couverture des indemnités journalières en complément des prestations servies par le régime obligatoire.

L’article 13 prévoit, en effet, que pour être qualifiés de solidaires et responsables et ainsi bénéficier du taux minoré de taxe, ces contrats ne doivent ni recueillir d’informations médicales auprès de l’assuré ni fixer le montant des primes en fonction de son état de santé. Si la seconde obligation est parfaitement légitime et conforme à la pratique actuelle, en revanche, les contrats collectifs obligatoires peuvent être amenés à recueillir des informations médicales pour d’autres garanties relevant de la prévoyance : incapacité, invalidité, et décès. L’amendement corrige cette erreur afin de ne pas pénaliser fiscalement les contrats collectifs obligatoires.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 13 modifié.

Article 14
(art. L. 136-5 et L. 243-1-3 du code de la sécurité sociale)

Versement des cotisations dans les secteurs soumis à l’obligation de mutualisation des congés payés

Le présent article vise à prélever les cotisations et contributions sociales dues au titre des périodes de congés payés directement sur la cotisation appelée par la caisse de congés payés.

1.  Le droit existant

a.  Les caisses de congés payés

L’indemnisation des congés payés relève de la compétence de l’employeur. Toutefois, dans certaines branches d’activité caractérisées par la mobilité des salariés, l’article L. 3141-30 du code du travail autorise la mise en place de caisses de congés payés par les employeurs pour mutualiser la gestion et le paiement des indemnités de congé des salariés.

L’article L. 3141-30 renvoie à des décrets le soin de déterminer « les professions, industries et commerces pour lesquels l’application des dispositions du présent chapitre comporte des modalités particulières, telles que la constitution de caisses de congés auxquelles les employeurs intéressés s’affilient obligatoirement. Ces dispositions concernent en particulier les salariés qui ne sont pas habituellement occupés de façon continue chez un même employeur au cours de la période reconnue pour l’appréciation du droit au congé. »

Ainsi, il existe de telles caisses dans les secteurs du bâtiment et travaux publics (BTP), des spectacles, des transports et de la manutention portuaire. Certaines caisses sont anciennes ; les caisses du BTP datent des années 1930.

Les entreprises adhérentes versent aux caisses des cotisations correspondant au coût des congés acquis par leurs salariés. Ces sommes font l’objet de placements financiers dont les produits couvrent les frais de gestion, les charges fiscales et sociales ainsi que les avantages prévus par les conventions collectives du secteur (par exemple, dans le BTP, jours supplémentaires au titre du fractionnement et de l’ancienneté, congé de mère de famille, etc.). Les caisses de congés paient les indemnités de congés payés aux salariés quand ils les prennent.

Ce système permet de libérer les entreprises de tâches administratives complexes. Il permet aussi de garantir la bonne application des dispositions légales et conventionnelles dans l’intérêt des salariés, de mutualiser les coûts entre les entreprises cotisantes et de favoriser la prise effective des congés, y compris en cas de changement d’employeur.

b.  Le versement des cotisations et contributions sociales sur les indemnités de congés payés

Antérieurement à la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, c’étaient les caisses de congés payés qui assuraient le versement aux URSSAF des cotisations patronales et salariales dues sur les indemnités de congés payés.

Compte tenu des difficultés portant sur le recouvrement de ces sommes auprès des caisses de congés payés, et des observations faites à cet égard par la Cour des comptes, l’article 40 de la loi de financement pour 2013 a transféré des caisses de congés payés aux entreprises la charge du paiement des cotisations au Fonds national d’aide au logement (FNAL) et du versement transport dus au titre des indemnités de congés payés. En application de l’article L. 243-1-3 du code de la sécurité sociale, la contribution au FNAL et le versement transport sont acquittés de manière libératoire par l’employeur par le biais d’une majoration des contributions dont il est redevable au titre des rémunérations.

Les caisses de congés payés demeurent redevables du paiement des cotisations, de la CSG, de la CRDS et des cotisations d’assurance chômage sur les indemnités de congés payés qu’elles versent.

Cet article demandait aussi la remise d’un rapport au Parlement sur l’élargissement de cette mesure à l’ensemble des cotisations et contributions sociales, rapport qui n’a toujours pas été remis, ce que votre rapporteur regrette.

c.  Des critiques récurrentes contre la gestion de ces caisses

Un rapport d’information du Sénat de M. Jean Arthuis sur les caisses de congés payés du BTP (octobre 2009) faisait état de problèmes de gestion et de gouvernance dans celles-ci.

Le rapport de la Cour des comptes sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale de septembre 2013 relevait, dans la continuité du rapport public annuel de 2009, que la caisse des congés des spectacles continuait à connaître de graves dysfonctionnements. Ainsi, une proportion élevée (de l’ordre de 10 %) des indemnités de congés n’était pas versée aux salariés, au détriment des intermittents les plus précaires. Par ailleurs, la caisse ne versait pas la totalité des cotisations et contributions dues, notamment le versement transport et la cotisation au Fonds national d’aide au logement (FNAL). Cette critique étant également valable pour les autres caisses de congés payés, elle a conduit à l’adoption de la mesure instaurant un prélèvement à la source pour ces deux contributions en loi de financement de la sécurité sociale pour 2013.

Par ailleurs, du fait qu’elles ont du mal à connaître la situation exacte de chaque entreprise affiliée, les caisses de congés payés pratiquent parfois des abattements indifférenciés sur les cotisations, qui ne sont pas conformes au code de la sécurité sociale.

L’objectif du Gouvernement n’est pas de mettre un terme au système de mutualisation de la gestion des congés payés, dont les entreprises des secteurs concernés apprécient l’utilité, mais de faire en sorte que le prélèvement et le versement des indemnités et cotisations dues soient réalisés de façon normale.

2.  Le dispositif proposé

Le présent article prévoit que, pour les droits à congés acquis postérieurement au 1er avril 2015, le versement direct vers les URSSAF des cotisations de sécurité sociale, de la CSG, de la CRDS et de la CSA due au titre des périodes de congés payés sera assis directement sur la cotisation appelée par la caisse de congés payés.

Le fait générateur des cotisations sera désormais associé au versement par l’employeur des sommes servant in fine à la caisse de congés payés à indemniser les salariés et non plus à la perception ultérieure de ces indemnités par les salariés.

Des dispositions transitoires sont toutefois prévues jusqu’au 1er avril 2018 afin de permettre aux entreprises de se préparer à la mise en œuvre de ce dispositif. Durant cette période transitoire relativement longue, il sera laissé la possibilité à l’employeur de continuer de faire reposer sur les caisses de congés payés le versement des cotisations et contributions dues au titre de l’indemnité de congés payés (cotisations de sécurité sociale, CSG, CRDS, CSA), mais ce versement sera effectué concomitamment au versement par l’employeur de la cotisation finançant la prise des congés.

a.  Le nouveau dispositif

Le 1° du I supprime la disposition de l’article L. 136-5 du code de la sécurité sociale selon laquelle la CSG est précomptée par les caisses de congés payés sur les indemnités avant avantages.

Le 2° du I propose une nouvelle écriture de l’article L. 243-1-3 du code de la sécurité sociale issu de la loi de financement pour 2013 qui avait créé, au titre des congés payés, des majorations forfaitaire sur les cotisations et contributions déjà dues sur les salaires.

Le nouveau dispositif est applicable au régime général et au régime agricole en métropole et dans les départements d’outre-mer.

Le 1° de l’article L. 243-1-3 concerne la cotisation au FNAL et le versement transports : il maintient un versement libératoire de majorations proportionnelles aux cotisations et contributions correspondantes sur les rémunérations ; cette majoration est déjà fixée à 11,5 % par le décret n° 2012-1552 du 28 décembre 2012.

Le 2° de l’article L. 243-1-3 concerne les cotisations sociales, la CSG, la CRDS et la contribution de solidarité pour l’autonomie (CASA). Il instaure un versement assis sur les montants dus aux caisses de congés payés pour la couverture des périodes de congés des salariés. Le cas échéant, la différence entre le montant de cotisations et contributions déjà versées et le montant des cotisations et contributions calculées sur l’indemnité de congés payés, fera l’objet d’une régularisation auprès de la caisse de congés payés, afin de prendre en compte notamment la part marginale de l’indemnité financée par la mutualisation. Le cas échéant, les versements des cotisations et contributions à la charge des salariés font l’objet d’un ajustement dans des conditions fixées par décret sur la base des montants d’indemnités de congés payés effectivement versés.

Ainsi, tous les prélèvements sociaux sont concernés par la mesure, sauf les cotisations d’assurance chômage. Il appartiendra aux partenaires sociaux de statuer sur l’extension de cette règle pour les cotisations chômage afin d’obtenir le schéma le plus homogène.

b.  L’entrée en vigueur

Le A du II du présent article dispose que cette réforme s’applique aux périodes d’acquisition de droits à congés postérieures au 1er avril 2015 pour les cotisations sociales, la CSG, la CRDS et la CASA, et au 1er avril 2016 pour les cotisations au FNAL et le versement transport. La date du 1er avril permet d’être en adéquation avec la période annuelle de décompte des congés payés. S’agissant des cotisations versées au FNAL et du versement transport, l’entrée en vigueur est fixée à 2016 car les cotisations étant déjà prélevées à la source, celles qui portent sur les indemnités de congés payés 2015 ont déjà été payées.

Le B instaure une période transitoire, jusqu’à une date fixée par décret par secteur concerné et au 1er avril 2018 au plus tard, pendant laquelle les caisses de congés payés opèreront le versement des cotisations et contributions sociales dues en lieu et place des employeurs, avant la fin du mois au cours duquel les cotisations leur sont versées. Un décret fixe le taux et l’assiette à partir desquels les cotisations et contributions sont versées pendant la période transitoire.

Le C précise qu’un décret fixe les conditions permettant aux entreprises des secteurs qui le souhaitent de bénéficier du dispositif transitoire.

3.  Impact financier de la mesure

a.  Pour les caisses de congés payés

Ces dispositions conduiront à une baisse relative du niveau moyen de la trésorerie des caisses de congés payés, correspondant à la part des cotisations sociales qu’elles détenaient. Cette trésorerie demeurera toutefois importante, puisque les caisses conservent les montants correspondants au coût du versement des indemnités de congés payés elles-mêmes aux salariés. Compte tenu de la faiblesse des taux d’intérêt sur les emprunts souverains, l’impact sur les recettes de fonctionnement et le financement des indemnités sera limité. Le Gouvernement a indiqué à votre rapporteur que l’impact sur les coûts de gestion devrait représenter moins de 1 % du coût de fonctionnement de ces caisses.

b.  Pour les salariés

La présente mesure n’a pas d’impact sur l’acquisition des droits à congés payés et des droits contributifs des salariés. Les indemnités de congés payés ainsi que les primes spécifiques ne sont pas modifiées. Votre rapporteur souligne que les primes et indemnités font l’objet de cotisations spécifiques et ne sont donc pas touchées par la mesure.

c.  Pour les entreprises des secteurs concernés

Cette mesure de rationalisation et de simplification est neutre quant au coût du travail dans les secteurs concernés comme pour les droits ouverts aux salariés.

d.  Pour la sécurité sociale

Cette mesure apporte 1,52 milliard d’euros de trésorerie dès 2015, et 0,5 milliard d’euros en 2016.

Ce gain contribue à compenser pour partie les pertes de recettes liées à la mise en œuvre en 2015 des baisses de cotisations et contributions sociales dans le cadre du pacte de responsabilité et de solidarité.

Il s’agit uniquement d’un impact en trésorerie, ce qui signifie que le gain que cela représente pour la sécurité sociale n’est pas acquis pour les années suivantes. Votre rapporteur souligne qu’il sera nécessaire de trouver l’an prochain d’autres ressources pour assurer la compensation à la sécurité sociale des pertes de recettes liées aux mesures du pacte de responsabilité.

*

* *

La Commission examine les amendements identiques AS8 de M. Jean-Pierre Door, et AS155 de M. Dominique Tian.

M. Jean-Pierre Barbier. L’article 14 s’attaque à un héritage du Front populaire. Depuis 1937, la caisse de congés payés du bâtiment permet à un million et demi de salariés de ce secteur de bénéficier d’une « portabilité » de leurs droits à congés. La mise en commun des cotisations permet aussi de financer une prime spécifique de congés payés. Le prélèvement à la source voulu par le Gouvernement ne permettra plus aux caisses concernées de placer les cotisations et les empêchera de verser les primes de vacances.

Vous prenez un risque énorme pour récupérer 1,52 milliard d’euros pour une seule année, dans l’unique but de compenser les exonérations de charges adoptées dans le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale cet été. Outre que vous allez mettre en difficulté les caisses de congés payés, les salariés seront les premiers à pâtir de cet article néfaste.

M. Dominique Tian. L’article 14 pénalise les salariés les moins bien payés qui effectuent les tâches les plus pénibles. Au moment où l’on parle de pénibilité, nous avons un gouvernement de gauche qui choisit bien ses victimes !

Mme la présidente Catherine Lemorton. Monsieur Tian, soit vous n’avez pas lu l’article 14, soit vous ne l’avez pas compris.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Je suis frappé de voir M. Tian défendre une conquête du Front populaire !

Les caisses de congés payés des secteurs du bâtiment, mais aussi du spectacle et des transports, conservent un temps les cotisations versées par les employeurs et jouent sur cette trésorerie abondante qu’elles placent. Dans tous les autres secteurs, ces cotisations sont prélevées à la source. Il est seulement proposé d’appliquer le droit commun à ces caisses. Je concède qu’il s’agit d’une mesure de trésorerie unique, qui ne s’appliquera qu’entre avril 2015 et avril 2016, et rapportera 1,5 milliard d’euros en 2015, et 500 millions d’euros en 2016.

Certes, les caisses en question vont y perdre des revenus financiers. Toutefois, la Cour des comptes a dénoncé à plusieurs reprises certaines de leurs pratiques, et elles se sont aussi exonérées du paiement du versement transport. Ce prélèvement ne les empêchera pas de disposer d’une trésorerie et de continuer à prévoir des mesures spécifiques pour leurs bénéficiaires. En l’état de la dette, l’État ne satisferait pas à son devoir de gestion en bon père de famille, s’il laissait de telles sommes inemployées.

Je suis défavorable aux amendements de suppression de l’article 14.

M. Jean-Pierre Barbier. Grâce à leur trésorerie abondante, les caisses versent une prime supplémentaire de congés payés de 30 %, et paient en même temps les cotisations. Si vous prélevez les cotisations à la source, vous les empêchez de le faire. Pour une opération de trésorerie ponctuelle, vous prenez le risque de casser un système qui marche et de priver les salariés d’une prime qui leur permet de prendre des vacances. Je suis très surpris qu’un gouvernement qui se dit de gauche remette en cause un tel acquis social.

Mme Isabelle Le Callennec. Cet article est un nouveau mauvais coup porté aux professionnels du bâtiment. Il signe la fin de la prime de vacances et de la prime de jours supplémentaires d’ancienneté. Alors que le bâtiment souffre et que ses salariés, qui manifestent à proximité de l’Assemblée nationale, sont menacés par le chômage, vous prenez plus d’un milliard dans leur poche. C’est très grave !

M. Dominique Tian. Dès qu’un système est bien géré et qu’il s’est constitué une trésorerie, l’État cherche à récupérer l’argent pour combler ses propres besoins de trésorerie. C’est la logique de la cagnotte qui, hier, a donné lieu à la création de la taxe sur les mutuelles et qui, prochainement, doit nous amener à rafler la trésorerie des chambres de commerce. Sans doute sont-elles trop bien gérées ! Cette pratique antiéconomique nous surprend d’autant plus que vous choisissez ici de pénaliser les ouvriers du bâtiment en vous en prenant à leurs vacances et à leur pouvoir d’achat.

M. Jean-Pierre Door. Même si le projet de rapport indique que la mesure peut être sans impact sur les droits des salariés, je constate qu’il s’agit bien d’une opération de tuyauterie qui consiste, en 2015, à compenser une partie des pertes de recettes pour la sécurité sociale consécutives au vote du dernier PLFRSS. Elle envoie aussi un message négatif à un secteur en grande difficulté, dont les représentants manifestent aujourd’hui dans nos rues.

M. Bernard Accoyer. La Commission serait bien inspirée de supprimer cet article à l’unanimité. Sur le terrain, nous constatons le désespoir des Français qui travaillent dans les secteurs fragilisés comme le bâtiment. Cette mesure constitue une véritable provocation.

M. Gérard Bapt, rapporteur. J’ai entendu que l’on retirait 1,5 milliard d’euros de la poche des salariés : c’est faux ! Les caisses seront seulement privées du produit financier issu du placement de ces sommes, qui vient abonder leur trésorerie. Sans doute préférez-vous ne pas alléger la dette avec les 2 milliards d’euros attendus de la mesure.

La Cour des comptes a critiqué le fonctionnement des caisses concernées à plusieurs reprises. Les délais de versement des indemnités sont très élevés et le taux de non-paiement définitif atteint 5 à 6 % en 2012. J’ajoute que, selon une enquête du ministère du travail effectuée en 2009, les congés in fine non payés bien qu’ayant été provisionnés financent la diminution du taux d’appel de la cotisation à la retraite des entreprises. S’il s’agit là, pour vous, d’une conquête du Front populaire, elle est à front renversé !

M. Jean-Pierre Barbier. L’argent que vous récupérez aujourd’hui, vous en auriez bénéficié en cours d’année. La mesure n’est en aucun cas utile au désendettement de notre pays : elle siphonne seulement par anticipation la trésorerie des caisses du bâtiment. C’est une mesure d’affichage.

M. Dominique Tian. Cette mesure s’applique à des entreprises domiciliées en France employant des salariés qui cotisent en France. Elles seront, une nouvelle fois, désavantagées par rapport aux entreprises sous-traitantes européennes, qui pratiquent souvent le dumping social sur le marché français. Mesurez-vous vraiment la responsabilité que vous prenez ?

La Commission rejette les amendements.

Puis elle adopte l’article 14 sans modification.

Article 15
(art. L. 243-6-5 [nouveau], L. 243-7, L. 243-13 et L. 652-3 du code de la sécurité sociale et art. L. 724-7-1 [nouveau], L. 724-7, L. 725-26 [nouveau] et L. 725-12
du code rural et de la pêche maritime)

Dispositions relatives au contrôle et au recouvrement des cotisations
et contributions sociales

Cet article vise à la fois à sécuriser les cotisants et à renforcer l’efficacité des contrôles et du recouvrement, à travers trois mesures :

– la limitation à trois mois des contrôles visant les entreprises de moins de dix salariés ;

– l’élargissement du périmètre de contrôle ;

– l’encadrement des transactions pouvant être conclues entre URSSAF et cotisant ;

– le renforcement de la procédure d’opposition à tiers détenteur.

1.  La limitation à trois mois des contrôles visant les entreprises de moins de dix salariés

a.  L’absence de limitation de la durée des contrôles en droit social

L’article 52 du livre des procédures fiscales limite à trois mois la vérification sur place des livres et documents comptables pour les très petites entreprises (en fonction du chiffre d’affaires).

Cette limitation se justifie par le fait qu’un contrôle peut constituer une gêne pour l’activité de l’entreprise d’autant plus importante que l’entreprise est petite. Dans les très petites entreprises, la mobilisation du personnel ou du chef d’entreprise lui-même est susceptible d’avoir une influence sur l’activité économique de l’entité contrôlée.

En droit social, il n’y a pas de limitation de la durée des contrôles pour les très petites entreprises (TPE).

En moyenne, les contrôles des URSSAF dans les TPE durent un peu plus d’un mois, mais certaines situations ont été rapportées où le contrôle a duré plus d’un an. Or, la Cour de cassation a introduit en 2011, dans le domaine du droit de la sécurité sociale, sans la définir ni même l’appliquer pour l’instant, la notion de « délai raisonnable » dans sa jurisprudence (13). À la suite de cet arrêt, des jugements du premier degré ont annulé des procédures de contrôle sur le fondement de la méconnaissance du délai raisonnable dans lequel la lettre d’observations de l’inspecteur doit être notifiée.

Enfin, la limitation de la durée des contrôles peut aussi être dans l’intérêt des organismes de recouvrement. Elle permettrait de libérer des inspecteurs pour contrôler davantage d’entreprises. Elle limiterait aussi les pertes liées à la prescription d’une partie des redressements.

b.  La limitation à trois mois des contrôles dans les TPE

Le 1° du I du présent article rétablit dans le code de la sécurité sociale un article L. 243-13 au sein de la section relative au contrôle des recettes du régime général. Son premier alinéa dispose que les contrôles des URSSAF visant les entreprises de moins de dix salariés ou les travailleurs indépendants ne peuvent s’étendre sur une période de plus de trois mois. Cette disposition s’applique tant pour le contrôle sur place que pour le contrôle sur pièces.

Le délai court entre le début effectif du contrôle et la lettre d’observations.

Le deuxième alinéa de l’article L. 243-13 précise que le délai de trois mois peut être prorogé une fois à la demande de l’entreprise contrôlée ou du contrôleur. La prorogation est de droit. L’étude d’impact précise que cette prorogation a vocation à s’appliquer seulement dans des circonstances exceptionnelles (par exemple un accident subi par un inspecteur ou contrôleur du recouvrement).

Ce seuil de dix salariés sert déjà à la définition du champ d’application d’autres mesures relatives au recouvrement, notamment la possibilité d’effectuer un contrôle sur pièces ou la détermination de la périodicité du paiement des cotisations.

Cependant, votre rapporteur rappelle que s’il s’agit de coordonner ce seuil de 10 salariés dans le code de la sécurité sociale, il faut reprendre le même que celui mentionné notamment à l’article R. 243-59-3 du code de la sécurité sociale à propos du contrôle des obligations déclaratives et de paiement, à savoir « les employeurs et travailleurs indépendants occupant neuf salariés au plus au 31 décembre de l’année qui précède celle de l’avis de contrôle ».

Le mode de calcul des effectifs sera le mode de calcul de droit commun, fixé par l’article D. 241-26 du code de la sécurité sociale, appliqué notamment pour les allégements généraux de cotisations patronales. Il s’agit d’équivalents temps pleins appréciés au 31 décembre sur la moyenne des douze mois de l’exercice.

C’est un seuil bas qui se justifie par le fait que dans les entreprises d’une certaine taille, les investigations sont plus longues et le cotisant peut avoir besoin de temps pour rassembler les documents demandés. Par ailleurs, certaines analyses et interprétations peuvent être nécessaires avant d’établir, le cas échéant, le redressement. Le relèvement de ce seuil n’irait donc pas nécessairement dans l’intérêt des entreprises contrôlées.

Le II de l’article L. 243-13 indique que ces dispositions ne sont pas applicables lorsque la personne contrôlée verse des rémunérations à des salariés dont le nombre est égal ou supérieur à dix. La précision « directement ou par l’entremise d’un tiers » ne semble pas nécessaire dans la mesure où l’alinéa suivant permet de tenir compte des effectifs des filiales.

Le 2° du II de l’article L. 243-13 indique que le seuil de dix salariés est apprécié au niveau du groupe.

L’article L. 243-13 prévoit les situations exorbitantes du droit commun qui lèvent le délai : le travail dissimulé, l’obstacle à contrôle, l’abus de droit (tel que défini à l’article L. 243-7-2) et le constat de comptabilité insuffisante ou de documentation inexploitable.

Le 1° du II du présent article crée un article L. 724-7-1 dans le code rural et de la pêche maritime qui étend l’application de l’article L. 243-13 précité au régime agricole.

2.  L’élargissement du périmètre de contrôle

L’article L. 243-7 du code de la sécurité sociale qui précise le champ de contrôle des URSSAF ne vise que les employeurs, les travailleurs indépendants et toute personne qui verse des cotisations ou contributions sociales.

Or, il existe des structures qui ne sont ni employeurs ni contributeurs qui, contractualisant avec l’employeur, attribuent un ou plusieurs avantages aux salariés de celui-ci. Il en va ainsi d’une association créée pour gérer un parc de véhicules et leur attribution aux salariés d’une entreprise ou de la gestion, par une holding, des seuls avantages concédés aux dirigeants d’une autre entité. Ces associations ou holdings n’ont pas la qualité d’employeur et ne versent pas de cotisations.

Les contrôles inopinés de travail dissimulé, qui peuvent être envisagés en dehors du champ précité, ne constituent pas le vecteur adapté car la seule irrégularité qui peut être constatée lors d’un tel contrôle est celle relative au travail dissimulé.

Aussi le 2° du I du présent article propose-t-il d’ajouter à l’article L. 243-7 précité une phrase permettant un contrôle de l’URSSAF dans une structure non-employeur lorsqu’à l’occasion du contrôle d’un employeur, les inspecteurs ont découvert des éléments permettant de présumer le versement par une entité tierce de rémunérations au sens de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale à des travailleurs qu’elle n’emploie pas.

Cette mesure est différente de celle prévue à l’article L. 242-1-4 du code de la sécurité sociale intégrant dans l’assiette les sommes et avantages versés à un salarié par une personne n’ayant pas la qualité d’employeur. En effet, ce dispositif vise les sommes et avantages alloués en contrepartie d’une activité accomplie dans l’intérêt de ce tiers.

Sur le plan procédural, le déclenchement d’opérations de contrôle dans une structure distincte de l’employeur justifie que l’entité contrôlée bénéficie du droit à l’information classique (avis de contrôle, mention de l’existence de la Charte du cotisant contrôlé, droit de se faire assister du conseil de son choix tout au long de la procédure).

Selon la situation, ce sera l’employeur ou le tiers qui sera redressé : si les rémunérations versées par le tiers profitent au tiers, l’article L. 242-1-4 s’applique et c’est le tiers qui est redressé. Si le tiers n’est qu’un intermédiaire qui verse des sommes ou des avantages à des salariés en vertu d’un contrat passé avec leur employeur, sans que ces rétributions ne soient en lien avec une activité qui profite au tiers, alors c’est l’employeur qui sera redressé.

Le 2° du II du présent article insère une phrase dans l’article L. 724-7 du code rural et de la pêche maritime permettant l’application de l’élargissement de ce champ de contrôle au régime agricole.

3.  L’encadrement des transactions pouvant être conclues entre URSSAF et cotisant

a.  L’incertitude juridique actuelle

Se fondant sur une jurisprudence de la Cour de cassation des années 1970 (14), certaines URSSAF ont été amenées à conclure des transactions avec les cotisants. Cette possibilité n’étant pas expressément prévue par la loi, il n’existe aucun cadre juridique réglementant cette pratique. Cela crée une certaine insécurité juridique et une rupture d’égalité entre les cotisants devant les prélèvements sociaux.

Or, la possibilité de conclure une transaction notamment sur les sujets des frais professionnels et avantages en nature répond à un véritable besoin. Par exemple, dans un arrêt de mai 2014, la Cour de cassation a annulé les éléments forfaitaires de justifications de frais internet avancés par une entreprise. Lorsqu’ils déduisent ces remboursements de frais, les employeurs devraient désormais archiver un très grand nombre de justificatifs pour des montants dérisoires (frais de connexion, d’impression...), alors que la cour d’appel avait préalablement admis la réalité des frais auxquels les salariés étaient exposés et le mode de justification forfaitaire. Le contrôle par l’URSSAF aurait en l’espèce été extrêmement fastidieux sur une base réelle. La transaction peut ainsi conduire à sécuriser des méthodes d’évaluation forfaitaires rendues nécessaires par des contraintes liées à la difficulté de conservation de l’ensemble des pièces justificatives.

Selon la définition donnée par l’article 2044 du code civil, « la transaction est un contrat par lequel les parties terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître. Ce contrat doit être rédigé par écrit ».

Il est dans l’intérêt de la sécurité sociale d’encourager ces procédures car elles permettent d’accélérer et de sécuriser le recouvrement tout en favorisant une gestion non-contentieuse des litiges.

Le présent article propose donc de créer une procédure de transaction encadrée, s’inspirant de celle qui existe en matière fiscale.

Rappelons que l’article L. 247 du livre des procédures fiscales dispose que « l’administration peut accorder sur la demande du contribuable, (…), par voie de transaction, une atténuation d’amendes fiscales ou de majorations d’impôts lorsque ces pénalités et, le cas échéant, les impositions auxquelles elles s’ajoutent ne sont pas définitives ». La transaction s’applique lorsque l’administration fiscale consent au redevable une atténuation des pénalités prononcées ou encourues, et, le cas échéant, renonce à porter l’affaire devant les tribunaux.

Le contribuable s’engage à verser au Trésor une somme à titre de sanction, inférieure aux pénalités encourues. En aucun cas, la transaction ne peut conduire à atténuer l’impôt dû.

b.  Le dispositif proposé

Le 3° du I du présent article complète la section du code de la sécurité sociale relative aux droits des cotisants du régime général par un article L. 243-6-5 qui permet aux directeurs des organismes de recouvrement du régime général (URSSAF) de conclure une transaction avec les cotisants.

L’application de ce nouvel article est étendue au régime agricole par le 3° du II qui crée un article L. 725-26 du code rural et de la pêche maritime.

Définition

Le I de l’article L. 243-6-5 précité dispose que le directeur de l’URRSAF peut conclure une transaction avec un cotisant lorsque les sommes dues n’ont pas un caractère définitif.

Champ de la transaction

Le I de l’article L. 243-6-5 dispose que la transaction est exclue en cas de travail dissimulé.

Les cas dans lesquelles une transaction peut être conclue sont limitativement énumérés dans le II de l’article L. 243-6-5. Elle peut porter sur :

– les pénalités et majorations de retard, comme en droit fiscal ;

– l’évaluation d’éléments d’assiette relatifs aux avantages en nature, aux avantages en argent et aux frais professionnels, lorsque la détermination de ces éléments présente une difficulté particulière ;

– les montants de redressements calculés en application des méthodes de vérification par échantillonnage et extrapolation.

Protection du champ de compétence des commissions de recours amiable (CRA)

Lorsqu’un contrôle prévu à l’article L. 243-7 du code de la sécurité sociale a été engagé, la transaction doit être conclue avant que la commission de recours amiable (CRA) ne soit saisie. L’ouverture par le cotisant d’une procédure précontentieuse devant la CRA apparaît en effet incompatible avec l’engagement d’une procédure transactionnelle. La possibilité de conclure une transaction est de nouveau ouverte lorsque le cotisant décide de saisir le tribunal des affaires de la sécurité sociale (TASS).

Ces dispositions permettent d’éviter toute interférence entre la compétence des CRA et le champ de la transaction. Par ailleurs, il est prévu, par voie réglementaire, de préciser le champ de la transaction en supprimant la possibilité d’en conclure sur les majorations de retard lorsque la CRA a refusé la remise. Le directeur de l’organisme de recouvrement ne saurait ainsi accorder de son seul chef ce que la CRA a refusé.

Procédure

Le IV de l’article L. 243-6-5 indique que la transaction doit, à peine de nullité, respecter la procédure fixée par ce même article et par les mesures d’application réglementaire.

L’étude d’impact indique qu’un décret en Conseil d’État précisera la procédure, en en donnant quelques éléments :

– l’initiative de la transaction appartient tant au cotisant qu’aux organismes de recouvrement ;

– l’examen de la demande de transaction relève de l’organisme dont dépend le cotisant ;

– si le montant de la transaction excède 150 000 euros, le directeur de l’URSSAF doit recueillir l’accord de l’ACOSS.

L’étude d’impact précise aussi que la décision du directeur de transiger est soumise au contrôle de légalité de la Mission nationale de contrôle (MNC) qui sera destinataire du projet de convention. Celle-ci contrôlera à la fois le respect des critères posés pour l’article L. 243-6-5 et l’équilibre des concessions réciproques.

Effet de la transaction

La transaction devient définitive par approbation du conseil d’administration de l’URSSAF ou d’un autre organisme de recouvrement.

Dans ce cas, aucune procédure contentieuse ne peut être entreprise ou reprise sur l’objet de la transaction.

Enfin, le V de l’article L. 243-6-5 dispose que la transaction conclue par un organisme s’impose aux autres, dans le cas où le cotisant change d’implantation géographique.

Ce dispositif s’appliquera aux transactions conclues à compter d’une date qui reste à définir par décret en Conseil d’État, et au plus tard le 1er octobre 2015. Ce délai laisse le temps nécessaire à l’élaboration dudit décret.

Votre rapporteur est favorable à ces mesures qui permettent de donner un cadre juridique clair à un mode de règlement des conflits qui est beaucoup pratiqué dans les champs fiscal et social, mais insuffisamment encadré dans la sphère sociale.

Cet article fixe un cadre juridique clair et prévoit un contrôle des transactions par la MNC et par l’ACOSS. L’agence centrale sera par ailleurs chargée de proposer une doctrine générale de recours à des transactions.

4.  Le renforcement de la procédure d’opposition à tiers détenteur

a.  Les inconvénients de la procédure d’opposition à tiers détenteur

La procédure d’opposition à tiers détenteur permet aux organismes créanciers de cotisations ou contributions sociales, de majorations ou de pénalités de recouvrer ces sommes en faisant opposition sur les fonds détenus pour le compte des assurés débiteurs par tous tiers détenteurs. Ce dispositif s’inspire de la procédure d’avis à tiers détenteur fiscal, dont le mécanisme (caractérisé par un rapport tripartite : créancier saisissant, débiteur saisi, tiers saisi) est identique à celui de la saisie-attribution.

Les créances doivent être couvertes par un titre exécutoire, condition sine qua non de toute mesure d’exécution forcée.

Cette procédure est prévue à l’article L. 652-3 du code de la sécurité sociale pour le Régime social des indépendants, et s’applique par extension, en vertu des articles L. 136-5, L. 242-11 et de l’ordonnance 96-650 du 24 janvier 1996 aux URSSAF, ainsi qu’aux caisses d’assurance vieillesse des professions libérales.

Cependant, l’opposition à tiers détenteur présente un certain nombre d’inconvénients qui limitent fortement son utilisation par les organismes de recouvrement qui lui préfèrent notamment la saisie attribution, pourtant plus onéreuse et plus longue, mesure dans laquelle la procédure de recouvrement forcé est intégralement externalisée auprès de l’huissier de justice.

Ainsi, le caractère suspensif de la contestation de l’opposition à tiers détenteur devant le juge de l’exécution incite aujourd’hui certains débiteurs à contester systématiquement les actions des organismes de recouvrement, faisant obstacle au recouvrement des cotisations.

b.  Le dispositif proposé

Le 4° du I du présent article modifie l’article L. 652-3 précité.

Le a) du 4° étend le dispositif de l’opposition à tiers détenteur aux contributions sociales. Cet ajout permet d’inclure les contributions pour les oppositions à tiers détenteur pratiquées par le RSI, les organismes conventionnés pour l’assurance maladie ainsi que la Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales. Cet ajout n’a pas d’impact sur les URSSAF qui utilisent l’opposition à tiers détenteur mentionnée à l’article L. 243-3-1 du code de la sécurité sociale, qui renvoie lui-même à l’article L. 652-3 en mentionnant les contributions.

Le b) du 4° réécrit le troisième alinéa de l’article L. 652-3, relatif à la contestation de la procédure. En effet, la contestation étant actuellement suspensive, elle pouvait être utilisée dans le seul but de retarder le paiement. Le présent article dispose que la contestation de l’opposition reste suspensive du paiement jusqu’au jugement, sauf dans huit situations limitativement énumérées (travail dissimulé, obstacle à contrôle, abus de droit, absence de bonne foi, etc.).

Le c) du 4° étend l’article L. 652-3 au recouvrement des indus de prestations sociales. Cette extension est utile pour les réseaux qui sont compétents à la fois en matière de recouvrement et de service de prestations. Ces derniers faisant déjà de l’opposition à tiers détenteur sur leurs cotisations pourraient la pratiquer pour les prestations indûment versées avec un coût marginal très faible.

Enfin, le 4° du II étend cette procédure au régime agricole, en modifiant l’article L. 725-26 du code rural et de la pêche maritime.

5.  Entrées en vigueur

Le III prévoit l’entrée en vigueur des différentes mesures.

Le A du III prévoit l’entrée en vigueur de la limitation des contrôles à trois mois au 1er janvier 2015.

Le B fixe l’entrée en vigueur des mesures relatives à la transaction au 1er octobre 2015.

Le C prévoit l’entrée en vigueur des mesures relatives à l’opposition à tiers détenteur au 1er janvier 2015 : les nouvelles dispositions s’appliquent aux titres exécutoires émis à compter du 1er janvier 2015. La formulation retenue signifie que l’opposition à tiers détenteur s’applique aux contraintes délivrées à compter de cette date. Le cotisant dispose alors d’un délai de quinze jours pour former opposition devant le tribunal des affaires de sécurité sociale. Ce n’est qu’au terme de ce délai et à défaut d’opposition que l’opposition à tiers détenteur pourra être envisagée.

*

* *

La Commission est saisie de l’amendement AS255 du rapporteur.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Il s’agit de supprimer une précision inutile.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine les amendements identiques AS103 de Mme Jacqueline Fraysse et AS137 de M. Dominique Tian.

Mme Jacqueline Fraysse. Il s’agit de supprimer les alinéas 15 à 24, qui traitent de la possibilité de transactions entre le directeur de l’URSSAF et les employeurs se trouvant dans l’illégalité.

La Cour des comptes estime la fraude au paiement des cotisations par les employeurs entre 20 et 25 milliards d’euros pour l’année 2012. Sachant que le déficit de la sécurité sociale est de 15 milliards d’euros, on comprend l’importance de récupérer ces sommes. De ce point de vue, nous regrettons que le Gouvernement ne se fixe pas un objectif plus ambitieux que la récupération de 76 millions d’euros.

La transaction mise en place par l’article 15 permet à un employeur de demander à un directeur d’URSSAF ou à une caisse générale de sécurité sociale de revoir le montant des pénalités de retard, mais aussi l’évaluation de certains éléments d’assiette des cotisations, et les montants des redressements. En clair, ce dispositif permet aux employeurs de ne pas payer l’intégralité de leur dû alors même que leur situation financière serait bonne.

Ce type de transaction, à la discrétion des interlocuteurs, peut engendrer des inégalités entre les cotisants. Par ailleurs, alors même que la Cour des comptes demande que soient développés les moyens de contrôle et les sanctions, le choix de la souplesse aux dépens de la sévérité constitue, à notre sens, un mauvais signal envoyé aux employeurs dans l’illégalité.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Avis défavorable.

Madame Fraysse, je crains que vous n’ayez mal interprété le dispositif proposé par le Gouvernement. Les transactions n’empêchent pas le contrôle ; elles ne peuvent même avoir lieu que parce qu’un contrôle a révélé une anomalie.

Les 25 milliards d’euros de fraude au paiement des cotisations employeurs cités par la Cour des comptes ne sont qu’une évaluation. En matière de travail dissimulé, il est évidemment difficile d’obtenir des estimations précises.

Les transactions ne sont pas une nouveauté : les demandes de remises sont d’ores et déjà examinées par les commissions de recours amiable (CRA). Un directeur d’URSSAF ne peut déroger à une décision de refus de transaction ; il n’a que la possibilité de revenir sur une remise accordée par la CRA qu’il estimerait trop élevée. Sa décision est donc encadrée, et tout se déroulera dans la transparence.

M. Denys Robiliard. Les alinéas 15 à 24 ne font que poser les limites d’une pratique déjà existante mais pas encadrée. La transaction est prévue par l’article 2044 du code civil et rien n’interdit à une URSSAF d’y recourir – un arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation l’a même reconnu en 1970. Pour répondre aux inquiétudes de Mme Fraysse, mieux vaut prévoir un encadrement plutôt que laisser les choses en l’état !

La Commission rejette les amendements.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, elle rejette l’amendement AS138 de M. Dominique Tian.

Puis elle adopte l’article 15 modifié.

Après l’article 15

La Commission examine l’amendement AS124 de M. Dominique Tian.

M. Élie Aboud. On sait que les commissions de recours amiable (CRA) ne font qu’entériner les positions des organismes de sécurité sociale. Nous proposons donc de permettre aux cotisants qui le souhaitent d’y défendre leurs droits. En outre, cela épargnerait aux URSSAF des procédures longues et inutiles.

M. Gérard Bapt, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Avis défavorable. Les CRA sont des instances chargées des précontentieux, et non des contentieux. Leurs décisions – validées, le cas échéant, par le directeur de l’organisme – peuvent être ensuite contestées devant le tribunal des affaires de la sécurité sociale (TASS). Si les CRA devaient entendre les cotisants, on voit mal comment on pourrait refuser à ces derniers de se faire représenter par des avocats, et ce serait l’escalade. Restons-en à la procédure actuelle, qui est rapide.

La Commission rejette l’amendement.

Article 16
(art. L. 243-6 du code de la sécurité sociale)

Simplification des modalités de contestation des cotisations AT-MP

Cet article vise à simplifier les modalités de contestation des cotisations d’accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP) afin d’éviter que l’employeur n’ait à former plusieurs recours pour obtenir le remboursement des cotisations indûment versées auprès de l’URSSAF.

1.  Les modalités de contestation des cotisations AT-MP ont fait l’objet de nouvelles interprétations juridiques depuis 2013

a.  Le mode de fixation de la cotisation AT-MP

Selon la logique assurantielle qui prévaut au sein de la branche AT-MP, le mode de fixation des cotisations AT-MP repose sur une tarification du risque propre à chaque employeur.

Trois modes de tarification (individuelle, mixte ou collective) permettent de calculer le taux de cotisation de chaque entreprise, en fonction de leur nombre de salariés. Les seuils d’effectifs applicables ont été modifiés par la réforme de la tarification des risques professionnels introduite par le décret n° 2010-753 du 5 juillet 2010, comme l’indique le tableau ci-dessous.

Mode de tarification

Ancien système (jusqu’en 2012)

Collectif
(1 à 9 salariés)

Mixte
(10 à 199 salariés)

Individuel
(à partir de 200 salariés)

Nouveau système (depuis 2012)

Collectif
(1 à 19 salariés)

Mixte
(20 à 149 salariés)

Individuel
(à partir de 150 salariés)

Source : CNAMTS – Direction des risques professionnels.

L’article L. 242-5 du code de la sécurité sociale dispose que le taux de cotisation de chaque entreprise en matière d’accident du travail et de maladies professionnelles est fixé chaque année par les caisses d’assurance retraite et de santé au travail (CARSAT), selon trois critères :

– son effectif ;

– son secteur d’activité ;

– son taux de sinistralité (c’est-à-dire le rapport entre le nombre d’accidents du travail et de maladies professionnelles et le nombre de salariés).

Le taux des cotisations AT-MP d’une entreprise au titre d’une année donnée (n) est déterminé en fonction des dépenses de sinistralité qu’elle a générées au titre de l’antépénultième année (n-2) et des deux années précédant celle-ci (soit n-3 et n-4). Par ailleurs, pour les entreprises d’au moins vingt salariés, la Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) peut intervenir en amont de la fixation du taux par la CARSAT pour reconnaître le caractère professionnel de l’accident ou de la maladie.

Une fois le taux de la cotisation AT-MP déterminé sur la base de ces critères, il est notifié à l’entreprise par la CARSAT. Les Unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (URSSAF) sont ensuite chargées du recouvrement de la cotisation AT-MP.

TABLEAU RÉCAPITULATIF DES ORGANISMES INTERVENANT DANS LA DÉTERMINATION DU TAUX, LA NOTIFICATION ET LE RECOUVREMENT DE LA COTISATION AT-MP

CPAM

– Reconnaissance du caractère professionnel de l’accident ou de la maladie pour les entreprises d’au moins vingt salariés ;

– Le cas échéant, fixation du taux d’incapacité permanente pour les salariés.

CARSAT

– Détermination annuelle du taux (en fonction du nombre et de la gravité des accidents et maladies reconnus au titre de la législation sur les risques professionnels) ;

– Notification du taux.

URSSAF

– Recouvrement de la cotisation AT-MP ;

– Remboursement des cotisations indues (application de la prescription triennale).

b.  Les modalités de contestation des cotisations AT-MP

En vertu de l’article R. 143-21 du code de la sécurité sociale, toute entreprise peut contester dans un délai de deux mois le taux de cotisations AT-MP qui lui est notifié par la CARSAT. Au-delà de ce délai, l’entreprise ne peut plus remettre en cause le taux notifié.

Toutefois, à l’expiration de ce délai, elle peut introduire une action contre les éléments constitutifs de ce taux, tels que le caractère professionnel d’un accident ou d’une maladie ou le taux d’incapacité permanente. Lorsque la décision de recours est favorable à l’entreprise, par exemple parce que le juge conclut à l’absence d’origine professionnelle d’un sinistre, la décision d’inopposabilité du sinistre entraîne la minoration du taux de la cotisation AT-MP initialement déterminé et notifié par la CARSAT à l’entreprise.

Dès lors, cette inopposabilité ouvre un droit à remboursement des cotisations indues devant les URSSAF. Or l’article L. 243-6 du même code pose le principe d’une prescription triennale, et fixe le point de départ du délai de prescription à la date de versement des cotisations indues. Ainsi, lorsqu’un employeur estime avoir réglé à tort des cotisations AT-MP, il peut en demander le remboursement dans un délai maximal de trois ans suivant le versement de l’indu. Au-delà, l’URSSAF peut opposer à l’entreprise le principe de prescription triennale et ne pas procéder au remboursement des cotisations.

2.  Un impératif de sécurisation juridique des modalités de contestation des cotisations AT-MP

a.  La question des conditions d’application de la prescription triennale a fait l’objet d’un revirement de jurisprudence de la Cour de cassation

Le problème de l’application de la prescription triennale

Dans une circulaire commune du 24 juin 2009, l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) et la Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) avaient indiqué que la prescription applicable aux demandes de remboursement de cotisation AT-MP pouvait être interrompue par la contestation de l’employeur des différents éléments constitutifs du taux de cotisation AT-MP. La Cour de cassation avait confirmé cette position dans un arrêt de 2011 (Cass. 2e civ. 3 mars 2011, n° 10-30554 – GEREP c/ URSSAF de Seine-et-Marne). Ainsi, tout recours engagé par l’employeur à l’encontre d’une décision ayant une incidence sur le niveau de ces cotisations était interruptif de prescription.

Cependant, pour des raisons diverses dues à la contestation tardive d’un sinistre ou aux délais d’instruction, la notification des taux rectifiés pouvait intervenir plus de trois ans après le versement des cotisations au titre desquelles l’employeur peut prétendre à remboursement. Ce dernier pouvait donc se voir notifier une minoration de son taux, sans pouvoir récupérer les cotisations indues après l’expiration du délai de trois ans suivant le versement de cette cotisation.

Le revirement de jurisprudence de la Cour de cassation en 2013

Plus récemment, la Cour de cassation a rendu une série de décisions bouleversant l’interprétation des conditions d’application de la prescription triennale prévue à l’article L. 246-3 du code de la sécurité sociale en matière de remboursement de cotisations d’AT-MP indues.

Dans un arrêt du 24 janvier 2013 (15), la Cour a décidé qu’en matière de remboursement de cotisations AT-MP versées à tort suite à minoration de taux, la saisine initiale de la CPAM d’une contestation technique, telle qu’une demande en inopposabilité du sinistre ou une demande de minoration du taux d’incapacité permanente, n’interrompt pas la prescription de l’action en remboursement de l’article L. 243-6 du code de la sécurité sociale devant les URSSAF, ces organismes étant deux entités strictement indépendantes.

En conséquence, il a été déduit de cette décision que seul un recours conservatoire formé auprès de la CARSAT ou de la Cour nationale de l’incapacité et de la tarification de l’assurance des accidents du travail (CNITAAT), dans les deux mois suivant la notification du taux de cotisation, pouvait interrompre la prescription, sous réserve que cette contestation ait par ailleurs été portée à l’attention de l’URSSAF en raison de l’indépendance des caisses.

La Cour a explicitement confirmé le sens de l’arrêt du 24 janvier 2013 dans un nouvel arrêt du 10 octobre 2013 (16), en précisant que l’interruption de la prescription ne valait que pour les sinistres visés dans les recours conservatoires.

La multiplication du nombre de recours conservatoires

Cette série de décisions a eu, dès 2013, un effet considérable sur le volume de contentieux. En effet, si les décisions de la Cour de cassation n’ont pas eu d’effet s’agissant des recours formés devant la CARSAT, il en va différemment lorsque la modification du taux résulte d’une décision initiale de la CPAM.

Afin d’interrompre le cours de la prescription triennale, l’employeur doit désormais former, en sus du recours formé à l’encontre de la décision de la CPAM portant sur le caractère professionnel d’un sinistre, au moins trois recours conservatoires devant la CARSAT, correspondant à chacune des trois années pour lesquelles le taux de cotisations a été notifié à l’entreprise par la CARSAT. L’employeur peut également former de tels recours conservatoires devant la CNITAAT. L’étude d’impact attachée au présent article rappelle que ces recours conservatoires formés à titre préventif pour interrompre le cours de la prescription triennale sont dénués de sens, puisque seul le contentieux formé devant la CPAM est susceptible de clore ces recours.

Selon la CNITAAT, les deux arrêts de la Cour de cassation rendus en janvier et octobre 2013 ont engendré l’enregistrement de 1 897 recours conservatoires, soit une augmentation de 1 100 dossiers en 2013 par rapport à l’année 2012. En parallèle, plus de 8 200 recours gracieux ont été formés devant les CARSAT en 2013. Or, les recours conservatoires liés à cette jurisprudence de la Cour ont vocation à rester dans le stock de contentieux pendant parfois plusieurs années, dans l’attente de la décision de la CPAM.

a.  La nécessité de sécuriser l’application de la prescription triennale

Plusieurs des intervenants auditionnés dans le cadre de l’examen du présent projet de loi de financement ont souligné l’insécurité juridique provoquée par les décisions successives de la Cour, puisque pas moins de quatre arrêts ont été rendus sur cette question en un an et demi.

La nécessité d’une clarification de la législation en matière de prescription triennale, mentionnée dans les recommandations formulées par la Cour de cassation dans ses bilans annuels pour 2012 et 2013, a été rappelée à plusieurs reprises par le Parlement, notamment au travers d’un amendement adopté par la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale lors de l’examen du PLFSS pour 2014.

Votre rapporteur se félicite par conséquent que le présent article entreprenne de donner une réponse claire et définitive à la question de l’application de la prescription triennale en matière de remboursement de cotisations indues.

3.  Le dispositif proposé

Afin de répondre aux difficultés exposées précédemment, le présent article propose une simplification des modalités de contestation des cotisations AT-MP.

Le I insère un nouvel alinéa à l’article L. 243-6, introduisant une dérogation à l’application de la prescription triennale décrite au premier alinéa du même article. Le , le et le du I modifient des références.

Lorsqu’un recours devant une CPAM ou une CARSAT entraîne une minoration du taux de cotisations AT-MP initialement notifié à l’entreprise par la CARSAT, l’entreprise peut prétendre à un remboursement des cotisations indues. Le du I prévoit que la demande de remboursement pourra désormais porter « sur l’ensemble de la période au titre de laquelle les taux sont rectifiés », même si cette période excède trois années à partir de la date de versement des cotisations.

En conséquence, à compter du 1er janvier 2015, les entreprises n’auront plus à saisir à la fois la CPAM et la CARSAT, voire la CNITAAT, lorsque la modification du taux de leurs cotisations résulte d’une décision de la CPAM. En cas de décision favorable à l’employeur, elles pourront récupérer l’ensemble des cotisations qui avaient été calculées en application des taux ayant été rectifiés.

Le II définit la date d’entrée en vigueur des dispositions du I pour les recours formés devant une CPAM ou une CARSAT à partir du 1er janvier 2015. Les dispositions de cet article ne sont donc pas rétroactives et ne portent pas sur les contentieux déjà formés. Il s’agit ici d’appliquer un principe de précaution, car il est difficile de concevoir les conséquences de l’application des nouvelles modalités de contestation du contentieux AT-MP sur les recours déjà formés.

S’agissant des CARSAT et de la CNITAAT, elles devraient enregistrer une diminution du nombre de nouveaux recours conservatoires à compter de l’entrée en vigueur de cet article. Il leur restera néanmoins à traiter un volume considérable de recours en stock résultant du revirement jurisprudentiel de la Cour de cassation de 2013.

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La Commission est saisie de l’amendement AS132 de M. Dominique Tian.

M. Élie Aboud. S’agissant du remboursement des cotisations indûment perçues par la branche accidents du travail-maladies professionnelles (AT-MP), il convient de conférer à l’action engagée en matière de tarification un effet interruptif de la prescription applicable aux cotisations correspondantes.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Il me semble que cet amendement est satisfait par l’article 16 lui-même. En effet, l’insécurité juridique provoquée par plusieurs revirements de jurisprudence de la Cour de cassation en matière de remboursement de cotisations AT-MP indûment perçues avait conduit madame la ministre à s’engager à résoudre ce problème après expertise. C’est ce qu’elle fait avec l’article 16. Je vous propose donc de retirer votre amendement.

M. Dominique Tian. Nous nous félicitons que madame la ministre ait jugé notre amendement suffisamment judicieux pour répondre à la question qu’il soulève. Néanmoins, nous le maintenons et, s’il n’est pas adopté, nous le soutiendrons à nouveau en séance publique afin de connaître l’avis du Gouvernement. Il nous semble en effet qu’il apporte une réponse plus complète que l’article 16 au problème posé par les revirements de jurisprudence.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Il est quelque peu contradictoire de reprocher au rapporteur, comme l’a fait M. Vercamer, de ne pas prendre position et de se retrancher derrière le Gouvernement, et de refuser de tenir compte de son avis lorsqu’il le donne, en réclamant celui de la ministre ! En tout état de cause, je demande à la Commission de repousser cet amendement.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 16 sans modification.

Article 17
(art. L. 723-35 et article L. 731-13-2 [nouveau] du code rural et de la pêche maritime)

Modernisation du recouvrement des cotisations du régime de la mutualité sociale agricole

Cet article apporte des modifications substantielles à certaines règles de fonctionnement du régime de la mutualité sociale agricole (MSA) en matière de remise de majorations et de pénalités de retard de cotisations ainsi que de dématérialisation des déclarations.

1.  La simplification du fonctionnement du régime agricole en matière de cotisations sociales

a.  Les remises de pénalités et de majorations de retard de cotisations

Le régime agricole se distingue par des procédures d’examen et de traitement relativement lourdes

Les attributions du conseil d’administration des caisses de la MSA sont fixées par l’article L. 723-35 du code rural et de la pêche maritime qui précise notamment que les remises de majoration et pénalités relèvent de la seule compétence des commissions de recours amiables (CRA). Ainsi, les conseils d’administration des caisses de la MSA ou les commissions de recours amiable, (lorsqu’elles en ont reçu délégation, ont compétence pour accorder des remises de pénalités et majorations. Le dispositif en vigueur à la MSA suppose l’examen systématique par les CRA des droits, contestations et demandes de remises de pénalités et majorations de retard. Cela encombre leur ordre du jour et génère en amont une charge administrative particulièrement lourde : il s’agit d’une démarche précontentieuse et la demande comme son examen doivent répondre à un formalisme important ; en outre l’examen par les CRA de demandes de remises de pénalités et majorations ne peut être entamé qu’après avis conforme des comités de protection sociale des salariés (CPSS) et des non-salariés (CPSNS).

En 2010, près de 96 000 dossiers ont été examinés par l’ensemble des CRA. Pas moins de 82 000 décisions concernaient uniquement des demandes de remise des majorations de retard (soit plus de 85 % des décisions rendues).

Des mesures de simplification sont envisageables, en s’inspirant notamment du mode de fonctionnement des autres régimes. Ainsi, le régime général ainsi que le régime social des indépendants (RSI) présentent une organisation différente, prévu par voie réglementaire. L’article R. 243-20 du code de la sécurité sociale donne compétence aux directeurs des URSSAF pour statuer sur des demandes portant sur des montants inférieurs à un seuil fixé par arrêté. Il s’échelonne entre 10 et 50 % du plafond annuel de la sécurité sociale selon la taille de l’organisme concerné. Un dispositif similaire existe pour le RSI, les demandes étant adressées auprès des caisses de base.

Le consensus en faveur d’une simplification

Un rapport d’audit remis en décembre 2011 par la mission d’audit, d’évaluation et de contrôle des organismes de protection sociale agricole portant sur le fonctionnement des CRA a mis en évidence que ce système conduisait à attribuer aux comités un rôle dépassant leurs attributions, générant des situations de double instruction, sans apporter de garanties supplémentaires en droit.

De son côté, la Cour des comptes a, dans son rapport de 2011 sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, estimé nécessaire de transformer la compétence exclusive des CRA en une compétence partagée avec les directeurs des caisses de MSA, sur le modèle du dispositif en vigueur dans le régime général.

Dans ce contexte, le présent article propose de déléguer aux directeurs de caisses de MSA la compétence de remise de pénalités et majorations de retard inférieure à un seuil fixé par arrêté interministériel. Cette disposition permettra de réduire les flux des dossiers examinés en CRA, afin qu’elles se concentrent sur les dossiers à fort enjeu financier.

Dans une démarche de clarté et de simplification, le Gouvernement envisage que le seuil soit identique à celui existant pour les demandes de remise en vigueur dans le régime agricole et qui font l’objet d’un contrôle de légalité par les Missions nationales de contrôle et d’audit des organismes de sécurité sociale. La déclinaison réglementaire envisagée par le Gouvernement permettrait donc, in fine, aux directeurs de caisses de statuer sur les demandes de remises de pénalités et majorations de retard de cotisations portant sur des montants inférieurs ou égaux à :

– 1 856 euros en ce qui concerne les cotisations sur les salaires (soit l’équivalent de 5 % du plafond annuel de la sécurité sociale) ;

– 741 euros s’agissant des cotisations non salariées (c’est-à-dire 2 % du plafond annuel de la sécurité sociale).

Par ailleurs, le présent article propose de compléter la démarche de simplification en supprimant l’obligation d’avis conforme des comités paritaires de protection sociale pour les décisions prises dans cette matière.

Les modifications législatives qu’il implique seront complétées par un décret en Conseil d’État qui modifiera les articles R. 731-75, R. 741-26 et
R. 741-28 du code rural et de la pêche maritime en précisant notamment dans quelles conditions le directeur de caisse de la MSA pourra accorder les remises pour les demandes inférieures ou égales à ces montants, eux-mêmes fixés par arrêté.

b.  la dématérialisation des déclarations et des paiements

Le II de cet article vise également à aligner les obligations de déclaration des non-salariés agricoles sur celles des indépendants.

L’obligation faite aux travailleurs indépendants non agricoles

L’article 27 de la loi n° 2013-1203 du 23 décembre 2013 de financement de la sécurité sociale pour 2014 a créé l’obligation pour les travailleurs indépendants non-agricoles d’effectuer par voie dématérialisée leurs déclarations pour le calcul de leurs cotisations et contributions sociales. Cette obligation concerne aussi le paiement, dès lors que la somme due est supérieure à 25 000 euros en 2014 et 10 000 euros à partir du premier janvier 2015.

Pour mémoire, en cas de non-respect de ces obligations (de déclaration comme de paiement), les travailleurs indépendants sont soumis à une majoration de cotisations dans la limite de 0,2 % des sommes dont la déclaration ou le paiement ont été effectués par une autre voie que celle dématérialisée.

L’article 26 de la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 relative à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises a modifié ce critère d’obligation de dématérialisation. Elle y a substitué un critère se référant à un revenu professionnel défini par décret.

Étendre cette démarche aux non-salariés agricoles

Les données fournies par la MSA mettent en lumière un mouvement spontané relativement important de dématérialisation des déclarations de revenu professionnel de la part des chefs d’exploitations ou d’entreprises agricoles soumis au régime réel d’imposition. Ce taux n’a cessé de croître, passant de 49,3 % en 2010 à plus de 59 % en 2013.

Dans ce contexte, le présent article vise à harmoniser les obligations des travailleurs non-salariés agricoles avec celles des travailleurs indépendants en matière de télédéclaration. Il ambitionne en outre d’inciter les non-salariés agricoles ou leurs tiers déclarants à recourir aux services en ligne proposés par la MSA en la matière.

Reproduire le système en vigueur pour les travailleurs indépendants supposera donc de définir par voie réglementaire les seuils à partir desquels déclarations et paiements s’effectueront obligatoirement par voie réglementaire. Le Gouvernement envisage de retenir les étapes suivantes en fixant l’obligation de déclaration :

– à 10 000 euros de revenus professionnels dès 2015, afin de toucher 60 % des cotisants. Il s’agirait d’une avancée statistique majeure qui, pour autant, ne provoquerait pas de profond bouleversement, dans la mesure où la majorité des personnes ciblées a déjà adopté la dématérialisation ;

– au même seuil en 2016, afin de laisser le temps aux acteurs de poursuivre leur adaptation aux nouvelles obligations ;

– puis à des seuils de plus en plus bas à compter de 2017.

Impact financier des mesures de simplification

Si les gains administratifs attendus de ces deux mesures sont évidents, l’étude d’impact jointe au projet de loi reconnaît une difficulté de les évaluer précisément. Elle suppose cependant que, s’agissant des procédures d’allégement de la charge administrative des CRA, un à deux équivalents temps plein pourront être économisés dans chacune des 35 caisses, soit un gain de 1,7 million d’euros par an à compter de 2015. La généralisation des télédéclarations entraînera également des gains, d’autant plus qu’elle interviendra alors que les outils sont déjà en place.

2.  Simplification de l’examen des remises de pénalités et majorations de retard et dématérialisation des déclarations de cotisations sociales

En I, le présent article modifie le livre VII du code rural et de la pêche. Il change la rédaction de l’article L. 723-35 en et insère un article L. 731-13-2 nouveau en . Le II précise les dispositions transitoires dans l’attente des déclinaisons réglementaires prévues en I.

a.  Remise des pénalités et majorations de retard

En I, l’a du complète le premier alinéa de l’article L. 723-3 qui décrit les pouvoirs généraux des caisses de sécurité sociale des professions agricoles. La rédaction proposée prévoit que ces conseils d’administration soient chargés de statuer sur les demandes de remise de pénalités et de majorations de retard. Ne seront concernées que les demandes supérieures à un seuil fixé par voie réglementaire. Ce seuil sera fixé par arrêté des ministres chargés du budget, de la sécurité sociale et de l’agriculture, sur le modèle des dispositions en vigueur dans le régime général.

Disposition de conséquence, le b supprime deux alinéas au sein du même article, les alinéas 6 et 11.

L’alinéa 6 de l’article confie au comité de la protection sociale des salariés agricoles et au comité central de la protection sociale des non-salariés agricoles la compétence en matière de remise des pénalités et majorations de retard des cotisations sociales des employeurs.

L’alinéa 11 prévoit, quant à lui, que le conseil d’administration ne peut prendre de délibérations relatives à la remise des pénalités et majorations de retard des cotisations sociales des non-salariés, qu’ « après avis conforme du comité de la protection sociale des non-salariés ».

b.  Généralisation de la dématérialisation des déclarations sociales

Le du I comporte les dispositions relatives à la télédéclaration. Il insère dans le code rural et de la pêche maritime un article L. 731-13-2 nouveau qui prévoit la dématérialisation des déclarations et des versements des non-salariés agricoles dont les revenus sont les plus importants.

Son premier alinéa pose l’obligation de déclaration et de paiement dématérialisés. Les opérations concernent le calcul des cotisations et contributions sociales ainsi que leur versement.

Dans un deuxième alinéa, il est prévu que ces obligations s’imposent au-delà d’un seuil fixé par décret. Il porte sur les revenus professionnels définis aux articles L. 731-14 à L 731-22, c’est-à-dire l’ensemble de l’assiette des revenus soumis à cotisations et selon la nature et les modalités de calcul définies à ces articles. Sont ainsi essentiellement concernés :

– les revenus soumis à l’impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices agricoles ;

– les revenus provenant des activités non-salariées agricoles et soumis à l’impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux ou des bénéfices non commerciaux ;

– les rémunérations allouées aux gérants et associés de certaines sociétés, provenant des activités non-salariées agricoles et soumises à l’impôt sur le revenu ;

– ainsi que, pour leur montant excédant 10 % du capital social, des primes d’émission et des sommes versées en compte courant qu’ils détiennent en pleine propriété ou en usufruit, certains revenus de capitaux mobiliers.

Le troisième et dernier alinéa de l’article L. 731-13-2 dans sa nouvelle rédaction rappelle, logiquement, que la dématérialisation des procédures ne modifie pas le régime des majorations prévues par le droit commun à l’article L. 133-5-5 du code de la sécurité sociale et qui traite des télédéclarations.

En II, le présent article comporte des dispositions de nature à sécuriser la mise en œuvre des dispositions du I. . Il prévoit que les conseils d’administration des caisses de mutualité agricole demeurent compétents pour statuer sur l’ensemble des demandes de remise des pénalités et majorations de retard.

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La Commission adopte l’article 17 sans modification.

Article 18
(art. 35 de la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012 relative à la simplification du droit et à l’allégement des démarches administratives ; art. L. 136-5, et art. L. 241-6-2 [nouveau], L. 752-4 du code de la sécurité sociale ; art. L. 5427-1 et L. 6331-53 du code du travail)

Création d’un guichet unique pour les prestations familiales des marins

Les prestations familiales des marins sont recouvrées et distribuées par différents acteurs. Dans une démarche de clarification et d’optimisation des moyens des organismes de sécurité sociale, le présent article vise à instaurer un système de guichets uniques pour le recouvrement d’une part, et pour le versement des prestations d’autre part.

1.  De l’intérêt d’instaurer des guichets uniques pour le versement des prestations et pour la collecte des cotisations

a.  Les acteurs en charge de la gestion des prestations familiales des marins

Les prestations familiales servies aux marins pêcheurs et aux marins de la marine marchande le sont par la caisse nationale d’allocation familiale (CNAF) ou, si les intéressés le souhaitent, par la caisse maritime d’allocation familiale (CMAF), un organisme créé par la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale et prévu à l’article L. 212-3 du code de la sécurité sociale.

Aujourd’hui seul un tiers des marins a fait le choix d’un rattachement à la CMAF. Il en ressort une situation de faible activité au regard des moyens consacrés à son fonctionnement. C’est pourquoi cet article vise à dissoudre cette caisse et à confier la gestion de ces prestations au régime général.

L’article L. 212-3 du code de la sécurité sociale

Le IV prévoit l’abrogation de cet article qui rassemble les éléments relatifs au fonctionnement de la CMAF. Il prévoit notamment que : « la Caisse maritime d’allocations familiales assure en faveur des personnes affiliées au régime spécial de sécurité sociale des gens de mer le service des prestations familiales ». Il prévoit en outre qu’elle « assure également pour ces personnes :

1° Le recouvrement des cotisations d’allocations familiales dues par les employeurs et les travailleurs indépendants selon les règles et sous les garanties et sanctions applicables à ce recouvrement par les unions pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales et les caisses générales de sécurité sociale ;

2° Le recouvrement de la contribution sociale généralisée selon les dispositions des articles L. 136-1 et suivants ;

3° Le recouvrement de la contribution pour le remboursement de la dette sociale instituée par l’article 14 de l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale ;

4° Le contrôle et le contentieux du recouvrement prévu aux 1°, 2° et 3°. »

À ce jour, la CMAF gère 13 460 comptes cotisants, suit 6 388 allocataires et verse annuellement 24 millions d’euros de prestations légales ainsi que 2 millions d’euros au titre de l’action sociale. Pour assurer ses missions, elle mobilise 78 salariés, ce qui représente des coûts de gestion élevés au regard de l’organisation du réseau des caisses d’allocations familiales. Cette problématique tend à s’aggraver, le nombre de ses ressortissants étant en constante diminution (- 26 % depuis 10 ans) ce qui augmente le coût relatif de gestion de la CMAF.

b.  Instaurer un interlocuteur unique pour le versement des prestations comme pour le recouvrement des cotisations

Le présent article vise à proposer un guichet unique pour la gestion des prestations familiales des marins d’une part, ainsi que pour la collecte des cotisations d’autre part, conduisant à l’abrogation de l’article L. 212-3 du code de la sécurité sociale à compter du 1er janvier 2016, c’est-à-dire à la suppression de la CMAF.

La gestion des prestations familiales

Il est proposé de transférer les activités de versement des prestations assurées par la CMAF vers la branche famille du régime général. Pour ce faire, le dispositif retenu est simple : à compter du 1er janvier 2016, tous les marins relèveront de la CAF de leur lieu de résidence principale qui sera leur interlocuteur unique.

On peut parler de « guichet unique » pour les marins dans la mesure où la CNAF assurera non seulement les prestations et l’action sociale aujourd’hui délivrées par la CMAF, mais également celles que la loi n’a pas attribuées à cet organisme et que les CAF assurent donc déjà, avec notamment la gestion de l’aide personnalisée au logement (APL) ainsi que du revenu de solidarité active (RSA). En outre, la CNAF continuera à verser au service social maritime la subvention que la CMAF lui verse.

Cette réforme garantira non seulement la continuité des droits des marins, mais, en créant ce guichet unique, leur facilitera le recours à l’ensemble des prestations sociales assurées par la branche famille. Ce progrès important pour les marins se traduira en outre, pour le service public, par le rapprochement de structures et donc par des gains de fonctionnement.

Le recouvrement des cotisations

En ce qui concerne le recouvrement assuré par la CMAF et portant sur les cotisations familiales ainsi que les contributions sociales (CSG et CRDS), le projet de loi prévoit un transfert d’activités vers l’établissement national des invalides de la marine (ENIM). Pour mémoire, cet établissement a aujourd’hui en charge le régime de sécurité sociale des marins à l’exception de la branche famille. Il est constitué de deux caisses : la caisse générale de prévoyance qui couvre les risques maladie, maternité, invalidité, décès et accident du travail et la caisse de retraite des marins, en charge du risque vieillesse. L’ENIM est placé sous la triple tutelle des ministres chargés de la mer, de la sécurité sociale et du budget.

L’option de confier cette activité à l’ENIM a été préférée au transfert de la mission de recouvrement à l’URSSAF en raison de l’expertise dont cet établissement dispose déjà, lui qui recouvre déjà les autres cotisations sociales au titre du régime spécial des marins. Cela permettra effectivement la création d’un guichet unique des cotisations sociales des marins, avec un même système d’information.

Si, sous réserve de l’adoption du projet de loi, cet établissement devenait le guichet unique pour le recouvrement des cotisations sociales des marins, l’ENIM aura la possibilité de déléguer des activités à l’URSSAF, ce qui est en effet envisagé s’agissant notamment des activités situées en aval du recouvrement. En revanche, les politiques de contrôle, de relation avec les cotisants, de recouvrement amiable ou forcé relèveront explicitement et exclusivement de son conseil d’administration.

c.  Les gains attendus pour les régimes de sécurité sociale

Les économies de fonctionnement attendues sont évaluées à 3,5 millions d’euros par an à compter de 2016. Cette évaluation repose sur la reprise de 70 personnes travaillant à la CMAF par la CAF et l’URSSAF de la région Poitou-Charentes. Ce transfert d’ETP, dont le coût moyen est estimé à 50 000 euros par an, est censé s’intégrer dans le plafond d’emploi défini par les conventions d’objectifs et moyens (COG). Cette opération neutralisera donc le coût pour les structures d’accueil en termes de masse salariale.

Le transfert vers la CAF et l’URSSAF des personnels de la CMAF n’entraînera pas de changement de statut, ceux-ci relevant de la convention collective de l’Union des caisses nationales de sécurité sociale (UCANSS). Ce transfert leur permettra de bénéficier en outre du protocole « Évolution des réseaux » du 30 décembre 2013, s’ils choisissent d’effectuer une mobilité géographique ou encore de changer d’emploi ou de famille professionnelle. C’est au moyen d’un décret en Conseil d’État que le directeur de l’ENIM pourra déléguer certaines missions à l’URSSAF Poitou-Charentes

2.  Transfert des compétences et instauration d’un guichet unique

Cet article modifie les codes de la sécurité sociale et du travail. Il organise, en cinq étapes, le transfert des compétences de la CMAF et la suppression de cet organisme.

a.  Fin de la déclaration sociale nominative auprès du régime des marins

Le I modifie l’article 35 de la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012 relative à la simplification du droit et à l’allégement des démarches administratives, dont le II prévoit de modifier la rédaction de l’article L. 133-5-3 du code de la sécurité à compter du 1er janvier 2016.

La disposition visée prévoit que la déclaration sociale nominative se substitue à l’ensemble des déclarations auxquelles sont tenus les employeurs auprès d’une liste d’organismes sociaux parmi lesquels se trouve la CMAF.

Le du II de l’article abrogeant l’article L. 212-3, le présent I prévoit, par cohérence, de supprimer la mention de cet article dans le II de l’article 35 de la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012, avant même l’intégration de ces dispositions dans le code de la sécurité sociale.

Y demeureront évidemment les mentions des autres organismes tels que les caisses primaires d’assurance maladie (L. 211-1) ou encore l’URSSAF (L. 213-1), qui ne sont pas visés par cet article.

b.  Recouvrement des cotisations sociales et dissolution de la CMAF

Le II modifie le code de la sécurité sociale afin d’organiser le transfert du recouvrement des cotisations affectées au financement des prestations familiales des marins ( et ), de mettre en cohérence le droit en vigueur dans les départements d’outre-mer () et d’abroger les dispositions encadrant l’existence et le fonctionnement de la CMAF ().

Transfert du recouvrement de la CSG et de la CRDS

Le complète le I de l’article L. 136-5 du code de la sécurité sociale qui porte sur les modalités de recouvrement de la CSG et de la CRDS. Cet article dispose qu’elles sont collectées par les organismes du régime général de sécurité sociale, sous réserve « de dispositions particulières », dispositions qu’il s’agit ici de compléter.

C’est l’objet de ce qui insère un alinéa prévoyant précisément que les contributions visées sont recouvrées par ces organismes. Il est cependant fait mention du « régime spécial de sécurité sociale des marins » : les dispositions spécifiques relatives à l’affiliation, aux droits et aux cotisations sont donc rappelées, mais intégrées et gérées par la CNAF et l’URSSAF.

Transfert du recouvrement des cotisations familiales

Le insère quant à lui un article L. 241-6-2 nouveau, composé de deux alinéas et qui porte sur le recouvrement des cotisations familiales.

Le premier d’entre eux prévoit que l’organisme gérant le régime spécial de sécurité sociale des marins est en charge du recouvrement des cotisations d’allocations familiales au titre de ses affiliés.

Le second alinéa prévoit qu’un décret fixe les conditions dans lesquelles la mission de recouvrement peut être déléguée, pour tout ou partie, à des organismes du régime général de sécurité sociale, cette délégation se fondant sur une convention.

Ces dispositions, claires et cohérentes, ont le mérite de la souplesse et, articulées avec l’alinéa suivant et les autres dispositions de l’article 18, permettent le transfert de la gestion des prestations de la CMAF vers la CNAF et des activités de recouvrement des cotisations familiales vers l’ENIM.

Mise en cohérence pour les départements d’outre-mer

Le modifie le 6° de l’article L. 752-4. Il supprime la référence à l’article L. 212-3, abrogé au IV du présent article, pour y substituer la mention des compétences désormais « dévolues à l’organisme gestionnaire du régime spécial de sécurité sociale des marins ». Il s’agit d’une disposition de conséquence juridique, les caisses du régime général étant déjà habilitées par la loi à exercer les compétences de la caisse des marins dans les départements d’outre-mer.

Abrogation des dispositions du code de la sécurité sociale régissant le fonctionnement de la CMAF

Le du présent article abroge la section II du chapitre II du titre I du livre deuxième du code de la sécurité sociale. Cette section est composée d’un article unique, l’article L. 212-3 (cf. supra), qui rassemble les dispositions régissant l’existence et le fonctionnement de la CMAF.

c.  Recouvrement des cotisations au titre de l’indemnisation du chômage et de la formation professionnelle

Le III modifie le code du travail, et plus précisément ses articles L. 5427-1 et L. 6331-53.

Le substitue une nouvelle rédaction au f de l’article L. 5427-1. Celui-ci porte sur le recouvrement des cotisations versées au titre de l’indemnisation des salariés involontairement privés d’emploi. Il prévoit déjà, dans la rédaction de son f, que la caisse des marins se substitue à l’URSSAF pour le recouvrement des cotisations au titre de ses affiliés. La nouvelle rédaction proposée permet tout simplement de remplacer la mention de cet organisme par celle de « l’organisme gestionnaire du régime spécial de sécurité sociale des marins », avec le même périmètre (« lorsqu’elles sont dues au titre des salariés affiliés » à ce régime).

Le procède à des changements similaires s’agissant du financement des actions de formation professionnelle, ce qui suppose de modifier de la même façon la référence à la « caisse nationale d’allocations familiales des pêches maritimes » aux deuxième et troisième alinéas de l’article L. 6331-53.

d.  Date et modalités de dissolution de la caisse maritime d’allocations familiales

L’objet du IV est de prononcer et d’organiser la dissolution de la CMAF. Ses six alinéas contiennent donc des dispositions non codifiées car transitoires.

Le premier alinéa retient la date du 1er janvier 2016 pour la dissolution de la Caisse. Cet horizon laisse un an pour organiser le transfert des activités et des personnels, un délai relativement exigeant mais accessible, compte tenu de la taille de l’organisme et de la compétence dont la CNAF dispose déjà dans ce domaine.

Le deuxième alinéa prévoit très explicitement que les droits et obligations des personnes affiliées à la CMAF avant la date du 1er janvier 2016 sont intégralement transférés aux caisses d’allocations familiales du lieu de résidence, en ce qui concerne les prestations familiales.

Le troisième alinéa porte quant à lui sur le recouvrement des cotisations et contributions dues par les employeurs et travailleurs indépendants assurés avant le 1er janvier 2016 : ces compétences sont transférées à l’ENIM.

Le quatrième alinéa précise que les contrats de travail des salariés de la CMAF sont transférés à la CAF de Charente-Maritime et à l’URSSAF de Poitou-Charentes. Libre aux organismes visés d’en déterminer les proportions. L’étude d’impact jointe au projet de loi envisage que 70 des 78 ETP soient transférés à la CAF de Charente-Maritime.

Le cinquième alinéa prévoit que des conventions régiront les modalités de transfert des personnels, conventions signées entre les directeurs de la CMAF, de la CAF et de l’ACOSS.

Au terme du sixième alinéa, ces mêmes conventions détermineront les modalités de transfert, à compter du 1er janvier 2016, des meubles et immeubles de la CMAF.

e.  Entrée en vigueur de l’article

Le V prévoit que l’ensemble des dispositions de cet article entreront en vigueur le 1er janvier 2016. Cela signifie notamment que les affiliations, prestations et cotisations gérées par la CMAF le seront jusqu’à cette date. Cela laisse douze mois au régime des marins pour informer les affiliés sur les modalités de basculement vers le régime spécial de sécurité sociale des marins et sur l’instauration d’un guichet unique pour les prestations et d’un autre guichet unique pour le recouvrement.

Ces mesures seront directement applicables dans les départements de Guadeloupe, Guyane, Martinique et Réunion.

*

* *

La Commission adopte l’article 18 sans modification.

Article additionnel après l’article 18
(art. L. 613-4 du code de la sécurité sociale)

Simplification des règles de détermination du régime
servant les prestations aux indépendants pluriactifs

La Commission examine l’amendement AS257 du rapporteur.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Cet amendement vise à simplifier les règles déterminant le régime qui sert les prestations en nature des travailleurs indépendants exerçant par ailleurs une autre activité non indépendante. Il s’agit de leur permettre de rester rattachés, s’ils le souhaitent, à leur régime d’origine.

La Commission adopte l’amendement.

Après l’article 18

La Commission est saisie de l’amendement AS38 de M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. Les amendements AS38, AS37 et AS39 visent à réformer en profondeur le système des retraites, en proposant respectivement une mise en extinction progressive des régimes spéciaux et leur alignement progressif sur le régime général. En dépit des différentes réformes intervenues, nos régimes de retraite restent en grande difficulté, en raison notamment de l’allongement de la durée de la vie. En outre, il convient de garantir une certaine justice sociale. Or, les régimes spéciaux offrent un certain nombre d’avantages qui, s’ils pouvaient être justifiés par le passé, ne le sont plus aujourd’hui. Il est donc nécessaire d’instaurer un régime universel, a fortiori depuis que le Gouvernement a instauré le compte personnel de prévention de la pénibilité.

M. Élie Aboud. Le compte personnel de prévention de la pénibilité sera appliqué à compter du 1er janvier 2015, selon des modalités qui ont été discutées avec les branches professionnelles. Comment expliquer à des parlementaires étrangers par exemple que, dans notre pays, coexistent des régimes spéciaux, un régime général et un compte pénibilité ? Ouvrez les yeux, chers collègues de la majorité ! Quelle est la justification des régimes spéciaux, dès lors qu’il existe un compte pénibilité dont les critères sont notamment le travail de nuit, le travail posté ou le travail en caisson hyperbare ?

M. Michel Liebgott. Nous sommes tous favorables à l’universalité à long terme. Encore faut-il que l’alignement des différents régimes se fasse par le haut et que ne soient pas remis en cause des droits acquis par les salariés grâce à leur travail. Au demeurant, certains régimes spéciaux sont exemplaires sous certains aspects, tel le régime minier, dont la majorité précédente avait décidé l’extinction et que nous avons souhaité maintenir. Ce régime comporte en effet une offre de soins de proximité, dont on s’inspire aujourd’hui dans la lutte contre la désertification médicale. Il faut donc faire preuve de discernement avant de supprimer des régimes qui donnent satisfaction, même s’ils peuvent poser problème d’un point de vue financier. Et je ne parle pas du droit local qui s’applique en Alsace et Moselle…

M. Arnaud Robinet. Cet amendement, que je vais voter, est une façon pour nous de relancer, comme chaque année, le débat sur les retraites, en montrant que, si les réformes intervenues ont permis des avancées, le problème n’est pas réglé. À ce propos, je demanderai à madame la présidente de la Commission de créer une mission d’information sur le suivi de la réforme de 2013, dont les décrets d’application ont été publiés en janvier 2014, car la situation de nos caisses de retraite n’a pas connu d’amélioration depuis. Quant au compte pénibilité, véritable usine à gaz qui ne répond ni aux préoccupations de nos concitoyens ni aux attentes des entreprises, il a été remis en question par le Premier ministre lui-même. Plutôt que de rouvrir sans cesse le débat, donnons un coup de pied dans la fourmilière et réglons le problème une fois pour toutes ! Je crois du reste que, si nous n’en prenons pas l’initiative, nous y serons contraints sous peu.

M. Jean-Pierre Barbier. Je constate que nos collègues de la majorité sont plus enclins à protéger les régimes spéciaux que les caisses de congés payés de la fédération du bâtiment ou du spectacle.

M. Francis Vercamer. Je précise à M. Liebgott que l’amendement ne vise que les nouveaux entrants, dont je ne suis pas certain qu’ils soient très nombreux dans le secteur des mines… Les deux autres, en revanche, visent à aligner les différents régimes, ce qui, je le reconnais, serait plus complexe : raison de plus pour voter celui-ci !

La Commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement AS118 de M. Dominique Tian.

La Commission examine les amendements identiques AS37 de M. Francis Vercamer et AS119 de M. Dominique Tian.

M. Francis Vercamer. Si notre amendement était adopté, chers collègues de la majorité, vous pourriez faire porter la responsabilité de la suppression des régimes spéciaux à l’UDI…

M. Dominique Tian. Il s’agit d’un amendement fondamental. Je rappelle que les déficits des régimes spéciaux sont financés par les salariés du privé. Une telle situation n’est ni tenable, ni juste. Une réforme s’impose donc. Il faudra bien qu’un véritable débat ait lieu sur cette question, comme le demande d’ailleurs la Cour des comptes.

M. Michel Liebgott. Il ne faut pas raisonner de façon caricaturale. N’oubliez pas, chers collègues de l’opposition, que si les pensions des fonctionnaires sont calculées sur les six derniers mois de traitement, les primes sont exclues de ce calcul. Or, nous savons, étant pour la plupart d’entre nous gestionnaires de collectivités locales, que ces primes forment une part importante, voire croissante, des rémunérations. Il faudrait établir une comparaison détaillée des différents régimes sur ce point.

M. Arnaud Robinet. Gouverner, c’est prévoir, monsieur Liebgott. Or, le Conseil d’orientation des retraites (COR) a montré, dans une étude parue avant la réforme de 2013, que, dans les années à venir, le taux de remplacement des fonctionnaires sera supérieur à celui des salariés du privé. Il est donc temps d’agir et d’engager une nouvelle réforme des retraites. Nous allons célébrer, l’année prochaine, le soixante-dixième anniversaire de notre système de protection sociale. Croyez-vous que, depuis la Seconde Guerre mondiale, le monde et la société n’aient pas évolué ? L’ensemble du système, notamment l’assurance maladie, doit être réformé en profondeur, pour y introduire davantage de justice et d’équité.

M. Dominique Tian. J’ai vu récemment un reportage consacré aux conducteurs de trains à grande vitesse (TGV), qui partent à la retraite à 52 ans. Savez-vous ce qu’ils font, une fois à la retraite ? Ils vont conduire des TGV en Corée ou ailleurs ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Ils ne sont donc pas si fatigués. C’est bien la preuve que leur régime de retraite est inadapté.

M. Michel Issindou. Je ne peux rester sans réaction devant les propos de M. Tian. Les réformes successives vont aboutir à l’alignement progressif des différents systèmes. La majorité précédente a elle-même voté en 2008 celui des durées et des taux de cotisation, et nous ne l’avons pas remis en cause. J’ajoute que ceux des employés de la SNCF qui choisissent de partir à la retraite à 52 ans touchent une pension largement minorée, de sorte qu’ils doivent chercher un emploi de conducteur de bus ou de tramway, moins avantageux. Ils se font donc rares aujourd’hui… Peut-être l’extinction des régimes spéciaux ne se fait-elle pas assez vite à votre goût, mais le processus est en cours. Ne remettons donc pas ce sujet sur le tapis dans le cadre de ce PLFSS, qui plus est avec une telle exagération.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Il faut se féliciter que le savoir-faire français s’exporte jusqu’en Corée. (Sourires.) Il y a même un praticien hospitalier qui est allé opérer en Corée du Nord ! S’agissant du rapport d’information demandé par M. Robinet, je crois qu’il pourrait être confié au COR, dont c’est la mission. Enfin, M. Tian devrait faire confiance à la loi Fillon, qui a prévu l’harmonisation progressive des durées de cotisation. Je propose donc de rejeter ces amendements.

La Commission rejette les amendements.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette successivement les amendements AS39 de M. Francis Vercamer et AS120 de M. Dominique Tian.

La Commission examine l’amendement AS123 de M. Dominique Tian.

M. Dominique Tian. Comme en témoigne un très récent rapport de la Cour des comptes, la situation du Régime social des indépendants (RSI) est dramatique, notamment en raison de la fraude, qui lui aurait fait perdre beaucoup d’argent. Il est vrai que le RSI s’acharne à réclamer des cotisations à ceux qui ne lui doivent rien et oublie ses débiteurs véritables… Je demande par conséquent que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur ce régime, même si des évolutions doivent intervenir prochainement. Chaque semaine, nous sommes interrogés dans nos permanences par les victimes de ces dysfonctionnements.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Les dysfonctionnements du RSI sont anciens ; ils ont été dénoncés à maintes reprises, et encore l’an dernier par la Cour des comptes. Des progrès ont néanmoins été réalisés. Je m’étonne au passage que M. Tian soit aussi sévère avec cet organisme, dans la mesure où sa présidence est assurée par les employeurs. En tout état de cause, il me semble que ce serait plutôt aux rapporteurs de notre Commission ou à la MECSS de faire un rapport sur ce sujet. J’ajoute que la Cour des comptes a fixé des objectifs au RSI et qu’elle peut vérifier auprès des organismes contrôlés s’ils sont remplis. Je propose donc à M. Tian de retirer son amendement, faute de quoi j’y serais défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Chapitre III
Relations financières entre les régimes et entre ceux-ci et l’État

Article 19
(art. L. 225-1-4 du code de la sécurité sociale et article L. 731-5
du code du code rural et de la pêche maritime)

Financement des besoins de trésorerie du régime des exploitants agricoles

Cet article vise à concrétiser une demande ancienne des gestionnaires du régime des exploitants agricoles, à savoir de bénéficier des conditions de financement de l’agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS), plus favorables que celles dont ils disposent seuls.

1.  Un financement des besoins de trésorerie inutilement coûteux

La caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA) doit, comme les autres organismes de sécurité sociale, recourir à l’emprunt de court terme pour financer ses besoins de trésorerie. Elle y pourvoit en s’adressant directement à un groupement de banques au titre des dépenses liées aux prestations vieillesse. Les organismes relevant du régime général de sécurité sociale bénéficient quant à eux de ressources d’un coût moindre, issues d’emprunts contractés par l’ACOSS et qui représentent un volume dix fois supérieur aux sommes levées par la CCMSA.

Compte tenu de la communauté des missions de service public assurées par les caisses relevant de l’ACOSS et par la CCMSA, ainsi que des efforts de maîtrise budgétaire conduits par la mutualité agricole, il semble aujourd’hui opportun de permettre à la CCMSA de bénéficier des tarifs de financement obtenus par l’ACOSS. Le dispositif envisagé autorisera, sous une certaine limite, la CCMSA à se financer contre rémunération auprès de l’ACOSS, lui permettant en cela une économie conséquente.

a.  Le recours aux marchés financiers

L’ACOSS répond aux besoins de trésorerie du régime général par des concours bancaires proposés par la Caisse des dépôts et consignation ainsi que par l’émission de titres de paiement sur les marchés financiers.

Conformément au e du 2° du C du I de l’article LO 111-3 du code de la sécurité sociale, l’article L. 225-1-4 du même code prévoit que l’ACOSS est autorisée à fournir des avances aux régimes obligatoires de base autres que le régime général ainsi qu’aux organismes et fonds mentionnés au 8° du III de l’article LO. 111-4 du même code, à savoir :

– les organismes concourant au financement des régimes obligatoires de base, à l’amortissement de leur dette et à la mise en réserve de recettes à leur profit ;

– les organismes financés par des régimes obligatoires de base ;

– les fonds comptables retraçant le financement de dépenses spécifiques relevant d’un régime obligatoire de base ;

– les organismes qui financent et gèrent des dépenses relevant de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie.

La loi organique n° 2005-881 du 2 août 2005 relative aux lois de financement de la sécurité sociale habilite également le régime des non-salariés agricoles à recourir à des ressources non permanentes afin de couvrir ses besoins en trésorerie, dans la limite d’un plafond déterminé chaque année en loi de financement de la sécurité sociale. Il s’agit d’une part de compenser les écarts de trésorerie entre les encaissements (cotisations et taxes affectées) et les décaissements ainsi que, d’autre part, de financer le déficit récurrent de la branche.

Les LFSS fixent donc annuellement un plafond de trésorerie autorisé, le tableau ci-après rappelant les plafonds autorisés par le législateur depuis 2009 :

(en millions d’euros)

 

2009

2010

2011

2012

2013

2014

Plafond de trésorerie autorisé à la CCMSA

3 200

3 500

4 500

2 900

4 000

3 500

Source : Annexe n° 10 au projet de loi, page 216.

La CCMSA dispose d’un interlocuteur unique pour se financer, à savoir un groupement de banques conduit par le Crédit agricole.

Ainsi, en 2014, elle a recouru à :

– des prêts de très court terme, pour 50 millions d’euros ;

– un prêt de court terme, pour 1,7 milliard d’euros ;

– un prêt de plus long terme comprenant sept tirages, pour 2,9 milliards d’euros.

Ces opérations impliquent des charges financières. Elles sont relativement élevées dans le cas de la CCMSA, surtout si on les compare à celles supportées par l’ACOSS. Le bilan du dernier exercice clos, 2013, laisse apparaître un coût financier de 36 millions d’euros pour un montant emprunté de 2,4 milliards d’euros. Sur la même période, les charges financières supportées par l’ACOSS ont été inférieures du tiers, à savoir de 20 millions d’euros, pour un volume d’emprunt dix fois supérieur, de 22 milliards d’euros (soit un taux de financement de 0,137 % pour l’ACOSS, proche des taux du marché monétaire, de 0,09 % en moyenne, contre 1,47 % pour la CCMSA).

b.  Permettre un recours encadré aux possibilités d’emprunt de l’ACOSS

Permettre à la CCMSA d’emprunter à l’ACOSS ne devrait pas alourdir les coûts de gestion pour le régime général mais simplement faire de l’ACOSS une agence prestataire de la CCMSA : elle lui fournira des lignes de crédits moins onéreuses en lui facturant le recours à sa signature sur les marchés, une opération « gagnant-gagnant » pour les organismes de sécurité sociale.

Si elle était adoptée, cette disposition entrerait en vigueur dès le 1er janvier 2015 et se traduirait par la réaffectation du surcoût engendré par le recours autonome aux marchés financiers, soit un montant évalué à 33 millions d’euros par an en moyenne. L’hypothèse de calcul repose le maintien des conditions de marché actuelles (favorables) et sur une facturation par l’ACOSS équivalente à 10 points de base. Elle se fonde également sur l’hypothèse d’une stabilité voire d’une décroissance des besoins de financements de la CCMSA au titre de la branche vieillesse, les réformes engagées en 2013 dans le cadre de la réforme des retraites, et notamment les mesures de financements retenues dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014, permettant d’escompter une diminution du déficit grâce en particulier à la mobilisation des réserves de la caisse et à la résorption progressive de niches sociales.

Cette somme ne sera plus versée en rémunération des prestations du groupement bancaire emmené par le Crédit agricole mais devrait être réaffectée comme suit :

– 3 millions d’euros versés à l’ACOSS au titre des charges de gestion ;

– 30 millions d’euros d’économies pour l’ACOSS.

2.  Cet article propose que la CCMSA puisse se financer auprès de l’ACOSS

Cet article vise à permettre à la CCMSA de recourir aux capacités de financements de marché de l’ACOSS. Pour ce faire, il doit :

– modifier les dispositions du code de la sécurité sociale autorisant l’ACOSS à lui proposer des financements (I) ;

– modifier le code rural et de la pêche maritime afin de permettre à la CCMSA d’y recourir (II) ;

– définir les plafonds d’emprunts autorisés au cours des années à venir afin d’offrir une visibilité de gestion raisonnable aux acteurs, en l’occurrence sur la période 2015-2017 (III).

a.  L’ACOSS pourra proposer à la CCMSA des prêts et avances inférieurs à 12 mois contre rémunération

Le I de cet article modifie l’article L. 225-1-4 du code de la sécurité sociale.

Il propose une nouvelle rédaction ouvrant la possibilité à l’ACOSS de consentir des prêts et avances à CCMSA. Pour ce faire, l’article L. 225-1-4 est complété et réorganisé.

Dans sa rédaction actuelle, il permet déjà à l’ACOSS de fournir, « à titre exceptionnel et contre rémunération », des avances d’une durée inférieure à un mois aux divers organismes concourant au financement des régimes de base (cf. description de ces organismes en première partie du commentaire).

Or, l’objectif du présent article est de l’autoriser à fournir à titre non exceptionnel, contre rémunération, des avances et des prêts d’une durée inférieure à 12 mois.

La rédaction proposée en tire les conséquences en créant deux nouveaux alinéas à l’article L. 225-1-4, numérotés 1° et 2°, et en déclinant les possibilités d’avances et ou de prêts de l’agence. Ainsi :

– en 1° : l’agence pourra consentir des avances et des prêts, d’une durée inférieure à 12 mois, au seul régime d’assurance vieillesse des non-salariés agricoles. Cette faculté interviendra contre rémunération ;

– en 2° : il est maintenu la rédaction en vigueur permettant les seules avances contre rémunération aux autres organismes, et ce pour des durées inférieures à un mois.

Conséquence rédactionnelle, le dernier alinéa de l’article prévoit que pour les cas nouveaux mentionnés en 1° comme pour ceux déjà en vigueur et désormais mentionnés en 2° que les modalités de mise en œuvre de ces accords seront déterminées par des conventions conclues entre l’ACOSS et le régime, l’organisme ou le fonds concerné. Ces conventions seront soumises à l’approbation des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget.

b.  La CCMSA pourra solliciter des avances et des prêts auprès de l’ACOSS

Le II prévoit des modifications symétriques dans le code rural et de la pêche maritime. Il propose plus spécifiquement de modifier son article L. 731-5. Dernier des articles de la section I du chapitre Ier du titre III du livre VII de ce code relative aux ressources du régime de protection sociale des non-salariés agricoles, il prévoit la possibilité de recours par la CCMSA à des ressources non permanentes dans les limites prévues par la loi de financement de la sécurité sociale. Ce recours intervient dans le cadre d’une convention avec des établissements financiers, convention approuvée par les ministres chargés de l’agriculture, de la sécurité sociale et du budget.

Compte tenu des modifications intervenues en I au code la sécurité sociale, cet article insère un deuxième alinéa dans l’article L. 731-5 du code rural et de la pêche maritime qui autorise la CCMSA à recourir à des prêts et avances auprès de l’ACOSS, en mentionnant les conditions prévues à l’article L. 225-1-4 du code de la sécurité sociale.

c.  Pour les exercices 2015, 2016 et 2017, un plafond d’emprunt proposé à hauteur de 3,8 milliards d’euros

Le III de l’article comporte des dispositions non codifiées définissant les plafonds d’emprunt de la CCMSA auprès de l’ACOSS. Le niveau proposé est de 3,8 milliards d’euros. Cette somme correspond aux besoins estimés de la caisse centrale pour assurer la trésorerie des prestations du régime vieillesse. Cela ne signifie pas que la CCMSA va s’endetter de 3,8 milliards d’euros chaque année auprès de l’ACOSS et donc du régime général, mais bien qu’elle pourra recourir à des avances et des prêts de moins de 12 mois pour un montant cumulé de 3,8 milliards d’euros, les avances et les prêts de moins de 12 mois étant, par définition, remboursés dans l’année.

Il s’agit donc d’une disposition particulièrement bienvenue qui permettra à la CCMSA de se financer à moindre frais et, conjuguée aux effets des mesures de retour à l’équilibre, permettra une forte diminution du recours au secteur bancaire et donc des charges financières en découlant.

*

* *

La Commission examine l’amendement de suppression AS164 de M. Dominique Tian.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Je suis très étonné par cet amendement, dans la mesure où l’article 19 vise à répondre à une demande de la Mutualité agricole (MSA), qui souhaite se financer auprès de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) plutôt qu’auprès du Crédit agricole, et ce afin de réaliser une économie annuelle d’une trentaine de millions d’euros. Avis défavorable.

M. Dominique Tian. Il ne s’agit pas de savoir auprès de qui se finance la MSA, mais de s’inquiéter que celle-ci ne renforce encore sa capacité d’endettement alors que le régime souffre d’un déficit chronique considérable. Après avoir pris beaucoup d’argent à toutes les entités encore excédentaires, on s’arrange pour qu’un organisme gravement déficitaire puisse emprunter un peu moins cher ! Nous aurions préféré que l’on nous propose des mesures pour lutter contre cet endettement.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Cet article vise à permettre à la MSA de réaliser quelques dizaines de millions d’euros d’économies, et vous nous parlez de son déficit. Ce n’est pas le même débat. Il s’agit ici de répondre à une demande ponctuelle. Mieux vaut que la MSA économise 30 millions d’euros plutôt que d’emprunter à des taux supérieurs auprès d’un établissement bancaire, fût-il le Crédit agricole.

La Commission rejette l’amendement.

Elle étudie ensuite l’amendement AS165 de M. Dominique Tian.

M. Dominique Tian. À cause du tour de passe-passe organisé par cet article, la « banque » de la sécurité sociale, l’ACOSS, va supporter de nouvelles charges, pour un montant de 3,5 milliards d’euros, alors que l’encours total de sa dette a dépassé les 130 milliards. On peut donc s’interroger sur la pertinence d’une mesure qui consiste à y ajouter la dette de la MSA. Tout cela explosera un jour ou l’autre !

M. Gérard Bapt, rapporteur. En supprimant l’alinéa 3, vous supprimez l’autorisation de consentir des prêts et avances d’une durée inférieure à douze mois. Par contre, vous maintenez, pour le régime des exploitants agricoles, la possibilité de recourir à des prêts et avances.

Cet amendement n’ayant aucun sens, je propose de le repousser.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 19 sans modification.

Article 20
(ord. n° 2002-149 du 7 février 2002, ordonnance n° 96-1122 du 20 décembre 1996, art. L. 762-1-2 du code rural et de la pêche maritime, art. 33 de la loi n° 2003-1199 du 18 décembre 2003)

Organisation comptable et budgétaire
de la Caisse de sécurité sociale de Mayotte

Bien que le régime de Mayotte demeure juridiquement distinct du régime général, notamment en ce qui concerne les règles d’affiliation et les prestations servies, le présent article vise à rapprocher l’organisation comptable et budgétaire de la caisse de sécurité sociale de Mayotte de celle des caisses générales de sécurité sociale, conformément aux recommandations de la Cour des comptes.

Il transfère la gestion des prestations familiales de la caisse d’allocations familiales de la Réunion vers la caisse de sécurité sociale de Mayotte, et aligne les règles financières et comptables de cette dernière sur le droit commun.

Le mode de tarification des séjours hospitaliers des Mahorais qui sont pris en charge dans un hôpital français en dehors de Mayotte est modifié.

1.  Le transfert de la gestion des prestations familiales

Actuellement, la Caisse de sécurité sociale de Mayotte (CSSM) a pour rôle d’assurer la gestion des régimes d’assurance maladie, maternité, invalidité et décès, AT-MP et d’assurance vieillesse. La gestion du régime des prestations familiales de ce département d’Outre-mer est confiée à la caisse d’allocations familiales de la Réunion.

Le 2° du I du présent article modifie l’article 15 de l’ordonnance n° 2002-149 du 7 février 2002 pour prévoir qu’à compter du 1er janvier 2015, la CSSM aura pour rôle d’exercer la politique d’action sociale en faveur des ressortissants du régime des prestations familiales et de leurs familles dans les conditions fixées par l’article 26 de l’ordonnance n° 96-1122 du 20 décembre 1996.

Le 3° du I modifie l’article 19 de l’ordonnance du 7 février 2002 pour prévoir que la gestion du régime des prestations familiales est assurée par la CSSM. Un décret fixera les conditions d’application de cet article.

La CSSM devient à la fois l’organisme payeur et l’organisme gestionnaire des prestations familiales à Mayotte (4° du I).

Par ailleurs, le III du présent article modifie l’article L. 762-1-2 du code rural et de la pêche maritime pour prévoir qu’à compter du 1er janvier 2016, la CSSM aura pour rôle d’assurer le service des prestations familiales pour les non-salariés agricoles, rôle jusqu’ici également dévolu à la caisse d’allocations familiales de la Réunion.

Le VI prévoit que les droits, biens et obligations de la caisse d’allocations familiales de La Réunion afférents à la gestion du régime des prestations familiales à Mayotte sont transférés à la caisse de sécurité sociale de Mayotte.

2.  Organisation comptable et financière

Si la gestion de la trésorerie de la CSSM est en principe centralisée à l’ACOSS comme celle de l’ensemble des organismes du régime général, les mécanismes de financement habituels des organismes de base par les caisses nationales du régime général ne s’appliquent pas à Mayotte. Seule l’affectation à la Caisse nationale d’assurance vieillesse des excédents du régime de retraite pour l’exercice précédent est prévue.

La CSSM dégage chaque année des résultats comptables à partir des contributions versées par les caisses nationales du régime général et a donc accumulé localement des réserves. Ces réserves sont gérées en trésorerie par l’ACOSS mais ne sont pas affectées aux caisses nationales, tant comptablement qu’en trésorerie.

Un alignement sur le droit commun et une simplification des circuits financiers, en ce qui concerne les prestations familiales, est donc nécessaire.

Le 6° du II modifie l’article 26 de l’ordonnance n° 96-1122 du 20 décembre 1996 afin de rapprocher l’organisation financière et comptable de la CSSM du régime général. Le financement des dépenses de gestion technique administrative de la caisse mahoraise sera assuré par une dotation annuelle des caisses nationales du régime général pour la part des dépenses non couverte par les ressources du régime.

La caisse de Mayotte ne dégagera plus de résultat comptable, les excédents ou déficits constatés par différence entre les recettes propres et les dépenses des régimes gérés par la CSSM étant par construction remontés dans les comptes des caisses nationales au travers des mécanismes de dotation d’équilibre. Cela permettra également de consolider les comptes de la CSSM dans ceux des branches du régime général, ce qui répond à une recommandation réitérée de la Cour des comptes.

Les dépenses de gestion administrative de la caisse doivent respecter les autorisations budgétaires fixées par les contrats pluriannuels de gestion.

Le IV de l’article 26 précité précise que la gestion de chacun des régimes est retracée distinctement dans les écritures comptables de la caisse de sécurité sociale de Mayotte.

Ainsi, la CSSM est considérée comme un organisme de base du régime général, qui doit à ce titre se soumettre aux obligations comptables fixées par l’ACOSS.

Le V dispose que les réserves et reports à nouveau inscrits dans les comptes de la CSSM au 1er janvier 2015 au titre de la gestion des régimes de sécurité sociale, de l’action sociale et de la prévention, sont transférés aux organismes nationaux. Cet apurement est neutre financièrement pour la CSSM, la trésorerie étant déjà gérée par l’ACOSS.

Sans préjudice du résultat de l’exercice 2014, ce transfert des réserves et du report à nouveau se traduira, en 2015 pour les caisses nationales, par un produit exceptionnel global toutes branches confondues d’environ 95 millions d’euros.

3.  Tarification des séjours hospitaliers des Mahorais

La facturation des séjours hospitaliers des Mahorais lorsqu’ils sont pris en charge sur le territoire national hors de l’île de Mayotte s’établit actuellement sur la base des tarifs journaliers de prestation (TJP) et non sur les règles de droit commun qui fondent la prise en charge par l’assurance maladie des séjours hospitaliers sur les tarifs nationaux fixés dans le cadre de la tarification à l’activité (groupes homogènes de séjours – GHS). Cet état de fait pose question dans la mesure où :

– un séjour hospitalier tarifé sur la base des TJP occasionne un coût pour l’assurance maladie plus élevé que s’il était tarifé sur la base d’un GHS ;

– la solvabilité du régime de sécurité sociale de Mayotte est assurée par le régime général, le régime de Mayotte étant intégré au régime général sur le plan financier.

Il apparaît donc nécessaire de faire évoluer le cadre juridique applicable afin de réintégrer les assurés mahorais dans le droit commun de la tarification hospitalière.

Le 1° du II ajoute à l’ordonnance du 20 décembre 1996 précitée un article 20-5-7 qui dispose que les frais d’hospitalisation qui relèvent de la tarification à l’activité seront facturés sur la base des tarifs nationaux (GHS).

Le VII fixe la mise en œuvre de cette mesure au 1er janvier 2016, afin de permettre aux établissements de santé concernés d’anticiper cette évolution.

Cet alignement sur le droit commun de la tarification des séjours hospitaliers générerait une économie pour l’assurance maladie estimée à 4 millions d’euros sur la base des données de facturation disponibles.

*

* *

La Commission adopte l’article 20 sans modification.

Article 21
(art. L. 131-7, L. 131-8, L. 136-8 et L. 651-2-1 du code de la sécurité sociale
et art. L. 14-10-5 du code de l’action sociale et des familles)

Réaffectation de la taxe sur les salaires, des droits de consommation sur les tabacs et de la contribution sociale de solidarité des sociétés
dans le cadre de la compensation des mesures du pacte de responsabilité

Cet article prévoit la compensation des exonérations de cotisations patronales décidées dans le cadre du pacte de responsabilité par des réaffectations de recettes à la sécurité sociale.

Les mesures du Pacte de responsabilité ayant pour objet d’améliorer la compétitivité des entreprises par des baisses de charges ont un impact sur les recettes de la sécurité sociale de 5,9 milliards d’euros – et de 6,3 milliards d’euros en y incluant le FSV et la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA).

Le projet de loi de finances pour 2015 prévoit la compensation globale de cette perte de recettes pour la sécurité sociale, ainsi que l’affectation à la sécurité sociale du produit de la fiscalisation des majorations de pensions pour enfant prévu dans le volet financier accompagnant la loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraites. Le présent article prévoit quant à lui les réaffectations de recettes internes à la sécurité sociale afin d’assurer une compensation équilibrée du Pacte entre les branches et le Fonds de solidarité vieillesse (FSV).

1.  Rappel des pertes de recettes consécutives au Pacte de responsabilité

Le pacte de responsabilité et de solidarité est structuré autour de plusieurs piliers : la poursuite de l’allégement du coût du travail ; la modernisation du système fiscal et la baisse de la fiscalité pour les entreprises ; la simplification des procédures administratives ; des engagements en matière d’emploi ; et enfin, des mesures de solidarité en faveur du pouvoir d’achat des ménages, et en particulier, des plus modestes d’entre eux.

Le volet compétitivité des entreprises est principalement décliné dans la loi de financement de la sécurité sociale rectificative pour 2014, à travers les mesures suivantes :

– renforcement des allégements généraux de cotisations sociales : il s’agit d’approfondir le mécanisme de la réduction dégressive de cotisations patronales (17) sur les bas salaires, situés entre 1 et 1,6 SMIC, afin de parvenir à « zéro charge URSSAF » au niveau du SMIC à compter du 1er janvier 2015 ;

– exonération partielle de cotisations patronales famille jusqu’à 1,6 SMIC ;

– exonération partielle de cotisations famille des travailleurs indépendants : il s’agit d’une réduction des cotisations d’allocations familiales des travailleurs indépendants (agricoles et non agricoles), pour les revenus d’activité compris entre 1 et 3,8 SMIC, sous la forme d’une réduction forfaitaire de 3,1 points jusqu’à 3 SMIC qui deviendrait ensuite dégressive pour s’annuler à 3,8 SMIC ;

– création d’un abattement d’assiette sur la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) due au titre de l’exercice 2015, première étape d’une démarche qui verra la suppression de cette contribution à l’horizon 2017, après application d’un abattement de plus grande ampleur en 2016 (18).

IMPACT FINANCIER THÉORIQUE DU PACTE DE RESPONSABILITÉ
ET DE SOLIDARITÉ SUR LES RÉGIMES OBLIGATOIRES DE BASE EN 2015

(en milliards d’euros)

Exonération de cotisations famille entre 1 et 1,6 SMIC

3,7

Renforcement des allégements généraux

0,3

Allégements de cotisations en faveur des indépendants au 1er janvier 2015

1,0

Abattement de C3S à compter du 1er janvier 2015

0,9

Impact total sur les régimes obligatoires de base

5,9

Impact y compris FSV

6,0

Impact y compris FSV et CNSA

6,3

Au total, le Pacte de responsabilité entraîne une perte de recettes de 6,3 milliards d’euros pour la sécurité sociale en 2015, y compris Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (19).

2.  Les transferts prévus entre l’État et la sécurité sociale

a.  La compensation directe du Pacte

Comme le Gouvernement s’y était engagé au moment de la discussion du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014, l’article 28 du projet de loi de finances pour 2015 prévoit les modalités globales de la compensation intégrale de ces mesures pour la sécurité sociale.

Ainsi, sur les 6,3 milliards d’euros :

– 4,75 milliards d’euros sont compensés par le transfert à l’État de la part des aides personnalisées au logement (APL) actuellement financée par la branche famille, dans un objectif d’unification du financement du fonds national d’aide au logement (FNAL) ;

– le régime général bénéficiera de 1,52 milliard d’euros de recettes supplémentaires en 2015 grâce à la mise en place de la retenue à la source des cotisations et contributions de sécurité́ sociale sur les indemnités versées par les caisses de congés payés (cf. article 14 du présent projet de loi) ; du fait de son entrée en vigueur au 1er avril 2015, cette mesure produira encore des effets pendant les trois premiers mois de 2016, pour environ 0,5 milliard d’euros, mais il s’agira ensuite de trouver une autre recette pour compenser les pertes de recettes liées au pacte de responsabilité pour la sécurité sociale ;

– la différence entre les montants que représentent ces transferts et le coût du pacte de responsabilité, soit 0,03 milliard d’euros, est compensée par une majoration de 0,02 % de la fraction de TVA nette affectée au régime général.

b.  Les autres transferts prévus entre État et sécurité sociale

L’article 28 du projet de loi de finances procède à d’autres transferts entre État et sécurité sociale. En réalité, c’est le montant global de TVA nette affectée au régime général qui ajuste in fine les transferts pour que le gain net pour la sécurité sociale en 2015 atteigne 6,3 milliards d’euros auxquels s’ajoutent 1,2 milliard d’euros que l’État s’était engagé à transférer à la sécurité sociale à partir de 2015 en contrepartie de la fiscalisation des majorations de pension pour enfant (mesure prévue dans la loi de finances pour 2014 et discutée dans le cadre du projet de loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraites), soit un total de 7,5 milliards d’euros.

L’article 28 du projet de loi de finances pour 2015 propose d’affecter l’ensemble des prélèvements sociaux sur le capital à la sphère sociale. La création en loi de finances pour 2013 du prélèvement de solidarité au taux de 2 % a en effet conduit à partager le produit des prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine et les produits de placement entre l’État (soit 2 points sur l’ensemble des 15,5 points de prélèvements sur le capital) et la sphère sociale (13,5 points). Ce partage nuit à la lisibilité des prélèvements obligatoires. L’opération conduit à inscrire sur le budget général de l’État, en mesure de périmètre, un montant de crédits équivalent au produit du prélèvement auparavant affecté aux différents fonds (Fonds national d’aide au logement, Fonds national des solidarités actives, et fonds de solidarité), soit 2,5 milliards d’euros. Cette mesure est neutre en 2015 tant pour la sécurité sociale que pour l’État.

L’article précité modifie par ailleurs les modalités de compensation des exonérations de cotisations sociales sur les heures supplémentaires. Actuellement assurée par une fraction de TVA de 0,34 %, la compensation de ce dispositif sera effectuée par crédits budgétaires, mode de compensation de droit commun pour les dispositifs d’exonération ciblés (géographiques ou sectoriels). Cette réforme s’accompagne de l’inscription, en mesure de périmètre, des crédits budgétaires correspondants sur la mission « Travail et emploi », pour un montant de 516 millions d’euros en 2015.

Enfin, la principale fraction de TVA affectée à la sécurité sociale est minorée, pour 2015, de 0,75 point (– 1,7 milliard d’euros) par l’article 28 précité pour tenir compte :

– de l’ensemble des mesures contenues dans cet article ;

– de la compensation du transfert du financement des formations médicales à la sécurité sociale (139 millions d’euros) ;

– du transfert à la sécurité sociale du rendement de la mesure de fiscalisation des majorations de pension pour enfants pour un montant de 1,2 milliard d’euros.

Le tableau suivant retrace l’ensemble de ces flux.

TRANSFERTS COMPENSÉS ENTRE L’ÉTAT ET LA SÉCURITÉ SOCIALE EN 2015

(en millions d’euros)

Perte pour la sécurité sociale

 

Gain pour la sécurité sociale

         

Pacte de responsabilité

– 6 300

 

Compensation du pacte

6 300

Création d’un abattement sur la C3S

– 1 000

 

Rebudgétisation des APL

4 750

Exonérations de cotisations famille pour les travailleurs indépendants

– 1 000

 

Mesures sur les caisses de congés payés

1 520

Renforcement des allégements généraux

– 4 300

 

Majoration de la fraction de TVA nette affectée au RG

30

         

Diminution de la fraction de TVA nette affectée à la sécurité sociale

– 2 534

 

Prélèvement de solidarité

2 534

         

Transferts

– 655

   

655

Financement des formations médicales

– 139

 

Majoration de la fraction de TVA nette

139

Diminution de la fraction de TVA nette affectée

– 516

 

Rebudgétisation de la compensation des exonérations sur les heures sup.

516

         
     

Affectation des gains liés à la fiscalisation des majorations de pension (via la faction de TVA nette)

1 200

   

Total de TVA nette à restituer à la sécurité sociale

– 1 681

3.  Les réaffectations de taxe internes à la sécurité sociale proposées par le présent article

Tirant les conséquences de ces dispositions, le présent article procède à des réaffectations de recettes internes entre les branches et caisses de sécurité sociale afin d’une part d’assurer une compensation équilibrée des effets du pacte de responsabilité et de solidarité pour chacune d’entre elles et d’autre part pour faire bénéficier le FSV du produit de la fiscalisation des majorations de pensions pour enfants.

a.  Les rééquilibrages entre branches

Le présent article modifie un nombre limité de clés d’affectation des recettes fiscales entre branches, régimes et organismes de sécurité sociale. En effet, les mesures de compensation prévues à l’article 28 du projet de loi de finances entraînent des déséquilibres entre des caisses recevront un montant de compensation supérieur aux recettes occasionnées par le pacte (les caisses des branches maladie et famille) et des caisses sous-compensées (la CNAV, le FSV et la CNSA).

La Caisse nationale d’assurance maladie (CNAMTS) étant affectataire, à compter du 1er janvier 2015, de la majorité du prélèvement de solidarité (une fraction étant par ailleurs affectée à la CNSA), une partie de ses autres recettes fiscales est réaffectée vers les autres branches et organismes de sécurité sociale. Ainsi, une fraction des droits de consommation sur les tabacs dont elle est affectataire est réorientée vers le régime des salariés agricoles ainsi que vers la CNSA, affectés par les allégements généraux du Pacte de responsabilité.

En ce qui concerne la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF), le transfert à l’État des aides personnelles au logement (pour près de 4,75 milliards d’euros) excède largement la perte de recettes qu’occasionnent les mesures du Pacte. Une part de la taxe sur les salaires, dont elle était affectataire, est donc réaffectée au FSV afin que celui-ci bénéficie des gains de la fiscalisation des majorations de pension pour enfants, soit 1,2 milliard d’euros.

b.  La modification des clés de répartition des taxes affectées à la compensation des exonérations de cotisations sociales

Le A du I du présent article modifie l’article L. 131-7 du code de la sécurité sociale, qui impose la compensation par le budget de l’État des mesures d’exonération de cotisations sociales.

Le premier alinéa de l’article L. 131-7 comprend actuellement une liste de mesures d’exonérations qui ne sont pas compensées par l’État ; il s’agit essentiellement des allégements de cotisations patronales (dispositif « Fillon ») et des exonérations de cotisations familiales.

Le 2° du A du I complète l’article L. 131-7 par un alinéa qui prévoit que la compensation n’est pas applicable à certaines mesures précisément énumérées :

– les gains de levées d’options et les attributions d’actions gratuites déjà mentionnés dans la rédaction actuelle l’article L. 131-7 ;

– les cotisations d’allocations familiales pour les agents non statutaires des régimes spéciaux ;

– les exonérations de cotisations familiales, y compris celles prévues par la loi de financement de la sécurité sociale rectificative pour 2014 ;

– les allégements généraux de cotisations patronales (y compris l’élargissement prévu par la loi de financement de la sécurité sociale rectificative pour 2014) ;

– l’exonération partielle de cotisations familles pour les travailleurs indépendants et les exploitants agricole ;

– l’abattement d’assiette sur la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S).

Le B du I modifie l’article L. 131-8 du code de la sécurité sociale relatif au panier de recettes fiscales affectées à la sécurité sociale.

En ce qui concerne la taxe sur les salaires, le transfert de la branche famille au FSV atteint 1,3 milliard d’euros :

– la part affectée à la CNAF passe de 27,5 % à 18 % ;

– la part affectée au FSV passe de 19 % à 28,5 %.

La répartition de la totalité des recettes de la taxe sur les salaires est désormais celle-ci.

RÉPARTITION DES RECETTES DE LA TAXE SUR LES SALAIRES

(en pourcentages)

 

2014

2015

Famille

27,5

18

Vieillesse

53,5

53,5

FSV

19

28,5

Total

100

100

En ce qui concerne les droits de consommation sur les tabacs, le transfert entre branche maladie et régime agricole s’élève à 57 millions d’euros, et le transfert entre branche maladie et CNSA s’élève à 218 millions d’euros :

– la part affectée à la CNAMTS passe de 60 % à 57,53 % ;

– la part affectée au régime agricole passe de 7,48 % à 7,99 % ;

– la part nouvellement affectée à la CNSA est de 1,96 %.

La répartition de la totalité des recettes des droits tabacs est présentée ci-dessous :

RÉPARTITION DES RECETTES DES DROITS DE CONSOMMATION SUR LES TABACS

(en pourcentages)

 

2014

2015

CNAMTS

60

57,53

CNAF

8,97

8,97

Régime des exploitants agricoles

19,49

19,49

Régime des salariés agricoles

7,48

7,99

Fonds de financement de la CMU

3,15

3,15

FCAATA

0,31

0,31

CNSA

-

1,96

Autres régimes

0,60

0,60

Total

100

100

Il aurait pu être envisagé de ne pas réorienter une fraction des droits tabacs aujourd’hui affectés à la branche maladie vers le régime des salariés agricoles, dans la mesure où ce régime est adossé au régime général. Cette option aurait cependant présenté une lisibilité moindre.

Le C du I modifie l’article L. 136-8 du même code pour prévoir que l’ACOSS est chargée de centraliser et de répartir le produit de la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) sur les jeux réalisés dans les casinos. Il s’agit de corriger une omission de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 qui prévoit que l’ACOSS centralise l’ensemble des prélèvements sociaux sur les revenus du capital et des jeux. Votre commission a ajouté par amendement (n° 160) la CRDS sur les jeux de la Française des jeux mentionnés au I de l’article 18 de l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996, déjà centralisée par l’ACOSS en pratique.

Le D du I modifie l’article L. 652-2-1 du même code relatif la répartition de la C3S et de la C3S additionnelle. Jusqu’en 2014, la C3S était affectée au RSI afin d’assurer son équilibre. La loi de financement rectificative pour 2014 a modifié cet article, prévoyant la répartition de la C3S entre la CNAMTS, la CNAV, le FSV et la branche invalidité-maternité du régime des exploitants agricoles.

Le présent article modifie les parts affectées à la CNAMTS et à la CNAV. La première passe de 22 % à 13,3 % et la seconde de 33 % à 41,7 %. Ainsi, environ 0,4 milliard d’euros passent de la branche maladie à la branche vieillesse.

Le tableau suivant présente l’évolution de la répartition de la C3S entre 2014, la loi de financement rectificative et le présent projet de loi.

(en pourcentages)

 

2014

LFRSS

2014

PLFSS
2015

RSI

à hauteur de déficits maladie et vieillesse

CNAMTS

22,0

13,3

CNAV

33,0

41,7

FSV

Solde

14,0

14,0

CCMSA

30,89

31,0

31,0

Total

100,0

100,0

100,0

Le II du présent article modifie l’article L. 14-10-5 du code de l’action sociale et des familles pour ajouter le droit de consommation sur les tabacs à la liste des recettes propres de la CNSA.

Le tableau ci-après retrace l’ensemble des flux qui concernent les régimes obligatoires de base de sécurité sociale, par branche.

(en milliards d’euros)

 

Régime général

Tous régimes

FSV

CNSA

 

Maladie

AT-MP

Vieillesse

Famille

Toutes branches

Toutes branches

   
                 

Mesures du Pacte de solidarité et de responsabilité

– 1,3

0,0

– 1,0

– 3,6

- 5,9

– 5,9

– 0,1

– 0,2

Création d’un abattement sur la C3S et adossement du RSI au RG

– 0,5

 

– 0,3

 

– 0,9

– 0,9

   

Exonération cotisations familiales des TI

     

– 1,0

– 1,0

– 1,0

   

Exonération d’allocations familiales jusqu’à 1,6 SMIC

     

– 3,7

– 3,7

– 3,7

   

Renforcement des allégements généraux

– 0,7

0,0

– 0,7

1,1

– 0,3

– 0,3

   
                 

Mesures visant la compensation du Pacte de solidarité et de responsabilité

0,6

0,0

0,6

5,0

6,2

6,2

0,0

0,0

Prélèvement à la source des cotis. dans les secteurs avec caisses de congés payés

0,6

0,0

0,6

0,2

1,4

1,4

   

Budgétisation des APL

     

4,8

4,8

4,8

   
                 

Autres mesures PLF

2,6

0,1

0,2

0,1

2,9

2,9

0,0

0,0

Transfert des formations médicales

– 0,1

     

– 0,1

– 0,1

   

Transfert du prélèvement de solidarité

2,5

     

2,5

2,5

   

Budgétisation des exo heures sup.

0,2

0,1

0,2

0,1

0,5

0,5

   
                 

Ajustement de la fraction de TVA nette

– 1,3

– 0,1

– 0,2

– 0,1

– 1,7

– 1,7

0,0

0,0

                 

Transfert intra-sécu
(art. 21 PLFSS)

– 0,7

0,0

0,4

– 1,3

– 1,5

– 1,5

1,3

0,2

Droits tabacs

– 0,3

     

– 0,3

– 0,2

 

0,2

C3S

– 0,4

 

– 0,4

 

0,0

0,0

   

Taxe sur les salaires

     

– 1,3

– 1,3

– 1,3

1,3

 
                 

Effet net des transferts PLF/PLFSS 2015

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

1,2

0,0

*

* *

La Commission examine l’amendement AS9 de M. Jean-Pierre Door, tendant à supprimer l’article.

M. Jean-Pierre Door. Cet amendement nous permet de dénoncer la supercherie à laquelle s’est livré le Gouvernement dans la loi de financement rectificative de la sécurité sociale (LFRSS) adoptée en juillet dernier. Environ 6 milliards d’euros d’allégements de charges ont été actés, mais non compensés, alors que la loi organique dispose expressément que toute exonération de cotisation ou de charge doit être intégralement compensée, à l’euro près.

Le Gouvernement nous avait dit à l’époque que la compensation interviendrait dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2015, c’est-à-dire aujourd’hui. Elle consiste d’abord à transférer l’aide personnalisée au logement (APL) – 4,6 milliards d’euros – de la branche famille vers le budget de l’État, ensuite à prélever pendant un an 1,5 milliard sur les caisses des congés payés du bâtiment et des spectacles, enfin à transférer vers le Fonds de solidarité vieillesse (FSV) le produit de la fiscalisation des majorations familiales de retraite. Tout cela n’est que pure supercherie.

Cet artifice va permettre d’accroître le budget de l’État. Mais comment l’État va-t-il compenser ces 4 milliards d’euros supplémentaires ? Personne ne le sait. Et qu’en sera-t-il en 2016 ? Allez-vous continuer ce jeu de cache-cache, où l’on compense au petit bonheur, en allant chercher des recettes ici ou là ? Quel expédient prendra la suite du prélèvement sur les caisses de congés payés qui, vous l’avez assuré, ne sera pas renouvelé l’an prochain ? L’APL sera-t-elle durablement transférée au budget de l’État, au détriment d’ailleurs de la Caisse nationale d’allocations familiales (CNAF), qui est loin d’être satisfaite de cette manipulation ?

Pour toutes ces raisons, nous demandons la suppression de l’article 21.

M. Jean-Louis Roumegas. Si nous n’allons pas jusqu’à soutenir l’amendement de M. Door, nous le rejoignons sur la question de la compensation des pertes de recettes votées dans le cadre de la LFRSS et sur le terme de « supercherie ».

Mme la ministre nous avait expliqué que cela ne nuisait en rien aux prestations sociales, puisque la perte de recettes était intégralement compensée. Les gens ne comprennent pas ce discours, car l’argent qui sert à la compensation est bel et bien prélevé sur certains budgets. Nous aimerions savoir lesquels, car je doute que ce soit neutre.

Par ailleurs, l’argent qu’affecte l’État à la compensation des recettes aurait pu être consacré, soit au maintien des prestations familiales, qui vont être rognées, soit à la réduction du déficit. C’est une question politique, et vous aurez beau expliquer les choses, les gens ne comprendront pas que l’on réduise, d’une façon ou d’une autre, dans le contexte actuel, les prestations familiales.

M. Jean-Pierre Barbier. Cet été, il manquait 6 milliards d’euros de recettes. Aujourd’hui, il manque toujours 6 milliards. Comment allons-nous faire, si ce n’est en aggravant encore la dette ? Le rapporteur va sans doute nous expliquer comment ces 6 milliards vont être compensés. Pour cette année, nous avons compris que 1,5 milliard sera pris sur les caisses des congés payés du bâtiment et des spectacles. Mais, comme cela ne se reproduira pas l’année prochaine, vous trouverez sûrement d’autres solutions pour 2015 ! Quant aux 4,5 milliards transférés au budget de l’État et qui disparaissent du budget de la sécurité sociale, vous allez également nous expliquer comment ils seront compensés. Ne nous répondez pas que cela ne concerne pas la Commission des affaires sociales car, pour le coup, nous sommes tous concernés à la fois par le budget de la sécurité sociale et par le budget de l’État.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Je me rappelle la discussion que nous avons eue lors de l’examen du PLFRSS. L’opposition nous disait sans cesse : « Vous dites que ce sera compensé, mais on veut savoir comment ! » Et lorsque nous répondions que cela figurerait au PLF pour 2015, on nous rétorquait : « Nous voulons le savoir tout de suite. »

Aujourd’hui, nous examinons le PLFSS pour 2015, et je me permets de vous rappeler l’engagement majeur qui a été pris cet été, en réponse à notre exigence unanime : l’État compensera les effets du pacte de responsabilité sur le budget de la sécurité sociale, et le fera à l’euro près. Et vous nous demandez, une fois de plus, comment ; mais ce sujet, cher collègue, est débattu en ce moment même dans l’hémicycle.

Puisque vous parlez de supercherie, je rappellerai aussi celle à laquelle vous vous étiez livrés lorsque, pour financer la réduction du déficit du FSV, vous aviez, à la façon du sapeur Camember, interverti avec la branche famille, des recettes qui n’étaient pas pérennes. Marie-Françoise Clergeau avait à juste titre dénoncé le procédé. En l’occurrence, il s’agissait effectivement d’une supercherie, car la diminution inéluctable du produit de l’exit tax, pour ne prendre que cet exemple, avait pour effet mécanique l’aggravation du déficit de la branche famille, qui n’a pas manqué de se produire.

Aujourd’hui, le Gouvernement propose de mettre à la charge de l’État les allocations logement, qu’il s’agisse de l’aide personnalisée au logement (APL) ou de l’allocation de logement à caractère familial (ALF). Il est normal que ces mesures soient financées par la solidarité nationale, et ce transfert de charges concourt par ailleurs à la compensation des pertes de recettes liée au pacte de solidarité sur le budget de la sécurité sociale, compensation qui se fait bien à l’euro près, comme vous le réclamiez. Mais cela ne vous empêche pas de continuer à nous demander comment le PLF, actuellement en discussion dans l’hémicycle, va faire pour y parvenir !

Malgré des circonstances difficiles, le déficit de la sécurité sociale va diminuer cette année, fût-ce insuffisamment, et continuera de diminuer l’an prochain. De la même façon, le budget de l’État voit son déficit diminuer d’année en année par rapport à celui que vous nous aviez laissé, chers collègues de l’opposition.

Selon la Cour des comptes, la dette sociale est plus pernicieuse que celle de l’État, car elle correspond à des prestations distribuées aujourd’hui, mais gagées sur l’avenir des enfants mêmes à qui ces prestations s’adressent.

Je propose donc à la Commission de repousser l’amendement.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements AS258 et AS259 du rapporteur, visant à corriger des erreurs matérielles.

Elle adopte ensuite l’article 21 modifié.

Après l’article 21

La Commission est saisie de l’amendement AS210 de Mme Dominique Orliac.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Cet amendement a déjà été examiné dans le cadre de la LFRSS pour 2014. Il n’a pas lieu d’être, car les associations bénéficient pleinement de son article 2 ; les avantager par rapport à d’autres structures créerait une iniquité. Avis défavorable, donc.

L’amendement est retiré.

Article 22
(art. L. 136-6 du code de la sécurité sociale)

Modalités de versement de l’État à la sécurité sociale des prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine au titre de l’« exit tax »

Cet article modifie les modalités de versement, par l’État aux organismes sociaux, des prélèvements sociaux au titre de « l’exit tax ».

L’exit tax est une taxation à l’impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux des plus-values latentes sur les valeurs mobilières et droits sociaux des contribuables qui quittent le territoire national. La plupart des personnes bénéficient d’un sursis de paiement jusqu’à la réalisation effective de la plus-value. Il y a donc un décalage temporel entre le calcul de l’impôt et sa mise en recouvrement. De plus, on constate une différence significative entre le montant des émissions mises en recouvrement et les recouvrements effectifs.

Or, c’est sur la base des émissions mises en recouvrement que la part correspondant aux prélèvements sociaux est versée par l’État à la sécurité sociale, ce qui entraîne une minoration des recettes nettes d’impôt sur le revenu.

L’article 22 modifie les modalités de versement des sommes dues au titre des prélèvements sociaux, afin qu’elles soient versées sur la base du recouvrement effectif.

1.  Les modalités actuelles de prélèvement et de versement aux organismes sociaux des prélèvements sociaux au titre de l’exit tax

a.  Le dispositif de l’exit tax

Mis en place par la loi du 29 juillet 2011 de finances rectificative pour 2011 afin de soumettre à l’impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux les plus-values latentes sur les valeurs mobilières constatées avant le transfert hors de France du domicile fiscal des particuliers, le dispositif appelé « exit tax » a pour objectif de limiter l’évasion fiscale. Il vise à ce que les contribuables paient un impôt sur leurs plus-values latentes et sur leurs plus-values en report d’imposition au moins égal à ce qu’ils auraient payé en restant en France.

L’article 167 bis du code général des impôts vise les contribuables fiscalement domiciliés en France pendant les six années précédant le transfert de leur domicile fiscal hors de France, qui possèdent 50 % des bénéfices sociaux d’une société ou 800 000 euros de participations dans des sociétés (y compris SICAV et fonds communs de placement).

La règle généralement prévue par les conventions fiscales et par le droit communautaire est qu’une plus-value est imposée dans l’État de résidence du cédant. Afin de respecter ce principe, l’article 167 bis du code général des impôts prévoit que l’imposition est établie antérieurement au départ de France du contribuable, lorsque celui-ci est encore résident fiscal.

S’agissant de plus-values latentes, l’impôt calculé est provisoire. Lorsque le contribuable quitte le territoire national pour un État membre de l’Union européenne, il bénéficie d’un sursis de paiement jusqu’à réalisation de la plus-value. En cas de survenue à l’étranger d’un événement qui aurait purgé la plus-value s’il était intervenu en France (donation ou décès), il est procédé à̀ un dégrèvement de l’impôt en sursis de paiement ou à une restitution de l’impôt déjà̀ payé.

En cas de cession à l’étranger, l’impôt sur la plus-value latente établi à titre provisoire au départ de France fait l’objet d’un nouveau calcul tenant compte de la plus-value réelle et, pour le bénéfice des abattements, de la durée de détention incluant la période de séjour à l’étranger. La fraction de l’impôt étranger réputée taxer la même assiette s’impute sur l’impôt français tandis que l’éventuelle moins-value peut devenir imputable sur d’autres plus-values taxables par la France.

Ces plus-values sont également soumises aux prélèvements sociaux en application du e) bis du I de l’article L. 136-6 du code de la sécurité́ sociale qui inclut dans le champ de la contribution sociale sur les revenus du patrimoine « les plus-values et créances mentionnées au I et au II de l’article 167 bis du code général des impôts ».

b.  Le recouvrement de l’exit tax

Comme on l’a vu, il y a un décalage temporel entre le calcul de l’impôt et sa mise en recouvrement. Par ailleurs, du fait du mécanisme de sursis de paiement et d’éventuels dégrèvements ou dérogations, il existe une différence significative entre le montant des émissions mises en recouvrement et le niveau des recouvrements effectifs à terme.

Or, le premier alinéa du III de l’article L. 136-6 du code de la sécurité sociale dispose que « Le produit annuel de cette contribution (la contribution sociale sur les revenus du patrimoine) résultant de la mise en recouvrement du rôle primitif est versé le 25 novembre au plus tard aux organismes affectataires ». Cela signifie que le Trésor public verse à la sécurité sociale le produit de la contribution sur les revenus du patrimoine sur la base des mises en recouvrement.

Ce système entraîne une minoration des recettes d’impôt sur le revenu, puisque les recouvrements effectifs à terme sont inférieurs aux montants mis en recouvrement au titre de l’exit tax. Ce décalage est aggravé par le fait que les prélèvements sociaux ne sont pas dégrevés ou restitués dans les mêmes cas que l’impôt sur les plus-values (dégrèvement ou restitution prévus au dernier alinéa du 2 du VII et au premier alinéa du 4 du VIII de l’article 167 bis du code général des impôts).

En 2013, les sommes non recouvrées mais effectivement transférées aux organismes sociaux ont entraîné une minoration de l’ordre de 0,5 milliard d’euros des recettes nettes d’impôt sur le revenu.

Toutefois, il convient de rappeler qu’en contrepartie des dégrèvements et non-valeurs que l’État prend à sa charge, il prélève 3,6 % des montants mis en recouvrement. Il prélève également, comme pour tous les impôts et taxes affectés à la sécurité sociale, 0,5 % des montants mis en recouvrement en compensation des frais d’assiette et de recouvrement. L’ACOSS reçoit donc in fine 95,9 % des montants mis en recouvrement.

2.  Le dispositif proposé

Cet article modifie l’article L. 136-6 du code de la sécurité sociale relatif à la contribution sociale sur les revenus du patrimoine.

Le I du présent article modifie le III de l’article L. 136-6 précité. Le 1° du I supprime la référence au e bis du I de l’article 167 bis du code général des impôts relatif à l’exit tax pour la mise en recouvrement et le versement aux organismes affectataire de la contribution sur les revenus du patrimoine.

Le 2° du I prévoit un dispositif spécifique pour la mise en recouvrement et le versement des prélèvements sociaux sur l’exit tax, indiquant que le produit de cette contribution est versé à l’ACOSS « pour le montant effectivement recouvré net du prélèvement prévu au III de l’article 1647 du code général des impôts ». La logique est donc inversée : l’ACOSS reçoit les sommes effectivement recouvrées nettes de l’impôt sur le revenu. En conséquence, le prélèvement de l’État de 3,6 % ne pourra plus s’appliquer sur le périmètre du dispositif.

Le II précise que ces dispositions entreront en vigueur au 1er janvier 2015.

3.  Impact financier pour la sécurité sociale

L’impact de cette mesure est estimé à 445 millions d’euros par an dans les prochaines années, soit une perte de recettes de 445 millions d’euros pour la sécurité sociale, et un gain équivalent pour l’État.

Si la mesure est neutre pour l’ensemble des finances publiques, elle minore le rendement des prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine et a donc un impact sur les prévisions de recettes des affectataires de la sécurité sociale et sur les trajectoires de soldes proposées dans le présent projet de loi.

*

* *

La Commission adopte l’article 22 sans modification.

Article 23

Approbation du montant de la compensation des exonérations
mentionnées à l’annexe 5

Conformément aux dispositions organiques, cet article approuve le montant, figurant dans l’annexe 5 au présent projet de loi, de la compensation par l’État des pertes de recettes résultant, pour les organismes sociaux, des différents mécanismes d’exonération, de réduction ou d’abattement d’assiette en matière de cotisations et contributions sociales – communément appelées « niches sociales ».

Ce montant de 3,7 milliards d’euros en 2015, 3 658 millions d’euros précisément, correspond aux compensations prévues en application de l’article L. 131-7 du code de la sécurité sociale. Elles sont effectuées soit par des crédits budgétaires inscrits dans le projet de loi de finances, soit par de la fiscalité affectée.

La compensation ne concerne ni les allégements généraux ni les exemptions d’assiette.

1.  Les exonérations compensées

L’article L. 131-7 du code de la sécurité sociale (tel que modifié par l’article 21 du présent projet de loi) dispose que toute mesure de réduction ou d’exonération des cotisations sociales instituée à compter de la loi n° 94-937 du 25 juillet 1994 donne lieu à compensation intégrale de la sécurité sociale par l’État. L’obligation de compensation ne s’applique pas à certaines exonérations précisément listées :

– les gains de levées d’options et les attributions d’actions gratuites déjà mentionnés dans la rédaction actuelle l’article L. 131-7 ;

– les cotisations d’allocations familiales pour les agents non statutaires des régimes spéciaux ;

– les exonérations de cotisations familiales, y compris celles prévues par la loi de financement de la sécurité sociale rectificative pour 2014 ;

– les allégements généraux de cotisations patronales (y compris l’élargissement prévu par la loi de financement de la sécurité sociale rectificative pour 2014) ;

– l’exonération partielle de cotisations familles pour les travailleurs indépendants et les exploitants agricole ;

– l’abattement d’assiette sur la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S).

a.  Les exonérations ciblées compensées

Les exonérations ciblées font l’objet d’une compensation budgétaire, hormis celles dont la non-compensation est soit explicitement prévue par la loi, soit antérieure à la loi de 1994.

En 2015, les exonérations ciblées compensées devraient atteindre 3,5 milliards d’euros. Ce montant tient compte des réformes envisagées dans les projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2015.

Ce montant de 3,5 milliards d’euros résulte de la somme des crédits budgétaires de compensation à la sécurité sociale inscrits dans chaque programme du budget de l’État.

Ce montant est en hausse, après plusieurs années de baisse, en raison de la compensation par des crédits budgétaires de la déduction sur les heures supplémentaires pour les entreprises de moins de 20 salariés (auparavant compensée par recettes fiscales). Cette compensation atteint 516 millions d’euros en 2015.

Parmi les exonérations ciblées compensées, la place la plus importante revient aux exonérations en faveur des entreprises et des travailleurs indépendants implantés en outre-mer (plus de 1,1 milliard d’euros), du contrat d’apprentissage (1,0 milliard d’euros) et des travailleurs occasionnels demandeurs d’emploi (0,3 milliard d’euros).

Cela étant, une fois posé le principe de la compensation du coût pour les organismes sociaux, l’exécution ne coïncide pas nécessairement avec les montants initialement prévus, au titre tant des pertes de recettes que des montants inscrits en loi de finances.

Néanmoins, la compensation de l’État au titre des exonérations ciblées demeure satisfaisante. Fin 2013, l’état semestriel des sommes restant dues par l’État aux organismes de sécurité sociale faisait apparaître une dette nette de l’État de 17 millions d’euros pour l’ensemble des régimes, mais une créance nette à l’égard du régime général de 82 millions d’euros.

b.  Les exonérations compensées par affectation de recettes fiscales

Les déductions forfaitaires pour les services à la personne sont compensées par affectation de recettes fiscales. Il s’agit de la déduction forfaitaire pour les particuliers employeurs de 0,75 euro par heure de travail effectué qui s’impute sur la cotisation maladie, maternité, invalidité et décès depuis le 1er janvier 2013. Une déduction de 3,70 euros par heure est prévue dans les départements d’outre-mer.

Le coût de ce dispositif est estimé à 200 millions d’euros en métropole et 30 millions d’euros outre-mer, intégralement compensés.

1.  Les exonérations non compensées

a.  Les exonérations ciblées non compensées

Soit qu’elles aient été instaurées avant les obligations de compensation posées en 1994 et étendues en 2004 et 2005, soit qu’elles aient été instaurées postérieurement mais assorties d’un refus explicite de compensation, plusieurs exonérations ciblées ne sont pas compensées, pour un montant qui, à la différence de celui des exonérations compensées, augmente (3,8 milliards d’euros en 2015, contre 3,2 milliards en 2013 et 3,7 milliards en 2014).

Comme pour les exonérations compensées, les trois principales mesures (aide à domicile des personnes fragiles sous le régime du particulier employeur ou bien par le biais d’une association ou d’une entreprise, contrat unique d’insertion), constituent à elles seules trois quarts du coût.

En 2014 et 2015, le dynamisme de ces exonérations tiendrait principalement à l’exonération au titre des contrats uniques d’insertion dans le cadre de la montée en charge des contrats d’avenir.

b.  Les allégements généraux sur les bas salaires et le panier fiscal

Entre 2007 et 2010, les deux allégements à portée générale – la réduction de cotisations « Fillon » sur les bas salaires et l’exonération des heures supplémentaires –, c’est-à-dire les deux montants les plus importants de pertes de recettes pour la sécurité sociale, ont été compensés par le biais de « paniers » de recettes affectées aux régimes et organismes touchés par ces pertes de recettes. Ces affectations étaient assorties de garanties quant au maintien effectif, au vu de l’exécution constatée, des recettes sociales.

À partir de 2011, le principe du panier a été abandonné pour la plus importante de deux exonérations générales, à savoir la réduction (dite « Fillon ») de cotisations sociales patronales (20,5 milliards d’euros en 2014). Autrement dit, la sécurité sociale a conservé à titre permanent les recettes de l’ancien « panier » fiscal, tandis que l’exonération n’est plus compensée.

Au total, le coût des exonérations générales sur bas salaires s’élève à 21 milliards d’euros. La prévision réalisée pour 2015 intègre les mesures du pacte de responsabilité visant à réduire le coût du travail et améliorer la compétitivité des entreprises. Le montant des allégements généraux progresserait ainsi de + 3,6 % passant à 21,5 milliards d’euros.

Le montant correspondant à l’élargissement du dispositif des allégements généraux est intégralement compensé à la sécurité sociale par différents transferts présentés à l’article 21.

Quant à l’exonération des heures supplémentaires, son champ a été considérablement réduit par la loi de finances rectificative pour 2012 (20) et elle est désormais compensée par crédits budgétaires, comme indiqué dans le paragraphe précédent.

c.  La compensation des pertes de recettes liées au pacte de responsabilité

Les dispositions en recettes de la loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 adoptées dans le cadre du pacte de responsabilité sont intégralement compensées par l’État à la sécurité sociale en 2015. Toutefois, il ne s’agit pas d’une application de l’article 131-7 de la sécurité sociale.

Les pertes de recettes sont compensées de façon générale, non par l’affectation de crédits budgétaires fléchés mais par des transferts de charges, de recettes, et l’adaptation de la fraction de TVA nette affectée par l’État à la sécurité sociale.

Ces mesures sont présentées dans le commentaire de l’article 21.

1.  La vision d’ensemble des « niches sociales »

L’annexe 5 au présent projet de loi ne considère pas seulement les allégements généraux et les exonérations ciblées ainsi que les modalités de leur compensation mais, dans l’esprit de la loi organique de 2005 relative aux lois de financement de la sécurité sociale, s’attache à identifier et à chiffrer l’ensemble des taux, assiettes et dispositifs dérogatoires susceptibles de faire perdre des recettes aux organismes sociaux.

Cette partie de l’annexe fait notamment apparaître l’ensemble des éléments qui sont totalement ou partiellement exemptés de prélèvement social, autrement dit les niches sociales, et évalue les pertes de recettes potentielles qui en résultent pour la sécurité sociale.

Dès lors, le coût de l’ensemble des allégements, exonérations et niches peut ainsi être établi :

PERTES DE RECETTES RÉSULTANT DES EXONÉRATIONS ET EXEMPTIONS D’ASSIETTE
DE COTISATIONS ET DE CONTRIBUTIONS (2011-2015)

(en milliards d’euros)

 

2011

2012

2013

2014

2015

Allégements généraux et heures sup

24,2

23,6

20,7

20,7

21,5

Exonérations ciblées compensées

3,4

3,1

3,9

3,9

3,7

Exonérations ciblées non compensées

3,0

3,2

3,2

3,6

3,8

Exemptions d’assiette

9,2

8,0

6,4

6,6

6,9

Total des pertes de recettes

39,8

37,9

34,2

34,9

35,8

Sources : annexe 5 des PLFSS 2012, 2013, 2014 et 2015.

*

* *

La Commission adopte l’article 23 sans modification.

TITRE II
CONDITIONS GÉNÉRALES DE L’ÉQUILIBRE FINANCIER
DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

Article 24

Approbation du tableau d’équilibre de l’ensemble
des régimes obligatoires pour 2015

Conformément aux dispositions organiques (L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale), cet article, pendant de l’article d’équilibre du projet de loi de finances, retrace l’équilibre financier de la sécurité sociale dans un tableau, présenté par branche et établi pour l’ensemble des régimes obligatoires de base, dont il propose l’approbation. Le tableau suivant met en regard les données afférentes au tableau d’équilibre financier pour 2015 avec celles relatives à l’exercice 2014.

TABLEAU D’ÉQUILIBRE DE L’ENSEMBLE DES RÉGIMES OBLIGATOIRES DE BASE

(en milliards d’euros)

 

2014*

2015

 

Prévisions de recettes

Objectifs de dépenses

Solde

Prévisions de recettes

Objectifs de dépenses

Solde

Maladie

186,4

193,8

-7,4

191,3

198,0

-6,7

Vieillesse

218,1

219,9

-1,7

222,7

224,0

-1,3

Famille

56,2

59,1

-2,9

52,4

54,6

-2,3

AT-MP

13,5

13,2

0,3

13,7

13,5

0,3

Toutes branches (hors transferts)

461,2

472,9

-11,7

466,5

476,6

-10,1

* Prévisions révisées par le présent projet de loi de financement.

Par rapport aux prévisions révisées pour 2014 figurant à l’article 5 du présent projet loi de financement, le solde de l’exercice 2015 se redresserait de 1,6 milliard d’euros. En outre, si l’on prend en compte le déficit du Fonds de solidarité vieillesse (FSV), le solde négatif de l’ensemble atteindrait 13 milliards d’euros contre 27,7 milliards en 2009, 29,1 milliards en 2010, 24 milliards en 2011, 19,2 milliards en 2012, 17,3 milliards en 2013 et 15,7 milliards d’euros en 2014.

Les recettes de l’ensemble des régimes obligatoires de base devraient s’établir à 466,5 milliards d’euros pour 2015, en progression de 1,1 % par rapport aux prévisions rectifiées des recettes de l’année 2014 figurant à l’article 5 du présent projet de loi.

Cette estimation de l’évolution des recettes s’appuie sur une reprise modérée de la croissance (1 %) et une progression lente de la masse salariale du secteur privé (2 % en 2015, contre 1,2 % en 2013 et 1,6 % en 2014).

Les diverses mesures des précédentes lois de financement de la sécurité sociale (notamment les hausses de taux des cotisations vieillesse et AT-MP, la baisse du taux des cotisations famille) sont les principaux déterminants de l’évolution de recettes de cotisations. L’impact sur les recettes des mesures nouvelles prévues par les lois financières initiales et rectificatives depuis août 2012 est présenté dans le tableau ci-après (les pertes de recettes de la loi de financement rectificative pour 2014 marquées d’un astérisque sont compensées) :

MESURES NOUVELLES RELATIVES AUX RECETTES PRISES DEPUIS L’ÉTÉ 2012

(en millions d’euros)

Loi

Mesure

Impact 2013

Impact 2014

Impact 2015

LFR août 2012

Hausse du forfait social de 8 % à 20 %

2 290

2 298

2 318

Hausse des contributions sur les stock-options

291

270

270

Majoration de deux points du prélèvement sur le capital

803

767

805

Assujettissement aux prélèvements sociaux des revenus immobiliers des non-résidents

191

181

190

Prélèvements sur les retraites chapeaux

60

61

62

LFSS pour 2013

Hausse de la fiscalité sur les bières

470

539

506

Hausse de la fiscalité sur les tabacs

200

250

250

Déplafonnement de la cotisation maladie des travailleurs indépendants

387

363

280

Introduction d’une exonération dégressive sur la cotisation minimale maladie (travailleurs indépendants)

-67

-87

-85

Réintégration d’une fraction des dividendes des travailleurs indépendants dans l’assiette des cotisations

75

65

55

Clarification de l’assiette de la taxe sur les salaires et création d’une tranche additionnelle

470

479

490

Assujettissement des ruptures conventionnelles au forfait social

330

331

334

Augmentation des cotisations de la branche ATMP

200

203

207

TVA nette (hors compensation des exonérations au titre des heures supplémentaires et des services à la personne)

9 235

11 839

12 052

LFSS pour 2014

Revalorisation du taux de TSCA (passage de

9 % à 14 %) pour les contrats d’assurance maladie complémentaire non responsables

 

70

50

Création d’une taxe sur boissons énergisantes

 

20

20

Assujettissement des frontaliers suisses

 

163

325

Réforme des plus-values immobilières (PVI) : incidence sur les ASSO

-42

-83

276

LFRSS pour 2014

Intégration des temps de pause dans les allégements généraux

   

180

Diminution de 1,8 point des cotisations familles entre 1 et 1,6 SMIC*

   

-3 700

Renforcement des allégements généraux*

   

-900

Abattement sur les cotisations familiales des travailleurs indépendants*

   

-1 000

Diminution de CSSS*

   

-1 000

* Pertes de recettes intégralement compensées à la sécurité sociale par les projets de loi de finances et de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015.

Le tableau ci-après retrace les mesures du présent projet de loi de financement et de la loi de financement rectificative pour 2014 ayant un impact en 2015 sur les recettes des régimes obligatoires de base, et du régime général en particulier.

IMPACT DES MESURES NOUVELLES DE RECETTES EN 2015

(en milliards d’euros)

 

Ensemble des régimes obligatoires de base

Dont régime général

Modification des modalités de recouvrement des prélèvements sociaux au titre de l’exit tax

- 4,45

- 4,45

Création d’un abattement sur la C3S et adossement du RSI au RG

-0,9

-0,9

Exonération de cotisations famille des non-salariés

-1,0

-1,0

Exonération d’allocations familiales jusqu’à 1,6 SMIC

-3,7

-3,7

Renforcement des allégements généraux

-0,3

-0,3

Prélèvement à la source des cotisations dans les secteurs ayant des caisses de congés payés

1,4

1,4

Transfert à la CNAMTS du prélèvement de solidarité

2,5

2,5

Circuits comptables et financiers à Mayotte

0,1

0,1

Total

-6,35

-6,35

L’article 28 du projet de loi de finances pour 2015 prévoit la compensation intégrale des exonérations prévues par la loi de financement de la sécurité sociale rectificative pour 2014 dans le cadre du pacte de responsabilité, conformément à ce qui avait été annoncé (se reporter au commentaire de l’article 21 qui détaille les mesures de compensations du pacte). Ainsi, la part de TVA nette affectée de l’État à la sécurité sociale est ajustée en fonction de ces compensations, ainsi que d’autres mesures de transferts prévues entre État et sécurité sociale, si bien que le solde du tableau ci-dessus ne reflète pas la variation des recettes de la sécurité sociale.

À cet égard, votre rapporteur déplore le manque de lisibilité de l’annexe 9 quant aux mesures nouvelles en recettes.

S’agissant des dépenses, elles atteindraient 476,6 milliards d’euros en 2015, soit une progression de 0,8 % par rapport au montant prévisionnel rectifié pour 2014 de 472,9 milliards d’euros, essentiellement à mettre au compte de la maladie et de la vieillesse. A contrario, les dépenses de la branche famille devraient sensiblement diminuer, du fait des mesures d’économies.

D’après la commission des comptes de la sécurité sociale, les dépenses d’assurance maladie croîtraient spontanément de 3,9 % en 2015 en l’absence de mesures : la fixation d’un ONDAM à +2,1 % dans le cadre du présent projet traduit donc un effort important, avec des économies qui doivent être supérieures à 3,2 milliards d’euros.

Le tableau ci-dessous détaille les mesures d’économies prévues dans le champ de l’ONDAM.

MESURES D’ÉCONOMIES PRÉVUES DANS LE CHAMP DE L’ONDAM EN 2015

(en millions d’euros)

Efficacité de la dépense hospitalière

520

Optimisation des dépenses des établissements

55

Optimisation des achats et fonctions logistiques

350

Liste en sus

105

Tarification des plasmas thérapeutiques

10

Virage ambulatoire et adéquation de la prise en charge en établissement

370

Développement de la chirurgie ambulatoire

100

Réduction des inadéquations hospitalières

110

Rééquilibrage de la contribution de l’ONDAM % à l’OGD

160

Produits de santé et promotion des génériques

1 065

Baisse des prix des médicaments

550

Promotion et développement des génériques

435

Biosimilaires

30

Tarifs des dispositifs médicaux

50

Pertinence et bon usage des soins

1 155

Baisse des tarifs des professionnels libéraux

150

Actions de maîtrise des volumes et de la structure de prescription des médicaments

400

Lutte contre les iatrogénies médicamenteuses

100

Maîtrise médicalisée hors médicament

375

Mise en œuvre des réévaluations de la HAS

130

Lutte contre la fraude

75

TOTAL

3 185

Source : annexe 9 au PLFSS.

Les dépenses au titre de la vieillesse progresseraient de 1,9 % en 2015. Cette évolution tient compte des mesures prévues par la loi du 20 janvier 2014 garantissant l’avenir et la justice du système de retraites, dont l’évolution progressive de la durée d’assurance requise pour l’obtention d’une retraite à taux plein. Le régime général d’assurance vieillesse sera à l’équilibre en 2017 : malgré la conjoncture difficile, le déficit, qui atteignait presque 9 milliards d’euros en 2010, a déjà été divisé par 5 (– 1,6 milliards d’euros en 2014). En 2015, les dépenses d’assurance vieillesse connaîtront par ailleurs une évolution modérée due au faible niveau d’inflation, la règle de revalorisation des pensions étant construite sur la base de l’évolution des prix afin de garantir le pouvoir d’achat des retraités.

Les dépenses de la branche famille sont affectées par un changement de périmètre en 2015 correspondant au transfert à la charge de l’État de la part de l’aide personnalisée au logement (APL) actuellement financée par la branche famille. Ce transfert (soit 4,8 milliards d’euros) couvrira l’impact sur la CNAF des mesures de baisses des cotisations sociales mises en œuvre au 1er janvier 2015 par la loi de financement rectificative de la sécurité sociale du 8 août 2014 dans le cadre du pacte de responsabilité et de solidarité. Hormis cet effet, la branche famille contribue à hauteur de 900 millions d’euros aux économies prévues en 2015.

En l’absence de mesures nouvelles, la situation financière des autres régimes de base (hors régime général) devrait continuer de s’améliorer avec un excédent de 0,2 milliard d’euros, mais cette amélioration résulterait largement des mécanismes d’intégration financière qui conduisent à faire supporter à ce dernier les déficits des autres régimes.

Le régime des exploitants agricoles se redresse peu à peu, du fait de la diminution du volume des prestations vieillesse versées ; il est estimé à 150 millions d’euros en 2015 par la commission des comptes de la sécurité sociale. Quant à la branche vieillesse du Régime social des indépendants, son déficit avant transfert de C3S atteint 1,5 milliard d’euros.

Par ailleurs, dans le cadre de la renégociation des conventions d’objectifs et de gestion (COG) entre l’État et les caisses, mais également avec l’ACOSS, un objectif de gains d’efficience et de réduction des dépenses de fonctionnement, permis en partie par la montée en charge de la dématérialisation, des mutualisations et de mesures de simplification, devrait permettre de dégager une économie sur l’ensemble des caisses de l’ordre de 500 millions d’euros en 2015. Ces économies sont intégrées dans les prévisions de dépenses des branches et ne constituent pas une mesure nouvelle à proprement parler.

Le tableau ci-après présente l’impact par branche des mesures nouvelles dans l’ensemble des régimes obligatoires de base.

IMPACT DES MESURES NOUVELLES SUR LES COMPTES DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

(en milliards d’euros)

 

Régime général

Tous régimes

 

Maladie

AT-MP

Vieillesse

Famille

Toutes branches

Toutes branches

Solde tendanciel avant mesures nouvelles PLFSS et LRSSR

- 10,5

0,4

- 1,5

- 3,2

- 14,7

- 14,5

Mesures du Pacte de solidarité et de responsabilité

- 1,3

0,0

- 1,0

- 3,6

- 5,9

- 5,9

Création d’un abattement sur la C3S et adossement du RSI au RG

- 0,5

 

- 0,3

 

- 0,9

- 0,9

Exonération cotisations familiales des TI

     

- 1,0

- 1,0

- 1,0

Exonération d’allocations familiales jusqu’à 1,6 SMIC

     

- 3,7

- 3,7

- 3,7

Renforcement des allégements généraux

- 0,7

0,0

- 0,7

1,1

- 0,3

- 0,3

Mesures compensant le Pacte de solidarité et de responsabilité

0,6

0,0

0,6

5,0

6,2

6,2

Prélèvement à la source des cotis. dans les secteurs avec caisses de congés payés

0,6

0,0

0,6

0,2

1,4

1,4

Budgétisation des APL

     

4,8

4,8

4,8

Transferts prévus en PLF

2,6

0,1

0,2

0,1

2,9

2,9

Transfert des formations médicales

- 0,1

     

- 0,1

- 0,1

Transfert du prélèvement de solidarité

2,5

     

2,5

2,5

Budgétisation des exo heures sup.

0,2

0,1

0,2

0,1

0,5

0,5

Ajustement de la fraction de TVA nette

- 1,3

- 0,1

- 0,2

- 0,1

- 1,7

- 1,7

Transfert intra-sécu
(art. 21 PLFSS)

- 0,7

0,0

0,4

- 1,3

- 1,5

- 1,5

Effet net des transferts PLF/PLFSS 2015

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

Économies ONDAM

3,2

0,0

   

3,3

3,3

Économies de la branche famille

     

0,9

0,9

0,9

Majoration du transfert au titre de la sous-déclaration des AT-MP

0,2

-0,2

       

Réforme de l’assurance décès

0,2

     

0,2

0,2

Circuits comptables et financiers à Mayotte

0,1

     

0,1

0,1

Solde après mesures nouvelles

- 6,9

0,2

- 1,5

- 2,3

- 10,5

- 10,3

Au total donc, les mesures portées par le présent projet de loi de financement permettent de réduire le déficit de la branche maladie de 3,6 milliards d’euros, celui de la branche famille de 0,9 milliard d’euros et celui de l’ensemble du régime général de 4,2 milliards d’euros.

Trois branches demeureraient déficitaires ; seule la branche des accidents du travail et des maladies professionnelles devant enregistrer un léger excédent.

*

* *

La Commission examine l’amendement AS24 de M. Francis Vercamer, tendant à supprimer l’article.

M. Francis Vercamer. L’équilibre budgétaire et financier du projet de loi de financement de la sécurité sociale semble compromis, car les hypothèses sur lesquelles il repose pèchent par optimisme. Le chômage, en particulier, continue de progresser, et l’INSEE ainsi que d’autres organismes prévoient qu’il en sera de même en 2015, ce qui pèsera sur les recettes comme sur les dépenses. Le Gouvernement table en outre sur une croissance de 1 % du PIB et sur une inflation de 1,2 %. Si je n’ai pas d’idées préconçues sur l’inflation, j’estime en revanche que la prévision de croissance est surévaluée, compte tenu des projections des organismes spécialisés, selon lesquels elle sera moindre. Il semble donc que l’équilibre financier ne sera pas davantage atteint qu’en 2013 et en 2014, années où les déficits ont été plus importants que ceux prévus initialement.

M. Jean-Louis Roumegas. Bien que ce soit pour des raisons différentes, nous sommes également pour la suppression de l’article. Nous aurions souhaité, en effet, un équilibre différent, dans lequel les prestations sociales, familiales en particulier, ne soient pas rabotées. Nous voterons donc l’amendement.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Je vous fais crédit de votre bonne foi, monsieur Roumegas, mais cela ne vaut pas forcément pour tous les partisans de la suppression de l’article…

M. Michel Issindou. Je comprends l’inquiétude de certains concernant la croissance, mais les instituts de prévision ont montré par le passé qu’il leur arrivait souvent de se tromper ! Il n’est donc pas interdit d’avoir une vision plus optimiste. Au demeurant, ce qui compte, dans un système contributif fondé sur des cotisations, c’est moins la progression du PIB que celle de la masse salariale, sur laquelle sont assises les cotisations, et qui sera de 1,2 % en 2014. Cela peut sembler surprenant, mais les salaires continuent de progresser dans le secteur privé.

S’agissant des retraites, le comité de suivi nous dira, le 15 juin prochain, si la progression des recettes est suffisante pour assurer l’équilibre financier que nous avons prévu à l’horizon 2020. Il y a, certes, des raisons objectives de s’inquiéter pour l’avenir, mais il y en a aussi de croire que celui-ci sera meilleur grâce aux mesures que nous avons prises, notamment dans le cadre du pacte de responsabilité, pour redresser l’économie, l’emploi et, donc, les recettes de la sécurité sociale. Il serait regrettable d’anticiper des déficits. Faisons davantage confiance, les uns et les autres, aux capacités de notre pays et aux politiques que nous menons ! Ne soyons pas défaitistes !

M. Gérard Bapt, rapporteur. Je suis défavorable à l’amendement.

S’agissant de la branche famille, en admettant que le dispositif gouvernemental proposé soit intégralement adopté – ce qui, dans l’attente de l’intervention de Mme Marie-Françoise Clergeau, n’est pas encore acquis –, les dépenses seront encore en augmentation en 2015 par rapport à 2014. Rappelons que l’ensemble des dépenses sociales représentent, dans notre pays, 33 % du PIB, record mondial. Si l’on doit bien rechercher plus d’efficience et de justice sociale tout en maîtrisant les dépenses, y compris celles de la branche famille, et sans créer de nouvelles injustices, cela paraît préférable pour la bonne santé économique de la nation. C’est pourquoi il convient, en l’état actuel de notre débat, d’adopter l’article 24 tel qu’il est rédigé.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 24 et l’annexe C.

Article 25

Approbation du tableau d’équilibre du régime général pour 2015

De la même manière que pour les régimes obligatoires de base, et conformément aux dispositions organiques, le présent article retrace l’équilibre financier du régime général, dans un tableau d’équilibre, présenté par branche, dont il propose l’approbation.

TABLEAU D’ÉQUILIBRE DU RÉGIME GÉNÉRAL

(en milliards d’euros)

 

2014*

2015

 

Prévisions de recettes

Objectifs de dépenses

Solde

Prévisions de recettes

Objectifs de dépenses

Solde

Maladie

161,4

168,8

– 7,3

166,9

173,6

– 6,7

Vieillesse

115,1

116,7

– 1,6

119,4

120,9

– 1,5

Famille

56,2

59,1

– 2,9

52,4

54,6

– 2,3

AT-MP

12,0

11,8

0,2

12,3

12,1

0,2

Toutes branches (hors transferts)

332,7

344,3

– 11,7

338,4

348,6

– 10,3

* Prévisions révisées par le présent projet de loi de financement.

Au regard des prévisions rectifiées pour 2014 figurant à l’article 5 du présent projet de loi, le solde du régime général s’améliorerait de 1,4 milliard d’euros en 2015. Le « tendanciel » présenté par la commission des comptes de la sécurité sociale en septembre prévoyait quant à lui une dégradation de 3,1 milliards d’euros du déficit du régime général à hauteur de – 14,7 milliards d’euros, ce qui permet d’évaluer à 4,3 milliards d’euros l’effort de redressement des comptes porté par le présent projet de loi de financement (à l’arrondi près).

Cet effort de redressement est porté quasi exclusivement par des économies sur les dépenses.

L’ensemble de ces mesures sont détaillées dans le commentaire de l’article 24.

*

* *

La Commission adopte l’article 25 sans modification.

Article 26

Approbation du tableau d’équilibre des organismes concourant au financement des régimes obligatoires (FSV),
détermination de l’objectif d’amortissement de la dette sociale
et des prévisions de recettes du FRR et de la section 2 du FSV pour 2015

Conformément aux dispositions organiques, cet article :

– porte approbation du tableau d’équilibre des organismes concourant au financement des régimes obligatoires, en l’occurrence, depuis 2008, du seul Fonds de solidarité vieillesse (FSV), au I ;

– détermine l’objectif d’amortissement au titre de l’année à venir des organismes chargés de l’amortissement de la dette sociale, en l’espèce, la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES), au II ;

– prévoit, par catégorie, les recettes affectées aux organismes chargés de la mise en réserve de recettes au profit des régimes obligatoires de base, c’est-à-dire, au Fonds de réserve pour les retraites (FRR), au III, et au FSV, au IV.

Le tableau d’équilibre du Fonds de solidarité vieillesse

Le FSV devrait atteindre en 2015 un déficit de 2,9 milliards d’euros, contre 3,7 milliards d’euros en 2014, soit un redressement de 0,8 milliard d’euros, comme le montre le tableau suivant.

TABLEAU D’ÉQUILIBRE DU FSV

(en milliards d’euros)

 

2014

2015

Prévisions de recettes

Prévisions de dépenses

Solde

Prévisions de recettes

Prévisions de dépenses

Solde

FSV

16,7

20,3

– 3,7

16,6

19,6

– 2,9

L’évolution tendancielle des comptes pour 2015, telle que présentée par la commission des comptes de la sécurité sociale, prévoyait un déficit de 4,2 milliards d’euros.

Côté dépenses, le FSV est très impacté par le niveau élevé du chômage puisqu’il prend en charge les cotisations vieillesse des personnes privées d’emploi. Le coût de prise en charge des cotisations retraites des chômeurs augmente depuis 2009 et devrait atteindre 11,3 milliards d’euros en 2014, soit 45 % des charges du FSV. Le coût de la prise en charge des cotisations retraite des chômeurs est augmenté par la hausse des taux de cotisations vieillesse prévue par la dernière réforme des retraites.

En 2014, le FSV est mis à contribution pour le financement de la prime exceptionnelle de 40 euros qui sera versée aux retraités modestes dont les pensions n’excèdent pas 1 200 euros. Cette mesure en faveur du pouvoir d’achat entraînera une augmentation des dépenses du fonds de l’ordre de 250 millions d’euros qui sera pour partie compensée par la réaffectation de 0,5 point de forfait social jusqu’ici affecté à la section 2.

À partir de 2015, le fonds financera également une disposition de la loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraites en faveur des jeunes apprentis : un versement complémentaire du FSV vers les régimes permettra de financer la validation, au titre des droits à la retraite, de l’intégralité des trimestres d’apprentissage.

Côté recettes, le présent projet de loi prévoit de réaffecter 150 millions d’euros dès 2014 de la section 2 vers la section 1.

En 2013 et 2014, le fonds a reçu l’affectation exceptionnelle du produit de la contribution additionnelle de solidarité et d’autonomie (CASA) sur les pensions de retraite qui a été mise en place dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 et dont le produit lui a été affecté par le biais d’une affectation d’une fraction de CSG supplémentaire. En 2015, la fin du transfert de CSG de la CNSA vers le FSV conduit à réduire le produit de CSG qui diminuera de près de 3 % (0,3 milliard d’euros).

Les recettes de la cotisation sociale de solidarité des sociétés (C3S) vont diminuer en 2015 et 2016 puis disparaître en 2017. En effet, dans le cadre du pacte de responsabilité, le Gouvernement a annoncé la suppression à horizon 2017 de la C3S. Pour 2015, un premier abattement sur l’assiette de la C3S a été décidé en loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014. Durant la phase de disparition progressive de cette taxe, ses produits seront répartis entre la CNAM, la CNAV, la MSA et le FSV. Le taux attribué au FSV est de 14 %. En conséquence, le FSV ne percevra en 2015 qu’un montant de 0,9 milliard d’euros, contre 2,2 milliards d’euros en 2014.

Dans le cadre de la compensation des pertes de recettes liées au pacte de responsabilité, le FSV bénéficiera à partir de 2015 d’une majoration de 19 % à 28,5 % de l’affectation de taxe sur les salaires au FSV.

Enfin, 1,2 milliard d’euros de recettes sont affectées au FSV à partir de 2015, représentant le produit de la fiscalisation des majorations de pension pour enfants. Ces recettes lui sont affectées par le biais de transferts prévus entre l’État et la sécurité sociale dans le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale.

La conjonction de ces mesures permet de ramener le déficit du FSV à 2,9 milliards d’euros (contre 4,2 milliards d’euros en tendanciel).

L’objectif d’amortissement de la dette sociale

L’objectif d’amortissement de la dette sociale pour 2015 est fixé à 13,1 milliards d’euros, en hausse par rapport à l’objectif fixé pour 2014 de 12,8 milliards d’euros initialement, objectif rectifié à 12,7 milliards d’euros par l’article 5 du présent projet.

Au total, ses produits nets devraient atteindre, en 2015, 16,4 milliards d’euros, soit 6,8 milliards d’euros de CRDS, 6,1 milliards d’euros de CSG, 2,1 milliards d’euros provenant du FRR et 1,4 milliard d’euros provenant du prélèvement social sur les revenus du capital. Ses charges financières, qui constituent quasiment l’intégralité de ses dépenses, devraient s’établir à 3,2 milliards d’euros.

Le résultat prévisionnel pour 2015, 13,1 milliards d’euros, est intégralement destiné à l’amortissement de la dette sociale.

Les charges financières devraient diminuer de 2,2 % en 2015. La Caisse bénéficie de conditions de refinancement très attractives, son taux de refinancement étant globalement passé de 3,56 % fin 2010 à 2,70 % fin 2012 et 2,44 % au 31 juillet 2014.

Après une reprise de dette de 6,6 milliards d’euros en 2012 – correspondant à un montant de 9,7 milliards d’euros de déficits vieillesse au titre de 2011, duquel ont été déduits 3,1 milliards d’euros au titre de la régularisation du transfert de l’exercice précédent – , la CADES a repris 7,7 milliards d’euros en 2013 au titre des déficits vieillesse pour l’exercice 2012 – correspondant à un montant initial de 8,9 milliards d’euros, duquel ont été déduits 1,2 milliard d’euros au titre de la régularisation du transfert des déficits de 2011.

Conformément à l’article 16 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014, qui élargit le périmètre de la reprise de dette aux déficits des branches maladie et famille du régime général, la CADES s’est vue transférer 10 milliards d’euros de dette en 2014, soit 6 milliards d’euros de déficits « vieillesse » – 3,3 milliards d’euros au titre de la CNAV et 2,7 milliards d’euros au titre du FSV -, et 4 milliards d’euros au titre des déficits les plus anciens de la branche maladie, autrement dit, du déficit 2012 de cette branche, qui s’est établi à 5,9 milliards d’euros. En effet, l’ordre de priorité posé par l’article 16 précité exige que la marge restant après reprise du déficit vieillesse permette de reprendre d’abord les déficits de la branche maladie, avant ceux de la branche famille, et, au sein de la branche maladie, les déficits les plus anciens.

En 2015, la CADES reprendra à nouveau 10 milliards d’euros de déficits de l’ACOSS.

Dans ces conditions, la dette transférée à la CADES depuis sa création atteindra 237 milliards d’euros fin 2015.

Avec un objectif d’amortissement de 13,1 milliards d’euros, le montant total de la dette amortie par la CADES depuis sa création serait porté à 110 milliards d’euros, pour une situation nette à la fin de l’année 2015 de – 129,9 milliards d’euros en amélioration de 3,1 milliards d’euros par rapport à fin 2014.

Le modèle de gestion « actif-passif » de la CADES lui permet de réaliser des simulations d’amortissement de la dette sociale en fonction des paramètres ayant une incidence en la matière, en l’occurrence, essentiellement le rendement de la ressource, l’évolution des taux d’intérêt et le taux d’inflation.

Son scénario médian, qui intègre le schéma de reprise de dette programmée jusqu’à 2017, lui permettait d’espérer avoir amorti l’intégralité de la dette sociale en 2024, dans le respect donc de la contrainte organique. Cependant, le report de l’objectif d’équilibre des comptes de la sécurité sociale au-delà de 2017 entraînera un déficit résiduel de l’ACOSS dont la reprise n’est pas prévue.

Le président de la CADES indique que si l’on veut éviter un report de l’échéance de l’amortissement de la dette sociale, il faudrait transférer dès 2015 et chaque année les déficits de l’ACOSS vers la CADES, en lui attribuant les financements nécessaires (c’est-à-dire une hausse de la CRDS de l’ordre de 0,07 point par tranche de 10 milliards, d’après les calculs de la CADES en 2014).

Les prévisions de recettes affectées au Fonds de réserve pour les retraites (FRR)

Depuis la réforme des retraites de 2010, le FRR n’est plus affectataire d’aucune recette. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 a aménagé les conditions du décaissement progressif de ses actifs, sous la forme d’un versement annuel de 2,1 milliards d’euros au profit de la CADES.

Au 31 juillet 2014, la valeur de marché du portefeuille du Fonds était de 36 milliards d’euros, une fois déduit le quatrième versement de 2,1 milliards d’euros à la CADES : à cette date, son portefeuille était constitué à un peu plus de 36,5 % d’actifs de performance et à un peu plus de 53,5 % d’actifs obligataires et de trésorerie, pour une performance de 5,2 % depuis le début de l’année.

Dans le cadre de la loi n° 2014-40 du 20 janvier 2014 garantissant l’avenir et la justice du système de retraites, le Fonds de réserve s’est vu confier une mission nouvelle : celle de la stabilisation conjoncturelle de l’assurance vieillesse. En effet, le comité de surveillance des retraites mis en place par le projet de loi pourra préconiser le recours aux réserves du FRR en vue de la correction des écarts de nature conjoncturelle par rapport à la trajectoire de redressement financier des comptes de l’assurance vieillesse. Un décret, qui n’a pas encore été publié, devrait encadrer ces éventuels décaissements vers les régimes de retraite.

Dans la mesure où le Fonds est engagé dans une phase de décaissement progressif, les recettes qui lui sont affectées sont, pour la cinquième année successive, nulles.

● Les prévisions de recettes mises en réserve par le Fonds de solidarité vieillesse

La loi n° 2010-930 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites a créé au sein du FSV une section 2, consacrée à la mise en réserve des recettes affectées au financement du maintien à 65 ans de l’âge de départ à la retraite pour les parents de trois enfants ou plus ainsi que pour les parents d’un enfant handicapé.

Ont initialement été affectées à cette section une fraction du forfait social, à hauteur de 0,77 point pour un montant de 143 millions d’euros en 2011, et une fraction du prélèvement social sur les revenus du capital à hauteur de 0,2 point, soit 221 millions d’euros en 2011, soit au total, 364 millions d’euros.

En 2012, ont été affectés à cette section 0,5 point du forfait social pour un rendement prévisionnel de 148 millions d’euros, et 0,2 point du prélèvement social sur les revenus du capital, pour 252 millions d’euros, soit 400 millions d’euros au total.

À compter de 2013, en application de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, la section 2 est exclusivement financée par 0,5 point de forfait social.

À fin 2013, le montant de la réserve constituée s’élève à 0,9 milliard d’euros. Or, au vu des projections statistiques réalisées, le besoin de financement jusqu’en 2020 pour la retraite à taux plein à 65 ans pour les parents de trois enfants et plus et les parents d’enfant handicapé (280 millions d’euros) n’excédera pas cette réserve déjà constituée. Celle-ci sera suffisante pour financer le dispositif jusqu’à son extinction complète, sachant que le pic de dépense sera atteint en 2024. En effet, les mesures financées par la section 2 s’appliquent aux générations 1951 à 1955, qui en bénéficieront lors de la liquidation de leurs droits entre 2016 et 2020, ce qui explique le caractère résiduel des dépenses qui seront engagées à partir de 2023 et la situation durablement excédentaire de cette section

Le présent projet de loi prévoit donc de transférer la recette affectée à la section 2 vers la section 1 du FSV dès 2014 ; ceci permettra notamment de contribuer au financement de la prime exceptionnelle de 40 euros en 2014 dont bénéficieront les retraités modestes.

*

* *

La Commission adopte l’article 26 sans modification.

Article 27

Habilitation des régimes de base et des organismes concourant à leur financement à recourir à l’emprunt

Conformément aux dispositions organiques, cet article arrête la liste des régimes obligatoires de base et des organismes concourant à leur financement habilités à recourir à des ressources non permanentes ainsi que les limites dans lesquelles leurs besoins de trésorerie peuvent être couverts par de telles ressources. Il porte donc habilitation de certains régimes et organismes à recourir à des ressources non permanentes.

Sept régimes ou organismes bénéficieront d’une telle habilitation : régime général, régimes des exploitants agricoles Caisse centrale de la mutualité sociale agricole, (CCMSA), Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL), Caisse autonome nationale de la sécurité sociale dans les mines (CANSSM), Caisse nationale des industries électriques et gazières (CNIEG), Caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF et Caisse de retraite du personnel de la RATP.

1.  Le régime général

La trésorerie des différentes branches du régime général est gérée par l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS).

Le plafond d’emprunt de trésorerie de l’ACOSS a été fixé dans la loi de financement pour 2014 à 34,5 milliards d’euros pour l’année 2014, en augmentation de 5 milliards par rapport au plafond de 29,5 milliards retenu en 2013.

À la fin de l’année 2014, le solde prévisionnel du compte de l’ACOSS devrait atteindre – 28,8 milliards d’euros, après la reprise de dette par la CADES effectuée en juin pour un montant de 10 milliards d’euros en application de la loi de financement pour 2011 qui prévoit le transfert annuel, dans la limite de 10 milliards d’euros, des déficits de l’année précédente de la CNAV et du FSV, et de la loi de financement pour 2014, qui permet également le transfert des déficits des branches maladie et famille, toujours dans la limite de ce plafond global de 10 milliards d’euros.

Le point bas en « brut » (21) s’élèverait à – 32,8 milliards d’euros le 11 décembre 2014 (– 31,1 milliards d’euros en « net » à la même date), soit en-dessous du plafond des ressources non permanentes fixé désormais en « brut » à 34,5 milliards d’euros par la loi de financement.

La structure de financement de l’ACOSS pour 2014 fait une large place aux instruments de marché, ce qui lui permet en particulier de bénéficier du niveau exceptionnellement bas des taux d’intérêt à court terme, tout en privilégiant la mutualisation des trésoreries sociales (22).

Alors qu’en 2009, la part des concours bancaires via la Caisse de dépôts et consignations représentait encore 69 % du financement des besoins de trésorerie, elle n’est plus que de 15 % en 2014. À l’inverse, les billets de trésorerie souscrits sur les marchés financiers et les euro commercial papers participent à 49 % au financement de l’ACOSS en 2014 (contre 31 % en 2009).

En 2014, les concours de la Caisse des dépôts sont mobilisés, via les prêts « tuiles », de façon à faire face spécifiquement à l’échéance du versement des retraites qui constitue chaque mois le plus fort décaissement pour l’ACOSS. Compte tenu de l’augmentation des besoins, l’ACOSS a souscrit en 2014 un prêt de moyen terme d’un montant de 6 milliards d’euros, sous la forme de trois prêts de 2 milliards d’euros accordés en février, juillet et août 2014, remboursables en février et mars 2015.

L’ACOSS place aussi des billets de trésorerie auprès d’autres acteurs publics qui enregistrent des excédents de trésorerie ponctuels ou durables, dans le cadre de l’optimisation de la gestion des trésoreries publiques en fin d’année et de l’effort de mutualisation des trésoreries sociales, en l’occurrence celles de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA), de la CADES et des caisses d’assurance maladie et de retraite des industries électriques et gazières (IEG).

L’ensemble de ces billets de trésorerie « sociaux » et « publics » a acquis une importance croissante au fil des années, pour assurer 25 % du financement global en 2014 (contre 4 % seulement en 2009).

En 2015, compte tenu de la reprise par la CADES des déficits 2014 de la branche vieillesse du régime général, du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) et d’une partie de ceux des branches maladie et famille (dans la limite de 10 milliards d’euros), le besoin de trésorerie maximal de l’ACOSS atteindrait, le 10 décembre, – 32,7 milliards d’euros (le point bas en « brut », c’est-à-dire y compris les financements liés à la gestion du risque de liquidité, s’établirait à la même date à – 34,1 milliards d’euros), pour parvenir à un solde de – 32,2 milliards d’euros au 31 décembre (contre – 28,8 milliards d’euros au 31 décembre 2014).

La différence entre la variation de trésorerie (– 3,4 milliards d’euros après reprise de dette) et le déficit 2014 du régime général fixé par l’article 5 du présent projet de loi de financement (– 11,7 milliards d’euros) s’explique par plusieurs opérations affectant différemment les comptes et la trésorerie, principalement par le déficit prévisionnel du FSV, qui pèse en trésorerie sur le régime général.

Le plafond de recours du régime général à des ressources non permanentes intègre une marge d’aléa et est ainsi fixé par le présent article à 36,3 milliards d’euros.

Le tableau ci-après permet de situer l’autorisation demandée pour 2015 par rapport aux plafonds fixés par les précédentes lois de financement.

RÉGIME GÉNÉRAL
PLAFOND DE RECOURS À DES AVANCES DE TRÉSORERIE (1997-2015)

(en milliards d’euros)

Année

Plafond initial

voté en LFSS

Plafond rectifié

en LFSS

1997

12,2

-

1998

4,7

-

1999

4,4

-

2000

4,4

-

2001

4,4

-

2002

4,4

-

2003

15

-

2004

33

-

2005

13

-

2006

18,5

-

2007

28

-

2008

36

-

2009

18,9

29

2010

65

-

2011

20*

18

2012

22

-

2013

29,5

-

2014

34,5

-

2015

36,4

 

(*) 58 milliards d’euros du 1er janvier au 31 mai.

Source : annexe 9.

2.  Le régime des exploitants agricoles

Fin 2011, la CADES, pour la première fois, a repris des déficits de la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA), en l’occurrence ceux des exercices 2009 et 2010 (23).

En 2014, le profil de trésorerie de la CCMSA se caractérise par un point bas qui s’établirait à – 3,2 milliards d’euros le 4 novembre, et un point haut à
– 1,1 milliard d’euros le 8 avril. L’article 31 de la LFSS pour 2014 avait ainsi fixé le plafond de trésorerie du régime à 3,5 milliards d’euros.

Même si le déficit de la branche vieillesse s’est réduit entre 2013 et 2014 de près de 0,3 milliard d’euros, le financement des déficits accumulés reste à la charge du régime. Aussi, le profil pour 2015 se caractériserait par un point bas à
– 3,4 milliards d’euros. Dans ces conditions, un plafond d’emprunt à 3,7 milliards d’euros est proposé, en hausse limitée de 200 millions d’euros par rapport au montant fixé en 2014.

Lors de leur audition par votre rapporteur, les responsables de la caisse centrale de la Mutualité sociale agricole ont réitéré leurs remarques sur les risques que comporte le financement d’un découvert de trésorerie résultant de déficits cumulés de plus de 3 milliards d’euros. La possibilité offerte par l’article 19 du présent projet de loi d’emprunter à l’ACOSS contre rémunération des avances d’une durée inférieure à un mois constitue un progrès pour la MSA qui aura ainsi accès aux conditions de financement très favorables dont bénéficie l’ACOSS.

3.  La Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales

Depuis 2010, la CNRACL connaît des résultats déficitaires, et n’a plus de réserves pour les couvrir.

Pour 2014, le plafond de couverture des besoins de trésorerie de la CNRACL a été fixé à 950 millions d’euros, en tenant compte de la mobilisation des excédents du fonds pour l’emploi hospitalier (FEH) pour un montant d’environ 200 millions d’euros, permettant à la Caisse de reconstituer une partie de son fonds de roulement et de minorer ses emprunts. Ainsi, le point bas de trésorerie s’est établi à - 469 millions d’euros le 26 novembre 2014.

Grâce à des transferts importants de réserves vers la CNRACL en 2013 et 2014, et à une augmentation des cotisations, la situation financière a été assainie.

Le présent article propose ainsi un plafond de 600 millions d’euros pour 2015, contre 950 millions en 2014.

4.  La Caisse autonome nationale de la sécurité sociale dans les mines

En 2014, le point bas de trésorerie (– 824 millions d’euros) devrait être atteint le 23 décembre, pour un plafond de 900 millions d’euros autorisé en loi de financement.

Les ressources de la caisse de mines, régime désormais fermé, sont constituées essentiellement de ressources externes : compensation inter-régimes, subvention de l’État et cessions immobilières. Celles-ci ne suffisent néanmoins plus à contenir des besoins de trésorerie croissants, qui ont requis de majorer significativement, au cours des dernières années, les autorisations d’emprunt accordées à la caisse en loi de financement de la sécurité sociale.

Par conséquent, en raison de la limitation des concours de la Caisse des dépôts, partenaire bancaire historique du régime des mines, et conformément aux dispositions de la loi de financement pour 2014 qui prévoit de prolonger la possibilité ouverte en loi de financement pour 2013, le régime complétera son besoin de financement grâce au recours à des avances de trésorerie de l’ACOSS, pour un montant maximal de 250 millions d’euros. Cette mesure permet de garantir le financement du régime durant la totalité de la période conventionnelle, soit jusqu’à la fin 2017, en complément des avances et prêts obtenus auprès de la Caisse des dépôts et consignations et des autres partenaires bancaires.

Pour 2015, les prévisions montrent que le profil de trésorerie continue de se dégrader, avec un point bas qui atteindrait - 930 millions d’euros.

Le plafond proposé par le présent article est donc de 1 050 millions d’euros.

5.  La Caisse nationale des industries électriques et gazières

La CNIEG assure à la fois le versement des retraites de base (adossées sur le régime général) et complémentaires (adossées sur l’ARRCO-AGIRC), mais c’est seulement au titre des droits de base que le plafond de ses ressources non permanentes relève du champ de la loi de financement.

Le profil de trésorerie est tributaire du versement trimestriel des pensions de retraite et du transfert mensuel reçu de la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV). En 2012, il a été décidé de mensualiser le versement de la soulte annuelle due par la CNIEG à la CNAV dans le cadre de l’adossement, ce qui a ainsi permis de réduire de 250 millions d’euros le besoin de trésorerie. Ensuite, le versement des pensions a été mensualisé à compter d’avril 2013. Grâce à cela, le solde moyen de trésorerie a été ramené à - 46 millions d’euros du second trimestre à la fin de l’année 2013 (contre - 361 millions d’euros au premier trimestre), avec un point bas à – 290 millions d’euros (contre - 678 millions d’euros au premier trimestre).

La mensualisation du paiement des pensions a permis de réduire le besoin de trésorerie à partir de 2013, et la hausse de la contribution tarifaire d’acheminement votée en loi de financement pour 2013 s’est traduite par un rendement accru, qui a permis au régime de couvrir les droits spécifiques passés des activités régulés et de dégager un excédent pour financer les déficits futurs. Cet excédent est placé à l’ACOSS contre rémunération.

En 2014, le point bas du régime devrait être de - 184 millions d’euros, pour un plafond de 440 millions d’euros.

Pour 2015, un plafond d’emprunt de 200 millions d’euros est proposé.

6.  La Caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF

Ce régime, qui bénéficie de l’autonomie de gestion depuis 2008, est structurellement équilibré par une subvention de l’État. Mais son profil de trésorerie particulier, correspondant au décalage entre le versement trimestriel des pensions et l’encaissement mensuel des cotisations, présente d’importants besoins au début de chaque trimestre, ce qui suppose donc de prévoir une autorisation d’emprunt.

Du fait des tensions sur la trésorerie, à partir de 2012, il a été décidé (24) de verser les pensions de manière fractionnée à raison d’un tiers versé le premier jour ouvré de chaque trimestre, et de deux tiers versés après la date d’encaissement des cotisations, soit après le 5 de chaque début de trimestre. En 2013 et 2014, le même dispositif s’agissant du versement fractionné des pensions a été reconduit, via le décret n° 2012-1435 du 20 décembre 2012 et le décret n° 2013-1240 du 23 décembre 2013, avec une modification notable concernant la date de versement du 1er tiers des pensions du 1er trimestre. Le versement de cette fraction a été fixé au 2 janvier, alors que la date de versement du 1er tiers des pensions du 1er trimestre 2012 avait été fixée au 31 décembre 2011. Cette dernière disposition a permis de réduire le besoin de trésorerie au 31 décembre.

Ainsi, en 2014 le point bas se situerait à - 300 millions d’euros début janvier, le point haut ayant quant à lui été atteint à 854 millions d’euros le 7 avril 2014.

Pour 2015, le Gouvernement envisage de prolonger le paiement fractionné. Dans ce cadre, le profil prévisionnel du régime prévoit un point bas à - 329 millions d’euros du 2 au 4 janvier 2015. Toutefois, le régime mettra en œuvre au cours de l’année 2015 la mensualisation du versement des pensions, aussi le besoin moyen de trésorerie sera-t-il ramené à – 190 millions d’euros sur l’exercice. Le présent article propose de fixer le plafond de recours aux ressources non permanentes à 400 millions d’euros.

7.  La Caisse de retraite du personnel de la RATP

Adossé au régime général fin 2005, le régime de retraite de la RATP est structurellement équilibré par une subvention de l’État.

En 2014, le point bas de la trésorerie (– 0,3 million d’euros) aurait été atteint mi-janvier, pour un plafond de 15 millions d’euros fixé en loi de financement.

En 2015, il est proposé de maintenir le plafond de recours à des ressources non permanentes à 15 millions d’euros.

*

* *

La Commission adopte l’article 27 sans modification.

Article 28

Approbation du rapport sur l’évolution pluriannuelle du financement de la sécurité sociale (annexe B)

Conformément aux dispositions organiques, cet article approuve le rapport décrivant les prévisions de recettes et les objectifs de dépenses par branche des régimes obligatoires de base et du régime général, les prévisions de recettes et de dépenses des organismes concourant au financement de ces régimes, ainsi que l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM) pour les quatre années à venir, en cohérence avec les perspectives d’évolution des recettes, des dépenses et du solde de l’ensemble des administrations publiques présentées dans le rapport économique, social et financier joint au projet de loi de finances de l’année. Ce rapport constitue l’état annexé B au présent projet de loi et porte sur les années 2015 à 2018.

L’objectif du Gouvernement est de redresser les comptes de la sécurité sociale et de les ramener à l’équilibre.

Dans un environnement économique difficile, le Gouvernement a reporté son objectif de retour à l’équilibre, auparavant fixé à 2017, afin de ne pas peser sur la reprise économique attendue en 2015. D’ici à 2018, le déficit du régime général et du FSV devrait être ramené à 2,9 milliards d’euros (contre 15,4 milliards d’euros en 2014).

Les prévisions pluriannuelles figurant à l’annexe B reposent sur les hypothèses macro-économiques à moyen terme retracées dans le tableau suivant, en cohérence avec le programme de stabilité et la loi de programmation des finances publiques.

HYPOTHÈSES MACROÉCONOMIQUES RETENUES DANS LA PROJECTION PLURIANNUELLE

(en pourcentage)

 

2014

2015

2016

2017

2018

PIB (volume)

0,40 %

1,00 %

1,70 %

1,85 %

1,85 %

Masse salariale privée

1,60 %

2,00 %

3,50 %

4,20 %

4,20 %

ONDAM

2,4 %

2,1 %

2,0 %

1,9 %

2,0 %

Inflation

0,50 %

0,90 %

1,40 %

1,75 %

1,75 %

Source : annexe B au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015.

Ces hypothèses conduisent à déduire, toutes choses égales par ailleurs, l’évolution suivante des soldes du régime général et de l’ensemble des régimes obligatoires de base, pour chacune de leurs branches.

Le solde du régime général

Le solde du régime général devrait être fortement réduit à l’horizon 2018, puisqu’il représenterait 1,3 milliard d’euros, contre encore 11,7 milliards d’euros en 2014 et 17,4 milliards d’euros en 2012.

La branche vieillesse devrait être à l’équilibre en 2017.

Toutefois, le Fonds de solidarité vieillesse restera en déséquilibre de 1,6 milliard d’euros en 2018.

Avec la fixation d’un ONDAM à 2,1 % en 2015, 2,0 % en 2016 et 1,9 % en 2017, – en deçà des prévisions retenues dans la loi de programmation des finances publiques en 2013 –, le déficit de l’assurance maladie devrait être réduit à 1,4 milliard d’euros en 2018, contre 7,3 milliards d’euros en 2014. Ces déficits ne reculent que lentement, mais résolument, grâce à la mise en œuvre de la stratégie nationale de santé qui doit permettre d’améliorer l’organisation des soins et de renforcer son efficience, mais également d’actions de maîtrise des dépenses liées aux produits de santé, tant en ville qu’à l’hôpital.

La branche famille verrait son déficit réduit à 0,7 milliard d’euros à l’horizon 2018, contre 2,9 milliards d’euros en 2014.

La branche accidents du travail et maladies professionnelles devrait voir son excédent se confirmer et même s’accroître sur l’ensemble de la période, puisque celui-ci passerait de 200 millions d’euros en 2014 à 1,2 milliard d’euros en 2018, permettant ainsi à la branche d’effacer ses déficits cumulés passés.

Le solde des régimes obligatoires de base

Le déficit des régimes obligatoires de base devrait être ramené de 11,7 milliards d’euros en 2014 à 2,4 milliards d’euros en 2018.

L’annexe B s’attachant presque exclusivement aux prévisions pluriannuelles relatives au régime général, il semble ici important de rappeler qu’une attention particulière doit être attachée au financement des déficits du régime des exploitants agricoles, dont la nature est structurelle. Les mesures de justice prises dans le cadre de la réforme des retraites à l’égard des professions agricoles sont entièrement financées, à travers les mesures prises dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014. Cela dit, les déficits du régime des exploitants agricoles tendent à se réduire spontanément d’année en année, la population de retraités diminuant.

Au total, les déficits cumulés du régime général sur la période 2015-2018 représenteraient 22,3 milliards d’euros, et 32,2 milliards d’euros en tenant compte des déficits cumulés du FSV. Les déficits cumulés de l’ensemble des régimes de base sur la même période s’établiraient à 23,6 milliards d’euros, et 39,6 milliards d’euros au total en intégrant les déficits du FSV.

Si nous sommes donc loin des niveaux historiques de déficits cumulés atteints par le passé, une vigilance reste néanmoins de mise sur ce sujet.

De ce point de vue, l’élargissement du périmètre de reprise de dette par la CADES aux déficits des branches famille et maladie, dans la limite inchangée de 10 milliards d’euros par an et de 62 milliards d’euros au total à l’horizon 2017, devrait permettre le transfert de la majeure partie des déficits du régime général, y compris du FSV, à cette date.

Toutefois, la révision de la trajectoire de retour à l’équilibre, et le report de cet objectif au-delà de 2017 conduiront l’ACOSS à supporter un déficit dont le transfert à la CADES n’est pas prévu. Fin 2018, l’ACOSS devrait encore gérer 28,5 milliards d’euros de déficit, d’après les prévisions pluriannuelles figurant à l’annexe B.

Comme indiqué dans le commentaire de l’article 26, si l’on veut éviter un report de l’échéance de l’amortissement de la dette sociale au-delà de 2024, il faudrait transférer dès 2015 et chaque année les déficits de l’ACOSS vers la CADES, en lui attribuant les financements nécessaires (c’est-à-dire une hausse de la CRDS de l’ordre de 0,07 point par tranche de 10 milliards, d’après les calculs de la CADES en 2014).

*

* *

La Commission examine l’amendement AS17 de M. Jean-Pierre Door.

M. Jean-Pierre Door. Je reviens en quelques mots sur l’article 21, avant le fameux transfert de charges dont le rapporteur semble satisfait. Nous persistons à dire qu’il s’agit d’une simple acrobatie budgétaire entre le PLFSS et le PLF et d’une véritable supercherie, contraire à la loi organique que vous aviez pourtant vous-même votée. Vous étiez favorables, en effet, à ce que toutes les exonérations soient intégralement compensées par des recettes nouvelles.

En l’espèce, il s’agit d’un simple transfert à fonds perdus, puisqu’on ne sait pas comment les 4,3 milliards d’euros seront financés par le budget de l’État – à moins que le rapporteur, la ministre ou le secrétaire d’État chargé du budget ne nous le dise prochainement.

C’est pourquoi nous proposons de supprimer les alinéas 29 à 32, qui puisent à la même inspiration que l’article 21.

M. Jean-Pierre Barbier. Vous comprendrez, mes chers collègues, que nous ne puissions avoir confiance dans les solutions que vous proposez pour redresser les finances de notre pays. Démontrez-nous, monsieur le rapporteur, que nous sommes de mauvaise foi en nous apportant, lorsque nous débattrons du même sujet dans l’hémicycle la semaine prochaine, une fois que la première partie du PLF aura été examinée, la preuve de l’économie réalisée. Aujourd’hui, vous nous dites seulement que vous allez faire financer une dépense transférée par un budget déjà fortement déficitaire. Nous ne voyons vraiment pas comment vous allez faire.

M. Michel Issindou. Le budget de l’État a sa logique et ses équilibres. Le transfert existe, et il sera compensé par les économies que doit faire l’État. Celui-ci a choisi d’assumer entièrement cette dépense pour que la sécurité sociale ne creuse pas son déficit. Vous avez tout loisir, monsieur Barbier, d’aller consulter le projet de loi de finances.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Il n’y a pas de mauvaise foi à dire que les allégements contenus dans le pacte de responsabilité sont compensés : il existe différentes façons de le faire. Qu’il s’agisse de recettes supplémentaires ou de dépenses transférées, le résultat est le même : les pertes de recettes de sécurité sociale liées au pacte de responsabilité seront intégralement compensées.

Le déficit du budget de l’État continuera à diminuer, même si cette diminution, comme celle du déficit de la sécurité sociale, est ralentie par rapport aux objectifs. Mais, à la question, que vous avez posée tout au long de cet été, de savoir si les pertes de recettes de sécurité sociale seraient compensées, la réponse est oui.

Je suis défavorable à l’amendement.

M. Jean-Pierre Door. Si les recettes du PLFSS passent dans le PLF, nous allons finir par nous demander à quoi sert le PLFSS et s’il ne serait pas préférable de supprimer sa partie recettes pour la transférer au PLF !

Monsieur le rapporteur, nous sommes tous les deux membres du Haut Conseil du financement de la protection sociale. Jamais nous n’y avons vu pratiquer ce genre de tuyauterie ! Lorsque l’on veut compenser des exonérations de charges, il faut baisser le coût du travail, nous en sommes tous d’accord, et il y a d’autres solutions pour ce faire. Il y a la TVA sociale, dont il faudra bien accepter de débattre un jour. Il y a les autres taxes, les impôts, la CSG, etc. Mais jamais, au grand jamais, on n’a vu un transfert du type de celui qui nous est présenté, et que le budget de l’État devra bien compenser de son côté. Nous voulons savoir où sont passés 4,5 milliards d’euros, et j’attends une réponse la semaine prochaine, car je pense que vous-même ne le savez pas aujourd’hui !

M. Gérard Bapt, rapporteur. L’argumentation de M. Door est extraordinaire. Il commence par nous demander où sont passées les recettes de la sécurité sociale. Mais ce ne sont pas des recettes qui sont transférées au budget de l’État : ce sont des dépenses ! M. Door assiste régulièrement aux réunions du Haut Conseil du financement de la protection sociale, où l’on débat de la prise en charge des dépenses en distinguant entre les dépenses de solidarité, que les partenaires sociaux considèrent comme devant relever du budget de l’État, et les dépenses assurantielles, qui sont gagées sur des cotisations et relèvent du budget de la protection sociale. Le fait que des dépenses puissent aller d’un côté ou de l’autre, selon que l’on considère qu’elles relèvent du domaine assurantiel ou de la solidarité, n’est donc pas nouveau, puisque cela est régulièrement discuté lors des réunions du Haut Conseil, et je suis désolé que M. Door ne s’en aperçoive que ce soir !

L’engagement du Gouvernement, que nous lui avons demandé par un vote unanime de l’Assemblée nationale, est tenu. Les dépenses pour la sécurité sociale sont intégralement compensées.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 28 et l’annexe B sans modification.

Après l’article 28

La Commission examine l’amendement AS19 de Mme Michèle Delaunay.

Mme Michèle Delaunay. En 2006, l’Institut national du cancer a demandé à deux auteurs issus du milieu académique de réévaluer une étude qu’ils avaient publiée, concernant le coût sanitaire et social du tabac. Cette réévaluation a été reprise par la Cour des comptes en 2012 et par les rapports de notre collègue Jean-Louis Touraine et de notre ancien collègue Yves Bur. Les chiffres sont spectaculaires : le coût sanitaire et social du tabac s’élève à 47,7 milliards d’euros, soit trois points de PIB, soit encore 742 euros par Français, fumeur ou non.

La Cour des comptes dit elle-même que ces dépenses considérables doivent être recalculées de manière plus précise, mais elle n’en conteste pas le caractère considérable. Ces quelque 50 milliards annuels nous privent de toute marge de manœuvre en matière de sécurité sociale. C’est vrai pour les dépenses de santé, c’est vrai pour les molécules nouvelles, c’est vrai aussi pour la compensation de la perte d’autonomie. Nous sommes pieds et poings liés.

Mon amendement vise à fixer les prix du tabac en tenant intégralement compte de cet énorme surcoût. Je dis bien surcoût, car l’on doit évidemment soustraire de ces 47,7 milliards d’euros les 13 milliards d’euros de droits de consommation que rapporte le tabac ainsi que, sans vouloir faire de mauvais esprit, le montant des pensions des 73 000 personnes qui meurent chaque année à cause du tabac avant même – dans leur immense majorité – de pouvoir profiter de leur retraite. Les gens qui travaillent avec la Chine disent d’ailleurs que ce pays, qui aurait eu la capacité d’interdire le tabac à l’intérieur de ses frontières, s’en est sciemment gardé afin de réduire le « péril gériatrique » qui le menaçait. Je pense que ce n’est pas totalement faux.

Aujourd’hui, il serait irresponsable de ne pas prendre en compte ce coût sanitaire et social dans la fixation des prix du tabac. J’ai travaillé avec Gérard Bapt sur le bisphénol et, alors que nous n’avions en la matière que de fortes présomptions, elles ne nous en ont pas moins amenés à prendre des mesures drastiques. Or, y a-t-il un autre produit que le tabac qui tue un consommateur sur deux ?

Je connais les deux critiques principales qui seront faites à cet amendement. On me dira d’abord qu’il y a bien d’autres produits toxiques, au premier rang desquels l’alcool. C’est vrai, mais il faut bien commencer par un bout. En outre, la toxicité de l’alcool est moins facile à cibler que celle du tabac, qui est la drogue à la fois la plus toxique et la plus addictogène.

Une seconde critique consiste à dire qu’on ne peut pas le faire si les autres pays ne le font pas et que, si les pays européens, en particulier, ne le font pas en même temps que nous, il y aura de la contrebande. Mais il faut bien qu’un pays commence. Et je crois pouvoir vous dire que le premier pays qui évoquera le coût sanitaire et social global du tabac et qui fixera son prix en fonction de ce coût sera suivi, car les autres pays sont, eux aussi, plombés par l’ampleur des dégâts.

Je ne vous ai pas parlé de l’aspect humain, car je crois que ce dont nous devons parler aujourd’hui, à un moment où les budgets sont incroyablement contraints, ce sont des 50 milliards d’euros qui nous filent chaque année entre les doigts parce que nous ne sommes pas assez courageux.

M. Jean-Louis Roumegas. Même si nous ne le faisons qu’à l’occasion d’un amendement, je me réjouis que nous rouvrions le débat sur le tabac. J’anime un groupe de travail contre l’ingérence de l’industrie du tabac, auquel participe le Comité national contre le tabagisme (CNCT). Les mesures que nous proposons vont dans le même sens que l’amendement proposé. Si le prix du tabac doit être multiplié par trois, encore faut-il le faire d’un coup pour que cela produise un effet dissuasif. Car, en échelonnant cette hausse, le législateur en diluerait les effets, comme le souhaite d’ailleurs l’industrie du tabac, les consommateurs s’habituant par palier aux nouveaux prix.

En matière de lutte contre la contrebande, je regrette que l’amendement de notre collègue Laurent Grandguillaume sur la traçabilité des produits, pourtant adopté en première lecture par notre assemblée, n’ait pas été repris par le Gouvernement, de sorte que l’industrie reste maîtresse de cette traçabilité, juge et partie en quelque sorte.

À moyen terme, la hausse des prix devrait permettre de diminuer le coût sanitaire et social du tabac. Pour 18 milliards d’euros qu’il rapporte en taxes, il engendre en effet un coût direct de 47 milliards d’euros, sans même compter les coûts indirects dans la sphère privée, telles les dépenses induites par l’absentéisme.

M. Denis Jacquat. Le Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques (CEC) de l’Assemblée nationale nous a chargés l’an dernier, Jean-Louis Touraine et moi, d’un rapport sur les politiques publiques de lutte contre le tabagisme. Il l’a adopté à l’unanimité. Nous assurons désormais le suivi de la question. Les chiffres qui sont avancés sont exacts. Les ressources liées au tabac s’élèvent bien à 15 milliards d’euros, tandis que le coût induit s’établit à quelque 45 milliards d’euros, soit le triple. Nous l’avions écrit dans notre rapport, pour mieux combattre l’idée reçue que rappelle l’exposé sommaire de l’amendement, à savoir que les fumeurs « rapporteraient » plus à l’État qu’ils ne coûtent.

De nombreux textes répriment le tabagisme. La loi Evin, excellente à cet égard, fut suivie par le décret Bertrand interdisant de fumer dans les lieux publics. Leur application systématique réduirait encore la consommation de tabac.

Mais d’autres problèmes se posent désormais. La France a le triste privilège de connaître, en Europe, le taux plus élevé de femmes enceintes continuant de fumer durant le dernier trimestre de leur grossesse, et ce taux est du reste en augmentation. Les relevés opérés dans les voitures font également apparaître que le taux d’acide nicotinique y est élevé, notamment sur les sièges arrière. Aussi faudrait-il y interdire la consommation de tabac quand des enfants de moins de douze ans y sont assis.

Si les textes actuels sont plutôt bien appliqués, les propositions nouvelles peinent à trouver des relais. Certes, le président de la République a lancé un plan cancer, tandis que la ministre Marisol Touraine a récemment présenté un programme de réduction du tabagisme. Le paquet de cigarettes coûtera également bientôt 30 centimes d’euros supplémentaires. Mais les effets de la réglementation se font parfois attendre. Ainsi, en Australie, l’imposition du conditionnement neutre au 1er décembre 2012 n’a pas produit de résultats probants, bien que le prix du paquet de cigarettes soit prohibitif : 15 euros ! Au contraire, la consommation de tabac a même augmenté.

Je suis surpris que l’on anticipe, en cas de hausse des prix, une baisse de la consommation, sans prévoir la hausse concomitante des achats transfrontaliers, comme il est aisé d’en faire en Alsace ou à Metz. La contrebande et la contrefaçon sont également à prendre en compte, les cigarettes produites en Europe de l’Est s’écoulant à 1,40 euro seulement le paquet.

Je suis favorable à la lutte contre le tabagisme, mais je ne veux pas d’une lutte en ordre dispersé telle que nous l’observons aujourd’hui. Je déplore le manque de politique cohérente en ce domaine. Quelle est, au demeurant, la position du gouvernement sur les deux amendements de Mme Delaunay ? Je rappelle que nous en avons déjà examiné à plusieurs reprises, qui ressemblaient beaucoup au deuxième.

M. Arnaud Robinet. Madame Delaunay, vous n’invoquez que des raisons budgétaires et sociales. Si votre amendement était adopté, le prix du fameux paquet à l’effigie du cow-boy passerait de 7 euros à… 21 euros ! Je suis persuadé que cela aurait un effet dissuasif sur les ventes de tabac, mais non sur la consommation…

Mme Michèle Delaunay. Une hausse limitée à 6 % ne sert à rien !

M. Arnaud Robinet. De telles mesures ne font qu’augmenter la contrebande. J’y suis totalement opposé. Il faut au contraire miser sur la prévention, dès le collège ou l’école élémentaire, pour éclairer les jeunes sur les méfaits du tabac.

Quant à l’interdiction de fumer en voiture, c’est infantiliser les automobilistes, outre qu’il s’agit d’une mesure liberticide dont je ne veux pas. Contre la répression, je choisis la prévention.

M. Dominique Tian. Cet amendement est excessif. Il aurait pour résultat, non de dissuader les fumeurs, mais de faire exploser le marché parallèle, car nous sommes incapables de lutter efficacement contre les importations illégales. Dans ma ville, vous trouvez des cigarettes de contrebande à tous les coins de rue.

Dans le même temps, les élus peinent à financer la médecine préventive en milieu scolaire. Les infirmières ne sont pas assez nombreuses dans les établissements. Le taux de suicide chez les jeunes est parmi les plus élevés d’Europe et la consommation d’alcool explose. Quant à la drogue, le gouvernement veut dépénaliser le cannabis et envisage même l’ouverture de salles de shoot.

Madame Delaunay, votre amendement n’est pas sérieux. Vous ne faites que sanctionner les citoyens légalistes qui achètent leurs cigarettes chez les buralistes.

M. Élie Aboud. Aucun d’entre nous n’est contre la lutte contre le tabagisme. Mais comment obtenez-vous le chiffre de 35 milliards d’euros auquel vous évaluez le coût sanitaire et social non compensé par les ressources actuellement tirées du tabac ? Certes, comme ancienne ministre, vous avez le sens des responsabilités et vous vous référez à des rapports qui ont été publiés, mais je m’interroge sur la méthodologie. Le coût tel que vous l’estimez inclut-il, par exemple, celui des incendies causés par la cigarette, ou encore les fonds nécessaires à la préventologie ? Un coût global de 47 milliards d’euros me paraît énorme.

Mme Michèle Delaunay. Ces études sont disponibles pour qui veut les lire.

Mme Isabelle Le Callennec. Je suis très séduite par l’idée d’une pleine compensation du coût complet du tabagisme. Sans doute ne sera-t-elle pas adoptée, mais il faut employer tous les moyens pour lutter contre ce fléau. La prévention fait l’objet de débats depuis des années, et nous devons trouver de meilleurs moyens d’alerter les jeunes des dangers de la cigarette, car ils commencent de plus en plus tôt à s’y adonner, tandis que l’idée persiste, dans le grand public, que le tabac « rapporte » à l’État, comme vous le déplorez dans votre exposé sommaire.

Étant donné les règles de recevabilité financière imposées aux amendements des parlementaires, ceux-ci sont très souvent gagés par des hausses des droits de consommation sur le tabac. Aussi aimerais-je savoir quel est l’impact réel de ces hausses, une fois additionnés tous les amendements ainsi gagés.

Mme Michèle Delaunay. Notre collègue Robinet me reproche de ne présenter que des arguments financiers. Si je n’aborde pas les arguments d’humanité, c’est parce qu’ils sont à la fois trop faciles et trop terribles. Je voudrais pouvoir lui montrer ce film qui montre un patient souffrant d’un cancer du poumon avancé, et dont les douleurs ne peuvent faire l’objet de soins palliatifs.

L’argument financier, étonnamment, est moins souvent invoqué. J’ai ainsi constaté que, sur les réseaux sociaux, l’idée est couramment répandue que « le tabac rapporte tellement à l’État qu’il ne veut rien faire ». Quant à la prévention, elle se pratique depuis des années, sans guère de résultats puisque les jeunes filles n’ont jamais été aussi nombreuses à fumer, espérant contenir ainsi toute prise de poids. La prévalence du cancer du poumon a doublé chez les femmes au cours des années récentes.

Je peux m’avancer jusqu’à vous dire que le gouvernement sera bien content si mon amendement est adopté grâce au concours de députés des deux bords. La formulation retenue pour le calcul des prix nouveaux demeure ambiguë et générale : « de manière à compenser le coût sanitaire et social [du tabac] ». Elle ne recouvre pas forcément un triplement des tarifs. Un doublement serait déjà une avancée. La moitié des dégâts sanitaires provoqués par le tabac seraient ainsi couverts.

Mme Martine Pinville. Il y a diverses manières d’aborder le tabagisme. À côté de l’approche curative, la politique publique de la prévention joue un rôle, car les compétences psycho-sociales, comme celles qui permettent de refuser la cigarette, le tabac, les drogues, se construisent avant l’âge de dix ans. C’est pourquoi je rejoins notre collègue Dominique Tian au sujet des infirmières scolaires, et compte sur son soutien lorsque nous examinerons le futur projet de loi sur la santé.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Nous sommes tous d’accord, je le pense, sur les dégâts sanitaires et sociaux dus au tabac. Encore oublie-t-on parfois, parmi les affections dont il est la cause, les maladies oto-rhino-laryngologiques, ainsi que son incidence sur le cancer de la vessie, du sein, mais aussi de la peau. Aussi le programme lancé par Mme Marisol Touraine est-il extrêmement large, incluant, à l’instar de la Grande-Bretagne, l’interdiction du tabac en voiture quand des enfants comptent parmi les passagers.

Mais la prévention ne suffit pas. Des clips chocs peuvent rester sans effet. La persistance, voire la progression, du tabagisme durant la grossesse en témoigne. La proposition de notre collègue Michèle Delaunay est fondée sur l’idée que la société ne connaît pas le coût réel du tabac, idée dont je note qu’elle est partagée par notre collègue Isabelle Le Callennec.

Louable dans l’intention, la proposition pèche quant à ses effets prévisibles, qui seraient disproportionnés. Elle mérite néanmoins d’être retenue pour contribuer à conduire une évaluation plus exacte du coût réel du tabac. Nous pourrions demander au Gouvernement de confier à l’École d’économie de Toulouse, récemment récompensée par le prix Nobel, qui fasse le point sur ces coûts.

M. Denis Jacquat. Ce type de documents existe déjà !

Mme Michèle Delaunay. Je suis prête à retirer l’amendement, afin d’éviter qu’il ne soit rejeté, mais je le présenterai à nouveau en séance publique. Quant à l’idée d’un rapport de réévaluation des coûts du tabac, j’y avais songé, mais on m’avait opposé qu’une telle demande constituerait un cavalier législatif.

M. Gérard Bapt, rapporteur. En l’acceptant, la ministre s’impliquerait activement dans la lutte contre une certaine désinformation de l’opinion publique.

L’amendement est retiré.

La Commission examine ensuite l’amendement AS21 de Mme Michèle Delaunay.

Mme Michèle Delaunay. L’autre amendement que je présente sur le même sujet est plus facile à appliquer. Il tend à porter les taux de la part proportionnelle et de la part spécifique au même niveau sur les cigares et cigarillos que sur les cigarettes, l’incidence sur le cancer de la bouche ne variant que peu d’un produit à l’autre. La fiscalité y gagnerait en rationalité.

M. Denis Jacquat. Nous avions déjà examiné des amendements similaires les années passées. Je fais miens les propos de notre collègue Martine Pinville sur la prévention, mais il semble que la « grande » loi de santé publique qui nous a été annoncée ait fait place à une simple « loi de santé », avec un volet de santé publique… Je crains vraiment que la montagne n’accouche d’une souris.

Mme Martine Carrillon-Couvreur, présidente. Nous aurons l’occasion d’en reparler, car le projet de loi nous sera transmis très prochainement.

M. Francis Vercamer. J’étais d’accord, sur le fond, avec le précédent amendement, mais je crains qu’il ne demeure un vœu pieux. Aussi ma préférence va-t-elle à l’égalisation des niveaux de taxation entre les différents produits du tabac, car la mesure a l’avantage d’être plus concrète et plus formalisée.

M. Élie Aboud. Je suis également favorable à l’amendement, mais l’omission de la cigarette électronique n’est-elle pas fâcheuse ?

M. Jean-Pierre Door. Le débat que nous menons est vieux de plusieurs années. Notre collègue Yves Bur l’a mené souvent, et de manière fort combative ! Du fait de ma profession, je ne peux qu’adhérer à cet amendement.

Mais que recouvre exactement la différence entre taux spécifique et taux normal ? Si le premier pénalise le producteur, il convient en effet de l’augmenter, car c’est au stade de la production que se trouvent les fauteurs d’accidents cardio-vasculaires.

M. Jean-Louis Roumegas. J’approuve cet amendement, qui met en évidence des vérités de bon sens. On ne peut que se demander pourquoi cet alignement n’a pas encore eu lieu.

Le programme lancé par la ministre va également dans le bon sens, en imposant le conditionnement neutre, en interdisant le tabagisme en voiture en présence d’enfants, et même le « vapotage » sur le lieu de travail, car il peut être une première étape vers la consommation de tabac, et non pas forcément une sortie du tabagisme.

D’autres mesures, réclamées par les associations, se font attendre, notamment dans le domaine du pilotage de la politique de la santé, qui fait la part trop belle aux services de Bercy, au motif que les taxes relèvent de leur champ de compétence. C’est au ministère de la Santé qu’il revient d’être chef de file dans ce domaine.

Je crois également qu’il faudrait mettre un terme à l’auto-« blanchiment » auquel se livre l’industrie du tabac à travers le financement d’œuvres et d’événements culturels qui permettent à ses représentants de plastronner aux côtés de ceux des pouvoirs publics lors de l’inauguration. On fait semblant d’agir, alors qu’on se complaît dans la situation actuelle, tandis que le tabagisme continue de progresser en France, notamment chez les femmes et les jeunes.

Mme Michèle Delaunay. Vous avez raison, monsieur Aboud, la cigarette électronique n’est pas totalement innocente, puisqu’elle contient de la nicotine, mais elle est actuellement plus utile que nocive car elle permet à nombre de personnes de se discipliner pour arrêter de fumer. Le professeur Dautzenberg considère qu’elle est 250 fois moins chargée en nicotine que la cigarette classique.

Qu’en est-il des taxes spécifiques ? Leur fixation dépend de considérations de production, mais aussi de pressions que je ne peux établir de manière certaine.

M. Olivier Véran. L’amendement est intéressant, car il n’est pas logique d’avoir des fiscalités différentes sur des tabacs de même toxicité, mais nous avons déjà eu ce débat sans trouver la solution. Il serait utile de connaître les montants en jeu en matière de rentrées fiscales et de conséquences pour l’industrie concernée.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Avez-vous ces éléments, madame Delaunay ?

Mme Michèle Delaunay. Je n’ai pas d’étude d’impact.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Un amendement semblable a déjà été présenté par Mme Fraysse, sans parler de M. Bur, que j’ai croisé lors de la conférence de presse de Mme Touraine à l’occasion de la présentation du plan de lutte contre le tabagisme, et qui m’a questionné sur nos intentions en matière de prix. À ce stade, nous sommes toujours en discussion avec le Gouvernement. De deux choses l’une : soit nous retenons l’idée de M. Véran, ce qui peut inciter le Gouvernement à prendre une décision ; soit l’amendement est retiré, quitte à ce qu’il soit redéposé lors de la réunion tenue en application de l’article 88 si le Gouvernement ne réagit pas.

Mme Michèle Delaunay. Je préfère le retirer et le représenter dans l’hémicycle plutôt que de voir notre Commission le rejeter.

M. Élie Aboud. Elle l’adopterait !

Mme Michèle Delaunay. Songez que le tabac tue 200 personnes chaque jour, 73 000 personnes par an, c’est-à-dire plus que la population d’une ville comme Pau. Notre Parlement serait vidé en trois jours !

Mme Martine Pinville. Je partage l’avis du rapporteur, qui préconise un temps de concertation avec le Gouvernement.

Mme Isabelle Le Callennec. Les recettes supplémentaires viendraient-elles alimenter le budget de la sécurité sociale, ou celui de l’État ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. Actuellement, environ 98 % des droits sur le tabac sont dirigés vers le budget de la sécurité sociale.

L’amendement AS21 est retiré.

La Commission adopte la troisième partie du projet de loi modifiée.

QUATRIÈME PARTIE
DISPOSITIONS RELATIVES AUX DÉPENSES POUR L’EXERCICE 2015

TITRE VI
DISPOSITIONS RELATIVES À LA GESTION DES RÉGIMES OBLIGATOIRES DE BASE ET DES ORGANISMES CONCOURANT À LEUR FINANCEMENT AINSI QU’AU CONTRÔLE ET À LA LUTTE CONTRE LA FRAUDE

Avant l’article 65

La Commission examine l’amendement AS75 de M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. Je présenterai en même temps mon amendement AS43, qui est de la même teneur.

Les fraudes aux cotisations sociales ont atteint, selon les estimations, de 20 à 25 milliards d’euros en 2012, doublant ainsi en douze ans. En matière d’économies, la Cour des comptes préconise un effort sur les dépenses plutôt que la création de nouveaux prélèvements. Dans cet esprit, mes amendements tendent à élargir la base de données des informations disponibles, en complément du répertoire national commun de protection sociale (RNCPS), afin d’améliorer la lutte contre la fraude.

M. Gérard Bapt, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Le droit de communication oblige déjà les fournisseurs d’énergie et les opérateurs de téléphonie à transmettre aux organismes de sécurité sociale les informations demandées, mais au cas par cas et non via un fichier ouvert en permanence. Cette solution, qui satisfait amplement vos amendements, me semble plus prudente.

M. Francis Vercamer. Je maintiens tout de même l’amendement AS75.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement AS75.

L’amendement AS43 est retiré.

Article additionnel avant l’article 65

Rationalisation de l’organisation informatique de la branche famille

La Commission passe à l’amendement AS261 du rapporteur.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Selon le rapport annuel de la Cour des comptes sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, paru en septembre 2012, la gouvernance du système d’information de la branche famille manque de clarté et de pilotage, cependant que la dispersion de ses structures en quatorze entités et l’éclatement des missions nuisent à l’efficience de la branche famille. L’amendement AS261 tend à rationaliser l’organisation de ce système d’information, avec une direction informatique unique au sein de la Caisse nationale des allocations familiales, qui deviendrait ainsi opérateur de service informatique pour la branche.

Cette nouvelle organisation concrétise ce que nous avons obtenu de la part de la direction nationale de la CNAF : j’étais à l’origine de cette demande, mais il faut rendre hommage à M. Morange et M. Germain, alors coprésidents de la Mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale, qui, passez-moi l’expression, avaient mis le couteau sous la gorge du président de la CNAF. Suite à un appel d’offres, le système propriétaire « main frame » a été remplacé par un système ouvert beaucoup plus réactif et moderne, qui permet un pilotage unique – vœu déjà formulé par la Cour des comptes –, mais également une économie de gestion pérenne de 20 millions d’euros par an.

M. Pierre Morange. M. Bapt, M. Germain et moi avions en effet ferraillé sur ce sujet. Les établissements publics sont souvent captifs de ces systèmes d’exploitation « main frame » très lourds, installés dans les années soixante-dix et quatre-vingt. En optant pour un système ouvert, le coût pour la branche famille a été ramené d’environ 30 ou 35 millions d’euros à quelque 10 ou 15 millions ; l’extension de ce choix à de nombreux autres établissements publics générerait une économie plus substantielle encore.

La Commission adopte l’amendement.

Article 65
(art. L. 114-17 du code de la sécurité sociale)

Proportionnalité des sanctions prononcées
en cas de fraude aux prestations famille et vieillesse

Cet article vise à permettre aux caisses de sécurité sociale de prononcer des sanctions en rapport avec la gravité des faits reprochés. Il vise, d’une part, à diminuer le seuil minimal des pénalités financières et, d’autre part, à introduire des sanctions spécifiques pour les cas de réitérations d’infractions ou d’obstacles à contrôle, afin d’éviter que les organismes n’en soient réduits soit à ne retenir que de simples avertissements, soit à l’inverse à mettre en œuvre des sanctions parfois exagérément lourdes comme la suspension du service des prestations.

Ces mesures ont pour objectif de garantir l’effectivité des sanctions prononcées.

1.  Un panel de sanctions inadapté à la diversité des situations

Les personnes ou organismes qui méconnaissent les dispositions du code de la sécurité sociale peuvent se voir appliquer une pénalité financière en application des articles L. 114-17, L. 162-1-14, L. 162-1-14-1 et L. 162-1-14-2 du code de la sécurité sociale. Ces mêmes inobservations du code de la sécurité sociale peuvent donner lieu à une demande par la caisse de sécurité sociale de remboursement des sommes indûment perçues.

L’article L. 114-17 fixe les règles relatives aux pénalités financières pour les organismes d’assurance vieillesse et famille. Le tribunal des affaires de sécurité sociale est compétent pour la contestation des pénalités comme celle de leur recouvrement.

a.  Faute de sanction proportionnée, de simples avertissements sont prononcés

Le I de l’article L. 114-7 dispose que le montant de la pénalité est fixé en fonction de la gravité des faits, dans la limite de deux fois le plafond mensuel de la sécurité sociale. Quatre faits peuvent donner lieu à des sanctions :

– l’inexactitude des déclarations faites pour le service des prestations ;

– l’absence de déclaration d’un changement de situation ;

– l’exercice d’un travail dissimulé par le bénéficiaire de prestations versées sous conditions de ressources ou de cessation d’activité ;

– les agissements visant à obtenir ou à tenter de faire obtenir le versement indu de prestations, même sans en être le bénéficiaire.

En cas de fraude, les pénalités sont augmentées. Le II de l’article L. 114-7 dispose que le montant de la pénalité ne peut être inférieur à un dixième du plafond mensuel de la sécurité sociale (soit 313 euros). En outre, la limite du montant de la pénalité prévue au I de cet article est portée à quatre fois le plafond mensuel de la sécurité sociale (12 516 euros). Dans le cas d’une fraude commise en bande organisée au sens de l’article 132-71 du code pénal, cette limite est portée à huit fois le plafond mensuel de la sécurité sociale.

La pénalité minimale, fixée par voie réglementaires, s’élève à un dixième du plafond mensuel de la sécurité sociale et la pénalité maximale à 12 516 euros.

En cas de fraude de faible gravité, les caisses se bornent souvent à prononcer un simple avertissement, la sanction minimale pouvant paraître trop élevée. En 2013, 6 709 avertissements ont été prononcés par les caisses d’allocations familiales. Ces avertissements ont un caractère peu dissuasif.

b.  Des pénalités inadaptées en cas d’obstacle à contrôle

Les caisses d’allocations familiales (CAF) et les caisses d’assurance retraite et de santé au travail (CARSAT) font face à un nombre important et croissant de situations d’obstacle à contrôle : en 2012, 14 % des contrôles sur place réalisés par les CAF (soit 28 000 cas sur la base d’environ 200 000 contrôles sur place réalisés en 2013) et 18 % de ceux conduits par les CARSAT ont été rendus difficiles ou empêchés. Concernant les contrôles sur pièces, le nombre de refus opposés aux contrôles réalisés par les CAF est de l’ordre de 100 000. Ces obstacles à contrôle prennent diverses formes : refus explicite, refus implicite lorsque l’assuré ne donne pas suite aux demandes de rendez-vous de l’agent de contrôle, non-communication d’informations ou de pièces justificatives, violences physiques ou verbales.

En cas d’obstacle à contrôle, l’article L. 161-1-4 du code de la sécurité sociale permet aux caisses de suspendre le service de la prestation qui fait l’objet du contrôle.

Toutefois, ce dispositif est inadapté lorsque l’allocataire bénéficie d’une aide au logement versée directement aux bailleurs, et sans effet en cas de contrôle sur le versement d’une prestation indue, lorsque l’allocataire n’a plus de droit ouvert à cette prestation.

Enfin, il peut sembler disproportionné quand il vise les bénéficiaires de minimas sociaux.

c.  La récidive est définie de façon trop restrictive

Enfin, l’article L. 114-17 du code de la sécurité sociale prévoit qu’en matière de fraudes, le montant des pénalités financières peut être doublé en cas de récidive.

Conformément à la définition de la récidive donnée par le code pénal, le doublement de la pénalité n’intervient qu’à des conditions restrictives : le caractère identique des faits et le prononcé d’une pénalité.

Du fait de la diversité des fraudes existantes, les organismes peuvent être confrontés à des fraudes caractérisées pour des situations différentes – fausse déclaration, omission de déclaration, fraude pour des prestations de nature différente… qui n’entrent donc pas dans le champ de la récidive au sens pénal.

L’étude d’impact indique qu’en 2013, la Caisse nationale des allocations familiales a identifié 695 cas représentant un montant total de prestations indûment versées de plus de 4,5 millions d’euros. Ce nombre correspond à des réitérations de fraude, quel que soit l’acte frauduleux réitéré : omission de déclaration, fausse déclaration, dissimulation de concubinage, faux et usage de faux et escroquerie.

1.  Le dispositif proposé

Afin de garantir la proportionnalité des sanctions prononcées et leur effectivité, il est proposé de mettre en place un dispositif de sanctions cohérent, plus adapté aux situations individuelles et utilisables par les organismes de recouvrement. Le présent article modifie l’article L. 114-17 du code de la sécurité sociale, proposant trois mesures.

a.  L’abaissement du seuil minimum de pénalités

Le du présent article modifie le II de l’article L. 114-17 précité, fixant le montant de la sanction minimale lorsque l’intention de frauder est établie à un trentième du plafond mensuel de la sécurité sociale, soit 104 euros actuellement.

En cas de fraude de faible gravité, la diminution du montant minimal de la pénalité facilitera le prononcé de sanctions financières qui auront un caractère plus adapté que dans le dispositif actuel où les caisses ont le choix entre une pénalité plus élevée et un simple avertissement.

À l’appui de la modification législative présentée, la Caisse nationale des allocations familiales envisage de diffuser un barème de sanctions aux CAF afin de permettre une meilleure qualification des sanctions et une aide à la décision au moment du prononcé des pénalités financières.

b.  La mise en place de sanctions en cas d’obstacle à contrôle

Le a) du 1° ajoute les obstacles à contrôle à la liste des quatre cas pouvant faire l’objet d’une pénalité – comme c’est déjà le cas dans les dispositifs de sanctions relatifs à la branche famille et au recouvrement des cotisations.

Ces obstacles peuvent être des actions comme des omissions, ayant pour objet de se soustraire ou de faire obstacle au contrôle. Les comportements caractérisant un obstacle à contrôle sont très précisément détaillés (refus de contrôle ou de communication d’informations ou de documents, réponse fausse ou incomplète, tardive, refus de se rendre à une convocation, etc.). Ainsi, les CAF et les CARSAT pourront prononcer des sanctions en cas d’obstacle à contrôle lorsque la possibilité de suspendre le versement de la prestation n’est pas adaptée.

c.  La mise en place d’un dispositif de sanctions renforcées en cas de réitération d’infractions

Le b) du 1° élargit la notion de récidive pour les manquements aux règles relatives aux prestations familiales et de la branche vieillesse. Ainsi, tout manquement réalisé en application de l’article L. 114-17 et ayant donné lieu à une sanction devenue définitive peut constituer le premier terme de récidive d’un nouveau manquement à cet article, dès lors que la première infraction constatée est devenue définitive. Ainsi, la situation n’a pas besoin d’être identique à la première pour être qualifiée de récidive. Il s’agit d’une réitération d’infractions, quelle que soit leur nature.

Cette mesure permettrait ainsi de doubler le montant des pénalités financières prononcées dans ce type de cas. La gravité des faits est prise en compte pour fixer le montant de la pénalité.

d.  L’impact financier des mesures proposées

L’impact financier attendu du présent article provient principalement de la création de la sanction pour obstacle à contrôle, et essentiellement pour la branche famille. Le gain résultera des sanctions pour obstacle à contrôle elles-mêmes ainsi que de l’augmentation consécutive du nombre de redressements.

L’étude d’impact estime à 6,5 millions d’euros le gain pour le régime général (en réalité seulement la branche famille) en 2015 et les années suivantes, dont :

– 5,6 millions d’euros résultant de l’augmentation du nombre de redressements dans les cas d’obstacle à contrôle ;

– 0,7 million d’euros résultant du prononcé de petites pénalités (3 500 pénalités par rapport aux 7 000 avertissements notifiés actuellement) ;

– 0,2 million provenant de la caractérisation des récidives ; la réitération d’infractions similaires n’étant actuellement pas définie, il est difficile d’en évaluer l’ampleur : le montant proposé est sans doute sous-évalué.

*

* *

La Commission se saisit de l’amendement AS107 de Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. Cet amendement, dont je ne suis pas sûre qu’il soit à sa juste place, tend à responsabiliser les holdings en les rendant passibles de pénalités en cas de fraude des sociétés qu’elles dominent. La mesure permettrait d’instaurer, au sein du groupe, des contrôles internes qui nous semblent de bonne pratique.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Outre qu’il n’est effectivement pas à sa place, l’amendement est satisfait par des dispositions législatives sur la responsabilité des donneurs d’ordre en matière de travail dissimulé, votées, me semble-t-il, avec le projet de loi de transposition de l’accord national interprofessionnel.

Votre amendement vise toutes les prestations, celles de la branche famille comme les retraites ; nous allons vérifier s’il est effectivement satisfait. D’ici là, je vous invite à le retirer, pour le réécrire afin de l’insérer au mieux dans le texte.

Mme Jacqueline Fraysse. D’accord.

L’amendement est retiré.

La Commission en vient à l’amendement AS199 de M. Stéphane Claireaux.

M. Stéphane Claireaux. Cet amendement vise à donner de nouveaux instruments de lutte contre les mouvements contestataires qui remettent en cause la légalité de la sécurité sociale. Depuis plusieurs années, ces mouvements, profitant des lourdeurs de la procédure pénale, incitent en effet de plus en plus d’assurés à se désaffilier, et nombreux sont ceux qui passent à l’acte.

Afin de raccourcir les délais de sanction, il pourrait être accordé au directeur de la caisse concernée le pouvoir de sanctionner immédiatement tout comportement tendant à refuser ou à remettre en cause l’affiliation obligatoire auprès d’un organisme de sécurité sociale.

Le champ de la lutte contre la fraude couvrirait ainsi l’affiliation au même titre que les cotisations ou les prestations. En introduisant dans le code de la sécurité sociale une sanction spécifique pour défaut ou refus délibéré d’affiliation, le législateur marquerait sa volonté de lutter sur tous les registres de la fraude à la sécurité sociale.

M. Gérard Bapt, rapporteur. M. Claireaux soulève un problème bien réel. Souvent évoqués sur telle ou telle radio « périphérique », ces mouvements, qui allèguent des directives européennes pour préférer des assurances privées au régime de la sécurité sociale, représentent en effet un vrai problème et concernent environ 300 personnes. Toutefois, son amendement donnerait un pouvoir de sanction pénale au directeur de l’Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (URSSAF). Je vous suggère donc de le retirer pour le revoir juridiquement d’ici à l’examen en séance.

Mme Isabelle Le Callennec. Qui est derrière ces mouvements contestataires ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. Des chefs d’entreprise, des irréductibles Gaulois, qui refusent le régime de la Sécurité sociale et prétendent s’affilier à une assurance privée en arguant du droit européen, ce qui donne lieu à des procédures interminables.

M. Stéphane Claireaux. N’étant pas à l’origine de cet amendement, je le maintiens.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 65 sans modification.

Article 66
(art L. 242-1-3 du code de la sécurité sociale et
art L. 725-12-2 [nouveau] du code rural et de la pêche maritime)

Régulation des déclarations à la suite d’un contrôle

Cet article vise à rétablir une égalité de traitement entre salariés en termes d’ouverture de droits à l’assurance vieillesse, en cas de non-paiement des cotisations sociales par leur employeur.

1.  La législation actuelle ne protège pas suffisamment les droits des salariés en cas de non-paiement des cotisations sociales par leur employeur

a.  Un double dispositif d’ouverture de droits à l’assurance vieillesse, source d’inégalités entre salariés

Les salariés dont l’entreprise a fait l’objet d’un redressement, que ce soit à la suite d’un contrôle comptable d’assiette ou d’un contrôle lié à la lutte contre le travail dissimulé, doivent voir leur situation régularisée pour que leurs droits à l’assurance vieillesse soient pris en compte.

Cette procédure a été introduite par l’article 12 de la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites créant l’article L. 242-1-3 du code de la sécurité sociale. D’une part, l’URSSAF doit informer les caisses d’assurance retraite et de la santé au travail (CARSAT) du paiement du redressement de cotisations établi pour l’entreprise. D’autre part, l’employeur doit transmettre à la CARSAT une déclaration faisant apparaître les montants des rémunérations individuelles rectifiés à la suite des contrôles réalisés, pour les salariés concernés.

Ainsi, les CARSAT ne peuvent procéder à la rectification des droits des salariés qu’une fois en possession de la déclaration rectificative établie par l’employeur et de l’information selon laquelle le redressement a été versé à l’organisme de recouvrement.

Ces dispositions lient donc la régularisation des droits à l’assurance vieillesse au paiement effectif des cotisations redressées par l’employeur, ce qui n’apparaît pas suffisamment protecteur des droits des salariés. En effet, certains redressements peuvent entraîner l’insolvabilité de l’employeur et exposent donc les salariés au risque de ne jamais voir leur situation régularisée.

En revanche, lorsqu’il n’y a pas de redressement, le versement des cotisations patronales n’est pas nécessaire. Le code de la sécurité sociale prévoit en effet que « sont également valables pour l’ouverture du droit et le calcul desdites pensions, les cotisations non versées, lorsque l’assuré a subi en temps utile, sur son salaire, le précompte des cotisations d’assurance vieillesse » (article R. 351-11). En conséquence, les salariés qui peuvent apporter la preuve d’un précompte sur leur rémunération bénéficient d’une alimentation de leurs droits, quand bien même les cotisations dues n’ont jamais été versées à l’organisme de recouvrement. Cela permet notamment de ne pas pénaliser les salariés d’entreprises en difficulté, dont les dirigeants ne se sont pas rendus coupables de fraude mais ne parviennent plus à régler les échéances de cotisations sociales.

b.  Une procédure déclarative peu respectée et ne protégeant pas suffisamment les droits des salariés

L’article L. 242-1-3 prévoit la responsabilité déclarative de l’employeur : ce dernier doit transmettre à la CARSAT un document rectifiant les données sociales pour les salariés concernés. Or, il apparaît qu’en pratique, lorsque cette déclaration modificative est faite, ce sont dans la majorité des cas les URSSAF qui procèdent à son élaboration et à son envoi, car elles disposent le plus souvent de toutes les informations nécessaires.

Cette procédure se révèle à la fois plus simple pour l’employeur et plus protectrice des droits des salariés en cas de mauvaise volonté de l’employeur (situation fréquente en cas de travail dissimulé) ou de disparition de l’entreprise.

1.  L’harmonisation des procédures devrait permettre de rétablir une égalité de traitement entre salariés

Le I du présent article modifie l’article L. 242-1-3 précité. Désormais, lorsqu’un redressement de cotisations sociales opéré par l’URSSAF (organisme mentionnée à l’article L. 213-1) ou la caisse générale de sécurité sociale dans les départements d’outre-mer (organisme mentionné à l’article L. 752-4) a une incidence sur les droits des salariés au titre de l’assurance vieillesse, ces organismes doivent transmettre les informations nécessaires aux CARSAT afin qu’elles procèdent à la rectification des droits des salariés concernés. La charge déclarative est donc transférée de l’employeur à l’URSSAF.

Par ailleurs, la prise en compte des droits vieillesse des salariés ne serait plus conditionnée au paiement du redressement par leur employeur.

L’article prévoit en revanche une exception en cas de constat de travail dissimulé (au sens des articles L. 8221-3 et L. 8221-5 du code du travail) faisant état d’une collusion entre l’employeur et le salarié. Dans cette situation, la rectification des droits des salariés concernés ne serait effective qu’à compter du paiement du redressement.

Ces nouvelles dispositions devraient rétablir une égalité de traitement entre les salariés, notamment entre ceux victimes de travail dissimulé et ceux qui sont confrontés aux difficultés financières de leur entreprise. Elles s’appliqueraient aux redressements notifiés à compter du 1er janvier 2015.

Le II du présent article procède à la même modification pour le régime agricole, avec l’insertion d’un nouvel article L. 7525-12-2 dans le code rural et de la pêche maritime.

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La Commission adopte l’article 66 sans modification.

Article additionnel après l’article 66
(art L. 114-12-1 du code de la sécurité sociale)

Intégration du montant des prestations
dans le répertoire national commun de la protection sociale

La Commission examine l’amendement AS3 de M. Pierre Morange.

M. Pierre Morange. Cet amendement, que l’on peut considérer comme de précision, fait suite à des travaux menés depuis le PLFSS pour 2007 sur le croisement des fichiers sanitaires et médico-sociaux avec ceux du fisc, afin de lutter contre la fraude sociale.

De tels échanges devaient logiquement embrasser l’ensemble des informations mais, dans les faits, le contrôle s’est cantonné à l’éligibilité des droits. Lors de la précédente législature, dans le cadre d’un rapport de la MECSS sur la fraude sociale, M. Mallot, M. Tian et moi-même avions souligné l’impérieuse nécessité d’inscrire les montants. Pour mémoire, cette fraude représente de 20 à 25 milliards d’euros, selon l’estimation même du Premier président de la Cour des comptes, qui insistait sur la nécessité de renforcer la lutte dans ce domaine. Il s’agit aussi, d’ailleurs, de lutter contre la fraude fiscale – qui pour sa part atteint de 60 à 70 milliards d’euros –, notamment par le dépistage des économies souterraines dans nos banlieues.

Mon amendement relaie les préconisations techniquement mises en œuvre par l’ancien Gouvernement, ainsi qu’une question écrite que j’avais adressée en 2013 au Gouvernement actuel pour l’informer du caractère opérationnel du dispositif ; il prévoit donc l’inscription du montant des prestations dans le RNCPS.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Cet amendement découle en effet des travaux de la MECSS, au sein de laquelle M. Morange siégeait alors au côté de M. Jean Mallot.

Un amendement sur le sujet avait été voté dans le PLFSS pour 2013, mais l’amendement de M. Morange tend à rendre plus contraignant le code de la sécurité sociale car les informations visées, qui doivent faire l’objet d’une demande, ne sont pas toujours accessibles dans le RNCPS. Je suis favorable à cette mesure de simplification.

La Commission adopte l’amendement à l’unanimité.

M. Pierre Morange. Huit années de travail ! (Sourires et applaudissements.)

Article additionnel après l’article 66
(art. L. 133-4-2 du code de la sécurité sociale)

Annulation des exonérations de cotisations en cas de travail dissimulé

La Commission en vient à l’amendement AS260 du rapporteur.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Cet amendement vise à permettre l’annulation des exonérations en cas de verbalisation pour travail dissimulé dans l’hypothèse, aujourd’hui non couverte, d’exonérations accordées après demande préalable.

Actuellement, toutes les exonérations sont annulées en cas de travail dissimulé, à l’exclusion de celles qui font l’objet d’une demande préalable. Ces exonérations, qui ne donnent lieu qu’à des vérifications de conformité sur pièces par les organismes de recouvrement, sont celles octroyées dans le cadre de l’aide aux chômeurs créateurs ou repreneurs d’entreprises (ACCRE), ou aux travailleurs indépendants qui, âgés de soixante-cinq ans pour les hommes et soixante ans pour les femmes, ont élevé au moins quatre enfants jusqu’à l’âge de quatorze ans. Pour les indépendants, les exonérations continuent donc de s’appliquer même en cas de fraude. Il est proposé de mettre fin à cette anomalie.

La Commission adopte l’amendement.

Elle adopte ensuite le titre VI modifié.

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La Commission adopte l’ensemble du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 modifié.

ANNEXE
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR

(par ordre chronologique)

Ø Caisse centrale de la Mutualité sociale agricole (CCMSA) – M. Gérard Pelhâte, président du conseil d’administration, M. Michel Brault, directeur général, et M. Christophe Simon, chargé des relations parlementaires

Ø Fédération des particuliers employeurs à domicile (FEPEM) – Mme Marie-Béatrice Levaux, présidente, et M. Adrien Dufour, chargé de mission au pôle Affaires publiques

Ø Mouvement des entreprises de France (MEDEF) – M. Claude Tendil, président de la commission Protection sociale, Mme Delphine Benda, directrice déléguée à la direction de la protection sociale, et Mme Émeline Touzet, chargée de mission à la direction des affaires publiques

Ø Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES) – M. Patrice Ract-Madoux, président du conseil d’administration, et Mme Geneviève Gauthey, inspectrice des finances publiques, responsable du budget et de la communication

Ø Table ronde réunissant des représentants de syndicats de salariés :

– Confédération française démocratique du travail (CFDT) – Mme Sonia Buscarini, MM. Alain Deluc et Philippe Le Clezio, secrétaires confédéraux

– Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC) – M. Jean-Michel Lebas, trésorier adjoint

– Confédération française de l’encadrement – Confédération générale des cadres (CFE-CGC) – M. Jean-François Gomez, délégué national secteur Protection sociale, et Mme Anne Bernard, chef du service Économie et protection sociale

– Force ouvrière (CGT-FO) – M. Jean-Marc Bilquez, secrétaire confédéral chargé du secteur de la protection sociale

– Confédération générale du travail (CGT) – M. Pierre-Yves Chanu, conseiller confédéral

Ø Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) – M. Jean-Louis Rey, directeur, et M. Alain Gubian, directeur financier

Ø Direction de la sécurité sociale (DSS) – M. Thomas Fatome, directeur, Mme Mathilde Delpy, chef du bureau de la synthèse financière et M. Jonathan Bosredon, chef de service, adjoint au directeur

© Assemblée nationale

1 () De 1,1 % hors tabac avant l’été à 0,5 %.

2 () Il convient en effet de tenir compte d’une correction de – 0,5 % au titre de 2013.

3 () Cette loi a prévu une augmentation progressive de la part déplafonnée des cotisations salariales et patronales, de 0,15 point en 2014 puis 0,05 point par an entre 2015 et 2017.

4 () En application de la loi organique n° 2010-1380 du 13 novembre 2010 relative à la gestion de la dette sociale.

5 () Voire 18 000 euros pour l’investissement dans une SOFICA et en outre-mer au titre du « Girardin » ; le « Malraux » échappe aussi au plafonnement.

6 () Par exemple, les personnes en difficulté exerçant une activité de réinsertion socioprofessionnelle : assiette égale à 40 % du SMIC horaire par heure d’activité lorsque la rémunération est inférieure à ce seuil (art. L. 241-12 du code de la sécurité sociale et arrêté du 31 mars 1994).

7 () Certains dispositifs d’assiettes forfaitaires sont fixés par un décret, voire par la loi : cotisation d’assurance vieillesse des détenus employés par l’administration pénitentiaire (art. R. 381-105 du code de la sécurité sociale), cotisations sur le pécule perçu par les compagnons d’Emmaüs (art. L. 241-12), ministres du culte (articles R. 381-88 et suivants).

8 () C’est-à-dire les professions assujetties de plein droit au régime général de la sécurité sociale, qu’elles soient salariées ou non, par exemple les vendeurs à domicile, les gérants de SARL qui détiennent mois de la moitié du capital, les artistes du spectacle et les mannequins, les assistantes maternelles, etc.

9 () Cass. soc., 24 mars 1994, n° 90-21.572.

10 () L’article 25 de la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006 a précisé que le recours subrogatoire des caisses doit s’exercer poste par poste sur les seules indemnités qui réparent les postes de préjudice qui ont été pris en charge par des dépenses effectives des caisses, à l’exclusion de ceux qui ont un caractère purement personnel. De plus, alors que les tiers payeurs disposaient d’un recours prioritaire sur la somme allouée en réparation de l’ensemble des préjudices soumis à recours, à la mesure des prestations versées, y compris en cas de réparation seulement partielle du préjudice subi par la victime, cet article a instauré un droit de préférence au profit de cette dernière.

11 () Art. L. 376-4 du code de la sécurité sociale.

12 () Les contrats sont dits solidaires et responsables lorsque l’organisme ne recueille pas d’informations médicales auprès de l’assuré au titre de ce contrat ou des personnes souhaitant bénéficier de cette couverture, que les cotisations ou les primes ne sont pas fixées en fonction de l’état de santé de l’assuré et que ces garanties respectent les conditions mentionnées à l’article L. 871-1 du code de la sécurité sociale.

13 () Cass. Civ. 2, 17 fév. 2011, n° 10-11980.

14 () Cass. Soc. 22 oct. 1970, n° 69-100.87.

15 () Cass. Civ. 2e, 24 janvier 2013, n° 11-22.585.

16 () Cass. Civ.2e, 10 octobre 2013, n° 1223.477.

17 () Les cotisations employeur au Fonds national d’aide au logement (qui appartient au budget de l’État) sont incluses dans le champ de la réduction dégressive de cotisations.

18 () En conséquence de cette mesure qui génère une diminution du rendement de la C3S à hauteur de 1 milliard d’euros en 2015, la loi de financement de la sécurité sociale rectificative a organisé l’intégration financière du régime social des indépendants (RSI) au régime général. La C3S assure en effet aujourd’hui l’équilibre financier du RSI. Afin de ne pas déstabiliser le financement de ce dernier, le texte propose de substituer à la recette issue de la C3S des dotations d’équilibre du régime général auquel le RSI sera donc financièrement adossé.

19 () La contribution solidarité autonomie de 0,3 % sur les salaires, versée par les employeurs en contrepartie de la suppression d’un jour férié, entre dans le champ des allégements de cotisations employeur prévus.

20 () Seules les exonérations forfaitaires patronales (1,50 euro par heure supplémentaire) pour les entreprises de moins de 20 salariés ont été maintenues.

21 () Depuis 2013, le plafond est en « brut », c’est-à-dire qu’il tient compte de l’immobilisation sur des comptes de secours de sommes empruntées au-delà des besoins journaliers pour pallier d’éventuels incidents, ainsi que des périodes de « surémission », notamment en amont des échéances des pensions de retraite.

22 () Pour plus de détails, se reporter à l’annexe 9 du PLFSS.

23 () Les déficits cumulés des branches maladie et vieillesse du régime avaient été repris par l’État au 31 décembre 2008.

24 () Décret n° 2011-1925 du 21 décembre 2011 et décret n° 2012-1435 du 20 décembre 2012.