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N° 2351

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 12 novembre 2014.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES SUR LE PROJET DE LOI ADOPTÉ PAR LE SÉNAT APRÈS ENGAGEMENT DE LA PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE, relatif à la désignation des conseillers prud’hommes,

PAR Mme Sylviane BULTEAU,

Députée.

——

Voir les numéros :

Sénat : 423 rect., 769, 770 (2013-2014) et T.A. 1 (2014-2015).

Assemblée nationale : 2296.

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 5

I. UNE RÉFORME DU MODE DE DÉSIGNATION DES CONSEILLERS PRUD’HOMMES NÉCESSAIRE À DEUX TITRES 6

A. UNE ÉLECTION SOUFFRANT D’UN TAUX D’ABSTENTION CONSIDÉRABLE MALGRÉ LES EFFORTS DES POUVOIRS PUBLICS 6

1. Un taux d’abstention exponentiel 7

2. Les efforts infructueux des pouvoirs publics 8

B. LA NOUVELLE DONNE DE LA REPRÉSENTATIVITÉ DES ORGANISATIONS SYNDICALES ET PATRONALES 9

1. Une représentativité fondée sur la mesure de l’audience 9

2. Le risque d’une concurrence entre les deux systèmes 10

II. LA SOLUTION SIMPLE ET ÉQUILIBRÉE PROPOSÉE PAR LE PROJET DE LOI 11

A. UNE RÉFORME CONFORME À LA CONSTITUTION ET PRÉSERVANT L’ÉQUILIBRE DE LA JURIDICTION PRUD’HOMALE 11

1. Les scénarios d’évolution envisagés par le rapport Richard 12

2. La solution retenue par le Gouvernement 13

B. UNE SOLUTION PRÉSENTANT DES AVANTAGES MULTIPLES 16

1. Un renforcement de la légitimité de l’institution prud’homale 16

2. Une diminution notable des coûts d’organisation 17

TRAVAUX DE LA COMMISSION 19

I. DISCUSSION GÉNÉRALE 19

II. EXAMEN DES ARTICLES 27

Article 1er Habilitation du Gouvernement à procéder par voie d’ordonnance à la réforme du mode de désignation des conseillers prud’hommes 27

Article 2 : Prorogation du mandat des conseillers prud’hommes actuellement en fonction 30

ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 35

INTRODUCTION

Renforcer la légitimité démocratique des conseils de prud’hommes, tel est l’objectif du présent projet de loi. Celui-ci vise à fixer un cadre rigoureux de rénovation du mode de désignation des juges prud’homaux, que devra respecter le Gouvernement dans l’élaboration de cette réforme qu’il propose de conduire par voie d’ordonnance.

La nécessité de cette réforme est reconnue par tous, comme le démontre l’adoption du projet de loi au Sénat, le 14 octobre dernier, en dépit du changement de majorité politique que vient de connaître la Haute Assemblée. En effet, les nouvelles règles régissant la représentativité des organisations syndicales et patronales, élaborées entre 2008 et 2014, impliquent de faire évoluer les modalités de désignation des juges prud’homaux.

C’est d’ailleurs l’édiction du nouveau cadre de la représentativité patronale, par la loi du 5 mars 2014 (1), qui a justifié les reports successifs et les modifications de fond ayant affecté ce projet de loi.

À l’origine, en effet, la réforme de la désignation des conseillers prud’hommes faisait l’objet de l’article 19 de l’avant-projet de loi relatif à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale. Cet article proposait d’habiliter le Gouvernement à procéder par ordonnance, afin qu’il substitue à l’élection prud’homale, une désignation des conseillers liée à l’audience des organisations. Était également prévu un régime transitoire de nomination pour les juges du collège des employeurs, jusqu’à la mise en place concrète du nouveau système de mesure de l’audience concernant les organisations patronales.

Au regard de l’importance de cette question concernant une juridiction de l’ordre judiciaire, le Gouvernement a finalement décidé de dissocier l’examen de cette réforme du projet de loi relatif à la formation professionnelle, pour lui consacrer un projet de loi spécifique comportant un article unique. Cet article unique reprenait, avec une rédaction améliorée, les dispositions de l’article 19 précité.

Ce projet de loi spécifique a été délibéré en Conseil des ministres le 22 janvier 2014, puis déposé le même jour à l’Assemblée nationale (2). Au vu du calendrier de travail très chargé de l’Assemblée, le Gouvernement a ensuite choisi de le retirer pour le redéposer, le 28 mars 2014, au Sénat (3).

Après concertation et consultation du Conseil supérieur de la prud’homie et du Conseil d’État, le Gouvernement a présenté au Sénat, le 16 juillet 2014, une lettre rectificative modifiant très sensiblement le projet de loi (4). Cette lettre rectificative scinde l’article unique en deux articles. L’article 1er conserve les dispositions initialement déposées s’agissant de la définition du périmètre de l’ordonnance, à l’exception du régime transitoire de nomination pour les juges du collège des employeurs qui se trouve supprimé, car l’article 2 propose une solution plus simple : celle de proroger le mandat des conseillers prud’hommes actuellement en fonction jusqu’au 31 décembre 2017 au plus tard.

C’est ce projet de loi rectifié qui a été soumis à la Commission des affaires sociales du Sénat le 23 juillet 2014, qui l’a adopté sans modification. Il a ensuite été discuté et adopté en séance publique par la Haute Assemblée, le 14 octobre dernier, avec une modification de précision. Il se trouve désormais soumis, dans le cadre de la procédure accélérée, à l’examen de l’Assemblée nationale.

I. UNE RÉFORME DU MODE DE DÉSIGNATION DES CONSEILLERS PRUD’HOMMES NÉCESSAIRE À DEUX TITRES

La réforme du mode de désignation des conseillers prud’hommes apparaît nécessaire à deux titres. Les élections prud’homales souffrent, tout d’abord, d’un taux d’abstention considérable, qui atteint la légitimité de cette institution, malgré les efforts importants accomplis par les pouvoirs publics pour combattre ce phénomène.

Ensuite, la nouvelle donne juridique de la représentativité des organisations syndicales et patronales, désormais fondée sur un critère d’audience, impose de revoir les règles de désignation des juges prud’homaux, afin d’éviter toute concurrence entre les deux systèmes.

A. UNE ÉLECTION SOUFFRANT D’UN TAUX D’ABSTENTION CONSIDÉRABLE MALGRÉ LES EFFORTS DES POUVOIRS PUBLICS

Aux termes de l’article L. 1421-1 du code du travail, le conseil de prud’hommes est une juridiction « élective et paritaire », composée en nombre égal de salariés et d’employeurs. Les juges prud’homaux ne sont donc pas des magistrats professionnels, mais des conseillers élus tous les cinq ans au suffrage universel direct, la moitié par les salariés, l’autre moitié par les employeurs. On en dénombre quelque 14 500, répartis dans 210 conseils de prud’hommes.

Malgré les mesures prises par les pouvoirs publics pour améliorer l’organisation de l’élection prud’homale, celle-ci souffre d’un taux d’abstention exponentiel, qui a atteint 74 % lors du dernier scrutin en date du 3 décembre 2008.

1. Un taux d’abstention exponentiel

Depuis 1979, année de la première consultation générale, le taux d’abstention aux élections prud’homales a presque doublé, passant de 37 % en 1979 à 74 % en 2008.

La progression de ce taux apparaît constante, comme le retrace le tableau ci-dessous, et préoccupante au regard de l’augmentation comparative du nombre d’inscrits. En effet, le nombre d’inscrits a notablement crû, passant de 13,7 millions en 1979 à 19,2 millions en 2008, tandis que le nombre de votants a, dans le même temps, diminué très fortement, passant de 8,5 millions à 4,8 millions.

ÉVOLUTION DU TAUX D’ABSTENTION AUX ÉLECTIONS PRUD’HOMALES DEPUIS 1979

 

1979

1982

1987

1992

1997

2002

2008

Taux d’abstention

37,93 %

42,20 %

54,88 %

60,43 %

66,39 %

67,65 %

74,37 %

Source : Ministère du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

Toutefois, la tendance au recul de la participation à ce scrutin n’est pas uniforme selon les collèges électoraux. En effet, si l’on observe une baisse continue du taux de participation chez les salariés, de 63,03 % en 1979 à 25,48 % en 2008, dans le collège des employeurs, le taux participation augmente de nouveau depuis 1997, passant de 20,88 % à 31,16 % en 2008, tout en demeurant inférieur au premier taux de 48,48 % obtenu en 1979. Le graphique ci-dessous compare ces deux évolutions contrastées.

ÉVOLUTION DU TAUX DE PARTICIPATION
AUX ÉLECTIONS PRUD’HOMALES PAR COLLÈGE

Source : Avis n° 2286-tome VI sur le projet de finance pour 2011, du 14 octobre 2010, de M. Francis Vercamer au nom de la Commission des affaires sociales.

2. Les efforts infructueux des pouvoirs publics

Face à l’érosion considérable du taux de participation, les pouvoirs publics ont déployé, élection après élection, un éventail de mesures visant à améliorer l’organisation de ce scrutin.

Ainsi, pour les élections de 1987, un système informatisé, centralisé au niveau national, a été créé, pour garantir l’exhaustivité et la fiabilité des listes électorales. Il faut rappeler ici, en effet, la complexité du scrutin prud’homal : l’ensemble des salariés, des employeurs et des demandeurs d’emploi forment le corps électoral de cette élection, qui a lieu ensuite par liste et à la représentation proportionnelle intégrale. L’électeur vote par collège, selon qu’il est salarié ou employeur, et par section, en fonction de l’activité qu’il exerce (agriculture, industrie, commerce, encadrement ou activités diverses). Plusieurs listes électorales doivent donc être constituées, pour chaque collège et par section.

Pour les élections de 1992, le système informatisé mis en place a été amélioré et des guides d’information à destination des acteurs institutionnels ont été élaborés. En effet, de très nombreux acteurs participent à l’organisation et à la tenue des élections prud’homales :

– les services de l’État, principalement la direction générale du travail et les préfectures, sont chargés de l’organisation générale et locale du scrutin ;

– les communes doivent établir les listes électorales, tenir les bureaux de vote et réaliser le dépouillement ;

– les partenaires sociaux constituent les listes de candidats et mènent campagne.

Pour les élections de 1997, un numéro vert a été instauré pour les administrations concernées et le public, et des sessions de formation ont été programmées pour les acteurs institutionnels. Pour les élections de 2002, des outils informatiques ont été mis en ligne pour les mairies, des bureaux de vote ont été implantés à proximité des lieux de travail, les conditions de vote par correspondance ont été assouplies, et les modalités de contestation des inscriptions électorales ont été simplifiées.

Ces efforts ont été poursuivis pour les élections de 2008, où plusieurs mesures fortes ont été prises, que rappelle l’encadré ci-dessous.

Les innovations introduites pour le scrutin de décembre 2008

Outre le report du scrutin de l’année 2007, déjà très chargée en élections politiques, à 2008, l’administration a pris trois séries de mesures pour parfaire l’organisation des dernières élections prud’homales et accroître la participation.

Tout d’abord, la simplification des règles relatives à la constitution des listes électorales a été poursuivie. D’importantes actions ont été menées telles que la fusion de la déclaration prud’homale avec la déclaration annuelle des données sociales, la mise en place d’un centre de traitement et d’un centre d’appel dédiés, et la détermination automatique de la section d’appartenance des salariés à partir du code de la nomenclature des activités françaises (code NAF) de leur établissement. Ces différentes opérations ont permis d’améliorer substantiellement la liste électorale du collège salarié avec une augmentation de deux millions d’inscriptions par rapport aux élections de 2002.

Ensuite, les modalités de vote ont été élargies : toute condition restrictive au vote par correspondance a été supprimée, les électeurs parisiens ont été autorisés à voter par Internet et 460 bureaux de vote ont été implantés en entreprise. Ces modifications ont donné des résultats positifs : 600 000 électeurs supplémentaires ont voté par correspondance et 32 % des électeurs parisiens ont choisi de voter en ligne.

Enfin, une campagne d’information et de communication a été menée tout au long de l’année 2008, en liaison avec les partenaires sociaux et institutionnels. Selon l’enquête réalisée sur l’impact de cette campagne, 77 % des 1 000 personnes interrogées déclarent se souvenir des spots diffusés et 72 % affirment qu’ils les ont appréciés.

Source : Avis n° 2286-tome VI sur le projet de finance pour 2011, du 14 octobre 2010, de M. Francis Vercamer au nom de la Commission des affaires sociales.

Au final, force est de constater que les nombreuses mesures mises en œuvre par les pouvoirs publics se sont révélées infructueuses, et n’ont pas réussi à enrayer la progression continue de l’abstention aux élections prud’homales, dont le niveau très élevé affecte désormais la légitimité.

B. LA NOUVELLE DONNE DE LA REPRÉSENTATIVITÉ DES ORGANISATIONS SYNDICALES ET PATRONALES

Au-delà des difficultés propres au scrutin prud’homal, la nouvelle donne juridique de la représentativité des organisations syndicales et patronales, désormais fondée sur l’audience de chacune d’entre elles, rend nécessaire l’évolution du mode de nomination des juges prud’homaux, en raison des risques de concurrence entre les deux systèmes.

1. Une représentativité fondée sur la mesure de l’audience

Les règles régissant la représentativité des organisations syndicales et patronales ont profondément évolué entre 2008 et 2014 : elles obéissent désormais à un cadre clair, dont la mesure de l’audience constitue la pierre angulaire.

Ainsi, depuis la loi du 20 août 2008 (5) et aux termes de l’article L. 2121-1 du code du travail, pour voir établie leur représentativité, les organisations syndicales doivent maintenant remplir sept critères : le respect des valeurs républicaines, l’indépendance, la transparence financière, l’ancienneté de deux ans, l’influence caractérisée par l’activité et l’expérience, les effectifs d’adhérents et les cotisations, ainsi qu’un certain degré d’audience pour chaque niveau de négociation.

Au niveau de l’entreprise, les organisations syndicales doivent recueillir au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour des élections professionnelles. Aux niveaux des branches et national interprofessionnel, l’addition des votes que celles-ci ont recueillis dans les entreprises et lors du scrutin dédié aux entreprises de moins de onze salariés (6) doit dépasser 8 %.

Le premier cycle quadriennal de mesure de l’audience s’est achevé en 2013. Au niveau national interprofessionnel, les principales organisations syndicales ont obtenu les résultats suivants : la CGT a recueilli 26,77 % des voix, la CFDT 26 %, la CGT-FO 15,94 %, la CFE-CGC 9,43 %, et la CFTC 9,3 %.

S’agissant des organisations patronales, les règles régissant leur représentativité ont été fixées par la loi du 5 mars 2014 précitée. Cette loi a créé un nouvel article L. 2151-1 du code du travail, aux termes duquel la représentativité des organisations d’employeurs est déterminée d’après les critères suivants : le respect des valeurs républicaines, l’indépendance, la transparence financière, l’ancienneté minimale de deux ans, l’influence caractérisée par l’activité et l’expérience, ainsi que l’audience, qui se mesure en fonction du nombre d’entreprises adhérentes et par niveau de négociation.

Au niveau des branches, les organisations patronales doivent justifier de l’adhésion d’un nombre d’entreprises représentant au moins 8 % de l’ensemble des entreprises adhérant à des organisations d’employeurs des branches concernées. Au niveau national interprofessionnel, les mêmes règles de décompte s’appliquent (7).

La mesure de l’audience des organisations patronales doit être effectuée tous les quatre ans. Le système de mesure se trouve actuellement en cours de conception, pour permettre de présenter les premiers résultats d’audience en 2017, soit en même temps que ceux du deuxième cycle de mesure de l’audience des organisations syndicales.

2. Le risque d’une concurrence entre les deux systèmes

Le maintien de l’élection prud’homale présenterait donc le risque d’une concurrence entre les deux systèmes de mesure du poids des organisations syndicales et patronales, qui serait certainement préjudiciable au dialogue social.

En effet, les résultats obtenus par les organisations divergent selon la voie de mesure choisie, comme l’indique le tableau ci-dessous pour les organisations syndicales. Ainsi, la CGT a enregistré un score supérieur aux élections prud’homales, par rapport à ses résultats d’audience, alors qu’à l’inverse, la CFDT affiche un score inférieur, les scores de la CGT-FO, de la CFE-CGC et de la CFTC étant proches mais non identiques.

RÉSULTATS ÉLECTORAUX ET D’AUDIENCE DES PRINCIPALES ORGANISATIONS SYNDICALES

 

CGT

CFDT

CGT-FO

CFE-CGC

CFTC

Résultats aux élections prud’homales de 2008

33,98 %

21,81 %

15,81 %

8,20 %

8,69 %

Résultats à la mesure d’audience de 2013

26,77 %

26 %

15,94 %

9,43 %

9,3 %.

Pour les organisations patronales, la donne apparaît plus complexe car certaines présentent des listes communes aux élections prud’homales, ce qui ne permet de mesurer leurs poids respectifs. En effet, le MEDEF, la CGPME, l’UPA, la FNSEA et l’UNAPL ont choisi, en 2008, de regrouper leurs candidats en une même liste dénommée Union pour les droits des employeurs (UDE).

RÉSULTATS DES ÉLECTIONS PRUD’HOMALES DE 2008 POUR LE COLLÈGE DES EMPLOYEURS

 

Union pour les droits
des employeurs (UDE)

Association des employeurs
de l’économie sociale (AEES)

Divers employeurs

Résultats par liste

72,16 %

19,14 %

8,7 %

Source : Rapport « Pour le renforcement de la légitimité de l’institution prud’homale : quelle forme de désignation des conseillers prud’hommes ? », M. Jacky Richard, avril 2010.

Or, la divergence de résultats entre les élections prud’homales et l’audience pourrait donner lieu à des contestations entre les organisations, par exemple en matière de répartition des sièges au sein des instances de gestion paritaire, ce qui affecterait de manière très négative le dialogue social.

II. LA SOLUTION SIMPLE ET ÉQUILIBRÉE PROPOSÉE PAR LE PROJET DE LOI

Pour toutes ces raisons, il semble donc nécessaire de procéder à la réforme du mode de désignation des conseillers prud’hommes, ce qui constitue l’objet de ce projet de loi. Celui-ci retient une solution qui apparaît à la fois conforme à la Constitution et respectueuse l’équilibre de la juridiction prud’homale, tout en présentant des avantages multiples.

A. UNE RÉFORME CONFORME À LA CONSTITUTION ET PRÉSERVANT L’ÉQUILIBRE DE LA JURIDICTION PRUD’HOMALE

Au vu des changements juridiques et jurisprudentiels intervenus ces dernières années, le projet de loi propose, au final, une réforme dont les contours s’éloignent des trois scénarios d’évolution qu’avait envisagés M. Jacky Richard dans son rapport de mai 2010.

1. Les scénarios d’évolution envisagés par le rapport Richard

Conscient du problème posé par l’augmentation exponentielle du taux d’abstention aux élections prud’homales, M. Xavier Darcos, alors ministre du travail, avait en effet mandaté, en octobre 2009, M. Jacky Richard, conseiller d’État, pour mener une mission de réflexion sur les évolutions envisageables du mode de désignation des conseillers prud’hommes.

Son rapport (8), remis en mai 2010, propose trois scénarios distincts, impliquant des modifications plus ou moins profondes de ce mode de désignation : le premier scénario réside dans l’aménagement du mode actuel d’élection des conseillers prud’hommes, le deuxième dans le recours à un système de désignation, et le troisième dans la mise en place d’une élection au suffrage indirect. L’encadré ci-dessous rappelle les principales orientations de chacun des dispositifs proposés.

les trois scénarios d’évolution du rapport richard de mai 2010

a) Aménager le mode actuel d’élection des conseillers

Est tout d’abord envisagée l’hypothèse du maintien du mode actuel d’élection des conseillers prud’hommes, mais en en rénovant certaines modalités et en améliorant, en priorité, l’information et la communication sur l’institution prud’homale. Le rapport recommande quatre aménagements principaux du scrutin :

– la généralisation du vote par Internet, sous réserve que toutes les garanties nécessaires soient apportées en matière de sécurité, de fiabilité du vote, de sincérité du résultat et de transparence du processus ;

– le maintien du vote par correspondance sans condition, en remédiant aux difficultés rencontrées lors du scrutin de décembre 2008 ;

– la suppression du vote à l’urne, complexe à gérer pour les communes et qui n’apporte pas de gains significatifs en termes de participation ;

– la suppression du vote par section qui serait remplacé par un vote unique par collège, ce qui simplifierait l’organisation de l’élection et accroîtrait sa lisibilité ; les conseillers élus seraient ensuite répartis entre les cinq sections des conseils de prud’hommes.

Néanmoins, l’effet des mesures proposées sur le taux de participation reste incertain et l’organisation du scrutin prud’homal demeurera complexe et coûteuse. (…)

b) Recourir à un système de désignation des conseillers

La deuxième option étudiée par le rapport consiste à substituer à l’élection un système de désignation des conseillers par les organisations syndicales selon leur représentativité. Pour le collège salarié, la répartition des sièges s’effectuerait en fonction de l’audience des différents syndicats, qui sera précisément mesurée pour la première fois en 2013, puis tous les quatre ans. Ce procédé de mesure de l’audience constitue d’ailleurs l’un des motifs de remise en cause de l’élection prud’homale sous sa forme actuelle, car ces deux processus risquent de rentrer en conflit : les résultats obtenus par les syndicats au scrutin prud’homal peuvent, en effet, perturber les équilibres de représentativité.

Pour le collège employeur, la répartition des sièges entre les organisations professionnelles pose des problèmes plus sensibles. En effet, la question de la représentativité patronale n’a pas encore été réglée. Le rapport propose donc trois solutions provisoires : maintenir temporairement le mode actuel d’élection pour le collège employeur ; répartir des quotas de sièges entre les organisations d’employeurs proportionnellement au nombre de leurs adhérents, mais pondéré en fonction du nombre de salariés de leurs entreprises membres ; laisser la négociation entre les organisations décider de la répartition des quotas de sièges.

Au-delà des difficultés techniques que pose cette deuxième option, elle semble juridiquement contestable au regard du principe constitutionnel d’égal accès aux charges publiques.

c) Mettre en place une élection au suffrage universel indirect

La dernière hypothèse envisagée par le rapport réside dans la mise en place d’une élection au suffrage universel indirect par un corps de grands électeurs. Pour le collège salarié, le corps des grands électeurs se composerait naturellement des représentants du personnel pour les entreprises de plus de dix salariés, mais une solution devrait être trouvée pour la représentation des demandeurs d’emploi et des salariés des entreprises de moins de dix salariés. Pour ces derniers, le rapport recommande la désignation de délégués des salariés des très petites entreprises par les organisations syndicales, en fonction des résultats obtenus lors du scrutin d’audience sur sigle.

S’agissant du collège employeur, le rapport préconise l’organisation d’une élection ad hoc de délégués des employeurs appelés ensuite à élire les conseillers prud’homaux, à l’instar du mécanisme existant pour l’élection des juges des tribunaux de commerce.

Cette dernière hypothèse présente trois avantages notables : elle préserve le principe d’une élection des conseillers, elle devrait permettre d’obtenir un taux élevé de participation, et sa mise en œuvre sera moins complexe en termes d’organisation et bien moins coûteuse.

Source : Avis n° 2286-tome VI sur le projet de finance pour 2011, du 14 octobre 2010, de M. Francis Vercamer au nom de la Commission des affaires sociales.

Parmi ces trois scénarios d’évolution, le dernier, proposant la mise en place d’une élection au suffrage universel indirect, recueillait la préférence de M. Jacky Richard en 2010. Il n’a cependant finalement pas été choisi par le Gouvernement, pour les raisons exposées ci-dessous.

2. La solution retenue par le Gouvernement

En effet, depuis la publication du rapport de M. Jacky Richard, ont eu lieu deux évolutions juridique et jurisprudentielle de premier ordre, qui expliquent que la solution retenue par le projet de loi s’écarte des trois scénarios proposés.

Tout d’abord, la question de la représentativité des organisations patronales a été réglée, ce qui rend à la fois le maintien d’un système d’audience électorale concurrent peu souhaitable, qu’il s’agisse d’une élection directe ou indirecte comme l’envisage le rapport de M. Richard, et ouvre la possibilité de recourir à un dispositif de désignation, puisque le poids de chacune des organisations d’employeurs sera désormais connu.

Ensuite, la jurisprudence du Conseil constitutionnel a notablement évolué, levant les doutes quant à la constitutionnalité du remplacement de l’élection prud’homale par un dispositif de désignation des conseillers.

Une solution répondant aux exigences constitutionnelles

Dans son rapport, M. Jacky Richard s’interrogeait, en effet, sur la constitutionnalité d’une telle substitution, au regard du principe d’égal accès aux charges publiques, en raison de la création, par répercussion, d’une forme de monopole de présentation des candidats par les organisations syndicales et patronales.

Or, cette interrogation n’a plus lieu d’être depuis la décision du Conseil constitutionnel du 3 décembre 2010, sur la question prioritaire de constitutionnalité intitulée « M. Roger L. ». Dans cette décision, le Conseil constitutionnel a ainsi validé le dispositif de désignation des assesseurs des tribunaux des affaires de sécurité sociale (TASS), qui s’avère très proche de celui proposé par le projet de loi. L’encadré ci-dessous expose le détail de cette décision.

Il faut, par ailleurs, signaler que les organisations syndicales et patronales demeureront libres de présenter tout candidat à la désignation, sans qu’aucune obligation d’affiliation ne soit requise.

La décision du conseil constitutionnel du 3 décembre 2010

Présidé par un magistrat du siège du tribunal de grande instance (TGI) dans le ressort duquel le TASS a son siège, voire par un magistrat honoraire, le TASS est compétent pour le contentieux général de la sécurité sociale. Le président est assisté par deux assesseurs, l’un représentant les travailleurs salariés, l’autre les employeurs et les travailleurs indépendants.

Comme le soulignent les commentaires aux Cahiers du Conseil constitutionnel sous la décision n° 2010-76 du 3 décembre 2010, « l’esprit dans lequel le TASS est constitué est d’associer à la compétence juridique du magistrat, président, la compétence professionnelle des assesseurs, dont la légitimité résulte non de leurs aptitudes techniques mais de la représentativité du syndicat qui propose leur désignation », conformément au caractère échevinal de cette juridiction spécialisée.

Le premier président de la cour d’appel désigne par ordonnance, après avis du président du TASS, les assesseurs sur une liste de personnes élaborée par les autorités compétentes de l’État en matière de sécurité sociale ou de mutualité sociale agricole, sur proposition notamment des organisations d’employeurs et de salariés les plus représentatives.

Le requérant contestait le pouvoir de proposition des syndicats, qui privait selon lui les justiciables d’élire eux-mêmes les assesseurs du TASS.

Or, comme le soulignent les commentaires aux Cahiers du Conseil constitutionnel, « aucune exigence constitutionnelle n’impose que les justiciables aient un droit à l’élection des juges ou que les juges soient choisis parmi leurs pairs ».

Le Conseil constitutionnel a estimé que le pouvoir de présentation des candidats reconnu aux organisations professionnelles ne méconnaissait pas le principe d’égal accès aux emplois publics.

En outre, il a considéré qu’il n’y avait pas de risque objectif qu’un justiciable syndiqué soit jugé différemment d’un justiciable non syndiqué, car le droit français proscrit tout mandat impératif des assesseurs. Une fois désignés, les assesseurs représentent uniquement les salariés ou les employeurs, en toute indépendance et impartialité.

Source : Rapport n° 769 du 23 juillet 2014 de M. Jacky Le Menn au nom de la Commission des affaires sociales du Sénat.

Choisir le critère de l’audience comme nouveau fondement de la désignation des juges prud’homaux ne pose pas non plus de problème constitutionnel. Le fait que le décompte de la mesure de l’audience soit distinct pour les organisations syndicales et patronales ne contient, en effet, aucune discrimination portant atteinte au principe d’égalité. Il s’inscrit dans la jurisprudence constante du Conseil Constitutionnel, qui permet au législateur de régler de façon différente des situations différentes, pourvu que la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l’objet de la loi qui l’établit, ce qui est le cas du dispositif proposé par le projet de loi.

Enfin, a été soulevée la question de la constitutionnalité de la prorogation du mandat des conseillers jusqu’en 2017. En effet, il s’agit d’une deuxième prolongation de deux ans, après celle opérée par la loi du 15 octobre 2010 (9). Les conseillers prud’hommes actuellement en fonction verront donc leur mandat prolongé de quatre ans au total, pour un mandat initial de cinq ans.

Or, il semble raisonnable de penser que cette prorogation obéit à des motifs d’intérêt général suffisants, reposant sur la réforme en cours de déploiement de la représentativité patronale, et proportionnés pour répondre aux exigences constitutionnelles. A contrario, l’édiction d’un dispositif transitoire de désignation pour le seul collège des employeurs pourrait porter atteinte au principe d’égalité, en créant une disparité réelle dans les modes de nomination des juges entre les deux collèges.

Une solution respectant l’équilibre de la juridiction prud’homale

Conforme aux exigences constitutionnelles, la solution retenue par le Gouvernement respecte également l’équilibre de la juridiction prud’homale : elle ne remet en cause ni son indépendance, ni son impartialité, ni son caractère paritaire.

Elle préserve, de plus, l’unité de la juridiction en conservant un mode unique de désignation des conseillers prud’hommes, plutôt que d’instaurer un système à deux vitesses, reposant sur l’audience de représentativité pour les juges présentés par les organisations syndicales et sur un mode de nomination ad hoc et transitoire pour ceux présentés par les organisations d’employeurs.

L’article 1er du projet de loi vise ainsi à habiliter le Gouvernement à prendre par voie d’ordonnance les dispositions législatives nécessaires pour substituer à l’élection des conseillers prud’hommes, une désignation fondée sur l’audience des organisations syndicales et patronales. Il définit un cadre et des principes de réforme très précis que devra suivre le Gouvernement.

L’article 2 vise, ensuite, à proroger le mandat actuel des conseillers prud’hommes, jusqu’au prochain renouvellement général, qui interviendra le 31 décembre 2017 au plus tard. Il tire également les conséquences de cette prorogation, en matière de formation et de fonctionnement des tribunaux.

B. UNE SOLUTION PRÉSENTANT DES AVANTAGES MULTIPLES

Au-delà de sa plus grande simplicité, la solution retenue par le Gouvernement présente des avantages multiples.

1. Un renforcement de la légitimité de l’institution prud’homale

La réforme proposée permettra ainsi un renforcement de l’institution prud’homale, en fondant le mode de désignation des conseillers sur des bases plus solides.

Il faut souligner ici, en effet, que plus de 5,45 millions de salariés ont participé à la première mesure de l’audience des organisations syndicales, alors que seuls 4,7 millions de salariés avaient voté lors des dernières élections prud’homales de 2008.

Par ailleurs, s’agissant de la question du vote des demandeurs d’emploi, membres du corps électoral des prud’hommes mais pas de celui de la mesure de l’audience, celle-ci constitue en réalité un faux problème.

En effet, conformément à l’article L. 2131-1 du code du travail, les syndicats ont pour mission l’étude et la défense des droits et des intérêts matériels et moraux, tant collectifs qu’individuels, des personnes mentionnées dans leurs statuts. Ils sont donc habilités à défendre les intérêts des demandeurs d’emploi, dès lors que leur statut le prévoit. Ils remplissent d’ailleurs, en pratique, cette mission en assumant la gestion paritaire du régime d’assurance chômage.

En outre, les demandeurs d’emploi ne se trouvant pas dans une relation de travail, ils ne sont plus susceptibles de saisir le conseil de prud’hommes, sauf en tant qu’anciens salariés. Et, dans ce cas, le cycle de mesure de l’audience se déroulant sur quatre années, il est plus que probable qu’ils aient pu voter aux élections professionnelles dans leur ancienne entreprise et ainsi participer à ce processus.

Enfin, il faut rappeler que lors du dernier scrutin prud’homal de 2008, seuls 5 % des demandeurs d’emploi s’étaient inscrits sur les listes électorales.

2. Une diminution notable des coûts d’organisation

Un autre avantage collatéral de la réforme proposée par le Gouvernement réside dans la diminution notable des coûts d’organisation à la charge de l’État.

En effet, l’organisation des élections prud’homales s’avère très coûteuse : sans compter les subventions de communication des syndicats, plus de 86,6 millions d’euros ont été nécessaires à la tenue du scrutin de 2008. La constitution des listes électorales et l’acheminement des documents représentent les deux premiers postes de dépenses, à hauteur de 27,6 millions d’euros et de 27 millions d’euros. À titre de comparaison, les élections municipales de 2008 ont coûté 107,9 millions d’euros, alors que le nombre d’électeurs appelés à participer était deux fois supérieur.

Au long cours, le coût d’organisation des élections prud’homales n’a cessé de croître, comme l’indique le graphique ci-dessous.

ÉVOLUTION DU COÛT D’ORGANISATION DES ÉLECTIONS PRUD’HOMALES DEPUIS 1987

(hors subventions de communication des syndicats)


Source : Avis n° 2286-tome VI sur le projet de finance pour 2011, du 14 octobre 2010, de M. Francis Vercamer au nom de la Commission des affaires sociales.

D’après l’étude d’impact annexée au projet de loi, le coût du nouveau mode de désignation se situerait autour de 6 millions d’euros, soit un montant près de 15 fois inférieur à celui du coût des élections prud’homales.

Enfin, la mise en place d’un mode de désignation reposant sur l’audience aura pour conséquence de décharger les communes de l’organisation concrète de l’élection, une demande que celles-ci formulent régulièrement.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. DISCUSSION GÉNÉRALE

Au cours de sa séance du mercredi 12 novembre 2014, la commission des affaires sociales procède à l’examen du présent projet de loi, sur le rapport de Mme Sylviane Bulteau.

M. Jean-Patrick Gille, président. Le projet de loi relatif à la désignation des conseillers prud’hommes sera examiné par notre assemblée en séance publique le jeudi 20 novembre prochain. Ce texte dont il avait été un moment envisagé de faire figurer les dispositions dans le projet de loi relatif à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale avait initialement été déposé à l’Assemblée nationale en janvier dernier avant d’être retiré puis déposé au Sénat en mars. Il a enfin fait l’objet d’une lettre rectificative en juillet.

Il ne concerne en rien le fonctionnement des conseils de prud’hommes, sujet qui pourrait être abordé dans le texte actuellement préparé par le ministre de l’économie. Il habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance les dispositions nécessaires pour remplacer l’élection des conseillers prud’hommes par une désignation fondée sur la mesure de l’audience des organisations syndicales de salariés et des organisations professionnelles d’employeurs.

Par ailleurs, il prolonge le mandat actuel des conseillers jusqu’au prochain renouvellement général des conseils de prud’hommes, qui devra intervenir avant le 31 décembre 2017.

Mme Sylviane Bulteau, rapporteure. Le projet de loi que nous examinons ce matin poursuit résolument l’objectif de renforcer la légitimité démocratique des conseils de prud’hommes.

Il vise à fixer un cadre rigoureux de réforme du mode de désignation des juges prud’homaux, que devra respecter le Gouvernement dans l’élaboration de cette réforme, que le projet de loi l’autorise à mener par ordonnance.

La nécessité de cette réforme est reconnue par tous, comme le démontre l’adoption du projet de loi au Sénat, le 14 octobre dernier, malgré le changement de majorité politique que vient de connaître la Haute assemblée.

Cette réforme apparaît en effet nécessaire à deux titres.

Les élections prud’homales souffrent, tout d’abord, d’un taux d’abstention dont l’importance croissante atteint la légitimité de ces tribunaux, malgré les efforts importants accomplis par les pouvoirs publics pour combattre ce phénomène.

Depuis 1979, le taux d’abstention aux élections prud’homales a presque doublé, passant de 37 % à 74 % en 2008, alors que, dans le même temps, le nombre d’inscrits a augmenté, ce qui apparaît donc très préoccupant.

Pour faire face à la progression continue de l’abstention, les pouvoirs publics ont déployé, élection après élection, un éventail de mesures pour améliorer l’organisation de ce scrutin, qui se sont révélées infructueuses.

Ensuite, la nouvelle donne juridique de la représentativité des organisations syndicales et patronales, désormais fondée sur l’audience, impose de revoir les règles de désignation des juges prud’homaux, afin d’éviter toute concurrence entre les deux systèmes.

En effet, les résultats obtenus par les organisations divergent selon la voie de mesure choisie. À titre d’exemple, la CGT a enregistré un score supérieur aux élections prud’homales de 2008, par rapport à ses résultats d’audience de 2013, alors qu’à l’inverse, la CFDT affiche un score inférieur.

Or, la divergence de résultats entre les élections prud’homales et l’audience pourrait donner lieu à des contestations entre les organisations, par exemple en matière de répartition des sièges au sein des instances de gestion paritaire, ce qui affecterait de manière très négative le dialogue social.

Pour toutes ces raisons, il semble donc nécessaire de réformer le mode de désignation des conseillers prud’hommes.

Le projet de loi propose une solution qui apparaît à la fois conforme à la Constitution et respectueuse de l’équilibre de la juridiction prud’homale.

S’agissant de la constitutionnalité du remplacement de l’élection prud’homale par une désignation, il faut tout d’abord souligner que, dans sa décision du 3 décembre 2010, le Conseil constitutionnel a rappelé qu’aucune exigence constitutionnelle n’impose que les justiciables aient un droit à l’élection des juges.

Ensuite, s’agissant de la constitutionnalité de la prolongation des mandats jusqu’en 2017, elle apparaît justifiée par des motifs d’intérêt général suffisants et proportionnés, reposant sur la réforme en cours de déploiement de la représentativité patronale.

Conforme aux exigences constitutionnelles, la solution retenue par le projet de loi respecte également l’équilibre de la juridiction prud’homale : elle ne remet en cause ni son indépendance, ni son impartialité, ni son caractère paritaire.

La réforme proposée permettra, en outre, un renforcement réel de la légitimité démocratique de l’institution prud’homale, en fondant la désignation des conseillers sur des bases plus solides.

Il faut souligner ici, en effet, que plus de 5,45 millions de salariés ont participé à la première mesure de l’audience des organisations syndicales, alors que seuls 4,7 millions de salariés avaient voté lors des dernières élections prud’homales de 2008.

Mes chers collègues, je vous invite donc à adopter le projet de loi qui nous est soumis ce matin, dans sa rédaction issue des travaux du Sénat.

Mme Martine Pinville. Ce projet de loi comporte deux articles et tend à moderniser le mode de désignation des conseillers prud’homaux.

Le premier vise à autoriser le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures nécessaires pour transformer l’élection des conseillers prud’homaux en un mode de désignation basé sur la représentativité syndicale, appréciée selon les critères de la loi du 20 août 2008, et patronale telle qu’issue de la loi du 5 mars 2014.

L’article 2 proroge de deux ans les mandats des conseillers prud’hommes actuels, soit jusqu’en 31 décembre 2017. Je veux d’ailleurs remercier ici ces derniers qui œuvrent au quotidien dans notre pays pour vérifier l’application du droit du travail.

Je veux rappeler les raisons qui ont conduit le Gouvernement à présenter ce texte. Tout d’abord, nous le savons tous, et madame la rapporteure l’a souligné, l’élection prud’homale connaît un fort taux d’abstention, lequel n’a cessé de croître depuis plus de trente ans. Il s’est élevé à 74,3 % en 2008 contre 37,4 % en 1979, et ce malgré les efforts constants des divers acteurs pour améliorer l’organisation de ce scrutin. Seuls 4,7 millions de salariés ont voté lors de la dernière élection en 2008, affaiblissant ainsi la légitimité de l’institution prud’homale.

Le coût de l’élection a aussi été avancé comme argument bien qu’il ne puisse, à lui seul, justifier la réforme, comme l’ont rappelé nos collègues au Sénat, soulignant le fait que les mesures d’audience introduites par les lois de 2008 et de 2013 sur la représentativité viennent faire concurrence à cette élection. En mars 2014, pour la première fois, l’audience des organisations syndicales a été mesurée au niveau national interprofessionnel : ce sont 5,4 millions de salariés qui se sont exprimés, soit 700 000 de plus qu’aux élections prud’homales. Pour les organisations patronales, cette mesure sera appliquée en 2017, conformément à la loi du 5 mars 2014 dont notre collègue Jean-Patrick Gille a été le rapporteur.

De façon cohérente, le projet de loi que nous examinons aujourd’hui, s’inscrit dans la continuité des dispositions que nous avons adoptées précédemment. Ce nouveau mode de désignation permettra d’éviter que deux systèmes de légitimité des partenaires sociaux coexistent et se fassent concurrence. Dès 2017, les conseillers prud’hommes seront désignés sur la base de l’audience.

Voilà les raisons pour lesquelles, mes chers collègues, je vous invite à vous prononcer favorablement à l’adoption de ce texte.

M. Gérard Cherpion. Ce projet de loi, qui comporte deux articles, pose deux problèmes, l’un de forme, l’autre de fond.

En ce qui concerne la forme, se pose la question du calendrier. À cet égard, je rappelle qu’en 2010, suivant les propositions du rapport fait par MM. Jacky Richard et Alexandre Pascal, la loi du 15 octobre 2010 avait déjà reporté la périodicité des élections prud’homales de cinq à sept ans ; on envisage aujourd’hui de les reporter à neuf ans. Cette situation n’est d’ailleurs pas sans créer de difficultés au sein de certains tribunaux car des listes sont épuisées par disparition des élus sur les neuf ans. Cela pose la question même du renouvellement des tribunaux. Le rapport Richard et Pascal ne demandait pas la suppression de l’élection, contrairement à ce que veut faire le projet de loi. On constate une certaine dispersion lorsque l’on songe qu’une loi est annoncée par le ministre de l’économie, qui doit amener une réforme de fond des conseils de prud’hommes. J’aurais préféré voir grouper l’ensemble de la question à la fois sur le problème de l’élection ou de la désignation et sur la façon dont doit évoluer l’institution.

Le calendrier lui-même laisse apparaître une certaine confusion puisque le texte a d’abord été disjoint de la loi relative à la formation professionnelle, puis redéposé à l’Assemblée nationale le 22 janvier comme texte spécifique, pour être retiré le 28 mars et être redéposé le même jour au Sénat. Le 16 juillet, une lettre rectificative a suivi un Conseil des ministres. Tout cela pour que le projet de loi soit discuté très récemment devant la Haute assemblée, dans le cadre d’une procédure accélérée, dans le but d’autoriser le Gouvernement à légiférer par ordonnance.

Sur le fond, se pose la question de la différence qui existe entre la représentativité et l’audience. La représentativité des salariés résulte des dispositions de la loi de 2008, celle des employeurs résultera de la loi de 2014. Cependant, la représentativité et l’audience ne sont pas la même chose. La réforme prévoit que la base soit la mesure de l’audience mais comment celle-ci sera-t-elle comptabilisée ? Au niveau départemental, au niveau régional ? Nul ne le sait à ce stade. Cela rebattra les cartes pour les syndicats car l’audience de la CGT par exemple n’est pas sa représentativité et ce contraste est important.

Au sujet de la question de la constitutionnalité, le ministre du travail a considéré devant le Sénat, comme le fait d’ailleurs le rapport, qu’il n’y avait pas d’incompatibilité par rapport à la décision du Conseil constitutionnel du 3 décembre 2010. Certes. Mais, la différence réside dans ce que les tribunaux des affaires de sécurité sociale (TASS) sont présidés par un magistrat professionnel alors que les conseils de prud’hommes le sont soit par un salarié, soit par un employeur. On n’est donc pas dans le même cas de figure.

À mon sens, il y a un problème de constitutionnalité puisque, s’il y a désignation, il risque d’y avoir une inégalité d’accès aux charges publiques, ce qui avait déjà été signalé. La question des ordonnances demeure. Le ministre a indiqué que la désignation des conseillers se fondera sur les résultats de l’audience des organisations syndicales et non sur leur représentativité, ainsi un syndicat non représentatif à l’échelle nationale interprofessionnelle, comme l’UNSA ou SUD, pourra malgré tout désigner des conseillers prud’hommes dans les ressorts territoriaux. Dans ces conditions, des personnes non syndiquées, se verront barrer la route, sauf, selon le ministre, à être désignées par un syndicat, hypothèse qui me semble peu probable car on voit mal un syndicat agir de la sorte.

J’observe, par ailleurs, que, le ministre lui-même, il y a peu, avait voté contre la réforme alors qu’il était dans l’opposition. Il est vrai que les temps changent et les avis aussi…

M. Christophe Cavard. Je m’étonne des conditions dans lesquelles on nous demande d’examiner ce texte important pour les tribunaux prud’homaux. L’heure matinale à laquelle ont été programmés nos travaux, au lendemain d’un jour férié, est mal venue, comme le montre le faible nombre de commissaires présents. Cela relève d’une mauvaise organisation du calendrier de notre Commission car beaucoup d’entre nous viennent de loin.

Les deux articles qui constituent le texte présenté posent un cadre général, qui fait débat depuis longtemps, pour la représentation au sein des conseils prud’hommes et l’élection des conseillers. Ce texte pose aussi la question du recours aux ordonnances au sujet duquel mon groupe demeure très réservé, sauf en cas d’urgence, ce qui, en l’occurrence, n’est pas le cas puisque le projet de loi préconise un statu quo jusqu’au 31 décembre 2017, avec mise en œuvre des mesures au-delà de cette date. Nous aurions préféré un texte de loi plus précis sur cette question.

Aujourd’hui, il y a plus de 15 000 conseillers prud’hommes. Bien entendu, personne ici ne remet en cause le rôle des tribunaux prud’homaux, particulièrement dans une période où règne une grande instabilité dans le droit, comme dans le code du travail. Les débats qui ont lieu au sein de cette commission montrent à l’envi qu’une interprétation des textes est nécessaire. La récente loi sur la sécurisation de l’emploi, par exemple, appellera, elle aussi, des interprétations, et les conseils de prud’hommes trouveront pleinement leur rôle dans cet exercice. Dans ce contexte, il est possible de s’interroger sur la représentation au sein de cette institution.

La raison évoquée pour justifier le passage de l’élection à la désignation est celle de l’abstention. De fait, l’évolution de cette dernière est inquiétante puisqu’en 1979 elle était de 37,9 % et, en 2008, de 74,3 %. Cela conduit effectivement à s’interroger sur la représentativité des conseillers prud’hommes, bien que cela ne soit pas le cas du groupe écologiste, et donc, sur la légitimité éventuelle de certains conseillers élus. Nous aurions préféré que le temps soit donné à la réflexion sur cette abstention chronique et les moyens de l’enrayer. Cette situation pose, certes, la question du syndicalisme mais aussi, celle du mode de désignation des représentants ainsi que la constitution du corps électoral. Si la logique des élections professionnelles est conservée, cela exclut la représentation de ceux qui sont à la recherche d’un emploi, cela d’autant plus qu’il faut être salarié depuis au moins trois mois pour être inscrit sur les listes. Des formes innovantes auraient pu être trouvées, en accord avec les partenaires sociaux, tel le vote électronique, qui a été expérimenté, avec des fortunes diverses, notamment pour la CGT ou l’obligation de vote. Cela montre qu’il existe d’autres solutions que la désignation.

La question du coût des élections prud’homales a été invoquée, certes celui-ci est évalué à 90 millions d’euros mais c’est là le prix de la démocratie et je veux croire que nous allons être rassurés sur ce point.

La question des collèges représentés se pose aussi. Je pense aux nouveaux venus dans les collèges d’employeurs, particulièrement, issus de l’économie sociale et solidaire, et aux représentants du secteur associatif. La question de leur participation se pose puisque ces employeurs ne sont pas représentés dans les élections professionnelles. Pour l’ensemble de ces raisons, le groupe écologiste est très réservé sur ce texte.

M. Jean-Patrick Gille, président. Au sujet de l’organisation de nos travaux, je tiens à vous dire, monsieur Cavard, que celle-ci ne dépend que des impératifs de l’ordre du jour de la séance publique, la Commission n’en est donc pas comptable.

Je passe maintenant la parole aux inscrits pour deux minutes.

Mme Kheira Bouziane. Au sujet de l’intérêt de ce projet de loi, mon premier questionnement porte sur l’approbation ou la désapprobation des syndicats, certains y sont favorables, d’autres non. En tout état de cause, la mise en œuvre des dispositions du texte, dans la mesure où elle remet en cause le mode de désignation des prud’hommes, devra être entourée de beaucoup de garanties.

La raison avancée pour justifier ce bouleversement est le fort taux d’abstention : cet argument est dangereux car il pourrait être appliqué à d’autres scrutins, les élections européennes par exemple. Ce sont donc les fondements de la démocratie qui sont remis en cause. Comme notre collègue Christophe Cavard, je considère que, dans la période de difficultés sociales qui est la nôtre, l’argument portant sur le coût des élections est mal venu.

Par ailleurs, le mode de représentation du patronat n’est pas précisé dans le texte, la question demeure donc posée. Enfin, la question de l’audience : celle-ci sera-t-elle mesurée au niveau local ou national ? Dans ce dernier cas, les résultats risqueraient d’être déconnectés du monde du travail sur les territoires.

M. Dominique Dord. Lorsqu’il s’agit de proposer des mesures de simplification et d’économie dans le domaine de la vie publique, je suis plutôt d’accord. À cet égard, je ne pense pas que le changement que vous apportez soit décisif. Cependant, prétendre renforcer la démocratie en voulant supprimer une élection ne peut remporter mon concours. Comme l’ont fait observer plusieurs de nos collègues, les élections sur la représentativité n’ont pas apporté un collège électoral plus important que celui des conseils de prud’hommes. Cela laisse de côté des questions importantes telles la représentation des chômeurs et la représentativité locale. Sur le plan de la légitimité démocratique, la preuve n’est pas apportée : le texte posant plus de questions de restriction que d’amélioration.

Autre sujet, le recours aux ordonnances. Pourquoi donc, sur un sujet ancien comme celui des conseils de prud’hommes, vouloir contourner le Parlement ? C’est à croire que le Gouvernement redoute de trop nombreux amendements au sein de sa propre majorité, car je ne vois pas pourquoi il y aurait urgence sur ce sujet.

Ainsi, sur le fond, représentativité et légitimité démocratique, le texte apporte plutôt moins que plus et, sur la forme, je ne comprends pas le recours aux ordonnances.

M. Jean-Pierre Door. Les questions soulevées par notre collègue écologiste Christophe Cavard m’incitent à vous interroger, madame la rapporteure. Le rapport de MM. Richard et Pascal établit trois scénarios. Vous avez retenu celui de la désignation en vous fondant sur le taux d’abstention. Vous recourez à la désignation au détriment de toute démocratie sociale, dans ces conditions, comme le disait notre collègue Kheira Bouziane, pourquoi ne pas faire de même pour les élections municipales, européennes ou autres ? Cela permettrait aussi de faire des économies. Mais il s’agirait là d’un autre mode de démocratie.

Le rapport Richard et Pascal propose d’autres scénarios et d’autres discussions auraient pu voir le jour : votre choix est soit le mauvais, soit mal motivé. Au lieu de vous fonder sur les taux d’abstention, mieux vaudrait lutter contre l’abstentionnisme.

M. Jean-Pierre Barbier. Comme le disait Churchill, la démocratie est la pire forme de gouvernement à l’exception de toutes les autres. Vous réglez le problème en supprimant l’élection au profit de la désignation et en avançant que l’abstention est trop élevée et que cela coûte trop cher. Ces désignations qui seront fondées sur la représentativité syndicale posent la question de la représentativité même. En France, fort peu de salariés sont syndiqués et, dans les conditions, fort peu seront représentés. La question se pose aussi de l’indépendance des personnes désignées, en l’occurrence par les syndicats : auront-elles des comptes à rendre à ces derniers ?

Enfin, le choix de la procédure d’examen accélérée, puis celui de légiférer par voie d’ordonnance, ne sont pas à la hauteur d’un sujet qui reste d’importance.

M. Élie Aboud. Au nom d’une simplification administrative et de mesures d’économie, on ouvre la porte à des pratiques peu démocratiques. Dans ces conditions, pourquoi recourir à la désignation au lieu de se rapporter directement aux résultats électoraux des syndicats ? Une loi va bientôt intervenir sur le fond, pourquoi cette précipitation ? Pourquoi ne pas prendre le temps de la réflexion et s’interroger sur le fonctionnement des prud’hommes, les délais et les raisons de l’abstention, au lieu de mettre en cause une légitimité de représentation qui vient du vote ?

Mme la rapporteure. Le projet de loi n’est pas né uniquement – voire pas du tout – d’une réaction devant un taux d’abstention et des coûts trop élevés, même si cela est la réalité. Il fallait mettre en cohérence la loi du 20 août 2008 qui mesure aujourd’hui l’audience, et donc la représentativité des syndicats, avec le fonctionnement des élections prud’homales. Je vous ai précédemment donné l’exemple d’un syndicat dont le score aux élections prud’homales a été supérieur à ses résultats d’audience. Il s’agit donc d’éviter des contestations susceptibles de survenir entre les organismes de représentation des salariés ou des employeurs.

J’espère ne pas avoir trop insisté sur l’argument de l’abstention car il ne s’agit pas de remettre en cause le mode de l’élection, à l’instar de ce qui a été évoqué pour les élections européennes.

Les inquiétudes manifestées au sujet de la représentativité seront tempérées par les dispositions de l’article 1er qui comporte neuf points avec lesquels l’ordonnance que prendra le Gouvernement devra être en conformité. Le travail de concertation entre le Gouvernement et les organisations syndicales et patronales sera déterminant pour leur garantir, à tous, une bonne représentativité. Quant aux représentants du secteur de l’économie sociale et solidaire, ils font d’ores et déjà partie de listes, notamment au sein des organisations patronales. Ainsi, la représentation de petites structures demeure garantie et l’ordonnance du Gouvernement y veillera. C’est bien ce que nous souhaitons tous.

En 2010, le rapport de MM. Richard et Pascal proposait effectivement trois scénarios. Mais la majorité précédente n’a pas mis à profit les deux ans qui lui restaient pour s’en emparer. En ce qui concerne le renforcement de la représentation démocratique, il s’agit simplement, au sujet de la mesure de l’audience réalisée au moment des élections professionnelles, de constater qu’il y a plus d’électeurs pour celles-ci que pour les élections prud’homales. Le taux d’abstention a inquiété tous les gouvernements successifs. Beaucoup de choses ont été tentées pour réduire cette augmentation sans grand succès. Il ne s’agit donc pas de porter atteinte au principe de l’élection.

Dans la loi à venir, qui sera présentée par M. Emmanuel Macron, figureront des mesures relatives au fonctionnement des conseils de prud’hommes, qui seront de nature à réduire les délais auxquels sont confrontés les justiciables. Le projet de loi examiné aujourd’hui règle la question de l’articulation de la désignation des conseillers et de la représentativité syndicale. Il constitue le travail en amont pour le débat de fond qui portera sur la réforme du fonctionnement de la juridiction prud’homale.

II. EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er

Habilitation du Gouvernement à procéder par voie d’ordonnance
à la réforme du mode de désignation des conseillers prud’hommes

Cet article a pour objet d’habiliter le Gouvernement, dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, à procéder par voie d’ordonnance à la réforme du mode de désignation des conseillers prud’hommes.

Ces dispositions figuraient dans le projet de loi initial, déposé le 28 mars 2014 au Sénat, et n’ont pas été modifiées, sur le fond, par la lettre rectificative du Premier ministre du 16 juillet 2014 (10).

Lors de son examen en séance publique, le 14 octobre dernier, le Sénat l’a adopté en l’état, sans opérer aucune modification.

1.  Un cadre et des principes de réforme du mode de désignation des conseillers prud’hommes très précis

L’article 1er fixe un cadre et des principes de réforme très précis à l’habilitation du Gouvernement qu’il propose, dans lesquels l’ordonnance à venir devra s’inscrire.

Un nouveau mode de désignation respectant l’équilibre de la juridiction prud’homale

Aux termes de l’alinéa 1, le nouveau mode de désignation des conseillers prud’hommes devra, tout d’abord, respecter l’indépendance, l’impartialité et le caractère paritaire de la juridiction prud’homale.

S’agissant de l’indépendance, les nouvelles modalités de désignation devront donc permettre aux juges prud’homaux de conserver leur liberté de décision et les préserver de toutes instructions et pressions.

S’agissant de l’impartialité, elles devront leur permettre de continuer d’animer les débats judiciaires de manière contradictoire et de prononcer leurs sentences en ne tenant compte que du bien fondé, en droit et en fait, des prétentions des parties.

S’agissant du caractère paritaire de la juridiction, elles ne devront pas remettre en cause le principe fondamental du conseil des prud’hommes, suivant lequel les litiges individuels du travail sont jugés par des représentants des salariés et des employeurs en nombre égal.

En matière prud’homale, le respect des exigences constitutionnelles d’indépendance et d’impartialité est lié et assuré par la composition même des conseils, de nature paritaire, par la prohibition d’ordre public de tout mandat impératif, par la faculté de recourir à un juge départiteur extérieur aux membres élus et par la possibilité, selon le cas, d’interjeter appel ou de former un pourvoi en cassation, toutes matières sur lesquelles le projet de loi ne revient pas.

L’habilitation du Gouvernement que propose le présent article n’a donc aucunement vocation à conduire à une modification de l’équilibre de la juridiction prud’homale : son objet est circonscrit au mode de désignation de ses juges, dont les nouveaux contours garantiront une représentation égalitaire des salariés et des employeurs.

Seront notamment maintenus les deux collèges distincts actuels, la parité du nombre de leurs membres, ainsi que l’unicité des modalités d’accès à la fonction de juge, résidant dans la présentation par une organisation, quel que soit le collège d’appartenance, conformément au principe constitutionnel d’égalité devant la loi et d’égal accès aux charges publiques.

Un nouveau mode de désignation reposant sur l’audience des organisations

Aux termes du même alinéa 1, le nouveau mode de désignation des conseillers prud’hommes devra, ensuite, reposer sur l’audience des différentes organisations syndicales et d’employeurs.

Comme cela a été rappelé dans l’exposé général, l’audience constitue l’un des critères de représentativité de ces organisations. Pour les syndicats de salariés, elle est définie au 5° de l’article L. 2121-1 du code du travail et doit être établie selon des règles propres à chaque niveau de négociation. Pour les organisations d’employeurs, elle est définie au 6° de l’article L. 2151-1 du même code, et doit être établie en fonction du nombre d’entreprises adhérentes et par niveau de négociation.

Le nouveau système devra donc articuler le dispositif de mesure de l’audience de représentativité, depuis l’entreprise au niveau national, avec celui de désignation des juges prud’homaux et, par conséquent, avec la composition par section des conseils de prud’hommes et leur répartition sur le territoire.

La mise en place d’un tel système suppose de résoudre des problèmes techniques de premier ordre, concernant par exemple le niveau de mesure d’audience à retenir comme matrice de désignation des juges prud’homaux. Ce système devra également présenter une grande finesse, pour éviter de provoquer l’éviction de conseillers prud’hommes appartenant à des syndicats indépendants de dimension réduite.

L’ensemble du processus devra donc être mené en concertation étroite avec les partenaires sociaux et les représentants de la prud’homie.

Un nouveau mode de désignation à construire dans son intégralité

Enfin, aux termes des 1° à 9° du présent article, l’ordonnance que prendra le Gouvernement devra procéder à une réforme intégrale du mode de désignation des juges prud’homaux, afin d’en garantir la cohérence et l’effectivité. Elle devra ainsi définir et déterminer les nouvelles règles relatives :

– à ce mode de désignation (1°) ;

– aux modalités de répartition des sièges par organisation dans les sections, collèges et conseils (2°) ;

– aux conditions des candidatures et leurs modalités de recueil et de contrôle (3°) ;

– aux modalités d’établissement de la liste de candidats (4°) ;

– à la procédure de nomination des conseillers prud’hommes (5°) ;

– aux modalités de remplacement en cas de vacance (6°) ;

– à la durée du mandat des conseillers prud’hommes (7°) ;

– au régime des autorisations d’absence des salariés pour leur formation à l’exercice de la fonction prud’homale (8°) ;

– aux adaptations, le cas échéant, nécessaires en matière de définition des collèges et sections (9°).

Il faut souligner ici que l’exhaustivité de la liste des points devant être pris en compte par la future ordonnance constitue un réel garde-fou pour le Parlement, en offrant une définition très précise du cadre de l’habilitation accordée au Gouvernement.

2.  Une réforme d’ensemble complexe et technique, justifiant le recours à une ordonnance

Les dispositions régissant l’élection, de la constitution des listes électorales à la contestation des scrutins, ainsi que le statut et la durée du mandat des conseillers prud’hommes, sont aujourd’hui prévues aux livres IV des premières parties législative et réglementaire du code du travail, qui comprennent au total près de 500 articles.

La réforme d’ensemble souhaitée par le Gouvernement suppose de modifier un grand nombre de ceux-ci : le volume des textes concernés s’avérera donc très important. Elle impose également de prendre des mesures coordonnées qui relèveront des deux niveaux juridiques, législatif et réglementaire, et qui présenteront une forte technicité.

En effet, comme expliqué ci-dessus, le nouveau mode de désignation porté par l’ordonnance devra être articulé avec le dispositif de mesure de l’audience des organisations syndicales, d’ores et déjà en fonctionnement, et le dispositif de mesure de l’audience des organisations d’employeurs, qui se trouve encore en phase de conception.

Pour toutes ces raisons, l’article premier propose d’habiliter le Gouvernement à prendre par voie d’ordonnance les mesures relevant du domaine de la loi visant à réformer ce mode de désignation.

Aux termes des alinéas 1 et 11, cette ordonnance devra être prise dans un délai de dix-huit mois à compter de la promulgation de la loi, et le projet de ratification de celle-ci déposé devant le Parlement dans les six mois de la publication de l’ordonnance.

Comme l’indique l’étude d’impact annexée au projet de loi, la mise en œuvre des dispositions figurant dans l’ordonnance requerra ensuite l’édiction de plusieurs décrets d’application, pour définir, entre autres, les modalités de recueil des candidatures à la fonction de conseiller prud’hommes.

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La Commission adopte cet article sans modification.

Article 2

Prorogation du mandat des conseillers prud’hommes actuellement en fonction

Cet article vise à proroger le mandat des conseillers prud’hommes actuellement en fonction et à procéder aux adaptations rendues nécessaires par cette prorogation.

Ces dispositions ne figuraient pas dans le projet de loi initial, déposé le 28 mars 2014 au Sénat. En effet, le 10° de l’article unique de ce dernier proposait un système différent, consistant à déterminer par ordonnance un régime transitoire applicable, d’une part, à la durée du mandat des conseillers prud’hommes, et, d’autre part, à la désignation des conseillers du collège des employeurs jusqu’à l’entrée en vigueur du dispositif de mesure de l’audience des organisations patronales issu de la loi du 5 mars 2014 précitée.

La lettre rectificative du Premier ministre du 16 juillet 2014 a supprimé ce 10° et retenu une solution plus simple, qui consiste à proroger le mandat des conseillers prud’hommes actuels et à régler directement au sein du projet de loi les conséquences de cette prorogation, notamment en termes de formation.

Lors de son examen en séance publique, le 14 octobre dernier, le Sénat a adopté cet article en modifiant la rédaction de son dernier alinéa, à l’initiative de la rapporteure et avec l’avis favorable du Gouvernement, pour rendre celle-ci plus précise (11).

1.  La prorogation du mandat des conseillers prud’hommes en fonction

Le I du présent article vise, tout d’abord, à proroger le mandat des conseillers prud’hommes aujourd’hui en fonction, jusqu’à leur prochain renouvellement général, dont la date sera ultérieurement fixée par décret. Dans tous les cas, ce renouvellement général devra intervenir au plus tard le 31 décembre 2017.

Cette solution, distincte de celle proposée par le projet de loi initial, présente l’avantage de la simplicité et de la clarté. Elle se justifie pour des raisons opérationnelles et de cohérence du dispositif de désignation des juges, que rappelle l’encadré ci-dessous. Elle permet, en effet, de maintenir un mode unifié de désignation des représentants des collèges des salariés et des employeurs, ainsi que d’articuler le calendrier du renouvellement général des conseillers prud’hommes avec celui du cycle quadriennal de mesure de l’audience des organisations syndicales et patronales, dont la prochaine échéance interviendra en 2017.

Les raisons justifiant le choix d’une prorogation des mandats
d’après la lettre rectificative du premier ministre

Dans la version initiale du projet de loi transmise au Parlement, le Gouvernement avait prévu une habilitation visant à aménager un dispositif transitoire pour la période allant de 2015 à 2017. Celui-ci aurait consisté, d’une part, en une désignation des conseillers du collège salariés en fonction des résultats des élections professionnelles de 2008 et, d’autre part, en une désignation des conseillers du collège employeurs selon des règles ad hoc valables de façon transitoire, dans l’attente de la première mesure de la représentativité patronale.

Au regard du nouveau cadre législatif résultant de la loi du 5 mars 2014 et compte tenu des concertations conduites depuis l’adoption en conseil des ministres du projet de loi initial, le Gouvernement propose de proroger le mandat des conseillers de prud’hommes de deux ans, soit jusqu’au 31 décembre 2017.

Cette solution se justifie de plusieurs points de vue :

– du point de vue de l’équilibre et de la cohérence du dispositif, afin d’éviter pour les années 2016 et 2017 un hiatus difficile à justifier entre le mode de désignation applicable aux représentants des salariés (désignation en fonction de l’audience) et le mode de désignation applicable aux représentants des employeurs (désignation ad hoc et ne pouvant, par construction, être fondée sur l’audience) ;

– du point de vue opérationnel : la mise en place d’un mode de désignation ad hoc pour le collège employeurs aurait conduit, in fine, soit à se baser sur les résultats des élections de 2008 qui fondent les actuels mandats (ce qui rendait dès lors peu utile le choix de procéder au renouvellement des conseillers en place), soit à devoir procéder à une nouvelle forme de consultation occasionnant une procédure particulièrement lourde et dont le principe même aurait été contradictoire avec l’objectif de la réforme ;

– du point de vue pratique, les conseillers du collège salarié n’étant alors désignés et formés que pour une durée de deux ans avant le renouvellement des deux collèges devant intervenir en 2017.

Source : Lettre rectificative au projet de loi relatif à la désignation des conseillers prud’hommes, présentée par le Premier ministre au Président du Sénat le 16 juillet 2014.

2.  Le traitement des conséquences de la prorogation proposée

Les II et III traitent, ensuite, des conséquences de la prorogation proposée, en procédant aux adaptations qu’elle induit.

L’octroi de jours d’autorisation d’absence supplémentaires

Le II a ainsi pour objet d’octroyer des jours d’autorisation d’absence supplémentaires aux salariés exerçant la fonction de conseillers prud’hommes, sur leur demande et pour répondre à leurs besoins de formation jusqu’au terme de leur mandat prolongé.

En effet, l’article L. 1442-2 du code du travail prévoit aujourd’hui que les employeurs doivent accorder à leurs salariés, membres de conseils de prud’hommes, des autorisations d’absence rémunérées, à la demande de ces derniers et pour les besoins de leur formation, dans la limite de six semaines par mandat.

Or, le mandat des conseillers prud’hommes actuels ayant débuté en 2008, certains d’entre eux ont d’ores et déjà épuisé leur quota de six semaines de formation. Ceux-ci ne pourraient donc plus participer à des formations au cours des trois prochaines années, alors que ces dernières s’avèrent utiles jusqu’en fin mandat, pour maintenir les connaissances des juges prud’homaux actualisées au vu des changements législatifs et réglementaires fréquents du droit social.

Il apparaît dès lors nécessaire d’augmenter ce quota et d’offrir à tous les conseillers prud’hommes la possibilité de bénéficier d’autorisations d’absence supplémentaires pour la période de prorogation de leur mandat.

Le 1° du II propose, tout d’abord, d’accorder six jours d’autorisation d’absence supplémentaires au titre de la première prolongation du mandat des conseillers, opérée par la loi du 15 octobre 2010 (12) et qui court du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2015. Cette loi avait, en effet, procédé à une première prorogation des mandats, sans en tirer les conséquences en matière de droit à formation, une erreur que le 1° du II a pour but de réparer.

Le 2° du II prévoit, ensuite, d’accorder six autres jours d’autorisation d’absence supplémentaires au titre de la deuxième prolongation du mandat des conseillers prud’hommes, opérée par le I, et qui courra du 1er janvier 2016 à la date du prochain renouvellement général, qui doit intervenir au plus tard le 31 décembre 2017.

Ces autorisations d’absence supplémentaires obéiront au même régime que celles de droit commun prévues à l’article L. 1442-2 du code du travail précité : leur durée ne pourra pas être imputée sur celle des congés payés, conformément à l’article L. 3142-12 du même code, et elles seront rémunérées par l’employeur, qui pourra lui-même s’en prévaloir pour sa participation au financement de la formation professionnelle.

D’après l’étude d’impact annexée au projet de loi, l’octroi de ces autorisations d’absence supplémentaires implique l’élaboration et la publication de décrets d’application, pour prolonger à la fois les agréments des organismes de formation prud’homale et la durée des conventions qu’ils ont signées avec l’État.

Pour mémoire, en 2013, près de 10 000 conseillers prud’hommes ont participé à quelque 1 330 sessions de formation, pour un coût total de 6,4 millions d’euros.

L’assouplissement des règles de pourvoi des sièges vacants

Par ailleurs, la prorogation des mandats des conseillers prud’hommes pourrait engendrer, en pratique, des difficultés de vacance de sièges dans les juridictions.

Aujourd’hui, l’article L. 1423-10 du code du travail prévoit que, lorsque le président du conseil de prud’hommes constate une difficulté provisoire de fonctionnement d’une section, il peut, après avis conforme du vice-président et sous réserve de l’accord des juges intéressés, affecter temporairement les conseillers prud’hommes d’une section à une autre. Ces affectations sont prononcées pour une durée de six mois, renouvelable deux fois.

Afin d’anticiper les problèmes de vacance qui pourraient surgir au cours de la période de prolongation des mandats, le III propose d’augmenter le nombre de renouvellements possibles des affectations temporaires, en autorisant que celles-ci soient renouvelées plus de deux fois jusqu’à la date du prochain renouvellement général des conseillers prud’hommes.

Toutefois, cette procédure dérogatoire ne pourrait être mise en œuvre qu’à la condition que la vacance constatée ne puisse être pourvue par la procédure de droit commun, prévue à l’article L. 1442-4 du même code, selon laquelle les candidats placés sur une liste immédiatement après le dernier candidat élu sont appelés à remplacer les conseillers élus sur cette liste dont le siège deviendrait vacant.

D’après les informations fournies par le Gouvernement, les cas de vacance demeurent toutefois rares en pratique. Entre 2009 et 2013, seules 25 élections complémentaires ont été organisées suite à des démissions, principalement dans le collège des employeurs, pour plus de 14 500 conseillers prud’hommes au total.

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La Commission adopte cet article sans modification.

M. Gérard Cherpion. Nous nous abstenons sur le vote de ce projet de loi, des points peuvent effectivement faire débat, pour lesquels un consensus pourrait être trouvé sous réserve d’un certain nombre d’explications supplémentaires. Je dois encore entendre l’ensemble des partenaires sociaux, notre décision sera alors prise.

Mme la rapporteure. Nous aurons, monsieur Cherpion, le débat jeudi prochain avec le ministre et je ne doute pas, qu’à cette occasion, vous obteniez réponse à toutes vos questions.

La Commission adopte l’ensemble du projet de loi sans modification.

ANNEXE :
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

(par ordre chronologique)

Ø Table ronde regroupant des représentants des syndicats de salariés membres du Conseil supérieur de la prud’homie :

Confédération générale du travail (CGT) – M. Bernard Augier, conseiller juridique, et Mme Christine Pourre

Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC) – M. Denis Lavat, secrétaire fédéral adjoint

Confédération générale du travail – Force ouvrière (CGT-FO) – Mme Véronique Lopez-Rivoire, responsable du service juridique

Confédération française démocratique du travail (CFDT) * – M. Laurent Loyer, secrétaire confédéral au service juridique, en charge des questions Prud’hommes

Ø Ministère du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social – Direction générale du travail – Mme Valérie Delahaye-Guillocheau, chef de service, et Mme Catherine Vedrenne, chef du bureau des prud’hommes

Ø Confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME) – M. Jean-Louis Jamet, vice-président délégué, et M. Richard Muscatel, chef de file national Prud’hommes, membres du conseil supérieur de la prud’homie

Ø Cabinet du ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social – Mme Bethânia Gaschet, directrice adjointe du cabinet, et M. Damien Ranger, conseiller parlementaire

Ce représentant d’intérêts a procédé à son inscription sur le registre de l’Assemblée nationale, s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale.

© Assemblée nationale

1 () Loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale.

2 () Projet de loi n° 1722 relatif à la désignation des conseillers prud’hommes, déposé à l’Assemblée nationale le 22 janvier 2014.

3 () Projet de loi n° 423 relatif à la désignation des conseillers prud’hommes, déposé au Sénat le 28 mars 2014.

4 () Lettre rectificative au projet de loi relatif à la désignation des conseillers prud’hommes, présentée par le Premier ministre au Président du Sénat le 16 juillet 2014.

5 () Loi n° 2008-789 du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail.

6 () Aux termes de l’article L. 2122-10-1 du code du travail, en vue de mesurer l’audience des organisations syndicales auprès des salariés des entreprises de moins de onze salariés, un scrutin sur sigle est organisé au niveau régional tous les quatre ans.

7 () Il faut signaler ici que des règles spécifiques s’appliquent aux organisations nationales multi-professionnelles, comme le prévoit l’article L. 2152-2 du code du travail.

8 () « Pour le renforcement de la légitimité de l’institution prud’homale : quelle forme de désignation des conseillers prud’hommes ? », Rapport au ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique, M. Jacky Richard et M. Alexandre Pascal, avril 2010.

9 () Loi n° 2010-1215 du 15 octobre 2010 complétant les dispositions relatives à la démocratie sociale issues de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008.

10 () Voir l’exposé général du présent rapport.

11 () Amendement n° 5 de précision rédactionnelle, présenté par Mme Emery-Dumas, rapporteure au nom de la Commission des affaires sociales du Sénat.

12 () Loi n° 2010-1215 du 15 octobre 2010 complétant les dispositions relatives à la démocratie sociale issues de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008.