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N
° 3356

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 16 décembre 2015.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE SUR LA PROPOSITION DE LOI visant à intégrer le principe de substitution dans le cadre réglementaire national applicable aux produits chimiques (n° 3277).

PAR M. Jean-Louis ROUMÉGAS

Député

——

Voir le numéro :

Assemblée nationale : 3277.

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 5

TRAVAUX DE LA COMMISSION 13

I. DISCUSSION GÉNÉRALE 13

II. EXAMEN DES ARTICLES 29

Article 1er (article L. 521-5-1 et L. 521-5-2 [nouveaux] du code de l’environnement) : Obligation d’examiner les possibilités de substitution de certaines substances chimiques 29

Article 2 (article 244 quater : B du code général des impôts) : Incitation fiscale par le biais du crédit d’impôt recherche 37

Article 3 (article L. 1313-10-1 [nouveau] du code de la santé publique) : Utilisation d’un pictogramme « déconseillé aux femmes enceintes » 40

Titre 41

TABLEAU COMPARATIF 43

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 49

INTRODUCTION

Le monde fait face à une épidémie de maladies chroniques.

Le 20 septembre 2011, l’Assemblée générale des Nations Unies a reconnu « le fardeau et la menace que représentent les maladies non-transmissibles à échelle mondiale » et le rôle primordial des gouvernements pour y répondre.

En France comme dans le reste du monde, cancers, maladies cardio-vasculaires, maladies respiratoires, obésité, diabète, maladies neurologiques, troubles de la reproduction, mettent en danger nos populations et la pérennité de nos systèmes de santé.

La vision classique d’une augmentation de ces maladies liée au vieillissement de la population, à la sédentarité, aux progrès du dépistage et aux seules conséquences du tabagisme et de l’alcool, apparaît de moins en moins pertinente.

La communauté scientifique a accumulé les preuves du lien entre ces maladies chroniques et l’environnement au sens large, de la pollution de l’air, de l’eau, des sols, à notre façon de produire, nos conditions de travail, d’habitat, d’alimentation.

Nous avons tous les éléments pour comprendre que la diminution de l’espérance de vie en bonne santé de nos populations est l’indicateur d’une mauvaise qualité de notre environnement, et que toute dégradation de notre environnement a un impact sur notre santé.

Les réponses institutionnelles

Le projet de loi de modernisation de notre système de santé, définitivement adopté par l’Assemblée nationale le 17 décembre 2015 a reconnu pour la première fois le concept d’exposome, soit l’exposition globale des populations à des facteurs non-génétiques susceptibles d’altérer la santé.

Parmi les facteurs de risque, les substances chimiques que l’on trouve dans notre environnement sont les mêmes que l’on retrouve dans notre sang et qui perturbent notre système hormonal.

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) évalue à 5 millions par an les décès liés aux substances chimiques, soit 8 % de la mortalité mondiale. Selon Achim Steiner, directeur exécutif du programme des Nations Unies pour l’Environnement, « les produits chimiques occupent une place de plus en plus importante dans la vie moderne et sont essentiels à beaucoup d’économies nationales, mais leur gestion irrationnelle remet en cause la réalisation d’objectifs de développement essentiels et le développement durable pour tous ».

Cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques (CMR), perturbateurs endocriniens, polluants volatils, métaux lourds, nanomatériaux, additifs alimentaires sont autant de substances auxquelles nos populations sont exposées quotidiennement et tout au long de la vie. Le coût sanitaire annuel des seuls perturbateurs endocriniens s’élèverait à 157 milliards d’euros dans l’Union européenne (1,2 % du PIB). En France, celui de la pollution de l’air intérieur est évalué à 19 milliards d’euros par an par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES).

En interdisant le bisphénol A dans les biberons, puis dans les contenants alimentaires, la France s’est portée à l’avant-garde de la lutte contre les perturbateurs endocriniens au niveau européen.

Mais cette avancée est symbolique au regard de l’ensemble des substances chimiques auxquelles nos populations sont exposées : la Société chimique américaine en répertorie 100 millions dans le monde ; il s’en invente 10 000 par jour ; elles sont plus de 100 000 en circulation dans l’Union européenne.

À l’échelon européen, le règlement n°1907/2006 REACH, qui vise à une gestion des risques liés à l’utilisation des substances chimiques, a constitué une avancée majeure et est devenu une source d’inspiration pour plusieurs pays dans le monde. Il a provoqué une modification culturelle chez les consommateurs, qui plébiscitent davantage les produits qui ne menacent pas leur santé ou l’environnement.

Cependant, le faible nombre de substances sur lequel porte le règlement REACH ainsi que l’absence de disposition relatives aux « effets cocktail » (mélange de plusieurs substances) et aux perturbateurs endocriniens limitent sérieusement son efficacité.

Le principe de substitution

En 2001, dans son Livre blanc sur la politique en matière de substances chimiques, la Commission européenne a reconnu que le principe de substitution est un objectif majeur pour mettre en place un véritable régime de protection de la santé humaine et de l’environnement.

En 2003, la Commission royale britannique sur la pollution de l’environnement soulignait que « l’incertitude considérable inhérente à notre compréhension de la façon dont les substances chimiques interagissent avec l’environnement exige une approche précautionneuse, qui sera le mieux mise en œuvre par la substitution », et recommandait au gouvernement britannique « d’adopter la substitution comme objectif central de sa politique chimique. »

Le principe de substitution peut être défini comme « le remplacement des substances dangereuses par des alternatives sans danger, quand de telles alternatives existent et à un coût économique raisonnable ».

Actuellement, aucune contrainte législative au niveau européen ou national ne favorise la substitution de substances suspectées mais non règlementées.

En France, un premier pas a été fait, lors de la Conférence environnementale en 2015 : un groupe de travail doit définir une méthodologie d’évaluation des solutions de substitution des perturbateurs endocriniens ; les principaux industriels concernés pourront déposer des projets collaboratifs à l’occasion d’appels à projets du fonds unique interministériel.

Les entreprises et le pari de la substitution

Pour certaines entreprises, la substitution constitue déjà un objectif à atteindre. Néanmoins, de nombreuses organisations s’accordent sur le fait qu’en l’absence d’incitation réglementaire, la substitution sera marginale et l’objectif de protection des populations ne sera jamais atteint ; un rapport de 2003 de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) démontre l’inefficacité des approches volontaires, tant sur l’étendue des démarches que d’un point de vue économique : si le coût d’une alternative plus sûre est tropélevé en raison d’une faible demande, l’innovation sera faible – en particulier dans les PME, qui ont plus de difficultés économiques à adopter l’alternative.

Lors des rencontres et auditions qui ont conduit à l’élaboration de cette proposition de loi, les représentants des entreprises ont souligné que leurs choix se portent plus naturellement vers des substances suspectées, mais dont elles connaissent les risques, que vers de nouvelles substances dont elles ne savent rien, et pour lesquelles le coût de la recherche éco-toxicologique est élevé.

Par ailleurs, nombreuses sont les entreprises qui adoptent des pratiques exemplaires, mais qui peinent à faire valoir leurs efforts et à y trouver un avantage compétitif. En dépit des progrès réalisés en matière de connaissance des substances et d’une meilleure communication dans la chaîne d’approvisionnement, la profession regrette de ne pas observer d’impact positif du règlement REACH sur la confiance que le grand public accorde aux produits chimiques. Elle observe que l’Agence européenne des produits chimiques n’affiche que les aspects négatifs de la chimie et ne valorise pas la substitution, car son rôle se limite à la gestion des aspects négatifs.

À rebours des idées reçues, plusieurs études démontrent qu’une contrainte règlementaire sur les produits chimiques est de nature à amorcer un processus d’innovation favorable au secteur de la chimie et à la recherche. Un exemple parmi d’autres : les dépôts de brevets internationaux ont augmenté à l’annonce d’une législation plus contraignante sur les phtalates ; il a suffi de jouer sur le nombre d’atomes d’hydrogène d’un phtalate incriminé pour trouver une nouvelle molécule présentant les caractéristiques d’un phtalate sans en être un.

L’intervention du législateur apparaît donc nécessaire pour favoriser l’innovation dans le secteur de l’industrie chimique sujette à une grande inertie en raison de l’importance des coûts.

L’innovation est d’autant plus nécessaire que l’industrie chimique est confrontée à la pression croissante des consommateurs, des détaillants et des investisseurs, qui exigent des produits plus sûrs sans distinction dans une même famille de substances ou selon l’usage qui en est fait. Ce climat anxiogène, parfois irrationnel, dicté par la rumeur, ne profite pas à l’industrie. Dans le même temps, les économies émergentes se positionnent pour devenir des leaders de la chimie innovante.

Si la chimie peut poser problème, c’est aussi une partie de la solution aux grandes questions liées à la santé, l’environnement, le changement climatique. La France l’a compris, comme en témoigne la mise en place, en 2014, du projet d’investissement d’avenir Pivert (Picardie innovations végétales, enseignements et recherches technologiques), le premier centre européen de recherche, d’innovation et d’expérimentation dans la chimie du végétal à base de biomasse oléagineuse.

Au vu de ce contexte, le moment est opportun pour imaginer une stratégie de substitution des substances chimiques préoccupantes et remettre la chimie au service du bien-être de nos populations.

Le dispositif

On ne peut que s’étonner de l’absence, en France et en Europe, d’une forme d’incitation réglementaire à la substitution, mais aussi d’une plateforme d’accompagnement des industriels dans leurs démarches.

Une loi française aurait un impact significatif sur la perception par l’Union européenne de la question de la substitution. Tel est l’objectif de cette proposition de loi, qui prévoit un dispositif innovant rassemblant l’ensemble des acteurs dans un esprit de confiance restaurée et respectueux des contraintes imposées par le droit européen.

Ce dispositif reconnaît un devoir d’audit des substances chimiques à tout fabricant, importateur, utilisateur en aval soumis, dans l’exercice de ses activités industrielles, au règlement européen CLP (classification et étiquetage des produits).

L’hypothèse centrale du dispositif est qu’un processus de recensement obligatoire est nécessaire pour faire découvrir aux entreprises des possibilités de substitution ou d’usage différent, et les inciter à les adopter.

En matière d’obligation de moyens, il existe déjà dans notre droit des dispositifs similaires, parmi lesquels l’obligation de réalisation d’un audit énergétique pour les entreprises de plus de 250 salariés fixée par la loi n° 2013-619 du 16 juillet 2013. Il n’y a aucune contrainte de mise en œuvre.

Le devoir de recensement s’inscrit dans un esprit d’anticipation. Il a pour ambition d’inciter les professionnels à ne plus attendre passivement la règlementation de substances suspectées, lorsqu’une alternative à un coût raisonnable existe.

Accompagner les entreprises

Cette ambition n’est réalisable qu’à condition d’accompagner les entreprises. Les entreprises florissantes de demain sont celles qui auront su s’adapter à la complexité des échanges commerciaux dans le monde, il est du devoir des États de les encourager à anticiper les contraintes réglementaires.

Ces entreprises, selon leur place dans la chaîne de production, qu’il s’agisse de grands groupes ou de PME, n’ont pas toujours des intérêts convergents. Deux besoins communs ont été identifiés lors des auditions menées pour cette proposition de loi :

– une plateforme de validation des tests sur les perturbateurs endocriniens ; les lignes directrices de l’OCDE en comptent plus de cent, mais des lacunes demeurent et des investissements sont nécessaire à la mise au point de tests in vitro et in vivo adaptés pour établir l’innocuité ou la dangerosité d’un produit même à très faible dose.

– une plateforme d’aide technique, scientifique, administrative et financière à la substitution.

Les entreprises soulignent également la nécessité d’une projection officielle claire sur l’avenir de la réglementation de toutes les substances dites « gris clair à gris foncé », soit suspectées mais non encadrées par le règlement REACH.

Une perspective clarifiée pour les agences de l’État

En France, l’aide technique à la substitution se limite à un site Internet proposé par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail sur le partage d’expériences de substitution réussies de substances CMR, et à un accompagnement de l’Institut national de l’environnement industriel et du risque scientifique (INERIS) pour la substitution du seul bisphénol A.

Au niveau européen, il n’existe pas non plus de plateforme d’aide à la substitution. Ce rôle est assumé par l’ONG suédoise ChemSec, dont le travail considérable constitue la seule base de données publique d’aide à la substitution, substance par substance. La liste que cette ONG publie est, selon Geert Dancet, directeur exécutif de l’Agence européenne des produits chimiques, « une initiative qui aide les autorités comme les entreprises à savoir quelles substances seront bientôt placées par la Commission européenne sur la liste des substances préoccupantes. »

Sans remettre en cause cette initiative d’intérêt général, on peut se demander s’il est légitime qu’une ONG se substitue aux agences nationales et si cela ne révèle pas une lacune du dispositif européen. Il semble opportun, a minima, d’instaurer une collaboration entre nos agences nationales et cette initiative.

Par ailleurs, l’aide financière à la substitution en France est émiettée : on ne recense pas moins de sept outils d’aide à la substitution, parmi lesquels le crédit impôt recherche ou le fonds unique interministériel. Cette complexité administrative, à laquelle pourrait répondre un guichet unique d’aide à la substitution, compte parmi les freins identifiés par les entreprises.

Le dispositif propose donc une plateforme d’aide aux entreprises pilotée par l’Institut national de l’environnement industriel et du risque scientifique (INERIS).

Cette plateforme met à disposition des entreprises, par l’intermédiaire d’un site internet, un recensement de la littérature scientifique existante sur chaque substance suspectée, l’état de sa réglementation européenne et dans le reste du monde, ainsi que les expériences de substitution réussies. La liste des substances à examiner en priorité est définie par l’INERIS, après avis de l’ANSES.

En complément de cette plateforme, il convient d’étudier les conditions pour garantir, sur une durée limitée, l’éligibilité du crédit impôt recherche et du crédit impôt innovation pour la recherche de substances ou d’un ensemble de substances alternatives, et d’outils d’évaluation en éco-toxicologie.

Les exemples étrangers

La France ne serait pas le premier État à accompagner ses entreprises vers une réduction de l’utilisation de substances préoccupantes.

En 1989, le Parlement de l’État du Massachusetts a adopté une loi de réduction des produits toxiques, dite « loi Tura » (toxics use reduction act) qui investit les entreprises de trois responsabilités.

D’abord, elles doivent délivrer un rapport annuel sur l’ensemble de leurs utilisations. Ensuite, les entreprises doivent suivre un processus de « planification de réduction de produits chimiques toxiques ».

Les entreprises doivent conserver une copie du plan dans les locaux de l’installation, afin que les inspecteurs de l’État puissent y avoir accès à tout moment lors de leurs inspections – même si la signature du planificateur suffit généralement pour garantir la bonne qualité du plan.

Enfin, les entreprises doivent payer une contribution – entre 3 000 et 35 000 dollars par an – couvrant les frais des services pourvus par l’État pour les aider à respecter leurs obligations.

Le service local de protection de l’environnement reçoit les rapports des entreprises, certifie les planificateurs et assure l’application de la loi.

Deux autres agences ont été créées spécifiquement par la loi Tura :

– le bureau d’assistance technique, formé d’ingénieurs qui se déplacent dans les installations demandeuses pour offrir avis et conseils techniques relatifs à la réduction des produits chimiques toxiques ;

– l’Institut de réduction de produits toxiques (Turi) est chargé de toutes les autres activités découlant de la loi Tura : formation des planificateurs, versement des subventions, organisation de la recherche, analyses des alternatives, appui technique aux entreprises, gestion d’un laboratoire travaillant avec les entreprises pour trouver des solutions, gestion d’une bibliothèque d’information spécialisée dans les produits chimiques et les alternatives.

Au cours des dix premières années du programme, les entreprises du Massachusetts ont réduit l’utilisation de produits toxiques de 40 % et les rejets dans l’air, l’eau et les sols de 90 %. Au cours des onze années suivantes (2000 à 2011), l’utilisation de produits toxiques a encore chuté de 20 % et les émissions de 70 %.

En Suède, le gouvernement fournit une aide à l’industrie par le biais de sa base de données interactive Prio, qui contient aussi bien les substances réglementées que celles qui ne sont pas couvertes par une réglementation. Prio fournit des informations sur les propriétés sanitaires et environnementales intrinsèques de ces substances. Par le biais d’un site web interactif, elle permet aux entreprises d’évaluer leurs utilisations de substances chimiques, d’étudier les opportunités de réduction des risques par la substitution et d’anticiper les législations à venir.

L’ONG ChemSec, sur son site Internet Subsport, rassemble la banque de donnée sur la substitution la plus complète en Europe.

Au Danemark, la banque de cas de substitution Catsub est un portail donnant accès à des expériences réussies de substitution de matières dangereuses dans différents secteurs et procédés. Il contient des centaines de cas de substitutions menées par des entreprises, des professionnels ainsi que des chercheurs.

En Allemagne, le BAuA (Institut allemand de sécurité et de santé au travail) propose plusieurs outils d’aide à la substitution.

Loin d’être un frein économique, le dispositif valorisera les bonnes pratiques mises en œuvre par les entreprises. Les modalités de cette valorisation seront définies par un décret en conseil d’État.

Cette proposition de loi pose des principes d’intérêt général. Le dialogue entre toutes les parties prenantes doit permettre d’affiner le dispositif, au service de la protection des populations.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. DISCUSSION GÉNÉRALE

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Ce matin, mercredi 16 décembre 2015, nous examinons la proposition de loi visant à intégrer le principe de substitution dans le cadre réglementaire national applicable aux produits chimiques, que le groupe Écologiste a inscrit dans la journée réservée du jeudi 14 janvier 2016 et sur laquelle nous avons nommé rapporteur M. Jean-Louis Roumégas.

Compte tenu de la suspension des travaux parlementaires du 18 décembre au 12 janvier, il est nécessaire d’examiner aujourd’hui cette proposition de loi.

À l’issue du délai de dépôt, le secrétariat de la Commission a enregistré quarante-cinq amendements, dont dix-sept ont été retirés par leurs auteurs avant leur publication.

L’amendement CD41 de M. Jean-Louis Roumégas a été déclaré irrecevable au titre de l’article 40, car créant une charge pour un établissement public.

Il nous reste donc vingt-sept amendements à examiner.

M. Jean-Louis Roumégas, rapporteur. Je commencerai la présentation de cette proposition de loi en évoquant les mots prononcés par le Président de la République lors de la Conférence environnementale de novembre 2014 : « Le XXIsiècle doit être le siècle de l’hygiène chimique ». Il faisait référence à l’augmentation des maladies chroniques, des cancers, des maladies cardio-vasculaires, des maladies respiratoires, de l’obésité, du diabète, des maladies neurologiques, des troubles de la reproduction, qui menacent la santé des populations et la pérennité de nos systèmes de santé.

Les chiffres de l’assurance maladie sont têtus : songez que, si le taux des maladies chroniques était le même qu’il y a quinze ans, le déficit de l’assurance maladie serait nul.

La vision classique d’une augmentation de ces maladies liée au vieillissement de la population, à la sédentarité, aux progrès du dépistage et aux seules conséquences du tabagisme et de l’alcool, apparaît de moins en moins pertinente.

Nous disposons de tous les éléments pour comprendre que la diminution de l’espérance de vie en bonne santé de nos populations est l’indicateur d’une mauvaise qualité de notre environnement et que toute dégradation de celui-ci a un impact sur notre santé.

Cette proposition de loi apporte un début de réponse à l’épidémie de maladies chroniques reconnues par l’OMS, en agissant à la source des pollutions causées par les substances toxiques. Cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques (CMR), perturbateurs endocriniens, polluants volatils, métaux lourds, nanomatériaux, additifs alimentaires sont autant de substances auxquelles nous sommes exposés quotidiennement et tout au long de la vie.

S’il est un constat que nous devons partager, c’est que le temps de la chimie ne sera jamais celui de la réglementation : 100 millions de substances chimiques sont répertoriées dans le monde, il s’en invente 10 000 par jour, 143 000 sont en circulation dans l’Union européenne, et le règlement REACH n’en cible que 30 000.

Oui, à l’échelon européen, REACH a constitué une avancée juridique majeure. Pour la première fois, des obligations ont renversé la charge de la preuve des autorités publiques vers l’industrie. Ce règlement est une source d’inspiration pour plusieurs pays dans le monde.

Non, REACH ne suffit pas aujourd’hui à protéger efficacement nos populations.

Ce fut l’objet d’un long débat lors de sa création : le règlement REACH est basé sur le principe de gestion, non sur celui de substitution. En dehors de trente substances dites « soumises à autorisation », rien n’oblige les industriels à substituer une substance – CMR, par exemple – reconnue toxique au-delà d’un certain seuil, même lorsqu’il existe sur le marché une alternative à coût économique raisonnable. Cette logique est inadaptée au nouveau paradigme toxicologique qui s’impose avec les perturbateurs endocriniens : les effets sur la santé sont plus nocifs à faible dose qu’à forte dose, et lorsque les substances interagissent entre elles par « effet cocktail ».

De plus, faute de moyens, seuls 5 % des dossiers sont effectivement contrôlés, alors que, selon l’Agence européenne des produits chimiques, 60 % des dossiers sont incomplets. Ce constat est partagé par les gouvernements des pays scandinaves qui ont appelé, dans une lettre à la Commission européenne de mars 2015, à mettre en place des réponses complémentaires à REACH.

À ceux qui considèrent que la France doit attendre un battement de cil de la Commission européenne pour agir à l’échelon national, a fortiori en matière de santé publique, je veux dire ceci : cette posture désespère les populations, qui l’expriment dans les urnes – je vous renvoie au scrutin de dimanche dernier…

À la minute où je vous parle, la Cour européenne de justice rend son jugement sur la plainte déposée par la Suède contre la Commission européenne pour n’avoir pas établi, comme elle s’y était engagée, une définition des perturbateurs endocriniens, en 2013. Je rappelle que la France s’est jointe à la plainte de la Suède et que la Commission européenne a été condamnée ce matin. Combien d’années faudra-t-il avant de répondre à nos concitoyens qui, étude après étude, découvrent qu’ils sont exposés à des perturbateurs endocriniens dans leur alimentation, l’eau qu’ils boivent, leurs vêtements, leurs meubles, leurs produits d’entretien, leurs poches de perfusion ou les jouets de leurs enfants ?

L’ONG ChemSec, dans une liste qui sert de référence à la Commission européenne, évalue à 830 les substances hautement préoccupantes selon les critères de REACH, mais qui ne sont aujourd’hui ciblées par aucun règlement : au rythme de REACH – trente substances « soumises à autorisation » depuis 2007 –, il faudra 100 ans pour inciter les industriels à substituer ces substances.

Je vous propose donc d’examiner un dispositif visant à intégrer le principe de substitution dans le cadre réglementaire national et dans le respect des contraintes imposées par le droit européen. Le principe de substitution peut être défini comme le « remplacement des substances dangereuses par des alternatives sans danger, quand de telles alternatives existent et à un coût économique raisonnable ».

Pour certaines entreprises, la substitution constitue déjà un objectif à atteindre. Néanmoins, plusieurs études s’accordent sur le fait qu’en l’absence d’incitation réglementaire, la substitution sera marginale : un rapport de l’OCDE de 2003 démontre l’inefficacité des approches volontaires, tant sur l’étendue des démarches que d’un point de vue économique.

Les interventions du législateur sont donc particulièrement indiquées pour favoriser l’innovation dans le secteur de la chimie, sujet à une grande inertie due à de fortes économies d’échelle et à des lacunes dans l’information des consommateurs.

L’innovation est d’autant plus nécessaire que l’industrie chimique est confrontée à la pression croissante des consommateurs, des détaillants et des investisseurs, qui exigent des produits plus sûrs. Un climat anxiogène, parfois irrationnel, dicté par la rumeur, fragilise l’industrie. Dans le même temps, les économies émergentes se positionnent pour devenir des leaders de la chimie innovante.

Enfin, les entreprises qui adoptent des pratiques exemplaires peinent à faire valoir leurs efforts et à y trouver un avantage compétitif. Elles observent que l’Agence européenne des produits chimiques n’affiche que les aspects négatifs de la chimie et ne valorise pas la substitution, car son rôle se limite à la gestion des aspects négatifs.

Au vu de ce contexte, le moment est opportun pour imaginer une stratégie de substitution des substances chimiques préoccupantes et remettre la chimie au service du bien-être de nos populations.

Je tiens, à ce stade, à préciser la méthode qui a guidé cette proposition de loi. Nous avons mené, dans le cadre de mon rapport d’information sur les perturbateurs endocriniens en 2013, puis au cours de ces derniers mois, une vingtaine d’auditions, des agences sanitaires – l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), et l’institut national de l’environnement industriel et des risques (INERIS) –, aux entreprises, comme Carrefour, ou aux producteurs, comme Bayer, l’Union des industries chimiques, la Fédération des cosmétiques – majors et PME –, la Fédération des entreprises de la beauté (FEBEA), COSMED et Solvay, en passant par les organisations non gouvernementales (ONG) nationales et européennes et les cabinets de consulting, qui font déjà du conseil aux entreprises en matière de substitution.

Cette proposition de loi pose des principes d’intérêt général. Le dialogue doit permettre d’affiner le dispositif, au service de la protection des populations et dans un esprit de confiance restaurée entre services publics, État, industries et consommateurs.

Le dispositif préconisé par cette proposition de loi reconnaît dans son article 1er un devoir d’audit des substances chimiques préoccupantes et des alternatives existantes, sur la base d’une liste qui serait définie par le Gouvernement. Le pari central du dispositif est qu’un processus de recensement obligatoire est nécessaire pour faire découvrir aux entreprises des possibilités de substitution ou d’usage différent, et les inciter à les adopter. Ce devoir de recensement consiste simplement en une obligation de moyens : la mise en œuvre des options identifiées dans le plan est volontaire. Son degré d’analyse et, par conséquent, son coût, sont modestes.

Notre ambition n’est réalisable qu’à condition d’accompagner les entreprises. En France, l’aide technique à la substitution se limite à un site internet proposé par l’Anses sur le partage d’expériences de substitution réussies de substances CMR et à un accompagnement de l’INERIS pour la substitution du seul bisphénol A.

Au niveau européen, il n’existe pas non plus de plateforme officielle d’aide à la substitution, mais il existe des plateformes associatives et des plateformes nationales dans les pays scandinaves.

Nous proposons que l’INERIS mette en place une banque de données de substitutions réussies ou de pistes de substitution pour les substances de la liste définie. La plateforme de l’INERIS permettra également aux entreprises de savoir sur quelles substances elles pourraient mutualiser leurs efforts de recherche en matière de substitution.

Nous proposons également que le Gouvernement établisse un label qui valorise les démarches vertueuses. Il pourrait s’agir d’un label rassurant les investisseurs des entreprises concernées sur le degré d’anticipation des entreprises vis-à-vis de la réglementation chimique.

Nous proposons enfin, à l’article 2, une incitation fiscale, sous la forme d’une majoration du crédit d’impôt recherche pour les entreprises ayant réalisé des démarches de substitution vertueuses.

Enfin, à l’article 3, nous proposons un étiquetage pour les produits contenant des substances ayant fait l’objet de recommandations particulières de l’Anses et qui ne font l’objet que d’une publication sur internet. L’étiquetage est aussi une mesure d’incitation pour l’ensemble des entreprises du secteur.

Il ne s’agit pas d’une surtransposition puisqu’en termes réglementaires, il n’y a pas d’obligation nouvelle pour les entreprises. Nous nous en tenons aux obligations réglementaires au niveau européen. Ce texte propose une information, une sensibilisation et une incitation pour les entreprises françaises à aller vers une innovation ciblée dans le sens d’une meilleure protection sanitaire des populations.

M. Jean-Yves Caullet. J’ai noté, à la lecture de cette proposition de loi et en écoutant votre intervention, monsieur le rapporteur, qu’elle se fondait sur un cercle vertueux, basé sur l’incitation et le recensement, les pouvoirs publics se chargeant de recenser ce qui est le plus problématique et essayant d’inciter les entreprises à adopter les possibilités de substitution. Il faut ensuite délivrer une information positive afin que les entreprises qui se lanceraient dans cette démarche y trouvent un gain de compétitivité par rapport à celles qui ne le feraient pas.

De ce point de vue, la démarche est originale. Elle n’est pas une charge contre l’industrie chimique, mais au contraire, une forme de réhabilitation de la chimie de demain, qui doit être en mesure de proposer de plus en plus de produits de substitution et de passer à une gestion incitative.

La philosophie de ce texte, fondée sur l’incitation, l’aide, le recensement et l’information, rend la démarche intéressante. Toutefois, il reste un certain nombre de difficultés, s’agissant notamment de la question des incitations, qui serait plus à sa place dans une loi de finances.

À l’article 1er, l’audit reste obligatoire. Or, pour des entreprises de petite taille, ce sont des charges importantes. De la même façon, il y a encore beaucoup de précisions à apporter en ce qui concerne l’information.

Autant, du point de vue de la philosophie du texte, je pense qu’il est possible d’aboutir à un texte intéressant et positif, répondant à une vraie préoccupation et favorisant la mise en mouvement du secteur, autant dans la forme, la discussion est inaboutie. Nous aurons sans doute le temps, d’ici à l’examen en séance publique, de perfectionner ce texte pour en gommer les incertitudes et aboutir à un texte plus consensuel.

À ce stade, en attendant la discussion des amendements, la position du groupe Socialiste, républicain et citoyen penche vers l’abstention, afin de ne pas barrer la route à une démarche intéressante.

M. Jean-Marie Sermier. Cette proposition de loi instaure le principe de substitution dans le cadre réglementaire national pour les produits chimiques. Nous partageons la définition qui est donnée du principe de substitution comme « le remplacement des substances dangereuses par des alternatives sans danger, quand de telles alternatives existent et à un coût économique raisonnable ».

Mais nous soulignons en même temps que l’encadrement législatif et réglementaire des produits chimiques doit reposer sur un cadre communautaire harmonisé afin que les dispositions applicables au niveau national ne soient pas une nouvelle source de distorsion de concurrence vis-à-vis de nos partenaires européens. Même si vous dites, monsieur le rapporteur, que vous ne surtransposez pas, vous créez des obligations supplémentaires d’affichage par rapport aux autres pays européens.

Au niveau européen, le règlement REACH, qui instaure une gestion européenne des risques liés à l’utilisation des substances chimiques, représente une avancée juridique majeure. Il prévoit, en effet, des obligations à l’encontre des producteurs et importateurs de substances chimiques et le renversement de la charge de la preuve des autorités publiques vers l’industrie.

Il s’agit de recenser, d’évaluer et de contrôler les substances chimiques. Depuis quelques années, des équipes sont mobilisées pour travailler sur ces substances et, d’ici à 2018, plus de 30 000 substances chimiques seront connues et leurs risques potentiels établis. L’Europe disposera ainsi des moyens juridiques et techniques pour garantir à tous un haut niveau de protection contre les risques liés aux substances chimiques.

Les dispositions de ce règlement sont claires : tous les industriels doivent enregistrer au niveau européen les substances qu’ils fabriquent ou importent en quantité supérieure à une tonne par an. Après enregistrement, plusieurs hypothèses sont aujourd’hui possibles.

Aller plus loin risque de nous exposer à sortir du cadre communautaire. Lors des demandes de mise d’autorisation sur le marché (AMM) des produits contenant une ou plusieurs substances dont on envisage la substitution ou lors du renouvellement des AMM des produits, les États membres ont l’obligation de procéder à l’évaluation comparative des produits, selon les principes fixés par le règlement européen. Cela veut dire qu’à chaque fois, on vérifie qu’il n’existe pas un produit plus compatible avec la qualité environnementale.

Il existe aujourd’hui une réglementation européenne claire. Par ailleurs, des équipes travaillent dans les entreprises chimiques à la réalisation de produits qui génèrent moins de risques. Ces produits sont intégrés petit à petit dans les différentes matières actives des produits utilisés.

Le Président de la République lui-même s’était prononcé pour ne faire que transposer la réglementation européenne, non la surtransposer.

C’est la raison pour laquelle le groupe Les Républicains votera, en l’état, contre ce texte.

M. Yannick Favennec. Au groupe Union des démocrates et indépendants, nous sommes tout à fait conscients de l’importance de la lutte contre les substances chimiques préoccupantes qui peuvent menacer la santé des travailleurs et, plus généralement, celle de l’ensemble de nos concitoyens.

Si l’objectif de la proposition de loi peut paraître louable, nous sommes néanmoins perplexes en ce qui concerne son application.

D’abord, il est demandé aux fabricants, aux importateurs ou aux utilisateurs en aval de substances chimiques préoccupantes de faire un diagnostic annuel. Or la réalisation d’un tel diagnostic risque de représenter une contrainte particulièrement lourde pour ces entreprises, qui ne sont pas préparées à un tel changement. D’autant que le code du travail contient déjà plusieurs articles prévoyant la substitution des produits chimiques dangereux par d’autres produits moins dangereux.

De plus, la réglementation européenne prévoit déjà un enregistrement qui devrait permettre le recensement de plus de 30 000 substances chimiques d’ici à 2018. Il existe donc un véritable risque de doublon. Par ailleurs, en cas de manquement, les entreprises peuvent être soumises à d’importantes sanctions financières. Plutôt que d’accompagner utilement les entreprises, ce texte prévoit de les sanctionner, ce qui ne nous paraît absolument pas opportun.

Si nous nous accordons à dire que les entreprises doivent se pencher sur la problématique de la substitution, il faut prendre en compte le fait qu’une telle transition entre les produits chimiques préoccupants et leurs alternatives ne se fera pas du jour au lendemain.

En outre, il reste encore aujourd’hui difficile d’évaluer les effets de certains produits sur la santé ou sur l’environnement. Il ne faut donc pas prendre le risque de tomber dans un climat anxiogène, qui ne serait bénéfique pour personne. En effet, les études se contredisent et il est difficile de voir clair sur les risques que représente un produit.

Si l’idée d’une majoration du crédit d’impôt recherche peut sembler bonne, nous nous interrogeons sur les critères qui seront mis en place pour définir la majoration. Comment peut-on mesurer qu’une entreprise a suffisamment contribué à la recherche de substances alternatives ? De plus, le moyen de financement paraît plutôt fragile.

Le droit d’information des consommateurs est légitime. Néanmoins, ce texte ne prévoit qu’un pictogramme pour les femmes enceintes, pictogramme qui existe déjà sur des produits qui ne contiennent pourtant pas de substances chimiques préoccupantes. Ne risque-t-on pas de brouiller le message ? Et quid des autres consommateurs, qui méritent aussi d’être informés ?

Enfin, nous aimerions connaître le rôle du principe de précaution, qui s’applique seulement à des risques non avérés. Ce principe a déjà permis l’interdiction de certains insecticides. Peut-il être invoqué pour certaines substances chimiques préoccupantes ?

Mme Laurence Abeille. Je remercie mon collègue Jean-Louis Roumégas de présenter une proposition de loi qui met l’accent sur ce qui doit désormais être le cœur de nos préoccupations sanitaires : la pollution de notre environnement par des milliers de substances toxiques, une pollution multiforme, qui est présente partout, dans l’air que nous respirons, les produits que nous mangeons, les cosmétiques, l’eau, les produits d’ameublement etc.

Le dernier exemple en date a été donné par l’association Foodwatch, qui s’est intéressée aux hydrocarbures aromatiques d’huile minérale présents dans les emballages de produits alimentaires, notamment dans l’encre utilisée sur les emballages. Selon l’Autorité européenne de sécurité des aliments, ou European food safety authority (EFSA), ces substances « peuvent être à la fois mutagènes et cancérogènes ». Foodwatch a analysé plusieurs centaines de produits alimentaires et a découvert que la plupart étaient contaminés par ces substances, qui migrent de l’emballage vers l’aliment. Cette pollution toxique est présente partout et pose un vrai défi sanitaire.

La semaine dernière, dans notre commission, nous avons examiné un texte d’un de nos collègues écologistes sur la pollution de l’air : si l’impact sanitaire de la pollution de l’air est très souvent cité – car c’est une pollution qu’on perçoit dès qu’on sort de chez soi et dont les effets ont été largement étudiés –, ce n’est pas la seule source de pollution environnementale qui affecte notre santé, loin de là.

Cette proposition de loi fournit un chiffre que nous devrions tous connaître : selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), 8 % des décès dans le monde sont liés aux substances toxiques. À ce jour, 100 millions de substances chimiques sont répertoriées dans le monde et il en circule plus de 100 000 dans l’Union européenne. Si toutes ces substances chimiques ne sont pas toxiques – heureusement –, beaucoup le sont et, surtout, une grande partie n’a pas fait l’objet d’une évaluation sanitaire. Seules trente et une substances sont aujourd’hui interdites par le règlement européen REACH.

Notre médecine curative semble dépassée pour lutter contre cette menace sanitaire. Un signe révélateur et inquiétant de cette menace est la stagnation de l’espérance de vie en bonne santé dans les pays occidentaux. (Murmures sur divers bancs)

Lutter contre ces maladies environnementales, c’est changer notre façon de concevoir la médecine et passer du soin à la prévention. Lutter contre la prolifération des produits chimiques est indispensable. Il vaut mieux prévenir que guérir, et agir en amont coûte relativement peu au regard du coût des maladies environnementales pour nos comptes sociaux. Le coût sanitaire annuel des seuls perturbateurs endocriniens s’élèverait à 157 milliards d’euros dans l’Union européenne, soit 1,2 % du produit intérieur brut (PIB). En France, le coût de la pollution de l’air intérieur est évalué à 19 milliards d’euros par an par l’Anses, et un récent rapport sénatorial estime le coût global de la pollution de l’air, intérieur et extérieur, en France, à plus de 100 milliards d’euros par an, soit deux fois plus que le tabac.

Cette proposition de loi est donc un pas important pour lutter contre cette catastrophe sanitaire. Elle introduit le principe de substitution, qui est défini comme « le remplacement des substances dangereuses par des alternatives sans danger, quand de telles alternatives existent et à un coût économique raisonnable ». Ce texte vise plus précisément à imposer aux entreprises un audit des substances toxiques utilisées, et à aider ces entreprises à substituer des substances sans danger à ces substances toxiques.

Il s’agit d’aller de l’avant et de ne pas attendre qu’un produit soit interdit pour réfléchir à son remplacement. Si cette proposition de loi est adoptée, les entreprises françaises auront mieux anticipé les changements et auront alors un réel avantage compétitif face aux entreprises étrangères.

Cette proposition de loi prévoit également un système de labellisation. Le label permettra aux entreprises engagées dans cette détoxification de se démarquer, et donc d’accroître leur compétitivité.

Enfin, l’étiquetage prévu à l’article 3 est également indispensable. C’est un gage de transparence, et les consommateurs ont le droit de connaître les risques des produits qui les entourent.

Il faut cesser d’opposer la santé humaine, l’emploi et l’entreprise. Cette opposition nous a menés à des drames tels que ceux de l’amiante, et nous avons vécu ces débats hier encore en séance publique à propos du diesel. Il est aujourd’hui impératif de comparer le coût de l’inaction à celui de l’action.

M. Guillaume Chevrollier. Nous pouvons être favorables au principe de la substitution, mais la proposition de loi risque de semer l’inquiétude chez les industriels de notre pays. Alors que le Gouvernement semblait avoir compris la nécessité de la simplification administrative, la majorité va renforcer les charges administratives et augmenter les coûts pour nos entreprises.

Depuis dix ans, les entreprises ont fait face à une hausse du coût de la gestion réglementaire de 300 % : cette augmentation porte atteinte à leur compétitivité, car les ressources qui y sont consacrées réduisent d’autant celles disponibles pour l’innovation.

En matière de sécurité des produits, des améliorations sont intervenues, telles que la création d’une Agence européenne des produits chimiques et la mise en place du règlement REACH.

Par ailleurs, les nouvelles obligations que vous souhaitez introduire n’ont fait l’objet d’aucune étude d’impact. Je ne suis donc pas favorable à cette proposition de loi qui va à l’encontre des intérêts économiques de notre pays sans apporter aucune valeur ajoutée concrète pour la protection de la santé et de l’environnement. J’ajoute que le Président de la République s’était engagé à ne pas aller au-delà de la réglementation européenne.

M. Gérard Menuel. Le principe de substitution peut être séduisant en première approche, car les éléments de fond liés à la santé et à l’environnement méritent toute notre attention. Mais, dans ce débat nécessaire, cette proposition de loi apporte des éléments qui ne sont pas quantifiés. De plus, les solutions proposées ne s’appuient sur aucune démarche scientifique ni analyse d’impact social ou économique, que ce soit sur les entreprises ou le milieu rural.

Je ne peux pas voter un texte dont les conséquences ne sont ni connues, ni maîtrisées, sans approche scientifique réelle. Ce n’est peut-être pas de la surtransposition, mais cela en a l’esprit au regard du cadre communautaire.

M. Alain Leboeuf. On ne peut qu’être favorable sur le principe à cette proposition de loi tendant à imposer aux entreprises françaises de trouver des alternatives aux substances chimiques préoccupantes. Nous partageons l’absolue nécessité de protéger la santé humaine et l’environnement, d’ailleurs un certain nombre d’entreprises y travaillent.

De telles dispositions concernant les substances cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques existent déjà dans le code du travail et dans le règlement européen REACH.

Alors que le Gouvernement dit vouloir simplifier les procédures pour éviter la paralysie des entreprises – le Premier ministre le répète à l’envi et les Français l’ont fait comprendre lors des dernières élections – cette proposition de loi est une surréglementation qui ne fera qu’ajouter de la complexité aux dispositifs qui existent déjà. C’est contraire à l’effort de simplification qui est voulu pour nos entreprises.

Cette proposition nuira en outre à la compétitivité de nos entreprises tant au sein de l’Union européenne qu’hors de l’Europe. Une étude d’impact nous semble donc absolument nécessaire avant de pouvoir nous prononcer sur ce texte. En l’état, nous nous opposerons à cette proposition.

M. Michel Heinrich. Nous comprenons tous l’intérêt de la substitution, mais ce texte est inutile : les règlements européens incitent déjà à la substitution. Une fois de plus, nous voulons aller au-delà de la réglementation européenne, ce qui est une constante française, quelles que soient les majorités.

Par ailleurs, le droit du travail prévoit déjà l’évaluation des produits dangereux sur les lieux de travail et la substitution. C’est une politique omniprésente dans notre industrie, et ce texte ne peut que pénaliser nos entreprises.

M. Charles-Ange Ginésy. Sur le fond, c’est une idée utile. Mais cette proposition pose des problèmes sur la forme. Nous n’avons pas suffisamment d’évaluations pour connaître son impact sur les entreprises.

Les principes de substitution et d’incitation sont deux bons principes, mais s’il ne faut pas opposer la nécessité de maîtriser les produits chimiques dangereux et l’emploi, il ne faut pas non plus se tromper de niveau. Les contraintes que nous mettrions en place pour les entreprises en France réduiraient notre activité économique.

Je ne partage pas votre constat, monsieur le rapporteur, concernant le vote des Français dimanche dernier. Je l’interprète comme un appel à régler les problèmes de chômage, d’économie et de niveau de vie plutôt qu’un appel à plus d’écologie.

Battons-nous pour votre proposition, mais au niveau européen, qui me semble le bon niveau.

Mme Sophie Rohfritsch. M. Jean-Louis Roumégas fait référence à l’espérance de vie en bonne santé, qui serait menacée par les produits chimiques. Mais celle-ci est très élevée en France : nous sommes classés parmi les meilleurs pays de l’OCDE à ce titre.

Nous devons tous être très attentifs à la situation de l’industrie agroalimentaire dans notre pays. Nous vivons une crise de confiance à la suite de l’affaire de la viande de cheval et de l’avis de l’OMS sur la viande et les produits de charcuterie. Veillons à ne pas l’aggraver en imposant, malgré les dispositions législatives et réglementaires qui existent déjà pour protéger nos concitoyens, des indications qui instilleront un doute supplémentaire.

Nous devons mettre tout ce qui concerne l’alimentation sur la table, et décider une fois pour toutes de ce que nous devons faire, en collaboration avec l’industrie agroalimentaire, qui fait des efforts sur l’étiquetage ou le gaspillage alimentaire. Ce type de message négatif est relativement dangereux, nous devons y être attentifs.

M. Laurent Furst. L’intention de ce texte est louable. Mais comme mes collègues, je crains la surréglementation, maladie bien française, qui se manifeste par la volonté d’utiliser le droit pour vivre bien, en tout et en permanence. Au final, collectivement, nous vivons moins bien à force de tout surréglementer.

Je veux souligner ce chiffre qui m’obsède : 7,5 millions d’emplois dans l’industrie allemande, 2,5 millions dans l’industrie française. L’écart s’est creusé de manière très rapide, en conséquence du problème de compétitivité du « site France ». Ce sont des motifs de compétitivité économique, mais aussi l’accumulation réglementaire, qui le rendent moins attractif, et ce genre de textes y contribue.

Pour répondre à Mme Laurence Abeille, je ne trouve pas inintéressant que l’on évalue économiquement la qualité de l’air et d’autres éléments, mais les mesures que nous prenons peuvent aussi être évaluées économiquement. J’aimerais que ces évaluations se fassent lorsqu’il faut défendre des politiques favorables à l’environnement, mais aussi quand on défend l’économie de notre pays.

M. le rapporteur. Vos nombreuses interventions témoignent de votre intérêt pour le sujet abordé, à défaut de partager les solutions proposées. La question de la substitution est un sujet d’avenir : la Commission européenne commence à y travailler ; des ONG proposent déjà des démarches de substitution au niveau européen ; et tout le monde conçoit la nécessité de compléter la réglementation actuelle avec le principe de substitution. La simple démarche d’interdiction ou d’autorisation prévue par la réglementation actuelle n’est pas suffisante, il faut une démarche positive, et c’est l’esprit de cette proposition de loi.

Je remercie Jean-Yves Caullet de sa bonne compréhension de la proposition de loi. Il s’agit en effet d’une démarche positive, et non pas d’écologie punitive. Je suis tout à fait disposé à faire évoluer le texte d’ici à son examen en séance publique, nous avons déjà pris langue avec les différents ministères pour améliorer le dispositif et le rendre plus opérationnel.

Le sujet de l’incitation peut bien entendu évoluer : le bonus au crédit d’impôt recherche n’est qu’une proposition. Pour avoir auditionné les entreprises, je peux vous dire qu’elles attendent que l’éligibilité de la recherche et du développement en matière de substitution soit mieux reconnue. Alors que certains rapports parlementaires ont dénoncé une affectation à mauvais escient du crédit impôt recherche, nous aurions intérêt à le cibler sur des objectifs sanitaires.

Le caractère obligatoire de l’audit est la seule obligation prévue par le texte. Il faut au moins informer les gens, mais il n’y a pas ensuite d’obligation d’action : nous respectons le cadre réglementaire européen. Faut-il renoncer à cette obligation d’information, de sensibilisation et de diagnostic ? Une telle obligation de diagnostic a été instituée en matière thermique sans l’assortir d’une obligation de travaux. Je suis prêt à réfléchir à d’autres solutions si elles ont l’appui du Gouvernement, telles qu’une incitation suffisamment forte pour être efficace. Mais ce serait dommage, car il ne s’agit pas d’une obligation coûteuse pour les entreprises.

Monsieur Jean-Marie Sermier, vous prétendez, avec plusieurs de vos collègues du groupe Les Républicains, que cette proposition va au-delà du cadre européen. Ce n’est pas le cas : nous ne modifions pas la réglementation, il s’agit toujours d’appliquer la réglementation européenne, en particulier REACH et les réglementations sur les cosmétiques, les produits phytosanitaires, les biocides, et j’en passe. Il s’agit simplement d’aider les entreprises à s’adapter à ces réglementations et à anticiper davantage leur évolution. Certaines entreprises le font déjà, j’en conviens, mais pas toutes. Ce n’est d’ailleurs pas fait de façon ciblée du point de vue sanitaire ; les adaptations répondent davantage à des objectifs de marketing qu’à de réelles évolutions durables.

Prenons l’exemple des parabènes. Les entreprises, sous la pression des distributeurs et des consommateurs, ont remplacé les parabènes par le methylisothiazolinone, ou MIT, qui pose d’autres problèmes toxiques, en particulier d’allergies. Cette substitution a répondu à un besoin marketing, mais elle aurait mérité d’être instruite par les pouvoirs publics pour mieux orienter les entreprises et les consommateurs. C’est l’exemple d’une substitution sur laquelle les entreprises ont investi mais qui n’a pas eu d’effet durable et qui n’a pas apporté d’amélioration pour la population. Nous proposons une autre démarche.

Il ne s’agit donc pas de créer un climat anxiogène, mais plutôt de sortir du climat de rumeur et de réaction irrationnelle ou marketing, soumis à l’émotion médiatique, pour aller vers une démarche raisonnée, appuyée par les pouvoirs publics. Cela permettrait aux entreprises de s’engager dans une démarche plus rationnelle et plus durable. La plateforme que nous proposons de mettre en place sous l’égide de l’Institut national de l'environnement industriel et des risques – l’INERIS – peut donner aux entreprises des informations sur les substitutions qui ne sont pas sûres et qu’il ne convient pas de faire en l’état.

Monsieur Yannick Favennec, je pense effectivement que le diagnostic n’a pas à être annuel, un diagnostic tous les cinq ans pourrait suffire. Nos auditions se sont déroulées sous forme de tables rondes réunissant les industries, les organisations non-gouvernementales, les services de l’État, les agences sanitaires et les bureaux d’études qui pratiquent déjà ce type de diagnostic. Ce format a permis de nous assurer qu’il ne s’agissait pas d’une contrainte lourde. Cela n’a rien de comparable à ce qui est fait lorsque l’on évalue une substance avant son autorisation, c’est un simple diagnostic sur la présence de substances préoccupantes.

La liste de ces substances préoccupantes devra par ailleurs être établie par le Gouvernement. Cela peut être la liste candidate de REACH, ou bien aller au-delà, car nos agences sanitaires font elles-mêmes des recommandations, à l’instar de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail. Cette liste devra être évolutive, et il n’est évidemment pas question de la fixer dans une loi.

Le travail de diagnostic est donc simple : il s’agit de faire un recensement des substances préoccupantes figurant dans cette liste, et de proposer les substitutions déjà connues. Il est question non pas d’évaluer de nouveaux procédés ou de nouvelles substances, mais simplement de prévenir les entreprises que des expériences de substitution déjà connues peuvent être mises en œuvre. C’est donc un diagnostic simple, dont le coût a été estimé par les bureaux d’études entre 5 000 et 10 000 euros selon la taille des entreprises et le nombre de substances utilisées.

L’obligation faite aux entreprises peut très bien être modulée dans le temps, ou échelonnée en fonction de la taille des entreprises. Nous pourrions y réfléchir d’ici à l’examen en séance publique. Pour des grandes entreprises ou des PME, le coût est négligeable, mais je conçois que cela puisse poser un problème pour les TPE.

Je remercie Laurence Abeille d’avoir insisté sur le coût de l’inaction. Si la présente proposition ne représente qu’un marché de quelques centaines de millions d’euros au niveau national, l’inaction, elle, se traduirait par un coût de plusieurs milliards du fait des maladies respiratoires et d’autres maladies chroniques déclenchées aussi bien par la pollution de l’air extérieur que de celle de l’air intérieur – de ce point de vue, je vous renvoie à la notion d’exposum, aujourd’hui reconnue et introduite dans le code de la santé publique.

Je remercie nos collègues du groupe Les Républicains pour leurs interventions, qui ont souvent eu pour objet de souligner l’importance de ne pas surréglementer, afin de ne pas trop compliquer la vie des entreprises. Je veux dissiper tout malentendu : le seul point de la proposition qui pourrait éventuellement être considéré comme une surréglementation serait l’obligation pour les entreprises de réaliser un audit, si cette obligation était maintenue. Peut-être l’obligation d’établir un diagnostic est-elle insoutenable pour certaines entreprises, et je suis disposé à faire évoluer le texte en tenant compte de cette difficulté. Tout le reste de la proposition repose sur le principe du volontariat : il ne s’agit que d’inciter et de soutenir les entreprises allant dans le bon sens, et non d’imposer de nouvelles réglementations – ce qui serait de toute façon impossible.

J’en profite pour vous indiquer que, dans l’affaire des perturbateurs endocriniens, la Cour de Justice de l’Union européenne, saisie par la Suède, vient de condamner la Commission européenne pour carence. Il est dangereux de laisser croire aux gens que l’on ne peut rien faire parce que l’Europe nous empêche d’agir : une telle attitude peut faire des dégâts, notamment sur le plan électoral, comme nous l’avons vu récemment. Tel n’est pas le cas avec ce texte, notre proposition ne relevant pas de la dimension européenne : tout ce qui a trait aux incitations fiscales, à l’information aux entreprises et à l’adaptation de celles-ci s’inscrit uniquement dans le cadre des politiques économiques et fiscales de niveau national, et il n’est pas prévu d’évolution constitutionnelle au niveau européen, ni de modification des traités de nature à inverser le cours des choses. Renvoyer à une harmonisation européenne pour se dispenser d’agir, cela revient à dire que l’on renonce à toute politique économique ou fiscale tant qu’il ne se passe rien au niveau européen : il me paraît difficile de soutenir un tel point de vue.

En conclusion, je voudrais vous citer un exemple concret et vous indiquer quels ont été les effets, sur les plans sanitaire et économique, d’une réglementation similaire à celle que nous proposons. Aux États-Unis, dans l’État du Massachusetts – donc dans un cadre fédéral, beaucoup plus intégré que le cadre européen, sur le plan économique comme sur le plan réglementaire –, il existe une loi appelée Toxics Use Reduction Act (TURA), qui impose aux entreprises un recensement des produits chimiques utilisés et une planification visant à réduire ces produits chimiques, avec l’accompagnement d’agences d’État. Vingt ans après l’entrée en vigueur de cette loi, l’utilisation des produits toxiques a été divisée par deux, et la dispersion environnementale de ces produits a été diminuée de 90 %, ce qui n’empêche pas le Massachusetts d’être un État à l’économie florissante, abritant le MIT de Cambridge, mais aussi des entreprises en pointe au niveau mondial dans le secteur de l’innovation technologique.

Nous proposons pour notre part un dispositif plus simple, prévoyant l’accompagnement par des agences d’État, mais aussi l’intervention d’un nouvel acteur, le conseil sanitaire pour les entreprises. Ce métier existe déjà, sous la forme de bureaux d’études qui ne demandent qu’à se développer : ce serait un moteur de croissance et un moteur pour l’innovation des entreprises. Je vous invite, mes chers collègues, à y voir une aide à l’innovation et à la croissance – une croissance dirigée vers un secteur d’avenir, à savoir le mieux-être sanitaire de nos populations – plutôt qu’un frein au développement des entreprises.

II. EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er
(article L. 521-5-1 et L. 521-5-2 [nouveaux] du code de l’environnement)

Obligation d’examiner les possibilités de substitution de certaines substances chimiques

I. L’ÉTAT DU DROIT

Il n’existe pas, à l’échelon national, de disposition législative obligeant les producteurs, importateurs et utilisateurs de substances chimiques à examiner les possibilités de substitution des substances préoccupantes qu’ils utilisent dans les produits destinés à la consommation.

La seule obligation qui s’impose aux industriels repose sur le règlement européen n°1907/2006, dit REACH (Registration, Evaluation, Authorization and Restriction of Chemicals), entré en vigueur en 2007 pour sécuriser la fabrication et l’utilisation des substances chimiques dans l’industrie européenne. Ce règlement, qui vise à une gestion des risques liés à l’utilisation des substances chimiques, a pour objet l’enregistrement et l’évaluation des substances toxiques. Il a constitué une avancée juridique majeure. En effet, pour la première fois, des obligations à l’encontre des producteurs et importateurs de substances chimiques ont renversé la charge de la preuve des autorités publiques vers l’industrie.

Mais le règlement REACH n’est pas basé sur le principe de substitution. La seule obligation de substitution concerne les substances de l’annexe XIV dite « soumise à autorisation » qui sont à ce jour au nombre de 31. Rien n’oblige les industriels à substituer les substances de la « liste candidate à l’annexe XIV » (168 en décembre 2015), même lorsqu’il existe un substitut à coût économique raisonnable et, a fortiori, il n’y a aucune logique de substitution pour les substances « hautement préoccupantes » selon les critères de REACH, mais non encore inscrites sur la liste candidate.

Par ailleurs, au regard de l’ensemble des substances chimiques à évaluer, l’apport du dispositif apparaît donc très timide :

– il ne porte que sur 30 000 substances parmi les 143 000 en circulation dans l’Union européenne et les contraintes budgétaires au niveau européen ne permettent pas un contrôle efficace des industriels ;

– lors de son entrée en vigueur en 2007, il n’y avait pas encore de consensus scientifique sur le fait que certaines substances peuvent altérer la santé à très faible dose, cumuler leurs impacts par « effet cocktail » et agir de façon transgénérationelle ; il repose sur le principe de « maîtrise valable du risque » (seuil de dangerosité), et n’encadre donc pas les substances dont les propriétés intrinsèques rendent l’exposition des populations impossible à maîtriser ;

– la lenteur du processus d’enregistrement laisse sur le marché des centaines de substances susceptibles d’être classées « hautement préoccupantes » selon les critères de REACH, mais non encore réglementées. La Commission européenne les estime à 700. Les organisations non-gouvernementales, via la « liste SIN » établie par l’Organisation non gouvernementale (ONG) suédoise ChemSec, font état de 831 substances.

Enfin, la définition européenne des perturbateurs endocriniens, qui devait être proposée en 2013, est repoussée à 2017.

Pour cet ensemble de raisons, dans un bilan du règlement REACH établi en 2013, l’Institut de recherche de la confédération des syndicats européens estime qu’« au rythme actuel, il faudra plus de cent ans pour inciter les industriels à remplacer leurs substances toxiques les plus préoccupantes par des alternatives plus sûres. »

Le code du travail, par ses articles R. 4412-15, R. 4412-16 et R. 4412-76, protège certes les salariés en disposant que « tout agent chimique dangereux » doit être supprimé. Et lorsque la suppression du risque s’avère impossible, « ce dernier est réduit au minimum par la substitution d’un agent chimique dangereux par un autre agent chimique ». Mais ces dispositions réglementaires ne s’appliquent qu’aux travailleurs alors que l’objet de la proposition de loi est de protéger l’ensemble de la population.

L’urgence à protéger les populations nous impose de réfléchir sans tarder à un dispositif législatif adapté.

II. LES DISPOSITIONS DE LA PROPOSITION DE LOI

L’article premier constitue l’élément clé du dispositif proposé. Cette disposition prévoit la création de deux articles nouveaux dans le code de l’environnement.

Le premier de ces deux articles (L. 521-5-1) prévoit l’obligation (alinéa 2) pour tout « fabricant, importateur ou utilisateur aval » de réaliser annuellement un diagnostic des substances chimiques qualifiées de « préoccupantes ». Ces substances sont définies dans une liste publique régulièrement mise à jour.

Un processus de recensement obligatoire est rendu nécessaire pour faire découvrir aux entreprises des possibilités de substitution ou d’usage différent et les inciter à les adopter. Ce devoir de recensement consiste simplement en une obligation de moyens : la mise en œuvre des options identifiées dans le plan reste volontaire.

Les alinéas 3 et 4 détaillent le contenu de la liste qui devra inclure principalement les substances préoccupantes selon les critères de REACH, mais également les substances mentionnées à l’article L. 523-1 du code de l’environnement (il s’agit des substances à l'état nano particulaire), celles utilisées comme additifs ou arômes dans le cadre défini par le règlement (CE) n° 178/2002 du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2002, ainsi que les substances qui seront définies par les futures règlementations relatives aux perturbateurs endocriniens.

Les quatre alinéas suivants détaillent le contenu du diagnostic auquel sont soumises les substances toxiques : l’évaluation de la nécessité du recours à ces substances et le recensement des alternatives existantes (alinéa 5), l’évaluation des effets sanitaires et environnement des alternatives (alinéa 6) ainsi qu’une analyse technique et financière du recours à ces alternatives (alinéa 7).

L’alinéa 8 prévoit l’obligation de transmission à l’autorité administrative de ces informations, le premier diagnostic étant établi avant le 1er janvier 2018 (alinéa 9).

Les alinéas 11 à 15 fixent le régime des sanctions applicables aux entreprises qui ne respecteraient pas les dispositions évoquées précédemment : en premier lieu, une mise en demeure est prévue (alinéa 12) pour que les intéressés puissent se conformer à leurs obligations. S’ils ne le font pas, une sanction pécuniaire pouvant atteindre 2 % du chiffre d’affaire est prévue (alinéa 13).

L’alinéa 16 fixe le délai de prescription à quatre ans.

Le second article créé par l’article premier de la proposition de loi (art. L. 521-5-2) précise le rôle joué par l’Institut national de l’environnement industriel et des risques (INERIS) dans la mise en œuvre des dispositions de l’article précédent (L. 521-5-1).

Cet article dispose que l’INERIS « apporte un appui technique, scientifique et administratif aux démarches de substitution des substances chimiques préoccupantes » (alinéa 17). Il prévoit également que c’est même institut qui publie, après avis de l’ANSES, la liste mentionnée précédemment (alinéas 18 et 19). Il met par ailleurs à disposition des entreprises et des particuliers, « sur un site internet prévu à cet effet », un observatoire des alternatives à chaque substance chimique préoccupante.

L’INERIS est également chargé d’informer les entreprises des aides financières auxquelles elles peuvent prétendre de par leurs démarches en faveur de la substitution des substances chimiques préoccupantes (alinéa 20).

Enfin, un label pourra être décerné par le ministère de l’Écologie aux entreprises s’étant engagées en faveur de la substitution des substances chimiques préoccupantes (alinéas 21 et 22).

L’INERIS

Créé en 1990, l’Institut national de l’environnement industriel et des risques (INERIS) est un établissement public à caractère industriel et commercial placé sous la tutelle du ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie. Il est né de la restructuration du centre de recherche des charbonnages de France (CERCHAR) et de l’institut de recherche chimique appliquée (IRCHA) et bénéficie d’un héritage de plus de soixante années de recherche et d’expertise reconnues.

L’INERIS a pour mission de contribuer à la prévention des risques que les activités économiques font peser sur la santé, la sécurité des personnes et des biens, et sur l’environnement. Il mène des programmes de recherche visant à mieux comprendre les phénomènes susceptibles de conduire aux situations de risques ou d’atteintes à l’environnement et à la santé, et à développer sa capacité d’expertise en matière de prévention. Ses compétences scientifiques et techniques sont mises à la disposition des pouvoirs publics, des entreprises et des collectivités locales afin de les aider à prendre les décisions les plus appropriées dans l’optique d’une amélioration de la sécurité environnementale.

Le siège de l’INERIS est situé à Verneuil-en-Halatte, dans l’Oise. L’institut y dispose de 40 hectares, dont 15 sont utilisés pour des plateformes d’essais, ainsi que de 30 000 m² pour ses laboratoires. Il compte aussi cinq antennes dans différentes régions.

L’institut compte un effectif total d’environ 600 personnes, dont 40 spécialistes des géosciences basés à Nancy dans le cadre d’activités de recherche et d’expertise sur les risques liés aux anciennes exploitations minières.

La compétence de l’INERIS s’étend aux domaines suivants :

– les risques accidentels : les sites classés Seveso, les transports de marchandises dangereuses, le système général harmonisé de classification et d'étiquetage des produits chimiques, les risques liés à la malveillance, les dispositifs technologiques de sécurité ;

– les risques chroniques : la pollution de l’eau et de l’air, les sols pollués, les substances et produits chimiques, les champs électromagnétiques (CEM), la mise en œuvre du règlement européen Reach, les liens entre l’environnement et la santé ;

– les risques liés aux sols et sous-sols : les cavités, la surveillance des anciens sites miniers, les émanations de gaz, le captage et le stockage souterrains du CO² (CCS) ;

– la certification, la formation, les outils d’aide à la gestion des risques.

L’activité de l’INERIS :

Le budget de l’INERIS s’élève à environ 80 millions d’euros dont 3 millions proviennent de contrats d’expertise passés avec des pays étrangers, notamment en Afrique et autour du bassin méditerranéen.

L’appui aux politiques publique constitue le principal secteur d’activité (57 %), devant l’expertise conseil et règlementaire (23 %) et la recherche amont et partenariale (20 %).

L’ANSES

L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) est l’agence nationale française chargée de la sécurité sanitaire. Sa mission consiste à évaluer les risques dans le domaine de l’alimentation, de l’environnement et du travail, en vue d'éclairer les pouvoirs publics dans leur politique sanitaire. C’est un établissement public d’évaluation des risques dans les domaines de l’alimentation, de l’environnement et du travail.

L’agence résulte de la fusion, en 2010, de l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) et de l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail (AFSSET).

Cette fusion a été réalisée en vertu de l’ordonnance n° 2010-18 du 7 janvier 2010, prise en application de l’article 115 de la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires. Cette fusion a été motivée par la complémentarité des outils et moyens d'expertise des deux agences ainsi que par l’existence de thématiques communes. La qualité de l’eau, par exemple, concerne la santé publique mais aussi l’environnement ; par ailleurs, certaines substances chimiques, à l’instar des biocides, étaient jusqu'alors du ressort de l’AFSSET, et les pesticides, du ressort de l’AFSSA, alors qu’il s’agit le plus souvent des mêmes molécules. Les nanomatériaux sont, quant à eux, présents aussi bien dans le milieu que dans l’alimentation.

Depuis le 1er juillet 2015, l’ANSES est en charge de la délivrance des autorisations de mise sur le marché des pesticides.

III. LES TRAVAUX DE LA COMMISSION

Votre rapporteur a déposé et fait adopter un amendement CD37 visant à préciser la définition des entreprises qui sont concernées par l’audit chimique créé par l’article premier. Il affine notamment la notion d’« utilisateurs en aval », présente dans le texte déposé.

Par ailleurs, cet amendement inclut dans le périmètre des entreprises concernées les entreprises du secteur du cosmétique et celles qui fabriquent des dispositifs médicaux. En effet, si ces entreprises sont exemptées du règlement n° 1272/2008 du 16 décembre 2008 (dit « règlement CLP ») pour le produit fini, elles sont potentiellement concernées par la problématique de l’exposition de publics vulnérables à des substances préoccupantes.

Votre rapporteur a également fait adopter deux amendements rédactionnels CD35 et CD36 supprimant la définition de la liste des substances préoccupantes de l’article L. 521-5-1 (nouveau) pour l’insérer dans l’article L. 521-5-2 (nouveau), à l’alinéa 17, où elle occupe une place plus logique.

L’amendement CD38, également présenté par votre rapporteur et également adopté, précise que les alternatives aux substances préoccupantes pouvent être « chimiques ou non ». Si cette assertion semble évidente, il est utile de rappeler que des substances naturelles peuvent très souvent être utilisées en lieu et place de substances chimiques.

Votre rapporteur a ensuite déposé et fait adopter l’amendement CD39 qui substitue à la notion d’« analyse » technique et financière du recours aux alternatives des substances préoccupantes la notion d’« estimation ».

Cet amendement vise à clarifier l’esprit de l’audit chimique. Il s’agit d’un diagnostic simple qui permet de s’assurer que chaque entreprise s’est interrogée sur la question de la substitution des substances préoccupantes qui se sont pas encore considérées comme devant être soumises à autorisation, dans le cadre du règlement REACH. L’objectif est de conserver à cet audit un coût raisonnable. Libre ensuite à chaque entreprise de mener une analyse plus approfondie des possibilités de substitution dont elle dispose.

Après les amendements de pure forme CD8 à CD12, votre rapporteur a rétabli, à l’alinéa 17, par l’amendement CD40, la définition de la liste des substances supprimée aux alinéas 2 et 4 par les amendements CD35 et CD36 précédemment évoqués.

Cet amendement CD40, en outre, enrichit la liste des substances concernées par le processus de substitution. En effet, elle inclut, outre les substances de la liste candidate de REACH, celles ayant fait l’objet d’une recommandation de la part de l’ANSES (y compris les additifs et les arômes), ainsi que les nanosubstances.

La liste des « substances candidates » de REACH constitue une base qui a fait consensus lors des auditions menées dans le cadre de la préparation de la présente proposition de loi : il s’agit de substances non encore soumises à autorisation (Annexe XIV de REACH) mais suspectées de nocivité. La seule obligation qui incombe aux entreprises utilisant les substances de la liste candidate (Article 33 de REACH) est d’informer les utilisateurs de la présence de ces substances dans leurs produits et de leur bonne utilisation : elles ne sont donc pas soumises à l’obligation de substitution.

Il conviendrait que les entreprises s’assurent qu’il n’existe aucune alternative à ces substances à un coût économique raisonnable. Cependant, se limiter à cette liste ne serait pas pertinent d’un point de vue sanitaire. L’exemple du Bisphénol A, interdit en France dans les biberons et les contenants alimentaires, mais qui ne fait pas partie des « substances candidates », prouve que cette base est insuffisante.

La liste de la Proposition 65, en Californie, comprend 955 substances consultables sur le site http://oehha.ca.gov/prop65/prop65_list/Newlist.html.

La TEDX liste, aux États-Unis, recense plus de 1 000 substances pour lesquelles au moins une étude a reconnu un potentiel effet perturbateur endocrinien pour l’homme.

Il conviendra donc, a minima, d’élargir la liste de l’audit chimique à des substances figurant dans la « SIN » liste de l’ONG ChemSec – sur laquelle s’appuie la Commission européenne – ou dans la liste des 700 substances (annonce de la Commission européenne du 12 mai 2015) qui seront analysées dans le cadre de l’étude d’impact d’une définition des perturbateurs endocriniens.

Après avoir fait adopter les amendements rédactionnels CD13, CD14 et CD44, votre rapporteur a fait adopter un amendement CD15 prévoyant que la liste des substances concernées par l’audit technique devait être définie par un décret du Gouvernement, et non par l’INERIS. En effet, les auditions menées par le rapporteur ont permis de déterminer que l’INERIS n’avait pas la compétence nécessaire pour établir cette liste. C’est pourquoi il sera désormais prévu que cette liste soit d’origine gouvernementale. Il est souhaitable que, dans ce cadre, le Gouvernement procède à une consultation collégiale des acteurs du secteur (entreprises, organisations non gouvernementales, agences sanitaires).

Enfin, après les amendements rédactionnels CD16 à CD18, votre rapporteur a apporté une dernière modification à l’article premier de la proposition de loi : l’amendement CD45 supprime le décret en Conseil d’État, initialement prévu pour définir les modalités de mise en œuvre du label. En effet, un tel décret n’est pas nécessaire pour lancer ce type de démarche ; à titre d’exemple l’INERIS, sur demande du ministère de l’écologie, délivre des labels pour les papiers thermiques « sans Bisphénol A ». L’INERIS dispose de l’expertise pour étudier la qualité des demandes des entreprises.

*

* *

La commission est saisie de l’amendement CD37 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement, qui vise à préciser la définition des entreprises concernées par l’audit chimique créé par l’article 1er, affine notamment la notion d’« utilisateurs en aval », présente dans le texte. Nous sommes disposés à retravailler cette mesure avant la séance publique, en tenant compte des remarques émises sur la taille des entreprises et leur éligibilité aux aides. Entre-temps, je vous invite à adopter cet amendement en l’état.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels CD35 et CD36 du rapporteur.

Elle examine ensuite l’amendement CD38 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement vise à préciser que les alternatives à l’utilisation des substances chimiques peuvent être chimiques ou non.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel CD7 du rapporteur.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CD39 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement, qui répond à des objections qui m’ont été faites au cours du débat, a pour objet de préciser que l’audit prévu à l’article 1er consiste en une simple « estimation » permettant de s’assurer que chaque entreprise s’est interrogée sur la question de la substitution des substances préoccupantes.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels CD8, CD9, CD10, CD11 et CD12 du rapporteur.

Elle examine ensuite l’amendement CD40, 3e rectification du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement vise à déplacer la définition de la liste des substances concernées par le processus de substitution en l’insérant à l’alinéa 17.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels CD13, CD14 et CD44 du rapporteur.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CD15 du rapporteur.

M. le rapporteur. Les auditions auxquelles nous avons procédé ont mis en évidence que l’INERIS n’avait pas la compétence pour établir lui-même la liste des substances concernées par l’audit prévu. Il reviendra donc à l’État de fixer cette liste par décret.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels CD16, CD17 et CD18 du rapporteur.

Elle examine ensuite l’amendement CD45 du rapporteur.

M. le rapporteur. Le texte prévoit un décret en Conseil d’État pour définir les modalités de mise en œuvre du label. Or, un tel décret n’est pas nécessaire pour lancer ces démarches ; à titre d’exemple, l’INERIS, sur demande du ministère de l’écologie, délivre des labels pour les papiers thermiques « sans Bisphénol A ». L’INERIS dispose de l’expertise pour étudier la qualité des demandes des entreprises.

Nous avons donc précisé que le ministre chargé de l’environnement peut attribuer un label aux entreprises concernées.

La Commission adopte l’amendement.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Après recomptage des votes, à la demande du groupe Les Républicains, il ressort qu’une majorité se dessine pour adopter l’article.

La Commission adopte l’article 1er ainsi modifié, les groupes Les Républicains et Union des démocrates et indépendants votant contre.

Article 2
(article 244 quater B du code général des impôts)

Incitation fiscale par le biais du crédit d’impôt recherche

I. L’ÉTAT DU DROIT

Il n’existe actuellement aucune aide spécifique destinée à encourager les entreprises qui travaillent à la substitution de substances chimiques potentiellement toxiques.

Les aides à la substitution des substances toxiques qui existent ne s’inscrivent pas dans une démarche globale et, dans les faits, ces aides concernent uniquement les substitutions déjà rendues obligatoires. L’objet de la proposition de loi est d’étendre le dispositif à l’ensemble des substances préoccupantes.

La proposition de loi prévoit d’utiliser le crédit d’impôt recherche (CIR), mesure générique de soutien aux activités de recherche et développement (R&D) des entreprises, pour inciter les entreprises à développer la recherche dans ce domaine.

Inscrit à l’article 244 quater B du code général des impôts, le crédit d’impôt recherche concerne l’ensemble des entreprises, sans restriction de secteur ou de taille. Celles qui engagent des dépenses de recherche fondamentale et de développement expérimental peuvent bénéficier du CIR en déduisant ces dépenses de leur impôt sous certaines conditions. Le taux du crédit d’impôt recherche varie selon le montant des investissements.

1. La plupart des entreprises peuvent en bénéficier

Les entreprises industrielles, commerciales, artisanales et agricoles, quel que soit leur statut juridique, qui sont soumises à l’impôt sur les sociétés ou à l’impôt sur le revenu dans la catégorie des BIC (bénéfices industriels et commerciaux) et étant imposées d’après leur bénéfice réel (normal ou simplifié).

Les entreprises exonérées de l’impôt sur les sociétés sont exclues du dispositif, sauf les jeunes entreprises innovantes (JEI), les entreprises créées pour la reprise d’une entreprise en difficulté et les entreprises situées en zone aidée.

2. Le champ des dépenses couvertes est vaste

Sont couvertes par le CIR les activités de recherche fondamentale (contribution théorique ou expérimentale à la résolution de problèmes techniques) ou appliquée (applications possibles des résultats d'une recherche fondamentale) et les activités de développement expérimental (prototypes ou installations pilotes), quel qu’en soit le domaine.

Sont éligibles les dépenses suivantes :

– les dotations aux amortissements des biens et bâtiments affectées à la recherche ;

– les dépenses de personnel concernant les chercheurs et techniciens de recherche (le salaire des jeunes docteurs est pris en compte pour le double de son montant pendant les deux années qui suivent leur embauche en contrat à durée indéterminée) ;

– les rémunérations supplémentaires des salariés auteurs d’une invention ;

– les dépenses de fonctionnement, fixées forfaitairement à 75 % des dotations aux amortissements et 50 % des dépenses de personnel (200 % pour les dépenses concernant les jeunes docteurs) ;

– les dépenses de recherche externalisées, confiées à tout organisme public, université, fondation reconnue d’utilité publique, association de la loi de 1901 ayant pour fondateur et membre un organisme de recherche ou une université, dépenses retenues pour le double de leur montant (à condition qu’il n’existe pas de lien de dépendance entre l’organisme et l’entreprise) ;

– les dépenses de recherche confiées à des organismes agréés par le ministère de la recherche (limitées à trois fois le montant total des autres dépenses de recherche ouvrant droit au crédit d’impôt) ;

– les frais de brevets ;

– les dépenses de normalisation des produits de l'entreprise (pour 50 % du montant) ;

– les dépenses de veille technologique (60 000 euros par an au maximum) ;

– les dépenses de nouvelles collections dans le secteur textile-habillement-cuir.

3. Les taux du crédit d’impôt-recherche

Ces taux sont de :

– 30 % pour les dépenses de recherche jusqu’à 100 millions d’euros (ou 50 % dans les départements d’outre-mer),

– 5 % au-delà.

Le CIR est déterminé par année civile, quelle que soit la date de clôture de l'exercice. Les subventions publiques reçues pour les projets de recherche ouvrant droit au CIR doivent être déduites des bases de calcul du crédit. Les subventions remboursables sont ajoutées aux bases de calcul pour l’année de leur remboursement.

Pour le crédit d’impôt qui s’applique aux dépenses d’innovation des PME, le taux est de 20 % (ou 40 % dans les départements d’outre-mer), sur des dépenses plafonnées à 400 000 euros par an.

II. LES DISPOSITIONS DE LA PROPOSITION DE LOI

Dans le but d’inciter les entreprises à mener des études sur les possibilités de substituer des substances à celles qui pourraient être nocives, la proposition de loi majore de 5 % le montant du crédit d’impôt recherche dont peuvent bénéficier les entreprises qui contribuent « à la recherche d’une ou d’un ensemble de substances alternatives, conformément à l’article L. 521-5-1 du code de l’environnement », créé par l’article premier de la proposition.

C’est l’administration fiscale qui est chargée de déterminer si les travaux de l’entreprise sont suffisants pour bénéficier de la majoration du montant du crédit d’impôt recherche.

L’alinéa 4 prévoit une compensation de la perte de recette engendrée par cette mesure par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts, relatifs au régime fiscal des tabacs manufacturés.

Enfin, le dernier alinéa dispose que cette mesure n’est applicable « qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû », ce qui signifie qu’il n’est pas possible pour une entreprise de recevoir un remboursement d’impôt de la part de l’administration fiscale.

III. LES TRAVAUX DE LA COMMISSION

Votre rapporteur a déposé un amendement à l’alinéa 2 : ce ne sera plus « l’administration fiscale » qui déterminera si l’entreprise a suffisamment contribué à la recherche relative à la substitution des substances toxiques, mais simplement « l’administration ». Cette modification a pour objectif de permettre au gouvernement de s’organiser comme il l’entend pour mettre en œuvre l’incitation fiscale.

*

* *

La Commission adopte successivement les amendements de précision juridique CD21, rédactionnel CD19 et de clarification rédactionnelle CD20 du rapporteur.

Puis elle adopte l’article 2 ainsi modifié.

Article 3
(article L. 1313-10-1 [nouveau] du code de la santé publique)

Utilisation d’un pictogramme « déconseillé aux femmes enceintes »

I. L’ÉTAT DU DROIT

C’est en 2004 qu’a été adoptée, pour la première fois, une disposition juridique visant à prévenir de manière systématique les femmes enceintes des dangers que représentent certains produits pour leur grossesse. Il s’agissait alors de les mettre en garde contre les dangers de l’alcool.

Lors de la seconde lecture devant le Sénat du projet de loi sur les droits des personnes handicapées (1), un amendement déposé par Mme Anne-Marie Payet, avec le soutien du ministre chargé de la Santé, a été adopté le 19 octobre 2004. Il avait pour objet de faire figurer, sur toutes les unités de conditionnement des boissons alcoolisées, un message sanitaire à l’attention des femmes enceintes dans le but de permettre une meilleure information sur les risques sanitaires induits par la consommation d’alcool sur le fœtus pendant la grossesse.

Le message, originellement littéraire, a été enrichi d’un pictogramme annexé à l’arrêté du 2 octobre 2006 « relatif aux modalités d’inscription du message à caractère sanitaire préconisant l’absence de consommation d'alcool par les femmes enceintes sur les unités de conditionnement des boissons alcoolisées. »

L’apposition de ce pictogramme sur les bouteilles d’alcool a bénéficié d’une très forte approbation. Ainsi, selon un sondage publié quelque temps après l’introduction de cette mesure, 82 % des Français se déclaraient favorables à la présence du pictogramme sur les bouteilles. Cette approbation semble consensuelle, puisque toutes les catégories de Français partagent cette adhésion, y compris ceux buvant quotidiennement de l’alcool (69 %).

Le pictogramme est perçu par l’ensemble des personnes interrogées comme clair, facile à comprendre et utile : 61 % des Français interrogés comprennent spontanément et sans ambiguïté que le pictogramme signifie qu’il ne faut absolument pas consommer d’alcool pendant la grossesse.

II. LES DISPOSITIONS DE LA PROPOSITION DE LOI

Instruit par le succès du pictogramme relatif aux dangers de l’alcool pour les femmes enceintes, l’auteur de la proposition de loi propose qu’un pictogramme similaire soit apposé sur les produits contenant des substances chimiques sur lesquelles l’ANSES a émis des recommandations.

Cette disposition serait inscrite dans un article L. 1313-10-1 nouveau complétant le titre Ier du livre III de la première partie du code de la santé publique qui crée l’agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail et en régit le fonctionnement.

III. LES TRAVAUX DE LA COMMISSION

Votre rapporteur a déposé deux amendements de précision :

– le premier réécrit au singulier l’expression « des substances », de manière à bien préciser que les dispositions entrent en application dès la première substance signalée ;

– le second est destiné à substituer à la notion de « fabricant » celle de « producteurs ou importateurs d’article contenants cette substance », de manière à inclure dans le champ du dispositif les produits d’origine étrangère.

*

* *

La Commission adopte successivement les amendements de précision CD42 et CD43, et l’amendement rédactionnel CD22 du rapporteur.

Puis elle adopte l’article 3 ainsi modifié.

Titre

La commission adopte l’amendement rédactionnel CD23 du rapporteur.

*

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Nous en venons aux explications de vote sur l’ensemble du texte.

M. Jean-Yves Caullet. Si les amendements adoptés au cours de cette séance précisent un certain nombre de choses, ils ne lèvent pas complètement l’objection portant sur l’obligation mise à la charge des entreprises, ce qui empêche que notre Commission exprime une large adhésion aux orientations de ce texte. J’insiste sur le fait qu’il est proposé un processus de validation par les agences de la démarche effectuée par les entreprises, ce qui induit un élément de confiance à l’égard de l’information délivrée aux consommateurs – un élément important, à mes yeux, si l’on veut éviter que des substitutions ne se fassent à mauvais escient.

En résumé, les améliorations apportées au texte sont utiles, mais ne suffiraient pas à ce que nous adoptions ce texte en séance publique en son état actuel, c’est pourquoi j’invite nos collègues à faire preuve de sagesse lors du vote sur l’ensemble de la proposition qui va avoir lieu au sein de notre Commission dans quelques instants.

Mme Cécile Duflot. Je vous remercie de m’accueillir au sein de votre Commission, au sein de laquelle je n’ai pas le droit de vote – je suis ici aujourd’hui pour exprimer la position du groupe Écologiste en l’absence de François de Rugy, qui vous prie de l’excuser.

Nous sommes tout à fait favorables à ce que ce texte soit retravaillé avant et pendant la séance publique, mais chacun est convenu que les amendements qui viennent d’être adoptés ont amélioré le texte. Certains peuvent avoir des réticences, mais le vote qui va avoir lieu ici ne changera rien à l’amélioration du texte d’ici à son examen en séance publique, ni à ce que sera le vote final, c’est pourquoi il serait dommage de ne pas adopter en Commission cette proposition de loi telle qu’elle a été amendée.

M. le rapporteur. Je remercie les deux députés qui viennent de s’exprimer, et j’exprime une reconnaissance particulière à Jean-Yves Caullet qui, après avoir prôné l’abstention en début de séance, nous invite désormais à la sagesse. Je souhaite évidemment que nous travaillions, avec l’ensemble des membres de la Commission qui le souhaitent, à l’amélioration de ce texte d’ici à son examen en séance publique, afin de parvenir au plus large consensus possible. Notre objectif ne doit pas être d’aboutir à une proposition de loi en forme de témoignage, mais d’obtenir un texte constituant une véritable avancée, même modeste, et les débats que nous venons d’avoir m’ont convaincu que c’était chose possible.

*

La Commission rejette l’ensemble de la proposition de loi modifiée.

TABLEAU COMPARATIF

___

Dispositions en vigueur

___

Texte de la proposition de loi

___

Texte adopté par la Commission

___

 

PROPOSITION DE LOI VISANT À INTÉGRER LE PRINCIPE DE SUBSTITUTION DANS LE CADRE RÉGLEMENTAIRE NATIONAL APPLICABLE AUX PRODUITS CHIMIQUES,

PROPOSITION DE LOI VISANT À INTÉGRER LE PRINCIPE DE SUBSTITUTION DANS LE CADRE RÉGLEMENTAIRE NATIONAL APPLICABLE AUX PRODUITS CHIMIQUES,

   

Proposition de loi rejetée

 

Article 1er

Article 1er

Code de l’environnement

Après l’article L. 521-5 du code de l’environnement, sont insérés deux articles L. 521-5-1 et L. 521-5-2 ainsi rédigés :

 
 

« Art. L. 521-5-1. – I. – Tout fabricant, importateur, ou utilisateur en aval soumis, dans l’exercice de ses activités industrielles, au règlement (CE) n° 1272/2008 du 16 décembre 2008 relatif à la classification, à l’étiquetage et à l’emballage des substances et des mélanges, modifiant et abrogeant les directives 67/548/CEE et 1999/45/CE et modifiant le règlement (CE) n° 1907/2006, est tenu de réaliser, chaque année, un diagnostic des substances incluses dans la liste de substances chimiques préoccupantes définie à l’article L. 521-5-2, établi de manière indépendante par des auditeurs reconnus compétents.

 
 

« Le diagnostic comprend notamment :

 
 

« – le recensement des substances chimiques incluses dans la liste mentionnée à l’article L. 521-5-2. Ce recensement inclut également les substances mentionnées à l’article L. 523-1 et les substances utilisées comme additifs ou arômes dans le cadre du règlement (CE) n° 178/2002 du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2002 établissant les principes généraux et les prescriptions générales de la législation alimentaires, instituant l’Autorité européenne de sécurité des aliments et fixant des procédures relatives à la sécurité des denrées alimentaires ayant fait l’objet de recommandations spécifiques par l’agence mentionnée à l’article L. 1313-1 ;

 
 

« – l’évaluation de la nécessité du recours à ces substances et pour chacune d’entre elles, le recensement des alternatives existantes ;

 
 

« – l’évaluation, en fonction des informations disponibles, des effets sanitaires et environnementaux des alternatives ;

 
 

« – une analyse technique et financière du recours à ces alternatives.

 
 

« La personne morale assujettie transmet à l’autorité administrative les informations relatives à la mise en œuvre de cette obligation.

 
 

« Le premier diagnostic est établi au plus tard le 1er janvier 2018.

 
 

« Un décret définit les modalités d’application du diagnostic, notamment les modalités de reconnaissance des compétences et de l’indépendance des auditeurs et les modalités de transmission des informations.

 
 

« II. – L’autorité administrative peut sanctionner les manquements qu’elle constate aux présentes dispositions.

 
 

« Elle met l’intéressé en demeure de se conformer à ses obligations dans un délai qu’elle fixe. Elle peut rendre publique cette mise en demeure.

 
 

« Lorsque l’intéressé ne se conforme pas, dans le délai fixé, à cette mise en demeure, l’autorité administrative peut lui infliger une amende dont le montant est proportionné à la gravité du manquement, à sa situation, à l’ampleur du dommage et aux avantages qui en sont tirés, sans pouvoir excéder 2 % du chiffre d’affaires hors taxes du dernier exercice clos.

 
 

« Les sanctions sont prononcées après que l’intéressé a reçu notification des griefs et a été mis à même de consulter le dossier et de présenter ses observations, assisté, le cas échéant, par une personne de son choix.

 
 

« Les sanctions pécuniaires sont recouvrées comme les créances de l’État étrangères à l’impôt et au domaine.

 
 

« L’autorité administrative ne peut être saisie de faits remontant à plus de quatre ans s’il n’a été fait durant cette période aucun acte tendant à leur recherche, à leur constatation ou à leur sanction. »

 
 

« Art. L. 521-5-2. – I. – Conformément à ses statuts, l’Institut national de l’environnement industriel et des risques apporte un appui technique, scientifique et administratif aux démarches de substitution des substances chimiques préoccupantes.

 
 

« Il veille notamment à :

 
 

« – mettre à disposition des entreprises et du public, sur un site internet prévu à cet effet, un observatoire des alternatives à chaque substance chimique préoccupante mentionnée sur une liste établie par l’organisme cité au premier alinéa du présent article, après avis de l’agence citée par l’article L. 1313-1 du code de la santé publique ;

 
 

« - informer dans le détail les entreprises sur les outils financiers à leur disposition pour soutenir leurs démarches de substitution des substances chimiques préoccupantes et à mutualiser leurs dépenses de recherche sur une substance, ou un ensemble de substances, ouvrant droit au crédit d’impôt mentionné à l’article 244 quater B du code général des impôts.

 
 

« II. – Le ministre chargé de l’environnement peut attribuer un label aux entreprises dont l’engagement en matière de substitution des substances chimiques préoccupantes présente un intérêt pour la protection de la santé des populations et de l’environnement.

 
 

« Un décret en Conseil d’État définit les modalités de mise en œuvre de ce label, notamment ses conditions d’attribution et de retrait. »

 
 

Article 2

Article 2

Code général des impôts

   

Art. 244 quater B. – I. - Les entreprises industrielles et commerciales ou agricoles imposées d’après leur bénéfice réel ou exonérées en application des articles 44 sexies, 44 sexies A, 44 septies, 44 octies, 44 octies A, 44 duodecies, 44 terdecies à 44 quindecies peuvent bénéficier d’un crédit d’impôt au titre des dépenses de recherche qu’elles exposent au cours de l’année. Le taux du crédit d’impôt est de 30 % pour la fraction des dépenses de recherche inférieure ou égale à 100 millions d’euros et de 5 % pour la fraction des dépenses de recherche supérieure à ce montant. Le premier de ces deux taux est porté à 50 % pour les dépenses de recherche exposées à compter du 1er janvier 2015 dans des exploitations situées dans un département d’outre-mer. Pour les dépenses mentionnées au k du II, le taux du crédit d’impôt est de 20 %. Ce taux est porté à 40 % pour les dépenses mentionnées au même k exposées, à compter du 1er janvier 2015, dans des exploitations situées dans un département d’outre-mer.

   

Lorsque les sociétés de personnes mentionnées aux articles 8 et 238 bis L ou groupements mentionnés aux articles 239 quater, 239 quater B et 239 quater C ne sont pas soumis à l’impôt sur les sociétés, le crédit d’impôt peut, sous réserve des dispositions prévues au dernier alinéa du I de l’article 199 ter B, être utilisé par les associés proportionnellement à leurs droits dans ces sociétés ou ces groupements.

   

II. - Les dépenses de recherche ouvrant droit au crédit d’impôt sont :

   

………………………………….

   

III. - Les subventions publiques reçues par les entreprises à raison des opérations ouvrant droit au crédit d’impôt sont déduites des bases de calcul de ce crédit, qu’elles soient définitivement acquises par elles ou remboursables. Il en est de même des sommes reçues par les entreprises, organismes ou experts mentionnés au d, au d bis ou au 6° du k du II, pour le calcul de leur propre crédit d’impôt. Lorsque ces subventions sont remboursables, elles sont ajoutées aux bases de calcul du crédit d’impôt de l’année au cours de laquelle elles sont remboursées à l’organisme qui les a versées.

   

………………………………….

   

III bis. - Les entreprises qui engagent plus de 100 millions d’euros de dépenses de recherche mentionnées au II joignent à leur déclaration de crédit d’impôt recherche un état décrivant la nature de leurs travaux de recherche en cours, l’état d’avancement de leurs programmes, les moyens matériels et humains, directs ou indirects, qui y sont consacrés et la localisation de ces moyens.

I. – Après le III bis de l’article 244 quater B du code général des impôts est inséré un III ter ainsi rédigé :

 
 

« III ter. – Le montant du crédit d’impôt recherche est majoré de 5 % si l’administration fiscale estime que l’entreprise a suffisamment contribué, au cours de l’exercice précédent, à la recherche d’une ou d’un ensemble de substances alternatives, conformément aux dispositions de l’article L. 521-5-1 du code de l’environnement ».

 

………………………………….

   
 

II. – La perte de recettes pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

 
 

III. – Le I. n’est applicable qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.

 
 

Article 3

Article 3

Code de la santé publique

Après l’article L. 1313-10 du code de santé publique, il est inséré un article L. 1313-10-1 ainsi rédigé :

 
 

« Art. L. 1313-10-1. – Lorsque l’agence a émis des recommandations spécifiques sur des substances chimiques concernant les femmes enceintes, les fabricants sont tenus de marquer d’un pictogramme « Déconseillé aux femmes enceintes » leurs produits contenant ces substances. »

 

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

(par ordre chronologique)

Association Réseau environnement santé

– M. André Cicolella, président

Comité pour le Développement Durable en Santé (C2DS)

– M. Olivier Toma, président fondateur

Institut national de l'environnement industriel et des risques (INERIS)

– M. Raymond Cointe, directeur général

– M. Philippe Hubert, directeur des risques chroniques

Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES)

– M. Jean-Nicolas Ormsby, directeur-adjoint santé-environnement

Union des industries chimiques (UIC)

– M. Jean Pelin, directeur général

– M. Frank Garnier, vice-président représentant des syndicats sectoriels

– M. Philippe Prudhon, directeur des affaires techniques

– Mme Marie Zimmer-Jehanne, responsable management des produits

Fédération des entreprises de la beauté (FEBEA)

– M. Patrick O’Quin, président

– Mme Françoise Audebert, conseillère scientifique et règlementaire

Cosmed

– M. Jean-Marc Giroux, président

Ecomundo

– M. Pierrick Drapeau, responsable autorisations et affaires publiques

Fondation Rovaltain

– M. Wilfried Sanchez, directeur

Watchfrog

– M. Grégory Lemkine, co-fondateur et président-directeur général.

© Assemblée nationale

1 () Ce projet est devenu la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.