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N
° 4125

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 13 octobre 2016

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2017 (n° 4061),

TOME III

EXAMEN DE LA SECONDE PARTIE
DU PROJET DE LOI DE FINANCES

MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES
ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

Volume 2

Examen des articles (article 38)

Par Mme Valérie RABAULT

Rapporteure générale,

Députée

——

SOMMAIRE

___

Pages

CADRAGE GÉNÉRAL DU DISPOSITIF DE PRÉLÈVEMENT À LA SOURCE DE L’IMPÔT SUR LE REVENU 19

I. LE CONTEXTE HISTORIQUE ET INTERNATIONAL 20

A. LE PRÉLÈVEMENT À LA SOURCE : UN SUJET RÉCURRENT DANS LE DÉBAT FISCAL FRANÇAIS 20

B. LA FRANCE EST, AVEC LA SUISSE, LE SEUL PAYS MEMBRE DE L’OCDE SANS PRÉLÈVEMENT À LA SOURCE 21

C. LA PRÉPARATION PAR LA LOI DE FINANCES POUR 2016 DE LA MISE EN œUVRE DU PRÉLÈVEMENT À LA SOURCE 22

II. LE RÉGIME JURIDIQUE PROPOSÉ 22

A. LE PRÉLÈVEMENT À LA SOURCE CONCERNERAIT LA TOTALITÉ DES FOYERS IMPOSABLES ET LA QUASI-TOTALITÉ DE L’ASSIETTE DE L’IMPÔT SUR LE REVENU 23

B. LES MODALITÉS DU PRÉLÈVEMENT À LA SOURCE 25

1. Les modalités générales 25

2. L’assiette du prélèvement 25

3. Le taux du prélèvement 26

C. L’AJUSTEMENT DE L’IMPÔT AUX VARIATIONS DE REVENUS 26

D. LA PRÉSERVATION DE LA VIE PRIVÉE DES CONTRIBUABLES 28

III. LES CONTRAINTES JURIDIQUES ET LES SOLUTIONS PROPOSÉES 28

A. L’ÉGALITÉ DEVANT LES CHARGES PUBLIQUES : LA QUESTION DE LA PROGRESSIVITÉ DE L’IMPÔT 29

1. Les exigences découlant de l’égalité devant les charges publiques 29

2. Le respect du principe par le dispositif proposé 29

B. L’ÉGALITÉ DEVANT LA LOI FISCALE : LE CHAMP DU PRÉLÈVEMENT À LA SOURCE 30

1. Les exigences en matière de champ de la réforme découlant de l’égalité devant la loi fiscale 30

2. Le respect par le dispositif proposé de l’égalité devant la loi fiscale 31

C. LE DROIT À LA VIE PRIVÉE : LA NÉCESSAIRE GARANTIE DE LA CONFIDENTIALITÉ DES DONNÉES FISCALES DES CONTRIBUABLES 32

D. L’ENCADREMENT EUROPÉEN : L’ABSENCE DE DISCRIMINATION ENTRE RÉSIDENTS ET NON-RÉSIDENTS PLACÉS DANS DES SITUATIONS IDENTIQUES 34

IV. LA MISE EN œUVRE DE LA RÉFORME 35

A. L’ANNÉE DE TRANSITION 35

1. La perception d’un crédit d’impôt ad hoc : le CIMR 35

2. L’imperfection des alternatives au CIMR 35

a. Les effets négatifs et de long terme d’un étalement de l’impôt 2017 36

b. L’insuffisance incitative et les effets de bord indésirables d’une exonération 36

3. La satisfaction des objectifs de la réforme par le CIMR 36

4. La question du maintien des avantages fiscaux liés à 2017 37

a. Le maintien d’avantages liés à un impôt annulé 37

b. La compatibilité du maintien de ces avantages avec l’exigence de bon usage des deniers publics 37

5. L’encadrement du CIMR destiné à éviter l’optimisation fiscale et à compromettre le niveau des recettes 38

B. LE CALENDRIER DE LA MISE EN œUVRE DE LA RÉFORME 39

V. L’IMPACT BUDGÉTAIRE, ÉCONOMIQUE ET ADMINISTRATIF DE LA RÉFORME 42

A. UN IMPACT BUDGÉTAIRE GLOBALEMENT NEUTRE 42

1. Un impact estimé nul en l’absence de modulation 42

2. Un impact incertain en prenant en compte les modulations 42

3. Le rattachement à l’exercice N des sommes versées par les collecteurs en janvier N + 1 43

B. L’IMPACT POUR LES TIERS COLLECTEURS 43

C. L’IMPACT POUR L’ADMINISTRATION FISCALE 44

1. L’adaptation des outils informatiques 44

2. La formation du personnel 45

3. La réorganisation administrative 45

D. LA LUTTE CONTRE LA FRAUDE : LES SANCTIONS PRÉVUES 45

VI. LES TRAVAUX PRÉPARATOIRES CONDUITS PAR LA RAPPORTEURE GÉNÉRALE 47

1. La présentation générale du dispositif proposé à la commission des finances 47

2. Les tables rondes et auditions organisées dans le cadre de l’instruction du projet 48

3. Les difficultés signalées 48

EXAMEN DE L’ARTICLE 51

TITRE IV – DISPOSITIONS PERMANENTES 51

I.– MESURES FISCALES ET MESURES BUDGÉTAIRES NON RATTACHÉES 51

Article 38 : Instauration du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu 51

PREMIÈRE PARTIE : LES MODALITÉS DE LA RÉFORME 51

I. UNE RÉFORME CONCERNANT 97,6 % DE L’ASSIETTE DE L’IMPÔT SUR LE REVENU 51

Texte du projet de loi (alinéas 1 à 12): 51

A. LE PRÉLÈVEMENT À LA SOURCE SE COMPOSE DE DEUX PARTIES : LA RETENUE À LA SOURCE ET L’ACOMPTE 53

B. LES REVENUS SE TROUVANT DANS LE CHAMP DE LA RETENUE À LA SOURCE 57

1. Les traitements et salaires 58

2. Les pensions et rentes viagères à titre gratuit 59

C. LES REVENUS SE TROUVANT DANS LE CHAMP DE L’ACOMPTE 60

D. LES REVENUS EXCLUS DU CHAMP DE LA PRÉSENTE RÉFORME 61

1. L’exclusion des plus-values immobilières ou mobilières et des revenus de capitaux mobiliers 61

a. Les plus-values immobilières 62

b. Les plus-values mobilières 62

c. Les revenus de capitaux mobiliers 64

2. Les revenus explicitement exclus du champ de la réforme 65

a. L’actionnariat salarié 65

b. Les revenus versés à des contribuables non-résidents faisant déjà l’objet d’un prélèvement à la source 67

c. Les autres revenus exclus par le présent article 71

d. Les revenus de source étrangère ouvrant droit à un crédit d’impôt 71

E. L’APPLICATION DE LA RÉFORME AUX REVENUS EN PROVENANCE DE L’ÉTRANGER 71

1. Les catégories de revenus en provenance de l’étranger non concernés par la réforme 72

2. Le régime applicable aux revenus d’activité et de remplacement en provenance de l’étranger 72

a. Les différentes catégories de revenus en provenance de l’étranger 72

b. Le champ des revenus de source étrangère imposés en France dépend de ses conventions fiscales 73

c. Les règles pratiques mises en œuvre pour éviter les doubles impositions 73

3. Le dispositif prévu par le présent article 74

a. La liste des revenus en provenance de l’étranger entrant dans le champ du PAS 74

b. Seuls les revenus de source étrangère seraient soumis au PAS selon des modalités spécifiques 75

c. L’exclusion des revenus de source étrangère ouvrant droit à un crédit d’impôt en application d’une convention fiscale internationale 76

F. LE CALCUL DU PRÉLÈVEMENT 76

II. LA DÉFINITION DE L’ASSIETTE DU PRÉLÈVEMENT 77

Texte du projet de loi (alinéas 13 à 24) : 77

A. POUR LES REVENUS SOUMIS À LA RETENUE À LA SOURCE 78

B. POUR LES REVENUS RELEVANT DE L’ACOMPTE 80

1. Les revenus imposables pris en compte dans l’assiette de l’acompte 80

a. Le revenu imposable des indépendants (BIC, BA et BNC) 80

i. La détermination des BIC 81

ii. La détermination des bénéfices agricoles 81

iii. La détermination des BNC 82

iv. Les régimes « micro » 83

v. La prise en compte d’abattements applicables l’année de paiement de l’acompte 83

b. Les revenus fonciers 86

c. Les pensions alimentaires 89

d. Les rentes viagères à titre onéreux 90

e. L’exclusion de certains revenus ou charges de l’assiette de l’acompte 91

i. Revenus imposés selon le système du quotient 91

ii. Autres revenus exceptionnels exclus de l’assiette de l’acompte 92

2. Une assiette ancienne, semblable à celle actuellement retenue 92

a. L’ancienneté de l’assiette de l’acompte limite la contemporanéité de l’imposition et certains avantages de la réforme 93

i. L’absence de changement des modalités de calcul de l’impôt dans le régime de l’acompte 94

ii. Une différence de situation patente par rapport au régime de la retenue à la source 96

b. Le recours à la modulation serait nécessaire mais revêt une certaine complexité 97

i. La modulation de l’acompte serait nécessaire pour éviter une surcharge fiscale provisoire 97

ii. Le recours à la modulation est complexe et peut être dissuasif 99

c. Les alternatives reposant sur une estimation de son revenu par le contribuable se révèlent délicates 101

i. Une estimation reposant sur le chiffre d’affaires assorti d’un taux de charges liés aux précédents exercices ne serait ni simple ni optimale 101

ii. Une estimation directe du revenu imposable par le contribuable 103

d. Les inconvénients présentés par l’ancienneté de l’assiette de l’acompte doivent être nuancés par les facilités proposées aux contribuables 105

3. La prise en compte de cas particuliers pour l’établissement de l’assiette 106

a. Les déficits catégoriels seraient retenus pour une valeur nulle 106

b. L’ajustement prorata temporis des BIC, BA et BNC afférents à une période inférieure à douze mois. 107

4. L’exclusion du prélèvement à la source des exploitants individuels qui ont opté pour le versement libératoire 108

III. LA DÉFINITION DU TAUX APPLICABLE 110

Texte du projet de loi (alinéas 25 à 50) : 110

A. LE TAUX DE DROIT COMMUN 114

1. Les modalités de calcul de l’impôt afférent aux revenus dans le champ du prélèvement à la source 114

a. Le point de départ : l’impôt dû par le foyer fiscal avant réductions et crédits d’impôt 114

b. La détermination du montant de l’impôt afférent aux seuls revenus dans le champ du PAS, par le calcul d’un quotient 116

2. Un taux égal au rapport entre ce montant d’impôt et les revenus se trouvant dans le champ du PAS 118

3. La prise en compte des revenus perçus en N − 2 ou N − 1, voire des revenus perçus en N − 3 120

a. Les revenus et l’impôt pris en compte pour calculer le taux 120

b. Le caractère par construction historique du taux de prélèvement 121

4. L’absence de prise en compte des réductions et crédits d’impôt dans le calcul du prélèvement à la source 122

a. Une contrainte budgétaire s’imposant au titre de l’année 2018 122

b. Une option de nature à majorer le prélèvement à la source applicable aux foyers fiscaux bénéficiant d’avantages fiscaux récurrents, cette majoration étant compensée en septembre de la même année par le versement de la restitution 123

i. La distinction entre avantages fiscaux occasionnels et récurrents 123

ii. L’absence de prise en compte des avantages fiscaux dans le taux du prélèvement permet d’éviter des régularisations en année N + 2, pour les avantages non récurrents 135

iii. L’absence de prise en compte des avantages fiscaux dans le taux du prélèvement conduit en revanche à « surprélever » les contribuables entre janvier et août, et à amplifier les régularisations en septembre, pour les avantages récurrents 136

B. LE TAUX NUL POUR LES FOYERS FISCAUX NON IMPOSÉS DU FAIT DE RÉDUCTIONS OU CRÉDITS D’IMPÔT, ET DONT LES REVENUS SONT INFÉRIEURS À CERTAINS SEUILS 140

1. Des foyers non imposés au cours des années précédentes du fait d’avantages fiscaux pourraient se trouver assujettis au prélèvement à la source 140

2. L’application d’un taux nul pour les foyers fiscaux remplissant deux conditions cumulatives 141

C. EN L’ABSENCE DE TAUX CALCULÉ PAR L’ADMINISTRATION FISCALE, LE RECOURS À UN « TAUX PAR DÉFAUT » 142

1. Une grille de taux par défaut applicable en l’absence de taux calculé par l’administration, caractérisé par de forts effets de seuil 142

2. Les personnes concernées par le taux par défaut 148

a. Les personnes non connues de l’administration fiscale, soit, dans la généralité des cas, les primo-déclarants 148

b. Les personnes pour lesquelles l’administration fiscale ne dispose que de données anciennes 149

c. Les personnes non reconnues par l’administration fiscale, ou en contrat court, ou en début de contrat 149

d. Les personnes rattachées à un foyer fiscal 151

3. Une grille de taux par défaut qui pourrait concerner un nombre non négligeable de contribuables, et qui risque de conduire à des « surprélèvements » temporaires 152

D. L’OPTION DU TAUX PAR DÉFAUT REPOSE SUR LE RESPECT DE LA CONFIDENTIALITÉ 153

1. Un champ d’application restreint mais justifié par la préservation de la confidentialité 154

a. L’option du taux par défaut ne porte que sur les revenus salariaux 154

b. L’option du taux par défaut préserve la confidentialité du contribuable 155

2. L’obligation de verser un complément de retenue à la source 157

3. Les difficultés susceptibles d’être induites par l’option pour le taux par défaut 159

a. Une option source de complexité et de lourdeur pour le contribuable 159

b. Le souci de confidentialité pourrait conduire à une surimposition 160

IV. LA MODIFICATION DU TAUX À LA SUITE D’UN CHANGEMENT DE SITUATION 161

Texte du projet de loi (alinéas 51 à 65) : 161

A. DANS LE CAS D’UN MARIAGE OU D’UN PACS 163

1. Le droit existant : les effets fiscaux d’une union sont par construction différés dans le temps 163

2. Le droit proposé : le calcul d’un taux commun au nouveau foyer fiscal applicable soit dans les trois mois suivant la déclaration de l’union, soit le 1er janvier de l’année suivant l’union 164

a. Les modalités de calcul du nouveau taux 164

b. L’application du nouveau taux soit dans les trois mois suivant la déclaration de l’union, soit le 1er janvier de l’année suivante, sur option 165

B. DANS LE CAS DU DÉCÈS D’UN DES CONJOINTS OU PARTENAIRES SOUMIS À IMPOSITION COMMUNE 168

1. Le droit existant : un dispositif de double déclaration pour les revenus de l’année du décès 168

2. Le droit proposé : la prise en compte contemporaine des effets du décès sur le taux de prélèvement du conjoint survivant 169

a. Le calcul du taux applicable jusqu’au 31 décembre de l’année du décès, avec le maintien du quotient conjugal et la prise en compte des seuls revenus du conjoint survivant 170

b. Le taux applicable du 1er janvier de l’année suivant le décès au mois de septembre de la deuxième année suivant le décès 171

C. DANS LE CAS D’UN DIVORCE OU D’UNE RUPTURE DE PACS 173

1. Le droit existant : l’année de la séparation, le paiement des impôts dus par le couple au titre de l’année précédente 173

2. Le droit proposé : le calcul d’un nouveau taux pour chaque ex-conjoint dès l’année de la séparation 174

V. LA MODULATION DU PRÉLÈVEMENT À LA SOURCE 176

Texte du projet de loi (alinéas 66 à 94 et 211 à 223) : 176

A. L’ÉTAT DU DROIT 180

1. La modulation des tiers provisionnels 180

2. La modulation des mensualités 180

3. Une faculté peu utilisée par les redevables 181

a. Environ un tiers des contribuables sont concernés chaque année par une baisse de revenu 181

b. Les demandes de modulation actuelles sont très limitées 182

B. LE DISPOSITIF PROPOSÉ 183

1. Les enjeux de la modulation dans le cadre de la présente réforme 183

a. Une prise en compte de changements de situation non appréhendés par le reste du dispositif 183

b. Un enjeu important du point de vue du contribuable 183

c. Un enjeu budgétaire fondamental du point de vue de l’État 184

2. L’interdiction de moduler à la hausse ou à la baisse en cas de changement de situation non déclaré 185

3. La faculté de modulation à la hausse peut être utilisée avec une grande liberté 185

4. La faculté de modulation à la baisse est sollicitée sous la responsabilité du redevable 186

a. Un critère d’éligibilité à la modulation visant à écarter les demandes de modulation peu significatives 187

b. L’établissement d’un PAS théorique de l’année courante permettant d’écarter les modulations peu significatives 188

c. Les conséquences de la modulation 190

5. Les majorations applicables en cas de modulation à la baisse injustifiée 190

a. La majoration en cas de non-respect a posteriori du critère d’éligibilité à la modulation 190

b. La majoration en cas de modulation excessive 192

6. Une clause de bonne foi 193

VI. LE VERSEMENT DES ACOMPTES EN CAS DE DÉBUT OU D’ARRÊT DE PERCEPTION DE REVENUS RELEVANT DE L’ACOMPTE 194

Texte du projet de loi (alinéas 95 à 98 et 124 à 128) : 194

A. LA POSSIBILITÉ D’OPTER POUR UN VERSEMENT SPONTANÉ D’ACOMPTE EN CAS DE DÉBUT DE PERCEPTION D’UN REVENU SOUMIS À L’ACOMPTE 195

1. L’imposition de droit commun du début d’activité : le report du paiement à la liquidation de l’impôt 195

2. Le calcul par le contribuable de l’impôt dû au titre d’une nouvelle activité ou d’un revenu soumis à acompte nouvellement perçu 196

3. Des modalités de détermination de l’acompte spontané susceptibles d’être délicates à mettre en œuvre 197

a. L’estimation du montant de l’acompte spontané 197

b. Les risques et les incertitudes entourant l’acompte spontané 198

i. Une estimation délicate 198

ii. L’absence de précisions quant à d’éventuelles sanctions 199

iii. Les interrogations liées aux potentiels effets négatifs de l’ajustement prorata temporis sur la trésorerie de certains contribuables 200

B. LA DEMANDE D’ARRÊT DE VERSEMENT D’ACOMPTE EN CAS DE CESSATION DE PERCEPTION D’UN REVENU RELEVANT DE L’ACOMPTE 201

1. L’arrêt des versements d’acompte et l’imputation des versements effectués sur l’imposition immédiate 202

2. La simplification et la modernisation de l’imposition immédiate 203

a. La prise en compte du dernier taux de prélèvement à la source pour l’établissement de l’imposition immédiate 203

b. La modernisation de l’imposition immédiate : l’extension au régime micro-BA 204

VII. LA POSSIBILITÉ D’OPTER POUR UN TAUX INDIVIDUALISÉ AU SEIN DES COUPLES 205

Texte du projet de loi (alinéas 99 à 105) : 205

A. LES EFFETS DU PRÉLÈVEMENT À LA SOURCE SUR L’IMPOSITION DES COUPLES DANS LE CAS D’UNE DISPARITÉ DE REVENUS ENTRE CONJOINTS 205

B. LES MODALITÉS DE CALCUL DU TAUX INDIVIDUALISÉ 207

1. En premier lieu, le calcul du taux d’imposition du conjoint aux revenus les moins élevés 207

2. En conséquence, le calcul du taux d’imposition du conjoint aux revenus les plus élevés 208

3. Un effet neutre sur l’impôt acquitté 208

C. LES MODALITÉS DE MISE EN œUVRE DE L’INDIVIDUALISATION DES TAUX 210

VIII. LES MODALITÉS DE PRÉSENTATION DES DÉCLARATIONS, OPTIONS OU DEMANDES PAR LES CONTRIBUABLES 211

Texte du projet de loi (alinéa 106) : 211

IX. LES OBLIGATIONS DÉCLARATIVES DES TIERS COLLECTEURS 212

Texte du projet de loi (alinéas 107 à 118, 245 et 246) : 212

A. LE DROIT EN VIGUEUR 213

1. Les obligations déclaratives en matière fiscale 214

2. Les obligations déclaratives en matière sociale 214

B. LE DISPOSITIF PROPOSÉ 216

1. Une extension des obligations déclaratives en vigueur 216

2. La mise en œuvre de cette obligation déclarative 217

a. Les tiers collecteurs dans le champ de la DSN 217

b. Les tiers collecteurs hors champ de la DSN 217

c. Les particuliers employeurs 218

d. Les petites entreprises ou associations ayant recours à des titres simplifiés 218

X. LES MODALITÉS DE RECOUVREMENT DU SOLDE DE L’IMPÔT DÛ 219

Texte du projet de loi (alinéas 123, 132 à 138, 129, 130 et 176 à 207) : 219

A. LE DROIT EXISTANT 222

1. Les modalités de recouvrement en une fois, par acomptes ou par prélèvements mensuels 222

2. Le recouvrement par voie de rôle des prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine et les revenus d’activité et de remplacement de source étrangère 225

B. LE DROIT PROPOSÉ 226

1. Le maintien de la déclaration des revenus, au printemps N + 1 226

2. La suppression des acomptes et de la mensualisation 228

3. Les modalités de recouvrement du solde de l’impôt 229

4. Diverses coordinations résultant de la réforme 231

a. La définition des modalités de la mensualisation de la taxe d’habitation, de la taxe foncière et de la contribution à l’audiovisuel public 231

b. La suppression de la mensualisation du paiement de l’ISF 232

C. LE RECOUVREMENT IMMÉDIAT DU SOLDE EN CAS D’APPLICATION DE LA MAJORATION PRÉVUE À L’ARTICLE 1729 G 233

XI. LES MODALITÉS DE VERSEMENT DE L’ACOMPTE 234

Texte du projet de loi (alinéas 139 à 150, 164 à 169, 171 à 175, 119 à 122, 239 et 240) : 234

A. LE VERSEMENT MENSUEL DE L’ACOMPTE ET LES POSSIBILITÉS D’ÉCHELONNEMENT INFRA-ANNUEL 236

1. Le droit en vigueur 236

a. Le paiement des mensualités en cas d’option pour la mensualisation 236

b. Les tiers provisionnels 236

c. Les facultés d’échelonnement 236

2. Le droit proposé 237

a. Les modalités de versement de l’acompte 237

b. L’échelonnement infra-annuel 237

c. Les modalités de versement des acomptes 237

B. L’ACOMPTE ET LE SOLDE SERAIENT PRÉLEVÉS SUR LE COMPTE DU CONTRIBUABLE 237

C. LE RECOUVREMENT FORCÉ DE L’ACOMPTE 239

XII. LE PAIEMENT DE LA RETENUE À LA SOURCE PAR LES COLLECTEURS 240

Texte du projet de loi (alinéas 151 à 163 et 247 à 253) : 240

A. LE CHAMP DES COLLECTEURS DE LA RETENUE À LA SOURCE 242

B. LE DÉROULEMENT DE LA RETENUE À LA SOURCE 244

1. Un prélèvement effectué lors du paiement des salaires et pensions 244

2. L’application du taux de retenue à la source 245

3. Le reversement des sommes collectées à l’administration fiscale 245

4. Le cas des employeurs relevant des dispositifs simplifiés de déclaration et de recouvrement de cotisations sociales 247

a. Les entreprises de moins de vingt salariés 247

b. Les particuliers employeurs, pour lesquels la retenue à la source soulève des questions spécifiques 248

5. Les modalités de réclamation 250

6. La définition des règles de privilège attachées à la retenue à la source 251

C. LES CONSÉQUENCES DE LA RÉFORME POUR LES TIERS PAYEURS 252

XIII. LES SANCTIONS APPLICABLES POUR LES CONTRIBUABLES 254

Texte du projet de loi (alinéas 208 à 210) : 254

A. L’APPLICATION D’UNE MAJORATION DE 10 % EN CAS DE RETARD DE PAIEMENT 255

B. L’AUGMENTATION DE LA MAJORATION EN CAS D’INSUFFISANCE EXCESSIVE DU COMPLÉMENT DE RETENUE À LA SOURCE PAYÉ AVEC RETARD 256

XIV. LES SANCTIONS APPLICABLES POUR LES TIERS COLLECTEURS 256

Texte du projet de loi (alinéas 224 à 237) : 256

A. LA SANCTION DU RETARD, DU DÉFAUT OU DE L’INSUFFISANCE DE PAIEMENT OU DE DÉCLARATION 257

1. La sanction du retard de paiement 257

2. La sanction du retard de déclarations relatives à certaines sommes versées 260

3. La sanction de l’insuffisance de retenue à la source 260

4. La sanction pénale du défaut de reversement de la retenue à la source 261

5. Les conséquences pour le contribuable des défauts ou insuffisances du collecteur de la retenue à la source 263

a. La décharge du contribuable en cas de défaut de versement des retenues effectuées par le collecteur 264

b. Le maintien des obligations fiscales du contribuable en l’absence de retenue réalisée par le collecteur 264

B. LA SANCTION DE LA VIOLATION DU SECRET PROFESSIONNEL 265

XV. L’UTILISATION DU NIR POUR LES ÉCHANGES ENTRE ADMINISTRATION FISCALE ET COLLECTEURS, L’EXTENSION DE L’OBLIGATION DE SECRET PROFESSIONNEL POUR LE TIERS COLLECTEUR 268

Texte du projet de loi (alinéas 241 à 244) : 268

A. L’UTILISATION DU NIR DANS LES RELATIONS ENTRE ADMINISTRATION FISCALE ET COLLECTEURS : L’ENJEU CENTRAL DE LA FIABILITÉ DES IDENTIFIANTS DES CONTRIBUABLES 268

B. L’EXTENSION DE L’OBLIGATION DE SECRET PROFESSIONNEL POUR LE TIERS COLLECTEUR 271

XVI. LE PRÉLÈVEMENT À LA SOURCE DES PRÉLÈVEMENTS SOCIAUX SUR LES REVENUS DU PATRIMOINE 271

Texte du projet de loi (alinéas 259 à 265 et 245 à 258) : 271

A. L’ÉTAT DU DROIT 273

1. Les prélèvements sociaux sur les revenus du capital sont pour partie déjà prélevés à la source 273

a. La distinction entre revenus du patrimoine et revenu de placement 273

b. Les prélèvements sociaux sur les produits de placement sont déjà prélevés à la source 275

2. Les prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine sont encore prélevés par voie de rôle en année N + 1 275

B. LE DISPOSITIF PROPOSÉ 276

1. Les prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine seraient prélevés à la source dès lors qu’ils entrent dans le champ de l’acompte 276

2. Les mesures de coordination avec le code de la sécurité sociale 277

XVII. L’ENTRÉE EN VIGUEUR DE LA RÉFORME 278

Texte du projet de loi (alinéas 270 à 274) : 278

A. UNE RÉFORME APPLICABLE AUX REVENUS PERÇUS ET RÉALISÉS À COMPTER DU 1ER JANVIER 2018 278

B. L’ENTRÉE EN VIGUEUR ANTICIPÉE DES DISPOSITIONS RELATIVES À L’INFORMATISATION DES DÉCLARATIONS ET À L’OBLIGATION DE SECRET PROFESSIONNEL S’IMPOSANT AUX COLLECTEURS 279

1. La généralisation de l’informatisation de certaines déclarations applicable dès le 1er janvier 2017 279

2. L’application des dispositions relatives à l’obligation de secret professionnel pour les collecteurs à compter du 1er octobre 2017 280

DEUXIÈME PARTIE : LA PÉRIODE DE TRANSITION 281

Texte du projet de loi (alinéas 275 à 340) : 281

I. LE CRÉDIT D’IMPÔT DE MODERNISATION DU RECOUVREMENT 286

A. UN CRÉDIT D’IMPÔT PORTANT SUR LES REVENUS DE 2017 NON EXCEPTIONNELS, ET SE TROUVANT DANS LE CHAMP DE LA RÉFORME 286

1. Les modalités de calcul du CIMR 287

2. Les conditions d’imputation du crédit d’impôt, garantissant le maintien des avantages fiscaux au titre de 2017 288

3. L’impact du dispositif proposé 292

a. Une période de transition favorable pour les personnes enregistrant une hausse de revenus en 2017 ou une baisse de revenus en 2018 292

b. Le maintien à un niveau constant du soutien apporté aux différents secteurs économiques et sociaux par l’intermédiaire des réductions et crédits d’impôt 293

c. La mise en place du prélèvement à la source n’alourdirait pas l’impôt dû et ne devrait pas affecter la trésorerie de contribuables bénéficiant de certains avantages fiscaux 293

B. LA DÉFINITION DES REVENUS EXCEPTIONNELS POUR LES DIFFÉRENTES CATÉGORIES DE REVENU 296

1. Les traitements et salaires 296

a. Les indemnités associées à la fin de l’exercice d’une activité : les indemnités versées à l’occasion de la rupture du contrat de travail, les indemnités versées lors de la cessation des fonctions des mandataires sociaux et dirigeants, ainsi que les indemnités de clientèle 297

b. Les prestations de retraite servies sous forme de capital et les pécules versés en fin de carrière aux footballeurs professionnels 300

c. Les indemnités, allocations et primes versées en vue de dédommager leurs bénéficiaires d’un changement de résidence ou de lieu de travail 302

d. Les aides et allocations capitalisées servies en cas de conversion, de réinsertion ou pour la reprise d’une activité professionnelle 302

e. Les sommes perçues au titre de la participation ou de l’intéressement non affectées à un plan d’épargne salariale 302

f. Les sommes issues de la monétisation de droits inscrits sur un compte épargne temps 304

g. Les gratifications surérogatoires, les revenus correspondant à des années antérieures ou postérieures par leur date normale d’échéance, ainsi que tout autre revenu non susceptible d’être recueilli annuellement 305

2. Les revenus fonciers non exceptionnels 306

a. L’architecture globale de la période de transition pour les revenus fonciers 306

b. La définition des revenus fonciers non exceptionnels ouvrant droit au CIMR 307

c. Les autres revenus fonciers sont a contrario considérés comme exceptionnels 309

3. Une dérogation aux règles de déductibilité des charges liées aux travaux 309

a. Les charges non pilotables 309

b. Les charges pilotables 310

c. Les modalités d’imputation des charges non pilotables 310

d. Les modalités d’imputation des charges pilotables 311

e. L’impact de la période transitoire sur certains dispositifs fonciers 313

f. Exemples de mise en œuvre du CIMR dans le domaine foncier et de la mesure spécifique d’imputabilité des travaux 316

4. Les modalités de détermination des revenus exceptionnels des travailleurs indépendants : le dispositif du complément de CIMR 319

a. L’assiette du CIMR des indépendants serait plafonnée sur la base d’une appréciation pluriannuelle 320

b. Les contribuables ayant dénoncé leur option pour le versement libératoire pour 2017 puis opté de nouveau pour ce régime pour 2018 ne bénéficieraient pas du CIMR 321

c. Le CIMR serait ajusté en 2019 au regard des revenus perçus en 2018 322

i. Bénéfice de 2018 supérieur à celui de 2017 323

ii. Bénéfice de 2018 inférieur à celui de 2017 mais supérieur à ceux de la période 2014-2016 323

iii. Clause de sauvegarde reposant sur l’activité du contribuable 324

iv. Cas d’un début d’activité en 2017 325

d. Les difficultés susceptibles d’être soulevées par le dispositif propre aux indépendants 327

i. Le risque de la mise en place d’un dispositif complexe et lent 327

ii. L’absence relative de prise en compte complète de la variabilité de l’activité des travailleurs indépendants 327

iii. Le caractère potentiellement restrictif de la clause de sauvegarde liée au surcroît d’activité milite pour une clarification 329

5. Les revenus non exceptionnels des dirigeants 330

a. Une définition du dirigeant par référence au contrôle de la société 330

b. L’assiette du CIMR des dirigeants serait plafonnée sur la base d’une appréciation pluriannuelle proche de celle applicable aux indépendants 331

c. Les dérogations ou les ajustements possibles 331

C. UNE CLAUSE GÉNÉRALE ANTI-OPTIMISATION 333

1. La nécessité de prévoir des dispositions spécifiques pour l’année 2017 333

2. Un dispositif de demande de justifications par l’administration fiscale sur la détermination du montant du CIMR, pouvant conduire à la remise en cause de ce dernier 334

3. L’allongement d’une année du délai de reprise de droit commun pour l’impôt sur le revenu dû au titre de 2017 336

II. LE CIMR APPLICABLE AUX PRÉLÈVEMENTS SOCIAUX 337

A. LES PRÉLÈVEMENTS SOCIAUX NON CONCERNÉS PAR LE CIMR SOCIAL 338

1. Les prélèvements sociaux sur les revenus placés hors du champ du prélèvement 338

2. Les prélèvements sociaux sur les revenus d’activité entrant dans le champ du prélèvement et non du CIMR 339

B. LES PRÉLÈVEMENTS SOCIAUX VISÉS PAR LE CIMR SOCIAL 339

1. Un champ limité 339

2. Les modalités de calcul du CIMR social 339

TROISIÈME PARTIE : DISPOSITIONS DIVERSES 341

Texte du projet de loi (alinéas 108, 131, 170, 238, 239 et 266 à 269) : 341

I. L’ABROGATION DES DISPOSITIONS RELATIVES À LA DÉTERMINATION DU BÉNÉFICE DE CERTAINES EXPLOITATIONS AGRICOLES RELEVANT DU FORFAIT AGRICOLE 342

A. LES MODALITÉS DE DÉTERMINATION DU BÉNÉFICE DANS LE BAIL À PORTION DE FRUITS OU EN CAS DE CHANGEMENT D’EXPLOITANT 342

B. LA CADUCITÉ DE L’ARTICLE 77 EN RAISON DE LA SUPPRESSION DU FORFAIT AGRICOLE. 343

II. LA SUPPRESSION DE LA SUSPENSION DE L’IMPÔT SUR LE REVENU EN CAS DE SERVICE NATIONAL 343

III. LA CORRECTION DES MOYENS DE PAIEMENT SEPA : L’EXTENSION AUX PAIEMENTS INFÉRIEURS À 300 EUROS DES MOYENS DE PAIEMENT DÉMATÉRIALISÉS 343

IV. L’ABROGATION DU PRIVILÈGE DU TRÉSOR POUR LE RECOUVREMENT DES ACOMPTES PRÉVUS À L’ARTICLE 1664 DU CGI 345

V. LA PRISE EN COMPTE DE LA RETENUE À LA SOURCE POUR LE CALCUL DE LA QUOTITÉ INSAISISSABLE DU SALAIRE 346

VI. L’EXTENSION DE LA GARANTIE DE L’ASSOCIATION POUR LA GESTION DU RÉGIME DE GARANTIE DES CRÉANCES DES SALARIÉS 347

VII. L’AJOUT DE LA RETENUE À LA SOURCE PARMI LES DÉPENSES OBLIGATOIRES DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES ET DE LEURS GROUPEMENTS 348

A. L’INCLUSION DANS LA LISTE DES DÉPENSES OBLIGATOIRES DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES DE LA RETENUE À LA SOURCE 348

B. LES CONSÉQUENCES DU CARACTÈRE DE DÉPENSES OBLIGATOIRES DES RETENUES À LA SOURCE 348

C. L’ABSENCE DE COORDINATIONS SUPPLÉMENTAIRES À RÉALISER 349

1. Les établissements publics de coopération intercommunale 349

2. Les syndicats mixtes 350

3. Les départements et régions faisant l’objet de dispositions particulières 350

4. Les départements et régions d’outre-mer 350

Après l’article 38 401

TRAVAUX DE LA COMMISSION 403

ÉCHANGE DE VUES ET TABLE RONDE AVEC M. FRANÇOIS-XAVIER FERRUCCI, SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DE SOLIDAIRES FINANCES PUBLIQUES ET M. ALEXANDRE DERIGNY, SECRÉTAIRE GÉNÉRAL ADJOINT DE LA CGT FINANCES 403

TABLE RONDE AVEC LES REPRÉSENTANTS DU MEDEF ET DE LA CGPME 425

AUDITION DE M. BRUNO PARENT, DIRECTEUR GÉNÉRAL DES FINANCES PUBLIQUES 437

ANNEXE : LISTE DES AUTRES PERSONNES AUDITIONNÉES 460

CADRAGE GÉNÉRAL DU DISPOSITIF DE PRÉLÈVEMENT À LA SOURCE DE L’IMPÔT SUR LE REVENU

L’impôt sur le revenu (IR) est aujourd’hui pour l’essentiel acquitté un an après la perception des revenus, à l’exception de certains revenus spécifiques qui font l’objet de retenues à la source (RAS) (1).

Ainsi, les revenus perçus au cours de l’année N − 1 (par exemple 2015) sont déclarés par les contribuables au cours du printemps de l’année N (2016) et font l’objet d’un avis d’imposition transmis à l’automne de cette même année N (2016). Au cours de cette année N (2016), les contribuables effectuent donc des versements provisionnels calculés sur la base de l’impôt acquitté en année N – 1 (2015), qui portait lui-même sur les revenus perçus en année N – 2 (2014).

Les contribuables sont donc amenés à payer leurs impôts pendant les neuf premiers mois de l’année N (2016) sur la base des revenus qu’ils ont perçus en année N – 2 (2014). La régularisation de l’impôt restant dû n’intervient qu’en septembre de l’année N (2016), après la réception de l’avis d’imposition (2). Ce mécanisme emporte un décalage significatif entre la perception des revenus et leur taxation, ce qui peut occasionner, pour les contribuables dont les revenus varient d’une année sur l’autre, des difficultés.

Pour réduire ces difficultés, le présent article propose de prélever l’impôt sur le revenu au moment où celui-ci est perçu, c’est-à-dire directement à sa source.

La mise en œuvre du prélèvement à la source s’articule autour des dispositions suivantes :

– il concernera tous les contribuables ;

– les revenus qui feront l’objet du prélèvement à la source sont les salaires, traitements et pensions, les rentes viagères, les revenus fonciers, les bénéfices agricoles (BA), les bénéfices non commerciaux (BNC) et les bénéfices industriels et commerciaux (BIC) ;

– ne seront pas concernés par le prélèvement à la source : les plus-values immobilières, les revenus de capitaux mobiliers, les plus-values mobilières, les revenus des stocks options, les attributions gratuites d’actions… Pour ces types de revenus, l’imposition continuera à être réalisée comme elle l’est actuellement ;

– le prélèvement à la source s’appuiera sur deux mécanismes : la retenue à la source, qui concernera les salaires ou les pensions net imposables et qui sera réalisée par l’employeur sur la base d’un taux transmis par l’administration fiscale, et les acomptes, qui concerneront les revenus fonciers, les BIC, BNC et BA et qui seront versés directement par le contribuable auprès de l’administration fiscale ;

– dans le cas de la retenue à la source, le taux transmis par l’administration fiscale à l’employeur pourra être le taux d’imposition réel du foyer fiscal, un taux par défaut ou un taux individualisé dans le cas d’un couple ;

– l’année 2017 sera l’année de transition entre le système actuel et celui du prélèvement à la source. En 2018, l’impôt sur les revenus 2017 aurait dû être perçu. Il ne le sera pas. En 2018, c’est l’impôt sur les revenus 2018 qui sera perçu. En parallèle, le présent projet de loi de finances prévoit de conserver aux contribuables le bénéfice des réductions et crédits d’impôt qu’ils auraient acquis au titre de l’année 2017.

I. LE CONTEXTE HISTORIQUE ET INTERNATIONAL

A. LE PRÉLÈVEMENT À LA SOURCE : UN SUJET RÉCURRENT DANS LE DÉBAT FISCAL FRANÇAIS

La mise en place du prélèvement à la source (PAS) de l’impôt sur le revenu ne constitue pas un débat nouveau en France.

Ainsi que le rappelait le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO) dans son rapport sur ce thème en 2012 (3), les premières traces de ce débat remontent aux années 1930 et s’inscrivaient dans le cadre des réflexions menées sur les procédures permettant de fiabiliser le recouvrement de l’impôt. Le déclenchement de la seconde guerre mondiale et les besoins financiers afférents accélérèrent la réflexion et une retenue à la source sur les salaires fut instaurée par décret du 10 novembre 1939, sous le nom de « stoppage à la source » ; il s’agissait d’un impôt proportionnel assis sur l’ensemble des rémunérations, fixé selon un barème simplifié prenant en compte les charges de famille et libératoire de l’impôt sur le revenu. Dans un contexte de lutte contre l’inflation, ce dispositif fut remplacé en 1948 par un « versement forfaitaire » prenant la forme d’une taxe sur les salaires de 5 %, qui, elle, n’était pas libératoire de l’impôt. Ce versement forfaitaire fut à son tour abrogé par la loi du 28 décembre 1959 créant l’impôt sur le revenu unifié et progressif, dans sa forme moderne (4). La retenue à la source fut donc appliquée en France pendant vingt ans.

Après quelques initiatives restées sans suite sous la IVRépublique, puis l’engagement d’un projet en 1967, abandonné à la suite des événements de mai 1968, un rapport de l’Inspection générale des finances publié en 1970 (5) sur le recouvrement de l’impôt sur le revenu conduisit à la loi du 29 juin 1971 instaurant le paiement mensualisé de l’impôt sur le revenu (6).

Un projet de retenue à la source de l’impôt sur le revenu fut introduit par un amendement gouvernemental en octobre 1973, dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances pour 1974. Adopté par l’Assemblée nationale, le dispositif introduit par cet amendement fut supprimé par le Sénat, l’opposition se cristallisant, d’une part, sur la question du civisme fiscal, qui aurait été réduit du fait de la disparition de l’acte de paiement de l’impôt, et, d’autre part, sur les charges supplémentaires induites pour les entreprises.

Le débat ressurgit à la fin des années 1990 et au début des années 2000, se traduisant par la publication d’un nombre tout à fait notable de rapports sur le sujet, qui ne connurent pas de suites (7). En 2007, une concertation fut engagée en vue d’instaurer la retenue à la source au 1er janvier 2009 et déboucha sur la remise d’un rapport (8). Le projet fut toutefois abandonné à la suite des élections présidentielle et législatives du printemps 2007.

À partir de 2012, de nouveaux travaux vinrent alimenter la réflexion sur le sujet, parmi lesquels le rapport du CPO de février 2012 ou encore le rapport sur la fiscalité des ménages publié en mai 2014 (9), qui consacrait une partie de ses développements à la modernisation et la simplification de l’impôt sur le revenu.

B. LA FRANCE EST, AVEC LA SUISSE, LE SEUL PAYS MEMBRE DE L’OCDE SANS PRÉLÈVEMENT À LA SOURCE

Le système fiscal français fait figure de quasi-exception parmi les pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), alors que tous les pays développés, à l’exception de la Suisse, de Singapour – qui n’est pas membre de l’OCDE – et donc de la France, appliquent une retenue à la source sur les salaires pour le paiement de l’impôt sur le revenu des personnes physiques.

La retenue à la source a été adoptée par la plupart des pays depuis plusieurs décennies – voire un siècle –, ainsi que le soulignent les exemples suivants :

– en 1917 au Canada ;

– en 1925 en Allemagne ;

– en 1943 aux États-Unis ;

– en 1944 au Royaume-Uni ;

– en 1973 en Italie ;

– en 1979 en Espagne.

C. LA PRÉPARATION PAR LA LOI DE FINANCES POUR 2016 DE LA MISE EN œUVRE DU PRÉLÈVEMENT À LA SOURCE

L’article 76 de la loi de finances pour 2016 (10) comportait trois mesures de nature à préparer et faciliter le plus possible la mise en œuvre du prélèvement à la source :

– la remise au Parlement par le Gouvernement d’un rapport sur les modalités de mise en œuvre du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu à compter de 2018. Devaient notamment être abordés l’étude des revenus concernés par la réforme, le traitement des dépenses fiscales acquises en 2017 et le coût de la réforme. L’évaluation préalable du présent article constitue ce rapport (11) ;

– la généralisation de la déclaration des revenus par voie électronique pour les contribuables dont la résidence principale est équipée d’un accès à internet ;

– l’abaissement, entre 2016 et 2019, du seuil de revenu à partir duquel le paiement de l’impôt doit être fait par voie dématérialisée.

Le dispositif proposé par le présent article 38 du projet de loi de finances, tirant les conséquences des précédentes tentatives de mise en œuvre du prélèvement à la source, s’appuyant sur les comparaisons internationales et tenant compte des spécificités fiscales françaises, vise à instaurer, pour les revenus perçus à compter du 1er janvier 2018, le prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu.

II. LE RÉGIME JURIDIQUE PROPOSÉ

Le prélèvement à la source proposé par le Gouvernement conduirait les contribuables, à la différence des modalités d’imposition sur le revenu en vigueur, à payer leur impôt de façon contemporaine à la perception des revenus sur lesquels cet impôt est assis. Il mettrait ainsi un terme au décalage d’un an qui existe aujourd’hui et permettrait une meilleure adaptation de l’impôt acquitté aux variations des revenus perçus.

A. LE PRÉLÈVEMENT À LA SOURCE CONCERNERAIT LA TOTALITÉ DES FOYERS IMPOSABLES ET LA QUASI-TOTALITÉ DE L’ASSIETTE DE L’IMPÔT SUR LE REVENU

Le prélèvement à la source concernerait la totalité des foyers fiscaux imposables et porterait sur 97,5 % de l’assiette de l’impôt sur le revenu. Les recettes tirées du prélèvement à la source, quant à elles, correspondraient à plus de 94 % du total des recettes brutes de cet impôt, ce qui représenterait, si l’on prenait pour référence mutatis mutandis l’évaluation révisée pour 2016, 72 milliards sur un total de 76,3 milliards d’euros.

Les revenus relevant du prélèvement à la source (PAS) feraient l’objet, selon leur nature, de deux modalités de recouvrement distinctes :

– une retenue à la source (RAS), collectée et versée par un tiers collecteur. Elle concernerait notamment les salariés (le collecteur étant l’employeur) et les titulaires de pensions de retraite (le collecteur étant la caisse de retraite) ;

– un acompte contemporain, acquitté par le contribuable et directement prélevé sur son compte par l’administration fiscale. Il concernerait notamment les travailleurs indépendants et les titulaires de revenus fonciers.

Les revenus exclus du prélèvement à la source continueraient d’être imposés selon les modalités en vigueur. Leur exclusion est motivée par plusieurs considérations :

– ils font déjà l’objet d’un prélèvement contemporain à leur perception (revenus de capitaux mobiliers, revenus perçus par des non-résidents, etc.) ;

– leur soumission au prélèvement à la source serait trop complexe en raison de la nature particulière de ces revenus (imprévisibilité et caractère exceptionnel) et des différentes règles d’imposition applicables (par exemple, revenus de l’actionnariat salarié).

Le tableau qui suit présente la synthèse des modalités d’imposition des revenus inclus dans le champ de la réforme et fait état des revenus en étant exclus.

REVENUS INCLUS ET EXCLUS DU PRÉLÈVEMENT À LA SOURCE

Revenus dans le champ du prélèvement à la source

Revenu hors du champ du prélèvement à la source

Retenue à la source

Acompte contemporain

Traitements et salaires

Bénéfice industriels et commerciaux (BIC)

Plus-values immobilières (PVI)

Pensions de retraite

Bénéfices non commerciaux (BNC)

Plus-values mobilières (PVM)

Indemnités journalières de sécurité sociale, allocations chômage

Bénéfices agricoles (BA)

Revenus de capitaux mobiliers (RCM)

Indemnités versées lors de la rupture du contrat de travail (pour leur part imposable)

Revenus fonciers

Stock-options, attribution d’actions gratuites (AGA), carried interest, bons de souscription de parts de créateur d’entreprise (BSPCE)

Participation, intéressement

Rentes viagères à titre onéreux (RVTO)

Indemnités pour préjudice moral supérieures à un million d’euros

Rentes viagères à titre gratuit

Par exception, pensions alimentaires, salaires et pensions versés par des débiteurs établis à l’étranger

Revenus de non-résidents soumis à une retenue à la source et revenu de source étrangère ouvrant droit à un crédit d’impôt

Source : commission des finances, d’après l’évaluation préalable et le dispositif de l’article.

Le tableau ci-après indique le poids dans l’assiette et les recettes de l’impôt sur le revenu des différentes catégories de revenus, selon qu’elles se trouvent dans le champ de la réforme ou non.

RÉPARTITION DE L’ASSIETTE DES REVENUS ET DES RECETTES D’IMPÔT COLLECTÉES ENTRE REVENUS SE TROUVANT DANS LE CHAMP DE LA RÉFORME ET REVENUS
HORS CHAMP DE LA RÉFORME

(en milliards d’euros)

Type de revenus

Assiette nette

(en milliards d’euros)

Part dans l’assiette totale

Recettes d’impôt sur le revenu brut

(en milliards d’euros)

Part dans les recettes d’impôt sur le revenu brut

Revenus se trouvant dans le champ du PAS

936,7

97,6 %

76,3

94,2 %

Dont revenus se trouvant dans le champ de la retenue à la source

847,5

88,3 %

62,6

77,3 %

Dont revenus se trouvant dans le champ de l’acompte

89,2

9,3 %

13,7

16,9 %

Revenus se trouvant hors champ du prélèvement à la source

23,2

2,4 %

4,7

5,8 %

Total des revenus

959,9

100 %

81

100 %

Source : commission des finances.

B. LES MODALITÉS DU PRÉLÈVEMENT À LA SOURCE

1. Les modalités générales

Ainsi qu’il a été vu, l’imposition des revenus dans le champ du prélèvement à la source serait recouvrée selon deux modalités, la retenue à la source et l’acompte contemporain.

Les revenus soumis à la retenue à la source feraient l’objet, chaque mois, d’un prélèvement par le tiers payeur – employeur, caisse de retraites, etc. – qui serait ensuite chargé de reverser à l’administration fiscale les sommes collectées. Le contribuable ne serait donc plus redevable des sommes collectées par le tiers. Il continuerait cependant à déclarer chaque année, comme aujourd’hui, les revenus perçus.

Les autres revenus, dont ceux des travailleurs indépendants ou les revenus fonciers, feraient l’objet d’un acompte contemporain acquitté mensuellement ou, sur option du contribuable, trimestriellement.

Les titulaires de revenus soumis à la retenue à la source, tels que les salariés, percevraient un revenu net d’impôt dont le montant correspondrait exactement au revenu réellement disponible.

Les réductions d’impôt et les crédits d’impôt, à l’image de ce qui existe aujourd’hui, seraient perçus lors de la liquidation de l’impôt, en septembre N + 1. Si le dispositif introduit ici un décalage entre le paiement de l’impôt et la perception des réductions et crédits d’impôt, ce décalage serait sans effet pour les avantages fiscaux récurrents, perçus eux chaque année.

2. L’assiette du prélèvement

L’assiette du prélèvement varierait selon la nature des revenus.

Pour ceux soumis à la retenue à la source, il s’agirait des revenus perçus l’année d’imposition (par exemple, les salaires mensuels).

Pour ceux relevant de l’acompte contemporain, il s’agirait :

– entre janvier et août de l’année d’imposition N, des revenus déclarés au titre l’avant-dernière année par rapport à cette année d’imposition, soit les revenus perçus en année N − 2 ;

– entre septembre et décembre de l’année d’imposition N, des revenus déclarés au titre de l’année précédant celle de l’imposition, soit les revenus perçus en année N – 1.

3. Le taux du prélèvement

Le taux du prélèvement serait établi de la même manière pour l’ensemble des revenus inclus dans le champ du prélèvement à la source, qu’ils relèvent de la retenue à la source ou de l’acompte.

Il serait obtenu en faisant le rapport entre l’impôt afférent aux revenus relevant du prélèvement à la source et le montant de ces revenus, déterminés selon les modalités prévues par le projet de réforme.

Pour ce calcul, l’impôt afférent aux revenus relevant du prélèvement à la source serait calculé en multipliant l’impôt acquitté au titre des derniers revenus déclarés, hors réductions d’impôt (RI) et crédits d’impôt (CI), par le rapport entre, d’une part, le montant des revenus imposables relevant du prélèvement à la source et, d’autre part, le revenu net imposable global (incluant donc des revenus hors du champ du prélèvement à la source).

L’équation complète est reproduite ci-après.

L’impôt et les revenus pris en compte dans le calcul du taux sont les derniers connus soit, entre janvier et août, ceux de l’année N − 2 et, entre septembre et décembre, ceux de l’année N − 1.

Malgré l’apparente complexité du calcul du taux, l’opération serait dans la plupart des cas relativement simple. Par exemple, une personne ne percevant que des salaires se verrait appliquer un taux correspondant au rapport entre le dernier impôt acquitté et le dernier montant des salaires déclarés.

C. L’AJUSTEMENT DE L’IMPÔT AUX VARIATIONS DE REVENUS

Le prélèvement à la source conduisant à une imposition contemporaine des revenus, il permettrait, à la différence du régime actuel, un ajustement quasiment en temps réel de l’impôt acquitté sur les revenus perçus.

Actuellement, les contribuables acquittent l’impôt l’année suivant la perception de leurs revenus. En conséquence, les variations de revenus ne sont pas prises en compte, l’impôt à payer étant le même que les revenus aient augmenté, diminué ou qu’ils soient constants. Les facultés de modulation offertes, qui sont au demeurant peu employées, ne concernent que les échéances de paiement, non le montant finalement dû. Ainsi, la charge fiscale pour le contribuable reste in fine la même.

Dans le cadre du dispositif proposé, l’impôt dû s’adapterait aux variations de revenus.

L’imposition des revenus soumis à la retenue à la source bénéficierait de « l’effet assiette » : une variation du montant du salaire ou de la pension conduirait automatiquement à une variation corrélative de l’impôt acquitté, le taux d’imposition s’appliquant à une assiette différente.

L’imposition des revenus dans le champ de l’acompte contemporain, en revanche, ne permettrait pas cette adaptation automatique du fait de l’ancienneté de l’assiette retenue. Néanmoins, le dispositif de modulation en temps réel permettrait d’ajuster l’impôt acquitté à la variation des revenus perçus.

La possibilité de moduler, à la hausse comme à la baisse, les montants acquittés au titre de l’impôt dû, serait ouverte à tous les contribuables percevant des revenus inclus dans le champ du prélèvement à la source.

Ce dispositif offrirait ainsi aux travailleurs indépendants une souplesse en cas de variation de leur activité et donc de leurs bénéfices. Il permettrait aux salariés d’accentuer l’effet assiette en réduisant leur taux d’imposition pour ajuster plus finement leur impôt à l’évolution de leurs salaires.

La modulation serait donc une avancée pour donner son plein effet au projet de réforme. Cependant, telle que figurant dans le dispositif proposé, elle présente une certaine complexité et les sanctions qu’elle entraîne en cas d’erreurs pourraient dissuader des contribuables d’y recourir.

Enfin, tous les contribuables verraient les changements touchant la situation de leur foyer fiscal pris en compte l’année d’imposition. Par exemple, en cas de mariage ou de conclusion d’un pacte civil de solidarité (pacs), le taux d’imposition – et donc le montant d’impôt dû – tiendrait compte de la part supplémentaire que comptera le foyer fiscal. À l’inverse, en cas de séparation ou de décès, la prise en compte de la modification de la composition du foyer fiscal éviterait au contribuable de payer l’impôt sur les revenus de l’ancien foyer, souvent plus importants. Les naissances, en revanche, ne seraient pas immédiatement prises en compte une fois déclarées : les contribuables, s’ils souhaitent qu’elles aient un effet sur leur prélèvement, devraient demander la modulation de ce dernier.

SYNTHÈSE DES MODALITÉS DU PRÉLÈVEMENT À LA SOURCE

Modalités

Retenue à la source

Acompte contemporain

Assiette

Revenus perçus l’année d’imposition

Revenus perçus les deux années précédant l’année d’imposition

Taux de droit commun

Rapport entre l’impôt afférent aux revenus dans le champ du PAS et le montant de ces mêmes revenus

Rapport entre l’impôt afférent aux revenus dans le champ du PAS et le montant de ces mêmes revenus

Option pour le taux par défaut
(« taux neutre »)

Oui (pour les revenus salariaux)

Non

Option pour
le taux individualisé

Oui

Oui

Modulation du prélèvement

Oui

Oui

Versement trimestriel

Non

Oui

Échelonnement infra-annuel du paiement

Non

Oui (pour les BIC, BNC et BA)

D. LA PRÉSERVATION DE LA VIE PRIVÉE DES CONTRIBUABLES

L’employeur, chargé de la collecte et du versement des retenues à la source, serait à cet effet rendu destinataire des taux d’imposition de ses salariés.

Aussi, et bien qu’un taux d’imposition ne permette pas, en lui-même, de déduire précisément des aspects relevant de la vie privée des contribuables, sont prévus plusieurs mécanismes pour garantir la confidentialité de ces données privées (Cf. infra, III, C, pour la présentation générale de ces mécanismes).

Les salariés pourraient opter pour un « taux neutre », tiré d’une grille de taux par défaut, proportionnelle et progressive. Ce taux ne prendrait pas en compte la situation du foyer fiscal auquel les salariés appartiennent, ni l’éventuelle perception de revenus parallèles, tels que des revenus fonciers.

Les salariés auraient également la possibilité d’opter pour un taux individualisé au sein d’un couple, afin de ne pas, au travers du taux d’imposition, faire savoir à l’employeur le niveau global de revenu du conjoint, ni de supporter une charge fiscale plus lourde que celle induite par leur salaire propre.

Enfin, des sanctions dissuasives seraient infligées aux personnes qui auraient délibérément violé l’obligation de secret professionnel, qui serait étendue aux informations fiscales transmises aux employeurs par l’administration.

III. LES CONTRAINTES JURIDIQUES ET LES SOLUTIONS PROPOSÉES

La réforme visant à mettre en place un prélèvement à la source modifie les modalités de recouvrement de l’impôt sur le revenu. Si le choix du mode de recouvrement d’un impôt est laissé à la discrétion du législateur (12), plusieurs limites encadrent une telle réforme, ainsi qu’avait pu notamment le souligner le CPO dans son rapport de 2012 précédemment mentionné (13).

A. L’ÉGALITÉ DEVANT LES CHARGES PUBLIQUES : LA QUESTION DE LA PROGRESSIVITÉ DE L’IMPÔT

1. Les exigences découlant de l’égalité devant les charges publiques

L’égalité devant les charges publiques, qui découle de l’article 13 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789, suppose que les contribuables soient imposés en fonction de leurs capacités contributives.

En outre, le Conseil constitutionnel a dégagé des alinéas 10 et 11 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 l’exigence d’une politique de solidarité nationale en faveur de la famille (14).

Le Conseil constitutionnel a tiré de ces principes que l’impôt doit être une fonction croissante des capacités contributives du foyer fiscal. Le barème progressif de l’impôt sur le revenu est donc une exigence constitutionnelle, et le quotient familial et le quotient conjugal découlent de ces principes (15). Tout dispositif qui ne tiendrait pas compte, à l’échelle du foyer, des capacités contributives et qui appliquerait un prélèvement à la source déconnectée des charges de famille encourrait par conséquent un risque d’inconstitutionnalité.

2. Le respect du principe par le dispositif proposé

Le prélèvement à la source ne reviendrait ni sur le quotient familial, ni sur le quotient conjugal et ne conduirait pas à une individualisation de l’impôt.

En premier lieu, le taux propre d’imposition de chaque foyer serait calculé au regard des revenus perçus au niveau du foyer, et non par chacun des conjoints. La prise en compte des revenus et charges familiales est donc garantie. Le barème d’imposition n’est par ailleurs pas remis en cause, assurant ainsi la progressivité et la « familialisation » de l’impôt acquitté l’année de perception des revenus.

En deuxième lieu, l’option pour le taux individualisé, ouverte aux couples dont l’un des membres perçoit des revenus substantiellement plus élevés que l’autre, ne remet pas en cause la « familialisation » de l’impôt :

– il s’agit d’une option réversible, exercée sur la base volontaire du contribuable, et non d’une obligation ;

– le taux individualisé prend en compte les revenus communs du foyer et le quotient familial. Il ne s’agit donc pas d’un taux similaire à celui qui serait appliqué à un célibataire sans enfant percevant des revenus identiques ;

En troisième lieu, la grille de taux par défaut, si elle conduit à appliquer aux salaires un taux ne tenant pas compte de la situation familiale du foyer, ne remet en cause ni la progressivité de l’impôt, ni sa « familialisation » :

– la grille de taux par défaut est progressive ;

– si elle pourrait s’appliquer de façon automatique à certaines situations, dues à l’absence de calcul et de transmission par l’administration d’un taux propre au foyer, cette application ne serait que provisoire et prendrait fin une fois le taux propre transmis ;

– dans l’immense majorité des cas, l’option pour le taux par défaut conduirait simplement à réduire la retenue à la source effectuée sur les salaires et s’accompagnerait du versement, par le contribuable, d’un complément de retenue à la source pour que l’impôt acquitté mensuellement, soit celui dû au regard du taux du foyer. Ce serait donc bien le taux tenant compte de la « familialisation » de l’impôt qui serait appliqué. Dans les cas où aucun complément de retenue à la source ne serait requis, l’impôt finalement dû tiendrait compte des montants excédentaires versés, qui seraient restitués. En tout état de cause, cette option n’aurait pas d’impact sur le montant d’impôt total dû.

B. L’ÉGALITÉ DEVANT LA LOI FISCALE : LE CHAMP DU PRÉLÈVEMENT À LA SOURCE

1. Les exigences en matière de champ de la réforme découlant de l’égalité devant la loi fiscale

Le principe constitutionnel d’égalité, garanti par l’article 6 de la Déclaration de 1789, ne suppose pas une application uniforme des règles juridiques, et notamment fiscales. Il ne s’oppose pas, en effet, à ce que des situations objectivement différentes fassent l’objet d’un traitement différent. En outre, il est admis que le législateur puisse déroger au principe d’égalité pour des motifs d’intérêt général, si la différence de traitement qui en résulte est en rapport direct avec l’objet de la loi.

Ce principe, toutefois, pourrait faire obstacle à ce que le prélèvement à la source ne s’applique pas à l’ensemble des revenus de même nature.

L’étude faite par le CPO dans son rapport de 2012 n’excluait pas a priori la constitutionnalité d’une retenue à la source exclusivement réservée aux salaires. Les salariés et les indépendants se trouvent en effet dans une situation distincte s’agissant de la régularité et du rythme de perception de leurs revenus. En outre, aucun tiers payer n’intervient dans le cadre de l’activité des indépendants (16).

Le CPO soulignait néanmoins qu’il faudrait probablement, dans l’hypothèse d’une exclusion des indépendants d’une retenue à la source, avancer un motif d’intérêt général suffisant pour justifier la différence de traitement.

2. Le respect par le dispositif proposé de l’égalité devant la loi fiscale

Le dispositif de prélèvement à la source proposé par le Gouvernement s’inscrit dans le respect de ce cadrage constitutionnel. À la différence des hypothèses étudiées par le CPO, les indépendants ne seraient pas exclus du prélèvement à la source. S’ils ne feraient pas l’objet d’une retenue à la source comme les salariés ou les titulaires de pensions autres qu’alimentaires, par exemple, ils seraient néanmoins imposés de façon contemporaine à la perception de leurs revenus d’activité au travers d’un acompte contemporain.

La différence des modalités de recouvrement est donc beaucoup moins marquée que dans les cas étudiés par le CPO et est justifiée par l’absence de tiers payeur en ce qui concerne les indépendants.

En outre, si les règles d’assiette de l’acompte seraient distinctes de celles de la retenue à la source, cela n’aurait pas pour effet d’entraîner une rupture d’égalité : la différence objective de situation entre salariés ou pensionnés et indépendants, ainsi qu’il a été vu, permet de mettre en place un régime adapté à chaque catégorie de revenu. Au demeurant, les indépendants ne seraient pas dans une situation moins confortable que les salariés dans la mesure où, comme eux, ils pourraient moduler leur prélèvement et exercer différentes options afin d’adapter le plus finement possible le montant d’impôt acquitté aux revenus réellement perçus.

Aussi, l’ensemble des revenus d’activité seraient imposés de façon contemporaine. Plus généralement, ainsi qu’il a été vu, 97,5 % de l’assiette de l’impôt sur le revenu serait concernée par le prélèvement à la source. La quasi-totalité des revenus perçus serait donc incluse dans le champ de la réforme.

L’exclusion de certains revenus du champ du prélèvement à la source ne devrait pas présenter pas plus de difficulté sous l’angle constitutionnel :

– les revenus de capitaux mobiliers et les plus-values immobilières font déjà l’objet d’un prélèvement contemporain de leur perception ;

– l’application d’un prélèvement à la source aux gains résultant de la cession de valeurs mobilières et aux revenus de l’actionnariat salarié présenterait une trop grande difficulté technique, due notamment à leur caractère exceptionnel, aux difficultés d’anticipation de leur montant et à la multiplicité des règles d’imposition applicables. La différence de traitement découle ainsi d’une différence de situation, voire répond à un motif d’intérêt général tiré de la complexité excessive de l’application à ces revenus du dispositif proposé et des risques quant au niveau des recettes publiques.

C. LE DROIT À LA VIE PRIVÉE : LA NÉCESSAIRE GARANTIE DE LA CONFIDENTIALITÉ DES DONNÉES FISCALES DES CONTRIBUABLES

Le respect de la vie privée est une exigence constitutionnelle découlant de l’article 2 de la Déclaration de 1789 (17). C’est également un impératif conventionnel garanti par l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (CEDH). Dès lors, la mise en place du prélèvement à la source, qui fait intervenir un tiers collecteur susceptible de disposer à ce titre d’informations personnelles sur les contribuables, se doit de prévoir des garanties suffisantes pour assurer le respect de la vie privée.

Le prélèvement à la source repose sur deux modalités : la retenue à la source et l’acompte contemporain, directement acquitté par le contribuable. La question du respect de la vie privée des citoyens se pose uniquement dans le cadre de la retenue à la source du fait de l’intervention dans le paiement de l’impôt d’un tiers collecteur (par exemple, l’employeur).

Sous l’empire du droit actuel, le contribuable s’acquitte directement et personnellement de l’impôt dû, sans passer par un tiers. Le dispositif de la retenue à la source prévoit que l’impôt dû au titre des revenus dans son champ n’est plus acquitté directement par le contribuable, mais versé par un tiers collecteur, par exemple l’employeur.

À cette fin, le tiers collecteur serait rendu destinataire du taux d’imposition propre au foyer fiscal auquel le contribuable appartient, calculé par l’administration. Or, le taux d’imposition du foyer permettrait de connaître des éléments relevant de la vie privée du contribuable :

– situation conjugale ;

– situation familiale, pouvant conduire à estimer le nombre d’enfants ou de personnes à charge ;

– perception de revenus non salariaux inclus dans le champ du prélèvement à la source, comme des revenus fonciers ou des bénéfices non commerciaux (BNC) ;

– niveau des revenus perçus par le conjoint, etc.

Le tiers collecteur ne pourrait naturellement pas déduire l’ensemble de ces informations du seul taux, d’autant plus qu’un même taux peut recouvrir de très nombreuses situations selon, notamment la composition du foyer ou la nature et le montant des revenus globalement perçus. Néanmoins, il serait susceptible d’en déduire certains aspects, surtout s’il dispose par ailleurs d’une connaissance relative de la situation personnelle des contribuables, comme peut l’avoir un employeur dans une petite structure.

Au-delà de la simple question du respect de la vie privée, la connaissance, même partielle, de la situation personnelle du contribuable permise par la transmission du taux pourrait être utilisée pour ne pas accorder à des salariés une hausse de rémunération, voire pour identifier, en cas de licenciement économique, ceux qui seraient réputés moins lésés par la perte du revenu afférent à l’emploi perdu.

Afin de parer à ces éventuels problèmes, le dispositif proposé par le Gouvernement prévoit de garantir le respect de la vie privée des contribuables et la confidentialité de leurs données fiscales selon plusieurs modalités.

D’une part, les contribuables percevant des revenus salariaux pourraient décider, s’ils le souhaitent, d’opter pour se voir appliquer sur leurs salaires un taux proportionnel établi sur la base d’une grille de taux par défaut. Ce taux, absolument neutre au regard de la situation financière et familiale du foyer fiscal, empêcherait toute déduction quant à la vie privée du contribuable par son employeur.

D’autre part, les couples dont l’un des membres perçoit des revenus substantiellement plus élevés que l’autre auraient la possibilité d’opter pour un taux individualisé. L’application de ce taux éviterait au membre du couple dont le revenu est le plus faible de se voir appliquer un taux tenant compte des revenus de son conjoint et fournissant ainsi une information sur la différence de revenus au sein du couple.

Enfin, le projet prévoit l’extension de l’obligation de secret professionnel aux taux transmis aux collecteurs par l’administration fiscale, et assortit la violation délibérée de cette obligation d’une peine de cinq ans d’emprisonnement et de 300 000 euros d’amende. Tout employeur qui divulguerait le taux d’imposition d’un de ses salariés serait passible de ces sanctions. L’importance de ces dernières les rend suffisamment dissuasives pour assurer aux contribuables le respect de leur vie privée.

Ainsi, le dispositif proposé serait de nature à apaiser les inquiétudes, légitimes compte tenu du sujet, qui ont pu naître avant la communication du projet de réforme.

D. L’ENCADREMENT EUROPÉEN : L’ABSENCE DE DISCRIMINATION ENTRE RÉSIDENTS ET NON-RÉSIDENTS PLACÉS DANS DES SITUATIONS IDENTIQUES

Aucune règle de droit européen ne régit les modalités de recouvrement des impôts directs acquittés par les personnes physiques. En effet, cette matière ne relève pas de la compétence de l’Union européenne. Ainsi, chaque État – et chaque législateur national – est libre de déterminer les règles qu’il souhaite.

Les seules réserves encadrant cette liberté résident dans l’absence de discrimination entre résidents et non-résidents et l’absence d’entrave à la liberté de circulation. Cependant, la Cour de justice de l’Union européenne a estimé que des modalités de recouvrement différentes pouvaient être appliquées selon que le contribuable est résident ou non-résident, afin de protéger le Trésor contre le risque de non-recouvrement de l’impôt dû par des personnes domiciliées fiscalement à l’étranger (18). Il faut néanmoins que le taux de prélèvement soit comparable entre résidents et non-résidents et qu’ils puissent bénéficier des mêmes avantages fiscaux (par exemple, la déduction des frais professionnels).

L’extension aux revenus salariaux et de remplacement de la retenue à la source, proposée par le présent article, conduirait au demeurant à rapprocher les règles de prélèvement des résidents et des non-résidents, qui font déjà l’objet d’une retenue à la source.

En l’espèce, le dispositif proposé prévoit de soumettre l’ensemble des revenus de source française perçus par les non-résidents au prélèvement à la source :

– les revenus salariaux font déjà l’objet d’une retenue à la source ;

– les revenus des indépendants et les revenus fonciers feraient l’objet d’un acompte contemporain, à l’image de ce qui est prévu pour les résidents.

Il n’y aurait donc aucune différence de traitement, assurant la compatibilité du dispositif avec le droit européen.

IV. LA MISE EN œUVRE DE LA RÉFORME

A. L’ANNÉE DE TRANSITION

Si rien n’était prévu pour neutraliser le passage au prélèvement à la source, en 2018, les contribuables devraient acquitter un impôt sur les revenus perçus en 2017 ainsi que sur ceux perçus en 2018. Pour éviter cette difficulté, du fait du caractère inédit d’une telle configuration, l’année de transition ferait l’objet d’un traitement particulier.

1. La perception d’un crédit d’impôt ad hoc : le CIMR

Afin d’éviter aux contribuables une « double imposition » en 2018 (au titre des revenus perçus en 2017 et à raison de ceux perçus en 2018), est prévu le « crédit d’impôt modernisation du recouvrement » (CIMR), qui annulerait l’impôt dû au titre des revenus perçus en 2017 et inclus dans le champ du prélèvement à la source. Les autres revenus, tels que les plus-values immobilières ou mobilières ainsi que les revenus de capitaux mobiliers mais également les revenus exceptionnels, insusceptibles d’être recueillis annuellement, resteraient imposés selon les règles actuelles.

Sans ce dispositif, la charge fiscale pesant sur les contribuables serait beaucoup trop lourde et hors de proportion avec leurs capacités contributives, ce qui serait susceptible d’emporter l’inconstitutionnalité de la réforme au motif d’une rupture d’égalité devant les charges publiques.

Le CIMR serait octroyé aux contribuables lors de la liquidation définitive de l’impôt dû au titre des revenus relevant du prélèvement à la source perçus en 2017, soit en septembre 2018 au moment du solde.

L’absence de double imposition de ces revenus serait totale dans la mesure où le présent article abrogerait les articles 1664 et 1681 A à E du code général des impôts (CGI), qui prévoient le paiement de l’impôt sur le revenu par mensualités ou acomptes provisionnels. En conséquence, les contribuables ne verseraient aucune mensualité ni aucun acompte en 2018 au titre de l’impôt dû à raison des revenus perçus en 2017 et le CIMR couvrirait l’ensemble de cet impôt en septembre.

2. L’imperfection des alternatives au CIMR

La forme du crédit d’impôt a été préférée à d’autres solutions afin de satisfaire les objectifs qui sous-tendent la réforme.

– permettre le maintien des réductions d’impôt et des crédits d’impôt auxquels les contribuables pourraient prétendre au titre des dépenses réalisées en 2017 ;

– ne pas alourdir la charge des contribuables ;

– garantir à l’État un niveau de recettes suffisant.

a. Les effets négatifs et de long terme d’un étalement de l’impôt 2017

Un étalement sur plusieurs années du paiement de l’impôt dû au titre des revenus perçus en 2017 éviterait au Trésor de renoncer à une année de recettes fiscales tirées de l’impôt sur le revenu. Néanmoins, cette solution présenterait plusieurs inconvénients :

– alourdissement de la charge fiscale supportée ;

– difficultés de lisibilité de l’imposition par les contribuables, surtout si la durée d’étalement est importante (un contribuable pouvant, en 2025 ou 2030 par exemple, devoir encore s’acquitter d’une partie de l’impôt 2017) ;

– limitation de l’effet incitatif des réductions et crédits d’impôt, les gains étant eux dilués sur la période d’étalement.

b. L’insuffisance incitative et les effets de bord indésirables d’une exonération

Une exonération sur les seuls revenus relevant du prélèvement à la source conduirait à limiter la progressivité de l’impôt et à réduire les recettes fiscales. Dans ce cas, seuls les revenus exceptionnels ou exclus du prélèvement seraient imposés au barème progressif. Le reste des revenus, exonérés, n’étant pas pris en compte, l’impôt dû serait alors très faible, voire nul, sans rapport avec les capacités contributives réelles des foyers fiscaux concernés – souvent importantes.

Une telle solution réduirait également l’incitation à effectuer des dons ou toute autre opération permettant de bénéficier de réductions d’impôt.

Enfin, elle entraînerait l’établissement d’un revenu fiscal de référence (RFR) faible ou nul, ce qui conduirait un très grand nombre de contribuables à bénéficier de certains avantages liés au niveau de RFR (notamment des exonérations fiscales et sociales).

3. La satisfaction des objectifs de la réforme par le CIMR

Le CIMR s’imputerait sur l’impôt dû au titre de 2017 lors de la liquidation définitive de cet impôt, en septembre 2018, après que les contribuables auront :

– déclaré les revenus perçus en 2017 ;

– imputé les réductions et crédits d’impôt acquis en 2017.

Au terme de cette liquidation, le CIMR serait octroyé aux contribuables. Il correspondrait à l’impôt dû sur les revenus relevant du prélèvement à la source avant déduction des réductions et crédits d’impôt. En conséquence, ces derniers produiraient toujours, malgré l’annulation de l’impôt, leur plein effet.

L’incitation aux opérations ouvrant droit à de tels avantages fiscaux serait ainsi maintenue grâce au dispositif proposé, ce qui satisferait le motif d’intérêt général de soutien aux secteurs socioéconomiques dont l’activité peut dépendre de tels dispositifs fiscaux, dont le coût total représente 13,6 milliards d’euros.

4. La question du maintien des avantages fiscaux liés à 2017

a. Le maintien d’avantages liés à un impôt annulé

La question de la constitutionnalité du maintien des avantages fiscaux liés à un impôt annulé par un dispositif spécifique pourrait se poser. Il pourrait en effet être considéré que les avantages fiscaux ayant pour but et conséquence de réduire l’impôt dû, la renonciation par l’État à percevoir cet impôt conduirait nécessairement à l’abandon des avantages fiscaux associés.

Cependant, une autre approche, économique, conforme à l’intention du législateur fiscal lorsqu’il adopte tel ou tel mécanisme de réduction ou de crédit d’impôt, repose sur le lien indissociable non entre l’avantage fiscal et l’impôt, mais entre l’avantage fiscal et l’opération qui a conduit à son octroi (par exemple, l’embauche d’une garde d’enfants, la réalisation de certains travaux, etc.). Dans cette opération, l’instrument fiscal n’est qu’un outil au service d’une politique publique, qui constitue le véritable objet de la loi.

Dans ce cadre, dès lors que la contrepartie économique de l’avantage a été effective, cet avantage devrait pouvoir être maintenu.

b. La compatibilité du maintien de ces avantages avec l’exigence de bon usage des deniers publics

Le bon usage des deniers publics, découlant des articles 14 et 15 de la Déclaration de 1789, est un objectif à valeur constitutionnelle (OVC) et s’oppose à une gestion budgétaire susceptible de faire peser des charges manifestement hors de proportion avec l’objectif poursuivi par la politique mise en œuvre. Sa qualité d’OVC implique que le législateur dispose de la compétence pour le mettre en œuvre. Dans cette mise en œuvre, ce dernier doit s’assurer de sa conciliation avec, notamment, les principes constitutionnels d’égalité devant les charges publiques et d’égalité devant la loi fiscale.

Il pourrait être jugé que l’annulation de l’impôt dû au titre des revenus perçus en 2017, combinée au maintien des avantages fiscaux liés à cette année, conduirait à une charge excessive pour les finances publiques. Le contexte budgétaire actuel, relativement contraint, pourrait venir à l’appui d’une telle analyse.

Néanmoins, tel ne devrait pas être le cas au regard du dispositif proposé et de ses effets.

En premier lieu, si l’État renonçait en 2018 à percevoir une grande partie de l’impôt dû au titre de 2017, annulé par le CIMR, il encaisserait cette même année l’impôt dû au titre de 2018.

Par ailleurs, si les avantages fiscaux liés à 2017 étaient maintenus, ils ne seraient perçus qu’en septembre 2018. Or, comme cela vient d’être indiqué, 2018 ne serait pas pour le Trésor une année « blanche » dans la mesure où les recettes fiscales rentreraient bien (celles de l’impôt 2018).

En outre, dans la mesure où les revenus, notamment salariaux, ont plutôt tendance à croître d’une année sur l’autre, les recettes fiscales perçues au titre de l’impôt 2018 pourraient s’avérer plus élevées que celles qui auraient été perçues, cette même année, au titre de 2017. En conséquence, il est possible que le niveau des recettes fiscales ne chute pas, empêchant de conclure à un mauvais usage des deniers publics.

L’évaluation du Gouvernement confirme cette analyse dans la mesure où elle conclut à un impact budgétaire neutre en 2018 (Cf. infra, V, A).

En second lieu, le maintien des avantages fiscaux est motivé par le nécessaire soutien aux secteurs sociaux et économiques qui, pour beaucoup, dépendent, en partie, pour exister et se développer, de ces avantages et de l’incitation des contribuables à adopter tel ou tel comportement. Si les avantages étaient supprimés, l’impact économique et social pourrait se révéler négatif.

Compte tenu de cet impact, il est permis de penser que, dans le cadre d’une vision d’ensemble, supprimer les avantages liés à l’année 2017 serait faire un mésusage des deniers publics en réduisant l’activité économique, le pouvoir d’achat et, partant, en dégradant la situation de l’économie française et donc in fine le niveau des recettes budgétaires.

5. L’encadrement du CIMR destiné à éviter l’optimisation fiscale et à compromettre le niveau des recettes

Afin d’éviter que le geste fiscal constitué par le CIMR n’entraîne de la part de certains contribuables des comportements d’optimisation fiscale qui pourraient compromettre le niveau des recettes perçues en 2018 par le Trésor (par exemple en logeant artificiellement des revenus en 2017 pour qu’ils soient couverts par le crédit d’impôt), le dispositif proposé prévoit plusieurs garde-fous.

D’une part, les revenus exceptionnels seraient exclus du champ du CIMR. Leur détermination serait propre à chaque catégorie de revenus (traitements et salaires, revenus fonciers, bénéfices des travailleurs indépendants, rémunérations des dirigeants).

D’autre part, une clause générale anti-optimisation est prévue. Elle permettrait à l’administration de solliciter du contribuable toute justification sur l’assiette retenue pour le calcul du CIMR et, en fonction des réponses fournies, de remettre en cause, en tout ou partie, le CIMR octroyé.

B. LE CALENDRIER DE LA MISE EN œUVRE DE LA RÉFORME

La mise en œuvre du prélèvement à la source a fait l’objet d’une intense préparation de la part de l’administration fiscale.

Le calendrier de la réforme, dans une version simplifiée, figure dans le tableau suivant. Pour des éléments plus détaillés, ainsi que pour les aspects liés aux campagnes de communication que lancerait l’administration afin de sensibiliser les contribuables et les collecteurs à la mise en œuvre du prélèvement à la source, il est renvoyé aux sous-parties 1 et 2 de la partie 4 de l’évaluation préalable de l’article 38 jointe au présent projet de loi de finances (pages 287 et suivantes).

CALENDRIER SIMPLIFIÉ DE LA MISE EN œUVRE DU PRÉLÈVEMENT À LA SOURCE
(2017-2019)

Date

Revenus dans le champ de la retenue à la source

Revenus dans le champ de l’acompte contemporain

Collecteur (employeurs, organismes de retraite)

Printemps 2017

Déclaration des revenus 2016 :
– permettrait le calcul du prélèvement à la source
– permettrait la collecte ou la confirmation des coordonnées bancaires

Déclaration des revenus 2016 :
– permettrait le calcul du prélèvement à la source
– permettrait la collecte ou la confirmation des coordonnées bancaires

Été 2017

Réception des avis d’imposition au titre de 2016 :
– mention du taux de prélèvement à la source applicable entre janvier et août 2018

Réception des avis d’imposition au titre de 2016 :
– mention du taux de prélèvement à la source applicable entre janvier et août 2018
– mention du montant de l’acompte prélevé entre janvier et août 2018

Septembre 2017

Possibilité d’opter pour le taux par défaut ou pour un taux individualisé

Possibilité d’opter pour le taux par défaut ou pour un taux individualisé

Possibilité d’opter pour le paiement trimestriel de l’acompte

Solde de l’impôt dû au titre de 2016

Solde de l’impôt dû au titre de 2016

Automne 2017

Réception des taux d’imposition des contribuables

Janvier 2018

Perception du premier revenu diminué de la retenue à la source
(le revenu mensuel sera, à compter de ce moment, perçu diminué de la retenue effectuée)

Premier versement d’acompte (si mensualisation) le 15

Première retenue à la source effectuée sur les revenus versés
Chaque mois, à partir de ce moment, les retenues seraient effectuées

Cessation des mensualités et des tiers provisionnels de l’impôt dû au titre de 2017

Février 2018

Premier versement d’acompte (si option trimestrielle) le 15
(échéances futures : 15 mai, 15 août, 15 novembre)

Versement à l’administration de la première retenue effectuée
(Chaque mois, à partir de ce moment, les retenues seraient effectuées)

Avril 2018

Versement à l’administration des premières retenues effectuées par une microentreprise entre janvier et mars (si option trimestrielle)

Printemps 2018

Déclaration des revenus 2017 : permettrait le calcul du CIMR 

Déclaration des revenus 2017 : permettrait le calcul du CIMR

Été 2018

Réception des avis d’imposition au titre de 2017 ;
– mention du taux de prélèvement applicable entre septembre 2018 et août 2019

Réception des avis d’imposition au titre de 2017 ;
– mention du taux de prélèvement applicable entre septembre 2018 et août 2019

Septembre 2018

Bénéfice du CIMR :
annulation totale de l’impôt 2017 en l’absence de revenus exceptionnels ou hors champ du prélèvement

Bénéfice du CIMR :
annulation totale de l’impôt 2017 en l’absence de revenus exceptionnels ou hors champ du prélèvement

Imputation des réductions et crédits d’impôt 2017 sur les revenus non couverts par le CIMR

Imputation des réductions et crédits d’impôt 2017 sur les revenus non couverts par le CIMR

Paiement du solde de l’impôt 2017 en cas de perception de revenus exceptionnels ou hors champ du prélèvement (si les réductions et crédits d’impôt n’ont pas annulé l’impôt)

Paiement du solde de l’impôt 2017 en cas de perception de revenus exceptionnels ou hors champ du prélèvement (si les réductions et crédits d’impôt n’ont pas annulé l’impôt)

Actualisation du taux de prélèvement au regard de la déclaration des revenus 2017

Actualisation du taux de prélèvement au regard de la déclaration des revenus 2017

31 décembre 2018

Fin de l’option de modulation du prélèvement (si option exercée)

Fin de l’option de modulation du prélèvement (si option exercée)

Janvier à août 2019

Perception des revenus diminués de la retenue à la source effectuée avec le taux 2017

Versements d’acompte sur la base du taux 2017

Retenues à la source effectuées avec le taux 2017

Printemps 2019

Déclaration des revenus 2018 :
– mention de l’impôt déjà acquitté en 2018

Déclaration des revenus 2018 :
– mention de l’impôt déjà acquitté en 2018

Septembre 2019

Bénéfice des réductions et crédits d’impôt 2018

Bénéfice des réductions et crédits d’impôt 2018

Bénéfice du complément de CIMR

Septembre à décembre 2019

Perception des revenus diminués de la retenue à la source effectuée avec le taux 2018

Versements d’acompte sur la base du taux 2018

Retenues à la source effectuées avec le taux 2018

Solde 2018 :
étalement jusqu’à décembre s’il est supérieur à 300 euros

Solde 2018 :
étalement jusqu’à décembre s’il est supérieur à 300 euros

Source : évaluation préalable de l’article.

À partir de 2018, et tout au long de l’année, les contribuables pourraient :

– demander à moduler leur prélèvement à la hausse ou à la baisse, en cas de variation de leur revenu ou, par exemple, d’une naissance ;

– opter pour le taux par défaut ou le taux individualisé ;

– déclarer les changements de situation intervenus pendant l’année (mariage, pacs, divorce, séparation, décès) ;

– en cas de début de perception d’un revenu relevant de l’acompte, déclarer spontanément un montant d’acompte à ce titre et le verser ;

– en cas de cessation de perception d’un revenu relevant de l’acompte, arrêter le versement de l’acompte ;

– s’ils sont travailleurs indépendants percevant des bénéfices industriels et commerciaux (BIC), des bénéfices non commerciaux (BNC) ou des bénéfices agricoles (BA), procéder à un échelonnement infra-annuel des versements d’acompte.

V. L’IMPACT BUDGÉTAIRE, ÉCONOMIQUE ET ADMINISTRATIF DE LA RÉFORME

A. UN IMPACT BUDGÉTAIRE GLOBALEMENT NEUTRE

D’après l’évaluation préalable de l’article, la mise en œuvre du prélèvement à la source à compter du 1er janvier 2018 ne devrait pas avoir d’impact sur le budget 2018, en l’absence de modulation.

1. Un impact estimé nul en l’absence de modulation

Le Gouvernement, en se fondant sur les revenus 2015 et en retenant les hypothèses suivantes, considère que, hors modulation, l’impact budgétaire de la réforme serait nul :

– le taux de recouvrement en 2017 est estimé à 95 % ;

– le taux de recouvrement retenu pour 2018 est de 97 %, hypothèse basse selon le Gouvernement (en comparant avec le taux de recouvrement des prestations sociales par les entreprises, qui est de 99 %).

Le tableau suivant illustre l’impact de la réforme en 2018.

IMPACT BUDGÉTAIRE DE LA MISE EN œUVRE DU PRÉLÈVEMENT À LA SOURCE

(en milliards d’euros)

Prélèvement à la source 2018

(en émission)
(A+)

Recettes afférentes
(recouvrement 97 %)

(A)

Impôt 2017 émis et annulé par le CIMR en 2018
(B+)

Coût du CIMR
(recouvrement 95 %)
(B)

(A+) – (B+)

(A) – (B)

73,5

71,3

75,1

71,3

– 1,6

0

Source : évaluation préalable de l’article.

En tenant compte des estimations de taux de recouvrement, et malgré le fait que le CIMR annulerait un montant supérieur au montant en émission des prélèvements réalisés en 2018 (différence de 1,6 milliard d’euros), l’impact en 2018 est nul.

2. Un impact incertain en prenant en compte les modulations

Si la possibilité de moduler le prélèvement est prise en compte, le Gouvernement aboutit à deux résultats distincts, qui sont fonction du comportement qu’adopteraient les contribuables en 2018.

Si la modulation à la baisse est exercée, les simulations du Gouvernement, qui reposent sur un recours à cette modalité par un quart des contribuables pouvant l’exercer, conduisent à un coût de 750 millions d’euros en 2018.

En revanche, si la modulation à la hausse est retenue, l’estimation gouvernementale aboutit à un gain de 100 millions d’euros.

3. Le rattachement à l’exercice N des sommes versées par les collecteurs en janvier N + 1

Du fait de l’intervention des tiers collecteurs dans le mécanisme de la retenue à la source, et du versement par eux des retenues effectuées le mois suivant ces retenues, l’impôt dû au titre du mois de décembre N serait recouvré par l’administration fiscale en janvier N + 1.

Néanmoins, cela n’aurait pas d’impact, ni en comptabilité budgétaire, ni en comptabilité nationale.

L’absence d’impact en comptabilité budgétaire est prévue à l’article 28 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) (19), qui permet la comptabilisation de recettes et de dépenses au cours d’une période complémentaire à l’année civile à laquelle se rattache l’exercice budgétaire, qui ne peut excéder vingt jours. En conséquence, les sommes encaissées jusqu’au 20 janvier N + 1 pourraient être rattachées à l’exercice budgétaire N.

L’absence d’impact en comptabilité nationale, quant à elle, est due au fait que le prélèvement serait rattaché à l’année durant laquelle le contribuable l’acquittera. Ainsi, même si la retenue faite au titre de décembre N est versée en janvier N + 1 (et indépendamment de la période complémentaire), la recette fiscale de l’État serait enregistrée au moment de la retenue, soit en décembre N.

B. L’IMPACT POUR LES TIERS COLLECTEURS

Les entreprises, les organismes versant des pensions et les administrations publiques deviendraient, dans le cadre du prélèvement à la source, les tiers collecteurs de l’impôt sur le revenu dû par les personnes qu’elles emploient ou à qui elles servent des pensions. Les entreprises constituant la part la plus importante du contingent des collecteurs, les développements qui suivent se concentrent sur elles. Ils sont néanmoins transposables aux autres collecteurs.

Les entreprises recevraient de la part de l’administration fiscale le taux propre à chaque employé qui serait appliqué aux salaires pour permettre la collecte des retenues à la source dues, aux fins de reversement de ces dernières à l’administration.

Afin de réduire le plus possible la charge susceptible d’être induite par ce nouveau rôle, le Gouvernement a prévu plusieurs dispositifs :

– la collecte et le versement se feraient par voie dématérialisée, au moyen de déclarations électroniques (déclaration sociale nominative – DSN –, « déclaration 3 en 1 »). Ces modalités simplifieraient les opérations incombant aux employeurs ;

– des campagnes de communication spécifiquement destinées aux entreprises, ainsi que l’évaluation préalable du présent article le souligne ;

– des campagnes de communication générales à l’adresse de l’ensemble de la population, pour sensibiliser ces derniers à la réforme et notamment au fait que le seul interlocuteur des contribuables resterait l’administration fiscale, comme aujourd’hui, et non leur employeur.

En revanche, aucune compensation pécuniaire – ou autre – n’est prévue.

D’après le Gouvernement, l’impact total sur les entreprises serait limité et se réduirait essentiellement à une formation d’une demi-journée aux mécanismes généraux du prélèvement à la source (20). Ce seraient surtout, toujours selon le Gouvernement, les administrations publiques et les verseurs de revenus de remplacement comme les caisses de retraites, qui auraient à supporter les coûts les plus importants, liés à l’adaptation de leurs systèmes d’information pour la production de la « déclaration 3 en 1 » et l’acquisition de logiciels spécifiques (21).

C. L’IMPACT POUR L’ADMINISTRATION FISCALE

D’après l’évaluation préalable, la réforme aurait un impact important en termes informatiques mais ne devrait en revanche pas entraîner de gains substantiels en matière de productivité, cette dernière ayant déjà un niveau élevé.

1. L’adaptation des outils informatiques

L’équipement informatique et l’architecture des systèmes d’information de l’administration devraient être adaptés pour :

– garantir la constance du lien entre l’administration et les contribuables, pour tenir compte des demandes (options, modulation, etc.), fournir aux contribuables les informations qu’ils sollicitent ou dont ils ont besoin, etc. ;

– garantir la constance du lien entre l’administration et les collecteurs, afin de transmettre de façon optimale les taux d’imposition et de recouvrer les sommes collectées et versées ;

– permettre le bon fonctionnement du dispositif, par le développement de nouvelles applications ou l’évolution d’outils existants. Une quarantaine de composants du système d’information de l’administration fiscale seraient ainsi concernés entre 2017 et 2018.

2. La formation du personnel

Afin de fournir aux contribuables et aux collecteurs un service optimal, l’administration fiscale devra procéder à un vaste effort de formation professionnelle de son personnel en 2017 et 2018.

Pour en limiter le coût et pour garantir la qualité des formations dispensées, le plan serait principalement assuré en interne par des agents de l’administration fiscale, ceux qui connaissent le mieux l’ensemble de la réforme et ses implications.

3. La réorganisation administrative

Les services devront, une fois le prélèvement à la source mis en place, faire face à de nouvelles missions, supposant une modification de leur organisation.

À titre d’exemple, les services des impôts des entreprises (SIE), qui ne s’occupent actuellement pas des questions de recouvrement, seraient chargés d’assurer la gestion et la surveillance du reversement de l’impôt collecté par les entreprises, devenues collecteurs.

Néanmoins, selon le Gouvernement, du fait de la dématérialisation croissance des obligations déclaratives, l’impact en 2017 et 2018 pour les services devrait être moins important que ce que l’ampleur de la réforme pourrait laisser supposer.

Pour une étude complète de l’impact estimé sur l’administration fiscale qu’aurait la réforme, il est renvoyé à l’évaluation préalable, pages 325 à 332.

D. LA LUTTE CONTRE LA FRAUDE : LES SANCTIONS PRÉVUES

La lutte contre la fraude fiscale n’est pas un sujet propre au prélèvement à la source.

L’acompte contemporain, du fait de ses modalités de détermination et de recouvrement, ne présente pas de différence majeure sous l’angle de la lutte contre la fraude avec le droit actuel.

La retenue à la source, en revanche, fait intervenir un nouvel acteur dans le recouvrement de l’impôt dans la mesure où celui-ci ne serait plus directement acquitté par le contribuable, mais collecté par un tiers qui serait chargé de le reverser à l’administration. Ce tiers collecteur pourrait vouloir conserver les retenues effectuées afin de détourner ces sommes et d’améliorer sa situation financière.

Les fraudes susceptibles d’être constatées dans le cadre d’autres impositions, notamment la collecte de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), ne devraient pas se retrouver avec la retenue à la source. Les retenues collectées par les tiers correspondraient en effet :

– à des situations identifiées par l’administration fiscale, qui aurait communiqué pour chaque contribuable un taux particulier lié aux derniers revenus connus d’elle ;

– à des revenus déclarés par le tiers collecteur, via la DSN ou la « déclaration 3 en 1 », et par leur bénéficiaire, via la déclaration annuelle de revenu.

Le collecteur ne pourrait donc éluder certaines retenues ni le versement de rémunérations sur lesquelles des retenues seraient dues. En tout état de cause, il ne devrait pas pouvoir le faire plus facilement que ce qu’il serait susceptible de faire actuellement.

Néanmoins, afin d’éviter tout risque de fraude, le projet de réforme prévoit différentes sanctions :

– des majorations pour tout retard ou insuffisance dans les déclarations devant être faites ;

– des majorations pour tout retard ou défaut de paiement ;

– un alourdissement des majorations lorsque le défaut déclaratif ou de paiement est délibéré ;

– une sanction pénale en cas de non-déclaration et de non-versement des retenues effectuées (amende pénale de 9 000 euros et cinq ans d’emprisonnement).

Ces sanctions dissuasives, qui peuvent d’ailleurs se cumuler dans le respect des exigences constitutionnelles en la matière, constituent des outils efficaces de lutte contre la fraude que pourraient envisager les tiers collecteurs.

S’agissant des contribuables, le prélèvement à la source ne modifierait pas les choses : la déclaration annuelle de revenu serait maintenue et faite au printemps de l’année suivant l’année de perception du revenu imposé, permettant à l’administration de s’assurer que les retenues ou les acomptes versés correspondent bien à l’impôt dû au titre de ces revenus.

La régularisation de l’impôt, en septembre de l’année suivant celle de la perception des revenus, conduirait ainsi le contribuable à acquitter un solde d’impôt si les versements réalisés l’année précédente s’avéraient insuffisants.

Par ailleurs, si le contribuable ne s’est pas acquitté de ce qu’il devait verser, des majorations lui seraient appliquées.

En conséquence, le prélèvement à la source ne devrait pas encourager d’éventuels comportements d’optimisation fiscale, et en tout état de cause ne favoriserait pas plus la fraude de la part des contribuables que dans le cadre du droit en vigueur.

En outre, ainsi qu’il a été vu au titre de l’année de transition, un dispositif spécifique est prévu pour éviter de la part des contribuables tout comportement d’optimisation fiscale en 2017.

VI. LES TRAVAUX PRÉPARATOIRES CONDUITS PAR LA RAPPORTEURE GÉNÉRALE

Compte tenu de l’ampleur de la réforme proposée, tant sur le fond – la refonte des modalités de paiement et de recouvrement de l’impôt sur le revenu – que sur la forme – plus de vingt pages de dispositif dans le projet de loi de finances et une évaluation préalable de plus de quatre cents pages –, et des délais contraints de l’examen de la loi de finances, l’analyse du prélèvement à la source a fait l’objet de nombreux travaux de la part de la commission des finances et particulièrement de la Rapporteure générale.

Le ministre des finances et des comptes publics, M. Michel Sapin, et le secrétaire d’État chargé du budget, M. Christian Eckert, ont transmis aux commissions des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat pendant l’été 2016, le 30 août, un avant-projet de texte.

Cet envoi anticipé, bien avant l’enregistrement à l’Assemblée nationale du projet de loi de finances pour 2017 (intervenu le 28 septembre 2016), a rendu possible une étude plus poussée du dispositif que ne l’aurait permis une transmission dans les délais constitutionnels, même si la version adoptée en Conseil des ministres s’est révélée différente sur plusieurs points de cet avant-projet.

1. La présentation générale du dispositif proposé à la commission des finances

Le mardi 20 septembre 2016, soit avant l’enregistrement du projet de loi de finances à la présidence de l’Assemblée nationale, la Rapporteure générale a présenté, devant la commission des finances, de façon synthétique mais de la manière la plus exhaustive possible, la réforme proposée par le Gouvernement avec de nombreux exemples à l’appui :

– le principe général de la réforme ;

– les revenus concernés ;

– les modalités de prélèvement à la source, l’assiette et le taux ;

– le traitement de l’année de transition ;

– différentes questions susceptibles de se poser régulièrement.

Cette réunion a permis à l’ensemble des commissaires des finances de l’Assemblée nationale – ainsi qu’à toute personne ayant regardé la diffusion vidéo de la réunion – de se familiariser avec le dispositif proposé par le Gouvernement.

2. Les tables rondes et auditions organisées dans le cadre de l’instruction du projet

À la suite de la présentation de la réforme, une table ronde a été organisée afin de réunir des représentants syndicaux du personnel de la direction générale des finances publiques (DGFiP) et d’obtenir ainsi leur perception de la réforme, d’un point de vue général d’une part, s’agissant plus spécifiquement de l’impact pour l’administration fiscale, de l’autre.

Le 21 septembre, une seconde table ronde a été tenue, réunissant des organisations représentatives des entreprises afin de recueillir leur point de vue sur l’impact, pour les entreprises, de la mise en œuvre du prélèvement à la source.

Le 27 septembre, le directeur général des finances publiques, M. Bruno Parent, et plusieurs personnes de la direction de la législation fiscale ont été entendues afin de présenter la réforme et de répondre aux questions des députés.

Le 28 septembre, la commission a pu, dans le cadre de leur audition sur le présent projet de loi de finances, interroger le ministre chargé des finances et le secrétaire d’État chargé du budget sur le prélèvement à la source.

Enfin, plusieurs auditions, ouvertes à l’ensemble des commissaires des finances, ont été organisées avec des organisations représentant des travailleurs indépendants, des directeurs des ressources humaines et des tribunaux de commerce.

3. Les difficultés signalées

À l’occasion de ces travaux préparatoires, plusieurs difficultés ont été signalées de manière récurrente à la Rapporteure générale.

En premier lieu, l’effet « bas de la feuille de paie » a été dénoncé comme susceptible de conduire à une perception d’un revenu en diminution, l’impôt en ayant été soustrait.

Des risques liés au climat dans les entreprises, s’agissant de l’ambiance des relations de travail, ont également été avancés en raison de cet effet « bas de la feuille de paie », si les salariés comparent leurs rémunérations et constatent qu’ils ne perçoivent pas le même montant alors qu’ils réalisent le même travail.

En deuxième lieu, la dégradation des relations professionnelles a également été avancée du fait de la disposition, par l’employeur, des taux d’imposition et des conséquences éventuelles en termes de confidentialité ou de progression salariale.

En troisième lieu, la charge pour les entreprises a été signalé plusieurs fois à la Rapporteure générale, du fait de l’activité de collecte et de versement proprement dite mais également en raison des probables questions ou réclamations que pourraient faire les employés auprès de leur hiérarchie ou des ressources humaines.

Enfin, la complexité du dispositif, de ses modalités de mise en œuvre et de certaines options proposées aux contribuables a, elle aussi, été régulièrement soulignée.

EXAMEN DE L’ARTICLE

TITRE IV
DISPOSITIONS PERMANENTES

I.– MESURES FISCALES ET MESURES BUDGÉTAIRES NON RATTACHÉES

La commission des finances a examiné l’article 38 lors de sa première réunion du jeudi 10 novembre 2016 matin.

Article 38
Instauration du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu

PREMIÈRE PARTIE : LES MODALITÉS DE LA RÉFORME

I. UNE RÉFORME CONCERNANT 97,6 % DE L’ASSIETTE DE L’IMPÔT SUR LE REVENU

Texte du projet de loi (alinéas 1 à 12):

(1) I. – A. – Au chapitre premier du titre premier de la première partie du livre Ier du code général des impôts, est insérée une section VIII intitulée : « Prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu » comprenant les articles 204 A à 204 N ainsi rédigés :

PRINCIPE

(2) « Art. 204 A. – 1. Les revenus imposables à l’impôt sur le revenu suivant les règles applicables aux salaires, aux pensions ou aux rentes viagères ou dans les catégories des bénéfices industriels et commerciaux, des bénéfices agricoles, des bénéfices non commerciaux et des revenus fonciers, à l’exception des revenus mentionnés à l’article 204 D, donnent lieu, l’année au cours de laquelle le contribuable en a la disposition ou de leur réalisation, à un prélèvement.

(3) « 2. Le prélèvement prend la forme :

(4) « 1° Pour les revenus mentionnés à l’article 204 B, d’une retenue à la source effectuée par le débiteur lors du paiement de ces revenus ;

(5) « 2° Pour les revenus mentionnés à l’article 204 C, d’un acompte acquitté par le contribuable ;

(6) « 3. Le prélèvement effectué par le débiteur ou acquitté par le contribuable s’impute sur l’impôt sur le revenu dû par ce dernier au titre de l’année au cours de laquelle il a été effectué. Il est restitué lorsqu’il excède l’impôt dû.

CHAMP DU PRÉLÈVEMENT À LA SOURCE

(7) « Art. 204 B. – Sous réserve de la dérogation prévue à l’article 204 C, donnent lieu à l’application de la retenue à la source prévue au 1° du 2 de l’article 204 A les revenus soumis à l’impôt sur le revenu suivant les règles applicables aux salaires, aux pensions ou aux rentes viagères à titre gratuit.

(8) « Art. 204 C. – Donnent lieu au paiement de l’acompte prévu au 2° du 2 de l’article 204 A les revenus soumis à l’impôt sur le revenu dans les catégories des bénéfices industriels et commerciaux, des bénéfices agricoles, des bénéfices non commerciaux et des revenus fonciers, les rentes viagères à titre onéreux ainsi que, par dérogation à l’article 204 B, les pensions alimentaires et, lorsqu’ils sont versés par un débiteur établi hors de France, les revenus de source étrangère imposables en France suivant les règles applicables aux salaires, aux pensions ou aux rentes viagères.

(9) « Art. 204 D. – Ne sont pas soumis au prélèvement prévu à l’article 204 A les indemnités, avantages, distributions, gains nets ou revenus mentionnés au quatrième alinéa de l’article 80, aux I et II de l’article 80 bis, au I de l’article 80 quaterdecies et aux articles 80 quindecies et 163 bis G, les revenus soumis aux retenues à la source prévues aux articles 182 A, 182 A bis et 182 B ainsi que les revenus de source étrangère qui ouvrent droit, en application d’une convention fiscale internationale, à un crédit d’impôt égal à l’impôt français correspondant à ces revenus.

CALCUL DU PRÉLÈVEMENT

(10) « Art. 204 E. – Le prélèvement prévu à l’article 204 A est calculé en appliquant au montant des revenus, déterminé dans les conditions prévues aux articles 204 F et 204 G, un taux selon les modalités prévues aux articles 204 H et 204 I.

(11) « Le prélèvement peut être modifié sur demande du contribuable dans les conditions prévues à l’article 204 J.

(12) « Le taux du prélèvement pour les conjoints ou partenaires liés par un pacte civil de solidarité peut être individualisé dans les conditions prévues à l’article 204 M.

*

* *

Le A du I du présent article complète le chapitre Ier du titre Ier de la première partie du CGI consacré à l’impôt sur le revenu par une nouvelle section VIII, intitulée « Prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu ». Cette dernière viendrait s’insérer après la section VII portant sur la retenue à la source sur les indemnités de fonction perçues par les élus locaux – cette dernière ayant d’ailleurs vocation à disparaître, du fait de l’abrogation de l’article 204-0 A prévu par l’article 5 du présent projet de loi de finances.

La section VIII ainsi créée comporterait quatorze articles, soit les articles 204 A à 204 N, qui définissent les principes et modalités d’application du prélèvement à la source.

L’article 204 A nouveau pose le principe du prélèvement à la source, qui peut prendre la forme d’une retenue à la source ou d’un acompte, selon la nature des revenus concernés. Le champ des revenus soumis à la retenue à la source est défini par l’article 204 B, tandis que celui des revenus relevant de l’acompte est déterminé par l’article 204 C – l’article 204 D excluant plusieurs catégories de revenus du champ de la réforme.

L’article 204 E décrit le mécanisme général du prélèvement à la source, qui correspond à l’application d’un taux, calculé selon les modalités définies par l’article 204 H, à une assiette déterminée dans les conditions prévues par les articles 204 F et 204 G.

Ce taux peut être modifié en cours d’année :

– soit en raison de changements de situation – mariage, décès, divorce – qui doivent être déclarés par les contribuables dans le cadre de l’article 204 I ;

– soit du fait d’une demande de modulation par les contribuables, à la hausse comme à la baisse, selon les modalités définies par l’article 204 J ;

– soit du fait d’une demande d’individualisation du taux au sein d’un couple, prévue par l’article 204 M.

L’article 204 K prévoit la possibilité, pour les contribuables travailleurs indépendants, de verser spontanément un acompte lorsqu’ils débutent leur activité, tandis que l’article 204 L définit dans quelles conditions les contribuables peuvent demander à interrompre le versement d’un acompte en cas d’arrêt d’activité. Enfin, l’article 204 N prévoit que ces différentes déclarations et demandes doivent être présentées par voie électronique pour les contribuables dotés d’un accès à internet.

A. LE PRÉLÈVEMENT À LA SOURCE SE COMPOSE DE DEUX PARTIES : LA RETENUE À LA SOURCE ET L’ACOMPTE

● L’article 204 A nouveau du CGI pose le principe du prélèvement contemporain de l’impôt sur les revenus perçus par les contribuables. Il énumère les revenus se trouvant dans son champ : les traitements et salaires, pensions et rentes viagères, les bénéfices industriels et commerciaux (BIC), les bénéfices non commerciaux (BNC), les bénéfices agricoles (BA), les revenus fonciers (RF), à l’exception de certains revenus définis à l’article 204 D, donneraient lieu à un prélèvement l’année au cours de laquelle le contribuable en disposerait ou l’année de leur réalisation.

Il emporterait donc une profonde modification de la chronique du recouvrement de l’impôt, qui serait désormais acquitté au fil de la perception des revenus, et non plus avec un an de décalage. Les versements opérés au cours de l’année N viendraient s’imputer sur le montant d’impôt sur le revenu finalement dû, lors de la liquidation intervenant à l’été N + 1.

Aux termes du 2 de l’article 204 A (alinéas 3 à 5), le prélèvement contemporain pourrait prendre la forme :

– d’une retenue à la source, pour les revenus mentionnés à l’article 204 B (Cf. infra), soit les traitements, salaires, pensions et rentes viagères à titre gratuit : ces revenus se caractérisent en effet par l’existence d’un tiers payeur (l’employeur, l’État ou la collectivité territoriale, la caisse de retraite, l’organisme de sécurité sociale…), qui serait chargé de collecter l’impôt sur le revenu et de le reverser au Trésor public ;

– d’un acompte, pour les revenus mentionnés à l’article 204 C (Cf. infra), soit de façon schématique les BIC, les BNC, les BA et les revenus fonciers : cet acompte serait acquitté par le contribuable, en l’absence de tiers payeur identifié (sauf à considérer le locataire d’un propriétaire bailleur, ou encore le client d’un travailleur indépendant, comme un tiers payeur possible, ce qui ne serait guère praticable).

La notion de prélèvement contemporain de la perception des revenus n’impliquerait pas nécessairement, en fonction de la nature du revenu, l’intervention d’un tiers payeur, le montant d’impôt pouvant être acquitté, au moment où ce revenu se constitue, par le bénéficiaire du revenu lui-même.

● Comme détaillé infra, ne se trouveraient hors du champ de la réforme que les catégories de revenus suivantes :

– les plus-values immobilières ;

– les plus-values mobilières ;

– les revenus de capitaux mobiliers ;

– les revenus de l’actionnariat salarié (attributions gratuites d’actions, stock-options…) ;

– les revenus d’ores et déjà soumis aux retenues à la source prévues par les articles 182 A, 182 A bis et 182 B pour les contribuables non-résidents.

● Le 3 de l’article 204 A (alinéa 6) précise que les prélèvements effectués par le débiteur (pour la retenue à la source) ou acquittés par le contribuable (pour l’acompte), viendraient s’imputer sur l’impôt sur le revenu dû au titre de l’année au cours de laquelle le prélèvement a été opéré. Si le montant des prélèvements s’avérait supérieur à l’impôt dû, une fois effectuée la déclaration des revenus au printemps de l’année N + 1, l’excédent serait restitué au contribuable.

La mise en œuvre du prélèvement à la source ne signifierait donc nullement la suppression de la déclaration des revenus par les contribuables au printemps N + 1 et de la régularisation effectuée à l’été N + 1. La déclaration des revenus resterait bien évidemment indispensable pour que les contribuables actualisent leur situation familiale, vérifient et complètent les revenus figurant déjà au titre de la déclaration préremplie et reportent les dépenses ouvrant droit à réductions et crédits d’impôt.

Par ailleurs, il résulte de cette disposition que, dès lors que la retenue à la source a été effectuée par le tiers payeur, qu’elle ait ou non été reversée à l’administration fiscale, elle s’imputerait sur l’impôt sur le revenu dû par ce contribuable. Le contribuable ne pourrait donc pas se voir prélever deux fois, dans le cas où le débiteur de la retenue à la source n’aurait pas rempli ses obligations de reversement des sommes collectées.

● La réforme proposée concerne la très grande majorité des revenus perçus par les foyers fiscaux, à savoir 97,6 % de l’assiette des revenus imposables. Le tableau ci-après retrace, pour les différentes catégories de revenus, l’assiette nette, les recettes d’impôt brut perçues à ce titre, ainsi que le nombre de foyers fiscaux titulaires de ces revenus, et ce pour l’impôt de 2016 perçu sur les revenus de 2015 (sur la base de la deuxième émission).

Type de revenus

Assiette nette

(en milliards d’euros)

Recettes d’IR brut

(en milliards d’euros)

Nombre de foyers fiscaux

(en millions)

Nombre de foyers fiscaux titulaires de ces revenus et imposables

Nombre de foyers fiscaux titulaires de ces revenus et non imposables

Nombre de foyers fiscaux imposables pour lesquels ces revenus sont majoritaires

Nombre de foyers fiscaux imposables pour lesquels ces revenus représentent plus de 90 % de leurs revenus

Traitements, salaires et pensions

854

62,8

33,4

17,1

16,3

16,4

14,6

Traitements et salaires 

553

45,1

22,3

12,23 

10,04 

10,9 

8,7 

Revenus de remplacement 

29,3

0,9

5,3

1,6 

3,7 

0,2 

0,1 

Pensions de retraite 

260,3

16,4

12,3

6,33 

5,94 

5,1 

3,7 

Pensions d’invalidité 

5,6

0,2

0,7

0,2 

0,5 

0,04 

0,01 

Pensions en capital 

0,5

0

0,03

0,03 

0,0 

0,00 

0,00 

Rentes viagères à titre onéreux

0,366

0

0,365

0,246

0,12

0,00 

0,00 

Pensions alimentaires

4,8

0,1

1,37

0,347

1,027

0,02 

0,00 

Total indépendants

52,8

9,2

2,4

1,6 

0,8 

0,65

0,3

BIC

14,5

1,7

1,3

0,8 

0,5 

0,2 

0,1 

BNC

33

6,7

0,8

0,6 

0,2 

0,4 

0,2 

BA

5,3

0,7

0,4

0,2 

0,2 

0,1 

0,03 

Revenus fonciers

31,2

4,5

4,6

3,5

1,1

0,25

0,06

Dont revenus fonciers au régime micro

5,5

0,3

1,4

0,9 

0,5 

0,01 

0,01 

Dont revenus fonciers au régime réel

25,7

4,2

3,1

2,57 

0,57 

0,24 

0,05 

RCM

16

2,7

15,4

9,8

5,6

0,033

0,003

Dont revenus des actions et parts 

9,1

2

11

 

 

 

 

Dont intérêts 

6,9

0,7

10,6

 

 

 

 

PVM 

5,8

1,8

0,43

0,36

0,07

0,014

0,0015

Dont gains imposables au barème 

4,4

1,4

0,4

0,35 

0,07 

0,012 

0,0014 

Dont gains imposables au taux proportionnel

1,4

0,4

0

0,02 

0,00 

0,001 

0,000 

Gains de levée d’option

0,2

0,1

0,009

0,008

0,0004

0,00

0,00

Revenus dans le champ du PAS

936,7

76,3

34,2

       

Revenus hors champ du PAS

23,2

4,7

15,5

     

Total

959,9

81

36,1

     

Part des revenus dans le champ du PAS dans l’assiette totale de l’IR

97,6 %

Part des recettes d’IR issus de revenus dans le champ du PAS dans les recettes totales d’IR

94,2 %

En jaune = revenus soumis à la retenue à la source.

En bleu = revenus soumis à l’acompte.

En orange, revenus hors du champ du prélèvement à la source.

Source : chiffres de l’évaluation préalable de l’article 38 et DGFiP.

Les revenus soumis à la retenue à la source représenteraient une part prépondérante des revenus se trouvant dans le champ de la réforme, puisque, selon les chiffres fournis par l’évaluation préalable, leur assiette atteindrait 847,5 milliards d’euros, ce qui représenterait pas moins de 90,5 % de l’assiette des revenus soumis au prélèvement à la source – et 88,3 % de l’assiette totale de l’impôt sur le revenu.

L’assiette des revenus soumis à acompte atteindrait quant à elle 89,2 milliards d’euros, soit 9,5 % de l’assiette des revenus soumis au prélèvement à la source et 9,3 % de l’assiette totale de l’impôt sur le revenu.

RÉPARTITION DE L’ASSIETTE DES REVENUS ET DES RECETTES D’IMPÔT COLLECTÉES ENTRE REVENUS SE TROUVANT DANS LE CHAMP DE LA RETENUE À LA SOURCE, REVENUS DANS LE CHAMP DE L’ACOMPTE ET REVENUS HORS CHAMP DE LA RÉFORME

Type de revenus

Assiette nette

(en milliards d’euros)

Part dans l’assiette totale

Recettes d’impôt sur le revenu brut

(en milliards d’euros)

Part dans les recettes d’impôt sur le revenu brut

Revenus se trouvant dans le champ du PAS

936,7

97,6 %

76,3

94,2 %

Dont revenus se trouvant dans le champ de la retenue à la source

847,5

88,3 %

62,6

77,3 %

Dont revenus se trouvant dans le champ de l’acompte

89,2

9,3 %

13,7

16,9 %

Revenus se trouvant hors champ du prélèvement à la source

23,2

2,4 %

4,7

5,8 %

Total des revenus

959,9

100 %

81

100 %

Source : commission des finances.

RÉPARTITION DE L’ASSIETTE DES REVENUS SE TROUVANT DANS LE CHAMP
DE LA RÉFORME ET DES RECETTES D’IMPÔT COLLECTÉES À CE TITRE

Type de revenus

Assiette nette

(en milliards d’euros)

Part dans l’assiette totale

Recettes d’impôt sur le revenu brut

(en milliards d’euros)

Part dans les recettes d’impôt sur le revenu brut

Revenus se trouvant dans le champ de la retenue à la source

847,5

90,5 %

62,6

82 %

Revenus se trouvant dans le champ de l’acompte

89,2

9,5 %

13,7

18 %

Revenus se trouvant dans le champ du PAS

936,7

100 %

76,3

100 %

Source : commission des finances

● Près de 95 % de l’ensemble des 36,1 millions de foyers fiscaux, soit 34,2 millions de foyers, déclarent au moins un revenu imposable, positif ou négatif, dans le champ de la réforme. Ce taux passerait à 100 % pour les 17,5 millions de foyers fiscaux imposables.

Plus précisément, pour 99,7 % des foyers imposables, soit 17,4 millions, les revenus dans le champ de la réforme constitueraient à eux seuls les revenus majoritaires du foyer (soit plus de la moitié de leur revenu global brut). Pour plus de 96 % d’entre eux, soit pour près de 16,9 millions de foyers, ces revenus représenteraient à eux seuls 90 % de leurs revenus.

Le tableau ci-après présente de façon schématique les revenus se trouvant dans le champ de la réforme et ceux qui se trouveraient hors champ, en précisant pour les premiers les revenus assujettis à la retenue à la source et ceux soumis à acompte.

REVENUS INCLUS ET EXCLUS DU PRÉLÈVEMENT À LA SOURCE

Revenus dans le champ du prélèvement à la source

Revenu hors du champ du prélèvement à la source

Retenue à la source

Acompte contemporain

Traitements et salaires

Bénéfice industriels et commerciaux (BIC)

Plus-values immobilières (PVI)

Pensions de retraite

Bénéfices non commerciaux (BNC)

Plus-values mobilières (PVM)

Indemnités journalières de sécurité sociale, allocations chômage

Bénéfices agricoles (BA)

Revenus de capitaux mobiliers (RCM)

Indemnités versées lors de la rupture du contrat de travail (pour leur part imposable)

Revenus fonciers

Stock-options, attribution d’actions gratuites (AGA), carried interest, bons de souscription de parts de créateur d’entreprise (BSPCE)

Participation, intéressement

Rentes viagères à titre onéreux (RVTO)

Indemnités pour préjudice moral supérieures à un million d’euros

Rentes viagères à titre gratuit

Par exception, pensions alimentaires, salaires et pensions versés par des débiteurs établis à l’étranger

Revenus de non-résidents soumis à une retenue à la source et revenu de source étrangère ouvrant droit à un crédit d’impôt

Source : commission des finances, d’après l’évaluation préalable et le dispositif de l’article.

B. LES REVENUS SE TROUVANT DANS LE CHAMP DE LA RETENUE À LA SOURCE

● L’article 204 B (alinéa 7 du présent article) pose le principe selon lequel donneraient lieu à application de la retenue à la source les revenus qui sont soumis à l’impôt sur le revenu suivant les règles applicables aux salaires, aux pensions ou aux rentes viagères à titre gratuit.

Bien évidemment, ces revenus n’ont vocation à être soumis à la retenue que pour leur montant imposable, selon les règles en vigueur, notamment celles prévoyant des exonérations de tout ou partie de certains revenus (22).

Ce sont les revenus qui se prêtent le plus naturellement à une retenue à la source, dès lors qu’ils sont versés par un tiers payeur bien identifié et que les montants imposables sont a priori connus au moment de leur versement.

● Le principe posé par l’article est assorti d’une dérogation par renvoi à l’article 204 C (présenté infra), qui prévoit que ne sont pas soumis à la retenue à la source, mais à l’acompte :

– les pensions alimentaires ;

– les revenus de source étrangère imposables en France selon les règles applicables aux salaires, pensions ou rentes viagères, dès lors qu’ils sont versés par un débiteur établi hors de France.

Par ailleurs, les rentes viagères à titre onéreux relèvent également du régime de l’acompte (article 204 C).

Enfin, les revenus de l’actionnariat salarié (stock-options, attributions gratuites d’action et bons de souscription de parts de créateur d’entreprise), qui sont imposés selon les cas selon les règles applicables aux traitements et salaires, aux plus-values mobilières ou aux dividendes, se trouvent quant à eux hors du champ de la réforme ; il en va de même pour les traitements et salaires perçus par des non-résidents soumis à une retenue à la source spécifique (article 204 D, Cf. infra).

Les revenus dans le champ de la retenue à la source représentent une assiette de près de 848 milliards d’euros, dont 553 milliards d’euros de traitements et salaires, 29 milliards d’euros de revenus de remplacement et 266 milliards d’euros de pensions de retraite et d’invalidité.

1. Les traitements et salaires

Sont imposables en tant que salaires, et donc soumis à retenue à la source, les sommes perçues à raison d’une activité salariée – y compris les indemnités de stage –, qu’il s’agisse de la rémunération principale ou d’éléments accessoires.

Parmi les éléments du salaire imposable, doivent être mentionnés :

– la rémunération principale proprement dite, à savoir les salaires versés par les entreprises, les traitements versés par les collectivités publiques, les rémunérations des dirigeants (pour la part de leurs revenus relevant de la catégorie des traitements) ;

– la participation et l’intéressement ;

– les sommes inscrites au crédit d’un compte épargne temps ;

– les indemnités journalières pour maladie ou maternité versées aux salariés par les organismes de sécurité sociale ;

– les sommes perçues en fin d’activité, telles que les indemnités de licenciement, les indemnités de départ à la retraite ou en préretraite, les indemnités de rupture conventionnelle… ;

– les allocations de chômage et assimilées ;

– les primes et avantages divers.

Quant aux avantages en nature (nourriture, logement, véhicule, informatique…), il n’est pas possible, par construction, de leur appliquer une retenue à la source ; leur imposition n’a vocation à intervenir qu’au stade de la régularisation, une fois la déclaration de revenus effectuée.

2. Les pensions et rentes viagères à titre gratuit

Les pensions et rentes viagères consistent en des allocations périodiques, dont le paiement est, d’une manière générale – mais pas nécessairement –, garanti aux bénéficiaires leur vie durant. Elles sont en principe imposables, sauf disposition spécifique prévoyant leur exonération (retraite mutualiste des anciens combattants, certaines pensions militaires…) ; elles seraient donc soumises à retenue à la source – à l’exception des pensions alimentaires et des rentes viagères à titre onéreux.

Les principales pensions sont les suivantes :

– les pensions de retraite, qu’elles soient versées par les régimes de sécurité sociale, les régimes complémentaires ou l’entreprise, ainsi que les versements forfaitaires uniques versés aux titulaires de droits de faible montant, les allocations de veuvage, et les pensions servies au titre des plans d’épargne populaire (PERP) ;

– les pensions d’invalidité ;

– les rentes viagères à titre gratuit : à savoir l’allocation périodique qu’une personne (le débirentier) verse en exécution d’engagements contractuels à une autre personne (le crédirentier), mais constituée à titre gratuit, c’est-à-dire qu’aucune contrepartie n’est stipulée en échange de la rente promise. L’exemple le plus couramment cité est celui d’une rente viagère constituée en dot par un parent à son enfant – mais en pratique, les rentes viagères à titre gratuit ne représentent sans doute que des sommes imposables marginales et ne concernent qu’un nombre très restreint de contribuables – à la différence des rentes viagères à titre onéreux.

C. LES REVENUS SE TROUVANT DANS LE CHAMP DE L’ACOMPTE

Les revenus mentionnés à l’article 204 C nouveau (alinéa 8 du présent article), à la différence des traitements, salaires et pensions, ne font pas l’objet d’une retenue à la source réalisée par le débiteur du revenu mais d’un acompte contemporain acquitté par son bénéficiaire en application du 2° du 2 de l’article 204 A. Entrent dans le champ de cet article les revenus suivants :

– bénéfices industriels et commerciaux (BIC) ;

– bénéfices non commerciaux (BNC) ;

– bénéfices agricoles (BA) ;

– revenus fonciers ;

– rentes viagères à titres onéreux (RVTO), telles qu’un viager immobilier ;

– pensions alimentaires, qu’elles soient servies aux ascendants ou descendants en vertu de l’obligation alimentaire (23), aux enfants en vue de leur entretien en cas de divorce ou de séparation (24), ou pour d’autres motifs, comme les prestations compensatoires (25) ;

– revenus de sources étrangères imposables en France par application des règles applicables aux salaires, aux pensions ou aux rentes viagères, lorsque le débiteur desdits revenus est établi hors de France.

La différence dans la modalité de prélèvement s’explique par l’absence d’un tiers payeur débiteur du revenu (cas notamment des revenus des travailleurs indépendants) ou par la complexité et les effets négatifs qu’une retenue à la source impliquerait pour d’autres revenus :

– pour les revenus fonciers, il semble préférable de faire peser le versement de l’impôt sur le bailleur, déjà identifié par l’administration fiscale, plutôt que sur le locataire (26) ;

– pour les salaires et pensions de source étrangère dont le débiteur se situe hors de France, une retenue à la source serait susceptible d’entraîner plusieurs complications :

• frein à l’embauche de salariés français en raison de la charge administrative supplémentaire ;

• difficultés liées à l’échange d’informations avec l’administration fiscale française ;

• risque de ne pouvoir contraindre les débiteurs étrangers au recouvrement des retenues dues.

– pour les RVTO, le Gouvernement considère qu’imposer à un particulier de pratiquer une retenue à la source sur une rente versée à un autre particulier serait peu souhaitable (en revanche, n’est pas exclue, à terme, la mise en place d’un tel dispositif pour les rentes versées par un organisme gestionnaire, telle une banque) ;

– enfin, pour les pensions alimentaires, le contexte parfois conflictuel dans lequel elles s’inscrivent associé à la nature non professionnelle du tiers payeur et à l’absence de circuit existant de retenue à la source (27) conduisent à privilégier l’acompte.

D. LES REVENUS EXCLUS DU CHAMP DE LA PRÉSENTE RÉFORME

La mise en place du prélèvement à la source prévue par le présent article ne s’appliquerait pas à deux ensembles de revenus :

– ceux qui, non pris en compte par l’article 38, s’en trouvent de fait exclus, à savoir les plus-values immobilières (PVI), les plus-values mobilières (PVM) et les revenus de capitaux mobiliers (RCM) ;

– ceux qui sont explicitement exclus par le nouvel article 204 D (alinéa 9), c’est-à-dire :

• les revenus tirés des dispositifs d’actionnariat salarié ;

• les traitements versés des non-résidents faisant déjà l’objet d’une retenue à la source et, de manière plus marginale ;

• les revenus de source étrangère ouvrant le droit à l’application d’un crédit d’impôt en application d’une convention fiscale internationale.

1. L’exclusion des plus-values immobilières ou mobilières et des revenus de capitaux mobiliers

Dans le silence de l’article 38, ces trois catégories de revenus sont exclues du présent dispositif en raison :

– de l’existence de prélèvements à la source déjà opérationnels (PVI ou RCM) ;

– de leur caractère irrégulier et de la difficulté à déterminer le gain taxable, ce qui rendrait la perception du PAS excessivement complexe (PVM).

a. Les plus-values immobilières

Conformément à l’article 150 U du CGI, les PVI réalisées par des personnes physiques domiciliées en France sont soumises, au titre de l’impôt sur le revenu, à un prélèvement proportionnel de 19 % auquel il convient d’ajouter la perception des prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine au taux global de 15,5 %.

Conformément à l’article 150 VG du GI, une déclaration (modèle n° 2048) retraçant les éléments nécessaires à la liquidation de l’impôt doit être déposée, en général par les soins du notaire, à l’appui d’une demande d’enregistrement au service de publicité foncière.

Compte tenu de ce prélèvement, qui est déjà en pratique opéré à la source sous le contrôle d’une personne assermentée et dont le fonctionnement actuel ne soulève pas de problèmes, le Gouvernement a donc opté pour le maintien de ces revenus hors du champ du PAS.

b. Les plus-values mobilières

Les PVM ont été exclues du champ de la retenue à la source en raison de leur caractère irrégulier et des modalités complexes de calcul de la plus-value taxable.

Les principaux chiffres

Les gains de cession de valeurs mobilières sont déclarés par 1,2 % des foyers fiscaux, soit 400 000 foyers sur 36,1 millions.

L’assiette est de 5,8 milliards d’euros, soit 0,9 % du montant total de 960 milliards d’euros de revenus soumis à l’IR. Ce total est à partager entre les gains imposables au barème (4,4 milliards d’euros) et ceux qui sont imposables à un taux proportionnel (1,4 milliard d’euros).

Le produit correspondant à l’imposition de ces gains représente 1,8 milliard d’euros (soit 1,4 milliard d’euros pour les gains imposés au barème et 0,4 milliard d’euros pour les gains imposés à taux proportionnel).

• Les abattements pour durée de détention

Depuis le 1er janvier 2013, les PVM font l’objet d’une taxation au barème de l’impôt sur le revenu alors qu’ils étaient, avant cette date, soumis à un prélèvement libératoire au taux proportionnel au taux de 24 %. Ces PVM sont imposés par voie de rôle en année N + 1, sans que cette imposition ne soit prise en compte dans les tiers provisionnels ou les mensualités de l’IR.

Cette « barémisation » des PVM à compter de 2013 s’est accompagnée de la mise en place de deux abattements pour durée de détention :

– l’abattement de droit commun (0 % avant deux ans de durée de détention, 50 % entre deux ans et huit ans, 65 % après huit ans) ;

– l’abattement renforcé dont bénéficient les détenteurs de parts de petite et moyenne entreprise (PME) de moins de dix ans (0 % avant un an de durée de détention, 50 % entre un an et quatre ans, 65 % entre quatre ans et huit ans, 85 % après huit ans).

En outre, l’article 17 de la loi de finances pour 2014 (28) a prévu la mise en place d’un abattement spécifique pour les dirigeants de PME partant en retraite (abattement fixe de 500 000 euros avant application de l’abattement renforcé mentionné ci-dessus).

• La « tunnelisation » des plus-values et des moins-values mobilières

Conformément au 11 de l’article 150-0 D du CGI, « les moins-values subies au cours d’une année sont imputables exclusivement sur les plus-values de même nature réalisées au cours de la même année ou des dix années suivantes ».

En pratique, lorsque la compensation entre les plus-values de l’année et les moins-values reportées en application de cette disposition font apparaître un solde positif, ce solde est imposable à l’IR après application de l’abattement pour durée de détention.

• Le maintien de prélèvements proportionnels dans certains cas

Les gains tirés des plans d’épargne en actions (PEA) ainsi que ceux de ces plans qui sont plus spécifiquement destinés au financement des PME (dits « PEA-PME ») sont en principe exonérés d’IR lorsque le plan a plus de cinq ans. Toutefois, les retraits anticipés donnent lieu à une imposition au taux forfaitaire de 22,5 % (en cas de retrait avant deux ans) ou de 19 % (en cas de retrait entre deux et cinq ans).

En outre, les produits tirés de titres non cotés inscrits sur un PEA font l’objet d’une exonération limité à 10 % de leur montant ; l’excédent est imposé au barème de l’IR avec application de l’abattement de 40 %.

Les gains tirés de la cession des bons de souscriptions de parts de créateurs d’entreprise (BSPCE) sont taxés au taux proportionnel de 19 % ; leur régime est détaillé ci-dessous, mais il convient de préciser que les rendements indiqués ci-dessus (fournis par l’administration fiscale) comprennent ceux qui s’attachent à la cession de tels bons (dans la catégorie des gains imposables à taux proportionnel).

c. Les revenus de capitaux mobiliers

Les RCM ont été maintenus en dehors du champ de la réforme en raison non seulement de l’application d’un prélèvement à la source obligatoire (non libératoire) mais aussi du maintien de nombreux prélèvements proportionnels.

Les principaux chiffres

Les RCM sont déclarés par 43 % des 36,1 millions de foyers fiscaux, soit 15,4 millions de foyers.

Ils représentent 1,7 % de l’assiette de l’IR, soit 16 milliards d’euros (9,1 milliards d’euros pour les dividendes et 6,9 milliards d’euros pour les intérêts).

Le produit correspondant est de 2,7 milliards d’euros (2 milliards pour les dividendes et 0,7 milliard pour les intérêts).

• Une imposition au barème de l’IR depuis 2013

Dans un souci de justice fiscale, l’article 9 de la loi de finances pour 2013 (29) a prévu l’imposition des RCM au barème de l’impôt sur le revenu, en supprimant le prélèvement forfaitaire libératoire (PFL) optionnel applicable à ces revenus aux taux de 21 % pour les dividendes et de 24 % pour les intérêts des produits de placement à revenu fixe.

Afin de garantir une perception de recettes stables pour le Trésor, la suppression du PFL optionnel s’est accompagnée de la mise en place d’un prélèvement forfaitaire obligatoire (PFO) non libératoire de la « barémisation » opérée en année N + 1 ; ce PFO est perçu à compter du 1er janvier 2013 aux taux de 21 % pour les dividendes et de 24 % pour les intérêts, auxquels il faut ajouter les prélèvements sociaux sur les produits de placement au taux global de 15,5 %.

Un abattement de 40 % est pratiqué sur les dividendes distribués par des sociétés à l’impôt sur les sociétés ou à un impôt équivalent dans un État de l’espace européen ou ayant conclu avec la France une convention fiscale.

• Le maintien de nombreux prélèvements proportionnels

Par dérogation et sur option du contribuable, les produits de placement à revenu fixe restent assujettis, au titre de l’impôt sur le revenu, à un prélèvement proportionnel libératoire au taux de 24 % lorsque le montant de ces produits est inférieur à 2 000 euros sur l’ensemble de l’année pour le foyer fiscal.

Les produits de l’assurance vie (et des autres bons ou contrats de capitalisation assimilés) sont, sur option du contribuable, assujettis à un prélèvement forfaitaire libératoire de l’IR, dont le taux est dégressif en fonction de l’ancienneté du contrat : 35 % pour les contrats de moins de quatre ans, 15 % entre quatre et huit ans et 7,5 % après huit ans.

Certains régimes plus particuliers visent par ailleurs l’imposition des revenus versés à des résidents installés dans les États et territoires non coopératifs (au taux libératoire de 75 %) ou encore les revenus tirés d’un bon ou contrat anonyme (au taux libératoire de 60 %).

Le prélèvement forfaitaire libératoire sur les produits d’épargne solidaire est par ailleurs fixé à 5 %.

Il ressort donc de l’ensemble de ces éléments que la détermination du revenu net taxable au titre des RCM est d’une particulière complexité. Leur prise en compte dans le champ du PAS risquerait d’entraîner des charges de gestion importantes pour l’administration fiscale.

2. Les revenus explicitement exclus du champ de la réforme

Le nouvel article 204 D du CGI (alinéa 9 du présent article) prévoit explicitement d’exclure du champ de la réforme certains revenus qui, étant en principe qualifiés de traitements ou salaires, devraient logiquement en faire partie.

Il s’agit en premier lieu de certains revenus de l’actionnariat salarié, que le CGI qualifie de revenus salariaux, mais aussi des traitements et salaires versés à des non-résidents qui font l’objet de prélèvements à la source propres, justifiant leur exclusion du champ de la présente réforme.

Les revenus de source étrangère faisant l’objet d’un crédit d’impôt en application d’une convention internationale sont également exclus de la présente réforme (30).

a. L’actionnariat salarié

À ne pas confondre avec l’épargne salariale, l’actionnariat salarié se définit comme un ensemble de dispositifs destinés à associer les salariés au capital de leur entreprise.

• Les stock-options

L’avantage lié à la différence entre la valeur réelle de l’action à la date de la levée de l’option et le prix de souscription de cette action est imposé dans la catégorie des traitements et salaires, sans application d’un abattement pour durée de détention.

Le rabais excédentaire, c’est-à-dire la différence entre le prix auquel l’action est offerte et 95 % du cours moyen de l’action, est en outre imposé l’année de la levée de l’option et non au jour de la cession de l’action.

Compte tenu des difficultés à déterminer, au moment de la cession de l’action, les différents gains liés à la cession de ces actions, le présent article les maintient en dehors de la réforme.

• Les actions gratuites

Le dispositif d’attribution d’actions gratuites (AGA), mis en place par l’article 83 de la loi n° 2004-1484 du 30 décembre 2004 de finances pour 2005, permet aux sociétés par actions cotées ou non cotées d’attribuer, sous certaines conditions, des actions gratuites à leurs salariés et mandataires sociaux.

Le cadre fiscal applicable aux AGA a fait l’objet d’une réforme de grande ampleur par l’article 135 de la loi du 6 août 2015 (31) sur laquelle un amendement adopté dans le cadre de la première partie du présent projet de loi de finances entend revenir partiellement.

Le présent commentaire n’a pour objet que de rappeler les raisons pour lesquelles, du point de vue fiscal, il a semblé préférable de les maintenir hors du champ de la présente réforme.

L’attribution d’actions gratuites est susceptible de générer quatre types de revenus différents, qui font chacun l’objet d’un traitement fiscal particulier :

– l’avantage initial résultant de l’attribution de l’action gratuite, aussi appelé « gain d’acquisition » et paradoxalement qualifié d’« avantage salarial » depuis 2015 par l’article 80 quaterdecies du CGI, est actuellement pris en compte dans la catégorie des plus-values mobilières alors qu’il était, avant la loi du 6 août 2015 précitée, traité fiscalement comme un salaire ;

– la plus-value liée à la cession de telles actions est prise en compte dans la catégorie des plus-values mobilières, dont les conditions d’abattement pour durée de détention ont été réformées à plusieurs reprises ces dernières années ;

– les produits financiers liés à ces actions, ou dividendes, sont pris en compte dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ;

– l’indemnité compensant la renonciation ou la perte des actions gratuites en cours d’acquisition est prise en compte dans la catégorie des traitements et salaires.

Le présent article n’exclut explicitement du champ de la réforme que le gain d’acquisition, les autres revenus tirés des AGA entrant naturellement dans le champ des autres exclusions décrites précédemment (PVM ou RCM).

Compte tenu de l’application au gain d’acquisition de l’abattement propre aux plus-values mobilières, en application de l’article 135 précité, et des difficultés propres à déterminer le montant imposable dans chaque catégorie, les AGA ont été maintenue hors du champ de la présente réforme pour les mêmes raisons que les PVM.

En outre, dans l’hypothèse où le dispositif voté en première partie du présent projet de loi de finances, tendant à revenir sur la réforme de la fiscalité des AGA opérée en 2015, serait définitivement adopté, il conviendrait de maintenir la fiscalisation du gain d’acquisition des AGA hors du champ de la présente réforme, compte tenu de la complexité globale du cadre fiscal applicable aux revenus tirés de ces AGA.

• Les BSPCE

D’après le Bulletin officiel des finances publiques (BOFiP), le dispositif des BSCPE a été créé « afin de permettre aux jeunes sociétés de s’attacher, par le biais d’un intéressement à leur capital, le concours de salariés qu’elles ne peuvent s’offrir compte tenu de leur faible surface financière ».

Ils confèrent à leurs bénéficiaires le droit de souscrire des titres représentatifs du capital de leur entreprise à un prix définitivement fixé au jour de leur attribution. Ils offrent ainsi la perspective de réaliser un gain en cas d’appréciation du titre entre la date d’attribution du bon et la date de cession du titre acquis au moyen de ce bon.

L’article 136 de la loi du 6 août 2015 précitée a procédé à un aménagement limité des conditions d’octroi de ces BSCPE, sans modifier leur fiscalité.

Actuellement, les gains tirés de la cession de tels bons font l’objet d’un prélèvement proportionnel libératoire au taux de 19 %. Ce taux est porté à 30 % lorsque le bénéficiaire exerce son activité dans la société depuis moins de trois ans.

Ce prélèvement proportionnel est perçu par voie de rôle en année N + 1 ; ce n’est donc pas l’existence d’un prélèvement à la source concurrent qui justifie leur exclusion de la réforme mais l’imposition proportionnelle et les difficultés à déterminer l’assiette taxable.

b. Les revenus versés à des contribuables non-résidents faisant déjà l’objet d’un prélèvement à la source

• Les revenus salariaux

Les revenus salariaux, les pensions et les rentes viagères de source française versés à des personnes n’ayant pas leur domicile fiscal en France sont soumis à un prélèvement à la source partiellement libératoire.

Conformément à l’article 197 A du CGI, l’IR dû par les non-résidents à raison de leurs revenus de source française est calculé dans les conditions de droit commun mais le taux ne peut en principe être inférieur à 20 % du revenu net imposable (ou 14,4 % pour les revenus ayant leur source dans les départements d’outre-mer).

Dans le cas où le contribuable non-résident peut justifier que le taux moyen d’imposition résultant du barème français appliqué à l’ensemble de ses revenus mondiaux serait inférieur à ces taux, ce taux moyen est alors appliqué à ses revenus de source française.

L’article 120 de la loi de finances pour 2015 (32) a en outre prévu que les non-résidents fiscaux établis dans un autre État de l’Union européenne ou dans un État lié à la France par une convention fiscale peuvent bénéficier de ce dispositif en annexant à la déclaration une déclaration sur l’honneur, dans l’attente de pouvoir produire les pièces justificatives relatives à leurs autres revenus mondiaux.

Afin de garantir le recouvrement de ces recettes fiscales pour le Trésor, un dispositif spécifique de retenue à la source sur les revenus salariaux de source française versés à des non-résidents est prévu par l’article 182 A du CGI.

Cette retenue à la source est appliquée, en fonction de la durée d’activité du redevable, selon un barème par tranches actualisé annuellement.

BARÈME APPLICABLE AUX REVENUS SALARIAUX DES NON-RÉSIDENTS EN 2016

(en euros)

Taux

Limite des tranches selon la période à laquelle se rapportent les paiements

Revenus annuels

Revenus trimestriels

Revenus mensuels

Revenus hebdomadaires

Revenus journaliers

0 % en deçà de :

14 446

3 612

1 204

278

46

12 % de :

14 446

3 612

1 204

278

46

À :

41 909

10 477

3 492

806

134

20 % au-delà de :

41 909

10 477

3 492

806

134

Source : article 182 A du CGI.

Si l’on compare la situation des non-résidents avec celle des résidents, on peut noter que :

– la base de cette retenue est constituée « conformément aux règles applicables en matière d’impôt sur le revenu » mais sans intégrer les charges de famille sous la forme du quotient familial ;

– la déduction des frais professionnels réels est également exclue, ce qui permet toutefois l’application de l’abattement forfaitaire de 10 %.

Cette retenue à la source est partiellement libératoire : seule la fraction soumise au taux de 20 % est imposée au barème progressif de l’IR avec les autres revenus de source française.

Dans certains cas, il apparaît donc que le dispositif applicable aux non-résidents est plus favorable que celui applicable aux résidents fiscaux.

Exemple 1

Soit un contribuable non-résident fiscal célibataire ayant eu en année N, après abattement forfaitaire, un revenu annuel taxable de source française de 50 000 euros.

La retenue à la source opérée est de 3 295 euros (tranche taxable à 12 %) et 1 618 euros (tranche taxable à 20 %) soit un total de 4 913 euros.

Au titre de l’année N, ce contribuable est imposé sur ses revenus de source française au barème de l’IR sur la seule fraction excédant 41 909 euros, c’est-à-dire en l’occurrence sur 8 091 euros.

Compte tenu de ses revenus, c’est le taux minimal de 20 % qui trouve à s’appliquer ; le montant correspondant d’impôt est donc de 1 618 euros.

Le montant déjà acquitté s’impute sur ce montant ; le redevable n’aurait par conséquent aucun complément d’impôt à acquitter. Son montant total d’impôt serait donc de 4 913 euros.

Pour un même niveau de revenus, un résident aurait été taxé à hauteur de 9 355 euros.

Lorsque le revenu augmente, l’intérêt du dispositif spécifique aux non-résidents reste valable.

Exemple 2

Soit le même contribuable avec des revenus de source française de 150 000 euros (après abattement).

La somme totale à acquitter au titre de la retenue à la source serait de 24 913 euros (3 295 euros au titre de la tranche à 12 % et 21 618 euros au titre de la tranche à 20 %).

Au titre de l’année N, la fraction excédant 41 909 euros est taxée au barème de l’IR, soit en l’occurrence 108 091 euros, ce qui correspond à un impôt de 30 730 euros.

Le contribuable devrait acquitter un supplément de 5 820 euros.

Pour un même niveau de revenus, un résident aurait été taxé à hauteur de 42 965 euros.

Lorsque le foyer fiscal contient davantage de parts, le contribuable peut demander le remboursement de l’excédent de retenue à la source lorsqu’elle excède le montant théorique d’IR qui serait dû sur la totalité de ses revenus de source française et étrangère.

Exemple 3

Soit un contribuable domicilié en France, marié et dont le foyer dispose de trois parts. Ses seuls revenus en année N sont un salaire de source française d’un montant imposable de 50 000 euros après abattement forfaitaire de 10 %.

La retenue à la source est de 4 913 euros. Au titre de l’année N, il est imposé au taux de 20 % sur la fraction excédant 41 909 euros, soit 1 618 euros.

Aucun complément n’est exigé, mais l’impôt dû en France par un tel foyer serait de 2 926 euros. Le redevable peut donc prétendre à un remboursement de la différence entre la retenue à la source et ce montant.

• Le dispositif applicable aux prestations artistiques ou sportives

L’article 182 A bis du CGI prévoit l’application d’une retenue à la source spécifique pour les prestations artistiques fournies en France. Cette retenue à la source s’applique aux montants bruts après déduction de l’abattement forfaitaire de 10 %.

La retenue est perçue au taux de 15 % ; elle est libératoire pour la fraction du revenu n’excédant pas 41 909 euros. Elle est imputable sur le solde de l’impôt finalement dû.

Un dispositif similaire est prévu pour les prestations sportives par l’article 182 B du CGI. Dans ce cas précis, aucun abattement pour frais professionnels n’est applicable. La retenue n’est pas libératoire et s’impute sur l’impôt finalement exigible.

• Le dispositif applicable aux revenus non salariaux

L’article 182 B du CGI prévoit une retenue à la source spécifique pour certains revenus non salariaux :

– les sommes versées en rémunération d’une activité déployée en France dans l’exercice de l’une des professions mentionnées à l’article 92 du CGI, c’est-à-dire les bénéfices non commerciaux ;

– les produits définis à l’article 92 du CGI et perçus par les inventeurs ou au titre de droits d’auteur, les obtenteurs de nouvelles variétés végétales ainsi que les produits de la propriété industrielle et de droits assimilés ;

– les sommes payées en rémunération des prestations de toute autre nature fournies ou utilisées en France.

Compte tenu de l’existence de ces différents prélèvements à la source, dans l’ensemble avantageux pour leurs bénéficiaires, l’alinéa 9 prévoit de les exclure du champ du PAS.

c. Les autres revenus exclus par le présent article

De manière plus marginale, l’alinéa 9 exclut également du champ de la présente réforme :

– les indemnités de plus d’un million d’euros perçues au titre du préjudice moral fixées par une décision de justice ;

– les parts de carried interest, c’est-à-dire la part de la plus-value réalisée par un fonds d’investissement qui revient à ses dirigeants ou aux membres de l’équipe de gestion, qui sont en principe imposables dans la catégorie des plus-values mobilières (PVM). Toutefois, lorsque les conditions prévues ne sont pas remplies, elles restent imposées dans la catégorie des traitements et salaires.

Pour bénéficier du régime plus favorable des PVM, les parts doivent notamment avoir été détenues pendant cinq ans, elles doivent représenter certains minima d’investissement dans la société émettrice, et être détenues par les dirigeants de certaines structures limitativement énumérées (société de capital-risque, société de gestion de portefeuille, etc.).

d. Les revenus de source étrangère ouvrant droit à un crédit d’impôt

Exclus par l’alinéa 9 du présent article, le champ de ces revenus est explicité ci-dessous.

E. L’APPLICATION DE LA RÉFORME AUX REVENUS EN PROVENANCE DE L’ÉTRANGER

S’agissant des revenus en provenance de l’étranger perçus par des résidents fiscaux, le présent projet de loi de finances contient plusieurs dispositions méritant un commentaire d’ensemble :

– l’alinéa 8 prévoit que les revenus de source étrangère imposables en France suivant les règles imposables aux salaires, aux pensions ou aux rentes viagères seraient soumis au PAS sous la forme de l’acompte et non de la retenue à la source ;

– l’alinéa 9 prévoit que les revenus de source étrangère ouvrant droit à un crédit d’impôt français correspondant à ces revenus, en application d’une convention fiscale internationale, n’entrent pas dans le champ du PAS ;

– l’alinéa 20 prévoit par ailleurs que, pour la détermination de l’assiette du PAS, les revenus de source étrangère imposables en France seraient retenus pour leur montant net imposable à l’IR.

1. Les catégories de revenus en provenance de l’étranger non concernés par la réforme

Il convient à titre préliminaire de rappeler que les PVM, les RCM et les PVI sont globalement placés hors du champ de la présente réforme : dès lors que ces revenus seraient perçus par un résident fiscal français en provenance de l’étranger, ils seraient donc également placés hors du champ de la réforme.

S’agissant des revenus fonciers, les conventions fiscales liant la France prévoient en règle générale qu’ils sont imposables dans l’État dans lequel l’immeuble est situé.

Les revenus fonciers que des résidents fiscaux français pourraient tirer d’immeubles situés à l’étranger sont donc, en principe et sous réserve de conventions particulières, placés hors du champ de la présente réforme dans la mesure où ils sont imposés à l’étranger.

Enfin, la question de l’applicabilité de la présente réforme aux revenus provenant de l’étranger ne se pose par définition que pour les résidents fiscaux français.

Au sens de l’article 4 B du CGI, sont considérées comme ayant leur résidence fiscale en France les personnes :

– qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal ;

– qui exercent en France une activité professionnelle, salariée ou non, à moins qu’elles ne justifient que cette activité y est exercée à titre accessoire ;

– qui ont en France le centre de leurs intérêts économiques.

Les résidents fiscaux français sont soumis à une obligation fiscale illimitée, c’est-à-dire qu’ils sont imposables en France à raison de l’ensemble de leurs revenus, quelle que soit leur source géographique.

A contrario, les non-résidents fiscaux sont soumis à une obligation fiscale limitée : ils ne paieraient en France leurs impôts qu’à raison des revenus de source française. À cet effet, plusieurs dispositifs de retenue à la source existent déjà qui ont été exposés ci-dessus (2 du D du présent I).

Enfin, les non-résidents fiscaux français bénéficiant de revenus en provenance de l’étranger ne sont pas concernés par le droit fiscal français.

2. Le régime applicable aux revenus d’activité et de remplacement en provenance de l’étranger

a. Les différentes catégories de revenus en provenance de l’étranger

La compréhension du régime fiscal applicable aux revenus d’activité et de remplacement en provenance de l’étranger (imposables en France) suppose de distinguer les deux notions connexes que sont les revenus en provenance de l’étranger et les revenus de source étrangère.

Seule une partie des revenus en provenance de l’étranger sont juridiquement qualifiés de revenus de source étrangère. L’autre partie, assimilée à des revenus de source française, serait soumise au PAS selon les modalités de droit commun.

LES REVENUS D’ACTIVITÉ ET DE REMPLACEMENT EN PROVENANCE DE L’ÉTRANGER

Catégorie de revenus

Qualification au regard du droit fiscal

Revenus provenant d’une activité exercée en France dont le débiteur se trouve à l’étranger

Revenu de source française

Revenus provenant d’une activité exercée à l’étranger dont le débiteur se trouve en France

Revenus de source française

Revenus provenant d’activités exercées à l’étranger dont le débiteur se trouve à l’étranger

Revenus de source étrangère

b. Le champ des revenus de source étrangère imposés en France dépend de ses conventions fiscales

Les modalités d’imposition en France des revenus en provenance de l’étranger dépendent en grande partie des conventions fiscales signées par la France. Selon l’évaluation préalable, ces conventions étaient au nombre de 120 au 1er janvier 2016.

Sans préjudice des conventions particulières avec un État étranger, le modèle de convention fiscale de l’OCDE, largement utilisé par la France dans ce domaine, permet toutefois d’appréhender les grands principes selon lesquels sont imposés en France les revenus de source étrangère.

Dans le domaine des revenus d’activité ou de remplacement, cette convention fiscale type opère une distinction entre plusieurs catégories de revenus, en permettant ainsi de déterminer dans quel État partie à la convention ces revenus seraient imposés :

– les traitements et salaires provenant d’une activité habituelle sont imposés dans l’État de résidence à moins que l’emploi ne soit exercé dans l’autre État ; les rémunérations provenant de missions temporaires sont imposables uniquement dans l’État de résidence, tandis que les rémunérations publiques sont imposées dans l’État qui les verse ;

– les pensions sont imposées dans l’État de résidence, à l’exception des pensions publiques qui sont imposées dans l’État qui les verse ;

– d’autres catégories particulières de revenus (comme les jetons de présence, les salaires des artistes et des sportifs) sont réparties pour être imposées dans les deux États.

c. Les règles pratiques mises en œuvre pour éviter les doubles impositions

Afin de donner à ces principes une portée pratique, deux dispositifs sont mis en place afin d’effacer les doubles impositions. Il revient à l’État de résidence du redevable de les mettre en œuvre.

• La mise en place de crédits d’impôt

Selon cette méthode, la France est alors, en tant qu’État de résidence, en droit d’imposer l’intégralité du revenu du contribuable. Toutefois, le redevable bénéficie d’un crédit d’impôt à raison des impôts déjà acquittés dans l’autre État.

Ce crédit d’impôt correspond dans la plupart des cas au montant de l’impôt acquitté dans l’autre État, dans la limite du montant de l’impôt français calculé à raison de ces mêmes revenus ; dans certains cas, il correspond au montant de l’impôt français découlant aux revenus de source étrangère, quel que soit le montant acquitté dans l’autre État.

• La mise en place d’une exemption avec progressivité par application du taux effectif

Selon cette méthode, la France exonère les revenus imposables dans l’autre État mais les prend en compte dans le calcul du taux moyen d’IR applicable aux autres revenus du redevable.

Ainsi, le taux selon lequel le redevable serait prélevé n’est appliqué qu’à ses revenus de source française ; mais il est calculé en déterminant le taux moyen d’imposition applicable résultant de la « barémisation » de l’ensemble de ses revenus, y compris ceux qui ont été exonérés.

3. Le dispositif prévu par le présent article

a. La liste des revenus en provenance de l’étranger entrant dans le champ du PAS

Sous réserve de conventions fiscales particulières, les revenus en provenance de l’étranger entrant dans le champ du PAS seraient donc en pratique les suivants :

– les salaires des travailleurs domiciliés fiscalement en France et y exerçant leur activité sous la forme d’une mission de longue durée pour le compte d’un employeur établi à l’étranger ;

– les salaires de certains travailleurs domiciliés fiscalement en France et exerçant leur activité à l’étranger, rémunérés par un employeur établi en France sous la forme d’une mission temporaire ;

– les salaires des travailleurs perçus sous le régime d’un accord frontalier, domiciliés fiscalement en France et exerçant leur activité hors de France pour le compte d’un employeur étranger ;

– certains salaires perçus par des artistes ou des sportifs domiciliés fiscalement en France ;

– certains jetons de présence perçus en France dans la mesure où le droit interne les rend imposables selon les règles applicables aux traitements et salaires ;

– les retraites des pensionnés domiciliés fiscalement en France recevant une pension de la part d’un payeur établi hors de France ;

– les redevances en provenance de l’étranger perçues par un travailleur indépendant domicilié fiscalement en France.

b. Seuls les revenus de source étrangère seraient soumis au PAS selon des modalités spécifiques

Dans la liste mentionnée ci-dessus, seuls les revenus qualifiés de revenus de source étrangère seraient imposés selon des modalités spécifiques, c’est-à-dire sous forme d’acompte, alors qu’ils auraient dû, dans la logique globale de la réforme, être pris en compte sous la forme d’une retenue.

Les autres, assimilés à des revenus de source française, seraient soumis au PAS dans les conditions de droit commun, c’est-à-dire sous la forme d’une retenue à la source.

Selon l’évaluation préalable, il serait en effet particulièrement complexe de soumettre des tiers collecteurs établis à l’étranger à une obligation de mise en œuvre du PAS.

LES REVENUS D’ACTIVITÉ ET DE REMPLACEMENT
EN PROVENANCE DE L’ÉTRANGER ET LE PAS

Catégorie de revenus

Qualification au regard du droit fiscal

Modalités de prélèvement à la source

Revenus provenant d’une activité exercée en France dont le débiteur est établi à l’étranger

Revenu de source française

Retenue à la source

Revenus provenant d’une activité exercée à l’étranger dont le débiteur se trouve en France

Revenus de source française

Retenue à la source

Revenus provenant d’activités exercées à l’étranger dont le débiteur se trouve à l’étranger

Revenus de source étrangère

Acompte

– dont revenus de source étrangère ouvrant droit à un crédit d’impôt en application d’une convention fiscale

Revenus de source étrangère

Hors champ du PAS

S’agissant de la première catégorie de revenus indiquée dans le tableau ci-dessous, qui impliquent un débiteur établi à l’étranger – et pourraient à ce titre, pour les mêmes raisons, être exclus du champ du PAS –, l’évaluation préalable relève que ces débiteurs sont déjà redevables en France des prélèvements sociaux dans la mesure où les salariés relèvent en général d’un régime français de sécurité sociale.

À cet effet, le Centre national des firmes étrangères (CNFE) a déjà pour mission d’informer et de guider les débiteurs étrangers dans leurs démarches. Ce débiteur a en outre la faculté de désigner un représentant fiscal.

c. L’exclusion des revenus de source étrangère ouvrant droit à un crédit d’impôt en application d’une convention fiscale internationale

Comme indiqué dans le tableau ci-dessus, les revenus couverts par un crédit d’impôt selon les modalités décrites précédemment sont toutefois maintenus hors du champ du PAS.

Le fait de soumettre à acompte des revenus dont l’imposition est par la suite potentiellement effacée par le biais du crédit d’impôt implique en effet à la fois une lourdeur de gestion et un effort de trésorerie inutile pour les redevables.

F. LE CALCUL DU PRÉLÈVEMENT

Le prélèvement à la source, qu’il soit réalisé au travers d’une retenue à la source ou par le versement d’un acompte contemporain, serait calculé selon les modalités définies à l’article 204 E nouveau du CGI (alinéas 10 à 12 du présent article).

Aux termes du premier alinéa de cet article (alinéa 10 du présent article), le montant du prélèvement dû est obtenu en appliquant aux revenus inclus dans le champ de la réforme le taux d’imposition calculé selon les modalités prévues par la réforme, à l’article 204 H nouveau du CGI ou, en cas de changement de situation devant être déclaré, à l’article 204 I.

L’assiette du prélèvement est déterminée selon les modalités définies à l’article 204 F nouveau s’agissant des revenus soumis à retenue à la source et à l’article 204 G nouveau s’agissant des revenus soumis à l’acompte contemporain.

Sont également prévues les possibilités de moduler le prélèvement, en renvoyant à l’article 204 J nouveau la définition des modalités de modulation, et d’opter pour une individualisation du taux au sein d’un couple, ainsi que le permet l’article 204 M nouveau du CGI.

Il est renvoyé aux commentaires de chacun de ces aspects pour les détails des différents dispositifs prévus :

– pour la détermination de l’assiette du prélèvement à la source, Cf. infra, II ;

– pour la détermination du taux du prélèvement à la source :

• pour le taux propre au foyer, Cf. infra, III, A ;

• pour la grille de taux par défaut, sa présentation et son option, Cf. infra, III, C et D ;

• pour les changements de situation, Cf. infra, IV ;

– pour la modulation du prélèvement, cf infra, V ;

– pour l’individualisation du taux, cf infra, VII.

II. LA DÉFINITION DE L’ASSIETTE DU PRÉLÈVEMENT

Texte du projet de loi (alinéas 13 à 24) :

ASSIETTE DU PRÉLÈVEMENT

(13) « Art. 204 F. – L’assiette de la retenue à la source prévue au 1° du 2 de l’article 204 A sur les revenus mentionnés à l’article 204 B est constituée du montant net imposable à l’impôt sur le revenu des sommes versées et des avantages accordés, avant application du 3° de l’article 83 et des deuxième et troisième alinéas du a du 5 de l’article 158.

(14) « Art. 204 G. – 1. L’assiette de l’acompte prévu au 2° du 2 de l’article 204 A dû au titre des revenus mentionnés à l’article 204 C est constituée du montant des bénéfices ou revenus imposés au barème progressif de l’impôt sur le revenu la dernière année pour laquelle l’impôt a été établi à la date du versement prévu au 1 de l’article 1663 C.

(15) « 2. Elle est déterminée pour chaque catégorie de bénéfice ou revenu et pour chaque membre du foyer fiscal dans les conditions suivantes :

(16) « 1° Pour les bénéfices industriels et commerciaux est retenu le bénéfice net mentionné au 1 de l’article 38, diminué du report déficitaire appliqué conformément aux 1° bis et 1° ter du I de l’article 156. Lorsque les bénéfices industriels et commerciaux sont déterminés selon le régime d’imposition défini à l’article 500 ou lorsqu’au titre de la dernière année mentionnée au premier alinéa du 1, le contribuable a été imposé selon les dispositions de l’article 1510 et qu’au titre de l’année en cours, il a dénoncé son option pour ce régime, le bénéfice à retenir s’entend du résultat imposable déterminé dans les conditions prévues à l’article 500 ;

(17) « 2° Pour les bénéfices agricoles déterminés selon un régime réel d’imposition est retenu le bénéfice réel mentionné à l’article 72, diminué du report déficitaire appliqué conformément au 1° du I de l’article 156 et en faisant application, le cas échéant, des dispositions de l’article 750 A. Lorsque les bénéfices agricoles sont déterminés selon le régime d’imposition défini à l’article 64 bis ou conformément à l’article 750 B, le bénéfice à retenir s’entend du résultat imposable déterminé dans les conditions prévues à ces articles ;

(18) « 3° Pour les bénéfices non commerciaux est retenu le bénéfice mentionné à l’article 93, diminué du report déficitaire appliqué conformément au 2° du I de l’article 156. Lorsque les bénéfices non commerciaux sont déterminés selon le régime d’imposition défini à l’article 102 ter ou en faisant application de l’article 100 bis, le bénéfice à retenir s’entend du résultat imposable déterminé dans les conditions prévues à ces articles. Lorsqu’au titre de la dernière année mentionnée au premier alinéa du 1, le contribuable a été imposé selon les dispositions de l’article 1510 et qu’au titre de l’année en cours, il a dénoncé son option pour ce régime, le bénéfice à retenir s’entend du résultat imposable déterminé dans les conditions prévues à l’article 102 ter ;

(19) « 4° Pour les revenus fonciers est retenu le revenu net, déterminé dans les conditions prévues aux articles 14 à 33 quinquies, sous déduction des déficits fonciers imputables conformément au 3° du I de l’article 156 ;

(20) « 5° Pour les pensions alimentaires, les rentes viagères à titre onéreux ainsi que les revenus de source étrangère est retenu le montant net imposable à l’impôt sur le revenu ;

(21) « 6° Les bénéfices mentionnés aux 1° à 3° sont déterminés après application des abattements prévus aux articles 44 sexies à 44 quindecies applicables au titre de l’année de paiement de l’acompte ;

(22) « 7° Les revenus mentionnés aux 1° à 5° auxquels se sont appliquées les dispositions de l’article 163-0 A ainsi que les produits ou recettes imposables ayant la nature de plusvalues définies à l’article 39 duodecies, les subventions d’équipement, les indemnités d’assurance compensant la perte d’un élément de l’actif immobilisé et les charges ou dépenses ayant la nature de moinsvalues définies à l’article 39 duodecies ne sont pas retenus dans l’assiette de l’acompte.

(23) « 3. Lorsque le résultat de l’une des catégories de revenus mentionnées aux 1° à 5° du 2 est déficitaire, il est retenu pour une valeur nulle.

(24) « 4. Si l’un des bénéfices mentionnés aux 1° à 3° du 2 de l’année mentionnée au 1 est afférent à une période de moins de douze mois, il est ajusté prorata temporis sur une année.

*

* *

L’assiette du prélèvement à la source est définie par l’article 204 F nouveau du CGI, pour les revenus soumis à la retenue à la source, et par l’article 204 G, pour ceux relevant de l’acompte.

A. POUR LES REVENUS SOUMIS À LA RETENUE À LA SOURCE

● Aux termes de l’article 204 F du CGI (alinéa 13), l’assiette de la retenue à la source applicable aux revenus mentionnés à l’article 204 B serait constituée du montant net imposable des sommes versées et des avantages accordés, avant application de la déduction au titre des frais professionnels prévue par le 3° de l’article 83 du même code, pour les salaires, ainsi que de l’abattement de 10 % pratiqué sur les pensions sur le fondement des deuxième et troisième alinéas du a du 5 de l’article 158 du même code.

Dans la généralité des cas, le montant net imposable des salaires ou des pensions est égal au montant brut versé après déduction des cotisations sociales ainsi que de la part déductible de la CSG (33), et après déduction des frais professionnels ou de l’abattement sur les pensions.

En l’espèce, l’assiette de la retenue à la source correspondrait à ce montant net imposable des revenus, mais avant l’application de la déduction ou de l’abattement.

Pour mémoire, la déduction au titre des frais professionnels peut prendre la forme soit d’une déduction forfaitaire de 10 %, avec un montant minimum de 426 euros et un plafond égal à 12 170 euros (pour l’imposition des revenus de 2015), soit d’une déduction des frais réels, qui doivent être justifiés. S’agissant des pensions, toutes les pensions imposables ainsi que les rentes viagères à titre gratuit bénéficient d’un abattement de 10 %, dont le montant ne peut être inférieur à 379 euros ni excéder 3 711 euros (pour l’imposition des revenus de 2015).

L’absence de prise en compte de ces déductions et abattement pour l’application de la retenue à la source répondrait au besoin de retenir une assiette simple et connue du collecteur – les frais réels qui peuvent être déduits n’étant connus, par construction, que du bénéficiaire des revenus, tandis que la déduction et l’abattement forfaitaires sont plafonnés à un certain montant, ce qui imposerait au collecteur de prendre en compte les effets de ce plafonnement pour le calcul de la retenue à la source.

Par ailleurs, l’absence de prise en compte de ces déductions et abattement serait neutralisée par le fait que le taux de retenue à la source est calculé de la même façon, en ramenant l’impôt dû par le contribuable aux revenus avant déductions et abattement (Cf. infra, III). Ce mode d’évaluation de l’assiette n’occasionnerait donc aucun « surprélèvement », comme cela a pu être évoqué à tort par certains articles de presse.

● L’assiette de la retenue à la source correspondrait au montant net imposable des revenus, ce qui signifie également que ne seraient pas pris en compte les revenus partiellement ou totalement exonérés en application des dispositions en vigueur.

Si l’énumération des différents cas d’exonération des revenus imposés selon les règles applicables aux traitements et salaires dépasse largement l’objet du présent commentaire, il convient d’en rappeler quelques exemples, à titre d’illustration :

– les salaires versés aux apprentis et les indemnités de stage sont exonérés d’impôt sur le revenu, dans la limite du montant annuel du SMIC (article 81 bis du CGI) ;

– les indemnités de licenciement, de départ à la retraite et de rupture conventionnelle sont exonérées à hauteur de certains plafonds, en fonction de différents paramètres (rémunération du salarié, montant de l’indemnité de licenciement prévu par la convention collective…) (article 80 duodecies) ;

– les indemnités journalières versées par les organismes de sécurité sociale sont exonérées en totalité en cas de maladie longue et coûteuse, et à hauteur de 50 % de leur montant en cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle (articles 80 quinquies et 81) ;

– une partie de la rémunération des « impatriés » (la prime d’impatriation, notamment) est exonérée d’impôt sur le revenu (article 155 B) ;

– les sommes versées au titre de la participation et de l’intéressement réinvesties dans des plans d’épargne salariale (dans la limite de la moitié du plafond annuel de la sécurité sociale, s’agissant de l’intéressement) sont exonérées d’impôt sur le revenu ;

Ces différentes règles devront nécessairement être prises en compte par le tiers payeur de la retenue à la source, pour déterminer l’assiette à laquelle appliquer le taux de prélèvement du contribuable.

B. POUR LES REVENUS RELEVANT DE L’ACOMPTE

L’assiette de l’acompte contemporain est constituée des revenus soumis à ce régime de prélèvement, définis au 2° du 2 du nouvel article 204 A. Ses modalités de détermination sont prévues au nouvel article 204 G du CGI :

– son 1 précise la temporalité de l’assiette, qui est ancienne (alinéa 14 du présent article) ;

– son 2 définit les revenus imposables à prendre en compte (alinéas 15 à 22 du présent article) ;

– ses 3 et 4 apportent des précisions sur la prise en compte de cas particuliers (déficits et revenus afférents à une période inférieure à douze mois) (alinéas 23 et 24 du présent article).

1. Les revenus imposables pris en compte dans l’assiette de l’acompte

Le prélèvement à la source ne modifie pas, au regard du droit actuel, les modalités de détermination des revenus auxquels il s’applique : il s’agit d’une réforme ne touchant que les modalités de paiement de l’impôt. Les revenus imposables relevant de l’acompte seront donc présentés relativement succinctement dans les développements qui suivent.

a. Le revenu imposable des indépendants (BIC, BA et BNC)

Les BIC, BA et BNC sont déclarés par près de 7 % des 36,1 millions de foyers fiscaux français et par 9 % des 17,5 millions de foyers imposables. Leur masse représente 5,5 % de l’assiette des revenus soumis à l’impôt sur le revenu, soit 53 milliards d’euros environ sur un total de 960 milliards d’euros. Enfin, les recettes fiscales tirées de ces revenus, de 9,2 milliards d’euros, correspondent à 11,2 % du montant brut des recettes de l’impôt sur le revenu (81 milliards d’euros toutes catégories de revenus confondues). Le tableau suivant illustre le poids des revenus des travailleurs indépendants dans l’impôt sur le revenu français.

POIDS DES REVENUS DES TRAVAILLEURS INDÉPENDANTS DANS L’IMPÔT SUR LE REVENU

(en milliards d’euros et en millions de foyers fiscaux)

Revenus

Assiette

% Assiette IR totale

Impôt brut

% IR brut total

Foyers fiscaux (arrondi)

BIC

14,5

1,5 %

1,7

2,1 %

1,3

BNC

33,0

3,4 %

6,7

8,3 %

0,8

BA

5,3

0,6 %

0,7

0,9 %

0,4

Total

52,8

5,5 %

9,1

11,2 %

2,4

Source : évaluation préalable.

i. La détermination des BIC

Le 1° du 2 de l’article 204 G (alinéa 16), relatif aux BIC, dispose qu’est pris en compte le bénéfice net prévu au 1 de l’article 38 du CGI, après imputation, le cas échéant, du report déficitaire, et distingue la situation du contribuable selon qu’il relève du régime réel ou du régime micro-BIC.

Aux termes du 1 de l’article 38 du CGI, le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l’actif net à la clôture et à l’ouverture de la période dont les résultats servent de base à l’impôt.

La période servant de base à l’impôt, en vertu de l’article 36 du CGI, correspond à l’année civile si l’exercice coïncide avec cette dernière, ou à une période de douze mois dans le cas contraire. Par exemple, dans l’hypothèse d’un exercice clos le 30 juin N, les résultats servant de base à l’impôt sont ceux de l’exercice courant du 1er juillet N − 1 au 30 juin N.

En l’absence de bilan, la période à prendre en compte est celle courant depuis la fin de la dernière période imposée jusqu’au 31 décembre de l’année considérée. Ainsi, toujours dans l’hypothèse d’un exercice habituellement clos le 30 juin, l’imposition au titre de l’année N porterait sur les bénéfices réalisés entre le 1er juillet N − 1 et le 31 décembre N. Le bénéfice provisoire ainsi imposé viendrait ensuite en déduction des résultats du bilan de l’exercice auquel il se rattache.

La différence des valeurs de l’actif net est, le cas échéant, diminuée des suppléments d’apports réalisés par l’exploitant ou les associés, et accrue des prélèvements que ces derniers auraient pu faire.

Doivent également être prises en compte, pour la détermination du bénéfice imposable au titre des BIC, les rectifications extracomptables : réintégrations, qui s’ajoutent au résultat comptable, et déductions, qui en sont retranchées.

ii. La détermination des bénéfices agricoles

Le 2° du 2 de l’article 204 G (alinéa 17), relatif aux BA, renvoie aux modalités de détermination actuelles de cette catégorie de revenu.

En application du premier alinéa de l’article 72 du CGI, les bénéfices imposables au titre du régime réel des BA suivent, pour leur détermination, les règles du régime réel des BIC.

Cependant, sont prévues des adaptations justifiées par les contraintes et caractéristiques propres à la production agricole, telles qu’un niveau de chiffre d’affaires faible au regard du capital investi, une proportion élevée d’éléments non amortissables dans le bilan ou encore une forte irrégularité des revenus. Ainsi, et à titre d’exemples sont prévues des déductions spéciales pour investissement et pour aléas (34).

En outre, aux termes de l’article 75-0 A du CGI, un exploitant agricole soumis au régime réel d’imposition dispose de la faculté de rattacher son revenu exceptionnel à l’exercice de sa réalisation et aux six exercices suivants. Pour déterminer le bénéfice agricole imposable au titre d’une année comprise dans cette période, est prise en compte une fraction de ce revenu exceptionnel (1/7 du total).

Enfin, pour atténuer les effets de la progressivité de l’impôt et intégrer la volatilité des revenus agricoles, l’article 75-0 B permet aux exploitants soumis à un régime réel d’imposition d’opter pour que le bénéfice imposable au titre d’une année N corresponde à la moyenne des bénéfices de l’année d’imposition et des deux années précédentes (N − 2 et N − 1) (35). L’option est valable au titre de l’année au cours de laquelle elle est exercée. Elle doit être exercée dans le délai de déclaration du résultat du premier exercice auquel elle s’applique (elle peut être jointe à la déclaration de résultat). Cette option est valable cinq ans et est tacitement reconduite par période de cinq ans. Elle ne peut être dénoncée que dans le délai de dépôt de la déclaration des résultats du dernier exercice de la période quinquennale. En cas de dénonciation, l’exploitant ne peut à nouveau opter pour le dispositif de la moyenne triennale avant cinq ans. Dans le cadre de ce dispositif, il n’est pas tenu compte des reports déficitaires : le déficit est pris en compte au titre de l’année au cours duquel il est dégagé. Par exemple, si les résultats entre N – 2 et N sont, respectivement, de 7 000 euros, 20 000 euros et un déficit de 18 000 euros, l’imposition en N sera de 3 000 ([7 000 + 20 000–18 000] / 3).

iii. La détermination des BNC

Le 3° du 2 de l’article 204 G (alinéa 18), quant à lui, renvoie aux modalités de détermination des BNC prévues par le CGI.

En application de l’article 93 du CGI, le bénéfice à retenir dans le cadre du régime des BNC est constitué de l’excédent des recettes totales sur les dépenses rendues nécessaires par l’exercice de la profession considérée, sur une année civile. Parmi ces dépenses figurent notamment le loyer des locaux professionnels, les amortissements ou encore les dépenses engagées aux fins d’obtention d’un diplôme.

La détermination du bénéfice obéit aux règles de comptabilité de caisse, et non d’engagement : seules les recettes effectivement encaissées et les dettes payées sont prises en compte. Toutefois, le contribuable peut opter pour le régime de la déclaration contrôlée, dans lequel sont comptées les créances acquises et les dépenses engagées (comme en matière de BIC).

Enfin, l’article 100 bis du CGI prévoit, pour les BNC tirés de la production littéraire, scientifique, artistique ou provenant d’une activité sportive, et sur option du contribuable, que le bénéfice imposable est établi en procédant à la différence entre la moyenne des recettes de l’année d’imposition et des deux années précédentes et la moyenne des dépenses sur la même période.

iv. Les régimes « micro »

Lorsque le chiffre d’affaires réalisé au titre d’une activité relevant des BIC, des BNC et, depuis la loi de finances rectificative pour 2015 (36), des BA, n’excède pas un certain montant, le contribuable est soumis à un régime « micro » (micro-BIC, micro-BNC et micro-BA). Il peut néanmoins choisir d’opter pour le régime réel précédemment décrit.

Le bénéfice imposable dans le cadre des régimes « micro » est égal au chiffre d’affaires diminué d’un abattement. Le tableau suivant présente, pour chacun de ces régimes, les modalités d’établissement du bénéfice imposable.

RÉGIMES MICRO-BIC, MICRO-BA ET MICRO-BNC

Régime

Fondement (article CGI)

Bénéfice
concerné

Plafond de recettes

Abattement

Assiette imposable

Micro-BIC

50-0

Ventes / fourniture de logement

82 200 euros (1)

71 %

29 % du CA HT

Micro-BIC

50-0

Autres activités commerciales

32 900 euros (2)

50 %

50 % du CA HT

Micro-BA

64 bis

Revenus agricoles

82 200 euros
(moyenne triennale des recettes)

87 %

13 % de la moyenne triennale des recettes

Micro-BNC

102 ter

Revenus non commerciaux

32 900 euros

34 %

66° % du CA HT

CA HT : chiffre d’affaires hors taxes.

(1) 90 300 euros si les recettes de la pénultième année n’excèdent pas le plafond de 82 200 euros.

(2) 34 900 euros si les recettes de la pénultième année n’excèdent pas le plafond de 32 900 euros.

v. La prise en compte d’abattements applicables l’année de paiement de l’acompte

En application du 6° de l’article 204 G (alinéa 21), les BIC, BNC et BA sont déterminés après application des abattements prévus aux articles 44 sexies à 44 quindecies du CGI applicables au titre de l’année de paiement de l’acompte.

Les articles 44 sexies à 44 quindecies prévoient des avantages fiscaux pour certaines entreprises, qui peuvent être imposées à l’IR, en fonction de leur nature ou de leur lieu d’implantation :

– les jeunes entreprises innovantes (JEI) définies à l’article 44 sexies-0 A du CGI, en application de l’article 44 sexies A du même code ;

– les entreprises qui se créent dans les zones d’aides à finalité régionale (ZAFR), en application de l’article 44 sexies du CGI ;

– les entreprises créées pour reprendre une entreprise industrielle en difficulté, en application de l’article 44 septies du CGI ;

– les entreprises qui exercent une activité ou se créent dans les zones franches urbaines – territoires entrepreneurs (ZFU-TE), y compris les PME qui emploient au plus cinquante personnes et dont le chiffre d’affaires n’excède pas 10 millions d’euros, en application des articles 44 octies et 44 octies A du CGI ;

– les entreprises de pêche maritime, en application de l’article 44 nonies du CGI ;

– les entreprises implantées dans les bassins d’emploi à redynamiser, en application de l’article 44 duodecies du CGI ;

– les entreprises créées dans les zones de restructuration de la défense (ZRD), en application de l’article 44 terdecies du CGI ;

– les PME créées dans les zones franches d’activités des départements d’outre-mer (ZFADOM), en application de l’article 44 quaterdecies du CGI ;

– enfin, les entreprises créées dans les zones de revitalisation rurale (ZRR) qui emploient moins de onze salariés, ont leur siège social dans la zone ou y réalisent au moins 75 % de leur chiffre d’affaires et satisfont à des conditions de création et de détention de capital, en application de l’article 44 quindecies du CGI.

Ces avantages fiscaux exonèrent totalement ou partiellement les entreprises éligibles, de façon généralement décroissante. À titre d’exemple, l’article 44 sexies prévoit une exonération totale d’impôt pour les vingt-quatre premiers mois d’activité, puis un abattement de 75 %, 50 % et 25 % sur les bénéfices réalisés respectivement la troisième, la quatrième et la cinquième année d’activité.

Grâce à ce mécanisme, même si l’assiette de l’acompte est ancienne et retient des bénéfices réalisés en N − 2 et N − 1 (Cf. infra, 2), les abattements applicables l’année N seraient pris en compte pour sa détermination, évitant au contribuable de supporter une surimposition cette année-là.

L’imputation et le report des déficits catégoriels
des BIC, BA, BNC et revenus fonciers

Aux termes du premier alinéa du I de l’article 156 du CGI, les déficits catégoriels peuvent être imputés sur le revenu global du contribuable pour permettre une compensation d’ensemble des résultats bénéficiaires et déficitaires obtenus dans les différentes catégories de revenus.

Si le revenu global n’est pas suffisant pour absorber l’intégralité du déficit, l’excédent de ce dernier est reportable sur le revenu des six années suivantes.

Ce principe connaît toutefois des nuances au travers de la « tunnelisation » de certains déficits catégoriels :

– pour les BIC, les déficits d’activités commerciales à caractère non professionnel (1) ne sont pas déductibles du revenu global ; ils ne peuvent qu’être imputés sur les bénéfices tirés d’activités semblables durant la même année ou les six années suivantes (1° bis du I de l’article 156). Les déficits liés à la location d’un logement meublé, quant à eux, ne peuvent être imputés que sur les bénéfices de même nature réalisés la même année ou les dix années suivantes (1° ter du I de l’article 156) ;

– pour les BA, les déficits agricoles ne peuvent venir en déduction du revenu global que lorsque le total des revenus nets d’autres catégories dont dispose le contribuable n’excède pas un seuil (de 107 718 euros pour l’imposition des revenus de 2015). Si ce seuil est franchi, les déficits agricoles ne pourraient s’imputer que sur des bénéfices de même nature (1° du I de l’article 156) ;

– pour les BNC, les déficits provenant d’une activité non commerciale au sens de l’article 92 du CGI, autres que ceux provenant de l’exercice d’une profession libérale ou des charges et offices, ne sont pas déductibles du revenu global du contribuable ; là encore, ils ne peuvent qu’être imputés sur les bénéfices tirés d’activités semblables durant la même année ou les six années suivantes (2° du I de l’article 156) ;

– pour les revenus fonciers, les déficits fonciers ne peuvent être imputés que sur les revenus fonciers des dix années suivantes ; toutefois, il est possible d’imputer sur le revenu global le déficit foncier résultant des dépenses autres que les intérêts d’emprunt dans la limite de 10 700 euros ; par ailleurs, les déficits fonciers supportés par les propriétaires de monuments historiques générant des revenus peuvent être imputés sur le revenu global sans limitation de montant (3° du I de l’article 156).

Le tableau qui suit synthétise ces hypothèses particulières, lorsque les déficits catégoriels ne peuvent être imputés sur le revenu global.

(1) Le caractère non professionnel de l’activité suppose l’absence de participation personnelle, directe et continue d’un membre du foyer fiscal.

IMPUTATION DES DÉFICITS CATÉGORIELS NON IMPUTABLES SUR LE REVENU GLOBAL

Catégorie de revenu

Base légale
(article 156 CGI)

Déficit déductible

Bénéfice d’imputation

Durée d’imputation

BIC

1° bis du I

Déficit non professionnel

Bénéfice non professionnel

N + 6 années

1° ter du I

Déficit de la location d’un logement meublé

Bénéfice de la location d’un logement meublé

N + 10 années

BA

1° du I

Déficit agricole

Bénéfice agricole si les autres revenus excèdent 107 718 euros

N + 6 années

BNC

2° du I

Déficit d’une acticité non professionnelle ou non libérale

Bénéfice d’une activité non professionnelle ou non libérale

N + 6 années

Revenus fonciers

3° du I

Déficit foncier

Revenu foncier

10 années suivantes

b. Les revenus fonciers

Les alinéas 8 et 14 du présent article prévoient que les revenus fonciers entreraient dans le champ du PAS.

Compte tenu de leur mode de perception, en général directement par le propriétaire, ils entrent logiquement dans la catégorie des revenus dont le PAS serait prélevé sous la forme d’un acompte.

Les principaux chiffres

Les revenus fonciers sont déclarés par près de 13 % de l’ensemble des 36,1 millions de foyers fiscaux (soit 4,6 millions de foyers).

Ils représentent une assiette de 31,2 milliards d’euros, soit 3,3 % de l’assiette totale de l’impôt sur le revenu (960 milliards d’euros). L’assiette nette est répartie entre le régime micro-foncier (5,5 milliards d’euros) et le régime réel (25,7 milliards d’euros).

Près de 82 % des titulaires de revenus fonciers déclarent des revenus nets fonciers inférieurs à 10 000 euros. Sur les 4,6 millions de foyers déclarant des revenus fonciers, environ 82 % déclarent par ailleurs des revenus strictement positifs.

Le produit de l’IR sur les revenus fonciers représente 4,5 milliards d’euros, auquel il faut ajouter 5,2 milliards d’euros au titre des prélèvements sociaux, soit un produit total de 9,7 milliards d’euros.

Ce produit est réparti entre le régime au réel (4,2 milliards d’euros de produit) et le régime micro-foncier (0,3 milliard d’euros).

Pour 1,5 % des 17,5 millions de foyers imposables (soit 250 000 personnes), les revenus fonciers constituent les revenus majoritaires.

• L’opportunité de soumettre les revenus fonciers au PAS par le biais du versement d’un acompte

Le fait de soumettre au champ de la présente réforme les revenus fonciers ne va pas de soi. Les revenus fonciers peuvent en effet présenter une certaine irrégularité (absence de revenus entre deux locations, imputation des charges par nature irrégulière en particulier en cas de réalisation de travaux).

Cet élément est d’ailleurs mis en évidence par l’évaluation préalable du présent article.

Extrait de l’évaluation préalable : l’irrégularité des revenus fonciers

Sur près de 4,8 millions de foyers titulaires de revenus fonciers suivis entre les années 2014 et 2015 et ayant effectivement déclaré des revenus fonciers :

– environ 34 % d’entre eux, soit 1,6 million de foyers environ, ont vu ces revenus diminuer entre ces deux années, la baisse médiane étant de 17,8 %, dont environ 0,8 million ont vu ces revenus diminuer de plus de 30 % ;

– environ 44 % d’entre eux, soit 2,1 millions de foyers environ, ont vu ces revenus augmenter entre ces deux années, dont environ 1,1 million ont vu ces revenus augmenter de plus de 30 %.

Sur près de 3,6 millions de foyers imposables titulaires de revenus fonciers suivis entre les années 2014 et 2015 et ayant effectivement déclaré au moins l’un de ces revenus (positif ou négatif) au titre de l’une des deux années :

– environ 33 % d’entre eux, soit 1,2 million de foyers environ, ont vu ces revenus diminuer entre ces deux années, dont environ 0,5 million ont vu ces revenus diminuer de plus de 30 % ;

– environ 45 % d’entre eux, soit 1,6 million de foyers environ, ont vu ces revenus augmenter entre ces deux années, dont environ 0,8 million ont vu ces revenus augmenter de plus de 30 %.

Selon le Gouvernement, le mode de formation des revenus fonciers est donc proche de celui des indépendants, ce qui justifie qu’ils fassent l’objet d’un prélèvement à la source « par souci de cohérence globale » et dans un souci de lisibilité globale de la réforme.

S’agissant de l’éventualité d’un maintien du dispositif en vigueur, c’est-à-dire un paiement en année N + 1 avec paiement des tiers provisionnels et une option possible pour la mensualisation, l’évaluation préalable évoque une trop grande complexité, voire une illisibilité (coexistence en année N de tiers provisionnels ou de mensualité avec les prélèvements au titre du PAS).

Une imposition complète en année N + 1 aurait par ailleurs un effet « régressif pour le contribuable » et pèserait sur la trésorerie de l’État.

Deux options ont donc été étudiées et écartées par le Gouvernement :

– la mise en œuvre d’un acompte contemporain calculé par le contribuable lui-même sur la base de ses revenus fonciers de l’année en cours ;

– une majoration du prélèvement contemporain auquel le redevable est soumis au titre de la part dominante de ses revenus.

• L’assiette de l’acompte contemporain sur les revenus fonciers

L’assiette du prélèvement contemporain sur les revenus fonciers serait pour l’essentiel déterminée selon les mêmes modalités que les revenus de la catégorie des BIC, BNC et BA soumis à ce même acompte.

En pratique, il serait donc calculé sur la base des dernières informations disponibles, c’est-à-dire les informations de l’année N − 2 pour l’acompte prélevé entre janvier et août de l’année N et de l’année N – 1 pour le reste de l’année N.

Dans le détail, le revenu net foncier retenu pour l’assiette de l’acompte serait déterminé dans les conditions de droit commun, c’est-à-dire sous déduction des charges visées aux articles 14 à 33 quinquies du CGI comprenant :

– les primes d’assurance ;

– les dépenses supportées pour le compte du locataire ;

– les provisions pour dépenses prévues par la copropriété ;

– les dépenses d’amélioration ;

– les frais spécifiques pris en compte au titre du régime des monuments historiques (frais d’adhésion à des associations foncières, frais de démolition imposés par le permis de construire, les travaux de reconstitution de la toiture ou des murs extérieurs) ;

– les impositions de toute nature incombant au propriétaire à raison des propriétés ;

– les intérêts des dettes contractés pour la conservation, la construction, l’acquisition, la réparation ou l’amélioration de la propriété ;

– les frais de gestion ;

– les dépenses de fonctionnement des fonds de placement immobilier ;

– les amortissements et déductions spécifiques aux dispositifs d’investissement locatif (« Périssol », « Robien, « Borloo ») ;

– certaines dépenses spécifiques aux propriétés rurales.

Dans le cadre du régime micro-foncier déterminé par l’article 32 du CGI, applicables aux redevables dont le revenu foncier brut annuel est inférieur à 15 000 euros, un abattement forfaitaire de 30 % est appliqué afin de prendre en compte l’ensemble de ces charges.

Conformément aux alinéas 19 et 23, les revenus fonciers nets seraient déterminés après imputation du report déficitaire que le contribuable peut pratiquer en application du 3° de l’article 156 du CGI.

Toutefois, lorsque les revenus fonciers sont déficitaires au titre de l’année du prélèvement à la source, ce déficit est retenu pour une valeur nulle pour l’application du PAS.

L’exemple ci-dessous montre en effet que le déficit foncier du redevable est pris en compte dans le calcul du taux. En le prenant en compte également dans l’assiette, il serait d’une certaine manière pris en compte deux fois.

Exemple

Soit un contribuable célibataire qui exerce une activité commerciale à titre professionnel et qui est titulaire des revenus fonciers. Il déclare :

– au titre de l’année N − 2, un BIC de 31 700 euros et un déficit foncier de 20 000 euros ; ce déficit provenant de dépenses autres que les intérêts d’emprunt s’impute à hauteur de 10 700 euros sur le BIC du contribuable, la fraction non imputée sur les autres revenus (9 300 euros) étant reportable et imputable sur les revenus fonciers des dix années suivantes ;

– au titre de l’année N − 1, un BIC de 25 300 euros et un revenu net foncier de 10 000 euros avant imputation du report déficitaire et de 700 euros après imputation du déficit reportable de 9 300 euros de l’année N − 2.

Le montant d’impôt sur le revenu dû au titre des années N − 2 et N − 1 est respectivement de 1 582 euros et 2 282 euros (barème de l’année 2015).

Au cours de l’année N, le taux de prélèvement à la source serait de :

– 5 % (1 582 / [31 700 + 0]) de janvier à août ;

– 8,8 % (2 282 / [25 300 + 700]) de septembre à décembre.

Au titre de l’année N, l’assiette de l’acompte contemporain serait de :

– 0 euro au titre des revenus fonciers et de 31 700 euros au titre des BIC entre janvier et août ;

– 700 euros (soit 10 000 – 9 700) au titre des revenus fonciers et de 25 300 euros au titre des BIC entre septembre et décembre de l’année N.

Le montant mensuel de l’acompte contemporain dû au cours de l’année N serait donc de :

– 132 euros (31 700 × 5 % / 12) entre janvier et août ;

– 191 euros ([25 300 + 700] × 8,8 % / 12) entre septembre et décembre.

c. Les pensions alimentaires

L’alinéa 20 prévoit que l’assiette de l’acompte contemporain comprend également les pensions alimentaires perçues par le redevable.

Conformément aux articles 205 à 207 du code civil, l’obligation alimentaire réciproque lie les ascendants et les descendants mais aussi le gendre ou la belle-fille et son beau-père ou sa belle-mère.

En cas d’adoption simple, l’article 367 du code civil prévoit une obligation alimentaire réciproque entre l’adoptant et l’adopté.

Le code civil prévoit par ailleurs la mise en œuvre de dispositions particulières destinées à faire bénéficier des personnes déterminées soit de pensions alimentaires, soit d’autres prestations, en cas de divorce ou de séparation de corps.

Du point de vue fiscal, le 2° du II de l’article 156 du CGI prévoit que ces pensions alimentaires sont, sous certaines conditions, déductibles du revenu global.

La prise en compte des pensions alimentaires dans le champ du PAS est une option qui peut être discutée. En effet, en pratique, les personnes ne perçoivent ces pensions que de manière très irrégulière, l’acompte contemporain étant, pour sa part, déterminé en année N − 2 ou N − 1.

Selon l’évaluation préalable de cet article, les pensions alimentaires représentent une assiette de 4,8 milliards d’euros. Elles sont perçues par 1,4 million de foyers, dont 347 000 sont imposables. Le produit d’IR correspondant s’élève à 100 millions d’euros.

Cette étude explicite les raisons techniques pour lesquelles ces pensions ne seraient pas soumises au régime de la retenue à la source, mais au régime de l’acompte : relations entre particuliers, situations parfois conflictuelles, absence de tiers collecteur.

Elle ne justifie toutefois pas les raisons pour lesquelles ces revenus n’auraient pu être maintenus hors du champ du PAS.

d. Les rentes viagères à titre onéreux

Une rente viagère à titre onéreux (RVTO) est une somme d’argent versée en application d’un contrat, de façon périodique, à un bénéficiaire jusqu’à son décès en contrepartie de la cession d’un bien ou d’un capital.

Sur le plan fiscal, les RVTO ne sont considérées comme un revenu, pour l’application de l’impôt sur le revenu dû par le bénéficiaire, que pour une fraction de leur montant.

Cette fraction, déterminée d’après l’âge du bénéficiaire lors de l’entrée en jouissance de la rente, est fixée à :

– 70 % si l’intéressé est âgé de moins de cinquante ans ;

– 50 % s’il est âgé de cinquante à cinquante-neuf ans ;

– 40 % s’il est âgé de soixante à soixante-neuf ans ;

– 30 % s’il est âgé de plus de soixante-neuf ans.

Au plan social, les RVTO sont assujetties aux prélèvements sociaux dus sur les revenus du patrimoine (au taux global de 15,5 %) qui sont recouvrés comme l’impôt sur le revenu.

Au titre des revenus de l’année 2015, environ 365 000 foyers ont déclaré des RVTO, pour une base imposable d’environ 366 millions d’euros, environ 246 000 d’entre eux, soit près de 68 %, étant imposables.

Au titre de cette même année, le montant brut moyen des RVTO perçues (avant abattement) par foyer fiscal par âge d’entrée en jouissance était le suivant :

– moins de cinquante ans : 3 323 euros ;

– de cinquante à cinquante-neuf ans : 1 633 euros ;

– de soixante à soixante-neuf ans : 2 588 euros ;

– à partir de soixante-dix ans : 2 689 euros.

L’évaluation préalable de l’article justifie l’application du PAS sous forme d’acompte par les difficultés techniques à les soumettre à une retenue à la source (absence de tiers collecteur).

e. L’exclusion de certains revenus ou charges de l’assiette de l’acompte

Certains revenus qui entrent dans le champ de l’article 204 C et qui devraient être pris en compte dans l’assiette de l’acompte contemporain en sont exclus, en application du 7° du 2 de l’article 204 G (alinéa 22 du présent article).

Il s’agit de revenus qui sont considérés comme exceptionnels, leur exclusion de l’assiette de l’acompte ayant pour effet de les soumettre à une imposition identique à celle actuellement en vigueur.

i. Revenus imposés selon le système du quotient

Les BIC, BNC, bénéfices agricoles, revenus fonciers, pensions alimentaires, RVTO et revenus de source étrangère versés par un débiteur établi hors de France, lorsqu’ils ont été imposés en application de l’article 163-0 A du CGI, sont exclus de l’assiette de l’acompte.

Cet article porte sur l’imposition selon le système dit « du quotient » pour des revenus par nature non susceptibles d’être recueillis annuellement (et donc exceptionnels).

L’imposition selon le système du quotient suppose quatre étapes :

– calcul de l’impôt sur le revenu ordinaire ;

– calcul de l’impôt sur le revenu ordinaire majoré du quotient. Ce quotient est obtenu en divisant le revenu exceptionnel par un coefficient, qui est de quatre (37) ;

– multiplication par ce même coefficient de la différence entre le montant de l’impôt sur le revenu ordinaire majoré du quotient et celui de l’impôt sur le seul revenu ordinaire. Ce produit permet d’obtenir la cotisation supplémentaire qui correspond au seul revenu exceptionnel ;

– enfin, addition du montant de l’impôt sur le revenu ordinaire et de la cotisation supplémentaire, pour obtenir le montant d’impôt finalement dû.

Ce dispositif permet d’atténuer les effets de la progressivité de l’impôt. Il s’applique sur option exercée par le contribuable.

ii. Autres revenus exceptionnels exclus de l’assiette de l’acompte

Ne sont pas non plus retenus pour la détermination de l’assiette de l’acompte contemporain les revenus suivants :

– les plus et moins-values à court ou long terme, définies à l’article 39 duodecies du CGI ;

– les subventions d’équipements ;

– les indemnités d’assurance qui visent à compenser la perte d’un élément d’actif immobilisé.

Du fait de la nature exceptionnelle de ces revenus, leur intégration dans l’assiette aurait conduit à une surimposition du contribuable (38).

2. Une assiette ancienne, semblable à celle actuellement retenue

Les revenus inclus dans le champ du prélèvement à la source mais ne relevant pas de la retenue à la source feraient l’objet d’un « acompte contemporain », versé selon une base mensuelle ou, sur option du contribuable, trimestrielle (Cf. infra, XI).

L’acompte est qualifié de contemporain dans la mesure où il servirait à payer l’impôt dû l’année de son versement. Le décalage actuel d’un an entre la perception du revenu et l’acquittement de l’impôt dû au titre de ce revenu serait ainsi supprimé, conformément à l’objectif général qui sous-tend la réforme du prélèvement à la source.

Le dispositif de l’acompte contemporain présente néanmoins une différence majeure avec la retenue à la source, résidant dans son assiette.

Alors que l’assiette de la retenue à la source est composée des revenus perçus au moment du paiement de l’impôt, celle de l’acompte est ancienne et correspond aux revenus perçus au cours des deux années qui précèdent ce paiement :

– entre janvier et août de l’année N, le contribuable verserait un acompte assis sur les revenus perçus en N − 2 ;

– entre septembre et décembre de l’année N, l’administration fiscale disposant des données relatives aux revenus perçus en N − 1 qui ont été déclarés au printemps de l’année N, l’acompte serait assis sur les revenus perçus en N − 1.

a. L’ancienneté de l’assiette de l’acompte limite la contemporanéité de l’imposition et certains avantages de la réforme

Assis sur les revenus perçus au cours des deux années précédant l’imposition et calculé sur la base d’un taux lui aussi fondé sur ces deux années (Cf. infra, III), l’acompte contemporain ne présente pas de changement manifeste au regard des modalités d’imposition en vigueur. Or, à la différence de la situation actuelle, dans laquelle les revenus perçus l’année N sont imposés l’année N + 1, le prélèvement à la source est censé imposer les revenus l’année de leur perception.

L’ancienneté de l’assiette empêcherait le contribuable relevant de l’acompte de bénéficier de l’effet assiette de la retenue à la source, qui conduit à ce que le montant d’impôt dû s’adapte automatiquement à l’évolution du revenu perçu.

Pour les contribuables relevant de l’acompte, la variation des revenus d’une année sur l’autre ou au cours de l’année d’imposition serait dépourvue d’effet sur le montant d’impôt dû, sauf recours au dispositif de modulation.

Or, ainsi que l’indique l’évaluation préalable du présent article et le tableau de synthèse suivant, les travailleurs indépendants connaissent souvent des variations de leur revenu d’une année sur l’autre.

NOMBRE DE FOYERS FISCAUX « INDÉPENDANTS »
CONNAISSANT DES VARIATIONS DE REVENUS

(en millions de foyers fiscaux)

Variation

Foyers fiscaux (total)

Foyers fiscaux imposables

Nombre (arrondi)

Pourcentage

Nombre (arrondi)

Pourcentage

Diminution (1)

1,2

45 %

0,7

41 %

Diminution supérieure à 30 %

0,7

26 %

0,3

18 %

Augmentation (2)

1,2

43 %

0,8

47 %

Augmentation supérieure à 30 %

0,7

26 %

0,5

29 %

(1) La diminution médiane est de 21,5 %.

(2) L’augmentation médiane est de 18,2 %.

i. L’absence de changement des modalités de calcul de l’impôt dans le régime de l’acompte

Le maintien du décalage temporel entre l’assiette de l’impôt et son paiement pourrait conduire à des situations préjudiciables pour la trésorerie des contribuables, ainsi que l’illustre l’exemple suivant.

Un contribuable marié perçoit des BIC d’un montant de 100 000 euros en N − 2 et de 120 000 euros en N − 1. Le taux d’imposition entre janvier et août de l’année N est de 18,7 %, celui entre septembre et décembre de 20,6 % (39).

Au titre de l’acompte contemporain, ce contribuable verserait :

– huit mensualités de 1 558 euros chacune (100 000 × 18,7 % / 12) ;

– quatre mensualités de 2 060 euros chacune (120 000 × 20,6 % / 12).

L’impôt total payé en N serait de 20 704 euros, indépendamment du montant des BIC effectivement perçus cette année-là.

IMPÔT ACQUITTÉ EN ANNÉE N AU TITRE DE REVENUS SOUMIS À L’ACOMPTE

(en euros)

Année

Revenu

Taux

Impôt correspondant

Mensualité

Nombre de mensualités

Montant dû

N − 2

100 000

18,7 %

18 700

1 558

8

12 464

N − 1

120 000

20,6 %

24 720

2 060

4

8 240

Impôt acquitté en N

20 704

Source : calculs de la commission des finances.

L’absence de prise en compte du revenu perçu l’année N pourrait conduire à une surcharge fiscale importante en N dans l’hypothèse d’une variation à la baisse entre N − 2 et N − 1, d’une part, et N, de l’autre, et à un complément d’IR substantiel en N + 1, lors du solde, dans l’hypothèse d’une variation à la hausse.

Si, l’année N, les BIC ont diminué et s’élèvent à 75 000 euros, le montant total d’impôt acquitté (20 704 euros) correspondrait à 27,6 % du revenu, alors que le taux d’imposition pour un revenu de ce montant est de 15 %.

Si les BIC ont augmenté et s’élèvent à 150 000 euros, l’impôt payé correspondrait à 13,8 % du revenu, alors que le taux d’imposition pour un tel revenu est de 22,9 %.

Dans le premier cas, le contribuable aurait versé en N un excédent de 9 454 euros, qu’il ne récupérerait qu’en septembre N + 1, lors du solde. L’impact du versement de cet excédent sur la trésorerie serait conséquent et risquerait de causer des difficultés au contribuable.

Dans le second cas, le contribuable aurait versé moins que ce que son revenu suppose, le conduisant, lors du solde en septembre N + 1, à devoir payer un complément de 13 646 euros qui s’ajouterait à l’acompte dû au titre de l’année N + 1.

Le tableau ci-après résume l’ampleur de la régularisation intervenant en septembre N + 1, lors du solde de l’IR dû au titre des revenus perçus en N.

RÉGULARISATION EN N + 1 DE L’IMPOSITION EN ANNÉE N
DE REVENUS SOUMIS À L’ACOMPTE

(en euros)

Revenu perçu
en N

Taux
d’imposition

Impôt dû
au titre de N

Impôt acquitté en N

Solde
(en N + 1)

75 000

15,0 %

11 250

20 704

–9 454

150 000

22,9 %

34 350

20 704

13 646

Les difficultés décrites ne sont pas dues à la mise en œuvre du prélèvement à la source. Elles existent déjà dans le droit en vigueur et sont une source de complexité dans la gestion courante de la trésorerie des contribuables français.

Néanmoins, leur persistance dans le cadre du prélèvement à la source est regrettable dans la mesure où l’objectif de la réforme est de rendre l’imposition réellement contemporaine de la perception des revenus, ce qui n’est pas le cas dans le cadre de l’acompte de droit commun, hors modulations.

Il est également regrettable que, pour les travailleurs indépendants, les titulaires de revenus fonciers, de pensions alimentaires, de RVTO et de revenus de source étrangère versés par un débiteur établi hors de France, l’imposition contemporaine des revenus ne se traduise pas par la prise en compte d’une assiette contemporaine.

ii. Une différence de situation patente par rapport au régime de la retenue à la source

Si les revenus précédemment indiqués relevaient non de l’acompte mais de la retenue à la source, les montants versés en année N seraient différents selon le montant du revenu perçu en raison de l’effet assiette de la retenue à la source, ainsi que l’illustre le tableau ci-dessous.

IMPÔT ACQUITTÉ EN ANNÉE N AU TITRE DE REVENUS
SOUMIS À LA RETENUE À LA SOURCE

(en euros)

Taux résultant des revenus N − 2 et N − 1

Nombre de mensualités

Revenu N de 75 000 euros

Revenu N de 150 000 euros

Impôt correspondant

Montant dû par rapport aux mensualités

Impôt correspondant

Montant dû par rapport aux mensualités

Taux N − 2

18,7 %

8

14 025

9 350

28 050

18 700

Taux N − 1

20,6 %

4

15 450

5 150

30 900

10 300

Impôt acquitté en N

 – 

14 500

 – 

29 000

Source : calculs de la commission des finances.

Dans le régime de la retenue à la source, le contribuable aurait acquitté en N, pour un revenu de 75 000 euros, un impôt de 14 500 euros, inférieur de 6 204 euros à celui versé par le contribuable soumis à l’acompte.

Si les revenus relevant de la retenue à la source perçus en N s’élèvent à 150 000 euros, l’impôt acquitté en N aurait été de 29 000 euros, réduisant de 8 293 euros le complément dû lors du solde, qui s’établirait à 5 350 euros.

RÉGULARISATION EN N + 1 DE L’IMPOSITION EN ANNÉE N
DE REVENUS SOUMIS À LA RETENUE À LA SOURCE

(en euros)

Revenu perçu
en N

Taux d’imposition

Impôt dû
au titre de N

Impôt acquitté
en N

Solde
(en N + 1)

75 000

15 %

11 250

14 500

– 3 250

150 000

22,9 %

34 350

29 000

5 350

Source : calculs de la commission des finances.

L’avantage de la contemporanéité de l’imposition en termes de trésorerie est patent dans l’hypothèse de la retenue à la source, là où il est nul dans le régime de l’acompte. Le tableau suivant synthétise les hypothèses précédemment développées en comparant directement les deux modalités de recouvrement, régies par des règles d’assiette distinctes.

COMPARAISON DE LA CHARGE FISCALE SELON QUE LE CONTRIBUABLE
RELÈVE DU RÉGIME DE L’ACOMPTE OU DE LA RETENUE À LA SOURCE

(en euros)

Revenu perçu

Acompte

Retenue à la source

N − 2

N − 1

N (a)

N (b)

Impôt dû en N

Solde
N + 1 (a)

Solde
N + 1 (b)

Impôt dû en N (a)

Impôt dû en N (b)

Solde N + 1 (a)

Solde N + 1 (b)

100 000

120 000

75 000

150 000

20 704

– 9 454

13 646

14 500

29 000

– 3 250

5 350

Source : calculs de la commission des finances.

Ainsi qu’il ressort de ce tableau, le montant du revenu perçu en N est indifférent sur le montant de l’impôt qui serait payé cette année-là si le contribuable relève de l’acompte. Dans le cadre de la retenue à la source, au contraire, l’imposition est adossée à la réalité du revenu à travers l’effet assiette.

Dans les deux situations, le montant total de l’impôt dû au titre des revenus perçus en N est identique, l’application d’un régime plutôt que l’autre étant sans incidence sur l’imposition (11 250 euros si les revenus sont de 75 000 euros, 34 350 s’ils sont de 150 000 euros). En revanche, les sommes effectivement versées l’année de la perception du revenu sont très différentes et peuvent grever de façon importante les capacités financières des contribuables.

b. Le recours à la modulation serait nécessaire mais revêt une certaine complexité

i. La modulation de l’acompte serait nécessaire pour éviter une surcharge fiscale provisoire

Afin de limiter les effets négatifs d’une imposition assise sur les revenus des deux années précédentes et d’assurer à l’imposition un minimum de contemporanéité, il serait indispensable aux contribuables de moduler le montant de leur acompte.

L’article 204 J nouveau du CGI qu’introduit le présent article porte sur les modalités de modulation du prélèvement, qui peut être faite à la hausse ou à la baisse.

Dans le cas d’un décès, d’un mariage ou d’un pacs ou d’un divorce ou d’une séparation, situations prévues au 1 de l’article 204 I nouveau, la modulation du prélèvement consécutive au changement de situation serait subordonnée à la déclaration à l’administration du changement correspondant.

En dehors de ces hypothèses, la modulation pourrait être demandée par le contribuable à l’administration fiscale. Elle pourrait reposer sur une naissance, le départ d’un enfant du foyer fiscal ou encore sur une variation des revenus perçus.

En ce qui concerne spécifiquement les titulaires de revenus soumis au régime de l’acompte, la modulation du prélèvement permettrait de faire face à deux situations :

– une évolution du revenu en cours d’année ;

– une évolution du revenu par rapport aux deux années précédentes dans la mesure où le taux et l’assiette de l’acompte sont adossés aux revenus perçus au cours de ces années.

Dans ces situations, le contribuable procéderait à l’estimation de ses revenus pour l’année en cours, puis demanderait à l’administration de calculer, sur la base de ces revenus estimés, un nouveau taux d’imposition.

Le nouveau taux s’appliquerait au plus tard le troisième mois qui suit la décision de modulation, jusqu’à la fin de l’année civile. Le montant de l’acompte issu de la modulation serait diminué de celui des versements déjà effectués.

Il est renvoyé aux commentaires consacrés à la modulation du prélèvement pour une présentation complète et détaillée du dispositif (Cf. infra, V).

Le Gouvernement admet que la modulation est « nécessaire afin de permettre à un travailleur indépendant […] d’adapter son prélèvement contemporain à la variation de ses revenus » (40). À la différence des revenus soumis à la retenue à la source, en effet, l’assiette d’imposition de l’acompte est figée, quelles que soient les éventuelles variations du revenu perçu l’année d’imposition.

En conséquence, sans modulation, le contribuable acquitterait l’année N un impôt correspondant aux revenus perçus lors des années N − 2 et N − 1, qui peuvent être substantiellement supérieurs à ceux perçus en N. En résulterait une surimposition potentiellement conséquente pendant cette année N, ainsi que l’exemple précédent l’illustre.

Dans l’hypothèse d’une hausse des revenus en année N, la modulation permettrait, au contraire, d’accroître l’impôt acquitté cette année pour diminuer corrélativement le montant dû lors de la régularisation en septembre N + 1.

La possibilité offerte de moduler le montant de l’acompte, à la hausse comme à la baisse, constituerait un avantage certain au regard de la situation actuelle. En l’état du droit, en effet, la modulation proposée aux contribuables ne porte pas sur le montant de l’impôt dû, qui reste inchangé, mais sur ses modalités de paiement. In fine, le contribuable s’acquitte du même montant d’impôt, qu’il ait eu recours ou non à la modulation. Dans le cadre du prélèvement à la source, en revanche, c’est bien l’impôt dû, et non simplement son paiement, qui serait modulé, permettant d’adosser réellement les versements au revenu effectivement perçu.

Il s’agirait donc d’une avancée bienvenue et opportune à laquelle les titulaires de revenus relevant de l’acompte seraient fortement incités à recourir.

ii. Le recours à la modulation est complexe et peut être dissuasif

Si la modulation est bien une avancée qui permettrait aux contribuables dont les revenus relèvent de l’acompte de s’acquitter d’un montant d’impôt en relation avec le revenu qu’ils perçoivent réellement, il s’agit néanmoins d’un mécanisme délicat et potentiellement dissuasif.

En premier lieu, les modalités de modulation du prélèvement seraient complexes.

D’une part, elles supposent du contribuable une estimation de son revenu, ce qui peut s’avérer délicat. Le Gouvernement reconnaît d’ailleurs qu’une telle estimation est par nature difficile et que cette difficulté est l’une des raisons qui l’a conduit à écarter, pour l’imposition des travailleurs indépendants, l’option consistant à retenir comme assiette un revenu estimé par le contribuable (41).

Les travailleurs indépendants sont certes capables d’évaluer relativement correctement la variation de leur revenu dans la mesure où celle-ci est liée à l’évolution de leur activité professionnelle. Or, il est vraisemblable qu’un travailleur indépendant réalise des prévisions, ne serait-ce que pour arbitrer entre certains choix de gestion, de conduite de son activité. Néanmoins, ces prévisions sont par nature aléatoires et peuvent être soumises à des événements qui ne peuvent tous être anticipés.

Dès lors, considérer que la modulation reposant sur une estimation du revenu par son titulaire est la condition requise pour fournir à l’acompte un caractère réellement contemporain minimal revient à exiger du contribuable un effort qui, pour le Gouvernement lui-même, pourrait revêtir une complexité excessive.

D’autre part, la modulation à la baisse est fermement encadrée. Elle ne serait ouverte que si la variation de revenu revêt une certaine ampleur conduisant à ce que le montant du prélèvement soit inférieur de 10 % et 200 euros au prélèvement supporté sans modulation. En deçà de ce seuil, la modulation est impossible. Cet encadrement est légitime en ce qu’il tend à éviter qu’une quantité excessive de modulations à la baisse ne conduise à remettre en cause le niveau des recettes fiscales, notamment en 2018, alors que l’avantage qu’en retirerait chaque contribuable ayant eu recours à cette modulation serait modeste. Il n’en reste pas moins qu’elle limiterait la corrélation de l’imposition et du revenu en année N.

Enfin, la modulation à la baisse ne pourrait être dénoncée par le contribuable si, après l’avoir demandée, celui-ci réalise que les revenus de l’année en cours seraient finalement plus élevés que ce qu’il avait estimé. Une telle situation peut correspondre à plusieurs hypothèses :

– surcroît d’activité ;

– obtention d’un contrat inattendu ou supposé perdu ;

– diminution de certaines dépenses conduisant à accroître le bénéfice, etc.

Une fois demandée et effective, la modulation s’appliquerait jusqu’au 31 décembre de l’année. La seule possibilité offerte au contribuable de rétablir la situation consisterait alors à moduler à la hausse son prélèvement. Une telle situation présenterait des inconvénients en termes de gestion et une lourdeur pour le contribuable.

En second lieu, les conséquences d’un recours erroné à la modulation pourraient rendre le dispositif dissuasif.

Après avoir estimé son revenu et reçu le nouveau taux de la part de l’administration, le contribuable procéderait aux versements d’acompte sur la base de ces nouvelles données. En N + 1, une fois les revenus de N connus à la suite de la déclaration annuelle faite par le contribuable, l’administration pourrait vérifier que les critères d’ouverture de la modulation étaient bien satisfaits et que la modulation n’a pas revêtu de caractère excessif. S’il s’avère que la modulation n’aurait pas dû être faite ou qu’elle a été excessive, le contribuable s’exposerait à des sanctions pécuniaires (42).

Il ne serait pas exigé du contribuable ayant recours à la modulation qu’il estime précisément son revenu, mais la marge d’erreur ouverte, de 10 %, pourrait se révéler insuffisante, par exemple si l’ampleur de la variation du revenu et donc de l’acompte a été atténuée en fin d’année par un événement imprévu au moment de la demande de modulation.

En conséquence, eu égard à l’incertitude liée à l’estimation du revenu sur laquelle reposerait la modulation et compte tenu des sanctions applicables, il n’est pas exclu qu’un certain nombre de contribuables préféreraient ne pas prendre de risque et ne moduleraient pas leur prélèvement.

En tout état de cause, les démarches que supposerait la modulation pourraient à elles seules dissuader des contribuables d’en solliciter le bénéfice. Cette hypothèse n’est pas virtuelle dans la mesure où l’évaluation préalable de l’article précise expressément que les organismes professionnels représentant les travailleurs indépendants consultés dans le cadre de la préparation de la réforme ont fait état de leur préférence pour un dispositif n’entraînant pas de modifications profondes des habitudes actuelles (43).

Il ressort donc du dispositif proposé que la seule possibilité offerte à un contribuable d’éviter une surimposition en N ou une régularisation trop lourde en N + 1 serait de recourir à un dispositif aléatoire et complexe, dont la méconnaissance serait passible de sanctions.

c. Les alternatives reposant sur une estimation de son revenu par le contribuable se révèlent délicates

Afin d’éviter la surcharge susceptible de peser sur le contribuable en raison du caractère ancien de l’assiette de l’acompte contemporain, pourrait être préférée l’alternative consistant à retenir comme assiette le revenu perçu l’année N, estimé par le contribuable. Cette solution présente néanmoins d’importantes difficultés, dont certaines ont déjà été évoquées au titre de la modulation.

i. Une estimation reposant sur le chiffre d’affaires assorti d’un taux de charges liés aux précédents exercices ne serait ni simple ni optimale

Ainsi qu’il a été vu, l’estimation peut s’avérer délicate, motif qui a conduit le Gouvernement à écarter l’option reposant sur une évaluation du chiffre d’affaires auquel serait appliqué un taux de charges fondé sur les charges déductibles. Pour les contribuables relevant d’un régime micro, ce taux de charges correspondrait à l’abattement actuellement appliqué (par exemple, s’agissant du régime micro-BA, 87 %).

Un tel dispositif se rapprocherait des modalités applicables à la retenue à la source dans la mesure où, si le taux de charges serait fondé sur les chiffres d’affaires et les charges déductibles constatés en N − 2 et N − 1, l’assiette de l’acompte serait le chiffre d’affaires trimestriel de l’année N.

L’exemple suivant illustre cette alternative. Il repose sur un contribuable célibataire et sans enfant qui a réalisé en N − 2 un chiffre d’affaires de 200 000 euros, pour un total de charges déductibles de 170 000 euros (soit un bénéfice de 30 000 euros), et en N − 1 un chiffre d’affaires de 230 000 euros pour un total de charges déductibles de 180 000 euros (soit un bénéfice de 50 000 euros).

TAUX DE CHARGES APPLICABLES AU CHIFFRE D’AFFAIRES DE L’ANNÉE N

Année

N − 2

N − 1

Chiffre d’affaires (en euros)

200 000

230 000

Charges (en euros)

170 000

180 000

Taux de charges

85,0 %

78,3 %

Part du chiffre d’affaires imposée

15,0 %

21,7 %

Taux moyen d’imposition

11,2 %

18,7 %

Lors de l’année N, le contribuable :

– appliquerait le taux d’imposition de N − 2, de 11,2 %, à 15 % du chiffre d’affaires de chacun des trois premiers trimestres ;

– appliquerait le taux d’imposition de N − 1, de 18,7 %, à 21,7 % du chiffre d’affaires du dernier trimestre.

Le tableau suivant illustre l’impôt acquitté en N pour des chiffres d’affaires de 260 000 euros et de 165 000 euros. Les charges associées sont, respectivement, de 200 000 et de 140 000 euros. L’impôt réellement dû dans le premier cas, assis sur un bénéfice de 60 000 euros, est de 12 355 euros. Dans le second cas, assis sur un bénéfice de 25 000 euros, il est de 2 142 euros (44).

MONTANT DE L’ACOMPTE ASSIS SUR LE CHIFFRE D’AFFAIRES (CA) DÛ EN ANNÉE N

(en euros)

Trimestre

Accroissement du CA en N

Diminution du CA en N

CA trimestriel

Assiette

Impôt payé

CA trimestriel

Assiette

Impôt payé

Trimestre 1

65 000

9 750

1 092

35 000

5 250

588

Trimestre 2

60 000

9 000

1 008

40 000

6 000

672

Trimestre 3

60 000

9 000

1 008

40 000

6 000

672

Trimestre 4

75 000

16 275

3 043

50 000

10 850

2 029

Total

260 000

44 025

6 151

165 000

28 100

3 961

Si le dispositif actuel était appliqué, il conduirait à une sous-imposition plus prononcée dans l’hypothèse d’un accroissement du CA, et à une surimposition plus forte dans l’hypothèse d’une diminution du CA, ainsi qu’en témoigne le tableau suivant.

MONTANT DE L’ACOMPTE DÛ EN APPLICATION DU DISPOSITIF PROPOSÉ EN ANNÉE N

(en euros)

Année

Revenu

Taux

Impôt correspondant

Mensualité

Nombre de mensualités

Montant dû

N − 2

30 000

11,2 %

3 360

280

8

2 240

N − 1

50 000

18,7 %

9 350

780

4

3 117

Impôt payé en année N

5 357

Le dispositif assis sur le chiffre d’affaires auquel est appliqué un taux de charges reste imparfait et n’atteint pas la contemporanéité de la retenue à la source, dans la mesure où l’assiette reste liée aux revenus des deux dernières années puisqu’elle est déterminée par application des taux de charges de ces années (45). Il est toutefois plus performant que le dispositif proposé par le Gouvernement s’agissant du lien entre revenus perçus et impôt payé.

Néanmoins, il revêt une complexité évidente par l’introduction de la notion de taux de charges.

En outre, sa mise en œuvre supposerait un traitement important des données déclaratives par l’administration fiscale. En effet, si les charges d’exploitation et financières sont facilement identifiables, elles ne permettent pas nécessairement d’appréhender l’ensemble des charges déductibles. Il en va ainsi, par exemple, du suramortissement de 40 % prévu à l’article 39 decies du CGI.

ii. Une estimation directe du revenu imposable par le contribuable

Une autre possibilité serait de faire complètement évaluer par le contribuable son bénéfice imposable, sans passer par la prise en compte du chiffre d’affaires assorti d’un abattement lié aux années N − 2 et N − 1.

Si le caractère délicat d’une telle estimation est certain, il s’agit néanmoins d’une solution retenue dans le cadre de la réforme pour différentes situations :

– début d’activité, sur option du contribuable, en vertu de l’article 204 K nouveau du CGI (Cf. infra, VI) ;

– modulation du prélèvement.

Il peut ainsi sembler étrange qu’une solution applicable dans certaines hypothèses ne soit pas étendue à l’ensemble des situations, surtout lorsque certaines de ces hypothèses sont celles dans lesquelles les contribuables présentent le plus de risque d’erreurs d’estimation (tel est notamment le cas des nouveaux travailleurs indépendants, qui peuvent être peu au fait des règles fiscales et comptables).

Dans le cadre d’un tel dispositif, l’impôt acquitté en année N serait plus proche de l’impôt réellement dû que dans les deux autres options, celle précédemment présentée et celle retenue par le présent projet de loi de finances. C’est ce qu’illustre le tableau suivant, qui repose sur les mêmes données que le précédent exemple.

ACOMPTE VERSÉ EN ANNÉE N ASSIS SUR LE BÉNÉFICE ESTIMÉ PAR LE CONTRIBUABLE

(en euros)

Taux résultant des revenus N − 2 et N − 1

Nombre de mensualités

Revenu N de 60 000 euros

Revenu N de 25 000 euros

Impôt correspondant

Montant dû par rapport aux mensualités

Impôt correspondant

Montant dû par rapport aux mensualités

Taux N − 2

11,2 %

8

6 720

4 480

2 800

1 867

Taux N − 1

18,7 %

4

11 220

3 740

4 675

1 558

Impôt acquitté en N

 – 

8 220

 – 

3 425

Source : calculs de la commission des finances.

Plusieurs pays retiennent comme assiette du prélèvement contemporain l’estimation faite par le contribuable de ses revenus de l’année d’imposition.

D’après l’évaluation préalable du présent article, sur les douze pays étudiés qui imposent les revenus des travailleurs indépendants au moyen d’un acompte contemporain, sept, soit plus de la moitié, proposent une méthode de calcul fondée sur les revenus de l’année d’imposition.

Les risques inhérents à un tel dispositif résident dans les erreurs d’estimation de la part des contribuables, voire dans les comportements d’optimisation fiscale. Néanmoins, ce constat appelle les observations suivantes :

– de tels risques existent déjà dans la réforme, l’estimation de son revenu par le contribuable étant prévue dans certaines situations ;

– une erreur de la part du contribuable serait résolue lors du solde, en N + 1, au travers de la régularisation. L’alourdissement du solde dû à une sous-estimation du revenu présente, en lui-même, un caractère suffisamment dissuasif pour réduire les comportements fondés sur de la mauvaise foi ou des tentatives d’optimisation ;

– une sous-estimation volontaire peut être sanctionnée, si la bonne foi du contribuable ne peut être établie.

L’exemple belge est à cet égard éloquent : si l’impôt acquitté au travers de l’acompte est inférieur à l’impôt réellement dû, des majorations sont appliquées. Il s’agit d’une option maximaliste, à laquelle pourrait être préférée une solution moins pénalisante qui tient mieux compte de l’inévitable imprécision liée à une estimation, à l’image de ce qui est fait en Australie. La méthode d’imposition australienne, ainsi qu’il ressort de l’évaluation préalable, ne prévoit des pénalités pour le contribuable que si l’impôt payé par ce dernier sur la base de son estimation est inférieur à une part de l’impôt réellement dû, en l’occurrence 85 %.

Cette souplesse est opportune :

– elle permet de ne pas pénaliser les erreurs légitimes d’estimation et sécurise la situation du contribuable ;

– elle garantit la perception de recettes suffisantes et proches de la réalité de l’impôt dû.

L’intérêt d’une évolution des modalités de calculs de l’acompte, et notamment de la question de son assiette, est au demeurant implicitement reconnu par le Gouvernement dans l’évaluation préalable dans la mesure où il est indiqué que l’option retenue par le projet de réforme « n’hypothèque pas l’avenir quant à la mise en œuvre éventuelle, dans le futur, de l’option n° 2 mieux à même d’assurer la contemporanéité du prélèvement à la source » (46).

En conséquence, bien que l’estimation de son revenu par le contribuable présente une certaine complexité, elle pourrait, si elle rencontrait l’assentiment des travailleurs indépendants, constituer dans un avenir plus ou moins proche une solution de substitution à l’assiette de l’acompte actuellement proposée.

Il semble néanmoins préférable de mettre en œuvre le prélèvement à la source selon les modalités validées par les organisations représentant les travailleurs indépendants pour assurer l’acceptabilité de la réforme, quitte à la faire évoluer ultérieurement afin que le changement ne soit pas trop brutal.

d. Les inconvénients présentés par l’ancienneté de l’assiette de l’acompte doivent être nuancés par les facilités proposées aux contribuables

Le constat précédemment tiré de l’ancienneté de l’assiette, qui peut paraître sévère, doit être relativisé. Si l’assiette n’est pas idéale, les solutions alternatives ne le sont pas non plus. Surtout, le dispositif proposé prévoit un nombre important de facilités pour les contribuables, qui permettraient d’atténuer la charge fiscale supportée, selon les cas, en N ou N + 1 en fonction de la variation des revenus perçus :

– la surcharge en année N pour le contribuable dont les revenus diminuent se traduirait par un gain important en N + 1 ;

– ce contribuable pourrait par ailleurs faire usage de la faculté de report des versements d’acompte (trois reports d’une mensualité chacun ou, si le versement est trimestriel, un report) ;

– la surcharge en année N + 1 pour le contribuable dont les revenus augmentent se traduit par un gain de trésorerie en N ;

– ce contribuable pourrait par ailleurs faire usage de la faculté de lissage du solde sur plusieurs mois, lorsque celui-ci excède 300 euros ;

– enfin, ainsi qu’il a été vu, la modulation du prélèvement permettrait un ajustement des sommes versées à la réalité du revenu perçu.

3. La prise en compte de cas particuliers pour l’établissement de l’assiette

a. Les déficits catégoriels seraient retenus pour une valeur nulle

Le 3 de l’article 204 G (alinéa 23 du présent article) précise que si le résultat de l’une des catégories de revenu soumis à l’acompte contemporain est déficitaire, il est retenu pour une valeur nulle.

Cette disposition permet d’éviter, en cas de déficit catégoriel important, que le montant de l’acompte dû soit négatif.

Si cette disposition augmente nécessairement l’assiette d’imposition du foyer fiscal dans l’hypothèse de perception parallèle de revenus soumis à la retenue à la source (tels que des revenus salariaux), elle n’aurait pourtant pas pour effet d’alourdir l’impôt dû.

Les modalités de détermination du taux, en effet, intégreraient elles aussi l’absence de prise en compte du déficit (47). Ainsi, l’assiette serait plus large mais le taux serait plus faible, ce qui conduirait à un montant d’impôt dû identique à celui actuellement supporté, voire plus faible dans certaines hypothèses. L’exemple suivant illustre cette situation et l’absence de surimposition.

Une personne célibataire perçoit en N − 2 et N − 1 un salaire annuel de 42 000 euros. Elle exerce également une activité relevant du régime des BIC, qui est déficitaire à hauteur de 10 000 euros.

Dans le droit actuel, son assiette d’IR est de 27 800 euros (42 000 × 90 % – 10 000) (48) et son taux moyen d’imposition de 9,7 %, ainsi qu’il ressort du simulateur d’impôt de la DGFiP. L’IR dû en N − 2 et N − 1 s’élève donc à 2 695 euros.

Dans le cadre du prélèvement à la source, l’assiette serait de 42 000 euros. Le taux d’imposition correspondrait au résultat du quotient entre, d’une part, l’impôt acquitté en N − 2 et N − 1, d’autre part, les revenus perçus en N − 2 et N − 1, soit : 2 695 / (42 000 + 0) = 6,4 %.

Les revenus perçus en N sont identiques à ceux des deux années précédentes. L’impôt dû en N serait donc de 2 688 euros et porterait uniquement sur les salaires, via la retenue à la source (42 000 × 6,4 %), le montant de l’acompte dû au titre des BIC étant nul (0 × 6,4 %).

Le contribuable aurait ainsi acquitté un impôt inférieur de 7 euros par rapport au droit actuel. Aucun complément ne serait exigé, la différence se situant en deçà du seuil de recouvrement.

b. L’ajustement prorata temporis des BIC, BA et BNC afférents à une période inférieure à douze mois.

Le 4 de l’article 204 G (alinéa 24 du présent article) prévoit que les revenus mentionnés aux 1° à 3° du 2 de cet article, c’est-à-dire les BIC, les bénéfices agricoles et les BNC, perçus l’année de référence d’établissement de l’assiette de l’impôt dû, font l’objet d’un ajustement prorata temporis lorsqu’ils sont afférents à une période inférieure à douze mois.

Un contribuable célibataire a débuté une activité commerciale le 1er mars de l’année N − 2. Il déclare 21 000 euros de BIC au titre de N − 2 et 26 000 euros au titre de N − 1. L’impôt dû au titre de ces deux années est de :

– pour N − 2, 1 582 euros ;

– pour N − 1, 2 282 euros (49).

En l’absence d’ajustement prorata temporis pour l’année N − 2, le taux d’imposition applicable aux revenus de janvier à août de l’année N serait de 7,5 % (1 582 / 21 000).

Avec l’ajustement prorata temporis, pour l’obtention du taux applicable de janvier à août, l’impôt acquitté en N − 2 serait divisé, non par le revenu de cette année, mais par ce revenu ajusté à douze mois, selon la formule suivante : 21 000 × (12/10). Le taux serait donc égal à : 1 582 / (21 000 × 1,2), soit 6,3 %.

Si aucun autre revenu que les BIC n’est perçu, l’ajustement ne produirait pas d’effet : le taux serait réduit mais l’assiette élargie, conduisant à une imposition équivalente l’année N :

– l’application du taux de 7,5 % à une assiette de 21 000 euros conduit à une imposition de 1 575 euros ;

– l’application du taux de 6,3 % à une assiette de 25 000 euros (21 000 × 1,2) conduit à une imposition de 1 588 euros.

En revanche, si d’autres revenus sont perçus, tels des salaires, l’ajustement permettrait au foyer fiscal de mieux répartir la charge d’imposition entre revenus afin de tenir compte de l’augmentation probable des BIC entre une année d’activité partielle et une année de plein exercice.

Le tableau suivant illustre cette situation. En plus des BIC de 21 000 euros correspondant à dix mois d’activité, le contribuable perçoit un salaire annuel de 24 000 euros (constant entre N − 2 et N). L’impôt total est de 7 135 euros.

RÉPARTITION DU PRÉLÈVEMENT À LA SOURCE ENTRE LES CATÉGORIES DE REVENUS AVEC ET SANS AJUSTEMENT PRORATA TEMPORIS

(en euros)

Ajustement

Salaires N − 1

BIC N − 1

Total

Impôt dû N − 1

Taux

RAS

Acompte

Sans

24 000

21 000

45 000

7 135

15,9 %

3 805

3 330

Avec

24 000

25 200

49 200

7 135

14,5 %

3 480

3 655

À salaire constant, le fait de ne pas procéder à l’ajustement conduit à appliquer un taux plus élevé et aboutit à une retenue à la source plus importante. Inversement, l’acompte dû au titre des BIC serait plus faible, alors que le bénéfice est en principe plus important.

Grâce au dispositif proposé, la répartition de la charge fiscale entre les catégories de revenus est plus équitable et tient mieux compte de la réalité probable des revenus perçus.

4. L’exclusion du prélèvement à la source des exploitants individuels qui ont opté pour le versement libératoire

Texte du projet de loi (alinéas 119 à 122) :

(119) 6° A l’article 1510 :

(120) a) Le III est complété par un alinéa ainsi rédigé :

(121) « Les contribuables qui s’acquittent du versement libératoire au titre de l’année en cours ne sont pas redevables de l’acompte prévu au 2° du 2 de l’article 204 A au titre des revenus soumis à ce versement. » ;

(122) b) Au premier alinéa du IV, la date : « 31 décembre » est remplacée par la date : « 30 septembre » ;

*

* *

L’article 151-0 du CGI permet aux exploitants individuels qui relèvent des régimes micro-BIC de l’article 50-0 ou micro-BNC de l’article 102 ter, de régler l’impôt dû au moyen d’un versement, mensuel ou trimestriel, libératoire de l’impôt sur le revenu. Le montant de ce versement est déterminé par l’application au chiffre d’affaires hors taxes d’un taux qui varie en fonction de la nature de l’activité à laquelle se livre le contribuable :

– 1 % pour les activités de vente ou de fourniture de logements ;

– 1,7 % pour les prestations de services ;

– 2,2 % pour les activités non commerciales.

L’exemple suivant montre le fonctionnement du versement libératoire dû par un contribuable célibataire qui a opté pour le versement trimestriel et qui a réalisé en année N un chiffre d’affaires de 60 000 euros au titre d’une activité de vente. Le taux du versement libératoire est donc de 1 %.

VERSEMENT LIBÉRATOIRE DÛ PAR UN EXPLOITANT INDIVIDUEL

(en euros)

Mois

Chiffre d’affaires hors taxes

Total trimestriel

Versement libératoire dû

Janvier

2 000

13 000

130

Février

5 000

Mars

6 000

Avril

4 000

26 000

260

Mai

10 000

Juin

12 000

Juillet

3 000

8 000

80

Août

0

Septembre

5 000

Octobre

8 000

13 000

130

Novembre

4 000

Décembre

1 000

Total

60 000

60 000

600

L’impôt acquitté au titre de l’activité réalisée l’année N, payé la même année, est de 600 euros. Par comparaison, si le contribuable n’avait pas opté pour le versement libératoire et avait été imposé en vertu du régime micro-BIC applicable aux activités de ventes, l’impôt dû au titre de N, versé en N + 1, se serait élevé à 721 euros (après abattement de 71 %) (50).

L’option pour le versement libératoire permet ainsi au contribuable la réalisation d’une économie substantielle, l’impôt acquitté étant inférieur de l’ordre de 17 % à celui qui aurait été dû au titre du régime micro-BIC.

Compte tenu du caractère libératoire de l’impôt sur le revenu du versement prévu par l’article 151-0, les contribuables ayant opté pour un tel dispositif ne sauraient devoir verser l’acompte mentionné à l’article 204 A.

Dans le cas contraire, en effet, ces contribuables supporteraient une double imposition provisoire de leurs revenus, avant régularisation lors de l’établissement du solde, en N + 1. Au-delà des évidentes difficultés de trésorerie qu’une telle solution aurait pour les contribuables, sans faire mention de la complexité administrative et des risques juridiques induits, cette double imposition conduirait à retenir une assiette différente pour l’établissement du même impôt. Les modalités d’imposition du versement libératoire et des régimes « micro » diffèrent en effet, ainsi que le tableau suivant l’illustre.

MODALITÉS DE DÉTERMINATION DE L’IMPÔT DÛ DANS LES RÉGIMES MICROS
ET AU TITRE DU VERSEMENT LIBÉRATOIRE DES EXPLOITANTS INDIVIDUELS

Nature des revenus

Régime micro

Versement libératoire
(151-0 CGI)

BIC vente / logement

Barème progressif IR
sur 29 % du CA (50-0 CGI)

1 % du CA

BIC autres activités

Barème progressif IR
sur 50 % du CA (50-0 CGI)

1,7 % du CA

BNC

Barème progressif IR
sur 66 % du CA (102 ter CGI)

2,2 % du CA

BA

Barème progressif IR
sur 13 % du CA (64 bis CGI)

Sans objet

En conséquence, le 6° du B du I du présent article, dans son a (alinéas 120 et 121) assure la coordination entre l’acompte prévu par le 2° du 2 de l’article 204 A nouveau du CGI et le système du versement libératoire susceptible d’être appliqués aux BIC et aux BNC.

Il complète à cet effet le III de l’article 151-0 par un alinéa précisant que les contribuables qui ont acquitté leur impôt au travers du versement libératoire ne sont pas redevables de l’acompte mis en place dans le cadre du prélèvement à la source.

Le b du 6° (alinéa 122) modifie quant à lui le IV de l’article 151-0 en avançant du 31 décembre au 30 septembre N − 1 la date à laquelle doit être adressée à la caisse du régime social des indépendants (RSI) la demande d’option ou de renonciation du bénéfice du régime.

Le délai supplémentaire ainsi accordé à l’administration permettrait à cette dernière de tirer les conséquences du choix du contribuable, en arrêtant l’acompte contemporain (en cas d’option) ou en mettant en place ce dernier (en cas de renonciation).

III. LA DÉFINITION DU TAUX APPLICABLE

Texte du projet de loi (alinéas 25 à 50) :

TAUX DE DROIT COMMUN

(25) « Art. 204 H. – 1. 1° L’administration fiscale calcule pour chaque foyer fiscal le taux prévu à l’article 204 E. Il est égal au rapport entre le montant de l’impôt sur le revenu du foyer fiscal afférent aux revenus mentionnés au 1 de l’article 204 A, sous déduction des crédits d’impôt correspondant à ces revenus prévus par les conventions fiscales internationales, et ces mêmes revenus pour leurs montants déterminés dans les conditions mentionnées à l’article 204 F et à l’article 204 G, à l’exception du 7° du 2 de cet article.

(26) « Pour le calcul du premier terme du numérateur, l’impôt sur le revenu résultant de l’application des règles prévues aux 1 à 4 du I de l’article 197 ou, le cas échéant, à l’article 197 A est multiplié par le rapport entre les montants nets imposables des revenus mentionnés au 1 de l’article 204 A, les déficits étant retenus pour une valeur nulle, et le revenu net imposable au barème progressif de l’impôt sur le revenu, hors déficits, charges et abattements déductibles du revenu global ;

(27) « 2° L’impôt sur le revenu et les revenus pris en compte mentionnés au 1° sont ceux de l’avantdernière année pour le calcul du taux relatif aux versements de l’acompte acquittés et aux retenues à la source effectuées entre le 1er janvier et le 31 août de l’année au cours de laquelle le contribuable dispose des revenus ou réalise les bénéfices, et ceux de l’année précédente pour le calcul du taux relatif aux versements de l’acompte acquittés et aux retenues à la source effectuées entre le 1er septembre et le 31 décembre.

(28) « Toutefois, dans le cas où l’impôt sur le revenu de l’avantdernière année ou de la dernière année n’a pu être établi, l’impôt sur le revenu et les revenus pris en compte pour le calcul du taux sont ceux de la dernière année pour laquelle l’impôt a été établi à la date du calcul de l’acompte par l’administration ou de la transmission du taux au débiteur des revenus en application du 4°, sans que cette année ne puisse être antérieure à l’antépénultième année par rapport à l’année de prélèvement ;

(29) « 3° Le taux est arrondi à la décimale la plus proche. La fraction de décimale égale à 0,50 est comptée pour un.

(30) « 4° L’administration fiscale met le taux à disposition du contribuable et le transmet au débiteur mentionné au 1° du 2 de l’article 204 A.

TAUX NUL POUR LES CONTRIBUABLES NON-IMPOSÉS

(31) « 1 bis. Par dérogation au 1, le taux prévu à l’article 204 E est nul pour les contribuables qui remplissent cumulativement les deux conditions suivantes :

(32) « 1° L’impôt sur le revenu, avant imputation du prélèvement prévu à l’article 204 A, mis en recouvrement au titre des revenus des deux dernières années d’imposition connues est nul ;

(33) « 2° Le montant des revenus, au sens du 1° du IV de l’article 1417, de la dernière année d’imposition connue est inférieur à 25 000 € par part de quotient familial.

(34) « Pour l’appréciation de la condition prévue au 1°, les crédits d’impôt prévus aux A et 3 du E du II de l’article [38] de la loi n° 2016XXXX du XX décembre 2016 de finances pour 2017 ne sont pas pris en compte.

(35) « Le montant des revenus prévu au 2° est indexé chaque année comme la limite supérieure de la première tranche du barème de l’impôt sur le revenu.

GRILLE DE TAUX PAR DÉFAUT

(36) « 2. 1° Lorsque le débiteur ne dispose pas d’un taux calculé par l’administration fiscale ou lorsque l’année dont les revenus ont servi de base au calcul du taux est antérieure à l’antépénultième année par rapport à l’année de prélèvement, il est appliqué un taux proportionnel fixé dans les conditions suivantes :

(37) « a) Pour les contribuables domiciliés en métropole :

(38) « 

Base mensuelle de prélèvement

Taux proportionnel

Inférieure ou égale à 1 361 €

0 %

De 1 362 € à 1 493 €

2 %

De 1 494 € à 1 647 €

4 %

De 1 648 € à 1 944 €

7 %

De 1 945 € à 2 602 €

9 %

De 2 603 € à 3 250 €

12,5 %

De 3 251 € à 4 685 €

17 %

De 4 686 € à 7 288 €

21,5 %

De 7 289 € à 9 639 €

25,5 %

De 9 640 € à 17 356 €

33 %

De 17 356 € à 33 681 €

39 %

Supérieure à 33 681 €

43 %

(39) « b) Pour les contribuables domiciliés en Guadeloupe, à La Réunion et en Martinique :

(40) « 

Base mensuelle de prélèvement

Taux proportionnel

Inférieure ou égale à 1 560 €

0 %

De 1 561 € à 1 778 €

2 %

De 1 779 € à 2 062 €

4 %

De 2 063 € à 2 531 €

6 %

De 2 532 € à 3 019 €

8 %

De 3 020 € à 4 168 €

11 %

De 4 169 € à 7 095 €

15 %

De 7 096 € à 8 750 €

19,5 %

De 8 751 € à 10 825 €

24,5 %

De 10 826 € à 17 650 €

32 %

De 17 651 € à 37 500 €

38,5 %

Supérieure à 37 500 €

42,5 %

(41) « c) Pour les contribuables domiciliés en Guyane et à Mayotte :

(42) « 

Base mensuelle de prélèvement

Taux proportionnel

Inférieure ou égale à 1 670 €

0 %

De 1 671 € à 1 864 €

1,5 %

De 1 865 € à 2 109 €

3 %

De 2 110 € à 2 533 €

5 %

De 2 534 € à 3 067 €

7 %

De 3 068 € à 4 551 €

10 %

De 4 552 € à 7 210 €

13,5 %

De 7 211 € à 8 750 €

17,5 %

De 8 751 € à 10 825 €

21,5 %

De 10 826 € à 17 667 €

30 %

De 17 668 € à 37 500 €

38 %

Supérieure à 37 500 €

42,5 %

(43) « d) Les limites des tranches des grilles prévues aux a à c sont réduites ou augmentées proportionnellement à la période à laquelle se rapportent le versement par le débiteur des revenus mentionnés à l’article 204 B ou le calcul de l’acompte mentionné à l’article 204 C.

(44) « Pour les revenus mentionnés à l’article 204 C, les grilles prévues aux a à c s’appliquent à ces revenus majorés de 11 % ;

(45) « 2° Par dérogation au 1, le taux prévu au 1° est également applicable aux revenus des personnes rattachées au sens des 2° et 3° du 3 de l’article 6 ou à charge au sens des articles 196 et 196 A bis, au titre de la dernière année pour laquelle l’impôt a été établi.

OPTION POUR LA GRILLE DE TAUX PAR DÉFAUT SOUS CONDITION DE VERSEMENT D’UN COMPLÉMENT DE RETENUE À LA SOURCE

(46) « 3. 1° Sur option du contribuable, le taux mentionné au 2 est appliqué aux traitements et salaires soumis à la retenue à la source prévue au 1° du 2 de l’article 204 A.

(47) « L’option peut être exercée à tout moment auprès de l’administration fiscale et est mise en œuvre au plus tard le troisième mois qui suit celui de la demande. Elle est tacitement reconduite, sauf dénonciation dans les trente jours qui suivent la communication au contribuable d’un nouveau taux de prélèvement ;

(48) « 2° Lorsque le montant de la retenue à la source résultant de l’application de ce taux est inférieur à celui qui aurait résulté de l’application du taux prévu, selon le cas, au 1 du présent article, à l’article 204 I, à l’article 204 J ou à l’article 204 M, le contribuable acquitte un complément de retenue à la source égal à la différence entre ces deux montants.

(49) « Ce complément est calculé et versé par le contribuable au plus tard le dernier jour du mois suivant celui de la perception du revenu, dans les conditions prévues aux 4 et 6 de l’article 1663 C.

(50) « À défaut de paiement, le recouvrement du complément de retenue à la source est assuré et poursuivi selon les mêmes modalités et sous les mêmes garanties et sûretés que l’impôt sur le revenu. Le rôle d’impôt sur le revenu servant de base au calcul du taux de retenue qui aurait dû être appliqué à défaut d’option vaut titre exécutoire en vue de l’exercice des poursuites consécutives à son non-paiement.

*

* *

● Aux termes de l’article 204 E, le prélèvement à la source résulte de l’application à l’assiette définie à l’article 204 F (pour la retenue à la source) et à l’article 204 G (pour l’acompte) d’un taux, déterminé dans les conditions prévues par l’article 204 H.

Le taux défini pour l’application du prélèvement à la source serait calculé par l’administration fiscale pour chaque foyer fiscal (du 1 de l’article 204 H) :

– sur la base des revenus de l’année N − 2 et de l’impôt acquitté en N − 1, pour les retenues à la source et les acomptes intervenant entre janvier et août de l’année N ;

– sur la base des revenus de l’année N − 1 et de l’impôt acquitté en N, pour les retenues à la source et les acomptes intervenant entre septembre et décembre de l’année N ;

De façon schématique, ce taux serait établi en calculant le rapport entre l’impôt sur le revenu du foyer fiscal afférent aux revenus se trouvant dans le champ du prélèvement à la source (avant prise en compte des réductions et crédits d’impôt), d’une part, et les revenus se trouvant dans le champ du prélèvement, d’autre part ( du 1 de l’article 204 H) :

Taux =

● Par dérogation, dès lors que l’impôt acquitté par le foyer fiscal après imputation des réductions et crédits d’impôt au titre des revenus des deux dernières années connues est nul, et que le revenu fiscal de référence (RFR) de ce foyer est inférieur à 25 000 euros par part de quotient familial, le taux d’imposition serait égal à 0 % (1 bis de l’article 204 H).

● Lorsque le débiteur de la retenue à la source ne disposerait pas d’un taux calculé par l’administration fiscale, il appliquerait aux traitements, salaires et pensions un taux proportionnel, selon le montant des revenus, en application d’une grille de « taux par défaut » (2 de l’article 204 H).

● Le contribuable pourrait opter à tout moment pour l’application par son employeur de ce « taux par défaut », s’il ne souhaite pas que ce dernier ait connaissance du taux d’imposition de son foyer fiscal (3 de l’article 204 H).

A. LE TAUX DE DROIT COMMUN

Les modalités de calcul du taux telles que définies par le du 1 de l’article 204 H (alinéas 25 et 26 du présent article) peuvent être retranscrites sous la forme suivante :

=

Sachant que, le cas échéant, devraient être déduits du numérateur les crédits d’impôt correspondant à des revenus se trouvant dans le champ du PAS, prévus par les conventions fiscales internationales.

1. Les modalités de calcul de l’impôt afférent aux revenus dans le champ du prélèvement à la source

a. Le point de départ : l’impôt dû par le foyer fiscal avant réductions et crédits d’impôt

Le taux de prélèvement serait calculé à partir de l’impôt sur le revenu dû par le foyer fiscal au titre de ses revenus N − 2 ou N − 1, selon la période de l’année, ce qui permettrait de prendre en compte tous les éléments retenus pour le calcul de l’impôt, à savoir :

– pour l’établissement du revenu net global imposable, les déficits catégoriels et leur imputation, le cas échéant, sur le revenu global, les charges et abattements applicables, tels que les pensions alimentaires ou l’abattement pour les personnes âgées aux revenus modestes ;

– par définition, le barème progressif, avec les tranches du barème par part de 0 %, 14 %, 30 %, 41 % et 45 % ;

– le quotient familial et conjugal, avec le cas échéant des demi-parts dérogatoires (anciens combattants, invalides…) ;

– le plafonnement des effets du quotient familial ;

– la réduction d’impôt de 30 % ou 40 % pour les contribuables domiciliés outre-mer ;

– la décote ainsi que la réduction de l’impôt résultant de l’article 2 du présent projet de loi de finances.

En cela, les principes fondateurs de l’impôt sur le revenu, et notamment sa progressivité, sa « conjugalisation » et sa « familialisation », ne seraient nullement modifiés.

Les charges déductibles et les abattements applicables au revenu global

La somme des différents revenus nets catégoriels aboutit au revenu brut global, dont peuvent être déduits certains abattements et charges :

● Au titre des charges déductibles du revenu global, doivent être mentionnés :

– les pensions alimentaires (versées à des ascendants ou descendants, ou en cas de divorce ou de séparation) ;

– les frais d’accueil de personnes âgées de plus de soixante-quinze ans qui vivent sous le toit du contribuable ;

– les cotisations versées au titre de l’épargne individuelle et facultative – plan d’épargne populaire (PERP) et produits assimilés comme Prefon, Corem et CGOS ;

– les versements effectués au titre de la retraite mutualiste du combattant ;

– les charges foncières afférentes aux monuments historiques dont la gestion ne procure pas de revenus ;

– les travaux de grosses réparations supportés par les nus propriétaires dans le cas de démembrements de propriété consécutifs à une succession ou une donation.

● Au titre des abattements, doivent être mentionnés :

– l’abattement en faveur des personnes de plus de soixante-cinq ans ou invalides, de situation modeste (abattement de 2 347 euros lorsque le revenu global net n’excède pas 14 730 euros, et de 1 174 euros lorsqu’il est compris entre 14 730 et 23 730 euros) ;

– l’abattement lié au rattachement des enfants mariés, pacsés ou chargés de famille, de moins de vingt et un ans ou de moins de vingt-cinq ans s’ils sont étudiants.

En revanche, les réductions et crédits d’impôt ne seraient pas pris en compte (Cf. infra), puisque serait retenu l’impôt sur le revenu résultant de l’application des règles prévues aux 1 à 4 du I de l’article 197 (51), c’est-à-dire avant imputation des réductions d’impôt, des crédits d’impôt (52) et des prélèvements ou retenues à la source non libératoires.

b. La détermination du montant de l’impôt afférent aux seuls revenus dans le champ du PAS, par le calcul d’un quotient

● La première étape du calcul du taux consisterait à calculer, à partir de l’impôt sur le revenu dû par le foyer fiscal, le montant de l’impôt afférent aux revenus se trouvant dans le champ du PAS : cela correspond au numérateur de la fraction posée supra.

En effet, pour calculer le taux du PAS, il importerait de « neutraliser » les effets de l’imposition des revenus ne se trouvant pas dans le champ de la réforme, notamment les PVM, les RCM et les revenus de l’actionnariat salarié – ces derniers restant imposés selon les mêmes modalités qu’aujourd’hui.

Pour ce faire, l’article 204 H retient l’option du « prorata », qui revient à calculer la part d’impôt correspondant aux revenus dans le champ du PAS, proportionnellement à l’importance de ces revenus au sein de l’ensemble des revenus du foyer fiscal.

L’impôt dû serait multiplié par un quotient, égal au rapport entre les montants nets imposables des revenus se trouvant dans le champ du PAS et le revenu net imposable au barème progressif de l’impôt sur le revenu (y compris donc les PVM, les RCM et les revenus de l’actionnariat salarié).

Les revenus non soumis au barème progressif de l’impôt sur le revenu

Certains revenus imposables ne sont pas soumis au barème progressif de l’impôt sur le revenu prévu au 1 de l’article 197 du CGI, mais imposés à un taux proportionnel.

Il s’agit principalement :

– des plus-values immobilières qui sont, en règle générale, soumises au taux proportionnel de 19 % ;

– des plus-values à long terme réalisées par les titulaires de revenus imposables dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux (BIC), des bénéfices agricoles (BA) ou des bénéfices non commerciaux (BNC) qui sont imposables au taux proportionnel de 16 % ;

– de certains gains d’actionnariat salarié (notamment, sous réserve qu’ils remplissent l’ensemble des conditions requises, les gains d’acquisition d’actions gratuites attribuées avant le 28 septembre 2012 et les bons de souscription de parts de créateur d’entreprise (BSPCE) ;

– des revenus de capitaux mobiliers lorsqu’ils sont soumis à un prélèvement forfaitaire libératoire (produits d’assurance-vie et des bons ou contrats de capitalisation) ;

– des versements en capital retraite imposables sur option au taux de 7,5 % ;

– de certains revenus de source française des non-résidents soumis dans certains cas à une retenue à la source totalement ou partiellement libératoire.

Source : direction générale des finances publiques.

Exemple : un contribuable a disposé en année (N − 2) de salaires, d’un montant de 30 000 euros, et d’une PVM, d’un montant imposable de 10 000 euros (après prise en compte d’un abattement pour durée de détention).

L’impôt acquitté à ce titre était de 5 455 euros. Le montant d’impôt afférent aux revenus dans le champ du PAS, soit à ses revenus salariaux, est calculé comme suit :

IR afférent aux revenus PAS =5 455

IR afférent aux revenus PAS = 5 455  = 3 980 euros.

Les revenus dans le champ du PAS représentant 72,9 % des revenus du foyer fiscal, l’impôt afférent aux revenus dans le champ du PAS serait égal à 72,9 % de l’impôt total dû.

Pour tous les foyers fiscaux ne percevant que des revenus relevant du champ du PAS, ce quotient serait par définition égal à un.

● Comme l’expose l’évaluation préalable (pages 109 et suivantes), cette méthode du « prorata » a été préférée à celle de la « re-liquidation », qui aurait consisté à isoler les revenus dans le champ du PAS pour calculer l’impôt dû au titre de ces seuls revenus. Cette méthode aurait eu pour inconvénient de minorer l’impôt afférent à ces revenus, en atténuant ainsi sa progressivité, et à réduire le taux d’imposition, ce qui conduirait ensuite à augmenter l’importance de la régularisation en N + 1 et à imposer les revenus se trouvant hors champ du PAS au taux marginal – donnant au contribuable le sentiment que ses revenus hors PAS seraient plus lourdement imposés.

Il convient de préciser qu’aux termes du deuxième alinéa du du 1 de l’article 204 H :

– pour l’établissement des montants nets imposables des revenus se trouvant dans le champ du PAS, les déficits seraient retenus pour une valeur nulle – puisqu’ils ont déjà été pris en compte pour le calcul de l’impôt.

– pour l’établissement du revenu net imposable au barème progressif de l’impôt, les déficits, charges et abattements déductibles du revenu global ne seraient pas pris en compte, là encore parce qu’ils l’ont déjà été lors du calcul de l’impôt.

2. Un taux égal au rapport entre ce montant d’impôt et les revenus se trouvant dans le champ du PAS

● Le taux de prélèvement de droit commun serait ensuite calculé en établissant le rapport entre :

– l’impôt afférent aux revenus dans le champ du PAS, réduit le cas échéant des crédits d’impôt correspondant aux revenus dans le champ du PAS et prévus par les conventions fiscales internationales ;

– et ces mêmes revenus dans le champ du PAS, pour leurs montants déterminés dans les conditions prévues par les articles 204 F et 204 G, à savoir les articles définissant l’assiette du PAS pour les différentes catégories de revenus. Les dispositions du 7° du 2 de l’article 204 G ne s’appliqueraient pas toutefois, ce qui signifie que les revenus donnant lieu à l’application du quotient prévu par l’article 163-0 A, ainsi que certains revenus tels que les subventions d’équipement, seraient cette fois pris en compte.

Exemple 1 : un contribuable perçoit des BNC égaux à 30 000 euros en année N − 2. Son impôt sur le revenu acquitté en septembre N − 1 est égal à 3 355 euros.

Son taux d’imposition est égal au rapport entre l’IR acquitté et les revenus perçus, soit 11,2 %.

C’est ce taux qui trouvera à s’appliquer pour le calcul de l’acompte acquitté entre janvier et août de l’année N.

Exemple 2 : un contribuable perçoit en année N − 2 des salaires de 84 000 euros et des RCM de 24 000 euros (dividendes bénéficiant d’un abattement de 40 %, et soumis à un PFO de 21 %). Son impôt acquitté en septembre N − 1 est égal à 22 853 euros (avant imputation du crédit d’impôt au titre du PFO, égal à 5 040 euros, soit 21 % de 24 000 euros).

Taux = Taux = = 22,9 %.

C’est ce taux qui s’appliquerait pour la retenue à la source effectuée sur les salaires perçus de janvier à août de l’année N.

● Le taux du PAS ayant vocation à s’appliquer à une assiette de revenus déterminée selon certaines règles, il est logique qu’il soit calculé en rapportant l’impôt au montant des revenus calculé selon ces mêmes règles.

C’est la raison pour ce mode de calcul du taux, en retenant au dénominateur les salaires avant déduction de 10 % pour frais professionnels (ou avant déduction des frais professionnels au réel), neutraliserait le fait que le taux de retenue à la source s’applique aux traitements et salaires avant déduction de 10 % pour frais professionnels (ou avant déduction des frais au réel). Il en irait de même pour l’abattement de 10 % applicable aux pensions.

Exemple : un contribuable perçoit en année N − 2 des salaires de 30 000 euros. Son impôt, calculé sur la base d’un revenu net imposable de 27 000 euros (après déduction de 10 %), est égal à 2 455 euros.

Le taux de la retenue à la source sera égal à 8,2 % (soit 2 455 / 30 000), et il viendra s’appliquer à une assiette égale au salaire avant déduction, soit 2 500 euros par mois.

Le résultat est identique à celui qui serait obtenu avec un taux égal à l’impôt dû rapporté au salaire net imposable (53), soit 9,1 % (2 455 / 27 000), et appliqué au salaire après déduction, soit 2 250 euros, comme le montre le calcul ci-dessous :

8,2 % de 2 500 euros = 205 euros

9,1 % de 2 250 euros = 205 euros.

3. La prise en compte des revenus perçus en N − 2 ou N − 1, voire des revenus perçus en N − 3

a. Les revenus et l’impôt pris en compte pour calculer le taux

● Le taux serait calculé selon les modalités qui viennent d’être exposées, en retenant, comme l’indique l’alinéa 27 :

– les revenus de l’année N − 2 et l’impôt acquitté en N − 1, pour les retenues à la source et les acomptes intervenant entre janvier et août de l’année N ;

– les revenus de l’année N − 1 et de l’impôt acquitté en N, pour les retenues à la source et les acomptes intervenant entre septembre et décembre de l’année N.

Ce séquençage correspond au calendrier de déclaration des revenus par les contribuables, au printemps, et à l’établissement des avis d’imposition par l’administration fiscale à l’été : en août de l’année N, dans la généralité des cas, les revenus de l’année N − 1 et l’impôt dû à ce titre sont connus par l’administration fiscale, ce qui lui permettrait d’actualiser le taux du prélèvement à la source et de transmettre ce taux aux débiteurs de la retenue à la source (employeurs et caisses de retraite, pour l’essentiel), le cas échéant.

Ainsi, au cours d’une même année N, deux taux s’appliqueraient : l’un pendant les huit premiers mois, l’autre, issu de données « rafraîchies », pendant les quatre derniers mois – le même taux s’appliquant ainsi de septembre N à septembre N + 1.

Les deux taux appliqués au cours d’une même année ne seraient d’ailleurs pas nécessairement différents, notamment si les revenus du foyer fiscal – et la législation fiscale – n’ont pas évolué entre les années N − 2 et N − 1.

● Néanmoins, le deuxième alinéa du du 1 (alinéa 28) précise que dans le cas où l’impôt au titre des revenus de l’année N − 2 ou de l’année N − 1 n’aurait pas pu être établi, seraient pris en compte, pour le calcul du taux de prélèvement en année N, l’impôt et les revenus de la dernière année pour laquelle l’impôt a été établi, sans que cette année puisse être antérieure à l’année N − 3.

En pratique, cela signifie qu’une personne qui a acquitté l’impôt sur le revenu au titre de ses revenus de 2018, qui n’en a pas acquitté en 2019 et 2020 (par exemple parce qu’elle est partie à l’étranger), pourrait se voir appliquer en janvier 2021 un taux de prélèvement à la source fondé sur ses revenus de 2018 (et l’impôt acquitté à ce titre). Ce taux de prélèvement à la source pourrait s’appliquer jusqu’à la fin de l’année 2021.

En revanche, à compter du 1er janvier 2022, ce taux de prélèvement ne pourrait plus être utilisé, compte tenu de l’ancienneté de ces revenus (N − 4), et ce serait le taux par défaut (Cf. C du III) qui prendrait le relais, jusqu’en septembre suivant – date à laquelle l’administration fiscale devrait disposer des données fiscales nécessaires pour établir un taux de prélèvement actualisé, sur la base de la déclaration de revenus du printemps.

Selon les informations fournies par l’administration fiscale, cette disposition constituerait une sorte de « clause de sauvegarde », permettant de disposer d’un taux même ancien, fondé sur les données du contribuable, de préférence au taux par défaut.

b. Le caractère par construction historique du taux de prélèvement

● Le mode de calcul du taux reposerait sur les données fiscales disponibles au moment de l’imposition, lesquelles sont nécessairement datées. Définir un taux d’imposition en temps réel apparaît assez illusoire, compte tenu de la structure et de la complexité de notre système fiscal, comme le relevait d’ailleurs le rapport du Conseil des prélèvements obligatoires de 2012 (54).

De ce fait, la contemporanéité de l’imposition dans le cadre du PAS résulterait de l’application à une assiette contemporaine de ce taux « historique », dans le cas de la retenue à la source effectuée sur les salaires et les retraites. Cela permettrait au contribuable de bénéficier d’un « effet assiette », avec par exemple une diminution mécanique de l’impôt prélevé lorsque son salaire diminue.

En revanche, un tel « effet assiette » ne pourrait être constaté dans le cadre de l’acompte, puisque l’assiette serait alors, de même que le taux, établie par référence aux revenus et bénéfices des années N − 2 et N − 1 (Cf. B du II)

Pour les revenus se trouvant dans le champ de l’acompte, la contemporanéité de l’imposition pourrait être recherchée par une demande de modulation du taux de prélèvement – à la hausse comme à la baisse, comme le prévoit l’article 204 J (Cf. V), en fonction de l’évolution de ses revenus notamment ; cela supposerait nécessairement une démarche du contribuable.

● Le du 1 (alinéa 29) prévoit que le taux tel qu’issu du mode de calcul ainsi exposé serait arrondi à la décimale la plus proche – la fraction de décimale égale à 0,5 étant comptée pour un. Cela signifie en pratique qu’un taux d’imposition de 7,72 % serait arrondi à 7,7 %, qu’un taux de 7,78 % serait arrondi à 7,8 %, et qu’un taux de 7,75 % le serait à 7,8 % également. Le différentiel entre impôt prélevé et impôt dû in fine – par construction d’un montant très limité – qui résulterait des arrondis du taux de prélèvement aurait vocation à être régularisé à l’été de l’année suivante.

● Le du 1 (alinéa 30) prévoit que l’administration mettrait le taux à disposition du contribuable et le transmettrait au débiteur de la retenue à la source, à savoir l’employeur ou la caisse de retraite ou les organismes de sécurité sociale.

S’agissant des modalités de mise à disposition du taux auprès du contribuable, l’évaluation préalable précise que l’avis d’imposition transmis par l’administration à l’été de l’année N indiquerait au contribuable le taux de prélèvement s’appliquant à compter du mois de septembre N. L’avis d’imposition adressé à l’été 2017, au titre de l’imposition des revenus de 2016, mentionnerait par ailleurs le taux de prélèvement à la source qui s’appliquerait aux revenus du foyer fiscal à compter du 1er janvier 2018, date d’entrée en vigueur de la réforme. Le contribuable pourrait également trouver son taux de prélèvement dans son espace particulier, sur le site impots.gouv.fr.

Les modalités de transmission du taux par l’administration fiscale vers le débiteur de la retenue à la source sont détaillées dans le B du XII.

4. L’absence de prise en compte des réductions et crédits d’impôt dans le calcul du prélèvement à la source

Comme vu supra, le taux du prélèvement à la source sur les revenus de l’année N serait calculé à partir de l’impôt acquitté par le foyer fiscal en année N − 1 ou N, avant l’imputation des réductions et crédits d’impôt. Leur prise en compte n’interviendrait qu’au moment de la régularisation, à l’été N + 1. Cette option apparaît au premier abord assez contre-intuitive, compte tenu de l’objectif de la réforme de renforcer la contemporanéité de l’imposition.

Certes, il en est de même aujourd’hui, puisque les réductions et crédits d’impôt obtenus au titre d’une année N ne sont pris en compte pour le calcul de l’imposition qu’à l’été N + 1. Pour autant, les mensualités et acomptes versés entre janvier et août de l’année N + 2 sont calculés à partir de l’impôt dû en N + 1 après prise en compte des réductions et crédits d’impôt : de ce fait, dès lors que le foyer fiscal a bénéficié d’un avantage fiscal en année N, ses prélèvements effectués au cours de l’année N + 2 en tiennent compte, ce qui peut se traduire le cas échéant par un accroissement ou une minoration de la régularisation, selon que le foyer fiscal bénéficie ou pas d’avantages fiscaux pour les années suivant l’année N, comme cela est développé ci-après.

Afin de disposer d’un ordre de grandeur, il convient de rappeler qu’en 2014, 9,6 millions de foyers fiscaux avaient imputé des réductions ou crédits d’impôt au titre de l’imposition des revenus de l’année 2013. Ils sont 8,7 millions en 2016 (au titre de l’imposition des revenus de 2015, et sur la base de la deuxième émission, qui ne couvre pas la totalité des foyers fiscaux).

a. Une contrainte budgétaire s’imposant au titre de l’année 2018

Le choix de ne pas intégrer l’effet des réductions et crédits d’impôt dans le calcul du taux est intrinsèquement lié à celui de maintenir le bénéfice de ces réductions et crédits d’impôt acquis au titre de l’année 2017 dans le cadre de la période de transition, alors même que les revenus de l’année 2017 n’auraient pas vocation, pour la plus grande partie, à être imposés, comme cela est détaillé infra dans la deuxième partie du présent commentaire.

Le maintien des avantages fiscaux au titre de l’imposition des revenus de 2017 devrait se traduire par des pertes de recettes de 13,6 milliards d’euros pour l’année 2018, ainsi que l’indique l’évaluation préalable, dont près de 9 milliards d’euros sous forme de crédits d’impôt et 4,6 milliards d’euros sous forme de réductions d’impôt.

Retenir au numérateur de la formule du taux d’imposition prévu par l’article 204 H l’impôt après réductions et crédits d’impôt viendrait minorer les taux de prélèvement à la source des foyers fiscaux et partant, les recettes de l’impôt sur le revenu, à hauteur d’environ 10,6 milliards d’euros sur une base historique (55), selon les chiffres fournis par l’évaluation préalable (56). Cela se traduirait donc par un « double coût » en 2018, assez peu soutenable pour les finances publiques. Cet écueil, indissociable de la réforme du prélèvement à la source, avait d’ailleurs été identifié par le rapport particulier sur les scénarios de mise en œuvre de la retenue à la source (57), dans le cadre des travaux du Conseil des prélèvements obligatoires ; la perte de recettes avait alors été chiffrée à près de 12 milliards d’euros (montant qui comprenait la dépense fiscale afférente à la prime pour l’emploi, de l’ordre de 2 milliards d’euros).

b. Une option de nature à majorer le prélèvement à la source applicable aux foyers fiscaux bénéficiant d’avantages fiscaux récurrents, cette majoration étant compensée en septembre de la même année par le versement de la restitution

i. La distinction entre avantages fiscaux occasionnels et récurrents

● Parmi les différents crédits et réductions d’impôt sur le revenu, certains d’entre eux peuvent être qualifiés d’occasionnels, en ce qu’ils n’ont pas vocation à se reproduire de façon régulière, tandis que d’autres bénéficient aux foyers fiscaux de façon plus continue, en venant minorer l’impôt dû de façon récurrente.

Cette répartition ne repose pas sur un critère juridique, mais résulte en pratique de la nature de la dépense ouvrant droit à avantage fiscal, qui a vocation ou non à se reproduire. Elle découle également des modalités d’imputation de l’avantage fiscal, laquelle peut être effectuée sur plusieurs années.

L’exemple typique d’un avantage fiscal occasionnel est le crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE), au titre des dépenses de rénovation énergétique réalisées par le contribuable dans son habitation principale : celui-ci n’a pas vocation à changer ses fenêtres ou sa chaudière tous les ans. Tel est également le cas des réductions d’impôt au titre d’investissements dans les PME (réduction d’impôt « Madelin » prévue par l’article 199 terdecies-0 A du CGI), au titre d’investissements productifs en outre-mer (199 undecies B) ou d’investissements dans le logement social outre-mer (199 undecies C).

En revanche, des avantages fiscaux présentent un caractère récurrent lorsque le foyer fiscal a tendance à reconduire les dépenses y ouvrant droit d’une année sur l’autre : tel est généralement le cas pour la réduction et le crédit d’impôt au titre de l’emploi d’un salarié à domicile prévus par l’article 199 sexdecies du CGI (emploi d’une garde d’enfant pour une famille, d’une aide-ménagère pour une personne âgée), mais aussi pour la réduction d’impôt au titre des frais de dépendance prévue par l’article 199 quindecies (les personnes accueillies en EHPAD y sont généralement hébergées jusqu’à la fin de leur vie), ou encore le crédit d’impôt au titre des frais de garde des jeunes enfants (article 200 quater B).

La récurrence de l’avantage fiscal peut aussi résulter de son imputation sur plusieurs années, après la réalisation de l’investissement y ouvrant droit : tel est le cas des réductions d’impôt au titre des investissements locatifs, tels que le dispositif « Scellier », le dispositif « Pinel » ou encore le dispositif « Censi-Bouvard », pour lesquels la réduction d’impôt est imputée par fraction sur plusieurs années – six, neuf ou douze ans pour le « Pinel », neuf ans pour le « Scellier » et pour le « Censi-Bouvard ». Dès lors, si l’investissement ouvrant droit à réduction d’impôt n’a pas vocation à se renouveler tous les ans, l’avantage fiscal à ce titre vient minorer l’impôt dû pendant plusieurs années, à hauteur d’un montant identique et bien identifié.

● Le tableau ci-après vise à apprécier le caractère récurrent ou non des réductions et crédits d’impôt dont bénéficient les ménages et les entreprises : réalisé à partir des données transmises par l’administration fiscale, il retient les foyers fiscaux ayant pu être suivis sur les trois années 2013, 2014 et 2015, et ayant bénéficié d’avantages fiscaux, en indiquant pour chaque année et chaque avantage fiscal, le montant moyen des réductions et crédits d’impôt ayant été imputé et/ou restitué chaque année, et en mentionnant la part des foyers fiscaux en ayant bénéficié en 2013, 2014 et 2015, afin de mesurer leur récurrence sur trois années.

La part des foyers fiscaux ayant bénéficié d’un même avantage fiscal sur trois années est logiquement élevée pour les réductions d’impôt précitée « Scellier », « Pinel » et « Duflot » (entre 84 % et 90 %), avec des montants moyens de réduction d’impôt compris entre 3 450 et 4 850 euros. Elle est de l’ordre de 70 % pour le crédit d’impôt au titre des cotisations versées à des organisations syndicales – le montant moyen étant dans ce cas beaucoup plus modeste, de l’ordre de 100 euros – et de 60 % pour la réduction d’impôt au titre des dons (montant moyen de 377 euros).

Cette proportion est également de l’ordre de 60 % pour la réduction et le crédit d’impôt au titre de l’emploi d’un salarié à domicile (montant moyen de respectivement 1 250 euros et 1 700 euros), ainsi que pour le crédit d’impôt pour frais de garde d’enfants de moins de six ans (montant moyen de 726 euros).

Les avantages fiscaux bénéficiant aux entreprises présentent généralement un caractère moins récurrent, à l’exception du crédit d’impôt en faveur de l’agriculture biologique (71 %), du crédit d’impôt en faveur des métiers d’art (48 %) et du crédit d’impôt famille (47 %), notamment.

FOYERS SUIVIS SUR TROIS ANS ET AYANT BÉNÉFICIÉ D’UNE RÉDUCTION OU D’UN CRÉDIT D’IMPÔT
AU TITRE DES REVENUS 2013 (6ÉMISSION), 2014 (6E ÉMISSION) ET/OU 2015 (2E ÉMISSION) – AVANTAGES FISCAUX DES MÉNAGES*

Réduction ou crédit d’impôt

RI/CI en 2013

RI/CI en 2014

RI/CI en 2015

RI/CI en 2013, en 2014 et en 2015

Nombre

Montant (en millions d’euros)

Montant moyen (en euros)

Nombre

Montant (en millions d’euros)

Montant moyen (en euros)

Nombre

Montant (en millions d’euros)

Montant moyen (en euros)

Nombre

%

Total des montants moyens (en millions d’euros)

Montant moyen (en euros)

Réduction d’impôt Scellier (article 199 septvicies du CGI)

238 076

1 109

4 657

248 138

1 175

4 734

243 315

1 152

4 733

214 008

90%

1 038

4 851

Réductions d’impôt Duflot ou Pinel (199 novovicies)

6 427

19

2 966

22 760

77

3 390

52 518

187

3 566

5 633

88%

19

3 451

Réduction d’impôt au titre de l’investissement meublé non professionnel (« Censi-Bouvard ») (199 sexvicies)

43 007

153

3 552

45 102

158

3 494

46 787

158

3 377

36 168

84%

133

3 691

Crédit d’impôt sur les cotisations syndicales (199 quater C)

1 424 423

140

98

1 435 936

142

99

1 415 950

144

101

985 321

69%

105

106

Réduction d’impôt au titre des cotisations versées aux associations de défense des forêts contre l’incendie (200 decies A)

3 465

epsilon

102

3 660

epsilon

96

3 872

epsilon

93

2 209

64%

epsilon

114

Réduction d’impôt au titre des dons (200)

4 673 068

1 264

271

4 241 814

1 260

297

4 155 438

1 310

315

2 832 194

61%

1 069

377

Réduction d’impôt au titre des investissements locatifs dans les DOM (199 undecies A)

31 592

214

6 782

28 008

175

6 259

23 822

134

5 607

18 586

59%

112

6 045

Crédit d’impôt pour frais de garde de jeunes enfants (200 quater B)

1 655 742

1 026

619

1 675 530

1 056

630

1 664 738

1 073

644

976 627

59 %

709

726

Crédit d’impôt pour l’emploi d’un salarié à domicile (199 sexdecies)

1 403 206

1 828

1 303

1 398 293

1 832

1 310

1 403 848

1 858

1 323

818 683

58 %

1 398

1 708

Réduction d’impôt pour l’emploi d’un salarié à domicile (199 sexdecies)

1 511 660

1 424

942

1 435 135

1 472

1 026

1 362 183

1 434

1 053

860 193

57 %

1 075

1 249

Réduction d’impôt pour frais de comptabilité et d’adhésion à un CGA (199 quater B)

78 483

49

622

81 386

52

638

84 304

54

637

44 147

56 %

29

664

Réduction d’impôt pour dépenses d’hébergement des personnes dépendantes (199 quindecies)

178 389

215

1 204

195 125

256

1 313

190 881

251

1 317

98 270

55 %

150

1 526

Réduction d’impôt au titre des primes de contrats de rente survie (199 septies)

34 927

10

297

28 031

9

310

26 512

8

313

18 525

53 %

6

329

Crédit d’impôt au titre des dépenses engagées par les exploitants agricoles pour assurer leur remplacement (200 undecies)

27 013

12

438

27 896

13

455

30 311

14

476

14 158

52 %

7

526

Réduction d’impôt pour frais de scolarité (199 quater F)

2 327 024

434

186

1 775 741

340

191

1 744 975

334

191

1 128 789

49 %

236

209

Réduction d’impôt au titre des intérêts d’emprunt souscrit pour financer la reprise d’une société (199 terdecies-0 B)

2 190

2

742

1 766

1

676

1 400

1

624

1 077

49 %

1

803

Réduction d’impôt au titre des FIP Corse (199 terdecies-0 A – VI ter)

7 001

16

2 259

8 867

20

2 310

11 443

27

2 361

3 405

49 %

9

2 533

Réduction d’impôt au titre des investissements productifs outre-mer (199 undecies B)

15 057

291

19 317

15 548

279

17 938

15 409

264

17 131

7 070

47 %

139

19 689

Crédit d’impôt pour loyers impayés (200 nonies)

35 205

4

128

33 928

5

137

29 772

4

145

13 860

39 %

2

133

Crédit d’impôt PFL sur RCM

400 862

54

136

448 889

62

139

493 910

72

146

148 692

37 %

15

102

Réduction d’impôt FIPOM (199 terdecies-0 A – VI ter A)

116

1

5 032

162

1

4 341

210

1

4 282

39

34 %

0

4 981

Réduction d’impôt au titre de souscription de FCPI (199 terdecies-0 A – VI)

25 641

29

1 121

25 911

30

1 158

25 467

31

1 208

8 550

33 %

10

1 149

Réduction d’impôt au titre de l’investissement dans le logement social en outre-mer (199 undecies C)

8 777

262

29 822

7 057

189

26 846

7 867

209

26 544

2 881

33 %

94

32 718

Réduction d’impôt pour investissements forestiers (199 decies H)

7 274

6

861

5 513

5

856

6 767

5

708

2 229

31 %

2

880

Réduction d’impôt au titre des SOFICA (199 unvicies)

5 952

19

3 186

6 337

20

3 122

6 270

20

3 159

1 807

30 %

6

3 444

Réduction d’impôt au titre de la souscription de FIP (199 terdecies-0 A – VI bis)

19 274

23

1 213

19 361

24

1 217

19 995

24

1 192

5 645

29 %

7

1 247

Crédit d’impôt Retenue à la source des élus locaux

327

1

4 331

907

2

2 398

1 015

3

2 851

85

26 %

0

5 200

Réduction d’impôt au titre des investissements dans le secteur du tourisme (199 decies E à G)

5 503

18

3 293

3 078

9

3 002

2 095

5

2 590

1 297

24 %

4

3 228

Réduction d’impôt Malraux (199 tervicies)

4 586

27

5 839

8 102

31

3 805

7 206

29

3 969

973

21 %

7

7 268

Réduction d’impôt pour souscription au capital d’une PME
(199 terdecies-0 A – I à V)

40 992

87

2 126

36 973

78

2 106

36 466

71

1 936

5 420

13 %

16

2 998

Réduction d’impôt au titre de la prestation compensatoire (199 octodecies)

8 758

31

3 519

10 520

34

3 237

10 987

35

3 213

921

11 %

1

1 462

Crédit d’impôt pour dépenses d’équipements en faveur de l’aide à la personne (200 quater A)

30 544

29

950

38 333

37

975

44 091

44

994

1 663

5 %

0

147

Crédit d’impôt en faveur de la transition énergétique (200 quater)

630 527

588

932

618 800

829

1 340

1 063 826

1 509

1 419

7 103

1 %

5

743

Crédit d’impôt emprunt pour financer l’acquisition de la résidence principale (200 quaterdecies)

1 417 950

1 129

796

1 023 520

727

710

650 601

403

619

578 519

 

437

 

FOYERS SUIVIS SUR TROIS ANS ET AYANT BÉNÉFICIÉ D’UNE RÉDUCTION OU D’UN CRÉDIT D’IMPÔT
AU TITRE DES REVENUS 2013 (6E ÉMISSION), 2014 (6E ÉMISSION) ET/OU 2015 (2E ÉMISSION) – AVANTAGES FISCAUX DES ENTREPRISES*

Réduction ou crédit d’impôt

RI/CI en 2013

RI/CI en 2014

RI/CI en 2015

RI/CI en 2013, en 2014 et en 2015

Nombre

Montant (en millions d’euros)

Montant moyen (en euros)

Nombre

Montant (en millions d’euros)

Montant moyen(en euros)

Nombre

Montant (en millions d’euros)

Montant moyen (en euros)

Nombre

%

Total des montants moyens (en millions d’euros)

Montant moyen (en euros)

Crédit d’impôt en faveur de l’agriculture biologique (article 244 quater L du CGI)

5 635

12

2 142

6 333

14

2 166

6 835

15

2 209

4 024

71 %

9

2 233

Crédit d’impôt en faveur des métiers d’art (244 quater O)

180

1

3 538

180

1

3 638

181

1

3 468

86

48 %

0

4 407

Crédit d’impôt famille (244 quater F)

1 525

1

732

1 734

1

785

1 964

2

851

722

47 %

0

667

Crédit d’impôt formation du chef d’entreprise (244 quater M)

123 128

27

221

134 395

29

219

142 842

32

221

56 535

46 %

14

247

Crédit d’impôt Maître restaurateur (244 quater Q)

263

1

2 269

275

1

2 278

272

0

1 760

107

41 %

0

1 555

Crédit d’impôt Mécénat entreprise (238 bis – 1 et 4)

2 772

2

640

3 269

2

618

4 040

2

604

1 012

37 %

1

872

Crédit d’impôt apprentissage (244 quater G)

64 553

85

1 310

52 477

57

1 082

40 937

40

967

20 030

31 %

29

1 430

Crédit d’impôt pour investissement en Corse (244 quater E)

1 569

6

3 548

1 654

7

4 197

1 629

4

2 729

426

27 %

3

6 552

Crédit d’impôt en faveur de l’intéressement (244 quater T)

448

0

1 103

401

0

1 217

295

0

1 217

74

17 %

0

1 433

Crédit d’impôt recherche (CIR)

4 335

6

1 443

5 274

9

1 694

3 734

7

1 953

93

2 %

1

10 896

Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) (244 quater C)

249 328

328

1 316

398 581

689

1 728

403 430

774

1 920

179 673

 

354

 

(*) champ : réductions et crédits d’impôts hors crédits d’impôt sur revenus de source étrangère et crédits d’impôt PFO/PFL sur RCM, pour la partie imputée et restituée, l’objectif étant de suivre ici la récurrence de ces avantages fiscaux sur trois ans.

Le tableau ci-après retrace pour les différents avantages fiscaux bénéficiant aux ménages la dépense fiscale afférente en 2015 et les prévisions pour 2016 et 2017, ainsi que le nombre de bénéficiaires en 2015, en précisant pour chacun d’entre eux leur taux de récurrence, tel qu’apprécié sur la période 2013 à 2015.

Il convient de préciser que certains avantages fiscaux, tels que la réduction d’impôt au titre d’investissements dans le secteur du tourisme, la réduction d’impôt « Scellier » ou encore le crédit d’impôt au titre des intérêts d’emprunt pour l’acquisition de la résidence principale, sont en extinction, même s’ils produisent encore des effets pour les contribuables. À cet égard, la prime pour l’emploi, supprimée à compter de l’imposition des revenus de 2015 n’a pas été prise en compte.

PRÉSENTATION DE LA DÉPENSE FISCALE AFFÉRENTE AUX DIFFÉRENTS RÉDUCTIONS
ET CRÉDITS D’IMPÔT BÉNÉFICIANT AUX MÉNAGES

Réduction ou crédit d’impôt

Nombre de bénéficiaires en 2015

Dépense fiscale en 2015

Dépense fiscale en 2016

Dépense fiscale en 2017

Taux de récurrence

2013-2015

Réduction d’impôt Scellier (article 199 septvicies du CGI)

nc

1 211

1 211

1 211

90 %

Réduction d’impôt Duflot ou Pinel (199 novovicies)

25 307

77

195

360

88 %

Réduction d’impôt au titre de l’investissement meublé non professionnel (Censi-Bouvard) (199 sexvicies)

51 853

164

167

170

84 %

Crédit d’impôt sur cotisations syndicales (199 quater C)

1 645 580

152

154

156

69 %

Réduction d’impôt au titre des cotisations versées aux associations de défense des forêts contre l’incendie (200 decies A)

4 866

epsilon

epsilon

epsilon

64 %

Réduction d’impôt au titre des dons (200)

5 746 500

1 315

1 370

1 400

61 %

Réduction d’impôt au titre des investissements locatifs dans les DOM (199 undecies A)

33 046

180

140

110

59 %

Crédit d’impôt pour frais de garde de jeunes enfants (200 quater B)

1 864 685

1 175

1 205

1 235

59 %

Crédit d’impôt pour emploi d’un salarié à domicile (199 sexdecies)

1 517 145

1 986

2 025

2 025

58 %

Réduction d’impôt pour emploi d’un salarié à domicile (199 sexdecies)

2 353 964

1 540

1 495

1 495

57 %

Réduction d’impôt pour frais de comptabilité et d’adhésion à un CGA (199 quater B)

103 943

52

55

37

56 %

Réduction d’impôt pour dépenses d’hébergement des personnes dépendantes (199 quindecies)

444 536

308

300

300

55 %

Réduction d’impôt au titre des primes de contrats de rente survie (199 septies)

50 179

9

8

8

53 %

Crédit d’impôt au titre des dépenses engagées par les exploitants agricoles pour assurer leur remplacement (200 undecies)

29 264

13

16

16

52 %

Réduction d’impôt pour frais de scolarité (199 quater F)

nc

343

340

355

49 %

Réduction d’impôt au titre des intérêts d’emprunt souscrit pour financer la reprise d’une société (199 terdecies-0 B)

2 037

1

1

1

49 %

Réduction d’impôt au titre des FIP Corse (199 terdecies-0 A – VI ter)

9 487

21

28

28

49 %

Réduction d’impôt au titre des investissements productifs outre-mer (199 undecies B)

18 808

297

285

285

47 %

Crédit d’impôt pour loyers impayés (200 nonies)

37 675

5

5

5

39 %

Réduction d’impôt FIPOM (199 terdecies-0 A – VI ter A)

179

1

1

1

34 %

Réduction d’impôt au titre de souscription de FCPI (199 terdecies-0 A – VI)

27 870

30

32

32

33 %

Réduction d’impôt au titre de l’investissement dans le logement social en outre-mer (199 undecies C)

7 845

202

225

nc

33 %

Réduction d’impôt pour investissements forestiers (199 decies H)

6 797

5

5

5

31 %

Réduction d’impôt au titre des SOFICA (199 unvicies)

6 790

20

21

21

30 %

Réduction d’impôt au titre de la souscription de FIP (199 terdecies-0 A – VI bis)

20 799

23

24

24

29 %

Réduction d’impôt au titre des investissements dans le secteur du tourisme (199 decies E à G)

3 552

9

6

6

24 %

Réduction d’impôt Malraux (199 tervicies)

8 800

32

31

33

21 %

Réduction d’impôt pour souscription au capital d’une PME (199 terdecies-0 A – I)

49 244

77

72

72

13 %

Réduction d’impôt au titre de la prestation compensatoire (199 octodecies)

13 934

40

43

43

11 %

Crédit d’impôt pour dépenses d’équipements en faveur de l’aide à la personne (200 quater A)

41 960

41

48

48

5 %

Crédit d’impôt en faveur de la transition énergétique (200 quater)

660 564

874

1 670

1 670

1 %

Crédit d’impôt au titre des intérêts d’emprunt pour l’acquisition d’une résidence principale (200 quaterdecies)

1 099 047

763

420

200

Sous-total pour les RI-CI dont la récurrence est supérieure à 50 %

8 182

8 341

8 523

Total pour les RI et CI

10 966

11 598

11 352

Source : commission des finances, sur la base des chiffres figurant dans le tome II de l’annexe Évaluations des voies et moyens au présent projet de loi de finances.

Il permet de constater que les dépenses fiscales pour lesquelles le taux de récurrence est supérieur à 50 % représentent entre les deux tiers et les trois quarts de la dépense fiscale totale.

ii. L’absence de prise en compte des avantages fiscaux dans le taux du prélèvement permet d’éviter des régularisations en année N + 2, pour les avantages non récurrents

● Dans le droit en vigueur, pour un foyer fiscal bénéficiant d’une réduction ou d’un crédit d’impôt occasionnel au titre de l’année N, la prise en compte des avantages fiscaux au titre de l’année N dans les mensualités et acomptes versés en année N + 2 se traduit par un important solde d’impôt à acquitter à l’été N + 2 – si le foyer fiscal ne bénéficie plus d’avantage fiscal au titre de l’année N + 1. L’effet de la régularisation est alors concentré sur septembre N + 2.

● Le droit proposé, avec l’absence de prise en compte des avantages fiscaux dans le taux de prélèvement, se traduirait en revanche par un montant constant d’impôt acquitté chaque mois, et une restitution ponctuelle en septembre N + 1 à hauteur de la réduction ou du crédit d’impôt ; la régularisation qui intervient dans le droit en vigueur en septembre N + 2 est ainsi évitée.

● En revanche, si l’avantage fiscal était pris en compte pour établir le taux de prélèvement du contribuable, le taux serait réduit à partir de septembre N + 1, et ce jusqu’en août N + 2. Il en résulterait alors une régularisation en septembre N + 2 puis en septembre N + 3 – en prenant pour hypothèse que le foyer fiscal ne bénéficie pas d’un autre avantage fiscal d’un montant similaire au titre de l’imposition de ses revenus N + 1. De façon schématique, la régularisation serait réalisée à hauteur d’un tiers en septembre N + 2, et à hauteur des deux tiers en septembre N + 3.

Ainsi, un investissement réalisé en année N, ouvrant droit à avantage fiscal en année N + 1, pourrait occasionner une régularisation d’impôt jusqu’à près de trois ans après l’engagement de la dépense, du fait de son effet sur le taux de prélèvement, ce qui pourrait susciter des incompréhensions de la part des contribuables.

● Le tableau ci-après illustre les effets d’un avantage fiscal non-récurrent sur l’imposition d’un foyer fiscal :

– dans le droit en vigueur (en prenant pour hypothèse que son impôt est payé mensuellement) ;

– dans le droit proposé (sans prise en compte de l’avantage fiscal dans le taux de PAS) ;

– dans le cas où le calcul du taux de PAS prendrait en compte l’avantage fiscal.

Le cas retenu est celui, très simplifié, d’un contribuable célibataire dont les revenus et l’impôt sont constants, par hypothèse ; son IR est égal à 2 000 euros. Il change ses fenêtres en année N, et bénéficie d’un CITE égal à 1 000 euros en année N + 1, qui ramène donc son impôt à 1 000 euros.

 

Année N

Année N + 1

Année N + 2

Année N + 3

Droit existant

IR dû (au titre des revenus N − 1) = 2 000 euros

IR dû (au titre des revenus N) = 1 000 euros

IR dû (au titre des revenus N + 1) = 2 000 euros

IR dû (au titre des revenus N + 2) = 2 000 euros

Janvier- août :

200 euros/mois

Sept.-déc. :

200 euros/mois (sur deux mois)

Janvier- août :

200 euros/mois

Sept.-déc. :

Restitution de 600 euros

Janvier- août :

100 euros/mois

Sept.-déc. :

100 euros en sept et 367 euros d’oct. à déc. soit une régularisation de 1 000 euros

Janvier- août :

200 euros/mois

Sept.-déc. :

200 euros/mois (sur deux mois)

Droit proposé

IR dû (au titre des revenus N − 1) = 2 000 euros

IR dû (au titre des revenus N) = 1 000 euros

IR dû (au titre des revenus N + 1) = 2 000 euros

IR dû (au titre des revenus N + 2) = 2 000 euros

Janvier- août :

167 euros/mois

Sept.-déc. :

167 euros/mois (sur quatre mois)

Janvier- août

167 euros/mois

Sept.-déc. :

167 euros/mois (sur quatre mois)

Restitution = 1 000 euros

Janvier- août :

167 euros/mois

Sept.-déc. :

167 euros/mois (sur quatre mois)

Janvier- août :

167 euros/mois

Sept.-déc. :

167 euros/mois (sur quatre mois)

PAS avec prise en compte des RI/CI pour le calcul du taux

IR dû (au titre des revenus N − 1) = 2 000 euros

IR dû (au titre des revenus N) = 1 000 euros

IR dû (au titre des revenus N + 1) = 2 000 euros

IR dû (au titre des revenus N + 2) = 2 000 euros

Janvier- août :

167 euros/mois

Sept.-déc. :

167 euros/mois (sur quatre mois)

Janvier- août

167 euros/mois

Sept.-déc. :

83 euros/mois (sur quatre mois)

Restitution = 1 000 euros

Janvier- août :

83 euros/ mois

Sept.-déc. :

167 euros/mois (sur quatre mois)

Solde IR dû sur revenus N + 1 = 332 euros

(montants PAS en N + 1 =167*8+83*4)

Janvier- août :

167 euros/mois

Sept.-déc. :

167 euros/mois (sur quatre mois)

Solde IR dû sur revenus N + 2 = 668 euros

(montants PAS en N + 2 = 83*8+167*4)

Source : commission des finances.

iii. L’absence de prise en compte des avantages fiscaux dans le taux du prélèvement conduit en revanche à « surprélever » les contribuables entre janvier et août, et à amplifier les régularisations en septembre, pour les avantages récurrents

● Dès lors qu’il s’agit d’un avantage fiscal que l’on peut qualifier de « récurrent », sa prise en compte dans le calcul du taux serait de nature à améliorer l’exactitude du taux de prélèvement et à limiter l’ampleur de la régularisation en septembre, voire de l’effacer.

De la même façon que dans la partie précédente, le tableau ci-après illustre cet effet, en prenant le cas schématique d’un couple dont les revenus et l’impôt sont constants d’une année sur l’autre, avec un impôt de 3 000 euros, et qui emploie un salarié à compter de janvier N pour garder son enfant. Le crédit d’impôt à ce titre est égal à 1 500 euros par an, et est récurrent d’une année sur l’autre.

 

Année N

Année N + 1

Année N + 2

Année N + 3

Droit existant

IR dû (au titre des revenus

N − 1) = 3 000 euros

IR dû (au titre des revenus N) = 1 500 euros

IR dû (au titre des revenus N + 1) = 1 500 euros

IR dû (au titre des revenus N + 2) = 1 500 euros

Janvier- août :

300 euros/ mois

Sept.-déc. :

300 euros/ mois (sur deux mois)

Janvier- août :

300 euros/mois

Sept.-déc. :

0 euro/mois

Restitution de 900 euros

Janvier- août :

150 euros/ mois

Sept.-déc. :

150 euros/mois (sur deux mois)

Janvier- août :

150 euros/ mois

Sept.-déc. :

150 euros/ mois (sur deux mois)

Droit proposé

IR dû (au titre des revenus N − 1) = 3 000 euros

IR dû (au titre des revenus N) = 1 500 euros

IR dû (au titre des revenus N + 1) = 1 500 euros

IR dû (au titre des revenus N + 2) = 1 500 euros

Janvier- août :

250 euros/ mois

Sept.-déc. :

250 euros/ mois (sur quatre mois)

Janvier- août :

250 euros/mois

Sept.-déc. :

250 euros/ mois (sur quatre mois)

Restitution = 1 500 euros

Janvier- août :

250 euros/ mois

Sept.-déc. :

250 euros/mois (sur quatre mois)

Restitution = 1 500 euros

Janvier- août :

250 euros/ mois

Sept.-déc. :

250 euros/ mois (sur quatre mois)

Restitution = 1 500 euros

PAS avec prise en compte des avantages fiscaux pour le calcul du taux

IR dû (au titre des revenus N − 1) = 3 000 euros

IR dû (au titre des revenus N) = 1 500 euros

IR dû (au titre des revenus N + 1) = 1 500 euros

IR dû (au titre des revenus N + 2) = 1 500 euros

Janvier- août :

250 euros/ mois

Sept.-déc. :

250 euros/ mois (sur quatre mois)

Janvier- août :

250 euros/mois

Sept.-déc. :

125 euros/ mois (sur quatre mois)

Restitution = 1 500 euros

Janvier- août :

125 euros/ mois

Sept.-déc. :

125 euros/mois (sur quatre mois)

Janvier- août :

125 euros/mois

Sept.-déc. :

125 euros/ mois (sur quatre mois)

Source : commission des finances

Ce tableau très simplifié permet de constater que la réforme proposée se traduirait par une hausse des prélèvements mensuels opérés de janvier à août à compter de l’année N + 2 par rapport au droit existant (250 euros, au lieu de 150 euros) ; chaque année, le versement du montant du crédit d’impôt au titre des revenus de l’année précédente interviendrait, à hauteur de 1 500 euros, en septembre. L’amplitude de la régularisation serait donc accrue par rapport au droit existant, ce qui est peu compréhensible dans le cadre d’une réforme visant à rendre l’imposition la plus contemporaine possible.

En revanche, si l’avantage fiscal était pris en compte pour le calcul du taux de prélèvement, le montant acquitté chaque mois serait réduit par rapport au droit existant dès septembre N + 1 (125 euros contre 150 euros), du fait de l’étalement du prélèvement sur douze mois au lieu de dix, et il n’y aurait pas de restitution chaque année en septembre (58).

Il s’agit donc, pour les contribuables concernés par des avantages fiscaux récurrents, d’une perte en trésorerie infra-annuelle observée entre janvier et août – jusqu’à la restitution opérée en septembre chaque année –, qui pourrait susciter des incompréhensions et nuire à l’acceptabilité de la réforme.

● Néanmoins, comme le relève l’évaluation préalable, le fait de prélever l’impôt sur douze mois – alors que les mensualités sont aujourd’hui égales au dixième de l’impôt acquitté en N − 1 –, conduirait à un gain en trésorerie d’environ 17 % (16,66 %) chaque mois, par rapport au droit existant. Ainsi, au cours d’une année N, l’absence de prise en compte des avantages fiscaux pour le calcul du taux ne conduirait à ce que le montant du prélèvement à la source soit supérieur aux mensualités qu’il acquitte actuellement qu’à la condition que l’avantage fiscal imputable excède 16,66 % de l’impôt sur le revenu brut dû.

Selon les chiffres fournis par l’évaluation préalable, au titre de la deuxième émission des revenus de l’année 2015, 49 % des foyers imputant des crédits ou réductions d’impôt ont imputé un montant d’avantage fiscal inférieur de 16,66 % de leur impôt.

VENTILATION PAR DÉCILE DE RFR DES FOYERS FISCAUX AYANT ANNULÉ MOINS DE 16 % DE LEUR IMPÔT BRUT PAR IMPUTATION DE CRÉDITS OU DE RÉDUCTIONS D’IMPÔT

RFR par part

(en euros)

Nombre total
de foyers

Ensemble des foyers ayant annulé moins de 16 % de leur impôt brut * par imputation de crédits
ou réductions d’impôt **

Borne inférieure

Borne supérieure

Nombre de foyers

Montant imputé
(en millions d’euros)

0

2 652

3 606 472

691

0 %

0

0 %

2 652

6 552

3 606 472

279

0 %

0

0 %

6 552

9 122

3 606 472

111

0 %

0

0 %

9 122

11 227

3 606 472

178

0 %

0

0 %

11 227

13 365

3 606 472

27 728

1 %

2

0 %

13 365

15 520

3 606 472

285 935

7 %

29

1 %

15 520

18 166

3 606 472

613 441

15 %

82

4 %

18 166

21 894

3 606 472

816 312

19 %

134

6 %

21 894

28 933

3 606 472

1 021 568

24 %

254

12 %

28 933

3 606 472

1 456 400

34 %

1 573

76 %

Total

 

36 064 720

4 222 643

100 %

2 074

100 %

*  Impôt après application du barème progressif et de la décote, y compris impôt à taux proportionnel et impôt sur les retraites à 7,5 %.

** Hors application du plafonnement global des niches.

Source : Évaluation préalable de l’article 38.

● Au-delà des chiffres présentés dans les tableaux ci-dessus, qui permettent d’identifier la part des foyers fiscaux bénéficiant sur trois années d’un même avantage fiscal (59), il n’est pas aisé de décompter précisément le nombre de contribuables qui seraient concernés par une majoration infra-annuelle de leurs prélèvements mensuels – à l’exception des bénéficiaires du dispositif « Pinel », « Scellier » et « Censi-Bouvard » précités, que l’on peut facilement identifier, et dont on peut penser que l’avantage fiscal représente, dans la généralité des cas, plus de 17 % de leur impôt.

Corrélativement, il n’est pas non plus aisé de dénombrer les contribuables bénéficiaires d’avantages fiscaux non récurrents, pour lesquels l’absence de prise en compte des réductions et crédits d’impôt pour le calcul du taux permettrait d’éviter au contraire des régularisations en année N + 2 et N + 3.

● En tout état de cause, l’effet de majoration des mensualités entre janvier et août, et d’accentuation de l’amplitude de la régularisation concernerait les contribuables qui recourent le plus aux réductions et crédits d’impôt, et pour lesquels le montant de ces derniers est important. Il s’agit majoritairement de foyers fiscaux relevant des déciles les plus élevés.

C’est ce qui ressort du tableau présenté par l’évaluation préalable, qui retrace la ventilation par déciles de RFR par part des foyers fiscaux qui bénéficieraient de la prise en compte des réductions et crédits d’impôt pour le calcul de leur taux d’imposition en 2018 : 75 % des foyers fiscaux bénéficiaires relèveraient des deux derniers déciles de RFR par part – soit les foyers fiscaux dont le RFR par part est supérieur à 21 894 euros.

VENTILATION PAR DÉCILE DE RFR DES FOYERS FISCAUX BÉNÉFICIAIRES D’UNE PRISE EN COMPTE DES AVANTAGES FISCAUX POUR LE CALCUL DE LEUR TAUX DE PRÉLÈVEMENT À LA SOURCE

RFR par part
(en euros)

Nombre total de foyers*

Ensemble des foyers ayant imputé des réductions
et crédits d’impôt

Borne inférieure

Borne supérieure

Nombre de foyers

Montant imputé
(en millions d’euros)

0

2 652

3 606 472

1 700

0 %

2

0 %

2 652

6 552

3 606 472

563

0 %

0

0 %

6 552

9 122

3 606 472

345

0 %

0

0 %

9 122

11 227

3 606 472

1 105

0 %

0

0 %

11 227

13 365

3 606 472

352 409

4 %

100

1 %

13 365

15 520

3 606 472

1 106 105

13 %

463

4 %

15 520

18 166

3 606 472

1 439 333

17 %

836

8 %

18 166

21 894

3 606 472

1 618 727

19 %

1 252

12 %

21 894

28 933

3 606 472

1 855 118

21 %

1 986

19 %

28 933

3 606 472

2 314 101

27 %

5 955

56 %

Total

 

36 064 720

8 689 506

100 %

10 596

100 %

Source : revenus 2015, deuxième émission ; évaluation préalable de l’article 38.

Enfin, l’évaluation préalable fait valoir que le principe d’une régularisation systématique en N + 1, se traduisant par une restitution au titre des avantages fiscaux de l’année N, donnerait davantage de visibilité à ces avantages dont bénéficierait le contribuable, en permettant de bien les identifier ; les intégrer dans le taux de prélèvement serait moins lisible. Cet argument semble toutefois assez peu convaincant, dans la mesure où le contribuable connaît en tout état de cause le montant de l’avantage fiscal dont il bénéficie lors de sa déclaration d’impôt et de son avis d’imposition, et que d’ores et déjà, les mensualités ou acomptes qu’il acquitte prennent en compte ses avantages fiscaux – dont l’effet est donc déjà « dilué », pour reprendre les termes de l’évaluation préalable.

B. LE TAUX NUL POUR LES FOYERS FISCAUX NON IMPOSÉS DU FAIT DE RÉDUCTIONS OU CRÉDITS D’IMPÔT, ET DONT LES REVENUS SONT INFÉRIEURS À CERTAINS SEUILS

1. Des foyers non imposés au cours des années précédentes du fait d’avantages fiscaux pourraient se trouver assujettis au prélèvement à la source

Parmi les ménages bénéficiant d’avantages fiscaux, certains peuvent être imposables, mais voir leur impôt annulé par l’imputation des réductions ou crédits d’impôt et in fine ne pas être imposés. Or, du fait de l’absence de prise en compte des réductions et crédits d’impôt pour le calcul du taux, ces foyers pourraient se voir assujettis à une retenue à la source ou à un acompte en année N, alors qu’in fine, après régularisation en septembre N + 1, ils ne seraient pas imposés.

Prenons le cas d’un foyer fiscal de salariés dont l’impôt de 1 000 euros a été annulé en 2017, par un crédit d’impôt d’un même montant au titre de l’emploi d’un salarié à domicile en 2016. Leurs salaires seraient soumis à une retenue à la source au 1er janvier 2018, puisque le taux de cette retenue est calculé à partir de l’impôt dû en 2017 avant réductions et crédits d’impôt. Ce foyer fiscal bénéficierait d’un crédit d’impôt en septembre 2018, correspondant aux dépenses engagées en 2017 s’il a également employé un salarié en 2017 – dans le cadre d’une dépense fiscale récurrente. De ce fait, la réforme pourrait conduire à modifier les flux financiers infra-annuels entre le foyer et l’administration fiscale : le ménage resterait non imposé sur l’année N, mais il serait prélevé de janvier à août, puis se verrait restituer ses réductions et crédits d’impôt au titre de l’année N − 1 – si l’avantage fiscal est récurrent –, ce qui annulerait son impôt.

Pour éviter que des foyers fiscaux non imposés du fait de dépenses fiscales récurrentes ne basculent dans l’impôt sur le revenu dans le cadre du prélèvement à la source pendant les huit premiers mois de l’année, alors que leurs revenus sont modestes ou moyens et qu’in fine, ils ne seront pas imposés, un dispositif spécifique a été prévu dans le cadre du 1° bis de l’article 204 H (alinéas 31 à 35).

2. L’application d’un taux nul pour les foyers fiscaux remplissant deux conditions cumulatives

● Par dérogation aux modalités de calcul du taux de PAS exposées supra, le taux du prélèvement à la source serait nul dès lors que le foyer fiscal remplit les deux conditions suivantes, cumulativement :

– l’impôt sur le revenu mis en recouvrement au titre des revenus des deux dernières années d’imposition connues est nul – étant précisé que bien évidemment, c’est l’impôt à acquitter avant imputation des prélèvements à la source qui doit être nul – l’impôt étant mis en recouvrement une fois les réductions et crédits d’impôt imputés ;

– le montant du RFR du foyer fiscal de la dernière année d’imposition connue est inférieur à 25 000 euros par part de quotient familial.

● Le fait de retenir un critère d’imposition nulle sur les deux dernières années connues, après imputation des réductions et crédits d’impôt, permettrait de cibler les foyers fiscaux pour lesquels l’impôt est effacé sous l’effet d’avantages fiscaux récurrents (bénéficiant au foyer fiscal deux années de suite) ; le dispositif ne concernerait donc pas les foyers fiscaux dont l’impôt aurait été annulé sous l’effet d’une réduction ou d’un crédit d’impôt ponctuel, non reconduit. Il convient néanmoins de noter que le dispositif proposé peut bénéficier aussi à des foyers fiscaux dont l’imposition au titre de l’année N − 2 serait nulle du fait du niveau de leur revenu imposable, et non parce qu’elle aurait été effacée par une réduction d’impôt.

Comme le relève l’évaluation préalable, « cette disposition contribuera à renforcer l’acceptabilité du prélèvement à la source ».

● L’alinéa 34 précise que pour apprécier la première condition, à savoir un impôt mis en recouvrement égal à zéro après imputation des réductions et crédits d’impôt, le crédit d’impôt de modernisation du recouvrement (CIMR) et le CIMR complémentaire (Cf. A du I de la deuxième partie) ne sont pas pris en compte. En effet, le CIMR a vocation à effacer l’imposition due au titre d’une grande partie des revenus perçus en 2017, dans le cadre de l’année de transition, tandis que le CIMR complémentaire constitue son prolongement pour l’imposition des revenus de 2018, pour les travailleurs indépendants. Les prendre en compte pour l’appréciation de la condition précitée viendrait fausser la logique du dispositif proposé.

L’alinéa 35 indique que le seuil de 25 000 euros par part de quotient familial, défini pour apprécier l’éligibilité des foyers fiscaux au dispositif du taux nul, serait indexé chaque année comme la limite supérieure de la première tranche du barème de l’impôt sur le revenu, qui est elle-même indexée chaque année sur l’inflation.

● Au regard de la ventilation des foyers fiscaux par décile de RFR par part figurant dans l’évaluation préalable, il apparaît que la mesure pourrait concerner des foyers fiscaux relevant des neuf premiers déciles (sachant que la borne inférieure du huitième décile de RFR par part est de 21 894 euros), dès lors que leur impôt est égal à zéro sur deux années successives après imputation des réductions et crédits d’impôt.

La présente mesure devrait concerner entre 1,3 à 1,4 million de foyers fiscaux, dont la ventilation par décile de RFR par part est retracée ci-après. Les pertes de recettes afférentes sont estimées à environ 800 millions d’euros.

VENTILATION PAR DÉCILE DE RFR PAR PART DES FOYERS FISCAUX
BÉNÉFICIAIRES DU TAUX NUL PRÉVU PAR LE 1° BIS DE L’ARTICLE 204 H

Borne inférieure de RFR
(en euros)

Borne supérieure de RFR
(en euros)

Nombre de foyers

0

11 670

127 041

11 670

12 631

127 041

12 631

13 203

127 041

13 203

13 793

127 040

13 793

14 468

127 041

14 468

14 689

127 041

14 689

15 300

127 040

15 300

16 514

127 041

16 514

18 667

127 041

18 667

25 000

127 040

Total

1 270 407

Source : évaluation préalable de l’article 38.

C. EN L’ABSENCE DE TAUX CALCULÉ PAR L’ADMINISTRATION FISCALE, LE RECOURS À UN « TAUX PAR DÉFAUT »

1. Une grille de taux par défaut applicable en l’absence de taux calculé par l’administration, caractérisé par de forts effets de seuil

● Aux termes du du 2 de l’article 204 H (alinéa 36), un taux proportionnel, fonction du niveau des revenus, serait appliqué « lorsque le débiteur ne dispose pas d’un taux calculé par l’administration fiscale » ou « lorsque l’année dont les revenus ont servi de base au calcul du taux est antérieure à l’antépénultième année par rapport à l’année de prélèvement. »

Ce « taux par défaut » serait déterminé par le biais d’une grille figurant au a du du 2 (alinéa 38) – pour les contribuables domiciliés en métropole. Deux autres grilles sont prévues : l’une pour les contribuables domiciliés en Guadeloupe, à La Réunion et en Martinique (b du du 2, soit l’alinéa 40), pour tenir compte des effets de la réfaction de 30 % opérée sur leur impôt (60), l’autre pour les contribuables domiciliés en Guyane et à Mayotte (c du du 2, soit l’alinéa 42), pour tenir compte de la réfaction de 40 %, cette fois, dont ils bénéficient (61).

En l’absence de taux de prélèvement, le débiteur de la retenue – qui devrait être en pratique quasiment le seul utilisateur de la grille de taux par défaut, sauf exceptions (62) – appliquerait cette grille, qui aurait vocation à « être intégrée dans les logiciels de paie afin d’être appliquée automatiquement dans les situations le nécessitant », aux termes de l’évaluation préalable.

● Selon l’évaluation préalable, la grille de taux par défaut a été établie à partir de l’application du barème progressif aux revenus perçus par un célibataire (une part de quotient familial), en intégrant les effets de la décote.

L’évaluation préalable indique que « la grille par défaut (…) a été élaborée afin de coller dans la mesure du possible au niveau d’imposition existant actuellement, sur la base du barème applicable pour l’imposition des revenus de 2015, pour un niveau de revenu donné pour une part de quotient familial, calculé comme étant le rapport entre, d’une part, l’impôt sur le revenu résultant de l’application du barème progressif et éventuellement de la décote et, d’autre part, le revenu imposable.

« La première tranche, au taux de 0 %, aura pour limite supérieure le plus haut revenu imposable non imposé actuellement, apprécié après application de la décote, et après seuil de mise en recouvrement, soit 16 337 euros de salaire imposable, sur la base de la législation actuelle », ou encore 1 361 euros de salaire mensuel imposable.

Il convient d’ailleurs de noter que les grilles proposées ne prennent pas en compte l’effet de la réduction d’impôt prévue par l’article 2 du présent projet de loi de finances, et qu’elles auraient vocation à être adaptées en conséquence.

Le principe de la grille est donc de prévoir un taux proportionnel, croissant avec le niveau des revenus, sachant que le même taux s’applique à l’ensemble des revenus du contribuable (il ne s’agit pas d’un barème par tranche de revenus).

GRILLE DE TAUX PAR DÉFAUT PROPOSÉE POUR LES CONTRIBUABLES
DOMICILIÉS EN MÉTROPOLE EN TERMES DE REVENUS MENSUELS

Base mensuelle de prélèvement

(en euros)

Taux proportionnel

Inférieure ou égale à 1 361

0 %

De 1 362 à 1 493

2 %

De 1 494 à 1 647

4 %

De 1 648 à 1 944

7 %

De 1 945 à 2 602

9 %

De 2 603 à 3 250

12,5 %

De 3 251 à 4 685

17 %

De 4 686 à 7 288

21,5 %

De 7 289 à 9 639

25,5 %

De 9 640 à 17 356

33 %

De 17 356 à 33 681

39 %

Supérieure à 33 681

43 %

Ainsi, à titre d’exemple, un contribuable relevant du taux par défaut dont le salaire mensuel net (63) est compris entre 1 494 et 1 647 euros serait soumis à un taux proportionnel de 4 %.

Le graphique ci-après met en regard l’impôt acquitté en application du barème progressif par un célibataire en fonction de son revenu, et celui résultant de l’application du taux par défaut :

BARÈME PROGRESSIF DE L’IR COMPARÉ À LA GRILLE DE TAUX PAR DÉFAUT

Source : évaluation préalable de l’article.

● Ce graphique permet de constater que :

– l’impôt acquitté sur la base du taux par défaut serait toujours supérieur à l’impôt qui serait dû avec le barème progressif par un célibataire : il serait d’autant plus proche de l’impôt dû en application du barème que le montant de revenus serait proche de la borne supérieure de la tranche ; en revanche, il serait d’autant plus éloigné que le montant de revenus serait proche de la borne inférieure de la tranche ;

– corrélativement, l’application de la grille se traduirait par des brusques ressauts d’imposition pour les revenus égaux au montant inférieur de chaque tranche de la grille : le dispositif proposé occasionnerait d’importants effets de seuils.

Exemple : dans le cadre de la grille par défaut, un salarié percevant un revenu net mensuel de 1 361 euros par mois ne sera pas imposé ; dès lors que son salaire sera égal à 1 362 euros, il sera prélevé de 27,24 euros par mois.

ÉVALUATION DES EFFETS DE SEUIL OCCASIONNÉS
PAR LA GRILLE DE TAUX PAR DÉFAUT

Niveau de salaire mensuel (en euros)

1 361-1 362

1 493-1 494

1 647-1 648

1 944-1 945

2 602-2 603

3 250-3 251

4 685-4 686

7 288-7 289

9 639-9 640

17 356-17 367

33 681-33 682

Taux applicables

0%-2%

2%-4%

4%-7%

7%-9%

9%-12,5%

12,5%-17%

17%-21,5%

21,5%-25,5%

25,5%-33%

33%-39%

39%-43%

Ressaut d’imposition pour un euro de salaire mensuel supplémentaire

27,2

29,9

49,48

38,97

91,19

146,4

211

291,8

723,2

1 041,7

1 347,6

Ressaut d’imposition apprécié sur une base annuelle pour un euro de salaire mensuel supplémentaire

327

359

594

468

1 094

1 757

2 532

3 501

8 679

12 501

16 172

Source : commission des finances.

● La grille de taux par défaut aurait vocation à être mise à jour annuellement, en fonction de l’évolution du barème de l’impôt sur le revenu, avant le 1er janvier de l’année au titre de laquelle elle s’applique, dans le cadre de la loi de finances.

● Le d du du 2 (alinéa 43) de l’article 204 H prévoit, selon une formulation ramassée, et de ce fait quelque peu elliptique, que les limites des tranches des différentes grilles seraient « réduites ou augmentées proportionnellement à la période à laquelle se rapportent le versement par le débiteur des revenus mentionnés à l’article 204 B ou le calcul de l’acompte mentionné à l’article 204 C ».

L’évaluation préalable précise qu’il s’agit d’adapter la grille de taux par défaut aux durées d’emploi ainsi qu’à la périodicité des paiements des revenus soumis au PAS. La grille par défaut devrait ainsi être déclinée par trimestre, par semaine, par jour et par heure, « en reprenant les conventions prévues à l’article 91 A de l’annexe II du code général des impôts » – cet article 91 A se rapportant à la retenue à la source effectuée sur les salaires des contribuables non-résidents en application de l’article 182 A.

L’article 91 A précité précise que lorsque les traitements, salaires et rentes viagères soumis à cette retenue à la source sont payés par trimestre, au mois, à la semaine ou à la journée, les limites des tranches du tarif annuel sont divisées par 4, par 12, par 52 ou par 312.

En transposant cette règle, on parviendrait au barème journalier suivant :

GRILLE DE TAUX PAR DÉFAUT PROPOSÉE POUR LES CONTRIBUABLES
DOMICILIÉS EN MÉTROPOLE EN TERMES DE REVENUS JOURNALIERS

Base journalière de prélèvement

(en euros)

Taux proportionnel

Inférieure ou égale à 52,35

0 %

De 52,36 à 57,42

2 %

De 57,43 à 63,35

4 %

De 63,36 à 74,77

7 %

De 74,78 à 100,08

9 %

De 100,09 à 125

12,5 %

De 125,01 à 180,19

17 %

De 180,20 à 280,31

21,5 %

De 280,32 à 370,73

25,5 %

De 370,74 à 667,54

33 %

De 667,55 à 1 295,42

39 %

Supérieure à 1 295,42

43 %

Le dernier alinéa du d du du 2 (alinéa 44) mentionne par ailleurs que pour les revenus relevant de l’acompte, soit dans le cas mentionné supra d’un début d’activité, les grilles de taux par défaut s’appliqueraient à ces revenus majorés de 11 %.

Cette disposition résulte du fait que la grille a été construite pour l’imposition des salaires, qui font l’objet d’une déduction forfaitaire de 10 % pour frais professionnels. Tel n’est pas le cas pour les revenus soumis à l’acompte ; à titre d’exemple, un contribuable entre dans l’impôt à partir d’un revenu déclaré de 16 337 euros, soit un revenu net imposable de 14 703 euros, tandis qu’un contribuable percevant des BNC entre dans l’impôt à partir de bénéfices de 14 703 euros (soit 90 % de 16 337 euros, ou, en sens inverse, 14 703 euros majorés de 11,11 %) (64).

2. Les personnes concernées par le taux par défaut

De façon schématique, en se fondant sur le texte de l’article 204 H et sur les éléments fournis par l’évaluation préalable, les personnes susceptibles d’être concernées par l’application du taux par défaut se répartiraient en quatre catégories :

– celles pour lesquelles l’administration fiscale ne serait pas en mesure de calculer le taux d’imposition du foyer fiscal (absence de déclaration des revenus au cours des dernières années) ;

– celles pour lesquelles l’administration fiscale serait en mesure de calculer le taux d’imposition du foyer fiscal, mais sur la base de données trop anciennes ;

– celles pour lesquelles l’administration fiscale n’aurait pas été en mesure de transmettre le taux au débiteur de la retenue à la source, de façon plus ou moins durable (problèmes d’identification des salariés, contrats courts…).

– les personnes rattachées au foyer fiscal, sur le fondement du du 2 de l’article 204 H (alinéa 45).

a. Les personnes non connues de l’administration fiscale, soit, dans la généralité des cas, les primo-déclarants

La première catégorie correspondrait principalement aux personnes « primo-déclarantes », qui ne sont pas identifiées par l’administration fiscale, car elles déposeront pour la première fois une déclaration de revenus l’année suivant celle de la perception des revenus, en tant que contribuable. Cela correspondrait notamment au cas des personnes entrant sur le marché du travail et non connues de l’administration fiscale car elles étaient auparavant rattachées au foyer de leurs parents, mais aussi des personnes fiscalement domiciliées jusqu’alors à l’étranger, qui viendraient s’installer en France.

Selon l’évaluation préalable, en 2015 (pour l’imposition des revenus de 2014), environ 500 000 personnes ont été identifiées comme primo-déclarantes ; il s’agit majoritairement de célibataires (91 %) et de personnes de moins de vingt-cinq ans (68 %), pour une masse totale de salaires et pensions de 3,7 milliards d’euros.

Il convient d’observer qu’entre janvier et août de l’année N, seraient concernées par le taux par défaut :

– les personnes qui déposeraient leur première déclaration de revenus en année N + 1 au titre de leurs salaires perçus en N ;

– mais aussi les personnes qui déposeraient une déclaration de revenus pour la première fois en année N au titre de leurs salaires perçus en N − 1.

Ces personnes primo-déclarantes pourraient ainsi se trouver durablement assujetties au « taux par défaut » (jusqu’à vingt mois, puisque si elles prennent un emploi en janvier de l’année N, l’administration ne pourrait transmettre à leur employeur leur taux propre qu’en septembre de l’année N + 1), sauf démarche de leur part, en demandant une modulation de leur taux (Cf. V).

L’évaluation préalable précise que le taux par défaut s’appliquerait aussi lorsque le contribuable est connu de l’administration fiscale et a déjà déposé une déclaration de revenus au titre des années N − 2 ou N − 1, mais qu’il a uniquement, au titre de l’une de ces deux années, perçu des revenus se trouvant hors champ du PAS (RCM, PVM…). Dans ce cas, en dépit du dépôt d’une déclaration de revenus, l’administration ne serait pas en mesure d’établir le taux de prélèvement à la source, en l’absence de revenus concernés par la réforme dans les déclarations des années précédentes. La situation du contribuable serait alors la même que celle d’un primo-déclarant, et la grille de taux par défaut serait appliquée.

b. Les personnes pour lesquelles l’administration fiscale ne dispose que de données anciennes

Pour la seconde catégorie, il s’agirait de personnes pour lesquelles l’administration fiscale peut calculer un taux de retenue à la source et le transmettre, mais sur la base de revenus antérieurs à l’année N − 3, donc sur la base de données trop anciennes. Tel pourrait notamment être le cas de contribuables expatriés revenant en France après plusieurs années d’absence.

c. Les personnes non reconnues par l’administration fiscale, ou en contrat court, ou en début de contrat

Pour la troisième catégorie, lorsque l’administration ne serait pas en mesure de transmettre le taux propre au foyer fiscal du salarié même si ce dernier est connu des services fiscaux, plusieurs cas pourraient être distingués :

– lorsque le tiers payeur n’a pas demandé à l’administration fiscale le taux de prélèvement propre au contribuable (retard ou défaillance déclarative de l’employeur), ou en cas d’échec de l’échange d’informations en vue de l’identification du contribuable (absence de numéro d’inscription au répertoire de l’INSEE, ou NIR, qui correspond au numéro de sécurité sociale du salarié (65), NIR non certifié, NIR provisoire, état civil incomplet…).

L’application du taux par défaut pourrait ainsi résulter de difficultés administratives à établir un lien entre le contribuable et, pour résumer, son identifiant fiscal, via le NIR ;

– de façon plus structurelle, les contrats courts donneraient lieu aussi à l’application du taux par défaut, du fait de la difficulté, déjà pointée par le rapport particulier précité du Conseil des prélèvements obligatoires sur les scénarios de mise en œuvre de la réforme, pour l’administration fiscale d’avoir une parfaite connaissance de la structure de l’emploi, compte tenu des situations d’emplois multiples et de la multiplication des contrats courts.

L’évaluation préalable indique que, compte tenu des délais nécessaires avant que « l’administration fiscale puisse transmettre à l’employeur le taux de prélèvement propre à l’employé, ce dernier [l’employeur] appliquera en pratique la grille de taux par défaut en cas de contrat court d’une durée inférieure à un ou deux mois. » Elle ajoute que « des solutions sont néanmoins à l’étude pour les salariés qui font l’objet de contrats courts réguliers auprès d’un même employeur ».

Sur ce dernier point, en réponse à une demande de la Rapporteure générale, l’administration a précisé que « la piste en cours d’étude consisterait à faire figurer, dans les échanges avec les collecteurs, les salariés qui bénéficient de contrats courts récurrents connus de l’employeur, y compris les mois sans versement de rémunération, afin d’éviter de leur appliquer à chaque rémunération la grille de taux par défaut (par exemple pour un salarié qui serait embauché en janvier, puis en avril puis en juillet/août). Cette solution, dérogatoire, nécessite néanmoins une expertise complémentaire pour assurer sa faisabilité ».

Potentiellement, le nombre de salariés soumis au taux par défaut pourrait s’avérer important, au regard du développement du recours aux contrats à durée déterminée (CDD) et des contrats de mission. Selon les données fournies par l’administration fiscale, le nombre de CDD de moins d’un mois est estimé à 16,3 millions en 2015, et le nombre de CDD de plus d’un mois à 4 millions. Parmi ces 20,3 millions d’embauches en CDD, 17,9 millions concernent des CDD de moins de trois mois. Ces chiffres permettent de prendre la mesure du recours à ce type de contrats, mais non de déduire le nombre total de personnes effectivement concernées – une personne pouvant effectuer plusieurs CDD au cours d’une même année.

Il est en revanche précisé dans l’évaluation préalable que les gratifications versées aux stagiaires lors d’un stage ou d’une période de formation ne feraient pas l’objet d’un prélèvement à la source ; il est en effet fort peu probable que de telles gratifications atteignent le seuil à partir duquel le taux par défaut n’est pas nul (soit 1 362 euros par mois), tandis que ces gratifications sont exonérées d’impôt dans la limite du montant annuel du SMIC, en application de l’article 81 bis du CGI.

– de façon transitoire, les débuts de contrat, lorsque le salarié change d’employeur : l’évaluation préalable précise que le tiers payeur doit appliquer la retenue à la source alors qu’il n’a pas encore déclaré ce salarié à l’administration fiscale et n’a pas pu, par conséquent, recevoir son taux d’imposition – sachant que le principe de l’échange d’informations via la DSN ne permet pas de recevoir le taux de prélèvement du salarié avant la fin du mois suivant celui de l’embauche, voire le deuxième mois.

Selon les exemples fournis par l’évaluation préalable, un salarié embauché en avril, et payé le 5 du mois suivant, pourrait se voir appliquer le taux par défaut en mai, en juin, voire en juillet, avant que ne puisse être appliqué le taux d’imposition propre à son foyer fiscal.

L’administration fiscale précise que la durée moyenne d’application du taux par défaut devrait varier entre un à deux mois. Cette durée dépendra de la date de dépôt de la déclaration et de la date à laquelle l’employeur finalise les opérations de paie.

d. Les personnes rattachées à un foyer fiscal

Enfin, le du 2 de l’article 204 H (alinéa 45) prévoit que, par dérogation au principe selon lequel le taux est calculé par l’administration fiscale pour chaque foyer fiscal, ce taux propre au foyer fiscal ne s’applique pas aux revenus :

– des personnes rattachées au foyer fiscal au sens des 2° et 3° du 3 de l’article 6 du CGI, soit les enfants majeurs de moins de vingt et un ans, ou de moins de vingt-cinq ans s’ils sont étudiants, qui peuvent être rattachés au foyer fiscal de leurs parents ;

– des personnes à charge du foyer fiscal au sens des articles 196 et 196 A bis du CGI, soit les enfants de moins de dix-huit ans ou infirmes, et les personnes invalides vivant sous le toit du foyer fiscal.

Il s’agirait dans la généralité des cas de jeunes actifs, qui n’ont pas encore effectué de déclaration de revenus en leur nom propre.

La question des personnes rattachées à un foyer fiscal s’avère en effet complexe, puisque le rattachement au foyer fiscal de ces personnes ne peut se présumer, et qu’il n’est connu in fine qu’à l’occasion de la déclaration de revenus en N + 1. De ce fait, si l’administration fiscale transmettait à l’employeur de la personne concernée le taux de prélèvement de son foyer de rattachement au titre de l’imposition des revenus de N − 2 ou N − 1, rien ne permettrait de garantir que cette personne salariée serait toujours rattachée pour l’imposition des revenus perçus au cours de l’année en cours – ce rattachement n’étant effectué qu’au printemps de l’année N + 1. Par ailleurs, appliquer le taux d’imposition du foyer fiscal de rattachement (donc en règle générale, le taux d’imposition des parents) à un jeune actif prenant un emploi payé au SMIC pourrait se traduire par un « surprélèvement », si le taux d’imposition des parents était élevé (66).

Environ 1,6 million de contribuables rattachent près de 1,9 million d’enfants célibataires majeurs, parmi lesquels environ 0,3 million déclarent des revenus salariaux et assimilés, d’un montant moyen de 3 370 euros – ce qui laisse à penser que la très grande majorité des personnes rattachées serait soumise à un taux par défaut de 0 %.

3. Une grille de taux par défaut qui pourrait concerner un nombre non négligeable de contribuables, et qui risque de conduire à des « surprélèvements » temporaires

● Au regard des développements précédents, le nombre de contribuables concernés par le taux par défaut pourrait ne pas être anecdotique, que ce soit de façon temporaire (début d’un contrat de travail, difficultés administratives…), ou de façon plus pérenne (primo-déclarants, personnes enchaînant des contrats courts, personnes rattachées…).

● Or, du fait même de la grille proposée, les contribuables célibataires acquitteraient un impôt supérieur – avec un différentiel variable selon le niveau des revenus – à celui qu’ils auraient dû acquitter en appliquant le barème progressif (en ramenant l’impôt dû sur une base mensuelle).

Certes, les effets de ce « surprélèvement » seraient corrigés lors de la régularisation réalisée à l’été N + 1, à la suite de la déclaration des revenus, mais le contribuable subirait des pertes en trésorerie pendant l’année N.

Le « surprélèvement » serait d’autant plus important que le contribuable soumis au taux par défaut appartient à un foyer fiscal comportant un grand nombre de parts de quotient familial, et/ou à un foyer fiscal dont l’autre membre ne percevrait pas de revenus ou des revenus inférieurs, puisque le taux par défaut serait calibré à partir de l’imposition d’un célibataire.

Exemple : un foyer fiscal dont l’un des membres perçoit des revenus salariaux de 5 000 euros par mois, dont l’autre membre ne travaille pas, et comprenant trois enfants, devrait acquitter un impôt de 1 804 euros au titre de ses revenus, du fait des effets du quotient conjugal et familial.

Le taux de retenue à la source calculé par l’administration fiscale (avec pour hypothèse que ses revenus étaient les mêmes en N − 2 ou N − 1) serait de 3 % (1 804 / 60 000).

Or, si le contribuable percevant des salaires était soumis au taux par défaut, il se verrait appliquer chaque mois une retenue de 21,5 %, soit 1 075 euros par mois, ce qui représente sur l’année un impôt de 12 900 euros (sachant que l’impôt qui serait dû par un célibataire percevant ces mêmes revenus serait de 10 555 euros, soit 2 345 euros de moins…).

Le contribuable concerné, s’il était assujetti pendant toute l’année au taux par défaut – hypothèse assez théorique puisqu’il aurait un très grand intérêt à demander une modulation –, aurait alors acquitté 11 096 euros de trop, qui lui seraient restitués à l’été N + 1.

● L’application du taux par défaut aux rémunérations versées dans le cadre de contrats courts pourrait également se traduire par un « surprélèvement ». Prenons un exemple concret : un contribuable enchaîne les contrats courts de durée limitée, dont la rémunération est suffisamment élevée pour qu’il se trouve dans le champ du taux par défaut (soit un salaire supérieur à 53 euros par jour). Néanmoins, il ne travaille pas pendant toute l’année et in fine, sur l’année, le montant de ses revenus est inférieur au point d’entrée dans l’impôt (soit 16 337 euros) : le contribuable aura été prélevé à la source au cours de l’année, ce qui aura pesé sur sa trésorerie, mais les sommes ainsi acquittées lui seront restituées en N + 1.

● Certes, ces difficultés doivent être fortement nuancées à la fois :

– par le fait que, compte tenu de la distribution des salaires, les taux proportionnels les plus utilisés seraient faibles, comme le met en avant l’évaluation préalable ;

– par le fait que les personnes primo-déclarantes, ou qui enchaînent les contrats courts, perçoivent des revenus généralement moins élevés que le revenu médian ; et que les célibataires sont surreprésentés parmi les primo-déclarants ;

– par le fait que le taux par défaut ne devrait s’appliquer, dans nombre de cas, que de façon temporaire, pendant quelques mois ;

– par le fait que les contribuables pourraient, s’ils estiment que le taux qui leur est appliqué est trop élevé, demander une modulation à la baisse, dans des conditions détaillées au V ;

– par le fait qu’en dernière analyse, il s’agirait d’un « surprélèvement » temporaire, qui sera régularisé ensuite.

Néanmoins, on ne peut ignorer cet écueil ; par exemple, une personne en couple venant s’installer en France avec deux enfants, non connue des services fiscaux par définition, se verrait appliquer le taux par défaut, nettement plus élevé que le taux de prélèvement qui résulterait de sa situation familiale, et ne pourrait voir son taux adapté que par une démarche volontaire (demande de modulation) ou attendre l’été suivant pour régularisation.

D. L’OPTION DU TAUX PAR DÉFAUT REPOSE SUR LE RESPECT DE LA CONFIDENTIALITÉ

Le 3 de l’article 204 H nouveau du CGI (alinéas 46 à 50 du présent article) offre à un contribuable la possibilité, en ce qui concerne l’imposition des traitements et salaires soumis à la retenue à la source, d’opter pour l’application du taux par défaut prévu au 2 du même article. Ce taux proportionnel se substituerait à celui calculé par l’administration selon les modalités définies au 1 de l’article 204 H ou celui résultant d’un changement de situation, d’une modulation ou d’une individualisation dudit taux (1° du 3, alinéa 46 du présent article).

L’exercice de l’option peut être fait à tout moment auprès de l’administration et prend effet dans un délai de trois mois à compter de la demande. Un mécanisme de reconduction tacite permet d’éviter d’avoir à renouveler la formalité chaque année, prémunissant ainsi le contribuable de tout changement non désiré de situation. L’option est réversible et peut être dénoncée par son bénéficiaire. La dénonciation est toutefois enserrée dans un délai relativement étroit dans la mesure où elle ne peut intervenir que dans les trente jours qui suivent la communication au contribuable de son taux propre, déterminé en application du 1 de l’article 204 H ou des articles 204 I, 204 J ou 204 M (alinéa 47 du présent article).

Si la retenue à la source ainsi imposée porte sur un montant inférieur à celui qui aurait résulté de l’application du taux calculé par l’administration, un complément de retenue à la source est dû (2° du 3, alinéas 48 à 50 du présent article).

1. Un champ d’application restreint mais justifié par la préservation de la confidentialité

Le 1° du 3 révèle que l’option aurait un champ d’application restreint dans la mesure où elle ne concernerait qu’une partie des revenus faisant l’objet du prélèvement à la source.

a. L’option du taux par défaut ne porte que sur les revenus salariaux

Ainsi que l’illustre le tableau suivant, l’option offerte par le 3 du nouvel article 204 H serait ouverte qu’aux revenus salariaux.

REVENUS RELEVANT DU PRÉLÈVEMENT À LA SOURCE SUSCEPTIBLES
DE SE VOIR APPLIQUER SUR OPTION LE TAUX D’IMPOSITION PAR DÉFAUT

Revenus

Modalité d’imposition

Option du taux par défaut

Traitements et salaires (A)

Retenue à la source

Oui

Pensions (autres qu’alimentaires) (B)

Retenue à la source

Non

Rentes viagères à titre gratuit (C)

Retenue à la source

Non

BIC

Acompte

Non

BA

Acompte

Non

BNC

Acompte

Non

Revenus fonciers

Acompte

Non

Rentes viagères à titre onéreux

Acompte

Non

Pensions alimentaires

Acompte

Non

Revenus de source étrangère versés par un débiteur établi hors de France imposés suivant les règles applicables aux revenus A, B et C

Acompte

Non

Cette restriction est justifiée par les situations qu’elle entend couvrir et qui sont celles d’un contribuable souhaitant préserver le caractère confidentiel de ses revenus ou de la situation de son foyer fiscal vis-à-vis de son employeur.

L’administration étant le seul interlocuteur des contribuables s’agissant du taux d’imposition appliqué, l’option par défaut aurait pour conséquence de priver l’employeur de la transmission du taux spécifique au foyer du contribuable. Seul lui serait fourni le taux proportionnel correspondant au montant du traitement ou du salaire perçu.

Le souci de confidentialité des données jouant vis-à-vis des employeurs, il est logique que l’application du taux proportionnel sur option ne s’applique qu’aux revenus salariaux.

b. L’option du taux par défaut préserve la confidentialité du contribuable

L’option s’inscrirait ainsi dans le cadre de la préservation de la confidentialité des données fiscales et de la situation personnelle du contribuable au regard de son employeur. En effet, le taux calculé par l’administration en application du 1 de l’article 204 H ou résultant d’un changement de situation, d’une modulation ou d’une individualisation, prévus respectivement aux articles 204 I, 204 J et 204 M, porterait sur une assiette recouvrant l’ensemble des revenus mentionnés à l’article 204 A.

Le taux d’imposition que transmet l’administration étant propre à chaque foyer fiscal, il permettraot de déduire certains éléments de la situation du foyer et donc de la vie personnelle du contribuable :

– vie en couple ou célibat ;

– présence au sein du foyer de personnes à charge ;

– ampleur des revenus du conjoint ;

– ampleur des revenus catégoriels ne relevant pas de la retenue à la source tels que les BIC, les BA, les BNC ou encore les revenus fonciers, etc.

Un même taux d’imposition pouvant recouvrir différentes situations, il serait souvent difficile d’inférer de cette seule information la réalité de la vie privée des salariés. À titre d’exemples, un taux de 6,9 % peut correspondre aux montants imposables suivants :

– pour un célibataire sans enfant :

• à un salaire mensuel de 2 000 euros ;

• à un salaire mensuel de 1 625 euros et des revenus fonciers, des BIC ou des BNC de 3 600 euros ;

• à un salaire mensuel de 1 583 euros et des revenus de capitaux mobiliers de 5 000 euros.

– pour une personne mariée sans enfant :

• à des revenus salariaux annuels de 48 000 euros qu’elle est seule à percevoir ;

• à des revenus salariaux annuels de 48 000 euros perçus à part égale par les deux membres du couple ;

– pour une personne mariée avec trois enfants à charge :

• à des revenus salariaux de 86 400 euros, peu importe leur répartition au sein du couple ;

• à des revenus salariaux de 24 000 euros qu’elle perçoit seule, et des revenus fonciers de 54 250 euros perçus par le couple.

Les exemples pourraient être multipliés, et l’évaluation préalable du présent article en fournit dix-sept pour ce seul taux, la liste n’étant pas exhaustive (67). La vie privée des contribuables serait ainsi préservée en dehors de tout dispositif de sanction particulier.

Cependant, si l’employeur dispose par ailleurs d’éléments sur la situation conjugale ou familiale du salarié, il pourrait arriver à certaines conclusions.

En outre, le taux d’imposition serait plus transparent lorsqu’il sera supérieur au taux qui aurait été calculé sur la base des seuls salaires perçus. Si, là encore, les situations susceptibles d’être couvertes par un même taux sont nombreuses – l’évaluation préalable fournit seize exemples (68) –, elles correspondraient principalement à deux hypothèses :

– le salarié est un célibataire qui, en N − 2 et N − 1, a perçu d’autres revenus imposables que son seul salaire ;

– le salarié est membre d’un couple dont l’autre membre perçoit des revenus plus importants.

Le taux peut donc témoigner de la perception de revenus autres que ceux des seuls traitements ou salaires, information que le contribuable n’entend pas nécessairement faire connaître à son employeur, soit par souci de préserver son intimité, soit pour se prémunir de toute conséquence relative à d’éventuelles progressions salariales ou de revendications en matière de revenus (certains employeurs pourraient en effet être incités à refuser à leurs salariés des hausses de rémunération au motif que ceux-ci perçoivent d’autres revenus).

Ainsi, un contribuable célibataire percevant en N − 2, N − 1 et N un salaire mensuel de 2 500 euros (soit un revenu salarial annuel de 30 000 euros) et des BIC pour un montant annuel de 40 000 euros devrait s’acquitter d’un impôt de 14 455 euros (69). Le taux d’imposition serait de 20,6 % : 14 455 / (30 000 + 40 000).

Le taux d’imposition correspondant à un salaire mensuel de 2 500 euros est, pour un contribuable célibataire, de 9,1 %, soit plus de deux fois moins que le taux propre dont l’employeur aurait communication. Avec cette information, ce dernier pourrait facilement déduire que son salarié perçoit des revenus non salariaux conséquents, conduisant à une imposition au taux moyen de 20,6 %.

Si le contribuable choisit l’option du taux par défaut, et compte tenu de la grille figurant dans le projet de réforme, l’employeur appliquerait aux salaires un taux de 9 % et ne serait pas en mesure d’inférer quoi que ce soit de la situation fiscale de son salarié.

2. L’obligation de verser un complément de retenue à la source

Le 2° du 3 de l’article 204 H (alinéas 48 à 50 du présent article) précise que le contribuable qui a opté pour le taux par défaut au titre de l’imposition de ses traitements et salaires doit acquitter un complément de retenue à la source si le montant de la retenue résultant de l’application du taux par défaut est inférieur à celui qui aurait résulté, pour les mêmes revenus, du taux calculé par l’administration. L’option ne saurait en effet avoir pour conséquence de réduire le montant d’impôt réellement dû par le contribuable : il s’agit d’une faculté relative aux modalités d’imposition.

Le complément est égal à la différence entre le montant de l’impôt acquitté et celui de l’impôt théoriquement dû au titre des traitements et salaires.

Aux termes du deuxième alinéa du 2° (alinéa 49 du présent article), il incombe au contribuable de calculer le montant du complément dû et de le verser à l’administration fiscale. Les conditions de versement sont celles de l’acompte applicable aux revenus mentionnés à l’article 204 C nouveau, par renvoi à l’article 1663 C du CGI qu’introduit le 12° du B du présent article (alinéas 139 à 147).

Le versement doit être effectué au plus tard le dernier jour du mois suivant la perception du revenu. Ainsi, pour un revenu perçu en mars, la date limite du versement du complément de retenue à la source correspondant est le 30 avril. Le mois servant de base étant celui de la perception de la rémunération, et non celui au titre duquel cette dernière est versée, les salariés percevant au début du mois M + 1 le salaire afférent au mois M bénéficie d’une période de presque deux mois complets pour réaliser le versement, tandis que les autres contribuables ne disposent que d’un peu plus d’un mois.

Soit le même contribuable que celui du précédent exemple, dont les revenus sont rappelés ci-dessous (ils sont supposés constants entre N − 2 et N).

COMPLÉMENT DÛ EN CAS D’OPTION POUR LE TAUX PAR DÉFAUT

(en euros)

Salaires annuels

Taux

Impôt dû

Taux par défaut

Impôt dû avec le taux par défaut

Mensualité

Complément

Mensualité du complément

30 000

20,6 %

5 562

9 %

2 700

225

2 862

239

L’option pour le taux par défaut conduirait à ce que la retenue à la source effectuée par l’employeur porte sur un montant de 2 700 euros, soit 225 euros par mois. L’impôt en principe dû au titre des salaires perçus est de 5 562 euros (application aux revenus salariaux du taux de 20,6 %). Le contribuable devrait donc s’acquitter d’un complément de retenue à la source de 2 862 euros par des versements mensuels de 239 euros chacun.

Du fait du versement du complément de retenue à la source, le contribuable qui a opté pour le taux par défaut ne subirait pas les effets de seuils induits par la grille de taux par défaut : le montant d’impôt acquitté au titre des revenus salariaux serait identique à celui qui aurait été versé sur la base du taux propre.

En application des 4 et 6 de l’article 1663 C nouveau du CGI (alinéas 143 et 145 du présent article), les versements sont arrondis à l’euro le plus proche et ne sont pas dus si leur montant est inférieur à 5 euros.

Le recouvrement du complément de retenue qui n’aurait pas été versé obéit aux modalités de l’impôt sur le revenu, le rôle servant de base de calcul du taux du foyer qui se serait appliqué en l’absence d’option pour le taux par défaut valant titre exécutoire aux fins des poursuites consécutives à l’absence de paiement.

Par ailleurs, le 1 de l’article 1729 G nouveau du CGI, introduit par le présent article, sanctionne les retards de versement du complément de retenue à la source ainsi que les versements inférieurs de plus de 30 % au montant qui aurait dû être versé (alinéas 209 et 210 du présent article). Pour plus de détail sur ces sanctions, il est renvoyé aux commentaires du 25° du B du I du présent article, portant sur l’article 1729 G du CGI (Cf. infra, XIII).

3. Les difficultés susceptibles d’être induites par l’option pour le taux par défaut

Si l’option pour le taux par défaut présente des avantages certains en matière de confidentialité du contribuable vis-à-vis de son employeur, le dispositif prévu par le 3 de l’article 204 H ne présente pas moins pour autant un certain nombre de difficultés et d’interrogations.

a. Une option source de complexité et de lourdeur pour le contribuable

Il est prévu que le contribuable doive lui-même calculer le montant du complément de retenue à la source. Eu égard à la complexité fiscale, il n’est pas exclu que des contribuables se trompent, en toute bonne foi, dans le montant du complément dû, voire qu’ils estiment ne pas en devoir.

En outre, l’option du taux par défaut présente une certaine lourdeur et peut déboucher sur une complexité susceptible d’être difficile à appréhender pour certains contribuables. Elle peut, en effet, conduire à l’application de trois modalités d’imposition concomitantes :

– la retenue à la source effectuée sur les traitements et salaires par l’employeur, sur la base du taux par défaut ;

– le complément de retenue à la source, versée par le contribuable à l’administration ;

– l’acompte sur les revenus mentionnés à l’article 204 C.

b. Le souci de confidentialité pourrait conduire à une surimposition

Ainsi qu’il a été vu précédemment dans le cadre de l’étude de la grille de taux par défaut, celle-ci a été calculée sur la base du taux moyen d’imposition d’un célibataire sans enfant.

Or, il est possible que de nombreux contribuables imposés sur la base de ce taux appartiennent à un foyer fiscal comptant plusieurs parts : couple, personnes à charge, etc. Dès lors, le taux par défaut étant indifférent à la situation du foyer fiscal, des traitements et salaires qui, en application des règles d’établissement de l’impôt sur le revenu, auraient conduit à un impôt faible voire nul, se trouveraient plus fortement imposés, ainsi que l’illustre l’exemple suivant.

Un contribuable marié avec deux enfants à charge ne souhaite pas que son employeur connaisse sa situation familiale. Il perçoit des salaires mensuels de 3 000 euros, soit un montant annuel de 36 000 euros (l’autre membre du foyer ne perçoit aucun revenu). L’impôt dû est nul (70).

S’il opte pour la grille de taux par défaut, son employeur effectuerait une retenue à la source sur son salaire au taux de 12,5 %, pour un total de 4 500 euros acquitté en douze mensualités de 375 euros chacune. L’impact sur la trésorerie est évident, et il faudrait attendre au foyer fiscal considéré septembre de l’année N + 1 pour obtenir la restitution des sommes acquittés en N (l’option n’ayant pas pour effet d’alourdir l’impôt finalement dû, qui resterait nul dans cet exemple).

Si cette hypothèse ne serait pas la plus fréquente dans la mesure où un contribuable dont le foyer compte plusieurs parts n’aurait aucun intérêt financier à opter pour le taux par défaut, c’est une éventualité qu’il ne faut pas exclure a priori.

Il pourrait toujours être opposé à ces observations que l’option relève du seul choix du contribuable et que rien n’impose à ce dernier de l’exercer. Par ailleurs, il est probable qu’un employeur recevant de l’administration le taux neutre ne penserait pas que le salarié concerné cherche à préserver son intimité, du fait de l’irrationalité financière d’un tel choix, et envisagerait plutôt la perception par son salarié de revenus parallèles importants, par exemple fonciers. Dans cette situation, l’option pour le taux par défaut pourrait se révéler pénalisante pour le contribuable, selon la perception que son employeur aurait du patrimoine de celui-ci.

Néanmoins, le cas d’une personne salariée disposant de revenus accessoires de faible volume, mais qui ne souhaite pas que son employeur le sache pour ne pas hypothéquer une éventuelle augmentation salariale, correspond à une situation susceptible d’être réalisée.

De la même manière, une personne ne percevant aucun revenu autre que son salaire, mais qui ne désire pas que son employeur dispose d’une information sur sa situation personnelle et la composition de son foyer fiscal, pourrait vouloir elle aussi opter pour le taux par défaut.

Balayer d’un revers de main ces hypothèses, au motif qu’elles ne sont pas financièrement rationnelles et qu’elles relèvent en tout état de cause d’un choix du contribuable, n’est pas judicieux, surtout dans la mesure où la question de la confidentialité du contribuable se trouve au cœur du projet de réforme. Il serait ainsi malvenu de pénaliser des personnes qui ne font qu’un simple usage d’un outil destiné à préserver leur vie personnelle, au titre d’une aspiration parfaitement légitime et garantie par le Gouvernement.

IV. LA MODIFICATION DU TAUX À LA SUITE D’UN CHANGEMENT DE SITUATION

Texte du projet de loi (alinéas 51 à 65) :

MODIFICATION DU TAUX À LA SUITE D’UN CHANGEMENT DE SITUATION

(51) « Art. 204 I. – 1. Le calcul et les conditions de mise en œuvre prévus au 1 de l’article 204 H du taux prévu à l’article 204 E sont modifiés en cas de :

(52) « 1° Mariage ou conclusion d’un pacte civil de solidarité ;

(53) « 2° Décès de l’un des conjoints soumis à imposition commune ;

(54) « 3° Divorce, rupture d’un pacte civil de solidarité ou événements mentionnés au 4 de l’article 6.

(55) « 2. Ces changements de situation sont déclarés à l’administration fiscale par les contribuables concernés dans un délai de soixante jours.

(56) « 3. À la suite de la déclaration mentionnée au 2 :

(57) « 1° Dans les cas mentionnés au 1° du 1, le taux du prélèvement est calculé selon les modalités prévues au 1° du 1 de l’article 204 H, en additionnant les revenus de chaque membre du futur foyer fiscal et en déterminant l’impôt correspondant par application des règles prévues aux 1 à 4 du I de l’article 197 ou, le cas échéant, à l’article 197 A pour un couple, en tenant compte, le cas échéant, du quotient familial correspondant à la situation du futur foyer fiscal.

(58) « Ce taux s’applique dans les conditions prévues au 2° du 1 de l’article 204 H, au plus tard le troisième mois qui suit celui de la déclaration du changement de situation ou, sur demande des contribuables, à compter du 1er janvier suivant, et jusqu’à l’application du taux du nouveau foyer fiscal constitué, dans les conditions prévues à l’article 204 H ;

(59) « 2° Dans le cas mentionné au 2° du 1, le taux applicable au conjoint ou partenaire survivant est calculé selon les modalités prévues au 1° du 1 de l’article 204 H :

(60) « a) En retenant les revenus et bénéfices que celui-ci a perçus ou réalisés personnellement ou en commun, réduits au prorata temporis à compter du décès, et en déterminant l’impôt correspondant en leur appliquant les règles prévues aux 1 à 4 du I de l’article 197 ou, le cas échéant, à l’article 197 A, en prenant en compte l’ensemble des parts de quotient familial dont bénéficiait le foyer fiscal au 1er janvier de l’année du décès.

(61) « Ce taux s’applique dans les conditions prévues au 2° du 1 de l’article 204 H, au plus tard le troisième mois qui suit celui de la déclaration du décès, et jusqu’au 31 décembre de l’année du décès ;

(62) « b) En retenant les revenus et bénéfices mentionnés au a sans être réduits au prorata temporis et en déterminant l’impôt correspondant en leur appliquant les règles prévues aux 1 à 4 du I de l’article 197 ou, le cas échéant, à l’article 197 A, en prenant en compte le quotient familial correspondant à la situation du foyer fiscal postérieurement au décès.

(63) « Ce taux s’applique dans les conditions prévues au 2° du 1 de l’article 204 H, à compter du 1er janvier de l’année suivant le décès et jusqu’à l’application du taux du nouveau foyer fiscal constitué à compter du 1er septembre de la seconde année qui suit celle du décès dans les conditions prévues à l’article 204 H ;

(64) « 3° Dans les cas mentionnés au 3° du 1, les taux de prélèvement applicables à chaque ancien conjoint ou partenaire sont calculés selon les modalités prévues au 1° du 1 de l’article 204 H, en retenant leurs revenus respectifs estimés sous leur responsabilité au titre de l’année du changement de situation et en déterminant l’impôt correspondant en appliquant à ces revenus les règles prévues aux 1 à 4 du I de l’article 197 ou, le cas échéant, à l’article 197 A, en tenant compte du quotient familial correspondant à la situation déclarée par chacun.

(65) « Ce taux s’applique au plus tard le troisième mois qui suit celui de la déclaration du changement de situation et jusqu’à l’application du taux de chaque nouveau foyer fiscal constitué, dans les conditions prévues à l’article 204 H.

*

* *

L’article 204 I prévoit que le taux calculé par l’administration fiscale pour chaque foyer fiscal est modifié lorsque surviennent trois catégories d’événements, ayant pour dénominateur commun d’entraîner la disparition ou la création d’un foyer fiscal :

– le mariage ou la conclusion d’un pacte civil de solidarité (pacs) ;

– le décès de l’un des conjoints soumis à imposition commune ;

– le divorce, la rupture d’un pacs ou les événements entraînant une imposition distincte des époux et partenaires (71).

Ces changements de situation personnelle doivent être déclarés à l’administration fiscale par les contribuables concernés dans un délai de soixante jours (alinéa 55).

En l’absence de disposition spécifique, le texte proposé laisse à penser que l’absence de déclaration dans ce délai serait susceptible d’entraîner la sanction prévue par l’article 1729 B du CGI, soit une amende de 150 euros pour défaut de production dans les délais prescrits d’un document devant être remis à l’administration fiscale. Il serait utile de préciser que tel n’est pas le cas, afin de ne pas pénaliser les contribuables qui omettraient de faire une telle déclaration, notamment dans des circonstances personnelles douloureuses (décès, séparation) et alors même que cette déclaration pourrait s’avérer avantageuse en termes de niveau d’imposition.

Le mécanisme proposé pour les différents changements de situation vise à prendre en compte de façon contemporaine leurs effets sur le taux d’imposition des contribuables concernés, et à réduire ainsi l’ampleur des régularisations opérées l’année suivante.

A. DANS LE CAS D’UN MARIAGE OU D’UN PACS

1. Le droit existant : les effets fiscaux d’une union sont par construction différés dans le temps

● En cas de mariage ou de conclusion d’un pacs en année N, le principe est que les conjoints ou partenaires sont soumis à imposition commune pour les revenus qu’ils ont perçus au cours de l’année de leur union (5 de l’article 6 du CGI). Ils remplissent une déclaration commune au printemps N + 1, en tenant compte de leur situation de marié ou pacsé au 31 décembre de l’année N ainsi que de leurs charges de famille au 1er janvier N – ou au 31 décembre N si les charges ont augmenté dans l’année.

En pratique, dans ce cas, en année N, chaque futur membre du couple acquitte ses impôts sur ses revenus de l’année N − 1, par mensualités ou par acomptes. Au cours des huit premiers mois de l’année N + 1, chacun acquitte son impôt par mensualités ou acomptes, calculés sur la base de l’impôt qu’il a acquitté en année N. Ce n’est qu’en septembre N + 1 que les effets de leur union – notamment du quotient conjugal – se font sentir, l’impôt à acquitter au titre des revenus de l’année N étant calculé au niveau du couple (72).

● Néanmoins, le 5 de l’article 6 précité du CGI prévoit que les conjoints peuvent aussi opter pour une imposition séparée de leurs revenus perçus l’année de l’union. Dans ce cas, en septembre N + 1, chaque membre du couple déclare ses propres revenus de l’année N, ainsi que, le cas échéant, la quote-part justifiée des revenus communs lui revenant (ou à défaut de justification, la moitié de ces revenus communs). Chacun continue à acquitter ses impôts au titre de ces revenus de l’année N, comme s’il était encore célibataire. Ce n’est qu’en septembre N + 2 que les membres du couple seront imposés conjointement, sur les revenus perçus en N + 1.

À cet égard, il convient de préciser que l’imposition commune est, dans la plupart des cas, soit avantageuse, du fait du quotient conjugal, soit neutre, d’un point de vue fiscal ; néanmoins, dans certains cas, l’imposition séparée peut s’avérer plus favorable (du fait par exemple des effets de la décote, du minimum de perception de l’impôt, de la répartition des enfants entre les membres du couple pour optimiser les effets du quotient familial, du plafonnement des niches fiscales…).

À titre indicatif, la part des foyers fiscaux optant pour une imposition séparée de leurs revenus perçus l’année de l’union n’est pas négligeable, puisqu’elle dépasse 40 %.

2. Le droit proposé : le calcul d’un taux commun au nouveau foyer fiscal applicable soit dans les trois mois suivant la déclaration de l’union, soit le 1er janvier de l’année suivant l’union

Le du 3 de l’article 204 I (alinéas 57 et 58 du présent article) vise à prendre en compte de façon contemporaine les effets du mariage ou du pacs sur le taux d’imposition des membres du nouveau foyer fiscal, sans remettre toutefois en cause l’option existante en faveur d’une imposition séparée des revenus perçus l’année de l’union.

a. Les modalités de calcul du nouveau taux

Après que les contribuables concernés auront effectué leur déclaration de mariage ou de pacs auprès de l’administration fiscale, cette dernière devrait recalculer leur taux d’imposition. Pour ce faire, elle mettrait en œuvre les règles générales prévues par l’article 204 H, mais avec deux modifications :

– les revenus pris en compte pour calculer le taux du PAS seraient égaux à la somme des revenus de chaque membre du futur foyer fiscal de l’année N − 2 ou N − 1, selon que la date de calcul du taux intervient entre janvier et août, ou entre septembre et décembre ;

– l’impôt sur le revenu afférent aux revenus du PAS serait un impôt théorique, égal à l’impôt qui aurait été acquitté sur la somme des revenus de chaque membre (hors réductions et crédits d’impôt), en tenant compte du quotient familial correspondant à la situation du futur foyer fiscal – donc en appliquant le quotient conjugal, notamment, et le cas échéant le quotient familial. Le calcul de cet impôt devrait également prendre en compte les déficits, abattements et charges déductibles du revenu global du futur foyer fiscal.

Le taux est donc calculé selon la formule suivante :

Exemple : un couple se marie en avril de l’année N. Le premier conjoint (C1) a perçu en année N − 2 et N − 1 des salaires mensuels de 3 000 euros, tandis que le deuxième (C2) a perçu en année N − 2 et N − 1 des salaires mensuels de 1 000 euros. Les revenus sont constants d’une année sur l’autre.

En année N, le taux de retenue à la source de C1 est de 11,3 % (IR de 4 075 euros, donc 4 075/36 000), tandis que le taux de retenue à la source de C2 est de 0 % (personne non imposée).

En juillet de l’année N, l’administration aura transmis aux employeurs de C1 et C2 le nouveau taux qui leur sera appliqué, égal à :

= = 6,9 %.

De ce fait, le taux d’imposition de C1 serait ramené de 11,3 % à 6,9 %, tandis que le taux de C2 ne serait plus nul, mais de 6,9 %.

L’impact sur l’impôt acquitté au total par le couple serait positif, puisque l’impôt acquitté sur l’année avec les anciens taux aurait été de 4 068 euros, alors qu’il passera à 3 690 euros (la retenue de C1 passant de 339 à 207 euros, tandis que la retenue de C2 passe de 0 à 69 euros).

Cela permet de réduire l’ampleur de la régularisation en septembre N + 1 : l’impôt effectivement dû au titre des revenus de l’année N par le couple est de 3 332 euros, sous l’effet du quotient conjugal. Cela conduira à restituer au couple 358 euros, au lieu de 736 euros si le taux n’avait pas été modulé dès l’année N.

Par ailleurs, le couple pourra opter pour une individualisation du taux, afin d’éviter que C1 ne soit imposé alors qu’il ne l’était pas auparavant (Cf. VII).

b. L’application du nouveau taux soit dans les trois mois suivant la déclaration de l’union, soit le 1er janvier de l’année suivante, sur option

La prise en compte des effets fiscaux de l’union, par l’application du nouveau taux, pourrait intervenir à des moments différents :

– soit le taux s’appliquerait au plus tard le troisième mois suivant celui de la déclaration de l’union – soit, par exemple, au plus tard, pour un pacs intervenu en mars et déclaré en avril, en juillet suivant ;

– soit, sur demande des contribuables, le taux s’appliquerait de façon différée, à compter du 1er janvier suivant la déclaration de l’union, soit le 1er janvier N + 1 ;

Cette option pour une application différée vise à tenir compte de l’option prévue par le 5 de l’article 6 du CGI en faveur d’une imposition séparée des revenus perçus l’année de l’union – sans toutefois qu’un lien ne soit explicitement établi par le texte entre l’option pour l’imposition séparée et celle pour une application différée du nouveau taux.

Dans ce cas, les membres du nouveau foyer fiscal seraient imposés sur la base de leur taux d’imposition propre en année N, puis se verraient appliquer le taux d’imposition propre au couple au 1er janvier de l’année suivant l’union. Cela permet en effet de transposer le principe d’une imposition distincte au titre des revenus de l’année de l’union. Ainsi, tout au long de l’année N + 1, le taux appliqué à chaque membre du couple serait le taux commun « théorique », sachant que cette même année N + 1, ces contribuables feraient leur dernière déclaration de revenus séparée.

En tout état de cause, dans le premier cas (application dans les trois mois suivant la déclaration), le taux « théorique » s’appliquerait jusqu’en août de l’année N + 1 (73) ; à compter de septembre N + 1, le taux du nouveau foyer fiscal constitué pourrait s’appliquer, sur la base de la déclaration de revenus commune réalisée au printemps N + 1.

Dans le second cas (application différée au 1er janvier de l’année N + 1), le taux « théorique » s’appliquerait jusqu’en août de l’année N + 2, puisque le taux du nouveau foyer fiscal constitué ne pourrait être connu qu’après la première déclaration commune, soit au printemps N + 2. Ce taux commun « théorique » a vocation à être « rafraîchi » en septembre N + 1, sur la base des revenus déclarés par chacun au printemps N + 1.

Il convient de noter que dans le cas d’une union intervenant en fin d’année, quelle que soit l’option choisie, le nouveau taux calculé par l’administration fiscale ne pourrait pas s’appliquer au cours de l’année N ; il pourrait aussi s’appliquer après le 1er janvier N + 1, si la déclaration de l’union intervient en tout fin d’année, ou a fortiori au début de l’année suivant l’union.

● Les délais impartis à l’administration pour faire appliquer le nouveau taux (hors option pour une application différée) sont relativement restreints, puisque ce taux devrait s’appliquer au plus tard le troisième mois suivant la déclaration de l’union, alors même que l’article 1671 tel que rédigé par le présent article dispose que le débiteur de la retenue à la source applique le taux calculé par l’administration fiscale au plus tard le deuxième mois suivant sa transmission. L’administration ne disposerait donc que d’un mois pour calculer et transmettre le nouveau taux au collecteur.

 

Année N − 1

Année N

(année du mariage ou pacs)

Année N + 1

Année N + 2

Droit actuel

Mensualités ou acomptes versés au titre de l’IR dû sur leurs revenus N − 2 par chaque membre du futur couple

Mensualités ou acomptes versés au titre de l’IR dû sur leurs revenus N − 1 par chaque membre du couple

● Mensualités ou acomptes versés au titre de l’IR dû sur leurs revenus propres N par les membres du couple de janvier à août

● En septembre :

 option pour l’imposition commune : calcul de l’IR au titre des revenus perçus en N par les conjoints, avec prise en compte des mensualités ou acomptes versés jusqu’en août par chacun

 option pour l’imposition séparée : IR acquitté en septembre sur revenus perçus en N par chacun des conjoints

● option pour l’imposition commune : mensualités ou acomptes versés au titre de l’IR dû sur leurs revenus N + 1 par le couple

● option pour l’imposition séparée : Mensualités ou acomptes versés au titre des revenus perçus en N + 1 par les deux membres du couple de janvier à août et régularisation en septembre, en acquittant l’IR dû sur les revenus du couple perçus en N + 1

Droit proposé, avec une application immédiate du nouveau taux

Prélèvement réalisé sur leurs revenus N − 1 pour chaque membre du futur couple, chacun ayant son propre taux (RAS ou acompte)

Dans un délai de trois mois à compter de la déclaration, nouveau taux « théorique » commun calculé en prenant en compte les revenus (N − 2) ou (N − 1) du couple et l’impôt théorique afférent, applicable à chaque membre du couple pour les revenus N

Option pour l’imposition commune (par hypothèse)

● application du taux « théorique » jusqu’en août ;

● taux effectif du nouveau foyer fiscal applicable à partir de septembre, sur la base de la première déclaration commune au printemps

Taux effectif du nouveau foyer fiscal

Droit proposé, avec option pour une application du nouveau taux au 1er janvier de l’année suivante

Prélèvement réalisé sur leurs revenus N − 1 pour les membres du futur couple, chacun ayant son propre taux (RAS ou acompte)

Maintien du taux d’imposition propre à chaque membre du couple pour les revenus N

Option pour l’imposition séparée (par hypothèse) :

● application du taux « théorique » commun calculé en prenant en compte les revenus du couple (N − 1) et l’impôt théorique afférent, de janvier à août ; application du taux « rafraîchi » de septembre à décembre

●régularisation de l’imposition des revenus N le cas échéant dans le cadre de la déclaration de revenus séparée de chaque membre du couple en septembre

● application du taux « théorique » rafraîchi, jusqu’en août ;

● taux effectif du nouveau foyer fiscal applicable à partir de septembre, sur la base de la première déclaration commune au printemps (sur les revenus N + 1)

B. DANS LE CAS DU DÉCÈS D’UN DES CONJOINTS OU PARTENAIRES SOUMIS À IMPOSITION COMMUNE

De façon générale, la réforme du prélèvement à la source s’avère favorable aux ayants droit des contribuables qui décèdent.

En effet, selon les règles fiscales en vigueur, lorsqu’un contribuable décède sans conjoint, ses ayants droit sont tenus d’acquitter ses dettes fiscales, qui peuvent porter non seulement sur l’impôt dû au titre de l’année de son décès, mais aussi sur l’impôt au titre des revenus perçus l’année précédente (selon la date où survient le décès). Ces dettes viennent grever la succession.

Désormais, dans le cadre de la réforme, en cas de décès d’un contribuable sans conjoint, l’arrêt du versement des revenus se traduirait automatiquement par l’arrêt automatique de la retenue à la source, tandis que les versements d’acompte pourraient être interrompus sur simple demande. L’impôt dû au titre des revenus perçus au cours de l’année du décès serait acquitté au fil de l’eau, ce qui annulerait ou restreindrait la dette fiscale à la charge des ayants droit – cette dette se limitant à l’impôt restant le cas échéant dû en cas de régularisation en septembre N + 1 (74).

Le du 3 de l’article 204 I (alinéas 59 à 63) porte quant à lui sur le cas du décès d’un des conjoints soumis à imposition commune : il vise à prendre en compte là encore de façon contemporaine les effets de ce décès sur le taux de prélèvement du conjoint survivant et à restreindre les régularisations au cours des années suivantes.

1. Le droit existant : un dispositif de double déclaration pour les revenus de l’année du décès

● Dans le droit en vigueur, lorsque l’un des conjoints décède au cours de l’année N, le conjoint survivant doit effectuer deux déclarations de revenus en année N + 1 :

– une première déclaration au nom du couple, pour les revenus perçus par les deux membres du foyer fiscal entre le 1er janvier et la date du décès ;

– une seconde déclaration à son seul nom, pour les revenus qu’il a perçus entre la date du décès et le 31 décembre ; l’impôt est calculé sur la base du quotient familial apprécié au 1er janvier de l’année, ce qui permet au conjoint survivant de bénéficier du quotient conjugal.

Le conjoint survivant bénéficie ainsi d’un double avantage : en premier lieu, la moindre imposition résultant de la double déclaration, et donc de l’application du barème progressif à des revenus perçus sur une fraction d’année, et en second lieu, le maintien du bénéfice du quotient conjugal pour la déclaration des revenus réalisée par le seul conjoint survivant.

● Pour autant, ces règles fiscales favorables n’ont un effet pour le conjoint survivant que l’année suivant le décès, en septembre N + 1 (ou avant, si le contribuable demande une modulation de ses acomptes ou de ses mensualités au cours de l’année N + 1 en prévision de la baisse de son impôt), alors même qu’au cours de l’année N, ce contribuable se trouve seul à faire face à l’imposition due sur les revenus perçus par le couple en N − 1 – à cet égard, la situation n’est bien sûr pas la même selon que le conjoint décède en janvier ou en décembre.

Exemple : un couple composé de C1, qui perçoit des revenus mensuels de 3 000 euros, et de C2, qui perçoit des revenus mensuels de 2 000 euros (les revenus étant supposés constants d’une année sur l’autre).

C1 décède en mai de l’année N. Le couple était redevable, au titre des revenus perçus en N − 1, d’un impôt de 4 911 euros, soit des mensualités de 491 euros par mois entre janvier et octobre. C2 devra donc s’acquitter de 491 euros par mois entre mai et octobre, alors que ses revenus sont de 2 000 euros.

En revanche, en année N + 1, C1 ne sera pas imposé. Au titre de sa première déclaration (imposition des revenus des deux conjoints les quatre premiers mois, soit 20 000 euros), l’impôt sera nul, de même qu’au titre de sa seconde déclaration (imposition de ses seuls revenus entre mai et décembre, soit 16 000 euros). Les mensualités ou acomptes acquittés au cours de l’année N + 1 lui seront remboursés.

2. Le droit proposé : la prise en compte contemporaine des effets du décès sur le taux de prélèvement du conjoint survivant

Le dispositif proposé vise à prendre en compte de la façon la plus immédiate possible les effets du décès sur le taux d’imposition du conjoint survivant, en prévoyant l’application successive de deux taux, l’un l’année du décès, l’autre l’année suivante, applicable jusqu’au mois de septembre N + 2 – jusqu’à ce que le taux de prélèvement du nouveau foyer fiscal, composé du seul conjoint survivant, soit établi.

Les règles en vigueur, à savoir la double déclaration en année N + 1 par le conjoint survivant, ne sont pas modifiées.

Si le nombre de décès recensés par l’INSEE pour l’année 2014 s’est établi à 560 000, seule une part d’entre eux concerne des personnes soumises à imposition commune avec leur conjoint ou partenaire.

a. Le calcul du taux applicable jusqu’au 31 décembre de l’année du décès, avec le maintien du quotient conjugal et la prise en compte des seuls revenus du conjoint survivant

Dans le cadre du prélèvement à la source, le conjoint décédé aurait acquitté au fil de l’eau l’impôt dû au titre de ses revenus (et des revenus communs). De ce fait, le conjoint survivant ne serait pas tenu d’acquitter seul, en année N, l’impôt restant dû au titre des revenus de l’année précédente.

Après la déclaration du décès, l’administration fiscale calculerait le nouveau taux applicable au conjoint survivant, selon les modalités définies à l’article 204 H mais avec deux modifications :

– les revenus pris en compte pour calculer le PAS seraient ceux du seul conjoint survivant, ainsi que les revenus communs – dont le conjoint survivant est désormais seul bénéficiaire – qui ont été perçus en année N − 2 ou en année N − 1, selon la date du calcul ; ces revenus seraient réduits au prorata temporis, au titre de la seule période entre la date du décès et le 31 décembre, ce qui correspondrait à l’avantage fiscal résultant de l’application du barème à une fraction des revenus ;

– l’impôt sur le revenu afférent serait un impôt théorique égal à l’impôt qui aurait été acquitté au titre de cette fraction de revenus, en prenant en compte les parts de quotient familial dont bénéficiait le foyer fiscal au 1er janvier – l’application du quotient conjugal est donc maintenue. Devraient également être pris en compte les abattements et déficits catégoriels dont bénéficie le foyer fiscal.

Le taux est donc calculé selon la formule suivante :

Exemple : soit un couple composé d’un conjoint C1 percevant des salaires mensuels de 3 000 euros et d’un conjoint C2 percevant des salaires mensuels de 2 000 euros. Le conjoint C1 décède en mai de l’année N.

Jusqu’au décès de C1, le taux de retenue à la source des deux conjoints était de 8,2 % (4 911 euros d’impôt rapporté à un revenu de 60 000 euros).

Après le décès de C1, le conjoint survivant se verra appliquer, dans les trois mois suivant sa déclaration et jusqu’au 31 décembre de l’année N, le taux suivant :

=

Soit un taux nul, puisque l’impôt dû au titre de salaires de 16 000 euros est nul – même sans prendre en compte le quotient conjugal.

Comme vu dans l’exemple précédent, le conjoint survivant ne sera pas imposé au titre de ses revenus perçus en année N. De ce fait, en septembre N + 1, il se verra restituer les sommes retenues à la source sur ses revenus (8,2 % de 2 000 euros, sur six mois (75) = 984 euros) comme sur ceux de son conjoint décédé (8,2 % de 3 000 euros sur quatre mois = 984 euros), soit 1 968 euros.

En l’absence de calcul du nouveau taux, le contribuable aurait continué à être imposé au même taux de mai à décembre, soit un taux de 8,2 % au lieu de 0 %. La régularisation aurait donc été plus importante, avec une restitution de 2 952 euros, au lieu de 1 968 euros.

Le calcul du nouveau taux par l’administration fiscale permettrait de réduire le taux d’imposition du conjoint survivant dans les trois mois suivant la déclaration, et donc de minorer le montant de la régularisation en N + 1.

De la même façon que dans le cas précédent, les délais impartis à l’administration pour faire appliquer le nouveau taux seraient relativement restreints, à savoir dans les trois mois suivant la déclaration du décès. Pour autant, en dépit du caractère resserré de ces délais, ce taux n’aurait vocation à s’appliquer que pendant une durée très limitée dans les cas où les décès surviendraient à partir du second semestre – et ne trouverait probablement pas à s’appliquer dans le cas de décès intervenant à partir du mois d’octobre.

b. Le taux applicable du 1er janvier de l’année suivant le décès au mois de septembre de la deuxième année suivant le décès

Dans un second temps, l’administration fiscale calculerait le nouveau taux applicable au conjoint survivant, toujours selon les règles prévues par l’article 204 H, mais en retenant cette fois :

– les revenus du seul conjoint survivant, ainsi que les revenus communs du foyer fiscal, qui ont été perçus en année N – 1 ;

– l’impôt sur le revenu afférent à ces revenus, en prenant en compte désormais le quotient familial post-décès – donc sans appliquer le quotient conjugal.

L’objectif est de définir le taux d’imposition désormais applicable au seul conjoint survivant, selon la formule suivante :

Exemple : en reprenant la configuration de l’exemple précédent, le conjoint C2 se verrait assujetti, à compter du 1er janvier N + 1, au taux suivant :

= = 6,9 %

Ce taux a vocation à s’appliquer jusqu’à ce que le taux du nouveau foyer fiscal, constitué du seul conjoint survivant, soit calculé en septembre N + 2, sur la base de la déclaration de revenus réalisée au printemps N + 2. Aucune des deux déclarations réalisées au printemps N + 1, l’une au titre des revenus perçus par le couple avant le décès, l’autre au titre des revenus perçus par le conjoint survivant après le décès, ne permettrait de déterminer le taux d’imposition propre du conjoint survivant.

Là encore, le taux serait « rafraîchi » en septembre N + 1, en prenant en compte les revenus déclarés par le conjoint survivant au printemps N + 1.

 

Année N − 1

Année N

(année du décès)

Année N + 1

Année N + 2

Droit actuel

Mensualités ou acomptes versés au titre de l’IR dû sur les revenus de l’année N − 2

Mensualités ou acomptes versés au titre de l’IR dû sur les revenus du couple de l’année N − 1

● Mensualités ou acomptes définis sur la base des revenus du couple de l’année N − 1, versés au titre des revenus N (sauf demande de modulation)

● Double déclaration au printemps :

– déclaration au nom du couple pour les revenus perçus par le couple entre le 1er janvier N et la date du décès

– déclaration au nom du seul conjoint survivant pour les revenus de celui-ci perçus entre la date du décès et le 31 décembre N

Régularisation en septembre

● Mensualités ou acomptes définis sur la base de l’impôt acquitté en N + 1

● Régularisation en septembre le cas échéant

Droit proposé

Prélèvement réalisé sur leurs revenus N − 1 avec le taux commun au foyer fiscal

Dans un délai de trois mois à compter de la déclaration du décès, nouveau taux « théorique » :

● calculé en prenant en compte les revenus du seul conjoint survivant (ainsi que les revenus communs) réduits au prorata temporis, et l’impôt théorique afférent à ces revenus, avec bénéfice des parts de quotient familial du couple

● applicable jusqu’au 31 décembre

● Application d’un nouveau taux à compter du 1er janvier

– Calculé en prenant en compte les revenus du conjoint survivant (ainsi que les revenus communs) et l’impôt théorique afférent à ces revenus (sur la base des revenus (N − 1), sans prise en compte du quotient conjugal

● Dans le cadre de la régularisation en septembre, double déclaration :

le cas échéant, restitution des sommes prélevées à la source au-delà de l’impôt finalement dû ; « rafraîchissement » du taux sur la base des revenus N déclaré par le conjoint survivant

● de janvier à août, application du taux « rafraîchi »

● à partir de septembre, application du taux du nouveau foyer fiscal, sur la base de la déclaration du conjoint survivant de l’été

C. DANS LE CAS D’UN DIVORCE OU D’UNE RUPTURE DE PACS

Selon la même logique, le 3° du 3 de l’article 204 I (alinéas 64 et 65 du présent article) vise à adapter de la façon la plus immédiate possible le taux de prélèvement des membres d’un foyer fiscal qui divorcent ou se séparent.

En 2014, 123 500 divorces ont été recensés par l’INSEE ; en revanche, le nombre de ruptures de pacs n’est pas disponible.

1. Le droit existant : l’année de la séparation, le paiement des impôts dus par le couple au titre de l’année précédente

Le 6 de l’article 6 du CGI pose le principe selon lequel chaque époux ou partenaire est imposé distinctement sur les revenus qu’il a perçus l’année du divorce ou de la rupture du pacs, ainsi que sur la part des revenus communs lui revenant – sachant qu’à défaut de justification de leurs parts respectives, chacun est imposé sur la moitié des revenus communs.

Il convient de noter qu’en application du 4 de l’article 6, ces règles s’appliquent également aux époux et partenaires qui font l’objet d’une imposition séparée dans les cas suivants :

– lorsqu’ils sont séparés de biens et ne vivent pas sous le même toit ;

– lorsqu’étant en instance de séparation de corps ou de divorce, ils ont été autorisés à avoir des résidences séparées ;

– lorsqu’en cas d’abandon du domicile conjugal par l’un ou l’autre des époux, chacun dispose de revenus distincts.

Chaque ex-conjoint effectue sa propre déclaration de revenus au printemps suivant la séparation, comprenant le cas échéant les pensions alimentaires versées – et déductibles – et celles perçues. L’imposition de chacun des conjoints ou partenaires est établie en retenant un quotient familial de base d’une part, tout en répartissant entre eux les charges de famille (appréciées au 1er janvier ou, si elles ont augmenté, au 31 décembre), selon, notamment que les enfants se trouvent à la charge de l’un ou de l’autre, ou en garde alternée.

Les conjoints ou partenaires doivent acquitter l’impôt dû au titre des revenus perçus en année N − 1 au cours de l’année de leur séparation, ce qui peut susciter des difficultés, en cas de mésentente entre eux. L’évaluation préalable précise que l’administration fiscale, lorsqu’elle est informée au cours de l’année N de la séparation, peut interrompre les prélèvements de mensualités et d’acomptes et rembourser ceux qui ont été effectués, l’impôt dû au titre des revenus de l’année N − 1 étant acquitté en une seule fois en septembre N, à charge pour les deux ex-conjoints de se répartir la charge de l’imposition due.

2. Le droit proposé : le calcul d’un nouveau taux pour chaque ex-conjoint dès l’année de la séparation

Les dispositions du 3° du 3 de l’article 204 H tendent là encore à permettre une prise en compte contemporaine des effets de la séparation des conjoints ou partenaires sur leur taux d’imposition respectif, et partant à limiter l’ampleur de la régularisation l’année suivante.

À la différence des mécanismes précédents, l’administration fiscale serait amenée à calculer les deux nouveaux taux de prélèvement sur la base des revenus de l’année en cours tels qu’estimés par chaque ex-conjoint – et non sur la base des revenus de l’année N − 2 ou N − 1. Il s’agirait en définitive du seul cas où le taux serait calculé sur la base d’une assiette de revenus contemporaine.

Ainsi, l’administration fiscale devrait calculer leur nouveau taux selon les modalités prévues par l’article 204 H, mais avec les adaptations suivantes :

– seraient pris en compte les revenus respectifs des ex-conjoints « estimés sous leur responsabilité au titre de l’année de changement de situation », ce qui supposerait également que, le cas échéant, ils répartissent entre eux les revenus communs ;

– l’impôt « théorique » afférent à ces revenus serait calculé en tenant compte du quotient familial correspondant à la situation déclarée par chacun : chaque ex-conjoint devrait donc déclarer le nombre de demi-parts ou de quarts de part dont il bénéficie.

Taux de chaque conjoint =

À la différence des changements de situation précédents (union ou décès), pour lesquels ne seraient requises que la déclaration de l’événement et sa date, la déclaration d’un divorce ou d’une rupture de pacs imposerait aux contribuables d’estimer le montant de leurs revenus de l’année (en prenant en compte les pensions alimentaires versées ou déduites) et, le cas échéant, d’indiquer leur situation à l’égard des charges de famille (répartition de la charge des enfants).

Il aurait été envisageable de se fonder sur les revenus perçus par les ex-conjoints en année N − 2 ou N − 1, pour le calcul du taux. Toutefois, en cas de versement de pensions alimentaires à compter de l’année de la séparation, les revenus du conjoint qui les verse seraient minorés, tandis que les revenus du conjoint qui les perçoit seraient majorés, ce qui ferait perdre de sa pertinence à une prise en compte des revenus N − 2 ou N − 1. Par ailleurs, il resterait nécessaire de porter à la connaissance de l’administration fiscale la répartition de la charge des enfants.

Il convient d’observer qu’en cas d’évaluation erronée des revenus attendus au titre de l’année de séparation, et notamment d’une sous-évaluation, qui se traduirait par un taux d’imposition plus faible des ex-conjoints, il n’y aurait pas de sanction lors de la régularisation en septembre N + 1.

La prise en compte contemporaine des effets de la séparation sur le taux de prélèvement viendra réduire la régularisation intervenant en septembre N + 1, lorsque les deux ex-conjoints effectueront leur première déclaration de revenus séparée.

Exemple : un couple avec deux enfants se sépare en avril N ; le premier conjoint C1 perçoit un salaire mensuel de 3 000 euros, tandis que le deuxième, C2, perçoit un salaire mensuel de 1 500 euros.

En janvier N, en supposant que les revenus sont constants d’une année sur l’autre, les revenus de C1 et C2 sont assujettis à une retenue à la source au taux de 5,1 % (soit un IR de 2 730 euros ramené à des revenus de 54 000 euros).

À compter du divorce, C2 prend la garde des deux enfants et perçoit une pension alimentaire de 500 euros par mois.

Le nouveau taux de C2 calculé par l’administration est le suivant :

Taux = = 0 %

Le nouveau taux de C1 calculé par l’administration est le suivant :

Taux = =

Taux = 8,3 %

 

Année N − 1

Année N

(année du divorce ou de la rupture du pacs)

Année N + 1

Année N + 2

Droit actuel

Mensualités ou acomptes versés au titre de l’IR dû sur les revenus du couple de N − 2

Mensualités ou acomptes versés au titre de l’IR dû sur les revenus du couple de N − 1

● Mensualités ou acomptes définis sur la base des revenus N − 1, au titre des revenus N

● Régularisation en septembre, après la première déclaration séparée de chaque conjoint réalisée au printemps

Mensualités ou acomptes au titre de l’IR dû sur les revenus de chaque conjoint

Droit proposé

Prélèvement réalisé sur leurs revenus N − 1 avec le taux commun au foyer fiscal

Dans un délai de trois mois à compter de la déclaration de la séparation, nouveau taux « théorique » pour chacun des ex-conjoints :

Calculé sur la base des revenus estimés par chaque ex-conjoint (compte tenu le cas échéant des pensions alimentaires), avec le quotient familial correspondant à la situation déclarée par chacun

● Application du taux « théorique » pour chacun des deux ex-conjoints entre janvier et août

● Régularisation le cas échéant en septembre, après la première déclaration séparée de chaque conjoint réalisée au printemps ;

● Application, à compter de septembre, du taux propre à chaque conjoint

● Application, du taux propre à chaque conjoint, « rafraîchi » en septembre

V. LA MODULATION DU PRÉLÈVEMENT À LA SOURCE

Texte du projet de loi (alinéas 66 à 94 et 211 à 223) :

MODULATION DU PRÉLÈVEMENT

(66) « Art. 204 J. – 1. Le montant du prélèvement mentionné à l’article 204 A peut être modulé à la hausse ou à la baisse sur demande du contribuable.

INTERDICTION DE LA MODULATION EN CAS D’ABSENCE DE DÉCLARATION D’UN CHANGEMENT DE SITUATION

(67) « Toutefois, quand un changement de situation mentionné au 1 de l’article 204 I est intervenu, aucune demande de modulation ne peut être présentée tant que ce changement de situation n’a pas été déclaré.

MODULATION À LA HAUSSE

(68) « 2. Le contribuable peut choisir librement de moduler à la hausse le taux mentionné aux articles 204 H et 204 I ou l’assiette de l’acompte mentionnée à l’article 204 G qui lui est applicable.

(69) « Le taux du prélèvement ou l’assiette de l’acompte modulés à la hausse par le contribuable s’appliquent au plus tard le troisième mois qui suit celui de la demande et jusqu’au 31 décembre de l’année ou, si le taux ou le montant de l’acompte modulés qui résultent de sa demande sont inférieurs respectivement au taux ou au montant de l’acompte déterminés par l’administration fiscale à partir de l’impôt sur le revenu et des revenus de l’année précédente en application du 1 de l’article 204 H, jusqu’à la date à compter de laquelle ces derniers taux ou montant d’acompte s’appliquent.

MODULATION À LA BAISSE

(70) « 3. 1° La modulation à la baisse du prélèvement n’est possible que si le montant du prélèvement estimé par le contribuable au titre de sa situation et de ses revenus de l’année en cours est inférieur de plus de 10 % et 200 € au montant du prélèvement qu’il supporterait en l’absence de cette modulation ;

(71) « 2° Le contribuable qui souhaite que son prélèvement soit modulé déclare, sous sa responsabilité, sa situation et l’estimation de l’ensemble de ses revenus au titre de l’année en cours. Lorsque l’administration n’en a pas la disposition, le contribuable déclare sa situation et l’ensemble de ses revenus réalisés au titre de l’année précédente ;

PRÉLÈVEMENT ESTIMÉ AU TITRE DE L’ANNÉE EN COURS

(72) « 3° L’administration fiscale calcule le prélèvement résultant de cette déclaration en appliquant au montant des revenus estimés, déterminé dans les conditions prévues à l’article 204 F et à l’article 204 G, à l’exception du 7° du 2 du même article, un taux calculé selon les modalités du 1° du 1 de l’article 204 H, les revenus pris en compte pour le calcul de ce taux étant ceux résultant de la déclaration mentionnée au premier alinéa et l’impôt sur le revenu y afférent, celui résultant de l’application à ces revenus des règles prévues aux 1 à 4 du I de l’article 197 ou, le cas échéant, à l’article 197 A en vigueur à la date de la demande.

(73) « Dans le cas prévu au b du 5°, l’estimation mentionnée au premier alinéa s’entend comme celle réalisée conjointement par les deux membres du couple.

(74) « Dans le cas prévu au c du 5°, l’estimation mentionnée au premier alinéa s’entend comme celle réalisée par le conjoint ou partenaire survivant au titre de la période postérieure au décès.

(75) « Dans le cas prévu au d du 5°, l’estimation mentionnée au premier alinéa s’entend comme celle réalisée par l’ancien conjoint ou partenaire au titre de l’année entière ;

PRÉLÈVEMENT QUE SUPPORTERAIT LE CONTRIBUABLE EN L’ABSENCE DE MODULATION

(76) « 4° L’administration fiscale calcule le montant du prélèvement que le contribuable supporterait en l’absence de cette modulation selon les modalités suivantes :

CAS GÉNÉRAL (PAS DE MODULATION OU CHANGEMENT DE SITUATION ANTÉRIEUR LA MÊME ANNÉE, TAUX PAR DÉFAUT, CHANGEMENT DE SITUATION L’ANNÉE PRÉCÉDENTE)

(77) « a) Le montant de retenue à la source pris en compte est calculé en appliquant au montant de l’assiette mentionnée à l’article 204 F déclarée par le contribuable au titre de l’année en cours les deux tiers du taux qui s’applique entre le 1er janvier et le 31 août et le tiers du taux qui s’applique entre le 1er septembre et le 31 décembre, en application du 2° du 1 de l’article 204 H, du 2 de l’article 204 H en retenant le taux sur une base annuelle en application du d du 1° du 2 du même article ou, lorsque le contribuable a déclaré au cours de la dernière ou de l’avantdernière année un changement de situation mentionné à l’article 204 I, en application de ce dernier article ;

(78) « b) Le montant de l’acompte pris en compte est le montant des versements acquittés en application de l’article 1663 C à la date de la demande de modulation auxquels s’ajoutent les versements qui seraient opérés, en l’absence de modulation, postérieurement à cette date par application des articles 204 G et 204 I, dans les conditions prévues à l’article 1663 C ;

CAS PARTICULIERS

(79) « 5° Par dérogation au 4° :

MODULATION PRÉCÉDENTE

(80) « a) Lorsque le prélèvement dont le contribuable demande la modulation est consécutif à une précédente modulation réalisée au cours de la même année :

(81) « – le montant de retenue à la source pris en compte est calculé en appliquant au montant de l’assiette mentionnée à l’article 204 F déclarée par le contribuable au titre de l’année en cours la moyenne prorata temporis du taux résultant de la précédente modulation ainsi que des autres taux qui se sont appliqués le cas échéant avant la date de la mise en œuvre de ce taux ;

(82) « – le montant de l’acompte pris en compte est le montant des versements acquittés en application de l’article 1663 C à la date de la nouvelle demande de modulation, auxquels s’ajoutent les versements qui seraient opérés postérieurement à cette date en application de la précédente modulation ;

MARIAGE

(83) « b) Lorsque le prélèvement dont les membres d’un couple demandent la modulation est consécutif à un changement de situation, prévu au 1° du 1 de l’article 204 I, au cours de l’année et que le taux prévu au 1° du 3 du même article s’applique à la date de la demande de modulation :

(84) « – le montant de retenue à la source pris en compte est calculé en appliquant, pour chaque membre du couple, au montant de l’assiette mentionnée à l’article 204 F qu’il a déclaré au titre de l’année en cours la moyenne prorata temporis du taux résultant de l’application du 1° du 3 de l’article 204 I ainsi que des autres taux qui se sont appliqués le cas échéant avant la date de mise en œuvre de ce taux ;

(85) « – le montant de l’acompte pris en compte est le montant des versements acquittés par chaque membre du couple en application de l’article 1663 C à la date de la demande de modulation, auxquels s’ajoutent les versements qui seraient opérés pour chaque membre du couple postérieurement à cette date, en l’absence de modulation, en application du 1° du 3 de l’article 204 I ;

DÉCÈS

(86) « c) Lorsque le prélèvement dont le conjoint ou partenaire survivant demande la modulation est consécutif à un changement de situation prévu au 2° du 1 de l’article 204 I au cours de l’année :

(87) « – le montant de retenue à la source pris en compte est calculé en appliquant au montant de l’assiette mentionnée à l’article 204 F déclarée par le conjoint ou partenaire survivant à compter du décès et jusqu’au 31 décembre la moyenne prorata temporis du taux résultant de l’application du 2° du 3 de l’article 204 I ainsi que des autres taux qui se sont appliqués entre la date de décès et la date de mise en œuvre de ce taux ;

(88) « – le montant de l’acompte pris en compte est le montant des versements afférents aux revenus ou bénéfices dont a disposé le conjoint ou partenaire survivant, acquittés en application de l’article 1663 C entre la date du décès et la date de la demande de modulation, auxquels s’ajoutent les versements de même nature qui seraient opérés postérieurement à cette date, en l’absence de modulation, en application du 2° du 3 de l’article 204 I ;

DIVORCE

(89) « d) Lorsque le prélèvement dont l’ancien conjoint ou partenaire demande la modulation est consécutif à un changement de situation prévu au 3° du 1 de l’article 204 I au cours de l’année :

(90) « – le montant de retenue à la source pris en compte est calculé en appliquant au montant de l’assiette mentionnée à l’article 204 F déclarée par l’ancien conjoint ou partenaire la moyenne prorata temporis du taux résultant de l’application du 3° du 3 de l’article 204 I ainsi que des autres taux qui se sont appliqués depuis le 1er janvier ;

(91) « – le montant de l’acompte pris en compte est le montant des versements afférents aux revenus ou bénéfices dont l’ancien conjoint ou partenaire a disposé, acquittés en application de l’article 1663 C du 1er janvier à la date de la demande de modulation, auxquels s’ajoutent les versements de même nature qui seraient opérés postérieurement à cette date, en l’absence de modulation, en application du 3° du 3 de l’article 204 I ;

CONSÉQUENCES DE LA MODULATION À LA BAISSE

(92) « 6° Lorsque le contribuable décide de moduler à la baisse son prélèvement :

(93) « a) Le taux modulé calculé dans les conditions prévues au 3° s’applique au plus tard le troisième mois qui suit celui de la décision de modulation et jusqu’au 31 décembre de l’année ;

(94) « b) Le montant de l’acompte calculé dans les conditions prévues au 3° est diminué du montant des versements déjà acquittés, sans pouvoir donner lieu à restitution, et s’applique jusqu’au 31 décembre de l’année.

[…]

SANCTIONS EN CAS DE DÉFAUT DE PAIEMENT DE L’ACOMPTE OU DES COMPLÉMENTS DE RETENUE À LA SOURCE OU EN CAS DE MODULATION EXCESSIVE

[…]

(211) « 2. La faculté de modulation à la baisse du prélèvement prévue à l’article 204 J donne lieu à l’application d’une majoration de 10 % :

(212) « a) Lorsque le montant du prélèvement calculé selon les modalités prévues au 3° du 3 de l’article 204 J, les revenus pris en compte étant ceux effectivement constatés au titre de l’année et l’impôt sur le revenu y afférent, celui résultant de l’application à ces revenus des règles prévues aux 1 à 4 du I de l’article 197 ou, le cas échéant, à l’article 197 A en vigueur à la date de la modulation, s’avère inférieur de moins de 10 % ou de moins de 200 € au montant du prélèvement qui aurait été effectué en l’absence de modulation, calculé selon les modalités prévues au 4° du 3 de l’article 204 J en tenant compte des revenus mentionnés à l’article 204 B effectivement perçus au titre de l’année.

(213) « L’assiette de la pénalité est égale à la différence, lorsqu’elle est positive, entre ce dernier montant de prélèvement et le montant du prélèvement effectué.

(214) « Toutefois, lorsque le montant du prélèvement effectué s’avère inférieur de plus de 30 % au montant du prélèvement qui aurait été effectué en l’absence de modulation dans les conditions précitées, le taux de la majoration est égal à la moitié de la différence entre ce montant et le montant du prélèvement effectué, rapportée à ce premier montant ;

(215) « b) Dans le cas contraire, lorsque le montant du dernier prélèvement estimé, calculé selon les modalités prévues au 3° du 3 de l’article 204 J et majoré, le cas échéant, du montant des versements non restitués en application du b du 6° du 3 du même article, s’avère inférieur de plus de 10 % au montant du prélèvement qui aurait été effectué selon les modalités prévues au 3° du 3 de l’article 204 J précité, les revenus pris en compte étant ceux effectivement constatés au titre de l’année et l’impôt sur le revenu y afférent, celui résultant de l’application à ces revenus des règles prévues aux 1 à 4 du I de l’article 197 ou, le cas échéant, à l’article 197 A en vigueur à la date de la modulation.

(216) « L’assiette de la pénalité est égale à la différence, lorsqu’elle est positive, entre le montant du prélèvement qui aurait été effectué mentionné à l’alinéa précédent et le montant du prélèvement effectué.

(217) « Toutefois, lorsque le montant du prélèvement effectué s’avère inférieur de plus de 30 % au premier montant mentionné à l’alinéa précédent, le taux de la majoration est égal à la moitié de la différence entre ce premier montant et le montant du prélèvement effectué, rapportée à ce premier montant.

(218) « 3. La majoration prévue au 2 ne s’applique pas ou est réduite lorsque le contribuable justifie que l’estimation erronée de sa situation ou de ses revenus a été, en tout ou partie, réalisée de bonne foi à la date de sa demande de modulation et provient d’éléments difficilement prévisibles à cette date, ou lorsque le contribuable justifie que le prélèvement qui aurait été effectué en l’absence de modulation à la baisse est différent de celui calculé en application du deuxième alinéa du 2, en raison de la répartition de ses revenus au cours de l’année.

(219) « La majoration prévue au 2 ne s’applique pas aux sommes majorées en application du 1. » ;

(220) 28° A l’article 1730 :

(221) a) Au dernier alinéa du 2, les mots : « du b » sont remplacés par les mots : « du 1 ou du 2 de l’article 1729 G » ;

(222) b) Le b du 2 et les 3 et 4 sont abrogés ;

(223) c) Au 5, les mots : « aux a et b du 2 » sont remplacés par les mots : « au a du 2 » ;

*

* *

Outre les cas de prise en compte automatique des changements de situation des redevables prévus par l’article 204 I mentionné ci-dessus, l’article 204 J (alinéas 66 à 94) prévoit une faculté de modulation à la hausse ou à la baisse à l’initiative du redevable, dont les conditions d’utilisation sont complexes et peuvent aboutir à l’application de majorations.

A. L’ÉTAT DU DROIT

1. La modulation des tiers provisionnels

Conformément à l’article 1664 du CGI (76), les tiers provisionnels sont en principe exigibles le 31 janvier et le 30 avril de l’année suivant celle au cours de laquelle sont perçus les revenus, dans le cas où le redevable n’a pas opté pour le prélèvement mensuel.

Ces tiers provisionnels correspondent au tiers des cotisations mises à la charge du redevable au titre de la dernière année où il a été imposé.

De manière particulièrement succincte et claire, le 4 de cet article 1664 indique que « le contribuable qui estime que le montant du premier versement effectué au titre d’une année est égal ou supérieur aux cotisations dont il sera finalement redevable pourra se dispenser du second versement prévu pour cette année ».

En cas d’erreur du contribuable, une majoration de 10 % est prévue par l’article 1730 du CGI (77), lorsqu’à la suite de la mise en recouvrement du rôle les versements effectués sont inexacts de plus du dixième. Toutefois, aucune majoration n’est appliquée lorsque la différence constatée résulte d’une loi intervenue postérieurement à la date du dépôt de la déclaration visée ci-dessus.

2. La modulation des mensualités

Conformément à l’article 1681 B du CGI (78), les redevables peuvent également opter en année N pour un prélèvement mensuel égal, pour chaque mois de janvier à octobre, au dixième de l’impôt établi au titre de l’année N − 2 ou une année antérieure lorsque cet impôt n’a pas encore été établi.

Deux facultés de modulation sont ouvertes par cet article :

– si le redevable estime que les mensualités ont atteint le montant des cotisations dont il serait finalement redevable, il peut demander la suspension des prélèvements suivants ;

– s’il estime que l’impôt exigible serait différent de celui qui a servi aux prélèvements, il peut demander la modification du montant de ces derniers.

Dans les deux cas, la demande, qui doit en tout état de cause être formulée avant le 30 juin de chaque année, doit préciser le montant présumé de l’impôt dû et doit être formulée auprès de l’administration fiscale au plus tard le dernier jour du mois qui précède celui du prélèvement effectif.

Cet article 1681 B prévoit en outre que si le montant d’impôt présumé par le contribuable est inférieur de plus de 20 % au montant réellement dû, une majoration de 10 % est appliquée à la différence entre les deux tiers de l’impôt dû et les prélèvements effectués entre le mois de janvier et le mois de juillet.

Cette différence ainsi que la majoration s’ajoutent au montant du prélèvement qui a lieu le deuxième mois qui suit la mise en recouvrement de l’impôt.

3. Une faculté peu utilisée par les redevables

L’analyse des données concernant l’utilisation de ces facultés de modulation fait ressortir un paradoxe : alors que le nombre de redevables qui pourraient en faire usage est relativement important, la proportion de ceux qui utilisent effectivement l’une ou l’autre des facultés de modulation est très limitée.

a. Environ un tiers des contribuables sont concernés chaque année par une baisse de revenu

• Les données du rapport du Conseil des prélèvements obligatoires (2012)

Afin d’appréhender l’ampleur des hausses et des baisses de revenus des contribuables, le rapport du CPO consacré au prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu (79) fournit certaines données particulièrement utiles.

Selon ce rapport, « au moins un tiers des contribuables (80) connaissent chaque année une baisse de revenu. Cette proportion a même atteint 40 % depuis 2008 du fait de la dégradation de la conjoncture économique ».

Pour cette catégorie de population, la baisse médiane du revenu est de 10 %.

Un tiers de cette catégorie de redevables (soit 10 % de la population totale) subit par ailleurs une baisse de revenu supérieure à 30 %, ce qui, au sens de l’administration fiscale, constitue une baisse brutale de revenu ouvrant droit à un étalement des échéances.

D’après ce rapport, les trois quarts des baisses de revenu sont liées à un changement de situation professionnelle (départ en retraite ou chômage). Le quart restant s’explique par des changements de situation conjugale (divorce) ou familiale (perte d’allocations familiales, etc.).

• Les données de l’évaluation préalable du présent article (2015)

Les données plus récentes issues de l’évaluation préalable mettent en outre en évidence une augmentation du nombre de foyers concernés par des variations significatives de revenus.

Sur les 33,9 millions de foyers suivis entre 2014 et 2015, 42 % (soit 14,4 millions de foyers) ont vu leurs revenus diminuer avec une baisse médiane de 6,5 % (dont 2,8 millions de foyers ayant vu leurs revenus diminuer de plus de 30 %).

Environ 56 % d’entre eux (soit 18,9 millions de foyers) ont par ailleurs vu leurs revenus augmenter (dont 3,8 millions de foyers ont vu leurs revenus augmenter de plus de 30 %).

Sur les 17,3 millions de foyers imposables (dont le montant d’IR est strictement positif), 38 % (soit 6,6 millions de foyers) ont vu leur revenu baisser avec une baisse médiane de 4 % (dont 400 000 foyers enregistrant une baisse de plus de 30 %).

En outre, 60 % d’entre eux (soit 10,5 millions de foyers) ont vu leurs revenus augmenter entre ces deux années, dont 1,5 million de foyers ont enregistré une hausse de plus de 30 %.

b. Les demandes de modulation actuelles sont très limitées

Le rapport du CPO fait état d’une utilisation très marginale des facultés de modulation offertes par le droit en vigueur.

Selon ce rapport – dont les données étudiées sont celles de l’année 2010 –, dans le domaine de l’étalement des paiements, « environ 2 % des contribuables utilisent chaque année la procédure de droit commun, alors que plus de 30 % seraient susceptibles de l’utiliser. Le différentiel est encore plus marqué pour les contribuables qui subissent une baisse brutale de revenus : ils sont à peine 0,01 % chaque année à bénéficier de la procédure spécifique de délais de paiement, alors que 10 % devraient en bénéficier de droit ».

L’évaluation préalable du présent article fait en outre état d’un recul de l’utilisation de cette faculté : au titre de l’année 2015, 339 875 délais ont été accordés pour une durée moyenne de 3,9 mois et un montant moyen de 677 euros. Au total, 1 % des contribuables ont eu recours à ce service en 2015.

S’agissant des modulations d’acomptes, le rapport du CPO indique qu’environ 7 % des redevables de l’IR mensualisés en font usage, soit environ 25 % des contribuables qui subissent une baisse de revenu et qui pourraient faire usage de cette faculté (les données étudiées étant celles de l’année 2010).

B. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

La mise en place du PAS se traduirait, à compter du 1er janvier 2018, par la suppression des tiers provisionnels et de la mensualisation de l’IR (81) en vigueur, au profit d’un nouveau dispositif de modulation.

1. Les enjeux de la modulation dans le cadre de la présente réforme

a. Une prise en compte de changements de situation non appréhendés par le reste du dispositif

Au regard de l’ensemble des statistiques évoquées ci-dessus, on constate donc que la modification automatique du taux suite à un changement de situation (prévue par les alinéas 51 à 65 du présent article) ne permettrait, en réalité, que de traiter une part des baisses de revenus liées à un changement de situation.

L’essentiel des cas (retraite, chômage mais aussi naissance) serait pris en compte par le biais de la modulation facultative et très encadrée présentée ci-dessous.

b. Un enjeu important du point de vue du contribuable

Du point de vue du contribuable, l’enjeu de la modulation est donc particulièrement important dans la mesure où il permettrait :

– de parfaire le caractère contemporain du prélèvement à la source, ce qui est l’un des enjeux principaux de la réforme ;

– de pallier certaines rigidités du dispositif proposé, en particulier pour le paiement des acomptes sur les revenus non salariaux ou sur les revenus fonciers. S’agissant des salaires, en effet, la prise en compte d’une baisse ou d’une hausse de revenus est permise de facto par l’application du taux calculé par l’administration à l’assiette courante des revenus du redevable.

Pour les revenus non salariaux et les revenus fonciers, l’assiette du prélèvement étant calculée par référence à des éléments plus anciens, celle-ci est par nature moins ajustée à l’évolution courante des revenus du redevable.

Pour ces dernières catégories de revenus, l’enjeu de la modulation serait donc particulièrement important.

Pour le contribuable, l’usage de la modulation prévue par le présent article est d’une nature très différente de celle en vigueur :

– actuellement, le contribuable sollicite en année N une modulation des acomptes ou mensualités par référence aux revenus de l’année N − 1 dont il a une entière connaissance ;

– a contrario, la mise en place d’une retenue à la source va contraindre le redevable à évaluer ses revenus de l’année courante afin de solliciter une baisse du montant du prélèvement contemporain. En cas d’erreur de sa part ou de changement de circonstances, le présent dispositif risque de se traduire par l’application de majorations qui risqueraient de le dissuader d’en faire usage une nouvelle fois.

c. Un enjeu budgétaire fondamental du point de vue de l’État

Du point de vue de l’État, la modulation d’un acompte contemporain constitue un changement de paradigme complet, qui ne saurait être sous-estimé au profit de la seule prise en compte des intérêts du contribuable.

Actuellement, la modulation des tiers provisionnels ou des mensualités produit des effets qui, d’un point de vue budgétaire, sont circonscrits à l’intérieur d’un même exercice budgétaire ; en effet, en cas d’erreur dans le paiement des tiers provisionnels ou des mensualités dans le courant de l’année N, la différence 
– ainsi que les pénalités – sont perçues au moment de la liquidation de l’impôt au mois de septembre.

Il s’agit donc d’un impact « infra-annuel » qui n’a pas de conséquences sur l’équilibre budgétaire de l’État.

A contrario, la modulation d’un prélèvement contemporain serait opérée en année N sur les revenus perçus au cours de cette même année.

En cas d’erreur du redevable, l’impact budgétaire serait pris en compte, du point de vue de l’État, dans l’établissement du solde de l’année N. Un éventuel rattrapage ne serait, par construction, opéré qu’en année N + 1.

Cet impact budgétaire serait particulièrement sensible en 2018, première année de mise en place du prélèvement à la source. À compter de cette année, les redevables seraient en effet en mesure d’ajuster directement le montant des acomptes, alors que cet ajustement aurait été opéré en 2019 avec le système actuel.

Le Gouvernement estime que le « coût » de la modulation ainsi identifiable serait de 6,2 milliards d’euros en 2018 (pour 6,8 millions de bénéficiaires) dans l’hypothèse où l’ensemble des redevables susceptibles de faire usage de cette faculté l’exercent effectivement. Si l’on retient qu’un quart des contribuables éligibles à cette modulation en font un usage effectif, les simulations réalisées aboutissent à un coût probable de 750 millions d’euros en 2018.

2. L’interdiction de moduler à la hausse ou à la baisse en cas de changement de situation non déclaré

L’alinéa 67 du présent article prévoit qu’aucune demande de modulation (à la hausse ou à la baisse) ne peut être présentée tant qu’un changement de situation du foyer – tel que défini par le nouvel article 204 I – n’a pas été déclaré, c’est-à-dire en cas de mariage ou de conclusion d’un pacs, de décès, de divorce (ou de rupture d’un pacs).

Conformément à l’alinéa 55 du présent article, ces changements de situation doivent en principe être déclarés dans un délai de soixante jours à l’administration, sachant toutefois que le dispositif envisagé par le Gouvernement ne devrait pas déboucher sur l’application de pénalités dans ce cas précis.

Selon les informations transmises par l’administration, la demande de modulation supposerait, en tout état de cause, que soient confirmés les éléments relatifs à la composition du foyer fiscal (et donc les éventuels changements de situation).

La demande de modulation pourrait donc être concomitante à la déclaration d’un changement de situation.

3. La faculté de modulation à la hausse peut être utilisée avec une grande liberté

Les alinéas 68 et 69 prévoient une faculté de modulation à la hausse du prélèvement à la source dont l’utilisation par le redevable est relativement simple et libre :

– celui-ci peut moduler, à son initiative, le taux de la retenue ou l’assiette de l’acompte ;

– le nouveau taux ou la nouvelle assiette de l’acompte s’applique au plus tard trois mois après la demande et jusqu’à la fin de l’année, date à laquelle un nouveau taux est en tout état de cause recalculé par l’administration.

Dans l’éventualité où le nouveau taux (pour la retenue) ou la nouvelle assiette (pour l’acompte) sont inférieurs à ceux qui sont recalculés, dans le courant de l’année, en fonction des éléments de l’année précédente, l’administration substitue, sans pénalité, ces nouveaux éléments à ceux sollicités par le redevable.

Comme l’indique l’évaluation préalable de cet article, le fait de laisser au redevable le soin de moduler à la hausse son prélèvement n’allait pas de soi : « Puisqu’il est nécessaire d’autoriser la modulation à la baisse, du point de vue du Trésor, il serait alors logique, au regard du même objectif, d’obliger à moduler à la hausse et, en tout état de cause, d’autoriser à moduler à la hausse. »

L’obligation de moduler à la hausse a toutefois été laissée de côté par le Gouvernement, l’évaluation préalable évoquant deux raisons principales :

– le contribuable ne serait a priori pas toujours capable de prévoir exactement, lors de l’année N, les revenus qu’il percevrait au titre de cette même année ;

– le contribuable ne serait dans la capacité de prévoir précisément ses revenus que dans les derniers mois de l’année. Il serait à craindre, selon le Gouvernement, que le rattrapage mis en place soit confiscatoire sur les derniers mois de l’année.

On peut, en tout état de cause, noter que ces deux arguments pourraient également trouver à s’appliquer en cas de sanction d’une minoration excessive.

D’après l’évaluation préalable, le Gouvernement entend accompagner la mise en place de la réforme par une campagne de communication visant à sensibiliser les contribuables à l’intérêt d’opérer une modulation à la hausse plutôt que d’attendre une régularisation importante en année N + 1.

En outre, en l’état de la rédaction proposée par le Gouvernement, aucune disposition n’interdit d’opérer une modulation à la hausse après avoir opéré, au cours de la même année, une modulation à la baisse. Un contribuable qui, dans le courant de l’année, voudrait « rattraper » un niveau de PAS permettant d’éviter une majoration pourrait ainsi le faire.

4. La faculté de modulation à la baisse est sollicitée sous la responsabilité du redevable

Dans l’ensemble, la faculté de moduler à la baisse ses prélèvements à la source est placée sous la responsabilité du redevable qui la demande. D’une relative complexité, cette modulation est contrôlée a priori et a posteriori par l’administration fiscale et pourrait se traduire a posteriori par des majorations :

– dans un premier temps, le redevable déclarerait, en année N, ses revenus présumés pour cette même année et solliciterait une modulation à la baisse ;

– dans un deuxième temps, l’administration recalculerait le montant de ses prélèvements, pour l’année N, en fonction des éléments déclarés. La modulation ne serait alors pas autorisée a priori lorsque le montant du prélèvement modulé est inférieur de moins de 10 % au montant prélevé en l’absence de modulation (ci-après « critère d’éligibilité »). Logiquement, aucune pénalité ne trouverait à s’appliquer au stade de cette demande dans la mesure où la modulation serait refusée avant sa mise en œuvre ;

– dans un troisième temps, l’administration fiscale constaterait, en année N + 1, si la demande du redevable était bien légitime rétrospectivement et si, par ailleurs, la demande de modulation n’a pas été excessive (ci-après « critères de sortie »).

Concrètement, le montant des prélèvements réalisés conformément aux estimations du redevable seraient comparés avec ceux qui auraient été réalisés en l’absence de modulation.

À ce stade, deux majorations pourraient alors être pratiquées :

– si le calcul définitif fait ressortir a posteriori que le « critère d’éligibilité » n’était pas respecté, une majoration de 10 % serait appliquée. Cette majoration serait portée à 50 % lorsque la minoration du PAS dû est supérieure à 30 % ;

– si le calcul définitif fait ressortir a posteriori que le « critère d’éligibilité » était bien respecté, une majoration de 10 % serait tout de même appliquée en cas de majoration excessive (supérieure à une marge d’erreur de 10 %). Cette majoration serait également portée à 50 % en cas de minoration du PAS dû supérieure à 30 %.

a. Un critère d’éligibilité à la modulation visant à écarter les demandes de modulation peu significatives

Les alinéas 70 et 71 prévoient que la modulation à la baisse n’est possible que si le montant du PAS estimé par le contribuable, au regard de sa situation et de ses revenus de l’année en cours, est inférieur de plus de 10 % et 200 euros au montant du PAS théorique qu’il supporterait en l’absence de cette modulation.

Pour le calcul de ce ratio, les éléments suivants seraient établis avant que le redevable ne soit autorisé à appliquer cette modulation :

– le contribuable déclare « sous sa responsabilité » sa situation et l’estimation de l’ensemble de ses revenus au cours de l’année en cours et de l’année précédente lorsque l’administration n’en dispose pas ;

– l’administration calcule le PAS minoré résultant de cette déclaration, en appliquant aux revenus estimés par le redevable le taux du PAS calculé selon les modalités de droit commun fixées à l’article 204 H du CGI (alinéa 25 du présent article) ;

– l’administration détermine le montant de PAS théorique auquel le redevable serait soumis en l’absence de modulation au titre de l’année N (82).

Globalement, l’architecture du dispositif appelle les commentaires suivants :

– le ratio de 10 % et de 200 euros permettant d’écarter les minorations peu significatives est totalement nouveau par rapport aux dispositifs en vigueur. Selon les informations fournies par le Gouvernement, ces seuils permettraient d’écarter les demandes à partir d’un seuil considéré comme raisonnable et supportable (16,50 euros par mois) ;

– selon l’évaluation préalable, le Gouvernement a préféré laisser de côté une option de travail plus restrictive visant à permettre l’entrée dans la modulation en cumulant deux critères relatifs respectivement à la baisse de revenus et à une variation non négligeable du taux du PAS.

Certains exemples mis en avant dans l’évaluation préalable démontrent en effet que ces critères cumulatifs pourraient conduire à écarter de la modulation certains redevables dont les revenus sont en partie salariaux (soumis à retenue) et en partie commerciaux (soumis à l’acompte).

Dans l’hypothèse où le redevable enregistrerait en année N une forte augmentation des revenus salariaux et une baisse des revenus commerciaux, le décalage temporel entre l’assiette des revenus salariaux (taux appliqué aux revenus courants) et des revenus commerciaux (acompte calculé à partir des revenus des années N − 2 ou N − 1) conduirait à la fois à une stabilité du revenu global et du montant d’IR, excluant ainsi la modulation (83).

b. L’établissement d’un PAS théorique de l’année courante permettant d’écarter les modulations peu significatives

Pour écarter les demandes de modulation peu significatives formulée en année N, le présent dispositif prévoit non pas une comparaison avec le montant de PAS acquitté en année N − 1, mais avec un PAS théorique qui serait acquitté en année N en prenant en compte :

– les revenus estimés par le redevable au titre de l’année en cours ;

– un taux « rafraîchi » qui ne serait pas celui appliqué en année N − 1.

Détaillé à l’alinéa 77, ce taux « rafraîchi » serait calculé en opérant la moyenne entre les taux applicables en année N − 1 entre le 1er janvier et le 30 août (pondéré à hauteur des deux tiers) et celui applicable entre le 1er septembre et le 31 décembre (pondéré pour un tiers).

Concrètement, à supposer que le redevable fasse sa demande de modulation en première partie de l’année, ce taux « rafraîchi » serait donc différent de celui qui a été porté à sa connaissance en application de l’alinéa 30 du présent article.

Lorsque le redevable est soumis à l’obligation de verser un acompte (et non une retenue), l’alinéa 78 précise que le PAS théorique serait calculé par addition des acomptes versés jusqu’à la demande de modulation et des sommes qui seraient versés après cette date en l’absence de modulation.

Les alinéas 79 à 91 visent par ailleurs à détailler techniquement les modalités de calcul de ce PAS théorique (soit sous la forme d’une RAS en cas de retenue ou d’acompte pour les revenus non salariaux) en cas de changement de situation préalable ou de modulation précédente :

– en cas de modulation précédente au cours de la même année, le PAS théorique serait déterminé à partir d’une moyenne entre le taux applicable avant et après la précédente modulation. En cas d’acompte, le montant pris en compte serait la somme des acomptes déjà versés et de ceux qui seraient versés après la précédente modulation. Cette rédaction rend possible au moins deux modulations à la baisse au cours de la même année, alors que le Bulletin officiel des finances publiques-Impôts, BOFiP-I, indique actuellement qu’il n’est « accepté qu’une seule demande de modulation ou de suspension par année de la part du contribuable » ;

– en cas de mariage préalable à la modulation et lorsque ce changement de situation a été régulièrement déclaré, la RAS théorique serait calculée à partir des revenus déclarés par les deux conjoints pour l’année en cours et une moyenne prorata temporis des taux applicables avant le mariage et de celui applicable une fois le mariage déclaré à l’administration (et ayant donné lieu au calcul d’un nouveau taux). En cas d’assujettissement à un acompte, le prélèvement théorique serait calculé à partir du montant des versements opérés par chaque membre du couple à la demande de modulation ;

– en cas de décès de l’un des conjoints préalable à la demande de modulation, la RAS théorique serait calculée en retenant les revenus déclarés, pour l’année en cours, par le conjoint survivant et la moyenne prorata temporis du nouveau taux applicable suite à ce changement de situation et du ou des taux (en cas d’individualisation au sein du couple) applicables avant cet événement. En cas d’assujettissement à un acompte, le montant théorique est calculé en retenant ;

– en cas de divorce préalable à une demande de modulation, la RAS théorique serait calculée à partir des revenus déclarés par la personne divorcée sollicitant la modulation à partir de ses revenus déclarés une moyenne prorata temporis des taux applicables avant et après cet événement. En cas d’assujettissement à un acompte, le montant théorique serait calculé à partir des versements opérés sur la base des revenus dont l’ancien conjoint a disposé personnellement avant la date de modulation et ceux qui seraient opérés ensuite sans modulation.

c. Les conséquences de la modulation

Selon les alinéas 92 à 94, une demande de modulation d’un redevable entraîne, selon le cas, le calcul d’un nouveau taux ou d’un nouveau montant d’acompte au maximum dans les trois mois de la demande.

Ces nouvelles modalités de prélèvement s’appliquent jusqu’au 31 décembre de l’année en cours.

5. Les majorations applicables en cas de modulation à la baisse injustifiée

Les facultés de modulation à la baisse du PAS prévues par les alinéas 70 à 91 doivent être lues en parallèle avec celles qui viennent sanctionner les modulations à la baisse injustifiées, prévues aux alinéas 211 à 219.

De ce point de vue, le dispositif proposé repose sur une dissymétrie entre les critères d’éligibilité à respecter pour solliciter la modulation à la baisse et ceux à respecter a posteriori pour éviter une majoration.

Alors que le critère d’éligibilité à la modulation vise à écarter les demandes peu significatives, les majorations appliquées « à la sortie » viennent en effet sanctionner à la fois le non-respect du critère d’éligibilité mais aussi des modulations jugées excessives.

Concrètement, la sanction d’une modulation à la baisse injustifiée intervient sous la forme d’une majoration dans deux cas distincts :

– lorsqu’il apparaît que le redevable ne remplissait pas a posteriori le critère d’éligibilité à la modulation (exclusion des demandes de modulation insignifiantes, c’est-à-dire inférieures à 10 % du montant prélevé ou 200 euros) ;

– lorsque, bien que remplissant a posteriori le critère d’éligibilité la modulation, il apparaît a posteriori que la modulation a été excessive.

Il est rappelé que ces majorations ne s’appliquent pas en cas d’erreur, même manifeste, dans la modulation à la hausse.

a. La majoration en cas de non-respect a posteriori du critère d’éligibilité à la modulation

Conformément à l’alinéa 212, une majoration de 10 % s’applique en cas de non-respect a posteriori du critère d’éligibilité à la modulation.

Schématiquement, cette majoration interviendrait dans le cas suivant :

– en année N, le redevable déclare une estimation de ses revenus (en baisse) au titre de l’année courante ; sur cette base, l’administration applique le taux en vigueur et calcule un nouveau montant de prélèvement ;

– sur la base des revenus ainsi estimés, l’administration calcule également un montant de PAS théorique pour l’année en cours en appliquant au montant des revenus ainsi déclarés un taux « rafraîchi ». Dans le cas de versement d’acomptes, le PAS théorique est calculé par addition des acomptes déjà versés et des acomptes à verser en année N sans modulation. L’administration peut alors déterminer si le redevable est a priori autorisé à solliciter une modulation ;

– en année N + 1, sur la base des revenus effectivement déclarés, l’administration recalcule rétrospectivement le montant de PAS modulé que le redevable aurait dû verser et opère un rapprochement avec le montant de PAS théorique qu’il aurait acquitté sans modulation ;

– dans le cas où le montant de PAS modulé ainsi recalculé est inférieur de moins de 10 % au montant de PAS théorique exigible en l’absence de modulation, une pénalité est appliquée ;

– l’assiette de cette pénalité est égale à la différence entre le montant du PAS théorique exigible en l’absence de modulation et le montant effectif du PAS perçu au titre de l’année N.

En outre, l’alinéa 214 prévoit l’application d’une majoration de 50 % de cette assiette lorsque le montant du PAS effectif au titre de l’année N est inférieur de plus de 30 % au PAS théorique exigible en l’absence de modulation.

Exemple

Soit un foyer fiscal dont le prélèvement à la source qui aurait été effectué au cours de l’année N en l’absence de modulation est de 2 000 euros.

Sur la base d’une estimation, par ses soins, de sa situation et des revenus qu’il percevrait in fine au titre de l’année N, le montant de prélèvement à la source auquel devrait être soumis le contribuable au cours de l’année N est égal à 1 000 euros.

Le contribuable est par conséquent autorisé à moduler à la baisse (1 000 < 90 % × 2 000 et 2 000 – 1 000 > 200 euros).

En septembre l’année N + 1, sur la base des revenus perçus in fine par le foyer au titre de l’année N, le prélèvement à la source qui aurait été effectué au cours de l’année N en l’absence de modulation est toujours de 2 000 mais le montant de prélèvement à la source auquel aurait dû être soumis le foyer se révèle être égal à 1 900 euros.

Le prélèvement à la source effectué in fine au cours de l’année N est de 1 800 euros (> 70 % × 2 000).

Dans la mesure où 2 000 – 1 900 < 200 euros, une pénalité de 20 euros (10 % (2 000 – 1 800]) sera appliquée.

Si le prélèvement à la source effectué in fine au cours de l’année N avait été de 1 000 euros (< 70 % × 2 000), une pénalité de 250 euros soit :

1/2 × (2 000 – 1 000) / 2 000) × (2 000 – 1 000) aurait été appliquée (soit un taux de 25 %)

Source : évaluation préalable de l’article 38 du présent projet de loi de finances.

b. La majoration en cas de modulation excessive

L’alinéa 217 prévoit en outre l’application d’une majoration de 10 % lorsqu’il apparaît que le redevable, tout en respectant a posteriori le critère d’éligibilité à la modulation, a pratiqué une modulation excessive, c’est-à-dire allant au-delà d’une marge d’erreur fixée en l’occurrence à 10 % du montant.

Schématiquement, cette majoration interviendrait dans le cas suivant :

– en année N, le redevable déclarerait ses estimations de revenus (en baisse) au titre de l’année courante ; sur cette base, l’administration calculerait un nouveau montant de prélèvement sur la base du taux en vigueur ;

– sur la base des derniers revenus déclarés, l’administration calculerait également un montant de PAS théorique pour l’année en cours en appliquant au montant des revenus ainsi déclarés un taux « rafraîchi ». Dans le cas de versement d’acomptes, le PAS théorique serait calculé par addition des acomptes déjà versés et des acomptes à verser en année N sans modulation. L’administration pourrait alors déterminer si le redevable est a priori autorisé à solliciter une modulation ;

– en année N + 1, sur la base des revenus effectivement déclarés, l’administration opérerait un rapprochement entre le montant de PAS modulé acquitté au titre de l’année N et le montant du PAS théoriquement exigible compte tenu des revenus effectifs de l’année N.

– s’il apparaît que le montant de PAS modulé acquitté en année N est inférieur de plus de 10 % au PAS théoriquement exigible, une majoration de 10 % s’appliquerait à la différence entre ces deux montants.

En outre, l’alinéa 217 prévoit également l’application d’une majoration de 50 % de cette assiette lorsque le montant du PAS effectif au titre de l’année N est inférieur de plus de 30 % au PAS théorique exigible en l’absence de modulation.

Exemple

Soit un foyer fiscal dont le prélèvement à la source qui aurait été effectué au cours de l’année N en l’absence de modulation est de 5 000 euros.

Sur la base d’une estimation, par ses soins, de sa situation et des revenus qu’il percevrait in fine au titre de l’année N, le montant de prélèvement à la source auquel devrait être soumis le contribuable au cours de l’année N est égal à 1 000 euros.

Le contribuable est par conséquent autorisé à moduler à la baisse (1 000 < 90 % × 5 000 et 5 000 – 1 000 > 200 euros).

En septembre de l’année N + 1, sur la base des revenus perçus in fine par le foyer au titre de l’année N, le montant de prélèvement à la source auquel aurait dû être soumis le foyer se révèle être égal à 3 000 euros.

Le prélèvement à la source effectué in fine au cours de l’année N est de 2 500 euros (> 70 % × 3 000).

Dans la mesure où 1 000 < 90 % × 3 000, une pénalité de 50 euros (10 % × [3 000 – 2 500]) serait appliquée.

Si le prélèvement à la source effectué in fine au cours de l’année N avait été de 1 000 euros (< 70 % × 3 000), une pénalité de 667 euros soit :

1/2 × ([3 000 – 1 000] / 3 000 × [3 000 – 1 000]) aurait été appliquée avec un taux de 33,33 %.

Source : évaluation préalable de l’article 38 du présent projet de loi de finances.

6. Une clause de bonne foi

L’alinéa 218 prévoit que les majorations mentionnées ci-dessus ne s’appliquent pas ou est réduite lorsque le contribuable justifie que :

– l’estimation erronée de sa situation ou de ses revenus a été, en tout ou partie, réalisée de bonne foi à la date de sa demande de modulation et provient d’éléments difficilement prévisibles à cette date (ce qui devrait permettre aux agriculteurs de recourir plus facilement à la modulation, compte tenu des sujétions et des aléas auxquels ils font face, notamment climatiques ou liés aux cours de matières) ;

– ou lorsque le contribuable justifie que le prélèvement qui aurait été effectué en l’absence de modulation à la baisse est différent du PAS théorique en raison de la répartition de ses revenus au cours de l’année.

VI. LE VERSEMENT DES ACOMPTES EN CAS DE DÉBUT OU D’ARRÊT DE PERCEPTION DE REVENUS RELEVANT DE L’ACOMPTE

Texte du projet de loi (alinéas 95 à 98 et 124 à 128) :

VERSEMENT D’UN ACOMPTE SPONTANÉ EN CAS DE DÉBUT D’ACTIVITÉ

(95) « Art. 204 K. – Le contribuable peut spontanément déclarer un montant d’acompte au titre de l’année de début d’une activité relevant d’une catégorie de bénéfice ou revenu mentionnée à l’article 204 C ou au titre de l’année suivante et en acquitter le montant dans les conditions prévues au 3 de l’article 1663 C.

(96) « Le montant des versements dus l’année suivant le début de son activité est calculé, le cas échéant, sur la base du montant de l’acompte déclaré au titre de l’année de début de son activité, ajusté le cas échéant prorata temporis sur une année pleine, jusqu’à la mise en œuvre du prélèvement selon les modalités prévues au premier alinéa de l’article 204 E.

ARRÊT DU VERSEMENT D’UN ACOMPTE EN CAS D’ARRÊT D’ACTIVITÉ

(97) « Art. 204 L. – Lorsque l’un des membres du foyer fiscal n’est plus titulaire de revenus ou bénéfices dans l’une des catégories mentionnée à l’article 204 C au titre de l’année en cours, il peut demander à ne plus verser la part de l’acompte correspondant aux bénéfices ou revenus de la catégorie. Cette demande est prise en compte à compter du versement prévu à l’article 1663 C qui suit le mois de la demande.

(98) « La part de l’acompte relative aux bénéfices industriels et commerciaux, bénéfices agricoles et bénéfices non commerciaux qui a déjà été acquittée à la date à laquelle l’impôt sur le revenu dû au titre de la cessation totale de l’activité imposée dans cette catégorie de revenus est établi est imputée sur le montant dû au titre de cette imposition. Le montant ainsi imputé n’est plus imputable sur l’impôt sur le revenu dû au titre de l’année.

[…]

CESSATION D’ACTIVITÉ DES INDÉPENDANTS

(124) 8° A l’article 201 :

(125) a) Au premier alinéa du 1, les mots : « ou minière, ou d’une exploitation agricole dont les résultats sont imposés d’après le régime du bénéfice réel » sont remplacés par les mots : «, minière ou agricole » et l’alinéa est complété par les mots : «, y compris, dans le cas d’une exploitation agricole dont le résultat est soumis à l’article 64 bis, en raison des bénéfices qui proviennent de créances acquises et non encore recouvrées. » ;

(126) b) Le premier alinéa du 1 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Il est calculé au dernier taux retenu pour le calcul de l’acompte mentionné au 2° du 2 de l’article 204 A. » ;

(127) c) Au 3 bis, les mots : « au régime défini à l’article 500 » sont remplacés par les mots : « aux régimes définis aux articles 500 et 64 bis » et après les mots : « au 3 de l’article 500 » sont ajoutés les mots : « ou au III de l’article 64 bis » ;

(128) 9° Le premier alinéa du 1 de l’article 202 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Il est calculé au dernier taux retenu pour le calcul de l’acompte mentionné au 2° du 2 de l’article 204 A. » ;

*

* *

Les alinéas 95 à 98 du présent article insèrent, dans le CGI, deux articles 204 K et 204 L portant sur les modalités de versement d’acompte en cas de début ou de cessation de perception de revenus relevant de l’acompte contemporain. Ces deux dispositifs sont optionnels, à la discrétion du contribuable.

Contrairement à ce qui ressort de la lecture littérale de l’article 204 K, qui vise une « activité », du chapeau de l’article 204 L, qui mentionne lui aussi la cessation d’une « activité », et de l’évaluation préalable, qui n’analyse que la situation des travailleurs indépendants, ces dispositifs s’appliquent bien à l’ensemble des revenus inclus dans le champ de l’acompte contemporain, et non uniquement aux revenus des travailleurs indépendants (ainsi que l’administration fiscale a pu le confirmer à la Rapporteure générale). En effet, sont visés l’ensemble des revenus mentionnés à l’article 204 C, et non seulement les BIC, BNC et bénéfices agricoles. En conséquence, les RVTO, les pensions alimentaires ou encore les revenus fonciers pourraient faire l’objet d’un acompte spontané et seraient éligibles à l’arrêt des versements en cas de cessation de perception des revenus afférents (84).

A. LA POSSIBILITÉ D’OPTER POUR UN VERSEMENT SPONTANÉ D’ACOMPTE EN CAS DE DÉBUT DE PERCEPTION D’UN REVENU SOUMIS À L’ACOMPTE

L’article 204 K introduit par le présent article offre la possibilité à un contribuable débutant une activité ou commençant à percevoir un revenu relevant d’une catégorie mentionnée à l’article 204 C de déclarer, de façon spontanée, un montant d’acompte au titre de l’année de début d’activité, et d’en acquitter le montant. Ce dernier serait réparti sur la durée restant à courir dans l’année civile, selon une base mensuelle ou trimestrielle, ainsi que le prévoient les 1 et 2 de l’article 1663 C nouveau du CGI, auquel renvoie l’article 204 K (alinéas 139 à 141 du présent article).

Ce dispositif constitue une option à laquelle le contribuable peut recourir, et non une obligation.

1. L’imposition de droit commun du début d’activité : le report du paiement à la liquidation de l’impôt

Le droit commun applicable aux débuts d’activité réside dans le report du paiement de l’impôt dû au titre des revenus perçus l’année de démarrage au moment de la liquidation de cet impôt, soit en septembre de l’année suivante.

La motivation de cette solution réside dans la nécessité, pour les travailleurs indépendants démarrant une activité, de consacrer leur trésorerie au développement de ladite activité plutôt qu’au paiement de l’impôt. En outre, l’estimation du revenu peut s’avérer délicate lorsque le contribuable ne dispose d’aucune référence antérieure.

En conséquence, et contrairement à ce qui ressort de la version provisoire du rapport d’information fait par le Rapporteur général de la commission des finances du Sénat sur le prélèvement à la source, le dispositif proposé à l’article 204 K nouveau du CGI ne traduit pas « le manque de prise en compte (…) de la réalité des situations » des contribuables (85).

Si les modalités d’évaluation de l’acompte spontané et ses effets peuvent susciter certaines interrogations, ainsi qu’il sera vu, il ne s’agit en tout état de cause que d’une option, et non d’une obligation. Le contribuable n’est en rien tenu de déclarer un acompte spontané, le droit commun prévoyant le paiement de l’impôt l’année suivant le début de perception du revenu. Cette absence de contrainte tient précisément à la prise en compte de la réalité des situations des contribuables concernés.

2. Le calcul par le contribuable de l’impôt dû au titre d’une nouvelle activité ou d’un revenu soumis à acompte nouvellement perçu

Si le contribuable opte pour le versement d’un acompte spontané, le montant de ce dernier servirait à déterminer celui de l’acompte dû au titre de l’année suivant celle du début d’activité, c’est-à-dire en principe la première année pleine d’exercice (sauf si le début d’activité est intervenu un 1er janvier), jusqu’à ce que le prélèvement puisse être établi selon les modalités normales prévues à l’article 204 E, à savoir :

– la détermination de l’assiette en application de l’article 204 G ;

– la détermination du taux en application de l’article 204 H ou, le cas échéant, des articles 204 I, 204 J ou 204 M.

Le montant d’acompte estimé au titre de l’année N de début d’activité servirait pour le calcul de l’impôt dû l’année suivante, jusqu’à ce que l’administration dispose des informations complètes du contribuable, c’est-à-dire jusqu’à ce que la déclaration de revenu N soit faite et traitée. En conséquence, entre janvier et août de l’année N + 1, le paiement de l’acompte serait fait sur la base du montant spontanément versé.

Il serait alors procédé à un ajustement prorata temporis, pour tenir compte du fait que le revenu estimé au titre de l’année N a pu porter sur une année non complète, ainsi que le prévoit le second alinéa du nouvel article 204 K (alinéa 96 du présent article).

Cette option, qui repose sur la seule volonté du contribuable, permet de ne pas avoir à supporter en septembre N + 1 une charge fiscale conséquente due au cumul des versements de l’acompte N + 1 et de la régularisation de l’impôt dû au titre de l’année N.

3. Des modalités de détermination de l’acompte spontané susceptibles d’être délicates à mettre en œuvre

a. L’estimation du montant de l’acompte spontané

Le contribuable doit estimer le montant d’acompte qu’il verserait à l’administration, ce qui suppose de sa part l’estimation :

– du bénéfice imposable qu’il réaliserait l’année de début d’activité ;

– du taux d’imposition qui lui serait applicable.

L’exemple suivant illustre cette hypothèse.

Un contribuable débute en avril N une activité relevant du régime des BIC. Il souhaite verser spontanément un acompte contemporain au titre de cette activité, dès l’année N.

Il estime son bénéfice de l’année N à 18 000 euros. Avec l’appui du simulateur de la DGFiP, il évalue l’impôt dû à 868 euros (pour un taux moyen de 4,8 %).

L’acompte étant versé le 15 de chaque mois, le contribuable paierait huit mensualités, entre le 15 mai et le 15 décembre, d’un montant unitaire de 109 euros (868/8).

En N + 1, le montant de l’acompte spontanément déclaré servirait de base à l’impôt dû jusqu’en août inclus, soit neuf mensualités d’un montant de 97 euros chacune ([868 × 12/9]/12, où le rapport 12/9 correspond à l’ajustement prorata temporis sur une période de douze mois du revenu estimé au titre des neuf mois d’activité en année N).

L’estimation du montant d’acompte dû peut aussi se faire avec l’appui de la grille de taux par défaut prévu au 2 de l’article 204 H, si le contribuable ne recourt pas au simulateur d’impôt de la DGFiP.

En reprenant l’exemple précédent, le taux proportionnel qui serait appliqué est de 4 % (correspondant à la tranche de rémunération annuelle dans laquelle se situent les 18 000 euros de BIC estimés), soit moins que le taux de 4,8 % fourni par le simulateur. L’acompte spontané s’élèverait alors à 720 euros, contre 868 euros avec le taux fourni par le simulateur. Dans l’hypothèse d’une estimation correcte de son revenu par le contribuable, ce dernier devrait s’acquitter d’un complément d’impôt de 148 euros lors du solde, en septembre N + 1.

Si le contribuable de l’exemple précédent est marié, il aurait tout intérêt à faire usage du simulateur : ce dernier lui indiquerait que l’impôt dû est nul, là où il aurait versé un acompte de 720 euros avec la grille de taux par défaut, conduisant à un remboursement équivalent au moment du solde.

Il paraîtrait donc préférable, lorsque cela sera possible, de recourir au simulateur plutôt qu’à la grille de taux par défaut compte tenu des tranches sur lesquelles elle repose, de ses effets de seuils et de l’absence de prise en compte de la composition du foyer fiscal.

En tout état de cause, le contribuable serait totalement libre s’agissant de l’estimation de son acompte spontané. Il pourrait ainsi, s’il le souhaite, déclarer et verser un acompte sans aucune connexion avec la réalité des revenus qu’il percevrait cette année-là (tout comme, dans le droit commun, il pourrait ne rien déclarer). La régularisation de l’impôt interviendrait en effet lors du solde de l’année suivante, et si l’estimation est sans lien avec les revenus, le contribuable verserait un complément.

b. Les risques et les incertitudes entourant l’acompte spontané

i. Une estimation délicate

Si le contribuable souhaite que son acompte corresponde à la réalité des revenus qu’il percevrait l’année de début de leur perception – notamment pour réduire le montant de la régularisation lors du solde, l’année suivante –, il pourrait se heurter à certaines difficultés.

L’estimation du bénéfice pourrait s’avérer difficile, surtout si l’activité entamée présente un caractère fortement conjoncturel, ainsi qu’il a été vu au sujet de l’assiette de l’acompte.

L’application des règles comptables et fiscales de détermination du bénéfice risquerait également de s’avérer délicate pour le contribuable s’il n’en est pas familier.

La seule hypothèse dans laquelle l’estimation pourrait s’avérer relativement simple serait celle d’une soumission à un régime « micro », qui tient compte non du bénéfice mais du chiffre d’affaires auquel est appliqué un abattement forfaitaire. Néanmoins, là encore, l’évaluation ex ante du chiffre d’affaires pour la période de l’année restant à courir ne se ferait pas sans difficulté.

L’estimation du taux d’imposition devrait en principe être plus facile grâce au simulateur en ligne proposé par la DGFiP. Avec l’aide de cet outil, le contribuable, sur la base du revenu imposable qu’il aura estimé, connaîtrait le montant de l’impôt qu’il devra au titre de l’année de début d’activité. Il lui appartiendrait alors de calculer le montant de chaque mensualité d’acompte en divisant l’impôt dû par le nombre de versements à effectuer.

La délicatesse d’une telle estimation, qui repose entièrement sur le contribuable, n’est pas hypothétique et a d’ailleurs été mise en évidence par le Gouvernement lui-même dans l’évaluation préalable du présent article, au titre de la présentation des options susceptibles d’être retenues pour l’imposition contemporaine des travailleurs indépendants.

L’« option n° 2 », reposant sur une estimation du contribuable, retenait le chiffre d’affaires de la période d’imposition auquel était appliqué un taux de charges (qui aurait été égal à l’abattement actuellement pratiqué pour les régimes « micro »). Le Gouvernement a écarté cette option au motif qu’elle pourrait « s’avérer complexe à mettre en œuvre » et que l’autre option, finalement retenue, recelait « moins de difficultés et de coût de mise en œuvre pour le contribuable » (86).

Ainsi que cela a été vu dans l’analyse de l’assiette de l’acompte (87), il peut sembler étonnant d’appliquer à des nouvelles activités des modalités écartées au titre du régime de droit commun des travailleurs indépendants, ce d’autant plus que ces nouvelles activités sont propices à une méconnaissance des règles comptables et fiscales, notamment s’agissant des charges déductibles ou des réintégrations comptables à effectuer.

ii. L’absence de précisions quant à d’éventuelles sanctions

En l’état, le dispositif du prélèvement à la source ne prévoit pas de sanction du contribuable qui aurait déclaré un montant d’acompte spontané trop faible au regard des revenus réellement perçus.

Cette absence de sanction paraît normale dans la mesure où l’acompte spontané procéderait de la seule volonté du contribuable. Prévoir un mécanisme coercitif risquerait de limiter considérablement l’incitation, et donc l’intérêt, du recours à ce dispositif. En outre, il paraîtrait hasardeux d’inférer de l’absence de la mention d’une sanction la possibilité d’appliquer des pénalités pour ce qui n’est pas une obligation, mais bien une simple option.

Néanmoins, et même si l’administration fiscale a confirmé à la Rapporteure générale l’absence de sanction au titre de l’acompte spontané, il paraît opportun d’inscrire expressément dans la loi que les erreurs d’estimation au titre de l’acompte spontané ne sont pas sanctionnées, afin de lever toute ambiguïté sur ce sujet (88).

iii. Les interrogations liées aux potentiels effets négatifs de l’ajustement prorata temporis sur la trésorerie de certains contribuables

L’ajustement prorata temporis en N + 1 permet de tenir compte, sur la base de l’estimation du contribuable, de ce que serait le revenu perçu sur une période de douze mois.

Ne pas le faire conduirait dans la plupart des cas à une régularisation importante de l’impôt dû au titre de N + 1, en N + 2, du fait d’une assiette réduite par rapport à la réalité du revenu perçu.

Néanmoins, il est des situations où cet ajustement serait susceptible d’alourdir, dès l’année N + 1, la charge fiscale du contribuable. Tel serait notamment le cas pour les activités démarrées en cours d’année et qui concentreraient en fin d’année civile les bénéfices annuels. Dans une telle hypothèse, l’ajustement prorata temporis serait artificiel, ainsi qu’en témoigne l’exemple qui suit.

Un contribuable célibataire et sans enfant à charge débute le 1er juillet N une activité relevant des BIC dont le chiffre d’affaires, compte tenu de sa nature, est concentré sur le second semestre de l’année civile. Il souhaite procéder à une estimation fidèle du revenu qu’il percevrait cette année afin de réduire la régularisation l’année suivante. Il estime alors son revenu de l’année N à 24 000 euros (il est imposé selon le régime réel). Avec le simulateur de la DGFiP, il détermine son taux d’imposition moyen à 8,34 % et l’impôt dû au titre de N à 2 002 euros.

Ce contribuable acquitterait donc, entre août et décembre N, cinq acomptes de 400 euros chacun (après avoir arrondi à l’euro le plus proche la décimale).

Pour l’année N + 1, l’ajustement prorata temporis conduit à calculer le montant de son acompte sur une période de douze mois. L’acompte versé en N serait donc multiplié par le rapport entre cette période et la période à laquelle cet acompte se rapportait, soit 12/6. L’acompte de N + 1, qui servirait de base de calcul aux versements de janvier à août inclus, serait alors de 4 004 euros (2 002 × [12/6]).

Les mensualités acquittées entre janvier et août s’élèveraient donc à 334 euros, soit un total versé sur cette période de 3 006 euros (334 × 8), largement supérieur aux versements effectués en N (de 2 000 euros en tout).

Or, du fait de la nature de l’activité, le revenu annuel se concentrerait sur les derniers mois de l’année. Ainsi, malgré le démarrage tardif de l’activité, en juillet N, le revenu estimé au titre des six derniers mois de cette année correspondrait probablement à l’intégralité du revenu annuel perçu dans le cadre de cette activité, ou au moins à une très grande partie de celui-ci.

La régularisation n’interviendrait qu’au moment du solde, soit en septembre N + 2. Si la déclaration des revenus perçus en N + 1, faite au printemps N + 2, établit que le revenu réellement perçu cette année-là correspondait bien au revenu estimé en N, et non à celui imposé au moyen de l’ajustement prorata temporis, le contribuable bénéficierait d’une restitution d’impôt. Ainsi, in fine, il n’aurait pas payé plus que ce qu’il devait.

En revanche, la charge fiscale pesant l’année N + 1 aura eu un impact négatif sur sa trésorerie, le conduisant à avancer une somme qui ne lui serait remboursée qu’un an après. Une telle situation risquerait de s’avérer particulièrement préjudiciable dans la mesure où un début d’activité suppose de disposer d’une trésorerie importante, ce que le Gouvernement relève lui-même dans l’évaluation préalable, ainsi qu’il a été vu.

Pourrait être soulevée l’objection reposant sur le fait que l’acompte spontané est à la discrétion du contribuable, que rien ne le contraint à opter pour cette solution et qu’il aurait pu, par ailleurs, anticiper l’impôt à acquitter en N + 1 dans son estimation du revenu de l’année N, en tenant compte de la répartition temporelle des bénéfices tirés de son activité.

Néanmoins, il semble opportun de souligner les éventuelles difficultés de trésorerie que le dispositif proposé pourrait induire à l’égard de certaines activités, afin que les contribuables aient pleinement conscience des risques de trésorerie auxquels ils pourraient s’exposer s’ils souhaitent procéder à une estimation correcte de leur revenu la première année.

B. LA DEMANDE D’ARRÊT DE VERSEMENT D’ACOMPTE EN CAS DE CESSATION DE PERCEPTION D’UN REVENU RELEVANT DE L’ACOMPTE

L’article 204 L (alinéas 97 et 98 du présent article) traite de la situation inverse de celle faisant l’objet de l’article 204 K dans la mesure où il concerne la cessation d’activité (ou de perception du revenu).

En l’état du droit, en application de l’article 201 du CGI, la cessation totale d’une activité relevant des BIC ou des bénéfices agricoles emporte imposition immédiate des bénéfices non encore imposés. Les gains réalisés après la cessation totale de l’activité mais rattachés à celle-ci sont soumis au régime de l’ancienne activité (BIC ou BA). Les charges devenues certaines après l’arrêt de l’exploitation, quant à elles, constituent un déficit imputable sur le revenu global (sous réserve de n’avoir pas déjà été déduites des résultats de l’exercice de cessation au titre de provisions).

La cessation d’une activité relevant des BNC, régie par l’article 202 du CGI, obéit aux mêmes règles que celles applicables aux BIC s’agissant de la détermination des bénéfices immédiatement imposables (et, par exception au régime de droit commun des BNC, sont prises en compte les créances acquises, même si elles n’ont pas été effectivement encaissées, ainsi qu’en dispose le premier alinéa du 1 de cet article).

Cette imposition immédiate revêt un caractère provisoire et serait imputée sur l’impôt établi ultérieurement au titre de l’ensemble des revenus perçus pendant l’année de cessation.

1. L’arrêt des versements d’acompte et l’imputation des versements effectués sur l’imposition immédiate

Si l’un des membres du foyer fiscal (qui peut être l’unique membre) cesse de percevoir des revenus relevant de l’article 204 C du CGI en cours d’année, il dispose de la faculté de demander à ne plus verser l’acompte dû au titre de ces revenus (ou, en cas de perception de revenus relevant de plusieurs catégories, la part de l’acompte correspondant aux revenus dont il n’est plus titulaire).

La demande prend effet à compter du versement prévu à l’article 1663 C nouveau du CGI qui suit le mois de la demande. En application du 1 de cet article, le versement, mensuel, intervient au plus tard le 15 de chaque mois. Cependant, sur option du contribuable et en vertu du 2 du même article, il peut revêtir un caractère trimestriel, étant alors dû au plus tard les 15 février, 15 mai, 15 août et 15 novembre.

CALENDRIER DE LA PRISE EN COMPTE DE LA DEMANDE
DE CESSATION DE VERSEMENT D’ACOMPTE

Mois de la demande (année N)

Prise en compte de la demande (versement mensuel)

Prise en compte de la demande (versement trimestriel)

Janvier

Février

Février

Février

Mars

Mai

Mars

Avril

Mai

Avril

Mai

Mai

Mai

Juin

Août

Juin

Juillet

Août

Juillet

Août

Août

Août

Septembre

Novembre

Septembre

Octobre

Novembre

Octobre

Novembre

Novembre

Novembre

Décembre

Février N + 1

Décembre

Janvier N + 1

Février N + 1

Source : commission des finances, d’après l’évaluation préalable de l’article.

Le second alinéa de l’article 204 L du CGI (alinéa 98 du présent article), quant à lui, tire les conséquences du versement de l’acompte contemporain pour l’application des règles d’imposition immédiate dans le cadre d’une cessation d’activité, imputable sur l’impôt sur le revenu final dû (cet alinéa ne concerne que la cessation de perception de BIC, BNC ou BA, et non des autres revenus inclus dans le champ de l’acompte).

Du fait du paiement concomitant de l’impôt l’année de la cessation d’activité, des sommes ont déjà été versées. Par conséquent, l’article 204 L tient compte de ces versements, en prévoyant leur déduction de l’imposition immédiate prévue aux articles 201 et 202 du CGI.

Prévoir la possibilité de cesser le versement de l’acompte est opportun dans la mesure où, à la différence de la retenue à la source, un revenu qui cesserait d’être perçu n’entraînerait pas automatiquement la nullité du versement, l’assiette de l’acompte étant ancienne.

2. La simplification et la modernisation de l’imposition immédiate

Le projet de réforme du Gouvernement procède également à une simplification et à une modernisation des règles d’imposition immédiate dans le cadre de cessation d’activité, en modifiant les articles 201 et 202 du CGI (alinéas 124 à 128 du présent article).

a. La prise en compte du dernier taux de prélèvement à la source pour l’établissement de l’imposition immédiate

Pour l’établissement de l’imposition immédiate, il est actuellement tenu compte du barème en vigueur et de la situation du foyer fiscal au 1er janvier de l’année d’imposition.

Avec le nouveau dispositif, cette imposition immédiate serait calculée en multipliant le résultat de la cessation par le dernier taux de prélèvement connu à la date de cessation (la déclaration du résultat doit être déposée dans les soixante jours qui suivent la cessation).

La prise en compte, pour le calcul de l’imposition immédiate, du dernier taux de prélèvement à la source, découle du b du 8° et du 9° du B du I du présent article (alinéas 126 et 128), qui complètent en ce sens le premier alinéa du 1 des articles 201 et 202 du CGI (relatifs, respectivement, aux BIC et aux bénéfices agricoles, d’une part, aux BNC, d’autre part).

L’exemple suivant illustre les modalités de calcul de l’impôt dû dans le cadre d’une cessation d’activité, en application des règles découlant du projet de réforme.

Un travailleur indépendant perçoit en N − 2 et N − 1 des BIC d’un montant de 50 000 euros. L’impôt dû au titre de ces années est de 9 355 euros.

Le taux de l’acompte contemporain dû l’année N est de 18,7 % et son montant est de 9 350 euros. Chaque mensualité s’élève ainsi à 779 euros.

Le contribuable part à la retraite le 1er juin de l’année N. Sa demande prend effet le mois suivant, soit en juillet. Ce contribuable aura acquitté, entre janvier et juin, six mensualités pour un total de 4 674 euros.

Sa déclaration de résultat, déposée dans les soixante jours qui suivent la cessation d’activité, fait état d’un BIC de 40 000 euros au titre de l’année N. L’imposition immédiate serait égale au produit du taux d’imposition (18,7 %) et du résultat (40 000 euros), soit 7 480 euros.

Seraient déduites les mensualités déjà versées, soit 4 674 euros. Le montant net à payer serait donc de 2 806 euros.

Lors du solde de l’impôt dû par le foyer au titre de l’année N, en N + 1, l’imposition immédiate de 7 480 euros serait imputée sur l’impôt final.

b. La modernisation de l’imposition immédiate : l’extension au régime micro-BA

Les a et c du 8° du B du I du présent article (alinéas 125 et 127) étendent les règles de cessation d’activité aux contribuables relevant du régime du micro-BA, prévu à l’article 64 bis du CGI.

L’article 201 du CGI ne s’applique actuellement qu’aux exploitants agricoles imposés d’après le régime du bénéfice réel. Il excluait ainsi ceux relevant du forfait agricole, supprimé par la loi de finances rectificative pour 2015 (89). Pour les BIC, en revanche, tous les contribuables étaient concernés, qu’ils relèvent d’un régime réel ou du micro-BIC prévu à l’article 50-0 du CGI. De la même manière, l’article 202 s’applique indifféremment aux titulaires de BNC imposés d’après un régime réel ou relevant du micro-BNC de l’article 102 ter.

Tirant les conséquences de la substitution du régime micro-BA au forfait agricole par la loi de finances rectificative pour 2015 précitée, les alinéas 125 et 127 du présent article ajoutent, au premier alinéa du 1 et au 3° bis de l’article 201, la référence au régime du micro-BA de l’article 64 bis. Il n’existe en effet aucune raison d’exclure des modalités d’imposition de la cessation d’une activité les exploitants soumis à un tel régime d’imposition, voisin des autres régimes « micro ».

VII. LA POSSIBILITÉ D’OPTER POUR UN TAUX INDIVIDUALISÉ AU SEIN DES COUPLES

Texte du projet de loi (alinéas 99 à 105) :

INDIVIDUALISATION AU SEIN DES COUPLES

(99) « Art. 204 M. – 1. Le taux de prélèvement du foyer fiscal est, sur option du contribuable, individualisé selon les modalités prévues aux 2 et 3 du présent article pour chacun des conjoints ou partenaires liés par un pacte civil de solidarité et soumis à imposition commune.

(100) « 2. Le taux individualisé du conjoint ou du partenaire qui a personnellement disposé des revenus les plus faibles au cours de la dernière année pour laquelle l’impôt a été établi est déterminé selon les règles prévues au 1 de l’article 204 H.

(101) « Toutefois, les revenus pris en compte sont constitués de la somme de ceux dont il a personnellement disposé et de la moitié des revenus communs, et l’impôt sur le revenu y afférent est déterminé par l’application à ces mêmes revenus des règles prévues aux 1 à 4 du I de l’article 197 ou, le cas échéant, à l’article 197 A en retenant la moitié des déficits, charges et abattements déductibles du revenu global du foyer fiscal, ainsi que des parts de quotient familial dont le foyer fiscal bénéficie.

(102) « 3. Le taux individualisé applicable à l’autre conjoint ou partenaire est déterminé selon les modalités prévues au 1 de l’article 204 H en déduisant au numérateur l’impôt afférent aux revenus dont a personnellement disposé le premier conjoint, calculé dans les conditions du 2 du présent article, et celui afférent aux revenus communs du foyer fiscal, calculé en appliquant à leur assiette, établie dans les conditions prévues à l’article 204 G, le taux de prélèvement du foyer fiscal mentionné au 1 du présent article et en retenant au dénominateur les seuls revenus dont il a personnellement disposé.

(103) « 4. Les taux individualisés prévus respectivement aux 2 et 3 s’appliquent, selon les modalités du 2° du 1 de l’article 204 H, à l’ensemble des revenus déterminés dans les conditions prévues aux articles 204 F et 204 G, dont chacun des conjoints ou partenaires a personnellement disposé.

(104) « Le taux de prélèvement du foyer fiscal mentionné au 1 s’applique aux revenus communs du foyer fiscal.

(105) « 5. L’option peut être exercée à tout moment. Les taux individualisés sont applicables au plus tard le troisième mois suivant celui de la demande. L’option est tacitement reconduite, sauf dénonciation par le contribuable dans les trente jours qui suivent la mise à disposition d’un nouveau taux de prélèvement.

*

* *

A. LES EFFETS DU PRÉLÈVEMENT À LA SOURCE SUR L’IMPOSITION DES COUPLES DANS LE CAS D’UNE DISPARITÉ DE REVENUS ENTRE CONJOINTS

● Le principe, posé par l’article 204 H nouveau du CGI, est que le taux du prélèvement à la source est calculé pour chaque foyer fiscal ; ce taux aurait vocation à s’appliquer quel que soit le niveau des revenus perçus par chaque conjoint, et donc quelle que soit la répartition des revenus au sein du couple.

Dans le droit en vigueur, l’impôt dû est acquitté par le couple : la répartition de la charge de l’impôt entre chaque conjoint relève de leur choix propre et l’administration fiscale n’a pas à en connaître. En cas de différence de niveau des revenus, le conjoint percevant les revenus les plus élevés peut prendre en charge la plus grande partie de l’imposition, ou la totalité, mais l’impôt peut aussi être réparti en parts égales.

Toutefois, la mise en place d’un prélèvement à la source sur les revenus perçus par chaque conjoint conduirait en pratique à une forme de répartition de la charge de l’impôt entre eux. En cas de disparité des revenus, l’application du taux du foyer fiscal aux revenus perçus par le conjoint aux revenus les plus faibles pourrait conduire à prélever un impôt élevé sur celui-ci, alors même que jusqu’alors, l’impôt était acquitté uniquement, ou à titre principal, par le conjoint percevant les revenus les plus élevés.

Exemple : un couple composé un conjoint 1 (C1) percevant un salaire mensuel de 6 000 euros et d’un conjoint 2 (C2) percevant un salaire mensuel de 1 500 euros. Le couple doit acquitter un impôt de 13 011 euros (au titre de revenus de 90 000 euros).

En application de l’article 204 H, les salaires de C1 comme de C2 devraient être assujettis à une retenue à la source au taux de 14,5 %.

À ce titre, C1 acquittera chaque mois 870 euros, et donc 10 440 euros sur l’année, tandis que C2 acquittera 217,50 euros par mois, et donc 2 610 euros sur l’année.

C1 acquitte un impôt quatre fois supérieur à celui de C2, puisque ses revenus sont quatre fois supérieurs – soit une forme de proportionnalité de l’imposition au sein du couple, à rebours de la logique générale de progressivité de l’imposition.

Cette situation pourrait poser deux difficultés :

– pour le conjoint aux revenus les moins élevés, dans le cadre de la retenue à la source, cela porterait à la connaissance de l’employeur le taux d’imposition du foyer fiscal auquel il appartient, lequel taux serait supérieur au taux qui résulterait de son seul salaire, et cela révélerait à son employeur des éléments sur la situation matérielle de son foyer fiscal ;

– le cas échéant, cela imposerait le conjoint aux revenus les plus faibles plus fortement que cela n’était le cas auparavant dans le cadre de la répartition de la charge fiscale au sein du couple, ce qui pourrait même décourager son activité.

● Selon les chiffres fournis par l’évaluation préalable, le nombre de foyers fiscaux concernés par cette problématique est loin d’être anecdotique, puisque sur les 7,6 millions de couples imposés dont les deux conjoints déclarent des revenus concernés par la réforme proposée :

– seulement 12 % d’entre eux, soit environ 910 000 foyers fiscaux, ont des revenus concernés par la réforme répartis à parts égales entre eux – à 10 % près ;

– 47 % d’entre eux, soit près de 3,6 millions de foyers fiscaux, ont des revenus qui diffèrent d’un rapport allant de 1,1 à 2 ;

– 20 % d’entre eux, soit 1,5 million, ont des revenus qui diffèrent d’un rapport supérieur à 3.

C’est la raison pour laquelle l’article 204 M (alinéas 99 à 105 du présent article) ouvrirait la possibilité, sur option, d’appliquer à chaque membre du couple soumis à imposition commune un taux individualisé, conduisant à imposer le conjoint aux revenus les moins élevés à un taux calculé sur la base de ses seuls revenus. Ce mécanisme de taux individualisé pourrait s’appliquer aussi bien dans le cadre de la retenue à la source que dans celui de l’acompte.

Aux termes de l’article 204 M, cette individualisation s’effectuerait sur option « du contribuable ». On peut noter qu’elle pourrait être exercée par l’un des membres du foyer, sans que l’autre ne soit nécessairement d’accord.

B. LES MODALITÉS DE CALCUL DU TAUX INDIVIDUALISÉ

1. En premier lieu, le calcul du taux d’imposition du conjoint aux revenus les moins élevés

Lorsque l’option en faveur du taux individualisé sera exercée, l’administration procéderait en premier lieu au calcul du taux du conjoint aux revenus les plus faibles – au titre de la dernière année pour laquelle l’impôt a été établi (2 de l’article 204 M, alinéas 100 et 101).

Son taux d’imposition serait calculé selon les règles définies par l’article 204 H, mais en prenant en compte :

– les revenus dont ce conjoint a personnellement disposé, ainsi que la moitié des revenus communs ;

– l’impôt sur le revenu « théorique » qui devrait être acquitté sur ces revenus, en prenant en compte la moitié des parts de quotient familial, ainsi que la moitié des déficits, charges et abattements déductibles du revenu global du foyer.

Le taux serait donc calculé de la manière suivante :

Les revenus pris en compte seraient les revenus N − 2 ou N − 1, selon la date du calcul du taux par l’administration, qui se trouvent dans le champ du PAS.

De ce fait, ce taux serait équivalent à celui qui s’appliquerait au conjoint concerné s’il était imposé séparément, sur ses seuls revenus et le cas échéant sur la moitié des revenus communs, avec la moitié du quotient familial.

2. En conséquence, le calcul du taux d’imposition du conjoint aux revenus les plus élevés

L’administration calculerait ensuite le taux applicable à l’autre conjoint (3 de l’article 204 M, alinéa 102), les modalités prévues par l’article 204 H étant adaptées pour tenir compte de l’impôt acquitté par l’autre conjoint et de l’impôt acquitté au titre des revenus communs au couple :

– pour l’impôt figurant au numérateur, serait retenu l’impôt dû par le foyer fiscal, minoré de l’impôt afférent aux revenus dont a personnellement disposé l’autre conjoint et de l’impôt afférent aux revenus communs du foyer fiscal ;

Pour calculer l’impôt afférent aux revenus communs du foyer fiscal, lesquels sont par construction des revenus soumis à acompte (par exemple des revenus fonciers, ou encore des BIC résultant de la location d’un meublé), leur serait appliqué le taux de prélèvement propre au foyer fiscal, calculé selon les modalités définies par l’article 204 H ;

– pour les revenus figurant au dénominateur, seraient retenus les seuls revenus dont le conjoint concerné a personnellement disposé.

Le taux sera donc calculé de la manière suivante :

Taux =

Les revenus pris en compte seraient les revenus N − 2 ou N − 1, selon la date du calcul du taux par l’administration, qui se trouvent dans le champ du PAS.

3. Un effet neutre sur l’impôt acquitté

● In fine, l’impôt total acquitté par les deux conjoints sur leurs revenus personnels, venant s’ajouter le cas échéant à l’impôt acquitté au titre des revenus communs, serait équivalent à l’impôt total qu’ils auraient acquitté sans individualisation : l’exercice de l’option serait totalement neutre sur l’impôt versé au cours de l’année. La seule différence résiderait dans la répartition de l’impôt entre les conjoints.

Le taux du conjoint aux revenus les moins élevés serait plus faible que le taux du foyer fiscal, voire ramené à zéro. Le taux de l’autre conjoint serait plus élevé que le taux du foyer fiscal, tout en étant moins élevé que s’il était imposé séparément, car il bénéficie du quotient conjugal.

Le taux applicable aux revenus communs resterait en revanche le taux de prélèvement propre au foyer fiscal.

● L’option pour le taux individualisé se traduirait donc par l’application de trois taux différents au sein du même foyer fiscal, lorsque les membres du foyer fiscal ont des revenus communs (4 de l’article 204 M, alinéas 103 et 104) :

– l’un applicable aux revenus ou bénéfices personnels perçus par le conjoint aux revenus les plus faibles ;

– l’autre applicable aux revenus ou bénéfices personnels perçus par le conjoint aux revenus les plus élevés ;

– le dernier, propre au foyer fiscal, applicable aux revenus communs (revenus fonciers, BIC…).

Exemple 1 : soit un couple composé d’un conjoint C1 percevant un salaire mensuel de 4 000 euros et d’un conjoint C2 percevant un salaire mensuel de 2 000 euros – les salaires étant constants d’une année sur l’autre. L’impôt dû par le foyer fiscal est de 8 151 euros. Le taux de retenue à la source propre au foyer fiscal est de 11,3 %.

Si l’option en faveur du taux individualisé est exercée :

– le taux de C2 sera égal à l’impôt qu’il acquitterait au titre de ses seuls revenus, rapporté à ces revenus, soit 1 666/24 000, soit 6,9 % au lieu de 11,3 % ;

– le taux de C1 sera calculé comme suit :

= = 13,5 %

Ce taux de 13,5 % est supérieur au taux de 11,3 % applicable au foyer fiscal, mais inférieur au taux de 15,2 % auquel C2 serait assujetti au titre de ses propres revenus, avec une part de quotient familial.

Taux

Taux de droit commun

Taux individualisé

Taux applicable à C1, qui perçoit 4 000 euros/mois

11,3 %

13,5 %

Impôt acquitté par C1 sur l’année

5 424 euros

6 480 euros

Taux applicable à C2, qui perçoit 2 000 euros/mois

11,3 %

6,9 %

Impôt acquitté par C2

2 712 euros

1 656 euros

Impôt total acquitté

8 136 euros

8 136 euros

Exemple 2, avec revenus communs : soit un couple composé d’un conjoint C1 percevant un salaire mensuel de 6 000 euros et d’un conjoint C2 percevant un salaire mensuel de 2 000 euros – les salaires étant constants d’une année sur l’autre – ainsi que des revenus fonciers de 10 000 euros.

L’impôt dû est égal à 17 631 euros. Le taux de retenue à la source pour le foyer fiscal est égal à 16,6 % (soit 17 631 euros ramené au revenu de 106 000 euros).

Si l’option en faveur du taux individualisé est exercée :

– le taux de C2 sera égal à l’impôt qu’il acquitterait au titre de ses seuls revenus et de la moitié des revenus communs, rapporté à ces revenus, soit :

Taux =

Taux = = 8,2 % (au lieu de 16,6 %).

– le taux de C1 sera calculé comme suit :

Taux =

= = 19,4 % (au lieu de 16,6 %).

Taux

Taux de droit commun

Taux individualisé

Taux applicable à C1, qui perçoit 6 000 euros/mois

16,6 %

19,4 %

Impôt acquitté par C1 sur l’année

11 952 euros

13 968 euros

Taux applicable à C2, qui perçoit 2 000 euros/mois

16,6 %

8,2 %

Impôt acquitté par C2

3 954 euros

1 968 euros

Impôt acquitté par C1 et C2 sur les revenus communs de 10 000 euros

1 660 euros

1 660 euros

Impôt total acquitté

17 566 euros

17 596 euros

C. LES MODALITÉS DE MISE EN œUVRE DE L’INDIVIDUALISATION DES TAUX

● C’est à l’administration qu’il reviendrait de procéder au calcul du taux d’imposition de chacun des membres du couple, une fois l’option exercée. Le nouveau taux serait ensuite transmis à l’employeur, dans le cas d’une retenue à la source, sans que celui-ci ait connaissance de la nature de ce taux (taux propre au foyer fiscal ou taux individualisé).

L’évaluation préalable précise par ailleurs que sur l’avis d’imposition sur les revenus de 2016, transmis en septembre 2017, figurerait le taux de prélèvement du foyer fiscal, mais aussi les taux individualisés de chacun des conjoints si l’option était exercée, pour donner un élément d’appréciation aux contribuables.

● Aux termes du 5 de l’article 204 M (alinéa 105), l’option pourrait être exercée à tout moment ; même si cela n’est pas précisé dans le texte, elle devrait également pouvoir être dénoncée à tout moment, ce qui soulève là encore la question d’un éventuel désaccord au sein du couple sur l’exercice de l’option.

De la même façon que pour les modifications de taux résultant d’un changement de situation, prévues par l’article 204 I, les taux individualisés seraient applicables au plus tard le troisième mois suivant celui de la demande.

L’option serait tacitement reconduite, sauf dénonciation par le contribuable dans les trente jours qui suivent la mise à disposition d’un nouveau taux de prélèvement.

VIII. LES MODALITÉS DE PRÉSENTATION DES DÉCLARATIONS, OPTIONS OU DEMANDES PAR LES CONTRIBUABLES

Texte du projet de loi (alinéa 106) :

MODALITÉS D’OPTION

(106) « Art. 204 N. – Les déclarations, options ou demandes prévues au 3 de l’article 204 H et aux articles 204 I à 204 M sont présentées par voie électronique par les contribuables dont la résidence principale est équipée d’un accès à internet et qui sont en mesure de le faire. Dans les autres cas, les contribuables utilisent les autres moyens mis à leur disposition par l’administration. ».

*

* *

● Dernier article de la nouvelle section VIII sur le prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu, l’article 204 N (alinéa 106) pose le principe selon lequel les déclarations, options ou demandes prévues par les articles précédents seraient présentées par voie électronique dès lors que les contribuables disposent d’un accès à internet dans leur résidence principale et sont en mesure de procéder ainsi.

Se trouveraient dans le champ de cette disposition :

– l’option prévue par le 3 de l’article 204 H en faveur de l’application du taux par défaut, lorsque le contribuable ne souhaite pas que son employeur ait connaissance du taux de prélèvement propre à son foyer fiscal ;

– les déclarations de mariage ou de conclusion d’un pacs, de décès de l’un des conjoints soumis à imposition commune, ou encore de divorce ou de rupture d’un pacs, prévues par le 2 de l’article 204 I, ainsi que la demande d’une application différée au 1er janvier N + 1 du nouveau taux du foyer fiscal issu du mariage ou du pacs prévue par le 1° du 3 ;

– les demandes de modulation à la hausse comme à la baisse, prévues par l’article 204 J, et, dans le cadre d’une modulation à la baisse, la déclaration de la situation ainsi que des revenus estimés de l’année en cours ;

– la déclaration spontanée d’un montant d’acompte au titre de l’année de début d’une activité, prévue par l’article 204 K ;

– la demande d’interruption du versement de l’acompte en cas d’arrêt d’activité, prévue par l’article 204 L ;

– l’option en faveur d’une individualisation du taux au sein des couples, prévue par l’article 204 M.

● La formulation retenue est similaire à celle figurant à l’article 1649 quater B quinquies introduit par la loi de finances pour 2016 (90), relatif à la généralisation progressive de la télédéclaration des revenus.

Dans le cas où la résidence principale du contribuable ne serait pas dotée d’un accès à internet, ou que ce dernier ne serait pas en mesure de présenter ses demandes et options par cette voie, celui-ci pourrait utiliser les autres moyens mis à sa disposition par l’administration. En pratique, il pourrait se rendre au guichet, afin de formuler sa demande auprès des agents de la DGFiP, ou bien appeler une plateforme téléphonique dédiée, ou bien encore recourir au courrier.

IX. LES OBLIGATIONS DÉCLARATIVES DES TIERS COLLECTEURS

Texte du projet de loi (alinéas 107 à 118, 245 et 246) :

OBLIGATIONS DÉCLARATIVES DU TIERS DÉCLARANT

(107) B. – Le code général des impôts est ainsi modifié :

(108) 1° L’article 77 est abrogé ;

(109) 2° Après l’article 87, il est inséré un article 870 A ainsi rédigé :

(110) « Art. 870 A. – Les personnes tenues d’effectuer la retenue à la source prévue au 1° du 2 de l’article 204 A déclarent chaque mois à l’administration fiscale, directement ou, pour les employeurs ayant recours aux dispositifs simplifiés prévus à l’article L. 13356 du code de la sécurité sociale, par l’intermédiaire de l’organisme mentionné à l’article L. 133510 du même code, des informations relatives au montant prélevé sur le revenu versé à chaque bénéficiaire. » ;

(111) 3° L’article 87 A est remplacé par les dispositions suivantes :

(112) « Art. 87 A. – Les déclarations mentionnées aux articles 87 et 870 A sont transmises mensuellement selon les modalités prévues aux articles L. 13353 ou L. 13358 du code de la sécurité sociale.

(113) « Pour les personnes n’entrant pas dans le champ d’application de l’article L. 1335-3 du code de la sécurité sociale, les déclarations mentionnées aux articles 87 et 870 A sont souscrites auprès de l’organisme ou de l’administration désigné par décret, au plus tard le 31 janvier de l’année suivant celle au cours de laquelle les sommes ont été versées pour la première et au plus tard le mois suivant celui au cours duquel les sommes ont été précomptées, à une date fixée par arrêté du ministre chargé du budget, pour la seconde. » ;

(114) 4° À l’article 89 :

(115) a) Le troisième alinéa est supprimé ;

(116) b) Au dernier alinéa, les mots : « la déclaration des traitements, salaires, pensions et rentes viagères payés par le défunt pendant l’année au cours de laquelle il est décédé doit être souscrite » sont remplacés par les mots : « les déclarations mentionnées aux articles 87, 870 A et 88 sont souscrites » ;

(117) 5° L’article 89 A est remplacé par les dispositions suivantes :

(118) « Art. 89 A. – Les déclarations mentionnées aux articles 87, 870 A, 88, 240 et 241 sont transmises par le déclarant à l’administration fiscale selon un procédé informatique. » ;

[…]

COORDINATION AVEC LE CODE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

(245) D. - Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

(246) 1° Au 2° du II de l’article L. 13353, les mots : « la déclaration prévue à l’article 87 » sont remplacés par les mots : « les déclarations prévues aux articles 87 et 870 A » ;

[…]

*

* *

Les alinéas 107 à 118 détaillent les obligations déclaratives auxquelles seraient soumis les tiers déclarants afin que l’administration soit pleinement et régulièrement informée des montants prélevés sur les revenus salariaux. Ces obligations ne trouveront, par conséquent, à s’appliquer que dans le cadre de la perception de la retenue à la source, et non dans le cadre du versement des acomptes.

Comme l’indique l’évaluation préalable du présent article, « le mécanisme de la retenue à la source prévue par le projet de réforme du Gouvernement nécessite que l’inaction du tiers payeur des revenus, collecteur de la retenue à la source, soit assortie de pénalités afin d’assurer l’effectivité du dispositif ».

Les obligations prévues par ces alinéas 107 à 118 doivent donc être lues avec les sanctions prévues par les alinéas 230 à 235 (Cf. infra XIV, A).

A. LE DROIT EN VIGUEUR

Les obligations déclaratives incombant aux tiers payeurs peuvent être distinguées suivant la nature des prélèvements opérés.

1. Les obligations déclaratives en matière fiscale

Conformément à l’article 87 du CGI en vigueur, toute personne physique ou morale versant des salaires ou traitements assimilés est tenue de souscrire une déclaration dont le contenu est fixé par voie réglementaire.

Cet article du CGI précise en outre que cette déclaration doit faire ressortir distinctement, pour chaque dirigeant ou cadre, le montant des indemnités pour frais d’emplois, les frais de représentation, de déplacement, de mission et les autres frais professionnels alloués ou remboursés au cours de l’année précédente.

Le détail des informations contenues dans cette déclaration sont prévues par l’article 39 de l’annexe III du CGI :

– s’agissant du déclarant, ses références (raison sociale, adresse, numéro SIRET), ses effectifs, le montant de la taxe sur les salaires, éventuellement le montant de la taxe d’apprentissage ;

– s’agissant des salariés, leur état civil, leurs coordonnées, les conditions d’emploi, le montant des sommes payées dans l’année en distinguant les différents types de versement, le temps de travail (en particulier pour les salariés à temps partiel), ainsi que certaines informations relatives à l’actionnariat salarié (attributions de stock-options, d’actions gratuites ou de BSPCE).

Selon l’article 87 A du CGI en vigueur (91), cette déclaration est transmise selon les conditions prévues par l’article L. 133-5-3 du code de la sécurité sociale, c’est-à-dire dans les mêmes conditions que la déclaration sociale nominative (DSN).

La sanction du non-respect de ces obligations déclaratives est fixée à l’article 1736 du CGI, à hauteur d’une amende de 5 % des sommes non-déclarées (92).

L’article 89 du CGI prévoit par ailleurs les modalités de transmission de ces informations en cas de cessation totale ou partie de l’activité de l’entreprise ou de la profession : en pareil cas, le contribuable doit transmettre les informations dans un délai de quarante-cinq jours suivant la cessation de l’activité.

1. Les obligations déclaratives en matière sociale

Comme l’indique l’évaluation préalable de l’article (93), « la mise en œuvre de la retenue à la source empruntera principalement les circuits d’information de la déclaration sociale nominative. Cette dernière, entièrement automatisée, sera généralisée d’ici janvier 2017 pour les employeurs du secteur privé relevant du régime général de la sécurité sociale, et couvre d’ores et déjà quatre salariés sur cinq. La DSN sera utilisée pour la transmission du taux de retenue à la source à l’employeur et pour le reversement au Trésor par l’employeur de la retenue effectuée à l’image des mécanismes actuellement en vigueur pour les contributions et cotisations sociales ».

L’état d’avancement de la mise en place de la DSN

L’article L. 133-5-3 du code de la sécurité sociale prévoit que tout employeur (à l’exception de ceux qui utilisent le chèque emploi-service universel) transmet à l’Urssaf, la caisse générale de sécurité sociale dont il relève ou le cas échéant la mutualité sociale agricole (MSA) les informations relatives, pour chaque salarié, au lieu d’activité, au contrat de travail, au montant des rémunérations, aux contributions sociales et à la durée du travail. Cette déclaration est effectuée par voie électronique selon des modalités fixées chaque année par voie d’arrêté.

Cet article prévoit déjà que la DSN permettra la transmission des informations prévue à l’article 87 du CGI.

La mise en œuvre de cette DSN a été prévue en trois phases entre 2013 et janvier 2018.

La première phase, lancée au premier trimestre de l’année 2013 sur une base volontaire, concernait les attestations de salaire, les attestations d’employeur pour Pôle emploi, les déclarations mensuelles de mouvements de main-d’œuvre pour les entreprises de plus de cinquante salariés, ainsi que les formulaires de radiation destinés aux organismes gérant les contrats collectifs de prévoyance.

Le décret n° 2014-1082 du 24 septembre 2014 a rendu obligatoire la mise en place de la DSN dans les 15 000 plus grandes entreprises (plus de 2 millions d’euros de cotisations sociales ou un million d’euros avec un tiers déclarant redevable de plus de 10 millions d’euros). Le passage à la DSN a été rendu obligatoire, pour ces entreprises, à compter de la paie du mois d’avril 2015.

La deuxième phase (mi-2015 à mi-2016) a permis un élargissement aux déclarations de paiement des cotisations sociales (déclaration unifiée des cotisations sociales, bordereaux et tableaux récapitulatifs des cotisations et contributions sociales destinés aux Urssaf). La mise en œuvre de cet élargissement a été rendue effective à compter du mois d’octobre 2015.

La troisième phase doit permettre, à compter du second semestre 2016, de remplacer les déclarations de cotisation à la MSA et aux organismes complémentaires de retraite, santé et prévoyance et l’élargissement de la DSN à la déclaration annuelle des données sociales et quelques autres déclarations sociales spécifiques.

Le décret n° 2016-611 du 18 mai 2016 a fixé les dates limites de transmission obligatoire de la DSN :

– à compter de la paie du mois de juillet 2016, les entreprises relevant du régime général et agricole ne faisant pas appel à un tiers déclarant et dont le montant de cotisation est supérieur à 50 000 euros, ainsi que les tiers déclarant dont le montant à déclarer est supérieur à 10 millions d’euros, devraient mettre en œuvre la DSN ;

– la DSN devient obligatoire pour toutes les entreprises à compter du 1er janvier 2017. La généralisation pour les employeurs du régime agricole interviendra en avril 2017 (lorsque le montant de cotisation est inférieur à 3 000 euros).

Les employeurs de la fonction publique devraient basculer à la DSN avant janvier 2020.

Pour les collecteurs qui ne relèveraient pas de la DSN à compter du 1er janvier 2018, l’évaluation préalable indique qu’un dispositif ad hoc sera mis en place par l’administration fiscale, caractérisé par des modalités déclaratives et de reversement simples, fortement inspirées des principes fonctionnels et techniques de la DSN. QUESTION RG (idée ce que cela va être ?)

La mise en œuvre de la présente réforme s’appuierait donc sur celle en cours dans le domaine social, mais elle ne devrait pas modifier ni le rythme, ni les modalités de déclaration de la DSN. Elle induirait, à terme, le renseignement automatisé par le collecteur de deux données supplémentaires relatives au montant du prélèvement à la source opéré ainsi que le taux de prélèvement à la source appliqué.

A. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

1. Une extension des obligations déclaratives en vigueur

L’alinéa 110 prévoit l’insertion dans le CGI d’un nouvel article 87-0 A indiquant que les personnes tenues d’effectuer la retenue à la source (sur les revenus salariaux) déclarent chaque mois directement à l’administration fiscale « des informations » relatives au montant prélevé sur le revenu des bénéficiaires.

Toutefois, pour les personnes éligibles au dispositif simplifié de déclaration et de recouvrement des contributions sociales (prévu à l’article L. 133-5-6 du code de la sécurité sociale), cette déclaration pourrait être réalisée auprès de l’organisme collecteur.

La rédaction proposée, faisant référence à l’obligation de transmettre « des informations », peut paraître particulièrement imprécise, surtout si l’on considère qu’un défaut de déclaration donne lieu à l’application des amendes prévues aux alinéas 230 à 235.

Selon les informations transmises par le Gouvernement, cet article, dans sa version transmise au Conseil d’État, renvoyait à un décret le soin de définir le contenu de ces informations.

L’alinéa 113 prévoit que ces informations sont transmises mensuellement dans le cadre de la DSN.

Pour les employeurs qui ne sont pas soumis à la DSN, cette déclaration devra être transmise à un organisme désigné par décret, l’évaluation préalable évoquant un groupement d’intérêt public créé à cet effet.

L’alinéa 118 prévoit enfin que la transmission des informations serait réalisée par voie informatique.

2. La mise en œuvre de cette obligation déclarative

a. Les tiers collecteurs dans le champ de la DSN

Pour les tiers collecteurs qui seraient dans le champ de la DSN lors de la mise en œuvre du prélèvement à la source, en janvier 2018, les obligations déclaratives mentionnées ci-dessus seraient remplies, de manière relativement simple, par le biais de la DSN.

S’il ne faut pas négliger que la présente réforme vient ajouter de la complexité à la mise en œuvre de la DSN, il convient toutefois de noter que les synergies entre les deux réformes seraient importantes.

b. Les tiers collecteurs hors champ de la DSN

S’agissant des collecteurs hors champ de la DSN, en particulier les employeurs publics, l’évaluation préalable indique qu’un vecteur déclaratif commun serait mis en place spécifiquement pour la retenue à la source. Pour des raisons d’économies d’échelle, ce vecteur serait exploité par le groupement d’intérêt public (GIP) en charge de la modernisation des déclarations sociales.

Ce vecteur commun serait mis en place sous la forme d’une « déclaration 3 en 1 » limitée à la retenue à la source.

Selon l’évaluation préalable, elle comporterait les six types d’informations suivantes :

– le NIR ou numéro d’inscription au répertoire (sous-entendu de l’INSEE) ;

– les éléments de l’état civil des salariés ;

– le montant du revenu net imposable ;

– le montant de la retenue à la source ;

– le taux appliqué ;

– en retour de la déclaration, l’administration transmettrait les taux de prélèvement de chaque bénéficiaire de revenus, afin que le collecteur l’applique sur les revenus versés.

Cette déclaration comporterait en outre des demandes d’informations relatives aux modalités de paiement, notamment les coordonnées bancaires du compte sur lequel l’administration devrait effectuer le prélèvement.

Selon l’évaluation préalable, il est possible de déterminer le coût de ces obligations déclaratives à partir d’une proratisation du coût estimatif de la mise en œuvre de la DSN, soit entre 300 et 600 euros pour un collecteur de moins de dix salariés, de 1 000 à 2 000 euros environ pour un collecteur de dix à deux cent cinquante salariés et de 4 000 à 8 000 euros environ pour un collecteur de plus de deux cent cinquante salariés.

S’agissant du secteur public, l’évaluation préalable fournit des exemples de mise en œuvre pour les collectivités territoriales et les établissements hospitaliers ainsi que pour l’État, notamment les militaires.

c. Les particuliers employeurs

La mise en œuvre de ces obligations déclaratives peut légitimement faire naître des questions s’agissant des particuliers employeurs, en particulier lorsqu’ils utilisent des titres simplifiés en matière sociale (chèque emploi service universel 
– CESU − et Pajemploi pour la garde d’enfants).

Selon les informations transmises par le Gouvernement, les centres en charge de ces titres simplifiés effectueraient dès 2017 les formalités déclaratives liées à la DSN.

Selon l’évaluation préalable, les employeurs à domicile seraient soumis aux mêmes obligations légales que les autres employeurs. Toutefois, la mise en œuvre du prélèvement à la source sera adaptée à leurs spécificités :

– les informations données par le particulier employeur dans le cadre de la déclaration CESU ou Pajemploi seraient transmises à l’administration fiscale par le centre gestionnaire compétent en lieu et place de l’employeur ;

– le centre gestionnaire porterait à la connaissance du particulier employeur le taux de prélèvement de son employé, donnée ayant été transmise par l’administration fiscale. À défaut, le centre gestionnaire communiquerait le taux par défaut.

d. Les petites entreprises ou associations ayant recours à des titres simplifiés

Les entreprises de moins de vingt salariés peuvent utiliser le titre emploi service entreprise (TESE) tandis que les associations peuvent utiliser le chèque emploi associatif (CEA).

Ces employeurs sont soumis à une obligation déclarative auprès des unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (Urssaf) qui est remplie par voie dématérialisée à hauteur de 99 % pour le TESE comme pour le CEA. Pour cette catégorie d’employeurs, le taux de prélèvement serait transmis aux Urssaf par l’administration fiscale.

L’Urssaf serait chargée de calculer le prélèvement à la source et de le prélever sur le compte bancaire de l’employeur au même titre que les cotisations sociales puis de le reverser à l’administration fiscale.

Dans ce schéma, l’Urssaf constituerait donc un intermédiaire entre l’administration fiscale et l’employeur chargé de réaliser l’ensemble des étapes de la collecte et du reversement du prélèvement à la source.

X. LES MODALITÉS DE RECOUVREMENT DU SOLDE DE L’IMPÔT DÛ

Texte du projet de loi (alinéas 123, 132 à 138, 129, 130 et 176 à 207) :

OBLIGATIONS DÉCLARATIVES

(123) 7° Le premier alinéa du 1 de l’article 170 est complété par les mots : «, et du prélèvement prévu à l’article 204 A » ;

[…]

(132) 12° Après l’article 1663 A, sont insérés deux articles 1663 B et 1663 C ainsi rédigés :

RECOUVREMENT DU SOLDE DE L’IMPÔT SUR LE REVENU

(133) « Art. 1663 B. – 1. Après imputation des réductions et crédits d’impôt, prélèvements, retenues à la source et acomptes, le solde de l’impôt sur le revenu et des autres impositions figurant sur le même article de rôle est recouvré dans les conditions fixées par les articles 1663 et 1730.

(134) « 2. À défaut d’option contraire, ce solde est prélevé par l’administration fiscale dans les conditions de l’article 1680 A.

(135) « 3. Par dérogation aux articles 1663 et 1681 sexies, lorsque son montant excède 300 €, ce solde est recouvré par prélèvements mensuels d’égal montant à partir du deuxième mois qui suit la mise en recouvrement du rôle. Le dernier prélèvement intervient en décembre.

(136) « En cas de décès du contribuable, le solde est acquitté dans les conditions fixées par les articles 1663 et 1730.

(137) « Les prélèvements mensuels sont arrondis à l’euro le plus proche. La fraction d’euro égale à 0,50 est comptée pour 1.

(138) « 4. Le 3 n’est pas applicable aux impositions mises en recouvrement après le 30 septembre ou exigibles dès la mise en recouvrement du rôle ou résultant de la mise en œuvre d’une rectification ou d’une procédure d’imposition d’office.

[…]

EXIGIBILITÉ IMMÉDIATE DU SOLDE EN CAS DE DÉFAUT DE PAIEMENT D’UN ACOMPTE OU D’UNE MODULATION EXCESSIVE

(129) 10° Les quatrième et cinquième alinéas du 2 de l’article 1663 deviennent un 3 et l’article est complété par un 4 ainsi rédigé :

(130) « 4. En cas d’application d’une majoration prévue à l’article 1729 G, l’impôt sur le revenu et les autres impositions figurant sur le même article de rôle sont exigibles en totalité dès leur mise en recouvrement. » ;

[…]

COORDINATION ET ADAPTATION DES RÈGLES DE RECOUVREMENT

(176) 19° Les articles 1681 A à 1681 E sont abrogés ;

(177) 20° L’article 1681 ter est remplacé par les dispositions suivantes :

(178) « Art. 1681 ter. – 1. La taxe d’habitation et les taxes foncières sont recouvrées dans les conditions prévues au 1 de l’article 1663 et à l’article 1730. Toutefois, le contribuable peut opter pour des prélèvements mensuels sur un compte ouvert par lui et répondant aux conditions de l’article 1680 A.

(179) « Lorsqu’elle est exercée pour la taxe d’habitation, cette option est également valable pour le recouvrement de la contribution à l’audiovisuel public due par les personnes mentionnées au 1° du II de l’article 1605.

(180) « L’option est exercée expressément et renouvelée tacitement chaque année.

(181) « 2. Les prélèvements effectués chaque mois, de janvier à octobre, sont égaux au dixième de l’impôt établi l’année précédente.

(182) « Toutefois, le contribuable peut demander la suspension des prélèvements ou la modification de leur montant. Cette demande précise le montant présumé de l’impôt. Elle ne peut être postérieure au 30 juin et est prise en compte le mois qui suit celui au cours duquel elle est formulée.

(183) « Le solde de l’impôt est prélevé en novembre à concurrence du montant mentionné au premier alinéa. Le complément éventuel est prélevé en décembre. Lorsque le prélèvement de décembre est supérieur d’au moins 100 % à l’une des mensualités, le solde de l’impôt est recouvré par prélèvement d’égal montant à partir de la troisième mensualité qui suit la mise en recouvrement du rôle.

(184) « Toutefois, si l’impôt est mis en recouvrement après le 31 octobre, le solde est acquitté dans les conditions prévues par les articles 1663 et 1730.

(185) « Il est mis fin aux prélèvements dès qu’ils ont atteint le montant de l’impôt mis en recouvrement. Le tropperçu éventuel est remboursé au contribuable au plus tard à la fin du mois qui suit celui au cours duquel il est constaté.

(186) « Il est également mis fin aux prélèvements mensuels en cas de décès du contribuable. Le solde de l’impôt est acquitté dans les conditions fixées par les articles 1663 et 1730.

(187) « Lorsque, après la mise en recouvrement, le montant du dernier prélèvement de l’année est inférieur au montant mentionné au 2 de l’article 1657, il est ajouté à celui de la mensualité précédente.

(188) « Lorsque l’option est exercée pour la taxe d’habitation, les dispositions du présent 2 s’appliquent à la somme de la cotisation de taxe d’habitation et de la contribution à l’audiovisuel public.

(189) « 3. Les modalités d’application du présent article sont fixées par décret. » ;

(190) 21° Les articles 1681 ter A et 1681 ter B sont abrogés ;

(191) 22° À l’article 1681 quater A :

(192) a) Au A, les mots : « l’article 1681 D » sont remplacés par les mots : « l’article 1680 A » ;

(193) b) Au F, les mots « en Conseil d’État » sont supprimés ;

(194) 23° À l’article 1681 sexies :

(195) a) Au 1, les mots : « l’article 1681 D » sont remplacés par les mots : « l’article 1680 A » ;

(196) b) Au 2 :

(197) – les mots : « les acomptes mentionnés à l’article 1664, » sont supprimés ;

(198) – les mots : « visé aux 1° ou 2° de l’article 1681 D » sont remplacés par les mots : « mentionné à l’article 1680 A » ;

(199) c) Au 3, les mots : « l’article 1681 D » sont remplacés par les mots : « l’article 1680 A » ;

(200) 24° Au 4 de l’article 1684 et au deuxième alinéa de l’article 1688, la référence : « 1664 » est remplacée par la référence : « 1663 A » ;

(201) 25° Au second alinéa du I de l’article 1723 ter00 A, la deuxième phrase est supprimée ;

(202) 26° À l’article 1724 quinquies :

(203) a) Au I, les mots : « à l’article 1681 A » sont remplacés par les mots : « à l’article 1681 ter » ;

(204) b) Au II, les mots : « et, le cas échéant de l’article 1664, » sont supprimés ;

(205) c) Il est rétabli un III ainsi rédigé :

(206) « III. – Si un prélèvement mensuel prévu au 3 de l’article 1663 B n’est pas opéré, le contribuable est soumis aux dispositions du 4 de l’article 1663 et de l’article 1730. » ;

(207) d) Au IV, les mots : « en Conseil d’État » sont supprimés ;

*

* *

La mise en place du prélèvement à la source emporterait par construction une refonte des modalités de recouvrement du solde de l’impôt, ou, pour reprendre la formule de l’évaluation préalable, un « changement de paradigme ». En septembre de l’année N + 1, le foyer fiscal serait désormais amené à s’acquitter du solde de l’impôt dû au titre des revenus de l’année N, après la prise en compte des retenues à la source et acomptes effectués au cours de l’année N, alors qu’aujourd’hui, la régularisation réalisée en septembre N + 1 se fait en prenant en compte les prélèvements – mensualités ou tiers provisionnels – intervenus au cours de l’année N + 1.

Parallèlement au paiement du solde de l’impôt dû au titre des revenus de l’année N, le foyer fiscal continuerait à être prélevé à la source sur ses revenus de l’année N + 1.

Dans le cadre de la réforme, le montant du solde à acquitter ou à restituer, et donc de la régularisation, devrait être minoré dans la généralité des cas, du fait de l’« effet assiette » de la réforme – pour la seule retenue à la source –, qui devrait conduire à prélever un montant d’impôt plus proche de celui effectivement dû, de la prise en compte contemporaine des effets fiscaux des mariages, décès et divorces, comme vu supra, et du recours des contribuables à la modulation de leur taux, à la hausse comme à la baisse.

A contrario, la prise en compte des réductions et crédits d’impôt en N + 1, et non dans le calcul du taux, devrait accroître l’importance des régularisations en faveur des foyers fiscaux bénéficiant d’avantages fiscaux de façon récurrente, par le biais de restitutions – sachant qu’aujourd’hui, ces avantages fiscaux sont retenus pour le calcul des mensualités et acomptes prélevés de janvier à août N + 1.

Le tableau ci-après récapitule le déroulement du recouvrement de l’impôt sur une année N, avant et après la réforme proposée.

Opération

Droit existant

Droit proposé

Modalités de versement de l’impôt

Mensualités versées de janvier à octobre N ou acomptes versés en février et en mai de l’année N, au titre de l’IR dû sur les revenus de l’année N – 1

Retenue à la source et/ou acomptes versés de janvier à août N, puis de septembre à décembre N après rafraîchissement des données fiscales, au titre de l’IR dû sur les revenus de l’année N

Déclaration des revenus de l’année N − 1 au printemps

Déclaration des revenus N − 1 au printemps de l’année N, ainsi que de la situation familiale du foyer et de ses avantages fiscaux

Déclaration des revenus N − 1 au printemps de l’année N, ainsi que de la situation familiale du foyer, de ses avantages fiscaux et des prélèvements à la source intervenus en année N − 1

Régularisation de l’IR dû au titre des revenus N − 1 à l’été de l’année N

Solde de l’impôt dû au titre des revenus de l’année N − 1 :

● recouvrement du solde de l’IR restant dû compte tenu des mensualités et acomptes intervenus en année N

● prise en compte des réductions et crédits d’impôt éventuellement acquis au titre de l’année N − 1

Solde de l’impôt dû au titre des revenus de l’année N − 1 :

● recouvrement de l’IR dû sur les revenus hors PAS et sur ceux dans le champ du PAS, après prise en compte des retenues et acomptes intervenus en année N − 1 sur les revenus dans le champ du PAS

● prise en compte des réductions et crédits d’impôt éventuellement acquis au titre de l’année N − 1

Modalités de recouvrement de l’IR restant dû au titre des revenus N − 1

Ajustement des mensualités ou de l’acompte versé en septembre en fonction de l’IR restant dû

Recouvrement du solde restant dû, soit par prélèvement en une fois, soit par prélèvements mensuels d’égal montant de septembre ou octobre à décembre

A. LE DROIT EXISTANT

1. Les modalités de recouvrement en une fois, par acomptes ou par prélèvements mensuels

● Les contribuables s’acquittant de leur impôt sur le revenu dans les conditions de droit commun des impôts sur rôle le font en une fois, dans les trente jours après la date de mise en recouvrement du rôle, c’est-à-dire après réception de leur avis d’imposition, en application du 1 de l’article 1663 du CGI.

● Néanmoins, comme le prévoit l’article 1664, dès lors que l’impôt sur le revenu dû par le contribuable l’année précédente est supérieur ou égal à 347 euros, celui-ci est tenu de régler d’avance deux acomptes – ou tiers provisionnels – calculés à partir de l’impôt mis en recouvrement l’année précédente (94). Les dates limites de paiement des tiers provisionnels sont fixées au 15 février et au 15 mai de l’année N (au titre de l’impôt dû sur les revenus de l’année N − 1) (95).

Le solde de l’impôt est ensuite recouvré par voie de rôle (premier alinéa du 3 de l’article 1664), à l’été : le total des versements effectués au titre des tiers provisionnels en février et en mai est imputé sur le montant d’impôt sur le revenu finalement dû. Le solde est payé à l’initiative du contribuable, selon le mode de règlement de son choix.

Les modes de paiement de l’impôt sur le revenu

Les contribuables peuvent recourir à différents modes de paiement pour s’acquitter de leurs impôts. Ces modes de paiement peuvent être répartis en deux catégories.

● La première regroupe les modes de paiement dématérialisés, et comprend :

– le paiement par prélèvement automatique mensuel ou à échéance ;

– le télérèglement, qui consiste pour le contribuable à donner un ordre de paiement sur le site www.impots.gouv.fr et se traduit par un prélèvement automatique ; l’option est exercée expressément et ponctuellement par le contribuable, à chaque échéance d’impôt.

● La deuxième catégorie correspond aux modes de paiement non dématérialisés, qui recouvre :

– le paiement en espèces ;

– le paiement par chèque ;

– le paiement par titre interbancaire de paiement (TIP) ;

– le paiement par virement sur le compte du Trésor ouvert dans les écritures de la Banque de France.

Le paiement en espèces est accepté dans la limite de 300 euros (article 1680 du CGI). Par ailleurs, l’article 1681 sexies, tel qu’issu de la loi de finances pour 2016 (1), prévoit un seuil de paiement dématérialisé obligatoire : il s’élève à 10 000 euros au titre de 2016 et sera progressivement abaissé pour atteindre 300 euros en 2019, ce qui correspond au plafond des paiements en espèces actuellement en vigueur. De ce fait, la loi de finances pour 2016 a procédé à une quasi-généralisation de la dématérialisation des modes de paiement, seuls les paiements inférieurs à 300 euros restant hors champ.

Montant au-dessus duquel le paiement par prélèvement ou en ligne est obligatoire :

2016 10 000 euros – avis d’acompte ou d’impôt reçus en 2016

2017 2 000 euros – avis d’acompte ou d’impôt reçus en 2017

2018 1 000 euros – avis d’acompte ou d’impôt reçus en 2018

2019 300 euros – avis d’acompte ou d’impôt reçus en 2019

(1) Article 76 de la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016.

Par ailleurs, le solde est immédiatement exigible si tout ou partie d’un acompte n’a pas été versé dans les délais prévus.

Si les acomptes déjà versés sont supérieurs à l’impôt dû, le surplus des paiements effectués est remboursé au contribuable.

● Par ailleurs, sur option du contribuable, le paiement de l’impôt sur le revenu peut s’effectuer sur une base mensuelle, selon les modalités définies par les articles 1681 A à 1681 E du CGI. L’option pour le prélèvement mensuel automatique est ouverte à tout contribuable. Les prélèvements sont effectués à l’initiative de l’administration fiscale, sur un compte ouvert au nom du contribuable (ou de l’un des époux ou partenaire d’un pacs, ou d’un compte joint). Bien évidemment, les contribuables ayant opté pour le prélèvement mensuel ne sont plus assujettis au versement des tiers provisionnels.

Selon les données figurant dans le rapport d’activité de la DGFiP, le taux de paiement de l’impôt par mensualisation s’établissait à 58,2 % en 2015, contre 53,1 % en 2013.

Les prélèvements mensuels sont effectués sur la base de l’impôt sur le revenu acquitté l’année précédente (96) ; chacune des dix mensualités, effectuées de janvier à octobre, est égale au dixième de cet impôt. Les prélèvements mensuels sont effectués le 15 de chaque mois.

De la même façon que pour l’acompte, le contribuable peut moduler, à la hausse comme à la baisse, le montant de ses prélèvements, ou les suspendre, en application de l’article 1681 B, comme vu supra.

La différence entre l’impôt mis en recouvrement dans le cadre de l’avis d’imposition à l’été N + 1, et la base de calcul des dix acomptes mensuels déterminés en début d’année constitue le solde de l’impôt.

Les modalités de recouvrement du solde sont définies par l’article 1681 C : si l’impôt est supérieur à la base de référence, le solde fait normalement l’objet d’une ou deux mensualités supplémentaires :

– s’il est inférieur ou égal à l’une des dix premières mensualités, le solde est prélevé en novembre ;

– s’il est supérieur, il est prélevé en novembre pour un montant égal à une des dix premières mensualités, et le complément est prélevé en décembre ; dans le cas où l’échéance de décembre serait supérieure au double d’une mensualité, le solde à payer est étalé sur les trois derniers mois de l’année.

Si l’impôt est égal à la base de référence (c’est-à-dire qu’il n’a ni augmenté ni baissé par rapport à l’année N − 1), les dix premières mensualités calculées en début d’année correspondent à l’impôt dû. Les prélèvements sont donc interrompus après encaissement de la dernière mensualité d’octobre.

Si l’impôt est inférieur à la base de référence, il est mis fin aux prélèvements dès qu’ils ont atteint le montant de l’impôt mis en recouvrement ; le trop-perçu éventuel est remboursé au contribuable.

2. Le recouvrement par voie de rôle des prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine et les revenus d’activité et de remplacement de source étrangère

Les prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine et sur les revenus d’activité et de remplacement de source étrangère sont liquidés par l’administration fiscale à partir des montants de revenus portés dans la déclaration des revenus. Ils sont recouvrés par voie de rôle selon les mêmes règles et concomitamment à l’impôt sur le revenu.

Figurent ainsi sur le même article de rôle que celui de l’impôt sur le revenu les impositions suivantes :

IMPOSITIONS FIGURANT SUR LE MÊME ARTICLE DE RÔLE QUE L’IMPÔT SUR LE REVENU

Nature de la contribution

Taux

Base d’application

Prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine et assimilés

Contribution sociale généralisée (CSG)

8,2 %

– Revenus fonciers

– Rentes viagères à titre onéreux : fraction imposable à l’impôt sur le revenu

– Revenus de capitaux mobiliers soumis à l’impôt sur le revenu et qui n’ont pas fait l’objet d’un prélèvement à la source des prélèvements sociaux

– Plus-values de cession de valeurs mobilières et gains divers avant application éventuelle des abattements pour durée de détention et de l’abattement fixe ; plus-values exonérées des « impatriés » ; plus-values en report d’imposition

– Gains de levée d’options et gains d’acquisition d’actions gratuites attribuées avant le 28 septembre 2012

– Revenus des professions non salariées (BA, BIC, BNC) qui ne font pas l’objet d’un prélèvement par les organismes sociaux (notamment BIC non professionnels et, en particulier, locations meublées non professionnelles)

– Plus-values à long terme des professions non salariées, taxées à 16 %

– Revenus d’origine indéterminée soumis à l’impôt sur le revenu en application des articles L. 66-1° et L. 69 du livre des procédures fiscales et des articles 168, 1649 A et 1649 quater A du CGI

– Revenus dont l’imposition est attribuée à la France par une convention internationale relative aux doubles impositions.

Contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS)

0,5 %

Prélèvement social

4,5 %

Contribution additionnelle « solidarité autonomie »

0,3 %

Prélèvement de solidarité

2 %

Contributions salariales

Contributions salariales

10 %

Gains de levée d’options sur titres attribuées à compter du 16 octobre 2007 et gains d’acquisition d’actions gratuites attribuées à compter du 16 octobre 2007 sur décision prise au plus tard le 7 août 2015

Contributions sociales sur les revenus d’activité et de remplacement

CSG

7,5 %

3,8 % ou 6,6 %

6,2 %

3,8 % ou 6,2 %

Revenus d’activité et de remplacement de source étrangère :

– salaires, revenus non salariaux, indemnités de préretraite

– pensions de retraite ou d’invalidité

– indemnités de maladie, maternité, accident du travail

– allocations de chômage

CRDS

0,5 %

CSG

7,5 %

Gains de levée d’options attribuées à compter du 28 septembre 2012 et gains d’acquisition d’actions gratuites attribuées à compter du 28 septembre 2012 sur décision prise au plus tard le 7 août 2015

CRDS

0,5 %

Contribution additionnelle solidarité autonomie (CASA)

0,3 %

Pensions de retraite et d’invalidité et indemnités de préretraite de source étrangère, soumises au taux normal de CSG.

Source : CGI, direction générale des finances publiques.

Depuis 2014, le montant des prélèvements sociaux mis en recouvrement et figurant sur l’avis d’imposition est pris en compte pour le calcul des tiers provisionnels et des mensualités dus par le contribuable au cours d’une année.

Depuis 2013, le solde de l’impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux est recouvré sur le même avis d’imposition et payé selon les mêmes modalités.

In fine, le montant que doit acquitter le contribuable figurant sur l’avis d’imposition commun à l’impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux est égal au montant total de l’impôt sur le revenu (diminué des réductions et crédits d’impôt), et des prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine et sur les revenus de source étrangère d’activité ou de remplacement, diminué du montant des acomptes ou mensualités versées.

B. LE DROIT PROPOSÉ

1. Le maintien de la déclaration des revenus, au printemps N + 1

● La mise en œuvre de la réforme du prélèvement à la source n’emporterait pas disparition de la déclaration de revenus par les contribuables. Comme l’indique l’évaluation préalable, « le geste citoyen de la déclaration par chaque foyer, lors de l’année N + 1, des revenus perçus au titre de l’année N sera maintenu conformément aux dispositions actuellement en vigueur, afin de régulariser à l’occasion du solde à compter de septembre de l’année N + 1, le paiement de l’impôt dû in fine au titre de l’année N ».

L’évaluation préalable précise que ce dispositif de régularisation a été adopté par la plupart des pays de l’OCDE (Allemagne, Royaume-Uni, Espagne, Italie, Danemark, Irlande, Belgique, Pays-Bas, États-Unis…).

Il est en effet indispensable que les foyers fiscaux procèdent à une déclaration de revenus afin de faire état de l’évolution de leur situation, par exemple en termes de charges de famille (naissance d’un enfant, fin du rattachement d’un enfant), de faire figurer les dépenses exposées ouvrant droit à des réductions et des crédits d’impôt, mais aussi de reporter leurs revenus et bénéfices qui ne sont pas connus par l’administration fiscale – sachant qu’à ce jour, grâce au rattachement aux contribuables des revenus perçus, par l’intermédiaire de leur numéro d’inscription au répertoire de l’INSEE (NIR), la grande majorité de ces revenus figurent dans la déclaration préremplie. L’évaluation préalable indique sur ce point que « la déclaration préremplie concerne près de 90 % des revenus » (97).

● L’alinéa 123 prévoit par ailleurs de compléter l’article 170 du CGI, qui définit les conditions de souscription de la déclaration des revenus : le contribuable devrait y faire figurer « le prélèvement prévu à l’article 204 A ».

En d’autres termes, sur la déclaration des revenus, devraient être reportés, outre les revenus et bénéfices du foyer fiscal et tous les autres éléments nécessaires au calcul de l’impôt, les sommes prélevées dans le cadre du prélèvement à la source, soit sous la forme de retenue à la source, soit sous la forme d’acompte.

De même que la plupart des revenus du foyer fiscal figurent déjà dans la déclaration préremplie, les prélèvements à la source effectués devraient être eux aussi préremplis dans la très grande majorité des cas. Toutefois, subsisteraient des cas où les contribuables devraient reporter les prélèvements qui ont été effectués sur leurs revenus, par exemple en cas d’échec d’identification du contribuable et donc de non-rattachement des sommes versées dans le cadre de la retenue à la source sur la base du taux par défaut (Cf. XV).

Tel serait également le cas pour les prélèvements à la source effectués sur les revenus perçus par des personnes rattachées à un foyer fiscal, lesquelles seraient soumises au taux par défaut : le rattachement au foyer fiscal ne se présumant pas, et n’étant connu que lors de la déclaration de revenus, il appartiendrait au foyer fiscal de faire figurer à la fois les revenus perçus par la personne rattachée et les sommes prélevées à la source, par l’application du taux par défaut.

Il s’agirait d’une formalité supplémentaire reposant sur les contribuables, la sanction en cas d’oubli étant très concrète, à savoir la non-prise en compte de sommes déjà acquittées et donc, le cas échéant, le paiement de l’impôt alors que le contribuable n’est pas imposable.

Néanmoins, l’évaluation préalable précise que, « si le montant de la retenue à la source porté par l’administration fiscale sur la déclaration de revenus est inférieur au montant prélevé et n’a fait l’objet d’aucune demande de rectification lors du dépôt de cette déclaration, la rectification et la restitution du trop payé pourront toujours être obtenues ultérieurement au moyen d’une réclamation contentieuse ».

Elle relève que « si le montant de retenue à la source porté sur la déclaration de revenus perçus lors de l’année N est supérieur à celui réellement supporté par le contribuable, ce dernier devra également signaler l’erreur afin de ne pas bénéficier du rattachement d’un paiement indu. À défaut, l’éventuelle insuffisance d’impôt payé lui sera réclamée dans le cadre d’une procédure de contrôle et pourra être assortie de pénalités », ce qui apparaît pour le moins sévère alors que l’erreur viendrait de l’administration, et que le contribuable pourrait ne pas se rendre compte de celle-ci.

2. La suppression des acomptes et de la mensualisation

● Parallèlement à la mise en place du prélèvement à la source, les dispositions actuelles relatives aux modalités de recouvrement de l’impôt sur le revenu seraient supprimées :

– l’article 1664 du CGI, définissant le régime des acomptes – ou tiers provisionnels – serait abrogé (alinéa 148) ;

– les articles 1681 A à 1681 E du même code, portant sur le paiement mensuel de l’impôt, seraient également abrogés (alinéa 176).

● Le prélèvement à la source se traduirait par un étalement plus important de l’impôt dû, puisque les retenues à la source et les acomptes seraient réalisés sur une base mensuelle, alors que dans le cadre de la mensualisation ou des acomptes provisionnels, les prélèvements interviennent par dixième, de janvier à octobre, ou par tiers, de février à septembre.

En prenant pour hypothèse que l’impôt dû est constant d’une année sur l’autre, en s’établissant à 120, qu’il ne porte que sur des revenus se trouvant dans le champ du PAS, et que le foyer fiscal ne bénéficie d’aucune réduction d’impôt, la chronique des versements serait la suivante :

Mois

Janv.

Fév.

Mars

Avril

Mai

Juin

Juillet

Août

Sept

Oct.

Nov.

Déc.

Droit existant

Acomptes

 

40

   

40

     

40

     

Sommes cumulées

 

40

   

80

     

120

     

Mensualités

12

12

12

12

12

12

12

12

12

12

   

Sommes cumulées

12

24

36

48

60

72

84

96

108

120

   

Droit proposé

Prélèvements à la source

10

10

10

10

10

10

10

10

10

10

10

10

Sommes cumulées

10

20

30

40

50

60

70

80

90

100

110

120

Note de lecture : les acomptes et mensualités en année N sont effectués au titre de l’impôt dû sur les revenus N − 1, tandis que les prélèvements à la source en année N sont opérés au titre de l’impôt dû sur les revenus N.

Ainsi, comme évoqué supra, les prélèvements opérés mensuellement dans le cadre de la réforme seraient moins élevés de 16,66 % que les mensualités acquittées aujourd’hui (soit un versement de 10 au lieu de 12). À la fin du mois de septembre, le foyer fiscal aurait acquitté une somme égale à 120, dans le cadre des tiers provisionnels, à 108 dans le cadre de la mensualisation, et à 90 dans le cadre du prélèvement à la source.

De façon plus marginale, l’évaluation préalable souligne que ce gain de trésorerie serait accentué par le fait que les mensualités sont aujourd’hui appelées le 15 de chaque mois, alors que la retenue à la source serait synchronisée avec le versement du salaire, qui intervient en général en fin de mois, voire au début du mois suivant. En revanche, dans le cadre de l’acompte, il n’y aurait pas de changement, puisque celui-ci devrait être versé au plus tard le 15 de chaque mois.

3. Les modalités de recouvrement du solde de l’impôt

Les modalités de recouvrement du solde de l’impôt sur le revenu figurent à l’article 1664 s’agissant du prélèvement par acompte, et à l’article 1681 C du CGI s’agissant des prélèvements mensuels. Ces deux articles étant abrogés, le 12° du B du I introduit un nouvel article 1663 B relatif au recouvrement du solde de l’impôt sur le revenu (alinéas 133 à 138).

Ces modalités de recouvrement ne connaissent toutefois pas de modifications substantielles, à l’exception de la mise en place d’un étalement systématique du versement du solde dès lors qu’il excède 300 euros : il s’agit de tenir compte de l’existence de prélèvements à la source opérés concomitamment sur les revenus du contribuable, à la différence du droit en vigueur.

● Aux termes du 1 de l’article 1663 B nouveau du CGI, le solde de l’impôt sur le revenu ainsi que des autres impositions figurant sur le même article de rôle – à savoir, comme vu supra, les prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine et sur les revenus d’activité et de remplacement de source étrangère –, serait recouvré dans les conditions définies par l’article 1663, qui définit les conditions d’exigibilité des impôts directs, et par l’article 1730, qui prévoit une majoration de 10 % en cas de retard de paiement des sommes dues.

Le solde serait calculé après imputation des réductions et crédits d’impôt, des prélèvements, ainsi que des retenues à la source et acomptes : s’agissant de l’impôt dû au titre de l’année N et dont le solde est acquitté en N + 1, ce ne seraient plus les tiers provisionnels et mensualités versés au cours de l’année N + 1 qui seraient défalqués de l’impôt dû, mais les sommes prélevées à la source tout au long de l’année N.

Il convient de préciser que le seuil de 61 euros, prévu par le 1 bis de l’article 1657 du CGI, en deçà duquel les impositions initiales établies au titre de l’impôt sur le revenu, avant imputation de tout crédit d’impôt, ne sont pas mises en recouvrement, n’est pas modifié par la présente réforme.

● En application de l’article 1663 du même code, le solde de l’impôt dû est exigible trente jours après la date de mise en recouvrement du rôle. Aux termes du 2 de l’article 1663 B (alinéa 134 du présent article), à défaut d’option contraire, le solde serait prélevé par l’administration fiscale dans les conditions de l’article 1680 A – celui-ci reprend les dispositions actuelles relatives au prélèvement effectué par l’administration sur le compte du contribuable, telles que prévues dans le cadre de la mensualisation par l’article 1681 D, qui est abrogé.

Cette disposition s’inscrit dans la lignée de la réforme engagée par la loi de finances pour 2016 en faveur de la dématérialisation des moyens de paiement, puisque le prélèvement sur le compte du contribuable constituerait le mode de paiement par défaut. Le contribuable pourrait néanmoins, s’il le souhaite, opter pour un autre mode de paiement. Mais en tout état de cause, à compter de 2019, il aura l’obligation de s’acquitter du solde de son impôt par un mode de paiement dématérialisé dès lors que la somme due excédera 300 euros, soit, si ce n’est pas le prélèvement à l’échéance, le télérèglement.

L’évaluation préalable indique que, lors de la déclaration des revenus de 2016, sera effectuée une collecte des coordonnées bancaires de l’ensemble des contribuables (ou la simple confirmation de ces coordonnées lorsque l’administration en dispose déjà), afin de préparer cette généralisation du prélèvement automatique.

● Par dérogation aux dispositions de l’article 1663, le 3 de l’article 1663 B (alinéa 135) dispose que, dès lors que son montant excède 300 euros, le solde serait recouvré par prélèvements mensuels d’égal montant à partir du deuxième mois qui suit la mise en recouvrement du rôle – le dernier prélèvement intervenant en décembre. Ainsi, lorsque la mise en recouvrement du rôle interviendra en juillet, le solde supérieur à 300 euros serait acquitté en quatre versements d’égal montant entre septembre et décembre. S’il intervient en août, le solde supérieur à 300 euros serait acquitté en trois versements entre octobre et décembre.

Un dispositif d’étalement sur le même principe existe, comme vu supra, dans le cadre du paiement mensuel de l’impôt, dès lors que l’échéance de décembre serait supérieure au double d’une mensualité.

● Enfin, aux termes du 4 de l’article 1663 B (alinéa 138), il est précisé que cet étalement du solde ne serait pas applicable aux impositions mises en recouvrement après le 30 septembre, par exemple en raison de retards dans le dépôt des déclarations d’impôt ou de délais dans leur traitement lorsqu’elles présenteraient des spécificités. Il ne serait pas non plus applicable lorsque les impositions résulteraient de la mise en œuvre d’une rectification ou d’une procédure d’imposition d’office, et lorsque les impositions seraient exigibles dès la mise en recouvrement du rôle – notamment, aux termes de l’article 1663, en cas de décès du contribuable ou de cessation de l’exercice d’une profession non commerciale.

4. Diverses coordinations résultant de la réforme

La suppression des dispositifs de tiers provisionnels et de prélèvements mensuels emporte plusieurs mesures de coordination et d’adaptation, figurant aux alinéas 177 à 207.

a. La définition des modalités de la mensualisation de la taxe d’habitation, de la taxe foncière et de la contribution à l’audiovisuel public

Dans le droit en vigueur, les articles 1681 ter, 1681 ter A et 1681 ter B prévoient la possibilité d’acquitter la taxe d’habitation, la taxe foncière et la contribution à l’audiovisuel public (CAP) par des prélèvements mensuels, dans les conditions prévues par l’article 1681 A pour l’impôt sur le revenu (98).

Selon le rapport d’activité de la DGFiP de 2015, le taux de mensualisation de la taxe d’habitation – et donc corrélativement, de la CAP – est de l’ordre de 35 % en 2015 ; ce taux s’établit à 30 % pour la taxe foncière.

Pour tirer les conséquences de la suppression de l’article 1681 A, le 20° du B du I (alinéas 177 à 189) procède à une nouvelle rédaction de l’article 1681 ter, qui définit désormais les modalités de mensualisation à la fois de la taxe d’habitation, de la taxe foncière et de la CAP, en reprenant les dispositions applicables prévues par les articles 1681 A à 1681 C, sans modification de fond. Parallèlement, les articles 1681 ter A (pour la taxe foncière) et 1681 ter B (pour la CAP) sont abrogés (21° du B, soit l’alinéa 190).

Le 1 de l’article 1681 ter A, dans la rédaction proposée par le présent article, pose le principe selon lequel le contribuable peut opter pour la mensualisation de sa taxe d’habitation et de sa taxe foncière, donnant lieu à des prélèvements mensuels sur un compte ouvert par lui – l’option pour la mensualisation de la taxe d’habitation emportant celle de la CAP. Les deux premiers alinéas du 2 de l’article 1681 ter reprennent la majeure partie des dispositions de l’article 1681 B, tandis que les cinq alinéas suivants correspondent pour l’essentiel aux dispositions de l’article 1681 C.

Enfin, le a du 26° du B du I (alinéa 203) modifie l’article 1724 quinquies, qui prévoit les conditions de perte du bénéfice de l’option pour le paiement mensuel de l’impôt sur le revenu et de la cotisation foncière des entreprises en cas de deux retards de paiement au cours de la même année : il s’agit de tirer les conséquences de la suppression de l’article 1681 A et d’étendre l’application de ses dispositions à la mensualisation de la taxe d’habitation, de la CAP et de la taxe foncière.

b. La suppression de la mensualisation du paiement de l’ISF

Le 25° du B du I (alinéa 201) met fin à la possibilité de s’acquitter de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) par mensualités en supprimant le deuxième alinéa de l’article 1723 ter-00 A – ce dernier renvoyant à l’article 1681 A, abrogé par le présent article.

Cette possibilité, introduite par la première loi de finances rectificative pour 2011 (99), ne concerne que les redevables de l’ISF dont le patrimoine a une valeur nette taxable inférieure à 2,57 millions d’euros, et pour lesquels l’ISF est recouvré par voie de rôle. Selon les informations recueillies auprès de l’administration fiscale, elle n’a jamais été mise en œuvre en pratique.

Enfin, doivent être mentionnées plusieurs autres coordinations. La suppression de l’article 1681 D du CGI a conduit à introduire un nouvel article 1680 A relatif au prélèvement effectué par l’administration fiscale sur un compte : le a du 22° du B du I (alinéa 192), le a, le deuxième alinéa du b et le c du 23° du B du I (alinéas 195, 198 et 199) modifient en conséquence l’article 1681 quater A. Ce dernier porte sur le paiement de la cotisation foncière des entreprises et des taxes additionnelles, et l’article 1681 sexies, relatif au paiement des impôts directs par virement ou par prélèvements.

La suppression de l’article 1664 relatif aux acomptes provisionnels se traduit également par plusieurs mesures de coordination, figurant au premier alinéa du b du 23°, au 24° et au b du 26° du B du I (alinéas 197, 200 et 204).

L’article 1724 quinquies précité est complété par un III (alinéa 206), qui dispose que, dès lors que l’un des prélèvements mensuels prévu pour le versement du solde de l’impôt sur le revenu, au 3 de l’article 1663 B, n’est pas opéré, le contribuable est soumis au 4 de ce même article 1663 B – ce qui semble signifier que le solde deviendrait immédiatement exigible et qu’il ne pourrait faire l’objet de l’étalement prévu par le 3.

Enfin, le b du 22° du B (alinéa 193) et le d du 26° du B du I (alinéa 207) viennent transformer le renvoi à des décrets en Conseil d’État en renvoi à des décrets simples, pour la définition des modalités d’application respectivement des articles 1681 quater A et 1724 quinquies.

C. LE RECOUVREMENT IMMÉDIAT DU SOLDE EN CAS D’APPLICATION DE LA MAJORATION PRÉVUE À L’ARTICLE 1729 G

Aux termes du 1 de l’article 1663 du CGI, les impôts directs, ainsi que les produits et taxes assimilés, sont exigibles trente jours après la date de la mise en recouvrement du rôle (100).

Les deux derniers alinéas du 2 de cet article prévoient également l’exigibilité immédiate :

– de l’imposition établie dans le cadre d’une cessation d’activité, notamment en application des articles 201 et 202 du CGI (Cf. supra, VI, B) ;

– de certains droits et pénalités :

• taxe sur les salaires non versée, en application de l’article 1679 bis du CGI ;

• amendes prévues à l’article 1729 B du CGI, en cas de défaut de production dans les délais prescrits de certains documents devant être remis à l’administration fiscale ;

• majoration de 5 % en cas de retard de paiement de certains impôts, au titre de l’article 1731 du CGI.

Le 10° du B du I du présent article (alinéas 129 et 130) modifie cet article 1663.

En application de l’alinéa 129 du présent article, les deux derniers alinéas de l’article 1663 deviennent un 3, ce qui a pour effet de structurer de façon plus cohérente l’article, dont le 2 porterait désormais uniquement sur le déménagement en dehors du ressort du service chargé du recouvrement de l’impôt.

L’alinéa 130, lui, complète l’article 1663 d’un 4 qui ajoute à la liste des sommes immédiatement exigibles, par dérogation au 1 de cet article, le solde de l’impôt dû lorsque son contribuable a été sanctionné pour défaut de paiement ou modulation indue ou excessive.

Du fait de cette exigibilité immédiate du solde, le contribuable ne pourrait faire usage de la possibilité d’étalement du solde en plusieurs versements lorsque ce solde excède 300 euros (possibilité prévue au 3 du nouvel article 1663 B du CGI 
– alinéa 135 du présent article –, ainsi que le prévoit le 4 du même article 
– alinéa 138 du présent article).

XI. LES MODALITÉS DE VERSEMENT DE L’ACOMPTE

Texte du projet de loi (alinéas 139 à 150, 164 à 169, 171 à 175, 119 à 122, 239 et 240) :

MODALITÉS DE VERSEMENT DE L’ACOMPTE

(139) « Art. 1663 C. – 1. L’acompte calculé par l’administration fiscale dans les conditions prévues à l’article 204 E est versé par douzième au plus tard le 15 de chaque mois de l’année selon les modalités prévues à l’article 1680 A.

(140) « 2. Sur option du contribuable, l’acompte est versé par quart au plus tard les 15 février, 15 mai, 15 août et 15 novembre.

(141) « L’option est exercée auprès de l’administration fiscale, dans les conditions prévues à l’article 204 N, au plus tard le 1er octobre de l’année qui précède celle au cours de laquelle l’option s’applique. Elle est tacitement reconduite, sauf dénonciation par le contribuable dans le même délai que celui de l’exercice de l’option.

(142) « 3. Lorsqu’il est fait application des articles 204 J, 204 K ou 204 M, le montant de l’acompte à verser ou restant à verser est réparti sur le nombre de mois ou de trimestres restant à courir sur l’année civile, selon que le contribuable opte ou non pour un paiement trimestriel.

(143) « 4. Les versements mentionnés aux 1 et 2 sont arrondis à l’euro le plus proche. La fraction d’euro égale à 0,50 est comptée pour 1.

ÉCHELONNEMENT INFRA-ANNUEL

(144) « 5. Par dérogation aux 1 et 2, au cours d’une même année civile et à hauteur de la part d’acompte correspondant aux bénéfices industriels et commerciaux, aux bénéfices agricoles et aux bénéfices non commerciaux, le contribuable peut demander le report de paiement d’au maximum trois échéances sur l’échéance suivante en cas de paiement mensuel ou d’une échéance sur la suivante en cas d’option pour le paiement trimestriel. Cette demande est prise en compte pour l’échéance qui suit le mois de la demande. Elle ne peut conduire à reporter l’année suivante une partie des versements dus lors de l’année civile en cours.

MODALITÉS DE VERSEMENT

(145) « 6. Les versements inférieurs à 5 € ne sont pas dus.

(146) « 7. À défaut de paiement, le recouvrement de l’acompte est assuré et poursuivi selon les mêmes modalités et sous les mêmes garanties et sûretés que l’impôt sur le revenu. Le rôle d’impôt sur le revenu servant de base au calcul de l’acompte vaut titre exécutoire en vue de l’exercice des poursuites consécutives à son non-paiement.

(147) « 8. La succession de tout contribuable célibataire, divorcé ou veuf est dispensée du versement de l’acompte. » ;

(148) 13° L’article 1664 est abrogé ;

(149) 14° L’article 1665 est remplacé par les dispositions suivantes :

(150) « Art. 1665. – Un décret fixe les modalités d’application des articles 1663 B et 1663 C. » ;

[…]

PAIEMENT PAR LE COLLECTEUR

[…]

(164) 16° À l’article 1679 quinquies :

(165) a) Au troisième alinéa, les mots : « et il est fait application des dispositions du 2 et du 3 de l’article 1664 pour son recouvrement et celui du solde de la taxe » sont supprimés ;

(166) b) Le cinquième alinéa est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :

(167) « À défaut de paiement volontaire, le recouvrement des acomptes exigibles est assuré et poursuivi dans les conditions fixées pour les impôts directs par le titre IV du livre des procédures fiscales et assorti des garanties et sûretés prévues par le code général des impôts.

(168) « Le versement du solde est exigible à partir du 1er décembre. Le solde de l’impôt est recouvré par voie de rôles dans les conditions fixées par l’article 1663.

(169) « Toutefois, par dérogation aux règles de l’article 1663, l’impôt restant dû est exigible en totalité dès la mise en recouvrement des rôles, si tout ou partie d’un acompte n’a pas été versé le 15 du mois suivant celui au cours duquel il est devenu exigible. » ;

[…]

COMPTES SUR LESQUELS L’ADMINISTRATION FISCALE PRÉLÈVE
L’ACOMPTE ET LE SOLDE

(171) 18° Après l’article 1680, il est inséré un article 1680 A ainsi rédigé :

(172) « Art. 1680 A. – Les prélèvements opérés à l’initiative de l’administration fiscale sont effectués sur un compte ouvert par le contribuable dans un établissement habilité à cet effet qui peut être :

(173) « 1° Un compte de dépôt dans un établissement de crédit établi en France ou dans l’espace unique de paiement en euros, une caisse de crédit agricole régie par le livre V du code rural et de la pêche maritime, une caisse de crédit mutuel, une caisse de crédit municipal ou un centre de chèques postaux ;

(174) « 2° Un livret A, sous réserve que l’établissement teneur du livret le prévoie dans ses conditions générales de commercialisation, ou un livret A ou un compte spécial sur livret du Crédit mutuel relevant du 2 du I de l’article 146 de la loi n° 2008776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie.

(175) « Ces opérations n’entraînent aucun frais pour le contribuable. » ;

[…]

OBLIGATIONS DÉCLARATIVES DU TIERS DÉCLARANT

[…]

(239) C. – Le livre des procédures fiscales est ainsi modifié :

RECOUVREMENT FORCÉ DE L’ACOMPTE

(240) 1° Au 1 de l’article L. 257-0 A, après les mots : « À défaut de paiement » sont insérés les mots : « de l’acompte mentionné à l’article 1663 C du code général des impôts ou » ;

*

* *

A. LE VERSEMENT MENSUEL DE L’ACOMPTE ET LES POSSIBILITÉS D’ÉCHELONNEMENT INFRA-ANNUEL

Les alinéas 139 à 143 prévoient les modalités de versement mensuel de l’acompte de PAS calculé par l’administration dans les conditions explicitées précédemment.

1. Le droit en vigueur

a. Le paiement des mensualités en cas d’option pour la mensualisation

En cas d’option pour la mensualisation, l’article 1681 B du CGI précise que le prélèvement est effectué chaque mois entre janvier et octobre (donc sur dix mois) sur le compte du contribuable.

Comme indiqué précédemment, s’il estime que les prélèvements mensuels effectués ont atteint le montant des cotisations dont il serait finalement redevable, le contribuable peut demander la suspension des prélèvements suivants.

Le solde de l’impôt est prélevé en novembre à concurrence de l’une des mensualités et le solde définitif éventuel en décembre.

b. Les tiers provisionnels

En l’absence d’option pour le prélèvement mensuel, l’article 1664 du CGI prévoit que les tiers provisionnels doivent être acquittés le 31 janvier et le 30 avril de l’année suivant celle de la réalisation des revenus. Le solde de l’IR est perçu en septembre.

c. Les facultés d’échelonnement

Outre les facultés de modulation des mensualités ou des tiers, déjà exposées précédemment, le paiement de l’IR peut faire l’objet d’un étalement dans certaines circonstances :

– conformément à l’article 357 H de l’annexe III du CGI, un étalement de droit est accordé lorsqu’une baisse des revenus salariaux d’au moins 30 % est constatée par l’administration fiscale entre les revenus perçus au titre du mois où est formulée la demande et un montant de référence égal à la moyenne de ces mêmes revenus perçus par le foyer fiscal au cours des trois derniers mois. À l’appui de la demande, le redevable doit fournir les pièces justifiant le montant des revenus. En cas de réponse positive de l’administration fiscale, l’étalement court à dater du mois de la demande et jusqu’au 31 mars de l’année suivante. L’administration fixe avec le redevable, par contrat, un échéancier de paiement ;

– en cas de baisse de revenus inférieur à 30 %, une demande d’étalement peut être sollicitée ; l’octroi de cette faculté est à la discrétion de l’administration.

2. Le droit proposé

a. Les modalités de versement de l’acompte

Les alinéas 139 à 143 prévoient, pour le cas spécifique de l’acompte, que le versement est opéré au plus tard le 15 de chaque mois de l’année courante.

Sur option du contribuable, l’acompte peut être prélevé par quatre au plus tard les 15 février, 15 mai, 15 août et 15 novembre de l’année courante.

L’option doit être exercée au plus tard le 1er octobre de l’année qui précède celle au cours de laquelle l’option serait amenée à s’appliquer. Elle est ensuite tacitement reconduite, sauf dénonciation par le contribuable dans les mêmes conditions.

En cas de modulation de l’acompte ou de versement d’un acompte spontané en début d’activité, le montant de l’acompte à verser ou restant à verser est réparti sur le nombre de mois ou de trimestres restant à courir.

b. L’échelonnement infra-annuel

L’alinéa 144 prévoit en outre une faculté d’échelonnement infra-annuelle de droit spécifiquement applicable aux acomptes liés aux BIC, BNC et BA.

Sur simple demande, le redevable peut bénéficier du report d’au maximum trois échéances sur l’échéance suivante (en cas de paiement mensuel) et d’une échéance sur l’échéance suivante (en cas d’option pour le paiement trimestriel).

Cette demande est prise en compte par l’administration fiscale le mois suivant la formulation de la demande. Toutefois, elle ne peut conduire à reporter le paiement d’une échéance à l’année civile suivante.

c. Les modalités de versement des acomptes

Les alinéas 145 à 150 précisent en outre que les versements inférieurs à 5 euros ne sont pas dus, ce qui correspond, mensuellement, à l’absence de mise en recouvrement des cotisations d’impôt inférieures à 61 euros prévue par le 1 bis de l’article 1657 du CGI en vigueur (non modifié par le présent article).

L’alinéa 148 procède à la suppression de l’article 1664 du CGI, qui prévoit actuellement le dispositif applicable en matière du paiement de l’IR par tiers provisionnel.

B. L’ACOMPTE ET LE SOLDE SERAIENT PRÉLEVÉS SUR LE COMPTE DU CONTRIBUABLE

Le 18° du B du I du présent article (alinéas 171 à 175) introduit dans le CGI un nouvel article 1680 A relatif aux modalités de prélèvement de l’acompte contemporain et du solde d’impôt dû.

À la différence de la retenue à la source, qui est versée au Trésor par le collecteur de la retenue (par exemple l’employeur), l’acompte contemporain ne transite pas par un tiers débiteur mais est directement acquitté par le contribuable.

Le présent article abroge, à son alinéa 176, les articles 1681 A à 1681 E du CGI, constituant la division « Paiement mensuel de l’impôt sur le revenu » au sein du III de la section I du chapitre Ier du livre II de ce code, du fait des modifications apportées aux règles de recouvrement par le prélèvement à la source.

S’agissant de l’acompte contemporain, le projet de réforme reprend, pour l’essentiel, les dispositions de l’article 1681 D qui détermine le compte sur lequel les prélèvements mensuels d’impôt sur le revenu sont opérés par l’administration fiscale.

Le nouvel article 1680 A du CGI ne présente que deux modifications par rapport à la rédaction de l’article 1681 D :

– la référence aux prélèvements mensuels est supprimée et remplacée par la mention selon laquelle tous les prélèvements opérés à l’initiative de l’administration sont effectués sur un compte ouvert par le contribuable. Ce changement est nécessaire dans la mesure où :

• le paiement de l’impôt par prélèvements mensuels en vigueur serait supprimé avec le prélèvement à la source ;

• le paiement de l’acompte contemporain porterait sur douze mensualités, au lieu de dix dans l’état du droit ;

• il pourrait également, sur option du contribuable, être trimestriel et non mensuel ;

• enfin, le contribuable aurait la possibilité de demander des reports infra-annuels de versement ;

– il est précisé que l’établissement dans lequel le contribuable a ouvert son compte doit faire l’objet d’une habilitation à cet effet.

Les comptes susceptibles d’être prélevés au titre de l’acompte, en revanche, ne sont pas modifiés, ce qui constitue une facilité bienvenue pour les contribuables qui n’auraient ainsi pas à réaliser des transferts de comptes, de nouvelles ouvertures ou d’autres démarches auprès de leur établissement.

Ces comptes peuvent être :

– un compte de dépôt ouvert dans :

• un établissement de crédit établi en France ou dans le SEPA (Single Euro Payments Area, ou espace unique de paiement en euros (101)) ;

• une caisse de crédit agricole (102) ;

• une caisse de crédit mutuel ;

• une caisse de crédit municipal ;

• un centre de chèques postaux ;

– un livret A, si l’établissement teneur du livret prévoie la possibilité du prélèvement dans ses conditions générales de commercialisation ;

– un livret A ou un compte spécial sur livret du Crédit mutuel, s’il a été ouvert avant le 1er janvier 2009, en vertu du 2 du I de l’article 146 de la loi de modernisation de l’économie (103).

Ne modifiant pas l’architecture d’ensemble des modalités de prélèvements, le nouvel article 1680 A prévoit, à l’image de l’article 1681 D, que les opérations liées aux prélèvements n’entraînent aucun frais pour le contribuable.

En conséquence, le nouvel article 1680 A reprend les règles en vigueur en les adaptant aux spécificités de la retenue à la source.

Le contribuable devrait mentionner sur sa déclaration de revenus ses coordonnées bancaires afin de rendre possible le prélèvement de l’acompte contemporain, étant précisé que les coordonnées bancaires déjà connues de l’administration fiscale seraient préremplies sur la déclaration (104).

C. LE RECOUVREMENT FORCÉ DE L’ACOMPTE

Le 1° du C du I du présent article (alinéa 240) tire les conséquences de la mise en œuvre du prélèvement à la source en matière de recouvrement forcé de l’impôt.

L’article L. 257-0 A du livre des procédures fiscales définit les modalités de recouvrement forcé, lorsqu’elles n’ont pas été acquittées dans les délais prescrits :

– des sommes mentionnées sur l’avis d’imposition ;

– des sommes mentionnées sur l’avis de mise en recouvrement.

Le contribuable peut émettre une réclamation assortie d’une demande de sursis de paiement, dans les conditions prévues à l’article L. 277 du livre des procédures fiscales, s’il conteste de bien-fondé ou le montant de l’impôt mis à sa charge.

S’il ne le fait pas, le comptable public lui adresse une mise en demeure de payer avant la notification du premier acte de poursuite.

Trente jours après la notification de la mise en demeure, et en l’absence de paiement ou d’une demande de sursis de paiement, le comptable peut engager des poursuites. Les frais de poursuites sont à la charge du contribuable, en application de l’article 1912 du CGI.

L’alinéa 240 du présent article ajoute l’acompte contemporain aux sommes dont le défaut de paiement peut entraîner la mise en œuvre de la procédure précédemment décrite.

Cette insertion est nécessaire dans la mesure où l’acompte contemporain diffère des modalités d’imposition actuelles, en vertu desquelles les tiers provisionnels ou les mensualités et le solde de l’impôt dû au titre d’une année N sont acquittés la même année civile, en N + 1. Dans le régime du prélèvement à la source, en revanche, l’acompte serait acquitté en année N et le solde en septembre N + 1.

L’absence d’extension au défaut de paiement de l’acompte des poursuites dans le cadre du recouvrement forcé pourrait ainsi conduire à infliger au Trésor un préjudice de trésorerie et budgétaire en le privant de recettes fiscales qui lui sont dues jusqu’au recouvrement du solde afférent à ces recettes.

Ces poursuites ne sont pas exclusives de la majoration de 10 % en cas de retard prévue au 1 de l’article 1729 G nouveau du CGI (Cf. infra, XIII).

XII. LE PAIEMENT DE LA RETENUE À LA SOURCE PAR LES COLLECTEURS

Texte du projet de loi (alinéas 151 à 163 et 247 à 253) :

PAIEMENT PAR LE COLLECTEUR

(151) 15° L’article 1671 est ainsi rétabli :

(152) « Art. 1671. – 1. La retenue à la source prévue au 1° du 2 de l’article 204 A est effectuée par le débiteur lors du paiement des sommes et avantages mentionnés à l’article 204 F.

(153) « Lorsque le débiteur de la retenue à la source n’est pas établi en France, il est tenu de faire accréditer auprès de l’administration fiscale un représentant établi en France, qui s’engage à remplir les formalités lui incombant et, le cas échéant, à acquitter les prélèvements à sa place.

(154) « L’obligation de désigner un représentant fiscal ne s’applique pas au débiteur établi dans un autre État membre de l’Union européenne ou dans un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales ainsi qu’une convention d’assistance mutuelle en matière de recouvrement de l’impôt.

(155) « 2. Le redevable de la retenue à la source prévue au 1° du 2 de l’article 204 A applique le taux calculé par l’administration fiscale, au plus tard le deuxième mois suivant sa transmission par l’administration. À défaut de taux transmis par l’administration, le redevable applique le taux mentionné au 2 de l’article 204 H.

(156) « Les sommes prélevées en application de la retenue à la source prévue au 1° du 2 de l’article 204 A sont déclarées dans les conditions prévues à l’article 87 A et versées au comptable public compétent désigné par arrêté du ministre chargé du budget.

(157) « Ce versement intervient à une date fixée par décret le mois suivant celui au cours duquel a eu lieu le prélèvement ou, si le débiteur est un employeur dont la paie est effectuée postérieurement à la période mensuelle d’emploi, le mois au cours duquel a eu lieu le prélèvement.

(158) « Par dérogation à l’alinéa précédent, l’employeur dont l’effectif est de moins de onze salariés peut opter, dans des conditions fixées par décret, pour un versement au plus tard le mois suivant le trimestre au cours duquel ont eu lieu les prélèvements.

(159) « 3. Par dérogation au 2, lorsque les employeurs ont recours aux dispositifs simplifiés prévus à l’article L. 13356 du code de la sécurité sociale, la retenue à la source est reversée au comptable public par l’intermédiaire de l’organisme mentionné à l’article L. 133510 du même code dans les conditions prévues par ces articles.

(160) « 4. Sauf dans les cas mentionnés à l’article L. 13356 du code de la sécurité sociale, la retenue à la source prévue au 2 est acquittée par télérèglement.

(161) « 5. La retenue à la source est recouvrée et contrôlée selon les mêmes modalités et sous les mêmes garanties et sûretés que la taxe sur la valeur ajoutée.

(162) « Les réclamations du débiteur ou du bénéficiaire des revenus sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à cette taxe, selon des modalités précisées par décret en Conseil d’État.

(163) « Par dérogation au premier alinéa, lorsque la retenue à la source prévue au 2 a été avancée par les institutions de garantie mentionnées à l’article L. 325314 du code du travail, elle est garantie par un privilège de même rang que celui des revenus sur lesquels elle a été précomptée. » ;

[…]

COORDINATION AVEC LE CODE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

[…]

(247) 2° Au premier alinéa de l’article L. 133‑5‑6, après le mot : « sociales » sont insérés les mots : « ainsi que de la retenue à la source prévue à l’article 204 A du code général des impôts » ;

(248) 3° L’article L. 133‑5‑7 est complété par un 3° ainsi rédigé :

(249) « 3° Déclarer et reverser les montants donnant lieu à la retenue à la source prévue à l’article 204 A du code général des impôts » ;

(250) 4° A l’article L. 133‑5‑8, les mots : « et contributions sociales » sont remplacés par les mots : «, contributions sociales et de la retenue à la source » et les mots : « et contributions » sont remplacés par les mots : «, contributions et de la retenue à la source » ;

(251) 5° A l’article L. 133‑5‑10, les mots : « et contributions » sont remplacés par les mots : «, contributions et la retenue à la source » ;

(252) 6° L’article L. 133‑5‑11 est remplacé par les dispositions suivantes :

(253) « Art. L. 133‑5‑11. - Les modalités de transmission des déclarations aux régimes et à l’administration fiscale, pour le compte desquels sont recouvrées les cotisations, contributions et la retenue à la source mentionnées à l’article L. 133‑5‑10 ainsi que les modalités des versements correspondants font l’objet de conventions entre les organismes gérant ces régimes, ainsi que d’une convention avec l’administration fiscale. » ;

[…]

*

* *

A. LE CHAMP DES COLLECTEURS DE LA RETENUE À LA SOURCE

● Compte tenu des revenus se trouvant dans le champ de la retenue à la source prévue par le 1° du 2 de l’article 204 A nouveau du CGI, les collecteurs seraient les suivants :

– les employeurs privés (entreprises, particuliers employeurs) et les employeurs publics (État, collectivités territoriales, établissements publics nationaux, établissements hospitaliers…), au titre des traitements et salaires qu’ils versent ;

– les caisses de retraite obligatoires et complémentaires, la Caisse nationale d’assurance maladie, les institutions de prévoyance, les compagnies d’assurances, les mutuelles ainsi que Pôle emploi, au titre des revenus de remplacement et des pensions.

Environ 1,7 million de collecteurs seront ainsi concernés par la retenue à la source, dont 1,6 million d’entreprises privées. L’État constituera le collecteur le plus important, avec environ 2,5 millions d’agents dans le champ de la retenue à la source.

Le tableau ci-après retrace les différentes catégories de collecteurs de la retenue à la source, avec pour chacune d’entre elles, le nombre de contribuables concernés (y compris, bien évidemment, ceux dont le taux de retenue à la source serait égal à zéro) :

CATÉGORIES DE COLLECTEURS CONCERNÉS PAR LE PRÉLÈVEMENT À LA SOURCE

Principales catégories de collecteurs

Catégorie de revenus

Estimation du nombre de collecteurs

Estimation du nombre d’usagers concernés
(en millions)

Entreprises privées

Traitements - Salaires

1,6 million (1)

18

État

Traitements - Salaires

1

2,5

Collectivités territoriales

Traitements - Salaires

65 000 budgets incluant des frais de personnel (2)

1,9

Établissements publics nationaux

Traitements - Salaires

1 000 budgets incluant des frais de personnel (3)

0,5

Établissements hospitaliers

Traitements - Salaires

5 638 budgets incluant des charges de personnels de la fonction publique hospitalière (4)

1,2

Caisses de retraite

Pensions de retraite

136 (5)

16,7

Caisse nationale d’assurance maladie

Revenus de remplacement

161

Variable en fonction du nombre de bénéficiaires de revenus de remplacement

Institutions de prévoyance Compagnies d’assurances mutuelles

Revenus de remplacement

800( 6)

Variable en fonction du nombre de bénéficiaires de revenus de remplacement

Pôle emploi

Revenus de remplacement

1

3,2 (chômeurs indemnisés)

(1) Source : GIP MDS.

(2) (3) (4) Source : service des collectivités locales de la direction générale des finances publiques.

(5) Source : direction de la sécurité sociale.

(6) Source : https://acpr.banque-france.fr/agrements-et-autorisations/registres-et-listes/registre-des-organismes-dassurance.html.

Source : Évaluation préalable de l’article 38.

● Leurs missions seraient les suivantes :

– appliquer une retenue à la source sur les revenus qu’ils versent, avec le taux calculé et transmis par l’administration fiscale, ou, en l’absence d’un tel taux, avec celui résultant de la grille de taux par défaut ;

– déclarer les montants individuels prélevés à l’administration fiscale, afin qu’ils puissent être retracés et reportés sur la déclaration de revenus des contribuables ainsi prélevés ;

– reverser l’ensemble des prélèvements effectués au titre d’un mois (ou, sur option pour les entreprises de moins de onze salariés, au titre d’un trimestre).

Bien évidemment, c’est l’administration fiscale qui demeurerait l’interlocuteur unique des contribuables en ce qui concerne la détermination, la gestion et la modification du taux, ainsi que pour la régularisation en année N + 1 de l’impôt effectivement dû au titre de l’année N.

B. LE DÉROULEMENT DE LA RETENUE À LA SOURCE

Les modalités de mise en œuvre de la retenue à la source par le tiers payeur des revenus, avec l’application du taux de prélèvement et le reversement des sommes collectées à l’administration fiscale, sont définies par un nouvel article 1671 au sein du CGI (alinéas 151 à 163).

1. Un prélèvement effectué lors du paiement des salaires et pensions

● Aux termes du 1 de l’article 1671 ainsi créé (alinéa 152), la retenue à la source serait opérée par le débiteur lors du paiement des sommes et avantages mentionnés à l’article 204 F, lequel définit l’assiette de la retenue à la source.

Elle interviendrait donc concomitamment au versement des traitements, salaires et pensions, soit, dans la généralité des cas, en fin de mois pour les salaires, et en début de mois pour les retraites (105).

● Des dispositions spécifiques sont par ailleurs prévues lorsque le débiteur de la retenue à la source n’est pas établi en France : il s’agirait d’un cas relativement spécifique, à savoir lorsque des salaires de source française, c’est-à-dire versés en contrepartie d’une activité exercée en France, seraient versés par des débiteurs établis à l’étranger. Ces revenus seraient alors considérés comme de source française, même si le payeur est à l’étranger, et seraient en général exclusivement imposables en France en vertu des conventions fiscales.

En l’espèce, il s’agirait de salariés exerçant leur activité en France, qui relèvent en règle générale d’un régime français de sécurité sociale, par exemple lorsqu’ils y exercent leur activité à titre permanent et sous réserve des règles prévues par les accords internationaux en matière de sécurité sociale. Les employeurs devraient alors s’acquitter des contributions et cotisations sociales à raison de ces salaires.

L’évaluation préalable indique que, compte tenu des obligations existantes en matière sociale, le prélèvement serait mis en œuvre sous forme de retenue à la source – la circonstance que l’employeur n’ait pas d’établissement en France étant sans incidence.

En revanche, les deuxième et troisième alinéas du 1 de l’article 1671 (alinéas 153 et 154) prévoient que, dans ce cas, le débiteur de la retenue à la source serait tenu de faire accréditer auprès de l’administration fiscale un représentant établi en France, qui s’engage à remplir les formalités lui incombant et, le cas échéant, à acquitter les prélèvements à sa place. Cette obligation de désigner un représentant fiscal ne s’appliquerait qu’aux débiteurs qui ne sont pas établis dans un pays de l’Union européenne ou dans un autre pays de l’Espace économique européen (EEE) ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude fiscale et une convention d’assistance mutuelle en matière de recouvrement de l’impôt – soit, en pratique, l’Islande et la Norvège.

Il convient de noter que, d’ores et déjà, pour remplir ses obligations relatives à la déclaration et au versement des cotisations sociales, l’employeur établi à l’étranger a la faculté de désigner par convention un représentant résidant en France, responsable personnellement des obligations déclaratives et financières lui incombant.

2. L’application du taux de retenue à la source

Le 2 de l’article 1671 définit les conditions dans lesquelles le débiteur appliquerait le taux de retenue à la source, tel qu’il est calculé dans les conditions prévues par l’article 204 H : ce taux lui serait transmis par l’administration fiscale soit via la DSN, soit via la « déclaration 3 en 1 ».

Le tiers payeur des revenus disposerait d’un délai d’intégration de ce taux d’au minimum un mois, puisque ce dernier devrait être appliqué au plus tard le deuxième mois suivant sa transmission par l’administration.

L’évaluation préalable indique à ce propos que « lors de la liquidation de la paie d’un salarié, le moteur de calcul du logiciel de paie appliquera le taux de prélèvement propre à ce salarié transmis par l’administration fiscale et intégré par le tiers payeur des revenus dans le logiciel susmentionné. Il calculera ainsi le montant de retenue à la source à effectuer et déduira ce montant du salaire à verser ».

Le tiers collecteur devrait en revanche appliquer le taux issu de la grille de taux par défaut dans le cas où le taux propre au salarié (ou plus rarement au retraité) n’aurait pas été transmis par l’administration.

Cette grille fournie annuellement par l’administration fiscale devrait être intégrée chaque année dans les logiciels de paie des tiers payeurs ; l’évaluation préalable précise que « le recours à cette grille de taux par défaut sera signalé à l’administration fiscale de manière automatique ».

Les sommes prélevées en application de la retenue à la source seraient déclarées dans les conditions prévues par l’article 87 A, évoquée au IX.

3. Le reversement des sommes collectées à l’administration fiscale

● Les sommes prélevées dans le cadre de la retenue à la source seraient reversées par le collecteur, soit via la DSN, soit via la « déclaration 3 en 1 » précitée, par télérèglement – sauf pour les employeurs relevant des dispositifs simplifiés de déclaration et de recouvrement.

Dans le premier cas, l’évaluation préalable indique que la DSN disposerait d’une zone de paiement dans laquelle l’entreprise devrait indiquer ses coordonnées bancaires, le montant à prélever correspondant à la retenue à la source effectuée ainsi que l’ordre de paiement. Sur la base de ces informations, l’administration fiscale réalisera une demande auprès de la Banque de France, qui procéderait au prélèvement correspondant sur le compte bancaire de l’entreprise.

Est également indiqué qu’un établissement pourrait décider que le paiement effectif soit pris en charge par un autre établissement (par exemple le siège de l’entreprise) ; la déclaration nominative serait toutefois obligatoirement déposée au niveau de chaque établissement, même si le paiement est effectué par une autre structure.

Dans le second cas, la « déclaration 3 en 1 » utilisée pour reverser les montants de retenue à la source comporterait les informations relatives au montant à prélever ainsi que les coordonnées bancaires du collecteur permettant d’effectuer la demande de prélèvement auprès de la Banque de France ; le fonctionnement de ce dispositif devrait être similaire à celui de la DSN.

Enfin, l’évaluation relève que « pour les collecteurs de la sphère publique, notamment ceux dont le système d’information est interfacé avec Chorus ou pour lesquels le paiement intervient par validation d’un mandat par un comptable public, un circuit financier spécifique sera mis en place ».

● Aux termes des deux derniers alinéas du 2 de l’article 1671 (alinéas 157 et 158), le versement des sommes collectées devrait intervenir à une date fixée par décret, le mois suivant celui au cours duquel a eu lieu le prélèvement ou, si le débiteur est un employeur dont la paie est effectuée postérieurement au mois d’emploi, le mois au cours duquel a eu lieu le prélèvement.

Des données figurant dans l’évaluation préalable, il apparaît que l’échéance de versement devrait être fixée le 5 du mois, pour les entreprises d’au moins cinquante salariés, et le 15 du mois pour les entreprises de moins de cinquante salariés, selon le calendrier déjà applicable en matière de cotisations sociales dans le cadre de la DSN.

Par dérogation au principe du versement mensuel de la retenue à la source, les employeurs dont les effectifs sont inférieurs à onze salariés pourraient opter, dans des conditions fixées par décret, pour un reversement trimestriel des sommes collectées, ce qui vise à leur donner des facilités de trésorerie.

L’évaluation préalable souligne que l’entreprise versant les salaires le 28 du mois bénéficierait également d’un avantage en trésorerie, d’une durée moindre toutefois : en effet, pendant une période comprise entre dix et vingt jours – selon que l’entreprise compte plus ou moins de cinquante salariés – elle disposerait des sommes issues de la retenue à la source pratiquée au titre de ce mois.

L’impact de ces dispositions apparaît assez peu aisé à évaluer. Sur ce point, le rapport particulier précité du Conseil des prélèvements obligatoires sur les scénarios de mise en œuvre du prélèvement à la source évoquait la possibilité de permettre aux tiers payeurs de conserver en trésorerie le produit d’impôt collecté chaque mois, notamment pour les petites entreprises. Il relevait néanmoins qu’un tel mécanisme suscitait une certaine inquiétude parmi les représentants des tiers payeurs, en indiquant que l’on pouvait craindre qu’une gestion erratique de l’avantage en trésorerie par des petites entreprises ne les mette en difficulté au moment de reverser le produit d’impôt collecté antérieurement.

● Du fait de ces modalités de reversement, les retenues à la source effectuées sur les revenus versés en décembre seraient reversées à l’État dans le courant du mois de janvier. Il serait donc nécessaire de procéder à une adaptation réglementaire des règles de rattachement budgétaire des retenues effectuées en décembre de chaque année.

La loi organique relative aux lois de finances du 1er août 2001 (106) autorise en effet le Gouvernement à rattacher par décret à l’exercice budgétaire de l’année N des recettes encaissées entre le 1er et le 20 janvier de l’année N + 1 (107). L’évaluation préalable indique qu’« afin d’assurer ainsi la parfaite cohérence entre la période couverte par l’exercice budgétaire et celle des revenus imposés au titre de cet exercice, le Gouvernement soumettra au Conseil d’État un projet de décret permettant de rattacher au budget de l’exercice N le prélèvement à la source opéré sur l’ensemble des revenus du 1er janvier au 31 décembre de l’année N ».

4. Le cas des employeurs relevant des dispositifs simplifiés de déclaration et de recouvrement de cotisations sociales

Le 3 de l’article 1671 (alinéa 159) définit les modalités de reversement des sommes collectées pour les employeurs se trouvant dans le champ des dispositifs simplifiés de déclaration et de recouvrement de cotisations sociales prévus par l’article L. 133-5-6 du code de la sécurité sociale : il s’agit des entreprises et associations à but non lucratif employant moins de vingt salariés, ainsi que des particuliers employeurs.

a. Les entreprises de moins de vingt salariés

Environ 75 000 entreprises et associations de moins de vingt salariés ont ainsi recours au titre emploi service entreprise (TESE) ou au chèque emploi associatif (CEA). Ces employeurs sont soumis à une obligation déclarative auprès de l’Urssaf, celle-ci étant remplie par voie dématérialisée à plus de 99 %.

S’agissant de ces très petites entreprises, la retenue à la source serait reversée à l’administration fiscale par l’intermédiaire de l’Urssaf, dans le cadre des dispositifs simplifiés existants.

L’Urssaf jouerait un rôle pivot dans le processus de retenue à la source : elle recevrait de l’administration le taux de prélèvement à la source de source, elle serait chargée de calculer le montant de retenue à la source à effectuer, de prélever celui-ci sur le compte de l’employeur au même titre que les cotisations sociales, puis de le reverser à l’administration fiscale.

Cela impose de modifier les articles L. 133-5-6 et L. 133-5-7 du code de la sécurité sociale, qui définissent le champ du dispositif simplifié de déclaration et de recouvrement : aujourd’hui limité aux cotisations sociales, il convient de l’étendre à la retenue à la source prévue par le 1° du 2 de l’article 204 A (alinéas 247 à 249). Par coordination, il est nécessaire de compléter les articles L. 133-5-8 et L. 133-5-10 du code de la sécurité sociale, en mentionnant la retenue à la source, aux côtés des cotisations et contributions sociales (alinéas 250 et 251).

Les modalités de transmission des déclarations et de reversement des sommes collectées entre l’administration fiscale et l’Urssaf seront précisées par convention, comme le prévoient les alinéas 252 et 253, qui viennent compléter en ce sens l’article L. 133-5-11 du code de la sécurité sociale.

b. Les particuliers employeurs, pour lesquels la retenue à la source soulève des questions spécifiques

Il convient de consacrer des développements spécifiques au cas des particuliers employeurs, qui relèvent de l’article L. 133-5-6 : c’est également l’Urssaf qui jouerait un rôle d’intermédiaire entre ces employeurs et l’administration fiscale.

Aujourd’hui, les dispositifs simplifiés utilisés par les particuliers employeurs pour s’acquitter de leurs obligations sociales (déclaration et paiement des cotisations) s’articulent autour du chèque emploi service universel (CESU), à destination des particuliers employeurs, et de Pajemploi, à destination des particuliers ayant recours à une garde d’enfants. Une fois que l’employeur a déclaré la rémunération versée à son salarié, les cotisations dues sont automatiquement prélevées sur son compte bancaire. La retenue à la source opérée sur les salaires versés par les particuliers employeurs a vocation à s’appuyer sur ces dispositifs simplifiés.

Néanmoins, la situation de ces employeurs, qui sont au nombre de 3,6 millions – dont un tiers d’employeurs occasionnels –, est nécessairement spécifique : d’abord parce que ce ne sont pas des professionnels et qu’ils ne disposent pas de logiciel de paie ; ensuite parce qu’un même salarié compte le plus souvent plusieurs employeurs, du fait de la multiactivité qui caractérise ce secteur ; enfin, parce que les changements d’employeur sont plus fréquents.

Par ailleurs, les modes de rémunération dans ce secteur se construisent de façon particulière, les employeurs comme les salariés raisonnant en termes de salaire net, et non de salaire brut, tandis que les relations entre les parties ont nécessairement un caractère plus personnel que celles existant au sein d’une entreprise. En cela, l’introduction d’une retenue à la source sur les salaires versés par les particuliers employeurs suscite davantage de questions et de difficultés que pour les autres employeurs.

C’est la raison pour laquelle l’article 28 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 a instauré un dispositif spécifique, qui conduit à ce que le salarié ne reçoive plus son salaire de l’employeur, mais du CESU ou de Pajemploi ; le salaire versé sera net des cotisations, mais aussi, le cas échéant, de la retenue à la source – laquelle ne serait donc pas mise en œuvre par l’employeur. Ce dernier serait prélevé sur son compte bancaire des sommes correspondant à la rémunération de son salarié ainsi qu’aux cotisations sociales qu’il doit acquitter, tandis que les centres CESU ou Pajemploi reverseraient à l’administration fiscale la retenue à la source collectée sur le salaire. Optionnel et requérant l’accord du salarié, ce dispositif permettrait d’éviter que l’employeur ne soit amené à opérer la retenue à la source lui-même sur le salaire de son salarié.

En l’absence de recours à ce mécanisme, c’est le centre CESU ou Pajemploi qui transmettrait à l’employeur le taux de prélèvement à la source à appliquer, jouant là encore le rôle d’intermédiaire entre l’administration fiscale et l’employeur. Ce dernier verserait au salarié un salaire net de la retenue à la source effectuée. Le centre CESU ou Pajemploi effectuerait alors directement sur son compte bancaire le prélèvement correspondant au montant de la retenue à la source, puis reversera les sommes collectées à l’administration fiscale. Si le particulier employeur oublie de procéder à la retenue à la source, il serait donc mécaniquement conduit à acquitter l’impôt dû par son salarié.

Ces différents mécanismes supposent, pour se dérouler de façon fluide, que l’employeur procède aux opérations de déclaration selon des modalités dématérialisées et qu’il puisse recevoir de la même façon le taux de prélèvement de son salarié. Or, si le taux de dématérialisation des volets sociaux dans le cadre de Pajemploi atteint 99,7 %, celui-ci n’atteint que 62,8 % dans le cadre du CESU – du fait de l’utilisation de titres papier.

L’évaluation préalable précise que « la possibilité de conserver des échanges papier demeurera ouverte. Elle sera toutefois a priori peu adaptée au bon fonctionnement du prélèvement à la source, celui-ci nécessitant une circulation rapide de l’information entre les parties prenantes ».

On peut en effet s’interroger sur la mise en œuvre pratique de la retenue à la source par les particuliers employeurs ne recourant pas aux modes dématérialisés de déclaration et de paiement, dont le nombre n’est pas anecdotique.

5. Les modalités de réclamation

Aux termes du 5 de l’article 1671 (alinéas 161 à 163), la retenue à la source est recouvrée et contrôlée selon les mêmes modalités et sous les mêmes garanties et sûretés que la taxe sur la valeur ajoutée (TVA).

Le 5 définit de façon succincte le régime juridique des réclamations du débiteur de la retenue à la source ou du bénéficiaire des revenus – le salarié ou le retraité –, en prévoyant que celles-ci sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à cette taxe (le juge compétent étant le juge administratif), et en renvoyant à un décret en Conseil d’État la définition des modalités d’application.

Les réclamations du titulaire des revenus pourraient concerner notamment les cas d’erreurs du collecteur, lequel pourrait effectuer des prélèvements supérieurs à ce qu’ils auraient dû être, soit que l’erreur porte sur l’assiette (application du taux de prélèvement sur des revenus non imposables, par exemple des remboursements de frais), soit qu’elle porte sur le taux (le collecteur appliquant un taux de prélèvement supérieur à celui communiqué par l’administration fiscale).

L’évaluation préalable indique à cet égard que « dans ces situations, il est envisagé de s’inspirer du mécanisme de régularisation applicable en matière de TVA (article 208 de l’annexe II du code général des impôts) ou en matière de cotisations sociales. Le collecteur sera autorisé à effectuer lui-même les corrections nécessaires sur les déclarations de retenues postérieures ». C’est donc ce dispositif qui devrait être déterminé par le décret en Conseil d’État précité.

Cela devrait alors permettre à l’employeur qui s’apercevrait qu’un revenu a fait l’objet d’une retenue à la source totalement ou partiellement indue – ou dont le salarié s’aperçoit qu’une erreur a été commise – de rectifier l’erreur sur la DSN ou la « déclaration 3 en 1 » suivante, en imputant les trop-versés au titre d’un mois M sur la retenue à la source faite sur le mois ou les mois suivants, et ainsi de régulariser la situation.

Dès lors qu’il s’agirait d’une erreur de l’administration, par exemple du fait de la mise à disposition d’un taux de prélèvement à la source erroné auprès du tiers payeur des revenus, la rectification devrait être obtenue directement auprès de l’administration fiscale.

L’évaluation préalable précise que, dans ce cas, « les modalités opérationnelles de traitement de la réclamation contentieuse par l’administration fiscale seront très proches de celles qui existent pour les réclamations après établissement de l’impôt. Elles auront néanmoins des spécificités liées à leur nature, qui nécessitent une réaction rapide, avant la liquidation de l’impôt. Les demandes seront présentées auprès des services locaux (services des impôts des particuliers). Les agents seront chargés de l’instruction de ces demandes et de vérifier si le taux calculé par l’administration fiscale est effectivement erroné ou si le taux transmis est différent de celui calculé par l’administration fiscale (en cas de problème technique notamment). Si la réclamation de l’usager est fondée, celui-ci sera remboursé par virement bancaire ».

Enfin, à défaut de régularisation des erreurs de prélèvement en cours d’année, les rectifications devraient être effectuées lors de la liquidation de l’impôt en septembre N + 1, au moment du calcul du solde de l’impôt dû. Tel sera le cas en cas d’erreur non signalée à l’administration fiscale ou d’absence de régularisation dans la DSN ou dans la « déclaration 3 en 1 ».

6. La définition des règles de privilège attachées à la retenue à la source

● L’Association pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés (AGS) est l’organisme chargé de gérer le régime de garantie des salaires, afin de permettre, en cas de redressement ou de liquidation judiciaire de l’entreprise, de garantir le paiement des sommes dues aux salariés (salaires, préavis, indemnités de rupture…), dans les conditions fixées par le code du travail.

L’AGS ayant effectué des avances de créances auprès des salariés devient alors un créancier de l’entreprise en procédure collective. Les modalités de remboursement des créances de l’entreprise sont différentes selon leur rang et les étapes de la procédure collective.

Différents types de créances sont avancés par l’AGS, notamment des créances super-privilégiées qui bénéficient de la subrogation légale et doivent être payées en priorité, des créances relevant des articles L. 622-17 et L. 641-13 du code de commerce, des créances bénéficiant d’un privilège général sur les biens mobiliers et immobiliers, et des créances chirographaires (108).

Ainsi, l’AGS constitue un créancier particulier dans la mesure où elle bénéficie des privilèges que la loi accorde aux salariés. Le régime de garantie des salaires est légalement subrogé dans les droits des salariés au titre du superprivilège.

● En l’absence de privilège spécifique prévu pour la retenue à la source effectuée sur les salaires en cas de procédure collective, les sommes actuellement récupérées par l’AGS dans le cadre du régime de créances super-privilégiées, s’agissant des salaires, pourraient être mécaniquement minorées.

C’est pourquoi le dernier alinéa du 5 de l’article 1671 prévoit que, lorsque la retenue à la source a été avancée par l’AGS, elle serait garantie par un privilège de même rang que celui des revenus sur lesquels elle a été précomptée – à savoir les salaires.

Cette modification est effectuée au bénéfice de l’AGS. Elle est neutre tant pour l’entreprise en procédure collective que pour le salarié.

C. LES CONSÉQUENCES DE LA RÉFORME POUR LES TIERS PAYEURS

La mise en place du prélèvement à la source se traduirait par la création de tâches nouvelles pour les tiers payeurs, nécessitant des adaptations spécifiques de leurs outils informatiques, de paie et de gestion, et suscitant des coûts. Par ailleurs, les collecteurs devraient nécessairement répondre aux interrogations et sollicitations des personnes à qui ils versent des revenus.

L’évaluation préalable retrace dans un tableau les différents coûts associés à la mise en place de la réforme par le collecteur.

TABLEAU RÉCAPITULATIF DU COÛT DE LA MISE EN PLACE DE LA RÉFORME
PAR LES COLLECTEURS

Coût

Employeurs privés

Employeurs publics

Tiers verseurs de revenus de remplacement

Charges administratives

Information des contribuables

Coût faible compte tenu des campagnes d’informations nationales programmées

Coût du face à face avec les contribuables

Coût faible :

– l’administration fiscale calcule et transmet le taux et est en charge du recouvrement du solde ;

– axe de communication fort : le recouvrement de l’IR reste une relation entre le contribuable et l’administration fiscale ;

– mise en place d’un dispositif d’assistance dédié.

Coût du système d’information

Coût nul : couvert par la DSN

Coût d’adaptation du SI pour la production de la « déclaration 3 en 1 »

Coût d’adaptation du SI pour la production de la « déclaration 3 en 1 »

Formation

« métier »

Auto-formation éventuelle d’1/2 journée pour comprendre les mécanismes généraux du prélèvement à la source

Formation de 1 heure à ½ journée, à laquelle s’ajoute éventuellement ½ journée d’auto-formation, pour comprendre les mécanismes généraux du prélèvement à la source

Mise en conformité

Support des Échanges avec l’administration fiscale

Coût nul : couvert par la DSN

Coût limité si préfiguration de la DSN

Coût de l’aménagement des SI pour prendre en charge la nouvelle déclaration

– collecteur comptant plus de 250 salariés ou allocataires :

3 975 euros < X < 7 950 euros

– collecteur comportant entre 10 et 250 salariés ou allocataires :

1 037 euros < X < 2 075 euros

– collecteur comportant moins de 10 salariés ou allocataires :

300 euros < X < 600 euros

Mise à jour du logiciel de paye

Contrats de maintenance, évolution réglementaire : intégration des taux de prélèvement et de la grille de taux par défaut

Logiciel propriétaire : coût spécifique d’intégration des taux de prélèvement et de la grille de taux par défaut

Source : évaluation préalable de l’article 38.

La présentation des coûts proposée semble toutefois se caractériser par un certain optimisme, notamment pour le « coût du face à face avec les contribuables ». Les différentes personnes auditionnées par la Rapporteure générale ont insisté sur l’importance du changement que la retenue est susceptible d’occasionner au sein des entreprises, ne serait-ce que du seul effet « bas de la feuille de paie » pour les salariés, et sur le temps et les moyens humains qu’il sera nécessaire de dégager pour répondre aux questions et pour accompagner la réforme – et ce, en dépit des campagnes d’information nationales qui pourraient être conduites.

Par ailleurs, l’évaluation préalable indique que l’évolution nécessaire des systèmes de paie – impliquant pour les collecteurs d’intégrer le fichier des taux et de procéder à deux boucles de calcul complémentaires (calcul du prélèvement et soustraction de celui-ci au revenu versé) s’interprète comme une évolution réglementaire, et qu’elle « devrait trouver naturellement sa place dans les forfaits de maintenance ». Pour autant, à ce stade, il est difficile d’affirmer que les coûts à ce titre seront nuls ou complètement négligeables.

Enfin, la réforme du prélèvement à la source imposerait de faire évoluer les logiciels propres des payeurs de revenus de remplacement, développés et maintenus en interne, afin de prendre en compte le vecteur déclaratif propre à la retenue à la source et de l’appliquer aux revenus versés. La réforme nécessiterait également de faire évoluer les applications PAY et ETR de l’administration fiscale, qui permettent de traiter la rémunération des agents civils de l’État, ainsi que l’application de paiement des pensions PEZ utilisée par le service des retraites de l’État. L’évaluation préalable précise qu’a priori, aucune évolution ne serait nécessaire dans les systèmes d’information des ressources humaines de chacun des ministères pour le périmètre des agents rémunérés par le biais des applications PAY et ETR.

Elle indique en revanche que « le ministère de la défense devra faire évoluer l’application Louvois, puis l’application Source Solde qui sera amenée à la remplacer à compter de 2019 », un groupe de travail spécifique étant mobilisé sur le sujet de l’intégration de la retenue à la source dans Louvois. À cet égard, il semble que l’instabilité du système Louvois et ses faiblesses désormais bien identifiées constituent une difficulté structurante pour la mise en œuvre de la retenue à la source, laquelle pourrait se traduire par de nouvelles difficultés dans le versement des soldes aux militaires.

XIII. LES SANCTIONS APPLICABLES POUR LES CONTRIBUABLES

Texte du projet de loi (alinéas 208 à 210) :

SANCTIONS EN CAS DE DÉFAUT DE PAIEMENT DE L’ACOMPTE OU DES COMPLÉMENTS DE RETENUE À LA SOURCE OU EN CAS DE MODULATION EXCESSIVE

(208) 27° Après l’article 1729 F, il est inséré un article 1729 G ainsi rédigé :

(209) « Art. 1729 G. – 1. Tout retard dans le paiement des sommes dues au titre de l’acompte prévu au 2° du 2 de l’article 204 A ou du complément de retenue à la source prévu au 3 de l’article 204 H donne lieu à l’application d’une majoration de 10 % des sommes non acquittées dans les délais prescrits.

(210) « Toutefois, lorsque le versement d’un complément de retenue à la source s’avère inférieur de plus de 30 % au montant du complément qui aurait dû être versé, le taux de cette majoration est égal à la moitié de la différence entre le montant du complément dû et celui du complément acquitté, rapportée à ce premier montant.

[…]

*

* *

Le présent article, par ses alinéas 208 à 219, introduit dans le CGI un nouvel article 1729 G portant sur les sanctions applicables aux contribuables dans trois hypothèses :

– retard dans le paiement de l’acompte contemporain (1 de l’article, alinéa 209) ;

– retard ou insuffisance dans le paiement du complément de retenue à la source dû lorsque l’option pour la grille de taux par défaut est exercée (1 de l’article, alinéas 209 et 210) ;

– erreur dans le recours à la modulation à la baisse du prélèvement (soit que la modulation était indue, soit qu’elle s’est révélée excessive) (2 de l’article, alinéas 211 à 219 du présent article). Pour le détail des sanctions applicables en cas de modulation excessive ou erronée, il est renvoyé aux développements sur la modulation (Cf. supra, V, B).

A. L’APPLICATION D’UNE MAJORATION DE 10 % EN CAS DE RETARD DE PAIEMENT

En application des 1 et 2 du nouvel article 1663 C du CGI, introduit par le présent article, l’acompte contemporain serait versé par douzième le 15 de chaque mois ou, en cas d’option exercée en ce sens par le contribuable, par quart les 15 février, 15 mai, 15 août et 15 novembre (Cf. supra, XI).

Le complément de retenue à la source, dû par le contribuable qui aurait opté, en application du 3 de l’article 204 H nouveau du CGI, pour l’application à ses revenus salariaux d’un taux par défaut déterminé en fonction de la grille prévu au 2 du même article, devrait être versé au plus tard le dernier jour du mois suivant celui de la perception du revenu (alinéa 46 du présent article, Cf. supra, III, D).

Le premier alinéa du 1 de l’article 1729 G (alinéa 209 du présent article) prévoit que tout retard dans le paiement de l’acompte ou du complément de retenue à la source entraînerait une majoration de 10 % des sommes qui n’ont pas été versées dans les délais prescrits. Cette majoration vise à réparer le préjudice de trésorerie subi par le Trésor, en cas de retard de paiement, ainsi que le préjudice budgétaire si le versement n’est pas intervenu (par exemple, si le prélèvement au titre d’un mois donné est revenu impayé du fait d’une provision insuffisante sur le compte bancaire du contribuable) (109).

Un contribuable qui perçoit des BIC et dont le montant d’acompte contemporain dû au titre de l’année N est de 9 000 euros devrait verser au plus tard le 15 de chaque mois 750 euros d’acompte. Si le versement dû au titre du mois de juin n’intervient que le 20, le contribuable devrait s’acquitter d’une majoration de 75 euros (750 × 10 %).

B. L’AUGMENTATION DE LA MAJORATION EN CAS D’INSUFFISANCE EXCESSIVE DU COMPLÉMENT DE RETENUE À LA SOURCE PAYÉ AVEC RETARD

Lorsque le paiement du complément de retenue à la source prévu au 3 de l’article 204 H est effectué avec retard et qu’il porte sur un montant inférieur de plus de 30 % au complément qui aurait dû être fait, la majoration fait l’objet d’un mode de détermination particulier.

Son taux est égal au rapport entre, d’une part, la moitié de la différence entre le montant du complément dû et celui acquitté, d’autre part, le montant du complément dû. Cette majoration serait donc nécessairement supérieure à 15 % (110).

À titre d’exemple, si un contribuable devait un complément de retenue à la source de 5 000 euros mais n’a versé, avec retard, qu’un complément de 3 000 euros (inférieur de 40 % à ce qui était dû), lui serait infligée une majoration de 20 % : ([5 000 – 3 000] / 2) / 5 000.

XIV. LES SANCTIONS APPLICABLES POUR LES TIERS COLLECTEURS

Texte du projet de loi (alinéas 224 à 237) :

SANCTIONS EN CAS DE RETARD DE PAIEMENT DU TIERS COLLECTEUR

(224) 29° L’article 1731 est complété par un 4 ainsi rédigé :

(225) « 4. La majoration prévue au 1 s’applique aux versements prévus à l’article 1671 qui n’ont pas été effectués dans les délais prescrits. » ;

(226) 30° Au III de l’article 1736, les mots : « 87, 87 A, 88 et 241 » sont remplacés par les mots : « 88, s’agissant des seules rentes viagères à titre onéreux, et 241, s’agissant des droits d’auteur imposés suivant les règles applicables aux bénéfices non commerciaux et des droits d’inventeur » ;

SANCTION EN CAS DE VIOLATION DU SECRET PROFESSIONNEL

(227) 31° Après l’article 1753 bis B, il est inséré un article 1753 bis C ainsi rédigé :

(228) « Art. 1753 bis C. – Les personnes qui contreviennent intentionnellement à l’obligation prévue à l’article L. 288 A du livre des procédures fiscales sont punies des peines mentionnées à l’article 22621 du code pénal.

(229) « La peine encourue est réduite à une amende de 10 000 € pour les personnes mentionnées aux 3°, 4°, 6° et 7° de l’article L. 13356 du code de la sécurité sociale et qui ont recours au dispositif simplifié prévu par cet article. » ;

SANCTION POUR INSUFFISANCE DE RETENUE À LA SOURCE ET SANCTIONS DÉCLARATIVES DU TIERS COLLECTEUR

(230) 32° Avant l’article 1759, il est inséré un article 17590 A ainsi rédigé :

(231) « Art. 17590 A. – Les infractions à l’obligation d’effectuer la retenue à la source prévue à l’article 1671 et aux obligations déclaratives prévues à l’article 870 A entraînent l’application d’une amende qui, sans pouvoir être inférieure à 500 € par déclaration, est égale à :

(232) « 1° 5 % des retenues qui auraient dû être effectuées ou déclarées, en cas d’omissions ou d’inexactitudes ;

(233) « 2° 10 % des retenues qui auraient dû être effectuées ou déclarées, en cas de nondépôt de la déclaration dans les délais prescrits ;

(234) « 3° 40 % des retenues qui auraient dû être effectuées ou déclarées, en cas de nondépôt de la déclaration dans les trente jours suivant une mise en demeure ou en cas d’inexactitudes ou d’omissions délibérées ;

(235) « 4° 80 % des retenues qui ont été effectuées mais délibérément non déclarées et non versées au comptable public. » ;

SANCTION PÉNALE POUR DÉFAUT DE REVERSEMENT DE LA RETENUE À LA SOURCE

(236) 33° L’article 1771 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

(237) « Est passible des peines prévues au premier alinéa le débiteur mentionné à l’article 1671 qui n’a ni déclaré ni versé au comptable public les retenues qu’il a effectuées en application du même article, si le retard excède un mois. » ;

[…]

*

* *

Les tiers collecteurs sont passibles de sanctions dans deux séries d’hypothèses :

– en cas de retard ou de défaut de paiement ou de manquement à leurs obligations déclaratives ;

– en cas de violation du secret professionnel attaché aux informations fiscales transmises par l’administration, afin de garantir la confidentialité du contribuable.

A. LA SANCTION DU RETARD, DU DÉFAUT OU DE L’INSUFFISANCE DE PAIEMENT OU DE DÉCLARATION

1. La sanction du retard de paiement

Le 29°du B du I du présent article (alinéas 224 et 225) tire les conséquences du rétablissement de l’article 1671 du CGI, relatif au paiement du prélèvement par le tiers collecteur.

Il modifie l’article 1731 du CGI, qui prévoit une majoration de 5 % en cas de retard dans le paiement des sommes qui doivent être versées aux comptables de l’administration fiscale et qui ne relèvent pas des impositions suivantes :

– IR ;

– contributions sociales recouvrées comme en matière d’IR ;

– taxe d’habitation ;

– taxes foncières sur les propriétés bâties et non bâties ;

– impositions recouvrées comme celles susmentionnées ;

– impôt de solidarité sur la fortune (ISF).

Cet article 1731 est complété par un 4 qui étend l’application de la majoration de 5 % aux versements dus au titre de la retenue à la source qui n’ont pas été réalisés dans les délais prescrits.

Aux termes du 2 de l’article 1671 rétabli, le versement des sommes collectées par l’employeur intervient le mois qui suit celui au cours duquel le prélèvement a eu lieu (ou le mois du prélèvement, si la paie est effectuée après la période mensuelle d’emploi). Les employeurs dans le champ de la DSN effectueraient le versement concomitamment à la transmission de la DSN, le 5 ou le 15 du mois suivant le prélèvement. La date de versement des employeurs hors champ de la DSN serait fixée par voie réglementaire ; elle se situerait entre le 5 et le 15 du mois suivant le prélèvement.

Les microentreprises qui emploient moins de onze salariés bénéficient d’une souplesse destinée à améliorer leur trésorerie : elles peuvent, sur option, procéder au versement le mois qui suit le trimestre au cours duquel les prélèvements ont eu lieu.

LIMITE DU VERSEMENT DES SOMMES COLLECTÉES

Entreprise

Mois travaillé

Mois du prélèvement

Mois limite
du versement

Paie effectuée le mois travaillé

Avril

Avril

Mai

Paie effectuée le mois suivant

Avril

Mai

Mai

Microentreprise
(sur option)

Avril

Avril

Juillet

Mai

Mai

Juin

Juin

Les exemples suivants illustrent l’application de la majoration prévue en cas de retard de paiement.

Une entreprise paie ses employés le mois de la période mensuelle d’emploi correspondante. Au titre des rémunérations d’avril, elle collecte un montant de prélèvement à la source de 3 000 euros. Si le versement de ces 3 000 euros intervient après la date limite en mai, elle devrait s’acquitter d’une majoration de 150 euros (3 000 × 5 %).

Une microentreprise comptant six salariés a décidé d’opter pour le versement trimestriel. Elle paie ses employés le mois de la période mensuelle d’emploi correspondante. Le salaire soumis à retenue à la source de chaque salarié est de 2 500 euros. Chaque salarié se voit appliquer un taux de 9 %. La retenue à la source prélevée chaque mois est de 114 euros (111). Au titre des mois d’avril, mai et juin, la collecte totale est de 342 euros (114 × 3). Si le versement à l’administration n’intervient pas dans les délais, l’entreprise se verrait appliquer une majoration de 17 euros (342 × 5 %).

La majoration de 5 % prévue au nouveau 4 de l’article 1731 du CGI se cumulerait avec les intérêts de retard prévus à l’article 1727 du même code, qui sont de 0,4 % par mois en application du III de cet article et qui s’appliquent à toute créance fiscale qui n’a pas été acquittée dans le délai légal. Les intérêts sont calculés à compter du premier jour du mois qui suit celui au cours duquel l’impôt devait être acquitté et jusqu’au dernier jour du mois de paiement.

L’acquittement de la majoration et des intérêts se ferait en deux temps :

– l’administration fiscale adresserait à l’entreprise un courrier l’informant du motif et du montant de la pénalité. Si aucune contestation n’est soulevée, un avis de mise en recouvrement serait émis et l’entreprise verserait une somme correspondant aux retenues non versées dans les délais, augmentée de la majoration ;

– un second avis authentifiant les intérêts de retard serait ensuite émis. Dans l’exemple précédent de l’entreprise devant une retenue de 3 000 euros au plus tard en mai, si le paiement effectif intervient en juillet, deux mois d’intérêt de retard seraient calculés (juin et juillet), soit 24 euros (0,4 % × 3 000 × 2).

2. La sanction du retard de déclarations relatives à certaines sommes versées

Le 30° du B du I du présent article (alinéa 226) modifie le III de l’article 1736 du CGI, qui prévoit une amende correspondant à 5 % des sommes non déclarées lorsque ne seraient pas respectées les obligations suivantes :

– celle qui résulte des articles 87 et 87 A du CGI, relatifs à l’obligation faite à toute personne versant des traitements, salaires, émoluments ou rétributions imposables, de souscrire une déclaration comprenant différentes informations énumérées à l’article 39 de l’annexe III du CGI portant sur le déclarant et sur les personnes rétribuées ;

– celle qui résulte de l’article 88 du CGI, relatif à l’obligation faite à toute personne payant des pensions ou des rentes viagères de déclarer les sommes versées et de fournir les indications relatives aux personnes percevant ces sommes. Ces indications sont énumérées à l’article 39 A de l’annexe III du CGI ;

– celle qui résulte de l’article 241 du CGI, relatif à l’obligation faite aux personnes morales qui procèdent à l’encaissement et au versement de droits d’auteur ou d’inventeur, de déclarer le montant des sommes versées à leurs membres ou leurs mandants.

Le présent article supprime les références aux articles 87 et 87 A du fait de la mise en place de la retenue à la source, de l’obligation déclarative prévue au nouvel article 87-0 A introduit par le 2° du B et de la réécriture de l’article 87 A à laquelle procède le 3° du même B (l’article 87-0 A nouveau imposerait aux collecteurs de la retenue à la source une déclaration des informations relatives au montant prélevé sur les revenus versés – Cf. supra, IX).

Est en outre précisé le champ d’application de l’amende s’agissant des autres obligations :

– au titre de l’obligation résultant de l’article 88, seules les RVTO seraient conservées, non les pensions ;

– au titre de l’obligation résultant de l’article 241, il est précisé que les droits d’auteurs seraient ceux imposés suivant les règles applicables aux BNC.

3. La sanction de l’insuffisance de retenue à la source

Le 32° du même B (alinéas 230 à 235), qui tire notamment les conséquences des modifications précédemment décrites opérées par le 30°, prévoit la sanction des omissions, inexactitudes, retards ou défaut de versement de retenue à la source prévu à l’article 1671 ou de déclaration prévue à l’article 87-0 A, au travers d’un nouvel article 1759-0 A du CGI.

Les majorations des retenues applicables ne pourraient être inférieures à 500 euros et seraient affectées de différents coefficients en fonction de la gravité du manquement :

– en vertu du 1° de l’article 1759-0 A, la majoration serait de% en cas d’omissions ou d’inexactitudes (alinéa 232 du présent article) ;

– en vertu du 2°, la majoration serait de 10 % en cas de non-dépôt de la déclaration prévue à l’article 87-0 A dans les délais prescrits (alinéa 233 du présent article) ;

– en vertu du 3°, la majoration serait de 40 % lorsque la déclaration n’est pas déposée dans les trente jours qui suivent une mise en demeure ou lorsque les omissions ou inexactitudes sont délibérées (alinéa 234 du présent article) ;

– enfin, en vertu du 4°, les retenues effectuées mais délibérément non déclarées et non versées au comptable public seraient passibles d’une majoration de 80 %. Ainsi, pour reprendre l’exemple précédent, l’entreprise qui aurait effectué une retenue de 3 000 euros en avril et qui, volontairement, ne l’aurait ni déclarée ni versée, encourrait une majoration s’élevant à 2 400 euros (3 000 × 80 %) (alinéa 235 du présent article).

La relance des collecteurs défaillants serait faite par l’administration fiscale, en liaison avec le groupement d’intérêt public DSN.

Les majorations applicables aux omissions ou inexactitudes (de 5 % et 40 % selon le caractère délibéré ou non) couvriraient l’absence de retenue effectuée, si par exemple l’employeur n’a pas récupéré et appliqué le taux d’imposition que l’administration lui aurait transmis, ainsi que les erreurs résultant de l’application du mauvais taux à un contribuable (taux d’un autre contribuable, taux par défaut alors qu’un taux propre avait été transmis, ou encore mauvais taux de la grille par défaut au regard du montant du salaire).

4. La sanction pénale du défaut de reversement de la retenue à la source

Enfin, le 33° du même B (alinéas 236 et 237) complète le dispositif de sanction lié aux déclarations et au versement des retenues effectuées en modifiant l’article 1771 du CGI.

Cet article sanctionne pénalement les personnes qui n’auraient pas versé les retenues d’IR ou qui auraient effectué des versements insuffisants dans les délais prescrits, à condition que ce défaut ait un retard supérieur à un mois. Il s’applique actuellement aux personnes devant effectuer des retenues à la source au titre de l’impôt sur les salaires versés à des non-résidents.

Les sanctions prévues sont une amende pénale de 9 000 euros et une peine d’emprisonnement de cinq ans (112).

Le présent article ajoute aux opérations susceptibles d’entraîner l’application de ces sanctions l’absence de déclaration et l’absence de versement au comptable public des retenues effectuées en application de l’article 1671 rétabli, si le retard excède un mois. L’objectif d’une sanction aussi dissuasive est d’éviter que les collecteurs ne fassent de la rétention indue de retenues à la source, notamment à des fins d’amélioration de leur trésorerie (voire de détournements fiscaux).

En cas de non-versement des retenues effectuées, le tiers collecteur pourrait s’exposer à un cumul de sanctions :

– sanction fiscale prévue au 4 du nouvel article 1759-0 A précédemment évoquée ;

– sanction pénale prévue à l’article 1771.

S’appliquerait alors l’encadrement constitutionnel du cumul de sanctions pénales et fiscales, qui découle notamment de la décision rendue par le Conseil constitutionnel le 24 juin 2016 (113) :

– le cumul est possible ;

– le principe de nécessité des délits et des peines impose que les sanctions pénales ne s’appliquent qu’aux cas les plus graves de dissimulation frauduleuse de sommes soumises à l’impôt ;

– pour apprécier cette gravité, peuvent être retenus le montant de la fraude, la nature des agissements ou les circonstances de leur intervention ;

– au titre de la proportionnalité des peines, l’application combinée de sanctions pénale et fiscale ne peut conduire à ce que le montant global des sanctions dépasse le montant le plus élevé de l’une des sanctions encourues.

Le régime des sanctions en cas de défaillance de l’employeur au titre de la CSG

La contribution sociale généralisée (CSG) due au titre des revenus d’activité, comme le seraient les impôts dus sur les revenus salariaux, fait l’objet d’une retenue à la source effectuée par l’employeur.

En vertu de l’article L. 136-5 du code de la sécurité sociale (CSS), la CSG suit les règles gouvernant les cotisations sociales en ce qui concerne les garanties, majoration de retard et pénalités de recouvrement. Sont prévues :

1) une majoration de 5 % des sommes non réglées à la date de leur exigibilité (article R. 243-18 du CSS) ;

2) une majoration complémentaire de 0,4 % par mois écoulé à compter de la date d’exigibilité.

Le manquement aux obligations déclaratives est également susceptible d’entraîner des pénalités :

1) pénalité de 7,5 euros par salarié et par mois de retard en cas de défaut de production de la DSN ou d’omissions (plafonnée à 750 euros par mois de retard), en application des articles L. 133-5-4 et R. 243-16 du CSS ;

2) majoration de 0,2 % des sommes non déclarées par voie dématérialisée, en application de l’article L. 133-5-5 du CSS.

En outre, en vertu de l’article L. 244-8 du CSS, l’Urssaf peut demander à l’employeur le remboursement des prestations versées aux salariés, si l’employeur n’a pas acquitté les cotisations dues.

En l’absence de versement dans les délais prescrits, l’Urssaf peut fixer à titre provisionnel le montant des cotisations dues, en fonction des versements antérieurs (article R. 242-5 du CSS).

Par ailleurs, la rétention par l’employeur de la CSG entraîne l’application des sanctions suivantes :

1) l’amende prévue pour les contraventions de cinquième classe (1 500 euros en vertu de l’article 131-13 du code pénal), en application de l’article R. 244-3 du CSS ;

2) en cas de récidive dans un délai de trois ans, une peine de deux ans d’emprisonnement et de 3 750 euros d’amende (article L. 244-6 du CSS).

Enfin, en application du 2° de l’article 45 de l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics, le non-respect des obligations fiscales et sociales emporte l’exclusion de la procédure de passation de marchés publics.

Les sanctions prévues au titre des manquements aux obligations du collecteur des retenues à la source sont plus lourdes afin de se montrer dissuasives et d’éviter le plus possible, par anticipation, d’éventuels dysfonctionnements.

5. Les conséquences pour le contribuable des défauts ou insuffisances du collecteur de la retenue à la source

Dans le cadre de la retenue à la source, ce ne serait plus le contribuable qui s’acquitterait directement auprès de l’administration fiscale de l’impôt qu’il doit, mais le tiers collecteur – par exemple son employeur. En conséquence, si le contribuable devrait toujours déclarer annuellement les revenus qu’il a perçus, il ne serait plus redevable de l’impôt, sauf si aucune retenue n’a été faite.

a. La décharge du contribuable en cas de défaut de versement des retenues effectuées par le collecteur

Il serait illogique et injuste que le contribuable sur les revenus duquel une retenue à la source a été effectuée par le tiers collecteur doive, en cas d’absence par ce dernier de reversement de ces retenues, s’acquitter auprès du Trésor des sommes que celui-ci n’aurait pas perçu.

Une telle hypothèse reviendrait en effet à imposer deux fois le contribuable :

– une première fois, par la retenue à la source effectuée sur le revenu ;

– une seconde fois, par le versement au Trésor des sommes qui ne lui auraient pas été versés par le collecteur au titre de l’impôt dû par le contribuable.

En conséquence, dès lors que la retenue à la source aurait été réalisée, le contribuable n’en serait plus redevable. Les montants ainsi retenus pourraient dès lors s’imputer sur l’impôt finalement dû, lors du solde.

La circonstance que le collecteur ait ou non reversé les retenues effectuées serait ici sans incidence sur la situation fiscale du contribuable. La défaillance du collecteur dans le versement serait traitée par le régime de sanctions précédemment décrit.

b. Le maintien des obligations fiscales du contribuable en l’absence de retenue réalisée par le collecteur

Si le collecteur n’avait effectué aucune retenue à la source, en revanche, le contribuable en resterait redevable. Cette situation est en effet distincte de la précédente dans la mesure où le contribuable n’aurait pas été privé de la part de son revenu correspondant à l’impôt dû, faute de retenue effectuée : son revenu disponible intègrerait la retenue qui aurait dû être faite.

Ce régime découle du 3 de l’article 204 A nouveau du CGI (alinéa 6 du présent article), aux termes duquel « le prélèvement effectué par le débiteur ou acquitté par le contribuable s’impute sur l’impôt sur le revenu dû ». Le fait de ne viser que le « prélèvement effectué » et non celui versé conduit à rendre le contribuable redevable des retenues non réalisées.

En conséquence, la responsabilité du contribuable ne disparaîtrait pas totalement avec la mise en place de la retenue à la source : elle serait maintenue à hauteur de l’impôt finalement dû auquel auraient été imputées les retenues effectuées par le collecteur (que celles-ci aient ou non été versées).

Le collecteur qui n’aurait pas effectué les retenues, quant à lui, s’exposerait aux sanctions précédemment décrites.

B. LA SANCTION DE LA VIOLATION DU SECRET PROFESSIONNEL

Le dispositif de la retenue à la source fait des employeurs les tiers collecteurs, chargés de prélever puis de reverser à l’administration les retenues effectuées sur les rémunérations de leurs salariés.

Pour ce faire, ainsi qu’il a été vu, l’employeur est rendu destinataire par l’administration du taux d’imposition du foyer auquel le salarié appartient ou du taux individualisé en cas d’option en ce sens. En l’absence de taux transmis par l’administration, l’employeur appliquerait aux rémunérations la grille de taux par défaut prévue au 2 de l’article 240 H nouveau du CGI.

Dans la mesure où il n’est pas rare que l’employeur connaisse la situation conjugale ou familiale de ses salariés, surtout dans les petites structures, il lui serait possible, de façon relativement aisée, de déduire du taux transmis la perception de revenus extra-salariaux ou le montant des revenus perçus par le conjoint de son employé (même si, ainsi que cela a été vu, un même taux peut recouvrir un grand nombre de situations – Cf. supra, III, D).

En conséquence, afin de garantir la préservation de la vie privée des contribuables, le projet de réforme met en place plusieurs dispositifs :

– l’option pour la grille de taux par défaut (en principe, hypothèse d’une personne qui perçoit d’autres revenus que son salaire – Cf. supra, III, D) ;

– l’option pour un taux individualisé au sein du foyer fiscal (hypothèse d’un couple dont l’un des membres perçoit des revenus substantiellement plus élevés que l’autre – Cf. supra, VII) ;

– enfin, la sanction pénale de toute divulgation volontaire et non appropriée du taux d’imposition transmis par l’administration.

À cet effet, le présent article introduit dans le livre des procédures fiscales, par le 2° du C de son I, un nouvel article L. 288 A (alinéas 241 à 244, Cf. infra, XV).

Ce nouvel article étendrait aux informations relatives à l’état civil et au taux de prélèvement des contribuables l’obligation de secret professionnel prévue à l’article L. 103 du même code, qui vise les personnes appelées à intervenir, à raison de leurs fonctions, dans l’assiette, le contrôle, le recouvrement ou le contentieux des impôts, taxes et redevances.

Le 31° du B du même I introduit dans le CGI un nouvel article 1753 bis C qui prévoit la sanction de la méconnaissance délibérée de l’obligation de secret professionnel (alinéas 227 à 229 du présent article). Deux types de sanctions seraient prévus :

– toute personne contrevenant intentionnellement à l’obligation serait punie des peines prévues à l’article 226-21 du code pénal, qui sanctionne les personnes détentrices de données à caractère personnel qui détournent ces informations de leur finalité :

• d’une amende de 300 000 euros ;

• et de cinq ans d’emprisonnement.

Il pourrait donc s’agir aussi bien de l’employeur strictement entendu que de toute personne qui, travaillant par exemple dans les services dédiés aux ressources humaines ou à la gestion financière, serait appelée à manier le taux propre du contribuable ;

– les personnes mentionnées aux 3°, 4°, 6° et 7° de l’article L. 133-5-6 du code de la sécurité sociale et qui ont recours au dispositif simplifié de déclaration en matière sociale seraient, quant à elles, punies d’une amende de 10 000 euros. Cela recouvre les particuliers employeurs qui ont recours aux dispositifs suivants :

• services à la personne ;

• garde d’enfants ;

• stagiaires aides familiaux au pair ;

• accueillants familiaux qui accueillent des personnes âgées ou handicapées adultes à titre onéreux.

S’il est compréhensible de ne pas infliger aux particuliers employeurs la sanction prévue à l’article 226-21 du code pénal, particulièrement lourde, l’ampleur de la variation de la sanction applicable en fonction de la qualité de l’auteur de l’infraction n’en demeure pas moins considérable, alors qu’il s’agit dans les deux cas de la même infraction.

La lourdeur de la sanction est nécessaire pour dissuader toute divulgation volontaire du taux d’imposition. Le dispositif s’inscrirait ainsi pleinement dans le souci de la préservation indispensable de la confidentialité des contribuables et garantirait que les nouvelles modalités de recouvrement de l’IR seraient sans conséquences sur la vie privée des employés.

La sanction prévue par le présent article en cas de violation de l’obligation de secret professionnel s’appliquerait à compter du 1er octobre 2017, soit de façon anticipée par rapport à l’essentiel du présent article, en application du 5° du G de son I (alinéa 274). Cette entrée en vigueur anticipée est nécessaire pour éviter tout défaut de couverture de la garantie de confidentialité, dans la mesure où les taux d’imposition propre à chaque foyer fiscal seraient communiqués aux employeurs avant le 1er janvier 2018 aux fins de préparer la mise en œuvre effective du prélèvement à la source.

L’avant-projet d’article prévoyait également l’interdiction de discrimination à raison de la situation fiscale des employés. Néanmoins, compte tenu des difficultés en matière de preuve et des effets potentiellement négatifs du dispositif alors proposé, la version du présent article adoptée en Conseil des ministres et soumise au Parlement n’a pas conservé cette disposition.

Le tableau suivant dresse la synthèse des sanctions applicables aux tiers collecteurs, en fonction du manquement commis.

SANCTIONS ENCOURUES PAR LES TIERS COLLECTEURS DE LA RETENUE À LA SOURCE

Infraction

Fondement dans l’article 38 du présent projet de loi de finances

Base légale

Sanction pécuniaire

Autre sanction

Retard de paiement

Alinéas 224 et 225

1731 CGI

Majoration de 5 % des retenues correspondantes

 – 

Retard de déclarations

Alinéa 226

1736 CGI

Amende de 5 %
des retenues correspondantes

 – 

Omissions ou inexactitudes dans la retenue ou la déclaration prévue à l’article 87-0 A du CGI

Alinéa 232

1759-0 A CGI (nouveau)

Majoration de 5 % des retenues correspondantes

 – 

Non-dépôt de la déclaration prévue à l’article 87-0 A du CGI

Alinéa 233

1759-0 A CGI (nouveau)

Majoration de 5 % des retenues correspondantes

 – 

Non-dépôt, malgré mise en demeure, de la déclaration prévue à l’article 87-0 A du CGI

Alinéa 234

1759-0 A CGI (nouveau)

Majoration de 40 % des retenues correspondantes

 – 

Omissions ou inexactitudes délibérées dans la retenue ou la déclaration prévue à l’article 87-0 A du CGI

Alinéa 234

1759-0 A CGI (nouveau)

Majoration de 40 % des retenues correspondantes

 – 

Défaut délibéré de déclaration et de versement des retenues

Alinéa 235

1759-0 A CGI (nouveau)

Majoration de 80 % des retenues correspondantes

 – 

Défaut de versement des retenues à la source en cas de retard supérieur à un mois

Alinéa 237

1771 CGI

Amende pénale de 9 000 euros

5 ans d’emprisonnement

Violation intentionnelle du secret professionnel

Alinéa 228

1735 bis C (nouveau)

Amende pénale de 300 000 euros

5 ans d’emprisonnement

Violation intentionnelle du secret professionnel (particulier employeur)

Alinéa 229

1735 bis C (nouveau)

Amende pénale de 10 000 euros

 – 

XV. L’UTILISATION DU NIR POUR LES ÉCHANGES ENTRE ADMINISTRATION FISCALE ET COLLECTEURS, L’EXTENSION DE L’OBLIGATION DE SECRET PROFESSIONNEL POUR LE TIERS COLLECTEUR

Texte du projet de loi (alinéas 241 à 244) :

UTILISATION DU NUMÉRO D’INSCRIPTION AU RÉPERTOIRE (NIR) POUR LES ÉCHANGES ET EXTENSION DE L’OBLIGATION DE SECRET PROFESSIONNEL AU TIERS COLLECTEUR

(241) 2° Après l’article L. 288, il est inséré un article L. 288 A ainsi rédigé :

(242) « Art. L. 288 A. – Sur la base du numéro d’inscription au répertoire national d’identification des personnes physiques et des éléments d’état civil communiqués par les débiteurs du prélèvement mentionnés à l’article 204 A du code général des impôts, l’administration fiscale transmet à ceux-ci le taux de prélèvement prévu à l’article 204 E du même code avec le numéro d’inscription au répertoire national d’identification des personnes physiques correspondant.

(243) « Ces opérations sont réalisées et ces informations recueillies, détenues ou transmises aux seules fins des missions définies au présent article ainsi qu’à l’article 204 A du code général des impôts.

(244) « L’obligation de secret professionnel prévue à l’article L. 103 s’étend à ces informations. ».

*

* *

A. L’UTILISATION DU NIR DANS LES RELATIONS ENTRE ADMINISTRATION FISCALE ET COLLECTEURS : L’ENJEU CENTRAL DE LA FIABILITÉ DES IDENTIFIANTS DES CONTRIBUABLES

La réforme proposée prévoit l’utilisation du numéro d’inscription au répertoire (NIR) de l’INSEE – appelé communément numéro de sécurité sociale – afin d’identifier les contribuables, dans le cadre des échanges entre l’administration fiscale et les collecteurs de la retenue à la source.

L’article L. 288 A du livre des procédures fiscales, introduit par le 2° du C du I (alinéas 241 à 244), prévoit ainsi que l’administration fiscale transmettrait aux collecteurs de la retenue à la source le taux de prélèvement des contribuables sur la base du NIR et des éléments d’état civil que ces collecteurs lui communiqueraient.

● Le NIR est d’ores et déjà un identifiant partagé par les payeurs de revenus et l’administration fiscale, en étant utilisé dans le cadre de la déclaration préremplie : les revenus perçus par les contribuables sont transmis à l’administration fiscale par leurs employeurs en se fondant sur le NIR. Ils figurent alors dans la déclaration de revenus envoyée au printemps aux foyers fiscaux.

L’administration fiscale dispose d’une table de correspondance entre le numéro NIR, d’une part, et le numéro SPI (ou simplification des procédures d’imposition) (114), d’autre part, c’est-à-dire l’identifiant fiscal utilisé pour la liquidation de l’impôt. Ainsi, elle peut rattacher au NIR d’un contribuable son SPI, et donc reporter les revenus imposables déclarés par l’employeur sur la déclaration préremplie.

● Dans le cadre de la réforme proposée, le NIR du salarié, ses éléments d’état civil et son adresse, communiqués par les tiers payeurs de revenus via la DSN ou la « déclaration 3 en 1 », devraient permettre à l’administration fiscale d’identifier le contribuable et de transmettre son taux de prélèvement au tiers payeur. C’est également sur la base de ces identifiants que le tiers payeur pourrait déclarer les sommes prélevées sur les revenus du contribuable et que les sommes reversées à l’administration pourraient être rattachées à ce même contribuable.

● Les échecs d’identification des contribuables sur la base du NIR ont aujourd’hui pour conséquence l’absence de renseignement de la déclaration préremplie, que le contribuable doit remplir manuellement. En revanche, dans le contexte du prélèvement à la source, ces échecs d’identification auraient des conséquences beaucoup plus dommageables, puisque, ainsi que l’indique l’évaluation préalable, « le contribuable dont les prélèvements à la source réalisés par son collecteur ne seraient pas portés à la connaissance de l’administration devrait prendre contact avec l’administration fiscale pour justifier que ces prélèvements ont bien été effectués ». Par ailleurs, en cas de difficulté d’identification du contribuable via le NIR, celui-ci se verrait appliquer le taux par défaut par son employeur.

La fiabilité des modalités d’identification des contribuables via le NIR constitue donc un enjeu central pour la mise en œuvre de la réforme.

Le rapport précité sur les scénarios de la réforme du prélèvement à la source relevait que « selon la direction générale des finances publiques, le taux d’appariement entre NIR et SPI est d’environ 90 % », sachant que le rapport a été publié au début de l’année 2012. Depuis cette date, ce taux d’appariement a été amélioré. Selon les informations fournies par l’administration fiscale, « le taux de reconnaissance pour les traitements et salaires d’appariement avec un numéro fiscal est aujourd’hui de l’ordre de 94 % ». Des travaux considérables sont engagés dans la perspective de la mise en œuvre de la réforme afin d’améliorer la fiabilité du système d’identification.

Ainsi, selon l’évaluation préalable, « afin de renforcer la fiabilité du système d’identification, l’administration fiscale a en conséquence mené au premier trimestre 2016 une opération de fiabilisation des identifiants auprès de 1,8 million de contribuables (dont 1,4 million par courrier). Les résultats de cette opération sont très positifs : 800 000 réponses des usagers, en cours de traitement, ont été reçues par l’administration fiscale soit un taux de retour de plus de 60 %. Une nouvelle opération de fiabilisation sera conduite dans les mois à venir auprès des usagers qui n’ont pas répondu à la première opération. Les éléments communiqués par ces usagers contribueront à renforcer le taux de reconnaissance, déjà excellent, des informations transmises à l’administration fiscale par les tiers.

« En complément, en cas d’échec d’identification, les futurs collecteurs devront s’assurer que les données NIR et état civil dont ils disposent dans leur système d’information sont parfaitement fiables, notamment pour les cas plus complexes des personnes nées hors de France. Dans le cadre des groupes de travail mis en place par l’administration fiscale à l’automne 2016, une sensibilisation approfondie à ces problématiques est réalisée et des réponses sont apportées aux collecteurs pour surmonter ces difficultés ».

L’administration fiscale fait également valoir que « la mise en œuvre de la DSN, puis du prélèvement à la source, devrait naturellement augmenter encore davantage le taux de reconnaissance, le collecteur étant informé chaque mois des échecs d’identification ».

Il apparaît donc qu’à ce stade, les opérations de fiabilisation ne sont pas terminées – et que pour la première campagne conduite, environ 40 % des usagers n’ont pas répondu à l’administration fiscale.

Il importe que les importants travaux en cours permettent de parvenir à un taux optimal de reconnaissance des contribuables, sans quoi la retenue à la source pourrait imposer aux contribuables non identifiés des formalités supplémentaires, source de complexité, tout en se traduisant par l’application pour ces derniers du taux par défaut.

B. L’EXTENSION DE L’OBLIGATION DE SECRET PROFESSIONNEL POUR LE TIERS COLLECTEUR

Afin de garantir la confidentialité du taux de prélèvement propre à chaque foyer fiscal, l’article L. 288 A du livre des procédures fiscales étend aux informations relatives à l’état civil et au taux de prélèvement des contribuables l’obligation de secret professionnel prévue à l’article L. 103 du livre des procédures fiscales – aux termes duquel cette obligation s’applique à toutes les personnes appelées à intervenir, à raison de leurs fonctions ou attributions, dans l’assiette, le contrôle, le recouvrement ou le contentieux des impôts, taxes et redevances.

L’article 1753 bis C du CGI, introduit par le présent article et commenté supra, prévoit la sanction de la méconnaissance intentionnelle de cette obligation de secret professionnel, afin de prévenir tout détournement de l’utilisation du taux de prélèvement au sein des entreprises.

L’article L. 288 A précise également que les opérations d’identification ne sont réalisées et que les informations relatives au NIR et aux éléments d’état civil ne sont recueillies, détenues et transmises qu’aux seules fins d’identification des contribuables et de mise en œuvre de la retenue à la source, afin d’encadrer les conditions dans lesquelles ces opérations sont réalisées.

XVI. LE PRÉLÈVEMENT À LA SOURCE DES PRÉLÈVEMENTS SOCIAUX SUR LES REVENUS DU PATRIMOINE

Texte du projet de loi (alinéas 259 à 265 et 245 à 258) :

PRÉLÈVEMENT À LA SOURCE DES PRÉLÈVEMENTS SOCIAUX

(259) 8° Après l’article L. 1366, il est inséré un article L. 13661 ainsi rédigé :

(260) « Art. L. 13661. – 1. Les revenus mentionnés à l’article 204 C du code général des impôts, lorsqu’ils sont soumis à la contribution prévue à l’article L. 1366 du code de la sécurité sociale, dans les conditions prévues au III de cet article, ou lorsqu’ils entrent dans le champ d’application du II bis de l’article L. 1365 du même code donnent lieu, l’année de leur réalisation ou au cours de laquelle le contribuable en a la disposition, à un prélèvement acquitté par le contribuable dans les conditions et selon la même périodicité de versement que celles applicables à l’acompte prévu au 2° du 2 de l’article 204 A du code général des impôts.

(261) « 2. L’assiette du prélèvement afférent aux revenus mentionnés au 1 est déterminée par application des règles définies à l’article 204 G du code général des impôts.

(262) « Le montant du prélèvement est calculé en appliquant à cette assiette le taux des contributions prévues, selon le cas, aux articles L. 1361 ou L. 1366 du code de la sécurité sociale et 14 ou 15 de l’ordonnance n° 9650 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale et des prélèvements prévus aux articles 16000 S du code général des impôts et L. 24514 du code de la sécurité sociale et de la contribution additionnelle prévue à l’article L. 14104 du code de l’action sociale et des familles, afférents à ces mêmes revenus.

(263) « Les demandes présentées en application des articles 204 J à 204 L du code général des impôts s’appliquent également aux prélèvements définis par le présent article.

(264) « 3. Le montant du prélèvement payé au cours d’une année s’impute sur le montant des contributions et prélèvements mentionnés au deuxième alinéa du 2 dû au titre de cette même année. S’il excède le montant dû, l’excédent est restitué.

(265) « 4. Le prélèvement est recouvré et contrôlé selon les modalités et sous les mêmes garanties, sanctions et sûretés que l’acompte prévu au 2° du 2 de l’article 204 A du code général des impôts. ».

[…]

COORDINATION AVEC LE CODE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

(245) D. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

(246) 1° Au 2° du II de l’article L. 13353, les mots : « la déclaration prévue à l’article 87 » sont remplacés par les mots : « les déclarations prévues aux articles 87 et 870 A » ;

(247) 2° Au premier alinéa de l’article L. 13356, après le mot : « sociales » sont insérés les mots : « ainsi que de la retenue à la source prévue à l’article 204 A du code général des impôts » ;

(248) 3° L’article L. 13357 est complété par un 3° ainsi rédigé :

(249) « 3° Déclarer et reverser les montants donnant lieu à la retenue à la source prévue à l’article 204 A du code général des impôts » ;

(250) 4° A l’article L. 13358, les mots : « et contributions sociales » sont remplacés par les mots : «, contributions sociales et de la retenue à la source » et les mots : « et contributions » sont remplacés par les mots : «, contributions et de la retenue à la source » ;

(251) 5° A l’article L. 133510, les mots : « et contributions » sont remplacés par les mots : «, contributions et la retenue à la source » ;

(252) 6° L’article L. 133511 est remplacé par les dispositions suivantes :

(253) « Art. L. 133511. – Les modalités de transmission des déclarations aux régimes et à l’administration fiscale, pour le compte desquels sont recouvrées les cotisations, contributions et la retenue à la source mentionnées à l’article L. 133510 ainsi que les modalités des versements correspondants font l’objet de conventions entre les organismes gérant ces régimes, ainsi que d’une convention avec l’administration fiscale. » ;

(254) 7° Au III de l’article L. 1366 :

(255) a) Au premier alinéa, la deuxième phrase est remplacée par la phrase suivante :

(256) « Le produit annuel de cette contribution résultant, d’une part, des prélèvements prévus par l’article L. 13661 et, d’autre part, des montants des rôles généraux et supplémentaires mis en recouvrement au cours d’une année est versé à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale dans des conditions fixées par convention. » ;

(257) b) Au quatrième alinéa, après les mots : « par article de rôle », sont ajoutés les mots : «, avant imputation des prélèvements prévus par l’article L. 13661, » ;

(258) c) Au cinquième alinéa, les mots : « trente jours » sont remplacés par les mots : « quarantecinq jours » ;

*

* *

Les alinéas 259 à 265 du présent article prévoient que les prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine feraient désormais l’objet d’un prélèvement à la source concomitant au versement de l’acompte de PAS.

En toute logique, ce prélèvement à la source des prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine ne serait opéré que lorsque ces revenus entrent dans le champ de l’acompte prévu par le présent article.

A contrario, les prélèvements sociaux pesant sur des revenus du patrimoine qui n’entrent pas dans le champ de la présente réforme resteraient prélevés par voie de rôle en année N + 1 (pour l’essentiel, les revenus de capitaux mobiliers, les plus-values mobilières, les produits de l’épargne salariale, sachant par ailleurs que les plus-values immobilières, soumises aux prélèvements sociaux sur les revenus de placement, ne sont pas concernées par le présent article).

Les principaux chiffres

Les prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine représentaient 8,6 milliards d’euros en 2015 (en augmentation de 5,8 % par rapport à 2014).

Selon les estimations annexées au projet de loi de financement de la sécurité sociale actuellement en discussion, ils devraient s’élever à 9,2 milliards d’euros en 2016 (+ 7,4 %) et 9,2 milliards d’euros en 2017 (– 0,7 %).

La forte augmentation en 2016 s’expliquerait en particulier par la forte progression des prélèvements sur les plus-values mobilières (+ 34,7 %).

En 2016, une part importante de ce produit devrait être affectée au Fonds de solidarité vieillesse (6,5 milliards).

A. L’ÉTAT DU DROIT

1. Les prélèvements sociaux sur les revenus du capital sont pour partie déjà prélevés à la source

a. La distinction entre revenus du patrimoine et revenu de placement

Au sens de l’article L. 136-6 du code de la sécurité sociale, la catégorie des revenus du patrimoine, faisant l’objet de prélèvements sociaux au taux global de 15,5 %, comprend :

– les revenus fonciers ;

– les rentes viagères constituées à titre onéreux ;

– les revenus de capitaux mobiliers, autre que ceux spécifiquement qualifiés de revenus de placement en raison de l’existence d’un prélèvement à la source particulier ;

– les plus-values mobilières ainsi que le gain d’acquisition lié à l’attribution gratuite d’actions ;

– les plus-values latentes et créances imposables au titre de l’exit tax ;

– les plus-values de cessions de parts d’une société d’investissement à capital variable (SICAV) ou d’un fonds commun de placement (FCP) dont l’imposition à l’IR fait l’objet d’un report (en application de l’article 150-0 B quater) ;

– les revenus qui entrent dans la catégorie des BIC, des BNC, des BA qui ne sont pas assujettis aux prélèvements sociaux sur les revenus d’activité ou de remplacement (pour l’essentiel, il s’agit donc des revenus tirés de locations meublées non professionnelles imposées dans la catégorie des BIC) ;

– les revenus perçus par des non-résidents fiscaux tirés d’immeubles situés en France.

Au sens de l’article L. 136-7 du code de la sécurité sociale, la catégorie des revenus de placement, faisant l’objet de prélèvements sociaux au taux global de 15,5 %, comprend :

– les revenus de l’assurance vie faisant l’objet d’un prélèvement à la source spécifique ;

– les produits de placement à revenu fixe, faisant également l’objet d’un PAS spécifique ;

– les dividendes faisant l’objet d’un PAS spécifique au taux de 21 % ;

– les plus-values immobilières dont l’imposition à l’IR, au taux proportionnel de 19 %, fait également l’objet d’une retenue à la source ;

– les comptes d’épargne logement et les plans d’épargne logement lorsqu’ils sont soumis à l’IR ;

– les plans d’épargne populaire ;

– le gain imposable tiré du retrait anticipé d’un PEA ;

– les produits tirés de la délivrance des sommes issues de la participation et de l’intéressement ou d’un plan d’épargne entreprise.

Pour certaines catégories de revenus (notamment les revenus de capitaux mobiliers), la distinction entre les revenus du patrimoine et de placement – au sens du code de la sécurité sociale – découle donc davantage de l’existence ou non d’un prélèvement à la source que d’une réelle différence de nature entre le patrimoine ou les placements du redevable.

Les différents prélèvements sur les revenus du patrimoine et de placement

Il existe aujourd’hui cinq prélèvements sociaux applicables aux produits du patrimoine :

– la contribution sociale généralisée (CSG) prévue à l’article L. 136-7 du code de la sécurité sociale, au taux de 8,2 % ;

– la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS), prévue à l’article 16 de l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale, au taux de 0,5 % ;

– le prélèvement social prévu à l’article L. 245-15 du code de la sécurité sociale au taux de 4,5 %. Rappelons que le taux du prélèvement social a connu deux hausses successives : il est d’abord passé de 2,2 % à 3,4 % pour les produits de placement acquis ou constatés à compter du 1er octobre 2011 (loi de finances rectificative pour 2011). Il a ensuite été porté par la loi de finances rectificative pour 2012 de 3,4 % à 4,5 % pour les produits de placement acquis ou constatés à compter du 1er juillet 2012 ;

– le prélèvement de solidarité mentionné à l’article 1600-0 S du CGI, au taux de 2 %. Créé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, ce prélèvement s’est en réalité substitué à la contribution additionnelle au prélèvement social, dite « contribution RSA », dont le taux s’établissait à 1,1 % ;

– et enfin, la contribution de solidarité pour l’autonomie prévue à l’article L. 14-10-4 du code de l’action sociale et des familles, au taux de 0,3 %.

La CSG sur les revenus du patrimoine est déductible du revenu global à hauteur de 5,1 %.

b. Les prélèvements sociaux sur les produits de placement sont déjà prélevés à la source

Conformément à l’article L. 136-7 du code de la sécurité sociale, les revenus de placement font l’objet des prélèvements sociaux au taux global de 15,5 % au moment de leur versement aux bénéficiaires.

Ils font donc l’objet d’un prélèvement à la source dans les mêmes conditions que le prélèvement à la source opéré sur ces produits de placement au titre de l’impôt sur le revenu.

2. Les prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine sont encore prélevés par voie de rôle en année N + 1

Conformément au III de l’article L. 136-6 du code de la sécurité sociale, les prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine sont recouvrés selon les mêmes règles que l’IR.

Ils sont donc perçus par voie de rôle en même temps que l’IR en année N + 1.

PRÉLÈVEMENTS SOCIAUX SUR LES REVENUS DU PATRIMOINE FIGURANT SUR LE MÊME ARTICLE DE RÔLE QUE L’IMPÔT SUR LE REVENU

Nature de la contribution

Taux

Base d’application

Contribution sociale généralisée (CSG)

8,2 %

– Revenus fonciers

– Rentes viagères à titre onéreux : fraction imposable à l’impôt sur le revenu

– Revenus de capitaux mobiliers soumis à l’impôt sur le revenu et qui n’ont pas fait l’objet d’un prélèvement à la source des prélèvements sociaux

– Plus-values de cession de valeurs mobilières et gains divers avant application éventuelle des abattements pour durée de détention et de l’abattement fixe ; plus-values exonérées des « impatriés » ; plus-values en report d’imposition

– Gains de levée d’options et gains d’acquisition d’actions gratuites attribuées avant le 28 septembre 2012

– Revenus des professions non salariées (BA, BIC, BNC) qui ne font pas l’objet d’un prélèvement par les organismes sociaux (notamment BIC non professionnels et, en particulier, locations meublées non professionnelles)

– Plus-values à long terme des professions non salariées, taxées à 16 %

– Revenus d’origine indéterminée soumis à l’impôt sur le revenu en application des articles L. 66-1° et L. 69 du livre des procédures fiscales et des articles 168, 1649 A et 1649 quater A du CGI

– Revenus dont l’imposition est attribuée à la France par une convention internationale relative aux doubles impositions.

Contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS)

0,5 %

Prélèvement social

4,5 %

Contribution additionnelle « solidarité autonomie »

0,3 %

Prélèvement de solidarité

2 %

Par dérogation aux règles applicables aux prélèvements sociaux sur les revenus d’activité ou de remplacement – qui sont prélevés au moment de leur versement au bénéficiaire –, le II bis de l’article L. 136-5 du code de la sécurité sociale prévoit que :

– les prélèvements sociaux sur les revenus d’activité ou de remplacement, lorsqu’ils sont de source étrangère, sont recouvrés comme les prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine sous réserve que ces prélèvements n’aient pas fait l’objet d’un précompte par l’employeur ;

– le prélèvement sur l’avantage lié à la levée d’une stock-option est également recouvré selon les mêmes modalités que les prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine.

B. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Compte tenu de la mise en place du prélèvement à la source de l’IR, il est logique que les prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine fassent également l’objet d’un prélèvement à la source.

1. Les prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine seraient prélevés à la source dès lors qu’ils entrent dans le champ de l’acompte

Les alinéas 259 et 260 du présent article prévoient que les revenus soumis au PAS sous la forme d’un acompte – conformément à l’article 204 C du CGI commenté supra – feraient également l’objet d’un prélèvement à la source des prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine.

En pratique, le recoupement entre le champ des prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine et celui des revenus soumis au PAS sous forme d’acompte permet de déduire le champ des revenus concernés par la présente disposition :

– les revenus soumis à l’IR dans la catégorie des BIC, des BNC et des BA (soumis à l’acompte) qui entrent dans le champ des prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine. En pratique, il s’agit pour l’essentiel des revenus tirés de locations meublées non professionnelles imposées dans la catégorie des BIC ;

– les revenus fonciers ;

– les revenus rentes viagères constituées à titre onéreux.

Les autres revenus visés par les prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine étant placés hors du champ du PAS, ils ne seraient donc pas visés par la présente disposition (pour l’essentiel les revenus de capitaux mobiliers ne faisant pas l’objet d’une retenue à la source, les plus-values mobilières, les plus-values taxables au titre de l’exit tax ou placées en report d’imposition).

Les revenus salariaux visés au II bis de l’article L 136-5 du code de la sécurité sociale mentionné précédemment, qui sont par dérogation prélevés comme les prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine, feraient par conséquent également l’objet d’un prélèvement à la source.

Le fait générateur de la perception à la source de ces prélèvements sociaux serait constitué par la réalisation de ces revenus ou leur perception par le contribuable.

L’assiette de l’acompte serait identique à celle de l’acompte d’IR, telle que définie par l’article 204 G commenté précédemment.

Le taux applicable serait le taux global de 15,5 % mentionné précédemment.

Par symétrie avec l’acompte d’IR, les demandes de modulation ou d’acompte spontané seraient également applicables à ces prélèvements sociaux.

Le PAS acquitté sur ces revenus du patrimoine en année N s’imputerait sur le montant exigible en année N + 1 ; lors de la régularisation, l’excédent perçu serait éventuellement restitué.

2. Les mesures de coordination avec le code de la sécurité sociale

Les alinéas 245 à 258 prévoient par ailleurs diverses dispositions de coordination du code de la sécurité sociale avec la mise en place d’un prélèvement à la source des prélèvements sociaux sur le patrimoine ou la mise en place d’obligations déclaratives des tiers collecteurs dans le cadre du PAS.

Au-delà de la simple mise en cohérence, le droit proposé modifie le droit en vigueur sur un point : l’alinéa 258 prévoit que la majoration de 10 % applicable lorsque les prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine ne seraient pas perçus dans les temps serait appliquée quarante-cinq jours après la mise en recouvrement et non trente jours dans le droit en vigueur. Il s’agit d’une mise en cohérence avec la majoration de 10 % applicable en cas de retard de paiement de l’impôt sur le revenu, ce délai de quarante-cinq jours figurant à l’article 1730 du CGI.

XVII. L’ENTRÉE EN VIGUEUR DE LA RÉFORME

Texte du projet de loi (alinéas 270 à 274) :

ENTRÉE EN VIGUEUR

(270) G. – 1° Sous réserve des 2° à 5°, les A à F s’appliquent aux revenus perçus ou réalisés à compter du 1er janvier 2018 ;

(271) 2° Le 5° du B s’applique aux déclarations mentionnées aux articles 87, 88, 240 et 241 du code général des impôts afférentes aux revenus perçus ou réalisés à compter du 1er janvier 2017 et aux déclarations mentionnées à l’article 870 A du même code afférentes aux revenus perçus à compter du 1er janvier 2018 ;

(272) 3° Les 13° et 19° du B s’appliquent à compter de l’imposition des revenus perçus ou réalisés à compter du 1er janvier 2017 ;

(273) 4° Le 20° du B s’applique à compter des impositions dues au titre de l’année 2018 ;

(274) 5° Les 31° du B et 2° du C s’appliquent à compter du 1er octobre 2017.

*

* *

A. UNE RÉFORME APPLICABLE AUX REVENUS PERÇUS ET RÉALISÉS À COMPTER DU 1ER JANVIER 2018

● Aux termes du du G du I (alinéa 270), les dispositions du I relatives à la mise en œuvre de la réforme s’appliquent aux revenus perçus et réalisés à compter du 1er janvier 2018, sous réserve de certaines exceptions énumérées aux 2° à 5° du même G.

Le prélèvement à la source, soit sous la forme de l’acompte, soit sous la forme de la retenue à la source, trouverait à s’appliquer à tous les revenus se trouvant dans le champ de la réforme, et que le contribuable a perçus ou réalisés à partir de l’année 2018.

● Corrélativement, le du G du I (alinéa 272) prévoit que les tiers provisionnels et les mensualités dus au titre de l’imposition des revenus de l’année 2017 ne seraient pas appelés par l’administration fiscale à compter du 1er janvier 2018. Comme cela est décrit infra, afin d’éviter une double contribution des foyers fiscaux aux charges publiques en 2018, à la fois au titre de l’imposition des revenus de 2017 et au titre de l’imposition des revenus de 2018 via le prélèvement à la source, un dispositif spécifique est prévu pour l’imposition des revenus perçus en 2017, visant à effacer une large partie de l’impôt dû à ce titre.

C’est la raison pour laquelle il est précisé que l’abrogation de l’article 1664 (13° du B du I, soit l’alinéa 148), définissant le régime des acomptes par tiers provisionnels, ainsi que celle des articles 1681 A à 1681 E (19° du B du I, soit l’alinéa 176) relatifs aux modalités du paiement mensuel de l’impôt, s’appliqueraient pour l’imposition des revenus perçus ou réalisés à compter du 1er janvier 2017.

● Le du G du I (alinéa 273) dispose que les modalités de mensualisation du paiement de la taxe d’habitation, de la CAP et de la taxe foncière, définies par le 20° du B du I (alinéas 177 à 189) s’appliqueraient à compter des impositions dues au titre de l’année 2018.

En effet, le 20° du B du I tire les conséquences de la suppression des dispositions relatives à la mensualisation de l’impôt sur le revenu, auxquelles renvoyaient les articles 1681 ter, 1681 ter A et 1681 ter B relatifs à la mensualisation de la taxe d’habitation, de la CAP et de la taxe foncière, en proposant une nouvelle rédaction de l’article 1681 ter. Celui-ci définit selon quelles modalités ces différents prélèvements pourraient être mensualisés.

Les dispositions de l’article 1681 ter ainsi rédigé trouveraient ainsi à s’appliquer à la taxe d’habitation, à la CAP et à la taxe foncière dues à compter de l’année 2018.

B. L’ENTRÉE EN VIGUEUR ANTICIPÉE DES DISPOSITIONS RELATIVES À L’INFORMATISATION DES DÉCLARATIONS ET À L’OBLIGATION DE SECRET PROFESSIONNEL S’IMPOSANT AUX COLLECTEURS

1. La généralisation de l’informatisation de certaines déclarations applicable dès le 1er janvier 2017

Comme vu supra, le 5° du B du I (alinéas 117 et 118) modifie l’article 89 A du CGI relatif aux modalités de transmission de certaines déclarations à l’administration fiscale, pour étendre son champ à la nouvelle déclaration prévue par l’article 87-0 A incombant aux collecteurs de la retenue à la source, et pour généraliser la transmission informatique à tous les déclarants
– cette transmission informatique n’étant aujourd’hui obligatoire que lorsque le déclarant a souscrit au cours de l’année précédente une déclaration comportant au moins 200 bénéficiaires.

Aux termes du du G du I (alinéa 271), les dispositions de l’article 89 A du CGI portant sur les déclarations déjà existantes, à savoir celles figurant aux articles 87, 88, 240 et 241, s’appliquent aux déclarations afférentes aux revenus perçus et réalisés à compter du 1er janvier 2017 : en d’autres termes, la généralisation de leur transmission informatique, quel que soit le nombre de bénéficiaires du déclarant, s’appliquerait dès le 1er janvier 2017.

Les dispositions de l’article 89 A relatives à la nouvelle déclaration réalisée par les tiers collecteurs s’appliqueraient quant à elle à compter du 1er janvier 2018, soit, fort logiquement, la même date d’entrée en vigueur que cette déclaration.

2. L’application des dispositions relatives à l’obligation de secret professionnel pour les collecteurs à compter du 1er octobre 2017

Comme l’indique l’évaluation préalable, une « phase d’initialisation des taux de prélèvement entre les collecteurs de la retenue à la source et l’administration fiscale » est prévue à l’automne 2017, aux mois d’octobre et novembre. Cette phase a pour objectif de transmettre l’ensemble des taux de prélèvement aux collecteurs afin de leur permettre de procéder, le cas échéant, dès le mois de décembre 2017 (pour ceux qui liquident les revenus au cours de ce mois en préparation d’un versement du revenu début janvier 2018) aux calculs des retenues à la source relatives aux versements de janvier 2018.

C’est la raison pour laquelle le du G du I (alinéa 274) dispose que s’appliqueraient à compter du 1er octobre 2017 :

– le 2° du C du I (alinéas 241 à 244), qui crée l’article L. 288 A du livre des procédures fiscales étendant l’obligation de secret professionnel au taux de prélèvement transmis par l’administration fiscale aux tiers collecteurs de la retenue à la source ;

– et le 31° du B du I (alinéas 227 à 229), instaurant l’article 1753 bis C du CGI qui définit les sanctions applicables en cas de violation de l’obligation de secret professionnel prévue par l’article L. 288 A.

Cette entrée en vigueur anticipée des dispositions relatives au respect du secret professionnel se justifie par le fait que les collecteurs de la retenue à la source disposeront des informations sur le taux de prélèvement de leurs salariés dès octobre 2017.

DEUXIÈME PARTIE : LA PÉRIODE DE TRANSITION

Texte du projet de loi (alinéas 275 à 340) :

CRÉDIT D’IMPÔT « MODERNISATION DU RECOUVREMENT » (CIMR)

(275) II. – A. – Les contribuables bénéficient, à raison des revenus non exceptionnels entrant dans le champ du prélèvement mentionné à l’article 204 A du code général des impôts, tel qu’il résulte de la présente loi, perçus ou réalisés en 2017, d’un crédit d’impôt « modernisation du recouvrement » destiné à assurer, pour ces revenus, l’absence de double contribution aux charges publiques en 2018 au titre de l’impôt sur le revenu.

(276) B. – Le crédit d’impôt prévu au A est égal au montant de l’impôt sur le revenu dû au titre de l’année 2017 résultant de l’application des règles prévues aux 1 à 4 du I de l’article 197 du code général des impôts ou, le cas échéant, à l’article 197 A du même code multiplié par le rapport entre les montants nets imposables des revenus non exceptionnels mentionnés au 1 de l’article 204 A du code général des impôts, les déficits étant retenus pour une valeur nulle, et le revenu net imposable au barème progressif de l’impôt sur le revenu, hors déficits, charges et abattements déductibles du revenu global. Le montant obtenu est diminué des crédits d’impôt prévus par les conventions fiscales internationales afférents aux revenus mentionnés au 1 de l’article 204 A du code précité.

DÉFINITION DES REVENUS NON EXCEPTIONNELS RELEVANT DE LA CATÉGORIE DES TRAITEMENTS ET SALAIRES

(277) C. – Sont pris en compte au numérateur du rapport prévu au B pour le calcul du crédit d’impôt prévu au A les montants nets imposables suivant les règles applicables aux salaires, aux pensions ou aux rentes viagères à l’exception :

(278) – des indemnités versées à l’occasion de la rupture du contrat de travail ;

(279) – des indemnités versées à l’occasion de la cessation des fonctions des mandataires sociaux et dirigeants ;

(280) – des indemnités de clientèle, de cessation d’activité et celles perçues en contrepartie de la cession de la valeur de la clientèle ;

(281) – des indemnités, allocations et primes versées en vue de dédommager leurs bénéficiaires d’un changement de résidence ou de lieu de travail ;

(282) – des prestations mentionnées à l’article 80 decies du code général des impôts ;

(283) – des prestations de retraite servies sous forme de capital ;

(284) – des aides et allocations capitalisées servies en cas de conversion, de réinsertion ou pour la reprise d’une activité professionnelle ;

(285) – des sommes perçues au titre de la participation ou de l’intéressement et non affectées à la réalisation de plans d’épargne constitués conformément aux dispositions du titre III du livre III de la troisième partie du code du travail, ainsi que les sommes mentionnées au a du 18° de l’article 81 du code général des impôts ;

(286) – des sommes retirées par le contribuable d’un plan mentionné à l’alinéa précédent ;

(287) – des sommes issues de la monétisation de droits inscrits sur un compte épargne temps ;

(288) – des gratifications surérogatoires, quelle que soit la dénomination retenue par l’employeur ;

(289) – des revenus qui correspondent par leur date normale d’échéance à une ou plusieurs années antérieures ou postérieures ;

(290) – de tout autre revenu qui, par sa nature, n’est pas susceptible d’être recueilli annuellement.

DÉFINITION DES REVENUS FONCIERS NON EXCEPTIONNELS

(291) D. – 1. Le montant net imposable du revenu foncier à retenir au numérateur du rapport prévu au B pour le calcul du crédit d’impôt prévu au A est déterminé, sous réserve du 2, dans les conditions prévues aux articles 14 à 33 quinquies du code général des impôts, au 3° du I de l’article 156 du même code et au I du II du présent article.

(292) Ce montant est retenu à proportion de la part des recettes foncières suivantes dans le total des recettes foncières de l’année 2017 :

(293) 1° Loyers et fermages perçus en 2017 directement ou indirectement par le contribuable et dont l’échéance est intervenue au titre de cette même année à raison de l’exécution normale des contrats ou conventions de toute nature conclus entre les propriétaires et les locataires.

(294) Toutefois, les loyers et fermages échus en 2017 :

(295) – consistant en la remise d’immeubles ou de titres donnant vocation à la propriété ou à la jouissance de tels immeubles, de constructions ou d’aménagements en sont exclus ;

(296) – à raison de l’exécution des contrats ou conventions et couvrant une période de location supérieure à douze mois ne sont retenus que dans la limite d’un montant correspondant à douze mois ;

(297) 2° Revenus des propriétés dont le propriétaire se réserve la jouissance, mentionnés à l’article 30 du code général des impôts.

(298) 2. En cas de rupture d’un engagement, les majorations du revenu net foncier effectuées au titre de l’année 2017 en application des dispositions des f à m du 1° du I de l’article 31 du code général des impôts, de l’article 31 bis dudit code et du III de l’article 156 bis du même code, ne sont pas prises en compte dans le montant net imposable du revenu foncier mentionné au 1.

DÉFINITION DES REVENUS NON EXCEPTIONNELS POUR LES INDÉPENDANTS

(299) E. – 1. Le montant net imposable des bénéfices industriels et commerciaux, des bénéfices agricoles et des bénéfices non commerciaux à retenir au numérateur du rapport prévu au B pour le calcul du crédit d’impôt prévu au A est déterminé, pour chaque membre du foyer fiscal et pour chacune de ces catégories de revenus, dans les conditions prévues à l’article 204 G du code général des impôts.

(300) 2. Ce montant, le cas échéant après application des abattements prévus aux articles 44 sexies à 44 quindecies du code général des impôts, est retenu dans la limite du plus faible des deux montants suivants :

(301) 1° Le bénéfice imposable au titre de l’année 2017, déterminé selon les règles prévues au 1, avant application des éventuels abattements prévus aux articles 44 sexies à 44 quindecies du code précité ;

(302) 2° Le plus élevé des bénéfices imposables au titre des années 2014, 2015 ou 2016,déterminé selon les règles prévues au 1, avant application des éventuels abattements prévus aux articles 44 sexies à 44 quindecies du même code.

(303) Les dispositions du présent 2 ne sont pas applicables lorsque le bénéfice imposable en 2017 est le premier bénéfice déclaré à la suite d’une création d’activité en 2017. Toutefois, lorsque le bénéfice réalisé en 2018 par le membre concerné du foyer, majoré le cas échéant des traitements et salaires, des bénéfices qu’il a réalisés relevant des autres catégories mentionnées au 1 et des revenus des gérants et associés mentionnés à l’article 62 du code général des impôts qu’il a perçus, imposables au titre de cette même année, est inférieur au bénéfice réalisé en 2017 majoré le cas échéant de ses revenus relevant des autres catégories précitées réalisés en 2017, le crédit d’impôt est remis en cause à hauteur de la différence constatée, dans la limite de la différence, lorsqu’elle est positive, entre le bénéfice réalisé en 2017 et le bénéfice réalisé en 2018, sauf si le contribuable justifie que la baisse de son bénéfice en 2018 résulte uniquement de la variation de son activité par rapport à 2017.

COMPLÉMENT DE CIMR POUR LES INDÉPENDANTS EN 2019

(304) 3. En cas d’application du 2° du 2, le contribuable peut obtenir un crédit d’impôt complémentaire dans les conditions suivantes :

(305) 1° Lorsque le bénéfice imposable au titre de l’année 2018, déterminé selon les règles prévues au 1, est supérieur ou égal au bénéfice imposable au titre de l’année 2017, déterminé selon les mêmes règles, le contribuable bénéficie d’un crédit d’impôt complémentaire, lors de la liquidation du solde de l’impôt sur le revenu dû au titre de 2018, égal à la fraction du crédit d’impôt dont il n’a pas pu bénéficier en application du 2 ;

(306) 2° Lorsque le bénéfice imposable au titre de l’année 2018, déterminé selon les règles prévues au 1, est inférieur au bénéfice imposable au titre de l’année 2017, déterminé selon les mêmes règles, mais supérieur au plus élevé des bénéfices imposables au titre des années 2014, 2015 ou 2016 retenus en application du 2° du 2, le contribuable bénéficie, lors de la liquidation du solde de l’impôt sur le revenu au titre de 2018, d’un crédit d’impôt complémentaire égal à la différence entre :

(307) – le crédit d’impôt calculé en retenant au numérateur du rapport prévu au B le bénéfice imposable au titre de l’année 2018, déterminé selon les règles prévues au 1 ;

(308) – et le crédit d’impôt déjà obtenu en application du 2 ;

(309) 3° Lorsque le bénéfice imposable au titre de l’année 2018, déterminé selon les règles prévues au 1, est inférieur au bénéfice imposable au titre de l’année 2017, déterminé selon les mêmes règles, le contribuable peut bénéficier, par voie de réclamation, d’un crédit d’impôt complémentaire égal à la fraction du crédit d’impôt dont il n’a pas pu bénéficier en application du 2 ou des deuxième à quatrième alinéas, s’il justifie que la hausse de son bénéfice déclaré en 2017 par rapport aux trois années précédentes et à l’année 2018 résulte uniquement d’un surcroît d’activité en 2017.

(310) 4. Pour l’application des 1 et 2, si le bénéfice imposable au titre des années 2014, 2015 et 2016 s’étend sur une période de moins de douze mois, il est ajusté prorata temporis sur une année.

(311) 5. Les contribuables mentionnés à l’article 1510 du code général des impôts, tel qu’il résulte de la présente loi, qui ont dénoncé leur option en 2016 pour 2017 et qui ont exercé une nouvelle option pour le versement libératoire en 2017 pour 2018 ne bénéficient pas du crédit d’impôt prévu au A.

DÉFINITION DES REVENUS NON EXCEPTIONNELS DES DIRIGEANTS

(312) F. – 1. Les montants nets imposables suivant les règles applicables aux salaires perçus dans les conditions mentionnées au 2 à retenir au numérateur du rapport prévu au B pour le calcul du crédit d’impôt prévu au A, après application du C, sont retenus dans la limite du plus faible des deux montants suivants :

(313) 1° Leur montant net imposable au titre de l’année 2017 ;

(314) 2° Le plus élevé de ces revenus imposables au titre des années 2014, 2015 ou 2016.

(315) 2. Les dispositions du 1 sont applicables :

(316) 1° Aux rémunérations perçues par les personnes qui, au sens des a et c du 2° du III de l’article 1500 B ter du code général des impôts, contrôlent en 2017 la société qui les leur verse au cours de cette même année ;

(317) 2° Aux rémunérations perçues par les conjoints, ascendants, descendants ou frères et sœurs des personnes qui, au sens de l’alinéa précédent, contrôlent la société qui les leur verse en 2017 au cours de cette même année.

(318) 3. Ces dispositions ne s’appliquent pas lorsque l’année 2017 constitue la première année au titre de laquelle les personnes concernées perçoivent des rémunérations mentionnées au 2.

(319) Toutefois, lorsque les rémunérations perçues en 2018 par ces personnes, majorées le cas échéant de leurs autres traitements et salaires, de leurs bénéfices relevant des catégories mentionnées au 1 du E et de leurs autres revenus des gérants et associés mentionnés à l’article 62 du code général des impôts imposables au titre de cette même année, sont inférieures à celles perçues en 2017 de la même société, majorées le cas échéant de ces mêmes autres revenus réalisés en 2017, le bénéfice du crédit d’impôt est remis en cause à hauteur de la différence constatée, dans la limite de la différence, lorsqu’elle est positive, entre les rémunérations perçues en 2017 et celles perçues en 2018.

(320) 4. En cas d’application du 2° du 1, lorsque les rémunérations imposables suivant les règles applicables aux salaires perçues de la même société en 2018 sont supérieures ou égales à celles perçues en 2017, le contribuable peut demander, par voie de réclamation, la restitution de la fraction du crédit d’impôt dont il n’a pas pu bénéficier en application du 1.

(321) Dans le cas où les rémunérations imposables suivant les règles applicables aux salaires perçues de la même société en 2018 sont inférieures à celles perçues en 2017 mais supérieures à la plus élevée des rémunérations perçues au titre des années 2014, 2015 ou 2016 retenues en application du 2° du 1, le contribuable peut demander par voie de réclamation, la restitution d’une partie de la fraction du crédit d’impôt dont il n’a pas pu bénéficier en application du 1 à hauteur de la différence constatée entre les rémunérations perçues en 2018 et, selon le cas, celles perçues en 2014, 2015 ou 2016.

(322) À défaut, la restitution de la fraction du crédit d’impôt dont le contribuable n’a pas pu bénéficier en application du 1 peut également être demandée, sous réserve qu’il justifie, d’une part, que la hausse des rémunérations déclarées en 2017 par rapport à celles perçues de la même société les trois années précédentes correspond à une évolution objective des responsabilités qu’il a exercées ou à la rémunération normale de ses performances au sein de cette société en 2017 et, d’autre part, que la diminution de cette même rémunération en 2018 est également justifiée.

MODALITÉS DE PRISE EN COMPTE DU CIMR

(323) G. – Le crédit d’impôt prévu au A et le crédit d’impôt complémentaire prévu au 3 du E accordés au titre de l’impôt sur le revenu dû au titre de l’année 2017 s’imputent sur l’impôt sur le revenu dû, respectivement, au titre des revenus 2017 ou 2018, après imputation de toutes les réductions et crédits d’impôt et de tous les prélèvements ou retenues non libératoires.

(324) L’excédent éventuel est restitué.

(325) H. – Le crédit d’impôt prévu au A et le crédit d’impôt complémentaire prévu au 3 du E ne sont pas retenus pour l’application du plafonnement mentionné à l’article 2000 A du code général des impôts.

MESURE REVENUS FONCIERS SUR LES TRAVAUX 2017/2018

(326) I. – Par dérogation aux dispositions des articles 12, 13, 28 et 31 du code général des impôts, les charges de la propriété sont déductibles dans les conditions suivantes :

(327) 1° Celles mentionnées aux a bis, a quater et c à e bis du 1° du I de l’article 31 du code général des impôts, afférentes à des dettes dont l’échéance intervient en 2017, ne sont déductibles que pour la détermination du revenu net foncier imposable de l’année 2017 ;

(328) 2° Celles mentionnées aux a, b et b bis du 1° et aux c à c quinquies du 2° du I de l’article 31 du code général des impôts sont retenues, pour la détermination du revenu net foncier imposable de l’année 2018, à hauteur de 50 % des montants respectivement supportés au titre de ces mêmes dépenses en 2017 et en 2018.

(329) Toutefois, l’alinéa précédent ne s’applique pas aux dépenses afférentes à des travaux d’urgence rendus nécessaires par l’effet de la force majeure ou effectués sur un immeuble acquis en 2018.

CLAUSE GÉNÉRALE ANTI-OPTIMISATION

(330) J. – 1. L’administration fiscale peut demander au contribuable des justifications sur tous les éléments servant de base à la détermination du montant du crédit d’impôt prévu au A ou du crédit d’impôt complémentaire prévu au 3 du E sans que cette demande constitue le début d’une procédure de vérification de comptabilité ou d’une procédure d’examen de situation fiscale personnelle.

(331) Cette demande indique expressément au contribuable les points sur lesquels elle porte et lui fixe un délai de réponse qui ne peut être inférieur à deux mois.

(332) Lorsque le contribuable a répondu de façon insuffisante à la demande de justifications, l’administration fiscale lui adresse une mise en demeure d’avoir à compléter sa réponse dans un délai de trente jours en précisant les compléments de réponse qu’elle souhaite.

(333) Lorsque le contribuable s’est abstenu de répondre à la demande de justifications ou de compléments, l’administration fiscale peut remettre en cause le montant du crédit d’impôt prévu au A ou du crédit d’impôt complémentaire prévu au 3 du E selon les procédures d’imposition d’office prévues aux articles L. 65 et suivants du livre des procédures fiscales.

(334) Si la réponse fait apparaître que le contribuable a procédé à des opérations qui ont eu principalement pour objet et pour effet d’augmenter le montant du crédit d’impôt prévu au A ou de son crédit d’impôt complémentaire prévu au 3 du E, l’administration peut remettre en cause le montant de ces crédits d’impôt selon les procédures prévues aux articles L. 55 et suivants du livre des procédures fiscales.

(335) 2. Pour l’impôt sur le revenu dû au titre de l’année 2017, le droit de reprise de l’administration fiscale s’exerce jusqu’à la fin de la quatrième année qui suit celle au titre de laquelle l’imposition est due.

(336) 3. Seuls les revenus déclarés spontanément par le contribuable sont pris en compte dans le calcul du montant du crédit d’impôt prévu au A et du crédit d’impôt complémentaire prévu au 3 du E.

CRÉDIT D’IMPÔT PRÉLÈVEMENTS SOCIAUX

(337) K. – Les revenus de l’année 2017 mentionnés à l’article 204 C du code général des impôts lorsqu’ils sont soumis à la contribution prévue à l’article L. 1366 du code de la sécurité sociale, dans les conditions prévues au III de cet article, ou lorsqu’ils sont soumis à la contribution prévue à l’article L. 1361 du code précité, dans les conditions prévues au II bis de l’article L. 1365 du même code ouvrent droit à un crédit d’impôt dans les mêmes conditions que celles prévues au A, ainsi qu’à un crédit d’impôt complémentaire dans les mêmes conditions que celles prévues au 3 du E.

(338) Le montant du crédit d’impôt est calculé en appliquant au montant des revenus déterminés dans les conditions prévues aux B à F le taux des contributions prévues selon le cas aux articles L. 1361 ou L. 1366 du code de la sécurité sociale et 14 ou 15 de l’ordonnance n° 9650 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale et des prélèvements prévus aux articles 16000 S du code général des impôts et L. 24514 du code de la sécurité sociale et de la contribution additionnelle prévue à l’article L. 14104 du code de l’action sociale et des familles, afférents à ces mêmes revenus.

(339) Le crédit d’impôt prévu au premier alinéa et son crédit d’impôt complémentaire accordés au titre des revenus de l’année 2017 s’imputent sur les contributions et prélèvements mentionnés au deuxième alinéa et dus respectivement au titre des revenus 2017 ou 2018. S’il excède les contributions et prélèvements dus, l’excédent est restitué.

(340) Les dispositions du J sont applicables au crédit d’impôt prévu au premier alinéa et à son crédit d’impôt complémentaire.

*

* *

La réforme prenant effet à compter du 1er janvier 2018, l’année 2018 constituerait l’année de transition, durant laquelle serait opéré le basculement entre un régime fondé sur un décalage d’un an entre la perception des revenus et leur imposition, vers un régime d’imposition contemporaine des revenus.

En l’absence de modalités particulières d’imposition, le contribuable pourrait être amené à acquitter en 2018 l’impôt sur ses revenus de l’année 2017, mais aussi le prélèvement à la source sur les revenus perçus au cours de l’année 2018 – pour ceux se trouvant dans le champ de la réforme.

Une telle situation n’est pas envisageable, en ce qu’elle se traduirait, pour les contribuables, par une double contribution aux charges publiques, s’agissant des revenus se trouvant dans le champ de la réforme – qui représentent, pour mémoire, 97,5 % de l’assiette de l’impôt. C’est la raison pour laquelle le présent article propose un dispositif spécifique, qui vise trois objectifs :

– ne pas introduire de rupture caractérisée d’égalité devant les charges publiques qui résulterait d’un paiement excessif, voire confiscatoire, de l’impôt, tant au titre des revenus de 2017 que de ceux de 2018 ;

– conserver pour les contribuables le bénéfice des réductions et crédits d’impôt au titre des dépenses et investissements réalisés en 2017 (dons, emploi d’un salarié à domicile, investissements locatifs…), afin de maintenir au même niveau le soutien apporté aux différents secteurs sociaux et économiques par l’intermédiaire de ces avantages fiscaux ;

– maintenir le niveau de recettes d’impôt sur le revenu perçues par le Trésor public en 2018, afin que la mise en œuvre de la réforme ne se traduise ni par une hausse ni par une baisse manifestes des recettes publiques.

Le dispositif proposé, qui prend la forme d’un crédit d’impôt intitulé « crédit d’impôt de modernisation du recouvrement » (CIMR), vise à annuler l’impôt dû par les foyers fiscaux au titre des revenus qu’ils ont perçus en 2017, mais pour les seuls revenus se trouvant dans le champ de la réforme et qui ne revêtiraient pas un caractère exceptionnel. Cela correspond à ce qu’il est communément appelé l’« année blanche », à savoir une absence d’imposition des revenus de 2017, mais pas pour la totalité d’entre eux.

I. LE CRÉDIT D’IMPÔT DE MODERNISATION DU RECOUVREMENT

A. UN CRÉDIT D’IMPÔT PORTANT SUR LES REVENUS DE 2017 NON EXCEPTIONNELS, ET SE TROUVANT DANS LE CHAMP DE LA RÉFORME

Le dispositif proposé consisterait à faire bénéficier les contribuables d’un crédit d’impôt, dit CIMR, égal à l’impôt qu’ils auraient dû acquitter au titre des revenus perçus en 2017, non exceptionnels et se trouvant dans le champ du PAS, et ce avant l’imputation des réductions et crédits d’impôt (A du II).

Cela permettrait ainsi d’annuler l’imposition due au titre de la plupart, mais pas de la totalité des revenus perçus en 2017, tout en maintenant le bénéfice des réductions et crédits d’impôt obtenus au titre de 2017.

Le dispositif reposerait sur trois principes :

– il ne concernerait que les revenus se trouvant dans le champ de la réforme : en effet, les modalités d’imposition des PVM, RCM et autres PVI seraient inchangées – soit avec l’application d’une retenue à la source, libératoire ou non (PVI et RCM), soit avec une imposition en N + 1 (PVM et actionnariat salarié) –, il n’y aurait donc pas de risque d’une double imposition de ces revenus en 2018 ;

– il ne porterait que sur les revenus perçus en 2017 qui sont considérés comme non exceptionnels : l’évaluation préalable relève que des revenus exceptionnels ne sont pas, par nature, susceptibles de se renouveler, et donc que leur imposition ne risquerait pas d’entraîner une imposition excessive ou confiscatoire en 2018. Par ailleurs, l’absence d’encadrement de l’annulation de l’imposition risquerait de conduire à des comportements d’optimisation fiscale massifs, les contribuables ayant tout intérêt à concentrer la perception effective de leurs revenus lors de l’année 2017.

Le présent article procède à la définition des revenus non exceptionnels 
– dont l’imposition a vocation à être effacée dans le cadre du dispositif proposé – pour chaque catégorie de revenus : ces dispositions sont présentées au B du présent I ;

– il permettrait que les contribuables bénéficient des réductions et crédits d’impôt au titre des revenus de 2017, même s’ils n’acquittent pas d’impôt au titre de ces revenus.

1. Les modalités de calcul du CIMR

● Les modalités de calcul du CIMR afférent aux seuls revenus du PAS constituent le miroir de celles retenues pour calculer le taux de prélèvement et prévues par l’article 204 H. La méthode du prorata est également appliquée, afin de retenir cette fois l’impôt afférent aux seuls revenus dans le champ du PAS et non exceptionnels.

Aux termes du B du II (alinéa 276), le CIMR serait ainsi calculé à partir :

– du montant de l’IR dû au titre de tous les revenus perçus en 2017, qu’ils se trouvent ou non dans le champ du PAS, et avant imputation des réductions et crédits d’impôt ;

– multiplié par un quotient permettant d’établir la part des revenus non exceptionnels et dans le champ du PAS, au sein de l’ensemble des revenus du foyer fiscal : ce quotient est égal au rapport entre les montants nets imposables des revenus non exceptionnels dans le champ du PAS, les déficits étant retenus pour une valeur nulle, et le revenu net imposable au barème progressif de l’impôt hors déficits, charges et abattements déductibles.

Ce qui permet d’établir la formule suivante :

Par ailleurs, le montant du CIMR serait diminué des crédits d’impôt prévus par les conventions fiscales internationales, et afférents aux revenus se trouvant dans le champ du PAS. Sans cette disposition, ces crédits d’impôt seraient comptabilisés deux fois, la première en venant s’imputer sur l’impôt théorique devant être acquitté, la seconde par une majoration du CIMR, qui prendrait en compte la totalité de l’impôt dû au titre de ces revenus – alors même qu’ils donnent lieu à un crédit d’impôt.

● Exemple : un couple perçoit en 2017 des salaires de 60 000 euros, ainsi qu’une PVM d’un montant imposable de 10 000 euros ; il ne bénéficie pas de réductions d’impôt.

En septembre 2018, son impôt « théorique » serait égal à 7 911 euros.

Le CIMR serait alors calculé selon la formule suivante :

= 7 911 euros 84,4 % = 6 677 euros

L’IR finalement dû serait alors égal à :

IR dû in fine = IR2017 – CIMR = 7 911 – 6 677 = 1 234 euros.

Le CIMR vient annuler l’impôt dû au titre des revenus dans le champ du PAS, à savoir les salaires : ces derniers représentant 84,4 % du total des revenus perçus par le foyer fiscal, le CIMR est égal à 84,4 % de l’impôt dû au titre de 2017, soit 6 677 euros.

Le couple doit acquitter 1 236 euros au titre de ses revenus de 2017, soit l’impôt dû au titre de sa PVM (hors champ du PAS).

2. Les conditions d’imputation du crédit d’impôt, garantissant le maintien des avantages fiscaux au titre de 2017

● En pratique, les contribuables procéderaient, comme à l’accoutumée, à la déclaration de leurs revenus de 2017, au printemps 2018. Le maintien d’une telle déclaration serait en tout état de cause nécessaire, ne serait-ce que pour permettre d’établir, pour chaque foyer fiscal, le revenu fiscal de référence (RFR) au titre de l’année 2017. Le RFR est en effet utilisé pour déterminer l’éligibilité à divers avantages fiscaux (exonération de taxe d’habitation et de taxe foncière, par exemple) et sociaux (exonération ou taux réduit de CSG, prestations sociales…).

L’impôt sur le revenu dû au titre de l’année 2017 serait, dans un premier temps, liquidé dans les conditions habituelles à l’été 2018 : lors de la liquidation de cet impôt « théorique », s’imputeraient les réductions et crédits d’impôt, ainsi que tous les prélèvements ou retenues non libératoires. Serait ensuite imputé le crédit d’impôt dit CIMR, qui serait restituable (G du II, alinéas 323 et 324).

Puisque le CIMR serait calculé sans prendre en compte les réductions et crédits d’impôt, et qu’il viendrait s’imputer sur un impôt qui, lui-même, prendrait en compte ces réductions et crédits d’impôt, le dispositif proposé permettrait de maintenir le bénéfice des avantages fiscaux :

IR finalement dû = [IR à acquitter sur les revenus de 2017 – RI et CI]– CIMR

Avec CIMR = IR afférent aux revenus non exceptionnels hors champ du PAS, avant imputation des RI et CI

En prenant pour hypothèse un impôt dû de 100 au titre des salaires perçus par un foyer fiscal, et donc d’un CIMR d’un même montant (puisque les salaires sont des revenus non exceptionnels dans le champ du PAS), si le foyer bénéficie d’une réduction d’impôt de 20 du fait de dons, l’IR finalement dû consistera en une restitution de la réduction d’impôt au titre des dons :

IR finalement dû = [100 – 20] – 100 = – 20

Fort logiquement, le H du II (alinéa 325) précise que le CIMR (de même que le CIMR complémentaire évoqué infra pour les travailleurs indépendants) ne serait pas retenu pour l’application du plafonnement mentionné à l’article 200-0 A. En effet, cet article pose le principe selon lequel sont retenus pour l’application du plafonnement à 10 000 euros des avantages fiscaux, tous les crédits et réductions d’impôt à l’exception de ceux limitativement énumérés (par exemple ceux ayant trait aux dons ou aux dépenses afférentes à la dépendance). Sans une disposition expresse, le CIMR serait soumis aux effets de ce plafonnement, ce qui n’aurait aucune logique puisqu’en l’espèce, son montant est directement corrélé au montant de l’impôt qui devrait être acquitté par le contribuable au titre de ses revenus de 2017, et non à une dépense ouvrant droit à une minoration de son imposition.

● Tous les contribuables qui n’ont perçu en 2017 que des revenus se trouvant dans le champ du PAS et non exceptionnels ne seraient pas imposés, le mécanisme du CIMR conduisant à annuler l’impôt qu’ils devraient au titre des revenus de 2017. Dès lors que ces mêmes contribuables ont bénéficié d’avantages fiscaux au titre de 2017, ils obtiendraient la restitution du montant des réductions et crédits d’impôt.

Le mécanisme retenu ne pourrait pas conduire à faire bénéficier les contribuables de la totalité d’une réduction d’impôt si le montant d’impôt dû au titre des revenus de 2017 est inférieur au montant de la réduction d’impôt : le CIMR permet de restituer le montant d’avantage fiscal qui aurait pu être imputé ou restitué sur l’impôt dû au titre de 2017 par les contribuables – ni plus, ni moins.

Ainsi, un contribuable qui devrait acquitter au titre de ses salaires de 2017 un impôt théorique de 100, et qui bénéficie par ailleurs d’une réduction d’impôt de 120 au titre d’un investissement outre-mer, se verra restituer à l’été 2018 un montant de 100 (mais non de 120), via le CIMR :

IR finalement dû = [IR à acquitter sur les revenus de 2017 – RI et CI ]– CIMR

= [100 -120] -100 = 0 – 100 = – 100

● Le tableau ci-après expose quelques cas, permettant d’illustrer les modalités d’imputation du CIMR.

Revenus perçus en 2017

IR 2017 avant RI/CI

IR 2017
après
RI/CI

CIMR

IR dû ou restitution en septembre 2018 =

IR dû après CI/RI - CIMR

Couple avec deux enfants percevant des salaires de 40 000 euros ; bénéfice d’un CI de 2 000 euros au titre de l’emploi d’une nounou.

0

– 2 000

0

Restitution de
2 000 euros

(soit le montant du CI salarié à domicile)

Célibataire percevant 30 000 euros de salaires ; bénéfice d’un CITE de 3 000 euros.

2 500

2 500 – 3 000 =
– 500

2 500

Restitution de
3 000 euros

(– 2 500 – 500), soit le montant du CITE

Célibataire percevant 30 000 euros de salaires ; bénéfice d’un CITE de 1 500 euros.

2 500

2 500 – 1 500
= 1 000

2 500

Restitution de
1 500 euros

(soit 1 000 – 2 500), soit le montant du CITE

Couple avec deux enfants percevant 60 000 euros de salaires et une réduction d’impôt au titre d’un investissement locatif (4 000 euros)

3 500

0

(la RI ne peut être totalement imputée)

3 500

Restitution de
3 500 euros

(soit le montant de la RI qui aurait pu être imputée, et non le total de la RI)

Couple percevant 60 000 euros de salaires et ayant réalisé une PVM de 5 000 euros 

6 411

6 411

6 411 × (60 000/65 000) = 5 918

Versement à l’administration fiscale de 493 euros
(6 411-5 918)

Couple percevant 60 000 euros de salaires et ayant réalisé une PVM de 5 000 euros ; bénéfice d’une RI de 3 000 euros au titre de l’emploi d’un salarié à domicile

6 411

3 411

6 411 × (60 000/65 000) = 5 918

Restitution de
2 507 euros

(3 411-5 918)

● Exemple : un contribuable perçoit en 2017 des salaires de 40 000 euros et des RCM (dividendes avec abattement de 40 %) pour un montant imposable de 10 000 euros. Il bénéficie donc d’un crédit d’impôt au titre du PFO sur les RCM, d’un montant de 2 100 euros, et d’un crédit d’impôt de 2 000 euros au titre de l’emploi d’un salarié à domicile.

En septembre 2018, son impôt « théorique » serait égal à 6 955 euros, avant crédits et réductions d’impôt.

Le CIMR serait alors calculé selon la formule suivante :

= 5 961 euros.

L’IR finalement dû serait alors égal à :

IR = IR « théorique » – RI/CI – CIMR = 6 955 – 2 100 – 2 000 – 5 961 =2 855 – 5 961 = – 3 106

Le contribuable bénéficiera in fine d’une restitution de 3 106 euros en septembre 2018, soit le montant de ses deux crédits d’impôt (4 100 euros), minoré de l’impôt dû au titre de ses revenus hors champ du PAS – à savoir les RCM (soit 994 euros).

L’évaluation préalable présente un grand nombre d’exemples illustrant l’application du CIMR, dans ses pages 223 à 229.

● Le mécanisme proposé, via un crédit d’impôt, pourrait paraître assez complexe à saisir au premier abord, notamment du fait de son articulation avec l’imputation des réductions et crédits d’impôt sur l’impôt dû.

Néanmoins, l’autre option qui aurait pu être envisagée pour annuler l’imposition des contribuables au titre de leurs revenus non exceptionnels, à savoir une exonération d’impôt pour les revenus concernés, présenterait plusieurs inconvénients dirimants. En premier lieu, elle réduirait fortement la progressivité de l’imposition des revenus qui ne se trouvent pas dans le champ du PAS (le taux d’imposition en serait fortement minoré). Ensuite, elle réduirait l’effet incitatif des réductions d’impôt, puisque celles-ci ne pourraient plus être imputées, ou du moins ne pourraient l’être que sur l’impôt dû au titre des revenus non concernés par le CIMR. Enfin, l’exonération des revenus non exceptionnels conduirait à diminuer très fortement, voire à ramener à zéro, le RFR de la plupart des foyers fiscaux, ce qui aurait des conséquences massives sur leur éligibilité à différents dispositifs d’exonérations fiscales et sociales.

● Les mensualités ou tiers provisionnels qui auraient normalement été acquittés par les contribuables entre janvier et août 2018, au titre de l’imposition des revenus de 2017, en l’absence de réforme, ne seront pas appelés – sans quoi les contribuables auraient dû faire l’avance de l’impôt dû, qui leur serait dans la très grande majorité des cas restitué en septembre –, parallèlement aux prélèvements à la source opérés sur leurs revenus perçus à partir de janvier 2018.

3. L’impact du dispositif proposé

a. Une période de transition favorable pour les personnes enregistrant une hausse de revenus en 2017 ou une baisse de revenus en 2018

Les termes d’« année blanche » peuvent s’avérer trompeurs, en donnant l’impression que les contribuables n’acquitteraient pas d’impôt pendant une année de revenus – alors qu’ils verseraient l’impôt de façon ininterrompue, en 2017 sur leurs revenus de 2016, et en 2018 sur leurs revenus de 2018. Néanmoins, l’annulation de l’imposition due au titre des revenus non exceptionnels perçus en 2017 dans le cadre du CIMR procure un réel avantage aux contribuables à l’échelle d’une vie – à savoir une année d’imposition en moins.

Cet avantage sera d’autant plus perceptible pour les contribuables dont les revenus perçus en 2017 sont plus élevés que ceux perçus en 2018, pour diverses raisons :

– les personnes partant à la retraite en 2017, qui n’acquitteraient pas l’impôt sur leur dernière année d’activité, mais seraient assujetties en 2018 sur leurs pensions, moins élevées par construction ; à titre indicatif, ce sont environ 700 000 personnes qui partent à la retraite chaque année ;

– les personnes enregistrant une baisse de revenus en 2018 pour d’autres raisons, par exemple du fait de la perte de leur emploi, ou encore parce qu’elles cessent de percevoir une certaine catégorie de revenus – par exemple lorsqu’un contribuable ne perçoit plus de revenus fonciers parce qu’il vend son bien ;

– les personnes bénéficiant d’une hausse de leurs revenus en 2017, quelle qu’en soit la raison.

Sur ce dernier point, l’annulation de l’imposition au titre des revenus non exceptionnels perçus en 2017 devrait inciter les contribuables à augmenter leur activité, en travaillant davantage au cours de cette année : pour un salarié, cela pourrait prendre la forme de la réalisation d’heures supplémentaires, voire de prise d’un second d’emploi, tandis que les contribuables sur le point de prendre leur retraite pourraient être tentés de repousser leur départ de quelques mois, jusqu’à la fin de l’année 2017. Cela pourrait aussi encourager des contribuables sortis du marché du travail, quelle qu’en soit la raison, à reprendre une activité. Il en sera de même pour les travailleurs indépendants, qui seront incités à accroître leur activité en 2017 et en 2018.

Enfin, la réforme serait également favorable pour les ayants droit de personnes décédées en 2017 : dès lors qu’une personne décède en 2017, ses ayants droit n’auraient pas à acquitter l’impôt dû par cette dernière à l’été suivant, puisque celui-ci, au titre des revenus relevant du champ du PAS et non exceptionnels, serait annulé par le CIMR.

b. Le maintien à un niveau constant du soutien apporté aux différents secteurs économiques et sociaux par l’intermédiaire des réductions et crédits d’impôt

Par ailleurs, les contribuables bénéficieront des réductions et crédits d’impôt afférents à l’année 2017, sans acquitter l’impôt dû au titre des revenus perçus cette même année. Comme évoqué supra, le Gouvernement prévoit d’allouer, lors de la liquidation de l’impôt dû au titre des revenus de 2017, soit à l’été 2018, 13,6 milliards d’euros au titre du maintien de ces avantages fiscaux.

Le soutien apporté aux différents secteurs économiques et sociaux par l’intermédiaire de ces avantages fiscaux est donc maintenu, qu’il s’agisse des dons aux organismes d’intérêt général, de l’emploi de salariés à domicile, des investissements réalisés en outre-mer, des investissements locatifs… Si ces avantages n’étaient pas maintenus, il est à craindre que les flux de certains investissements se tariraient, que les montants des dons se réduiraient, et que le travail dissimulé, s’agissant de l’emploi de salariés à domicile, s’accroîtrait.

c. La mise en place du prélèvement à la source n’alourdirait pas l’impôt dû et ne devrait pas affecter la trésorerie de contribuables bénéficiant de certains avantages fiscaux

Parallèlement aux crédits d’impôt et aux réductions d’impôt correspondant à des opérations particulières, existent en droit fiscal des avantages fiscaux liés à certaines situations, statutaires ou géographiques. L’objectif de ces avantages fiscaux est de réduire, voire d’annuler, l’impôt dû par le contribuable qui en bénéficie au titre des revenus de l’année concernée.

Dans la mesure où l’impôt dû au titre de l’année 2017 serait couvert par le CIMR (à l’exception des revenus exceptionnels et de ceux en dehors du champ du PAS), ces avantages perdraient de leur intérêt cette année-là : le CIMR atteindrait l’objectif qu’ils recouvrent – diminuer l’impôt dû –, voire le dépasserait.

Ainsi, en raisonnant sur l’impôt dû au titre de chaque année, la mise en place du prélèvement à la source n’aurait pas d’impact négatif pour les contribuables bénéficiant de tels avantages. Il pourrait même avoir un impact positif si l’avantage ne réduit que partiellement l’impôt dû, le CIMR pouvant l’annuler intégralement.

Cependant, si le raisonnement se fonde non sur l’impôt dû au titre de chaque année, mais sur le montant d’impôt effectivement acquitté chaque année, il conduirait à constater un effet a priori potentiellement négatif sur la trésorerie de ces contribuables.

Le CIMR annulerait l’impôt dû, se substituant ainsi à l’avantage fiscal qu’il recouvrirait. Néanmoins, en 2018, les contribuables qui bénéficient de ces avantages pourraient avoir l’impression de se trouver dans une situation moins favorable que celle dans laquelle ils auraient été en l’absence de prélèvement à la source, en raison de la mise en œuvre de ce dernier.

En 2018, en effet, l’impôt dû au titre des revenus perçus en 2017 et couvert par le CIMR ne serait pas payé, en revanche l’impôt dû au titre des revenus perçus en 2018 serait acquitté. En conséquence, les contribuables pourraient payer plus que ce qu’ils auraient versé en l’absence de réforme s’ils avaient, au titre de 2017, bénéficié d’un avantage fiscal qui aurait diminué ou annulé l’impôt de cette année, payé en 2018.

Néanmoins, ce constat doit être nuancé, ainsi que le montre l’exemple suivant, reposant sur la situation d’un jeune agriculteur.

En application de l’article 73 B du CGI, les jeunes agriculteurs bénéficient d’un abattement pendant cinq ans (total la première année, de 50 % les quatre années suivantes).

Soit un jeune agriculteur dont l’avantage décrit ci-dessus arrive à terme le 31 décembre 2017 (l’impôt dû est supposé constant sur la période considérée).

Ainsi que le montre le tableau suivant, le jeune agriculteur ne serait pas plus lourdement imposé dans le cadre du prélèvement à la source qu’il ne l’est actuellement. Au contraire, dans la mesure où le CIMR couvrirait l’intégralité de l’impôt dû au titre des revenus perçus en 2017, la charge fiscale réellement supportée serait moindre avec le prélèvement à la source que sans.

COMPARAISON DE LA CHARGE FISCALE D’UN JEUNE AGRICULTEUR EN FONCTION DU REVENU IMPOSÉ AVEC ET SANS LE PRÉLÈVEMENT À LA SOURCE

Revenu imposé

Part de l’impôt payé sans le PAS (A)

Part de l’impôt payé avec le PAS (B)

Différence (B-A)

2016

50 %

50 %

0 %

2017

50 %

0 % (1)

– 50 %

2018

100 %

100 %

0 %

(1) Hypothèse d’un CIMR couvrant l’intégralité de l’impôt dû au titre de 2017.

Le jeune agriculteur retire un net avantage du CIMR au regard de l’impôt qu’il doit, en économisant la moitié d’une année d’imposition par rapport à ce qu’il aurait dû acquitter en l’absence de réforme.

En revanche, en raisonnant non pas en fonction du revenu imposé mais par rapport à l’année de paiement de l’impôt, le jeune agriculteur pourrait avoir l’impression d’être surimposé.

Cependant, les règles régissant l’acompte contemporain prévoient une assiette portant sur le bénéfice imposable réalisé lors des années N – 2 et N – 1 et un taux d’imposition reposant, lui aussi, sur l’impôt et les revenus de ces deux années.

En conséquence, bien qu’en 2018, l’impôt qui serait acquitté serait celui dû au titre des revenus de cette année-là, et non des revenus 2017, l’imposition tiendrait compte de l’existence d’un abattement en 2017. Cet abattement réduirait les acomptes acquittés en 2018, de septembre à décembre, et en 2019, de janvier à août (115).

Les mêmes conclusions pourraient être tirées d’autres dispositifs d’assiette permettant de réduire l’impôt, tels que l’imputation d’un déficit catégoriel (par exemple, et pour rester dans le domaine agricole, le déficit agricole imputable l’année de sa réalisation et les six années suivantes en application de l’article 156 du CGI).

Elles s’appliquent également aux avantages liées aux zones d’implantation de certaines activités (tels que ceux prévus aux articles 44 sexies et suivants du CGI). L’année de transition pourrait inciter des entreprises à ne pas se créer en 2017 et à attendre 2018. Une création en 2017 conduirait en effet à ce que l’exonération au titre des bénéfices réalisés cette année-là soit absorbée par le CIMR. Cependant, la dimension fiscale n’est pas la seule à être prise en considération par les entreprises. En outre, les avantages fiscaux zonés liés à l’IR ne sont pas les seules mesures d’aides : sont souvent prévus des soutiens relatifs à la fiscalité locale, voire des subventions.

Au demeurant, la suspension d’un tel avantage en 2017 aurait pour effet d’accroître le revenu imposable au titre de cette année, emportant les conséquences suivantes :

– les acomptes versés en 2018 et 2019 seraient plus élevés ;

– le CIMR perçu en 2018 serait plus faible dans la mesure où, ainsi qu’il sera vu, serait prévu un dispositif de plafonnement reposant sur une appréciation pluriannuelle.

En tout état de cause, prévoir la suspension ou la prorogation d’un tel avantage fiscal d’assiette au motif que le CIMR pourrait, dans certaines hypothèses, le neutraliser, pourrait poser problème du point de vue constitutionnel, au regard du principe d’égalité devant la loi fiscale.

Les avantages décrits visent à alléger la charge fiscale de certaines contribuables. Le CIMR atteignant, voire dépassant, cet objectif, aucun préjudice ne saurait être invoqué du fait de la « perte » d’un avantage comparatif par rapport aux autres contribuables. L’impôt dû resterait en effet inchangé ou aurait diminué dans le cadre du prélèvement à la source, ne justifiant pas un report.

B. LA DÉFINITION DES REVENUS EXCEPTIONNELS POUR LES DIFFÉRENTES CATÉGORIES DE REVENU

Le mode de formation des revenus imposables diffère selon les catégories de revenus, ce qui justifie de procéder à une définition des revenus exceptionnels propre à chaque catégorie de revenus.

1. Les traitements et salaires

Le C du II (alinéas 277 à 290) définit les revenus non exceptionnels relevant de la catégorie des traitements et salaires de façon négative, en dressant une liste des revenus qui sont considérés comme exceptionnels, tous les revenus ne figurant pas dans cette liste étant donc considérés comme non exceptionnels.

La notion de revenu exceptionnel n’est pas nouvelle, puisqu’elle existe d’ores et déjà dans le cadre du mécanisme du quotient prévu par l’article 163-0 A du CGI. Ce mécanisme vise à ce que la progressivité du barème de l’impôt sur le revenu n’aboutisse pas à soumettre à une imposition excessive les revenus du contribuable qui ont un caractère exceptionnel (116) : sont concernés les revenus qui, par leur nature, ne sont pas susceptibles d’être recueillis annuellement.

Néanmoins, au-delà de cette définition générale, l’article 163-0 A ne procède pas à une énumération des revenus considérés comme exceptionnels ; les éléments de doctrine disponibles sont retracés dans l’encadré ci-après.

Les revenus exceptionnels dans la catégorie des traitements et salaires pour l’application du système du quotient défini par l’article 163-0 A du CGI

● Constituent notamment des revenus exceptionnels dans la catégorie des traitements et salaires :

– une gratification supplémentaire perçue par un salarié pour services exceptionnels ;

– des indemnités, allocations et primes versées par les employeurs à leurs salariés en vue de les dédommager des contraintes inhérentes à l’exercice de leur activité professionnelle et, notamment, des désagréments et sujétions résultant d’un changement de résidence ;

– les primes de départ volontaire perçues par les salariés lorsqu’ils quittent l’entreprise sans faire l’objet d’un licenciement, d’une mise à la retraite ou en préretraite ;

– la fraction imposable de l’indemnité de licenciement ou de l’indemnité de rupture conventionnelle prévue à l’article L. 1237-13 du code du travail ;

– les allocations servies aux salariés privés d’emploi qui créent ou reprennent une entreprise industrielle, commerciale, artisanale ou agricole ou une activité libérale, soit à titre individuel, soit dans le cadre d’une société, quelle qu’en soit la forme juridique et dont ils exercent effectivement le contrôle. Il est souligné que ces allocations présentent le caractère de traitements et salaires même si certains bénéficiaires les investissent dans l’entreprise qu’ils créent.

● Ne sont pas considérés comme présentant le caractère de revenus exceptionnels, notamment :

– le salaire versé durant la période du préavis (ou délai-congé) : ce salaire est normalement imposable au titre de l’année au cours de laquelle il a été payé ;

– les droits inscrits sur un compte épargne temps (CET) qui donnent lieu à une indemnisation monétaire en application de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail ou du décret n° 2008-455 du 14 mai 2008 relatif aux modalités d’indemnisation des jours accumulés sur le compte épargne temps des personnels médicaux, pharmaceutiques et odontologiques des établissements publics de santé ;

– les gains réalisés par un particulier dans le cadre de la gestion d’un portefeuille de valeurs mobilières.

En pratique, la déclaration des revenus de 2017 présenterait des cases spécifiques, afin de permettre aux contribuables de déclarer les revenus exceptionnels qui n’ouvrent pas droit au crédit d’impôt.

a. Les indemnités associées à la fin de l’exercice d’une activité : les indemnités versées à l’occasion de la rupture du contrat de travail, les indemnités versées lors de la cessation des fonctions des mandataires sociaux et dirigeants, ainsi que les indemnités de clientèle

Les trois premières catégories de revenus considérés comme exceptionnels correspondent à des indemnités versées lors de la fin de l’exercice d’une activité.

● Il s’agit en premier lieu des indemnités versées à l’occasion de la rupture du contrat de travail, dont les modalités d’imposition sont définies par le 1 de l’article 80 duodecies du CGI.

Cela recouvre les indemnités de licenciement, les indemnités versées à l’occasion d’un départ volontaire, telles que les indemnités versées lors d’une démission et lors d’une rupture conventionnelle homologuée, les indemnités de départ à la retraite ou en préretraite mais aussi les indemnités de non-concurrence, les indemnités compensatrices de congés payés, les indemnités compensatrices de préavis, ainsi que les indemnités de fin de contrat à durée déterminée ou de fin de mission.

Nombre de ces indemnités se voient appliquer des mesures d’exonération totale ou partielle, avec dans ce dernier cas des plafonnements calculés selon des règles variables, ainsi que le retrace le tableau ci-après :

RÉGIME AU REGARD DE L’IMPÔT SUR LE REVENU DES INDEMNITÉS PERÇUES
EN CAS DE RUPTURE DU CONTRAT DE TRAVAIL

Nature de l’indemnité

Régime au regard de l’impôt sur le revenu
des indemnités versées en cas de rupture
de contrat de travail

Indemnité compensatrice de préavis

Imposable

Indemnité compensatrice de congés payés

Imposable

Indemnité compensatrice de non-concurrence

Imposable

Indemnités de fin de contrat à durée déterminée ou de fin de mission (intérim) :

Imposable

Indemnités de rupture anticipée d’un contrat à durée déterminée :

 

– montant des rémunérations qui auraient été perçues jusqu’au terme du contrat

Imposable

– surplus de l’indemnité

Régime de l’indemnité de licenciement

Indemnité de licenciement (autre que les indemnités pour licenciement abusif ou irrégulier)

Hors plan social

Exonérée dans la limite la plus élevée :

– du montant légal ou conventionnel sans limitation ;

– de 50 % de l’indemnité totale ou du double de la rémunération annuelle brute de l’année civile précédente, sans excéder six fois le montant annuel du plafond de la sécurité sociale – PASS (231 696 euros pour 2016)

Plan social

Exonérée en totalité

Prime ou indemnité de départ volontaire (démission, rupture négociée…)

Hors plan social

Imposable en totalité avec application du système du quotient

Plan social

Exonérée en totalité

Rupture conventionnelle

Exonérée dans la limite la plus élevée :

– du montant légal ou conventionnel sans limitation ;

– de 50 % de l’indemnité totale ou du double de la rémunération annuelle brute de l’année civile précédente, sans excéder six fois le montant annuel du plafond de la sécurité sociale (231 696 euros pour 2016)

Prime ou indemnité de retraite

Départ volontaire

Hors plan social

Imposable en totalité avec application du quotient ou de l’étalement

Plan social

Exonérée en totalité

Mise à la retraite par l’employeur

Exonérée dans la limite la plus élevée :

– du montant légal ou conventionnel sans limitation ;

– de 50 % de l’indemnité totale ou du double de la rémunération annuelle brute de l’année civile précédente, sans excéder cinq fois le montant annuel du plafond de la sécurité sociale (193 080 euros pour 2016)

Prime ou indemnité de préretraite

Hors plan social

Imposable en totalité avec application du quotient ou de l’étalement

Plan social

Exonérée en totalité

Source : BOFiP.

Dans le cadre du mécanisme du quotient prévu par l’article 163-0 A du CGI, sont considérées également comme des revenus exceptionnels les primes de départ volontaire perçues par les salariés lorsqu’ils quittent l’entreprise sans faire l’objet d’un licenciement, d’une mise à la retraite ou en préretraite, ainsi que la fraction imposable de l’indemnité de licenciement ou de l’indemnité de rupture conventionnelle.

Classer ces indemnités parmi les revenus exceptionnels apparaît donc logique dans la généralité des cas, en ce qu’elles n’ont pas vocation à se reproduire de façon régulière. Néanmoins, on peut s’interroger sur le caractère exceptionnel des indemnités de fin de contrat à durée déterminée ou de fin de mission, qui sont le plus souvent considérées comme une part de sa rémunération par le salarié qui enchaîne des contrats courts.

● Ensuite, sont mentionnées les indemnités versées à l’occasion de la cessation des fonctions des mandataires sociaux et des dirigeants, dont le régime fiscal est défini par le 2 de l’article 80 duodecies du CGI.

Ces indemnités, qualifiées dans certains cas de « parachutes dorés », constituent une rémunération imposable ; néanmoins, en cas de cessation forcée des fonctions, seule la fraction des indemnités qui excède trois fois le plafond annuel de la sécurité sociale (PASS) – soit 115 848 euros en 2016 – est imposable (ce montant ayant été ramené de six fois à trois fois le PASS par la loi de finances pour 2016 (117)).

Comme les indemnités de licenciement, ces sommes revêtent par nature un caractère exceptionnel, qui justifie de ne pas les prendre en compte pour le calcul du CIMR.

● Les indemnités de clientèle, de cessation d’activité, et celles perçues en contrepartie de la cessation de la valeur de la clientèle, relèvent d’une logique similaire :

– les indemnités de clientèle dues en application de l’article L. 7313-13 du code du travail, aux voyageurs, représentants ou placiers (VRP) en cas de rupture du contrat de travail à l’initiative de l’employeur : elles sont destinées à réparer le préjudice causé aux bénéficiaires par la perte, pour l’avenir, de la clientèle qu’ils ont apportée, créée ou développée, et sont versées en règle générale à l’expiration du contrat. Selon la doctrine administrative, elles représentent, pour l’application des dispositions du 1 de l’article 80 duodecies du CGI précité, une indemnité de licenciement, et sont donc soumises aux mêmes règles que celles présentées dans le tableau supra ;

– les indemnités de clientèle perçues par les VRP en contrepartie de la cession de la valeur de la clientèle à un tiers : elles sont imposables dans les conditions de droit commun des traitements et salaires, tout en pouvant bénéficier du système du quotient.

b. Les prestations de retraite servies sous forme de capital et les pécules versés en fin de carrière aux footballeurs professionnels

● Sont considérées comme des revenus exceptionnels les prestations de retraite servies sous forme de capital.

Celles-ci comprennent notamment les sorties en capital de contrats PERP (118) ou encore de contrats PREFON retraite (119), mais aussi les retraites de faible montant versées par les régimes ou contrats de retraite en France ou à l’étranger qui font, par exception, l’objet d’une liquidation non pas sous forme de rente viagère, mais sous forme d’un versement unique. Doivent également être citées les prestations en capital versées dans le cadre de plans d’épargne pour la retraite collectifs (PERCO) ou de contrats « en sursalaire » (120).

En application du deuxième alinéa de l’article 79 du CGI, et du b quinquies du 5 de l’article 158 du même code, les prestations de retraite faisant, par exception au principe du versement sous forme de rente, l’objet d’un versement sous forme de capital, sont imposables au barème progressif de l’impôt sur le revenu selon les règles des pensions et retraites. Néanmoins, en application du II de l’article 163 bis du même code et sous certaines conditions, le contribuable peut opter pour un prélèvement forfaitaire au taux de 7,5 % sur ses prestations de retraite versées en capital, qui libère les revenus auxquels il s’applique de l’impôt sur le revenu. Ce prélèvement est assis sur le montant du capital diminué d’un abattement de 10 % (121).

Certaines prestations de retraite versées en capital relèvent de modalités d’imposition spécifiques : tel est le cas des prestations en capital versées dans le cadre de PERCO (122) ou de contrats « en sursalaire » (123).

Les prestations de retraite servies sous forme de capital constituent des revenus exceptionnels éligibles au mécanisme de quotient défini à l’article 163-0 A, et ce, par exception, quel que soit leur montant. Elles sont considérées de la même façon pour le calcul du CIMR. Si tel n’était pas le cas, on peut penser que l’« année blanche » aurait une influence sur les comportements des contribuables, qui seraient incités à liquider leurs prestations en 2017 et à opter pour des prestations en capital dès lors que cela leur est possible, de préférence à une sortie en rente.

● Relèvent de la même logique les prestations mentionnées à l’article 80 decies du CGI : il s’agit des prestations servies par le régime de prévoyance des joueurs de football professionnel.

Les joueurs professionnels sont obligatoirement affiliés à un régime de prévoyance, financé par des cotisations versées par les joueurs et leurs employeurs. Il prévoit le versement :

– d’un « pécule » en fin de carrière, dont le montant est fonction de l’âge, de l’ancienneté du joueur au moment de la liquidation de ce versement et du nombre d’années d’activité sportive ayant donné lieu à cotisation ;

– d’un capital en cas d’invalidité ou de décès.

Le capital versé en cas de décès ou d’invalidité totale et définitive est exonéré d’impôt, tandis que les autres prestations, et notamment le « pécule » servi en fin de carrière, sont imposables dans la catégorie des pensions, en vertu de l’article 80 decies. Toutefois, afin d’atténuer les effets de la progressivité de l’impôt sur le revenu, l’imposition est effectuée en appliquant un système de quotient spécifique, propre à ces prestations, prévu par le premier alinéa de l’article 163-0 A bis.

Là encore, comme l’atteste l’existence d’un mécanisme de quotient, ces revenus ont un caractère exceptionnel difficilement contestable.

c. Les indemnités, allocations et primes versées en vue de dédommager leurs bénéficiaires d’un changement de résidence ou de lieu de travail

Ces indemnités, telles que les primes de mobilité géographique qui peuvent être versées aux salariés mutés à raison d’un changement de leur lieu de travail, constituent un complément de rémunération imposable à l’impôt sur le revenu dans les conditions de droit commun, sauf exception (124). Elles n’ont pas vocation à être versées de façon régulière, et sont associées à un événement ponctuel. Elles entrent d’ailleurs également dans le champ du quotient prévu par l’article 163-0 A, selon la doctrine administrative.

d. Les aides et allocations capitalisées servies en cas de conversion, de réinsertion ou pour la reprise d’une activité professionnelle

Il s’agit de toutes les aides dont peuvent bénéficier des personnes en conversion, en réinsertion, ou reprenant une activité professionnelle. L’administration fiscale n’a toutefois pas été en mesure de fournir à la Rapporteure générale des exemples d’aides ou d’allocations qui se trouveraient dans le champ de cette disposition.

e. Les sommes perçues au titre de la participation ou de l’intéressement non affectées à un plan d’épargne salariale

● En premier lieu, il convient de rappeler à grands traits les avantages fiscaux afférents aux dispositifs d’association des salariés aux résultats de leur entreprise et en faveur de l’épargne salariale, lesquels sont :

– la participation, obligatoire dans les entreprises d’au moins cinquante salariés et calculée sur la base du montant des bénéfices de l’entreprise, selon une formule spécifique ;

– l’intéressement, toujours facultatif, qui donne lieu au versement de primes d’intéressement d’un montant aléatoire, l’aléa étant lié soit aux résultats soit aux performances de l’entreprise ;

– l’abondement par l’entreprise de plans d’épargne salariale, destiné à permettre aux salariés de se constituer un portefeuille de valeurs mobilières : ces plans peuvent prendre la forme d’un plan d’épargne entreprise (PEE), d’un plan d’épargne interentreprises (PEI), d’un plan d’épargne de groupe (PEG) ou bien encore d’un plan d’épargne pour la retraite collectif (PERCO) d’entreprise ou interentreprises.

Le régime fiscal des sommes versées est le suivant :

– pour la participation : les sommes versées immédiatement au salarié sont soumises à l’impôt sur le revenu dans la catégorie des traitements et salaires, au titre de l’année de leur versement.

En revanche, ces sommes sont exonérées d’impôt dès lors qu’elles sont rendues indisponibles pendant une période fixée en principe à cinq ans, en étant affectées à un plan d’épargne salariale (PEE, PEI…) ou à un compte que l’entreprise doit consacrer à des investissements (article 163 bis AA et 16° bis de l’article 157 du CGI) ;

– pour l’intéressement, les sommes versées aux salariés sont également imposées à l’impôt sur le revenu selon les règles applicables aux traitements et salaires.

Néanmoins, lorsque les salariés affectent les primes versées à un plan d’épargne salariale, ce qui rend celles-ci indisponibles pendant une durée de cinq années en principe, ces sommes sont exonérées d’impôt sur le revenu, dans la limite d’un montant égal à la moitié du PASS (soit 19 308 euros), en application du 18° bis de l’article 81 du CGI ;

– les sommes versées par l’entreprise dans des plans d’épargne salariale au profit de leurs salariés sont exonérées d’impôt sur le revenu à condition d’être maintenues dans le plan d’épargne pendant au moins cinq ans, en application du I de l’article 163 bis B et du a du 18° de l’article 81.

Il convient de préciser que les sommes rendues indisponibles pendant cinq ans, du fait de leur placement dans un plan d’épargne salariale, peuvent être débloquées de façon anticipée, dans certains cas, tels que le mariage ou la conclusion d’un pacs, la naissance ou l’adoption d’un troisième enfant, la rupture du contrat de travail, l’invalidité ou le surendettement. Dans ce cas, les sommes ainsi débloquées conservent le régime fiscal avantageux qui leur était attaché.

● Le présent article prévoit que sont considérées comme des revenus exceptionnels :

– les sommes perçues au titre de la participation ou de l’intéressement et non affectées à la réalisation de plans d’épargne salariale ;

– les sommes mentionnées au a du 18° de l’article 81 – c’est-à-dire les abondements par l’entreprise des plans d’épargne salariale au bénéfice de leur salarié –, et les sommes retirées par le contribuable d’un plan d’épargne salariale.

S’agissant du premier item, cela correspond au cas où le salarié souhaite disposer immédiatement des sommes versées au titre de la participation et de l’intéressement (125). Les sommes versées seraient alors soumises à l’impôt sur le revenu. Le présent article prévoit que ces sommes seront considérées comme des revenus exceptionnels, et donc que l’imposition due à ce titre ne sera pas effacée par le CIMR.

Sans cette disposition, l’incitation fiscale à placer les sommes versées au titre de la participation et de l’intéressement dans un plan d’épargne salarial disparaîtrait, et sans doute une large part des salariés qui en bénéficient opterait-elle pour un versement immédiat de ces sommes en 2017.

Le deuxième item correspond aux sommes versées par l’entreprise pour abonder un plan d’épargne salariale au profit de son salarié : en principe, ces sommes ne peuvent être débloquées avant une période de cinq années – à l’issue de laquelle elles ne sont pas imposables à l’impôt sur le revenu – sauf cas limitativement énumérés évoqués plus haut. Selon l’administration fiscale, le dispositif proposé vise des plans d’épargne salariale qui pourraient permettre un déblocage avant cinq années, selon des modalités spécifiques. Par ailleurs, il vise à couvrir les situations où un salarié débloquerait de façon anticipée des sommes affectées à de tels plans d’épargne salariale au titre des cas évoqués plus haut (mariage, rupture du contrat de travail…) en effectuant une fausse déclaration.

f. Les sommes issues de la monétisation de droits inscrits sur un compte épargne temps

Dispositif de capitalisation des droits à congé rémunéré, le compte épargne temps (CET) permet aux salariés qui le souhaitent soit d’acquérir de tels droits à congé, soit de bénéficier d’une rémunération, immédiate ou différée, en contrepartie des périodes de congé ou de repos non prises.

Les sommes inscrites au crédit d’un compte épargne temps sont en principe soumises à l’impôt sur le revenu. L’imposition est établie au titre de l’année où elles sont versées au salarié, et non lors de leur affectation au compte.

Considérer ces sommes issues de la monétisation des droits du CET comme des revenus exceptionnels vise à éviter que les salariés ne soient incités à procéder massivement à la monétisation de ces droits au cours de 2017 pour bénéficier d’une exonération fiscale. Néanmoins, cette disposition conduit à sortir du champ du CIMR des sommes qui sont assimilables à des revenus salariaux courants.

La doctrine administrative a d’ailleurs considéré que les salaires perçus en contrepartie de droits affectés sur un CET ne remplissaient pas les conditions prévues par l’article 163-0 A du CGI. Aux termes d’une décision de rescrit du 23 février 2010 (126), « un revenu exceptionnel au sens de cet article est un revenu qui, par sa nature, n’est pas susceptible d’être recueilli annuellement. Les revenus perçus dans le cadre normal de l’activité professionnelle ne sont pas susceptibles d’être qualifiés d’exceptionnels, même si leur montant varie fortement d’une année sur l’autre. Par suite, les sommes issues de la monétisation de droits inscrits sur un CET, qui sont, par nature, des revenus salariaux ordinaires ne peuvent être qualifiées de revenus exceptionnels. Elles ne peuvent davantage être qualifiées de revenus différés dès lors que la monétisation des droits affectés sur un CET dépend de la volonté du salarié ». De ce fait, le système du quotient n’est pas applicable à l’indemnisation des jours accumulés sur le CET.

Il serait envisageable de ne considérer ces revenus comme exceptionnels que dans le cas où leur montant excéderait un plafond.

g. Les gratifications surérogatoires, les revenus correspondant à des années antérieures ou postérieures par leur date normale d’échéance, ainsi que tout autre revenu non susceptible d’être recueilli annuellement

À la fin de l’énumération proposée par le C du II, figurent trois catégories de revenus définies de façon générale – à la différence des précédents items –, qui jouent ainsi le rôle de « clauses de sauvegarde », afin de couvrir les cas qui ne peuvent être énumérés de façon précise et éviter des abus dans l’attribution de rémunérations et d’avantages. Il s’agit :

– de gratifications surérogatoires, quelle que soit la dénomination retenue par l’employeur ;

– des revenus qui correspondent par leur date normale d’échéance à une ou plusieurs années antérieures ou postérieures ;

– de tout autre revenu qui, par sa nature, n’est pas susceptible d’être recueilli annuellement.

Selon les informations communiquées à la Rapporteure générale, la notion de gratification surérogatoire correspond aux sommes qui seraient « accordées manifestement sans lien avec le contrat de travail ou allant au-delà ». Tel serait le cas des gratifications ou des primes « sans rapport avec l’activité et la performance, dont le montant et le versement revêtiraient un caractère discrétionnaire ».

Les « revenus qui correspondent par leur date normale d’échéance à une ou plusieurs années antérieures ou postérieures » visent quant à eux les revenus différés ou anticipés. Selon les informations transmises par l’administration fiscale, les revenus différés sont définis comme les revenus dont le contribuable a eu la disposition au cours d’une année mais qui, par leur date normale d’échéance, se rapportent à une ou plusieurs années antérieures. Par échéance « normale », on entend la date à laquelle le revenu aurait dû être perçu ou être disponible pour le contribuable en raison de la réalisation du fait générateur du revenu. À titre d’illustration, des rappels de salaires, de traitements ou de pensions ou des arriérés de loyers constituent des revenus différés.

A contrario, les revenus anticipés sont les revenus qui devraient correspondre, par leur date normale d’échéance, à une année postérieure. Tel serait le cas par exemple d’une prime de performance perçue en année N alors que sa date normale d’échéance serait en année N + 1 ou N + 2.

Enfin, le dernier item reprend la définition du revenu exceptionnel telle qu’issue de l’article 163-0 A, à savoir un revenu qui par sa nature n’est pas susceptible d’être recueilli annuellement.

À cet égard, l’administration fiscale observe que « sont considérées comme des revenus non exceptionnels les primes prévues par le contrat de travail ou une convention ou un accord collectif, et les primes correspondant à un usage d’entreprise. Il en sera de même des primes inscrites dès l’origine dans le contrat de travail ou, sous réserve qu’il soit antérieur à 2017, dans un avenant à celui-ci et dont les modalités de détermination seraient précisées par ce dernier ».

2. Les revenus fonciers non exceptionnels

Les alinéas 291 à 298 du présent article prévoient une définition des revenus fonciers qui, considérés comme non exceptionnels, ouvriraient droit à l’application du CIMR en 2018.

Les revenus fonciers exceptionnels seraient par conséquent imposés au barème de l’IR en 2018 (au titre de 2017) dans les conditions de droit commun.

Ces alinéas 291 à 298 doivent par ailleurs être lus en parallèle avec les alinéas 326 à 329 qui prévoient, au titre des années 2017 et 2018, un dispositif particulier d’imputation des charges foncières liées à la réalisation de travaux, afin d’éviter que la mise en œuvre du CIMR ne se traduise par une désincitation à réaliser ces travaux en 2017.

a. L’architecture globale de la période de transition pour les revenus fonciers

Le traitement des revenus fonciers dans le cadre de la période de transition reposerait sur une double distinction :

– une distinction entre les revenus exceptionnels et non exceptionnels ; seuls les revenus non exceptionnels bénéficieraient du CIMR, tandis que les autres seraient imposés normalement en 2018 ;

– une distinction entre les charges pilotables et les charges non pilotables prises en compte pour la détermination, en 2017 comme en 2018, du revenu net foncier imposable. Les charges dites « pilotables » sont celles qui peuvent indifféremment être décidées par le propriétaire en 2017 ou en 2018, notamment les dépenses de travaux.

Compte tenu de l’année dite « blanche » en 2017, les revenus nets fonciers de l’année 2017 ne seraient pas imposés (à condition d’être non exceptionnels) alors que ceux de l’année 2018 le seraient, sous le nouveau régime de l’acompte de prélèvement à la source.

Dès lors, il peut être tentant, du point de vue du redevable, de majorer ses revenus nets fonciers imposables en 2017 et de minorer ceux qui le seraient en 2018.

En l’absence d’un dispositif spécifique, l’existence de ces charges foncières pilotables permettrait aisément de reporter sur l’année 2018 des dépenses qui, sans l’effet d’aubaine apporté par l’année blanche, auraient normalement été engagées en 2017.

Pour les charges pilotables, le présent article prévoit donc, pour 2018, une imputation lissée sur les deux années 2017 et 2018 permettant de gommer l’intérêt d’un report des travaux en 2018. En effet, à l’échelle macroéconomique, un tel report, pratiqué par les titulaires de revenus fonciers, aurait un impact négatif important sur le secteur du bâtiment.

b. La définition des revenus fonciers non exceptionnels ouvrant droit au CIMR

Pour l’application du CIMR, qui permettrait en 2018 d’effacer les impôts afférents aux revenus « normaux » de l’année 2017 afin d’éviter une double imposition en 2018, le présent article prévoit de distinguer les revenus exceptionnels et de revenus non exceptionnels, seuls ces derniers bénéficiant du CIMR.

À cette fin, l’alinéa 291 prévoit dans un premier temps que les revenus fonciers nets de l’année 2017 seraient déterminés selon les règles de droit commun.

L’ensemble des charges foncières dont la déduction est permise par le CGI pourraient dont être déduites pour la détermination de ce revenu net foncier de l’année 2017, en particulier les dépenses de réparation et d’entretien, les primes d’assurance, les dépenses supportées pour le compte du locataire, les dépenses d’amélioration, les impositions de toute nature incombant au propriétaire, les intérêts de dettes contractées pour l’acquisition ou la conservation du bien, les frais de gestion et de gardiennage, les dépenses supportées par un fonds de placement immobilier.

Seraient également pris en compte les amortissements spécifiques (« Périssol », « Borloo », etc.) en faveur de l’investissement locatif dans la détermination de ce revenu net foncier.

Conformément au 3° du I de l’article 156 du CGI, auquel le présent dispositif renvoie explicitement, les déficits fonciers imputables sur les revenus fonciers dans une période de dix années seraient également pris en compte.

Dans un second temps, le présent article prévoit la détermination du montant des revenus non exceptionnels au titre de l’année 2017 comme la somme des revenus suivants :

– les loyers et fermages perçus en 2017 (directement ou indirectement) et dont l’échéance est intervenue en 2017 en application de l’exécution normale du contrat de location.

En particulier, les arriérés de loyers perçus en 2017 au titre d’une location en 2016 ne seraient pas pris en compte dans le CIMR ; les loyers qui seraient, par convention entre le bailleur et le preneur, payés en 2017 au lieu de l’être en 2016, ne sauraient être non plus être pris en compte dans le CIMR.

En outre, les loyers perçus en 2017 et échus cette même année ne seraient pas pris en compte lorsqu’ils sont liés à la remise d’immeubles ou de titres donnant accès à la propriété ou à la jouissance d’immeubles.

De même, dans le cas où les loyers sont perçus en application de contrats couvrant une période supérieure à douze mois, ceux-ci ne seraient retenus que dans la limite d’un montant correspondant à douze mois ;

– les revenus de propriétés dont le propriétaire se réserve la jouissance, mentionnés à l’article 30 du CGI et qui bénéficient d’une exonération en application de l’article 15 de ce code.

Conformément à l’alinéa 298, en cas de rupture d’un engagement locatif dans le cadre des dispositifs « Périssol », « Borloo » ou « Robien » – qui entraîne la réintégration au revenu foncier taxable des amortissements pratiqués en application de ces dispositifs –, ces majorations du revenu net foncier ne seraient pas prises en compte pour l’application du CIMR.

Dans un troisième temps, le montant des revenus fonciers à retenir pour l’application du CIMR serait déterminé en fonction de la proportion que la somme des revenus non exceptionnels mentionnés ci-dessus représente dans la somme totale des revenus fonciers (RF).

c. Les autres revenus fonciers sont a contrario considérés comme exceptionnels

L’ensemble des revenus n’entrant pas dans la catégorie des revenus non exceptionnels mentionnée ci-dessus sont donc considérés comme exceptionnels, et seraient par conséquent placés hors du champ du CIMR ; à ce titre, ils seraient donc imposés en année N + 1.

À titre d’exemple, le BOFiP-I mentionne, dans la catégorie des revenus fonciers exceptionnels entraînant l’application du mécanisme du quotient :

– les indemnités « pas-de-porte » perçues par un propriétaire, c’est-à-dire un supplément de loyer perçu à l’entrée dans les lieux ;

– le supplément de loyer résultant de l’attribution gratuite en fin de bail des aménagements effectués par le preneur.

L’évaluation préalable du présent article mentionne en outre les subventions perçues pour financier les charges déductibles, certains compléments de loyer et fermages spécifiques aux propriétés rurales

3. Une dérogation aux règles de déductibilité des charges liées aux travaux

Afin d’éviter un report sur l’année 2018 des opérations d’entretien ou d’amélioration des biens immobiliers, les alinéas 326 à 329 prévoit un dispositif spécifique d’imputabilité de ces charges en 2017 et 2018.

a. Les charges non pilotables

L’alinéa 327 définit les charges non pilotables comme :

– les primes d’assurance ;

– les provisions pour dépenses courantes de maintenance, de fonctionnement et d’administration des parties communes prévues dans le budget de la copropriété, ainsi que les provisions pour travaux qui sont hors de ce budget ;

– les impositions de toute nature incombant au propriétaire ;

– les intérêts de dettes contractées pour l’acquisition, la conservation, la construction, la réparation ou l’amélioration des propriétés ;

– les frais de gestion, les frais de rémunération des gardes et concierges, les honoraires divers liés à la gestion de l’immeuble ;

– les dépenses supportées par les fonds de placement immobilier au titre de leurs frais de fonctionnement et de gestion liés aux actifs immobiliers.

Comme l’indique l’évaluation préalable, « bien qu’ils ne donnent pas lieu à paiement, peuvent également être regardés comme des charges récurrentes les amortissements pratiqués par les contribuables au titre de divers dispositifs fiscaux (dispositifs " Périssol ", " Robien ", " Borloo "), la chronique de leur imputation sur les recettes taxables ne pouvant être modifiée ou suspendue par le contribuable ».

b. Les charges pilotables

Cette catégorie vise les dépenses de travaux dont la réalisation ne présente aucun caractère d’urgence, et qui représentent en réalité les charges souvent les plus onéreuses.

L’alinéa 328 les définit comme :

– les dépenses de réparation et d’entretien supportées par le propriétaire ;

– les dépenses d’amélioration à l’exclusion des frais de construction, de reconstruction ou d’agrandissement ;

– les dépenses d’amélioration des locaux professionnels ou commerciaux destinées à protéger ces locaux des effets de l’amiante ou faciliter l’accueil des handicapés ;

– pour les propriétés rurales, les dépenses d’amélioration non rentables des propriétés non affectées à l’habitation, les dépenses d’amélioration incorporés aux bâtiments d’exploitation rurale, les dépenses de remplacement d’un bâtiment d’exploitation rurale, les travaux de gros entretien et de restauration des espaces naturels.

c. Les modalités d’imputation des charges non pilotables

Les charges non pilotables mentionnées ci-dessus ne seraient déductibles que pour la détermination du revenu net foncier imposable de l’année 2017 dès lors qu’elles sont afférentes à des dettes dont l’échéance intervient en 2017.

Compte tenu de l’équation décrite ci-dessus, permettant de déterminer le montant du CIMR foncier, on peut donc dire que ces charges non pilotables imputés obligatoirement en 2017 minoreraient le revenu net foncier de l’année 2017, donc le montant de CIMR foncier dont le redevable pourrait bénéficier au titre de ses revenus non exceptionnels.

Exemple 1

Un contribuable diffère à janvier 2018, le paiement de sa taxe foncière 2017, exigible au 15 octobre 2017, d’un montant de 1 000 euros. En effet, cette charge ne lui aurait procuré aucune économie d’impôt en 2017 du fait de l’octroi du CIMR sur le revenu foncier net imposable diminué du montant de la taxe foncière payée et la majoration de retard qu’il supporterait (10 %) serait souvent inférieure à l’économie d’impôt sur le revenu dont il bénéficierait. Toutefois, il ne pourrait pas déduire cette charge de ses revenus fonciers perçus en 2018, nonobstant son paiement sur cette même année. En effet, l’échéance de cette charge intervenant en 2017, celle-ci ne serait déductible qu’au titre des revenus fonciers de l’année 2017.

Exemple 2

Un contribuable reçoit le 15 décembre 2016 l’appel de fonds de son syndic de copropriété correspondant aux charges afférentes au premier trimestre 2017 et décide de régler le montant dû à réception de cet appel de fonds, soit en 2016. Ce dernier ne pourrait pas déduire cette charge de ses revenus fonciers perçus en 2016, nonobstant son paiement sur cette même année. En effet, l’échéance de cette charge intervenant en 2017, celle-ci ne serait déductible qu’au titre des revenus fonciers de l’année 2017.

Source : évaluation préalable de l’article 38 du présent projet de loi de finances.

d. Les modalités d’imputation des charges pilotables

L’alinéa 328 indique par ailleurs que les charges pilotables décrites précédemment seraient retenues, pour la détermination du revenu net foncier imposable en 2018, à hauteur de 50 % des montants dépensés en 2017 et 2018.

Ce dispositif vise par conséquent à établir, pour la détermination du revenu net imposable en 2018, une moyenne entre les années 2017 et 2018, ce qui permettrait d’éviter que certains contribuables n’opèrent des travaux en 2018 plutôt qu’en 2017.

L’alinéa 329 précise toutefois que cette globalisation des dépenses de travaux entre 2017 et 2018 ne s’applique pas aux dépenses afférentes à des travaux d’urgence rendus nécessaires par l’effet de la force majeure, qui resteraient totalement imputables, selon le cas, en 2017 ou 2018.

Le dispositif proposé ne traite pas de l’imputation des charges pilotables engagées en 2017, ce qui implique qu’elles seraient imputables dans leur totalité selon les règles de droit commun en 2017.

Cette lecture est confirmée par l’évaluation préalable du présent article, qui précise que des travaux engagés en 2017 seraient totalement imputables en 2017 et à hauteur de 50 % en 2018.

Extrait de l’évaluation préalable, page 246

Ce dispositif, qui permettrait d’éviter les reports de charges et donc de travaux de 2017 vers 2018 consisterait en :

– une déduction intégrale des dépenses de travaux payées au cours de l’année 2017, dans les conditions de droit commun, pour la détermination du revenu net foncier de l’année 2017. Ainsi, si le contribuable est titulaire lors de l’année 2017 de revenus non concernés par le prélèvement à la source prévu par le projet de réforme du Gouvernement, les charges payées en 2017 auraient un effet fiscal ;

– une déduction des dépenses de travaux payées au cours de l’année 2018 égale à la moyenne des dépenses de l’espèce payées au cours des années 2017 et 2018.

Plusieurs exemples sont fournis à l’appui de cette lecture.

Exemple 1

Pour des dépenses de travaux payées de 3 000 euros en 2017 et 0 euro en 2018, les charges prises en compte fiscalement seraient de 3 000 euros en 2017 et 1 500 euros en 2018 (soit la moyenne des dépenses des années 2017 et 2018 d’un total de 3 000 euros).

Exemple 2

Pour des dépenses de travaux payées de 1 500 euros en 2017 et 1 500 euros en 2018, les charges prises en compte fiscalement seraient de 1 500 euros en 2017 et 1 500 euros en 2018 (soit la moyenne des dépenses des années 2017 et 2018 d’un total de 3 000 euros).

Exemple 3

Pour des dépenses de travaux payées de 0 euro en 2017 et 3 000 euros en 2018, les charges prises en compte fiscalement seraient de 0 euro en 2017 et 1 500 euros en 2018 (soit la moyenne des dépenses des années 2017 et 2018 d’un total de 3 000 euros).

Source : évaluation préalable de l’article 38 du présent projet de loi de finances.

Compte tenu de l’architecture du CIMR décrite précédemment, le fait de permettre une imputation à 100 % des dépenses de travaux de 2017 (pour le calcul du revenu net foncier de 2017) et à hauteur de 50 % de ces mêmes dépenses pour la détermination du revenu net foncier de l’année 2018 introduit une asymétrie de traitement entre deux catégories de redevables :

– pour la grande majorité des redevables, dont les revenus non exceptionnels (y compris les loyers) vont être couverts, d’un point de vue fiscal, par le CIMR, le fait de réaliser les travaux en 2017 ou en 2018 serait neutre ;

– pour certains contribuables bénéficiant de revenus hors champ du PAS (en particulier des RCM et des PVM), qui resteraient imposables sur ces revenus, le fait de conserver une possibilité d’imputation de 100 % de ces dépenses offre un avantage fiscal au titre de 2017 et de 2018, ce qui n’est pas le cas pour la première catégorie des personnes.

e. L’impact de la période transitoire sur certains dispositifs fonciers

• Le dispositif micro-foncier

Le régime micro-foncier permet la prise en compte des charges foncières sous la forme d’un abattement forfaitaire de 30 % du revenu brut.

Ces dispositions continueraient de s’appliquer de manière normale en 2017 et en 2018.

Au titre de l’année 2017, l’abattement forfaitaire viendrait diminuer le revenu net foncier couvert par le CIMR.

En 2018, l’abattement de 30 % s’appliquerait de manière normale, sans dispositif de lissage entre 2017 et 2018.

• La faculté d’imputer les déficits fonciers sur le revenu global

En 2017 comme en 2018, la faculté d’imputer les déficits fonciers sur le revenu global continuerait à s’appliquer de manière normale. Conformément à l’article 156 du CGI, les déficits fonciers peuvent en effet s’imputer sur le revenu global dans la limite de 10 700 euros, hors intérêts d’emprunt.

Exemple

Soit un bailleur soumis à l’impôt sur le revenu dont les revenus fonciers se décomposent en :

– 10 000 euros (2017) et 60 000 euros (2018) de recettes foncières annuelles ;

– 30 000 euros (2017) et 10 000 euros (2018) de travaux ;

– 10 000 euros (2017 et 2018) d’autres charges.

En 2017, le contribuable pourrait opérer une déduction intégrale des dépenses de travaux de l’année 2017. Son déficit foncier constaté en 2017 s’élèverait donc à 30 000 euros (10 000 – 30 000 – 10 000) se décomposant en :

– 10 700 euros imputables sur le revenu global de 2017 ;

– 19 300 euros reportables sur les revenus fonciers des dix années suivantes.

En 2018, les dépenses de travaux, déductibles au titre de 2018, seraient plafonnées à la moyenne des dépenses de l’espèce payées en 2017 et 2018, soit 20 000 euros (30 000 + 10 000 / 2).

Le revenu net foncier du contribuable s’élèverait donc en 2018 à 30 000 euros (60 000 – 20 000 – 10 000), sur lequel le déficit foncier en report au 31 décembre 2017, soit 19 300 euros, serait imputé.

Son revenu foncier net imposable en 2018 s’élèverait donc à 10 700 euros (30 000 – 19 300).

Source : évaluation préalable de l’article 38 du présent projet de loi de finances.

Ainsi, à supposer qu’un déficit foncier supérieur à 10 700 euros imputé par un redevable en 2017 soit occasionné par d’importants travaux, ce redevable pourrait bénéficier en 2018 à la fois du report et de la prise en compte de 50 % de ces travaux pour la détermination des revenus nets fonciers de l’année 2018.

• Les dispositifs d’investissement locatif « Borloo ancien », « Robien », « Borloo neuf » et « Besson », les dispositifs « Malraux ancien » et monuments historiques

Le dispositif « Borloo ancien » permet aux propriétaires de logements donnés en location à compter du 1er octobre 2006 (sous respect de certains plafonds de loyer et de ressources du locataire) de pratiquer une déduction de 30 % des revenus bruts dans le secteur intermédiaire, de 60 % dans le secteur social et de 70 % pour les logements loués à un organisme en vue de leur sous-location à des personnes défavorisées.

Comme indiqué précédemment, les déductions afférentes aux loyers perçus en 2017 et 2018 continueraient à être appliquées.

Considérées comme des charges récurrentes, les déductions de l’année 2017 ne pourraient être pratiquées que pour la détermination du revenu net foncier de l’année 2017.

Cette prise en compte en 2017 viendrait automatiquement minorer le revenu net foncier de l’année 2017 donc, par la suite, le montant du CIMR foncier dont le redevable pourrait bénéficier.

Les dispositifs « Besson ancien » et « Besson nouveau », pour les acquisitions réalisées entre le 1er janvier 1999 et le 30 septembre 2006, ouvrent le droit à un amortissement accéléré et une déduction spécifique. Ces dispositifs continueraient à s’appliquer avec les mêmes conditions que celles applicables au « Borloo ancien ».

L’amortissement « Robien » permet, pour les investissements réalisés entre le 1er janvier 2003 et le 31 décembre 2009, de pratiquer un amortissement de 8 % du prix d’acquisition pendant cinq ans, puis 2,5 % pendant quatre ans. L’amortissement « Robien » recentré est moins avantageux.

Ces amortissements seraient pris en compte normalement pour la détermination des revenus nets fonciers des années 2017 et 2018.

En 2017, ils minoreraient les revenus nets fonciers des redevables, donc le CIMR dont ils pourraient bénéficier au titre des loyers non exceptionnels perçus.

Le dispositif « Malraux ancien » prévoit que les déficits provenant de dépenses, autres que les intérêts d’emprunt, effectuées en vue de la restauration complète d’un immeuble bâti situé dans un secteur protégé peuvent s’imputer, sans limitation de montant, sur le revenu global.

Dans ce cadre, les dépenses prises en compte pour la détermination du revenu net foncier comprennent, outre les charges déductibles dans les conditions de droit commun, certaines dépenses spécifiques limitativement énumérées au b ter du 1° du I de l’article 31 du CGI (frais d’adhésion à des associations foncières urbaines de restauration, travaux de démolition imposé par le permis de construire, travaux de reconstitution de toiture).

Ce dispositif s’applique aux déficits résultant de dépenses portant sur des immeubles pour lesquels une demande de permis de construire ou une déclaration de travaux a été déposée au plus tard le 31 décembre 2008.

En application de l’article 118 de la loi de finances pour 2016 (127), le dispositif « ancien Malraux » s’applique aux déficits fonciers résultant de dépenses payées jusqu’au 31 décembre 2017.

Ce dispositif « Malraux ancien » est en voie d’extinction mais peut encore produire des effets fiscaux en 2017.

Les dépenses visées au b ter du 1° du I de l’article 31 du CGI ne sont donc par construction imputables qu’au titre de 2017 ;

Compte tenu de la prise en compte des travaux effectués en 2017 à hauteur de 50 % en 2018, ce dispositif « Malraux ancien » continuerait, par ce biais à produire des effets fiscaux en 2018.

Le régime des monuments historiques permet aux propriétaires de monuments historiques et assimilés de bénéficier, pour la détermination de l’assiette de l’impôt sur le revenu, de modalités dérogatoires de prise en compte des charges foncières supportées à raison de ces immeubles.

Les charges foncières supportées par les propriétaires de monuments historiques ou assimilés peuvent être admises en déduction :

– soit du revenu global du propriétaire lorsque l’immeuble ne lui procure aucune recette ;

– soit du revenu foncier procuré par l’immeuble, lorsque celui-ci donne lieu à la perception de recettes imposables et qu’il n’est pas occupé par le propriétaire ;

– soit pour partie du revenu foncier et pour partie du revenu global, lorsque l’immeuble procure des recettes mais est occupé en partie par son propriétaire.

Depuis 2009, plusieurs conditions complémentaires ont été ajoutées pour bénéficier du dispositif :

– l’engagement de conserver la propriété de l’immeuble concerné pendant une période d’au moins quinze années à compter de son acquisition ;

– la détention directe de l’immeuble ;

– l’absence de mise en copropriété de l’immeuble.

Par ailleurs, en application des dispositions de l’article 31-0 bis du CGI, dans sa rédaction issue de la loi de finances pour 2016 (128), ces modalités dérogatoires peuvent également s’appliquer au preneur à bail lorsque la location est consentie dans le cadre d’un bail emphytéotique d’une durée d’au moins dix-huit ans.

Dans ce cas, le preneur à bail est imposé sous le régime des revenus fonciers, sur les recettes qu’il a perçues après prise en compte des charges qu’il a supportées. En cas de constatation d’un déficit foncier, il peut bénéficier, par substitution du propriétaire, des modalités dérogatoires prévues par le présent régime.

Ces dispositions s’appliqueraient de manière normale en 2017 et 2018.

Parmi les charges déductibles au titre du régime des monuments historiques entrant dans la catégorie des charges pilotables mentionnées précédemment, elles seraient imputables à 100 % au titre de l’année 2017 et de 50 % en 2018.

f. Exemples de mise en œuvre du CIMR dans le domaine foncier et de la mesure spécifique d’imputabilité des travaux

• Cas n° 1 : le redevable a reporté en 2016 un déficit foncier en partie non imputé sur le revenu global

M. X a refait la toiture de son immeuble donné en location en 2016, pour un montant de 70 000 euros. Ses revenus locatifs hors travaux sont de 30 000 euros.

En 2016, M. X enregistre donc un déficit foncier de 40 000 euros.

Il ne paiera pas d’impôt sur ses revenus fonciers au titre de 2016 (donc en 2017) ; il peut en outre imputer sur son revenu global 10 700 euros au titre de 2016 et reporter 29 300 euros de déficit en 2017.

En 2017, ses revenus fonciers sont toujours de 30 000 euros ; il peut imputer 29 300 euros de déficit reportable. Il a donc un revenu net imposable en 2017 de 700 euros, pris en compte dans le CIMR.

L’année 2017 étant l’année dite « blanche », l’imputation d’une partie du déficit en 2017 efface donc en partie de l’effet fiscal lié à ces travaux réalisés en 2016.

• Cas n° 2 : le redevable impute en 2017 des charges de travaux sans imputation sur le revenu global

En 2017, M. X change sa chaudière pour 8 000 euros. Ses revenus fonciers sont de 10 000 euros.

En 2017, il pourra imputer 8 000 euros : son revenu net foncier sera donc de 2 000 euros.

Ce revenu net foncier sera effacé par l’effet du CIMR, ainsi que l’effet fiscal des travaux.

En 2018, il pourra imputer la moitié de cette somme sur son revenu foncier, soit 4 000 euros.

S’il avait réalisé ces travaux en 2018, il aurait pu imputer 4 000 euros également.

S’il avait réalisé ces travaux en 2016 ou 2019, il aurait toutefois pu imputer l’intégralité des 8 000 euros. Mais le choix de réaliser ces travaux en 2017 ou 2018 est fiscalement neutre.

• Cas n° 3 : le redevable impute en 2017 des charges de travaux avec imputation sur le revenu global et report mais sans avoir de revenus hors champ du PAS

En 2017, M. X refait la toiture de son immeuble donné en location pour un montant de 80 000 euros. Ses revenus locatifs nets hors travaux sont de 50 000 euros. Il a par ailleurs des revenus salariaux non exceptionnels de 60 000 euros.

En 2017, il peut effacer fiscalement en totalité ses revenus fonciers ; en outre, un déficit foncier de 30 000 euros peut être en partie imputé sur le revenu global à hauteur de 10 700 euros en 2017 et reporté en 2018 à hauteur de 19 300 euros. Ses revenus salariaux net de l’imputation partielle du déficit foncier sont donc de 49 300 euros en 2017.

Compte tenu de l’année blanche, l’effet fiscal de ces travaux ne se fait pas sentir en 2017, ni au titre de la déductibilité ni au titre de l’imputabilité sur le revenu global.

En 2018, son revenu foncier est toujours de 50 000 euros.

Il pourra imputer la moitié des travaux effectués en 2017, soit 40 000 euros ; à cette somme, il faut ajouter l’imputation des déficits fonciers en report de 19 300 euros.

En 2018, son revenu foncier est donc fiscalement effacé et il enregistre un déficit de 9 300 euros. Ce déficit foncier n’est plus imputable sur le revenu global mais reportable en 2019.

Au total, M. X percevra un effet fiscal lié à ces travaux à hauteur de 59 300 euros en 2018.

• Cas n° 4 : le redevable impute en 2017 des charges de travaux avec imputation sur le revenu global et en ayant des revenus hors champ du PAS

En 2017, M. X refait la toiture de son immeuble donné en location pour un montant de 80 000 euros. Ses revenus locatifs nets hors travaux sont de 50 000 euros. Il a par ailleurs des revenus mobiliers de 20 000 euros.

En 2017, il peut effacer fiscalement ses revenus fonciers et enregistrer un déficit foncier de 30 000 euros.

Il peut imputer 10 700 euros de déficit foncier sur son revenu global et reporter en 2018 un déficit de 19 300 euros.

Au titre de 2017, le déficit foncier imputable viendra minorer ses revenus mobiliers, dont le montant net imposable s’établira donc à 9 300 euros.

Comme les revenus mobiliers sont hors champ du PAS et sont imposables en année N + 1 dans les conditions de droit commun, M. X perçoit un effet fiscal lié à ses travaux dès 2017.

En 2018, ses revenus fonciers sont toujours de 50 000 euros ; il pourra imputer la moitié de ces travaux, soit 40 000 euros, ainsi que les déficits reportés, soit 19 300 euros. Un nouveau déficit de 9 300 euros sera reportable en 2019.

Au total, M. X percevra un effet fiscal lié à ces travaux à hauteur de 59 300 euros en 2018 plus 10 700 euros imputés sur ses revenus hors champ du PAS en 2017.

• Cas n° 5 : le redevable impute en 2018 des charges de travaux en partie reportables sur 2019

En 2018, M. X refait la toiture de son immeuble donné en location pour un montant de 80 000 euros, sans avoir fait de travaux en 2017. Ses revenus locatifs nets hors travaux sont de 20 000 euros.

En 2018, il pourra donc imputer 40 000 euros ; son déficit foncier s’établit donc à 20 000 euros.

• Cas n° 6 : rentabilité comparée d’un investissement locatif sur dix ans avec et sans mise en œuvre du CIMR

M. X acquiert un appartement en 2014 et le revend en 2023. Durant les 10 ans pendant lesquels il détient cet appartement, il en perçoit des recettes locatives annuelles brutes de 2 500 euros. Par ailleurs, M. X supporte 700 euros de charges annuelles afférentes à cet appartement.

M. X perçoit donc annuellement un revenu net foncier de 1 800 euros par an pendant dix ans, soit 18 000 euros sur l’ensemble de la période.

En l’absence de réforme, du fait du décalage d’un an entre la perception des revenus et leur imposition, M. X aurait dû acquitter de l’impôt sur 1 800 euros par an pendant dix ans, entre 2015 et 2024.

En 2024, il aurait acquitté l’impôt afférent aux loyers perçus en 2023, alors même qu’ayant cédé l’appartement, il ne percevait plus de loyers à cette date.

Du fait de la réforme, M. X pourra signaler dès la cession de son appartement qu’il ne perçoit plus de revenus fonciers et il n’aura plus d’impôt sur le revenu afférent à ses revenus fonciers à acquitter en 2024.

Par ailleurs, du fait de la mise en œuvre du CIMR, M. X sera imposé, sur la période, sur un revenu total de 16 200 euros et non sur un revenu de 18 000 euros. Dès lors, la rentabilité de son investissement sera d’autant plus forte.

(unités)

Année

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

2023

2024

total

Revenu net foncier perçu

1 800

1 800

1 800

1 800

1 800

1 800

1 800

1 800

1 800

1 800

-

18 000

Assiette imposée en l’absence de réforme

-

1 800

1 800

1 800

1 800

1 800

1 800

1 800

1 800

1 800

1 800

18 000

Assiette imposée avec la réforme

-

1 800

1 800

1 800

(au titre des revenus 2016)

1 800

(au titre des revenus 2018)

1 800

1 800

1 800

1 800

1 800

-

16 200

4. Les modalités de détermination des revenus exceptionnels des travailleurs indépendants : le dispositif du complément de CIMR

Certains revenus susceptibles d’être perçus par les travailleurs indépendants sont, par nature, considérés comme exceptionnels et ne sont pas inclus dans l’assiette de l’acompte contemporain, ainsi qu’il a été vu (Cf. supra, II, B). Il s’agit des revenus mentionnés au 7° du 2 de l’article 204 G nouveau du CGI (revenus imposés selon le système du quotient prévu à l’article 163-0 A du CGI, plus ou moins-values définies à l’article 39 duodecies, subventions d’équipement, indemnités d’assurance liées à la perte d’un élément d’actif immobilisé).

Si de tels revenus étaient réalisés en 2017, ils ne seraient pas couverts par le CIMR et resteraient imposés au titre de l’année 2017.

Néanmoins, limiter la définition des revenus exceptionnels à ces catégories, pour l’application du CIMR, pourrait inciter certains contribuables à des comportements d’optimisation en 2017 afin de maximiser le montant du CIMR auquel ils auraient droit. Les BIC, BNC et bénéfices agricoles peuvent en effet, plus facilement que les revenus salariaux, faire l’objet d’un pilotage relatif :

– en concentrant des recettes sur un exercice en particulier pour accroître artificiellement le chiffre d’affaires ;

– en reportant des charges sur l’exercice suivant pour gonfler le bénéfice imposable de l’exercice en cours.

En conséquence, afin d’éviter de tels comportements, le projet de réforme prévoit, au E du II du présent article, des modalités particulières de détermination des revenus exceptionnels des travailleurs indépendants en 2017, fondées sur une appréciation pluriannuelle (alinéas 299 à 311).

La détermination des revenus exceptionnels des indépendants obéit à une démarche en deux temps :

– en 2018, pour le calcul du CIMR ;

– en 2019, pour l’ajustement du CIMR (versement d’un complément ou, au contraire, éventuelle restitution).

a. L’assiette du CIMR des indépendants serait plafonnée sur la base d’une appréciation pluriannuelle

Ainsi qu’il a été vu, le CIMR serait calculé en multipliant l’impôt brut dû au titre de 2017 par le rapport entre les revenus non exceptionnels dans le champ du prélèvement à la source perçus en 2017 et l’ensemble des revenus perçus cette même année.

S’agissant des BIC, BNC et bénéfices agricoles, les revenus non exceptionnels (retenus au numérateur de la formule de calcul du CIMR) seraient appréciés au moyen d’une comparaison pluriannuelle, et correspondraient au plus faible des deux montants suivants (alinéas 300 à 302) :

– le bénéfice imposable au titre de l’année 2017 ;

– le plus élevé des bénéfices imposables au titre des années 2014, 2015 et 2016.

Ainsi, si le bénéfice réalisé en 2017 est supérieur au plus élevé des bénéfices 2014-2016, l’assiette du CIMR serait plafonnée à ce dernier. Si, en revanche, le bénéfice réalisé en 2017 est inférieur au plus élevé de ces bénéfices, il serait intégralement retenu pour le calcul du CIMR. L’exemple suivant illustre le calcul du CIMR pour deux travailleurs indépendants.

Deux contribuables célibataires A et B perçoivent, entre 2014 et 2017, les BIC suivants :

REVENUS PERÇUS PAR DEUX CONTRIBUABLES SUR LA PÉRIODE 2014-2017

(en euros)

Exercice

Contribuable A

Contribuable B

2014

24 000

24 000

2015

30 000

30 000

2016

36 000

36 000

2017

30 000

48 000

L’impôt dû au titre de 2017 par le contribuable A est de 3 355 euros (129). Le bénéfice de 2017 étant inférieur au plus élevé des bénéfices constatés entre 2014 et 2016, l’impôt dû au titre de 2017 serait totalement annulé par le CIMR (le montant de ce dernier étant égal à l’impôt dû : 3 355 × (30 000 / 30 000).

L’impôt dû au titre de 2017 du contribuable B est de 8 755 euros (130). Dans la mesure où le BIC de 2017 excède le plus élevé des BIC des trois années précédentes, ce contribuable percevrait un CIMR plafonné au bénéfice 2016, dont le montant serait de 6 566 euros (8 755 × (36 000 / 48 000)). Il devrait donc acquitter un impôt au titre de 2017 d’un montant de 2 189 euros, qui correspondrait à la part de bénéfice imposable non couverte par le CIMR (8 755 – 6 566).

Pour ne pas pénaliser les travailleurs indépendants qui auraient débuté leur activité entre 2014 et 2016, le 4 du E (alinéa 310 du présent article) prévoit un ajustement prorata temporis sur une période de douze mois si l’un des bénéfices perçus entre 2014 et 2016 est afférent à une période d’activité inférieure à douze mois. En l’absence d’un tel ajustement, le plafonnement aurait été artificiellement bas, diminuant le CIMR auquel le contribuable aurait pu prétendre.

b. Les contribuables ayant dénoncé leur option pour le versement libératoire pour 2017 puis opté de nouveau pour ce régime pour 2018 ne bénéficieraient pas du CIMR

En vertu du 5 du même E (alinéa 311), un contribuable relevant du régime du versement libératoire, prévu à l’article 151-0 du CGI, qui a dénoncé en 2016 son option pour 2017 et qui, en 2017, exerce une nouvelle option pour le versement libératoire pour 2018, ne bénéficierait pas du CIMR.

Un tel contribuable se serait acquitté, pendant l’année 2016, de l’impôt dû au titre des revenus réalisés cette année-là, au travers des versements libératoires effectués et assis sur son chiffre d’affaires trimestriel (Cf. infra, II, B). L’impôt dû au titre de 2017 serait acquitté selon les modalités actuelles, en 2018, le CIMR ne le couvrant pas. En 2018, le contribuable paierait également l’impôt dû au titre de cette année-là, selon les modalités du versement libératoire.

L’année 2018 conduirait donc à une double imposition (impôt dû au titre de 2017 non couvert par le CIMR et impôt dû au titre de 2018 acquitté par le versement libératoire), mais aucun impôt n’aurait été versé en 2017 (du moins sur les revenus susceptibles de faire l’objet du versement libératoire).

Cette double imposition n’est pas choquante. D’une part, le contribuable doit assumer son choix consistant à ne s’acquitter d’aucun impôt en 2017, dont la conséquence est de supporter en 2018 l’impôt dû au titre de 2017 et celui dû au titre de 2018.

D’autre part, la double imposition en matière de versement libératoire la première année d’effet de l’option n’est pas propre à la mise en œuvre du prélèvement à la source : elle existe déjà dans le droit actuel.

Enfin, l’impôt dû dans le régime du versement libératoire est plus faible que celui dû au titre des régimes « micro » (Cf. infra, II, B).

c. Le CIMR serait ajusté en 2019 au regard des revenus perçus en 2018

La spécificité du dispositif de l’année de transition pour les travailleurs indépendants repose sur la prise en compte des revenus perçus en 2018 dans la détermination du montant des revenus non exceptionnels de 2017.

Ainsi qu’il a été vu, le CIMR est plafonné en fonction du montant des bénéfices imposables sur la période 2014-2017. Ce plafonnement peut avoir pour effet, comme l’illustrait le second exemple ci-dessus, de devoir s’acquitter de l’impôt en 2017 sur des revenus qui correspondent pourtant à l’activité régulière du contribuable.

En conséquence, est prévu un volet complémentaire lors de la liquidation de l’impôt dû au titre de 2018, en septembre 2019, qui aurait vocation à s’appliquer dans deux hypothèses :

– le bénéfice 2018 excède le bénéfice 2017 (alinéa 305) ;

– le bénéfice 2018 est inférieur au bénéfice 2017 mais est supérieur au plus élevé des bénéfices 2014-2016 (alinéas 306 à 308).

En revanche, aucun complément de CIMR ne serait en principe accordé en 2019 si le bénéfice imposable réalisé en 2018 s’avère inférieur au plus élevé des bénéfices 2014-2016.

i. Bénéfice de 2018 supérieur à celui de 2017

Si le bénéfice imposable réalisé en 2018 est supérieur à celui de 2017 (et que ce dernier était lui-même supérieur au plus élevé des bénéfices de la période 2014-2016), le contribuable se verrait octroyer un complément de CIMR.

Ce complément correspondrait à la différence entre le CIMR qui aurait été versé si l’intégralité du bénéfice 2017 avait été prise en compte et le CIMR effectivement versé, ainsi que le montre l’exemple qui suit.

Un contribuable dont l’activité croît perçoit, entre 2014 et 2018, les BNC suivants :

REVENUS PERÇUS PAR UN CONTRIBUABLE SUR LA PÉRIODE 2014-218

(en euros)

Exercice

BNC

2014

25 000

2015

32 000

2016

36 000

2017

42 000

2018

48 000

L’impôt dû au titre de 2017 est de 6 955 euros (131).

Le CIMR versé en 2018 serait assis sur le bénéfice 2016, plus élevé de la période triennale retenue (le bénéfice 2017 étant supérieur). Il s’élèverait à 5 961 euros (6 955 × (36 000 / 42 000)).

Le bénéfice de 2018 étant supérieur à celui de 2017, un complément de CIMR serait versé en 2019, correspondant à la différence du CIMR qui aurait été octroyé si le bénéfice de 2017 avait été retenu, et le CIMR effectivement versé. Le CIMR assis sur le bénéfice de 2017 se serait élevé à 6 955 euros (6 955 × (42 000 / 42 000)). Le complément de CIMR serait donc de 994 euros (6 955 – 5 961). L’intégralité de l’impôt dû en 2017 aurait donc été annulée par le CIMR et son complément.

ii. Bénéfice de 2018 inférieur à celui de 2017 mais supérieur à ceux de la période 2014-2016

Si le bénéfice imposable en 2018 est inférieur à celui de 2017 mais supérieur au plus élevé de la période 2014-2016, retenu pour le plafonnement du CIMR, un complément de CIMR serait également accordé.

Ce complément correspondrait à la différence entre le CIMR qui aurait été versé en retenant le bénéfice de 2018 et celui effectivement versé. Cela reviendrait donc à plafonner le CIMR total au montant des revenus perçus en 2018, ainsi que l’illustre l’exemple ci-dessous.

Le contribuable B du premier exemple réalise en 2018 un bénéfice de 42 000 euros, soit moins que le bénéfice de 2017 qui s’élevait à 48 000 euros. Le CIMR perçu s’élevait à 6 566 euros, assis sur le plus élevé des bénéfices 2014-2016, d’un montant de 36 000 euros.

En septembre 2019, ce contribuable bénéficierait d’un complément de CIMR, assis sur le bénéfice réalisé en 2018. Si le bénéfice 2018, et non celui de 2016, avait été retenu au numérateur du CIMR, ce dernier se serait élevé à 7 661 euros (8 755 × (42 000 / 48 000)).

Le complément de CIMR correspondrait donc à la différence entre ce CIMR « virtuel » et celui effectivement perçu en 2018, soit 1 095 euros (7 661 – 6 566).

Le contribuable aurait donc finalement acquitté un montant d’impôt au titre de 2017 d’un montant de 1 094 euros.

iii. Clause de sauvegarde reposant sur l’activité du contribuable

Est néanmoins prévu un élément de souplesse dans le dispositif du complément de CIMR, afin de ne pas pénaliser les travailleurs indépendants (alinéa 309).

SI le bénéfice 2017 s’avère supérieur au plus élevé des bénéfices de la période 2014-2016 et à celui de 2018, le contribuable aurait quand même la possibilité d’obtenir un complément de CIMR pour que ce dernier couvre intégralement l’impôt dû au titre de 2017. Pour ce faire, il lui faudra apporter la preuve que le montant du bénéfice réalisé en 2017 correspond uniquement à un surcroît d’activité cette année-là, et non à un pilotage des recettes ou des charges aux fins d’optimisation.

Cette « clause de sauvegarde » permettrait de traiter équitablement les indépendants qui auraient réalisé un bénéfice plus important en 2017 sans que cela ne soit dû à un comportement d’optimisation ni à une gestion courante anormale. Sans elle, en effet, ces travailleurs indépendants n’auraient bénéficié que d’une annulation partielle de leur impôt, les plaçant dans une situation différente et moins confortable que les autres contribuables.

Soit le contribuable B du premier exemple, dont l’impôt dû au titre de 2017, assis sur des BIC de 48 000 euros, s’élève à 8 755 euros. En 2018, il a bénéficié d’un CIMR de 6 566 euros et, en 2019, d’un complément de CIMR de 1 095 euros. Le reste d’impôt au titre de 2017 est donc de 1 094 euros.

Si ce contribuable apporte la preuve que le niveau du bénéfice réalisé en 2017, supérieur à ceux des trois années précédentes et à celui de 2018, est uniquement dû à un surcroît d’activité, il pourrait obtenir de l’administration l’annulation complète de cet impôt, au moyen d’un versement de 1 094 euros.

iv. Cas d’un début d’activité en 2017

Enfin, le dispositif de détermination des revenus non exceptionnels de l’année 2017 prévoit l’hypothèse d’un début d’activité en 2017 (alinéa 303 du présent article).

Par définition, dans cette hypothèse, il n’existe pas de bénéfice à prendre en compte au titre des trois années précédentes, empêchant l’application de la comparaison pluriannuelle. Le CIMR serait alors octroyé en retenant le bénéfice déclaré au titre de 2017, et ferait l’objet d’un ajustement en 2018 reposant sur la prise en compte de l’ensemble des revenus perçus par le contribuable entrant dans le champ du prélèvement à la source (seraient également pris en compte, le cas échéant, les revenus des gérants et associés mentionnés à l’article 62 du CGI, qui obéissent à des règles particulières) :

– si le bénéfice réalisé en 2018, majoré des autres revenus, est supérieur au bénéfice réalisé en 2017, majoré des mêmes revenus perçus cette année-là, le CIMR octroyé ne serait pas remis en cause ;

– en revanche, si l’addition du bénéfice 2018 et des autres revenus perçus cette année-là est inférieure à l’addition du bénéfice et des autres revenus perçus en 2017, le CIMR serait remis en cause à hauteur de la différence constatée. Cette différence est plafonnée à la différence entre le bénéfice 2017 et le bénéfice 2018, si celle-ci est positive.

La clause de sauvegarde liée à la démonstration d’un simple surcroît d’activité est toutefois applicable, pour permettre au contribuable de ne pas voir son CIMR remis en cause lorsque le montant du bénéfice réalisé en 2017 provient d’une gestion normale et d’une conjoncture favorable à son activité.

Soit un contribuable qui perçoit ses premiers BIC en 2017 et qui, parallèlement, perçoit des revenus salariaux. Le tableau suivant illustre le montant des revenus perçus.

REVENUS PERÇUS PAR UN CONTRIBUABLE DÉMARRANT EN 2017
UNE ACTIVITÉ RELEVANT DES BIC DONT LES REVENUS 2018 EXCÈDENT CEUX DE 2017

(en euros)

Exercice

Revenus salariaux

BIC

2017

12 000

12 000

2018

20 000

6 000

Le CIMR versé en 2018 au titre de l’impôt dû en 2017 serait assis sur la totalité des BIC perçus cette année-là, qui est celle du début d’activité.

En 2018, les BIC diminueraient mais le cumul des différents revenus perçus cette année-là (26 000 euros) aboutirait à un montant supérieur au cumul des revenus de 2017 (24 000 euros). Le CIMR versé en 2018 ne serait donc pas remis en cause en 2019.

La situation serait différente si le contribuable percevait les revenus suivants :

REVENUS PERÇUS PAR UN CONTRIBUABLE DÉMARRANT EN 2017
UNE ACTIVITÉ RELEVANT DES BIC DONT LES REVENUS 2017 EXCÈDENT CEUX DE 2018

(en euros)

Exercice

Revenus salariaux

BIC

2017

12 000

12 000

2018

16 000

6 000

Le cumul des revenus perçus en 2018 porterait sur un montant de 22 000 euros et serait inférieur au cumul des revenus perçus en 2017 d’un montant de 24 000 euros.

Le CIMR perçu en 2018 au titre de l’impôt dû en 2017 pourrait donc être remis en cause à hauteur de la différence entre ces deux totaux, soit 2 000 euros (la limite liée à la différence entre les BIC 2017 et les BIC 2018 ne saurait s’appliquer en l’espèce dans la mesure où elle excède la différence des revenus des deux années).

Le contribuable pourrait néanmoins éviter cette remise en cause s’il établit que la supériorité des BIC perçus en 2017 par rapport à 2018 est uniquement due à un surcroît d’activité en 2017.

Enfin, un contribuable célibataire qui démarrerait une activité non salariée en 2017 percevrait les revenus suivants :

REVENUS PERÇUS PAR UN CONTRIBUABLE DÉMARRANT EN 2017
UNE ACTIVITÉ RELEVANT DES BIC DONT LES REVENUS 2018 EXCÈDENT CEUX DE 2017

(en euros)

Exercice

Revenus salariaux

BIC

2017

24 000

10 000

2018

16 000

16 000

Le cumul des revenus perçus en 2017 porterait sur un montant de 34 000 euros, celui des revenus perçus en 2018 sur un montant de 32 000 euros, soit une différence de 2 000 euros.

Ainsi que le prévoit l’alinéa 303, le CIMR pourrait être remis en cause. Cependant, la remise en cause à hauteur de cette différence est faite uniquement dans la limite de la différence entre le bénéfice 2017 et le bénéfice 2018, si celle-ci est positive. En l’espèce, cette différence est négative (– 6 000), les BIC ayant augmenté d’une année sur l’autre. Le CIMR ne serait donc pas remis en cause en 2019.

d. Les difficultés susceptibles d’être soulevées par le dispositif propre aux indépendants

La détermination des revenus non exceptionnels perçus par les travailleurs indépendants en 2017 et les modalités de calcul du CIMR et de délivrance éventuelle de son complément présenteraient une certaine complexité, pourraient s’avérer difficilement lisibles et soulèveraient des questions quant à leur pertinence.

i. Le risque de la mise en place d’un dispositif complexe et lent

Le montant des revenus à prendre en compte pour le CIMR reposerait sur une appréciation pluriannuelle remontant à 2014 et ferait l’objet d’une approche en deux temps :

– en 2018, pour le versement du CIMR, qui pourrait être plafonné ;

– en 2019, avec la prise en compte du bénéfice réalisé en 2018, pour ajuster le CIMR (ajustement qui pourrait, dans le cas d’une création d’activité en 2017, être fait à la baisse).

Ce dispositif serait plus difficile à manier et plus long que ceux applicables à d’autres catégories de revenus, par exemple les traitements et salaires ou les revenus fonciers.

En outre, les travailleurs indépendants ne bénéficieraient complètement de l’annulation de l’impôt dû au titre de 2017 qu’en septembre 2019, soit une année après les autres contribuables. Ce décalage pourrait s’avérer inopportun en termes de trésorerie et peu propice au développement des activités conduites.

ii. L’absence relative de prise en compte complète de la variabilité de l’activité des travailleurs indépendants

La définition des revenus non exceptionnels des travailleurs indépendants reposerait sur une appréciation du bénéfice 2017 par rapport aux trois précédents et au suivant :

– si le bénéfice 2017 est supérieur aux précédents, il ne serait pas intégralement pris en compte en 2018 pour le calcul du CIMR ;

– si le bénéfice 2018 est inférieur aux précédents, aucun complément ne serait, en principe, versé, empêchant tout déplafonnement et donc toute couverture intégrale par le CIMR de l’impôt dû au titre de 2017.

La première étape ne tient pas compte de l’accroissement de l’activité d’une année sur l’autre, situation qui n’est pourtant pas anormale, et priverait le contribuable pour au moins un an d’une partie de l’avantage fiscal accordé pour 2017, alors que les autres contribuables en bénéficieraient totalement et immédiatement. La seconde étape, qui fait intervenir le résultat de 2018, ne tiendrait, elle, pas compte des difficultés inhérentes à une activité indépendante et de la volatilité des bénéfices susceptibles d’être réalisés. Seul le résultat 2018 ou la démonstration apportée par le contribuable d’un simple surcroît d’activité en 2017 permettrait, selon les situations, de conduire au versement d’un CIMR final couvrant l’intégralité de l’impôt dû.

Les conséquences de cette approche pourraient s’avérer, d’un point de vue économique, préjudiciables aux contribuables dans la mesure où elles auraient pour effet de priver les travailleurs indépendants d’une partie de l’avantage octroyé au titre de 2017.

Certes, le dispositif proposé inciterait le contribuable à faire croître son activité entre 2017 et 2018 afin que le CIMR et son complément annulent l’intégralité de son impôt 2017. En outre, il éviterait les comportements consistant à créer une activité en 2017 pour bénéficier du CIMR et à l’interrompre ensuite. Néanmoins, il ne serait guère incitatif pour l’exercice 2017 du fait du décalage d’un an de la perception intégrale de l’avantage fiscal.

Pourrait ainsi être défendue une approche inverse de celle figurant dans le projet de réforme :

– le CIMR des travailleurs indépendants versé en 2018 serait assis sur le bénéfice réalisé en 2017, sans prise en compte des revenus précédents ;

– en 2019, le bénéfice réalisé en 2018 serait pris en compte pour déterminer s’il y a lieu de procéder à une remise en cause partielle du CIMR octroyé.

Dans le cadre de cette approche alternative, les travailleurs indépendants ne seraient pas incités à gonfler artificiellement leur résultat de 2017 afin de ne pas avoir à reverser en 2019 une partie du CIMR perçu en 2018. Ils seraient par ailleurs incités à faire croître leur activité entre 2017 et 2018, de la même manière que le fait le dispositif proposé.

Naturellement, la clause de sauvegarde reposant sur la démonstration du caractère normal de la gestion en 2017 serait maintenue afin d’éviter des restitutions de CIMR indues.

Reste néanmoins que la remise en cause du CIMR pourrait, du point de vue de l’affichage, de l’acceptabilité et de l’impact psychologique de la réforme, s’avérer fortement négatif.

iii. Le caractère potentiellement restrictif de la clause de sauvegarde liée au surcroît d’activité milite pour une clarification

Le dispositif prévu pour les travailleurs indépendants mériterait de faire l’objet d’une clarification sur la clause de sauvegarde liée au surcroît d’activité en 2017.

Cette clause, ainsi qu’il a été vu, permettrait au contribuable dont le bénéfice réalisé en 2017 excède celui de 2018 de bénéficier d’un complément de CIMR s’il démontre que le montant du bénéfice de 2017 est uniquement dû à un surcroît d’activité.

En premier lieu, aucune précision n’est fournie quant aux modalités de démonstration de ce surcroît d’activité. Or, il n’est pas exclu que certains contribuables, dont la gestion aurait pourtant été irréprochable et l’activité effectivement croissante, aient des difficultés à établir ce point.

En deuxième lieu, le présent article prévoit que cette sauvegarde jouerait si le caractère supérieur du bénéfice réalisé en 2017 résulte uniquement d’un surcroît d’activité. L’unicité requise est restrictive et pourrait empêcher un contribuable de bénéficier du complément de CIMR si le surcroît d’activité est la cause principale mais non exclusive de la différence de bénéfice. Or, et ainsi qu’il sera vu, d’autres facteurs peuvent conduire à améliorer le résultat d’une activité sans qu’ils relèvent pour autant d’une gestion anormale ou d’un comportement d’optimisation.

En troisième lieu, en effet, lier uniquement au surcroît d’activité, entendu strictement, l’éligibilité au complément de CIMR ne permet pas de prendre complément en compte la gestion normale d’une activité indépendante.

Une hausse de bénéfice peut, naturellement, trouver son origine dans un accroissement de l’activité.

Elle peut néanmoins avoir d’autres causes, pour un volume d’activité constant (nombre de ventes ou de prestations inchangé) :

– diminution des coûts de consommation intermédiaire, pour un artisan ou un agriculteur, par exemple ;

– diminution de certaines charges, telles que le loyer des locaux professionnels ;

– augmentation des prix des produits vendus ou des prestations fournies.

Dans chacune de ces trois hypothèses, pour une activité identique, le contribuable réalise un bénéfice supérieur à celui de l’exercice précédent.

Le contribuable peut ensuite supporter une diminution de son bénéfice, toujours à activité constante, s’il décide de finalement baisser ses prix ou encore si ses consommations intermédiaires ont augmenté. Ce dernier cas est particulièrement saillant pour des activités liées à des produits dont les cours sont soumis à une forte volatilité tels que les produits agricoles, les matières premières ou encore l’énergie.

L’administration fiscale a indiqué à la Rapporteure générale que le surcroît d’activité prévu couvrirait les augmentations de chiffre d’affaires, même si les volumes des ventes ou des prestations n’ont pas changé d’une année sur l’autre. Elle a également indiqué que la variation du prix des consommations intermédiaires serait prise en compte.

Néanmoins, afin de lever toute ambiguïté sur ce sujet, une officialisation par le ministre en séance de ces informations et leur consécration dans la doctrine fiscale paraîtraient opportunes.

5. Les revenus non exceptionnels des dirigeants

Les alinéas 312 à 322 prévoient une définition des revenus non exceptionnels des dirigeants d’entreprise à prendre en compte dans le CIMR, dont la logique est proche de celle prévue pour la définition des revenus non exceptionnels des indépendants exposée ci-dessus.

a. Une définition du dirigeant par référence au contrôle de la société

Pour l’application du présent dispositif, le présent article retient une définition du dirigeant de l’entreprise issue de l’article 150-0 B ter du CGI, relatif au régime du report d’imposition applicable aux plus-values d’apport de titres à une société contrôlée par l’apporteur.

Selon cet article, une société est contrôlée par le contribuable lorsque :

– la majorité des droits de vote ou des droits dans les bénéfices sociaux de la société est détenue, directement ou indirectement, par le contribuable ou par l’intermédiaire de son conjoint ou de leurs ascendants ou descendants ou de leurs frères et sœurs ;

– lorsqu’il exerce de fait le pouvoir de décision ;

– lorsqu’il dispose seul de la majorité des droits de vote ou des droits dans les bénéfices sociaux de cette société en vertu d’un accord conclu avec les autres associés ou actionnaires ;

Pour l’application du présent article, seul les deux premiers critères sont retenus, sachant que le deuxième englobe de fait les cas visés par le dernier critère.

Selon l’alinéa 316 du présent article, ce contrôle de la société serait apprécié « en 2017 », ce qui est particulièrement large ; dans le régime du report d’imposition, ces critères sont contrôlés à un moment précis (la cession des titres) qui ne trouveraient pas à s’appliquer, dans de nombreux cas, sur l’ensemble de l’année 2017. Il reviendrait à l’administration fiscale de préciser par instruction les modalités d’appréciation de ces critères dans le temps.

L’alinéa 317 prévoit la définition des revenus non exceptionnels s’applique aux rémunérations versées au dirigeant (tel que défini ci-dessus) mais aussi aux rémunérations versées à ses proches (conjoint, ascendants, descendants, frères ou sœurs).

b. L’assiette du CIMR des dirigeants serait plafonnée sur la base d’une appréciation pluriannuelle proche de celle applicable aux indépendants

Le montant des rémunérations des dirigeants ouvrant droit à l’application du CIMR est plafonné au plus faible des deux montants suivants :

– le montant net imposable en 2017 ;

– ou le montant le plus élevé imposable au titre des années 2014, 2015 ou 2016.

Ainsi, si le bénéfice réalisé en 2017 est supérieur au plus élevé des bénéfices 2014-2016, l’assiette du CIMR serait plafonnée à ce dernier. Si, en revanche, le bénéfice réalisé en 2017 est inférieur au plus élevé de ces bénéfices, il serait intégralement retenu pour le calcul du CIMR.

c. Les dérogations ou les ajustements possibles

Le présent dispositif prévoit plusieurs dispositifs dérogatoires ou d’ajustements permettant de prendre en compte les situations particulières :

– ces dispositions ne s’appliqueraient pas lorsque l’année 2017 constitue la première année au titre de laquelle ces personnes perçoivent ces rémunérations ;

– toutefois, par dérogation à l’alinéa précédent, lorsque l’ensemble des rémunérations versé à ces dirigeants (ou à leurs proches) en 2018 (en faisant masse des autres salaires, des revenus non salariaux et des autres revenus perçus en tant que gérants ou associés) est inférieur à ces mêmes revenus perçus en 2017, le crédit d’impôt serait plafonné à hauteur de la différence entre les revenus perçus en 2017 et en 2018 ;

Exemple

Un dirigeant débute son activité dans la société A et perçoit en 2017 une rémunération de 100 000 euros sans percevoir d’autres bénéfices.

En 2018, il bénéficie en principe d’un CIMR assis sur 100 000 euros.

En 2018, il perçoit toutefois 75 000 euros (50 000 de la société A et 25 000 de diverses autres sociétés). L’assiette du CIMR dont il bénéficierait serait finalement plafonnée à 75 000 euros.

– lorsque le plafonnement du CIMR du dirigeant est opéré en retenant le plus élevé des montants imposables des années 2014 à 2016, s’il apparaît in fine que les salaires perçus de la société contrôlée en 2018 sont supérieurs à ceux perçus en 2017, le contribuable peut finalement solliciter la restitution de la fraction de crédit d’impôt dont il aurait bénéficié en retenant le montant net imposable au titre de l’année 2017 ;

Exemple

Un dirigeant perçoit de la société A :

– 100 000 euros en 2017 ;

– 80 000 euros en 2014, 90 000 euros en 2015 et 85 000 euros en 2016.

Le CIMR serait plafonné à 90 000 euros.

Toutefois, en 2018, il perçoit en 2018 une rémunération de 120 000 euros.

Le contribuable peut alors solliciter un CIMR de 100 000 euros.

– dans le cas où les revenus salariaux perçus de la société contrôlée en 2018 sont inférieurs à ceux perçus en 2017 mais supérieurs à la plus élevée des rémunérations perçues entre 2014 et 2016, le contribuable peut solliciter, cette fois sous la forme d’une réclamation, la restitution de la fraction du CIMR dont il aurait pu bénéficier à hauteur de la différence entre les rémunérations de l’année 2018 et celles retenues entre 2014 et 2016 ;

Exemple

Un dirigeant perçoit de la société A :

– 100 000 euros en 2018 ;

– 110 000 euros en 2017 ;

– 90 000 euros en 2014 et 2015 et 85 000 euros en 2016.

Le CIMR serait en théorie plafonné à 90 000 euros.

Toutefois, en 2018, il peut réclamer un CIMR de 100 000 euros.

– à défaut d’application des dispositifs précédents, l’alinéa 322 prévoit par ailleurs la possibilité d’une restitution du CIMR non perçu lorsque le dirigeant peut justifier que la hausse des rémunérations perçues en 2017 par rapport à celles perçues entre 2014 à 2016 correspond à une évolution objective de ses responsabilités ou à une rémunération normale de ses performances. Le dirigeant doit également démontrer que la baisse des rémunérations en 2018 est également justifiée.

C. UNE CLAUSE GÉNÉRALE ANTI-OPTIMISATION

1. La nécessité de prévoir des dispositions spécifiques pour l’année 2017

Le mécanisme du CIMR est susceptible d’inciter certains contribuables à majorer de façon artificielle leurs revenus de l’année 2017, et ce faisant, de diminuer le montant d’impôt dû au titre de l’année 2018 – voire de l’année 2016.

L’évaluation préalable relève qu’en l’absence de dispositif particulier tenant compte du caractère exceptionnel du CIMR, les moyens de contrôle dont dispose l’administration fiscale ne seraient a priori guère adaptés, notamment parce que les dispositifs juridiques existants visent avant tout à contrôler toute démarche destinée à diminuer indûment les revenus imposables. À l’inverse, ils ne sont pas adaptés au contrôle d’une démarche visant à majorer les revenus imposables, en augmentant par exemple les recettes, en ne comptabilisant pas certaines charges, en évitant de constituer des provisions, en augmentant les stocks de fin d’année…

C’est la raison pour laquelle la mise en œuvre du CIMR serait accompagnée de dispositions spécifiques pour le contrôle des revenus déclarés au titre de l’année 2017. Ces dispositions ne peuvent être que générales, dans la mesure où il est impossible de prévoir ex ante tous les montages qui pourraient être élaborés.

L’évaluation préalable mentionne à titre d’illustration quelques montages qui peuvent être envisagés :

Exemple 1 : Un contribuable dirigeant d’une société bénéficiaire en France crée en 2017 une entreprise individuelle dont l’objet est le conseil en gestion ou le marketing. Les prestations facturées en 2017 et en 2018 à la société viendront en diminution du bénéfice imposable de celle-ci tandis que l’impôt afférent au bénéfice individuel issu de cette activité de conseil sera, nonobstant le dispositif pluriannuel d’appréciation prévu pour les travailleurs indépendants, annulé s’agissant du bénéfice réalisé au titre de l’exercice 2017.

Exemple 2 : Les membres d’une famille travaillant dans une entreprise familiale s’accordent pour assouplir au titre de l’année 2017 les critères de détermination de la prime de rendement annuelle afin que le montant de cette prime soit en 2017 particulièrement avantageux.

Exemple 3 : Un auteur ou un chanteur négocie avec sa maison d’édition ou de disques pour toucher en 2017 une importante avance sur revenus de droits d’auteur, une part de celle-ci étant perçue par anticipation au titre des années ultérieures.

Exemple 4 : Une personne possède en France une société détenue par une holding située à l’étranger. Cette personne crée à la fin de l’année 2016 une entreprise individuelle de conseil qui facture en 2017 et en 2018 à la holding des prestations. Cette opération permet au contribuable de rapatrier en franchise d’impôt pour 2017 des fonds localisés dans la holding. Le dispositif pluriannuel d’appréciation des BNC présenté supra ne permettra pas d’éviter un tel montage.

2. Un dispositif de demande de justifications par l’administration fiscale sur la détermination du montant du CIMR, pouvant conduire à la remise en cause de ce dernier

● Le 1 du J (alinéas 330 à 334) définit les modalités particulières selon lesquelles l’administration fiscale pourrait demander aux contribuables d’apporter des justifications sur tous les éléments servant de base à la détermination du montant du CIMR et du CIMR complémentaire : pour ce faire, il reprend largement, en les adaptant, les dispositions applicables pour les demandes d’éclaircissements que peut formuler l’administration fiscale auprès du contribuable en vue de l’établissement de l’impôt sur le revenu, prévues par les articles L. 16, L. 16 A et L. 69 du livre des procédures fiscales.

L’administration fiscale peut ainsi demander aux contribuables ces justifications, sans que cette demande ne constitue le début d’une procédure de vérification de comptabilité ou d’une procédure d’examen de situation fiscale personnelle. De la même façon que dans le cadre des articles L. 16 et L. 16 A précités, la demande de l’administration fiscale doit indiquer explicitement au contribuable les points sur lesquels elle porte et fixer un délai de réponse, qui ne peut être inférieur à deux mois. Dès lors que le contribuable a répondu de façon insuffisante à la demande de justifications, l’administration fiscale lui adresse une mise en demeure de fournir des compléments de réponse dans un délai de trente jours.

● À l’issue de cette procédure, deux cas pourraient se présenter.

En l’absence de réponse à sa demande de justifications ou à sa demande de compléments, l’administration fiscale pourrait remettre en cause le montant du CIMR ou du CIMR complémentaire, selon les procédures d’imposition d’office prévues aux articles L. 65 et suivants du livre des procédures fiscales – et ce, de la même façon que lorsque le contribuable s’est abstenu de répondre aux demandes d’éclaircissements précitées (article L. 69 du livre des procédures fiscales).

La procédure de taxation d’office

La procédure d’imposition d’office a pour caractéristique de ne pas être contradictoire : elle se déroule sans que le contribuable ne soit amené à présenter sa position, et elle met la preuve à sa charge s’il conteste l’imposition devant les tribunaux.

Dans le cas d’une imposition d’office, l’administration fait une évaluation aussi exacte que possible des bases d’imposition, à l’aide des éléments d’appréciation dont elle dispose. Les impositions peuvent être assorties de pénalités, qui varient en fonction des infractions relevées.

L’imposition d’office a pour conséquence d’exclure la procédure normale de rectification à caractère contradictoire. En particulier, la commission départementale ou nationale des impôts directs n’a pas vocation à intervenir.

Néanmoins, l’administration fiscale est tenue de porter les bases ou les éléments de l’imposition d’office, ainsi que leurs modalités de détermination, à la connaissance du contribuable, trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions.

Une fois l’imposition mise en recouvrement, le contribuable peut présenter une réclamation, mais il ne peut obtenir une réduction ou la décharge de l’imposition qu’en apportant la preuve qu’elle est exagérée.

En l’espèce, la procédure d’imposition d’office pourrait par exemple se traduire par une minoration du CIMR ou du CIMR complémentaire, et donc une majoration de l’impôt effectivement dû par le contribuable au titre des revenus de 2017 (par exemple dans le cas où des revenus s’avèrent exceptionnels, alors qu’ils n’ont pas été mentionnés comme tels dans la déclaration de revenus) ou au titre des revenus de 2018, compte tenu des dispositions prévues par le CIMR complémentaire, notamment.

Le deuxième cas correspondrait à la situation où le contribuable a répondu à l’administration fiscale, mais où sa réponse fait apparaître qu’il a procédé à des opérations ayant eu « principalement pour objet et pour effet d’augmenter » le montant du CIMR ou du CIMR complémentaire : dans ce cas, l’administration pourra remettre en cause le montant de ces crédits d’impôt selon les procédures prévues aux articles L. 55 et suivants du livre des procédures fiscales, à savoir la procédure de rectification contradictoire.

La procédure de rectification contradictoire

La procédure de rectification contradictoire, qui constitue la procédure normale de rectification des bases d’imposition, est suivie dans tous les cas où l’administration fiscale, après avoir constaté une insuffisance, une inexactitude, une omission ou une dissimulation dans les éléments servant au calcul des impôts, désire apporter des rectifications aux déclarations des contribuables.

L’administration doit alors adresser au contribuable une proposition de rectification, motivée de façon à permettre à l’intéressé de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. Cette proposition de rectification doit mentionner le délai ouvert au contribuable pour y répondre, qui est de trente jours – il peut être prorogé de trente jours si le contribuable en fait la demande.

Dans ce délai, le contribuable peut soit accepter la rectification proposée (l’absence de réponse dans le délai imparti valant acceptation tacite), soit présenter ses observations, qui peuvent prendre la forme d’un refus pur et simple.

Si le redevable produit des observations dans le délai légal et si ses observations sont reconnues fondées, l’administration abandonne ou modifie son projet de rectification. Si l’administration rejette les observations, elle doit en informer le contribuable par une réponse motivée.

Dans les deux cas, l’administration fiscale pourrait être amenée, le cas échéant, à appliquer des pénalités, sur le fondement de droit commun de l’article 1729 du CGI.

3. L’allongement d’une année du délai de reprise de droit commun pour l’impôt sur le revenu dû au titre de 2017

● Le droit de l’administration de réparer les omissions, insuffisances ou erreurs dans l’établissement de l’impôt ne peut être exercé que pendant un certain délai, appelé « délai de reprise » ou de prescription, à l’expiration duquel l’administration ne peut plus établir d’imposition primitive ou supplémentaire.

Aux termes du premier alinéa de l’article L. 169 du livre des procédures fiscales, s’agissant de l’impôt sur le revenu, le droit de reprise de l’administration fiscale s’exerce jusqu’à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l’imposition est due. À titre d’exemple, pour l’imposition des revenus de 2015, déclarés et acquittés en 2016, le délai de reprise expire le 31 décembre 2018.

Par exception, le droit de reprise s’exerce jusqu’à la fin de la dixième année suivant celle au titre de laquelle l’imposition est due dans trois cas : en cas d’activité occulte, lorsque l’administration a dressé un procès-verbal de flagrance fiscale et en cas de non-respect des obligations déclaratives concernant notamment les comptes détenus à l’étranger, les contrats d’assurance vie souscrits auprès d’organismes établis à l’étranger ou bien encore les trusts.

● Le 2 du H du II (alinéa 335) porte le délai de reprise de trois à quatre années pour l’impôt sur le revenu dû au titre de l’année 2017 : en conséquence, le délai de reprise pour l’imposition de ces revenus expirerait le 31 décembre 2021, au lieu du 31 décembre 2020.

Cet allongement d’une année se justifie par le caractère pluriannuel de certains dispositifs prévus dans le cadre du CIMR et du CIMR complémentaire : le mécanisme d’appréciation des revenus servant au calcul du CIMR pour les travailleurs indépendants, pour les titulaires de revenus fonciers et pour les dirigeants de sociétés s’échelonnent sur plusieurs années, et ils ne pourraient être évalués définitivement qu’en 2019, puisqu’ils prennent en compte non seulement les années 2014, 2015, 2016 mais aussi l’année 2018. Ce ne serait donc qu’en 2019 que les contrôles de l’administration fiscale sur ces revenus perçus au titre de l’année 2017 pourraient débuter. De ce fait, et compte tenu des risques d’optimisation fiscale associés aux dispositifs du CIMR et du CIMR complémentaire, il apparaît justifié d’allonger d’une année le délai de reprise dont dispose l’administration fiscale.

● Enfin, le 3 du H du II (alinéa 336) dispose que seuls les revenus déclarés spontanément par le contribuable seraient pris en compte dans le calcul du montant du CIMR et du CIMR complémentaire. De ce fait, si dans le cadre d’un contrôle effectué ensuite, il apparaît que le contribuable a perçu des revenus non exceptionnels en 2017 mais qu’il ne les a pas déclarés, il ne pourrait bénéficier du CIMR et serait donc imposé.

Cette disposition vise à inciter les contribuables à déclarer leurs revenus perçus en 2017 – alors qu’ils pourraient considérer qu’en l’absence d’imposition des revenus non exceptionnels, ils pourraient s’en abstenir. L’absence de déclaration des revenus perçus au titre de l’année 2017 aurait en effet des répercussions fiscales et sociales considérables (notamment s’agissant de tous les avantages fiscaux et sociaux dont l’éligibilité est liée au niveau de RFR du foyer fiscal), dès lors que pour certaines catégories de revenus, l’administration fiscale n’aurait pas connaissance de leur existence si elles ne sont pas déclarées spontanément.

II. LE CIMR APPLICABLE AUX PRÉLÈVEMENTS SOCIAUX

Les alinéas 337 à 340 prévoient, par symétrie avec la mise en place du CIMR sur les revenus destinés à assurer l’absence de double contribution fiscale aux charges publiques en 2018, la mise en place d’un CIMR spécifique sur les prélèvements sociaux dont le prélèvement à la source interviendrait pour la première fois à compter du 1er janvier 2018.

À l’instar du CIMR sur la fiscalité des revenus, ce CIMR sur les prélèvements sociaux ne viserait qu’à éviter une double contribution sociale en 2018 (celle qui aurait dû normalement être prélevée en 2018 en l’absence de réforme et celle dont le prélèvement à la source débuterait à compter du 1er janvier 2018).

Par construction, le présent CIMR social ne viserait donc que les prélèvements sociaux dont le prélèvement à la source est organisé, à compter du 1er janvier 2018, par les alinéas 259 à 265 commentés précédemment.

Les autres prélèvements sociaux ne seraient donc pas concernés par ce CIMR social, soit que les revenus sur lesquels ils pèsent sont hors du champ de la réforme, soit qu’ils font déjà l’objet d’un prélèvement à la source.

A. LES PRÉLÈVEMENTS SOCIAUX NON CONCERNÉS PAR LE CIMR SOCIAL

1. Les prélèvements sociaux sur les revenus placés hors du champ du prélèvement

Comme indiqué au début de cet exposé, plusieurs catégories de revenus seraient maintenues hors du champ du PAS, soit qu’il soit techniquement complexe d’opérer un prélèvement à la source sur une assiette peu évidente à déterminer, soit que le droit en vigueur prévoie déjà des prélèvements à la source spécifiques.

Ainsi, les plus-values mobilières et immobilières ainsi que les revenus de capitaux mobiliers seraient maintenus hors du champ du PAS.

Ces revenus continueraient donc à être imposés par voie de rôle en année N + 1 ; en toute logique, les prélèvements sociaux pesant sur ces revenus continueraient également à être perçus sur ce même rôle en année N + 1, sauf pour les plus-values immobilières (prélèvement à la source). Le risque de double prélèvement social étant écarté, il n’y a pas lieu de les prendre en compte dans le présent CIMR social.

Les revenus de capitaux mobiliers seraient également maintenus hors du champ du prélèvement du PAS ; du point de vue des prélèvements sociaux, ces revenus seraient soumis soit aux prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine, lorsqu’ils sont imposés par voie de rôle en année N + 1, soit à ceux pesant sur les revenus de placement, lorsque ces revenus sont déjà soumis, au titre de l’impôt sur les revenus, à un prélèvement à la source (libératoire ou non).

Dans ce second cas, les prélèvements sociaux sont d’ores et déjà perçus en même temps que le prélèvement à la source dont ils font déjà l’objet.

Les prélèvements sociaux sur les revenus de placement seraient donc en grande majorité perçus à la source en 2017 comme en 2018, sans qu’il existe un quelconque risque de double prélèvement social.

2. Les prélèvements sociaux sur les revenus d’activité entrant dans le champ du prélèvement et non du CIMR

Les revenus salariaux entrant dans le champ du PAS sont actuellement, pour l’essentiel, soumis aux prélèvements sociaux sur les revenus d’activités et de remplacement.

Ces prélèvements sociaux sont actuellement déjà prélevés à la source. À ce titre, le risque de double prélèvement social en 2018 serait également écarté, ce qui justifie qu’ils ne soient pas non plus visés par le présent CIMR social.

B. LES PRÉLÈVEMENTS SOCIAUX VISÉS PAR LE CIMR SOCIAL

1. Un champ limité

Le présent dispositif de CIMR social se limite donc aux seuls prélèvements sociaux qui sont, actuellement, prélevés par voie de rôle en année N + 1, et seront, à compter du 1er janvier 2018, prélevés à la source en application des alinéas 259 à 265.

Il s’agit donc spécifiquement :

– des prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine afférents à des revenus soumis à acompte, c’est-à-dire les revenus fonciers et les rentes viagères à titre onéreux ;

– des revenus soumis à l’IR dans la catégorie des BIC, des BNC et des BA (soumis à l’acompte) qui entrent dans le champ des prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine. En pratique, il s’agit pour l’essentiel des revenus tirés de locations meublées non professionnelles imposées dans la catégorie des BIC ;

– de manière plus marginale, des prélèvements sociaux sur les revenus d’activité et de remplacement pesant sur les revenus de source étrangère (sous réserve, pour les revenus d’activité, que ces prélèvements n’aient pas fait l’objet d’un précompte par l’employeur) et de ceux pesant sur l’avantage lié à l’octroi de stock-options, actuellement imposé dans la catégorie des traitements et salaires.

2. Les modalités de calcul du CIMR social

Le montant du CIMR social serait déterminé par application au montant des revenus non exceptionnels couverts par le CIMR, dont les modalités de calcul ont déjà été exposées, le taux global des prélèvements sociaux soit :

– le taux global de 15,5 % pour les revenus soumis aux prélèvements sociaux pesant sur les revenus du patrimoine ;

– le taux global de 8 % pour les revenus d’activité mentionné précédemment qui, par dérogation, sont prélevés comme les prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine.

TROISIÈME PARTIE : DISPOSITIONS DIVERSES

Texte du projet de loi (alinéas 108, 131, 170, 238, 239 et 266 à 269) :

OBLIGATIONS DÉCLARATIVES DU TIERS DÉCLARANT

[…]

(108) 1° L’article 77 est abrogé ;

[…]

SUSPENSION DE L’IMPÔT SUR LE REVENU EN CAS DE SERVICE NATIONAL

(131) 11° L’article 1663 A est abrogé ;

[…]

CORRECTION DES MOYENS DE PAIEMENT SEPA

(170) 17° Le premier alinéa de l’article 1680 est complété par les mots : « ou suivant les modes de paiement autorisés par décret. » ;

SANCTION PÉNALE POUR DÉFAUT DE REVERSEMENT DE LA RETENUE À LA SOURCE

[…]

(238) 34° Le 3 de l’article 1920 est abrogé.

QUOTITÉ INSAISISSABLE DU SALAIRE ET EXTENSION DE LA GARANTIE DE L’ASSOCIATION POUR LA GESTION DU RÉGIME D’ASSURANCE DES CRÉANCES DES SALAIRES (AGS)

(266) E. – Le code du travail est ainsi modifié :

(267) 1° Le premier alinéa de l’article L. 32523 est complété par les mots : « et de la retenue à la source prévue à l’article 204 A du code général des impôts » ;

(268) 2° Le dernier alinéa de l’article L. 32538 et l’article L. 325317 sont complétés par les mots : « ainsi que la retenue à la source prévue à l’article 204 A du code général des impôts ».

COLLECTIVITÉS LOCALES

(269) F. – Les articles L. 23212, L. 33211, L. 36641, L. 43211, L. 5217121, L. 711133 et L. 721032 du code général des collectivités territoriales sont respectivement complétés par un 34°, un 23°, un 30°, un 15°, un 27°, un 22° et un 22° ainsi rédigés : « La retenue à la source prévue au 1° du 2 de l’article 204 A du code général des impôts ».

*

* *

I. L’ABROGATION DES DISPOSITIONS RELATIVES À LA DÉTERMINATION DU BÉNÉFICE DE CERTAINES EXPLOITATIONS AGRICOLES RELEVANT DU FORFAIT AGRICOLE

Le 1° du B du I du présent article (alinéa 108) abroge l’article 77 du CGI. Cet article porte sur la répartition du bénéfice en cas de bail à portion de fruits ou de changement d’exploitant.

A. LES MODALITÉS DE DÉTERMINATION DU BÉNÉFICE DANS LE BAIL À PORTION DE FRUITS OU EN CAS DE CHANGEMENT D’EXPLOITANT

Dans le bail à portion de fruits, l’imposition du métayer et du bailleur porte sur la part du revenu imposable qui revient à chacun d’eux proportionnellement à leur participation dans les bénéfices ou produits, en fonction de la décision de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires, prévue à l’article 1651 du CGI. Il est indiqué que cette commission se réfère aux usages locaux.

En cas de changement d’exploitant, y compris s’il résulte d’un décès, l’article 77 prévoit que le bénéfice de l’exploitation transférée est imposable au nom de l’exploitant qui a levé les récoltes pendant l’année d’imposition.

Cela permet d’éviter qu’un exploitant qui n’a pas participé à des récoltes réalisées une année donnée soit imposé sur elles au titre de l’année en question.

Dans l’hypothèse où tant l’exploitant sortant que l’entrant ont participé aux récoltes, le bénéfice forfaitaire est partagé :

– au prorata de la durée d’exploitation que chacun a assurée ;

– sur demande expresse et conjointe des deux exploitants, au prorata de la part des produits revenant à chacun d’eux (à charge pour les exploitants d’indiquer les conditions exactes de répartition des produits).

Ces dispositions s’inscrivent dans le cadre du régime du forfait agricole, prévu par l’article 64 du CGI. Le régime du forfait agricole imposait les exploitants qui en relevaient sur une base forfaitaire établie en deux phases.

La première phase était collective. Sur décision de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires, compte tenu des propositions du directeur départemental des finances publiques :

– le département était découpé en régions agricoles, pour tenir compte des différences de rendements pécuniaires existant d’une région agricole à l’autre ;

– le bénéfice et le fermage moyen à l’hectare de la région agricole était établi au regard d’un compte d’exploitation-type, correspondant aux exploitations d’importance moyenne répondant au type de la région agricole et normalement exploitées.

La seconde phase était individuelle. Elle déterminait, au regard des résultats de la phase collective et notamment du rendement moyen à l’hectare, la base d’imposition propre à chaque exploitant.

B. LA CADUCITÉ DE L’ARTICLE 77 EN RAISON DE LA SUPPRESSION DU FORFAIT AGRICOLE.

L’article 64 du CGI – et donc le forfait agricole – a été abrogé par l’article 33 de la loi de finances rectificative pour 2015 (132) et remplacé par le régime du micro-BA, prévu à l’article 64 bis du CGI et dont l’assiette est déterminée par l’application à la moyenne triennale des recettes de l’exploitation un abattement de 87 %.

Ainsi, l’alinéa 108 du présent article tire les conséquences de la suppression du régime du forfait agricole en abrogeant l’article 77 du CGI, qui déclinait ses modalités d’application dans les hypothèses particulières qu’il recouvrait.

II. LA SUPPRESSION DE LA SUSPENSION DE L’IMPÔT SUR LE REVENU EN CAS DE SERVICE NATIONAL

Aux termes de l’article 1663 A du CGI, la perception de l’impôt sur le revenu est suspendue pour les jeunes gens salariés pendant la durée du temps légal de leur service national.

Cette disposition est devenue obsolète, alors que la loi du 28 octobre 1997 portant réforme du service national (133) a suspendu l’appel sous les drapeaux pour tous les Français nés après le 31 décembre 1978. Le 11° du B du I (alinéa 131) vient donc l’abroger.

III. LA CORRECTION DES MOYENS DE PAIEMENT SEPA : L’EXTENSION AUX PAIEMENTS INFÉRIEURS À 300 EUROS DES MOYENS DE PAIEMENT DÉMATÉRIALISÉS

Le 17° du B du I du présent article (alinéa 170) modifie l’article 1680 du CGI, qui prévoit les dispositions générales relatives au paiement de l’impôt.

Aux termes du premier alinéa de cet article, l’impôt recouvré par un titre exécutoire tel qu’un rôle peut être payé en espèces à la caisse du comptable public chargé du recouvrement, dans la limite de 300 euros ; cette limite, jusqu’à la loi de finances rectificative pour 2013, était de 3 000 euros (134).

L’article 76 de la loi de finances pour 2016 (135) a prévu l’abaissement progressif du paiement dématérialisé de l’impôt par les particuliers :

– 10 000 euros à compter du 1er janvier 2016 ;

– 2 000 euros à compter du 1er janvier 2017 ;

– 1 000 euros à compter du 1er janvier 2018 ;

– 300 euros à compter du 1er janvier 2019.

S’inscrivant dans le mouvement de généralisation du paiement dématérialisé, l’alinéa 170 du présent article complète le premier alinéa de l’article 1680 du CGI pour ajouter au paiement en espèces les modes de paiement autorisés par décret. Le chapeau de cet alinéa fait référence aux moyens de paiement SEPA.

Les moyens de paiement SEPA

Le SEPA (Single Euro Payments Area, ou espace unique de paiement en euros), a été lance en 2002 dans le prolongement de la généralisation de l’euro. L’espace SEPA comprend tous les États membres de l’Union européenne, de l’Association européenne de libre-échange et la principauté de Monaco.

Les moyens de paiement SEPA portent sur trois instruments :

1) Le virement SEPA, qui est :

– un ordre de paiement adressé par un donneur d’ordre à un établissement bancaire ;

– libellé en euros ;

– réalisé entre deux comptes tenus par des établissements financiers localisés dans l’espace SEPA ;

– exécuté en un jour ;

2) Le prélèvement SEPA, également libellé en euros et effectué entre deux comptes d’établissements situés dans l’espace SEPA ;

3) Le paiement par carte SEPA, qui correspond au paiement par carte bancaire.

Les moyens de paiement autorisés par décret que vise l’alinéa 170 du présent article sont ceux issus du décret n° 2015-1136 du 14 septembre 2015 relatif au paiement des impôts recouvrés par voie de rôle :

– prélèvement à l’échéance, en application de l’article 382 C de l’annexe III du CGI, créé par ce décret ;

– télérèglement, en application de l’article 382 D de l’annexe III du CGI, créé par ce même décret.

Il semble opportun de prévoir expressément dans la loi la possibilité d’autres modes de paiement que les espèces, même en deçà de 300 euros (le décret du 14 septembre 2015 a d’ailleurs été pris, notamment, au visa de l’article 1680 du CGI).

La mensualisation rend plus fréquent le paiement de telles sommes au titre de l’impôt dû, et le prélèvement à la source, notamment s’agissant de l’acompte, accentuerait cette tendance (une mensualité de 300 euros correspondant à un acompte de 3 600 euros, ce qui constitue déjà un montant d’impôt à acquitter conséquent).

Cette consécration aurait également pour effet de donner à ces moyens de paiement une pleine base légale.

IV. L’ABROGATION DU PRIVILÈGE DU TRÉSOR POUR LE RECOUVREMENT DES ACOMPTES PRÉVUS À L’ARTICLE 1664 DU CGI

Le privilège du Trésor est une sûreté réelle spécifique destinée à garantir le recouvrement de l’impôt. Le classement conféré par le privilège du Trésor est plus ou moins avantageux selon le rang accordé par la loi à la créance fiscale. Le rang est déterminé d’après la qualité attachée par la loi aux différentes sortes de créances fiscales privilégiées.

En matière d’impôts directs et de taxes assimilées, le privilège du Trésor s’exerce, aux termes du 1 de l’article 1920 du CGI, avant tout autre sur les meubles et effets mobiliers.

Il s’exerce en outre, en vertu du 2 du même article, sur les récoltes, fruits, loyers et revenus d’un immeuble, pour la fraction de l’impôt sur les sociétés due à raison des revenus d’un immeuble et pour la taxe foncière.

Le 3 de l’article 1920 prévoit que ce privilège peut s’exercer pour recouvrer, dès leur exigibilité, les versements devant être réalisés par un contribuable en exécution de l’article 1664, qui porte sur le paiement d’acomptes d’impôt qui s’imputeraient sur l’impôt finalement dû.

Le 34° du B du I du présent article (alinéa 238) abroge, à compter du 1er janvier 2018, le 3 de l’article 1920.

Cette abrogation est logique dans la mesure où l’article 1664, qui constitue l’objet du privilège du Trésor sur lequel porte le 3 de l’article 1920, est également abrogé par le présent article (par le 13° du B de son I, à l’alinéa 148).

En tout état de cause, d’après les informations fournies par l’administration fiscale, ce privilège n’était que peu utilisé. En outre, le recouvrement de l’impôt acquitté dans le cadre du prélèvement à la source est expressément assorti de garanties et de sûretés :

– s’agissant du recouvrement de l’acompte, sont applicables les garanties et sûretés prévues pour l’impôt sur le revenu, en vertu du 7 de l’article 1663 C nouveau du CGI (alinéa 146) ;

– s’agissant du recouvrement de la retenue à la source, sont applicables les garanties et sûretés prévues pour la TVA, en vertu du 5 de l’article 1671 rétabli (alinéa 161).

Le recouvrement de l’imposition n’est donc en aucun cas compromis par l’abrogation du 3 de l’article 1920, devenu au demeurant sans objet avec l’abrogation de l’article 1664 auquel il renvoyait, du fait des garanties et sûretés prévues dans le reste du présent article.

V. LA PRISE EN COMPTE DE LA RETENUE À LA SOURCE POUR LE CALCUL DE LA QUOTITÉ INSAISISSABLE DU SALAIRE

Les articles L. 3252-1 et suivants du code du travail définissent le régime juridique de protection des salaires à l’égard des saisies qui peuvent être réalisées au titre des sommes dues par un débiteur salarié. L’article L. 3252-2 dispose que les rémunérations ne sont saisissables que dans certaines limites et proportions, selon un barème défini par l’article R. 3252-2.

L’assiette sur laquelle est calculée la fraction insaisissable est déterminée par l’article L. 3252-3 : celui-ci prévoit qu’est pris en compte le montant de la rémunération, de ses accessoires ainsi que de la valeur des avantages en nature, après déduction des cotisations et contributions sociales obligatoires.

Compte tenu des modalités actuelles de paiement de l’impôt sur le revenu, l’impôt dû n’entre pas en ligne de compte pour déterminer la fraction insaisissable des rémunérations.

● Le du E du I (alinéa 267) complète l’article L. 3252-3 du code du travail, afin de prévoir que la fraction insaisissable des rémunérations est déterminée après déduction de la retenue à la source effectuée par l’employeur, en sus de la déduction des cotisations sociales.

La quotité insaisissable et donc, corrélativement, la fraction saisissable, seraient donc fixées sur la base du montant net à verser, c’est-à-dire le montant effectivement perçu par le salarié, minoré de la retenue à la source.

Cette disposition aurait pour effet, par rapport à la situation actuelle, de diminuer la quotité saisissable par les différents créanciers du débiteur. Elle répondrait à l’objectif de protection des salaires poursuivi par le code du travail, en garantissant aux salariés un niveau minimal de revenu mensuel disponible.

VI. L’EXTENSION DE LA GARANTIE DE L’ASSOCIATION POUR LA GESTION DU RÉGIME DE GARANTIE DES CRÉANCES DES SALARIÉS

● Le régime de garantie des salaires permet, en cas de redressement ou de liquidation judiciaire de l’entreprise, ou encore, sous certaines conditions, en cas de procédure de sauvegarde, de garantir le paiement des sommes dues aux salariés (salaires, préavis, indemnités de rupture…), dans les conditions fixées par le code du travail.

Fondé sur la solidarité des employeurs, ce régime de garantie des salaires est financé par des cotisations patronales calculées sur la base des rémunérations donnant lieu aux contributions d’assurance chômage ; il est géré par l’Association pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés (AGS), organisme patronal.

Tout employeur de droit privé est assujetti au régime de garantie des créances des salariés, quel que soit son statut juridique (commerçant, artisan, agriculteur, profession libérale, personne morale de droit privé, entreprise de travail temporaire, société commerciale dont le capital est majoritairement détenu par l’État…).

La mise en œuvre de la garantie par l’AGS suppose à la fois l’ouverture d’une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire, et l’absence de fonds disponibles de l’employeur pour payer aux salariés certaines des créances résultant du contrat de travail. Les sommes garanties par l’AGS sont limitées dans leur montant, le plafond étant fixé à 77 232 euros en 2016, toutes créances du salarié confondues.

En liaison avec les instances de l’AGS, la délégation Unédic AGS a notamment pour mission de mettre à la disposition des mandataires de justice les fonds nécessaires au règlement des créances des salariés, et de procéder à la récupération des sommes avancées à partir du suivi des plans de redressement et de la réalisation des actifs de l’entreprise.

● Aux termes du dernier alinéa de l’article L. 3253-8 du code du travail, qui énumère les sommes couvertes par le régime de garantie des créances des salariés, cette garantie inclut les cotisations et contributions sociales et salariales.

Le du E du I (alinéa 268) vient compléter cet alinéa, pour étendre le champ de la garantie à la retenue à la source prévue par l’article 204 A, par analogie avec les dispositions applicables en matière de cotisations sociales.

Il convient à cet égard de noter qu’il vient compléter l’article L. 3253-17 du code du travail dans la rédaction résultant des dispositions du projet de loi de modernisation de la justice du XXIe siècle.

VII. L’AJOUT DE LA RETENUE À LA SOURCE PARMI LES DÉPENSES OBLIGATOIRES DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES ET DE LEURS GROUPEMENTS

Le F du I du présent article (alinéa 269) prévoit les mesures de coordination induites par le prélèvement à la source pour les collectivités territoriales et leurs groupements.

A. L’INCLUSION DANS LA LISTE DES DÉPENSES OBLIGATOIRES DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES DE LA RETENUE À LA SOURCE

Les articles du code général des collectivités territoriales (CGCT) portant sur les dépenses obligatoires des différents échelons locaux sont complétés par la mention de la retenue à la source effectuée sur les traitements et salaires du personnel local.

Sont ainsi complétés :

– l’article L. 2321-2, qui dresse la liste des dépenses obligatoires des communes ;

– l’article L. 3321-1, qui dresse la liste des dépenses obligatoires des départements ;

– l’article L. 3664-1, qui dresse la liste des dépenses obligatoires de la métropole de Lyon, collectivité territoriale à statut particulier au sens de l’article 72 de la Constitution ;

– l’article L. 4321-1, qui dresse la liste des dépenses obligatoires des régions ;

– l’article L. 5217-12-1, qui dresse la liste des dépenses obligatoires des métropoles ;

– l’article L. 71-113-3, qui dresse la liste des dépenses obligatoires de la collectivité territoriale de Guyane, qui s’est substituée à la région et au département en application du dernier alinéa de l’article 73 de la Constitution ;

– enfin, l’article L. 71-103-2, qui dresse la liste des dépenses obligatoires de la collectivité territoriale de Martinique, résultant elle aussi de l’application du dernier alinéa de l’article 73 de la Constitution.

B. LES CONSÉQUENCES DU CARACTÈRE DE DÉPENSES OBLIGATOIRES DES RETENUES À LA SOURCE

L’ensemble des retenues à la source effectuées par les collectivités territoriales et leur groupement sur les rémunérations versées à leur personnel relèveraient du régime des dépenses obligatoires.

Les crédits nécessaires à leur règlement devraient donc impérativement figurer dans le budget local, à défaut de quoi s’appliqueraient les articles L. 1612-15 à L. 1612-16 du CGCT, relatifs au contrôle budgétaire en cas de non-inscription de dépenses obligatoires :

– constat du défaut d’inscription par la chambre régionale des comptes, sur saisine du préfet, du comptable public concerné ou de toute personne justifiant d’un intérêt en ce sens ;

– mise en demeure de la collectivité concernée de procéder à l’inscription requise ;

– en cas de non-inscription dans le délai d’un mois suivant la mise en demeure, la chambre régionale des comptes peut demander au préfet d’inscrire la dépense au budget. De nouvelles ressources ou la diminution de dépenses facultatives peuvent être décidées, afin d’assurer l’équilibre du budget ;

– le budget rectifié est rendu exécutoire par le préfet.

Ainsi, les collectivités territoriales ne pourraient se servir des sommes collectées au titre de la retenue à la source pour améliorer leur situation budgétaire, le contrôle opéré par les juridictions financières et le représentant de l’État dans le département étant applicable.

C. L’ABSENCE DE COORDINATIONS SUPPLÉMENTAIRES À RÉALISER

Aucune autre mesure de coordination spécifique que celles décrites précédemment n’est requise en raison de l’application, par renvoi, des articles modifiés aux obligations budgétaires d’autres collectivités territoriales ou groupements.

1. Les établissements publics de coopération intercommunale

Aux termes de l’article L. 5211-36 du CGCT, les dispositions du livre III de la deuxième partie de ce code, qui incluent notamment les dépenses obligatoires des communes prévues à l’article L. 2321-2, sont applicables aux établissements publics de coopération intercommunale dans le cadre des compétences qu’ils exercent.

Cet article s’applique aux établissements publics de coopération intercommunale autres que les métropoles, qu’ils soient à fiscalité propre (communautés de communes, communautés d’agglomération et communautés urbaines) ou non (syndicats de communes).

De la même manière, les syndicats d’agglomérations nouvelles, prévus aux articles L. 5332-1 et suivants du CGCT, se voient également appliquer les règles du livre III de la deuxième partie du CGCT, en vertu de l’article L. 5334-1 de ce code.

L’inclusion expresse de la retenue à la source parmi les dépenses obligatoires des métropoles est en revanche nécessaire en raison des règles propres régissant cette catégorie d’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre.

2. Les syndicats mixtes

Les syndicats mixtes, qu’ils soient fermés ou ouverts, obéissent eux aussi aux règles déjà décrites :

– en vertu de l’article L. 5711-1 pour les syndicats mixtes fermés, qui leur rend notamment applicable le chapitre Ier du titre Ier du livre II de la cinquième partie du CGCT, dans lequel est inclus l’article L. 5211-36 du CGCT déjà évoqué ;

– en vertu de l’article L. 5722-1 pour les syndicats mixtes ouverts, qui renvoie au livre III de la deuxième partie du CGCT.

3. Les départements et régions faisant l’objet de dispositions particulières

S’agissant des départements, l’article L. 3411-2 soumet le département de Paris aux règles applicables à l’ensemble des départements.

S’agissant des régions, le livre III de la quatrième partie du CGCT, qui inclut notamment l’article L. 4321-1 relatif aux dépenses obligatoires, s’applique :

– à la région Île-de-France, en vertu de l’article L. 4411-1 du CGCT ;

– à la collectivité territoriale de Corse, ainsi que le prévoit l’article L. 4421-1 du CGCT.

4. Les départements et régions d’outre-mer

S’agissant des départements et régions d’outre-mer :

– l’article L. 3441-1 étend aux départements de Guadeloupe, de Mayotte et de La Réunion les règles applicables à l’ensemble des départements ;

– l’article L. 3542-1 relatif au Département de Mayotte renvoie à l’article L. 3321-1 du CGCT, portant sur les dépenses obligatoires des départements ;

– l’article L. 4437-3 du CGCT rend inapplicable à Mayotte le titre II du livre III de la quatrième partie, portant notamment sur les dépenses obligatoires des régions ;

– l’article L. 4431-1 du CGCT applicable à la Guadeloupe et à La Réunion renvoie notamment au livre III de la quatrième partie de ce code.

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* *

La commission est saisie des amendements de suppression identiques II-CF 147 de M. Gilles Carrez, II-CF 12 de M. Marc Le Fur, II-CF 212 de M. Lionel Tardy, II-CF 225 de M. Hervé Mariton, II-CF 319, de Mme Marie-Christine Dalloz et II-CF 327 de M. Charles de Courson.

M. le président Gilles Carrez. Je veux au préalable remercier notre Rapporteure générale : une fois de plus, sa présentation est limpide alors que nous avons le plus grand mal à voir les lignes directrices de l’étude d’impact de l’article 38. Son rapport est de bien meilleure qualité que les documents que nous propose le Gouvernement.

M. Yann Galut. Je partage ce jugement !

M. Marc Le Fur. Notre commission pourrait collégialement regretter que nous ne disposions pas de l’avis du Conseil d’État, car à côté des enjeux financiers, il y a aussi des enjeux juridiques, pour ce qui touche notamment aux sanctions et aux modalités de contrôle.

M. le président Gilles Carrez. Nous n’allons pas refaire ce débat. Le Conseil d’État dans cette affaire est au service de l’exécutif. Et il ne peut pas nous communiquer son avis si l’exécutif ne le souhaite pas.

M. Charles de Courson. Mais, de mémoire, on n’a jamais refusé au président de la commission ou au rapporteur général l’accès à ce document.

M. le président Gilles Carrez. Mais on ne peut pas le diffuser.

Pour justifier le dépôt de mon amendement de suppression II-CF 147, je m’en tiendrai strictement à des considérations d’ordre technique.

Je ne m’en cache pas : il y a dix ans, avec Didier Migaud, je poussais à une réforme de l’impôt et la mise en place du prélèvement à la source. Mais, depuis, la gestion de l’impôt a beaucoup progressé, sur trois points en particulier, qui m’ont fait revenir sur ma position : la mensualisation, qui peut être facilement généralisée aujourd’hui ; la déclaration préremplie ; la réactivité des services fiscaux enfin, qui, grâce à la dématérialisation des procédures, permet au contribuable d’ajuster ses acomptes pour atteindre un bon degré de contemporanéité entre son revenu et l’impôt, d’autant que le système peut encore progresser.

Dès lors, une réforme me paraît beaucoup moins nécessaire qu’il y a quelques années, et ce d’autant qu’au moment du basculement vers le nouveau système, elle va s’avérer d’une complexité bien plus considérable que je ne l’imaginais moi-même au départ.

Ma crainte principale est que, pendant quelques mois, au début de l’année 2018, elle suscite l’incompréhension d’un grand nombre de contribuables – je les évaluais à un ou deux millions, mais ils seront probablement davantage à s’interroger sur ce qui leur arrive.

En effet, ces contribuables vont découvrir sur leur feuille de paie, qui plus est dans une période où la fiscalité est un sujet particulièrement sensible, un prélèvement mensuel d’autant plus visible qu’il sera bien plus élevé que ce qu’ils ont l’habitude de payer, du fait de différents phénomènes que la Rapporteure générale a bien détaillés, notamment les crédits d’impôt, le taux par défaut, s’ils le choisissent, ou les déficits fonciers.

L’expérience montre qu’une réforme fiscale mal comprise met toujours en grande difficulté le Gouvernement qui la propose – on l’a vu avec la taxe professionnelle en 1975 ou, en 1992, avec la tentative avortée de mettre en place la taxe d’habitation départementale.

En tout état de cause, une réforme de cette ampleur, dont je ne dis pas qu’elle n’a pas d’utilité, doit être lancée en début et non en fin de législature. C’est presque un point de déontologie politique : quel que soit le prochain gouvernement, c’est lui faire courir, en début de quinquennat un grand danger, en accentuant la défiance déjà forte des Français face à la fiscalité. Comme le disait la Rapporteure générale, le diable est dans les détails. Je vous invite à examiner l’étude d’impact et son rapport : dans nombre de cas de figure, le contribuable sera plongé dans une totale incompréhension. Il s’ensuivra une perte de confiance dont nous n’avons aucunement besoin dans un moment politiquement très sensible.

M. Marc Le Fur. Je partage l’avis de notre président et défends moi aussi un amendement de suppression, le II-CF 12.

L’avantage du prélèvement à la source mis en exergue par le Gouvernement, à savoir l’immédiateté du prélèvement, n’existe pas, pas plus en tout cas qu’avec la mensualisation. En effet, contrairement à ce que nous imaginions au départ, les taux de prélèvement ne pourront en aucun cas renforcer la contemporanéité entre les revenus perçus et l’impôt puisque ceux qui seront appliqués jusqu’en septembre seront les taux correspondant à l’année N – 2, puis, de septembre à décembre, les taux de l’année N – 1.

En outre, ne seront pas pris en compte les événements de la vie des ménages : la naissance d’un enfant, par exemple, ce qui est totalement absurde, même si j’ai bien noté les efforts de notre Rapporteure générale.

Quant à la modulation, censée renforcer l’immédiateté de l’impôt, il s’avère qu’elle sera très compliquée, voire risquée pour le contribuable.

J’ajoute que cette notion d’immédiateté de l’impôt ne vaudra que pour ce qui concerne les revenus, puisque les déductions fiscales, c’est-à-dire les avantages dont bénéficie le contribuable, restent dans le calcul de l’année N + 1. En d’autres termes, et contrairement à ce qui se passe aujourd’hui où il y a concomitance entre les prélèvements et les déductions, les mauvaises nouvelles sont pour tout de suite, les bonnes pour plus tard !

M. Dominique Lefebvre. C’est faux !

M. Marc Le Fur. Le calcul des taux d’imposition sera un autre élément de complexité introduit par le nouveau système : aujourd’hui, le contribuable connaît deux taux : le taux marginal d’imposition et le taux réel qui figure sur son avis d’imposition. Demain, il lui faudra composer non plus avec deux, mais cinq taux au total : deux taux de prélèvement à la source, l’un jusqu’en août, l’autre entre septembre et décembre ; le taux forfaitaire, cher, qui s’appliquera, d’une part, aux contribuables qui souhaitent la confidentialité et, d’autre part, aux nouveaux contribuables, et donc aux jeunes – qui, soit dit en passant, sont les grandes victimes de cette réforme ; le taux modulé, qui pourra s’appliquer en cas de changement de situation ; le taux individualisé enfin pour lequel pourront opter les couples. Et je ne parle là que de contribuables tout à fait communs.

N’oublions pas non plus la complexité générée pour les employeurs ! Alors que, jusqu’à présent, l’impôt faisait l’objet d’un colloque singulier entre le contribuable et l’administration fiscale, on introduit désormais dans le dispositif un tiers qui n’a rien demandé, soit, très concrètement, 1,7 million d’intervenants qui sont des entreprises, mais aussi des collectivités locales et des employeurs individuels.

Tout cela a un coût, que le Conseil des prélèvements obligatoires a chiffré en 2012, à partir de comparaisons internationales : il en coûte 4 euros au Danemark, parce que les taux sont simples et qu’il n’y a pas de déductions fiscales, mais, aux Pays-Bas, la facture monte à 200 euros par contribuable pour les entreprises. Nous allons donc au-devant d’un choc de complexité considérable, qui va générer une grande incertitude chez les consommateurs, Lorsqu’en janvier 2018, les gens découvriront leur feuille de paie largement amputée, même s’ils récupèrent une partie de leur argent l’année suivante, cela aura forcément un impact sur la consommation dès cette année 2018.

Mme Marie-Christine Dalloz. On veut nous faire croire que cette réforme est une réforme d’envergure, qui va introduire de la simplification dans notre système fiscal. En réalité, Marc Le Fur a raison de parler de choc de complexité.

Le prélèvement à la source n’est pas une idée neuve : en 1939, 1951, 1966 et 1973, il a déjà été envisagé, mais jamais appliqué, les gouvernements successifs ayant reculé devant la difficulté. La complexité de notre impôt sur le revenu, familialisé et progressif n’a en effet rien à voir avec ce qui se pratique dans les autres pays. Ou alors, est-ce à dire qu’il faut supprimer tout cela ?

Si notre taux de recouvrement de l’impôt était mauvais, encore pourrait-on se poser la question du prélèvement à la source, mais il est de 98 %, et il faut cesser de penser qu’on va l’améliorer : il est déjà parfait.

Par ailleurs, vous qui n’aimez pas beaucoup les employeurs, voilà que vous les mettez au cœur de la relation entre le contribuable et l’administration fiscale ! Vous leur imposez ce faisant des charges qu’il n’y a pas lieu de leur faire subir. En plus des conséquences possibles dans les relations employeur-employés, un autre problème se pose : celui de la protection des données. On sait que des hackers peuvent rentrer dans les systèmes des entreprises et collecter les données fiscales des salariés. Tant que l’on n’aura pas de garanties en la matière, on ne peut se résoudre à passer au prélèvement à la source. D’où mon amendement de suppression II-CF 319.

M. Hervé Mariton. Cette réforme fiscale nous est présentée comme fondamentale et irréversible. Or, nous sommes un certain nombre, notamment chez Les Républicains, à penser que si, en 2017, les circonstances politiques le permettent, il faudra revenir dessus.

Mme Karine Berger. Impossible !

M. Hervé Mariton. Entendre dire que la réversibilité est impossible alors que cette réforme nous est proposée en toute fin de législature pose une sérieuse question de principe. Il serait donc bon que la Rapporteure générale, dont on connaît le sérieux et la qualité de l’analyse, nous éclaire sur ce point et qu’elle nous dise si la réforme est ou non réversible, et dans quelles conditions.

Par ailleurs, une réforme de la fiscalité qui ne serait qu’une réforme technique portant sur les modalités du prélèvement ne me paraît pas avoir grand sens, et il me semble d’ailleurs que la majorité avait pris des engagements au sujet d’une réforme majeure.

Concernant cette perspective, la Rapporteure générale est restée très prudente sur la perspective d’une fusion entre l’impôt sur le revenu (IR) et la contribution sociale généralisée (CSG) – engagement historique fort de l’actuelle majorité –, à laquelle Les Républicains sont rigoureusement opposés. Un élargissement de la base est également envisageable, avec une baisse des taux qui pourrait aller – c’est en tout cas ce que défend votre serviteur – jusqu’à une forme de flat tax. Sans cela, on ne comprend pas l’intérêt d’instaurer la retenue à la source sinon pour produire un effet cosmétique qui permette au Gouvernement de cacher à l’opinion publique l’absence de véritable réforme. En tout état de cause, j’y insiste, à ce point du débat, nous avons besoin d’être éclairés sur les conditions d’une possible réversibilité.

M. Charles de Courson. Le prélèvement à la source a commencé à être mis en place au milieu du XIXe siècle en Nouvelle-Zélande, de mémoire en 1850 ; il s’est étendu au Japon en 1905, puis aux États-Unis avant la Seconde Guerre mondiale et au Royaume-Uni après. Toutes les démocraties occidentales pratiquent le prélèvement à la source, sauf la France : nous sommes à cet égard une anomalie. Ce n’est pas la seule, d’ailleurs…

Cela étant, cessons d’en faire un enjeu politicien, car l’opposition elle-même a tenté à plusieurs reprises de mettre en place le prélèvement à la source. Arrêtons donc de dire lorsqu’on est dans l’opposition l’inverse de ce que l’on a dit lorsqu’on était dans la majorité – et réciproquement !

Pourquoi le groupe UDI a-t-il néanmoins déposé un amendement de suppression ? Lorsque j’ai interrogé le directeur général des finances publiques sur les délais dont disposerait, le cas échéant, l’opposition pour annuler la réforme, il n’a pas pu me répondre et m’a renvoyé vers le ministre, qui ne nous a toujours pas répondu. J’espère qu’il en ira différemment avec notre Rapporteure générale.

Je trouve trop facile en effet d’attendre la dernière année du quinquennat pour lancer des réformes qui n’entreront en vigueur qu’après les élections, avec, de surcroît, la probabilité assez forte d’un changement de majorité. Cette remarque vaut tout autant pour l’opposition, qui a fini par adopter la TVA sociale, mais en fin de législature, ce qui fait qu’elle n’a pu être mise en œuvre avant le changement de majorité. Cette question d’opportunité est une question grave au regard du respect des principes démocratiques.

Je me permettrai de rappeler ici l’engagement n° 14 du candidat François Hollande : « La contribution de chacun sera rendue plus équitable par une grande réforme permettant la fusion à terme de l’impôt sur le revenu et de la CSG, dans le cadre d’un prélèvement simplifié sur le revenu », engagement réitéré par le Président de la République lors de sa conférence de presse du 7 septembre 2015, au cours de laquelle il a déclaré : « Le prélèvement à la source permettra d’avoir des évolutions de notre système fiscal par une intégration entre la CSG et l’IR puisque ce sera la même base avec des modes de prélèvements qui peuvent être comparables. »

Le groupe UDI est farouchement hostile à cette perspective, et je sais qu’au sein même de l’actuelle majorité il y a de grands débats sur cette question. Pourquoi ? Parce que seuls 20 % de nos concitoyens ne paient pas la CSG, contre 56 % qui ne paient pas l’IR. Cela va occasionner d’énormes transferts.

M. le président Gilles Carrez. Monsieur de Courson, ne nous éloignons pas du sujet ; nous examinerons cet aspect en séance.

M. Charles de Courson. Une autre raison qui nous pousse à nous opposer au prélèvement à la source est l’« année blanche » qui n’en sera pas vraiment une. Les gouvernements successifs ont multiplié les crédits d’impôt et les déductions qui minent l’impôt et vont poser de vrais problèmes lors du basculement vers le nouveau dispositif. Ce basculement va évidemment influer sur les comportements économiques tout au long de la première année, et il faut s’attendre à un effet de dépression, notamment sur l’investissement immobilier ou le locatif : logiquement, les gens vont différer leurs travaux en conséquence.

Enfin, comment appliquer le prélèvement à la source sur des contrats courts – je pense notamment aux contrats de vendanges, qui ne durent que quelques jours ? J’avais suggéré qu’en dessous d’un certain montant – quelques centaines d’euros – on n’applique pas la retenue à la source, mais l’idée n’a pas été retenue.

Telles sont les raisons de notre amendement de suppression II-CF 327.

M. Lionel Tardy. Pourquoi avoir attendu la fin du quinquennat pour lancer cette réforme qui sera mise en œuvre lorsque vous ne serez plus au pouvoir ?

M. Dominique Lefebvre. Quelle prétention !

M. Lionel Tardy. Après le choc de simplification, qui ne s’est pas vraiment traduit en actes, voici à présent le choc de complexification qui va, lui, se vérifier dans les faits. Le prélèvement ne sera source de simplification ni pour les contribuables ni pour l’administration, compte tenu des nombreuses interrogations qui subsistent.

Quant aux entreprises, la réforme aura pour elles un vrai coût, ne serait-ce que celui des logiciels et de la réorganisation du service de paie – que dire de la situation dans les TPE ! Pire, la responsabilité de l’employeur pourra être engagée, même s’il a un expert-comptable, et la menace de la sanction sera pour le chef d’entreprise comme une épée de Damoclès. Les chefs d’entreprise ne sont pas des collecteurs d’impôt.

Pour que cette réforme soit acceptable, il aurait fallu un changement de politique fiscale et un véritable allégement des charges administratives et fiscales qui pèsent sur les entreprises. Personne ne semble avoir pensé aux petites entreprises, qui vont subir un transfert de charges et de responsabilités injustifié.

L’ensemble de ces raisons expliquent que nous ayons déposé cet amendement de suppression II-CF 212.

Mme la Rapporteure générale. Charles de Courson a fort justement rappelé que toutes les grandes économies pratiquaient le prélèvement à la source ; j’ajoute aux pays qu’il a cités l’Allemagne depuis 1925 et, dernièrement, l’Italie depuis 1973 et l’Espagne depuis 1979.

En France, les débats ont commencé à l’Assemblée nationale en 1930… Autrement dit, cela fait déjà plus de quatre-vingts ans que nous en débattons.

M. Marc Le Fur. Cela prouve bien que ce n’est pas forcément une bonne idée !

Mme la Rapporteure générale. Cela permet surtout de relativiser les problèmes. Marie-Christine Dalloz s’inquiétait du sort des employeurs : dans les autres pays, il semble qu’ils s’en sortent. Nos entreprises internationalisées le pratiquent depuis bien longtemps.

Marc Le Fur a souligné qu’il n’y aurait pas de véritable contemporanéité entre l’impôt et le revenu, puisque le taux ne bougeait pas. Certes, mais l’assiette, elle, va évoluer, ce qui va dans le sens d’une plus grande immédiateté.

En ce qui concerne la réversibilité, il faudra en effet interroger le ministre dans l’hémicycle. Ce que je peux dire d’ores et déjà, c’est que le système actuel ne sera pas interrompu, puisque le projet de loi de finances se contente de mettre en place un certain nombre de fonctionnalités nouvelles liées au dispositif du prélèvement à la source.

M. Hervé Mariton. Qu’en tirez-vous comme conclusion ?

M. le président Gilles Carrez. Que le système actuel n’est pas coupé, et que la question sera posée au ministre dans l’hémicycle.

Mme la Rapporteure générale. Je m’en tiens à ce qui est écrit dans le projet de loi de finances.

J’insiste enfin sur un dernier point. Beaucoup d’entre vous ont abordé la question des transferts. 30 % des ménages connaissent des variations de revenus d’une année sur l’autre. L’assiette a donc un véritable effet sur l’impôt que vous payez…

M. Marc Le Fur. Dans les deux sens !

Mme la Rapporteure générale… et il est important de prendre en compte cette donnée.

M. Dominique Lefebvre. Le groupe Socialiste rejettera tous les amendements de suppression de l’article 38, en commission comme en séance.

Un vieux proverbe dit que quand on veut noyer son chien, on l’accuse d’avoir la rage, et il faut, dans tout ce qui a été dit, distinguer entre ce qui relève de vrais problèmes et ce qui tient de la posture idéologique.

Ainsi, monsieur Le Fur, à défaut d’avoir lu l’avis du Conseil d’État, je suppose que vous avez lu intégralement, comme tout le monde ici, les 413 pages de l’évaluation préalable, qui contiennent la réponse à plusieurs de vos questions. Vous savez donc que certains de vos propos sont parfaitement mensongers. Je regrette d’ailleurs, monsieur le président, que cette évaluation préalable n’ait pas été mise en ligne sur le site internet de l’Assemblée, dans le dossier législatif du projet de loi de finances.

La lecture de cette passionnante étude, très bien faite, montre en effet que nous avons une administration remarquable, probablement la meilleure administration française, et qui a beaucoup travaillé pour qu’en juin 2017 cette réforme soit opérationnelle. Libre alors au Gouvernement et la majorité qui seront au pouvoir à ce moment-là de passer à la trappe trois ans de travail et un dispositif prêt à fonctionner, mais il faudra le justifier.

Tous les présupposés qui vous amènent à dire qu’il ne faut pas faire le prélèvement à la source à cause de la fusion IR-CSG, de l’individualisation de l’impôt, de la suppression de la conjugalisation et du quotient familial sont des arguments farfelus. Notre réforme est une réforme du mode de prélèvement ; contrairement à ce que l’on entend dire, elle ne touche ni au mode de calcul de l’impôt ni aux droits des contribuables.

J’ai pour ma part retenu de cette étude deux éléments – vous avez dû la lire comme moi, monsieur le président…

M. le président Gilles Carrez. J’ai eu beaucoup de mal !

M. Dominique Lefebvre. Cela m’étonne de vous, depuis le temps que vous siégez à la commission des finances… C’est un rapport remarquablement bien fait.

Premièrement, le système français de prélèvement à la source sera l’un des plus simples du monde, notamment parce qu’il se met en place à un moment où les technologies ont beaucoup évolué et que nous disposons de la déclaration sociale nominative (DSN), qui représente une économie de 5 milliards pour les entreprises.

M. Marc Le Fur. Elle n’est pas mise en place partout.

M. Dominique Lefebvre. M. Roux de Bézieux lui-même, représentant des entreprises, a déclaré ici même que la DSN fonctionnait et qu’elle serait mise en place au 1er janvier 2017. Je préfère faire confiance au représentant des entreprises…

Par ailleurs, il est faux de dire que nous introduisons avec l’entreprise un tiers entre l’administration et le contribuable, puisque la seule chose que fera l’entreprise c’est d’appliquer au salaire un taux qui lui sera transmis ou, à défaut, un taux neutre.

Deuxièmement, comme je l’ai dit à M. de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances du Sénat, toute la question est de savoir si cette réforme est faite pour le cas général ou pour les cas particuliers. Si vous la faites pour le cas général, toute l’étude d’impact montre qu’elle se traduira par une grande simplification du système.

Par ailleurs, l’alternative que propose le sénateur de Montgolfier n’en est pas une. Non seulement elle aurait des conséquences budgétaires qui se calculeraient en dizaines de milliards d’euros mais, en matière de contemporanéité entre le revenu et l’impôt, elle ne représente aucun progrès puisque, avec un taux inchangé, elle ne prend jamais l’assiette en compte. Au contraire, avec la retenue à la source, un retraité qui gagnait 2 000 euros et se retrouve avec une pension de 1 000 euros, s’il payait 5 % de 2 000 euros la dernière année où il a travaillé, ne paiera que 5 % de 1 000 euros l’année suivante. Vous ne pouvez donc pas nier que la meilleure manière d’être dans la contemporanéité, c’est de coller à l’évolution mensuelle du revenu !

Cela vaut en tout cas pour 80 % des contribuables, puisque 88 % des revenus prélevés à la source consisteront en traitements, pensions, rentes et salaires, qui constituent l’essentiel des revenus de l’immense majorité des foyers fiscaux : les couples composés d’un salarié, d’une profession libérale et disposant d’importants revenus fonciers, ne représentent qu’un ou deux millions de contribuables.

Quant à ceux qui prétendent qu’en matière de crédits et de réductions d’impôt tout va changer, je leur réponds que ces crédits et ces réductions ne peuvent être payés qu’une fois constatés : or ils ne peuvent être constatés qu’au terme de l’année fiscale et sont donc toujours payés en année N + 1 ; ils continueront de l’être.

La seule question est une question de trésorerie infra-annuelle entre l’anticipation du début d’année et le rattrapage du mois de juillet. C’est la raison pour laquelle, je proposerai un amendement qui autorise pour les crédits d’impôt récurrents – aides à la personne, dispositifs « Censi-Bouvard », « Scellier » – la possibilité de verser au contribuable une avance de 30 % avant le calcul du solde en juillet. Et, ce n’est pas l’État qui fera de la trésorerie, puisque, comme le note le rapporteur général du Sénat lui-même dans son rapport, pour un contribuable mensualisé, le prélèvement à la source représentera un gain de 17 % en trésorerie, et un gain de 25 % pour un contribuable au tiers provisionnel. Il ne faut donc pas raconter n’importe quoi.

Je réitère ma demande, monsieur le président, pour que l’évaluation préalable sur le prélèvement à la source soit jointe au dossier législatif afin que tout un chacun puisse facilement se la procurer sur le site de l’Assemblée nationale. On peut avoir des désaccords, mais on ne peut pas tronquer la vérité.

Mme Karine Berger. Ce débat est effectivement très important et nous avons tous intérêt à renoncer aux postures politiciennes pour réfléchir à ce qui est le plus utile pour notre pays en ce qui concerne l’impôt sur le revenu.

La commission des finances est bien placée pour savoir à quel point l’impôt sur le revenu a souvent été instrumentalisé pour servir d’autres objectifs connexes. La contribution à la collectivité via l’impôt devient ainsi de moins en moins compréhensible pour nos concitoyens, tant elle est perturbée par d’autres enjeux.

Il y a un autre phénomène : avec le décalage d’un an, on ne peut jamais savoir quelle sera sa situation personnelle au moment où il faudra régler l’impôt sur le revenu. Contrairement à une idée largement répandue, ce ne sont pas seulement les Français ayant de petits revenus ou de petites retraites qui sont concernés, ce sont aussi des gens ayant de très hauts revenus qui subissent un effet de décalage très important. Je ne parle même pas de l’éventuelle évolution de la structure familiale : un divorce, par exemple, peut créer des tensions épouvantables pour le paiement de l’impôt sur le revenu.

Nous avons tous intérêt à faire de l’impôt sur le revenu un impôt digne de 2016. Dans le monde entier, on a mis en place un mécanisme pour que les gens sachent, à partir de leur feuille de paie, quelle somme a été prélevée, et surtout, à la fin du mois, ce que cela représente en termes de pouvoir d’achat super-net. Il est très important que l’on arrive, en France, à parler de négociations salariales et de négociations de revenus en termes de super-net.

M. Hervé Mariton. C’est la prime aux cadres dirigeants !

Mme Karine Berger. Si vous avez eu des expériences dans des entreprises privées, monsieur Mariton, vous devez savoir que, pour les cadres supérieurs, la négociation se fait aujourd’hui en prenant en compte l’impôt sur le revenu,…

M. Hervé Mariton. Des cadres supérieurs comme vous !

M. Charles de Courson. Et les sportifs !

Mme Karine Berger. … ce qui est refusé à l’ensemble des Français de la classe moyenne qui, eux, n’ont pas le droit de venir dans l’entreprise pour discuter de leur salaire brut et du paiement de l’impôt sur le revenu.

M. Marc Le Fur. On familialise totalement !

Mme Karine Berger. Pas du tout, puisqu’aujourd’hui, l’impôt sur le revenu est familial. S’agissant des cadres supérieurs qui négocient leur salaire, c’est bien l’impôt sur le revenu au regard de leur structure familiale qui est intégré.

M. Marc Le Fur. Si vous avez trois enfants, on vous paie moins…

Mme Karine Berger. Il s’agit d’un effort de clarification du pouvoir d’achat dans notre pays, au sens le plus général du terme, c’est-à-dire y compris pour les ménages très aisés, compte tenu du fait que l’impôt sur le revenu est dégrevé dans nombre de situations.

M. Hervé Mariton. Les entreprises s’adaptent à la politique fiscale de l’État…

Mme Karine Berger. Sur la question de la réversibilité, mes chers collègues, je vous invite à plus de cohérence. Tous ceux qui viennent de s’exprimer nous ont dit que, pour différentes raisons, la situation allait créer un choc considérable sur l’organisation de la vie quotidienne et sur la relation au salaire de nos concitoyens. Personnellement, je ne le crois pas, mais si vous en êtes persuadés, si vous pensez véritablement que ce changement de mode de trésorerie et de ponction va provoquer un choc majeur à partir de 2018, cela veut dire que la façon dont les Français vont anticiper l’évolution de l’impôt sur le revenu en 2018 aura un impact en 2017. Auquel cas, monsieur le président de la commission des finances, vous en serez d’accord avec moi, vous en déduirez que si vous revenez sur le dispositif, le Conseil constitutionnel, à supposer qu’il soit saisi, pourrait répondre que la grande rétroactivité s’enclenche dans la mesure où la moitié de l’année 2017 aura été passée. Et si vous êtes persuadés que cette réforme aura un impact considérable sur les comportements, cela signifie que, mécaniquement, la grande rétroactivité s’enclenchera : la jurisprudence du Conseil est sur ce point systématique, dans la mesure où les changements de comportements auront perduré au-delà de la moitié de l’année.

Personnellement, je ne crois pas qu’il y aura un choc d’ampleur. Mais vous ne pouvez pas, mes chers collègues, défendre l’idée que cette réforme changera la relation à l’impôt sur le revenu et, dans le même temps, penser que cela puisse être réversible dès l’année 2018.

M. Hervé Mariton. Où est la logique ?

Mme Karine Berger. C’est très simple : si vous pensez, monsieur Mariton, que ce changement de mode de prélèvement aura un impact sur les décisions individuelles, celles-ci seront prises en 2017, de janvier à juin. La possibilité pour une nouvelle majorité de changer éventuellement ce système n’interviendrait qu’en juillet. La moitié de l’année serait passée : par conséquent, le Conseil constitutionnel considérerait qu’il y a grande rétroactivité.

M. le président Gilles Carrez. Chers collègues, nous avons eu un échange très long sur les amendements de suppression. Nous allons maintenant nous efforcer d’aller plus vite, car presque tous les arguments ont été échangés à l’occasion de cette discussion, certes nécessaire.

La commission rejette les amendements.

La commission examine, en discussion commune, les amendements II-CF 308 de Mme Marie-Christine Dalloz, II-CF 364 de M. Éric Woerth, II-CF 228 de Mme Claudine Schmid et II-CF 247 de M. Jean-Christophe Fromantin.

Mme Marie-Christine Dalloz. La DSN, dont nous parle M. Lefebvre, créera une complexité nouvelle pour les chefs d’entreprise.

Il y a une dizaine de jours, j’étais dans des entreprises du Jura. Les gens sont très inquiets face à la perspective du prélèvement à la source par le canal de l’entreprise et craignent que le directeur des ressources humaines (DRH) connaisse en détail tout ce qui concerne le ménage, les revenus et les variations de revenus dans le couple.

Vous vous seriez simplifié la vie en optant pour le prélèvement mensuel obligatoire contemporain de l’impôt sur le revenu, collecté par les services fiscaux, qui font un excellent travail. C’est à eux que doit être confié le recouvrement de l’impôt sur le revenu. Il aurait été plus logique de mettre en œuvre un tel dispositif, comme le propose mon amendement II-CF 308.

M. Éric Woerth. La réforme proposée par le Gouvernement n’est pas sans intérêt. Mais j’y vois tout à la fois une bonne idée et une mauvaise mise en place.

La bonne idée, c’est de supprimer le décalage d’un an entre les revenus et l’impôt. En effet, pourquoi traîner une dette d’impôt tout au long de l’année ? Le climat est incertain et la situation des gens évolue. On peut toujours négocier avec les impôts et reporter le paiement, mais vous avez toujours cette dette au-dessus de votre tête. Même si c’est plus compliqué, parce qu’on n’a pas tous les éléments en main, mieux vaut prélever l’impôt et réduire sa dette, voire l’annuler complètement, et être à jour au 1er janvier ou au 1er février. Cette idée n’est pas novatrice, mais c’est une bonne idée et elle existe dans d’autres pays. L’erreur du Gouvernement est de vouloir passer par les entreprises, autrement dit le prélèvement à la source.

Le prélèvement à la source a plusieurs défauts.

D’abord, il crée un risque de fusion entre la CSG et l’impôt sur le revenu, Gilles Carrez l’a dénoncé à plusieurs reprises.

Ensuite, il fait intervenir l’entreprise. Certes, elle collecte déjà la CSG et bien d’autres impôts ou charges. Mais l’impôt sur le revenu, c’est autre chose ; il n’est pas nécessaire de leur rajouter des charges administratives supplémentaires.

Il y a, de surcroît, un risque en termes de confidentialité. On a beau le nier, ce risque existe tel et bien, d’autant que la France n’a pas le même rapport à l’argent que d’autres pays.

J’y vois enfin un risque non négligeable : celui de dévaloriser la valeur travail. Le montant de l’impôt aura été soustrait avant d’arriver au chiffre final sur la feuille de paie et, finalement, on aura l’impression de gagner moins, même si c’est net d’impôt. C’est psychologique, mais cela risque de créer des tensions salariales.

Je propose un prélèvement mensuel contemporain, fondé sur la déclaration sociale nominative, qui est en cours d’élargissement et deviendra obligatoire à partir de 2017. Elle est déjà expérimentée dans un certain nombre d’entreprises. Tous les mois, les entreprises communiquent aux unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (Urssaf) une déclaration dans laquelle figurent toutes les caractéristiques de la paie du salarié. Il suffit que l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) se branche sur l’administration fiscale et transmette les données. Cela ne concerne pas le contribuable ni l’entreprise. L’entreprise est ainsi déchargée de cette tâche : elle envoie la DSN et la mensualisation est adaptée à la situation réelle du contribuable.

Ensuite, il y a évidemment la déclaration de revenus et, à un moment donné, un rectificatif. Pour nombre de salariés, d’ailleurs, cela fonctionne plutôt bien. Il faut voir comment cela peut fonctionner pour les travailleurs indépendants. Les salariés ayant souvent un salaire à peu près stable, cela ne pose pas de difficulté. Et si un changement d’ordre familial intervient durant l’année, il suffit de le signaler.

Je propose donc une mensualisation obligatoire contemporaine, fondée sur la généralisation de la déclaration sociale nominative. Cette proposition ne me semble pas être une usine à gaz. Elle conserve le lien entre l’administration fiscale et le contribuable, lien qui sera distendu si l’on opte pour le passage par un tiers, à savoir l’entreprise. Ma proposition semble aussi être en cohérence avec l’idée qu’il faut éviter ou gommer la plupart des incertitudes, s’agissant notamment de la dette d’impôt, que nous avons tous sur les revenus de l’année précédente.

Tel est l’esprit de mon amendement II-CF 364.

Mme Claudine Schmid. Il serait, en effet, préférable de travailler sur un impôt contemporain, plutôt que sur un prélèvement à la source par l’intermédiaire de l’employeur. Les contribuables savent ce qu’ils doivent régler en termes d’impôt et sont capables de le faire eux-mêmes. Il n’est pas nécessaire de les infantiliser.

Ce projet de retenue à la source de l’impôt sur le revenu constituera une nouvelle charge pour les employeurs, sans garantir aux contribuables la confidentialité des données fiscales, à laquelle ils sont très attachés.

Afin que les employeurs n’aient pas à endosser le rôle de collecteur, je propose par mon amendement II-CF 228 que le prélèvement s’effectue directement sur ordre du contribuable, selon les mêmes modalités que la mensualisation actuelle. Ainsi, le lien direct et exclusif entre l’administration fiscale et le contribuable serait maintenu, tout en préservant les relations de travail de conflits potentiels.

M. Jean-Christophe Fromantin. L’objectif de mon amendement II-CF 247 est de proposer une troisième voie, que j’ai appelée la « voie responsable ».

Le principe est de laisser au contribuable le soin de fixer lui-même le taux de prélèvement qui lui serait appliqué dans le cadre de la retenue à la source. Ma proposition aurait trois avantages, le premier étant la confidentialité, qui est un enjeu majeur dans cette affaire.

Le deuxième avantage est de laisser au contribuable la possibilité d’ajuster lui-même sa trésorerie, en prenant en compte les réductions et crédits d’impôt dont il peut bénéficier.

Le troisième avantage est de simplifier les choses pour l’entreprise, qui peut appliquer le taux demandé par le contribuable. L’administration, dont la relation avec le contribuable, du coup, est maintenue, peut procéder à un ajustement en fin d’année, sur la base des informations transmises.

Cette proposition responsabilise le contribuable. Elle évite de mettre à la charge de l’entreprise le calcul et la gestion administrative du prélèvement à la source, et les conflits qui peuvent en découler. Elle permet également au contribuable de s’occuper lui-même de la gestion de sa trésorerie.

Mme la Rapporteure générale. Nous avons déjà débattu de nombreux points sur ce sujet ; je n’y reviens pas. Je voudrais seulement donner quelques éléments de réponse sur l’amendement II-CF 247. La solution que vous proposez, monsieur Fromantin, pourrait être séduisante, à ceci près que vous créez une rupture d’égalité entre les salariés, selon qu’ils seraient soumis au prélèvement à la source ou à l’acompte, puisque vous prenez en compte les crédits et réductions d’impôt dans un cas, mais pas dans l’autre.

En outre, vous introduisez de la complexité puisque c’est le contribuable qui estimerait lui-même son impôt.

M. Jean-Christophe Fromantin. C’est seulement une possibilité.

Mme la Rapporteure générale. Reste que globalement, votre amendement complexifie les choses.

J’émets un avis défavorable à tous ces amendements.

M. Éric Woerth. Vous n’avez pas d’opinion sur mon amendement, madame la Rapporteure générale ? Je suis très vexé !

Mme la Rapporteure générale. Je reconnais que votre amendement est très bien documenté et très bien écrit, monsieur Woerth, mais, avant que vous n’arriviez, nous avions déjà discuté des points qu’il soulève. C’est ce qui explique mon avis défavorable.

M. le président Gilles Carrez. C’est un amendement important, parce qu’il montre qu’il ne s’agit pas d’une posture.

Mme la Rapporteure générale. Deux questions se posent : celle de savoir si cet amendement « tourne » ou pas ; celle ensuite de la philosophie générale qui le sous-tend.

Sur les questions de fond relatives au prélèvement à la source, nous avons un point de divergence, monsieur Woerth. À la question de savoir si votre amendement est applicable, je peux vous répondre par l’affirmative : oui, d’un point de vue technique, il tourne.

M. Éric Woerth. Comme la terre…

Mme la Rapporteure générale. Éric Woerth ayant été ministre du budget, je n’avais pas d’inquiétude sur ce point.

Mme Claudine Schmid. Madame la Rapporteure générale, pourquoi tenez-vous absolument à ce que l’employeur soit le collecteur ? Il y a d’autres pays où l’impôt est contemporain, mais ce n’est pas l’employeur qui le collecte. C’est cela que je n’arrive pas à comprendre dans votre raisonnement. Pourquoi passer par l’employeur ? Pourquoi le contribuable ne ferait-il pas lui-même le versement ?

Mme la Rapporteure générale. Pour cette étude, nous avons récupéré des bulletins de salaire de différents pays, comme la Belgique ou l’Allemagne. Comme nous les avons rendus anonymes, nous pourrions les insérer dans le rapport pour que vous puissiez les consulter. Dans ces pays, c’est bien l’employeur…

Mme Claudine Schmid. Pas en Suisse.

Mme la Rapporteure générale. Peut-être pas en Suisse, mais c’est le cas en Allemagne, en Belgique et au Royaume-Uni : je peux vous montrer mes anciens bulletins de salaire lorsque j’y travaillais… Ce sont les entreprises qui font le prélèvement et indiquent le montant net du salaire. Sur les bulletins de salaire allemands, il y a beaucoup plus d’informations, mais c’est une autre culture. Nous ne sommes pas là pour faire un copier-coller de ce qui existe ailleurs ; nous constatons seulement que ce système fonctionne dans d’autres pays et que ce sont bien les employeurs qui font le prélèvement à la source.

M. Dominique Lefebvre. Ces amendements montrent que le débat peut avancer. Tout le monde part de l’idée que le prélèvement doit être contemporain, et ce que j’ai retenu de l’amendement d’Éric Woerth, c’est qu’il propose, grosso modo, comme le rapporteur général de la commission des finances au Sénat, que ce qui sera prélevé en 2018 sera dû au titre des revenus de 2018 et non des revenus de 2017. Si nous sommes d’accord sur ce point, il y a ensuite toutes les conséquences qui en découlent, comme ce qu’il faut faire pour l’année blanche, etc.

La question qui revient, c’est celle du tiers collecteur, mais il n’y a pas plus de différence de nature que de différence de volume et de montant entre l’impôt sur le revenu, qui est une imposition de toute nature, et la contribution sociale généralisée, qui est un impôt de toute nature. Il est donc faux de dire à des entreprises qu’elles vont collecter des impôts d’État puisqu’elles le font déjà.

La seule différence entre la CSG et l’impôt sur le revenu, c’est qu’il y a pour la première un taux unique pour les salariés, alors qu’en ce qui concerne l’impôt sur le revenu, le taux sera adressé à l’employeur par la déclaration sociale nominative, qui fonctionne d’ores et déjà. Sinon, il y aura un taux neutre.

En ce qui concerne la contemporanéité, le problème, depuis le début, est le suivant : comment calculer le montant de la mensualité ? Il est plus simple d’avoir un taux qui s’applique à un revenu qui peut varier d’un mois sur l’autre, pour calculer la mensualité en fonction du revenu perçu, y compris avec un système de tiers. Qui connaît le mieux le revenu imposable ? Qui le calcule déjà dans les logiciels de paie ? Qui le transmet à l’administration fiscale ?

Vous dites que nous allons créer un tiers entre le contribuable et l’administration fiscale. Je vous rappelle qu’aujourd’hui, nous recevons tous une feuille de déclaration de revenus préremplie : c’est bien parce que l’employeur a transmis le niveau de salaire à la direction générale des finances publiques (DGFiP). Il y a donc un lien, aujourd’hui, entre l’employeur et la DGFiP. En réalité, vous ne faites qu’inverser le lien, en demandant que ce soit la DGFiP qui donne un taux.

Mme Karine Berger. Très juste !

M. Dominique Lefebvre. L’étude d’impact consacre six pages aux revenus allant de 20 000 à 60 000 euros, ce qui concerne la majorité de nos concitoyens, en fonction de la situation familiale et du nombre de parts. Pour un taux de 6,9 %, vous avez vingt-cinq situations fiscales différentes, en termes de revenus et de composition… Vous ne pouvez pas nier que le système que nous proposons est plus simple, plus automatique, pour ajuster le montant payé chaque mois au revenu perçu chaque mois par le contribuable. Ce qui est une véritable avancée pour plus de 80 % des contribuables.

Le Gouvernement et la majorité qui seront en place en juin prochain devront donc y réfléchir : 80 % des contribuables ont, grosso modo, sur leur feuille d’impôt, un traitement ou un salaire et quasiment pas de réductions ni de crédits d’impôt. Il y a 13 milliards d’euros de crédits et réductions d’impôt, 8 millions de bénéficiaires sur 36 millions de contribuables, 4 millions percevant 75 % des crédits et réductions d’impôt. Le problème de trésorerie ne touche donc qu’un petit nombre de contribuables. Si vous êtes amené à être aux responsabilités en juin, monsieur le président, il faudra regarder de près cette réforme.

Je maintiens qu’il faut passer par l’employeur parce que c’est lui qui édite le revenu imposable mensuel, auquel on applique un taux. Si vous faites autrement, vous n’arriverez jamais à ajuster. Quand on me parle d’une réforme alternative qui va améliorer la vie des contribuables, je réponds qu’il y aura toujours un décalage important entre la mensualité proposée aux contribuables et l’évolution spontanée de leurs revenus.

Le cas de la personne qui part à la retraite ou qui se retrouve au chômage est typique. Si vous gagnez, par exemple, 2 000 euros par mois, au chômage, dans le meilleur des cas, vous touchez 75 % de votre salaire. Avec le prélèvement à la source, votre montant d’impôt mensuel, qui est un acompte sur un impôt dû, diminuera automatiquement.

L’objectif, s’agissant aussi des crédits et réductions d’impôt, est d’éviter un trop grand décalage. Il est faux de dire qu’il y aura plus de régularisation a posteriori qu’avant. Il y en aura moins, mais il faut éviter qu’il y en ait encore trop. De ce point de vue, notre système est plus performant que le vôtre. Si vous êtes aux manettes et que vous êtes amenés à y réfléchir à nouveau, vous vous en rendrez compte.

Le groupe Socialiste écologiste et républicain votera contre ces amendements.

La commission rejette successivement les amendements II-CF 308, II-CF 364, II-CF 228 et II-CF 247.

La commission examine, en présentation commune, les amendements II-CF 277 et II-CF 278 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Je voudrais insister sur la situation particulière des jeunes, qui sont les grands défavorisés de cette réforme, alors que le Président de la République nous avait expliqué qu’il serait le Président des jeunes.

Aujourd’hui, un jeune qui commence à travailler le 1er janvier de l’année N remplit sa déclaration d’impôt au printemps de l’année N + 1 et va payer, à l’automne de cette même année, son impôt dès le premier mois. Nous avons, dans notre système, un avantage réel pour les jeunes, qui a une logique, car le jeune qui commence à travailler a des dépenses liées au travail qu’il effectue. Or cet avantage va disparaître.

Deuxième difficulté pour les jeunes : comme ils n’ont pas de taux de référence, on leur impose le taux forfaitaire, c’est-à-dire un taux défavorable. La Rapporteure générale elle-même l’a reconnu. Non seulement on l’impose dès le premier mois, mais à un taux plus élevé. Certes, il est remboursé l’année suivante, mais il n’en reste pas moins que cela peut poser problème.

Troisième difficulté : il existe un dispositif très apprécié des jeunes et des familles, qui exonère les étudiants travaillant à temps très partiel durant leur année universitaire ou scolaire, jusqu’à l’équivalent de trois SMIC. Cet avantage, de fait, est ingérable dans votre système, dans la mesure où l’employeur, par définition, n’a pas connaissance du montant que va toucher le jeune durant l’année. Celui-ci est donc imposé au taux forfaitaire, alors qu’il ne devrait en fait pas payer d’impôt du tout. Il sera remboursé l’année suivante, mais cela occasionne une autre difficulté. Ce jeune, dans bien des cas, appartient à un foyer fiscal. Donc, ce n’est pas lui qui est imposé et c’est le foyer fiscal qui bénéficie du remboursement. Encore faut-il identifier, dans ce foyer fiscal, ce qui doit revenir au jeune : là encore, vous ajoutez de la complexité.

Les jeunes vont découvrir que l’avantage fiscal dont ils bénéficiaient jusqu’à présent pendant dix-huit mois, va disparaître, ce qui n’est pas très encourageant. Ce sont les plus grands perdants du dispositif.

M. le président Gilles Carrez. Madame la Rapporteure générale, n’y a-t-il pas un moyen de régulariser dès la première année de travail ?

Mme la Rapporteure générale. Le problème que soulève Marc Le Fur est exact. Pour tenter d’y remédier, nous proposerons un peu plus loin un amendement qui revoit la calibration du taux par défaut. S’agissant d’un célibataire, le jeune paiera le juste prix.

L’étude d’impact mentionne 500 000 primo-déclarants en 2015, dont 90 % sont célibataires. Notre proposition concernant le taux par défaut résout donc ce problème pour la très grande majorité d’entre eux. Par ailleurs, le texte en l’état prévoit toujours la possibilité de demander une modulation.

J’émets un avis défavorable sur vos amendements, monsieur Le Fur. Mais l’objectif, est que l’on puisse résoudre le problème du taux par défaut – et cela ne concernerait pas que les primo-déclarants, car il n’y a pas que les jeunes qui entrent sur le marché du travail.

M. Dominique Lefebvre. Le prélèvement à la source pose deux questions : celle de l’entrée dans le dispositif et celle des contrats courts, autrement dit de la situation de tous ceux pour lesquels la DGFiP n’a pas de taux de référence.

Je rappelle que tout le monde est censé faire une déclaration d’impôt, même si l’on ne travaille pas. Par conséquent, le taux de référence est égal à zéro pour 52 % des foyers fiscaux…

C’est le taux neutre qui règle ce problème, d’où l’importance de savoir quelle est l’ampleur du problème et qui cela concerne. La Rapporteure générale vient de dire que les jeunes, dans 90 % des cas, ont le statut fiscal de célibataire. Je rappelle, et cela figure dans l’évaluation préalable, que, sur 36 millions de contribuables, il y a tout de même entre 16 et 18 millions de foyers fiscaux sous le statut de célibataire, ce qui veut dire que le barème du célibataire est le bon barème.

Ensuite, pour évaluer l’ampleur du problème, il s’agit de savoir à quel niveau de salaire commence le jeune. Pour un célibataire, en dessous de 1 300 euros de revenus environ, le taux de référence est égal à zéro. Le cas d’un jeune qui démarrerait dans la vie active à 4 000 euros par mois et qui se retrouverait, avec le barème du taux neutre, avec un niveau d’imposition élevé qui pourrait être recalculé, le cas échéant, l’année suivante, n’est tout de même pas le plus fréquent.

C’est le problème dont je parle depuis le début : soit on part du particulier, soit on part du cas général. Partir du cas général ne signifie pas nier les problèmes particuliers. La Rapporteure générale le dit, il faudra s’adapter au fil du temps. Mais il est faux de dire que le prélèvement à la source est un problème pour la majorité des jeunes. Pour une grande majorité d’entre eux, c’est, au contraire, une solution, parce que c’est plus simple : ils perçoivent un revenu et paient directement l’impôt sur ce revenu. Nous verrons ce qu’il en est dans un an ou deux.

Le juge de paix, ce sera en 2019 et 2020 : on s’apercevra qu’il n’y aura pas plus de régularisations qu’aujourd’hui. On en constatera même moins et il y aura une plus grande corrélation entre l’impôt payé mensuellement et le revenu perçu.

M. Marc Le Fur. Je vous remercie, madame la Rapporteure générale, d’admettre que c’est un problème. C’est même, à mon avis, un problème majeur.

La solution que vous évoquez consiste à instaurer un taux un peu plus favorable pour les jeunes. Je rappelle qu’aujourd’hui, s’ils commencent à travailler en janvier, ils ne paient pas d’impôt la première année. Ils vont payer une fois sur deux ans, deux fois sur trois ans, trois fois sur quatre ans, etc. Autrement dit, ils bénéficient d’un avantage très réel, qui leur est accordé par la société, pour commencer dans la vie.

Par ailleurs, un certain nombre de ces jeunes relèvent, non pas de leur propre foyer fiscal, mais de celui de leurs parents, ce qui complique l’exercice. J’aimerais, madame la Rapporteure générale, que vous nous indiquiez, sur les 500 000 personnes qui commencent à travailler, même s’ils sont célibataires, combien sont rattachés au foyer fiscal de leurs parents.

Enfin, les jeunes, et notamment les jeunes étudiants, ne sont pas soumis à l’impôt sur le revenu jusqu’à l’équivalent de trois SMIC, c’est-à-dire environ 4 000 euros dans l’année. Comment cet avantage pourra-t-il perdurer puisque, par définition, l’employeur ne sait pas, quand il embauche un jeune en février ou en mars, combien il va gagner dans l’année et s’il ne va pas avoir d’autres employeurs ?

Nous risquons de voir disparaître l’un des rares avantages que nous avons accordés aux jeunes étudiants qui travaillent et qui ont le mérite de vouloir s’assumer.

Mme la Rapporteure générale. Monsieur Le Fur, je ne connais pas, pour les 500 000 personnes primo-déclarantes, la part de ceux qui sont rattachés au foyer fiscal des parents et de ceux qui ont un foyer fiscal propre. Nous allons tenter de récupérer cette information.

M. Dominique Lefebvre. Les termes sont importants, monsieur Le Fur. Le jeune qui débute dans la vie active ne bénéficie d’aucun avantage fiscal particulier : dès le premier salaire, il va être imposé. Un jeune, qui débute le 1er janvier 2018, remplira, en mai 2019, une déclaration d’impôt sur ses revenus de 2018, ce qui l’amènera, en septembre 2019, à devoir payer la totalité de l’impôt sur le revenu dû au titre des revenus de 2018 puisque, par définition, comme il n’était pas imposable en 2017, il n’a en 2018 ni tiers provisionnel ni mensualisation.

Autrement dit, un jeune qui commencerait à travailler le 1er janvier 2018 moyennant un salaire mensuel de 2 000 euros ne paiera, dans le système actuel, aucun impôt jusqu’au 15 septembre 2019, date à laquelle il devra en revanche payer en une seule fois la totalité de son impôt pour 2018, soit environ 1 200 euros s’il est imposé à hauteur de 5 %, par exemple.

M. le président Gilles Carrez. Marc Le Fur considère que le fait de ne pas payer d’impôt la première année constitue précisément un avantage objectif accordé à la jeunesse de France – un avantage de trésorerie, s’entend.

M. Dominique Lefebvre. Ce n’est pas un avantage puisque l’impôt devra être acquitté dans sa totalité au mois de septembre de l’année N + 1 ! L’évaluation préalable de l’article 38 montre bien que nous devons concilier deux priorités : d’une part, veiller à la bonne collecte de l’impôt et à son paiement en temps voulu et, d’autre part, tenir compte des effets de trésorerie. En l’occurrence, l’affirmation selon laquelle les ménages s’exposeraient à des effets de trésorerie négatifs est fausse.

M. le président Gilles Carrez. Deux visions s’opposent : certains considèrent qu’il s’agit d’un avantage objectif assumé par la société, et qu’il appartient aux jeunes concernés de se débrouiller pour être prêts le moment venu ; d’autres estiment au contraire que ce cadeau fait aux jeunes est empoisonné.

Mme Marie-Christine Dalloz. Les jeunes ne sont pas les seuls concernés : toutes les personnes au chômage pendant plus d’un an qui retrouvent un emploi subiront le même impact. On fragilisera ainsi des populations qui n’en ont nul besoin ! Je suis convaincue que cette mesure aura une incidence concrète sur le pouvoir d’achat.

M. Marc Le Fur. Comment faire en sorte que ce dispositif demeure alors que les jobs d’été sont exonérés d’impôt dans la limite de trois fois le montant du SMIC ? Rien dans le texte n’est prévu en ce sens.

Mme la Rapporteure générale. Vous prétendez qu’il s’agit d’un avantage de trésorerie : sur le plan économique, c’est exact, mais il arrive souvent que des jeunes – et d’autres – n’aient pas conservé suffisamment de fonds sur leur compte pour s’acquitter de l’impôt le moment venu, au point qu’ils doivent solliciter une avance auprès de leur employeur.

M. Marc Le Fur. Ils ont été exonérés d’impôt pendant un an !

Mme la Rapporteure générale. Il y a la théorie, et il y a la pratique, monsieur Le Fur… Pour avoir travaillé dans des entreprises privées, j’ai souvent rencontré des cas de ce genre.

M. le président Gilles Carrez. La Fontaine a écrit une fable là-dessus : « la cigale ayant chanté tout l’été se trouva fort dépourvue quand la bise fut venue »…

Mme la Rapporteure générale. C’est peut-être économiquement un avantage de trésorerie, mais il se transforme parfois en cadeau empoisonné.

Quant à la question de l’exonération en deçà de trois SMIC, vous avez raison : une régularisation doit intervenir l’année suivante.

M. le président Gilles Carrez. Les amendements de Marc Le Fur soulèvent à juste titre un point très important de la réforme.

La commission rejette les amendements II-CF 277 et II-CF 278.

Puis elle examine les amendements identiques II-CF 15 de M. Marc Le Fur et II-CF 385 de M. Charles de Courson.

M. Marc Le Fur. Le monde agricole a cette singularité : les revenus y sont de plus en plus erratiques du fait de la variation des cours. La possibilité de calculer le montant de l’acompte à partir de la moyenne triennale en tient compte, tant en matière fiscale qu’en matière sociale. Mon amendement II-CF 15 vise à généraliser cette possibilité. Le seul moyen d’amortir quelque peu l’impôt – même s’il est paradoxal par rapport à l’objectif de la réforme – consiste à tenir compte des revenus passés. Il s’agit d’une demande du monde agricole, confronté au caractère erratique des chiffres d’affaires – qui le sera de plus en plus à l’avenir, compte tenu des multiples incertitudes qui existent.

M. Charles de Courson. Le problème est plus complexe que cela. La très forte variabilité des prix et même des intrants se traduit par une fluctuation très élevée – sans doute davantage que dans toutes les autres catégories sociales – des revenus agricoles. Dans le système actuel, qui correspond quasiment à une mensualisation obligatoire, comme l’indiquait Mme la Rapporteure générale, le montant de l’acompte est calculé sur la base des bénéfices connus, c’est-à-dire les années N – 1 et N – 2. Mon amendement II-CF 385 vise à calculer cette assiette à partir d’une moyenne triennale, ce qui ne change naturellement rien du point de vue de la déclaration et de la régularisation, mais présente l’avantage de lisser l’acompte afin d’éviter toute envolée excessive en cas de forte chute des bénéfices.

M. le président Gilles Carrez. Il ne serait donc plus calculé sur la base de deux années, mais de trois.

Mme la Rapporteure générale. Je suis très surprise par ces deux amendements. Le texte ouvre déjà cette possibilité ; vous entendez la rendre obligatoire.

M. Charles de Courson. Automatique.

Mme la Rapporteure générale. Non, obligatoire. Or les agriculteurs dont les revenus baissent sur trois années seront perdants : dans le cas où un revenu de 150 en année N – 3 passerait à 100 l’année suivante et à 50 en année N – 1, l’obligation que vous proposez serait désavantageuse pour les agriculteurs concernés, qui devront acquitter un acompte plus important la dernière année.

À ce stade, cette disposition est optionnelle. Pourquoi vouloir la rendre obligatoire ? Nous avons posé cette même question au président de l’Assemblée permanente des chambres d’agriculture. Mieux vaut selon moi laisser la liberté de choisir aux intéressés.

Cela étant, les revenus agricoles sont effectivement soumis à d’importants facteurs d’incertitude. La clause de bonne foi en cas de modulation peut certes être invoquée si les réajustements proposés présentent des écarts excessifs par rapport aux bénéfices, mais nous devrons rappeler au ministre en séance publique qu’un message doit être transmis aux directions départementales des finances publiques sur ce point.

Quoi qu’il en soit, je m’étonne que vous, qui défendez régulièrement la liberté pour les entreprises, souhaitiez en l’espèce rendre une option obligatoire, alors que les agriculteurs peuvent aujourd’hui l’utiliser s’ils le jugent nécessaire !

M. Charles de Courson. Le problème ne se pose pas dans ces termes. Imaginons que vous soyez vigneronne de champagne dans l’Aube, madame la Rapporteure générale, et que votre vignoble soit touché par un épisode de grêle : ce n’est qu’en septembre ou octobre de l’année N que se confirmera l’effondrement de vos revenus. Un céréaliculteur serait fixé vers le mois de juillet. En attendant, ils paient depuis le mois de janvier un impôt sur le revenu sans savoir quels seront leurs bénéfices réels, dont ils découvriront en cours d’année qu’ils sont peut-être nuls, voire négatifs !

M. le président Gilles Carrez. Cet argument vaut pour de nombreuses cultures. Peut-être peut-on envisager de prolonger le délai dans lequel l’option peut être choisie ?

M. Charles de Courson. Les dates varient en effet selon les filières ; pour la vigne, c’est septembre ! J’ajoute que mon amendement n’est pas exclusif de l’option.

Mme la Rapporteure générale. Les agriculteurs peuvent choisir de payer leur impôt sur le revenu sur la base d’une moyenne triennale dès l’exercice auquel elle s’appliquera, et l’option dure cinq ans. S’ils choisissent de le payer en fonction des bénéfices de l’année N sans appliquer la modulation triennale et qu’ils constatent en septembre que leur récolte est mauvaise, ils auront en effet payé chaque mois un acompte bien supérieur au montant qu’ils devront acquitter in fine en fonction des revenus perçus. La modulation demeure possible…

M. Marc Le Fur. C’est trop risqué !

Mme la Rapporteure générale. Je suis d’accord avec vous, monsieur Le Fur : les amendes sont trop élevées, et des amendements seront présentés sur ce point. Mais il reste tout à fait possible de prendre contact avec les services fiscaux pour demander la modulation triennale.

M. Charles de Courson. Le droit d’option doit être invoqué avant le début de l’année considérée. J’accepte de redéposer l’amendement en vue de la séance publique pourvu que l’on envisage de prolonger d’une manière ou d’une autre le délai applicable au droit d’option.

M. Marc Le Fur. Je ferai de même.

Les amendements II-CF 15 et II-CF 385 sont retirés.

La commission passe à l’amendement II-CF 83 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Cet amendement porte sur un sujet majeur qu’a bien mis en lumière la présentation de Mme la Rapporteure générale. Aujourd’hui, notre droit fiscal prévoit la concomitance de l’examen des revenus avec celui des charges : le contribuable paie en quelque sorte son impôt en fonction de la différence entre les deux. Demain, il paiera son impôt sur le revenu et les charges n’en seront déduites que l’année suivante, une fois la déclaration effectuée. Pour résumer, les familles se chargeront de la trésorerie de l’État… Elles subiront une imposition bien supérieure à celle d’aujourd’hui pour n’être remboursées qu’ultérieurement.

Prenons le cas, classique, d’un couple avec deux enfants qui perçoit un revenu mensuel imposable de 4 000 euros, soit un impôt de 2 618 euros. Le couple en question emploie une personne pour garder ses deux enfants et la paie 400 euros par mois, ce qui lui permet de réduire son impôt de 2 400 euros, soit 218 euros – ou 22 euros par mois. Après la réforme, il subira un prélèvement à la source calculé sur la base de 4 000 euros, c’est-à-dire 218 euros par mois au lieu de 22 euros jusqu’en septembre, voire en décembre, après quoi il sera remboursé de 2 400 euros. En attendant ce remboursement, le couple aura déboursé un montant bien supérieur à celui qu’il acquitte aujourd’hui, quand bien même il sera in fine remboursé. Encore une fois, au lieu de payer 22 euros d’impôt par mois, il en paiera 218. C’est pourquoi je propose par cet amendement de rétablir la concomitance entre les revenus et les charges.

Mme la Rapporteure générale. Avis défavorable. Un amendement devrait être présenté, visant les réductions et crédits d’impôt récurrents qui répondra à votre question. J’ajoute que votre amendement coûterait 10 milliards d’euros.

M. Marc Le Fur. Certes, et c’est la preuve par l’absurde que les familles se chargent de la trésorerie de l’État, même si elles sont remboursées ensuite.

Mme la Rapporteure générale. Non, les réductions et crédits d’impôt étaient déjà versés en année N + 1.

M. Marc Le Fur. Vous nous annoncez une mesure spécifique concernant les dépenses récurrentes, à la différence des dépenses occasionnelles. Cependant, cette récurrence concerne la nature des dépenses, et non leur montant. L’aide à domicile, par exemple, coûtera moins cher à mesure que les enfants grandissent. Cette différence de niveau ne peut être résolue qu’en conservant la concomitance actuelle entre l’examen des revenus et celui des charges. La particularité de la fiscalité française tient au fait qu’elle ne porte pas sur le revenu, mais sur la différence entre le revenu et les charges.

Mme Karine Berger. Si le prélèvement à la source se base sur un taux net, comme le propose Marc Le Fur, alors le gouvernement au pouvoir en 2018 – l’année de transition – subira un manque à gagner de plusieurs milliards d’euros, puisqu’il faudra tout de même rembourser les crédits d’impôt valables pour 2017. C’est une décision politique que, sur un tel sujet, nous devrions sans doute prendre tous ensemble.

M. Marc Le Fur. Cela ne vaudra pas que pendant l’année de transition, mais aussi les années suivantes !

Mme Karine Berger. Non : il faut être prêt à assumer un manque à gagner de 5 à 10 milliards en 2018, quel que soit le gouvernement en fonction à cette date.

Imaginons, monsieur le président, que nous trouvions un accord sur l’application d’un taux prenant en compte les réductions et crédits d’impôt : l’opposition serait-elle alors prête à accepter le principe du prélèvement à la source ?

M. le président Gilles Carrez. Cette proposition risque de créer un grave problème concernant les réductions d’impôt accordées au titre des investissements dans les sociétés pour le financement du cinéma et de l’audiovisuel (SOFICA) …(Sourires)

M. Charles de Courson. Entre la proposition de Marc Le Fur et celle du Gouvernement, un compromis possible pourrait consister à viser les dépenses récurrentes.

M. le président Gilles Carrez. Certes, mais on ne pourrait alors retenir que les aides à domicile et le logement locatif.

M. Charles de Courson. Soit, mais comment s’assurer a priori qu’une dépense sera récurrente ? On peut avoir eu besoin d’une aide à domicile pour s’occuper d’un enfant malade, par exemple, et ne plus en avoir besoin l’année suivante.

M. le président Gilles Carrez. Pour une fois, je reprends un argument cher à Dominique Lefebvre : le mieux est l’ennemi du bien. Nous envisageons un dispositif qui permettra de régler 90-95 % des problèmes, n’allons pas le condamner en raison de 5 % de cas exceptionnels ! En l’occurrence, le Gouvernement présentera un amendement qui couvre environ 80 % des dépenses fiscales récurrentes. Un crédit d’impôt relevant de la « loi Scellier » ou de la « loi Pinel » correspond à une dépense fiscale absolument récurrente pendant six, neuf ou douze ans.

M. Marc Le Fur. Pas une nounou !

M. le président Gilles Carrez. Les crédits d’impôt liés à l’emploi d’une nounou valent souvent plusieurs années, tant que les enfants sont en bas âge.

M. Marc Le Fur. Peut-être, mais leur montant varie !

M. Dominique Lefebvre. L’évaluation préalable comporte de nombreuses informations chiffrées sur ce sujet, et Mme la Rapporteure générale en a demandé d’autres en complément afin que nous puissions examiner ce mécanisme dans la durée. Je répète que la question des crédits d’impôt correspond à un montant compris entre 10 et 13 milliards d’euros et concerne huit à neuf millions de contribuables. Et pour les contribuables qui ne paient pas d’impôt, le texte prévoit d’ores et déjà un taux nul.

Reste un problème de trésorerie infra-annuelle et d’ajustement correspondant. Je travaille actuellement en lien avec le Gouvernement sur un amendement dont j’espère qu’il aboutira d’ici à la séance. Le problème est en effet de définir ceux des crédits d’impôt qui peuvent être jugés récurrents, compte tenu du principe juridique d’égalité des contribuables au regard du montant de l’acompte qui leur est demandé par rapport à leurs revenus réels. En 2017, les crédits d’impôt porteront sur des dépenses engagées en 2016 et seront versés en 2018. L’idée est d’isoler les crédits récurrents. Les crédits d’impôt liés à un investissement immobilier, par exemple, sont accordés pour six ou neuf ans : plutôt que d’effectuer un paiement important à la fin juillet, mieux vaut étaler les versements – car même un gros chèque en juillet produit un effet négatif pendant les premiers mois de l’année, avant d’en produire un positif. L’idée est de cibler certains crédits récurrents pour qu’ils donnent lieu à un premier versement de 30 % en début d’année et d’éviter de verser des montants que le contribuable aurait à rembourser quelques mois plus tard. Deux types de crédits me semblent devoir être ciblés : les aides à la personne et les crédits d’impôt récurrents dans l’immobilier.

On parle beaucoup du crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE) compte tenu de son coût et parce qu’il constitue désormais une seule dépense éligible. À titre personnel, j’ai bénéficié – à mon corps défendant – d’un effet d’aubaine lorsque nous l’avons modifié pour la catégorie des hauts revenus, dont nous faisons tous ici partie – sauf ceux des députés qui parviennent, monsieur de Courson, à ne pas payer d’impôt, ce qui doit choquer bon nombre de nos concitoyens. Le changement de mes fenêtres m’a coûté 12 000 euros…

Mme Karine Berger. Elles sont chères, vos fenêtres !

M. Dominique Lefebvre. J’ai beaucoup de fenêtres. (Sourires.)

… j’ai bénéficié d’un CITE de 3 000 euros. Comment les choses se sont-elles passées pour moi ? Les travaux ayant eu lieu l’année N, j’ai bénéficié du CITE pendant l’année N + 1 et, à ce titre, une bonne partie de mon dernier tiers provisionnel a été effacée. Mais l’impôt que j’ai dû acquitter pendant l’année N + 2 a été calculé en incluant le bénéfice du CITE… De ce fait, mon troisième tiers a été majoré de 3 000 euros pour ajuster ma situation. Autrement dit, j’ai fait le yo-yo.

Essayons donc d’adopter un dispositif plus simple en prévoyant une avance de 30 % qui sera finalement plus favorable au contribuable du point de vue de sa trésorerie infra-annuelle.

M. Marc Le Fur. Je comprends bien la distinction envisagée entre dépenses récurrentes et non récurrentes, mais je crains qu’elle ne soit purement théorique et bien difficile à mettre en œuvre : certaines dépenses dites récurrentes sont très variables !

De plus, nous n’avons pas abordé la question majeure des dons. Les donateurs se trouveront dans une situation d’incertitude.

M. Dominique Lefebvre. Pourquoi ?

M. Marc Le Fur. Le dispositif, madame la Rapporteure générale, créerait une inégalité entre les salariés et les non-salariés, puisque les premiers seront soumis à la retenue à la source tandis que les seconds seront soumis à l’acompte, lequel restera comme aujourd’hui établi sur la base des revenus de l’année N – 1. Les non-salariés bénéficieront donc toujours de la concomitance entre le calcul du revenu et celui des charges, selon le système de l’acompte. J’y vois une véritable difficulté constitutionnelle : cette concomitance disparaîtrait pour les salariés, lesquels devraient se charger de la trésorerie de l’État pour être remboursés ultérieurement, tandis que les indépendants conserveraient la possibilité de déduire leurs charges de leurs revenus. C’est une question d’égalité, madame la Rapporteure générale.

M. le président Gilles Carrez. En effet, il sera tenu compte sans délai des crédits et autres réductions d’impôt pour tous ceux qui relèvent du régime de l’acompte, lequel s’applique aux revenus fonciers, aux bénéfices industriels et commerciaux, aux bénéfices non commerciaux et aux bénéfices agricoles.

M. Marc Le Fur. Permettez-moi d’approfondir, monsieur le président…

M. le président Gilles Carrez. Il est temps de mettre un terme à ce débat. Chacun aura compris qu’il y a selon vous une rupture d’égalité entre les non-salariés et les salariés ou les retraités. Cette précision figurera au compte rendu.

La commission rejette l’amendement II-CF 83.

Elle est saisie de l’amendement II-CF 276 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Il est défendu.

Suivant l’avis défavorable de la Rapporteure générale, la commission rejette l’amendement II-CF 276.

Elle passe à l’amendement II-CF 145 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Cet amendement porte lui aussi sur les jeunes obtenant leur premier emploi.

Suivant l’avis défavorable de la Rapporteure générale, la commission rejette l’amendement II-CF 145.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements II-CF 491 de la Rapporteure générale, II-CF 267, II-CF 273, II-CF 268, II-CF 271, II-CF 269, II-CF 272, II-CF 274 et II-CF 270 de M. Marc Le Fur, et II-CF 328 de M. Charles de Courson.

Mme la Rapporteure générale. L’amendement II-CF 491, initialement déposé par Pierre-Alain Muet et Karine Berger, posait problème ; nous l’avons donc réécrit, mais je propose à Karine Berger de le défendre.

Mme Karine Berger. Lors du premier débat que nous avons eu sur le prélèvement à la source, nous avons indiqué que la grille proposée à ce stade pour le taux neutre n’était pas satisfaisante pour au moins deux raisons. D’une part, elle se décompose en marches avec des taux marginaux très élevés à chaque franchissement. D’autre part, elle ne correspond pas du tout aux taux qui s’appliquent aux personnes célibataires.

Je propose donc avec Pierre-Alain Muet de préciser que le taux neutre n’est ni plus ni moins que le taux appliqué à une personne célibataire d’un point de vue fiscal. C’est d’autant plus simple que Mme la Rapporteure générale propose par ce même amendement de faire en sorte que le taux par célibataire soit publié avec une incrémentation de 1 euro afin que les entreprises appliquent systématiquement le taux neutre à ceux de leurs employés qui souhaiteraient en bénéficier sans avoir à rechercher quelque information supplémentaire. En somme, c’est un amendement de simplification et de clarification qui fournira aux entreprises un outil très simple à utiliser par rapport à d’autres formes de tableaux.

M. Marc Le Fur. Ce taux neutre s’applique dans deux cas de figure : à ceux qui le choisissent et à ceux à qui il est imposé, en particulier les jeunes. Dans la plupart des cas, ce taux neutre est plus élevé que le taux qui finira par s’appliquer ; de plus, il n’est ni progressif, ni conjugalisé, ni familialisé. En clair, il est non seulement plus cher pour un célibataire, puisqu’un taux plus élevé s’applique, mais aussi beaucoup plus cher pour un couple marié, et davantage encore s’il a des enfants.

Autrement dit, le choix, qui est la condition de la confidentialité de l’impôt, est donc extrêmement cher pour les familles. Le Gouvernement prétend leur offrir la possibilité de relever d’un taux d’impôt confidentiel dont leur employeur ne pourra pas prendre connaissance, mais ce taux s’accompagne un coût extrêmement élevé, a fortiori lorsqu’il s’agit de familles avec enfants à charge.

Mes amendements II-CF 267, II-CF 273, II-CF 268, II-CF 271, II-CF 269, II-CF 272, II-CF 274 et II-CF 270 visent donc pour l’essentiel à conjugaliser ce taux, faute de quoi la confidentialité ne sera qu’illusoire puisqu’elle sera trop chère, en particulier pour les jeunes. Si je propose plusieurs amendements ayant le même objet, c’est pour tenir compte des écarts de taux d’imposition entre la métropole et l’outre-mer et de la diversité des situations familiales des foyers fiscaux.

M. Charles de Courson. Mon amendement II-CF 328 vise à ne pas imposer le prélèvement à la source lorsque la rémunération équivaut à 0,5 fois le SMIC. C’est en faisant mes tournées de vendanges que j’ai été saisi de ce véritable problème, les contrats de vendangeurs durant généralement huit à dix jours. Il arrive, en cas de maladie par exemple, qu’il faille embaucher très vite, pour le jour même. Les employeurs se demandent alors comment bénéficier de ce taux. Pourquoi ne pas exclure du prélèvement à la source les contrats de courte durée assortis d’une faible rémunération ? Cela simplifierait les choses. Ces revenus modestes sont de toute façon déclarés. Qu’aurait-on donc à gagner à ne pas les exclure ? Cela vaut non seulement dans le secteur des vendanges, mais aussi pour toutes sortes d’autres petits boulots.

Mme la Rapporteure générale. S’agissant des montants de revenus auxquels vous faisiez référence, monsieur Le Fur, je précise qu’ils ne sont pas imposables et que le taux est fixé à zéro : il n’y a donc aucune difficulté sur ce point.

Charles de Courson, en revanche, soulève un véritable problème. Le seuil quotidien est en effet fixé à 53 euros – un montant rapidement atteint en une journée de vendanges. L’amendement II-CF 491 que nous avons défendu ne résout pas pleinement cette question. Celui de Charles de Courson non plus, au demeurant, car le dépassement du seuil de 53 euros par jour est tout de même très plausible. En tout état de cause, la question des contrats courts fait partie des points qui demeurent en discussion avec le Gouvernement.

M. Charles de Courson. Si j’ai déposé cet amendement, c’est précisément pour soulever la question. J’ai d’ailleurs hésité entre deux approches, la première se fondant sur la – courte – durée des contrats et la seconde sur leur montant. J’ai opté pour la seconde mais je suis prêt à rehausser le montant s’il est trop bas – ce que je crois – voire à coupler les deux approches, en visant les durées inférieures à tel plafond et ne donnant pas lieu au versement d’un salaire supérieur à tel plancher. Travaillez-vous sur ces deux axes, madame la Rapporteure générale ?

M. le président Gilles Carrez. Mes chers collègues, au rythme où nous allons, nous ne pourrons pas achever nos débats dans les temps. Je demande à chacun de bien vouloir accélérer la cadence, car les sujets dont nous débattons ont déjà été évoqués lors de la discussion générale.

M. Marc Le Fur. En l’occurrence, la Rapporteure générale ne m’a pas répondu sur l’application du taux neutre, qui permet au contribuable de faire en sorte que son employeur ne puisse pas connaître son taux d’impôt. Or ce taux neutre est extrêmement élevé même pour un célibataire. L’amendement que vous proposez, madame la Rapporteure générale, ne résout pas le problème puisqu’il n’est pas conjugalisé. Autrement dit, il devient inaccessible dès que les contribuables concernés fondent une famille.

M. le président Gilles Carrez. Comme vous l’a indiqué la Rapporteure générale, son amendement améliore le système sans pour autant le conjugaliser.

La commission adopte l’amendement II-CF 491 (amendement II-739).

En conséquence, les amendements II-CF 267, II-CF 273, II-CF 268, II-CF 271, II-CF 269, II-CF 272, II-CF 274, II-CF 270 et II-CF 328 tombent.

La commission examine, en discussion commune, les amendements II-CF 492 de la Rapporteure générale et II-CF 26 de M. Marc Le Fur.

Mme la Rapporteure générale. J’ai évoqué ce point lors de ma présentation. Il est proposé de prendre en compte les naissances pour le calcul du taux, au même titre qu’un mariage, un divorce ou un décès.

Ces trois derniers cas se traduisent par la création ou la disparition de foyers fiscaux. Ce n’est pas le cas des naissances, dont l’effet est de modifier le nombre de parts de quotient familial des foyers fiscaux existants. Je propose que les naissances, de même que les adoptions, reçoivent le même traitement. Monsieur Le Fur, vous proposez une mesure similaire portant uniquement sur les naissances, mais pas sur les adoptions.

M. le président Gilles Carrez. D’autant que la date de la naissance est, en général, plus prévisible que celle du décès !

M. Marc Le Fur. À l’évidence, il faut prendre en compte ces événements, et qu’ils aient des effets sur le taux. Vu les délais laissés à l’administration, seuls les événements intervenant au premier semestre de l’année ont un impact sur le taux.

Une naissance, même si elle intervient en octobre ou en novembre, doit avoir un impact sur le taux du contribuable.

M. le président Gilles Carrez. Lorsqu’un enfant naît le 31 décembre, la demi-part s’applique depuis le 1er janvier. Ce sera toujours le cas dans le nouveau système.

La commission adopte l’amendement II-CF 492 (amendement II-740). En conséquence, l’amendement II-CF 26 tombe.

Elle en vient à l’examen de l’amendement II-CF 148 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Quand un événement intervient, il doit rapidement se répercuter sur le taux. Au vu des délais laissés à l’administration dans le texte actuel, les événements du premier semestre de l’année sont pris en compte, mais pas ceux qui interviennent plus tard dans l’année. Je souhaite réduire les délais accordés à l’administration. Puisque la logique est celle de la contemporanéité, allons au bout de cette logique : exigeons que l’administration soit réactive et transmette vite les informations à l’entreprise.

Mme la Rapporteure générale. Vous proposez de faire passer le délai de trois mois à un mois. Il faut respecter le principe de réalité : un délai de trois mois constitue d’ores et déjà une forme de réactivité. Avis défavorable.

M. Marc Le Fur. La prise en compte des événements aura donc des effets si cet événement intervient en début d’année, mais cela ne marchera plus après. La contemporanéité est vraiment ralentie en l’état du texte.

M. Dominique Lefebvre. Ce sera de toute façon mieux que la situation actuelle !

La commission rejette l’amendement.

Elle est saisie de l’amendement II-CF 172 de Mme Claudine Schmid.

Mme Claudine Schmid. Les alinéas 153 et 154 de l’article 38 prévoient que lorsque le débiteur n’est pas résident en France, il doit passer par l’intermédiaire d’un représentant fiscal. Dans les faits, un représentant fiscal est une société qui va prélever jusqu’à 4 % des montants. Le collecteur – l’employeur – aura une charge de travail supplémentaire, et en plus cela lui coûtera 4 % plus cher.

Je m’interroge sur le bien-fondé de cette mesure. Est-ce que dans les zones frontalières, les employeurs domiciliés à l’étranger continueront à employer des personnes en France ?

Il serait utile de supprimer, au moins pour la Suisse, l’obligation de représentant fiscal, faute de quoi des zones frontalières vont souffrir de cette mesure. C’est ce que propose mon amendement II-CF 172.

Mme Karine Berger. Et pourquoi pas en Italie ?

Mme Claudine Schmid. On compte des exceptions, notamment les pays membres de l’Union européenne et ceux ayant passé certains accords avec la France, dont des conventions de recouvrement de l’impôt. C’est pourquoi les pays de l’Union européenne et de nombreux autres ne sont pas concernés, mais des niches subsistent. Ou bien nous faisons disparaître le représentant fiscal pour tout le monde, parce qu’il ne concerne que quelques pays – je présenterai un amendement en ce sens en séance –, ou bien nous le supprimons pour un pays frontalier.

J’en ai discuté avec le ministre, qui m’a dit de faire attention à ne pas ouvrir une brèche qui permettrait à d’autres pays de s’y engouffrer – nous pensions notamment au « Brexit ». Je veux bien revoir la rédaction de mon amendement en vue de la séance, et prévoir le cas « des pays ayant signé avec l’Union européenne des accords de sécurité sociale ». La sécurité sociale comprend les retraites et le chômage, donc le travail. Aucun accord de sécurité sociale n’existe avec le Royaume-Uni, tandis que la Suisse en bénéficie.

Je suis donc disposée à changer la rédaction de l’amendement en vue de la séance si l’avis de la Rapporteure générale est plus ou moins favorable.

Mme la Rapporteure générale. Claudine Schmid a raison, le problème est bien réel. Lorsque vous êtes domicilié en France et que vous passez la frontière pour aller travailler dans un pays limitrophe, soit vous avez des revenus payés par un employeur étranger, et vous êtes alors soumis à l’acompte ; soit, dans le cas très particulier qui est soulevé, vous avez des revenus de source française payés par un employeur étranger. C’est un cas plus marginal que l’acompte. Dans ce cas, l’employeur étranger est soumis à la retenue à la source.

Ce cas n’est pas détaillé précisément dans le projet de loi qui nous est soumis ; cela fait partie des points que nous avons signalés au ministère de l’économie et des finances pour qu’une solution soit trouvée. Je propose à Claudine Schmid de retirer son amendement afin que nous puissions en débattre en séance publique, en espérant que nous aurons obtenu une réponse d’ici là.

Mme Claudine Schmid. Je retire mon amendement et je le redéposerai pour la séance publique. Le coût est quand même de 4 % pour les employeurs, qui hésiteront à employer nos frontaliers.

L’amendement est retiré.

M. Charles de Courson. Je n’ai pas bien compris cette partie du texte. Ce qui nous est proposé est-il compatible avec les presque cent quatre-vingt-seize conventions fiscales bilatérales que nous avons conclues ?

Il y a le problème des travailleurs domiciliés en France qui vont travailler à l’étranger – en Suisse, en Allemagne ou ailleurs – qui concerne des dizaines de milliers de personnes. La question s’est posée à propos de la CSG : comment peut-on obliger un employeur allemand, suisse, belge ou luxembourgeois à pratiquer le prélèvement à la source si ce n’est pas prévu par une convention internationale ?

Mme la Rapporteure générale. La convention fiscale a une valeur supra-législative. Si les dispositions d’une convention fiscale sont contraires à ce que nous allons voter, seule la convention fiscale s’appliquera.

C’est pour cela que le cas général prévoit un acompte de la part du salarié. Un salarié vivant en France, mais travaillant en Suisse pour un employeur suisse, devra verser un acompte, c’est une forme de mensualisation. Mais le cas très particulier soulevé par Claudine Schmid n’est pas traité dans le projet de loi qui nous est soumis, et ce seront toujours les dispositions de la convention fiscale qui l’emporteront sur la loi. Dans les conventions fiscales existantes, le prélèvement à la source n’était pas envisagé ; c’est pour cela que la solution de l’acompte a été retenue.

M. le président Gilles Carrez. Nous nous situons dans le cas très particulier de revenus de source française versés par un employeur situé à l’étranger. C’est là que le problème se pose.

Mme Claudine Schmid. D’après le texte, l’employeur devra prendre un représentant fiscal, dont le coût est de l’ordre de 4 %. Allez après cela leur demander d’investir en France…

Mme la Rapporteure générale. Claudine Schmid a raison : par analogie, le Gouvernement a souhaité mettre en place un prélèvement à la source puisque l’employeur acquitte déjà les cotisations sociales. Nous aurions aussi pu passer par l’acompte, ce qui aurait évité de verser les 4 % que vous mentionnez. Ce point doit être résolu.

La commission en vient à l’amendement II-CF 493 de la Rapporteure générale.

Mme la Rapporteure générale. Le code général des impôts punit le défaut de production dans les délais prescrits d’un document devant être remis à l’administration. Du coup, en l’état du texte et faute de précision sur ce point, si une personne oubliait de déclarer dans les soixante jours son mariage à l’administration fiscale, l’application des dispositions en vigueur conduirait à entraîner une amende de 150 euros majorable.

M. Jean-Marie Beffara. C’est le cadeau de mariage ! (Sourires.)

Mme la Rapporteure générale. C’est ce qui découle du droit existant. Je préfère inscrire dans la loi l’absence de sanction.

L’amendement II- CF 493 (amendement II-741) est adopté à l’unanimité.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements II-CF 279 et II-CF 321 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. On nous vend ce texte en nous disant que la contemporanéité permettra de moduler. Mais quand on examine les conditions de la modulation, il apparaît que le risque de sanction encouru par les contribuables est considérable. De ce fait, personne ne va moduler. Par conséquent, l’un des aspects positifs attendus de ce texte n’aura pas de traduction concrète.

Je vous propose donc, afin de rendre ce texte moins dramatique qu’il ne l’est dans sa rédaction actuelle, de faciliter la modulation. Il faut une sanction si la modulation est dénuée de fondement, mais cette sanction ne doit pas totalement décourager le contribuable d’utiliser cette faculté. Ces deux amendements répondent à cette logique.

Mme la Rapporteure générale. Je pourrais partager votre idée, mais je n’ai pas compris la rédaction de votre amendement : il faudrait préciser à quel montant s’applique le plafonnement de 20 % que vous proposez.

M. Marc Le Fur. Ce sont les 20 % de la différence.

Mme la Rapporteure générale. Dans ce cas il faut l’écrire ; vous pourriez déposer un nouvel amendement en séance pour préciser cet aspect. Je pense aussi qu’il faut un peu de souplesse, je partage donc l’idée de Marc Le Fur, mais la rédaction de ces amendements doit être précisée.

M. Marc Le Fur. Entendu, je retire donc ces deux amendements.

Les amendements sont retirés.

M. Charles de Courson. La sanction est-elle applicable aux entreprises qui gèrent la paie ? C’est devenu tellement compliqué que beaucoup de petites et moyennes entreprises recourent aux services d’une autre entreprise pour se charger de la paie. Comment ces prestataires auront accès au taux ? Et en cas d’erreur de leur part, est-ce que la responsabilité sera transférée à l’entreprise qui gère la paie ? Ces pratiques sont extrêmement développées. Certains m’ont dit que les entreprises qui gèrent la paie seraient susceptibles d’augmenter un peu le prix du service du fait de cette nouvelle complication.

Mme la Rapporteure générale. C’est une bonne question…

M. Marc Le Fur. La question va particulièrement se poser pour l’année de transition. Un certain nombre de revenus exceptionnels seront malgré tout imposés lors de cette année de transition, mais qui va décider si les revenus sont normaux ou exceptionnels ? Dans un premier temps, ce sera une décision de l’employeur : s’il accorde une prime à son employé, il devra décider s’il lui applique le taux de l’impôt. Si l’employeur n’applique pas le taux de l’impôt, considérant qu’il n’y a pas lieu de l’imposer car ce sont des revenus perçus pendant l’année de transition, mais que malgré tout, cette prime est considérée comme devant être imposée, qui sera responsable ? Le salarié ou l’employeur ? Le salarié n’aura rien fait, c’est l’employeur qui aura décidé si ces revenus sont des revenus exceptionnels ou non.

Il y a donc une difficulté majeure, en particulier pour l’année de transition. Cela va d’ailleurs occasionner des conflits entre les salariés et les employeurs, parce qu’en cas de problème, le salarié en imputera la responsabilité à son employeur.

M. Dominique Lefebvre. Marc Le Fur use et abuse de l’adjectif « majeur », il faudrait trouver autre chose !

Sur tous ces sujets, nous ne partons pas de rien, il existe aujourd’hui un certain nombre de dispositions. La question de Charles de Courson mérite d’être posée à l’administration fiscale, mais si l’on reprend bien l’ensemble du dispositif – vous avez lu comme moi, monsieur le président, l’ensemble du rapport d’évaluation –, les différentes responsabilités de l’administration, du contribuable et du tiers préleveur sont parfaitement déterminées. Les employeurs demandent déjà aujourd’hui à des tiers d’effectuer les prestations de fiche de paie, ils sont donc bien dans le circuit de la DSN. En droit, l’employeur ne peut pas se défausser de sa responsabilité sur le prestataire. Si le prestataire commet une erreur, le contrat qui le lie à l’entreprise règle ce type de problèmes. Nous allons nous en tenir à des solutions simples. Nous sommes obligés de prévoir ce type de mécanismes, ils existent déjà.

Sur la mensualisation, nous n’acceptons pas que chacun fasse comme il veut pour respecter le principe d’égalité, et aussi, plus prosaïquement, parce qu’il existe une problématique générale de trésorerie de l’État. Tout cela mérite d’être expliqué, mais l’administration fiscale est parfaitement consciente de ces problèmes. Elle maîtrise parfaitement ces questions de responsabilité, et celle des sanctions si l’on ne respecte pas les règles. Il faut se faire réexpliquer les choses, mais la DGFiP le fera parfaitement.

M. Charles de Courson. Le texte renvoie aux dispositions de droit commun. Mais la spécificité du prélèvement à la source, c’est que l’entreprise doit connaître le taux. Le problème est de savoir comment une entreprise qui a sous-traité la gestion de sa paie à des prestataires pourra accéder au taux.

M. Dominique Lefebvre. C’est bien le tiers qui fait aujourd’hui pour l’entreprise un certain nombre d’opérations, y compris de déclaration des salaires, qui va gérer la DSN pour son compte.

M. Charles de Courson. Mais qui va donner le taux au sous-traitant chargé de la paie ? L’employeur ?

M. Dominique Lefebvre. L’employeur, évidemment. Cette information suivra le circuit de la DSN. Il faut vérifier quel est le circuit de la DSN en cas de sous-traitance de la paie. Je pense que le taux sera adressé à l’employeur, qui le fera suivre à son prestataire. Si le prestataire commet une faute, c’est l’application des dispositions du contrat entre le prestataire et l’employeur qui en réglera les conséquences.

La commission est saisie de trois amendements identiques, II-CF 16 de M. Marc Le Fur, II-CF 352 de M. Joël Giraud et II-CF 386 de M. Charles de Courson.

M. Joël Giraud. Il s’agit simplement de supprimer la majoration applicable en cas de modulation excessive des acomptes pour les bénéfices agricoles, dans la mesure où ces bénéfices sont soumis à des fluctuations extrêmement importantes.

M. Charles de Courson. On ne peut pas reprocher à un agriculteur de s’être trompé dans l’estimation de son bénéfice.

Suivant l’avis défavorable de la Rapporteure générale, la commission rejette les amendements.

La commission examine l’amendement II-CF 280 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Il est défendu.

Suivant l’avis défavorable de la Rapporteure générale, la commission rejette l’amendement.

Elle en vient l’amendement II-CF 177 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Il s’agit d’un sujet important…

M. Dominique Lefebvre. Je préfère « important » à « majeur » ! Ça change !

M. Marc Le Fur. Il y a beaucoup de choses importantes dans ce texte, vous allez créer des mines de difficultés pour vos successeurs.

Nous voyons ce qui va se passer dans bon nombre d’entreprises : le DRH, le chef d’entreprise et d’autres personnes dans l’entreprise auront connaissance du taux de l’impôt. Cela ouvre la voie à des raisonnements du type : « Finalement, tu ne te débrouilles pas si mal, tu ne paies pas d’impôt, pourquoi augmenter ton salaire ? » Des discriminations vont apparaître, à tel point que le Gouvernement avait prévu de lutter contre ce type d’agissements dans son texte initial.

Bon soldat, je ne fais que reprendre la rédaction initiale du texte du Gouvernement. Évitons la possibilité de discriminations au détriment de personnes qui ne paient pas d’impôts, ou qui paient un impôt inférieur à celui généralement appliqué à leur tranche de salaire.

Prenons l’exemple très concret de personnes aux revenus moyens qui ne paient pas d’impôts parce qu’elles ont des charges, des enfants, etc., alors que leurs collègues paient un impôt. Cela va créer une difficulté. Finalement, le raisonnement peut consister à dire que si les revenus sont convenables et que le couple ne se débrouille pas trop mal, une augmentation de salaire peut attendre. Ce seront autant de difficultés concrètes dans nos entreprises, souvent au détriment des femmes, d’ailleurs.

Certes, il y a la possibilité offerte par le taux neutre, mais nous avons vu que le coût de son utilisation est très élevé. Il existe de multiples occasions pour lutter contre les discriminations, en particulier à l’égard des femmes ; je propose que nous en revenions au texte gouvernemental dans sa rédaction initiale.

Mme la Rapporteure générale. Ce dispositif faisait en effet partie de la mouture initiale – Marc Le Fur a l’œil – et a été retiré du projet.

Cet amendement tend en fait à inverser la charge de la preuve : ce serait à l’employeur de justifier que le salarié n’a pas subi de discrimination en raison d’un taux d’imposition anormalement bas.

Le Gouvernement estime que le droit existant suffit pour couvrir l’ensemble des situations qui pourraient survenir : un salarié qui se sentirait discriminé peut dénoncer son employeur. Nous avons auditionné l’Association nationale des directeurs de ressources humaines (ANDRH), et la possibilité que la connaissance du taux entraîne des discriminations a été évoquée. Un certain nombre de dispositifs existent dans le projet de loi sur la déontologie et les sanctions applicables à l’employeur.

Mme Karine Berger. Ce n’est pas une obligation !

Mme la Rapporteure générale. L’employeur est tenu à une obligation de confidentialité. Cela ne veut pas dire qu’un directeur ou un responsable d’équipe dispose de cette information : dans une grande entreprise, le responsable hiérarchique n’a pas d’information sur le taux d’imposition de ses subordonnés. La personne responsable du service de la paie et la personne responsable des ressources humaines ne sont pas censées le communiquer. Et dans ce cas, les sanctions prévues sont extrêmement lourdes.

Le droit existant et les sanctions pour ceux qui divulgueraient le taux appliqué à leurs salariés paraissent suffisants. Avis défavorable.

Mme Karine Berger. Je suis un peu étonnée de ces éléments de réponse.

Tout d’abord, il n’est absolument pas question d’inverser de la charge de la preuve dans cet amendement. Il n’est pas non plus question de divulgation d’informations.

La question est de savoir si la connaissance du taux d’imposition d’une personne peut modifier le comportement de son employeur lors de négociations salariales. Comme nous ne nous sommes jamais retrouvés dans cette situation jusqu’à présent, il me paraît important que la loi prévoie cette situation. Nous allons mettre en place un système nouveau, jusqu’à présent, l’employeur ne connaissait pas le taux marginal. Il est important de préciser que maintenant qu’il en aura connaissance, il ne peut pas se fonder dessus lors de négociations salariales.

La réponse du Gouvernement est importante, et je pense que la proposition de Dominique Lefebvre est la bonne : ne nous prononçons pas tout de suite, attendons d’avoir beaucoup plus d’éléments lors du débat dans l’hémicycle. On ne peut se contenter du droit existant.

M. Dominique Lefebvre. Que les choses soient claires : nous sommes prêts à soutenir cet amendement s’il apparaît que dans l’état du droit, ce cas de figure est exclu des motifs de contestation d’une discrimination.

J’ai bien entendu la Rapporteure générale et Karine Berger. Effectivement, ce cas n’existait pas jusqu’à présent. Tout dépend de la rédaction actuelle. Je vous propose de redéposer cet amendement en séance, et de nous prononcer en fonction de la réponse du Gouvernement. Si le droit actuel est trop flou, nous voterons cet amendement, mais à cette heure, nous n’avons pas les éléments. Il sera également intéressant d’entendre le ministre nous détailler les raisons pour lesquelles, dans le texte transmis aux parlementaires après le passage devant le Conseil d’État, cette disposition a été retirée.

Nous devons y voir plus clair, mais je prends ici l’engagement qu’en fonction de la réponse du Gouvernement, si nous estimons qu’il y a une incertitude, nous voterons cet amendement.

Mme la Rapporteure générale. Il y a bien une inversion de la charge de la preuve. L’article 4 de la loi du 27 mai 2008 dispose : « Toute personne qui s’estime victime d’une discrimination directe ou indirecte présente devant la juridiction compétente les faits qui permettent d’en présumer l’existence. Au vu de ces éléments, il appartient à la partie défenderesse » – c’est-à-dire l’entreprise – « de prouver que la mesure en cause est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. »

L’amendement de Marc Le Fur renvoie à cet article, il y a donc bien une inversion de la charge de la preuve.

Cette question avait déjà été abordée par notre commission en septembre ; les débats en séance seront très utiles.

M. Marc Le Fur. Je suis là pour aider… Mais je doute tout de même de la confidentialité sur le fond. Aujourd’hui, un dossier fiscal concerne un foyer fiscal et les services fiscaux. Les consultations des dossiers fiscaux dans les services publics sont parfaitement traçables.

Il ne faut pas se faire d’illusions, le taux de l’impôt sera connu des DRH, de l’ensemble du service, d’un certain nombre de prestataires extérieurs qui sont dans la chaîne de paiement des salaires. De fait, il sera diffusé et sera pris en compte dans la négociation – Karine Berger parlait de négociations après impôt –, y compris pour ceux qui ne paient pas l’impôt alors qu’ils ont parfois des revenus moyens.

Je suis en tout cas d’accord pour faciliter notre travail commun, je retire cet amendement.

L’amendement est retiré.

La commission en vient aux amendements identiques II-CF 213 de M. Lionel Tardy, II-CF 281 de M. Marc Le Fur et II-CF 358 de Mme Marie-Christine Dalloz.

M. Lionel Tardy. Cet amendement de repli a pour objet de reporter d’un an la mise en place du prélèvement à la source, notamment pour éviter la concomitance avec l’introduction de la DSN. À ce jour, seulement 520 000 des 1,6 million d’entreprises qui emploient des salariés l’ont mise en place. Des difficultés sont apparues dans l’application de ce dispositif lors des premiers tests. Il se pourrait que cela se reproduise au 1er janvier 2017.

Dans tous les cas, toutes les TPE ne seront pas prêtes au 1er janvier 2018. Ajouter à cela le prélèvement à la source n’est pas réaliste.

M. Marc Le Fur. Nous sommes dans une situation aberrante : on nous assure que tout sera facile grâce à la DSN, or celle-ci n’est pas généralisée, en particulier dans les petites entreprises. La difficulté sera considérable dans ces dernières, car les rapports entre les salariés et le patron n’y sont pas les mêmes. En voulant l’appliquer à toute de force, nous faisons des acrobaties. Par exemple, nous avons déjà voté des dispositions spécifiques pour les élus locaux, qui ne sont pas vraiment comprises. Nous avons également voté des dispositions pour les personnes travaillant à domicile. Tout cela mérite un peu plus de réflexion, c’est pourquoi il faut décaler d’une année l’application de cette réforme. Ce serait un mauvais cadeau de la majorité à ses successeurs dans cette ultime loi de finances.

Mme Marie-Christine Dalloz. Cette réforme n’a rien de structurel, c’est une réforme technique : un mode de prélèvement différent de la fiscalité. Elle ne change rien sur le fond. Les débats de ce matin, les différentes propositions et les réponses apportées, attestent de la difficulté qu’éprouveront nos concitoyens à comprendre le nouveau mode de prélèvement de l’impôt sur le revenu.

Pour toutes ces raisons, dans la mesure où un travail d’explication sera nécessaire auprès des contribuables, il me semble essentiel de reporter d’un an la mise en œuvre de ce prélèvement à la source.

C’est ce que l’on appelle un amendement de repli…

Suivant l’avis défavorable de la Rapporteure générale, la commission rejette les amendements.

La commission examine l’amendement II-CF 437 de Mme Catherine Coutelle.

Mme Karine Berger. Nous l’avons vu, la loi permet de moduler le taux au sein du couple en fonction du salaire de chacun, et c’est essentiel. Il n’est pas question de remettre en cause le mécanisme de calcul de l’impôt, qui reste familial et conjugal, mais nous proposons que, dans sa communication, le Gouvernement insiste sur cette possibilité nouvelle que le dispositif du prélèvement à la source offre aux couples.

Mme la Rapporteure générale. Avis favorable.

M. Dominique Lefebvre. Je rappelle à ceux qui n’auraient pas lu l’évaluation préalable que, selon les simulations, le taux qui résulterait de cette individualisation en fonction du revenu est identique au taux conjugalisé dans 80 % des cas, ce qui s’explique par la sociologie : la plupart du temps, les revenus des deux membres du couple sont comparables.

M. le président Gilles Carrez. Et, dans 90 % des cas, le taux est inférieur à 10 % !

M. Dominique Lefebvre. Reste qu’il peut exister des écarts. Il est donc important d’informer les contribuables que ce système, qui est bien fait, existe. Le groupe Socialiste, écologiste et républicain soutient par conséquent cet amendement.

M. Marc Le Fur. L’individualisation nuit à la confidentialité. Imaginons une dame dont le revenu est modeste : on en déduira immédiatement que son conjoint a des revenus importants.

La commission adopte l’amendement II-CF 437 (amendement II-742).

Elle est alors saisie de l’amendement II-CF 150 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Nous abordons la série de dispositions relatives à l’année transitoire, pendant laquelle les revenus ne sont pas imposés, sauf lorsqu’ils sont exceptionnels. Cela se conçoit parfaitement : il s’agit d’éviter l’optimisation fiscale. Il ne faudrait pas que, pour échapper à l’impôt, des personnes qui décident de leurs propres revenus ne les majorent pendant cette année « blanche ».

Reste à définir les revenus exceptionnels. Or la liste qui nous est proposée me paraît particulièrement redoutable. Je lui préférerais un autre dispositif, qui existe dans notre droit, et comporte un élément objectif : la référence à la moyenne des revenus des trois années précédentes. Si des revenus, quelle qu’en soit la nature, sont supérieurs à cette moyenne triennale, on peut les considérer comme exceptionnels. Sinon, il n’y a aucune raison d’embêter le contribuable.

Cette solution serait plus simple, plus opérationnelle, mais aussi moins pénalisante. Car lorsque nous allons examiner chacune des situations, vous allez voir que, dans la rédaction actuelle, on impose l’indemnité de celui qui perd son emploi, la prime de départ de l’employé en contrat à durée déterminée (CDD), les heures supplémentaires, certaines primes, les revenus des VRP qui font leur résultat, etc.

Mme la Rapporteure générale. Deux philosophies s’opposent ici : celle du texte et celle que vient de défendre Marc Le Fur. Tout le monde s’accorde à dire qu’il faut éviter l’optimisation et que les revenus exceptionnels de 2017 doivent se voir appliquer l’impôt sur le revenu. La question est de savoir ce que l’on appelle revenu exceptionnel. Le projet de loi en dresse une liste précise et très détaillée.

M. le président Gilles Carrez. Qui se termine par « … tout autre revenu qui, par sa nature, n’est pas susceptible d’être recueilli annuellement » !

Mme la Rapporteure générale. Cette liste est longue et précise.

M. Marc Le Fur. Mais pas limitative !

Mme la Rapporteure générale. Vous proposez, monsieur Le Fur, de renvoyer à la définition suivante : « un revenu qui par sa nature n’est pas susceptible d’être recueilli annuellement ». Cela ouvre la voie à une grande insécurité juridique pour les contribuables.

Je suggère donc que nous en restions à la version du Gouvernement, quitte à amender au besoin la liste des revenus qui y sont considérés comme exceptionnels. Ainsi, je proposerai dans mon amendement II-CF 490 que les primes de précarité des CDD en soient exclues.

M. Dominique Lefebvre. Je soutiens la Rapporteure générale.

Le texte soulevait deux questions d’ordre constitutionnel : le risque d’insécurité juridique et le risque d’inégalité. Il a été soumis au Conseil d’État, dont je ne doute pas que le Gouvernement ait suivi les préconisations dans sa rédaction.

M. Marc Le Fur. C’est juste parce que cela vient du Gouvernement, en somme !

M. Dominique Lefebvre. Nous n’allons donc pas adopter des amendements qui créent de l’insécurité juridique ou des inégalités manifestes.

En revanche, quelques points du texte peuvent être précisés.

On sait que quelques tribunaux vont être encombrés pendant trois ou quatre ans par quelques contentieux fiscaux formés par des contribuables qui s’estimeront lésés. Mais notre mission, comme législateur, est de définir le cadre le plus clair et le plus juste possible.

M. Marc Le Fur. Si la série d’alinéas ouverte par l’alinéa 277 constituait une liste exhaustive, nous pourrions débattre de chacun de ses éléments. Mais ce n’est pas le cas, puisque l’alinéa 288 mentionne « des gratifications surérogatoires, quelle que soit la dénomination retenue par l’employeur ». Voilà qui va faire découvrir aux Français un nouvel adjectif, « surérogatoire », dont personne ne connaît la définition et qui n’a d’ailleurs à ce jour aucune définition fiscale, bref un adjectif fourre-tout.

C’est pourquoi je vous propose un autre critère, objectif celui-là : le fait qu’un revenu se distingue de ceux des années précédentes, lesquels sont connus des services fiscaux et des particuliers.

À défaut, nous nous préparons de grandes difficultés. Même si nous les atténuons par des amendements à la marge, madame la Rapporteure générale, ce ne sera qu’un emplâtre sur une jambe de bois. Le texte accorde ici à l’administration fiscale un pouvoir totalement discrétionnaire.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement II-CF 31 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Étonnamment, le texte classe parmi les revenus exceptionnels les indemnités versées à l’occasion de la rupture du contrat de travail. En d’autres termes, on considère que le chômeur a décidé de son propre licenciement ! On peut comprendre que le revenu soit considéré comme exceptionnel, donc imposé, lorsqu’il résulte d’une décision du contribuable. Mais ici, ce n’est pas le cas. Voici à quoi aboutit votre texte, mes chers collègues de gauche : les gens qui sont licenciés, avec une petite indemnité de départ, et que vous prétendez défendre, vont être soumis à l’impôt alors que, la même année, un cadre qui touche 10 000 ou 20 000 euros par mois ne le sera pas ! Comment allez-vous l’expliquer à nos compatriotes ? Ce texte est non seulement très complexe, mais aussi très injuste.

Mme la Rapporteure générale. D’abord, les indemnités de licenciement sont exonérées d’impôt sur le revenu, jusqu’à un plafond correspondant au plus élevé de ces deux montants : le montant de l’indemnité légale ou conventionnelle, ou 50 % du montant de l’indemnité totale. C’est seulement la partie au-dessus qui est prise en compte.

Ensuite, votre amendement est bien plus large que ce que vous venez de dire. La rupture conventionnelle peut être à l’initiative du salarié.

M. Marc Le Fur. Ce n’est pas lui qui décide du montant de l’indemnité.

Mme la Rapporteure générale. Il existe aussi une indemnité de départ volontaire, par exemple dans certains grands groupes.

M. Marc Le Fur. On sait ce qu’il en est du volontariat en pareil cas…

Mme la Rapporteure générale. Je suis donc défavorable à cet amendement, mais je serai plutôt favorable à votre amendement II-CF 151, plus précis.

M. Marc Le Fur. C’est un amendement de repli.

Mme la Rapporteure générale. Vous aviez fait un gros package…

M. Marc Le Fur. Madame la Rapporteure générale, il est vrai qu’une partie de l’indemnité de licenciement n’est pas imposable, mais cela résulte des conventions collectives, lesquelles sont plus ou moins favorables. Dans certains cas, l’indemnité est très vite imposable. C’est un problème de fond.

Quant aux départs conventionnels, ils ne sont jamais aussi volontaires qu’ils en ont l’air. La gauche nous le dit encore de temps en temps… En tout état de cause, ils ne résultent pas de la décision d’une seule personne. Voilà pourquoi les indemnités de rupture conventionnelle devraient être exclues de la liste.

Aux termes de mon amendement de repli II-CF 151, l’indemnité versée à l’occasion d’un licenciement économique ne peut être considérée comme un revenu exceptionnel imposable au titre de l’année « blanche ».

M. Charles de Courson. Pourquoi le texte parle-t-il « des indemnités versées à l’occasion de la rupture du contrat de travail » et non de la part de ces indemnités qui dépassent le montant fixé par la convention collective, puisqu’en droit fiscal, comme l’a rappelé à juste titre la Rapporteure générale, seule cette fraction est imposable ? Ce passage est très mal rédigé.

En outre, le droit fiscal permet d’étaler dans le temps le versement de ces indemnités. Mais comment le dispositif s’articule-t-il au système du quotient ?

Mme la Rapporteure générale. Celui-ci restera applicable.

M. Charles de Courson. Donc acte, mais tout cela est très mal rédigé…

La commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements II-CF 490 de la Rapporteure générale et II-CF 154 de M. Marc Le Fur.

Mme la Rapporteure générale. L’amendement II-CF 490 tend à exclure de la liste des revenus exceptionnels les indemnités de fin de CDD et de fin de mission d’intérim.

M. Marc Le Fur. L’amendement II-CF 154 est défendu.

La commission adopte l’amendement II-CF 490 (amendement II-743).

En conséquence, l’amendement II-CF 154 tombe.

La commission en vient à l’amendement II-CF 151 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Cet amendement a été défendu. J’ai bien pris note tout à l’heure de l’avis favorable de Mme la Rapporteure générale.

Suivant l’avis favorable de la Rapporteure générale, la commission adopte l’amendement II-CF 151 (amendement II-744).

Elle aborde ensuite l’amendement II-CF 152 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Il s’agit du traitement des indemnités liées à une rupture conventionnelle. Nous venons d’en parler.

Suivant l’avis défavorable de la Rapporteure générale, la commission rejette l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement II-CF 153 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Cet amendement concerne les indemnités de départ à la retraite, qui, elles non plus, ne résultent pas de la décision du seul contribuable qui fait valoir ses droits à la retraite.

M. Charles de Courson. C’est pourtant un choix !

Mme la Rapporteure générale. Il existe déjà des exonérations. L’indemnité de départ volontaire à la retraite est exonérée en deçà du plus élevé des deux montants suivants : soit le minimum légal ou conventionnel, soit 50 % de l’indemnité totale ou le double de la rémunération annuelle brute de l’année civile précédente, sans excéder six fois le montant annuel du plafond de la sécurité sociale, soit 231 696 euros pour 2016.

Avis défavorable.

M. Jean-Louis Gagnaire. Nos collègues ne cessent de parler d’égalité entre les régimes de retraite du public et du privé, oubliant que 95 % des fonctionnaires ne touchent aucune indemnité de départ à la retraite !

M. Charles de Courson. Mais cette indemnité existe aussi dans la fonction publique.

M. le président Gilles Carrez. C’est un autre débat.

La commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement II-CF 155 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Cet amendement concerne les indemnités correspondant aux congés payés non pris par le salarié. Le cas est assez fréquent. Des congés acquis en 2016 et non pris pourront donc donner lieu à des versements en 2017 : je n’imagine pas que les personnes concernées puissent être imposées sur ces revenus alors – je le répète – qu’un cadre supérieur à 20 000 euros par mois ne paiera pas d’impôt au titre de l’année 2017 !

Mme la Rapporteure générale. Ces questions méritent d’être posées. Tout dépend du moment auquel le salarié décide de solder son compte…

M. Marc Le Fur. Il n’a pas le choix !

Mme la Rapporteure générale. Il peut décider de prendre un congé sabbatique et solder alors son compte épargne temps (CET).

M. Marc Le Fur. Mon amendement porte sur les congés payés classiques.

Mme la Rapporteure générale. L’indemnité dont vous parlez est donc associée à la rupture du contrat de travail.

M. Marc Le Fur. Non.

Mme la Rapporteure générale. De deux choses l’une : soit le salarié solde son CET, soit il s’agit des congés payés restants au moment de la rupture du contrat de travail.

M. Marc Le Fur. Je rédigerai deux amendements pour distinguer les deux cas de figure. Mais, dans l’hypothèse d’une rupture du contrat de travail, l’indemnité compensatrice de congés payés doit être exclue des revenus exceptionnels. Un contrat rompu en février 2017 donnera lieu à un versement correspondant à des congés acquis en 2016 : le salarié ne doit évidemment pas payer l’impôt sur ces revenus en 2017 !

Mme la Rapporteure générale. Dans cette hypothèse, si le salarié n’avait pas pris ses congés, il aurait de toute façon été imposé à ce titre en 2016.

L’amendement est retiré.

La commission aborde l’amendement II-CF 494 de la Rapporteure générale.

Mme la Rapporteure générale. Cet amendement tend à inclure les golden hellos dans les revenus exceptionnels.

La commission adopte l’amendement (amendement II-745).

Elle en vient alors à l’amendement II-CF 32 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Certains salariés bénéficient d’indemnités, allocations et primes destinées à les dédommager d’un changement de résidence ou de lieu de travail. On ne saurait imposer les indemnités compensatrices d’un déménagement effectué à la demande de l’entreprise : cela reviendrait à pénaliser un salarié qui a le mérite d’accepter la mobilité voulue par l’employeur.

M. le président Gilles Carrez. Mais un salarié qui déménagera le 31 décembre 2016 paiera l’impôt sur cette indemnité alors que, aux termes de votre amendement, celui qui déménagerait le 1er janvier 2017 en serait exonéré !

M. Marc Le Fur. Dois-je rappeler qu’un salarié qui aura gagné 20 000 euros par mois en 2017 ne sera pas imposé sur ce revenu ?

M. le président Gilles Carrez. On a bien compris…

Mme la Rapporteure générale. Amendement excellemment expliqué par le président de la commission… Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

La commission est saisie de l’amendement II-CF 175 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Défendu.

Suivant l’avis défavorable de la Rapporteure générale, la commission rejette l’amendement.

Elle aborde alors l’amendement II-CF 176 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Il s’agit ici des indemnités servies en cas de conversion, de réinsertion ou de reprise d’une activité professionnelle. On va les soumettre à l’impôt alors que l’on prétend encourager ce type de démarche ! Mon amendement II-CF 176, comme les autres de cette série, montre les errements de cette réforme. Faut-il encore rappeler que des salaires très élevés ne seront pas, eux, imposés en 2017 ?

Suivant l’avis défavorable de la Rapporteure générale, la commission rejette l’amendement.

M. Marc Le Fur. Les petits paieront !

M. Charles de Courson. Comme toujours !

La commission en vient à l’amendement II-CF 29 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Ici, c’est le gaulliste qui parle : favorables à la participation et à l’intéressement, nous ne souhaitons pas que les sommes versées à ce titre soient considérées comme des revenus exceptionnels, donc imposées en 2017 alors que des salaires très élevés ne le seront pas.

Suivant l’avis défavorable de la Rapporteure générale, la commission rejette l’amendement.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements II-CF 33 et II-CF 173 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Ces amendements traitement des sommes correspondant aux droits inscrits sur un CET, que les salariés ont accumulés faute de pouvoir prendre leurs congés, et qu’ils soldent généralement lorsque l’activité de l’entreprise le permet, à l’occasion d’un départ à la retraite, etc. Le Gouvernement propose d’imposer ce crédit comme revenu exceptionnel alors même qu’il n’est pas lié à l’année 2017 mais résulte des années antérieures. Une fois de plus, vous allez imposer des gens modestes alors que vous épargnez fiscalement des personnes qui gagnent très bien leur vie.

Mme la Rapporteure générale. Il est exact que le crédit qui sera porté au CET aura été généré en 2016.

Mais, pour éviter tout effet d’aubaine, je vous propose, plutôt que de supprimer l’alinéa 287 comme le fait votre amendement II-CF 33, de rectifier votre amendement II-CF 173 en précisant que les sommes correspondantes ne sont considérées comme revenu exceptionnel qu’au-delà d’un plafond de dix jours par an. Sinon, les salariés pourraient être tentés de solder la totalité de leur CET en 2017 afin de ne payer aucun impôt sur ces revenus.

M. Marc Le Fur. Et ceux qui partent à la retraite et soldent plusieurs années d’épargne temps ?

Mme la Rapporteure générale. Ils auraient été imposés sur ces revenus s’ils avaient soldé leur compte en 2016 !

M. le président Gilles Carrez. Exactement !

M. Marc Le Fur. Je ne comprends pas votre raisonnement : le salarié qui ne paiera pas d’impôt sur le revenu perçu en 2017 aurait lui aussi été imposé dans l’ancien système.

Mme la Rapporteure générale. C’est moi qui ne comprends pas le vôtre : si un salarié solde son CET en 2016, il paiera l’impôt sur le revenu. Vous souhaitez que celui qui le solde en 2017 en soit exonéré, alors que ces jours ont été acquis bien avant 2017. À titre de compromis, nous vous proposons d’appliquer un plafond.

M. Dominique Lefebvre. L’enjeu, au départ, est d’instaurer un « crédit d’impôt modernisation du recouvrement » (CIMR) pour éviter aux ménages d’être doublement imposés en 2018 : sur leurs revenus de 2017 et sur ceux de 2018. Cela ne doit pas pour autant nous conduire à exonérer entièrement d’impôt des revenus qui normalement auraient été taxés. Dans cette logique, on comprend que les revenus dont nous parlons soient considérés comme exceptionnels. Pour certains d’entre eux, nous sommes d’accord avec vous, monsieur Le Fur, et nous votons en conséquence. Mais nous ne devons pas oublier l’objectif : éviter les surimpositions.

M. le président Gilles Carrez. L’amendement II-CF 173 rectifié tend à compléter l’alinéa 287 par les mots : « , pour celles correspondant à des droits excédant une durée de dix jours ; ».

L’amendement II-CF 33 est retiré.

Puis la commission adopte l’amendement II-CF 173 ainsi rectifié (amendement II-746).

La commission examine alors, en discussion commune, les amendements II-CF 28, II-CF 156 et II-CF 30 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Nous en arrivons au fameux adjectif « surérogatoire », que la France va découvrir grâce à ce texte ! À la liste des revenus exceptionnels, le texte du Gouvernement ajoute en effet les « gratifications surérogatoires, quelle que soit la dénomination retenue par l’employeur ». Si l’on peut comprendre que le législateur établisse une liste, et débattre de sa nature, on ne saurait laisser une telle liberté d’interprétation à l’administration fiscale, qui pourra utiliser cet adjectif pour y mettre à peu près tout ce qu’elle veut. Et l’on devine les difficultés qui vont en résulter pour les employeurs : comment sauront-ils lesquelles des primes versées en 2017 sont surérogatoires ? Comment qualifier celle qu’ils versent d’habitude, mais peut-être un peu plus cette année-là ?

Tel est le sens de mon amendement II-CF 28.

Mme la Rapporteure générale. Monsieur Le Fur, n’est-il pas un peu contradictoire de se plaindre – sans doute à bon droit, ici – d’un manque de précision après avoir défendu tout à l’heure un amendement tendant à supprimer toute espèce de liste pour lui substituer la simple référence à « un revenu qui par sa nature n’est pas susceptible d’être recueilli annuellement » ?

Je vous avoue que j’ai moi-même découvert à cette occasion l’adjectif « surérogatoire ». Il sert à désigner une prime qui n’est prévue ni par le contrat de travail, ni par la convention collective, ni par quelque texte que ce soit.

Votre amendement n’est pas assez précis. Avis défavorable.

M. Marc Le Fur. Les amendements II-CF 156 et II-CF 30 sont des amendements de repli, qui tendent à limiter le champ des versements surérogatoires. L’amendement II-CF 30 précise que sont visés ceux de ces versements « dont le montant versé au titre de l’année 2017 est supérieur de 10 % au montant des mêmes gratifications versées au titre de l’année 2016 ».

Mme la Rapporteure générale. Mais vous ne définissez toujours pas les primes surérogatoires ; vous vous contentez de fixer un plafond en deçà duquel elles seraient exonérées. Tout cela doit être repris en vue de la séance.

La commission rejette successivement les amendements en discussion commune.

Puis elle aborde l’amendement II-CF 157 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Défendu.

Suivant l’avis défavorable de la Rapporteure générale, la commission rejette l’amendement.

Elle examine alors l’amendement II-CF 159 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Par définition, les droits d’auteur, très irréguliers, ne sont pas susceptibles d’être recueillis annuellement. Ils ne devraient pourtant pas être imposés au titre de 2017. Imaginons un auteur qui n’a pas grand succès, hormis une année où il touche de gros revenus. Manque de chance, cela tombe en 2017 !

Mme la Rapporteure générale. Il est possible d’échelonner leur versement sur plusieurs exercices. Mais quand on les déclare soi-même, c’est au titre des bénéfices non commerciaux, alors que votre amendement les prend en compte dans le cadre des salaires et pensions. Avis défavorable.

M. Charles de Courson. L’alinéa 290 – « de tout autre revenu qui, par sa nature, n’est pas susceptible d’être recueilli annuellement » – est inintelligible !

M. le président Gilles Carrez. Son interprétation est discrétionnaire. Nous en avons déjà parlé en abordant le texte.

M. Charles de Courson. Je déposerai un amendement de suppression. Cet alinéa n’est pas sauvable…

La commission rejette l’amendement.

Elle en vient ensuite à l’amendement II-CF 158 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Les employeurs vont être confrontés à de multiples difficultés en 2017. Comment sauront-ils si la rémunération qu’ils versent est exceptionnelle, donc imposable, ou de droit commun ? Les employeurs, qui sont en première ligne dans cette affaire, devraient pouvoir demander à l’administration fiscale de préciser sa position par un rescrit.

Suivant l’avis favorable de la Rapporteure générale, la commission adopte l’amendement II-CF 158 (amendement II-747).

Elle examine alors, en discussion commune, les amendements II-CF 160 de M. Marc Le Fur, II-CF 355 de M. Charles de Courson, II-CF 84 et II-CF 85 de M. Marc Le Fur, II-CF 178 de Mme Claudine Schmid et II-CF 86 de M. Marc Le Fur.

M. Charles de Courson. La mise en place de la retenue à la source va entraîner une instabilité fiscale concernant la déductibilité des travaux de réparation et d’amélioration des immeubles en 2017. Cette situation risque de conduire les propriétaires bailleurs à différer à 2019 toutes les réparations non indispensables, ce qui gèlera toutes les réparations lourdes en 2017 comme en 2018, au détriment de l’emploi dans ce secteur.

C’est pourquoi, nous proposons par l’amendement II-CF 355 que la déduction fiscale des travaux effectués en 2017 puisse être reportée sur l’année suivante, en 2018.

Mme Claudine Schmid. Les dépenses résultant des travaux liés au changement d’occupant devraient être déductibles au même titre que les dépenses afférentes à des travaux d’urgence, car la remise en état ou le rafraîchissement d’un bien entre deux locataires n’est généralement pas reportable.

Tel est le sens de l’amendement II-CF 178.

M. Marc Le Fur. Je redoute un véritable krach dans le secteur du bâtiment en 2017 et en 2018. Aujourd’hui, un bailleur peut déduire de ses revenus fonciers la totalité des dépenses pour travaux. En 2017 comme en 2018, il ne pourra en déduire que 50 %. Cela revient au même du point de vue de l’administration, la déduction étant de deux fois 50 % pour une année. Mais le bailleur, lui, sera incité à reporter à 2019 tout ce qui peut l’être. Nous risquons de provoquer une crise sérieuse dans le bâtiment : les travaux réalisés dans les immeubles loués sont importants pour nos artisans. D’où mes amendements II-CF 84, II-CF 85 et II-CF 86.

Mme la Rapporteure générale. J’y ai fait référence : on évalue à 400 millions d’euros le montant total des dépenses pour travaux déduites des revenus fonciers. Le Gouvernement a choisi de répartir ce montant par moitié sur les deux années 2017 et 2018. Mais vous avez raison : certains propriétaires vont être tentés de reporter les travaux.

Je propose que nous en discutions avec le Gouvernement dans l’hémicycle. C’est une question à 200 millions d’euros !

M. Marc Le Fur. Et quelques milliers d’emplois…

Mme la Rapporteure générale. Je ne sous-estime pas cet enjeu, monsieur Le Fur, d’où ma réponse.

M. Charles de Courson. Dire que c’est une question à 200 millions est typique d’un raisonnement que je qualifierai de primitif. Le montant en jeu est bien supérieur, car la très forte chute des travaux de réparation et d’entretien va coûter cher en TVA, en cotisations sociales, etc. Notre amendement II-CF 355 ne va pas coûter, mais bien rapporter !

Mme la Rapporteure générale. Sagesse sur l’amendement II-CF 355. Avis défavorable aux autres amendements.

M. Dominique Lefebvre. Je voudrais lever toute ambiguïté : il n’y a aucune divergence entre nous quant aux objectifs. Nous partageons le même souci. Ces amendements devraient être redéposés en vue de la séance pour que nous puissions en discuter avec le Gouvernement dans l’hémicycle. Le débat est légitime : le problème que vous soulevez est précisément celui que les dispositions prévues, telles qu’elles sont expliquées dans le rapport d’évaluation préalable, visent à résoudre. Y parviennent-elles ? La discussion avec le ministre sera éclairante à cet égard.

La commission rejette successivement ces amendements.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements II-CF 349, II-CF 174, II-CF 353 et II-CF 350 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Ces amendements sont défendus.

Mme la Rapporteure générale. Avis défavorable à ces quatre amendements.

La commission rejette successivement ces amendements.

Puis elle adopte l’article 38 modifié.

M. le président Gilles Carrez. Mes chers collègues, avant de suspendre nos travaux, nous allons examiner quatre des amendements portant articles additionnels après l’article 38, mais qui eux aussi touchent au prélèvement à la source.

Après l’article 38

La commission se saisit des amendements identiques II-CF 17 de M. Marc Le Fur et II-CF 388 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. À l’heure actuelle, les jeunes agriculteurs bénéficient d’un abattement de 50 % sur les bénéfices qu’ils réalisent au cours de leurs soixante premiers mois d’activité. Cet abattement est porté à 100 % au titre de l’exercice en cours à la date d’inscription dans leur comptabilité de la dotation d’installation aux jeunes agriculteurs.

La mise en place du crédit d’impôt modernisation du recouvrement va conduire à la priver d’une année d’abattement puisque tous les contribuables bénéficieront de ce crédit d’impôt « effaçant » l’impôt de 2017.

Afin que l’instauration du prélèvement à la source ne porte pas préjudice aux jeunes agriculteurs, mon amendement II-CF 388 propose de permettre à ces exploitants de renoncer à leur abattement pour l’année 2017, et de proroger de douze mois la période initiale de soixante mois.

M. Marc Le Fur. L’amendement II-CF 17 est identique.

Mme la Rapporteure générale. Je ne vois pas en quoi ces amendements avantagent les jeunes agriculteurs.

M. Charles de Courson. Quand la période de soixante mois, c’est-à-dire cinq ans, couvre l’année 2017, nous proposons de la prolonger d’un an.

Mme la Rapporteure générale. Mais si l’abattement ne s’applique pas en 2017, cela accroît le bénéfice, de sorte que les acomptes versés en 2018 et 2019, assis notamment sur le bénéfice 2017, seront plus élevés. En outre, le crédit d’impôt modernisation du recouvrement annule l’impôt, là où l’abattement le réduit : le bénéfice 2017 sera plus élevé sans abattement.

M. le président Gilles Carrez. Mieux vaut alors retirer les amendements pour les réécrire.

Les amendements identiques sont retirés.

La commission examine enfin les amendements identiques II-CF 18 de M. Marc Le Fur et II-CF 369 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Encore une histoire de fous… Les déficits agricoles sont en principe déductibles du revenu global de l’exploitant au titre de leur année de constatation et des six années suivantes.

Néanmoins, les exploitants dont la somme de toutes les catégories de revenus hors bénéfices agricoles excède un certain seuil, fixé à 107 000 euros en 2015, ne peuvent imputer leurs déficits agricoles que sur les bénéfices agricoles des six années suivantes, et non pas sur leur revenu global.

Le projet de prélèvement à la source proposé par le Gouvernement prévoit de compenser le ressaut d’impôt lié à la taxation des deux années de revenus 2017 et 2018 sur la même année, à travers la création d’un crédit d’impôt modernisation du recouvrement d’un montant égal à l’impôt dû sur les revenus courants attribués en 2017, qui viendrait s’imputer sur l’impôt sur le revenu globalement dû en 2018.

L’assiette du crédit d’impôt correspondant à la somme des revenus courants attribués ou perçus en 2017 après déduction des déficits reportables, l’imputation de déficits antérieurs aurait ainsi pour effet de diminuer le montant du crédit d’impôt sans pour autant diminuer le montant de l’impôt 2018.

Tel est l’objet de l’amendement II-CF 369.

M. Marc Le Fur. L’amendement II-CF 18 est identique.

Mme la Rapporteure générale. Avis défavorable, pour les mêmes raisons que précédemment.

La commission rejette les amendements identiques.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

ÉCHANGE DE VUES ET TABLE RONDE AVEC M. FRANÇOIS-XAVIER FERRUCCI, SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DE SOLIDAIRES FINANCES PUBLIQUES ET M. ALEXANDRE DERIGNY, SECRÉTAIRE GÉNÉRAL ADJOINT DE LA CGT FINANCES

Lors de la séance de la commission du 20 septembre 2016, les membres de la commission ont procédé à un échange de vues sur l’avant-projet de texte transmis par le Gouvernement et relatif à la modernisation du recouvrement de l’impôt sur le revenu par la mise en place du prélèvement à la source.

M. le président Gilles Carrez. En accord avec Mme la Rapporteure générale, j’ai pris l’initiative d’organiser quelques auditions et échanges de vues entre nous sur la question du prélèvement à la source. Nous avons reçu un avant-projet de texte le 3 ou le 4 septembre dernier, qui comporte trente-deux pages. Son exposé des motifs est assez clair. L’essentiel du dispositif sera inscrit en seconde partie du projet de loi de finances, même si certaines mesures seront introduites dans sa première partie. Afin de gagner un peu de temps avant l’audition des ministres, mercredi prochain, il a semblé utile de procéder dès aujourd’hui à l’audition des syndicats de la direction générale des finances publiques (DGFiP) et, demain matin, à celle des futurs « collecteurs » que sont les entreprises – Mouvement des entreprises de France (MEDEF) et Confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME). La semaine prochaine, mardi après-midi, nous rencontrerons l’administration fiscale, c’est-à-dire M. Bruno Parent, le directeur général des finances publiques, et Mme Véronique Bied-Charreton, la directrice de la législation fiscale, qui seront accompagnés de toutes leurs équipes.

Mme la Rapporteure générale procède elle-même à une série d’auditions dont elle nous fournira la liste. Avant que nous ne recevions les syndicats, il nous a paru utile d’avoir une discussion libre entre nous sur la base de l’avant-projet que j’invite Mme la Rapporteure générale à nous présenter.

Mme Valérie Rabault, Rapporteure générale. Je me contenterai cet après-midi de dresser quelques grandes lignes et de vous proposer quelques exemples qui nous permettront de nous rendre compte des effets de la réforme. Je répondrai évidemment à vos questions, et l’audition des ministres, la semaine prochaine, permettra de traiter celles qui se poseraient encore. Après vous avoir proposé un mode d’emploi de la réforme, je m’interrogerai sur l’année « blanche » – je ne sais si le nom est bien choisi –, c’est-à-dire sur la période de transition qui aura lieu en 2017-2018, avant d’en venir aux questions qui restent en suspens et sur lesquelles nous attendons des éclairages de la part du Gouvernement.

La réforme obéit à un principe général : aligner en temps réel les revenus et l’imposition. Tout le monde est concerné : les salariés, les retraités, les indépendants, les dirigeants et associées de sociétés soumises à l’impôt sur le revenu, les agriculteurs, les bénéficiaires de revenus fonciers… tout comme les élus. En revanche, tous les revenus ne sont pas concernés : les revenus imposés à la source seront les salaires, les traitements, les pensions de retraite, les rentes viagères, les revenus fonciers, les bénéfices industriels et commerciaux (BIC), les bénéfices agricoles (BA), et les bénéfices non commerciaux (BNC). Les plus-values immobilières, les revenus de capitaux mobiliers, les plus-values mobilières, et certaines catégories de revenus tels que les stock-options et les attributions gratuites d’actions ne sont pas concernés par la réforme. Ils resteront imposés selon le schéma en vigueur aujourd’hui : sauf exception, perçus en année N, ils seront taxés l’année N + 1.

Le prélèvement à la source pourra prendre deux formes, selon les revenus concernés. Il pourra soit être effectué par un tiers pour le compte du Trésor public – ce sera le cas lorsque l’employeur prélèvera une partie de votre salaire avant de le remettre à l’administration fiscale –, soit effectué par le contribuable lui-même auprès de cette dernière sous la forme d’un acompte qu’il devra payer tous les mois ou tous les trimestres, selon son choix. Ce dernier vecteur concerne notamment les revenus fonciers, les BIC, BA et BNC, mais aussi les pensions alimentaires.

Pour les revenus qui font l’objet d’une retenue à la source, l’assiette correspond aux salaires ou pensions nets de contribution sociale généralisée (CSG) et de cotisations sociales, sans que soient pris en compte les crédits et les réductions d’impôt – j’insiste sur ce point. Pour les revenus faisant l’objet d’un acompte, l’assiette comprendra les bénéfices et les revenus de l’année N – 2 pour les acomptes versés de janvier à août de l’année N, et les bénéfices et revenus de l’année N – 1 pour les acomptes versés de septembre à décembre.

Mme Marie-Christine Dalloz. Est-ce à dire qu’il y aura deux années fiscalisées lors d’une même année ?

M. Dominique Baert. Plutôt que deux années entreront dans le calcul !

Mme la Rapporteure générale. Le taux appliqué aux revenus faisant l’objet d’une retenue à la source ou d’un acompte sera calculé par l’administration fiscale à partir et des revenus et de l’impôt du foyer en année N – 1 ou N – 2. Une formule simplifiée est mise en place pour le cas où le contribuable n’aurait jamais fait de déclaration de revenus – certains cas, je l’avoue, sont assez complexes. Le calcul du taux ne prend pas en compte à ce stade les réductions et les crédits d’impôt.

Mais que verra l’employeur ? Il pourra vous prélever en application du taux que je viens de décrire, c’est-à-dire le taux de droit commun. Il pourra aussi ne voir qu’un taux par défaut, demandé par le contribuable ou bien indiqué par l’administration fiscale dans le cas, par exemple, où l’on entre pour la première fois sur le marché du travail. Une grille de taux proportionnels s’applique en fonction du revenu mensuel, calculé à partir du taux applicable à un célibataire sans personne à charge. Enfin, l’employeur pourra n’avoir connaissance, à la demande des personnes en couple, que d’un taux individualisé. En cas de différence de revenus, par exemple, on peut ne pas souhaiter que son employeur voie que son conjoint gagne beaucoup plus.

Il sera possible de faire évoluer le taux avec la situation familiale ou matérielle du contribuable.

Dans le cas d’un changement de situation familiale, il faudra obligatoirement déclarer dans les deux mois à l’administration fiscale un mariage, une séparation ou un décès. Cette dernière disposera ensuite de trois mois pour recalculer le taux. D’autres cas de changements de situation familiale, comme la naissance d’un enfant, ne feront pas l’objet d’une obligation de déclaration en temps réel.

M. le président Gilles Carrez. Comme par hasard, à chaque fois que l’impôt doit baisser, il devient moins urgent de faire une déclaration…

Mme la Rapporteure générale. Je vous détaille le texte tel qu’il a été écrit… Une naissance pourra évidemment être déclarée immédiatement, mais, comme aujourd’hui, la régularisation sera possible au moment de la déclaration de revenus.

Dans le cas d’un changement de la situation matérielle, le taux pourra aussi évoluer si les revenus du contribuable évoluent à la baisse ou à la hausse. Il sera possible de faire une déclaration en temps réel à l’administration fiscale. En cas d’erreur concernant une baisse des revenus, une sanction est prévue que je trouve pour ma part un peu lourde – une clause de bonne foi est tout de même prévue. Si la déclaration n’est pas faite en temps réel, la régularisation pourra se faire au moment de la déclaration de revenus.

Pour bien faire comprendre les choses, je vous présente sept exemples.

Un célibataire sans crédit d’impôt dont le salaire net s’élève à 1 700 euros mensuels est aujourd’hui redevable d’un impôt sur le revenu de 960 euros par an qu’il peut payer par tiers ou par mensualités. Avec la réforme, 80 euros d’impôt seront prélevés mensuellement directement par son entreprise, et le salaire net, qui apparaîtra sur sa fiche de paie, s’élèvera à 1 620 euros par mois.

Un célibataire qui perçoit le même salaire net mais qui bénéficie d’un crédit d’impôt de 500 euros est aujourd’hui redevable de 960 euros moins 500 euros, soit 460 euros d’impôt sur le revenu, payés par tiers ou par mensualités. Avec la réforme, il sera prélevé mensuellement de 80 euros en année N, son salaire net s’élèvera donc à 1 620 euros, mais il sera remboursé de 500 euros, au mois de septembre de l’année N + 1, après que sa déclaration de revenus aura été traitée.

M. Dominique Lefebvre. C’est déjà le cas aujourd’hui : les crédits et les réductions d’impôt au titre d’une année N sont perçus l’année N + 1. Mais surtout, les crédits et réductions d’impôt de l’année 2017 seront maintenus : il n’y aura donc pas d’année « blanche » sur ce plan, s’agissant notamment des réductions et des crédits d’impôt récurrents.

Mme la Rapporteure générale. Venons-en au cas d’un célibataire qui perçoit 1 700 euros nets par mois en salaire, qui bénéficie de 500 euros de crédit d’impôt, et dont les revenus fonciers mensuels s’élèvent à 600 euros. Aujourd’hui, il paie 1 720 euros au titre de l’impôt sur le revenu par an, soit par tiers, soit par mensualités. Avec la réforme, il paiera 2 220 euros d’impôts sur le revenu par an, soit 137 euros retenus mensuellement à la source. Il devra régler un acompte de 48 euros par mois sur les revenus fonciers au titre de l’impôt sur le revenu, et il sera remboursé de 500 euros en septembre de l’année N + 1.

Un couple dont le conjoint 1 perçoit un salaire de 1 500 euros nets et le conjoint 2 6 000 euros nets paie aujourd’hui 13 000 euros d’impôts sur le revenu par an. Avec la réforme, trois taux peuvent jouer.

Si le prélèvement à la source s’opère avec le taux de droit commun, le membre 1 sera prélevé chaque mois de 217 euros et son salaire net s’élèvera à 1 283 euros, le membre 2 de 867 euros, ce qui ramènera son salaire net à 5 133 euros. Le prélèvement total annuel reste de 13 000 euros.

Si ce couple opte pour un taux par défaut, 16 200 euros d’impôt seront prélevés sur l’année et 3 200 euros seront remboursés en année N + 1. Un taux par défaut de 4 % s’appliquera au premier membre du couple qui se verra prélevé de 60 euros par mois – son salaire net mensuel s’élèvera à 1 440 euros –, et un taux de 21,5 % s’appliquera au second membre, qui sera prélevé de 1 290 euros par mois – son salaire net s’élèvera alors à 4 710 euros.

En cas de taux individualisé défini par le couple, 13 000 euros au total seront prélevés sur l’année, un membre du couple étant prélevé de 36 euros par mois alors que l’autre le sera de 1 048 euros.

Imaginons que ce même couple bénéficie d’un crédit d’impôt de 2 000 euros, par exemple parce qu’il emploie une nounou. Aujourd’hui, il paie 11 000 euros d’impôts sur le revenu par an. Si le prélèvement à la source s’opère avec le taux de droit commun, le premier membre sera prélevé de 217 euros par mois, le second membre sera prélevé de 867 euros mensuellement, soit un prélèvement total annuel de 13 000 euros. Le couple sera remboursé de 2 000 euros en année N + 1. Si le couple choisit le taux par défaut, très désavantageux pour eux en termes de trésorerie, il sera prélevé au total de 16 200 euros puis remboursé de 5 200 euros en année N + 1, soit 2 000 euros de crédit d’impôt, auxquels s’ajouteront 3 200 euros d’un « trop-perçu » découlant du taux par défaut. Si, en revanche, les conjoints demandent le taux individualisé, ils seront prélevés de 13 000 euros et remboursé de 2 000 euros en année N + 1.

Le même couple avec deux enfants, sans crédit d’impôt, paierait aujourd’hui 9 991 euros, sous l’effet de la « conjugalisation » et la « familialisation », autrement dit le quotient familial. Si l’on applique le taux de droit commun, le prélèvement total annuel effectué sur leurs salaires reste de 9 991 euros. Le prélèvement à la source avec le taux par défaut amène à prélever sur les deux salaires 16 200 euros, mais le couple sera remboursé en année N + 1 de 6 209 euros. Avec le taux individualisé, ils seront prélevés exactement de ce qu’ils doivent au Trésor public.

Prenons un dernier exemple : celui de ce même couple avec ses deux enfants qui, cette fois, bénéficie d’un crédit d’impôt d’un montant de 2 000 euros. Aujourd’hui, il ne paie que 7 991 euros d’impôt sur le revenu. Avec la réforme, et l’application du taux de droit commun, il paiera 9 991 euros, mais obtiendra un remboursement de 2 000 euros en année N + 1. La mise en œuvre du taux par défaut se traduirait par un « trop-perçu » remboursé en année N + 1, en plus du remboursement du crédit d’impôt. Avec le taux individualisé, le couple est prélevé de ce qu’il doit exactement, mais le crédit d’impôt continue d’être remboursé l’année suivante.

J’en viens à la question de « l’année blanche ». L’impôt sur le revenu acquitté en 2018 portera sur les revenus perçus en 2018, alors qu’avec le système actuel il aurait porté sur les revenus perçus au titre de l’année 2017 ; en revanche, les revenus exceptionnels perçus en 2017 seront taxés en 2018. J’estime en conséquence que l’expression « année blanche » n’est pas totalement pertinente car elle laisse entendre que l’impôt ne serait pas payé, ce qui est faux.

Je précise que les réductions et les crédits d’impôt au titre des revenus de 2017 seront maintenus et versés en 2018. Si vous changez votre chaudière en 2017, vous bénéficierez du crédit d’impôt pour la transition énergétique en 2018 ; si vous faites un don pour une campagne électorale en 2017, vous bénéficierez des réductions d’impôt prévues en 2018… Il en va de même pour la réduction d’impôt afférente à l’emploi d’un salarié à domicile.

Un contribuable peut-il se voir prélever de l’impôt sur le revenu alors qu’il n’est pas imposable ? Cela peut se produire du fait du taux choisi et de la non-prise en compte des crédits et réductions d’impôt, mais le contribuable sera de toute façon remboursé en année N + 1. Le taux par défaut peut conduire à une « surimposition » temporaire de certains contribuables, cependant il ne s’agit que d’un décalage, ils seront toujours remboursés l’année suivante.

Comment gérer la situation d’un contribuable qui aurait à la fois un acompte et une retenue à la source ? Les deux s’ajoutent de manière analytique.

Un contribuable peut-il modifier à la baisse le taux qui lui est appliqué ? Ce sera possible, mais il devra prendre garde à ne pas déclarer un revenu trop inférieur à la réalité car des sanctions sont prévues en cas de modulation irrégulière – la bonne foi est néanmoins prise en compte.

Enfin, un contribuable peut-il refuser de voir son impôt prélevé par son employeur ? La réponse est non.

M. le président Gilles Carrez. Je vous remercie, madame la Rapporteure générale. Pourriez-vous m’éclairer sur ce qui se passe pour les crédits ou des réductions d’impôt ? Certains sont récurrents comme ceux qui découlent des dispositifs « Scellier » ou « Pinel ». Prenons l’exemple d’un investissement en « loi Scellier » qui ouvre droit à la réduction d’impôt maximale, soit 75 000 euros répartis sur neuf ans. Je m’exprime sous le contrôle des éminents spécialistes du logement de notre commission, Jean-Louis Dumont et Christophe Caresche. Chaque année, le contribuable concerné a droit à une réduction d’impôt de 8 300 euros. Dans le système actuel, le bénéfice de la première année de réduction d’impôt « Scellier » n’intervient que l’année N + 1, mais, ensuite, son impôt est calculé par rapport à l’impôt des années précédentes : le « Scellier » est donc intégré. Avec la réforme, ce ne sera plus le cas : chaque année, il faudra faire une avance. Le contribuable risque d’être très surpris et se précipiter chez son employeur pour lui demander des comptes. Que se passe-t-il avec les réductions et les crédits d’impôt récurrents ?

Mme la Rapporteure générale. Ils ne sont pas pris en compte pour le calcul du taux du prélèvement à la source.

M. Dominique Lefebvre. Il faut commencer par réaffirmer que la mise en place du prélèvement à la source ne se traduit en aucune manière par une modification du montant de l’impôt payé pour qui que ce soit. Il n’y a pas d’augmentation d’impôts liée au passage au prélèvement à la source. Il y a en revanche du décalage de trésorerie, dans un sens et dans l’autre, en particulier en raison du mode de traitement choisi des crédits et des réductions d’impôt et de leur maintien au titre de l’année 2017. Je rappelle qu’au-delà des contribuables, ces dispositifs bénéficient aussi aux secteurs économiques dans lesquels les investissements ont été réalisés et aux bénéficiaires des dons concernés – ces bénéficiaires étaient extrêmement mobilisés pour que les crédits et les réductions d’impôt soient maintenus.

Si, comme je vous l’ai demandé par écrit, monsieur le président, nous avions travaillé dans l’ordre en commençant par auditionner les concepteurs administratifs de la réforme pour être certains de bien comprendre ses mécanismes, nous aurions su répondre à certaines des questions que nous nous posons aujourd’hui. En tout état de cause, il n’est pas possible à ce stade de distinguer les crédits et réductions d’impôt selon qu’ils sont récurrents ou ponctuels.

Ensuite, les crédits et réductions d’impôt ont toujours bénéficié au contribuable en année N + 1 par rapport au moment de la dépense : le prélèvement à la source ne changera rien en la matière.

Enfin, vous soulevez un problème de trésorerie en parlant du montant payé mensuellement par le contribuable entre les mois de janvier et de juillet et calculé sur la base de l’impôt des revenus soumis au barème, hors crédits et réductions d’impôt. Ils vont avancer les sommes dues, dites-vous ; je vous rappelle que le remboursement aura lieu à la fin du mois d’août, lorsque l’administration fiscale aura effectué ses calculs. Et si l’on entre dans ce débat, encore faut-il rappeler que pour 70 milliards d’euros de produit annuel de l’impôt sur le revenu, on compte 12 à 13 milliards de crédits et de réductions d’impôt qui ne concernent qu’une partie des contribuables. Soyons clairs, nous ne parlons pas du contribuable lambda qui a seulement un salaire sans réduction ou crédit d’impôt : à lui, la réforme simplifiera la vie !

Prenons l’exemple d’un couple de cadres supérieurs redevable de 36 000 euros d’impôts et bénéficiaires de 12 000 euros de crédits et de réductions d’impôt. Aujourd’hui, il verse 2 400 euros tous les mois aux impôts, sur dix mois. Demain, avec le prélèvement à la source, ils seront prélevés de 3 000 euros tous les mois, mais dès le 31 août, ils recevront un chèque de 12 000 euros de crédits et de réductions d’impôt.

Le chèque correspondant à un crédit ou à une réduction d’impôt répond aussi à une demande récurrente d’Henri Emmanuelli qui a toujours considéré qu’il fallait montrer clairement aux contribuables l’effort que l’État consent à leur intention par l’intermédiaire des réductions et crédits d’impôt.

Je comprends la question posée, mais elle concerne uniquement un problème de trésorerie alors que la préservation des logiques de crédits et de réductions d’impôt constitue un véritable enjeu pour les secteurs économiques et les bénéficiaires concernés. Si l’on fait le choix technique d’un prélèvement à la source à normes fiscales constantes, il me semble difficile de faire autrement.

Le cas des personnes qui, aujourd’hui, en raison des crédits et réductions d’impôt récurrents ne sont plus du tout redevables mérite en revanche d’être résolu. Mme la Rapporteure générale l’a évoqué et, à ma connaissance, il devrait être réglé dans le projet de loi qui sera déposé la semaine prochaine. Si ce n’était pas le cas, un amendement devrait permettre de résoudre le problème, qui prévoira que si, pendant deux années de suite, vous n’avez pas payé d’impôt alors que le mode de calcul, avant crédits et réductions d’impôt, vous conduit à être prélevé, il sera possible de vous appliquer un taux de base à zéro, quitte à régulariser ultérieurement.

M. Christophe Caresche. La question des crédits d’impôt est quand même compliquée à gérer. Le système peut avoir un résultat vertueux en poussant à supprimer les crédits d’impôt… Ce qui supposerait de diminuer aussi les taux d’imposition…

Un certain nombre de pays ont adopté le prélèvement à la source. Utilisent-ils aussi les crédits d’impôt ? Ces derniers sont-ils compatibles avec ce mode de perception de l’impôt ?

Mme la Rapporteure générale. En Allemagne et au Royaume-Uni, cela se passe exactement comme je vous l’ai décrit. Nous avons récupéré des bulletins de paie venant de ces pays : le système est en tout point identique à celui qui nous est proposé.

M. Christophe Caresche. Mais, dans ces pays, le montant des crédits d’impôt est-il aussi élevé que chez nous ?

Mme la Rapporteure générale. Non, ils en ont moins que nous.

M. le président Gilles Carrez. C’est pour cela que je prenais l’exemple d’une réduction d’impôt « Scellier » : en France, on peut aboutir à des réductions d’impôt considérables.

Mme Karine Berger. Comme Dominique Lefebvre, monsieur le président, je pense qu’il aurait été préférable de commencer par une présentation générale de la réforme par ses auteurs.

Il faut que tout le monde prenne conscience que nous aurons affaire à un taux brut, et non à un taux net. Il ne s’agit pas d’une mensualisation de l’impôt sur le revenu, mais bien d’un mécanisme d’impôt à la source tel qu’il est déjà en place dans tous les autres pays : on prélève plus ou moins au taux maximum, et on rembourse, le cas échéant, un an plus tard. C’est ainsi que cela se passe aux États-Unis, au Royaume-Uni, en Allemagne… C’est une modification très importante de la façon dont nous voyons l’impôt sur le revenu.

Je suis par ailleurs très étonnée par le taux dit « neutre ». Il ne s’agit pas du tout du taux individuel. Ce n’est pas à nous que l’on va apprendre qu’un taux moyen ne peut pas être un taux par strate fiscale : une strate fiscale est définie par un taux marginal. Il n’existe pas une seule personne dans un taux de strate marginal qui ait le même taux moyen que son voisin, c’est mathématiquement impossible. Par ailleurs, le passage d’une strate à l’autre sur le taux neutre se traduit par une augmentation considérable de l’impôt. Je ne sais pas d’où vient ce taux « neutre », mais il est tout sauf neutre…

M. le président Gilles Carrez. Pardonnez-moi de vous interrompre un instant. Ce n’est pas le taux marginal qui figure sur nos avis d’imposition mais toujours le taux moyen. Ce dont il est question aujourd’hui est d’instaurer un taux neutre qui serait, si j’ose dire, une sorte de « taux moyen moyenné »… Je comprends la pureté du raisonnement mathématique qui sous-tend votre intervention, et je ne perçois pas quel serait l’inconvénient du dispositif proposé.

Mme Karine Berger. L’inconvénient, Mme la Rapporteure générale vient de le démontrer, est que cela conduit à un prélèvement plus élevé ; surtout, cela fait augmenter d’un coup le taux moyen d’imposition de l’ensemble des revenus. C’est pourquoi je suggère une grille un peu plus progressive ; si taux par défaut il y a, on maintiendra ainsi la logique de la progressivité de l’impôt sans lui préférer un mécanisme fondé sur des moyennes.

Mme Véronique Louwagie. Je remercie Mme la Rapporteure générale pour cette présentation précise et clairement illustrée, qui met en lumière les difficultés d’application de la réforme envisagée. Les travailleurs indépendants, les agriculteurs, les professions libérales et d’une manière générale tous les contribuables soumis aux régimes des BIC, des BNC et des BA verseraient donc à l’administration fiscale des acomptes mensuels calculés, pour la période de janvier à août, sur la base des revenus de l’année N – 2, sur ceux de l’année N – 1 de septembre à décembre, le règlement global faisant ensuite l’objet d’une régularisation annuelle. Ce dispositif est donc analogue à celui qui a été retenu pour le prélèvement des cotisations sociales dues au titre du Régime social des indépendants (RSI), et l’on sait qu’il est à l’origine d’énormes problèmes de trésorerie pour les professions indépendantes dont les revenus varient fortement d’une année à l’autre. Quand bien même elles ont été atténuées depuis que nous avons revu le mécanisme, ces difficultés persistent, et je crains qu’elles ne soient aggravées par la réforme proposée, qui entraînera la régularisation de l’impôt sur le revenu en même temps que celle des contributions au titre du RSI. C’est très inquiétant. Je déplore que l’on n’ait pas tiré les enseignements des difficultés nées du système retenu pour le RSI et j’aimerais que l’on mesure l’impact cumulé de toutes ces mesures pour les professions indépendantes.

M. Pierre-Alain Muet. Je me réjouis de voir se profiler, enfin, le prélèvement à la source. M. Jacques Chirac, alors secrétaire d’État à l’économie, l’avait proposé en 1967, puis M. Valéry Giscard d’Estaing en 1973 quand il était ministre des finances, et enfin M. Thierry Breton, son lointain successeur, sans que jamais l’idée aboutisse ; j’espère que ce sera le cas cette fois. La déclaration sociale nominative (DSN) en donne l’opportunité car elle permettra un prélèvement à la source précisément ajusté au revenu mensuel. Ce n’est pas le cas actuellement puisqu’en prélevant l’impôt à la source au taux de l’année précédente, on n’ajuste qu’à demi : sur la bonne assiette, mais pas avec le bon taux. À terme, l’existence de la déclaration sociale nominative permettra un prélèvement à la source bien plus moderne que ce qui existe dans la plupart des autres pays. Je rappelle que tous pratiquent le prélèvement à la source – à l’exception de Singapour et de la Suisse, où l’impôt est cantonal et non fédéral, ce qui rend impossible le prélèvement à la source – et appliquent peu ou prou les modalités qui nous sont proposées.

Toutefois, je ne comprends pas davantage que ma collègue Karine Berger ce qu’est le taux « par défaut ». Le Gouvernement serait bien avisé de ne présenter que les deux taux qui ont un sens. Le premier est le taux moyen du ménage, qui figure sur l’avis d’imposition. Mais l’on sait bien qu’on ne peut l’appliquer aux deux membres du foyer fiscal si leurs revenus sont très différents – pourquoi imposer à un taux très élevé une personne dont le revenu est très faible au motif que son conjoint a un revenu élevé ? Le bon taux est effectivement le taux individualisé : on part du taux que chacun payerait s’il était célibataire mais l’on tient compte du quotient familial et conjugal. Ce qui est proposé est une avancée importante et j’espère que le Gouvernement cessera de parler du taux « par défaut », dont la présentation serait la meilleure manière de nuire à l’acceptation d’une excellente mesure, pour insister sur le taux individualisé. Le quotient familial a l’avantage de permettre de prendre en considération les revenus du couple, mais l’inconvénient de pénaliser implicitement le conjoint dont le revenu est le plus bas. En conservant le quotient familial tout en individualisant les taux de prélèvement, on corrige cette iniquité, chacun se voyant imposé en fonction de ses revenus propres. J’espère que la gauche parviendra à mener à bien ce à quoi la droite a renoncé par trois fois et qui est une indispensable modernisation de l’imposition.

Mme Marie-Christine Dalloz. Je conviens que ce qui a trait à la fiscalité n’est jamais simple. J’aime à entendre Pierre-Alain Muet évoquer ce qui serait sa « modernisation » – après que nous avons beaucoup entendu parler de justice pendant quatre ans, nous allons donc entendre parler de modernité… Pourtant, de grandes difficultés sont prévisibles pour ce qui a trait au crédit d’impôt puisque, comme l’a indiqué Dominique Lefebvre, il faut bénéficier d’un très faible crédit d’impôt pour ne pas être pénalisé par la réforme envisagée. Le président de notre commission l’a souligné : qui bénéficie d’un crédit d’impôt important et récurrent sera forcément pénalisé – mais j’ai bien entendu que ce n’est pas votre préoccupation puisque, pour résumer, ceux qui ont les moyens d’avoir un gros crédit d’impôt ont largement les moyens de payer. D’autre part, madame la Rapporteure générale, il y aura bel et bien une année blanche, puisque les revenus ordinaires de 2017 ne seront pas soumis à fiscalité, dans la mesure où on paiera en 2018 sur les revenus de 2018.

M. le président Gilles Carrez. Un crédit d’impôt annulera ce qui aurait dû être payé en 2017.

Mme Marie-Christine Dalloz. Voyez donc : la réalité est qu’il y aura bien une année blanche, sauf pour les revenus exceptionnels qui seront fiscalisés l’année suivante, et éventuellement pour les crédits d’impôt. Quel équilibre sera trouvé ? A-t-on mesuré si cela signifie un déficit pour les finances publiques ? Pour ce qui est du taux individualisé, on a oublié qu’en France le taux d’imposition est « familialisé » : c’est justement parce que notre régime fiscal n’est pas uniquement construit sur le modèle « une part, une personne » que nous n’avons pas appliqué le même dispositif fiscal que les pays voisins. Quant au taux par défaut, dit « taux neutre », il est tout sauf neutre, et facteur de gros dégâts. Enfin, peut-être l’État trouvera-t-il là un moyen technique d’afficher une réduction du déficit en 2017, mais les contribuables, eux, verront leur trésorerie en déficit et je redoute vivement les conséquences de cette mesure sur le pouvoir d’achat de nos concitoyens jusqu’au mois de septembre 2018, et donc sur la consommation. Avons-nous les moyens de nous offrir une année de consommation en berne ? J’en doute.

M. Jean-Claude Buisine. Le projet de retenue de l’impôt à la source suscite bien des interrogations. En premier lieu, pourquoi confier aux entreprises, quelle que soit leur forme juridique, la collecte de l’impôt ? Il n’est qu’à voir comment le taux de recouvrement de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) fluctue selon les départements… Je crains que, de même, l’impôt ne soit pas reversé de façon régulière au niveau national. Recenser les variations du taux de recouvrement de la TVA devrait conduire à s’interroger sur ce qu’il est possible de faire en cette matière. Ensuite, comment l’impôt sera-t-il collecté quand une entreprise sera en cessation d’activité ou en liquidation ? Cette question est sans réponse aujourd’hui. Les procédures de redressement et de liquidation judiciaire sont d’une extrême complexité et l’on sait combien il est difficile de recouvrer l’impôt en ces circonstances. Et encore : la mise en place du nouveau système se fera sans grande complication pour les grosses entreprises, qui disposent généralement de conseils, mais elle sera autrement difficile pour les petites entreprises, singulièrement artisanales.

Par ailleurs, si aucun problème particulier ne se pose lorsque les revenus sont déclarés par des tiers, il n’en va pas de même pour les autres catégories de revenus, fonciers notamment. Je n’imagine pas les propriétaires fonciers reverser spontanément chaque mois la quote-part d’impôt due. Les difficultés de recouvrement seront multiples – et cela vaudra aussi pour les revenus des professions libérales ou des artisans. On s’apprête à enclencher un mécanisme dont l’application et le suivi seront d’une grande lourdeur.

M. Nicolas Sansu. Quel est donc l’objectif véritable du basculement vers la retenue à la source d’un impôt dont le taux actuel de recouvrement – 98 % la première année et plus de 99 % après relances et saisies – par une administration fiscale très efficace est excellent, et même exceptionnel au regard de ce qui est constaté dans d’autres pays ? Tout simplement parce que ce projet en cache un autre : la fusion de l’impôt sur le revenu et de la CSG, qui ne sont pas de même nature puisque la CSG, qui pourvoit au financement de la protection sociale, est une contribution proportionnelle et non pas progressive. Autrement dit, c’est pour tout le monde pareil : votre employeur n’est pas obligé de savoir ce que vous gagnez ni ce que vous faites pour payer tant de CSG ou de cotisations sociales. Autant dire que la mesure envisagée met à mal le principe du respect de la vie privée : quelle sera la confidentialité quand l’employeur aura à connaître des niveaux d’imposition de ses différents salariés ? Ce n’est pas normal, comme il n’est pas normal de donner aux employeurs le rôle de collecteurs de l’impôt, impôt qui est le lien entre l’État et le contribuable. Pour toutes ces raisons, je trouve ce projet malvenu.

Mme Arlette Grosskost. Sur le plan macro-économique, il va sans dire que le prélèvement de l’impôt à la source aura des conséquences importantes sur la trésorerie du contribuable, quel qu’il soit. À dater du 1er janvier 2018, cette trésorerie sera moindre dans tous les cas – sans même parler du décalage du crédit d’impôt. Qui a moins de ressources dépensant moins, a-t-on évalué l’incidence de cette mesure sur le pouvoir d’achat des contribuables ? Quant à la collecte de l’impôt par les entreprises, ce sera pour elles un impôt administratif supplémentaire. Les grandes entreprises sauront s’adapter, mais qu’en sera-t-il des PME, des entreprises de taille intermédiaire (ETI), des artisans et des commerçants ? A-t-on évalué combien allait leur coûter l’inévitable ajustement informatique de leur comptabilité ? Seront-ils d’une manière ou d’une autre dédommagés ou remboursés de cet impôt administratif supplémentaire ? Enfin, les revenus fonciers perçus en 2017 ne seront, a priori, pas déclarés ; mais si je fais des travaux en 2017, je n’en récupérerai jamais le montant, puisqu’ils ne donnent pas lieu à réduction ou d’un crédit d’impôt : ils sont simplement déduits du revenu foncier, qui s’en trouve minoré d’autant. Ce n’est pas la même chose. Comment cela va-t-il se passer ?

M. le président Gilles Carrez. La réponse à ces questions figure dans l’exposé des motifs de l’avant-projet de loi : « Concernant les revenus fonciers, le crédit d’impôt de modernisation du recouvrement s’accompagnera d’un dispositif visant à ne pas désinciter les ménages à réaliser en 2017 des travaux d’entretien ou d’amélioration des immeubles loués. » Et encore : « Au regard des différences existantes concernant le mode de formation des revenus afférents à chaque catégorie de revenus soumis à l’impôt sur le revenu, comprenant notamment les règles relatives à la déduction des charges ou celles relatives à la constitution des produits, une définition du caractère non exceptionnel des revenus perçus en 2017 inclus dans le champ de la réforme qui ouvriront droit au crédit d’impôt de modernisation du recouvrement sera, par souci d’égalité, prévue pour chaque catégorie de revenus […]. » Le problème est que ces points, cruciaux, ne sont pas traités dans la loi ; quel sera alors leur support juridique ?

M. Alain Fauré. À en croire Arlette Grosskost, la réforme pourrait entraîner une réduction du pouvoir d’achat en 2018. En réalité, 90 % des ménages réglant déjà l’impôt par le biais de prélèvements automatiques, la différence sera infime ; on joue donc inutilement à se faire peur. Quant à « l’année blanche » dont on a malencontreusement fait état à un moment, il n’y en aura pas : tous ceux qui auront eu des revenus exceptionnels en 2017 devront les déclarer, dans la continuité de ce qui se produit aujourd’hui. Il ne me paraît pas très sain de jouer à se faire peur et de vouloir effrayer les petits artisans et commerçants qui, bien souvent, ne payent pas l’impôt sur le revenu. Il faut raison garder.

M. Jean-Louis Dumont. À aucun moment il n’a été question des indemnités des élus locaux territoriaux qui, aujourd’hui, font l’objet d’un prélèvement direct calculé sur un forfait ; or la réforme ne sera pas sans conséquences pour les élus.

À voir le fâcheux fonctionnement du RSI, on peut craindre des problèmes pour les pensions et même les revenus des artisans. Est-il prévu que l’administration fiscale se mette à l’écoute des cas particuliers ? Je viens du monde rural, et j’appelle à ce que l’on prenne conscience de ce qui pourrait advenir si l’administration fiscale n’installe pas un réseau d’écoute. Actuellement, certains s’en sortent difficilement ; il n’est pas concevable que la réforme ait pour eux des conséquences analogues à celles du RSI et que de nouvelles difficultés s’ajoutent à celles qu’ils connaissent déjà. Et je ne m’appesantirai pas sur le cas des militaires qui, pour percevoir leur solde, se débattent encore avec le tristement célèbre logiciel LOUVOIS…

M. Dominique Lefebvre. Un peu plus de temps que ne nous permet l’horaire serait nécessaire pour répondre à toutes ces interrogations, mais l’audition de la DGFiP et la transmission par le Gouvernement du texte accompagné de l’étude d’impact permettront des clarifications. Le prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu nous oblige à respecter avec une grande rigueur les principes constitutionnels que sont l’égalité d’une part, la protection de la vie privée d’autre part. Le principe d’égalité conduit le Gouvernement à proposer le prélèvement de l’impôt à la source pour 98 % des revenus, car on ne peut avoir des salariés qui payent l’impôt au moment où ils perçoivent leur revenu et des non-salariés qui le payent beaucoup plus tard. Le principe de la protection de la vie privée explique l’instauration du taux neutre. Je partage l’opinion de ma collègue Karine Berger à ce sujet, pour partie, car peu nombreux sont les contribuables qui ont ce taux moyen d’imposition et ce niveau de revenu mensuel. Le taux neutre permet précisément de préserver la confidentialité
– par exemple si un salarié payé au SMIC dispose par ailleurs de revenus du patrimoine extrêmement importants dont il ne souhaite pas que son employeur ait connaissance, non plus que de ses charges de famille qui s’expliquent par l’entretien d’enfants naturels qu’il aura reconnus.

La question est de savoir pour combien de contribuables le taux d’imposition moyen est supérieur au taux neutre, et cette proportion paraît effectivement assez élevée. Le tableau qui figure dans l’avant-projet de loi montre que le taux moyen d’imposition est inférieur ou égal à 9 % pour 90 % des contribuables. Or, l’application du barème fait parvenir assez rapidement à un taux de 15 à 20 %. Pour les ménages dont les revenus mensuels s’étagent entre 4 000 et 7 000 euros – c’est le cas d’un parlementaire dont le conjoint est haut fonctionnaire – on arrive à un taux « neutre » de 21,5 %. Cela n’existe pas dans la réalité, même avant crédit et réduction d’impôt. Il faudrait travailler cette question, tout en se rappelant que l’instauration du taux neutre tend à ce que l’employeur ne soit pas renseigné sur la vie privée du salarié, et notamment sur le fait que son taux d’imposition est nettement supérieur à ce qui résulterait de l’imposition de son seul salaire s’il est bas. Enfin, il est exact qu’une série de contribuables sont dans des situations complexes – ainsi de ceux qui feront état de revenus soumis au prélèvement à la source et de revenus qui ne le sont pas. Mais la situation la plus commune est probablement celle du salarié qui ne bénéficie ni de crédit ni de réduction d’impôt et qui paye, l’année N + 1, l’impôt dû sur le revenu de l’année N. Je rappelle aussi qu’un tiers des foyers fiscaux voient leur revenu baisser d’une année à l’autre ; ce sera pour eux une simplification effective de payer immédiatement l’impôt dû et de disposer de la sorte d’un revenu effectivement disponible. C’est évidemment une bonne chose pour la gestion de leurs ressources par les contribuables.

Mme la Rapporteure générale aurait pu citer le cas de contribuables qui payent un montant de CSG – dont le taux est de 7,5 % – trois à quatre fois plus élevé que celui de leur impôt sur le revenu. Ceux-là éprouvent parfois plus de difficulté à payer 1 500 euros d’impôt annuel sur le revenu de l’année précédente, parce que ce revenu n’est plus le même, que les 4 000 ou 5 000 euros de CSG qui ont été prélevés sur leur salaire et pour lesquels ils n’ont plus à épargner. Là est le fondement de la réforme et je ne voudrais pas qu’une série de cas particuliers – parmi lesquels on trouvera quand même, je le redis, les crédits et les réductions d’impôt, dont il faudra vérifier qui en bénéficie le plus et le mieux – en détourne.

Enfin, cher collègue Dumont, un des articles du texte concerne spécifiquement les élus, et il en résulte que ceux dont, aujourd’hui, le taux marginal d’imposition est supérieur au taux forfaitaire de prélèvement à la source de 25 % payeront davantage d’impôts. En somme, on soumet les indemnités des élus au barème de l’imposition sur le revenu, comme on l’a fait pour les revenus du capital. Je nous vois mal expliquer à nos concitoyens que ce n’est pas ainsi qu’il faut procéder, même si cela va faire mal au porte-monnaie des élus… Je suggère d’y réfléchir !

Mme la Rapporteure générale. Monsieur Dumont, l’article relatif aux élus, qui s’appliquera au 1er janvier 2017, figurera sans doute dans la première partie du projet de loi de finances pour 2017 ; les autres articles du texte, qui s’appliqueront au 1er janvier 2018, figureront dans la seconde partie. La présentation qui vous a été faite aujourd’hui visait uniquement à décrire le fonctionnement du dispositif. C’est pourquoi je n’ai pas abordé l’aspect politique de la réforme qui est, comme cela a été rappelé, d’assurer l’adéquation entre les revenus et le paiement de l’impôt et de permettre ainsi aux contribuables de récupérer un revenu net.

Enfin, madame Louwagie, il en sera demain pour les indépendants comme il en est aujourd’hui : l’assiette et le taux d’imposition dépendent déjà des revenus constatés l’année N – 1. Je n’ai pas parfaitement compris votre comparaison avec le RSI, mais nous aurons l’occasion d’en débattre avec le ministre.

M. le président Gilles Carrez. Nous conduirons plusieurs auditions la semaine prochaine, dont celle de la DGFiP. Les ministres nous ont présenté l’architecture générale de la réforme le 6 avril, mais il serait bon d’évoquer spécifiquement avec eux les indemnités des élus locaux, qui sera traitée en première partie de la loi de finances. Madame la Rapporteure générale et moi-même verrons si cela peut s’envisager au cours de la semaine du 5 octobre.

Puis, lors de la même séance du 20 septembre 2016, la commission entend, sous forme de table ronde, M. François-Xavier Ferrucci, secrétaire général de Solidaires Finances publiques, et M. Alexandre Derigny, secrétaire général adjoint de la CGT Finances.

M. le président Gilles Carrez. Mme Hélène Fauvel, secrétaire générale de FO DGFiP, qui était également conviée, est empêchée.

M. François-Xavier Ferrucci, secrétaire général de Solidaires Finances publiques. J’exposerai la position de Solidaires Finances publiques sur le projet de prélèvement de la source – une position constante depuis que le sujet affleure l’actualité avant de replonger dans les limbes – avant de commenter brièvement quelques-uns des échanges de vues qui ont eu lieu entre vous et dont nous avons pris connaissance sur le circuit de vidéo interne de l’Assemblée nationale.

Sachez, en préambule, que le timing de cette réforme nous chagrine quelque peu. Il est bien de tenir ses promesses mais, étant donné l’ampleur du projet, il nous paraît très audacieux, sinon dangereux, de s’y lancer dans un temps si court. Ensuite, les éléments qui figurent dans l’avant-projet de loi montrent que le prélèvement de l’impôt à la source n’est pas adapté à la structure actuelle de l’impôt sur le revenu. D’autre part, si les notions de quotient familial et de quotient conjugal sont prises en considération, la manière dont elles le sont, notamment pour moduler le taux d’imposition appliqué au prélèvement à la source, sera particulièrement compliquée à mettre en œuvre par les services de la DGFiP, et le contribuable qui souhaitera user de cette possibilité devra faire preuve d’une grande réactivité.

Au cours de vos échanges, il a été question du « taux neutre », et une intervention a porté sur le barème envisagé, effectivement très élevé au regard du dispositif en vigueur. L’application d’un taux neutre, quel que soit le barème retenu, déclenchera dans tous les cas un prélèvement inférieur à ce qu’il aurait été si l’on avait appliqué le taux moyen déterminé par l’administration fiscale. Le salarié considéré devra donc régler le complément directement. Il résultera de cette architecture que les prélèvements mensuels, recouvrés par l’employeur, seront traités à la DGFiP par le service des impôts des entreprises, le paiement volontaire étant recouvré par le service des impôts des particuliers. Il conviendra donc d’apparier les versements parvenus à l’administration par deux canaux différents. Les outils informatiques le permettent certes assez facilement, à ceci près que les données dont nous disposons sont très friables : la preuve en est que, chaque année, nous nous livrons à des opérations de fiabilisation des identifiants pour nous permettre d’apparier les différents éléments concernant un même contribuable.

J’ai encore en mémoire la voix du ministre Christian Eckert expliquant il y a quelque temps devant votre Assemblée que si un contribuable se trouve être le futur parent d’un enfant qui naîtra en février, il pourra faire prendre en compte cette naissance immédiatement dans le calcul du prélèvement de l’impôt à la source. Mais, à lire ce que prévoit l’avant-projet de loi, on constate que les seuls cas de changement de situation entraînant la variation automatique du taux de prélèvement sont le mariage, la conclusion d’un pacte civil de solidarité (pacs), la séparation, le divorce et le décès de l’un des deux conjoints. La prise en compte de la demi-part par enfant à charge supplémentaire est mentionnée dans le cadre global qui offre au contribuable la possibilité de moduler le taux du prélèvement – et encore faut-il, pour que la modulation à la baisse soit autorisée, que le montant estimé du prélèvement modifié soit inférieur de plus de 10 % et 200 euros au montant du prélèvement que supporterait le contribuable en l’absence de cette modulation. Cela signifie, en pratique, que très peu de contribuables pourront faire varier le taux du prélèvement à la source en cours d’année.

L’un de vous a dit que 90 % des contribuables seraient mensualisés. Permettez-moi de rectifier cette indication : ils sont 58,3 % à l’être pour l’impôt sur le revenu. Cela étant, le taux de recouvrement spontané de cet impôt s’établit à 98 %, et à 99,4 % après relance simple. Certes, 30 % des contribuables voient leur revenu varier d’une année à l’autre ; mais la mensualisation, telle qu’elle est actuellement mise en œuvre, rend possible des ajustements permettant au contribuable en difficulté à un moment donné de moduler ses versements pour faire face à une baisse ponctuelle de ses revenus. Or, l’avant-projet de loi ne prend pas en considération la situation du contribuable dont les revenus ne varient pas mais qui doit faire face à une charge inattendue – une inondation ou un changement de voiture par exemple. Actuellement, ces difficultés se règlent par un recours gracieux, et nombreux sont les contribuables qui viennent demander à nos services un étalement ou un moratoire ; ils leur étaient assez facilement accordés.

Demain, avec la retenue à la source, l’impôt étant prélevé et déjà dans les caisses de l’État, c’en sera terminé des recours gracieux. Aujourd’hui déjà, consigne a été donnée à nos collègues de ne pas accepter de recours gracieux quand l’impôt a été recouvré en tout ou en partie. On compte chaque année 200 000 recours gracieux pour l’impôt sur le revenu ; quand ils auront été rendus impossibles, il y a fort à parier que les réclamations gracieuses se reporteront, en fin d’année, sur la taxe d’habitation – et il y en a déjà un million par an à ce titre. Qu’en sera-t-il alors des recettes des collectivités territoriales, déjà quelque peu malmenées s’agissant de la dotation globale de fonctionnement ?

M. Alexandre Derigny, secrétaire général adjoint de la CGT Finances. Pour la CGT Finances, le premier problème tient à ce que la réforme est présentée comme répondant à une promesse du Gouvernement alors qu’il ne s’agit pas d’une réforme fiscale mais d’une réforme du recouvrement de l’impôt. Mais le taux de recouvrement étant supérieur à 99 %, est-ce bien la réforme la plus urgente qu’il faille mener ? Une réforme en profondeur de notre système fiscal, destinée à le rendre plus juste et plus efficace, aurait été nécessaire ; ce ne sera évidemment pas le cas.

Nous sommes aussi inquiets à l’idée que ce qui nous est « vendu » comme une mesure de simplification pour les contribuables ne soit source de grandes déceptions. Quand on évoque le prélèvement de l’impôt à la source, les citoyens s’en félicitent, croyant que le paiement de l’impôt s’en trouvera facilité, qu’ils en auront fini avec les déclarations de revenus et avec les avis d’imposition et que leurs relations avec l’administration fiscale prendront définitivement fin. Mais la réalité sera tout autre et, par manque d’explications, on vend une réforme qui provoquera bien des déceptions.

Ajoutons que le prélèvement à la source ne concerne pas tous les contribuables mais avant tout les salariés et les pensionnés. Comme cela a été dit au cours de vos échanges, la réforme ne changera pas grand-chose pour les autres catégories de contribuables – artisans, professions libérales – qui, aujourd’hui déjà, payent des acomptes, l’assiette étant leur revenu de l’année précédente. Le nouveau système ne mettra pas tous les contribuables sur un pied d’égalité puisque l’impôt des salariés sera prélevé avant même que les intéressés aient perçu leur revenu, ce qui ne sera pas obligatoirement le cas pour les bénéficiaires de revenus d’autres natures.

L’élément phare de la réforme est la suppression du décalage d’un an dans la perception de l’impôt. Cela est exact pour l’assiette, mais le décalage perdurera pour le taux d’imposition, que l’on ne pourra connaître qu’une fois l’année écoulée. Comme l’a souligné François-Xavier Ferrucci, le système fiscal français, qui repose sur la « familialisation », la « conjugalisation » et la progressivité de l’impôt sur le revenu, rend impossible la contemporanéité de la perception des revenus et du prélèvement de l’impôt. Mais la mensualisation ayant fait de grands progrès, les contribuables peuvent désormais modifier dès le 1er janvier leurs prélèvements mensuels pour tenir compte des revenus qu’ils ont réellement perçus jusqu’au 31 décembre de l’année précédente.

Un autre point nous semble poser problème. On explique que le nouveau dispositif supprimera l’avance de trésorerie, ce qui sera bénéfique pour les contribuables. Or, dans certains cas, ce sera l’inverse. Ainsi, un primo-actif qui obtient un contrat de six mois sera imposé dès le premier mois par un prélèvement à la source. Dans le système actuel, gagnerait-il 2 000 euros chaque mois de son contrat qu’il ne payerait rien, car au terme des six mois il ne serait pas imposable. Dans le nouveau système, il va le devenir, et il devra payer pendant six mois un impôt qui lui sera remboursé dix-huit mois plus tard ! Est-ce vraiment satisfaisant ?

Il en est de même des crédits d’impôt. On lit dans les dossiers de presse du ministère que les entreprises bénéficieront en quelque sorte d’une avance de trésorerie. C’est exact, mais pour les personnes physiques, l’impôt sur le revenu sera prélevé immédiatement sans qu’elles puissent bénéficier en même temps de la déduction fiscale qu’est le crédit d’impôt : il y faudra un an, après que l’on aura vérifié que le contribuable n’a pas dépassé les plafonds de revenus légalement requis. Cette asymétrie est gênante.

Nous avions émis de nombreuses réserves et remarques sur la confidentialité. Dans ce domaine, de nombreux points ont évolué ; je ne reviens pas sur le taux neutre. Mais, alors que le système est déjà compliqué, la réforme accentue cette complexité et crée une véritable usine à gaz. Imaginez le nombre de va-et-vient qu’elle occasionnera entre le contribuable, l’entreprise et les services fiscaux… L’individualisation ne réglera pas tous les problèmes.

Nous avions soulevé la question de l’égalité entre les femmes et les hommes. Pour les femmes, dont les revenus sont souvent inférieurs à ceux des hommes, la « conjugalisation » de l’impôt aura pour effet une augmentation du prélèvement sur le salaire, et par voie de conséquence, une diminution du revenu disponible.

On nous rétorque que l’individualisation règle tous les problèmes. Mais j’attire votre attention sur le fait que celle-ci doit être demandée par le contribuable. Gardons-nous d’une vision trop idyllique de la réalité d’un couple…

J’insiste également sur les relations nouvelles entre l’administration fiscale et l’employeur qu’instaure le prélèvement à la source. Aujourd’hui, pour le contribuable, il existe une seule source d’erreurs : l’administration fiscale ; demain, il y en aura deux, puisque les erreurs pourront provenir également de l’employeur. Cela risque de poser un certain nombre de questions.

On assiste à un renversement de la charge de la preuve. Jusqu’à présent, le contribuable déclarait ses impôts, recevait son avis d’imposition dont il vérifiait l’adéquation avec sa déclaration, puis payait. Demain, il devra d’abord payer, ensuite déclarer avant de recevoir l’avis, à charge pour lui à ce moment-là de démontrer qu’une erreur a été commise un an auparavant.

Enfin, on peut s’interroger sur l’intervention d’un tiers pour collecter un impôt dont le taux de recouvrement atteint 99 %. Nous connaissons les difficultés de recouvrement de la TVA : en sollicitant le concours d’entreprises en difficulté, le taux de recouvrement de l’impôt sur le revenu va inéluctablement baisser.

La mise en œuvre de cette réforme va poser de gros problèmes aux services fiscaux qui ont déjà subi 30 000 suppressions de postes en dix ans. D’autres gains de productivité ne sont pas envisageables.

Les services fiscaux devront prendre en charge le reste à recouvrer des entreprises et l’information des contribuables ainsi que gérer l’ajustement en temps réel des taux d’imposition ; à cet égard, le délai de trois mois qui a été avancé entre la demande de rectification du taux d’un contribuable et l’application sur son salaire me paraît totalement irréaliste.

M. Dominique Lefevbre. Je souhaite poser une question simple sur la DGFiP que vous représentez. Ce grand service d’État, essentiel – il n’y a pas d’État sans impôt –, peut-il être mis en difficulté par une réforme que la France est le seul pays européen, avec la Suisse, à ne pas avoir mise en œuvre ? Avez-vous des échanges avec vos homologues des autres services collecteurs d’impôt européens ? Au Royaume-Uni, aux Pays-Bas, en Belgique, au Luxembourg, en Allemagne, en Espagne, au Portugal, en Italie, toutes les administrations fiscales prélèvent l’impôt à la source. Or, je n’ai pas l’impression qu’elles sont moins performantes que la nôtre, ni qu’elles peinent à relever ce défi.

Un certain nombre d’impôts font déjà l’objet d’un prélèvement à la source, sans que celui-ci soit nécessairement libératoire. On collecte environ 90 milliards d’euros de CSG par un prélèvement à la source auprès des employeurs. Je n’ai pas entendu parler de problèmes de recouvrement, y compris pour les entreprises en difficulté. Il s’agirait en l’espèce de collecter 70 milliards. Pourquoi saurait-on le faire pour la CSG mais pas pour l’impôt sur le revenu ? D’autant que cette réforme est concomitante, pour une bonne partie en tout cas, avec la mise en place de la déclaration sociale nominative : la question est bien celle de la transmission entre les services de la DGFiP et chaque employeur du taux de prélèvement à la source qui doit être appliqué à leur salarié. J’ai du mal à comprendre en quoi ce n’est pas faisable.

Que cette réforme demande un changement des comportements et donne lieu à des décalages de trésorerie, j’en conviens. Mais pour la grande majorité des contribuables, qui ne cumulent pas les revenus prélevés à la source avec d’autres types de revenus, ni les crédits et les réductions d’impôt – qui finissent, vos organisations syndicales le disent, par saper l’assiette de l’impôt sur le revenu –, le prélèvement à la source permet de connaître son revenu disponible pour consommer, investir, épargner, après paiement de l’impôt dû sur ce revenu. Or actuellement, on perçoit le revenu et on paye un an plus tard : les recours gracieux, que vous avez évoqués, concernent dans la majorité des cas des contribuables qui ne sont pas en mesure de payer leurs impôts l’année qui suit leur déclaration car leurs revenus ont baissé. C’est le cas classique des personnes partant à la retraite ou se retrouvant au chômage.

Se pose également la question de la réhabilitation de l’impôt. J’ai commencé ma carrière comme assistant social : j’avais compris qu’il était facile de pousser les gens dans l’endettement. Une situation dans laquelle le citoyen lambda dispose d’un revenu disponible sur son compte en banque net de prélèvements, sous réserve de régularisations a posteriori, ne me paraît pas choquante.

Enfin, s’agissant des crédits et réductions d’impôt dont vous dénoncez parfois les opportunités d’optimisation qu’ils offrent aux hauts revenus, ne pensez-vous pas qu’il serait préférable, y compris pour les assainir à long terme, que l’État fasse ultérieurement un chèque de remboursement ? À ma connaissance, c’est ce qui se passe aux États-Unis, au Royaume-Uni ou en Allemagne. Les crédits et réductions d’impôt ont toujours été payés en année N + 1. Je ne vois pas en quoi cette réforme y changera quoi que ce soit : ils seront toujours payés en année N + 1. L’État saura signifier au contribuable le montant exact des dispositifs votés dans cette assemblée qui permettent d’alléger son impôt. Cela fera apparaître que l’impôt sur le revenu soumis au barème est aujourd’hui déjà élevé, très progressif et que, je l’avais indiqué dans mon rapport sur la fiscalité des ménages, son produit est très concentré sur les derniers déciles.

M. Christophe Caresche. Vous avez largement évoqué les conséquences de la réforme pour les contribuables, en soulevant des interrogations légitimes. Pouvez-vous préciser davantage quel en sera l’impact sur les services fiscaux ?

Mme Marie-Christine Dalloz. Une fois n’est pas coutume, messieurs, nos regards politiques vont se croiser…

Aujourd’hui, nous constatons qu’au fil des années les citoyens sont de plus en plus nombreux à utiliser la télédéclaration. En outre, grâce à la mensualisation, l’État est assuré de percevoir des revenus réguliers.

Compte tenu de ces évolutions, qu’est-ce qui pourrait justifier la réforme ? Pour faire comme les autres ? Je ne crois pas aux réformes pour faire comme les autres. La modernisation de notre système fiscal ? je n’y crois pas non plus. Enfin, il faut le dire, il y aura une année blanche.

Je suis farouchement opposée au prélèvement à la source car cette réforme ne règle rien. C’est édifiant : Dominique Lefebvre vient de nous dire que cette réforme permettra d’assainir à long terme les crédits et les réductions d’impôt. Si on veut les supprimer, il faut le dire tout de suite. Mais ayons d’abord le courage de réformer dès maintenant notre modèle fiscal !

Enfin, on oublie cette spécificité française qu’est le quotient familial : il n’existe nulle part ailleurs. Gardons ce dispositif tel qu’il est.

Vous faites état de 30 000 suppressions d’emplois dans les services fiscaux sur les dix dernières années. Chaque gouvernement, certes, a sa part de responsabilité. Quelles sont les conséquences en termes d’emplois de cette réforme ?

M. Nicolas Sansu. Pour répondre à Dominique Lefebvre, on ne peut pas comparer le prélèvement de la CSG et celui de l’impôt sur le revenu. La CSG est calculée sur la base d’un taux quasi unique et proportionnel. En outre, l’employeur n’a pas à connaître la situation familiale du salarié pour prélever la CSG.

Je suis inquiet pour la confidentialité. Le contribuable doit conserver un lien direct avec l’administration fiscale, avec l’État ; l’intervention d’un tiers n’est pas une bonne chose. Qui plus est, la « conjugalisation » et la « familialisation » de l’impôt sur le revenu en France compliquent la donne.

Enfin, qu’est-ce qui est le plus important ? Que l’impôt sur le revenu soit bien recouvré. La mensualisation et le recours gracieux sont autant de moyens qui nous permettent d’avoir le meilleur taux de recouvrement d’Europe. Sans doute les autres pays européens sont meilleurs, puisqu’ils pratiquent le prélèvement à la source, mais ils recouvrent moins bien que nous. Faut-il aller vers un système qui ne garantit pas un recouvrement aussi efficace que celui d’aujourd’hui ?

Monsieur Lefebvre, j’entends votre argument sur les niches fiscales. Il y a quatre ans, nous eussions pu en supprimer un certain nombre, comme le proposait le programme d’un candidat à la présidence de la République. Je n’y peux rien si les niches fiscales ont augmenté durant les quatre dernières années.

M. le président Gilles Carrez. Hors crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), elles n’ont pas augmenté.

M. Nicolas Sansu. Mais le CICE est une niche fiscale, monsieur le président. Force est de reconnaître que les niches ont augmenté de 12 milliards d’euros par an.

Une question reste en suspens, monsieur Lefebvre, vous qui êtes un rocardien assumé. On sait que le prélèvement à la source constitue le premier pas vers une fusion entre la CSG et l’impôt sur le revenu. Il faut arrêter de se raconter des histoires. Mais, dans ce cas, il faut s’interroger sur le financement de la protection sociale : faut-il la financer par l’impôt sur le revenu ou par les cotisations sociales ? Cette question n’apparaît jamais dans la présentation de votre réforme. Pensez-vous, messieurs les syndicalistes, que le prélèvement à la source est la première étape de la fusion ?

M. Pierre-Alain Muet. Que le prélèvement à la source soit la première étape d’une fusion de l’impôt sur le revenu et de la CSG ne me gêne nullement puisque j’ai toujours plaidé pour cette dernière. Les deux sujets peuvent néanmoins être traités indépendamment.

Quant à l’affirmation selon laquelle un impôt progressif ne pourrait pas être prélevé à la source, je rappelle que les cotisations sociales, qui sont dégressives, font l’objet d’un prélèvement à la source.

M. Nicolas Sansu. Mais elles n’ont pas de caractère familial.

M. Pierre-Alain Muet. Il est proposé que le prélèvement de l’impôt conjugalisé soit individualisé. Cette proposition me paraît importante car elle corrige une des inégalités du quotient familial qui est d’appliquer un taux trop élevé au revenu le plus faible, souvent celui des femmes. Avec le prélèvement à la source individualisé, l’impôt est prélevé sur le revenu de chacun en fonction de son niveau de contribution.

Dans l’histoire, le prélèvement à la source a souvent été mis en place pour réaliser des gains de productivité et pour améliorer le recouvrement. Ce n’est clairement pas le sujet aujourd’hui. Tous les gains de productivité ont déjà été réalisés grâce à l’informatisation de l’imposition et le recouvrement est excellent. Cette réforme possède une vertu fondamentale : celle de rendre l’impôt plus citoyen et plus proche de la réalité des contribuables. Nous sommes le seul pays dans lequel l’impôt est payé avec une année de décalage. L’impôt ne s’ajuste pas aux baisses de revenus occasionnelles. On peut parler d’imposition contemporaine ; c’est une fiction pour éviter le prélèvement à la source. La seule façon d’ajuster correctement l’impôt aux revenus instantanés est le prélèvement à la source. On le fera d’autant qu’une grande réforme sera intervenue, la DSN. Quand celle-ci sera au point, le décalage sera de l’ordre de deux ou trois mois, contre un an ou un an et demi aujourd’hui. C’est bien de s’ajuster à la bonne assiette ; c’est encore mieux quand on ajuste la bonne assiette avec le bon taux.

Cette réforme est essentielle pour nos concitoyens ; c’est la raison pour laquelle elle a été dans l’histoire proposée par divers partis politiques.

L’impôt en France comporte de nombreuses niches fiscales parce qu’elles passent inaperçues. Le fait que les niches fiscales soient payées avec une année de décalage permettra à ceux qui en bénéficient de se rendre compte que ces dispositifs – un peu moins de 450 – sont dérogatoires. Les taux de l’impôt sur le revenu paraissent très élevés mais l’impôt est mité par les niches fiscales, ce qui n’est pas particulièrement citoyen. À défaut d’une réforme plus ample, nous devrions au moins faire cette réforme qui devrait être consensuelle. Elle constitue une grande avancée.

Cette réforme ne remet absolument pas en cause le travail de la DGFiP. C’est elle qui fixera les taux et recouvrera l’impôt in fine. Je suis étonné que les syndicats n’aient pas évolué sur ce point. Je comprends certaines critiques mais j’aimerais que la dimension citoyenne – je sais que vous y êtes attachés – ne soit pas oubliée.

Mme Véronique Louwagie. Quel sera l’impact en termes d’emplois de cette réforme ? On peut supposer qu’elle aura pour conséquence une augmentation de la télédéclaration.

Cette réforme donnera-t-elle lieu à une modification de l’organisation des services, notamment géographique ? Doit-on s’attendre à une concentration, voire à la suppression de services, sur certains territoires ?

M. le secrétaire général de Solidaires Finances publiques. S’agissant tout d’abord des gains de productivité éventuels et des éventuelles suppressions d’emplois, chaque fois que nous rencontrons Christian Eckert ou que nous avons des échanges avec notre directeur général, il nous est affirmé que la mise en place du prélèvement à la source, si elle advient, ne générera pas de suppressions d’emplois. Pour nous, syndicats, cette mise en place devrait conduire à tout le moins à un moratoire sur les suppressions d’emplois dès cette année, voire à des créations d’emplois. Car de notre point de vue, le mécanisme de gestion du prélèvement à la source tel qu’il est prévu aujourd’hui va entraîner une surcharge de travail et la mise en œuvre de procédures nouvelles.

Deuxième point que vous avez soulevé : la structure et l’organisation du travail. Aujourd’hui, il y a un lien direct entre le redevable et l’administration fiscale, la DGFiP. Il y aura désormais un troisième intervenant : le service qui gérera l’assiette de l’impôt sera différent de celui qui gérera le recouvrement, alors que l’ambition qui sous-tendait la création de la DGFiP et la fusion de la direction générale des impôts (DGI) et de la direction générale de la comptabilité publique (DGCP) était bien de faire en sorte que le contribuable ait affaire, sinon à un interlocuteur fiscal unique, du moins à un service unique prenant à la fois en charge l’assiette et le recouvrement. Nous ne sommes pas des archaïques primaires opposés aux progrès de l’informatique ; nous prenons en compte les évolutions qui entrent en jeu dans notre administration ou ailleurs. Mais la mécanique va se compliquer lorsqu’il faudra apparier nos bases de données qui sont notamment issues des télédéclarations : jusqu’ici, quand un agent des finances publiques faisait de la saisie manuelle – travail rébarbatif et sans aucune valeur ajoutée –, il pouvait, s’il en avait le temps, rectifier certaines informations nécessaires au calcul de l’assiette et au recouvrement. Aujourd’hui, le transfert de la saisie des informations au contribuable par le biais de la télédéclaration entraîne une détérioration régulière des bases de données qu’il faut rectifier chaque année pour faire en sorte que leur contenu soit cohérent.

Mais là où cela va devenir grave, c’est au niveau du traitement des demandes des contribuables. Aujourd’hui, malgré notre équipement informatique, les contribuables persistent à venir en masse dans nos services pour avoir une relation directe avec les agents des finances publiques et des explications sur la fiscalité, sur le paiement, etc. On recense à peu près 3,5 millions de contacts annuels, y compris avec des contribuables qui sont des internautes mais qui nous sollicitent pour avoir des explications et des renseignements. Nous pensons que dès l’année prochaine, puis en 2018 et au cours des années suivantes, nous serons énormément sollicités – d’abord, pour obtenir des explications et ensuite, pour l’ajustement des taux d’imposition en cours d’année. C’est pour nous permettre d’absorber cette charge de travail que nous revendiquons à tout le moins un moratoire sur les suppressions d’emplois, voire des créations d’emplois.

Concernant l’organisation géographique des services, il faut savoir que depuis cinq ans de manière très forte, est appliqué, indépendamment de la mise en place à venir du prélèvement à la source, un plan de restructuration et de resserrement du réseau des services de la DGFiP qui pousse à la concentration – c’est là où je rejoins l’analyse de M. Dominique Lefèvre –, à la départementalisation et à la régionalisation, nonobstant l’impact des réformes territoriales. Il est clair que la gestion du prélèvement à la source va être assurée par le biais de plateformes téléphoniques – ce que l’on appelle aujourd’hui chez nous les « centres de contact », centres d’impôts virtuels pour les particuliers. Tout se fera à distance : c’est ainsi que notre administration nous présente l’organisation d’un premier niveau chargé de répondre aux premières questions sur le prélèvement à la source. Il y aura donc bien restructuration du réseau, disparition de nombreux sites de la DGFiP en zones rurales et périurbaines et véritable concentration en centre-ville dans les grandes métropoles urbaines – sur des sujets métier mais aussi sur des sujets de gestion interne des ressources humaines.

Pour en revenir au premier point, la difficulté pour la DGFiP ne réside pas dans la mise en œuvre du recouvrement : les outils dont nous disposons aujourd’hui permettent de le faire sans problème. Ce que nous avons voulu dire, c’est que la structure de l’impôt sur le revenu finit par coincer et que pour éviter aux contribuables d’être pénalisés par la conjugalité ou le quotient familial, on invente des dispositifs qui sont de véritables usines à gaz. Il sera extrêmement compliqué pour le contribuable de faire évoluer son taux d’imposition en cours d’année pour tenir compte d’un événement familial survenant en 2018, d’autant que la conclusion d’un mariage ou d’un pacs, la séparation de pacsés, le divorce et le décès du conjoint sont les seuls cas où l’évolution du taux est automatique : le contribuable déclare la situation et l’administration calcule l’impact que pourra avoir cette situation sur l’impôt sur le revenu – mais ex ante puisqu’il s’agit toujours de la situation de l’année précédente. Dans les autres situations – naissance, crédit d’impôt, travaux immobiliers donnant lieu à déduction –, on ne peut procéder au calcul de manière contemporaine sur le prélèvement : il faut attendre la déclaration. Et même en cas de naissance d’un enfant à charge, les choses sont très compliquées d’après ce que je lis dans l’avant-projet de loi. Certes, ce texte peut toujours évoluer mais je n’ai pas spécialement envie de solliciter de bonnes idées pour l’améliorer pour que cela nous amène peut-être demain à dire qu’il est très bien conçu. Il y a là une vraie difficulté. Je vous laisse une note présentant deux exemples chiffrés, l’un d’un contribuable partant à la retraite, l’autre d’un contribuable salarié, au regard de l’évolution du taux. Vous y verrez que le retraité va devoir cotiser pendant un an et demi alors que son impôt sur le revenu sera de zéro. Au bout de cette année et demie, on lui remboursera le trop-versé.

M. le secrétaire général adjoint de la CGT Finances. Rassurez-vous, nous sommes nous aussi, en tant que représentants d’organisations syndicales, très attachés à l’aspect citoyen de l’impôt. D’ailleurs, une grande partie des réserves que nous avons vis-à-vis du prélèvement à la source sont fondées là-dessus. D’abord, nous réclamons une véritable réforme de la fiscalité – ce que n’est pas ce texte. Je suis aussi assez content que nos critiques vis-à-vis du trop grand nombre de niches fiscales convergent avec les vôtres. Je prends acte de cette avancée et m’en réjouis. Mais dire que le prélèvement à la source va être une réhabilitation de l’impôt sur le revenu me laisse pantois. Aujourd’hui, l’impôt est direct. C’est vraiment un impôt citoyen, symbole de notre impôt révolutionnaire. Le citoyen déclare son revenu, reçoit un avis puis paie son impôt. Or, on va transformer cet impôt citoyen en impôt indirect. On va le rendre invisible, noyé, perdu. On ne saura même plus qu’on le paie. Est-ce le réhabiliter et le mettre en avant ? Je ne le pense pas.

S’agissant de ce que cela peut impliquer dans l’avenir, je ne dirai pas quelle est ma position personnelle quant à savoir s’il est bon que l’impôt soit conjugalisé, familialisé ou individualisé. En revanche, que l’on soit en faveur de ce dispositif ou contre, il est évident que le prélèvement à la source peut être une première marche vers la fusion de l’impôt sur le revenu et de la CSG mais nous avons, nous, d’autres inquiétudes. Dans la mesure où l’impôt sur le revenu est un impôt particulièrement citoyen, nous souhaitons qu’il soit davantage progressif ; or il l’est de moins en moins puisque ces dernières années, on a supprimé tranche après tranche. C’est exactement l’inverse que nous souhaitons. Ce prélèvement à la source pourrait aussi être une première marche vers la mise en place d’une flat tax. Je suis sûr que dans l’hémicycle, certaines personnes sont pour et que d’autres, comme nous, y sont opposées. Je ne pense donc absolument pas que l’on réhabilite l’impôt sur le revenu. Et en termes de nature du recouvrement, la CSG et de l’impôt sur le revenu ne sont absolument pas comparables : l’impôt sur le revenu est progressif, conjugalisé et familialisé là où la CSG s’applique à un individu et est proportionnelle.

Nous sommes nous aussi pour que le prélèvement soit le plus contemporain possible. C’est évidemment une avancée mais il faut qu’il soit mis en place dans des conditions optimales. Pourquoi confier ce recouvrement, même s’il est plus contemporain, aux entreprises plutôt qu’aux administrations fiscales ? M. Éric Woerth, ancien ministre de l’économie, affirmait que les PME avaient mieux à faire que de recouvrer l’impôt : nous pensons nous aussi que ce n’est pas leur rôle premier.

Vous disiez que l’amélioration de la DSN pourrait rendre le taux plus contemporain. Or, ce n’est pas la DSN mais le système fiscal qui fait que le taux peut être contemporain ou non. Quelle que soit la réactivité de la DSN, au 1er janvier d’une année N, vous ne pourrez pas préjuger du revenu qu’un contribuable pourrait percevoir le 31 décembre de cette même année. Dès lors, le taux sera totalement faux si cette personne perçoit des revenus importants au mois de décembre. Cela ne changera donc rien. Le système fiscal étant annualisé, tant que l’année n’est pas terminée, on ne peut déterminer avec certitude un taux d’imposition.

Ne nous trompons pas de débat : jamais la CGT n’a condamné la dématérialisation ni la télédéclaration. Dès lors qu’elles peuvent avoir un effet positif et simplifier la vie des contribuables, nous y sommes tout à fait favorables. Nous y sommes opposés lorsqu’elles sont le prétexte de suppressions d’emplois alors même que nous avons des tâches considérables à accomplir et des défis extrêmement importants à relever – par exemple, en matière de fraude fiscale.

Sur le plan international enfin, on ne peut comparer ce qui n’est pas comparable. Les systèmes fiscaux ne sont pas identiques en Allemagne, aux États-Unis et en France. Indiscutablement, la mise en place d’un prélèvement à la source est beaucoup plus compliquée en France en raison du fait que l’impôt est conjugalisé, progressif et familialisé. D’ailleurs, il est également un dispositif qui pose problème et dont les contribuables se plaignent en Allemagne : le décalage dans le remboursement des crédits d’impôt par rapport au prélèvement à la source. Dans une logique comptable, il y a des recettes et des dépenses mais les contribuables se retrouvent redevables de recettes tout en devant attendre un an et demi pour se faire rembourser en dépenses.

M. le secrétaire général de Solidaires Finances publiques. Je terminerai en appelant votre attention sur le taux de recouvrement de l’impôt sur le revenu. Je ne parle pas des entreprises indélicates qui ne reverseraient pas l’impôt, comme certaines s’en abstiennent aujourd’hui pour la TVA. Toutes les entreprises ne sont pas indélicates, mais il faut imaginer le cas de celles qui, étant en difficulté, se retrouveraient placées en situation de redressement ou de liquidation judiciaire : comment récupérer l’impôt sur le revenu qu’elles auront prélevé ?

M. Nicolas Sansu. Il suffit de voir ce qui se passe pour les cotisations Urssaf…

M. le président Gilles Carrez. Exactement ! Nous vous remercions, messieurs, de cet échange très utile.

TABLE RONDE AVEC LES REPRÉSENTANTS DU MEDEF ET DE LA CGPME

Lors de sa séance du 21 septembre 2016, la commission a entendu, sous forme de table ronde, M. Geoffroy Roux de Bézieux, vice-président délégué du Mouvement des entreprises de France (MEDEF), et M. Gérard Orsini, président de la commission juridique et fiscale de la Confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME), sur l’avant-projet de texte transmis par le Gouvernement et relatif à la modernisation du recouvrement de l’impôt sur le revenu par la mise en place du prélèvement à la source.

M. le président Gilles Carrez. Nous poursuivons le cycle d’auditions sur l’avant-projet de texte transmis par le Gouvernement et relatif à la modernisation du recouvrement de l’impôt sur le revenu par la mise en place du prélèvement à la source, qui semble devoir être désigné désormais sous l’acronyme « PALS ».

Hier, nous avons entendu les principaux syndicats de fonctionnaires du ministère des finances ; la semaine prochaine, nous recevrons la direction générale des finances publiques (DGFiP). Aujourd’hui, nous accueillons les représentants des entreprises qui se verraient confier un rôle d’auxiliaire, de collaborateur dans le recouvrement de l’impôt : M. Geoffroy Roux de Bézieux, vice-président délégué du Mouvement des entreprises de France (MEDEF), et M. Gérard Orsini, président de la commission juridique et fiscale de la Confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME).

M. Geoffroy Roux de Bézieux, vice-président délégué du Mouvement des entreprises de France (MEDEF). Les entreprises que représente le MEDEF ne sont pas hostiles par principe ou par idéologie au prélèvement à la source. Toutefois, les conditions dans lesquelles cette réforme est engagée nous paraissent extrêmement inquiétantes et dangereuses.

D’abord, je souligne l’absence de concertation avec les entreprises. La première réunion technique avec la DGFiP aura lieu demain, à notre demande répétée.

Ensuite, il est inenvisageable pour nous de mettre en œuvre cette réforme sans avoir auparavant simplifié l’impôt sur le revenu. Lorsque j’étais salarié en Angleterre, j’étais prélevé à la source, mais l’impôt se résumait à trois tranches, deux niches fiscales et n’était pas « familialisé ». Ce schéma est à l’opposé de l’impôt français. L’argument selon lequel tous les autres pays pratiquent le prélèvement à la source est à mon avis, pour cette raison, assez biaisé.

Enfin, il a fallu sept ans pour mettre en place la déclaration sociale nominative (DSN) – la dernière tranche devrait être achevée pour l’été 2017. La réforme du prélèvement à la source est conduite à marche forcée pour pouvoir être appliquée le 1er janvier 2018.

Un certain nombre de points nous inquiètent : en premier lieu, les coûts, qui ne sont pas complètement négligeables, contrairement à ce qu’on nous dit. Ce sont à la fois des coûts informatiques – pour la modification des logiciels de paie –, qui représentent un coût d’entrée que nous avons du mal à estimer – nous sommes curieux de voir l’étude d’impact réalisée par la DGFiP qui nous sera présentée demain –, mais aussi des coûts cachés : du temps, des équipes. Les grandes entreprises vont pouvoir organiser le prélèvement à la source – la responsable fiscale du groupe L’Oréal m’a indiqué qu’elle avait déjà prévu de mettre en place une équipe spéciale pour répondre aux salariés, équipe qui sera autonome afin de préserver le secret fiscal.

Une telle organisation est possible dans un grand groupe. Dans une entreprise de plus petite taille, c’est soit le président-directeur général, soit la direction des ressources humaines qui se trouvera face aux salariés. Le 31 janvier 2018, les salaires nets vont baisser en moyenne de 200 euros. Le calcul est simple : le salaire médian s’élève à 2 200 euros, le taux d’imposition moyen s’établit à 10 %, le montant prélevé sera donc de 200 euros. Malgré toutes les campagnes de communication de la DGFiP, il est certain que les salariés se tourneront vers leurs employeurs. Nous en avons un exemple récent : lors de la fiscalisation des heures supplémentaires ou de la participation employeur aux complémentaires santé, les salariés sont venus nous voir. La direction générale devra consacrer du temps à la mise en œuvre de cette réforme et à son explication.

Autre sujet de préoccupation, le secret fiscal. Nos salariés vont être soumis au secret fiscal. Certes, la violation du secret fiscal doit être intentionnelle, mais la preuve en est difficile à administrer, et elle donne lieu à des sanctions pénales ainsi qu’à des amendes très significatives. Monsieur X peut vouloir se venger de madame Y en divulguant son taux de prélèvement. Tel est le type de problème auquel nous allons être confrontés : on ne peut pas laisser à l’entreprise la responsabilité de le résoudre.

La clause de non-discrimination fiscale, qui a été ajoutée par le Conseil d’État, nous paraît excessivement dangereuse. Là aussi, le fait que l’entreprise détienne une information sur les revenus d’un foyer fiscal pose un énorme problème. Je le disais en introduction : la « familialisation » de l’impôt en France rend cette réforme très complexe. On nous dit qu’on peut dissocier les taux d’imposition, mais ce choix sera minoritaire.

Il nous semble qu’il existe une autre manière de rendre l’impôt contemporain du revenu, puisque tel semble être l’objectif à la lecture de l’exposé des motifs, et de permettre au contribuable de mieux gérer sa trésorerie. C’est, sans passer par les entreprises, de rendre le prélèvement mensuel contemporain. On atteint le même but d’un point de vue psychologique et de gestion de la trésorerie pour les contribuables mais sans faire appel aux entreprises.

Deux derniers points : en Suisse, les entreprises sont rémunérées pour effectuer le prélèvement à la source, ce qui atteste de la réalité de la charge imposée aux entreprises. Il me semble que les entreprises perçoivent 2 % du prélèvement au titre des frais de gestion.

L’absence de prise en compte des crédits et réductions d’impôt constitue pour nous
– et sans doute aussi pour le contribuable – un autre sujet d’inquiétude, car elle risque de se traduire par une majoration du taux de prélèvement, qui aura des effets non plus neutres sur la trésorerie, mais négatifs.

M. Gérard Orsini, président de la commission juridique et fiscale de la Confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME). Mon discours ne sera pas différent de celui de M. Roux de Bézieux.

Pour une petite entreprise, la mesure impliquera de déléguer l’élaboration du prélèvement et de la déclaration sur les bulletins de salaire à des experts-comptables. Ainsi, le coût du bulletin de salaire augmentera de un, voire de deux euros. Psychologiquement, pour le patron de la PME, c’est un handicap. Ce sont des récriminations de ce type qui vont remonter à la CGPME. Chaque fois qu’il y a une augmentation, le petit patron tousse et la CGPME tremble.

On nous explique que le prélèvement contemporain va dans le sens de la citoyenneté par rapport à l’impôt. Pourtant, aujourd’hui, le citoyen perçoit sa rémunération et dispose librement de son argent pour le mettre de côté et payer l’impôt. Sa responsabilité sur son budget est donc complète et entière. Or le prélèvement automatique va en quelque sorte le déresponsabiliser, alors qu’il ne s’agit que de viser des populations – retraités et chômeurs – qui traversent des périodes particulières de la vie, quand elles ne sont pas victimes d’accidents de la vie. On élabore un système général pour répondre à des situations particulières.

On pourrait comprendre la réforme s’il s’agissait de baisser la pression fiscale pour rendre du pouvoir d’achat. Mais il s’avère qu’il n’y a aucun retour sur l’impôt. Au contraire, on aboutit à une complexification de l’impôt tant dans sa procédure que dans son mode de fonctionnement. Rappelons que l’impôt sur le revenu entre dans les caisses de l’État à plus de 98-99 %, donc de façon très sûre, alors que les prélèvements et les déclarations faites par les entreprises rentrent un peu moins bien ; pour les déclarations de taxe sur la valeur ajoutée (TVA), je crois que le différentiel est de l’ordre de 4 %.

M. Alain Fauré et M. Dominique Lefebvre. C’est faux !

M. le président de la commission juridique et fiscale de la CGPME. Ce sont les chiffres que nous avions relevés.

En tout état de cause, il n’y a pas de simplification puisque le système déclaratif reste le même et qu’il faudra ajuster entre les prélèvements automatiques et ceux qui interviendront en régularisation, après la déclaration des revenus. Les entreprises vont devoir assurer ce prélèvement et assumer le coût qui en résulte.

Afin de préserver la confidentialité, mais aussi la neutralité de la politique salariale, j’entends bien que des dispositions sont prévues pour réprimer les éventuelles discriminations fondées sur des informations fiscales. Cependant, si un petit patron doit arbitrer entre deux secrétaires, l’une dont le foyer fiscal perçoit des revenus élevés et une autre qui se trouve dans l’embarras, il aura plutôt tendance à augmenter la dernière. Une bonne politique salariale ne peut pas être uniquement fondée sur une sensibilité aux questions sociales ; elle doit plutôt être la juste rétribution du travail. La réforme créera au sein de l’entreprise des différences qui n’existaient pas jusqu’alors entre les salariés, ce qui peut ne pas être sans conséquence sur le climat social. Resteront-ils sans réaction lorsqu’ils percevront un salaire amoindri à la fin du mois ?

Je note également que, aujourd’hui, les professionnels indépendants peuvent gérer librement leur trésorerie en vue d’un paiement de l’impôt sur le revenu par tiers. Demain, ils seront soumis à des prélèvements mensuels actualisés au doigt mouillé. Quant au taux « neutre », il risque de faire florès. Il y aura deux populations : ceux qui n’ont qu’une seule nature de revenus se laisseront prélever par leur entreprise au taux calculé par l’administration, mais ceux qui disposent de sources de revenus diverses préféreront probablement un taux « neutre » qui ne révélera pas leur véritable niveau d’imposition, ce qui pourrait engendrer un retard d’encaissement de l’impôt pour le Trésor public.

En clair, cette réforme ne satisfait les PME ni sur le plan de la responsabilité et de la citoyenneté du contribuable ni en termes de simplification de l’impôt et d’amélioration des flux de trésorerie. Pour l’entreprise se posent des problèmes de gestion de l’impôt et de confidentialité.

Mme Valérie Rabault, Rapporteure générale. Avez-vous pris contact avec les organisations patronales des pays dans lesquels le prélèvement à la source est déjà en place, par exemple en Allemagne ou au Royaume-Uni ? La plupart des pays ont opté pour cette méthode de prélèvement, mais, à la différence du cas français, il est vrai qu’ils ne pratiquent pas la « conjugalisation » – sauf, sur option, aux États-Unis. Nous serions sans doute le premier pays avec « conjugalisation » de l’impôt à mettre en place le prélèvement à la source.

J’ai été sensible à l’argument selon lequel le fait d’avoir connaissance du taux d’imposition de ses salariés peut influencer la politique salariale mise en œuvre à leur égard. Nous avons néanmoins constaté que tout était écrit sur le bulletin de salaire des Allemands, mise à part la déclaration de la religion qui déclenche aussi le paiement d’un impôt. Comment font-ils ?

M. Dominique Lefebvre. Je comprends que chacun puisse avoir une opinion générale sur la réforme, mais j’aimerais que nous nous en tenions aux faits. Monsieur Roux de Bézieux, vous affirmez que la première réunion sur le sujet, entre le MEDEF et la DGFiP, aura lieu demain à votre demande, alors que les deux ministres, avec lesquels nous nous trouvions encore hier soir, nous ont dit qu’il y avait déjà eu des échanges avec les organisations d’employeurs, les organisations d’experts-comptables et les éditeurs de logiciels.

Il est clair qu’une réforme de cette ampleur ne se met pas en place en trois jours. Mais un délai suffisant est prévu entre le vote du texte, qui interviendra à la fin de l’année, et sa mise en œuvre. J’invite les uns et les autres à travailler dans l’idée qu’il y aura bien une réforme, et, en conséquence, à la calibrer au mieux. Je ne suis pas certain qu’une nouvelle majorité reviendrait sur cette réforme en 2017.

La question de la performance du recouvrement avait déjà été posée hier, avec les organisations syndicales de la DGFiP. Actuellement, le taux de recouvrement de la contribution sociale généralisée (CSG), collectée par les entreprises, est supérieur à celui de l’impôt sur le revenu. Je ne vois pas en quoi les choses seraient fondamentalement différentes dans le cadre de la réforme. Pour les entreprises, seule la gestion de taux différenciés distingue le prélèvement de l’impôt sur le revenu de celui de la CSG. Mais, à ma connaissance, elles gèrent déjà des taux différenciés pour la perception de cotisations sociales à un certain nombre de régimes complémentaires. Il leur reste à s’assurer de la fiabilité de la transmission par la DGFiP du taux appliqué aux salariés, qui peut être modulé en cours d’année. Cette fiabilité repose notamment sur la généralisation de la DSN. Tout le reste relève d’une relation entre la DGFiP et le contribuable.

Mme la Rapporteure générale l’a souligné : le prélèvement à la source est généralisé hors de France. La seule véritable grande spécificité de l’impôt sur le revenu français par rapport aux autres pays concerne un sujet hors champ : le nombre des crédits et des réductions d’impôt. Il s’agit, le cas échéant, d’un problème de trésorerie entre la DGFiP et le contribuable. Partout ailleurs dans le monde, le prélèvement à la source concerne les entreprises de toute taille et donne satisfaction aux salariés. Certains de mes collaborateurs ont travaillé aux Pays-Bas, en Allemagne ou au Royaume-Uni, où ils ont été prélevés à la source : tous trouvent que c’était plus simple.

Et puis, quelle différence de nature voyez-vous entre l’impôt sur le revenu, la CSG et une cotisation sociale pour la maladie et les retraites ? Il n’y en a pas ! Si vous invoquez un problème de rapport citoyen à l’impôt, autant supprimer tous les prélèvements à la source, donner des salaires bruts aux salariés et leur demander de signer des chèques !

Nous sommes entrés dans le débat sur le prélèvement à la source en considérant les cas particuliers. Nous avons surtout parlé des contribuables dont la situation est complexe, qui cumulent les types de revenus, les crédits et les réductions d’impôt, mais la plupart des contribuables perçoivent un seul revenu et ne bénéficient ni de crédits ni de réductions d’impôt. Le taux d’imposition est égal à 0 % pour 50 % des foyers fiscaux : pour les salariés concernés, l’impact du prélèvement à la source sur le salaire net sera donc nul. Par ailleurs, un tiers de 30 % des contribuables qui paient l’impôt sur le revenu a un taux d’imposition compris entre 0 et 3 %, un autre tiers se situe entre 3 et 6 %, et un dernier tiers entre 6 et 9 %. Nous ne faisons pas la réforme pour des cas particuliers, mais pour le cas général. Pour les agents de la fonction publique comme pour nombre de salariés, toutes ces questions ne se posent pas, y compris en ce qui concerne l’affichage du taux d’imposition.

M. Alain Chrétien. Cette réforme est à la fois inutile et néfaste.

Elle est inutile, car 60 % des contribuables sont aujourd’hui mensualisés, et que tous peuvent d’ores et déjà moduler leurs prélèvements mensuels en fonction de leurs revenus. Si l’on voulait adapter le montant de l’impôt à la variation des ressources – ce qui constitue l’un des principaux arguments du Gouvernement pour mettre en œuvre cette réforme –, il aurait suffi de généraliser la mensualisation et d’améliorer la flexibilité des mensualités. Votre projet est donc complètement inutile.

Plutôt que de prélever l’impôt à la source, il faudrait commencer par le faire baisser ! Certes, vous voulez que l’impôt sur le revenu baisse un petit peu aujourd’hui pour faire croire aux Français que c’est votre politique, mais, après 35 milliards d’euros de hausses, vous ne faites qu’un milliard de baisse !

Cette réforme est aussi néfaste. Vous parlez depuis des années de simplifier la vie des entreprises, mais vous l’avez compliquée avec le compte pénibilité, et vous recommencez avec le prélèvement à la source. En ajoutant l’impôt sur le revenu à la TVA et à la CSG qu’elles perçoivent déjà, vous faites des entreprises les premières administrations fiscales de France, devant le ministère des finances. Plutôt que de mettre d’abord en œuvre le prélèvement à la source, il fallait commencer par faire une grande réforme fiscale. Je me souviens de la déclaration de Jean-Marc Ayrault sur ce sujet à la fin de 2013. On peut dire qu’elle n’a pas été suivie d’effets !

Plus grave encore, je crois que cette réforme constitue les prémices d’une fusion de l’impôt sur le revenu et de la CSG, Dominique Lefebvre l’a dit en filigrane…

M. Dominique Lefebvre. C’est faux !

M. le président Gilles Carrez. Cher collègue, permettez-moi de vous interrompre ! Nous aurons un débat général, mais, ce matin, nous traitons des problèmes que risquent de rencontrer les entreprises qui deviennent collecteurs de l’impôt sur le revenu.

M. Alain Chrétien. J’y viens, mais le fait que cette réforme constitue un préliminaire à la fusion de la CSG et de l’impôt sur le revenu aura des conséquences.

Afin de financer les surcoûts auxquels les entreprises devront faire face, les organisations patronales demanderont-elles au Gouvernement de bénéficier d’une partie des frais de gestion prélevés auprès des contribuables ?

M. Alain Fauré. Messieurs, avez-vous été reçus à Bercy, et avez-vous pu faire part de toutes vos interrogations ? Que vous a-t-on répondu ?

Je vous ai entendu évoquer le problème du secret fiscal. Je vous rappelle qu’il se pose déjà aujourd’hui. Lorsqu’un collaborateur fait l’objet d’une saisie sur salaire pour non-paiement d’un impôt ou d’un autre prélèvement, l’employeur est d’ores et déjà tenu de conserver le secret complet.

Vous parlez aussi des prélèvements différenciés. Mais, aujourd’hui, un cadre et un non-cadre font l’objet de prélèvements totalement différents sans que, à ma connaissance, cela pose le moindre problème au sein des entreprises.

J’entends parler de « déresponsabilisation » du citoyen : parlons plutôt de la responsabilité des chefs d’entreprise auxquels il revient d’établir des distinctions salariales favorisant ceux qui s’impliquent et s’appliquent, plutôt qu’en se fondant sur la situation financière des uns et des autres ! J’avoue que l’utilisation d’un tel argument contre le prélèvement à la source me laisse sans voix !

La réforme apporte un avantage concernant les crédits d’impôt. Jusqu’à présent, il fallait attendre la fin de l’année pour faire une déclaration à l’administration fiscale. Désormais, notamment grâce aux outils numériques, il sera possible, tout au long de l’année, d’apporter des informations et de signaler des changements de situation afin d’ajuster le prélèvement à la réalité.

Nous avons encore un an et demi devant nous pour mettre la réforme en place, et, à ce stade, il est bon que nous nous interrogions et que des questions soient posées. Il faut seulement éviter de mélanger le discours politique, comme celui que vient de tenir Alain Chrétien, et l’adaptation et le changement que nos concitoyens attendent.

M. Jean-Christophe Fromantin. Disposez-vous d’éléments concrets, pour chaque grand type d’entreprise, s’agissant des coûts de gestion de la réforme et des dépenses liées au paramétrage et à la configuration des logiciels ? On comprend que la charge ne sera pas équivalente dans une TPE et pour L’Oréal. La comparaison du coût de la réforme pour les entreprises et de son économie pour l’État faciliterait l’évaluation de son utilité – ou son inutilité. Si la charge pour les entreprises, qui devra être compensée par l’État, est supérieure au coût de la gestion actuelle ou au coût d’une généralisation de la mensualisation, nous serons en droit de nous interroger sur la pertinence du dispositif.

Ne pourrait-on pas résoudre le problème de confidentialité en inversant la proposition actuelle ? Au lieu que le recours au taux neutre ou forfaitaire constitue une option, ne pourrait-il pas devenir le taux de « droit commun » ? Le contribuable solliciterait, s’il le souhaite l’application d’un taux ajusté. Cela restituerait à ce dernier une forme d’autonomie dans la gestion de sa trésorerie. Il devrait alors régler en fin d’année le différentiel d’impôts lié à l’écart entre le taux forfaitaire et le niveau de ses revenus.

M. Olivier Carré. Mes collègues évoquent la généralisation du prélèvement à la source dans les autres pays, mais je rappelle qu’elle a eu lieu à une époque où les systèmes informatiques et les rapports entre le citoyen et l’administration n’avaient rien à voir avec ceux d’aujourd’hui. Désormais, dans la plupart des cas, avec les feuilles préremplies et le prélèvement mensuel automatisé, la relation entre le contribuable et l’administration est extrêmement simple. Est-il opportun, en 2016, de mettre en place un dispositif pour lequel les autres pays ont opté il y a une trentaine d’années ? Est-il vraiment moderne aujourd’hui ?

Nous assistons à une forme de privatisation de la collecte de l’impôt. L’entreprise deviendra un tiers collecteur, et elle agira en lieu et place de l’État. Dès lors, je m’interroge sur sa responsabilité. Certes, elle collecte déjà la CSG, mais c’est sur la base d’un taux simple, sans déduction possible, et sans que l’employeur ait accès à une quelconque information sur son salarié. Il me semble donc difficile de comparer les deux collectes. La réforme pose une question majeure : jusqu’où sera engagée la responsabilité juridique de l’entreprise ? À terme, cette situation pourrait être extrêmement pénalisante pour elle.

M. Olivier Faure. Cette réforme vise à simplifier considérablement la vie de nos concitoyens. Contrairement à ce qu’avançait Alain Chrétien, le prélèvement à la source n’équivaut pas à une simple mensualisation, qui constitue un prélèvement au titre des revenus de l’année N – 1. Aujourd’hui, lorsqu’un changement d’emploi se traduit par une baisse de salaire, lorsque l’on devient chômeur ou retraité, les choses sont compliquées en termes de trésorerie.

Je suis très sensible à la proposition que vient de présenter Jean-Christophe Fromantin. J’imagine cependant que la solution qu’il propose entraînerait des coûts supérieurs à ceux de la réforme, et qu’elle demanderait un ajustement permanent des entreprises. Elle va cependant dans le bon sens en termes de confidentialité, même si, comme le faisait remarquer Dominique Lefebvre, les foyers dans lesquels les disparités de revenus sont considérables ne doivent pas représenter le cas le plus courant – il faudrait étudier cela sur le plan sociologique. Quels salariés sont venus s’inquiéter auprès de vous des problèmes de confidentialité posés par le prélèvement à la source ? J’ai le sentiment que la question agite les cadres supérieurs, mais que les inquiétudes sont moindres pour les autres, et qu’en tout cas, pour eux, elles ne se traduiront pas dans la réalité lorsque la réforme s’appliquera.

M. Jean-Louis Gagnaire. Le prélèvement à la source est selon moi un système moderne, ce qui n’empêche pas que je me pose de nombreuses questions à son sujet.

Je prends le contre-pied de ce qu’a affirmé notre collègue Alain Chrétien : nous avons fait la démonstration que, en matière de fiscalité, nous étions plutôt bienveillants à l’égard des entreprises. Nous avons plutôt chargé les ménages pour soulager celles-ci – contrairement à certains, j’assume totalement ce choix.

Je voudrais que nous interrogions également les employeurs publics, notamment l’État. Celui-ci n’est pas très vertueux – je pense à un ministère qui n’est pas capable de payer les professeurs trois mois après leur embauche. Comment l’État employeur gérera-t-il la réforme ?

Je m’interroge aussi sur l’ajustement en « temps réel ». Qu’est-ce que le temps réel ? S’il faut quatre ou cinq mois pour que les informations remontent aux directions des impôts et qu’elles redescendent dans les entreprises, ce ne sera plus du temps réel ! Il faudrait être dans l’instantanéité. De quoi êtes-vous capable en matière d’ajustement ?

Je suis très troublé par la question des crédits d’impôt. Nous sommes à la commission des finances : nous avons conscience des stratégies d’optimisation fiscale déployées par les uns ou les autres, qui permettent à certains de ne pas payer du tout d’impôt sur le revenu. Le jour où ceux-là devront consentir une avance, je crains qu’ils soient moins généreux dans certains de leurs dons. Des modèles économiques en seraient totalement modifiés. Certes, cela vaut principalement pour la première année, mais, si j’ai bien compris, en 2018, les calculs se feront principalement par rapport à l’année 2016, ce qui induit un décalage de deux ans au lieu d’un seul. La question du temps réel est vraiment posée.

Ne pensez-vous pas qu’il serait préférable de commencer de manière expérimentale et progressive par un prélèvement à la source sur les retraités ? Ceux qui sont imposables sont de moins en moins nombreux, et ils disposent de revenus plus stables ?

M. Éric Woerth. Il me semble depuis longtemps qu’il est nécessaire de réduire le délai entre la perception du revenu par le contribuable et le prélèvement de l’impôt. Ce délai crée en effet des incertitudes dans un monde de moins en moins prévisible. Et puis, autant se faire mal tout de suite plutôt que de remettre cela à plus tard ! Aujourd’hui, sur le plan théorique – mais est-ce si théorique que cela ? –, l’État est créancier, au 1er janvier, de l’impôt dû par le contribuable sur ses revenus de l’année passée : une telle situation ne me semble pas idéale. Je suis favorable à ce que l’impôt soit perçu la même année que celle du versement du revenu sur lequel il porte.

Les entreprises ont-elles un rôle à jouer en la matière ? Je pense que non. Je ne crois pas, monsieur Gagnaire, que le Gouvernement ait été bienveillant avec les entreprises – ce n’est d’ailleurs pas ce qu’elles cherchent, elles veulent seulement être traitées comme dans les autres pays, et faire leur travail. Or ce travail ne consiste pas à collecter l’impôt, même si elles le font déjà. Je ne suis pas sûr que l’on doive charger la barque. Moins on leur fait faire de métiers connexes, mieux elles se portent.

Comme les directeurs des ressources humaines l’ont noté, je crois aussi que le prélèvement à la source peut-être assez dangereux et avoir de réels effets psychologiques. Dans les faits, le salaire net inscrit au bas de la fiche de paye va diminuer : il sera amputé de votre impôt et vous gagnerez moins que ce que vous gagniez auparavant. Autrement dit, la valeur du travail sera, en quelque sorte, subitement réduite. Certes, cela ne sera qu’artificiel, mais, de fait, votre paye, qui correspond à votre travail, sera réduite de manière significative, comme l’ont montré, hier, les exemples cités par Mme la Rapporteure générale. Des Français qui ne paient pas l’impôt se retrouveront ainsi au même niveau de rémunération faciale que certains qui, en raison de leurs qualifications, gagnent davantage en brut. Cet effet psychologique risque de se traduire dans la réalité et de créer une tension sur les salaires.

Pour éviter cette dérive, il existe des solutions que j’ai validées auprès d’un certain nombre de techniciens de l’impôt. Pour supprimer le délai du prélèvement, il serait possible de mettre en place une mensualisation contemporaine. À l’ère des big data et de la transmission de l’information, le montant du salaire mensuel peut facilement être transmis à une administration fiscale qui a su se moderniser. Elle adapterait la mensualisation, avec un ou deux mois de décalage. Ce système pourrait parfaitement fonctionner, au moins pour les salariés. Il aurait l’avantage de ne pas faire intervenir les entreprises, et de mettre fin au décalage entre le revenu et l’imposition.

M. le vice-président délégué du MEDEF. Le MEDEF n’a pas d’opposition de principe au prélèvement à la source, mais cette réforme présente selon nous d’extraordinaires difficultés opérationnelles.

J’ai été interrogé sur les échanges que nous avons eus avec la DGFiP. Tout dépend de ce que l’on appelle un « échange ». Nous avons été reçus à trois reprises, mais, sans polémiquer, car l’attitude de Bercy reste la sienne quel que soit le gouvernement en place, on s’est contenté de nous expliquer ce qui allait être fait, et comment cela allait être fait. Nous avons demandé qu’une commission plus technique aborde véritablement les sujets : elle se réunit demain pour la première fois. La concertation commence. Cela nous laisse un an et demi pour travailler, délai que nous estimons insuffisant.

Madame la Rapporteure générale, s’agissant d’un benchmark avec les organisations patronales étrangères, le problème, c’est que la Confederation of British Industry (CBI) a mis en place le prélèvement à la source il y a trente ans, et que son dispositif n’a rien à voir avec le nôtre. Là-bas, cela rejoint un peu le propos de M. Lefebvre, l’impôt sur le revenu est quasiment une CSG à trois taux : l’une des trois tranches d’imposition s’applique automatiquement selon le montant de votre salaire. Il n’y a ni « familialisation » ni « conjugalisation » de l’impôt, et les trois niches fiscales existantes ne sont pas prises en compte. En conséquence, la question de la confidentialité ne se pose pas.

Le prélèvement à la source de la CSG ne pose pas de problème puisque cette dernière est universelle et que son taux est unique, quel que soit le contrat de travail. Au contraire, le prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu nous introduit dans un monde inconnu, avec la « conjugalisation », l’existence de niches fiscales, et la possibilité de faire varier les taux. Tout cela pose de nombreuses questions.

S’agissant des contreparties financières, nous ne disposons que du seul exemple de la Suisse, où les entreprises retiennent 2 % du prélèvement à la source pour frais de gestion. Je suis incapable de dire combien nous coûtera la réforme. Les coûts de mise en place seront certainement plus élevés que les coûts de gestion dans la durée. Une fois les logiciels modifiés, les choses devraient être plus simples. J’insiste toutefois sur le coût caché de management. Il s’agit d’un point fondamental, notamment dans les PME, où il faudra que le patron ou la direction des ressources humaines consacre du temps à répondre aux questions des salariés et à leur expliquer la réforme.

Le travail d’un patron, monsieur Fauré, ce n’est pas seulement d’évaluer la performance : les augmentations de salaire et l’attribution des primes et bonus se font aussi dans un contexte général. D’ailleurs, soyons honnêtes ! Aujourd’hui, surtout s’il vit sur place, un patron de PME connaît déjà un peu la situation de ses salariés. Nous avons demandé à la DGFiP le nombre de foyers au sein desquels il existe un fort écart de revenu ou de patrimoine. Nous n’avons pas la réponse, mais les patrons nous disent qu’ils ont l’impression que cela existe sur le terrain. Lorsqu’on s’apercevra qu’un salarié qui gagne le SMIC est imposé à 30 %, cela risque de poser des problèmes…

M. le président Gilles Carrez. Cela devrait être assez rare !

M. le vice-président délégué du MEDEF. Cela peut arriver avec les revenus patrimoniaux, même si je n’ai pas de chiffres précis à produire à cet égard ! En tout cas, un patron intégrera ces éléments dans son raisonnement managérial : il ne peut pas traiter ses salariés uniquement sur le fondement de performances chiffrées.

Vous avez raison, monsieur Fauré, le chef d’entreprise est déjà soumis au secret fiscal s’agissant des saisies sur salaire, mais il ne s’agit que de situations très rares.

Je n’ai pas encore évoqué le problème d’exécution que posera le prélèvement à la source sur les contrats courts. Le risque de fortes erreurs de prélèvement existe. Si le taux par défaut sur un contrat d’un mois est très élevé alors que le salarié aurait dû se voir appliquer un taux bien plus faible, il connaîtra un vrai problème de pouvoir d’achat.

Comme M. Éric Woerth, et comme le Conseil des prélèvements obligatoires, nous recommandons le prélèvement contemporain. Nous sommes plutôt favorables à la coïncidence entre l’année de perception d’un revenu et celle de son imposition. Nous pensons qu’il est possible de progresser sur ce point de manière très simple en prélevant mensuellement tous les salariés, et en instaurant la contemporanéité du prélèvement et du revenu.

Monsieur Gagnaire, vous avez évoqué une expérimentation : nous avons fait une demande en ce sens auprès de Bercy. Nous n’avons pas vérifié, mais l’on nous a répondu qu’il serait anticonstitutionnel que des contribuables soient soumis, lors d’une même année fiscale, à deux régimes de prélèvement différents.

Monsieur Fromantin, je crains que votre idée de généralisation d’un taux « neutre » ne génère davantage de coûts et de complexité, et qu’elle ne soit plus coûteuse si les choses doivent ensuite être gérées au sein des entreprises.

M. Alain Fauré. Il y a déjà des prélèvements individualisés en matière de cotisations salariales.

M. le vice-président délégué du MEDEF. S’il y avait une case déjà cochée parmi trois pour des prélèvements individuels, et que les entreprises et les salariés n’avaient rien à faire, il n’y aurait pas de problème !

M. Dominique Lefebvre. Sur un plan technique, vous n’avez pas parlé de la DSN. Les ministres nous ont dit que la transmission du taux à l’employeur se ferait tous les mois par la DSN. Si ce dernier ne dispose pas du bon taux, il appliquera un taux par défaut, le taux « neutre » dont nous serons amenés à discuter. La seule vraie question est donc celle de la fiabilité de la transmission automatisée du taux. Ce système est-il fiable selon vous, et sera-t-il opérationnel à la fin de l’année 2017 ? Cela conditionne la réussite de la réforme – si elle est mise en place.

M. le vice-président délégué du MEDEF. Le MEDEF et les organisations patronales ont soutenu la DSN, car ils considèrent qu’elle constitue un élément de simplification. Elle doit être mise en place par étapes jusqu’à l’été 2017. Sous réserve que la dernière étape se passe bien – 20 000 entreprises doivent encore l’adopter –, nous ne voyons pas de raison objective ou technique qui empêche un flux d’informations de circuler de Bercy vers les entreprises. Notez bien qu’aucun flux n’est encore en place dans ce sens aujourd’hui ! L’utilisation de la DSN ne devrait donc pas être un point bloquant, mais nous aurions souhaité bénéficier au moins d’une année supplémentaire pour la mise en place du système.

M. Alain Fauré. Toute nouveauté amène à se poser des questions. Tout cela me rappelle un peu le débat sur le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE). On parlait, à l’époque, de complexité ; finalement, les choses sont relativement simples, même pour les commissaires aux comptes et les experts-comptables, et les entreprises se sont approprié l’outil.

Avec le prélèvement à la source, je me demande si, en cas de plan de sauvegarde d’une entreprise, l’impôt sur le revenu ne pourrait pas être pris en compte dans une enveloppe globale, comme le sont déjà les cotisations sociales. Il s’agirait en tout cas d’un effet collatéral de la réforme dont les entreprises pourraient tirer avantage. Il faudra se renseigner sur le sujet.

M. le vice-président délégué du MEDEF. Je reviens au taux par défaut : si l’on utilise le taux moyen, cela risque de poser problème, notamment pour les contrats courts, comme je l’ai déjà expliqué. Ce sera par exemple le cas si un contribuable voit le revenu de quatre semaines de travail prélevé à 10 % alors qu’il n’est pas éligible à l’impôt sur le revenu, ou que le taux que l’administration lui aurait calculé est très bas.

M. Éric Woerth. Messieurs, que pensez-vous du fait que le salaire inscrit au bas de la feuille de paye sera subitement minoré ? L’impact psychologique peut n’être que momentané – la phase de « dépression nerveuse » serait passagère –, mais la comparabilité de la valeur travail risque d’en être affectée. Le prélèvement à la source et le fait d’être payé puis de faire un chèque à l’État constituent deux démarches différentes. C’est la raison pour laquelle je suis favorable à la fiscalisation contemporaine.

Il ne faut pas non plus oublier que l’État s’y retrouve assez bien. Dans un pays où le pouvoir d’achat augmente un peu, il est toujours préférable de fiscaliser le revenu de l’année en cours plutôt que celui de l’année précédente. Je ne sais pas si, dans sa grande largesse, le Gouvernement a décidé d’opter pour un dispositif en sifflet qui respecterait le pouvoir d’achat des contribuables.

M. le président de la commission juridique et fiscale de la CGPME. Comme vient de le dire M. Woerth, l’adéquation entre la rémunération et le travail en prend un coup. Le salarié percevait la rémunération complète de son travail, avec laquelle il participait aux dépenses budgétaires de la nation. J’entends qu’il s’agit d’une simplification, mais elle minore la responsabilité citoyenne et individuelle. L’appartenance du contribuable et du citoyen au système sera moins forte si on le prive de sa participation active et directe au fonctionnement de la collectivité.

La modification d’un taux par le salarié nécessitera des délais – l’administration fiscale saisie aura trois mois pour réagir à une demande et prévenir l’entreprise. Le ménage à trois entre le contribuable, l’administration et l’entreprise engendrera aussi certainement une déperdition en termes de réactivité. Il faudra s’adapter.

La responsabilité de l’entreprise – le troisième larron chargé de la collecte de l’impôt – pourra être mise en cause. Cependant, dans les faits, elle se décharge souvent du calcul des salaires et de l’établissement des fiches de paie sur un cabinet d’expertise comptable – c’est en tout cas ce qui se passe fréquemment dans les PME. Or, il n’existe aucun lien juridique entre le salarié et l’étude d’expertise comptable. Qu’en est-il, en conséquence, de la responsabilité de ces cabinets au regard du travail qu’ils auront effectué ?

M. Dominique Lefebvre. Le fait que les réductions et les crédits d’impôt ne soient pas pris en compte pour le calcul du taux de prélèvement à la source constitue une bonne chose sur le plan du secret fiscal, car l’employeur ne peut rien déduire en la matière du taux dont il a connaissance.

AUDITION DE M. BRUNO PARENT, DIRECTEUR GÉNÉRAL DES FINANCES PUBLIQUES

Lors de sa séance du 27 septembre 2016, La commission a entendu M. Bruno Parent, directeur général des finances publiques, Mme Véronique Bied-Charreton, directrice de la législation fiscale, M. Grégoire Deyirmendjian, sous-directeur en charge de la fiscalité des personnes, et Mme Maryvonne Le Brignonen, directrice du projet Prélèvement à la source, sur l’avant-projet de texte transmis par le Gouvernement et relatif à la modernisation du recouvrement de l’impôt sur le revenu par la mise en place du prélèvement à la source.

M. le président Gilles Carrez. Nous poursuivons le cycle d’auditions que la commission des finances consacre à l’avant-projet de texte, transmis par le Gouvernement, relatif à la modernisation du recouvrement de l’impôt sur le revenu par la mise en place du prélèvement à la source. Mardi dernier, après un remarquable exposé de notre Rapporteure générale et un premier échange de vues, nous avons entendu les représentants des deux principales organisations syndicales de Bercy, Solidaires finances publiques et CGT Finances. Le lendemain matin, nous avons reçu des représentants du Mouvement des entreprises de France (MEDEF) et de la Confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME), futurs « collaborateurs » de Bercy dans la collecte de l’impôt.

Ces premiers travaux, très utiles, ont permis de dégager les principales questions posées par la réforme : l’« année blanche », le taux neutre, le traitement des réductions et des crédits d’impôt, la confidentialité… Nous sommes donc en mesure d’interroger de façon précise les personnalités que nous recevons aujourd’hui sur ce projet que certains désignent par l’acronyme « PALS ».

M. Bruno Parent, directeur général des finances publiques. Nous utilisons plutôt l’acronyme « PAS ».

M. le président Gilles Carrez. Il me semble par ailleurs qu’il sera utile, à l’issue de notre cycle d’auditions, de rencontrer une nouvelle fois les ministres, qui étaient venus nous faire une présentation générale de la réforme le 6 avril dernier.

M. le directeur général des finances publiques. Le projet que nous vous présentons est, à certains égards, inédit. Il a demandé plus d’un an de travail, et il a fait l’objet d’une très forte concertation : des centaines de réunions se sont déjà tenues avec les différentes parties prenantes, et il s’en tient encore tous les jours. Le Conseil d’État a aussi bénéficié d’un délai particulièrement long pour effectuer son analyse juridique. Ce projet sera également fortement documenté : une étude d’impact inédite par son volume sera présentée lors du dépôt du projet de loi de finances. Elle devrait répondre à certaines de vos interrogations.

Toute révérence gardée à l’égard des travaux du Parlement, nous poursuivons les nôtres à vive allure, et nous sommes dans les délais par rapport à notre compte à rebours. La concertation se poursuit, ainsi que la préparation des outils informatiques propres à l’administration en liaison avec les collecteurs et les gestionnaires de la déclaration sociale nominative (DSN). Au cas où le vote du Parlement serait favorable, nous préparons aussi une campagne de communication et d’accompagnement qui aura lieu en 2017, afin que nos concitoyens comprennent bien les tenants et les aboutissants de cette réforme novatrice du recouvrement de l’impôt sur le revenu.

Je me permets quelques remarques rapides avant de laisser la place à vos questions.

Je suis frappé d’entendre principalement parler, dans les débats médiatiques, de cas spécifiques et de situations particulières. De tels exemples sont évidemment dignes d’intérêt, mais je rappelle que, pour l’immense majorité de nos concitoyens redevables de l’impôt sur le revenu, la réforme sera d’une très grande simplicité. La plupart des contribuables auront un taux d’imposition inférieur à 10 %, ce qui ramène les débats à la réalité.

Nous avons tenté de construire un dispositif qui atteigne l’objectif essentiel de la contemporanéité tout en cherchant les solutions les plus gérables, les plus simples et les plus à notre portée dans le cadre du calendrier qui est le nôtre. La réforme devra s’appliquer au 1er janvier 2018, mais nous serons prêts avant cette date, puisque nous avons l’ambition de transmettre les taux à nos concitoyens et aux futurs collecteurs au cours du dernier trimestre de l’année 2017.

Je ne prétends pas que nous ayons tout parfaitement réussi dans notre recherche de la plus grande simplicité possible, mais nous avons en tout cas beaucoup travaillé en ce sens. Je rappelle, par exemple, que les collecteurs n’auront aucune option à formuler et qu’ils ne se trouveront jamais que dans deux situations : soit l’administration leur aura transmis le taux applicable au foyer fiscal, et ils l’appliqueront sans se poser de questions, soit ce taux n’aura pas été transmis, et ils appliqueront, sans se poser de questions techniques, le taux dit « par défaut », voté par le Parlement. Lorsque j’évoque les collecteurs, je ne pense pas aux seules entreprises : les collectivités locales ou l’État sont évidemment concernés. J’ai d’ailleurs le privilège d’être à la fois acteur du prélèvement à la source, au sein de l’administration fiscale, et collecteur, comme administration versant des revenus à des fonctionnaires et des retraités.

M. le président Gilles Carrez. La presse indique que les 10 % de frais professionnels ne seront pas pris en compte dans le prélèvement mensuel à la source à partir du 1er janvier 2018. Ce n’est pas ma lecture de la réforme. Ai-je tort ?

La semaine dernière, nous nous sommes beaucoup interrogés sur les crédits et les réductions d’impôt. Les crédits et les réductions d’impôt récurrents, qui peuvent être de montants élevés, correspondant par exemple à des emplois familiaux ou à des investissements en matière de logement, n’entrent pas dans le champ de la réforme. Aujourd’hui, le calcul des mensualités tient compte de celles des années précédentes, c’est-à-dire des crédits et des réductions d’impôt, mais ce ne sera plus le cas, demain, avec le prélèvement mensuel à la source. Sachant que nous parlons de sommes qui se situent entre 10 et 12 milliards d’euros par an, selon un rapport assez récent du Conseil des prélèvements obligatoires, nous pouvons craindre que des prélèvements surévalués posent dans un premier temps des problèmes d’incompréhension et de pouvoir d’achat, même si les choses sont régularisées par la suite.

M. Dominique Lefebvre. Une grande réforme, souhaitée et rêvée par tous les gouvernements depuis 1974, se met en place avec l’appui d’une grande administration française.

Monsieur le président, les crédits et les réductions d’impôt prendront effet en année N + 1, comme cela s’est toujours pratiqué. Ce que vous présentez comme un défaut a au moins l’avantage de mettre les crédits et réductions d’impôt en pleine lumière. Après tout, les autres pays qui pratiquent le prélèvement à la source ne voient pas 15 ou 20 % de l’impôt sur le revenu disparaître parce que le Parlement a arbitré en faveur de mesures de dépenses fiscales de préférence à l’ouverture de crédits budgétaires.

La semaine dernière, après avoir affirmé qu’il n’y avait eu aucune concertation avec Bercy, le représentant du MEDEF, M. Geoffroy Roux de Bézieux, a fini par reconnaître que quelques réunions de travail avaient eu lieu. Depuis, le cabinet du ministre chargé des finances m’a fourni des informations à ce sujet, et je peux vous dire qu’il y a eu plus de trois réunions, contrairement à ce qu’avançait notre interlocuteur. M. Roux de Bézieux nous a confirmé que, du côté des entreprises, la DSN serait en parfait état de fonctionnement à la fin de l’année. Pouvez-vous garantir que la procédure de transmission des taux mis en place par la direction générale des finances publiques (DGFiP) sera assurée mois après mois de façon quasi parfaite, ce qui limiterait le recours au taux neutre ?

J’en viens au taux neutre. La semaine dernière, nous avons évoqué les effets de seuil. Pour ma part, je doute que de nombreux contribuables aient un taux moyen d’imposition à peu près égal au taux neutre. Parmi les 17 millions de contribuables, vous nous direz peut-être combien bénéficient de crédits et de réductions d’impôt. Nous pourrions même espérer connaître le décile et le montant moyen concernés, car ces éléments appartiennent au débat démocratique. Le taux neutre, correspondant à celui d’un célibataire sans charges de famille et ne bénéficiant d’aucun crédit ni réduction d’impôt, nous a paru élevé, et même brutal. Sans doute n’est-ce pas sans raison que vous avez fait ce choix, mais j’ai peur qu’il ne donne lieu, par la suite, à de nombreuses régularisations. Dans le rapport que j’ai remis au Premier ministre, en avril 2014, j’indiquais que 90 % des ménages imposés l’étaient à un taux inférieur à 9 %. Pouvez-vous nous donner des explications techniques relatives à ce choix ? Peut-être pouvons-nous trouver le point d’équilibre qui permettrait que le prélèvement ne soit ni sous-évalué ni surévalué.

Certains parlent d’une augmentation des impôts : c’est totalement faux ! Vous nous confirmerez que la réforme se fait à législation fiscale constante. Notre président a évoqué la modification du calendrier de trésorerie, mais je n’ai pas compris que la réforme se traduirait par un gain de trésorerie pour l’État. Cela dit, si ce n’est pas le cas et que les contribuables ont ce sentiment, c’est soit qu’un tiers bénéficie partiellement de la situation – ce pourrait être les entreprises –, soit qu’il faut résoudre un problème de compréhension du dispositif.

M. Alain Chrétien. Le Gouvernement souhaite que le contribuable puisse ajuster le paiement de son impôt à la variation de ses revenus. Mais, dès lors que près de 60 % des contribuables sont déjà mensualisés, et qu’il leur est permis, dans ce cadre, de moduler les prélèvements en fonction des revenus de l’année en cours, vous disposiez déjà de l’instrument correspondant à l’objectif poursuivi. Pouvez-vous nous le confirmer ?

M. Charles de Courson. Je ne me contenterai pas d’une seule question, j’en poserai sept.

Si l’on ne réévalue pas le barème de l’impôt de deux années, nous aurons un « effet base » de l’ordre de 2 à 3 milliards d’euros qui accentuera la pression fiscale. Avez-vous prévu d’actualiser le barème de 4 à 5 % en 2018 pour résoudre ce problème ?

N’y a-t-il pas un risque de désamorçage des crédits d’impôt en 2017 ? On appelle comme toujours notre attention sur les réductions d’impôt portant sur les investissements en outre-mer, mais il en existe d’autres pour lesquels il y aura un problème d’investissement durant une année. Comment résolvez-vous ce problème ?

Comment gérer les contrats de travail de très courte durée ? Par exemple, on compte 120 000 contrats vendanges pour la seule Champagne. Je faisais mes tournées de vendange, et les employeurs me demandaient comment ils pourraient bien faire le prélèvement à la source quand ils embauchent parfois la veille pour le lendemain. Comment l’administration fiscale transmettra-t-elle un taux pour les « petits boulots » ? Ne faudrait-il pas prévoir un seuil en deçà duquel le prélèvement à la source ne s’appliquerait pas ?

Qu’en est-il de la compatibilité entre les systèmes informatiques des entreprises et celui de la DGFiP ? Quid de la responsabilité des entreprises qui feraient des erreurs ou qui n’appliqueraient pas correctement les taux – pour diverses raisons, il pourrait parfois même s’agir d’erreurs volontaires ?

Comment organiser l’amorçage pour les salariés qui n’avaient pas de revenus précédemment ?

Quel taux s’appliquera aux revenus relevant de plusieurs catégories ? Imaginons un salarié détenteur d’un gros portefeuille d’actions : son taux d’imposition sera-t-il calculé sur l’ensemble du revenu, dividendes compris, ou uniquement sur le salaire ?

Enfin, lorsque les familles comportent plus de deux personnes – avec des parents et un enfant par exemple –, selon quelles modalités définirez-vous le taux moyen pour que celui-ci soit bien celui de l’année N – 1 ? Si un jeune travaille avec un salaire modeste alors que ses parents gagnent bien leur vie, comment éviter qu’il ne soit taxé à 10 ou 15 % ?

M. Gaby Charroux. L’efficacité de la perception de l’impôt sur le revenu en France est de 99,4 %. C’est remarquable, et cette performance nous classe, je crois, au premier rang européen, mais elle signifie également que nous disposons d’assez peu de marges de progression en la matière. En dehors de la volonté de rendre contemporains la perception du revenu et le prélèvement de l’impôt, je ne vois donc pas quel avantage les finances de l’État tirent de la réforme, à moins de considérer que la généralisation de la perception mensuelle constitue un objectif.

Les sondages indiquent que près des deux tiers des Français seraient assez favorables au prélèvement à la source. Ils considèrent que ce système sera plus simple pour eux. Pourtant, il semble qu’il y aura une obligation d’ajustement permanent et, surtout, que la réforme signera la fin du choix du mode de paiement de l’impôt : plus de paiement par tiers ou en une seule fois !

Qu’en sera-t-il du cumul des crédits d’impôt de 2017 et de 2018 ? On risque de voir des contributions à l’économie sociale disparaître si l’on ne trouve pas de solutions.

La question de la confidentialité se pose, car la connaissance de la situation fiscale d’un individu ou d’un foyer pourrait être instrumentalisée.

Comment sera prise en compte la charge de travail comptable qui incombera aux entreprises – je pense en particulier aux plus petites d’entre elles ? Ne doit-on pas, sur le modèle suisse, permettre que les collecteurs prélèvent 2 % des sommes en transit pour financer les frais de gestion qui leur incombent ?

M. François André. Les revenus agricoles entrent dans le périmètre de la réforme. Aujourd’hui, le droit fiscal permet aux agriculteurs soumis à l’impôt sur le revenu d’opter pour un système de moyenne triennale. Il est largement privilégié par ces derniers, car il atténue de façon glissante la variabilité des revenus, et il offre une visibilité sur l’impôt à acquitter en ayant le mérite de la simplicité. Confirmez-vous que le prélèvement à la source fera de facto disparaître le système de moyenne triennale ?

Si tel est le cas, nous risquons de rencontrer un problème de lisibilité, car les prélèvements sociaux resteront très majoritairement soumis au régime triennal. Quant à la simplicité, elle a des chances de « perdre en substance », si vous permettez cet euphémisme, dès lors qu’on laissera le soin au contribuable lui-même, de solliciter en permanence l’adaptation de ses versements en cours d’exercice. Je crains que le monde agricole ne voie pas d’un bon œil cette tâche nouvelle.

Les retenues à la source seront opérées par des collecteurs. Qui sera le collecteur pour les revenus des exploitants agricoles soumis à l’impôt sur le revenu ? Quel organisme, selon quelles modalités, et pour quelles contreparties ?

Les dates des exercices comptables des exploitations agricoles ne coïncident pas avec celles de l’année fiscale, mais plutôt avec les cycles de production. Par quel mécanisme le prélèvement à la source surmontera-t-il ce décalage des calendriers ?

Les exploitants agricoles procèdent souvent à des arbitrages économiques lors de la clôture des exercices comptables – je pense en particulier à la déduction pour investissement ou à la déduction pour aléas. Sachant que ces arbitrages ont in fine un impact sur le revenu imposable, comment concilier la contemporanéité du prélèvement avec des choix qui ne peuvent se faire qu’une fois le résultat de l’exercice connu ?

M. Patrick Hetzel. Les entreprises peuvent rencontrer des difficultés. En les transformant en collecteurs – charge nouvelle dont elles n’ont nul besoin –, ne risque-t-on pas de voir baisser l’excellent taux de recouvrement de l’impôt que citait Gaby Charroux ?

La réforme vise à rendre contemporains la perception du revenu et le paiement de l’impôt, mais avec le jeu des crédits d’impôt qui ne sont pris en compte qu’au mois de septembre de l’année N + 1, on n’améliore strictement rien par rapport à la situation actuelle.

Quant aux taux « neutres », ils ne sont pas si neutres que cela. Ils vous obligent à mettre en place une véritable usine à gaz avec une régularisation ultérieure par le contribuable. Vous rendez les choses administrativement plus complexes au lieu de les simplifier. Vous prétendez faire œuvre de simplification administrative, mais n’est-ce pas tout l’inverse qui se produit ?

Mme Claudine Schmid. Le Centre des non-résidents perçoit chaque année 500 millions d’euros d’impôts, essentiellement prélevés sur des revenus du patrimoine. Avec la réforme, comment les taux seront-ils fixés, et qui sera le collecteur ?

M. Éric Woerth. Je m’interroge pour ma part sur le principe même de la réforme. Pourquoi avoir choisi de passer par les entreprises ? Il me semble qu’il serait possible de rendre la mensualisation contemporaine dès lors que celui qui verse le revenu transmet l’information en temps réel à l’administration fiscale, ce qui, aujourd’hui, ne présente plus aucune difficulté sur le plan technique. Nous aurions pu régler ainsi la question de l’intermédiation de l’entreprise, tout en évitant les problèmes liés au prélèvement à la source.

Le prélèvement à la source se traduit d’abord par une grande différence sur la feuille de paye. Le choc risque d’être réel pour ceux qui verront baisser leur « salaire net ». Les difficultés psychologiques sont évidentes. Ensuite, ce procédé pose des questions en termes de prix du travail. Je préfère que l’on gagne ce que l’on doit gagner, et que l’on paie ce que l’on doit payer.

Je suis assez favorable à l’idée de résoudre le problème que pose le décalage d’une année entre le revenu et l’imposition, mais je ne comprends pas pourquoi l’on n’a pas choisi de laisser le contribuable régler directement à l’administration fiscale ce qu’il lui doit tous les mois.

Mme Valérie Rabault, Rapporteure générale. Ma première question est la même que celle d’Éric Woerth : pourquoi avez-vous choisi de passer par un tiers pour la perception de l’impôt plutôt que de privilégier la relation directe entre le contribuable et l’administration fiscale ?

Ma deuxième question concerne les revenus immobiliers sur lesquels il est possible d’imputer des travaux. Comment les travaux effectués en 2017 pourront-ils être déduits des revenus lors de cette année particulière ?

M. le président Gilles Carrez. Autrement dit, les propriétaires risquent de ne faire aucuns travaux en 2017, car ils n’y auront pas intérêt. Peut-être avez-vous pensé à mettre en place une disposition incitative ?

Mme Véronique Bied-Charreton, directrice de la législation fiscale. Elle est prévue, monsieur le président.

M. Lionel Tardy. La réforme du prélèvement à la source doit être effective à partir du 1er janvier 2018. À première vue, il s’agit d’une réforme séduisante, mais plus on l’étudie dans le détail, plus on s’aperçoit qu’elle est d’une complexité extrême, que ce soit pour la fixation des taux, pour leur modulation, pour la collecte, par le jeu des réductions et crédits d’impôt…

Les employeurs qui collectent déjà une multitude de charges et cotisations sociales se verront confier une charge de travail supplémentaire. Elle sera particulièrement lourde pour les petites et les moyennes entreprises, qui ne disposent ni des ressources humaines nécessaires ni des moyens indispensables pour adapter leur système informatique. Les coûts d’adaptation lors de l’année de transition, et les coûts de gestion en régime de croisière seront élevés.

De nombreuses interrogations pratiques subsistent s’agissant notamment des règles applicables aux particuliers employeurs. Malgré les propos rassurants de l’exécutif, dans les faits, l’employeur se trouvera en première ligne en cas de contestation par le salarié. Cette réforme risque donc de créer des tensions sociales dans des entreprises qui n’ont pas besoin de cela.

L’avant-projet de texte prévoit une disposition protégeant les salariés de toute discrimination pour des raisons fiscales. Cette mesure constituera une nouvelle source de conflits au sein de l’entreprise. Elle risque de provoquer une explosion du nombre de contentieux.

Par ailleurs, que se passera-t-il si l’entreprise commet une erreur dans la collecte de l’impôt ? Disposez-vous d’éléments susceptibles de rassurer les chefs d’entreprise sur ce point ? Des conflits supplémentaires pourraient découler de la réforme. Les chefs d’entreprise prennent conscience qu’on leur transfère une charge de travail sans moyens supplémentaires, et que ce travail peut être à l’origine de multiples litiges nouveaux. Il faut leur donner des réponses précises.

M. Jean-Louis Gagnaire. Le prélèvement à la source constituera une charge pour les entreprises, notamment les plus petites d’entre elles. Une indemnisation est-elle prévue ? Elle ne saurait être proportionnelle à l’impôt collecté, car cela « avantagerait » les grands groupes.

Quel sera l’effet de la réforme sur l’effectif des administrations fiscales ? La charge de la collecte étant transférée aux entreprises, les effectifs devraient être allégés, mais je ne suis pas certain que l’on parvienne à ce résultat, car il faudra continuer à gérer les flux d’informations – notamment entre les contribuables et l’administration fiscale.

Le système est aujourd’hui très complexe. C’est une spécificité française que tout le monde dénonce, mais à laquelle, en définitive, tout le monde semble attaché. Sur ce plan, le prélèvement à la source ne change rien.

M. le président Gilles Carrez. Je me permets d’ajouter une question relative à la rédaction de certaines dispositions : ne fait-elle pas courir des risques juridiques en termes d’incompétence négative ?

Je constate par exemple que, pour la définition des revenus exceptionnels, une sorte de « disposition balai » évoque « tout autre revenu qui, par sa nature, n’est pas susceptible d’être recueilli annuellement », et que l’exposé des motifs renvoie à une définition qui ne figurera pas dans la loi, s’agissant des règles de déduction des charges ou de constitution des produits. Je m’interroge sur la ligne de partage entre les revenus exceptionnels, pris en compte s’ils sont formés en 2017, et les revenus non exceptionnels, intégrés dans le crédit d’impôt de modernisation du recouvrement. Alors que la Constitution prévoit de façon très stricte que la loi fixe les règles concernant l’assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes natures –, le dispositif que vous proposez ne fait-il pas courir quelques risques juridiques ?

Mme la directrice de la législation fiscale. Le Gouvernement prépare un rapport complet qui vous sera remis au moment du dépôt de la loi de finances. Ce document détaille de manière extrêmement précise la réforme, toutes les options que nous avons étudiées et les raisons pour lesquelles nous en avons écarté certaines. Il développe notamment les modalités de calcul du taux par défaut, ou celles du passage à la contemporanéité des agriculteurs ou des indépendants. Une deuxième partie explique pourquoi les autres réformes – notamment celle évoquée par M. Woerth – n’ont pas été retenues. Une dernière partie étudie les conséquences de la réforme sur les entreprises, sur la trésorerie et le budget de l’État, sur les collecteurs et sur les contribuables. On y trouve également une vingtaine de pages sur les revenus des non-résidents. Ce rapport, en passe d’être achevé, comptera près de 400 pages. Chacun devrait donc aisément y trouver des réponses à ses questions.

L’objectif de cette réforme est la contemporanéité du prélèvement avec la perception des revenus. L’amélioration des dispositifs existants n’atteindrait pas cet objectif, car, aujourd’hui, lorsqu’un contribuable s’adresse au service des impôts parce qu’il est en difficulté financière, il n’obtient pas de remise, sauf décision gracieuse, mais peut au mieux étaler le paiement de ses impôts. Une personne au chômage depuis un an continuera donc de payer l’impôt de l’année précédente, lorsqu’il était en activité. Avec cette réforme, une personne au chômage ou un retraité paie l’impôt correspondant à sa situation. Grâce à la retenue à la source, et au fait que l’impôt est prélevé auprès des collecteurs, l’effet « assiette » est instantané : quand il n’y a plus de revenu, il n’y a plus de prélèvement. Cet effet « assiette », qui concerne 90 % des revenus soumis au prélèvement à la source, va beaucoup changer la situation puisque le prélèvement s’adapte aux variations de revenus.

Pourquoi ne pas charger l’administration fiscale de gérer ce passage à la contemporanéité ? L’information la plus contemporaine, c’est l’entreprise qui en dispose, puisque c’est elle qui verse le salaire. L’administration, elle, a une information plus historique, celle des dernières déclarations d’impôts. Faire prélever l’impôt par l’administration fiscale impose de maintenir en permanence un flux entre celle-ci et les employeurs qui l’informent des versements. Il y aurait donc forcément un décalage dans le temps, puisque cette information ne peut pas être instantanée. Pour le contribuable, cela se traduirait par un décalage entre le salaire versé et le prélèvement de l’administration fiscale. Par exemple, lorsqu’un treizième mois est versé en décembre, si l’administration fiscale n’en a pas connaissance instantanément, le contribuable sera prélevé comme un mois normal. Ce n’est qu’en janvier ou février qu’il sera prélevé sur une assiette double. L’assiette contemporaine est chez l’employeur. De plus, c’est l’employeur qui effectue le flux financier, ce qui donne à l’administration fiscale la capacité d’appréhender cet argent à sa source, en s’épargnant les problèmes de la solution de confier aux banques les tâches de tiers collecteur.

Charger l’administration fiscale de la collecte serait une solution dégradée qui continuerait de faire peser sur les employeurs des obligations d’informations vis-à-vis de l’administration.

M. Éric Woerth. Ce n’est pas une solution dégradée : elle est simplement moins contemporaine.

Mme la directrice de la législation fiscale. Les réductions et crédits d’impôt sont toujours payés à l’année N + 1. Ce sont souvent des réductions et crédits d’impôt accordés, au moment de la liquidation de l’impôt – l’année N + 1 –, à raison de dépenses effectuées lors de l’année N.

Ce projet ne réforme pas l’impôt sur le revenu, mais le recouvrement. Ce système ne va donc pas changer. Mais le Gouvernement a prévu d’effacer l’impôt pour 2017, afin d’éviter une double contribution aux charges publiques en 2018, c’est-à-dire à la fois le paiement de l’impôt dû au titre de 2017 dans les conditions normales et le prélèvement à la source.

Pour autant, les réductions et crédits d’impôt ouverts au titre de l’exercice 2017 seront intégralement maintenus, afin de préserver l’ensemble des incitations pour les secteurs économiques et sociaux concernés. Cela veut dire qu’en 2018, au moment de la liquidation de l’impôt 2017, les contribuables recevront un chèque équivalent à la somme du montant de leur crédit d’impôt et de la réduction d’impôt à laquelle ils auraient eu droit si l’impôt pour 2017 n’avait pas été effacé.

Si l’on intégrait dès 2018 des réductions ou crédits d’impôt dans le taux, le coût pour les finances publiques et le bénéfice pour les contribuables seraient doubles, puisque les contribuables vont recevoir l’ensemble des remboursements et crédits d’impôt pour 2017. Si l’on intègre en plus dans leur taux des remboursements et crédits d’impôt au titre de 2018 qui ne seront liquidées qu’en 2019, le coût serait double, à hauteur d’une dizaine de milliards d’euros. C’est la première raison pour laquelle les remboursements et crédits d’impôt ne sont pas intégrés dans le taux.

Une des conditions qui permettaient de maintenir les remboursements et crédits d’impôt pour 2017 était justement de ne pas accorder ce double avantage, qui aurait entraîné une rupture d’égalité devant les charges publiques pour les contribuables.

M. le président Gilles Carrez. Je me suis mal fait comprendre. Prenons le cas de l’année 2020 ou 2021, en régime de croisière. Supposons qu’un contribuable bénéficie d’un dispositif fiscal qui s’étale sur neuf ans, tels que les dispositifs « Scellier » ou « Pinel ». Aujourd’hui, au bout de deux ans, sa mensualité est calculée sur l’impôt qu’il a payé l’année précédente, et prend donc en compte ce dispositif. La mensualité est donc réduite d’autant. Or j’ai compris que, passée la période de transition, un dispositif « Scellier » ou « Pinel » ne sera pas immédiatement pris en compte.

Mme la directrice de la législation fiscale. Tout est lié. Il est difficile d’avoir en 2018, au moment où nous basculerons dans la réforme, un double coût de remboursements et crédits d’impôt.

Par ailleurs, les remboursements et crédits d’impôt que nous pourrions intégrer dans le taux sont des réductions et crédits historiques, comme aujourd’hui. Les contribuables en ont bénéficié deux ans auparavant, puis au moment du rafraîchissement du taux, un an auparavant. En tout cas, ce ne sont pas des réductions et crédits d’impôt contemporains.

Tout comme aujourd’hui, dans les acomptes, ce sont des réductions d’impôt dont nous avons bénéficié par le passé qui sont prises en compte.

Si l’on étudie plus précisément la stabilité des crédits et réductions d’impôt dans le temps, il faut rappeler que seuls 9,6 millions de ménages en bénéficient.

M. le président Gilles Carrez. C’est la moitié des 17 millions de ménages qui paient l’impôt sur le revenu !

Mme la directrice de la législation fiscale. Parmi eux, seuls 65 % de contribuables bénéficient trois années de suite, de manière stable, de remboursements et crédits d’impôt. Ce n’est donc pas une population d’une grande stabilité. Pour ceux qui conservent plusieurs années de suite des remboursements et crédits d’impôt, il existe de fortes variations de montant.

Par conséquent, ouvrir ces remboursements et crédits d’impôt dans le temps nous expose à des régularisations importantes qui entraîneront des surprises au moment du solde. Si le taux a été abaissé pour prendre en compte une situation antérieure, mais que l’on s’aperçoit alors que la situation contemporaine ne donne pas droit aux remboursements et crédits d’impôt, les ménages concernés se verront réclamer de l’argent supplémentaire.

Mme la Rapporteure générale. Ce n’est pas la question qui est posée. Imaginons un contribuable mensualisé payant aujourd’hui 100 euros d’impôts, et bénéficiant de 10 euros de crédit d’impôt. Cela veut dire qu’il doit payer 90 euros, sur dix mensualités, donc 9 euros par mois. Nous sommes bien d’accord pour dire que, dans la réforme proposée, en régime de croisière, ce contribuable paiera 100 euros sur une année, et se verra rembourser 10 euros l’année suivante, s’agissant de crédits d’impôt récurrents.

Mme la directrice de la législation fiscale. Si le crédit d’impôt est récurrent, il sera remboursé chaque année du crédit d’impôt au titre de l’année précédente.

Mme la Rapporteure générale. La question du président Carrez est extrêmement importante. Aujourd’hui, la mensualisation intègre les crédits d’impôt.

Mme la directrice de la législation fiscale. Sauf si vous n’en avez pas bénéficié deux ans auparavant.

Mme la Rapporteure générale. Prenons le cas d’un crédit d’impôt récurrent, sur dix ans, dans sa cinquième année. La mensualité est bien calculée en déduisant le crédit d’impôt. La proposition qui nous sera soumise dans le projet de loi n’intègre pas le crédit d’impôt, et le bénéficiaire sera remboursé en année N + 1.

Mme la directrice de la législation fiscale. Puisqu’il s’agit de crédit d’impôt récurrent, il sera versé au contribuable en septembre.

Si l’on regarde la chronique de trésorerie des remboursements et crédits d’impôt, il n’y a jamais de surprélèvements sur l’année.

Mme la Rapporteure générale. Aujourd’hui, la mensualité d’avril intègre le crédit d’impôt des années passées. Dans le système qui est proposé, au même mois d’avril, le montant prélevé n’intégrera aucun crédit d’impôt : le remboursement aura lieu en septembre.

M. Jean-Louis Gagnaire. Dans le cas extrême d’un jeune ménage, qui a des frais de gardes d’enfant et divers crédits d’impôt, la mensualité en tient compte, et il ne paie aucun impôt. Le crédit d’impôt annule l’impôt, et nombre de ménages non imposables sont dans cette situation.

M. le président Gilles Carrez. Mais ils paient lors des premiers mois de l’année.

M. Jean-Louis Gagnaire. Non, car il suffit de demander à l’administration fiscale d’adapter les mensualités en fonction de l’impôt qui sera réellement payé au mois de septembre, et celle-ci s’exécute.

Ces ménages ont des dépenses qui vont générer du crédit d’impôt, mais, après plusieurs années, ils n’auront pas à verser d’avance, puisque les ménages non imposables ne paient aucune mensualité.

M. le président Gilles Carrez. Et il y aura une démarche à faire, alors que, dans le système actuel, aucune démarche n’est nécessaire.

Mme la directrice de la législation fiscale. Il faut faire la différence entre les crédits et réductions d’impôt récurrents et les autres. Aujourd’hui, lorsqu’un contribuable peut bénéficier d’un crédit d’impôt nouveau dans l’année, les mensualités ou les acomptes provisionnels n’en tiennent pas compte.

M. le président Gilles Carrez. Nous sommes d’accord, nos questions ne portent pas sur ce cas.

Mme la directrice de la législation fiscale. Ensuite, les remboursements et crédits d’impôt récurrents ne concernent que 65 % des contribuables, et cette récurrence n’est pas stable dans le temps : une année, il peut s’agir d’économies d’énergie ; l’année suivante, de dons, et ainsi de suite. Si l’on intègre par anticipation ces remboursements et crédits d’impôt, nous ouvrons la possibilité que, au moment de la liquidation, les remboursements et crédits d’impôt ne soient plus du même montant, ce qui imposerait de demander des régularisations.

Dans la réforme proposée, le calcul du taux de prélèvement ne prend pas en compte les remboursements et crédits d’impôt accordés deux ans auparavant. Mais, dans le cas de remboursements et crédits d’impôt récurrents, chaque année, à aucun moment un contribuable ne paiera plus qu’aujourd’hui sur une année.

M. le président Gilles Carrez. Sur une année, d’accord, mais pas au mois d’avril.

Mme la directrice de la législation fiscale. En effet, mais, si l’on compare l’effet trésorerie de ce dispositif au dispositif actuel, les ménages feront l’avance en début d’année avant de percevoir un chèque en septembre, alors qu’aujourd’hui ils ne font pas d’avance en début d’année mais ne perçoivent pas de chèque en septembre.

Comme le prélèvement à la source sera fait sur douze mois et non sur dix, ceux dont les remboursements et crédits d’impôt représentent moins de 16 % de l’impôt sur le revenu seront gagnants, parce que le paiement de l’impôt sera étalé sur deux mois supplémentaires et qu’ils percevront un chèque dès le mois d’août. En fonction du poids des remboursements et crédits d’impôt dans leur impôt, ils pourront donc même être gagnants en trésorerie. C’est la troisième des raisons pour lesquelles le Gouvernement propose de ne pas intégrer les remboursements et crédits d’impôt au calcul du taux d’imposition.

La quatrième raison tient plus à un choix politique, et c’est à la représentation nationale d’en décider : cette réforme entend aussi assurer la clarté de l’impôt sur le revenu. Aujourd’hui, tout le monde confond taux marginal, taux moyen, décote… Avec le prélèvement à la source, le foyer verra son taux moyen unique, et le fait de ne pas introduire de remboursements et crédits d’impôt historiques dans le calcul du taux, mais de les donner en une seule fois au moment de la liquidation de l’impôt, permettra au contribuable de mesurer, de manière très concrète, l’effort qui est fait par les remboursements et crédits d’impôt.

M. le président Gilles Carrez. Notre collègue Dominique Lefebvre nous a expliqué cela de manière limpide la semaine dernière !

Mme la directrice de la législation fiscale. Nous avons expliqué le dispositif aux grandes associations qui bénéficient de dons dans le cadre de la mise en place de cette réforme, et elles ont préféré ce système plutôt que de diluer les remboursements et crédits d’impôt, amenant le taux moyen de 8,2 % à 8,1 %. Ces associations préfèrent que le taux moyen d’imposition continue d’apparaître à 8,2 % et que les contribuables bénéficient d’un chèque, ou que l’on réduise le montant de leur impôt, car cela rend plus lisible l’effort fait par l’État pour ces remboursements et crédits d’impôt.

Reste le cas particulier de ceux qui sont habitués à ne pas payer d’impôt du fait des remboursements et crédits d’impôt. On en compte un million. Le passage au prélèvement à la source pourrait donner à ces personnes l’impression qu’elles sont imposables, puisqu’elles seraient prélevées sur un taux brut avant de percevoir un chèque. Le Gouvernement réfléchit à un dispositif spécifique afin que le prélèvement de ces personnes reste nul, mais il n’est pas encore intégré au projet.

M. le président Gilles Carrez. Cela concerne un million de personnes parmi les 17 millions qui paient l’impôt.

M. Dominique Lefebvre. Afin d’éviter toute confusion, rappelons que les remboursements et crédits d’impôt sont toujours payés à l’année N + 1, et il ne peut pas en être autrement, puisque ce sont des avantages fiscaux qui résultent de dépenses fiscales effectives constatées l’année précédente.

Le seul problème concerne la séquence de trésorerie infra-annuelle. Ainsi, les jeunes couples qui commencent à faire garder leurs enfants vont payer la nourrice tout en acquittant les mensualités de l’année précédente, lorsqu’ils n’avaient pas droit au crédit d’impôt. Et, quand ils cessent de payer la nourrice, ils bénéficient encore une année du crédit d’impôt. Il y a donc un décalage de trésorerie sur plusieurs années. Le prélèvement à la source permettra l’instantanéité.

Comme le dit Mme la directrice de la législation fiscale, il y aura une forme d’avance du contribuable entre janvier et la mi-août, lorsque l’impôt est constaté. Mais, ensuite, ce sera l’État qui fera une avance de trésorerie de juillet à décembre, puisque les contribuables toucheront alors les remboursements et crédits d’impôt pour l’année entière. À cela s’ajoute l’effet de l’étalement du paiement sur douze mois et non dix. Je suis persuadé que, si l’on actualise les choses sur l’année, certains seront gagnants et d’autres perdants. À cet égard, je n’ai pas compris grand-chose aux équations des économistes de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE).

Plus le débat sur le prélèvement à la source se focalisera sur les remboursements et crédits d’impôt, qui ne touchent qu’une partie des contribuables, plus il sera nécessaire de détailler – par décile, par niveau de revenu, par catégorie de contribuables – qui est bénéficiaire des remboursements et crédits d’impôt. Il ne sera pas toujours possible de se cacher derrière le cas de la personne âgée qui bénéficiera de la disposition balai, celle qui prévoit que ceux qui n’ont pas payé d’impôt au cours des deux dernières années seront supposés avoir un taux de prélèvement de zéro. Je crois savoir que cette disposition, qui évite de faire payer des gens que l’on remboursera intégralement, figurera dans le texte présenté au conseil des ministres.

Mais l’enjeu de trésorerie, par ailleurs assez faible, concernera des catégories de contribuables bénéficiaires de certains remboursements et crédits d’impôt, car ils ont des revenus suffisants pour financer les sociétés de financement de l’industrie cinématographique et de l’audiovisuel (SOFICA) chères à Pierre-Alain Muet, ou l’immobilier d’outre-mer cher à nos collègues d’outre-mer.

Ainsi, nous ferons apparaître tous ces contribuables qui ont des revenus importants mais ne paient pas l’impôt sur le revenu. Plus nous approfondirons ce débat, plus cette question se révélera, et plus l’équité et la justice de notre système fiscal seront mises en question, ce dont je me félicite. Je vous encourage à pousser ce débat, qui ne peut que se conclure par la remise en cause des crédits et réductions d’impôt comme mode de gouvernance des finances publiques, spécificité française dont on connaît les effets sur la réalité de l’impôt en France.

M. le directeur général des finances publiques. D’autres points importants ont également été soulevés. Certains se sont interrogés sur la charge pour les entreprises, singulièrement les plus petites. Sans porter de jugement ni utiliser de vocabulaire trop normé, je souhaite décrire ma compréhension du sujet. Ce dispositif est rattaché à la paye des entreprises. La plupart des petites entreprises ont recours à des éditeurs de logiciels qui leur fournissent une prestation. Ceux-ci devront faire évoluer leur produit de manière à intégrer le taux et la multiplication par l’assiette. Je ne peux pas m’engager pour ces éditeurs de logiciels, mais certains d’entre eux ont pour pratique commerciale de considérer que les évolutions du logiciel de paye qu’ils fournissent à leurs clients, lorsqu’elles trouvent leur source dans une évolution législative ou réglementaire, sont incluses dans le forfait annuel de maintenance dudit logiciel. Les PME ne construisent pas elles-mêmes leur logiciel de paye, elles l’achètent, et il intégrera tous les dispositifs. Nous y travaillons avec les éditeurs de logiciels, et nous pouvons supposer que ce sera à moindre coût, puisque ce sera inclus dans le forfait de maintenance que tout client paie lorsqu’il recourt à une société de fourniture de logiciels.

Venons-en aux effectifs de la DGFiP. Nous allons d’abord connaître un pic, car il faudra faire beaucoup d’efforts d’accompagnement, de pédagogie, et d’assistance aux contribuables, comme il est d’usage pour cette administration. Dans un premier temps, cette réforme constituera donc plutôt une charge supplémentaire. Une fois en régime de croisière, lorsque chacun aura compris les vertus et les modalités de la réforme, les gains à attendre à la DGFiP tiendront à ce que nous ne consacrons pas de forces considérables au recouvrement amiable de l’impôt sur le revenu. Beaucoup de progrès et de gains de productivité ont déjà été faits. Le recouvrement amiable de l’impôt des particuliers – ce qui dépasse le seul impôt sur le revenu – correspond à 1 200 équivalents temps plein. Nous avons pu lire que le prélèvement à la source permettrait d’économiser des dizaines de milliers d’emplois à la DGFiP : c’est faux. Les ministres ont d’ailleurs expliqué que cette réforme n’avait ni pour finalité ni pour effet de faire économiser massivement de l’emploi public. À terme, quelques économies sont à attendre, mais gardons en mémoire ce chiffre de 1 200 équivalents temps plein, qui est un majorant, puisqu’il inclut le recouvrement de la fiscalité locale ou de l’impôt sur la fortune.

Monsieur Hetzel, il me semble que vous avez employé l’expression d’« usine à gaz » à propos du taux par défaut. Ce taux pourra être utilisé dans deux situations. Il pourra être choisi volontairement par le contribuable, à des fins de confidentialité. Nous savons que le taux est peu porteur d’informations confidentielles, mais le texte prévoit cette latitude. Dans ce cas, le texte actuel ne prévoit pas de conférer à ces contribuables un avantage financier. S’ils font le choix du taux par défaut, ils devront verser un acompte qui compensera le fait que le prélèvement sur leur salaire aura été inférieur à ce qu’il aurait dû être.

Dans d’autres situations, le taux par défaut s’appliquera de manière automatique, parce que le collecteur n’aura pas eu d’informations de la part de la DGFiP s’agissant du taux. C’est le cas du jeune salarié qui entre pour la première fois sur le marché du travail, ou des petits contrats à durée déterminée (CDD), comme lors des vendanges. Dans ce cas, le taux par défaut sera appliqué. Il sera décliné dans un barème mensuel, hebdomadaire ou quotidien, de manière à s’adapter à de tout petits contrats. Dans l’hypothèse où ce jeune vendangeur serait embauché durablement par l’entreprise, il ne se verra pas appliquer éternellement le taux par défaut. L’entreprise informera la DGFiP de cette embauche, et, si le contribuable souhaite accélérer les choses, il aura la possibilité, notamment grâce au portail « impôts.gouv.fr », de déclarer sa situation de famille, qui n’est pas prise en compte par le taux par défaut. De la sorte, nous calculerons un taux que nous communiquerons au collecteur – l’entreprise dans notre exemple. Ainsi le taux par défaut ne se sera appliqué que transitoirement, le temps que le système d’information engrange les informations nécessaires.

L’idée selon laquelle les jeunes seraient pénalisés de ce fait, parce qu’il faudrait attendre la liquidation de l’impôt sur le revenu pour s’apercevoir qu’ils étaient non imposables, est inexacte. Le système s’autorégule en cours d’année, dans le mois ou les deux mois qui suivent.

Mme la directrice de la législation fiscale. Le taux par défaut sera calculé par le législateur. Ce sera un taux synthétique, calculé à partir du barème de l’impôt sur le revenu pour un célibataire. Nous avons calculé l’impôt sur le revenu dû par un célibataire selon son niveau de revenu, puis nous avons essayé de faire des tranches de taux moyen, de manière que ce taux soit lisible, plutôt que de donner un barème, beaucoup moins lisible. Le barème du taux par défaut sera intégré dans les logiciels de paye et sera indexé chaque année.

Quand aucun taux n’aura été adressé par la DGFiP pour les logiciels de paye, ils appliqueront automatiquement ce taux par défaut. Dans quels cas la DGFiP ne donnera-t-elle pas cette information ? Tout d’abord, chaque fois qu’il y aura des erreurs d’appariement. Tous les échanges se feront à partir du numéro d’inscription au répertoire (NIR), communément appelé numéro de sécurité sociale. Ces échanges seront particulièrement sécurisés, parce que cet identifiant est sûr du côté de l’entreprise, notamment pour toute la sphère sociale de l’entreprise, et du côté de la DGFiP, qui a mis en place depuis des années un chantier de fiabilisation de ces identifiants.

Dans les cas de défaut de reconnaissance temporaire, l’entreprise ne reçoit pas de taux, et son logiciel de paye appliquera automatiquement ce taux par défaut.

Dans d’autres cas, l’entreprise ne peut pas recevoir de taux de l’administration de manière normale. Ce peut-être dans le cas de contrats courts, sachant que, ce barème de taux reprenant le barème de l’impôt sur le revenu, toutes les personnes payées au SMIC auront un taux zéro, il n’y aura pas de prélèvement. Le barème de taux ne prévoit pas un barème supérieur à celui qui résulterait de la législation actuelle en fonction du barème. Tous ceux qui ne paient pas l’impôt sur le revenu, car ils perçoivent 1,1 SMIC, continueront à ne pas être prélevés.

De même, le jeune résidant dans un foyer fiscal qui se voit appliquer un taux plus important ne se verra pas appliquer le taux du foyer : nous ne savons pas si ses parents vont le rattacher ou non au foyer fiscal, puisque cette option n’est pas remise en cause. Le jeune qui est aujourd’hui rattaché à un foyer fiscal se verra donc appliquer le taux par défaut.

M. le directeur général des finances publiques. Afin d’éviter de le surprélever.

M. Pierre-Alain Muet. Il est bon d’indiquer le taux moyen au contribuable, mais notre impôt est en taux marginal. Le taux moyen est donc continu, un euro gagné en plus sera imposé au niveau du taux marginal. Or la grille de taux par défaut reproduite dans l’avant-projet de loi fait apparaître des effets de seuil brutaux, le taux moyen pouvant augmenter de 2 % selon que l’on gagne un euro de plus ou de moins. Dans un logiciel de paye, la logique veut que le taux moyen soit continu et évolue doucement. On ne peut pas présenter dans un projet de loi de finances de brusques hausses des taux moyens pour un euro de plus.

M. le président Gilles Carrez. La question de Pierre-Alain Muet me paraît très importante. Le taux par défaut n’est pas calculé en continu, comme le taux moyen. Le taux moyen est un calcul ex post qui prend en compte le fait que différentes tranches de revenu ont été imposées à différents taux du barème progressif. Le taux par défaut est un taux ex ante qui va connaître des seuils.

M. Charles de Courson. Un contrat de quinze jours bien rémunéré parce qu’il est effectué dans des conditions exceptionnelles se verra appliquer le taux par défaut, comme s’il durait toute l’année. Cela va aboutir à des taux de prélèvement sans lien avec le taux final. Des personnes non imposables qui effectuent parfois des petits boulots bien rémunérés, car il y a des contraintes très fortes se verront appliquer un taux par défaut élevé, alors qu’elles sont non imposables.

Pourquoi le Gouvernement n’a-t-il pas choisi d’exonérer de prélèvement à la source les contrats inférieurs à un certain montant ? Ce serait plus protecteur pour les personnes modestes.

M. Éric Alauzet. Le taux donné pour chaque tranche dans ce tableau est une moyenne au sein de la tranche. Le taux d’imposition n’est pas le même pour une personne qui touche 3 000 euros par mois que pour une personne qui touche 4 000 euros par mois.

M. le président Gilles Carrez. Pour une base mensuelle de 2 602 euros, le taux par défaut est de 9 %. En passant à 2 603 euros, ce taux passe à 12,5 %. C’est le problème.

M. Éric Alauzet. C’est une moyenne au sein de la tranche, ce n’est pas le vrai taux.

Mme la directrice de la législation fiscale. Le taux par défaut s’applique dans des situations extrêmement rares. Dans les pays où le prélèvement à la source est déjà mis en place, l’administration ne cherche généralement pas à calculer le vrai taux du foyer concerné : elle applique un taux par défaut aboutissant à un surprélèvement généralisé, et rembourse les contribuables au moment de la liquidation de l’impôt. Ce n’est pas du tout le système retenu dans le projet de réforme du Gouvernement, où nous avons voulu nous rapprocher le plus possible de la situation réelle de chaque foyer.

Si nous avons retenu cette méthode, c’est avant tout pour le progrès qu’elle représente en termes de lisibilité. Pour le titulaire d’un contrat de travail, il vaut mieux savoir par avance que, au niveau de rémunération qui est le sien, il sera prélevé à 4 %, par exemple : c’est beaucoup plus clair que d’avoir à procéder lui-même à un calcul en fonction d’un barème qui lui aura été communiqué.

Il est possible que le barème ne comporte pas suffisamment de tranches et doive être affiné : je rappelle que, en l’état actuel, nous parlons d’un avant-projet. Au demeurant, j’attire votre attention sur le fait que très peu de contribuables sont concernés par les dernières tranches. Par ailleurs, on peut difficilement savoir à l’avance si la personne que vous avez citée en exemple effectuera dans l’année d’autres travaux très bien rémunérés, ce qui fait que l’on ne peut exclure le cas où une personne ne serait pas du tout imposée durant toute une année, avant de faire l’objet d’une régularisation la conduisant à s’acquitter d’un énorme montant d’impôt. Tous les cas de figure peuvent se présenter, mais j’insiste sur le fait que ceux que je viens d’évoquer sont des cas particuliers, bien distincts de ce que sera la situation générale.

M. Pierre-Alain Muet. Il me semble que l’on devrait conseiller aux contribuables de consulter les logiciels du ministère des finances, qui permettent de connaître avec précision le taux d’imposition applicable à un revenu donné. Je comprends le besoin de visibilité et trouve que le taux moyen présente un avantage, celui de permettre au contribuable de savoir instantanément ce qu’il paie. Cela dit, dans un système comme le nôtre, fondé sur le taux marginal et bien conçu, les taux moyens sont continus : chaque fois que l’on incrémente le revenu d’un euro, le taux d’imposition augmente légèrement – il n’y a pas de sauts brutaux comme dans le système qui nous est présenté, où un euro de revenu supplémentaire peut se traduire par une augmentation d’impôt de 20 ou 30 euros. Je sais bien que ce n’est pas ce qui va se passer dans la réalité, puisque les logiciels dont vous disposez vous permettent de déterminer exactement le taux moyen applicable à un revenu, et il me semble que l’on devrait éviter de présenter ce tableau aux contribuables.

M. le directeur général des finances publiques. Effectivement, la grille présentée dans le projet est sans doute perfectible, mais nous ne devons pas perdre de vue l’objectif que nous poursuivons, à savoir la plus grande simplicité possible pour l’entreprise – et le collecteur en général. Demander au contribuable d’aller chercher lui-même le taux qui lui est applicable serait, à mon sens, beaucoup trop compliqué.

M. Éric Alauzet. Paradoxalement, on risque de provoquer ce que l’on cherche généralement à éviter, en laissant penser que le taux marginal est susceptible de toucher d’autres revenus que le revenu marginal – en d’autres termes, qu’avec un revenu de 4 168 euros, je suis imposé à 11 %, mais qu’avec un euro de plus, je suis imposé à 15 % ! En réalité, avec un revenu de 4 168 euros, je suis plutôt imposé à 13 %, et à environ 13,1 % si je touche un euro de plus.

M. le président Gilles Carrez. J’aimerais également savoir comment on calcule l’individualisation au sein du couple qui en demande l’application : commence-t-on par celui qui a le revenu le moins élevé ?

M. le directeur général des finances publiques. L’objectif est que l’addition des deux soit équivalente à la globalité !

M. le président Gilles Carrez. J’ai bien compris le résultat recherché : c’est sur le moyen d’y parvenir que je vous interroge…

M. Dominique Lefebvre. Le ministre nous a confirmé que la question du taux neutre pourrait faire l’objet d’un travail visant à affiner le dispositif présenté. L’étude d’impact nous permettra de disposer d’une estimation du nombre de contribuables concernés, mais je rappelle d’ores et déjà que seules deux catégories de contribuables seront touchées.

La première est constituée de ceux percevant des revenus autres que ceux retenus à la source, et d’un montant important – par exemple, des personnes payées au SMIC mais percevant des revenus fonciers de l’ordre de 10 000 euros mensuels –, qui ne sont sans doute pas très nombreux.

La seconde est celle des personnes entrant sur le marché du travail – pour lesquelles, par définition, on ne pourra se fonder sur les revenus des années précédentes. La semaine dernière, nous avons évoqué la situation des personnes qui ne font que des petits boulots saisonniers, leur procurant un revenu annuel qui n’entraîne pas de prélèvement à la source : au bout de deux ou trois ans, ces personnes se retrouvent forcément dans les fichiers de la DGFiP, et se voient déjà attribuer un taux de PAS égal à zéro. Là encore, la question soulevée concerne un nombre limité de contribuables : pour la très grande majorité des autres, la réforme va surtout se traduire par la contemporanéité et le paiement de l’impôt sur douze mois au lieu de dix, ce qui est beaucoup plus simple à gérer.

M. Alain Fauré. J’aimerais savoir ce qui se passerait en termes de responsabilité du paiement si une entreprise devenait défaillante pour une raison ou une autre : a-t-on prévu un dispositif destiné à protéger le contribuable qui, lui, n’aurait rien à se reprocher ?

Par ailleurs, pourquoi avoir décidé que l’employeur serait collecteur, plutôt que d’opter pour un mécanisme de prélèvement automatique ?

M. Jean-Claude Buisine. À vous entendre, monsieur le directeur général, on a l’impression que deux notions vont disparaître, à savoir celle du quotient familial et celle du fait générateur au 1er janvier. De quelle manière allez-vous prendre en compte les changements intervenant dans la situation familiale des contribuables après le 1er janvier ?

M. le président Gilles Carrez. Pour ma part, j’ai été étonné de constater que le projet faisait état d’ajustements automatiques à l’initiative de l’administration fiscale sur déclaration du contribuable en cas de mariage, de pacte civil de solidarité, de décès ou de divorce, mais pas en cas de naissance. Pourquoi la naissance, plus prévisible que le décès, n’est-elle pas prise en compte ?

M. le directeur général des finances publiques. Pour ce qui est du taux de recouvrement, vous avez évoqué le risque qu’il diminue lorsque cette réforme sera mise en œuvre. En la matière, nous pouvons nous référer à un dispositif très analogue, celui des cotisations sociales à la charge des employeurs, qui présente un taux de recouvrement comparable à celui de l’impôt sur le revenu.

Par ailleurs, nous savons bien que certaines entreprises peuvent se trouver confrontées à des difficultés, ce dont notre administration a à connaître quand ces difficultés ont des conséquences sur la capacité des entreprises à reverser la TVA ou à s’acquitter d’autres impôts – à l’instar de nos collègues des organismes sociaux. Quand une entreprise est défaillante et que nous décidons de l’accompagner, notamment afin de préserver des emplois, nous établissons la liste de ses créances fiscales et sociales : demain, cette liste pourra également comprendre des créances au titre du prélèvement à la source, sans que cela nous pose de problème particulier.

Enfin, nous avons cherché à mettre au point une mécanique qui soit le moins sujette à l’erreur possible. Il s’agit de multiplier un salaire taxable, que l’entreprise connaît, par un taux qui lui a été fourni ou qui a été intégré au logiciel de paie auquel elle recourt. Nous ne devons cependant pas négliger la diversité et la complexité des situations, ainsi que le risque d’erreur humaine.

Sur ce point, je formulerai trois observations. Premièrement, le système fonctionne en continu : la DSN étant mensuelle, si une erreur a été commise sur une partie du prélèvement à la source, elle peut être corrigée dès le mois suivant. Deuxièmement, si une entreprise défaillante a effectué un prélèvement sur le salaire de son employé, mais n’a pas reversé l’argent correspondant au Trésor public, le système est conçu de telle manière que le contribuable concerné n’aura aucun souci à se faire : même si l’argent n’a pas été versé dans les caisses de l’État, le contribuable est considéré comme ayant rempli ses obligations fiscales – à charge pour nous de nous retourner vers l’entreprise pour récupérer l’argent au moyen d’une procédure de recouvrement forcé, avec application éventuelle d’une sanction.

M. le président Gilles Carrez. Comme c’est déjà le cas pour les cotisations salariales.

M. le directeur général des finances publiques. Tout à fait, les mécanismes et les procédures sont les mêmes, et les responsabilités quasiment identiques.

Mme la directrice de la législation fiscale. Comme cela a été dit, cette réforme du recouvrement ne change rien au calcul de l’impôt. Les changements intervenant dans la situation familiale du contribuable sont pris en compte de manière contemporaine à leur survenance, et non avec un décalage d’un an. La naissance d’un enfant fait partie des cas dans lesquels le contribuable concerné peut moduler son prélèvement à la baisse, l’année même où cette naissance intervient.

M. Dominique Lefebvre. La question qui se pose est bien celle du niveau de mensualité. Un enfant né au cours de l’année fiscale 2016 est actuellement pris en compte pour le calcul de l’impôt 2016, et ce sera toujours la même chose avec le prélèvement à la source : de ce point de vue, l’application de la réforme constituera une mesure de trésorerie favorable aux familles – ce qui ne devrait pas déplaire à nos collègues de droite.

Mme la directrice de la législation fiscale. Effectivement, il en sera ainsi à partir de 2018, et pas seulement pour les naissances, mais pour tous les changements de situation, qui nécessitent actuellement des traitements extrêmement complexes, notamment en cas de divorce. La contemporanéité, source de simplification, va également permettre d’éviter les à-coups indésirables que constituent les prélèvements d’un montant trop faible ou trop élevé et les ajustements qui s’ensuivent.

M. le président Gilles Carrez. Vous n’avez pas vraiment répondu à ma question. En cas de mariage, de divorce ou de décès, le contribuable déclare le changement de situation à l’administration, qui calcule alors le taux de prélèvement. La naissance, elle, n’entraîne pas de déclaration à l’administration : le contribuable adapte lui-même ses prélèvements, avec le risque d’erreur que cela implique – et s’il se trompe de plus 10 %, des pénalités lui sont appliquées. Il y a donc une dissymétrie entre le traitement de la naissance et celui des autres événements familiaux, que je ne m’explique pas.

Mme la directrice de la législation fiscale. Les changements de situation que sont le mariage, le divorce et le décès créent de nouveaux foyers fiscaux, avec l’attribution de nouveaux identifiants. La naissance, elle, ne constitue qu’un changement dans la composition du foyer fiscal : à l’instar d’un changement dans le montant des revenus, elle n’entraîne qu’une modification du calcul de l’impôt. J’ajoute que nous mettrons en ligne tous les outils permettant au contribuable de déclarer la naissance d’un enfant – un parcours usager très ergonomique a été prévu, et il suffira au contribuable d’approuver le nouveau taux qui lui sera soumis.

M. le président Gilles Carrez. Quelle sera la procédure pour les couples souhaitant bénéficier, non pas du taux neutre, mais de taux individualisés ?

Mme la directrice de la législation fiscale. Lorsque, au sein d’un couple, une personne perçoit des revenus sensiblement plus élevés que l’autre, la possibilité d’individualisation des taux permettra d’éviter que le taux de prélèvement applicable à l’une des deux personnes donne à l’employeur une indication sur le niveau de revenu de son conjoint : ce dispositif est destiné à préserver la confidentialité. L’administration va calculer le taux de prélèvement à partir du revenu du conjoint ayant les revenus les plus faibles en lui attribuant la moitié du quotient familial : aux revenus propres de cette personne, on appliquera la moitié des parts.

M. le président Gilles Carrez. Un tel système est avantageux pour celui qui gagne le moins.

Mme la directrice de la législation fiscale. L’essentiel est que le conjoint ayant les revenus les plus élevés ne se voie pas appliquer un taux prohibitif – ce qui n’est effectivement pas le cas, puisqu’il continue de bénéficier pleinement du quotient conjugal.

Mme Arlette Grosskost. En fait, tout se passe comme s’ils étaient célibataires ?

Mme la directrice de la législation fiscale. Non, puisque l’on tient compte pour l’un du quotient familial, pour l’autre du quotient conjugal.

M. Charles de Courson. Vous n’avez pas répondu à deux de mes questions portant sur l’effet base.

Premièrement, un décalage va se produire durant l’année d’entrée en vigueur de la réforme, ce qui nécessite de réévaluer fortement le barème – à défaut, cela va entraîner des plus-values fiscales et une augmentation de la pression fiscale. Or vous n’en parlez pas.

Deuxièmement, on calcule le taux d’imposition en faisant le rapport entre le montant de l’impôt sur le revenu payé durant l’année N – 1 et l’ensemble des revenus, qu’ils soient ou non dans le champ du prélèvement obligatoire, avant d’appliquer ce taux au salaire. Or l’impôt sur le revenu n’est pas calculé sur la base du salaire net, mais après un abattement de 10 %. Comment le taux que vous calculez va-t-il être appliqué sur les salaires, puisqu’il n’est pas appliqué sur le salaire brut, mais après application des cotisations sociales ?

Mme la directrice de la législation fiscale. Les choses sont tout à fait claires : le taux est calculé en tenant compte du fait que l’assiette retenue est constituée du montant du salaire avant abattement de 10 %.

M. Charles de Courson. Actuellement, le taux est abattu.

Mme la directrice de la législation fiscale. Le taux retenu est inférieur au taux moyen figurant actuellement sur l’avis d’imposition : il n’y aura donc aucun surprélèvement, contrairement à ce que l’on a récemment pu lire dans un journal. L’indexation du barème servant à conserver un taux d’imposition fixe, il n’est pas nécessaire de revaloriser ce taux.

M. Charles de Courson. Chaque année, on revalorise le barème en tenant compte du taux d’inflation. Il faudra donc bien indexer le barème 2018 comme on le fait tous les ans : à défaut, il se produira mécaniquement une accentuation de la pression fiscale, sous la forme d’un ressaut de l’impôt sur le revenu de l’ordre de 3 milliards d’euros. Je ne comprends pas que cette question ne soit évoquée nulle part.

Mme la directrice de la législation fiscale. Pour 90 % des revenus, on se référera à une assiette contemporaine : les prélèvements à la source effectués en 2018 le seront sur la base des revenus réels. À cette assiette, on appliquera des taux historiques – ceux de 2016 pour le début de l’année, puis ceux de 2017.

M. Charles de Courson. Vous parlez du prélèvement à la source, mais qu’en sera-t-il du paiement final de l’impôt ?

Mme la directrice de la législation fiscale. Chaque année, le barème sera réévalué. Il y aura une liquidation de l’impôt 2016 en 2017, et de l’impôt 2017 en 2018, sur la base des barèmes votés chaque année par le Parlement.

M. Dominique Lefebvre. Notre collègue de Courson a tort de se focaliser sur les abattements. En réalité, il faut faire le rapport entre un numérateur constitué des impôts payés sur les revenus soumis au barème après abattement et un dénominateur constitué du salaire imposable avant abattement : le taux intègre donc automatiquement l’abattement de 10 %.

Si l’on n’appliquait pas le prélèvement à la source en 2018, l’État toucherait cette année-là l’impôt sur le revenu de 2017. Avec le PAS, il touchera l’impôt sur le revenu de 2018, ce qui implique forcément une progression de l’assiette, puisque cette progression s’observe tous les ans. Cela dit, compte tenu du fait que les taux sont historiques, il s’opérera toujours une petite régularisation finale : à défaut, avec un pouvoir d’achat augmentant en moyenne de 1,7 % par an et une revalorisation du taux de 1 %, l’État perdrait 0,7 %. Pouvez-vous nous préciser quel dispositif est prévu pour procéder au paiement de cette régularisation ? Les contribuables auront-ils la possibilité d’étaler ce paiement sur plusieurs mois ?

M. le président Gilles Carrez. Je vais demander à Mme Bied-Charreton de répondre maintenant aux questions de François André portant sur la situation des agriculteurs.

Mme la directrice de la législation fiscale. Les bénéfices agricoles, comme les revenus des autres indépendants, se verront appliquer le principe de contemporanéité par le biais du calcul d’un acompte contemporain. Les agriculteurs paieront donc un acompte correspondant à l’impôt dû au titre de l’exercice en cours. À l’issue de multiples concertations, il a été décidé que, plutôt que d’essayer d’approcher une assiette contemporaine déterminée à partir d’un chiffre d’affaires et d’un taux de charges fixes, l’administration allait calculer un acompte sur la base des éléments d’informations dont elle dispose au sujet des exploitations concernées, comme cela se fait déjà pour les cotisations sociales.

M. François André. Sur quelle période ?

Mme la directrice de la législation fiscale. On ne change rien aux règles fiscales : cela continuera donc à se faire sur la période de leur exercice N – 2 et en appliquant le taux de cette même période – en passant à l’exercice N – 1 en septembre. Ce qui va changer par rapport à aujourd’hui, c’est que l’acompte sera calculé par rapport aux bénéfices contemporains : ainsi, dès qu’un agriculteur mettra fin à son activité, il cessera de payer.

M. François André. La moyenne triennale va donc disparaître ?

Mme la directrice de la législation fiscale. Non, la moyenne triennale, qui est une règle d’assiette, sera intégrée dans le calcul du bénéfice agricole et il en sera tenu compte dans le calcul des acomptes. L’autre avantage de la réforme est qu’elle va permettre un échelonnement infra-annuel, dont bénéficieront les indépendants ayant une saisonnalité dans leurs bénéfices : grâce à la contemporanéité, ils pourront reporter certaines échéances d’impôt. Par exemple, un agriculteur qui sait qu’il ne réalisera aucun bénéfice durant les trois premiers mois de l’année pourra reporter trois échéances mensuelles sur une quatrième.

En résumé, la facture initiale adressée par l’administration fiscale aux indépendants et aux agriculteurs ne sera pas différente de celle d’aujourd’hui, puisqu’elle sera calculée sur les mêmes bases. En revanche, l’application du principe de contemporanéité va leur permettre de moduler, voire de reporter leurs prélèvements en fonction de leurs bénéfices de l’année ; en cas de cessation d’activité, ils pourront arrêter de payer – ce qui n’est pas possible à l’heure actuelle compte tenu du décalage entre le moment où les bénéfices sont réalisés et celui où sont payés les impôts correspondants.

M. François André. Qui va collecter ?

Mme la directrice de la législation fiscale. Le paiement s’effectuera directement auprès de l’administration fiscale, sans intervention d’un tiers collecteur.

M. Alain Fauré. Les sommes correspondant aux prélèvements effectués par les employeurs pourront-elles être incluses, en cas de mise en œuvre d’un plan de sauvegarde, dans la masse financière constituée pour le règlement des cotisations Urssaf ?

M. le directeur général des finances publiques. Il existe toute une série de dispositions s’appliquant déjà aux entreprises en difficulté et relevant du recouvrement. En général, on commence par étaler les dettes au moyen de moratoires et de délais de paiement ; dans les cas les plus graves, l’abandon de la créance peut même être envisagé. Je précise que la créance aura un rang privilégié, comme c’est actuellement le cas pour les impôts.

Je reviens un instant sur la situation des agriculteurs, qui constitue une excellente illustration des avantages de la réforme proposée : les agriculteurs que nous avons rencontrés sont d’ailleurs extrêmement intéressés par le nouveau dispositif. Chacun connaît les difficultés rencontrées par les agriculteurs du fait des fluctuations du prix du lait ou de la baisse des volumes de vente de viande. En la matière, la réforme va permettre une capacité d’adaptation si ce n’est en temps réel, du moins de manière très contemporaine, qui n’existe pas aujourd’hui.

M. Alain Fauré. Si la réforme peut rendre le sourire aux agriculteurs, nous n’allons pas nous en plaindre !

M. Charles de Courson. Il reste une question à laquelle vous n’avez pas répondu, celle des revenus mixtes, c’est-à-dire situés à la fois dans le champ et hors champ. J’ai cru comprendre que l’on calculait le taux en tenant compte de l’ensemble formé par les deux catégories de revenus, mais comment les choses vont-elles se passer quand la part des revenus situés dans le champ sera très minoritaire par rapport à celle des revenus hors champ ?

Par ailleurs, dans l’hypothèse où serait nommé en 2017 un gouvernement souhaitant annuler la réforme avant qu’elle n’entre en vigueur, c’est-à-dire avant janvier 2018, j’aimerais savoir quelle serait la date limite pour qu’il le fasse – il s’agit, je le précise, d’une question purement technique.

Mme la directrice de la législation fiscale. Le taux de prélèvement, qui est le taux moyen du foyer, tient compte également des revenus hors champ du prélèvement. Si nous avons fait ce choix, c’est pour éviter que, au moment de la liquidation de l’impôt, c’est-à-dire celui où les revenus hors champ du prélèvement seront taxés, le contribuable n’ait l’impression qu’ils sont taxés à un taux supérieur à celui appliqué à ses revenus imposés à la source : il est important de montrer qu’il n’existe pas de catégories de revenus plus imposées que d’autres.

Les revenus hors champ seront imposés en une seule fois, au moment du solde. Cela dit, la très grande majorité des revenus hors champ se voit déjà appliquer un acompte contemporain. Ainsi les dividendes sont-ils soumis au prélèvement forfaitaire obligatoire (PFO), correspondant à un acompte contemporain de l’année où ils sont versés, une régularisation étant effectuée au moment du solde – c’est déjà, en quelque sorte, un prélèvement à la source.

M. Charles de Courson. Ce n’est pas le cas pour tous les revenus hors champ.

Mme la directrice de la législation fiscale. Les seuls qui ne soient pas soumis à ce régime sont les plus-values mobilières, dont l’imposition, non incluse dans les acomptes, est réglée en une seule fois ; ce système restera inchangé.

En ce qui concerne les non-résidents, une partie de leurs revenus fait l’objet d’un prélèvement à la source en vertu de dispositions soit conventionnelles, soit prévues par le code général des impôts. Rien ne sera changé à ce dispositif.

Mme Claudine Schmid. Mais il n’y a pas de prélèvement à la source sur les revenus fonciers ?

Mme la directrice de la législation fiscale. Les revenus fonciers qui ne sont pas prélevés à la source, mais réglés en même temps que l’impôt sur le revenu, vont basculer dans les acomptes contemporains au même titre que les revenus fonciers des résidents. Ainsi le non-résident qui cessera de louer cessera également de payer son impôt – alors qu’à l’heure actuelle il continue de régler l’impôt dû sur l’année précédente.

Mme Claudine Schmid. Et cela se fera sans collecteur ?

Mme la directrice de la législation fiscale. Effectivement.

M. le directeur général des finances publiques. Pour ce qui est du délai dont disposerait un nouveau gouvernement souhaitant annuler la réforme avant son entrée en vigueur, je vous dirai ceci : le projet mobilise tellement les forces de la DGFiP et, en particulier, celles de la direction de la législation fiscale, qui s’efforcent de rendre possible son entrée en application, conformément au mandat qui leur a été donné par le Gouvernement – et que le Parlement leur donnera peut-être également –, que, pour ma part, je ne peux raisonner autrement qu’en termes de droit positif. Je suis donc dans l’incapacité de répondre à votre question.

M. Charles de Courson. Monsieur le directeur général, vous êtes un haut fonctionnaire républicain et votre position vous honore. Cela dit, on ne peut exclure que ceux d’entre nous qui s’opposent aujourd’hui à cette réforme soient, demain, en situation de faire en sorte qu’elle ne s’applique pas – quand bien même le ministre de l’économie et des finances a laissé entendre que le processus enclenché était irréversible. Dès lors, je vous demande de répondre à cette réponse purement technique : quelle serait la date limite pour arrêter la mise en application de la réforme ?

M. le directeur général des finances publiques. La réponse technique que vous me demandez nécessiterait d’avoir étudié la question de manière approfondie, ce que je n’ai pas fait. Évidemment, si un ministre devait me poser la même question, je ferais en sorte d’être en mesure d’y répondre.

M. Charles de Courson. Fort bien. Je poserai donc cette question au ministre, en lui expliquant que vous n’avez pas souhaité me répondre.

M. Jean-Claude Buisine. Puisque l’instauration du prélèvement à la source ne remet pas en cause le principe de la déclaration fiscale par le contribuable, j’aimerais savoir si la mise en œuvre de la réforme est susceptible d’avoir des conséquences sur le contrôle des déclarations, et du contrôle fiscal en général. Des mesures ont-elles été prises, ou du moins envisagées, afin de faire en sorte que le niveau de contrôle exercé par l’administration fiscale ne subisse pas de dégradation à partir de 2018 ?

M. le directeur général des finances publiques. Le contrôle du reversement par les entreprises des sommes qu’elles auront collectées relève des attributions ordinaires de l’administration fiscale. À côté de la régularité du recouvrement, il faudra également veiller, dans le cadre des mesures anti-abus qui sont prévues pour l’année de transition – donc de manière temporaire –, à ce que certains contribuables ne mettent en place des stratégies d’optimisation fiscale fondées sur l’existence d’une « année blanche ». Cela dit, c’est seulement lorsque nous aurons un doute sur le comportement de tel ou tel contribuable que nous procéderons à une vérification : les opérations de contrôle resteront donc marginales. Comme vous l’avez dit, le système déclaratif reste maintenu, avec une déclaration préremplie engageant la responsabilité du contribuable qui la signe.

M. le président Gilles Carrez. Il est impossible de définir précisément et de façon exhaustive dans la loi les revenus exceptionnels : c’est ce qui justifie qu’une disposition balai ait été prévue, qui constituera le fondement du contrôle.

M. le directeur général des finances publiques. Ce contrôle sera mis en œuvre avec mesure par notre administration.

ANNEXE :
LISTE DES AUTRES PERSONNES AUDITIONNÉES

Union nationale des professions libérales (UNAPL)

– M. Michel Chassang, président

Union professionnelle artisanale (UPA)

– M. Pierre Burban, secrétaire général

Conférence générale des juges consulaires de France

– M. Yves Lelièvre, président

Assemblée permanente des chambres d’agriculture (APCA)*

– M. Guy Vasseur, président

Association nationale des DRH (ANDRH)

– Mme Bénédicte Ravache, secrétaire générale

Fédération des particuliers employeurs de France (Fepem)

– Mme Marie Béatrice Levaux, présidente

Syndicat des Indépendants

– M. Jean-Guilhem Darré, délégué général

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de l’Assemblée nationale, s’engageant dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale.

© Assemblée nationale

1 () Parmi lesquels figurent notamment les traitements, salaires et pensions versés à des personnes non domiciliées fiscalement en France, les rémunérations des auteurs, artistes et sportifs domiciliés en France, les revenus se trouvant dans le champ du prélèvement forfaitaire non libératoire tels que les dividendes et les produits de placement à revenu fixe, ainsi que les plus-values immobilières.

2 () À noter qu’en l’absence d’acomptes provisionnels ou de versements mensuels, le contribuable acquitte l’ensemble de l’impôt dû après réception de son avis d’imposition.

3 () Conseil des prélèvements obligatoires, Prélèvements à la source et impôt sur le revenu, février 2012.

4 () Loi n° 59-1472 du 28 décembre 1959 portant réforme du contentieux fiscal et divers aménagements fiscaux.

5 () MM. Jacques Delmas et Pierre Bilger, Rapport au ministre sur le recouvrement de l’impôt sur le revenu, Paris, 1970.

6 () Loi n° 71-505 du 29 juin 1971 portant institution d’un système de paiement mensuel de l’impôt sur le revenu.

7 () Inspection générale des finances, La mise en place d’une retenue à la source en matière d’impôt sur le revenu, décembre 1998 ; Mission d’analyse comparative des administrations fiscales, mars 1999 ; MM. Paul Champsaur et Thierry Bert, Mission 2003 : construire ensemble le service public de demain, ministère de l’économie, des finances et de l’industrie, janvier 2000 ; ministère de l’économie, des finances et de l’industrie, Le point sur la retenue à la source de l’impôt sur le revenu, février 2002.

8 () MM. Raymond Viricelle, Claude Bébéar, François Auvigne, Rapport sur les modalités de mise en œuvre du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu en France, mars 2007.

9 () MM. François Auvigne et Dominique Lefebvre, Rapport sur la fiscalité des ménages, avril 2014.

10 () Loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016.

11 () Prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu, annexe au projet de loi de finances pour 2017, évaluation préalable de l’article 38 déposée en application de l’article 51 (8°) de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances et rapport au Parlement en application de l’article 76 de la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016.

12 () Conseil constitutionnel, décision n° 95-285 DC du 28 décembre 1990, Loi de finances pour 1991.

13 () CPO, Prélèvement à la source et impôt sur le revenu, février 2012. L’analyse des contraintes juridiques a fait l’objet d’un rapport particulier de Mme Marie-Astrid de Barmon, annexé au rapport.

14 () Voir notamment Conseil constitutionnel, décision n° 97-393 DC du 18 décembre 1997, Loi de financement de la sécurité sociale pour 1998.

15 () Conseil constitutionnel, décision n° 99-419 DC du 9 novembre 1999, Pacte civil de solidarité, commentaire de cette décision in Cahiers du Conseil constitutionnel, 1999, n° 8.

16 () À l’appui de cette lecture « accommodante », pourrait être mentionnée la majoration de 25 % des revenus déclarés si le travailleur indépendant n’a pas adhéré à un centre ou une association de gestion agréés, justifiée par la facilité plus grande pour les indépendants de ne pas déclarer une partie de leur revenu par rapport aux salariés (cette différence de traitement a été déclarée conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2010-16 QPC du 23 juillet 2010, M. Philippe E. [Organismes de gestion agréés]).

17 () Pour un exemple de prise en compte de l’exigence du respect de la vie privée, voir par exemple Conseil constitutionnel, décision n° 94-352 DC du 18 janvier 1995, Loi d’orientation et de programmation relative à la sécurité.

18 () Cour de justice des Communautés européennes (CJCE), 3 octobre 2006, FKP Scorpio Konzertproduktionen GmbH, affaire n° 290/04.

19 () Loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF).

20 () Le Gouvernement considère que le coût informatique, notamment s’agissant des logiciels de paie, sera nul ou très faible dans la mesure où les contrats de maintenance des éditeurs intègrent les évolutions réglementaires. Il ne faut cependant pas exclure que, pour certaines entreprises, les mises à jour voire l’acquisition de nouveaux logiciels pourraient entraîner un coût non négligeable.

21 () Évaluation préalable du présent article, page 323.

22 () Voir infra, article 204 F.

23 () Articles 205 à 207 du code civil.

24 () Article 373-2-2 du code civil.

25 () Article 270 du code civil.

26 () La comparaison internationale montre d’ailleurs que le mécanisme de l’acompte est le plus fréquent, s’agissant des revenus fonciers. La retenue à la source se rencontre moins souvent et connaît des exceptions en fonction de la nature du revenu foncier (Royaume-Uni) ou du payeur des revenus (Espagne).

27 () Les pensions alimentaires n’étant soumises à aucun prélèvement social.

28 () Loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014.

29 () Loi n° 2012-1509 du 29 décembre 2012 de finances pour 2013.

30 () Compte tenu du fait que les revenus en provenance de l’étranger se trouvent en partie en dehors du champ de la réforme, en partie dans le champ de celle-ci soit sous forme de retenue, soit sous forme d’acompte, leur régime global est exposé de manière unifiée ci-dessous (E du présent I).

31 () Loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, dite « loi Macron ».

32 () Loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015.

33 () La CSG est déductible à hauteur de 5,1 % pour les revenus d’activité et de 4,2 % ou 3,8 % pour les revenus de remplacement (4,2 % pour les retraites et pensions d’invalidité et 3,8 % pour les autres revenus de remplacement). Reste donc imposable à l’impôt sur le revenu une fraction non déductible de 2,4 % de CSG (tandis que la CRDS n’est pas déductible).

34 () La déduction pour investissement (DPI) est prévue à l’article 72 D du CGI, la déduction pour aléa (DPA) à l’article 72 D bis.

35 () Ainsi que le soulignait notre collègue François André, cette option « est intéressante quand les revenus sont à la hausse. Elle est en revanche désavantageuse ou sans incidence lorsque les revenus sont à la baisse ou stable » (Rapport d’information sur la fiscalité agricole, Assemblée nationale, XIVe législature, n° 2722, 15 avril 2015, page 78).

36 () Loi n° 2015-1786 du 29 décembre 2015 de finances rectificative pour 2015. Le régime micro-BA s’est substitué au forfait agricole.

37 () Le système du quotient s’appliquant également aux revenus différés, le coefficient applicable à ces derniers est égal au nombre d’années civiles correspondant aux échéances normales de versement augmenté de un. Par exemple, pour un contribuable percevant en 2016 des arriérés de salaires afférents aux années 2009, 2010, 2011, 2012, 2013 et 2015, le coefficient est de sept (six années + 1).

38 () Pour un exemple concret des effets de cette exclusion, s’agissant d’une plus-value professionnelle, il est prié de se référer à l’évaluation préalable du présent article, page 115, exemple n° 12.

39 () Le taux d’imposition est calculé sur la base de l’impôt payé en N − 2 et N − 1, Pour la présentation détaillé du taux de droit commun, il est renvoyé aux développements complets (Cf. infra, III). Les taux retenus dans les exemples mentionnés sont ceux calculés avec le simulateur d’impôt en ligne de la DGFiP.

40 () Évaluation préalable de l’article, page 57. Voir également, pour la nécessité d’une modulation du prélèvement des travailleurs indépendants et, plus généralement, des titulaires de revenus soumis à l’acompte, les développements pages 186-188.

41 () Évaluation préalable de l’article, pages 57-60.

42 () Cf. infra, V.

43 () Évaluation préalable de l’article, page 60.

44 () D’après le simulateur d’impôt de la DGFiP.

45 () Sauf dans les hypothèses de régimes micro, où les charges correspondraient à l’abattement prévu par la loi (par exemple, 87 % s’agissant des bénéfices agricoles).

46 () Évaluation préalable de l’article 38, page 60. L’option n° 2 est celle reposant sur le chiffre d’affaires diminué d’un montant de charges déductibles, précédemment présentée.

47 () Pour une présentation détaillée du calcul du taux d’imposition, Cf. infra, III.

48 () Les revenus salariaux se voient appliquer l’abattement de 10 % pour frais professionnels, puis le déficit des BIC est soustrait du résultat de ce produit.

49 () Montants obtenus avec le simulateur d’impôt de la DGFiP.

50 () D’après le simulateur d’impôt de la DGFiP.

51 () Ou de l’article 197 A, s’agissant du calcul de l’impôt dû par un contribuable non domicilié fiscalement en France, mais percevant des revenus de source française.

52 () Y compris le crédit d’impôt égal au montant du prélèvement forfaitaire obligatoire sur les RCM, le cas échéant.

53 () Ce taux correspond d’ailleurs au taux moyen d’imposition qui figure sur l’avis d’imposition.

54 () CPO, Prélèvements à la source et impôt sur le revenu, février 2012.

55 () C’est-à-dire sur la base du montant des crédits et réductions d’impôt imputés au titre de l’année N − 2, et non de l’année N.

56 () Le différentiel entre 13,6 milliards d’euros, soit les pertes de recettes fiscales au titre des avantages fiscaux de 2017, et ce chiffre de 10,6 milliards d’euros, correspond pour l’essentiel à la part restituée des avantages fiscaux, qui n’est par construction pas prise en compte dans le calcul du taux.

57 () CPO, Rapport particulier sur les scénarios de mise en œuvre de la retenue à la source de l’imposition des ménages de M. Sébastien Velez.

58 () Il convient toutefois d’observer que lorsque le foyer fiscal ne bénéficierait plus de l’avantage fiscal, il enregistrerait une régularisation en année N + 2 et N + 3, comme vu supra – sachant que cet effet de régularisation se produit également dans le droit en vigueur.

59 () Sachant qu’un foyer fiscal peut bénéficier de plusieurs avantages fiscaux au titre d’une même année, ce qui ne permet pas d’additionner le nombre de foyers fiscaux concernés par un avantage fiscal récurrent.

60 () Cette réfaction de 30 %, en application du 3 de l’article 197 du CGI, s’applique au montant de l’impôt issu du barème progressif et du quotient familial, après plafonnement des effets de ce dernier et avant application de la décote. L’avantage retiré de cette réduction d’impôt ne peut excéder 5 100 euros.

61 () Cette réfaction de 40 %, elle aussi prévue par le 3 de l’article 197, s’applique de la même façon ; l’avantage qui en est retiré est quant à lui plafonné à 6 700 euros.

62 () L’évaluation préalable indique que cette grille pourra être utilisée par les travailleurs indépendants ou les titulaires de revenus fonciers, pour leurs versements d’acompte contemporain spontané s’ils le souhaitent, en cas de début d’activité, lorsque l’administration ne peut calculer l’acompte contemporain au préalable.

63 () Après déduction des cotisations sociales et de la part déductible de la CSG, mais avant déduction de 10 % pour frais professionnels.

64 () Il convient toutefois de rappeler que la déduction forfaitaire de 10 % est plafonnée, à un montant de 12 170 euros ; ce plafonnement n’intervient toutefois par construction que pour des revenus très élevés, supérieurs à 121 700 euros par contribuable.

65 () Les modalités d’utilisation du NIR sont détaillées infra.

66 () Sur ce point, les salaires versés aux élèves et étudiants de moins de vingt-cinq ans au titre d’emplois exercés pendant leurs congés sont exonérés d’impôt dans la limite de trois fois le SMIC mensuel (36° de l’article 81). Pour les étudiants rattachés au foyer fiscal de leurs parents, cela signifie que leurs salaires pourraient être soumis au taux par défaut, si leurs revenus étaient supérieurs à 1 361 euros par mois – ou 53 euros par jour, mais finalement exonérés lors de la régularisation, en N + 1.

67 () Évaluation préalable de l’article, pages 135-136.

68 () Id., page 138.

69 () D’après le simulateur d’impôt de la DGFiP.

70 () Au regard de la simulation effectuée avec le simulateur d’impôt de la DGFiP.

71 () Soit : lorsqu’ils sont séparés de biens et ne vivent pas sous le même toit ; lorsqu’étant en instance de séparation de corps ou de divorce, ils ont été autorisés à avoir des résidences séparées ; lorsqu’en cas d’abandon du domicile conjugal par l’un ou l’autre des époux, chacun dispose de revenus distincts.

72 () En pratique, les mensualités ou acomptes versés par l’un des déclarants sont remboursés par l’administration fiscale, tandis que les mensualités et acomptes versés par l’autre déclarant viendront minorer l’impôt dû par le nouveau foyer fiscal.

73 () Il sera par ailleurs « rafraîchi » en septembre de l’année N, si l’union a eu lieu en début d’année et que le taux théorique commun s’est appliqué avant le mois de septembre.

74 () Selon la date du décès, les ayants droit devraient aussi, le cas échéant, verser l’impôt restant dû lors de la régularisation à l’été de l’année N, au titre des revenus perçus en N − 1.

75 () En prenant pour hypothèse que le nouveau taux a été appliqué à compter du mois de juillet.

76 () Dont la suppression est par ailleurs prévue par l’alinéa 148.

77 () La suppression de ces majorations est prévue par l’alinéa 222.

78 () Dont la suppression est prévue par l’alinéa 176.

79 () CPO, Prélèvement à la source et impôt sur le revenu, février 2012.

80 () Il s’agit d’un tiers des foyers fiscaux imposables à l’IR.

81 () Voir les alinéas 148 et 176 du présent article.

82 () Voir ci-dessous les modalités techniques d’établissement de ce PAS théorique.

83 () Voir l’exemple en bas de la page 197 de l’évaluation préalable.

84 () Contrairement à ce qu’indique le Rapporteur général de la commission des finances du Sénat dans le rapport d’information provisoire fait au nom de la commission des finances du Sénat, qui ne mentionne que les BIC, BNC et BA (M. Albéric de Montgolfier, Rapport sur le projet d’instauration du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu, Sénat, session ordinaire de 2016-2017, page 49).

85 () Id., page 50.

86 () Évaluation préalable de l’article, pages 58-59.

87 () Cf. supra, II, B.

88 () Le principe d’une sanction ne peut en effet être complètement écarté : une sous-estimation du revenu imposable au titre de l’année de début d’activité conduirait à une baisse des recettes fiscales et pourrait s’inscrire dans le cadre d’un comportement d’optimisation.

89 () Loi n° 2015-1786 du 29 décembre 2015 de finances rectificative pour 2015.

90 () Article 76 de la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016.

91 () Dont la rédaction est remplacée par les alinéas 112 et 113.

92 () Cette amende est supprimée par l’alinéa 226 et lui substitue un régime d’amendes progressif prévu par les alinéas 230 à 233.

93 () Voir page 31.

94 () Ne sont toutefois pas pris en compte, pour le calcul des tiers provisionnels, l’impôt sur le revenu et les prélèvements sociaux afférents aux revenus exceptionnels ou différés ouvrant droit au mécanisme du quotient, l’impôt afférent aux PVM, l’impôt sur le revenu à taux proportionnel, ainsi que la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus.

95 () Comme vu supra, le contribuable qui estime, sous sa propre responsabilité, que le montant du premier versement d’acompte effectué au titre d’une année est égal ou supérieur à l’impôt sur le revenu dont il sera finalement redevable, peut se dispenser du second versement prévu pour cette année.

96 () Toutefois, toute personne, non encore imposée, peut demander à souscrire un contrat de mensualisation pour le paiement de son impôt sur le revenu ; le nouvel adhérent fixe alors lui-même la base des prélèvements mensuels à effectuer sur son compte. Par ailleurs, comme pour l’acompte, ne sont pas pris en compte pour le calcul des mensualités l’impôt sur le revenu et les prélèvements sociaux afférents à certains revenus.

97 () La déclaration préremplie, qui concernait initialement les seules données relatives à l’état civil, à la situation familiale et au nombre d’enfants mineurs, s’est enrichie, à compter de l’imposition des revenus de 2005, des données relatives aux salaires, pensions, retraites, allocations de pré-retraite, allocations chômage et indemnités journalières maladie, et, à compter de l’imposition des revenus de 2009, des revenus de capitaux mobiliers.

98 () Aux termes de l’article 1681 ter B, l’option pour la mensualisation de la taxe d’habitation est également valable pour le recouvrement de la contribution à l’audiovisuel public.

99 () Article 1er de la loi n° 2011-900 du 29 juillet 2011 de finances rectificative pour 2011.

100 () À titre d’exemple, si la mise en recouvrement du rôle intervient le 31 juillet, l’impôt sera exigible à partir du 30 août.

101 () Cf. infra, Troisième partie, III, pour plus de précisions sur le SEPA et les moyens de paiement.

102 () L’alinéa 173 renvoie au livre V du code rural. Or, les caisses de crédit agricole sont désormais régies par la section 3 du chapitre III du titre Ier du livre V du code monétaire et financier.

103 () Loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie.

104 () Tel est le cas des contribuables actuellement titulaires d’un contrat de mensualisation ou qui ont opté pour le prélèvement à l’échéance.

105 () Tel est le cas pour les retraites du régime général : celles au titre du mois de janvier, par exemple, sont versées au début du mois de février. Néanmoins, les dates varient selon les régimes de retraite – les retraites des fonctionnaires de l’État sont ainsi versées en fin de mois.

106 () Loi organique n° 2001-692 du 1 août 2001 relative aux lois de finances.

107 () La période complémentaire est aujourd’hui prévue par le décret n° 2007-687 du 4 mai 2007 pris en application de l’article 28 de la loi organique n° 2001-692 modifiée du 1er août 2001 relative aux lois de finances et en ce qui concerne la période complémentaire à l’année civile.

108 () Soit un créancier simple, ne disposant d’aucune garantie particulière (privilège, nantissement, hypothèque) lui permettant d’être payé avant les autres créanciers sur le prix de vente des biens de son débiteur.

109 () D’après l’évaluation préalable de l’article, le nombre de rejet bancaire est estimé à 35 000 par mois.

110 () Cette majoration ne s’applique que si le complément versé (CV) est inférieur de plus de 30 % au complément dû (CD). Dans l’hypothèse d’un versement de 30 % inférieur à celui dû, CV = 0,7 CD. La majoration serait alors obtenue par la formule suivante : ((CD – CV) / 2) CD, soit ((CD – 0,7CD) / 2) / CD, soit 0,15 CD / CD, soit 15 %.

111 () Chaque salarié doit un impôt de 225 euros, soit 19 euros par mensualité (18,75 arrondis).

112 () Et non d’un an, contrairement à ce qu’indique l’évaluation préalable de l’article (page 179).

113 () Conseil constitutionnel, décision n° 2016-545 QPC du 24 juin 2016, Alec W. et al. [Pénalités fiscales pour insuffisance de déclaration et sanctions pénales pour fraude fiscale].

114 () Pour les personnes morales, l’équivalent du SPI est le SIREN.

115 () Le taux d’imposition, notamment, prendrait en compte les avantages d’assiette résultant du calcul de l’impôt dû au titre de 2017, ainsi que l’administration fiscale l’a confirmé à la Rapporteure générale.

116 () Il consiste à calculer l’impôt correspondant à un revenu exceptionnel en divisant le montant de ce revenu par un coefficient égal à quatre, en ajoutant au revenu net global « courant » le chiffre résultant de cette division, puis en multipliant par le même coefficient la cotisation supplémentaire ainsi obtenue.

117 () Article 3 de la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016.

118 () Soit dans le cas d’une sortie partielle en capital, à hauteur de 20 %, soit pour l’acquisition d’une résidence principale, soit pour les PERP aux faibles en-cours.

119 () Est autorisé dans ce cadre un versement en capital à hauteur de 20 % de la valeur des droits individuels résultant du contrat effectué, à la date de la liquidation des droits.

120 () Les contrats « en sursalaire » (« article 82 ») sont des régimes de retraite, adossés à des contrats d’assurance vie, à droits définitivement acquis souscrits et financés, en tout ou partie, par l’entreprise au profit de ses salariés et prévoyant le versement aux bénéficiaires, lors de leur départ à la retraite, soit d’un capital, soit d’une rente viagère.

121 () Lorsque le contrat a été souscrit à l’étranger et que les cotisations versées n’étaient pas déductibles du revenu imposable du bénéficiaire, le 6° bis de l’article 120 prévoit que seule la part du versement correspondant aux produits attachés aux prestations de retraite versées en capital est imposable à l’impôt sur le revenu. L’imposition est alors faite selon les règles applicables aux revenus de capitaux mobiliers.

122 () Le capital perçu est exonéré d’impôt sur le revenu.

123 () Lorsque le contrat se dénoue sous la forme d’un versement en capital, les produits du contrat sont imposables à l’impôt sur le revenu dans les conditions prévues à l’article 125-0 A du CGI, selon les règles applicables aux contrats de capitalisation et d’assurance vie.

124 () Les primes et indemnités attribuées par l’État aux agents publics et aux salariés à l’occasion du transfert hors de la région Île-de-France du service, de l’établissement ou de l’entreprise où ils exercent leur activité, bénéficient de l’exonération d’impôt prévue par le 24° de l’article 81 du CGI.

125 () La rédaction proposée n’inclut pas le cas où les sommes versées au titre de la participation seraient affectées non à un plan, mais à un compte bloqué de l’entreprise ; dans ce cas les sommes resteraient en tout état de cause exonérées.

126 () Décision de rescrit du 23 février 2010, n° 2010/07 FP.

127 () Loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016.

128 () Article 119 de la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016.

129 () D’après le simulateur d’impôt de la DGFiP.

130 () D’après le simulateur d’impôt de la DGFiP.

131 () D’après le simulateur d’impôt de la DGFiP.

132 () Loi n° 2015-1786 du 29 décembre 2015 de finances rectificative pour 2015.

133 () Loi n° 97-1019 du 28 octobre 1997 portant réforme du service national.

134 () Article 19 de la loi n° 2013-1279 du 29 décembre 2013 de finances rectificative pour 2013.

135 () Loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016.