Convention sur l'avenir de l’Europe

Travaux de M. Pierre Lequiller,
membre de la Convention sur l'avenir de l'Europe,
Président de la délégation pour l'Union européenne

M. Pierre Lequiller, Président de la délégation pour l'Union européenne de l'Assemblée
nationale a été désigné le 9 juillet 2002, par le Président de l'Assemblée nationale, 
représentant titulaire de l'Assemblée pour la Convention sur l'avenir de l'Europe."

Communication de MM. Pierre Lequiller et Jacques Floch, sur l'état
d'avancement des travaux de la Convention
(réunion de la délégation pour l'Union européenne du 20 mai 2003

 

Pierre Lequiller,
membre titulaire de la Convention,
Président de la délégation pour l’Union européenne

Sommaire :
Amendements déposés par M. Pierre Lequiller sur les articles 1 à 16 du projet de traité constitutionnel
Intervention lors du débat sur l’avenir de l’Europe le mardi  3 décembre 2002
Intervention dans les débats du groupe de travail "compétences complémentaires"
Projet d'intervention sur l'avant projet de traité constitutionnel

Projet d'intervention sur la gouvernance économique
Intervention orale de M. Pierre Lequiller, le 28 octobre 2002, lors de la session plénière
Intervention de Pierre Lequiller lors de la session plénière des 3 et 4 octobre 2002

Intervention orale de M. Pierre Lequiller, le 4 octobre 2002, lors de la session plénière

Contribution de Pierre Lequiller à la Convention européenne : "Un Président pour l'Europe"  sur le site de la Convention
Contribution de M. Pierre Lequiller à la Convention européenne (2 octobre 2002)
Intervention de M. Pierre Lequiller lors de la session plénière de la Convention européenne des 12 et 13 septembre 2002.
Communication du Président Pierre Lequiller sur la Convention, à la délégation pour l’Union européenne (25 juillet 2002).
Intervention orale de M. Pierre Lequiller le 4 octobre 2002, lors de la session plénière

Amendements déposés par M. Pierre Lequiller sur les articles 1 à 16 du projet de traité constitutionnel

FICHE AMENDEMENT

 Proposition d'amendement à l'article : 1

 Déposée par M. Pierre LEQUILLER, Président de la délégation pour l'Union européenne

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 Article 1 :

 Dans le point 1., après les mots : « leur avenir commun », insérer les mots : « sur la base d’une union sans cesse plus étroite » ;

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 Explication éventuelle :

 La référence à "Union sans cesse plus étroite" est actuellement partie intégrante des Traités. La supprimer constituerait un signal négatif vis-à-vis des citoyens européens.

FICHE AMENDEMENT

 Proposition d'amendement à l'article : 1

 Déposée par M. Pierre LEQUILLER, Président de la délégation pour l'Union européenne

___________________________________________________________________________

 Article 1 :

 Après le point 1., insérer le point 1. bis suivant :

"La devise de l'Union est [à compléter]. L'emblème de l'Union est le drapeau bleu frappé d'un cercle de douze étoiles d'or. L'hymne de l'Union est "l'Hymne à la joie" de Ludwig Van Beethoven. La monnaie de l'Union est l'euro. Le 9 mai, jour de l'Europe, est jour férié "

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 Explication éventuelle :

 Ces symboles contribueront à donner une identité à l'Union aux yeux de ses citoyens, comme sur le plan international.

 FICHE AMENDEMENT

 Proposition d'amendement à l'article 1er :

 Déposée par M. Pierre LEQUILLER, Président de la délégation pour l'Union européenne

___________________________________________________________________________

 Article 1 :

 Dans le point 2., remplacer les mots «  respecte l’identité nationale de ses États membres. » par les mots : « est fondée sur un principe de solidarité entre ses États membres et respecte leur identité nationale, et notamment leur structure politique, constitutionnelle, y compris l'organisation des pouvoirs publics au niveau national, régional et local. » .

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 Explication éventuelle :

 Cet amendement vise à la fois à intégrer le principe de la solidarité entre les États membres, dans la Constitution - ce principe constitue un fondement essentiel de la construction européenne - et à mettre clairement en exergue que la responsabilité de l'organisation des pouvoirs publics de chaque État membre leur appartient en propre.

FICHE AMENDEMENT

Proposition d'amendement à l'article 2 :

 Déposée par M. Pierre LEQUILLER, Président de la délégation pour l'Union européenne

___________________________________________________________________________

 Article 2 :

 Après le mot « démocratie, », insérer les mots :  « de pluralisme, ».

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 Explication éventuelle :

 L’amendement vise à souligner l’importance du pluralisme- politique, médiatique, culturel- comme valeur de l’Union.

 FICHE AMENDEMENT

 Proposition d'amendement à l'article 3 :

 Déposée par M. Pierre LEQUILLER, Président de la délégation pour l'Union européenne

___________________________________________________________________________

 Article 3 :

 Dans le point 1., après les mots « le bien être des peuples » insérer les mots « en préservant l'acquis de la construction européenne » ;

___________________________________________________________________________

 Explication éventuelle :

 Cet amendement se comprend par son texte même

 FICHE AMENDEMENT

 Proposition d'amendement à l'article 3:

 Déposée par M. Pierre LEQUILLER, Président de la délégation pour l'Union européenne

___________________________________________________________________________

 Article 3 :

 Dans le point 2. , remplacer les mots « économique et sociale » par les mots « économique, sociale et territoriale »

___________________________________________________________________________

 Explication éventuelle :

 La cohésion territoriale est au cœur des politiques communautaires et en particulier de la politique régionale. L'objectif de convergence du développement des territoires de l'Union doit être intégré dans la Constitution.

FICHE AMENDEMENT

 Proposition d'amendement à l'article 3 :

 Déposée par M. Pierre LEQUILLER, Président de la délégation pour l'Union européenne

___________________________________________________________________________

 Article 3 :

 Dans le point 2., après les mots « les hommes et les femmes », insérer les mots « , la qualité du travail, la santé publique, la formation tout au long de la vie, »

___________________________________________________________________________

 Explication éventuelle :

 Cet amendement reprend des objectifs importants mentionnés par les Traités actuels et des recommandations du groupe de travail sur l'Europe sociale.

FICHE AMENDEMENT

Proposition d'amendement à l'article 3:

 Déposée par M. Pierre LEQUILLER, Président de la délégation pour l'Union européenne

___________________________________________________________________________

 Article  3:

 Dans le point 2., remplacer les mots « et la protection sociale. » par les mots «  , un niveau élevé de protection sociale, la lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale et contre toute forme de discrimination et l’accès à des services d’intérêt général efficaces et de qualité. » 

___________________________________________________________________________

 Explication éventuelle :

 Cet amendement reprend des objectifs importants mentionnés par les Traités actuels et des recommandations du groupe de travail sur l'Europe sociale.

FICHE AMENDEMENT

 Proposition d'amendement à l'article 3 :

 Déposée par M. Pierre LEQUILLER, Président de la délégation pour l'Union européenne

___________________________________________________________________________

 Article  3:

 Dans le point 3., remplacer les mots "culturelle respectée" par "culturelle et linguistique respectée et favorisée" ;

___________________________________________________________________________

 Explication éventuelle :

 La diversité linguistique est un des fondements de l'identité européenne et son maintien participe directement au projet qui rassemble les États membres.

FICHE AMENDEMENT

 Proposition d'amendement à l'article 3 :

 Déposée par M. Pierre LEQUILLER, Président de la délégation pour l'Union européenne

___________________________________________________________________________

 Article 3 :

 Dans le point 4., après le mot « protection » , insérer les mots : « des droits de l’homme et en particulier » 

___________________________________________________________________________

 Explication éventuelle :

 La protection et le développement des droits de l'homme participent dès à présent aux axes principaux de l'action de l'Europe dans le monde.

FICHE AMENDEMENT

 Proposition d'amendement à l'article 3 :

 Déposée par M. Pierre LEQUILLER, Président de la délégation pour l'Union européenne

___________________________________________________________________________

 Article 3 :

 Dans le point 4., après les mots « droit international, » insérer les mots «  au maintien et au développement de la diversité culturelle, à la préservation de l'environnement et des ressources naturelles » ;

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 Explication éventuelle :

 L'action internationale en faveur de la diversité culturelle, comme celle en faveur de la protection de l'environnement et des ressources naturelles (qui ne se confond pas avec le développement durable) constituent une des priorités de l'action de l'Europe dans le monde. Il ne serait pas concevable de revenir en arrière en ne les inscrivant pas dans la Constitution. Par ailleurs, ces objectifs sont mentionnés parmi les priorités internes de l'Union (point 2).

FICHE AMENDEMENT

 Proposition d'amendement au Titre II :

 Déposée par M. Pierre LEQUILLER, Président de la délégation pour l'Union européenne

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 Titre II:

 Reprendre le texte de la Charte dans une nouvelle "deuxième partie", insérée après la première, et supprimer les dispositions relatives aux droits fondamentaux, qui seraient redondantes avec la Charte, dans le présent titre II

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 Explication éventuelle :

 Cet amendement a pour objet d’intégrer la Charte en début du traité constitutionnel, conformément à l’option privilégiée par une large majorité du groupe de travail sur la Charte.

 Cette option améliore la lisibilité du traité constitutionnel et exprime l’importance accordée par l’Union à la protection des droits fondamentaux.

 Elle correspond aux solutions retenues par la plupart des Constitutions contemporaines et, en particulier, par la majorité des Constitutions des États membres, qui font figurer les garanties des droits fondamentaux dans le corps même et au début de leur Constitution (cf. articles 1er à 19 de la Loi fondamentale allemande, articles 1er à 54 de la Constitution italienne, articles 10 à 55 de la Constitution espagnole, articles 12 à 79 de la Constitution du Portugal, articles 1er  à 23 de la Constitution néerlandaise, articles 9 à 31 de la Constitution luxembourgeoise, articles 4 à 24 de la Constitution belge, articles 4 à 25 de la Constitution grecque, articles 40 à 45 de la Constitution irlandaise, etc.). Cette inscription au début du traité constitutionnel prend ainsi mieux en compte les traditions constitutionnelles des Etats membres.

 Si des procédures de révision différenciées devaient être prévues pour les différentes parties du Traité, la Charte devra en tout état de cause faire l’objet de la procédure de modification la plus solennelle, parce qu’assurer la garantie des droits fondamentaux participe au « noyau dur » de toute véritable Constitution (certaines d’entre elles excluent d’ailleurs toute révision des dispositions relatives aux droits fondamentaux - cf. art. 79 alinéa 3 de la Loi fondamentale allemande, par exemple).

 NB : Dans la note en bas de page (1) de la note du secrétariat (CONV 528/03), il convient de préciser que ne devront pas être reprises toutes les adaptations rédactionnelles de la Charte mentionnées dans le rapport du groupe de travail, mais seulement certaines de ces adaptations.

FICHE AMENDEMENT

 Proposition d'amendement à l'article 10 :

 Déposée par M. Pierre LEQUILLER, Président de la délégation pour l'Union européenne

___________________________________________________________________________

 Article 10 :

 Au point 3., après le mot «  économique », insérer le mot « et sociale » 

___________________________________________________________________________

 Explication éventuelle :

 Les débats à la Convention et les travaux du groupe social ont montré l'importance d'associer les dimensions économiques et sociales. D'ores et déjà ces deux volets sont étroitement associés dans les politiques de l'Union.

 FICHE AMENDEMENT

 Proposition d'amendement à l'article 10 :

 Déposée par M. Pierre LEQUILLER, Président de la délégation pour l'Union européenne

___________________________________________________________________________

 Article 10 :

 Au point 4., après les mots « la définition » , insérer les mots « et la mise en œuvre » .

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 Explication éventuelle :

 Après Saint-Malo, les Conseils européens de Cologne et de Laeken, les arrangements Union européenne-OTAN et la première opération militaire de gestion de crise de l'Union européenne en Macédoine, l'Union européenne a dépassé le stage exclusif de la définition progressive d'une politique de défense commune et a commencé à la mettre en œuvre.

FICHE AMENDEMENT

 Proposition d'amendement à l'article 11 :

 Déposée par M. Pierre LEQUILLER, Président de la délégation pour l'Union européenne

___________________________________________________________________________

 Article 11 :

 Dans le point 1, après les mots "la politique commerciale commune", insérer les mots "à l'exception des accords internationaux visés à l'article 12, paragraphe 4, dernier alinéa"

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 Explication éventuelle :

 Il est indispensable de maintenir la compétence partagée entre l'Union et les États membres dans les accords visés par l'article 133, paragraphe 6, deuxième alinéa du TCE.

FICHE AMENDEMENT

 Proposition d'amendement à l'article 11 :

Déposée par M. Pierre LEQUILLER, Président de la délégation pour l'Union européenne

___________________________________________________________________________

 Article 11 :

 Dans le point 1, après les mots : "adopté l'euro", rajouter l'alinéa" - les organisations communes de marché des produits agricoles couverts par la deuxième partie,"

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 Explication éventuelle :

 Les organisations communes de marché relèvent de la compétence exclusive de l'Union.

FICHE AMENDEMENT

 Proposition d'amendement à l'article 11 :

 Déposée par M. Pierre LEQUILLER, Président de la délégation pour l'Union européenne

___________________________________________________________________________

 Article 11 :

 Dans le point 2, remplacer les mots "d'exercer sa compétence au niveau interne" par les mots "de réaliser l'un de ses objectifs".

___________________________________________________________________________

 Explication éventuelle :

 La compétence peut être exercée en l'absence d'accord international. Par contre la conclusion d'accords peut être en revanche nécessaire pour réaliser un des objectifs de l'Union.

FICHE AMENDEMENT

 Proposition d'amendement à l'article 11 :

 Déposée par M. Pierre LEQUILLER, Président de la délégation pour l'Union européenne

___________________________________________________________________________

 Article 11 :

 A la fin du point 2, rajouter l'alinéa suivant : "Le présent paragraphe ne s'applique pas à la conclusion des accords définis par l'article 12, paragraphe 4, dernier alinéa, comme relevant de la compétence partagée de l'Union et des États membres".

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 Explication éventuelle :

 L'existence d'un acte interne dans les domaines du commerce des services audiovisuels, culturels, d'éducation, de santé ou sociaux ne remet pas en cause la compétence partagée dans ces domaines, en particulier en ce qui concerne la compétence de conclure un accord international.

FICHE AMENDEMENT

 Proposition d'amendement à l'article 12 :

 Déposée par M. Pierre LEQUILLER, Président de la délégation pour l'Union européenne

___________________________________________________________________________

 Article 12 :

 A la fin du point 4, rajouter les alinéas suivants :

- les règles de concurrence ;

- la recherche et le développement technologique, l'espace ;

- la coopération au développement ;

- l'aide humanitaire ;

- les accords internationaux dans le domaine du commerce des services culturels et audiovisuels, des services d'éducation, ainsi que des services sociaux et de santé humaine et des accords concernant les aspects non commerciaux de la propriété intellectuelle.

___________________________________________________________________________

 Explication éventuelle :

 L'ensemble des domaines inclus par cet amendement fait à l'heure actuelle partie des domaines de compétence partagée.

FICHE AMENDEMENT

 Proposition d'amendement à l'article 13 :

 Déposée par M. Pierre LEQUILLER, Président de la délégation pour l'Union européenne

___________________________________________________________________________

 Article 13 :

 Dans le titre, et dans les points 1. et 2., après le mot « économique », insérer les mots « et sociales ».

___________________________________________________________________________

 Explication éventuelle :

 Les débats à la Convention et les travaux du groupe social ont montré l'importance d'associer les dimensions économiques et sociales. D'ores et déjà ces deux volets sont étroitement associés dans les politiques de l'Union.

FICHE AMENDEMENT

Proposition d'amendement à l'article 13 :

 Déposée par M. Pierre LEQUILLER, Président de la délégation pour l'Union européenne

___________________________________________________________________________

 Article 13 :

 A la fin du point 1, rajouter la phrase suivante : "Ces grandes orientations comportent des objectifs mesurables dans les domaines économiques, environnemental et social".

___________________________________________________________________________

Explication éventuelle :

 Il s'agit de mettre en œuvre les engagements pris par l'Union et les États membres, dans le domaine du développement durable, au sommet de Johannesburg en septembre 2002.

FICHE AMENDEMENT

 Proposition d'amendement à l'article 14 :

 Déposée par M. Pierre LEQUILLER, Président de la délégation pour l'Union européenne

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 Article 14 :

 Avant la première phrase, insérer les alinéas suivants :

« Les objectifs de la politique étrangère et de sécurité commune sont :

 - la promotion des valeurs et des objectifs communs définis aux articles 2 et 3 ;

- la sauvegarde des intérêts fondamentaux, de l’indépendance et de l’intégrité de l’Union, conformément aux principes de la charte des Nations Unies ;

- le renforcement de la sécurité de l’Union sous toutes ses formes ;

- le maintien de la paix et le renforcement de la sécurité internationale, conformément aux principes de la charte des Nations Unies , ainsi qu’aux principes de l’ acte final de Helsinki et aux objectifs de la charte de Paris, y compris ceux relatifs  aux frontières extérieures ;

- la promotion de la paix internationale ;

- le renforcement de la démocratie et de l’État de droit, ainsi que le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

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 Explication éventuelle :

 Cet amendement introduit dans le traité les objectifs de la politique étrangère et de sécurité commune tels que le prévoit l'article 11 du TUE. Il serait peu compréhensible pour le lecteur de ne mentionner dans cet article 14 relatif à la PESC que la clause selon laquelle les États membres sont solidaires de cette politique, sans en avoir auparavant exposé le contenu.

FICHE AMENDEMENT

 Proposition d'amendement à l'article 15 :

 Déposée par M. Pierre LEQUILLER, Président de la délégation pour l'Union européenne

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 Article 15 :

  Dans le titre remplacer les mots «  d’appui » par les mots «  de coordination, de complément ou d’appui ».

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 Explication éventuelle :

 La formulation "d'appui" est trop restrictive comme l'avait montré les débats sur les conclusions du groupe de travail sur les compétences.

FICHE AMENDEMENT

 Proposition d'amendement à l'article 15 :

 Déposée par M. Pierre LEQUILLER, Président de la délégation pour l'Union européenne

___________________________________________________________________________

 Article 15 :

 Dans le point 2., remplacer les mots "d'appui" par les mots "de coordination, de complément ou d'appui" ;

___________________________________________________________________________

 Explication éventuelle :

 La formulation "d'appui" est trop restrictive comme l'avait montré les débats sur les conclusions du groupe de travail sur les compétences.

FICHE AMENDEMENT

 Proposition d'amendement à l'article 15 :

 Déposée par M. Pierre LEQUILLER, Président de la délégation pour l'Union européenne

___________________________________________________________________________

 Article 15 :

 Dans le point 2., rajouter l'alinéa suivant : - le tourisme

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 Explication éventuelle :

 Le tourisme fait partie des domaines d'intérêt commun : l'Union doit pouvoir y contribuer par des action d'appui, de coordination ou de complément (elle y est d'ailleurs déjà actuellement engagée).

FICHE AMENDEMENT

 Proposition d'amendement à l'article 15 :

 Déposée par M. Pierre LEQUILLER, Président de la délégation pour l'Union européenne

___________________________________________________________________________

 Article 15 :

 Dans le point 4., après les mots "des États membres", rajouter les mots ", sauf exception prévue par la deuxième partie".

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 Explication éventuelle :

 L'interdiction de toute harmonisation n'est expresse dans le TCE que pour certains des domaines concernés; Il peut en outre y avoir certains sujets pour lesquels une telle harmonisation peut être souhaitable (par exemple, s'agissant du sport, pour la lutte contre le dopage).


 

 Intervention
lors du débat sur l’avenir de l’Europe

  Mardi  3 décembre 2002
Seul le texte prononcé fait foi

Monsieur le Président, Monsieur le Président de la Convention, Messieurs les ministres, Madame la ministre, mes chers Collègues,
Mes premiers mots s’adresseront au Président de l'Assemblée nationale. Je voudrais vous rendre hommage, avec toute la conférence des Présidents, Monsieur le Président, de vouloir placer l’Europe au cœur du travail de notre assemblée, avec ce débat exceptionnel, avec la réunion conjointe avec le Bundestag du 22 janvier prochain, avec l’instauration de séances de questions d’actualité européenne, outre d’autres initiatives envisagées.
Plus de 60 % des règles de la vie du citoyen sont d’origine européenne ; il convient d’en parler tout autant à Paris qu’à Bruxelles.
C’est dans cet esprit que la délégation pour l’Union européenne s’est efforcée d’ouvrir ses travaux aux commissaires comme aux parlementaires européens, aux commissions pour les affaires européennes des autres Parlements de l’Union comme à la délégation européenne du Sénat français.
Je me réjouis également du travail en commun engagé avec les commissions permanentes de l’Assemblée, avec lesquelles plusieurs auditions communes ont d’ores et déjà été organisées.

L’Europe traverse une période historique, tant les rendez-vous sont nombreux et capitaux.
D’abord, l’élargissement, que je préfère appeler « l’unification de l’Europe ». En effet, Monsieur le Président de la Convention, vous proposez dans votre architecture plusieurs dénominations pour l’Europe de demain et ma préférence va à « l’Europe unie », beaucoup plus parlante pour le citoyen européen que le nom d'Union européenne.
Cette Europe unie, c’est la garantie accrue de la paix. Et la paix n’a pas de prix. L’Europe a réconcilié la France et l’Allemagne. Par le marché intérieur, elle a uni quinze pays. Avec le transfert de souveraineté majeur qu’est l’euro, elle a intégré nos destins. Avec l’élargissement, le rêve et l’objectif des pères fondateurs deviennent réalités.
Aux quelques Cassandre à la vision courte, je rappellerai que ces peuples de l’Est, que Copenhague va, dans dix jours, arrimer aux nôtres, nous ont libéré de Yalta et du Mur de Berlin. Aux petits comptables, je rappellerai que d’ores et déjà, nos accords d’association avec ces pays ont été bénéfiques à nos exportations et à notre économie. Il faut éviter d’agiter les peurs et les égoïsmes :
C’est donc par un oui clair qu’il faudra en 2004 les accueillir.
Deuxième rendez–vous majeur : la Constitution. La Convention qui, sous votre égide, Monsieur Giscard d’Estaing, travaille déjà depuis plusieurs mois, a un rôle historique. Jacques Floch et moi-même qui avons l’honneur d’y représenter l’Assemblée nationale, en mesurons déjà les remarquables avancées.
Qui aurait dit, il y a seulement un an, que nous aurions une Constitution, avec un préambule intégrant la Charte ? Qui aurait dit que nous aurions un accord sur la personnalité juridique unique de l’Union ? Qui aurait dit que nous nous accorderions, grâce aux groupes de travail de Mendez de Vigo et de Gisela Stuart, sur l’implication des parlements nationaux dans le contrôle de la subsidiarité ? Qui aurait dit que le groupe de travail Dehaene, auquel j’appartiens, préconiserait un ministre européen unique des affaires étrangères présidant le Conseil « Relations extérieures » ?
Je salue la méthode conventionnelle. Par la formule qui associe parlementaires européens et nationaux, gouvernements et commissaires, pays membres et pays candidats, j’ai le grand espoir que les conclusions de la Convention seront suffisamment fortes pour permettre une conférence intergouvernementale très courte. Comme le souhaite le Premier ministre Jean-Pierre Raffarin, nous pourrions peut-être ainsi aboutir à un nouveau Traité de Rome avant la fin 2003. Pour la nouvelle Europe, quoi de plus symbolique qu’un nouveau Traité de Rome ?
Pour autant, il faut être vigilant et tenace. Il faut être audacieux et ambitieux. Si le résultat est tiède et médiocre, nous aurons manqué le rendez-vous de l’Histoire. Et pour moi, le grand enjeu de cette Convention, c’est de rendre notre « Europe unie », aujourd’hui trop complexe et peu comprise par le citoyen, lisible et populaire.
Et nous n’avons plus que six mois pour réussir.
D’abord, que doit faire l’Europe et que ne doit-elle pas faire ? Que doivent faire les Etats ? Certes, le système d’alerte précoce préconisé par le rapport Mendez de Vigo permettra aux parlements nationaux d’exercer enfin le contrôle sur le principe de subsidiarité. Certes, le rapport Lamassoure propose la classification des compétences en compétences exclusives, partagées et complémentaires. Mais le contenu de ces catégories n’est pas encore clarifié. Par exemple, certains sont encore tentés de faire de la politique étrangère une compétence exclusive de l’Union dans sa gestion civile et même, à terme, militaire, ce qui est évidemment irréaliste et inopportun. Peut-on sérieusement envisager que l’ordre d’envoi au combat de soldats français ne soit pas exclusivement décidé par la France ? Certains, souvent les mêmes, demandent que l’on renationalise la politique agricole commune, ce qui est dangereux et d’ailleurs régressif par rapport au Traité de Rome de 1957.
Les citoyens ne comprendront bien l’Europe que si elle concerne leur vie quotidienne. Et la France a raison de vouloir renforcer la gouvernance économique et sociale de l’Europe. L’euro implique que nous coordonnions mieux nos politiques économiques et sociales. Grâce au Président de la République, au Premier ministre, et à vous-même, Monsieur le ministre des affaires étrangères, je me réjouis que sur ce sujet, comme sur d’autres, désormais la France et l’Allemagne travaillent de concert. Mais j’irai plus loin : il n’y aura de gouvernance économique que s’il y a une présidence stable de l’eurogroupe.
Puissance économique certes, puissance politique dans le monde car il faut éviter un monde unipolaire. J’ai ainsi proposé au groupe « action extérieure » de la Convention de définir et de mettre en œuvre un pacte de convergence des politiques étrangères et de sécurité dans le cadre de la PESC.
Sur un sujet d’actualité dramatique, la sécurité maritime
– compétence partagée –, l’Europe doit assumer pleinement la responsabilité d’une politique ambitieuse, au lieu de réagir au coup par coup, – Erika I, Erika II – après les catastrophes. Et les Etats membres doivent appliquer les décisions prises en commun sans se dérober.
Enfin, même dans les compétences complémentaires, la Convention doit plaider pour une coopération beaucoup plus intense. Un exemple me tient à cœur : la culture. Elle repose à la fois sur la diversité et sur un patrimoine commun. Diversité d’abord : pour défendre le français mais aussi les autres langues européennes, pour promouvoir notre création artistique et cinématographique, il nous faut consacrer le principe de la diversité culturelle. S’agissant d’un patrimoine commun, quelle timidité de l’Europe dans ce domaine ! La coopération intraeuropéenne, par exemple en matière d’échanges universitaires, est parfois moins importante qu’avec l’Outre Atlantique. Développons les manifestations culturelles européennes, les échanges universitaires, le soutien européen à la création artistique, les lycées et centres culturels communs à l’étranger, les universités européennes sur le continent. J’y vois la condition pour qu’émerge réellement une citoyenneté européenne.
Après le projet et les missions de l’Europe, j’en viens aux institutions. Tout le monde s’accorde pour reconnaître qu’à quinze et plus encore à vingt-cinq, une refondation d’ensemble s’impose, transparente et efficace. L’Europe ne peut plus avancer masquée au fil de compromis successifs et de traités obscurs.
Le triangle institutionnel doit être conservé. Il faut même en renforcer chacune de ses composantes. Il faut préserver et même étendre le droit d’initiative de la Commission. Notamment en matière économique et sociale et dans le domaine de la justice et des affaires intérieures.
Il faut que le Parlement européen devienne un vrai Parlement, qui participe pleinement à l’élaboration des lois européennes. Pas des directives, des règlements mais bien des lois européennes. Cela nécessite d’étendre la procédure de codécision, ce qui implique de recourir plus souvent au vote à la majorité qualifiée au Conseil. Un vrai parlement vote les recettes comme les dépenses. Il est responsable des unes comme des autres. Dans cet esprit, j’en suis venu à proposer la création de véritables ressources propres, c’est-à-dire un impôt européen dont les députés européens seront, lors des élections, comptables devant le citoyen.
Vous avez opportunément relancé, en juillet dernier, Monsieur le Président Giscard d’Estaing, l’idée française d’un « Congrès », composé de représentants du Parlement européen et des parlements nationaux. J’y attache la plus grande importance, car il faut que l’Europe soit au cœur des débats nationaux.
Pour avoir vécu les récentes élections nationales, en France bien sûr, et les avoir suivies en Allemagne, j’ai pu constater que l’Europe y tenait trop peu de place.
Mais il faut prêter attention aux réticences exprimées par certains conventionnels à cette idée du Congrès, du fait d’un malentendu. Nombreux sont ceux qui craignent en réalité une concurrence faite au Parlement européen. Pour faire gagner cette belle idée, il nous faut expliquer qu’il ne s’agit aucunement d’une deuxième chambre législative, ni même d’une institution permanente.
Après la Commission, après le Parlement européen, le troisième côté du triangle, le Conseil. Il n’est plus possible d’avoir un Président du Conseil qui change tous les six mois. L’Europe n’est ni crédible ni efficace sur la scène internationale et elle n’est pas lisible pour le citoyen.
La proposition également française d’une présidence stable formulée par Jacques Chirac à Strasbourg en mars dernier répond à cette double critique.
La proposition d’un ministre européen des affaires étrangères cumulant les fonctions de Solana et de Patten, placé auprès du Conseil européen, répond également à cette exigence d’efficacité.
Mais, là encore, il faut prêter attention aux conventionnels qui, sur la présidence de l’Europe, ont une autre vision. Nombreux sont encore ceux qui, du côté allemand comme du côté de pays de populations moins importantes, veulent un Président de la Commission directement élu par le Parlement européen. En fait, ils veulent même faire des élections européennes une confrontation partisane de candidats à la présidence de la Commission. Je suis totalement opposé à cette dérive, contraire à l’esprit du traité de Rome. Prisonnière d’une majorité de circonstance, la Commission perdrait son indépendance et son autorité.
Mais si l’on veut aboutir à la large majorité qui est la marque de la méthode conventionnelle, il faut rechercher une solution qui rassemble. D’ailleurs, il faut, me semble-t-il, dépasser le clivage entre approches intergouvernementale et supranationale. Il ne s’agit pas de faire « un choix Conseil » ou un « choix Commission ».
C’est dans cet esprit de recherche d’un point de rencontre que j’ai déposé, en ma qualité de conventionnel, une contribution sur la création d’un Président unique de l’Europe, présidant à la fois le Conseil européen et la Commission.
Ce Président étant proposé et responsable devant le Conseil, cette solution me paraît conforme à l’esprit et aux objectifs de la proposition française de Strasbourg d’assurer une visibilité pour le citoyen comme sur la scène internationale.
De toutes façons, la présidence stable de l’Union, qu’elle soit bicéphale ou unique, constituera, après l’introduction de l’euro, une avancée politique majeure de la construction européenne. L’Europe aura enfin un visage.
En conclusion, le choix de la méthode de ratification du futur traité constitutionnel appartient au Président de la République et à lui seul. Quel que soit le mode adopté, et encore plus s’il s’agit d’un référendum, cela implique une mobilisation active de chacun d’entre nous. Certains membres de la délégation ont d’ores et déjà organisé des réunions d’information et de sensibilisation sur l’élargissement et sur les enjeux de la Convention. Pour l’Europe, rien n’est pire que le silence et l’indifférence. L’Irlande nous l’a prouvé lors de ses référendums à un an d’intervalle. Quand on ne parle pas de l’Europe, elle perd, quand on en parle, elle gagne.
Je me réjouis que le Premier ministre ait décidé de lancer une grande campagne d’information et de dialogue sur l’Europe. L’Europe mérite en effet un immense débat auquel nous devons tous participer parce qu’elle est synonyme de paix et peut-être, nous le souhaitons, demain, de puissance.
 


Intervention sur le thème des compétences complémentaires
(débats sur le rapport du groupe présidé par M. Christophersen – 8 novembre, 10h15)
Seul le texte prononcé fait foi

Je voudrais tout d’abord saluer la qualité du travail effectué par le groupe, sous la présidence de notre collègue Henning Christophersen.
 La question de la répartition des compétences, et celle de leur exercice, constituent un sujet central pour le renforcement de l’efficacité de l’action commune. Les débats en plénière qui se sont déroulés sur ce thème, comme les résultats du groupe de travail sur la subsidiarité, ont permis de mettre en lumière qu’il s’agissait davantage, à ce stade, d’améliorer et de renforcer les conditions de l’exercice des compétences, plutôt que d’en modifier sensiblement la répartition.
 Dans cet esprit, l’effort de clarification de la répartition des compétences qui a animé les travaux du groupe constitue une priorité que j’approuve pleinement. Je pense en particulier à la proposition du groupe de répartir les compétences selon trois catégories distinctes. Cette proposition recoupe très justement les propositions de notre collègue Alain Lamassoure dans son rapport au Parlement européen, sous réserve de l’appellation de « mesures d’appui » : je préfèrerais personnellement que l’on s’en tienne au terme de « compétences complémentaires » qui me semble plus juste.
 S’agissant des principes devant régir l’exercice des compétences, j’approuve tout à fait la proposition du groupe ajoutant le principe de solidarité aux principes de subsidiarité et de proportionnalité. Il s’agit là du fondement même de la construction européenne.
 Mais je voudrais insister sur un point, mes chers collègues : l’effort louable de clarification ne doit pas affaiblir la capacité d’action de l’Union. Il s’agit en particulier de maintenir la capacité de l’Union à s’adapter à des besoins d’action commune qui resteront nécessairement évolutifs. Le maintien d’un accès à la procédure de l’article 308 me semble de ce point de vue essentiel.
  C’est pourquoi, comme notre Convention l’a déjà fortement souligné en plénière, il ne faut pas de « catalogue de compétences » et l’on doit laisser leur place aux critères de compétences par objectif. Dans le même esprit, je regrette que les propositions de la Commission relatives à l’introduction d’un critère d’« intensité » de la compétence de l’Union n’ait pas été suffisamment discutées. Nous devons approfondir cette proposition.
  En tout état de cause, je suis très réticent sur la proposition du groupe faisant correspondre strictement les catégories de compétences à certains types d’instrument. Il faut laisser la souplesse nécessaire. Il me semble en particulier qu’il ne faut pas exclure, ni rendre exceptionnelle, l’utilisation de directives ou de règlements dans le champ des compétences complémentaires. Cette utilisation existe déjà dans les faits et il faut en maintenir la possibilité pour l’avenir.
  Enfin, il me paraît qu’en termes de domaine de compétences :
– la recherche, compte tenu de l’importance de l’action de l’Union dans ce domaine, ne me paraît pas relever des compétences complémentaires mais plutôt des compétences partagées ;
– par ailleurs, et je voudrais finir par là, le domaine du sport doit être introduit dans les compétences complémentaires de l’Union. C’est déjà le cas dans les faits, mais le manque actuel de base juridique dans les traités handicape très sérieusement l’action commune dans ce domaine. Au–delà même des sujets techniques pour lesquels l’action commune de l’Union s’impose – comme la lutte contre le dopage –, le sport constitue à l’évidence un sujet éminemment populaire à travers lequel l’Union peut se rendre plus proche du citoyen. Et cela correspond à un objectif majeur de notre Convention auquel nous devons répondre.


Intervention en session plénière, vendredi 8 novembre à 9h30 sur l’avant-projet de Traité constitutionnel
Seul le texte prononcé fait foi
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Monsieur le Président,

Votre proposition d'architecture constitue une étape capitale pour la Convention. A nous, maintenant grâce à cet ordre du jour clair, de définir concrètement son contenu. Sans aborder le fond, je voudrais insister sur quelques priorités.
Premièrement, comme l’a très bien dit le représentant du gouvernement allemand
M. Bury, ministre délégué aux affaires européennes, il faut préserver l’acquis communautaire, et notamment les compétences de la Commission, dans les domaines du marché intérieur et de la concurrence qui ont tant fait pour l’Europe. A ce titre, dans la deuxième partie consacrée aux politiques, la politique de la concurrence ne devrait pas être considérée comme relevant d’un « domaine spécifique » distinct du marché intérieur.
Deuxièmement, il faut réformer les procédures de décisions communautaires notamment dans les domaines de la politique étrangère et de défense ainsi que, comme je l’ai indiqué hier, sur la gouvernance économique et sociale de l’Union.
Troisièmement, il est nécessaire de renforcer le système institutionnel pour une plus grande lisibilité pour le citoyen européen. Il faut, me semble–t–il, faire simple si l’on veut rendre l’Europe populaire et dépasser l’opposition stérile et dangereuse entre les logiques intergouvernementale et supranationale. Nous ne pourrons pas sortir de cette Convention sans une réforme ambitieuse. 
La nouvelle Constitution ne doit pas être faite pour nous faire plaisir mais pour plaire au citoyen européen. S’il ne comprend pas, il la désapprouvera et nous aurons échoué. Elle ne se fera donc pas par la défense corporatiste de chacun des coins du Triangle – Parlement, Commission, Conseil – mais par un renforcement des trois : extension de la majorité qualifiée, extension de la codécision, grande visibilité de l’exécutif.
Il ne faut pas que chacune des institutions tire à elle le drapeau européen au risque de le déchirer. Il faut au contraire que les trois acteurs renforcés œuvrent ensemble par compromis au service d’une Europe puissante. C’est dans cet esprit de compromis que j’aimerais que, sans à priori, l’on n’exclue pas l’idée d’une présidence unique de l’Union qui pourrait rassembler peut–être ceux qui la voient au Conseil et ceux qui la voient à la Commission ; cette idée aurait le mérite de la lisibilité. C’ets enfin l’esprit de démocratie qui doit guider nos travaux en associant les deux sources de la souveraineté européenne : celle des Etats et celle des peuples : c’est l’idée du Congrès. Là encore soyons pragmatiques et réalistes. Il ne s’agit aucunement de créer une nouvelle institution législative et pour bien le montrer je ne ferais pas apparaître le Congrès des peuples d’Europe dans le titre IV de l’avant projet de l’avant-projet de traité constitutionnel mais dans une rubrique séparée après ce titre ou bien encore dans le titre VI sur la vie démocratique de l’Union.
Enfin, je crois utile d’inscrire comme vous l’avez fait la question des ressources de l’Union. L’Europe doit, selon moi, avoir ses ressources propres et ses institutions seront ainsi responsables de leur gestion.
Une remarque pour conclure sur la dénomination, puisque vous avez opportunément posé le problème. Je constate en lisant la presse européenne que dans toutes les langues l’Union européenne s’abrège en Union. C’est pour cela que je réponds d’ores et déjà à votre question sur la dénomination que ma préférence va à l’Europe Unie dont l’abréviation sera l’Europe, ce qui est beaucoup plus fort et parlant pour le citoyen européen.


Intervention en session plénière, jeudi 7 novembre à 15 heures, sur le rapport final du groupe de travail « Gouvernance économique »
Seul le texte prononcé fait foi
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Si la Convention a d’ores et déjà permis de franchir plusieurs étapes très importantes, notamment avec la présentation d’un avant-projet de Traité constitutionnel, il est dommage que le groupe de travail sur la gouvernance économique n’ait pu, en l’absence de consensus, aller au-delà d’un relatif statut quo. Je tiens néanmoins à saluer les efforts déployés par Klaüs Hänsch pour surmonter les divergences de vues qui sont apparues au sein de son groupe. Mais il faut cesser d’opposer l’Europe économique et l’Europe sociale, qui constituent en réalité les deux faces d’une même pièce. Si nous voulons bâtir ensemble une économie performante, c’est bien pour la mettre au service des citoyens européens. 

Alors que l’Union va devoir coordonner la politique économique et budgétaire de 25 Etats membres à partir de 2004, alors que la croissance est aujourd’hui en panne, alors que le pacte de stabilité est – à tort ou à raison – souvent remis en cause, la Convention doit apporter des réponses ambitieuses, parce que la situation actuelle n’est pas satisfaisante.

Les politiques économiques doivent rester décentralisées et relever des Etats membres. Mais dans une Europe élargie, cela ne rend que plus nécessaire une coordination plus forte et plus efficace, qui justifie un renforcement du rôle de la Commission. Il faut lui donner un véritable pouvoir de proposition, et pas seulement de recommandation, dans l’élaboration des grandes orientations de politique économique (GOPE). Parallèlement, le Parlement européen – actuellement tenu à l’écart de la gouvernance économique de l’Union – doit renforcer son contrôle sur la validation de ces GOPE.
           
La Commission devrait également pouvoir adresser directement des avertissements aux gouvernements dont les finances publiques dérapent. Actuellement, ce pouvoir appartient au Conseil des ministres, mais la courtoisie diplomatique et les échanges de bons procédés entre Etats membres en paralysent l’exercice. Il me semble aussi nécessaire, dans une Europe élargie, de passer au vote à la majorité qualifiée pour certaines questions liées à la fiscalité : j’y vois une condition sine qua non pour que l’Europe progresse dans ce domaine.

Enfin, je serais partisan d’une reconnaissance officielle de l’Eurogroupe dans le Traité constitutionnel, en le dotant d’un président stable et d’une véritable capacité de décision sur les questions concernant la zone euro.

Sur tous ces sujets, la Convention ne peut pas se contenter du statu quo.


Contribution de M. Pierre Lequiller à la Convention européenne 
Seul le texte prononcé fait foi

Débat sur le rapport du groupe sur le rôle des Parlements nationaux

Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les conventionnels,
S’il y a bien un sujet sur lequel la Convention est condamnée à réussir, c’est celui d’une meilleure association des Parlements nationaux à la construction européenne. Vous avez vous-même évoqué en juin dernier la nécessité de prendre des initiatives « dramatiques »  - c’est votre terme  – pour apporter une réponse à la mesure des attentes exprimées par les citoyens. Le moment est venu de nous prononcer.  
L’association des Parlements nationaux présente un triple enjeu :
renforcer la légitimité des actions de l’Union ;
donner à chaque citoyen une meilleure prise sur le processus de décision ; 
favoriser une meilleure connaissance par les parlementaires des dossiers européens, ce qui est un préalable à leur implication personnelle.
J’approuve pleinement les conclusions du groupe de travail présidé par Gisela Stuart, qui formulent des propositions innovantes et constructives. C’est dans cet esprit qu’il faut approfondir l’idée d’un Congrès, qui ne doit pas être une nouvelle institution législative ajoutant à la complexité du système actuel, mais une réunion périodique de représentants du Parlement européen et des Parlements nationaux qui débattraient annuellement des orientations politiques fondamentales de l’Union et prendraient part à la procédure de ratification de la seconde partie du traité constitutionnel.  Le Congrès pourrait également être compétent pour confirmer – ou infirmer – l’élection par le Conseil européen d’un Président de l’Europe. Cela aurait le mérite de donner à ce « visage » de l’Union une véritable légitimité populaire.
S’agissant du contrôle du principe de subsidiarité, et dans le prolongement des propositions du groupe de travail de M. Mendez de Vigo, une délégation du Congrès devrait pouvoir émettre un avis collectif sur des propositions législatives de la Commission, afin d’amplifier la portée politique des avis émis par les Parlements nationaux individuellement. En ce qui concerne le contrôle juridictionnel ex-post, je suis plus réticent à l’idée de le confier à la Cour de Justice. Peut-être devons-nous réfléchir à un organe ad hoc dont la composition permettrait de mieux prendre un compte le caractère mi-politique, mi-juridictionnel du principe de subsidiarité.
Le rôle des Parlements nationaux doit être inscrit dans le futur traité constitutionnel et nous devrons, à l’avenir, favoriser le recours à la coopération interparlementaire. Il s’agit là d’un aspect essentiel de l’équilibre institutionnel européen.


Intervention orale de M. Pierre Lequiller, le 4 octobre 2002, lors de la session plénière de la Convention européenne

Le système proposé par Inigo Mendez de Vigo a le grand mérite de la simplicité et je l'approuve.
Si les citoyens savent que nous avons créé un contrôle simple, impliquant les parlements nationaux pour veiller à la proximité des décisions, ils seront rassurés tant on leur dit, souvent à tort d'ailleurs, que l'Union a outrepassé ses pouvoirs et tant cela les exaspère.
Donc, un oui clair aux propositions du groupe de travail Mendez de Vigo d'alerte non bloquante ex-ante et de recours devant la Cour de justice des Communautés européennes ex-post.
Trois remarques toutefois :
- Premièrement, comme l'a dit M. Moscovici, je ne mettrai pas de lien précis entre l'avis émis par un parlement dans la première phase et la possibilité pour lui seul d'engager ex-post un recours devant la Cour de justice. Cela risquerait de susciter une inflation des saisines dans le simple but de prendre date.
- Deuxièmement, pour moi, le recours devant la Cour de justice doit intervenir entre l'adoption et l'entrée en vigueur du texte, pour ne pas créer d'insécurité juridique préjudiciable.
- Troisièmement, il convient de prévoir, selon moi, une chambre spécialisée de la Cour de justice, composée à parité de juges européens et de juges nationaux.
J'en ai parlé à Inigo Mendez de Vigo et ne voudrais pas compliquer ni retarder la procédure, mais dans l'alerte ex-ante, comme Pierre Moscovici, je pense qu'une démarche collective parallèle à l'initiative d'un parlement pourrait rendre le système plus efficient encore. On pourrait envisager non pas le Congrès dans son ensemble (je suis d'accord avec M. Glotz), mais une délégation spécialisée et réduite du Congrès qui pourrait être saisie par un parlement national ; l'avis de cette délégation donnerait plus de force à l'alerte et cela permettrait à la Commission européenne d'apprécier le caractère significatif de ces avis, dès lors qu'ils rassemblent des représentants des parlements nationaux et du Parlement européen.
Voilà pour la procédure. Mais je confirme que le mécanisme, moyennant ces remarques, de M. Mendez de Vigo, est le bon.
D'ailleurs, ce contrôle permettra probablement aux citoyens européens de constater que l'Union n'outrepasse pas ses compétences si souvent qu'on veut bien le dire. Il mettra peut-être en valeur le fait que les gouvernements utilisent souvent l'Union comme bouc émissaire n'assumant pas toujours des décisions qu'ils préfèrent, tout en protestant contre l'Union, voir prendre par elle.
En tout état de cause, l'image de l'Europe sera rehaussée chez les citoyens, et c'est là l'essentiel.


Contribution de M. Pierre Lequiller à la Convention européenne 

Paris  le 2 octobre 2002

UN PRESIDENT POUR L'EUROPE

EXPOSÉ DES MOTIFS

1. Une réforme ambitieuse des institutions s'impose sans tarder
- La Convention constitue la dernière chance avant l'élargissement, qui impliquera des contraintes institutionnelles nouvelles ;
- l'opinion publique demande un " mieux " d'Europe centré sur les domaines où elle est plus efficace que l'action dispersée des Etats, dans la perspective de la consolidation d'une " Fédération d'Etats-nations ";
- le contexte de la mondialisation impose que l'Union soit davantage présente dans le monde pour défendre, ensemble, nos intérêts et nos valeurs et assumer nos responsabilités ;
- l'Europe a besoin d'un projet lisible pour ses citoyens, d'une ambition commune.
La réforme institutionnelle est indispensable pour donner une légitimité nouvelle et une efficacité accrue à l'Europe. L'alternative c'est la montée des scepticismes et populismes de tous ordres, et, à la clé, l'affaiblissement collectif.

2. Il existe une large majorité, au sein de la Convention, sur les objectifs de fond de la réforme institutionnelle et, d'ores et déjà, au-delà même de la question de la présidence, sur certaines orientations, que l'on doit garder à l'esprit dans le cadre de la réflexion en cours
a) Le renforcement de la démocratie européenne
Orientations qui s'esquissent au sein de la Convention :
- élaboration d'un " traité constitutionnel " plus lisible pour les citoyens et introduction dans le traité de la " Charte des droits fondamentaux " ;
- clarification du rôle de chaque institution, renforcement du Parlement européen (extension de la codécision, débat sur l'accroissement du rôle du Parlement européen en matière budgétaire) et confirmation du rôle de la Commission, en particulier de son indépendance ;
- introduction des parlements nationaux dans le système européen (rôle en matière de subsidiarité, celui d'un éventuel Congrès pour l'élection d'un Président ou pour un débat d'information annuel) ;
- simplification de la classification des compétences, des procédures et des instruments législatifs.
b) La concentration de l'Union sur les sujets d'intérêt commun, là où elle est efficace
Perspectives qui se dégagent :
- renforcement des objectifs de l'Union au sein du Traité (et débat sur l'introduction, dans le domaine de la politique étrangère, d'une " doctrine diplomatique " commune) ;
- pas de remise en cause des compétences actuelles de l'Union et application renforcée du principe de subsidiarité pour les compétences existantes ;
- développement de l'action de l'Union dans le domaine de la politique étrangère, de la défense, de la sécurité intérieure, de la justice (et, pour certains conventionnels, de la gouvernance économique).
c) L'amélioration des conditions de l'efficacité de l'action
Eléments d'orientation qui se dessinent :
- renforcement des conditions de la prise de décision : extension de la majorité qualifiée, application progressive de la méthode communautaire à l'essentiel des domaines du troisième pilier et introduction par étapes d'éléments communautaires dans la PESC (sur le plan de la capacité d'initiative, des règles de vote au sein du Conseil) ;
- nécessité d'un exécutif européen bénéficiant d'une capacité d'impulsion, cohérence, visibilité et stabilité accrues : sur le plan des relations extérieures, vis-à-vis des pays tiers et dans le cadre des organisations internationales et sur le plan intérieur, vis-à-vis des citoyens ;
- mise en place des conditions institutionnelles d'une " avant-garde " ouverte et réflexion sur l'évolution des modes de révision du Traité évitant les blocages potentiels liés à la règle de l'unanimité ;
- débat sur la mise en place de véritables ressources propres.
Les objectifs de fond semblent rassembler une majorité de conventionnels et s'expriment d'ores et déjà par des orientations importantes qui peuvent inspirer un consensus. C'est sur cette convergence et dans ce contexte qu'il faut bâtir la réforme institutionnelle, au service des peuples d'Europe.

3. Pour atteindre les objectifs communs dans le cadre des orientations institutionnelles qui se dégagent, les propositions de réformes relatives à la Présidence de l'Union doivent confirmer un ensemble de principes de méthode qui sont au cœur de l'efficacité de l'action au service de l'intérêt commun européen
a) Renforcer les éléments de l'équilibre institutionnel et la méthode communautaire
Il s'agit de ne pas remettre en cause le principe et les modalités essentielles de l'équilibre des pouvoirs entre légitimités nationale et européenne (intergouvernemental/supranational) et les fondements institutionnels principaux des pouvoirs des éléments du " Triangle " (les pouvoirs de codécision du Conseil des ministres et du Parlement européen, le pouvoir d'initiative de la Commission qui impose de maintenir les conditions de son indépendance, et sa force exécutive ). Il convient de conforter la méthode communautaire qui a fait les preuves de son efficacité.
L'orientation générale des réformes institutionnelles doit donc plutôt aller dans le sens d'un renforcement simultané des différentes composantes du système, plutôt que d'un choix Conseil ou d'un choix Commission.
L'introduction des parlements nationaux au sein du système doit par ailleurs constituer un élément de réponse complémentaire à la nécessité d'un renforcement de la légitimité des institutions.
b) Intégrer pleinement le principe d'égalité entre Etats membres
Il convient de prendre en compte la caractéristique fondamentalement collégiale de la construction européenne, les équilibres nécessaires entre " grands " et " petits " Etats, les équilibres régionaux, sur la base d'un principe d'égalité.
c) Mettre en place un véritable "exécutif" de l'Union
Donner à l'exécutif européen plus de stabilité, de lisibilité, de légitimité, de capacité d'impulsion - au service de l'intérêt des peuples d'Europe - correspond à un objectif largement partagé. Mais le terme d'"exécutif" ou de "gouvernement" recouvre des concepts divers et des ambiguïtés. Il s'agit en effet à la fois de la capacité de gouverner, c'est-à-dire de donner les impulsions nécessaires et de décider dans les domaines non législatifs - par exemple dans le champ de la diplomatie - et de la responsabilité de la mise en œuvre, normative et administrative. La mission de représentation constitue un autre volet de ces fonctions exécutives.
Dans le système institutionnel actuel ces fonctions exécutives sont réparties entre le Conseil européen pour l'impulsion, la Commission pour le pouvoir de proposition, le Conseil des ministres pour le pouvoir de décision, et à nouveau, la Commission pour la mise en œuvre, en même temps que les Etats membres pour ce qui ne relève pas d'une mise en œuvre communautaire.
S'il ne s'agit pas de résoudre d'un coup cette complexité, pour une part nécessaire du fait des différents niveaux du pouvoir et des différentes sources de légitimité, il convient à la fois de mieux cerner les diverses composantes des fonctions exécutives - fonction de coordination, fonction d'exécution, fonction de représentation - et de donner à ce "pouvoir exécutif européen" plus de légitimité, de lisibilité, de cohérence, d'efficacité et finalement de poids politique.
C'est particulièrement vrai dans le domaine de la politique étrangère pour lequel l'actuel dichotomie entre le Conseil et la Commission, entre le champ diplomatique d'une part, et les relations commerciales et l'aide au développement, d'autre part, implique qu'une cohérence nouvelle soit trouvée par le haut. Il y a là un enjeu majeur de la Convention.
d) Associer les différentes institutions
Le Président de l'Union devra avoir, d'une manière ou d'une autre - quel que soit le mode de désignation la confiance du Conseil européen, mais aussi, selon des modalités à confirmer, celle des autres institutions, et en particulier des parlementaires.
e) S'efforcer de progresser vers plus de simplicité et de lisibilité
Outre l'enjeu majeur d'une plus grande " visibilité " la solution trouvée doit rester relativement simple et facile à communiquer, même si une certaine complexité restera la conséquence incontournable de la conjugaison des légitimités européenne et nationale.
Sur le plan de la méthode, il s'agit de dépasser une vision antagoniste des approches intergouvernementales et supranationales pour promouvoir l'expression institutionnelle d'une conciliation concrète de ces deux approches dans un esprit communautaire. C'est par le haut que pourront être transcendés les antagonismes potentiellement réducteurs et bloquants.

DISPOSITIF

Le mandat de la Convention européenne est ambitieux : imaginer un système institutionnel plus simple, plus légitime et plus efficace. L'alternative à laquelle nous sommes confrontés est claire :
- soit nous nous limitons à des réformes " techniques ", à la marge, et nous décevrons les citoyens qui attendent beaucoup de nos travaux ;
- soit nous réfléchissons ensemble à une architecture institutionnelle qui surmonte les oppositions habituelles entre " communautaristes " et " intergouvernementaux ", entre pays démographiquement les plus importants et les autres, pour donner du sens et des perspectives à l'Europe réunifiée.
Parce que la Convention doit se donner les moyens de saisir une chance historique, ma démarche s'inscrit sans ambiguïté dans la seconde option, mais avec le réalisme et le pragmatisme qui doivent guider toute réflexion institutionnelle.
Dans un esprit d'ouverture et de compromis, j'ai émis l'idée que l'Union se dote d'un Président unique, exerçant la présidence du Conseil européen et de la Commission. J'ai depuis plusieurs semaines multiplié les consultations avec de nombreux partenaires européens ; j'ai l'intention de poursuivre et d'intensifier ces contacts. J'ai écouté avec attention les arguments des uns et des autres, leurs préoccupations et leurs attentes. J'ai la conviction que nous avons aujourd'hui les moyens de surmonter nos divergences. D'ores et déjà, un accord se dégage sur des questions fondamentales :
- Il faut élaborer un " traité constitutionnel " unique qui soit lisible pour les citoyens ;
- Il faut inclure dans ce traité la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- L'Union européenne doit acquérir une personnalité juridique unique ;
-Il faut fusionner les piliers de l'Union, tout en prévoyant des procédures distinctes selon les matières traitées ;
- Il faut encourager le recours à des coopérations renforcées ouvertes afin de progresser dans la voie de l'intégration européenne.
L'émergence d'un véritable exécutif européen est une condition essentielle à l'approfondissement du projet européen. Ma proposition d'une présidence intégrée poursuit l'objectif d'une clarification des fonctions et des responsabilités. Cette proposition n'est pas figée et ses modalités devront encore évoluer pour élargir la base d'un accord que je crois possible, et qui me semble avoir le mérite de la clarté. Mais j'entends avant tout tracer une nouvelle perspective qui nous permettra, le moment venu, d'expliquer au citoyen les raisons de nos choix institutionnels.
Première hypothèse : Le Président de l'Europe exerce les présidences du Conseil européen et de la Commission.

1. Un triangle institutionnel dont la légitimité et l'efficacité sont renforcées :
- Une Présidence du Conseil européen et de la Commission exercée par la même personne
- Une Commission européenne aux prérogatives confortées
- Un Parlement européen aux pouvoirs renforcés
La Présidence de l'Europe et la présidence de la Commission sont intégrées et exercées par la même personne : le Président de l'Europe. Il est le " visage " de l'Union, tant sur le plan des relations extérieures (il représente l'Union vis-à-vis des pays tiers et dans le cadre des relations internationales) que sur le plan intérieur, vis-à-vis des citoyens européens. Le Président constitue, dans la durée, une capacité d'impulsion, de proposition et de mise en œuvre des décisions prises par les institutions européennes.
Le Président est élu pour un mandat de cinq ans non renouvelable, par le Conseil européen qui se prononce à la double majorité des Etats et de la population. Il ne peut être un Chef d'Etat ou de gouvernement en exercice et ne prend ses fonctions qu'après un vote d'investiture du Congrès, composé pour 1/3 de représentants du Parlement européen et pour 2/3 de représentants des Parlements nationaux.
Il constitue le collège des commissaires, selon les règles actuellement en vigueur. Le caractère collégial de la Commission européenne est préservé et les équilibres géographiques sont respectés.
A travers le Président de l'Europe, la Commission est renforcée dans son rôle d'impulsion et d'exécution. Son monopole d'initiative est confirmé. Dans cette conception intégrée, le Président de l'Europe transcende une approche opposant d'un côté les légitimités nationales des Etats et de l'autre la légitimité européenne : il appartient au Président de l'Europe d'assumer et de conjuguer cette double légitimité. Dans cet esprit, il s'appuie dans l'exercice de ses fonctions sur les services de la Commission, et sur les services du secrétariat du Conseil, selon les domaines de compétence concernés. Pour exercer sa mission en toute indépendance, le Président de l'Europe ne vote pas, ni au sein du Conseil européen, ni au sein de la Commission.
Les pouvoirs et responsabilités du Président sont liés au rôle des institutions qu'il préside. A cet égard, il convient de conforter le rôle d'orientation du Conseil européen et d'éviter que celui-ci ne se transforme en instance d'appel des décisions - ou de l'impossibilité de décision - du Conseil des ministres.
Le Président de l'Europe est placé à la tête du Conseil permanent de l'Union (ex Conseil Affaires générales), devant lequel il propose le programme triennal de l'Union préparé par la Commission (ce qui renforce le rôle de la Commission par rapport aux conclusions du Conseil européen de Séville). Ce programme doit être validé par le Conseil européen. Au préalable, un débat d'information est organisé sur ce programme devant le Congrès européen.
Afin de renforcer la légitimité des institutions et de respecter le parallélisme des formes, le Président de l'Europe et la Commission sont responsables devant le Conseil européen et devant le Congrès, qui se prononce à la majorité des deux tiers de ses membres. L'initiative de la mise en cause de la responsabilité du Président et de la Commission appartient concurremment au Conseil européen et au Parlement européen. Le Parlement européen dispose ainsi du pouvoir d'enclencher seul une procédure de révocation du Président de l'Europe et de la Commission en saisissant lui-même le Congrès européen, par le vote d'une résolution adoptée à la majorité des deux tiers de ses membres.

2. Un Conseil des ministres restructuré
L'organisation du Conseil des ministres est simplifiée afin d'accroître l'efficacité de son action.
Trois grandes formations sont créées : une formation " Economie et monnaie ", composée des ministres de l'économie et des finances ; une formation " Politique étrangère et de sécurité commune ", composée des ministres des Affaires étrangères et, éventuellement, des ministres de la Défense ; une formation " Affaires intérieures et Justice ", composée des ministres de l'Intérieur et de la Justice.
Le Secrétariat général du Conseil est maintenu dans ses fonctions actuelles, notamment pour la PESC.
Le " Ministre des Affaires étrangères de l'Union ", dont la nomination est confirmée par le Conseil européen, est placé auprès du Président de l'Europe et préside la formation " Politique étrangère et de sécurité commune ". Son mandat est de cinq ans. Il cumule, en tant que membre de la Commission, les fonctions de Commissaire chargé des relations extérieures et de Haut représentant, assurant ainsi la cohérence de la conduite des affaires extérieures et de la représentation de l'Union au sein des institutions internationales.
La stabilité et la lisibilité de la présidence du Conseil " Politique étrangère et de sécurité commune ", incarnée par le ministre des Affaires étrangères de l'Union, permettra à celui-ci de mettre clairement en valeur, à l'issue des conseils, les points d'accord qui auront été obtenus. La même situation se retrouvera pour le Conseil européen, s'agissant du Président de l'Europe.
Conformément à la réforme des structures et du fonctionnement du Conseil, approuvée en juin 2002 par les Chefs d'Etat et de gouvernement lors du Conseil européen de Séville, les six Conseils sectoriels seraient : Emploi, politique sociale, santé et consommateurs ; Compétitivité (marché intérieur, industrie et recherche) ; Transports, télécommunications et énergie ; Agriculture et pêche ; Environnement ;Education, jeunesse et culture.
Les présidences des différentes formations du Conseil des ministres devraient être assurées selon des règles de rotation géographique par groupes de pays pour une durée, par exemple, de deux ans et demi. Ce système, déjà proposé par plusieurs Etats membres, présente l'avantage de respecter le principe d'une participation égalitaire des Etats. A l'exception de la formation " Politique étrangère et de sécurité commune ", les présidences du Conseil continueraient ainsi à être assurées par des ministres en exercice et la stabilité serait assurée, tout en conservant une rotation nécessaire dans une Europe élargie, qui tienne compte des équilibres politiques et géographiques.
A l'occasion des nombreux contacts pris pour préparer cette proposition, d'autres options ont été envisagées, pour assurer la présidence du Conseil des ministres, qui méritent d'être approfondies. Ainsi, dans le prolongement de la logique d'intégration, il pourrait être envisagé - à plus long terme - de confier la présidence des formations du Conseil directement à des Commissaires. Une autre solution consisterait à prévoir que chaque formation du Conseil élise en son sein son Président.
Parallèlement aux formations sectorielles du Conseil des ministres, il est créé un " Conseil permanent de l'Union ", présidé par le Président de l'Europe. Composé des représentants permanents des pays membres - qui auraient le rang de ministre dans leur gouvernement national -, ce Conseil permanent de l'Union devrait être chargé de la coordination, de la préparation et du suivi des Conseils européens, des questions institutionnelles et administratives et des dossiers horizontaux affectant plusieurs politiques de l'Union. Il devrait se réunir au moins une fois par mois.
Afin de renforcer les compétences du Parlement européen, il convient d'étendre la co-décision à l'ensemble des matières communautarisées ; dans ces domaines, le Conseil des ministres devrait se prononcer à la majorité qualifiée. A plus long terme, la codécision pourrait être étendue en matière budgétaire.

3. Des compétences clarifiées et contrôlées
La répartition des compétences entre l'Union et les Etats membres doit obéir à des règles souples tout en s'inscrivant dans un cadre juridique clarifié. Sans établir de catalogue des compétences, il est proposé de distinguer, dans le prolongement du rapport Lamassoure adopté par le Parlement européen, trois catégories de compétences étant entendu que la compétence de droit commun doit appartenir aux Etats, sans qu'il soit nécessaire d'en préciser le contenu.
Trois catégories de compétences devraient être mentionnées dans le volet constitutionnel du traité : les compétences propres de l'Union, les compétences partagées entre l'Union et les Etats membres et les compétences complémentaires.
Afin de contrôler l'application du principe de subsidiarité, une délégation permanente chargée de ce contrôle est créée au sein du Congrès. Le rôle de cette délégation doit être entendu en combinaison avec la procédure " d'alerte rapide " prévue dans les conclusions du groupe de travail de M. Mendez de Vigo sur la subsidiarité.
Ainsi, tout en reconnaissant à chaque Parlement national - plus précisément à chaque chambre - le droit d'adresser directement un avis motivé à la Commission européenne puis la possibilité, le cas échéant, de saisir directement la Cour de Justice dans le cadre d'un recours juridictionnel ex-post, il convient de favoriser une concertation entre les Parlements nationaux. C'est pourquoi, s'agissant de la phase ex-ante, les avis motivés adressés à la Commission européenne devraient également être transmis pour information à la délégation permanente du Congrès qui pourrait éventuellement déposer un avis représentant le point de vue collectif de la délégation.
En favorisant la concertation, il s'agit aussi d'éviter la multiplication et la dispersion des recours en annulation, dans la phase juridictionnelle ex-post. Au sein de la Cour de Justice, l'exercice du contrôle du principe de subsidiarité devrait être confié à une chambre spécialisée, composée à parité de juges communautaires et de juges nationaux.
Par ailleurs, le Congrès pourra être compétent pour la révision des traités, s'agissant de la partie non constitutionnelle. Il s'agit ainsi de conforter la méthode de la Convention.
Le Congrès n'est en aucune manière une seconde chambre législative.
Seconde hypothèse : La présidence de l'Europe et la présidence de la Commission demeurent distinctes
L'hypothèse du maintien de deux présidences distinctes, celle de l'Union et celle de la Commission ne doit pas, à ce stade, être écartée.
Dans ce cas, le Président de la Commission doit être élu par le Conseil européen, puis investi par le Parlement européen qui se prononce par un vote à la majorité simple de ses membres. La Commission est responsable devant le Parlement européen qui a le pouvoir de la renverser ; en contrepartie, le Parlement européen peut-être dissous par le Conseil européen.
Le Président de l'Europe est élu pour un mandat de cinq ans non renouvelable par le Conseil européen qui se prononce à la majorité des Etats et de la population. Il ne peut être un Chef d'Etat ou de gouvernement en exercice et ne prend ses fonctions qu'après un vote d'investiture du Congrès, composé pour 1/3 de représentants du Parlement européen et pour 2/3 de représentants des Parlements nationaux.
Le Président de l'Europe exerce la Présidence du Conseil européen et s'appuie sur les services du Secrétariat général du Conseil. Il joue un rôle d'impulsion en contribuant à définir les orientations politiques fondamentales de l'Union. Il est le " visage " de l'Europe et assure la conduite de la politique étrangère de l'Union. Un ministre des Affaires étrangères, qui préside la formation " Politique étrangère " du Conseil des ministres, est placé auprès de lui.

CONCLUSION

La proposition institutionnelle d'un président de l'Europe - désigné par le Conseil européen et confirmé par le Congrès - faisant coïncider la présidence du Conseil européen et celle de la Commission, tel que le dispositif ci-dessus le décrit, permet de répondre concrètement à un double enjeu, expression essentielle d'un objectif de service de l'intérêt commun des peuples d'Europe :
- un impératif démocratique : en conférant au Président de l'Union - responsable de l'exécutif communautaire - la stabilité et les conditions de l'autorité liés à un mandat pluriannuel à plein temps, et à la double investiture du Conseil européen et du Congrès, on donne un "visage" à l'Europe et une légitimité nouvelle à l'exécutif de l'Union, conditions essentielles pour l'approfondissement de la démocratie européenne ;
- une exigence d'efficacité de l'action commune : la lisibilité et la légitimité nouvelle, gage d'indépendance et de poids politique, conférées à l'exécutif européen, permettront de lui donner la capacité d'insuffler à l'Europe - à travers ses responsabilité au sein du Conseil européen et de la Commission, et en coopération avec les autres institutions, en particulier le Parlement européen et le Conseil des ministres - l'élan nécessaire au service de l'action commune, tant dans le domaine interne que sur le plan international.
Cette proposition se veut être une contribution à la réflexion commune dans le cadre de la Convention. Beaucoup de ses éléments restent naturellement à préciser ou à débattre. La proposition n'est ni intergouvernementale ni communautariste. L'enjeu est de dégager les voies d'un progrès institutionnel au service de l'intérêt des peuples et d'une certaine conception de l'homme, dans un esprit d'union. C'est la voie communautaire.
Il est intéressant de noter qu'au stade actuel les premières observations portées à l'encontre de ces propositions, se basent aussi bien sur des craintes qu'elles n'induisent une dérive intergouvernementale que sur l'inquiétude qu'elles ne fassent le lit d'un pouvoir européen échappant au contrôle des Etats. La symétrie de ces observations encourage à penser que les voies proposées peuvent jalonner une direction d'équilibre et de progrès.
Dans cet esprit, cette proposition vise à mettre en place des institutions européennes plus démocratiques et plus efficaces et suppose donc d'accepter un certain nombre de principes de logique et de précaution :
- la proposition préserve et renforce les principaux éléments constitutifs de l'équilibre institutionnel actuel - en particulier les principaux pouvoirs respectifs des institutions, Conseil européen, Conseil des ministres, Parlement européen, Commission - et la méthode communautaire, associant légitimités nationales et supranationales ;
- elle assume la complexité incontournable liée en particulier à l'exercice de la double légitimité et le fait que les institutions communautaires ne peuvent s'inscrire dans les cadres classiques du droit constitutionnel et du droit international ;
- il n'y aura pas de solution adéquate qui soit une solution parfaite. Il convient de promouvoir celle qui sera susceptible de répondre, a priori, le mieux aux exigences de l'intérêt commun ;
- enfin, les progrès du système institutionnel ne vaudront que si, dans l'avenir, la volonté politique de les mettre en œuvre dans un esprit d'union prévaut, dans la durée, sur la recherche de la préservation des intérêts particuliers.
Il faut souligner, en conclusion, que s'agissant de la présidence de l'Union deux propositions principales ont été présentées et évoquées depuis quelques mois, (outre celles qui visent à réformer le système de la rotation semestrielle de la présidence du Conseil des ministres, sans réellement le remettre en cause) : d'une part, la proposition d'un "Président de l'Union" et, d'autre part, celle d'un président de la Commission élu par le Parlement européen.
Si aucune des deux propositions de base concernant la présidence n'arrivent à rassembler un consensus au sein de la Convention le risque d'un statu quo institutionnel
- peut être amélioré à la marge - est réel. Ce serait au détriment de l'Union et de l'intérêt des peuples d'Europe. Il convient de rechercher la voie d'un compromis équilibré au service de la démocratie et de l'efficacité. C'est l'objet même et l'inspiration de la proposition de présidence intégrée.

ANNEXE

LES RÉPONSES AUX PREMIERES OBSERVATIONS DÉJA ÉMISES PAR RAPPORT A LA PRÉSENTE PROPOSITION D'UNE PRÉSIDENCE INTEGRÉE

a) S'agissant de l'observation jugeant que la proposition serait trop intergouvernementale et pourrait mettre en cause l'indépendance de la Commission.
Plusieurs éléments infirment l'opinion d'un risque d'affaiblissement de l'indépendance de la Commission et de son rôle :
- la règle de nomination proposée et le mode de mise en cause éventuelle de sa responsabilité (Conseil européen et Congrès) confortent l'indépendance du Président ; elle sera à ce titre au moins aussi grande que celle du Président de la Commission dont l'indépendance n'est actuellement pas contestée. Le rôle de support des services de la Commission (sur lesquels le Président pourra se reposer au titre de ses attributions exécutives, comme pour son rôle de président de la Commission) va également dans le sens d'une indépendance réelle vis-à-vis de l'influence des Etats ;
- pour conforter l'indépendance nécessaire à l'exercice de la " double casquette présidentielle ", et éviter les conflits d'intérêts, il convient de préciser que le Président ne vote pas au sein du Conseil européen ni au sein de la Commission.
La confirmation du rôle du Conseil européen comme organe d'impulsion et d'orientation, et non comme organe d'appel du Conseil des ministres, risque de dérive qui a été dénoncée unanimement au Conseil de Séville, doit permettre au Président de ne pas être impliqué directement dans une fonction relevant du processus législatif (qui serait liée au renvoi devant le Conseil européen de projets examinés par le Conseil des ministres), alors même qu'en tant que Président de la Commission il serait par ailleurs à l'origine des projets ;
- en réalité la cohérence entre les fonctions qu'exercent respectivement le Président du Conseil européen et le Président de la Commission serait forte :
" sur le plan législatif, entre l'impulsion politique du Conseil européen et sa déclinaison normative par la Commission. Le Président européen propose au Conseil européen un programme pluriannuel stratégique. Le Président européen, en tant que Président de la Commission, en vertu de son monopole d'initiative, propose les textes législatifs correspondant au programme pluriannuel (qui est préparé par les services de la Commission et qui a été débattu au "Conseil permanent de l'Union" ; sur ce point la proposition renforce le pouvoir de la Commission par rapport à la situation actuelle).
" dans le domaine exécutif, en particulier pour la PESC, entre les moyens et domaines d'action de l'Union : le Président européen, en tant que Président du Conseil européen, peut proposer les principes et les orientations générales de la politique étrangère et de sécurité commune, y compris pour les questions ayant des implications en matière de défense. Le Conseil des ministres décide. Le Président européen, en tant que Président de la Commission en assure le suivi en proposant toutes les initiatives nécessaires à leur mise en œuvre. Dans ce domaine il serait particulièrement paralysant de prolonger une situation qui sépare le pouvoir de décision de celui de la mise en œuvre - notamment financière - et la diplomatie de l'aide au développement et de la politique commerciale.
b) A propos de la perspective, inverse, de la constitution d'un " pouvoir européen " qui échapperait au contrôle des Etats :
Le but recherché est bien de donner à l'exécutif européen un poids politique important au service de l'intérêt commun, et donc les bases d'une indépendance (voir paragraphe précédent). Néanmoins le contrôle des Etats reste assuré :
- comme évoqué précédemment le pouvoir du Conseil européen pour nommer le Président, et éventuellement mettre en cause sa responsabilité, représente un contrôle effectif direct des Etats ;
- par ailleurs, les Etats conservent leurs pouvoirs actuels sur les décisions de l'Union : le Conseil européen est compétent pour les orientations générales et le Conseil des ministres est colégislateur (et détient le pouvoir de contrôle pour l'élaboration des normes exécutives).
D'autre part, des garanties supplémentaires sont prévues, confortant le rôle collectif du Conseil européen, parmi lesquelles :
- l'approbation par le Conseil européen du programme pluriannuel de l'Union, avec, bien entendu, la possibilité de l'amender ;
- la coordination des travaux du Conseil et la préparation du Conseil européen par un Conseil Affaires générales rénové (" Conseil permanent de l'Union ").
c) En ce qui concerne la crainte d'un " pouvoir présidentiel " trop fort qui affaiblirait la dimension collégiale des institutions :
L'objectif est bien de doter l'exécutif européen d'un poids et d'une visibilité réelles. En tout état de cause tout pouvoir exécutif, quel que soit le niveau auquel il se situe - local, national, ou supranational - a un " visage ", le pouvoir de celui-ci étant contrôlé et équilibré par des organes collégiaux. Et, de fait, beaucoup d'éléments limitent le pouvoir du Président et constituent des contrepoids :
- le Président est doublement responsable devant le Conseil européen et le Congrès ;
- son pouvoir, comme Président du Conseil européen et de la Commission, est de nature exécutive, notamment pour la conduite de la diplomatie, la représentation de l'Union ; il lui revient aussi celui de participer à la responsabilité de l'initiative législative en tant que Président de la Commission ;
- les pouvoirs du Président n'empiètent ni sur le pouvoir collégial du Conseil européen (impulsion, orientation, programme pluriannuel), ni sur celui, du même type, de la Commission (initiative, participation à la mise en œuvre des décisions).
d) En réponse aux observations craignant une diminution des pouvoirs du Parlement européen
Le Parlement européen est actuellement compétent pour valider la désignation du Président de la Commission. La présente proposition vise, par l'instauration d'un Congrès rassemblant parlementaires européens et nationaux, à élargir la légitimité et donc l'indépendance du Président de l'Union. Le Parlement européen reste en charge de la désignation du Président et de la mise en cause de sa responsabilité, même si ce pouvoir est partagé avec les parlements nationaux. En outre, le poids politique accru de ce Président, par rapport au Président de la Commission dans le système actuel, accroît conséquemment le poids politique du Parlement européen en tant qu'organe participant à la désignation du Président, et à la mise en cause éventuellement de sa responsabilité. C'est l'ensemble des éléments du "triangle" qui est renforcé.
Il faut souligner par ailleurs que le partage, avec les parlements nationaux, du pouvoir de validation du Président s'accompagne par ailleurs, dans la présente proposition, d'un renforcement du rôle du Parlement européen en matière législative par l'extension de la procédure de codécision. Le renforcement du rôle du Parlement européen en matière budgétaire pourrait par ailleurs constituer un renforcement utile de la démocratie européenne.
Le rôle du Parlement européen en sortira renforcé.
e) A propos de la préoccupation de la constitution d'un directoire des grands pays
Il convient de souligner, s'agissant de la crainte d'un directoire auquel conduirait l'instauration de la présidence de l'Union, que la présente proposition ne porte en aucune manière atteinte à la structure communautaire des institutions. Les Etats membres restent maîtres des décisions de l'Union à travers les compétences d'orientation du Conseil européen et de colégislateur du Conseil des Ministres - sous réserve des règles de pondération. Par ailleurs, l'intérêt commun européen reste en particulier porté par la Commission, confortée dans son indépendance, et par le Parlement européen, renforcé dans ses pouvoirs.
D'autre part, la décision même de désignation du Président de l'Union est prise au sein du Conseil européen selon la règle de la double majorité - qui doit assurer les "petits" et les "grands" qu'aucune décision ne sera prise contre l'un ou l'autre de ces deux ensembles potentiels - et validée par le Congrès qui rassemble représentants des légitimités européennes et nationales. La validation par le Congrès reprend en compte la participation des Etats, par le biais du Parlement européen et des parlements nationaux.
Enfin, l'expérience passée, montre que pour l'ensemble des institutions européennes, les présidences ont été successivement exercées par des personnalités représentant des pays dont l'importance démographique est très variable.


Intervention de M. Pierre Lequiller lors de la session plénière de la Convention européenne des 12 et 13 septembre 2002

Bruxelles – Jeudi 12 septembre 2002

Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les Conventionnels,

Il est un peu paradoxal  qu’au moment même où l’Europe fait un énorme progrès avec l’euro, où elle est si attractive pour les pays candidats, elle est de moins en moins bien comprise et perçue par les citoyens. 

Les instruments dont dispose l’Union se sont multipliés au fur et à mesure des différentes politiques et actions européennes. Au point que cette prolifération instrumentale est devenue l’un des principaux facteurs d’opacité du fonctionnement de la Communauté. L’Union a besoin de nouveaux instruments, plus simples et plus clairs, qui garantissent la lisibilité de son action. Sans efficacité et lisibilité accrue, sans démocratie et transparence renforcée, l’Europe devient impopulaire, le citoyen se détourne de l’Europe et le populisme progresse. 

Orientations, Programmes cadres, stratégies communes, actions communes, positions communes, décisions-cadres, conventions, Livres blancs, Livres verts, résolutions, déclarations, etc : chaque nouvelle politique a créé ses propres instruments, si bien que le citoyen, qui doit être au centre de notre préoccupation, est désormais bien incapable d’identifier l’origine, comme la portée de ces actes. La distinction fondamentale entre directives et règlements est souvent dépassée au point que certaines directives sont parfois plus précises que des règlements.

 Tout en maintenant la distinction fondamentale entre le droit primaire et le droit dérivé, on pourrait ainsi distinguer :
- Un traité constitutionnel unique, qui constituerait le pilier constitutionnel de l’Union. Celui-ci devrait intégrer la Charte des droits fondamentaux, définir la structure institutionnelle de l’Union et établir les règles de répartition des compétences.
- Les lois européennes, qui seraient les normes de droit commun de l’Union européenne. Il devrait s’agir de normes à portée générale, comportant des principes d’action sans contenir de règles de détail. Dans cet esprit, le recours à des « lois cadre » serait susceptible de donner une plus grande lisibilité aux politiques de l’Union. Avant d’être adoptées, ces normes feraient l’objet d’une large consultation, en application du principe de transparence. Il faudrait, à terme, envisager une procédure d’adoption uniforme des lois européennes, en généralisant progressivement le recours à la co-décision – où le Parlement européen joue pleinement son rôle – avec un vote à la majorité qualifiée du Conseil.
- Les règlements seraient, dans ce schéma, des normes d’exécution élaborées par la Commission, sous le contrôle du Conseil et du Parlement européen.

Il faut, autant que possible transposer, en l’adaptant, cette simplification au 2e et au 3e pilier.

Enfin, je suis favorable à l’attribution à l’Union européenne de la personnalité juridique unique.

Je vous remercie.


Communication du Président Pierre Lequiller sur la Convention, à la délégation pour l’Union européenne (25 juillet 2002).

I - L'indispensable réforme des institutions
La réforme des institutions s'impose sans tarder :
· C'est la dernière chance avant l'élargissement : l'Union à quinze est lourde, peu lisible, peu compréhensible, insuffisamment efficace sur le plan international. A vingt cinq ou vingt sept ce serait pire. Il faut sortir par le haut de la traditionnelle interrogation "approfondissement ou élargissement". Les nouveaux adhérents doivent pouvoir connaître les perspectives de l’Union.
· L'opinion publique demande un "mieux" d'Europe. Même si les enquêtes indiquent qu'une majorité d'européens pensent que l'appartenance de leur pays à l'Union européenne est une bonne chose, de nombreuses critiques sont portées sur l'organisation et le fonctionnement des institutions : absence de perspective claire, complexité extrême, opacité, éloignement du citoyen, interventions inopportunes de l'Europe dans des domaines pour lesquels l'action des Etats (ou des collectivités infra-étatiques) serait plus efficace, et, au contraire, insuffisance d'action commune dans d'autres domaines (politique étrangère, lutte contre la grande criminalité, politique de l'immigration…).
· Le contexte de la mondialisation et de l'hyper puissance américaine implique que l'Union soit davantage présente dans le monde pour que nous soyons capables, ensemble, de défendre efficacement nos intérêts et nos valeurs. L'Europe doit être une force au service du développement durable, d'un équilibre entre compétitivité et protection sociale, de la diversité culturelle. La gravité des enjeux (tensions régionales, misère, sous-développement, destruction de l'environnement, menaces terroristes…) requiert plus d'Europe dans le monde.
· Il est nécessaire de clarifier les perspectives de la construction européenne, au moins à moyen terme (la Convention sera une étape, qui sera suivie d’autres étapes) . Après la réalisation du  marché intérieur, la mise en place de l'Euro, l'émergence d'une politique extérieure commune, la décision de l'élargissement, l'Europe a besoin de rebâtir un projet lisible pour ses citoyens, une ambition commune - notamment pour les jeunes, qui demandent une Europe plus généreuse, plus audacieuse- sur la base d'objectifs affichés, et de moyens clarifiés, au service d'une certaine conception de l'homme qui est au cœur du projet européen. C’est l’Europe de demain que nous devons nous attacher à bâtir, qui comporte sa part d’idéal, pour le bien commun des peuples d’Europe, et en particulier pour celui des générations nouvelles.

II - La "feuille de route" de la Convention est très ouverte
· La déclaration adoptée à Nice avait prévu qu'un débat "large et approfondi s'engage sur l'avenir de l'Union européenne". Elle avait précisé que ce débat porterait, entre autre, sur : la délimitation des compétences, le statut de la Charte des droits fondamentaux, la simplification des traités, le rôle des Parlements nationaux.
· La déclaration adoptée par les Chefs d'Etat et de Gouvernement à Laeken le 15 décembre dernier fixe le mandat de la Convention. Celui-ci est très large et va bien au-delà des quatre questions de Nice. La déclaration de Laeken ne contient pas en effet une liste précise de sujets, mais un énoncé de quelques axes majeurs de réflexion, précisés par une série de questions :
- Une meilleure répartition et définition des compétences (comment rendre la répartition des compétences plus transparente ? Comment appliquer le principe de subsidiarité ? Faut-il ajuster les compétences ? Dans quels domaines ? Comment préserver l'adaptabilité nécessaire tout en évitant l'"élargissement furtif" des compétences de l'Union ?…).
- La simplification des instruments de l'Union (réduction du nombre des instruments législatifs ? Distinction mesures législatives et mesures d'exécution ? Recours accru aux législations cadre ?…).
- Davantage de démocratie, de transparence et d'efficacité dans l'Union (comment doit être désigné le président de la Commission ? Faut-il renforcer le rôle du Parlement européen, élargir la codécision ? Quel rôle pour les Parlements nationaux ? Faut-il une nouvelle institution ? Faut-il davantage de décisions prises à la majorité qualifiée ? Peut-on garder la rotation semestrielle des présidences et faut-il modifier le mode de désignation du président du Conseil européen ? Comment accroître la cohérence de la politique étrangère européenne ? Doit-on renforcer la représentation de l'Union dans les enceintes internationales ? …).
- La voie vers une Constitution pour les citoyens européens ? (Faut-il unifier l'Union et les Communautés ? Que faire de la division en piliers ? Faut-il distinguer un Traité de base et les autres dispositions des Traités ? Cela doit-il conduire à une distinction des procédures de modification ? La Charte doit-elle être intégrée dans le Traité de base ? Faut-il un texte constitutionnel ?).

III - La composition de la Convention et l'organisation du débat public, permettent à la réforme des institutions européennes de sortir de la traditionnelle méthode diplomatique
· La composition de la Convention
Construire l'Europe de demain sur la base de l'intérêt commun des peuples d'Europe implique de sortir d'une logique de défense des intérêts strictement nationaux et catégoriels. La composition même de la Convention - calquée sur la Convention relative à la Charte - permet de ce point de vue d'ouvrir le débat, notamment à travers une forte participation parlementaire - Parlement européen et Parlements nationaux - et la participation des pays candidats.
La Convention rassemble ainsi les principales parties prenantes au débat de l'Union. Outre son Président et ses deux Vice-Présidents (Valéry Giscard d'Estaing, Guiliano Amato et Jean-Luc Dehaene), la Convention est composée de :
- 15 représentants des chefs d'Etat ou de Gouvernement des Etats membres ;
- 13 représentants des pays candidats à l'adhésion ;
- 30 représentants des Parlements nationaux des Etats membres ;
- 26 représentants des Parlements nationaux des pays candidats à l'adhésion ;
- 16 représentants membres du Parlement européen ;
- 2 représentants de la Commission européenne.
A chacun des titulaires correspond un membre suppléant.
Le Comité économique et social, le Comité des régions, les partenaires sociaux et le médiateur assistent à la Convention en tant qu'observateurs.
La Déclaration de Laeken prévoit que les pays candidats à l'adhésion participent aux délibérations sans toutefois pouvoir empêcher le consensus qui se dégagerait entre les Etats membres.
Le Présidium de la Convention est composé du Président de la Convention, des Vice-Présidents, de deux représentants des membres du Parlement européen, de deux représentants de la Commission, de deux représentants des Parlements nationaux (Gisela Stuart ,RU, travailliste ; John Bruton ,Ir., Fine Gael) et des représentants des gouvernements espagnols, danois et grec, pays qui exercent la Présidence de l'Union européenne pendant la Convention. Un représentant des pays candidats participe aux travaux du Présidium en tant qu’observateur.Le Présidium a un rôle de coordination et de préparation des travaux de la convention.
· L'organisation du débat public autour de la Convention :
Au niveau européen, diverses dispositions ont été prises pour relayer la Convention et ouvrir au public les débats sur l'avenir de l'Europe. Jean-Luc Dehaene, Vice-Président, a été chargé de coordonner ce processus. Un site web d'information sur la Convention a été mis en place, ainsi qu'un "Forum" permettant aux organisations représentatives de la société civile d'apporter leur contribution au débat (plus de 600 organisations y ont déjà participé). Des groupes de contact sectoriels ont été mis en place avec les organisations, présidés par des conventionnels : Secteur social, Environnement, Universités et laboratoires d'idées, Régions et autorités locales, Droits de l'Homme, Développement, Culture.
Par ailleurs, une "Convention jeunes" a été mise en place (chaque conventionnel a désigné un jeune à cette convention). Elle s'est réunie du 9 au 12 juillet et a fait un rapport à la Convention ( ce rapport, que beaucoup ont considéré comme étant insuffisamment novateur, insiste sur la nécessité de mettre en place une Europe fédérale). La Convention jeune poursuivra très probablement ses travaux pendant la durée de la Convention, selon des modalités qui restent à déterminer.
En France, il convient de noter que l'Assemblée nationale a mis en place un "portail" spécifique Convention sur le site de l'Assemblée, qui a un objectif d'information, assorti d'un forum de discussion. (Il faut par ailleurs rappeler que l'Assemblée a organisé fin 2001 les "Assises nationales pour l'Europe" et les "mardis de l'Europe").
Le Gouvernement a fait part de son intention de lancer différents modes de dialogue (site web, organisations de débats dans les régions…) à la suite du débat national de 2001. Ces intentions restent à préciser.

IV - Le développement des débats depuis février
· Le programme général
La Convention a commencé ses travaux fin février par une période d'écoute qui s'est achevée par la session des 24 et 25 juin (débat avec la société civile). La seconde étape doit être une phase d'analyse visant à comparer les avantages et les inconvénients des propositions avancées pour organiser l'Union européenne. La troisième phase devra permettre de faire la synthèse entre les différentes propositions et d'élaborer des recommandations. Un consensus sera recherché, sans que l'on puisse à ce stade exclure l'hypothèse de propositions optionnelles.
Les travaux de la Convention devraient se terminer au plus tard en juin 2003, la future CIG prenant ensuite le relais (le Président Valéry Giscard d'Estaing a répété à plusieurs reprises que la Convention ne sacrifierait pas son "ambition à des contraintes de calendrier").
Après la session inaugurale du 28 février (interventions des présidents du Conseil européen, de la Commission, du Parlement européen, et du Président Valéry Giscard d'Estaing) la Convention a tenu jusqu'à présent six sessions : les 21 et 22 mars (les attentes des conventionnels), les 15 et 16 avril (les missions de l'Union), les 23 et 24 mai (les compétences de l'Union), les 6 et 7 juin (parlements nationaux et justice/affaires intérieures), les 23 et 24 juin (dialogue avec la société civile), les 11 et 12 juillet (politique étrangère, défense, et rapport de la Convention jeune).
Outre les très nombreuses contributions des Conventionnels (consultables sur le site de l'Assemblée), deux textes ont participé notamment au débat : le rapport d'Alain Lamassoure sur les compétences, adopté par le Parlement européen, et celui de la Commission à la Convention, sur l'action de l'Union en matière de politique extérieure, de sécurité et de justice et de "gouvernance" économique.
Le Président Valéry Giscard d'Estaing a fait un rapport sur la Convention au Conseil européen de Séville (texte distribué) qui met en lumière les principales tendances du débat.
· Les groupes de travail
Afin d'approfondir l'examen des problématiques en discussion - sans priver la Convention elle-même de sa capacité de débattre - il a été décidé de créer six groupes de travail (présidés par des membres du Présidium) sur certains points particuliers ; leurs travaux ont débuté à la mi-juin et s'achèveront début octobre :
Subsidiarité (Président M. Inigo Méndez de Vigo, représentant du Parlement européen)
Comment assurer de la manière la plus efficace le contrôle du respect du principe de subsidiarité ? Faut-il créer un mécanisme ou une procédure de contrôle ? Cette procédure doit-elle être de nature politique et/ou judiciaire ?
Ce groupe fera rapport en septembre.
Charte (Président M. Antonio Vitorino, commissaire européen)
Si l'on décide d'insérer la Charte des droits fondamentaux dans le Traité : par quelles modalités convient-il de le faire et quelles en seraient les conséquences ? Quelles seraient les conséquences d'une adhésion de la Communauté/Union à la Convention européenne des droits de l'homme ?
Personnalité juridique (Président M. Giuliano Amato, vice-président)
Quelles seraient les conséquences d'une reconnaissance explicite de la personnalité juridique de l'Union européenne ? Et celles d'une fusion de la personnalité juridique de l'Union et des Communautés européennes ? Peuvent-elles contribuer à la simplification des traités ?
Ce groupe fera rapport en septembre.
Parlements nationaux (Président Mme Gisela Stuart, représentant la Chambre des Communes)
De quelle façon est exercée le rôle des Parlements nationaux dans l'actuelle architecture de l'Union européenne ? Quels sont les arrangements nationaux qui fonctionnent le mieux ? Est-il nécessaire d'envisager de nouveaux mécanismes/procédures au niveau national ou au niveau européen ?
Compétences "complémentaires" (président M. Henning Christophersen, représentant le Gouvernement danois)
Comment traiter à l'avenir les compétences dites "complémentaires" : convient-il de rendre aux Etats membres toute compétence pour les matières dans lesquelles actuellement l'Union a une compétence complémentaire, ou faut-il expliciter les limites de la compétence complémentaire de l'Union ?
"Gouvernance économique" (Président M. Klaus Hänsch, représentant le Parlement européen)
La mise en place de la monnaie unique implique une coopération économique et financière plus poussée. Quelles formes une telle coopération pourrait-elle prendre ?
Quatre nouveaux groupes de travail ont été décidés lors de la session des 11 et 12 juillet ("Espace de liberté, sécurité et justice" (Président M. John Bruton, représentant le Parlement irlandais), "Simplification des procédures législatives et des instruments" (Président M. Giulano Amato, vice-président), "Relations extérieures" (président M. Jean-Luc Dehaene, vice-président), "Défense" (président M. Michel Barnier, commissaire européen)). Ils commenceront leur travaux en septembre.
M. Jacques Floch a souhaité adhérer au groupe "espace de liberté, sécurité et justice" et moi-même au groupe "politique étrangère". D'après le Président Valéry Giscard d'Estaing, une troisième vague de groupes de travail, concernant le domaine institutionnel, devrait intervenir à partir de décembre.
La session des 12 et 13 septembre sera consacrée à la simplification des procédures législatives, et celle des 3 et 4 octobre au contrôle de la subsidiarité. 

V - Les premières directions qui s'esquissent à ce stade
La "phase d'écoute" venant tout juste de s'achever, aucun groupe de travail n'ayant encore achevé ses travaux, une seconde vague de groupes venant à peine d'être créée, avant une troisième prévue à la fin de l'année, il est bien entendu plus que prématuré de tenter de dégager les contours des futures conclusions de la Convention, qui interviendront probablement à la fin du printemps 2003.
Néanmoins quelques éléments d'orientations peuvent être dégagés à partir des sessions déjà intervenues et des groupes de travail.
· Les missions de l'Union :
Une forme de consensus s'est sans difficulté dégagée autour de l'énoncé des grandes missions de l'Union : la paix, la prospérité économique, la défense d'une forme de société alliant compétitivité économique et protection sociale, la promotion de la diversité culturelle, du développement durable, en Europe et dans le monde.
· La répartition des compétences :
- L'affirmation d'un objectif de simplification (que l'on retrouve pour la plupart des thèmes) ;
- Pas de liste de compétences, mais sans doute l'organisation des compétences en catégories qui pourraient être : compétences exclusives de l'Union, compétences partagées, compétences complémentaires (un groupe de travail a été mis en place à ce propos) ;
- La réaffirmation du principe selon lequel l'Union n'a que des compétences d'attribution ;
- S'agissant de la répartition des compétences il n'y a pas eu de demandes importantes de compétences nouvelles pour l'Union sur le plan interne, mais beaucoup ont souhaité que les compétences de l'Union soient néanmoins renforcées en matière d'action judiciaire et policière transfrontalière, ainsi que dans le domaine économique et social ( sur ce point les avis sont divers ).
Une demande forte s'est affirmée dans le sens de compétences plus importantes pour l'Union en matière de politique extérieure.
Il n'y a pas eu de remise en cause des compétences actuelles de l'Union.
- Par contre la mise en place d'un contrôle renforcé du principe de subsidiarité a fait l'objet d'un consensus. Les modalités de ce contrôle restent à préciser. Le groupe de travail mis en place à ce sujet semble pencher pour une procédure « a priori » confiée à un organe ad hoc, à composition politique mais de nature juridictionnel - inspiré du contrôle constitutionnel français- statuant dans des délais brefs à l'issue de la procédure législative mais avant l'entrée en vigueur de l'acte ( la composition de l'organe, les modes de saisine, la portée des décisions restent encore entièrement à définir ). Les travaux du groupe Subsidiarité doivent être rapprochés de ceux du groupe sur les Parlements nationaux.
- La nécessité de maintenir une certaine flexibilité, permettant aux compétences de s'adapter éventuellement à l'évolution des enjeux.
· La place et le rôle des Parlements nationaux ont fait l'objet de débats en session plénière et de la constitution d'un groupe de travail. A ce stade les principaux éléments qui émergent du débat paraissent les suivants :
- Nécessité de renforcer le contrôle des gouvernements par les Parlements nationaux (examen des systèmes les plus performants, réflexion sur les dispositions du protocole annexé au traité d'Amsterdam…) et les liens de coopération entre le Parlement européen et les Parlements nationaux, qui doivent se développer dans une logique de complémentarité et de coopération et non de concurrence ;
- Refus très large d'une seconde chambre mais affirmation forte du rôle des Parlements nationaux en matière de contrôle de subsidiarité (participation à un organe ad hoc et/ou saisine de cet organe… ? réflexion à croiser avec les réflexions du groupe de travail subsidiarité) ;
- Le rôle des Parlements nationaux en matière de justice-affaires intérieures, de politique extérieure, comme dans le domaine de la coordination économique et budgétaire a été évoqué sans qu'aucun élément net ne ressorte encore à ce stade ;
- Le Président Valéry Giscard d'Estaing a par ailleurs annoncé (Le Monde 23/07/02) qu'il proposera à la Convention de "réfléchir à l'instauration d'un Congrès européen, qu'on pourrait désigner sous le nom de "Congrès des peuples d'Europe", qui rassemblerait périodiquement, par exemple une fois par an, l'ensemble des parlementaires européens, et un nombre proportionnel de parlementaires nationaux. Ce Congrès, sans pouvoir législatif, serait consulté sur l'évolution éventuelle des compétences de l'Union et sur les élargissements à venir. Il entendrait un rapport annuel du Président du Conseil et du Président de la Commission sur l'état extérieur et intérieur de l'Union et pourrait prononcer, ou confirmer, les nominations à certaines fonctions".
· Lors des travaux du groupe sur la gouvernance économique, il est apparu à tous les participants que, dans un contexte marqué par l’asymétrie entre une politique monétaire centralisée et des politiques budgétaires définies à l’échelon national, il était nécessaire d’améliorer la coordination entre autorités nationales. L’idée de renforcer les prérogatives de la Commission, en lui donnant un pouvoir de proposition dans la définition des objectifs de politique économique, a été largement approuvé. Cela ne nécessite toutefois aucun transfert de compétences. En contrepartie, il est apparu nécessaire de renforcer la légitimité démocratique du processus et d’y associer le Parlement européen et les parlements nationaux.
· S'agissant des relations extérieures les débats en session plénière du 11 juillet ont été marqués par un large consensus autour d'un nécessaire renforcement de la politique de l'Union.
La politique extérieure constitue sans nul doute un point essentiel des travaux de la Convention. La grande majorité des propositions avancées a ainsi été dans le sens d’un renforcement par étapes du rôle des institutions communautaires et d’une plus grande cohérence institutionnelle, mais selon des mécanismes spécifiques et en tenant compte de l’importance du rôle des Etats dans ce domaine, et du fait qu’il ne s’agit  pas de décisions de nature législative mais exécutive ( la Convention des jeunes a, pour sa part, préconisé que la politique extérieure soit de la compétence exclusive de l’Union) :
- La dualité Haut représentant/Commissaire chargé des relations extérieures a été largement débattue. Nombre d’interventions ont été dans le sens, soit d’une fusion des deux fonctions – sans que le rattachement à la Commission ne paraisse rallier une majorité –, soit d’un cumul de ces fonctions par une même personne disposant de la confiance du Conseil et de la Commission. Certains ont proposé de renforcer les pouvoirs du Haut représentant (droit d’initiative, présidence du Conseil « Affaires générales » dans sa formation politique extérieure – ainsi que peut–être présidence du COPS).
- S’agissant des règles de procédures, beaucoup d’intervenants se sont déclarés partisans d’un passage à la majorité qualifiée, la plupart souhaitant une évolution progressive et le maintien de certains garde–fous. Les « coopérations renforcées », ou une autre formule permettant à un groupe de pays d’aller de l’avant, ont été évoqués par nombre d’orateurs.
- Une majorité de conventionnels a par ailleurs souhaité une plus grande coordination des représentations diplomatiques et une fusion de certaines représentations au sein d’organisations internationales ( en commençant par exemple par le FMI ou la Banque mondiale).
- Beaucoup ont évoqué le renforcement souhaitable du contrôle parlementaire de la PESC (Parlement européen et parlements nationaux).
- Enfin il est apparu à nombre de conventionnels que l’augmentation des ressources financières de la PESC était nécessaire.
Un groupe de travail traitera de ces questions à partir de septembre (présidence de Jean-Luc Dehaene).
· En ce qui concerne les débats relatifs au domaine de la défense intervenus le 12 juillet, il convient de souligner qu' une majorité d’intervenants a souhaité un renforcement de la capacité d’action de l’Union afin que celle–ci puisse devenir un acteur crédible sur la scène mondiale.
- Beaucoup de conventionnels ont souligné qu’il convenait d’abord de préciser les domaines d’intérêt communautaire - en appliquant le principe de subsidiarité - : ont ainsi été évoqués, l’industrie de l’armement, la politique de la recherche et du développement, la gestion des crises et la prévention des conflits.
- Plusieurs membres de la Convention ont considéré qu’il était nécessaire d’établir un concept stratégique d’ensemble, associant les trois institutions, et beaucoup se sont déclarés partisans d’une révision des missions de Petersberg.
- En ce qui concerne les procédures, nombre de conventionnels ont estimé qu’il convenait d’élargir le champ de la majorité qualifiée en intégrant la formule de l’« abstention constructive ».
- La formule des coopérations renforcées a été considérée par beaucoup comme devant être étendue au domaine de la défense. Certains ont évoqué l’intégration dans le traité des coopérations renforcées qui existent en dehors du traité (comme l’article 5 du traité de Bruxelles) ; le Président s’est déclaré partisan de cette intégration.
- Beaucoup ont souligné que les décisions d’engagements de troupes doivent, au premier chef, relever de la compétence des Parlements nationaux.
- Une majorité a considéré que les industries d’armement devraient être soumises aux règles du marché intérieur (réforme de l’article 296 du traité).
- L’utilisation possible des moyens de l’OTAN a été très majoritairement souhaitée, même si l’hypothèse d’actions autonomes a été considérée comme devant être intégrée.
- La nécessité d’une augmentation des moyens financiers de l’Union dans ce domaine et un renforcement des budgets de défense des Etats est apparue prioritaire a beaucoup de conventionnels.
Les sujets de défense feront l'objet des travaux d'un groupe à partir de septembre.
· Les questions relatives à "l'espace de liberté, de sécurité et de justice" ont fait l'objet d'un débat en session plénière le 6 juin, qui fait apparaître la volonté des Conventionnels de rendre l’action européenne plus lisible et plus efficace dans ce domaine. La Convention s’est ainsi prononcée pour un renforcement du rôle de l’Union dans le domaine de la politique de sécurité et de justice.
- Au-delà de la nécessaire coopération entre les Etats membres, une majorité de Conventionnels a souligné les enjeux d’une harmonisation progressive des législations nationales.
- Pour concilier liberté et sécurité, l’accent doit être mis sur le nécessaire contrôle démocratique afin de rendre les décisions européennes plus légitimes. Le développement des prérogatives d’Europol et d’Eurojust devra donc s’accompagner de mécanismes de contrôle qui pourraient être confiés au Parlement européen et aux Parlements nationaux. Un contrôle juridictionnel pourrait également être attribué à la Cour de Justice des Communautés européennes.
- L’exigence de sécurité – qui justifie pour la plupart des Conventionnels la création d’une police des frontières extérieures de l’Union – doit se concilier avec l’affirmation d’un espace de liberté fondé sur les valeurs européennes.
- Une majorité significative de conventionnels a, par ailleurs, prôné l’application de la méthode communautaire aux matières du 3ème pilier.
Un autre groupe de travail traitera précisément de ces questions à partir de septembre.
· La question du financement de l'Union
- Le financement de l'Union n'est pas directement à l'ordre du jour de la Convention tel qu'il ressort de la déclaration de Laeken, mais beaucoup de conventionnels ont déjà évoqué la nécessité d'augmenter le budget communautaire, notamment en matière de politique étrangère, de défense, et de justice/affaires intérieures. Cette question reviendra très probablement dans les futures discussions de la Convention.
- Par ailleurs, l'idée d'une réforme des "ressources propres", afin de substituer à la ressource PNB - qui n'est pas une ressource propre - une ressource communautaire, sans charge fiscale supplémentaire, a été évoquée par plusieurs conventionnels, dont les représentants de la Commission. Il s'agit en particulier de créer un lien plus direct et plus transparent entre les citoyens et le budget de l'Union européenne.
· Vers une "constitution européenne" ?
- L'idée d'un Traité constitutionnel fait l'objet d'un quasi consensus, mais encore implicite. Le groupe de travail relatif à la personnalité juridique semble préconiser, à ce stade, un traité unique, regroupant des traités existants (parallèlement à la fusion de l'Union et des Communautés) au sein de l'Union (à qui la personnalité juridique serait conférée), organisé en deux parties, la première regroupant les dispositions de nature constitutionnelle.
- L'intégration de la Charte des droits fondamentaux dans le Traité semble recevoir l'agrément de la plupart des membres du groupe de travail compétent (mais le Royaume-Uni et l'Irlande sont contre).
- La question des procédures de révision du futur traité reste posée (procédure sans doute plus souple pour la seconde partie). La Convention pourrait peut-être se voir pérennisée comme formule de révision du Traité.
- Le Président Valéry Giscard d'Estaing a indiqué qu'une première "structure" de Traité pourrait être proposée par le présidium à la Convention fin octobre.
· Le cœur des questions institutionnelles n'a pas encore été abordé.
Les questions institutionnelles n'ont pas encore été, en tant que telles, à l'ordre du jour des travaux de la Convention. Des groupes de travail seront créés dans ce domaine à la fin de l'automne.
- Il ne semble pas, à ce stade, que le triangle institutionnel, ni le mode d'adoption des décisions de l'Union et des Communautés, ne soient remis en cause dans leurs principales caractéristiques. Par contre beaucoup de contributions préconisent un renforcement des trois organes constituant le triangle, notamment des pouvoirs du Parlement européen (généralisation de la codécision, et extension des pouvoirs budgétaires du Parlement). De nombreux conventionnels se sont déclarés partisans d'une extension de la méthode communautaire au troisième pilier, et progressivement, avec des modalités spécifiques au deuxième pilier. Par ailleurs l'extension de la majorité qualifiée semble être préconisée par la plupart des conventionnels . La Convention des jeunes a clairement souhaité une Europe fédérale, en préconisant notamment que la Commission devienne «  le vrai exécutif européen »
- La réorganisation du Conseil a déjà été amorcée à Séville, à traité constant. Au-delà de cette réorganisation, la question de la présidence de l'Union (Présidence à plein temps issue du Conseil européen, présidence de la Commission dont la légitimité serait renforcée - élection par le Parlement européen, par un Congrès parlementaire associant les parlements nationaux, ou bien élection au suffrage universel - ou présidence intégrée Conseil/Commission) et celle de ses pouvoirs sera un point fort des discussions institutionnelles à venir.
- Une forte demande semble porter sur la simplification des procédures législatives et des instruments (qui pourraient selon certains être regroupés en loi-cadre, loi, et règlement exécutif).


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