Question au Gouvernement n° 1434 :
emprunts

13e Législature

Question de : M. Didier Migaud
Isère (4e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche

Question posée en séance, et publiée le 24 juin 2009

EMPRUNT NATIONAL

M. le président. La parole est à M. Didier Migaud, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
M. Didier Migaud. J'aurais aimé poser ma question au Président de la République, pour comprendre la logique de sa proposition d'un grand emprunt.
Jusqu'à présent, le Président de la République nous avait expliqué qu'il fallait dépenser moins, pour emprunter moins et payer moins d'impôts. Pourtant, depuis mai 2007, la France n'a jamais autant emprunté, ni accru sa dette. Tant le niveau d'emprunt que celui de la dette ont atteint un record absolu.
Or, que nous propose le Président de la République ? Emprunter plus, pour dépenser plus et, à l'avenir, payer plus d'impôts pour rembourser !
M. Patrick Roy. Eh oui !
M. Didier Migaud. Il reprend ainsi une proposition qu'il aurait lui-même jugée absurde lorsque vous la faisiez, monsieur le président de l'Assemblée nationale, en octobre dernier.
Le mot " absurde " est sévère. Pour ma part, je dirais plutôt incompréhensible, car nous empruntons déjà beaucoup tous les jours, mais peu pour investir. Toutes les dépenses budgétaires et fiscales nouvelles, depuis mai 2007, ont été financées par des emprunts supplémentaires : le bouclier fiscal, le paquet fiscal, la baisse de la TVA sur la restauration, la future réforme de la taxe professionnelle. Tout est financé par une aggravation du déficit, et donc par l'augmentation de la dette et des emprunts.
M. Michel Sapin. Eh oui !
M. Didier Migaud. Incompréhensible également, parce qu'un emprunt souscrit auprès du grand public coûte toujours plus cher à l'État, et donc au contribuable. Ainsi, une étude publiée en 1997 par Bercy montre que l'emprunt Balladur-Sarkozy a coûté trois à quatre milliards d'euros de plus qu'un emprunt ordinaire.
Quelle est donc la logique de cette décision ? Pouvez-vous nous rappeler le montant de l'emprunt déjà engagé depuis le début de cette année ? L'augmentation de la dette depuis mai 2007 ? En fait, ne s'agit-il pas d'un moyen facile mais coûteux de reporter la facture à l'après 2012 ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur plusieurs bancs du groupe GDR.)
M. le président. La parole est à Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi. Monsieur le député, la logique de cette décision, annoncée hier par le Président de la République, est tout simplement une logique de bonne gestion. (Exclamations et rires sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
M. Michel Sapin. Quel humour !
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie. Avec quoi finance-t-on de nouveaux investissements ? Qu'il s'agisse des ménages, des entreprises ou de l'État, lorsqu'on investit dans l'avenir, de manière durable, on finance par la dette. C'est classique.
Au nouveau gouvernement, le Président de la République a confié une nouvelle analyse, une nouvelle méthode.
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. L'emprunt, une nouvelle méthode !
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie. La nouvelle méthode consistera, en associant l'ensemble du Parlement et des partenaires sociaux, à identifier nos priorités d'investissement, afin de développer le potentiel de croissance de notre économie. Lorsque nous aurons identifié les priorités d'investissement, celles dont la rentabilité à court terme n'est pas évidente - le numérique, la connaissance -, nous pourrons alors calibrer le volume d'endettement nécessaire.
M. Michel Sapin. Soixante milliards ?
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie. C'est précisément à cet effort que nous sommes invités par le Président de la République : travailler ensemble, pendant une durée de trois mois, à l'identification de ces priorités, et calibrer la dette qui sera nécessaire pour la financer.
Il ne s'agit pas de s'effaroucher et de faire de la dette un épouvantail. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Il s'agit d'identifier ce à quoi elle correspond. La dette qui finance les dépenses de fonctionnement n'est pas une bonne dette. Celle qui finance les dépenses d'investissement, celle qui sert à renforcer l'actif public de la France, est une dette utile.
M. Michel Sapin. Vous n'en croyez pas un mot !
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie. Le Président de la République a appelé à financer cette dette par un emprunt national. C'est évidemment un geste politique, pour engager l'ensemble du pays autour de la définition des priorités stratégiques, à laquelle, je l'espère, vous contribuerez dans le cadre d'une démarche participative. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP. - Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Données clés

Auteur : M. Didier Migaud

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Finances publiques

Ministère interrogé : Économie, industrie et emploi

Ministère répondant : Économie, industrie et emploi

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 24 juin 2009

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