Question au Gouvernement n° 1814 :
banques et établissements financiers

13e Législature

Question de : M. Didier Migaud
Isère (4e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche

Question posée en séance, et publiée le 16 décembre 2009

TAXATION DES BONUS

M. le président. La parole est à M. Didier Migaud, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
M. Didier Migaud. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre. Il y a quelques semaines, nous avons proposé de taxer les bénéfices des banques et de relever la taxe sur les salaires et les bonus des traders.
Qu'avons-nous alors entendu ? " Inopportun ! Inapproprié ! Démagogie ! Vous souhaitez que l'État spécule ! "
Notre première proposition permettait tout simplement aux contribuables d'être associés aux bénéfices des banques, retrouvés grâce au soutien massif de l'État - et donc du contribuable. Était-ce légitime ? Oui : beaucoup d'autres pays l'ont fait. Pourtant, vous l'avez refusé.
Notre seconde proposition permettait de dissuader les banques de verser des bonus extravagants, choquants. Il n'est pas normal que les entreprises paient le même taux de taxe sur les salaires selon que l'on est trader ou, par exemple, infirmière. Notre proposition était-elle légitime ? Oui. Pourtant, vous l'avez refusée.
Chaque fois qu'il s'agit de réguler le capitalisme financier, vous agissez a minima - Alain Vidalies l'a dit - et sous la pression de l'opinion. Si le discours est dur et, en apparence, volontariste, les mesures tardent à suivre et sont d'une grande douceur, ou encore sans effet.
M. Jean Glavany. C'est qu'ils ont changé d'avis !
M. Didier Migaud. Ma question est donc simple : monsieur le Premier ministre, allez-vous taxer les bénéfices des banques, à partir du moment où ils ont été obtenus grâce au soutien massif de l'État ? Allez-vous taxer les bonus des traders ? Allez-vous passer par la loi ?
M. Roland Muzeau. Bah non !
M. Didier Migaud. La grande différence entre le Président de la République et le Premier ministre britannique, c'est que, si les deux ont parlé et écrit, l'un a déjà présenté un texte devant la Chambre des Communes. Ce n'est pas encore le cas en France !
M. Marcel Rogemont. Eh non !
M. Didier Migaud. Qu'attendez-vous ? (Bravo ! et applaudissements sur les bancs du groupe SRC et plusieurs bancs du groupe GDR.)
M. le président. La parole est à Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi. Monsieur le député, souvenez-vous du 25 août 2009. Ce jour-là, le Président de la République convoquait l'ensemble des représentants des banques et les incitait à la discipline (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) et à la modération ; et il obtenait de diviser par deux une provision sur bonus d'un milliard d'euros. Ensuite commençait un travail qui est la seule différence entre nous.
M. Christian Eckert. Ce n'est pas la seule !
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie. En effet, nous souhaitons quant à nous agir sur le plan international. Nous ne voulons pas sanctionner les seules banques françaises. Nous voulons tout simplement que tout le monde joue sur un pied d'égalité.
Depuis le 25 août, nous avons fait beaucoup de choses.
M. Marcel Rogemont. Vous n'avez rien fait !
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie. Nous avons convaincu l'ensemble des dirigeants du G20 d'encadrer les bonus. Nous avons obtenu l'interdiction des bonus garantis, le différé du paiement de 50 % des bonus sur trois ans...
M. Albert Facon. ...différé seulement !
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie. ...et nous avons obtenu qu'en face d'un bonus, il y ait un malus. L'ensemble des pays du G20 a été convaincu et est en train de mettre en oeuvre ce dispositif.
Je vais tout simplement vous citer le Président de la République,...
M. Jean Glavany. Il change d'avis tout le temps ! Précisez la date !
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie. ...qui proposait, dans son discours du 25 août, " la création dans toutes les places financières d'une taxe assise sur les bonus distribués, dont le produit alimenterait les systèmes de garanties des dépôts. "
C'était le 25 août 2009. Or que se passe-t-il ? Nous mettons en oeuvre cette proposition,...
Plusieurs députés du groupe SRC. Non !
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie. ...pas seulement à Paris, car cela n'aurait aucun sens, mais à Londres et à Paris, et nous allons essayer de convaincre l'ensemble de nos partenaires européens, ainsi que les États-Unis. En effet, ce n'est pas seulement à Paris, c'est aussi à Londres et à New York que doivent se mettre en place de tels systèmes.
Oui, nous allons donc mettre en place ce système. Oui, je reviendrai devant votre assemblée pour vous proposer, à l'occasion d'un projet de loi de finances rectificative ou d'un autre véhicule, par exemple le projet de loi de régulation bancaire, qui viendra devant vous, un dispositif permettant de taxer les bonus, car c'est légitime.
Plusieurs députés du groupe SRC. Ah !
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie. À circonstances exceptionnelles et à financement exceptionnel, taxation exceptionnelle, mais pour tous, pas seulement à Paris ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Données clés

Auteur : M. Didier Migaud

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Impôts et taxes

Ministère interrogé : Économie, industrie et emploi

Ministère répondant : Économie, industrie et emploi

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 16 décembre 2009

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