Chine
Question de :
M. Philippe Folliot
Tarn (3e circonscription) - Nouveau Centre
Question posée en séance, et publiée le 10 avril 2008
FLAMME OLYMPIQUE
M. le président. La parole est à M. Philippe Folliot, pour le groupe Nouveau Centre.M. Philippe Folliot. Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
Mal à la France ! Nous avons été très nombreux à avoir mal à la France ! Le triste et affligeant spectacle du passage à Paris, ce lundi, de la flamme olympique a interpellé nombre de nos concitoyens.
De pacifiques drapeaux tibétains confisqués ; trois mille policiers déployés, sans compter les vigiles chinois, pour escorter la flamme, devenue pour beaucoup, comme pour moi, celle de la honte : quel dévoiement du symbole de paix et de fraternité de l'olympisme ! Surtout à Paris, en France, mère patrie des droits de l'Homme et du citoyen et berceau du baron Pierre de Coubertin !
Quel boomerang pour la sanguinaire dictature chinoise, qui, avec le voyage de cette flamme olympique, voulait s'offrir une opération de communication planétaire et n'aura finalement obtenu que ce qu'elle mérite : une opération vérité sur les atrocités commises par ce régime, tant en Chine qu'au Tibet !
Qu'il s'agisse de la répression sauvage des émeutes du désespoir au Tibet, des terribles laogaï, les camps chinois de travail forcé, ou encore des milliers d'exécutions capitales par an, nul ne pourra dire : " Je ne savais pas. "
Les sportifs ne doivent pas être pris en otages (Applaudissements sur les bancs du groupe Nouveau Centre) ; les Jeux olympiques de Pékin doivent avoir lieu. Pour autant, la France doit s'exprimer sur cette question clairement et officiellement.
Monsieur le Premier ministre, ma question est double. Première question : à quel moment le Président de la République, qui, de surcroît, présidera l'Union européenne durant le déroulement des Jeux olympiques, a-t-il l'attention d'annoncer que ni lui ni aucun officiel français n'assistera ni à la cérémonie d'ouverture ni à celle de clôture des Jeux de Pékin ?
M. Roland Muzeau. Rigolo, va !
M. Philippe Folliot. Seconde question : quand le Président de la République française, à l'instar de la chancelière allemande ou du président des États-Unis, recevra-t-il officiellement le dalaï-lama ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Nouveau Centre et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire, ainsi que sur quelques bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
M. le président. La parole est à M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères et européennes.
M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères et européennes. Monsieur Folliot, je vais tenter de vous répondre avec la conviction du militant des droits de l'Homme que je n'ai jamais cessé d'être (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine)...
M. Jean-Paul Bacquet. En particulier avec vos amis Chinois !
M. le ministre des affaires étrangères et européennes. ...et avec le sens de la responsabilité d'un ministre des affaires étrangères. Les deux ne sont pas incompatibles et se rejoignent dans la nécessité d'oeuvrer pour le dialogue entre les autorités chinoises et le dalaï-lama.
Pour répondre précisément à vos questions, j'ai été, comme vous, très malheureusement surpris par le déroulement de cette manifestation - d'autant que j'avais reçu au Quai d'Orsay les groupes de militants des droits de l'Homme et de militants du Tibet que vous connaissez bien. Ne revenons pas sur cette sombre journée : des enquêtes administratives ont été diligentées par le ministre de l'intérieur afin d'en savoir plus sur le déroulement des événements. Il reste que je suis singulièrement surpris, je le répète, par la conduite de ceux qui, aux termes de la Charte olympique, avaient la responsabilité de cette manifestation. Les Chinois, par leur comportement dans les rues de Paris, ont également surpris les sportifs, dont l'étonnement n'était pas inférieur au mien. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe Nouveau Centre.)
La position officielle de la France est d'appeler au dialogue : il est possible de parler et d'entendre à la fois les autorités chinoises et le dalaï-lama.
Pour ce qui est du boycott ou de la participation à la cérémonie d'ouverture des Jeux olympiques, lorsque l'évolution le permettra, le Président de la République s'exprimera sur sa position personnelle. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
M. Frédéric Cuvillier et M. Roland Muzeau. Maintenant, maintenant !
M. le ministre des affaires étrangères et européennes. En attendant, aucun des vingt-sept pays membres de l'Union européenne ne demande le boycott des Jeux olympiques eux-mêmes. Personne ne le demande, personne, personne ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe Nouveau Centre.)
Dans quelles conditions pourrions-nous faire progresser le dialogue ? Nous parlons avec les autorités chinoises (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine) et je m'adresse au dalaï-lama au moins deux fois pas semaine. Comme vous l'avez souligné - et cela leur est commun - personne ne réclame l'indépendance du Tibet : voilà peut-être une possibilité pour se parler.
Quoi qu'il en soit, la critique est facile alors qu'il est bien difficile dans ce cas de concilier les droits de l'Homme et la responsabilité. Mais nous le ferons - avec votre aide, j'en suis sûr ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Nouveau Centre et sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Auteur : M. Philippe Folliot
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : Affaires étrangères et européennes
Ministère répondant : Affaires étrangères et européennes
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 10 avril 2008