droit international
Question de :
M. Didier Migaud
Isère (4e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche
Question posée en séance, et publiée le 22 octobre 2008
LUTTE CONTRE LES PARADIS FISCAUX
M. le président. La parole est à M. Didier Migaud, pour le groupe SRC.M. Didier Migaud. Se tient aujourd'hui à Paris une réunion sur les paradis fiscaux. Je regrette d'ailleurs l'absence à cette réunion d'un certain nombre de pays, comme les États-Unis ou la Suisse, et davantage encore celle du Luxembourg, alors que M. Juncker préside l'Eurogroupe.
Les paradis fiscaux sont des lieux où se développent la fraude fiscale et le blanchiment de l'argent sale. M. le Premier ministre a récemment déclaré que des " trous noirs " tels que les centres offshore ne devaient plus exister et que la disparition des paradis fiscaux devait préluder à une refondation du système financier international. Le Président de la République lui-même a affirmé, lors du dernier Conseil européen à Bruxelles, " qu'il ne serait pas normal qu'une banque à qui nous octroierions des fonds propres continue à travailler dans des paradis fiscaux ".
Précisément, un plan de recapitalisation de six grandes banques françaises, d'un montant total de 10,5 milliards d'euros, a été annoncé. Ce plan doit s'accompagner, selon nous, de garanties très fortes et de conditions. Or les modalités de cette recapitalisation ne permettent pas à l'État de disposer de droits de vote ni de sièges dans les conseils d'administration de ces banques. L'État signerait en effet avec les établissements concernés une convention qui se limiterait essentiellement à reprendre la charte du MEDEF sur les rémunérations des dirigeants et à prévoir des engagements trop vagues sur la distribution de crédits à l'économie. Cela nous paraît insuffisant, madame la ministre de l'économie.
De même, aucune disposition de ce projet de convention n'a trait à la question des paradis fiscaux, alors que ces banques y ont développé à la fois des filiales et des activités.
Ma question est simple. À l'heure où l'État injecte massivement des fonds dans les banques françaises, allez-vous mettre en accord paroles et actes, en exigeant de ces banques qu'elles cessent leurs activités dans les paradis fiscaux ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur de nombreux bancs du groupe GDR.)
M. le président. La parole est à M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique. (Protestations sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique. Monsieur le président de la commission des finances, la réunion qui a eu lieu tout à l'heure à l'initiative de la France et de l'Allemagne, et à laquelle assistaient dix-sept pays, dont onze représentés au niveau ministériel, est très importante, car elle a permis de relancer sur le plan politique ce qui n'avait pratiquement jamais été entrepris : la lutte internationale contre les paradis fiscaux. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.) Cette réunion a eu lieu en présence du secrétariat général de l'OCDE, qui a été chargé par le G8 de suivre cette problématique.
Nous avons abouti à des réponses très concrètes, qui consistent à faire en sorte que la directive Épargne soit étendue à d'autres zones géographiques et à d'autres produits et que les conventions de l'OCDE qui permettent d'assurer la transparence financière soient appliquées à l'ensemble des pays. On ne peut pas vouloir la moralisation du capitalisme financier, que le Président de la République a appelée de ses voeux, sans lutter fermement contre les " trous noirs " financiers que sont les paradis fiscaux, lesquels ont probablement accéléré la crise.
Quant aux banques françaises - et je parle sous le contrôle de Christine Lagarde -, elles auront, bien évidemment, à clarifier l'ensemble de leurs relations et de leurs opérations avec les paradis fiscaux (Exclamations sur les bancs du groupe SRC), comme c'est le cas pour l'ensemble des banques européennes ; le Président de la République l'a indiqué ce matin. Il est évident que l'ensemble du système bancaire bénéficiant de subventions, d'aides ou de recapitalisations publiques devra clarifier ses relations avec les paradis fiscaux.
Nous sommes aujourd'hui très bien partis. D'ici au mois de mai, se tiendra, à Berlin, une nouvelle réunion, au cours de laquelle nous arrêterons la liste noire des pays à fiscalité dommageable, des prédateurs fiscaux, ainsi que l'ensemble des mesures de rétorsion que nous devons prendre sur le plan international pour être plus efficaces contre ces États qui n'ont rien à faire dans la communauté internationale. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
M. Henri Emmanuelli. Ce n'est pas sérieux !
Auteur : M. Didier Migaud
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Relations internationales
Ministère interrogé : Budget, comptes publics et fonction publique
Ministère répondant : Budget, comptes publics et fonction publique
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 22 octobre 2008