aides de l'État
Question de :
M. Didier Migaud
Isère (4e circonscription) - Socialiste, radical, citoyen et divers gauche
Question posée en séance, et publiée le 21 janvier 2009
CONTREPARTIES DEMANDÉES AU SECTEUR BANCAIRE
M. le président. La parole est à M. Didier Migaud, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.M. Didier Migaud. Madame la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, à la fin de l'année 2008, six grandes banques françaises ont obtenu de l'État 10, 5 milliards d'euros. Leur situation, compte tenu de la crise financière, exigeait sans doute cette décision. Encore faut-il s'entendre sur les contreparties à exiger de leur part dans ce contexte.
M. Patrick Roy. Voilà une bonne question !
M. Didier Migaud. D'autres pays comme le Royaume-Uni, l'Allemagne ou l'Italie ont souhaité en contrepartie de leurs participations rentrer dans le capital des banques, ...
M. Maxime Gremetz. Il ne fallait pas les privatiser !
M. Didier Migaud. ...participer à leur conseil d'administration et, du coup, peser sur leurs décisions, notamment pour ce qui est de leur politique de distribution des dividendes et la rémunération de leurs dirigeants.
Au moment où l'État envisage un deuxième versement, d'un peu plus de 10 milliards d'euros, il importe de s'interroger sur l'efficacité du premier dispositif car de nos circonscriptions, des entreprises, remontent à nouveau des informations relatives au difficile accès au crédit et à sa cherté.
Les banques s'interrogent, nous le savons, sur la question de savoir si elles doivent ou non verser des dividendes à leurs actionnaires, de la même façon que certains dirigeants estiment tout à fait légitimes de percevoir encore des rémunérations exorbitantes. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Certaines banques allemandes, anglaises, italiennes se sont, quant à elles, engagées à ne pas verser de dividendes, comme je l'ai dit. Ce n'est pas une mince affaire : les dividendes versés par trois des plus importantes banques pour l'année 2007 à leurs actionnaires s'élèvent en effet à 10,5 milliards, soit l'équivalent des sommes versées par l'État à la fin de l'année 2008.
Madame la ministre, la question des contreparties à exiger des banques est posée. Comptez-vous leur demander d'accepter une présence de l'État dans les conseils d'administration ? Envisagez-vous de les inciter à ne pas verser de dividendes à leurs actionnaires ? Dès lors qu'il y a insuffisance de crédits, elles ne devraient pas avoir d'argent à verser aux actionnaires. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur quelques bancs du groupe GDR.) Et si elles n'ont pas besoin de fonds propres, alors qu'elles remboursent en priorité l'État, qui s'est endetté pour leur venir en aide.
Il s'agit de passer des intentions aux actes, madame la ministre. C'est pourquoi je vous demande quelles contreparties réelles seront demandées aux banques afin qu'elles fassent tout simplement leur travail et mettent fin à des situations exorbitantes du droit commun. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
M. le président. La parole est à Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi. Monsieur le président Migaud, vous avez raison et vous avez tort. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Vous avez raison d'indiquer que le gouvernement français a voulu, non pas faire des cadeaux aux banques, mais les aider à reconstituer leurs fonds propres afin qu'elles financent l'économie. C'était le sens de la première tranche de 10,5 milliards d'euros pour laquelle l'État recevra une rémunération de l'ordre de 8 % : le 11 décembre prochain, il percevra ainsi plus de 800 millions d'euros d'intérêts pour les titres super-subordonnés qu'il a souscrits. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Vous avez raison de souligner que des engagements sont indispensables. Je vous rappelle qu'avec cette première tranche, nous avons demandé aux banques deux sortes d'engagements. Il s'agissait tout d'abord d'un engagement économique, auquel le Premier ministre était particulièrement attaché, à savoir l'augmentation du crédit à l'économie de 3 % à 4 %...
M. Roland Muzeau. Les PME sont étranglées !
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie.... dont nous suivons l'évolution, mois par mois. Il s'agissait ensuite d'un engagement d'ordre éthique relatif à la rémunération des dirigeants et à leurs performances ainsi qu'aux stock-options. Les banques ont adopté des principes en ce sens à la fin de l'année 2008 et les présenteront lors des assemblées générales avant la fin du premier semestre.
Une deuxième tranche sera très prochainement mise à la disposition des banques, non qu'il s'agisse de leur faire un cadeau, ...
M. Maxime Gremetz. Mais si, ne nous racontez pas d'histoires !
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie. ...mais parce qu'il importe de consolider leurs fonds propres pour financer l'économie, à l'heure où les exigences en ce domaine sont renforcées.
Nous allons assortir cette proposition d'une option et d'engagements. L'option pourra s'exercer entre titres super-subordonnés et actions, de préférence non assorties de droit de vote. Quant aux engagements, il s'agira tout d'abord de réitérer ceux qui ont déjà été pris. Il s'agira ensuite d'augmenter la rémunération des capitaux propres, c'est-à-dire de limiter les dividendes versés aux actionnaires et, enfin, de s'interdire de verser des bonus aux dirigeants.
M. Guy Geoffroy. Très bien !
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie. Les choses sont claires : nous n'en restons pas aux intentions, nous agissons. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Auteur : M. Didier Migaud
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Banques et établissements financiers
Ministère interrogé : Économie, industrie et emploi
Ministère répondant : Économie, industrie et emploi
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 21 janvier 2009