Question orale n° 1692 :
réforme

13e Législature

Question de : M. Jean Lassalle
Pyrénées-Atlantiques (4e circonscription) - Députés n'appartenant à aucun groupe

M. Jean Lassalle appelle l'attention de M. le ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, chargé des collectivités territoriales, sur les répercussions de la loi sur la réforme territoriale et l'intercommunalité pour l'avenir de nos communes. Comment pourrons-nous expliquer à nos enfants que, sous prétexte de remédier à un empilement de niveaux de compétences, nous avons consenti à disloquer notre organisation territoriale jusqu'à mettre en danger nos propres communes, entités historiques de notre tradition républicaine ? Cette loi, destinée à clarifier l'organisation territoriale étatique ainsi qu'à effectuer des économies, pose de nombreuses incohérences, si ce n'est des contradictions sur le plan financier. En effet, l'extension de l'assemblée régionale couplée à celle de l'intercommunalité nécessite la création de nouvelles structures coûteuses. Le nombre de conseillers territoriaux sera plus élevé que celui des conseillers régionaux actuels et pose ainsi des questions d'ordre logistiques, car il est peu probable qu'ils se satisfassent d'un simple strapontin. Il en est de même pour les conseillers communautaires dont le nombre est croissant. Élus locaux, nous restons soucieux de la bonne administration du territoire et de la compétence du nouvel élu territorial qui sera en charge de territoires plus vastes. Comment ne pas craindre une distanciation entre l'élu et l'administré ? Comment ne pas voir dans cette nouvelle organisation, la mise en place de nouveaux agents territoriaux, coûteux ? Élus ruraux, nous ne voulons pas casser notre relation de proximité. Sur ce point, la croissance exponentielle programmée, et déjà fortement réalisée, des communautés d'agglomérations et des communautés de communes amène à renforcer les inégalités entre grandes et petites communes. Ces dernières voient leurs moyens d'action se réduire considérablement en faveur de ces nouveaux regroupements encore flous. À l'horizon 2020 peut-il affirmer que les 27 400 communes de moins de 1 000 habitants n'auront pas disparu ? Qu'elles n'auront pas fusionné ou absorbé leurs propres voisines ? Hélas, il craint bien que la nouvelle métropole n'amène à la mise en place d'une France à double vitesse dans laquelle les zones rurales se retrouvent une fois de plus dénigrées. La loi sur la réforme territoriale c'est l'aménagement de l'analyse de Jean-François Gravier au niveau des nouveaux regroupements de communes : les métropoles et le désert français.

Réponse en séance, et publiée le 1er février 2012

CONSÉQUENCES DE LA RÉFORME DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

M. le président. La parole est à M. Jean Lassalle pour exposer sa question, n° 1692, relative aux conséquences de la mise en oeuvre de la loi du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales.
M. Jean Lassalle. Ma question, qui s'adresse à M. le ministre chargé des collectivités territoriales, n'appelle pas de réponse particulière dans l'immédiat. Je ne pose pas plus la question à ce gouvernement qu'à ceux qui l'ont précédé ou qu'à celui qui lui succédera. C'est un état d'esprit que je veux évoquer, au moment où se préparent, en France, de grandes échéances nationales.
Les différentes lois sur la réorganisation de la territorialité condamnent irrémédiablement à la disparition les 25 000 communes de France qui comptent moins de 1 000 habitants. Elles ne vont pas disparaître du fait d'un décret, d'un arrêté ou d'une loi ; elles disparaîtront simplement parce qu'elles n'auront plus aucune signification, dès lors qu'elles n'auront plus aucune compétence et plus aucun subside.
Je ne suis pas opposé à la réforme de l'intercommunalité, mais je pense que nous devons absolument garder cet acquis exceptionnel que nous avons avec nos 36 000 communes, et en particulier les 25 000 qui sont les plus menacées. Ce sont en effet 25 000 foyers d'apprentissage de la démocratie et de l'insertion, ce sont 25 000 bannières tricolores, ce sont 25 000 foyers de ruralité dans notre pays, ce sont 25 000 lieux où l'on entretient le territoire d'une manière totalement bénévole. Les condamner, ce serait condamner 500 000 bénévoles à disparaître. Or comme l'avait dit le président François Mitterrand, la France est un pays extraordinaire qui a trouvé le moyen de faire entretenir les trois quarts de son territoire par 500 000 bénévoles et où 500 000 autres bénévoles sont prêts à les remplacer en cas de défaillance.
Madame la secrétaire d'État, je voulais faire part de ma très grande inquiétude, que j'ai exprimée dans mon dernier livre Le retour du citoyen.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la santé.
Mme Nora Berra, secrétaire d'État chargée de la santé. Monsieur le député, je vais vous donner la réponse du ministre Philippe Richert sur la question relative à la réforme des collectivités territoriales.
Aborder la réforme des collectivités territoriales posée par la loi du 16 décembre 2010 uniquement sous l'angle de la logistique me paraît à la fois extrêmement réducteur par rapport aux ambitions de cette réforme, mais aussi très largement infondé.
D'abord, en ce qui concerne le couple commune-intercommunalité, pour endiguer l'inflation des conseils communautaires que vous déplorez, le législateur a très précisément encadré leur composition, et notamment le nombre de vice-présidents, afin d'éviter les excès que vous dénoncez et leur impact sur le budget des communes concernées.
Par ailleurs, si les schémas départementaux de coopération intercommunale ont défini une nouvelle géographie de l'intercommunalité, c'est pour permettre l'émergence de périmètres de solidarité plus pertinents, en les faisant si possible coïncider avec de véritables bassins de vie et, d'autre part, donner à ces nouveaux ensembles une taille critique suffisante pour leur permettre d'assurer dans les meilleures conditions possibles les services attendus par les populations grâce à une mutualisation accrue de leurs moyens, et notamment de leurs personnels.
L'attractivité d'un territoire, c'est, bien sûr, ses aménités naturelles, mais aussi et surtout les services, et que les populations qui souhaitent y demeurer trouvent leur place.
La mise en place du conseiller territorial procède de la même logique et doit s'accompagner d'une redéfinition des compétences respectives des départements et des régions, ainsi que de leurs moyens pour éviter les doublons et favoriser les synergies.
Cette réforme n'a donc pas pour objectif de faire disparaître les communes et de supprimer les élus locaux dont le rôle est indispensable dans le monde rural, mais de mettre en place une organisation qui puisse assurer le meilleur service au meilleur coût aux populations concernées.
M. le président. La parole est à M. Jean Lassalle.
M. Jean Lassalle. Je remercie Mme la secrétaire d'État et, à travers elle, M. le ministre chargé des collectivités territoriales, pour cette réponse.
Cela étant, ma question reste posée. Je ne veux en l'occurrence ni m'inscrire en faux ni engager une polémique, car je m'adresse à l'ensemble de la classe politique française : nous n'avons malheureusement pas pris conscience de ce que représentait cette réforme.
L'aménagement du territoire, avec le principe de subsidiarité, est une très belle trouvaille française et doit partir du bas vers le haut, pas du haut vers le bas. Malheureusement, en l'état actuel des choses, s'il n'y a pas de prise de conscience, ces 25 000 communes voteront pour la dernière fois en 2014 !

Données clés

Auteur : M. Jean Lassalle

Type de question : Question orale

Rubrique : Collectivités territoriales

Ministère interrogé : Collectivités territoriales

Ministère répondant : Collectivités territoriales

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 24 janvier 2012

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