Première séance du jeudi 12 septembre 2019
- Présidence de M. Sylvain Waserman
- 1. Mobilités
- 2. Ordre du jour de la prochaine séance
Présidence de M. Sylvain Waserman
vice-président
M. le président
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à neuf heures.)
1. Mobilités
Nouvelle lecture (suite)
M. le président
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi d’orientation des mobilités (nos 2135, 2206).
Discussion des articles (suite)
M. le président
Hier soir, l’Assemblée a poursuivi la discussion des articles du projet de loi, s’arrêtant à l’article 26 CB.
Rappel au règlement
M. le président
La parole est à M. François Ruffin, pour un rappel au règlement.
M. François Ruffin
Rappel au règlement fondé sur l’article 58, alinéa 1. Nous examinons un projet de loi relatif aux mobilités…
M. le président
Pardonnez-moi de vous interrompre, mais je vous rappelle qu’en vertu du nouveau règlement, l’on ne peut pas se contenter d’invoquer l’article 58. Vous devez préciser le fondement de votre rappel au règlement.
M. François Ruffin
Il ne s’appliquera qu’au 1er octobre !
M. le président
Pas du tout ! Il est entré en vigueur dès le 1er septembre. Veuillez préciser l’article sur lequel se fonde votre rappel au règlement.
M. François Ruffin
Le bon déroulement des débats ! Nous avons appris hier que la SNCF mettait fin à la liaison ferroviaire Perpignan-Rungis.
M. le président
Pardonnez-moi, monsieur Ruffin, mais sans vouloir être procédurier…
M. François Ruffin
Vous l’êtes.
M. le président
Non, mais je suis garant du respect du règlement, lequel prévoit, depuis le 1er septembre, que l’on ne peut plus interrompre les débats en prenant la parole pour un rappel au règlement fondé sur l’article 58 ou le bon déroulement des débats : il faut préciser l’article qui aurait été enfreint dans la conduite des débats.
J’insiste sur ce point, non pour le plaisir d’être procédurier, mais pour vous faire comprendre la philosophie du rappel au règlement. Vous devez préciser dans quelle mesure le règlement n’a pas été respecté.
La parole est à M. François Ruffin.
M. François Ruffin
Dans ce cas, je demande une suspension de séance pour obtenir des explications au sujet de la liaison Perpignan-Rungis.
M. le président
Avez-vous la délégation de votre groupe à cet effet ?
M. François Ruffin
Non.
M. le président
Prenez le temps de trouver la personne qui dispose de la délégation et je vous accorderai, bien évidemment, cette suspension de séance.
Article 26 CB
M. le président
Je suis saisi de deux amendements, nos 472 et 495, tendant à supprimer l’article 26 CB.
La parole est à M. Gérard Menuel, pour soutenir l’amendement no 472.
M. Gérard Menuel
Ce projet de loi prévoit de nouvelles mesures pour renforcer le renouvellement des flottes publiques et privées. Ces obligations vont dans le bon sens.
Or, l’article 26 CB prévoit de repousser au 1er janvier 2023 les obligations de verdissement des flottes incombant aux loueurs de véhicules et aux entreprises de plus de cent véhicules pour les « véhicules conçus et construits pour le transport de marchandises qui correspondent à la catégorie N1 », à savoir les véhicules utilitaires légers, ou VUL. Ce report nous paraît injustifié.
D’une part, cet article aura pour effet de ralentir et de retarder la conversion écologique d’une portion non négligeable du parc automobile, responsable de 19 % des émissions de gaz à effet de serre du secteur français des transports.
D’autre part, des offres de VUL à faibles émissions existent aujourd’hui sur le marché et sont appelées à se développer dans les prochaines années.
Cet amendement tend par conséquent à supprimer ce report qui ralentira la conversion des VUL au profit de motorisations plus propres et fera obstacle à la décarbonation du secteur des transports.
M. le président
La parole est à M. Matthieu Orphelin, pour soutenir l’amendement no 495.
M. Matthieu Orphelin
L’enjeu lié aux véhicules utilitaires légers est important, pour ce qui concerne tant la pollution locale que l’émission de CO2. L’amendement vise donc à supprimer le délai supplémentaire de trois ans, comme vient de l’exposer M. Menuel.
Je vous proposerai par la suite un autre amendement qui vise à tenir compte du faible marché des gros VUL.
M. le président
La parole est à M. Jean-Luc Fugit, rapporteur de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, pour donner l’avis de la commission.
M. Jean-Luc Fugit, rapporteur de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire
Nous avons abordé ce sujet en commission la semaine dernière. Vous nous alertez, monsieur Menuel, quant au risque encouru. Cet article a été introduit en première lecture à la suite d’un amendement de Mme Valérie Lacroute. Je reconnais bien les arguments que vous invoquez car nous avons, nous aussi – soyons clairs et transparents –, discuté avec les représentants de l’AFHYPAC, l’Association française pour l’hydrogène et les piles à combustible, et de Renault, pour ne citer qu’eux.
Cela étant, et M. Orphelin l’a d’ailleurs rappelé, la gamme disponible de véhicules utilitaires légers à faibles émissions est assez restreinte. Par crainte que les obligations minimales prévues ne soient atteintes par l’ensemble des entreprises au 1er janvier 2022, nous avions pensé en reporter l’entrée en vigueur. Après réflexion, et à la suite de la discussion que nous avons eue en commission la semaine dernière, il semble que nous devrions nuancer notre position. M. Orphelin présentera ainsi l’amendement no 751, auquel je serai favorable.
En l’état, ces deux amendements de suppression me semblent excessifs, aussi y serai-je défavorable. En revanche, je suis d’accord avec la proposition que M. Orphelin nous fera un peu plus tard et qui permettra d’appliquer cette mesure dès le 1er janvier 2022 à certains types de véhicules.
Rappelons enfin que les pourcentages de véhicules à faibles émissions que nous prévoyons d’inscrire dans la loi sont des minimums, des planchers et non des plafonds. Rien n’empêche une entreprise qui souhaiterait, pour des raisons qui lui sont propres, investir dans le verdissement de sa flotte, de dépasser ces planchers sans attendre l’échéance que nous fixons.
Ne dramatisons pas la situation. Je vous invite à retirer ces amendements au bénéfice de l’amendement no 751.
M. le président
La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des transports, pour donner l’avis du Gouvernement.
M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d’État chargé des transports
Je souscris à l’argumentation du rapporteur. Il convient de distinguer entre les véhicules utilitaires légers de plus de 2,6 tonnes, pour lesquels le marché n’est pas encore mature, et les autres, pour lesquels le report ne s’impose pas. Le dispositif proposé par l’amendement no 751 de M. Orphelin permet de régler la question des véhicules utilitaires plus légers, de moins de 2,6 tonnes, et le Gouvernement y sera favorable.
Il convient de distinguer les véhicules de plus de 3,5 tonnes des autres utilitaires car l’offre en VUL « lourds » à très faibles émissions est encore peu développée. Si un report pur et simple de l’obligation de verdir sa flotte appliqué à l’ensemble des VUL ne s’impose pas, il paraît nécessaire d’aménager l’obligation pour les VUL lourds, ce que prévoit l’amendement no 751 de M. Orphelin puisqu’il tend à limiter le report de l’échéance du 1er janvier 2022 au 1er janvier 2023 aux seuls véhicules compris entre 2,6 et 3,5 tonnes. Le Gouvernement y sera favorable.
J’en profite pour répondre d’un mot à M. Ruffin, qui m’interroge à propos de la ligne de train Perpignan-Rungis. De telles annonces sont courantes, mais le cadre reste clair : la ligne de fret Perpignan-Rungis, qui est saisonnière, prend fin chaque année le 15 juillet, pour reprendre début novembre.
Le problème qui se pose est que ce train n’emporte pas suffisamment de marchandises. Le Gouvernement souhaite, par conséquent, rassembler régulièrement autour d’une table le marché de Rungis, le marché de Perpignan et la région Occitanie – c’était le cas hier encore – pour remettre des marchandises dans ce train et lui permettre de fonctionner à compter du 28 octobre, quel que soit son opérateur.
Rien n’a changé, il n’y a pas d’annonce nouvelle, mais le Gouvernement se mobilise. J’espère que cette clarification aura été utile.
M. le président
La parole est à M. François Ruffin.
M. François Ruffin
Ce sont justement les conclusions de la réunion d’hier qui nous inquiètent. Nous souhaiterions d’ailleurs qu’elles soient davantage rendues publiques et que vous les confirmiez, ou non. Ce que nous entendons, c’est que la SNCF aurait décidé de se retirer durablement de la liaison Perpignan-Rungis, et non pas seulement jusqu’au 25 octobre. Vous le niez, mais faites attention car, sur ce dossier, nous avons déjà entendu de Mme la ministre nombre de promesses et de mensonges. N’en ajoutez pas.
M. le président
La parole est à M. Matthieu Orphelin.
M. Matthieu Orphelin
Je retire mon amendement.
(L’amendement no 495 est retiré.)
(L’amendement no 472 n’est pas adopté.)
M. le président
L’amendement no 299 de M. François-Michel Lambert est défendu.
(L’amendement no 299, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)
M. le président
La parole est à M. Matthieu Orphelin, pour soutenir l’amendement no 751.
M. Matthieu Orphelin
Cet amendement tend à limiter le report de l’obligation de verdissement des flottes de véhicules légers aux seuls VUL dits lourds, à savoir la tranche des véhicules dont le poids total autorisé en charge est proche de 3,5 tonnes.
(L’amendement no 751, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)
(L’article 26 CB, amendé, est adopté.)
Article 26 C
M. le président
La parole est à M. Paul-André Colombani, pour soutenir l’amendement no 368.
M. Paul-André Colombani
Cet amendement tend à permettre au Gouvernement d’évaluer la proposition du maire de Cannes, M. David Lisnard, d’étendre les pouvoirs de police portuaire des maires des communes littorales, qui sont de plus en plus gênés par les bateaux de croisière dont il convient de limiter les désagréments. Tout le monde se souvient des images de l’accident évité de justesse à Venise, cet été. Cette mesure ne permettrait pas seulement d’éviter les accidents : elle renforcerait les moyens de lutter contre la pollution atmosphérique. Selon les ONG, en effet, quatre-vingts bateaux de la plus importante compagnie de croisière émettent dix fois plus de soufre que les 260 millions d’automobilistes européens.
M. Matthieu Orphelin
Bravo !
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Luc Fugit, rapporteur
Avis défavorable, car la commission a souhaité simplifier la rédaction du rapport relatif à la décarbonation des transports aérien et maritime, prévu à cet article. En particulier, nous ne souhaitons pas dresser la liste de technologies particulières.
M. le président
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d’État
Le pouvoir de police est détenu par le préfet. Par ailleurs, des actions sont menées en ce sens au niveau national et international, notamment le projet porté par l’Organisation maritime internationale. Les objectifs que vous poursuivez avec cet amendement semblent ainsi satisfaits et je vous invite donc à le retirer.
M. le président
La parole est à M. Paul-André Colombani.
M. Paul-André Colombani
Je ne retirerai pas cet amendement important. La réponse du Gouvernement reflète, une fois encore, sa volonté de ne pas accorder davantage de pouvoirs aux élus locaux. Ceux-ci possèdent déjà certaines compétences en matière de police portuaire, mais à Ajaccio, par exemple – qui est la ville que je connais le mieux –, on est tout de même obligé d’accepter dans le port, les jours où les seuils de pollution sont atteints, en plus des bateaux qui assurent la continuité territoriale, des paquebots de croisière qui émettent de soufre en veux-tu, en voilà.
(L’amendement no 368 n’est pas adopté.)
(L’article 26 C est adopté.)
Article 26
M. le président
La parole est à Mme Aude Luquet.
Mme Aude Luquet
Je tenais à intervenir au sujet de cet article, en particulier de son alinéa 23 qui tend à inciter les employeurs à prendre en charge, sous la forme d’un forfait mobilité durable, tout ou partie des frais engagés par les salariés qui utiliseraient un moyen de transport vertueux pour se rendre sur leur lieu de travail. Plusieurs moyens sont visés et un décret rend possible d’inclure dans ce forfait d’autres services de mobilité partagée.
Le groupe du Mouvement démocrate et apparentés souhaiterait que ce soit le cas des services de partage automobile à faibles émissions, qui visent au remplacement d’un véhicule ancien par un véhicule neuf et moins polluant pour un budget équivalent, grâce à un financement partiellement issu des revenus du partage, le propriétaire s’engageant à partager son véhicule au moins une semaine par mois.
Les zones à faibles émissions étant amenées à se multiplier, cette mesure apporterait une réponse simple et rapide aux personnes à faibles revenus qui, faute d’autre solution, restent dépendantes de la voiture individuelle et n’ont pas les moyens d’abandonner leur véhicule à vignette Crit’Air de classe 5 pour un véhicule de classe 0, 1 ou 2.
Outre qu’il permettrait de rajeunir et de verdir le parc automobile, le partage de véhicules de particuliers ou d’entreprises optimiserait l’utilisation des véhicules, diminuant ainsi la taille du parc et son emprise sur la voirie, ce qui se traduirait par une diminution des émissions de polluants atmosphériques et autres nuisances.
Je conclurai en rappelant que, sur quarante millions de véhicules circulant en France, quinze millions sont âgés de plus de dix ans, et que les mesures de restriction d’entrée dans la capitale qui ont été annoncées pourraient, à terme, toucher un million de véhicules, puis deux et trois millions, et encore davantage.
Tous ces éléments plaident en faveur de cette solution alternative, qui étend les possibilités de déplacement durable à des territoires aujourd’hui isolés et permet de réduire les inégalités territoriales.
Monsieur le secrétaire d’État, le groupe du Mouvement démocrate et apparentés souhaite que vous acceptiez de travailler sur ce sujet et de prendre en compte sa proposition, qui tend à favoriser la circulation de véhicules plus propres et moins nombreux.
M. le président
Sur l’article 26, je suis saisi d’un amendement de coordination, no 594, de M. Jean-Luc Fugit.
(L’amendement no 594, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
M. le président
L’amendement no 595 de M. Jean-Luc Fugit, est rédactionnel.
(L’amendement no 595, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
M. le président
Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 96 et 585.
La parole est à Mme Sophie Auconie, pour soutenir l’amendement no 96.
Mme Sophie Auconie
Cet amendement vise à maintenir à 100 salariés le seuil à partir duquel s’applique actuellement le plan de mobilité. L’abaissement de ce seuil à 50 salariés, qui procède du vote d’un amendement, représente une contrainte technique et administrative supplémentaire qui serait difficile à assumer, notamment pour les PME, qui ne disposent pas des ressources internes leur permettant de répondre à ce type d’obligation.
M. le président
La parole est à M. Jean-Marie Sermier, pour soutenir l’amendement no 585.
M. Jean-Marie Sermier
Nous défendons ici une certaine souplesse. De fait, si les plans de mobilité sont importants – et le groupe Les Républicains a voté en faveur des articles correspondants –, ces plans sont surtout adaptés aux grandes entreprises.
En effet, dans les PME, le personnel se connaît et connaît le chef d’entreprise ; il a la capacité d’organiser, indépendamment d’un plan de mobilité, un système de covoiturage sans qu’il soit nécessaire d’instaurer une politique en la matière. Il s’agit donc de respecter le bon sens des dirigeants et du personnel de ces entreprises de 50 à 100 salariés, qui restent de petites sociétés. Le Gouvernement ne souhaitant pas compliquer la vie des PME, nous l’invitons à conserver le seuil de 100 personnes.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Luc Fugit, rapporteur
En première lecture, nous avons rendu obligatoire le dialogue social au sein de l’entreprise sur la mobilité, et donc sur les déplacements domicile-travail, au titre de la QVT, la qualité de vie au travail. Les partenaires sociaux qui ont travaillé à la création du forfait mobilités durables se sont accordés sur ce seuil de 50 salariés : il ne s’agit pas de revenir en arrière. L’adoption de l’amendement priverait nombre de salariés – ceux des entreprises de 50 à 100 salariés – de la possibilité de bénéficier de ce forfait. Avis défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d’État
Cet amendement est important pour les salariés et, pour les mêmes raisons que M. le rapporteur, je crois nécessaire de maintenir le seuil à cinquante. Tout d’abord, il s’agit du seuil à partir duquel les discussions sur les questions de mobilité deviennent obligatoires, notamment sur la question cruciale des trajets domicile-travail.
Ensuite, ce seuil de 50 personnes est celui à partir duquel on estime qu’une entreprise a atteint la taille critique lui permettant de proposer à ses travailleurs des opérations de mutualisation des déplacements.
Pour ces deux raisons, il me semble que l’abaissement du seuil à 50 salariés ne complique pas d’une manière significative le travail des employeurs de TPE-PME et permet de généraliser un dispositif très bénéfique pour les salariés qui, comme on a pu le constater ces derniers temps, connaissent des difficultés importantes pour effectuer ces trajets du quotidien.
M. le président
La parole est à Mme Valérie Lacroute.
Mme Valérie Lacroute
L’abaissement du seuil alourdit le travail des entreprises, d’autant plus qu’à ce jour, il n’est pas certain que toutes les entreprises de plus de 100 salariés aient mis en place des plans de mobilité. À cet égard, je pense tout particulièrement aux administrations, à commencer par l’Assemblée nationale.
Ainsi, la semaine dernière, les parkings de l’Assemblée étaient en travaux. Venant à Paris pour trois jours et ayant beaucoup à faire, j’étais venue en voiture.
M. Matthieu Orphelin
Oh non !
M. Jean-Charles Colas-Roy
Et le climat ?
Mme Valérie Lacroute
Le parking du 101, rue de l’Université était plein, alors même que les travaux de l’Assemblée nationale n’avaient pas encore repris et que les parlementaires n’étaient pas tous revenus. J’en déduis que ce parking était en grande majorité occupé par des fonctionnaires.
Je ne suis donc pas certaine que le plan de mobilité que l’on entend imposer aux entreprises de plus de cinquante salariés soit effectif dans une administration comme la nôtre, où de très nombreux fonctionnaires se rendent en voiture, ce qui est regrettable.
Imposer à des PME de 50 salariés un dispositif, certes louable et qu’il faudra mettre en place, mais que certaines entreprises de 100 salariés, dont l’Assemblée nationale, n’appliquent pas, c’est un peu fort de café !
M. Jean-Charles Colas-Roy
On en aurait bien besoin !
M. le président
La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d’État
Nous parlons ici du seuil rendant obligatoires les négociations, qui s’imposeront aux entreprises dès lors qu’elles disposent d’un site physique de plus de cinquante salariés. Rien n’empêche, en revanche, un employeur – y compris cette auguste maison – de mener les actions que vous appelez de vos vœux en matière de mobilité de son personnel.
(Les amendements identiques nos 96 et 585 ne sont pas adoptés.)
M. le président
La parole est à M. Christophe Bouillon, pour soutenir l’amendement no 750.
M. Christophe Bouillon
Les négociations annuelles sont un moment important de la vie des entreprises, car elles permettent aux représentants du personnel et à la direction d’aborder des sujets comme les conditions de travail et la rémunération. Elles seraient aussi l’occasion de faire avancer la réflexion sur les déplacements à l’échelle de l’entreprise.
La situation de notre assemblée, qui vient d’être évoquée, confirme que la mise en œuvre de plans de déplacements a été difficile pour les entreprises, qui ont été très peu nombreuses à s’y lancer.
Le Gouvernement a fait, avec raison, le choix de lancer un forfait mobilités durables. Il me semble important que l’ensemble des questions relatives aux déplacements au sein de l’entreprise puisse être discuté à l’occasion des négociations annuelles, afin d’avancer. Cela permettra aux salariés de prendre conscience des déplacements qu’ils effectuent et incitera peut-être les entreprises à se tourner vers les collectivités locales, détentrices de la compétence en matière de mobilités, pour bâtir avec leur aide un véritable plan de déplacements d’entreprise. L’examen de cet article me semble être le bon moment pour mener cette réflexion.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Luc Fugit, rapporteur
Monsieur Bouillon, votre proposition d’instaurer des négociations professionnelles annuelles en matière de mobilité est déjà satisfaite par le texte adopté en première lecture, puisque les discussions obligatoires sur la mobilité, notamment entre le domicile et le travail, ont été incluses au titre de la QVT.
Par ailleurs, deux points de votre amendement sont en décalage avec la philosophie initiale du texte : premièrement, l’idée de rendre obligatoire ce forfait mobilités ne correspond pas à l’équilibre trouvé entre les partenaires sociaux lors de la première lecture ; deuxièmement, votre proposition, si elle est applicable aux mobilités actives, ne prévoit pas d’incitations financières au covoiturage, ce dont il serait dommage de se priver. Je demande donc le retrait de l’amendement, ou j’émettrai un avis défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d’État
Votre amendement est satisfait, monsieur Bouillon, car les négociations obligatoires sur la qualité de vie au travail sont annuelles. De plus, nous avons introduit des négociations obligatoires en matière de mobilité pour les entreprises de plus de cinquante salariés, dont le forfait mobilités durables est l’une des modalités pratiques. Le Gouvernement s’est par ailleurs engagé à tirer un bilan de ce dispositif dans les dix-huit mois.
(L’amendement no 750 n’est pas adopté.)
M. le président
La parole est à M. Paul-André Colombani, pour soutenir l’amendement no 309.
M. Paul-André Colombani
Cet amendement rend éligibles au forfait mobilités durables les voitures particulières à très faibles émissions, les véhicules à deux ou trois roues et les quadricycles à moteur électrique, ainsi que l’autopartage et le motopartage.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Luc Fugit, rapporteur
Comme je l’ai dit en commission la semaine dernière, cet amendement est déjà satisfait par le texte adopté en première lecture. Demande de retrait.
(L’amendement no 309, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)
M. le président
La parole est à M. Loïc Prud’homme, pour soutenir l’amendement no 478.
M. Loïc Prud’homme
Cet amendement vise à permettre le cumul du forfait mobilités durables avec le remboursement par l’employeur de 50 % des frais d’abonnement aux services de transport en commun.
Il nous a été rétorqué que ce cumul était déjà possible dans la limite d’un plafond de 400 euros. Nous souhaitons la suppression de ce plafond, qui est largement dépassé lorsqu’on associe l’usage du vélo à un abonnement TER. La prise en compte de ces dépenses est pourtant la moindre des choses si nous voulons inciter les gens à abandonner la voiture et parvenir à un report modal massif.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Luc Fugit, rapporteur
L’amendement de M. Prud’homme est déjà satisfait : l’alinéa 46 de l’article 26 prévoit la possibilité de cumuler le forfait mobilités avec le remboursement des frais de transport en commun. Demande de retrait ou avis défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d’État
La rédaction actuelle de l’article 26 autorise ce cumul dans la limite d’un plafond de 400 euros ou du montant de la prise en charge des transports en commun, quand elle excède ce plafond.
M. le président
La parole est à M. Loïc Prud’homme.
M. Loïc Prud’homme
Pardonnez-moi de le dire, mais je trouve hallucinant que, face à un défi climatique sans précédent, on nous fasse des réponses d’épicier et qu’on plafonne à 400 euros la prise en charge de déplacements qui cumulent plusieurs modes de transport, comme le train et le vélo. Nous demandons qu’il soit possible de dépasser ce plafond lorsque cela permet de prendre en charge les frais de transport de manière plus complète.
Comme beaucoup d’entre vous sans doute, j’ai rencontré les présidents des CCI, les chambres de commerce et d’industrie, qui m’ont dit ce que leur coûtent les retards de leurs salariés, qui subissent des embouteillages quotidiens sur la route – je citerai, pour ce qui me concerne, l’agglomération bordelaise.
Il faut également prendre en compte les externalités négatives qui résultent de l’utilisation massive de la voiture et les coûts sanitaires qu’elle engendre.
Je ne peux pas entendre l’argument consistant à dire que le cas est déjà prévu, dans la limite de 400 euros, alors que, dans le même temps, les grilles fiscales permettent à quelqu’un qui habite à des dizaines de kilomètres de son lieu de travail de se faire rembourser ses frais de déplacements dans une berline très polluante. Nous pinaillons pour 400 euros : franchement, ce n’est pas à la hauteur de la situation.
(L’amendement no 478 n’est pas adopté.)
M. le président
La parole est à M. Christophe Bouillon, pour soutenir l’amendement no 755.
M. Christophe Bouillon
Le sujet est important, et ma collègue Josette Manin, auteure de cet amendement, a souhaité qu’il soit à nouveau discuté. Nous espérons que vous aurez un regard différent de celui que vous avez eu lors de la première lecture.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Luc Fugit, rapporteur
Monsieur Prud’homme, vous nous reprochez une « réponse d’épicier » mais votre amendement no 478 ne fait pas référence à un quelconque plafond : il évoque uniquement la possibilité d’un cumul. Cette demande est satisfaite et ma réponse s’en tenait rigoureusement à votre amendement.
Quant à la tenue d’une liste d’employés destinée à faciliter le covoiturage sur la base du volontariat, que propose l’amendement de M. Bouillon, c’est un point qui relève des négociations annuelles sur la mobilité menées au sein des entreprises, dont nous venons de parler assez longuement, et certainement pas du niveau législatif. Ces mesures trouveront naturellement leur place à la faveur des discussions relatives à la QVT. Si un certain nombre d’employés sont intéressés par le covoiturage, l’établissement par l’employeur de listes permettant de les mettre en relation est une question de bon sens. Cela me semble évident, et j’espère que ce sera le cas.
M. le président
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d’État
Une demande de retrait, pour les mêmes raisons que le rapporteur. Cette question relève de la souplesse de l’organisation de l’entreprise.
S’agissant de l’amendement de M. Loïc Prud’homme, discuté précédemment, je tiens à rappeler que le plafond du forfait mobilités durables a été doublé, passant de 200 à 400 euros, et son utilisation élargie au ticket à l’unité. Du reste, rien n’empêche une entreprise d’aller au-delà du plafond inscrit dans la loi, comme beaucoup le font déjà.
(L’amendement no 755 n’est pas adopté.)
M. le président
Je suis saisi de trois amendements, nos 303, 496 et 752, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 303 et 496 sont identiques.
La parole est à M. Paul-André Colombani, pour soutenir l’amendement no 303.
M. Paul-André Colombani
Il vise à rendre le forfait mobilités durables obligatoire pour les employeurs.
M. le président
La parole est à M. Matthieu Orphelin, pour soutenir l’amendement no 496.
M. Matthieu Orphelin
Le forfait mobilités durables est l’une des belles mesures de ce projet de loi. Nous perdons du temps si nous ne tentons pas de la généraliser plus rapidement, en particulier pour les grandes entreprises – par exemple celles de plus de 5 000 salariés, ou un peu moins. Cette généralisation n’a que des avantages – même l’entreprise est gagnante.
M. le président
La parole est à M. Christophe Bouillon, pour soutenir l’amendement no 752.
M. Christophe Bouillon
Le forfait mobilités durables est en effet une belle mesure – à condition qu’il soit utilisé. Il existe un débat sur la méthode : en première lecture, on nous a répondu qu’il n’était pas souhaitable de rendre ce forfait obligatoire car, malgré l’obligation de mettre en place des plans de déplacements dans les entreprises, peu d’entreprises s’y étaient employées et y étaient parvenues. Drôle d’argument que celui qui consiste à dire que, puisque certaines mesures obligatoires ne sont pas appliquées, il ne faut plus rendre quoi que ce soit obligatoire ! Dans ces conditions, il va devenir difficile de porter des objectifs.
En tant que législateurs, nous devons au contraire être ambitieux. Comme mes collègues viennent de le dire, le forfait mobilités durables cumule tous les avantages, en particulier pour les entreprises, qui, comme M. Prudhomme l’a rappelé, peuvent faire face à des difficultés liées à des retards ou à des déplacements plus longs pour de nombreux salariés. Tout ce qui entoure la réflexion de l’employeur sur les déplacements de ses employés va dans le bon sens et le forfait mobilités durables est un outil qui accompagne ces démarches, en permettant aux salariés d’opter pour d’autres modes de transport. C’est donc une mesure très positive – à condition, bien entendu, que nous ne perdions pas de temps pour la rendre obligatoire, ce qui incitera chacun à se mettre autour de la table et à trouver des solutions opérantes.
Personne, ici, ne remet en cause l’urgence écologique et chacun a compris que le domaine des transports était capital. Le projet de loi comporte de nombreuses mesures tendant à la décarbonation des transports et chacun doit y contribuer – c’est vrai pour les administrations comme pour les entreprises, et l’État se doit d’être beaucoup plus exigeant en la matière. Rendre obligatoire le forfait mobilités durables permettra de faciliter cette démarche. Il faut, bien entendu, que les services de l’État aient la capacité d’y accompagner les entreprises, mais je sais que c’est le cas – l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, l’ADEME, a ainsi une expertise remarquable en la matière. Rendre cette mesure obligatoire sera également reçu par les salariés comme un véritable progrès. Il serait dommage de s’arrêter au milieu du gué.
M. le président
Quel est l’avis de la commission sur ces amendements ?
M. Jean-Luc Fugit, rapporteur
Je rappelle que seule la négociation annuelle relative aux déplacements domicile-travail est obligatoire. Un choix a été fait, un point d’équilibre a été trouvé : ce qui est ici proposé est de laisser les partenaires sociaux se saisir de la mesure et travailler sur le sujet au cours de l’année qui vient.
Comme la ministre de la transition écologique et solidaire l’avait dit en première lecture et comme le secrétaire d’État l’a rappelé tout à l’heure, une évaluation du dispositif doit être réalisée au bout de dix-huit mois, sur la base de laquelle des conclusions seront tirées. Laissons les partenaires sociaux, au sein des entreprises, travailler sur ce sujet ; nous serons, vous comme nous, de fins observateurs des résultats. Restons-en au point d’équilibre que nous avions trouvé : je demande le retrait ; à défaut, avis défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d’État
Le texte comporte des avancées majeures, notamment la création du forfait mobilités durables et la possibilité de le cumuler avec d’autres types de prise en charge ; il rend également obligatoire la négociation sur les questions de mobilité pour les sites de plus de cinquante salariés.
Le Gouvernement dressera un bilan du dispositif ; s’il se révélait négatif, il pourrait rendre les modalités de prise en charge plus automatiques, puisqu’il a été habilité à prendre de telles dispositions par ordonnance. Cependant, je pense que la mesure sera plébiscitée et que ce dispositif progressif et ambitieux, de nature à satisfaire vos préoccupations écologiques, sera mis en place par les entreprises.
(Les amendements identiques nos 303 et 496 ne sont pas adoptés.)
(L’amendement no 752 n’est pas adopté.)
M. le président
La parole est à M. Jean-Marie Sermier, pour soutenir l’amendement no 447.
M. Jean-Marie Sermier
Il s’agit de rectifier ce qui est sans doute une erreur : le forfait mobilités durables peut certes bénéficier à l’ensemble des salariés mais, dans les zones très rurales, on n’a pas toujours accès à des transports collectifs ou au covoiturage pour aller travailler – je pense par exemple à l’instituteur qui devrait se rendre dans le village voisin, sans pouvoir le faire à vélo car les zones montagneuses sont trop vallonnées. L’amendement tend donc à étendre le forfait mobilités durables aux vélos électriques.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Luc Fugit, rapporteur
Cet amendement, qui vise à intégrer les frais de recharge d’un véhicule électrique dans le champ du forfait mobilités durables, ne me paraît pas nécessaire, car cette prise en charge est déjà prévue au titre des frais de carburant – il s’agit de l’alinéa 15 de l’article 26, qui modifie l’article L. 3261-3 du code du travail. L’avantage fiscal et social sera d’ailleurs identique dans les deux cas. L’amendement étant déjà satisfait, je demande son retrait.
M. le président
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d’État
Mon argument sera le même : en pratique, cette demande est déjà satisfaite. Les employeurs peuvent en effet participer aux frais de recharge des véhicules électriques – c’est du reste ce que fait déjà, par exemple, l’entreprise Legrand, chez moi, en Haute-Vienne.
M. le président
Maintenez-vous l’amendement, monsieur Sermier ?
M. Jean-Marie Sermier
Puisque le rapporteur et le secrétaire d’État ont confirmé la lecture la plus efficace de cet amendement de mon collègue Pierre Cordier, je le retire.
(L’amendement no 447 est retiré.)
M. le président
La parole est à M. Vincent Descoeur, pour soutenir l’amendement no 127.
M. Vincent Descoeur
La contre-valeur des titres périmés pourrait, si la disposition du projet de loi était votée, être versée au budget des activités sociales et culturelles des entreprises auprès desquelles les salariés se sont procuré leurs titres. Or, toutes les entreprises ne disposent pas d’un service dédié à ces activités. L’amendement propose donc d’élargir la mesure aux dispositifs mutualisés inter-entreprises mis en place par accord paritaire pour les salariés des plus petites entreprises.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Luc Fugit, rapporteur
Je comprends la logique de l’amendement, mais il soulève trois problèmes. Tout d’abord, la disposition proposée n’a fait l’objet ni d’une concertation ni d’une expertise. Ensuite – et c’est là le problème principal –, cette mesure, à supposer que l’opportunité en soit confirmée, relèverait du domaine réglementaire. Enfin, la rédaction est incorrecte, car le 4° de l’article L. 23-113-1 du code du travail ne prévoit pas d’accord paritaire. Je demande donc le retrait de l’amendement ; à défaut, avis défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d’État
Le dispositif est similaire à celui du titre-restaurant, largement plébiscité, raison pour laquelle nous avons souhaité établir un parallélisme des formes entre ce dernier et le forfait mobilités durables. Nous tirerons également des conclusions de la mise en place du dispositif dans dix-huit mois.
M. le président
La parole est à M. Vincent Descoeur.
M. Vincent Descoeur
J’entends parfaitement les arguments du rapporteur et du secrétaire d’État. Chacun a bien compris que l’idée était de faire profiter le plus grand nombre possible de salariés de ce dispositif. S’il s’agit d’une disposition relevant du domaine réglementaire, je vous invite à y réfléchir.
(L’amendement no 127 n’est pas adopté.)
M. le président
La parole est à M. Jean-Marie Sermier, pour soutenir l’amendement no 186.
M. Jean-Marie Sermier
Cet amendement de notre collègue Ian Boucard tend à faire du forfait mobilités durables une mesure sociale. En effet, voilà plusieurs années que le forfait de base n’a plus évolué, alors que le prix des carburants a beaucoup augmenté. Il s’agit uniquement d’un rattrapage permettant aux salariés de retrouver un peu de pouvoir d’achat.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Luc Fugit, rapporteur
L’amendement propose un alignement de l’avantage fiscal bénéficiant aux véhicules électriques pour les véhicules utilisant des carburants fossiles. Cela ne me semble pas opportun. En effet, le projet de loi maintient l’avantage fiscal et social de 200 euros pour les carburants fossiles ; celui-ci est porté à 400 euros pour les véhicules électriques, afin d’inciter à l’utilisation de modes de transport moins polluants, en termes de polluants de proximité comme d’émissions de CO2. Je suis donc défavorable à l’amendement.
M. le président
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d’État
Nous parlons de transition écologique et il faut rester cohérents. J’entends bien vos préoccupations, monsieur Sermier, mais nous souhaitons maintenir le dispositif dans sa version actuelle et n’accorder un avantage fiscal de 400 euros qu’aux véhicules qui polluent le moins.
(L’amendement no 186 n’est pas adopté.)
M. le président
Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 101 et 115.
La parole est à M. Vincent Descoeur, pour soutenir l’amendement no 101.
M. Vincent Descoeur
Après la réponse à l’amendement de mon collègue, je comprends bien que vous souhaitez qu’il y ait une différence entre les seuils. Cet amendement ne visait pas à les mettre au même niveau, mais il proposait de ne pas oublier, tout de même, de relever celui qui concerne les frais de carburant, étant donné qu’il n’avait fait l’objet d’aucune réévaluation depuis son instauration en 2008, malgré la forte hausse des prix, dont nous savons tous quelque chose.
S’il faut certes encourager les nouveaux véhicules, il ne faut pas oublier les salariés qui continueront à se déplacer avec des véhicules utilisant du carburant et qui n’ont peut-être pas les moyens de les changer dans l’immédiat.
M. le président
La parole est à Mme Sophie Auconie, pour soutenir l’amendement no 115.
Mme Sophie Auconie
Cet article, qui crée un forfait mobilités durables, modifie les limites d’exonération pour l’impôt sur le revenu et les cotisations sociales de la prise en charge possible par l’employeur des frais engagés par les salariés pour les trajets du domicile au lieu de travail, en relevant le seuil de 200 euros applicable à 400 euros lorsqu’il s’agit notamment de véhicules électriques ou à hydrogène. C’est un geste vertueux que nous saluons.
Toutefois, il maintient le seuil de 200 euros lorsque la prise en charge de l’employeur s’applique aux frais de carburant.
Le présent amendement vise à relever aussi la limite annuelle pour les frais de carburant de 200 euros à 300 euros. En effet, ce seuil, instauré en 2008 – il y a onze ans –, n’a jamais fait l’objet d’une réévaluation, malgré l’inflation et, surtout, malgré la hausse des prix du carburant que supportent certains de nos concitoyens, qui nous l’ont fait savoir lors des mouvements sociaux de la fin de l’année 2018.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Luc Fugit, rapporteur
Vous proposez de réduire le différentiel entre l’aide aux carburants fossiles et celle aux sources d’énergie que nous souhaitons encourager, notamment celles qui sont plus vertueuses du point de vue de leur impact environnemental, c’est-à-dire l’hydrogène et l’électricité. Cela me semble aller à l’encontre de la philosophie de ce texte.
Il faut avoir à l’esprit que nous avons préféré faire porter l’effort budgétaire sur la création du forfait mobilités durables. C’est l’argument le plus important.
Enfin, l’impact de ce relèvement sur les finances publiques n’a pas été évalué. Ce débat n’a jamais trouvé d’écho dans les discussions menées par les partenaires sociaux autour du forfait mobilités durables.
Pour toutes ces raisons, j’émets un avis défavorable à votre amendement, à moins que vous ne le retiriez – ce qui m’étonnerait.
M. le président
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d’État
Dans le droit fil de ce que nous avons dit précédemment, nous souhaitons maintenir la cohérence en termes de transition écologique, c’est-à-dire que nous voulons soutenir les véhicules les plus propres en maintenant cette différence. Le pouvoir d’achat est lui-même soutenu par d’autres dispositifs du Gouvernement, sur lesquels je ne reviens pas ici mais que vous avez tous en tête.
(Les amendements identiques nos 101 et 115 ne sont pas adoptés.)
(L’article 26, amendé, est adopté.)
Article 26 bis A
(L’article 26 bis A est adopté.)
Article 26 bis
M. le président
Je suis saisi d’un amendement, no 738, tendant à la suppression de l’article 26 bis.
La parole est à M. Jean-Marie Sermier, pour le soutenir.
M. Jean-Marie Sermier
Après avoir beaucoup travaillé sur le sujet, la commission a opté pour la mise en place d’une vignette Crit’Air pour les professionnels. Lorsque nous les avons rencontrés, ceux-ci nous ont expliqué que, pour certains véhicules, ils ne pouvaient pas connaître la totalité des critères – si je puis dire ! – leur permettant d’établir ce classement.
Sur le fond, nous ne sommes pas contre cette mesure, mais il nous semble qu’à ce stade, les professionnels ne disposent pas des données technologiques suffisantes pour s’assurer que la vignette répond aux objectifs du texte.
Si ce n’était pas le cas, cela complexifierait le système et contribuerait à ce que nos concitoyens se sentent encore un peu plus perdus, alors qu’ils sont déjà en difficulté face à toutes les références et toutes les vignettes que peuvent recevoir les produits de consommation.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Luc Fugit, rapporteur
Nous avons déjà eu cette discussion en première lecture et en commission. Vous connaissez mon avis. Dans l’intervalle, j’ai rencontré les responsables de l’entreprise Village Automobiles, dans ma circonscription. Cette entreprise compte onze concessionnaires, qui n’ont pas tout à fait la même appréciation que vous. En effet, la date de première mise en circulation et d’autres éléments fournissent l’information nécessaire pour effectuer cet affichage.
Pourquoi l’affichage Crit’Air est-il important ? Nous abordons le domaine des polluants de proximité et nous allons certainement parler dans quelques minutes des zones à faibles émissions – ZFE –, que certaines agglomérations commencent à mettre en place progressivement. Nous avons donc besoin de connaître cette information.
Nous parlions hier soir du CO2 et nous avons eu de grands débats, notamment sur la publicité. Quand on se rend dans une concession pour acheter un véhicule, même d’occasion, il est important d’avoir une idée de son niveau de pollution en matière de CO2, ce qui est très important pour le climat. C’est une information qu’on obtient aisément.
Le classement Crit’Air permet, en outre, deux choses : de connaître le niveau d’émissions du véhicule et de savoir si le véhicule permettra de rouler en permanence au sein d’une zone à faibles émissions mobilité – je rappelle que vingt-trois de ces zones sont en préparation.
Nous devons faire confiance à la capacité des concessionnaires et de nos concitoyens à s’approprier ces indicateurs de choix. Le fait d’afficher ces vignettes Crit’Air dans les concessions offrira une aide supplémentaire à la décision, qui s’ajoutera à tous les autres éléments sur lesquels les citoyens peuvent se fonder pour acheter un véhicule.
Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d’État
En ce qui concerne la complexité du procédé, il me semble qu’avec le certificat d’immatriculation, la date d’immatriculation et la motorisation du véhicule, il est tout à fait possible, a fortiori pour des professionnels de l’automobile, de déterminer la vignette Crit’Air adéquate.
Je demande donc le retrait de cet amendement.
(L’amendement no 738 n’est pas adopté.)
(L’article 26 bis est adopté.)
Article 27
M. le président
Sur l’article 27, je suis saisi de deux amendements identiques, nos 387 et 479.
La parole est à M. Hubert Wulfranc, pour soutenir l’amendement no 387.
M. Hubert Wulfranc
Le groupe de la Gauche démocrate et républicaine s’opposera à l’instauration des zones à faibles émissions. D’un point de vue social, la création de ces ZFE – dont le principe n’est pas forcément à rejeter – devrait s’accompagner d’une offre de transports en commun suffisante à l’échelle de la deuxième couronne et en zone périurbaine.
Or, dans les métropoles concernées, cette offre n’est pas encore suffisamment homogène et performante, loin de là, pour justifier la création de ces ZFE.
Sur le plan territorial, nous estimons qu’elles portent en germe un conflit en l’hyper-centre et les agglomérations industrielles et de services logistiques lourds.
En arrière-plan, il y a des enjeux d’aménagement du territoire. En effet, les véhicules très polluants vont continuer à faire tourner leur moteur, à circuler et à s’entreposer. Le risque d’un aménagement du territoire qui avive une division du travail à grande échelle est clairement avéré dans les métropoles qui mettent en place ces ZFE.
Nous avons par ailleurs de nombreux débats sur les mesures alternatives destinées à assurer la transition écologique, qu’il s’agisse de son rythme ou de sa qualité, à propos notamment du renouvellement global des flottes, personnelles ou professionnelles. L’activation de ces mesures devrait permettre d’éviter de créer ces ZFE qui, en l’état, seraient des « zones à forte exclusion ».
M. le président
La parole est à M. Loïc Prud’homme, pour soutenir l’amendement no 479.
M. Loïc Prud’homme
Sans répéter ce que vient de dire M. Wulfranc, je voudrais appuyer son propos. Nous faisons en effet la même analyse de ces zones à forte exclusion.
Cette mesure de création de ZFE est injuste et peu efficace, car elle ne s’attaque ni au problème de fond ni aux véhicules les plus neufs, mais aux plus polluants, qui sont notamment peu adaptés au milieu urbain.
C’est donc avant tout, comme cela a déjà été exposé, une mesure contraignante pour les plus fragiles de nos concitoyens, ceux qui n’ont pas les moyens de se payer la voiture dernier cri – ou dernier Crit’Air – qui leur permettrait de rouler tous les jours, en tous lieux et en toutes circonstances, mais qui ne serait qu’un véhicule fallacieusement repeint en vert car, avec ou sans vignette Crit’Air, un véhicule continue à polluer.
Cette mesure vise à interdire la circulation des voitures les plus anciennes, que possèdent les gens qui ont le moins de moyens et qui, de fait, sont aussi les premiers à subir la pollution. Ce n’est plus une double peine que vous leur infligez, mais une triple peine, en les obligeant à trouver d’autres solutions pour se rendre sur leur lieu de travail, car ils ne pourront plus accéder aux centres-villes.
Comme l’a rappelé Hubert Wulfranc, c’est une question d’aménagement du territoire, car c’est bien de cela qu’il s’agit quand on parle de circulation.
Ce que nous voyons aujourd’hui est complètement délirant : les centres-villes, comme je le constate dans la métropole bordelaise, sont des espèces de trous noirs qui absorbent les emplois et les services. Les gens qui n’ont plus les moyens d’habiter à proximité des emplois et des services se retrouvent centrifugés dans des zones périurbaines ou rurales, sans avoir les moyens d’acheter des véhicules récents respectant les critères d’admission dans les ZFE ni disposer d’une offre de transports en commun qui leur permettrait de se passer de leur voiture. Ces ZFE sont une sorte d’apartheid social déguisé en mesure écologique.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Luc Fugit, rapporteur
Nous avons déjà eu ces débats en première lecture et en commission : vous savez donc que je n’ai pas la même appréciation que vous sur ce sujet.
Rappelons que la création de zones à faibles émissions ne s’accompagne pas de la mise en place de péages urbains qui pourraient laisser entendre à certains qu’ils peuvent payer pour aller polluer. Ce n’est pas cela !
Nous voulons mettre en place ces zones à faibles émissions de manière très progressive. Il en existe actuellement trois et vingt-trois sont en préparation, qui concerneront 17 millions de nos concitoyens. L’idée n’est pas d’exclure des personnes mais, très progressivement, les véhicules les plus polluants, avec la possibilité d’écarter les voitures extrêmement polluantes, mises en circulation avant 1995 et qui n’ont pas du tout de vignette et les véhicules diesel d’avant 2001, qui ont une vignette Crit’Air 5. Nous sommes tous d’accord pour dire que ces véhicules sont très polluants et, heureusement, la majorité des automobilistes ne possèdent pas des véhicules mis en circulation avant 2001.
La véritable question est de savoir s’il existe un accompagnement de cette mesure ?
J’insiste sur la progressivité d’une mesure qui va s’appliquer au cours des années qui viennent. Dans la métropole du Grand Paris, des zones à faible émission vont se mettre en place pour parvenir à ce que les véhicules soient les moins polluants possibles en 2030.
Pour accompagner la mesure, des primes à la conversion – c’est-à-dire des aides – ont été accordées et elles ont connu un énorme succès en 2018. Je crois que les personnes qui en ont bénéficié en sont satisfaites. Dans ma circonscription, certains de mes concitoyens m’ont même dit qu’ils avaient pu se procurer des véhicules électriques d’occasion à des prix tout à fait raisonnables. Les modèles d’occasions commencent, en effet, à arriver.
Au cours de la décennie à venir, avec des trajectoires que nous avons définies et rappelées hier soir pour le verdissement obligatoire des flottes de véhicules d’entreprise, de l’État et des collectivités, vont apparaître sur le marché de l’occasion des véhicules portant des vignettes Crit’Air 0, 1 ou 2, sachant que la vignette Crit’Air 0 correspond aux voitures électriques ou à l’hydrogène.
Ces véhicules deviendront de plus en plus accessibles.
Le verdissement des flottes, l’arrivée des véhicules propres sur le marché de l’occasion et la mise en place des zones à faible émission seront progressifs et simultanés : de ce fait, il n’y aura aucune exclusion massive des personnes.
Ce que nous voulons exclure, ce sont les polluants de proximité. Je répète ce que j’ai dit mardi à la tribune : nous ne sommes pas contre certaines personnes ou certains types de véhicules, mais contre la pollution. Notre objectif est d’accompagner nos concitoyens vers l’utilisation de véhicules moins polluants. Pour ce faire, vous avez raison, il faut aller au-delà des mesures que je viens de rappeler et développer encore plus les transports en commun et les dispositifs de partage – d’ailleurs, l’incitation au covoiturage et la possibilité donnée aux collectivités de réserver des voies aux véhicules à occupation multiples sont des mesures que l’on retrouve dans le projet de loi. Ce dernier est cohérent : l’un de ses objectifs est de favoriser des mobilités plus propres. Nous voulons lutter contre le CO2 et les polluants de proximité, et non contre nos concitoyens. Je demande donc le retrait de ces deux amendements ; à défaut, avis défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d’État
Les zones à faibles émissions sont des outils efficaces pour améliorer la qualité de l’air, un objectif que nous poursuivons tous.
Sur le plan social, la prime à la conversion a été doublée pour les 20 % des Français les plus modestes. Par ailleurs, les travailleurs parcourant plus de 30 kilomètres par jour entre leur domicile et leur lieu de travail bénéficient aujourd’hui d’une défiscalisation. Enfin, nous avons diligenté une mission afin de résoudre le problème du reste à charge, qui touche les ménages les plus modestes, par des dispositifs de microcrédit.
Le dispositif existant permet donc d’appréhender la question le plus justement possible. Je demande le retrait des deux amendements.
(Les amendements identiques nos 387 et 479 ne sont pas adoptés.)
M. le président
La parole est à M. Jean-Pierre Vigier, pour soutenir l’amendement no 208.
M. Jean-Pierre Vigier
L’article 27 impose aux EPCI – établissements publics de coopération intercommunale – de plus de 100 000 habitants de prévoir, dans le cadre de leur plan climat-air-énergie territorial, un plan d’action pour la protection de l’atmosphère contenant des mesures en faveur de la qualité de l’air. Dans ce cadre, l’amendement no 208 vise à promouvoir les énergies et technologies alternatives, qui méritent d’être bien identifiées afin de répondre pleinement aux enjeux de la transition énergétique – en particulier, pour ce qui nous concerne aujourd’hui, en matière de mobilité.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Luc Fugit, rapporteur
J’ai envie de dire que cet amendement n’apporte rien de nouveau. À la limite, il pourrait même semer la confusion. Toutes les technologies que vous évoquez bénéficient aujourd’hui…
Vous me tournez le dos, monsieur Vigier ! Je ne veux pas donner l’impression de parler pour rien…
M. Jean-Marie Sermier
C’est moi qui le distrayais !
M. Jean-Pierre Vigier
On peut faire deux choses à la fois !
M. Jean-Luc Fugit, rapporteur
La plupart des carburants que vous évoquez correspondent aujourd’hui à des véhicules bénéficiant des Crit’Air 0, 1 ou 2, c’est-à-dire à des véhicules qui, au cours des prochaines années et sans doute pendant assez longtemps, ne seront pas exclus des zones à faible émission. En effet, la planification prévue pour les zones à faibles émissions qui commencent à être mises en place dans la métropole du Grand Paris, à Grenoble ou à Strasbourg, ou qui sont en gestation à Lyon, à Toulouse ou ailleurs, est progressive : les véhicules à vignette Crit’Air 0, 1 ou 2, que vous citez explicitement, ne seront pas du tout inquiétés dans la prochaine décennie. Les véhicules menacés sont les 100 % diesel ou les 100 % essence, qui seront progressivement exclus en fonction de leur âge et de leur niveau de pollution.
Il n’y a donc pas lieu d’insister sur ces technologies en particulier, et d’autant moins qu’elles vont automatiquement prendre de l’essor, car les constructeurs les développeront de plus en plus, compte tenu des orientations que nous avons adoptées à l’article 26 en matière de verdissement des flottes. Je demande donc le retrait de votre amendement, faute de quoi j’émettrai un avis défavorable, car il sera naturellement satisfait.
(L’amendement no 208, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)
M. le président
La parole est à M. Vincent Descoeur, pour soutenir l’amendement no 62.
M. Vincent Descoeur
Il s’agit de mentionner explicitement que la concertation préalable à la mise en place d’une zone à faibles émissions associe les organisations professionnelles, afin d’intégrer les contraintes de déplacements liées à leurs activités.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Luc Fugit, rapporteur
Ce sujet a déjà été évoqué à plusieurs reprises. Lorsque l’on veut mettre en place une zone à faibles émissions, la concertation paraît nécessaire. D’ailleurs, les agglomérations souhaitant appliquer ce dispositif ont naturellement prévu des espaces de concertation, y compris avec les professionnels – l’agglomération grenobloise a même commencé par là. Il n’y a donc pas lieu de préciser la nécessité d’une concertation pour telle ou telle catégorie de citoyens. Comme on le dit souvent, les élus locaux sont les plus proches de nos concitoyens : ils continueront naturellement de prévoir des espaces de concertation en vue de la mise en place des zones à faibles émissions.
L’agglomération toulousaine vient ainsi de présenter, en début de semaine, quatre scénarios possibles pour la mise en place de sa ZFE, qui font l’objet d’une consultation, tant des professionnels que de l’ensemble des citoyens de l’agglomération. Cette démarche est assez intéressante. Les interactions avec les citoyens permettront peut-être de voir si l’un des scénarios se dégage par rapport aux autres.
Je le répète : il n’est pas utile de prévoir cette concertation dans la loi. Il est évident que nous incitons fortement les collectivités à le faire, mais cela me paraît assez naturel compte tenu de la relation entre les élus locaux et les citoyens.
M. le président
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d’État
Cette concertation est déjà prévue par les textes. Par ailleurs, en pratique, les ZFE mises en place ont fait l’objet d’une large concertation. Quinze collectivités se sont déjà engagées dans ce type de dispositif, tandis que vingt-trois, au total, ont ouvert des discussions. Votre amendement est donc satisfait en pratique.
(L’amendement no 62 n’est pas adopté.)
M. le président
La parole est à M. Paul-André Colombani, pour soutenir l’amendement no 311.
M. Paul-André Colombani
Le plan d’action climat-air-énergie territorial prévoit déjà une interdiction de circulation en cas de pic de pollution pour les véhicules les plus polluants. Nous proposons, avec cet amendement, que le représentant de l’État ait également la possibilité, en pareil cas, d’interdire aux navires les plus polluants l’accès aux ports français.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Luc Fugit, rapporteur
Nous avons déjà adopté en première lecture des mesures en ce sens. Ainsi, aux termes de l’article 24 bis, les métropoles sont compétentes pour installer des bornes de recharge électriques permettant d’alimenter les navires à quai : cette mesure va dans le sens que vous souhaitez. En outre, à l’article 23, nous avons un peu allégé les obligations des opérateurs de recharge.
Il ne me semble pas souhaitable d’interdire le stationnement complet de certains navires dans les ports, car cela risquerait de priver ces derniers d’une partie du trafic maritime. Il vaut mieux chercher à réduire les émissions polluantes, grâce notamment aux dispositifs d’électrification que je viens d’évoquer.
Par ailleurs, le code de l’environnement permet déjà au préfet ou au préfet maritime de prendre, sur le fondement de leurs pouvoirs de police, des mesures de réduction de la circulation. Vous pouvez donc considérer votre amendement comme satisfait. Demande de retrait ou avis défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d’État
Comme l’a dit M. le rapporteur, le préfet a toute latitude pour prendre les mesures proportionnées.
L’industrie s’est déjà engagée dans ce domaine en prenant des mesures très concrètes en matière d’électrification et de GNL, ou gaz naturel liquéfié. La semaine dernière, avec Mme la ministre de la transition écologique et solidaire, je me suis rendu à Marseille pour visiter des navires : j’ai ainsi pu observer dans quelle mesure les filtres à particules, secs ou humides, permettent de diminuer ces particules non seulement au sol, mais aussi en mer, de manière à préserver la santé des salariés du secteur maritime. Il n’y a pas lieu de prononcer une interdiction absolue : mieux vaut accompagner la transition déjà à l’œuvre. Demande de retrait.
M. le président
La parole est à M. Paul-André Colombani.
M. Paul-André Colombani
Nous ne sommes pas d’accord. Tous les ports ne sont pas prêts à mettre en œuvre cette transition. Nous proposons de mettre entre les mains du préfet un outil de régulation, non d’adopter une mesure d’interdiction. Aujourd’hui, aucun port n’a la possibilité de connecter au réseau électrique l’ensemble des bateaux de croisière. Si nous appliquons vos mesures, nous n’en tirerons de bénéfices que dans trois, quatre ou cinq ans.
M. Jean-Luc Fugit, rapporteur
Le préfet peut déjà agir !
M. Paul-André Colombani
Prenons l’exemple d’Ajaccio. La ville est alimentée par une centrale au fioul. Imaginez la répercussion si l’on connectait tous les bateaux à l’électricité ! Pour 100 kilomètres en voiture électrique, la centrale consomme 23 litres de fioul : combien consommerait-elle pour alimenter les bateaux de croisière ?
(L’amendement no 311 n’est pas adopté.)
(L’article 27 est adopté.)
Article 28
M. le président
Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 388 et 480, tendant à supprimer l’article 28.
L’amendement no 388 de M. Hubert Wulfranc est défendu.
La parole est à M. Loïc Prud’homme, pour soutenir l’amendement no 480.
M. Loïc Prud’homme
Je reviens à la question des ZFE, pour réagir aux réponses apportées par M. le rapporteur et M. le secrétaire d’État à propos de la prime à la conversion. Cela nous renvoie aux discussions que nous avons eues hier soir sur la trajectoire que nous voulons suivre.
Vous évoquez un succès de la prime à la conversion, mais remplacer son véhicule par une voiture électrique qui coûte entre 15 000 et 20 000 euros n’est pas accessible au commun des mortels, même si vous soulignez que l’on peut parfois trouver des modèles d’occasion.
M. Jean-Luc Fugit, rapporteur
Il y en aura de plus en plus !
M. Loïc Prud’homme
Mise à part la question du prix, qui n’est pas totalement neutre, il faudrait, au rythme actuel, plus d’un siècle pour renouveler entièrement le parc : nous ne sommes pas à la hauteur des enjeux. La prime à la conversion n’est donc pas la bonne réponse au développement des ZFE.
Se pose ensuite un problème de cohérence. M. le rapporteur a parlé de la ville de Toulouse, qui a présenté quatre scénarios pour la mise en place des ZFE. La belle affaire ! Dans le même temps, en effet, Toulouse étudie la construction d’une deuxième rocade – à 2 milliards d’euros – afin de faire tourner deux fois plus de bagnoles autour de la ville. Pardonnez-moi, mais il faut rester cohérent ! On ne peut pas mettre en place des ZFE tout en continuant à construire des rocades et à dérouler un tapis rouge aux voitures.
Je le répète, la création de ZFE n’est pas cohérente : tant que nous n’aurons pas trouvé de solutions alternatives pour les déplacements, les gens seront condamnés à rouler en voiture. Les plus fragiles rouleront dans des voitures anciennes et seront malheureusement exclus des centres-villes et des endroits où ils ont besoin de se rendre, comme je l’ai dit tout à l’heure, pour trouver des services et rejoindre leur boulot.
M. le président
Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements de suppression ?
M. Jean-Luc Fugit, rapporteur
Je me suis déjà exprimé sur ce sujet. La prime à la conversion n’est pas la seule réponse aux ZFE : il y a aussi le verdissement progressif du parc et l’arrivée progressive des véhicules d’occasion au cours des prochaines années.
Quant à l’agglomération toulousaine, je ne sais pas ce qui résultera de l’étude sur la construction d’une deuxième rocade dont vous avez parlé. Il s’agit là de choix locaux. On peut imaginer que les quatre scénarios de ZFE seront étudiés avec ou sans la construction de cette rocade. Ce que je peux vous dire, c’est que la progressivité de la mise en place des ZFE correspond à la progressivité du verdissement des flottes et à l’arrivée croissante des véhicules d’occasion. Vous me dites que cela ne se fera pas dans les six mois, et je suis bien d’accord : tout cela se mettra en place progressivement, sur plusieurs années.
M. Loïc Prud’homme
Sur un siècle !
M. Jean-Luc Fugit, rapporteur
Ne laissons pas croire à nos concitoyens que l’adoption de ce texte entraînera demain, partout, des interdictions de rouler ! Ce n’est pas aussi simple que cela, et vous le savez très bien. Encore une fois, tout cela sera très progressif et dépendra du niveau de pollution des véhicules. Je le répète, les véhicules affectés seront les plus anciens ; il en reste heureusement de moins en moins, et ce sont ceux qui bénéficient des aides à la conversion. Ne dramatisons pas la situation !
Je conviens avec vous qu’il faut voir les choses avec rigueur et détermination. Soyons déterminés à lutter contre la pollution de l’air, cette fameuse pollution de proximité qui est encore plus importante que les émissions de CO2 – je ne dis pas pour autant que le CO2 n’est pas important… Pensez à tous les impacts sanitaires de la pollution, notamment aux bronchiolites dont sont atteints les enfants de moins de 13 ans, dont la sphère ORL, qui n’est pas mature, est fortement agressée par ces polluants. Pensez aussi au coût de cette pollution – 100 milliards d’euros – et à ses effets sur la qualité de vie au travail. Dans certaines agglomérations, les investisseurs interrogent les élus locaux sur leur action contre la pollution de l’air avant de décider de s’y installer.
Eh bien ! les ZFE peuvent constituer des facteurs d’attractivité dans certaines agglomérations, notamment, et même si cela peut faire sourire, pour un certain type de tourisme soucieux de la qualité de l’air, qui ne concerne certes que les grandes villes, mais qui bénéficie à l’économie française dans sa globalité. Ne dramatisons donc pas la situation.
M. le président
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d’État
Je serai très rapide puisque nous avons déjà eu cette discussion à propos des amendements précédents. Nous pensons que les zones à faibles émissions sont un dispositif très efficace pour améliorer la qualité de l’air et M. le rapporteur en a exposé tous les avantages. Leur mise en place suppose une concertation avec les collectivités : quinze d’entre elles s’y sont déjà engagées et vingt-trois sont concernées. Ce nombre suffit à démontrer la bonne volonté des collectivités et nous prenons le temps d’assurer une mise en œuvre correcte de ce dispositif.
S’agissant de l’aspect social, nous avons rappelé les diverses mesures que le prochain projet de loi de finances destinera aux 20 % des Français les plus modestes, qui rencontrent des difficultés à se déplacer ou à renouveler leur véhicule. Pour toutes ces raisons je vous demande de retirer ces amendements. A défaut l’avis sera défavorable.
(Les amendements identiques nos 388 et 480 ne sont pas adoptés.)
M. le président
La parole est à M. Christophe Bouillon, pour soutenir l’amendement no 756.
M. Christophe Bouillon
Je voudrais prendre quelques minutes pour évoquer un sujet dont l’enjeu est assez important : celui du transit de poids lourds sur des routes communales dont le gabarit n’est pas adapté à ce type de trafic, et ce alors que notre pays est couvert par un réseau d’autoroutes que ce texte veut encore améliorer via la programmation d’infrastructures routières visant, ici à faire sauter des nœuds autoroutiers, là à améliorer des dessertes ou à contourner certaines agglomérations. Pourtant, beaucoup de poids lourds n’empruntent pas ces axes autoroutiers, dont la vocation économique est pourtant d’accueillir un trafic de marchandises conséquent.
Cet amendement est un des outils qui permettraient d’éviter cette situation, qui est aujourd’hui celle de beaucoup d’axes routiers, mais il en est d’autres, dont on pourra discuter au moment d’examiner le rapport annexé et les investissements en matière d’infrastructures. Il est dû à l’initiative de notre collègue sénatrice Nicole Bonnefoy, qui l’a défendu jusqu’en commission mixte paritaire, et il a recueilli l’avis favorable du rapporteur, Didier Mandelli. Il vise à permettre au président de l’EPCI ou au maire de la commune dont le territoire se situe à proximité d’un axe autoroutier de définir une zone de circulation restreinte afin d’obliger les poids lourds à emprunter l’autoroute au lieu de traverser des communes qui ne sont pas du tout adaptées à ce type de circulation.
Par cette proposition, notre collègue Nicole Bonnefoy se fait l’écho des protestations d’un grand nombre d’habitants et de plus de 125 communes de sa circonscription qui se sont élevés par voie de pétition contre l’importance du trafic de poids lourds sur la route nationale 10 et les nuisances qu’il engendre – congestion, augmentation de la pollution et autres facteurs de dégradation de la qualité de vie de la population.
Force est de constater aujourd’hui que l’importance des moyens consacrés à améliorer l’état du réseau routier et à développer l’utilisation de ce réseau, notamment pour le transport de marchandises, ne permet pas de mettre fin à des stratégies d’évitement qui pénalisent les communes périphériques et des communes rurales qui ne peuvent pas accueillir un tel trafic.
J’évoquerai le deuxième outil quand nous aborderons l’examen de vos projets d’investissements en termes d’infrastructures – votre texte évoque la question des nœuds autoroutiers – mais je veux dès maintenant souligner l’absurdité de certaines situations.
J’illustrerai mon propos par l’exemple de la Seine-Maritime – maintenant que vous êtes en charge des transports, vous allez devenir, monsieur le secrétaire d’État, un connaisseur hors pair du réseau routier, départemental et national, et autoroutier ! En raison de l’absence de continuité entre les deux axes autoroutiers A 151, qui relie Dieppe, commune de notre collègue Sébastien Jumel, à Rouen et A 150, de Barentin au Havre, commune de notre Premier ministre, les poids lourds qui doivent aller des Hauts-de-France au pays de Caux sont obligés d’emprunter la route départementale 47 et de traverser des petites communes, comme Pissy-Pôville, provoquant dans les villages des bouchons et une pollution importante.
L’État serait bien inspiré de remédier à ce type de situation par des aménagements autoroutiers – des échangeurs, par exemple – afin d’éviter que des poids lourds n’empruntent des routes qui ne sont pas faites pour ça. C’est d’autant plus nécessaire que de plus en plus de transporteurs venant d’autres pays d’Europe transitent par nos communes, guidés par leur GPS, sans se préoccuper de savoir si les routes qu’ils empruntent sont adaptées à ce type de trafic. Dans certaines petites communes, il arrive même que ces poids lourds bloquent la circulation, leur gabarit ne laissant même pas l’espace suffisant pour permettre aux voitures de les croiser.
Excusez-moi de décrire aussi précisément et aussi concrètement ces situations, mais elles empoisonnent la vie de nombreux habitants de ces villages et de ces communes. Étant donné l’effort consenti par l’État, c’est-à-dire par nous tous, en termes de structures autoroutières, il faut faire en sorte que ce soit elles qui soient utilisées pour le fret de marchandises afin de libérer pour d’autres circulations les routes qui traversent les villages et les communes de notre beau pays.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Luc Fugit, rapporteur
Votre amendement est doublement satisfait. Premièrement, tous les EPCI peuvent créer des ZFE, au point que la nouvelle rédaction de l’alinéa 4 que vous nous proposez d’adopter poserait problème, notamment dans les zones couvertes par un PPA – un plan de protection de l’atmosphère – ou dans celles qui comportent des axes de passage assez encaissés et sont peu denses sur le plan démographique. En effet, bien qu’en-deçà du seuil de 100 000 habitants, elles rencontrent des problèmes de pollution non négligeables en raison de leur topographie. Je pense à ma grande région Auvergne Rhône-Alpes : plus de 70 % de son territoire se trouvant à plus de 1 000 mètres d’altitude, elle compte beaucoup de vallées et de zones encaissées, telles que la vallée de l’Arve, ce qui pose de nombreux problèmes.
D’autre part le code général des collectivités territoriales permet déjà d’inclure les autoroutes dans les zones de circulation restreinte, notamment les ZFE désormais. C’est pourquoi, même si les problématiques que vous soulevez sont extrêmement pertinentes, le texte permet, en l’état, avec le dispositif des ZFE, de mettre fin aux situations particulières que vous évoquez, notamment les problèmes liés aux voies à grande circulation.
Votre amendement étant satisfait, je vous en demande le retrait, sinon l’avis sera défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d’État
Je confirme les propos du rapporteur : votre amendement est satisfait par la création de la ZFE puisque, comme vous le savez, nous avons supprimé la condition d’un nombre minimal d’habitants. Quant à votre long développement sur la nécessité de restreindre ces trafics, il pose des questions très justes, concernant notamment l’intégration de certaines informations dans les dispositifs GPS, mais je vous confirme que l’autorité en charge de la circulation peut d’ores et déjà décider de telles restrictions dès lors qu’elles sont proportionnées et qu’il existe des itinéraires de substitution.
(L’amendement no 756 n’est pas adopté.)
M. le président
Je suis saisi de deux amendements, nos 64 et 739, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Vincent Descoeur, pour soutenir l’amendement no 64.
M. Vincent Descoeur
Nous proposons par cet amendement qu’un calendrier des interdictions de circulation dans ces zones à faibles émissions soit arrêté pour une durée de trois ans, à la fois pour tenir compte des évolutions technologiques susceptibles d’intervenir et pour donner de la visibilité aux acteurs de la mobilité.
M. le président
La parole est à M. Jean-Marie Sermier, pour soutenir l’amendement no 739.
M. Jean-Marie Sermier
Nous sommes évidemment très favorables à la création de ZFE, parce que cette solution permettra d’améliorer drastiquement l’état de l’atmosphère, mais aussi le bien-être, dans les centres-villes les plus importants. Vous nous avez par ailleurs mis en garde contre la tentation de dramatiser certains problèmes sans égard pour la question des investisseurs et du tourisme. On ne peut quand même pas ne pas penser aux Français modestes qui seront obligés de circuler dans ces ZFE, qu’il s’agisse de se rendre à leur travail, d’honorer un rendez-vous médical ou tout simplement de vivre.
Vous avez certes dit, en réponse à notre collègue Prud’homme, que le Gouvernement mettait en place des mesures d’aide au renouvellement de son véhicule, mais elles ne suffiront pas aux plus modestes d’entre eux, dont les véhicules sont souvent les plus anciens et les plus mal entretenus, donc les plus polluants, et ne vous permettront pas de faire l’économie de progressivité et de pédagogie.
Il s’agit là plutôt d’un amendement d’appel, susceptible d’être retiré en fonction de votre réponse. Qu’on mette en place immédiatement les ZFE, nous sommes d’accord, mais soyons quand même tolérants pendant les trois premières années du dispositif, pour permettre à nos concitoyens de s’adapter. Ceux qui pourront s’acheter un nouveau 4x4 satisfaisant aux conditions Crit’Air pourront circuler immédiatement dans une ZFE sans aucun problème, mais donnons trois ans pour s’adapter à celui qui a une voiture « pourrie » parce qu’il n’a pas la possibilité de faire autrement.
Au-delà de ce texte, j’espère que le Gouvernement fera preuve d’une certaine souplesse dans ses instructions, au bénéfice notamment des plus démunis, qui risquent de trouver qu’entre les riches et les autres, il y a deux poids, deux mesures.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Luc Fugit, rapporteur
Je suis tout à fait d’accord avec vous, et c’est d’ailleurs ainsi que les ZFE se mettent en place, comme le montrent les retours d’expérience réguliers, notamment auprès de l’ADEME, des agglomérations qui sont en train d’en créer. Si vous prenez le temps de considérer les calendriers qui ont été établis à cet effet, vous constaterez que cette progressivité que vous appelez, à raison, de vos vœux est bien prévue. Je serai le premier à m’opposer à la mise en place d’une ZFE qui exclurait d’emblée plus de la moitié du parc automobile ou qui serait réservée aux véhicules bénéficiant de la vignette CritAir 1. Cela serait évidemment impossible et inacceptable.
Comme je l’ai indiqué en première lecture, des retours d’expérience peuvent être organisés avec l’ADEME. Le Conseil national de l’air, où siègent les collectivités, les syndicats et l’ensemble des acteurs intéressés par ces sujets, a également prévu d’organiser des retours d’expérience.
Vos amendements laissent entendre que les véhicules les moins polluants ne sont pas accessibles. Il est vrai que les modèles récents sont assez coûteux. Toutefois, il existe diverses aides à l’achat et, comme je l’ai dit tout à l’heure, grâce au verdissement des flottes, des véhicules d’occasion peu polluants apparaîtront progressivement sur le marché ces prochaines années. C’est pour cela que les ZFE sont progressives. En outre, l’adoption d’un amendement de ce type risquerait de laisser croire que les ZFE ne sont créées que pour trois ans.
Les agglomérations sont prêtes à s’engager dans la durée. Une quinzaine d’entre elles ont signé des engagements en ce sens le 8 octobre 2018. Pour la plupart, les plannings des ZFE prévues par les agglomérations déjà inscrites dans la démarche sont progressifs jusqu’à 2030, soit pour une dizaine d’années. Le délai de trois ans est donc largement couvert. Vous avez raison d’appeler notre vigilance sur ce sujet, mais nous pouvons faire confiance aux collectivités pour mettre en œuvre des dispositifs progressifs. Les réunions de concertation et de partage d’expérience organisées par l’ADEME permettront aux collectivités qui veulent se lancer de profiter de l’expérience des autres. C’est ainsi que nous parviendrons à mailler le territoire de zones à faibles émissions là où c’est nécessaire.
Je demande donc le retrait de cet amendement.
M. le président
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d’État
Je demande également le retrait de l’amendement, pour deux raisons.
Tout d’abord, il est important de laisser de la souplesse aux collectivités, grâce notamment à l’évaluation qui, comme le prévoit le CGCT, le code général des collectivités territoriales, doit être réalisée au moins tous les trois ans.
Ensuite, comme je l’ai déjà indiqué, une mission travaille à l’élaboration de mécanismes de financement, de microcrédit notamment, afin d’aider les particuliers qui renouvellent leur véhicule à supporter le reste à charge. Ce type de solution sera particulièrement pertinent pour les 20 % de Français les plus modestes, que la prime à la conversion pourra inciter à faire le premier pas, mais pour lesquels un reste à charge de 1 000 ou 1 500 euros sera un obstacle. Je ne doute pas que nous parviendrons à la loi de finances mieux armés sur ces sujets.
M. le président
La parole est à M. Jean-Marie Sermier.
M. Jean-Marie Sermier
Monsieur le secrétaire d’État, puisque vous prônez l’indulgence envers les Français les plus modestes pendant les trois premières années, et puisque les avocats pourront se référer à nos propos si cet engagement n’est pas respecté, je retire mon amendement. Nos demandes ont obtenu satisfaction.
(L’amendement no 739 est retiré.)
M. le président
Qu’en est-il de l’amendement no 64 ?
M. Vincent Descoeur
Il est également retiré.
(L’amendement no 64 est retiré.)
M. le président
L’amendement no 68 de M. Vincent Descoeur est défendu.
(L’amendement no 68, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)
M. le président
Les amendements identiques nos 66 et 740 de MM. Vincent Descoeur et Jean-Marie Sermier sont défendus.
(Les amendements identiques nos 66 et 740, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)
M. le président
La parole est à Mme Sophie Auconie, pour soutenir l’amendement no 82.
Mme Sophie Auconie
En France, les mesures de la pollution atmosphérique sont effectuées par des organismes de surveillance agréés par le ministère de l’environnement, les AASQUA – associations agréées pour la surveillance de la qualité de l’air –, qui sont une quarantaine sur le territoire, chaque région en comptant au moins une. Les mesures effectuées par des capteurs fixes ou mobiles permettent de quantifier de nombreux polluants, dont le dioxyde de soufre, le dioxyde d’azote, l’ozone, le plomb, les particules et le monoxyde de carbone. Dans le cadre du déploiement des ZFE, l’amendement propose de densifier le maillage des capteurs de pollution afin de mieux identifier les zones les plus exposées, mais aussi de mieux mesurer les impacts de la ZFE sur les niveaux de pollution.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Luc Fugit, rapporteur
Nous disposons déjà d’un maillage d’outils de mesure vingt-quatre heures sur vingt-quatre et sept jours sur sept. Certaines de ces mesures sont effectuées par des stations fixes, d’autres par des stations mobiles. Les données recueillies font l’objet d’une modélisation et d’une itération très efficaces, qui a fait ses preuves depuis février 2001. Aujourd’hui, nous n’avons pas besoin de plus de stations, mais plutôt de capteurs supplémentaires permettant de mesurer d’autres polluants, lesquels pourraient être intégrés dans l’indice de qualité de l’air ATMO.
Le Conseil national de l’air, que j’ai réuni hier matin, s’est prononcé à l’unanimité pour que les particules les plus fines, dites PM2,5 – c’est-à-dire dont le diamètre est inférieur à 2,5 microns – soient intégrées dans l’indice ATMO, que nous publions chaque jour pour faire état de la qualité de l’air et où ne sont prises en compte, outre l’ozone, le dioxyde d’azote et le SO2, ou dioxyde de soufre, que les particules dites PM10, c’est-à-dire celles dont le diamètre est inférieur à 10 microns. Nous attendons que la ministre prenne un arrêté qui nous permettra de disposer de mesures plus détaillées à partir du 1er janvier 2020, ce qui répondra à vos demandes. Sur les 173 stations fixes qui maillent le pays, quelque 113 ou 116 mesurent les PM2,5. Ces données devraient donc enrichir l’indice de qualité de l’air publié quotidiennement. Il s’agirait d’une évolution importante, puisque cet indice n’a pas été modifié depuis 2004. Les premières discussions que j’ai eues avec la ministre me laissent penser qu’elle suivra l’avis du Conseil national de l’air en la matière.
Je saisis cette occasion pour vous rappeler que se tiendra la semaine prochaine, le mercredi 18 septembre, la journée nationale de la qualité de l’air, qui donnera certainement lieu, sur l’ensemble des territoires dont vous êtes élus, à des manifestations destinées à faire prendre conscience des enjeux. Vous êtes invités ce jour-là, à huit heures, à l’Assemblée nationale, à un petit-déjeuner permettant à la représentation nationale d’échanger sur les questions de la pollution de l’air et de ses impacts sanitaires, afin de voir ce que nous pouvons faire, avec une ONG – France nature environnement –, des acteurs de terrain qui effectuent des mesures – Atmo France, la fédération des AASQUA – et Santé publique France, qui pourra rendre compte des questions sanitaires. J’ai souhaité que cette rencontre réunisse l’ensemble des groupes politiques autour d’un enjeu qui nous est commun. La pollution de l’air, contre laquelle nous luttons tous, ne doit pas nous opposer les uns aux autres. Je vous attends nombreux pour vérifier auprès des acteurs de terrain que beaucoup de choses sont mises en œuvre.
Madame Auconie, l’amendement que vous soutenez ne me paraît pas nécessaire dans le contexte que je viens de décrire. Il ne serait d’ailleurs pas le bon vecteur législatif. En effet, les capteurs n’ont pas à se limiter à la pollution liée aux transports. Ces derniers sont certes responsables de plus de 60 % des émissions d’oxyde d’azote, mais ne représentent qu’environ 20 % des émissions de particules fines – 19 % en moyenne pondérée. Aussi devons-nous développer des capteurs susceptibles de mesurer les pollutions industrielle, agricole et liée à l’habitat.
Enfin, si l’on veut encore plus de mesures et de stations fixes – ce qui coûte du reste assez cher : de l’ordre de 150 000 à 200 000 euros au bas mot –, puisque les collectivités sont membres des conseils d’administration des associations agréées pour la surveillance de la qualité de l’air et participent à leur financement, rien ne les empêche – bien au contraire, et je leur lance même un appel – de financer des capteurs supplémentaires pour mieux rendre compte de certaines situations.
Pour toutes ces raisons, je suis défavorable à cet amendement.
M. le président
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d’État
Le maillage du territoire est déjà assuré par les dispositifs que vient de rappeler M. le rapporteur. Par ailleurs, nous pouvons nous appuyer sur des scientifiques de très haut niveau – notre rapporteur au premier chef –, qui font de la France un des leaders dans ce domaine. Je demande donc le retrait de l’amendement, qui est satisfait.
M. le président
La parole est à Mme Sophie Auconie.
Mme Sophie Auconie
Je retire l’amendement. Les dispositifs que vous venez de négocier avec les institutions, et que la ministre pourrait mettre en application, nous satisfont, car ils amélioreront encore les analyses de la qualité de l’air, ce que nous souhaitons tous.
(L’amendement no 82 est retiré.)
M. le président
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l’amendement no 190.
Mme Emmanuelle Ménard
Il vise à conserver au certificat de qualité de l’air sa raison d’être originelle – la préservation de la qualité de l’air – et à empêcher qu’il serve à sanctionner d’autres infractions, sans lien avec cet objectif, commises par les automobilistes concernés.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Luc Fugit, rapporteur
Je comprends l’intention de l’amendement. Il suppose toutefois que des caméras dédiées soient installées. Or, des dispositifs de surveillance trop onéreux ne permettraient pas de sanctionner, notamment, les automobilistes non autorisés qui pénétreraient dans les ZFE. Mieux vaut une mutualisation des dispositifs. Je suggère donc le retrait de l’amendement, sans quoi je rendrai un avis défavorable.
(L’amendement no 190 est retiré.)
(L’article 28 est adopté.)
Articles 28 bis A à 29 ter
(Les articles 28 bis A, 28 bis B, 28 bis, 28 ter, 28 quater A, 28 quater B, 28 quater, 28 quinquies, 29, 29 bis et 29 ter sont successivement adoptés.)
Article 1er A et rapport annexé (précédemment réservé)
M. le président
À la demande du Gouvernement, nous examinons à présent le titre Ier A, qui a été précédemment réservé.
Mme Barbara Pompili, présidente de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire
Je demande une suspension de séance.
Suspension et reprise de la séance
M. le président
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix heures quarante-cinq, est reprise à dix heures cinquante.)
M. le président
La séance est reprise.
La parole est à M. Loïc Prud’homme, pour soutenir l’amendement no 460.
M. Loïc Prud’homme
Par cet amendement, nous souhaitons affirmer que la maîtrise publique des infrastructures existantes ou à venir est un objectif prioritaire de la stratégie de l’État en matière d’investissements dans le système des transports. Nous appelons notamment à la renationalisation des autoroutes et nous nous insurgeons de nouveau contre la privatisation d’Aéroports de Paris.
S’agissant des autoroutes, c’est assez simple : s’il avait conservé ses autoroutes, l’État aurait pu engranger 24 milliards d’euros de recettes depuis 2006, ce qui n’est pas rien lorsqu’on en a besoin pour engager une transition écologique, notamment en matière de transport, premier émetteur de gaz à effet de serre.
Nous demandons également la maîtrise publique des infrastructures aéroportuaires. Il s’agit bien sûr ici de remettre en question la privatisation d’Aéroports de Paris, qui est une aberration anti-écologique. La part des émissions de gaz à effet de serre liées au secteur de l’aviation civile pourrait passer de 2 % des émissions mondiales aujourd’hui à 20 % d’ici 2050. L’aviation est un secteur qui n’est pas couvert par l’accord de Paris et le kérosène aérien n’est toujours pas taxé, puisque vous l’avez refusé. La question que pose cet amendement est celle de savoir comment nous pouvons contrôler et contraindre ces secteurs fortement émetteurs de gaz à effet de serre : en privatisant les infrastructures qui les supportent.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Bérangère Abba, rapporteure de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire
Chers collègues, je suis ravie de vous retrouver autour de ces sujets de financement de la programmation des investissements de l’État dans les infrastructures de transports. Nous avons déjà largement évoqué la renationalisation éventuelle des sociétés concessionnaires d’autoroutes. D’abord, nous avons soulevé le fait que l’État n’était pas sans exercer un contrôle sur ces sociétés d’autoroutes au moyen des contrats qui les lient. Nous avons tout loisir, d’ici à la fin des contrats de concession, d’observer la situation et de délibérer quant à la suite à leur donner. Cependant, les rompre de manière anticipée engagerait des frais importants qui hypothéqueraient totalement la présente programmation des infrastructures. J’émets donc un avis défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d’État
Même avis. Nous avons déjà eu l’occasion de débattre de cette question. Nous sommes un État de droit. Les contrats, pour les plus grosses concessions, arrivent à échéance entre 2031 et 2036. L’État stratège devra d’ailleurs se prononcer sur ce qu’il entend faire à l’issue de ces contrats, comme j’ai eu l’occasion de le dire ici-même.
Pour ce qui est, par ailleurs, du secteur aérien, nous reviendrons évidemment sur les dispositifs d’éco-contribution, mais je rappellerai que la régulation du secteur a eu lieu très en amont. En 2016 a été signé l’accord international CORSIA– Carbon offseting and reduction scheme for international aviation, ou régime de compensation et de réduction de carbone pour l’aviation internationale –, qui entrera en vigueur en 2021. Il concerne la majorité des opérateurs, notamment américains et chinois, qui représentent 76 % des émissions de gaz à effet de serre. Voilà donc un premier secteur qui s’est autorégulé. Par ailleurs, sur un plan très pratique, il faut absolument faire advenir les biocarburants durables dans l’aviation. Je mobiliserai très prochainement pour cette mission tous les services, notamment la Direction générale de l’aviation civile.
M. le président
La parole est à M. Loïc Prud’homme.
M. Loïc Prud’homme
M. le secrétaire d’État, au mois de juillet dernier, vous déclariez dans la presse que vous étiez prêt à engager, sinon une nationalisation des autoroutes, du moins la mise en place d’un système permettant de recourir à un emprunt sur les bénéfices futurs issus du retour de ces autoroutes dans le giron public – je ne me souviens pas de vos propos exacts mais vous voyez à quoi je fais référence. Avez-vous changé d’avis au cours de l’été, à la suite peut-être d’un coup de chaud, ou est-ce moi qui ai mal compris la position qui était la vôtre en juillet ?
M. le président
La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d’État
Je vous prie de croire, monsieur le député, à ma parfaite régulation thermique et à la cohérence de mes propos ! (Sourires.) Au début du mois de juillet, j’ai soulevé plusieurs problèmes. Le premier était de savoir ce que ferait l’État à l’issue des contrats de concession, c’est-à-dire entre 2031 et 2036 pour les plus importants. Ce problème, qui est devant nous, pose la question du rôle de l’État-stratège vis-à-vis des infrastructures de mobilité et, plus largement de l’énergie et des télécommunications. Peut-être faut-il repenser ce rôle – et je m’emploierai évidemment à cette tâche.
J’ai également abordé le problème du financement. Comme vous le savez, nous recherchions alors 350 millions d’euros pour financer la loi mobilités – car cette loi, nous y reviendrons, est financée. J’avais effectivement proposé un mécanisme qui, sur la base des recettes futures – les concessions pouvant revenir dans le giron de l’État – permettait d’emprunter à des taux relativement bas. Mais ce problème de financement ayant été résolu avec les annonces de Mme la ministre le 18 juillet dernier, il ne se pose plus aujourd’hui.
Les deux autres questions que j’ai soulevées, et que j’évoquerai ici rapidement, sont d’une part la possible décentralisation de la gestion du réseau routier non concédé, en raison du rôle de chef de file joué aujourd’hui par les régions, et d’autre part l’amélioration de la gestion du réseau routier, le système actuel ayant un caractère dual du fait de l’existence d’un réseau concédé et d’un réseau non concédé. Nous devrons nous positionner très rapidement sur ce dossier qui fait actuellement l’objet d’une réflexion conduite au sein de nos services. J’espère être en cohérence avec mes propos et avoir clarifié ce que j’ai proposé en juillet.
(L’amendement no 460 n’est pas adopté.)
M. le président
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l’amendement no 573.
Mme Emmanuelle Ménard
Par cet amendement, je suggère de revenir à la rédaction de l’alinéa 3 proposée par le Sénat, qui permet d’insister sur l’accessibilité et la mobilité de nos territoires. Je prendrai évidemment comme exemple la ville de Béziers, qui attend depuis plus de trente ans l’arrivée de la ligne nouvelle à grande vitesse. Nous connaissons tous l’impact d’une ligne et d’une gare TGV sur le dynamisme et le développement économiques locaux, et aussi, bien sûr, sur l’emploi. C’est particulièrement important dans une ville moyenne qui, comme Béziers, compte trois quartiers prioritaires.
Dans le cadre du développement des villes moyennes, en l’occurrence dans l’Hérault, et pour éviter de se focaliser sur Montpellier et de privilégier toujours cette ville, il est très urgent de lancer enfin le tronçon manquant entre Montpellier, Béziers et Perpignan. Ainsi, EDF Renouvelables souhaitait, voilà quelques mois, délocaliser 200 emplois situés à Béziers, en invoquant le fait que Montpellier était quand même plus pratique.
Je rappellerai quelques faits, et tout d’abord la saturation totale de l’axe Montpellier-Béziers-Narbonne, qui lui vaut d’obtenir le plus mauvais score en matière de régularité des grandes lignes en France. J’insiste sur ce point car les habitants du Biterrois en pâtissent tous les jours.
Or il n’existe plus de capacité résiduelle, que ce soit pour les lignes de TER – transport express régional –, de fret ou de ferroutage. Tous les acteurs publics, région, départements, agglomérations, communes et jusqu’aux services de l’État sont d’accord sur le tracé de la nouvelle ligne, sur ses gares et sur son phasage. Elle correspond de surcroît en tout point aux objectifs affichés par le projet de loi, à commencer par celui d’améliorer concrètement les déplacements du quotidien pour tous les citoyens, dans tous les territoires.
Je rappelle aussi que cette ligne est le petit chaînon qui manque pour relier Amsterdam et Séville ou Malaga, autrement dit l’Europe du Nord et l’Europe du Sud.
Enfin, détail non négligeable que j’ai rappelé dans la discussion générale, 13 400 camions passent tous les jours la barrière de péage entre la France et l’Espagne : c’est autant de trafic que la ligne Montpellier-Béziers-Perpignan permettrait de dérouter.
Bref, vous l’avez compris, et j’y reviens toujours : oui à cette ligne nouvelle, mais vite.
M. le président
La parole est à M. Paul-André Colombani, pour soutenir l’amendement no 314.
M. Paul-André Colombani
Cet amendement de François Pupponi tend à préciser que priorité doit être donnée aux quartiers prioritaires de la politique de la ville, très souvent délaissés en matière de mobilité. Il contribuerait donc à réduire certaines inégalités et à lutter contre la ghettoïsation dont les habitants de ces quartiers sont souvent victimes.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Bérangère Abba, rapporteure
L’amendement de Mme Ménard peut être considéré comme un témoignage sur des questions purement locales. Techniquement, il revient à une version antérieure du premier objectif de la programmation, reformulé entre-temps pour des raisons de clarté rédactionnelle. Il était par exemple question de « mobilité des zones rurales », lesquelles, on l’aura compris, ne sont pas mobiles en tant que telles.
Vos objectifs de réduction des inégalités territoriales, d’accessibilité et de désenclavement, madame Ménard, sont précisément ceux du projet de loi. Votre amendement me semble donc satisfait : demande de retrait.
L’avis sera le même sur l’amendement de M. Pupponi, comme sur les suivants du même ordre : il ne nous semble pas pertinent de hiérarchiser les urgences et les problématiques, fussent-elles celles des quartiers prioritaires de la politique de la ville ou d’autres territoires enclavés.
M. le président
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d’État
Sur l’amendement no 314, il convient de préciser que les quartiers prioritaires de la politique de la ville sont évidemment mentionnés, et à de nombreuses reprises, dans le texte, en particulier dans le présent titre.
Je connais par ailleurs votre préoccupation, madame Ménard, quant à l’ouverture d’une nouvelle ligne entre Montpellier et Perpignan ; mais, comme je vous l’ai dit en commission, cet aménagement figure bien entendu dans le scénario 2 du COI. Comme vous le savez aussi, les procédures d’acquisition du foncier se poursuivent.
J’entends aussi vos préoccupations quant aux délais, mais les choix du COI, en particulier sur le phasage, répondent à l’exigence de sincérité de la programmation. Trop souvent, dans notre République, on a promis des réalisations qui n’étaient pas financées. Ici, la trajectoire est financée et les promesses seront tenues. Pour cette raison, bien que je comprenne vos préoccupations, je vous suggère le retrait de l’amendement.
M. le président
La parole est à M. Michel Castellani.
M. Michel Castellani
Je n’apprendrai rien à personne en disant que les transports contribuent de façon essentielle à l’aménagement du territoire. Par son amendement, François Pupponi entend œuvrer à une meilleure intégration des quartiers défavorisés au tissu urbain, avec les effets bénéfiques que cela peut avoir sur les déplacements, bien sûr, mais aussi et surtout sur l’emploi.
L’amendement sous-tend donc une conception globale de la politique des transports et, plus largement, de l’équilibre territorial, question dont François Pupponi, comme vous le savez, est un spécialiste. C’est donc au nom d’une vision globale des politiques d’aménagement que nous défendons cet amendement.
M. le président
La parole est à Mme Sophie Auconie.
Mme Sophie Auconie
J’ajouterai un mot sur les inégalités territoriales et sur l’importance, pour plusieurs raisons, du désenclavement des zones rurales.
La première raison tient aux fluctuations du coût du pétrole, le plus souvent, hélas, dans le sens d’une augmentation, ce qui tire bien entendu à la hausse le prix du carburant. De plus, à travers un certain nombre de dispositions, l’État a augmenté les taxes sur le carburant.
En même temps, nous voulons, vous et nous, valoriser les transports vertueux. Je suis élue d’un territoire, l’Indre-et-Loire, qui est voisin du vôtre, monsieur le secrétaire d’État, et dont l’une des parties, le Lochois, est très enclavée. Il dispose d’une ligne ferroviaire dite « secondaire », mais, secondaire, elle ne l’est pas pour tout le monde. Le prix du billet pour l’emprunter a été porté de 6 à 9 euros, quand la durée d’un trajet de Loches à Tours passait, lui, de une heure à une heure et demie. Et, pour la même liaison, le prix du trajet en bus, mode de transport au gasoil, est passé de 6 à 3 euros.
Au-delà de l’inscription, dans la loi, d’un certain nombre de priorités pour les territoires, notamment en termes d’équipements, j’aimerais que l’on mesure combien il est important, pour l’État, de tenir ses engagements financiers, en particulier dans le cadre des contrats de plan État-région : certaines lignes méritent en effet toutes les attentions, d’autant que cela va dans le sens des objectifs auxquels vous nous incitez.
Je vous le demande donc, monsieur le secrétaire d’État : rencontrez-nous, le sénateur du Lochois, la députée que je suis, le maire de Loches et le président de la communauté de communes, voire le président de la région ou le vice-président chargé des transports. Le sujet est d’importance, et nous avons besoin de vous. Écoutez-nous et entendez-nous. À cet égard, je salue la qualité de nos débats et de votre écoute depuis leur début.
M. le président
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard.
Je vous précise, ma chère collègue, que les députés non inscrits ne disposent plus que de trente secondes de temps de parole.
Mme Emmanuelle Ménard
Merci, monsieur le président, je serai brève.
J’ai bien entendu vos arguments, monsieur le secrétaire d’État, mais je rappelle que la ville de Béziers comporte trois quartiers prioritaires de la politique de la ville. Pour eux, l’État joue le jeu : le problème n’est donc pas là, car l’argent ne suffit pas. Le développement de ces quartiers est un tout : il faut y installer des filières d’enseignement supérieur et y créer de l’activité économique. Dans ces conditions, la nouvelle ligne Montpellier-Béziers-Perpignan est évidemment essentielle ; c’est pourquoi j’y insiste tant.
On n’y arrivera pas si l’on ne conjugue pas tous les efforts pour sauver ces quartiers qui, malgré tous les moyens mobilisés, sont encore à l’abandon.
M. le président
Le temps de parole des députés non inscrits est épuisé. Leurs amendements seront donc mis aux voix directement, après le simple énoncé, selon l’usage, des avis de la commission et du Gouvernement, à l’exclusion de toute autre intervention.
(Les amendements nos 573 et 314, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
M. le président
L’amendement no 135 de Mme Emmanuelle Ménard est défendu.
(L’amendement no 135, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)
M. le président
La parole est à M. Vincent Descoeur, pour soutenir l’amendement no 25.
M. Vincent Descoeur
Il vise à assurer la reconnaissance de la spécificité de la montagne. Nous en avons déjà longuement débattu, et j’ai retiré, sur ce thème, un certain nombre d’amendements. J’ai néanmoins maintenu celui-ci, car la prise en compte des difficultés inhérentes aux reliefs me paraît importante.
J’ai bien entendu votre refus de toute hiérarchie, madame la rapporteure, mais ne le partage pas, car une priorisation, pour peu qu’elle ne se perde pas dans les détails, me paraît tout au contraire nécessaire pour des territoires qui, objectivement, cumulent le plus de handicaps et de retards en termes d’infrastructures.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Bérangère Abba, rapporteure
Le souci que vous venez d’exprimer, monsieur Descoeur, est partagé. Certains territoires, qui cumulent en effet des difficultés, ont des attentes en matière de désenclavement. Votre amendement est néanmoins satisfait par l’alinéa 3 de l’article et par l’alinéa 25 du rapport annexé, aux termes duquel la « programmation tient compte des enjeux spécifiques en matière d’accessibilité des territoires de montagne, insulaires, ultra-marins et frontaliers, en leur accordant une attention particulière tant en matière d’entretien que de développement des infrastructures ».
Quant à la hiérarchisation, il est évident qu’elle est impossible : elle reviendrait à exclure certaines priorités, notamment en termes de désenclavement. Je suis convaincue, en revanche, que le Conseil d’orientation des infrastructures a en tête les enjeux dont vous parliez, et qu’il ne manque pas d’accorder la priorité à certaines urgences.
M. le président
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d’État
Nous avons déjà eu cet important débat au début de l’examen du texte. Je vous confirme que les préoccupations issues de territoires qui cumulent des difficultés sont bien prises en compte, non seulement dans le projet de loi, mais aussi par des actions concrètes, telles que le plan de désenclavement routier, sur lequel nous reviendrons. Je suggère donc le retrait de l’amendement.
Je reste par ailleurs à votre disposition, madame Auconie, pour poursuivre la discussion utile et nécessaire dont vous parliez.
Mme Sophie Auconie
Merci, monsieur le secrétaire d’État.
(L’amendement no 25 n’est pas adopté.)
M. le président